N° 727

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 décembre 2024

 

RAPPORT D’INFORMATION

FAIT

AU NOM DE LA DÉLÉGATION AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
ET À LA DÉCENTRALISATION
 

sur le projet de loi de finances pour 2025 et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025

 

 

 

PAR

M. Tristan LAHAIS et M. Nicolas RAY

Députés

 

 

Voir les numéros : 

Assemblée nationale : 324, 459, 462, 468, 471, 472, 486, 524, 527, 540 et T.A. 8.

 325, 487, 480 et 622. Commission mixte paritaire : 638.  

Sénat :  143 et 144 à 150 (2024-2025).

 129, 138, 130 et T.A. 29 (2024-2025). Commission mixte paritaire : 168 et 169.

 


 

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION

PREMIÈRE PARTIE : LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2025 AFFECTANT LE FINANCEMENT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

I. LA MODULATION À LA BAISSE DES CONDITIONS D’ATTRIBUTION DU FONDS DE COMPENSATION POUR LA TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE (ARTICLE 30 DU PLF) ET LE GEL EN 2025 DE LA DYNAMIQUE DES FRACTIONS DE LA TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE AFFECTÉES AUX COLLECTIVITÉS (ARTICLE 31 DU PLF)

A. LE RÔLE ESSENTIEL DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DANS L’INVESTISSEMENT PUBLIC

1. Le FCTVA, un puissant levier en faveur de l’investissement des collectivités territoriales

a. Un concours financier aux collectivités financé par un prélèvement sur les recettes de l’État

b. Une compensation significative qui s’adresse à un nombre important de bénéficiaires

c. Des régimes de versements différenciés selon le type de collectivités

2. Une assiette de dépenses éligibles qui a fait récemment l’objet d’élargissements successifs à certaines dépenses de fonctionnement

3. L’automatisation récente du FCTVA a permis une simplification et une sécurisation du processus de versements, au prix toutefois d’un rétrécissement de l’assiette des dépenses éligibles

a. Une modernisation du FCTVA rendue nécessaire par des difficultés de gestion récurrentes

b. Une application progressive de la date d’entrée en vigueur de la réforme

B. DEPUIS 2018, LE PRODUIT DE LA TVA REPRÉSENTE UNE PART CROISSANTE DES RECETTES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. Le remplacement de la DGF des régions par une fraction de TVA à compter de 2018

2. La suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales a été compensée par le transfert d’une nouvelle fraction de TVA

3. L’instauration d’une fraction de TVA destinée aux départements fragilisés et la mise en place d’un fonds de sauvegarde des départements

4. La suppression progressive de la CVAE et sa compensation aux collectivités territoriales

a. La compensation aux régions

b. La compensation aux départements et au bloc communal

C. LE RESSERREMENT DES MODALITÉS D’ATTRIBUTION DU FCTVA S’ACCOMPAGNERAIT D’UNE STABILITÉ DES FRACTIONS DE TVA COMPENSATRICES DES RÉCENTES RÉFORMES DE LA FISCALITÉ LOCALE

1. Les mesures de réduction du FCTVA conduiraient à diminuer les ressources des collectivités à hauteur de 800 millions d’euros

2. Le gel en 2025 des fractions de TVA à leur niveau de 2024 représenterait une perte de recettes évaluée à 1,2 milliard d’euros pour les collectivités

D. MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

1. En commission des finances

2. En séance publique

E. MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

F. POSITION DES RAPPORTEURS

1. Le dispositif resserrant le FCTVA est inadapté en raison de son caractère rétroactif et va pénaliser l’investissement des collectivités

2. Le gel des fractions de TVA constitue une remise en cause d’une juste compensation des dernières réformes de la fiscalité locale et répartit l’effort de façon inéquitable entre les collectivités

II. LE FONDS DE RÉSERVE AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES (ARTICLE 64 DU PLF)

A. LA TENTATION CONSTANTE DE L’ÉTAT DEPUIS 2012 DE FAIRE CONTRIBUER LES COLLECTIVITÉS AUX EFFORTS DE MAÎTRISE DES DÉPENSES PUBLIQUES PAR LA MODÉRATION DE LEURS RECETTES

1. La contribution au redressement des finances publiques (CRFP) : une réduction des concours financiers imposée par le législateur

2. Le mécanisme des « contrats de Cahors » : un encadrement imposé des dépenses de fonctionnement

B. LE FONDS DE RÉSERVE PROPOSÉ PAR LE PLF POUR 2025 : UN DISPOSITIF À MI-CHEMIN ENTRE LA RÉGULATION BUDGÉTAIRE ET LA PÉRÉQUATION

1. Un dispositif de régulation budgétaire inspiré en partie des « contrats de Cahors »

2. Un objectif de péréquation dont la mise en œuvre s’appuie sur le comité des finances locales

C. MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

D. MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

E. POSITION DES RAPPORTEURS

1. Le caractère vexatoire et injuste du « fonds de réserve »

2. La solution peu satisfaisante du « dispositif de lissage » sénatorial

3. L’option d’une mise en réserve au niveau des collectivités elles-mêmes

SECONDE PARTIE : LE RELÈVEMENT DU TAUX DE LA COTISATION EMPLOYEURS À LA CAISSE NATIONALE DE RETRAITES DES AGENTS DES COLLECTIVITÉS LOCALES (CNRACL) (ARTICLE 14 DU PLFSS ET RAPPORT ANNEXÉ)

I. LES ORIGINES DE LA DÉGRADATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE LA CNRACL

A. LES SPÉCIFICITÉS D’UN RÉGIME DE RETRAITE AU PÉRIMÈTRE DE PLUS EN PLUS LARGE

1. L’extension progressive de son périmètre d’action de la CNRACL depuis sa création

2. L’apport des réformes intervenues en 2003 et en 2010 sur l’équilibre financier de la CNRACL

B. LA CNRACL À L’HEURE DU DÉFICIT : FACTEURS ET CONSÉQUENCES

1. Les principaux facteurs explicatifs du déficit de la CNRACL

2. Les conséquences de la dégradation des comptes de la CNRACL sur la soutenabilité du régime à moyen terme

II. UN RELÈVEMENT DE DOUZE POINTS ÉTALÉ SUR PLUSIEURS ANNÉES DU TAUX DE COTISATION EMPLOYEUR : LA PISTE PRIVILÉGIÉE PAR LE PLFSS POUR RÉTABLIR L’ÉQUILIBRE DES COMPTES DE LA CNRACL

A. L’objectif de rétablissement du solde global des régimes obligatoires de base de sécurité sociale entre 2025 et 2028

B. Le relèvement progressif, mais significatif, du taux de cotisation employeur à la CNRACL

III. MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

IV. MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

V. POSITION DES RAPPORTEURS

1. Le choix contestable d’un alourdissement massif et précipité des charges pesant sur les employeurs territoriaux

2. L’intérêt d’une réforme du mécanisme de compensation démographique au bénéfice de la CNRACL

3. Le panel de mesures systémiques susceptibles d’être mises en œuvre afin d’améliorer durablement la situation financière de la Caisse

4. L’urgence d’une reprise par la CADES de la dette accumulée par la CNRACL

EXAMEN PAR LA DÉLÉGATION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

 


  1  

   INTRODUCTION

Dans un courrier adressé le 2 septembre dernier aux présidents et aux rapporteurs généraux des commissions des finances des deux assemblées, MM. Bruno Le Maire et Thomas Cazenave, respectivement ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et ministre délégué chargé des comptes publics, ont fait état d’une « augmentation extrêmement rapide » des dépenses des collectivités territoriales susceptible, « à elle seule », de « dégrader les comptes 2024 de 16 milliards d’euros par rapport au programme de stabilité 2024‑2027 ». Le Gouvernement Barnier a adopté par la suite un discours plus conciliant. Pour autant, les mesures inscrites dans le projet de loi de finances (PLF) et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 veillaient à mieux maîtriser l’évolution des dépenses locales et à solliciter des collectivités une contribution au redressement des finances publiques.

Certes, les dépenses d’équipement des collectivités se sont mises à progresser fortement à compter de 2023 (+ 9,6 %) et le rythme semble s’accélérer cette année au vu des premières estimations fournies par la direction du budget ([1]). Mais il s’agit là, tout d’abord, d’un effet attendu du cycle électoral, un rebond ayant été constaté au milieu de la mandature municipale 2014-2020 ([2]). L’accélération traduit surtout la volonté des élus locaux d’accroître leurs investissements, notamment dans le domaine de la transition écologique, conformément aux souhaits exprimés par l’État lui-même tout au long de l’année 2023 ([3]).

À cet égard, les dispositifs présentés par le précédent Gouvernement au début du mois d’octobre 2024 ont soulevé de fortes inquiétudes quant à leur soutenabilité pour les collectivités territoriales. La mise en place d’un prélèvement, estimé à 2,8 milliards d’euros en 2025, au profit d’un « fonds de réserve » a été justifiée par le souhait de « lisser » dans le temps les dépenses des collectivités territoriales et de leurs groupements, en incitant les gestionnaires à porter en priorité leurs efforts d’économies sur la section de fonctionnement, conformément aux orientations inscrites à l’annexe de la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour 2023 à 2027 ([4]). Pourtant, l’État a, dans le même temps, proposé d’alourdir les charges de fonctionnement des collectivités au travers d’un relèvement de plusieurs points des taux de cotisation des employeurs à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL).

Comment, dans ces conditions, parvenir à dégager une capacité d’autofinancement (CAF) suffisante pour lancer de nouveaux projets ?

Derrière ce paradoxe apparent, on peut voir la volonté de l’État, non entièrement assumée, de ralentir les dépenses d’investissement du secteur public local. La réduction envisagée du taux et du périmètre d’application du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) confirme l’idée d’une interférence directe de l’État dans la gestion publique locale destinée à « brider » leur participation à la dynamique de l’investissement public national.

Certes, les collectivités gardent toujours la possibilité de recourir à leur épargne pour financer leurs projets. Leur trésorerie, qui s’élevait à 57,8 milliards d’euros à fin octobre 2022, a déjà été ramenée à 44,9 milliards d’euros à la fin du mois d’octobre dernier. Dans cet ensemble, les disponibilités de la strate départementale, fragilisée depuis 2023 par la baisse des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et la hausse des dépenses d’allocations individuelles de solidarité (AIS), ont chuté de 54 % en deux ans ([5]). Il est donc probable que de nombreuses collectivités, confrontées à une contrainte trop forte, en soient réduites à reporter leurs nouveaux investissements, y compris ceux destinés à atténuer les effets du changement climatique ou à s’y adapter.

Le PLF pour 2025 adopte donc, selon toute vraisemblance, une approche procyclique qui paraît d’autant plus contestable que les perspectives de croissance économique n’ont cessé de se dégrader au cours des derniers mois, passant de 1,1 % lors du dépôt du texte à 0,9 % dans les dernières prévisions publiées par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ([6]).

S’agissant des projets d’investissement déjà lancés, il est fort probable que, face à la raréfaction de leur épargne, les collectivités soient contraintes de recourir davantage à l’emprunt. Ce qui est présenté par l’État comme un ensemble de mesures destinées à rassurer nos partenaires européens sur la capacité de notre pays à respecter ses objectifs de maîtrise du solde des administrations publiques peut déboucher sur une nouvelle dégradation des finances publiques nationales.

Plus fondamentalement, les difficultés rencontrées actuellement par les collectivités ne sont que le résultat du pilotage croissant des budgets locaux par le budget de l’État. La montée en puissance des transferts de fiscalité illustre le mouvement de « recentralisation » rampante dénoncé depuis plusieurs années par les associations d’élus locaux ([7])

Dépourvus de la plupart des leviers fiscaux qui leur permettaient, autrefois, de mener sur le long terme les politiques pour lesquelles ils avaient été élus, les décideurs locaux en sont réduits à solliciter de l’État le respect d’engagements pris au moment de la mise en place de « compensations » qu’il avait lui-même décidées.

En ce sens, la stabilisation, envisagée dans le PLF pour 2025, des fractions de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) allouées aux régions, aux départements et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) apparaît d’autant plus comme une violation de la « parole donnée » que ces transferts avaient été mis en place, pour une large part, en compensation de réformes visant à réduire la fiscalité locale, telles que la suppression de la taxe d’habitation sur la résidence principale en 2020 et la suppression progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en 2021 et en 2023.

En décidant, à la suite de la réunion de bureau du 15 octobre 2024, de se saisir des principales dispositions du PLF pour 2025 et du PLFSS pour 2025 intéressant les finances des collectivités et de leurs groupements, la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation a souhaité s’interroger sur le sens et la portée des « mesures d’économies » présentées par le nouveau Gouvernement lors de la réunion du comité des finances locales du 8 octobre dernier.

Le présent avis budgétaire, élaboré indépendamment des circonvolutions de la procédure législative, appelle à une nette réorientation des mesures envisagées.

Sans remettre en cause le principe d’une participation des collectivités à la maîtrise des dépenses publiques globales, les rapporteurs rappellent l’importance qui s’attache à ce que l’initiative et le contenu des mesures d’économies soient laissées, autant que possible, à la discrétion des décideurs locaux dans le strict respect du principe de libre administration. Si l’État peut valablement accorder des dotations libres d’emploi, ils insistent pour que les modalités d’allocation de ces ressources ne soient pas assujetties aux aléas de la gestion par l’État de ses propres finances. Les élus locaux ont, plus que jamais, besoin de prévisibilité pour mener à bien leurs projets sans dégrader la qualité du service public qu’ils offrent à leurs concitoyens.

Plus précisément, les rapporteurs souhaitent qu’il soit mis un terme aux mesures visant à prélever de manière unilatérale une part des ressources des collectivités, qu’il s’agisse du « fonds de réserve » initialement proposé ou de la version adoucie du « dispositif de lissage conjoncturel » imaginé par le Sénat.

Par une ponction de leurs recettes en 2025 et un reversement sur les trois années suivantes, le mécanisme du « fonds de réserve » revenait finalement à ce que l’État pilote le fonds de roulement des collectivités à leur place. Or, les collectivités, déjà largement dépourvues de leurs leviers fiscaux, doivent pouvoir disposer librement de leurs réserves.

Dans la même optique, la réforme du FCTVA leur paraît difficilement justifiable et devrait être abandonnée. L’« année blanche » imposée sur la fraction de TVA affectée aux collectivités territoriales illustre la remise en cause par l’État de la compensation de réformes de la fiscalité locale qu’il a pourtant lui-même initiées à peine quelques années plus tôt.

S’agissant de la CNRACL, les rapporteurs reconnaissent que des mesures d’urgence doivent être prises rapidement afin de redresser les comptes du régime. On peut, sur ce point, s’inquiéter des effets à moyen terme sur le déficit prévisionnel de la Caisse des mesures visant à réduire les dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales : en effet, les élus locaux interrogés estiment que la tendance sera de plus en plus au recrutement de personnels contractuels, en lieu et place de fonctionnaires au regard d’un environnement économique et financier incertain. Comme les agents contractuels ne cotisent pas à la CNRACL, l’attrition de la base cotisante devrait s’accroître d’autant.

L’intervention de l’État ne saurait pour autant se réduire à une simple réforme paramétrique : pour incontournable qu’il soit, le relèvement des taux de cotisation des employeurs doit être, autant que possible, limité afin d’alléger la charge correspondante pour les collectivités territoriales et leurs groupements. Le régime de retraite des fonctionnaires territoriaux doit être réformé de manière systémique au travers d’un panel de mesures destinées à en pérenniser les ressources.

Dans l’intervalle, il convient d’aider la CNRACL à échapper à la spirale de l’endettement. À cette fin, la dette cumulée du régime pourrait utilement être reprise par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES).

Représentant 20 % des dépenses publiques et bénéficiant de différents transferts de l’État (dotations, subventions, fiscalité transférée), les collectivités pourraient être appelées à participer à la réduction des déficits publics. Elles l’ont d’ailleurs déjà été par le passé, notamment suite à la diminution de 11 milliards des dotations de l’État sur la période 2014-2017 ([8]).

Si une participation doit être mise en place, elle devra se faire dans le dialogue, la concertation et l’incitation plutôt que par la coercition et la précipitation. Elle devra aussi s’inscrire dans le cadre une réforme profonde de la fiscalité directe locale, pour redonner une autonomie fiscale aux collectivités, spécialiser une taxe principale par niveau de collectivité et garantir une contribution financière des citoyens au fonctionnement des services publics locaux.

Ces différentes préconisations pourront, le cas échéant, faire l’objet d’amendements déposés sur l’un ou l’autre des deux textes actuellement en navette parlementaire soit en nouvelle lecture si le nouveau Gouvernement décide de reprendre leur examen, soit en première lecture si la procédure budgétaire est entièrement réinitiée.


  1  

   PREMIÈRE PARTIE : LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2025 AFFECTANT LE FINANCEMENT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Si la présence d’un article fixant les montants de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et des variables d’ajustement est habituelle en première partie du PLF pour 2025, telle n’est pas le cas des deux articles qui l’accompagnent, le premier affectant le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), l’autre révisant les modalités d’une ressource fiscale aussi essentielle pour les collectivités que sont aujourd’hui les fractions de TVA qui leur sont affectées. En seconde partie du PLF pour 2025, l’article instituant un « fonds de réserve » des collectivités territoriales décrit un mécanisme singulier, complexe et controversé de participation des collectivités aux efforts de maîtrise de la dépense publique, justifiant un examen attentif de ce dispositif.

I.   LA MODULATION À LA BAISSE DES CONDITIONS D’ATTRIBUTION DU FONDS DE COMPENSATION POUR LA TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE (ARTICLE 30 DU PLF) ET LE GEL EN 2025 DE LA DYNAMIQUE DES FRACTIONS DE LA TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE AFFECTÉES AUX COLLECTIVITÉS (ARTICLE 31 DU PLF)

Alors que la loi de finances pour 2024 a prévu une augmentation des crédits consommés au titre du FCTVA à hauteur de 404 millions d’euros pour atteindre 7,1 milliards d’euros, l’article 30 du PLF prévoit a contrario une réduction de 800 millions d’euros des crédits consommés en 2025 par rapport à la dynamique anticipée. Le montant du FCTVA serait réduit à 6,85 milliards d’euros en 2025, en baisse de 258 millions d’euros par rapport à la prévision pour 2024.

Cette évolution serait la résultante de deux mesures paramétriques concomitantes : d’une part, la diminution du taux de remboursement qui passerait de 16,404 % de la dépense éligible, à 14,85 %, pour les attributions versées à compter du 1er janvier 2025, d’autre part, la réduction de l’assiette du fonds de compensation, ainsi recentrée sur les seules dépenses d’investissement.

En outre, les collectivités territoriales qui perçoivent le produit de fractions de TVA qui leur sont affectées au titre de la compensation des dernières réformes de la fiscalité locale, ne bénéficieraient pas, en 2025, de la dynamique fiscale de l’année précédente.

  1.   LE RÔLE ESSENTIEL DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DANS L’INVESTISSEMENT PUBLIC

En raison du rôle central des collectivités territoriales dans l’investissement public, le FCTVA, principale dotation d’équipement versée par l’État, constitue un instrument essentiel de soutien à la formation brute de capital fixe nationale. À cet égard, il convient de rappeler que les administrations publiques locales ont investi 63,6 milliards d’euros en 2023, soit 58 % de l’investissement public total, dont les deux-tiers ont été portés par le bloc communal ([9]). L’État demeure le principal co‑financeur de cet effort, à hauteur de 10 milliards d’euros en 2023, dont 6,7 milliards d’euros proviennent du FCTVA.

1.   Le FCTVA, un puissant levier en faveur de l’investissement des collectivités territoriales

a.   Un concours financier aux collectivités financé par un prélèvement sur les recettes de l’État

Dans la mesure où les collectivités territoriales ne sont pas, en raison de leurs activités, assujetties à la TVA, elles ne peuvent pas, en principe, bénéficier du droit à récupération pour la TVA qu’elles acquittent au titre de leurs dépenses d’investissements.

L’article 13 de la loi de finances rectificative pour 1975 ([10]) a institué un mécanisme visant à compenser pour les collectivités une partie de la charge représentée par la TVA grevant leurs achats, sous la forme d’un fonds d’équipement des collectivités locales (FECL) dont les ressources étaient réparties entre les collectivités au prorata de leurs dépenses réelles d’investissement ([11]).

Ce mécanisme n’a été formellement appelé « fonds de compensation pour la TVA » qu’avec l’article 66 la loi de finances pour 1978 ([12]).

Depuis 1983, le FCTVA ne fait plus l’objet d’une dotation budgétaire mais résulte d’un prélèvement sur recettes (PSR). Les crédits afférents échappent donc aux règles de la régulation budgétaire. Non pilotable pour les finances publiques puisque son montant résulte du niveau de l’investissement des administrations publiques locales, le FCTVA est exclu de la trajectoire des concours financiers de la loi de programmation des finances publiques.

Le FCTVA n’est, juridiquement, ni un remboursement de TVA ni un « fonds », comme l’a confirmé la DGCL lors de son audition par les rapporteurs, mais un concours de l’État à l’investissement des collectivités territoriales dont le montant se rapproche de celui de la TVA supportée en amont par celles-ci. La Direction du budget a également rappelé que le Conseil d’État s’est prononcé sur la nature du droit à l’attribution du FCTVA qui « ne naît qu’au cours de la deuxième année suivant la réalisation des dépenses d’investissement » considérant qu’il s’agit d’une subvention et non d’un remboursement de la TVA ([13]), conformément à la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de TVA qui ne permet pas, d’une manière générale, de récupérer ou d’être exonéré de la TVA pour les activités qui n’y sont pas assujetties.

Dans sa rédaction antérieure à la loi de finances pour 2021, l’article L. 1615‑1 du CGCT disposait que le FCTVA est destiné à « permettre progressivement le remboursement intégral de la TVA acquittée par les collectivités territoriales et leurs groupements sur les dépenses réelles d’investissement ». La rédaction actuelle, issue de l’article 251 de la loi de finances pour 2021, ne se réfère plus à des remboursements mais à des « attributions [qui] visent à compenser la TVA acquittée par les collectivités territoriales et leurs groupements sur leurs dépenses d’investissement […] ».

b.   Une compensation significative qui s’adresse à un nombre important de bénéficiaires

Les attributions au titre de ce dernier sont déterminées en appliquant aux dépenses réelles d’investissement un taux de compensation forfaitaire qui s’applique quel que soit le taux de TVA ayant grevé les opérations éligibles. Ce dernier est fixé depuis le 1er janvier 2015 à 16,404 % ([14]).

Ce taux correspond au ratio du montant de la TVA au taux normal (20 %) rapporté à la dépense hors taxe, soit 16,667 %, diminué d’un taux de réfaction forfaitaire de 0,263 %, afin d’exclure des attributions le montant correspondant à la contribution de la France au budget de l’Union européenne assise sur la TVA.

