N° 2732

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 mars 2020

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI

visant à plafonner les frais bancaires,
(n° 2599)

PAR M. Alexis CORBIÈRE

Député

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 Voir le numéro : 2599

 


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SOMMAIRE

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Pages

Introduction

1. Les frais pour incidents bancaires : un « impôt privé » qui pénalise tous les clients et aggrave les difficultés des plus modestes

2. Des plafonds de droit commun insuffisamment contraignants

3. Des plafonds spécifiques dans un but incertain d’« inclusion bancaire »

4. L’exclusion injustifiée des particuliers agissant pour des besoins professionnels

5. Des banques de détail devenues dépendantes des frais dincidents bancaires

6. Les apports de la proposition de loi

examen en commission

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er [Art. L. 131-73, L. 133-26 et L. 312-1-3 du code monétaire et financier] Plafonnement de lensemble des frais perçus à raison dincidents de paiement ou dirrégularités de fonctionnement du compte bancaire

Article 2 [Art. L. 162-1 du code des procédures civiles dexécution et L. 262 du livre des procédures fiscales] Interdiction dapplication de frais dincident bancaires pour les opérations de saisie attribution ou de saisie administrative à tiers détenteur

Article 3 [Art. L. 312-1-5 du code monétaire et financier] Application à tous les clients particuliers de la garantie dinformation préalable au prélèvement de frais dincidents sur le compte bancaire

Liste des personnes auditionnÉes par le rapporteur


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   Introduction

Les frais pour « incidents bancaires » que les banques prélèvent à leurs clients confrontés à des difficultés financières ne constituent pas la rémunération normale d’un service financier, mais une sanction inutile pour le client, dont ils aggravent les difficultés, et une source de revenus importante pour les banques, maintenue dans la plus grande opacité.

Les conséquences défavorables de ces pratiques bancaires ont conduit le législateur à intervenir à plusieurs reprises pour fixer des limites aux montants de frais prélevés par les banques.

La loi a ainsi institué des plafonds ciblés sur quelques opérations, comme les frais de rejets ou les commissions d’intervention, mais les montants de ces plafonds, fixés par décret, sont trop élevés : les banques ont ainsi pu s’aligner sur des montants maxima très supérieurs aux coûts de gestion des incidents.

Au titre d’une démarche dite d’« inclusion bancaire » pour partie prévue par la loi et pour partie issue d’accords conclus avec les banques, des plafonds spécifiques ont été fixés pour les clients les plus modestes, au risque de les stigmatiser, mais sans faire échec aux cumuls d’incidents pour la très grande majorité des clients qui les subissent.

Ces constats plaident pour l’application de plafonds bien plus rigoureux, et leur généralisation. Dans ce but, la proposition de loi procède à une simplification drastique en fixant directement des montants de plafonds pour l’ensemble des frais, frais de rejet, commissions d’intervention mais également lettres diverses : 2 euros par opération, 20 euros par mois et 200 euros par an.

Cette protection est étendue aux comptes des travailleurs indépendants et micro-entrepreneurs, exclus jusqu’à présent du plafonnement des commissions d’intervention. Complétée par un régime complet et innovant de transparence de la part des banques sur les revenus que leur procurent les frais d’incidents, cette approche présente de nombreux avantages.

Elle va protéger tous les consommateurs de services bancaires, mettant fin aux prélèvements mécaniques de frais visant à rentabiliser le client à court terme, sans aucun rôle pédagogique ni démarche d’accompagnement. La loi brisera ainsi le cercle vicieux de défiance entre les clients qui connaissent des difficultés financières, occasionnelles ou récurrentes, et les personnels des banques, chargés de clientèle, contraints aujourd’hui de maximiser les frais pour incidents.

L’approche sera désormais vertueuse : puisque les revenus tirés des frais bancaires seront limités, les banques seront incitées à prévenir les incidents pour éviter que leurs coûts de gestion ne dépassent les montants plafonnés. Cette réorientation globale du fonctionnement des banques constitue la meilleure garantie de mise en œuvre des engagements qu’elles affichent aujourd’hui de mieux accompagner les personnes en difficulté.

Lors de l’examen de cette proposition par la commission des finances, les groupes de la majorité ont rejeté l’ensemble de ses dispositions, ainsi que les amendements du rapporteur, au motif qu’il ne reviendrait plus au Parlement d’intervenir sur le sujet : le législateur devrait désormais laisser le Gouvernement négocier avec les banques des « accords de place » volontaires, et la représentation nationale devrait se contenter de publier des rapports examinant la mise en œuvre des engagements des banques

Pourtant de très nombreux rapports sont disponibles sur le sujet, dont une vaste enquête de terrain des associations de défense des consommateurs, les rapports annuels du comité consultatif des services financiers et de l’observatoire de l’inclusion bancaire, une communication de la Cour des comptes à la commission des finances du Sénat…et même le rapport d’une mission d’information de la commission des finances de l’Assemblée nationale datant de moins d’une année !

Le débat dans l’hémicycle va permettre de vérifier si les ambitions du « monde d’après », invoquées désormais rituellement par le Gouvernement et sa majorité, s’étendent au quotidien de millions de nos concitoyens clients des banques, que la crise sanitaire expose à des difficultés financières de tous ordres et donc à des frais pour incidents bancaires.

Au demeurant, il aurait dû revenir au Gouvernement, au titre des mesures d’urgence économique et sociale, de veiller à ce que, durant toute la durée de l’état d’urgence sanitaire, aucune banque n’aggrave par des frais pour incidents bancaires les difficultés auxquelles nos concitoyens sont confrontés.

Le Gouvernement s’y est pourtant refusé, allant jusqu’à faire supprimer, par un amendement adopté à l’Assemblée nationale, un article, introduit par le Sénat lors de l’examen du projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions ([1]), qui exonérait de frais d’incidents bancaires les clients les plus modestes pendant toute la durée de l’état d’urgence sanitaire !

Or il n’est plus possible de nier que les banques de détail gèrent un bien commun, la monnaie, et exercent une mission de service public, puisque la crise sanitaire a conduit l’État à leur demander de distribuer massivement, en urgence, et pour un coût quasi-nul, des crédits de trésorerie aux entreprises, garantis jusqu’à un total de 300 milliards d’euros.

Sur cet aspect, comme sur d’autres, la crise sanitaire joue un rôle de révélateur de nos impasses économiques et sociales, et nous met au défi de procéder enfin aux réformes de fond.

 


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1.   Les frais pour incidents bancaires : un « impôt privé » qui pénalise tous les clients et aggrave les difficultés des plus modestes

La dénomination de « frais bancaires » recouvre deux catégories distinctes de tarifs appliqués par les établissements de crédits à leurs clients :

– les frais de tenue de compte et autres rémunérations pour les services de paiement fournis par les banques, pour lesquels la loi prévoit des obligations d’information sur les conditions tarifaires ;

– les frais liés aux incidents et irrégularités de fonctionnement du compte bancaire, visés par la présente proposition de loi.

Le plus souvent, le client est exposé à des frais pour incidents lorsque son compte est insuffisamment pourvu pour couvrir l’opération de paiement demandée à la banque : il peut s’agir d’un découvert simple ou d’un dépassement de découvert autorisé. Les banques peuvent alors appliquer plusieurs types de frais d’incidents.

En premier lieu, les commissions d’intervention sont censées rémunérer l’analyse opérée par la banque qui constate qu’une demande de paiement entraîne un découvert non autorisé et doit alors décider d’accepter ou de rejeter le paiement.

Si la banque a décidé de procéder au paiement, le client ne s’expose pas, au titre de ce paiement, à des frais pour incidents supplémentaires, mais il acquitte des intérêts débiteurs, les « agios », pour le crédit de courte durée que la banque lui accorde tant que son compte reste à découvert ou que le montant de découvert autorisé n’a pas été modifié.

Si la banque a décidé de rejeter le paiement, le client s’expose à des frais de rejet : frais de rejet de chèque, frais de rejet de paiement par carte ou frais de rejet de prélèvement.

Enfin, les banques appliquent des frais supplémentaires, en facturant, dans différentes situations, des lettres d’informations d’incidents adressées au détenteur du compte à découvert.

Certaines de ces lettres sont prévues par la loi, comme la procédure d’information dite lettre Murcef ([2]) qui impose au banquier d’informer son client des conséquences du défaut de provision du compte sur lequel un chèque est présenté et risque d’être rejeté. Cependant, la plupart de ces lettres sont établies et facturées à la discrétion des banques.

L’encadré page suivante présente les différents frais pour incidents selon la dénomination commune des principaux frais et services bancaires définie à l’article D. 312-1-1 du code monétaire et financier ([3]) .

Article D. 312-1-1 du code monétaire et financier

A. Liste des services les plus représentatifs rattachés à un compte de paiement :

(…)

12° Commission dintervention : somme perçue par l’établissement pour l’intervention en raison d’une opération entraînant une irrégularité de fonctionnement du compte nécessitant un traitement particulier (présentation d’un ordre de paiement irrégulier, coordonnées bancaires inexactes, absence ou insuffisance de provision …) ;

(…)

C. Frais bancaires et cotisations :

(…)

Frais dopposition (blocage) de la carte par la banque : le compte est débité des frais perçus par la banque lorsque celle-ci bloque une carte et s’oppose à toute transaction en cas d’utilisation abusive de cette carte par le titulaire ;

(…)

12° Frais de lettre dinformation préalable pour chèque sans provision : le compte est débité des frais perçus par la banque quand elle informe le client, par lettre, qu’il a émis un chèque sans provision ;

13° Frais de lettre dinformation pour compte débiteur non autorisé : le compte est débité des frais perçus par la banque lorsqu’elle informe le client, par lettre, que le solde du compte est débiteur (négatif) sans autorisation ou a dépassé le montant ou la durée du découvert autorisé ;

14° Forfait de frais par chèque rejeté pour défaut de provision : le compte est débité des frais forfaitaires perçus par la banque pour un rejet de chèque pour défaut ou insuffisance de provision ;

15° Frais de rejet de prélèvement pour défaut de provision : le compte est débité des frais perçus par la banque quand le solde disponible du compte est insuffisant pour régler le montant du prélèvement présenté au paiement par le créancier et que l’opération est rejetée ;

16° Frais par saisie administrative à tiers détenteur : le compte est débité des frais bancaires liés à une procédure diligentée par un comptable public pour l’obtention d’une somme qui lui est due ;

17° Frais par saisie-attribution : le compte est débité des frais bancaires liés à une procédure judiciaire engagée par un créancier pour obtenir une somme qui lui est due ;

(…)

20° Frais de non-exécution de virement permanent pour défaut de provision : le compte est débité des frais perçus par la banque quand l’ordre de virement permanent n’a pas pu être exécuté en raison d’un solde disponible insuffisant ;

(…)

22° Intérêts débiteurs : le compte est débité des intérêts à raison d’un solde débiteur du compte pendant un ou plusieurs jours ;

23° Frais suite à notification signalée par la Banque de France dune interdiction démettre des chèques : le compte est débité des frais perçus par la banque pour mettre en œuvre l’interdiction pour le client d’émettre des chèques signalée par la Banque de France ;

24° Frais pour déclaration à la Banque de France dune décision de retrait de carte bancaire : le compte est débité des frais perçus par la banque qui déclare à la Banque de France une décision de retrait de carte bancaire dont son client fait l’objet.


Ainsi que l’atteste le rapport annuel de l’Observatoire des tarifs bancaires publié chaque année par le comité consultatif des services financiers (CCSF) à partir de la documentation tarifaire publique de 109 établissements bancaires et de l’analyse de 65 073 tarifs ([4]), l’ensemble des réseaux bancaires français appliquent aujourd’hui à leurs clients des frais pour incidents bancaires, qui sont tous prévus par les contrats standards appliqués aux clients particuliers.

Souvent perçue comme banale, cette situation n’a pourtant rien d’évident. En effet, alors qu’une banque, prestataire de services financiers, ne devrait être en position d’exiger un paiement de son client que pour des services financiers, les frais pour incidents bancaires ne sont pas appliqués, dans la grande majorité des cas, dans le cadre d’une prestation de service ([5]).

De façon manifeste, le rejet d’un paiement par la banque ne constitue pas un service accordé au client. Il s’agit en réalité d’une décision unilatérale de refus de crédit, dont il n’est pas évident qu’elle doive donner lieu à un paiement par le client. Alors que la décision de rejet de paiement expose le débiteur à des difficultés avec ses créanciers, les frais de rejet prélevés par la banque constituent donc une pénalité supplémentaire.

La facturation de commissions d’intervention semblerait, au premier abord, relever d’un service financier, puisqu’en acceptant de payer au-delà du solde du compte, la banque évite au client de s’exposer à des difficultés avec ses créanciers. Mais ceci revient pour la banque à prendre la décision d’accorder un prêt pour lequel elle est rémunérée par les intérêts débiteurs acquittés par le client. Or les taux des agios sont systématiquement plus élevés que les crédits habituels.

Si la décision du banquier de ne pas rejeter un paiement constitue bien un service, ce service est largement rémunéré par la « prime de taux » des agios, et les montants élevés de commission d’intervention ne se justifient pas.

Dans l’un et l’autre cas, loin de constituer une mesure de « pédagogie » sanctionnant le non-respect de la convention du compte, les frais pour incidents sont la marque d’une relation inégale entre l’établissement bancaire et ses clients exposés à des difficultés financières, ponctuelles ou récurrentes.

Entièrement à la décision des banques, et sans contrepartie individuelle pour le client, les frais pour incidents bancaires peuvent plus légitimement être qualifiés d’« impôt privé » perçu par les banques. Il ne s’agit cependant pas d’un impôt destiné à financer les services d’intérêt général mais, au contraire, d’un prélèvement au seul profit des banques qui pénalise une grande partie des clients des banques, et disproportionnellement les clients les plus modestes.

Selon les données communiquées par le comité consultatif des services financiers, 25 % des comptes bancaires connaissent au moins un incident de paiement par an.

Selon une vaste Enquête sur les frais d’incidents bancaires présentée, en novembre 2017, par l’Union nationale des associations familiales (UNAF) et l’Institut national de la consommation (INC), entre 4 et 6 millions de clients des banques subiraient des frais d’incident chaque mois ([6]).

Aux difficultés passagères que ces frais occasionnent pour un très grand nombre de nos concitoyens s’ajoute le phénomène de cascade de frais, accru depuis plusieurs années par la massification des prélèvements bancaires SEPA ([7]) : quelques prélèvements simultanés ou très rapprochés sur un compte même temporairement à découvert peuvent ainsi entraîner des centaines d’euros de frais en quelques semaines.

En appliquant des frais pour incidents, la banque réduit le solde du compte et accroît la probabilité qu’il se trouve à nouveau à découvert, ce qui permettra à la banque de prélever à nouveau des commissions d’intervention ou de décider un rejet de paiement…

Ainsi que l’indiquent les associations de défense des consommateurs dans le rapport précité : « La bouée en plomb a été lancée, le client s’enfonce, prélèvement après prélèvement, frais d’incident après frais d’incident, agios après agios.» ([8])

Dès lors, les frais pour incidents bancaires pèsent disproportionnellement sur les ménages en difficulté financière. Sur les échantillons représentatifs étudiés par l’UNAF en 2017, on constatait ainsi que les services bancaires coûtaient trois fois plus cher aux ménages modestes avec enfants : 2,1 % de leur budget, contre 0,7 % pour la population générale, et cet écart tenait entièrement aux frais pour incidents et aux agios.

Ces inégalités sont aggravées par les pratiques des banques en matière de remises commerciales, les « extournes ».

Comme l’attestent les témoignages de représentants syndicaux des personnels des banques, les clients ayant des revenus et une épargne suffisants pour intéresser la banque ont de fortes chances de se voir rembourser tout ou partie de leurs frais occasionnels, alors que les clients qui n’ont pas la même surface financière n’ont pas de capacité de négociation.


Une description de la procédure de traitement des incidents bancaires

L’Enquête sur les frais d’incidents bancaires, déjà mentionnée, publiée par l’UNAF et l’INC en novembre 2017, décrit la procédure de traitement des incidents par les banques qui peut connaître des variations selon les réseaux bancaires mais repose principalement sur les éléments suivants :

– des opérations informatiques nocturnes décomptant les opérations de débit et de crédit de la journée écoulée pour établir le nouveau solde du compte ;

– l’émission automatique d’alertes par le système informatique en cas de dépassement d’un découvert autorisé ;

– une intervention par le conseiller bancaire qui repose d’abord sur des préconisations émises par le système informatique, « en fonction des informations disponibles sur le client (profil de risque, comportements bancaires...) ».

Les conseillers bancaires ne chercheraient pas, dans les situations les plus courantes, à prendre des décisions différentes du système informatique car le temps qu’ils y consacreraient manquerait pour les rendez-vous commerciaux.

Le travail d’analyse des dossiers d’incidents se bornerait dès lors à l’examen des dossiers des clients subissant le plus de frais bancaires afin de « trouver un subtil équilibre » devant la « double injonction de la recherche de chiffre d’affaires et la maîtrise du risque : jusqu’à quand le client pourra payer ces frais d’incidents sans qu’il ne dépose un dossier de surendettement par lequel le montant du découvert non payé risque d’être effacé » 

Source : UNAF et INC, Enquête sur les frais d’incidents bancaires : Pratiques actuelles et conséquences Propositions pour lutter contre l’exclusion bancaire, novembre 2017, p. 21.

2.   Des plafonds de droit commun insuffisamment contraignants

Afin d’atténuer les conséquences défavorables des pratiques des banques, le législateur est intervenu à plusieurs reprises pour établir des limites aux montants de frais d’incidents prélevés par les banques.

Comme les frais de rejet ont été précocement identifiés comme particulièrement pénalisants et manifestement injustifiés, ils ont, les premiers, fait l’objet de tentatives d’encadrement :

 d’abord pour les frais de rejets de chèques de petits montants, par l’article 15 de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite  Murcef,

 puis pour les frais de rejets de l’ensemble des chèques ainsi que les frais de rejets de prélèvements ou de paiements par cartes, par l’article 70 de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite DALO. ([9])

Inchangés depuis 2008, les plafonds de frais, fixés par décrets, sont de :

– 30 ou 50 euros pour un chèque selon que son montant est inférieur ou supérieur à 50 euros (article D. 131-25 du code monétaire et financier),

– 20 euros pour rejet sur un autre mode de paiement, sans excéder le montant du paiement rejeté (article D. 133-6 du code monétaire et financier).

Ces plafonds couvrent l’ensemble des frais occasionnés et incluent donc les éventuelles lettres d’information ou commissions d’intervention liées à ces rejets.

● Concernant les commissions d’interventions, l’article 52 de la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires, a prévu un double plafonnement par opération et par mois ([10]). Depuis octobre 2013, ces plafonds sont de 8 euros par opération et 80 euros par mois (article R. 312-4-1 du code monétaire et financier).

● Il faut cependant constater que le plafonnement des frais bancaires, ciblé par catégories d’opérations, n’est pas efficient.

