N° 278

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2017

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE LADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI (n° 235)
de finances pour 2018

TOME V

JUSTICE

JUSTICE ET ACCÈS AU DROIT

PAR Mme Laetitia AVIA

Députée

——

 

 Voir le numéro : 273-III-29


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les réponses au questionnaire budgétaire devaient parvenir à la rapporteure pour avis au plus tard le 10 octobre 2017 pour le présent projet de loi de finances. À cette date, 30 % des réponses attendues étaient parvenues à votre rapporteure.

 

 


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SOMMAIRE

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 Pages

INTRODUCTION............................................ 5

PremiÈre partie : les crÉdits pour 2018 de la justice et de laccÈs au droit

I. Les crÉdits en faveur de la justice en progression de plus de 5 %

A. La conduite et le pilotage de la politique de la justice

1. Une hausse des crédits pour lancer le plan de transformation numérique

2. Lévolution des effectifs

B. La justice judiciaire

1. Une progression des moyens destinée à améliorer le fonctionnement des juridictions

2. L’évolution des effectifs

C. Le Conseil supÉrieur de la magistrature

II. Le budget pour laccÈs au droit et À la justice en hausse de 8,7 %

A. Laide juridictionnelle

B. LaccÈs au droit et le rÉseau judiciaire de proximitÉ

C. Laide aux victimes

D. La mÉdiation familiale et les espaces de rencontre

Seconde partie : LaccÈs au droit et À la justice dans les litiges civils du quotidien À faible enjeu financier

I. un accÈs au droit perfectible

A. Les conseils dÉpartementaux de laccÈs au droit

B. Les maisons de la justice et du droit

II. la conciliation comme prÉalable obligatoire À la saisine du tribunal dinstance

A. le dÉveloppement dune procÉdure…

B. qui nÉcessite des moyens humains et financiers supplÉmentaires

III. pour un accÈs numÉrique À la justice

A. La dÉmatérialisation du traitement de laide juridictionnelle

B. la mise en place dune procÉdure numÉrique, simple et rapide, pour les litiges de la vie courante

examen en commission

personnes entendues

DÉPLACEMENTs EFFECTUÉs


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MESDAMES, MESSIEURS,

Alors que la garde des Sceaux devrait présenter au premier semestre 2018 une loi de programmation pour la justice, le premier budget du quinquennat apparaît comme un budget de transition.

Confortant la volonté du Gouvernement d’une remise à niveau des moyens de la justice, la mission « Justice » devrait voir sa dotation, à périmètre constant, progresser de 3,9 % pour atteindre 8 739 millions d’euros en crédits de paiement. Les autorisations d’engagement devraient s’établir à 9 029 millions d’euros.

Le présent avis porte sur la justice et l’accès au droit, c’est-à-dire sur les crédits des programmes « Justice judiciaire », « Conduite et pilotage de la justice », « Conseil supérieur de la magistrature » et « Accès au droit et à la justice » de la mission « Justice » ([1]).

Les moyens consacrés à la justice et à l’accès au droit devraient fortement progresser en 2018, tant en crédits de paiement, qui s’établiraient à 4 324 millions d’euros (+ 5,5 %), qu’en autorisations d’engagement, qui s’élèveraient à 4 664,7 millions d’euros (+ 11,3 %). Ce budget devrait permettre de financer trois priorités : la mise à niveau des moyens des juridictions, la transformation numérique du ministère comme préalable à la transformation numérique de la justice et l’amélioration de l’accès au droit et à la justice pour les plus démunis.

Par ailleurs, 1 000 emplois supplémentaires sont prévus en 2018, dont 228 sont destinés aux services judiciaires. 148 emplois seront créés dans les juridictions, afin de résorber les vacances d’emplois de magistrat et de renforcer leurs équipes. 80 emplois seront créés au secrétariat général du ministère, dont 50 pour mettre en œuvre le plan de transformation numérique.

Après une présentation des crédits prévus pour l’année prochaine, votre rapporteure pour avis a choisi cette année de mettre en lumière le plan de transformation numérique du ministère de la Justice qui doit permettre de passer de l’âge informatique à l’ère numérique et de s’intéresser à l’accès au droit et à la justice dans le cadre des litiges civils de la vie courante, c’est-à-dire ceux qui, en matière de consommation ou entre particuliers, font l’objet d’une demande inférieure ou égale à 4 000 euros. Représentant de l’ordre de 80 000 affaires nouvelles par an, ces litiges, auparavant dévolus aux juridictions de proximité, entrent, depuis le 1er juillet 2017, dans le champ de compétence des tribunaux d’instance.

Améliorer le traitement de ces litiges du quotidien suppose de développer l’accès du justiciable à la connaissance de ses droits, d’encourager les modes alternatifs de règlement des litiges, comme la conciliation, et de mettre en place une procédure numérique, plus simple et plus rapide.


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   PremiÈre partie : les crÉdits pour 2018 de la justice et de l’accÈs au droit

Les moyens consacrés à la justice et à l’accès au droit devraient fortement progresser en 2018, tant en crédits de paiement, qui s’établiraient à 4 324 millions deuros (+ 5,5 %), qu’en autorisations d’engagement, qui s’élèveraient à 4 664,7 millions deuros (+ 11,3 %).

Le détail des évolutions de crédits par programme est retracé dans les tableaux suivants.

lÉvolution des crÉdits de paiement

(en millions deuros)

Programme

LFI
2017

PLF
2018

Variation
2018/2017

Justice judiciaire

3 315,2

3 446,5

+ 3,9 %

Conduite et pilotage de la politique de la justice

377,0

434,6

+ 15,3 %

Conseil supérieur de la magistrature

4,5

4,8

+ 4,9 %

Accès au droit et à la justice

403,1

438,2

+ 8,7 %

lÉvolution des autorisations dengagement

(en millions deuros)

Programme

LFI
2017

PLF
2018

Variation
2018/2017

Justice judiciaire

3 421,4

3 450,0

+ 0,8 %

Conduite et pilotage de la politique de la justice

361,4

772,0

+ 113,6 %

Conseil supérieur de la magistrature

3,8

4,5

+ 19,5 %

Accès au droit et à la justice

403,1

438,2

+ 8,7 %

1 000 emplois supplémentaires sont prévus en 2018, dont 228 sont destinés aux services judiciaires :

– 148 emplois seront créés dans les juridictions, dont 100 emplois de magistrats. Ils ont vocation à résorber les vacances d’emplois de magistrat et à renforcer les équipes qui les entourent par le recrutement de greffiers et de juristes assistants ;

– 80 emplois seront créés au secrétariat général essentiellement pour mettre en œuvre un vaste plan de transformation numérique du ministère (50 équivalents temps plein – ETP). Ils permettront également d’assurer la gestion du contrat de partenariat public privé du tribunal de Paris dans le quartier des Batignolles (15 ETP) et la montée en puissance de l’Agence nationale des techniques d’enquêtes numériques judiciaires (ANTEN‑J) en charge des interceptions judiciaires (15 ETP).

I.   Les crÉdits en faveur de la justice en progression de plus de 5 %

En 2018, les moyens destinés au fonctionnement de la justice, qui sont inscrits au sein des programmes « Justice judiciaire », « Conduite et pilotage de la justice » et « Conseil supérieur de la magistrature », devraient progresser de 5,1 % pour atteindre 3 885,8 millions deuros en crédits de paiement et de 11,6 % pour sétablir à 4 226,5 millions deuros en autorisations dengagement.

Cette évolution traduit la priorité accordée aux moyens des juridictions, avec une augmentation de leurs dotations de fonctionnement de 35,1 millions d’euros, une progression de 46,7 millions d’euros des crédits consacrés à l’investissement immobilier judiciaire et un effort sans précèdent en faveur de la transformation numérique du ministère (+ 27,4 millions d’euros).

A.   La conduite et le pilotage de la politique de la justice

Placé sous la responsabilité du secrétaire général du ministère de la Justice, le programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice » a une double finalité : d’une part, il vient en appui des directions du ministère pour les compétences d’intérêt commun qui méritent d’être mutualisées (l’action sociale, l’informatique, la statistique et les études, notamment) et, d’autre part, il regroupe les moyens des services centraux de la Chancellerie et des opérateurs relevant du ministère (notamment l’Agence publique pour l’immobilier de la justice et l’Établissement public du palais de justice de Paris).

1.   Une hausse des crédits pour lancer le plan de transformation numérique

Ce programme représenterait 772 millions deuros en autorisations dengagement, soit plus du double par rapport à 2017, et 434,6 millions deuros en crédits de paiement, en hausse de 15,3 %.

► La forte progression des autorisations d’engagement et des crédits de paiement ainsi prévue résulte, à titre principal, du lancement, en 2018, du vaste plan de transformation numérique du ministère. Parmi les 544 millions d’euros en engagements et 191 millions d’euros en paiements prévus au titre des dépenses en matière d’informatique devraient ainsi être mobilisés :

– 121,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et 30,5 millions d’euros en crédits de paiement pour le projet de plateforme nationale des interceptions judiciaires ;

– 61,5 millions d’euros pour la maintenance des matériels et des réseaux informatiques ;

– 449,5 millions d’euros en engagements et 96 millions d’euros en paiements pour le plan de transformation numérique du ministère.

Prévu pour cinq ans, ce plan repose sur trois priorités :

– ladaptation des réseaux et des outils de travail (accroissement des capacités de traitement des serveurs nationaux, développement des outils de communication mobiles sécurisés, renforcement de la visioconférence, passage progressif à la téléphonie sous IP) ;

– le développement de plusieurs projets applicatifs (dématérialisation de la chaîne civile – projet Portalis –, dématérialisation de la chaîne pénale autour du développement des fonctionnalités de Cassiopée, refonte de l’application du casier judiciaire, dématérialisation de l’aide juridictionnelle, open data des décisions juridictionnelles, développement du portail numérique en détention, déploiement du système d’information du renseignement pénitentiaire, rénovation du système d’information de la police judiciaire de la jeunesse, adaptation des systèmes d’information de la Chancellerie) ;

– laccompagnement et le soutien apporté tant aux usagers internes (assistance, soutien de proximité) qu’aux utilisateurs externes, en particulier ceux ne maîtrisant pas les nouvelles technologies.

Ce plan de transformation numérique devrait trouver des prolongements dans la mission relative à la transformation numérique, qui a été confiée par la garde des Sceaux, le 6 octobre 2017, à MM. Jean-François Beynel et Didier Casas. Ces derniers devraient rendre leurs conclusions le 15 janvier 2018.

► Des moyens supplémentaires sont également prévus pour l’action sociale à destination des personnels du ministère, qui devrait bénéficier d’une dotation de 40,6 millions d’euros, en augmentation de 9,3 % par rapport à 2017. Cette action regroupe les rémunérations des agents qui concourent à la mise en œuvre des politiques d’action sociale ainsi que les crédits (25 millions d’euros) en faveur de l’action sociale ministérielle (protection sociale complémentaire, services médico-sociaux, restauration collective, Fondation d’Aguesseau, logement social et petite enfance). La hausse de moyens inscrits dans le projet de loi de finances est notamment destinée à la prise en charge de la petite enfance et à la restauration collective.

► Les crédits destinés à la gestion de ladministration centrale, c’est-à-dire les services d’administration centrale, les neuf délégations interrégionales placées sous l’autorité du secrétaire général ainsi que l’Agence publique pour l’immobilier de la justice (APIJ) et l’Établissement public du palais de justice de Paris (EPPJP), devraient s’élever à 130,2 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 146 millions d’euros en crédits de paiement.


Alors que le ministère de la Justice a achevé, en 2017, le regroupement de ses services centraux sur deux sites – le parc du Millénaire et la place Vendôme –, des moyens supplémentaires sont prévus en 2018, d’une part pour l’extension des locaux de l’administration centrale pour faire face à la croissance des effectifs et, d’autre part, pour la poursuite de la sécurisation des sites.

