—  1  —

N° 2139

______

ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME  LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 31 janvier 2024.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LA PROPOSITION DE LOI, ADOPTÉE PAR LE SÉNAT
APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE
 

renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires

 

PAR Mme Violette SPILLEBOUT

Députée

——

 

 

 

 

 

 

 

 


Voir les numéros :

 Sénat :  648 (2022-2023), 7, 8 et T.A. 2 (2023-2024).

Assemblée nationale :  1713.


—  1  —

 

SOMMAIRE

___

Pages

Introduction......................................................... 7

Commentaire des articles de la proposition de loi

titre Ier consolider l’arsenal répressif en cas de violences commises à l’encontre des élus

Article 1er (art. 222-12, 222-13, 222-14-5, 222-47 et 222-48 du code pénal) Aggravation des peines encourues pour des faits de violences commises à l’encontre des élus

Article 1er bis (nouveau) (art. 322-8 du code pénal) Renforcement des sanctions en cas d’atteinte dangereuse aux biens appartenant ou utilisés par des personnes dépositaires de l’autorité publique

Article 2  (art. 222‑33‑2‑2 du code pénal) Création d’une peine de travail d’intérêt général en cas d’injure publique à l’encontre de personnes dépositaires de l’autorité publique ou de certains élus ainsi que d’une circonstance aggravante lorsque la victime de harcèlement est titulaire d’un mandat électif

Article 2 bis (art. 65-5 [nouveau] de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) Allongement des délais de prescription des délits d’injure et de diffamation publiques commis à l'encontre des personnes mentionnées à l’article 31 et au premier alinéa de l’article 33 de la loi de 1881

Article 2 ter  (art. 223‑1‑1 du code pénal) Création d’une circonstance aggravante en cas d’atteinte à la vie privée et familiale d’un candidat à un mandat électif public pendant la durée de la campagne électorale

titre ii améliorer la prise en charge des élus victimes de violences, agressions ou injures dans le cadre de leur mandat ou d’une campagne électorale

Article 3  (art. L. 2123-35, L. 2573-10, L. 3123-29 et L. 4135-29 du code général des collectivités territoriales) Octroi automatique de la protection fonctionnelle aux maires, aux élus municipaux les suppléant ou ayant reçu délégation, victimes de violences, de menaces ou d’outrages

Article 4 (supprimé) (art. L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales) Élargissement du dispositif de compensation par l’État des coûts liés à l’obligation de contracter une assurance pour la protection des élus municipaux

Article 5 (art. L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales) Compétence de l’État dans l’octroi de la protection fonctionnelle aux élus agissant en qualité d’agent de l’État

Article 6 (art. L. 5214-8 et L. 5842-21 du code général des collectivités territoriales) Application des dispositions relatives à la protection fonctionnelle et à l’amoindrissement de la responsabilité des élus locaux aux élus des communautés de communes

Article 7 (art. L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales) Mesure de coordination

Article 8 (art. L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales) Prise en charge des restes à charge ou des dépassements d’honoraires au titre de la protection fonctionnelle

Article 9 (art. L. 252-3 [nouveau] du code des assurances) Faculté de saisine du bureau central de tarification par les élus pour l’assurance des permanences électorales et des lieux accueillant des réunions électorales

Article 10 (art. L. 52‑18‑1, L. 52-18-2 et L. 52-18-3 du code électoral) Élargissement du bénéfice de la protection fonctionnelle aux candidats aux élections et remboursement des frais de sécurisation engagés par les candidats

titre iii renforcer la prise en compte des réalités des mandats électifs locaux par les acteurs judiciaires et étatiques

Article 11 (art. 43 du code de procédure pénale) Dépaysement des affaires mettant en cause un maire ou un adjoint au maire dans l'exercice de leur mandat

Article 12 (art. L. 132‑3 du code de la sécurité intérieure) Renforcement de l’information du maire sur les suites judiciaires données aux infractions constatées sur son territoire

Article 13  (art. L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales) Espace de communication réservé au procureur de la République dans les bulletins municipaux

Article 14 L. 1324 et L. 132-5 du code de la sécurité intérieure Composition des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance et obligation annuelle de présence de certains membres

Article 15 (nouveau) Application de la loi dans les territoires ultramarins

Article 16 (nouveau) Rapport sur l’opportunité d’élargir la protection fonctionnelle à tous les élus locaux et à leurs familles

Article 17 (nouveau) Rapport sur l’opportunité d’élargir la protection fonctionnelle aux élus locaux ayant cessé leurs fonctions depuis moins de six ans

Article 18 (nouveau) Rapport sur les actions menées pour lutter contre les violences faites aux élus et leurs conséquences

Article 19 (nouveau) Rapport sur le coût pour les communes de l’obligation de souscrire un contrat d’assurance pour couvrir les frais liés à la protection fonctionnelle

Examen en commission

Personnes entendues

 


—  1  —

 

 

Mesdames, Messieurs,

 

L’année 2024 doit être celle des élus locaux : garantir les conditions de leur sécurité et de l’exercice serein de leur mandat revient à protéger l’engagement politique, c’est-à-dire le bon fonctionnement de notre démocratie. La présente proposition de loi, transmise par le Sénat, constitue le volet « sécurité » d’un ensemble plus large de mesures – législatives ou non – qui doivent permettre une rénovation profonde du statut de nos élus.

L’augmentation très nette du nombre d’agressions d’élus, mais aussi la banalisation des injures publiques, des outrages et de phénomènes de harcèlement collectif, notamment en ligne, appelle une réaction forte des pouvoirs publics. Une récente mission d’information conduite sur le statut de l’élu, co-rapportée par Sébastien Jumel et Violette Spillebout, rapporteure de la présente proposition de loi, a rappelé l’ampleur de ces violences, dont il faut cependant déplorer encore l’insuffisante précision statistique : en 2022, 2 265 faits d’atteintes aux élus ont été recensés sur le territoire national, soit une augmentation de 32 % par rapport à l’année précédente. Les statistiques incomplètes de l’année 2023 font état d’une augmentation significative des violences envers les élus, puisque sur les neuf premiers mois de 2023, 2 387 faits avaient été recensés – ce qui conduit à anticiper une hausse de 15 % de ces faits par rapport à 2022.

Dans six cas sur dix, les élus concernés par ces agressions sont des maires, élus les plus proches de nos concitoyens mais aussi les plus vulnérables. Dans deux cas sur dix, ce sont les autres conseillers municipaux qui sont victimes de tels faits ; les conseillers départementaux et régionaux étant significativement moins exposés que les élus du bloc communal.

Les données statistiques concernant la nature des infractions commises à l’encontre des élus sont très partielles. On sait toutefois que la grande majorité des atteintes aux élus sont constituées par des menaces (26 %) et outrages (41 %), les violences physiques demeurant fort heureusement marginales (moins de 5 %). Dans le cadre de la cinquième enquête du Cevipof sur les maires de France ([1]) réalisée pour l’Association des maires de France (AMF), qui a été publiée en novembre 2023, 69 % des maires interrogés ont déclaré avoir déjà été victimes d’incivilités (+ 16 points par rapport à 2020), 39 % avoir subi injures et insultes (+ 10 points), 41 % avoir fait l’objet de menaces verbales ou écrites (+ 13 points), 27 % avoir été attaqués sur les réseaux sociaux (+7 points) et 7 % avoir subi des violences physiques (+ 2 points par rapport à 2020).

L’année 2023 a aussi été marquée par des faits de grande violence envers des maires et leurs familles. Ceux-ci ont été particulièrement choquants, qu’il s’agisse de l’incendie volontaire et criminel du domicile du maire de Saint-Brévin-les-Pins, ou encore de l’attaque à la voiture bélier dirigée contre le domicile du maire de L’Haÿ-les-Roses. Ces attaques ont montré qu’il était urgent d’agir pour renforcer la sécurité de nos élus locaux, ce qui passe par un renforcement de leur protection mais aussi des sanctions auxquelles s’exposent les auteurs de tels faits.

Dans ce contexte, le Gouvernement a institué, le 17 mai 2023, un centre d’analyse et d’action contre les atteintes aux élus (CALAE), chargé d’une double mission de collecte de données, pour mieux comprendre et analyser cette montée des violences, et de renforcement de la protection des élus locaux. Ainsi, ce centre est chargé de piloter le « pack sécurité », qui recouvre la création d’un réseau de plus de 3 400 référents « atteintes aux élus » dans les services de gendarmerie et de police sur tout le territoire, le renforcement du dispositif « Alarme élu » pour le traitement rapide des appels des élus qui se sentent menacés, la facilitation des dépôts de plaintes, le développement de formations et d’actions de sensibilisation à la gestion des incivilités et la mobilisation de la plateforme PHAROS pour mieux détecter et judiciariser les violences en ligne.

En complément, le Gouvernement a présenté, le 7 juillet 2023, un plan national contre les violences, qui doit permettre de renforcer la protection juridique, psychologique et physique des élus, les sanctions pour les auteurs d’infractions commises contre les élus et les relations entre les maires et les parquets.

La présente proposition de loi, déposée au Sénat le 23 mai dernier par M. François-Noël Buffet et plusieurs de ses collègues, regroupe les dispositions législatives nécessaires à la mise en œuvre de certaines mesures annoncées dans ce plan. Ainsi, elle prévoit trois volets de mesures :

– le titre Ier renforce les sanctions encourues par les auteurs de faits de violences commises à l’encontre de titulaires de mandats électifs ;

– le titre II améliore la prise en charge des élus locaux victimes de violences, en prévoyant notamment un octroi automatique de la protection fonctionnelle par la collectivité territoriale (article 3) et une meilleure protection des candidats à un mandat électif public (article 10) ;

– le titre III a pour objectif de renforcer la prise en compte des réalités des mandats électifs locaux par les acteurs judiciaires et étatiques, en améliorant l’information des maires notamment par les procureurs, ainsi qu’en renforçant les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance.

Votre rapporteure réaffirme son engagement auprès des élus locaux pour que leur sécurité au quotidien soit mieux assurée. Personnellement victime de tels faits de violences à son encontre, elle aura à cœur, pendant l’examen de la présente proposition de loi, d’une part, de renforcer les dispositifs de protection de tous les élus locaux – et non pas uniquement de ceux qui exercent des fonctions exécutives comme c’est le cas actuellement –, ainsi que des candidats à un mandat électif qui sont également victimes de violences, et, d’autre part, d’étendre cette protection à la famille de ces élus et candidats – ce qui constitue une condition sine qua non de l’exercice serein d’un mandat. Elle déposera, afin de compléter ces dispositifs et dans le prolongement des travaux menés avec M. Sébastien Jumel, une proposition de loi plus large rénovant le statut de l’élu. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


   Commentaire des articles de la proposition de loi

titre Ier
consolider l’arsenal répressif en cas de violences commises à l’encontre des élus

Adopté par la commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 1er aggrave les peines encourues pour des faits de violences commises à l’encontre des élus. Ces peines sont renforcées afin d’être alignées sur celles prévues en cas de violences contre certains dépositaires de l’autorité publique particulièrement exposés dans le cadre de missions de maintien de l’ordre. Elles sont ainsi portées soit à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende lorsque les violences ont entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours, soit à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende si l’incapacité de travail qui en résulte est supérieure à huit jours.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté un amendement CL1 ([2]) de M. Thibault Bazin (LR) qui étend le champ d’application de l’article 1er aux violences subies par un ancien élu lorsque celles-ci sont motivées par des faits ou des actions intervenues dans le cadre de ses fonctions électives passées.

 

 

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 10 de la loi n° 2022-52 du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure a créé une infraction spécifique réprimant les violences exercées à l’encontre des membres des forces de sécurité intérieure (article 222-14-5 du code pénal).

L’article 1er de la présente proposition de loi reprend les dispositions de l’article 15 ([3]) de la loi n° 2023‑22 du 24 janvier 2023 d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (dite « LOPMI »), censuré par le Conseil constitutionnel au motif qu’il ne présentait pas de lien, même indirect, avec les dispositions figurant dans le projet de loi initial.

  1.   L’état du droit
    1.   Les élus sont protégés en tant que personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public
      1.   La qualité de personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public de la victime constitue une circonstance aggravante dans le cadre de certaines infractions

La qualité d’élu n’est pas prise en compte en tant que telle par le code pénal, à la seule exception du délit spécifique de menaces et d’intimidations à l’encontre d'une personne investie d'un mandat électif public défini à l’article 433-3 du code pénal. Cet article sanctionne de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes ou les biens proférée à l’encontre d'une personne investie d'un mandat électif public, une autre personne dépositaire de l’autorité publique ou une personne chargée d'une mission de service public. Cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende sont encourus, aux termes du même article, en cas de menaces de mort ou d’atteinte aux biens dangereuse pour les personnes, et dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende en cas de menaces, violences ou tout autre acte d’intimidation en vue de contrainte la personne élue à accomplir ou s’abstenir d’accomplir un acte de sa fonction.

En dehors de cette mention explicite, les élus font l’objet d’une protection dans le code pénal en leur qualité de personnes dépositaires de l’autorité publique ou de personnes chargées de mission de service public.

Définition des personnes dépositaires de l’autorité publique et des personnes chargées d’une mission de service public

La qualité de « personne dépositaire de l'autorité public » revient à toute personne titulaire d’un pouvoir de décision et de contrainte sur les individus ou sur les choses dans l’exercice de ses fonctions, dont elle est investie par délégation de la puissance publique. Entrent donc notamment dans cette catégorie les titulaires de fonctions exécutives, comme les maires ou les préfets, et les représentants des forces de l'ordre, comme les policiers ou les gendarmes.

La qualité de « personne chargée d’une mission de service public » est attribuée à toute personne qui, sans avoir reçu un pouvoir de décision ou de commandement découlant de l'autorité publique, est chargée d’accomplir des actes ou d’exercer une fonction dont la finalité est de satisfaire à un intérêt général.

La circulaire du 6 novembre 2019 ([4]) précise que « les responsables des exécutifs locaux (maires, présidents d’intercommunalités, des conseils départementaux et régionaux) mais aussi les adjoints aux maires et conseillers municipaux délégués, ont la qualité de personnes dépositaires de l’autorité publique. Les autres élus locaux, lorsqu’ils ne se voient confier par délégation aucune prérogative de puissance publique, comme les parlementaires, ont quant à eux la qualité de personnes chargées d’une mission de service public ».

La qualité de personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public est constitutive d’une circonstance aggravante lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur de l’infraction et que les faits sont commis en raison de ses fonctions dans le cas des dégradations ([5]) , du meurtre ([6]) ou de l’empoisonnement ([7]) ainsi que des tortures et des actes de barbarie ([8]) .

Pour l’ensemble de ces infractions est donc prévue une circonstance aggravante lorsqu’elles sont commises à l’encontre d’un élu, qu’il soit dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, à l’exception de l’infraction de dégradation, destruction ou détérioration volontaire d’un bien appartenant à autrui (article 322-8 du code pénal) pour laquelle la circonstance aggravante ne s’applique que pour les élus dépositaires de l’autorité publique.

Par ailleurs, les atteintes commises à l’encontre des élus sont susceptibles d’être réprimées par des infractions spécifiques qui prennent en compte la qualité de la victime comme élément constitutif de l’infraction dans les cas suivants :

– les menaces et intimidations, en application de l’article 433-3 du code pénal (voir supra) ;

– les outrages, définis par l’article 433-5 du même code comme « les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l’envoi d’objets quelconques adressés à une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie » qui sont punis de 7 500 euros d’amende. Lorsqu’il est adressé à une personne dépositaire de l’autorité publique, l’outrage est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Les peines sont aggravées lorsque les faits sont commis en réunion.

– des actes de rébellion et de rébellion armée définis par l’article 433-6 du même code comme « le fait d’opposer une résistance violente à une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d'une mission de service public agissant, dans l'exercice de ses fonctions, pour l'exécution des lois, des ordres de l'autorité publique, des décisions ou mandats de justice ». Les actes de rébellion sont sanctionnés de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. La rébellion armée est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. Les peines sont aggravées lorsque les faits sont commis en réunion.

  1.   Lorsque des violences sont commises à l’encontre d’élus leur qualité de dépositaire de l’autorité publique ou de personne chargée d’une mission de service public constitue également une circonstance aggravante

Les violences sont définies au paragraphe 2 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre II du code pénal. Ces différents faits de violences font l’objet de peines aggravées lorsque l’infraction est commise sur une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public.

Répression des violences par le code pÉnal

 

Infraction

Article du code pénal

Peines encourues

Peines encourues lorsque l’infraction est commise sur une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public

 

Article du code pénal

Emprisonnement / réclusion

Violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner

222-7

 

Quinze ans de réclusion criminelle

 222-8 (al. 5 et 7)

Vingt ans de réclusion criminelle

Violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente

222-9

 

Dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende

222-10 (al. 5 et 7) 

Quinze ans de réclusion criminelle

Violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours

222-11

 

Trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende

222-12 (al. 5 et 7)  

Cinq ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende

Violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours

Article R624-1

 

Amende prévue pour les contraventions de la 4e classe et peines complémentaires (voir également art. 222-14 pour certaines victimes mineures ou vulnérables)

222-13 (al. 5 et 7)

Trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende

La même section du code pénal comprend également deux infractions autonomes, créées par la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, qui sanctionnent les atteintes à l’intégrité physique de certaines personnes dont les personnes dépositaires de l’autorité publique :

– L’article 222-14-1 réprime les violences commises en bande organisée ou avec guet-apens avec usage ou menace d’une arme. Elles sont punies de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende en l’absence d’une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours ; de quinze ans de réclusion criminelle en présence d’une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours ; de vingt ans de réclusion criminelle lorsqu’elles ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, et de trente ans de réclusion criminelle lorsqu’elles ont entraîné la mort de la victime ;

– L’article 222-15-1 réprime l’embuscade, entendue comme « le fait d’attendre un certain temps et dans un lieu déterminé [une personne dépositaire de l’autorité publique] dans le but, caractérisé par un ou plusieurs faits matériels, de commettre à son encontre, soit à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, soit en raison de sa qualité, que l’auteur connaissait ou ne pouvait ignorer, des violences avec usage ou menace d’une arme ». Il n’est pas nécessaire que les violences aient été effectivement perpétrées et aucune incapacité totale de travail n’est requise. Les peines prévues sont de cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende ; elles sont portées à sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende lorsque les faits sont commis en réunion.

La loi n° 2021-646 du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés a complété ces deux articles afin d’en rendre applicables les dispositions aux violences commises dans les mêmes conditions à l’encontre des proches de ces personnes (conjoint, ascendant ou descendant en ligne directe, ou de toute autre personne vivant habituellement au domicile) dès lors qu’elles ont lieu en raison des fonctions de ces personnes.

  1.   Le renforcement, en 2022, des sanctions encourues par les auteurs de violences commises à l’encontre des membres des forces de sécurité intérieure

Créé par l’article 10 de la loi n° 2022-52 du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure, l’article 222-14-5 du code pénal aggrave les sanctions pénales encourues par les auteurs de violences commises contre les professions les plus exposées dans le cadre des missions de maintien de l’ordre.