Pour être éligible, la dépense doit respecter les règles cumulatives suivantes :

– La dépense doit avoir été réalisée par un bénéficiaire du fonds dont la liste, étendue, est fixée par l’alinéa premier de l'article L. 1615-2 du CGCT. Il s’agit de l’ensemble des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs régies, des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), des centres communaux d’action sociale (CCAS), des caisses d’école, du centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et des centres de gestion (CDG) ;

– Le bénéficiaire doit être propriétaire de l'équipement pour lequel cette dépense a été engagée (principe de patrimonialité). Cependant l’article précité prévoit quelques exceptions (domaine public de l’État, fonds de concours destinés à des travaux de voirie depuis 2005, etc.) ;

– La dépense doit intervenir dans un domaine de compétence du bénéficiaire ;

– La dépense doit être une dépense réelle d’investissement. Toutefois, depuis 2016, l’assiette de ces dépenses a été étendue à certaines dépenses de fonctionnement (cf. infra) ;

– La dépense doit être grevée de TVA. Notamment, les subventions n’ouvrent pas droit au FCTVA ;

– La dépense ne doit pas être exposée pour les besoins d'une activité assujettie à la TVA permettant la récupération de la TVA par la voie fiscale ;

– La dépense ne doit pas avoir été réalisée pour un bien devant être cédé ou mis à disposition d’un tiers autre que l’État ou un tiers exerçant une mission de service public ou la gestion d’un service public.

c.   Des régimes de versements différenciés selon le type de collectivités

Les régimes de versement du FCTVA sont régis par le II de l'article L. 1615-6 du CGCT.

Le régime de droit commun prévoit que le versement du FCTVA intervienne la deuxième année suivant la réalisation des dépenses. Des dérogations à cette règle ont été progressivement introduites. Le législateur a identifié les catégories de collectivités et groupements qui se voient ainsi appliquer un régime de versement avancé, soit l'année même de la réalisation de la dépense (régime simultané), soit l'année suivante (régime anticipé).

Afin d’encourager le développement de l’intercommunalité, l’article 118 de la loi du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République a permis aux communautés de communes et communautés d’agglomération de bénéficier du régime de versement simultané. Ce régime dérogatoire a été étendu par l’article 24 de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, aux communes nouvelles ainsi qu’aux communes membres d’un EPCI appliquant la mise en commun de la DGF prévue à l’article L. 5211-28-2 du CGCT, aux métropoles et aux communautés urbaines se substituant à des communautés d’agglomération. Enfin, l’article 8 de l’ordonnance du 10 décembre 2015 relative à la métropole du Grand Paris a étendu ce régime aux établissements publics territoriaux (EPT).

L’article 1er de la loi de finances rectificative pour 2009 et l’article 44 de la loi de finances pour 2010 ([15]) ont, dans le cadre du plan de relance de l’économie adopté à la suite de la crise dite des subprimes, permis à certaines collectivités de bénéficier, de manière pérenne, d’un régime de versement anticipé du FCTVA, dès lors qu’elles s’engageaient contractuellement à accroître leurs dépenses d’investissement en 2009 et en 2010 et ont respecté cet engagement.

Toutes les collectivités et établissements bénéficiaires du FCTVA qui ne relèvent pas du régime simultané ou du régime anticipé relèvent du régime de droit commun.

Près de 41 000 collectivités et groupements bénéficient du FCTVA (+ 11 % depuis 2020).

Nombre de bénéficiaires du FCTVA par catégories (2020-2023)

Catégories

2020

2021

2022

2023

Proportion de bénéficiaires en 2023

Communes

30 761

31 140

32 060

33 257

95 %

Groupements à fiscalité propre

1 220

1 261

1 265

1 257

100 %

Syndicats

3 447

3 485

3 439

4 126

43 %

CCAS-CIAS

1 319

1 403

1 317

2 115

18 %

SDIS

93

99

100

100

100 %

Départements

98

97

97

97

97 %

Régions

17

17

17

17

100 %

TOTAL

36 955

37 502

38 295

40 969

 

Source : Direction du budget, OFGL.

2.   Une assiette de dépenses éligibles qui a fait récemment l’objet d’élargissements successifs à certaines dépenses de fonctionnement

Le législateur est intervenu à plusieurs reprises, à partir de 2016, pour autoriser la prise en charge par le FCTVA de certaines dépenses de fonctionnement.

En premier lieu, les articles 34 et 35 de la loi de finances pour 2016 ([16]) ont élargi le bénéfice du FCTVA aux dépenses d’entretien des bâtiments publics et de la voirie, payées à compter du 1er janvier 2016.

L’article 80 de la loi de finances pour 2020 ([17]) a rendu éligible au FCTVA les dépenses d’entretien des réseaux (eau, assainissement, fibre, etc.) à compter du 1er janvier 2020.

Enfin, l’article 69 de la loi du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 ([18]) a rendu éligible au FCTVA les dépenses payées à compter du 1er janvier 2021 qui se rapportent à la fourniture de prestations de solutions relevant de l’informatique en nuage (« cloud »).

Toutefois, à compter du 1er janvier 2021, l’automatisation du FCTVA (cf. infra) a conduit, dans un souci de neutralité budgétaire de la réforme, à exclure de l’assiette les dépenses d’acquisition de terrain (compte 211) et celles d’aménagement et d’agencement de terrains (compte 212), ainsi que les travaux en régie et les fonds de concours entre collectivités ou groupements, pour un montant évalué à 500 millions d’euros.

Un arrêté du 30 janvier 2024 a cependant réintégré les dépenses d’aménagement et d’agencement de terrains (terrains sportifs, aires de jeux, parcs et jardins) dans l’assiette éligible à compter du 1er janvier 2024, soit un montant d’environ 40 millions d’euros en 2024 et 250 millions d’euros en année pleine.

3.   L’automatisation récente du FCTVA a permis une simplification et une sécurisation du processus de versements, au prix toutefois d’un rétrécissement de l’assiette des dépenses éligibles

Jusqu’en 2021, la gestion du FCTVA était entièrement manuelle, selon une logique de « guichet ouvert » conduisant à d’erreurs et des retards de paiement. L’automatisation du FCTVA a substitué une logique comptable, basée sur une assiette de comptes éligibles, à une logique d’éligibilité selon des critères juridiques.

a.   Une modernisation du FCTVA rendue nécessaire par des difficultés de gestion récurrentes

« Le FCTVA cumule des difficultés de pilotage budgétaire tant pour les collectivités territoriales que pour l’État : des risques systémiques de versements en doublons, une gestion manuelle très peu outillée, tant sur les compétences des agents qu’en ce qui concerne les outils de gestion. En définitive, la qualité de service aux collectivités territoriales est apparue assez médiocre (en termes de lisibilité des textes et des décisions de gestion des préfectures, de délais de versements, de prévisibilité financière). » Tel était le constat dressé en mai 2016 par l’inspection générale des finances (IGF) et l’inspection générale de l’administration (IGA) au terme d’une revue de dépenses portant sur le FCTVA ([19]).

Soulignant la complexité des règles applicables au FCTVA, les risques de « doublons » en cas de récupération de la TVA par la voie fiscale, et le caractère chronophage de sa gestion, les auteurs du rapport estimaient nécessaire une modernisation de la gestion du FCTVA en privilégiant le scénario d’une automatisation du fonds sur une base purement comptable s’appuyant sur les mandats émis par les collectivités territoriales et déjà contrôlés par le comptable.

Si l’automatisation impliquait des développements informatiques et une clarification des dépenses éligibles, il est apparu que la mise en œuvre du calcul des attributions dans le cadre d’une procédure de traitement automatisé des données budgétaires permettrait d’instituer un processus plus fluide et plus sécurisé, l’allègement de la procédure déclarative et une réduction des délais de versement des attributions.

La réforme retenue a consisté à automatiser la gestion du FCTVA par un recours à une base comptable des dépenses engagées et mises en paiement permettant une dématérialisation quasi-intégrale de la procédure d’instruction, de contrôle et de versement. L’objectif de la réforme a été de conserver au maximum les règles d’assiette en vigueur.

b.   Une application progressive de la date d’entrée en vigueur de la réforme

Sur cette base, le principe de l’automatisation du dispositif de FCTVA a été introduit par l’article 156 de la loi de finances pour 2018 ([20]).

Toutefois, en raison de l’ampleur de la réforme et de sa complexité technique, nécessitant la création d’une application spécifique permettant l’échange de données entre les applications de comptabilité Hélios et Chorus, mais aussi, afin de poursuivre la réflexion avec les associations des collectivités territoriales concernant d’éventuelles restrictions sur l’assiette des dépenses éligibles rendues nécessaires par l’automatisation des remboursements et par le principe de neutralité budgétaire de la réforme, la mise en œuvre de la réforme a été reportée à deux reprises.

Ainsi, l’article 258 de la loi de finances pour 2019 ([21]) a décalé au 1er janvier 2020 l’entrée en vigueur de la réforme. Il a aussi exclu certaines dépenses d’investissement de l’automatisation en raison de leur caractère spécifique ; pour ces dépenses, les attributions du fonds continuent de résulter d’une procédure déclarative. S’agissant des travaux pour autrui, l’automatisation a conduit à revenir au droit commun impliquant, conformément au principe de patrimonialité, de verser le FCTVA à la collectivité propriétaire.

L’article 249 de la loi de finances pour 2020 ([22]) a repoussé une dernière fois l’entrée en vigueur de la réforme au 1er janvier 2021, en raison de la nécessité, d’une part, d’approfondir l’évaluation financière de la nouvelle assiette « afin de garantir la neutralité budgétaire de la mise en œuvre de la réforme » selon l’évaluation préalable, car les simulations menées par la DGFiP sur les années antérieures avaient identifié un risque de surcoût annuel de la réforme pour l’État évalué entre 250 et 400 millions d’euros, d’autre part, d’achever les tests de fonctionnement régulier de l’application ALiCE ([23]) destinée à recevoir les transmissions automatiques de données comptables depuis Helios.

Les modalités de gestion automatisée du FCTVA et la liste des comptes servant à déterminer l’assiette éligible sont fixées par voie réglementaire, respectivement par un décret du 30 décembre 2020 et par un arrêté du même jour ([24]).

Conformément au décret précité, l’entrée dans le dispositif s’est faite de manière décalée selon les types de bénéficiaires :

– à compter du 1er janvier 2021, pour les 2 000 collectivités et groupements bénéficiaires du régime simultané (année N) ;

– à compter du 1er janvier 2022, pour les 18 000 collectivités et groupements bénéficiaires du régime anticipé (année N+1) ;

– à compter du 1er janvier 2023, pour les 25 000 collectivités et groupements bénéficiaires du régime de droit commun (année N+2).

Le tableau ci-après rend compte des attributions au titre du FCTVA versées de 2019 à 2023, par type de bénéficiaires et par mode de versement.

Évolution des attributions au titre du FCTVA (2019-2023)

Catégories

Mode de versement

Exécution 2019

Exécution 2020

Exécution 2021

Exécution 2022

Exécution 2023

Évolution 2022-2023

Commune, communes nouvelles

Manuel

2 953 185 307

3 188 146 998

3 041 124 641

1 020 945 656

29 856 323

3,2 %

ALiCE

 

 

94 831 630

1 995 671 260

3 082 557 692

Départements

Manuel

977 680 687

1 035 961 425

1 035 642 373

75 954 230

35 668 516

8,2 %

ALiCE

 

 

 

1 059 771 904

1 193 758 178

Régions

Manuel

554 959 880

537 562 020

527 066 194

14 510 134

62 461 004

-1,9 %

ALiCE

 

 

 

529 900 514

471 481 666

CC, CA, EPT

Manuel

658 307 852

707 355 228

458 163 464

24 814 884

3 321 845

8,2 %

ALiCE

 

 

493 107 967

712 758 343

794 809 166

CU, métropoles, CTU

Manuel

421 121 201

506 116 211

442 027 087

139 512 163

2 108 319

-2,4 %

ALiCE

 

 

132 511 679

425 144 850

553 399 524

Syndicats

Manuel

217 727 302

246 563 335

295 113 098

163 586 662

10 584 263

14,1 %

ALiCE

 

 

 

105 285 948

296 215 503

Autres (SDIS, CCAS, etc.)

Manuel

165 772 414

179 217 113

179 687 040

75 490 262

8 901 026

-3,2 %

ALiCE

 

 

1 901 105

105 021 682

165 755 157

Sous-total

Manuel

5 948 754 646

6 400 922 331

5 978 823 897

1 514 813 992

148 684 660

 

ALiCE

 

 

722 352 381

4 933 554 501

6 557 976 886

 

Total

5 948 754 646

6 400 922 331

6 701 176 278

6 448 368 493

6 706 661 546

4,0 %

Source : DGCL, réponses au questionnaire budgétaire PLF pour 2025.

Ainsi, la consommation des crédits s’est élevée à 6,71 milliards d’euros en 2023, en augmentation de 257 millions d’euros par rapport à l’année précédente. L’exécution est très proche de l’évaluation inscrite en loi de finances pour 2023 de 6,65 milliards d’euros, illustrant l’avancée que constitue la mise en œuvre de l’automatisation en termes d’accès aux données et de prévisions pour la DGFiP et la Direction du budget. En 2023, les attributions manuelles ont représenté moins de 150 millions d’euros, soit 2,2 % du total du FCTVA.

La consommation des crédits du FCTVA est liée à l’évolution de l’investissement local qui varie principalement en fonction du cycle électoral, avec une baisse observée lors de l’année du scrutin et l’année suivante, pendant lesquelles les équipes établissent leur programme pluriannuel d’investissement (PPI), et une augmentation progressive au fur et à mesure de l’exécution du PPI sur le reste du mandat.

Cycle de l’investissement local et évolution du FCTVA (2008-2024)

Source : rapport sur la situation des finances publiques locales annexé au PLF pour 2025

B.   DEPUIS 2018, LE PRODUIT DE LA TVA REPRÉSENTE UNE PART CROISSANTE DES RECETTES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Inexistante au sein des recettes fiscales des collectivités territoriales avant 2018, la taxe sur la valeur ajoutée y occupe désormais une place prépondérante, devant la taxe foncière, avec un montant de 52,1 milliards d’euros en 2023, sur 116,5 milliards d’euros de produit de fiscalité directe locale (soit 44,5 %) qui représente, lui-même, la moitié des recettes réelles de fonctionnement toutes collectivités confondues. Cette évolution est la résultante des différentes réformes de la fiscalité locale successives intervenues depuis 2017.

Répartition du produit total de fiscalité locale en 2023

Source : DGFiP. d’après fichier de Recensement des Éléments d’Imposition (REI).

En 2023, la TVA représentait 63 % des recettes fiscales des régions, 40 % de celles des départements, et 18 % de celles du bloc communal.

Pour 2024, le produit national de TVA est attendu en hausse de seulement + 0,8 %, alors qu’il était attendu en hausse de + 4,8 % en LFI pour 2024 ([25]). En conséquence, l’ensemble des fractions revenant aux collectivités territoriales s’élèverait à 52,5 milliards d’euros, au lieu de 54,4 milliards d’euros anticipés.

1.   Le remplacement de la DGF des régions par une fraction de TVA à compter de 2018

L’article 149 de la loi de finances pour 2017 ([26])  a substitué, à compter du 1er janvier 2018, la DGF perçue par les régions depuis 2004 par une fraction de TVA.

La base compensée correspond à la DGF attribuée aux régions en 2017 augmentée de la dotation globale de décentralisation (DGD) versée à la collectivité de Corse. La fraction de TVA affectée à chaque région est définie comme le ratio entre le montant compensé et les recettes nettes de TVA de 2017 appliqué au produit net de TVA de l’année. Chaque collectivité perçoit ainsi un montant proportionnel à sa DGF de 2017 et, pour la collectivité de Corse, du montant perçu cette année-là au titre de sa DGD. En conséquence, le montant de la fraction de TVA transférée aux régions évolue chaque année comme le produit de la TVA nationale.

Toutefois, le V de l’article précité a prévu un mécanisme de garantie à hauteur du montant de la DGF supprimé en 2017 soit 4,025 milliards d’euros. Ce dispositif n’a été activé qu’en 2020 pour 18 millions d’euros afin de compenser la baisse de TVA constatée cette année-là. En 2023, le montant de cette fraction s’élevait à 5,1 milliards d’euros.

2.   La suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales a été compensée par le transfert d’une nouvelle fraction de TVA

L’article 16 de la loi de finances pour 2020 ([27])  a prévu la suppression de la taxe d’habitation sur les locaux meublés affectés à l’habitation principale (THRP) ainsi qu’un nouveau schéma de financement des collectivités territoriales et de leurs groupements.

Les EPCI à fiscalité propre et la Ville de Paris perçoivent une fraction de TVA en compensation de la perte de leurs recettes de THRP.

Pour calculer cette dernière à compter de l’année 2021, il est appliqué au produit national de TVA de l’année considérée le ratio entre, d’une part, les recettes de THRP et les compensations d’exonération de THRP perçues par les EPCI et la Ville de Paris en 2020 et, d’autre part, le produit national de TVA encaissé en 2021.

En compensation du transfert de la part départementale de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) au bloc communal, les départements perçoivent également une fraction de TVA.

De manière analogue, pour calculer cette fraction de TVA, il est appliqué au produit national de TVA de l’année considérée le ratio entre, d’une part, les recettes de TFPB et les compensations d’exonération de TFPB perçues par le département en 2020 et, d’autre part, le produit national de TVA encaissé en 2021.

Le montant de la fraction de TVA transférée aux EPCI, à la Ville de Paris et aux départements versée du fait de la suppression de la THRP évolue donc chaque année comme le produit de la TVA nationale.

Un mécanisme de garantie à hauteur du montant des recettes supprimées permet d’empêcher que les recettes de TVA compensatrices soient inférieures aux montants perçus avant la réforme. Jusqu’à présent, il n’a pas été nécessaire de le mettre en œuvre.

En 2023, le montant de ces fractions de TVA s’élevait à 8,8 milliards d’euros pour les EPCI et à 16,6 milliards d’euros pour les départements.

3.   L’instauration d’une fraction de TVA destinée aux départements fragilisés et la mise en place d’un fonds de sauvegarde des départements

Le E du V de l’article 16 de la loi de finances pour 2020 précité a prévu d’affecter, à compter du 1er janvier 2021, une fraction complémentaire du produit national de la TVA aux départements et à la métropole de Lyon, ainsi qu’aux collectivités de Guyane, de Martinique et de Corse, en cas de fragilité financière ([28]). Cette fraction est égale à 250 millions d’euros pour 2021 et évolue chaque année comme le produit national de la TVA, la dynamique alimentant de façon cumulative un « fonds de sauvegarde ».

Les règles de répartition de la fraction complémentaire de TVA et du « fonds de sauvegarde » sont respectivement fixées par le I et le II de l’article 208 de la même loi de finances. Sont éligibles à la fraction complémentaire de TVA les départements dont le montant par habitant de droits de mutation à titre onéreux (DMTO) est inférieur au montant moyen perçu par l’ensemble des départements et dont le taux de pauvreté est supérieur à 12 %. Le montant de 250 millions d’euros est réparti entre les départements éligibles en fonction d’un indice de fragilité sociale prenant en compte la proportion de bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA), de l’allocation personnalisée pour l’autonomie (APA), de la prestation de compensation du handicap (PCH) et le revenu moyen par habitant. Les crédits du « fonds de sauvegarde » sont alloués aux départements éligibles confrontés à une baisse importante du produit de DMTO et à une augmentation importante des dépenses exposées au titre des allocations individuelles de solidarité précitées (« effet de ciseau »). L’article 252 de la loi de finances pour 2024 ([29]) a prévu, pour l’année 2024, des critères assouplis d’éligibilité, en raison de la détérioration de la situation financière des départements.

En 2023, le montant de la fraction de TVA et du « fonds de sauvegarde » était de 279 millions d’euros en 2023. Le « fonds de sauvegarde » a été abondé en loi de finances pour 2024 ([30]) à hauteur de 53 millions d’euros pour être porté à 106 millions d’euros.

4.   La suppression progressive de la CVAE et sa compensation aux collectivités territoriales

a.   La compensation aux régions

Adopté dans le cadre du Plan de relance, l’article 8 de la loi de finances pour 2021 ([31]) a procédé à une première baisse de la CVAE à hauteur de la part affectée aux régions, soit 50 %, et un ajustement du taux du plafonnement de la contribution économique territoriale (CET) en fonction de la valeur ajoutée de façon à ne pas neutraliser la réduction de moitié de la CVAE pour les entreprises déjà plafonnées du fait d’une contribution foncière des entreprises (CFE) élevée.

En compensation, les régions ont bénéficié en 2021 d’une fraction de TVA égale au produit de CVAE qu’elles avaient perçu en 2020, majoré ou minoré des attributions ou prélèvements au titre du fonds de péréquation des ressources régionales prévu à l’article L. 4332-9 du CGCT, soit 9,8 milliards d’euros. À compter de 2022, cette fraction de TVA est complétée par sa propre dynamique.

Ainsi, depuis 2022, il est appliqué annuellement au produit budgétaire national de TVA de l’année N un ratio entre le montant de CVAE perçu en 2020 par les régions et le produit national de TVA encaissé en 2021.

Au titre des premiers mois de chaque année, ce ratio est appliqué à l’évaluation des recettes nettes de TVA de l’année qui figure dans le projet de loi de finances de l’année. Le montant prévisionnel ainsi obtenu est versé chaque mois à la région concernée via le compte d’avances aux collectivités territoriales. Une régularisation est effectuée, généralement en novembre, sur la base de la prévision de TVA de l’année contenue dans le projet de loi de finances pour l’année suivante. Une régularisation finale peut avoir lieu au début de l’année suivante, une fois le montant définitif de la TVA connu.

Ce mécanisme permet à chaque région de bénéficier sur sa fraction de la dynamique annuelle nationale de TVA. Ainsi, si le produit national de TVA augmente de 5 % en année N, la fraction de chaque bénéficiaire augmentera de 5 %.

En 2023, les régions ont perçu 10,9 milliards d’euros au titre de cette fraction de TVA.

b.   La compensation aux départements et au bloc communal

Dans un second temps, l’article 55 de la loi de finances pour 2023 ([32]) a engagé la suppression progressive sur deux ans, en 2023 et 2024, de la part restante de la CVAE affectée au bloc communal et aux départements. Ces collectivités territoriales ne perçoivent plus la CVAE et reçoivent en compensation des fractions de TVA. Depuis 2023, le produit de CVAE est donc directement affecté à l’État et non plus aux collectivités territoriales.

À compter de 2023, le bloc communal ([33]) et les départements se voient affecter une fraction du produit net de la TVA. Cette fraction est déterminée en appliquant chaque année au produit net national de TVA un ratio égal au rapport :

 d’une part, de la somme de la moyenne quadriennale de CVAE des années 2020 à 2023 et de la moyenne quadriennale des compensations d’exonérations de CVAE des années 2020 à 2023 perçues par chaque collectivité ou établissement public de coopération intercommunal (EPCI) ;

 d’autre part, du produit national de TVA encaissé en 2022.