2.   L’évolution des effectifs

80 emplois devraient être créés pour conduire le plan de transformation numérique (50 ETP), accompagner la montée en puissance de l’agence nationale des techniques d’enquêtes numériques judiciaires en charge des interceptions judiciaires (15 ETP) et constituer l’équipe de gestion du contrat de partenariat public privé du tribunal de Paris à Batignolles (15 ETP).

Le plafond d’emplois du programme devrait s’établir à 2 286 équivalents temps plein annuel travaillé (ETPT), en progression de 129 ETPT par rapport à 2017.

B.   La justice judiciaire

Placé sous la responsabilité du directeur des services judiciaires, le programme « Justice judiciaire » regroupe les crédits nécessaires au fonctionnement de la justice civile, pénale, commerciale et sociale. Il concerne les magistrats et les agents des services judiciaires (fonctionnaires et contractuels), ainsi que les juges non professionnels bénévoles ou rémunérés à la vacation (juges consulaires, conseillers prud’hommes, magistrats exerçant à titre temporaire, assesseurs des tribunaux pour enfants, etc.), assistants et agents de justice, déployés dans les juridictions judiciaires.

Au 1er janvier 2018, les juridictions de l’ordre judiciaire comprendront la Cour de cassation, 36 cours d’appel, le tribunal supérieur d’appel de Saint-Pierre-et-Miquelon, plus d’un millier de juridictions du premier degré, dont 168 tribunaux de grande instance (TGI) et tribunaux de première instance, 304 tribunaux d’instance, 134 tribunaux de commerce, 210 conseils de prud’hommes ainsi que les 239 tribunaux des affaires sociales, tribunaux du contentieux de l’incapacité et commissions départementales d’aide sociale, qui ont vocation à être intégrés dans les pôles sociaux des tribunaux de grande instance au 1er janvier 2019.

Le 6 octobre 2017, la garde des Sceaux a confié à MM. Philippe Houillon et Dominique Raimbourg la mission de mener une concertation avec l’ensemble des acteurs de la justice et les élus sur l’adaptation de l’organisation judiciaire autour des principes de proximité, d’efficacité et de spécialisation du service public de la justice, tout en préservant le maillage actuel des juridictions. Leurs conclusions sont attendues pour le 15 janvier 2018.

1.   Une progression des moyens destinée à améliorer le fonctionnement des juridictions

Avec une dotation de 3,45 milliards deuros, le programme « Justice judiciaire » progresserait de 0,8 % en autorisations dengagement et de 3,9 % en crédits de paiement par rapport à 2017.

► Les crédits destinés au traitement et au jugement des contentieux civils, qui recouvrent les dépenses de personnel et les frais de justice des juridictions civiles, commerciales et sociales, devraient progresser de 3,7 % pour s’établir à 1 003,2 millions d’euros, dont 54 millions d’euros au titre des frais de justice.

► Les crédits destinés à la conduite de la politique pénale et au jugement des affaires pénales, qui englobent les dépenses de personnel et les frais de justice des juridictions pénales, progresseraient de 3,2 % pour s’élever à 1 207,3 millions d’euros, dont 414,3 millions d’euros au titre des frais de justice.

► Les moyens humains permettant à la Cour de cassation de remplir sa mission se stabiliseraient à 50,5 millions d’euros (+ 0,2 %).

► L’ensemble des moyens humains permettant le fonctionnement du casier judiciaire national ainsi que ses frais de justice s’établiraient à 12,3 millions d’euros, en augmentation de 4,3 %.

► La dotation destinée à couvrir les dépenses de personnel, les dépenses de fonctionnement courant des juridictions et les dépenses dinvestissement relatives aux bâtiments judiciaires ainsi que la subvention versée au Conseil national des barreaux devrait s’établir à 986 millions d’euros en engagements et 972,5 millions d’euros en paiements.

Les dépenses de personnel devraient s’élever à 391,7 millions d’euros.

Les moyens de fonctionnement des juridictions devraient progresser de 8 % en engagements et de 7 % en paiements pour atteindre, respectivement, 400,9 millions et 381,3 millions d’euros. Il s’agit notamment de permettre l’adaptation du réseau judiciaire, l’intégration des tribunaux des affaires sociales et des tribunaux du contentieux de l’incapacité au sein des tribunaux de grande instance ainsi que le déménagement et l’installation du palais de justice de Paris sur le site des Batignolles.

Les dépenses d’investissement devraient s’élever à 192,2 millions d’euros en engagements et à 198,3 millions d’euros en paiements, afin notamment d’assurer la sécurité et l’accessibilité des palais de justice, la première phase des travaux du palais de justice historique de Paris, le lancement des études relatives à la construction d’un palais de justice à Saint-Laurent-du-Maroni, l’adaptation du réseau judiciaire, le financement des loyers des partenariats public-privé des nouveaux palais de justice de Caen et de Paris, la livraison des palais de justice de Pointe-à-Pitre et de Saint-Malo ainsi que l’extension de la cour d’appel de Douai et l’opération de Cayenne.

La subvention destinée au Conseil national des barreaux pour assurer la formation des élèves avocats devrait s’établir à 1,1 million d’euros.

► L’ensemble des moyens humains et budgétaires permettant d’assurer la formation initiale et continue des magistrats et fonctionnaires des greffes progresserait de 7,9 % pour atteindre 163,1 millions d’euros. La dotation prévue pour l’École nationale de la magistrature devrait s’élever à 33,1 millions d’euros.

La hausse des moyens de formation a notamment pour objectif de développer la formation « régionalisée » au travers de la prise en charge des frais de déplacement et d’hébergement des 10 000 nouveaux conseillers prud’homaux qui devront suivre, à compter du 1er janvier 2018, la formation initiale obligatoire prévue par la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (2,6 millions d’euros), de la couverture des frais de déplacement des juges consulaires pour la formation initiale des nouveaux juges (0,8 million d’euros) et du plan de formation des correspondants locaux informatiques et des responsables de la gestion informatique (0,5 million d’euros).

► Les crédits de personnels destinés à laccès au droit et à la justice (bureaux d’aide juridictionnelle, maisons de justice et du droit, etc.) devraient augmenter, pour s’élever à 27,6 millions d’euros.

2.   L’évolution des effectifs

Le plafond d’emplois est fixé, en 2018, à 33 327 ETPT, soit une augmentation de 579 ETPT par rapport au plafond d’emploi autorisé pour 2017.

En 2018, 148 créations demplois sont prévues dans les juridictions, dont 100 emplois de magistrats. Ils permettront de résorber les vacances d’emplois de magistrat et de renforcer l’équipe autour du magistrat grâce au recrutement de greffiers et de juristes assistants.

Cette création nette d’emplois à hauteur de 148 équivalents temps plein résulte :

– d’une part, d’une économie de 183 emplois permise par la mise en œuvre de certaines dispositions de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle (47 emplois de magistrats, 28 emplois de greffiers et 108 emplois d’adjoints administratifs) ([2]) ;

– d’autre part, de la création de 331 emplois (147 emplois de magistrats, 48 emplois de juristes assistants et 136 emplois de greffiers).

Ces 331 nouveaux emplois se répartissent de la manière suivante :

– 173 emplois pour l’amélioration des délais de traitement et la résorption des vacances de postes ;

– 98 emplois pour le renforcement des équipes autour des magistrats dont 50 emplois de greffiers pour l’assistance des magistrats du parquet et 48 emplois de juristes assistants pour le renforcement de l’équipe juridictionnelle des magistrats ;

– 60 emplois au titre des nouvelles mesures législatives, se divisant, d’une part, en 47 emplois de magistrats pour l’accompagnement de la réforme statutaire du juge des libertés et de la détention ([3]) et, d’autre part, 13 emplois de greffiers au titre de la généralisation de l’audition de l’enfant, de l’indemnisation des victimes, des expropriations liées au Grand Paris, de la formation des conseillers prud’homaux, de l’allongement des délais de prescription en matière pénale, de la juridiction unifiée des brevets et, enfin, du répertoire des données à caractère personnel.

C.   Le Conseil supÉrieur de la magistrature

En 2018, le programme consacré au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) serait doté de 4,5 millions deuros en autorisations dengagement et de 4,8 millions deuros en crédits de paiement, soit une hausse de, respectivement, 19,5 % et 4,9 % par rapport à 2017.

Les dépenses de personnel s’établiraient à 2,7 millions d’euros. Elles correspondent aux vacations des 22 membres du CSM (1,36 million d’euros) et à la rémunération des effectifs du secrétariat général du Conseil, qui s’élèvent à 22 équivalents temps plein annuel travaillé (1,34 million d’euros).

Le budget de fonctionnement du Conseil représenterait 1,81 million d’euros en autorisations d’engagement et 2,1 millions d’euros en crédits de paiement. Il recouvre six catégories de dépenses :

– des dépenses de structure, à hauteur de 956 300 euros en engagements et 1,3 million d’euros en paiements, dont 550 000 euros en autorisations d’engagement et 909 000 euros en crédits de paiement destinés au loyer et 290 000 euros de charges locatives et privatives liées au siège du CSM, situé à l’hôtel Moreau-Lequeu, dans le 9e arrondissement de Paris ;

– des dépenses d’activité de 468 500 euros en engagements et de 461 500 euros en paiements (frais de réception, frais de déplacement, fournitures de bureau, documentation et abonnements, etc.) ;

– des dépenses d’équipement pour un montant de 120 170 euros en engagements et de 91 670 euros en paiements (dépenses de carburant et d’entretien des véhicules du Conseil, achat et location de mobilier, etc.) ;

– des dépenses informatiques de 139 000 euros en engagements et 166 000 euros en paiements ;

– des dépenses de formation à hauteur de 13 000 euros ;

– des dépenses, d’un montant de 15 000 euros, liées à deux subventions versées, l’une au réseau européen des conseils de justice, l’autre au réseau francophone des conseils de la magistrature judiciaire.

II.   Le budget pour l’accÈs au droit et À la justice en hausse de 8,7 %

Par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, les moyens du programme « Accès au droit et à la justice » progresseraient de 8,7 % pour atteindre 438,2 millions deuros en 2018.

A.   L’aide juridictionnelle

Volet essentiel de la politique d’accès au droit, l’aide juridictionnelle s’adresse aux personnes physiques, et exceptionnellement aux personnes morales à but non lucratif, dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits en justice. Elle consiste en la prise en charge par l’État de tout ou partie – l’aide pouvant être totale ou partielle – des frais relatifs à un procès (rétribution d’avocat, d’huissier de justice, frais d’expertise, etc.) ou à une transaction.

Le projet de loi de finances initiale pour 2018 prévoit une dotation de 321,1 millions d’euros pour laide juridictionnelle, à laquelle devraient s’ajouter 83 millions d’euros de ressources extrabudgétaires. Les moyens ainsi mobilisés en 2018 devraient progresser de 5,7 % pour atteindre 404,1 millions deuros. Cette hausse est justifiée par l’effet progressif de la revalorisation de l’unité de valeur de référence servant à calculer la rétribution des avocats, les relèvements successifs du plafond de l’aide juridictionnelle, la présence obligatoire d’un avocat lors de l’audience d’une personne faisant l’objet de soins sans consentement et l’extension de l’aide juridique à certains cas de médiation.

Devraient par ailleurs être mobilisés 64 millions d’euros au titre des aides aux interventions non-juridictionnelles des avocats (par exemple lors d’une garde à vue ou d’une audition libre). Leur forte progression (+ 27,5 %) s’explique principalement par l’obligation, depuis le 1er janvier 2017, de la présence d’un avocat lors de la garde à vue d’un mineur, mesure qui doit être saluée.