Il crée ainsi une infraction spécifique réprimant les violences commises à l’encontre d’un militaire de la gendarmerie nationale, d’un militaire déployé sur le territoire national dans le cadre d’une opération intérieure, d’un fonctionnaire de la police nationale, d’un agent de police municipale ou d’un agent de l’administration pénitentiaire, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions et dès lors que sa qualité est apparente ou connue de l’auteur.

L’infraction est également constituée lorsque la victime est :

– un proche des personnes mentionnées (conjoint, ascendant ou descendant en ligne directe, ou toute autre personne vivant habituellement à leur domicile) lorsque les violences sont commises en raison des fonctions exercées par la personne dépositaire de l’autorité publique ;

– une personne affectée dans les services de police, nationale ou municipale, ou de gendarmerie nationale ou de l’administration pénitentiaire et qui exerce sous l’autorité de cette personne et dont la qualité est apparente ou connue de l’auteur, lorsque les violences sont commises dans l’exercice ou du fait de ses fonctions.

Cette infraction est punie de :

– sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende si les violences ont entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours ;

– cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende, si les violences ont entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou si elles n’ont pas entraîné d’incapacité de travail.

L’article prévoit, en outre, huit circonstances aggravantes (voir encadré ci-dessous).

Les circonstances aggravantes prévues dans le cadre de l’application de l’article 222-14-5 du code pénal

L’article 222-14-5 prévoit huit circonstances aggravantes lorsque l’infraction est commise :

– par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice ;

– avec préméditation ou avec guet-apens ;

– avec usage ou menace d’une arme ;

– dans des établissements d’enseignement ou d’éducation ou dans les locaux de l’administration, ainsi que, lors des entrées ou sorties des élèves ou du public ou dans un temps très voisin de celles-ci, aux abords de ces établissements ou locaux ;

– par un majeur agissant avec l’aide ou l’assistance d’un mineur ;

– dans un moyen de transport collectif de voyageurs ou dans un lieu destiné à l’accès à un moyen de transport collectif de voyageurs ;

– par une personne agissant en état d’ivresse manifeste ou sous l’emprise manifeste de produits stupéfiants ;

– par une personne dissimulant volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée.

Lorsque les faits de l’infraction sont accompagnés de l’une de ces circonstances aggravantes, les peines sont portées à :

– dix ans d’emprisonnement et à 150 000 euros d’amende pour les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours ;

– sept ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende pour les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ayant pas entraîné d’incapacité de travail.

Lorsque les faits de l’infraction sont accompagnés d’au moins deux de ces circonstances aggravantes, les peines sont portées à dix ans d’emprisonnement et à 150 000 euros d’amende pour les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ayant pas entraîné d’incapacité de travail.

Par ailleurs, le dernier alinéa de l’article 222-14-5 rend applicable les règles relatives à la période de sûreté pour les infractions aggravées punies d’une peine d’emprisonnement de dix ans prévues à cet article.

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat
    1.   La disposition initiale

L’article 1er reprend les dispositions de l’article 15 de la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (dite « LOPMI »), censuré dans une décision n° 2022-846 DC du 19 janvier 2023 par le Conseil constitutionnel au motif qu’il ne présentait pas de lien, même indirect, avec les dispositions du projet de loi initial ([9]) . Le Conseil constitutionnel souligne que cette décision « ne prive évidemment [pas] le législateur de la possibilité d’adopter à nouveau ces dispositions dans un autre texte ».

Le dispositif étend aux titulaires d’un mandat électif public le champ d’application de l’article 222-14-5. Les violences commises à l’encontre des élus ou de leurs proches seraient ainsi punies de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d’amende, si elles ont entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou si elles n'ont pas entraîné d’incapacité de travail, et de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende si elles ont entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours. Les circonstances aggravantes (voir supra) seraient également applicables.

L’article 1er prévoit, en outre, que l’infraction visée à l’article 222-14-5 puisse être, en application de l’article 222-47, sanctionnée d’une peine complémentaire d’interdiction de séjour telle que définie à l’article 131-31 du code pénal.

L’interdiction de séjour telle que définie par l’article 131-31 du code pénal

La peine d'interdiction de séjour emporte défense de paraître dans certains lieux déterminés par la juridiction. Elle comporte, en outre, des mesures de surveillance et d'assistance. La liste des lieux interdits ainsi que les mesures de surveillance et d'assistance peuvent être modifiées par le juge de l'application des peines, dans les conditions fixées par le code de procédure pénale.

L'interdiction de séjour ne peut excéder une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit.

L’article 1er prévoit, enfin, la possibilité d’une peine complémentaire d’interdiction du territoire français à titre définitif ou pour une durée de dix ans ou plus en application de l’article 222-48 et dans les conditions prévues à l’article 131-30 du code pénal. Ces dispositions ayant été modifiées par l’article 9 du projet de loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration », il conviendra d’en tenir compte dans le cadre des amendements déposés par votre rapporteure en séance publique pour s’assurer de la cohérence du dispositif avec le droit désormais en vigueur ([10])

  1.   Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification tant en commission des lois qu’en séance publique.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté, avec un avis favorable de votre rapporteure, un amendement CL1 ([11]) de M. Thibault Bazin (LR) qui étend le champ d’application de l’article 1er aux violences subies par un ancien élu lorsque celles‑ci sont motivées par des faits ou des actions intervenues dans le cadre de ses fonctions électives passées.

*

*     *

Introduit par la commission

 

     Résumé du dispositif et effets principaux

Introduit à l’initiative de M. Éric Poulliat (Renaissance) ([12]) dont l’amendement a reçu un avis favorable de votre rapporteure, l’article 2 bis permet de combler un vide juridique en prévoyant une circonstance aggravante en cas de « destruction, dégradation ou détérioration d’un bien appartenant à autrui par l’effet d'une substance explosive, d’un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes » (article 322-6 du code pénal) lorsqu’elle est commise en raison de la qualité de personne chargée d’une mission de service public de son propriétaire ou de son utilisateur. Les peines peuvent ainsi être portées à vingt ans de réclusion criminelle et à 150 000 euros d’amende, comme cela est d’ores et déjà prévu par l’article 322-8 du code pénal lorsque l’atteinte dangereuse est portée à un bien en raison de la qualité de personne dépositaire de l’autorité publique de son propriétaire ou de son utilisateur.

 

*

*     *

Article 2
(art. 222‑33‑2‑2 du code pénal)
Création d’une peine de travail d’intérêt général en cas d’injure publique à l’encontre de personnes dépositaires de l’autorité publique ou de certains élus ainsi que d’une circonstance aggravante lorsque la victime de harcèlement est titulaire d’un mandat électif

Adopté par la commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 2 crée une peine de travail d’intérêt général (TIG) en cas d'injure publique lorsque celle-ci est commise à l’encontre des personnes dépositaires de l’autorité publique ou de certains élus ainsi qu’une nouvelle circonstance aggravante pour les cas de harcèlement, notamment en ligne, lorsque la victime est titulaire d’un mandat électif.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté un amendement CL65 de M. Thomas Rudigoz (Renaissance) ([13]) afin de permettre au juge de prononcer une peine de travaux d'intérêt général (TIG) en cas d’outrage tel que défini à l’article 433-5 du code pénal.

       Dernière modification législative intervenue

La loi n° 2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, afin de mieux lutter contre les formes collectives de harcèlement a précisé que l’infraction était également constituée lorsque les propos ou comportements étaient le fait de plusieurs personnes agissant de manière concertée, même si aucune d’entre elles n’agissait de façon répétée ainsi que lorsque ces agissements étaient imposés à la victime par plusieurs personnes qui, en l’absence de concertation, étaient conscientes que leurs propos ou comportements caractérisaient une répétition.

  1.   L’état du droit
    1.   La répression des injures publiques proférées à l'encontre des personnes dépositaires de l'autorité publique ou chargée d’une mission de service publique

L’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse définit l’injure comme « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait ». L’injure doit ainsi être distinguée de la diffamation – qui nécessite l’allégation ou l’imputation d’un fait précis portant atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne visée ([14])  –  et de l’outrage ([15]).

L’injure peut être publique ou privée. L’injure privée est punie d’une amende prévue pour les contraventions de première classe ([16]) . L’injure publique est sanctionnée, aux termes de l’article 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, par une amende de 12 000 euros lorsqu’elle s’adresse aux personnes et aux corps mentionnés aux articles 30 et 31 de la loi (voir encadré ci-dessous). Elle est punie par la même amende lorsqu’elle s’adresse à des particuliers et qu’elle n’a pas été précédée de provocation.

 

Les personnes et les corps désignés aux articles 30 et 31 de la loi du 29 juillet 1881

L’article 30 de la loi du 29 juillet 1881 mentionne les cours, les tribunaux, les armées de terre, de mer ou de l’air et de l’espace, les corps constitués et les administrations publiques.

L’article 31 de la même loi mentionne le Président de la République, un ou plusieurs membres du ministère, un ou plusieurs membres de l’une ou de l’autre Chambre, un fonctionnaire public, un dépositaire ou agent de l'autorité publique, un ministre de l'un des cultes salariés par l'État, un citoyen chargé d’un service ou d’un mandat public temporaire ou permanent, un juré ou un témoin, à raison de sa déposition.

Les injures publiques formulées à l’encontre de ces personnes ou corps sont sanctionnées par une amende de 12 000 euros.

De plus lourdes peines sont prévues lorsque l’injure publique s’adresse à « une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, ainsi qu’à une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap » (article 33 de la même loi). De tels faits sont punis d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. Ces peines peuvent être portées à trois ans d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende lorsque les faits sont commis par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission. Dans ce dernier cas, le juge peut prévoir l’affichage ou la diffusion de la décision prononcée.

  1.   Une absence d’infraction particulière ou de circonstance aggravante lorsque le harcèlement touche des élus ou personnes dépositaires de l'autorité publique

Si aucune infraction spécifique ou circonstance aggravante n’est aujourd’hui prévue en cas de harcèlement des élus ou personnes dépositaires de l’autorité publique, la qualification « générale » de harcèlement moral, définie à l’article 222-33-2-2 du code pénal, s’applique.  

Le premier alinéa de cet article définit l’infraction comme « le fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale ». Ces faits sont punis d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende lorsqu’ils ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont entraîné aucune incapacité de travail.  

En outre, afin d’améliorer la lutte contre les formes collectives de harcèlement, la loi n° 2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes a précisé que l’infraction était également constituée lorsque les propos ou comportements sont le fait de plusieurs personnes agissant de manière concertée, alors qu’aucune d'entre elles n'a agi de façon répétée, ainsi que dans les cas où les agissements sont commis par plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, sont conscientes que leurs propos ou comportements entraînent une répétition pour la victime.

Le législateur a défini cinq circonstances aggravantes dans le cadre de l’infraction définie à l’article 222-33-2-2 du code pénal :

1° Lorsque les faits ont conduit à une incapacité totale de travail de plus de huit jours ;

2° Lorsqu’ils ont été commis sur un mineur ;

3° Lorsqu’ils ont été commis sur une personne particulièrement vulnérable, du fait de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou d’un état de grossesse, lorsque cette vulnérabilité est apparente ou connue de leur auteur ;

4 ° Lorsqu’ils ont été commis en utilisant un service de communication au public en ligne ou par le biais d’un support numérique ou électronique ;

5 ° Lorsqu’ils ont été commis en présence d’un mineur qui y a assisté.

La peine est alors portée à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende lorsqu’une circonstance aggravante existe, et à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d'amende si les faits sont commis en mettant en œuvre deux circonstances aggravantes.

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat
    1.   Compléter les sanctions actuellement prévues en cas d’injure publique par un travail d'intérêt général

L’article 2 de la proposition de loi prévoit de compléter les sanctions actuellement prévues pour les injures publiques par l’article 33 de la loi de 1881 en y ajoutant une peine de travail d’intérêt général (TIG).

Cette peine alternative ou complémentaire est définie par l’article 131-8 du code pénal qui dispose que « lorsqu’un délit est puni d'une peine d'emprisonnement, la juridiction peut prescrire, à la place de l’emprisonnement, que le condamné accomplira, pour une durée de vingt à quatre cents heures, un travail d'intérêt général non rémunéré au profit soit d'une personne morale de droit public, soit d'une personne morale de droit privé chargée d'une mission de service public ou d'une association habilitées à mettre en œuvre des travaux d'intérêt général ». Ce travail peut également être réalisé au profit d'une personne morale de droit privé remplissant certaines conditions ([17]) et habilitée à mettre en œuvre des travaux d’intérêt général, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

  1.   L’ajout d’une circonstance aggravante lorsque les faits de harcèlement moral sont commis sur le titulaire d’un mandat électif

L’article 2 de la proposition de loi ajoute une sixième circonstance aggravante à celles énumérées à l’article 222-33-2-2 du code pénal, lorsque les faits de harcèlement moral sont commis sur le titulaire d’un mandat électif. Dans ce cadre, le harcèlement serait puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende et, dans le cas du cyber-harcèlement, de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

Le Sénat n’a adopté aucune modification ni en commission ni en séance.

  1.   La position de la commission

L’outrage qui consiste en des « paroles, gestes ou menaces, [des] écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l’envoi d'objets quelconques adressés à une personne chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l’exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie » ([18]) est actuellement puni de 7 500 euros d’amende. Des peines aggravées sont prévues lorsqu’il est adressé à une personne dépositaire de l’autorité publique, à un sapeur-pompier ou à un marin-pompier dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses missions (un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende). De même, l’outrage peut être sanctionné par six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende lorsqu’il est adressé à une personne chargée d’une mission de service public et que les faits ont été commis à l’intérieur d'un établissement scolaire ou éducatif, ou à l’occasion des entrées ou sorties des élèves, aux abords d’un tel établissement.

La commission a adopté, avec un avis favorable de votre rapporteure, un amendement CL65 de M. Thomas Rudigoz (Renaissance) ([19]) afin de permettre au juge de prononcer une peine de travaux d'intérêt général (TIG) en cas d’outrage tel que défini à l’article 433-5 du code pénal.

 

*

*        *

Votre rapporteure tient, en outre, à souligner la nécessité de compléter l’arsenal législatif afin de mieux réprimer certaines formes de violences en ligne auxquelles les titulaires de mandats électifs sont particulièrement exposés. Elle appelle de ses vœux une tenue rapide de la commission mixte paritaire devant avoir lieu sur le projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique (dit « SREN ») qui comporte des mesures particulièrement bienvenues sur ce sujet.   

*

*     *

Article 2 bis
(art. 65-5 [nouveau] de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse)
Allongement des délais de prescription des délits d’injure et de diffamation publiques commis à l'encontre des personnes mentionnées à l’article 31 et au premier alinéa de l’article 33 de la loi de 1881

Adopté par la commission avec modifications

       Résumé du dispositif introduit au Sénat et effets principaux

Introduit à l’initiative de la rapporteure et du sénateur M. Hussein Bourgi (groupe SER([20])) en commission des lois au Sénat ([21]), l’article 2 bis allonge les délais de prescription des délits d’injure et de diffamation publiques commis à l’encontre des personnes mentionnées à l'article 31 et au premier alinéa de l'article 33 de la loi de 1881, notamment les parlementaires et les élus des exécutifs locaux, en les portant à un an contre trois mois en l’état actuel du droit.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté un amendement CL104 ([22])  de votre rapporteure précisant le champ d’application de l’allongement des délais prévus par l’article 2 bis

       Dernière modification législative intervenue

L’article 38 de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a modifié l’article 33 de la loi du 29 juillet 1881 pour créer une circonstance aggravante lorsque les injures publiques envers certaines personnes en raison « de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » ou de « leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap » ont été formulées par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public.

  1.   L’état du droit

La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse a institué un régime spécifique et original réprimant les délits de presse tout en préservant la liberté d’expression.

L’article 29 de la loi précitée définit la diffamation comme « toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé ». Le même article définit l’injure comme « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait ».

L’article 31 de la même loi sanctionne par une amende de 45 000 euros la diffamation commise à raison de leurs fonctions ou de leur qualité, à l’encontre du Président de la République, d’un ou plusieurs membres du ministère, d’un ou plusieurs membres de l’une ou de l'autre chambre, d’un fonctionnaire public, d’un dépositaire ou d’agent de l’autorité publique, d’un ministre de l’un des cultes salariés par l'État, d’un citoyen chargé d’un service ou d’un mandat public temporaire ou permanent, un juré ou un témoin, à raison de sa déposition.

L’article 33 sanctionne par une amende de 12 000 euros les injures publiques formulées contre les mêmes personnes ainsi que contre les cours, les tribunaux, les armées de terre, de mer ou de l'air et de l'espace, les corps constitués et les administrations publiques (article 30 de la même loi). Ces sanctions sont portées à un an d’emprisonnement et 45 000 € d’amende lorsque l’injure concerne une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ou une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap. Elles sont portées à trois ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende lorsque les faits sont commis par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission [voir aussi supra le commentaire de l’article 2 de la présente proposition de loi qui renforce ces sanctions en y ajoutant la possibilité de prononcer une peine de travail d’intérêt général].  

L’article 65 de la loi de 1881 prévoit un délai de prescription des crimes, délits et contraventions prévus par cette loi de trois mois révolus à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s’il en a été fait. L’article 65-3 de la même loi prévoit cependant un délai dérogatoire de prescription d’un an pour les délits suivants :

– les provocations non suivies d’effet à commettre des crimes ou délits déterminés, les apologies de certains crimes ou délits, les provocations à la haine ou à la violence pour un motif discriminatoire, ainsi la contravention de cris ou chants séditieux (article 24 de la loi de 1881) ;

– les contestations, négation, minoration ou banalisation de crimes contre l'humanité, réduction en esclavage ou crime de guerre (article 24 bis de la même loi) ;

– les diffamations commises contre des particuliers à raison de l’origine, de la religion ou du genre (article 32 de la même loi) ;

– les injures à raison de l’origine, de la religion ou du genre (article 33 de la même loi).

  1.   Le dispositif introduit par le Sénat
    1.   Le dispositif introduit en commission des lois

Introduit à l’initiative du rapporteur de la commission des lois du Sénat et du sénateur M. Hussein Bourgi (groupe SER([23])([24]), l’article 2 bis crée un nouvel article 65-5 au sein de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse qui porte également à un an le délai de prescription des délits d’injure et de diffamation publiques commis à l’encontre des personnes mentionnées à l’article 31 et au premier alinéa de l’article 33 de la loi.

Cet allongement du délai de prescription concerne, plus précisément :

– Les cas de diffamation commise à raison de leurs fonctions ou de leur qualité, envers le Président de la République, un ou plusieurs membres du ministère, un ou plusieurs membres de l'une ou de l'autre chambre, un fonctionnaire public, un dépositaire ou agent de l'autorité publique, un ministre de l'un des cultes salariés par l'État, un citoyen chargé d'un service ou d'un mandat public temporaire ou permanent, un juré ou un témoin, à raison de sa déposition, en application de l’article 31 ;

– Les injures publiques envers les mêmes personnes ainsi que les corps mentionnés à l’article 30, que sont les cours, les tribunaux, les armées de terre, de mer ou de l'air et de l'espace, les corps constitués et les administrations publiques.

  1.   Les modifications adoptées en séance publique

L’article a été adopté sans modification en séance publique.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté un amendement CL104 ([25])  de votre rapporteure précisant le champ d’application de l’allongement des délais prévus par l’article 2 bis. L’amendement spécifie que le délai de prescription des délits d’injures publiques et de diffamation n’est porté à un an que lorsque la victime est titulaire d’un mandat électif ou candidate à un tel mandat au moment des faits.