À l’instar de la compensation de la CVAE aux régions, ce ratio est appliqué à l’évaluation des recettes nettes de TVA de l’année qui figure dans le projet de loi de finances de l’année. Une régularisation est effectuée en novembre, lorsque le produit net de TVA encaissé au titre de l’année est connu, une dernière régularisation pouvant avoir lieu au début de l’année suivante.

Ce mécanisme permet à chaque collectivité ou EPCI de bénéficier, sur sa fraction « socle » de TVA calculée sur la moyenne quadriennale de CVAE perçue avant la réforme, de l’évolution annuelle du produit national de TVA.

S’agissant du seul bloc communal, le produit de cette dynamique est affecté chaque année à un fonds national de l’attractivité économique des territoires (FNAET). Ce fonds est réparti l’année suivante entre les communes et les EPCI afin de tenir compte du dynamisme de leurs territoires respectifs, selon des modalités définies par décret.

La répartition du FNAET

Le 2° du B du XXIV de l’article 55 de la loi de finances précitée institue un fonds national de l’attractivité économique des territoires (FNAET) alimenté par l’évolution de la fraction de TVA affectée au bloc communal, afin de conserver une partie du lien qui existait entre la CVAE perçue et le lieu d’imposition.

Deux décrets de 2023 ([34]) définissent les modalités de répartition du fonds aux communes et aux EPCI pour les années 2023 et 2024, et à compter de 2025.

Ces décrets prévoient qu’en 2023 et 2024, le FNAET est réparti en tenant compte de la CVAE déclarée par les entreprises respectivement en 2022 et en 2023, selon les critères applicables à la répartition de la CVAE avant la réforme. À compter de 2025, le FNAET serait réparti au prorata, pour le tiers, des valeurs locatives des immobilisations imposables à la CFE établies au 1er janvier de l'année qui précède celle de la répartition et, pour les deux-tiers, des effectifs salariés employés provenant de la déclaration sociale nominative (DSN) de l'année qui précède celle de la répartition. Ces critères sont donc les mêmes qu’avant la réforme. Ce choix de conserver, au moins provisoirement, les mêmes critères, corrigés par l’apport de la DSN s’agissant des effectifs salariés, est conforme à une recommandation de l’IGA et de l’IGF qui, au terme d’une étude sur la territorialisation de la compensation de la CVAE publiée en mai 2023, ont fait le constat qu’ « aucun critère alternatif parmi les nombreux inventoriés en théorie ne fait la preuve de sa pertinence » ([35]).

En 2023, le montant réparti au titre du FNAET s’est élevé à 608 millions d’euros.

Pour 2024, selon les éléments fournis par la Direction du budget aux rapporteurs, sur la base de la prévision d’évolution de la TVA nationale actualisée à fin octobre 2024, le montant à répartir s’élèverait seulement à 193,7 millions d’euros, soit une division par trois par rapport à 2023. 4 045 communes et 1 239 EPCI à fiscalité propre seront bénéficiaires du FNAET. Le montant définitif sera régularisé en 2025.

En 2023, le bloc communal a perçu 5,5 milliards d’euros et les départements 4,9 milliards d’euros au titre de cette fraction de TVA.

Le tableau ci-après récapitule l’ensemble des fractions de TVA perçues par les collectivités territoriales au titre des réformes successives de la fiscalité locale intervenues ces dernières années.

Évolution du montant des fractions de TVA transférées aux collectivités territoriales
et à leurs groupements (2018-2025)

(en milliards d’euros)

Fiscalité supprimée ou dispositif créé

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024 (e)

2025 (e)

DGF des régions

4,2

4,3

4,0

4,6

5,0

5,1

5,2

5,2

CVAE

-

-

9,8

10,7

10,9

10,9

10,9

Régions

4,2

4,3

4,0

14,4

15,7

16,0

16,0

16,0

TFPB

-

-

-

14,9

16,3

16,6

16,5

16,5

Fonds de sauvegarde

-

-

-

0,3

0,3

0,3

0,3

0,3

CVAE

-

-

-

-

-

4,9

4,9

4,9

Départements

-

-

-

15,1

16,5

21,8

21,6

21,6

CVAE

-

-

-

-

-

5,5

5,7

5,7

THRP

-

-

-

7,9

8,6

8,8

9,2

9,2

Bloc communal

-

-

-

7,9

8,6

14,3

14,9

14,9

Total

4,2

4,3

4,0

37,4

40,9

52,1

52,5

52,5

Source : rapport sur la situation des finances publiques locales annexé au PLF pour 2025.

C.   LE RESSERREMENT DES MODALITÉS D’ATTRIBUTION DU FCTVA S’ACCOMPAGNERAIT D’UNE STABILITÉ DES FRACTIONS DE TVA COMPENSATRICES DES RÉCENTES RÉFORMES DE LA FISCALITÉ LOCALE

Afin de faire participer les collectivités territoriales à la maîtrise des comptes publics, l’article 30 du PLF pour 2025 prévoit une réduction tant du taux de remboursement que de l’assiette des dépenses éligibles au FCTVA tandis que l’article 31 procède à un gel en 2025 de la plupart des fractions de TVA transférées aux départements, aux régions et au bloc communal.

1.   Les mesures de réduction du FCTVA conduiraient à diminuer les ressources des collectivités à hauteur de 800 millions d’euros

Ainsi, le A de l’article 30 prévoit d’exclure de l’assiette du FCTVA les dépenses de fonctionnement : l’entretien des bâtiments publics et de la voirie, l’entretien des réseaux et la fourniture de prestations de solution d’informatique en nuage (« cloud »).

Le B procède à une diminution du taux de compensation du FCTVA dès le 1er janvier 2025, quelle que soit la date de réalisation des dépenses éligibles, le faisant passer de 16,404 % à 14,850 %, soit une baisse de 1,554 point correspondant à une baisse du montant des remboursements de 9,5 %. Par dérogation, le taux de 5,6 % compensant la fourniture de prestations de solution de « cloud » est maintenu pour les dépenses éligibles réalisées avant l’exercice 2025.

Pour 2025, cette mesure de réduction d’assiette et de taux devrait conduire à une baisse de 800 millions d’euros du montant du FCTVA par rapport à sa dynamique anticipée. La mesure d’assiette contribuerait pour 10 % de ce montant et la réduction du taux compterait pour 90 %. Cet écart s’explique par le fait que le recentrage de l’assiette ne produirait des effets que pour les investissements à réaliser à partir du 1er janvier 2025 tandis que la réduction du taux s’appliquerait aux attributions du FCTVA dès le 1er janvier 2025.

Ainsi, le FCTVA, qui aurait dû atteindre 7,64 milliards d’euros en 2025 à droit inchangé, devrait finalement s’élever à 6,85 milliards d’euros. Compte tenu de la réforme, la consommation des crédits sur le FCTVA serait ainsi attendue en baisse de 258 millions d’euros par rapport à la prévision inscrite en loi de finances pour 2024.

Selon les données fournies par la Direction du budget aux rapporteurs, les économies attendues de cette mesure pour l’État en 2025 se répartiraient entre les strates de la façon suivante :

– communes : 366 millions d’euros ;

– groupements : 199 millions d’euros ;

– départements : 143 millions d’euros ;

– régions : 64 millions d’euros ;

– autres : 24 millions d’euros.

En année pleine, les économies s’élèveraient à 1,1 milliard d’euros, réparties de la façon suivante :

– 423 millions d’euros, s’agissant de la suppression des dépenses de fonctionnement de l’assiette éligible, dont 209 millions d’euros pour les dépenses d’entretien des voiries, 139 millions d’euros pour les dépenses d’entretien des bâtiments publics, 72 millions d’euros pour les dépenses d’entretiens et 3 millions d’euros pour les dépenses de « cloud » ;

– 681 millions d’euros en raison de la réduction du taux des attributions.

2.   Le gel en 2025 des fractions de TVA à leur niveau de 2024 représenterait une perte de recettes évaluée à 1,2 milliard d’euros pour les collectivités

Le I de l’article 31 prévoit que le montant de la TVA des régions est fixé en 2025 au même niveau que celui de 2024.

Le II modifie le mécanisme de régularisation de la fraction de TVA perçue chaque année par les EPCI à partir de 2025. Au lieu de s’appliquer sur l’évaluation du produit net de TVA de l’année inscrite en loi de finances, la régularisation s’applique sur l’évaluation de l’année précédente. Dès lors, le montant final de la fraction de TVA perçue en année N sera calculé à partir de la TVA perçue en année N-1. Ainsi, en 2025, les EPCI percevront le même montant de TVA qu’en 2024 (« année blanche ») puis, les années suivantes, ils percevront une fraction de TVA établie sur la TVA de l’année précédente, avec la dynamique de l’année précédente. Ce mode de calcul aura pour conséquence de réduire le montant de la régularisation en fin d’année.

Les III et IV effectuent la même modification s’agissant des départements, de la métropole de Lyon, du département de Mayotte, des collectivités de Corse, de Guyane et de Martinique, ainsi que de la Ville de Paris. Toutefois, la fraction de TVA alimentant le fonds de sauvegarde des départements n’est pas affectée par la mesure.

Selon la Direction du budget, en tenant compte d’une prévision d’évolution de la TVA nationale de + 2,3 % en 2025, la moindre recette pour les collectivités et les groupements concernés s’élèverait globalement à 1,2 milliard d’euros. En outre, le gel des fractions de TVA aurait pour conséquence d’instaurer en 2025 une « année blanche » pour les versements au bloc communal au titre du FNAET, puisque celui-ci ne serait pas alimenté cette année-là.

D.   MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

1.   En commission des finances

La commission des finances a examiné les amendements portant sur les articles 30 et 31 lors de sa réunion du 25 octobre 2024.

Des députés issus de cinq groupes ont déposé des amendements de suppression de l’article 30 ([36]). Le rapporteur général a déposé un amendement concurrent I-CF1873 proposant de remonter le taux de remboursement de telle façon que le montant prévisionnel du FCTVA en 2025 soit identique à celui de 2024, soit 7,104 milliards d’euros, revenant ainsi sur la baisse nominale de 258 millions d’euros du FCTVA proposée par le PLF. Le taux de remboursement serait ainsi fixé à 15,41 % au lieu de 14,85 %.

La commission ayant adopté les amendements de suppression, l’amendement du rapporteur général est tombé.

M. Tristan Lahais et le groupe EcoS, ainsi que des députés issus de quatre groupes ont déposé des amendements de suppression de l’article 31 ([37]). Après avoir rappelé que « le budget de l’État ne perçoit plus que 45 % à 46 % du produit de TVA », le rapporteur général a considéré que « le maintien d’un reversement de 52,5 milliards d’euros aux collectivités locales n’était pas à négliger dans le contexte actuel ». Ces amendements de suppression ont été rejetés.

La commission a examiné des amendements alternatifs prévoyant de revaloriser les fractions de TVA au niveau de l’inflation prévue dans le PLF, soit + 1,8 % (I-CF1568 et I-CF1715), ou de modifier la répartition de l’effort entre strates (I-CF1677 et I-CF1679). Ces amendements ont également été rejetés.

La commission a ensuite rejeté l’article 31.

2.   En séance publique

Pour la séance publique, 18 amendements identiques de suppression de l’article 30 ont été déposés par des députés des groupes (par ordre alphabétique) Dem, DR, EcoS, EPR, GDR, HOR, LFI-NUPES, LIOT, RN, SOC ainsi que par quatre députés non-inscrits ([38]). Les deux rapporteurs ont déposé ou co-signé des amendements de suppression ([39]).

M. Nicolas Ray a déposé 4 amendements de repli visant à réintégrer dans l’assiette de dépenses éligibles les dépenses d’entretien des bâtiments publics, de la voirie, des réseaux et de fournitures de prestations informatiques, considérant ces dépenses indispensables pour l’avenir, à rétablir le taux du remboursement ou, à défaut, à le porter au niveau qui était le sien avant la loi de finances pour 2015, soit un taux de FCTVA de 15,761 %, ou à défaut, à son niveau de 2003, lorsque le taux de TVA était de 19,6 %, soit un taux de FCTVA de 15,482 % ([40]).

Dans sa séance du samedi 9 novembre 2024, l’Assemblée nationale a adopté à la quasi-unanimité (145 voix pour, 1 contre) les amendements de suppression de l’article 30, avec l’avis favorable du rapporteur général et l’avis défavorable du Gouvernement. Le rapporteur général a souligné le caractère rétroactif de la mesure qui « pourrait déstabiliser les plans de financement de certaines collectivités ». Le ministre du budget et des comptes publics a reconnu « comprendre les arguments, notamment sur la question de la rétroactivité », précisant que le Gouvernement allait « retravailler l’article ».

Six amendements de suppression ont également été déposés sur l’article 31 par les groupes EcoS, GDR, LFI-NUPES, LIOT, SOC et par des membres du groupe HOR ([41]). Ces amendements ont été rejetés, suivant l’avis du rapporteur général et du ministre.

L’Assemblée nationale a, en revanche, adopté :

– l’amendement I-1767 de M. Philippe Lottiaux (RN), excluant la fraction de TVA des départements du dispositif, avec un avis défavorable du rapporteur général et du ministre. Le rapporteur général a rappelé que la fraction de TVA au titre du fonds de sauvegarde des départements n’était pas concernée par le gel. Il a estimé que le traitement différencié des départements risquerait de les placer « dans une position contracyclique par rapport aux autres collectivités territoriales ».

– l’amendement I-1128 de M. Matthias Renault (RN) prévoyant que la fraction de TVA des régions sera égale, en 2025, à son niveau de 2021 et non à son niveau de 2024, correspondant à une diminution de 500 millions d’euros.

L’article 31, ainsi amendé, a été adopté par l’Assemblée nationale.

E.   MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

En raison du rejet par l’Assemblée nationale de la première partie du PLF pour 2025, le Sénat a été saisi du texte déposé par le Gouvernement.

La commission des finances du Sénat a adopté un amendement FINC.9 de suppression de l’article 30 du rapporteur général, M. Jean-François Husson.

Elle a ensuite adopté l’article 31 sans modification.

Lors de l’examen des articles en séance publique, le 30 novembre 2024, le Sénat a adopté douze amendements identiques de suppression de l’article 30.

Il a également adopté, contre l’avis du rapporteur général et du Gouvernement, l’amendement I-720 (après l’article 30) de Mme Cukierman et du groupe CRCE-K prévoyant la contemporénéisation des versements du FCTVA à compter de 2025. Ainsi, les trois régimes de versement du FCTVA seraient supprimés, les attributions étant versées l’année même de la dépense, afin de « soutenir la commande publique locale et de lutter contre la baisse de l’investissement public », selon les auteurs. Selon les informations fournies aux rapporteurs par la Direction du budget, la mise en œuvre d’une telle mesure présenterait, pour 2025, un coût de 6,4 milliards d’euros.

S’agissant de l’article 31, le Sénat a adopté un amendement rédactionnel I‑2180 du rapporteur général puis a adopté l’article 31 ainsi amendé.

F.   POSITION DES RAPPORTEURS

1.   Le dispositif resserrant le FCTVA est inadapté en raison de son caractère rétroactif et va pénaliser l’investissement des collectivités

Les attributions versées par le FCTVA constituent, au même titre que les subventions ministérielles, celles d’autres collectivités et de l’Union européenne, les dotations de l’État (DSIL, DETR, « fonds vert »), mais également les emprunts bancaires, des ressources prises en compte dans l’établissement des plans de financement des collectivités territoriales et de leurs groupements. Les versements du FCTVA sont intégrés dans les plans pluriannuels d’investissement (PPI) et la stabilité du taux de ce concours, lié à celui de la TVA, et sa gestion désormais automatisée, donnent une grande prévisibilité à cette ressource.

Aussi, l’annonce de la réforme envisagée a pu être considérée comme « la remise en cause d’une vache sacrée » (Michel Klopfer ([42])) ou encore « le franchissement d’une ligne rouge » (André Laignel ([43])), d’autant que le FCTVA avait échappé jusqu’à présent aux mesures de contraintes sur la dépense locale contenues dans les lois de programmation des finances publiques successives.

Pour France Urbaine, la baisse de la ressource constituée par le FCTVA va conduire à un besoin de financement externe supplémentaire qui va se traduire, soit par un « lissage » des PPI, soit par une détérioration des ratios en raison d’un recours accru à l’emprunt. L’AMF attire également l’attention sur « la fragilisation du respect de la règle d’or » par les collectivités en situation financière tendue, notamment les collectivités ultra-marines, et sur les difficultés potentielles d’accès à l’emprunt bancaire et aux subventions européennes du fait des exigences d’apports minimum. Intercommunalités de France relève que la diminution du taux du FCTVA équivaut à un renchérissement d’environ 2 % du coût des investissements, qui s’ajoute à la hausse des prix des années précédentes.

L’élargissement progressif de l’assiette éligible à certaines dépenses de fonctionnement à partir de 2016 a pu paraître comme un écart à une doctrine bien établie de subventionnement des seules dépenses d’investissement par le FCTVA. Pour autant, comme l’a rappelé France Urbaine, l’intégration des dépenses d’entretien de voirie, de bâtiment et de réseau visait à mettre un terme à la « guerre des imputations comptables », la distinction entre entretien courant, relevant du fonctionnement, et gros entretien, relevant de l’investissement, n’étant pas toujours aisée, ce qui a conduit à de nombreux contentieux administratifs entre collectivités et préfets. En outre, l’intégration des dépenses d’informatique en nuage (« cloud ») était la conséquence d’une évolution technologique et commerciale : le passage de l’acquisition d’infrastructures et de licences informatiques à celui d’abonnements à des services (solutions de logiciels en tant que service ou « SaaS »). Il était donc logique, selon Intercommunalités de France, que des opérations de même nature dont les modalités techniques sont différentes, ne soient pas pénalisées au regard du FCTVA.

La rétroactivité de la mesure pose également problème à plusieurs titres :

1° Du fait qu’elle porte sur des investissements réalisés en 2023, 2024 et 2025 en fonction du régime de versements du FCTVA, elle va bouleverser voire mettre en péril les plans de financement en cours d’exécution des collectivités concernées.

2° Elle crée une rupture de traitement entre les collectivités selon leur régime de versements. Ainsi, le caractère rétroactif de la diminution du taux des attributions du FCTVA n’affectera pas les communes nouvelles, les EPT et les EPCI à fiscalité propre qui perçoivent le versement du FCTVA la même année que l’investissement, à trimestre échu. En revanche, elle aura un impact fort sur le financement des investissements des communes au régime de droit commun – en particulier les petites communes – et dans une moindre mesure, des collectivités au régime anticipé.

3° La mesure de restriction de l’assiette s’appliquera aux investissements réalisés à compter du 1er janvier 2025 tandis que la diminution du taux s’appliquera à compter de la même date sur des investissements déjà réalisés. Ce décalage temporel participe à complexifier le dispositif et à rendre peu lisibles ses conséquences, tout en contribuant à créer des distorsions injustifiées.

Les rapporteurs considèrent que le FCTVA, qui représente les deux-tiers du concours de l’État à l’investissement public local, doit être préservé dans sa configuration actuelle. La mesure proposée dans le PLF pour 2025 va affecter négativement l’investissement des collectivités, à rebours des besoins d’investissement qu’exige la transition écologique, évalués à environ 21 milliards d’euros supplémentaires par an d’ici 2030 par l’I4CE en 2021, évaluation confirmée par France Stratégie en 2023 ([44]).

M. Tristan Lahais souligne que cette réforme n’est pas dictée par une ligne directrice claire, autre que celle de réduire un PSR indispensable à l’investissement des collectivités territoriales, que ce soit pour le renouvellement des équipements publics, des voiries et des réseaux, etc… mais aussi pour l’atténuation et l’adaptation au changement climatique des territoires. Le maintien de l’entretien des bâtiments publics dans l’assiette des dépenses éligibles doit être une priorité. Le rapporteur relève que la rétroactivité de la mesure aurait « piégé » nombre de collectivités en les privant d’une partie du financement de projets déjà lancés. Aussi a-t-il voté la suppression de cet article et se félicite-t-il de sa suppression par l’Assemblée nationale comme par le Sénat.

M. Nicolas Ray considère que la rétroactivité de la réforme est une erreur. Il est opposé à toute diminution du taux du FCTVA. Pour ces raisons, il a voté contre cet article. La question du périmètre de l’assiette peut toutefois se poser. Si le FCTVA devait être redimensionné pour participer à l’effort de maîtrise de la dépense locale, il pourrait être alors envisagé de revenir à l’assiette initiale des dépenses d’investissement avant les élargissements successifs entrepris depuis 2016. Toutefois, le FCTVA devrait s’appliquer aux dépenses d’entretien nécessaires pour la remise en état des bâtiments publics en cas d’intempéries et de catastrophes naturelles dans la mesure où celles-ci ne sont pas éligibles aux aides de la dotation de solidarité aux collectivités territoriales touchées par des événements climatiques ou géologiques (DSEC).

Les rapporteurs relèvent que les modulations envisagées pour le FCTVA contribuent à l’instabilité juridique permanente à laquelle les collectivités sont exposées et que regrettent régulièrement les élus locaux. Au demeurant, dans le rapport précité de mai 2023 sur l’investissement des collectivités territoriales ([45]), l’IGF faisait le constat que « dans un contexte d’incertitude sur leur situation financière, les collectivités attendent d'abord de l'État une prévisibilité pluriannuelle de leurs ressources et des soutiens à l'investissement, ainsi qu’une stabilité de la règle du jeu », un constat que partagent pleinement les rapporteurs.

2.   Le gel des fractions de TVA constitue une remise en cause d’une juste compensation des dernières réformes de la fiscalité locale et répartit l’effort de façon inéquitable entre les collectivités

La part de TVA nationale revenant aux collectivités s’élève désormais à 52,1 milliards d’euros, après les réformes de la fiscalité locale intervenues en 2018 avec la DGF des régions, en 2020 avec la suppression de la THRP, en 2021 avec la suppression de la part régionale de la CVAE puis en 2023 avec la réforme de la CVAE. La TVA représente désormais une part substantielle du panier de ressources des EPCI et de la Ville de Paris (25 % des recettes réelles de fonctionnement s’agissant des EPCI), des départements (28 % des RRF) et des régions (53 % des RRF). La part de la TVA dans le panier fiscal est encore plus élevée et même prépondérante : 54 % pour les EPCI, 40 % pour les départements et 63 % pour les régions en 2023 ([46]).

