N° 1745
______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2023
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2024
(n° 1680),
TOME II
examen de la premiÈre partie conditions gÉnÉrales de l’Équilibre financier |
Volume 1
COMMENTAIRES D’ARTICLES
(de l’article liminaire jusqu’à l’article 23)
Par M. Jean-RenÉ CAZENEUVE
Rapporteur général,
Député
——
SOMMAIRE
___
Pages
PREMIÈRE PARTIE : CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE PREMIER : DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I – Impôts et ressources autorisés
A – Autorisation de perception des impôts et produits
Article 1er Autorisation de percevoir les impôts existants
Article 3 Régime fiscal du plan d’épargne avenir climat
Article 5 Crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte
Article 6 Aménagement de la fiscalité du logement
Article 8 Aménagement de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises
Article 11 Adaptation des tarifs d’accise sur les énergies
Article 12 Réduction progressive de dépenses fiscales défavorables à l’environnement
Article 15 Taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance
Article 16 Réforme des redevances des agences de l’eau
Article 17 Suppression de dépenses fiscales inefficientes et d’une taxe à faible rendement
Article 18 Mise en œuvre du transfert du recouvrement des contributions indirectes à la DGFiP
Article 19 Mise en œuvre du plan de lutte contre les fraudes
Article 20 Délit de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale
Article 22 Renforcement du contrôle des prix de transfert des entreprises multinationales
Article 23 Aménagement des modalités de réalisation des contrôles fiscaux
Article liminaire
Prévisions de solde structurel et de solde effectif
de l’ensemble des administrations publiques de l’année 2024,
prévisions d’exécution 2023 et exécution 2022
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article liminaire présente sous forme d’un tableau les prévisions de soldes, de dette, de taux de prélèvements obligatoires et de principales dépenses d’investissement en milliards d’euros pour l’ensemble des administrations publiques. S’y ajoutent l’objectif d’évolution en volume et la prévision en milliards d’euros de la dépense publique, qui font l’objet dans le même tableau d’une déclinaison par sous-secteur d’administration.
Les prévisions portent sur 2023 et 2024. Elles sont complétées par les données correspondantes d’exécution pour 2022 et les prévisions pour 2024, telles qu’elles figuraient dans le texte initial du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.
Pour 2024, le déficit public est estimé à 4,4 % du produit intérieur brut (PIB), en baisse sensible de 0,5 point. La majeure partie (3,7 % du PIB) proviendrait de sa composante structurelle, dont la sensible réduction de 0,4 point explique l’essentiel de l’amélioration du solde effectif des administrations publiques. Le déficit conjoncturel se réduirait de 0,1 point, passant de 0,7 % à 0,6 % du PIB de 2023 à 2024, mais demeurerait supérieur de 0,1 point à son niveau de 2022, tandis que l’impact des mesures temporaires ou exceptionnelles serait stable, se traduisant par une contribution de – 0,1 point de PIB au solde effectif.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
Avant de rejeter la première partie du projet de loi de finances pour 2024, la commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur général puis a rejeté l’article.
Aux termes de l’article 1er H de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) ([1]) et comme le prévoyait antérieurement la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques (LOPGFP) ([2]), l’article liminaire présente, dans un tableau de synthèse, le solde structurel et le solde effectif annuels pour l’année précédente, l’année en cours et l’année à venir, avec l’indication des calculs permettant de passer de l’un à l’autre en intégrant les mesures ponctuelles temporaires. Le tableau doit aussi rappeler les prévisions de la loi de programmation des finances publiques pour l’année en question.
Les exigences de la LOLF, telle que réformée par la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la gestion des finances publiques ([3]), prévoient en outre que le tableau de synthèse comporte, pour les trois mêmes années, l’état de la prévision, déclinée par sous-secteur d’administration publique, de l’objectif d’évolution en volume et de la prévision en milliards d’euros courants des dépenses des administrations publiques, ainsi que l’état des prévisions de prélèvements obligatoires, de dépenses et d’endettement de l’ensemble des administrations publiques, exprimées en pourcentage du produit intérieur brut (PIB).
I. la décrue du déficit public
Après la forte dégradation des comptes publics en 2020 et 2021 du fait de la crise sanitaire, la normalisation du solde public est amorcée. Après deux années de stabilité, à – 4,8 % du PIB en 2022 et – 4,9 % en 2023, le solde des administrations publiques pour 2024 serait de – 4,4 % du PIB, soit le déficit le plus faible depuis 2020.
Soldes DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES pour les annÉes 2019 À 2024
(en % du PIB)
Soldes |
Exécution 2019 |
Exécution 2020 |
Exécution 2021 |
Exécution 2022 |
Prévision 2023 |
Prévision |
Solde structurel (1) |
– 2,2 |
– 1,3 |
– 5,1 |
– 4,2 |
– 4,1 |
– 3,7 |
Solde conjoncturel (2) |
0,2 |
– 5,0 |
– 1,4 |
– 0,5 |
– 0,7 |
– 0,6 |
Mesures exceptionnelles et temporaires (3) |
– 1 |
– 2,8 |
– 0,1 |
– 0,1 |
– 0,1 |
– 0,1 |
.Solde effectif (4 = 1 + 2 + 3) |
– 3 |
– 9,1 |
– 6,5 |
– 4,8 |
– 4,9 |
– 4,4 |
Solde effectif hors mesures exceptionnelles (5=4-3) |
– 2,9 |
– 6,3 |
– 6,4 |
– 4,7 |
– 4,8 |
– 4,3 |
Source : articles liminaires des lois de finances pour 2021, 2022 et 2023 et du projet de loi de finances pour 2024.
A. une amélioration du solde public dans un contexte de légère accélération de la croissance
1. Les effets de la croissance en recettes et en dépenses
Après une année 2022 marquée par l’invasion russe de l’Ukraine, le rebond des tensions d’approvisionnement et la hausse des prix des matières premières qui ont entraîné un net ralentissement de l’activité à partir de l’automne, la croissance du produit intérieur brut (PIB) atteindrait 1 % en 2023, conformément à l’estimation figurant dans le Programme de stabilité pour les années 2023 à 2027, tandis que l’inflation s’établirait à 4,9 %. En 2024, une croissance de 1,4 % témoignerait de l’accélération de l’activité à l’heure où l’effet des chocs de l’année 2022 se dissipe et où la normalisation de l’inflation verrait celle-ci réduite à 2,6 %.
Quoiqu’elles ne soient pas nulles, les incertitudes entourant ces prévisions s’atténuent : l’évolution de l’inflation, laquelle atteindrait 4,9 % en 2023, est conforme aux prévisions du Programme de stabilité 2023-2027 ; les craintes relatives à l’approvisionnement énergétique sont moindres dans un contexte de rapide reconstitution des stocks de gaz et d’économie d’énergie, tandis que la production d’électricité rebondit ; le risque financier reflue par rapport au printemps dernier, marqué par le rachat de Crédit suisse et la faillite de Silicon Valley Bank.
Les prévisions de recettes fiscales nettes pour 2023 sont révisées à la hausse de 3,9 milliards d’euros par rapport à la loi de finances pour 2023, notamment en raison de recettes d’impôts sur le revenu, d’impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée (part État) respectivement supérieures de 3,3 milliards d’euros, 6 milliards d’euros et 1,6 milliard d’euros à la prévision initiale, les autres recettes fiscales étant inférieures de 6,9 milliards d’euros à celle-ci. Non corrigé des effets du bouclier tarifaire, le taux de prélèvements obligatoires passerait de 45,4 % du PIB en 2022 à 44 % du PIB en 2023 ; corrigé des effets du même bouclier, il passerait de 45,6 % du PIB en 2022 à 44,4 % du PIB en 2023.
En 2024, les recettes fiscales nettes progresseraient de 17,3 milliards d’euros par rapport à la prévision révisée pour 2023, pour s’établir à 349,4 milliards d’euros, sous l’effet de prévisions d’impôt sur les sociétés, d’impôt sur le revenu et de taxe sur la valeur ajoutée (part État) respectivement supérieures de 10,9 milliards d’euros, 3,5 milliards d’euros et 4,1 milliards d’euros à la prévision révisée pour 2023. Corrigé des effets du bouclier tarifaire, le taux de prélèvements obligatoire serait stable, à 44,4 % du PIB ; non corrigé des mêmes effets, il connaîtrait une progression réduite de 0,1 point pour s’établir à 44,1 % du PIB.
La prévision de dépense publique fait l’objet de données détaillées, qui déclinent l’objectif d’évolution des dépenses des administrations publiques (ODAP) figurant désormais obligatoirement dans les lois de programmation des finances publiques (LPFP).
Évolution de la dÉpense publique
pour l’ensemble des administrations publiques entre 2022 et 2024
|
2022 |
2023 |
2024 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt) en % du PIB |
57,7 |
55,9 |
55,3 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros) |
1 523 |
1 575 |
1 622 |
Évolution de la dépense publique hors crédits d’impôt en volume (en %) |
– 1,1 |
– 1,3 |
0,5 |
Principales dépenses d’investissement (en milliards d’euros) |
/ |
25 |
30 |
Source : article liminaire du projet de loi de finances pour 2024.
En cohérence avec les prévisions d’inflation, la dépense publique, pour la deuxième année ([4]), évaluée en milliards d’euros, progresse en valeur mais diminuerait en volume en 2023.
2. Une réduction du déficit
Ayant atteint un point haut en 2020 sous l’effet des conséquences de la pandémie de covid-19, le déficit public rapporté au PIB se réduit graduellement. Après que l’exécution pour l’année 2021 a donné lieu à un déficit très inférieur aux prévisions (– 6,5 % contre – 8,5 % en PLF 2021), le déficit a été conforme en 2022 à la prévision (– 4,8 %, comme attendu aux termes de l’article liminaire de la version initialement déposée du projet de loi de finances pour 2022). Après une quasi-stabilité en 2023, il connaîtrait une régression de 0,5 point en 2024.
DÉficit public effectif depuis 2009
Année |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
En % du PIB |
7,2 |
6,9 |
5,2 |
5,0 |
4,1 |
3,9 |
3,6 |
3,6 |
3,0 |
2,3 |
3,1* |
En milliards d’euros |
138,9 |
137,4 |
106,1 |
104,0 |
86,5 |
83,9 |
79,7 |
81,3 |
68,0 |
54,1 |
74,7 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Année |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
|
|
|
|
|
|
En % du PIB |
9,0 |
6,5 |
4,8 |
4,9 |
4,4 |
|
|
|
|
|
|
En milliards d’euros |
208,2 |
162,1 |
126,8 |
138,8 |
128,3 |
|
|
|
|
|
|
* Le déficit public est aggravé, en 2019, par la mesure exceptionnelle de bascule du CICE en baisse de cotisations sociales, à hauteur de 0,8 point de PIB.
Source : Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), comptes nationaux jusqu’en 2021, projet de loi de finances pour 2024 pour les années 2022 à 2024.
En 2023, le déficit public devrait en effet atteindre 4,9 %, alors que la prévision initiale était de 5 % du PIB, la baisse des prix de l’énergie ayant permis une réduction du coût des différentes mesures de soutien. En 2024, il poursuivrait sa réduction avec une baisse sensible de 0,5 point, pour s’établir à 4,4 % du PIB, conformément au Programme de stabilité 2023-2027, sous l’effet de la fin progressive des mesures temporaires relatives la hausse des prix de l’énergie et des mesures de relance et de soutien, cet effet étant cependant partiellement compensé par la hausse de la charge d’intérêt de la dette sous l’effet de la hausse des taux.
Ces prévisions demeurent inchangées par rapport au Programme de stabilité 2023-2027, qui prévoit le retour d’un ajustement nominal positif à partir de 2024 du fait notamment de l’amélioration du solde conjoncturel.
Trajectoire pluriannuelle des finances publiques
prévue par le programme de stabilité 2023-2027
(en % du PIB)
|
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
Solde public |
– 4,9 |
– 4,4 |
– 3,7 |
– 3,2 |
– 2,7 |
Ajustement nominal |
– 0,2 |
0,5 |
0,7 |
0,5 |
0,5 |
Solde conjoncturel |
– 0,8 |
– 0,7 |
– 0,5 |
– 0,3 |
0,0 |
Solde structurel (en % du PIB potentiel) |
– 4,0 |
– 3,6 |
– 3,1 |
– 2,8 |
– 2,6 |
Ajustement structurel |
0,0 |
0,4 |
0,4 |
0,3 |
0,2 |
Source : Programme de stabilité 2023-2027.
B. un solde structurel important qui amorce sa décrue
La notion de solde structurel doit permettre de donner une vision plus sincère de l’équilibre des comptes publics. Le solde structurel continue, en 2023 et 2024, de représenter une part importante du déficit effectif prévu.
1. Une donnée suivie au titre des engagements européens de la France
Le solde structurel est l’une des composantes du solde budgétaire public. Il correspond au solde corrigé des effets du cycle économique.
a. Une notion retenue par les traités européens et déclinée dans la loi organique
L’objectif d’équilibre des comptes publics du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG) est défini en termes de solde structurel. L’article 3 du TSCG précise que cet objectif est atteint lorsque le solde structurel des administrations publiques est inférieur à 0,5 point de PIB pour les États membres dont la dette dépasse 60 % du PIB et à un point de PIB pour les autres États membres.
Cette règle est normalement mise en œuvre dans le cadre du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance (PSC). Ce volet préventif prévoit que les États membres doivent déterminer un objectif de moyen terme (OMT), défini en termes de solde structurel, compris entre – 0,5 point de PIB et l’excédent. Ils doivent également définir une trajectoire d’ajustement structurel minimal en vue d’atteindre l’OMT, étant précisé que le solde structurel doit converger vers l’OMT retenu d’au moins 0,5 point de PIB par an (et de plus de 0,5 point par an lorsque la dette de l’État membre dépasse 60 % de son PIB).
En France, la loi de programmation des finances publiques doit, aux termes de la LOLF, déterminer les trajectoires des soldes structurels et effectifs annuels successifs des administrations publiques, qui est ensuite déclinée en lois de finances. Le solde structurel est un indicateur faisant l’objet d’un suivi pluriannuel encadré par la LOLF.
Le mécanisme de correction de la loi organique
L’article 62 de la LOLF ([5]) prévoit un mécanisme de correction lorsqu’un écart important est constaté entre l’exécution de l’année écoulée et la trajectoire de solde structurel définie dans la loi de programmation des finances publiques. Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a la mission d’identifier un tel écart, dans son avis joint au projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année précédente.
Un écart est considéré comme important lorsqu’il représente au moins 0,5 % du PIB sur une année donnée ou au moins 0,25 % du PIB par an en moyenne sur deux années consécutives.
Le déclenchement du mécanisme de correction doit conduire le Gouvernement à exposer les raisons de l’écart important qui a été constaté et à présenter des mesures de correction, lors de l’examen du projet précédemment mentionné de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année précédente.
Il est toutefois prévu que le déclenchement du mécanisme de correction n’intervienne pas, à l’appréciation du HCFP, en présence de circonstances exceptionnelles répondant aux conditions fixées par le TSCG, c’est-à-dire quand elles correspondent « à des faits inhabituels indépendants de la volonté de la partie contractante concernée et ayant des effets sensibles sur la situation financière des administrations publiques ou à des périodes de grave récession économique ».
b. Des règles de calcul complexes
Le calcul des composantes conjoncturelle et structurelle du déficit fait intervenir les notions de croissance potentielle, de PIB potentiel et d’écart de production. Le déficit structurel est la différence entre le déficit effectif et le déficit conjoncturel, lequel est fonction de l’écart entre le PIB effectif et le PIB potentiel. Le PIB potentiel est une construction économétrique définie comme le niveau maximum de production au-delà duquel apparaissent des tensions inflationnistes.
Plusieurs de ces notions, non observables en finances publiques ou en comptabilité nationale, sont sujettes à des discordances d’interprétation. Ainsi, l’enregistrement des mesures d’urgence prises dans le cadre des lois de finances rectificatives pour 2020 en tant que mesures temporaires a conduit à ne pas les comptabiliser dans le solde structurel.
2. Une décrue sensible en 2024
À partir de 2021, le solde structurel s’est éloigné des objectifs européens et de l’orientation pluriannuelle votée pour les années 2018 à 2022. Cependant, le Haut Conseil estimait depuis le printemps 2020 ([6]) que les conditions économiques étaient réunies pour que s’applique la clause des circonstances exceptionnelles, de nature à justifier des écarts à la trajectoire de la LPFP en vigueur, adoptée avant la crise sanitaire.
Si le solde structurel, passant de – 4,2 % à – 4,1 % du PIB a peu évolué entre 2022 et 2023, il amorcerait une décrue sensible en 2024 pour atteindre – 3,4 % du PIB, le Haut Conseil relevant toutefois que la prévision pour 2024 pourrait être « un peu surestimée, notamment du fait des recettes attendues, qui pourraient être moins élevées si la croissance économique était moins forte que prévu par le Gouvernement, et de certaines dépenses apparaissant sous-estimées (notamment les dépenses de santé et le coût des mesures énergétiques) » ([7]).
II. un suivi fin de l’Évolution des dépenses publiques
À la suite de la réforme de la LOLF, l’article liminaire est désormais enrichi de données déclinées par sous-secteur d’administration : administrations publiques centrales (APUC), administrations publiques locales (APUL) et administrations de sécurité sociale (ASSO).
déclinaison du solde, de la dépense publique en valeur
et de l’évolution en volume de celle-ci par sous-secteur d’administration
|
2022 |
2023 |
2024 |
Administrations publiques centrales |
|||
Solde en % du PIB |
– 5,2 |
– 5,4 |
– 4,7 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros) |
625 |
631 |
639 |
Évolution de la dépense publique hors CI en volume (en %)1 |
– 0,1 |
– 3,6 |
– 1,4 |
Administrations publiques locales |
|||
Solde en % du PIB |
0,0 |
– 0,3 |
– 0,3 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros=) |
295 |
312 |
322 |
Évolution de la dépense publique hors crédit d’impôt en volume (en %)1 |
0,1 |
1,0 |
0,9 |
Administrations de sécurité sociale |
|||
Solde en % du PIB |
0,4 |
0,7 |
0,6 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros) |
704 |
730 |
761 |
Évolution de la dépense publique hors CI en volume (en %)1 |
– 2,4 |
– 0,5 |
1,7 |
Toutes administrations publiques |
|||
Solde en % du PIB |
– 4,8 |
– 4,9 |
– 4,4 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt, en milliards d’euros) |
1 523 |
1 575 |
1 622 |
Dépense publique (hors crédits d’impôt) en % du PIB |
57,7 |
55,9 |
55,3 |
Évolution de la dépense publique hors CI en volume (en %) |
– 1,1 |
– 1,3 |
0,5 |
1 à champ constant, hors transferts entre administrations publiques.
N.B. : La somme des objectifs de dépense par sous-secteurs, exprimés en milliards, est supérieure pour chacune des années indiquées à l’objectif de dépense pour le champ des administrations publiques. Cette différence tient à la neutralisation des transferts entre administrations dans le chiffre présenté pour la dépense publique.
Source : article liminaire du projet de loi de finances pour 2024.
A. un déficit public largement porté par l’état
Présentant la part de chaque sous-secteur dans le solde public, l’article liminaire permet d’observer que le déficit continue d’être largement porté par l’État :
– en 2023, le déficit des APUC pèse sur le déficit des administrations publiques, et l’excédent des ASSO ne le compense que très partiellement ;
– pour l’année 2024, l’excédent des ASSO se réduirait de 0,1 point de PIB, tandis que le solde des APUC s’améliorerait de 0,7 point et que celui des APUL serait stable, le solde public total se trouvant amélioré par l’effet conjugué de ces variations.
La prévision de dépense en milliards d’euros renseigne sur les ordres de grandeur pour chacun des sous-secteurs. En 2024, la dépense des APUL, d’un montant de 322 milliards d’euros, représenterait environ la moitié de celle des APUC, qui s’élèverait à 639 milliards d’euros, laquelle serait inférieure d’environ 16 % à la dépense des ASSO, elle-même d’un montant de 761 milliards d’euros.
B. une sensible réduction en volume de la dépense des administrations centrales
En complément des prévisions en valeur, l’article liminaire comprend la prévision de l’évolution en volume des dépenses des administrations publiques par sous-secteur. Cette mention paraît indispensable pour éclairer les variations constatées dans un contexte où une inflation de 2,6 % est prévue pour l’année 2024.
Après deux années de baisse, la dépense publique connaîtrait une progression en volume de 0,5 %, essentiellement sous l’effet de la progression de la dépense des ASSO. Celle-ci progresse effectivement de 1,7 %, tandis que la dépense des APUC diminuerait de 1,4 % en 2024, après avoir connu une baisse de 3,6 % en 2023. Il convient de noter que la dépense des APUL progresserait également, à hauteur de 0,9 % en 2024, après une hausse de 1 % en 2023.
III. des références à la programmation des finances publiques à actualiser
En application de l’article 1er H de la LOLF, l’article liminaire d’un projet de loi de finances doit rappeler les prévisions de la loi de programmation des finances publiques en vigueur pour l’année en question. C’est l’objet de la dernière colonne du tableau figurant au deuxième alinéa de cet article.
En l’absence d’une loi de programmation en vigueur, le projet de loi de finances pour 2024 reprend toutefois, à l'instar du projet de loi et de la loi de finances pour 2023, les prévisions figurant à l’article 3 du texte initial du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 ([8]), déposé le 22 septembre 2022.
Actuellement soumis, en nouvelle lecture, à l’examen du Sénat, ledit projet de loi de programmation des finances publiques pourrait être adopté avant que ne soit examiné en nouvelle lecture le projet de loi de finances pour 2024. Le cas échéant, il conviendra alors d’actualiser en conséquence la colonne concernée du tableau de l’article liminaire.
*
* *
PREMIÈRE PARTIE : CONDITIONS GÉNÉRALES
DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE PREMIER : DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I – Impôts et ressources autorisés
A – Autorisation de perception des impôts et produits
Article 1er
Autorisation de percevoir les impôts existants
Résumé du dispositif et effets principaux
L’article 1er du projet de loi de finances autorise la perception des ressources de l’État et des impositions de toutes natures affectées à des personnes morales autres que l’État.
Il prévoit également que, sous réserve de dispositions contraires, les dispositions fiscales du projet de loi de finances s’appliquent au 1er janvier 2024.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
Avant de rejeter la première partie du projet de loi de finances pour 2024, la commission a adopté cet article sans modification.
I. L’autorisation de percevoir les ressources publiques
Aux termes de l’article XIV de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, « tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement ». Découlant du principe ainsi posé en 1789, l’article 1er du projet de loi de finances de l’année renouvelle l’autorisation annuelle de percevoir les impôts, élément essentiel de la tradition démocratique en vertu de laquelle l’impôt n’est légitime que parce qu’il est librement consenti par la Nation. Il revient donc au Parlement d’exprimer ce consentement qui, par nature, doit être renouvelé régulièrement.
Compétence exclusive et obligatoire de la loi de finances de l’année, l’autorisation prévue par l’article 1er voit son champ précisé par le 1° du I de l’article 34 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ([9]), qui dispose que « la loi de finances de l’année autorise, pour l’année, la perception des ressources de l’État et des impositions de toutes natures affectées à des personnes morales autres que l’État ».
L’autorisation n’est accordée que pour l’année, conformément au principe constitutionnel d’annualité repris à l’article 1er de la LOLF. Elle vise non seulement les recettes fiscales mais également l’ensemble des autres ressources perçues en vue de financer le service public : revenus industriels et commerciaux, rémunérations de services rendus, fonds de concours, remboursements de prêts et d’avances, produits de cessions… Elle couvre les impositions de toutes natures affectées aux collectivités territoriales, aux établissements publics et aux organismes divers – publics ou privés – habilités à les percevoir. D’application générale, le principe d’annualité de l’impôt vise à protéger, par cette autorisation, l’ensemble des contribuables, quel que soit l’organisme bénéficiaire de l’imposition.
Cet article matérialise ainsi le monopole de la loi de finances sur l’autorisation de percevoir les impôts et les impositions de toutes natures. En particulier, c’est la loi de finances qui autorise le prélèvement des impositions de toutes natures affectées à la protection sociale et non la loi de financement de la sécurité sociale.
Pour que le consentement soit libre, encore faut-il qu’il soit éclairé. Les ressources perçues par l’État – recettes fiscales, recettes non fiscales et fonds de concours –, ainsi que les dépenses fiscales relatives aux impositions dont le produit est perçu par l’État, sont détaillées respectivement dans les premier et second tomes de l’annexe au projet de loi de finances relative aux évaluations des voies et moyens.
La liste des impositions affectées aux autres organismes publics et la présentation des prélèvements obligatoires par sous-secteur d’administration publique sont fournies respectivement par le premier tome de cette annexe et par le rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la nation prévu à l’article 50 de la LOLF.
Le dispositif de l’article 1er du projet de loi de finances comporte immuablement deux parties.
Le I autorise la perception des ressources de l’État et des impositions de toutes natures affectées à des personnes morales autres que l’État pendant l’année 2024.
Le II précise les modalités d’entrée en vigueur des dispositions fiscales de la loi de finances qui ne comportent pas de date d’application particulière : par défaut, elles s’appliquent à compter du 1er janvier 2024.
Deux exceptions sont traditionnellement prévues :
– l’une pour l’impôt sur les sociétés, qui prévoit en l’occurrence que celui-ci est dû sur les résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 2023, mention nécessaire en raison, d’une part, du fait que la date de clôture de l’exercice diffère d’une entreprise à l’autre et, d’autre part, du mode de recouvrement par acomptes et soldes de cet impôt direct ;
– l’autre pour l’impôt sur le revenu, la loi de finances s’appliquant à l’impôt dû au titre de l’année 2023 et des années suivantes.
La mise en place du prélèvement à la source pourrait conduire à l’extinction progressive de la deuxième exception. Celle-ci demeure cependant nécessaire car l’article 2 du projet de loi a pour objet de revaloriser les seuils et limites du barème de l’impôt sur le revenu de l’année 2023 afin de neutraliser les effets de l’inflation.
*
* *
Article 2
Indexation sur l’inflation du barème de l’impôt sur le revenu pour les revenus de 2023 et des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source
Résumé du dispositif et effets principaux
Le présent article procède à l’indexation :
– du montant des tranches de revenus du barème de l’impôt sur le revenu (IR) ainsi que de plusieurs seuils et plafonds intervenant dans le calcul de l’impôt, à hauteur de l’évolution des prix hors tabac anticipée pour 2023 par rapport à 2022, soit + 4,8 %. Le coût de la mesure est évalué à 6,1 milliards d’euros ;
– des limites des tranches des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source, soit le taux transmis à l’employeur dans les cas où l’administration n’est pas en mesure de calculer le taux personnalisé ou lorsque le contribuable en fait la demande, à hauteur de l’évolution de la limite supérieure de la première tranche du barème de l’IR.
Dernières modifications législatives intervenues
À l’exception d’une interruption pour l’imposition des revenus de 2011 et de 2012, les lois de finances initiales procèdent, chaque année, à l’indexation du barème de l’IR sur le taux d’inflation anticipé, afin de neutraliser les effets de l’inflation sur le niveau d’imposition à l’IR des ménages.
L’article 2 de la loi de finances pour 2022 a procédé à la revalorisation du barème de l’IR à hauteur de 5,4 %.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté, contre l’avis du Rapporteur général, un amendement de M. Lecamp (MODEM) et de plusieurs de ses collègues procédant à deux modifications du barème proposé par le présent article. La première modification porte sur le montant du plafond de la première tranche de l’IR qui est fixé à 11 380 euros au lieu des 11 294 euros prévus par le texte initial – soit une revalorisation de 5,6 % par rapport au montant de 2022 (et non plus de 4,8 %). La seconde modification conduit à supprimer les alinéas 7 et 8 qui prévoyaient l’indexation sur l’inflation estimée à 4,8 % des montants des seuils des quatrième et cinquième tranches. Ces deux seuils demeurent donc identiques à ceux en vigueur en 2022, soit 78 750 euros pour la quatrième tranche et 168 994 euros pour la cinquième et dernière tranche.
La commission a adopté l’article 2 ainsi modifié. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. L’état du droit
Traditionnellement, la loi de finances de l’année revalorise les seuils des différentes tranches du barème de l’impôt sur le revenu (IR) applicable aux revenus de l’année à hauteur du taux d’inflation des prix hors tabac. L’indexation du barème de l’IR sur l’évolution des prix s’est appliquée de façon quasi continue depuis 1969, de manière différenciée selon les tranches du barème dans un premier temps, puis de manière indifférenciée depuis 1981.
Bien qu’il ne relève d’aucune obligation législative, le principe de l’indexation annuelle du barème de l’IR sur l’évolution de l’inflation constitue une mesure plutôt consensuelle de modération de la pression fiscale reconduite, sauf exceptions limitées, chaque année en loi de finances initiale.
Dans le contexte économique et budgétaire contraint qui a suivi la crise de 2009, la dernière loi de finances rectificative pour 2011 ([10]) a procédé au gel des seuils du barème pour l’imposition des revenus de 2011 et des années suivantes, permettant ainsi des recettes supplémentaires de l’ordre de 1,6 milliard d’euros en 2012. La loi de finances pour 2013 ([11]) n’est pas revenue sur le gel et ce n’est qu’avec la loi de finances pour 2014 ([12]) que la pratique de l’indexation a été rétablie.
Après 2013, chaque loi de finances initiale a ainsi procédé à une revalorisation des tranches du barème de l’IR comme présenté par le tableau suivant.
ÉVOLUTION DU TAUX D’INFLATION ET DE L’INDEXATION DU BARÈME
DE L’IMPÔT SUR LE REVENU DEPUIS 2014
Année n |
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
Indexation du barème réalisée en PLF de l’année n (pour l’imposition des revenus de l’année n-1, en %) |
0,8 |
0,5 |
0,1 |
0,1 |
1 |
1,6 |
1 |
0,2 |
1,4 |
5,4 |
Coût de la mesure en année N (pertes de recettes d’IR, en M€) |
700 |
485 |
100 |
100 |
1 100 |
1 176 |
1 100 |
230 |
1 500 |
6 200 |
Source : commission des finances d’après les articles 2 des lois de finances initiales pour 2014 à 2023.
L’inflation constatée l’année n peut s’avérer légèrement différente du taux d’indexation du barème car il est établi sur la base des prévisions d’inflation arrêtées à l’été de l’année n, lors de l’élaboration du PLF pour l’année n+1. Au cours des dernières années, l’écart entre l’inflation anticipée et l’inflation constatée n’avait in fine jamais dépassé 0,1 point. Depuis 2021, cet écart demeure modéré mais peut s’accentuer du fait d’une accélération de l’inflation difficile à anticiper ex ante. La différence entre le taux de revalorisation du barème de l’IR et l’inflation a été de – 0,2 point en 2022 et de + 0,2 point en 2023 ([13]).
L’indexation du barème de l’IR n’a pas été remise en cause par la mise en place du prélèvement à la source : l’impôt sur le revenu est toujours liquidé l’année suivant celle de la perception des revenus du foyer fiscal suite à la déclaration annuelle obligatoire du contribuable. Lorsqu’un écart apparaît entre le montant d’impôt sur le revenu dû et l’impôt prélevé à la source, le solde est dû ou l’excédent est restitué. Ainsi, l’indexation réalisée dans la loi de finances de l’année n ajuste le barème de l’IR dû au titre des revenus de l’année n-1, déclarés en année n.
L’indexation du barème de l’IR sur l’évolution du niveau des prix permet de maintenir constante la pression fiscale qui pèse sur les contribuables, c’est-à-dire le rapport entre l’impôt dû et le revenu. Dit autrement, elle « neutralise » les effets liés à l’inflation sur le pouvoir d’achat des ménages.
A contrario, si le barème n’évoluait pas dans les mêmes proportions que le niveau des prix, l’impôt dû par les ménages dont les revenus ont augmenté au même rythme que l’inflation s’accroîtrait. La progressivité du barème impliquerait qu’une part plus importante de leurs revenus soit soumise au taux marginal le plus élevé auquel ils sont assujettis et leur taux marginal pourrait lui-même augmenter en cas de changement de tranche. Le poids de l’impôt acquitté par rapport aux revenus du ménage augmenterait en conséquence d’une année sur l’autre. L’indexation est donc une mesure favorable aux contribuables.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
A. L’indexation du barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation, à hauteur de 5,4 %
1. La revalorisation du barème de l’impôt sur le revenu
● Le 1° du B du I procède à l’indexation du barème de l’IR sur les revenus perçus ou réalisés en 2023 et déclarés en 2024, en revalorisant chacune des limites des tranches de 4,8 %. Ce taux correspond à l’évolution prévisionnelle de l’indice des prix hors tabac (IPCHT) en 2023 par rapport à 2022, qui figure dans le Rapport économique, social et financier annexé au présent PLF ([14]).
Comparaison des BARÈMEs DE L’IMPÔT SUR LE REVENU applicables aux revenus des années 2022 et 2023
Tranches de revenus 2022 |
Tranches de revenus 2023 |
Taux |
Jusqu’à 10 777 euros |
Jusqu’à 11 294 euros |
0 % |
10 777 euros – 27 478 euros |
11 295 euros – 28 797 euros |
11 % |
27 478 euros – 78 570 euros |
28 798 euros – 82 341 euros |
30 % |
78 570 euros – 168 994 euros |
82 341 euros – 177 106 euros |
41 % |
Fraction supérieure à 168 994 euros |
Fraction supérieure à 177 106 euros |
45 % |
Source : commission des finances
● L’indexation du barème est également une référence pour l’évolution d’autres types de montants conditionnant, selon les cas, une exonération ou une minoration d’imposition, ou encore le plafonnement d’un avantage fiscal. La législation fiscale prévoit ainsi que ces montants sont actualisés chaque année ou, pour certains, tous les trois ans, dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.
LISTE DES DISPOSITIFS DONT LES SEUILS, PLAFONDS OU ABATTEMENTS éVOLUENT
EN FONCTION DE LA REVALORISATION DU BARèME DE L’IR
Dispositifs |
Référence |
Impôt sur le revenu |
|
Seuils de chiffre d’affaires du régime de la micro-entreprise |
Article 50-0 du CGI * évolution triennale |
Seuils et plafonds applicables pour déterminer le régime d’imposition des exploitants agricoles |
Article 69 du CGI * évolution triennale |
Seuils et plafonds applicables pour déterminer le régime d’imposition des groupements agricoles d’exploitation en commun |
Article 71 du CGI * évolution triennale |
Abattement sur le bénéfice imposable des jeunes agriculteurs soumis à un régime réel d’imposition |
Article 73 B du CGI * évolution triennale |
Seuil et plafond de la déduction forfaitaire des frais professionnels du revenu brut |
3° de l’article 83 du CGI |
Seuil de recettes annuelles du régime déclaratif spécial |
1 de l’article 102 ter du CGI * évolution triennale |
Régime du micro-entrepreneur |
Article 151-0 du CGI |
Modalités d’imputation des déficits agricoles |
1° du I de l’article 156 |
Déductibilité du revenu global d’une somme représentative des avantages en nature des personnes âgées de plus de 75 ans vivant sous le toit du contribuable |
2° ter du II de l’article 156 du CGI |
Abattement forfaitaire sur le revenu en faveur des personnes modestes invalides ou âgées de plus de 65 ans |
article 157 bis du CGI |
Abattement applicable aux pensions et retraites |
a du 5 de l’article 158 |
Évaluation forfaitaire minimale du revenu imposable d’après certains éléments du train de vie |
1 de l’article 168 du CGI |
Retenue à la source spécifique sur les revenus salariaux et assimilés des contribuables non-résidents |
article 182 A du CGI |
Retenue à la source spécifique sur les sommes perçues par des contribuables non-résidents en contrepartie de prestations artistiques |
Article 182 A bis du CGI |
Application du taux minimum aux contribuables non-résidents |
Article 197 A du CGI |
Réduction d’impôt accordée au titre de certains dons faits par les particuliers |
1 ter de l’article 200 du CGI |
Grilles de taux par défaut du prélèvement à la source (voir infra) |
e du 1 du III de l’article 204 H du CGI |
Seuil de RFR associé au bénéfice du taux nul en matière de prélèvement à la source |
2 du II de l’article 204 H |
Seuil de chiffre d'affaires pour le régime simplifié d’imposition en bénéfices industriels et commerciaux (BIC) |
article 302 septies A bis *évolution triennale |
Fiscalité directe locale |
|
Plafonds pour les exonérations et dégrèvements de taxe foncière sur les propriétés bâties |
I, I bis, II de l’article 1417 du CGI |
Autres domaines fiscaux |
|
Barème de la taxe sur les salaires (TS) |
2 bis de l’article 231 du CGI |
Seuil de chiffre d’affaires pour la franchise en base ([15]) |
article 293 B du CGI |
Seuil de chiffre d'affaires pour le régime simplifié d’imposition en taxe sur la valeur ajoutée (TVA) |
article 302 septies A du CGI |
Exigibilité de la TS pour les associations |
article 1679 A du CGI |
Seuil de revenu imposable pour l’application d’une majoration de l’amende pour faits de flagrance fiscale |
Article 1740 B du CGI |
Source : commission des finances.
2. La revalorisation des plafonds applicables au quotient familial
La revalorisation des tranches du barème à hauteur de l’inflation s’accompagne de celle des différents montants utilisés pour le calcul de l’impôt s’agissant de l’avantage retiré du quotient familial.
Visant à corriger la progressivité du barème de l’impôt en fonction de la situation de famille et des charges du foyer fiscal, le quotient familial a pour conséquence d’alléger, à revenu égal, la charge fiscale pesant sur les familles par rapport à celle des redevables taxés sur un nombre inférieur de parts, en permettant d’imposer les revenus ainsi fractionnés dans des tranches plus basses.
Depuis la loi de finances pour 1982, l’avantage fiscal qui résulte de l’application du quotient familial est plafonné, de sorte que, pour les contribuables soumis au plafonnement, cet avantage tend à diminuer, en valeur relative par rapport à l’impôt dû, à mesure que le revenu augmente. Ainsi, le plafonnement bénéficie plus fortement aux contribuables dont les revenus sont les moins élevés.
Le 2° du B du I du présent article procède à l’indexation des plafonds de l’avantage retiré de l’application des différentes parts et demi-parts qui composent le quotient familial.
INDEXATION DE PLAFONDS ASSOCIÉS AU CALCUL DE L’IMPÔT SUR LE REVENU
(en euros)
Objet de la limite ou du seuil |
Pour l’imposition des revenus de 2022 |
Pour l’imposition des revenus de 2023 |
Plafond de l’avantage retiré de chaque demi-part de droit commun de quotient familial |
1 678 |
1 759 |
Plafond de l’avantage retiré de la part entière de quotient familial accordée au titre du premier enfant à charge des personnes vivant seules en application du II de l’article 194 du CGI |
3 959 |
4 149 |
Plafond de l’avantage retiré de la demi-part accordée aux personnes célibataires, divorcées ou veuves sans personne à charge ayant élevé seules pendant au moins cinq ans un ou plusieurs enfants en application des a, b et e du 1 de l’article 195 du CGI |
1 002 |
1 050 |
Plafond de la réduction d’impôt complémentaire au titre de la demi-part supplémentaire accordée à raison de la qualité d’ancien combattant ou de la situation d’invalidité d’un des membres du foyer fiscal en application des c, d, d bis et f du 1 et des 2 à 6 de l’article 195 du CGI |
1 673 |
1 753 |
Plafond de la réduction d’impôt complémentaire au titre de la part supplémentaire accordée aux contribuables veufs ayant au moins un enfant à charge en application du I de l’article 194 du CGI |
1 868 |
1 958 |
Source : commission des finances.
Par ailleurs, le rattachement au foyer fiscal d’un enfant majeur marié, pacsé ou chargé de famille, de moins de vingt et un ans ou de moins de vingt-cinq ans s’il poursuit ses études, ouvre droit à un abattement sur le revenu imposable, en application de l’article 196 B du CGI. Le A du I du présent article fixe le montant de l’abattement à 6 674 euros pour l’imposition des revenus de 2023.
3. La revalorisation de la décote
En deçà d’un certain montant, l’impôt brut résultant du barème progressif fait l’objet d’une décote après l’application éventuelle du plafonnement des effets du quotient familial et avant la prise en compte des réductions et crédits d’impôt. Ce mécanisme permet de lisser l’entrée dans le barème de l’IR pour les ménages aux ressources modestes.
Son montant est égal à la différence entre, d’une part, 833 euros pour les contribuables célibataires, divorcés ou veufs, ou 1 378 euros pour les couples mariés ou pacsés, soumis à une imposition commune et, d’autre part, 45,25 % du montant de l’impôt brut issu de l’application du barème progressif après le plafonnement des effets du quotient familial.
Les montants associés à la décote sont fixés au a du 4 de l’article 197 du CGI et évoluent traditionnellement chaque année dans les mêmes proportions que la limite supérieure de la première tranche du barème de l’IR.
Le 3° du B du I du présent article procède à l’indexation de la décote, en portant son montant à 873 euros dans le premier cas et à 1 444 euros dans le second.
Par conséquent, pour les revenus réalisés ou perçus en 2023, la décote trouverait à s’appliquer tant que l’impôt issu du barème serait inférieur à 1 929 euros pour une personne célibataire, divorcée ou veuve et inférieur à 3 191 euros pour les contribuables soumis à une imposition commune.
Ainsi, le montant d’imposition brut d’un célibataire dont le revenu imposable au titre de l’année 2023 s’élèverait à 25 000 euros serait de 1 508 euros ([16]). La décote serait de 191 euros ([17]). Le montant d’imposition dû après l’application de la décote serait de 1 317 euros ([18]).
B. La revalorisation des grilles de taux par défaut applicables pour les revenus perçus ou réalisÉs à compter du 1er janvier 2024
Le taux de la retenue à la source que doivent effectuer les collecteurs est calculé par l’administration fiscale selon les modalités définies à l’article 204 H du CGI. Toutefois, lorsque le débiteur ne dispose pas du taux individualisé ou lorsque l’administration n’est pas en mesure de transmettre un taux suffisamment « à jour » de la situation fiscale du contribuable, il est fait application des grilles de taux dit « par défaut », prévues aux a à c du III de l’article 204 H du CGI.
Trois grilles, respectivement applicables aux contribuables domiciliés en métropole (a du 1 du III), en Guadeloupe, à La Réunion et en Martinique (b du 1 du III), en Guyane et à Mayotte (c du 1 du III), précisent le taux applicable pour chaque tranche de base mensuelle de prélèvement. Les grilles spécifiques établies pour ces territoires ultra-marins tiennent compte des effets de la réduction de 30 % ou 40 %, selon les cas, qui s’y applique.
Les 1° à 3° du C du I du présent article procèdent à une revalorisation des montants retenus pour les bases mensuelles de prélèvement, dans les limites inscrites dans les tableaux ci-dessous.
GRILLE DU TAUX « PAR DÉFAUT » POUR LES CONTRIBUABLES DOMICILIÉS
EN MÉTROPOLE
Base mensuelle de prélèvement actuelle |
Base mensuelle de prélèvement proposée |
Taux proportionnel |
Inférieure à 1 518 € |
Inférieure à 1 591 € |
0 % |
Supérieure ou égale à 1 518 € et inférieure à 1 577 € |
Supérieure ou égale à 1 591 € et inférieure à 1 653 € |
0,5 % |
Supérieure ou égale à 1 577 € et inférieure à 1 678 € |
Supérieure ou égale à 1 653 € et inférieure à 1 759 € |
1,3 % |
Supérieure ou égale à 1 678 € et inférieure à 1 791 € |
Supérieure ou égale à 1 759 € et inférieure à 1 877 € |
2,1 % |
Supérieure ou égale à 1 791 € et inférieure à 1 914 € |
Supérieure ou égale à 1 877 € et inférieure à 2 006 € |
2,9 % |
Supérieure ou égale à 1 914 € et inférieure à 2 016 € |
Supérieure ou égale à 2 006 € et inférieure à 2 113 € |
3,5 % |
Supérieure ou égale à 2 016 € et inférieure à 2 150 € |
Supérieure ou égale à 2 113 € et inférieure à 2 253 € |
4,1 % |
Supérieure ou égale à 2 150 € et inférieure à 2 544 € |
Supérieure ou égale à 2 253 € et inférieure à 2 666 € |
5,3 % |
Supérieure ou égale à 2 544 € et inférieure à 2 912 € |
Supérieure ou égale à 2 666 € et inférieure à 3 052 € |
7,5 % |
Supérieure ou égale à 2 912 € et inférieure à 3 317 € |
Supérieure ou égale à 3 052 € et inférieure à 3 476 € |
9,9 % |
Supérieure ou égale à 3 317 € et inférieure à 3 734 € |
Supérieure ou égale à 3 476 € et inférieure à 3 913 € |
11,9 % |
Supérieure ou égale à 3 734 € et inférieure à 4 357 € |
Supérieure ou égale à 3 913 € et inférieure à 4 566 € |
13,8 % |
Supérieure ou égale à 4 357 € et inférieure à 5 224 € |
Supérieure ou égale à 4 566 € et inférieure à 5 475 € |
15,8 % |
Supérieure ou égale à 5 224 € et inférieure à 6 537 € |
Supérieure ou égale à 5 475 € et inférieure à 6 851 € |
17,9 % |
Supérieure ou égale à 6 537 € et inférieure à 8 165 € |
Supérieure ou égale à 6 851 € et inférieure à 8 557 € |
20 % |
Supérieure ou égale à 8 165 € et inférieure à 11 333 € |
Supérieure ou égale à 8 557 € et inférieure à 11 877 € |
24 % |
Supérieure ou égale à 11 333 € et inférieure à 15 349 € |
Supérieure ou égale à 11 877 € et inférieure à 16 086 € |
28 % |
Supérieure ou égale à 15 349 € et inférieure à 24 094 € |
Supérieure ou égale à 16 086 € et inférieure à 25 251 € |
33 % |
Supérieure ou égale à 24 094 € et inférieure à 51 611 € |
Supérieure ou égale à 25 251 € et inférieure à 54 088 € |
38 % |
Supérieure ou égale à 51 611 € |
Supérieure ou égale à 54 088 € |
43 % |
Source : commission des finances d’après le présent article.
GRILLE DU TAUX « PAR DÉFAUT » POUR LES CONTRIBUABLES DOMICILIÉS
EN GUADELOUPE, À LA RÉUNION ET EN MARTINIQUE
Base mensuelle de prélèvement actuelle |
Base mensuelle de prélèvement proposée |
Taux proportionnel |
Inférieure à 1 741 € |
Inférieure à 1 825 € |
0 % |
Supérieure ou égale à 1 741 € et inférieure à 1 847 € |
Supérieure ou égale à 1 825 € et inférieure à 1 936 € |
0,5 % |
Supérieure ou égale à 1 847 € et inférieure à 2 035 € |
Supérieure ou égale à 1 936 € et inférieure à 2 133 € |
1,3 % |
Supérieure ou égale à 2 035 € et inférieure à 2 222 € |
Supérieure ou égale à 2 133 € et inférieure à 2 329 € |
2,1 % |
Supérieure ou égale à 2 222 € et inférieure à 2 454 € |
Supérieure ou égale à 2 329 € et inférieure à 2 572 € |
2,9 % |
Supérieure ou égale à 2 454 € et inférieure à 2 588 € |
Supérieure ou égale à 2 572 € et inférieure à 2 712 € |
3,5 % |
Supérieure ou égale à 2 588 € et inférieure à 2 677 € |
Supérieure ou égale à 2 712 € et inférieure à 2 805 € |
4,1 % |
Supérieure ou égale à 2 677 € et inférieure à 2 945 € |
Supérieure ou égale à 2 805 € et inférieure à 3 086 € |
5,3 % |
Supérieure ou égale à 2 945 € et inférieure à 3 641 € |
Supérieure ou égale à 3 086 € et inférieure à 3 816 € |
7,5 % |
Supérieure ou égale à 3 641 € et inférieure à 4 659 € |
Supérieure ou égale à 3 816 € et inférieure à 4 883 € |
9,9 % |
Supérieure ou égale à 4 659 € et inférieure à 5 292 € |
Supérieure ou égale à 4 883 € et inférieure à 5 546 € |
11,9 % |
Supérieure ou égale à 5 292 € et inférieure à 6 130 € |
Supérieure ou égale à 5 546 € et inférieure à 6 424 € |
13,8 % |
Supérieure ou égale à 6 130 € et inférieure à 7 344 € |
Supérieure ou égale à 6 424 € et inférieure à 7 697 € |
15,8 % |
Supérieure ou égale à 7 344 € et inférieure à 8 165 € |
Supérieure ou égale à 7 697 € et inférieure à 8 557 € |
17,9 % |
Supérieure ou égale à 8 165 € et inférieure à 9 280 € |
Supérieure ou égale à 8 557 € et inférieure à 9 725 € |
20 % |
Supérieure ou égale à 9 280 € et inférieure à 12 761 € |
Supérieure ou égale à 9 725 € et inférieure à 13 374 € |
24 % |
Supérieure ou égale à 12 761 € et inférieure à 16 956 € |
Supérieure ou égale à 13 374 € et inférieure à 17 770 € |
28 % |
Supérieure ou égale à 16 956 € et inférieure à 25 880 € |
Supérieure ou égale à 17 770 € et inférieure à 27 122 € |
33 % |
Supérieure ou égale à 25 880 € et inférieure à 56 568 € |
Supérieure ou égale à 27 122 € et inférieure à 59 283 € |
38 % |
Supérieure ou égale à 56 568 € |
Supérieure ou égale à 59 283 € |
43 % |
Source : commission des finances d’après le présent article.
GRILLE DU TAUX « PAR DÉFAUT » POUR LES CONTRIBUABLES DOMICILIÉS
EN GUYANE ET À MAYOTTE
Base mensuelle de prélèvement actuelle |
Base mensuelle de prélèvement proposée |
Taux proportionnel |
Inférieure à 1 865 € |
Inférieure à 1 955 € |
0 % |
Supérieure ou égale à 1 865 € et inférieure à 2 016 € |
Supérieure ou égale à 1 955 € et inférieure à 2 113 € |
0,5 % |
Supérieure ou égale à 2 016 € et inférieure à 2 248 € |
Supérieure ou égale à 2 113 € et inférieure à 2 356 € |
1,3 % |
Supérieure ou égale à 2 248 € et inférieure à 2 534 € |
Supérieure ou égale à 2 356 € et inférieure à 2 656 € |
2,1 % |
Supérieure ou égale à 2 534 € et inférieure à 2 632 € |
Supérieure ou égale à 2 656 € et inférieure à 2 758 € |
2,9 % |
Supérieure ou égale à 2 632 € et inférieure à 2 722 € |
Supérieure ou égale à 2 758 € et inférieure à 2 853 € |
3,5 % |
Supérieure ou égale à 2 722 € et inférieure à 2 811 € |
Supérieure ou égale à 2 853 € et inférieure à 2 946 € |
4,1 % |
Supérieure ou égale à 2 811 € et inférieure à 3 123 € |
Supérieure ou égale à 2 946 € et inférieure à 3 273 € |
5,3 % |
Supérieure ou égale à 3 123 € et inférieure à 4 310 € |
Supérieure ou égale à 3 273 € et inférieure à 4 517 € |
7,5 % |
Supérieure ou égale à 4 310 € et inférieure à 5 578 € |
Supérieure ou égale à 4 517 € et inférieure à 5 846 € |
9,9 % |
Supérieure ou égale à 5 578 € et inférieure à 6 291 € |
Supérieure ou égale à 5 846 € et inférieure à 6 593 € |
11,9 % |
Supérieure ou égale à 6 291 € et inférieure à 7 300 € |
Supérieure ou égale à 6 593 € et inférieure à 7 650 € |
13,8 % |
Supérieure ou égale à 7 300 € et inférieure à 8 031 € |
Supérieure ou égale à 7 650 € et inférieure à 8 416 € |
15,8 % |
Supérieure ou égale à 8 031 € et inférieure à 8 897 € |
Supérieure ou égale à 8 416 € et inférieure à 9 324 € |
17,9 % |
Supérieure ou égale à 8 897 € et inférieure à 10 325 € |
Supérieure ou égale à 9 324 € et inférieure à 10 821 € |
20 % |
Supérieure ou égale à 10 325 € et inférieure à 13 891 € |
Supérieure ou égale à 10 821 € et inférieure à 14 558 € |
24 % |
Supérieure ou égale à 13 891 € et inférieure à 17 669 € |
Supérieure ou égale à 14 558 € et inférieure à 18 517 € |
28 % |
Supérieure ou égale à 17 669 € et inférieure à 28 317 € |
Supérieure ou égale à 18 517 € et inférieure à 29 676 € |
33 % |
Supérieure ou égale à 28 317 € et inférieure à 59 770 € |
Supérieure ou égale à 29 676 € et inférieure à 62 639 € |
38 % |
Supérieure ou égale à 59 770 € |
Supérieure ou égale à 62 639 € |
43 % |
Source : commission des finances d’après le présent article.
Le II du présent article prévoit que ces modifications des grilles de taux par défaut seront applicables aux revenus perçus ou réalisés à compter du 1er janvier 2024.
III. L’IMPACT DE LA MESURE
Le coût budgétaire de la revalorisation du barème de l’impôt sur le revenu et des seuils et limites qui lui sont associés est chiffré à 6,1 milliards d’euros pour l’année 2024, au titre des moindres recouvrements de recettes d’impôt sur le revenu pour l’État. Dans un contexte d’inflation encore élevée, ce coût se rapproche de celui évalué pour l’exercice actuel, soit 6,2 milliards d’euros à la suite d’une revalorisation de + 5,4 % du barème applicable aux revenus de l’année 2022. Il est sans commune mesure avec la revalorisation au titre de l’exercice 2021 durant lequel l’indexation sur l’inflation du barème à hauteur d’1,4 % avait coûté 230 millions d’euros.
Le maintien de la revalorisation du barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation est donc un choix fort du Gouvernement pour :
– d’une part, maintenir le pouvoir d’achat des ménages dont le niveau de revenus augmente à la même vitesse que l’inflation puisqu’une absence de revalorisation conduirait à alourdir la pression fiscale sur ces ménages. Environ 1,4 million de ménages seraient dans cette situation d’après les informations données par le Gouvernement au Rapporteur général – parmi eux, 767 000 ménages deviendraient non imposés grâce à l’indexation du barème ;
– et, d’autre part, soutenir le pouvoir d’achat des ménages dont le niveau de revenu stagne ou évolue moins rapidement que l’inflation puisque cette revalorisation se traduira par une diminution de leur niveau d’imposition. Ainsi, le Gouvernement a indiqué au Rapporteur général que 20,3 millions de ménages bénéficieraient d’une diminution de leur impôt en 2023.
impact de la revalorisation du barème de l’IR sur les foyers fiscaux
en fonction de leur taux marginal d’imposition
(en milliers)
Taux du barème de l’IR |
Nombre de foyers fiscaux imposés à cotisation constante |
Nombre de foyers fiscaux imposés bénéficiant d’une baisse de leur cotisation |
0 % |
767 |
30 |
11 % |
631 |
12 606 |
30 % |
11 |
7 071 |
41 % |
1 |
473 |
45 % |
ɛ |
70 |
Total |
1 410 |
20 250 |
Nota : les contribuables relevant du taux barème à 0 % disposent de revenus soumis à taux forfaitaire ou proportionnel, notamment au PFU, et sont imposés à ce titre.
Source : réponses du Gouvernement au Rapporteur général.
*
* *
Article 3
Régime fiscal du plan d’épargne avenir climat
Résumé du dispositif et effets principaux
Le présent article instaure le régime fiscal du plan d’épargne avenir climat (PEAC) prévu par l’article 16 du projet de loi relatif à l’industrie verte.
– les gains tirés du PEAC sont exonérés du prélèvement forfaitaire unique sur les revenus des capitaux mobiliers et n’entrent pas en compte dans la détermination du revenu net imposable. Ils sont toutefois intégrés au calcul du revenu fiscal de référence ;
– pour le calcul des plus-values de cession ultérieure, la valeur d’acquisition des titres issus du PEAC à la suite d’un retrait ou de la clôture de ce plan correspond à la valeur de ce titre le jour de l’un ou de l’autre de ces évènements.
Le présent article supprime également la possibilité pour les mineurs d’ouvrir un plan d’épargne retraite (PER) individuel. Pour ceux d’entre eux qui en détiendraient déjà, aucun versement ne pourra plus être effectué à compter du 1er janvier 2024.
Dernières modifications législatives intervenues
L’article 16 du projet de loi relatif à l’industrie verte instaure le PEAC aux article L. 221-34-2 à L. 221-34-4 du code monéraire et financier, un nouveau produit d’épargne finançant la transition écologique, exclusivement réservé aux personnes âgées de moins de 21 ans.
Les PER ont été créés par l’article 71 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte) et ont vocation à remplacer progressivement les produits antérieurs (Perco, contrats « Madelin », Perp et autres produits assimilés).
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté, contre l’avis du Rapporteur général, un amendement de M. Michel Castellani (LIOT) demandant au Gouvernement de remettre au Parlement, avant le 30 juin 2025, un rapport d’évaluation du plan d’épargne avenir climat estimant le coût de ce produit d’épargne pour les administrations publiques.
La commission a adopté l’article 3 ainsi modifié. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. L’État du droit
A. Le plan d’Épargne avenir climat
L’article 16 du projet de loi relatif à l’industrie verte crée un nouveau produit d’épargne exclusivement réservé aux mineurs et aux jeunes jusqu’à vingt-et-un ans, le plan d’épargne avenir climat (PEAC). Les versements effectués sur ce plan seront principalement alloués au financement de l’économie productive et de la transition écologique.
L’objectif de ce nouveau produit financier est d’offrir une solution d’épargne aux mineurs en meilleure adéquation avec les opportunités offertes par leur profil d’investissement de long terme ainsi qu’avec leurs aspirations en matière d’emploi de cette épargne dont l’encours représentait environ 40 milliards d’euros en 2021 ([19]).
● Les conditions d’ouverture du PEAC sont régies par un nouvel article L. 221-34-2 du code monétaire et financier.
Réservé aux personnes de moins de vingt-et-un ans résidant habituellement en France, ce produit pourra être proposé par des établissements de crédit, des entreprises d’investissement ou d’assurance, des mutuelles et des institutions de prévoyance.
Le PEAC pourra recevoir des versements en numéraire, dans la limite d’un plafond global fixé par un arrêté du ministre chargé de l’économie. Lors de l’examen en séance de l’article 16 du projet de loi relatif à l’industrie verte à l’Assemblée nationale, le Gouvernement, a précisé que ce plafond serait fixé au même niveau que celui du livret A, soit 22 950 euros actuellement ([20]).
● Le nouvel article L. 221-34-3 du code monétaire et financier (CMF) encadre la destination des versements effectués sur le PEAC.
Les fonds collectés seront affectés à l’acquisition de titres financiers contribuant au financement de la transition écologique, d’instruments financiers bénéficiant de niveaux faibles d’exposition aux risques et d’obligations vertes.
Sauf décision contraire et expresse du titulaire, le plan d’épargne avenir climat fera l’objet d’une gestion pilotée avec une désensibilisation progressive aux risques, en fonction de l’horizon de déblocage des sommes. En l’absence de garantie de l’État, cette stratégie d’investissement inspirée de celle du PER permet d’offrir une forme de protection au capital investi.
● Les modalités de sortie du plan d’épargne avenir climat sont régies par le nouvel article L. 221-34-4 du CMF.
Cet article prévoit que jusqu’aux dix-huit ans du titulaire du plan, les droits constitués sont bloqués. Lorsque le titulaire a atteint l’âge de dix-huit ans et que son plan a été ouvert depuis plus de cinq ans, plus aucun versement n’est possible mais les retraits partiels de sommes ou de valeurs par le titulaire n’entrainent pas la clôture du plan qui est automatique lorsque celui-ci atteint l’âge de trente ans.
L’étude d’impact de l’article 16 du projet de loi relatif à l’industrie verte avait pris pour hypothèse que le PEAC pourrait avoir le même rendement annuel qu’un placement diversifié en actions avec une maturité de quinze à vingt ans, soit 5 %.
B. ÉlÉments relatifs À La fiscalitÉ des gains en capital réalisÉs par des particuliers
Les produits de portefeuille-titres et des placements financiers des particuliers, dont fait partie le plan d’épargne avenir climat, relèvent de la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au regard de l’impôt sur le revenu (IR).
Parmi les produits d’épargne accessibles aux mineurs figure le plan d’épargne retraite (PER). Les avantages fiscaux associés aux PER donneraient lieu à des stratégies d’optimisation fiscale dans le cas où ils sont détenus par des mineurs.
1. L’imposition des revenus mobiliers
● La base d’imposition de l’IR est constituée du revenu net global dont dispose chaque année le contribuable (article 1er A du code général des impôts - CGI). Il s’obtient en déterminant d’abord les revenus nets des diverses catégories de revenus (revenus fonciers, bénéfices industriels et commerciaux, traitements et salaires, revenus des capitaux mobiliers, etc…) qui peuvent être imposés selon des règles propres à chacune d’elle, puis en retranchant au total de ces revenus catégoriels les déficits, charges et abattements à déduire du revenu global. 157 du CGI énumère les éléments n’entrant pas en compte pour la détermination du revenu net global.
● Le I de l’article 150-0 A du CGI définit le régime de droit commun d’imposition à l’IR des gains en capital réalisés par les particuliers dans le cadre de la gestion à titre non professionnel d’un portefeuille de titres. Sous réserve de régimes spécifiques énumérés au III de cet article, ils sont soumis à un prélèvement forfaitaire unique (PFU). Aussi appelé « flat tax », le PFU consiste en une imposition à l’IR à un taux forfaitaire unique de 12,8 % auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux de 17,2 %, soit une taxation globale de 30 % (article 200 A du CGI). Les contribuables y ayant intérêt peuvent toutefois opter pour le barème progressif de l’IR.
● L’article 150-0 D du CGI détaille les différents éléments permettant de déterminer les gains de cessions mentionnés au I du 150-0 A en définissant le prix de cession ainsi que le prix d’acquisition des valeurs, titres ou droits acquis ou souscrits puis cédés.
Les 11 et 12 de l’article 150-0 D prévoient que, sauf exception prévues par le a et le b du 12, les moins-values subies au cours d’une année sont imputées exclusivement sur les plus-values de même nature imposables au titre de la même année.
2. Le revenu fiscal de référence
Le revenu fiscal de référence (RFR) est défini au IV de l’article 1417 du CGI. Le montant de revenu à prendre en considération pour le calcul du RFR comprend les revenus et les plus-values retenus pour l’établissement de l’IR,majorés, le cas échéant, de certains revenus exonérés ou soumis à prélèvement libératoire et de certaines charges déductibles du revenu global.
Le RFR permet d’apprécier le montant global des revenus du contribuable qu’il soit redevable de l’IR ou non. Il permet de déterminer l’éligibilité à certaines aides sociales (bourse des collèges, attribution d’un logement social) et certains avantages fiscaux (exonérations d’impôts locaux). Il sert de base d’imposition à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.
3. Des stratégies d’optimisation fiscale associées aux PER ouverts pour les mineurs
Le plan d’épargne retraite (PER) est un produit d’épargne retraite permettant aux personnes physiques de se constituer des droits à retraite supplémentaire par rapport au régime de retraite légal obligatoire.
Une des principales caractéristiques fiscales du PER est la possibilité offerte au contribuable de déduire de l’assiette de l’IR les versements réalisés sur son plan. Cette déductibilité est plafonnée et s’opère selon les cas au niveau du revenu catégoriel ou au niveau du revenu global.
En particulier, les versements volontaires aux PER individuels (1°de l’article L. 224-2 du code monétaire et financier) sont déductibles du revenu imposable global dans la limite d’un plafond annuel et individuel (article 163 quatervicies du CGI).
Or, le CMF ne fixe actuellement pas d’âge minimal pour souscrire un plan d’épargne retraite individuel (articles L. 224-28 et suivants), permettant son ouverture pour un mineur. Ainsi, les cotisations versées par des parents sur un PER ouvert au profit de leur enfant membre du foyer fiscal doivent être regardées comme des versements volontaires de l’enfant et sont, en conséquence, déductibles du revenu global du foyer fiscal.
D’après l’évaluation préalable du présent article, l’élargissement du plafond de déductibilité des versements de l’assiette de l’IR du foyer permis par l’accessibilité du PER aux mineurs, donne lieu à des comportements d’optimisation fiscale.
II. Le Dispositif proposÉ
Le I du présent article détermine un régime fiscal pour le plan d’épargne avenir climat tandis que le II ferme l’accès du plan d’épargne retraite aux mineurs à compter du 1er janvier 2024.
Le projet de loi relatif à l’industrie verte n’étant pas encore promulgué, le A du III du présent article prévoit une entrée en vigueur du I identique à celle de son article 16.
A. Le rÉgime fiscal du plan d’Épargne avenir Climat
● Après avoir précisé le mode de calcul des gains nets tirés du PEAC, le 1° du I du présent article exclut ces gains des revenus de capitaux mobiliers soumis au PFU. Pour cela, il ajoute ces gains à la liste des exceptions à l’imposition dans la catégorie des revenus mobiliers fixée au III de l’article 150-0 A du CGI. Les plus-values réalisées et les dividendes enregistrés chaque année dans le cadre du PEAC sont donc exonérées d’IR et de prélèvements sociaux.
● Le 2° du I du présent article complète l’article 150-0 D du CGI qui détaille les modalités de calcul des gains de cessions de valeurs, de titres ou de droits acquis ou souscrits puis cédés qui constituent des revenus mobiliers.
Le a de ce même 2° créé un 5 bis au sein de l’article 150-0 D qui envisage le cas d’une cession de titres issus du PEAC après un retrait ou la clôture de ce plan. Dans cette hypothèse, le prix d’acquisition de ces titres est réputé être égal à la valeur d’acquisition à la date dudit retrait ou de ladite clôture et non à la date de l’acquisition initiale dans le cadre du PEAC.
Le b de ce même 2° prévoit que les moins-values constatées dans un PEAC ne peuvent venir en diminution des plus-values de même nature imposables au titre de la même année au termes des 11 et 12 de l’article 150-0 D.
● Le 3° du I du présent article ajoute les produits et plus-values de placements retirés d’un PEAC à la liste des éléments, énumérés à l’article 157 du CGI, n’entrant pas en compte dans la détermination du revenu net global.
● Le 4° du I du présent article prévoit que les titres acquis dans le cadre du PEAC ne sont pas éligibles aux réductions d’impôts prévues aux articles 199 terdecies-0 et 199 terdecies-0 AB du CGI. Il s’agit de réductions d’impôt accordées aux redevables de l’IR qui effectuent des versements au titre de la souscription en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de certaines sociétés respectivement non cotées (dispositif « Madelin » ou immobilières, dites « sociétés foncières solidaires » exerçant leur activité dans le domaine du logement social ou à vocation agricole, en faveur d’un public fragile). Ces réductions d’impôt ne peuvent pas concerner, dans le droit en vigueur, des titres figurant dans un plan d’épargne en actions, un compte PME innovation, un plan d’épargne salariale ou un plan d’épargne retraite.
● Enfin, le 5° du I du présent article intègre les gains nets enregistrés au titre du PEAC à la liste des éléments majorant le revenu net imposable pour déterminer le revenu fiscal de référence qui figure au 1° du IV de l’article 1417 du CGI.
B. Suppression de la possibilitÉ offerte aux mineurs d’ouvrir un Plan d’Épargne retraite
Le II du présent article opère deux modifications au code monétaire financier dont l’entrée en vigueur est prévue au 1er janvier 2024 par le B du III du présent article.
Le 1° du II du présent article introduit un nouvel alinéa à l’article L. 224-2 du CMF qui prévoit que les PER détenus actuellement par des mineurs ne pourront plus recevoir de versements après le 1er janvier 2024.
Le 2 ° du II du présent article insère un nouvel alinéa à l’article L. 224-28 du CMF qui impose que seul un majeur pourra ouvrir un PER après cette même date.
C. Impact budgÉtaire
L’étude d’impact de l’article 16 du projet de loi relatif à l’industrie avait calculé le manque à gagner lié à l’exonération d’IR et de prélèvements sociaux des plus-values résultants des versements dans le PEAC. Pour cela, l’hypothèse de 677 000 ouvertures de comptes annuels a été retenue et trois scénarios d’abondement de ces comptes ont été envisagés. Selon les scénarios, le manque à gagner pour le budget de l’État est estimé entre 10 et 17 millions d’euros par an.
Évaluation du manque à gagner liÉ à l’exonÉration d’impÔt sur le revenu et de prÉlÈvements sociaux du PEAC
(en millions d’euros)
|
Scénario 1 |
Scénario 2 |
Scénario 3 |
Montant des versements annuels |
682 |
899 |
1 140 |
Exonération de prélèvement forfaitaire obligatoire |
10 |
13 |
17 |
Source : étude d’impact de l’article 16 du projet de loi relatif à l’industrie verte.
Par ailleurs, d’après l’évaluation préalable du présent article, la suppression de la possibilité pour les mineurs d’ouvrir un PER engendrerait un gain budgétaire pour l’État de l’ordre de 3,5 millions d’euros.
*
* *
Article 4
Transposition de la directive (UE) 2022/2523 du 14 décembre 2022
visant à assurer un niveau minimum d’imposition mondial pour les groupes d’entreprises multinationales et les groupes nationaux de grande envergure
Résumé du dispositif proposé
Le présent article transpose les dispositions de la directive (UE) 2022/2523 du Conseil du 14 décembre 2022 visant à assurer un niveau minimum d’imposition mondial pour les groupes d’entreprises multinationales et les groupes nationaux de grande envergure dans l’Union.
Cette directive transpose elle-même les dispositions du « modèle de règles globales anti-érosion de la base d’imposition » (GloBE), connu sous le nom de « pilier 2 », adopté par 136 pays membres du Cadre inclusif de l’OCDE et du G20 en octobre 2021 et publié le 20 décembre 2021.
Cet accord, qui s’inscrit dans la continuité des travaux menés dans le cadre du projet BEPS (Base erosion profit shifting), constitue le premier résultat de la solution à deux piliers négociée par les membres du Cadre inclusif pour limiter l’érosion des bases d’imposition des bénéfices des entreprises dans un contexte de numérisation croissante de l’économie.
Le présent article institue une règle d’imposition minimale des profits perçus au niveau mondial par les groupes multinationaux et nationaux de grande envergure implantés en France à un taux minimal effectif de 15 % – sous réserve que ces groupes enregistrent un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions d’euros. Cette réforme conduit à instituer un régime d’imposition qui se superpose aux règles d’imposition des bénéfices applicables en droit national.
L’économie générale de l’accord conclu par le Cadre inclusif repose sur une « approche descendante » visant à résoudre les situations de sous-imposition en prélevant un impôt le plus haut possible dans la chaîne de détention d’un groupe d’entreprises. Cette caractéristique a pour objectif de limiter les cas de double imposition et les possibilités d’échapper à l’impôt complémentaire.
Ce nouveau régime d’imposition permet ainsi de prélever un impôt complémentaire auprès des entités mères ultimes des groupes multinationaux et nationaux de grande envergure implantés en France pour leurs entités constitutives sous-imposées à l’échelle de l’État (autrement dit de « la juridiction ») où elles sont situées, y compris en France. Dans certains cas, cet impôt pourra être directement prélevé auprès des entités intermédiaires ou entités partiellement détenues de ces groupes. À cette fin, le présent article définit des règles permettant de déterminer l’assiette imposable, le taux, le montant et le redevable de l’impôt complémentaire. Il définit également les obligations déclaratives des groupes multinationaux.
Le taux effectif d’imposition est déterminé en comparant l’ensemble des impôts assis sur les bénéfices (ou une base équivalente) acquittés par les entités constitutives d’un groupe situées dans une même juridiction et la somme de leurs résultats « qualifiés ». Ces résultats sont déterminés à partir des états financiers consolidés du groupe, auxquels sont appliqués plusieurs retraitements.
En cas de sous-imposition, deux mécanismes s’appliquent :
– de manière prioritaire, la règle d’inclusion du revenu (RIR) permet de mettre à la charge d’une entité mère d’un groupe national ou multinational un impôt complémentaire ;
– de manière subsidiaire, la règle des bénéfices insuffisamment imposés (RBII) permet de réattribuer à une juridiction le reliquat d’impôt complémentaire qui n’a pas été prélevé en vertu de la RIR. Les modalités d’allocation du produit de la RBII entre les pays sont assises sur des critères permettant de mesurer la répartition territoriale de l’activité économique du groupe. Le présent article prévoit, pour l’application de la RBII, de créer un prélèvement ad hoc.
Par ailleurs, le présent article prévoit d’exercer une option prévue par le modèle de règles GloBE et la directive du 14 décembre 2022, permettant de prélever directement un impôt complémentaire auprès des entités situées en France qui seraient en situation de sous-imposition. Ce prélèvement permettra de capter des recettes fiscales qui seraient, à défaut, perçues par d’autres juridictions ayant institué l’impôt minimal mondial.
Afin d’articuler les règles du pilier 2 avec les législations applicables dans certaines juridictions (y compris la France), le présent article prévoit par ailleurs des modalités de calcul du taux effectif d’imposition particulières pour certaines entités (entités d’investissement, holdings, entités à détention minoritaire), certaines opérations (transferts d’actifs et de passifs) ou certains régimes fiscaux (régime des dividendes déductibles, impôt sur les distributions).
Parce que le régime de l’impôt minimal mondial est complexe, ses modalités de mise en œuvre sont régulièrement précisées par le Cadre inclusif au moyen d’instructions complémentaires et de commentaires. Ont ainsi été précisés au cours de l’année 2023 les régimes de protection applicables pour accompagner la montée en charge du pilier 2 ainsi que les modalités de détermination du résultat qualifié. Le présent article intègre ces éléments.
Le présent article définit enfin les modalités de déclaration, de contrôle, de sanction et de recouvrement de l’impôt complémentaire. Pour tenir compte des négociations en cours au niveau du Cadre inclusif, il prévoit également d’habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour prendre toute mesure relevant de ces domaines. Le présent article prévoit en outre que l’impôt complémentaire sera acquitté au moyen d’une déclaration d’informations et d’un relevé de liquidation transmis à l’administration fiscale par les groupes implantés en France 15 mois après la clôture de leur exercice.
Les dispositions relatives à la RIR et à l’impôt complémentaire national s’appliqueront aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2023. Celles portant sur la RBII entreront en vigueur de manière décalée et s’appliqueront aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2024. En conséquence, les premières recettes issues de l’impôt complémentaire seront collectées en 2026 : ce décalage s’explique par le fait que l’impôt complémentaire sera assis sur les résultats enregistrés lors des exercices ouverts en 2024 et calculé à partir du montant d’impôts couverts acquitté en tout ou partie par les entreprises en 2025.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté trois amendements identiques déposés par M. Lefèvre, Mme Magnier, Mme Goulet et plusieurs de leurs collègues, prévoyant que le Gouvernement remet au Parlement, avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2025, un rapport relatif à la mise en œuvre de l’imposition minimale internationale des personnes physiques.
La commission a adopté l’article 4 ainsi modifié. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. L’État du droit
A. Les rÈgles nationales d’imposition des bÉnÉfices des entreprises
Les entreprises exploitées en France dont le résultat fiscal est positif sont imposées sur les bénéfices qu’elles dégagent. Les règles d’imposition qui leur sont appliquées dépendent principalement de la nature juridique de la société, selon qu’elle relève de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés.
1. La définition du bénéfice fiscal
● La notion de bénéfice fiscal est étroitement liée au résultat comptable de l’entreprise. En comptabilité, le résultat enregistré à l’issue de l’exercice permet de mesurer les ressources nettes de la société après prise en compte de la dépréciation du capital. Un bénéfice comptable traduit donc l’enrichissement de l’entreprise qui l’enregistre.
La détermination du résultat comptable repose sur un ensemble de normes de natures législative et réglementaire insérées dans le code de commerce, sur le plan comptable général (PCG) ainsi que sur les prescriptions comptables générales ou sectorielles édictées par l’Autorité des normes comptables (ANC). Par ailleurs, au sein de l’Union européenne et depuis le 1er janvier 2005, les comptes consolidés des sociétés cotées et, sur option, les comptes consolidés des sociétés non cotées sont établis en appliquant les normes dites IFRS (International financial reporting standards) ([21]).
Schématiquement et en vertu des dispositions de l’article L. 123-13 du code de commerce, les comptes annuels d’une société sont composés en premier lieu de son bilan, qui décrit les éléments actifs de l’entreprise – ses emplois – et ses passifs – qui correspondent à ses ressources, en faisant apparaître distinctement ses capitaux propres. Les comptes de la société sont en second lieu composés du compte de résultat, qui fait état du résultat d’exploitation (entendu comme la différence entre les charges et les ressources d’exploitation), du résultat financier (soit la différence entre les produits et charges financières) et des produits et charges exceptionnelles. La somme de ces différents éléments permet de mesurer la perte ou le bénéfice de l’entreprise.
● Du point de vue fiscal, le bénéfice net d’une entreprise est apprécié à partir de son résultat comptable.
Aux termes de l’article 38 du code général des impôts (CGI), le bénéfice net industriel et commercial est à la fois déterminé « d’après les résultats d’ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d’éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d’exploitation » et constitué « par la différence entre les valeurs de l’actif net à la clôture et à l’ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l’impôt diminuée des suppléments d’apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l’exploitant ou par les associés ».
Cette double définition conduit à appréhender le résultat fiscal à la fois comme un résultat calculé à partir des opérations réalisées par l’entreprise et selon une approche fondée sur l’observation de la variation de l’actif net de la société. Elle conduit également à imposer, au-delà des revenus d’exploitation, l’ensemble des revenus accessoires des entreprises, qu’il s’agisse des intérêts de créances, des dépôts, des revenus issus de la location de biens immobiliers ou les revenus de valeurs mobilières.
Les bénéfices non commerciaux et les bénéfices agricoles
Le code général des impôts distingue plusieurs catégories de bénéfices : outre les bénéfices industriels et commerciaux, peuvent être cités les bénéfices agricoles et les bénéfices non commerciaux (BNC), qui recouvrent les bénéfices des professions indépendantes n’ayant pas un caractère commercial. Si les bénéfices agricoles sont déterminés par renvoi aux règles applicables aux entreprises industrielles et commerciales ([22]), le BNC est constitué par « l’excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l’exercice de la profession […] il tient compte des gains ou des pertes provenant soit de la réalisation des éléments d’actif affectés à l'exercice de la profession, soit des cessions de charges ou d’offices, ainsi que de toutes indemnités reçues en contrepartie de la cessation de l’exercice de la profession ou du transfert d'une clientèle » ([23]).
Cette approche, comparable à celle retenue dans le cadre des BIC, se fonde principalement sur la différence entre les recettes et les dépenses de la société.
Pour déterminer son résultat fiscal, les sociétés doivent toutefois procéder à un certain nombre de rectifications extracomptables pour mesurer leur perte nette ou leur bénéfice net. Ces dernières, prévues par le code général des impôts, sont nombreuses et de plusieurs ordres :
– de manière non exhaustive, les majorations (ou réintégrations) extracomptables concernent notamment les fractions de rémunération non déductibles, les amendes et pénalités, les provisions et charges à payer non déductibles, les moins-values nettes à long terme de l’exercice ou encore les amortissements non déductibles fiscalement et les amortissements réputés différés du point de vue fiscal ;
– à l’inverse, les déductions extracomptables à imputer sur le résultat de l’entreprise portent notamment sur certaines majorations d’amortissement, les provisions et charges à payer non déductibles antérieurement taxées qui sont réintégrées dans les résultats de l’exercice, les plus-values nettes à court terme dont l’imposition est différée ou encore les dividendes reçus par les sociétés relevant du régime mère-fille.
L’impôt différé : une divergence temporaire entre le résultat comptable et le résultat fiscal
Le décalage entre résultat fiscal et résultat comptable peut prendre un caractère définitif ou temporaire : le premier cas concerne par exemple l’impossibilité de déduire des amendes et pénalités de son résultat fiscal.
D’autres charges non déductibles fiscalement peuvent toutefois ouvrir droit à une déduction future, que l’entreprise enregistre en comptabilité comme un impôt différé actif – en d’autres termes, une créance d’impôt qui sera déductible lors d’un exercice ultérieur. À l’inverse, un impôt différé passif correspond à un produit imposable lors d’un exercice à venir.
À titre d’exemple, si une entreprise enregistre une provision pour anticiper le départ à la retraite futur d’un ou plusieurs de ces salariés, cette charge est déduite du résultat comptable de l’entreprise mais pas de son résultat fiscal pour l’exercice au cours duquel elle a été constituée – elle est donc comptabilisée en impôt différé actif. En revanche, lors du départ en retraite des salariés, le versement de leur indemnité de départ sera fiscalement déductible : l’écart entre le résultat comptable et le résultat fiscal sera par conséquent résorbé.
Des passifs d’impôt différé sont également comptabilisés dans le cas d’amortissements dégressifs ou accélérés, pour lesquels la société devra opérer une reprise progressive des amortissements déduits fiscalement durant les premières années d’utilisation du bien.
2. Une pluralité de régimes d’imposition des bénéfices
Les bénéfices sont imposés de manières différentes selon la forme juridique de l’entreprise : en principe, les sociétés de capitaux sont assujetties à l’impôt sur les sociétés (IS) tandis que les bénéfices des sociétés de personnes sont directement taxés à l’impôt sur le revenu (IR) entre les mains de leurs associés ([24]).
Ont pu s’ajouter à ces impôts des contributions assises sur les bénéfices revêtant un caractère permanent ou temporaire.
L’ensemble de ces impôts représentait 48 % de l’ensemble de la fiscalité directe des entreprises en 2021.
Produit brut des impositions de toute nature assises sur les bÉnÉfices des entreprises entre 2018 et 2021
(en millions d’euros)
|
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
Impôt sur les sociétés |
54 364 |
59 109 |
55 712 |
61 362 |
Impôt sur le revenu |
9 406 |
10 062 |
9 617 |
9 974 |
Contribution sociale sur les bénéfices |
1 118 |
1 240 |
1 171 |
1 042 |
Taxe de 3 % sur les versements de dividendes |
4 |
0 |
0 |
0 |
Total |
64 892 |
70 411 |
66 500 |
72 378 |
Source : commission des finances, d’après les données de l’INSEE.
a. L’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés
i. Les principes généraux
Les associés des sociétés de personnes sont, aux termes de l’article 8 du CGI, « personnellement soumis à l’impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans [cette] société ». Les bénéfices de ces sociétés, dites translucides, sont ainsi intégrés au revenu imposable des associés pour leur part de bénéfice correspondant à leurs droits sociaux et soumis au barème progressif de l’IR ([25]).
L’IS est quant à lui établi au nom de l’entreprise en tant que personne morale pour l’ensemble de ses activités imposables en France. Dans ce cadre, les bénéfices des sociétés sont imposés de manière proportionnelle au taux de 25 % ([26]), sous réserve des différents taux réduits applicables (cf. infra). Le taux de l’IS, s’élevant auparavant à 33 1/3 %, a progressivement diminué entre les années 2018 à 2022 en vertu des dispositions des articles 84 de la loi de finances pour 2018 ([27]) et 39 de la loi de finances pour 2020 ([28]).
Trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociÉtÉs entre 2018 et 2022
|
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
Taux normal de l'IS pour la tranche de bénéfices inférieure à 500 000 euros |
28 % |
28 % |
28 % |
26,5 % |
25 % |
Taux normal de l'IS pour la tranche de bénéfices supérieure à 500 000 euros |
33,33 % |
31 % |
28 % |
26,5 % |
25 % |
31 % pour les entreprises dont le CA ≥ 250 M€ |
27,5 % pour les entreprises dont le CA ≥ 250 M€ |
Source : commission des finances.
● Les entreprises soumises à l’IS peuvent néanmoins bénéficier d’un certain nombre de régimes spécifiques modifiant leur assiette taxable :
– le mécanisme de report des déficits (en avant ou en arrière) permet sous certaines conditions de considérer le déficit observé pour une année en charge déductible du résultat d’un exercice ultérieur ou de l’exercice de l’année antérieure ([29]) ;
– le régime mère-fille, prévu aux articles 145 à 216 du CGI, permet à toute société tête de groupe qui détient une participation d’au moins 5 % dans une de ses filiales d’être exonérée d’IS à hauteur de 95 % des produits nets des participations qui lui sont versés par celle-ci ;
– les cessions de titres de participation détenus depuis au moins deux ans sont exonérées d’IS, sous réserve de la réintégration d’une quote-part de frais et charges de 12 % imposée au taux normal ([30]).
– le régime de l’intégration fiscale, prévu aux articles 223 A et suivants du CGI, permet sur option à une société mère d’intégrer dans ses résultats fiscaux les résultats de ses filiales françaises dont elle détient au moins 95 % du capital – à la condition que la société tête de groupe ne soit pas elle-même détenue à plus de 95 % par une autre personne morale soumise à l’IS.
ii. Les règles particulières
Un certain nombre de dispositifs portant sur le taux ou l’assiette de l’impôt acquitté par les entreprises dérogent aux règles de droit commun.
● En premier lieu, des exonérations spécifiques sont prévues par les articles 206, 207 et 208 du CGI pour :
– les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les syndicats professionnels, les fondations reconnues d’utilité publique, les fondations d’entreprises, les fonds de dotation et les congrégations dont la gestion est désintéressée, lorsque leurs activités non lucratives restent significativement prépondérantes et le montant de leurs recettes d’exploitation tirées de leurs activités lucratives n’excèdent pas 76 679 euros ;
– à conditions « qu’elles fonctionnent conformément aux dispositions qui les régissent », les sociétés coopératives agricoles d’approvisionnement et d’achat, les sociétés coopératives agricoles de production, de transformation, conservation et vente de produits agricoles ([31]) ainsi que les unions de ces mêmes sociétés ;
– les coopératives artisanales et leurs unions, les coopératives d’entreprises de transports, les coopératives artisanales de transport fluvial ainsi que les coopératives maritimes et leurs unions ([32]) ;
– les organismes d’habitations à loyer modéré (HLM), les sociétés d’économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux, ainsi qu’Action Logement Services et Action Logement Immobilier ;
– les établissements publics de recherche et les établissements publics d’enseignement supérieur et les fondations reconnues d’utilité publique du secteur de la recherche.
