Intervention de M. Jean-Pierre JOUYET,

secrétaire d'Etat chargé des affaires européennes,

devant la réunion de la  COSAC

LUNDI 7 JUILLET

ASSEMBLEE NATIONALE - SALLE COLBERT

Seul le prononcé fait foi

 

Monsieur le Président de la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale,

Monsieur le Président de la Délégation pour l'Union européenne du Sénat,

Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs les Présidents,

Monsieur le Président de la commission des affaires constitutionnelle,

Mesdames, Messieurs les parlementaires,

Mesdames, Messieurs,

C'est un très grand plaisir d'être présent ici aujourd'hui devant les membres de la COSAC, pour vous présenter les priorités qui seront menées pendant nos 6 mois de Présidence. Je tiens à souligner que j'ai déjà eu le plaisir de rencontrer plusieurs d'entre vous dans mes différents déplacements et je suis ravi de les retrouver aujourd'hui à l'Assemblée nationale.

La Présidence française a défini son programme avec l'ambition de répondre aux principales préoccupations de nos concitoyens.

Nous sommes plus que jamais décidés à agir et à montrer la capacité de l'Union à répondre aux attentes concrètes de nos peuples. Plus que jamais l'Europe a besoin d'agir et de convaincre. Nous devons donc maintenir le cap.

Et nous avons besoin des Parlements pour relayer ces idées sur le terrain auprès de tous, pour jouer un rôle tout particulier dans l'engagement au plus près des citoyens dans les politiques européennes. Je tiens, en outre, à souligner le travail formidable et précieux des Délégations pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale et du Sénat. Je prends toujours un grand plaisir à les rencontrer et à débattre avec ses membres.

Le Chef de l'Etat a fixé quatre grandes priorités à la Présidence française. C'est autour de ces priorités que s'organiseront d'abord les deux Conseils européens de notre présidence qui intervient à un moment clé et dans un contexte particulier.

Sur le plan international tout d'abord :

- La situation économique internationale est incertaine avec une crise financière aux conséquences encore indiscernables ;

- Les crises demeurent, elles sont longues (Irak, Afghanistan) et connaissent pour certaines d'entre elles une recrudescence (Zimbabwe, Géorgie).

Sur le plan européen ensuite :

- Le Parlement européen et la Commission sont en fin de mandat (élections européennes en juin 2009, renouvellement de la Commission en novembre 2009). Ceci implique pour le prochain semestre un agenda législatif particulièrement chargé et un volume de textes en cours d'adoption plus important que la moyenne. Nous aurons donc un effort collectif important à fournir pour tenir les échéances ;

- Enfin, la présidence française verra le lancement des travaux du groupe de réflexion sur l'avenir de l'Union à l'horizon 2020-2030, dont les conclusions seront rendues en 2010. Cet exercice important doit nous permettre d'anticiper et de relever avec succès les défis que nous devrons affronter ensemble.

Un nouvel élément de contexte vient s'y ajouter: le rejet par les Irlandais du traité de Lisbonne.

- Le «non» irlandais est une réalité politique que nous ne pouvons que respecter et accepter. Cela dit, le traité de Lisbonne existe, il a été signé par 27 Etats membres et il est important que les 27 Etats membres se prononcent : aujourd'hui 20 l'ont approuvé, 1 l'a rejeté. Il faut que les 6 autres se prononcent.

Les conclusions du Conseil européen des 19 et 20 juin dernier sont claires à cet égard.

- La France souhaite que îe processus de ratification se poursuive afin de préserver toutes les possibilités d'une entrée en vigueur d'un traité qui comporte des avancées importantes pour aider l'Union élargie à agir plus efficacement et de manière plus démocratique.

- Pour ce qui est de l'avenir, il faut d'abord laisser le temps aux autorités irlandaises d'analyser la situation pour proposer une voie commune à suivre.

- Sur le fond, nous devons entendre le message des électeurs irlandais. Ils veulent une Europe qui entend leurs préoccupations et leurs inquiétudes.

Pour cette raison, notre présidence suscite beaucoup d'attentes, que la France ne peut pas décevoir. Ce qu'il faut, c'est que nous répondions aux demandes de fond des Européens : ce sera la tâche principale de la Présidence française et nous comptons sur l'aide active de tous nos partenaires pour y parvenir.

Sur la méthode, la France se propose de suivre deux principes : la concertation avec nos partenaires et la proximité avec les peuples européens. Le Président de la République a d'ailleurs indiqué, lors de la conférence de presse qu'il a tenue pendant le Conseil européen, l'importance qu'il accordait au travail commun avec les futures présidences tchèque et suédoise.

Comme vous le savez, il a fixé quatre grandes priorités :

- La lutte contre le réchauffement climatique et la sécurité énergétique

- L'adoption d'un pacte européen sur rimmigration et l'asile

- La bilan de santé de la PAC

- La relance de l'Europe de la défense.

Ces priorités donneront des impulsions significatives au projet européen, alors que depuis plusieurs armées le débat institutionnel a freiné le développement de nouvelles initiatives politiques.

La première concerne le paquet énergie-climat et la politique énergétique européenne. L'ambition de la Présidence française est de parvenir à un accord politique au Conseil sur l'ensemble de ce paquet à la fin de cette année. C'est un élément clé de l'exemplarité que nous voulons pour l'Europe pour conforter son rôle moteur dans les négociations internationales sur le climat en vue de la Conférence de Copenhague en 2009.

Au delà du paquet énergie-climat, la présidence française fera des propositions en matière de sécurité énergétique concernant à la fois l'Union européenne elle-même et ses relations avec ses partenaires majeurs, notamment la Russie.