 

*

*     *

 

Article 2 ter
(art. 223‑1‑1 du code pénal)
Création d’une circonstance aggravante en cas d’atteinte à la vie privée et familiale d’un candidat à un mandat électif public pendant la durée de la campagne électorale

Adopté par la commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Introduit à l’initiative de la rapporteure en commission des lois au Sénat ([26]), l’article 2 ter crée une nouvelle circonstance aggravante en cas d’atteinte à la vie privée et familiale lorsque cette atteinte affecte, pendant la durée de la campagne électorale, un candidat à un mandat électif public. Les peines encourues sont ainsi portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d'amende.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté un amendement CL71 ([27]) de votre rapporteure qui étend le champ de la circonstance aggravante créée par l’article 2 ter aux atteintes à la vie privée des proches des personnes mentionnées au deuxième alinéa de l’article 223-1-1 du code pénal.

La commission a également adopté un amendement CL70 ([28]) de votre rapporteure qui prévoit une circonstance aggravante lorsqu’une atteinte au sens de l’article 226-1 du code pénal est portée à la vie privée d’une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou titulaire d’un mandat électif public ou candidate à un tel mandat. Ces dispositions ont été modifiées, avec l’accord de la rapporteure, par un sous-amendement de Mme Sylvie Bonnet (LR) ([29]) qui étend la circonstance aggravante lorsque des atteintes sont portées à la vie privée des membres de la famille des titulaires d’un mandat électif ou candidats à un tel mandat. 

       Dernière modification législative intervenue

L’article 223-1-1 du code pénal a été créé par l’article 36 de la loi n° 2021‑1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République.

  1.   L’état du droit

L’article 223-1-1 du code pénal sanctionne d’une peine d’emprisonnement de trois ans et de 45 000 euros d’amende le fait de révéler, de diffuser ou de transmettre, par quelque moyen que ce soit, des informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d'une personne permettant de l'identifier ou de la localiser aux fins de l'exposer ou d’exposer les membres de sa famille à un risque direct d’atteinte à la personne ou aux biens que l’auteur de ces faits ne pouvait ignorer.

Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende lorsque les faits sont commis au préjudice des personnes suivantes :

– une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou titulaire d’un mandat électif public ou d’un journaliste ou d’une personne mineure ;

– une personne mineure ;

– une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur.

  1.   Le dispositif introduit par le Sénat
    1.   Le dispositif introduit en commission des lois

Introduit à l’initiative de la rapporteure en commission des lois au Sénat ([30]), l’article 2 ter modifie l’article 223-1-1 du code pénal pour ajouter parmi les personnes justifiant une aggravation des peines lorsqu’elles sont victimes d’une atteinte à la vie privée les candidats à un mandat électif public pendant la durée de la campagne électorale. Les atteintes à la vie privée et familiale d’un candidat à un mandat électif public pourront ainsi être sanctionnées d’une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende lorsqu’elles sont commises pendant la durée de la campagne électorale.

  1.   Les modifications adoptées en séance publique

L’article a été adopté sans modification en séance publique.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté un amendement CL71 ([31]) de votre rapporteure qui étend le champ de la circonstance aggravante créée par l’article 2 ter aux atteintes à la vie privée des proches des personnes, y compris les candidats à une élection, mentionnées au deuxième alinéa de l’article 223-1-1 du code pénal.

La commission a également adopté un amendement CL70 ([32]) de votre rapporteure qui prévoit une circonstance aggravante lorsqu’une atteinte au sens de l’article 226-1 du code pénal est portée à la vie privée d’une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou titulaire d’un mandat électif public ou candidat à un tel mandat.

Les atteintes à la vie privée réprimées à l’article 226-1 du code pénal

L’article 226-1 du code pénal réprime des atteintes à la vie privée différentes de celles visées à l’article 223-1-1.

Il s’agit, en particulier, du fait, au moyen d'un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui :

1° En captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ;

2° En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé.

3° En captant, enregistrant ou transmettant, par quelque moyen que ce soit, la localisation en temps réel ou en différé d'une personne sans le consentement de celle-ci.

Ces infractions sont sanctionnées par des peines d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d'amende, qui peuvent être portées à deux ans d’emprisonnement et 60 000 euros d’amende lorsque les faits sont commis par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité.

Le champ d’application de cette circonstance a été étendu, avec l’accord de la rapporteure, par un sous-amendement de Mme Sylvie Bonnet (LR) ([33]) lorsque ces atteintes sont portées à la vie privée des membres de la famille des titulaires d’un mandat électif ou candidats à un tel mandat. 

 

*

*     *

titre ii
améliorer la prise en charge des élus victimes de violences, agressions ou injures dans le cadre de leur mandat ou d’une campagne électorale

Adopté par la commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article rend automatique, c’est-à-dire sans décision préalable du conseil municipal, l’octroi de la protection fonctionnelle pour les maires, les élus municipaux le suppléant ou ayant reçu délégation, qui sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages qui en font la demande. Le conseil municipal pourrait cependant décider de retirer le bénéfice de cette protection fonctionnelle par une délibération motivée par un motif d’intérêt général prise dans un délai de trois mois à compter de la demande de l’élu.

       Modifications apportées par le Sénat

En premier lieu, à l’initiative de la rapporteure Mme Catherine Di Folco, la commission des lois du Sénat a élargi le dispositif prévu par le présent article aux conseillers régionaux et départementaux exerçant des fonctions exécutives (présidents, vice-présidents ou conseillers régionaux ou départementaux ayant reçu délégation).

En deuxième lieu, le Sénat a adopté en séance un amendement du Gouvernement modifiant la rédaction de l’article 3 pour préciser que la décision d’octroi de la protection naît à compter de la transmission de la demande de l’élu au préfet ou à son délégué le cas échéant. De plus, il ajoute des dispositions relatives à l’information, d’une part, des membres de l’organe délibérant dans un délai de 5 jours francs après la réception de la demande de protection fonctionnelle et, d’autre part, des tiers, en prévoyant une information spécifique lors de la séance suivante de l’organe délibérant. Enfin, la nouvelle rédaction modifie les modalités d’opposition de l’organe délibérant à l’octroi de cette protection. Ainsi, l’organe délibérant, convoqué à la demande de l’un ou de plusieurs de ses membres, pourrait se prononcer sur l’octroi de cette protection fonctionnelle dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle il a été informé de la demande.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

 

  1.   L’état du droit

La protection fonctionnelle désigne l’ensemble des mesures de protection et d’assistance mises en œuvre par la collectivité publique à l’égard de ses agents qui sont auteurs ou victimes de faits commis dans l’exercice de leurs fonctions ou en lien avec leurs fonctions.

La protection fonctionnelle a été érigée en principe général du droit pour les agents publics en 1963 ([34]), se traduisant par une obligation pour la collectivité publique de couvrir l’agent poursuivi pour faute de service des condamnations civiles prononcées contre lui, sous réserve de l’absence de faute personnelle. L’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ([35]) a donné une valeur législative à ce principe, en fixant les modalités de cette protection pour les fonctionnaires qui revêt trois composantes :

– la protection contre les violences, menaces ou outrages ;

– la couverture des condamnations civiles lorsque le fonctionnaire a été poursuivi pour une faute de service devant les juridictions judiciaires et que le conflit n’a pas été élevé ;

– la protection en cas de poursuites pénales à l’occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle.

Ces dispositions ont ensuite été codifiées aux articles L. 134-1 à L. 134-15 du code général de fonction publique par l’ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021. Cette codification a été l’occasion d’inscrire dans la loi l’application de ces dispositions à tous les agents publics.

  1.   L’éligibilité de certains élus locaux à la protection de la collectivité territoriale

Certains élus locaux bénéficient d’un régime de protection similaire à celui des agents publics, en raison des fonctions qu’ils exercent. Dans son arrêt Gillet, du 5 mai 1971 ([36]), le Conseil d’État a étendu le principe général du droit de protection fonctionnelle aux maires en retenant une conception large de la notion d’agent public. Des dispositions spécifiques ont ensuite été introduites dans le code général des collectivités territoriales (CGCT) pour prévoir les modalités de cette protection fonctionnelle.

La protection est accordée par la collectivité territoriale (commune, établissement public de coopération intercommunale (EPCI), département ou région) aux élus locaux dans deux cas :

– lorsque l’élu fait l’objet de poursuites pénales ou civiles et que les faits n’ont pas le caractère de faute détachable de l’exercice des fonctions ;

– lorsque l’élu ou ses proches sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages à l’occasion ou du fait de leurs fonctions.

● La collectivité territoriale est tenue d’accorder une protection à certains élus locaux qui font l’objet de poursuites pénales ou civiles lorsque les faits n’ont pas le caractère de faute détachable de l’exercice des fonctions. Cette protection est issue d’une combinaison entre le droit codifié pour la protection des élus qui font l’objet de poursuites pénales (articles L. 2123-34 du CGCT pour les communes, L. 5211-15 du CGCT pour les EPCI, L. 3123-28 du CGCT pour les départements et L. 4135-28 du CGCT pour les régions ([37])) et la jurisprudence administrative pour la protection des élus qui font l’objet de poursuites civiles ([38]). Il est cependant communément admis que le régime de protection prévu par le CGCT pour les élus qui font l’objet de poursuites pénales s’applique de façon identique dans le cadre de poursuites civiles ([39]).

Il est important ici de souligner qu’un agent public bénéficie de la protection fonctionnelle de la collectivité publique avant l’engagement des poursuites, dès lors qu’il est entendu en qualité de témoin assisté, placé en garde à vue ou qu’il lui est proposé une mesure de composition pénale (article L. 134-4 du code général de la fonction publique), ce qui n’est donc pas le cas pour les élus locaux.

La notion de poursuites judiciaires

La notion de poursuites pénales s’entend de la mise en mouvement de l’action publique pour l’application de la peine, c’est-à-dire dès que le procureur a requis l’ouverture d’une information judiciaire, a fait citer le défendeur directement devant le tribunal ou l’a convoqué en comparution immédiate ou quand la victime a déposé une plainte avec constitution de partie civile entre les mains du juge d’instruction. Elle couvre également la mise en examen ou le placement sous contrôle judiciaire. En revanche, ne sont pas considérés comme des poursuites pénales le classement sans suite de l’affaire par le procureur, le dépôt de plainte non assortie de constitution de partie civile, l’enquête préliminaire, la composition pénale ou la médiation pénale.

Les poursuites civiles sont déclenchées par assignation (délivrance d’une convocation de justice au demandeur) ou par une requête (demande adressée à la juridiction saisie).

En cas de faute personnelle détachable de l’exercice des fonctions, l’élu ne peut pas bénéficier de la protection de la collectivité territoriale.

Cette protection est accordée aux élus qui :

– soit, sont l’organe exécutif de la collectivité territoriale (maire, président de l’EPCI, président du conseil départemental ou président du conseil régional) ;

– soit, suppléent l’exécutif ([40]) ou ont reçu une délégation de l’exécutif.

Cette protection s’applique également aux élus remplissant ces conditions mais qui ont cessé leurs fonctions.

 

Les règles relatives à la suppléance de l’exécutif dans les collectivités territoriales

L’article L. 2122-17 du CGCT prévoit les modalités de suppléance du maire en cas d’absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement de celui-ci. Ainsi, il est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l’ordre des nominations et, à défaut, d’adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l’ordre du tableau. Ces dispositions s’appliquent de la même façon en cas de suppléance du président d’un EPCI (article L. 5211-1 du CGCT).

Les articles L. 3122-2 et L. 4133-2 du CGCT prévoient des dispositions similaires en cas de vacance du siège de président du conseil départemental ou régional pour quelque cause que ce soit. Les fonctions de président sont provisoirement exercées par un vice-président, dans l’ordre des nominations et, à défaut, par un conseiller désigné par l’organe délibérant.

.

Les règles relatives à la délégation de fonction

L’article L. 2122-18 du CGCT prévoit que le maire peut déléguer par arrêté, sous sa surveillance et sa responsabilité, une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal. Cette délégation fait l’objet d’un arrêté, qui doit expliquer avec clarté et précision la nature et l’étendue des fonctions qui font l’objet de la délégation. La délégation ne peut porter que sur une partie des fonctions du maire. En cas de délégations identiques à plusieurs adjoints, un ordre de priorité entre eux doit être établi. Par renvoi de l’article L. 5211-2 du CGCT, ces dispositions sont applicables au président d’un EPCI.

Les articles L. 3221-3 et L. 4231-3 du CGCT prévoient des dispositions similaires pour le président du conseil départemental et le président du conseil régional, qui peuvent déléguer, par arrêté, sous leur surveillance et leur responsabilité, l’exercice d’une partie de leurs fonctions aux vice-présidents ou, en cas d’empêchement des vice-présidents ou si ceux-ci sont déjà tous titulaires d’une délégation, aux autres conseillers.

La protection consiste principalement en la prise en charge des frais de justice, dont les honoraires d’avocat, engagés par les élus.

● Les communes et les EPCI sont tenus de protéger les élus locaux qui sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages lors de l’exercice de leurs fonctions ou en raison de leurs fonctions (articles L. 2123-35 du CGCT pour les communes ([41]), L. 5215-16, L. 5216-4 et L. 5217-7 du CGCT ([42]) pour les EPCI). Les départements et les régions ont la même obligation de protection de leurs élus qui sont victimes des faits précités lors de l’exercice de leurs fonctions uniquement (articles L. 3123-29 du CGCT pour les départements et L. 4135-29 du CGCT pour les régions). La protection fonctionnelle doit également être accordée aux élus victimes de voies de fait, d’injures ou de diffamations ([43]).

Cette protection, organisée par la collectivité territoriale, est accordée aux élus qui :

– soit, sont l’organe exécutif de la collectivité (maire, président de l’EPCI, président du conseil départemental ou président du conseil régional) ;

– soit, suppléent le maire ou le président de l’intercommunalité, occupent un poste de vice-président du conseil départemental ou régional, ou ont reçu une délégation de l’exécutif de la collectivité territoriale.

Dans les communes, cette protection est étendue aux conjoints, enfants et ascendants directs des élus municipaux concernés lorsqu’ils sont victimes d’actes similaires en raison des fonctions exercées par ces derniers, même après leur décès. En revanche, elle n’est pas étendue aux conjoints, enfants et ascendants directs des élus régionaux et départementaux victimes de tels actes.

La protection consiste en la prise en charge des frais de justice, dont les honoraires d’avocat, mais également des mesures visant à faire cesser les violences ou les menaces. Enfin, elle comprend, le cas échéant, la réparation des préjudices subis. Il ressort de la jurisprudence administrative que la collectivité territoriale doit assurer une juste réparation du préjudice ([44]) dans tous ses aspects (économique, matériel, personnel, corporel, moral) mais qu’elle garde un pouvoir d’appréciation sur les dépenses engagées qu’elle souhaite prendre en charge, les dispositions législatives n’ayant « en tout état de cause pas pour effet de contraindre la commune à prendre à sa charge, dans tous les cas, l’intégralité de ces frais » ([45]).

La commune, en sa qualité de tiers payeur, est subrogée dans les droits de l’agent contre le tiers responsable. Elle peut demander à l’auteur de l’infraction le remboursement des sommes versées à l’élu dans le cadre de la protection fonctionnelle au titre de la réparation du préjudice. De plus, elle peut, pour les mêmes fins, exercer une action directe devant la juridiction pénale, au besoin par voie de constitution de partie civile.

● Il est important de souligner que le Conseil d’État a précisé, dans un arrêt du 8 juin 2011 ([46]), que l’octroi de la protection fonctionnelle, qui relève d’un principe général du droit, s’applique à tous les agents publics quel que soit le mode d’accès à leur fonction. Cette jurisprudence pourrait impliquer que tous les élus non mentionnés expressément dans le CGTC peuvent bénéficier de la protection de la collectivité territoriale, sur appréciation du juge. Cependant, dans l’attente d’une jurisprudence sur ce sujet spécifique, le doute persiste à l’heure actuelle.

  1.   Les modalités d’octroi de la protection aux élus : la nécessité d’une décision spécifique prise par l’organe délibérant

De façon constante, la jurisprudence administrative considère que la décision d’octroi de la protection fonctionnelle relève de l’organe délibérant de la collectivité territoriale et doit donner lieu à une délibération spécifique de cet organe ([47]), sur demande de l’élu concerné. L’organe délibérant est chargé d’apprécier que les conditions légales sont remplies mais se trouve en situation de compétence liée lorsque les faits n’ont pas le caractère de faute détachable de l’exercice des fonctions ou lorsque les conditions de menaces ou d’atteintes sont réunies, si aucun motif d’intérêt général ne fait obstacle à l’octroi de cette protection. Dans le cas où l’élu est victime de violences, de menaces ou d’outrages, l’organe délibérant définit, le cas échéant, les modalités de la protection accordée, ainsi que le périmètre et le montant des dépenses engagées au titre de la réparation du préjudice subi qu’elle souhaite prendre en charge.

La mission d’information sur le statut de l’élu ([48]), co-rapportée par votre rapporteure et M. Sébastien Jumel a mis en évidence les limites de la délibération spécifique obligatoire de l’organe délibérant pour accorder la protection fonctionnelle :

– en premier lieu, elle relève que la décision de refuser d’accorder la protection fonctionnelle n’est pas toujours fondée sur un réel motif d’intérêt général mais sur d’autres considérations, propres au contexte local ;

– en deuxième lieu, elle observe que le délai entre la demande de protection d’un élu et le vote de la protection par l’organe délibérant est parfois particulièrement long, en l’absence de réunions de l’organe délibérant régulièrement convoquées par le chef de l’exécutif qui fixe, par ailleurs, l’ordre du jour.

  1.   Les modalités de financement de la protection fonctionnelle dans les communes

Des dispositions spécifiques sont prévues pour le financement et la compensation de la protection fonctionnelle des élus municipaux dans les communes.

Face au poids croissant du coût de cette protection, l’article 104 de la loi « Engagement et proximité » du 27 décembre 2019 ([49]) a institué l’obligation, pour les communes, de souscrire un contrat d’assurance permettant de couvrir le conseil juridique, l’assistance psychologique et les coûts correspondant à la protection des élus locaux accordée qu’ils soient poursuivis pour une faute non détachable de l’exercice de leurs fonctions (article L. 2123-34 du CGCT) ou parce qu’ils sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages à l’occasion ou du fait de leurs fonctions (article L. 2123-35 du CGCT).

Dans les communes de moins de 10 000 habitants, le coût de cette souscription est compensé par l’État en fonction d’un barème fixé par décret, au travers d’un accroissement de la « dotation particulière » prévue à l’article L. 2335-1 du CGCT (dotation particulière « élu local » ou DPEL).

De plus, dans toutes les communes, cette protection est accordée et prise en charge par l’État lorsque l’élu municipal concerné est poursuivi pour des faits accomplis en qualité d’agent de l’État (article L. 2123-34 du CGCT). Il bénéficie alors de la même protection fonctionnelle que celle accordée par l’État aux agents publics, c’est-à-dire y compris avant l’engagement de poursuites civiles ou pénales. En revanche, aucune disposition spécifique n’est prévue pour la prise en charge par l’État lorsque l’élu municipal agit en qualité d’agent de l’État et est victime de violences, menaces ou d’outrage (article L. 2123-35 du CGCT).