Dans son rapport 2023 sur les finances publiques locales ([47]), la Cour des comptes faisait le constat d’une forte dynamique des recettes de TVA en 2022, à hauteur de + 5,5 % à périmètre constant et + 9,4 % courant, expliquant 40 % de l’augmentation des recettes fiscales des collectivités. En revanche, dans son rapport de 2024 ([48]), la Cour des comptes souligne qu’en 2023, à périmètre constant, les encaissements de recettes de TVA ont au contraire moins augmenté (+ 1,9 %) que le PIB en valeur. La dépendance du panier fiscal des collectivités – notamment les plus grosses – à la TVA, impôt fortement corrélé au PIB, contribue à rendre leurs ressources beaucoup plus sensibles à la conjoncture économique et moins prévisibles. Ainsi, l’écart du produit de TVA définitivement constaté à la prévision contenue en loi de finances a conduit à une régularisation de près d’un milliard d’euros en novembre 2023 et de 1,9 milliard d’euros en novembre 2024 ([49]), constituant, pour reprendre les termes d’un article paru dans la Gazette des communes le 20 novembre 2024, un « coup de massue surprise » pour les collectivités.

Comme le relève Intercommunalités de France, les arguments de dynamisme et de stabilité de la TVA mis en avant pour remplacer la fiscalité locale par de la fiscalité nationale sont contredits par les faits. Une appréciation que partage M. Jean-Léonce Dupont, président de la commission des finances de Départements de France, pour qui « les départements ont le sentiment d’avoir été abusés dans un marché de dupes » dans la mesure où l’on a compensé le produit départemental de la taxe foncière qui est un impôt de « stock » par une fraction de TVA qui est un impôt de « flux » ([50]). Les départements ont rapidement fait le constat que cette ressource n’était pas aussi dynamique qu’envisagé par le Gouvernement alors qu’a contrario, la réévaluation des bases de la taxe foncière contribuait à accroître régulièrement son rendement.

Aussi, le gel des fractions de TVA proposé pour 2025 apparaît, tant pour les associations d’élus locaux auditionnées que pour les rapporteurs, comme un « retour sur la parole donnée » par l’État.

Les rapporteurs constatent que l’ « année blanche » pour la TVA des collectivités va impacter celles-ci de manière inéquitable dans la mesure où, bien que le « fonds de sauvegarde » des départements soit épargné, l’effort sera supporté majoritairement par les départements (à hauteur de près de 0,7 milliard d’euros) alors qu’il s’agit de la strate la plus en difficulté. En revanche, les communes ne seront pas concernées.

Si la réforme proposée aura l’avantage d’améliorer la visibilité des collectivités sur leurs recettes de TVA à partir de 2026, en calculant les fractions qui leur sont affectées sur le produit national de TVA de l’année précédente, et donc de réduire considérablement le montant des régularisations de fin d’année, elle prive les départements, les régions et les EPCI d’une recette attendue de 1,2 milliard d’euros et gèle le FNAET en 2025, figeant le lien existant entre le développement économique des territoires et une partie des retombées fiscales. Aussi, Intercommunalités de France comme Départements de France estiment que la TVA s’apparente à une « dotation » nationale sans lien avec les politiques territoriales ([51]).

M. Tristan Lahais considère que, dans son ensemble, le gel de la fraction de TVA, même temporaire, n’est qu’un « artifice » pour justifier une diminution des moyens accordés aux collectivités. S’agissant de la participation des collectivités territoriales à l’effort de réduction des déficits, il eût été préférable que l’État tienne un discours moins « sophistiqué » et plus honnête, invitant à un débat transparent avec les associations d’élus locaux sur l’opportunité, ou non, de diminuer leurs ressources, sur les modalités du partage de l’effort et sur les ressources concernées selon les strates. Pour ces raisons, le rapporteur a voté pour la suppression de cet article.

M. Nicolas Ray rappelle son opposition à la réforme fiscale qui a abouti à la suppression de la taxe d’habitation sur la résidence principale en 2020, qui a été particulièrement coûteuse pour le budget de l’État (23 milliards d’euros). Plutôt que remplacer la CVAE par de la TVA, il lui semble qu’il aurait été plus pertinent d’affecter une fraction d’impôt sur les sociétés (IS) aux EPCI et aux régions, et d’affecter une part de contribution sociale généralisée (CSG) aux départements, qui sont des taxes et impositions plus en adéquation avec le financement des compétences exercées.

Les rapporteurs soulignent que les compensations insuffisantes des réformes fiscales et l’instabilité des modalités de financement des collectivités territoriales, à rebours des engagements pris par les gouvernements successifs, contribuent à nourrir un sentiment de méfiance de la part des élus locaux. Afin d’y remédier, il convient de privilégier le dialogue État-collectivités territoriales sur la base de constats partagés. En outre, les rapporteurs plaident pour une fiscalité locale qui redonne un levier fiscal aux collectivités et associe les entreprises et les ménages au financement des services publics dont ils bénéficient sur leur territoire.

II.   LE FONDS DE RÉSERVE AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES (ARTICLE 64 DU PLF)

Le « fonds de réserve » inscrit dans le PLF 2025 s’inscrit dans la lignée des mesures prises par l’État depuis le début des années 2010 pour faire participer les collectivités territoriales et leurs groupements aux efforts de maîtrise de la dépense publique. Injuste et infantilisant pour les gestionnaires locaux, le mécanisme de prélèvement initialement proposé a été, heureusement, adouci par le Sénat sous la forme d’un « dispositif de lissage conjoncturel ». Celui-ci n’en demeure pas moins critiquable, tant dans son principe que dans ses modalités de fonctionnement.

A.   LA TENTATION CONSTANTE DE L’ÉTAT DEPUIS 2012 DE FAIRE CONTRIBUER LES COLLECTIVITÉS AUX EFFORTS DE MAÎTRISE DES DÉPENSES PUBLIQUES PAR LA MODÉRATION DE LEURS RECETTES

La mise en place, au travers du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire (TSCG) signé à Bruxelles le 2 mars 2012, d’une trajectoire de « convergence » vers un objectif « à moyen terme » de solde budgétaire de l’ensemble des administrations publiques ([52]) a logiquement amené l’État à imaginer des dispositifs destinés à faire participer les administrations publiques locales (APUL) aux efforts d’amélioration du déficit public global.

Chacune des lois de programmation des finances publiques adoptées depuis 2012 comporte une disposition d’ordre général rappelant que les collectivités territoriales « contribuent » à l’effort de réduction du déficit public « selon des modalités à l’élaboration desquelles elles sont associées » ([53]).

En dépit de la fixation d’un objectif d’évolution de la dépense locale (Odedel) à chaque loi de programmation depuis celle relative à la période 2014‑2019 ([54]), celui-ci a une valeur juridique non-contraignante. La contribution des APUL à la maîtrise du solde budgétaire global s’est donc assez logiquement portée sur les recettes allouées aux collectivités territoriales et à leurs groupements selon des mécanismes associant relativement peu les gestionnaires concernés.

1.   La contribution au redressement des finances publiques (CRFP) : une réduction des concours financiers imposée par le législateur

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 prévoyait en son annexe ([55]) une participation « à l’effort de redressement des comptes publics » sous la forme d’une réduction de 750 millions d’euros par an sur la période 2014-2015 de l’ensemble des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales, ainsi ramenés à 49,03 milliards d’euros en 2015, contre 50,53 milliards d’euros en 2013 (- 3 %). Le texte appelait ensuite l’État à « négocier » un « pacte de confiance et de solidarité » avec les collectivités territoriales afin de déterminer les modalités, à partir de 2014, de participation du secteur public local aux efforts de maîtrise des finances publiques.

À l’issue d’une série de consultations menées dans le cadre d’une « conférence nationale des finances publiques locales », le Premier ministre a annoncé le 16 juillet 2013 le contenu du pacte de confiance et de solidarité, qui se traduit essentiellement par une réduction des concours financiers de l’État en 2014 de 1,5 milliard d’euros au lieu des 750 millions d’euros initialement prévus. En conséquence, le prélèvement sur recettes (PSR) opéré au profit des collectivités territoriales dans la loi de finances initiale pour 2014 passe de 55,7 milliards d’euros en 2013 à 54,2 milliards d’euros en 2014 ([56]).

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 porte l’effort à 10,7 milliards d’euros sur la période 2015-2017 ([57]), montant qui correspond à la part des dépenses des APUL dans le total des dépenses publiques en 2013 (20,9 %).

Bien que la CRFP effectivement constatée en exécution ait été finalement un peu moins élevée que prévu (9,98 milliards d’euros sur la période 2015-2017) en raison d’un allègement de l’effort demandé au bloc communal en 2017 ([58]), les ressources des collectivités ont été affectées de près de 11,5 milliards d’euros en quatre ans avec l’objectif assumé d’inviter les collectivités à « une maîtrise accrue de leurs dépenses de fonctionnement » ([59]).

À chaque étape, si l’on excepte les modalités de répartition de l’effort, qui ont été fixées dans le respect des préconisations du comité des finances locales (CFL) ([60]), les collectivités territoriales n’ont pu que « prendre acte » ([61]) de la volonté du Gouvernement sans avoir pu peser sur la décision finale.

2.   Le mécanisme des « contrats de Cahors » : un encadrement imposé des dépenses de fonctionnement

Annoncé par le président de la République lors de la Conférence nationale des territoires du 17 juillet 2017, puis précisé par le Premier ministre dans un discours à Cahors le 14 décembre 2017, un nouveau dispositif d’encadrement des finances locales, dénommé « contrats de Cahors », est mis en place par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour 2018-2022 en son article 29.

Présenté comme un « chemin différent » de ce qui avait été pratiqué précédemment avec la CRFP, le mécanisme s’articule autour d’une véritable démarche contractuelle avec les « collectivités les plus importantes », étant précisé que seules « 1 % des communes » seraient concernées ([62]).

Très concrètement, les régions, les collectivités de Corse, de Martinique et de Guyane, les départements et la métropole de Lyon, ainsi que les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre dont les dépenses réelles de fonctionnement figurant dans le compte de gestion du budget principal étaient supérieures à 60 millions d’euros en 2016, soit 321 collectivités et groupements au total, sont invités à conclure avec le représentant de l’État un « contrat » par lequel ils s’engagent à respecter sur une période de trois ans (2018, 2019 et 2020) une cible d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement, un objectif d’amélioration du besoin de financement et une trajectoire d’amélioration, le cas échéant, de leur capacité de désendettement, définie comme le rapport en années entre l’encours de dette et l’épargne brute de l’exercice écoulé.

Si les collectivités disposaient d’une marge de négociation dans la fixation de la cible d’évolution des dépenses, des procédures de « sanction » sont venues accroître le caractère contraignant du dispositif.

Les contrats de Cahors : un partenariat sous contrainte

La conclusion d’un contrat et le respect des objectifs fixés permettent à une collectivité d’avoir l’assurance de la stabilité de ses concours financiers au cours de la période et, par ailleurs, de bénéficier d’une éventuelle majoration du taux de subvention alloué par l’État au titre de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) (VII de l’article 29 de la LPFP 2018-2022).

L’objectif d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement (DRF) peut, par ailleurs, s’éloigner de la cible générale fixée par la LPFP en son article 13 (1,2 % par an). En fonction de critères précisés par la loi tenant à l’accroissement démographique du territoire, au niveau du revenu moyen ses habitants ou aux efforts de maîtrise des DRF sur la période 2014-2016, le taux à respecter se situe dans une fourchette allant de 0,75 % à 1,65 % (IV de l’article 29 de la LPFP).

Tout dépassement, en revanche, de la cible d’évolution des DRF constaté dans les comptes de gestion donne lieu à la mise en œuvre d’une « reprise financière » égale à 75 % de l’écart dans la limite de 2 % des recettes réelles de fonctionnement du budget principal de l’année considérée. Le montant de cette reprise est prélevé sur les douzièmes de fiscalité prévus aux articles L. 2332‑2 (bloc communal), L. 3332‑1‑1 (départements) et L. 4331‑2‑1 (régions) du Code général des collectivités territoriales (CGCT) (V de l’article 29 de la LPFP).

Par ailleurs, les collectivités et groupements qui ne souhaiteraient pas s’engager dans une démarche contractuelle se verraient appliquer de manière automatique la cible générale d’évolution des DRF (1,2 % par an) : dans ce cas, la reprise financière opérée par l’État en cas de dépassement s’élèverait à 100 % de l’écart (VI de l’article 29 de la LPFP).

Lorsqu’en 2021, le Gouvernement s’est penché, au travers d’une commission pour l’avenir des finances publiques, sur les meilleurs moyens d’assurer la soutenabilité des comptes publics à l’issue de la crise sanitaire, le mécanisme des contrats de Cahors a été salué comme une « approche » ayant permis de « limiter l’évolution des dépenses de fonctionnement » des collectivités territoriales ([63]).

Effectivement, il ressort de l’analyse détaillée des DRF des collectivités depuis 2013 qu’elles ont évolué de + 1,40 % par an en moyenne sur la période 20182021 ([64]), ce qui est même un rythme inférieur à l’évolution moyenne constatée au cours de la période de la CRFP (+ 1,67 % par an sur la période 2014‑2017). Par ailleurs, peu de collectivités ont, en définitive, été sanctionnées pour dépassement : 12 collectivités ou groupements ont subi une reprise financière au titre de l’exercice 2018 et 14 au titre de l’exercice 2019 pour des montants peu significatifs (respectivement 25,3 millions d’euros et 75,8 millions d’euros) ([65]).

Sources : Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL) - rapports 2017, 2018, 2021 et 2024. Sont ici prises en compte les DRF des budgets principaux des collectivités et EPCI à fiscalité propre, hors syndicats.

En dépit de la validation du dispositif par le Conseil constitutionnel, qui a estimé que le législateur n’avait pas porté atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales ([66]), les « contrats de Cahors » ont été perçus par les associations d’élus locaux comme une forme de tutelle, le président du CFL, André Laignel, les ayant même qualifiés de « pacte de méfiance » en lieu et place du « pacte de confiance » évoqué par le Gouvernement en 2022 ([67]). On peut noter que, parmi les 321 collectivités et groupements ciblés par la LPFP pour 2018-2022, tous n’ont pas souhaité s’engager dans un processus de contractualisation : seuls 228 contrats ont été finalement signés, parmi lesquels on ne retrouve que 9 pour des régions et 45 pour des départements ([68]).

Lorsque le Gouvernement décide, en novembre 2022, de ne pas reconduire le dispositif, les associations d’élus locaux saluent une « avancée » tout en réaffirmant leur « refus » de tout mécanisme national d’encadrement des dépenses de fonctionnement ([69]).

B.   LE FONDS DE RÉSERVE PROPOSÉ PAR LE PLF POUR 2025 : UN DISPOSITIF À MI-CHEMIN ENTRE LA RÉGULATION BUDGÉTAIRE ET LA PÉRÉQUATION

Le PLF pour 2025 met en place un dispositif budgétaire original sous la forme d’un « fonds de réserve » dont les modalités de fonctionnement s’inspirent partiellement des « contrats de Cahors » tout en s’inscrivant dans une logique de renforcement de la péréquation financière horizontale.

1.   Un dispositif de régulation budgétaire inspiré en partie des « contrats de Cahors »

L’article 64 du PLF pour 2025 prévoit la mise en place d’un « fonds de réserve » destiné à permettre « l’association » des collectivités territoriales à l’effort de redressement des finances publiques conformément aux dispositions de la loi de programmation des finances publiques pour 2023 à 2027 en son article 17 ([70]). En dépit de sa dénomination, le dispositif proposé s’inscrit donc bien dans la logique de l’encadrement des finances locales en œuvre depuis 2012.

Les modalités de fonctionnement du fonds de réserve s’inspirent en partie de celui des « contrats de Cahors » sans en reprendre le cadre partenarial :

1° À l’image des reprises financières mises en œuvre en cas de dépassement d’un objectif d’évolution de DRF (cf. supra), le fonds a vocation à être alimenté par un « prélèvement » effectué sur les montants des impositions versées par l’État aux collectivités et groupements concernés. Le IV de l’article 64 prévoit que, comme en 2018, le prélèvement sera imputé sur le montant des douzièmes de fiscalité prévus pour le bloc communal, les départements et les régions respectivement aux articles L. 2332‑2, L. 3332‑1‑1 et L. 4331‑2‑1 du CGCT ;

2° Le prélèvement n’est appliqué qu’aux collectivités les plus importantes, à savoir les communes, les EPCI à fiscalité propre, les départements et les régions dont les DRF constatées dans le compte de gestion du budget principal de l’exercice 2023 sont supérieures à un certain montant. Il n’est mis en œuvre qu’en cas de « dépassement » d’un objectif budgétaire portant, cette fois, sur le respect d’un « solde de référence » et non d’un taux d’évolution des DRF (I de l’article 64).

Le périmètre du dispositif est plus large que celui fixé pour les « contrats de Cahors » dans la mesure où le seuil des DRF pris en compte pour l’application du prélèvement a été fixé à 40 millions d’euros au lieu de 60 millions d’euros.

À partir de l’examen des comptes de gestion, on peut estimer à 567 le nombre de collectivités et de groupements affichant un niveau de DRF supérieur à 40 millions d’euros en 2023. Dans cet ensemble, on dénombre 296 communes et 157 EPCI à fiscalité propre ([71]). Selon les informations données par le précédent Gouvernement lors de la réunion du CFL du 8 octobre dernier ([72]) et confirmées par la direction du budget ([73]), 438 collectivités et groupements seulement devraient s’acquitter du prélèvement compte tenu des exonérations prévues par le VI de l’article 64.

Les collectivités non assujetties au prélèvement

Pour chaque année d’application du prélèvement à compter de 2025, les collectivités et EPCI ci-après ne sont pas tenus de contribuer au fonds de réserve :

1/ Les régions qui n’étaient pas contributrices, l’année précédente, au fonds de solidarité régional mentionné à l’article L. 4332‑9 du CGCT. Ce dispositif a été institué par le I de l’article 196 de la loi de finances pour 2022 afin de renforcer la solidarité financière entre les régions.

2/ Les vingt premiers départements classés l’année précédente en fonction de l’indice de fragilité sociale défini au I de l’article 208 de la loi de finances pour 2020 afin de déterminer la répartition de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 250 millions d’euros allouée aux départements les plus fragiles par le 1° du 4 du E du V de l’article 16 de la même loi de finances (cf. page 22 supra).

3/ Les établissements publics territoriaux (EPT) qui n’étaient pas, l’année précédente, contributeurs au fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) mentionné à l’article L. 2336‑1 du CGCT ([74]).

4/ Les trois cents premiers EPCI à fiscalité propre classés l’année précédente en fonction des critères utilisés pour établir la dotation de péréquation de la dotation d’intercommunalité mentionnée à l’article L. 5211‑28 du CGCT. Le calcul de cette dotation de péréquation s’effectue à partir de la somme de deux rapports, chacun d’entre eux associant la donnée moyenne (potentiel fiscal par habitant ou revenu par habitant) des EPCI relevant de la même catégorie et celle de l’EPCI considéré.

5/ Les deux cent cinquante premières communes classées l’année précédente en fonction de l’indice synthétique des ressources et des charges utilisé pour le calcul de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) et mentionné aux articles L. 2334‑16 et suivants du CGCT.

Cet indice synthétique est constitué à partir de plusieurs rapports portant respectivement portant sur le potentiel financier par habitant, la proportion de logements sociaux, le nombre de bénéficiaires d’aides au logement ainsi que le revenu par habitant. Chaque rapport associe la donnée moyenne des communes relevant de la même strate géographique et celle de la commune considérée.

6/ Les deux mille cinq cents premières communes classées l’année précédente en fonction de l’indice synthétique utilisé pour le calcul de la troisième fraction de la dotation de solidarité rurale (DSR) et mentionné à l’article L. 2334‑22‑1 du CGCT.

Cet indice synthétique est constitué à partir de deux rapports portant respectivement portant sur le potentiel financier par habitant et le revenu par habitant. Chaque rapport associe la donnée moyenne des communes relevant de la même strate géographique et celle de la commune considérée.

Selon les éléments communiqués par la direction du budget, la répartition par strate des collectivités contributrices au fonds de précaution se présente comme suit :

Strate

Collectivités ou EPCI contributeurs

Observations

Régions ([75])

12

Pour mémoire, on peut noter que :

1/ Six régions n’étaient pas contributrices au fonds de solidarité régional en 2023 ([76]) ;

2/ Quatorze départements ont bénéficié en 2024 du fonds de sauvegarde prévu par le 4 du E du V de l’article 16 de la loi de finances pour 2020 précitée en son 2° ;

3/ Quatre EPT (sur les onze de l’Île-de-France) n’étaient pas contributeurs au FPIC en 2023 ([77]).

Départements

79

EPT

10

Autres EPCI

134

Communes

203

Total

438

Par ailleurs, les montants prélevés ont vocation à être bien plus élevés que ceux des reprises financières opérées en 2018 et en 2019 dans la mesure où ils correspondent à un écart entre le solde prévisionnel de l’ensemble des APUL inscrit dans la loi de finances initiale de l’année précédente, retraité de celui des organismes divers d’administration locale (ODAL), et celui constaté en exécution pour l’ensemble des collectivités territoriales et de leurs groupements au cours de l’exercice concerné (II et premier alinéa du III de l’article 64). Le prélèvement qui pourrait être opéré l’an prochain s’appuierait donc à la fois sur le solde inscrit à l’article liminaire de la loi de finances pour 2024 et sur le solde effectivement réalisé au cours de l’exercice 2024 ([78]). Tout écart de 0,1 point de PIB constaté en 2025 aboutirait donc à un prélèvement global théorique de 3 milliards d’euros sur les recettes des collectivités.

Le montant global du prélèvement ainsi défini est ensuite réparti entre les collectivités et les EPCI contributeurs au prorata des recettes nettes versées au cours de l’exercice précédent par la voie du compte de concours financiers d’avances aux collectivités territoriales (deuxième alinéa du III de l’article 64).

Le compte d’avances aux collectivités territoriales

Actuellement régi par le II de l’article 46 de la loi n° 2005‑1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, le compte « avances aux collectivités territoriales » est un compte spécial au sens donné par la loi organique n° 2001‑1692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) en son article 24. Composé de trois sections, le compte retrace le versement et le remboursement de diverses avances accordées aux collectivités territoriales et aux EPCI, y compris dans les outre-mer.

La deuxième section (programme 833) est la plus importante : elle enregistre les avances versées mensuellement aux collectivités sur le montant des impositions qui leur sont dues (« douzièmes de fiscalité »), qu’il s’agisse des impôts locaux (taxes foncières - TF, taxe d’habitation sur les résidences secondaires - THRS, taxe sur les surfaces commerciales - TASCOM, imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux - IFER, etc.) ou de la fiscalité transférée (fractions de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques - TICPE - allouées aux départements et aux régions, parts de taxe sur la valeur ajoutée affectée aux différents échelons en compensation de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises - CVAE, etc.). Une régularisation s’effectue sur les derniers versements en fin d’année lors de la mise en recouvrement définitive de chaque impôt.

Afin d’éviter qu’un important dépassement de solde au niveau national n’aboutisse à amputer de manière excessive les ressources d’une collectivité contributrice par l’application mécanique des proratas constatés au niveau du compte d’avances, le montant du prélèvement opéré au profit du fonds de réserve est plafonné pour la collectivité concernée à 2 % des recettes réelles de fonctionnement de son budget principal inscrites dans les comptes de gestion de l’exercice précédant celui de la répartition. On peut observer que ce plafond est similaire à celui prévu par les contrats de Cahors (cf. supra), la différence tenant à des minorations limitativement énumérées ([79]) (dernier alinéa du III de l’article 64).