Au regard de l’objectif de réduire le prélèvement sur les clients, les niveaux de plafonnement ne sont pas assez contraignants pour les banques, qui peuvent prélever un maximum de 960 euros par an sur un même compte au titre des commissions d’intervention, sans compter les frais supplémentaires au titre de lettres et injonctions diverses.

Les niveaux de plafonnement doivent également être interrogés au regard des coûts véritablement exposés par les banques afin de traiter les incidents pour lesquels elles facturent des frais. Aucune étude fondée sur le coût marginal ou le coût complet pour les banques n’a justifié les montants de ces tarifs.

Comme il a été indiqué au rapporteur lors de ses auditions, le montant de 20 euros pour un rejet de prélèvement a par exemple été fixé arbitrairement en 2008 en minorant légèrement les frais de rejet de chèques. Pourtant, depuis lors, la diffusion massive des prélèvements automatiques a réduit considérablement les coûts de gestion de ces incidents, ramenés à quelques centimes.

De même, les tarifs des commissions d’intervention ne tiennent pas compte du fait que ces opérations sont le plus souvent gérées de façon quasi-automatique, en appliquant aux comptes un scoring préenregistré. Ainsi, 54 % des conseillers bancaires interrogés lors de l’enquête, déjà mentionnée, de l’UNAF, « indiquent que la facturation d’une commission d’intervention n’implique aucun traitement nécessitant une intervention humaine. Pour 28 % d’entre eux, cette intervention ne dépasse pas cinq minutes » ([11]).

 

En outre, on constate que les banques se sont presque toutes alignées sur les montants les plus élevés autorisés par les plafonds réglementaires, comme le montre le graphique suivant comparant les coûts pour rejets de prélèvement appliqué, début 2019, par un échantillon d’une centaine de banques.

coût de rejet d’un prÉlÈvement pour provision insuffisante

Source : Rapport 2019 de l’Observatoire des tarifs bancaires – p. 52.

Malgré l’amplitude permise par les plafonds réglementaires, la concurrence entre banques ne joue pas en matière de frais d’incidents, y compris de la part des néobanques numériques.

Dans un rapport sur les frais d’incidents bancaires remis en juillet 2018, le comité consultatif des frais financiers a ainsi relevé que « les nouveaux acteurs, comme les réseaux traditionnels, ont des structures tarifaires similaires : les opérations courantes sur des produits très concurrentiels et peu différenciés sont très faiblement ou pas facturées alors que les tarifs sur opérations exceptionnelles et en particulier les incidents sont plus élevés » ([12]).

Paradoxalement, lorsque le législateur n’a pas fixé de plafond, on ne constate pas le même alignement tarifaire, comme le montre le graphique suivant concernant la facturation de lettres informant que le compte est débiteur. Cependant, la variabilité des pratiques bancaires vise dans ce cas plutôt à rendre plus difficile la comparaison des coûts entre banques, un moindre tarif appliqué sur un type d’incident pouvant alors être contrebalancé par d’autres facturations.

Tarifs pour une lettre sur compte débiteur

Source : Rapport 2019 de l’Observatoire des tarifs bancaires – p. 46.

3.    Des plafonds spécifiques dans un but incertain d’« inclusion bancaire »

Le constat de l’insuffisance des plafonds de droit commun a conduit, depuis 2013, les Gouvernements successifs à rechercher des plafonnements plus favorables mais réservés à un public ciblé dans le cadre d’une politique dite « d’inclusion bancaire » ([13]).

L’article 52 de la loi du 26 juillet 2013 prévoit ainsi que les banques proposent aux clients « en situation de fragilité, eu égard, notamment, au montant de leurs ressources » une « offre spécifique qui comprend des moyens de paiement (…) et des services appropriés à leur situation et de nature à limiter les frais supportés en cas d’incident » (article L. 312-1-3 du code monétaire et financier).

Il en résulte, pour les clients ayant souscrit l’offre spécifique ou bénéficiant de la procédure du droit au compte, un « plafonnement spécifique » des commissions d’intervention de 4 euros par opération et 20 euros par mois (article R. 312-4-2 du code monétaire et financier).

En outre, les banques ont pris des engagements supplémentaires en décembre 2018, consistant à proposer un nouveau plafond spécifique applicable à la fois aux frais de rejet et aux commissions d’intervention. Elles proposent ainsi :

– depuis février 2019, un nouveau plafond global de 25 euros par mois pour les clients identifiés comme « en situation de fragilité » et n’ayant pas souscrit l’offre spécifique, soit près de 3,3 millions de clients début 2020 ;

– depuis juin 2019, un plafond global de 20 euros par mois et 200 euros par an pour les souscripteurs de loffre spécifique (487 000 clients fin 2019).

Les représentants d’associations de défense des consommateurs auditionnés par le rapporteur ont cependant souligné les insuffisances des critères réglementaires encadrant les obligations des banques ([14]). La définition des publics bénéficiaires relève en effet largement des banques elles-mêmes.

Comme l’a relevé, en juin 2019, une mission de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur l’inclusion bancaire, il en résulte que « l’ouverture du droit de bénéficier ou non de ces dispositifs dépend de paramètres internes aux réseaux bancaires » au point qu’ « une personne détectée comme fragile dans un établissement ne le soit pas dans un autre, en raison de son lieu de résidence, de la politique commerciale choisie par la banque ou du fonctionnement des systèmes d’information de tel ou tel réseau. ([15])»

Pour les bénéficiaires de ces plafonnements, le progrès est réel mais n’en est pas moins ambigu car l’offre spécifique n’ouvre droit qu’à des instruments de paiement réduits (cartes à autorisation préalable ou chèques de banque), qui, de fait, limitent fortement les risques d’incidents.

La moyenne des frais appliqués aux clients bénéficiaires de l’offre spécifique serait ainsi de 11 euros par mois, très inférieure au plafond de 20 euros.

En présentant un bilan de la mise en œuvre des engagements des banques à ce titre, le 21 février 2020, le ministre Bruno Le Maire a reconnu que le nouveau plafonnement de 25 euros pour les clients que les banques identifient comme fragiles n’a permis de réduire les frais d’incidents que pour environ un million de comptes, la grande majorité des publics concernés ne subissant pas suffisamment d’incidents pour saturer les plafonds de frais.

La démarche dite d’inclusion bancaire doit dès lors être mise en regard du fait que la France compte environ 70 millions de comptes bancaires de personnes physiques, dont 25 % ont au moins un incident par an, alors que jusqu’à 6 millions de clients connaissent des découverts récurrents.

L’enjeu principal réside en réalité dans les montants de frais, bien plus élevés, que les banques se trouvent en position d’appliquer à des millions de nos concitoyens qui connaissent des difficultés de trésorerie, ponctuelles ou récurrentes, sans que les banques les identifient comme « en fragilité financière ».

4.   L’exclusion injustifiée des particuliers agissant pour des besoins professionnels

Le plafonnement actuel des frais bancaires est insuffisant non seulement par son contenu mais par son champ d’application car il n’est pas applicable aux comptes courants détenus, pour leurs besoins professionnels, par plus de 3 millions de clients personnes physiques des banques.

Si le travailleur indépendant est bien un professionnel, il se distingue à maints égards du dirigeant d’une société dans sa relation à la banque, face à laquelle il demeure un client particulier, méritant la même protection que les autres clients personnes physiques.

Jusqu’en 2013, la loi méconnaissait entièrement la spécificité des petits professionnels dans la relation bancaire, en n’imposant la conclusion d’une convention écrite que pour les comptes non professionnels.

L’article 59 de la loi du 26 juillet 2013 a constitué une première avancée en instaurant, à l’article L. 312-1-6 du code monétaire et financier, l’obligation d’une convention écrite pour le compte de dépôt des personnes physiques agissant pour des besoins professionnels.

Analysant cette évolution, la professeure Myriam Roussille, agrégée des facultés de droit, souligne que « cette mesure s’inscrit dans une tendance à étendre aux professionnels personnes physiques les mesures mises en place au profit des consommateurs. Si ce mouvement se poursuit, la notion de consommateur en droit bancaire pourrait bien laisser place, à l’avenir, à la notion de client personne physique qui s’opposera au client personne morale » ([16]) .

Pourtant, ce mouvement de renforcement des droits des travailleurs indépendants dans la relation à leurs banques n’a pas été mené à son terme.

L’article L. 312-1-3 du code monétaire et financier, modifié par l’article 57 de la loi du 26 juillet 2013, a réservé le plafond des commissions d’intervention aux incidents des comptes des personnes physiques « n’agissant pas pour des besoins professionnels » ce qui exclue les travailleurs indépendants et micro-entrepreneurs.

De même, l’article L. 312-1-5 du code monétaire et financier, établi par l’article 66 de la loi du 26 juillet 2013, restreint aux clients n’agissant pas pour des besoins professionnels les garanties minimales d’information préalable au prélèvement de frais d’incidents : une information gratuite, figurant sur le relevé de compte mensuel, et indiquant les montants et dénominations des frais que la banque entend prélever, ainsi qu’un délai minimum de quatorze jours après la date d’arrêté du relevé de compte avant que la banque ne procède au débit de ces frais.

5.   Des banques de détail devenues dépendantes des frais d’incidents bancaires

Les banques de détail, dont l’activité représente 66 % du produit net bancaire en France, sont de plus en plus dépendantes des recettes provenant des incidents bancaires.

Répartition du produit net bancaire par métiers des principaux groupes bancaires français en 2018

Source : Fédération française bancaire française, L’année de la banque 2019, p. 6-7.

La concurrence exacerbée entre banques sur les prestations de services de base pour les clientèles les plus mobiles explique leurs difficultés à réduire significativement les frais pour incidents bancaires dont la tarification est très supérieure aux coûts exposés par leur traitement.

Alors que les rapports annuels des banques ne fournissent aucun résultat d’activités au titre des frais pour incidents, l’enquête déjà mentionnée, de l’UNAF et de l’INC, non contestée publiquement par la Fédération bancaire française, présentait, au moyen d’un faisceau d’indices, une estimation du chiffre daffaires lié aux frais pour incidents bancaires susceptible d’atteindre 6,5 milliards d’euros et de représenter jusquà 30 % du profit des banques ([17]).

Ainsi que l’indiquait le ministre Pierre Moscovici lors de l’examen en séance publique du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires : « personne n’ignore que ces frais représentent une part importante du revenu des banques. L’État souhaite agir pour limiter le poids de ces frais pour nos concitoyens : rien n’est plus normal, car il n’est pas acceptable que le modèle économique de la banque repose sur la vulnérabilité de certains de nos concitoyens. » ([18])

La diminution des frais dincidents bancaires afin de restituer du pouvoir dachat aux particuliers nécessite donc de sortir le modèle économique de la banque de détail de sa dépendance croissante à légard des frais dincidents bancaires.

Le Gouvernement a pourtant tout récemment fait le choix inverse, en plafonnant fortement les commissions pour l’ouverture, la gestion et le transfert des plans d’épargne en actions (PEA). En effet, les banques ne peuvent qu’être incitées à accroître leurs prélèvements sur les clients captifs confrontés à des difficultés de paiement, puisqu’il leur est demandé de réduire leur rémunération pour les services financiers qu’elles rendent à la minorité des clients disposant d’un patrimoine financier à investir en actions…

Le plafonnement des frais bancaires du « produit phare » de la loi PACTE

L’article 91 de la loi  2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) a établi le principe dun plafonnement des frais bancaires liés aux plans épargne en action ([19]).

Le III de larticle L. 221-32 du code monétaire et financier prévoit ainsi que « les frais appliqués au titulaire du plan par la personne auprès de laquelle celui-ci est ouvert à raison de cette ouverture, de sa tenue, des transactions qui y sont opérées ou dun éventuel transfert de ce plan vers une autre personne font lobjet de plafonds fixés par décret ».


Le décret n° 2020-95 du 5 février 2020 relatif au plafonnement des frais afférents au plan dépargne en action et au plan dépargne en actions destiné au financement des PME et ETI vient d’y procéder à l’article D. 221-111-1 du code monétaire et financier qui prévoit que : les frais d’ouverture ne peuvent excéder un montant de 10 euros ; les frais de tenue de compte et à la garde ne peuvent excéder annuellement 0,4 % de la valeur des titres détenus (ou, pour les contrats de contrats de capitalisation, à la valeur de rachat du contrat) ; les majorations par des frais fixes par ligne de titres détenus ou par unité de compte ne peuvent excéder 5 euros ; les frais afférents aux transactions sont plafonnés à 0,5 % ou 1,2 % selon les types de transactions ; enfin, les frais de transfert du plan ne peuvent excéder 15 euros par ligne de titres et l’ensemble de ces frais est plafonné à 150 euros. Ces montants sont cependant revalorisés tous les trois ans en fonction de l’indice INSEE des prix à la consommation hors tabac.

Selon le communiqué de presse du gouvernement, « une personne ayant investi 1 000 euros dans des actions dune société cotée sacquittera au plus de neuf euros de frais annuels, contre vingt euros en moyenne actuellement. Si elle le souhaite, elle pourra transférer son PEA dans un autre établissement proposant une tarification plus intéressante pour un coût forfaitaire de quinze euros au plus, contre environ cent euros actuellement. ».

Pour mémoire, le décret  2019-878 du 22 août 2019 a augmenté les plafonds totaux de versements cumulés sur les PEA et PEA-PME de 150 000 à 225 000 euros par titulaire (et 450 000 euros pour un couple) (article D. 221-113-1). Il a également autorisé dabonder ces versements jusquà 20 000 euros par jeune majeur rattachés au foyer fiscal de leurs parents au titre dun PEA « jeune » (article D. 221-109).

Par ailleurs, les 5° bis et 5° ter de larticle 157 du code général des impôts exonèrent dimpôt sur le revenu les gains liés aux PEA ou PEA-PME conservés pour une durée supérieure à 5 ans, qui sont donc soumis seulement aux prélèvements sociaux (soit 17,2 %).

6.   Les apports de la proposition de loi

Ces différents constats plaident pour une démarche de simplification drastique du plafonnement des frais pour incidents bancaires, par l’application de plafonds bien plus rigoureux, et par leur généralisation, conformément à l’appel des associations de défense des consommateurs qui ont proposé de « généraliser le plafonnement global des frais à tous les clients » ([20]).

L’article 1er de la proposition de loi supprime les plafonnements spécifiques actuels pour les frais de rejet de chèques ou d’autres modes de paiement et établit un plafonnement généralisé de l’ensemble des frais d’incidents, frais pour rejet, commissions d’intervention mais également lettres diverses.... Les montants des plafonds seraient définis directement dans la loi : 2 euros par opération, 20 euros par mois et 200 euros par an.

L’article 1er rend ces plafonds applicables aux personnes physiques agissant pour des besoins professionnels, donc les travailleurs indépendants et les microentrepreneurs.

Alors que le texte de la proposition de loi prévoit que ces plafonds incluront les montants des agios au titre des périodes concernées par ces incidents, les échanges du rapporteur avec les représentants des associations de défense des consommateurs et les organes de régulation bancaire l’ont conduit à proposer de dissocier ces deux enjeux.

Il est en effet apparu qu’inclure les agios dans le plafond pourrait inciter les banques à rejeter un nombre plus important de paiements, faute de pouvoir rémunérer le crédit que représente le découvert bancaire, ce qui exposerait les clients à des difficultés supplémentaires. Tout en proposant de ne pas inclure les intérêts débiteurs dans le nouveau plafonnement, le rapporteur a présenté un amendement visant à mettre un terme à la perception actuelle par les banques d’un minimum forfaitaire d’agios, qui renchérit considérablement le coût des découverts et conduit fréquemment à dépasser le seuil de l’usure, tout particulièrement pour les découverts de petits montants.

Dans sa rédaction initiale, l’article premier abroge les dispositions relatives à l’offre spécifique et au plafonnement préférentiel des frais pour les clients dits « fragiles », que le nouveau plafonnement généralisé prive de son principal objet.

Le rapporteur a cependant présenté un amendement pour maintenir cet accompagnement, tout en le renforçant et en remplaçant la dénomination stigmatisante de « fragilité financière » par celle plus objective de « difficulté financière ».

L’article 1er établit par ailleurs un régime de transparence sur les frais d’incidents bancaires, détaillant leurs effets par typologie de clientèles, ainsi que sur les revenus qu’ils procurent aux banques.

Les garanties de transparence sont fournies par une communication détaillée de chaque banque à un superviseur public, l’autorité de contrôle prudentiel et de régulation (ACPR), mais également par une obligation de publication complémentaire annuelle par chaque banque, destinée au public.

 L’article 2 interdit la perception par les banques de frais pour les opérations de saisie attribution ou de saisie administrative à tiers détenteur, qui ne relèvent ni de la catégorie des frais de rejet, ni des commissions d’intervention, et pour lesquelles un prélèvement bancaire supplémentaire n’est pas justifié.

 Enfin, l’article 3 permet d’appliquer aux travailleurs indépendants et micro-entrepreneurs l’information gratuite, sur le relevé de compte mensuel, du montant et de la dénomination des frais pour incidents bancaires, et le délai de prévenance de 14 jours avant le débit du compte alors que la loi réserve aujourd’hui cette garantie minimale aux personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels.


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   examen en commission

Au cours de sa séance du 5 mars 2020, la commission examine la proposition de loi visant à plafonner les frais bancaires.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Sous la dénomination de frais bancaires, il convient de distinguer, d’une part, les frais de tenue de compte et pour rémunération des services de paiement fournis par les banques et, d’autre part, les frais pour incidents bancaires, qui sont les seuls visés par la proposition de loi qui nous occupe ce matin.

Concernant les frais standards, la loi a prévu des obligations d’information sur les conditions tarifaires et a harmonisé les terminologies afin de faciliter la comparaison des offres. Même si la situation n’est pas parfaite, on constate une diminution des tarifs dans un secteur par ailleurs exposé à la concurrence des néo‑banques.

La situation est très différente concernant les frais d’incidents, c’est-à-dire les frais appliqués lorsque le compte est insuffisamment pourvu. Dans un rapport remis en juillet 2018, à partir d’une comparaison des principaux tarifs pratiqués, le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) a établi que « les opérations courantes sur des produits de base et peu différenciés sont très faiblement ou pas facturées alors que les tarifs sur opérations exceptionnelles et en particulier les incidents sont plus élevés ».

Bien que difficilement lisibles pour nos concitoyens, ces frais peuvent être examinés suivant lordre chronologique dun incident. Tout dabord, les commissions dintervention sont censées rémunérer lanalyse du chargé de clientèle qui constate quune demande de paiement occasionne un découvert non autorisé et qui doit alors décider daccepter ou de rejeter le paiement. Ensuite, interviennent les frais supplémentaires appliqués dans les cas où la banque rejette le paiement – frais de rejet de chèque ou de rejet de paiement par carte ou de rejet de prélèvement. Enfin, des frais sont appliqués pour les lettres dinformations dincidents adressées au détenteur du compte à découvert. Certaines de ces lettres sont prévues par la loi, comme la lettre dite Murcef, mais la plupart sont établies et facturées à la discrétion des banques.