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat
    1.   La disposition initiale

Le présent article modifie l’article L. 2123-35 du CGCT pour mettre en place une protection fonctionnelle automatique, c’est-à-dire sans qu’une décision préalable de l’organe délibérant soit nécessaire, pour le maire, les élus municipaux le suppléant ou ayant reçu une délégation, qui sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages à l’occasion ou du fait de leurs fonctions et qui en font la demande. Il précise que la commune est tenue de réparer, le cas échéant, l’intégralité du préjudice qui en résulte.

L’octroi automatique de la protection fonctionnelle ne concernerait donc que les élus qui se trouvent dans le deuxième cas présenté supra, tandis que la procédure actuelle de délibération préalable de l’organe délibérant serait conservée pour la protection fonctionnelle des élus qui font l’objet de poursuites civiles ou pénales.

Par renvoi des articles L. 5215-16, L. 5216-4 et L. 5217-7 du CGCT, les dispositions prévues par l’article 3 pour les communes sont applicables aux membres des conseils des communautés urbaines, des conseils des communautés d’agglomération et des conseils métropolitains. Un vide juridique, corrigé par l’article 6 de la présente proposition de loi, existe aujourd’hui concernant l’applicabilité de ces dispositions aux membres des communautés de communes, en l’absence d’un renvoi spécifique de l’article L. 5214-8 du CGCT.

En sus d’une information dans les plus brefs délais du conseil municipal, l’article prévoyait que le conseil municipal pouvait décider de retirer le bénéfice de la protection fonctionnelle, par une délibération motivée par un motif d’intérêt général prise dans un délai de trois mois à compter de la demande adressée par l’élu à la collectivité, l’inscription de ce point à l’ordre du jour étant de droit à la demande d’un ou de plusieurs membres du conseil municipal.

  1.   Les modifications apportées par le Sénat
    1.   Les modifications apportées par la commission

À l’initiative de la rapporteure Mme Catherine Di Folco, la commission des lois du Sénat, en adoptant l’amendement n°COM-12, a élargi le dispositif d’octroi automatique de la protection fonctionnelle aux conseillers régionaux et départementaux exerçant des fonctions exécutives (président, vice-présidents ou conseillers régionaux ou départementaux ayant reçu délégation), par l’insertion aux articles L. 3123-29 et L. 4135-29 du CGCT de dispositions identiques à celles prévues pour les communes à l’article L. 2123-35 du CGCT.

Elle a ainsi étendu la protection fonctionnelle aux conseillers départementaux et régionaux exerçant des fonctions exécutives qui sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages du fait de leurs fonctions.

  1.   Les modifications apportées en séance

Le Sénat a adopté en séance l’amendement n°16 du Gouvernement qui modifie la rédaction de l’article 3 pour apporter plusieurs précisions au régime applicable en matière de protection fonctionnelle.

En premier lieu, si elle conserve le principe d’un octroi automatique de la protection fonctionnelle par la collectivité et d’une réparation intégrale du préjudice causé, la nouvelle rédaction précise que la décision d’octroi de la protection naît à compter de la transmission de la demande de l’élu au préfet ou à son délégué le cas échéant, effectuée dans le délai de quinze jours prévu par le droit commun (article L. 2131-2 du CGCT). Cette demande de protection doit d’abord être adressée au chef de l’exécutif de la collectivité lorsqu’elle vient d’un autre élu que celui-ci, ou, lorsqu’elle vient du chef de l’exécutif, à un élu le suppléant s’il s’agit du maire ou du président de l’EPCI ou à un vice-président dans les départements et les régions, ou un élu ayant reçu délégation. Après avoir accusé réception de cette demande, la collectivité la transmet au préfet ou à son délégué.

En deuxième lieu, la nouvelle rédaction précise les modalités d’information des membres de l’organe délibérant qui doivent être informés de l’octroi de cette protection dans un délai de 5 jours francs à compter de la réception de la demande de protection par la collectivité. Elle prévoit également que cette information est portée à l’ordre du jour de la séance suivante de l’organe délibérant, afin d’assurer une information éclairée des tiers.

Enfin, la nouvelle rédaction modifie les modalités d’opposition de l’organe délibérant à l’octroi de cette protection. Par dérogation au régime de retrait et d’abrogation de droit commun applicable à tout acte administratif créateur de droit qui dispose que l’abrogation ou le retrait d’un tel acte doit intervenir dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ([50]) et en l’absence d’une telle décision de la collectivité dans le dispositif d’octroi automatique de la protection, l’article 3 prévoit que l’organe délibérant peut retirer ou abroger la protection dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle il a été informé de l’octroi de cette protection. Le retrait ou l’abrogation de l’acte serait ensuite réalisé dans les conditions prévues par le droit commun aux articles L. 242-1 à L. 242-5 du code des relations entre le public et l’administration. Le chef de l’exécutif serait tenu de convoquer l’organe délibérant, à la demande d’un ou plusieurs de ses membres, dans ce délai. La convocation serait accompagnée d’une note de synthèse.

Lors de son audition par votre rapporteure, la direction générale des collectivités locales (DGCL) a précisé que le Gouvernement prévoyait d’harmoniser certains délais pour améliorer la cohérence et la lisibilité du dispositif. Ainsi, la protection serait accordée à l’issue d’un délai de cinq jours francs suivant la date de réception par la commune de la demande de protection, s’il a été procédé, dans ce délai dérogatoire au droit commun, à la transmission de la demande au préfet. La transmission au préfet et l’information des membres du conseil municipal dans un même délai de 5 jours, après qu'il a été accusé réception du dépôt de la demande, feraient donc naître la décision d’octroi de la protection, le dernier des deux délais, la transmission ou l’information, constituant alors la « date de naissance » de la décision.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

 

*

*     *

Si votre rapporteure salue les dispositions prévues par le présent article, elle considère qu’elles restent limitées dans leur champ d’application. En effet, en cohérence avec la jurisprudence sur la protection fonctionnelle des agents publics et pour harmoniser le droit applicable, il lui semble indispensable :

– d’une part, de prévoir que tous les élus locaux, qu’ils soient conseillers municipaux, communautaires, départementaux ou régionaux, victimes de violences, de menaces ou d’outrages peuvent bénéficier de la protection fonctionnelle de leur collectivité territoriale, qu’ils exercent ou non des fonctions exécutives. En effet, un élu local peut tout à fait être victime de tels faits sans qu’il ait un pouvoir décisionnaire. Elle relève toutefois que les élus exerçant des fonctions exécutives, notamment les présidents de l’exécutif, sont plus souvent victimes de tels agissements. Pour éviter de multiplier le nombre de protections fonctionnelles automatiquement accordées, votre rapporteure considère que la procédure actuelle prévoyant une délibération spécifique de l’organe délibérant doit être conservée pour l’octroi de la protection fonctionnelle aux élus qui n’exercent pas de fonctions exécutives ;

– d’autre part, d’étendre la protection fonctionnelle aux conjoints, enfants et ascendants directs des élus régionaux et départementaux victimes de violences, de menaces ou d’outrages. Ainsi, les familles de tous les élus locaux pourraient bénéficier de la protection fonctionnelle de la collectivité territoriale, lorsqu’ils sont victimes de tels faits et qu’ils en font la demande, après une délibération spécifique de l’organe délibérant.

Contrainte par les règles de recevabilité financière prévues par l’article 40 de la Constitution, votre rapporteure appelle le Gouvernement à porter ces propositions en séance. En cas de refus de ce dernier, elle inscrira les dispositions prévoyant l’extension de la protection fonctionnelle à tous les élus locaux et à leurs familles dans la proposition de loi qu’elle déposera conjointement avec Sébastien Jumel. Elle espère que les futurs débats démontreront la nécessité d’acter un tel élargissement.

 

*

*     *

Supprimé par la commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article élargit à l’ensemble des communes de moins de 10 000 habitants la compensation financière par l’État des coûts liés à la souscription obligatoire d’une assurance couvrant les frais découlant de l’octroi de la protection fonctionnelle à certains élus municipaux.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

       Modifications apportées par la commission

En adoptant quatre amendements identiques ([51]), dont un de votre rapporteure, la commission a supprimé cet article.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 104 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique a créé l’obligation pour toutes les communes de souscrire dans un contrat d’assurance, une garantie visant à couvrir le conseil juridique, l’assistance psychologique et les coûts découlant de leur obligation de protection à l’égard du maire, des élus municipaux le suppléant ou ayant reçu délégation. Il a également prévu que le coût de cette souscription est compensé par l’État en fonction d’un barème fixé par décret dans les communes de moins de 3 500 habitants.

L’article 247 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 a élargi aux communes de moins de 10 000 habitants le bénéfice de la compensation par l’État des coûts liés à cette assurance.

 

  1.   L’état du droit

Face à la hausse du nombre de demandes de protection fonctionnelle des élus municipaux, notamment en raison d’un nombre croissant de faits de violences ou de menaces, l’article 104 de la loi « Engagement et proximité » du 27 décembre 2019 ([52]) a instauré l’obligation, pour toutes les communes, de contracter une assurance destinée à couvrir les coûts liés à l’octroi de la protection fonctionnelle aux maires et aux élus municipaux les suppléant ou ayant reçu une délégation faisant l’objet de poursuites civiles ou pénales (article 2123-34 du CGCT), ou victimes de violences de menaces ou d’outrages (article 2123-35 du CGCT). Cette assurance doit couvrir le conseil juridique, l’assistance psychologique et les coûts résultant de l’obligation de protection à l’égard des élus concernés.

Cette assurance obligatoire permet ainsi aux communes, notamment les plus petites, de garantir une protection effective à leurs maires, aux élus municipaux les suppléants et conseillers municipaux délégués, alors même que leurs services juridiques sont peu développés et leurs budgets limités.

Dans certaines communes, le coût de cette souscription est compensé par l’État en fonction d’un barème fixé par décret. Auparavant prévue pour les communes de moins de 3 500 habitants, cette compensation a été élargie aux communes de moins de 10 000 habitants par l’article 247 de loi de finances pour 2024 ([53]).

La compensation prend la forme d’une dotation forfaitaire annuelle, dont la gestion est confiée aux préfets de département. Elle est financée par une majoration de la dotation particulière relative aux conditions d’exercice des mandats locaux (DPEL) prévue à l’article L. 2335-1 du CGCT. Cette majoration s’élève à 3,3 millions d’euros en 2024.

Le barème retenu pour la compensation par l’État est indexé sur le nombre d’élus siégeant au conseil municipal afin d’être proportionnellement identique pour chaque commune.

Montant de la compensation annuelle des coûts liés aux contrats d'assurance relatifs à la protection fonctionnelle des élus

Population (nombre d’habitants)

Montant de la compensation annuelle

De 1 à 99 habitants

72 €

De 100 à 499 habitants

87 €

De 500 à 1 499 habitants

102 €

De 1500 à 2 499 habitants

117 €

De 2 500 à 3 499 habitants

133 €

Source : article D. 2335-1-1 du code général des collectivités territoriales

D’après les chiffres transmis par la DGCL à votre rapporteure, 31 736 communes bénéficient aujourd’hui de cette compensation.

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat

Le présent article modifie l’article L. 2123-35 du CGCT pour étendre à l’ensemble des communes de moins de 10 000 habitants le dispositif de compensation par l’État des coûts liés à l’obligation de contracter une assurance pour couvrir le risque lié à la protection des élus victimes de violences, de menaces ou d’outrages.  En revanche, pour la compensation par l’État des coûts résultant de l’obligation d’assurance de la protection des élus qui font l’objet de poursuites civiles ou pénales, prévue à l’article L. 2123-34 du CGCT, seules les communes de moins de 3 500 habitants resteraient concernées.

L’article 247 de loi de finances pour 2024 ([54]) a prévu une disposition élargissant à l’ensemble des communes de moins de 10 000 habitants la compensation par l’État des coûts liés à l’obligation de contracter une assurance pour couvrir le risque lié à la protection fonctionnelle des élus, à la fois lorsqu’ils sont poursuivis au civil ou au pénal et lorsqu’ils sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages. D’après la DGCL, 2 216 communes supplémentaires peuvent désormais bénéficier de cette compensation, ce qui représente un coût annuel supplémentaire pour l’État d’environ 300 millions d’euros. 33 852 communes soit 97 % des communes françaises sont donc aujourd’hui concernées par cette compensation de l’État.

Prenant acte de l’adoption et de l’entrée en vigueur de cette disposition dont elle se félicite, votre rapporteure déposera un amendement pour supprimer l’article 4.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté quatre amendements identiques, dont un de votre rapporteure, qui ont supprimé l’article 4.

 

*

*     *

Adopté par la commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article précise que lorsque le maire, un élu municipal le suppléant ou ayant reçu délégation qui est victime de violences, menaces ou d’outrages à l’occasion ou du fait de ses fonctions, agit en qualité d’agent de l’État, il bénéficie, de la part de l’État, de la protection fonctionnelle prévue pour les agents publics.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté cet article modifié par un amendement de M. Paul Molac ([55]) précisant que l’élu municipal qui agit en qualité d’agent de l’État adresse sa demande de protection fonctionnelle au préfet.

 

  1.   L’état du droit

Comme vu précédemment, les communes sont tenues d’accorder au maire, à l’élu le suppléant ou ayant reçu délégation, une protection fonctionnelle en cas de poursuites civiles ou pénales pour des faits non détachables de l’exercice des fonctions ou lorsque l’élu est victime de violences, menaces ou d’outrage à l’occasion ou du fait de ses fonctions.

Or, le maire, l’élu le suppléant ou ayant reçu délégation, agit parfois en tant qu’agent de l’État, notamment en tant qu’officier d’état civil ou officier de police judiciaire.

● L’article L. 2123-34 du CGCT prévoit que lorsque l’élu concerné agit en tant qu’agent de l’État, il bénéficie, de la part de l’État, de la protection fonctionnelle prévue pour les agents publics. Il renvoie à l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, abrogé depuis la codification de cette loi dans le code général de la fonction publique (articles L. 134-1 à L. 134-12) par l’ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021, pour la définition et les modalités d’application de cette protection.

Les nouveaux articles du code général de la fonction publique précisent que la protection fonctionnelle est octroyée par la collectivité publique à ses agents :

– en cas de poursuites civiles (article L. 134-3 du code général de la fonction publique) ou pénales (article L. 134-4 du même code), y compris en cas de placement en garde à vue ou si l’agent se voit proposer une mesure de composition pénale, à raison de faits qui n’ont pas le caractère d’une faute personnelle détachable de l’exercice de ses fonctions ;

– en cas d’atteintes volontaires à l’intégrité de l’agent, de violences, de harcèlement, de menaces, d’injures, de diffamation ou d’outrages dont l’agent pourrait être victime sans qu’une faute personnelle puisse lui être imputée (article L. 134-5 du code général de la fonction publique). La protection de la collectivité publique peut être accordée, sur leur demande, au conjoint, au concubin, au partenaire lié par un pacte civil de solidarité à l’agent public, à ses enfants et à ses ascendants directs pour les instances civiles ou pénales qu’ils engagent contre les auteurs d’atteintes volontaires à l’intégrité de la personne dont ils sont eux-mêmes victimes du fait des fonctions exercées par l’agent public ou à la vie de l’agent public du fait des fonctions exercées par celui-ci (article L. 134-7 du même code).

● En revanche, l’article L. 2123-35 du CGCT, qui traite de la protection accordée aux élus municipaux victimes de violences, de menaces ou d’outrages, ne prévoit aucune disposition expresse relative à l’octroi de la protection fonctionnelle par l’État lorsque l’élu agit en qualité d’agent de l’État. Cette absence de disposition expresse est source d’ambiguïté même si l’élu qui agit en qualité d’agent de l’État entre dans le champ des dispositions prévues par l’article L. 134-5 du code général de la fonction publique précitées pour la protection fonctionnelle des agents publics. 

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat

Afin de clarifier le régime applicable en matière de protection fonctionnelle, le présent article complète l’article L. 2123-35 du CGCT pour prévoir que lorsque le maire, l’élu le suppléant ou ayant reçu délégation agit en tant qu’agent de l’État, il bénéficie, de la part de l’État, de la protection fonctionnelle qu’il octroie à ses agents publics, prévue aux articles L. 134-1 à L. 134-12 du code général de la fonction publique, lorsqu’il est victime de violences, de menaces ou d’outrages à l’occasion ou du fait de ses fonctions.

Cette harmonisation est indispensable pour assurer l’intelligibilité du droit. Elle garantit aussi, de façon logique, que l’État est responsable de la protection fonctionnelle de tous les agents publics qui agissent pour son compte.

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté cet article modifié par un amendement de précision déposé par M. Paul Molac. Cet amendement prévoit que lorsque le maire ou l’élu municipal le suppléant ou ayant reçu délégation agit comme agent de l’État et est victime de violences, de menaces ou d’outrages, il adresse sa demande de protection fonctionnelle au représentant de l’État dans le département.

*

*     *

Adopté par la commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Afin de pallier un vide juridique, cet article étend aux élus municipaux membres des communautés de communes les dispositions relatives à la protection fonctionnelle des élus municipaux exerçant des fonctions exécutives et à l’amoindrissement de leur responsabilité pénale pour les actions menées dans le cadre de leur mandat.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

 

  1.   L’état du droit

● Comme vu supra, les maires, les élus municipaux les suppléant ou ayant délégation bénéficient d’une protection fonctionnelle lorsqu’ils font l’objet de poursuites pénales ou civiles ou lorsqu’ils sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages, à l’occasion ou du fait de leurs fonctions (articles L. 2123-34 et L. 2123-35 du CGCT).

En outre, l’article L. 2123-34 du CGCT prévoit des dispositions relatives à la responsabilité pénale de ces mêmes élus, issues de la loi du 10 juillet 2000 dite « Fauchon » ([56]). Ainsi, ces élus ne peuvent être condamnés pénalement pour des faits non intentionnels (imprudence, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement) commis dans l’exercice de leurs fonctions que s’il est établi qu’ils n’ont pas accompli les diligences normales compte tenu de leurs compétences, du pouvoir et des moyens dont ils disposaient, ainsi que des difficultés propres aux missions que la loi leur confie. Cette disposition spécifique qui complète le cadre général en matière de responsabilité pénale pour les délits non intentionnels, prévue par l’article L. 121-3 du code pénal, impose au juge de prendre en compte la situation particulière des élus locaux.

● Ces dispositions relatives à la protection fonctionnelle et à la responsabilité pénale des élus locaux sont applicables à l’ensemble des élus locaux, à l’exception des élus municipaux membres des communautés de communes.

En effet, le CGCT prévoit des dispositions spécifiques pour :

– les maires et les élus municipaux les suppléant ou ayant reçu délégation (articles L. 2123-34 et L. 2123-35 du CGCT) ;

– les présidents de conseil départemental et les conseillers départementaux les suppléant ou ayant reçu une délégation (articles L. 3123-28 et L. 3123-29 du CGCT) ;

– les présidents de conseil régional et les conseillers régionaux les suppléant ou ayant reçu une délégation (articles L. 4135-28 et L. 4135-29 du CGCT).