La deuxième priorité concerne les migrations. Les politiques migratoires nationales ont un impact sur les autres Etats membres, et doivent être coordonnées dans un esprit de solidarité et de responsabilité communes au niveau européen. C'est d'autant plus le cas que nous devons nous préparer, d'ici 10 ans, à avoir un solde démographique négatif.

C'est pourquoi il est proposé d'adopter au Conseil européen d'octobre un « Pacte européen sur rimmigration et l'asile ».

Il inclut de façon traditionnelle, des propositions sur l'immigration illégale et le contrôle des frontières» Mais, surtout, il introduit trois thèmes plus novateurs : les migrations économiques, l'asile, et les synergies entre migrations et politique de développement.

Ce Pacte s'inscrit dans la continuité, à la fois des programmes de Tampere et de La Haye, des communications de la Commission et de l'agenda législatif, ainsi que des processus de concertation engagés avec les Etats d'origine (Rabat, Tripoli, et sommet UE-Afrique de décembre 2007). Il réaffirme également la nécessité de respecter les grands principes humanistes de l'Union européen et le droit européen et international.

Le Pacte a été élaboré en étroite concertation avec la Commission et les 26 autres Etats membres. Il fera l'objet d'une première discussion an Conseil JAI informel de Cannes, les 7 et 8 juillet, sur la base d'une version révisée tenant compte de ces consultations. Nous espérons un accord au Conseil européen d'octobre.

La troisième priorité concerne la sécurité et la défense européennes.

L'Europe, puissance industrielle, économique, financière et agricole majeure, n'est pas aujourd'hui l'acteur global qu'elle devrait être dans le monde.

Conformément aux conclusions du Conseil européen de décembre 2007, la stratégie européenne de sécurité sera actualisée afin de prendre en compte l'élargissement de l'Union intervenu depuis 2003 et les nouvelles menaces telles que, par exemple, la sécurité alimentaire, la sécurité énergétique, la lutte contre la prolifération et la cyber défense.

La multiplication des crises nécessite également que les Européens renforcent leurs capacités militaires et civiles. Les leçons tirées des opérations PESD montrent que, malgré les efforts déjà réalisés pour le développement des capacités, les États membres doivent s'engager davantage dans ce sens. Les traités actuels le permettent. L'Union européenne doit notamment développer son centre de planification et de conduite des opérations. Une telle capacité est essentielle pour permettre la réalisation d'opérations de l'Union.

Nous souhaitons avancer de manière pragmatique et non dogmatique. La relance que nous proposons s'inscrit dans une vision politique renouvelée, fondée sur la complémentarité entre la défense européenne et l'OTAN, et sur la perspective d'une relance de notre relation avec l'OTAN.

La quatrième priorité portera sur la politique agricole commune. Il y a d'abord l'actualité particulière liée au bilan de santé de la PAC, sur lequel nous espérons trouver un accord au Conseil d'ici novembre..

Il y a ensuite le lancement d'une réflexion sur l'avenir de la PAC : il s'agit, dans le contexte mondial actuel marqué par l'aggravation des déséquilibres alimentaires et la flambée des prix de certains produits, de dégager certains principes communs pour la PAC du futur : correction des déséquilibres alimentaires mondiaux, environnement, équilibre des territoires, qualité alimentaire, etc.

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Dans un contexte où les marchés financiers connaissent depuis l'été dernier de fortes turbulences, notre ambition sera également de faire progresser les principes de transparence et de responsabilité des acteurs financiers. Nous serons également très attentifs au renforcement de la compétitivité de l'économie européenne et notamment de ses PME. C'est tout l'objet des propositions que vient de faire la Commission avec son Small Business Act pour l'Europe.

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Le renforcement de la dimension sociale de l'action de l'Union sera un axe important de la présidence sur la base de la proposition de nouvel agenda social proposé par la Commission le 2 juillet. Nous mettrons en outre l'accent sur la mobilité des Européens et notamment celle des jeunes en réfléchissant à un élargissement des programmes existants (Comenius, Leonardo et Erasmus). La mobilité des chercheurs et les échanges culturels en Europe seront également au cœur de notre action.

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J'insisterai peut-être sur un point dans ce propos liminaire pour évoquer les relations entre TUE et la Méditerranée que la France souhaite, avec le soutien de la Commissions et des autres Etats membres, approfondir pour lui donner un nouvel élan.

Conformément aux conclusions du dernier Conseil européen, la France organisera le 13 juillet un sommet du «Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée » qui réunira, pour la première fois aux côtés des Etats membres de l'UE tous les Etats riverains de la Méditerranée, en vue de développer des projets concrets d'ambition régionale, associant sur une base volontaire les Etats membres et les pays du Sud de la Méditerranée.

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La présidence française s'attache à préserver la continuité des travaux des présidences successives. Je tiens à saluer notre prédécesseur, la Présidence slovène du Conseil, je salue ici même ses représentants, dont il faut souligner la rigueur et la grande qualité, et qui s'est coordonné parfaitement avec notre Présidence sur bon nombre de sujets.

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Pour conclure, nous voulons, le Président de la République l'a redit, une Europe où le débat est possible (sur les grands sujets comme l'OMC, la monnaie, les institutions, l'énergie...). Une Europe qui apporte des réponses concrètes aux préoccupations des citoyens européens.

Par ailleurs, je souhaiterais simplement vous renouveler ma totale disponibilité, tout au long de la présidence française, et je prends date, dès aujourd'hui pour le 3 novembre prochain où je serai ravi de venir à nouveau débattre avec vous, au Sénat.

Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.

Je vous remercie.