Une enveloppe de près de 11 millions d’euros est enfin prévue au titre de la contractualisation locale avec les barreaux. La dotation supplémentaire de 3 millions d’euros a pour objet de financer des actions de formation mises en place en lien avec les barreaux afin d’améliorer le dispositif d’aide juridictionnelle. Votre rapporteure estime que ce type de mesures doit être encouragé à l’avenir.

B.   L’accÈs au droit et le rÉseau judiciaire de proximitÉ

En 2018, 8,3 millions deuros devraient bénéficier à la politique d’accès au droit, qui a pour objet de permettre à tout citoyen, en particulier ceux qui rencontrent le plus de difficultés, de connaître leurs droits afin de pouvoir les exercer et de se rapprocher de la justice.

Ces crédits serviraient, en premier lieu et à hauteur de 8 millions deuros, à cofinancer les 101 conseils départementaux daccès au droit (CDAD) et les points daccès au droit, au nombre de 1 515. Ces centres départementaux sont des groupements d’intérêt public chargés de recenser les besoins, de définir une politique locale, d’initier des actions nouvelles, de dresser et de diffuser l’inventaire des actions menées et d’évaluer la qualité des dispositifs auxquels l’État apporte son concours.

La progression de 11 % des moyens destinés aux CDAD a pour objet de consolider et d’étendre le réseau des points d’accès au droit et de développer les consultations et les informations juridiques préalables ou alternatives à la saisine du juge au sein des juridictions ainsi que les consultations juridiques pour les publics les plus fragiles proposées dans divers lieux de proximité et dans les établissements pénitentiaires. Il s’agit ainsi de renforcer l’accès au droit en amont d’une saisine éventuelle du juge, objectif posé par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.

Ces crédits seraient destinés, en deuxième lieu et à hauteur de 50 000 euros, à renouveler le matériel informatique et le mobilier du réseau judiciaire de proximité constitué par les 141 maisons de justice et du droit (MJD) et les 36 antennes de justice. Ce réseau, qui devrait rester stable en 2018, assure une présence judiciaire de proximité et concourt à la prévention de la délinquance, à l’aide aux victimes et à l’accès au droit. Les mesures alternatives aux poursuites et les actions tendant à la résolution amiable des conflits peuvent y prendre place.

Enfin, ces crédits, à hauteur de 200 000 euros, permettraient de soutenir les associations spécialisées réalisant des actions denvergure nationale qui excèdent le champ de compétence locale des CDAD, notamment en faveur des publics fragilisés (personnes exclues, population issue de l’immigration, personnes incarcérées, etc.).

C.   L’aide aux victimes

L’aide aux victimes vise à améliorer la prise en charge des victimes d’infractions pénales, en leur apportant un soutien matériel et psychologique tout au long de leur parcours judiciaire et jusqu’à leur indemnisation.

27,7 millions deuros sont prévus dans le présent projet de loi de finances à ce titre.

La progression de la dotation de plus de 6 % en 2018 a pour objectif principal de renforcer l’action des associations locales d’aide aux victimes, d’une part, en permettant à davantage de victimes d’être suivies et, d’autre part, en offrant une prise en charge plus large grâce au développement du suivi social et administratif et de consultations réalisées par des juristes et des psychologues. Il s’agit également d’augmenter la capacité du réseau associatif à se mobiliser en urgence et à prendre en charge les victimes ou leurs proches, notamment en cas d’événement de grande ampleur.

D.   La mÉdiation familiale et les espaces de rencontre

Les moyens prévus en 2018 d’une part pour la médiation familiale, qui a pour objet un règlement apaisé des conflits familiaux, et d’autre part pour les espaces de rencontre, qui permettent le maintien des liens entre un enfant et ses parents dans des situations où ces derniers ne peuvent les accueillir à leur domicile, progressent de 43 % pour sétablir à 6,3 millions deuros.

En particulier, 2018 sera la deuxième année de l’expérimentation menée dans onze tribunaux de grande instance, qui consiste en ce qu’un grand nombre de saisines en modification du juge aux affaires familiales au sujet de l’exercice de l’autorité parentale ou de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant ou encore de stipulations contenues dans une convention homologuée soient obligatoirement précédées d’une tentative de médiation familiale.

 


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   Seconde partie : L’accÈs au droit et À la justice dans les litiges civils du quotidien À faible enjeu financier

Les litiges civils de la vie courante, c’est-à-dire ceux qui, en matière de consommation ou entre particuliers, font l’objet d’une demande inférieure ou égale à 4 000 euros, représentent de 75 000 à 80 000 affaires par an.

Ainsi, les juridictions de proximité, auxquelles étaient, jusqu’au 1er juillet 2017 ([4]), principalement dévolu ce type de litiges, ont été saisies, en 2016, de 78 800 affaires civiles relatives à des contentieux de moins de 4 000 euros
(– 3,1 % par rapport à 2015). Ces juridictions ont traité 79 400 affaires, dans un délai moyen de 5,9 mois.

ActivitÉ civile des juridictions de proximitÉ

 

2012

2013

2014

2015

2016

Affaires nouvelles

76 529

74 705

84 983

81 245

78 754

Affaires terminées

83 097

73 755

77 000

81 944

79 440

Durée moyenne (en mois)

6,0

5,7

5,6

5,9

5,9

Source : ministère de la Justice.

Pourtant, le contentieux de proximité apparaît, aux yeux des Français, comme difficile d’accès, lent et potentiellement coûteux. Près de 50 % des Français affirment mal connaître leurs droits et 88 % d’entre eux estiment que le système juridique français est difficile à comprendre ([5]). Aussi, lorsqu’ils se retrouvent en situation de litige, plus de la moitié des Français ne font pas valoir leurs droits par manque de temps, insuffisance de connaissances juridiques et crainte de devoir payer un avocat plus cher que le montant qu’ils demandent à leur adversaire.

Aussi est-il nécessaire de rendre l’institution judiciaire plus simple et plus proche du justiciable, sans quoi saisir le juge devient une démarche dissuasive.

Améliorer l’accès et maîtriser les délais de justice suppose de développer l’accès du justiciable à la connaissance de ses droits, d’affermir la conciliation comme préalable obligatoire à la saisine du tribunal d’instance et de procéder à la simplification et à la dématérialisation des procédures qu’il s’agisse de l’accès à l’aide juridictionnelle ou du règlement des litiges civils de faible enjeu financier.

I.   un accÈs au droit perfectible

L’accès au droit, défini à l’article 53 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, reconnaît à toute personne le droit de bénéficier :

– d’une information générale des personnes sur leurs droits et obligations et d’une orientation vers les organismes chargés de leur mise en œuvre ;

– d’une aide dans l’accomplissement de toute démarche en vue de l’exercice d’un droit ou de l’exécution d’une obligation de nature juridique et d’une assistance au cours de procédures non juridictionnelles ;

– de consultations juridiques ;

– d’une assistance pour la rédaction et la conclusion d’actes juridiques.

Cet accès au droit et de manière plus large à l’information juridique est essentiel car, comme l’ont souligné les représentants d’associations de consommateurs à votre rapporteure, de nombreux litiges résultent d’une méconnaissance du droit.

Si le pilotage de la politique d’accès au droit repose à titre principal sur le ministère de la Justice, assisté par le Conseil national de l’aide juridique, organisme consultatif ([6]), l’accès du justiciable à la connaissance de ses droits est mis en œuvre par les conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD) et par le réseau judiciaire de proximité constitué par les maisons de justice et du droit (MJD).

A.   Les conseils dÉpartementaux de l’accÈs au droit

L’organisation de l’accès au droit est confiée, au niveau local, aux conseils départementaux de laccès au droit.

LES CONSEILS DÉPARTEMENTAUX DE LACCÈS AU DROIT

La loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, modifiée par la loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits et par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, prévoit l’institution d’un CDAD dans chaque département.

Les CDAD ont pour mission de recenser les besoins, de définir une politique locale d’accès au droit et de dresser et diffuser l’inventaire des actions menées. Ils doivent, en outre, évaluer la qualité et l’efficacité des dispositifs auxquels l’État apporte son concours. Ils établissent un rapport annuel d’activité. Depuis la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, ils peuvent participer à la mise en œuvre des politiques locales de résolution amiable des différends et développer des actions communes.

Les CDAD sont des groupements d’intérêt public (GIP) présidés par le président du tribunal de grande instance du chef-lieu du département. Ils comportent des membres de droit : représentants de l’État (président du tribunal de grande instance du chef-lieu du département, procureur de la République et préfet du département), du département, de l’association départementale des maires, du ou de l’un des barreaux du département, de la caisse des règlements pécuniaires de ce barreau, des chambres départementales des huissiers de justice et des notaires et, enfin, d’une ou de plusieurs associations œuvrant dans le domaine de l’accès au droit, de l’aide aux victimes, de la conciliation ou de la médiation. La convention constitutive des CDAD peut par ailleurs prévoir la participation de membres associés (comme les barreaux du département non membres de droit) et de personnes qualifiées (comme les chefs de juridiction d’un autre tribunal de grande instance du département).

Outre le ministère de la Justice, les principaux financeurs des CDAD sont les conseils départementaux et régionaux, les communes, les préfectures et les barreaux. Il peut s’agir de contributions financières ou de contributions en nature ou en industrie (mise à disposition de personnels, de locaux ou d’équipements, délivrance d’informations juridiques ou de consultations juridiques gratuites, etc.).

Les 101 CDAD ont pour objet de créer, en lien avec les acteurs locaux concernés (à titre principal collectivités locales, professionnels du droit et associations), les conditions favorables à lémergence de lieux daccès au droit et dactions thématiques. Ils se sont également vu confier, par la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, la mise en œuvre de la politique locale de résolution amiable des différends, ce qui permet d’offrir aux citoyens, au-delà d’une simple information ou consultation juridique, une solution à leurs différends ainsi qu’une prise en charge globale et pluridisciplinaire.

À cet effet, ils ont développé des partenariats et mis en place des points daccès au droit (PAD).

Au nombre de 1 515, les points daccès au droit sont des structures de proximité réparties sur l’ensemble du territoire ([7]), financées et animées par les CDAD. Situés dans des lieux divers (maisons de services au public, locaux mis à disposition par les mairies ou les associations), ils peuvent également prendre la forme de points d’accès au droit itinérants. Leur développement est aussi encouragé depuis 2016 dans les tribunaux de grande instance, conférant à ces derniers le rôle de lieu d’accès au droit ([8]).

Qu’ils soient généralistes ou spécialisés, les points d’accès au droit accueillent de manière régulière, anonyme et confidentielle tous les publics. Ils offrent des services diversifiés :

– primo-accès au droit assuré par un agent d’accueil, avec le cas échéant une orientation vers d’autres organismes ;

– information juridique avec, si nécessaire, un accompagnement dans les démarches juridiques réalisé par des juristes appartenant à des associations ou relevant du CDAD ;

– consultations juridiques dispensées par des professionnels du droit (avocats, huissiers de justice ou notaires) ;

– aide à la rédaction de documents par des écrivains publics.

En 2016, les structures d’accès au droit ont reçu près de 550 000 personnes, 428 000 dans les PAD généralistes et 122 000 dans les PAD spécialisés.

Il ressort des auditions menées par la rapporteure pour avis que le développement de l’action des CDAD est essentiel au regard des enjeux liés à l’information et à la bonne orientation des justiciables, en particulier s’agissant des publics les plus fragiles et les plus éloignés du droit, et au développement des modes de règlement amiable des différends.

Aussi, votre rapporteure prône non seulement le renforcement du maillage territorial – y compris dans les juridictions –, de la cohérence et de la qualité du réseau de laccès au droit mais également le développement de laction des CDAD sur internet.