En outre, par renvoi à ses articles L. 2123-34 et L. 2123-35, le CGCT prévoit que les dispositions prévues pour les conseillers municipaux exerçant des fonctions exécutives aux articles sont applicables :

– aux membres des conseils des communautés urbaines (article L. 5215-16 du CGCT) ;

– aux membres des conseils des communautés d’agglomération (article L. 5216-4 du CGCT)

– aux membres des conseils métropolitains (article L. 5217-7 du CGCT).

En revanche, l’article L. 5214-8 du CGCT ne contient pas de disposition équivalente pour les communautés de communes.

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat

Afin de pallier ce vide juridique, le présent article insère à l’article L. 5214-8 du CGCT, qui liste les articles du CGCT applicables aux membres du conseil de la communauté de communes, une référence aux articles L. 2123-34 et L. 2123-35. Ainsi, les dispositions relatives à la protection fonctionnelle et à l’amoindrissement de la responsabilité pénale des élus municipaux s’appliqueraient également aux élus des communautés de communes.

Cette disposition permet de clarifier le droit applicable aux élus des communautés de communes.

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

 

*

*     *

Adopté par la commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article effectue une mesure de coordination à l’article L. 2123-34 du CGCT pour tenir compte de l’abrogation de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, suite à la codification de ces dispositions.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté cet article modifié par un amendement de coordination dans le code des communes de la Nouvelle-Calédonie et un amendement rédactionnel, présentés par votre rapporteure ([57]).

 

  1.   L’état du droit

L’article L. 2123-34 du CGCT prévoit que lorsque le maire ou un élu municipal le suppléant ou ayant délégation agit en tant qu’agent de l’État, il bénéficie, de la part de l’État, de la protection fonctionnelle prévue pour les agents publics à l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Cette loi a été abrogée le 1er mars 2022 par l’ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021 suite à sa codification dans le code général de la fonction publique.

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat

Tenant compte de l’abrogation de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le présent article remplace le renvoi à l’article 11 de cette loi par un renvoi aux articles L. 134-1 à L. 134-12 du code général de la fonction publique qui traitent de la protection fonctionnelle des agents publics.

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté un amendement de votre rapporteure qui effectue une coordination à l’article 7 à l’article L. 127-1 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie, qui renvoie aujourd’hui à l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 précitée. À l’initiative de votre rapporteure, la commission a également adopté un amendement rédactionnel.

*

*     *

Adopté par la commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article prévoit que la protection accordée par la commune comprend la prise en charge par celle-ci des restes à charge ou des dépassements d’honoraires des élus victimes de violences.

       Modifications apportées par le Sénat

La commission des lois du Sénat a adopté un amendement de la rapporteure Mme Catherine Di Folco, précisant que la prise en charge par la commune concernerait uniquement les dépassements d’honoraires et les restes à charge résultant de dépenses liées aux soins médicaux et à l’assistance psychologique et qu’elle s’effectuerait selon un barème fixé par décret.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

 

  1.   L’état du droit

Comme vu supra, l’article L. 2123-35 du CGCT prévoit que la commune est tenue d’assurer la protection du maire, des élus municipaux le suppléant ou ayant reçu délégation contre les violences, menaces ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion ou du fait de leurs fonctions. Elle doit également réparer, le cas échéant, le préjudice qui en a résulté. Pour mémoire, l’article 3 de la présente proposition de loi prévoit que la commune doit réparer l’intégralité du préjudice lié à cette situation.

Il convient de rappeler que l’assemblée délibérante de la commune, avant d’accorder la protection fonctionnelle aux élus concernés, doit d’abord vérifier que les conditions légales sont remplies et qu’aucun motif d’intérêt général ne fait obstacle à l’octroi de la protection fonctionnelle.  Elle détermine, dans un second temps, les modalités de cette protection fonctionnelle afin de faire cesser les violences, menaces ou outrages et de les réparer. Elle doit ainsi assurer une juste réparation du  préjudice subi ([58]), dans tous ses aspects (économique, matériel, personnel, corporel, moral). Les frais éligibles à la prise en charge ne font pas l’objet d’une liste exhaustive mais comprennent généralement les frais de justice, les frais médicaux ou d’accompagnement psychologique, d’assistance juridique, des actions de prévention et de soutien ou l’indemnisation du préjudice subi ([59]).

En revanche, le Conseil d’État considère que l’octroi de la protection fonctionnelle et la prise en charge de certains frais engagés par l’élu concerné, n’ont pas pour effet de contraindre la commune à prendre à sa charge l’intégralité de ces frais ([60]). La commune dispose donc d’un pouvoir d’appréciation sur les dépenses engagées qu’elle souhaite prendre en charge, et cette prise en charge peut n’être que partielle.

Par ailleurs, les contrats d’assurance souscrits obligatoirement par les communes pour couvrir les frais liés à l’octroi de la protection fonctionnelle aux élus victimes de violences, ne couvrent pas toujours l’ensemble des frais engagés par les élus concernés. Si ces contrats sont supposés couvrir « le conseil juridique, l’assistance psychologique et les coûts correspondant à la protection des élus locaux », certaines prestations ne sont pas couvertes (par exemple les prestations médico-sociales) ou seulement de façon limitée (par exemple, seules quelques séances sont prises en charge au titre du suivi psychologique). De même, les dépassements d’honoraires médicaux ne sont pas toujours pris en charge, ce qui peut poser problème dans les déserts médicaux où l’accès à un médecin entièrement conventionné peut être plus complexe.

Dans le cadre de sa mission d’information, votre rapporteure a été confrontée à d’autres types de problématiques, rapportées par les associations d’élus locaux : la présence de clauses d’exclusion de garantie rédhibitoires, l’absence de prise en charge des dépenses de lutte contre le harcèlement en ligne des élus, des clauses non adaptées à la situation particulière des élus (avec une distinction entre situation professionnelle et privée qui ne correspond pas à la réalité des faits).

La plupart de ces problématiques ne pouvant être réglées directement au niveau législatif, elle salue les travaux initiés par le Gouvernement pour renforcer l’information relative à la protection fonctionnelle à disposition des élus locaux par l’élaboration d’un guide spécifique et pour rendre plus fluides les relations entre les assureurs et les élus locaux, gage d’amélioration de la qualité de l’offre d’assurance pour les élus, avec la mise en place d’un guide des bonnes pratiques.

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat

Le présent article modifie l’article L. 2123-35 du CGCT pour prévoir que lorsqu’elle octroie une protection fonctionnelle au maire, aux élus municipaux le suppléant ou ayant délégation, la commune prend en charge les restes à charge ou les dépassements d’honoraires résultant des dépenses engagées par les bénéficiaires.

À l’initiative de la rapporteure Mme Catherine Di Folco, la commission des lois du Sénat a adopté un amendement n° COM-13, qui précise que la prise en charge concernerait les seuls dépassements d’honoraires et restes à charge médicaux et psychologiques et s’effectuerait selon un barème fixé par décret.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

 

*

*     *

Adopté par la commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article ouvre la possibilité pour chaque titulaire d’un mandat électif de saisir le bureau central de tarification lorsqu’il n’a pas pu obtenir de contrat assurantiel auprès d’au moins deux entreprises pour la couverture des biens tenant lieu de permanence électorale ou accueillant des réunions électorales. Le bureau central de tarification fixerait ensuite le montant de la prime exigible pour assurer le bien immobilier auquel un assureur serait tenu de garantir le risque, faute de quoi il s’exposerait à des retraits d’agréments et des sanctions.

       Modifications apportées par le Sénat

À l’initiative de la rapporteure Mme Catherine Di Folco, la commission des lois du Sénat a élargi le dispositif prévu par le présent article à tout candidat s’étant déclaré publiquement.

En séance, le Sénat a adopté un amendement de sa rapporteure qui renvoie à un décret en Conseil d’État les modalités d’application de l’article, notamment les critères permettant de définir les modalités de saisine du bureau central de tarification aux candidats à un mandat électif public.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté cet article modifié par quatre amendements rédactionnels de votre rapporteure ([61]).

 

  1.   L’état du droit

● Le bureau central de tarification (BCT) est une autorité administrative chargée de garantir l’obligation d’assurance dans les régimes d’assurance expressément prévus dans le livre II du code des assurances : la responsabilité civile automobile (articles L.212-1 à L.212-3) ; l’assurance des locataires, des copropriétaires et des syndicats des copropriétaires (articles L.215-1 à L. 215-4) ; l’assurance des engins de remontée mécanique (article L. 220-5) ; l’assurance construction (articles L. 243-4 à L. 243-6) ; l’assurance de la responsabilité civile médicale (articles L. 252-1 et L. 252-2) et l’assurance des catastrophes naturelles (article L. 125-6). Il peut être saisi par toute personne physique ou morale assujettie à une obligation d’assurance qui s’est vu refuser la garantie par au moins une entreprise d’assurance.

Le BCT, après étude du dossier, fixe le tarif selon lequel l’entreprise d’assurance est tenue de garantir le risque qui lui a été proposé. Il dispose donc du pouvoir d’imposer à l’entreprise d’assurance choisie par l’assujetti la couverture du risque.

Si l’entreprise maintient son refus de garantir le risque au tarif fixé par le BCT, elle est considérée comme ne fonctionnant plus conformément à la réglementation en vigueur et encourt, selon le cas, soit le retrait de certains agréments administratifs nécessaires pour réaliser ses opérations, soit certaines sanctions.

● Face à l’accroissement du nombre de dégradations de locaux nécessaires à l’exercice du mandat, les associations d’élus locaux relèvent la difficulté de leurs membres à souscrire à des contrats d’assurance pour les locaux utilisés en tant que permanences électorales ou accueillant des réunions électorales. Plusieurs compagnies n’hésiteraient pas à résilier les contrats d’assurance en raison de la sinistralité élevée et les élus sans contrat d’assurance ont des difficultés à louer leurs locaux, l’assurance en responsabilité civile étant obligatoire pour les locataires et les copropriétaires.

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat
    1.   La disposition initiale

Ainsi, le présent article insère un nouvel article dans un nouveau titre V bis consacré aux assurances obligatoires portant sur l’assurance des risques liés à l’exercice d’un mandat électif, dans le livre II du code des assurances. Cet article prévoit la possibilité, pour les titulaires d’un mandat électif, de saisir le bureau central de tarification, lorsqu’ils n’ont pu obtenir, auprès d’au moins deux entreprises d’assurance, un contrat d’assurance couvrant les risques de dommages des biens meubles et immeubles tenant lieu de permanence électorale ou accueillant des réunions électorales.

De façon identique à ce qui existe déjà dans les régimes d’assurance précités, le BCT fixera le tarif auquel l’entreprise d’assurance intéressée sera tenue de garantir le risque qui lui a été proposé. Si l’entreprise refuse de garantir ce risque, elle s’exposera au retrait des agréments administratifs nécessaires pour réaliser ses opérations ([62]) ou aux sanctions prévues à l’article L. 363-4 du code des assurances (avertissement, blâme, ou interdiction d’effectuer certaines opérations et toutes autres limitations dans l'exercice de l’activité ; suspension du mandataire général et interdiction de continuer de conclure des contrats d'assurance ou de réassurance sur le territoire de la République française). Le BCT pourra, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État, déterminer le montant d’une franchise qui reste à la charge de l’assuré.

Ainsi le BCT garantira que les élus nationaux et locaux bénéficient d’une couverture assurantielle des locaux utilisés comme permanences électorales ou qui accueillent des réunions électorales.

En revanche, contrairement à ce qui existe dans les autres régimes d’assurance dans lesquels le BCT peut déjà être saisi, le présent article ne crée pas d’obligation, pour les élus, d’assurer les locaux qu’ils utilisent dans l’exercice de leur mandat.

  1.   Les modifications apportées par le Sénat
    1.   Les modifications apportées en commission des lois

En commission, le Sénat a adopté l’amendement n° COM-14 de la rapporteure Mme Catherine Di Folco qui élargit à tout candidat s’étant déclaré publiquement la possibilité de saisir le BCT dans les conditions prévues par le présent article.

  1.   Les modifications apportées en séance publique

En séance, le Sénat a adopté l’amendement n° 19 de sa rapporteure qui renvoie à un décret en Conseil d’État les modalités d’application de l’article, notamment les critères permettant de définir les modalités de saisine du bureau central de tarification applicables aux candidats à un mandat électif public.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté cet article modifié par quatre amendements rédactionnels de votre rapporteure.

 

*

*     *

Article 10
(art. L. 52‑18‑1, L. 52-18-2 et L. 52-18-3 du code électoral)
Élargissement du bénéfice de la protection fonctionnelle aux candidats aux élections et remboursement des frais de sécurisation engagés par les candidats

Adopté par la commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 10 comporte deux mesures destinées à garantir la protection des candidats aux élections locales et nationales :

– l’extension du bénéfice de la protection fonctionnelle aux candidats à un mandat électif public ;

– l’ouverture du droit à une prise en charge par l’État, quels que soient le résultat électoral et la taille de la collectivité, des dépenses engagées pour sa sécurité par un candidat pendant la durée de la période électorale.

       Modifications apportées par le Sénat

La commission des lois du Sénat, à l’initiative de sa rapporteure ([63]) a précisé la durée pendant laquelle les candidats bénéficiaient de la protection fonctionnelle et de la prise en charge de leurs frais de sécurité par l’État, définie comme la période courant « pendant les six mois précédant le premier jour du mois de l'élection et jusqu'à la date du dépôt du compte de campagne ».

Le même amendement a également précisé le rôle d’approbation de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) des demandes de remboursements de frais de protection des candidats.

Il a, enfin, prévu une entrée en vigueur différée d’un an de ces dispositions. 

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté quatre amendements de votre rapporteure afin de définir la notion de candidat à une élection ([64]), de modifier la durée de la période au cours de laquelle ces candidats peuvent bénéficier de la protection fonctionnelle et du remboursement de leurs dépenses de protection ([65]), de sécuriser la doctrine de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) en matière de remboursement des dépenses « habituelles » de sécurité des candidats ne faisant pas l’objet de menace ([66]) et de clarifier le processus de caractérisation du niveau de menace pesant sur le candidat ([67]) .

  1.   L’état du droit
    1.   La protection fonctionnelle des agents publics et des titulaires de mandats électifs publics

D’origine jurisprudentielle ([68]), la protection fonctionnelle des agents publics est définie aux articles L. 134-1 à L. 134-12 du code général de la fonction publique. L’État a l’obligation de protéger ses agents publics contre les attaques dont ils peuvent faire l’objet à l’occasion de l'exercice de leurs fonctions ou contre les mises en cause de leurs responsabilités civiles et pénales devant le juge pénal à raison de faits qui n’ont pas le caractère d’une faute personnelle.

Plus précisément, l’agent public (ou ancien agent public) bénéficie aux termes de l’article L. 134-1 « d’une protection organisée par la collectivité publique qui l’emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire », ainsi que d’une couverture en cas de « condamnations civiles prononcées contre lui » lorsqu’il est poursuivi par un tiers et qu’une faute personnelle détachable de l’exercice de ses fonctions ne lui est pas imputable (article L. 134-3). La collectivité qui l’emploie est également tenue, aux termes de l’article L. 134-5 du même code « de protéger l'agent public contre les atteintes volontaires à l'intégrité de sa personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu'une faute personnelle puisse lui être imputée » et de réparer « le cas échéant, le préjudice qui en est résulté ». La collectivité doit, en outre, prendre « sans délai et à titre conservatoire », les mesures d'urgence de nature à faire cesser les risques manifestes d’atteinte grave à l’intégrité physique de ses agents publics (art. L. 134-6 du même code). La protection fonctionnelle peut être accordée, aux termes de l’article L. 134-7, à certains proches de l’agent public que sont son conjoint, son concubin, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, ses enfants et ses ascendants directs.

Le champ d’application de la protection fonctionnelle est donc très large. Il est encore, ainsi que l’indiquait à votre rapporteure M. Christophe Bernard, sous-directeur des élus locaux et de la fonction publique territoriale au sein de la direction générale des collectivités locales (DGCL) du ministère de l’intérieur, insuffisamment connu des acteurs qu’elle a vocation à protéger.

Certains élus locaux bénéficient d’un régime de protection similaire à la protection fonctionnelle des agents de la fonction publique. La protection est accordée par la collectivité territoriale soit lorsque l’élu fait l’objet de poursuites pénales ou civiles et que les faits n’ont pas le caractère de faute détachable de l’exercice des fonctions, soit lorsque l’élu ou ses proches sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages à l’occasion ou du fait de leurs fonctions.

Cette protection, dont les principes sont fixés par le code général des collectivités territoriales, a été largement précisée par la jurisprudence (voir supra le commentaire de l’article 3 de la présente proposition de loi).  

  1.   Le remboursement des dépenses de candidats dans le cadre des campagnes électorales

Dans le cadre des campagnes électorales, certaines dépenses peuvent faire l’objet d’un remboursement par l’État. La législation a pour objectif de renforcer l’égalité des candidats en instaurant un plafond des dépenses. Les candidats ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés – 3 % pour l’élection des membres de l’Assemblée de Polynésie française – peuvent ainsi, dans la limite de 47,5 % de ce plafond, se voir rembourser par l’État certaines dépenses effectivement engagées dans le cadre de la campagne et réglées sur leur apport personnel. En contrepartie, les candidats se doivent de respecter le principe de transparence financière en inscrivant dans un compte de campagne la totalité de leurs dépenses et de leurs recettes et en apportant les justificatifs nécessaires. L’obligation de déposer un compte de campagne s’impose pour les candidats têtes de liste aux élections municipales dans les communes d’au moins 9 000 habitants et pour tous les candidats aux élections législatives, sénatoriales, régionales, départementales, territoriales, provinciales et présidentielle.

Dans ce cadre, ainsi que l’a indiqué le Président de la CNCCFP, M. Jean‑Philippe Vachia, certaines dépenses de protection et de sécurité peuvent déjà faire l’objet d’un remboursement au titre du compte de campagne (article L. 52-12 du code électoral).

Dépenses de protection et de sécurité pouvant déjà être prises en charge au titre du compte de campagne (art. L.52-12 du code électoral)

–  La sécurité des réunions électorales

 Barrières de sécurité et clôtures mobiles (avec pose et dépose) ;

 Agents de sécurité à l’entrée et dans la salle et équipements afférents (exemples : talkie-walkie, badges, oreillettes) ;

 Prestation cynophile ; 

 Sécurité incendie (agent de sécurité incendie, prestation de conseil) ;

•      Assurances

•      Matériel (badges d’identification / d’accréditation, tours de cou pour badges, etc.)

– La sécurité lors des déplacements et déambulations électoraux du candidat

 Les frais de déplacement des agents de sécurité dans la limite des opérations visées ci-dessus ;

– Permanence électorale : caméras de surveillance (à hauteur de la valeur d’utilisation), prestation de contre-mesure (détection et brouillage) ;

– Prestations de sécurité informatique.

Il existe, par ailleurs, un autre dispositif permettant le remboursement des dépenses de la campagne officielle. Ces dépenses sont énumérées à l’article R. 39 du code électoral et correspondent aux frais d’impression des bulletins de vote, des affiches à apposer devant les bureaux de vote, des circulaires (« professions de foi ») et aux frais d’affichage. Un arrêté préfectoral, pris après avis d’une commission départementale, fixe le nombre des imprimés admis à remboursement et les tarifs d’impression et d’affichage.