Les montants de tous ces frais pour incidents sur le compte sont forfaitaires. Ces frais se distinguent des agios appliqués en cas de découvert qui sont censés correspondre à un taux d’intérêt pour le crédit que la banque accorde pendant toute la durée du découvert.

Il n’existe pas aujourd’hui de statistique publique sur le montant total des frais d’incidents bancaires et sur sa part dans le revenu des banques. Je dois dire que c’est l’une des surprises que j’ai eues au cours de mes auditions.

C’est l’un des problèmes que l’article premier de la proposition de loi permettra de résoudre, avec une obligation de reporting et de transparence sur ces montants, par typologie de clientèles, et sur les bénéfices pour les banques.

Cependant, il est de notoriété publique que la banque de détail dépend de façon croissante, pour financer son réseau, des revenus procurés par les frais d’incidents bancaires. Une enquête publiée par l’Union nationale des associations familiales (UNAF) et l’Institut national de la consommation (INC) – 60 millions de consommateurs proposait une fourchette allant d’un minimum de 2 milliards d’euros à un maximum de 6 milliards d’euros.

Nous savons également que les frais dincidents bancaires pèsent de façon disproportionnée sur les ménages en difficulté financière. LObservatoire de linclusion bancaire (OIB) a pu établir que les montants de frais dincidents payés par les 3,3 millions de clients identifiés comme fragiles par leurs banques sétablissent en moyenne à 300 euros par an, ce qui représente un total dun milliard deuros, soit entre la moitié et un sixième des montants de frais appliqués à la population totale. Sur les échantillons représentatifs étudiés par lUNAF en 2017, on constatait que les services bancaires coûtaient trois fois plus cher aux ménages modestes avec enfants : 2,1 % de leur budget, contre 0,7 % pour la population générale, et cet écart tenait entièrement aux frais dincidents et aux agios.

Ces inégalités sont aggravées par les pratiques des banques en matière de remises commerciales, ce que l’on appelle les extournes. Les représentants syndicaux des personnels des banques attestent que les clients ayant des revenus et une épargne suffisants pour intéresser la banque ont de fortes chances de se voir rembourser tout ou partie de leurs frais occasionnels, alors que les clients qui n’ont pas la même surface financière n’ont pas de capacité de négociation.

On voit donc que la concurrence exacerbée dans le secteur de la finance a contribué à rendre les banques de détail de plus en plus dépendantes des recettes provenant des incidents bancaires. Et ceci pèse disproportionnellement sur les ménages aux revenus moyens, modestes et très modestes. Permettez-moi de citer Pierre Moscovici, alors ministre de l’économie, lors de l’examen en séance publique, en 2013, du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires : « Personne nignore que ces frais représentent une part importante du revenu des banques. Il nest pas acceptable que le modèle économique de la banque repose sur la vulnérabilité de nos concitoyens. »

Cette situation n’est toujours pas acceptable. C’est pourquoi la proposition de loi vise à parvenir à un plafonnement véritablement satisfaisant de ces frais et à le généraliser. Cela revient à mener à son terme un mouvement engagé par loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable, dite loi Borloo, qui a prévu un plafonnement des frais de rejet pour chèque ou pour autres modes de paiement.

Inchangés depuis 2008, ces plafonds sont de 30 ou de 50 euros pour un chèque rejeté selon que son montant est inférieur ou supérieur à 50 euros et de 20 euros pour un rejet sur un autre mode de paiement, sans excéder le montant du paiement rejeté. Ces plafonds couvrent l’ensemble des frais occasionnés et incluent donc les éventuelles lettres d’information ou commissions d’intervention liées à ces rejets.

En 2013, le législateur est intervenu de nouveau, avec un plafonnement spécifique des commissions d’intervention par l’article 52 de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires qui prévoit un double plafonnement des frais, par opération et par mois. Un décret d’octobre 2013 a fixé des plafonds de 8 euros par opération et 80 euros par mois, ce qui revient tout de même, potentiellement, à un maximum de 960 euros par an.

Cependant, ce plafonnement ne s’applique que pour les comptes des personnes physiques « nagissant pas pour des besoins professionnels », ce qui exclut les travailleurs indépendants et micro-entrepreneurs. Or ces professionnels sont souvent dans une situation de dépendance face aux banques : ils devraient disposer des mêmes protections que les autres consommateurs.

Il est évident que les plafonnements actuels des frais sont insuffisants. L’existence de plafonds différents rend le dispositif peu lisible et la tarification des lettres d’information, de relance ou d’injonction constitue une forme de contournement.

Autre effet pervers : les banques se sont toutes alignées sur les montants plafonds, sans que jamais la concurrence ne les pousse à se démarquer en diminuant les frais d’incidents bancaires !

J’ajoute qu’aucune étude fondée sur le coût marginal ou le coût complet pour les banques n’a justifié les montants de ces tarifs. Le montant de 20 euros pour un rejet de prélèvement a par exemple été fixé arbitrairement en 2008 en minorant légèrement les frais de rejet de chèques, alors que la diffusion massive des prélèvements automatiques a réduit considérablement les coûts de gestion de ces incidents. De même, les tarifs des commissions d’intervention ne tiennent pas compte du fait qu’elles sont gérées de façon quasi-automatique, en appliquant un scoring préenregistré.

Depuis 2013, les seules initiatives nouvelles engagées par le gouvernement ont relevé de la politique dite d’inclusion bancaire avec des mesures ciblées destinées aux clients qui se trouvent en situation de fragilité financière.

En particulier, la loi a obligé les banques à proposer aux clients dits fragiles une offre spécifique de nature à limiter les frais en cas d’incident, donnant accès à des moyens de paiement limités et à des frais d’incidents plafonnés à 20 euros par mois.

C’est au titre de cette démarche de ciblage que les banques ont pris des engagements supplémentaires, annoncés par le Président Macron en décembre 2018, avec un nouveau plafond unique couvrant à la fois les frais de rejets et les commissions d’intervention : à 25 euros par mois pour les populations en situation de fragilité n’ayant pas souscrit l’offre spécifique, soit environ 3,3 millions de personnes ; à 20 euros par mois pour les 480 000 souscripteurs de l’offre spécifique.

Pour les bénéficiaires de ces plafonnements, il y a certes un progrès, mais il est ambigu, car la dénomination de fragilité financière inscrite dans la loi est assez stigmatisante.

En outre, la portée effective du plafonnement doit être relativisée : avec l’offre spécifique, un client n’a droit qu’à des cartes à autorisation préalable ou à des chèques de banque, et, dans ces conditions, éviter les frais d’incidents n’est pas un exploit. Les frais moyens appliqués à ces clients seraient ainsi de 11 euros, très inférieurs au plafond de 20 euros…

Enfin, il ne faut pas surestimer la générosité des banques : le public fragile présente aussi des risques de déposer un dossier devant les commissions de surendettement, qui seraient dès lors amenées à annuler tout ou partie des dettes envers les banques elles-mêmes.

En revanche, ni les plafonds actuels, ni les mesures ciblant certaines populations ne protègent suffisamment contre les phénomènes de cascade de frais, qui peuvent entraîner des centaines d’euros de surcoûts pour quelques incidents de paiement sur un compte temporairement à découvert. Ceci accélère le cercle vicieux de l’endettement de clients que les banques n’avaient pas forcément identifiés comme en situation de fragilité.

Alors que les dirigeants bancaires et les autorités de supervision estiment, dans l’ensemble, que les frais d’incidents auraient une vertu pédagogique et qu’il faut seulement protéger un public identifié comme fragile, nos concitoyens, clients des banques, estiment, eux, de façon générale, que les frais d’incidents bancaires sont rarement justifiés et les placent dans des situations difficiles.

La loi doit donc répondre à cette attente de nos concitoyens, en étendant à tous, de manière universelle – le mot est à la mode – le plafonnement global des frais que les banques appliquent aujourd’hui à la clientèle dite fragile : 2 euros par incident, 20 euros par mois et 200 euros par an.

Cette approche présente de nombreux avantages.

La loi protègera tous les consommateurs et cessera de stigmatiser certains clients cantonnés à des offres low cost.

La loi mettra un terme à la situation actuelle où les banques de détail, financièrement dépendantes des frais d’incidents, se trouvent dans l’incapacité objective de mener des actions de fond de prévention des incidents. La loi mettra fin aux prélèvements mécaniques de frais visant à rentabiliser le client à court terme, sans aucun rôle pédagogique ni démarche d’accompagnement.

Cela mettra fin au cercle vicieux de défiance entre les clients qui connaissent des difficultés financières, occasionnelles ou récurrentes, et les chargés de clientèle, incités aujourd’hui à maximiser les frais pour incidents.

L’approche sera désormais inverse : puisque les revenus provenant des frais d’incidents seront limités, les banques seront désormais incitées à tout faire pour prévenir les incidents afin de se trouver le moins possible dans des situations où les coûts de gestion dépasseraient les plafonds fixés par la loi.

Cette réorientation globale du fonctionnement des banques constitue la meilleure garantie de mise en œuvre de leurs engagements à mieux accompagner les personnes en difficulté. Il s’agit d’une véritable réforme structurelle, mais, pour le coup, d’une réforme véritablement marquée par le progrès.

Et pourquoi refuserait-on de plafonner les frais d’incidents bancaires pour tous les Français, alors qu’un décret du 5 février dernier, pris sur le fondement de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (loi PACTE), vient de plafonner fortement les commissions pour l’ouverture, la gestion et le transfert des plans d’épargne en actions et plans d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises ? Si l’on plafonne les frais pour des services financiers utilisés par la minorité des plus fortunés, pourquoi ne pas plafonner les frais bancaires de tous nos concitoyens ?

Je vous invite donc, chers collègues, à adopter les différents articles de cette proposition de loi, ainsi que les amendements que je vous présenterai pour en améliorer le texte ou en compléter les dispositions.

L’article premier supprime les plafonnements actuels pour les frais de rejet et établit de nouveaux plafonds plus favorables, généralisés à l’ensemble des frais d’incidents et applicables également aux personnes physiques agissant pour des besoins professionnels, donc les travailleurs indépendants et les micro‑entrepreneurs.

Le texte de la proposition de loi prévoit que ces plafonds incluront les montants des agios au titre des périodes concernées par ces incidents. Je vous proposerai toutefois un amendement modifiant ce point du texte.

Les échanges avec les représentants des associations de défense des consommateurs et les organes de régulation m’incitent en effet à dissocier la question des agios de celle des frais d’incidents. Inclure les agios dans le plafond pourrait inciter les banques à rejeter un nombre plus important de paiements, faute de pouvoir rémunérer le crédit que représente le découvert, ce qui exposerait les clients à des difficultés supplémentaires dans leurs relations aux créanciers.

Je vous proposerai donc de dissocier les deux aspects et de mettre un terme à la perception actuelle par les banques dun minimum forfaitaire dagios, qui renchérit considérablement le coût des découverts et conduit fréquemment à dépasser le seuil de lusure, tout particulièrement pour les découverts de petits montants.

Dans sa rédaction actuelle, l’article premier abroge les dispositions relatives à l’offre spécifique et au ciblage des clients dits fragiles. Si les limites de ce volet de la politique d’inclusion bancaire justifient la généralisation du plafond des frais d’incidents, je vous proposerai néanmoins de maintenir cette mesure dans la loi, tout en la renforçant et en remplaçant la dénomination stigmatisante de « fragilité financière » par celle plus objective de « difficulté financière ».

L’article 2 interdit la perception de frais pour les opérations de saisie-attribution ou à tiers détenteur. Je rappelle que les frais bancaires pour saisie administrative à tiers détenteur sont plafonnés à 100 euros depuis un décret de décembre 2018, consécutif à un amendement de notre collègue Joël Giraud, alors rapporteur général du budget, à la loi de finances rectificative pour 2017 qui a unifié les différentes procédures de recouvrement forcé des créances publiques.

Avant ce plafond de 100 euros, les frais bancaires pouvaient atteindre 10 % du montant dû au Trésor public, alors que, comme le relevait notre collègue Joël Giraud en commission des finances, « les personnes concernées ont souvent des difficultés financières et les frais bancaires élevés viennent accroître ces difficultés ».

La mesure de gratuité ne devrait pas poser de difficulté aux banques puisque la loi prévoit déjà l’absence de frais bancaires pour le contribuable lors des prélèvements des impôts. Dans les cas de saisie administrative à tiers détenteur (SATD), si le contribuable est en tort, il paye déjà des pénalités au Trésor public et on ne voit pas pourquoi il devrait payer, en plus, un « impôt privé » à sa banque.

Enfin, l’article 3 permet d’appliquer aux travailleurs indépendants et micro‑entrepreneurs l’information gratuite, sur le relevé de compte mensuel, du montant et de la dénomination des frais pour incidents bancaires, alors que la loi réserve aujourd’hui cette garantie minimale aux personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels.

M. le président Éric Woerth. La proposition de loi qui nous est présentée ce jour a l’avantage de constituer un support utile pour pouvoir discuter du sujet très important des frais bancaires.

Vous avez rappelé, monsieur le rapporteur, le nombre considérable des mesures prises. Malgré cela, le problème demeure ou a pu parfois changer de nature. Il y a donc un dialogue à avoir avec les banques sur ce sujet.

Il ne faut pas oublier toutefois que les interdictions conduisent souvent à des contournements et provoquent des conséquences inverses au but recherché. Elles risqueraient en loccurrence dentraîner lexclusion des personnes sur lesquelles pèsent des contraintes que létablissement de crédit considère comme trop importantes.

Il s’agit là d’un risque considérable : la conséquence serait l’exclusion bancaire complète de plusieurs de nos concitoyens.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. Je remercie tout d’abord le rapporteur d’avoir présenté ce sujet important, dont il faut se saisir. On dénombre en effet 3,3 millions de Français en situation de fragilité financière. Ces personnes sont exposées à des frais d’incidents bancaires. Conjugués à des factures qui s’accumulent, ces frais peuvent créer une spirale infernale susceptible d’enfoncer les publics les plus vulnérables. Les responsables politiques doivent donc se saisir de cette problématique et y répondre.

L’action publique s’est déjà bien engagée récemment là-dessus. Ainsi, en décembre 2018 un accord de place a été conclu, à l’initiative du Président de la République, par les principaux réseaux bancaires.

Cet accord prévoyait la réduction du plafond des frais d’incidents bancaires de toute nature pour les personnes en situation de fragilité financière. Il me semble important d’insister sur ce ciblage. Je rejoins en effet ce qu’a dit le président de la commission. Il faut éviter de tomber dans un excès inverse et de risquer de couper, par exemple, l’accès aux crédits du fait de contraintes trop fortes pesant sur les réseaux bancaires.

Cet accord de place prévoyait également l’augmentation du nombre de personnes éligibles à l’offre spécifique, ainsi qu’un gel des grilles tarifaires.

Cette méthode est souple, car elle ne passe pas par la loi. Elle est efficace, les premiers résultats en attestent. Ces derniers, présentés en conférence de presse le 21 février dernier par le ministre de l’économie et des finances, aux côtés du gouverneur de la Banque de France et de la présidente du CCSF, montrent en effet des progrès notables.

Des contrôles ont été réalisés par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

Comme le ministre l’a souligné, tout le monde ne respecte pas parfaitement cet accord. Tous les acteurs qui ne le respectent pas doivent être dénoncés.

Dans ce contexte, monsieur le rapporteur, avons-nous besoin de légiférer alors que nous avons une méthode qui est, pour une fois, efficace et rapide ? Le Président de la République a pris l’initiative, le ministre de l’économie a pris la main, un accord a été trouvé et un peu plus d’un an plus tard cela aboutit à des résultats tangibles.

Je crois qu’il faut laisser sa chance à cette méthode, qui fonctionne, quitte à l’améliorer, en reprenant par exemple certaines des idées d’amendements à la proposition de loi qui nous est présentée ce jour.

Je formule enfin auprès du président de la commission le vœu que la commission des finances se saisisse du suivi des actions menées par le ministère de l’économie et des finances pour s’assurer du respect de l’accord de place. Un nouveau point d’étape étant prévu sur ce sujet au printemps prochain, une audition du ministre pourrait être programmée par la commission. Si nous constations à cette occasion l’inefficacité des mesures prises, le véhicule législatif pourrait alors s’avérer pertinent.

M. Daniel Labaronne. Au nom du groupe La République en marche, je remercie M. Alexis Corbière pour l’intérêt qu’il porte à la question des frais d’incidents bancaires.

Dans ce domaine, les obligations des banques peuvent dériver de deux sources : la loi – c’est l’approche que vous proposez – et le contrat ou l’engagement réciproque, que nous souhaitons privilégier. C’est la méthode qui a été proposée aux banques par le Président de la République fin 2018.

D’un côté, les banques se sont engagées à réduire les frais d’incidents bancaires pour les clientèles fragiles. De l’autre, les pouvoirs publics se sont engagés à contrôler le respect de ces engagements et, s’ils étaient tenus, à ne pas légiférer sur le sujet. Nous voulons respecter la parole donnée. C’est la raison pour laquelle nous ne serons pas favorables à cette proposition de loi.

Si nous partageons l’objectif de plafonnement des frais d’incidents bancaires, nous divergeons quant à la méthode à adopter pour l’atteindre.

Les engagements des banques ont été rappelés : plafonnement à 25 euros pour les clients en situation de fragilité financière, soit 3,3 millions de personnes ; plafonnement à 20 euros par mois pour tous les bénéficiaires de l’offre spécifique, avec l’objectif d’augmenter de 30 % le nombre de ces bénéficiaires.

La mise en œuvre de ces engagements a fait l’objet de contrôles approfondis durant l’année 2019. De manière générale, l’activité bancaire est l’une des activités les plus contrôlées de France. Elle est contrôlée par l’ACPR, par la DGCCRF, par l’Observatoire des tarifs bancaires (OIB), par le CCSF, par les élus… Je ne crois pas que beaucoup d’activités lui soient comparables à ce titre.

L’ACPR a contrôlé 16 établissements bancaires couvrant 98 % des clients fragiles. La DGCCRF a examiné pour sa part 1 500 dossiers individuels dans 62 départements. Ces contrôles sérieux font apparaître que les engagements ont été respectés par les banques.

Le plafonnement a permis de réduire significativement les frais d’incidents bancaires pour un million de clients qui subissaient auparavant des frais supérieurs aux plafonds. Et le nombre de clients bénéficiaires de l’offre spécifique a augmenté de plus de 40 %. Les objectifs ont donc été dépassés.

À l’occasion d’un premier bilan de l’application des engagements de modération des tarifs d’incidents bancaires établi en février dernier, trois nouveaux engagements ont été pris par les acteurs. Les banques se sont engagées à mieux définir et à harmoniser les critères déterminant les publics fragiles, notamment dans leur rapport annuel. Le ministre de l’économie Bruno Le Maire s’est engagé à utiliser la procédure du name and shame pour les établissements qui ne respecteraient pas les engagements pris. Enfin, les grandes entreprises émettrices de factures se sont engagées à trouver des solutions techniques pour faciliter le remboursement potentiel des éventuels frais associés à plusieurs présentations d’une même facture.