Il conviendrait en particulier de généraliser les actions menées à destination des jeunes par les CDAD des Hautes-Pyrénées et de Seine-Maritime d’une part et par le CDAD du Cher d’autre part. Les premiers ont en effet créé des sites internet qui apportent une première information aux jeunes sur différentes thématiques (travail, justice et droit, sexualité, formation, logement, santé, papiers importants…) et les orientent vers les interlocuteurs pertinents, tandis que le second développe une application pour smartphones destinée aux jeunes. Pourrait par ailleurs être développée, à destination des publics plus âgés, l’expérimentation mise en place par le CDAD des Bouches du Rhône, qui consiste en une ligne téléphonique consacrée aux seniors pour leur permettre d’accéder aux dispositifs d’accès au droit et de prendre rendez-vous ou de bénéficier d’une consultation juridique gratuite sur leur lieu de vie.

Toutefois, le renforcement des points d’accès physiques et le développement numérique de l’accès au droit nécessitent des moyens financiers supplémentaires.

À cet égard, si la rapporteure pour avis salue la hausse de 11 % des moyens qui devraient être affectés, par le ministère de la Justice, aux CDAD en 2018, elle dénonce le désengagement de certains cofinanceurs qui, à l’instar du conseil régional d’Île-de-France, privilégient un versement direct aux associations. L’amputation du budget des CDAD d’Île-de-France de près de 15 % risque en effet de mettre en péril leur bon fonctionnement.

B.   Les maisons de la justice et du droit

L’accès du justiciable à la connaissance de ses droits passe également par le réseau judiciaire de proximité constitué par les 141 maisons de justice et du droit (MJD). Présentes dans 60 départements, ces structures sont implantées prioritairement (pour 91 % d’entre elles) dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ou à proximité de ceux-ci.

Établissements judiciaires créés par arrêté du garde des Sceaux, les MJD exercent une double activité d’accès au droit et de justice de proximité. Les mesures alternatives aux poursuites et les actions tendant à la résolution amiable des conflits peuvent également y prendre place.

LES MAISONS DE LA JUSTICE ET DU DROIT

Inscrites aux articles R 131-1 à R 131-11 du code de l’organisation judiciaire, les MJD sont créées par arrêté du garde des Sceaux.

Leur création repose sur des conventions signées par l’ensemble des partenaires de la structure : le préfet de département, les chefs du tribunal de grande instance dans le ressort duquel est située la MJD, le maire du lieu d’implantation ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale incluant cette commune, le bâtonnier de l’ordre des avocats, une ou plusieurs associations œuvrant dans le domaine de la prévention de la délinquance, de l’aide aux victimes ou de l’accès au droit, et le cas échéant, le président du conseil départemental de l’accès au droit, les directions départementales de la protection judiciaire de la jeunesse et régionales de l’administration pénitentiaire.

La convention constitutive détermine les missions qui sont exercées par la maison de justice et du droit et les conditions de fonctionnement de celle-ci. Elle fixe également les modalités selon lesquelles les collectivités territoriales mettent à la disposition de la maison de justice et du droit un local adapté à ses missions ainsi que la répartition entre les signataires des charges inhérentes à son fonctionnement.

Les MJD sont présidées par les chefs de la juridiction de rattachement.

Le président du tribunal de grande instance et le procureur de la République près ce tribunal désignent, après avis de l’assemblée générale des magistrats du siège et du parquet, un magistrat qui a pour mission de veiller à la coordination des actions conduites au sein des MJD situées dans le ressort du tribunal et au bon emploi des moyens qui concourent à leur réalisation, d’assurer l’information régulière des membres du conseil de la MJD sur l’activité de celle-ci et, le cas échéant, de représenter la MJD.

Sous l’autorité du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République près ce tribunal, le directeur de greffe du tribunal de grande instance dans le ressort duquel la MJD est située veille au bon fonctionnement administratif de celle-ci et en prépare le projet de budget. Il affecte à la MJD des greffiers de ce tribunal.

Afin d’assurer une présence judiciaire gratuite de proximité et de répondre aux besoins d’information juridique des usagers, les MJD accueillent de nombreux intervenants, dont des magistrats qui peuvent être amenés à tenir des permanences ou des audiences, des conciliateurs pour régler les litiges civils, des avocats, huissiers et notaires qui proposent des consultations gratuites et des membres d’associations d’accès au droit.

En 2016, les MJD ont reçu 762 329 personnes (convoquées ou visiteuses) dont 529 349 dans le domaine de laccès au droit, 133 022 dans le cadre de l’activité judiciaire civile et pénale et 39 185 dans le cadre de la conciliation et de la médiation.

Alors que l’article R 131-10 du code de l’organisation judiciaire prévoit que le directeur de greffe du TGI dans le ressort duquel se trouve la MJD lui affecte des greffiers de ce tribunal, qui ont pour mission d’assurer l’accueil et l’information du public, la réception, la préparation et le suivi des procédures alternatives aux poursuites et de prêter leur concours au bon déroulement des actions tendant à la résolution amiable des litiges, l’importante vacance de postes de greffiers dans les juridictions (près de 800 postes vacants au 31 juillet 2017) a pour conséquence qu’il n’est pas possible d’assurer la présence d’un greffier dans chaque MJD. Dans certains cas, le poste est alors pourvu par l’affectation d’un agent de catégorie C des services judiciaires ou par la mise à disposition d’un agent de la collectivité territoriale partenaire.

Ainsi, parmi les 141 MJD, 25 fonctionnent sans greffier et 18 sans agent du personnel judiciaire. Certaines, comme la MJD de Saint-Denis, ont même dû être fermées, faute de personnel.

Aussi, alors que le ministère de la Justice prévoit de maintenir le nombre de MJD en 2018, la rapporteure pour avis estime qu’il est impératif de consolider le réseau des MJD, en particulier par laffectation de greffiers et dagents du personnel judiciaire, car il convient enfin d’atteindre l’objectif, fixé par les textes, d’affecter un greffier dans chaque MJD. Votre rapporteure considère que les maisons de la justice et du droit constituent une pièce d’autant plus essentielle du dispositif d’accès au droit que, dans le cadre de la numérisation de la justice, elles permettront de garantir la proximité avec les citoyens.

Il importe par ailleurs, pour renforcer la politique d’accès au droit, daffermir les liens entre les MJD et les juridictions et, d’une manière plus générale, daméliorer la coordination entre les CDAD et les MJD.

II.   la conciliation comme prÉalable obligatoire À la saisine du tribunal d’instance

La procédure de conciliation est un mode alternatif de règlement des différends au sens de la directive du 21 mai 2008 ([9]) qui permet de trancher rapidement, à l’amiable, un différend civil ([10]) simple entre deux personnes physiques ou morales, en présence d’un tiers : le juge d’instance ou le conciliateur de justice.

Les principaux contentieux pour lesquels la conciliation est utilisée sont les relations de voisinage, les relations entre propriétaire et locataire et le droit de la consommation.

Simple, rapide, gratuite, confidentielle, proche des justiciables et ne requérant pas le ministère d’avocat : cette procédure présente de nombreux avantages.

A.   le dÉveloppement d’une procÉdure…

Hormis les cas de demandes formées par requête conjointe remise au greffe ou par présentation des parties devant le juge ([11]), la tentative de conciliation préalable est obligatoire sagissant des demandes dont le montant nexcède pas 4 000 euros.

En effet, quand le juge est saisi par voie d’assignation ([12]), l’article 829 du code de procédure civile prévoit une tentative de conciliation préalable obligatoire ([13]). L’article 831 précise que « le juge peut déléguer à un conciliateur de justice la tentative préalable de conciliation ».

De même, depuis l’entrée en vigueur de l’article 4 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, la saisine du tribunal d’instance par déclaration au greffe ([14]) doit être précédée d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, à peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office. Trois exceptions sont toutefois prévues :

– si l’une des parties au moins sollicite l’homologation d’un accord ;

– si les parties justifient d’autres diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable de leur litige ;

– si l’absence de recours à la conciliation est justifiée par un motif légitime (comme l’urgence).

Lorsqu’un accord est trouvé dans le cadre de la conciliation, l’une des parties peut soumettre le constat d’accord à l’homologation du juge d’instance afin qu’il lui confère force exécutoire, sauf si l’autre partie s’y oppose ([15]).

L’obligation préalable de conciliation avant la saisine du juge s’agissant des litiges du quotidien de faible montant poursuit un double objectif : accélérer la résolution de ces litiges et alléger la charge de travail des juridictions. En effet, le taux de réussite des conciliateurs de justice est satisfaisant, puisque sur les 133 428 affaires traitées par ces derniers sur saisine directe du justiciable en 2016, il s’établit à 57 %.

B.   … qui nÉcessite des moyens humains et financiers supplÉmentaires

Le développement de la conciliation préalable obligatoire à la suite de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle appelle des moyens humains et financiers supplémentaires en faveur des conciliateurs ainsi qu’une revalorisation de leur fonction afin de la rendre plus attractive.

En effet, bien que l’on ne dispose pas encore du recul nécessaire pour mesurer les conséquences de l’article 4 de cette loi sur l’activité des conciliateurs de justice – même si Michel Pinet, président de Conciliateurs de France, a indiqué ressentir sur le terrain un « frémissement » de nouvelles demandes –, il convient de rappeler que le Gouvernement estimait, lors de l’examen du texte, que leur charge de travail serait accrue de 33 % ([16]).

Or, il ressort des auditions menées par la rapporteure pour avis que le nombre de conciliateurs (1 958 en 2016) est insuffisant. Alors qu’il y a aujourd’hui, en moyenne, trois conciliateurs pour 100 000 habitants, la réforme prévue par la loi de 2016, nécessiterait, selon l’Association nationale des juges d’instance, de disposer d’un conciliateur pour 15 000 habitants.

En outre, leur répartition sur le territoire est inégale.

Enfin, s’ils sont tous issus de professions en lien avec le droit (anciens gendarmes, avocats, huissiers, etc.), les conciliateurs de justice présentent la caractéristique d’être, dans leur quasi-totalité, retraités, l’âge moyen se situant entre 66 et 70 ans.

 

LE CONCILIATEUR DE JUSTICE

Créé par un décret n° 78-381 du 20 mars 1978, le conciliateur de justice est un collaborateur occasionnel bénévole ([17]) de la justice, chargé de faciliter l’émergence d’une solution négociée satisfaisante pour chacune des parties en conflit.

Auxiliaire de justice assermenté, il est recruté et nommé au niveau des cours d’appel pour un an, puis deux ans renouvelables. Si aucun diplôme n’est exigé, il doit justifier d’une expérience en matière juridique d’au moins trois ans.

Il ne doit ni être investi de mandat électif dans le ressort de la cour d’appel, ni exercer d’activité judiciaire.

Il est nommé sur proposition du juge d’instance par ordonnance du premier président de la cour d’appel. Il rend régulièrement compte de son activité aux chefs de cour d’appel ainsi qu’au juge du tribunal d’instance auquel il est rattaché. Le conciliateur est tenu d’exercer ses fonctions dans la circonscription mentionnée dans l’ordonnance de nomination. Il tient ses permanences dans un lieu public et il est tenu à la neutralité.

Le conciliateur de justice peut être saisi :

– par le justiciable lui-même, en dehors de toute procédure judiciaire, par courrier, par téléphone, par mail ou à l’occasion d’un rendez-vous ;

– par le juge d’instance, dans le cadre d’une procédure devant le tribunal d’instance, lorsque ce dernier estime qu’il est utile de tenter un règlement à l’amiable avant de poursuivre l’instruction d’une affaire. Dans ce cas, la mission du conciliateur ne peut excéder un mois ;

– par le tribunal de commerce ou le tribunal paritaire des baux ruraux, lorsque le litige concerne des artisans, des commerçants, ou encore des exploitants agricoles.

Il organise le plus souvent les réunions de conciliation sur le lieu même où il tient ses permanences, à la mairie, au tribunal d’instance ou à la maison de la justice et du droit même s’il peut aussi se déplacer sur le lieu du différend.