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat
    1.   La disposition initiale

L’article 10 de la proposition de loi initiale crée un chapitre V ter qui complète le titre Ier du livre Ier du code électoral et comporte trois articles renforçant la protection des candidats à un mandat électif.

  1.   L’extension de la protection fonctionnelle

Le nouvel article L. 52-18-1 étend la protection fonctionnelle des agents publics définie aux articles L. 134-1 à L. 134-12 du code général de la fonction publique aux candidats à une élection. Cette protection est assurée par l’État.

  1.   Un remboursement des dépenses de sécurité des candidats à une élection lorsqu’une menace envers le candidat est avérée

L’article 10 prévoit la prise en charge par l’État des dépenses engagées pour la protection du candidat à une élection lorsqu’elle n’est pas assurée par un service public administratif et qu’une menace contre lui est avérée. Cette prise en charge couvre deux catégories d’activités :

– la fourniture de services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles tenant lieu de permanence électorale ou accueillant des réunions électorales, ainsi que la sécurité d’un candidat se trouvant dans ces immeubles ou dans les véhicules de transport public de personnes ;

– la protection de l’intégrité physique du candidat.

  1.   Les modifications apportées par le Sénat
    1.   Les modifications apportées en commission des lois

La commission des lois, adoptant l’amendement n° COM-15 de sa rapporteure ([69]), a précisé et complété l’article 10.

L’amendement explicite ainsi la notion de « campagne électorale » en proposant une définition identique à celle fixée par l'article L. 52-4 du code électoral qui délimite la période de « financement des campagnes électorales » comme s’étendant sur une période « de six mois précédant le premier jour du mois de l'élection et jusqu'à la date du dépôt du compte de campagne du candidat ».

Il prévoit que la responsabilité de l’instruction des demandes de remboursement incombe à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP).

Enfin, l’amendement n° COM-15 reporte d’un an après la promulgation de la loi l’entrée en vigueur de l’article 10. 

  1.   Les modifications apportées en séance publique

L’article a été adopté sans modification en séance publique.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté quatre amendements de votre rapporteure.

L’amendement CL72 définit la notion de candidat à une élection ([70]) afin de permettre l’application du chapitre V ter du code électoral créé par l’article 10. Plusieurs conditions cumulatives sont ainsi requises :

-         Un premier signe officiel de candidature, qui peut être une déclaration publique ou, à défaut, la désignation d’un mandataire financier. Cette « déclaration officielle de candidature » ne peut survenir plus de six mois avant l’élection ;

-         Un enregistrement officiel de la candidature auprès de la préfecture ;

-         Une participation effective au moins au premier tour de l’élection.

L’amendement CL73 modifie la durée de la période au cours de laquelle les candidats à une élection peuvent bénéficier de la protection fonctionnelle et du remboursement de leurs dépenses de sécurité pour préciser qu’elle s’achève avec la tenue de l’élection et non au moment – plus tardif – de la remise des comptes de campagne ([71]).

L’amendement CL74 permet de sécuriser la doctrine de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) en matière de remboursement des dépenses « habituelles » de sécurité des candidats ne faisant pas l’objet de menace ([72]). Ces dépenses (voir supra dans l’état du droit) doivent pouvoir continuer à être remboursées aux candidats ne faisant pas l’objet de menace.

L’amendement CL105, enfin, encadre le décret en Conseil d’État prévu à l’alinéa 10 pour préciser qu’il définit les critères caractérisant différents niveaux de menace dans le cadre d’un référentiel national auquel se réfère le préfet lorsqu’il doit déterminer le degré de gravité de la menace pesant sur un candidat à une élection. En fonction de cette évaluation, l’amendement prévoit que des plafonds de remboursement différenciés soient appliqués ([73]) .

 

*

*     *

 

Votre rapporteure souscrit pleinement aux objectifs que poursuit l’article 10 dont les dispositions permettent des avancées significatives en matière de protection de l’ensemble des candidats à des mandats électifs. Elle aurait souhaité déposer en commission des amendements étendant le champ des dispositions de l’article 10 aux dépenses de sécurité des proches du candidat et de protection de son domicile personnel. Ces dispositions ne pouvant faire l’objet d’un amendement parlementaire du fait des règles de recevabilité financière fixées à l’article 40 de la Constitution, votre rapporteure appelle le Gouvernement – auquel ces règles ne s’imposent pas – à les porter par voie d’amendement, ce qui permettra de rendre recevable une initiative parlementaire identique ([74]) .

*

*     *

titre iii
renforcer la prise en compte des réalités des mandats électifs locaux par les acteurs judiciaires et étatiques

Article 11
(art. 43 du code de procédure pénale)
Dépaysement des affaires mettant en cause un maire ou un adjoint au maire dans l'exercice de leur mandat

Adopté par la commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 11 encourage le dépaysement, dans la juridiction la plus proche, des affaires dans lesquelles un maire ou un adjoint au maire est mis en cause comme auteur.

       Modifications apportées par le Sénat

Adoptant un amendement n° COM-16 de sa rapporteure ([75]), la commission des lois a prévu la possibilité de dépayser une affaire dans laquelle un élu serait victime – et non seulement dans les cas où il serait auteur.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

  1.   L’état du droit

Les règles générales applicables en matière de dépaysement sont fixées par l'article L. 111-8 du code de l'organisation judiciaire, qui dispose qu’en matière civile, « le renvoi à une autre juridiction de même nature et de même degré peut être ordonné pour cause de suspicion légitime, de sûreté publique ou s'il existe des causes de récusation contre plusieurs juges. En matière pénale, le renvoi d'un tribunal à un autre peut être ordonné conformément aux articles 662 à 667-1 du code de procédure pénale ».

En matière pénale, l’article 43 du code de procédure pénale fixe les critères de compétence territoriale du procureur de la République. Son premier alinéa définit un principe général de compétence « du procureur de la République du lieu de l'infraction, [de] celui de la résidence de l’une des personnes soupçonnées d'avoir participé à l'infraction, [de] celui du lieu d'arrestation d'une de ces personnes, même lorsque cette arrestation a été opérée pour une autre cause, et [de] celui du lieu de détention d'une de ces personnes, même lorsque cette détention est effectuée pour une autre cause ».

Les lois n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité et n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales ont prévu une dérogation à ce principe. Ainsi, une affaire peut être transmise à un autre procureur de la République lorsque les faits mettent en cause « comme auteur ou comme victime, un magistrat, un avocat, un officier public ou ministériel, un militaire de la gendarmerie nationale, un fonctionnaire de la police nationale, des douanes ou de l'administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public qui est habituellement, de par ses fonctions ou sa mission, en relation avec les magistrats ou fonctionnaires de la juridiction ».

Ce dessaisissement de la juridiction constitue une faculté à la main du procureur général qui peut la mettre en œuvre « d'office, sur proposition du procureur de la République et à la demande de l'intéressé ». Il constitue « une mesure d'administration judiciaire qui n'est susceptible d'aucun recours. Elle n'est pas juridictionnelle » ([76]) .

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat
    1.   La disposition initiale

L’article 11, dans sa version initiale, rappelait que le second alinéa de l’article 43 du code de procédure pénale, qui permet de dépaysement dans les cas énoncés ci-dessus, est applicable lorsque le procureur de la République est saisi de faits mettant en cause en tant qu’auteur et dans l’exercice de son mandat un maire ou un adjoint au maire. Il excluait, en revanche, cette possibilité lorsque le maire ou l’adjoint au maire est victime et non auteur de ces faits.

  1.   Les modifications apportées par le Sénat
    1.   Les modifications apportées en commission des lois

Adoptant un amendement COM-16 de sa rapporteure ([77]), la commission des lois a supprimé cette impossibilité de dépayser une affaire dans laquelle un élu serait victime, estimant que cette possibilité devait pouvoir être mise en œuvre si les « circonstances des faits et les éléments de contexte spécifiques à chaque affaire en pareil cas » ([78])  le justifiaient.

  1.   Les modifications apportées en séance publique

L’article a été adopté sans modification en séance publique.

  1.   La position de la commission

La commission a adopté cet article sans modification.

*

*     *

Article 12
(art. L. 132‑3 du code de la sécurité intérieure)
Renforcement de l’information du maire sur les suites judiciaires données aux infractions constatées sur son territoire

Adopté par la commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 12 rend systématique la communication au maire par le procureur de la République des suites judiciaires données aux infractions causant un trouble à l’ordre public sur le territoire de la commune. Il impose également un délai d’une durée d’un mois au procureur de la République pour communiquer les motivations des décisions de classement sans suite pour des affaires résultant d’une plainte ou d’un signalement du maire.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté deux amendements identiques de votre rapporteure et de M. Sébastien Jumel (GDR) encourageant la signature de conventions locales entre associations d’élus locaux, préfet et procureur de la République afin d’améliorer l’information des maires sur le traitement judiciaire des infractions commises à l’encontre des élus ([79]).

       Dernière modification intervenue

L’article 3 de la loi n° 2021-646 du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés a rendu systématique l’information des maires par le procureur de la République des suites judiciaires données à certaines infractions commises sur le territoire de la commune.

  1.   L’état du droit

L’article 1er de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance prévoit plusieurs cas dans lesquels l’information du maire est obligatoire. L’article 59 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique est venu renforcer ces obligations qui font l’objet d’une codification à l’article L. 132-3 du code de la sécurité intérieure. Cet article dispose que :

– le maire est informé sans délai par les services de la police ou de la gendarmerie nationales des infractions causant un trouble à l'ordre public commis sur le territoire de sa commune ;

– le maire est systématiquement informé par le procureur de la République des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites, des poursuites engagées, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés lorsque ces décisions concernent des infractions signalées par lui en application du second alinéa de l'article 40 du même code. Il est ainsi systématiquement informé des poursuites engagées ou des mesures alternatives aux poursuites prononcées, en application de l'article 40-2 du code de procédure pénale et, à sa demande, des jugements définitifs et des appels interjetés, en vertu du même article L. 132-3 du code de la sécurité intérieure ;

– le maire est également systématiquement informé, lorsqu’il en fait la demande, par le procureur de la République

  1.      des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites, des poursuites engagées, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés lorsque ces décisions concernent ces mêmes infractions ;
  2.      des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites, des poursuites engagées, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés lorsque ces décisions concernent des infractions constatées sur le territoire de sa commune par les agents de police municipale en application de l’article 21-2 du code de procédure pénale et par les gardes champêtres en application de l'article 27 du même code.

Plus largement, comme le souligne l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) dans sa contribution écrite transmise à votre rapporteure : « Une circulaire du ministre de la Justice a été publiée le 7 septembre 2020 pour inciter les procureurs à intensifier leurs relations avec les maires. Cette circulaire préconise la désignation d’un magistrat référent pour être l'interlocuteur privilégié des élus du ressort. L’objectif étant qu’il « prenne attache [avec les élus] pour les informer, de façon individualisée et systématique, du suivi précis de ces procédures et des suites judiciaires décidées ». La circulaire encourage également la mise en place de réunions d’échanges avec les élus (intégrant aussi les forces de sécurité intérieure) pour expliquer leur action. Cette circulaire du Garde des Sceaux a impulsé un changement d’attitude de nombreux procureurs qui ont commencé à signer des conventions avec plusieurs associations départementales des maires (Cher, Eure-et-Loir, Haute-Loire, Loir-et-Cher, Rhône, Nord, Ain, Côte d’Or…) afin de renforcer leur communication, leur connaissance mutuelle et l’accompagnement des élus en leur qualité d’officiers de police judiciaire. S’il est indéniable que des avancées se sont concrétisées sur le terrain, elles restent cependant très hétérogènes et le lien maire-Parquet dépend encore trop souvent de la personnalité des procureurs locaux »

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat
    1.   La disposition initiale

L’article 12 prévoit, d’une part, que le maire soit systématiquement – et non plus seulement à sa demande – informé par le procureur de la République des suites judiciaires données aux infractions causant un trouble à l’ordre public commises sur le territoire de sa commune ainsi qu’aux infractions qu’il signale lui-même au parquet.

 L’article 12 instaure, en outre, un délai d’un mois pour la mise en œuvre de l’obligation d’information du maire des suites judiciaires données aux infractions qu’il a lui-même signalées au parquet en application du second alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale.

Cette proposition, ainsi que les dispositions figurant aux articles 13 et 14, sont issues d’un rapport du groupe de travail visant à renforcer les relations entre les magistrats du ministère public et les maires, présidé par le procureur général Hugues Berbain, remis au ministre de la Justice en 2022 et n’ayant pas fait l’objet d’une publication.

  1.   Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté l’article 12 sans modification ni en commission des lois, ni en séance publique.

  1.   Position de la commission

La commission a adopté deux amendements identiques de votre rapporteure et de M. Sébastien Jumel (GDR) qui complètent l’article 12. Ils visent à encourager la signature de conventions entre associations d’élus locaux, préfet et procureur de la République afin d’améliorer l’information des maires sur le traitement judiciaire des infractions commises à l’encontre des élus ([80])

 

*

*     *

Article 13
(art. L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales)
Espace de communication réservé au procureur de la République dans les bulletins municipaux

Rétabli par la commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 13 permet au procureur de la République du ressort de la cour d’appel compétent sur le territoire municipal de disposer dans les bulletins d’information générale des communes de plus de 1 000 habitants d’un espace de communication réservé.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a supprimé cet article en séance publique, à l’initiative de MM. MM. Hussein Bourgi et Éric Kerrouche (groupe Socialiste, Écologiste et Républicain) ([81]). L’amendement de suppression a été adopté contre l’avis de la rapporteure de la commission des lois, le Gouvernement s’en étant remis à la sagesse du Sénat.

       Modifications apportées par la commission

À l’initiative de votre rapporteure ([82]) , la commission a rétabli l’article 13 dans sa version initiale.

  1.   L’état du droit

L’article 9 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a inséré au sein du code général des collectivités territoriales (CGCT) un article L. 2121-27-1 créant une obligation, pour les communes de 3 500 habitants et plus, lorsque la commune diffuse, sous quelque forme que ce soit, un bulletin d’information générale sur les réalisations et la gestion du conseil municipal, d’y réserver un espace à l’expression des conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale. Cet article a été modifié par l’article 83 de la loi n° 2015‑991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, qui a élevé à 1 000 habitants et plus la taille minimale des communes soumises à cette obligation et qui a précisé que cet espace de communication était réservé « à l'expression des conseillers élus sur une liste autre que celle ayant obtenu le plus de voix lors du dernier renouvellement du conseil municipal ou ayant déclaré ne pas appartenir à la majorité municipale ».

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat
    1.   La disposition initiale

L’article 13 complète l’article L. 2121-27-1 du CGCT en y consacrant, également pour les communes de 1000 habitants et plus, la possibilité pour le procureur de la République du ressort de la cour d’appel compétent sur le territoire municipal, dans le respect du secret de l’instruction tel que défini à l’article 11 du code de procédure pénale, de disposer d’un espace réservé pour toute communication en lien avec les affaires de la commune dans ces bulletins communaux.

Le secret de l’instruction défini à l’article 11 du code de procédure pénale

Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l'instruction est secrète.

Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 434-7-2 du code pénal.

Toutefois, afin d'éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public ou lorsque tout autre impératif d’intérêt public le justifie, le procureur de la République peut, d’office et à la demande de la juridiction d'instruction ou des parties, directement ou par l’intermédiaire d’un officier de police judiciaire agissant avec son accord et sous son contrôle, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause.

  1.   Les modifications apportées par le Sénat
    1.   Les modifications apportées en commission des lois

La commission des lois du Sénat a adopté cet article sans modification.

  1.   Les modifications apportées en séance publiques

Le Sénat a supprimé cet article en séance publique, à l’initiative de MM. Hussein Bourgi et Éric Kerrouche (groupe Socialiste, Écologiste et Républicain) ([83]). Leur amendement n° 9 a été adopté avec un avis défavorable de la commission et un avis de sagesse du Gouvernement. Les auteurs de l’amendement ont notamment, dans leur exposé sommaire, justifié cette suppression en arguant du fait que cette disposition ne répondait à « aucune nécessité dans la mesure où les procureurs peuvent déjà s’exprimer librement dans la presse locale » et posait, par ailleurs, « des difficultés, dans la mesure où le maire, qui est directeur de la publication du bulletin et qui porte la responsabilité civile et pénale des contenus publiés, aurait par conséquent un droit de regard sur la communication du Procureur de la République ».

  1.   La position de la commission

À l’initiative de votre rapporteure ([84]) , la commission a rétabli l’article 13 dans sa version initiale.

 

*

*     *

Article 14
L. 1324 et L. 132-5 du code de la sécurité intérieure
Composition des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance et obligation annuelle de présence de certains membres

Adopté par la commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 14 consolide la présence du procureur de la République ou son représentant au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD), dont il consacre dans la loi la composition.

Il permet également, à la demande du maire, du préfet ou de l’autorité judiciaire, la création d’un groupe thématique de travail chargé des violences commises à l’encontre des élus au sein des CLSPD.

       Modifications apportées par le Sénat

La commission des lois a adopté un amendement n° COM-17 de sa rapporteure ([85]) qui élargit sensiblement le champ de l’article 14 en en étendant les dispositions aux conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CISPD). L’amendement précise, par ailleurs, que les membres de droit peuvent se faire représenter et que le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance se réunit au moins une fois par an en présence des membres de droit ou de leurs représentants, spécialement désignés à cet effet.

Un amendement de précision rédactionnelle de la rapporteure a été adopté en séance publique. 

       Modifications apportées par la commission

La commission, avec l’assentiment de votre rapporteure, a adopté quatre amendements de M. Sébastien Jumel (GDR) et un amendement de M. Sébastien Rome (LFI) prévoyant la désignation par le préfet d’un agent coordinateur pour chaque CLSPD  ([86]) et apportant des modifications à la composition des CLSPD et des CISPD ([87]) .

       Dernière modification législative intervenue

La loi n° 2021-646 du 25 mai 2021 dite « Sécurité globale » ([88]) , a étendu l'obligation de créer un CLSPD aux communes de plus de 5 000 habitants et créé une obligation pour les maires de communes de plus de 15 000 habitants de désigner un « coordinateur » au sein du CLSPD, chargé d’assurer l'animation, le suivi et la coordination des travaux du conseil

  1.   L’état du droit

Les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) ont été mis en place en 2002 ([89]). La loi n° 2007-297 ([90])  rend leur création obligatoire dans les communes de plus de 10 000 habitants et dans les communes comprenant un quartier prioritaire de la politique de la ville. Elle prévoit également la possibilité d’installer un tel conseil au niveau intercommunal – ce conseil intercommunal de sécurité de prévention de la délinquance (CISPD) étant, lorsqu’il est créé, présidé par le président de l’intercommunalité ou l’un de ses vice-présidents.

Aux termes de l'article D. 132-7 du code de la sécurité intérieure, qui fixe les missions confiées aux CLSPD, ceux-ci constituent « le cadre de concertation sur les priorités de la lutte contre l’insécurité et de la prévention de la délinquance dans la commune ». Ils offrent un cadre aux échanges d’informations entre les organismes publics et privés concernés et prennent en charge, le cas échéant, l’animation et le suivi du contrat local de sécurité.