En résumé, nous pensons que les établissements bancaires ont très largement tenu leurs engagements de plafonnement des frais d’incidents bancaires pour les clientèles fragiles. Nous constatons que de nouveaux engagements ont été pris, ce qui montre le caractère évolutif, souple des engagements réciproques. La méthode proposée par le Président de la République porte pleinement ses fruits. Nous voulons donc que cette méthode contractuelle soit privilégiée et poursuivie. C’est pour nous la bonne méthode, c’est pourquoi nous ne sommes pas favorables à cette proposition de loi.

Mme Véronique Louwagie. Merci au rapporteur pour la présentation de cette proposition de loi.

Plusieurs textes ont abordé la question des frais bancaires depuis le plafonnement, en 2013, des frais prélevés pour dépassement de découvert. En 2019, un plafond a notamment été imposé pour les frais d’incidents bancaires appliqués aux personnes en situation de fragilité financière.

Des problèmes demeurent néanmoins, malgré les améliorations obtenues. Plusieurs enquêtes font état de ces difficultés persistantes. Nous avons tous reçu dans nos permanences des personnes confrontées à des situations de ce type et sommes souvent assez démunis pour y faire face.

Force est toutefois de constater que les frais bancaires n’ont pas connu d’augmentation en 2019, même si leur volume reste important, à 6 milliards d’euros.

Des mesures existent, donc. Des engagements ont été pris. Il est important de s’assurer qu’ils sont bien respectés, de mettre en avant les comportements les plus vertueux en la matière et de dénoncer les organismes récalcitrants. Il serait intéressant d’établir un état des lieux exhaustif sur ce sujet, prenant en compte les engagements les plus récents.

Il est important également de pouvoir vérifier l’information dont bénéficient les clients des banques en matière de tarifs. La lisibilité des informations est essentielle. Des engagements de transparence ont été pris et des communications effectuées à l’aune de ceux-ci, mais il convient de s’assurer que ces informations sont lisibles pour ceux qui les reçoivent.

Par ailleurs, il me semble important de rassembler tous les acteurs autour d’une même table afin que les dispositions décidées à l’Assemblée nationale ne se retournent pas contre les personnes qu’elles concernent.

Plutôt que d’organiser simplement des auditions qui ne mèneraient pas à des propositions fortes, je suggère que nous menions une mission d’information. Cette mission pourrait nous conduire à porter des amendements ou à élaborer un texte.

M. Jean-Noël Barrot. Je souhaite également, au nom du groupe MODEM, remercier le rapporteur pour le travail qu’il a effectué sur ce sujet.

Nous partageons l’objectif de protection des ménages fragiles et de réduction des frais d’incidents bancaires qui pèsent sur eux. Nous souhaitons aussi favoriser l’accès du plus grand nombre aux services bancaires et, plus généralement, assurer à tout moment une forme de justice dans ce secteur entre les entreprises, les consommateurs et les épargnants. Nous avions d’ailleurs déjà alerté le Gouvernement sur ce sujet lors de la discussion de la loi PACTE.

Mais si nous partageons l’objectif visé par la proposition de loi, nous sommes en désaccord avec la méthode employée. Car nous croyons davantage à la responsabilité et à la force de l’engagement qu’à la norme. En effet, s’agissant de cette problématique, le poids des réputations engagées est suffisamment élevé pour amener les banques à faire évoluer leurs comportements.

Fin 2018, devant le Président de la République, les établissements bancaires ont pris trois engagements : le gel des grilles tarifaires pour l’ensemble de nos concitoyens, un plafonnement à 25 euros par mois des frais d’incidents bancaires pour les 3,3 millions de personnes en situation de fragilité financière et un plafonnement à 20 euros par mois et à 200 euros par an des frais d’incidents bancaires pour les bénéficiaires de l’offre spécifique.

Des contrôles ont été effectués pour vérifier la bonne tenue de ces engagements : deux vagues de contrôles ont été réalisées par l’ACPR et une vague de contrôle par la DGCCRF.

Or la méthode s’avère fructueuse, puisque les résultats sont au rendez-vous. Ainsi, les frais d’incidents bancaires ont été réduits pour un million de Français et le nombre de bénéficiaires de l’offre spécifique a augmenté de 40 %.

Ces contrôles, même si nous n’en connaissons pas encore le détail, ont probablement également mis en lumière des comportements isolés qui ne seraient pas encore totalement satisfaisants. Pour résoudre ces difficultés, le ministre de l’économie et des finances a annoncé deux catégories de mesures le 21 février dernier. Les premières sont des mesures de transparence – sur les banques qui ne joueraient pas le jeu, sur les critères déterminant l’éligibilité à l’offre spécifique –, et les secondes portent sur des sujets que les banques ne peuvent pas résoudre elles-mêmes et qui sont liés aux grands facturiers – sociétés de téléphonie, de distribution d’eau ou de gaz – dont les factures engendrent parfois la ponction de frais supplémentaires.

Il faudra peut-être aller plus loin et demander aux banques de prendre des engagements encore plus importants. Mais, à ce stade, il est trop tôt pour légiférer sur ce sujet. La force de l’engagement devrait permettre d’obtenir des concessions importantes pour les Français, notamment pour les ménages fragiles. Le groupe MODEM ne votera donc pas cette proposition de loi.

M. le président Éric Woerth. Je donne la parole à Mme Claudia Rouaux, qui remplace M. François André, malheureusement décédé.

Mme Claudia Rouaux. Je remplace effectivement le député François André, notamment dans la présente commission, qu’il affectionnait particulièrement.

Je suis ravie de consacrer ma première intervention à la proposition de loi déposée par La France insoumise relative au plafonnement des frais bancaires. C’est un sujet qui me tient à cœur.

J’ai pu constater les conséquences dramatiques des imputations de frais bancaires sur des agents en situation précaire dans le cadre de la présidence de la commission d’action sociale (CAS) de la région Bretagne.

Ma conviction est que le plafonnement et le contrôle des frais bancaires, notamment ceux résultant dincidents de paiement ou dirrégularités de fonctionnement dun compte bancaire, sont une nécessité – sous peine dentraîner les personnes en situation de fragilité financière dans une situation encore plus critique.

L’étude publiée par l’UNAF et 60 millions de consommateurs en octobre 2017 est sur ce point éclairante. Le montant moyen des frais facturés pour incident par les établissements de crédit s’élève à près de 300 euros par an pour les clients en difficulté, et même à 500 euros pour 20 % des clients concernés.

Il s’agit de mettre fin à cette spirale infernale qui veut que la fragilité financière engendre des frais qui finissent par aggraver cette même fragilité, donc par entraîner de nouveaux frais.

S’il n’est pas question d’encourager les incidents et irrégularités bancaires, l’enjeu est de lutter contre des pratiques qui produisent de la détresse sociale.

À ce sujet, les députés Socialistes et apparentés regrettent que le Gouvernement ait fait le choix en 2018 de passer par des engagements non contraignants pris par les banques concernant les frais d’incidents bancaires.

La loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires a établi un premier plafonnement des frais bancaires dans le code monétaire et financier. Cela ne s’est pas fait par simple engagement. C’est d’ailleurs sur la base d’un décret appliquant cette loi que les commissions perçues par les établissements de crédit à raison du traitement des irrégularités de fonctionnement d’un compte bancaire ont été plafonnées à 20 euros pour les bénéficiaires de l’offre spécifique.

Mais 20 euros par mois quand on a 600 euros de revenu mensuel, c’est énorme. Or ce plafond a paradoxalement été intégré dans les engagements pris par les banques en 2018. Alors même que le respect de ce plafond ne relève pas d’un engagement pris par les banques, mais bien d’une obligation réglementaire !

Le groupe Socialistes et apparentés votera cette proposition de loi et propose de la compléter de deux manières : en revoyant à la baisse les plafonds définis à l’article premier pour les particuliers bénéficiant de l’offre spécifique, et en transcrivant dans la loi le dispositif de name and shame annoncé par le ministre Bruno Le Maire le 21 février dernier, à l’encontre des établissements bancaires ne respectant pas leurs engagements en matière d’encadrement des frais bancaires.

Mme Lise Magnier. Je tiens également à remercier notre rapporteur d’avoir abordé ce sujet important, qui touche trop souvent les personnes les plus modestes et les plus fragiles et engendre fréquemment des spirales infernales, comme cela a été dit.

Pour autant, le groupe UDI, Agir et Indépendants privilégiera aussi la méthode de l’accord passé avec le monde bancaire français. Nous souhaitons privilégier une relation de confiance. Par ailleurs, j’ai toujours du mal avec le principe consistant à dire, sous prétexte que certains ne jouent pas le jeu, qu’il faut contraindre tout le monde. Ce principe me paraît trop souvent employé dans notre pays, et ne fait pas toujours avancer les choses de la bonne manière.

Des avancées ont donc été réalisées sur ce sujet important. Cette proposition de loi n’intervient pas en réalité à un bon moment. Il nous faut poursuivre les différents points d’étape. C’est notre rôle de législateur d’évaluer et de contrôler le respect des engagements pris par le monde bancaire.

Je m’associerai donc aux propos du rapporteur général proposant de faire un point d’étape et que la commission des finances se saisisse de ce sujet en organisant des auditions.

Si nous constations que les efforts fournis par les banques étaient insuffisants, nous pourrions accepter de passer par la contrainte législative, mais aujourd’hui nous ne voterons pas cette proposition de loi.

M. Michel Castellani. En pleine crise des gilets jaunes, les banques se sont engagées à plafonner les frais d’incidents bancaires à 25 euros par mois pour les populations les plus fragiles. Ces engagements faisaient suite à des dispositions législatives, notamment la loi de juillet 2013.

Cette promesse est loin d’être tenue. Constatant que l’accord passé fin 2018 par les établissements bancaires est contourné, il a paru nécessaire de passer par la loi. C’est l’objet de la présente proposition de loi. Le groupe Libertés et Territoires souscrit à cette approche, prévoyant notamment la création d’un plafond à 2 euros par incident, l’obligation d’information et l’exonération du paiement des frais afférant à une saisie administrative. Tout cela limiterait les conséquences financières que subissent particulièrement les personnes les plus fragiles.

De prime abord, une telle proposition de loi permettrait d’assurer la bonne application des promesses faites par les établissements bancaires.

La réglementation en vigueur leur impose par ailleurs une transparence sur leurs tarifs. Or force est de constater qu’ils sont illisibles, puisque l’extrait standard des tarifs l’est absolument.

Nous savons cependant que, si cette proposition de loi était adoptée, nous courrions le risque que les banques se rattrapent en augmentant d’autres frais.

Mais nous reconnaissons que cette proposition de loi a le mérite d’aborder certaines pratiques et de dénoncer les frais parfois démesurés que certains établissements bancaires font supporter à leurs clients modestes et fragiles.

M. Adrien Quatennens. Je salue l’excellent travail de mon collègue Alexis Corbière sur un sujet cher au groupe La France insoumise, qui a choisi de le mettre en avant à l’occasion de sa niche parlementaire.

Je ne peux pas me satisfaire d’entendre certains de nos collègues considérer que les engagements, somme toute assez théoriques, pris à la demande du Président de la République seraient suffisants pour faire face à cette situation.

Il faut nommer clairement ce dont nous parlons. Ce que nous désignons sous l’appellation de frais bancaires est à nos yeux un impôt privé de 7 milliards d’euros. À cet égard, nous pouvons nous demander si les clients des banques sont bien des clients, et non des vaches à lait.

La banque n’est plus au service de l’usager, c’est l’usager qui est au service de la banque.

À plusieurs reprises, nous avons eu l’occasion de mettre ce sujet en avant et de dénoncer les sommes représentées par les frais d’incidents bancaires – 7 milliards d’euros, c’est énorme ! Ces frais sont en hausse, et cette somme de 7 milliards d’euros correspond aux dividendes des banques.

Au vu de l’explosion connue par ces frais ces dernières années, nous pouvons nous demander si les banques ne cherchent pas, par ce biais, à compenser la faiblesse actuelle des taux d’intérêt.

Les frais d’incidents bancaires en France sont les plus élevés d’Europe. C’est un cercle vicieux sans justification morale ni économique. Un rejet de prélèvement facturé 20 euros ne coûte en réalité que 20 centimes à la banque. À titre de comparaison, l’Allemagne facture ces mêmes frais 3 euros et la Belgique 7,50 euros.

Nous voyons également le parcours du combattant que doivent entreprendre les clients lorsqu’ils veulent dénoncer ces frais et faire appel à un remboursement : lettres recommandées, préavis, contacts avec les banquiers, conciliateur de justice…

C’est donc un impôt privé, qui ponctionne en particulier les plus pauvres. Les 7 milliards d’euros de frais payés par les 6 millions de personnes les plus vulnérables représentent en moyenne 1 100 euros par an.

Nous constatons aussi les pressions et les menaces qui pèsent sur l’emploi des conseillers bancaires du fait de l’application du système de bonus malus. En effet, lorsqu’un employé bancaire effectue une remise, notamment sur les frais, sa propre rémunération en est affectée.

Le secteur bancaire fait l’objet du plus grand plan social qui existe. L’objectif est de fermer 2 000 agences sur dix ans et de réduire les effectifs de 10 % en trois ans. Ceci pour des banques qui perçoivent pourtant le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) pérennisé en baisse des cotisations sociales.

Notre proposition de loi vise à remédier à un engagement visiblement inefficace. Nous suggérons un plafonnement global de 2 euros par opération, 20 euros par mois et 200 euros par an. Baisser les frais ne représente aucune menace pour la stabilité du système bancaire. Je rappelle qu’en 2017, le résultat net des principales banques françaises s’élevait à 21 milliards d’euros et que leurs niveaux de fonds propres sont supérieurs à 13 %.

Je vous appelle à adopter cette proposition de loi.

M. Jean-Paul Dufrègne. Je veux à mon tour remercier le groupe La France insoumise et son rapporteur Alexis Corbière d’avoir inscrit ce sujet crucial dans notre actualité.

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) soutiendra cette proposition de loi.

Il est nécessaire de mettre de l’ordre dans cette jungle où beaucoup de Français parmi les plus fragiles se perdent et paient un tribut important.

Des situations très variées se présentent, impliquant des frais d’incidents, des agios, mais aussi parfois des traitements différenciés.

Le Gouvernement a obtenu des engagements et il semblerait que la majorité veuille privilégier le contrat sur la loi. Mais face à de telles situations, il ne faut pas avoir peur de « dégainer » la loi.

L’incidence de ces frais bancaires sur le budget familial peut être considérable. L’expression « spirale infernale » a été employée. N’oublions pas que derrière les mots d’incidents et d’agios se trouvent des familles, qui subissent les conséquences très graves entraînées par une interdiction bancaire.

Nous recevons tous dans nos permanences des personnes touchées par cette malédiction. Et nous voyons les difficultés dans lesquelles cela peut entraîner des gens qui finissent par se trouver dépassés.

Le premier article de la proposition de la loi prévoit un plafonnement des frais par incident, par mois et par an. Il s’agit à mon sens d’un cadre bien défini permettant de protéger les plus exposés et les plus faibles.

Il faut également dispenser beaucoup plus d’informations que nous ne le faisons actuellement et déployer des moyens plus conséquents pour assurer le suivi de ces situations. Il existe ainsi dans les départements des conseillers en économie sociale et familiale (CESF) qui aident les gens à travailler sur leurs budgets familiaux. Les banques pourraient mobiliser des moyens dans ce sens, pour aider les personnes concernées à sortir de cette spirale infernale et surtout à ne pas y revenir.

Nous voterons donc cette proposition de loi.

Mme Marie-Christine Dalloz. La France est le pays de l’Union européenne qui applique les frais bancaires les plus élevés. Il convient de souligner cette réalité.

Par ailleurs, nous avons tous connu des situations de fragilité. Or en situation précaire, le moindre incident engendre quasi systématiquement une surfacturation de frais, ce qui aggrave la fragilité.

La proposition de loi qui nous est présentée ce jour recouvre deux aspects. Tout d’abord, elle suggère un plafonnement des frais à 2 euros par incident, 20 euros par mois et 200 euros par an. Et elle propose également l’interdiction de la facturation des frais de saisie dans le cadre d’avis à tiers détenteur.

Ce dernier point me semble un sujet important. Les avis à tiers détenteur sont souvent le signe de la fin de beaucoup de choses.

Il faut en appeler à la responsabilité de part et d’autre, car un équilibre doit être trouvé. Il est impossible de mettre fin à la rémunération bancaire, mais il n’est pas acceptable non plus de laisser les situations se détériorer pour les clients fragiles.

Monsieur le rapporteur, pourquoi étendez-vous le plafond par incident aux comptes professionnels au lieu de le réserver aux seuls comptes particuliers, alors qu’il ne s’agit pas du même sujet ?

M. Charles de Courson. Le problème est que les banques généralistes ne gagnent plus leur vie sur les prêts. Elles essaient donc de se rattraper sur les services.

La France connaît les tarifs les plus élevés d’Europe. Nous avons légiféré, des accords de place ont été passés. Mais ceci a-t-il réduit les commissions bancaires ? La réponse est non.

En 2019, une légère baisse de 1 % a été relevée pour le système bancaire français. Mais en 2020 une augmentation des tarifs de l’ordre de 5 % est attendue : + 4,9 % pour les retours de lettres non réceptionnées, + 4,8 % pour l’envoi d’un chéquier, + 4 % pour les virements en agence, + 3,9 % pour une nouvelle carte bancaire, etc. Nous voyons bien que les banques gagnent leur vie.

Combien gagnent-elles sur les commissions ? Monsieur le rapporteur a évoqué ce problème sans y répondre. Plusieurs collègues ont cité les énormes écarts, pour le même service rendu, entre la France, l’Allemagne ou la Belgique. Ces écarts vont parfois d’un à deux ou d’un à trois. C’est énorme !

Nous avions obligé les banques à établir une fois par an un relevé des commissions bancaires, et à communiquer sur leurs tarifs. Quels sont ceux d’entre vous qui ont lu des relevés de ce type, totalement illisibles ? Personne ! J’ai essayé d’en lire, mais j’ai renoncé.

Une étude de l’Union fédérale des consommateurs-Que choisir (UFC-Que choisir) du 26 février 2020 a dénoncé l’illisibilité des tarifs des banques. Cette lisibilité était pourtant l’un de leurs engagements. Les établissements bancaires s’étaient effectivement engagés à faciliter la lecture et la comparaison des offres bancaires en éditant une brochure spécifique intitulée « extrait standard des tarifs » énonçant les prix des 12 principaux frais – tenue de compte, cotisation de carte bancaire, etc. Or l’UFC-Que choisir note, à partir des chiffres de l’Observatoire des tarifs bancaires, que quatre établissements – la BNP, la Société générale, HSBC et le Crédit du Nord – ont supprimé cet extrait au profit d’un seul document d’information fastidieux à lire pour les clients.