Estimation du prélèvement effectif en 2025

Selon les éléments communiqués par la direction du budget ([80]), l’application des exonérations et des limitations précitées devrait aboutir à un prélèvement effectif sur les recettes des collectivités de 2,8 milliards d’euros en 2025, dont 600 millions d’euros pour les communes, 500 millions d’euros pour les EPCI, 1,2 milliard d’euros pour les départements et 500 millions d’euros pour les régions.

Enfin, quel que soit son montant, le prélèvement ne pourra avoir pour effet de remettre en cause les montants de fiscalité transférée dus aux collectivités en compensation de certains transferts de compétences. Les dispositifs concernés sont expressément mentionnés au V de l’article 64 :

1° La part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) affectée aux départements et à Saint-Pierre-et-Miquelon par le I de l’article 59 de la loi n° 2003‑1311 du 30 décembre 2003 en compensation du transfert de la gestion du revenu minimum d’insertion (RMI) puis par le I de l’article 51 de la loi n° 2008‑1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 en compensation du transfert de la gestion du revenu de solidarité active (RSA), qui s’est substitué au RMI le 1er juin 2009 ([81]) ;

2° La fraction de TICPE allouée au département de Mayotte par les I et II de l’article 39 modifié de la loi n° 2011‑1977 du 28 décembre 2011 pour 2012 en compensation des charges supplémentaires qui ont découlé de sa départementalisation dans les années 2010 : gestion du fonds de solidarité pour le logement ([82]), financement des formations sociales initiales et financement des aides aux personnes âgées et handicapées ([83]), versement des bourses aux étudiants inscrits dans les instituts de formation sanitaire et sociale ([84]), etc. ;

3° La part de TICPE versée aux régions, aux collectivités territoriales de Corse, de Guyane et de Martinique ainsi qu’au département de Mayotte en application de l’article 41 de la loi n° 2013‑1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 en compensation de la suppression de la dotation globale de décentralisation (DGD) allouée autrefois en compensation du transfert des compétences liées à la formation professionnelle continue et à l’apprentissage ;

4° Le produit net de frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) affecté aux départements en application du pacte de confiance et de solidarité du 16 juillet 2013 précité afin d’améliorer le financement des allocations individuelles de solidarité (AIS) : RSA, allocation personnalisée pour l’autonomie (APA) et prestation de compensation du handicap (PCH) ([85]).

La « sanctuarisation » de ces transferts de fiscalité traduit la volonté du Gouvernement de ne pas porter atteinte, ne serait-ce que de manière indirecte, à l’obligation de compensation des transferts de compétences inscrite à l’article 72‑2 de la Constitution.

À titre subsidiaire, le V de l’article 64 exclut en son 4° du dispositif de prélèvement les recettes des établissements publics fonciers locaux (EPFL) ([86]).

2.   Un objectif de péréquation dont la mise en œuvre s’appuie sur le comité des finances locales

À la différence de la CRFP, qui constituait une ponction nette dans les ressources des collectivités, le fonds de réserve a une dimension péréquatrice. Comme l’indiquait le ministre chargé des comptes publics lors de son audition par le CFL précitée, les montants prélevés sont destinés à être « reversés aux collectivités » à compter de 2026.

Le VIII de l’article 64 précise, en effet, que les sommes affectées au titre d’une année sur le fonds de réserve des collectivités territoriales abondent par tiers pendant trois ans suivant la mise en réserve les fonds suivants, destinés à la péréquation horizontale au sein de chacune des trois strates de collectivités :

1° Le fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), issu de l’article 144 de la loi n° 2011‑1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 et actuellement régi par les articles L. 2336‑1 et suivants du CGCT, qui s’applique au bloc communal (fonds doté de 1 milliard d’euros par an depuis 2016) ;

2° Le fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), issu de l’article 255 de la loi n° 2019‑1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 et actuellement mentionné à l’article L. 3335‑2 du CGCT, qui concerne les départements (1,6 milliard d’euros de recettes redistribuées en 2022 ([87])) ;

3° Le fonds de solidarité régional supra, mentionné à l’article L. 4332‑9 du CGCT, qui s’applique aux régions (24 millions d’euros en 2023 ([88])).

Compte tenu des montants redistribués au travers de ces trois mécanismes de péréquation, l’apport théorique du fonds de réserve, soit 2,8 milliards d’euros ([89]) sur la période 2026-2028, est donc loin d’être négligeable.

Assez logiquement, le Gouvernement met en avant la dimension péréquatrice du dispositif, rappelant dans l’exposé des motifs de l’article 64 qu’il se rapproche dans ses modalités de fonctionnement des « prélèvements effectués en application d’un mécanisme de péréquation visant à réduire des écarts de ressources entre collectivités ». On peut noter qu’effectivement, les trois fonds de péréquation précités sont, comme pour le fonds de réserve, abondés par des prélèvements sur les avances de fiscalité locale ([90]).

Le IX de l’article 64, qui détaille les modalités de répartition de l’enveloppe, traduit la volonté du Gouvernement d’associer, autant que possible, les élus locaux à la gouvernance du dispositif.

Ainsi, le CFL est expressément chargé de procéder à la répartition entre les trois fonds précités de chaque fraction éligible au reversement, cette décision devant être prise au plus tard le 28 février de l’année concernée. Le montant à répartir, qui s’élève en principe au tiers du montant prélevé sur un exercice donné, peut être ajusté si nécessaire à la hausse ou à la baisse dans la limite de 10 % par décision du CFL (1° du même IX). S’il est procédé à un ajustement sur une année, le montant du surplus ou, le cas échéant, de la minoration est imputé à la hausse ou à la baisse sur le montant à répartir l’année suivante (2° dudit IX).

C.   MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

Lors de l’examen de la seconde partie du PLF en première lecture par la commission des finances, le rapporteur spécial, M. Emmanuel Mandon, a souligné que le dispositif envisagé, pour « imparfait » qu’il soit, ne constituait pas à ses yeux une « punition » des collectivités territoriales à l’image de la CRFP des années 2010. Le rapporteur général, M. Charles de Courson, a estimé, pour sa part, qu’il s’agissait bien d’un prélèvement au profit de l’État assimilable à une « imposition de toute nature » et était, à ce titre, « indéfendable » ([91]). Compte tenu des avis divergents ainsi exprimés, la commission a adopté les six amendements identiques n° II‑CF482 de Mme Élisa Martin, n° II‑CF846 de M. Paul Molac, n° II‑CF1070 de M. Nicolas Sansu, n° II‑CF1265 de M. Éric Woerth, n° II‑CF1402 de Mme Fanny Dombre Coste, n° II‑CF1792 de M. Tristan Lahais et n° II‑CF2044 de M. Jean-Pierre Bataille portant suppression de l’ensemble de l’article 64.

Quatorze amendements de suppression de l’article avaient été déposés en séance publique. Ils n’ont pas pu être discutés en raison du rejet par l’Assemblée nationale, lors de la séance publique du 12 novembre 2024, de la première partie du PLF. Le texte transmis au Sénat le 21 novembre dernier comporte donc toujours le dispositif du « fonds de réserve ».

D.   MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

Dès son examen par la commission des finances du Sénat en première lecture, le 20 novembre 2024, le « fonds de réserve » a été sévèrement critiqué par les rapporteurs spéciaux sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales », Mme Isabelle Briquet et M. Stéphane Sautarel, qui l’ont jugé trop « brutal » et « inabouti pour être acceptable ».

À l’instar de l’Assemblée nationale, la commission des finances du Sénat a donc adopté l’amendement n° II.10 des rapporteurs spéciaux ainsi que onze amendements identiques ([92]) portant suppression de l’article 64.

Pour autant, les sénateurs n’ont pas souhaité renoncer à l’idée d’une participation des collectivités territoriales à l’effort national de maîtrise des dépenses publiques. Par un amendement portant création d’un article additionnel après l’article 64 adopté en séance publique le 4 décembre dernier contre l’avis du précédent Gouvernement ([93]), l’un des deux rapporteurs spéciaux, M. Stéphane Sautarel, a donc proposé la mise en place d’un « dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales ».

Tout en reprenant partiellement le principe d’un prélèvement destiné à abonder, au cours des trois années suivantes, les mécanismes de péréquation mentionnés supra (FPIC, fonds national de péréquation des DMTO et fonds de solidarité régional), le nouveau dispositif se distingue du « fonds de réserve » initial sur cinq points essentiels :

1° Le prélèvement n’est pas conçu comme la « sanction » d’une éventuelle dégradation du solde budgétaire du secteur public local par rapport aux objectifs des lois de finances, mais comme la mise en réserve directe et unilatérale d’un milliard d’euros de recettes fiscales des collectivités et de leurs groupements ;

2° Au lieu de peser exclusivement sur les collectivités et les EPCI à fiscalité propre présentant des DRF élevées, l’effort est réparti entre les trois strates (bloc communal, départements et régions) selon des critères qui prennent en compte la situation financière des catégories concernées (taux d’épargne brute) (cf. infra) ;

La prise en compte de la situation financière de chaque strate contributrice

Le montant de la contribution de chaque strate de collectivités correspond à la moyenne de deux fractions du montant global du prélèvement (1 milliard d’euros) :

1° La première fraction est calculée en appliquant au montant global le ratio entre les recettes réelles de fonctionnement (RRF) de la strate et le total des RRF des collectivités et des EPCI à fiscalité propre ;

2° La seconde fraction est calculée en appliquant au même montant global le ratio entre le taux d’épargne brute moyen de la strate et la somme des taux d’épargne brute moyens de l’ensemble des collectivités et des EPCI à fiscalité propre.

Ce mécanisme permet donc d’alléger la charge des strates dont la situation financière est dégradée. Si l’on ne tenait compte que de la première fraction, la contribution des départements, qui représentaient 28 % des RRF des collectivités en 2023 ([94]), serait proche de 280 millions d’euros. Avec la seconde fraction, elle devrait être largement inférieure à ce montant en raison de la récente dégradation de leur capacité d’autofinancement (CAF) brute : au 31 octobre 2024, la CAF brute des départements ne représentait plus que 17,5 % de l’épargne brute des collectivités, contre près de 45 % au 31 octobre 2022 ([95]).

3° Le bloc communal comporte, par ailleurs, un nombre plus élevé de communes et d’EPCI à fiscalité propre éligibles, ce qui permet de mieux répartir la charge contributive et d’alléger l’effort pesant sur les départements. À cette fin, de nouvelles conditions d’éligibilité au prélèvement ont été définies (cf. infra) ;

Un périmètre plus large de contributeurs, surtout dans le bloc communal

L’éligibilité d’une commune ou d’un EPCI à fiscalité propre est établie à partir d’un « indice synthétique de ressources et de charges » calculé en fonction de critères qui restent proches de ceux utilisés pour l’éligibilité à la troisième fraction de la DSR (potentiel fiscal par habitant et revenu par habitant([96]). Le critère du potentiel fiscal par habitant est prépondérant, puisqu’il en représente 75 % de l’indice synthétique ([97]).

À la différence du mécanisme initial, qui ne concernait que très peu de communes, le nouveau dispositif fait cotiser toutes les communes dont l’indice synthétique est supérieur à 110 % de l’indice moyen de l’ensemble des communes, à l’exception de celles qui sont exemptées de prélèvement au FPIC en application du III de l’article L. 2336‑3 du CGCT.

Le nombre de départements éligibles devrait être, en revanche, plus faible que dans le « fonds de réserve » : le prélèvement ne sera désormais appliqué qu’à ceux dont l’indice de fragilité sociale ([98]) est inférieur ou égal à l’indice médian de l’ensemble des départements.

La contribution des régions reste, pour sa part, adossée à l’éligibilité au fonds de solidarité régional en application du II de l’article L. 4332‑9 du CGCT. Contrairement à ce qui avait été imaginé pour le « fonds de réserve », cette éligibilité est, cette fois, appréciée sur l’année du prélèvement et non sur celle qui précède.

4° À l’exception des régions, dont les règles de répartition du prélèvement s’alignent sur celles du fonds de solidarité régional, le montant de la contribution de la strate est réparti entre les collectivités et les EPCI à fiscalité propre éligibles en fonction de leur population ([99]), et non plus au prorata de la somme des ressources nettes versée sur l’année précédente. Le critère démographique est pondéré par l’écart de la collectivité ou de l’EPCI vis-à-vis de l’indice médian utilisé pour déterminer son éligibilité. Enfin, comme pour le « fonds de réserve », un plafond de prélèvement a été fixé à 2 % des RRF de la collectivité ou de l’EPCI concerné ;

5° Le produit de la contribution n’est alloué aux fonds de péréquation qu’à hauteur de 10 % du montant reversé chaque année, le solde étant réparti aux collectivités et EPCI à fiscalité propre contributeurs au prorata de leur contribution. Cette disposition traduit la volonté, exprimée par le Premier ministre lors du dernier Congrès des maires, de « restituer » les sommes prélevées aux collectivités contributrices ([100]). Sur ce dernier point, on peut noter que, contrairement à ce qui était envisagé dans le « fonds de réserve » initialement proposé dans le PLF, le CFL n’est pas habilité à modifier la part des reversements aux mécanismes de péréquation.

L’amendement ne définit un montant global de mise en réserve que pour l’année 2025. Tel qu’il est rédigé, le dispositif de lissage pourrait pourtant s’appliquer à des exercices ultérieurs sous réserve de la fixation par la loi de finances initiale d’un nouveau montant global à prélever.

Selon les éléments communiqués par la direction du budget à partir des calculs effectués par la commission des finances du Sénat ([101]), 2 589 collectivités et EPCI devraient être concernées au total en 2025, dont 13 régions, 50 départements, 126 EPCI et EPT ainsi que 2 400 communes. Si le dispositif de lissage était mis en place, l’effort contributif serait donc beaucoup moins concentré que dans le « fonds de réserve ».

E.   POSITION DES RAPPORTEURS

1.   Le caractère vexatoire et injuste du « fonds de réserve »

Tel qu’il a été conçu initialement, le dispositif du « fonds de réserve » apparaît à la fois vexatoire et injuste. À l’image des « contrats de Cahors », il sanctionne des collectivités territoriales ou des EPCI à fiscalité propre pour des dépassements dont ils ne sont absolument pas responsables et qui pouvaient difficilement être corrigés à quelques semaines de la fin de l’exercice 2024. En toute logique, aucune des associations d’élus sollicitées par les rapporteurs n’a accepté le principe de ce prélèvement, qualifié par André Laignel, président du CFL et premier vice‑président délégué de l’Association des maires de France et présidents d’intercommunalité (AMF), de « fonds de spoliation des collectivités » ([102]).

Par ailleurs, les critères retenus pour l’éligibilité au prélèvement, c’est‑à‑dire le seuil de DRF à 40 millions d’euros, ne permettent pas de s’assurer que des collectivités en difficulté financière ne soient pas soumises au prélèvement ou, au contraire, que des collectivités en bonne santé n’en soient pas exonérées.

L’exemple des départements illustre parfaitement le caractère inopérant du dispositif : si l’on tient compte des vingt départements exonérés en raison de leur indice de fragilité sociale ([103]), c’est tout le reste de la strate (79 départements) qui a vocation à être assujettie à la contribution. La situation est d’autant plus délicate pour les départements qu’à l’exception des DMTO, ces collectivités ne disposent d’aucun pouvoir de taux sur leurs ressources et n’ont guère de marge de manœuvre sur le niveau de leurs dépenses dans la mesure où les deux tiers ([104]) correspondent au versement de prestations sociales, par nature « non pilotables » selon les termes employés en audition par M. Jean-Léonce Dupont, vice-président délégué de Départements de France ([105]). Celui-ci souligne que ce ne sont pas vingt, mais vingt-neuf départements qui sont susceptibles d’avoir besoin du fonds de sauvegarde au titre de l’exercice 2024 et que, hors mesures du PLF pour 2025, certains départements pourraient être en cessation de paiement dès le début de l’année 2026. Dès lors, l’idée même de mettre à contribution des collectivités en grande difficulté lui paraît « inimaginable » ([106]).

Enfin, la dimension péréquatrice du « fonds de réserve » a suscité l’incompréhension des associations d’élus, notamment celles représentatives du bloc communal. Elle s’explique, en grande partie, par la volonté de l’État de redynamiser les dispositifs de péréquation horizontale, en particulier le FPIC, celui‑ci ayant, selon les termes employés en audition ([107]) par les représentants de la direction générale des collectivités locales (DGCL), « perdu en efficacité » en raison de sa stabilité au regard de la progression, depuis 2016, des dépenses des collectivités et des EPCI. La direction du budget a, par ailleurs, rappelé en audition ([108]) que la péréquation constituait un objectif de valeur constitutionnelle ([109]) de nature à renforcer la légitimité du prélèvement.

Sans remettre en cause l’intérêt de la péréquation horizontale, qui permet d’atténuer les inégalités de richesse entre les territoires, les rapporteurs estiment que la voie empruntée par le PLF pour la renforcer est éminemment contestable dans la mesure où le financement prévu ne tient quasiment pas compte des capacités contributives des collectivités ciblées par le prélèvement. Ils partagent ainsi l’opinion formulée sur ce sujet par France Urbaine et Intercommunalités de France ([110]), qui considèrent que les collectivités contributrices seront excessivement lésées par le « fonds de réserve ».

2.   La solution peu satisfaisante du « dispositif de lissage » sénatorial

En ce sens, le « dispositif de lissage conjoncturel » proposé par le Sénat apparaît comme un moindre mal, puisqu’il réduit à 10 % la part du prélèvement affectée aux fonds de péréquation horizontale, la majeure partie des sommes collectées étant désormais reversées progressivement aux contributeurs. Les rapporteurs notent également avec satisfaction la réduction du prélèvement, qui est ramené à 1 milliard d’euros en 2025 au lieu des 2,8 milliards d’euros initialement prévus. Ils se félicitent surtout de l’allègement de la charge pour les départements, qui ne supporteraient plus que 22 % de l’effort contributif contre 43 % dans la version initiale du « fonds de réserve ».

Effort contributif par strate (en milliards d’euros)

 

Communes

EPCI

Départements

Régions

Total

Fonds de réserve

0,6

0,4

1,2

0,5

2,8

Dispositif de lissage

0,25

0,25

0,22

0,27

1

Source : Commission des finances du Sénat et contribution écrite de la direction du budget.

Pour réduit qu’il soit, l’effort contributif n’en reste pas moins important, y compris pour les 50 départements ciblés. Chacun d’entre eux subirait, en effet, un prélèvement moyen de 4,4 millions d’euros sur un exercice qui s’annonce déjà comme particulièrement délicat sur le plan financier. C’est, d’ailleurs, l’un des arguments invoqués par le précédent Gouvernement à l’appui de l’avis défavorable qu’il a donné sur le « dispositif de lissage » en séance publique au Sénat ([111]).

Les rapporteurs soulignent surtout que le dispositif sénatorial ne remet nullement en cause la logique infantilisante qui s’attache à la ponction unilatérale opérée sur les ressources des collectivités territoriales et de leurs groupements. Selon eux, ce type de dispositif reflète l’incapacité de l’État à faire confiance dans la capacité des collectivités à contribuer à l’effort national de maîtrise de la dépense publique. C’est, en partie, la raison pour laquelle l’AMF s’est tout autant opposée au dispositif de lissage qu’à celui de « fonds de réserve » ([112]).

Par ailleurs, ils s’interrogent sur le sens même d’un dispositif permettant aux collectivités et à leurs groupements de récupérer sur trois ans des montants mis en réserve. Comme le souligne M. Michel Klopfer, président-fondateur du cabinet CMK, dans la Lettre du financier territorial de novembre 2024, l’effet sur les finances de l’État du prélèvement au bénéfice du « fonds de réserve » devrait être maximal en 2025 avant de décliner progressivement compte tenu des reversements par tiers. Dans tous les cas, le mécanisme de prélèvement devrait donc être un « jeu à somme nulle » dès 2028 ([113]).

Interrogé sur ce point, M. Thomas Fauconnier, sous‑directeur des finances locales et de l’action économique à la DGCL, indique que ce prélèvement devrait opérer un « lissage dans le temps » des dépenses des collectivités à un moment où celles-ci sont en forte progression ([114]). On peut légitimement douter qu’un tel objectif soit atteint dès lors que, comme le souligne Intercommunalités de France, la plupart des grands projets sont déjà lancés et qu’une ponction pourrait in fine se traduire par une hausse de l’endettement, à rebours de l’objectif poursuivi par l’État ([115]).

3.   L’option d’une mise en réserve au niveau des collectivités elles-mêmes

Dans le souci d’inciter les différentes strates à participer aux efforts de redressement des comptes publics dans le respect de la libre administration, les représentants des élus intercommunaux ont, au cours de leur audition ([116]), évoqué l’opportunité pour les collectivités de constituer à leur niveau un fonds de précaution qu’elles alimenteraient et dont le produit leur serait directement destiné. Interrogée sur ce point, la direction du budget a estimé que tout mécanisme de mise en réserve constituait une « piste intéressante » pour amortir la baisse de recettes en cas de crise conjoncturelle ([117]).

Afin de ne pas remettre en cause l’obligation de dépôt des disponibilités au Trésor ([118]) et de conserver les montants mis en réserve dans les comptes des collectivités, il pourrait être envisagé d’ajouter à la liste des provisions obligatoires celles consistant à la couverture des aléas correspondant à des baisses de ressources ou des hausses de dépenses qui seraient d’un montant significatif ou, tout simplement, imprévisibles.

 

Le régime des provisions dans les comptes des collectivités territoriales

Les dotations aux provisions font partie des dépenses obligatoires des communes (art. L. 2321‑2 du CGCT), des départements (art. L.3321‑1 du CGCT) et des régions (art. L. 4321‑1 du CGCT).

L’inscription d’une provision dans les comptes des communes et des EPCI n’est obligatoire que dans certains cas précis (ouverture d’un contentieux ou d’une procédure collective au sens du livre VI du Code de commerce, risque d’irrececouvrabilité d’une créance). La survenance de tout autre risque (par exemple, l’anticipation d’une dépense importante sur un exercice ultérieur) peut donner lieu à l’enregistrement d’une provision, mais la commune (ou l’EPCI) n’est pas tenue de le faire (art. R. 2321‑2 du CGCT).

Dans les départements et les régions, la provision doit être constituée dès l’apparition d’un risque sans que celui-ci soit précisé (art. D. 3321‑2 et D. 4321‑2 du CGCT).

D’un point de vue comptable, la provision se matérialise par l’inscription d’une charge de fonctionnement sur un exercice donné avec la constatation d’une recette de fonctionnement sur un exercice ultérieur lorsque le risque identifié se concrétise (régime semi-budgétaire). La collectivité peut également affecter la provision à la couverture de dépenses d’investissement (régime budgétaire).