– les sociétés mobilières d’investissement, pour les bénéfices réalisés dans le cadre de leur objet légal (en ce qui concerne les Sicav) ou pour la partie des bénéfices provenant des produits nets de leur portefeuille ou des plus-values de cession qu’elles réalisent sur la vente de titre faisant partie de ce portefeuille (pour les Sicaf) ;
– les sociétés de capital-risque, pour une partie de leurs produits et plus-values nets provenant de leur portefeuille et les fonds communs de créance ;
– les sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable ;
– les sociétés immobilières de gestion, pour la fraction de leur bénéfice net qui provient de la location de leurs immeubles.
● Le code général des impôts aménage en outre plusieurs taux réduits de l’impôt sur les sociétés, applicables soit à une fraction du bénéfice soit à certains types de revenus :
– les petites et moyennes entreprises (PME) dont le chiffre d’affaires est inférieur à 7,63 millions d’euros sont imposées à 15 % sur la fraction de leur bénéfice n’excédant pas 42 500 euros, sous réserve qu’elles soient détenues à 75 % par des personnes physiques ou par des sociétés qui satisfont elles-mêmes à cette condition ;
– les plus-values à long terme afférentes aux titres de sociétés à prépondérance immobilière cotées sont imposées au taux de 19 %, en vertu du a du I et du IV de l’article 219 du CGI ;
– en application du a du I de l’article 219 du CGI, les plus-values de long terme font l’objet d’une imposition séparée au taux de 15 % ;
– les produits tirés de la cession ou de la concession de certains actifs incorporels, notamment les brevets, font l’objet d’une imposition séparée au taux de 10 %, en vertu du même a ;
– les plus-values tirées de la cession de locaux professionnels destinés à être transformés en locaux d’habitation sont imposées au taux réduit de 19 % ([33]) ;
– les revenus patrimoniaux des établissements publics ainsi que des associations et collectivités non soumis à l’IS sont imposés aux taux de 24 %, 15 % ou 10 % en fonction de la nature de leurs revenus, en application des dispositions de l’article 219 bis du CGI.
● La charge fiscale due par les sociétés à raison de leurs bénéfices peut enfin être allégée par l’application de différents crédits ou réductions d’impôt.
La distinction entre crédit et réduction d’impôt
Les réductions et crédits d’impôt viennent en déduction de l’impôt calculé. La réduction d’impôt s’impute sur l’impôt avant imputation d’éventuels crédits d’impôt et prélèvements ou retenues non libératoires. Dans le cas où le montant de la réduction d’impôt excède le montant de l’impôt dû, l’excédent ne peut donner lieu à remboursement.
À l’inverse, dans le cas où le montant du crédit d’impôt excède le montant de l’impôt dû, le surplus est, selon les cas, immédiatement remboursable ou ouvre une créance pouvant être imputée sur l’impôt dû au titre d’un nombre limité d’exercice ultérieur (la fraction non consommée donnant lieu à un remboursement au terme de la période).
De manière non exhaustive, les crédits d’impôt dont peuvent bénéficier les entreprises se composent entre autres :
– du crédit d’impôt recherche (CIR), qui bénéficie aux entreprises qui exposent des dépenses de recherche au cours de l’année et dont le taux s’élève à 30 % pour la fraction de dépenses inférieure ou égale à 100 millions d’euros et 5 % au-delà ([34]) ;
– le crédit d’impôt « Prêt à taux zéro », qui concerne les établissements de crédit ou les sociétés de financement passibles de l’IS, au titre des avances remboursables ne portant pas intérêt consenties à des personnes physiques soumises à des conditions de ressources ([35]) ;
– du crédit d’impôt à raison des investissements productifs réalisés dans les départements d’outre-mer avant le 31 décembre 2029 ([36]), dont le taux s’élève à 38,25 % pour les entreprises soumises à l’IR et 35 % pour les entreprises soumises à l’IR.
La principale réduction d’impôt applicable aux entreprises concerne celle portant sur les dons faits à des œuvres ou organismes d’intérêt général (réduction d’impôt « mécénat »), dont le taux s’élève à 60 % du montant du don pour la fraction inférieure ou égale à 2 millions d’euros et à 40 % pour la fraction excédant ce montant, dans la limite du montant le plus élevé entre un plafond de 20 000 euros et 0,5 % du chiffre d’affaires hors taxe de l’entreprise ([37]).
b. Les contributions additionnelles, exceptionnelles ou sectorielles
Outre l’IR et l’IS, le législateur fiscal est régulièrement amené à instaurer des contributions temporaires ou permanentes frappant le résultat des entreprises.
● Les entreprises dont le chiffre d’affaires excède 7,63 millions d’euros sont ainsi, en application de l’article 235 ter ZC du CGI, assujetties à une contribution additionnelle à l’IS égale à 3,3 % de l’IS dû. Cette contribution a pour effet, de porter le taux facial de l’IS à 25,825 % pour les entreprises qui en sont redevables.
● De plus, l’article 40 de la loi de finances pour 2023 a institué une contribution temporaire de solidarité sur les surprofits du secteur de l’énergie : celle-ci est assise sur la part des résultats imposables de l’exercice 2022 qui excède de 20 % la moyenne des résultats imposables des quatre exercices précédents et son taux est égal à 33 %.
● Certains dispositifs sectoriels, sans être assis sur le résultat, s’y rattachent indirectement. Tel est notamment le cas de la taxe sur les excédents de provision pour sinistres restant à payer, prévue à l’article 235 ter X du CGI. Cette taxe, due par les entreprises d’assurance de dommage, vise à imposer les provisions excédentaires qu’elles ont constituées et qu’elles ont pu déduire de leur résultat imposable. Son taux s’élève à 0,40 % par mois écoulé depuis la constitution de la provision.
3. Le principe de territorialité de l’impôt sur les sociétés
● En principe en application du I de l’article 209 du CGI, l’IS ne frappe que les bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France, certains revenus et profits de source française réalisées par les entreprises étrangères et ceux dont l’imposition est attribuée à la France en vertu d’une convention internationale.
Par conséquent, les sociétés françaises ne sont pas soumises à l’IS pour les bénéfices réalisés par leurs entreprises exploitées à l’étranger. Lorsqu’une entreprise exerce son activité en France et à l’étranger, seule la part des bénéfices correspondant à l’entreprise exploitée en France est taxée.
● Cette règle est toutefois atténuée par l’application de certaines dérogations dont le but est de lutter contre l’évasion fiscale internationale :
– en application de l’article 57 du CGI, l’administration fiscale peut rectifier les comptes des entreprises liées à des entreprises étrangères du montant des bénéfices indirectement transférés à ces dernières ;
– en application du régime dit des sociétés étrangères contrôlées (SEC), prévu à l’article 209 B du CGI, les bénéfices des sociétés contrôlées directement ou indirectement à plus de 50 % par une société établie en France et soumise à un régime fiscal privilégié sont imposables à l’IS en France.
Le régime fiscal privilégié est défini à l’article 238 A du CGI : il s’agit des juridictions dans lesquelles les personnes physiques ou morales ne sont pas imposables ou sont assujetties à des impôts sur les bénéfices et les revenus dont le montant est inférieur de 40 % ou plus à celui de l’impôt dont elles auraient été redevables dans des conditions de droit commun en France. Cet article définit également des limites quant à la faculté des entreprises à déduire certaines charges de leur résultat lorsque celles-ci ont été payées ou dues à des personnes établies dans une juridiction à fiscalité privilégiée.
Ces mécanismes anti-abus sont complétés par l’article 238-0 A du CGI, qui définit les États et territoires non coopératifs (ETNC). Ceux-ci sont identifiés chaque année par arrêté des ministres chargés de l’économie et du budget sur le fondement de critères définis par le droit national relatifs aux échanges d’information. La liste des ETNC intègre également les pays qui figurent sur la liste européenne des États non coopératifs (dite « liste noire ») s’ils facilitent la création de dispositifs extraterritoriaux dépourvus de substance économique réelle et destinés à attirer des bénéfices, ou s’ils ne respectent pas au moins un des critères définis par le Conseil de l’Union européenne en matière de transparence fiscale et d’équité fiscale ([38]).
B. le dÉveloppement de la lutte internationale contre l’Érosion des bases d’imposition des entreprises
1. La mise en œuvre du projet BEPS à l’échelle de l’OCDE
● Fondées sur un système de conventions fiscales dont le contenu était largement hérité des principes élaborés par la Société des nations dans les années 1920, les règles nationales et internationales de lutte contre la double imposition se sont progressivement révélées inadéquates pour appréhender la base taxable des entreprises multinationales.
En premier lieu, l’intégration croissante de l’économie et la fragmentation des chaînes de valeur ont favorisé le développement de schémas agressifs permettant à ces entreprises d’optimiser la localisation de leur base taxable. En second lieu, l’importance croissante de la propriété intellectuelle dans la création de valeur a modifié leur modèle d’affaires et a favorisé la constitution d’actifs incorporels facilement mobiles. La numérisation de l’économie renforce ce phénomène, en permettant désormais aux entreprises de dissocier la création de valeur de leur présence physique sur un marché.
La planification fiscale agressive des entreprises multinationales a pour ressort principal l’exploitation des asymétries pouvant exister entre les différents régimes fiscaux nationaux. Elle conduit par ailleurs à exacerber la concurrence fiscale entre les États. Cette situation, déjà identifiée en 2006 lors du Forum sur l’administration de l’impôt à Séoul, a motivé la mise en œuvre d’un plan d’action coordonné et mis en œuvre à l’échelle de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
● Les travaux menés en 2013 par cette dernière ont conduit à estimer que les transferts de bénéfices opérés par les groupes multinationaux généraient un manque à gagner pour les États compris entre 4 et 10 % des recettes totales de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, soit entre 100 et 240 milliards de dollars par an au niveau mondial. En conséquence, les pays membres de l’OCDE et du G20 ont adopté en 2013 un projet nommé BEPS (Base erosion and profit shifting), composé de trois objectifs principaux, eux-mêmes déclinés en 15 actions.
Les rapports finaux sur chaque action du projet BEPS ont été publiés en 2015. Y figurent des recommandations de « bonnes pratiques » faites pour assurer une meilleure coordination des régimes fiscaux ainsi que des mesures nécessitant des modifications de législation interne, réalisées sous le contrôle des pairs.
Les actions du projet BEPS
– action n° 1 : relever les défis fiscaux posés par l’économie numérique ;
– action n° 2 : neutraliser les effets des dispositifs hybrides ;
– action n° 3 : concevoir des règles efficaces concernant les sociétés étrangères contrôlées ;
– action n° 4 : limiter l’érosion de la base d’imposition faisant intervenir les déductions d’intérêts et d’autres frais financiers ;
– action n° 5 : lutter plus efficacement contre les pratiques fiscales dommageables, en prenant en compte la transparence et la substance ;
– action n° 6 : empêcher l’utilisation abusive des conventions fiscales lorsque les circonstances ne s’y prêtent pas ;
– action n° 7 : empêcher les mesures visant à éviter artificiellement le statut d’établissement stable ;
– actions n° 8 à 10 : aligner les prix de transfert calculés sur la création de valeur ;
– action n° 11 : mesure et mise en œuvre du « BEPS » ;
– action n° 12 : règles de communication obligatoire d’informations ;
– action n° 13 : documentation des prix de transfert et déclaration pays par pays ;
– action n° 14 : accroître l’efficacité des mécanismes de règlement des différends ;
– action n° 15 : signature d’une convention multilatérale modifiant les conventions fiscales bilatérales afin de mettre en œuvre les mesures du projet BEPS
Certaines de ces actions, telle l’action 2, visent principalement à lutter contre les abus prenant la forme d’une double déduction, ou d’une déduction sans imposition correspondante dans un autre pays. D’autres visent à moderniser les règles fiscales ou à renforcer les informations mises à disposition des administrations fiscales. L’action 15 vise plus spécifiquement à rendre effective les recommandations du projet BEPS par l’adoption d’une convention multilatérale.
Cette « convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir le BEPS » (dite MLI), signée en 2017, est entrée en vigueur au 1er janvier 2019 en France, après que sa ratification a été préalablement autorisée par le Parlement ([39]). Elle a pour spécificité de modifier de façon synchronisée et uniforme le réseau de conventions fiscales bilatérales d’élimination de la double imposition de l’ensemble des États signataires.
● Afin de rendre ses recommandations les plus effectives possible, l’OCDE a enfin modifié sa gouvernance en fondant un « Cadre inclusif » associant des pays non membres de l’OCDE. Ce cadre, dont la première réunion s’est tenue en juin 2016 à Tokyo, regroupe désormais 143 États ainsi que 15 organisations internationales et régionales dotées du statut d’observateur ([40]).
pays membres du cadre inclusif de l’OCDE et du G20*
*Apparaissent en orange les pays membres de l’OCDE et en bleu les pays non membres de l’OCDE mais membres du Cadre inclusif.
Source : commission des finances, d’après l’OCDE.
2. Les mesures adoptées par l’Union européenne pour lutter contre l’érosion des bases d’imposition des entreprises
L’Union européenne a lancé plusieurs travaux tirant les conséquences des pistes de travail dressées par la Commission européenne dans une communication du 17 juin 2015 ([41]).
Ces travaux, pour certains directement inspirés des actions de BEPS, ont plus particulièrement conduit à l’adoption de plusieurs séries de directives, qui ont ensuite été transposées en droit interne.
● La directive « ATAD 1 » (pour Anti tax avoidance directive) du 12 juillet 2016 ([42]) avait pour objectif principal de lutter contre les dispositifs hybrides, de renforcer les règles relatives aux SEC, d’encadrer plus fortement la déductibilité des charges financières, de créer une exit tax sur les plus-values latentes et d’instituer une clause anti-abus générale en matière d’impôt sur les sociétés. La directive « ATAD 2 » du 29 mai 2017 étend quant à elle les mesures contre les dispositifs hybrides prévues par ATAD 1 à ceux faisant intervenir un pays tiers à l’Union européenne.
Les dispositions de ces directives ont rendu nécessaires plusieurs mesures de transposition en droit national, introduites par les lois de finances pour 2019 et 2020 ([43]) :
– à l’article 212 bis du CGI s’agissant de l’encadrement pour la déductibilité des charges financières ;
– aux articles 205 B à 205 D du CGI en ce qui concerne les dispositifs hybrides ;
– à l’article 205 du CGI concernant la clause anti-abus générale en matière d’IS.
● L’Union européenne a de surcroît mis en place un système d’échange automatique d’informations fiscales entre administrations nationales s’inscrivant dans les recommandations du projet BEPS.
Les règles applicables en la matière résultent des dispositions de sept directives dites DAC (directive on administrative cooperation), successivement adoptées et transposées en droit national pour compléter le champ des informations susceptibles d’être échangées :
– la directive DAC 1 du 15 février 2011 ([44]) porte sur les revenus ayant leur source dans un État membre et perçus par un résident d’un autre État membre ;
– la directive DAC 2 du 9 décembre 2014 ([45]) reprend la norme mondiale de l’OCDE en matière d’échange automatique d’informations sur les comptes financiers ;
– la directive DAC 3 du 8 décembre 2015 ([46]) étend le champ des informations échangées aux rescrits accordés aux entreprises pour le traitement fiscal de leurs opérations transfrontalières (ce qui inclut les accords préalables de prix de transfert) ;
– la directive DAC 4 du 25 mai 2016 ([47]) porte sur les échanges de déclarations pays par pays transmises par les entreprises aux administrations fiscales ;
Les déclarations pays par pays
L’action 13 du projet BEPS prévoit que les grands groupes multinationaux réalisent et transmettent aux autorités fiscales un reporting pays par pays (Country by country reporting – CbCR) de leurs activités. Cette recommandation a été introduite en droit interne depuis le 1er janvier 2016 en France et incombe, en application de l’article 223 quinquies C du CGI, aux entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires de plus de 750 millions d’euros.
Cette déclaration doit comporter la répartition pays par pays des bénéfices du groupe, des agrégats économiques comptables et fiscaux ainsi que des informations sur la localisation et l’activité des entités le constituant.
– la directive DAC 5 du 6 décembre 2016 ([48]) porte sur les informations collectées dans le cadre de la lutte anti-blanchiment ;
– la directive DAC 6 du 25 mai 2018 ([49]) impose aux conseillers fiscaux de déclarer aux autorités fiscales les transactions de leurs clients qui présentent un caractère potentiellement agressif ;
– la directive DAC 7 du 22 mars 2021 ([50]) prévoit enfin l’obligation pour les opérateurs de plateforme de déclarer auprès de l’administration fiscale les opérations réalisées par des vendeurs et prestataire par son intermédiaire.
● Enfin, l’Union européenne a également conduit des travaux visant à renforcer la transparence des comptes des entreprises multinationales. La directive 2021/2101/UE du 24 novembre 2021 ([51]) prévoit ainsi que les entreprises dont le chiffre d’affaires excède 750 millions d’euros ont l’obligation, avant le 30 juin 2026, de rendre public un document décrivant la nature de leurs activités, le montant de leur chiffre d’affaires, de leurs bénéfices et bénéfices non distribués, ainsi que l’impôt sur les bénéfices qu’elles paient dans chaque État membre de l’Union européenne et chaque pays figurant sur la liste de l’Union européenne relative aux pays et territoires non coopératifs.
Cette directive a été transposée par l’ordonnance n° 2023-438 du 21 juin 2023 relative à la communication, par certaines entreprises et succursales, d’informations relatives à l’impôt sur les bénéfices.
C. l’impÔt minimal mondial : une innovation sans prÉcÉdent issue de la solution À deux piliers négociÉe par le cadre inclusif OCDE/G20
Pour compléter les actions du projet BEPS et afin de tirer les conséquences de la numérisation croissante de l’économie, le Cadre inclusif a adopté un accord le 28 mai 2019 pour examiner une solution à deux piliers, suivi d’un programme de travail approuvé par le G20 à Osaka le 29 juin 2019 :
– le premier pilier a pour objectif de modifier la répartition des droits d’imposition des bénéfices des entreprises multinationales au profit des juridictions de marché. Les négociations menées dans ce cadre visent à tenir compte de la possibilité pour les entreprises d’atteindre les consommateurs sans présence physique sur un marché : il s’agit par conséquent de créer un critère d’imposition alternatif à celui de l’établissement stable reposant sur le lieu où l’entreprise réalise ses ventes ([52]) ;
– le pilier 2 vise à lutter contre l’érosion des bases fiscales des entreprises multinationales par la mise en œuvre d’une règle d’imposition minimale mondiale de leurs bénéfices.
À la suite de plusieurs consultations conduites en février ([53]) et novembre 2019 ([54]) auprès des entreprises, associations ou encore organisations non gouvernementales (ONG), une déclaration du 1er juillet 2021 ([55]) approuvant la solution à deux piliers et fixant le taux de l’imposition minimale à « au moins 15 % » a été adoptée par 130 des 139 membres du Cadre inclusif.
Le 8 octobre 2021 ([56]), 136 des 140 juridictions du Cadre inclusif adoptent une nouvelle déclaration approuvant le modèle de règles à mettre en œuvre. Le 20 décembre 2021, le « modèle de règles globales anti-érosion de la base d’imposition (Pilier deux) » est publié. Il prévoit notamment la mise en œuvre d’une imposition des entreprises multinationales dont le chiffre d’affaires est supérieur à 750 millions d’euros au taux effectif minimal de 15 %.
Selon l’OCDE, la mise en œuvre du pilier 2 générerait 220 milliards de dollars de recettes supplémentaires au niveau mondial, ce qui correspond à 9 % des recettes mondiales de l’impôt sur les bénéfices des entreprises.
1. Les principes généraux du pilier 2
Le modèle de règles globales anti-érosion de la base d’imposition (GloBE) constitue le résultat de trois ans de négociations et a pour objectif d’ériger un système international d’imposition se superposant aux règles nationales.
● Sa mise en œuvre repose sur l’application de plusieurs principes :
– le principe « d’agrégation juridictionnelle », selon lequel l’ensemble des résultats, des impôts sur les bénéfices payés par une entreprise et le taux effectif auquel elle est taxée sont calculés juridiction par juridiction. La mise en œuvre de ce principe nécessite par ailleurs de rattacher les bénéfices et les impôts payés par l’entreprise au pays source des revenus ;
– le principe de « l’approche descendante » pour la détermination du redevable, qui consiste à appliquer les règles de l’imposition minimale en premier lieu au sommet de la chaîne de détention d’une entreprise multinationale, en commençant par son entité mère ultime. Ce principe vise à éviter les situations de double imposition, dans le cas où plusieurs juridictions exigeraient pour plusieurs entités relevant du même groupe le paiement d’un impôt complémentaire ;
– la mise en œuvre de concepts « qualifiés ». Afin d’assurer une mise en œuvre du pilier 2 uniforme et d’éviter les risques de double ou de non-imposition, les règles GloBE définissent des notions autonomes qui s’écartent en partie de celles mobilisées en droit fiscal national.
● Le pilier 2 repose par ailleurs sur la mise en œuvre de deux règles principales :
– la règle d’inclusion du revenu (RIR, ou RDIR dans les documents publiés par l’OCDE), qui constitue une règle prioritaire. Elle consiste à assujettir à un impôt complémentaire l’entité mère d’un groupe dont les entités constitutives sont, dans une ou plusieurs autres juridictions, imposées à un taux inférieur au taux effectif minimum de 15 % ;
– la règle relative aux paiements insuffisamment imposés (RBII), qui constitue une règle subsidiaire, est quant à elle mise en œuvre lorsqu’un impôt complémentaire résiduel reste non acquitté après application de la RIR.
En conséquence, la particularité du pilier 2 réside dans le fait d’autoriser les États de siège des entreprises multinationales à prélever un impôt complémentaire pour les bénéfices sous-imposés des entités constitutives de ces mêmes entreprises situées dans d’autres pays. L’objectif sous-jacent de ce mécanisme est de limiter la concurrence fiscale et d’inciter les États à rehausser leur taux d’imposition sur les bénéfices des entreprises.
● Les règles GloBE prévoient toutefois la mise en œuvre d’un système complexe, nécessitant une mise en œuvre uniforme et coordonnée de la part de l’ensemble des membres du Cadre inclusif. Leur mise en œuvre s’appuie par conséquent sur des commentaires, des instructions administratives et des exemples publiés par l’OCDE et visant à éclairer les pays membres du Cadre inclusif pour qu’ils puissent introduire ces règles dans leur droit interne. Des premiers commentaires ont été publiés le 14 mars 2022, suivies d’instructions publiées le 1er février 2023 et le 17 juillet 2023. Un document cadre visant à instituer des régimes de protection a également été publié le 15 décembre 2022.
2. Les règles du pilier 2
L’application des règles GloBE repose sur la mise en œuvre de plusieurs étapes qui, conformément à l’architecture du modèle de règles GloBE, reposent sur :
– la définition de leur champ d’application (chapitre 1 du modèle de règles) ;
– les modalités de prélèvement de l’impôt complémentaire (chapitre 2) ;
– la détermination du résultat qualifié GloBE (chapitre 3) ;
– la détermination du montant des impôts couverts (chapitre 4) ;
– le calcul du taux effectif d’imposition des entreprises (chapitre 5) ;
– le traitement des cas de restructurations d’entreprise et des holdings (chapitre 6) ;
– la définition de régimes de neutralité fiscale (chapitre 7) ;
– les obligations déclaratives des groupes soumis aux règles du pilier 2 (chapitre 8).
Les chapitres 9 et 10 du modèle de règles portent enfin sur les régimes transitoires applicables et les définitions nécessaires à la mise en œuvre du pilier 2.
a. Le champ d’application du pilier 2
i. Un seuil de chiffre d’affaires de 750 millions d’euros
En vertu de l’article 1.1 du modèle de règles GloBE, sont incluses dans le champ d’application du pilier 2 les entités constitutives d’un groupe multinational dont le chiffre d’affaires dans les comptes consolidés de l’entité mère ultime ([57]) est d’au moins 750 millions d’euros au titre d’au moins deux des quatre derniers exercices fiscaux précédant l’année fiscale testée ([58]).
Selon les commentaires du modèle de règles ([59]), la prise en compte de deux des quatre derniers exercices fiscaux vise à limiter la volatilité du périmètre des entreprises concernées par les règles GloBE et garantir aux entreprises une visibilité sur les dispositions qui leur seront applicables. À cet égard, l’année fiscale en cours n’est pas retenue pour apprécier l’intégration dans le champ d’application des règles GloBE : cela signifie que les entreprises pourront connaître leur régime d’imposition dès le début de l’exercice, au regard de leurs résultats des quatre années précédentes.
Ce champ d’application s’approche de celui retenu pour l’obligation pour les groupes d’entreprises multinationales de transmettre chaque année un CbCR aux administrations fiscales. Il a également été défini pour exclure 85 à 90 % des groupes multinationaux tout en incluant 90 % des revenus qu’ils génèrent ([60]).
Les groupes nouvellement créés, parce qu’ils ne disposent pas de comptes consolidés à la date de leur création, seront testés sur leur troisième exercice : le seuil de chiffre d’affaires sera dans ce cas apprécié sur les deux premiers exercices du groupe ([61]). En conséquence, les groupes nouvellement créés ne peuvent entrer dans le champ d’application des règles GloBE qu’au titre de leur 3ème année d’existence si leur chiffre d’affaires dépasse le seuil de 750 millions pour les deux années précédentes. Le cas des restructurations d’entreprises conduit également à apprécier différemment le critère du chiffre d’affaires (cf. infra).
ii. Les notions d’entité mère ultime et d’entité constitutive
Les articles 1.2 à 1.4 du modèle de règles portent les définitions nécessaires pour identifier les groupes multinationaux entrant dans le champ des règles GloBE.
● En application de l’approche dite descendante, les règles du pilier 2 conduisent en premier lieu à identifier l’entité mère ultime d’un groupe. Celle-ci contrôle directement ou indirectement une ou plusieurs autres entités constitutives et n’est pas détenue par une autre entité ([62]).
Selon les définitions données par le modèle de règles GloBE, un titre de contrôle doit être entendu comme un « titre de participation dans une entité en vertu desquels le détenteur est tenu de consolider les actifs, les passifs, les produits, les charges et les flux de trésorerie de l’entité ligne à ligne selon une norme de comptabilité financière admissible […] ».
Cette définition, reposant sur le périmètre de consolidation des comptes, conduit à inclure dans le champ des règles GloBE à la fois des entités détenues par un groupe à moins de 50 % des titres de participation et, à l’inverse, peut conduire à exclure des entités pourtant détenues à plus de 50 % ([63]).
Cela découle du fait que la notion de contrôle ne dépend pas exclusivement du pourcentage de détention en comptabilité. La norme IFRS 10 définit ainsi plusieurs critères permettant d’apprécier le contrôle qu’une entreprise exerce sur l’une de ses entités :
– la détention du pouvoir sur les activités pertinentes de l’entité ;
– une exposition aux rendements variables de l’entité ;
– la capacité d’agir sur ces rendements.
● Les entités constitutives sont quant à elles les entités qui font partie d’un groupe ; cette catégorie inclut également les établissements stables d’une entité.
iii. Un critère lié à l’implantation internationale du groupe
L’article 1.2 du modèle de règles prévoit que sont inclus dans le champ d’application du pilier 2 les groupes qui comprennent au moins une entité ou un établissement stable qui « n’est pas situé dans la juridiction de l’entité mère ultime ». En principe, ce critère permet d’exclure des règles GloBE les groupes d’entreprises purement nationaux : le Cadre inclusif a toutefois laissé la possibilité d’étendre l’application du pilier 2 à de tels groupes pour favoriser une articulation la plus optimale possible entre le contenu de l’accord et les règles applicables dans le droit interne de ses pays membres. Cette option a notamment été retenue par l’Union européenne dans le cadre de la transposition du pilier 2 en droit européen ([64]) (cf. infra).
Pour rattacher une entité à une juridiction, l’article 10.3 du modèle de règles retient comme critères le lieu d’établissement de son siège de direction ou le lieu de sa création. Pour les entités à « double résidence », le critère de rattachement se fonde sur les dispositions des conventions fiscales en vigueur ou, à défaut, le lieu où elles paient le montant d’impôt le plus élevé.
Le modèle de règles ([65]) prévoit par ailleurs une définition ad hoc de la notion d’établissement stable, qui recouvre plusieurs situations :
– lorsqu’il existe une convention fiscale applicable en vigueur entre la juridiction où est située l’installation d’affaires et la juridiction de l’entité principale, le modèle de règles reconnaît la définition prévue par cette même convention, à condition que l’établissement soit imposé à raison de ses bénéfices par la juridiction dans lequel il est situé ;
– s’il n’existe pas de convention fiscale, l’établissement stable désigne une installation d’affaires dont une juridiction impose les bénéfices selon sa législation en vigueur, d’une manière similaire à celle retenue pour imposer ses propres résidents fiscaux ;
– dans le cas d’un pays n’ayant pas de système d’imposition des bénéfices, le modèle de règles renvoie aux définitions prévues par le modèle de convention fiscale de l’OCDE sur les revenus et la fortune ;
– en dernier lieu, le modèle de règles définit la notion d’établissement stable « apatride », qui concerne les cas non traités par les points précédents et dans lesquels la juridiction dans laquelle une entité est établie exonère les résultats d’une activité exercée par cette même entité hors de son territoire.
En conséquence, le lieu de rattachement de l’établissement stable est fondé sur les dispositions des conventions fiscales applicables ou, à défaut, en fonction du lieu où il est imposé à raison de sa présence commerciale.
iv. Les entités exclues
L’article 1.5 du modèle de règles GloBE exclut par principe certaines catégories d’entité, soit en raison de leur objet non lucratif soit pour préserver leur neutralité fiscale. Les règles GloBE ne leur sont pas applicables, ce qui implique, lorsqu’une entité exclue est également l’entité mère ultime d’un groupe multinational, que la RIR devra être appliquée à l’entité suivante dans la chaîne de détention. De la même manière, les résultats (à l’exception du chiffre d’affaires) des entités exclues ne sont pas pris en compte pour déterminer le résultat GloBE du groupe ainsi que son taux effectif d’imposition.
● Sont ainsi exclues :
– les entités publiques, les organisations internationales, les organisations à but non lucratif ;
– les fonds de pension, les fonds d’investissement qui sont des entités mères ultimes et les véhicules d’investissement immobilier qui sont des entités mères ultimes ([66]). Les commentaires publiés par l’OCDE justifient cette exclusion par la nécessité de préserver leur statut de véhicule d’investissement fiscalement neutre (cf. infra) ([67]).
L’ensemble de ces catégories sont définies de manière autonome par l’article 10.1 du modèle de règles.
Définitions des entités exclues en vertu de l’article 10.1 du modèle de règles
– une entité publique désigne une entité qui fait partie d’une administration publique ou qui est entièrement détenue par une telle administration, et qui a pour objet principal d’exercer une fonction publique ou de gérer ou placer les actifs de cette administration. Elle n’exerce pas d’activité économique ou commerciale et rend compte de ses résultats à l’administration publique et lui fournit un rapport annuel. Ses actifs reviennent à cette administration à sa dissolution ;
– une organisation internationale désigne toute organisation intergouvernementale ou une personne de droit public appartenant entièrement à celle-ci qui se compose principalement d’États. Une telle organisation a conclu avec la juridiction dans laquelle elle est établie un accord de siège ou un accord substantiellement similaire, et ses revenus ne peuvent pas, en vertu de la loi ou de ses documents fondateurs, échoir à des personnes privées ;
– une organisation à but non lucratif est une organisation établie et exploitée dans sa juridiction de résidence à des fins exclusivement religieuses, caritatives, scientifiques, artistiques, culturelles, sportives, éducatives ou similaires ou en tant qu’association professionnelle, organisation inter-entreprises, chambre de commerce, organisation syndicale, agricole ou horticole, civique ou organisme dont l’objet exclusif est de promouvoir le bien-être social. La majeure partie des recettes générées par ses activités sont exonérées d’impôt sur les bénéfices. L’organisation n’a aucun actionnaire ou membre disposant d’un droit de propriété ou de jouissance sur ses recettes ou actifs. Ceux-ci ne peuvent être distribués à des personnes privées ou à des organismes à but lucratif autrement qu’en relation avec les activités caritatives de l’entité, à titre de rémunération raisonnable, ou à titre de rémunération, au prix du marché, pour les biens acquis par l’entité ;
– un fonds de pension désigne une entité établie et gérée dans une juridiction dans le but exclusif ou quasi exclusif d’administrer ou de verser des prestations de retraite et des prestations annexes ou auxiliaires à des personnes physiques. Son activité est réglementée et les prestations qu’elle verse sont garanties ou protégées d’une quelconque autre façon par les réglementations nationales pour garantir le respect des engagements de pensions correspondants en cas d’insolvabilité du groupe ;
– un fonds d’investissement désigne une entité qui est conçue pour regrouper des actifs (qui peuvent être financiers ou non financiers) provenant de plusieurs investisseurs. Ses investissements sont conformes à une politique d’investissement définie pour permettre aux investisseurs de réduire leurs coûts de transaction, de recherche et d’analyse ou de partager collectivement les risques. L’entité est principalement conçue pour générer des plus-values ou des revenus d’investissement ou pour se prémunir contre un événement ou un résultat à caractère général ou spécifique (pour les fonds d’investissement qui sont aussi des entités d’investissement d’assurance) ; les investisseurs perçoivent un rendement sur les actifs du fonds au prorata de leur participation ; l’entité est soumise aux dispositions réglementaires en vigueur dans la juridiction où elle est établie ou gérée et elle est gérée par des gestionnaires de fonds professionnels ;
– Un véhicule d’investissement immobilier désigne une entité uniquement imposée à son niveau ou au niveau de ses actionnaires (sous un délai d’un an au maximum), sous réserve que cette personne détienne principalement des biens immobiliers et que ses capitaux soient largement répartis.
● Les entités détenues par des entités exclues sont sous certaines conditions elles-mêmes exclues du champ d’application des règles GloBE ([68]). Il est pour autant nécessaire que de telles entités :
– soient détenues directement ou indirectement à au moins 95 % par une ou plusieurs entités exclues (hors entités de service de fonds de pension ([69]) et qu’elles aient pour objet exclusif ou presque exclusif de détenir des actifs ou de réaliser des placements pour le compte de l’entité exclue, ou qu’elles exercent uniquement des activités accessoires à celles exercées par l’entité exclue ;
– ou qu’elles soient détenues directement ou indirectement à 85 % par une ou plusieurs entités exclues (hors entités de service de fonds de pension) à condition que l’essentiel des bénéfices de cette entité soit constitué de dividendes ou de plus ou moins-values de cession de titres exclus du résultat GloBE ([70]).
À des fins de simplification administrative, ces entités ont toutefois la possibilité d’opter pour leur assujettissement aux règles GloBE pour cinq ans.
b. Les redevables de l’impôt : les ressorts de la RIR et de la RPII
Le chapitre 2 du modèle de règles GloBE permet d’identifier le redevable de l’impôt complémentaire.
i. La règle d’inclusion du revenu
L’article 2.1 des règles GloBE prévoit que, par principe, l’entité mère ultime (EMU) d’un groupe multinational est redevable de l’impôt complémentaire dû au titre de la règle d’inclusion du revenu (RDIR) pour les entités constitutives qu’elle détient au cours d’une année fiscale et qui sont faiblement imposées dans une autre juridiction.
Le montant de cet impôt complémentaire est calculé en fonction d’un ratio d’inclusion qui dépend de la part revenant à l’entité mère dans les bénéfices de l’entité constitutive (EC) faiblement imposée.
Le ratio d’inclusion de l’EMU correspond au rapport entre le bénéfice GloBE de l’entité constitutive, minoré du montant de ce bénéfice attribuable à des titres de participations détenus par d’autres personnes, et le bénéfice GloBE de l’entité constitutive faiblement imposée au titre de l’année fiscale.
● Dans le cas d’une structure de détention simple, dans laquelle une entité mère ultime détient 100 % des titres de participation d’une entité mère intermédiaire (EMI), qui détient elle-même 100 % des titres de participation d’une entité constitutive faiblement imposée, l’application de la RIR conduirait à attribuer 100 % de la part d’impôt complémentaire à payer à l’entité mère ultime.
application de la RDIR à une entité constitutive détenue par une entité mère intermédiaire
Source : commission des finances, d’après les exemples donnés par l’OCDE.
● La perception de l’impôt complémentaire au niveau de l’entité mère ultime connaît toutefois deux exceptions.
En premier lieu, dans le cas où l’entité mère ultime est située dans une juridiction n’appliquant pas la RIR, les entités intermédiaires seront, en application de l’approche descendante, redevables de l’impôt complémentaire en fonction de leur part dans les bénéfices de l’entité faiblement imposée. Par exemple, si une entité faiblement imposée est détenue à parts égales par deux entités intermédiaires, celles-ci seront respectivement redevables de 50 % de l’impôt complémentaire dû.
Application de la RIR à des entités mères intermédiaires
Source : commission des finances, d’après les exemples donnés par l’OCDE.
Dans le cas où plusieurs entités mères intermédiaires font partie de la même chaîne de détention et que l’une d’elle exerce un contrôle sur les autres entités mères intermédiaires, la RIR est désactivée pour les entités mères intermédiaires contrôlées. Cette règle permet d’éviter de multiplier les redevables de l’impôt complémentaire.
Application de la RIR aux entités mères intermédiaires contrôlant d’autres entités mères intermédiaires
Source : commission des finances, d’après les exemples donnés par l’OCDE.
Ce mécanisme ne s’applique toutefois pas s’il n’existe pas de lien de contrôle entre les entités mères intermédiaires. La RIR s’applique alors à l’ensemble des entités mères intermédiaires selon les principes résultant de l’approche descendante.
● Une seconde exception à l’application de la RIR au niveau de l’entité mère ultime est prévue à l’article 2.1.4 du modèle de règles GloBE, lorsqu’une ou plusieurs entités mères intermédiaires situées dans une juridiction appliquant la RIR sont partiellement détenues (Partially-owned parent entity – POPE) ([71]).
Dans ce cas l’entité mère partiellement détenue est toujours redevable de l’impôt complémentaire à raison de la part de bénéfices de l’entité faiblement imposée lui revenant. Cette règle vise plus spécifiquement à prévenir les risques de déperdition de l’impôt complémentaire. Comme indiqué dans l’exemple précédent, si la chaîne de détention comprend plusieurs entités mères partiellement détenues, l’entité la plus haute est redevable en premier lieu de la RIR.
application de la RIR en prÉsence d’entitÉs mÈres partiellement dÉtenues (POPE)
Source : commission des finances, d’après les exemples donnés par l’OCDE.
● Afin d’éviter les cas de double imposition, l’article 2.3 du modèle de règles prévoit enfin la mise en œuvre d’un mécanisme de compensation visant à déduire du montant de l’impôt complémentaire dû par une entité redevable le montant d’impôt complémentaire dû par une entité située à un rang inférieur dans la chaîne de détention.
Application du mécanisme de compensation de la RIR
Source : commission des finances, d’après les exemples de l’OCDE.
Dans le cas ci-dessus, l’entité mère ultime est située dans une juridiction n’appliquant pas la RIR. Les entités mères intermédiaires EMI 1 et EMI 2 sont donc seules redevables de l’impôt complémentaire.
L’impôt complémentaire dû par l’EMI 2 sera calculé de la manière suivante :
L’impôt complémentaire théorique de l’EMI 1 sera calculé à la fois en fonction de la part de bénéfice lui revenant à raison de sa participation de l’entité faiblement imposée et de sa participation dans l’EMI 2.
Toutefois, en application du mécanisme de compensation, l’impôt complémentaire dont sera redevable l’EMI 1 sera minoré de la part de l’impôt complémentaire qui lui est attribuable et dont l’EMI 2 est également redevable, soit 18. Au total, l’EMI sera redevable d’un impôt égal à 10. En l’absence de mécanisme de compensation, l’impôt payé par l’EMI 1 et l’EMI 2 aurait atteint 118, soit un montant supérieur à l’impôt dû au titre de l’entité faiblement imposée.
● Ce mécanisme de compensation s’applique également dans le cas d’une chaîne de détention faisant intervenir plusieurs entités partiellement détenues devant appliquer la RIR.
application du mécanisme de compensation à des entités partiellement détenues
Source : commission des finances, d’après les exemples de l’OCDE.
Dans l’exemple ci-dessus, la RIR s’applique aux entités POPE 1 et POPE 2 dans la mesure où POPE 1 est directement détenue par une tierce partie (40 %) et POPE 2 est directement (10 %) et indirectement (36 %) détenue par un tiers. POPE 2 sera redevable d’un impôt complémentaire de 100, étant donné qu’elle détient à 100 % l’entité constitutive faiblement imposée. POPE 2 devrait, toute chose égale par ailleurs, être redevable d’un impôt complémentaire égal à 90. Néanmoins, en vertu du mécanisme de compensation, son impôt complémentaire est ramené à 0.
ii. La règle relative aux paiements insuffisamment imposés
La RPII joue le rôle d’un filet de sécurité dans le cas où les bénéfices d’entités constitutives échappent en tout ou partie à l’application de la RIR. Cela peut être le cas si l’entité mère ultime du groupe est une entité exclue ou qu’elle est située dans un territoire n’appliquant pas la RIR.
Pour tenir compte de la complexité de ce dispositif, les commentaires publiés par l’OCDE précisent que les membres du Cadre inclusif ont convenu que la RPII entrerait en vigueur de manière décalée, aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2023.
● Contrairement à la RIR, dont l’application prend la forme d’un impôt complémentaire acquitté par l’EMU, une EMI ou une entité partiellement détenue du groupe multinational, la RPII s’applique sous la forme du refus d’une déduction de charge ou de « tout autre ajustement équivalent » dont le montant doit être égal à la somme de l’impôt complémentaire calculé pour chaque entité constitutive faiblement imposée du groupe multinational (hors entité d’investissement). Dans le cas où ces refus de déduction ne seraient pas suffisants pour couvrir le montant de l’impôt complémentaire dû au titre de l’année fiscale considérée, la différence peut être reportée en tant que de besoin sur les années suivantes ([72]).
En tout état de cause, les commentaires publiés par l’OCDE précisent clairement que l’application de la RPII doit avoir pour conséquence le prélèvement d’une charge d’impôt supplémentaire (cash tax expense), qui s’ajoute à l’impôt que doit payer l’entité constitutive en application des règles d’imposition nationales.
exemple d’application de la RPII dans une juridiction appliquant un impÔt sur les bÉnÉfices de 20 % en annÉe N
|
Résultat sans application de la RPII |
Résultat avec application |
Produits |
200 |
200 |
Charges déductibles |
- 300 |
- 300 |
Ajustement RPII |
0 |
300 |
Profit ou perte |
- 100 |
200 |
Report en avant |
100 |
0 |
Impôt sur les bénéfices |
0 |
40 |
Source : commission des finances, d’après les exemples donnés par l’OCDE.
exemple d’application de la RPII dans une juridiction appliquant un impÔt sur les bÉnÉfices de 20 % en annÉe N+1
|
Résultat sans application de la RPII |
Résultat avec application |
Produits |
200 |
200 |
Charges déductibles |
- 100 |
- 100 |
Ajustement RPII |
0 |
100 |
Profit ou perte |
100 |
200 |
Report de déficits passés* |
- 100 |
0 |
Impôt sur les bénéfices |
0 |
40 |
* Dans cet exemple, il est fait l’hypothèse que la juridiction considérée autorise un report en avant de 100 d’un exercice sur l’autre.
Source : commission des finances, d’après les exemples donnés par l’OCDE.
L’exemple ci-dessus illustre la manière dont fonctionne la RPII, qui, selon le droit applicable dans la juridiction, peut produire des effets sur plusieurs exercices. En effet, en réintégrant des charges habituellement déductibles en droit national, la RPII a pour effet de majorer le résultat d’une entité constitutive et d’empêcher l’imputation d’un éventuel déficit reportable sur une année suivante. Au total, la réintégration d’une charge d’un montant de 300 en année n et de 100 en année n+1 a donc pour conséquence, selon les hypothèses retenues précédemment, une augmentation de l’impôt dû par l’entité constitutive insuffisamment imposée de 80 sur deux exercices.
● S’il existe un lien fort entre la RIR et la RPII, les règles de calcul applicables à la RIR et à la RPII diffèrent et ne conduisent pas à obtenir un résultat en toute hypothèse similaire s’agissant de l’impôt complémentaire qui sera effectivement dû.
Le modèle de règles GloBE prévoit ainsi que l’impôt dû au titre de la RPII est ramené à zéro si l’intégralité des titres de participation du groupe dans l’entité faiblement imposée sont détenus par une ou plusieurs entités mères assujettis à la RIR ([73]).
Ainsi, si une entité mère ultime assujettie à la RIR détient 90 % des titres de participation d’une entité constitutive faiblement imposée et qu’aucune autre entité mère du même groupe ne détient de titres de participation dans cette même entité faiblement imposée, la RIR s’appliquera selon un ratio d’inclusion de 90 % et aucun impôt ne sera prélevé au titre de la RPII pour le solde de 10 %.
Exemple de non application de la RPII
Source : Delphine Bocquet, Julien Martinez, Elisa Lorca, Règles GloBE du pilier 2 : champ d’application, Revue trimestrielle de fiscalité internationale, n° 2-2022, mai 2022.
Dans cet exemple, l’EMI détient à seulement 90 % l’entité constitutive faiblement imposée. Elle détient en revanche l’intégralité des titres du groupe pour cette entité. Son impôt complémentaire s’élèvera par conséquent à 90 au titre de la RIR et la RPII ne s’appliquera pas sur les 10 % restants.
Dans la situation inverse, lorsqu’aucune entité mère n’est assujettie à la RIR, la RPII s’applique de plein droit.
● Enfin, des situations plus complexes peuvent apparaître, dans le cas où une entité constitutive faiblement imposée est à la fois détenue par des entités mères situées dans une juridiction appliquant la RIR (en tenant compte des ratios d’inclusion) et une juridiction n’appliquant pas la RIR. Dans cette hypothèse, l’impôt dû au titre de la RPII est minoré de l’impôt dû au titre de la RIR ([74]).
Application de la RPII à une entitÉ constitutive dans le cadre d’une structure de dÉtention complexe
Source : commission des finances, d’après les exemples donnés par l’OCDE.
Dans cet exemple, la RIR est appliquée à la société B qui détient 40 % de l’entité constitutive faiblement imposée. Dans la mesure où la société A détient elle-même indirectement 95 % de cette entité et qu’elle est située dans une juridiction n’appliquant pas la RIR, la RPII s’applique. Celle-ci est calculée en déduisant le montant d’impôt dû par la société B au titre de la RIR : son montant sera ainsi égal à 60.
iii. L’attribution de l’impôt complémentaire dû au titre de la RPII aux différentes juridictions
La répartition du produit de la RPII découle d’une formule de calcul définie par l’article 2.6 du modèle de règles. Elle dépend du nombre d’employés du groupe multinational et de la valeur de ses actifs corporels dans chaque juridiction où il est présent, en application de la formule suivante :
Le nombre d’employés désigne le nombre d’employés dans l’ensemble des entités constitutives du groupe situées dans la juridiction et, pour le dénominateur, dans les juridictions dotées d’une RPII qualifiée.
La valeur totale des actifs corporels doit ici être entendue comme la somme des valeurs nettes comptables des actifs corporels de l’ensemble des entités constitutives du groupe dans la juridiction et, pour le dénominateur, dans l’ensemble des juridictions disposant d’une RPII qualifiée.
Cette méthode de calcul résulte de la nécessité, selon les commentaires publiés par l’OCDE, de tenir compte de facteurs qui reflètent la substance économique du groupe multinational dans chaque juridiction. Elle a également pour objectif d’allouer l’impôt aux juridictions qui auront les capacités les plus importantes pour mettre en œuvre la RPII au moyen d’un refus de déduction de charges ([75]).
● Le modèle de règles aménage toutefois une dérogation à ces règles d’attribution. Dans le cas où pour une année antérieure, une juridiction n’a pas été en mesure de prélever l’impôt complémentaire qui lui a été attribué (par exemple, si la déduction de charge appliquée n’a pas eu pour effet de majorer le résultat d’une entité de sorte qu’elle devienne bénéficiaire), son ratio pour la RPII est ramené à zéro pour les années suivantes. Corrélativement, la valeur comptable des actifs et le nombre d’employé des entités situées dans cette juridiction ne sont plus pris en compte pour ventiler le produit de la RPII entre les autres juridictions.
Il s’agit là d’un « filet de sécurité dans le filet de sécurité » afin de s’assurer que l’impôt complémentaire dû au titre de la RPII soit perçu ([76]). Suivant la même logique visant à privilégier un recouvrement effectif de l’impôt, cette exclusion ne s’applique pas si, pour un même groupe multinational, l’ensemble des juridictions ont un ratio pour la RPII égal à zéro.
● En revanche, le modèle de règles GloBE ne prévoit pas les modalités selon lesquelles la charge d’impôt due au titre de la RPII est ventilée entre les entités d’un même groupe situées dans une même juridiction. Les commentaires publiés par l’OCDE renvoient au droit interne des juridictions pour régler cette question, sous réserve que les arbitrages retenus aménagent la meilleure coordination possible avec les règles applicables aux autres impôts nationaux.
c. Le calcul du résultat GloBE
Le résultat GloBE constitue l’assiette de l’impôt minimal, c’est-à-dire le dénominateur qui servira à définir le taux effectif d’imposition d’une entité. Son calcul est réalisé à partir du résultat net comptable d’une entité constitutive, après application d’ajustements.
i. Les états financiers de l’entité constitutive
Le point de départ du calcul de l’assiette imposable est le résultat net comptable de l’entité constitutive au titre d’une année fiscale. Au sens de l’article 3.1 du modèle de règles GloBE, ce résultat net correspond « au bénéfice ou à la perte net(te) déterminé(e) pour une entité constitutive (avant tout ajustement de consolidation destiné à éliminer les transactions intragroupes) lors de l’établissement des états financiers consolidés de l’entité mère ultime ».
Il s’agit donc du résultat comptable de l’entité déterminé dans la norme utilisée pour la préparation des états financiers de l’entité mère ultime. Le modèle de règles prévoit toutefois que lorsqu’il n’est pas raisonnable d’utiliser cette norme, le résultat peut être déterminé en application d’une autre norme admissible ou d’une norme de comptabilité agréée ([77]). Les commentaires publiés par l’OCDE précisent toutefois que ce cas devrait rester rare et pourrait concerner les groupes multinationaux ayant fait l’acquisition récente d’une nouvelle entité.
ii. Les ajustements extracomptables obligatoires et généraux
L’article 3.2 du modèle de règle définit les corrections qui doivent être appliquées au résultat comptable afin de déterminer le résultat GloBE. Les commentaires publiés par l’OCDE indiquent que ces ajustements sont pour la plupart communs dans le droit national des pays membres du Cadre inclusif. Pour certains, ils conduisent le résultat comptable à s’écarter de manière permanente du résultat fiscal ; pour d’autres, la divergence ne sera que temporaire.
● La première correction concerne la charge fiscale nette de l’entité. Doivent être réintégrés au résultat comptable (avec pour effet de majorer la charge fiscale nette et le résultat GloBE de l’entité) :
– les impôts couverts (cf. infra) courant et différés, y compris les impôts payés sur des bénéfices exclus du résultat GloBE ([78]) ;
– les impôts complémentaires nationaux qualifiés ([79]) ;
– les impôts complémentaires prélevés en vertu des règles GloBE ;
– les impôts remboursables non qualifiés qui sont comptabilisés en charge.
Enfin, les impôts différés actifs imputables à un déficit au titre de l’année fiscale, parce qu’ils ont été comptabilisés en produits, sont réintégrés mais viennent en diminution de la charge fiscale nette.
Ces diverses réintégrations ont pour objectif de reconstituer le résultat avant impôt de la société afin de déterminer son taux d’imposition effectif. Ainsi, une société dont le résultat après impôt s’élève à 800 millions d’euros, après avoir acquitté 200 millions d’euros d’impôt sur les sociétés, a un taux effectif d’imposition sur les bénéfices de 20 % (soit 200 millions rapportés à un résultat de 1 milliard d’euros) et non de 25 %.
● Dans la mesure où les règles GloBE prévoient de retenir comme base de départ le résultat net comptable de l’entité constitutive avant impôt, les opérations intragroupes n’ont pas encore été neutralisées. La seconde correction concerne ainsi l’exclusion de certains dividendes.
Champ d’exclusion des dividendes
Dividendes et autres distributions |
Détention donnant droit à moins de 10 % des droits au profit, au capital, aux réserves et droits de vote* |
Détention donnant droit à plus de 10 % des droits au profit, au capital, aux réserves et droits de vote |
Détention de court-terme (moins d’un an) |
Dividende inclus dans le résultat |
Dividende exclu |
Détention de long-terme (plus d’un an) |
Dividende exclu |
Dividende exclu |
*Ces titres sont nommés « titres de portefeuille » dans le modèle de règles.
Source : Commentaires publiés par l’OCDE (chapitre 3, paragraphe 38).
La portée du principe d’exclusion des produits de titres de participation est donc plus large que celle applicable dans le cadre de la directive mère-fille ([80]), transposée aux articles 145 et 216 du CGI ([81]).
● Le résultat GloBE est en troisième lieu calculé en appliquant des corrections sur les gains et pertes sur titres. Trois ajustements distincts sont prévus par le modèle de règles.
En premier lieu, celui-ci prévoit de neutraliser certaines plus ou moins-values sur capitaux :
– les gains et pertes résultant des variations de la juste valeur d’un titre de participation (à l’exclusion des titres de portefeuille). La réévaluation à la juste valeur correspond à la prise en compte de la plus-value latente des titres détenus par l’entité ;
– les bénéfices ou pertes résultant d’un titre de participation comptabilisé selon la méthode de mise en équivalence ;
La méthode de consolidation par mise en équivalence
La consolidation par mise en équivalence est appliquée lorsqu’une société consolidante exerce une influence notable sur une entreprise tierce sans en détenir le contrôle (les commentaires de l’OCDE donnant l’exemple de sociétés détenant généralement 20 à 50 % des titres de participation d’une autre société). La mise en équivalence permet de remplacer la valeur comptable des actions de la filiale détenue par la valorisation de la part que la société mère détient dans les capitaux propres de cette même filiale. Par conséquent, sans opérer une consolidation « ligne à ligne », la mise en équivalence revient à réévaluer les titres des entités sur lesquels une société exerce une influence notable.
– les plus ou moins-value de cessions de titres (hors titres de portefeuille). Contrairement aux dividendes, le critère de la durée de détention n’a pas d’influence sur le traitement à réserver aux gains ou pertes tirés de la cession d’un titre.
retraitement des plus ou moins-values de cessions de titres
Plus ou moins-value de cession de titre |
Détention donnant droit à moins de 10 % des droits au profit, au capital, aux réserves et droits de vote* |
Détention donnant droit à plus de 10 % des droits au profit, au capital, aux réserves et droits de vote |
Détention de court-terme (moins d’un an) |
PV ou MV incluses |
PV ou MV exclues |
Détention de long-terme (plus d’un an) |
PV ou MV incluses |
PV ou MV exclues |
Source : commission des finances, d’après les commentaires de l’OCDE.
En second lieu, le modèle de règles prévoit l’inclusion des plus ou moins‑values se rapportant à toute immobilisation corporelle comptabilisée en OCI ([82]) (pour Other comprehensive income ou « autres éléments du résultat global »). Cette réintégration a pour objectif, selon les commentaires publiés par l’OCDE, de prévenir une asymétrie de traitement entre les gains latents découlant de réévaluations qui n’apparaîtraient pas dans le résultat net de la société et des charges d’amortissement qui sont comptabilisés dans le résultat net de la société.
En troisième lieu, les plus ou moins-values liées à l’acquisition ou la cession d’actifs et de passifs dans le cadre d’une réorganisation GloBE ([83]) (cf. infra) sont exclues du résultat GloBE.
● Le modèle de règles prévoit de traiter les crédits d’impôt remboursables dans les 4 ans suivant leur octroi comme des subventions, ce qui conduit à les réintégrer dans le résultat GloBE des entités constitutives.
● Le modèle de règles prévoit de surcroît qu’une transaction réalisée entre deux entités constitutives situées dans des juridictions différentes doit être comptabilisée pour le même montant et respecter le principe de pleine concurrence – le non-respect de cette règle entraînant un ajustement du résultat de l’une ou des deux entités. Dans le cas où un accord préalable sur les prix de transfert a été conclu entre deux administrations fiscales, les termes de cet accord doivent être mobilisés pour déterminer le résultat GloBE.
● En outre, sont prévues les réintégrations suivantes :
– les gains et pertes de change résultant de l’usage de monnaies différentes pour établir les comptes de l’entité et pour déterminer le résultat fiscal ;
– les paiements illégaux et les amendes d’un montant supérieur à 50 000 euros ;
– les erreurs sur le traitement comptable d’une opération ;
– les provisions constituées pour financer les indemnités de départ à la retraite.
iii. Les retraitements sectoriels
Le modèle de règles prévoit certains retraitements spécifiques à certaines catégories d’activités. Ces corrections portent :
– sur le secteur des assurances, afin d’assurer la neutralité du taux effectif d’imposition vis-à-vis des revenus d’investissement perçus pour les souscripteurs de contrats ;
– sur le secteur bancaire, afin de clarifier le traitement devant être réservé aux paiements relatifs aux obligations contingentes convertibles de catégorie 1 ([84]).
De surcroît, l’article 3.3 du modèle de règles GloBE prévoit d’exclure du résultat GloBE les résultats provenant de l’exploitation de navires en trafic international ([85]).
Cette exclusion se justifie, selon les commentaires publiés par l’OCDE, par les régimes fiscaux spécifiques généralement mis en œuvre par les juridictions membres du Cadre inclusif, telle la taxe au tonnage en France.
La taxation au tonnage des entreprises de transport maritime en France
Le I de l’article 209-0 B du CGI prévoit que les sociétés dont au moins 75 % du chiffre d’affaires provient d’activités d’exploitation de navires armés au commerce peuvent bénéficier du régime de la taxation au tonnage.
En vertu de ce régime, le résultat imposable provenant des opérations directement liées à l’exploitation de navires est déterminé par application à chaque navire d’une taxe forfaitaire dont le barème dépend du nombre de jour durant lesquels le navire est éligible au régime de taxation et d’un nombre d’unités du système de jaugeage universel (UMS), permettant de mesurer la capacité ou le volume du navire.
RÉcapitulatif des principaux retraitements nÉcessaires À la dÉtermination du rÉsultat Globe
Éléments |
Retraitement |
Retraitements généraux |
|
Charge fiscale nette |
|
Impôts couverts |
Réintégration (majoration de la charge fiscale nette) |
Impôts différés actifs imputables à un déficit au titre de l’année fiscale |
Réintégration (diminution de la charge fiscale nette) |
Impôts complémentaires nationaux qualifiés |
Réintégration (majoration de la charge fiscale nette) |
Impôts remboursables non qualifiés |
Réintégration (majoration de la charge fiscale nette) |
Dividendes |
|
Dividende issu d’un titre de portefeuille détenu à court terme |
Réintégration |
Autres dividendes |
Exclusion |
Gains et pertes sur titres |
|
Plus ou moins-value résultant des variations de la juste valeur d’un titre de participation |
Exclusion |
Plus ou moins-value résultant d’un titre de participation comptabilisé selon la méthode de mise en équivalence |
Exclusion |
Plus ou moins-value de cessions de titres (hors titres de portefeuille) |
Exclusion |
Plus ou moins-value de cessions de titres de portefeuille |
Réintégration |
Réévaluation se rapportant à toute immobilisation corporelle comptabilisée en OCI |
Réintégration |
Plus ou moins-value liées à l’acquisition ou la cession d’actifs et de passifs dans le cadre d’une réorganisation GloBE |
Exclusion |
Autres éléments |
|
Crédits d’impôt qualifiés |
Réintégration |
Gains et pertes de change asymétriques |
Réintégration |
Paiements illégaux |
Réintégration |
Erreurs sur le traitement comptable |
Réintégration |
Provisions constituées pour financer les indemnités de départ à la retraite |
Réintégration |
Retraitements sectoriels |
|
Résultats provenant de l’exploitation de navires en trafic international |
Exclusion |
Source : commission des finances.
iv. Les retraitements optionnels
Le modèle de règles prévoit enfin la possibilité d’opter de manière limitée dans le temps (5 ans dans la majorité des cas) pour certains retraitements.
Ces options concernent :
– s’agissant des paiements des rémunérations sous forme d’actions, la possibilité de substituer au montant comptabilisé en charges dans les états financiers le montant admis en déduction du résultat fiscal ;
– l’exclusion des plus ou moins-values latentes sur les actifs et passifs comptabilisés à la juste valeur, qui sont alors comptabilisées lors de leur réalisation ;
– la possibilité d’étaler en arrière la comptabilisation des plus-values de cession de biens immobiliers situés dans la même juridiction que l’entité constitutive ;
– la possibilité de consolider les transactions intragroupes réalisées entre entités constitutives situées dans une même juridiction.
Les instructions administratives publiées par l’OCDE en 2023 sont par ailleurs venues enrichir le champ des options pouvant être exercées par les entités entrant dans le champ d’application des règles GloBE :
– un groupe peut exclure du résultat GloBE les abandons de créance consentis à ses entités en difficulté économique ;
– pour une durée de cinq ans, les gains et pertes sur instrument de couverture du risque de change peuvent être exclus sous condition du résultat GloBE de l’entité qui supporte le risque de change ;
– enfin, un groupe peut décider d’inclure certaines plus-values sur titres et dividendes à son résultat GloBE.
v. L’allocation des résultats des établissements stables et des entités transparentes
Parce qu’ils ne constituent pas des entités à part entière et qu’ils ne disposent pas forcément de comptes sociaux, les établissements stables doivent faire l’objet de dispositions spécifiques permettant de guider la manière dont leurs résultats sont répartis entre ceux-ci et leur entité principale.
L’article 3.4 du modèle de règles prévoit ainsi qu’en principe, le résultat GloBE d’un établissement stable correspond au résultat enregistré dans ses comptes sociaux. S’il n’en dispose pas, il convient de comptabiliser le montant qui aurait été pris en compte s’ils avaient été établis de manière autonome.
Le résultat net des entités transparentes localement ([86]) qui ne sont pas des entités mères ultimes et qui ne sont pas détenues par une entité transparente est quant à lui diminué du montant attribuable aux détenteurs de titres non-membres du groupe ([87]).
En second lieu, si l’entité transparente exerce son activité par l’intermédiaire d’un établissement stable, la quote-part de résultat de ce dernier lui est attribuée. Le solde est réparti à chaque détenteur à hauteur de sa participation. Si l’entité transparente est une entité hybride inversée, son résultat lui est attribué.
Les entités fiscalement transparentes
Une entité est transparente lorsque la législation fiscale d’une juridiction considère ses revenus, dépenses, bénéfices et pertes comme s’ils étaient réalisés ou encourus par l’entité qui détient ses titres, à hauteur de sa participation.
L’article 10.2 du modèle de règles définit deux catégories d’entités transparentes.
La première catégorie regroupe les entités localement transparentes, qui se subdivisent en deux sous-catégories :
– l’entité fiscalement transparente, qui est reconnue comme transparente au regard de ses revenus, dépenses, bénéfices et pertes à la fois par la législation fiscale de sa juridiction et par celle où est située l’entité qui détient ses titres ;
– l’entité hybride inversée, qui est reconnue comme fiscalement transparente au regard de ses revenus, dépenses, bénéfices et pertes par la législation de sa juridiction mais pas par la législation de la juridiction de l’entité qui détient ses titres. Une telle entité n’est reconnue comme un sujet fiscal par aucune juridiction.
La seconde catégorie concerne les entités hybrides, qui sont considérées comme opaques dans les juridictions où elles sont établies et transparentes dans les juridictions de leurs détenteurs.
d. Le calcul du montant ajusté des impôts couverts
Le montant des impôts couverts constitue le numérateur du taux effectif d’imposition. À l’instar des corrections devant être apportés au résultat GloBE, les impôts couverts font l’objet de plusieurs ajustements, liés à l’allocation de ces impôts entre les différentes entités constitutives et la prise en compte des impôts différés.
i. Les impôts couverts
Les impôts couverts, définis à l’article 4.2 du modèle de règles, désignent les impôts dont il est tenu compte pour déterminer le taux effectif d’imposition.
● Ces impôts recouvrent en premier lieu ceux portant sur le résultat des entités constitutives. Cela concerne en France l’IS et la contribution additionnelle assise sur celui-ci.
● Sont également concernés les impôts sur les résultats distribués ou réputés distribués dans le cadre de régimes d’imposition des sociétés assis sur les profits distribués ([88]).
● En troisième lieu, sont couverts les impôts prélevés « en lieu et place » de l’impôt sur les bénéfices. Les commentaires publiés par l’OCDE font ainsi état des retenues à la source sur les intérêts ou encore des primes d’assurance, ainsi que des taxes assises sur une assiette alternative, tels que le nombre d’unités produites ou les surfaces commerciales. Toutefois, pour être considérés comme des impôts couverts, ces taxes doivent être prélevées en dehors de tout autre prélèvement assis sur le résultat. La taxe sur les surfaces commerciales en France (Tascom), bien que pouvant répondre à cette définition, ne pourra donc pas être comptabilisée comme un impôt couvert.
● Enfin, les impôts assis sur les bénéfices non distribués et les fonds propres (c’est-à-dire les réserves distribuables et d’autres éléments des capitaux propres) sont considérés comme couverts. Ce cas concerne par exemple la Zakat prélevée en Arabie Saoudite, qui est assise à la fois sur les revenus et les capitaux propres des entreprises.
Sont en revanche explicitement exclus de la catégorie des impôts couverts les impôts assis sur la consommation, les droits d’accise et droits d’enregistrement, les impôts fonciers ainsi que les taxes sur les services numériques. Il en va de même des impôts complémentaires payés en application des règles GloBE.
ii. L’affectation des impôts couverts entre plusieurs entités constitutives
Les règles d’affectation des impôts couverts visent à attribuer l’impôt à la juridiction dans laquelle le revenu a été généré.
En premier lieu, certaines juridictions ne retiennent pas les mêmes règles de territorialité de l’impôt que celles applicables en France au titre de l’IS. Dans le cadre d’un régime national d’imposition dit mondial, l’entité de siège inclut dans sa base imposable les revenus perçus par les établissements stables qui lui sont liés quand bien même ces derniers seraient situés à l’étranger (tandis qu’en France, les revenus des établissements n’étant pas exploités en France ne sont par principe par imposable au titre de l’IS). Le modèle de règle prévoit que les impôts payés par les entités de siège au titre des revenus de leurs établissements stables situés dans une autre juridiction doivent être attribués à ces derniers.
De manière similaire, en application de l’article 4.3 du modèle de règles, l’impôt couvert comptabilisé par une entité fiscalement transparente doit être réalloué au niveau des entités détentrices. Dans le cas d’une entité hybride ([89]), les impôts comptabilisés par les entités détentrices doivent lui être réalloués.
Le modèle de règles traite également du cas des sociétés étrangères contrôlées, dont le régime est prévu à l’article 209 B du CGI en France (cf. supra). Les bénéfices d’une société imposés par application de ce régime doivent ainsi être réalloués à ses filiales étrangères.
Enfin, les impôts prélevés sur les dividendes distribués par une entité constitutive à ses entités détentrices doivent être réalloués à l’entité distributrice (cet impôt prenant la plupart des cas la forme d’une retenue à la source).
iii. Le traitement des impôts différés
Comme indiqué précédemment, des divergences temporaires peuvent apparaître entre la valeur comptable et la valeur fiscale d’éléments d’actif ou de passif.
Ces différences sont comptabilisées sous la forme d’un impôt différé, actif s’il s’agit d’une déduction d’impôt à venir, ou passif, s’il s’agit d’une charge future d’impôt.
● Afin d’éviter d’avantager ou de désavantager les contribuables en raison de ces décalages temporels, le modèle de règles prévoit d’ajuster le montant des impôts couverts en fonction de la charge d’impôt différé retenue dans les états financiers des entités constitutives.
Cet ajustement obéit toutefois à des règles particulières. Ainsi :
– dans les juridictions dans lesquelles le taux d’imposition applicable est inférieur à 15 %, le produit ou la charge d’impôt différé sera calculé en appliquant le taux en vigueur dans la juridiction ;
– pour les juridictions dans lesquelles le taux applicable est supérieur à 15 %, un taux de 15 % est appliqué.
Exemple simplifiÉ du calcul du montant d’impôts couverts aprÈs prise en compte des impôts diffÉrÉs
(en millions d’euros)
|
Base |
Impôt |
Taux effectif d’imposition |
Résultat avant impôt IFRS |
500 |
125 |
25 % |
Amortissement dérogatoire |
-50 |
- 12,5 |
/ |
Imputation de déficit passé |
-250 |
- 62,5 |
|
Résultat fiscal (a) |
200 |
50 |
10 %* |
Comptabilisation des impôts différés au taux de 15 % |
|||
Impôt différé passif sur amortissement (b) |
50 |
7,5 |
|
Reprise d’impôt différé actif sur déficits reportables (c) |
250 |
37,5 |
|
Impôts couverts ajustés (a+b+c) |
/ |
95 |
19 % |
*Le taux effectif est calculé en partant du résultat avant impôt IFRS.
Source : commission des finances, d’après un exemple tiré de la revue trimestrielle de fiscalité internationale n° 2-2022 ([90]).
● Le modèle de règle prévoit toutefois certaines exclusions d’impôts différés, qui ne sont donc pas comptabilisés pour ajuster le montant des impôts couverts. Il s’agit :
– des impôts différés portant sur des éléments exclus du résultat GloBE ;
– des impôts différés résultant de positions fiscales incertaines ([91]) ;
– des incidences sur un impôt différé actif d’un ajustement de valeur ou d’un ajustement de reconnaissance d’un point de vue comptable ;
– des incidences résultant de la variation future d’un taux d’imposition applicable en droit interne ;
– des impôts différés issus de la génération ou de l’utilisation d’un crédit d’impôt.
● De surcroît, le modèle de règles prévoit la mise en œuvre d’un dispositif anti-abus permettant de recalculer le taux effectif d’imposition défini pour un exercice si un impôt différé passif ne se traduit pas par le paiement d’un impôt courant dans un délai de cinq ans. Ce mécanisme vise ainsi à prévenir le risque de manipulation du montant des impôts différés passifs et se matérialise par la « recapture » de l’impôt différé (c’est-à-dire son exclusion du calcul du taux effectif d’imposition).
Cependant, certains dispositifs applicables dans le droit interne de la majorité des États membres du Cadre inclusif conduisent à comptabiliser de manière obligatoire des impôts différés dont la reprise est susceptible d’intervenir au-delà de ce délai de cinq ans. Pour tenir compte de ces impôts différés qui, selon les commentaires publiés par l’OCDE, reflètent des activités substantielles et sont peu susceptibles d’être manipulés, le modèle de règles exclut du champ de la « recapture » :
– les différentiels d’amortissement d’actifs corporels ;
– les coûts de licence en contrepartie de l’exploitation de biens immobiliers ou l’exploitation de ressources naturelles ;
– les dépenses de recherche et développement capitalisées ;
– les dépenses de mise hors service et de réparation ;
– la comptabilisation à la juste valeur de plus-values nettes latentes ;
– les gains latents de change ;
– les provisions techniques des sociétés d’assurance et les coûts différés de souscription de police d’assurance ;
– les plus-values sur cessions de biens corporels réinvestis dans la même juridiction ;
– les impôts différés résultant d’un changement de méthode comptable.
● L’article 9.1 du modèle de règles traite enfin la question de la prise en compte des impôts différés constitués avant l’entrée en vigueur de l’accord sur le pilier 2. Ce stock doit être recalculé en appliquant les taux mentionnés précédemment (le taux le plus faible entre 15 % et le taux applicable dans la juridiction).
iv. L’option pour la perte GloBE
L’article 4.4 du modèle de règles prévoit cependant une option permettant d’adopter un régime de comptabilisation des impôts différés simplifié, qui se substitue aux principes énoncés ci-avant.
Cette option permet, pour chaque année fiscale au cours de laquelle une perte « GloBE » (soit un résultat négatif calculé en application du modèle de règles) est constatée dans une juridiction, de comptabiliser un impôt différé actif dont le montant est égal au produit de la perte GloBE et du taux minimum de 15 %. Le solde de l’impôt différé actif est ensuite reportable sur les années fiscales ultérieures.
v. Le calcul du montant d’impôts couverts ajustés
Au total, le montant des impôts couverts ajustés est, aux termes de l’article 4.1 du modèle de règles, la somme :
– des impôts courants couverts ajustés des impôts différés ;
– des impôts couverts sur les éléments comptabilisés au sein des autres éléments du résultat global ou des fonds propres ;
– des impôts payés sur des positions fiscales incertaines ;
– des crédits d’impôts qualifiés, s’ils sont comptabilisés en diminution de la charge d’impôt courant (ce qui s’explique par le fait que ces crédits d’impôts sont réintégrés dans le résultat GloBE).
Sont par ailleurs déduits de ce total :
– les crédits d’impôts non qualifiés – parce qu’ils ne sont pas intégrés au dénominateur ;
– toute charge d’impôt courant qui ne serait pas payée sous trois exercices ;
– les impôts exigibles mais non encore acquittés en raison d’une position fiscale incertaine.
e. Le calcul du taux effectif d’imposition et de l’impôt complémentaire
Le taux effectif d’imposition (TEI), traité aux articles 5.1 à 5.6 du modèle de règles, constitue le cœur du pilier 2.
Il se calcule juridiction par juridiction et non entité par entité. Ainsi, lorsque ce taux sera inférieur à 15 % pour l’ensemble des entités d’une même juridiction, les mécanismes de prélèvement de l’impôt complémentaire décrits précédemment pourront être activés.
Ce choix est justifié par les commentaires de l’OCDE comme permettant d’éviter la mise en œuvre de stratégies d’évitement qui auraient permis aux groupes multinationaux d’optimiser leur charge d’impôt entre entités d’une même juridiction ; il permet également de limiter les distorsions qui auraient pu naître du fait de différences en matière de droit fiscal applicable entre les juridictions ([92]).
i. Le calcul du taux effectif d’imposition
Au titre de chaque année fiscale, le TEI est calculé pour une juridiction selon la formule suivante :
Le bénéfice GloBE de toutes les entités constitutives (EC) est égal à la somme des bénéfices de l’ensemble des EC situées dans la juridiction. De manière similaire, les pertes correspondent à la somme des pertes de toutes les EC situées dans la juridiction. Le calcul du TEI ne concerne donc que les juridictions dans lesquelles les EC dégagent un bénéfice net ([93]).
Le principe de l’agrégation juridictionnelle connaît toutefois plusieurs exceptions. Afin de tenir compte de la spécificité de ces structures, le TEI des entités d’investissement est ainsi calculé de manière séparée au sein d’une même juridiction (cf. infra).
D’autre part, aux termes de l’article 5.6 du modèle de règles, le TEI des entités membres d’un sous-groupe à détention minoritaire est calculé comme si ces dernières formaient « un groupe multinational distinct » ([94]). Les entités à détention minoritaire sont celles pour lesquelles l’entité mère ultime détient directement ou indirectement une participation inférieure à 30 %. Cette règle se justifie par le fait que ces entités peuvent en parallèle être détenues par d’autres sociétés qui ne font pas partie du même groupe multinational.
Les entités apatrides font enfin l’objet d’un traitement séparé : leur TEI est calculé sur une base individuelle ([95]).
ii. Le calcul de l’impôt complémentaire
Une fois que le test du TEI a été réalisé et si les entités constitutives d’une même juridiction sont imposées à un taux inférieur à 15 %, le modèle de règles prévoit la manière dont doit être calculé l’impôt complémentaire qui sera prélevé en application de la RIR ou de la RPII.
Le taux de cet impôt est égal à la différence entre le TEI de la juridiction et le taux minimum de 15 %. Une fois ce taux déterminé, l’impôt complémentaire est calculé de la manière suivante :
Cette formule appelle plusieurs précisions.
● En premier lieu, l’assiette de l’impôt complémentaire diverge de celle retenue pour calculer le TEI. Le taux de l’impôt complémentaire est ainsi calculé sur une base nommée « bénéfice excédentaire » qui correspond à la différence entre le bénéfice GloBE de la juridiction et un revenu de « routine ».
En d’autres termes, l’impôt complémentaire est calculé à partir d’une assiette sur laquelle est appliquée une déduction correspondant à un bénéfice fondé sur la substance. Ce mécanisme, prévu à l’article 5.3 du modèle de règles, a pour objectif de tenir compte de la réalité de l’activité économique des entités constitutives dans la juridiction.
La déduction fondée sur la substance comprend deux volets. Le premier porte sur les frais de personnel supportés par les entités constitutives d’une même juridiction et s’applique à un taux de 5 %. Les frais éligibles à cette exclusion sont ceux résultant des dépenses liées à la rémunération des salariés, les taxes sur les salaires et les cotisations patronales de sécurité sociale. Les employés éligibles sont ceux qui exercent leur activité dans la juridiction de l’entité.
Le modèle de règles prévoit également un régime transitoire ayant pour effet de majorer de manière dégressive la déduction applicable aux frais de personnel jusqu’en 2033.
Évolution du taux de la déduction applicable aux frais de personnel
Année fiscale débutant en |
Taux de la déduction |
2023 |
10 % |
2024 |
9,8 % |
2025 |
9,6 % |
2026 |
9,4 % |
2027 |
9,2 % |
2028 |
9,0 % |
2029 |
8,2 % |
2030 |
7,4 % |
2031 |
6,6 % |
2032 |
5,8 % |
2033 |
5 % |
Source : article 9.2 du modèle de règles.
Le deuxième volet de la déduction fondée sur la substance concerne l’exclusion, à hauteur de 5 %, de la valeur nette comptable des actifs corporels des entités constitutives.
Ces actifs corporels sont limitativement énumérés par le modèle de règles et regroupent ;
– les biens, usines, équipements situés dans la juridiction ;
– les ressources naturelles situées dans la juridiction ;
– le droit pour un locataire d’utiliser des actifs corporels situés dans la juridiction ;
– les licences ou dispositifs de même nature concédés par l’État en contrepartie de l’utilisation de biens immobiliers ou de ressources naturelles entraînant des investissements importants dans des actifs corporels.
Ne sont toutefois pas pris en compte les biens détenus pour être vendus ou loués ainsi que ceux détenus en tant qu’investissement. De plus, dans la mesure où les revenus tirés de l’exploitation de navires en trafic international sont exclus du résultat GloBE, la valeur comptable des actifs corporels utilisés pour générer ces mêmes revenus sont exclus du champ de la déduction.
De la même manière que pour la déduction applicable aux frais de personnel, un taux dérogatoire s’appliquera durant les premières années de mise en œuvre du pilier 2.
Évolution du taux de la dÉduction applicable aux actifs corporels
Année fiscale débutant en |
Taux de la déduction |
2023 |
8 % |
2024 |
7,8 % |
2025 |
7,6 % |
2026 |
7,4 % |
2027 |
7,2 % |
2028 |
7,0 % |
2029 |
6,6 % |
2030 |
6,2 % |
2031 |
5,8 % |
2032 |
5,4 % |
2033 |
5 % |
Source : article 9.2 du modèle de règles.
● Le modèle de règles prévoit en second lieu d’additionner à l’impôt complémentaire les impôts additionnels courants.
Ceux-ci résultent de l’application des articles 5.4 et 4.1.5 du modèle de règles. Il s’agit respectivement :
– des corrections appliquées à des exercices antérieurs, notamment dans le cas où pour ces derniers l’impôt complémentaire doit être recalculé ;
– de l’impôt complémentaire exigé pour une juridiction qui dégage une perte GloBE pour laquelle le montant d’impôt ajusté est négatif et inférieur au montant d’impôt escompté (cf. supra).
● Les modalités de calcul de l’impôt complémentaire impliquent enfin de tenir compte des impôts complémentaires nationaux qualifiés prélevés auprès des entités constitutives.
Cet impôt national est celui qui peut être institué par une juridiction afin de lui permettre d’atteindre le taux effectif minimum de 15 % et éviter que d’autres pays prélèvent un impôt sur des bénéfices générés sur son territoire. Pour être reconnu comme « qualifié », cet impôt complémentaire national doit respecter les règles GloBE ([96]) .
iii. Les exclusions de minimis
● Par dérogation aux règles présentées précédemment, les entités déclarantes peuvent, sur option annuelle, considérer que leur impôt complémentaire est nul pour une juridiction et sur une année fiscale si les deux conditions cumulatives suivantes sont remplies ([97]) :
– le chiffre d’affaires GloBE moyen réalisé par les entités constitutives du groupe dans cette juridiction est inférieur à 10 millions d’euros ;
– le résultat GloBE moyen réalisé par les entités constitutives du groupe dans cette juridiction est une perte ou un bénéfice inférieur à un million d’euros ([98]).
Selon les commentaires publiés par l’OCDE ([99]), cette option vise à alléger la complexité des modalités de calcul du taux effectif d’imposition dans les cas où le montant de l’impôt complémentaire qui pourrait être exigé serait trop faible.
● Au-delà des exclusions de minimis, l’article 9.3 du modèle de règles prévoit par ailleurs d’exempter du paiement de l’impôt complémentaire dû au titre de la RPII les groupes multinationaux qui seraient en phase de démarrage de leurs activités. Cette exclusion concerne les groupes qui ont des entités constitutives dans six juridictions ou moins et dont la somme de la valeur nette comptable de leurs actifs corporels ne dépasse pas 50 millions d’euros. Cette exemption ne s’applique néanmoins plus au bout du cinquième exercice suivant l’exercice au cours duquel le groupe multinational est entré dans le champ d’application des règles GloBE.
iv. L’allocation de l’impôt complémentaire entre les entités constitutives de la juridiction
Une fois le montant de l’impôt complémentaire calculé, le modèle de règles ([100]) prévoit les conditions dans lesquelles l’entité mère le ventile entre ses entités constitutives.
Cette ventilation s’opère selon la formule suivante :
f. Les restructurations d’entreprises
Les articles 6.1 à 6.5 du modèle de règles portent sur les situations pouvant survenir au cours de la « vie » d’une entreprise. Il s’agit plus particulièrement des opérations de fusions, de scissions et de réorganisations. Ces articles traitent également le cas des coentreprises (Joint-venture).
i. Les fusions et les scissions de groupe
● Plusieurs hypothèses de fusions sont retenues par le modèle de règles. Pour chacun de ces cas, des modalités particulières de prise en compte du chiffre d’affaires sont définies pour apprécier si le groupe doit entrer dans le champ d’application du pilier 2.
En premier lieu, deux ou plusieurs groupes peuvent avoir fusionné pour former un groupe unique dans les quatre années précédant l’année fiscale testée. Le seuil de chiffre d’affaires de ce nouveau groupe est présumé être atteint si pour une année fiscale précédant celle de la fusion, la somme de leur chiffre d’affaires respectif excède 750 millions d’euros.
En second lieu, si une entité qui n’était pas membre d’un groupe fusionne avec un groupe au cours de l’année fiscale et si l’un d’entre eux ne dispose pas d’états financiers consolidés, le seuil de chiffre d’affaires est présumé être atteint si la somme des chiffres d’affaires figurant dans leurs comptes sociaux est supérieure à 750 millions d’euros.
● Dans le cas d’une scission de groupe, la règle de droit commun prévoyant de vérifier si le seuil de chiffre d’affaires est atteint sur deux des quatre précédents exercices n’est pas appliquée. L’article 6.1 du modèle de règles prévoit à l’inverse que pour la première année fiscale qui suit la scission, le seuil de chiffre d’affaires est apprécié pour cette seule année. Pour les trois exercices suivants, le groupe issu de la scission entre dans le champ d’application des règles GloBE si son chiffre d’affaires a excédé 750 millions d’euros sur au moins deux exercices.
ii. Les entrées et sorties d’entités constitutives au sein d’un groupe multinational
● Lorsque survient une acquisition ou une cession d’entreprise, le modèle de règles prévoit que doivent être considérées comme des entités constitutives celles dont une partie des actifs, passifs, produits charges et flux de trésorerie sont inclus, ligne à ligne, dans les comptes consolidés de l’entité mère ultime au cours de l’année d’acquisition ou de cession.
Pour calculer le résultat GloBE et les montant d’impôts couverts ajustés de l’entité constitutive, seule la fraction de résultat net et d’impôt intégrée aux états financiers de l’entité mère est prise en compte au titre de l’exercice d’acquisition. Le groupe acquéreur retient par ailleurs la valeur comptable historique des actifs et passifs de l’entité constitutive, ce qui permet de différer l’imposition de la plus-value sur les actifs transférés.
● S’agissant des actifs et passifs d’impôts différés, le modèle de règles prévoit qu’ils sont comptabilités par le groupe acquérant comme si celui-ci contrôlait déjà l’entité au moment de leur constatation ([101]).
● De plus, afin de calculer le montant des déductions fondées sur la substance (cf. supra), les frais de personnel pris en compte par le groupe cessionnaire sont ceux enregistrés dans ses états financiers depuis la date d’acquisition. La valeur des actifs corporels est quant à elle prise en compte au prorata de la période écoulée depuis l’acquisition.
● Enfin, si une entité mère est cédée par un groupe à un autre au cours d’un exercice, celle-ci doit appliquer séparément la RIR pour chacun des deux groupes en tenant compte des actifs et passifs figurant dans les comptes des deux groupes, au prorata de leur temps de détention.
iii. Les transferts d’actifs et de passifs
L’article 6.3 du modèle de règles reprend dans certaines limites les régimes de faveur en matière de fusions, scissions et d’apport partiel d’actifs applicables dans le droit interne de la majorité des pays membres du Cadre inclusif.
Ces régimes visent à assurer la neutralité au plan fiscal de telles opérations en leur conférant un caractère intercalaire : l’objectif est de permettre la réorganisation juridique des entreprises sans les pénaliser fiscalement.