Tel est le problème auquel nous faisons face. Pour ma part, je crois à la concurrence en la matière plus qu’à des lois. Or il existe de nouvelles formes de concurrence : ce sont les néo-banques, qui n’appliquent aucun frais ou des frais minuscules. Les responsables de ces néo-banques m’ont donné les chiffres de l’analyse de leur clientèle. Celle-ci est principalement constituée de clients fragiles, qui les remercient d’ailleurs de ne pas appliquer de découvert bancaire. Je crois qu’il faut s’orienter davantage vers ce type de solution. Je ne crois pas à l’efficacité de la loi dans ce domaine.

M. Philippe Chassaing. Merci au rapporteur pour son travail.

Je voudrais rappeler qu’il existe, dans l’arsenal des dispositions destinées aux personnes en situation de fragilité financière, un acteur important qui est en train d’émerger. Il s’agit des points conseil budget (PCB). Le Gouvernement a l’intention de développer ces structures. En 2019, 150 PCB ont été créés. La France en comptera 400 d’ici la fin de l’année prochaine.

Comme monsieur de Courson, je considère que la loi n’est pas le bon outil pour endiguer cette problématique. Les banques procédant à des tarifications croisées, si un plafond est imposé sur un frais d’incident bancaire, le risque est que le montant précédemment appliqué se déplace sur un autre frais. Il me semble donc plus pertinent de tenter d’agir sur la concurrence pour lutter contre ce phénomène.

Enfin, la politique actuelle consiste à développer une offre spécifique destinée aux personnes en situation de fragilité financière. Or votre proposition risque de vampiriser cette offre et, partant, de la rendre caduque, alors même qu’il s’agit d’un outil utile, relativement protecteur pour les ménages qui en bénéficient.

M. Julien Aubert. Les néo-banques peuvent effectivement constituer une solution, mais à condition que l’on ait accès à Internet. Or certaines populations, notamment rurales, en sont parfois privées. Par ailleurs, le réseau risque de disparaître, ce qui pose également un problème important.

Pour ma part, je crois en la loi. J’étais d’ailleurs l’un des seuls députés du groupe Les Républicains à voter la loi de séparation et de régulation des activités bancaires. La concurrence ne règle pas tout. Il peut y avoir des ententes bien senties entre banques pour limiter la baisse de ces frais bancaires, qui leur permettent de renflouer leurs caisses dans un climat peu favorable en matière de taux d’intérêt.

Je suis content que cette proposition de loi ait été déposée, car elle met en évidence une forme de cynisme à l’œuvre sur ce point. D’une certaine façon, on est forts avec les faibles, avec ceux qui n’ont pas forcément la possibilité de choisir un autre établissement bancaire. Nous le voyons bien avec les informations que nous avons demandé aux banques de fournir : non seulement il faut savoir compter, mais il faut savoir lire et s’y retrouver dans des notices d’une dizaine de pages conçues en réalité pour dissimuler l’information. Une volonté d’échapper à la loi ou aux règlements est donc à l’œuvre.

La seule critique que j’émettrai à l’égard de votre texte, par ailleurs assez lisible, a trait à l’étude d’impact qu’il faudrait mener pour en évaluer les conséquences sur la santé financière des banques. Si nous devions faire voter ce texte, il faudrait en effet que nous ayons une idée des conséquences qu’il pourrait avoir sur la santé financière de certains établissements bancaires français, qui ne sont pas toujours en bon état.

Cela étant dit, j’accueille avec beaucoup d’optimisme cette proposition de loi susceptible de protéger notamment tous ceux qui sont victimes de frais bancaires excessifs.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Je remercie les collègues qui se sont exprimés.

Une critique particulière a été émise par plusieurs d’entre vous, et je la respecte. Vous considérez qu’il ne faut pas légiférer, mais qu’une relation de confiance pourrait s’établir avec les établissements bancaires et aurait d’ailleurs déjà fait la preuve de son efficacité.

Je me félicite tout d’abord du fait que tout le monde s’accorde à considérer qu’il y a un problème. Je ne crois pas qu’une banalisation du phénomène s’opère ici, ce qui est déjà un acquis. À ce sujet, j’ai parfois été un peu étonné d’entendre les responsables d’établissements bancaires considérer que les sommes sont très exagérées, ou que de nombreuses fausses informations circulent sur ce point. Nous tous, nous savons – certes, en manquant parfois d’outils pour en juger – qu’un problème se pose, sur lequel il faut travailler. Je veux bien admettre toutefois que nous ayons des divergences sur la méthode à adopter.

Je ne vois pas en quoi une proposition de loi serait contradictoire avec un dialogue fécond avec les établissements bancaires.

Par ailleurs, je crois qu’un point de mon intervention liminaire a été mal compris. Je ne conteste pas que la démarche engagée en 2018 ait eu un petit effet. Il est vrai que 480 000 personnes ont intégré l’offre spécifique. J’ai rappelé cependant les conséquences d’une telle intégration. De plus, nous savons que les personnes entrées dans ce type de dispositif risquent ensuite de rencontrer des difficultés pour obtenir un crédit, même si elles en sont sorties.

Je souhaite un dispositif qui s’adresse à tout le monde, non à un public particulier. Près de 8 à 9 millions de personnes subissent chaque année un nombre significatif d’incidents bancaires sans être fragiles. Et par principe, je ne vois pas pour quelle raison un établissement bancaire devrait réaliser une marge sur le simple fait d’avoir signalé à quelqu’un qu’il est à découvert.

Je suis étonné qu’aucun établissement bancaire n’ait été capable de me dire le chiffre exact des marges réalisées sur les incidents. Lorsque je leur avançais le pourcentage de 80 %, ils me répondaient qu’il était tout à fait exagéré, mais lorsque je leur demandais quel était le vrai chiffre, ils me répondaient qu’ils n’en savaient rien. L’intérêt de ma proposition de loi est qu’elle poussera les établissements bancaires à travailler précisément sur ce sujet.

J’ai du mal à croire qu’ils n’aient aucune visibilité sur le coût réel d’une lettre facturée quinze ou dix-huit euros aux clients ! À partir du travail réalisé par les associations de consommateurs, nous avançons le chiffre de quelques centimes. Les banques nous répondent qu’il n’est pas bon. Mettons-nous donc d’accord sur un chiffre ! Cela permettrait d’ailleurs de répondre à la remarque concernant les conséquences qu’aurait ma proposition de loi sur les établissements bancaires.

Même si un dialogue a été mené avec les banques, et semble avoir porté des fruits, ma loi se décale par rapport à cela.

L’UNAF a mené une enquête sur des clients-types qui montre que, malgré les dispositions prises en décembre 2018, 78 % des interdits bancaires et des surendettés n’ont bénéficié d’aucune limite de frais alors qu’ils devaient y avoir droit automatiquement. De plus, 91 % des clients ayant moins de 1 800 euros de revenu et plus de 40 euros de frais pour incidents par mois ne bénéficient pas du plafonnement de leurs frais à 25 euros. Au total, seuls 27 % des clients ont obtenu le remboursement d’une partie de leurs frais. Les sommes remboursées vont de 1,50 euro à 200 euros, pour une moyenne de 92 euros.

Je suis favorable à l’idée de légiférer sur ce sujet. Cela ne s’oppose pas au dialogue fécond qui est engagé avec les banques, mais cela permet de préciser les choses.

Par ailleurs, il ne s’agit pas seulement de mobiliser un dispositif pour nos concitoyens les plus fragiles, mais de prévoir un système universel et simple.

Nous pouvons être en désaccord quant à la méthode à employer. Mais je ne me satisfais pas des affirmations tendant à dire que les mesures engagées suffisent et qu’il faut poursuivre l’effort avec la même méthode. Je vous propose donc autre chose.

Madame Louwagie, de nombreuses études ont déjà été réalisées par les associations, le CCSF, l’OIB, etc. Nous pouvons toujours en faire davantage, mais nous avons déjà beaucoup de matériaux pour avancer.

Monsieur Labaronne, madame Louwagie, monsieur Barrot, je prends acte du désaccord que nous avons quant à la méthode à employer.

Madame Rouaux, vous avez pris soin de présenter des amendements dont nous débattrons, et je vous en remercie. Nous partageons une philosophie commune.

Madame Magnier, nous sommes également en désaccord sur la méthode. Je ne considère pas que le fait de légiférer soit contradictoire avec la recherche et la poursuite d’un dialogue. De plus, nous sommes députés et législateurs, nous ne pouvons rien faire d’autre que de légiférer ! Vous dites que le gouvernement dialoguera avec les banques. Eh bien, qu’il le fasse ! Je ne suis pas encore le gouvernement, notre rôle est de légiférer. Je trouve étrange que des législateurs disent qu’il ne faut pas légiférer. En ce cas, que faisons-nous ? Devons-nous attendre que les événements se produisent ?

La démarche que je propose ne me semble donc pas contradictoire avec le dialogue engagé. Le débat suscité par cette proposition de loi créera d’ailleurs peut-être les conditions d’un changement et poussera peut-être le Gouvernement à aller plus loin dans les demandes faites aux banques.

Je remercie MM. Castellani, Quatennens et Dufrègne pour leur convergence de vues.

Madame Dalloz, la proposition de loi couvre également les avis à tiers détenteur car ils constituent à mon sens une forme de double peine. Des frais sont occasionnés par cette procédure, auxquels s’ajoutent 100 euros prélevés par les banques. Pour de nombreuses personnes, cela fait beaucoup !

S’agissant de l’élargissement des mesures proposées aux comptes professionnels, je manque d’éléments précis pour vous répondre. Mais je sais d’expérience que beaucoup d’entreprises et de petits commerçants ont des problèmes avec les banques. Celles-ci ne les accompagnent pas toujours dans leurs demandes de crédits, et leur imposent des frais bancaires souvent insupportables alors qu’ils jonglent déjà entre les factures. Il y a là matière à intervenir.

De plus, les micro-entreprises constituent parfois une forme de salariat déguisé. Et les micro-entrepreneurs ayant une activité de moins de 10 000 euros par an ne sont pas tenus d’avoir un compte d’entreprise. Ils utilisent donc des comptes personnels. Tout cela se recoupe.

Monsieur de Courson, vous soulignez avec raison l’illisibilité des informations communiquées par les banques.

Monsieur Chassaing, vous avez raison de rappeler l’existence des PCB. Il s’agit d’interlocuteurs utiles, mais dont l’activité ne s’oppose pas, me semble-t-il, à ce que je propose. Vous estimez également que la loi n’est pas utile et que le dialogue doit se poursuivre. Dont acte.

Monsieur Aubert, s’agissant des conséquences que la proposition de loi aurait sur les établissements bancaires, l’objet de ce texte est précisément de leur demander chaque année quels sont les bénéfices tirés des frais bancaires. Si nous avons la main un peu lourde, nous pourrons conduire un dialogue fécond avec eux pour ne pas les mettre à genoux, mais je demande d’abord à voir.

Je ne me satisfais pas d’entendre dire que les banques ne rapportent plus tant que cela et qu’elles comptent en réalité sur les marges générées par les frais pour assurer le maintien du réseau de leurs établissements sur le territoire français. Que cela repose sur les clients, notamment les clients en difficulté, me semble un peu rude. D’autant qu’une forme de solidarité inversée s’opère, de nombreuses prestations gratuites étant proposées aux clients fortunés alors que des prestations répondant à des besoins quotidiens restent payantes pour d’autres.

Si mon texte a une vertu, c’est aussi celle de demander aux banques de nous donner une visibilité sur la réalité des frais d’incidents bancaires. Elles contestent les éléments que nous avançons, ce que je peux entendre, mais qu’elles nous donnent alors d’autres éléments pour que nous puissions discuter !

 

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   EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er
[Art. L. 131-73, L. 133-26 et L. 312-1-3 du code monétaire et financier]
Plafonnement de lensemble des frais perçus à raison dincidents de paiement ou dirrégularités de fonctionnement du compte bancaire

L’article 1er remplace les différents plafonds de frais dincidents de paiement ou dirrégularité de fonctionnement du compte bancaire par un nouveau plafond unique et renforcé, dont le champ d’application est étendu, et les montants fixés directement dans la loi : 2 euros par incident, dans la limite de 20 euros par mois et de 200 euros par an.

Cet article définit en outre des modalités de transparence sur lincidence de ces frais bancaires selon les typologies de clientèles ainsi que sur les revenus quils procurent aux banques.

La commission des finances a rejeté cet article ainsi que l’ensemble des améliorations et des compléments que le rapporteur a proposé d’y apporter.

I. Un encadrement des frais d’incidents bancaires qui résulte de mesures de plafonnement successives et insuffisantes

L’encadrement actuel des frais prélevés par les banques en cas d’incidents sur un compte bancaire résulte d’interventions successives et toujours partielles du législateur.

La loi a tout dabord réglementé les frais de rejets de chèques pour défaut de provision, dont la procédure est définie par l’article L. 131-73 du code monétaire et financier qui indique, à son dernier alinéa, que « les frais de toute nature quoccasionne le rejet dun chèque sans provision sont à la charge du tireur ». Le législateur a dû intervenir à deux reprises.

En premier lieu, larticle 15 de la loi  2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite Murcef, a défini le principe d’un plafonnement, défini par décret, mais l’a réservé aux situations dans lesquelles « le montant du chèque rejeté est inférieur à 50 euros ». Un décret du 30 avril 2002 ([21]) a fixé ce montant maximum à 30 euros en précisant qu’il couvre les frais de toute nature perçus au titre du rejet, incluant la facturation de l’envoi d’une lettre d’injonction.

Ce décret a également précisé que « cette règle sapplique quelle que soit la dénomination et la justification des frais facturés par létablissement concerné à loccasion du rejet dun chèque ».

En deuxième lieu, larticle 70 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite DALO, a supprimé, à l’article L. 131-73, la restriction du plafonnement aux rejets de chèques dun montant inférieur à 50 euros. En conséquence, un décret du 15 novembre 2007 ([22])  a établi deux plafonds distincts à larticle D. 131-25 du code monétaire et financier :

– 30 euros pour les chèques dun montant inférieur ou égal à 50 euros ;

– 50 euros pour les chèques dun montant supérieur à 50 euros.

● En complément, l’article 70 de la loi du 5 mars 2007 a réglementé les frais pour « incidents de paiement autres que des chèques » qui visent les rejets de prélèvements ou de paiements par cartes bancaires.

Il prévoit que le montant des frais à ce titre « est plafonné dans des conditions fixées par décret, en fonction de la nature et du montant de lincident, sans excéder en tout état de cause ce dernier montant ». Initialement établie dans un III de l’article L 312-1-1 du code monétaire et financier relatif aux relations des établissements de crédit avec le client, cette disposition a été transférée au II de larticle L. 133-26 ([23]) relatif aux frais applicables aux instruments de paiement.

L’article D. 133-6 du code monétaire et financier ([24]) fixe un plafond de 20 euros par opération. Il précise que lorsque plusieurs demandes de paiement concernant la même opération ont été rejetées, le payeur peut demander le remboursement des frais perçus au titre de ces incidents au-delà du montant facturé pour le premier rejet. Il lui revient cependant d’apporter, par tout moyen, la preuve que ces demandes de paiement concernent la même opération.

● Enfin, larticle 52 de la loi  2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires a défini, à larticle L. 312-1-3, les principes applicables aux commissions dintervention, perçues en raison du traitement particulier d’une opération entraînant une irrégularité de fonctionnement du compte.

Le premier alinéa de larticle L. 312-1-3 prévoit un double plafonnement de ces frais, par opération et par mois. Un décret du 17 octobre 2013 ([25]) a fixé, à l’article R. 312-4-1 du code monétaire et financier, des plafonds de 8 euros par opération et 80 euros par mois.

Alors que les plafonds pour rejet de chèques ou rejet de paiements sont applicables à l’ensemble des clients des banques, larticle L. 312-1-3 a réservé les plafonds des commissions dintervention aux « personnes physiques nagissant pas pour des besoins professionnels », ce qui exclut l’ensemble des comptes bancaires professionnels de plus de 3 millions de travailleurs indépendants et micro-entrepreneurs.

Plafonds des frais d’incidents bancaires définis par la loi

 

Pour tous les clients

Pour les clients bénéficiaires de loffre spécifique

Plafond des frais de rejets de chèque

(Article L. 131-73)

– 50 euros pour un chèque supérieur à 50 euros ;

– 30 euros pour les chèques d’un montant inférieur

 

 

Plafond des frais de rejet de prélèvement ou de virement

(Article L. 133-26)

– Montant du rejet dans la limite de 20 euros

 

Plafond des commissions dintervention

(Article L. 312-1-3)

–8 euros par opération, dans la limite de 80 euros par mois

– 4 euros par opération, dans la limite de 20 euros par mois

 

– Tarif mensuel de l’offre spécifique plafonné à 3 euros

● Enfin, aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 312-1-3, l’article 52 de la loi du 26 juillet 2013 a donné la possibilité aux clients n’agissant pas pour des besoins professionnels « qui se trouvent en situation de fragilité eu égard, notamment, au montant de leurs ressources » de souscrire une « offre spécifique » comprenant « des moyens de paiement dont au moins deux chèques de banque par mois, et des services appropriés à leur situation et de nature à limiter les frais supportés en cas dincident ».

Ces clients, de même que les personnes bénéficiant de la procédure de droit au compte définie à l’article L. 312-1 du code monétaire et financier ([26]), se voient dès lors appliquer des plafonds de commissions dinterventions préférentiels.

Le décret, déjà mentionné, du 17 octobre 2013 a fixé, à l’article R. 312-4-1 du code monétaire et financier, ces plafonds spécifiques à 4 euros par opération et 20 euros par mois.

Par ailleurs, le décret n° 2014-738 du 30 juin 2014 relatif à l’offre spécifique de nature à limiter les frais en cas d’incident a précisé, à l’article R. 312‑4-3, les critères de « fragilité financière » ainsi que le contenu de l’offre spécifique, et plafonné son tarif mensuel à 3 euros.

● Par ailleurs, les banques ont pris, le 11 décembre 2018, des engagements collectifs volontaires supplémentaires de plafonnement des frais dincidents bancaires pour leurs clients en situation de fragilité financière.

Il en résulte deux nouveaux plafonds de frais qui englobent à la fois les frais de rejet et les commissions dintervention :

– depuis février 2019, un nouveau plafond global de 25 euros par mois pour les clients identifiés comme « en situation de fragilité » et n’ayant pas souscrit l’offre spécifique, soit près de 3,3 millions de clients début 2020 ;

– depuis juin 2019, un plafond global de 20 euros par mois et 200 euros par an pour les souscripteurs de loffre spécifique (487 000 clients fin 2019).

Outre que ce ciblage pose la question de la définition des publics bénéficiaires, qui relève largement des banques elles-mêmes, les mesures de plafonnement ciblé, issues de l’approche dit de « linclusion bancaire », doivent être mises en regard du fait que la France compte environ 70 millions de comptes bancaires pour personnes physiques, dont 25 % ont au moins un incident par an.