Certes, la campagne de recrutement de 600 conciliateurs lancée en mars 2017 commence à produire ses effets. De 1 958 conciliateurs en 2016, les effectifs sont déjà passés à 2 021 au 31 juillet 2017, l’objectif étant fixé à 2 249 à la fin de l’année 2017 et à 2 600 conciliateurs début 2019, selon les données transmises par la direction des services judiciaires. Toutefois, il est à craindre que, sous réserve qu’il soit atteint, cet afflux de conciliateurs ne suffise pas à faire face au développement des besoins en matière de conciliation. Il conviendrait, en outre, de veiller à ce que le maillage territorial assuré par les conciliateurs soit suffisamment fin.

Pour mener à bien le recrutement de nouveaux conciliateurs de justice et assurer une plus grande diversité de leurs origines, il est impératif de revaloriser cette fonction bénévole et en manque de reconnaissance, qui participe à une nouvelle approche de la résolution des litiges.

Plusieurs mesures ont été prises en 2016 et en 2017 afin de revaloriser la fonction de conciliateur, comme le doublement du montant de l’indemnité destinée à couvrir leurs menues dépenses, portée à 464 euros, pour le forfait de base, et à 926 euros, pour le forfait sur justificatifs, l’amélioration de la prise en charge de leurs frais de déplacement ou encore la diffusion d’une carte professionnelle uniformisée. Néanmoins, malgré leur récente hausse, les remboursements de frais demeurent bien inférieurs aux montants des frais réellement engagés pour les fournitures de bureau, l’affranchissement de courriers ou les équipements matériels (ordinateur, imprimante…).

Aussi, convaincue de l’intérêt de la conciliation préalable dans les litiges civils à faible enjeu financier, la rapporteure pour avis plaide pour que le plan de recrutement des conciliateurs soit revu à la hausse et que la prise en charge de leurs menues dépenses, en particulier du matériel informatique, soit améliorée.

Elle considère également qu’au-delà de la saisine en ligne des conciliateurs, déjà possible via le site des Conciliateurs de France, il convient de favoriser, en particulier pour les litiges en matière de droit de la consommation, le développement de plateformes de conciliation tenues par des conciliateurs de justice.

III.   pour un accÈs numÉrique À la justice

Au-delà du développement de l’accès au droit par internet, simplifier l’accès et le fonctionnement de la justice s’agissant du contentieux de proximité suppose d’accélérer et d’amplifier le chantier de transformation numérique du ministère de la Justice, afin de permettre :

– le développement d’un service public numérique de la justice, grâce auquel les citoyens et leurs avocats trouveront toutes les informations pratiques et pourront se pourvoir en justice, transmettre une requête et des pièces, suivre l’état d’avancement de leur dossier, mais également avoir accès à l’aide juridictionnelle ;

– la mise en place d’une procédure numérique, simple et rapide pour le règlement des litiges de la vie quotidienne.

A.   La dÉmatérialisation du traitement de l’aide juridictionnelle

L’aide juridictionnelle est une aide financière qui permet aux personnes sans ressources ou ayant des revenus modestes d’obtenir la prise en charge par l’État, selon les revenus des intéressés, de la totalité ou d’une partie des frais relatifs à un procès (honoraires d’avocat, frais d’huissier ou d’expertise....).

Alors que le montant de l’aide juridictionnelle s’est élevé à 382 millions d’euros en 2016, il n’est malheureusement pas possible, selon les services du ministère de la Justice, de déterminer, au sein de l’aide juridictionnelle, la part consacrée aux contentieux civils de moins de 4 000 euros. Néanmoins, elle est loin d’être négligeable au regard des estimations – portant sur des échantillons – fournies par les personnes auditionnées.

Aujourd’hui, il est difficile, pour ceux qui en ont besoin, d’avoir accès à l’aide juridictionnelle : la demande nécessite de se rendre au palais de justice, de remplir des formulaires et de remettre de nombreuses pièces justificatives.

Les admissions à l’aide juridictionnelle sont ensuite instruites par les bureaux d’aide juridictionnelle (BAJ) présents dans chaque tribunal de grande instance. Les BAJ examinent les dossiers au regard des conditions d’admission et de ressources des demandeurs et du bien-fondé de l’action puis notifient les décisions rendues.

Toutefois, face à l’augmentation régulière des décisions, qui se sont élevées à 1 122 586 ([18]) en 2016 (en progression de 5,7 %), les BAJ sont confrontés à un manque manifeste de moyens humains. La présidente du Conseil national de l’aide juridique a ainsi indiqué, lors de son audition, que les BAJ étaient « asphyxiés ».

Cette pénurie de personnel dans les BAJ conduit à un délai moyen de traitement élevé (39 jours) et à une qualité d’examen des dossiers dégradée. Ainsi, faute de pouvoir obtenir les justificatifs nécessaires, de nombreux BAJ se contentent de déclarations sur l’honneur.

Afin d’améliorer l’accès à l’aide juridictionnelle et d’accélérer les délais de traitement, la rapporteure pour avis prône la transformation numérique de laide juridictionnelle tout en veillant à ne pas exclure les personnes les plus éloignées des nouvelles technologies.

Un premier pas a été franchi cette année avec l’ouverture du portail « justice.fr », à partir duquel le justiciable peut obtenir les informations relatives à l’aide juridictionnelle et procéder à une simulation en ligne de son éligibilité. Cette première étape devrait réduire les demandes d’information auprès des bureaux d’aide juridictionnelle, faciliter la constitution des dossiers et limiter le nombre de décisions de rejet.

Dici à 2019 devrait être mise en place la dématérialisation de la demande daide juridictionnelle et de son instruction.

Grâce à la mise en place d’un nouveau système informatique de gestion de l’aide juridictionnelle, baptisé SIAJ (suivi informatisé des affaires juridiques), le justiciable devrait ainsi pouvoir effectuer sa demande d’aide juridictionnelle en ligne, ce qui lui évitera de devoir se déplacer. La dématérialisation s’accompagnera d’une simplification des formalités de la demande.

En outre, les juridictions devraient être dotées d’une application métier modernisée, dotée de nouvelles fonctions comme la dématérialisation des échanges avec les autres acteurs du dispositif, en particulier les avocats et les caisses des règlements pécuniaires des avocats.

Le processus d’instruction des demandes devrait également être modernisé grâce à l’automatisation de l’examen de la condition de ressources, ce qui devrait permettre de réduire le délai de traitement d’une demande et d’en améliorer la qualité en concentrant les moyens humains sur l’examen du bien-fondé de l’action.

La rapporteure pour avis considère que, pour produire pleinement ses effets, la dématérialisation du traitement du dossier d’aide juridictionnelle doit s’accompagner de la mise en place d’un identifiant unique qui permettra de regrouper les informations des services fiscaux et sociaux.

B.   la mise en place d’une procÉdure numÉrique, simple et rapide, pour les litiges de la vie courante

S’agissant des litiges civils récurrents dont le montant est inférieur à 4 000 euros, les procédures s’avèrent particulièrement complexes. En témoigne, par exemple, la multiplicité des voies d’accès, qui peuvent être extrajudiciaires (médiation ou conciliation), judiciaires (avec de nombreuses voies d’action : l’assignation, la déclaration au greffe ou encore l’injonction de payer) ou bien encore prendre une forme intermédiaire avec le recouvrement des petites créances grâce au titre exécutoire délivré par huissier de justice.

Ces procédures apparaissent, en outre, empreintes d’un formalisme trop lourd. Ainsi, si un justiciable choisit de saisir une juridiction par la voie de la déclaration au greffe, il doit imprimer son formulaire de déclaration au greffe ainsi que les pièces justificatives en double exemplaire et les transmettre par voie postale ou les remettre en main propre à la juridiction. Si le dossier comporte une erreur, le greffe retournera l’intégralité du dossier par lettre recommandée au justiciable afin qu’il la corrige et soumette à nouveau sa demande. Que de temps et d’énergie perdus !

Le développement croissant de services privés d’aide à la saisine des juridictions sur internet semble d’ailleurs répondre à l’inquiétude des justiciables devant la complexité de l’accès à la justice. Ainsi, depuis son lancement en 2012, le site « demanderjustice.com », qui fournit des informations et assiste les justiciables dans la saisine des juridictions en matière de litiges du quotidien, a traité plus de 410 000 dossiers.

Aussi, dans l’objectif de faciliter l’accès à la justice et d’accélérer le traitement des dossiers, la simplification et la dématérialisation des procédures civiles, en particulier de celles relatives aux litiges de moins de 4 000 euros, apparaissent-elles inévitables.

La dématérialisation offre de nombreuses perspectives aux personnels comme aux justiciables. Pour les magistrats et les greffiers, elle permettrait de simplifier le travail, de limiter les manipulations de documents et d’éviter les saisies inutiles. Pour les justiciables, elle permettrait de suivre les affaires en ligne, de faciliter le dépôt et l’échange de pièces avec les juridictions, de supprimer les convocations par courrier recommandé et de simplifier la notification des décisions de justice.

Cette perspective suppose la systématisation de la communication électronique, entre les juridictions, les justiciables et les auxiliaires de justice, et la mise en place de la signature électronique dans ces échanges. Elle suppose aussi que les juridictions disposent de matériels informatiques adaptés, que les volumes de connexion dans les juridictions soient suffisants et que les capacités des serveurs informatiques du ministère de la justice soient accrues pour permettre de gérer des flux de données plus importants.

De fait, le ministère de la Justice entend mettre en place un vaste plan de transformation numérique, dont le volet intitulé « Portalis », doté de 85 millions d’euros, concerne plus particulièrement la procédure civile.

Première étape du projet « Portalis », le site « justice.fr », mis en ligne le 12 mai 2016, offre aux citoyens une information sécurisée et gratuite sur les procédures judiciaires et le fonctionnement de la justice. L’utilisateur est ainsi guidé à chaque étape de sa recherche, en fonction de la nature de sa demande. Le site permet également des simulations en ligne, par exemple en matière d’aide juridictionnelle. Toutefois, il ne permet aujourd’hui aucune interactivité.

Le développement de « Portalis » devrait néanmoins permettre, selon le secrétaire général du ministère, de suivre, à partir de ce portail, l’état d’avancement de sa procédure civile ou pénale en 2018, puis, en 2019, de saisir l’ensemble des juridictions et, enfin, à partir de 2020-2021, d’aboutir à une dématérialisation complète de la procédure civile, ce qui suppose d’avoir développé un système d’archivage électronique et un système de signature électronique.

LE PROJET PORTALIS

Projet de dématérialisation de la chaîne civile, « Portalis » a pour objectif d’améliorer l’accès à la justice et la lisibilité de l’institution judiciaire.

Les différentes étapes du chantier numérique sont les suivantes :

– 12 mai 2016 : ouverture du portail internet du justiciable « justice.fr ». Il vise à informer le justiciable de ses droits et à l’orienter dans ses démarches pour toute la procédure pénale et civile, selon le litige voire la situation géographique, grâce à une recherche personnalisable. Le site internet met aussi à disposition l’ensemble des formulaires CERFA en vigueur, les listes de pièces justificatives à produire ainsi que les liens utiles vers les auxiliaires de justice. Il présente, par ailleurs, les modes alternatifs de règlement des litiges. Enfin, il propose différents simulateurs de calcul (aide juridictionnelle, pension alimentaire et saisie sur rémunérations) ;

– 2018 : accès en ligne, pour l’ensemble des justiciables, à l’état d’avancement de leur procédure, civile ou pénale ; possibilité de recevoir des documents des juridictions (convocations, avis, récépissés) par voie dématérialisée ainsi que des rappels de convocation par SMS ;

– 2019 : possibilité de saisine en ligne de l’ensemble des juridictions civiles par les avocats ([19]) et par tout justiciable ;

– à partir de 2020-2021 : mise en place du nouvel applicatif de la chaîne civile, « Portalis », qui remplacera les neuf applications informatiques civiles existantes et dématérialisation complète de la chaîne civile.