Le législateur a renforcé son rôle à plusieurs reprises :

– la loi n° 2014-896 du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales rend possible la constitution, au sein de ces conseils, de groupes de travail thématiques consacrés aux questions relatives à l'exécution des peines et à la prévention de la récidive ;

– la loi n° 2021-646 du 25 mai 2021 dite « Sécurité globale » ([91]) , a étendu l'obligation de créer un CLSPD aux communes de plus de 5 000 habitants et créé une obligation pour les maires de communes de plus de 15 000 habitants de désigner un « coordinateur » au sein du CLSPD, chargé d’assurer l'animation, le suivi et la coordination des travaux du conseil ([92]) .

Dans le cadre d’une mission dite « flash » qui leur avait été confiée par notre commission en 2020, MM. Stéphane Peu et Rémy Rebeyrotte soulignaient que « si l’utilité des conseils de sécurité et de prévention de la délinquance fait aujourd’hui l’objet d’un consensus, ils n’ont pas encore déployé tout leur potentiel » ([93]) .

  1.   La composition des CLSPD est aujourd’hui fixée par voie réglementaire

La composition des CLSPD résulte aujourd'hui des dispositions de l’article D. 132-8 du code de la sécurité intérieure.

La composition des CLSPD telle que fixée par l’article D. 132-8 du code de la sécurité intérieure :

Présidé par le maire ou son représentant, le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance comprend :

1° Le préfet de département et le procureur de la République, ou leurs représentants ;

2° Le président du conseil départemental, ou son représentant ;

3° Des représentants des services de l'État désignés par le préfet de département ;

4° Le cas échéant, le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, compétent en matière de dispositifs locaux de prévention de la délinquance et auquel la commune appartient, ou son représentant ;

5° Des représentants d'associations, établissements ou organismes œuvrant notamment dans les domaines de la prévention, de la sécurité, de l'aide aux victimes, du logement, des transports collectifs, de l'action sociale ou des activités économiques, désignés par le président du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance après accord des responsables des organismes dont ils relèvent.

En tant que de besoin et selon les particularités locales, des maires des communes et des présidents des établissements publics de coopération intercommunale intéressés ainsi que des personnes qualifiées peuvent être associés aux travaux du conseil.

La composition du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance est fixée par arrêté du maire.

  1.   La faculté de créer au sein des CLSDP des groupes de travail et d’échanges d’informations à vocation territoriale ou thématique

La loi permet aux CLSDP de créer en leur sein des groupes de travail et d’échange d’informations à vocation territoriale ou thématique. La loi n° 2014‑896 précitée précise que ces groupes peuvent traiter des questions relatives à l’exécution des peines et à la prévention de la récidive.

  1.   Le dispositif proposé par le Sénat
    1.   La disposition initiale

L’article 14 consacre au niveau législatif – au sein de l’article L. 132-4 du code de la sécurité publique – la composition des CLSPD. Ces dispositions reprennent, pour l’essentiel, la composition actuelle. Une distinction entre les membres de droit ([94]) et les membres facultatifs ([95])  est cependant établie.

Il demeure de la compétence du maire, qui préside le CLSPD, d’en fixer la composition par arrêté. L’article 14 précise que la présence des membres de droit est obligatoire pour permettre la tenue d’une réunion et que le CLSPD doit se réunir au moins une fois par an.

L’article 14, en outre, modifie l’article L. 132-5 pour favoriser la constitution au sein du CLSPD d’un groupe thématique chargé des violences commises à l’encontre des élus. Ce groupe pourrait être créé à la demande du maire, du préfet ou de l’autorité judiciaire et traiter de l’organisation d’une réponse aux violences ainsi que d’une stratégie d’accompagnement des élus qui en sont victimes.

  1.   Les modifications apportées par le Sénat
    1.   Les modifications apportées en commission des lois

La commission des lois a adopté un amendement n° COM-17 de sa rapporteure ([96]) qui élargit sensiblement le champ de l’article 14 en en étendant les dispositions aux conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CISPD). La composition des CISPD est ainsi fixée dans la loi. Les maires des communes membres de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ne constituent cependant pas des membres de droit afin, souligne le rapport sénatorial, « de ne pas entraver la faculté de réunion du conseil » ([97]). Ils pourront néanmoins être désignés membres du conseil par le président de l’EPCI. En outre, la faculté de demander la création d’un groupe de travail chargé des violences commises à l’encontre des élus, leur est ouverte au même titre que le président de l’EPCI, le représentant de l’État dans le département et l’autorité judiciaire.

L’amendement précise, par ailleurs, que les membres de droit peuvent être représentés et que le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance se réunit au moins une fois par an en présence des membres de droit ou de leurs représentants, spécialement désignés à cet effet.

  1.   Les modifications apportées en séance publique

Un amendement de précision rédactionnelle de la rapporteure ([98]) a été adopté en séance publique.

  1.   La position de la commission

La commission, avec l’assentiment de votre rapporteure, a adopté quatre amendements de M. Sébastien Jumel (GDR) et un amendement de M. Sébastien Rome (LFI). 

Quatre amendements de M. Sébastien Jumel ont ainsi été adoptés :

       L’amendement CL57 instaure une obligation pour le préfet de désigner un agent coordinateur pour chaque CLSPD, si le maire n’a pas procédé à cette désignation ([99]) ;

       L’amendement CL55 ([100]) prévoit, le cas échéant, la présence de droit d'un représentant du groupe local de traitement de la délinquance (GLTD) au sein des CLSPD et CISPD ;

       L’amendement CL58 ([101]) précise que les maires des communes de moins de 5000 habitants limitrophes d’une commune qui dispose d’un CSPD, puissent être associés aux réunions dudit conseil ;

       L’amendement CL56 ([102]) fait des maires des communes de l’EPCI des membres de droit du CISPD. 

Enfin, un amendement CL27 ([103]) de M. Sébastien Rome complète la liste des membres de droit des CLSPD et CISPD par des citoyens tirés au sort. 

 

*

*     *

Article 15 (nouveau)
Application de la loi dans les territoires ultramarins

Introduit par la commission

 

     Résumé du dispositif et effets principaux

Adopté à l’initiative de votre rapporteure ([104]) et inspiré par un amendement de M. Philippe Dunoyer ([105]) qui n’a pu être soutenu, l’article 15 permet l’application des dispositions votées dans le cadre de la proposition de loi aux territoires ultramarins de Nouvelle Calédonie, Polynésie française et Wallis et Futuna qui sont soumis au principe de « spécialité législative », selon lequel une disposition législative ne s’applique localement que si la loi le prévoit expressément, ainsi qu’aux terres australes et antarctiques françaises soumises au même principe.

 

*

*     *

 

Article 16 (nouveau)
Rapport sur l’opportunité d’élargir la protection fonctionnelle à tous les élus locaux et à leurs familles

Introduit par la commission

 

     Résumé du dispositif et effets principaux

Introduit à l’initiative de votre rapporteure ([106]), l’article 16 prévoit la remise, par le Gouvernement, d’un rapport au Parlement, avant le 1er septembre 2024, sur l’opportunité d’élargir la protection fonctionnelle en cas de violences, de menaces ou d’outrages, d’une part, à tous les élus locaux y compris ceux qui n’exercent pas de fonctions exécutives et, d’autre part, aux conjoints, aux enfants et aux ascendants directs des conseillers départementaux et régionaux.

Contrainte par les règles de l’article 40 de la Constitution, votre rapporteure n’a pas pu porter ces propositions directement par amendement. Elle proposera la suppression de cet article si le Gouvernement dépose en séance des amendements élargissant la protection fonctionnelle aux publics susmentionnés.

 

*

*     *

Article 17 (nouveau)
Rapport sur l’opportunité d’élargir la protection fonctionnelle aux élus locaux ayant cessé leurs fonctions depuis moins de six ans

Introduit par la commission

 

     Résumé du dispositif et effets principaux

Introduit par un amendement de M. François Cormier-Bouligeon ([107]), cet article prévoit la remise, par le Gouvernement, d’un rapport au Parlement, avant le 31 décembre 2024, sur l’opportunité d’élargir la protection fonctionnelle aux élus ayant cessé leurs fonctions depuis moins de six ans lorsque ceux-ci sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages.

*

*     *

Article 18 (nouveau)
Rapport sur les actions menées pour lutter contre les violences faites aux élus et leurs conséquences

Introduit par la commission

 

     Résumé du dispositif et effets principaux

Introduit par un amendement de M. Thomas Rudigoz ([108]), cet article prévoit la remise au Parlement, par le Gouvernement et dans le délai d’un an après la promulgation de la présente loi, d’un rapport recensant l’ensemble des actions menées pour lutter contre les violences faites aux élus et leurs conséquences. Ce rapport dresse également le bilan des suites données aux plaintes déposées par les élus auprès des services de police ou de gendarmerie pour des faits de violences dont ils sont victimes.

*

*     *

 

Article 19 (nouveau)
Rapport sur le coût pour les communes de l’obligation de souscrire un contrat d’assurance pour couvrir les frais liés à la protection fonctionnelle

Introduit par la commission

 

     Résumé du dispositif et effets principaux

Introduit par un amendement de M. Sébastien Rome ([109]), cet article prévoit que le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le coût pour les communes de l’obligation de souscrire un contrat d’assurance pour couvrir les frais liés à la protection fonctionnelle des élus. Ce rapport propose une réévaluation du montant des compensations de l’État.

 


—  1  —

 

   Examen en commission

Lors de la réunion du mercredi 31 janvier 2024, la Commission examine la proposition de loi, adoptée par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires (n° 1713) (Mme Violette Spillebout, rapporteure).

Lien vidéo : https://assnat.fr/NdlShz

M. le président Sacha Houlié. Nous examinons ce matin la proposition de loi, adoptée par le Sénat, renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires, dont Mme Violette Spillebout est la rapporteure.

Cette proposition a été déposée le 26 mai 2023 au Sénat par le président François-Noël Buffet, Mme Françoise Gatel et plusieurs de leurs collègues. Elle a ensuite été adoptée par le Sénat le 10 octobre 2023. Nous examinerons ce texte en séance la semaine prochaine, puisque le Gouvernement l’a inscrit à l’ordre du jour.

Cette initiative sénatoriale s’inscrit dans le cadre d’une réflexion plus large sur le nécessaire renforcement de la protection des élus locaux. Cette réflexion a également été menée par notre assemblée dans le cadre de la mission d’information sur le statut de l’élu local, réalisée au sein de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation et dont les rapporteurs étaient Violette Spillebout et Sébastien Jumel.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Compte tenu de mon engagement de long terme auprès des élus locaux pour faire en sorte que leur sécurité soit mieux assurée, je suis honorée d’assurer la fonction de rapporteure de cette proposition. Ayant moi-même été victime de violences, je mesure d’autant mieux les répercussions que de tels faits peuvent avoir sur la vie des élus et sur leur famille.

L’année 2024 doit être celle des élus locaux. Garantir les conditions de leur sécurité et de l’exercice serein de leur mandat revient à protéger l’engagement politique, c’est-à-dire le bon fonctionnement de notre démocratie. Le présent texte, transmis par le Sénat, constitue le volet « sécurité » d’un ensemble plus large de mesures – législatives ou réglementaires – qui doivent permettre une rénovation profonde du statut des élus. Sébastien Jumel et moi-même déposerons bientôt une proposition de loi sur le statut de l’élu, issue des travaux que nous avons menés dans le cadre de la mission d’information que le président a mentionnée.

L’augmentation très nette du nombre d’agressions d’élus, mais aussi la banalisation des injures publiques, des outrages et des phénomènes de harcèlement – notamment en ligne – appellent une réaction forte des pouvoirs publics.

Je souhaite rappeler l’ampleur de ces violences, dont il faut cependant déplorer encore l’insuffisante précision statistique. En 2022, 2 265 faits d’atteintes aux élus ont été recensés sur le territoire national, soit une augmentation de 32 % par rapport à l’année précédente. Les données incomplètes de l’année 2023 font état d’une augmentation significative des violences envers les élus, puisque sur les neuf premiers mois de 2023, 2 387 faits avaient été recensés – ce qui conduit à anticiper une hausse de 15 % par rapport à 2022. Je pense évidemment surtout aux élus victimes d’agressions particulièrement choquantes, parfois à leur domicile et mettant en danger leur famille, comme celle subie par Vincent Jeanbrun, maire de l’Haÿ-les-Roses.

Nous ne devons pas et nous ne pouvons pas laisser perdurer de telles violences. Il en va de l’essence même de notre démocratie. Dans six cas sur dix, les élus concernés par ces agressions sont des maires – élus les plus proches de nos concitoyens, mais aussi les plus vulnérables. Ce sont eux que nous devons protéger en priorité.

Dans ce contexte, le Gouvernement a mis en place, le 17 mai 2023, un centre d’analyse et d’action contre les atteintes aux élus (Calae), chargé d’une double mission de collecte de données, pour mieux comprendre et analyser cette montée des violences, et de renforcement de la protection des élus locaux. Ce centre est chargé de piloter le « pack sécurité », qui comprend la création dans les services de gendarmerie et de police d’un réseau de plus de 3 400 référents chargés des atteintes aux élus, le renforcement du dispositif « Alarme élu » – pour traiter rapidement les appels de ceux qui se sentent menacés –, la facilitation des dépôts de plaintes, le développement de formations et d’actions de sensibilisation à la gestion des incivilités et, enfin, la mobilisation de la plateforme Pharos pour mieux détecter et judiciariser les violences en ligne.

En complément, le 7 juillet 2023 le Gouvernement a présenté un plan national contre les violences, qui doit permettre de renforcer la protection juridique, psychologique et physique des élus. Il prévoit aussi d’augmenter les sanctions pour les auteurs d’infractions commises contre les élus et d’améliorer les relations entre les maires et les parquets.

La présente proposition de loi, déposée au Sénat le 23 mai dernier par François-Noël Buffet, regroupe les dispositions législatives nécessaires à la mise en œuvre de certaines mesures annoncées dans ce plan. Elle prévoit trois volets de mesures.

Le titre Ier renforce les sanctions encourues par les auteurs de violences commises à l’encontre de titulaires de mandats électifs. L’article 1er prévoit d’aggraver les peines encourues. L’article 2 crée une peine de travail d’intérêt général (TIG) en cas d’injure publique à l’encontre de personnes dépositaires de l’autorité publique ou de certains élus. Il prévoit aussi une circonstance aggravante lorsque la victime de harcèlement est titulaire d’un mandat électif.

Le titre II améliore la prise en charge des élus locaux victimes de violences. Outre des coordinations ou clarifications du droit actuel, il prévoit plusieurs mesures importantes. L’article 3 prévoit l’octroi automatique de la protection fonctionnelle par la collectivité territoriale aux élus locaux exerçant des fonctions exécutives. L’article 8 propose que les communes financent les restes à charge ou les dépassements d’honoraire pour les élus victimes de violences et qui font l’objet d’une mesure de protection fonctionnelle. L’article 9 permet aux élus de saisir le bureau central de tarification lorsqu’ils n’ont pas pu souscrire une assurance pour leur permanence électorale. Quant à l’article 10, il étend le bénéfice de la protection fonctionnelle aux candidats à un mandat électif public et ouvre droit à une prise en charge par l’État des dépenses engagées pour leur sécurité pendant la durée de la période électorale.

Enfin, le titre III a pour objectif de renforcer la prise en compte des réalités des mandats électifs locaux par les acteurs judiciaires et étatiques. L’article 11 encourage le dépaysement dans la juridiction la plus proche des affaires dans lesquelles un maire ou un adjoint est mis en cause comme auteur. L’article 12 améliore l’information des maires, notamment par les procureurs sur le suivi des plaintes concernant la commune. L’article 14 renforce les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance.

Le Sénat a adopté deux articles additionnels.

L’article 2 bis allonge les délais de prescription des délits d’injure et de diffamation publiques commis notamment à l’encontre des parlementaires et des élus des exécutifs locaux, en les portant à un an – contre trois mois en l’état actuel du droit.

L’article 2 ter crée une circonstance aggravante en cas d’atteinte à la vie privée et familiale d’un candidat à un mandat électif public pendant la durée de la campagne.

Le Sénat a également supprimé l’article 13, qui prévoyait un espace de communication réservé au procureur de la République dans les bulletins municipaux des communes de plus de 1 000 habitants.

De mon côté, je souhaite élargir le dispositif de protection fonctionnelle à l’ensemble des élus locaux et pas seulement à ceux qui ont des fonctions exécutives. Je propose aussi d’étendre cette protection à la famille de ces élus et candidats, ce qui constitue une condition sine qua non de l’exercice serein d’un mandat. Je suis cependant contrainte par les règles de recevabilité financière de l’article 40 de la Constitution, comme tout parlementaire. J’espère donc que le Gouvernement reprendra ces propositions par amendements lors de l’examen du texte en séance publique.

Nombre de mes propositions sont issues du travail mené avec Sébastien Jumel et d’autres collègues dans le cadre de la mission d’information sur le statut de l’élu local. Nous serons donc nombreux à défendre notre point de vue.

La protection des élus est une priorité politique. Un pays dans lequel on craint de s’engager parce qu’on se sait exposé à des pressions ou des violences est un pays dans lequel la démocratie s’essouffle. C’est donc notre combat à toutes et tous.

M. le président Sacha Houlié. Nous passons aux interventions des orateurs de groupe.

M. Thomas Rudigoz (RE). Je commencerai mon intervention en apportant mon témoignage d’élu local. Comme la rapporteure, nous sommes nombreux à avoir été témoins ou victimes de l’augmentation du climat de violence à l’égard des élus, et particulièrement des élus locaux.

Ainsi, en plein confinement en mai 2020, ma permanence de campagne pour les élections à la métropole de Lyon a été détériorée. Un groupe d’identitaires d’ultradroite qui voulaient porter atteinte à ma réputation y avait apposé des affiches diffamantes, car je menais une action déterminée pour mettre fin à leurs agissements violents – ce que nous avons obtenu quelque temps après avec la dissolution du néfaste mouvement Génération identitaire. Quelques mois plus tard, en plein débat sur le « pass vaccinal », un certain nombre de députés ont reçu des courriels de menaces de mort particulièrement violents, qui émanaient d’un individu opposé à ce dispositif.

Cette libération incontrôlée de la parole haineuse et des actes violents prend parfois des tournures bien plus dramatiques. Ainsi, nous avons tous en mémoire les faits terribles qui ont eu lieu à Saint-Brévin-les-Pins ou à l’Haÿ-les-Roses. J’ai ici une pensée particulière pour tous les élus locaux, tous les maires qui sont en première ligne face à de telles attaques.

Ces actes ne sont pas simplement le fait de personnes sans discernement. Ces dernières savent ce qu’elles recherchent : contraindre la parole et l’action des représentants démocratiquement élus. En tant qu’élu local, je suis très attaché à ce que les édiles puissent exercer leur mission sereinement.

Il est donc de notre responsabilité de législateur d’être particulièrement vigilants, afin que tous les moyens soient mis en œuvre pour éviter les situations dramatiques que nous avons rencontrées ces derniers mois. Que cela soit bien clair : nous ne parlons pas ici d’une discussion un peu animée sur un marché ou d’une remontrance vive d’un administré, mais de personnes qui utilisent intentionnellement la violence verbale ou physique vis-à-vis des élus. L’État doit donc être fort et se tenir à côté de ces hussards de la démocratie. Cette proposition de loi apporte une partie de la réponse en renforçant la protection fonctionnelle et l’arsenal répressif contre les actes violents à l’égard des élus locaux.