Ces régimes sont notamment prévus par les dispositions de la directive 2009/133/CE du 19 octobre 2009 ([102]) et, en droit interne, par les articles 210-0 A à 210 C du CGI.
● Dans le cadre du pilier 2, ce régime de faveur est aménagé pour les opérations relevant de « réorganisations GloBE ». Ces dernières correspondent aux transformations ou transferts d’actifs et de passifs, à l’occasion d’une fusion, d’une scission, d’une liquidation ou d’une opération de même nature, aux termes de laquelle :
– le transfert est rémunéré en tout ou majeure partie par une participation au capital émise par l’entité constitutive cessionnaire ([103]), ou, dans le cas d’une liquidation, la part des capitaux de l’entité liquidée est annulée ;
– les plus ou moins-value de l’entité constitutive cédante sur les actifs transférés ne sont pas soumises à impôt ;
– la législation fiscale de la juridiction dans laquelle est située l’entité constitutive cessionnaire lui impose de retenir la valeur historique des actifs ou passifs transférés.
Si ces critères sont remplis, la réorganisation GloBE bénéficie d’un régime de neutralité fiscale, ce qui permet à l’entité cédante d’exclure les plus ou moins-value réalisées à l’occasion de la cession de son résultat GloBE ; parallèlement, l’entité cessionnaire détermine son résultat GloBE à partir de la valeur nette comptable des actifs et passifs transférés retenue dans les écritures de l’entité constitutive cédante.
À l’inverse, les transferts opérés en dehors d’une réorganisation GloBE conduisent l’entité cédante à intégrer la plus ou moins-value dans le calcul de son résultat ; l’entité cessionnaire devra quant à elle comptabiliser les actifs et passifs selon leur prix d’acquisition.
● Le modèle de règles tient par ailleurs compte des cas dans lesquels le droit national fixe une limite aux contreparties pouvant être versées dans le cadre d’une réorganisation. Dans ce cas, une partie de la plus-value réalisée lors du transfert est imposable et ne peut donc être retenue comme une plus-value éligible au régime de la réorganisation GloBE. L’article 6.3 du modèle de règles prévoit en conséquence que la plus-value non qualifiée est intégrée dans le résultat GloBE de l’entité cédante ; symétriquement, pour déterminer le résultat de l’entité cessionnaire, la valeur des actifs et passifs transférés est ajustée pour tenir compte de la plus-value non qualifiée.
● Sur option ou de manière obligatoire selon les dispositions applicables dans le droit interne des États membres du Cadre inclusif, les sociétés peuvent être amenées à réévaluer la valeur de leurs actifs et passifs lors d’une opération de transfert. Cette réévaluation peut ensuite faire l’objet d’une imposition immédiate ou étalée dans le temps ([104]). En conséquence, l’article 6.3.4 du modèle de règles permet, sur option de l’entité déclarante, aux entités constitutives d’intégrer dans le calcul de leur résultat GloBE un montant de plus ou moins-value égal à la différence entre la valeur comptable des actifs ou passifs au moment du transfert et leur juste valeur après ce même transfert.
L’impôt payé au titre de cette variation de valeur sera retenu au titre des impôts couverts ; l’entité constitutive peut toutefois, sur option, étaler l’intégration de l’écart de réévaluation sur cinq ans.
g. Les entreprises revêtant une forme juridique particulière
Les principes généraux des règles GloBE peuvent imparfaitement s’adapter à certaines entreprises pour lesquelles il n’est pas possible d’identifier une entité mère ultime unique. Le modèle de règles précise dans ce cas le traitement fiscal qui doit leur être réservé.
i. Les coentreprises
Les comptes des coentreprises (Joint-venture), parce qu’elles ne sont pas contrôlées exclusivement pas une même entité, ne peuvent pas être consolidés ligne à ligne et agrégés aux résultats des autres entités du groupe auquel elles appartiennent. L’application des règles GloBE à ces entités nécessite donc des dispositions spécifiques, prévues par l’article 6.4 du modèle de règles.
De manière schématique, une joint-venture est une structure juridique créée par deux sociétés ou plus afin d’organiser leur coopération sur un projet commun. Aux termes du modèle de règles, ces structures sont plus précisément définies comme des entités « dont les résultats financiers sont reportés selon la méthode de mise en équivalence dans les états financiers consolidés de l’entité mère ultime, à condition que l’entité mère ultime détienne directement ou indirectement au moins 50 % de ses titres de participation » ([105]).
Le modèle de règles prévoit que l’impôt complémentaire des joint-venture et de leurs filiales est calculé de manière séparée, comme si elle était l’entité mère ultime d’un groupe multinational distinct. L’entité mère ultime du groupe qui détient une participation dans la joint-venture doit ensuite appliquer la RIR à proportion de sa participation dans cette même joint-venture.
ii. Les groupes multinationaux à entités mères multiples
Un groupe multinational à entités mères multiples correspond à deux ou plusieurs groupes dont les entités mères ultimes sont parties à un accord de jumelage d’actions ou à un accord de double cotation et dont au moins une entité ou établissement se situe dans une autre juridiction que celle des autres entités du groupe.
L’article 6.5 du modèle de règles prévoit que les entités constitutives de ces groupes – celles dont les états financiers sont consolidés ligne par ligne – sont considérées comme faisant partie d’un groupe multinational unique. Chaque entité mère du groupe doit par conséquent appliquent la RIR et la RPII pour leur part d’impôt complémentaire attribuable à une entité constitutive faiblement imposée.
h. Les régimes de neutralité fiscale et les régimes de distribution
Les articles 7.1 à 7.4 du modèle de règles adaptent les règles GloBE aux caractéristiques de certains régimes fiscaux spécifiques.
i. Les régimes de neutralité fiscale
Les pays membres du cadre inclusif peuvent imposer directement le revenu d’une société entre les mains de ses propriétaires : l’entité est alors considérée comme fiscalement transparente.
Ces modalités d’imposition peuvent poser difficulté pour l’application des règles GloBE lorsque l’entité transparente est également une entité mère ultime. Dans cette hypothèse, le TEI de cette entité serait très faible voire nul, ce qui conduirait à prélever un impôt complémentaire élevé quand bien même l’imposition des bénéfices de l’entreprise n’a pas fait l’objet d’un évitement.
Pour régler cette question, l’article 7.1 du modèle de règles prévoit que le bénéfice GloBE d’une entité fiscalement transparente qui est l’entité mère ultime d’un groupe est diminué du montant du bénéfice GloBE imputable à chaque titre de participation si :
– le détenteur du titre de participation est personnellement soumis à l’impôt sur ce bénéfice au titre d’une période d’imposition qui se termine douze mois après la fin de l’exercice du groupe multinational (à la condition que le détenteur du titre soit soumis à l’impôt sur la totalité de ce bénéfice à un taux supérieur au taux minimum – cette condition étant respectée si l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’au total, le bénéfice sera taxé à un taux supérieur au taux minimum de 15 %) ;
– de manière alternative, le détenteur est une personne physique, une entité publique, une organisation internationale, une organisation à but non lucratif ou un fonds de pension qui réside fiscalement dans la juridiction de l’entité mère ultime et qui détient des titres donnant droit à 5 % ou moins des bénéfices et actifs de l’entité mère ultime.
Symétriquement, les entités transparentes doivent diminuer leur perte GloBE du montant de la perte GloBE imputable à chaque titre de participation, à la condition que les détenteurs des titres puissent eux-mêmes déduire cette perte de leur revenu imposable.
ii. Le régime des dividendes déductibles
Certains régimes fiscaux des pays membres du Cadre inclusif prévoient un niveau d’imposition unique pour les détenteurs de titres d’une entité en permettant à cette dernière de déduire de son résultat imposable les distributions de bénéfices qu’elle réalise. Le montant du bénéfice non distribué est par ailleurs, dans le cadre de ces régimes, imposé dans les mains de l’entité.
Certains régimes applicables aux coopératives prévoient par ailleurs de considérer les ristournes qu’elles versent à leurs adhérents au prorata du travail qu’ils fournissent comme une forme de profit distribué pouvant être déduit du résultat imposable. En France, ce régime s’applique notamment aux coopératives relevant de la loi cadre du 10 septembre 1947 ([106]), à savoir :
– les sociétés coopératives constituées entre commerçants ;
– les sociétés coopératives d’achats en commun de commerçants détaillants ;
– les sociétés coopératives de commerçants détaillants ;
– certains organismes de crédit populaire ou coopératif, comme les sociétés de caution mutuelle, les banques populaires, les coopératives de crédit pour les industries d’art ou les sociétés de crédit maritime mutuel ;
– les sociétés mixtes d’intérêt agricole (SMIA).
Les coopératives agricoles bénéficient quant à elles non pas d’un régime d’assiette mais d’un régime d’exonération d’IS pour certaines de leurs opérations (cf. supra).
L’article 7.2 du modèle de règles tient compte de ces régimes d’une manière relativement similaire à celle aménagée pour les entités fiscalement transparentes. Il est ainsi prévu que les entités mères ultimes soumises à un régime de « dividende déductible » déduisent de leur bénéfice GloBE (sans pour autant pouvoir ramener le résultat en dessous de zéro ([107])) le montant du bénéfice distribué.
Les conditions prévues par le modèle de règles se rapprochent également de celles prévues pour les entités transparentes :
– le dividende distribué doit être imposé dans l’État de résidence de son bénéficiaire au titre de la période d’imposition se terminant dans les douze mois suivant la fin de l’exercice de l’entité mère ;
– le dividende doit être imposé à un taux au moins égal au taux minimum de 15 % ;
– le bénéficiaire du dividende est une personne physique et le dividende correspond à une ristourne.
Le régime s’applique également si le bénéficiaire est une personne physique ou une entité exclue (hors fonds d’investissement et véhicule d’investissement immobilier) qui réside fiscalement dans la juridiction de l’entité mère ultime et qui détient des titres de participation donnant droit à 5 % ou moins des bénéfices et actifs de l’entité mère ultime.
L’article 10.1 du modèle de règles précise également que les ristournes versées par les coopératives et les dispositifs d’exonération fiscale applicables aux coopératives sont couverts par l’application du régime des dividendes déductibles.
iii. Les régimes éligibles d’impôt sur les distributions
Les impôts sur les distributions sont assis sur les bénéfices distribués ou réputés distribués aux détenteurs de titres de participation et non sur les bénéfices réalisés par une entreprise ([108]). Comme indiqué précédemment, l’article 4.2 du modèle de règles prévoit de considérer ces impôts comme couverts pour la détermination du taux effectif d’imposition.
Les commentaires publiés par l’OCDE relèvent toutefois plusieurs difficultés pouvant se poser dans l’application des règles de droit commun du pilier 2 pour les entreprises soumises à un impôt sur les distributions.
En premier lieu, lorsque le bénéfice d’une société ne donne pas lieu à distribution, une grande partie des revenus de cette même société n’est pas soumise à impôt l’année où ils ont été perçus et déclarés dans ses états financiers. Elle peut ainsi être soumise à un impôt complémentaire quand bien même elle n’est en pratique pas sous imposée.
En second lieu, le montant des distributions réalisées au cours d’une année peut ne pas être corrélé au montant des revenus perçus par l’entreprise : il peut donc en résulter un taux effectif d’imposition très élevé ou très faible qui ne permettra pas de vérifier si une situation de sous imposition est avérée.
En conséquence, lorsqu’un groupe multinational détient une ou plusieurs entités constitutives situées dans une juridiction disposant d’un régime d’imposition sur les distributions, l’article 7.3 du modèle de règles prévoit que l’entité déclarante peut exercer une option annuelle permettant de majorer le montant des impôts couverts de ses entités constitutives situées dans une même juridiction.
Le montant de cette majoration – nommée impôt sur les distributions présumées (Deemed distribution tax) – est égal au plus faible montant entre le montant nécessaire pour porter le taux d’imposition de la juridiction au taux minimum et le montant d’impôt qui aurait été exigible si les entités situées dans la juridiction avaient distribué tous leurs bénéfices. Ce second cas vise à prévenir les cas d’abus, dans l’hypothèse où le revenu GloBE d’une entité serait supérieur au montant des bénéfices pouvant être distribués.
Un compte de régularisation doit être établi pour chaque année au cours de laquelle cette option est exercée. Ce compte est tout d’abord abondé du montant de l’impôt sur les distributions présumées. Il est ensuite diminué à la fin de chaque année fiscale suivante des impôts que les entités constitutives ont acquittés au titre des distributions réalisées ou présumées ([109]) puis, le cas échéant, du montant de la perte GloBE de la juridiction multipliée par le taux minimum ([110]).
Au terme du quatrième exercice suivant la constitution du compte de régularisation de l’impôt sur les distributions présumées, si celui-ci présente un solde positif, le taux effectif d’imposition et l’impôt complémentaire dû au titre de l’année au cours de laquelle le compte a été constitué sont recalculés. À cette fin, le solde du compte vient en diminution du montant des impôts couverts ajustés déclarés pour cette même année. Ce nouveau montant est ensuite comparé au bénéfice GloBE net pour la juridiction afin de déterminer le TEI.
mÉcanisme de suivi de la distribution du rÉsultat et ajustement de l’impÔt complÉmentaire
Source : commission des finances.
i. Le calcul du taux d’imposition effectif des entités d’investissement
Les entités d’investissement regroupent d’une part les entités exclues lorsqu’elles sont des entités mères ultimes (fonds d’investissement, véhicules d’investissement immobilier) ainsi que :
– les entités détenues directement ou indirectement à 95 % de leur valeur par un fonds d’investissement ou un véhicule d’investissement immobilier ;
– les entités détenues à au moins 85 % de leur valeur par un fonds d’investissement ou un véhicule d’investissement immobilier, à condition que leurs bénéfices soient constitués pour l’essentiel de dividendes ou de plus ou moins-values exclues au sens des règles GloBE (cf. supra) ;
– les entités d’investissement d’assurance, qui désignent des entités répondant à la définition d’un fonds d’investissement ou d’un véhicule d’investissement immobilier mais qui sont détenues par des compagnies d’assurance et établies « en lien avec des engagements au titre d’un contrat d’assurance ou de rente » ([111]).
● Afin de ne pas pénaliser fiscalement les investisseurs selon qu’ils investissent dans une entité d’investissement ou directement dans les actifs sous-jacents de ces entités, les entités d’investissement sont généralement placées sous un régime de neutralité fiscale.
Afin de tenir compte de la spécificité des régimes fiscaux applicables à de telles entités, les règles GloBE aménagent des principes dérogatoires pour définir leur TEI et leur impôt complémentaire.
Comme mentionné précédemment, la première dérogation concerne l’exclusion du champ d’application des règles GloBE des fonds d’investissement et véhicules d’investissement immobilier qui sont des entités mères ultimes.
Pour les entités d’investissement qui sont des entités constitutives, le modèles de règles prévoit le régime de droit commun applicable aux entités d’investissement opaques ([112]), et deux approches optionnelles.
● L’article 7.4 du modèle de règles prévoit en premier lieu que le TEI des entités d’investissement opaques est calculé séparément du TEI de la juridiction dans laquelle elle est située. Le TEI de l’entité d’investissement (EI) est ainsi déterminé de la manière suivante :
Le montant des impôts ajustés et la part du résultat GloBE à prendre en compte dépend de la quote-part de participation du groupe dans l’entité d’investissement.
Si plusieurs entités d’investissement sont situées dans une même juridiction, le montant de leurs impôts couverts et de leur résultat GloBE (pour la part attribuable au groupe) sont agrégés pour définir un TEI unique mais distinct du TEI des autres entités constitutives situées dans la même juridiction. Par parallélisme, l’exclusion des bénéfices liés à la substance ne pourra s’opérer qu’en agrégeant les frais de personnel et la valeur des actifs incorporels des entités d’investissement de la juridiction.
● Les entités d’investissement peuvent toutefois exercer deux types d’option.
La première, applicable pour cinq ans, permet au détenteur de l’entité d’investissement de la considérer comme une entité fiscalement transparente. Par conséquent la quote-part de résultat GloBE de l’entité d’investissement est attribuée à l’entité détentrice (ce qui permet à cette entité détentrice de déduire des revenus de l’entité d’investissement son propre bénéfice fondé sur la substance).
Pour exercer cette option, l’entité détentrice doit être soumis à un impôt sur la variation de la juste valeur de sa participation dans l’entité d’investissement à un taux au moins égal au taux minimum de 15 %.
La seconde option, alternative à la première, est ouverte aux entités déclarantes détenant des titres dans une entité d’investissement, hors entités d’investissement d’assurance. Elle permet d’inclure dans les bénéfices de l’entité déclarante les distributions et distributions présumées réalisées au titre d’un exercice par l’entité d’investissement. La part de bénéfices non distribués au terme d’un délai de trois exercices est néanmoins réintégrée au bénéfice de l’entité d’investissement.
Cette option est prise pour cinq ans et ne peut être exercée que s’il peut être présumé que les distributions seront soumises à une imposition d’au moins 15 %.
RÉgimes applicables aux entitÉs d’investissement
Source : Delphine Bocquet, Laurence Toxé, Maud Poncelet, François-Marc Venier, Anne-Christine Bosslet, Règles GloBE du Pilier 2 : structures de holdings spécifiques et entités d’investissement, Revue trimestrielle de fiscalité internationale, n° 2022-2, mai 2022.
j. Les obligations déclaratives
L’article 8.1 du modèle de règles prévoit que les groupes multinationaux entrant dans le champ d’application du pilier 2 doivent déposer une « déclaration d’information GloBE ».
● En principe, toutes les entités constitutives du groupe doivent déposer une telle déclaration dans la juridiction où elles se situent. Elles peuvent toutefois en être exemptées si l’entité mère ultime du groupe ou une autre entité spécifiquement désignée comme « déclarante » dépose en leur nom une déclaration, à la condition que la déclaration soit déposée dans une juridiction qui a conclu un accord d’échange d’informations avec la juridiction de l’entité constitutive.
Si plusieurs entités constitutives sont situées dans une même juridiction, l’un d’entre elles peut être désignée pour établir et déposer la déclaration GloBE de l’ensemble des entités constitutives de la juridiction.
● Si le modèle de règles laisse la possibilité aux États d’adapter le contenu de la déclaration dans les limites offertes par le cadre de mise en œuvre des règles GloBE (c’est-à-dire les instructions et les règles déterminées postérieurement à la publication du modèle de règles), plusieurs catégories d’informations revêtent un caractère obligatoire.
Il s’agit :
– d’informations permettant d’identifier les entités constitutives de la juridiction, notamment leur numéro fiscal et leur statut au regard des règles GloBE (entité d’investissement, entité transparente, coentreprises etc.) ;
– d’informations sur la structure capitalistique du groupe multinational, notamment sur les titres détenus par les entités constitutives conférant un contrôle sur d’autres entités ;
– les renseignements nécessaires pour calculer le TEI de chaque juridiction, l’impôt complémentaire par entité constitutive et son affectation par juridiction ;
– un historique des options exercées ;
– toute autre information nécessaire à la mise en œuvre des règles GloBE.
Est enfin prévu la possibilité de simplifier le format des déclarations GloBE, selon des modalités qui ne sont pas définies par le modèle de règles.
● Les entités déclarantes auront 15 mois à compter de la clôture de l’exercice fiscal pour déposer leur déclaration GloBE. Ce délai est porté à 18 mois pour la première déclaration.
● Enfin, le modèle de règles renvoie aux législations nationales pour définir les régimes de sanction et de confidentialité concernant le dépôt des déclarations GloBE.
3. Les instructions administratives et les régimes de protection
Plusieurs dispositions du modèle de règles sont progressivement précisées par le Cadre inclusif au moyen de documents spécifiques ou d’instructions administratives.
L’un de ces documents, publié en décembre 2022, porte plus particulièrement sur les régimes de protection du pilier 2 (Safe harbours). Par ailleurs, deux séries d’instructions ont d’ores et déjà été publiées en février et juillet 2023.
a. Les régimes de protection et d’allégement des sanctions
L’article 8.2 du modèle de règles prévoit la mise en œuvre de régimes de protection dont le contenu devait être précisé.
Les éléments publiés en décembre 2022 ([113]) prévoit l’application de plusieurs régimes de protection, certains étant transitoires et d’autres permanents, permettant de considérer que l’impôt complémentaire dû par un groupe multinational est nul dans une juridiction.
i. Les régimes de protection transitoires
Les régimes de protection provisoires (CbCR Safe harbours) portent sur les exercices ouverts au plus tard le 31 décembre 2026 (à l’exclusion des exercices clos après le 30 juin 2028).
● En premier lieu, l’impôt complémentaire d’un groupe multinational est égal à zéro dans une juridiction si les critères des « minimis » sont remplis. À cette fin, le groupe multinational doit déclarer au titre d’une juridiction un chiffre d’affaires de moins de 10 millions d’euros et un bénéfice avant impôt de moins d’un million d’euros dans son CbCR. Ce test est similaire à celui prévu par l’article 5.5 du modèle de règles, à la différence que ce dernier se fonde sur les informations GloBE de l’entité constitutive.
● Le second test permet à un groupe multinational de calculer un TEI simplifié qui, s’il est supérieur à un taux minimum transitoire, exonère le groupe de réaliser toutes les étapes nécessaires à la détermination de son TEI en application du modèle de règles. Le taux minimum transitoire augmente d’année en année, afin de rendre le régime de protection de moins en moins favorable.
Taux minimum transitoire au titre du test du « tei simplifiÉ »
Année d’ouverture de l’exercice |
Taux minimum transitoire |
2023 |
15 % |
2024 |
15 % |
2025 |
16 % |
2026 |
17 % |
Source : commission des finances.
Le calcul du TEI simplifié est égal au montant d’impôt couvert pour la juridiction (issus des états financiers) divisé par le bénéfice des entités constitutives tels que reportés dans le CbCR.
● Le dernier test porte sur le « revenu de routine » des entités de la juridiction. Il est rempli si le bénéfice avant impôt du groupe multinational, pour une juridiction, est inférieur ou égal au revenu de substance (c’est-à-dire le revenu à l’exclusion du bénéfice excédentaire) calculé conformément aux règles GloBE.
ii. Les régimes de protection permanents
Les régimes de protection permanents reposent sur les mêmes tests alternatifs que ceux prévus dans le cadre des régimes de protection temporaire (minimis, TEI simplifié, « revenu de routine »). Par principe, ces tests devront néanmoins être réalisés en se fondant sur les informations GloBE des groupes multinationaux et non ceux reportés dans leur CbCR.
iii. Le régime d’allégement des sanctions
Le document précité prévoit enfin d’instaurer un dispositif transitoire d’allégement des sanctions, en vertu duquel aucune sanction ne devrait être appliquée s’agissant de l’établissement de la déclaration GloBE si le groupe multinational met en œuvre des « mesures raisonnables » pour appliquer les règles GloBE. Ce dispositif, visant également à accompagner les entreprises pour la mise en œuvre du pilier 2, a vocation à s’appliquer pour les exercices ouverts jusqu’au 31 décembre 2026 (à l’exclusion des exercices clos après le 30 juin 2028).
b. Les instructions administratives
Les instructions administratives ont pour objectif de traiter un large champ de questions techniques appelant des éclaircissements pour transposer les règles du pilier 2 en droit national.
Deux documents ont été publiés le 2 février 2023 ([114]) et le 17 juillet 2023 ([115]). Sans entrer dans le détail de leur contenu, ces documents portent sur :
– des précisions s’agissant du champ d’application des règles GloBE, notamment sur la notion d’entité exclue ;
– l’application des règles GloBE aux compagnies d’assurance ;
– les règles de conversion monétaire dans le cadre des calculs GloBE ;
– l’application de l’exclusion de revenu fondée sur la substance ;
– l’impôt complémentaire qualifié national et les régimes de protection applicables en la matière ;
– l’application d’un régime de protection pour la RPII (UTPR Safe harbour)
Le régime de protection relatif à la mise en œuvre de la RPII
Les dispositions relatives au régime de protection de la RPII (UTPR Safe harbour) prévoient que pour tout exercice d’une durée maximale de douze mois ouvert jusqu’au 31 décembre 2025 et clos avant le 31 décembre 2026, lorsque la législation de la juridiction où est implantée l’entité mère ultime d’un groupe multinational prévoit un taux normal d’impôt sur les sociétés au moins égal à 20 %, l’impôt complémentaire calculé pour les entités constitutives situées dans cette juridiction au titre de la RPII (y compris l’entité mère ultime) est ramené à zéro pour chaque exercice clos dans cette période.
D. la transposition du pilier 2 par l’union europÉenne
Annoncée dès le 18 mai 2021 dans une communication de la Commission européenne ([116]), les travaux de transposition des règles du pilier 2 dans l’Union européenne se sont traduits par la présentation d’une proposition de directive le 22 décembre 2021.
Cette directive a ensuite été adoptée et publiée le 14 décembre 2022 ([117]). Elle reprend strictement le contenu du modèle de règles GloBE et a vocation, selon son vingt-quatrième considérant, à être mise en œuvre en utilisant « comme sources d’illustration ou d’interprétation le modèle de règles OCDE ainsi que les explications et exemples » ayant fait l’objet d’une diffusion au sein du Cadre inclusif.
La directive du 14 décembre 2022 comporte néanmoins plusieurs types de spécificités, liées à son architecture générale, son application aux groupes purement nationaux, ainsi qu’à ses dispositions relatives à la reconnaissance des règles des juridictions tierces. De surcroît, la directive reprend l’option aménagée par le modèle de règles permettant d’instituer un impôt complémentaire national et aménage sous condition une option pour une application différée de la RIR et de la RBII.
1. L’architecture de la directive
L’architecture de la directive reprend de manière générale la structure du modèle de règles.
La principale différence concerne les définitions, qui figurent, conformément à la structure habituelle des textes européens, au sein des premiers articles (chapitre 1 de la directive (UE) 2022/2523).
Architectures comparÉes de la directive du 14 dÉcembre 2022 et du modÈle de rÈgles globe
|
Directive (UE) 2022/2523 |
Modèle de règles GloBE |
Chapitre 1 |
Dispositions générales |
Champ d'application |
Chapitre 2 |
RIR et RBII |
Redevables de l'impôt |
Chapitre 3 |
Calcul du bénéfice ou de la perte admissible |
Calcul du résultat GloBE |
Chapitre 4 |
Calcul du montant ajusté des impôts concernés |
Calcul du montant ajusté des impôts concernés |
Chapitre 5 |
Calcul du taux effectif d'imposition et de l’impôt complémentaire |
Calcul du taux effectif d'imposition et de l’impôt complémentaire |
Chapitre 6 |
Règles spéciales relatives à la restructuration d’entreprises et aux holdings |
Restructurations d’entreprises et holdings |
Chapitre 7 |
Neutralité fiscale et régimes de distribution |
Régimes de neutralité fiscale et régimes de distribution |
Chapitre 8 |
Dispositions administratives |
Administration |
Chapitre 9 |
Règles transitoires |
Règles transitoires |
Chapitre 10 |
Dispositions finales |
Définitions |
Source : commission des finances.
Les dispositions finales de la directive portent sur des modalités de mise en œuvre du pilier 2 spécifiques à l’Union européenne (adoption d’actes délégués par la Commission européenne, information du Parlement européen). Ces dispositions prévoient par ailleurs que la transposition de la directive doit survenir avant la fin de l’année 2023 et que ses dispositions s’appliquent aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2023.
Autre différence de forme notable, la règle des paiements insuffisamment imposés (RPII) est renommée en règle des bénéfices insuffisamment imposés (RBII) ([118]). Cette nouvelle terminologie vise à mieux refléter les modalités d’application de cette règle, qui ont évolué depuis les premières étapes de négociation du modèle de règles GloBE ([119]).
2. L’application de l’impôt minimal aux groupes purement nationaux
Alors que le modèle de règles prévoit que l’inclusion d’un groupe dans le champ d’application du pilier 2 est conditionnée à l’implantation d’entités constitutives dans plusieurs juridictions, l’article premier de la directive prévoit que son propre champ d’application s’étend aux groupes purement nationaux ([120]).
Cet ajustement s’explique par la nécessité d’assurer la compatibilité du modèle de règles au droit primaire de l’Union européenne et notamment au principe de liberté d’établissement. Il s’agit plus concrètement d’éviter toute situation discriminatoire entre des entités situées dans un État membre et les entités situées dans un autre État membre.
En principe, une entité mère ultime d’un groupe multinational devra donc appliquer la règle d’inclusion du revenu (RIR) à elle-même et à toute les entités constitutives situées dans sa juridiction. Les groupes nationaux de grande envergure, présents dans un unique État membre, devront également s’auto-assujettir à la RIR.
Les définitions figurant à l’article 3 de la directive ont donc été enrichies d’une définition supplémentaire, relative aux groupes nationaux de grande envergure.
3. La reprise de l’option en faveur de l’impôt complémentaire national qualifié
Les articles premier et 11 de la directive prévoient que les États membres peuvent choisir d’appliquer un impôt national complémentaire qualifié permettant d’imposer les bénéfices excédentaires des entités faiblement imposées situées dans leur juridiction.
Cette option ouverte par le modèle de règles GloBE est donc reprise par l’Union européenne afin de permettre à une juridiction à faible imposition de capter les recettes fiscales complémentaires qui seraient, en l’absence d’un tel impôt national, perçues par la juridiction d’établissement de l’entité mère du groupe.
L’objectif de cette option reflète la philosophie d’ensemble de l’accord du Cadre inclusif, qui vise non seulement à récupérer les recettes fiscales dont le paiement a été évité mais aussi à inciter les États à rehausser leur taux d’imposition des bénéfices au niveau du taux minimum. En conséquence, la perception de l’impôt complémentaire national qualifié est prioritaire sur l’application de la RIR et de la RBII : l’impôt complémentaire perçu en application de ces deux dernières règles est ainsi diminué du montant de l’impôt complémentaire national qualifié acquitté par l’entité constitutive sous imposée.
L’article 11 de la directive prévoit par ailleurs que les modalités de calcul de cet impôt complémentaire peuvent reposer sur la base d’une norme de comptabilité financière « admissible ou agréée par l’organisme comptable agréé ». De plus, l’impôt complémentaire peut être ajusté pour éviter toute distorsion importante de la concurrence.
Ce même article prévoit par ailleurs un mécanisme permettant de prévenir des stratégies d’évitement que les États pourraient être amenés à élaborer pour favoriser les entreprises situées sur leur territoire : l’impôt complémentaire doit ainsi être acquitté dans les quatre exercices suivant l’exercice au cours duquel il était dû. À défaut, son montant est ajouté au montant de l’impôt complémentaire dû pour la juridiction et devra être perçu par une autre juridiction via un impôt additionnel courant.
L’application de l’option par un État membre, prise pour 3 ans, doit enfin être notifiée à la Commission européenne dans les trois mois suivant l’adoption des dispositions législatives et réglementaires nécessaire à l’institution de l’impôt complémentaire national.
4. La procédure de reconnaissance de l’équivalence des règles nationales de pays tiers
Les commentaires publiés par l’OCDE ([121]) précisent qu’une règle du revenu d’inclusion « qualifiée » est une norme équivalente à celles prévues par le modèle de règle, permettant d’atteindre le même résultat que celui qui serait obtenu en appliquant le modèle de règles et ses commentaires.
La mise en œuvre du pilier 2 repose en effet sur le fait que l’ensemble des États parties à l’accord mettent en œuvre de manière coordonnée un ensemble uniforme de règles pour s’assurer qu’aucune entreprise n’échappe à l’impôt complémentaire ou qu’aucune entreprise ne soit à l’inverse soumise à une situation de double imposition (dans le cas où, par exemple, une juridiction ne reconnaitrait pas la RIR d’une autre juridiction).
Il est donc prévu que le cadre de mise en œuvre GloBE (Globe implementation framework) définisse des principes directeurs pour qu’une juridiction puisse évaluer la conformité de la législation d’un autre pays aux règles GloBE.
Le considérant 26 de la directive 2022/2523 du 14 décembre 2022 prévoit ainsi que cette évaluation devra être menée en se référant à « l’évaluation à mener au niveau de l’OCDE ». Toutefois, pour assurer une transposition efficace de la directive, son article 52 définit également une procédure d’évaluation de l’équivalence des règles adoptées par des pays tiers. Cette procédure, qui permet de ne pas considérer la législation de ces pays comme un régime fiscal des sociétés contrôlées ([122]) , repose sur quatre conditions :
– le cadre juridique du pays tiers met en œuvre un ensemble de règles selon lesquelles l’entité mère d’un groupe multinational calcule et paye la part d’impôt complémentaire qui lui est attribuable pour ses entités constitutives faiblement imposées ;
– un taux effectif minimum d’imposition de 15 % est applicable dans le pays tiers ;
– le calcul du taux effectif d’imposition repose uniquement sur la combinaison des revenus des entités situées dans la même juridiction ;
– les modalités de calcul de l’impôt complémentaire intègrent un mécanisme de compensation permettant d’éviter une double imposition.
Ce même article 52 prévoit enfin que la Commission européenne est habilitée à adopter des actes délégués pour déterminer la liste des pays tiers qui ont mis en œuvre un cadre juridique considéré comme équivalent à une RIR qualifiée et à mettre à jour cette même liste.
5. L’option pour l’application différée de la RIR et de la RBII
L’option pour l’application différée de la RIR et de la RBII a été introduite durant les négociations portant sur la directive pour emporter l’approbation des États membres comptant peu de sièges de grandes entreprises sur leur territoire.
Cette option, prévue à l’article 50 de la directive du 14 décembre 2022, permet aux États membres dans lesquels ne sont pas situées plus de douze entités mères ultimes de groupes nationaux de grande envergure ou multinationaux de ne pas appliquer la RIR et la RBII durant six années fiscales consécutives à partir du 31 décembre 2023. Ces pays ne seront donc pas exonérés de transposer la directive mais disposeront d’un délai supplémentaire.
Les entités constitutives du groupe situé dans un pays exerçant l’option n’échapperont toutefois pas à l’impôt : le 2 du même article 50 prévoit que ces entités constitutives seront soumises à l’impôt complémentaire. La part qui devait revenir à l’État exerçant l’option sera ainsi réattribuée aux autres États membres.
6. Les régimes de protection
Parce que les modalités de mise en œuvre du modèle de règles GloBE sont progressivement enrichies, la directive ne reprend pas directement le contenu des régimes de protection définis par le Cadre inclusif en décembre 2022 (la directive ayant été adoptée de manière concomitante).
L’article 32 de la directive prévoit ainsi que l’impôt complémentaire d’un groupe national ou multinational peut être ramené à zéro pour une juridiction s’il remplit les conditions « d’une convention internationale éligible en matière de régimes de protection ». Ces ensembles de règles doivent, pour être admises, avoir été approuvées par l’ensemble des États membres ([123]).
II. Le droit proposÉ
Le présent article transpose les dispositions de la directive 2022/2523 du 14 décembre 2022. Conformément à ce que cette dernière prévoit, la transposition tient compte des instructions et éléments les plus récents adoptés par le Cadre inclusif pour introduire en droit national des règles considérées comme « qualifiées » à l’égard du modèle de règles GloBE.
Il est ainsi tenu compte des régimes de protection dits CbCR définis par le Cadre inclusif et des instructions publiées en février et juillet 2023, notamment concernant le régime de protection applicable pour la RBII.
● En premier lieu, le I du présent article insère dans le titre I de la première partie du livre premier du code général des impôts un chapitre II bis portant sur l’imposition minimale mondiale des groupes d’entreprises multinationales et des groupes nationaux de grande envergure.
● En second lieu, les II à V du présent article modifient le code général des impôts et le livre des procédures fiscales afin de prévoir des règles en matière de recouvrement, de contrôle et de sanction de l’impôt complémentaire.
● En troisième lieu, le VI du présent article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance des dispositions relative à la déclaration, au recouvrement, au contrôle à aux sanctions des impôts complémentaires dus par les groupes multinationaux et les groupes nationaux de grande envergure établis en France.
● En dernier lieu, le VII prévoit les modalités d’application du présent article.
A. La transposition du modÈle de rÈgles et de la directive 2022/2523 du 14 dÉcembre 2022
Le présent article reprend le contenu de la directive 2022/2523 du 14 décembre 2022, enrichi des éléments publiés par l’OCDE en 2023 pour préciser l’application des règles GloBE.
1. L’architecture de la transposition
Le nouveau chapitre inséré par le I du présent article est composé de 138 articles (223 VJ à 223 WY bis) répartis dans 9 sections.
Les structures respectives du modèle de règles GloBE et de la directive du 14 décembre 2022 y sont globalement reprises.
Tableau de correspondance des articles de transposition des rÈgles Globe
Section |
Sous-section |
Articles |
Articles de la directive |
Articles du modèle de règles |
Section I : Dispositions générales |
/ |
223 VJ 223 VK |
1 et 3 |
1.1 et article 10 |
Section II : Champ d’application et territorialité |
Sous-section 1 : Champ d'application de l’imposition |
223 VL à 223 VL ter |
2 |
1.1 |
Sous-section 2 : territorialité |
223 VM à 223 VM sexies |
4 |
10.3 |
|
Section III : calcul du taux effectif d'imposition |
Sous-section 1 : Détermination du dénominateur
|
223 VN et 223 VN bis |
15 |
3.1 |
223 VO à 223 VO quaterdecies |
16 |
3.2 |
||
223 VP à 223 VP quinquies |
17 |
3.3 |
||
223 VQ à 223 VQ quinques |
18 |
3.4 |
||
223 VR à 223 VR sexies |
19 |
3.5 |
||
Sous-section 2 : Détermination du numérateur : calcul du montant corrigé des impôts couverts |
223 VS à 223 VS ter |
20 |
4.2 |
|
223 VT à 223 VT quater |
21 |
4.1 |
||
223 VU à 223 VV quinquies |
22 et 23 |
4.4 et 4.5 |
||
223 VW à 223 VW octies |
24 |
4.3 |
||
223 VX à 223 VX quater |
25 |
4.6 |
||
Sous-section 3 : Modalités de détermination du TEI |
223 VY à 223 VY quater |
26 |
5.1 |
|
223 VZ à 223 VZ octies |
32 |
CbCR Safe Harbour |
||
223 VZ nonies |
32 |
UTPR Safe Harbour |
||
Section IV : Liquidation de l'impôt complémentaire |
Sous-section 1 : Déduction fondée sur la substance |
223 WA à 223 WA nonies |
28 et 48 |
5.3 |
Sous-section 2: Détermination de l’impôt complémentaire |
223 WB à 223 WB quinquies |
27 |
5.2 |
|
Sous-section 3 : Impôt complémentaire additionnel |
223 WC à 223 WC quater |
29 |
5.4 |
|
Sous-section 4 : Option en faveur de l’exclusion de minimis |
223 WD à 223 WD quater |
30 |
5.5 |
|
Sous-section 5 : Entités constitutives à détention minoritaire |
223 WE à 223 WE ter |
31 |
5.6 |
|
Section V : Modalités de collecte de l'impôt complémentaire |
Sous-section 1 : Impôt national complémentaire qualifié |
223 WF |
11 |
10.1 |
Sous-section 2 : Règles d'inclusion du revenu qualifiée |
223 WG |
5 à 8 |
2.1 |
|
223 WH à 223 WH ter |
9 |
2.2.1 |
||
223 WI |
10 |
2.3 |
||
Sous-section 3 : RBII |
223 WJ à 223 WK quater |
12 à 14 |
2.4 à 2.6 |
|
Section VI : Règles relatives à l'organisation du groupe et aux restructurations |
Sous-section 1 : application du seuil de chiffre d’affaires consolidé aux fusions et scissions de groupes |
223 WL à 223 WL quater |
33 |
6.1 |
Sous-section 2 : Entrées et sorties d’entités constitutives au sein d’un groupe d’entreprises multinationales |
223 WM et 223 WM bis |
34 |
6.2 |
|
Sous-section 3 : Transferts d’actifs et de passifs |
223 WN à 223 WN quinquies |
35 |
6.3 |
|
Sous-section 4 : Coentreprises |
223 WO à 223 WO quater |
36 |
6.4 |
|
Sous-section 5 : Groupes d’entreprises multinationales à entités mères multiples |
223 WP à 223 WP septies |
37 |
6.5 |
|
Section VII : Disposition particulières |
Sous-section 1 : Régimes de neutralité fiscale |
223 WQ et 223 WQ bis |
38 |
7.1 |
Sous-section 2 : Régimes de dividendes déductibles |
223 WR et 223 WR bis |
39 |
7.2 |
|
Sous-section 3 : Régimes éligibles d'imposition des distributions |
223 WS à 223 WS septies |
40 |
7.3 |
|
Sous-section 4 : Entités d’investissement et entités d’investissement d’assurance
|
223 WT à 223 WT quinquies |
41 |
7.4 |
|
223 WU à 22 WU ter |
42 |
7.5 |
||
223 WV à 223 WV quinquies |
43 |
7.6 |
||
Section VIII : Obligations déclaratives |
/ |
223 WW et 223 WW bis |
44 et 51 |
8.1 |
Section IX : Règles transitoires |
/
|
223 WX à 223 WX ter |
47 |
9.1 |
223 WY et 223 WY bis |
49 |
9.3 |
Source : commission des finances, d’après l’évaluation préalable du présent article.
Comme la directive européenne et le modèle de règles, le premier article du chapitre inséré dans le CGI consacré au pilier 2 porte sur l’institution de l’impôt minimal (223 VJ).
De plus, figurent dans la première section de ce même chapitre les principales définitions nécessaires à l’application des règles GloBE (certaines définitions étant par ailleurs disséminées dans d’autres articles, pour des raisons de lisibilité). Ces définitions visent à éviter d’éventuelles confusions avec des notions utilisées en droit national. Conformément à ce que prévoit la directive du 14 décembre 2022, le champ d’application de l’impôt minimal est également étendu aux groupes nationaux de grande envergure.
Deux différences de structures peuvent toutefois être signalées :
– les modalités de détermination des redevables de la RIR et de la RBII, figurant dès le chapitre 2 du modèle de règles, figurent dans la section V du nouveau chapitre inséré dans le CGI ;
– les régimes de protection (CbCR Safe harbour et l’UTPR Safe harbour), définis postérieurement à la publication du modèle de règles et de la directive, figurent dans la section III du chapitre créé par le présent article.
Le présent article reprend par ailleurs l’option ouverte par le modèle de règles et la directive s’agissant de la possibilité d’instituer un impôt complémentaire national qualifié.
2. Les modalités d’application des règles GloBE en France
Quand bien même la directive du 14 décembre 2022 prévoit de manière précise les modalités d’application du régime de l’impôt minimal mondial, les États membres disposent de plusieurs options pour la transposer dans leur droit interne. Il s’agit notamment de la forme que peut revêtir la RBII, de la faculté d’instituer ou non un impôt complémentaire et des modalités d’articulation entre l’impôt minimal mondial et l’IS.
Par ailleurs, les dispositions de la directive produiront des effets qui dépendent des régimes fiscaux applicables dans chaque État membre. Pour la France, les principaux enjeux reposent sur le champ des impôts couverts, la comptabilisation des crédits d’impôts qualifiés et le traitement fiscal des coopératives agricoles.
a. Le champ des impôts couverts
L’article 223 VS inséré dans le code général des impôts reprend la définition des impôts couverts donnée par le modèle de règles et la directive 2022/2523. Comme indiqué précédemment, ces impôts recouvrent l’IS et la contribution additionnelle de solidarité à l’IS, dans la mesure où ces deux impôts sont assis sur le résultat.
L’évaluation préalable du présent article précise également que la taxe sur les excédents de provision pour sinistres restant à payer pesant sur les compagnies d’assurance de dommages est assimilée à un impôt couvert.
Il peut de surcroît être noté qu’un prélèvement tel que la contribution temporaire de solidarité, instituée par la loi de finances pour 2023, pourrait certainement intégrer le périmètre des impôts couverts. Son champ d’application ne concerne toutefois que les exercices ouverts en 2022, ce qui signifie qu’elle ne sera plus en vigueur à la date d’ouverture des premiers exercices concernés par l’application des règles du pilier 2.
b. Les caractéristiques de l’impôt national complémentaire qualifié
Conformément à ce que prévoit l’article 11 de la directive du 14 décembre 2022, l’article 223 WF que prévoit d’insérer le présent article dans le CGI institue un impôt national complémentaire. Les modalités de calcul de celui-ci sont calquées sur les règles GloBE afin de s’assurer qu’il soit bien reconnu comme un impôt qualifié par les autres juridictions.
● L’impôt national complémentaire qualifié est assis sur le bénéfice excédentaire – c’est-à-dire le bénéfice net retraité des revenus liés à la substance – des groupes multinationaux et nationaux de grande envergure entrant dans le champ d’application des règles GloBE.
Conformément à ce que prévoit l’article 11 de la directive (UE) 2022/2523, il est prévu que ce bénéfice puisse être calculé selon les principes comptables français ou selon des normes comptables internationales, en lieu et place de la norme de comptabilité financière utilisée pour l’établissement des états financiers consolidés de l’entité mère ultime.
Le taux de cet impôt complémentaire est calculé selon les règles GloBE : il est égal à la différence entre le taux effectif d’imposition et le taux minimal de 15 %.
● Contrairement à la RIR, dont est seule redevable l’entité mère ultime, l’impôt complémentaire national peut être directement prélevé au niveau de chaque entité constitutive.
c. Les modalités d’application de la RBII
Le modèle de règles prévoit deux alternatives pour prélever l’impôt complémentaire dû au titre de la RBII : le refus de déduction de charge ou tout autre ajustement équivalent. L’article 12 de la directive du 14 décembre 2022 précise que cette deuxième option doit prendre la forme d’un prélèvement ad hoc.
Comme l’indique l’évaluation préalable du présent article, retenir l’option d’un refus de déduction de charge serait source de complexité à double titre. D’une part, il reviendrait à l’administration fiscale de calculer le montant de la base imposable à réintégrer pour obtenir le montant d’impôt complémentaire dû au titre de la RBII. D’autre part, une telle option entrerait en conflit avec les autres dispositifs de droit interne prévoyant la déduction de certaines charges (notamment les charges financières) ce qui aurait pour conséquence de réduire le champ des éléments pouvant être réintégrés pour les besoins de l’application de la RBII.
En conséquence, les articles 223 WJ à 223 WK insérées dans le CGI par le présent article prévoient l’institution d’un impôt complémentaire dû au titre de le RBII, calculé et réparti entre les entités constitutives. À cet égard, le modèle de règles renvoie aux législations nationales les modalités de répartition du montant de l’impôt dû au titre de la RBII. Ces modalités sont définies par l’article 223 WK quater, qui prévoit que le montant d’impôt dû par chaque entité constitutive est calculé en reproduisant la formule de calcul utilisée pour répartir la RBII entre chaque juridiction (c’est-à-dire en tenant compte du nombre d’employés et de la valeur des actifs corporels de chaque entité).
Dans ce cadre, comme pour calculer la part de la RBII revenant à la France, le présent article inclus les travailleurs indépendants et les intérimaires dans le champ des employés dont la rémunération doit être prise en compte ([124]).
Les dispositions de ces articles prévoient par ailleurs un cas supplémentaire d’application de la RBII qui n’a pas été prévu par le modèle de règles, dès lors que ce dernier ne prévoit pas directement d’inclure les filiales situées dans le même État que leur mère ultime dans le champ de l’imposition minimale. L’article 223 WJ dispose ainsi que les entités constitutives situées en France sont redevables d’un impôt complémentaire au titre de la RBII pour les entités constitutives sous-imposées situées dans le pays de l’entité mère ultime, si ce pays n’applique la RIR qu’aux entités situées dans une autre juridiction et pas à celles situées sur son propre territoire.
d. La comptabilisation des crédits et réductions d’impôt
Les régimes fiscaux applicables en France ont des répercussions sur le traitement des crédits d’impôt qualifiés et non qualifiés tels que définis par le modèle de règles GloBE
Pour mémoire, les crédits d’impôt qualifiés sont ceux qui sont remboursables dans un délai de quatre ans après la date de leur octroi. Le modèle de règles et l’article 223 VO quater du CGI créé par le présent article prévoient qu’ils sont traités comme des produits et viennent donc majorer le résultat GloBE des entités constitutives. En revanche, en application de l’article 223 VT ter du CGI créé par le présent article, les crédits d’impôts non qualifiés et les réductions d’impôt viennent en diminution du montant ajusté d’impôts couverts déclarés par les groupes – c’est-à-dire le numérateur du taux effectif d’imposition.
Cette distinction permet de traiter plus favorablement les crédits d’impôt qualifiés, qui auront pour effet de minorer dans une moindre mesure le TEI des groupes qui en bénéficient par rapport à une situation où ce même crédit d’impôt serait non qualifié.
exemple de comptabilisation des crÉdits d’impÔt qualifiÉs et non qualifiÉs
(en millions d’euros)
|
Entreprise A comptabilisant un crédit d’impôt qualifié de 100 |
Entreprise B comptabilisant un crédit d’impôt non qualifié |
Calcul du TEI sans prise en compte du crédit d’impôt |
||
Résultat |
1 000 |
1 000 |
Impôts couverts |
250 |
250 |
TEI |
25,0 % |
25,0 % |
Prise en compte du crédit d’impôt |
||
Résultat |
1 100 |
1 000 |
Impôts couverts |
250 |
150 |
TEI |
22,7 % |
15,0 % |
Source : commission des finances.
En France et de manière non exhaustive, peuvent être considérés comme des crédits d’impôt qualifiés :
– le crédit d’impôt recherche (CIR), imputable sur l’IS dû par le bénéficiaire dans les trois années suivant son octroi ([125]) ;
– les crédits d’impôt « Prêt à taux zéro » et « Éco-PTZ », remboursables par fraction d’un cinquième sur les quatre exercices suivant leur octroi ([126]) ;
– le crédit d'impôt en faveur des entreprises agricoles utilisant le mode de production biologique, imputable sur l’impôt dû au titre de l’année au cours de laquelle les conditions de son octroi ont été réunies ([127]) ;
– le crédit d’impôt en faveur des métiers d’art, également imputable sur l’impôt dû au titre de l’année de son octroi ([128]) ;
– le crédit d'impôt à raison des investissements productifs réalisés dans les départements d'outre-mer avant le 31 décembre 2025 prévu à l’article 244 quater W du CGI, qui revêt les mêmes caractéristiques d’imputation ([129]) ;
– le crédit d’impôt famille, pour lequel les modalités d’utilisation sont identiques à celles mentionnées précédemment ([130]).
À l’inverse, le crédit d’impôt pour investissement en Corse, prévu à l’article 244 quater E du CGI, est imputable sur l’impôt dû par l’entreprise sur les neuf années suivant son octroi. Il ne peut donc pas être considéré comme un crédit d’impôt qualifié.
e. L’articulation entre les régimes d’exonération d’IS applicables aux coopératives agricoles situées en France et les dispositions de la directive du 14 décembre 2022
L’article 223 WR du CGI créé par le présent article transpose les règles applicables aux régimes de dividendes déductibles prévus par le modèle de règles GloBE (cf. supra) et l’article 39 de la directive (UE) 2022/2523.
Cet article permet d’adapter les modalités d’application de l’impôt minimal mondial aux coopératives françaises, y compris les coopératives agricoles.
En premier lieu, les ristournes versées par les coopératives relevant de la loi cadre du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, déductibles du résultat imposable en droit français, bénéficieront du même régime au titre de l’impôt minimal mondial.
Les sociétés coopératives agricoles d’approvisionnement et d’achat, les sociétés coopératives agricoles de production, de transformation, conservation et vente de produits agricoles bénéficient en droit national d’un régime d’exonération d’IS prévu à l’article 207 du CGI pour certaines des opérations qu’elles réalisent avec leurs associés-coopérateurs.
L’article 223 WR inséré dans le CGI conduit à substituer au régime de l’exonération d’impôt des coopératives agricoles un régime de déduction d’assiette pour les seuls besoins du calcul du taux effectif d’imposition réalisé au titre de l’impôt minimal mondial. Les ristournes versées par les coopératives agricoles à leurs membres seront ainsi déduites de leur résultat net pour l’application des règles GloBE ([131]).
Toutefois, la quote-part du résultat mis en réserve et la quote-part du résultat issu des opérations réalisées avec les tiers non-coopérateurs (non éligible au régime d’exonération d’IS) ne seront pas déductibles du résultat.
f. Les obligations déclaratives des groupes multinationaux et nationaux de grande envergure
Les articles 223 WW et 223 WW bis reprennent les dispositions prévues par le modèle de règles et les articles 44 à 51 de la directive (UE) 2022/2523 s’agissant des obligations de déclarations des entreprises entrant dans le champ de l’impôt minimal mondial ainsi que les modalités selon lesquelles plusieurs entités peuvent mutualiser le dépôt de leur déclaration GloBE.
Les informations nécessaires à l’application des règles GloBE figureront dans une déclaration d’information ad hoc transmise par les entités constitutives à l’administration fiscale. Le délai de dépôt est fixé à 15 mois suivant la clôture de l’exercice, sauf pour le premier exercice au cours duquel le groupe ou l’entité est entré dans le champ d’application des règles GloBE – dans ce cas ce délai est porté à 18 mois.
L’article 223 WW prévoit par ailleurs qu’en plus de la déclaration d’informations, les entités constitutives devront déposer dans les mêmes délais un relevé de liquidation de l’impôt complémentaire dû. Le contenu de ce document et de la déclaration de résultat sera précisé par décret.
g. La non déductibilité de l’impôt complémentaire de l’assiette de l’IS et de l’IR
Le II du présent article modifie le 4° du 1 de l’article 39 du CGI afin d’exclure l’impôt minimal du champ des charges pouvant être déduites du bénéfice net imposable.
En conséquence, lorsqu’une entité d’un groupe multinational ou national de grande envergure sera redevable de l’impôt dû au titre de la RIR, de la RPII ou de l’impôt national complémentaire, son montant ne pourra pas avoir pour effet de diminuer leur assiette taxable au titre de l’impôt sur les bénéfices. Cette disposition permet d’éviter tout effet circulaire entre l’IS dû en France et l’impôt complémentaire. En effet, dans le cas inverse, le paiement d’un impôt complémentaire viendrait diminuer la base taxable au titre de l’IS et ainsi réduire le taux effectif d’imposition de l’entreprise (ce qui peut conduire au paiement d’un nouvel impôt complémentaire au titre de l’exercice considéré).
B. LEs dispositions portant sur le recouvrement de l’impÔt complÉmentaire et les sanctions
Le présent article modifie le code général des impôts et le livre des procédures fiscales afin de définir les modalités de recouvrement, les sanctions et le droit de reprise de l’administration en matière d’impôt complémentaire.
1. Les modalités de recouvrement de l’impôt complémentaire
Le III du présent article complète la section I du chapitre premier du livre II du CGI par un 13 composé de deux articles :
● L’article 1679 decies, qui prévoit les modalités de paiement de l’impôt complémentaire. Celui-ci est acquitté par télérèglement par l’entité mère du groupe pour ce qui concerne la RIR et par les entités constitutives pour l’impôt dû au titre de la RBII et l’impôt national complémentaire.
Cet article prévoit par ailleurs que sur option – de manière similaire à ce qui est prévu pour organiser les modalités de dépôt des déclarations GloBE – les entités constitutives d’un même groupe situées en France peuvent désigner une seule entité redevable qui sera chargée d’acquitter la totalité de l’impôt dû. Il est enfin prévu que l’impôt complémentaire sera exigible à la date de dépôt du relevé de liquidation ou à l’expiration du délai au terme duquel il doit être transmis.
● L’article 1679 undecies prévoit que l’impôt complémentaire est recouvré et contrôlé selon les mêmes procédures, garanties, sanctions sûretés et privilèges que l’impôt sur les sociétés (à l’exception des règles définissant les modalités de versement des acomptes applicables en matière d’IS). Il en va de même pour les règles relatives aux réclamations concernant l’impôt complémentaire, qui sont calquées sur celles applicables en matière d’IS.
2. Les sanctions applicables pour manquement aux obligations déclaratives
Le IV du présent article insère un article 1729 F dans le CGI afin de prévoir les sanctions applicables pour manquement aux obligations de déclaration. Ces dispositions ne sont pas précisément encadrées par le modèle de règles et la directive du 14 décembre 2022.
En cas de défaut de souscription ou de retard dans le dépôt de la déclaration d’informations ou du relevé de liquidation, les entités constitutives concernées sont passibles d’une amende de 100 000 euros.
Les autres manquements sont quant à eux passibles d’une amende dont le montant ne peut excéder 50 000 euros par déclaration.
Cet article prévoit également l’application d’un plafond au niveau du groupe : l’ensemble des amendes forfaitaires prononcées à l’encontre des entités du même groupe ne peut ainsi pas dépasser un million d’euros au titre d’un même exercice. Si ce montant est atteint, il est réparti entre les entités constitutives au prorata du montant de leur amende forfaitaire avant application du plafond.
3. Le droit de reprise de l’administration fiscale s’agissant de l’impôt complémentaire
En vertu des dispositions de l’article L. 169 du livre des procédures fiscales (LPF), le droit de reprise de l’administration fiscale en matière d’IR et d’IS est en principe limité à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due.
Dans la mesure où le délai de dépôt de droit commun de la déclaration relative à l’impôt complémentaire est de 15 mois (contre un peu plus de 5 mois pour la déclaration de résultat déposée au titre de l’IS), il est nécessaire de prévoir un délai de reprise plus long que le délai de droit commun.
Le V du présent article insère par conséquent un article 172 I dans le LPF prévoyant que le délai de reprise de l’administration fiscale s’exerce jusqu’à la fin de la cinquième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due.
4. Une habilitation à légiférer par ordonnance
Le VI du présent article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance dans un délai de 12 mois toute mesure relevant du domaine de la loi permettant de « préciser et de compléter toute disposition relative à la déclaration, au recouvrement, au contrôle et aux sanctions des impôts complémentaires ».
Cette habilitation se justifie par le fait que des discussions sont toujours en cours au niveau de l’OCDE sur les modalités déclaratives de l’impôt complémentaire et le champ des informations qui pourront être échangées entre les pays. Il sera donc nécessaire d’ajuster les dispositions applicables en France pour tirer les conséquences de ces négociations.
C. EntrÉe en vigueur de l’impÔt minimal
Le A du VII du présent article prévoit que les dispositions relatives à l’impôt minimal (les I et II du présent article) s’appliquent aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2023.
Le B du même VII prévoit que les dispositions portant sur la RBII, conformément à ce que prévoit la directive du 14 décembre 2022, entreront en vigueur de manière décalée et s’appliqueront aux exercices ouverts à compter du 31 décembre 2024.
Toutefois, le second alinéa de ce même B prévoit une dérogation à cette entrée en vigueur différée dans le cas où une entité constitutive située en France serait détenue par une entité mère ultime située dans un État membre ayant choisi d’exercer l’option prévue à l’article 50 de la directive (UE) 2022/2523. Cette option, comme mentionné précédemment, permet de surseoir à l’application des règles de l’impôt minimal si moins de 12 entités mères ultimes sont situées dans un même État membre.
Ce même article 50 prévoit que les entités constitutives du groupe multinational situées dans un autre pays que celui qui exerce l’option doivent être soumises à l’impôt complémentaire dû autre de la RBII. En conséquence, le présent article prévoit que dans cette hypothèse la RBII s’appliquera pour les exercices ouverts à compter du 31 décembre 2023 pour les entités constitutives concernées.
D. l’incidence budgÉtaire du pilier 2 en France
Les premières recettes fiscales issues de la mise en œuvre du pilier 2 seront perçues en 2026. Cela s’explique par le fait que l’impôt complémentaire sera assis sur les résultats enregistrés lors des exercices ouverts en 2024 et calculé à partir du montant d’impôts couverts acquitté en tout ou partie par les entreprises en 2025. Les premières déclarations et relevés de liquidation seront par ailleurs transmis 18 mois après la clôture des exercices ouverts en janvier 2024 (soit, au plus tôt, au 1er juin 2026).
Selon les estimations réalisées à partir des liasses fiscales de l’IS et présentées dans l’évaluation préalable du présent article, 574 redevables de l’impôt sur les sociétés en France se trouveraient dans le champ d’application du pilier 2. Parmi ces derniers, 42 pourraient, selon ces simulations, être amenés à s’acquitter d’un impôt complémentaire.
Le principal secteur d’activité qui serait susceptible de contribuer à l’impôt complémentaire est celui de l’information et de la communication ([132]) (à hauteur de 40 % du rendement total de l’impôt complémentaire), suivi du secteur des activités spécialisées, scientifiques et techniques et des activités de services administratifs et de soutien.
RÉpartition sectorielle du rendement estimÉ du pilier 2
Source : évaluation préalable du présent article.
Des estimations du rendement budgétaire du pilier 2 ont été réalisées en 2021 par le Conseil d’analyse économique. Il ressort de ces travaux que la mise en œuvre du pilier 2 pourrait avoir, à court-terme et sans tenir compte des déductions liées à la substance, un rendement de 6 milliards d’euros par an. À plus long terme, en tenant compte des ajustements de comportements des pays tiers, qui sont susceptibles d’instituer un impôt complémentaire national, ces estimations s’élèvent à 2 milliards d’euros par an ([133]) .
L’Observatoire européen de la fiscalité présente quant à lui des hypothèses comprises entre 3,3 et 3,5 milliards d’euros par an qui sont fondées sur plusieurs scénarios de taux applicables en ce qui concerne les déductions fondées sur la substance ([134]).
L’évaluation préalable du présent article propose une estimation minorante du surcroît de recettes résultant de la mise en œuvre du pilier 2, qui s’élève à 1,5 milliard d’euros par an. Cette hypothèse, calculée sur la base des liasses fiscales de l’exercice 2019, tient compte de l’instauration d’impôts nationaux complémentaires par les autres juridictions.
L’ensemble de ces estimations sont néanmoins « statiques » et ne tiennent pas compte des changements de comportements des groupes multinationaux et des États (hors impôt national complémentaire), qui, au demeurant, constituent l’un des objectifs principaux de la réforme conduite dans le cadre du pilier 2. Il est à cet égard possible qu’en raison de la moindre incitation à déplacer des bénéfices dans un pays à faible imposition, la France bénéficie d’un effet d’assiette qui conduirait à percevoir davantage de recettes d’IS. Cette hypothèse ne fait en revanche pas l’objet d’un chiffrage compte tenu des fortes incertitudes qui pèsent sur les comportements qui seront adoptés par tel ou tel groupe multinational.
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Article 5
Crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte
Résumé du dispositif proposé
Le présent article institue un crédit d’impôt au titre des investissements dans l’industrie verte (C3IV), conformément aux annonces formulées par le Gouvernement lors de l’examen du projet de loi relatif à l’industrie verte.
Les caractéristiques de ce crédit d’impôt s’appuient sur les dérogations prévues en matière d’aides d’État par l’encadrement temporaire de crise et de transition (Temporary crisis and transition framework) adopté par la Commission européenne le 9 mars 2023.
L’assiette du crédit d’impôt est composée des investissements réalisés par les entreprises sur l’ensemble de la chaîne de production de batteries, d’éoliennes, de pompes à chaleur et de panneaux photovoltaïques, sous réserve d’un certain nombre de conditions relatives au respect par les entreprises de leurs obligations fiscales, sociales et environnementales et à la durée d’exploitation des investissements. Ces conditions limitent également la capacité des entreprises à transférer leurs investissements vers un autre pays de l’Union européenne et de l’Espace économique européen et visent à prévenir le risque de concurrence fiscale entre les États membres. De plus, afin d’apporter une plus grande sécurité juridique aux entreprises bénéficiaires du crédit d’impôt, son octroi est surbordonné à la délivrance d’un agrément qui portera sur le plan d’investissement de l’entreprise et dont l’instruction sera conduite par la direction générale des finances publiques (DGFiP) et l’Agence de la transition écologique (ADEME).
Le taux normal du crédit d’impôt s’élève à 20 %. Ce taux est modulé en fonction de la taille des entreprises bénéficiaires et de la localisation de leurs investissements : il peut ainsi atteindre jusqu’à 60 % pour les petites entreprises réalisant des investissements dans certains départements et régions d’outre-mer. Le présent article prévoit également que le C3IV est plafonné à 150 millions d’euros, 200 millions d’euros ou 350 millions d’euros par entreprise selon la localisation de leurs investissements.
Le C3IV s’impute par fraction sur l’impôt sur les bénéfices dû par le contribuable à raison des dépenses exposées au cours de l’exercice ; l’excédent constitue une créance directement restituable.
Selon l’évaluation préalable du projet de loi de finances, le coût de ce dispositif s’élèverait à 500 millions d’euros par an, permettrait de générer 23 milliards d’euros d’investissement et de créer 40 000 emplois à horizon 2030. Du point de vue environnemental, l’accroissement des capacités de production d’énergies renouvelables conduirait à éviter l’émission de 50 millions de tonnes équivalent de CO2 (MtCO2eq) sur dix ans.
Conformément aux règles définies par l’encadrement temporaire de crise et de transition, la période de délivrance des agréments est bornée jusqu’au 31 décembre 2025. Les fractions de crédit d’impôt dues au titre des investissements réalisés après cette date pourront toutefois être imputées et restituées postérieurement à cette échéance.
Dernières modifications intervenues
Aucune modification législative récente n’est intervenue.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté un amendement déposé par M. Sitzenstuhl précisant que les investissements éligibles au crédit d’impôt doivent contribuer à la production de batteries, de panneaux solaires d’éoliennes ou de pompes à chaleur au sein de l’Union européenne.
Elle a ensuite adopté quatre amendements identiques déposés par MM. Cazeneuve, Fournier, Jumel et Lefèvre ainsi que plusieurs de leurs collègues étendant à cinq ans la durée durant laquelle les investissements éligibles au crédit d’impôt doivent être exploités sur le territoire national.
La commission a adopté le présent article ainsi modifié. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. L’État du droit
A. L’accÉlÉration du dÉploiement des Énergies renouvelables : un objectif stratÉgique
1. Les objectifs de développement des énergies renouvelables
La réduction des émissions de gaz à effet de serre fait l’objet d’objectifs contraignants fixés par la législation européenne et le droit national.
● Le règlement (UE) 2018/842 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 relatif aux réductions annuelles contraignantes des émissions de gaz à effet de serre par les États membres de 2021 à 2030 contribuant à l’action pour le climat afin de respecter les engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris fixe ainsi un objectif de réduction d’au moins 40 % des émissions en 2030 par rapport à 2005. Cet objectif a ensuite été porté à 55 % par rapport à 1990 dans le cadre du plan « Fit for 55 » présenté par la Commission européenne en 2021 et composé d’un ensemble de mesures visant à atteindre la neutralité carbone en 2050.
En France, l’article 1er de la loi dite climat et résilience ([135]) dispose que l’État s’engage à respecter la trajectoire prévue par le règlement (UE) 2018/842 précité. Pour y parvenir, l’article L. 100-4 du code de l’énergie, modifié par l’article 1er de la loi relative à l’énergie et au climat du 8 novembre 2019 ([136]), prévoit de porter à 33 % la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie d’ici 2030. Plus spécifiquement, les énergies renouvelables (ENR) doivent représenter « au moins 40 % de la production d’électricité, 38 % de la consommation finale de chaleur, 15 % de la consommation finale de carburant et 10 % de la consommation de gaz ».
La mise en œuvre de ces objectifs se traduit, en application des articles L. 222-1 A et suivants du code de l’environnement, par la définition d’un plafond national des émissions de gaz à effet de serre (nommé « budget carbone »), s’inscrivant dans une stratégie nationale bas carbone (SNBC) dont les modalités sont définies par décret.
● En 2022, selon les données provisoires du ministère de la transition énergétique, 20,7 % de la consommation finale brute d’énergie est issue des énergies renouvelables – un résultat en hausse de 1,4 point par rapport à 2021, qui reste toutefois inférieur à la cible fixée pour 2030. La biomasse solide représentait la part la plus importante d’énergie renouvelable consommée, avec une part de 6,6 %.
La production primaire française d’énergies renouvelables s’élevait à 345 Térawattheures (TWh) en 2021 et reposait principalement sur la filière bois-énergie, suivie des installations de production d’électricité hydraulique.
production primaire d’énergies renouvelables par filière en 2021
(en pourcentage)
.
Source : Ministère de la transition écologique, Chiffres clés des énergies renouvelables, édition 2022.
Les capacités de productions d’énergies renouvelables, stables jusqu’au milieu des années 2000, ont fortement progressé depuis 2005, en raison du développement de l’éolien, des pompes à chaleur et des biocarburants. Ces trois filières, qui représentaient 6 % de la production primaire d’ENR en 2005, en représentent désormais 30 %.
Évolution de la production primaire d’Énergies renouvelables
par filiÈre
(en TWh)
Source : Ministère de la transition écologique, Chiffres clés des énergies renouvelables, édition 2022.
S’agissant plus particulièrement de l’électricité, il ressort des données publiées par Eurostat que les capacités de production de la France reposent à 25 % sur les énergies renouvelables, à 13 % sur les énergies fossiles et à 62 % sur le nucléaire. Si la France se situe en 21ème position s’agissant de ses capacités de production d’électricité issues d’ENR derrière le Luxembourg (93 %) ou le Danemark (79 %), elle est toutefois en quatrième position s’agissant des pays mobilisant le moins les énergies fossiles, derrière la Finlande, la Suède et le Luxembourg.
2. Le conflit en Ukraine rend nécessaire un développement plus rapide des secteurs industriels stratégiques pour la transition énergétique
a. Une hausse sans précédent des prix de l’électricité et du gaz
La hausse des prix du gaz et de l’électricité à la suite du début du conflit en Ukraine a renforcé la nécessité pour les pays de l’Union européenne de diminuer leur dépendance aux énergies fossiles.
Alors qu’ils fluctuaient respectivement autour de 25 euros le mégawattheure (MWh) et 50 euros le MWh à l’été 2021, les prix du gaz et de l’électricité ont fortement progressé en 2022. Les prix à terme du gaz ont ainsi atteint plus de 300 euros par MWh en août 2022, tandis que les prix à 12 mois de l’électricité ont dépassé le seuil des 1 000 euros par MWh au cours du même mois d’août 2022.
Évolution du prix à terme de l’électricité
(en euros par MWh)
Source : Opéra énergie.
L’inflation des prix de l’électricité a en outre, au cours de l’année 2022, été exacerbée par la faible disponibilité des moyens de production décarbonés. Le niveau de production total d’électricité a ainsi atteint son niveau le plus faible depuis 1992 et se situait à un niveau inférieur de 15 % à celui atteint en 2021. Ce résultat s’expliquait en premier lieu par le faible taux de disponibilité du parc nucléaire français (58,1 % en moyenne en 2022), principalement en raison des opérations de contrôles et de réparations menées par EDF suite au phénomène de corrosion sous contrainte.
Par ailleurs, le faible niveau de précipitations, inférieur de 25 % par rapport aux normales attendues, a produit des effets significatifs sur la disponibilité de la production hydraulique, qui a diminué de 20 % en 2022 par rapport à la moyenne 2014-2019.
b. L’absence d’outils fiscaux spécifiques pour soutenir l’industrie verte
Les dispositifs visant à accroitre les capacités de production d’énergies renouvelables prennent majoritairement la forme d’instruments subventionnels s’appuyant sur le régime de droit commun des aides d’État.
Le principe d’interdiction des aides d’État
L’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) dispose que sont incompatibles avec le marché intérieur les aides accordées par les États faussant la concurrence et favorisant certaines entreprises ou productions. Afin de procéder à leur examen, l’article 108 du TFUE prévoit ainsi que ces aides doivent être notifiées à la Commission européenne.
L’article 107 du TFUE prévoit toutefois un certain nombre d’exemptions, relatives aux aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi (a du paragraphe 3), aux aides facilitant le développement de certaines activités ou régions économiques (c du même paragraphe), aux aides destinées à promouvoir la réalisation d’un projet important d’intérêt européen commun (PIIEC) ou encore aux aides visant à remédier à une perturbation grave de l’économie d’un État-membre (b du même paragraphe)
Pour apprécier la compatibilité d’une aide avec le droit primaire de l’Union européenne, le critère de référence retenu est celui de « l’investisseur avisé ». Il s’agit dans ce cadre d’apprécier si un État accorde un avantage à une entreprise en se comportant comme un opérateur en économie de marché et de comparer le comportement qu’un investisseur privé aurait pu retenir s’il avait été placé dans une situation analogue.
● Ces aides, généralement allouées à la suite d’appels à projet (AAP), concernent notamment :
– les dispositifs dont la gestion est assurée par l’Agence de la transition écologique (ADEME). Parmi ceux-ci, peut être cité le « Fonds chaleur » doté de 520 millions d’euros en 2023 ([137]), auquel est rattachée l’AAP « Biomasse chaleur industrie agriculture et tertiaire » (BCIAT), visant spécifiquement les installations biomasse, et les AAP pour les grandes installations solaires thermiques pour l’industrie ;
– les AAP et appels à manifestation d’intérêt relevant de France 2030. Ce plan d’investissement, lancé en 2022 et doté de 34 milliards au total, est composé d’enveloppes visant notamment à soutenir la filière bois, le développement de l’hydrogène vert ainsi que la production de batteries. Les investissements relatifs aux batteries et à l’hydrogène s’inscrivent principalement dans le cadre de PIIEC ([138]).
De plus, le soutien au développement des énergies renouvelables relève de différents dispositifs prenant la forme de subventions d’exploitation. Il s’agit principalement :
– de l’obligation d’achat, codifiée aux articles L. 314-1 à L 314-13 du code de l’énergie. Ce mécanisme contraint les opérateurs de réseau à acheter l’électricité renouvelable issue des filières de production mentionnées par la loi à des conditions tarifaires fixées par décret. En échange, les opérateurs bénéficient d’une compensation versée par l’État ;
– du complément de rémunération, prévu à l’article L. 314-18 du code de l’énergie, qui permet aux producteurs d’électricité renouvelables de bénéficier d’une prime en complément de la vente d’électricité sur le marché.
● Du point de vue fiscal, les dispositifs applicables portent davantage sur le soutien aux projets menés par les entreprises pour améliorer leur efficacité énergétique que sur la fabrication d’équipements nécessaires à la production d’énergie renouvelable en tant que telle. Les entreprises bénéficient ainsi, en application de l’article 39 AA du code général des impôts, de coefficients d’amortissement majorés pour les matériels destinés à économiser l’énergie et les équipements de production d’énergie renouvelable qu’elles acquièrent.
D’autre part, les petites et moyennes entreprises imposées au régime réel et réalisant avant le 31 décembre 2024 des travaux de rénovation énergétique des bâtiments à usage tertiaire dont elles sont propriétaires peuvent, en application de l’article 27 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, bénéficier d’un crédit d’impôt correspondant à 30 % des dépenses exposées, dans la limite de 25 000 euros.
B. La mise en place d’un dispositif d’aide aux investissements en matiÈre de production d’Énergie renouvelable au sein de l’union europÉenne
1. La mise en œuvre d’un encadrement temporaire de crise et de transition
À l’initiative de la France, la Commission européenne a adopté le 9 mars 2023 un encadrement temporaire de crise et de transition (Temporary crisis and transition framework – TCTF) ([139]) fixant des règles dérogatoires pour soutenir l’économie des États membres face aux répercussions du conflit en Ukraine.
Cet encadrement remplace et prolonge l’encadrement temporaire de crise adopté le 23 mars 2022. Il s’adosse à une révision du règlement général d’exemption par catégorie (RGEC), permettant de déclarer certaines aides d’État compatibles avec le marché intérieur sans devoir procéder préalablement à leur notification auprès de la Commission européenne ([140]).
L’adoption du TCTF s’inscrit par ailleurs dans le contexte de la promulgation aux États-Unis de l’Inflation reduction act (IRA) le 16 août 2022, qui prévoit un ensemble de mesures de soutien aux entreprises afin d’atteindre un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 50 % à horizon 2030 par rapport à 2005. Selon les estimations réalisées par le groupe Wood Mackenzie ([141]), la mise en œuvre de l’IRA aurait pour effet de porter les investissements sur le marché américain des énergies renouvelables à plus de 100 milliards d’euros en 2031.
2. Le champ et le montant des aides pouvant être allouées par les États membres
La section 2.8 du TCTF autorise les États membres à soutenir les investissements réalisés par les entreprises dans les secteurs stratégiques pour la transition vers une économie neutre en carbone.
● Le a du paragraphe 85 de la communication de la Commission précité définit le champ des aides concernées. Il s’agit de celles qui sont octroyées au plus tard le 31 décembre 2025 pour encourager la production de batteries, de panneaux solaires, de turbines éoliennes, de pompes à chaleur, d’électrolyseurs et d’équipements pour le piégeage, l’utilisation et le stockage de dioxyde de carbone ([142]).
Sont également concernées les aides versées pour financer la production de « composants essentiels conçus et utilisés principalement comme intrant direct » pour la production de ces équipements et la valorisation ou la production des « matières premières critiques correspondantes nécessaires à la production des équipements et composants essentiels » définis précédemment.
Ces aides peuvent prendre des formes diverses, qu’il s’agisse de subventions directes, d’avantages fiscaux, de prêts à des taux d’intérêt bonifiés ou de garanties sur de nouveaux prêts. Les coûts admissibles concernent l’ensemble des investissements réalisés en matière d’actif corporel et incorporel nécessaire à la production des marchandises éligibles. Les actifs incorporels doivent toutefois respecter les conditions cumulatives suivantes :
– rester associés à la zone concernée et ne soient pas transférés dans une autre zone ;
– être principalement exploités dans l’installation de production bénéficiaire de l’aide ;
– être amortissables ;
– avoir été acquis aux conditions de marché auprès d’un tiers non lié à l’acheteur ;
– être inclus dans les actifs de l’entreprise bénéficiaire de l’aide ;
– rester associés au projet pour lequel l’aide est accordée pendant au moins cinq ans, ou trois ans pour les petites et moyennes entreprises (PME).
● En application du g du paragraphe 85 précité, l’intensité maximale de l’aide varie en fonction de la zone géographique où sont réalisés les investissements et du type d’instrument retenu par les États membres.
En principe, l’intensité de l’aide ne peut excéder 15 % des coûts admissibles, dans la limite d’un plafond de 150 millions d’euros par entreprise et par État membre. Ces seuils sont toutefois portés à 20 % et 200 millions d’euros pour les investissements réalisés dans les zones d’aide à finalité régionale (ZAFR) mentionnées au c du paragraphe 3 de l’article 107 TFUE et 35 % et 350 millions d’euros dans les ZAFR mentionnées au a du même paragraphe du même article ([143]).
L’intensité de l’aide peut d’autre part être majorée de 5 points de pourcentage des coûts admissibles lorsqu’elle est attribuée sous la forme d’un avantage fiscal, d’un prêt ou d’une garantie, et peut être majorée de 10 ou 20 points de pourcentage pour les investissements respectivement réalisés par les moyennes et petites entreprises.
plafond des aides pouvant être allouÉes, par zone et type d’instrument
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Hors zones assistées |
Zones c |
Zones a |
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Plafond de l’aide |
150 millions d’euros |
200 millions d'euros |
350 millions d'euros |
Subventions directes |
Grandes entreprises |
15 % |
20 % |
35 % |
Entreprises de taille moyenne |
25 % |
30 % |
45 % |
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Petites entreprises |
35 % |
40 % |
55 % |
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Avantages fiscaux, prêts et garanties |
Grandes entreprises |
20 % |
25 % |
40 % |
Entreprises de taille moyenne |
30 % |
35 % |
50 % |
|
Petites entreprises |
40 % |
45 % |
60 % |
Source : commission européenne, d’après les annexes à la section 2.8 du TFTC.
● L’octroi des aides s’accompagne d’obligations incombant au bénéficiaire, qui doit, en vertu du i du paragraphe précité, s’engager à maintenir ses investissements dans la zone concernée pour au moins 5 ans – ou 3 ans dans le cas d’une petite ou moyenne entreprise. Afin de limiter les risques de concurrence fiscale, les États membres doivent quant à eux s’assurer de l’absence de risque de délocalisation des investissements en amont de l’octroi de l’aide et peuvent envisager d’inclure de manière non discriminatoire des exigences liées à la protection de l’environnement ou à la protection sociale.
● Le paragraphe 86 de la communication de la Commission européenne prévoit enfin un cas dérogatoire permettant à titre exceptionnel d’autoriser, sur le fondement du c du paragraphe 3 de l’article 107 du TFUE, l’octroi d’une aide individuelle jusqu’à concurrence du montant de la subvention que le bénéficiaire pourrait recevoir pour un investissement équivalent dans un pays tiers hors de l’Espace économique européen. Cette faculté est toutefois encadrée par un certain nombre de conditions complémentaires, s’ajoutant aux critères mentionnés précédemment :
– l’aide doit inciter le bénéficiaire à localiser l’investissement dans une ZAFR ;
– le bénéficiaire doit s’engager à utiliser les technologies de production de pointe les plus récentes disponibles sur le marché du point de vue des émissions environnementales ;
– le bénéficiaire doit fournir des « preuves solides » de l’existence de subventions qu’il recevrait en toute vraisemblance dans un pays tiers.
II. Le dispositif proposÉ
Le présent article résulte des annonces formulées par le Gouvernement dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à l’industrie verte et vise à créer un crédit d’impôt au titre des investissements dans l’industrie verte (C3IV), conformément aux dérogations au régime des aides d’État définies par la Commission européenne dans le cadre du TCTF.
Le 2° du I du présent article insère un nouvel article 244 quater I au sein du CGI définissant les paramètres du crédit d’impôt. Si son taux correspond aux intensités d’aide maximales permises par l’encadrement européen, son assiette est en revanche plus restreinte afin de cibler les investissements les plus stratégiques.
A. l’assiette du crÉdit d’impÔt
1. Le champ des dépenses éligibles
Le I de l’article 244 quater I prévoit que les entreprises industrielles et commerciales imposées d’après leur bénéfice réel et celles exonérées au titre des régimes applicables aux entreprises nouvelles, aux entreprises implantées dans les zones franches urbaines (ZFU), les bassins d’emploi à redynamiser (BER), les zones de restructuration de la défense (ZRD) et les zones de développement prioritaire (ZDP) peuvent bénéficier du crédit d’impôt au titre de leurs dépenses d’investissement « autres que de remplacement, engagées pour leurs activités contribuant à la production de batteries, de panneaux solaires, d’éoliennes ou de pompes à chaleur ».
● Le champ des technologies de production d’énergies renouvelables ouvrant droit au crédit d’impôt est moins étendu que celui prévu par le TCTF. Sont ainsi exclus les investissements réalisés pour la production d’électrolyseurs et d’équipements pour le piégeage, l’utilisation et le stockage de dioxyde de carbone.
Ce choix s’explique, selon l’évaluation préalable, à la fois par un objectif d’efficacité de la dépense publique et par la nécessité de cibler le crédit d’impôt sur les filières les plus stratégiques pour réussir la transition énergétique et celles particulièrement exposées à la concurrence internationale. Par conséquent, sont incluses dans le champ du crédit d’impôt les technologies disposant d’une maturité suffisante pour permettre une industrialisation dans les délais d’application du TCTF.
Conformément à la section 2.8 du TCTF, le A du II de l’article 244 quater I définit et rend éligible au crédit d’impôt tant les opérations de production d’équipements et de composants essentiels utilisés comme intrants directs que la production et la valorisation des matières premières critiques nécessaires à la production de ces mêmes équipements.
OpÉrations entrant dans le champ du crÉdit d’impôt
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Batteries |
Turbines éoliennes |
Panneaux solaires |
Pompes à chaleur |
Production d’équipements |
Cellules et modules de batteries |
– Mâts, pâles, nacelles, fondations posées ou flottantes, sous-stations électriques et câbles dynamiques et électriques de raccordement inter-éolien – Assemblage final de l’éolienne et son intégration sur fondation |
– Cellules photovoltaïques ou hybrides pouvant être associées à la fabrication de modules photovoltaïques ou hybrides – Plaquettes de silicium dédiées aux usages photovoltaïques, lingots de silicium et supports des panneaux sur tout type de surface |
Pompes à chaleur ou chauffe-eaux thermodynamiques, quelle que soit la technologie utilisée |
Production de composants essentiels utilisés principalement comme intrants directs |
Composants de batteries conçus et utilisés principalement comme intrants directs |
Composants essentiels conçus et utilisés principalement comme intrants directs |
Composants essentiels conçus et utilisés principalement comme intrants directs, y compris le verre utilisé dans les applications de production d’énergie solaire |
Composants essentiels conçus et utilisés principalement comme intrants directs |
Production des matières premières critiques |
Extraction, raffinage, production et transformation de graphite, de matériaux actifs d’électrode, de matériaux avancés et de métaux critiques |
Extraction, production et transformation de matériaux composites à base de fibres de verre ou de carbone et des matériaux critiques |
Extraction, production et transformation du silicium et des métaux critiques |
Extraction, production et transformation de matériaux critiques |
Valorisation des matières premières |
Valorisation des matières premières critiques |
Valorisation des matières premières critiques |
Valorisation des matières premières critiques |
Valorisation des matières premières critiques |
Source : commission des finances, d’après le A du II du présent article.
Le B du II du même article prévoit que ces équipements, sous-composants et matières premières seront précisés par arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie et de l’industrie.
● Le III du A de l’article 244 quater I du CGI définit les catégories d’actifs corporels ou incorporels composant l’assiette du crédit d’impôt.
S’agissant des actifs corporels, le présent article reprend l’ensemble des catégories mentionnées par la section 2.8 du TCTF, à savoir les bâtiments, installations, équipements, machines ou terrains d’assise nécessaire au fonctionnement des équipements. Est cependant prévue une condition d’éligibilité supplémentaire reposant sur le fait que ces actifs doivent avoir été acquis aux conditions de marché auprès d’une entreprise non liée au sens du 12 de l’article 39 du CGI ([144]).
Les actifs incorporels ouvrant droit au crédit d’impôt se composent des droits de brevet, des licences, d’un savoir-faire ou autres droits de propriété intellectuelle. Les conditions mentionnées par le présent article reprennent celles retenues dans le cadre de la section 2.8 du TFTC.