Parallèlement, le déploiement de « Portalis » devrait accompagner la montée en puissance du service d’accueil unique du justiciable (SAUJ), qui a vocation à informer les personnes sur les procédures qui les concernent et à recevoir de leur part des actes afférents à ces procédures.

LE SERVICE DACCUEIL UNIQUE DU JUSTICIABLE

Consacré par la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle du 18 novembre 2016, le service d’accueil unique du justiciable a pour objet d’améliorer l’accueil des justiciables au sein des juridictions.

Placé sous l’autorité d’un greffier, ce service assure aussi bien la délivrance d’informations générales et individualisées s’agissant de l’ensemble des procédures civiles, sociales et pénales, que la réception, aux fins de transmission, d’un certain nombre d’actes de procédures non urgentes et sans représentation d’avocat obligatoire, définies dans le décret n° 2017-897 du 9 mai 2017. Il constitue un point d’entrée procédural unique pour les justiciables.

Lancé en septembre 2016, le déploiement national du SAUJ devrait prendre fin en décembre 2017. Si la plupart sont situés dans les juridictions, quatre d’entre eux sont implantés dans des maisons de la justice et du droit.

Au 1er janvier 2018, plus de 320 SAUJ devraient ainsi être en service.

Le développement de « Portalis » devrait ainsi permettre, en 2018, au greffe d’une juridiction d’obtenir des informations sur toute procédure traitée par une autre juridiction, afin de renseigner de manière plus efficace les justiciables et, d’ici à 2021, de réaliser certains actes et dépôt de pièces.

Alors que le ministère lance un vaste plan de modernisation numérique de la justice et que, parmi les cinq chantiers de la Justice lancés par la ministre de la Justice le 6 octobre 2017, une mission relative à la transformation numérique a été confiée à M. Jean-François Beynel et à M. Didier Casas et une mission portant sur la simplification de la procédure civile l’a été à Mme Frédérique Agostini et à M. Nicolas Molfessis, votre rapporteure plaide en faveur d’une simplification et d’une dématérialisation rapide des procédures civiles, en particulier de celles relatives aux litiges à faible enjeu financier.

Pourrait ainsi être mise en place une procédure numérique, simple et rapide pour le règlement de tous les litiges civils inférieurs à 4 000 euros, que ce soit en matière de consommation, de conflit de voisinage ou encore d’injonction de payer ou de faire. En cas d’échec de la conciliation préalable, une décision judiciaire devrait être rendue dans les deux mois.

Votre rapporteure souligne toutefois que la mise en place de cette nouvelle procédure numérique de la justice civile ne doit pas aboutir à laisser de côté les justiciables qui ne sont pas familiers des nouvelles technologies ou qui ny ont pas accès. En ce sens, le rôle des greffes reste primordial dans l’accès à la justice, de même que celui des avocats.

Il est également nécessaire de veiller à la formation des personnels qui devront utiliser ces nouveaux outils, avec la mise en place de formations sur site, dont les chefs de juridiction du tribunal de grande instance de Créteil ont souligné l’intérêt à la rapporteure pour avis.


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   examen en commission

À l’issue de l’audition, en commission élargie, de Mme Nicole Belloubet, garde des Sceaux, ministre de la Justice (voir le compte rendu de la commission élargie du 25 octobre 2017 à 21 heures ([20])), la commission des Lois examine, pour avis, les crédits pour 2018 de la mission « Justice » (Mme Laetitia Avia, rapporteure pour avis « Justice et accès au droit » ; M. Bruno Questel, rapporteur pour avis « Administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse »).

Conformément aux conclusions de Mme Laetitia Avia, rapporteure pour avis « Justice et accès au droit », et de M. Bruno Questel, rapporteur pour avis « Administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse », la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Justice » pour 2018.

Après l’article 57

La Commission examine l’amendement n° II-54 du Gouvernement.

Mme Laetitia Avia, rapporteure pour avis « Justice et accès au droit ». Cet amendement du Gouvernement a pour objet de modifier les modalités de financement de l’autorité de régulation de la profession de commissaires aux comptes, le haut conseil au commissariat aux comptes, afin de les simplifier et de doter cette instance d’un budget à la hauteur des nouvelles missions qui lui ont été confiées par le règlement européen du 16 avril 2014 et par l’ordonnance du 17 mars 2016 relative au commissariat aux comptes. Ce dernier devrait ainsi passer de 11 millions d’euros actuellement à 18 millions d’euros.

Il convient en effet tout d’abord de simplifier les modalités de financement du haut conseil car l’actuel système des droits et contributions est complexe à gérer et à contrôler. En outre, il ne fait pas peser équitablement la charge du financement sur l’ensemble des commissaires aux comptes.

Il convient ensuite de renforcer les moyens humains et financiers du haut conseil pour lui permettre de faire face à ses nouvelles missions, à savoir l’inscription des commissaires aux comptes sur la liste nationale, le contrôle périodique de l’ensemble des cabinets qui certifient les comptes des entités d’intérêt public, la définition des orientations en matière de formation continue et le respect des obligations dans ce domaine, la conduite d’enquêtes et le prononcé de sanctions en cas de manquements à la réglementation du commissariat aux comptes et l’élaboration des normes professionnelles.

Aussi, le présent amendement prévoit de supprimer un système complexe reposant, d’une part, sur les droits et contributions qui sont dus par chaque commissaire aux comptes inscrit, à raison du nombre et du type de rapports de certification établis et, d’autre part, sur la cotisation due par la compagnie nationale des commissaires aux comptes, assise sur le chiffre d’affaires des commissaires aux comptes à l’égard de certaines catégories de clients. En remplacement, il prévoit d’instaurer une cotisation assise sur l’ensemble des honoraires facturés par les commissaires aux comptes aux personnes dont ils certifient les comptes et une cotisation moindre assise sur les seuls honoraires facturés aux entités d’intérêt public.

Ces nouvelles modalités de financement ont donc pour objectif d’assurer une répartition équitable de la charge de financement sur les différents types de cabinets de commissaires aux comptes.

J’émets un avis favorable à cet amendement.

La Commission accepte l’amendement n° II-54.

Elle examine ensuite l’amendement n° II-CL27 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Que des syndicats aussi importants pour la vie démocratique que le Syndicat de la magistrature dénoncent la situation humaine et financière particulièrement dégradée de la justice, parlant même de paupérisation de la justice, doit nous faire réagir.

Selon les dernières statistiques du Conseil de l’Europe, la France est le mauvais élève européen en matière de budget et d’effectifs de la justice. Avec environ 0,2 % du PIB consacré à la justice contre 0,33% en moyenne en Europe, la France se situe à la trente-septième place sur quarante-cinq. Notre pays a également deux fois moins de juges par habitant que la moyenne européenne : 10,7 juges professionnels pour 100 000 habitants contre 20,92 à l’échelle de l’Europe.

Ceci nous interpelle et doit aussi vous interpeler. Notre justice est manifestement sous-dotée. Elle est devenue une justice « low cost », dont l’image la plus choquante est celle que nous renvoient ces tribunaux dégradés et insalubres. La République a abandonné ces territoires et les citoyens justiciables qui s’y trouvent.

Dans ce cadre, notre amendement propose de commander un rapport destiné à faire un bilan de la situation actuelle de la justice et des moyens qui doivent être alloués à ce troisième pouvoir reconnu par la Constitution.

Mme Laetitia Avia, rapporteure pour avis « Justice et accès au droit ». Je pense que les échanges que nous avons eus avec la garde des Sceaux montrent que nous sommes tous conscients des difficultés rencontrées au quotidien par les juridictions.

Je tiens à rappeler l’engagement pris par la ministre en faveur d’une remise à niveau des moyens des juridictions dans le cadre du projet de loi de programmation qui nous sera présenté au premier semestre 2018 ainsi que les cinq « chantiers » qui ont été lancés et qui devraient nous permettre d’engager une réforme profonde de la justice dans notre pays.

Sur la méthode, j’observe que le Parlement dispose de nombreux moyens pour assurer sa bonne information, notamment au travers des missions d’information qu’il peut créer, telle que la mission consacrée, au printemps 2017, au redressement de la justice et présidée par M. Philippe Bas au Sénat, ainsi que des pouvoirs de contrôle sur pièces et sur place dont bénéficient le président, le rapporteur général et les rapporteurs spéciaux des commissions des finances.

Je souligne également qu’il est fait référence dans cet amendement à un groupe de travail chargé de l’élaboration du rapport qui serait composé notamment de syndicats, parmi lesquels un seul syndicat de magistrats – le Syndicat de la magistrature –, qui représente 20 % des magistrats syndiqués, alors que l’Union syndicale des magistrats (USM) en représente 70 %.

J’émets donc un avis défavorable à cet amendement.

M. Ugo Bernalicis. Il existe effectivement déjà beaucoup de rapports qui pointent l’indigence de notre administration en termes de justice. Il faudrait maintenant des mesures concrètes pour y remédier. Certes, l’USM représente une part plus importante des voix aux élections professionnelles chez les magistrats mais alors qu’elle était opposée au texte renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, vous ne l’avez pas écoutée.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL27.

Elle en vient à l’amendement n° II-CL29 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Peut-être que cet amendement vous sierra davantage, Madame la rapporteure, puisqu’il propose un rapport visant à régler le problème du manque de moyens de la justice, afin de permettre une remise à niveau par rapport à nos voisins européens. Ce rapport se veut plus opérationnel. Il reprend des propositions que nous avions formulées lors de l’élection présidentielle dans notre programme « L’avenir en commun » et dans notre livret thématique sur la justice, car, même si nous n’avons pas gagné cette élection – nous pouvons tous le regretter –, il est évident qu’il reste dans notre besace quelques bonnes propositions que vous pourriez reprendre à votre compte – j’en suis sûr – pour l’intérêt général et le bien de la justice.

Mme Laetitia Avia, rapporteure pour avis « Justice et accès au droit ». J’émets un avis défavorable à cet amendement, même si je salue l’effort pour demander un rapport avec davantage de préconisations. Je tiens à rappeler une nouvelle fois que le Parlement dispose déjà de tous les moyens pour formuler les préconisations qu’il juge utiles au redressement de la situation de la justice.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL29.

Elle aborde l’amendement n° II-CL33 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Faute d’être au Gouvernement, nous proposons des rapports, mais si nous y étions, nous consacrerions bien évidemment davantage de moyens à la justice.

Cet amendement a pour objet de demander un rapport sur le non-recours à la justice et à des mécanismes pour faire valoir leurs droits par les justiciables pauvres et mal informés. Ce droit à la justice est fondamental, toutefois sa mise en œuvre rencontre un certain nombre de freins. Le manque d’information, de moyens et d’accès au service public de la justice conduit à ce que de nombreux citoyens et citoyennes ne font pas valoir leurs droits. C’est inacceptable. Faire valoir ces revendications doit occuper une place naturelle dans un État de droit. Cette perspective d’un monde d’égalité et de liberté fondé sur le droit et son effectivité doivent être un enjeu fondamental pour les années à venir.

Pour autant, cette réalité objective est difficile à saisir. Une étude sérieuse doit permettre de l’évaluer afin de pouvoir mener une ambitieuse politique d’accès à la justice qui s’articulerait notamment autour d’un indispensable renforcement des mécanismes d’information via les maisons de la justice et du droit et un accès soutenu et simplifié à des conseils juridiques et à un avocat.

J’entends bien l’effort qui va être fait – et il est nécessaire – sur la question du numérique et de la dématérialisation, mais cela ne suffit pas.