II. Le renforcement et la gÉnÉralisation du plafonnement des frais pour incidents bancaires

L’article premier de la proposition de loi procède à une refonte densemble du régime de plafonnement des frais bancaires.

Un plafond unique, élargi et renforcé

Les 1° et 2° suppriment les plafonnements spécifiques respectivement, pour les frais de rejets de chèques au dernier alinéa de l’article L. 131-73 du code monétaire et financier, et, pour les frais de rejets de prélèvement ou de paiement par carte, au II de l’article L. 133-26.

Le 3° modifie la rédaction de l’article L. 312-1-3, aujourd’hui relatif aux seules commissions d’intervention, et établit un principe de plafonnement global applicable à « lensemble des frais et commission perçus à raison dincidents ou dirrégularités de fonctionnement du compte bancaire ». Ce nouveau plafonnement couvre donc à la fois les frais de rejets et les commissions dintervention.

La nouvelle rédaction ne comporte plus la restriction actuelle aux « clients personnes physiques nagissant pas pour des besoins professionnels », ce qui rend pleinement éligibles les comptes professionnels des particuliers travailleurs indépendants et micro-entrepreneurs.

Plutôt que d’être renvoyés à un décret, les montants du plafond sont directement définis par la loi : 2 euros par opération, 20 euros par mois et 200 euros par an.

L’intervention directe du législateur constitue une garantie de mise en œuvre effective par les banques, et prémunit du risque que des mesures réglementaires ne méconnaissent l’intention du législateur.

Le rapporteur écarte par ailleurs tout risque au regard du principe constitutionnel de liberté d’entreprendre. Si la fixation des tarifs bancaires se rattache bien à ce droit garanti par la Constitution, le législateur peut prévoir des dérogations à ce principe dès lors qu’elles sont justifiées par un motif d’intérêt général suffisant et qu’elles sont proportionnées à l’objectif poursuivi, ce qui est manifestement le cas. Les plafonds de frais fixés par la loi sont au demeurant identiques aux plafonds que les banques elles-mêmes ont accepté d’appliquer à une partie de leurs clients.

En outre il ne paraît pas exister d’obstacle à ce que la mesure s’applique aux contrats en cours qui lient les banques et leurs clients, dès lors que le nouveau plafonnement ne modifie pas l’économie générale des conventions de compte.

Des modalités de prise en compte des agios à préciser

Dans sa rédaction actuelle, l’alinéa 6 du présent article indique que le nouveau plafond des frais « inclut également les intérêts débités à raison dun solde débiteur du compte pendant un ou plusieurs jours », ce qui revient à inclure les agios dans le plafond global des frais d’incidents bancaires.

Les agios relèvent cependant dune logique distincte des commissions dintervention, puisqu’ils rémunèrent le crédit accordé par la banque lorsqu’elle effectue un paiement alors que le solde du compte bancaire est insuffisant. Inclure les agios dans un plafond global de frais pourrait conduire les banques à rejeter un nombre plus important de paiements, faute de pouvoir rémunérer le crédit accordé, ce qui exposerait les clients à des difficultés supplémentaires dans leurs relations aux créanciers. Les échanges du rapporteur avec les représentants des associations de défense des consommateurs et les organes de régulation bancaire l’ont conduit à proposer de ne pas maintenir les agios dans le plafond global.

Cependant, la distinction entre frais pour incidents et rémunération du crédit bancaire pose la question des situations où les banques facturent un minimum forfaitaire dagios. L’article R. 314-9 du code de la consommation ([27]) autorise en effet les banques à percevoir, pour chaque opération de découvert inférieur à un montant fixé par arrêté ([28]), un « minimum forfaitaire qui nest pas pris en compte pour déterminer le taux effectif global ».

Prélevés mensuellement ou trimestriellement dès lors qu’un compte a pu être débiteur, même pour des montants et des durées de découverts réduits, les montants forfaitaires dagios peuvent renchérir considérablement le coût des découverts, bien au-delà de celui qui résulte de l’application du taux effectif global (TEG) défini à l’article L. 314‑1 du code de la consommation, au point de dépasser le seuil du « prêt usuraire » défini à l’article L. 314‑6 du même code.

À titre d’exemple, pour un découvert non autorisé de 50 euros pendant 3 jours, l’application d’un taux effectif global annuel même très élevé conduit à des montants d’agios modiques (moins de dix centimes pour un taux de 20 % par exemple) alors que le prélèvement ultérieur d’un minimum forfaitaire de 7 euros correspond à un taux d’intérêt de 1 000 %.

Afin de renforcer les effets du plafonnement des frais d’incidents bancaires tout en conservant la distinction entre agios et frais bancaires, le rapporteur propose donc d’indiquer, à l’alinéa 6 du présent article, que les montants des intérêts perçus à raison d’un solde débiteur du compte ou du dépassement d’une facilité de découvert pendant un ou plusieurs jours sont établis par application exclusive des règles applicables au TEG et ne peuvent être accrus par la perception d’un minimum forfaitaire.

● Des garanties de transparence sur les conséquences des frais dincidents bancaires

Les alinéas 7 à 9 du présent article établissent un régime de transparence sur l’application des frais dincidents bancaires et sur les revenus procurés aux banques, qui paraît à la fois complet et innovant puisqu’il comprend :

– la communication non seulement des montants de frais appliqués par les banques mais également des bénéfices pour les banques après extournes, c’est-à-dire après remises commerciales aux clients ;

– la présentation par typologie de clientèles, qui permet de mieux cerner les effets notamment sur les clients en difficulté financière mais également selon d’autres critères ;

– une obligation de communication détaillée à un superviseur public, l’autorité de contrôle prudentiel et de régulation (ACPR), qui pourra ainsi établir un rapport synthétique annuel les reprenant de manière agréée et anonymisée ;

– et enfin une obligation de publication complémentaire annuelle par chaque banque destinée au public, qui constitue une garantie supplémentaire de transparence.

Le rapporteur relève que l’ACPR dispose d’une compétence de contrôle et de sanctions qui dissuadera les banques de fournir des données erronées. Par ailleurs, pour l’analyse des données, l’ACPR pourra recourir aux moyens de l’Observatoire de l’inclusion bancaire (OIB), qui relève également de la Banque de France, et qui dispose de compétences spécifiques de collecte et d’analyse d’informations sur l’accès aux services bancaires.

 

● La suppression des dispositions existantes relatives aux « clients en situation de fragilité financière »

Dans sa rédaction actuelle, le 3° de l’article 1er supprime les dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 312-1-3 relatives aux clients « qui se trouvent en situation de fragilité financière » et auxquels les banques doivent proposer une « offre spécifique ».

Si la généralisation et l’abaissement du plafonnement des frais d’incidents est en partie motivée par les insuffisances de ce volet de la politique d’inclusion bancaire, cette approche comporte néanmoins certains acquis que le rapporteur a proposé de conserver, tout en les renforçant, en redéfinissant les obligations des banques à ce titre. Ce nouveau dispositif prévoit :

– un changement de dénomination afin de remplacer le terme stigmatisant de « fragilité » financière, par celui, plus objectif, de « difficulté financière » ;

– une définition des critères déligibilité formalisée par un nouveau décret établi après avis des instances consultatives incluant les associations de défense des consommateurs, alors que ces critères relèvent aujourd’hui largement des banques elles-mêmes ;

– une offre de service élargie comprenant un accompagnement de nature à prévenir les incidents ou irrégularités de fonctionnement des comptes bancaires, alors que l’« offre spécifique » est aujourd’hui restreinte à quelques services de base et à un plafonnement préférentiel des frais bancaires que l’adoption de la proposition de loi rendrait inutile.

Les propositions complémentaires du rapporteur

Outre des modifications rédactionnelles, le rapporteur a proposé quatre mesures complémentaires.

Il a proposé de prévoir expressément la gratuité de la procédure dinformation dite lettre Murcef ([29]), qui impose au banquier d’informer son client des conséquences du défaut de provision du compte sur lequel un chèque est présenté et risque d’être rejeté.

Cette information est fréquemment facturée par les banques, quand bien même le client a suffisamment provisionné son compte et que la banque n’a pas procédé à un rejet du chèque, alors que le premier alinéa de l’article L. 131-73 du code monétaire et financier n’impose aucune formalité coûteuse mais seulement une information « par tout moyen approprié ».

Le rapporteur a également proposé de rendre effectif le droit au remboursement des frais pour rejet de prélèvements perçus à tort par les banques lorsqu’elles procèdent à des perceptions multiples de frais pour une même opération.

Plutôt que la procédure actuelle, largement ineffective, définie à l’article D. 133-6 du code monétaire et financier qui permet au client de demander leur remboursement, il a proposé d’établir, à l’article L. 133‑26 relatif aux rejets de paiements, une obligation didentification par la banque des rejets multiples et de remboursement des montants prélevés à tort.

Le rapporteur a en outre proposé d’instituer une obligation pour les banques de proposer systématiquement aux clients en difficulté financière de souscrire un livret dépargne populaire plutôt que des produits d’épargne moins rémunérateurs.

Le rapporteur a enfin proposé d’appliquer aux infractions au plafonnement des frais dincidents bancaires les contraventions de larticle L. 351-1 du code monétaire et financier, applicables aux cas de méconnaissance par les banques de leurs obligations au titre du droit au compte ([30]).

La commission des finances a rejeté cet article ainsi que chacune des propositions damélioration ou de compléments présentées par le rapporteur.

*

*      *

La commission examine, en discussion commune, lamendement CF1 de Mme Claudia Rouaux, et les amendements CF5 et CF6 du rapporteur.

Mme Claudia Rouaux. L’amendement CF1 est rédactionnel.

M. Alexis Corbière, rapporteur. L’amendement CF5 vise à garantir la gratuité de la procédure d’information dite lettre Murcef, qui impose au banquier d’informer son client des conséquences du défaut de provision du compte sur lequel un chèque est présenté et risque d’être rejeté. Cette information réglementaire est fréquemment facturée par les banques, même en l’absence de rejet du chèque, alors même que la loi n’impose aucune formalité coûteuse mais seulement une information par tout moyen approprié.

Par ailleurs, je vous propose d’établir un verrou à la fin de l’article relatif aux rejets de chèques, en indiquant sans ambiguïté que les frais prélevés à cette occasion ne peuvent conduire à dépasser le plafond global de frais établi par cette proposition de loi.

L’amendement CF6 impose un même verrou à l’article relatif aux rejets de paiements et de virements : les frais prélevés ne pourront conduire à dépasser le plafond global de frais.

 

M. Daniel Labaronne. Nous partageons tous le souci de limiter les frais d’incidents bancaires. À ce titre, les amendements présentés comportent des idées intéressantes et nous reconnaissons la pertinence de votre approche, mais nous ne pourrons pas les voter en raison du désaccord que nous avons sur la méthode à employer.

Nous pourrons toutefois mettre cela en discussion dans le cadre de nouveaux engagements. Votre travail aura été, de ce point de vue, utile.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. Ce n’est pas parce que nous sommes parlementaires que légiférer constitue forcément la meilleure solution ou formerait notre seule capacité d’action. Le député écrit et amende la loi, c’est un fait. Mais le constituant de 2008 précise également que le député contrôle l’action du Gouvernement et évalue les politiques publiques. Ces deux missions ne sont pas des missions annexes, elles sont aussi importantes que celle consistant à légiférer.

Or la proposition de loi qui nous est présentée constitue à cet égard un cas d’école. Elle revient en effet à utiliser un outil classique du député, alors que nous pourrions faire appel aux autres outils que sont le contrôle et l’évaluation pendant que l’exécutif mène un travail, certes perfectible, mais efficace, qu’il nous revient de suivre et, en cas de nécessité, de chercher à améliorer.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Je ne dis pas que ce qui a été fait en décembre 2018 n’a pas eu d’effets et que les engagements pris par les banques n’ont pas été tenus. Je propose autre chose : un dispositif universel consistant à dire que, quelle que soit votre situation financière, les banques ne peuvent pas facturer de frais au-delà d’une certaine somme fixée par opération, par mois et par an.

J’aurais du mal à me limiter à une posture ou à un rôle d’évaluation des engagements pris, car ceux que j’évoque ne l’ont pas encore été.

Je prends acte néanmoins du fait que nous avons une manière différente d’aborder le sujet. Chacun jugera de l’efficacité des mesures engagées.

Mais nous devrions pouvoir envisager que des normes soient décidées. Bien souvent, lorsque des engagements sont pris, il en résulte un grand flou sur le terrain, ainsi que des différences d’application selon les endroits. Il s’avère en outre très difficile d’évaluer le respect de ces engagements, faute d’éléments permettant d’en juger.

M. Daniel Labaronne. Nous avons une autre opposition de fond. Vous proposez une réforme structurelle, visant à étendre le dispositif à tout le monde. Or cela va à l’encontre de la démarche consistant à cibler les personnes en situation de fragilité bancaire.

Mais cette démarche remonte au gouvernement Mauroy, qui avait instauré le droit au compte ! Le gouvernement Ayrault avait suivi cette ligne, au moyen de la loi Moscovici instaurant l’offre spécifique ainsi que des plafonnements.

Nous poursuivons cet effort, par l’intermédiaire des engagements réciproques pris en faveur des personnes en situation de fragilité bancaire. Or vous proposez de l’étendre à tout le monde, entraînant un risque d’effet d’aubaine. Une personne aisée ayant plusieurs comptes pourrait ainsi voir son inconséquence profiter de vos dispositions.

Non seulement nous sommes en désaccord sur la méthode, mais nous nous opposons aussi à l’idée de généraliser le dispositif. Car cela reviendrait à abandonner le ciblage des personnes en situation de fragilité bancaire.

Par ailleurs, le contrôle des parlementaires s’exerce aussi à travers les organismes existants, comme le CCSF. Peut-être faudrait-il qu’un parlementaire siège également au sein de l’OIB ?

M. Gilles Carrez. La mission d’information sur l’épargne dans un environnement de taux bas, que je préside, fonde ses réflexions sur l’hypothèse d’un maintien des taux bas sur plusieurs années. Or l’une des conséquences de taux bas durables est la réduction des marges des banques. En France, les banques disposent d’un réseau important, représentant un nombre d’emplois considérable. Nous serons confrontés à cette question.

Par ailleurs, la Caisse des dépôts et consignations a pris le contrôle de La Poste, donc de la Banque postale, qui joue un rôle essentiel en matière d’accessibilité bancaire – rôle pour lequel elle dispose d’ailleurs d’une aide publique. Les membres de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations qui vous représentent constatent que cette banque, qui dispose d’une grande liquidité, est conduite à la placer au jour le jour à des taux négatifs et voit donc ses marges s’éroder. Il s’agit d’une réalité incontournable.

Autant je suis d’accord avec l’esprit de cette proposition de loi, autant il me semble nécessaire de cibler les publics les plus fragiles, dans un contexte où les banques vont au-devant de grandes difficultés.

Il y a vingt ou trente ans, on disait que les banques seraient la sidérurgie de demain. Cela ne s’est pas produit, mais nous devons rester attentifs. C’est l’un des objectifs de la mission d’information qui vient d’engager ses travaux.

M. le président Éric Woerth. Mais la surtarification bancaire sur des incidents ne saurait constituer un revenu en soi. Le service associé doit être payant, mais non surtarifé.

La commission rejette successivement lamendement CF1 de Mme Claudia Rouaux, et les amendements CF5 et CF6 du rapporteur.

La commission est saisie de lamendement CF7 du rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur. L’amendement CF7 propose de rendre obligatoire le remboursement des frais perçus à tort par les banques en cas de perceptions multiples de frais pour une même opération.

La loi prévoit aujourd’hui que les frais pour rejet de paiement s’appliquent une seule fois pour une même opération. Pourtant les clients peuvent se voir facturer des frais d’incidents multiples après refus répété d’un même prélèvement.

Un décret du 29 juillet 2009 autorise d’ailleurs le client à demander le remboursement des frais prélevés à tort, mais il y a très peu de demandes, car les clients ont du mal à distinguer les double ou triple facturations quand ils sont confrontés à des cumuls d’incidents.

Le ministre Bruno Le Maire a fait des annonces pour que les banques et les grands facturiers identifient mieux les nouvelles présentations de prélèvements déjà rejetés. Les résultats sont attendus d’ici novembre 2021 au plus tard.

Afin de s’assurer que cette initiative sera menée à son terme et pour éviter de faire peser le poids des démarches sur les clients, je vous propose d’instituer dans la loi l’obligation de remboursement de ces frais.

M. Daniel Labaronne. Cela est déjà satisfait par le décret mentionné. Mais une difficulté technique se présente pour identifier les facturations multiples. À l’occasion du bilan établi en février dernier, les grands facturiers se sont engagés à accélérer les solutions techniques pour y remédier. Nous souhaitons attendre que cet engagement soit tenu, avant de voir s’il convient d’aller plus loin.

La méthode employée et le fait que des engagements aient été pris nous conduisent à ne pas voter en faveur de cet amendement.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Pour l’instant, il faut que le client demande le remboursement de ces frais perçus à tort. Or nombreux sont ceux qui ne s’aperçoivent pas qu’ils ont fait l’objet de facturations multiples. L’idée de cet amendement est donc de rendre ce remboursement obligatoire.

Les banques disent parfois, de bonne foi sans doute, qu’elles peinent à distinguer les représentations de factures. Mais cet amendement avait pour objet de changer la méthodologie employée pour répondre à ce problème.

M. le président Éric Woerth. Ce problème doit être réglé entre les banques et les grands facturiers, qui refacturent rapidement, créant ainsi une multiplicité d’incidents, donc de frais.

La commission rejette lamendement CF7.

La commission examine, en discussion commune, lamendement CF8 du rapporteur, lamendement CF2 de Mme Claudia Rouaux et lamendement CF9 du rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur. L’amendement CF8 vise à simplifier la rédaction de l’alinéa qui définit un nouveau plafonnement plus favorable de l’ensemble des frais d’incidents, sans exception, et l’applique à l’ensemble des clients particuliers des banques.

Mme Claudia Rouaux. L’amendement CF2 propose de baisser les plafonds à un euro par opération, 10 euros par mois et 100 euros par an.

M. Alexis Corbière, rapporteur. L’article premier de la proposition de loi inclut les agios pour découvert non autorisé dans le champ du nouveau plafonnement des frais.

Comme je l’ai indiqué dans mon intervention initiale, les auditions avec les associations de consommateurs m’ont convaincu de la nécessité de distinguer clairement, d’une part, les frais d’incidents et, d’autre part, les agios qui rémunèrent le crédit accordé sous forme de découvert bancaire. L’amendement CF9 procède donc à cette modification.

Par ailleurs, les agios ne sont justifiés que dans la mesure où ils correspondent strictement à la rémunération d’un découvert. Ils ne doivent pas redevenir une sorte de pénalité forfaitaire camouflée. Or c’est aujourd’hui le cas avec la perception d’un minimum forfaitaire d’agios qui permet aux banques d’appliquer des agios qui dépassent le taux d’usure.