● Les dépenses exposées retenues pour le calcul du crédit d’impôt sont celles correspondant au prix de revient de l’actif minoré des taxes et frais de toute nature, à l’exception des frais directement engagés pour la mise en état d’utilisation du bien. Le IV de l’article 244 quater I prévoit de surcroît de déduire l’ensemble des aides publiques (y compris fiscales) reçues par l’entreprise au titre des dépenses exposées de l’assiette du crédit d’impôt.
2. Les conditions devant être respectées par les entreprises bénéficiaires du crédit d’impôt
a. L’octroi préalable d’un agrément
Le VIII de l’article 244 quater I prévoit que le bénéfice du crédit d’impôt est conditionné à la délivrance, au titre du plan d’investissement d’une entreprise, d’un agrément préalable du ministre chargé du budget dans les conditions prévues à l’article 1649 nonies du CGI ([145]). Cet article prévoit que la demande d’agrément doit être déposée préalablement à la réalisation de l’opération qui la motive et dispose que le ministre peut, par arrêté, instituer une procédure de délivrance simplifiée et déléguer le pouvoir de décision aux directeurs départementaux des finances publiques ou tout agent de grade supérieur.
La délivrance de l’agrément est de surcroît subordonnée à un avis conforme de l’ADEME, qui est plus particulièrement chargée de vérifier que les activités exposées dans la demande d’agrément sont conformes à celles entrant dans le champ du crédit d’impôt.
Compte tenu de l’ampleur des investissements susceptibles d’être réalisés par les bénéficiaires du crédit d’impôt, le choix de soumettre son bénéfice à la délivrance d’un agrément préalable a pour objectif de sécuriser juridiquement les entreprises et de faciliter leurs prises de décision. De surcroît, afin de permettre un engagement le plus rapide possible des investissements, le 3° du VIII de l’article 244 quater I prévoit que les dépenses engagées à compter de la date de réception de la demande d’agrément pourront être incluses dans l’assiette du crédit d’impôt.
Le 5° du VIII de l’article 244 quater I prévoit enfin que la décision de délivrance ou de refus de l’agrément est rendue dans un délai de trois mois ([146]).
b. Les conditions devant être remplies pour bénéficier d’un agrément
Deux catégories de conditions sont définies par l’article 244 quater I.
● La première catégorie de conditions porte sur la situation des entreprises sollicitant l’octroi d’un agrément. Celles-ci sont définies aux 1° à 6° du I de l’article 244 quater I du CGI et peuvent elles-mêmes être subdivisées entre deux types de conditions, selon qu’elles résultent des critères définis par la section 2.8 du TFTC ou de critères qui relèveraient strictement du droit national. Concernant la première série de conditions, les entreprises :
– ne sont pas des entreprises en difficulté ([147]) ;
– n’ont pas procédé au cours des deux exercices précédant la demande d’agrément à un transfert d’un État membre de l’Union ou d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen vers le territoire national d’activités identiques ou similaires à celles éligibles au crédit d’impôt ;
– ne procèdent pas au transfert de leur investissement ayant bénéficié du crédit d’impôt hors du territoire national au cours des deux exercices suivant leur mise en service. Ces deux dernières conditions visent plus spécifiquement à prévenir le risque de concurrence fiscale entre les États membres ;
– exploitent les investissements éligibles pendant au moins cinq ans, ou trois ans s’agissant des petites et moyennes entreprises ([148]).
Les conditions qui n’ont pas été définies par la Commission européenne sont les suivantes :
– les entreprises doivent respecter, durant la période d’imputation du crédit d’impôt, leurs obligations fiscales et sociales et l’obligation de dépôt de leurs comptes annuels ;
– elles exploitent leurs investissements éligibles dans le cadre d’une activité conforme à la législation environnementale.
Le B du II de l’article 244 quater I prévoit par ailleurs une condition spécifique relative au modèle d’affaires des entreprises bénéficiaire du crédit d’impôt, visant à favoriser une meilleure structuration des filières de production. Les plans d’investissement portant sur la production des composants considérés comme intrants directs pour une catégorie d’équipement doivent ainsi prévoir qu’au moins 50 % du chiffre d’affaires sera réalisé avec des entreprises fabriquant cette même catégorie d’équipement. De plus, les plans d’investissement portant sur la production ou la valorisation des matières premières doivent prévoir qu’au moins 50 % du chiffre d’affaires sera réalisé avec des entreprises produisant des intrants ou fabriquant des équipements mobilisant ces mêmes matières premières.
● Le 2° du VIII de l’article 244 quater I prévoit des conditions de délivrance de l’agrément qui portent plus spécifiquement sur le plan d’investissement défini par les entreprises, dont la viabilité devra être démontrée « par tout moyen ».
● Enfin, en vertu du 4° du VIII précité, le non-respect de l’ensemble de ces conditions entraîne le retrait de l’agrément et la déchéance des avantages fiscaux qui y sont attachés. À cette fin, le II du présent article opère une coordination au sein de l’article L. 169 du livre des procédures fiscales (LPF) afin de permettre à l’administration fiscale d’effectuer la reprise des avantages indûment perçus jusqu’à la fin de la troisième année suivant celle du non-respect des conditions d’octroi du crédit d’impôt.
B. le taux et le plafond du crédit d’impÔt
Le V de l’article 244 quater I définit les taux du crédit d’impôt, qui correspondent au montant d’aide maximal autorisé par le cadre européen.
Par conséquent, le taux normal du crédit d’impôt est de 20 %. Ce taux est modulé en fonction de la taille de l’entreprise bénéficiaire et sera majoré pour les investissements localisés dans des zones d’aides à finalité régionale (ZAFR). Le taux du crédit d’impôt pourra ainsi atteindre jusqu’à 60 % du montant des dépenses exposées pour les investissements réalisés par des petites entreprises dans des régions dites ultrapériphériques relevant du a du paragraphe 3 de l’article 107 du TFUE (Mayotte, la Guyane, Saint-Martin, la Guadeloupe, La Réunion et la Martinique).
Le VI de l’article 244 quater I définit quant à lui les plafonds du crédit d’impôt, qui varient également en fonction de la localisation des investissements.
plafond des aides pouvant Être allouÉes, par zone et type d’instrument
|
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Taux normal |
Zones c* |
Zones a* |
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Plafond du crédit d’impôt par entreprise |
150 millions d’euros |
200 millions d’euros |
350 millions d’euros |
Taux |
Grandes entreprises |
20 % |
25 % |
40 % |
Moyennes entreprises |
30 % |
35 % |
50 % |
|
Petites entreprises |
40 % |
45 % |
60 % |
*En droit national, les zones dites c et a sont respectivement définies aux annexes 1 et 2 au décret n° 2022-968 du 30 juin 2022 relatif aux zones d'aide à finalité régionale et aux zones d'aide à l'investissement des petites et moyennes entreprises pour la période 2022-2027 dans sa rédaction en vigueur au 1er septembre 2023.
Source : commission des finances, d’après les dispositions du présent article.
Le VII de l’article 244 quater I prévoit enfin que le crédit d’impôt peut être cumulé avec une autre aide d’État, sous réserve de respecter les conditions prévues par le TCTF. Le cumul du crédit d’impôt et des autres aides d’État versées ne peut excéder les plafonds mentionnés dans le tableau ci-avant.
C. les modalitÉs d’utilisation du crÉdit d’impÔt
En vertu du IX de l’article 244 quater I, le crédit d’impôt s’impute à l’impôt sur les sociétés (IS) ou l’impôt sur le revenu (IR) dû par le contribuable par fraction au titre des exercices ou années au cours desquelles les dépenses du plan d’investissement ont été exposées ([149]). S’agissant des sociétés de personnes ainsi que des groupements d’intérêt économique et groupements européens d’intérêt économique, le crédit d’impôt peut être utilisé par les associés ou les membres de ces groupements à proportion de leurs droits dans ces sociétés ou ces groupements.
L’excédent d’impôt constitue une créance sur l’État directement restituable. Cette caractéristique s’écarte des modalités d’utilisation retenues pour d’autres crédits d’impôt, tel le crédit impôt recherche qui, en application de l’article 199 ter B du CGI, ouvre droit à une créance imputable sur l’impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant son octroi et dont le solde peut être restitué à l’issue de cette période ([150]).
Dans le cas d’une fusion d’entreprises intervenant durant l’exécution du plan d’investissement ouvrant doit au crédit d’impôt, le présent article prévoit également que la fraction de créance non imputée par la société apporteuse est transférée à la société bénéficiaire de l’apport.
Enfin, pour les créances qui seraient ouvertes au bénéfice d’entreprises faisant partie d’un groupe de sociétés, le I du présent article modifie l’article 223 O du CGI afin de prévoir l’imputation du crédit d’impôt sur l’IS dont est redevable la société mère.
D. Le bornage du crÉdit d’impÔt
Le IV du présent article conditionne l’entrée en vigueur du présent article à une date fixée par décret qui ne peut être postérieure à plus de trois mois à compter de la réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de considérer le crédit d’impôt comme conforme au droit applicable en matière d’aides d’État.
Afin de permettre une mise en œuvre rapide des investissements susceptibles d’être réalisés par les entreprises, le III du présent article prévoit toutefois que celles-ci pourront déposer leur demande d’agrément dès la date de présentation du projet de loi de finances pour 2024 en Conseil des ministres, soit le 27 septembre 2023.
Conformément au cadre défini par la Commission européenne, le XI du présent article borne l’ouverture de la période durant laquelle les projets pourront être agréés au 31 décembre 2025. Cette disposition permettra toutefois d’exposer des dépenses éligibles au crédit d’impôt postérieurement à cette date, à la condition que le plan d’investissement ait été préalablement agréé avant la fin de l’année 2025.
E. L’impact de la mesure
● Selon les estimations figurant dans l’évaluation préalable du présent article, le C3IV aurait un coût annuel de 500 millions d’euros par an, soit un total de 3 milliards d’euros sur la période 2025-2031 (3,6 milliards d’euros dans l’hypothèse d’un fort taux de réalisation des projets).
Cette estimation a été réalisée sur la base des projets connus de la DGE et susceptibles de faire l’objet d’une demande d’agrément, après application d’un taux de pondération défini en fonction de leurs probabilités de réalisation.
● Du point de vue environnemental, la relocalisation d’activités industrielles vertes participera à l’atteinte des objectifs fixés par la SNBC et permettrait d’éviter l’émission de 34,6 millions de tonnes équivalent de CO2 (MtCO2eq) sur la durée de mise en œuvre du dispositif et de 50 MtCO2eq sur dix ans (soit une moyenne de 5 MtCO2eq par an). À titre de comparaison, le montant estimé des émissions des gaz à effet de serre françaises s’est élevé à 403 MtCO2eq en 2022, pour un objectif fixé par la SNBC s’élevant à 359 MtCO2eq par an pour la période 2024-2028 – cela implique de réduire les émissions de 44 MtCO2eq en 2024 par rapport à 2022 pour parvenir à cette cible.
Émissions de Gaz à effet de serre françaises et objectifs fixÉs par la stratÉgie nationale bas carbone
(en MtCO2eq)
Source : Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (CITEPA).
● Enfin, le C3IV devrait permettre de générer 23 milliards d’euros d’investissements et la création de 40 000 emplois directs sur le territoire national d’ici 2030.
*
* *
Article 6
Aménagement de la fiscalité du logement
Résumé du dispositif proposé
Le présent article prévoit différentes modifications en matière de fiscalité du logement.
En premier lieu, il proroge pour quatre ans, soit jusqu’au 31 décembre 2027, le dispositif de prêt ne portant pas intérêt destiné à financer la première accession à la propriété (PTZ) tout en le recentrant afin d’en renforcer l’efficacité et de limiter son impact en matière d’artificialisation des sols et d’étalement urbain. Il exclut des travaux finançables par le PTZ l’installation d’un dispositif de chauffage fonctionnant aux énergies fossiles ;
En deuxième lieu, il proroge jusqu’au 31 décembre 2027 le dispositif d’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ). Il généralise par ailleurs la possibilité pour les sociétés de tiers‑financement de distribuer ce produit et porte le plafond des avances remboursables pouvant être émises à 50 000 euros lorsque l’éco-PTZ est couplé à l’octroi de MaPrimeRénov’ et MaPrimeRénov’ Sérénité. Il permet de surcroît aux syndicats de copropriété de coupler l’éco-PTZ avec le bénéfice de MaPrimeRénov « Copropriétés ». Dans ce cadre, le plafond des avances remboursables est porté à 50 000 euros et les conditions d’octroi de ces dernières sont assouplies.
En troisième lieu, il proroge jusqu’au 31 décembre 2025 le crédit d’impôt pour les dépenses d’installation et de remplacement d’équipements destinés à aider les personnes âgées ou handicapées prévu à l’article 200 quater A du code général des impôts. Dans la perspective de l’instauration, au 1er janvier 2024, d’une nouvelle aide budgétaire unique « MaPrimeAdapt’ » visant à financer les travaux d’adaptation des logements à la perte d’autonomie liée à l’âge ou au handicap des personnes aux ressources modestes, il réserve le crédit d’impôt aux ménages aux ressources intermédiaires (compris entre le cinquième et le huitième décile) et le recentre sur les dépenses engagées par les personnes en situation de dépendance ou de handicap.
En quatrième lieu, il supprime les conditions de zonage applicables au crédit d’impôt versé pour les opérations de rénovation et de réhabilitation des logements sociaux en outre-mer réalisées par les organismes de logement social.
En cinquième lieu, cet article étend le périmètre du taux réduit de TVA de 10 % applicable au logement intermédiaire institutionnel à certains territoires prioritaires, notamment ceux faisant l’objet d’une opération de revitalisation du territoire (ORT) ou d’une grande opération d’urbanisme (GOU) comportant la transformation d’une zone d’activité économique (ZAE), des opérations programmes d’amélioration de l’habitat (OPAH) ou des opérations de requalification de copropriétés dégradées (ORCOD), aux logements résultant d’opérations d’acquisition-amélioration conduisant à une amélioration de la performance énergétique et aux travaux d’amélioration conduits dans le cadre de ces opérations d’acquisition-amélioration.
En sixième lieu, il confirme que les sociétés civiles de placement immobilier sont éligibles à la créance d’impôt sur les sociétés dont peuvent bénéficier les investisseurs à raison du montant de taxe foncière sur les propriétés bâties dont ils sont redevables pour leurs logements relevant du secteur locatif intermédiaire et intègre dans le calcul de cette créance la taxe spéciale d’équipement prélevée au profit de la Société du grand projet du Sud-Ouest.
Enfin, le présent article étend l’exonération de longue durée de TFPB (15 ans) applicable aux constructions neuves de logements sociaux aux logements sociaux anciens, qui peuvent être classés comme « passoires énergétiques » et qui font l’objet d’une opération de rénovation lourde. Pour bénéficier de l’exonération, ces logements devront faire l’objet d’un agrément des travaux qui leur permettront de satisfaire à des critères de performance environnementale, mais aussi de sécurité d’usage, de qualité sanitaire et d’accessibilité des bâtiments.
Dernières modifications législatives intervenues
L’article 90 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a instauré un PTZ dont les conditions d’octroi sont fixées aux articles L. 31-10-1 à L. 31‑10‑14 du code de la construction et de l’habitation (CCH), au bénéfice des personnes physiques, sous conditions de ressources, destiné à financer l’acquisition ou la construction d’une résidence principale en première accession à la propriété.
L’article 164 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 a prorogé le dispositif jusqu’au 31 décembre 2022.
L’article 87 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 a prorogé le PTZ jusqu’au 31 décembre 2023.
L’article 86 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 a prorogé l’éco-PTZ jusqu’au 31 décembre 2023. Il a également créé une nouvelle catégorie d’éco-PTZ pouvant être couplé avec MaPrimeRénov’, rehaussé le plafond d’avances pouvant être émises pour certaines opérations et prorogé jusqu’au 31 décembre 2023 l’expérimentation permettant aux sociétés de tiers-financement de distribuer l’éco-PTZ.
L’article 117 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 a prorogé pour trois ans, soit jusqu’au 31 décembre 2023, le crédit d’impôt sur le revenu afférent aux dépenses en faveur de l’aide aux personnes
L’article 144 de la loi n° 2019-1479 du 29 décembre 2019 de finances pour 2020 a étendu le champ du crédit d’impôt pouvant être octroyé aux organismes de logement social pour leurs opérations de rénovation de logement social dans les quartiers du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPRU) en outre-mer à celles réalisées dans les quartiers de la politique de la ville (QPV).
L’article 32 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 a modifié l’article 279-0 bis A du CGI afin d’assouplir les conditions de localisation des logements locatifs intermédiaires faisant l’objet du taux réduit de TVA de 10 % ; il a ainsi réduit de 35 % à 25 % la part minimale de logements locatifs sociaux dans les communes dans lesquelles ce taux est applicable pour la construction de logements intermédiaires.
L’article 81 de la loi de finances pour 2022 a substitué à l’exonération de TFPB dont peuvent bénéficier les personnes morales éligibles au régime de soutien aux investisseurs institutionnels dans le logement locatif intermédiaire une créance d’impôt sur les sociétés de même montant.
La loi de finances pour 2022 a prévu la compensation intégrale pour les dix premières années d’exonération de la perte de recettes supportée par les communes (et les EPCI) pour les logements sociaux agréés entre le 1er janvier 2021 et le 30 juin 2026.
La loi de finances pour 2023 a prolongé aux logements sociaux agréés jusqu’à 2026 le bénéfice de l’allongement à 25 ou 30 ans de l’exonération de TFPB.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté, contre l’avis du rapporteur général :
– quatre amendements identiques de Mme Émilie Bonnivard (LR), M. Inaki Echaniz (Soc), Mme Françoise Buffet (Renaissance) et M. Jean-Paul Mattei (MoDem) visant à maintenir l’éligibilité au PTZ des logements neufs, individuels et collectifs, dans l’ensemble du territoire national ;
– un amendement de Mme Marina Ferrari (Modem) visant à porter le plafond maximal individuel de ressources pour être éligible au PTZ de 37 000 euros à 50 000 euros.
Elle a également adopté, avec l’avis favorable du rapporteur général :
– un amendement de M. David Amiel (Re) étendant l’éco-PTZ aux prêts avances mutation, à la condition que les bénéficiaires de ces prêts respectent des conditions de ressources déterminées par décret ;
– un amendement de M. David Amiel (Re) prorogeant l’éco-PTZ aux avances remboursables émises jusqu’au 31 décembre 2028 et permettant aux assemblées générales de copropriétaires de souscrire à un emprunt ne portant pas intérêt visant à financer des travaux d’économies d’énergie ou de réduction de gaz à effet de serre.
Suivant l’avis favorable du rapporteur général, elle a adopté trois amendements identiques déposés par M. de Courson (Liot), Mme Pires Beaune (Soc) et M. Lottiaux (RN) visant à doter l’exonération de TFPB proposée par le présent article d’un caractère facultatif, aux choix des collectivités territoriales.
La commission des finances a adopté l’article ainsi amendé. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
Première partie : Les dispositifs fiscaux relatifs à l’accession à la propriété et la rénovation
des logements
I. L’État du droit
A. Le prÊt À taux zÉro pour le financement de la premiÈre accession À la propriÉtÉ (PTZ)
L’article 90 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a instauré un prêt ne portant pas intérêt (prêt à taux zéro ou « PTZ ») au bénéfice des personnes physiques, sous conditions de ressources, destiné à financer l’acquisition ou la construction d’une résidence principale en première accession à la propriété. Prévu initialement pour durer jusqu’au 31 décembre 2021, le dispositif a été prorogé d’un an à deux reprises, d’abord par l’article 164 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, puis par l’article 87 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022, jusqu’au 31 décembre 2023.
Ce dispositif repose sur un crédit d’impôt prévu par l’article 244 quater V du code général des impôts (CGI) et octroyé aux établissements de crédit et aux sociétés de financement mentionnés à l’article L. 511‑1 du code monétaire et financier ([151]) (CMF) passibles de l’impôt sur les sociétés (IS), de l’impôt sur le revenu (IR) ou d’un impôt équivalent, en contrepartie des PTZ accordés.
Les conditions d’octroi du PTZ sont fixées aux articles L. 31-10-1 à L. 31‑10-14 du code de la construction et de l’habitation (CCH) et ont connu plusieurs évolutions depuis 2011. Le montant du PTZ et les conditions de son remboursement dépendent du coût de l’opération, de la composition du foyer, de ses ressources, de la localisation géographique du bien, du caractère neuf ou ancien du logement concerné.
Le montant du PTZ est égal à un pourcentage du coût total de l’opération, dans la limite d’un plafond. À titre d’exemple, en zones tendues A bis et A, ce plafond est de 150 000 euros pour une personne et de 345 000 euros pour cinq personnes et plus. En zone C détendue, ces plafonds s’élèvent à 100 000 et 230 000 euros.
Les caractéristiques actuelles du prêt sont les suivantes :
– un octroi sous conditions de ressources, variables selon la localisation du logement et la composition du foyer ;
– une durée de remboursement modulable en fonction des ressources du foyer et ne pouvant excéder 25 ans, qui s’accompagne d’une période de remboursement différé de 5, 10 ou 15 ans durant laquelle le ménage ne paie aucune mensualité ;
– une attribution pour l’acquisition d’une résidence principale neuve, ancienne à réhabiliter en milieu rural, ou vendue par le bailleur social à son occupant ainsi que pour l’acquisition d’un logement faisant l’objet d’un contrat régi par les dispositions de la loi n° 84‑595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière ([152]) ou d’un contrat de bail réel solidaire ([153]), la nature du logement pouvant être acquis étant fonction de sa localisation géographique ([154]) ;
– une attribution réservée aux primo-accédants, soit les personnes n’ayant pas été propriétaires de leur résidence principale depuis au moins deux ans, sauf exception (invalidité, handicap, catastrophe naturelle).
Le PTZ n’a pas pour finalité de financer l’acquisition d’un logement dans son intégralité. Son montant est égal à une partie du coût total de l’achat, dans la limite d’un plafond qui ne peut pas excéder le montant du ou des autres prêts engagés d’une durée au moins égale à deux ans, et concourant au financement de la même opération.
Si l’article 164 de la loi de finances pour 2021 avait ouvert la possibilité de procéder à une « contemporanéisation » des ressources – soit une prise en compte des revenus en temps réel et non des revenus de l’année n-2 – cette réforme, jugée trop complexe à mettre en œuvre, a finalement été abandonnée.
Si le PTZ était initialement accessible partout sur le territoire national et pour l’acquisition d’un logement neuf, des conditions liées à la rénovation du logement acquis ont été introduites, progressivement, à compter de 2015 :
– pour les offres de prêt émises à compter du 1er janvier 2015, le dispositif a été étendu au financement de l’achat d’un logement ancien, dans certaines communes rurales ([155]) , sous la condition d’y réaliser des travaux (article 59 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015) ;
– pour les offres de prêts émises à compter du 1er janvier 2016, le dispositif a été étendu à l’ensemble du territoire lorsqu’il participe au financement de l’achat d’un logement ancien sous la condition d’y réaliser des travaux (article 107 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016) ;
– pour les offres de prêts émises à compter du 1er janvier 2018 (article 83 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018), le dispositif est recentré, pour les logements anciens, sous conditions de travaux, dans les communes classées dans les zones géographiques ne se caractérisant pas par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés d’accès au logement dans le parc résidentiel existant, soit les zones B2 et C.
Conditions actuelles d’obtention d’un PTZ
Type de logement |
Zonage géographique |
Conditions relatives à la rénovation du logement |
Conditions de ressources ([156]) |
Logement neuf ([157]) ou à construire |
Ensemble du territoire (zones A bis A, B1, B2 et C) |
Aucune, seules les conditions générales relatives à l’acquisition d’une résidence principale s’appliquent ([158]) |
Les conditions de ressources varient en fonction de la zone et du nombre de personnes logées |
Logement ancien |
Zones B2 ou C |
Travaux d’amélioration ou d’économies d’énergie représentant au moins 25 % du coût total de l’opération |
Les conditions de ressources varient en fonction de la zone et du nombre de personnes logées |
Logement social |
Ensemble du territoire (zones A bis, A, B1, B2 et C) |
Aucune, seules les conditions générales relatives à l’acquisition d’une résidence principale s’appliquent |
Identiques aux conditions prévues pour l’acquisition d’un logement neuf |
Source : Commission des finances
Environ 40 000 PTZ ont été octroyés en 2023, pour un montant de 1,2 milliard d’euros.
B. L’Éco-prÊt À taux zÉro (Éco-ptz)
Créé par l’article 99 de la loi de finances pour 2009 ([159]) et introduit à l’article 244 quater U du code général des impôts (CGI), l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) est un dispositif d’avances remboursables ne portant pas intérêt permettant de financer des travaux d’amélioration de la performance énergétique globale de logements achevés depuis plus de deux ans et utilisés comme résidence principale. Les établissements bancaires et les sociétés de financement distribuant ces avances bénéficient en échange d’un crédit d’impôt imputable sur l’impôt sur les sociétés.
En application de l’article 99 de la loi de finances pour 2009, l’octroi de ce crédit d’impôt était initialement borné aux avances émises avant le 31 décembre 2013. Il a été prorogé à quatre reprises, dont la dernière fois par l’article 86 de la loi de finances pour 2022 ([160]). Il s’applique désormais aux avances émises avant le 31 décembre 2023. Son coût s’est élevé à 29 millions d’euros en 2022 ([161]).
1. Les caractéristiques de l’éco-PTZ
a. Les personnes morales autorisées à distribuer l’éco-PTZ et les modalités de calcul du crédit d’impôt
● Le I de l’article 244 quater U du CGI prévoit que sont éligibles au crédit d’impôt les établissements de crédit et les sociétés de financement passibles de l’impôt sur les sociétés (IS) ou de l’impôt sur le revenu (IR) qui ont leur siège social en France ou dans un pays membres de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen pour les avances remboursables sans intérêt qu’ils allouent dans le cadre de l’éco-PTZ.
L’article 140 de la loi de finances pour 2020 ([162]) a également prévu qu’à titre expérimental et jusqu’au 31 décembre 2021, ce crédit d’impôt peut bénéficier aux sociétés de tiers-financement pour les avances remboursables qu’elles allouent dans les régions d’Île-de-France et des Hauts-de-France dans le cadre de l’éco-PTZ « Copropriétés » et « performance énergétique globale minimale » (cf. infra).
Cette expérimentation a ensuite été prorogée par l’article 86 de la loi de finances pour 2022 jusqu’au 31 décembre 2023.
Les sociétés de tiers-financement
Les sociétés de tiers-financement sont définies à l’article L. 381-1 du code de la construction et de l’habitation. Elles proposent une offre technique, portant sur la réalisation de travaux dont la finalité principale est la diminution des consommations énergétiques, intégrée à un service comprenant le financement partiel ou total de ladite offre. En principe, les personnes morales qui ne sont pas des établissements de crédit ou des sociétés de financement n’ont pas l’autorisation de réaliser des opérations de crédit à titre habituel. L’article L. 511-6 du code monétaire et financier prévoit toutefois une dérogation à cette règle au profit des sociétés de tiers-financement si leur actionnariat est majoritairement formé par des collectivités territoriales ou si elles sont rattachées à une collectivité territoriale de tutelle.
En outre, les sociétés de tiers-financement peuvent se financer par emprunt auprès d’établissements de crédit ou par tout autre moyen. Elles ne sont toutefois pas autorisées à procéder à l’offre public de titres financiers ni à collecter des fonds remboursables du public.
L’octroi du crédit d’impôt est d’autre part conditionné à la conclusion d’une convention entre l’établissement ou la société allouant l’avance remboursable et la société de garantie de gestion des financements et de la garantie de l’accession sociale à la propriété (Sgfgas). Cette convention définit les modalités de déclaration des avances remboursables et le contrôle de leur éligibilité, ainsi que les modalités de suivi du crédit d’impôt.
● Le montant du crédit d’impôt est, en application du II de l’article 244 quater U du CGI, « égal à l’écart entre la somme actualisée des mensualités dues au titre de l’avance remboursable sans intérêt et la somme actualisée des montants perçus au titre d’un prêt de même montant et durée de remboursement, consenti à des conditions normales de taux à la date d’émission de l’offre de prêt ne portant pas intérêt ».
b. Les conditions d’octroi de l’éco-PTZ pour les particuliers et les copropriétés
Le 2 du I de l’article 244 quater U prévoit plusieurs catégories de travaux pouvant être financés par l’éco-PTZ ([163]) :
– des travaux de rénovation ponctuelle permettant d’améliorer la performance énergétique d’un logement ;
– des travaux permettant d’atteindre une performance énergétique globale minimale ;
– des travaux de réhabilitation de systèmes d’assainissement non collectifs ;
– des travaux ayant ouvert droit à une aide de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) dans le cadre du programme « Habiter mieux », désormais renommé « MaPrimeRénov’ Sérénité ».
Depuis le 1er juillet 2022, en application de l’article 86 de la loi de finances pour 2022 précitée, l’éco-PTZ peut de surcroît être couplé avec MaPrimeRénov’ (MPR) et financer des travaux également éligibles à cette aide. Dans ce cas, l’éco‑PTZ ne peut être mobilisé que pour financer le reste à charge des travaux financés par MaPrimeRénov’.
D’autre part, lorsque l’éco-PTZ est couplé avec MaPrime Rénov’ ou MaPrimeRénov’ Sérénité, les démarches du bénéficiaire sont simplifiées : l’instruction de la demande d’avance s’appuie sur les éléments fournis par l’emprunteur à l’ANAH.
Le 4 de l’article 244 quater U prévoit que le plafond de l’avance remboursable pouvant être émise est égal à 30 000 euros par logement, sauf pour les travaux permettant d’atteindre une performance énergétique globale minimale, pour lesquels ce plafond est porté à 50 000 euros par logement. Des plafonds par type de travaux sont par ailleurs définis par décret.
plafonds de l’Éco-ptz par type de travaux
Types de travaux |
Plafonds |
Travaux de rénovation ponctuelle |
|
Isolation thermique des toitures |
– 15 000 euros pour la réalisation d’une action sauf pour le remplacement de fenêtres (7 000 euros) ; – 25 000 euros pour deux actions éligibles ; – 30 000 euros pour trois actions éligibles |
Isolation thermique des murs donnant sur l’extérieur |
|
Isolation thermique des parois vitrées et portes donnant sur l’extérieur |
|
Installation ou remplacement du système de chauffage ou d’une production d’eau chaude sanitaire |
|
Installation d’équipements de chauffage utilisant une source d’énergie renouvelable |
|
Installation d’équipements de production d’eau chaude sanitaire utilisant une source d’énergie renouvelable |
|
Isolation des planchers bas |
|
Autres catégories |
|
Travaux permettant d’atteindre une performance énergétique globale minimale |
50 000 euros |
Travaux de réhabilitation de systèmes d’assainissement non collectif |
10 000 euros |
Travaux ayant ouvert droit à une aide de l’ANAH dans le cadre de MaPrimeRénov’ Sérénité |
20 000 euros |
Travaux permettant d’améliorer la performance énergétique du logement ayant ouvert droit MaPrimeRénov’ |
30 000 euros |
Source : article D. 319-51 du code de la construction et de l’habitation.
● Le 3 du I de l’article 244 quater U prévoit que sont éligibles à l’éco-PTZ, sans conditions de ressources, les propriétaires occupants ou bailleurs, les copropriétaires bailleurs ou occupants ainsi que les sociétés civiles non soumises à l’impôt sur les sociétés dont au moins un des associés est membre d’un syndicat de copropriété.
De plus, le VI bis du même article prévoit que l’éco-PTZ peut directement être consenti à un syndicat de copropriétaires pour financer les travaux d’intérêt collectif réalisés sur les parties privatives et les parties et équipements communs d’un immeuble, ce dispositif étant plus connu sous le nom d’éco-PTZ « Copropriétés ». Dans ce cas, l’éco-PTZ ne peut toutefois pas porter sur des travaux ayant ouverts droit à MaPrimeRénov’ « Copropriétés ».
● Par principe, il ne peut être accordé qu’une seule avance remboursable par logement. Trois cas dérogatoires sont néanmoins prévus, selon que le demandeur est un syndicat de copropriété ou non.
Les personnes physiques et sociétés civiles peuvent en premier lieu solliciter dans un délai de 5 ans une nouvelle avance pour financer des travaux portant sur le même logement. Ces travaux supplémentaires peuvent exclusivement porter sur des rénovations ponctuelles ou l’atteinte d’une performance énergétique globale. La somme des deux avances est, dans ce cadre, plafonnée à 30 000 euros pour la première catégorie de travaux ou 50 000 euros pour la seconde catégorie.
Les syndicats de copropriétaires peuvent également bénéficier d’une avance supplémentaire dans un délai de 5 ans pour :
– un logement qui a déjà fait l’objet d’une avance remboursable émise au profit d’un propriétaire ;
– un logement qui a déjà fait l’objet d’une avance remboursable émise au profit du syndicat de copropriété.
La somme des avances remboursables ne peut alors excéder 30 000 euros par logement, ou 50 000 euros pour les travaux permettant d’atteindre une performance énergétique globale.
● En application du 9 de l’article 244 quater U du CGI, la durée de remboursement de l’éco-PTZ est plafonnée à 124 mois, soit 15 ans. Cette durée est portée à 20 ans pour les travaux permettant d’atteindre une performance énergétique globale minimale du logement.
● Enfin, le VI ter de l’article 244 quater U prévoit la possibilité d’octroyer un éco-PTZ « complémentaire » aux propriétaires membres d’un syndicat de copropriétés si ce dernier a bénéficié d’une avance. Cette avance complémentaire peut être émise pour financer des travaux de rénovation ponctuelle portant sur le même logement, sous réserve que les deux avances n’excèdent pas un plafond de 30 000 euros (ou 50 000 euros si l’aide accordée au syndicat de copropriétaires portait sur une rénovation énergétique globale).
2. Une faible distribution des éco-PTZ « Copropriétés », « MaPrimeRénov’ » et « Performance énergétique globale minimale »
De manière générale la production d’éco-PTZ individuels est dynamique : le nombre de prêt émis entre 2016 et 2022 a ainsi progressé de 258 % pour atteindre 82 071 en 2022, pour un montant total prêté qui a pour la première fois dépassé un milliard d’euros (1,1 milliard d’euros).
Cependant, l’éco-PTZ « Performance énergétique globale minimale » et les éco-PTZ couplés restent relativement peu distribués, malgré une hausse significative en 2022.
Nombre d’Éco-ptz individuels distribuÉs
|
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
Nombre de prêts accordés |
22 931 |
24 315 |
18 755 |
35 474 |
42 107 |
61 034 |
82 071 |
Dont performance énergétique globale minimale |
304 |
275 |
215 |
335 |
246 |
346 |
2 053 |
Montant total prêté (en millions d’euros) |
404,9 |
436,9 |
334,9 |
474,6 |
528,9 |
761,9 |
1 099,1 |
Dont performance énergétique globale minimale (en millions d’euros) |
6,1 |
5,8 |
4,4 |
5,9 |
5,2 |
8,5 |
78,4 |
Source : commission des finances, d’après les statistiques de la Sgfgas.
L’éco-PTZ est principalement mobilisé pour financer des actions de rénovation ponctuelle ou un bouquet d’actions de rénovation.
En 2022, les travaux de performance énergétique globale et les éco-PTZ couplés avec MaPrimeRénov’ et MaPrimeRénov’ Sérénité représentaient respectivement 2,5 %, 0,04 % et 0,5 % des éco-PTZ distribués.
ventilation de l’Éco-ptz par type d’opÉrations en 2022
Source : Sgfgas.
De plus, les éco-PTZ « Copropriétés » restent également peu fréquents (72 en 2022).
nombre d’Éco-ptz « copropriÉtÉs » et montant des prÊts
(à gauche, le nombre de prêts et à droite, en millions d’euros, le montant des avances)
Source : Sgfgas.
La part des travaux visant à assurer une performance énergétique globale des logements est en revanche plus importante lorsque les syndicats de copropriétaires recourent à l’éco-PTZ : cette catégorie de travaux atteint 39,5 % du nombre d’avances émises et 55,3 % des montants distribués.
C. Le crÉdit d’impÔt pour l’investissement dans le logement social en outre-mer
L’article 244 quater X du CGI, créé par l’article 21 de la loi de finances pour 2014 ([164]), permet aux organismes de logement social (OLS) qui acquièrent ou construisent des logements neufs dans les départements d’outre-mer de bénéficier d’un crédit d’impôt jusqu’au 31 décembre 2029 ([165]). L’octroi de ce dernier est notamment subordonné au respect des conditions suivantes :
– les logements doivent être donnés en location, pour une durée d’au moins cinq ans et dans les douze mois après leur achèvement ou leur acquisition, à des personnes physiques qui en font leur résidence principale ;
– les ressources des locataires ne doivent pas excéder des plafonds définis par décret ;
– le montant des loyers ne peut être supérieur à des limites fixées par décret qui dépendent de la localisation du logement.
Le montant du crédit d’impôt s’élève à 40 % du prix de revient des logements, minoré des taxes et des commissions d’acquisition versées ainsi que des aides publiques reçues.
L’article 110 de la loi de finances pour 2016 ([166]) a par ailleurs étendu le bénéfice de ce crédit d’impôt aux travaux de rénovation ou de réhabilitation des logements ([167]) achevés depuis plus de 20 ans et situés dans les quartiers éligibles au nouveau programme de renouvellement urbain (NPRU) ([168]). Pour être éligibles, les travaux doivent permettre aux logements d’acquérir des performances techniques voisines de celles de logements neufs ([169]) ou de les conforter contre le risque sismique ou cyclonique. L’article 144 de la loi de finances pour 2020 ([170]) a par la suite étendu le champ des logements éligibles à ceux situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).
Dans ce cadre, le crédit d’impôt est égal à 40 % du prix de revient des travaux de réhabilitation – minoré des taxes versées et des aides publiques reçues – sous réserve de l’application d’un plafond de 50 000 euros.
II. le dispositif proposÉ
A. la prorogation et l’ajustement des paramÈtres du ptz
Dans un contexte de hausse des coûts de la construction et des taux d’intérêt, l’extinction du PTZ au 31 décembre 2023, comme prévu par la loi de finances pour 2023, aurait un impact négatif sur l’accès à la propriété des ménages les plus modestes.
● Ainsi, le V du présent article modifie l’article 90 de la loi de finances pour 2011 afin de borner le dispositif du PTZ au 31 décembre 2027 et ainsi le prolonger de quatre années supplémentaires.
Néanmoins, le Gouvernement fait valoir, au-delà de l’objectif visant à favoriser l’accès à la propriété des ménages modestes, que les paramètres actuels du PTZ ne sont plus suffisamment adaptés aux différents objectifs environnementaux fixés par ailleurs, tels que la lutte contre l’artificialisation des sols et la rénovation énergétique des logements. Le Gouvernement considère qu’en finançant très majoritairement les logements individuels neufs, particulièrement en zones détendues, le PTZ contribue à l’artificialisation des sols et à l’étalement urbain et peut constituer, en soutenant l’acquisition de logements neufs dans des zones où la tension du marché est faible et les coûts de l’immobilier bas, un effet d’aubaine. Le Gouvernement considère également que les exigences associées au bénéfice du PTZ pourraient être plus élevées en matière de performance énergétique des logements anciens.
La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience », a notamment défini l’objectif de « zéro artificialisation nette » (ZAN) des sols d’ici 2050, l’interdiction progressive de mise en location les logements mal isolés ([171]) et le gel du loyer des passoires thermiques, etc.
Dans ce contexte, le I du présent article prévoit plusieurs modifications.
● Le a de son 1° complète l’article L. 31-10-2 du code de la construction et de l’habitation (CCH), afin de circonscrire le PTZ octroyé pour l’acquisition d’un logement neuf aux seuls logements situés dans un bâtiment d’habitation collectif ([172]) et dans une zone « tendue ([173]) ». En revanche, les opérations faisant l’objet d’un contrat de location-accession ou d’un bail réel solidaire, ainsi que les opérations d’accession sociale à la propriété effectuées dans et autour des quartiers concernés par la rénovation urbaine ou des quartiers propriétaires de la politique de la ville ([174]), resteront éligibles au PTZ neuf individuel, y compris en zones détendues.
Ce recentrage du PTZ a pour objectif affiché de lutter contre l’étalement urbain et l’artificialisation des sols, tout en orientant le PTZ neuf vers les zones tendues où les difficultés d’accès au logement sont les plus importantes.
● Le b du 1° modifie l’article L. 31-10-2 du CCH par coordination avec la modification apportée à l’article L. 31-10-1.
● Le a de son 2° modifie l’article L.31-10-3 du CCH afin d’y apporter une coordination de même nature.
● Le b du 2° inscrit à l’article L-31-10-3 du code de la construction et de l’habitation la condition relative à l’atteinte d’un niveau minimal de performance énergétique pour l’octroi d’un PTZ consacré à l’acquisition d’un logement ancien sous conditions de travaux de rénovation, jusqu’alors fixée par décret ([175]). La disposition ainsi ajoutée renvoie à un arrêté conjoint des ministres chargés du logement, de l’économie et du budget la détermination du niveau de performance énergétique requis.
● Enfin, le 3° du I du présent article modifie l’article L.31-10-10 du CCH afin d’exclure des travaux finançables par le PTZ l’installation d’un dispositif de chauffage fonctionnant aux énergies fossiles.
● Le C du VII du présent article prévoit que les dispositions définies à son I, portant sur l’évolution du dispositif du PTZ, s’appliquent aux offres de prêt émises à compter du 1er janvier 2024.
Conditions d’obtention d’un PTZ telles que prévues par le présent article
Type de logement |
Zonage géographique |
Conditions relatives à la rénovation du logement |
Conditions de ressources ([176]) |
Logement neuf ([177]) ou à construire : restriction aux logements situés dans un bâtiment d’habitation collective |
Zones tendues marquées par un déséquilibre important entre offre et demande de logement (zones A bis A, B1) |
Aucune, seules les conditions générales relatives à l’acquisition d’une résidence principale s’appliquent ([178]) |
Les conditions de ressources varient en fonction de la zone et du nombre de personnes logées |
Logement ancien |
Zones B2 ou C |
Travaux d’amélioration ou d’économies d’énergie représentant au moins 25 % du coût total de l’opération, avec exclusion des dispositifs de chauffage fonctionnant à l’énergie fossile |
Les conditions de ressources varient en fonction de la zone et du nombre de personnes logées |
Logement social |
Ensemble du territoire (zones A bis, A, B1, B2 et C) |
Aucune, seules les conditions générales relatives à l’acquisition d’une résidence principale s’appliquent |
Identiques aux conditions prévues pour l’acquisition d’un logement neuf |
B. la prorogation et l’ajustement des paramÈtres de l’Éco‑ptz
Afin de contribuer à la réduction du nombre de passoires thermiques et compte tenu du renchérissement des coûts de construction ainsi que de la hausse des taux d’intérêt, le IV du présent article proroge l’éco-PTZ jusqu’au 31 décembre 2027.
Cette prorogation s’accompagne de plusieurs ajustements opérés par le 3° du II du présent article ayant pour objectif de faciliter le recours à l’éco-PTZ et d’inciter les propriétaires à réaliser des travaux de rénovation globale.
● En premier lieu, la possibilité pour les sociétés de tiers-financement de distribuer l’éco-PTZ est généralisée.
● En second lieu, le plafond des éco-PTZ individuels couplés avec MaPrimeRénov’ et MaPrimeRénov’ Sérénité est rehaussé à 50 000 euros. Les avances remboursables émises en complément de MaPrimeRénov’ Sérénité ne peuvent de surcroît être allouées que pour financer le reste à charge du bénéficiaire pour les travaux qu’il finance au moyen de cette aide (à l’instar du mécanisme d’ores et déjà prévu pour le dispositif de cumul entre l’éco-PTZ et MaPrimeRénov’).
Par coordination, le montant total des avances accordées à un propriétaire est également porté à 50 000 euros si celui-ci sollicite une seconde avance dans un délai de 5 ans après le début des premiers travaux et que l’une d’entre elles relevait d’un éco-PTZ couplé.
● En troisième lieu, le présent article ouvre la possibilité de cumuler l’éco‑PTZ « Copropriétés » avec MaPrimeRénov’ « Copropriétés » ([179]). Dans le cadre de ce couplage :
– le plafond de l’avance remboursable est porté à 50 000 euros par logement ;
– le montant total des avances est rehaussé à 50 000 euros par logement lorsque le syndicat de copropriétaires sollicite une nouvelle avance dans un délai de 5 ans ;
– le bénéfice de l’éco-PTZ est ouvert aux logements achevés depuis moins de deux ans.
● De plus, le montant cumulé de la première avance et de l’avance « complémentaire » est porté à 50 000 euros lorsqu’un propriétaire individuel réalise de nouveaux travaux dans un logement ayant précédemment fait l’objet de travaux au titre de l’éco-PTZ « Copropriétés » couplé.
● La durée maximale de remboursement du prêt est par ailleurs portée à 240 mois (20 ans) pour les syndicats de copropriétaires bénéficiant de l’éco-PTZ couplé avec MaPrimeRénov’ « Copropriétés » ou réalisant des travaux de rénovation permettant d’atteindre une performance énergétique globale minimale.
● Enfin, le C du VII prévoit que les dispositions prévues par le présent article s’agissant de l’éco-PTZ sont applicables pour les logements dont la construction est achevée à compter du 1er janvier 2023.
C. la suppression du zonage du crÉdit d’impÔt pour la rÉhabilitation des logements sociaux en outre-mer
Le 4° du II du présent article modifie le 4 du I de l’article 244 quater X du CGI et supprime la condition de zonage jusqu’alors applicable pour bénéficier du crédit d’impôt portant sur les opérations de réhabilitation et de rénovation de logements sociaux en outre-mer. Cette suppression se justifie par le vieillissement important du parc social en outre-mer, ainsi que par la nécessité d’accélérer la rénovation énergétique de ces logements et leur adaptation pour faire face aux risques climatiques.
Le A du VII du présent article prévoit que cette extension est applicable aux travaux de rénovation ou de réhabilitation pour lesquels une déclaration préalable de travaux ou une demande de permis de construire est déposée à compter du 1er janvier 2024.
DeuxiÈme partie : Prorogation et modification du crÉdit d’impÔt aide À la personne dans la perspective de la mise en place de « MaPrimeAdapt’ »
1. Le crédit d’impôt pour les dépenses d’équipements pour personnes âgées ou handicapées
L’article 91 de la loi de finances pour 2005 ([180]) a créé un crédit d’impôt pour dépenses d’équipement de l’habitation principale en faveur de l’aide aux personnes, codifié à l’article 200 quater A du code général des impôts (CGI).
Aux termes du a du 1 de l’article 200 quater A, le crédit d’impôt est attribué au titre des dépenses d’installation ou d’équipements :
– spécialement conçus pour l’accessibilité des logements aux personnes âgées ou handicapées ;
– permettant l’adaptation des logements à la perte d’autonomie ou au handicap.
Dans ce dernier cas, l’avantage fiscal est réservé aux foyers au sein desquels l’un des membres souffre d’une perte d’autonomie ou présente un handicap dans trois situations prévus au 1° à 3° du c du 1 :
– la personne est titulaire d’une pension d’invalidité prévue par le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (c du 1 de l’article 195 du CGI) ou pour accident du travail d’au moins 40 % (d du 1 de l’article 195 du CGI) ;
– la personne est titulaire de la carte « mobilité inclusion » portant la mention « invalidité », « priorité » ou « stationnement pour personnes handicapées » ou de l’une des cartes d’invalidité équivalente délivrées jusqu’au 1er juillet 2017 ;
– la personne souffre d’une perte d’autonomie qui entraîne le classement au sein de l’un des quatre premiers groupes iso-ressources – dits GIR ([181]) – mentionnés à l’article L. 232-2 du code de l’action sociale et des familles.
Les travaux d’installation ou d’équipements doivent être effectués entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2023 dans la résidence principale du contribuable qu’il soit propriétaire, locataire ou qu’il l’occupe à titre gratuit.
Le crédit d’impôt s’élève à 25 % pour les dépenses d’installation ou de d’équipements précitées, dans la limite d’un plafond global sur cinq années consécutives de 5 000 euros pour une personne célibataire, veuve ou divorcée, et de 10 000 euros pour un couple marié ou pacsé soumis à imposition commune. Ce plafond est majoré de 400 euros par enfant ou personne invalide à charge (au sens des articles 196 à 196 B du CGI).
Ce crédit d’impôt a déjà été prorogé à six reprises, par les articles 80 de la loi de finances pour 2010, 99 de la loi de finances pour 2011, 82 de la loi de finances pour 2012, 73 de la loi de finances pour 2015, 81 de la loi de finances pour 2018 et 117 de la loi de finances pour 2021 ([182]).
2. Ma Prime Adapt’
Dans un contexte marqué par le vieillissement de la population et l’aspiration des seniors à vieillir à domicile, le Gouvernement entend accompagner l’aménagement du logement pour l’adapter à la perte d’autonomie liée à l’âge ou au handicap par le déploiement d’une nouvelle aide unique « MaPrimeAdapt’ » à compter du 1er janvier 2024.
Les contours de cette aide ont été annoncés à l’occasion du Conseil national de la refondation – Logement du 5 juin 2023 ([183]) et des informations s’y rapportant sont accessibles au public depuis le 1er septembre dernier sur le site France‑renov.gouv.fr.
Cette aide unique sera ouverte aux propriétaires occupants et aux locataires du parc privé, aux revenus modestes et très modestes, dès lors qu’ils ont plus de 70 ans ou plus de 60 ans avec une perte d’autonomie précoce. Le dispositif bénéficiera également aux personnes handicapées, sous les mêmes conditions de revenus c’est-à-dire qui appartiennent aux quatre premiers déciles.
Distribuée par l’Agence nationale de l’habitat (Anah) au titre de sa mission de promouvoir l’adaptation du parc existant de logements à la perte d’autonomie (article L. 321-1 du code de la construction et de l’habitation), « MaPrimeAdapt’ » a vocation à se substituer au crédit d’impôt prévu à l’article 200 quater A du CGI et à deux autres aides budgétaires : « Habitat et Cadre de vie » (gérée par la Caisse nationale d’assurance vieillesse) et « Habiter facile » (gérée par l’Anah). Elle sera plus incitative que les dispositifs en vigueur avec un taux de financement entre 50 % et 70 %
Le Gouvernement s’est fixé un objectif de 680 000 logements adaptés sur 10 ans. En 2024, le budget de l’ANAH devrait permettre d’adapter 45 000 logements. Pour cela l’État versera une dotation de 67 millions d’euros à l’opérateur prévus par l’action 4 du programme 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat de la mission Cohésion des territoires – Logement et ville.
II. Le dispositif proposÉ
1. La prorogation et le recentrage du crédit d’impôt pour les dépenses d’équipements
Compte tenu du ciblage de MaPrimeAdapt’ sur les personnes aux revenus les plus modestes, est proposée par le Gouvernement une prorogation temporaire du crédit d’impôt recentré a) sur les dépenses en faveur des personnes en situation de dépendance ou de handicap définie selon des critères les faisant concorder avec ceux ouvrant droit à la prime et b) sur les foyers dont les revenus sont intermédiaires. Le Gouvernement indique dans l’étude préalable qu’il étudiera ultérieurement l’élargissement de l’aide budgétaire aux ménages intermédiaires.
● Le 1° du II de présent article prévoit donc la prorogation de deux ans du crédit d’impôt équipement avec un recentrage de son champ d’application aux ménages dont les revenus sont intermédiaires et aux dépenses d’adaptation.
Le ii du a et le c du 1° du II prorogent le crédit d’impôt de deux ans. Il en résulte que le crédit d’impôt s’appliquera aux dépenses exposées jusqu’au 31 décembre 2025.
Le i du a du 1° du II restreint le champ des dépenses éligibles au crédit d’impôt prévues au a du 1 de l’article 200 quater A. Ainsi, les dépenses relatives à l’ « accessibilité des logements aux personnes âgées ou handicapées » sont écartées pour concentrer le crédit d’impôt sur les dépenses relatives à l’ « adaptation des logements à la perte d’autonomie ou au handicap ». Le b du 1° du II procède à une coordination en conséquence de cette modification.
Le iii du a du 1° du II modifie les caractéristiques des bénéficiaires du crédit d’impôt. Ainsi, seront éligibles les foyers au sein desquels l’un des membres au moins :
– est âgé d’au moins 60 ans et souffre d’une perte d’autonomie dont l’état de dépendance entraîne le classement au sein de l’un des quatre premiers groupes GIR mentionnés à l’article L. 232-2 du code de l’action sociale et des familles. Aucun, critère d’âge n’était fixé jusqu’à présent ;
– présente un taux d’incapacité supérieur ou égal à 50 % déterminé par une décision de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CADAH). Ce critère remplace les deux critères actuels figurant au 2° et 3° du c du 1 de l’article 200 quater A et relatifs à l’invalidité (soit respectivement le bénéfice d’une pension d’invalidité ou la détention d’une carte d’invalidité).
Le crédit d’impôt bénéficiera aux foyers dont le revenu fiscal de référence, apprécié dans les conditions prévues aux IV des articles 1391 B ter et 1417 du CGI, est compris entre un seuil et un plafond fixés au iv du a 1° du II. Seront éligibles les ménages dont les revenus sont situés entre le 5ème et le 8ème décile. Pour un célibataire résidant hors d’Île-de-France, cela correspond à un revenu annuel compris entre 20 805 euros et 31 094 euros. Les montants permettant d’apprécier la condition de ressources seront révisés au 1er janvier 2025 en fonction de l’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac.
Il en résulte qu’en dessous du seuil inférieur de revenus du crédit d’impôt, le contribuable sera éligible à « MaPrimeAdapt’ », et qu’au-dessus de ce seuil, il sera éligible au crédit d’impôt à condition de ne pas appartenir aux catégories de ménages les plus aisées relevant des déciles 9 et 10.
● Le d du 1° du II du présent article modifie le 10 de l’article 200 quater A pour préciser que le crédit d’impôt est exclusif du bénéfice de MaPrimeAdapt’. Pour mettre en œuvre cette disposition, le IV du présent article créé un nouvel article L. 98e dans le livre des procédures fiscales pour permettre à l’Anah de communiquer chaque année à l’administration fiscale la liste des personnes ayant bénéficié de MaPrimeAdapt’.
● Enfin, le VII du présent article prévoit que MaPrimeAdapt’ ne pourra pas être moins favorable que le crédit d’impôt prévu à l’article 200 quater A.
2. L’impact budgétaire
En 2023, les volets accessibilité et adaptation du crédit d’impôt prévu à l’article 200 quater A du CGI sont estimés à 85 millions d’euros et devraient bénéficier à 61 100 ménages.
D’après l’étude préalable du présent article, le recentrage de ce crédit d’impôt prévu par le présent article représente une économie de l’ordre de 60 millions d’euros. Cette économie est plus que compensée par les dépenses supplémentaires prévues pour MaPrimeAdapt’ qui sera financée à hauteur de 67 millions d’euros en 2024 (voir supra).
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TroisiÈme partie : la clarification et l’extension des dispositifs fiscaux en faveur du logement locatif intermÉdiaire institutionnel
A. La tva immobiliÈre
1. Les caractéristiques de la TVA immobilière
a. Champ de la TVA immobilière
La TVA n’est applicable que dans certains cas aux transactions immobilières. La règle est que sont soumises à la TVA les ventes réalisées par une personne assujettie à la TVA dans le cadre de son activité économique portant sur un bien immobilier neuf ou un terrain à bâtir.
En effet, les ventes d’immeubles entre particuliers sont situées hors du champ d’application de la TVA, et les ventes d’immeubles achevés depuis plus de cinq ans effectuées par un professionnel assujetti à la TVA sont en principe exonérées de TVA.
En revanche, les ventes par un professionnel d’immeubles neufs sont soumises de plein droit à la TVA s’appliquant sur le prix total.
Sont considérés comme des immeubles neufs pour l’application de la TVA :
– les immeubles achevés depuis moins de cinq ans ;
– les surélévations d’immeubles existants ;
– les immeubles rénovés lorsque les travaux rendent à l’état neuf certaines parties de la construction limitativement énumérées par la loi (notamment la majorité des fondations, ou éléments déterminant la résistance et la rigidité de l’ouvrage ou la consistance des façades hors ravalement, etc.).
b. Taux de la TVA immobilière
Les ventes par un professionnel d’immeubles neufs sont soumises à la TVA au taux de 20 %.
Par dérogation, le I de l’article 279-0 bis A du CGI prévoit que certaines livraisons de logements répondant à certaines conditions relèvent du taux réduit de 10 %. Ces logements doivent répondre aux conditions cumulatives suivantes :
1° ils sont destinés par le preneur à la location à usage de résidence principale pour des personnes physiques dont les ressources, appréciées à la date de conclusion du bail, n’excèdent pas les plafonds mentionnés au premier alinéa du III de l’article 199 novovicies et dont le loyer mensuel n’excède pas les plafonds mentionnés au même III ([184]) ;
2° le destinataire de la livraison ou, en cas de démembrement de la propriété, l’usufruitier, est l’une des personnes suivantes :
● un organisme d’habitations à loyer modéré mentionné à l’article L. 411‑2 du code de la construction et de l’habitation ([185]), une société d’économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux ou une société anonyme de coordination entre les organismes d’habitations à loyer modéré ;
● un organisme soumis au contrôle de la société Action Logement Immobilier ;
● une personne morale dont le capital est détenu, directement ou indirectement, en totalité par des personnes passibles de l’impôt sur les sociétés ;
● un établissement public administratif ;
● une caisse de retraite et de prévoyance ;
3° ils sont situés, à la date du dépôt de la demande de permis de construire, sur le territoire de communes situées en zone tendue ([186]) ;
4° leurs terrains sont situés, à la date du dépôt de la demande de permis de construire, sur le territoire d’une commune comptant déjà plus de 25 % de logements locatifs sociaux, ou dans un quartier prioritaire de la politique de la ville, ou les logements sont intégrés au sein d’ensembles immobiliers dans lesquels la proportion du nombre de logements locatifs sociaux excède 25 % ;
5° ils résultent d’une construction nouvelle ou d’une transformation de locaux affectés à un usage autre que l’habitation par des travaux mentionnés au 2° du 2 du I de l’article 257 du CGI. Aux termes de cet article, sont considérés comme immeubles neufs, les immeubles qui ne sont pas achevés depuis plus de cinq années, qu’ils résultent d’une construction nouvelle ou de travaux portant sur des immeubles existants qui ont consisté en une surélévation ou qui ont rendu à l’état neuf, soit la majorité des fondations, soit la majorité des éléments hors fondations déterminant la résistance et la rigidité de l’ouvrage, soit la majorité de la consistance des façades hors ravalement, soit l’ensemble des éléments de second œuvre tels qu’énumérés par décret en Conseil d’État, dans une proportion fixée par ce décret qui ne peut être inférieure à la moitié pour chacun d’entre eux.
Dans la mesure où les constructions de logements sociaux bénéficient, en règle générale, en application des articles 278 sexies et 278 sexies-0 A, du taux réduit de 5,5 %, ce taux de 10 % s’applique au logement intermédiaire.
Les taux réduits de TVA applicable aux livraisons de logements
Certaines livraisons de logements, en particulier sociaux, bénéficient de taux réduits de TVA. Ces taux réduits sont fixés par les articles 278 sexies et 278 sexies-0 A du CGI.
Il est précisé que le logement locatif social s’entend d’un logement auquel s’applique l’aide personnalisée au logement prévue pour les logements à usage locatif construits, acquis ou améliorés au moyen d’aides de l’État ou de prêts réglementés.
Dans le secteur du logement locatif social, bénéficient d’un taux de TVA de :
– 5,5 % les livraisons de logements locatifs sociaux financés par un prêt locatif aidé d’intégration (PLAI) (1) ;
– 5,5 % les livraisons de logements locatifs sociaux financés par un prêt locatif à usage social (PLUS) (2) lorsqu’ils sont situés, soit dans un quartier prioritaire de la politique de la ville, y compris partiellement, lorsque ces logements font l’objet d’une convention de renouvellement urbain, soit en dehors de ces quartiers, à condition, soit qu’ils fassent l’objet d’une convention de renouvellement urbain, soit qu’ils soient intégrés dans un ensemble immobilier pour lequel la proportion de logements relevant d’une telle convention, parmi l’ensemble des logements locatifs sociaux financés par un prêt locatif aidé d’intégration ou à usage social, est au moins égale à 50 % ;
– 10 % les livraisons des autres logements locatifs sociaux.
En outre, les livraisons de locaux dans le cadre de l’acquisition-amélioration financées par un PLAI ou un PLUS bénéficient d’une TVA à 5,5 %. C’est également le cas des livraisons de locaux dans le cadre de l’acquisition-amélioration financées par un prêt locatif social (PLS) (3) lorsque les travaux consistent en une transformation en logements locatifs sociaux de locaux à usage autre que d’habitation.
Pour accéder à un logement à loyer modéré, le candidat locataire doit justifier de ressources égales ou inférieures à des plafonds réglementaires, qui varient selon le type de prêt octroyé pour la construction du logement social, la composition du ménage et la localisation du bien. Ainsi, au 1er janvier 2023, un ménage de deux personnes, pour louer un logement situé hors Île-de-France, devait avoir des ressources inférieures à 17 531 euros pour un logement financé par un PLAI, 29 217 euros pour un logement financé par un PLUS, et 37 982 euros pour un logement financé par un PLS.
Enfin, bénéficient du taux réduit de 10 % les livraisons de logements à usage locatif autres que sociaux destinés à être occupés par des ménages dont le total des ressources n’excède pas celui prévu au 1° du I de l’article 279-0 bis A du CGI lorsque le destinataire est :
– pour les logements situés dans un quartier faisant l’objet d'une convention de rénovation urbaine ou d’une convention de renouvellement urbain, ou entièrement situés à moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers, l’association foncière logement ou des sociétés civiles immobilières dont cette association détient la majorité des parts ;
– pour les logements situés sur des terrains octroyés au titre des contreparties prévues dans le cadre de la participation des employeurs à l’effort de construction, un organisme réalisant, en substitution de l’association foncière logement, des opérations immobilières qui relèvent d’une convention de rénovation urbaine.
(1) Le prêt locatif aidé d’intégration (PLAI) s’entend du prêt réglementé octroyé pour financer un logement locatif social adapté aux besoins des ménages qui rencontrent des difficultés d’insertion particulières dont la construction, l'acquisition ou l'amélioration est éligible aux aides de l’État conditionnant l’application de l’aide personnalisée au logement.
(2) Le prêt locatif à usage social (PLUS) s’entend du prêt réglementé, autre que le prêt locatif aidé d’intégration, octroyé pour financer un logement locatif social dont la construction, l’acquisition ou l’amélioration est éligible aux aides de l’État conditionnant l’application de l’aide personnalisée au logement.
(3) Le prêt locatif social (PLS) s’entend du prêt réglementé octroyé pour financer un logement locatif social dont la construction, l’acquisition ou l’amélioration n’est pas éligible aux aides de l’État conditionnant l’application de l’aide personnalisée au logement
2. Des zones et projets prioritaires dans les domaines du logement et de l’urbanisme
a. Les contrats de projet partenarial d’aménagement
Les contrats de projets partenariaux d’aménagement (PPA) sont conclus entre l’État et des collectivités territoriales afin de favoriser la réalisation d’opérations d’aménagement. Ils sont prévus par les articles L. 312-1 à L. 312-2-1 du code de l’urbanisme.
Ils peuvent être conclus entre l’État et un ou plusieurs établissements publics ou collectivités territoriales parmi les suivants : un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ; un établissement public territorial (EPT) ; la Ville de Paris ; la métropole de Lyon ; et une ou plusieurs communes membres de l’établissement public ou de la collectivité territoriale signataire du contrat de PPA.
Sur proposition d’un ou de plusieurs signataires, le contrat peut également être signé par toute société publique locale, par toute société d’économie mixte ainsi que par toute autre personne publique ou tout acteur privé implantés dans son périmètre territorial et susceptibles de prendre part à la réalisation des opérations prévues par ce même contrat.
Un PPA peut être qualifié de grande opération d’urbanisme (GOU).
b. Les grandes opérations d’urbanisme
La grande opération d’urbanisme (GOU) est un outil opérationnel, mis en œuvre au niveau intercommunal, visant à coordonner les moyens d’action nécessaires à la réalisation de projets urbains d’une certaine ampleur ou complexité. Elle vise à faciliter l’exécution de ces opérations d’aménagement d’envergure via l’adaptation du régime d’urbanisme applicable.
Plus précisément, la GOU est une opération d’aménagement prévue par un contrat de PPA dont la réalisation requiert, en raison de ses dimensions ou de ses caractéristiques, un engagement conjoint spécifique de l’État et d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public cocontractant au PPA. Les GOU sont prévues par les articles L. 312-3 à L. 312-7 du code de l’urbanisme.
La qualification de GOU est décidée par délibération de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’établissement public cocontractant, après avis conforme des communes dont le territoire est inclus en tout ou partie dans le périmètre de l’opération et avec l’accord du représentant de l’État dans le ou les départements concernés.
L’acte décidant de la qualification de GOU fixe la durée et le périmètre de l’opération ainsi qu’une densité minimale de constructions, le cas échéant déclinée par secteur.
À l’intérieur du périmètre d’une GOU :
– l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d’aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l’objet d’une déclaration préalable est le maire de Paris, le président de la métropole de Lyon ou le président de l’EPCI ou de l’EPT à l’initiative de la GOU ;
– le droit de préemption urbain est exercé par la collectivité territoriale ou l’établissement public à l’initiative de la GOU ;
– il peut être fait usage du permis d’innover, qui permet, à certaines conditions, aux maîtres d’ouvrage de constructions ou d’aménagements, de déroger aux règles opposables à un projet s’ils démontrent que sont atteints des résultats satisfaisant aux objectifs poursuivis par les règles auxquelles il est dérogé ([187]) ;
– la création et la réalisation des opérations d’aménagement est réputée d’intérêt communautaire, ou d’intérêt métropolitain ;
– l’EPCI ou la collectivité territoriale à l’initiative de la GOU est compétent pendant toute la durée de l’opération pour la réalisation, la construction, l’adaptation ou la gestion d’équipements publics relevant de la compétence de la commune d’implantation, nécessaires à l’opération, et identifiés et localisés dans l’acte de qualification. Cet établissement ou cette collectivité assure alors la maîtrise d’ouvrage de ces équipements ;
– la collectivité territoriale ou l’établissement public à l’initiative de la GOU est seul compétent pour conclure, par décision de son organe délibérant, une ou plusieurs conventions de projet urbain partenarial.
c. Les zones d’activité économique
Les zones d’activité économique (ZAE) sont prévues par les articles L. 318‑8-1 et L. 318-8-2 du code de l’urbanisme. Elles ont été créées par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
Sont considérées comme des ZAE les zones d’activité industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire ou aéroportuaire créées, aménagées et gérées par une communauté de communes, une communauté urbaine, une communauté d’agglomération, une métropole, la métropole du Grand Paris ou la métropole de Lyon.
L’autorité compétente en matière de création, d’aménagement et de gestion des ZAE est chargée d’établir un inventaire des zones situées sur le territoire sur lequel elle exerce cette compétence. Cet inventaire comporte, pour chaque zone d’activité économique, les éléments suivants :
– un état parcellaire des unités foncières composant la ZAE, comportant la surface de chaque unité foncière et l’identification du propriétaire ;
– l’identification des occupants de la ZAE ;
– le taux de vacance de la ZAE, calculé en rapportant le nombre total d’unités foncières de la zone au nombre d’unités foncières qui ne sont plus affectées à une activité assujettie à la cotisation foncière des entreprises depuis au moins deux ans au 1er janvier de l’année d’imposition et qui sont restées inoccupées au cours de la même période.
Après consultation des propriétaires et occupants des ZAE pendant une période de trente jours, l’inventaire est arrêté par l’autorité compétente. Il est ensuite transmis à l’autorité compétente en matière de schéma de cohérence territoriale (Scot) et à l’autorité compétente en matière de document d’urbanisme ou de document en tenant lieu. Ce document est également transmis à l’autorité compétente en matière de programme local de l’habitat. Cet inventaire est actualisé au moins tous les six ans.
d. Les opérations programmées d’amélioration de l’habitat
Les opérations programmées d’amélioration de l’habitat (OPAH), prévues par l’article L. 303-1 du code de la construction et de l’habitation, ont pour objet la réhabilitation du parc immobilier bâti.
Elles tendent à améliorer l’offre de logements, en particulier locatifs, ainsi qu’à maintenir ou à développer les services de voisinage. Elles sont mises en œuvre dans le respect des équilibres sociaux, de la sauvegarde du droit des occupants et des objectifs du plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées ainsi que, s’il existe, du programme local de l’habitat.
Ces opérations donnent lieu à une convention entre la commune ou l’EPCI compétent en matière d’habitat ou le syndicat mixte qui aurait reçu mandat de ces derniers, l’Agence nationale de l’habitat et l’État.
Cette convention précise :
– le périmètre de l’opération ;
– le montant total des aides susceptibles d’être accordées par l’Agence nationale de l’habitat, l’État et, le cas échéant, la commune ou l’EPCI ou d’autres personnes publiques ou privées, pour l’amélioration de l’habitat, la construction de logements sociaux, l’acquisition de logements en vue de leur amélioration pour un usage locatif social, les baux à réhabilitation et les actions d’accompagnement prévues ;
– les actions d’accompagnement et d’amélioration du cadre de vie prévues par l’État, la commune ou l’EPCI ;
– les actions destinées à assurer le respect de la diversité de la population dans les quartiers, à maintenir le caractère social de l’occupation des logements et à favoriser le maintien sur place des occupants ;
– les actions destinées à assurer le maintien ou l’implantation de services ou d’équipements commerciaux ou artisanaux de proximité.
e. Les opérations de requalification de copropriétés dégradées
Les opérations de requalification des copropriétés dégradées (ORCOD) sont prévues par l’article L. 741-1 du code de la construction et de l’habitation.
Elles peuvent être mises en place par l’État, les collectivités territoriales ou leurs groupements pour lutter contre l’indignité et la dégradation des immeubles en copropriété.
Ces opérations sont menées sur un périmètre défini par l’État, ainsi que par les collectivités territoriales ou leurs groupements dans le cadre d’un projet urbain et social pour le territoire concerné ou d’une politique locale de l’habitat.
Chaque opération fait l’objet d’une convention entre personnes publiques, dont, le cas échéant, l’opérateur chargé de la mise en œuvre est signataire, qui prévoit tout ou partie des actions suivantes :
– un dispositif d’intervention immobilière et foncière, incluant des actions d’acquisition, de travaux et de portage de lots de copropriété ;
– un plan de relogement et d’accompagnement social des occupants ;
– la mobilisation des dispositifs coercitifs de lutte contre l’habitat indigne ;
– la mise en œuvre des actions prévues à l’article L. 303-1, dans le cadre des OPAH ;
– le cas échéant, la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde de la copropriété ([188]) ainsi que de la procédure d’administration provisoire renforcée applicable aux copropriétés dont l’équilibre financier est gravement compromis ou dont le syndicat est dans l’impossibilité de maintenir l’immeuble dans un bon état général ([189]) ;
– la mise en œuvre d’actions ou d’opérations d’aménagement, intégrant les objectifs de l’opération.
L’opération de requalification de copropriétés peut donner lieu à l’instauration du droit de préemption urbain renforcé ([190]), qui peut être délégué à l’opérateur chargé de la mise en œuvre de l’opération.
Pour assurer le relogement, à titre temporaire ou définitif, des occupants des logements dans les copropriétés situées dans le périmètre de ces opérations, le maire et le président de l’EPCI, signataires de la convention, peuvent user des prérogatives qu’ils tiennent des troisième et avant-dernier alinéas de l’article L. 521-3-3 du code de la construction et de l’habitation. Ces prérogatives leur permettent de désigner ces personnes à un organisme bailleur aux fins qu’il les loge et, en cas de refus du bailleur, de procéder à l’attribution d’un logement. Ces attributions s’imputent sur les droits à réservation dont disposent le maire et le président de l’EPCI sur le territoire de la commune ou de l’EPCI.
f. Les opérations de revitalisation de territoire
Les opérations de revitalisation de territoire (ORT) sont prévues par les articles L. 303-2 et L. 303-3 du code de la construction et de l’habitation.
Elles ont pour objet la mise en œuvre d’un projet global de territoire destiné à adapter et moderniser le parc de logements et de locaux commerciaux et artisanaux ainsi que le tissu urbain de ce territoire pour améliorer son attractivité, lutter contre la vacance des logements et des locaux commerciaux et artisanaux ainsi que contre l’habitat indigne, réhabiliter l’immobilier de loisir, valoriser le patrimoine bâti et réhabiliter les friches urbaines, dans une perspective de mixité sociale, d’innovation et de développement durable.
Elles donnent lieu à une convention entre l’État, ses établissements publics intéressés, un EPCI à fiscalité propre et tout ou partie de ses communes membres, ainsi qu’avec toute personne publique ou tout acteur privé susceptible d’apporter un soutien ou de prendre part à la réalisation des opérations prévues par la convention.
La convention définit le projet urbain, économique et social de revitalisation de territoire concerné, favorisant la mixité sociale, le développement durable, la valorisation du patrimoine et l’innovation. Elle délimite le périmètre des secteurs d’intervention, parmi lesquels figure nécessairement le centre-ville de la ville principale du territoire de l’EPCI à fiscalité propre signataire. La convention précise sa durée, le calendrier, le plan de financement des actions prévues et leur répartition dans les secteurs d’intervention délimités. Elle prévoit également les conditions dans lesquelles ces actions peuvent être déléguées à des opérateurs. Une convention d’ORT comprend tout ou partie des actions d’amélioration de l’habitat prévues à l’article L. 303-1 du CCH.
La convention d’ORT prévoit également tout ou partie des actions suivantes :
– un dispositif d’intervention immobilière et foncière contribuant à la revalorisation des îlots d’habitat vacant ou dégradé et incluant notamment des actions d’acquisition, de travaux et de portage de lots de copropriété ;
– un plan de relogement et d’accompagnement social des occupants, avec pour objectif prioritaire leur maintien au sein du même quartier requalifié ;
– l’utilisation des dispositifs coercitifs de lutte contre l’habitat indigne ;
– des actions en faveur de la transition énergétique du territoire, notamment de l’amélioration de la performance énergétique du parc immobilier et de la végétalisation urbaine et des bâtiments ;
– un projet social, comportant notamment des actions en faveur de la mixité sociale et d’adaptation de l’offre de logement, de services publics et de services de santé aux personnes en perte d’autonomie ;
– des actions ou opérations d’aménagement contribuant à l’aménagement des espaces et des équipements publics de proximité et prenant en compte les problèmes d’accessibilité, de desserte des commerces et des locaux artisanaux de centre-ville et de mobilité ainsi que l’objectif de localisation des commerces en centre-ville ;
– des dispositifs d’intervention immobilière et foncière visant la reconversion ou la réhabilitation des sites industriels et commerciaux vacants ainsi que des sites administratifs et militaires déclassés ;
– des actions destinées à moderniser ou à créer des activités ou des animations économiques, commerciales, artisanales, touristiques ou culturelles, sous la responsabilité d’un opérateur ;
– des actions ou opérations favorisant, en particulier en centre-ville, la création, l’extension, la transformation ou la reconversion de surfaces commerciales ou artisanales ;
– un engagement de la ou des autorités compétentes en matière de plan local d’urbanisme, de document d’urbanisme en tenant lieu ou de carte communale de procéder aux modifications des documents d’urbanisme, approuvés ou en cours d’approbation, nécessaires à la mise en œuvre des plans, projets ou actions prévus par la convention.
Par dérogation aux règles du code de commerce, la convention d’ORT peut également prévoir que, dans les centres-villes concernés :
– les baux relatifs à un local commercial conclus postérieurement à la signature de la convention ne peuvent porter que sur ce local dans les immeubles qui abritent à la fois un ou plusieurs locaux commerciaux ainsi que des locaux destinés à l’habitation, à l’exception des locaux destinés au fonctionnement des activités commerciales ou artisanales et du local destiné à l’habitation occupé par le commerçant ou l’artisan qui exerce son activité professionnelle en rez-de-chaussée ;
– sont interdits, postérieurement à la signature de la convention, les travaux qui conduisent, dans un même immeuble, à la condamnation de l’accès indépendant aux locaux ayant une destination distincte de l’activité commerciale ou artisanale.
L’ORT peut donner lieu à l’instauration du droit de préemption urbain renforcé prévu à l’article L. 211-4 du code de l’urbanisme et à l’instauration du droit de préemption sur les fonds artisanaux, les fonds de commerce, les baux commerciaux et les terrains faisant l’objet de projets d’aménagement commercial prévu à l’article L. 214-1 du même code.
Un bilan annuel et une évaluation tous les cinq ans des actions entreprises dans le cadre de l’ORT et de leurs incidences financières sont présentés aux conseils municipaux des communes et à l’organe délibérant de l’EPCI à fiscalité propre signataires de la convention.
B. La crÉance d’impÔt sur les sociÉtÉs pour les investissements dans le logement locatif intermÉdiaire
1. Le champ d’application
En application de l’article 1384-0 A du CGI, introduit par l’article 73 de la loi de finances pour 2014, les logements achevés avant le 1er janvier 2023 et taxés au taux intermédiaire de TVA de 10 % en vertu des dispositions de l’article 279-0 bis A du CGI bénéficient également d’une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pour une durée de 20 ans ([191]).
Pour les logements achevés à compter du 1er janvier 2023, l’article 81 de la loi de finances pour 2022 ([192]) a substitué à ce régime d’exonération de la TFPB l’octroi d’une créance d’IS d’égal montant et applicable pour la même durée ([193]).
En application de l’article 220 Z septies du CGI, peuvent bénéficier de cette créance, à la condition qu’elles soient propriétaires ou titulaires de l’usufruit d’un logement répondant aux critères définis aux 1° et 3° à 5° de l’article 279-0 bis A du CGI ([194]), les personnes suivantes :
– les organismes d’habitation à loyer modéré, les sociétés d’économies mixtes de construction et de gestion des logements sociaux ou les groupes d’organismes de logement social ;
– les organismes soumis au contrôle d’Action Logement Immobilier ;
– les personnes morales (y compris celles exonérées d’IS) dont le capital est détenu en totalité par des personnes passibles de l’IS ;
– les établissements publics administratifs ;
– les caisses de retraite et de prévoyance.
Le champ des personnes éligibles au régime prévu par l’article 220 Z septies du CGI est donc similaire à celui prévu à l’article 279-0 bis du CGI.
Le droit applicable ne permet toutefois pas aux sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) de bénéficier des dispositions de l’article 220 Z septies du CGI. En effet, comme l’avait relevé l’Inspection générale des finances dans un rapport publié en avril 2021 ([195]), leur régime fiscal, prévu à l’article 239 septies du CGI, conduit à les exclure de l’application de l’article 279-0 bis A du CGI.
Les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI)
Les sociétés civiles de placement immobilier sont des structures de placement collectif ayant pour objet social l’acquisition directe ou indirecte (y compris en l’état de futur achèvement), la construction et la gestion d’un patrimoine immobilier affecté à la location.
Leurs associés peuvent être des particuliers ou des personnes morales.
L’article 239 septies du CGI prévoit que les SCPI ne sont pas passibles de l’IS : leur régime fiscal est « translucide », ce qui signifie que les associés sont directement imposés sur les revenus de la SCPI comme s’ils les avaient directement perçus.
Leur situation est donc différente de celle des organismes de placement collectif immobilier (OPCI) et des organismes professionnels de placement collectif immobilier (OPPCI) qui peuvent bénéficier du régime applicable au logement locatif intermédiaire institutionnel pour leurs investissements indirects, dans la mesure où ils sont constitués sous la forme de sociétés de placement collectif à capital variable (Sppicav) passibles de l’IS mais bénéficiant d’une exonération de cet impôt.
2. Le calcul du montant de la créance
Le montant de la créance imputable sur l’IS est égal au montant de TFPB dû au titre du logement. Le cas échéant, s’y ajoutent les montants :
– de la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi) prévue à l’article 1530 bis du CGI ;
– de la taxe additionnelle spéciale annuelle au profit de la région d’Île‑de‑France prévue à l’article 1599 quater D du CGI ;
– des taxes spéciales d’équipement additionnelles à la TFPB prévues aux articles 1607 bis, 1607 ter et 1609 B à 1 609 G du CGI ;
– des impositions additionnelles perçues au profit des syndicats de communes et des syndicats mixtes en application de l’article 1609 quater du CGI ;
– des prélèvements opérés par l’État sur ces taxes en contrepartie des frais de dégrèvement et de non-valeurs qu’il prend à sa charge en application de l’article 1641 du CGI.
Les modalités de calcul de la créance ne tiennent en revanche pas compte de la taxe spéciale d’équipement prélevée au profit de la Société du grand projet du Sud-Ouest (SGPSO). Cette société a été créée sous la forme d’un établissement public local par l’ordonnance n° 2022-307 du 2 mars 2022 pour gérer la création des lignes à grande vitesse Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax ([196]).
Cela s’explique par le fait que cette taxe a été introduite à l’article 1609 H du CGI par les dispositions de l’article 77 de la loi de finances pour 2022, soit postérieurement à la création de l’article 220 Z septies du CGI.
II. le dispositif proposÉ
A. l’extension du champ des logements donnant lieu À l’application d’un taux de TVA de 10 %
Le 5° du II (alinéas 64 à 77) du présent article complète l’article 279‑0 bis A du CGI afin d’étendre le champ des livraisons de logements donnant lieu à l’application de la TVA au taux réduit de 10 %.
Ce taux réduit est rendu applicable, pour autant que les autres conditions prévues par l’article 279-0 bis A du CGI soient remplies :
– aux logements situés, à la date du dépôt du permis de construire, sur l’un des territoires suivants :
● le territoire de communes de réindustrialisation où sont réalisés des projets d’intérêt national majeur au sens du I de l’article L. 300-6-2 du code de l’urbanisme (alinéa 69) ;
La notion de projet d’intérêt national majeur est introduite par l’article 9 du projet de loi relatif à l’industrie verte. Tel qu’adopté par l’Assemblée nationale, cet article insère un article L. 300-6-2 dans le code de l’urbanisme, qui dispose qu’un projet industriel qui revêt, – eu égard à son objet et à son envergure, notamment en termes d’investissement et d’emploi – une importance particulière pour la transition écologique ou la souveraineté nationale, peut être qualifié par décret de projet d’intérêt national majeur. Cette qualification permet la mise en œuvre d’une procédure de mise en compatibilité des documents d’urbanisme, déclenchée par l’État avec l’accord du maire de la commune ou, lorsqu’un plan local d’urbanisme intercommunal est applicable, du président de l’EPCI concerné.
● le périmètre d’une grande opération d’urbanisme au sens de l’article L. 312‑3 du code de l’urbanisme, comportant la transformation d’une zone d’activité économique au sens de l’article L. 318-8-1 du même code, d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat prévue à l’article L. 303-1 du code de la construction et de l’habitation ou d’une opération de requalification de copropriétés dégradées prévue à l’article L. 741-1 du même code (alinéa 70) ;
● le territoire des communes qui ont conclu un contrat de projet partenarial d’aménagement mentionné à l’article L. 312-1 du code de l’urbanisme ou une convention d’opération de revitalisation de territoire prévue à l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation (alinéa 71).
– aux logements résultant d’une opération d’acquisition-amélioration au sens du 6° du I de l’article 278 sexies ([197]) dans des bâtiments ou parties de bâtiment à usage résidentiel qui conduit à une amélioration de la performance énergétique dans des conditions déterminées par arrêté conjoint du ministre chargé du budget, du ministre chargé de l’énergie et du ministre chargé du logement (alinéas 72 à 75) ;
– et aux travaux d’amélioration relevant de l’acquisition-amélioration réalisés par l’acquéreur sur ces immeubles (alinéas 76 et 77).
B. L’extension de la crÉance d’IS octroyÉE dans le cadre d’un investissement dans le logement locatif intermÉdiaire
En premier lieu, les modifications opérées par le présent article aux 3° et 5° du I de l’article 279-0 bis A du CGI et mentionnées précédemment ont comme répercussion d’étendre le champ des logements éligibles à la créance d’IS prévue à l’article 220 Z septies du CGI.
En second lieu, le 2° du II du présent article opère deux modifications ayant trait au champ des personnes éligibles à cette créance et à ses modalités de calcul :
– le bénéfice de la créance d’IS est étendu aux sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) détenues par des personnes passibles de l’IS pour les investissements qu’elles réalisent dans le logement locatif intermédiaire (alinéa 39) ;
– le montant de la taxe spéciale d’équipement prélevée au profit de la Société du grand projet du Sud-Ouest est intégré au montant de la créance d’IS (alinéa 40).
Enfin, le B du VII du présent article prévoit que cette extension s’applique aux logements dont la construction est achevée à compter du 1er janvier 2023.
III. l’impact Économique et financier
Ces mesures, annoncées dans les conclusions des travaux du Conseil national de la refondation, pour son volet relatif au logement, le 5 juin 2023, visent à soutenir le secteur intermédiaire institutionnel. Il s’agit, en particulier, de favoriser les réhabilitations de logements existants à loyer maîtrisé en dehors des seules zones tendues, notamment dans des zones où existent des programmes de revitalisation des villes moyennes et des centres-villes et dans les communes en cours de réindustrialisation, et de contribuer à la résorption du stock de passoires énergétiques.
● Le coût de la dépense fiscale constituée par le taux réduit de 10 % pour les ventes et livraisons à soi-même de certains logements locatifs intermédiaires est évaluée à 175 millions d’euros pour 2023 par les Voies et moyens annexées au PLF pour 2023. L’évaluation préalable chiffre le coût supplémentaire induit par l’extension de ce taux réduit par le présent article à :
– 16,9 millions d’euros en 2024 ;
– 28,1 millions d’euros en 2025 ;
– 56,62 millions d’euros en 2026 ;
– 84,3 millions d’euros par an en rythme de croisière, à partir de 2027.