À condition de définir des critères de provisionnement qui soient suffisamment clairs pour être pour être utilisés par les collectivités dans une optique de bonne gestion, M. Nicolas Ray, co-rapporteur, plaide en faveur d’un mécanisme de précaution sur lequel l’État n’a pas directement la main et qui aurait donc vocation à se substituer aux deux dispositifs envisagés dans le PLF pour 2025 aux articles 64 et 64 bis. Un tel dispositif contribuerait à maîtriser l’évolution des dépenses locales et à se prémunir contre les aléas conjoncturels tout en respectant la libre administration et l’autonomie financière des collectivités territoriales.

 


   SECONDE PARTIE : LE RELÈVEMENT DU TAUX DE LA COTISATION EMPLOYEURS À LA CAISSE NATIONALE DE RETRAITES DES AGENTS DES COLLECTIVITÉS LOCALES (CNRACL) (ARTICLE 14 DU PLFSS ET RAPPORT ANNEXÉ)

Le régime de retraite des fonctionnaires des collectivités territoriales et de leurs groupements, qui est resté excédentaire pendant de nombreuses années, doit aujourd’hui faire face à la dégradation rapide de sa situation financière en raison de l’attrition de sa base cotisante et de la charge, très lourde, que représente chaque année sa contribution à un mécanisme de compensation inter‑régimes. Si un relèvement des taux de cotisation des employeurs paraît difficilement évitable, il doit être aussi limité que possible et être complété par un éventail de mesures structurelles destinées à garantir à la Caisse des ressources pérennes.

I.   LES ORIGINES DE LA DÉGRADATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE DE LA CNRACL

Née de l’ordonnance n° 45‑993 du 17 mai 1945, la Caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) est un régime spécial de la sécurité sociale qui assure la gestion des prestations vieillesse pour les agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière. Sous l’effet conjoint d’une dynamique démographique et d’une conjoncture financière défavorables, la CNRACL fait aujourd’hui face à de sérieuses difficultés financières qui menacent la soutenabilité du régime.

A.   LES SPÉCIFICITÉS D’UN RÉGIME DE RETRAITE AU PÉRIMÈTRE DE PLUS EN PLUS LARGE

La CNRACL assurait en 2023 le versement de prestations vieillesse pour 1,34 million de retraités ainsi que de pensions d’invalidité pour plus de 226 000 affiliés ([119]).

En application des dispositions du décret n° 2007-173 du 7 février 2007 qui régit son fonctionnement, elle fait l’objet d’une gouvernance paritaire avec un conseil d’administration composé de 16 membres (8 titulaires et 8 suppléants) représentant les affiliés et de 16 autres membres (8 titulaires et 8 suppléants) représentant les employeurs territoriaux et hospitaliers ([120]). Sa gestion est confiée à la Caisse des dépôts et consignations en ce qui concerne la liquidation des droits de ses pensionnés.

Depuis sa création, la CNRACL a fait l’objet de réformes successives ayant considérablement modifié l’étendue de ses missions et de son périmètre d’action.

1.   L’extension progressive de son périmètre d’action de la CNRACL depuis sa création

À sa création, en 1945, la CNRACL avait vocation à assurer la gestion des pensions pour les agents des communes et des départements ([121]). En 1950, elle comptait environ 150 000 pensionnés ([122]).

Après la consécration des régions comme des collectivités territoriales par la loi n° 82‑213 du 2 mars 1982 et la création d’un statut de la fonction publique territoriale par la loi n° 84‑53 du 26 janvier 1984, tous les agents territoriaux, soit environ un million de fonctionnaires ([123]), sont affiliés à la CNRACL. La loi n° 86‑33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière a constitué un tournant majeur pour le régime en procédant à l’affiliation des agents de la fonction publique hospitalière, soit un peu plus de 700 000 personnes en 1987 ([124]). Elle est venue organiser la gestion des retraites des agents hospitaliers sous l’égide de la CNRACL en leur offrant un régime spécifique adapté à la pénibilité de leurs fonctions et à la particularité de leurs carrières ([125]).

À la fin de l’année 2022, la CNRACL enregistrait 1,38 million de fonctionnaires territoriaux et 0,81 million de personnels hospitaliers affiliés au régime en qualité de cotisants, soit près de 2,2 millions de personnes au total ([126]).

Évolution du nombre de cotisants et de pensionnés depuis 1980

Sources : recueil statistique de la CNRACL.

On peut préciser, à cette occasion, que seuls les fonctionnaires cotisent à la CNRACL : les employés contractuels des collectivités territoriales et des structures de santé dépendent du régime général pour la fraction de base de leurs pensions retraite et à l’institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques (IRCANTEC) pour la part complémentaire.

Par ailleurs, au-delà du versement des pensions de retraite, la CNRACL a élargi progressivement son offre sociale à d’autres types de prestations :

– la gestion du régime d’invalidité des fonctionnaires affiliés ;

– la gestion d’un fonds national de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles ;

– le versement de prestations d’action sociale.

Les multiples facettes de l’action sociale de la CNRACL

Au titre de son action sociale, la CNRACL intervient principalement pour soutenir les affiliés en situation de vulnérabilité, favoriser le maintien à domicile des retraités et accompagner les aidants.

Cet accompagnement peut prendre plusieurs formes. Il peut s’agir :

-          de prestations financières directes versées au bénéficiaire sous certaines conditions ;

-          d’aides au maintien à domicile ;

-          d’aides à l’amélioration ou d’adaptation de l’habitat ;

-          d’un soutien aux retraités en situation de handicap ou de la prise en charge de frais médicaux, etc.

En 2023, 67 000 affiliés ont perçu une aide sociale de la CNRACL ([127]).

En 2023, la CNRACL a alloué à ses pensionnés un total de 26 milliards d’euros de prestations légales, dont 23,3 milliards d’euros au titre de la vieillesse et 2,7 milliards d’euros de l’invalidité. Les dépenses au titre de l’action sociale s’élevaient à 123,1 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 6,5 millions d’euros au titre du fonds national de prévention.

Par ailleurs, on peut noter que, cette année-là, la Caisse a apporté une contribution de 656 millions d’euros à un mécanisme de compensation démographique interrégimes mis en place dans les années 1970.

Le mécanisme de compensation démographique, un dispositif de solidarité au fonctionnement de plus en plus contesté

La compensation démographique retraite, encore appelée compensation généralisée vieillesse, a été créée par la loi n° 74‑1094 du 24 décembre 1974, qui visait à instituer « un système de protection sociale commun à tous les Français ». Elle est actuellement régie par les articles L. 134‑1 et L. 134‑2 du Code de la sécurité sociale. D’abord conçue comme un mécanisme provisoire, qui devait durer 4 ans, elle est toujours en vigueur aujourd’hui et représente 6 milliards d’euros de transferts.

Le dispositif vise à assurer une solidarité interprofessionnelle entre les régimes de base de la branche vieillesse faisant face à des inégalités découlant, d’une part, du déséquilibre démographique et, d’autre part, des disparités de capacités contributives. En 2023, 17 régimes de base de retraite participaient au système de compensation, parmi lesquels figurent la CNRACL, la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), la Mutualité sociale agricole (MSA) et le régime de retraite des personnels civils de l’État.

La Cour des comptes, dans son dernier rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale ([128]), préconise la suppression du mécanisme de compensation. la gestion du dispositif, devenue trop complexe au fil des années, laisse apparaître des défaillances de plus en plus fréquentes dans le calcul de la compensation. Selon la Cour, une telle suppression serait sans effet sur les comptes de la branche vieillesse tout en soulageant ceux de la CNRACL qui en est l’un des principaux contributeurs.

2.   L’apport des réformes intervenues en 2003 et en 2010 sur l’équilibre financier de la CNRACL

Au début des années 2000, les prévisions anticipent une pression future sur le système français de retraite en général et sur les régimes spécifiques de la fonction publique en particulier. L’allongement de l’espérance de vie ([129]), qui favorise une croissance accélérée dans le temps du nombre de pensionnés par rapport au nombre d’actifs cotisants, a poussé les pouvoir publics à envisager un ensemble de réformes afin de garantir la soutenabilité du modèle français de retraite. La CNRACL n’échappe à cette tendance générale : le rapport démographique brut, qui était de 4,5 cotisants pour un pensionné en 1980 passe sous le seuil des 2,5 cotisants en 2005 ([130]).

Les réformes intervenues en 2003 et en 2010 ont permis de diminuer cette pression démographique. Le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003, pris en application de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, procède en ses articles 16 et 65 à un allongement progressif de la durée de cotisation à la CNRACL, qui passe à 160 trimestres à compter de 2008, contre 150 antérieurement. La loi n° 2010‑1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a relevé progressivement l’âge légal de départ à la retraite de quatre mois par an jusqu’en 2018.

L’âge légal est donc passé de 60 à 62 ans pour les affiliés à la CNRACL relevant de la catégorie sédentaire ([131]) et, pour les agents de la catégorie active, qui exercent des métiers considérés comme pénibles (infirmiers, aides‑soignants, pompiers, etc.), de 55 à 57 ans.

Les agents des fonctions publiques territoriales et hospitalières ont été conduits à adapter leurs carrières : l’âge moyen de départ à la retraite des affiliés à la CNRACL, qui était de 57,1 ans toutes catégories confondues en 2003, atteint 58,4 ans en 2010, puis dépasse 61 ans en 2017.

Évolution de l’âge moyen de départ à la retraite des pensionnés de droit direct vieillesse
entre 2002 et 2023

Source : Caisse des dépôts et consignations, Questions de politiques sociales (QPS) - Les brèves no 29

En dépit de la poursuite de la dégradation du rapport démographique brut, qui est ramené à 1,87 cotisant pour un pensionné en 2015 ([132]), la Caisse présentait encore une situation financière satisfaisante dans les années 2010, avec un résultat net comptable excédentaire de 15,3 millions d’euros en 2017 ([133]).

B.   LA CNRACL À L’HEURE DU DÉFICIT : FACTEURS ET CONSÉQUENCES

Après l’excédent constaté en 2017, les comptes de la CNRACL présentent un résultat déficitaire de 571 millions d’euros en 2018. Le déficit n’a cessé de se creuser depuis cette date et a atteint 2,5 milliards d’euros en 2023 ([134]).

Évolution du déficit de la CNRACL depuis 2017

(en milliards d‘euros)

Source : Délégation, données compilées à partir des rapports annuels des comptes de la CNRACL : 2017, 2018, 2019, 2020, 2021, 2022, 2023. Pour l’année 2024, l’estimation provient du rapport conjoint des trois corps d’inspection infra.

1.   Les principaux facteurs explicatifs du déficit de la CNRACL

Plusieurs éléments permettent d’expliquer la dégradation rapide de la situation financière de la Caisse.

Tout d’abord, le poids des cotisants par rapport aux pensionnés a poursuivi sa baisse : le rapport démographique brut est ainsi passé à 1,40 cotisant pour un retraité en 2023 ([135]).

Dans un rapport conjoint publié en 2024 ([136]), l’inspection générale des affaires sociales (IGAS), l’inspection générale des finances (IGF) et l’inspection générale de l’administration (IGA) sur la situation financière de la Caisse observent une progression du nombre de pensionnés sans commune mesure avec celle des cotisants : ainsi, sur la période 1980‑2022, la progression marginale du nombre de pensionnés s’établie à + 4,5 % par an contre + 1,7 % de nouveaux actifs cotisants au régime ([137]).

Cette situation est d’autant plus préoccupante pour la Caisse que celle-ci tire la quasi-totalité (97,3 % en 2022 ([138])) de ses ressources des cotisations employeurs et assurés affiliés au régime. À la différence des autres régimes de sécurité sociale, qui peuvent afficher un taux de couverture de 66,6 % ([139]) de leurs recettes par des cotisations, la CNRACL ne bénéficie d’aucune fraction d’impôt ni de transferts externes.

Par ailleurs, en dépit du déficit croissant de ses comptes, la Caisse demeure contributrice au mécanisme de compensation démographique. Dans leur rapport précité, l’IGAS, l’IGF et l’IGA évaluent à 16,7 milliards d’euros le montant de la compensation versée sur la période 2011-2022. En 2023, malgré un résultat négatif de 2,5 milliards d’euros, la contribution de la Caisse s’est élevée à 656 millions d’euros ([140]). Bien que le régime ait prochainement vocation à devenir bénéficiaire du système ([141]) en raison de sa propre évolution démographique, le fonds a pesé lourdement dans les comptes de la CNRACL, qui estime son coût cumulé à 80 milliards d’euros depuis la fin des années 1970, voire 100 milliards d’euros si l’on tient compte de l’inflation.

Enfin, la modification progressive de la structure des effectifs de la fonction publique territoriale a tendance à ralentir à la dynamique de croissance des recettes de la CNRACL. En effet, la part des personnels contractuels au sein de l’ensemble des agents publics territoriaux n’a cessé de s’accroître depuis dix ans, passant de 20,3 % en 2011 à 23,2 % en 2021. Dans la fonction publique hospitalière, ce ratio était de 25,4 % en 2021, contre 19 % en 2011. Or, ces agents ne cotisent pas à la CNRACL, mais au régime général pour l’assurance vieillesse de base et à l’IRCANTEC pour la part complémentaire (cf. supra).

Évolution des effectifs par statut dans les fonctions publiques hospitalières (FPH) et territoriale (FPT) (hors statuts particuliers)

 

2011

2021

Effectifs en milliers

Part en %

Effectifs en milliers

Part en %

FPH

Fonctionnaires

824,8

81,0 %

806,7

74,6 %

Contractuels

193,8

19,0 %

274,5

25,4 %

Total

1 018,6

100 %

1 081,2

100 %

FPT

Fonctionnaires

1 410,0

79,7 %

1 446,8

76,8 %

Contractuels

359,8

20,3 %

436,8

23,2 %

Total

1 769,8

100 %

1 883,6

100 %

TOTAL FPH et FPT

Fonctionnaires

2 234,8

80,1 %

2 253,5

76,0 %

Contractuels

553,6

19,9 %

711,3

24,0 %

Total

2 788,4

100 %

2 964,8

100 %

Source : Rapport annuel sur l’état de la fonction publique, éditions 2013 et 2023 - DGAFP.

On peut observer, par ailleurs, que la croissance des effectifs de contractuels a tendance à s’accélérer dans les deux fonctions publiques au cours des dernières années.

Évolutions des personnels hospitaliers et territoriaux

 

Source : Caisse des dépôts et consignations, QPS, Les brèves no 27 et 28.

On peut ajouter à ce « manque à gagner » l’impact sur le produit des cotisations du maintien d’un seuil horaire d’affiliation, qui prive la CNRACL de tous les fonctionnaires à temps partiel dont la durée de travail hebdomadaire est inférieure à 28 heures.

Selon le rapport précité de l’IGS, de l’IGA et de l’IGAS, la Caisse aurait été privée de près de 75 000 cotisants en 2019 pour un montant potentiel de cotisations d’environ 290 millions d’euros ([142]).

Les origines du seuil horaire d’affiliation à la CNRACL

La loi du 26 janvier 1984 précitée, en son article 107 que « tout fonctionnaire nommé dans un emploi à temps non complet doit être affilié à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales s'il consacre à son service un nombre minimal d'heures de travail ». Une disposition similaire figurait dans la loi du 9 janvier 1986 précitée en son article 108 pour les agents de la fonction publique hospitalière.

Le seuil de 28 heures hebdomadaires, décidé historiquement par le conseil d’administration de la Caisse, est aujourd’hui fixé par le pouvoir réglementaire (décret n° 2022-244 du 25 février 2022 pour la fonction publique territoriale).

2.   Les conséquences de la dégradation des comptes de la CNRACL sur la soutenabilité du régime à moyen terme

L’évolution tendancielle des comptes de la CNRACL pourrait affecter à plus ou moins long terme la soutenabilité du régime luimême. Selon le rapport précité de l’IGAS, de l’IGF et de l’IGA sur la situation financière de la Caisse ([143]), le déficit pourrait atteindre environ 11 milliards d’euros en 2030 en tenant compte de la dernière réforme des retraites ([144]) ainsi que des récentes revalorisations salariales. Dans ces circonstances, le recours à la dette est apparu inéluctable. Le montant des charges d’intérêts, qui devrait s’établir en 2024 à 306 millions d’euros, pourrait être proche de 1,5 milliard d’euros en 2030.

Projection du compte de résultat simplifié de la CNRACL

En M€

2024

2025

2026

2027

2028

2029

2030

Cotisations

25 438,8

25 588,8

25 697,6

25 800,6

26 322,3

26 856,5

27 399,2

Autres

675,7

649,9

699,8

749,8

776,1

808,6

841,5

Total recettes

26 114,5

26 238,7

26 397,4

26 550,4

27 098,4

27 665,2

28 240,7

Prestations vieillesse

26 112,8

27 858,6

29 482,2

31 176,2

32 279,1

33 453,0

34 656,7

Prestations invalidité

2 136,4

2 244,6

2 338,3

2 429,5

2 377,6

2 473,8

2 576,3

Fonds d'action sociale

134,5

134,5

134,5

134,5

139,9

145,7

151,6

Charges d'intérêts

306,0

433,0

550,0

655,0

898,1

1 147,1

1 474,8

Autres

1 194,6

1 022,2

854,7

826,0

559,1

538,5

519,0

Total dépenses

29 884,4

31 692,9

33 359,7

35 221,2

36 253,8

37 758,1

39 378,4

Solde

- 3 769,9

- 5 454,2

- 6 962,3

- 8 670,7

- 9 155,4

- 10 092,9

- 11 137,7

Source : Rapport de l’IGAS, de l’IGF et de l’IGA précité (page 29).

En l’absence de réforme du régime lui-même, la seule solution envisagée par l’IGAS, l’IGF et l’IGA pour un retour rapide à l’équilibre passe par une élévation du taux de cotisation des employeurs.

En application du I de l’article 5 du décret n° 2007‑173 du 7 février 2007 précité, ce taux est également fixé par décret. Il s’élève actuellement à 31,65 % ([145]). Dans leur rapport, les trois corps de contrôle recommandent de porter ce taux à 41,85 % dès 2025, puis de l’élever progressivement jusqu’à 50,34 % en 2030.

Taux de cotisation employeur d’équilibre en l’absence de réforme (en %)

 

2025

2026

2027

2028

2029

2030

Taux

41,85

44,4

47,26

47,78

49

50,34

Progression annuelle

10,2

2,55

2,86

0,52

1,22

1,34

Source : Rapport de l’IGAS, de l’IGF et de l’IGA précité (page 30).

Une telle hausse serait d’autant plus significative que le taux est resté stable entre 2014 et 2023, après la forte hausse opérée en 2012 et en 2013.

Évolution du taux de la contribution employeur à la CNRACL (2012-2024)

Source : Recueils statistiques de la CNRACL.

Selon le rapport précité, le relèvement de 10,2 points représenterait une recette de 5,5 milliards d’euros par an pour la Caisse dès 2025. Pour les seuls employeurs territoriaux, la charge supplémentaire est estimée à 3,3 milliards d’euros.

II.   UN RELÈVEMENT DE DOUZE POINTS ÉTALÉ SUR PLUSIEURS ANNÉES DU TAUX DE COTISATION EMPLOYEUR : LA PISTE PRIVILÉGIÉE PAR LE PLFSS POUR RÉTABLIR L’ÉQUILIBRE DES COMPTES DE LA CNRACL

L’article 14 du PLFSS pour 2025 porte approbation d’un rapport annexé décrivant, pour les quatre années à venir (2025 à 2028), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l’objectif national des dépenses d’assurancemaladie (ONDAM). Ce rapport récapitule l’évolution, depuis 2020, du solde des régimes obligatoires de base et, compte tenu d’une trajectoire déficitaire estimée pour 2024, détaille les « mesures nouvelles » en dépenses et en recettes permettant d’éviter l’accroissement du déficit.

Un relèvement significatif du taux de cotisation des employeurs à la CNRACL fait partie des mesures d’économies mentionnées à plusieurs reprises dans l’annexe.

A.   L’objectif de rétablissement du solde global des régimes obligatoires de base de sécurité sociale entre 2025 et 2028

Le rapport annexé, en ses deux premiers alinéas, prévoit qu’après une amélioration du solde des régimes obligatoires de base intervenue entre 2021 et 2023, le déficit repartirait à la hausse en 2024 (- 18,0 milliards d’euros).

Dans cet ensemble, le déficit de la branche vieillesse, fonds de solidarité vieillesse (FSV) compris, s’élèverait à environ 5,5 milliards d’euros ([146]). On peut noter que le déficit prévisionnel de la CNRACL pour 2024, estimé à 3,7 milliards d’euros (cfsupra), devrait contribuer sensiblement à la dégradation du solde de la branche. En 2023, le déficit de la Caisse (2,5 milliards d’euros) était même largement supérieur à celui du régime général et du FSV (1,4 milliard d’euros ([147])).

La situation du déficit des comptes sociaux depuis 2020 telle que présentée dans le rapport annexé

En 2020, sous l’effet des mesures prises afin de faire face à la crise sanitaire née de la pandémie de Covid-19 et de la récession qui l’a suivie, les comptes des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, FSV compris, avaient accusé un déficit de 39,7 milliards d’euros en 2020. Avec la reprise de la croissance économique, un redressement du solde a été constaté dès l’année 2021, marquée par un recul du déficit à 24,3 milliards d’euros en 2021. Le déficit a été progressivement ramené à 10,8 milliards d’euros en 2023 du fait de la quasi-extinction des dépenses liées à la crise sanitaire.

En 2024, le niveau élevé d’inflation contribue fortement à la croissance des prestations, les pensions de retraite ayant été, pour leur part, revalorisées de 5,3 % au 1er janvier. Le déficit de l’ensemble des comptes sociaux repartirait donc à la hausse cette année et pourrait atteindre 18 milliards d’euros.

Le PLFSS prévoit une réduction du déficit des régimes obligatoires de base à 16 milliards d’euros en 2025, suivie d’une nouvelle hausse à compter de 2026 (17,7 milliards d’euros). Cette dégradation du solde resterait, toutefois, contenue avec un déficit estimé à 19,9 milliards d’euros en 2028.

Le déficit de la branche vieillesse, FSV compris, serait ainsi ramené à 2,4 milliards d’euros ([148]) dès 2025 et resterait inférieur à 1 milliard d’euros en 2026 et en 2027.

Évolution du solde de la branche vieillesse et du FSV (2023-2028)

(en milliards d’euros)

 

2023

2024 (p)

2025 (p)

2026 (p)

2027 (p)

2028 (p)

Régimes de base

- 2,6

- 6,3

- 3,1

- 1,7

- 2,7

- 6,1

FSV

+ 1,1

+ 0,8

+ 0,7

+ 0,9

+ 1,9

+ 3,1

Solde consolidé

- 1,4

-5,5

-2,4

- 0,8

- 0,8

- 3,0

Source : Délégation à partir des données du rapport annexé au PLFSS 2025 (alinéas 25 et 26).