Mme Laetitia Avia, rapporteure pour avis « Justice et accès au droit ». Je ne peux que me réjouir de l’intérêt de mes collègues sur ce sujet de l’accès au droit qui est l’axe principal des auditions que j’ai menées ces dernières semaines dans le cadre de l’élaboration de mon rapport pour avis. Je ne peux également que regretter que, malgré leur intérêt pour l’accès au droit des plus démunis, les signataires de cet amendement n’aient pu être présents à ces différentes auditions.

Je tiens à rappeler que l’accès au droit passe par une présence physique suffisamment dense sur le territoire national via les maisons du droit et de la justice et les points d’accès au droit. J’ai d’ailleurs fait part à la garde des Sceaux de mon inquiétude quant au financement de ces centres d’accès au droit et au nombre – insuffisant – de greffiers affectés dans les maisons du droit et de la justice.

Pour ces raisons, je donne un avis défavorable à cet amendement.

M. Ugo Bernalicis. Je pense que l’on pourrait s’épargner ce genre d’arguments. J’ai assisté à quelques-unes des auditions conduites dans le cadre des avis budgétaires – certes, pas sur la justice – et, à part moi et le rapporteur ou la rapporteure pour avis, il n’y avait personne d’autre, notamment de votre majorité. Mais c’est normal, car il est extrêmement compliqué voire, certains jours, impossible d’être présent à chacune de ces auditions compte tenu du caractère très chargé de nos agendas. Il faudra peut-être à l’avenir songer à les retranscrire ou à les filmer, ce qui nous permettra d’avoir, collectivement, un travail plus efficace.

Mme Yaël Braun-Pivet, présidente. Je pense que nous devons tous avoir collectivement une réflexion sur l’organisation de notre travail parlementaire, qui s’avère très difficile et vire parfois à l’exercice d’équilibriste.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL33.

Elle aborde lamendement n° II-CL28 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Le 20 janvier 2011, le 23 février 2012, le 27 avril 2013, le 21 mai 2015 et d’autres encore : trop nombreuses sont les décisions rendues par la Cour européenne des droits de l’homme condamnant la France pour traitements inhumains et dégradants dans ses prisons. Nous avons déjà abordé ce sujet lors de l’audition de la garde des Sceaux et le constat est unanime sur la surpopulation chronique des établissements pénitentiaires, qui touche principalement les maisons d’arrêt où la densité carcérale s’établit en moyenne entre 130 % et 140 %. Le constat est aussi alarmant quant au manque d’effectifs du personnel pénitentiaire. L’insuffisance des recrutements a causé une explosion du nombre d’heures supplémentaires : plus de 4,3 millions d’heures chaque année.

Nous estimons donc qu’un bilan de la situation est nécessaire : le rapport d’information que nous proposons permettrait de faire le point sur les investissements requis pour rendre conforme à nos valeurs le fonctionnement du service public pénitentiaire. L’Assemblée nationale doit s’emparer de ce débat dès aujourd’hui afin d’établir un état des lieux et de réévaluer les propositions budgétaires notoirement insuffisantes qui sont faites par le Gouvernement.

M. Bruno Questel, rapporteur pour avis « Administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse ». C’est un sujet important et je crois avoir été suffisamment clair dans mon intervention liminaire pour en souligner la prise en compte par le Gouvernement et cette majorité. Le Parlement dispose déjà, à droit constant, de pouvoirs d’investigation et d’un droit d’information, au travers notamment de ses rapporteurs budgétaires et des commissions d’enquête qu’il peut créer.

Sur la composition du groupe de travail chargé de rédiger le rapport, un « tri syndical » semble une nouvelle fois avoir été opéré par les auteurs de l’amendement pour les représentants de magistrats mais aussi pour les syndicats d’avocats. Vous me trouverez facétieux mais je m’attendais même à ce que vous nous donniez la liste nominative des personnes que vous auriez souhaité voir siéger dans ce groupe de travail… Mon avis est donc défavorable.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL28.

Elle examine ensuite l’amendement n° II-CL30 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Libre à vous, chers collègues, d’élargir la composition des groupes de travail que nous vous proposons puisque nous sommes d’accord sur la nécessité d’un plan d’urgence pour les moyens du service public pénitentiaire. Le manque d’effectifs est grave et patent, l’insuffisance des recrutements est notoire. Nous développerons, dans les débats à venir, des propositions pour y remédier. Dans l’immédiat, nous demandons, par cet amendement, que soient examinés le coût et les économies budgétaires susceptibles de résulter de la mise en œuvre d’un plan d’urgence pour les prisons.

M. Bruno Questel, rapporteur pour avis « Administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse ». La loi de programmation pour la justice répondra à l’ensemble des questions posées par nos collègues. Je suis donc défavorable à cet amendement.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL30.

Elle en vient à l’amendement n° II-CL31 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Cet amendement demande un rapport sur les situations de maltraitances, de traitements inhumains et dégradants et de mauvais traitements touchant les détenus et l’ensemble des personnels pénitentiaires mais rendant aussi compte des conditions sanitaires déplorables observées dans certaines prisons. J’ai moi-même fait cette constatation lors d’une visite du centre pénitentiaire de Fresnes où il est ressorti de discussions avec des détenus une situation sanitaire préoccupante et des tensions très fortes avec le personnel. La violence pénitentiaire s’est banalisée, touchant aussi bien les détenus que les surveillants. À ce climat de violence s’ajoutent des conditions sanitaires dégradées. Je le rappelais à l’instant : la France a été condamnée par la CEDH à de multiples reprises pour l’état de ses prisons. L’objectif du rapport que nous proposons sera d’évaluer le coût pour les finances publiques d’une mise aux normes intégrale permettant la prévention de telles atteintes à la dignité humaine.

M. Bruno Questel, rapporteur pour avis « Administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse ». Même avis que pour les amendements précédents. Sur cette question précise, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté exerce une mission vigilante et ne manque pas d’alerter les pouvoirs publics sur les situations préoccupantes qu’elle est amenée à constater ou qui lui sont signalées par un détenu.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL31.

Elle se saisit ensuite de l’amendement n° II-CL32 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Il s’agit, par cet amendement, de demander un rapport sur les surcoûts induits par le recours aux partenariats public-privé (PPP). La garde des Sceaux nous a indiqué tout à l’heure que le ministère de la Justice n’y aurait plus recours à l’avenir mais il serait utile de disposer de chiffres sur le nombre de PPP en cours et les coûts qu’ils représentent. Cette évaluation serait aussi l’occasion d’étudier la possibilité juridique de dénoncer certains des PPP en cours, lesquels représenteraient, d’après un rapport de la Cour des comptes, un surcoût de 30 % par rapport aux autres modes de gestion. Compte tenu de l’état de nos finances publiques, peut-être pourrions-nous nous épargner ces dépenses somptuaires.

Nous proposons que ce rapport soit rédigé par un groupe de travail comportant des représentants de syndicats et d’associations. Il y a sans doute des imperfections sur le champ des personnes visées mais nous voulons faire observer que ces rapports ne devraient pas être l’apanage de missions d’inspection dépendantes d’une autorité hiérarchique ou relevant d’une seule administration. Nous souhaitons que le Gouvernement ouvre le champ de ses investigations lorsqu’il est amené à produire de tels rapports.

M. Bruno Questel, rapporteur pour avis « Administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse ». Je ne surprendrai personne en réitérant un avis défavorable sur cet amendement. La ministre a été claire s’agissant de l’avenir : l’administration pénitentiaire est convaincue que ce mode de construction et de gestion est inadapté aux problématiques pénitentiaires, c’est pourquoi elle n’y aura plus recours.

Mme Laetitia Avia, rapporteure pour avis « Justice et accès au droit ». Même avis.

M. Ugo Bernalicis. Les PPP sont des mauvais outils, bien au-delà du seul domaine pénitentiaire.

Mme Laetitia Avia, rapporteure pour avis « Justice et accès au droit ». Pour ce qui concerne la justice judiciaire, la garde des Sceaux s’est déclarée disposée à fournir tous les éléments d’information demandés par cet amendement. Pour le reste, je renouvelle mes observations sur la composition des groupes de travail, qui ne correspondent pas à la méthode de que cette majorité souhaite promouvoir.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL32.

Elle aborde ensuite l’amendement n° II-CL34 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Le présent amendement demande un rapport sur le recrutement et la fidélisation des personnels de l’administration pénitentiaire ainsi que du corps de commandement. Aucun rapport sur ce sujet n’a été publié à notre connaissance. Arrêts maladie en cascade, cas de burn out, démissions, suicides… les maux touchant les métiers pénitentiaires sont multiples et depuis trop longtemps l’État a ignoré ces problèmes, devenant ainsi en partie responsable des violences qu’ils génèrent. La mission essentielle de réinsertion qu’accomplissent les surveillants pénitentiaires, qui sont au contact quotidien des personnes condamnées, a été oubliée. Pour changer le rapport de force qui existe en détention, il faut renouveler cette approche et conduire une véritable réflexion sur les métiers de surveillance et d’encadrement. Il n’est plus possible de laisser des surveillants tout juste sortis de l’école gérer des mouvements de plus de 130 détenus. Car ce sont des agents publics que nous mettons ainsi en danger.

M. Bruno Questel, rapporteur pour avis « Administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse ». La garde des Sceaux a évoqué devant nous l’ouverture d’un sixième chantier, interne au ministère de la Justice, sur la gestion des ressources humaines, afin de prendre à bras le corps ce sujet, sur lequel j’ai moi-même eu des mots suffisamment forts lors de mon intervention liminaire pour qu’on ne puisse pas mettre en doute notre volonté d’avancer.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL34.

Elle examine l’amendement n° II-CL35 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Cette nouvelle demande de rapport – je précise qu’il s’agit de rapports demandés au Gouvernement, qui ne seraient donc pas à notre charge et ne nous priveraient pas de notre capacité à conduire des missions d’information sur d’autres sujets – concerne la charge de travail des conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation (CPIP) et l’impact sur les finances publiques des nécessités de recrutement de nouveaux conseillers. Les augmentations d’effectifs annoncées par le Gouvernement nous semblent insuffisantes. Les services pénitentiaires d’insertion et de probation remplissent des missions s’articulant autour de trois axes : l’insertion des personnes condamnées, l’aide à la décision judiciaire dans un souci d’individualisation des peines ainsi que le suivi et le contrôle des obligations imposées par les magistrats. La continuité du suivi entre la détention et le milieu ouvert est l’un des enjeux de la lutte contre la récidive et doit être au cœur de la politique de sécurité menée par le Gouvernement. Or la réalisation de cette mission est compromise par la charge de travail démentielle des CPIP : il n’est pas rare que certains d’entre eux soient amenés à suivre plus de 140 personnes. Cet état de fait conduit à ce que nombre d’agents se détournent de ce métier pourtant essentiel à la réhabilitation, humaine et sociale, des personnes condamnées.

M. Bruno Questel, rapporteur pour avis « Administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse ». Pour les mêmes raisons que celles précédemment développées, j’y suis défavorable. J’ajoute que les rapporteurs budgétaires disposent déjà d’éléments précis sur la charge de travail des CPIP qui reste plus élevée que la moyenne européenne. Toutefois, au 1er avril 2017, 75 personnes – et non 140 – étaient suivies par chaque agent et ce chiffre est en baisse de 7 personnes depuis 2016 grâce au recrutement, sous le précédent quinquennat, de 1 100 CPIP pour accompagner la réforme pénale. Le Gouvernement a par ailleurs lancé un plan ambitieux de création d’emplois pour les années 2018 à 2022 en vue de réduire le nombre de personnes suivies par chaque CPIP, avec déjà 150 emplois supplémentaires prévus en 2018.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL35.