● Le coût de l’extension de la créance d’IS imputable à raison du montant de TFPB due au titre des logements relevant du régime du logement locatif intermédiaire institutionnel est par ailleurs estimé à :
– 2,8 millions d’euros en 2025 ;
– 7,8 millions d’euros en 2026 ;
– 17,6 millions d’euros en rythme de croisière en 2027.
quatriÈme partie : l’extension de l’exonÉration de taxe fonciÈre sur les propriÉtÉs bÂties applicable aux logements locatifs sociaux
Les constructions neuves de logements locatifs sociaux financées à plus de 50 % par des prêts aidés de l’État font l’objet d’une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) de 15 ans à compter de l’année suivant celle leur achèvement.
L’exonération est étendue à 25 ans lorsque la décision d’octroi de prêt ou de subvention a été prise entre le 1er juillet 2004 et le 31 décembre 2026.
Lorsque le logement social satisfait à des critères de performance énergétique et de qualité environnementale prévus par le code de la construction et de l’habitation [198], ces durées sont étendues, respectivement, à 20 et 30 ans.
Catégorie de logement |
Durée d’exonération |
Durée d’exonération avec performance environnementale et énergétique |
Logement social |
15 ans |
20 ans |
Logements sociaux ayant fait l’objet d’une décision d’octroi de prêt ou de subvention prise entre le 1er juillet 2004 et le 31 décembre 2026 |
25 ans |
30 ans |
Source : commission des finances à partir du CGI.
Ces exonérations sont favorables aux organismes de logement social et constituent un paramètre important du financement des logements neufs. Leur renforcement sur la base de critère d’efficacité énergétique et environnemental est de nature à favoriser la transition énergétique au sein du parc social.
Part des logements sociaux par département en 2017
Source : La Banque postale, Regards sur la fiscalité locale (1986‑2018).
Ces exonérations sont en revanche défavorables pour les finances des collectivités territoriales au sein desquelles elles s’appliquent, car elles les privent d’une ressource fiscale qui se trouve aujourd’hui mal compensée par l’État du fait des minorations appliquées sur les allocations compensatrices (la perte de recettes est compensée à hauteur de 7 %). Avant minoration, la compensation est calculée sur le fondement des bases exonérées et des taux de l’année précédant le versement de la compensation ([199]).
allocations compensatrices des exonérations de TFPB
de logements sociaux en 2021
(en euros)
|
Montant exonéré |
Allocation avant minoration |
Taux de compensation |
Allocation après minoration |
Communes |
917 650 758 |
305 751 367 |
7 % |
21 309 953 |
EPCI à fiscalité propre |
42 064 545 |
18 854 140 |
7 % |
1 314 077 |
Source : Rapport du Gouvernement au Parlement sur le coût pour les collectivités territoriales des mesures d’exonération et d’abattement d’impôts directs locaux (2022).
Ces exonérations peuvent donc décourager les communes à favoriser la réalisation de projets de logements sociaux. Pour cette raison, l’article 175 de la loi de finances pour 2022 a prévu la compensation intégrale pour les dix premières années d’exonération de la perte de recettes supportée par les communes (et les EPCI) pour les logements dont la subvention, le financement ou l’agrément sont accordés entre le 1er janvier 2021 et le 30 juin 2026 (pour un coût budgétaire à terme pour l’État de 400 millions d’euros par an).
II. Le dispositif proposÉ
Le présent article crée un nouvel article 1384 C bis dans le CGI pour étendre l’exonération de TFPB de 15 ans (actuellement applicable aux constructions neuves de logements sociaux) aux logements sociaux ayant fait l’objet d’une opération unique de travaux de rénovation lourde ([200]).
En premier lieu, le dispositif vise les logements locatifs sociaux anciens, c’est-à-dire qui :
– sont achevés depuis au moins 40 ans à la date de dépôt de la demande d’agrément des travaux de rénovation lourde ;
– et ont bénéficié d’un prêt réglementé, ou d’une convention à l’aide personnalisée au logement depuis au moins 40 ans.
En second lieu, l’exonération vise seulement les « passoires énergétiques », c’est-à-dire les logements qui ont, avant les travaux de rénovation lourde, un niveau de performance énergétique et environnementale correspondant aux classes F ou G.
En effet, les bâtiments ou parties de bâtiment existants à usage d’habitation sont classés, par niveau de performance décroissant, en fonction de leur niveau de performance énergétique (exprimé en kilowattheures d’énergie primaire) et de leur performance en matière d’émissions de gaz à effet de serre (exprimées en kilogramme de dioxyde de carbone par mètre carré et par an) ([201]) . Le classement est établi en 7 catégories, la classe A regroupant les bâtiments « extrêmement performants » et la classe G ceux « extrêmement peu performants ». Les seuils de chaque classe sont fixés par arrêté ministériel.
Source : site internet du ministère de la transition écologique et de la Cohésion des territoires.
Pour bénéficier de l’exonération, les logements devront avoir reçu un agrément du préfet de département (à compter du 1er janvier 2024) pour des travaux permettant que le bâtiment ou la partie de bâtiment ou à la partie de bâtiment rénové :
– ’atteigne un niveau de performance énergétique ou environnementale correspondant aux classes A ou B ;
– respecte les critères légaux de sécurité d’usage ([202]), de qualité sanitaire ([203]) , et d’accessibilité des bâtiments ([204]).
Par cohérence avec le droit existant qui prévoit une extension à 25 ans de la durée de l’exonération pour les logements sociaux neufs ayant fait l’objet d’une décision de prêt ou de subvention avant le 31 décembre 2026, l’exonération est également portée à 25 ans lorsque la demande d’agrément de l’opération unique de travaux de rénovation lourde a été déposée entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2026.
Enfin, par coordination, il est précisé que les logements bénéficiaires de l’exonération instituée par le présent article ne peuvent se voir appliquer le dégrèvement partiel de TFPB prévu à l’article 1391 E du CGI, qui peut être accordé à certains propriétaires de logements sociaux à raison des dépenses de rénovation correspondant à des travaux d’économie d’énergie et de fluides éligibles au taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Par définition, le propriétaire d’un logement social n’a en effet pas vocation à être dégrevé partiellement de TFPB s’il en est déjà entièrement exonéré par le présent article.
III. L’impact budgÉtaire et Économique
Cette mesure étend donc aux logements sociaux anciens et peu performants d’un point de vue énergétique et environnementale une exonération de TFPB de longue durée qui doit favoriser la rénovation lourde du parc locatif ancien. L’offre locative devrait donc s’en trouver accrue, à moindre coût que la construction neuve, tout en respectant les critères environnementaux et de qualité des bâtiments.
D’après la Banque postale, le parc social comporterait 360 000 passoires énergétiques.
Cette mesure fiscale complète les efforts budgétaires déjà engagés par l’État pour la rénovation énergétique et l’extension du parc social dans le cadre du Plan de relance ([205]), ainsi que les incitations légales et réglementaires récentes, par exemple prévues dans la loi « Climat et résilience » ([206]).
Toutefois, le dispositif ne prévoit pas de compensation aux collectivités territoriales. L’évaluation préalable prévoit des moindres recettes pour les collectivités ainsi échelonnées (en millions d’euros) :
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
Effet pérenne |
|
- 3 |
- 8 |
- 17 |
Coût croissant de 9 millions d’euros par an |
Comme le précisent les documents budgétaires, « aucune exigence constitutionnelle n’impose, par principe, une compensation des exonérations de fiscalité locale. Pour autant, la pratique a permis de dégager une doctrine budgétaire : lorsque les exonérations ou abattements résultent d’une délibération des collectivités, ils ne sont pas compensés par l’État et sont à la charge des collectivités concernées. À l’inverse, lorsque les exonérations s’imposent aux collectivités, l’État peut faire le choix de les compenser. » ([207]) En l’absence de compensation prévue, suivant l’avis favorable du rapporteur général, la commission des finances a donc adopté des amendements pour confier au choix des collectivités la décision d’activer l’exonération prévue par le présent article.
*
* *
Article 7
Aménagement des dispositifs fiscaux de soutien au développement
des territoires ruraux et prorogation des dispositifs fiscaux de soutien
à la politique de la ville et au développement des territoires en reconversion
Résumé du dispositif proposé
Le présent article :
– proroge jusqu’au 30 juin 2024 trois zonages en vigueur ciblant les territoires ruraux (les zones de revitalisation rurales – ZRR, les bassins d’emploi à redynamiser – BER et les zones de revitalisation des commerces en milieu rural – ZoRCoMiR), et les fusionne à partir du 1er juillet 2024 dans un nouveau zonage unique dénommé France Ruralités Revitalisation, décliné en deux niveaux (un niveau socle construit en fonction du revenu des habitants et de la densité de population, et un niveau renforcé ciblant les communes les plus vulnérables) associés à des allègements fiscaux simplifiés ;
– proroge en 2024 les zonages en faveur de la politique de la ville (zones franches urbaines-territoire entrepreneur – ZFU-TE et quartiers prioritaires de la politique de la ville – QPV) ;
– proroge jusqu’en 2026, les zonages de soutien aux territoires en reconversion (bassins urbains à dynamiser – BUD, zones de développement prioritaire – ZDP et zones de revitalisation des centres‑villes – ZRCV) ;
– proroge jusqu’en 2027 les zonages (zones d’aides à finalité régionale – ZAFR et zones d’aide à l’investissement des petites et moyennes entreprises – ZAIPME) qui s’inscrivent dans le cadre des lignes directrices européennes relatives aux aides à finalité régionale et aux zones d’aide à l’investissement des PME pour 2022-2027.
Dernières modifications intervenues
La loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 a créé les QPV.
L’article 45 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015 a révisé les critères de classement en ZRR.
L’Engagement pour le renouveau du bassin minier (ERBM) a été signé le 7 mars 2017 pour une durée de dix ans, et les BUD ont été créés par la loi de finances pour 2017.
L’article 135 de la loi de finances pour 2019 a créé les ZDP.
L’article 110 de la loi de finances pour 2020 a créé les ZoRCoMiR.
L’article 68 de la loi de finances pour 2022 a prorogé pour une année, jusqu’au 31 décembre 2023, les ZRR, ZAFR, ZAIPME, ZFU, BER, BUD ainsi que les ZDP.
Le décret n° 2022-968 du 30 juin 2022 a institué la carte AFR pour la période 2022-2027 dans le cadre des lignes directrices européennes relatives aux aides à finalité régionale pour 2022-2027.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté cet article sans modification. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. L’état du droit
1. Les zonages fiscaux se superposent sans se compléter, notamment en ce qui concerne les zonages ruraux
De nombreux « zonages » – c’est-à-dire des fractions du territoire national délimitées sur des critères géographiques (milieu rural ou urbain, densité et dynamique démographique, etc.) et socio-économiques (chômage, activité commerciale ou industrielle et revenu) – ont été créés par les pouvoirs publics pour constituer le support de politiques publiques en faveur du développement de ces territoires.
Les entreprises installées dans le ressort de ces zonages peuvent ainsi bénéficier de plusieurs exonérations fiscales qui doivent favoriser leur installation et leur maintien : exonérations d’impôts sur les bénéfices (impôt sur le revenu ou impôt sur les sociétés) et d’impôts locaux de production (cotisation foncière des entreprises, taxe foncière sur les propriétés bâties et cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises). S’agissant des impôts locaux, les allègements peuvent être prévus par la loi (auquel cas ils sont compensés aux collectivités territoriales par l’État) ou laissés au choix des collectivités (auquel cas ils ne sont pas compensés). Des avantages financiers non fiscaux peuvent aussi être associés aux zonages (par exemple, la majoration d’une dotation pour les communes zonées, ou le bénéfice d’exonération de cotisations sociales pour les entreprises).
Aujourd’hui, de nombreux zonages coexistent, ainsi que les avantages associés. Ils visent à soutenir trois catégories de territoires : territoires ruraux, quartiers de la politique de la ville et territoires en reconversion.
Chacun des régimes associés à ces zonages est exclusif l’un de l’autre (le choix pour un établissement de bénéficier de l’un de ces régimes étant considéré comme l’exercice irrévocable d’une option). Le bénéfice des avantages associés à ces régimes est subordonné au respect du droit de l’Union européenne, notamment le règlement relatif aux aides d’État de faible montant (de minimis) ([208]).
Les zones de revitalisation rurale (ZRR) visent à favoriser les territoires ruraux caractérisés par leur faible développement économique et confrontés à des difficultés particulières. Les ZRR ont été créées en 1995 ([209]) et leurs critères réformés en 2015 ([210]). À la suite de cette réforme, afin d’éviter une sortie brutale du zonage de certaines communes, toutes celles anciennement éligibles continuent à bénéficier des effets du classement en ZRR.
Les bassins d’emploi à redynamiser (BER) se caractérisent par un taux de chômage élevé ainsi qu’une variation négative de population et de l’emploi. Dans les faits, les BER se situent dans les départements des Ardennes (zone d’emploi de la Vallée de la Meuse) et de l’Ariège (zone d’emploi de Lavelanet).
Les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZoRCoMiR) sont un zonage plus récent (créé par la loi de finances pour 2020) qui vise à dynamiser l’activité commerciale et lutter efficacement contre les fermetures des commerces de proximité en milieu rural.
Les zones de développement prioritaire (ZDP) concernent les communes situées dans les régions de France métropolitaine qui réunissent des critères de faible revenu, de part des jeunes sans emploi ni en formation et de densité faible. En pratique, seul le territoire de la Corse est concerné.
Les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) correspondent aux quartiers situés dans un territoire urbain (population d’au moins 10 000 habitants) et caractérisés par une population de 1 000 habitants au moins et un revenu faible d’habitants.
Les zones franches urbaines – territoires entrepreneurs (ZFU-TE) recouvrent des quartiers particulièrement défavorisés de plus de 8 500 habitants, et tendent à faciliter l’implantation d’entreprises ou le développement d’activités économiques.
Les bassins urbains à dynamiser (BUD) concernent les communes qui appartiennent à un ensemble d’EPCI contigus denses, fortement peuplés (un million d’habitants au moins) et avec un taux de chômage élevé. Ils s’inscrivent dans le cadre de l’Engagement pour le renouveau du bassin minier du Nord et du Pas‑de‑Calais (ERBM) signé le 7 mars 2017 par le Premier ministre et les acteurs institutionnels de la Région. Cet accord prévoyait un plan d’action sur dix ans, dont la mise en place d’un régime zoné spécifique.
Les zones de revitalisation des centres-villes (ZRCV) tendent à donner aux élus locaux les moyens de renforcer l’attractivité des centres‑villes des villes moyennes dont le revenu est plus faible que la moyenne nationale. Elles s’inscrivent dans le programme gouvernemental « action cœur de ville » qui prévoit leur prolongation jusqu’en 2026.
Les zones d’aide à finalité régionale (ZAFR) correspondent aux territoires de l’Union européenne présentant des retards de développement économique dans lesquels les pouvoirs publics, l’État et les collectivités territoriales peuvent allouer des aides aux entreprises pour encourager les investissements et la création durable d’emplois. Ces aides d’État sont qualifiées d’aides à finalité régionale (AFR).
Les zones d’aide à l’investissement pour les petites et moyennes entreprises (ZAI-PME) comprennent l’ensemble des communes de France à l’exception des communes situées dans la région Île-de-France (sauf celles situées dans une zone urbaine sensible – ZUS – ou une ZRR), et des communes de ZAFR ([211]).
Les zones de restructuration de la défense (ZRD) sont des territoires dans lesquels la réorganisation des unités militaires et des établissements relevant du ministère de la défense a conduit à une perte importante d’emplois. Ces territoires doivent être couverts par un contrat de redynamisation de sites de défense (CRSD) ([212]).
L’ensemble de ces dispositifs tendent à favoriser la création de nouvelles activités et d’emplois dans les territoires les plus vulnérables qui souffrent d’un déficit structurel d’activité et d’attractivité.
Objectifs des zonages
Source : commission des finances
Au total, environ 21 000 communes bénéficiaient en 2019 d’un ou plusieurs zonages à vocation économique, soit 60 % des communes françaises. Les ZRR regroupent le plus grand nombre de communes : 17 681 au 1er janvier 2023 d’après l’évaluation préalable, soit près de 51 % des communes de France et 16 % de la population française (dont 4 018 communes qui ne respectent plus les critères de classement révisés par la loi de finances rectificative pour 2015 ([213])).
Source : évaluation préalable du présent article.
Tous ces dispositifs ont été instaurés entre 1995 et 2021 et prennent fin au 31 décembre 2023, après avoir été prorogés à plusieurs reprises, la dernière prorogation étant intervenue pour une durée d’une année, en loi de finances pour 2022 ([214]).
On observe que les zonages ruraux (ZRR, ZoRCoMir et BER) se superposent largement : 77,3 % des communes classées en ZoRCoMiR sont aussi classées en ZRR et, sur les 404 communes classées en BER, 328 sont également classées en ZRR (soit 80 %).
On constate en outre que, pour ces trois zonages, si les exonérations portent sur les mêmes impôts (IR/IS, CFE et TFPB), leurs modalités diffèrent largement en ce qui concerne leur durée, le sens de la délibération de la collectivité, le champ des entreprises bénéficiaires ou encore la nature des opérations économiques visées (voir tableau infra). Cette complexité réduit la lisibilité des règles fiscales et l’effet incitatif à l’installation.
Du point de vue des collectivités, les exonérations facultatives (c’est-à-dire qui sont à leur main) connaissent un succès contrasté, mais globalement assez faible en proportion des communes et EPCI concernés dans les zonages (données 2023) ([215]) :
– en ZDP, aucune commune ni EPCI n’a délibéré pour aller plus loin que l’exonération légale pour la TFPB et la CET ;
– en ZRD, sur 309 communes, 126 ont délibéré sur la TFPB (et 10 EPCI) et 33 sur la CET (et 12 EPCI) ;
– dans les BUD (159 communes couvertes), 111 ont délibéré sur la TFPB (et 7 EPCI) mais aucune sur la CET (10 EPCI) ;
– dans les ZoRCoMiR, 266 communes ont délibéré sur la TFPB (et 17 EPCI), et 54 sur la CET (ainsi que 30 EPCI). Cela apparaît particulièrement faible au regard du nombre de communes concernées (14 105 communes).
– en revanche, dans les AFR et les ZAI-PME, les exonérations facultatives sont plus nombreuses : 3 234 délibérations ont été prises sur la CET par les communes et 2 594 par les EPCI. Ces délibérations portent néanmoins sur des faits générateurs divers (création, extension, reprise ou reconversion d’établissements) et des activités différentes (recherche, informatique, industrie, etc). De nombreuses exonérations ont donc pu être prises par les mêmes collectivités.
Au total, en 2018, seulement 65 460 entreprises avaient bénéficié d’au moins une exonération fiscale liée aux différents zonages, soit moins de 2,3 % des entreprises en France ([216]).
Les montants d’impôts auxquels renoncent ainsi les collectivités en se saisissant des facultés d’allègement de TFPB ou de CET dans les zonages ne sont en revanche pas connus (voir infra sur le coût des dispositifs de zonage pour les administrations publiques).
2. L’efficacité socio‑économique des zonages fiscaux n’est pas établie
L’efficacité des différents zonages a été évaluée, soit en se concentrant sur un seul zonage (notamment les ZRR ([217])) soit en effectuant une étude d’ensemble ([218]). Au total, l’efficacité des zonages sur le développement économique des territoires semble limitée, quand bien même les élus locaux y sont attachés et les considèrent comme la manifestation d’une attention particulière ou d’un soutien de l’État. Les travaux d’évaluation évoqués montrent les éléments suivants :
– d’abord, ces dispositifs sont peu connus des entreprises potentiellement bénéficiaires des exonérations : le non‑recours serait très élevé (selon l’évaluation préalable, seules 7 % des entreprises éligibles à une exonération en ZRR ont formulé une demande) ;
– ensuite, même lorsqu’ils sont connus, leur complexité, leur enchevêtrement et l’absence d’harmonisation des paramètres des exonérations (conditions, durée, etc.) réduit l’effet incitatif qu’ils pourraient susciter pour l’installation des entreprises. Ils constituent un avantage, mais très rarement décisif pour un choix d’implantation ;
– on observe dans les faits une forte attractivité des exonérations pour les activités libérales, alors qu’elles sont facilement transférables et peu créatrices d’emploi. C’est ainsi le secteur de la santé humaine et de l’action sociale qui concentre l’essentiel du bénéfice des exonérations fiscales, bien plus que le commerce ou l’industrie.
Répartition de l’assiette exonérée (tous zonages)
par secteur d’activité (2018)
Source : rapport Les dispositifs zonés de soutien du développement économique ou de l’emploi dans les territoires (juillet 2020), CGEDD, IGA, IGAS et IGF.
Le coût pour les administrations publiques est difficile à évaluer, dans la mesure où il repose en partie sur les collectivités locales et que les données manquent à ce sujet. Hors exonérations sur délibération des collectivités, les exonérations zonées étudiées par la mission interministérielle de 2020 représentent en 2018 pour l’État (exonérations d’impôts nationaux, de cotisations sociales et d’impôts locaux compensées) un effort financier de 619 millions d’euros, dont 179 millions d’euros d’exonérations de cotisations sociales.
La mission relève que les ZRR et les ZFU concentrent près de 90 % de l’effort financier mesuré.
Les activités soumises aux bénéfices non commerciaux (BNC), en particulier relatives à la santé humaine, sont donc les principales bénéficiaires des exonérations zonées d’impôt sur les bénéfices. Au total, les exonérations zonées constituent « un levier d’action par défaut, faute d’une alternative plus efficiente, et n’exercent pas d’effet d’entraînement sur les stratégies territoriales de développement économique » ([219]).
Le tableau suivant fait le point sur l’étendue des zonages, les exonérations prévues, le coût budgétaire lorsqu’il est connu, et sur l’efficacité du zonage lorsqu’elle a été évaluée.
II. Le dispositif proposé
Le présent article proroge jusqu’au 30 juin 2024 trois zonages ciblant les territoires ruraux (les ZRR, les BER et les ZoRCoMiR), et les fusionne à partir du 1er juillet 2024 dans un nouveau zonage unique dénommé « France Ruralités Revitalisation » (FRR), décliné en deux niveaux (un niveau « socle » construit en fonction du revenu et de la densité de population, et un niveau renforcé FRR « plus » ciblant les communes les plus vulnérables).
En deuxième lieu, le présent article définit les conditions de classement dans ce nouveau zonage à double niveau, et prévoit des conditions harmonisées d’exonération d’impôt sur les bénéfices (IR et IS) et d’impôts locaux fonciers (TFPB et CFE).
En troisième lieu, il proroge en 2024 les zonages en faveur de la politique de la ville (ZFU-TE et QPV), jusqu’en 2026 des zonages de soutien aux territoires en reconversion (BUD, ZDP et ZRCV) et jusqu’en 2027 les zonages qui s’inscrivent dans un cadre européen (ZAFR et ZAIPME).
1. Un nouveau zonage étendu qui vise les territoires ruraux vulnérables à compter de 2024
a. La FRR « socle » regroupera 14 000 communes caractérisées notamment par une densité et un revenu faibles
Les 5° et 6° du I du présent article créent les zones « France Ruralités Revitalisation » – FRR.
Les critères de classement en FRR sont de plusieurs ordres : ils s’appuient sur la densité de population, le revenu des habitants et l’évolution démographique. L’échelon de référence peut être l’EPCI, le bassin de vie ([220]) ou la commune.
En premier lieu, sont classées les communes qui appartiennent à un EPCI à la densité et au revenu faibles :
– la densité de population de l’EPCI est inférieure ou égale à la densité médiane nationale des EPCI ([221]) ;
– le revenu par unité de consommation médian est inférieur ou égal au 35e centile des revenus médians par EPCI.
Ces critères reprennent largement les critères rénovés de la ZRR, à savoir densité et revenu sur une maille intercommunale (voir le tableau plus bas de comparaison des anciens zonages ruraux avec le zonage FRR et FRR+).
En deuxième lieu, le préfet de région, « lorsque l’intérêt général le justifie », peut proposer au ministre chargé des collectivités territoriales le classement à titre complémentaire de l’ensemble des communes qui appartiennent à un bassin de vie qui satisfait aux mêmes critères de densité et de revenu faibles par rapport aux autres bassins de vie ([222]).
Le préfet propose la liste des communes concernées par arrêté, selon un calendrier et des modalités à définir par décret. Un arrêté des ministres chargés des collectivités et du budget détermine ensuite le classement.
En troisième lieu, sont également classées en FRR les communes métropolitaines situées dans un département dont la densité de population est inférieure au tiers de la densité moyenne française (35 habitants par kilomètre carré) et dont la population a diminué de plus de 4 % sur la période 1999-2019. Sont ainsi d’office classés l’intégralité des communes de six départements : Haute‑Marne, Nièvre, Creuse, Indre, Meuse et Cantal (selon l’évaluation préalable).
Enfin, sont classées dans le zonage les communes de Guyane, ainsi que celles de La Réunion comprises dans la zone spéciale d’action rurale ([223]) délimitée par décret.
b. La FRR « plus » identifie 4 000 communes particulièrement fragilisées au sein du socle
Selon l’évaluation préalable, le périmètre FRR+ porte sur environ 4 000 communes (identifiées parmi les 14 000 communes du socle) « caractérisées par une forte déprise démographique et économique, justifiant une intervention renforcée de la part de l’État. »
Seront classées en FRR+ les communes membres d’un EPCI confronté sur une période d’au moins dix ans à des difficultés particulières, appréciées en fonction d’un indice synthétique. Cet indice composite traduira, selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, la vulnérabilité d’un territoire à partir de trois variables : l’évolution de la population, du revenu médian et du taux d’emploi dans les EPCI concernés.
Les communes de FFR seront classées en fonction de cet indice en ordre décroissant. Les communes qui intègrent la FRR+ sont celles du premier quart du classement en fonction de l’indice (donc celles qui sont le plus en difficulté).
Le zonage en FFR et en FFR+ est établi par arrêté des ministres chargés des collectivités et du budget, et révisé tous les 6 ans, sur la base des données de l’Insee.
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2. Les zones FRR et FRR+ ouvriront des conditions harmonisées d’exonérations fiscales pour les entreprises
a. Les entreprises qui s’implantent en FRR et FRR+ bénéficieront d’allègements d’impôts sur les bénéfices
Les entreprises créées dans une FRR entre le 1er juillet 2024 et le 31 décembre 2029 et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale, ou professionnelle non commerciale (ce qui inclut notamment les activités libérales) ([224]) bénéficient d’exonérations d’impôt pour leurs bénéfices (IR ou IS) réalisés dans la zone.
L’exonération s’applique pour cinq ans à compter de l’année qui suit la création de l’établissement. À l’issue de la période d’exonération, l’entreprise bénéficie d’une entrée progressive dans l’impôt : sa base imposable fait l’objet d’un abattement égal à 75 % la première année, 50 % la deuxième et 25 % la troisième. À partir de la quatrième année suivant la période d’exonération, elle paie l’impôt normalement.
Cette durée d’exonération totale et d’entrée progressive des bénéfices dans l’impôt reprend le régime existant pour les ZRR.
Pour bénéficier des exonérations, les entreprises doivent être implantées dans les zones FRR ou FRR+.
Le dispositif vise les micros entrepreneurs et les petites et moyennes entreprises ([225]). Le siège social de l’entreprise ainsi que l’ensemble de son activité et de ses moyens d’exploitation doivent être implantés dans la zone. Le champ est donc substantiellement étendu par rapport aux ZRR ou aux ZoRCoMiR qui visent les entreprises de moins de 11 salariés (une PME peut compter jusqu’à 249 employés).
S’il s’agit d’une activité « non sédentaire », il faut que la part de cette activité réalisée en dehors de la zone soit d’au plus 25 % du chiffre d’affaires de cette activité. Au-delà de 25 %, les bénéfices sont soumis à l’IS ou à l’IR dans les conditions de droit commun en proportion du chiffre d’affaires réalisé en dehors des zones. Cette condition de chiffre d’affaires s’apprécie par exercice.
Comme pour les zonages actuels, le bénéfice des exonérations est subordonné au respect du règlement relatif aux aides d’État de faible montant (de minimis) ([226]).
Comme pour les entreprises dont la commune d’implantation sort de ZRR, les exonérations restent applicables pour leur durée restant à courir lorsque la commune d’implantation de l’activité sort de la liste des communes classées en zone FRR ou FRR+.
b. Les FRR+ ouvriront droit à des allègements renforcés : elles visent les créations d’activités
Les communes de FRR+ sont distinguées parmi les communes de FRR : elles bénéficient par construction de tous les allègements fiscaux prévus en FRR.
Comme le précise l’évaluation préalable, dans ces zones particulièrement en difficulté, « l’objectif ne serait pas seulement de favoriser le développement économique, mais également d’assurer la pérennité des entreprises déjà installées ».
Pour cette raison, les exonérations sont ouvertes non seulement aux créations d’entreprises, mais aussi aux créations d’activités (industrielles, commerciales, artisanales ou professionnelles non commerciales) ainsi qu’aux reprises d’entreprises en difficulté. Le champ des exonérations est donc plus étendu, car une entreprise déjà créée peut créer une nouvelle activité dans la zone (par exemple par un transfert d’activité). En FRR+, cette création d’activité ou la reprise d’entreprise en difficulté pourra donc être exonérée (d’IR ou d’IS, mais aussi, selon les délibérations locales, de CFE et de TFPB, voir infra). S’agissant des reprises d’entreprises en difficulté, on note que si elles étaient incluses pour les exonérations dans les ZRR, elles ne le seront que dans les zones FRR+ (et pas FRR « socle »).
En revanche, l’évaluation préalable précise que, tant en FRR qu’en FRR+, les exonérations s’appliquent aux filiales et aux franchises, cette question ayant pu nourrir des contentieux et débats juridiques en ce qui concerne les zonages actuels.
c. Les collectivités du bloc communal classées en FRR et FRR+ pourront également exonérer de TFPB et de CFE les entreprises bénéficiaires des exonérations sur les bénéfices
Les communes et EPCI à fiscalité propre peuvent exonérer de CFE les établissements exerçant une activité (même champ d’activités que pour les bénéfices) dans une FRR (32° du I).
Les communes et EPCI à fiscalité propre peuvent en outre exonérer de TFPB les immeubles situés en FRR et rattachés à un établissement qui remplit les conditions pour bénéficier de l’exonération de CFE (20° du I).
En FRR+, ces exonérations peuvent en outre être étendues aux extensions d’établissements (c’est-à-dire toute variation positive de la valeur locative) ([227]) réalisées jusqu’au 31 décembre 2029.
Les modalités d’exonération sont alignées sur celles prévues pour les bénéfices : exonération pendant cinq ans, suivie d’un abattement sur la base nette taxable qui permet une entrée progressive de l’assiette (ici, foncière, à partir de la valeur locative cadastrale) dans l’impôt (75 % d’abattement de la base nette imposable la première année, puis 50 % la deuxième et 25 % la troisième). Pour la CFE, l’exonération s’applique à compter de l’année qui suit la création, ou de la deuxième année qui suit l’extension de l’établissement (une extension d’établissement n’étant pas imposable à la CFE la première année). L’exonération de TFPB cesse de s’appliquer l’année suivant celle où les immeubles ne sont plus affectés à une activité exonérée.
Le redevable doit adresser la demande d’exonération de CFE et transmettre les éléments d’identification des immeubles concernés par l’exonération de TFPB au service des impôts dans les délais pour bénéficier de l’exonération ([228]). Pour les années suivantes, une déclaration n’est nécessaire qu’en cas de modification d’un élément quelconque servant à l’établissement de l’exonération.
Pour une application dès le 1er juillet 2024 des exonérations de TFPB et de CFE, les délibérations devront être prises dans les 90 jours suivant la publication de l’arrêté fixant la liste des communes classées en zone FRR.
Les exonérations de fiscalité locale prises par les collectivités dans les ZRR continueront à s’appliquer pour leur durée restant à courir (E du XXI).
d. Des dispositions anti-abus
De manière habituelle concernant les exonérations zonées, le 6° du I et le 20° du I prévoient que les exonérations applicables dans les zones FRR et FRR+ sont exclusives de celles prévues dans les autres dispositifs zonés.
Si l’établissement ou l’immeuble est éligible à l’un de ces régimes, et à celui en FRR (et FRR+), et qu’il souhaite bénéficier de ce dernier, l’entreprise doit exercer un droit d’option en ce sens. Ce dernier est irrévocable et emporte renonciation définitive aux autres régimes. À défaut d’option, le redevable continue de bénéficier de l’application du régime dont il bénéficiait avant l’institution de l’exonération propre aux FRR et FRR+. Ce droit d’option s’applique symétriquement aux autres dispositifs d’exonérations zonées.
Une « clause anti‑délocalisation » est prévue, comme elle existe actuellement en ZRR : une entreprise qui cesse volontairement son activité dans une zone FRR (c’est-à-dire un abandon qui n’est pas dû à une force majeure) en délocalisant (c’est-à-dire un transfert physique) cette activité moins de cinq ans après avoir bénéficié pour la première fois de l’exonération d’impôt sur les bénéfices, devra s’acquitter du montant correspondant aux exonérations d’impôts dont elle a bénéficié, dès l’année de la délocalisation.
Une « clause anti-abus » prévoit qu’une même personne ne peut pas bénéficier deux fois du dispositif d’exonération, y compris si elle change simplement de structure juridique (sauf pour la durée restant éventuellement à courir). En effet les exonérations ne s’appliquent pas aux activités qui bénéficient ou ont bénéficié, au titre d’une ou plusieurs des cinq années précédant la création dans la FRR, d’une exonération sur les bénéfices liée à un zonage (ZFU, BER, ZRD, ZFANG ([229]), ZRR, BUD, ZDP) ou d’une prime d’aménagement du territoire (versée dans les ZAFR).
L’entrée en vigueur des zones FRR et FFR+ intervient le 1er juillet 2024, les ZRR, BER et ZoRCoMiR prenant fin le 30 juin 2024 (4° du I).
3. Les autres zonages, au bénéfice des territoires urbains ou en reconversion, sont prorogés jusqu’en 2026
Les QPV (15° et 29° du I et XX) et les ZFU‑TE (3° du I) sont prorogés en 2024.
Les BUD (7° et 21° du I), les ZDP (8° et 22° du I) et les ZRCV (2° du XIX) sont prorogées jusqu’en 2026.
Les ZAFR et ZAIPME sont prorogées jusqu’en 2027 (1°, 26° et 28° du I).
Les ZRR, y compris pour les communes maintenues dans le zonage au titre des critères antérieurs à la réforme de 2015, sont prorogées jusqu’au 30 juin 2024 (27° du I, XVII, XVIII et E du XXI), tout comme les BER (XV du présent article) et les ZoRCoMiR (1° du XIX) avant la fusion de ces zonages en FRR à compter du 1er juillet 2024.
Le présent article procède à des coordinations pour les références aux zones fusionnées dans d’autres dispositions relatives à la fiscalité des bénéfices (9°, 10°, 11° et 16° du I) ou à la fiscalité locale (12°, 13°, 14° 16°, 17°, 18°, 19°, 23°, 24°, 25°, 30°, 31°, 33°, 34°, 35°, 37° du I).
Les exonérations de cotisations sociales et autre incitations juridiques ou financières associées aux ZRR sont basculées sur les zones FRR (III, IV, V, VI, VII, VIII, IX, X, XI, XII et XIII du présent article). Des coordinations de références sont aussi opérées dans le livre des procédures fiscales (II du présent article), dans la loi de 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire (qui a créé les ZRR – XIV du présent article) et dans la loi « NOTRe » ([230]) (XVI).
III. L’impact budgÉtaire et Économique
1. La réforme est utile pour soutenir l’implantation des entreprises
Cet article propose une réforme des zonages ruraux qui paraît nécessaire pour plusieurs raisons :
– les différents zonages ruraux se recoupent déjà largement, tout en prévoyant des allègements fiscaux dont les modalités diffèrent, sans motif autre que la sédimentation progressive de dispositifs historiquement distincts ;
– la complexité et la superposition de ces zonages entravent l’efficacité de l’action publique en milieu rural, comme en témoigne le faible taux de recours aux allègements fiscaux associés ;
– au total, l’efficacité de ces dispositifs dispersés semble faible selon les évaluations disponibles. Elles constituent un « coup de pouce » appréciable pour certaines entreprises, sans avoir de caractère déclencheur sur une décision d’implantation.
La refonte de ces zonages dans un dispositif unique, bien identifié des communes comme des entreprises, et avec un régime d’exonérations fiscales simplifié et harmonisé est donc opportune. Les entreprises pourront bénéficier d’exonérations similaires sur l’ensemble de leurs impôts commerciaux.
Notamment, l’extension claire des exonérations aux extensions d’activités, et donc aux franchises et aux filiales (contrairement à ce qui existe en ZRR, mais aussi dans les ZAFR, les BUD et les ZDP), manifeste la volonté de soutenir tous les commerces de proximité en milieu rural, quelle que soit la forme d’organisation de l’entreprise. De même, l’extension des entreprises bénéficiaires jusqu’aux PME évite de discriminer en fonction de la taille des entreprises alors que les entreprises moyennes peuvent contribuer fortement à la revitalisation économique d’un territoire rural. Les allègements fiscaux prévus et donc les zones rurales pourront attirer un champ plus vaste d’entreprises.
La simplification des allègements fiscaux devrait améliorer la connaissance et le taux de recours au dispositif par les entreprises.
L’entrée en vigueur au 1er juillet 2024 laisse le temps à l’administration, en concertation avec les territoires, d’établir le classement des communes dans les deux niveaux de zonage, dans le cadre qu’aura fixé la loi.
Le moment venu, il conviendra d’évaluer l’efficacité du dispositif, tant du point de vue des collectivités locales que des entreprises, ceci afin d’ajuster éventuellement ses modalités.
2. La réforme devrait aboutir à un zonage plus souple et plus adapté aux réalités rurales
S’agissant de la baisse du nombre des communes zonées entre les ZRR et le zonage FRR, la différence résultera essentiellement de la sortie du dispositif de communes maintenues en ZRR alors qu’elles ne satisfaisaient plus les critères réformés en 2015 (pour une application depuis 2017). Il n’y aurait pas de sens à retarder encore, sept années après, la mise en place effective de critères modernisés. Le choix d’une maille intercommunale (comme, d’ailleurs, c’était le cas en ZRR) permet en outre de tenir compte de la réalité de l’intégration intercommunale, toutes les communes étant désormais par principe couvertes par une intercommunalité à fiscalité propre. Ensuite, la souplesse laissée au préfet de région est appréciable : sur la base de son appréciation de l’intérêt général et de critères socio‑économiques relatifs aux bassins de vie de la région, il pourra ajouter des communes au zonage à titre complémentaire. Le zonage est donc évolutif et pourra donc suivre finement les réalités locales. En outre, les communes qui ne seraient pas zonées en FRR pourront bénéficier des nombreux zonages prorogés ou d’autres dispositifs de soutien au développement économique.
3. Cette réforme peut être le préalable à une évolution des autres zonages
S’agissant des zonages urbains (QPV et ZFU‑TE), leur prorogation jusqu’en 2024 permet d’attendre la fin de la concertation locale actuellement en cours sur les contrats de ville 2024-2030 pour engager une réforme. Comme le relève l’évaluation préalable, « le manque de cohérence de la géographie prioritaire de la politique de la ville peut s’expliquer par l’existence de deux zonages distincts. »
La prolongation des zonages au bénéfice des territoires en reconversion (BUD, ZDP, ZRCV, ZAFR et ZAIPME) jusqu’en 2026 ou 2027 est également cohérente, dans la mesure où ces régimes s’inscrivent dans des plans d’actions de long terme.
Ainsi, s’agissant des ZRCV, l’année 2026 correspond à l’échéance des programmes « Action cœur de Ville (acte II) » et « Petites villes de demain ». Pour les BUD, 2026 correspond à l’échéance du programme ERBM.
Les ZAFR, avec lesquelles s’articulent les ZAIPME, s’inscrivent dans le cadre européen des lignes directrices relatives aux aides à finalité régionale 2022‑2027. La prorogation de ces zonages jusqu’en 2027 apparaît donc aussi opportune.
Dans l’évaluation préalable, le Gouvernement évalue ainsi le coût pour l’État (donc du fait de l’exonération des bénéfices) de la création des zones FRR et FRR+, et de la prorogation des autres zonages (en millions d’euros) :
Note : cette évaluation est réalisée sur la base des données fiscales au titre de 2021 et tient compte des estimations des coûts par année de création et de reprise.
Le coût d’ensemble s’élèverait ainsi à 2,23 milliards d’euros sur la période 2025‑2037, dont :
– 170 millions d’euros au titre des exonérations fiscales attachées aux ZRR et BER prorogés pour six mois, qui peuvent courir jusqu’à 2032 :
– 1,67 milliard au titre des zones FRR et FRR+ ;
– 170 millions (sur la période 2025‑2032) au titre des dépenses fiscales attachés aux QPV et ZFU‑TE ;
– 10 millions au titre des BUD et ZDP (prorogés pour trois ans) ;
– et 200 millions d’euros pour les exonérations associées aux ZAFR (sur la période 2025-2032).
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Article 8
Aménagement de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée
des entreprises
Résumé du dispositif proposé
Le présent article prévoit la suppression progressive de la CVAE d’ici à 2027, plutôt que 2024. La cotisation minimum est supprimée dès 2024. Le taux de la taxe additionnelle à la CVAE (TA-CVAE), affectée aux chambres consulaires, est ajusté pour neutraliser l’effet de la suppression progressive de la CVAE sur les recettes de ces dernières.
Dernières modifications intervenues
La loi de finances pour 2021 a supprimé la part régionale de CVAE, compensée par l’affectation d’une part dynamique de TVA. Les régions percevaient alors 50 % de la CVAE. En conséquence :
– le taux théorique de CVAE a alors été divisé par deux, de 1,5 % à 0,75 %, ainsi que le taux effectif calculé à partir d’un barème en fonction du chiffre d’affaires et qui correspond à la CVAE réellement supportée par les entreprises ;
– la CVAE minimum, le dégrèvement complémentaire et le seuil d’assujettissement aux acomptes ont été réduits de moitié ;
– le plafonnement de la contribution économique territoriale – CET (composée de la CVAE et de la cotisation foncière des entreprises – CFE) en fonction de la valeur ajoutée (PVA), qui ouvre droit à un dégrèvement de CFE par l’État lorsque la CET excède ce plafond, a été abaissé de 3 % à 2 % de la valeur ajoutée afin d’éviter une neutralisation partielle de la baisse de la CVAE ;
– le taux de la TA‑CVAE a été doublé de 1,73 % à 3,46 % afin de ne pas grever les ressources de CCI France et du réseau consulaire.
Cette réforme a allégé la charge fiscale de plus d’un demi-million d’entreprises à hauteur de 7,2 milliards d’euros. Pour l’État, le coût budgétaire supporté s’est établi en rythme de croisière à 5,5 milliards d’euros par an.
Elle a par ailleurs permis aux régions d’éviter la baisse de CVAE liée à la crise sanitaire, en 2021 ou en 2022, tout en bénéficiant avec la TVA d’une recette au rendement plus dynamique et prévisible.
La loi de finances pour 2023 a prévu la suppression des parts communales ou intercommunales et départementales de la CVAE (environ 10 milliards d’euros au total) en deux ans :
– en 2023, le taux de la CVAE est divisé par deux et le produit restant est transféré à l’État, les collectivités étant immédiatement compensées par des fractions de TVA ;
– en 2024, il était prévu de supprimer entièrement la CVAE.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission des finances a adopté deux amendements identiques, avec l’avis favorable du rapporteur général, visant à inscrire dans les modalités de compensation de la CVAE une garantie de TVA « socle » pour les départements (en cas de baisse de la TVA liée à la conjoncture économique). Cette garantie avait été incidemment supprimée dans la loi de finances pour 2023.
La commission des finances a adopté l’article ainsi amendé. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. L’État du droit : l’achÈvement de la suppression progressive de la cvae en 2024
La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) constitue, avec la cotisation foncière des entreprises (CFE), la contribution économique territoriale (CET) qui a partiellement remplacé la taxe professionnelle à compter de 2010.
La CVAE est due par les entreprises situées dans le champ de la CFE et dont le chiffre d’affaires est supérieur à 152 500 euros. L’assiette est la valeur ajoutée fiscale.
Son produit était à l’origine partagé entre le bloc communal (essentiellement les EPCI) ([231]), les départements et les régions.
La CVAE est due par les entreprises indépendamment du caractère bénéficiaire ou déficitaire de leur exercice, à l’image d’autres impôts de production. Elle est donc considérée comme un impôt davantage nocif pour l’économie que les impôts sur les bénéfices comme l’impôt sur les sociétés (IS).
La loi de finances pour 2021 a supprimé la part régionale de CVAE (50 % du produit total). En compensation, les régions ont bénéficié en 2021 d’une fraction de TVA égale à la CVAE qu’elles avaient perçue en 2020 et, à compter de 2022, cette fraction de TVA suit la dynamique nationale. En conséquence, le taux légal a été divisé par deux et est passé de 1,5 % à 0,75 %. À noter que la substitution de TVA à la CVAE régionale a permis aux régions « d’enjamber » la baisse du rendement de la CVAE liée à la crise sanitaire (– 1 % en 2021 et – 3,5 % en 2022). En outre, la TVA est une ressource plus stable et plus dynamique que la CVAE (+ 8,6 % en 2022).
La loi de finances pour 2023 a ensuite engagé la suppression progressive sur deux ans (2023 et 2024) de la part restante de la CVAE affectée au bloc communal et aux départements :
– dès 2023, les collectivités territoriales cessent de percevoir la CVAE, et reçoivent en compensation des fractions de TVA. Le taux de la CVAE a été à nouveau divisé par deux en 2023 (à 0,375 %). L’État perçoit la CVAE en extinction (comme pour la taxe d’habitation, dont la suppression a été progressive à compter de 2020 et complète en 2023) ([232]).
– en 2024, il est prévu la suppression complète de cet impôt.
Pour le bloc communal comme les départements, le « socle » (hors dynamique) de la compensation en TVA est calculé sur une moyenne des années 2020 à 2023 ([233]). L’inclusion de l’année 2023 (le produit de CVAE qui aurait dû être perçu par les collectivités locales en l’absence de réforme) permet de tirer à la hausse le produit historique à compenser.
Avec la dynamique de la TVA en 2023, ces modalités de compensation permettent de garantir aux collectivités un niveau de compensation en hausse de 13,6 % par rapport à la ressource de CVAE dont elles ont bénéficié en 2022. En 2023, les départements devraient ainsi percevoir 4,9 milliards d’euros de compensation, et le bloc communal 5,5 milliards d’euros (10,4 milliards d’euros au total) ([234]).
Il résulte donc de cette compensation une augmentation de la « ressource CVAE » de près de 12 % pour les collectivités territoriales, en même temps qu’un allègement substantiel de la fiscalité de production pour les entreprises.
S’agissant de la dynamique de la compensation de TVA, pour les départements, elle suit les mêmes modalités que pour les régions, c’est-à-dire qu’elle reflète la dynamique annuelle de cet impôt au niveau national.
Pour le bloc communal, il est prévu de « territorialiser » la dynamique en l’affectant à un « Fonds national d’attractivité économique des territoires » (FNAET) dont les modalités de répartition ont été fixées par décret ([235]), mais seulement pour l’année 2023. Pour cet exercice, la dynamique (322 millions d’euros, dont 317 millions pour les EPCI et 6 millions pour les communes) est répartie sur la base des données déclarées en 2022 par les entreprises au titre de la CVAE ([236]), ce qui constitue une solution transitoire, la CVAE ayant vocation à être supprimée.
Pour les années suivantes, les critères retenus doivent permettre de conserver un lien entre le produit perçu et les politiques locales en faveur des investissements des entreprises. Sur ce point, un rapport gouvernemental ([237]) préconise un dispositif en deux temps :
– une période intermédiaire en 2024, pour avancer dans la réflexion, avec une répartition selon les critères actuels, actualisés sur la base des déclarations d’effectifs des entreprises ;
– à partir de 2025 ou 2026, l’utilisation de nouveaux critères à l’issue de travaux complémentaires à mener avec les associations de collectivités.
II. Le dispositif proposÉ : un Échelonnement de la suppression de la CVAE sur quatre annÉes jusqu’À 2027
Le présent article propose d’échelonner sur quatre années la suppression de la CVAE, avec une suppression complète en 2027.
Le taux de la CVAE (0,375 % en 2023) est abaissé à 0,28 % en 2024, 0,19 % en 2025 et 0,09 % en 2026 (1° du B du présent article) et la CVAE est supprimée en 2027 ([238]).
Le taux du plafonnement de la contribution économique territoriale (CET) en fonction de la valeur ajoutée est également abaissé progressivement sur quatre ans, suivant la baisse de la CVAE. Pour mémoire, ce plafonnement vise à éviter qu’une entreprise dégageant une faible valeur ajoutée (payant donc une faible CVAE) mais disposant pour son activité de biens immobiliers à forte valeur locative (payant donc une forte CFE) acquitte au total une CET jugée excessive. Ce plafonnement s’impute sur la CFE ([239]) et consiste en un dégrèvement pris en charge par l’État (1 049 millions d’euros en 2022). La loi de finances pour 2021 l’avait abaissé de 3 % à 2 % de la valeur ajoutée (en cohérence avec la suppression de la CVAE régionale, pour éviter que la baisse de la CVAE soit en tout ou partie neutralisée pour les entreprises bénéficiaires du plafonnement par une hausse corrélative de CFE). En cohérence avec la suppression des parts de CVAE du bloc communal et des départements, la loi de finances pour 2023 l’a à nouveau abaissé à 1,625 % en 2023. Le taux cible de 1,25 % qui devait s’appliquer en 2024 avec la suppression complète de CVAE sera donc atteint en 2027 (A du III).
La cotisation minimum (qui était variable selon le chiffre d’affaires) est en revanche supprimée dès 2024 (la CVAE n’est plus due quand elle est inférieure à 63 euros), ce qui exonère de CVAE dès 2024 environ 300 000 entreprises, selon l’exposé des motifs de l’article (C du I).
Le taux de la taxe additionnelle à la CVAE (TA-CVAE), affectée à CCI France, est augmenté progressivement sur les quatre prochaines années (de 6,92 % en 2023 à 27,68 % en 2026, E du I). La TA-CVAE est en effet assise sur la cotisation de CVAE. L’augmentation annuelle du taux jusqu’à l’extinction de la CVAE devrait neutraliser les effets de la suppression progressive de la CVAE sur cette taxe additionnelle et maintenir son rendement constant pour le réseau consulaire jusqu’en 2027 (la loi de finances pour 2023 prévoyait initialement que cette recette disparaîtrait avec la CVAE en 2024, la perte, de 245 millions d’euros ([240]), n’étant effective pour CCI France qu’à compter de 2025 compte tenu des modalités de reversement par l’État). Cette recette est donc maintenue pour trois années supplémentaires pour CCI France.
Des coordinations manquantes dans le droit en vigueur sont opérées pour le calcul des attributions de compensation ([241]), pour prendre en compte les fractions de TVA qui succèdent à la CVAE dans les recettes des EPCI (F du I), et pour préciser que la CVAE n’est plus incluse dans les recettes fiscales reversées aux collectivités [242] (II du présent article).
Les B et C procèdent à des coordinations dans la loi de finances pour 2023 et le IV du présent article précise les entrées en vigueur échelonnées.
III. L’impact budgÉtaire et Économique
Cet article reporte échelonne jusqu’en 2027 la suppression de la CVAE qui devait intervenir en 2024 mais ne remet pas en cause la suppression de cet impôt de production qui pénalise l’investissement et la compétitivité des entreprises, notamment industrielles.
L’échelonnement de la suppression permettra une nouvelle baisse de la pression fiscale des entreprises dès 2024. La CVAE restante (qui devrait atteindre environ 3,9 milliards d’euros en 2023) sera ainsi réduite d’un quart chaque année jusqu’en 2027. Selon l’évaluation préalable, le nombre de redevables de la CVAE sera réduit de plus de 50 % dès 2024. Cet échelonnement vise à concilier le soutien à la compétitivité des entreprises avec l’impératif de maîtrise des comptes publics.
Pour l’État, la perte de recettes est ainsi répartie (selon l’évaluation préalable, en milliards d’euros) :
Note : le coût net tient compte de l’impact sur l’IR et l’IS (la CVAE étant déductible du résultat imposable)
La TVA est devenue une ressource essentielle des collectivités ces dernières années, et cette tendance s’accentue en 2024.
Évolution des fractions de TVA versées aux collectivités locales
(en milliards d’euros)
Source : Rapport sur la situation des finances publiques locales annexé au présent projet de loi de finances.
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Article 9
Mécanisme d’encadrement de l’imposition forfaitaire sur les entreprises
de réseaux portant sur les réseaux de télécommunications fixes
Résumé du dispositif proposé
Cet article institue un mécanisme d’encadrement du tarif de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (IFER) qui porte sur les lignes de télécommunications fixes, c’est-à-dire les réseaux cuivre ou fibre (« IFER fixe »), afin de limiter autour d’un plafond fixé à 400 millions d’euros la hausse du rendement anticipée dans le contexte de la migration technologique des lignes cuivre vers les lignes fibre dans les prochaines années et de la fin de l’exonération des lignes fibre.
Il complète le mécanisme de plancher actuel sans le remplacer. Ce système constituera un mécanisme de rappel sur le tarif de l’année suivante qui est diminué en réaction au dépassement du plafond l’année précédente. Ainsi, le produit de l’IFER fixe devrait connaître une augmentation d’une ampleur maîtrisée au delà de 400 millions d’euros, Le tarif est en outre revalorisé annuellement en fonction de l’inflation (après application du plancher ou du nouveau plafond). Au total, ce système garantira de la visibilité aux collectivités territoriales et aux opérateurs, sans entraver les investissements nécessaires pour l’accès de tous au très haut débit et sans entraîner de surcoût pour les consommateurs, tout en permettant aux régions de bénéficier d’un surplus temporaire de recettes annuel sur les prochaines années.
Dernières modifications intervenues
La loi de finances pour 2011 a introduit un mécanisme d’ajustement du tarif pour garantir un produit d’IFER fixe plancher de 400 millions d’euros, afin de tenir compte de la réduction du nombre de lignes cuivre.
La seconde loi de finances rectificative pour 2017 a élargi l’assiette de l’IFER fixe à l’ensemble des réseaux de communications électroniques en fibre optique.
Chaque année, le tarif est revalorisé par arrêté ministériel en fonction de l’inflation prévisionnelle.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission des finances a adopté cet article sans modification. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. L’État du droit
1. L’IFER sur les lignes fixes de télécommunications devait assurer la neutralité économique de la suppression de la taxe professionnelle et a donc été conçue pour un rendement relativement stable
L’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (IFER) comprend 9 composantes, chacune étant associée à une catégorie particulière d’équipements dans certains secteurs liés à l’énergie, au transport ou à la communication. Chaque composante possède sa propre méthode de calcul, avec une contribution qui dépend généralement de la puissance ou d’autres mesures physiques des équipements possédés par l’entreprise.
Le double objectif de cette imposition qui, avec la contribution économique territoriale (CET), a succédé à la taxe professionnelle (TP), était de limiter le gain résultant de la suppression de la TP pour les entreprises de réseau et de continuer à procurer des recettes fiscales aux territoires accueillant ces équipements.
Le produit des IFER, 1,7 milliard d’euros en 2022, représente l’équivalent de 3 % de la fiscalité des entreprises utilisée pour le financement des services publics locaux.
L’article 1599 quater B du CGI soumet à l’IFER le réseau téléphonique classique (les « répartiteurs principaux de la boucle locale cuivre » ([243]), qui servent aussi aux lignes ADSL) et les réseaux de communications électroniques en fibre optique ([244]). Cette imposition porte donc sur les réseaux de télécommunications fixes (une autre composante de l’IFER porte sur les stations radioélectriques, pour les lignes de téléphonie mobile). C’est la première composante de l’IFER en rendement (données 2021).
Rendement des diffÉrentes composantes de l’IFER
(en millions d’euros)
Source : OFGL, DGFiP.
En 2022, le rendement s’est établi à 357,6 millions d’euros (– 11,3 millions d’euros).
C’est par ailleurs la seconde composante en termes d’établissements contributeurs comme le montre le graphique suivant.
Source : OFGL, DGFiP.
L’IFER sur les lignes fixes, ou IFER « fixe », est due par le propriétaire de l’équipement au 1er janvier de l’année d’imposition.
Le produit est affecté intégralement aux régions ([245]). Toutefois, en 2022, l’IFER fixe représente seulement 1,2 % des recettes réelles de fonctionnement (RRF) des régions ([246]).
En 2023, le tarif est de 19,04 euros par ligne en service, quelle que soit la technologie de la ligne (principe de neutralité technologique). Comme pour les autres IFER, il est revalorisé annuellement par arrêté ministériel en fonction de l’inflation prévisionnelle de l’année.
2. La transition technologique en cours vers la fibre optique va entraîner une hausse importante de cet impôt en contradiction avec son objectif initial
L’objectif initial de l’IFER était d’assurer la neutralité économique de la suppression de la taxe professionnelle (TP) pour les entreprises qui exploitent des infrastructures de réseau.
Pour cette raison, pour anticiper l’érosion prévisible du nombre des lignes cuivre (qui deviennent obsolètes) et donc de l’assiette, l’évolution du tarif de l’IFER fixe est encadrée par un mécanisme de « plancher » qui a pour objet de garantir aux régions et à l’opérateur historique du réseau (l’entreprise Orange) un niveau stable de rendement et de prélèvement autour de 400 millions d’euros. Ce système a été introduit en loi de finances pour 2011.
Lorsque le produit perçu au titre de l’IFER fixe est inférieur à 400 millions d’euros, le tarif de l’année suivante est majoré par un coefficient égal au quotient de 400 millions d’euros par le montant perçu.
C’est le tarif ainsi obtenu qui est ensuite revalorisé de l’inflation comme évoqué plus haut.
Ce dispositif doit permettre d’obtenir un rendement proche du plancher tout en respectant le principe de neutralité technologique (tarif unique quelle que soit la technologie de la ligne) alors que le réseau cuivre est progressivement remplacé par la fibre optique. Le tarif a ainsi été multiplié par près de 2,5 depuis 2015.
Parallèlement, afin d’encourager le déploiement de la fibre, les nouveaux réseaux en fibre optique sont exonérés pendant les cinq années qui suivent leur installation.
Il résulte de cet état du droit :
– sur les dernières années, une contraction de l’assiette de l’IFER fixe (migration des lignes cuivre imposées vers des lignes fibre exonérées) et même du rendement, malgré la revalorisation soutenue du tarif par le mécanisme de plancher (depuis 2015, le rendement n’a pas atteint le plancher, car l’assiette se réduit chaque année) ;
– sur les prochaines années, un doublement anticipé du produit de l’IFER fixe. En effet, les lignes fibre récemment installées et exonérées pendant 5 ans vont entrer massivement dans l’assiette à compter de 2026 et se voir appliquer un tarif très élevé (car revalorisé pour assurer le rendement plancher sur l’assiette des lignes cuivre en extinction).
Orange prévoit d’ici à 2030 la fermeture des lignes cuivre. Dans le même temps, 27,2 millions de lignes fibre devraient être imposées, selon l’évaluation préalable.
Rendement passÉ et Évolution attendue du produit de l’IFER fixÉ dans le cadre du mÉcanisme actuel de plancher
Source : évaluation préalable
À droit constant, le produit atteindrait ainsi 795 millions d’euros en 2030 (exposé des motifs du présent article).
II. le Dispositif proposÉ : le plafonnement du rendement annuel de l’IFER fixe
Le présent article propose d’instaurer un mécanisme inversé par rapport au droit existant, à savoir un ajustement annuel du tarif de manière à respecter un plafond de produit fiscal.
Il est prévu que lorsque le produit d’IFER fixe est supérieur à 400 millions d’euros, le tarif est minoré par un coefficient égal au quotient de 400 millions d’euros par le montant de produit perçu.
Note : la formule reste identique, mais s’applique cette fois en cas de produit supérieur à 400 millions d’euros, ce qui aboutit à une minoration du tarif.
Ce montant est ensuite revalorisé comme le taux prévisionnel d’inflation.
Ce mécanisme s’appliquera à compter des impositions dues au titre de 2024.
Il convient de noter que ce dispositif s’ajoute au droit existant qui prévoit le plancher (article 112 de la loi de finances pour 2011) et ne le remplace pas.
Ainsi, tant que le produit n’aura pas à nouveau atteint le plancher, le tarif continuera d’être revalorisé (voir plus bas dans l’impact budgétaire et économique).
III. L’impact budgÉtaire et Économique : une stabilisation du produit de l’IFEr tÉLÉCOM au bÉNÉfice des consommateurs et des rÉgions
Le présent article a pour objet de « contenir les effets de bord de la transition technologique » (évaluation préalable).
Ce dispositif de plafonnement permettra d’éviter :
– une revalorisation excessive du tarif sur des lignes cuivre encore moins nombreuses, ce qui pourrait entraîner une répercussion sur les opérateurs et les consommateurs finals pour les prix d’accès à internet par ce réseau. En effet, comme le rappelle l’évaluation préalable, Orange peut répercuter intégralement une hausse de l’IFER dans les tarifs d’accès à son réseau cuivre ;
– une hausse brutale du produit de l’IFER dans les années à venir, concentrée sur les lignes fibre, qui pourrait désinciter les opérateurs à engager les investissements nécessaires à l’accès au haut débit sur l’ensemble du territoire, ou en renchérir le coût au détriment des collectivités et des consommateurs.
Avec le plafonnement, le rendement devrait malgré tout progresser jusqu’en 2028 (il atteindrait 502 millions d’euros) et assurer des surplus de recettes aux régions par rapport à 2023, sans entraver le bon déploiement de la fibre ni entraîner des surcoûts pour les consommateurs.
Projection des effets de la rÉforme sur le tarif et le rendement
de l’IFER tÉlÉcom
Référence |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
2029 |
2030 |
Nombre d’éléments imposables (millions de lignes) |
21,4 |
18,8 |
16,7 |
15,3 |
14,9 |
16,1 |
19,8 |
23,5 |
27,2 |
Coefficient de majoration pour N+1* |
1,12 |
1,12 |
1,10 |
1,07 |
1,00 |
1,00 |
1,00 |
1,00 |
1,00 |
Tarif IFER (€)** |
16,32 |
19,04 |
21,78 |
24,45 |
26,77 |
27,42 |
28,00 |
28,59 |
29,19 |
IFER (M€) |
357,6 |
358,4 |
363,8 |
373,1 |
398,6 |
440,3 |
553,0 |
670,6 |
794,8 |
Réforme proposée |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
2029 |
2030 |
Coefficient de majoration‑minoration pour N+1* |
1,12 |
1,12 |
1,10 |
1,07 |
1,00 |
0,97 |
0,81 |
0,84 |
0,86 |
Tarif IFER (€)** |
16,32 |
19,04 |
21,78 |
24,45 |
26,77 |
27,42 |
27,08 |
22,47 |
19,32 |
IFER (M€) |
357,6 |
358,4 |
363,8 |
373,1 |
398,6 |
440,3 |
534,8 |
527,1 |
526 |
Source : évaluation préalable
On note que le coefficient demeure un coefficient de majoration en 2024 et 2025, année où le produit devrait à nouveau atteindre le plancher. À compter de 2027, c’est le plafond qui devrait être activé pour limiter la hausse.
*
* *
Article 10
Transposition de la directive (UE) 2020/285 du 18 février 2020
relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée
en ce qui concerne le régime particulier des petites entreprises
Résumé du dispositif et effets principaux
Cet article transpose la directive (UE) 2020/285 du 18 février 2020 relative au système commun de TVA en ce qui concerne le régime particulier des petites entreprises, qui modifie le régime de la franchise de TVA à compter du 1er janvier 2025. Pour ce faire,
– cet article modifie les plafonds applicables pour retenir, notamment, un plafond de 85 000 euros pour la franchise générale pour les livraisons de biens et les prestations de services, qui est le maximum autorisé par la directive ;
– il ouvre la possibilité, pour des assujettis établis dans d’autres États membres de l’UE, de bénéficier de la franchise en France, pourvu que leur chiffre d’affaires dans l’UE n’excède pas 100 000 euros ;
– il adapte les modalités de sortie de la franchise aux dispositions de la directive, en prévoyant que le bénéfice de la franchise est supprimé au 1er janvier de l’année qui suit le dépassement du plafond national, ou immédiatement si ce dépassement excède 10 % de ce plafond. Le dépassement du plafond européen de 100 000 euros entraîne également la perte immédiate du bénéfice de la franchise dans les États membres où l’assujetti n’est pas établi ;
– il prévoit les formalités déclaratives et d’enregistrement qui incomberont aux assujettis établis en France qui souhaitent bénéficier de la franchise dans d’autres États membres ;
– il insère les dispositions relatives au système d’échange de données entre États membres nécessaire à la mise en œuvre de ces dispositions.
Dernières modifications législatives intervenues
En application du VI de l’article 293 B du CGI, un décret n° 2023-422 du 31 mai 2023 a rehaussé les seuils de chiffre d’affaires applicables à la franchise en base de TVA pour les porter :
– de 85 800 à 91 900 euros pour le régime général applicable aux livraisons de biens et aux prestations de services ;
– de 34 400 à 36 800 euros pour le régime applicable aux prestations de services ;
– de 44 500 à 47 700 euros pour le régime spécifique applicable aux avocats, auteurs d’œuvres de l’esprit et artistes-interprètes.
La loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 a prorogé, pour l’année 2022, les plafonds expérimentaux spécifiques instaurés en 2017 pour les assujettis établis en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion, d’un montant de 100 000 euros pour la franchise applicable aux livraisons de biens et aux prestations de services, et de 50 000 euros pour celle applicable aux seules prestations de services. Ces plafonds ne sont plus applicables depuis le 1er janvier 2023.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté cet article sans modification. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. l’État du droit
A. LE RÉgime de franchise en base de TVA
La TVA s’applique en principe aux opérations suivantes effectuées par des assujettis ([247]) :
– les livraisons de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel ;
– les acquisitions intracommunautaires de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre, à certaines conditions ;
– les prestations de services effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel ;
– les importations de biens.
Est considéré comme assujetti quiconque exerce, d’une façon indépendante et quel qu’en soit le lieu, une activité économique, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité. L’activité économique est elle-même définie comme toute activité de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l’exploitation d’un bien meuble corporel ou incorporel en vue d’en retirer des recettes ayant un caractère de permanence ([248]) .
Toutefois, le droit européen prévoit depuis longtemps la faculté, pour les États membres, de créer un régime spécifique de franchise de la TVA pour les petites entreprises, faculté dont la France a usé. Cette franchise consiste, pour les assujettis concernés, à être dispensés de la déclaration et du paiement de la TVA sur les ventes de biens et les prestations de services qu’ils réalisent. Cet avantage a pour corollaire l’impossibilité de déduire la TVA d’amont. Cette franchise a, ainsi, les mêmes effets qu’une exonération de TVA.
1. Le cadre européen
La directive 67/228/CEE du Conseil, du 11 avril 1967, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, prévoyait déjà, à son article 14, que chaque État membre avait la faculté d’appliquer aux petites entreprises, pour lesquelles l’assujettissement au régime normal de la TVA se heurterait à des difficultés, le régime particulier qui s’adapte le mieux aux exigences et possibilités nationales.
Dans sa version en vigueur, la directive européenne sur la TVA ([249]) fixe un régime de franchise pour les livraisons de biens et les prestations de services effectuées par les petites entreprises, dont les règles diffèrent selon la date d’adhésion à l’UE des États membres et la date à laquelle ils ont instauré un tel régime de franchise.
C’est ainsi que les États membres qui ont usé de la faculté prévue à l’article 14 de la directive 67/228/CE précitée pour introduire des franchises ou des atténuations dégressives de la taxe peuvent les maintenir ainsi que leurs modalités d’application, si elles sont conformes au système de la TVA. De plus, il est prévu que ceux qui, au 17 mai 1977, appliquaient une franchise de taxe aux assujettis dont le chiffre d’affaires annuel était inférieur à la contre-valeur en monnaie nationale de 5 000 unités de compte européennes au taux de conversion de ladite date, peuvent l’augmenter jusqu’à 5 000 euros ([250]) .
Les États membres n’ayant pas usé de la faculté prévue à l’article 14 de la directive 67/228/CEE précitée peuvent néanmoins octroyer une franchise de taxe aux assujettis dont le chiffre d’affaires annuel est au maximum égal à 5 000 euros ou à la contre-valeur en monnaie nationale de cette somme ([251]).
Les États membres ayant adhéré après le 1er janvier 1978 peuvent octroyer une franchise de taxe aux assujettis dont le chiffre d’affaires annuel est au maximum égal à la contre-valeur en monnaie nationale d’un montant précisé par la directive pour chaque État ([252]). Par exemple, ce montant est de 10 000 euros pour la Pologne, de 16 000 euros pour l’Estonie, de 29 000 euros pour la Lituanie et de 35 000 euros pour la République tchèque.
L’article 283 de cette directive exclut du bénéfice de ce régime les livraisons de biens et les prestations de services effectuées par un assujetti qui n’est pas établi dans l’État membre duquel la TVA est due.
L’article 288 de la même directive précise les modalités de détermination du chiffre d’affaires qui sert de référence pour l’application du régime de franchise. Celui-ci est constitué par les montants hors TVA suivants :
– le montant des livraisons de biens et des prestations de services, pour autant qu’elles soient imposées ;
– le montant des opérations exonérées avec droit à déduction de la TVA payée au stade antérieur en vertu de l’article 98, paragraphe 2 ([253]) ou de l’article 105 bis ([254]) ;
– le montant des opérations exonérées en vertu des articles 146 à 149 ([255]) et des articles 151, 152 et 153 ([256]) ;
– le montant des opérations immobilières, des opérations financières visées à l’article 135, paragraphe 1, points b) à g) ([257]) et des prestations d’assurance, à moins que ces opérations n’aient le caractère d’opérations accessoires.
Toutefois, les cessions de biens d’investissement corporels ou incorporels de l’entreprise ne sont pas prises en considération pour la détermination du chiffre d’affaires.
La directive précise que les assujettis qui bénéficient de la franchise de taxe n’ont pas le droit de déduire la TVA ni de la faire apparaître sur leurs factures ([258]) et que les assujettis susceptibles de bénéficier de cette franchise peuvent opter soit pour le régime normal d’application de la TVA, soit pour l’application des modalités simplifiées d’application de la TVA prévues par la directive ([259]).
2. Le régime français
Le régime français de franchise en base de TVA figure aux articles 293 B à 293 G du CGI.
a. Entreprises concernées
Il est réservé, au titre d’une année N, aux assujettis établis en France dont le chiffre d’affaires hors taxe de l’année précédente n’excède pas :
– 91 900 euros ou 101 000 euros – à condition, dans ce dernier cas, que le chiffre d’affaires de l’année N – 2 n’excède pas 91 900 euros – s’il s’agit d’assujettis dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement ;
– 36 800 euros ou 39 100 euros – à condition, dans ce dernier cas, que le chiffre d’affaires de l’année N – 2 n’excède pas 36 800 euros – pour les autres activités de prestation de services.
Les entreprises concernées deviennent redevables de la TVA pour les opérations effectuées à compter du premier jour du mois au cours duquel cette limite est dépassée.
Les entreprises susceptibles de bénéficier de la franchise en base peuvent opter pour le paiement de la TVA.
La franchise en base est applicable aux entreprises individuelles et aux associations sans but lucratif qui réalisent des opérations imposables à la TVA.
Lorsqu’un assujetti effectue à la fois des livraisons de biens et prestations de services, la franchise ne lui est applicable que s’il n’a réalisé, au cours de l’année précédente :
– ni un chiffre d’affaires global supérieur à 91 900 euros – ou 101 000 euros, à condition, dans ce dernier cas, que le chiffre d’affaires global de la pénultième année n’excède pas 91 900 euros ;
– ni un chiffre d’affaires afférent à des prestations de services autres que des ventes à consommer sur place et des prestations d’hébergement supérieur à 36 800 euros – ou à 39 100 euros, à condition, dans ce dernier cas, que le chiffre d’affaires de la pénultième année afférent à ces services n’excède pas 36 800 euros.
Comme prévu par le VI de l’article 293 B du CGI, ces seuils sont actualisés tous les ans dans la même proportion que l’évolution triennale de la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu. La dernière revalorisation est intervenue le 3 juin 2023.
Le fait que ces plafonds soient supérieurs à 5 000 euros contrevient-il au droit européen ? Selon le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires de mars 2015 sur le TVA, « bien que ces plafonds excèdent le plafond de 5 000 euros, à actualiser pour maintenir sa valeur réelle, prévu par l’article 286 de la directive TVA, les autorités françaises n’ont pas sollicité de dérogation de la part de la Commission. Des États membres ont cependant obtenu des dérogations pour fixer les plafonds du régime de la franchise en base à des niveaux supérieurs au niveau des plafonds appliqués en France » ([260]) .
On peut rappeler que les plafonds applicables à la franchise ont été dissociés de ceux de la microentreprise à partir de 2018, la loi de finances pour 2018 ayant doublé les plafonds de chiffre d’affaires applicables aux régimes « micro » ([261]) .
La franchise en base est de droit pour les entreprises nouvelles la première année d’activité tant que le plafond de 101 000 euros ou de 39 100 euros, sans ajustement prorata temporis, n’est pas atteint. Il appartient aux entreprises nouvelles qui ne souhaitent pas bénéficier de la franchise en base de l’indiquer au service des impôts dès le début de leur activité.
Pour déterminer si la franchise est applicable aux entreprises nouvelles les années suivant celle de leur création, les limites de 91 900 euros ou 36 800 euros et de 101 000 euros ou 39 100 euros doivent être ajustées au prorata du temps d’exploitation de l’entreprise ou d’exercice de l’activité pendant l’année de création, comme le prévoit le II de l’article 293 D du CGI. L’ajustement prorata temporis du chiffre d’affaires limite est effectué en fonction du nombre de jours d’activité par rapport à 365 ([262]).
b. Opérations concernées
Les assujettis bénéficient de la franchise pour l’ensemble de leurs livraisons de biens et de leurs prestations de services, à l’exception des opérations qui en sont expressément exclues.
La franchise s’applique à l’ensemble des livraisons de biens, qu’elles soient internes ou intracommunautaires : les livraisons faites à destination d’un autre État membre de l’UE par les entreprises bénéficiaires de la franchise en base en France n’ont donc pas à être soumises à la TVA ([263]). Corrélativement, ces opérations ne constituent pas une acquisition intracommunautaire taxable pour l’acquéreur établi dans un autre État membre de l’UE ([264]). En revanche, les effets de la franchise en base ne s’étendent pas aux importations.
Certaines opérations sont expressément exclues du champ de la franchise en base, comme prévu par l’article 293 C du CGI. Cette franchise ne s’applique pas :
– aux opérations relevant du régime simplifié de l’agriculture ([265]) ;
– aux opérations soumises à la TVA sur option ([266]) ;
– aux opérations immobilières soumises à la TVA en application du paragraphe I de l’article 257 du CGI ([267]) ;
– aux livraisons intracommunautaires de moyens de transport neufs.
Sont également exclus du bénéfice de la franchise les redevables qui exercent une activité occulte au sens du deuxième alinéa de l’article L. 169 du livre des procédures fiscales, comme en dispose l’article 293 B du CGI. Une activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n’a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu’il était tenu de souscrire et soit n’a pas fait connaître son activité aux autorités compétentes, soit s’est livré à une activité illicite. Le droit de reprise de l’administration des impôts s’exerce, dans ce cas, jusqu’à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due, au lieu de la troisième année.
Il en est de même de ceux à l’encontre desquels l’administration a dressé un procès-verbal de flagrance fiscale, au titre de l’année ou de l’exercice au cours duquel ce procès-verbal a été établi, comme le prévoit l’article 293 BA du CGI ([268]) .
De plus, comme prévu par l’article 293 E du CGI, les assujettis bénéficiant de la franchise ne peuvent opérer aucune déduction de la TVA, ni faire apparaître la taxe sur leurs factures, notes d’honoraires ou sur tout autre document en tenant lieu. En cas de délivrance d’une facture, d’une note d’honoraires ou de tout autre document en tenant lieu par des assujettis, la facture, la note ou le document doit comporter la mention : « TVA non applicable, article 293 B du CGI ».
c. Appréciation des limites
Les opérations à retenir pour l’appréciation des plafonds de chiffres d’affaires doivent s’entendre hors TVA lorsqu’elles ont été soumises à cette taxe, comme le prévoit l’article 293 D du CGI.
Ces chiffres d’affaires sont constitués par le montant, hors TVA, des livraisons de biens et des prestations de services effectuées au cours de la période de référence, à l’exception des opérations exonérées et des cessions de biens d’investissement corporels ou incorporels mais y compris les opérations immobilières, bancaires, financières et des assurances qui n’ont pas le caractère d’opérations accessoires et les opérations visées au I et aux 1° à 7°, 12° et 14° du II de l’article 262 et à l’article 263 ([269]).
Il convient, en principe, de retenir les livraisons effectuées et les prestations réalisées au cours de l’année civile de référence (année précédente ou pénultième année, le cas échéant) et non les encaissements. Toutefois, les titulaires de revenus non commerciaux doivent retenir les recettes effectivement encaissées, même s’ils ont opté pour la détermination de leur résultat à partir des créances acquises et des dépenses engagées ([270]) .
Pour les opérations taxables sur la marge (ventes d’objets d’occasion, d’œuvres d’art, d’objets de collection ou d’antiquité, agents de voyages), il convient de retenir le montant total du chiffre d'affaires et non la seule marge ([271]) .
Pour les assujettis exploitant personnellement plusieurs établissements, il convient de retenir le montant du chiffre d’affaires global réalisé dans l’ensemble de ces établissements, même si les activités exercées relèvent, pour les unes, des bénéfices industriels et commerciaux et, pour les autres, des bénéfices non commerciaux ([272]) .
d. Option pour le paiement de la TVA
● Intérêt de l’option
La franchise en base a les effets d’une exonération : elle dispense les redevables qui en bénéficient de la déclaration et du paiement de la TVA. Corrélativement, elle les prive de toute possibilité de déduire la TVA grevant leurs acquisitions de biens et services. L’option pour le paiement de la TVA peut précisément leur permettre de récupérer la TVA d’amont, en particulier la taxe grevant leurs investissements.
L’option pour le paiement de la TVA peut ainsi se révéler avantageuse pour les assujettis ayant une clientèle de redevables pouvant récupérer la TVA ainsi que pour ceux ayant une activité d’exportation.
L’option peut également permettre, en cas d’abaissement du chiffre d’affaires au-dessous des limites, d’éviter d’avoir à procéder aux régularisations qu’entraîne la perte de la qualité de redevable ([273]) .
Enfin, les bénéficiaires de la franchise, bien que dispensés du paiement de la TVA, sont en principe exonérés de la taxe sur les salaires. L’option pour le paiement de la TVA reste donc sans incidence sur la taxe sur les salaires.
● Modalités d’exercice de l’option
Les assujettis en droit de bénéficier de la franchise en base peuvent opter à tout moment pour le paiement de la TVA, comme prévu par l’article 293 F du CGI. Cette option prend effet le premier jour du mois au cours duquel elle est déclarée. Elle doit être formulée par écrit auprès du service des impôts du lieu du principal établissement.
Cette option est globale et couvre obligatoirement une période de deux années, y compris celle au cours de laquelle elle est déclarée. Par exemple, une option déclarée le 10 août 2023 produira ses effets à compter du 1er août 2023 et jusqu’au 31 décembre 2024.
Elle est renouvelable par tacite reconduction pour une même durée, sauf dénonciation formulée au plus tard à l’expiration de chaque période. Toutefois, lorsque les assujettis ont obtenu un remboursement de crédit de taxe au cours ou à l’issue d’une période d’option, ils ne peuvent pas, à la fin de cette période, dénoncer l’option ; cette option est donc reconduite de plein droit pour une nouvelle période de deux ans.
Les personnes qui exercent l’option sont soumises à l’ensemble des obligations qui incombent aux redevables de la TVA. Elles relèvent du régime simplifié de déclaration ou, sur option, du régime réel normal ([274]).
Le fait d’indiquer la TVA sur les factures sans avoir formulé d’option expresse pour le paiement de la TVA rend l’assujetti redevable de la taxe sur le fondement du 3 de l’article 283 du CGI, qui dispose que « toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation ». Toutefois, cette mention ne constitue en aucun cas une option expresse. Dès lors, l'assujetti ne peut exercer aucun droit à déduction ([275]).
e. Changement de régime en cas de variation du chiffre d’affaires
● Dépassement des seuils de la franchise
La franchise en base reste applicable l’année suivant celle du franchissement de la limite de 91 900 ou 36 800 euros, à condition que le chiffre d’affaires de ladite année n’excède pas une limite majorée de 101 000 ou 39 100 euros.
Par suite, le franchissement des limites de 91 900 ou 36 800 euros au titre d’une année N entraîne l’obligation d’acquitter la TVA pour l’année N + 2, sauf si le chiffre d’affaires de l’année N + 1 s’abaisse en dessous de ces limites.
Si la limite de 101 000 ou 39 100 euros est franchie, l’exploitant perd le bénéfice de la franchise en base à compter du premier jour du mois au cours duquel intervient ce dépassement.
En cas d’activités mixtes (ventes et prestations de services), la franchise en base demeure applicable au titre des deux premières années de franchissement des limites, à condition que le chiffre d'affaires global n’excède pas 101 000 euros et qu’à l’intérieur de ce plafond le chiffre d’affaires des prestations de services n’excède pas 39 100 euros.
● Abaissement du chiffre d’affaires en deçà des seuils de la franchise
L’abaissement du chiffre d’affaires, pendant une année N, en dessous du seuil de 91 900 ou 36 800 euros rend la franchise applicable de droit à compter du 1er janvier de l’année suivante (N + 1). S’il souhaite rester redevable de la taxe, l’assujetti doit exercer l’option pour le paiement de la TVA avant le 1er février de l’année N + 1.
f. Franchise particulière des avocats, auteurs et artistes-interprètes
● Régime de la franchise particulière
Les avocats, les auteurs et les artistes-interprètes bénéficient d’une franchise particulière à raison de leur activité spécifique. Cette franchise s’applique aux personnes qui ont réalisé au cours de l’année civile précédente un chiffre d’affaires hors taxe n’excédant pas 47 700 euros ([276]) au titre :
– des opérations réalisées par les avocats et les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation dans le cadre de leur activité spécifique réglementée (conseil, assistance, représentation, plaidoirie, notamment) ;
– de la livraison de leurs œuvres et de la cession des droits patrimoniaux qui leur sont reconnus par la loi par les auteurs d’œuvres de l’esprit ;
– de l’exploitation des droits patrimoniaux qui leur sont reconnus par la loi par les artistes-interprètes.
La notion d’auteur d’œuvres de l’esprit est précisée dans l’encadré suivant.
L’auteur d’œuvres de l’esprit et ses droits patrimoniaux
En principe, la qualité d’auteur appartient sauf preuve contraire à celui ou ceux sous le nom de qui l’œuvre est divulguée.
Les œuvres de l’esprit doivent présenter les caractéristiques d’une création artistique et porter l’empreinte de la personnalité de l’artiste. Sous cette condition, l’article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle cite :
1° Les livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques ;
2° Les conférences, allocutions, sermons, plaidoiries et autres œuvres de même nature ;
3° Les œuvres dramatiques ou dramatico-musicales ;
4° Les œuvres chorégraphiques, les numéros et tours de cirque, les pantomimes, dont la mise en œuvre est fixée par écrit ou autrement ;
5° Les compositions musicales avec ou sans paroles ;
6° Les œuvres cinématographiques et autres œuvres consistant dans des séquences animées d’images, sonorisées ou non, dénommées ensemble œuvres audiovisuelles ;
7° Les œuvres de dessin, de peinture, d’architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie ;
8° Les œuvres graphiques et typographiques ;
9° Les œuvres photographiques et celles réalisées à l’aide de techniques analogues à la photographie ;
10° Les œuvres des arts appliqués ;
11° Les illustrations, les cartes géographiques ;
12° Les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture et aux sciences ;
13° Les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire ;
14° Les créations des industries saisonnières de l’habillement et de la parure. Sont réputées industries saisonnières de l’habillement et de la parure les industries qui, en raison des exigences de la mode, renouvellent fréquemment la forme de leurs produits, et notamment la couture, la fourrure, la lingerie, la broderie, la mode, la chaussure, la ganterie, la maroquinerie, la fabrique de tissus de haute nouveauté ou spéciaux à la haute couture, les productions des paruriers et des bottiers et les fabriques de tissus d’ameublement.
L’article L. 112-3 du code de la propriété intellectuelle protège également les auteurs de traductions, d’adaptations, de transformations ou d’arrangements des œuvres de l’esprit, les anthologies ou recueils d’œuvres diverses qui, par le choix et la disposition des matières, constituent des créations intellectuelles.
La question de savoir si une production constitue une « œuvre de l'esprit » a donné lieu à une abondante jurisprudence.
Les droits patrimoniaux reconnus par la loi aux auteurs des œuvres de l’esprit sont le droit de représentation, le droit de reproduction, et le droit à rémunération pour copie privée.
Ces droits sont attachés à l’auteur sa vie durant. À son décès, ils persistent au bénéfice de ses ayants droits pendant l’année civile en cours et les 70 années qui suivent, comme prévu par l’article L. 123-1 du code de la propriété intellectuelle.
Cependant, la franchise en base de TVA ne s’applique qu’aux livraisons d’œuvres désignées aux 1° à 12° de l’article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle et à la cession des droits patrimoniaux qui leur sont reconnus par la loi par les auteurs d’œuvres de l’esprit, à l’exception des architectes. Sont donc exclus du bénéfice de la franchise les logiciels, les créations des industries saisonnières de l’habillement et les œuvres d’architecture ([277]) .
La définition de l’artiste-interprète et celle de ses droits patrimoniaux sont précisées dans l’encadré suivant.
L’artiste-interprète et ses droits patrimoniaux
L’article L. 212-1 du code de la propriété intellectuelle définit l’artiste-interprète ou exécutant, à l’exclusion des figurants, comme la personne qui représente, chante, récite, déclame, joue ou exécute de toute autre manière une œuvre littéraire ou artistique, un numéro de variétés, de cirque ou de marionnettes.