B.   Le relèvement progressif, mais significatif, du taux de cotisation employeur à la CNRACL

Le relèvement du taux de cotisation employeur à la CNRACL, évoqué dès l’alinéa 3 du rapport annexé, constitue une des principales mesures permettant de résorber le déficit global. À la différence de ce que préconisait le rapport précité des corps de contrôle, il n’est pas envisagé de procéder à une hausse de 10,2 points en 2025, mais à une augmentation progressive de 12 points en trois ans (2025, 2026 et 2027).

1/ Pour l’année 2025, il est précisé à l’alinéa 16 que ce relèvement sera de 4 points. Cette hausse, appliquée aux employeurs hospitaliers et territoriaux, représenterait, selon les estimations faites par le Gouvernement, un complément de recettes de 2,3 milliards d’euros pour la CNRACL en 2025 ([149]). À partir des estimations figurant dans le rapport des corps de contrôle précité, on peut évaluer à 1,3 milliard d’euros la charge supplémentaire du relèvement pour les seuls employeurs territoriaux ([150]). Cette évaluation a été confirmée par la CNRACL ([151]).

2/ Le rapport annexé précise, en ses alinéas 10 et 17, que cette hausse devrait être suivie de deux autres hausses équivalentes en 2026 et 2027, ce qui porterait le taux de cotisation employeur à 43,65 %.

3/ Le relèvement du taux est, par ailleurs, mentionné à simple titre de rappel aux alinéas 9 et 22 du rapport annexé portant respectivement sur l’ONDAM et le solde de la branche vieillesse.

Le surcoût annuel pour les employeurs territoriaux pourrait donc s’élever au total à 2,6 milliards d’euros en 2026 puis à 3,9 milliards d’euros à partir de 2027.

À cette occasion, on peut observer que les effets de la hausse du taux se feront ressentir essentiellement sur les employeurs territoriaux. En effet, les établissements de santé pourront obtenir, au travers de l’ONDAM fixé à l’article 27 du PLFSS pour 2025, une compensation financière du relèvement ([152]). Il ne pourra en être de même pour les collectivités territoriales et leurs groupements, qui devront assumer la charge en totalité.

III.   MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

Lors de l’examen en première lecture du PLFSS à l’Assemblée nationale, le rapporteur pour avis de la commission des finances, M. Jean‑Didier Berger, a « pris acte » de la hausse du montant des cotisations à la CNRACL. Il a plaidé, toutefois, pour que l’État mette en place une compensation, même « temporaire » ou « partielle », de cette charge supplémentaire pour les employeurs territoriaux. À cet égard, il a noté qu’une baisse des cotisations d’assurance maladie des collectivités territoriales avait été mise en œuvre en 2024 en contrepartie du relèvement d’un point, à 31,65 %, de la cotisation à la CNRACL opéré en début d’année ([153]). La commission des finances a, ensuite, émis un avis défavorable à l’adoption de l’article 14 du PLFSS ([154]).

Au cours de l’examen du texte par la commission des affaires sociales, saisie au fond, le rapporteur général, M. Yannick Neuder, a fait part de son « inquiétude » concernant la hausse du montant des cotisations à la CNRACL ([155]). Outre les « conséquences » négatives qu’une telle mesure emporte pour les collectivités territoriales, il note que la compensation de cette hausse pour les établissements de santé, estimée à 1,1 milliard d’euros en 2025, réduirait d’autant les ressources affectées à leur financement au travers de l’ONDAM. La ponction pour les hôpitaux est évaluée au tiers de l’ensemble des ressources complémentaires affectées (3,3 milliards d’euros), ce qui est loin d’être négligeable ([156]).

La commission a ensuite adopté, après avis défavorable du rapporteur général, les deux amendements identiques n° AS237 de Mme Sophie Pantel et n° AS617 de M. Laurent Panifous portant suppression de l’ensemble des mentions au relèvement des taux de cotisation employeur à la CNRACL dans le rapport annexé (alinéas 3, 9, 10, 16, 17 et 22 précités).

En séance publique, le 4 novembre dernier, le rapporteur général a exprimé les mêmes préoccupations qu’en commission des affaires sociales. Après que le précédent Gouvernement, par la voix de M. Laurent Saint-Martin, ministre chargé du budget et des comptes publics, a insisté sur la nécessité du relèvement, motivé par des « réalités financières », l’Assemblée nationale a adopté les amendements identiques n° 636 de M. Pierre Cordier, n° 856 de M. Laurent Panifous, n° 1894 de M. David Taupiac et n° 2002 de M. Bertrand Bouyx portant suppression des alinéas précités du rapport annexé.

Faute de temps, l’ensemble du PLFSS n’a pas pu être voté dans le délai de vingt jours mentionné à l’article 47‑1 de la Constitution, le Gouvernement a décidé d’interrompre l’examen du texte le 5 novembre dernier et de saisir le Sénat de sa version initiale en application du troisième alinéa de l’article LO 111‑7 du Code de la sécurité sociale. Dans le texte déposé au Sénat le 8 novembre 2024, les amendements de suppression précités n’ont pas été repris par le Gouvernement.

IV.   MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

La commission des affaires sociales du Sénat, saisie au fond, a adopté l’amendement n° 138 de sa rapporteure générale, Mme Élisabeth Doineau, visant à étaler sur quatre années au lieu de trois la hausse du taux de 12 points de la cotisation des employeurs à la CNRACL ([157]), la progression envisagée étant désormais de 3 points par an entre 2025 et 2028. Lors de l’examen du rapport sur le PLFSS 2025 en commission ([158]), la rapporteure générale a indiqué que ce rééchelonnement, qui représente un moindre coût estimé à 600 millions d’euros en 2025 pour les hôpitaux et les collectivités territoriales, visait à « soulager les finances tendues » des employeurs concernés.

Lors de l’examen du texte en séance publique, le 21 novembre dernier, le Sénat a adopté l’amendement n° 1393 du Gouvernement portant réécriture du rapport annexé à l’article 14 du PLFSS. La nouvelle version de l’annexe mentionne expressément en son alinéa 9 ([159]) l’étalement sur quatre ans de la hausse de 12 points du taux de cotisation des employeurs à la CNRACL. Les alinéas 2 et 15, pour leur part, font état d’une augmentation taux de 3 points en 2025, trois nouvelles hausses de 3 points chacune étant prévues en 2026, 2027 et 2028 à l’alinéa 16 ([160]).

Cette solution a été confortée par la commission mixte paritaire, qui s’est réunie le 27 novembre dernier ([161]).

En conséquence de l’adoption, le 4 décembre dernier (scrutin public ° 519), de la motion de censure déposée en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution par Mme Mathilde Panot, M. Boris Vallaud, Mme Cyrielle Chatelain, M. André Chassaigne et 181 membres de l'Assemblée, le PLFSS pour 2025 a été considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale dans sa version résultant de la commission mixte paritaire.

V.   POSITION DES RAPPORTEURS

Le relèvement du taux de cotisation apparaît comme une mesure précipitée et brutale qu’il convient d’alléger et de compléter autant que possible. En contrepartie, les rapporteurs préconisent la mise en œuvre d’un panel de mesures non paramétriques destinées à assurer à la CNRACL des ressources pérennes et à la prémunir contre le risque d’une spirale d’endettement.

1.   Le choix contestable d’un alourdissement massif et précipité des charges pesant sur les employeurs territoriaux

Au cours de son audition ([162]), M. Jean-Pierre Cazenave, le président du conseil d’administration de la CNRACL, a confirmé que, depuis plusieurs années, la Caisse était contrainte de recourir en permanence à des aides de trésorerie, sans lesquelles « elle ne serait pas en capacité de payer les retraites qu’elle doit verser ».

Tout en reconnaissant l’urgence qui s’attache à apporter un soutien à l’un des acteurs majeurs de la protection sociale des agents territoriaux, les rapporteurs déplorent qu’une solution n’ait pas pu être apportée plus tôt à un problème qui est connu des services de tutelle depuis la fin des années 2010. Interrogée sur ce point ([163]), la direction de la sécurité sociale a indiqué que le Gouvernement, dans un premier temps, avait fait le choix de résorber le déficit de la Caisse au travers de la mise en place du « système universel » soumis au Parlement au début de l’année 2020 ([164]). La réforme ayant été suspendue lors de la crise sanitaire, puis remplacée par une mesure paramétrique en 2023 ([165]), les corps de contrôle précités (IGAS, IGF et IGA) ont été sollicités en novembre 2023 afin de définir les modalités du redressement des comptes de la CNRACL.

Le choix opéré par le précédent Gouvernement d’un relèvement rapide des taux de cotisation des employeurs témoigne d’une volonté de « rattraper le temps perdu » : une telle précipitation apparaît d’autant plus regrettable que le rapport de la mission de contrôle comporte des recommandations d’ordre systémique dont la mise en œuvre a vocation à s’étaler sur plusieurs années et qui, dès lors, auraient dû être envisagées dès l’apparition des premiers déficits de la Caisse.

Si le rythme de progression du taux de cotisation présenté dans le PLFSS pour 2025 est, heureusement, moins rapide que celui envisagé par les corps de contrôle (+ 10,2 points dès la première année), la hausse n’en demeure pas moins brutale pour les collectivités et leurs groupements.

Au-delà du coût global que représentera le relèvement de 12 points en 2028 (3,9 milliards d’euros), les estimations fournies par les associations d’élus locaux pour leur propre strate témoignent de l’impact considérable de la mesure, parfois même supérieur à celui de certaines des mesures d’économies du PLF pour 2025 : 240 millions d’euros pour les régions, 1,2 milliard d’euros pour les départements et 780 millions d’euros pour les intercommunalités ([166]). Le poids est également très important pour les communes rurales : au cours de son audition au titre de l’Association des maires ruraux de France (AMRF) ([167]), M. Bertrand Hauchecorne, maire de Mareau‑aux‑Prés (45), a indiqué que le coût du relèvement de taux en année pleine pour sa propre commune s’élevait à 52 000 euros, soit 7,5 % des dépenses de personnel de sa collectivité.

Les rapporteurs rappellent également que la compensation du relèvement à 31,65 % du taux de cotisation en 2024, opérée par une diminution d’un point du taux de cotisation maladie ([168]), s’éteindra le 31 décembre prochain. Pour les collectivités et leurs groupements, la charge réellement supportée en 2025 sera donc de 4 points de cotisation (et non de 3 points uniquement).

Ils plaident donc en faveur d’un étalement important de cette charge, qui irait ainsi au-delà des mesures déjà proposées par le Gouvernement précédent. En lieu et place d’un relèvement de 12 points en quatre ans (soit + 3 points par an), il pourrait être envisagé de procéder à cette hausse sur six ans (soit + 2 points par an), de façon à limiter le surcoût pour les collectivités et leurs groupements à 650 millions d’euros en 2025.

2.   L’intérêt d’une réforme du mécanisme de compensation démographique au bénéfice de la CNRACL

Toutes les associations d’élus sollicitées par les rapporteurs ont souligné « l’injustice » ([169]) qui s’attache à cette hausse de taux alors même que la Caisse a contribué pendant près de quarante ans à l’équilibre des autres régimes dans le cadre de la compensation démographique.

Au cours de leur audition ([170]), les représentants de la direction de la sécurité sociale (DSS) ont rappelé que le mécanisme de compensation était purement démographique, dès lors qu’il se limite à confronter des ratios d’effectifs de cotisants et de retraités, et qu’il ne tenait pas compte de la situation financière du régime appelé à contribuer.

Ils ont également confirmé qu’en raison de la dégradation rapide de son ratio de cotisants, la CNRACL verrait sa contribution diminuer au cours des prochaines années (2025 : environ 400 millions d’euros ; 2026 : environ 200 millions d’euros ; 2027 : environ 70 millions d’euros) et qu’elle pourrait devenir très légèrement bénéficiaire à compter de 2028.

Dès lors, malgré les défauts du mécanisme de compensation mentionnés par la Cour des comptes dans son rapport d’application de la loi de financement de la sécurité sociale précité ([171]), les rapporteurs estiment qu’il serait prématuré de le supprimer à un moment où il pourrait enfin contribuer à soulager financièrement la CNRACL.

Au contraire, il serait opportun de réformer le mécanisme de façon à avancer la date à partir de laquelle la CNRACL bénéficierait de contributions versées par les autres régimes. Les rapporteurs souhaitent donc que soient mises en œuvre les préconisations du rapport des corps d’inspection précité visant à réduire les biais méthodologiques du système qui sont défavorables à la CNRACL.

Les biais identifiés par le rapport de l’IGAS, de l’IGF et de l’IGA

En application des dispositions de l’article D. 134‑2 du Code de la sécurité sociale, le mécanisme de compensation est applicable aux « régimes de sécurité sociale dont l’effectif des actifs cotisants et des retraités titulaires de droits propres âgés de 65 ans ou plus dépasse au total 20 000 personnes au 1er juillet de l’année considérée ». L’exclusion des pensionnés de moins de 65 ans dans le calcul de l’effectif de référence désavantage particulièrement la CNRACL dans la mesure où cette catégorie représentait 21,4 % du total des pensionnés en 2022, contre 12,4 % des retraités tous régimes confondus.

Par ailleurs, les effectifs de retraités pris en compte dans le calcul de la compensation ne sont pas pondérés de la durée cotisée, alors que celle-ci détermine le calcul des droits à prestations des personnes concernées. Les régimes où les retraités ont de longues durées cotisées sont, dès lors, relativement désavantagés par rapport aux autres, dans la mesure où, à effectif égal, la charge de pension ne sera pas la même. C’est le cas de la CNRACL, dont la durée validée moyenne des pensionnés de plus de 65 ans était d’environ 118 trimestres en 2016, contre 100 pour l’ensemble des régimes.

À terme, il pourrait être également envisagé d’élargir le périmètre du mécanisme de compensation aux régimes de retraite complémentaire dans la mesure où le système existant ne comprend que des régimes de base ou, à l’image du service des retraites de l’État (SRE) et de la CNRACL, des régimes intégrés assurant aussi bien la couverture de base que la couverture complémentaire. Lors de leur audition ([172]), les représentants de la DSS ont indiqué que cette piste, évoquée initialement par les corps d’inspection précités, n’avait pas été approfondie.

3.   Le panel de mesures systémiques susceptibles d’être mises en œuvre afin d’améliorer durablement la situation financière de la Caisse

Selon le président du conseil d’administration de la CNRACL, M. Jean‑Pierre Cazenave, la croissance rapide de l’endettement (8,4 milliards d’euros d’encours à fin 2024 ([173]), contre 5,7 milliards d’euros au 31 décembre 2023 ([174])) n’est que le résultat d’une hausse des dépenses de prestations, qui sont par nature difficiles à réduire, et d’une attrition des ressources, issues quasi-exclusivement du produit des cotisations.

D’un point de vue général, les rapporteurs estiment que la hausse des taux de cotisation n’est pas une solution pérenne et qu’il convient d’apporter une réponse globale au problème au travers d’un panel de mesures systémiques.

À l’occasion des Assises des départements, le 15 novembre 2024, le Premier ministre Michel Barnier s’était prononcé en faveur d’une réflexion sur l’intégration des agents contractuels dans le régime de la CNRACL. Une telle option, qui paraît cohérente au regard de la diminution tendancielle des personnels titulaires dans les effectifs des collectivités, se heurterait toutefois à des difficultés liées aux grandes différences dans les modes de rémunération des agents concernés et le calcul des droits à prestations en vigueur dans leurs régimes respectifs. Cette piste avait été écartée par le rapport des corps d’inspection précité (cf. infra). Sans pour autant l’exclure, les représentants de la DSS reconnaissent qu’une telle réforme serait complexe à mettre en œuvre ([175]).

 Les « difficultés opérationnelles » soulevées par les corps d’inspection concernant l’affiliation des contractuels

Selon les auteurs du rapport ([176]), le rattachement des agents contractuels à la CNRACL n’apporterait qu’une solution limitée aux problèmes de la CNRACL dans la mesure où ils estiment à 15 % maximum l’effet de substitution sur la dégradation du ratio démographique. Un tel transfert se heurterait, par ailleurs, à des obstacles techniques liés, notamment, à la difficulté de connaître précisément certaines données nécessaires à la reconstitution des durées cotisées, qui sont parfois mal renseignées par les employeurs. Enfin, la rémunération des contractuels ne permet pas, à ce jour, de distinguer une part correspondant à un traitement indiciaire brut, qui serait assujetti aux cotisations à la CNRCL, et une part correspondant à des primes ([177]).

Lors de son audition, M. Cazenave a souligné que les régimes de retraite disposaient de plus en plus de ressources externes issues, pour une large part, de l’impôt.

En 2023, les impôts et taxes affectés à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) s’élevaient à 13,8 milliards d’euros, soit 8,7 % du total de ses ressources ([178]). Dans cet ensemble, le régime général avait reçu près de 9 milliards d’euros au titre de la taxe sur les salaires et 4,8 milliards d’euros de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S) ([179]).

Les rapporteurs considèrent que le régime de la CNRACL doit, à son tour, adopter un mode de financement mixte assis en partie sur des taxes affectées. Ainsi, la Caisse pourrait bénéficier de la réaffectation d’une partie des fractions d’impôts aujourd’hui versées à des régimes de protection sociale dont la situation financière est excédentaire. C’est le cas, par exemple, de la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) ([180]), qui bénéficie d’une part de la taxe sur les salaires à hauteur de 15,8 % en application du 1° de l’article L. 131‑8 du code de la sécurité sociale, ou bien du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) ([181]), qui perçoit une fraction de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du capital correspondant à un taux de 6,67 % en application du a) du 3° bis du même article du même code.

La plupart des autres mesures systémiques préconisées par les corps d’inspection dans leur rapport précité ne sont pas, à elles seules, de nature à résorber le déficit structurel de la CNRACL. Deux d’entre elles, soutenues par France Urbaine ([182]), recueillent toutefois l’assentiment des rapporteurs :

– la suppression du seuil horaire d’affiliation à la CNRACL précité ([183]) de façon à permettre l’intégration au régime des fonctionnaires à temps partiel, y compris ceux dont la durée de travail hebdomadaire est inférieure à 28 heures (recommandation n° 2 du rapport précité des corps de contrôle) ;

– la prise en charge par la CNAF, à condition que celle-ci puisse toujours bénéficier de la fraction entière de la taxe sur les salaires (cf. supra), du coût correspondant au versement des majorations pour enfants aux retraités, à l’image de ce qu’elle verse déjà au régime général et aux régimes agricoles en application de la loi n° 2015-1702 de financement de la sécurité sociale pour 2016 en son article 24 (recommandation n° 4 du même rapport).

À titre personnel, M. Nicolas Ray, co-rapporteur, préconise la mise en œuvre de la recommandation n° 3 du rapport visant à aligner sur le régime général les modalités de majoration des pensions à compter du troisième enfant ([184]).

4.   L’urgence d’une reprise par la CADES de la dette accumulée par la CNRACL

Dans l’attente des effets produits par les réformes systémiques précitées, il convient d’éviter que la CNRACL ne bascule dans une spirale d’endettement qui pourrait porter atteinte à sa viabilité financière. On peut souligner, sur ce point, que les charges d’intérêts de la dette sont passées de 8,6 millions d’euros en 2022 à 139,2 millions d’euros en 2023, ce qui correspond à une multiplication par 16 en un an ([185]).

Parmi les pistes évoquées par M. Cazenave ([186]) figure la reprise de la dette de la CNRACL par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), dont le bilan est, à ce jour, très satisfaisant et qui est déjà intervenue en 2020 pour couvrir les déficits de la CNRACL constatés en 2018 et en 2019. Selon M. Thomas Ramilijaona, sous-directeur du financement de la sécurité sociale à la DSS, une reprise substantielle est techniquement possible à condition que le législateur organique prolonge au-delà du 31 décembre 2033 les capacités d’amortissement des dettes sociales confiées à la CADES ([187]). Les rapporteurs se prononcent en faveur d’une telle intervention, qui leur paraît pleinement conforme à la vocation de la CADES.

Les potentialités offertes par la CADES

La CADES a été créée, dans le cadre du « plan Juppé », par l’ordonnance n° 96‑50 du 24 janvier 1996 sous la forme d’un établissement public national à caractère administratif. Elle a pour mission de reprendre et « d’apurer » une partie de la dette des organismes de sécurité sociale. Concrètement, la CADES est un émetteur sur le marché international des capitaux, le deuxième après l’Agence France Trésor. Elle bénéficie de ressources fiscales, notamment de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) et d’une fraction de la CSG.

Initialement créée pour une courte période, la CADES a aujourd’hui 28 ans d’existence. L’amortissement des dettes qu’elle reprend est censé s’interrompre au 31 décembre 2033 en application de l’art. 4 bis de l’ordonnance précitée, qui comporte des dispositions organiques. Au 30 juin 2024, la CADES a repris 396,5 milliards d’euros de dette sociale, dont 250 milliards d’euros ont été amortis ([188]).


   EXAMEN PAR LA DÉLÉGATION

Lors de sa réunion du 18 décembre 2024 à 15 heures, la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation a examiné le présent rapport et en a autorisé la publication.

Le compte rendu de cette réunion peut être consulté en ligne, sur le site de l’Assemblée nationale :

 

https://assnat.fr/LxBjsa

 

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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

 

Administrations :

Direction générale des collectivités locales (DGCL)

– M. Thomas Fauconnier, sous-directeur des finances locales et de l’action économique ;

– M. Julien Rougé, chef du bureau des concours financiers de l’État ;

– Mme Julie Gadenne, adjointe au chef du bureau des budgets locaux et de l’analyse financière.

Direction du budget (DB)

– M. Clément Boisnaud, sous-directeur 5e sous-direction Budgets de la défense, de la sécurité et de l'administration gouvernementale, générale et territoriale de l'État ;

– M. Nicolas Camelio, chef du bureau des collectivités locales.

Direction de la sécurité sociale (DSS)

– Mme Delphine Chaumel, sous-directrice des retraites et des institutions de la protection sociale complémentaire ;

– M. Thomas Ramilijaona, sous-directeur du financement de la sécurité sociale ;

– Mme Caroline Drouin, cheffe du bureau des régimes spéciaux.

Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales (CNRACL)

– M. Jean-Pierre Cazenave, président du conseil d’administration ;

– M. Ronan Mahieu, directeur des études et des statistiques à la direction des politiques sociales de la Caisse des dépôts ;

– Mme Ségolène de Bailliencourt, responsable Études et statistiques à la direction des politiques sociales de la Caisse des dépôts.

 

Associations d’élus :

France Urbaine

– M. Franck Claeys, délégué général adjoint ;

– Mme Louise Cormillère, conseillère finances locales ;

– M. Bastien Taloc, conseiller fonction publique ;

– Mme Sarah Bou Sader, conseillère relations parlementaires.

Association des maires ruraux de France (AMRF)

– M. Bertrand Hauchecorne, maire de Mareau-aux-Prés (45) et membre du conseil d’administration de l’AMRF.