L’amendement CF9 vise donc à ce que les agios respectent strictement les garanties offertes par le code de la consommation notamment l’application d’un taux effectif global et l’interdiction du prêt usuraire.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. Ces amendements offrent des pistes de réflexion intéressantes pour notre travail de contrôle et de suivi des démarches engagées avec les banques. Ainsi, l’abaissement des plafonds à un euro, 10 euros et 100 euros pourrait constituer une nouvelle étape si nous constations que les plafonds à 2 euros, 20 euros et 200 euros étaient bien respectés dans le cadre de l’accord de place.

Même si ces amendements sont repoussés pour des questions de méthode, il nous faut conserver toutes ces idées, qui serviront de base de travail pour nos discussions avec la place bancaire dans les prochains mois.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Je remercie Mme Rouaux, mais je reste favorable à un système universel, alors que son amendement implique le maintien d’un traitement un peu différencié. Je ne suis donc pas favorable à l’amendement CF2.

La commission rejette successivement lamendement CF8 du rapporteur, lamendement CF2 de Mme Claudia Rouaux et lamendement CF9 du rapporteur.

La commission examine, en discussion commune, lamendement CF3 de Mme Claudia Rouaux et lamendement CF10 du rapporteur.

M. Jean-Louis Bricout. L’amendement CF3 vise à demander au CCSF de publier un rapport annuel, sur la base de données agrégées et anonymisées transmises par les établissements de crédit, synthétisant le montant des frais et commissions perçus à raison d’incidents de paiement ou d’irrégularités de fonctionnement d’un compte bancaire et acquittés par des personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels.

Ce rapport devra établir les montants moyens de ces frais et commissions acquittés par opération, par mois et par an, en distinguant les montant moyens pour les personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels en situation de fragilité financière et pour celles qui ne relèvent pas de cette situation.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Votre amendement supprime le volet de contrôle et de transparence présenté à l’article premier qui est pourtant très innovant puisqu’il comprend : la communication non seulement des montants de frais appliqués mais des bénéfices pour les banques après extournes ; la présentation par typologie de clientèle, qui permet de mieux cerner les effets notamment sur les clients en difficulté financière mais également selon d’autres critères ; et la communication à une autorité publique ainsi qu’une publication par chaque banque, ce qui est une garantie supplémentaire de transparence. Vous remplacez ces mesures par un rapport synthétique du CCSF, sur la base de données agrégées transmises par les banques.

Je pense que le CCSF n’est pas le mieux doté pour réaliser ce travail. Le CCSF est d’abord une instance de négociation et de consensus entre parties prenantes. Il réalise déjà chaque année un rapport sur les tarifs bancaires, mais seulement à partir des tarifs publiés en ligne par les banques, et le recueil et l’analyse des données sont d’ailleurs confiés à un cabinet de conseil.

L’article premier confie cette mission à l’ACPR, qui est beaucoup mieux outillée pour analyser les données transmises par les banques et qui dispose d’une compétence de contrôle et de sanction qui dissuadera les banques de fournir des données erronées.

En tout état de cause, l’ACPR pourra recourir aux moyens de l’OIB, qui relève de la Banque de France et qui dispose de compétences de collecte et d’analyse d’informations sur l’accès aux services bancaires.

Lamendement CF3 est retiré.

M. Alexis Corbière, rapporteur. L’amendement CF10 est rédactionnel.

La commission rejette lamendement CF10 du rapporteur.

La commission est saisie de lamendement CF11 du rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Cet amendement vise à maintenir l’obligation pour les banques de réaliser un suivi des clients les plus susceptibles de subir des incidents bancaires, mais en améliorant le dispositif actuel.

La dénomination de « fragilité financière », stigmatisante, est remplacée par celle de « difficulté financière », plus objective.

Il faudra également revoir les critères d’identification des publics concernés, pour favoriser une harmonisation d’ailleurs recommandée par la mission flash de la commission des finances sur l’inclusion bancaire présentée en juin 2019 par notre collègue Philippe Chassaing.

L’amendement prévoit donc une redéfinition de ces critères par décret après concertation avec l’ensemble des acteurs.

Enfin, les banques ne devront plus seulement proposer une offre spécifique restreinte à quelques services de base et à un plafonnement préférentiel pour une part minoritaire des clients : elles devront proposer une offre de service élargie avec un accompagnement de nature à prévenir les incidents ou irrégularités de fonctionnement des comptes bancaires des clients.

M. Daniel Labaronne. Par cet amendement, vous justifiez le fait qu’une démarche ciblée en direction des publics fragiles est requise.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Je fais les deux ! Même si ma réponse est universelle, nous devons indiscutablement nous intéresser à certains de nos concitoyens en difficulté.

M. Philippe Chassaing. Toutes les banques n’utilisent pas forcément les mêmes critères de détection pour repérer les clients fragiles. Un engagement a été pris de manière contractuelle pour que les banques soient obligées de faire connaître leurs critères. Cela permettra d’objectiver les choses et de les rendre opposables d’une certaine manière.

En outre, une cellule constituée au sein de la Banque de France sera susceptible d’apporter des corrections si l’on observe que certaines banques n’appliquent pas les critères de plafonnement.

Je pense qu’il s’agit d’un progrès. Mais il faudra probablement plus fortement encadrer à l’avenir les critères de détection des personnes en situation de fragilité financière. Par ailleurs, leur uniformisation n’est peut-être pas souhaitable, les clientèles des banques n’étant pas tout à fait identiques. Mais un resserrement de ces critères pourra s’avérer nécessaire.

La commission rejette lamendement CF11.

Puis elle rejette larticle 1er.

Après larticle 1er

La commission est saisie de lamendement CF12 du rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Cet amendement prévoit que les banques proposeront systématiquement aux clients en difficulté financière de souscrire un livret d’épargne populaire (LEP), plutôt que des produits d’épargne moins rémunérateurs.

Alors que ces clients sont souvent éligibles au LEP, défiscalisé et rémunéré aujourd’hui au taux de 1 %, l’Observatoire de l’épargne réglementée (OER) a établi dans son rapport annuel publié en juin 2019 que seulement 21 % des individus éligibles détiennent un LEP alors que, parmi les personnes éligibles non détentrices de LEP, la moitié détient un livret A. On sait que le livret A est rémunéré aujourd’hui à 0,5 %, soit 0,5 point de moins que le LEP. Nous pourrons ainsi mettre fin à la double peine des clients dont les revenus sont les plus faibles : non seulement ils se voient appliquer beaucoup plus que les autres des frais d’incidents bancaires, mais leur épargne de précaution est moins bien rémunérée.

M. Charles de Courson. Est-ce du domaine de la loi de dire que les banques doivent proposer l’ouverture d’un compte ? Cela me paraît hors champ. Cela relève de la stratégie bancaire, non du domaine de la loi.

Mme Nadia Hai. C’est du ressort du devoir du conseil. Si l’on oblige la commercialisation de tel ou tel produit, l’on se place en dehors du devoir de conseil de chaque professionnel du secteur bancaire.

Rassurez-vous, monsieur Corbière, lorsqu’un professionnel se trouve face à un client en difficulté, il ne lui propose pas un contrat d’assurance-vie !

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. Je comprends l’amendement du rapporteur, dont l’esprit rejoint un peu ce que nous avions fait dans la loi PACTE pour l’assurance-vie. Il faut parfois forcer l’obligation de proposer un produit donné. Mais cela ne passe pas forcément par la loi.

Lorsque l’on constate que le LEP est sous-exploité alors qu’il présente parfois un meilleur rendement que le livret A, il est intéressant d’avoir une réflexion sur ce produit d’épargne. Je comprends donc la philosophie consistant à inciter davantage les banques à le proposer. Charge ensuite au client de décider ou non d’y souscrire, ce qui se fait de toute façon sous condition de revenu.

M. Jean-Paul Mattei. Concrètement, pour appliquer l’obligation que vous proposez, il faudra faire signer un imprimé prouvant que la banque a bien proposé un LEP. Si cette suggestion est intéressante, elle risque néanmoins d’alourdir encore davantage le formalisme de ce secteur.

Ce problème se retrouve d’ailleurs dans d’autres domaines. De nombreuses mesures de protection manquent ainsi d’efficacité, car trop d’information tue l’information.

M. Daniel Labaronne. Il faudrait sans doute que les agents du secteur bancaire soient mieux formés pour accompagner les publics fragiles.

Il faut effectivement mieux accompagner les publics fragiles dans leurs activités bancaires comme dans leurs activités d’épargne, vous avez raison. Mais cela doit passer par l’engagement, non par la loi. Et les PCB peuvent également jouer un rôle dans ce domaine, en accompagnant les publics fragiles dans leurs démarches d’épargne.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Je vous remercie pour cet échange.

La loi PACTE prévoyait déjà l’obligation de présenter certains contrats, notamment pour des investissements dans des entreprises solidaires. Ce que je propose n’est donc pas totalement nouveau.

Par ailleurs, ma proposition concerne les publics fragiles, avec lesquels s’opère déjà un dialogue renforcé.

La commission rejette lamendement CF12.

La commission est saisie de lamendement CF4 de Mme Claudia Rouaux, qui fait lobjet du sous-amendement CF19 du rapporteur.

Mme Claudia Rouaux. Nous avons bien compris que la majorité voulait privilégier le contrat sur la législation, c’est d’ailleurs sur la base de cet argument que l’article premier n’a pas été adopté. Dont acte.

Cependant, le contrat que vous avez passé avec les collectivités locales sous la forme du pacte de Cahors s’assortissait de sanctions.

Or aucune sanction n’est prévue pour les établissements bancaires qui ne respectent pas leur contrat.

J’ai entendu le ministre de l’économie, le 21 février, prendre des engagements sur le name and shame. L’amendement CF4 vise à traduire ces engagements.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Je suis favorable au name and shame – il faudrait d’ailleurs trouver une autre expression que cet anglicisme pour le désigner – mais je propose de confier cette procédure à l’OIB, sur son site Internet, plutôt qu’à l’administration comme le suggérait votre amendement. C’est l’objet du sous-amendement CF19. Cela me semble plus précis.

Le code monétaire et financier prévoit en effet que l’OIB, dans son rapport annuel, peut décrire et analyser les exemples de bonnes ou de mauvaises pratiques individuelles de certains établissements de crédit.

M. Daniel Labaronne. Le ministre Bruno Le Maire s’est engagé dans cette démarche de name and shame pour les quelques succursales d’établissements bancaires qui n’auraient pas respecté les engagements pris en décembre 2018.

M. Jean-Paul Mattei. Inscrire la liste des établissements visés dans la loi ne risquerait-il pas de ralentir la procédure ? Ne faudrait-il pas plutôt qu’elle reste du domaine du réglementaire ?

M. Alexis Corbière, rapporteur. Il n’est pas question d’inscrire dans la loi la liste des établissements visés par le name and shame. L’OIB, dont c’est la mission, pourrait en revanche se charger de l’établir.

Je ne sais pas d’ailleurs quel processus a prévu le ministre pour la publication de cette liste. Il pourrait être intéressant d’en discuter.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. Le ministre s’exprimera en séance publique le 26 mars sur ce sujet. Ce sera un moment important.

Si nous sommes défavorables à cette proposition de loi, pour les raisons que nous avons évoquées, sachez que le sujet du name and shame est très problématique pour les représentants des banques. Mais nous le défendrons. La position de la majorité n’est pas binaire sur ce point. En revanche, nous ne le défendrons pas en inscrivant cette procédure dans la loi.

La commission rejette le sous-amendement CF19 ainsi que lamendement CF4.

La commission est saisie de lamendement CF13 du rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Cet amendement visait initialement à mentionner le nouveau plafonnement global des frais à l’article du code monétaire et financier qui concerne plus particulièrement la convention de compte de dépôt des personnes physiques agissant pour des besoins professionnels.

Malgré le rejet du nouveau plafonnement global, cet amendement reste pertinent car il permettrait d’appliquer le plafonnement actuel des seules commissions d’intervention (8 euros par opération, 80 euros par mois) aux travailleurs indépendants, qui en sont aujourd’hui exclus.

Je vous propose donc d’adopter cette mesure de bon sens. Ces professionnels sont souvent dans une situation de dépendance financière face aux banques : ils doivent disposer des mêmes protections que les autres consommateurs.

M. Philippe Chassaing. La segmentation entre le ménage et l’activité économique a tendance à s’éroder. Il s’agit d’un sujet important sur lequel nous gagnerions à être davantage documentés avant d’en discuter.

La commission rejette lamendement CF13.

La commission est saisie de lamendement CF14 du rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Aucune sanction pénale n’est prévue aujourd’hui pour le cas où la banque applique des frais pour incidents supérieurs aux plafonds établis par la loi.

Je vous propose de réparer cet oubli en appliquant les contraventions déjà prévues dans les cas où les banques méconnaissent leurs obligations en matière de droit au compte.

Il s’agit de l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe : 1 500 euros au plus, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive.

La commission rejette lamendement CF14.

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Article 2
[Art. L. 162-1 du code des procédures civiles dexécution et L. 262 du livre des procédures fiscales]
Interdiction dapplication de frais dincident bancaires pour les opérations de saisie attribution ou de saisie administrative à tiers détenteur

L’article 2 interdit l’application de frais dincident sur le compte bancaire en cas de recouvrement forcé de créances privées par la procédure de saisie-attribution ou en cas de recouvrement forcé de créances publiques par la saisie administrative à tiers détenteur.

La commission des finances a rejeté cet article.

I. Les banques appliquent des montants ÉlevÉs de frais pour saisie attribution ou saisie administrative A tiers dÉtenteur

● En matière de saisie-attribution, l’article L. 162-1 du code des procédures civiles d’exécution ([31]) autorise le créancier muni d’un titre exécutoire à pratiquer une saisie « entre les mains dun établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôt ». La banque doit alors déclarer le solde des comptes du débiteur au jour de la saisie, puis, dans un délai de quinze jours pendant lequel les sommes laissées au compte sont indisponibles, procéder aux opérations permettant d’exécuter la saisie-attribution.

Larticle D. 312-1-1 du code monétaire et financier ([32]) qui présente la dénomination commune des principaux frais et services bancaires fait ainsi figurer au C. relatif aux « frais et cotisations bancaires », un 17° relatif aux « frais par saisie-attribution », lorsque « le compte est débité des frais bancaires liés à une procédure judiciaire engagée par un créancier pour obtenir une somme qui lui est due ».

La loi ne fixe aucun plafond des frais par saisie-attribution. Selon le comité consultatif des services financiers ([33]), le montant le plus couramment appliqué par les banques en 2018 à ce titre était de 100 euros, jusqu’à un maximum de 132 euros.

Définie à l’article L. 262 du code des procédures fiscales, la saisie administrative à tiers détenteur résulte de l’unification, par l’article 73 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, de différentes procédures de recouvrement forcé des créances publiques qui variaient jusqu’alors selon la nature des créances : avis, opposition ou saisie à tiers détenteur, opposition administrative, saisie de créance simplifiée…

À l’article D. 312-1-1 du code monétaire et financier, précité, le 16° du C. définit ainsi les « frais par saisie administrative à tiers détenteur » comme les frais appliqués lorsque « le compte est débité des frais bancaires liés à une procédure diligentée par un comptable public pour lobtention dune somme qui lui est due » ([34]).

Selon des données, antérieures à cette unification, figurant dans le rapport précité du comité consultatif des services financiers, les banques appliquaient, en 2018, des frais variables selon les procédures concernées, avec, pour la procédure davis à tiers détenteur, l’application fréquente du montant de 100 euros, porté parfois jusqu’à 132 euros.

L’article 73 de la loi de finances rectificative pour 2017 a établi au 5° de larticle L262 du code des procédures fiscales, un plafonnement des frais bancaires afférents à la saisie administrative à tiers détenteur en prévoyant que leur montant « ne peut dépasser 10 % du montant dû au Trésor public, dans la limite dun plafond fixé par décret ».

Ce plafonnement, entré en vigueur le 1er janvier 2019, résulte d’un amendement du rapporteur général du budget Joël Giraud ([35]) qui a appliqué à la nouvelle saisie administrative à tiers détenteur, le plafonnement préexistant de 10 % du montant dû au Trésor public en cas d’opposition administrative pour amendes, et lui a ajouté un plafond en valeur absolue.

Lors de l’examen de cet amendement par la commission des finances, le rapporteur général du budget relevait que « les personnes concernées ont souvent des difficultés financières » et que « les frais bancaires élevés viennent accroître ces difficultés » ([36]) donnant en exemple de recouvrement forcé pour frais de cantine ou de centres de loisirs sans hébergement pour lesquels les frais bancaires sont aussi élevés que les sommes non réglées à la commune.

Le décret n° 2018-1118 du 10 décembre 2018 relatif aux frais bancaires perçus par les établissements de crédit à la suite d’une notification par un comptable public d’une saisie administrative à tiers détenteur a fixé le montant maximum de frais à 100 euros toutes taxes comprises.

Il faut donc constater que le montant du plafond légal ne diffère pas significativement des montants de frais effectivement appliqués par les banques avant lintervention du législateur.

2. L’interdiction d’ajouter des frais bancaires aux coûts des procÉdures d’exÉcution de crÉances publiques ou privÉes

Les banques ne sont donc soumises à aucun plafonnement en cas de saisie-attribution et, en matière d’avis à tiers détenteur, l’intervention du législateur en 2017 a eu pour seul effet d’aligner le droit sur le fait, sans faire obstacle à l’application de frais bancaires jusqu’à 100 euros, sans dépasser 10 % du montant prélevé par le comptable public.

Cette situation est d’autant plus difficile à justifier que l’instauration de la saisie administrative à tiers détenteur a permis de généraliser la dématérialisation des saisies pour créances publiques, réduisant mécaniquement leur coût éventuel pour les banques.

En outre, les prélèvements opérés par le comptable public en cas de saisie administrative à tiers détenteur ne se distinguent pas significativement des autres prélèvements opérés à linitiative de ladministration fiscale et pour lesquels la loi a défini un principe dabsence de frais pour débit sur le compte bancaire :

 à larticle 1724 bis du code général des impôts pour les prélèvements fiscaux qui dispose que « les prélèvements opérés à linitiative de ladministration fiscale pour le paiement des impôts, droits et taxes mentionnés au présent code nentraînent aucun frais pour le contribuable » ([37]) ;

 à larticle L. 312-1-8 du code monétaire et financier pour les créances publiques non fiscales qui prévoit que « les prélèvements au profit des comptables publics et des régisseurs de recettes opérés pour le paiement des produits locaux, des produits divers et des amendes dont ils assurent le recouvrement nentraînent aucuns frais pour le débiteur prélevé. » ([38])

Il ne revient donc pas à la banque de prélever des frais supplémentaires, ni dans les cas de saisies pour créances publiques qui ont déjà pu donner lieu à des majorations de la part de l’administration fiscale, ni dans les cas de saisies pour créances privées, qui ont également pu exposer le débiteur à des pénalités et des frais de la part de ses créanciers.