Les droits patrimoniaux reconnus par la loi aux artistes-interprètes sont le droit d’autoriser, le droit à rémunération pour copie privée et le droit à rémunération équitable. Ces droits sont dits « voisins » du droit d’auteur.
La durée de ces droits est de 50 ans (ou de 70 ans lorsque l’interprétation est fixée dans un phonogramme) à compter du 1er janvier de l’année civile suivant celle de la première communication au public de l’interprétation de l’œuvre. Si l’artiste-interprète décède pendant la durée de la protection, les droits reviennent à ses héritiers.
La gestion des droits des artistes-interprètes est, comme celle des droits d’auteur, souvent collective et assurée par des organismes de gestion collective de droits.
La franchise particulière cesse de s’appliquer aux avocats, auteurs et artistes-interprètes dont le chiffre d’affaires hors taxe de l’année en cours dépasse 58 600 euros. Les professionnels concernés deviennent redevables de la TVA pour les opérations effectuées à compter du premier jour du mois au cours duquel le chiffre d’affaires limite est dépassé.
Les avocats, auteurs et artistes-interprètes susceptibles de relever de la franchise spécifique de 47 700 euros peuvent bénéficier pour l’ensemble de leurs opérations de la franchise de droit commun, sous les plafonds de 91 900 et 101 000 euros pour les livraisons de biens et de 36 800 et 39 100 euros pour les prestations de services. Cependant, ces franchises ne peuvent pas se cumuler, comme prévu par l’article 293 G du CGI.
Les ayants droits et les conjoints survivants d’auteurs bénéficient également de la franchise spécifique pour l’exploitation des droits qu’ils détiennent et la livraison des œuvres de leur ascendant ou conjoint décédé sous réserve qu’ils ne les aient pas acquises en vue de la vente ([278]). Les ayants droits des artistes-interprètes bénéficient également de la franchise spécifique ([279]).
● Franchise spéciale de 19 600 euros
Pour les opérations qui ne sont pas couvertes par la franchise particulière, les avocats, auteurs des œuvres de l’esprit et artistes-interprètes bénéficient d’une franchise spéciale lorsque le chiffre d’affaires de l’année précédente réalisé à ce titre n’a pas excédé 19 600 euros. Cette franchise cesse de s’appliquer dès lors que le chiffre d’affaires de l’année en cours a dépassé 23 700 euros.
Le dépassement des limites de la franchise particulière fait perdre automatiquement le bénéfice de la franchise de 19 600 euros, de même que l’option pour la TVA exercée au titre des opérations réglementées - sauf si le montant cumulé des opérations réglementées devenues imposables et des opérations non réglementées est inférieur à 19 600 euros.
En revanche, le dépassement de la limite de 19 600 euros (ou de 23 700 euros) est sans incidence sur l’application de la franchise particulière. Il en est de même en cas d’option pour la TVA au titre des opérations non réglementées.
Le cumul de franchises ne peut pas avoir pour effet d’augmenter les limites de 47 700 et de 58 600 euros de la franchise particulière.
Comme prévu par le VI de l’article 293 B du CGI, ces seuils sont actualisés tous les ans dans la même proportion que l’évolution triennale de la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu. La dernière revalorisation est intervenue le 3 juin 2023.
Le mécanisme de maintien de la franchise l’année suivant le dépassement du chiffre d’affaires limite ne s’applique pas aux assujettis bénéficiant des franchises particulières.
● Régime en cas de pluralité d’activités
En cas de pluralité d’activités, le bénéfice des franchises « avocat », « auteur » ou de la franchise de 19 600 euros s’apprécie distinctement en fonction des chiffres d’affaires respectifs de chaque activité.
En revanche, selon l’administration, si un assujetti cumule l’activité d’auteur et celle d’artiste-interprète, la limite de 47 700 euros s’apprécie toutes opérations confondues, la franchise particulière concernant l'ensemble des opérations ([280]).
Le dépassement de la franchise spécifique pour l’une des deux activités « avocat » ou « auteur » fait perdre automatiquement le bénéfice de la franchise de 19 600 euros pour les opérations qui ne relèvent pas de ces activités ([281]).
L’assujetti qui remplit simultanément les conditions pour bénéficier des franchises « avocat » et « auteur » et qui n’a pas opté pour le paiement de la TVA ne bénéficie d’aucune franchise lorsque le chiffre d’affaires cumulé de ces activités majoré, le cas échéant, du chiffre d’affaires bénéficiant effectivement de la franchise de 19 600 euros excède 67 300 euros l’année précédente ou 82 300 euros l’année en cours ([282]).
Les redevables concernés peuvent, le cas échéant, bénéficier de la franchise de droit commun pour l’ensemble de leurs opérations.
B. Les modifications apportÉes par la directive 2020/285 pour les petites entreprises
Les règles européennes encadrant la franchise de TVA pour les petites entreprises ont été modifiées par la directive (UE) 2020/285 du Conseil du 18 février 2020 modifiant la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne le régime particulier des petites entreprises et le règlement (UE) n° 904/2010 en ce qui concerne la coopération administrative et l’échange d’informations aux fins du contrôle de l’application correcte du régime particulier des petites entreprises ([283]).
La Commission européenne avait annoncé une révision de ces règles dans son Plan d’action sur la TVA, publié le 7 avril 2016 ([284]), en vue d’alléger la charge administrative pour les petites entreprises et de contribuer à la création d’un environnement fiscal propice à leur croissance et au développement des échanges transfrontaliers.
La directive (UE) 2020/285 prévoit, à son article 3, que les mesures de transposition nationales qu’elle appelle doivent être adoptées et publiées par les États membres au plus tard le 31 décembre 2024. Dans tous les cas, les États membres doivent appliquer ces dispositions à partir du 1er janvier 2025.
1. L’harmonisation des plafonds de la franchise en base et l’ouverture de la franchise hors de l’État membre d’établissement
Dans ses considérants, le texte de la directive 2020/285 précitée constate que les dispositions encadrant la franchise de TVA sont obsolètes et font peser une charge administrative excessive sur les petites entreprises pour les respecter ([285]). Le régime actuel ne permet, en effet, d’accorder une franchise qu’aux entreprises établies dans l’État membre dans lequel la TVA est due, ce qui a une incidence négative pour les entreprises non établies dans cet État. La directive vise donc, en premier lieu, à permettre que de petites entreprises établies dans d’autres États membres que celui dans lequel la TVA est due soient également autorisées à bénéficier de la franchise.
C’est ainsi que la directive 2020/285 modifie l’article 284 de la directive 2006/112/CE afin de prévoir que « les seuils fixés par un État membre ne font pas de distinction entre les assujettis qui sont établis sur son territoire et ceux qui ne le sont pas » et que « les États membres qui ont mis en place la franchise octroient également cette franchise pour les livraisons de biens et les prestations de services effectuées sur leur propre territoire par des assujettis établis dans un autre État membre ».
Les plafonds de chiffres d’affaires applicables au régime de la franchise, qui sont aujourd’hui disparates, font l’objet d’une certaine harmonisation. La directive 2006/112/CE est ainsi modifiée afin de prévoir que ces plafonds, dont la fixation demeure à la main des États membres, ne peuvent excéder 85 000 euros – ce qui est inférieur au plafond applicable en France. La directive précise que « les États membres peuvent fixer, sur la base de critères objectifs, des seuils différenciés pour des secteurs d’activité différents » et qu’ils « s’assurent qu’un assujetti qui satisfait aux conditions requises pour bénéficier de plus d’un seuil sectoriel ne puisse faire usage que d’un de ces seuils ».
Il est précisé qu’une vigilance particulière devrait être exercée dans le cas où un assujetti est soumis au régime normal de la TVA dans son État membre d’établissement mais fait usage de la franchise de TVA dans un autre État membre ([286]). En effet, dans cette hypothèse, il convient que la déduction de la taxe payée en amont présente un lien avec des livraisons de biens et prestations de services effectuées par l’assujetti et effectivement taxées. La directive souligne donc que, lorsque l’assujetti acquiert dans son État membre d’établissement des intrants qui interviennent dans des livraisons de biens et des prestations de services effectuées en franchise dans d’autres États membres, il ne devrait pas avoir la possibilité de déduire la TVA en amont.
De plus, la directive constate que le seuil de chiffre d’affaires annuel, qui constitue une condition d’application de la franchise de TVA, se compose uniquement de la valeur combinée des livraisons de biens et des prestations de services effectuées par une petite entreprise dans l’État membre dans lequel la franchise est octroyée. Il en résulte que l’ouverture de la faculté de bénéficier de la franchise dans les États membres autres que celui d’établissement pourrait entraîner des distorsions de concurrence si la franchise s’appliquait indépendamment du chiffre d’affaires global réalisé dans l’UE. Pour éviter ces distorsions, la directive tend à permettre aux seules entreprises dont le chiffre d’affaires annuel dans l’UE est inférieur à un certain seuil de bénéficier de la franchise dans un État membre dans lequel elles ne sont pas établies. L’article 284 de la directive 2006/112/CE est ainsi modifié afin de prévoir que l’octroi de la franchise aux assujettis établis dans un autre État membre n’est autorisé qu’à deux conditions :
– que le chiffre d’affaires annuel dans l’UE de l’assujetti n’excède pas 100 000 euros ;
– et que le montant des livraisons de biens et des prestations de services dans l’État membre dans lequel l’assujetti n’est pas établi n’excède pas le seuil applicable dans cet État membre pour l’octroi de la franchise aux assujettis établis dans cet État membre.
En revanche, la directive permet aux entreprises dont le chiffre d’affaires dans leur État membre d’établissement se situe en dessous du seuil national de continuer à bénéficier de la franchise dans cet État indépendamment de leur chiffre d’affaires dans d’autres États membres, et ce même si leur chiffre d’affaires total dépasse le seuil fixé à l’échelle de l’UE ([287]) .
Enfin, la directive, telle que modifiée par la directive (UE) 2022/542 ([288]), complète l’article 288 de la directive 2006/112/CE, qui fixe la composition du chiffre d’affaires qui sert de référence pour l’application de la franchise, pour y inclure le montant des opérations exonérées en vertu de l’article 138 lorsque l’exonération prévue audit article s’applique ([289]).
2. Les formalités déclaratives et d’enregistrement
La directive 2020/285 souligne qu’« elle ne devrait pas imposer de nouvelles obligations d’immatriculation ou de déclaration aux petites entreprises qui ne font usage de la franchise que dans l’État membre d’établissement » ([290]), conformément à son objectif de simplification.
En revanche, afin de permettre un contrôle efficace de l’application du nouveau régime de franchise, cette directive soutient que les assujettis souhaitant bénéficier de la franchise dans un État membre dans lequel ils ne sont pas établis devraient être tenus d’adresser au préalable une notification à l’État membre dans lequel ils sont établis ; pour des raisons de simplicité, ils ne devraient, cependant, être identifiés par un numéro individuel que dans l’État membre d’établissement ([291]). Une modification de la directive 2006/112/CE est insérée en ce sens, au 3 de son article 284. Il est prévu que les États membres peuvent utiliser le numéro individuel d’identification TVA déjà attribué à l’assujetti ou tout autre numéro.
Il est également précisé, au 4 de la nouvelle rédaction de l’article 284 de la directive 2006/112/CE, que « l’assujetti informe préalablement l’État membre d’établissement, au moyen d’une mise à jour d’une notification préalable, de toute modification des informations fournies précédemment », y compris l’intention de faire usage de la franchise dans un État membre autre que ceux indiqués dans la notification préalable et la décision de cesser d’appliquer le régime de franchise dans un État membre où il n’est pas établi.
Comme prévu par le 5 du même article 284, la franchise s’applique dans l’État dans lequel l’assujetti n’est pas établi :
– à partir de la date à laquelle l’État d’établissement lui communique son numéro individuel d’identification, dans le cas d’une notification préalable ;
– à partir de la date à laquelle l’État d’établissement confirme le numéro à l’assujetti, dans le cas d’une mise à jour d’une notification préalable.
Cette date ne peut être postérieure de plus de 35 jours ouvrables à celle de la réception, par l’État, de la notification préalable ou de sa mise à jour, sauf dans des cas spécifiques, afin d’effectuer des contrôles dans le cadre de la lutte contre la fraude ou l’évasion fiscale.
La cessation prend effet à partir du premier jour du trimestre civil suivant la réception des informations communiquées par l’assujetti ou, lorsque ces informations sont reçues durant le dernier mois d’un trimestre civil, à partir du premier jour du deuxième mois du trimestre civil suivant.
La notification préalable doit comporter au moins les informations suivantes, comme prévu par le nouvel article 284 bis :
– le nom, l’activité, la forme juridique et l’adresse de l’assujetti ;
– le ou les États membres dans lesquels l’assujetti entend faire usage de la franchise ;
– le montant total des livraisons de biens et des prestations de services effectuées dans l’État membre dans lequel l’assujetti est établi et dans chacun des autres États membres durant l’année civile précédente ;
– le montant total des livraisons de biens et des prestations de services effectuées dans l’État membre dans lequel l’assujetti est établi et dans chacun des autres États membres durant l’année civile en cours préalablement à la notification.
En revanche, lorsqu’un assujetti procède à une mise à jour de sa notification préalable afin d’informer son État d’établissement qu’il entend faire usage de la franchise dans un ou des États membres autres que ceux indiqués dans sa notification préalable, il n’est pas tenu de fournir l’ensemble de ces informations, dans la mesure où elles figurent déjà dans les déclarations fournies précédemment en application de l’article 284 ter de la directive 2006/112/CE, inséré par la directive.
En effet, ce nouvel article 284 ter prévoit, à ses paragraphes 1 et 2, qu’un assujetti faisant usage de la franchise dans un État membre dans lequel il n’est pas établi communique à l’État d’établissement, pour chaque trimestre civil, les informations suivantes :
– le numéro individuel d’identification ;
– le montant total des livraisons de biens et des prestations de services effectuées au cours du trimestre civil dans l’État membre d’établissement ;
– le montant total des livraisons de biens et des prestations de services effectuées au cours du trimestre civil dans chacun des États membres autres que l’État membre d’établissement.
L’assujetti est tenu de communiquer ces informations dans le délai d’un mois à compter de la fin de chaque trimestre civil.
De plus, le paragraphe 3 de cet article 284 ter prévoit que, lorsque le seuil de chiffres d’affaires dans l’UE, fixé à 100 000 euros par l’article 284 de la directive, est dépassé, l’assujetti doit en informer son État d’établissement dans un délai de 15 jours ouvrables. Il est également tenu, dans ce cas, de déclarer le montant des livraisons de biens et de prestations de services dans son État d’établissement et dans les autres États membres effectuées entre le début du trimestre civil en cours et la date à laquelle le seuil de chiffre d’affaires annuel dans l’UE a été dépassé.
Le nouvel article 284 quinquies inséré dans la directive 2006/112/CE dispose qu’un assujetti faisant usage de la franchise dans un État membre dans lequel il n’est pas établi n’est pas tenu, pour les livraisons de biens ou prestations de services couvertes par la franchise dans cet État membre :
– ni d’être immatriculé à la TVA ;
– ni de déposer une déclaration de TVA.
Il est également précisé qu’un assujetti faisant usage de la franchise dans l’État membre où il est établi et dans un autre État membre n’est pas tenu, en ce qui concerne les livraisons de biens et les prestations de services couvertes par la franchise dans son État d’établissement, de déposer une déclaration de TVA.
Toutefois, lorsqu’un assujetti ne respecte pas les règles prévues par l’article 284 ter, les États membres peuvent exiger de cet assujetti une immatriculation et une déclaration de TVA.
Le nouvel article 284 sexies de la directive 2006/112/CE fixe certaines modalités de la coordination entre les États membres relative à ce nouveau régime de franchise. Il prévoit que l’État membre d’établissement désactive sans tarder le numéro d’identification mentionné à l’article 284 ou, si l’assujetti continue de faire usage de la franchise dans un autre État membre, adapte sans tarder les informations reçues dans le cadre de la notification préalable ou d’une mise à jour de celle-ci, dans les cas suivants :
– en cas de dépassement du plafond de chiffre d’affaires annuel dans l’UE, fixé à 100 000 euros par l’article 284 ;
– lorsque l’État membre octroyant la franchise a notifié que l’assujetti ne peut pas se prévaloir de la franchise ou que la franchise a cessé de s’appliquer dans cet État membre ;
– si l’assujetti a fait part de sa décision de cesser d’appliquer la franchise ;
– si l’assujetti a fait savoir, ou si l’on peut présumer par d’autres moyens, que ses activités ont pris fin.
3. La sortie du régime de franchise
La directive introduit également des règles relatives à la sortie du régime de franchise, alors que le droit européen n’en contenait pas. Ces règles diffèrent de celles en vigueur en France, malgré des similarités :
– la directive précise les modalités d’application de la franchise dans le temps. Elle affirme ainsi qu’« afin d’empêcher le contournement des règles relatives à la franchise pour les petites entreprises et de préserver l’objectif de cette franchise, un assujetti, qu’il soit ou non établi dans l’État membre qui octroie la franchise, ne devrait pas pouvoir bénéficier de ladite franchise lorsque le seuil national fixé dans cet État membre a été dépassé au cours de l’année civile précédente » et que, « pour les mêmes raisons, un assujetti qui n’est pas établi dans l’État membre qui octroie la franchise ne devrait pas pouvoir bénéficier de ladite franchise lorsque le seuil fixé pour le chiffre d’affaires annuel dans l’Union a été dépassé au cours de l’année civile précédente » ([292]) ;
– elle ménage également une sortie progressive du régime de franchise en autorisant les assujettis dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas le seuil de franchise national de plus d’un pourcentage déterminé à continuer de bénéficier de la franchise pendant une période limitée. Dans la mesure où les seuils peuvent varier d’un État à l’autre, elle laisse aux États membres le choix entre deux pourcentages, pour autant que l’application du pourcentage n’ait pas pour effet de permettre à un assujetti dont le chiffre d’affaires dépasse un montant déterminé de bénéficier de la franchise. En revanche, parce que le seuil de chiffre d’affaires dans l’UE vise à garantir les recettes, la directive estime nécessaire que la franchise cesse de s’appliquer dès la date de dépassement de ce seuil, y compris en cours d’année civile ([293]) .
Le nouvel article 288 bis de la directive 2006/112/CE fixe les modalités de sortie du régime de la franchise. Il est prévu :
– une perte du bénéfice de la franchise pendant une année civile lorsque le plafond national de ce régime a été dépassé par l’assujetti au cours de l’année civile précédente, que l’assujetti soit ou non établi dans l’État membre octroyant la franchise. La directive prévoit que l’État membre qui octroie la franchise peut porter cette durée à deux années civiles ;
– la possibilité, pour les assujettis dépassant, au cours d’une année civile, le plafond national de 10 % au maximum, de continuer à bénéficier de la franchise pendant cette année civile. En revanche, lorsque ce plafond est dépassé de plus de 10 %, il est prévu que le régime de la franchise cesse de s’appliquer à partir de cette date. La directive ménage, toutefois, pour les États membres, la possibilité de fixer un plafond de 25 % ou d’autoriser l’assujetti à continuer de bénéficier de la franchise sans aucun plafond pendant l’année civile au cours de laquelle le seuil est dépassé, pour autant que l’application de ce plafond ou de cette option n’ait pas pour effet d’exonérer un assujetti dont le chiffre d’affaires dans l’État membre octroyant la franchise est supérieur à 100 000 euros ;
– l’impossibilité, pour l’assujetti qui n’est pas établi dans l’État membre octroyant la franchise, de bénéficier de celle-ci lorsque le plafond de chiffre d’affaires annuel dans l’UE, fixé à 100 000 euros, a été dépassé au cours de l’année civile précédente. Lorsque, au cours d’une année civile, ce seuil est dépassé, la franchise cesse de s’appliquer à compter de cette date.
II. le dispositif proposÉ
Le présent article transpose la réforme du régime de la franchise de TVA pour les petites entreprises prévu par la directive (UE) 2020/285 du Conseil du 18 février 2020.
Le I (alinéas 1 à 88) modifie le code général des impôts.
Le II (alinéa 89) modifie le code des impositions sur les biens et services. Il contient une modification de coordination à l’article L. 162-8 de ce code.
Le III (alinéa 90) prévoit une entrée en vigueur de cet article le 1er janvier 2025, conformément à la date d’entrée en vigueur prévue par la directive.
Au sein du I, les 1° à 3° (alinéas 2 à 6) contiennent des modifications de coordination aux articles 231, 262 ter et 285 bis du CGI.
Le a) du 4° (alinéas 8 et 9) complète le II de l’article 286 du même code afin de prévoir que les assujettis bénéficiant d’une franchise de taxe relevant de l’article 293 B bis, c’est-à-dire ceux établis dans un État membre de l’UE autre que la France, sont dispensés des obligations mentionnées aux 1° et 2° du I dudit article 286 lorsqu’ils remplissent, dans l’État membre d’établissement, les obligations prévues par les dispositions transposant, dans cet État membre, les 1 et 2 de l’article 284 ter de la directive 2006/112/CE précitée.
Les obligations mentionnées aux 1 ° et 2° du I de l’article 286 du CGI, qui incombent normalement à toutes les personnes assujetties à la TVA, sont les suivantes :
– celle de souscrire auprès de l’administration, dans les quinze jours du commencement de ses opérations, une déclaration conforme au modèle fourni par celle-ci ;
– celle de fournir, sur un imprimé remis par l’administration, tous renseignements relatifs à son activité professionnelle.
Les 1 et 2 de l’article 284 ter de la directive 2006/112/CE précitée prévoient qu’un assujetti faisant usage de la franchise dans un État membre dans lequel il n’est pas établi communique à l’État d’établissement, pour chaque trimestre civil, les informations suivantes :
– le numéro individuel d’identification ;
– le montant total des livraisons de biens et des prestations de services effectuées au cours du trimestre civil dans l’État membre d’établissement ;
– le montant total des livraisons de biens et des prestations de services effectuées au cours du trimestre civil dans chacun des États membres autres que l’État membre d’établissement.
L’assujetti est tenu de communiquer ces informations dans le délai d’un mois à compter de la fin de chaque trimestre civil.
Il s’agit d’alléger les obligations déclaratives qui pourraient peser sur les petites entreprises établies dans d’autres États membres de l’UE.
Le b) du 4° (alinéa 10) procède à une modification de coordination.
Le 5° (alinéas 11 et 12) complète l’article 286 ter du CGI afin de prévoir l’identification par un numéro individuel de tout assujetti bénéficiant d’une franchise de taxe relevant de l’article 293 B bis, c’est-à-dire tout assujetti bénéficiant de cette franchise alors qu’il est établi dans un État membre de l’UE autre que la France, s’il ne remplit pas, dans son État membre d’établissement, tout ou partie des obligations prévues par les dispositions transposant, dans cet État membre, les 1 et 2 de l’article 284 ter de la directive 2006/112/CE précitée.
Le 6° (alinéas 13 et 14) complètent l’article 287 du CGI afin de prévoir, par exception, que les livraisons de biens et les prestations de services couvertes par les franchises prévues pour les petites entreprises – aussi bien celle, déjà existante, prévue par l’article 293 B du CGI que celle, introduite par le présent article au nouvel article 293 B bis du même code, pour les entreprises établies dans un autre État de l’UE –, ne sont pas indiquées dans la déclaration de TVA que les redevables doivent fournir à l’administration. Néanmoins, il est prévu que cette disposition ne s’applique pas, c’est-à-dire que ces livraisons et prestations doivent bien figurer dans la déclaration de TVA, si l’assujetti bénéficiant d’une franchise ne remplit pas tout ou partie des obligations prévues par les dispositions transposant, dans cet État membre, les 1 et 2 de l’article 284 ter de la directive 2006/112/CE précitée.
Le 7° (alinéa 15) procède à une modification de coordination à l’article 289 B du CGI.
Le 8° (alinéas 16 à 28) insère un nouvel article 293-0 B dans le CGI, au sein de la section consacrée à la franchise de TVA, afin de définir, dans le cadre de ce régime, ce qu’est un assujetti établi en France et ce qu’est un assujetti établi dans un autre État membre de l’UE.
Le I de cet article prévoit qu’est considéré comme un assujetti en France :
– tout assujetti dont le siège de l’activité économique est situé en France ;
– tout assujetti dont le siège de l’activité économique est situé en territoire tiers, qui dispose d’un établissement stable en France et choisit d’être rattaché à la France en application du II de cet article.
Est considéré comme un assujetti établi dans un autre État membre de l’UE :
– tout assujetti dont le siège de l’activité économique est situé dans cet autre État membre ;
– tout assujetti dont le siège de l’activité économique est situé en territoire tiers, qui dispose d’un établissement stable dans cet autre État membre et choisit d’être rattaché à cet État membre conformément aux dispositions transposant, dans cet État membre, la section 2 du chapitre Ier du titre XII de la directive 2006/112/CE, c’est-à-dire les dispositions relatives à la franchise pour les petites entreprises.
Le II de cet article dispose que l’assujetti dont le siège de l’activité économique est situé en territoire tiers et qui dispose d’un établissement stable en France est rattaché à la France lorsque les conditions cumulatives suivantes sont remplies :
1° Il a manifesté auprès de l’administration française, dans les conditions déterminées par décret, l’intention de bénéficier de la franchise mentionnée à l’article 293 B ou, au moyen de la notification prévue à l’article 293 B ter, l’intention de bénéficier de la franchise mentionnée à cet article dans un ou d’autres États membres ;
2° Dans aucun des autres États membres :
a) il ne bénéficie de la franchise prévue par les dispositions transposant le 1 de l’article 284 de la directive 2006/112/CE ;
b) il n’est identifié en application des dispositions transposant le b du 3 du même article 284 de la directive 2006/112/CE, c’est-à-dire aux fins de l’application de la franchise.
L’encadré ci-dessous rappelle les définitions des notions de siège de l’activité économique et d’établissement stable, et leur utilisation pour l’application de la TVA aux prestations de services.
Les notions de siège de l’activité économique et d’établissement stable
Les notions de siège de l’activité économique et d’établissement stable revêtent une grande importance dans l’application des règles de territorialité relatives à la TVA, en particulier s’agissant des prestations de services. Elles ont donné lieu à des contentieux dont ont eu à connaître tant la Cour de justice de l’UE que le Conseil d’État.
Comme le prévoit l’article 259 du CGI, est considéré comme établi en France l’assujetti, prestataire ou preneur, qui a en France le siège de son activité économique ou un établissement stable ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle.
Conformément à l’article 10 du règlement UE/282/2011 du 15 mars 2011 (1), pour l’application des articles 44 et 45 de la directive TVA, le « lieu où l'assujetti a établi le siège de son activité économique » est le lieu où sont exercées les fonctions d’administration centrale de l’entreprise.
Afin de déterminer ce lieu, sont pris en considération le lieu où sont prises les décisions essentielles concernant la gestion générale de l’entreprise, le lieu de son siège statutaire et le lieu où se réunit la direction.
Lorsque ces critères ne permettent pas de déterminer avec certitude le lieu du siège de l’activité économique, le lieu où sont prises les décisions essentielles concernant la gestion générale de l’entreprise est le critère prépondérant. La présence d’une adresse postale ne peut déterminer à elle seule le lieu où l’assujetti a établi le siège de son activité économique. Ces précisions sont tirées de la jurisprudence de la Cour de justice de l’UE (2), qui a été reprise par l’administration (3).
En revanche, des notions telles que le lieu du preneur des prestations ou le lieu d’exploitation ou d’utilisation de ces prestations ne sauraient figurer parmi les facteurs de détermination du siège de l’activité du prestataire (4).
Conformément à la jurisprudence de la CJUE, le point de rattachement le plus utile afin de déterminer le lieu des prestations de services, du point de vue fiscal et, partant, prioritaire, est celui où l’assujetti a établi le siège de son activité économique. La prise en considération d’un autre établissement stable s’impose toutefois dans le cas où le rattachement au siège ne conduit pas à une solution fiscale rationnelle ou crée un conflit avec un autre État membre (5).
Un établissement stable en matière de TVA est caractérisé par un degré suffisant de permanence et une structure apte, du point de vue de l’équipement humain et technique, à rendre possible :
– soit la fourniture par cet établissement d’un service au sens de l’article 259, 2° du CGI (« établissement stable prestataire ») ;
– soit l’utilisation par cet établissement des services qui lui sont rendus au sens de l’article 259, 1° du CGI (« établissement stable preneur »). À cet égard, il n’est pas indispensable que l’établissement stable preneur exerce lui-même une activité économique.
La CJUE a jugé qu'une structure dépourvue de personnel propre ne peut constituer un établissement stable, tant prestataire que preneur (6). Elle a toutefois nuancé cette solution en ce qui concerne la notion d’établissement stable preneur en considérant qu’il n’est pas requis d’un assujetti qu’il détienne des moyens humains ou techniques en propre mais seulement qu’il ait le pouvoir de disposer de ces moyens comme s’ils étaient les siens (par exemple, par des contrats de service ou de location mettant ces moyens à sa disposition et ne pouvant être résiliés à brève échéance) (7).
Il a également été jugé qu’est sans incidence sur la qualification d’établissement stable prestataire la circonstance que les moyens techniques nécessaires à la réalisation de l’activité ne soient pas possédés par l'établissement mais seulement loués ou mis à sa disposition à titre gratuit (8).
Dès lors qu’un assujetti a son siège dans un État, il n’y a pas à rechercher l’existence d’un établissement stable distinct dans ce même État (9).
Enfin, le fait pour un assujetti de disposer d’un numéro d’identification à la TVA en France n’est pas suffisant en soi pour considérer qu’il y dispose d’un établissement stable (10).
(1) Règlement d’exécution (UE) n° 282/2011 du Conseil du 15 mars 2011 portant mesures d’exécution de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée.
(2) CJUE 28 juin 2007, C-73/06.
(3) BOI-TVA-CHAMP-20-50-10, §§ 100 à 120.
(4) CE 28 mai 2014, n° 361413.
(5) CJUE 20 février 1997 C-260/95 ; CJUE 16 octobre 2014, C-605/12 ; CE 17 juin 2015, n° 369100 ; BOI-TVA-CHAMP-20-50-10, § 130.
(6) CJUE 3 juin 2021, C-931/19.
(7) CJUE 7 avril 2022, C-333/20.
(8) CAA Nantes, 11 février 2021, n° 19NT00976 ; CE 22 décembre 2021, n° 451610.
(9) BOI-TVA-CHAMP-20-50-10, § 170.
(10) Article 11 du règlement d’exécution (UE) n° 282/2011 du Conseil du 15 mars 2011 portant mesures d’exécution de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ; BOI-TVA-CHAMP-20-50-10 § 170.
Le 9° (alinéa 29 à 38) modifie l’article 293 B du CGI afin de transposer les nouvelles règles européennes encadrant la franchise de TVA.
● Son I (alinéas 30 et 31) prévoit une franchise générale dispensant les assujettis établis en France du paiement de la TVA pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services lorsqu’ils n’ont pas réalisé en France un chiffre d’affaires excédant les plafonds suivants :
Plafonds de chiffres d’affaires pour l’application de la franchise
en base de tva (en euros) (cas général)
Année d’évaluation |
Chiffre d’affaires national total |
Chiffre d’affaires national afférent aux prestations de services autres que les ventes à consommer sur place et prestations d’hébergement |
Année civile précédente |
85 000 |
37 500 |
Année en cours |
93 500 |
41 250 |
Source : PLF pour 2024.
● Le II (alinéas 32 à 37) prévoit une franchise spécifique dispensant les avocats, les auteurs d’œuvres de l’esprit et les artistes-interprètes assujettis et établis en France du paiement de la TVA lorsqu’ils n’ont pas réalisé en France un chiffre d’affaires excédant les plafonds suivants (alinéas 33 et 33) :
Plafonds de chiffres d’affaires pour l’application de la franchise en base de tva (en euros) (cas des avocats, auteurs et artistes-interprètes)
Année d’évaluation |
Chiffre d’affaires national afférent aux opérations mentionnées au B du II de l’article 293 B du CGI |
Chiffre d’affaires national afférent aux opérations autres que celles mentionnées au B du II de l’article 293 B du CGI |
Année civile précédente |
47 500 |
37 500 |
Année en cours |
52 250 |
41 250 |
Source : PLF pour 2024.
Les opérations mentionnées au B du II de l’article 293 B du CGI sont les suivantes (alinéas 34 à 37) :
– les opérations réalisées par les avocats et les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation, dans le cadre de l’activité définie par la réglementation applicable à leur profession ;
– les livraisons par les auteurs d’œuvres de l’esprit, à l’exception des architectes, de leurs œuvres mentionnées aux 1° à 12° de l’article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle et la cession des droits patrimoniaux qui leur sont reconnus par la loi ;
– les opérations relatives à l’exploitation des droits patrimoniaux qui sont reconnus par la loi aux artistes-interprètes mentionnés à l’article L. 212-1 du code de la propriété intellectuelle.
● Le III (alinéa 38) dispose que l’application de la franchise prend fin, lorsque l’un de ces plafonds de chiffre d’affaires pour les opérations de l’année en cours est dépassé, pour les opérations intervenant à compter de la date de dépassement.
Par rapport au régime actuel, on relève de nombreuses continuités et quelques différences :
– Les grands traits du régime français de franchise en base sont préservés :
▪ Le plafond global de 91 900 euros de chiffre d’affaires est certes abaissé mais le niveau auquel il est porté, 85 000 euros, est le maximum autorisé par le droit européen et demeure proche du plafond français. Le plafond de 36 800 euros applicable aux prestations de services est quant à lui légèrement augmenté, pour atteindre 37 500 euros ;
▪ Des franchises spécifiques pour les prestations de services, d’une part, et pour certaines professions, d’autre part, sont préservées. Le plafond de la franchise applicable aux avocats, aux auteurs d’œuvres de l’esprit et aux artistes-interprètes pour leurs activités caractéristiques demeure presque inchangé, puisqu’il passe de 47 700 à 47 500 euros. La distinction entre un plafond de chiffre d’affaires afférent aux activités caractéristiques de ces professions et celui afférent à leurs autres activités demeure, ainsi que la définition de ces activités, qui reste strictement identique ;
▪ Une sortie progressive du régime est organisée, comme le permet le droit européen. Le Gouvernement a choisi de retenir une tolérance de 10 %. Une tolérance de 25 %, permise par le droit européen, était exclue, dans la mesure où elle aurait conduit à excéder le plafond de 100 000 euros. En revanche, il aurait été possible de retenir l’option consistant à autoriser l’assujetti à continuer de bénéficier de la franchise sans aucun plafond pendant l’année civile au cours de laquelle le seuil est dépassé, pour autant que l’application de cette option n’ait pas pour effet d’exonérer un assujetti dont le chiffre d’affaires en France aurait été supérieur à 100 000 euros.
– Quelques modifications doivent toutefois être relevées :
▪ Le plafond de chiffre d’affaires afférent aux autres activités des avocats, des auteurs d’œuvres de l’esprit et des artistes-interprètes est nettement relevé, puisqu’il passe de 19 600 à 37 500 euros ;
▪ Une simplification est opérée à travers la suppression de toute référence au chiffre d’affaires de la pénultième année, comme prévu par le droit européen. Seuls les chiffres d’affaires de l’année civile précédente et de l’année en cours sont pris en considération pour l’application de la franchise ;
▪ Les modalités de sortie de la franchise sont modifiées ; en effet, les assujettis deviennent aujourd’hui redevables de la TVA à compter du premier jour du mois au cours duquel les plafonds de chiffres d’affaires sont dépassés. Aux termes du PLF, conformément à la directive, la franchise cesse de s’appliquer pour les opérations intervenant à compter de la date de dépassement ;
▪ L’actualisation triennale des plafonds est supprimée, conformément à la directive, qui n’en prévoit pas.
Le 10° (alinéas 39 à 64) insère deux nouveaux articles 293 B bis et 293 B ter dans le CGI.
Le nouvel article 293 B bis (alinéas 40 à 48) fixe les conditions générales d’application, d’entrée et de sortie du régime de franchise de TVA pour les assujettis établis dans un État membre de l’UE autre que la France.
Le I (alinéas 40 à 42) prévoit que le régime de franchise prévu par l’article 293 B est applicable aux assujettis établis dans un État membre de l’UE autre que la France pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services réalisées en France lorsque les conditions suivantes sont cumulativement remplies :
– leur chiffre d’affaires sur le territoire de l’UE n’excède pas 100 000 euros lors de l’année précédente et de l’année en cours ;
– l’assujetti a adressé à son État membre d’établissement une notification préalable ou une mise à jour de celle-ci indiquant qu’il entend faire usage de la franchise en France, selon les formalités prévues par les dispositions transposant, dans cet État, les 3 et 4 de l’article 284 de la directive 2006/112/CE précitée.
Le II (alinéas 43 à 45) fixe les dates de début d’application de la franchise. Selon ses termes, la franchise s’applique à compter :
– si l’assujetti a indiqué faire usage de la franchise en France dans sa notification préalable, de la date de communication à l’assujetti de son numéro individuel d’identification pour la notification préalable dans l’État membre d’établissement par les autorités compétentes de cet État membre, conformément aux dispositions transposant, dans cet État membre, le 5 de l’article 284 de la directive 2006/112/CE précitée ;
– s’il a indiqué à l’occasion d’une mise à jour de la notification préalable, de la date de confirmation à l’assujetti de son numéro individuel d’identification pour la mise à jour de la notification préalable, conformément aux mêmes dispositions.
Le III (alinéas 46 à 48) fixe les dates de fin d’application de la franchise. La franchise cesse de s’appliquer :
– lorsque le plafond de chiffre d’affaires dans l’UE, fixé à 100 000 euros, est dépassé, pour les opérations intervenant à compter de la date de dépassement ;
– à la suite de la demande de l’assujetti adressée aux autorités compétentes de l’État autre que la France dans lequel il est établi, pour les opérations intervenant à compter du premier jour du trimestre civil suivant la réception des informations communiquées par cet assujetti à ces autorités ou, lorsque ces informations sont reçues durant le dernier mois d’un trimestre civil, à partir du premier jour du deuxième mois du trimestre civil suivant.
Ces règles s’entendent sans préjudice du III de l’article 293 B du CGI, qui prévoit la fin de l’application de la franchise lorsque l’un des plafonds de chiffre d’affaires fixés par cet article pour les opérations de l’année en cours est dépassé.
Le nouvel article 293 B ter (alinéas 49 à 64) fixe les formalités déclaratives et d’enregistrement applicables en France pour bénéficier de la franchise dans un autre État membre de l’UE.
Le I de ce nouvel article (alinéas 49 à 51) dispose que, pour bénéficier dans un ou des États membres de l’UE autres que la France du régime de franchise, l’assujetti établi en France, ou souhaitant être rattaché à la France en application du 1° du II de l’article 293-0 B aux fins d’y être établi, adresse une notification préalable à l’administration française. Aux fins de l’application de la franchise, cet assujetti est identifié par un numéro individuel d’identification délivré par l’administration française. L’assujetti doit informer l’administration française, au moyen d’une mise à jour de la notification préalable, de toute modification des informations fournies dans celle-ci, y compris de l’intention de faire usage de la franchise dans un ou des États membres autres que ceux indiqués dans la notification préalable et de la décision de cesser d’appliquer le régime de franchise dans un ou plusieurs de ces États membres.
Le II (alinéa 52) prévoit que l’administration française communique à l’assujetti ce numéro individuel d’identification au plus tard 35 jours ouvrables après la réception de la notification préalable ou de sa mise à jour, sauf dans des cas spécifiques où, pour éviter la fraude ou l’évasion fiscale, elle exige un délai supplémentaire, d’au moins 35 jours ouvrables supplémentaires, pour effectuer les contrôles nécessaires.
Le III (alinéas 53 à 56) fixe les informations que l’assujetti doit communiquer à l’administration française pour chaque trimestre civil :
– son numéro individuel d’identification ;
– le montant total des livraisons de biens et prestations de services effectuées au cours du trimestre civil en France ou un montant nul si aucune livraison ni prestation n’a été effectuée ;
– le montant total des livraisons de biens et prestations de services effectuées au cours du trimestre civil dans chacun des États membres autres que la France ou un montant nul si aucune livraison ni prestation n’a été effectuée, y compris dans les États membres où il ne bénéficie pas du régime de franchise.
L’assujetti doit communiquer ces informations dans un délai d’un mois à compter de la fin du trimestre civil.
Le IV (alinéas 57 et 58) prévoit que l’assujetti informe l’administration française lorsque son chiffre d’affaires dans l’UE dépasse 100 000 euros, dans un délai de quinze jours ouvrables, et qu’il communique le montant les livraisons de biens et prestations de services qui ont été effectuées entre le début du trimestre civil en cours et la date à laquelle le plafond de chiffre d’affaires annuel dans l’UE a été dépassé.
Le V (alinéas 59 à 63) prévoit que l’administration désactive sans délai le numéro individuel d’identification mentionné au I ou, si l’assujetti continue de faire usage du régime de franchise dans un ou plusieurs autres États membres, adapte sans délai les informations qu’il a transmises dans le cadre de la notification préalable ou de ses mises à jour, en ce qui concerne le ou les États membres concernés, dans les cas suivants :
1° le montant total des livraisons de biens et prestations de services déclarés par l’assujetti dépasse 100 000 euros ;
2° l’État membre octroyant la franchise a notifié que l’assujetti ne peut pas se prévaloir de la franchise ou que la franchise a cessé de s’appliquer dans cet État membre ;
3° l’assujetti a fait part à l’administration de sa décision de cesser de faire application du régime de franchise ;
4° l’assujetti a fait savoir, ou l’on peut présumer par d’autres moyens, que ses activités ont pris fin.
Le VI (alinéa 64) prévoit qu’un décret fixe les modalités d’application de cet article.
Le 11° (alinéas 65 à 68) apporte une modification de coordination à l’article 293 BA du CGI. Il tient compte de la suppression, à l’article 293 B, de la disposition excluant du bénéfice de la franchise les redevables qui exercent une activité occulte, en replaçant cette disposition à cet article.
Le 12° (alinéa 69) procède à une modification de coordination à l’article 293 C du CGI.
Le 13° (alinéas 70 à 84) introduit une nouvelle rédaction des articles 293 D et 293e du CGI.
L’article 293 D (alinéas 71 à 81), qui fixe les modalités de calcul du chiffre d’affaires servant de référence pour l’application de la franchise, est modifié de la manière suivante. Certaines opérations exonérées sont incluses dans ce calcul, à savoir :
– le montant des opérations exonérées avec droit à déduction en vertu des 8°, 9° et 10° du II de l’article 262 ([294]) et de l’article 298 undecies ([295]) ;
– le montant des opérations exonérées en vertu de l’article 262-00 bis ([296]) ;
– le montant des opérations exonérées en vertu des 1° et 3° du I de l’article 262 ter ([297]).
La mention des opérations bancaires, financières et des assurances qui n’ont pas le caractère d’opérations accessoires est remplacée par celle des « opérations financières, d’assurance et de réassurances mentionnées aux 1° et 2° de l’article 261 C qui n’ont pas le caractère d’opérations accessoires » ([298]).
De plus, il est précisé que le chiffre d’affaires dans l’UE qui sert de référence pour l’application de l’article 293 ter est le montant total annuel des livraisons de biens et des prestations de services, hors TVA, réalisé sur le territoire de l’UE, et que les chiffres d’affaires réalisés dans les autres États membres de l’UE entrant dans la composition du chiffre d’affaires annuel dans l’UE sont déterminés en application des dispositions transposant dans ces États l’article 288 de la directive 2006/112/CE.
La disposition prévoyant que les plafonds de la franchise sont ajustés au prorata du temps d’exploitation de l’entreprise ou d’exercice de l’activité pendant l’année de référence, est précisée. Le III de l’article 293 D préciserait ainsi que pour l’assujetti débutant son activité en cours d’année, les plafonds de la franchise sont ajustés à proportion de la durée de l’année restant à courir à la date du début d’activité.
L’article 293 E (alinéas 82 à 84) reçoit les modifications appelées par l’ouverture de la franchise aux assujettis établis dans un autre État membre. Il est notamment prévu que les factures, notes d’honoraires ou documents émis par les assujettis bénéficiaires de la franchise doivent comporter la mention de la base légale de cette franchise, à savoir : « TVA non applicable, article 293 B du CGI », « TVA non applicable, article 293 B bis du CGI » ou une autre référence à l’article 284 de la directive 2006/112/CE.
Le 14° (alinéa 85) abroge l’article 293 G du CGI.
Les 15°, 16° et 17° (alinéas 86 à 88) procèdent à des modifications de coordination aux articles 302 bis MB, 1609 sexvicies et 1649 quater B quater du CGI.
III. l’impact administratif et Économique
En termes de recettes fiscales, le présent article pourrait entraîner une baisse du produit de la TVA. En effet, des assujettis établis dans un État membre de l’UE autre que la France seront amenés à ne plus acquitter la TVA sur des opérations aujourd’hui imposées en France. Toutefois, cette diminution pourrait être compensée par l’abaissement du plafond du régime général de franchise et par la suppression de l’indexation des plafonds. De plus, les assujettis devront renoncer à la franchise dès l’année suivant le dépassement des plafonds, alors qu’ils peuvent la conserver une année de plus dans le régime actuel.
En termes économiques, cet article devrait faciliter les échanges intracommunautaires pour les petites entreprises établies dans l’UE et alléger leurs charges administratives.
En termes administratifs, une nouvelle plateforme informatique devra être créée pour permettre les échanges d’informations requis avec les autres États membres de l’UE. Des obligations nouvelles sont créées pour l’administration en termes d’identification et de gestion des demandes des assujettis souhaitant recourir à la franchise dans d’autres États membres.
*
* *
Article 11
Adaptation des tarifs d’accise sur les énergies
Résumé du dispositif et effets principaux
Le présent article reconduit le volet fiscal du bouclier tarifaire sur l’électricité jusqu’au 31 janvier 2025, en maintenant le tarif de l’accise sur l’électricité à 1 euro / MWh pour les ménages (au lieu de 32 euros / MWh) et à 0,50 euro / MWh pour les autres consommateurs (au lieu de 26 euros / MWh pour les PME et de 22,5 euros / MWh pour la haute puissance). Les activités exonérées d’accise ne sont pas concernées.
De plus, il prévoit que le tarif normal de l’accise sur le gaz naturel combustible, qui est de 8,37 euros / MWh, peut être majoré par arrêté du ministre chargé du budget sans pouvoir excéder 16,37 euros / MWh.
Dernières modifications législatives intervenues
Le volet fiscal du bouclier sur les prix de l’électricité a été reconduit par l’article 64 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 pour une année supplémentaire, c’est-à-dire pour les quantités d’électricité fournies jusqu’au 31 janvier 2024. De plus, ce texte a inscrit directement dans la loi le niveau de l’accise ainsi minorée, à savoir 1 euro / MWh pour les consommations relevant de la catégorie fiscale « ménages et assimilés » et 0,50 euro / MWh pour les consommations professionnelles, alors que le dispositif précédent autorisait le Gouvernement à mettre en œuvre, à certaines conditions, une minoration dans la limite d’un plancher. Il a également opéré une montée en puissance du bouclier fiscal, puisque celui-ci a intégré, à compter du 1er janvier 2023, la taxe communale sur la consommation finale d’électricité.
Les tarifs de l’accise sur les énergies, y compris le gaz naturel combustible, ont été recodifiés dans le nouveau code des impositions sur les biens et services par l’ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021 portant partie législative du code des impositions sur les biens et services et transposant diverses normes du droit de l’Union européenne. Ils figuraient auparavant dans le code des douanes.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté cet article sans modification. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. l’État du droit
A. Le bouclier tarifaire sur l’ÉlectricitÉ
1. L’accise sur l’électricité
La fiscalité pesant sur l’électricité repose sur l’essentiel sur une taxe à la consommation longtemps dénommée « taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité » (TICFE), ou encore « contribution au service public de l’électricité » (CSPE) ([299]), et aujourd’hui renommée « fraction de l’accise sur les énergies perçue sur l’électricité » ([300]). Elle est prévue par les articles L. 312-1 à L. 312-107 du code des impositions sur les biens et services. L’article L. 312-37 de ce code fixe les tarifs normaux de cette accise, qui sont reproduits dans le tableau ci-dessous.
tarifs normaux de la fraction de l’accise sur les Énergies perçue sur l’ÉlectricitÉ
Catégorie fiscale |
Tarif (en euros / MWh) à compter du 1er janvier 2023 |
Ménages et assimilés |
32,0625 |
Petites et moyennes entreprises |
25,6875 |
Haute puissance |
22,5 |
Source : article L. 312-37 du code des impositions sur les biens et services.
Une hausse de tarif est intervenue pour les catégories fiscales des ménages et des PME le 1er janvier 2023. Elle s’explique par l’intégration de la taxe communale sur la consommation finale d’électricité (TCCFE) à cette date. Le 1er janvier 2022, la taxe départementale sur la consommation finale d’électricité (TDCFE) avait déjà été intégrée à la TICFE ([301]).
Les catégories fiscales énumérées dans le tableau supra sont définies selon la nature des activités pour les besoins desquelles l’électricité est consommée et la puissance sous laquelle celle-ci est fournie.
catÉgories fiscales de l’ÉlectricitÉ
Catégorie fiscale |
Activités pour les besoins desquelles l’électricité est consommée |
Puissance sous laquelle l’électricité est fournie |
Ménages et assimilés |
Activités non économiques |
Inférieure ou égale à 250 kVA |
Activités économiques |
Inférieure ou égale à 36 kVA |
|
Petites et moyennes entreprises |
Activités économiques |
Supérieure à 36 kVA et inférieure ou égale à 250 kVA |
Haute puissance |
Toutes |
Supérieure à 250 kVA |
Source : article L. 312-24 du code des impositions sur les biens et services.
Toutefois, de nombreuses activités économiques bénéficient de tarifs inférieurs aux tarifs normaux. C’est le cas dans le secteur des transports et dans celui de l’industrie.
Les tarifs réduits applicables dans le secteur des transports sont prévus par l’article L. 312-48 du code des impositions sur les biens et services. Ils sont reproduits dans le tableau ci-dessous.
tarifs rÉduits d’accise sur l’ÉlectricitÉ dans le secteur des transports
Activités |
Tarif réduit (en euros / MWh) |
Transport guidé de personnes et de marchandises |
0,5 |
Transport collectif routier de personnes |
0,5 |
Alimentation à quai des engins flottants utilisés à des fins commerciales ou pour les besoins des autorités publiques |
0,5 |
Production à bord des navires et bateaux |
0 |
Manutention portuaire ([302]) |
0,5 |
Exploitation des aérodromes ouverts à la circulation aérienne publique |
7,5 |
Source : articles L. 312-48, L. 312-50, L. 312-51, L. 312-56, L. 312-57, L. 312-57-2 et L. 312-59 du code des impositions sur les biens et services.
Les tarifs réduits applicables dans le secteur de l’industrie sont prévus par l’article L. 312-64 du code des impositions sur les biens et services. Ils sont reproduits dans le tableau ci-dessous.
tarifs réduits d’accise sur l’ÉlectricitÉ dans le secteur industriel
Activités |
Tarif réduit (en euros / MWh) |
Doubles usages ([303]) |
0 |
Fabrication de produits minéraux non métalliques ([304]) |
0 |
Production de biens très intensive en électricité ([305]) |
0 |
Centres de stockage de données |
12 |
Source : articles L. 312-64, L. 312-66, L. 312-67, L. 312-68 et L. 312-70 du code des impositions sur les biens et services.
Pour certaines activités industrielles, le bénéfice d’un tarif réduit est soumis à la condition d’atteindre un niveau minimal d’électro-intensité et, le cas échéant, selon leur niveau d’électro-intensité.
L’intensité énergétique est définie dans l’encadré ci-dessous.
L’intensité énergétique
La définition et le mode de calcul de l’intensité énergétique sont précisés par les articles L. 312‑43 à L. 312-46 du code des impositions sur les biens et services.
Le niveau d’intensité énergétique peut être calculé en valeur de production ou en valeur ajoutée.
Le niveau d’intensité énergétique en valeur de production s’entend du quotient entre :
● au numérateur, le coût total d’acquisition, toute taxe comprise à l’exception de la TVA déductible, des produits soumis à l’accise sur les énergies et de la chaleur ;
● au dénominateur, le chiffre d’affaires, y compris les subventions directement liées au prix du produit, corrigé de la variation des stocks de produits finis, les travaux en cours et les biens ou les services achetés à des fins de revente, diminué des acquisitions de biens et services destinés à la revente.
Le niveau d’intensité énergétique en valeur ajoutée s’entend du quotient entre :
● au numérateur, le montant total de l’accise sur les produits utilisés, en appliquant le tarif normal ;
● au dénominateur, le chiffre d’affaires total soumis à la TVA diminué de la totalité des achats soumis à la TVA.
Pour la détermination du niveau d’intensité énergétique, seuls sont pris en compte en tant que produits taxables les produits suivants :
– ceux utilisés comme carburant pour les besoins du fonctionnement des moteurs stationnaires ou des installations et machines utilisées dans la construction, le génie civil et les travaux publics ;
– ceux utilisés comme combustible ;
– l’électricité.
Toutefois, ils peuvent être appréciés sur un sous-ensemble restreint de ces produits. Lorsqu’il est apprécié uniquement sur l’électricité, il est dénommé « niveau d’électro-intensité ». Lorsqu’un tarif réduit pour certains produits est conditionné au respect d’un niveau minimum d’intensité énergétique, le périmètre des produits pris en compte pour déterminer le niveau d’intensité énergétique est apprécié indépendamment du périmètre des produits éligibles au tarif réduit.
Les tarifs applicables sont prévus par l’article L. 312-65 du code des impositions sur les biens et services et reproduits dans le tableau ci-dessous.
tarifs rÉduits d’accise sur l’ÉlectricitÉ dans le secteur industriel sous condition d’Électro-intensitÉ
Activités |
Niveau minimal d’électro-intensité |
Tarif réduit (en euros / MWh) |
Entreprises ayant une activité industrielle |
0,5 % |
0 |
Installations industrielles relevant de certains secteurs d’activité exposés à la concurrence internationale |
0,5 % |
12 |
3,375 % |
7,5 |
|
6,75 % |
1 |
|
13,5 % |
0,5 ([306]) |
Source : articles L. 312-65, L. 312-71, L. 312-72 et L. 312-73 du code des impositions sur les biens et services.
Les « entreprises ayant une activité industrielle » sont les industries extractives, de l’industrie manufacturière, de la production et de la distribution d’électricité, de gaz, de vapeur ou d’air conditionné et de la production et de la distribution d’eau, de l’assainissement, de la gestion des déchets et de la dépollution.
Les « installations industrielles relevant de certains secteurs d’activité exposés à la concurrence internationale » appartiennent aux secteurs d’activité suivants :
– extraction de minerais de fer, de minéraux pour l’industrie chimique et d’engrais naturels, ainsi que les activités de soutien à ces activités ;
– métallurgie du fer, de l’aluminium, du cuivre, du plomb, du zinc ou de l’étain, ainsi que la fabrication des tubes, tuyaux et raccords de tubes et tuyaux en ces métaux, des barres, tiges, profilés et fils en plomb et des plaques, feuilles et bandes en zinc ;
– fabrication de produits chimiques de base, organiques et inorganiques, autres que les gaz industriels, les colorants et pigments et l’alcool éthylique dénaturé, à l’exception de l’enrichissement de l’uranium et de la production d’alcool éthylique à partir de matériaux fermentés ;
– fabrication de produits azotés et d’engrais ainsi que la production de compost par traitement et élimination de déchets organiques ;
– fabrication des matières plastiques de base suivantes : polyéthylène à basse densité, à basse densité linéaire et à haute densité, polypropylène, chlorure de polyvinyle et polycarbonate ;
– filature du coton, fabrication de fibres artificielles ou synthétiques et fabrication de vêtements en cuir, ainsi que des vêtements résistants au feu et de protection en cette matière ;
– fabrication de papier, de carton et de pâtes à papier mécaniques.
2. Le bouclier tarifaire
a. La hausse des prix de marché de l’électricité
À partir du printemps 2021, la conjonction d’une demande importante liée à la reprise économique, à la faiblesse des stocks européens et à la croissance de la consommation de gaz naturel liquéfié en Asie, d’une part, et d’une offre contrainte du fait de la saturation des capacités de production en Algérie et en Norvège, d’une baisse de la production de gaz naturel en Europe et des exportations russes, d’autre part, a provoqué une hausse inédite des cours du gaz naturel en Europe.
Bien que le « mix électrique » français soit peu carboné, cette hausse des prix du gaz s’est directement répercutée sur ceux de l’électricité en raison des règles de fonctionnement du marché européen de l’énergie, dans lequel la formation du prix de gros de l’électricité est déterminée par le prix de production de la dernière centrale nécessaire pour satisfaire la demande, qui est, le plus souvent, une centrale à gaz. Le doublement du prix du carbone dans le système européen d’échange de quotas d’émission (SEQE) au cours de l’année 2021 a également contribué à ce renchérissement.
Le prix à terme de l’électricité pour l’année suivante est ainsi passé d’environ 55 euros / MWh en mars 2021 à 90 euros / MWh en septembre, 150 euros / MWh en octobre et plus de 200 euros / MWh en décembre de la même année. Après la mise en place du bouclier tarifaire, ce prix s’est maintenu à un niveau très élevé et a atteint son pic fin août 2022, à plus de 1 000 euros / MWh, avant de se stabiliser autour de 550 euros / MWh. La fin de l’année 2022 et le premier semestre de 2023 ont vu cette baisse se poursuivre. Le prix à terme était d’environ 100 euros / MWh fin juin 2023. Il s’agit, toutefois, de prix à terme, ce qui implique que l’effet de cette baisse relative sur les tarifs de vente aux consommateurs finals est différé.
b. Les tarifs réglementés de vente d’électricité
En France, le prix de détail de l’électricité relève encore majoritairement des tarifs réglementés de vente de l’électricité (TRVe), dits « tarifs bleus », proposés par EDF et les entreprises locales de distribution. Ces tarifs bénéficient aux ménages et aux microentreprises pour leurs sites souscrivant une puissance inférieure ou égale à 36 kVA ([307]).
Aux termes de l’article L. 337-4 du code de l’énergie, la CRE transmet aux ministres chargés de l’économie et de l’énergie ses propositions motivées de TRVe. La décision est réputée acquise en l’absence d’opposition de l’un des ministres dans un délai de trois mois. Les tarifs sont publiés au Journal officiel.
Comme le prévoit l’article L. 337-6 du même code, les TRVe sont établis selon la méthode dite d’« empilement des coûts », c’est-à-dire par addition :
– du coût d’approvisionnement de la part relevant de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique ([308]) ;
– du coût du complément d’approvisionnement au prix de marché ;
– de la garantie de capacité ([309]) ;
– des coûts d’acheminement de l’électricité ;
– des coûts de commercialisation ;
– et d’une rémunération normale de l’activité de fourniture.
c. Le dispositif voté en loi de finances pour 2022 et sa reconduction
● Le dispositif de la LFI 2022
Tel que prévu par la LFI 2022 ([310]), le dispositif du bouclier relatif à l’électricité permettait au Gouvernement de mettre en œuvre une minoration exceptionnelle du tarif de l’accise lorsqu’en moyenne, le TRVe proposé aux ménages en France continentale, majoré des taxes applicables au 1er janvier 2022, excédait de plus de 4 % celui applicable au 1er août 2021, taxes comprises. Cette minoration ne pouvait conduire à ce que l’accise soit inférieure à 0,50 euro / MWh pour les consommations professionnelles et à 1,00 euro / MWh pour les consommations non professionnelles, soit les minima fixés par le droit européen ([311]).
Cette baisse de l’accise s’est appliquée de manière uniforme dans l’ensemble des territoires où elle est prélevée, y compris outre-mer, et à tous les types de consommations d’électricité. Elle était prévue pour durer jusqu’au 31 janvier 2023.
● La reconduction en LFI 2023
L’article 64 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 pour 2023 a reconduit le volet fiscal du bouclier sur l’électricité pour une année supplémentaire, c’est-à-dire pour les quantités d’électricité fournies jusqu’au 31 janvier 2024.
De plus, ce texte a inscrit directement dans la loi le niveau de l’accise, à savoir 1 euro par mégawattheure pour les consommations relevant de la catégorie fiscale « ménages et assimilés » et 0,50 euro par mégawattheure pour les autres consommations, alors que le dispositif précédent autorisait le Gouvernement à mettre en œuvre, à certaines conditions, une minoration dans la limite d’un plancher égal à 1 euro par mégawattheure pour les ménages et à 0,50 euro par mégawattheure pour les autres consommations.
Il a également opéré une montée en puissance du bouclier fiscal, puisque celui-ci a intégré, à compter du 1er janvier 2023, la TCCFE, ce qui a augmenté d’autant l’ampleur de la minoration du tarif.
3. L’évolution des TRVe en 2022 et 2023
La hausse des prix de marché de l’électricité a été en partie répercutée sur les TRVe, en trois étapes.
● La hausse du 1er février 2022
La CRE calcule une évolution des TRVe reflétant l’évolution réelle des coûts de fourniture (cf. supra la méthode législative d’empilement des coûts). Le niveau effectif du gel est fixé par le Gouvernement.
La CRE ayant proposé, dans une délibération du 18 janvier 2022 ([312]), une hausse de 36,5 % du niveau moyen des TRVe au 1er février 2022, l’accise avait été abaissée à son niveau minimum permis par le droit européen, soit 0,50 euro / MWh pour les consommations professionnelles et 1,00 euro / Mwh pour les consommations non professionnelles ([313]). Cette baisse de l’accise avait permis de contenir la hausse des TRVe à 20 %, toutes taxes comprises, de son niveau d’août 2021. Une hausse du plafond du volume d’Arenh a complété le bouclier afin de limiter cette hausse à 4 %. Les TRVe n’ont pas été augmentés en août 2022.
● La hausse du 1er février 2023
Au 1er février 2023, la CRE a évalué à 99,36 % toutes taxes comprises la hausse du TRVe pour les tarifs bleus résidentiels, par rapport au TRVe gelé en vigueur depuis le 1er février 2022 ([314]). Cette hausse reflète celle des coûts de fourniture, due au niveau exceptionnellement élevé des prix de gros à terme de l’électricité pour livraison en 2023 constaté en 2022. Ce niveau s’explique lui-même, d’une part, par le prix très élevé des prix de gros du gaz et, d’autre part, par la faible disponibilité anticipée du parc nucléaire français.
Le Gouvernement a décidé d’une hausse de 15 % des TRVe au 1er février 2023 ([315]).
● La hausse du 1er août 2023
Au 1er août 2023, la CRE a évalué à 0,88 % toutes taxes comprises la hausse du TRVe pour les tarifs bleus résidentiels, par rapport au TRVe calculé dans sa proposition du 19 janvier 2023 ([316]). Au 1er août 2023, la CRE estimait ainsi que les TRVe théoriques se situaient 74,5 % au-dessus des tarifs gelés en vigueur, toutes taxes comprises.
Le Gouvernement a décidé d’une hausse de 10 % des TRVe au 1er août 2023 ([317]).
4. Les effets du bouclier
Sur l’année 2022, le coût des boucliers tarifaire et fiscal sur l’électricité est évalué à 10,5 milliards d’euros. Cette mesure, combinée au bouclier tarifaire portant sur le gaz naturel et à la remise à la pompe de 15 centimes d’euro hors taxe mise en œuvre à partir du 1er avril 2022, a largement contribué à contenir l’inflation à 5,3 % au lieu de 8,4 % entre le deuxième trimestre 2021 et le deuxième trimestre 2022 ([318]).
Selon un rapport de Mme Christine Lavarde, sénatrice, publié en juin 2023 ([319]), le coût prévisionnel, en 2023, du bouclier tarifaire sur l’électricité, c’est-à-dire le coût du blocage des TRVe, s’élèverait à 23,75 milliards d’euros en 2023, tandis que le coût du bouclier fiscal sur l’électricité, c’est-à-dire la perte de recettes induite par la minoration du tarif de l’accise, s’élèverait à 10 milliards d’euros pour la même année.
5. Les autres aides sur l’électricité
a. Logement collectif
Deux décrets du 30 décembre 2022 ont instauré un dispositif d’aide aux ménages vivant dans des logements chauffés collectivement à l’électricité, le premier rétroactivement pour la période s’étendant du 1er juillet 2022 au 31 décembre 2022 ([320]) et le second pour l’année 2023 ([321]).
Ces dispositifs concernent les particuliers résidant en logements collectifs (immeubles d’habitation en copropriété, en location privée ou en logement social) chauffés collectivement à l’électricité par un contrat de fourniture d’électricité, dans le cadre d’un contrat d’exploitation de chaufferie ou par un réseau de chaleur.
Ils concernent également les casernes de gendarmerie, les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD) ou handicapées, les logements en intermédiation locative, les logements mobilisés pour l’accueil de personnes défavorisées ou encore les structures de l’aide sociale à l’enfance et les établissements de la protection judiciaire de la jeunesse. Ce dispositif bénéficie, enfin, aux opérateurs de bornes de recharge.
Ces dispositifs interviennent ex-post et induisent donc, à la différence du bouclier tarifaire, une avance de trésorerie de la part des consommateurs. Ils ont vocation à être répercutés sur leurs charges par les bailleurs et copropriétés. S’ils n’exigent aucune démarche des consommateurs eux-mêmes, ces dispositifs supposent que les bailleurs et les syndics de copropriétés signalent leurs sites éligibles aux fournisseurs par le moyen d’une attestation sur l’honneur.
Le mode de calcul des aides est équivalent à celui prévu dans le cadre du bouclier tarifaire sur les prix de l’électricité, soit la différence entre les TRVe non gelés et les TRVe gelés. Toutefois, en 2022 tout particulièrement, des organismes gestionnaires de logements collectifs ont pu renouveler leurs contrats de fourniture à des prix extrêmement élevés, bien supérieurs au niveau des TRVe non gelés calculés par la CRE.
Pour cette raison liée à la différence de nature entre les contrats de fourniture d’électricité individuels et collectifs, les dispositifs prévoient que pour les contrats souscrits en 2022, l’aide soit bonifiée par rapport à celle dont bénéficient les consommateurs individuels dans le cadre du bouclier. Cette bonification doit être versée lorsque le prix prévu au contrat est de plus de 30 % supérieur au prix du TRVe non gelé. Au-delà de ce seuil, 75 % du prix de l’électricité contractualisé est pris en charge par l’État.
Le coût de cette aide en 2023 est évalué à 720 millions d’euros ([322]).
b. Chèque énergie
Un chèque énergie exceptionnel de 100 euros a été versé à tous les bénéficiaires du chèque énergie, soit 5,8 millions de ménages, à la fin de l’année 2021. Adoptés dans le cadre de la loi de finances rectificative de fin d’année 2021 ([323]), les crédits nécessaires à cette première mesure ont atteint 600 millions d’euros.
Un nouveau chèque énergie exceptionnel, cette fois étendu jusqu'au quatrième décile de revenus, soit 12 millions de ménages, a été prévu par la seconde loi de finances rectificative pour 2022 ([324]) pour 1,8 milliard d’euros. Le montant versé était de 200 euros pour les 5,8 millions de ménages bénéficiaires du chèque énergie de droit commun, c’est-à-dire ceux appartenant aux deux premiers déciles de revenus, et de 100 euros pour les autres ménages bénéficiaires.
c. Les amortisseurs
● L’amortisseur de droit commun
L’article 181 de la LFI 2023 a créé un mécanisme de soutien baptisé « amortisseur » sur les prix de l’électricité. Il a prévu que les entités éligibles à ce nouveau dispositif bénéficient d’une baisse du prix de leur fourniture d’électricité égale à un montant en euros par mégawattheure (euros / MWh) correspondant à la différence entre le prix de l’électricité du contrat et un « prix d’exercice » - c’est-à-dire un prix de référence - dans la limite d’un « plafond » exprimé lui aussi en euros/MWh. Cette réduction s’applique sur une certaine « quotité » de consommation d’électricité du client final.
Le décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022 ([325]) a précisé les trois paramètres qui doivent déterminer le calcul de l’amortisseur, à savoir :
– la quotité de consommation d’électricité concernée, fixée à 50 % ;
– le prix d’exercice de référence, fixé à 180 euros / MWh ;
– et le plafond d’aide, fixé à 320 euros / MWh.
L’application de l’amortisseur électricité revient ainsi à réduire la facture des clients éligibles, pour la moitié des volumes consommés, de l’écart entre le prix de l’électricité de leur contrat et le prix d’exercice de 180 euros / MWh, cette réduction étant plafonnée à 320 euros / MWh. L’aide annuelle maximale découlant de ces paramètres est ainsi de 160 euros / MWh.
Le même décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022 a défini les consommateurs finals éligibles au dispositif d'amortisseur. Il s’agit des consommateurs suivants :
– les PME ([326]) ;
– les personnes morales de droit public qui emploient moins de 250 personnes et dont les recettes annuelles n’excèdent pas 50 millions d'euros ;
– les personnes morales de droit public ou privé dont les recettes annuelles provenant de financements publics, de taxes affectées, de dons ou de cotisations, sont supérieures à cinquante pour cent des recettes totales. Cela concerne, notamment, les associations ;
– les collectivités territoriales et leurs groupements.
Le coût de cette aide en 2023 est évalué à 2,9 milliards d’euros ([327]).
● Le « sur-amortisseur » pour les TPE
En raison notamment des difficultés rencontrées par les boulangers et les autres TPE dont le cycle productif nécessite une puissance élevée et ainsi non éligibles aux TRVe et, par voie de conséquences, au bouclier tarifaire sur les prix de l’électricité, le Gouvernement, après une concertation avec les fournisseurs, a mis en œuvre par voie réglementaire un dispositif spécifique destiné à celles de ces TPE qui ont renouvelé leur contrat de fourniture d’électricité en 2022.
Ce dispositif, qualifié de « sur-amortisseur » dans la mesure où il fonctionne selon les mêmes modalités que l’amortisseur mais avec des paramètres calibrés différemment, doit permettre de garantir à ces TPE, en 2023, un prix de leur électricité de 230 euros / MWh.
Les modalités précises de cette aide ont été définies dans un décret du 3 février 2023 ([328]). Le décret précise notamment que les entreprises éligibles au sur‑amortisseur sont celles :
– qui emploient moins de dix personnes et dont le chiffre d’affaires, les recettes ou le total de bilan annuels n’excèdent pas 2 millions d’euros, pour leurs sites souscrivant une puissance supérieure à 36 kilovoltampères (TPE et assimilées) ;
– ayant signé ou renouvelé un contrat de fourniture d’électricité au titre de 2023 entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2022 ;
– dont le prix de la part variable de l’électricité hors taxes, hors acheminement, résultant de leur contrat pour l’année 2023 excède 280 euros / MWh en moyenne annuelle.
Calqué sur le fonctionnement de l’amortisseur, le mécanisme TPE retient les paramètres suivants :
– une quotité de consommation d’électricité éligible fixée à 100 % ;
– un prix de référence de 230 euros / MWh ;
– et un plafond de 1 500 euros / MWh.
Le coût de cette aide en 2023 est évalué à 705 millions d’euros ([329]) .
B. L’imposition du gaz naturel combustible
1. Le tarif normal de l’accise
La fraction de l’accise perçue sur les gaz naturels est une imposition proportionnelle frappant les livraisons de gaz naturels aux consommateurs finals. Cette taxe a succédé à la taxe intérieure de consommation sur les gaz naturels (TICGN) à compter du 1er janvier 2022, date d’entrée en vigueur du code d’imposition sur les biens et services.
Les tarifs de l’accise sont distincts selon l’usage, carburant ou combustible, qui est fait du gaz naturel.
tarifs de la fraction de l’accise sur les Énergies perçue sur les gaz naturels
Catégorie fiscale |
Tarif (en euros / MWh) à compter de 2022 |
Gaz naturels carburant |
5,23 |
Gaz naturels combustibles |
8,45 |
Source : article L. 312-35 et L. 312-36 du code des impositions sur les biens et services.
Cependant, pour les gaz naturels combustibles, le tarif effectif de l’accise connaît une minoration par rapport à ce tarif. En effet, depuis le 1er janvier 2021 ([330]), l’exonération d’accise sur les gaz naturels injectés dans les réseaux de gaz et utilisés comme combustible en lien avec une garantie d’origine de biogaz a été remplacée par une réduction du taux plein de l’accise au prorata du taux de biogaz injecté dans les réseaux de gaz naturel.
Le tarif normal de la catégorie fiscale des gaz naturels combustibles est ainsi égal au résultat, arrondi au centième de mégawattheure, de la minoration du tarif mentionné dans le tableau précédent à hauteur du quotient entre :
– d’une part, la quantité d’hydrocarbures à l’état gazeux, autres que le gaz naturel, produits à partir de la biomasse ([331]) injectée en France dans les réseaux de gaz naturel ;
– et, d’autre part, la consommation de gaz fournie en France par les réseaux de gaz naturel.
Ces quantités sont évaluées au cours de la deuxième année précédant celle de l’application du tarif.
Le tarif résultant de cette minoration est applicable à tous les consommateurs (particuliers et professionnels) qui ne bénéficient pas d’un tarif réduit. Il est constaté chaque année par arrêté conjoint du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l'énergie.
Au cours des dernières années, le tarif effectif de l’accise sur les gaz naturels combustibles s’est établi aux niveaux présentés dans le tableau suivant.
tarifs effectifs de la fraction de l’accise sur les Énergies perçue sur les gaz naturels combustibles
Année |
Tarif effectif |
2020 |
8,45 |
2021 |
8,43 ([332]) |
2022 |
8,41 ([333]) |
2023 |
8,37 ([334]) |
2. Les tarifs réduits d’accise
Le code des impositions sur les biens et services prévoit des tarifs réduits et des exonérations de l’accise frappant les gaz naturels utilisés comme combustibles.
Ces tarifs réduits et exonérations sont repris dans le tableau suivant.
tarifs réduits d’accise sur le gaz naturel combustible
Consommations |
Tarif réduit (en euros / MWh) |
Travaux agricoles et forestiers ([335]) |
0,54 |
Déshydratation de légumes et plantes aromatiques ([336]) |
1,6 |
Installations intensives en énergie soumises au SEQE de l’UE ([337]) |
1,52 |
Installations intensives en énergie exposées à la concurrence internationale non soumises au SEQE de l’UE mais relevant d’activités soumises au SEQE de l’UE ([338]) |
1,6 |
Consommations |
Tarif réduit (en euros / MWh) |
Doubles usages ([339]) |
0 |
Fabrication de produits minéraux non métalliques ([340]) |
0 |
Grisou et gaz assimilés ([341]) |
0 |
Biogaz injecté dans le réseau |
0 |
Production de produits énergétiques et de produits assimilés (dont extraction) ([342]) |
0 |
Production d’électricité ([343]) |
0 |
Source : articles L. 312-4, L. 312-31, L. 312-32, L. 312-60, L. 312-61, L. 312-62, L. 312-64, L. 312-66, L. 312-67, L. 312‑75, L. 312-76, L. 312-77, L. 312-79, L. 312-85 et L. 312-86 du code des impositions sur les biens et services.
Si un bouclier tarifaire a également été mis en place pour le gaz naturel combustible, celui-ci ne comportait pas de volet fiscal. L’encadré ci-dessous résume les caractéristiques de ce bouclier.
Le gel des tarifs réglementés de vente de gaz
Contrairement au bouclier sur les prix de l’électricité, qui comprend à la fois une composante fiscale, consistant en une baisse de l’accise, et une composante tarifaire, consistant en un gel ou une hausse contenue des tarifs réglementés de vente, le bouclier mis en place sur les prix du gaz naturel, qui s’est achevé, en même temps que les tarifs réglementés de vente du gaz (TRVg), le 30 juin 2023, ne comportait qu’une composante tarifaire.
Il a été introduit, face à la forte croissance des prix de marché du gaz, par l’article 181 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022, puis, à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, prolongé par l’article 37 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 jusqu’au 31 décembre 2022, laquelle a également ouvert la possibilité d’une prolongation par arrêté jusqu’au 30 juin 2023 (2). Il a consisté en un gel des TRVg à leur niveau, toutes taxes comprises, en vigueur au 31 octobre 2021, jusqu’au 31 décembre 2022, puis en une hausse contenue à 15 % le 1er janvier 2023. L’article 181 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 avait également prévu qu’un décret pourrait imposer aux fournisseurs de gaz naturel de réduire leur prix de fourniture à partir du 1er juillet 2023 et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023 au bénéfice des consommateurs finals domestiques ; cette possibilité n’a pas été utilisée.
Initialement réservé aux clients résidentiels individuels bénéficiant des TRVg, le bénéfice du bouclier tarifaire sur le gaz a été étendu aux personnes physiques habitant des logements d’habitation en copropriété chauffés au gaz et ne bénéficiant pas des TRVg par décret du 9 avril 2022 (1).
Ce bouclier tarifaire sur le gaz a permis aux clients disposant d’une offre de TRVg ou indexée sur les TRVg de réaliser de substantielles économies. Ainsi, en l’absence du bouclier, le niveau moyen des TRVg au 1er juin 2022 aurait été supérieur de 48,70 % TTC par rapport au niveau en vigueur au 1er octobre 2021.
(1) Article 10 du décret n° 2022-514 du 9 avril 2022 relatif à l’aide en faveur de l’habitat collectif résidentiel face à l’augmentation du prix du gaz naturel.
(2) Cet arrêté a été publié le 30 décembre 2022. Il est consultable ici.
II. le dispositif proposÉ
Le présent article :
– proroge le volet fiscal du bouclier sur l’électricité pour une année supplémentaire (I, alinéas 1 à 4) ;
– et relève le tarif de l’accise sur le gaz naturel combustible (II, alinéas 5 à 7).
A. La prorogation du bouclier tarifaire sur l’ÉlectricitÉ
En premier lieu, le présent article reconduit le volet fiscal du bouclier sur l’électricité pour une année supplémentaire (I, alinéas 1 à 4).
Il prévoit que les tarifs de l’accise sur l’électricité qui ne sont pas nuls au 31 janvier 2023 sont égaux, pour les quantités d’électricité fournies entre le 1er février 2024 et le 31 janvier 2025, à :
– 1 euro par mégawattheure pour les consommations relevant de la catégorie fiscale « ménages et assimilés » ([344]) ;
– 0,50 euro par mégawattheure pour les autres consommations.
Il est précisé que ces dispositions s’appliquent à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis et Futuna.
B. la hausse de l’accise sur le gaz naturel combustible
Le II du présent article (alinéas 5 et 6) réécrit le troisième alinéa de l’article L. 312-36 du CIBS afin de prévoir que le tarif normal d’accise des gaz naturels combustible peut être majoré par arrêté du ministre chargé du budget sans pouvoir excéder 16,37 euros / MWh. Cet arrêté intervient au plus tard le 31 décembre 2023.
En prenant comme référence le tarif d’accise applicable au gaz naturel combustible en 2023, qui est de 8,37 euros / MWh, il en résulte une hausse maximale de 8 euros / MWh.
La réécriture du troisième alinéa de l’article L. 312-36 du CIBS entraîne la suppression de la disposition prévoyant une minoration de ce tarif à proportion des quantités de biogaz injectées dans les réseaux.
III. l’impact administratif et Économique
A. la prorogation du bouclier fiscal sur l’ÉlectricitÉ
La prorogation du bouclier fiscal sur l’électricité contribuera au soutien au pouvoir d’achat des ménages et de la compétitivité des entreprises.
Le coût pour les finances publiques devrait s’élever à environ 8,9 milliards d’euros, selon l’évaluation préalable.
Elle indique, de plus, que cette mesure « n’a pas d’incidence sur les fractions affectées aux communes et aux départements, l’État maintenant leurs recettes à travers les versements de la mission Avances aux collectivités locales ».
B. l’autorisation de rehausser l’accise du gaz naturel combustible
La hausse maximale proposée de l’accise sur le gaz naturel combustible devrait doubler le produit celle-ci. Celui-ci étant évalué, par les Voies et moyens annexées au PLF 2023, à 2,4 milliards d’euros, on en déduit que le gain supplémentaire pour les finances publiques serait du même ordre.
Pour les entreprises et les particuliers consommateurs de gaz naturel combustible, les factures seront augmentées. Pour une maison de 100 m2 chauffée au gaz, dont la consommation annuelle est de 15 576 kWh ([345]), le coût supplémentaire serait au plus de 124 euros d’accise par an, auxquels s’ajoutent 25 euros de TVA.
L’évaluation préalable estime, toutefois que cette hausse « sera plus que compensée par la baisse des tarifs hors taxe constatée en période de sortie de crise énergétique ».
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* *
Article 12
Réduction progressive de dépenses fiscales défavorables à l’environnement
Résumé du dispositif et effets principaux
Cet article prévoit :
– l’augmentation progressive du tarif réduit d’accise sur le gazole non routier (GNR), à raison de 5,99 euros / MWh par an, jusqu’à la suppression de ce tarif réduit le 1er janvier 2030 ;
– l’augmentation progressive du tarif réduit d’accise dont bénéficie le secteur agricole sur ses consommations de gazole, à raison de 2,85 euros / MWh par an, jusqu’à ce que le tarif de 23,86 euros / MWh soit atteint le 1er janvier 2030 ;
– la suppression, le 1er janvier 2024, des tarifs réduits d’accise sur les produits pétroliers consommés par les entreprises grandes consommatrices d’énergie, ainsi que sur les charbons consommés par les entreprises grandes consommatrices d’énergie exposées à la concurrence internationale ;
– le relèvement, dès le 1er janvier 2024, des plafonds de la déduction pour épargne de précaution (DEP) des agriculteurs ;
– le relèvement des seuils de recettes permettant aux agriculteurs de bénéficier d’une exonération totale (de 250 000 à 350 000 euros) ou partielle (de 350 000 à 450 000 euros) sur leurs plus-values de cession professionnelles ;
– la suppression de l’exonération de malus sur les émissions de CO2 et de malus poids à l’immatriculation pour les véhicules de certains services et personnes participant à la lutte contre les incendies en forêt, et la suppression de l’exonération d’accise sur les consommations de carburants des véhicules des services d’incendie et de secours ;
– diverses mesures de rationalisation et d’amélioration rédactionnelle des dispositifs de dépenses fiscales modifiées récemment ou dont l’encadrement européen a évolué.
Dernières modifications législatives intervenues
L’article 22 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 a reporté la fin du tarif réduit d’accise sur le GNR au 1er janvier 2024.
L’article 71 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a prévu pour le 31 décembre 2026 la fin de l’exonération d’accise pour les charbons utilisés par les installations de valorisation de la biomasse exploitées par des entreprises et pour les produits consommés par les moteurs des aéronefs et des navires pour les besoins de la construction, du développement, de la mise au point, des essais et de l’entretien de ces engins ou de leurs moteurs.
L’article 65 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a prévu un relèvement en deux étapes, au 1er janvier 2024 et au 1er janvier 2025, des tarifs réduits d’accise dont bénéficient certaines autres installations énergo-intensives sur leurs consommations de charbons.
L’article 50 de la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie a introduit une exonération totale d’accise sur les gazoles et les essences aux articles L. 312-78-1 et L. 312-78-2 du code de l’imposition sur les biens et services (CIBS).
L’article 34 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a prévu que les plafonds de la DEP sont actualisés chaque année en fonction de la variation de l’indice des prix à la consommation hors tabac constatée au titre de l’année précédente et arrondis à l’euro le plus proche.
En application du VI de l’article 69 du CGI, le plafond de recettes permettant de bénéficier du régime d’imposition dit « micro-bénéfices agricoles » (micro-BA) a été porté de 85 800 à 91 900 euros par le décret n° 2023-422 du 31 mai 2023 portant incorporation au code général des impôts de divers textes modifiant et complétant certaines dispositions de ce code.
L’article 51 de la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie a prévu une exonération de malus sur les émissions de CO2 et de malus sur la masse en ordre de marche pour les véhicules exclusivement affectés aux besoins des services déconcentrés de l’État chargés de la forêt, de l’Office national des forêts, des collectivités territoriales et de leurs groupements, des associations syndicales de propriétaires forestiers et des réserves communales de sécurité civile, pour leurs missions opérationnelles de prévention, de surveillance et de lutte contre les incendies. Cette exonération est prévue aux 3° des articles L. 421-70-1 et L. 421‑80-1 du CIBS.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté dix amendements à cet article :
– contre l’avis défavorable du rapporteur général, un amendement déposé par M. Jean‑Louis Fugit, rapporteur pour avis au nom de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, exonérant d’accise le biopropane carburant et combustible ;
– avec l’avis favorable du rapporteur général, neuf amendements identiques prévoyant le maintien de l’exonération de malus sur les émissions de CO2, de malus poids et d’accise sur les carburants pour les services d’incendie et de secours.
La commission a adopté cet article ainsi modifié. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. l’État du droit
A. le tarif d’accise applicable au gazole non routier
1. Qu’est-ce que le gazole non routier ?
L’expression « gazole non routier » (GNR) désigne le gazole utilisé pour le fonctionnement de moteurs qui ne servent pas à la propulsion de véhicules sur route ([346]). Ses principaux utilisateurs sont les secteurs agricole, industriel et des travaux publics.
Le GNR est identique au gazole ordinaire mais, parce qu’il bénéficie d’un avantage fiscal, il est distribué par un réseau spécifique et est coloré en rouge écarlate.
2. Le tarif applicable au GNR
Un tarif réduit de taxe sur les carburants a été mis en place pour le GNR en 1966 ([347]) afin d’aider à la mécanisation de certains secteurs de l’économie, notamment l’agriculture.
Ce tarif avantageux a été maintenu et constitue aujourd’hui une aide à la compétitivité des secteurs concernés.
Il se traduit par un tarif d’accise ([348]) ([349]) spécifique, environ trois fois inférieur au tarif normal. Ce tarif s’élève à 18,82 euros par mégawattheure ([350]) contre 59,40 euros par mégawattheure pour le tarif normal. Depuis le 1er janvier 2022, ces dispositions figurent à l’article L. 312-35 du nouveau code des impositions sur les biens et services (CIBS).