Intercommunalités de France

– Mme Claire Delpech, responsable du pôle finances et fiscalité ;

– M. Nicolas Laroche, responsable du pôle finances et fiscalité ;

– Mme Montaine Blonsard, responsable des relations avec le Parlement.

Départements de France

– M. Jean-Léonce Dupont, président du conseil départemental du Calvados, vice-président délégué de Départements de France, président de la commission finances et fiscalité locale ;

– M. Brice Lacourieux, conseiller relations avec le Parlement.

Régions de France

– M. William Tissandier, conseiller finances ;

– M. Frédéric Eon, conseiller parlementaire et juridique.

 

Contribution écrite :

Association des maires et des présidents d’intercommunalité de France (AMF)

– Contribution adressée le 13 décembre 2024.

 


([1]) + 13,9 % au moment du dépôt du PLF pour 2025.

([2]) +7 % en 2017 par rapport à 2016 selon le rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL) de 2017.

([3]) « Il faut investir » selon les termes employés par Mme Dominique Faure, ministre chargée des collectivités territoriales, en janvier 2023.

([4]) La LPFP comporte dans son rapport annexé (partie III – paragraphe D) une « trajectoire » d’évolution des dépenses et des recettes des administrations publiques locales (APUL), parmi lesquelles figure un objectif de progression des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales et de leurs groupements stricto sensu correspondant à un « rythme inférieur de 0,5 point au taux d'inflation ».

([5]) Situation mensuelle comptable des collectivités locales à fin octobre 2024 (bulletin n° 25 - novembre 2024).

([6]) Perspectives économiques de l’OCDE (décembre 2024).

([7]) « Nous vivons une recentralisation massive » - Entretien de M. André Laignel, vice-président de l’Association des maires de France et présidents d’intercommunalité (AMF), à Localtis (10 novembre 2021).

([8]) Gouvernements Ayrault (2012-2014) et Valls (2014-2016).

([9]) A. Colrat, A. Decludt, M. de Sarnez, A. Gillot, Q. Bolliet et A. Hairault, « L’investissement des collectivités territoriales », rapport de l’IGF, octobre 2023, et rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales 2024, juillet 2024.

([10]) Art. 13 de la loi n° 75-853 du 13 septembre 1975 de finances rectificative pour 1975.

([11]) Art. L. 235-13 à L. 235-16 abrogés de l’ancien code des communes.

([12]) Art. 66 de la loi n° 77-1467 du 30 décembre 1977 de finances pour 1978.

([13]) CE, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 27/10/2008, n° 284828.

([14]) Hormis pour les dépenses informatiques en nuage (« cloud ») pour lesquels le taux est fixé par dérogation à 5,6 %, en application du dernier alinéa du I de l’article L. 1615-6 du CGCT.

En 2014, le taux du FCTVA était de 15,761 % suite à l’augmentation du taux de TVA de 19,6 % à 20 %. Il était auparavant de 15,482 %.

([15]) Art. 1er de la loi n° 2009-122 du 4 février 2009 de finances rectificative pour 2009 (1) et art. 44 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010.

([16]) Art. 34 et 35 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

([17]) Art. 80 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

([18]) Art. 69 de la loi n° 2020-995 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 (3).

([19]) C. Baulinet, J. Fily, D. Reberry, « Revue des dépenses relatives à la gestion du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) », IGF et IGA, mai 2016.

([20]) Art. 156 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

([21]) Art. 258 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

([22]) Art. 249 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([23]) Automatisation de la Liquidation des Concours de l’État.

([24]) Décret n° 2020-1791 du 30 décembre 2020 relatif à l’automatisation de la gestion du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, et arrêté du 30 décembre 2020 fixant la liste des comptes éligibles à la procédure de traitement automatisée relative à l’attribution du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée à l’article L. 1615-1 du code général des collectivités territoriales.

([25]) Annexe « Évaluation des voies et moyens », tome 1, du projet de loi de finances pour 2025, p. 9-10.

([26]) Art. 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([27]) Art. 16 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

([28]) Cette fraction se substitue au « fonds de stabilisation des départements » créé par l’article 261 de la loi de finances pour 2019 qui prévoyait une dotation budgétaire de 115 millions d’euros afin de soutenir les départements « connaissant une situation financière dégradée par rapport aux charges induites par le financement des allocations individuelles de solidarité […] ».

([29]) Art. 252 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

([30]) Art. 131 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

([31]) Art. 8 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([32]) Art. 55 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

([33]) Les EPCI à fiscalité propre, la Ville de Paris, ainsi que les communes qui, n’étant pas membres d’un EPCI à fiscalité professionnelle unique (FPU), percevaient la CVAE (environ 4 045 communes).

([34]) Décrets n° 2023-364 du 13 mai 2023 et n° 2023-1101 du 27 novembre 2023 pris en application de l’article 55 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

([35]) L. Trupin, J.-B. Rozières, P. Reix, B. Chatard, « Territorialisation de la compensation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises », IGF et IGA, mai 2023, p. 2.

([36]) Amendements identiques I-CF1384 de M. Stéphane Delautrette et des membres du groupe SOC et apparentés, I-CF2284 de M. Aurélien Le Coq et des membres du groupe LFI-NUPES, I-CF 1140 de MM. Jean Bataille et Michel Castellani (LIOT), I-CF 1206 de MM. Nicolas Ray et Marc Le Fur (DR) et I-CF 1403 de Mme Christine Arrighi et des membres du groupe EcoS.

([37]) Amendements identiques I-CF565 de Mme Sophie Pantel et des membres du groupe SOC et apparentés, CF 665 de Mme Marianne Maximi et des membres du groupe LFI-NUPES, I-CF1141 de M. Jean Bataille (LIOT) et I-CF1758 de M. Tristan Lahais et des membres du groupe EcoS.

([38]) Amendements identiques 421, 595, 861, 906, 1032, 1342, 1383, 1468, 1726, 2022, 2288, 2572, 2925, 2998, 3066, 3203, 3368 et 3484.

([39]) Amendement 595 de M. Nicolas Ray et plusieurs de ses collègues, et amendement 3066 de Mme Christine Arrighi co-signé par M. Tristan Lahais et les membres du groupe EcoS.

([40]) Amendements 594, 367, 621 et 624 de M. Nicolas Ray et plusieurs de ses collègues.

([41]) Amendements identiques 1384, 2284, 2573, 2930, 3365 et 3382.

([42]) La Lettre du financier territorial, novembre 2024, n° 403, p. 14.

([43]) Lors de la présentation du PLF pour 2025 devant le Comité des finances locales le 8 octobre 2024.

([44]) I4CE, « Panorama des financements climat », mars 2021 et Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, « Les incidences économiques de l’action pour le climat », France Stratégie, mai 2023.

([45]) Op. cit. (page 12).

([46]) Rapport sur la situation des finances publiques locales annexé au PLF pour 2025, p. 18-19.

([47]) Cour des comptes, « Les finances publiques locales 2023, fascicule 1 », juillet 2023, p. 33.

([48]) Cour des comptes, « Les finances publiques locales 2024, fascicule 1 », juillet 2024, p. 10.

([49]) Dont 926 millions d’euros à reprendre aux départements.

([50]) Audition du 27 novembre 2024.

([51]) Auditions des 27 novembre 2024.

([52]) b du 1 de l’art. 3 du TSCG.

([53]) Art. 9 de la loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, art. 11 de la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, art. 13 de la loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 et art. 17 de la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.  

([54]) Art. 11 de la loi de programmation 2014-2019. Depuis la loi de programmation 2018-2022, l’objectif d’évolution se limite aux dépenses réelles de fonctionnement des collectivités territoriales et de leurs groupements.

([55]) Paragraphe 4 du D de la partie I.

([56]) Art. 46 de la loi  n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

([57]) D de la partie III de l’annexe à la loi de programmation des finances publiques pour 2014-2019.

([58]) Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales, annexe au projet de loi de finances pour 2018 (page 16).

([59]) D de la partie III de l’annexe à la loi de programmation des finances publiques pour 2014-2019.

([60]) Dans sa délibération n° 2013-13 du 25 juin 2013, le CFL souhaitait que la CRFP soit répartie au prorata des recettes de chaque échelon de collectivités dans le total des recettes locales.

([61]) Point 16 de la délibération n° 2013-13 précitée.

([62]) Discours du Premier ministre à Cahors du 14 décembre 2017.

([63]) Rapport de la commission présidée par M. Jean Arthuis (Nos finances publiques post-Covid-19 : pour de nouvelles règles du jeu) publié en mars 2021 (page 57).

([64]) Les années 2020 et 2021 ont été marquées par des circonstances particulières liées à la pandémie de Covid‑19 : les dépenses réelles de fonctionnement des collectivités territoriales ne croissent quasiment plus en 2020 (+ 0,24 %) avant de rebondir en 2021 (+ 2,47 %). Le dispositif des « contrats de Cahors » est même suspendu par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 en son article 12.

([65]) Rapport de M. Thomas Cazenave et Mme Christine Pires Beaune au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée nationale (n° 603 du 7 décembre 2022) - page 21.

([66]) CC, n° 2017-760 DC du 18 janvier 2018.

([67]) Séance du CFL du 26 septembre 2022.

([68]) Annexe au PLF 2023 consacrée au transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales (page 32).

([69]) Résolution générale adoptée à l’issue du 104ème Congrès de l’Association des maires de France et présidents d’intercommunalité (AMF) le 24 novembre 2022.

([70]) Exposé des motifs inscrit dans le PLF pour 2025 (page 221).

([71]) Données extraites des comptes de gestion de 2023 publiés sur le site de l’OFGL.

([72]) Audition conjointe de Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation et de M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics.

([73]) Contribution écrite adressée le 10 décembre 2024.

([74]) Le PLF pour 2025 procède en son article 62 à une modification des modalités de répartition entre EPT des abondements au FPIC.

([75]) Les quatorze régions de droit commun ainsi que les trois collectivités territoriales uniques (CTU) de Corse, Mayotte, Martinique et Guyane.

([76]) Source : www.dotations-dgcl.interieur.gouv.fr (dotations régionales 2023).  

([77]) Source : www.dotations-dgcl.interieur.gouv.fr (dotations intercommunales 2023).  

([78]) Solde déficitaire de 0,7 % du produit intérieur brut (PIB) pour l’ensemble des APUL en 2024, contre 0,2 % dans l’article liminaire du PLF 2024. Dans sa contribution écrite du 10 décembre (précitée), la direction du budget estime à 14,2 milliards d’euros l’écart de solde pour les collectivités et EPCI en 2024.

([79]) Le total des recettes réelles de fonctionnement auxquelles s’applique le plafond de 2 % peut être minoré des éventuelles atténuations de produits et recettes exceptionnelles ainsi que du produit des mises à disposition de personnels facturées dans le cadre d’une mutualisation de services entre un EPCI à fiscalité propre et ses communes membres.

([80]) Contribution écrite précitée du 10 décembre dernier.

([81]) En application de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

([82]) Ordonnance n° 2012-576 du 26 avril 2012 portant extension et adaptation à Mayotte du code de la construction et de l'habitation ainsi que de diverses lois relatives au logement.

([83])  Ordonnance n° 2012-785 du 31 mai 2012 portant extension et adaptation du code de l'action sociale et des familles au département de Mayotte.

([84]) Ordonnance n° 2013-1208 du 24 décembre 2013 relative à l'adaptation du code de la santé publique à Mayotte.

([85]) Dispositif de compensation aujourd’hui régi par le CGCT en son article L. 333’‑16‑3.

([86]) Parmi lesquelles on trouve, entre autres, le produit de la taxe spéciale d’équipement (TSE) et la contribution des communes qui ne respectent pas les objectifs de logements locatifs sociaux fixés par la loi nᵒ 2000‑1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) - cf. art. L. 324‑8 du code de l’urbanisme.

([87]) Rapport de la Cour des comptes sur les finances publiques locales en 2023 (fascicule 2 - page 101).

([88]) Op. cit. (page 102).

([89]) Cf. page 45 supra.

([90]) IV de l’art. L. 2336-3 du CGCT pour le FPIC, I de l’art. L. 3335-2 du CGCT pour le fonds national de péréquation des DMTO, I de l’art. L. 4332‑9 du CGCT pour le fonds de solidarité régional.

([91]) Compte-rendu de la réunion de la commission des finances du 30 octobre 2024.

([92]) Amendements n° II‑59 (Mme Cukierman), n° II‑69 rect. bis (Mme Noël), n° II‑108 rect. (M. Laouedj), n° II‑241 (M. Szczurek), n° II‑247 (M. Jean-Michel Arnaud), n° II‑731 (M. Roiron), n° II‑805 rect. quater (M. Genet), n° II‑811 rect. (M. Le Rudulier), n° II‑922 rect. bis (M. Louault), n° II‑1055 (M. Bennaroche), n° II‑1133 rect. (M. Buis).

([93]) Amendement II-11 Rect. Un amendement identique (II-248) avait également été déposé par M. Jean-Michel Arnaud pour la commission des lois.

([94]) Rapport de la Cour des comptes sur les finances publiques locales (fascicule 1) - juillet 2024 - pages 152 et 162.

([95])  Situation mensuelle comptable des collectivités locales au 31 octobre 2024 (page 2).

([96]) Art. L. 2334‑22‑1 du CGCT.

([97]) Pour mémoire, le potentiel financier est pondéré à 70 % dans le calcul de la 3ème fraction de DSR.

([98]) Tel que défini au I de l’article 208 de la loi de finances pour 2020 (éligibilité à la fraction complémentaire de TVA de 250 milliards d’euros et au fonds de sauvegarde).

([99]) La population prise en compte est celle calculée pour l’établissement de la dotation globale de fonctionnement (DGF) en application des art. L. 2334‑2 du CGCT (bloc communal) et L. 3334‑2 du CGCT (départements).

([100]) Allocution du Premier ministre le 21 novembre 2024.

([101]) Contribution écrite précitée du 10 décembre dernier.

([102]) Communiqué de presse de l’AMF du 16 octobre 2024.

([103]) Cf. critères d’exonération mentionnés page 43 supra.

([104]) 68 % en 2023 selon le rapport 2024 de la Cour des comptes sur les finances publiques locales (fascicule 1, page 92).

([105]) Propos utilisés lors de l’audition de Départements de France du 27 novembre 2024.

([106]) Ibid.

([107]) Audition de la DGCL du 21 novembre 2024.

([108]) Audition du 6 décembre dernier.

([109]) L’article 72‑2 de la Constitution, en son dernier alinéa, invite la loi à prévoir des « dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales ».

([110]) Audition du 27 novembre dernier.

([111]) Intervention de Mme Catherine Vautrin lors de la séance publique du 4 décembre dernier.

([112]) Contribution écrite du 13 décembre 2024.

([113]) Lettre du financier territorial n° 403 (novembre 2024) - page 15.

([114]) Propos tenus lors de l’audition précitée de la DGCL du 21 novembre 2024.

([115]) Contribution écrite apportée par Intercommunalités de France le 9 décembre 2024.

([116]) Audition d’Intercommunalités de France du 27 novembre dernier.

([117]) Contribution écrite du 10 décembre précitée.

([118]) Art. 26 de la loi n° 2001-692 du 1er août 2001 (modifiée) relative aux lois de finances (LOLF).

([119]) Recueil statistique 2023, direction des politiques sociales, direction des études et des statistiques de la Caisse des dépôts et des consignation, juin 2024 (page 14)

([120]) Deux commissaires du gouvernement représentant les ministres chargés de la sécurité sociale et du budget ainsi que le président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale et le président du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière assistent également aux réunions du conseil d’administration sans voix délibérative.

([121]) L’article 3 de l’ordonnance du 17 mai 1945 relative aux services publics des départements et des communes et de leurs établissements publics dispose qu’il est créé  « une caisse nationale des retraites à laquelle pourront être affiliés les agents des départements et des communes et de leurs établissements publics s'ils sont investis d'un emploi permanent ».  

([122]) Selon le recueil statistique de la CNRACL de 2020.

([123]) Données : séries longues sur l’emploi dans la fonction publique 1980-1998 - ministère de la fonction publique – direction générale DGAFP

([124]) Ibid.

([125])  Les dispositions de la loi de 1986 en matière de catégories actives et sédentaire permettent d’accorder une prise en compte de la pénibilité des métiers hospitaliers dans le calcul de l’âge de départ à la retraite.

([126]) Recueil statistique de la CNRACL 2023 (page 42).

([127]) Rapport annuel des comptes de la CNRACL - exercice 2023 - page 87.

([128]) Cour des comptes - rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, mai 2024. Chap. III

([129]) 83 ans pour les femmes et 75,9 ans pour les hommes en 2003, contre respectivement 69,2 ans et 63,4 ans en 1950 (Institut national de la statistique et des études économiques - INSEE - Tableaux de l’économie française 2020).

([130]) Recueil démographique de la CNRACL 2023 (page 13).

([131]) Un arrêté interministériel du 12 novembre 1969 introduit une classification des emplois de la fonction publique territoriale et hospitalière en catégorie active et sédentaire. Une distinction est ainsi introduite entre les catégories sédentaires et actives. Les métiers reconnus comme pénibles (catégorie active) permettent un départ anticipé à la retraite.

([132]) Recueil statistique de la CNRACL 2023 (page 11).

([133]) Rapport annuel des comptes de la CNRACL (exercice 2017).

(3) Rapports annuels des comptes de la CNRACL (exercices 2018 à 2023).

([135]) Recueil statistique de la CNRACL 2023 (page 11).

([136]) Rapport n° 2023-104R (IGAS), n° 2023-M-104-02 (IGF) et 23107R (IGA) publié en mai 2024.

([137]) Rapport de l’IGAS, de l’IGF et de l’IGA précité (page 13).

([138]) Ibid (page 32).

([139]) Ibid (même page).

([140]) Ibid (pages 18 et 19).

([141]) Cf. page 75 infra.

([142]) Op. cit. (page 22).

([143]) Rapport n° 2023-104R (IGAS), n° 2023-M-104-02 (IGF) et 23107R (IGA) publié en mai 2024.

([144]) Loi n° 2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.

([145]) II de l’article 5 du décret n° 91-613 du 28 juin 1991 fixant les taux des cotisations de divers régimes spéciaux de sécurité sociale (dernière modification par le décret n° 2024-49 du 30 janvier 2024).

([146]) Un déficit du régime général stricto sensu de 6,3 milliards d’euros, auquel se rajouterait un solde excédentaire de 0,8 milliard d’euros du FSV (alinéas 25 et 26 du rapport annexé).

([147]) Les chiffres clés de la sécurité sociale 2023 (édition 2024) - page 21.

([148]) Compte tenu d’un déficit du régime général de 3,1 milliards d’euros et d’un excédent du FSV de 0,7 milliard d’euros (alinéas 25 et 26 précités du rapport annexé).

([149]) PLFSS pour 2025, annexe 3 (pages 10 et 11).

([150]) Le rapport de l’IGAS-IGF-IGA précité (page 30) évalue à 3,3 milliards d’euros la charge que représenterait pour les employeurs territoriaux un relèvement du taux de cotisation de 10,2 points en 2025.

([151]) Contribution écrite adressée le 6 décembre dernier.

([152]) L’impact du relèvement sur l’ONDAM a, d’ailleurs, suscité l’inquiétude du rapporteur général de la  commission des affaires sociales, M. Yannick Neuder (cf. infra).

([153]) Rapport n° 480 du 23 octobre 2024 de M. Jean-Didier Berger, rapporteur pour avis de la commission des finances (pages 35 et 36). La perte pour la branche maladie avait été compensée à due concurrence par une hausse des crédits de la mission « santé » du budget général de l’État (programme 379).

([154]) Réunion du 23 octobre 2024.

([155]) Réunion du 24 octobre 2024.

([156]) Rapport n° 487 du 25 octobre 2024 de la commission des affaires sociales  - commentaires d’articles et d’annexes (page 314).

([157]) Rapport n° 138 (2024-2025), tome I, déposé le 13 novembre 2024, page 12

([158]) Réunion du mercredi 13 novembre 2024.  

([159]) La numérotation des alinéas du rapport annexé est décalée d’une unité dans la version publiée par le Sénat.

([160]) Ibid.

([161])Rapport de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, n° 638 (27 novembre 2024).

([162]) Audition du 2 décembre 2024.

([163]) Audition du 11 décembre 2024.

([164]) Projet de loi instituant un système universel de retraite (n° 2623 Rect.).

([165]) Loi n° 2023-270 du 14 avril 2023 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.

([166]) Évaluations fournies respectivement par Régions de France (audition du 2 décembre 2024), Départements de France (audition du 27 novembre 2024) et Intercommunalités de France (audition du 27 novembre 2024).  

([167]) Audition du 6 décembre 2024.

([168]) Décret n° 2024-49 du 30 janvier 2024 (art. 4).

([169]) Termes employés par les représentants de Régions de France lors de leur audition du 2 décembre dernier.

([170]) Audition du 11 décembre 2024 précitée.

([171]) Cf. page 61 supra.  

([172]) Audition du 11 décembre 2024 précitée.

([173]) Évaluation donnée lors de l’audition du 2 décembre 2024 précitée.

([174]) Rapport annuel des comptes de la CNRACL (exercice 2023)

([175]) Audition du 11 décembre 2024 précitée.

([176]) Rapport n° 2023-104R (IGAS), n° 2023-M-104-02 (IGF) et 23107R (IGA) précité (pages 47 à 52).

([177]) La rémunération des agents contractuels est fixée de manière globale par référence à un échelon.

([178]) Rapport du Gouvernement à la commission des comptes de la sécurité sociale (2023-2024).

([179]) Une fraction de la taxe sur les salaires (art. 231 du code général des impôts) est affectée, à hauteur de 55,57 %, à la CNAV (1° de l’art. L. 131‑8 du code de la sécurité sociale). Le produit de la C3S (art. L. 137‑30 et suivants du même code) bénéficie intégralement au régime général de base de l’assurance vieillesse.   

([180]) La CNAF a dégagé un excédent de 1,02 milliard d’euros en 2023 (rapport du Gouvernement à la commission des comptes de la sécurité sociale précité).

([181]) Selon le rapport précité, le FSV a dégagé un excédent de 1,14 milliard d’euros en 2023.

([182]) Contribution écrite de l’association adressée le 29 novembre 2024.

([183]) Cf. page 66 supra.  

([184]) Les affiliés à la CNRACL bénéficient d’une majoration de 10 % pour 3 ans, puis de 5 points supplémentaires pour chaque enfant au-delà. Dans le régime général, la majoration reste fixée à 10 % à compter du troisième enfant indépendant du nombre total d’enfants.

([185]) Rapport annuel des comptes de la CNRACL (2023).

([186]) Audition du 2 décembre 2024 précitée.  

([187]) Audition du 11 décembre 2024 précitée.

([188]) Résultats semestriels publiés par la CADES (communiqué du 4 octobre 2024).