En conséquence, le I. du présent article complète l’article L. 162-1 du code des procédures civiles d’exécution afin d’établir que la réalisation par un établissement de crédit des opérations destinées à l’exécution d’une saisie-attribution ne donne lieu à aucun frais pour le client.

Le II du présent article remplace, au 5° de l’article L. 262 du livre des procédures fiscales, le plafonnement actuel des frais pour saisie administrative à tiers détenteur par une interdiction d’appliquer des frais à ce titre.

Le rapporteur a invité la commission des finances à adopter cet article moyennant deux amendements rédactionnels tendant à préciser que l’interdiction d’appliquer des frais vise les « prélèvements » pour l’exécution de ces opérations, et non pas seulement leur « facturation ».

Cependant, la commission des finances a rejeté cet article.

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La commission est saisie de lamendement rédactionnel CF15 du rapporteur.

La commission rejette lamendement CF15.

La commission est saisie de lamendement rédactionnel CF16 du rapporteur.

La commission rejette lamendement CF16.

Puis la commission rejette larticle 2.

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Article 3
[Art. L. 312-1-5 du code monétaire et financier]
Application à tous les clients particuliers de la garantie dinformation préalable au prélèvement de frais dincidents sur le compte bancaire

Larticle 3 étend à lensemble des clients particuliers des banques des garanties minimales dinformation préalable au prélèvement de frais dincidents sur le compte bancaire, qui sont aujourd’hui restreintes aux seuls clients n’agissant pas pour des besoins professionnels.

La commission des finances a rejeté cet article.

I.   Les garanties d’information prÉalable au prÉlÈvement des frais d’incidents bancaires diffÈrent selon que le dÉtenteur du compte agit ou non pour des besoins professionnels

● Par application de l’article L. 314-7 du code monétaire et financier, les banques sont tenues, en tant que « prestataires de services de paiement », dadresser une information minimale gratuite sur leurs services à lensemble de leurs clients qualifiés d« utilisateurs de services de paiement » ([39]). Cette obligation comprend :

– pour lensemble des clients, sans distinction entre personnes physiques et personnes morales ou entre motifs d’utilisation du compte bancaire par les personnes physiques, la communication gratuite dune plaquette tarifaire, applicable depuis le 1er novembre 2009 ;

– pour « les personnes physiques et les associations », depuis le 1er janvier 2009, un récapitulatif annuel gratuit, chaque mois de janvier, indiquant lensemble des sommes perçues pour des services de paiement ou des services liés à la convention de compte de dépôt, et qui comprend, le cas échéant, les intérêts perçus au titre d’une position débitrice de ce compte ([40]).

Face aux constats de pratiques hétérogènes des banques et afin d’apporter des garanties de transparence et de lisibilité des plaquettes tarifaires ou du récapitulatif annuel, l’article 67 de la loi du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires a prévu, au V. de l’article L. 314-7 du code monétaire et financier, l’établissement par décret d’une dénomination commune des principaux frais et services bancaires, détaillée par l’article D. 312-1-1 ([41]).

● En outre, à l’article L. 312-1-5 du code monétaire et financier, l’article 66 de la loi du 26 juillet 2013 a établi des garanties supplémentaires d’information préalable sur les frais bancaires liés à des irrégularités et incidents :

 une information mensuelle, gratuite et détaillée, figurant sur le relevé de compte et indiquant les montants et dénominations « des frais bancaires liés à des irrégularités et incidents que létablissement entend débiter » ;

 un délai minimum de quatorze jours après la date d’arrêté de ce relevé de compte avant que la banque ne procède au débit des frais bancaires.

Le décret n° 2014-739 du 30 juin 2014 relatif à l’information préalable du consommateur en matière de frais bancaires a établi, à l’article R. 312-1-2 du code monétaire et financier, la liste des frais qui ne peuvent être débités sans information préalable dans le relevé de compte mensuel :

1° Les frais d’opposition (blocage) de la carte par la banque ;

2° Les frais de lettre d’information préalable pour chèque sans provision ;

3° Les frais de lettre d’information pour compte débiteur non autorisé ;

4° Le forfait de frais par chèque rejeté pour défaut de provision ;

5° Les frais de rejet de prélèvement pour défaut de provision ;

6° Les frais par avis à tiers détenteur ;

7° Les frais par opposition à tiers détenteur ;

8° Les frais par saisie-attribution ;

9° Les frais par opposition administrative ;

10° Les frais par virement occasionnel incomplet ;

11° Les frais de non-exécution de virement permanent pour défaut de provision ;

12° Les commissions d’intervention ;

13° Les frais suite à la notification signalée par la Banque de France d’une interdiction pour le client d’émettre des chèques ;

14° Les frais pour déclaration à la Banque de France du retrait de carte bancaire.

● Cependant, le premier alinéa de larticle L. 312-1-5 réserve cette information gratuite préalable à tout prélèvement aux « personnes physiques nagissant pas pour des besoins professionnels » : les banques ne sont donc pas tenues aux mêmes obligations lorsqu’elles prélèvent des frais d’incidents bancaires sur les comptes professionnels détenus par des personnes physiques.

Pour les personnes physiques agissant pour des besoins professionnels, l’article L. 312-1-6 du code monétaire et financier, établi par l’article 59 de la loi du 26 juillet 2013, prévoit seulement une « convention écrite entre le client et son établissement de crédit ».

Un arrêté du 1er septembre 2014 relatif à la convention de compte de dépôt pour les personnes physiques agissant pour des besoins professionnels en définit les principales stipulations, et prévoit notamment des garanties d’accès à la médiation, mais ne fixe aucune obligation dinformation préalable ou de délai de prévenance avant prélèvement de frais dincidents sur le compte.

II.   L’extension aux comptes des travailleurs indÉpendants et micro-entrepreneurs de l’obligation d’information gratuite prÉalable à tout prÉlÈvement de frais d’incidents bancaires

La catégorie des clients « personnes physiques agissant pour des besoins professionnels » comprend 3 millions d’entreprises individuelles, relevant, aux deux tiers, de travailleurs indépendants et, pour un tiers, de micro-entrepreneurs.

Dans leur écrasante majorité, ces clients particuliers se trouvent, face aux banques, dans la même situation de dépendance que les clients non professionnels. Aucune différence de situation ne justifie que le législateur leur refuse les mêmes garanties d’information préalable à l’application de frais d’incident sur le compte bancaire.

L’alinéa 2 du présent article supprime donc, à l’article L. 312-1-5 du code monétaire et financier, la restriction aux « personnes physiques nagissant pas pour des besoins professionnels » de l’obligation d’information gratuite préalable au prélèvement. En conséquence, les clients personnes physiques devront bénéficier des mêmes informations sur les frais d’incidents sur leurs comptes professionnels que pour leurs comptes personnels : la mention, sur le relevé mensuel de compte, des frais d’incidents que la banque envisage de prélever, avec un délai minimal de prévenance de quatorze jours avant le débit du compte.

L’alinéa 3 du présent article supprime par ailleurs le délai d’entrée en vigueur, fixé, en 2013, à dix-huit mois après la publication du décret d’application. Ce délai visait à laisser le temps aux établissements teneurs de compte d’opérer les modifications de leurs systèmes d’information offrant toutes les conditions de fiabilité ([42]).

Outre que cette précision est désormais obsolète, le rapporteur observe qu’il ne paraît pas nécessaire d’accorder un nouveau délai de mise en œuvre, l’extension à trois millions de clients supplémentaires des garanties d’informations applicables désormais à plusieurs dizaines de millions de comptes particuliers ne présentant pas, pour les banques, les mêmes enjeux techniques que leur mise en place initiale.

Le rapporteur a donc invité la commission des finances à adopter cet article sans modification.

Cependant, la commission des finances a rejeté cet article.

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La commission rejette larticle 3.

 

Après larticle 3

La commission est saisie de lamendement CF18 du rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Les missions de l’Observatoire de l’inclusion bancaire (OIB) sont restreintes à l’accès aux services bancaires des personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels.

Suivant la logique qui sous-tend l’ensemble de la proposition de loi, je vous propose de mettre fin à cette distinction, de moins en moins adaptée à la situation réelle des travailleurs indépendants et des micro-entrepreneurs.

Cet amendement vise également à donner plus de poids aux travaux de l’OIB en fixant au niveau législatif une partie de sa composition.

Je vous propose d’inscrire dans la loi, la présence de représentants des associations œuvrant dans le domaine de la lutte contre la pauvreté et de l’exclusion sociale, des associations de consommateurs et des associations familiales, dont la participation est prévue aujourd’hui seulement par décret ainsi que celle de représentants syndicaux des personnels des banques – ce qui garantira que l’OIB dispose de toutes les informations sur la manière dont les banques orientent concrètement le travail des conseillers, au contact direct des clientèles – et celle d’un député et d’un sénateur.

Cela alignerait la composition de l’OIB sur celle du Comité consultatif des services financiers (CCSF), qui comprend déjà des parlementaires parmi ses membres. Leur participation, non rémunérée, apportera des garanties supplémentaires que les travaux de l’Observatoire seront entendus et que ses préconisations seront mises en œuvre.

La commission rejette lamendement CF18.

La commission est saisie de lamendement CF17 du rapporteur.

M. Alexis Corbière, rapporteur. Le CCSF a notamment pour mission de rendre un rapport annuel sur les tarifs bancaires, mais le champ de ce rapport est aujourd’hui restreint aux clients personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels.

Je vous propose de supprimer cette restriction. Cela permettra au Comité de présenter des avis sur ce sujet, issus de la concertation de l’ensemble de ses membres, alors qu’aujourd’hui seule sa présidente peut, à titre personnel, présenter des rapports sur l’accès des travailleurs indépendants aux services bancaires et financiers.

Je propose également que le rapport sur les tarifs bancaires présente un état des lieux plus qualitatif sur l’action des banques pour prévenir les incidents ou irrégularités de fonctionnement des comptes.

Enfin, je vous propose d’inscrire dans la loi la participation de représentants syndicaux des personnels des banques, aujourd’hui prévue seulement par décret, contrairement à la participation des représentants des banques et des clientèles qui figure déjà dans la loi.

Il s’agit d’une garantie que le CCSF disposera de toutes les informations sur la manière dont les banques orientent concrètement le travail des conseillers, au contact direct des clientèles.

M. Éric Coquerel. Je salue l’excellente proposition de loi portée par M. Alexis Corbière. Le scandale des frais facturés par les banques dès lors que quelqu’un rencontre le moindre problème est une plaie quotidienne pour des millions de Français. C’est le genre de proposition de loi que l’on s’honore donc à présenter.

La commission rejette lamendement CF17.

Lensemble des articles de la proposition de loi ayant été rejeté, le texte est considéré comme rejeté par la commission.

M. le président Éric Woerth. Je tiens aussi à remercier le rapporteur pour ce texte. Il a fait l’objet d’un débat très intéressant qui se poursuivra en séance. Le ministre pourra préciser à cette occasion plusieurs éléments de l’accord-cadre passé avec les banques.

Je suis favorable également aux accords-cadres plutôt qu’à la législation, souvent contournée. Mais cela demande évidemment de nombreux contrôles.

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   Liste des personnes auditionnÉes par le rapporteur

 

 Audition commune dassociations :

– UFC Que choisir * : M. Matthieu Robin, chargé de mission banque et assurance, et M. Damien Barbosa, chargé de mission relations institutionnelles

– INC 60 millions de consommateurs *: Mme Stéphanie Turquin, économiste

– Union nationale des associations familiales (UNAF) : Mme Soisic Rivoalan, chargée de mission au pôle économie consommation

 

 Comité consultatif du secteur financier (CCSF) : Mme Corinne Dromer, présidente et M. Jean-Marc Lherm, secrétaire général adjoint

 

 

 Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) : M. Frédéric Visnovsky, secrétaire général adjoint, et secrétariat général du comité consultatif de la législation et de la réglementation financière, et Véronique Bensaïd-Cohen, conseillère auprès du Gouverneur de la Banque de France

 

 

 Ministère de léconomie et des finances, direction générale du Trésor, sousdirection des banques et des financements dintérêt général  BANCFIN : MM. Jérôme Reboul, sous-directeur, Arnaud Delaunay, chef de bureau des services bancaires et des moyens de paiement, Mme Céline Brezillon, adjointe au chef de bureau, et M. Paul Capocci, adjoint au chef de bureau

 

 

 Fédération bancaire française *: M. Benoit de la Chapelle Bizot, directeur général par intérim, M. Pierre Bocquet, directeur du département banque de détail et M. Nicolas Bodilis-Reguer, directeur des relations institutionnelles

 

 

 

 

* Ce représentant dintérêts a procédé à son inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique


([1]) Amendement n° 598 du Gouvernement de suppression de l’article 6 ter en première lecture à l’Assemblée nationale http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/amendements/2905/AN/598.

([2]) Établie, à l’article L. 131-73 du code monétaire et financier par l’article 15 de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier.

([3]) Décret n° 2014-373 du 27 mars 2014 relatif à la dénomination commune des principaux frais et services bancaires.

([4]) Comité consultatif des services financiers, Rapport annuel de l’Observatoire des frais bancaires, octobre 2019, 91 p.

([5]) Union nationale des associations familiale (UNAF) et Institut national de la consommation (INC), Enquête sur les frais d’incidents bancaires : Pratiques actuelles et conséquences Propositions pour lutter contre l’exclusion bancaire, novembre 2017, p. 20 et p. 44 https://www.unaf.fr/IMG/pdf/etude_complete-frais_incidents_unaf_final.pdf.

([6]) UNAF et INC, op. cit. p. 37.

([7]) Avec plus de 4,5 milliards de prélèvements en 2019.

([8]) UNAF et INC, op. cit. p. 44.

([9]) Article L. 131-73 du code monétaire et financier tel qu’issu des articles 15 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier et 70 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

([10]) Article L. 312-1-3 du code monétaire et financier établi par l’article 52 de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires.

([11])  UNAF et INC, op. cit. p. 38.

([12]) CCSF, Rapport sur les frais d’incidents bancaires, juillet 2018. p. 9.

([13]) Cour des comptes, Communication à la commission des finances du Sénat, juillet 2017. Les politiques publiques en faveur de l’inclusion bancaire et de la prévention du surendettement. p. 37-43. http://www.senat.fr/rap/r16-638/r16-638-annexe.pdf.

([14]) Article R. 312-4-3 du code monétaire et financier créé par le décret n° 2014-738 du 30 juin 2014 relatif à l'offre spécifique de nature à limiter les frais en cas d’incident.

([15]) Philippe Chassaing, Rapport d’information, en conclusion des travaux d’une mission d’information relative à l’inclusion bancaire, juin 2018, p. 32 http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_fin/l15b2074_rapport-information.

([16]) Myriam Roussille, « Loi SRAB : incidences sur les relations des banques avec leur clientèle », La Semaine juridique entreprise et affaires (JCP E) 2013, n° 48, 28 novembre 2013, 1 661, n° 17., cité par Corinne Dromer, Rapport du Président du CCSF, Les relations bancaires et financières d’un particulier devenant travailleur indépendant, février 2018, p. 3.

([17]) UNAF, INC, op. cit. p. 35 à 37.

([18]) Assemblée nationale, compte rendu intégral des séances du jeudi 14 février 2013, page 1805 http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/cri/2012-2013/20130148.pdf.

([19]) Le PEA est défini à l’article L. 221-32 du code monétaire et financier et le PEA-PME à l’article L. 221-32-1.

([20]) UNAF, UFC Que Choisir, Familles rurales, La CGT Fédération Banques et Assurances, Communiqué de presse commun, 3 juillet 2018- Frais d’incidents bancaires : il faut des réponses à la hauteur des enjeux ! https://www.unaf.fr/IMG/pdf/cp_commun-frais_bancaires-final.pdf.

([21])  Article 1er du décret n° 2002-694 du 30 avril 2002 relatif au plafonnement des frais bancaires applicables aux chèques sans provision d'un montant inférieur à 50 euros, codifié à l’article D. 131-25 du code monétaire et financier par le décret n° 2005-1007 du 2 août 2005 relatif à la partie réglementaire code monétaire et financier.

([22]) Décret n° 2007-1611 du 15 novembre 2007 relatif au plafonnement des frais bancaires applicables aux incidents de paiement.

([23]) Article 1er de l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement.

([24]) Décret n° 2009-934 du 29 juillet 2009 pris pour l'application de l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement.

([25]) Décret n° 2013-931 du 17 octobre 2013 relatif au plafonnement des commissions d'intervention.

([26]) Procédure instaurée par l’article 58 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit.

([27])  Article 4 du décret n° 85-944 du 4 septembre 1985 relatif au calcul du taux effectif global.

([28])  Montant fixé à 400 euros par l’arrêté, modifié, du 16 septembre 1986 pris en application du décret n° 85‑944 du 4 septembre 1985 relatif au calcul du taux effectif global.

([29])  Article 15 de la loi n° 2001‑1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier.

([30])  Il s’agit de la peine d’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe : 1 500 euros au plus, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive.

([31])  Article 47 n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution, établi à l’article L. 162-1 du code des procédures civiles d’exécution par l’ordonnance n° 2011-1895 du 19 décembre 2011 relative à la partie législative du code des procédures civiles d'exécution.

([32])  Décret n° 2014-373 du 27 mars 2014 relatif à la dénomination commune des principaux frais et services bancaires.

([33])  CCSF, Rapport sur les frais bancaires, juillet 2018, p. 11.

([34])  Article 1er du décret n° 2018-1175 du 18 décembre 2018 pris en application de l'article L. 262 du livre des procédures fiscales relatif à la saisie administrative à tiers détenteur.

([35])  Amendement n° 359 de M. Joël Giraud au nom de la commission des finances http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/amendements/0384/AN/359.

([36])  Assemblée nationale, Rapport n° 432 sur le projet de loi de finances rectificative pour 2017, p. 610 http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_fin/l15b0432_rapport-fond.pdf.

([37])  Principe figurant antérieurement à l’article 1681 D du code général des impôts et précisé par l’article 19 de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013 à l’occasion de l’entrée en vigueur de la norme SEPA de l’espace unique de paiement en euros.

([38])  Article 37 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives.

([39])  Article 5 de l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement.

([40])  Établie à l’article L. 312-1-1 du code monétaire et financier par l’article 24 de la loi n° 2008-3 du 3 janvier. 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, l’obligation de communiquer un récapitulatif annuel des frais a été transférée à l’article L. 314-7 par l’article 5 de l’ordonnance précitée du 15 juillet 2009.

([41])  Décret n° 2014-373 du 27 mars 2014 relatif à la dénomination commune des principaux frais et services bancaires.

([42])  Avis du 28 janvier 2014 du comité consultatif du secteur financier sur le dispositif, soumis à consultation publique, d’information préalable de la clientèle https://www.ccsfin.fr/sites/default/files/medias/documents/avis-dispositif-soumis-consultation-publique-information-prealable-de-la-clientele.pdf.