Le secteur agricole bénéficie, au sein de ce dispositif, d’un tarif encore inférieur, égal à 3,86 euros par mégawattheure ([351]). La différence entre le tarif réduit du GNR et ce tarif spécifique au secteur agricole est obtenue par le remboursement des consommateurs après l’achat.
3. Une fin programmée et plusieurs fois reportée
La fin du tarif réduit d’accise pour le GNR avait été initialement proposée par le Gouvernement dans le projet de loi de finances pour 2019 ([352]). Toutefois, il avait été alors décidé de différer cette mesure afin d’approfondir la concertation avec les secteurs concernés, si bien qu’aucune mesure n’avait finalement été adoptée en loi de finances pour 2019.
a. 2019 : la suppression progressive du tarif du GNR pour la plupart des secteurs, doublée de mesures d’accompagnement
Parce que le tarif réduit dont bénéficie le GNR est apparu opposé aux objectifs de réduction de la consommation de carburant et de la transition énergétique, la loi de finances pour 2020 avait prévu ([353]) sa suppression progressive en trois étapes entre le 1er juillet 2020 et le 1er janvier 2022.
Toutefois, les tarifs réduits du GNR devaient demeurer applicables pour :
– les usages agricoles ;
– les opérations de damage et de déneigement des routes de montagne ;
– le transport ferroviaire ;
– les segments des industries extractives fortement exposés à la concurrence internationale ;
– la manutention portuaire.
De plus, la suppression progressive de cet avantage était compensée par des mesures d’accompagnement :
– un mécanisme d’indexation des prix pour les entreprises de transport frigorifique ;
– la mise en place d’un système de « pieds de facture » permettant de répercuter les hausses du tarif du GNR sur les contrats en cours ;
– un suramortissement pour certains matériels et moteurs pour les entreprises de quatre secteurs, à savoir celles du BTP, celles produisant des substances minérales solides, les exploitants aéroportuaires et les exploitants de remontées mécaniques et de domaines skiables ;
– un suramortissement pour les PME distribuant exclusivement du GNR.
b. 2020 : Premier report
Face à la crise sanitaire, l’entrée en vigueur de la suppression de l’avantage fiscal du GNR a été reportée au 1er juillet 2021 par la troisième loi de finances rectificative pour 2020 ([354]). Par la même occasion, le caractère progressif de la disparition de cet avantage a également été abandonné.
c. 2021 : Deuxième report
La première loi de finances rectificative pour 2021 a, à nouveau, reporté cette suppression au 1er janvier 2023 ([355]).
d. 2022 : Troisième report
La première loi de finances rectificative pour 2022 a, à nouveau, reporté cette suppression au 1er janvier 2024 ([356]) .
B. les tarifs rÉduits d’accise pour certaines activitÉs Économiques
Des tarifs réduits d’accise sont prévus pour de nombreuses activités économiques.
Toutefois, l’article L. 312-42 du CIBS précise que le bénéfice des tarifs réduits constitutifs d’une aide d’État est subordonné au respect de certaines conditions :
– pour les activités ne relevant pas du secteur de la pêche et de l’aquaculture, celles prévues à l’article 44 du règlement général d’exemption par catégorie ([357]) ;
– pour les activités relevant du secteur de la pêche et de l’aquaculture :
1. Les tarifs réduits applicables aux activités énergo-intensives
a. Le SEQE
Les tarifs réduits d’accise dont bénéficient certaines activités énergo-intensives s’inscrivent dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission européen (SEQE). En effet, selon qu’une installation énergo-intensive est soumise au SEQE, ou relève d’une activité qui y est soumise, deux tarifs réduits d’accise peuvent trouver à s’appliquer.
Le SEQE est présenté dans l’encadré suivant.
Le SEQE
Les marchés carbone, également nommés système d’échange de quotas d’émissions ou système de permis d’émissions négociables (Emissions Trading Schemes – ETS), sont des outils réglementaires facilitant l’atteinte des objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES).
Depuis 2005, le système européen d’échange de quotas s’applique à plus de 11 000 installations fixes et couvre près de 45 % des émissions de gaz à effet de serre de l’UE. Initialement mis en œuvre pour faciliter l’atteinte de l’engagement de l’Union européenne au titre du Protocole de Kyoto, le SEQE a été pérennisé dans le cadre du paquet énergie-climat de mars 2009. Il est encadré par une directive de 2003 (1).
Le principe en est le suivant : les États membres imposent un plafond sur les émissions des 11 000 installations concernées puis leur allouent les quotas correspondants à ce plafond, gratuitement ou par enchères. Les entreprises assujetties ont la possibilité d’échanger des quotas sur le marché européen des quotas d’émission. Une installation qui émet plus que son allocation doit se procurer les quotas manquants, suivant le principe « pollueur-payeur ». Une installation qui émet moins que son allocation peut revendre ses quotas non utilisés et bénéficier ainsi de revenus.
Le système d’échange de quotas d’émission de GES a débuté le 1er janvier 2005 et a connu trois phases : 2005-2007 ; 2008-2012 ; 2013-2020. La quatrième phase, en cours, a débuté en 2021 et doit s’achever en 2030.
Les principaux secteurs couverts sont la production d’électricité, la production de chaleur, les installations industrielles à forte intensité énergétique et l’aviation (2). Le transport maritime pourrait être inclus dans les prochaines années alors que la construction et le transport routier pourraient se voir doter d’un système d’échange de quotas spécifique, commun à ces deux secteurs.
Participent à ce système les 27 États membres de l’UE ainsi que l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège. L’Irlande du Nord demeure incluse dans le SEQE pour sa seule production d’électricité.
La quasi-totalité des quotas étaient alloués gratuitement jusqu’en 2012. Depuis le début de la troisième phase en 2013, plus de la moitié des quotas sont vendus aux enchères, avec l’objectif de faire croître ce niveau progressivement. Toutefois, afin de préserver certains secteurs particulièrement exposés à un risque de fuite de carbone (c’est-à-dire un risque de voir la production se délocaliser du fait des contraintes climatiques), la possibilité de distribuer des quotas gratuits a été maintenue (3).
(1) Directive 2003/87 du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil.
(2) Article 71 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
(3) Le texte de cette directive est accessible ici.
b. L’intensité énergétique
Ces tarifs réduits d’accise s’appliquent sous réserve que l’installation présente un degré minimal d’intensité énergétique. La définition de l’intensité énergétique est présentée dans l’encadré suivant.
L’intensité énergétique
La définition et le mode de calcul de l’intensité énergétique sont précisés par les articles L. 312‑43 à L. 312-46 du code des impositions sur les biens et services.
Le niveau d’intensité énergétique peut être calculé en valeur de production ou en valeur ajoutée.
Le niveau d’intensité énergétique en valeur de production s’entend du quotient entre :
● au numérateur, le coût total d’acquisition, toute taxe comprise à l’exception de la TVA déductible, des produits soumis à l’accise sur les énergies et de la chaleur ;
● au dénominateur, le chiffre d’affaires, y compris les subventions directement liées au prix du produit, corrigé de la variation des stocks de produits finis, les travaux en cours et les biens ou les services achetés à des fins de revente, diminué des acquisitions de biens et services destinés à la revente.
Le niveau d’intensité énergétique en valeur ajoutée s’entend du quotient entre :
● au numérateur, le montant total de l’accise sur les produits utilisés, en appliquant le tarif normal ;
● au dénominateur, le chiffre d’affaires total soumis à la TVA diminué de la totalité des achats soumis à la TVA.
Pour la détermination du niveau d’intensité énergétique, seuls sont pris en compte en tant que produits taxables les produits suivants :
– ceux utilisés comme carburant pour les besoins du fonctionnement des moteurs stationnaires ou des installations et machines utilisées dans la construction, le génie civil et les travaux publics ;
– ceux utilisés comme combustible ;
– l’électricité.
Toutefois, ils peuvent être appréciés sur un sous-ensemble restreint de ces produits. Lorsqu’il est apprécié uniquement sur l’électricité, il est dénommé « niveau d’électro-intensité ». Lorsqu’un tarif réduit pour certains produits est conditionné au respect d’un niveau minimum d’intensité énergétique, le périmètre des produits pris en compte pour déterminer le niveau d’intensité énergétique est apprécié indépendamment du périmètre des produits éligibles au tarif réduit.
c. Les tarifs réduits d’accise pour la consommation d’énergie de certaines activités énergo-intensives
Deux niveaux de tarifs réduits sont prévus par les articles L. 312-74 à L. 312-78 du code des impositions sur les biens et services :
– le premier est destiné aux installations soumises au système européen d’échange de quotas d’émissions (SEQE) et exploitées par des entreprises dont le niveau d’intensité énergétique est au moins égal à 3 % en valeur de production ou à 0,5 % en valeur ajoutée ;
– le second s’applique aux installations qui ne sont pas, par elles-mêmes, soumises au SEQE, mais qui sont exposées à la concurrence internationale, relèvent d’activités soumises au SEQE et sont exploitées par des entreprises dont le niveau d’intensité énergétique est au moins égal à 3 % en valeur de production ou à 0,5 % en valeur ajoutée.
Il existe également un tarif spécifique, égal à zéro, pour les charbons utilisés par les installations de valorisation de la biomasse exploitées par des entreprises dont le niveau d’intensité énergétique, apprécié sur les seules consommations pour les besoins de valorisation de la biomasse, est au moins égal à 3 % en valeur de production, et qui sont soumises au SEQE ou à un accord conclu avec l’autorité administrative permettant d’atteindre des objectifs équivalents en matière de protection de l’environnement ou d’efficacité énergétique. La loi de finances pour 2023 a prévu la fin de cette dépense fiscale pour le 31 décembre 2026 ([360]) .
L’article L. 312-74 du CIBS précise que le système d’échange de quotas de gaz à effet de serre dans l’Union ou SEQE de l’UE, s’entend du système établi par la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil, dans sa rédaction en vigueur ([361]).
comparaison des tarifs normaux et des tarifs rÉduits d’accise sur les consommations d’Énergie des installations Énergo-intensives
Type d’installations |
Produit |
Tarif normal (en euro / MWh) |
Tarif réduit (en euro / MWh) |
Écart (en euro / MWh) |
Installations soumises au SEQE |
Charbons |
14,62 |
1,19 |
13,43 |
Fiouls lourds ([362]) |
12,555 |
1,665 |
10,89 |
|
Fiouls domestiques ([363]) |
15,62 |
5,66 |
9,96 |
|
Pétroles lampants ([364]) |
15,686 |
5,822 |
9,864 |
|
Gaz de pétroles liquéfiés combustible |
5,189 |
0 |
5,189 |
|
Gaz naturels combustible |
8,45 |
1,52 |
6,93 |
|
Installations exposées à la concurrence internationale non soumises au SEQE mais relevant d’activités qui y sont soumises |
Charbons |
14,62 |
2,29 |
12,33 |
Fiouls lourds (1) |
12,555 |
1,971 |
10,584 |
|
Fiouls domestiques (2) |
15,62 |
5,66 |
9,96 |
|
Pétroles lampants (3) |
15,686 |
5,822 |
9,864 |
|
Gaz de pétroles liquéfiés combustible |
5,189 |
0 |
5,189 |
|
Gaz naturels combustible |
8,45 |
1,6 |
6,85 |
|
Installations de valorisation de la biomasse |
Charbons |
14,62 |
0 |
14,62 |
Source : articles L. 312-36 et L. 312-75 du code des impositions sur les biens et services.
La loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a prévu, à son article 65, a prévu un relèvement des tarifs réduits d’accise dont bénéficient certaines installations énergo-intensives sur leurs consommations de charbons :
– elle a prévu le relèvement du tarif de l’accise sur les charbons consommés par certaines installations à compter du 1er janvier 2024 :
● le tarif doit passer de 1,19 à 2,79 euros / MWh pour les installations intensives en énergie soumises au SEQE ;
● le tarif doit passer de 2,29 à 3,89 euros / MWh pour les installations intensives en énergie exposées à la concurrence internationale qui ne sont pas soumises au SEQE mais relèvent d’activités qui y sont soumises.
– elle a prévu un nouveau relèvement de ces tarifs au 1er janvier 2025. À cette date :
● le premier de ces tarifs doit passer de 2,79 à 4,39 euros / MWh ;
● le second tarif doit passer de 4,39 à 5,49 euros / MWh.
2. Les tarifs réduits d’accise applicables à d’autres activités
D’autres activités bénéficient de tarifs réduits d’accise sur leurs consommations d’énergies.
C’est ainsi qu’une exonération totale d’accise s’applique aux carburants et combustibles consommés pour les besoins de la navigation intérieure, lorsque le déplacement est inhérent à la réalisation, par l’utilisateur de l’engin flottant, d’une activité économique ou à l’exercice par les autorités publiques d’activités non économiques, ainsi qu’aux carburants et combustibles destinés à l'avitaillement des bateaux navigant sur les cours d’eau ou parties de cours d’eau internationaux. Ces exonérations sont prévues par les articles L. 312-48 et L. 312-54 du CIBS.
L’article L. 312-54 précise que, pour ces tarifs réduits, l’article L. 312‑42, qui précise les conditions auxquelles le bénéfice des tarifs réduits constitutifs d’une aide d’État est subordonné, n’est applicable qu’au pétrole lampant et au gaz de pétrole liquéfié combustible. Pour les autres produits, ces tarifs réduits sont subordonnés, au titre du droit européen des aides d’État, au respect des conditions prévues, selon le cas, par le règlement général de minimis ou le règlement de minimis dans le secteur de la pêche et de l’aquaculture.
Une exonération totale d’accise est également prévue, par les articles L. 312-48 et L. 312-55 du CIBS, pour les produits taxables en tant que carburant ou combustible destinés à l’avitaillement des engins flottants armés pour un usage professionnel. L’article L. 312-55 précise que pour ce tarif réduit, l’article L. 312‑42, qui précise les conditions auxquelles le bénéfice des tarifs réduits constitutifs d’une aide d’État est subordonné, n’est applicable qu’au pétrole lampant et au gaz de pétrole liquéfié combustible, et que, pour les autres produits, il est subordonné, au titre du droit européen des aides d’État, au respect des conditions prévues, selon le cas, par le règlement général de minimis ou le règlement de minimis dans le secteur de la pêche et de l’aquaculture.
En outre, les produits consommés avant le 31 décembre 2026 par les moteurs des aéronefs et des navires pour les besoins de la construction, du développement, de la mise au point, des essais et de l’entretien de ces engins ou de leurs moteurs, bénéficient d’une exonération totale d’accise sur toutes leurs consommations d’énergies, sauf l’électricité. Cette exonération est prévue par les articles L. 312-64 et L. 312-69 du CIBS. Le bornage au 31 décembre 2026 a été introduit par la loi de finances pour 2023 ([365]). Cette dépense fiscale n’était, auparavant, pas bornée dans le temps.
Une exonération totale d’accise sur les gazoles et les essences consommés pour la propulsion des véhicules des services d’incendie et de secours est également prévue par les articles L. 312-78-1 et L. 312-78-2 du CIBS. Cette exonération a été introduite par l’article 50 de la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie.
C. La dÉduction pour Épargne de prÉcaution
La déduction pour épargne de précaution (DEP), prévue par l’article 73 du CGI, est un instrument fiscal de pilotage du résultat destiné à certains agriculteurs. Il leur permet de choisir, à certaines conditions, sur quel exercice certains revenus pourront être frappés par l’impôt.
Elle a été introduite, à compter du 1er janvier 2019, par l’article 51 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019. Son bornage, prévu par cette loi aux exercices clos jusqu’au 31 décembre 2022, a été repoussé par la loi de finances pour 2023 ([366]). Conformément à celle-ci, la DEP est applicable aux exercices clos jusqu’au 31 décembre 2025.
Elle a remplacé la dotation pour aléas (DPA) et la dotation pour investissement (DPI).
Elle peut être pratiquée par les exploitants individuels et les sociétés ou groupements agricoles qui relèvent de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles, sous réserve d’être imposés d’après un régime réel d’imposition.
1. Le plafonnement de la DEP
Cette déduction fait l’objet d’un double plafonnement :
● Un plafonnement en fonction du bénéfice imposable
Par exercice de douze mois, le montant de la déduction est plafonné à :
– 100 % du bénéfice imposable, s’il est inférieur à 28 612 euros ;
– à la somme de 28 612 euros, majorée de 30 % du bénéfice excédant cette limite, lorsqu’il est supérieur ou égal à 28 612 euros et inférieur à 52 985 euros ;
– à la somme de 35 924 euros, majorée de 20 % du bénéfice excédant 52 985 euros, lorsqu’il est supérieur ou égal à 52 985 euros et inférieur à 79 478 euros ;
– à la somme de 41 222 euros majorée de 10 % du bénéfice excédant 79 478 euros, lorsqu’il est supérieur ou égal à 79 478 euros et inférieur à 105 970 euros ;
– à la somme de 43 872 euros, lorsque le bénéfice imposable est supérieur ou égal à 105 970 euros.
Pour les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC) et les exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) qui n’ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, ces plafonds sont multipliés par le nombre des associés exploitants, dans la limite de quatre, sans pouvoir excéder le montant du bénéfice imposable.
● Un plafonnement en fonction du montant des déductions antérieurement pratiquées et non encore rapportées au résultat imposable
L’avantage constitué par la déduction du bénéfice a une contrepartie ; elle doit être rapportée au résultat d’un exercice ultérieur. Lorsqu’une somme déduite est rapportée au résultat de l’exploitation, elle est réintégrée extra-comptablement au résultat de l’exercice considéré et majore le bénéfice imposable de ce dernier. Du fait de cette réintégration extracomptable, la DEP n’entraîne pas une perte définitive de recettes pour l’État : il s’agit d’une perte de trésorerie, l’État la récupérant lors de la réintégration les recettes qu’il n’avait pas perçues au moment de la déduction.
La déduction est également plafonnée :
– Pour les exploitants individuels, à la différence positive entre la somme de 150 000 euros et le montant de déductions pratiquées et non encore rapportées au résultat ;
– Pour les GAEC et les EARL qui n’ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, à la différence positive entre la somme de 150 000 euros, multipliée par le nombre des associés exploitants, dans la limite de quatre, et le montant des déductions pratiquées et non encore rapportées au résultat.
Depuis le 1er janvier 2023 ([367]), l’ensemble de ces montants sont actualisés chaque année en fonction de la variation de l’indice des prix à la consommation hors tabac constatée au titre de l’année précédente et arrondis à l’euro le plus proche, comme le prévoit le 4 du I de l’article 73 du CGI. Ces montants réévalués s’appliquent pour la détermination du résultat imposable des exercices clos à compter du 1er janvier de l’année au titre de laquelle l’actualisation est réalisée. En application de ces dispositions, une actualisation a eu lieu le 3 juin 2023 ([368]) .
La déduction est pratiquée après application des abattements en faveur des jeunes agriculteurs ([369]), des entreprises implantées dans des bassins d’emploi à redynamiser ([370]), dans les zones de restructuration de la défense ([371]) et dans les zones franches d’activités outre-mer ([372]).
2. Les conditions de la DEP
Le bénéfice de la DEP est subordonné à certaines conditions.
a. L’inscription à un compte courant spécifique d’une partie de la déduction
La DEP s’exerce à la condition que, dans les six mois suivant la clôture de l’exercice et au plus tard à la date limite de dépôt de la déclaration des résultats se rapportant à l’exercice au titre duquel la déduction est pratiquée, l’exploitant ait inscrit à un compte courant ouvert auprès d’un établissement de crédit une somme comprise entre 50 % et 100 % du montant de la déduction. Ce compte courant retrace exclusivement les opérations relatives à la DEP.
L’épargne professionnelle ainsi constituée doit être inscrite à l’actif du bilan de l’exploitation.
À tout moment, le montant total de l’épargne professionnelle est au moins égal à 50 % du montant des déductions non encore rapportées. Elle ne peut jamais excéder le montant des déductions non encore rapportées.
En outre, l’exploitant peut, dans une certaine limite, substituer à l’épargne monétaire une épargne constituée des coûts engagés dans l’année pour acquérir ou produire des stocks de fourrage destinés à être consommés par les animaux de l’exploitation ou des stocks à rotation lente, c’est-à-dire dont le cycle de rotation est supérieur à un an. La condition d’inscription au compte courant est réputée satisfaite à concurrence des coûts qui ont été engagés à cette fin.
En cas de vente des stocks de fourrage ou des stocks de produits ou d’animaux, une quote-part du produit de la vente est inscrite au compte courant à hauteur d’un montant au moins égal à la différence entre 50 % du montant des déductions non encore rapportées et l’épargne professionnelle totale diminuée de la part des coûts d’acquisition ou de production du stock de fourrage ou du stock de produits ou d’animaux objet de la vente réputés affectés au compte courant. À défaut, la fraction de la déduction non encore rapportée qui excède le double de l’épargne professionnelle est rapportée au résultat de l’exercice.
b. L’utilisation des sommes
Les sommes déduites doivent être utilisées au cours des dix exercices qui suivent celui au cours duquel la déduction a été pratiquée pour faire face à des dépenses nécessitées par l’activité professionnelle. Ces sommes sont rapportées au résultat de l’exercice au cours duquel leur utilisation est intervenue ou au résultat de l’exercice suivant.
Lorsque ces sommes ne sont pas utilisées au cours des dix exercices qui suivent celui au titre duquel la déduction a été pratiquée, elles sont rapportées au résultat du dixième exercice suivant celui au titre duquel la déduction a été pratiquée.
Si la règle voulant que le montant total de l’épargne professionnelle soit au moins égal, à tout moment, à 50 % du montant des déductions non encore rapportées, n’est pas respectée, la fraction des déductions non encore rapportées qui excède le double de l’épargne professionnelle est rapportée au résultat de cet exercice, majorée d’un montant égal au produit de cette somme par le taux de l’intérêt de retard prévu à l’article 1727 du CGI, c’est-à-dire 0,20 % par mois.
c. L’articulation avec le régime des plus-values professionnelles
L'article 151 septies, qui prévoit un régime favorable pour les plus-values professionnelles des agriculteurs imposés à l’impôt sur le revenu, ne s’applique pas aux plus-values de cession de matériels roulants acquis lors d’un exercice au titre duquel la déduction a été rapportée et dans les deux ans précédant leur cession.
D. L’exonÉration des plus-values agricoles
L’article 151 septies du CGI prévoit un régime d’exonération des plus‑values professionnelles réalisées dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, à condition que celle-ci ait été exercée pendant au moins cinq ans. Les plus-values professionnelles sont celles réalisées à l’occasion de la cession d’un élément d’actif immobilisé par une entreprise, une société ou un groupement non soumis à l’impôt sur les sociétés. Selon le montant des recettes annuelles, la plus-value nette dégagée au titre de la période fiscale considérée bénéficie d'une exonération totale ou dégressive.
Plus précisément, les plus-values sont exonérées pour :
1° La totalité de leur montant lorsque les recettes annuelles sont inférieures ou égales à :
a) 250 000 euros s’il s’agit d’entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, à l’exclusion de la location directe ou indirecte de locaux d’habitation meublés ou destinés à être loués meublés, ou s’il s’agit d’entreprises exerçant une activité agricole ;
b) 90 000 euros s’il s'agit d’autres entreprises ou de titulaires de bénéfices non commerciaux ;
2° Une partie de leur montant lorsque les recettes sont supérieures à 250 000 euros et inférieures à 350 000 euros pour les entreprises mentionnées ci-dessus au a du 1° et, lorsque les recettes sont supérieures à 90 000 euros et inférieures à 126 000 euros, pour les entreprises mentionnées au b du 1°. Pour l’application de ces dispositions, le montant exonéré de la plus-value est déterminé en lui appliquant :
i) Pour les entreprises mentionnées au a du 1°, un taux égal au rapport entre, au numérateur, la différence entre 350 000 euros et le montant des recettes et, au dénominateur, le montant de 100 000 euros ;
ii) Pour les entreprises mentionnées au b du 1°, un taux égal au rapport entre, au numérateur, la différence entre 126 000 euros et le montant des recettes et, au dénominateur, le montant de 36 000 euros.
Lorsque l’activité de l’entreprise se rattache aux deux catégories définies aux a et b du 1°, l’exonération totale n’est applicable que si le montant global des recettes est inférieur ou égal à 250 000 euros et si, au sein de ce montant, le montant des recettes afférentes aux activités définies au b du 1° est inférieur ou égal à 90 000 euros.
Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, si le montant global des recettes est inférieur à 350 000 euros et si, au sein de ce montant, le montant des recettes afférentes aux activités définies au b du 1° est inférieur à 126 000 euros, le montant exonéré de la plus-value est déterminé en appliquant le moins élevé des deux taux qui aurait été déterminé dans les conditions fixées au 2° si l’entreprise avait réalisé le montant global de ses recettes dans les catégories visées au a du 1° ou si l’entreprise n’avait réalisé que des activités visées au b du 1°.
L’exonération vaut pour les plus-values nettes, c’est-à-dire après imputation des moins-values de même nature.
Toutefois, dès lors que les biens entrent dans le champ d’application du A de l’article 1594-0 G du CGI, la plus-value réalisée à l’occasion de la cession de tels biens n’entre pas dans la détermination de la plus-value nette exonérée. Il s’agit des acquisitions d’immeubles réalisées par une personne assujettie lorsque l’acte d’acquisition contient l’engagement, pris par l’acquéreur, d’effectuer dans un délai de quatre ans les travaux conduisant à la production d’un immeuble neuf, c’est‑à‑dire les terrains à bâtir.
De plus, en application de l’article 38 sexdecies GA de l’annexe III du CGI, les plus-values réalisées lors de la cession de terres ou de bâtiments d’exploitation ne sont pas retenues dans la base de l’impôt pour la fraction acquise avant le 1er janvier de la première année au titre de laquelle le montant des recettes a dépassé la limite du forfait. Cette exonération partielle s’applique uniquement aux terres et aux bâtiments d’exploitation qui, au moment de leur aliénation, figurent au bilan de l’exploitation soumise à un régime réel d'imposition. Elle est subordonnée aux conditions suivantes :
– l’activité agricole doit avoir été exercée à titre principal pendant au moins cinq ans ;
– le bien cédé ne doit pas constituer un terrain à bâtir au sens du A de l’article 1594-0 G du CGI.
Par ailleurs, bien que l’article 39 sexdecies GA de l’annexe III au CGI ne vise que les plus-values réalisées à l’occasion de la cession de terres et de bâtiments, il est admis que le bénéfice de l’exonération partielle s'applique également aux plus-values de cession afférentes aux améliorations foncières permanentes ainsi qu’aux installations qui présentent un caractère immobilier et en constituent un élément du prix de revient.
Lorsque l’une des deux conditions n’est pas remplie, la fraction de plus‑value acquise avant le 1er janvier de l’année au titre de laquelle les recettes de l’agriculteur ont franchi pour la première fois la limite du forfait est imposée selon le régime des plus-values des particuliers.
Pour l’application de ce dispositif d’exonération, la cession répond à une définition large et correspond, en règle générale, à toute opération aboutissant à la sortie de l’actif de l’élément considéré. La cession revêt ainsi le plus souvent la forme d’une vente, mais peut consister également en d’autres opérations (apport en société, échange, renonciation contre indemnité à un droit d’exclusivité, partage, donation, retrait pur et simple de l’actif, cessation d’activité, etc.). La cession peut aussi résulter d’événements tels que l’expropriation, l’expulsion, l’éviction ou la réquisition ([373]).
E. le rÉgime micro-ba
Un régime d’imposition dit « micro-BA » (soit « micro-bénéfices agricoles ») s’applique aux très petits exploitants agricoles dont la moyenne des recettes des trois dernières années ne dépasse pas 91 900 euros. Ce dispositif est prévu par les articles 64 bis et 69 du CGI.
Pour ces exploitants, le bénéfice imposable, avant prise en compte des plus‑values ou des moins-values provenant de la cession des biens affectés à l’exploitation, est égal à la moyenne des recettes hors taxes de l’année d'imposition et des deux années précédentes, diminuée d'un abattement de 87 %. Cet abattement ne peut être inférieur à 305 euros.
Les recettes à retenir s’entendent des sommes encaissées au cours de l’année civile dans le cadre de l’exploitation, augmentées de la valeur des produits prélevés dans l’exploitation et alloués soit au personnel salarié, soit au propriétaire du fonds en paiement du fermage, à l’exclusion de celles encaissées au titre des cessions portant sur les éléments de l’actif immobilisé, des remboursements de charges engagées dans le cadre de l’entraide agricole, des indemnités compensatoires de handicap naturel, des subventions et primes d’équipement et des redevances ayant leur origine dans le droit de propriété.
En cas de création d’activité, le montant des recettes à prendre en compte est égal, pour l’année de la création, aux recettes de ladite année et, pour l’année suivante, à la moyenne des recettes de l’année d'imposition et de l’année précédente.
L’exploitant dont la moyenne triennale des recettes dépasse ce seuil est imposé d’après un régime réel.
Le seuil de 91 900 euros est actualisé tous les trois ans dans la même proportion que l’évolution triennale de la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu. En application de cette disposition, la dernière revalorisation est intervenue le 3 juin 2023 ([374]) ; le seuil était auparavant de 85 800 euros.
F. l’exonÉration de malus automobiles pour les services chargÉs de la lutte contre les incendies
La première immatriculation des véhicules à moteur donne lieu à la perception de taxes, dont une taxe sur les émissions de dioxyde de carbone (CO2), également dite « malus sur les émissions de CO2 » ou encore « malus écologique », et d’une taxe sur la masse en ordre de marche, dite « malus poids ».
L’article 48 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a prévu une exonération de ces taxes pour les véhicules exclusivement affectés aux besoins des services d’incendie et de secours pour la réalisation des missions de protection des personnes, des animaux, des biens et de l'environnement contre les accidents, les sinistres et les catastrophes, et les associations agréées de protection civile, pour la réalisation de leurs missions. Ces exonérations sont prévues aux 1° et 2° des articles L. 421-70-1 et L. 421‑80-1 du CIBS.
La loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie a prévu une exonération de ces deux taxes pour les véhicules exclusivement affectés aux besoins des services déconcentrés de l’État chargés de la forêt, de l’Office national des forêts, des collectivités territoriales et de leurs groupements, des associations syndicales de propriétaires forestiers et des réserves communales de sécurité civile, pour leurs missions opérationnelles de prévention, de surveillance et de lutte contre les incendies. Cette exonération est prévue aux 3° des articles L. 421-70-1 et L. 421‑80-1 du CIBS.
II. le dispositif proposÉ
A. Un Étalement de la disparition du tarif rÉduit d’accise du GNR sur six ans
Les B (alinéas 27 à 34) et F (alinéas 44 à 51) du II du présent article prévoient un relèvement progressif de l’accise sur le gazole non routier (GNR) sur une durée de six années, jusqu’au 1er janvier 2030.
Le B du II (alinéas 27 à 34) modifie l’article L. 312-35 du CIBS afin de prévoir que le tarif d’accise du GNR, qui est aujourd’hui de 18,82 euros / MWh, est relevé, au 1er janvier de chaque année, de 5,99 euros, avant d’être supprimé au 1er janvier 2030. Le calendrier proposé pour le relèvement de ce tarif est donc le suivant :
– le 1er janvier 2024, 24,81 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2025, 30,80 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2026, 36,79 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2027, 42,78 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2028, 48,77 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2029, 54,76 euros / MWh.
À partir du 1er janvier 2030, le tarif réduit d’accise pour le GNR est supprimé. Le tarif d’accise applicable à compter de cette date est donc le tarif normal, de 59,40 euros / MWh.
Le F (alinéas 44 à 51) du II procède, à l’article L. 312-60 du CIBS, au relèvement, sur la même période de six ans, du tarif d’accise spécifique dont bénéficie le secteur agricole sur ses consommations de GNR, sans prévoir sa suppression. Ce tarif est relevé de 2,85 euros / MWh au 1er janvier de chaque année jusqu’en 2030, selon le calendrier suivant :
– le 1er janvier 2024, 6,71 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2025, 9,56 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2026, 12,41 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2027, 15,26 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2028, 18,11 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2029, 20,96 euros / MWh ;
– le 1er janvier 2030, 23,81 euros / MWh.
Le N du II (alinéas 69 à 78) du présent article précise les dispositions relatives à la procédure de remboursement dont bénéficie le secteur agricole sur ses achats de GNR.
Deux nouveaux articles L. 312-104-1 et L. 312-104-1 sont insérés dans le CIBS. Ils prévoient qu’un décret détermine les situations dans lesquelles la personne qui acquiert un produit pour lequel l’accise devenue exigible a été constatée à un tarif supérieur à celui dont relève l’usage auquel elle destine ce produit peut bénéficier d’une avance sur le montant du remboursement dont elle sera susceptible de bénéficier.
Il est prévu que ce décret détermine :
– les produits, usages et catégories de redevables concernés ;
– la date à laquelle l’avance est sollicitée ou versée à l’initiative de l’administration, au plus tôt le 1er janvier de l’année d’exigibilité du remboursement, ainsi que les modalités de sollicitation et de versement ;
– la date à laquelle l’avance est régularisée, au plus tard à la fin de l’année civile qui suit celle de l’exigibilité du remboursement, et les modalités de cette régularisation ;
– le nombre des avances, qui ne peut excéder trois par année civile ;
– les règles de détermination du montant des avances.
B. la suppression de tarifs rÉduits d’accise pour certaines activitÉs Économiques
Plusieurs dispositions du présent article abrogent des tarifs réduits d’accise applicables aux consommations d’énergies de certaines activités économiques. Elles procèdent également à des modifications rédactionnelles et de conséquence qui leur sont liées.
Le a) du 2° du J du II (alinéas 59 et 60) supprime à compter du 1er janvier 2024, à l’article L. 312-75 du CIBS, pour les activités relevant du SEQE-IF ([375]), les tarifs réduits d’accise suivants :
– S’agissant des installations intensives en énergie soumises au SEQE‑IF :
● Le tarif réduit d’accise pour les fiouls lourds, égal à 1,665 euro / MWh ;
● Le tarif réduit d’accise pour les fiouls domestiques, égal à 5,66 euros / MWh ;
● Le tarif réduit d’accise pour les pétroles lampants, égal à 5,822 euros / MWh ;
● Le tarif réduit d’accise pour les gaz de pétrole liquéfiés combustible, égal à 0 euro / MWh, soit une exonération totale d’accise ;
– S’agissant des installations intensives en énergie exposées à la concurrence internationale non soumises au SEQE-IF mais relevant d’activités soumises au SEQE-IF :
● Le tarif réduit d’accise pour les charbons, égal à 2,29 euros / MWh ;
● Le tarif réduit d’accise pour les fiouls lourds, égal à 1,971 euro / MWh ;
● Le tarif réduit d’accise pour les fiouls domestiques, égal à 5,66 euros / MWh ;
● Le tarif réduit d’accise pour les pétroles lampants, égal à 5,822 euros / MWh ;
● Le tarif réduit d’accise pour les gaz de pétrole liquéfiés combustible, égal à 0 euro / MWh, soit une exonération totale d’accise.
Le 1° du O du II (alinéa 80) supprime les articles L. 312-78-1 et L. 312‑78‑2 du CIBS, qui prévoient une exonération totale d’accise sur les gazoles et les essences consommés pour la propulsion des véhicules des services d’incendie et de secours. Cette exonération a été introduite par l’article 50 de la loi n° 2023‑580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie.
Le 1° du K (alinéa 62) et le 1° du L (alinéa 67) du II procèdent à des modifications de conséquence aux articles L. 312-76 et L. 312-77 du CIBS.
Le 2° du III (alinéa 85) procède à des modifications de conséquence à l’article 65 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023, qui avait prévu un rehaussement en deux étapes du tarif réduit d’accise applicable aux consommations de charbons par les installations intensives en énergie exposées à la concurrence internationale non soumises au SEQE mais relevant d’activités soumises au SEQE. Ce tarif, prévu par l’article L. 312-75 du CIBS, devait être porté à 3,89 euros / MWh le 1er janvier 2024 puis à 5,49 euros / MWh le 1er janvier 2025.
Le G (alinéa 52), le H (alinéa 53) et le 3° du O (alinéa 82) du II procèdent à des modifications rédactionnelles relatives à la suppression, au 1er janvier 2027, de l’exonération d’accise pour les consommations d’énergies, sauf l’électricité, par les moteurs des aéronefs et des navires pour les besoins de la construction, du développement, de la mise au point, des essais et de l’entretien de ces engins ou de leurs moteurs, prévue par les articles L. 312-64 et L. 312-69 du CIBS.
Le b) du 2° du J (alinéa 61), le M (alinéa 68) et le 3° du O (alinéa 82) du II du présent article procèdent à des modifications rédactionnelles relatives à la suppression, au 1er janvier 2027, de l’exonération d’accise pour les charbons utilisés par les installations de valorisation de la biomasse exploitées par des entreprises dont le niveau d’intensité énergétique, apprécié sur les seules consommations pour les besoins de valorisation de la biomasse, est au moins égal à 3 % en valeur de production, et qui sont soumises au SEQE ou à un accord conclu avec l’autorité administrative permettant d’atteindre des objectifs équivalents en matière de protection de l’environnement ou d’efficacité énergétique. Cette exonération est prévue par l’article L. 312-78 du CIBS.
Le I (alinéas 54 à 56), le 1° du J (alinéa 58), le 2° du K (alinéa 64) et le 2° du L (alinéa 67) du II prévoient des modifications rédactionnelles appelées par la révision de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil. En effet, la directive (UE) 2023/959 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 ([376]) a étendu le SEQE à l’ensemble des consommations, au-delà de l’industrie lourde et du secteur aérien. La référence au SEQE est ainsi remplacée, aux articles L. 312‑74, L. 312-75, L. 312‑76 et L. 312‑77 du CIBS, par une référence au système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre dans l’UE pour les installations fixes, ou « SEQE-IF ».
Les A (alinéas 25 et 26), C (alinéas 35 et 36), D (alinéas 37 à 41) et E (alinéas 42 et 43) du II procèdent à des aménagements aux articles L. 133-4, L. 312‑42, L. 312‑54 et L. 312-55 du CIBS appelés par la révision récente du cadre européen en matière d’aides d’État ([377]).
C. Le réhaussement des plafonds de la dÉduction pour Épargne de prÉcaution
Le A du I (alinéas 2 à 7) relève, à l’article 73 du CGI, les plafonds en fonction du bénéfice imposable applicables à la déduction pour épargne de précaution des agriculteurs.
Par exercice de douze mois, le montant de la déduction serait plafonné à :
– 100 % du bénéfice imposable, s’il est inférieur à 32 608 euros (au lieu de 28 612 euros) ;
– à la somme de 32 608 (au lieu de 28 612 euros), majorée de 30 % du bénéfice excédant cette limite, lorsqu’il est supérieur ou égal à 32 608 euros et inférieur à 60 385 euros (au lieu de 52 985 euros) ;
– à la somme de 40 942 euros (au lieu de 35 924 euros), majorée de 20 % du bénéfice excédant 60 385 euros (au lieu de 52 985 euros), lorsqu’il est supérieur ou égal à 60 385 euros et inférieur à 90 579 (au lieu de 79 478 euros) ;
– à la somme de 46 979 euros (au lieu de 41 222 euros), majorée de 10 % du bénéfice excédant 90 579 euros (au lieu de 79 478 euros), lorsqu’il est supérieur ou égal à 90 579 euros et inférieur à 120 771 euros (au lieu de 105 970 euros) ;
– à la somme de 50 000 euros (au lieu de 43 872 euros), lorsque le bénéfice imposable est supérieur ou égal à 120 771 euros (au lieu de 105 970).
La disposition prévoyant que, pour les groupements agricoles d’exploitation en commun (GAEC) et les exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) qui n’ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, ces plafonds soient multipliés par le nombre des associés exploitants, dans la limite de quatre, sans pouvoir excéder le montant du bénéfice imposable, demeurerait inchangée.
Le A du V (alinéa 87) précise que ces dispositions s’appliquent à l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2024 et des années suivantes.
Le IV (alinéa 86) prévoit que les dispositions du 4 du I de l’article 73 du CGI, qui prévoient l’indexation des seuils de la DEP en fonction de la variation de l’indice des prix à la consommation, ne s’appliquent pas à l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2024.
D. le réhaussement des seuils de l’exonÉration des plus‑values agricoles
Le B du I (alinéas 8 à 22) rehausse les plafonds applicables à l’exonération, totale ou partielle, des plus-values agricoles.
Le plafond de recettes permettant de bénéficier de l’exonération totale est porté de 250 000 à 350 000 euros pour les entreprises exerçant une activité agricole.
De plus, pour ces entreprises, la possibilité de bénéficier d’une exonération partielle est maintenue, avec un plafond rehaussé, porté de 350 000 à 450 000 euros. Le taux d’exonération applicable est égal au rapport entre, au numérateur, la différence entre 450 000 euros et le montant des recettes et, au dénominateur, le montant de 100 000 euros.
Les entreprises exerçant une activité agricole sont distinguées des entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, et considérées comme une catégorie séparée.
Les règles relatives aux conditions de l’exonération totale ou partielle lorsque l’activité se rattache à plus d’une catégorie sont modifiées de la manière suivante :
– l’exonération totale n’est applicable que si le montant global des recettes est inférieur ou égal au plus élevé des plafonds mentionnés au 1° du II de l’article 151 septies du CGI, à raison des activités exercées et si le montant des recettes afférentes à chacune de ces activités est inférieur ou égal au plafond afférent à chacune d’elles, mentionné au même 1° du II de l’article 151 septies du CGI ;
– lorsque ces conditions ne sont pas remplies, si le montant global des recettes est inférieur au plus élevé des plafonds à raison des activités exercées et si le montant des recettes afférentes à chacune de ces activités est inférieur au plafond afférent à chacune d’elles mentionné au 2° du II de l’article 151 septies du CGI, le montant exonéré de la plus-value est déterminé en appliquant le moins élevé des taux entre celui qui aurait été déterminé, selon les conditions fixées au même 2° du II de l’article 151 septies, si l’entreprise avait réalisé la totalité de ses recettes à raison de l’activité pour laquelle le plafond mentionné à ce 2° est le plus élevé et celui ou ceux déterminés dans les conditions fixées au même 2° si l’entreprise avait réalisé exclusivement chacune des autres activités exercées.
Le B du V (alinéa 88) précise que l’ensemble de ces nouvelles dispositions s’appliquent aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2024.
E. le relÈvement du plafond du rÉgime micro-ba
Le C du I (alinéa 23) relève, à l’article 69 du CGI, de 91 900 à 120 000 euros le plafond de la moyenne des recettes des trois dernières années, en deçà de laquelle les exploitants agricoles peuvent bénéficier du régime « micro‑BA ».
Le A du V (alinéa 87) précise que ces dispositions s’appliquent à l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2024 et des années suivantes.
F. la suppresSion de l’exonÉration de malus automobiles pour certains services et personnes chargÉs de la lutte contre les incendies
Le 2° du O du II (alinéa 81) supprime, à compter du 1er janvier 2024, les 3° des articles L. 421-70-1 et L. 421‑80‑1 du CIBS, qui prévoient une exonération de malus sur les émissions de CO2 et de malus poids pour les véhicules exclusivement affectés aux besoins des services déconcentrés de l’État chargés de la forêt, de l’Office national des forêts, des collectivités territoriales et de leurs groupements, des associations syndicales de propriétaires forestiers et des réserves communales de sécurité civile, pour leurs missions opérationnelles de prévention, de surveillance et de lutte contre les incendies.
Cette exonération a été introduite par la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie, à compter du 12 juillet 2023.
III. l’impact Économique et financier
S’agissant de l’étalement sur six ans de la suppression du tarif réduit d’accise sur le GNR, l’impact précis sur les recettes dépendra du volume des consommations. En 2022, le coût, pour les finances publiques, du report d’un an de cette suppression avait été évalué à 870 millions d’euros – on peut ainsi partir du principe d’un gain équivalent pour les finances publiques en 2024 dans l’hypothèse de la suppression du GNR à compter du 1er janvier 2024. La hausse de tarif prévue s’étalant désormais, de manière régulière, sur six années, on peut donc avancer un coût de :
870 000 000 * 6 / 2 = 2,61 milliards d’euros.
Eu égard à la suppression intégrale du tarif préférentiel inscrite dans le droit en vigueur, cette mesure bénéficiera à la compétitivité des secteurs concernés, à savoir, au premier chef, les bâtiments et travaux publics et l’agriculture.
S’agissant des autres mesures prévues par le présent article, les Voies et moyens annexées au PLF pour 2023 évaluaient à :
● 119 millions d’euros, en 2023, le coût de la déduction pour épargne de précaution ;
● 7 millions d’euros, en 2023, le coût du tarif réduit d’accise pour les produits énergétiques, hors gaz naturels et charbons, utilisés dans les installations grandes consommatrices d’énergie et soumises au SEQE ;
● à un coût négligeable, le tarif réduit pour les produits énergétiques, hors gaz naturels et charbons, utilisés dans les installations grandes consommatrices d’énergie exerçant une activité considérée comme fortement exposée à la concurrence internationale ;
● à un coût nul, le tarif réduit pour les charbons consommés dans les installations grandes consommatrices d'énergie exerçant une activité considérée comme fortement exposée à la concurrence internationale.
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Article 13
Renforcement des incitations fiscales à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports
Résumé du dispositif et effets principaux
Le présent article a pour objet de renforcer les incitations fiscales relatives à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports. À cette fin,
– il augmente les taux cibles de la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports (TIRUERT) – de 0,6 % pour les essences, de 0,4 % pour les gazoles et de 0,5 % pour les carburéacteurs, pour 2025 ;
– il procède à une nette augmentation du tarif, à compter de 2025, pour la filière des carburéacteurs ;
– il modifie l’incitation à utiliser l’énergie issue de certaines matières premières à partir de 2025 :
▪ en relevant de 0,1 %, pour les essences, le seuil au-delà duquel les quantités d’énergie issues des égouts pauvres issus des plantes sucrières et obtenus après deux extractions sucrières et des amidons résiduels issus des plantes riches en amidon, en fin de processus de transformation de l’amidon, ne sont pas prises en compte dans le calcul du pourcentage cible d’énergies renouvelables de la TIRUERT ;
▪ en relevant de 0,2 % pour les essences et de 0,1 % pour les gazoles, le seuil au-delà duquel les quantités d’énergie issues des graisses et huiles usagées ne sont pas prises en compte dans le calcul du pourcentage cible d’énergies renouvelables de la TIRUERT. Il relève également, pour les essences, la limite dans laquelle les graisses et huiles usagées font l’objet d’un double comptage ;
▪ en relevant de 0,5 % pour les essences et de 0,2 % pour les gazoles, la fraction de l’avantage fiscal réservée aux matières premières avancées (paille, fumier et boues d’épuration, bagasse, marcs de raison, certaines algues…) ;
▪ en supprimant, pour la filière des carburéacteurs, le double comptage des matières premières avancées et des graisses et huiles usagées ;
– il modifie également les modalités de comptabilisation des égouts pauvres dès le 1er janvier 2024, en prévoyant une prise en compte à hauteur de 60 % de leur contenu énergétique pour l’application du seuil spécifique aux égouts pauvres, et à hauteur de 40 % pour l’application du seuil des cultures destinées à l’alimentation humaine et animale. À compter du 1er janvier 2025, cette répartition serait fixée par arrêté.
La TIRUERT étant une taxe comportementale, l’impact budgétaire de ces mesures est faible.
Dernières modifications législatives intervenues
L’article 192 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a instauré la taxe relative à l’incorporation des biocarburants (TIRIB), issue de l’évolution de la composante « biocarburants » de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).
L’article 212 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 a relevé les pourcentages cibles d’incorporation de produits issus de sources renouvelables dans les essences et gazoles, le seuil au-delà duquel l’énergie issue des égouts pauvres issus de plantes sucrières n’est pas prise en compte dans le calcul de ces pourcentages, et celui au-delà duquel les quantités d’énergie issues des graisses et huiles usagées ne font plus l’objet d’un double comptage pour les essences.
L’article 213 de la même loi a renforcé l’exigence de traçabilité pour les produits issus de sources renouvelables.
L’article 58 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 a procédé à une nouvelle hausse des objectifs d’incorporation, élargi l’assiette de la taxe aux carburéacteurs, élargi la liste des types d’énergies éligibles dans le calcul de la TIRIB à l’électricité d’origine renouvelable à compter de 2022 et à l’hydrogène produit par électrolyse à partir d’électricité d’origine renouvelable et utilisé pour le raffinage de produits pétroliers à compter de 2023, réservé une fraction de l’avantage fiscal aux matières premières avancées et introduit un quadruple comptage de l’électricité d’origine renouvelable et un double comptage de l’hydrogène, notamment. Il a également renommé la TIRIB « taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports » (TIRUERT) à compter de 2022.
L’article 95 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 a augmenté les taux cibles d’incorporation de biocarburants de 0,3 % pour les essences et de 0,2 % pour les gazoles et a renforcé l’incitation à utiliser l’énergie issue des graisses et huiles usagées et des matières premières avancées. Il a également prévu la prise en compte de toutes les quantités d’hydrogène d’origine renouvelable, y compris celles non produites par électrolyse, et élargi les usages éligibles de cet hydrogène à l’alimentation des piles des moteurs électriques servant à la propulsion des véhicules, à la production de produits inclus dans l’assiette de la taxe ou à l’hydrotraitement de la biomasse. Toutes ces mesures s’appliquent à partir du 1er janvier 2023.
L’article 28 de la même loi a prévu, dès le 1er janvier 2022, l’absence de prise en compte, pour le calcul des objectifs d’incorporation des gazoles, des quantités d’énergie issues du soja, comme c’était déjà le cas pour les essences.
L’ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021 portant partie législative du code des impositions sur les biens et services et transposant diverses normes du droit de l’Union européenne a procédé à des modifications de coordination rendues nécessaires par la recodification des dispositions du code des douanes relatives à la taxation des énergies.
L’article 9 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 a rectifié des erreurs matérielles issues de cette recodification.
L’article 67 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a relevé les tarifs de la TIRUERT ainsi que ses pourcentages cibles. Elle a également renforcé l’incitation à l’incorporation des égouts pauvres, des graisses et huiles usagées et des matières premières avancées, et introduit la prise en compte de l’hydrogène bas-carbone produit par électrolyse et utilisé à certaines fins.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté, avec un avis de sagesse du rapporteur général, un amendement de M. Jean-Louis Fugit, rapporteur pour avis au nom de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, prévoyant un double comptage des quantités d’énergie issues de l’hydrogène bas-carbone dans le calcul des cibles de la TIRUERT.
La commission a adopté cet article ainsi modifié. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. L’État du droit
1. Qu’est-ce qu’un biocarburant ?
Les biocarburants et biocombustibles couvrent l’ensemble des carburants et combustibles liquides, solides ou gazeux produits à partir de la biomasse et destinés à une valorisation énergétique dans les transports et le chauffage. Ils produisent moins de gaz à effet de serre, et en particulier moins de dioxyde de carbone (CO2), que les carburants fossiles, parce que la quantité de CO2 dégagée lors de leur combustion est équivalente à celle capturée pendant la croissance de la matière première dont ils dérivent.
Les biocarburants sont utilisés sous la forme d’additifs ou de compléments aux carburants fossiles. On distingue trois générations de biocarburants selon l’origine de la biomasse utilisée et les procédés de transformation associés :
– la première génération de biocarburants correspond à la fabrication directe à partir des productions agricoles : elle est dite « en concurrence alimentaire » ;
– la deuxième génération de biocarburants – dite « avancée » – est issue de source ligno-cellulosique – bois, feuilles, paille – à partir de processus techniques plus avancés. Elle permet de répondre aux critiques adressées à la première génération en ce qu’elle dissocie les cultures alimentaires et énergétiques, puisqu’elle est fondée sur la production de végétaux non comestibles. Elle possède un meilleur bilan environnemental que la première génération en matière de consommation en eau et en engrais ; elle s’appuie sur des techniques d’extraction plus efficaces ;
– la troisième génération de biocarburants est liée à la production d’hydrogène par des micro-organismes, ce qui permet de s’affranchir de la contrainte du sol.
Seule la première génération de biocarburants a atteint le stade industriel ; la deuxième repose sur des technologies matures, dont l’industrialisation est en cours, quand la troisième n’est encore qu’au stade de la recherche.
Les biocarburants se partagent en deux filières, correspondant à deux types de moteurs à explosion :
– la filière de l’alcool pour les moteurs à allumage commandé, qui fonctionnent à l’essence ;
– et la filière de l’huile pour les moteurs diesel à allumage par compression, fonctionnant au gazole.
La filière de l’alcool comprend le bioéthanol, la bioessence de synthèse et l’ETBE (éthyl tert-butyl ether). Le bioéthanol est obtenu par la fermentation du sucre extrait des plantes, soit directement à partir de la betterave sucrière ou de la canne à sucre, soit indirectement par transformation de l’amidon contenu dans les graines des céréales. L’alcool issu de la fermentation est ensuite distillé et déshydraté pour obtenir du bioéthanol. L’ETBE est quant à lui le produit d’une réaction chimique entre l’éthanol et l’isobutène, lui-même dérivé du raffinage pétrolier.
Contrairement au bioéthanol qui est d’origine 100 % renouvelable, l’ETBE est un composé d’origine partiellement renouvelable. Dans la comptabilisation des quantités de biocarburants incorporés, seule la part énergétique d’origine renouvelable, soit 37 % pour l’ETBE, est prise en compte.
L’incorporation de bioéthanol ou d’ETBE dans l’essence présente l’avantage d’augmenter l’indice d’octane du carburant, ce qui limite le risque d’usure du moteur lié à l’autoallumage.
La bioessence de synthèse est obtenue à l’issue de processus industriels lourds opérés dans des raffineries et des bio-raffineries, notamment par hydrotraitement ([378]) d’huiles. Dans ce cas, elle est dénommée « huile végétale hydrotraitée de type essence » (HVHTE).
Source : ministère de la transition écologique.
La filière de l’huile comprend différents produits fabriqués à partir d’huiles issues de plantes oléagineuses (colza, tournesol, palme, soja) ou de graisses animales. Les huiles, à la suite d’une transestérification – c’est-à-dire la réaction qui consiste à faire réagir un corps gras, en l’espèce les triglycérides contenus dans les huiles ou les graisses, avec un alcool, soit de l’éthanol ou du méthanol – sont transformées en ester éthylique ou méthylique d’acide gras (EMAG). Lors de la production des EMAG, on obtient également de la glycérine, coproduit notamment valorisé dans les domaines pharmaceutique et cosmétique. Les EMAG regroupent les esters méthyliques d’huile végétale (EMHV), les esters méthyliques d’huile animale (EMHA) et les esters méthyliques d’huile usagée (EMHU).
Il faut y ajouter l’huile végétale hydrotraitée type gazole (HVHTG), qui est un biogazole de synthèse produit à partir d’un traitement de l’huile végétale à l’hydrogène.
Source : ministère de la transition écologique.
En France, en 2022, environ 4,8 milliards de litres de biocarburants ont été incorporés dans le gazole et l’essence.
Le diagramme suivant retrace la répartition de ce volume par catégorie de biocarburant.
Source : ministère de la transition écologique. Les aires de coloris bleu correspondent à des biogazoles, celle de coloris gris à des bioessences.
2. La taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports (TIRUERT)
Destinée, à l’origine, à compenser pour les agriculteurs les effets du gel des terres issu de la réforme de la politique agricole commune de 1992, la politique de soutien aux biocarburants lancée en 2005 a cherché, au fil du temps, à satisfaire deux autres objectifs :
– diminuer la facture énergétique grâce au développement d’une énergie renouvelable d’une part ;
– contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’autre part.
La politique française d’incorporation était alors insérée dans un cadre européen composé de deux directives, l’une concernant la cible à atteindre, à l’échéance de 2020, de 10 % d’énergie renouvelable dans la consommation totale d’énergie dans les transports ([379]), l’autre définissant la qualité des carburants ([380]).
Du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2018, l’article 266 quindecies du code des douanes soumettait au supplément de taxe générale sur les activités polluantes (TGAP-b) les opérateurs mettant à la consommation des carburants contenant une proportion de biocarburants inférieure à un objectif d’incorporation.
Cette taxe a été remaniée par la loi de finances pour 2019 ([381]) ; son intitulé a été à cette occasion rendu plus explicite, sous le terme de « taxe incitative relative à l’incorporation des biocarburants » (TIRIB).
Également codifiée à l’article 266 quindecies du code des douanes, cette taxe assujettit les opérateurs qui mettent à la consommation des carburants ([382]) contenant une proportion de biocarburants inférieure à un objectif évolutif d’incorporation.
Elle est assise sur le volume total, respectivement, des essences, des gazoles et, depuis le 1er janvier 2022, des carburéacteurs pour lesquels elle est devenue exigible au cours de l’année civile ([383]). L’inclusion de la filière des carburéacteurs dans l’assiette de cette taxe a été opérée en loi de finances pour 2021. Les carburéacteurs sont des combustibles pour moteurs à réaction, utilisés dans l’aviation, et autrement appelés « kérosène ».
Les obligations d’incorporation des biocarburants sont définies en pourcentage de pouvoir calorifique inférieur (PCI) qui est l’énergie thermique libérée par la combustion d’un litre de carburant. Le PCI des biocarburants est inférieur à celui des hydrocarbures fossiles dans lesquels ils sont incorporés, dans des proportions de 34 % pour l’éthanol par rapport à l’essence et de 8 % pour le biodiesel par rapport au gazole. Ainsi, 100 litres d’éthanol ont le même pouvoir calorifique que 65,7 litres d’essence. En conséquence, à plein de carburant identique, l’autonomie d’un véhicule diminue quand le pourcentage d’incorporation de biocarburants augmente.
Le montant de la taxe est calculé séparément pour chaque filière (essences, gazoles et, depuis le 1er janvier 2022, carburéacteurs). Ce montant est égal au produit de l’assiette et du tarif mentionné dans le tableau ci-dessous, auquel est appliqué un coefficient ; ce coefficient correspond à la différence entre le pourcentage national cible d’incorporation d’énergie renouvelable dans les transports – déterminé par le même tableau – et la proportion d’énergie renouvelable contenue dans les produits inclus dans l’assiette.
Conformément à sa nature évolutive – afin de respecter les objectifs d’incorporation à horizon 2030 déterminés au niveau européen – les tarifs et les objectifs nationaux d’incorporation attachés à cette taxe sont régulièrement revus. Leurs montants tels que prévus par le droit en vigueur figurent dans le tableau suivant.
tarifs de la taxe et pourcentages cibles d’incorporation
d’Énergie renouvelable dans les transports
Produits |
Tarif (€/hL) |
Pourcentage cible |
||
2023 |
2024 |
2023 |
2024 |
|
Essences |
104 |
140 |
9,5 % |
9,9 % |
Gazoles |
104 |
140 |
8,6 % |
9,0 % |
Carburéacteurs |
125 |
168 |
1 % |
1,5 % |
Source : IV de l’article 266 quindecies du code des douanes dans ses versions successives.
Si la proportion d’énergie renouvelable incorporée est supérieure ou égale au pourcentage national cible d’incorporation d’énergie renouvelable dans les transports, la taxe est nulle ; économiquement, cette taxe environnementale est incitative, l’objectif étant que son produit soit nul.
L’élargissement des types d’énergies éligibles en LFI 2021, 2022 et 2023
au titre de la TIRUERT
La loi de finances pour 2021 a introduit des modalités de calcul nouvelles de la proportion d’énergie renouvelable au titre de la TIRUERT, en élargissant la liste des types d’énergie éligibles. C’est ainsi que cette proportion contient, en sus des quantités de biocarburants incorporées :
– depuis le 1er janvier 2022, les quantités d’électricité d’origine renouvelable pour l’alimentation, en France, de véhicules routiers au moyen d’infrastructures de recharge ouvertes au public et exploitées par le redevable ;
– depuis le 1er janvier 2023, les quantités d’énergie contenues dans l’hydrogène produit par électrolyse à partir d’électricité d’origine renouvelable que le redevable a utilisé, en France, pour les besoins du raffinage de produits pétroliers.
Les quantités d’électricité d’origine renouvelable et celles d’énergie contenue dans l’hydrogène produit par électrolyse à partir d’électricité d’origine renouvelable peuvent être comptabilisées indifféremment pour la liquidation de la taxe incitative relative aux essences ou pour celle relative aux gazoles, une même quantité ne pouvant être prise en compte qu’une fois.
Cet élargissement de la base de calcul de la quantité d’énergie renouvelable à l’électricité d’origine renouvelable utilisée à certaines fins a entraîné, à compter du 1er janvier 2022, une redénomination de la taxe, sous le terme de « taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports » (TIRUERT).
De plus, la loi de finances pour 2022 a élargi les modes de production et les usages des quantités d’énergie contenues dans l’hydrogène pouvant être prises en compte dans le calcul des objectifs de la taxe, à compter du 1er janvier 2023. Tous les modes de production d’hydrogène ont été inclus pour autant que cet hydrogène soit renouvelable (1), et les utilisations de cet hydrogène ont été élargies à l’alimentation des piles des moteurs électriques servant à la propulsion des véhicules, à la production de produits inclus dans l’assiette de la taxe et à l’hydrotraitement de la biomasse.
La loi de finances pour 2023 a ajouté, dès le 1er janvier 2023, aux quantités d’énergie contenues dans l’hydrogène renouvelable, celles contenues dans l’hydrogène bas-carbone produit par électrolyse (2), et utilisées dans les mêmes conditions que celles qui prévalent pour l’hydrogène renouvelable.
(1) L’hydrogène renouvelable est défini par l’article L. 811-1 du code de l’énergie. Est considéré comme renouvelable l’hydrogène produit soit par électrolyse en utilisant de l’électricité issue de sources d’énergies renouvelables, soit par toute autre technologie utilisant exclusivement une ou plusieurs de ces mêmes sources d’énergies renouvelables et n’entrant pas en conflit avec d’autres usages permettant leur valorisation directe. Dans tous les cas, son procédé de production émet, par kilogramme d’hydrogène produit, une quantité d’équivalents dioxyde de carbone inférieure ou égale à un seuil. Ce seuil est aujourd’hui fixé à 3 kg par la taxonomie européenne.
(2) L’hydrogène bas-carbone est défini par l’article L. 811-1 du code de l’énergie. Il s’agit de l’hydrogène dont le procédé de production engendre des émissions inférieures ou égales au seuil retenu pour la qualification d’hydrogène renouvelable, sans pouvoir, pour autant, recevoir cette dernière qualification, faute d’en remplir les autres critères.
Les certificats d’incorporation d’énergie renouvelable
Comme le prévoit le VI de l’article 266 quindecies du code des douanes, le redevable de la taxe peut acquérir, y compris à titre onéreux, des droits de comptabilisation de quantités d’énergie renouvelable additionnelles auprès des autres redevables de cette taxe.
Cette disposition a été élargie, par les lois de finances pour 2021 et 2022, au-delà de ces seuls redevables pour inclure, à partir du 1er janvier 2022, les personnes qui fournissent de l’électricité pour l’alimentation, en France, de véhicules routiers au moyen d’infrastructures de recharge ouvertes au public et, à partir du 1er janvier 2023, celles qui fournissent de l’hydrogène pour l’alimentation, en France, de véhicules électriques et celles qui utilisent de l’hydrogène pour la production de produits inclus dans l’assiette de la taxe, dans la mesure où il contribue à leur contenu énergétique, ou pour les besoins du raffinage de produits pétroliers ou de l’hydrotraitement de la biomasse. Les redevables de la TIRUERT pourront ainsi se procurer des droits de comptabilisation de quantités d’énergies renouvelables auprès de ces personnes.
Les droits ainsi cédés sont comptabilisés au titre de la TIRUERT pour la détermination de la quantité d’énergie renouvelable selon les modalités applicables au titre de la même année aux matières sur lesquelles ces droits portent.
La cession de ces droits n’induit aucun changement du régime de propriété des quantités sur lesquelles ils portent. Elle n’induit, pour le cédant, aucune diminution de la quantité d’énergie contenue dans les produits inclus dans l’assiette de la taxe et, pour l’acquéreur, aucune augmentation de cette même quantité.
Les droits portant sur une même quantité d’énergie ne peuvent faire l’objet de plusieurs cessions.
Lorsque le cédant est redevable de la taxe, seuls peuvent être cédés les droits de comptabilisation de quantités qui conduisent, pour les besoins de la liquidation de la taxe qu’il doit, à excéder le pourcentage national cible d’incorporation d’énergie renouvelable dans les transports.
La loi de finances pour 2021 a rendu plus stricts les critères permettant de regarder une énergie comme renouvelable. Ces nouveaux critères sont entrés en vigueur le 1er janvier 2022 :
– tout d’abord, un renvoi est opéré à la directive 2018/2001 du 11 décembre 2018 ([384]) (dite « directive ENR ») pour la définition des sources d’énergie renouvelable ([385]) ;
– ensuite, il est prévu que l’énergie renouvelable ne soit plus comptabilisée qu’aux conditions cumulatives suivantes :
● la traçabilité des produits dans lesquels l’énergie renouvelable est contenue est assurée depuis leur production ;
● les quantités d’électricité qui la contiennent sont mesurées et communiquées à l’administration ;
● lorsque l’énergie est contenue dans des produits issus de la biomasse, ces derniers répondent aux critères de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre prévus au niveau européen ([386]).
– enfin, il est précisé que l’électricité qui n’est pas fournie à partir d’une connexion directe à une installation produisant de l’électricité renouvelable est réputée être renouvelable à hauteur de la proportion moyenne d’énergie renouvelable constatée en France par la Commission européenne :
● sur les deux années précédant l’exigibilité pour l’électricité fournie pour l’alimentation de véhicules routiers ;
● sur la deuxième année précédant l’exigibilité pour l’électricité utilisée pour produire de l’hydrogène par électrolyse.
Les critères d’admission de l’énergie issue de la biomasse
Ces critères sont ceux mentionnés aux 1 à 11 de l’article 29 de la directive ENR.
Pour être reconnue comme renouvelable, l’énergie produite à partir des biocarburants, des bioliquides et des combustibles issus de la biomasse doit répondre aux conditions suivantes, quelle que soit l’origine géographique de la biomasse :
– pour ceux produits à partir de déchets et résidus provenant de l’agriculture, à l’exclusion de ceux provenant de la sylviculture, les opérateurs ou les autorités nationales doivent disposer de plans de gestion afin de faire face aux incidences sur la qualité des sols, notamment leur teneur en carbone ;
– ceux produits à partir de la biomasse agricole ne doivent pas être produits à partir de matières premières provenant de terres de grande valeur en termes de diversité biologique (forêts primaires, forêts très riches en biodiversité, zones affectées à la protection de la nature ou d’écosystèmes ou d’espèces rares, menacés ou en voie de disparition, prairies naturelles) ;
– ceux produits à partir de la biomasse agricole ne doivent pas être produits à partir de matières premières provenant de terres présentant un stock important de carbone (zones humides, zones forestières continues) ou de tourbières ;
– ceux produits à partir de la biomasse forestière doivent être issus de pays ou de zones présentant des garanties de gestion durable de la forêt (légalité des opérations de récolte, régénération effective de la forêt, protection des zones désignées par le droit national ou international, exploitation soucieuse de la préservation de la qualité des sols et de la biodiversité, et maintenant ou améliorant la capacité de production à long terme de la forêt) et disposant, au minimum, d’une législation visant à conserver et renforcer les stocks et puits de carbone ;
– la réduction des émissions de gaz à effet de serre résultant de leur utilisation doit être d’au moins 65 % pour les biocarburants, d’au moins 70 % pour la production d’électricité à partir de combustibles issus de la biomasse utilisés dans des installations mises en service du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2025 et d’au moins 80 % pour les installations mises en service à partir du 1er janvier 2026.
De plus, ne sont pas prises en compte les quantités d’énergie issues des matières premières suivantes excédant certains seuils :
– les quantités d’énergie issues des cultures destinées à l’alimentation humaine ou animale et des résidus assimilés ([387]) ne sont prises en compte que dans la limite de 7 % pour les essences et les gazoles, et ne sont pas prises en compte du tout pour les carburéacteurs. Parmi ces cultures, l’énergie issue de la palme ou du soja n’est jamais prise en compte ;
– les égouts pauvres issus des plantes sucrières et obtenus après deux extractions sucrières, à hauteur de 50 % de leur contenu énergétique ([388]) et les amidons résiduels issus des plantes riches en amidon, en fin de processus de transformation de l’amidon, à hauteur de l’intégralité de leur contenu énergétique, sont pris en compte dans la limite de 1,0 % en 2023 ([389]) et de 1,1 % en 2024, pour les essences et les gazoles. Pour les carburéacteurs, ils sont pris en compte sans limite ;
– le tallol ([390]) ne peut être pris en compte que dans la limite de 0,1 % ;
– les huiles de cuisson usagées et les graisses animales ne peuvent être prises en compte que dans la limite de 0,9 % pour les essences, de 1,1 % pour les gazoles ([391]), et sans limite pour les carburéacteurs ;
En outre, depuis le 1er janvier 2022, une fraction de l’avantage fiscal est réservée aux matières premières avancées ([392]). En 2023, pour la comptabilisation des quantités d’énergie renouvelable, ne sont plus prises en compte les quantités d’énergie autres que celles issues des matières premières avancées contenues dans les produits inclus dans l’assiette et conduisant à excéder la différence entre le pourcentage cible et le montant de 1,2 % pour les essences, et 0,4 % pour les gazoles ([393]). Ces taux seront de 1,3 % pour les essences et de 0,5 % pour les gazoles à compter du 1er janvier 2024.
Illustration
En 2023, un opérateur met sur le marché des gazoles. Le pourcentage cible d’incorporation d’énergie renouvelable applicable est de 8,9 %. Sur ce taux, 0,4 % devra obligatoirement provenir de matières premières avancées, faute de quoi l’opérateur sera taxé au titre de la TIRUERT, cela même s’il remplit bien le pourcentage cible avec des biocarburants non issus de matières premières avancées.
Les matières premières avancées
Les matières premières avancées s’entendent des produits mentionnés dans la partie A de l’annexe IX de la directive ENR. Il s’agit :
– des algues, si elles sont cultivées à terre dans des bassins ou des photobioréacteurs ;
– de la fraction de la biomasse correspondant aux déchets municipaux en mélange, à l’exclusion des déchets ménagers triés relevant des objectifs de recyclage fixés au niveau européen ;
– des biodéchets provenant de ménages privés et faisant l’objet d’une collecte séparée ;
– de la fraction de la biomasse correspondant aux déchets industriels impropres à un usage dans la chaîne alimentaire humaine ou animale ;
– de la paille ;
– du fumier et des boues d’épuration ;
– des effluents d’huileries de palme et rafles ;
– du brai de tallol ;
– de la glycérine brute ;
– de la bagasse ;
– des marcs de raisins et lies de vin ;
– des coques ;
– des balles (enveloppes) ;
– des râpes ;
– de la fraction de la biomasse correspondant aux déchets et résidus provenant de la sylviculture et de la filière bois (écorces, branches, feuilles, aiguilles…) ;
– d’autres matières cellulosiques non alimentaires ;
– des autres matières ligno-cellulosiques à l’exception des grumes de sciage et de placage.
Enfin, des règles de double comptage pour les biocarburants issus de matières premières avancées, à l’exception du tallol, sont prévues ([394]). Ces derniers sont comptés double dans la limite de l’écart entre le pourcentage cible et 7 % : au-delà de ces valeurs limites, la part d’énergie issue de ces matières premières est comptabilisée de manière simple. Cette limite ne vaut que pour les quantités d’énergie contenues dans les essences et gazoles.
Une règle comparable est prévue pour l’énergie issue des graisses et huiles usagées : elle est comptée double dans la limite de 0,2 % du pourcentage cible pour les essences, et de 1,0 % pour les gazoles. Pour les carburéacteurs, le double comptage est, ici encore, déplafonné.
De plus, un quadruple comptage est prévu pour l’intégralité des quantités d’électricité d’origine renouvelable que le redevable a fournies en France pour l’alimentation de véhicules routiers au moyen d’infrastructures de recharge ouvertes au public.
Depuis le 1er janvier 2023, un double comptage est également prévu pour l’intégralité des quantités d’énergie contenues dans l’hydrogène renouvelable et répondant à l’une des conditions suivantes :
▪ il est fourni par le redevable en France pour l’alimentation des piles à combustible des moteurs électriques servant à la propulsion des véhicules ;
▪ il est utilisé pour la production de produits inclus dans l’assiette de la taxe que le redevable doit, y compris pour la production de produits intermédiaires, dans la mesure où il contribue à leur contenu énergétique ;
▪ il est utilisé par le redevable en France pour les besoins du raffinage de produits pétroliers ou de l’hydrotraitement de la biomasse.
Cette mesure vise à encourager l’utilisation de ces types d’énergies, en permettant aux metteurs en marché d’atteindre plus facilement les objectifs de taux d’incorporation qui leur sont fixés.
Le recouvrement de la TIRUERT, aujourd’hui assuré par l’administration des douanes, doit être confié à la direction générale des finances publiques (DGFiP) à compter du 1er janvier 2024 ([395]).
Une recodification des dispositions relatives à cette taxe dans le code des impositions sur les biens et services a été autorisée par voie d’ordonnance par la loi de finances pour 2022 ([396]).
Exemple : calcul d’une TIRUERT pour la filière gazole
En 2023, un opérateur a mis à la consommation 400 000 litres de gazole et 30 000 litres de gazole non routier (GNR), dont :
– 296 000 litres de gazole contenant 20 000 litres d’EMHV,
– 30 000 litres de GNR contenant 2 000 litres d’EMHV ;
– 4 000 litres de gazole livrés depuis un autre État membre de l’Union européenne, contenant 224 litres d’EMHV ;
– 100 000 litres de gazole importés contenant 6 500 litres d’EMHV.
L’opérateur peut se prévaloir :
– d’avoir incorporé 20 000 + 2 000 + 224 + 6 500 = 28 724 litres d’EMHV dans le gazole et le GNR mis à la consommation ;
– d’avoir mis à la consommation un total de 430 000 litres de gazole, dont 401 276 litres de gazole fossile et 28 724 litres d’EMHV incorporés.
Étant considéré que le pouvoir calorifique inférieur (PCI) est fixé à 36 megajoules par litre (MJ/L) et celui de l’EMHV est fixé à 33 MJ/L.
En appliquant la formule d’incorporation :
Part d’EnR = 100 (PCI EMHV x volume EMHV) / [(PCI gazole fossile x volume gazole fossile) + (PCI EMHV x volume EMHV)]
Est obtenue une part d’EnR incorporés égale à :
100 x (33 x 28 724) / [(36 x 401 276) + (33 x 28 724)] = 6,15 %
N’atteignant pas le pourcentage cible de 8,9 %, ce metteur sur le marché serait redevable de la TIRUERT.
Son montant serait égal à :
4 300 hL x 140 €/hL x (8,9 – 6,15) = 1 655 500 euros.
3. L’encadrement européen de l’incorporation de biocarburants, décliné au niveau législatif, implique une fiscalité évolutive afin d’atteindre les objectifs fixés à horizon 2030
En prévoyant leur incorporation dans les carburants d’origine fossile et en permettant l’application d’une fiscalité allégée sur les accises, la directive du 23 avril 2009, dite « EnR I » ([397]), a, la première, déterminé le cadre juridique européen applicable aux biocarburants.
Elle assignait aux États membres l’objectif de porter à 10 % la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale d’énergie du secteur des transports en 2020.
En outre, elle prévoyait des critères de durabilité pour les biocarburants et les bioliquides, notamment pour mesurer la conformité aux objectifs fixés et l’admissibilité à une aide financière.
Afin de mieux prendre en compte la problématique du changement indirect d’affectation des sols, la directive du 9 septembre 2015, dite « CASI » ([398]), avait introduit deux précisions : elle avait prévu, d’une part, que la part des biocarburants produits à partir « de céréales et d’autres plantes riches en amidon, sucrières et oléagineuses et à partir de cultures cultivées en tant que cultures principales essentiellement à des fins de production d’énergie sur des terres agricoles » ne pourrait être supérieure à 7 % de la consommation finale d’énergie du secteur des transports en 2020, et elle avait fixé une valeur de référence minimale de 0,5 % pour les biocarburants avancés, en 2020 également.
La dernière modification de cet encadrement européen afférent aux biocarburants provient de la directive du 11 décembre 2018, dite « EnR II » ([399]).
La directive EnR II
I.- Le contenu de la directive
Cette directive applique aux États membres un objectif d’au moins 32 % d’énergie renouvelable dans la consommation finale d’énergie de l’Union européenne en 2030, cette part étant d’au moins 14 % dans le secteur des transports.
S’agissant plus spécifiquement des biocarburants, la contribution des biocarburants avancés et du biogaz à l’intégration de l’énergie renouvelable dans le secteur des transports doit être d’au moins 0,2 % en 2022, 1 % en 2025 et 3,5 % en 2030. Il n’est pas possible, pour les États membres, de prévoir un taux inférieur à ces valeurs.
La part des biocarburants, bioliquides et combustibles consommés « lorsqu’ils sont produits à partir de cultures destinées à l’alimentation humaine et animale » ne peut dépasser 7 % de la consommation finale d’énergie dans le secteur des transports. Les États membres peuvent en outre fixer une limite inférieure, et opérer des distinctions en tenant compte des « meilleures données disponibles relatives à l’impact des changements indirects dans l’affectation des sols ».
Par ailleurs, la part des biocarburants, bioliquides et combustibles « produits à partir de cultures destinées à l’alimentation humaine et animale, présentant un risque élevé d’induire des changements indirects dans l’affectation des sols et dont la zone de production gagne nettement sur les terres présentant un important stock de carbone » ne peut excéder son niveau de 2019 – sauf s’ils sont certifiés comme présentant un faible risque d’induire les changements précités. Elle doit, en outre, diminuer progressivement à compter du 31 décembre 2023 pour s’établir, au plus tard le 31 décembre 2030, à 0 %.
Enfin, la directive détermine des critères de durabilité s’agissant notamment des biocarburants, qui sont destinés à apprécier l’atteinte des objectifs fixés et l’éligibilité aux aides financières.
II.- La révision de cette directive
Après une phase de consultation qui s’est achevée en février 2021, la Commission européenne a publié un projet en vue de la révision de cette directive. Cette révision, qui avait été annoncée lors du lancement du Pacte vert européen, s’est inscrite dans le plan « Fit for 55 », publié le 14 juillet 2021, qui vise à permettre aux États membres de l’UE de respecter l’objectif d’une réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre de 55 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux d’émission de 1990, et celui de devenir le premier continent neutre sur le plan climatique d’ici 2050. Le plan « Fit for 55 » prévoit de rehausser les objectifs en matière de part des énergies renouvelables dans le mix énergétique : celles-ci devraient représenter 40 % de la consommation d’énergie dans l’UE en 2030. Il est également prévu d’interdire la vente de voitures thermiques à partir de 2035 et d’encourager le développement des carburéacteurs durables, notamment par la taxation du kérosène.
Les négociations européennes concernant la révision de la directive sur les énergies renouvelables (RED III) se sont achevées le 30 mars 2023. L’accord politique provisoire du 30 mars été soumis au Comité des représentants permanents. Le Parlement européen a adopté le projet le 12 septembre 2023. Le Conseil doit encore l’examiner en vue de son adoption définitive.
Le texte comprend un objectif juridiquement contraignant tendant à porter la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique globale de l’UE à 42,5 % d’ici 2030. Les États membres qui le souhaitent peuvent compléter cet objectif par « un supplément indicatif de 2,5 % qui permettrait d’atteindre 45 % ».
Cette cible se situe à mi-chemin entre les 45 % que réclamaient la Commission et les eurodéputés, et les 40 % que demandaient les États. Il s’agit d’un relèvement notable par rapport à l’objectif actuel pour 2030 (32 %).
De plus, le texte simplifie les procédures d’autorisation pour les infrastructures d’énergies renouvelables, avec l’établissement de territoires dédiés où la réglementation sera assouplie.
Des objectifs sont également fixés par secteurs d’activité :
– dans les transports, le recours aux énergies renouvelables devrait entraîner une baisse de 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre. Cette réduction sera permise par une utilisation croissante de biocarburants avancés et par le recours à des carburants d’origine non biologique comme l’hydrogène ;
– l’industrie, selon l’accord, doit augmenter son utilisation d’énergies renouvelables de 1,6 % par an. D’ici 2030, 42 % de l’hydrogène utilisé dans l’industrie devra provenir de carburants renouvelables d’origine non biologique ;
– dans les bâtiments, l’objectif d’énergies renouvelables est fixé à 49 % en 2030. La part dans les systèmes de chauffage et de refroidissement devra augmenter de 0,8 % par an jusqu’en 2026 puis de 1,1 % par an entre 2026 et 2030.
En outre, l’accord renforce les critères de durabilité de l’utilisation de biomasse pour la production d’énergie.
Le plan « Fit for 55 »
La Commission européenne a publié, en juillet 2021, le paquet législatif « Fit for 55 » (1), qui contient ses propositions afin de mettre en œuvre l’objectif de baisse de 55 % des émissions nettes de CO2 en 2030 (au lieu d’une baisse de 40 % des émissions brutes) par rapport à 1990, objectif fixé par le Conseil européen de décembre 2020. Des discussions sur ce paquet sont en cours au sein du Conseil européen.
Le plan « Fit for 55 » contient 13 propositions législatives et initiatives couvrant les principaux secteurs de l’économie. Il vise notamment la décarbonation de l’industrie, le développement de mobilités et de carburants propres, l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments et l’augmentation de la capacité des puits de carbone naturels.
Il prévoit un renforcement ou une extension du principe « pollueur-payeur » afin d’orienter les investissements vers les activités bas carbone. Le marché actuel de quotas carbone pourrait être renforcé pour le transport aérien, et étendu au transport maritime. Un nouveau marché de quotas sur les combustibles fossiles des secteurs du bâtiment, du chauffage, et du transport routier, est également envisagé, ainsi qu’une harmonisation de la fiscalité énergétique entre les États membres. De plus, un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE serait mis en place pour lutter contre les fuites de carbone.
Figurent également dans ce plan le renforcement des normes d’émissions pour les véhicules légers en 2030 et l’interdiction de la vente des véhicules thermiques légers neufs dès 2035. Des initiatives sont prévues pour l’utilisation de carburants durables dans les secteurs aérien et maritime.
Ces réformes doivent s’accompagner de mesures de soutien, à travers le renforcement des fonds de soutien existants (fonds de modernisation pour les États d’Europe centrale et orientale, fonds pour l’innovation pour les entreprises qui investissent dans les énergies propres) et la création d’un fonds social pour le climat pour accompagner les ménages modestes et les petites entreprises dans la transition vers le bas carbone.
(1) L’expression « Fit for 55 » (« Paré pour 55 ») renvoie à l’objectif de réduction de 55 % des GES d’ici à 2030 par rapport à leur niveau de 1990.
Les objectifs des directives EnR I et II ont été déclinés à l’article L. 641-6 du code de l’énergie, qui dispose que l’État crée les conditions pour que la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables utilisée dans tous les modes de transport en 2030 soit égale à 15 % au moins de la consommation finale d’énergie dans le secteur des transports et que la part des biocarburants et du biogaz avancés produits à partir de matières premières avancés dans la consommation d’énergie finale de ce secteur soit d’au moins 0,2 % en 2022, 1 % en 2025 et 3,5 % en 2030.
En 2021, la part des énergies renouvelables s’est élevée à 8,9 % dans le secteur des transports ([400]).
Aussi la TIRUERT, qui vise à favoriser, via l’outil fiscal, l’atteinte de ces objectifs d’incorporation à travers les pourcentages nationaux cibles, doit-elle évoluer durant la période au terme de laquelle les objectifs seront devenus plus élevés.
4. Les mesures de la loi « Climat et Résilience »
La TIRUERT prend place dans une politique publique plus large tendant à promouvoir une transition vers une économie sobre en carbone, afin d’enrayer le réchauffement climatique, dont la loi du 22 août 2021 dite « Climat et Résilience » ([401]) constitue la réalisation normative la plus récente. Celle-ci contient notamment les mesures suivantes :
– la fin de la vente de voitures neuves émettant plus de 123 g/km de CO2 selon le cycle WLTP ou 95 g/km selon le cycle NEDC d’ici le 1er janvier 2030. Les véhicules émettant plus que ce seuil devront représenter, à cette date, au maximum 5 % de l’ensemble des ventes annuelles de voitures particulières neuves ([402]) ;
– la fin de la vente des véhicules lourds neufs affectés au transport de personnes ou de marchandises et utilisant majoritairement des énergies fossiles en 2040 ([403]) ([404]) ;
– l’obligation d’équiper de points de recharge électrique les parcs de stationnement de plus de 20 places gérés en délégation de service public, en régie ou via un marché public au 1er janvier 2025 ou au renouvellement de la délégation ou du marché ([405]) ;
– une uniformisation des interdictions de circulation dans les dix métropoles qui enregistrent des dépassements réguliers des valeurs limites de qualité de l’air, et la mise en place de zones à faibles émissions dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants d’ici le 31 décembre 2024 ([406]) ;
– une accélération des mesures de verdissement des flottes publiques et privées comptant plus de vingt véhicules : les flottes d’entreprise devront, à chaque renouvellement effectué à partir de 2027, acquérir au moins 40 % de véhicules à faibles émissions, et au moins 70 % à partir de 2030 ; les flottes de l’État et de ses établissements publics devront, quant à elles, acquérir, à chaque renouvellement, au moins 50 % de véhicules à faibles émissions d’ici 2027, et 70 % à compter de cette date ([407]).
II. Le dispositif proposÉ
Le présent article modifie l’article 266 quinquies du code des douanes afin de :
– relever le tarif de la TIRUERT pour la filière des carburéacteurs ;
– relever les cibles d’incorporation de biocarburants ;
– modifier les modalités de comptabilisation des quantités d’énergie issues des égouts pauvres et des graisses et huiles usagées ;
– renforcer, pour la filière des essences et celles des gazoles, l’incitation à utiliser des quantités d’énergie issues de matières premières avancées ;
– renforcer, pour la filière des essences, l’incitation à utiliser des quantités d’énergie issues de graisses et huiles usagées ;
– supprimer les doubles et quadruples comptages des quantités d’énergie issues de certaines sources pour la filière des carburéacteurs.