Elle étudie l’amendement n° II-CL36 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement vise à demander au Gouvernement la remise d’un rapport sur le coût anticipé pour les finances publiques du nécessaire développement des mesures alternatives à la détention provisoire et notamment de la mesure d’assignation à résidence sous surveillance électronique (ARSE).

Depuis plusieurs années, le recours à la détention provisoire, qui doit demeurer en principe exceptionnelle, n’a cessé de croître, devenant l’une des causes de la surpopulation carcérale dans les maisons d’arrêt. Le recours croissant à la détention provisoire nous paraît constituer une atteinte grave au principe de la présomption d’innocence et le symptôme d’une certaine crispation de la société sur la question sécuritaire. Pourtant, des dispositifs intermédiaires existent, conciliant le principe de la présomption d’innocence et l’exigence de sécurité, comme l’ARSE qui reste toutefois sous-utilisée. Il s’agirait donc, par ce rapport, d’apprécier les freins qui existent au prononcé d’alternatives à la détention provisoire.

M. Bruno Questel, rapporteur pour avis « Administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse ». Avis défavorable. La garde des Sceaux a évoqué tout à l’heure la nécessité de développer les peines autonomes par rapport à l’emprisonnement, ce qui sera l’occasion d’approfondir la question que vous évoquez.

Mme Caroline Abadie. Il existe une commission de suivi de la détention provisoire, au sein de laquelle je siège, qui présente, tous les trois ans, des données statistiques et des analyses relatives à l’évolution de la détention provisoire. Je ne manquerai pas, cher collègue, de vous adresser son rapport.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL36.

Elle en vient à l’amendement n° II-CL37 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la gestion budgétaire de chaque mesure d’aménagement de peine et d’alternative à l’incarcération.

La garde des Sceaux prétend mener une politique de développement des aménagements de peine et des alternatives à l’incarcération en faisant état d’une augmentation du budget de la mission « Justice ». Or ce budget est en baisse s’agissant des crédits consacrés aux aménagements de peine. Par ailleurs, il nous semble que le Parlement ne contrôle pas suffisamment les moyens dédiés à cette politique. Il faut sortir, de notre point de vue, d’un discours d’apparat, qui a le mérite de nous donner bonne conscience mais ne suffit pas à assurer l’effectivité de la politique de développement des aménagements de peine.

M. Bruno Questel, rapporteur pour avis « Administration pénitentiaire et protection judiciaire de la jeunesse ». Au risque de décevoir les espoirs de Mme Obono, j’émets, une nouvelle fois, un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement n° II-CL37.

 

 

 

 


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   personnes entendues

 Ministère de la Justice – Direction des affaires civiles et du sceau

— Mme Valérie Delnaud, cheffe de service, adjointe au directeur

 Ministère de la Justice – Direction des services judiciaires

— M. Ludovic André, sous-directeur des ressources humaines de la magistrature

— M. Arnaud Viornery, adjoint à la sous-directrice de l’organisation judiciaire et de l’innovation

 Ministère de la Justice - Secrétariat général

— M. Stéphane Verclytte, secrétaire général

— M. Yves Badorc, chef du service de l’accès au droit et à la justice et de l’aide aux victimes

 Conseil national de laide juridique

–– Mme Agnès Martinel, présidente

–– M. Nicolas Francillon, secrétaire

–– Mme Lise Duquet, cheffe du bureau de l’accès au droit et à la justice

 Association nationale des juges dinstance

–– Mme Violette Baty, co-présidente

–– M. Bruno Tadeusz, co-président

 Conciliateurs de France, fédération nationale des associations territoriales de conciliateurs de justice de cour dappel

— M. Michel Pinet, président

 Association nationale des magistrats exerçant à titre temporaire

–– Mme Edwige Mollaret-Laforêt, secrétaire

 Union syndicale des magistrats exerçant à titre temporaire

— M. Bernard Herrewyn, président

— Mme Monique Deval, secrétaire générale

 Union syndicale des magistrats

–– Mme Marie-Jane Ody, vice-présidente

–– Mme Pascale Loue Williaume, trésorière nationale adjointe

● Syndicat national des magistrats FO

–– M. Emmanuel Goyon, magistrat

–– M. Marc Lifchitz

 Syndicat de la magistrature

— Mme Clarisse Taron, présidente

— Mme Juliane Pinsard, secrétaire nationale

● Association pour le développement de linformatique juridique

–– M. Fabien Waechter, président

–– Mme Anne-Charlotte Gros, vice-présidente

 Demanderjustice.com

–– M. Léonard Sellem, directeur général

 Ledroitpourmoi.fr

–– M. Vincent Letamendia, président co-fondateur

 Association Open Law

— M. Benjamin Jean, président

— M. Cyril Gérard, chargé de mission

— M. Bruno Mathis, membre du conseil d’administration

 Conseil national des barreaux 

— M. Yves Tamet, président de la commission Accès au droit et à la Justice

— M. Florent Loyseau de Grandmaison, vice-président de la commission Libertés et Droits de l’Homme

— M. Jacques-Édouard Briand, directeur des affaires législatives et règlementaires

 Conférence des Bâtonniers 

— Mme Hélène Fontaine, ancienne bâtonnière de Lille

 Barreau de Paris 

— Mme Marie-Aimée Peyron, bâtonnière élue

 Institut national de la consommation

— M. Olivier Dailly, directeur général adjoint

— Mme Patricia Foucher, responsable du service économique, juridique, documentation de l’INC

 Syndicat des greffiers de France/FO

— Mme Claude Gigoi, greffière au TGI de Paris

— Mme Josette Courjol, greffière en administration centrale

 Syndicat national CGT des chancelleries et services judiciaires

— Mme Dominique Dutemps, directrice des services de greffe judiciaires

 UNSA services judiciaires

— M. Alain Richard, secrétaire général adjoint

— M. André Toutain, secrétaire général adjoint

 CLCV

— M. Jean-Yves Mano, président

— M. David Rodrigues, juriste

 UFC Que Choisir

— M. Guilhem Fenieys, chargé de mission relations institutionnelles

— M. Nicolas Godfroy, responsable du service juridique

Contributions écrites :

 M. Serge Guinchard, professeur émérite à Paris II

 Conférence nationale des présidents de tribunaux de grande instance

— Mme Joëlle Munier, présidente


DÉPLACEMENTs EFFECTUÉs

 

 Tribunal de grande instance de Créteil (lundi 16 octobre 2017)

Entretien avec M. Stéphane Noël, président du tribunal de grande instance, et Mme Laure Beccuau, procureure

● Tribunal de grande instance de Bobigny (jeudi 19 octobre 2017)

Entretien avec M. Renaud Le Breton de Vannoise, président du tribunal de grande instance, Mme  Christine Renaud, secrétaire générale du conseil départemental d’accès au droit et Mme Combot, première vice-présidente en charge de la coordination des tribunaux d’instance


([1]) Les crédits des autres programmes de la mission « Justice », « Administration pénitentiaire » et « Protection judiciaire de la jeunesse », font l’objet d’un avis distinct de votre commission des Lois, dont le rapporteur est M. Bruno Questel.

([2])  La répartition par mesure prévue par la loi dite « J21 » en est la suivante : rôle du notaire en matière d’envoi en possession (– 4 ETP), amende forfaitaire délictuelle pour défaut d’assurance et de permis de conduire (– 36 ETP), retrait des magistrats de certaines commissions administratives (– 20 ETP), extension de l’amende forfaitaire en matière de stupéfiants (– 55 ETP) et dématérialisation des procédures
(– 68 ETP).

([3])  Cette réforme prévue par la loi organique n° 2016-1090 du 8 août 2016 relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature confère au juge des libertés et de la détention le statut de juge spécialisé.

([4]) À la suite de la suppression des juridictions de proximité le 1er juillet 2017, ces litiges entrent désormais dans le champ de compétence des tribunaux d’instance.

([5]) Baromètre AXA Protection Juridique et IPSOS, 2014.

([6]) Le Conseil national de l’aide juridique est actuellement présidé par une conseillère à la Cour de cassation et vice-présidé par une conseillère dÉtat. Il comprend en outre un président de conseil départemental de laccès au droit, des représentants de plusieurs ministères (Justice, Affaires sociales, Budget), un greffier en chef des services judiciaires, des représentants des professions juridiques (huit avocats, deux notaires et deux huissiers de justice), un conseiller départemental, un représentant de lassociation des maires de France, deux représentants dassociations œuvrant dans le domaine de laide juridique et un représentant des Français établis hors de France désigné sur proposition de lAssemblée des Français de létranger. Il est chargé de recueillir toutes les informations quantitatives et qualitatives sur le fonctionnement de laide juridictionnelle et de laide à laccès au droit et de proposer aux pouvoirs publics toutes mesures propres à laméliorer, de faire aux conseils départementaux de laccès au droit des suggestions en vue de développer et dharmoniser les actions menées localement et, enfin, détablir chaque année un rapport sur lactivité daide juridique, au vu des rapports des conseils départementaux sur laide juridictionnelle et sur laide à laccès au droit dans leur ressort.

([7])  Les PAD sont implantés en milieu urbain, en particulier dans les quartiers de la politique de la ville ou dans les zones de sécurité prioritaire, mais également en milieu rural pour 101 d’entre eux.

([8])  La loi du 18 novembre 2016, dont le chapitre premier porte sur le renforcement de la politique d’accès au droit, a introduit dans le code de l’organisation judiciaire la notion de « service public de la justice » qui « concourt à laccès au droit et assure un égal accès à la justice ». Elle consacre ainsi la possibilité de bâtir des dispositifs d’accès au droit en juridiction.

([9]) Directive n° 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale.

([10]) En application de l’article 1529 du code de procédure civile, relèvent du champ de la conciliation les différends d’ordre familial, professionnel ou de consommation (troubles de voisinage, conflit entre un propriétaire et un locataire, divorce, créances impayées, malfaçons, difficultés à faire exécuter un contrat...).

([11]) Lorsque les parties se sont mises d’accord pour saisir ensemble le tribunal d’instance, la procédure peut être écrite (requête conjointe) ou orale (présentation volontaire des parties devant le juge).

([12]) L’assignation est « lacte dhuissier de justice par lequel le demandeur cite son adversaire à comparaître devant le juge » (article 55 du code de procédure civile). Lassignation doit contenir, à peine de nullité, les mentions prévues aux articles 56 (en particulier l’objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit) et 837 du code de procédure civile (date de l’audience de conciliation).

([13]) Cet article dispose en effet que « la demande en justice est formée par assignation à fin de conciliation et, à défaut, de jugement ».

([14]) Simple et gratuite, la déclaration au greffe peut être faite de manière orale ou écrite – rédigée sur papier libre ou sur formulaire Cerfa. Elle contient un exposé sommaire des demandes faites et des motifs qui les justifient, ainsi que les mentions prévues à l’article 58 du code de procédure civile (identité, profession et domicile du demandeur, nom et domicile du défendeur et objet de la demande).

([15]) Articles 833 et 1541 du code de procédure civile.

([16]) Cf. sur ce sujet, le rapport n° 3726, déposé par la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, sur le projet de loi (n° 3204), adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de la justice du XXIe siècle, et présenté par MM. Jean-Michel Clément et Jean-Yves Le Bouillonnec, Assemblée nationale, XIVe législature, 6 mai 2016.

([17]) Les conciliateurs de justice bénéficient d’une indemnité forfaitaire destinée à couvrir les menues dépenses de secrétariat, de téléphone, de documentation et d’affranchissement qu’ils exposent dans l’exercice de leurs fonctions.

 

([18]) Sur ces 1 122 586 décisions, 971 181 ont correspondu à des admissions à une aide totale ou partielle et 83 785 à des rejets.

([19]) Actuellement, la saisine en ligne n’est possible, pour les avocats, que devant le tribunal de grande instance et la cour d’appel dont ils relèvent.

([20]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/commissions_elargies/cr/