TEXTE ADOPTÉ  116

« Petite loi »

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

11 mai 2023

 

 

 

RÉsolution

 

visant à lutter contre les surtranspositions en matière agricole

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’Assemblée nationale a adopté la résolution dont la teneur suit :

 

Voir le numéro : 905.

 


1

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil,

Vu la directive 2009/128/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable,

Vu l’article L. 236‑1 A du code rural et de la pêche maritime,

Vu l’article L. 253‑8 du même code,

Vu l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 19 janvier 2023 dans l’affaire C‑162/21,

Considérant que le récent arrêt susvisé de la Cour de justice de l’Union européenne fait obstacle à la publication d’un nouvel arrêté dérogatoire pour l’autorisation d’utilisation des semences de betteraves enrobées avec des néonicotinoïdes pour les semis de 2023, fragilisant ainsi l’ensemble de la filière sucrière ;

Considérant que l’article L. 253‑8 du code rural et de la pêche maritime interdit en droit français l’usage de tout néonicotinoïde, y compris l’acétamipride utilisé en aspersion, pourtant potentiellement utilisable par dérogation dans d’autres États membres de l’Union européenne ;

Considérant que l’interdiction en droit français de substances autorisées au niveau européen est à l’origine de graves distorsions de concurrence, qui nuisent à l’agriculture française et à notre économie ;

Considérant que ces interdictions sont de nature à accroître le volume des produits importés, à fragiliser nos exportations et à compromettre notre objectif de souveraineté alimentaire ;

Considérant que ces interdictions ne protègent pas les consommateurs français, dans la mesure où des produits contenant les mêmes substances restent autorisés à l’importation, en provenance de pays européens et de pays tiers, et qu’il est donc nécessaire de renforcer les contrôles sur le respect des normes européennes ;

Considérant que le dérèglement climatique et les nouvelles aspirations sociétales rendent essentielle la recherche de nouvelles solutions pour reconcevoir notre modèle agricole et accompagner le monde agricole ;

Considérant que la transition agroécologique de l’agriculture française, telle que définie à l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime, ne peut se déployer de manière continue et régulière qu’à la condition de se fonder sur des alternatives durables, efficaces et opérationnelles aux produits phytopharmaceutiques ;

1. Réaffirme l’impérieuse nécessité de lutter contre les surtranspositions des directives européennes, pour éviter des distorsions de concurrence majeures au détriment de l’agriculture française et de notre économie ;

2. Regrette que les interdictions brutales de produits phytopharmaceutiques, ayant fait l’objet d’une concertation et d’une préparation insuffisantes, conduisent à des revirements qui décrédibilisent l’action et la parole publiques aux yeux des citoyens et insiste sur la nécessité du respect de l’intention du législateur en la matière ;

3. Invite le Gouvernement à défendre au niveau européen la généralisation des « clauses miroirs » dans les traités internationaux et dans les réglementations européennes, notamment le règlement concernant une utilisation des produits phytopharmaceutiques compatible avec le développement durable (SUR) ;

4. Souhaite conditionner toute interdiction de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques, qu’elle émane d’une autorité nationale ou européenne, à l’existence de solutions alternatives efficaces, n’entraînant ni perte de rendement, ni de surcoûts de production inacceptables pour le producteur et pouvant être déployées à grande échelle dans des délais compatibles avec ceux dans lesquels intervient l’interdiction ;

5. Demande au Gouvernement de renforcer les financements attribués aux programmes de recherche de solutions alternatives aux produits phytopharmaceutiques et, en particulier, ceux attribués au plan national de recherche et d’innovation « vers des solutions opérationnelles contre la jaunisse de la betterave sucrière » ;

6. Demande aux metteurs en marché et aux producteurs de produits phytosanitaires de faire la pleine transparence sur leur budget de recherche et de renforcer leurs efforts de développement d’alternatives pour nos agriculteurs ;

7. Demande la mise en place d’une véritable planification pour la recherche d’alternatives aux substances actives susceptibles d’être retirées lors de leur examen futur ;

8. Recommande de renforcer l’accompagnement et le conseil individuel des agriculteurs pour accélérer la diffusion des alternatives dans les exploitations ;

9. Recommande au Gouvernement de mettre en place un plan de soutien financier permettant la prise en charge intégrale des conséquences financières résultant, pour la filière betteraves, des pertes de rendement liées à la jaunisse de la betterave sucrière.

 

 

Délibéré en séance publique, à Paris, le 11 mai 2023.

 

 La Présidente,

Signé : Yaël BRAUN-PIVET