Ces modifications font l’objet du I (alinéas 1 à 23).
Le II (alinéa 24) précise les dates d’entrée en vigueur.
A. L’augmentation du tarif pour les carburÉacteurs
Le a) du 1° du I (alinéa 3) procède à une forte augmentation du tarif de la TIRUERT, pour les carburéacteurs, à compter du 1er janvier 2025 comme le précise le II (alinéa 24), en le faisant passer de 168 à 280 euros par hectolitre. Le 1er janvier 2023, ce tarif avait été porté de 125 à 168 euros par hectolitre.
Cette hausse de tarif s’explique par la suppression du double comptage de certaines quantités d’énergie pour cette filière, prévue par le c) du 2° du I du présent article. Il s’agit, selon l’évaluation préalable, de ne pas diminuer l’incitation fiscale et d’éviter ainsi que les biocarburants produits en France ne soient exportés dans d’autres pays plutôt que d’être incorporés au niveau national.
B. le relÈvement des cibles d’incorporation de biocarburants
Le b) du 1° du I (alinéas 4 à 7) propose de relever les pourcentages cibles d’incorporation de biocarburants dans les essences, les gazoles et les carburéacteurs, en deçà desquels la taxe est perçue, à partir du 1er janvier 2025.
Comme prévu par le II (alinéa 24), la date d’entrée en vigueur prévue pour ces dispositions est le 1er janvier 2025.
Ce relèvement est classique et vise à accroître progressivement l’incitation à l’intégration de biocarburants, mais aussi, depuis le 1er janvier 2022, à l’utilisation d’électricité renouvelable dans les infrastructures de recharge et à l’installation de telles infrastructures – ainsi, depuis le 1er janvier 2023, qu’à l’utilisation d’hydrogène renouvelable pour l’alimentation des piles des véhicules électriques, pour la production de produits inclus dans l’assiette de la taxe ou pour le raffinage de produits pétroliers ou l’hydrotraitement de la biomasse. S’y ajoutera, à compter du 1er janvier 2024, l’hydrogène bas-carbone produit par électrolyse et utilisé aux mêmes fins.
– le pourcentage cible pour les essences passe de 9,9 % en 2024 à 10,5 % en 2025 (alinéa 5) ;
– le pourcentage cible pour les gazoles passe de 9,0 % en 2024 à 9,4 % en 2025 (alinéa 6) ;
– le pourcentage cible pour les carburéacteurs passe de 1,5 % en 2024 à 2,0 % en 2025 (alinéa 7).
Depuis la création de cette taxe, les pourcentages cibles d’incorporation ont évolué comme indiqué dans le tableau suivant.
Évolution des pourcentages cibles d’incorporation
Pourcentage cible |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
2025 (PLF 2024) |
Essences |
7,9 % |
8,2 % |
8,6 % |
9,2 % |
9,5 % |
9,9 % |
10,5 % |
Gazoles |
7,9 % |
8 % |
8 % |
8,4 % |
8,6 % |
9,0 % |
9,4 % |
Carburéacteurs |
- |
- |
- |
1,0 % |
1,0 % |
1,5 % |
2,0 % |
Source : IV de l’article 266 quindecies du code des douanes dans ses versions successives et PLF pour 2024.
C. un encouragement renforcÉ À l’utilisation d’Énergie issue de certaines matiÈres premiÈres
Le a) du 2° du I (alinéas 9 à 13) relève :
– pour les essences, le seuil au-delà duquel les quantités d’énergie issues des égouts pauvres issus des plantes sucrières et obtenus après deux extractions sucrières et des amidons résiduels issus des plantes riches en amidon, en fin de processus de transformation de l’amidon, ne sont pas prises en compte pour le calcul du pourcentage cible, en le portant 1,2 %. Ce seuil est de 1,0 % en 2023 et de 1,1 % en 2024 ;
– pour les essences et les gazoles, le seuil au-delà duquel les quantités d’énergie issues des graisses et huiles usagées, ne sont pas prises en compte pour le calcul du pourcentage cible, en le portant à 1,1 % pour les essences, et à 1,2 % pour les gazoles. Ces seuils sont, respectivement, de 0,9 % en 2023 et en 2024 pour les essences, et de 1,0 % en 2023 et 1,1 % en 2024 pour les gazoles.
Comme prévu par le II (alinéa 24), ces modifications entrent en vigueur le 1er janvier 2025.
Aucun seuil ne plafonne les quantités d’énergie issues d’égouts pauvres et d’amidons et celles issues de graisses et huiles usagées prises en compte pour le calcul du pourcentage cible pour les carburéacteurs.
De plus, les ii) et iii) du a) du 2° du I (alinéas 14 à 16) modifient les modalités de comptabilisation des égouts pauvres. Ceux-ci sont actuellement pris en compte à hauteur de 50 % de leur contenu énergétique pour l’application du seuil spécifique aux égouts pauvres, et à hauteur de 50 % pour l’application du seuil des cultures destinées à l’alimentation humaine et animale.
Le ii) (alinéa 14) prévoit de modifier cette répartition en prévoyant une prise en compte à hauteur de 60 % de leur contenu énergétique pour l’application du seuil spécifique aux égouts pauvres, et à hauteur de 40 % pour l’application du seuil des cultures destinées à l’alimentation humaine et animale. Comme le prévoit le II (alinéa 24), cette modification doit entrer en vigueur le 1er janvier 2024. Il s’agit, selon l’évaluation préalable, de tenir compte des évolutions techniques de la filière de production du bioéthanol. En effet, l’évaluation préalable indique que l’évolution des procédés de production engagée par les producteurs d’égouts pauvres permet d’augmenter la fraction « non extractible », c’est-à-dire qui n’est pas en concurrence alimentaire, de ceux-ci. Elle précise qu’ « ainsi, pour un même volume de produit, 10 % d’énergie renouvelable de plus peuvent être pris en compte prioritairement dans l’atteinte du plafond d’incorporation des EP2 [c’est-à-dire des égouts pauvres de deuxième extraction] et amidons résiduels plutôt que dans le plafond d’incorporation des matières premières en concurrence alimentaire ». À l’inverse, « le maintien de la comptabilisation actuelle pourrait désinciter les producteurs d’EP2 à investir dans des procédés de production d’EP2 plus efficaces, favorisant ainsi l’incorporation de produits issus de cultures destinées à l’alimentation humaine et animale ».
Le iii) (alinéas 15 et 16) renvoie, à compter du 1er janvier 2025, cette répartition à un arrêté conjoint du ministre chargé du budget, du ministre chargé de l’énergie et du ministre chargé de l’agriculture, en fonction fractions des égouts pauvres destinées, respectivement, à l’alimentation humaine ou animale et à d’autres usages. L’évaluation préalable précise qu’il s’agit de permettre de « prendre en compte en cours d’année les progrès techniques réalisés par les producteurs, ainsi que les capacités de production annuelles d’EP2 selon les évolutions du marché, en concertation avec la filière de production de bioéthanol et les redevables de la TIRUERT, afin d’ajuster au mieux le taux de contenu énergétique des EP2 pris en compte pris en compte respectivement » pour l’application de chacun des deux seuils.
Le b) du 2° du I (alinéas 17 à 19) relève la fraction de l’avantage fiscal réservée aux matières premières avancées à compter du 1er janvier 2025, en la portant à 1,8 % pour les essences, et à 0,7 % pour les gazoles. Cette fraction est, pour les essences, de 1,2 % en 2023 et de 1,3 % en 2024, et, pour les gazoles, de 0,4 % en 2023 et de 0,5 % en 2024. Cette fraction demeure nulle pour les carburéacteurs.
Le c) du 2° du I (alinéas 20 à 23) supprime, à compter du 1er janvier 2025, pour la filière des carburéacteurs, le double comptage des quantités d’énergie issues des matières premières avancées et des graisses et huiles usagées. L’évaluation préalable indique que « cette mesure vise, d’une part, à encourager les redevables à l’incorporation réelle de biocarburants aux impacts environnementaux très faibles au profit d’une augmentation limitée de l’objectif d’incorporation d’énergie renouvelable pour les carburéacteurs et, d’autre part, à anticiper les prochaines évolutions du droit européen en la matière (l’adoption à venir du règlement ReFuel EU Aviation, qui ne tend pas vers l’application d’un double compte pour les carburéacteurs) ».
En revanche, le même c) du 2° du I (alinéas 20 à 23) fait passer de 0,2 % à 0,4 % la limite dans laquelle les quantités d’énergie issues des graisses et huiles usagées font l’objet d’un double comptage pour la filière des essences. Il s’agit de renforcer l’incitation à utiliser ces sources d’énergie et de soutenir la hausse de l’objectif d’incorporation de 0,6 % prévue par le présent article pour cette filière.
III. L’impact budgÉtaire, Économique et environnemental
L’impact budgétaire est réduit, la TIRUERT étant une taxe comportementale. Son efficacité ne consiste pas en un rendement, mais en une incitation à l’intention des metteurs en marché afin qu’ils recourent aux biocarburants, qu’ils mettent à disposition des infrastructures de recharge en électricité d’origine renouvelable pour les véhicules et qu’ils utilisent de l’hydrogène d’origine renouvelable. Le produit de la TIRUERT s’est élevé, en 2019, à environ 600 000 euros, à environ 900 000 euros en 2020 et à 4,2 millions d’euros en 2021. L’évaluation préalable précise que, « de manière exceptionnelle, en 2022, le rendement a été de 525 millions d’euros compte tenu du choix des opérateurs de vendre leurs matières premières renouvelables à l’exportation afin de bénéficier de la très forte hausse des prix résultant des tensions sur le prix des énergies et des matières premières agricoles en raison de la guerre en Ukraine ». Elle indique, en effet, que « la hausse de prix a plus que compensé la pénalité résultant de la non-atteinte des objectifs de la TIRUERT, laquelle a alors joué un rôle d’amortisseur sur les prix à la pompe et de captation de l’effet d’aubaine induit pour ces opérateurs par le contexte international ».
En termes économiques, le présent article devrait stimuler les investissements en faveur de la production de carburants issus de matières avancées et de carburéacteurs renouvelables, invitant à la diversification du mix énergétique et au renforcement de l’indépendance énergétique.
En termes environnementaux, il doit contribuer à la réduction des émissions de GES et à la lutte contre la pollution atmosphérique.
*
* *
Article 14
Renforcement du caractère incitatif à la transition énergétique
de la fiscalité applicable aux véhicules
Résumé du dispositif et effets principaux
Cet article prévoit :
– le renforcement, à partir de 2024, du barème de la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone (CO2) des véhicules de tourisme (« malus sur les émissions de CO2 ») ;
– la suppression du plafonnement de cette taxe à 50 % du prix d’acquisition du véhicule ;
– le renforcement, à partir de 2024, du barème de la taxe sur la masse en ordre de marche des véhicules de tourisme (« malus poids »), lequel démarrerait à 1,6 tonne au lieu de 1,8 tonne. Un barème progressif est également mis en place ;
– le renforcement, à partir de 2024, du barème de la taxe annuelle sur les émissions de CO2 pour les véhicules affectés à une activité économique. Ce barème démarrerait à 5 grammes (g) de CO2 / km, au lieu de 10 g de CO2 / km, et serait alourdi ;
– la suppression, à compter de 2025, des exonérations de malus poids et de taxe annuelle sur les émissions de CO2 dont bénéficient les véhicules hybrides. Ces exonérations sont remplacées, s’agissant du malus poids et des véhicules hybrides rechargeables, par un abattement traduisant forfaitairement la masse de la batterie ; et, s’agissant de la taxe annuelle sur les émissions de CO2, par un abattement pour les véhicules utilisant du superéthanol E85 ;
– le remplacement de la taxe annuelle sur l’ancienneté des véhicules affectés à une activité économique par une taxe sur les émissions de polluants atmosphériques ;
– l’abaissement de 10 % à 5 % du coefficient de vétusté appliqué, pour les malus à l’immatriculation, aux véhicules d’occasion ;
– la limitation du bénéfice du remboursement de malus à l’immatriculation (malus sur les émissions de CO2 et malus poids) pour les familles nombreuses à une fois par période de deux ans ;
– le renvoi à un décret de la définition du champ des véhicules de transport de marchandises assimilés à des voitures particulières.
Dernières modifications législatives intervenues
L’ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021 portant partie législative du code des impositions sur les biens et services et transposant diverses normes du droit de l’Union européenne a recodifié l’ensemble des impositions pesant sur les véhicules à moteur dans le nouveau code des impositions sur les biens et services (CIBS) ;
L’article 48 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a ajouté une exonération de malus sur les émissions de CO2 et de malus poids pour les véhicules des services d’incendie et de secours et les associations agréées de protection civile ;
La loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie a étendu cette exonération aux services de l’État et des collectivités territoriales chargés de la forêt, à l’Office national des forêts et aux associations syndicales de propriétaires forestiers.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté deux amendements à cet article, déposés par le rapporteur général, M. Jean-René Cazeneuve, et par M. Jean-Louis Fugit, rapporteur pour avis au nom de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Ces amendements rectifient des erreurs matérielles.
La commission a adopté cet article ainsi modifié. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. l’État du droit
Les taxes sur les véhicules à moteur ont connu une importante refonte en loi de finances pour 2020 ([408]) et en loi de finances pour 2021 ([409]). Avant ces réformes, il existait neuf taxes sur les véhicules à moteur, dont sept taxes à l’immatriculation – qui ne frappent le véhicule qu’une seule fois, à l’occasion de la délivrance de son certificat d’immatriculation – et deux taxes à l’utilisation, prélevées annuellement.
Ces réformes ont conduit à rationaliser et à moderniser ces taxes. Les principales modifications ont été les suivantes :
– les barèmes du malus automobile, qui est une taxe à l’immatriculation assise sur les émissions de dioxyde de carbone (CO2), ont été fortement durcis ;
– une taxe sur la masse en ordre de marche des véhicules de tourisme, dite « malus poids », a été créée ;
– la taxe sur les véhicules de société (TVS) a été remplacée par deux taxes : la taxe annuelle sur les émissions de dioxyde de carbone des véhicules de tourisme et la taxe annuelle sur l’ancienneté des véhicules de tourisme ;
– la taxe spéciale sur certains véhicules routiers (TSVR), dite « taxe à l’essieu », a été remplacée par la taxe annuelle sur les véhicules lourds de transport de marchandises.
De plus, l’ensemble de ces taxes, qui figuraient dans le code général des impôts, ont été recodifiées dans le code des impositions sur les biens et services (CIBS) à compter du 1er janvier 2022 ([410]) .
L’ensemble de ces taxes s’inscrit dans le cadre européen défini notamment par le règlement (UE) 2018/858 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules à moteur et de leurs remorques, ainsi que des systèmes, composants et entités techniques distinctes destinés à ces véhicules, modifiant les règlements (CE) n° 715/2007 et (CE) n° 595/2009 et abrogeant la directive 2007/46/CE. Ce règlement de 2018 fixe les catégories de véhicules au niveau européen, catégories qui sont utilisées en droit français. L’encadré suivant précise la définition de ces catégories.
Les catégories de véhicules prévues par le droit européen
L’article L. 421-1 du CIBS renvoie aux catégories de véhicules définies par le droit européen, en particulier par le règlement (UE) 2018/858 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules à moteur et de leurs remorques, ainsi que des systèmes, composants et entités techniques distinctes destinés à ces véhicules, modifiant les règlements (CE) n° 715/2007 et (CE) n° 595/2009 et abrogeant la directive 2007/46/CE.
L’article 4 de ce règlement prévoit les catégories de véhicules suivantes :
– la catégorie M comprend les véhicules à moteur conçus et construits essentiellement pour le transport de passagers et de leurs bagages. Elle est subdivisée comme suit :
● catégorie M1 : véhicules à moteur ne comprenant pas plus de huit places assises en plus de celle du conducteur et n’ayant pas d’espace pour des passagers debout, que le nombre de places assises se limite ou non à celle du conducteur ;
● catégorie M2 : véhicules à moteur comprenant plus de huit places assises en plus de celle du conducteur et ayant une masse maximale qui n’excède pas 5 tonnes, que ces véhicules à moteur aient ou non un espace pour des passagers debout ;
● catégorie M3 : véhicules à moteur comprenant plus de huit places assises en plus de celle du conducteur et ayant une masse maximale supérieure à 5 tonnes, que ces véhicules à moteur aient ou non un espace pour des passagers debout.
– la catégorie N comprend les véhicules à moteur conçus et construits essentiellement pour le transport de marchandises. Elle est subdivisée comme suit :
● catégorie N1 : véhicules à moteur ayant une masse maximale qui n’excède pas 3,5 tonnes ;
● catégorie N2 : véhicules à moteur ayant une masse maximale supérieure à 3,5 tonnes sans excéder 12 tonnes ;
● catégorie N3 : véhicules à moteur ayant une masse maximale supérieure à 12 tonnes.
– la catégorie O comprend les remorques.
De plus, l’article 3 du règlement de 2018 définit le « véhicule à usage spécial » comme celui de la catégorie M, N ou O ayant des caractéristiques techniques spécifiques lui permettant de remplir une fonction qui requiert des adaptations ou des équipements spéciaux. Cette catégorie inclut notamment les autocaravanes, les véhicules blindés, les ambulances, les corbillards, les véhicules accessibles en fauteuil roulant, les grues mobiles et les véhicules à moteur pour le transport de charges exceptionnelles.
L’article L. 421-30 du CIBS prévoit, à son 4°, que l’immatriculation des véhicules de tourisme au sens de l’article L. 421-2 autres que ceux mentionnés au b du 2° du même article L. 421-2, est soumise à :
– une taxe sur les émissions de dioxyde de carbone ;
– une taxe sur la masse en ordre de marche.
La définition des véhicules de tourisme est précisée dans l’encadré suivant.
La définition des véhicules de tourisme
La notion de véhicule de tourisme est une notion propre à la fiscalité. Elle ne correspond à aucune catégorie de véhicules qui serait définie, par ailleurs, par le droit européen ou français. Cette qualification ne figure donc pas sur les certificats d’immatriculation mais se déduit des informations qui y figurent.
Comme prévu par l’article L. 421-2 du CIBS, les véhicules de tourisme s’entendent des véhicules suivants :
1° Parmi les véhicules de la catégorie M1 :
a) ceux qui ne sont pas des véhicules à usage spécial ;
b) ceux qui sont accessibles en fauteuil roulant ;
2° Parmi les véhicules de la catégorie N1 :
a) ceux dont la carrosserie est « Camion pick-up » et qui répondent aux conditions cumulatives suivantes :
– ils comportent au moins cinq places assises ;
– ils ne sont pas exclusivement affectés à l’exploitation des remontées mécaniques et des domaines skiables. Les conditions dans lesquelles l’exploitation exclusive est constatée sont déterminées par décret ;
b) Ceux dont la carrosserie est « Camionnette » et qui répondent aux conditions cumulatives suivantes :
– ils comportent, ou sont susceptibles de comporter après une manipulation aisée, au moins deux rangs de places assises ;
– ils sont affectés au transport de personnes.
A. Le malus sur les Émissions de CO2 À l’immatriculation
La taxe sur les émissions de dioxyde de carbone des véhicules de tourisme est également dite « malus sur les émissions de CO2 » ou encore « malus écologique ».
Son fait générateur est constitué par la délivrance d’un certificat d’immatriculation résultant de la première immatriculation en tant que véhicule de tourisme en France au sens de l’article L. 421-36 du CIBS, comme prévu par l’article L. 421-33 du même code.
La définition de la première immatriculation d’un véhicule de tourisme
La première immatriculation en tant que véhicule de tourisme en France s’entend de :
1° la première immatriculation en France, c’est-à-dire la première autorisation pour la mise en circulation routière, d’un véhicule qui répond, lors de cette immatriculation, à la définition du véhicule de tourisme prévue par l’article L. 421-2 du CIBS, à l’exception des camionnettes affectées au transport de personnes ;
2° l’immatriculation en France postérieure à la première qui répond aux conditions cumulatives suivantes :
a) elle porte sur un véhicule qui, lors de sa première immatriculation en France ne répondait pas à la condition mentionnée au 1° ;
b) elle résulte de la première modification des caractéristiques techniques du véhicule qui le fait répondre à la condition mentionnée au 1° ;
3° lorsque, lors de la première immatriculation en France, le véhicule a été exonéré en application des articles L. 421-65 et L. 421-76 du CIBS (qui concernent les véhicules accessibles en fauteuil roulant), l’immatriculation postérieure à cette première immatriculation qui résulte de la première modification des caractéristiques techniques du véhicule qui lui fait perdre le bénéfice de ces exonérations.
Ces dispositions figurent à l’article L. 421-5 et L. 421-36 du CIBS.
Les dispositions relatives au montant de cette taxe sont prévues par les articles L. 421-58 à L. 421-70-1 du CIBS.
L’article L. 461-59 dispose que le montant de la taxe est égal à un tarif par véhicule déterminé en fonction de ses émissions de dioxyde de carbone au moyen du barème de l’année de première immatriculation du véhicule parmi les barèmes suivants :
– pour les véhicules immatriculés en recourant à la méthode dite WLTP, les barèmes WLTP mentionnés à l’article L. 421-62 ;
– pour les autres véhicules ayant fait l’objet d’une réception européenne, les barèmes NEDC mentionnés à l’article L. 421-63 ;
– pour les autres véhicules n’ayant pas fait l’objet d’une réception européenne, les barèmes en puissance administrative mentionnés à l’article L. 421‑64.
La définition des barèmes WLTP et NEDC est précisée par l’encadré suivant.
Les mesures des valeurs d’émission : du NEDC au WLTP
La mise sur le marché des véhicules à moteur est encadrée par le droit européen : elle dépend d’une autorisation administrative préalable de mise sur le marché, la « réception ».
Le processus de réception implique, notamment, le passage d’essais permettant de déterminer les émissions de CO2 du véhicule, afin de contrôler le respect, par les constructeurs, des obligations qui pèsent sur eux en la matière.
De 1973 à 2018, la méthode de détermination des émissions de CO2 a reposé sur le « nouveau cycle européen de conduite » – new european driving cycle, NEDC.
Définitivement discrédité par le scandale dit du « Dieselgate », au titre duquel le constructeur allemand Volkswagen est accusé d’avoir utilisé différentes techniques visant à frauduleusement réduire les émissions polluantes de certains de ces moteurs diesel et essence lors des tests d’homologation, le NEDC a été remplacé, depuis le 1er septembre 2018, par une nouvelle procédure d’essai mondiale harmonisée pour les voitures particulières et véhicules utilitaires légers, la norme « WLTP » (« Worldwide Harmonised Light Vehicle Test Procedure »).
Le nouveau protocole WLTP ([411]) est basé sur des cycles de roulage plus réalistes : il se déroule non plus en laboratoire mais sur un circuit de 23,25 kilomètres, sur lequel la voiture testée roule durant 30 minutes avec des vitesses moyenne et maximale plus élevées que dans le cadre du protocole NEDC. Ce cycle aboutit à une réévaluation des mesures d’émission calculées.
Par ailleurs, le cycle WLTP prend en compte le poids des options du véhicule pour déterminer ses émissions.
La mise en œuvre de ce nouveau protocole a impliqué une période transitoire entre le 1er septembre 2018 et le 29 février 2020 au cours de laquelle la méthode « NEDC corrélé » a été utilisée.
Désormais, pour les véhicules neufs immatriculés depuis cette dernière date, le barème du malus basé sur les émissions de CO2 est uniquement fondé sur des valeurs calculées selon la méthode WLTP.
L’article L. 421-60 du CIBS prévoit que le montant de la taxe est réduit de 10 % pour chaque période de douze mois entamée depuis la date de première immatriculation au sens de l’article L. 421-5. Pour l’application de cette disposition, la première période de douze mois est réputée n’être entamée qu’à compter du premier jour du septième mois. Cette réduction est appliquée, le cas échéant, après les règles particulières applicables à ce malus, à l’exception de celle mentionnée à l’article L. 421-61.
L’article L. 421-61 dispose que, pour les véhicules dont la première immatriculation est intervenue à compter du 1er janvier 2022, le montant de la taxe est plafonné à 50 % du prix d’acquisition du véhicule toutes taxes comprises.
Ce plafond est appliqué, le cas échéant, après la règle mentionnée à l’article L. 421‑60.
L’article L. 421-62 prévoit les barèmes en émissions de CO2, exprimées en grammes par kilomètre, de la méthode WLTP, pour chaque année de première immatriculation du véhicule depuis 2020. Pour les années à compter de 2023, le barème démarre à 123 g / km et comprend les 105 tranches suivantes.
barÈme en Émissions de CO2 de la mÉthode WLTP pour les annÉes |
|||||
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euro) |
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euro) |
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euro) |
Inférieures à 123 |
0 |
157 |
2 544 |
192 |
16 149 |
123 |
50 |
158 |
2 726 |
193 |
16 810 |
124 |
75 |
159 |
2 918 |
194 |
17 490 |
125 |
100 |
160 |
3 119 |
195 |
18 188 |
126 |
125 |
161 |
3 331 |
196 |
18 905 |
127 |
150 |
162 |
3 552 |
197 |
19 641 |
128 |
170 |
163 |
3 784 |
198 |
20 396 |
129 |
190 |
164 |
4 026 |
199 |
21 171 |
130 |
210 |
165 |
4 279 |
200 |
21 966 |
131 |
230 |
166 |
4 543 |
201 |
22 781 |
132 |
240 |
167 |
4 818 |
202 |
23 616 |
133 |
260 |
168 |
5 105 |
203 |
24 472 |
134 |
280 |
169 |
5 404 |
204 |
25 349 |
135 |
310 |
170 |
5 715 |
205 |
26 247 |
136 |
330 |
171 |
6 039 |
206 |
27 166 |
137 |
360 |
172 |
6 375 |
207 |
28 107 |
138 |
400 |
173 |
6 724 |
208 |
29 070 |
139 |
450 |
174 |
7 086 |
209 |
30 056 |
140 |
540 |
175 |
7 462 |
210 |
31 063 |
141 |
650 |
176 |
7 851 |
211 |
32 094 |
142 |
740 |
177 |
8 254 |
212 |
33 147 |
143 |
818 |
178 |
8 671 |
213 |
34 224 |
144 |
898 |
179 |
9 103 |
214 |
35 324 |
145 |
983 |
180 |
9 550 |
215 |
36 447 |
146 |
1 074 |
181 |
10 011 |
216 |
37 595 |
147 |
1 172 |
182 |
10 488 |
217 |
38 767 |
148 |
1 276 |
183 |
10 980 |
218 |
39 964 |
149 |
1 386 |
184 |
11 488 |
219 |
41 185 |
150 |
1 504 |
185 |
12 012 |
220 |
42 431 |
151 |
1 629 |
186 |
12 552 |
221 |
43 703 |
152 |
1 761 |
187 |
13 109 |
222 |
45 000 |
153 |
1 901 |
188 |
13 682 |
223 |
46 323 |
154 |
2 049 |
189 |
14 273 |
224 |
47 672 |
155 |
2 205 |
190 |
14 881 |
225 |
49 047 |
156 |
2 370 |
191 |
15 506 |
Supérieures à 225 |
50 000 |
Source : article L. 421-62 du CIBS.
L’article L. 421-63 du CIBS prévoit les barèmes en émissions de CO2, exprimées en grammes par kilomètre, des méthodes dites NEDC, pour chaque année de première immatriculation du véhicule depuis 2013. Pour les années à compter de 2023, le barème démarre à 110 g / km et comprend les 77 tranches suivantes.
barÈme en Émissions de CO2 des mÉthodes NEDC pour les annÉes |
|||||
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euro) |
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euro) |
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euro) |
Inférieures à 110 |
0 |
135 |
1 276 |
161 |
7 086 |
110 |
50 |
136 |
1 386 |
162 |
7 462 |
111 |
75 |
137 |
1 504 |
163 |
7 851 |
112 |
100 |
138 |
1 629 |
164 |
8 254 |
113 |
125 |
139 |
1 761 |
165 |
8 671 |
114 |
150 |
140 |
1 901 |
166 |
9 103 |
115 |
170 |
141 |
2 049 |
167 |
9 550 |
116 |
190 |
142 |
2 205 |
168 |
10 011 |
117 |
210 |
143 |
2 370 |
169 |
10 488 |
118 |
230 |
144 |
2 544 |
170 |
10 980 |
119 |
240 |
145 |
2 726 |
171 |
11 488 |
120 |
260 |
146 |
2 918 |
172 |
12 012 |
121 |
280 |
147 |
3 119 |
173 |
12 552 |
122 |
310 |
148 |
3 331 |
174 |
13 109 |
123 |
330 |
149 |
3 552 |
175 |
13 682 |
124 |
360 |
150 |
3 784 |
176 |
14 273 |
125 |
400 |
151 |
4 026 |
177 |
14 881 |
126 |
450 |
152 |
4 279 |
178 |
15 506 |
127 |
540 |
153 |
4 543 |
179 |
16 149 |
128 |
650 |
154 |
4 818 |
180 |
16 810 |
129 |
740 |
155 |
5 105 |
181 |
17 490 |
130 |
818 |
156 |
5 404 |
182 |
18 188 |
131 |
898 |
157 |
5 715 |
183 |
18 905 |
132 |
983 |
158 |
6 039 |
184 |
19 641 |
133 |
1 074 |
159 |
6 375 |
Supérieures à 184 |
20 000 |
134 |
1 172 |
160 |
6 724 |
|
|
Source : article L. 421-63 du CIBS.
L’article L. 421-64 du CIBS prévoit les barèmes en puissance administrative, exprimée en chevaux administratifs (CV), pour chaque année de première immatriculation du véhicule depuis 2013. Pour les années à compter de 2023, le barème démarre à 4 CV et comprend les 26 tranches suivantes.
barÈme en puissance administrative pour les annÉes À compter de 2023 |
|||
Puissance administrative (CV) |
Tarif (en euro) |
Puissance administrative (CV) |
Tarif (en euro) |
Inférieure à 4 |
0 |
16 |
20 500 |
4 |
500 |
17 |
23 000 |
5 |
2 250 |
18 |
25 500 |
6 |
3 500 |
19 |
28 000 |
7 |
4 750 |
20 |
30 500 |
8 |
6 500 |
21 |
33 000 |
9 |
8 000 |
22 |
35 500 |
10 |
9 500 |
23 |
38 000 |
11 |
11 500 |
24 |
40 000 |
12 |
12 750 |
25 |
42 500 |
13 |
14 500 |
26 |
45 000 |
14 |
16 000 |
27 |
47 500 |
15 |
18 750 |
Supérieure à 27 |
50 000 |
Source : article L. 421-64 du CIBS.
Diverses exonérations et abattements sont prévus :
– une exonération pour tout véhicule accessible en fauteuil roulant, prévue par l’article L. 421-65 du CIBS ;
– un abattement de 80 grammes par km, ou de 4 CV, pour le véhicule comportant au moins huit places assises et détenue par une personne morale, prévu par l’article L. 421-66 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule dont la source d’énergie est exclusivement l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux, prévue par l’article L. 421-67 du CIBS ;
– un abattement de 40 % des émissions de CO2, sauf lorsqu’elles excèdent 250 g / km, ou de deux CV, sauf lorsque la puissance administrative excède 12 CV, lorsque la source d’énergie du véhicule comprend le superéthanol E85, prévu par l’article L. 421-68 du CIBS ;
– une exonération, dans la limite d’un véhicule par bénéficiaire, pour tout véhicule détenu par les invalides et les personnes qui assument la charge d’un enfant invalide, prévue par l’article L. 421-69 du CIBS ;
– un abattement de 20 g / km par enfant ou d’un CV lorsque la personne détenant le véhicule assume la charge effective et permanente d’au moins trois enfants qui, soit sont à charge au sens des prestations familiales ([412]), soit font l’objet d’un placement à son domicile dans le cadre d’un dispositif de protection de l’enfance, d’un dispositif médico-social ou d’un service d’accueil familial thérapeutique, comme prévu par l’article L. 421-70. Cet abattement s’applique dans la limite d’un seul véhicule d’au moins cinq places par foyer. Lorsque l’abattement prévu par l’article L. 421-66 est également applicable, il est retenu le plus élevé des deux ;
– une exonération, prévue par l’article L. 421-70-1 du CIBS, pour les véhicules hors route exclusivement affectés aux besoins des sapeurs-pompiers, des personnels des services de l’État et des militaires des unités qui sont investis à titre permanent de missions de sécurité civile et des associations agréées de protection civile ainsi que des services de l’État et des collectivités territoriales chargés de la forêt, de l’Office national des forêts et des associations syndicales de propriétaires forestiers.
B. Le malus sur la masse en ordre de marche À l’immatriculation
Le fait générateur est le même que pour le malus CO2, à savoir la délivrance d’un certificat d’immatriculation résultant de la première immatriculation en tant que véhicule de tourisme en France.
Comme le prévoit l’article L. 421-72 du CIBS, le montant de la taxe est égal au produit d’un tarif unitaire par la fraction de la masse en ordre de marche excédant un seuil minimal. Ce tarif unitaire et ce seuil minimal sont ceux de l’année de la date de première immatriculation du véhicule au sens de l’article L. 421-5 parmi les seuils et tarifs mentionnés à l’article L. 421-75.
La définition de la masse en ordre de marche est précisée dans l’encadré suivant.
La définition de la masse en ordre de marche
L’article L. 421-23 du CIBS renvoie, pour la définition de la masse en ordre de marche, au règlement (UE) n° 1230/2012 de la Commission du 12 décembre 2012 portant application du règlement (CE) n° 661/2009 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les prescriptions pour la réception par type relatives aux masses et dimensions des véhicules à moteur et de leurs remorques et modifiant la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil, dans sa rédaction en vigueur.
L’article 2 de ce règlement, dans sa dernière version en vigueur, définit la masse en ordre de marche d’un véhicule à moteur comme la masse du véhicule, le ou les réservoirs de carburant étant remplis au moins à 90 % de leur capacité, y compris la masse
du conducteur, du carburant et des liquides, pourvu de l’équipement standard conformément aux spécifications du constructeur et, le cas échéant, la masse de la carrosserie, de la cabine, de l’attelage, de la ou des roues de secours ainsi que des outils.
L’article L. 421-73 dispose que le montant de la taxe est réduit de 10 % pour chaque période de douze mois entamée depuis la date de première immatriculation au sens de l’article L. 421-5. Pour l’application de cette règle, la première période de douze mois est réputée n’être entamée qu’à compter du premier jour du septième mois.
De plus, l’article L. 421-74 prévoit que le montant de la taxe est minoré de manière à ne pas excéder un seuil égal à la différence entre les termes suivants résultant de l’application au véhicule de la taxe sur les émissions de CO2 :
– le tarif maximal figurant dans le barème dont le véhicule relève parmi ceux mentionnés aux articles L. 421-62 et L. 421-64, auquel est appliquée, le cas échéant, la réduction mentionnée à l’article L. 421-60 ;
– le montant de la taxe sur les émissions de CO2.
Comme prévu par l’article L. 421-75, le tarif unitaire, exprimé en euros par kilogramme, et le seuil minimal, exprimé en kilogrammes, sont, pour chaque année de première immatriculation du véhicule, les suivants :
Année de première immatriculation |
Tarif unitaire (en euro / kg) |
Seuil minimal (en kg) |
Années à compter de 2022 |
10 |
1 800 |
2021 et années antérieures |
0 |
0 |
Divers exonérations et abattements sont prévus :
– une exonération pour tout véhicule accessible en fauteuil roulant, prévue par l’article L. 421-76 du CIBS ;
– un abattement de 400 kg, pour le véhicule comportant au moins huit places assises et détenu par une personne morale, prévu par l’article L. 421-77 du CIBS. Lorsque l’abattement prévu par l’article L. 421-81 est également applicable, il est retenu le plus élevé des deux ;
– une exonération pour tout véhicule dont la source d’énergie est exclusivement l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux, prévue par l’article L. 421-78 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule hybride rechargeable de l’extérieur dont l’autonomie équivalente en mode tout électrique en ville, déterminée lors de la réception, est supérieure à 50 km, prévue par l’article L. 421-69 du CIBS ;
– une exonération, dans la limite d’un véhicule par bénéficiaire, pour tout véhicule détenu par les invalides et les personnes qui assument la charge d’un enfant invalide, prévue par l’article L. 421-80 du CIBS ;
– un abattement de 200 kg par enfant lorsque la personne détenant le véhicule assume la charge effective et permanente d’au moins trois enfants qui, soit sont à charge au sens des prestations familiales ([413]), soit font l’objet d’un placement à son domicile dans le cadre d’un dispositif de protection de l’enfance, d’un dispositif médico-social ou d’un service d’accueil familial thérapeutique, comme prévu par l’article L. 421-81. Cet abattement s’applique dans la limite d’un seul véhicule d’au moins cinq places par foyer ;
– une exonération, prévue par l’article L. 421-81-1 du CIBS, pour les véhicules hors route exclusivement affectés aux besoins des sapeurs-pompiers, des personnels des services de l’État et des militaires des unités qui sont investis à titre permanent de missions de sécurité civile et des associations agréées de protection civile ainsi que des services de l’État et des collectivités territoriales chargés de la forêt, de l’Office national des forêts et des associations syndicales de propriétaires forestiers.
C. Les taxes sur l’affectation des vÉhicules de tourisme À des fins Économiques
L’article L. 421-94 du CIBS dispose que tout véhicule de tourisme affecté à des fins économiques sur le territoire de taxation est soumis à :
– une taxe annuelle sur les émissions de dioxyde de carbone ;
– une taxe annuelle sur l’ancienneté.
La définition du territoire de taxation est précisée dans l’encadré ci-dessous.
Le territoire de taxation
L’article L. 411-5 du CIBS dispose que les cinq territoires que sont ceux de la métropole, de la Guadeloupe et de la Martinique, de la Guyane, de La Réunion et de Mayotte sont regardés, pour l’application des taxes sur les véhicules, comme un territoire de taxation unique.
L’article L. 421-95 du même code prévoit qu’un véhicule est affecté à des fins économiques sur ce territoire de taxation lorsqu’il est autorisé à circuler sur ce territoire et que l’une des conditions suivantes est remplie :
1° il est détenu par une entreprise, immatriculé en France et les conditions mentionnées au 2° ne sont pas remplies ;
2° il circule sur les voies ouvertes à la circulation publique du territoire de taxation et une entreprise prend à sa charge, totalement ou partiellement, les frais engagés par une personne physique pour en disposer ou pour son utilisation ;
3° dans les situations autres que celles mentionnées aux 1° et 2°, il circule sur les voies ouvertes à la circulation publique du territoire de taxation pour les besoins de la réalisation de l’activité économique d’une entreprise.
Le fait générateur de ces taxes est constitué par toute affectation du véhicule à des fins économiques sur le territoire de taxation.
L’article L. 421-107 du CIBS prévoit que le montant de chacune de ces taxes est égal, pour chaque véhicule, chaque entreprise affectataire et chaque année civile, au produit des facteurs suivants :
1° le quotient entre, au numérateur, la durée de l’affectation du véhicule en France à des fins économiques, en jours, et, au dénominateur, le nombre de jours de l’année civile ;
2° le tarif annuel de la taxe.
L’article L. 421-108 précise que, lorsque, pour une même taxe, différents tarifs s’appliquent successivement au cours de la même année civile pour un même véhicule et une même entreprise, le tarif annuel est remplacé par la moyenne des tarifs applicables au cours de la période d’affectation du véhicule en France à des fins économiques, chacun étant pondéré par la durée, en nombre de jours, de sa période d’application. Lorsque plusieurs tarifs sont susceptibles de s’appliquer au cours d’une même journée, le plus élevé est retenu.
L’article L. 421-110 prévoit une minoration des taxes lorsqu’un véhicule de tourisme circule sur les voies ouvertes à la circulation publique du territoire de taxation et qu’une entreprise prend à sa charge, totalement ou partiellement, les frais engagés par une personne physique pour en disposer ou pour son utilisation, en fonction de la distance parcourue pour les déplacements professionnels. En effet, le facteur mentionné au 1° de l’article L. 421-107 est, dans ce cas, multiplié par le pourcentage suivant, déterminé en fonction de cette distance :
Distance annuelle parcourue (en km) |
Pourcentage |
De 0 à 15 000 |
0 |
De 15 001 à 25 000 |
25 |
De 25 001 à 35 000 |
50 |
De 35 001 à 45 000 |
75 |
Supérieure à 45 000 |
100 |
Lorsqu’une même personne physique recourt successivement à plusieurs véhicules au cours d’une même année civile, ce pourcentage est déterminé, pour chacun de ces véhicules, à partir de la somme des distances relatives à tous ces véhicules.
Une seconde minoration est prévue par l’article L. 421-11. Selon ses termes, le montant cumulé des taxes pour l’ensemble des véhicules de tourisme affectés à des fins économiques sur le territoire de taxation par une même entreprise fait l’objet d’une minoration de 15 000 euros.
1. La taxe annuelle sur les émissions de CO2
L’article L. 421-120 prévoit que pour les véhicules immatriculés selon la méthode WLTP, le tarif annuel, fonction des émissions de CO2 exprimées en grammes par kilomètre, est le suivant :
tarif annuel en Émissions de CO2 de la mÉthode WLTP |
|||||||||
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euros) |
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euros) |
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euros) |
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euros) |
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euros) |
0 à 20 |
0 |
71 |
57 |
122 |
195 |
173 |
1 938 |
224 |
4 682 |
21 |
17 |
72 |
58 |
123 |
197 |
174 |
2 001 |
225 |
4 725 |
22 |
18 |
73 |
58 |
124 |
198 |
175 |
2 065 |
226 |
4 769 |
23 |
18 |
74 |
59 |
125 |
200 |
176 |
2 130 |
227 |
4 812 |
24 |
19 |
75 |
60 |
126 |
202 |
177 |
2 195 |
228 |
4 880 |
25 |
20 |
76 |
61 |
127 |
203 |
178 |
2 261 |
229 |
4 924 |
26 |
21 |
77 |
62 |
128 |
218 |
179 |
2 327 |
230 |
4 968 |
27 |
22 |
78 |
117 |
129 |
232 |
180 |
2 394 |
231 |
5 036 |
28 |
22 |
79 |
119 |
130 |
247 |
181 |
2 480 |
232 |
2 081 |
29 |
23 |
80 |
120 |
131 |
249 |
182 |
2 548 |
233 |
5 150 |
30 |
24 |
81 |
122 |
132 |
264 |
183 |
2 617 |
234 |
5 218 |
31 |
25 |
82 |
123 |
133 |
266 |
184 |
2 686 |
235 |
5 288 |
32 |
26 |
83 |
125 |
134 |
295 |
185 |
2 757 |
236 |
5 334 |
33 |
26 |
84 |
126 |
135 |
311 |
186 |
2 827 |
237 |
5 404 |
34 |
27 |
85 |
128 |
136 |
326 |
187 |
2 899 |
238 |
5 474 |
35 |
28 |
86 |
129 |
137 |
343 |
188 |
2 970 |
239 |
5 521 |
36 |
29 |
87 |
131 |
138 |
359 |
189 |
3 043 |
240 |
5 592 |
37 |
30 |
88 |
132 |
139 |
375 |
190 |
3 116 |
241 |
5 664 |
38 |
30 |
89 |
134 |
140 |
392 |
191 |
3 190 |
242 |
5 735 |
39 |
31 |
90 |
135 |
141 |
409 |
192 |
3 264 |
243 |
5 783 |
40 |
32 |
91 |
137 |
142 |
426 |
193 |
3 300 |
244 |
8 859 |
41 |
33 |
92 |
138 |
143 |
443 |
194 |
3 337 |
245 |
5 929 |
42 |
34 |
93 |
140 |
144 |
461 |
195 |
3 374 |
246 |
6 002 |
43 |
34 |
94 |
141 |
145 |
479 |
196 |
3 410 |
247 |
6 052 |
44 |
35 |
95 |
143 |
146 |
482 |
197 |
3 448 |
248 |
6 126 |
45 |
36 |
96 |
144 |
147 |
500 |
198 |
3 485 |
249 |
6 200 |
46 |
37 |
97 |
146 |
148 |
518 |
199 |
3 522 |
250 |
6 250 |
47 |
38 |
98 |
147 |
149 |
551 |
200 |
3 580 |
251 |
6 325 |
48 |
38 |
99 |
149 |
150 |
600 |
201 |
3 618 |
252 |
6 401 |
49 |
39 |
100 |
150 |
151 |
664 |
202 |
3 676 |
253 |
6 477 |
50 |
40 |
101 |
162 |
152 |
730 |
203 |
3 735 |
254 |
6 528 |
51 |
41 |
102 |
163 |
153 |
796 |
204 |
3 771 |
255 |
6 605 |
52 |
42 |
103 |
165 |
154 |
847 |
205 |
3 813 |
256 |
6 682 |
53 |
42 |
104 |
166 |
155 |
899 |
206 |
3 852 |
257 |
6 733 |
54 |
43 |
105 |
168 |
156 |
952 |
207 |
3 392 |
258 |
6 811 |
55 |
44 |
106 |
170 |
157 |
1 005 |
208 |
3 952 |
259 |
6 889 |
56 |
45 |
107 |
171 |
158 |
1 059 |
209 |
3 992 |
260 |
6 968 |
57 |
46 |
108 |
173 |
159 |
1 113 |
210 |
4 032 |
261 |
7 047 |
58 |
46 |
109 |
174 |
160 |
1 168 |
211 |
4 072 |
262 |
7 126 |
59 |
47 |
110 |
176 |
161 |
1 224 |
212 |
4 113 |
263 |
7 206 |
60 |
48 |
111 |
178 |
162 |
1 280 |
213 |
4 175 |
264 |
7 286 |
61 |
49 |
112 |
179 |
163 |
1 337 |
214 |
4 216 |
265 |
7 367 |
62 |
50 |
113 |
181 |
164 |
1 394 |
215 |
4 257 |
266 |
7 448 |
63 |
50 |
114 |
182 |
165 |
1 452 |
216 |
4 298 |
267 |
7 529 |
64 |
51 |
115 |
184 |
166 |
1 511 |
217 |
4 340 |
268 |
7 638 |
65 |
52 |
116 |
186 |
167 |
1 570 |
218 |
4 404 |
269 |
7 747 |
66 |
53 |
117 |
187 |
168 |
1 630 |
219 |
4 446 |
|
|
67 |
54 |
118 |
189 |
169 |
1 690 |
220 |
4 488 |
|
|
68 |
54 |
119 |
190 |
170 |
1 751 |
221 |
4 531 |
|
|
69 |
55 |
120 |
192 |
171 |
1 813 |
222 |
4 573 |
|
|
70 |
56 |
121 |
194 |
172 |
1 875 |
223 |
4 638 |
|
|
Source : article L. 421-120 du CIBS.
Lorsque les émissions sont supérieures à 269 grammes par kilomètre, le tarif est égal au produit du tarif unitaire de 29 euros par gramme par kilomètre par les émissions de dioxyde de carbone, exprimées en grammes par kilomètre.
L’article L. 421-121 prévoit que, pour les véhicules autres que ceux immatriculés selon la méthode WLTP et qui ont fait l’objet d’une réception européenne, ont été immatriculés pour la première fois à compter du 1er juin 2004 et n’étaient pas affectés à des fins économiques sur le territoire de taxation par l’entreprise affectataire avant le 1er janvier 2006, le tarif annuel est égal au produit des émissions de dioxyde de carbone (CO2), exprimées en grammes par kilomètre, par le tarif unitaire suivant, exprimé en euros par gramme par kilomètre :
Émissions de dioxyde de carbone (en g/km) |
Tarif unitaire (en euros par gramme par kilomètre) |
Inférieures ou égales à 20 |
0 |
De 21 à 60 |
1 |
De 61 à 100 |
2 |
De 101 à 120 |
4,5 |
De 121 à 140 |
6,5 |
De 141 à 160 |
13 |
De 161 à 200 |
19,5 |
De 201 à 250 |
23,5 |
Supérieures à 250 |
29 |
L’article L. 421-122 prévoit que, pour les véhicules autres que ceux mentionnés aux articles L. 421-120 et L. 421-121, le tarif annuel, en fonction de la puissance administrative exprimée en chevaux administratifs, est le suivant :
Puissance administrative (en CV) |
Tarif annuel (en euro) |
Inférieure à 4 |
750 |
De 4 à 6 |
1 400 |
De 7 à 10 |
3 000 |
De 11 à 15 |
3 600 |
Supérieure à 15 |
4 500 |
Diverses exonérations sont prévues :
– une exonération pour tout véhicule accessible en fauteuil roulant, prévue par l’article L. 421-123 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule dont la source d’énergie est exclusivement l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux, prévue par l’article L. 421-124 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule répondant aux conditions cumulatives suivantes :
● sa source d’énergie combine soit, d’une part, l’électricité ou l’hydrogène et, d’autre part, le gaz naturel, le gaz de pétrole liquéfié, l’essence ou le superéthanol E85, soit, d’une part, le gaz naturel ou le gaz de pétrole liquéfié et, d’autre part, l’essence ou le superéthanol E85 ;
● il remplit l’un des deux critères suivants :
▪ ses émissions de CO2 n’excèdent pas, pour les véhicules immatriculés selon la méthode WLTP, 60 grammes par kilomètre ou, pour les véhicules mentionnés à l’article L. 421-121, 50 grammes par kilomètre ou, pour les autres véhicules, sa puissance administrative n’excède pas 3 chevaux administratifs ;
▪ ses émissions de CO2 ou sa puissance administrative n’excèdent pas le double de ces seuils et l’ancienneté du véhicule, déterminée à partir de sa date de première immatriculation, n’excède pas trois années.
– une exonération, prévue par l’article L. 421-126 du CIBS, pour tout véhicule affecté aux besoins des opérations exonérées de TVA mentionnées au 9° du 4 et au 7 de l’article 261 du CGI. Il s’agit :
● d’une part, des prestations de services et des livraisons de biens qui leur sont étroitement liées fournies à leurs membres, moyennant une cotisation fixée conformément aux statuts, par des organismes légalement constitués agissant sans but lucratif dont la gestion est désintéressée et qui poursuivent des objectifs de nature philosophique, religieuse, politique, patriotique, civique ou syndicale, dans la mesure où ces opérations se rattachent directement à la défense collective des intérêts moraux ou matériels des membres ;
● et, d’autre part, des services rendus par certains organismes d’utilité générale.
– une exonération pour tout véhicule affecté à des fins économiques sur le territoire de taxation par une personne physique exerçant son activité professionnelle en nom propre, prévue par l’article L. 421-127 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule exclusivement affecté par l’entreprise affectataire à la location ou à la mise à disposition temporaire de ses clients en remplacement de leur véhicule immobilisé, prévue par l’article L. 421-128 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule pris en location sur une période d’au plus un mois civil ou trente jours consécutifs par l’entreprise affectataire, prévue par l’article L. 421-129 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule affecté au transport public de personnes, prévue par l’article L. 421-130 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule affecté à des activités agricoles ou forestières, prévue par l’article L. 421-131 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule affecté à l’enseignement de la conduite ou du pilotage ou aux compétitions sportives, prévue par l’article L. 421-132 du CIBS.
2. La taxe annuelle sur l’ancienneté des véhicules
Le tarif annuel de la taxe sur l’ancienneté des véhicules est fixé par l’article L. 421-134 du CIBS. Il est fonction de l’année de première immatriculation du véhicule et de sa source d’énergie, conformément au barème suivant :
Année de première immatriculation du véhicule |
Tarif lorsque la source d’énergie est exclusivement le gazole |
Tarif pour les autres sources d’énergie |
À partir de 2015 |
40 |
20 |
De 2011 à 2014 |
100 |
45 |
De 2006 à 2010 |
300 |
45 |
De 2001 à 2005 |
400 |
45 |
Jusqu’à 2000 |
600 |
70 |
Source : article L. 421-134 du CIBS.
Comme prévu par l’article L. 421-135, la source d’énergie du véhicule est assimilée au gazole lorsque l’une des conditions suivantes est remplie :
1° sa source d’énergie est exclusivement le gazole ;
2° sa source d’énergie combine le gazole et un autre produit et il remplit le critère suivant :
a) pour les véhicules immatriculés en recourant à la méthode WLTP, les émissions de CO2 excèdent 120 grammes par kilomètre ;
b) pour les véhicules autres que ceux mentionnés au a, ayant fait l’objet d’une réception européenne, immatriculés pour la première fois à compter du 1er juin 2004 et qui n’étaient pas utilisés par le redevable avant le 1er janvier 2006, les émissions de CO2 excèdent 100 grammes par kilomètre ;
c) pour les véhicules autres que ceux mentionnés au a ou b, la puissance administrative excède 6 chevaux administratifs.
Diverses exonérations sont prévues :
– une exonération pour tout véhicule accessible en fauteuil roulant, prévue par l’article L. 421-136 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule dont la source d’énergie est exclusivement l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux, prévue par l’article L. 421-137 du CIBS ;
– une exonération, prévue par l’article L. 421-138 du CIBS, pour tout véhicule affecté aux besoins des opérations exonérées de TVA mentionnées au 9 ° du 4 et au 7 de l’article 261 du CGI. Il s’agit :
● d’une part, des prestations de services et des livraisons de biens qui leur sont étroitement liées fournies à leurs membres, moyennant une cotisation fixée conformément aux statuts, par des organismes légalement constitués agissant sans but lucratif dont la gestion est désintéressée et qui poursuivent des objectifs de nature philosophique, religieuse, politique, patriotique, civique ou syndicale, dans la mesure où ces opérations se rattachent directement à la défense collective des intérêts moraux ou matériels des membres ;
● et, d’autre part, des services rendus par certains organismes d’utilité générale.
– une exonération pour tout véhicule affecté à des fins économiques sur le territoire de taxation par une personne physique exerçant son activité professionnelle en nom propre, prévue par l’article L. 421-139 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule exclusivement affecté par l’entreprise affectataire à la location ou à la mise à disposition temporaire de ses clients en remplacement de leur véhicule immobilisé, prévue par l’article L. 421-140 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule pris en location sur une période d’au plus un mois civil ou trente jours consécutifs par l’entreprise affectataire, prévue par l’article L. 421-141 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule affecté au transport public de personnes, prévue par l’article L. 421-142 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule affecté à des activités agricoles ou forestières, prévue par l’article L. 421-143 du CIBS ;
– une exonération pour tout véhicule affecté à l’enseignement de la conduite ou du pilotage ou aux compétitions sportives, prévue par l’article L. 421-144 du CIBS.
II. le dispositif proposÉ
Les mesures proposées par le présent article modifient la fiscalité des véhicules afin de renforcer l’incitation au verdissement du parc automobile.
A. l’Élargissement de la dÉfinition des vÉhicules de tourisme
Le A (alinéas 2 à 6) tend à élargir la définition des véhicules de tourisme, afin de l’adapter à certaines pratiques.
En effet, c’est par renvoi à la notion de véhicule de tourisme, telle que prévue par l’article L. 421-2 du CIBS, que sont définies les assiettes des taxes sur les véhicules à moteur. C’est ainsi que l’article L. 421-30 du CIBS prévoit, à son 4°, que l’immatriculation des véhicules de tourisme au sens de l’article L. 421-2 autres que ceux mentionnés au b du 2° du même article L. 421-2, est soumise à une taxe sur les émissions de dioxyde de carbone et à une taxe sur la masse en ordre de marche. C’est ainsi également que l’article L. 421-94 du CIBS dispose que tout véhicule de tourisme affecté à des fins économiques sur le territoire de taxation est soumis à une taxe annuelle sur les émissions de dioxyde de carbone et à une taxe annuelle sur l’ancienneté.
Le 1° du A (alinéas 3 à 5) réécrit le 2° de l’article L. 421-2 du CIBS afin de prévoir que sont des véhicules de tourisme, parmi ceux de la catégorie N1, les véhicules déterminés par décret qui, compte tenu de leur carrosserie, équipements et autres caractéristiques techniques, sont susceptibles de recevoir les mêmes usages que les véhicules de la catégorie M1, c’est-à-dire de servir au transport particulier de personnes. L’exception concernant les véhicules exclusivement affectés à l’exploitation des remontées mécaniques et des domaines skiables est conservée dans les mêmes termes.
Il s’agit ainsi de renvoyer au décret la définition du champ des véhicules de transport de marchandises assimilés à des voitures particulières au regard de leur usage, en réaction à des pratiques d’évitement des malus. En effet, l’évaluation préalable précise qu’en l’état actuel du droit, une part substantielle de ces véhicules continue d’échapper à la fiscalité, soit en étant immatriculés, lors de la réception du véhicule dans un autre État membre de l’UE, avec une carrosserie « Camion », sur proposition des constructeurs, soit en ne proposant que quatre places assises au lieu de cinq. Seuls 2 % des pick-up pouvant être utilisés en tant que véhicules de tourisme relèveraient actuellement de cette catégorie.
Le 2° (alinéa 6) actualise une référence à un règlement européen à l’article L. 421-23 du CIBS. La définition de la masse en ordre de marche et celle de la masse en charge maximale techniquement admissible, auxquelles il est renvoyé, demeurent inchangées.
Le B (alinéas 7 à 9) procèdent à des modifications de coordination aux articles L. 421-30 et L. 421-36 du CIBS.
B. le renforcement du barÈme du malus CO2 et la suppression de son plafonnement
Le C (alinéas 10 à 31) procède à un alourdissement du barème du malus CO2 à l’immatriculation et modifie des réfactions et exonérations de cette taxe.
Le 1° (alinéas 11 à 15) révise à la baisse, en le portant de 10 % à 5 %, le coefficient de vétusté dont bénéficient les véhicules d’occasion pour chaque période de douze mois entamée depuis la date de première immatriculation. Toutefois, les véhicules de plus de dix ans continueraient à être exonérés de ce malus, comme prévu par le c) du 1° (alinéas 14 et 15). Selon l’évaluation préalable, il s’agit de lutter contre l’augmentation des importations de véhicules d’occasion très émetteurs.
Le 2° (alinéa 16) supprime le plafonnement de ce malus à 50 % du prix d’acquisition toutes taxes comprises, prévu par l’article L. 421-60 du CIBS. Selon l’évaluation préalable, ce plafonnement ne bénéficie qu’à un nombre réduit de véhicules (0,3 % des immatriculations), caractérisés par un prix de vente élevé, d’en moyenne 71 000 euros, et particulièrement polluants, puisque leurs émissions seraient, en moyenne, de 238 g de CO2 / km. Selon l’évaluation préalable, il s’agit également de mettre un terme à des risques de fraude dus aux difficultés de mise en œuvre de cette mesure, qui nécessite la mise en place d’un dispositif de collecte des prix de référence lourd à gérer pour les opérateurs économiques, en particulier s’agissant des véhicules importés. Il s’agit, enfin, d’une mesure d’équité entre les acquéreurs.
Le 3° (alinéas 17 à 20) alourdit le barème du malus sur les émissions de CO2 à l’immatriculation pour les véhicules immatriculés selon la méthode WLTP, barème prévu par l’article L. 421-62, pour les années à compter de 2024. Le barème applicable est reproduit dans le tableau suivant.
Par rapport à celui applicable en 2023, ce nouveau barème démarre à 117 g de CO2 / km, au lieu de 123 g de CO2 / km. Il est, également, significativement alourdi à compter de 166 g de CO2 / km. En effet, une simple réduction du seuil d’émissions à partir duquel la taxe est perçue, de 123 à 117 g de CO2 / km, aurait conduit à porter le malus, pour un véhicule émettant 190 g de CO2 / km, de 14 881 à 37 595 euros, au lieu de quoi il s’élèverait, selon ce nouveau barème, à 45 990 euros. De plus, le plafond du barème, qui était de 50 000 euros à compter de 255 g de CO2 par km, passe à 60 000 euros et est applicable dès que les émissions excèdent 193 g de CO2 par km.
barÈme en Émissions de CO2 de la mÉthode WLTP pour les annÉes |
|||||
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euro) |
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euro) |
Émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif (en euro) |
Inférieures à 117 |
0 |
143 |
1 276 |
169 |
7 959 |
118 |
50 |
144 |
1 386 |
170 |
8 770 |
119 |
75 |
145 |
1 504 |
171 |
9 681 |
120 |
100 |
146 |
1 629 |
172 |
10 692 |
121 |
125 |
147 |
1 761 |
173 |
11 803 |
122 |
150 |
148 |
1 901 |
174 |
13 014 |
123 |
170 |
149 |
2 049 |
175 |
14 325 |
124 |
190 |
150 |
2 205 |
176 |
15 736 |
125 |
210 |
151 |
2 370 |
177 |
17 247 |
126 |
230 |
152 |
2 544 |
178 |
18 858 |
127 |
240 |
153 |
2 726 |
179 |
20 569 |
128 |
260 |
154 |
2 918 |
180 |
22 380 |
129 |
280 |
155 |
3 119 |
181 |
24 291 |
130 |
310 |
156 |
3 331 |
182 |
26 302 |
131 |
330 |
157 |
3 552 |
183 |
28 413 |
132 |
360 |
158 |
3 784 |
184 |
30 624 |
133 |
400 |
159 |
4 026 |
185 |
32 935 |
134 |
450 |
160 |
4 279 |
186 |
35 346 |
135 |
540 |
161 |
4 543 |
187 |
37 857 |
136 |
650 |
162 |
4 818 |
188 |
40 468 |
137 |
740 |
163 |
5 105 |
189 |
43 179 |
138 |
818 |
164 |
5 404 |
190 |
45 990 |
139 |
898 |
165 |
5 715 |
191 |
48 901 |
140 |
983 |
166 |
6 126 |
192 |
51 912 |
141 |
1 074 |
167 |
6 537 |
193 |
55 023 |
142 |
1 172 |
168 |
7 248 |
Supérieures à 193 |
60 000 |
Source : PLF pour 2024.
Le 4° (alinéas 21 à 23) procède à des modifications de coordination à l’article L. 421-63 du CIBS, découlant de l’exonération de malus à partir de dix ans après la première immatriculation, prévue au c) du 1° du B.
Le 5° (alinéas 24 à 29) procède à la même modification à l’article L. 421‑64 du CIBS et renforce le barème en puissance administrative à compter de l’année 2024. Ce barème est reproduit dans le tableau ci-dessous. Il marque un alourdissement très significatif. Le plafond du malus est porté de 50 000 à 60 000 euros. Ce plafond est atteint dès 15 CV, au lieu de 28 CV aujourd’hui. Le malus applicable à un véhicule de 14 CV est porté de 16 000 à 52 000 euros.
barÈme en puissance administrative pour les annÉes À compter de 2024 |
|
Puissance administrative (CV) |
Tarif (en euro) |
Inférieure à 4 |
0 |
4 |
1 000 |
5 |
3 250 |
6 |
5 000 |
7 |
6 750 |
8 |
10 750 |
9 |
15 750 |
10 |
22 500 |
11 |
28 500 |
12 |
35 500 |
13 |
43 250 |
14 |
52 000 |
15 et plus |
60 000 |
Source : PLF pour 2024.
Le 6° (alinéas 30 et 31) complète l’article L. 421-70 du CIBS afin de limiter le bénéfice du remboursement de malus pour les familles d’au moins trois enfants à une fois par période de deux ans. Il est ainsi précisé que la limite d’un véhicule d’au moins cinq places par foyer est appréciée sur une période de deux ans, sauf dans les situations déterminées par décret où le véhicule est devenu inutilisable. Il s’agit de mettre fin à des pratiques frauduleuses constatées par l’administration et consistant à recourir à des prête-nom sollicitant un remboursement dans le cadre de l’acquisition d’un véhicule suivie de sa cession immédiate ou à brève échéance. Ces pratiques permettent à un demandeur de bénéficier plusieurs fois du remboursement sur une courte durée, pour des véhicules différents.
C. le renforcement du barÈme du malus poids
Le D (alinéas 32 à 48) procède à un alourdissement du barème du malus poids à l’immatriculation et modifie des réfactions et exonérations de cette taxe.
Le 1° (alinéas 33 à 35) modifie le mode de calcul de ce malus ; celui-ci devient, en effet, progressif, alors qu’il était, jusqu’à présent, proportionnel. Aussi l’article L. 421-72 du CIBS, tel que réécrit par le présent article, prévoit-il que le montant de la taxe est déterminé au moyen du barème de l’année de première immatriculation du véhicule associant un tarif marginal à chaque fraction de la masse en ordre de marche. Les produits de chacune de ces fractions par le tarif marginal associé sont calculés puis additionnés.
Le 2° (alinéas 36 à 39) modifie l’article L. 421-73 afin de porter de 10 % à 5 % le coefficient de vétusté dont bénéficient les véhicules d’occasion pour chaque période de douze mois entamée depuis la date de première immatriculation. Toutefois, les véhicules dont la première immatriculation est antérieure au 1er janvier 2022 continueraient à être exonérés de ce malus, comme prévu par le b) du 2° (alinéas 38 et 39). Selon l’évaluation préalable, il s’agit de lutter contre l’augmentation des importations de véhicules d’occasion très émetteurs.
Le 3° (alinéas 40 à 44) réécrit l’article L. 421-75 du CIBS afin d’introduire un barème progressif pour ce malus à compter de 2024. Ce barème est reproduit dans le tableau ci-dessous.
barÈme pour les annÉes À compter de 2024 |
|
Fraction de la masse en ordre de marche (en kg) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 1 599 |
0 |
De 1 600 à 1 799 |
10 |
De 1 800 à 1 899 |
15 |
De 1 900 à 1 999 |
20 |
De 2 000 à 2 100 |
25 |
À partir de 2 100 |
30 |
Source : PLF pour 2024.
Le seuil de démarrage de ce barème est fixé à 1 600 kg, au lieu de 1 800 aujourd’hui. L’adoption d’un barème progressif conduit, surtout, à alourdir considérablement l’imposition.
Illustration
● Un véhicule de 1950 kg subit aujourd’hui un malus poids de :
(1 950 – 1 800) * 10 = 1 500 euros.
● Avec ce nouveau barème, ce véhicule subira un malus égal à :
(1 799 – 1 599) * 10 = 2 000
(1 899 – 1 799) * 15 = 1 500
(1 950 – 1 900) * 20 = 1 000
________
4 500 euros
Le barème pour les années 2022 et 2023 demeure inchangé.
Le 4° (alinéas 45 et 46) remplace l’exonération dont bénéficient les véhicules hybrides électriques rechargeables de l’extérieur dont l’autonomie équivalente en mode tout électrique en ville, déterminée lors de la réception, est supérieure à 50 km, par un abattement de 200 kg, dans la limite de 15 % de la masse en ordre de marche, pour ces mêmes véhicules. Cette modification entre en vigueur le 1er janvier 2025.
L’évaluation préalable souligne qu’il s’agit de tenir compte du fait que les véhicules hybrides rechargeables sont émetteurs de CO2 et peuvent l’être autant que des véhicules thermiques, et de contrer des stratégies de contournement du malus par certaines entreprises, consistant à fournir des véhicules hybrides rechargeables à leurs employés, accompagnés d’une carte bancaire pour le paiement de l’essence, dans le seul but d’éviter l’application de la fiscalité écologique.
Le 5° (alinéas 47 et 48) complète l’article L. 421-81 du CIBS afin de limiter le bénéfice du remboursement de malus pour les familles d’au moins trois enfants à une fois par période de deux ans. Il est ainsi précisé que la limite d’un véhicule d’au moins cinq places par foyer est appréciée sur une période de deux ans, sauf dans les situations déterminées par décret où le véhicule est devenu inutilisable. Il s’agit de mettre fin à des pratiques frauduleuses constatées par l’administration et consistant à recourir à des prête-noms sollicitant un remboursement dans le cadre de l’acquisition d’un véhicule suivie de sa cession immédiate ou à brève échéance. Ces pratiques permettent à un demandeur de bénéficier plusieurs fois du remboursement sur une courte durée, pour des véhicules différents.
D. le renforcement du barÈme de la taxe annuelle sur les Émissions de CO2
Le 2° du E (alinéas 51 à 90) renforce le barème de la taxe annuelle sur les émissions de CO2.
Le a) (alinéas 52 à 57) indique, dans un nouvel article L. 421-119-1 du CIBS, la méthode de calcul de cette taxe, compte tenu de l’introduction d’un barème progressif.
Une trajectoire pluriannuelle est fixée, qui marque un net alourdissement de cette taxe. Il s’agit d’envoyer un signal-prix incitatif aux acheteurs.
Le b) (alinéas 58 à 64) fixe les barèmes applicables à compter du 1er janvier 2024.
barÈme WLTP |
|
Fraction des émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 14 |
0 |
De 15 à 55 |
1 |
De 56 à 63 |
2 |
De 64 à 95 |
3 |
De 96 à 115 |
4 |
De 116 à 135 |
10 |
De 136 à 155 |
50 |
De 156 à 175 |
60 |
À partir de 176 |
65 |
Source : PLF pour 2024.
barÈme nedc |
|
Fraction des émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 12 |
0 |
De 13 à 45 |
1 |
De 46 à 52 |
2 |
De 53 à 79 |
3 |
De 80 à 95 |
4 |
De 96 à 112 |
10 |
De 113 à 128 |
50 |
De 129 à 145 |
60 |
À partir de 146 |
65 |
Source : PLF pour 2024.
barÈme en puissance administrative |
|
Fraction de la puissance administrative (en CV) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 3 |
1 500 |
De 4 à 6 |
2 250 |
De 7 à 10 |
3 750 |
De 11 à 15 |
4 750 |
À partir de 16 |
6 000 |
Source : PLF pour 2024.
Le c) (alinéas 65 à 71) fixe les barèmes applicables à compter du 1er janvier 2025
barÈme WLTP |
|
Fraction des émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 9 |
0 |
De 10 à 50 |
1 |
De 51 à 58 |
2 |
De 59 à 90 |
3 |
De 91 à 110 |
4 |
De 111 à 130 |
10 |
De 131 à 150 |
50 |
De 151 à 170 |
60 |
À partir de 171 |
65 |
Source : PLF pour 2024.
barÈme nedc |
|
Fraction des émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 7 |
0 |
De 8 à 41 |
1 |
De 42 à 48 |
2 |
De 49 à 74 |
3 |
De 75 à 91 |
4 |
De 92 à 107 |
10 |
De 108 à 124 |
50 |
De 125 à 140 |
60 |
À partir de 141 |
65 |
Source : PLF pour 2024.
barÈme en puissance administrative |
|
Fraction de la puissance administrative (en CV) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 3 |
1 750 |
De 4 à 6 |
2 500 |
De 7 à 10 |
4 250 |
De 11 à 15 |
5 000 |
À partir de 16 |
6 250 |
Source : PLF pour 2024.
Le d) (alinéas 72 à 78) fixe les barèmes applicables à compter du 1er janvier 2026
barÈme WLTP |
|
Fraction des émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 4 |
0 |
De 5 à 45 |
1 |
De 46 à 53 |
2 |
De 54 à 85 |
3 |
De 86 à 105 |
4 |
De 106 à 125 |
10 |
De 126 à 145 |
50 |
De 146 à 165 |
60 |
À partir de 166 |
65 |
Source : PLF pour 2024.
barÈme nedc |
|
Fraction des émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 3 |
0 |
De 4 à 37 |
1 |
De 38 à 44 |
2 |
De 45 à 70 |
3 |
De 71 à 87 |
4 |
De 88 à 103 |
10 |
De 104 à 120 |
50 |
De 121 à 136 |
60 |
À partir de 137 |
65 |
Source : PLF pour 2024.
barÈme en puissance administrative |
|
Fraction de la puissance administrative (en CV) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 3 |
2 000 |
De 4 à 6 |
3 000 |
De 7 à 10 |
4 500 |
De 11 à 15 |
5 250 |
À partir de 16 |
6 500 |
Source : PLF pour 2024.
Le e) (alinéas 79 à 85) fixe les barèmes applicables à compter du 1er janvier 2027
barÈme WLTP |
|
Fraction des émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 40 |
0 |
De 41 à 48 |
1 |
De 49 à 80 |
2 |
De 81 à 100 |
3 |
De 101 à 120 |
4 |
De 121 à 140 |
10 |
De 141 à 160 |
50 |
À partir de 161 |
60 |
Source : PLF pour 2024.
barÈme nedc |
|
Fraction des émissions de CO2 (en g/km) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 33 |
1 |
De 34 à 40 |
2 |
De 41 à 66 |
3 |
De 67 à 83 |
4 |
De 84 à 99 |
10 |
De 100 à 116 |
50 |
De 117 à 132 |
60 |
À partir de 133 |
65 |
Source : PLF pour 2024.
barÈme en puissance administrative |
|
Fraction de la puissance administrative (en CV) |
Tarif marginal (en euro) |
Jusqu’à 3 |
2 250 |
De 4 à 6 |
3 250 |
De 7 à 10 |
4 750 |
De 11 à 15 |
5 500 |
À partir de 16 |
6 750 |
Source : PLF pour 2024.
Les f) et g) (alinéas 86 à 90) remplacent, à compter du 1er janvier 2025, l’exonération prévue pour les véhicules hybrides, prévue par l’article L. 421-25 du CIBS, par un abattement, pour les véhicules dont la source d’énergie comprend le superéthanol E85, de 40 % des émissions de CO2, sauf lorsqu’elles excèdent 250 g / km ; ou de 2 chevaux administratifs, sauf lorsque la puissance administrative excède 12 chevaux administratifs. L’évaluation préalable indique qu’il s’agit de limiter le champ des exonérations aux seuls véhicules fonctionnant à l’électricité ou à l’hydrogène, afin de reporter une partie des acquisitions vers des véhicules propres. Elle souligne, de plus, que le régime d’exonération actuel conduit à exonérer, dans certains cas, des voitures simplement hybridées, c’est-à-dire hybrides non rechargeables de l’extérieur, et que l’utilisation en mode électrique des voitures hybrides rechargeables est surestimée d’un facteur 2,5 à l’homologation.
E. le remplacement de la taxe annuelle sur l’anciennetÉ par une taxe sur les Émissions de polluants atmosphÉriques
Le 1° (alinéa 50) et les 3° et 4° du E (alinéas 91 à 101) remplacent la taxe annuelle sur l’ancienneté par une taxe sur les émissions de polluants atmosphériques.
Comme prévu par la nouvelle rédaction de l’article L. 421-134 du CIBS, le tarif annuel serait déterminé en fonction de l’appartenance du véhicule à l’une des trois catégories d’émissions de polluants suivantes :
1° La catégorie E, qui regroupe les véhicules dont la source d’énergie est exclusivement l’électricité, l’hydrogène ou une combinaison des deux ;
2° La catégorie 1, qui regroupe les véhicules qui ne sont pas alimentés par un moteur thermique à allumage commandé et qui respectent les valeurs limites d’émissions Euro 5 ou Euro 6 mentionnées respectivement au tableau 1 et au tableau 2 de l’annexe I du règlement (CE) n° 715/2007 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2007 relatif à la réception des véhicules à moteur au regard des émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 5 et Euro 6) et aux informations sur la réparation et l’entretien des véhicules, dans sa rédaction en vigueur ;
3° La catégorie des véhicules les plus émetteurs ou polluants, qui regroupe les véhicules ne relevant ni du 1°, ni du 2°.
Le tableau fixant le tarif en fonction de la catégorie d’émissions de polluants est reproduit ci-dessous.
tarif en fonction de la catÉgorie d’Émissions de polluants |
|
Catégorie d’émissions de polluants |
Tarif annuel (en euro) |
E |
0 |
1 |
100 |
Véhicules les plus polluants |
500 |
Source : PLF pour 2024.
Les valeurs limites d’émissions Euro 5 et Euro 6 prévues par l’annexe I du règlement (CE) n° 715/2007 précité sont reproduits dans les tableaux ci-dessous.
limites d’Émission « euro 5 » |
||||||||||||||||
|
Masse de référence (RM) (en kg) |
Valeurs limites |
||||||||||||||
Masse de monoxyde de carbone (CO) |
Masse d’hydrocarbures totaux (THC) |
Masse d’hydrocarbures non méthaniques (NMHC) |
Masse d’oxydes d’azote (NOx) |
Masse combinée d’hydrocarbures et d’oxydes d’azote (THC + NOx) |
Masse de particules (PM) |
Nombre de particules (PN) |
||||||||||
L1 (mg/km) |
L2 (mg/km) |
L3 (mg/km) |
L4 (mg/km) |
L2 + L4 (mg/km) |
L5 (mg/km) |
L6 (mg/km) |
||||||||||
Catégorie |
Classe |
|
PI |
CI |
PI |
CI |
PI |
CI |
PI |
CI |
PI |
CI |
PI |
CI |
PI |
CI |
M |
- |
Toutes |
1 000 |
500 |
100 |
- |
68 |
- |
60 |
180 |
- |
230 |
5,0 / 4,5 |
5,0 / 4,5 |
- |
6,0 * 1011 |
N1 |
I |
RM ≤ 1 305 |
1 000 |
500 |
100 |
- |
68 |
- |
60 |
180 |
- |
230 |
5,0 / 4,5 |
5,0 / 4,5 |
- |
6,0 * 1011 |
|
II |
1 305 < RM ≤ 1 760 |
1 810 |
630 |
130 |
- |
90 |
- |
75 |
235 |
- |
295 |
5,0 / 4,5 |
5,0 / 4,5 |
- |
6,0 * 1011 |
|
III |
1 760 < RM |
2 270 |
740 |
160 |
- |
108 |
- |
82 |
280 |
- |
350 |
5,0 / 4,5 |
5,0 / 4,5 |
- |
6,0 * 1011 |
N2 |
- |
toutes |
2 270 |
740 |
160 |
- |
108 |
- |
82 |
280 |
- |
350 |
5,0 / 4,5 |
5,0 / 4,5 |
- |
6,0 * 1011 |
Légende : PI = allumage commandé ; CI = allumage par compression.
Source : annexe I du Règlement (CE) n° 715/2007.
limites d’Émission « euro 6 » |
||||||||||||||||
|
Masse de référence (RM) (en kg) |
Valeurs limites |
||||||||||||||
Masse de monoxyde de carbone (CO) |
Masse d’hydrocarbures totaux (THC) |
Masse d’hydrocarbures non méthaniques (NMHC) |
Masse d’oxydes d’azote (NOx) |
Masse combinée d’hydrocarbures et d’oxydes d’azote (THC + NOx) |
Masse de particules (PM) |
Nombre de particules (PN) |
||||||||||
L1 (mg/km) |
L2 (mg/km) |
L3 (mg/km) |
L4 (mg/km) |
L2 + L4 (mg/km) |
L5 (mg/km) |
L6 (mg/km) |
||||||||||
Catégorie |
Classe |
|
PI |
CI |
PI |
CI |
PI |
CI |
PI |
CI |
PI |
CI |
PI |
CI |
PI |
CI |
M |
- |
Toutes |
1 000 |
500 |
100 |
- |
68 |
- |
60 |
80 |
- |
170 |
4,5 |
4,5 |
6,0 * 1011 |
6,0 * 1011 |
N1 |
I |
RM ≤ 1 305 |
1 000 |
500 |
100 |
- |
68 |
- |
60 |
80 |
- |
170 |
4,5 |
4,5 |
6,0 * 1011 |
6,0 * 1011 |
|
II |
1 305 < RM ≤ 1 760 |
1 810 |
630 |
130 |
- |
90 |
- |
75 |
105 |
- |
195 |
4,5 |
4,5 |
6,0 * 1011 |
6,0 * 1011 |
|
III |
1 760 < RM |
2 270 |
740 |
160 |
- |
108 |
- |
82 |
125 |
- |
215 |
4,5 |
4,5 |
6,0 * 1011 |
6,0 * 1011 |
N2 |
- |
toutes |
2 270 |
740 |
160 |
- |
108 |
- |
82 |
125 |
- |
215 |
4,5 |
4,5 |
6,0 * 1011 |
6,0 * 1011 |
Légende : PI = allumage commandé ; CI = allumage par compression.
Source : annexe I du Règlement (CE) n° 715/2007.
— 1 —
La nouvelle rédaction de l’article L. 421-135 du CIBS fixe le tarif annuel en fonction de la catégorie d’émissions de polluants. Ce tarif est reproduit dans le tableau ci-dessous.
III. l’impact administratif et Économique
Les mesures contenues dans cet article doivent permettre de :
– renforcer l’incitation au verdissement des achats de véhicules par les sociétés et par les particuliers ;
– accélérer le verdissement du marché des véhicules d’occasion ;
– augmenter les recettes fiscales, même si ces taxes ont, au premier chef, un caractère comportemental ;
– limiter la fraude ou, à tout le moins, certains comportements d’optimisation agressive apparus au cours des dernières années.
*
* *
Article 15
Taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance
Résumé du dispositif proposé
En premier lieu, le présent article institue, à compter du 1er janvier 2024, une taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance.
Cette dernière est assise sur les revenus liés à l’exploitation d’une infrastructure de transport de longue distance (à l’exclusion du produit de la vente d’électricité à des personnes autres que des usagers de l’infrastructure et des compensations versées par l’État pour certains coûts supportés par l’exploitant) située sur le territoire métropolitain, sur le territoire des départements d’outre-mer ainsi qu’à Saint-Martin, Saint-Barthélémy et Saint-Pierre-et-Miquelon (sont toutefois exclus de l’assiette de la taxe les revenus retirés de l’exploitation de la voirie et des ports maritimes à Saint-Martin et Saint‑Barthélemy, ainsi que les revenus issus de l’exploitation de la voirie classée en route nationale à Saint-Pierre-et-Miquelon).
Les entreprises assujetties à la taxe sont celles dont les revenus d’exploitation d’une infrastructure de transport de longue distance excèdent 120 millions d’euros sur un exercice et dont le niveau de rentabilité, entendu comme le quotient entre leur résultat net et leur chiffre d’affaires, est supérieur à 10 % en moyenne sur les sept derniers exercices.
Le montant de la taxe s’élève à 4,6 % de la fraction de revenus d’exploitation excédant 120 millions d’euros. Le rendement de ce prélèvement est estimé à 600 millions d’euros au titre de l’année 2024, qui seront affectés en intégralité à l’Agence de financement des infrastructures de transport (AFITF) afin de financer les investissements prévus dans le cadre du « plan d’avenir dans les transports ». Compte tenu de ses paramètres, la taxe sera principalement supportée par les sociétés concessionnaires d’autoroutes et les grands aérodromes.
En second lieu, le présent article abroge à compter du 1er janvier 2024 la taxe sur les recettes de l’exploitation du réseau autoroutier concédé.
Dernières modifications intervenues
L’ordonnance n° 2021-1842 du 22 décembre 2021 a recodifié les dispositions portant sur la taxe sur la distance parcourue sur le réseau autoroutier concédé et la taxe sur les recettes de l’exploitation du réseau autoroutier concédé au sein du code des impositions des biens et services (CIBS). Auparavant, ces dispositions figuraient respectivement aux articles 302 bis ZB et 302 bis ZB bis du code général des impôts.
Principaux amendements adoptés par la commission des finances
La commission a adopté cet article sans modification. Elle a ensuite rejeté la première partie du projet de loi de finances pour 2024.
I. L’État du droit
A. Les impositions de toute nature frappant les entreprises rÉalisant des opÉrations de transport de longue distance
Les transports font l’objet d’un ensemble de prélèvements qui ne portent pas spécifiquement sur l’exploitation d’infrastructures et dont l’assiette n’a pas uniquement pour périmètre les déplacements de longue distance.
1. Le transport routier
La taxation des déplacements routiers repose sur un ensemble de prélèvements acquittés par les utilisateurs de véhicules terrestres à moteur, qu’il s’agisse de particuliers ou d’entreprises. Ces prélèvements sont principalement composés de la taxe sur l’immatriculation des véhicules ([414]) et des taxes sur l’affectation des véhicules à des fins économiques (auparavant plus connues sous le nom de « taxe sur les véhicules de sociétés ») ([415]).
Cette seconde catégorie regroupe deux taxes frappant les véhicules de tourisme ([416]) et une taxe pour les véhicules lourds de transport de marchandises.
Cette dernière porte ainsi plus spécifiquement sur les opérations de transport de longue distance. En sont redevables les utilisateurs de poids lourds de plus de 12 tonnes comportant au moins deux essieux. Le tarif annuel de la taxe est déterminé par un barème définit à l’article L. 421-145 du code des impositions des biens et services (CIBS) dépendant du type de véhicule, de son nombre d’essieux, de sa masse en marche maximale et de la présence ou non d’un système de suspension pneumatique sur le véhicule. En fonction de ces paramètres, le tarif de la taxe est compris entre 120 et 932 euros par véhicule.
2. Le transport aérien
Les entreprises exploitant des aéronefs sont soumises à trois taxes distinctes :
– la taxe sur le transport aérien de passagers, prévue aux articles L. 422‑13 à L. 422-40 du CIBS ;
– la taxe sur le transport aérien de marchandises, prévue aux articles L. 422-41 à L. 422-48 du CIBS ;
– la taxe sur les nuisances sonores aériennes (articles L. 422-49 à L. 422‑57 du CIBS).
a. Les taxes sur le transport aérien de passagers et de marchandises
i. La taxe sur le transport aérien de passagers
Sont redevables de la taxe sur le transport aérien de passagers les entreprises de transport aérien pour tout embarquement de passagers à bord d’un aéronef sur le territoire métropolitain et sur celui des départements d’outre-mer, ainsi que sur le territoire de Saint-Barthélemy, Saint-Martin, de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française.
En Corse, cette taxe s’applique également à tout débarquement de passagers réalisant un vol commercial autre qu’en transit direct.
Le montant de la taxe est égal à la somme de plusieurs tarifs :
– le tarif de solidarité, déterminé en fonction des services additionnels dont bénéficient les passagers à bord et de la destination du vol :
– le tarif de l’aviation civile, déterminé en fonction de la destination du vol ;
– le tarif de sûreté et de sécurité, fixé en fonction du type d’aéroport ;
– le tarif de péréquation aéroportuaire, déterminé par arrêté des ministres chargés du budget et de l’aviation civile