Le groupe Renaissance présentera deux amendements. Le premier prévoit la remise d’un rapport qui récapitule l’ensemble des actions menées pour lutter contre les violences à l’égard des élus. Le second ouvre la possibilité de prononcer une peine de TIG en cas d’outrage.

Nous souhaitons que d’autres mesures soient adoptées dans les mois qui viennent, après le travail déjà réalisé au cours des derniers mois par Gérald Darmanin et Dominique Faure – ainsi que celui mené par la rapporteure avec Sébastien Jumel. Nous soutiendrons donc très largement ce texte.

Si nous voulons continuer à créer des vocations et renforcer l’engagement local, qui s’étiole au fil des années, notre responsabilité est immense.

Mme Edwige Diaz (RN). Ces dernières semaines, une nouvelle étape a été franchie dans la violence à l’égard des élus locaux. Ce qui constituait l’innommable hier est aujourd’hui quotidien – de la même manière que les faits divers ne font plus la une des journaux en raison de la banalisation de l’ultraviolence. Nous nous habituons jour après jour aux agressions contre ceux qui constituent les fondements de notre République.

Les atteintes verbales ou physiques à l’encontre des élus locaux ont ainsi augmenté de 32 % entre 2021 et 2022. Les agressions d’élus commises à l’Haÿ-les-Roses, Saint-Brévin‑les-Pins et Saint-Pierre-des-Corps sont seulement un échantillon de toutes celles qui ont rythmé l’actualité durant l’été 2023. Dans mon département, en Gironde, de nombreux élus ont également subi agressions, harcèlements et menaces. J’ai une pensée pour Mme le maire d’Yvrac et pour le conseiller municipal de Rions, dont l’agression a plongé cette petite commune dans l’incompréhension la plus totale.

Les conséquences de ce phénomène sont terribles. De plus en plus d’édiles ont le sentiment de ne plus être compris et d’être abandonnés par l’État. Ce sentiment est partagé par 64 % de nos concitoyens, qui estiment que la sécurité des élus locaux n’est pas assurée. Le trésorier de l’Association des maires de Gironde a précisé il y a quelques mois que plus d’une vingtaine d’élections municipales partielles avaient déjà eu lieu depuis les élections de 2019 en raison de multiples démissions.

Dans ce contexte, cette proposition va dans le bon sens. Augmenter les peines en faisant bénéficier les personnes titulaires d’un mandat électif de la protection offerte par une infraction destinée initialement à punir les agressions contre les pompiers, les policiers et les gendarmes relève de l’évidence. Les Français sont ainsi à 81 % favorables au renforcement des sanctions pénales pour les auteurs de violences faites aux élus. Dans la conception traditionnelle du droit pénal, la sévérité de la peine est le reflet de la gravité de l’infraction – et donc du tort causé à la société. C’est également le seul moyen d’assurer une véritable dissuasion.

Or notre République vit grâce à l’engagement des citoyens qui se présentent aux élections et qui incarnent la vie des collectivités locales. Porter atteinte à un élu, c’est porter atteinte à la République tout entière.

Cette proposition de loi est certes la bienvenue, mais notre groupe sera tout de même attaché à proposer diverses pistes d’amélioration. Les amendements des députés du RN iront par exemple dans le sens d’une extension de la protection des élus, notamment pendant les campagnes électorales. Nous proposerons également de porter à un an le délai de prescription pour les délits d’injure et de diffamation commis à l’encontre des élus, contre trois mois actuellement. Enfin, nous proposerons que cette loi prenne effet immédiatement, afin que ne s’écoule pas encore une année durant laquelle nos élus locaux continueraient à demeurer sans protection renforcée.

L’opportunité de ce texte n’est cependant pas aussi bien perçue par la partie la plus à gauche de notre commission. L’exposé sommaire d’un des amendements déposés par les députés de La France insoumise indique ainsi que « Cette escalade de l’échelle des peines est inacceptable, purement répressive et inutile. » et que « Renforcer les sanctions pénales ne résoudra en rien la crise démocratique. »

Au Rassemblement national, nous avons l’audace de penser que les élus sont des piliers de la démocratie et que la nation doit les protéger.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Allons-nous renforcer la sécurité des élus locaux et la protection des maires avec ce texte ? Notre groupe et l’élu local que je fus ne le croient pas.

Il nous faudra encore revenir sur ce sujet, comme je l’avais d’ailleurs prédit dans cette même salle il y a déjà un an lorsque nous avions examiné la proposition de loi visant à permettre aux assemblées d’élus et aux différentes associations d’élus de se constituer partie civile pour soutenir pleinement, au pénal, une personne investie d’un mandat électif public victime d’agression.

Je le dis aux élus et aux maires qui nous écoutent : le texte que nous examinons offrira certes certaines avancées techniques – sur la protection fonctionnelle – et d’autres intéressantes – sur la prise en charge des soins psychologiques –, mais rien pour vous protéger.

Les agressions contre les élus ont augmenté. Sept maires sur dix déclarent avoir été victimes d’incivilités. Les réseaux sociaux sont aussi de plus en plus source d’attaques contre les élus locaux. Je pense au cas de mon ami Robert Siegel, maire de Saint-Guilhem-le-Désert, qui a fait condamner la personne qui le harcelait – preuve que les outils juridiques existent déjà. Mais il n’y a rien dans ce texte pour accélérer les procédures, alors qu’il s’agissait de la première demande des élus car une décision de justice rapide permet d’éviter la répétition.

Qu’y a-t-il de concret dans ce texte pour suspendre rapidement les insultes sur les réseaux sociaux, tout en garantissant la liberté d’expression ? Rien.

Quels sont les moyens mis en œuvre pour éviter d’arriver à un acte délictuel sur un élu local ? Aucun – à part un article sur les candidats à une élection, qui constitue selon moi un cavalier.

Cette proposition de loi est donc défensive et ne cherche pas à reconstruire le lien entre nos concitoyens et la République, comme nous avons su reconstruire en peu de temps la cathédrale Notre-Dame. Dans ce texte, les élus sont considérés comme des êtres à part, capables en pleine crise d’appauvrissement d’augmenter leurs frais de mandat de 305 euros, alors que la Macronie avait commencé son œuvre en baissant l’aide personnalisée au logement (APL) de 5 euros.

Comme le dit notre collègue Sébastien Jumel dans le rapport qu’il a cosigné avec la rapporteure, « […] lorsque l’État reflue, recule, que les services publics deviennent des numéros verts, que les crises sont sans réponses, il ne reste que la commune et le maire […] » comme derniers recours. Ce qui expose les maires aux conflits ainsi qu’aux agressions qui se nourrissent de la désespérance sociale. La violence envers les élus, le repli sur soi ou l’abstention sont la conséquence de choix politiques qui ont abandonné nos institutions. Celles-ci ne sont pas un coût. Elles produisent du lien social – car seuls des humains humanisent d’autres humains. Baisser les moyens des collectivités et la qualité des services publics, c’est abaisser nos liens sociaux.

Lundi, nous avons adopté en séance une proposition visant à reconnaître les métiers de la médiation sociale, qui vise à prévenir ou à régler un conflit entre des personnes physiques ou entre des personnes physiques et des personnes morales grâce à l’intervention d’un tiers impartial et indépendant. Or il n’y a rien sur la médiation dans le présent texte qui se concentre sur la sanction. Quelle ironie !

On n’y trouve rien non plus en faveur d’une plus grande ouverture de la démocratie locale aux citoyens. Comment croire que le dialogue va être renoué en brandissant la menace de la sanction. Voulons-nous discipliner les citoyens ou les impliquer ?

Madame la rapporteure, votre texte, qui ne prévoit ni moyens humains ni politiques publiques – et ce n’est pas le discours de politique générale prononcé hier qui va nous rassurer – et qui ne donne pas aux élus un véritable pouvoir d’agir, est plutôt bancal. En conséquence, si nous voterons pour plusieurs articles, faute d’évolutions majeures de la rédaction du texte pour prévenir les agressions et protéger réellement les élus de la violence dans la société, nous ne serons pas favorables à son adoption.

M. Philippe Gosselin (LR). La croissance de la violence à l’encontre des élus locaux a été quasi exponentielle ces dernières années. C’est très grave. Ce phénomène s’est accru pendant la période du Covid. On dit que les maires, et de manière générale les élus locaux, sont à portée d’engueulade. Cette proximité est sans doute bénéfique, mais ils sont de plus en plus à portée d’insultes et parfois de menaces. Or cela n’est pas acceptable.

En 2021, Naïma Moutchou et moi-même avions constaté l’augmentation de ces faits dans le rapport de la mission flash sur les entraves opposées à l’exercice des pouvoirs de police des élus municipaux. Le Sénat avait dressé le même tableau, de même que la rapporteure et notre collègue Sébastien Jumel. Bref, ces menaces sont récurrentes depuis plusieurs années. Il y a parfois une forme de désinhibition de certains de nos concitoyens qui n’est pas acceptable.

Il faut le répéter, s’en prendre à un élu de la République, c’est s’en prendre à la République elle-même. Ces communes, ces villes et ces villages sont des petites républiques qui fondent la grande et leurs élus doivent être particulièrement protégés.

Ce texte repose sur une approche intéressante. Sera-t-il suffisant ? C’est une autre question. Je crois en effet que nous pourrions aller plus loin. Je me réjouis en tout cas du renforcement des sanctions lorsqu’il y a des violences. Il faut rappeler que si les élus ne sont pas au-dessus des lois et sont des citoyens comme les autres, ce sont tout de même des citoyens engagés. C’est en raison de leurs fonctions que ces hommes et ces femmes doivent être protégés par la République, et donc par la justice.

Il est également important d’améliorer la protection fonctionnelle des élus locaux, et tel est l’objet du titre II. Certes, des améliorations sont intervenues ces dernières années, mais certains élus locaux sont encore parfois très démunis. En outre, les élus de petites communes n’osent pas toujours demander à bénéficier de la protection fonctionnelle. Faire prendre en charge les frais d’avocat par la commune reste délicat.

Le dispositif proposé par le texte sur ce point est intéressant, et j’y souscris, mais il faudra aussi s’assurer du caractère effectif de cette prise en charge et de la protection fonctionnelle. Des freins existent. Un certain nombre de maires taisent les menaces dont ils ont été victimes et ne déposent pas plainte. Malgré l’augmentation quasi exponentielle des chiffres ces dernières années, je ne suis pas sûr que tous les faits soient réellement connus.

Enfin, il faut renforcer la prise en compte des réalités des mandats électifs par les juridictions. Il faut davantage de fluidité dans les échanges entre les procureurs et les élus locaux, mais aussi plus généralement avec les forces de l’ordre. Ces dernières peuvent avoir à mener des missions de police administrative ou judiciaire.

Cette proposition est sans doute insuffisante, mais elle va dans le bon sens. C’est une première pierre bienvenue, en attendant d’aller plus loin et de définir un statut de l’élu que nous sommes nombreux à appeler de nos vœux – non pour faire des élus locaux des citoyens à part, mais pour valoriser un engagement citoyen qui a parfois tendance à s’étioler, notamment à cause des menaces.

Mme Élodie Jacquier-Laforge (Dem). Nous sommes tous présents ici parce que nous avons été élus pour être les porte-voix de nos concitoyens, servir de courroie de transmission et parler de notre territoire. Nous avons la vocation républicaine et nous avons choisi d’être les représentants du peuple.

Malheureusement, nous avons tous été confrontés à des attaques virulentes, sur les réseaux sociaux mais aussi physiquement. Nous avons été victimes de menaces et de dégradations, comme l’a rappelé Thomas Rudigoz. Il en va de même pour les élus locaux. Bien que le maire soit l’élu le plus apprécié, c’est aussi celui qui est le plus proche de la colère et de la violence de nos concitoyens.

Le Gouvernement s’est saisi de ce sujet dès 2017 et des mesures ont été adoptées dans le cadre de la loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique ainsi que de celle votée il y a un an qui permet aux assemblées d’élus et aux différentes associations d’élus de se constituer partie civile.

Comme vous, j’ai entendu beaucoup de témoignages d’élus sur mon territoire, notamment à l’occasion d’une réunion à laquelle j’ai participé à Saint-Marcellin, en présence de Dominique Faure, alors ministre déléguée chargée des collectivités territoriales. Les gendarmes y ont présenté les formations qui peuvent être dispensées dans le cadre du plan national de prévention et de lutte contre les violences aux élus. J’ai moi-même été surprise de constater que beaucoup d’élus taisent les menaces dont ils ont fait l’objet. Leurs récits sont vraiment difficiles, notamment lorsque des maires racontent qu’elles trouvent du papier toilette souillé dans leur boîte à lettres personnelle ou qu’une autre décrit comment elle a été agressée en sortant du conseil municipal de sa commune de 200 habitants.

Alors que 3 000 plaintes et signalements ont été recensés, nous devons tous avoirs conscience de la gravité de ces violences et notre réponse doit être très ferme. Ce texte vise précisément à mieux protéger les élus locaux dans l’exercice de leur mandat et à améliorer l’accompagnement des acteurs judiciaires et étatiques. Il faudra aller plus loin. Cela passera par l’évolution de l’arsenal législatif, mais aussi par le nécessaire changement culturel des acteurs judiciaires et étatiques. À cet égard, le procureur a un rôle extrêmement important à jouer.

Ce texte renforce les peines encourues en cas de violences commises contre les élus et améliore la protection fonctionnelle ainsi que l’accès aux assurances pour les locaux des permanences électorales – notre groupe proposera un amendement sur ce dernier point.

Notre devoir commun est de défendre les élus locaux, mais aussi les candidats qui souhaiteraient s’engager. Le nombre de maires qui démissionnent est important. Pour préserver l’engagement, il faut mieux protéger les élus.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Depuis la déception de la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (loi « 3DS »), nous avons collectivement, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, relancé les réflexions sur le rôle et le statut des élus locaux. La crise des vocations observée en 2020 dans un nombre croissant de communes et les nombreuses démissions qui sont intervenues depuis lors – parfois à la suite de faits de violence – nous amènent à nous interroger sur les conditions d’exercice des mandats locaux.

Mme la rapporteure et Sébastien Jumel ont mené un travail sur ces questions au sein de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Je tiens à saluer la qualité du rapport et des propositions qui en découlent. Mon groupe a également déposé en novembre 2023 une proposition de loi globale visant à améliorer l’attractivité des mandats locaux. Je regrette que les sénateurs aient choisi un texte qui se limite à la seule dimension sécuritaire du sujet, sans se préoccuper des questions relatives à l’indemnisation des élus, aux conditions d’exercice, à la responsabilité juridique, à la formation ou à l’accompagnement de fin de mandat. Les règles de l’article 45 ne nous permettront malheureusement pas d’en débattre, et c’est dommage.

Pour autant, vous avez fait état, madame la rapporteure, de votre travail en cours sur une proposition de loi transpartisane sur ces sujets et je tiens à vous rappeler que mon groupe est disponible pour avancer dans le cadre de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Nos propositions sont connues.

Plusieurs mesures de ce texte rejoignent certaines d’entre elles, notamment en ce qui concerne les sanctions, les délais de prescription ou encore la protection fonctionnelle. Nous saluons la présence de mesures destinées à améliorer l’information des élus sur le suivi des procédures et formulerons nous-mêmes quelques propositions à la matière.

Nous voterons donc pour ce texte nécessaire et utile.

Nous regrettons cependant que le Sénat ait trop souvent distingué les conseillers sans délégation de ceux qui font partie de l’exécutif. Quand les tensions sont élevées du fait d’un projet local ou de la situation nationale, les agresseurs ne distinguent pas les élus selon l’ordre du tableau. Tous doivent pouvoir bénéficier des mêmes protections. Malheureusement, comme l’a rappelé la rapporteure, l’article 40 ne nous permet pas de le proposer. C’est un point sur lequel le Gouvernement devra intervenir et nous serons à vos côtés pour défendre cette position.

Nous proposons plusieurs mesures afin de se pencher de nouveau sur la question de la responsabilité pénale des élus locaux, à la suite des travaux menés par les associations d’élus et à l’aune d’une jurisprudence parfois absurde.

Les élus doivent rendre des comptes devant les électeurs et devant la justice lorsqu’ils commettent des délits ou des crimes, sans traitement de faveur. Mais leur responsabilité pénale personnelle ne doit pas être engagée lorsqu’ils n’ont pas enfreint manifestement et volontairement une obligation de sécurité. C’est alors la responsabilité de la commune en tant que personne morale qui doit être engagée, pour préserver les intérêts des tiers et, potentiellement, des victimes.

De même un élu qui représenterait sa commune au conseil d’administration d’une association ne saurait se voir suspecté de conflit d’intérêts lorsqu’il participe aux délibérations concernant cette association, dès lors qu’il y défend l’intérêt de la collectivité et non un intérêt privé. Nous regrettons que notre amendement en ce sens ait été déclaré irrecevable.

Nous pouvons réaliser des avancées importantes en la matière, afin de redonner un peu de quiétude aux élus locaux sans pour autant remettre en cause l’équilibre entre leur responsabilité et la préservation des intérêts des tiers.

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback (HOR). On ne va pas se mentir : il est très rare de ne pas avoir été victime d’agression lorsqu’on a exercé des responsabilités locales ou nationales. Que cela arrive dans le cadre du travail, c’est-à-dire dans nos permanences, est déjà quelque chose d’inqualifiable. Mais cela l’est encore davantage si cela intervient dans le cadre de la vie privée.

En préparant mon intervention hier soir, je me disais qu’on allait encore dire que nous étions en train de nous auto-protéger. Mais comment est-il possible que certains en arrivent à penser cela ? Pourquoi serions-nous moins bien traités que les autres ? Pourtant, nous sommes amenés à nous demander comment cette proposition de loi sera perçue…

Bref, merci de nous présenter ce texte, même s’il s’agit d’un petit texte. Nous attendons un véritable statut de l’élu – pas pour protéger les élus, mais pour protéger notre démocratie.

Que nous disent les maires, et notamment les maires ruraux – vous savez à quel point je suis attachée à la commune, quelle que soit sa dimension ? Qu’il n’y aura personne après eux, parce qu’il devient impossible de convaincre des candidats de prendre le relais en raison des responsabilités et des dangers que cela représente.

La pression est donc forte pour que nous améliorions la situation et puissions remplir cet engagement avec enthousiasme, détermination et envie – en un mot, que nous retrouvions l’envie de nous engager, sans être terrorisés.

Sanctionner les violences commises envers les élus comme nous l’avons fait pour celles qui visent les policiers, les gendarmes et les militaires, symboles mêmes de la République, nous semble être une bonne idée. C’est également le cas de la prise en compte des violences non seulement physiques, mais aussi psychologiques. Il est bon aussi que les acteurs du système judiciaire tiennent compte de la réalité des mandats électifs et, comme le propose Mme Naïma Moutchou, que les élus soient tenus informés des procédures engagées.

Néanmoins, je crains toujours, lorsque nous prévoyons des dispositions de cette nature, qu’elles se révèlent décevantes, et il conviendra donc que nous fassions savoir que nous travaillons à un texte beaucoup plus large, qui devrait permettre à tous ceux de nos concitoyens qui aiment la chose publique et sont convaincus qu’elle est nécessaire à notre démocratie de s’y engager.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Avec 32 % de hausse en 2022 et 15 % de hausse estimée pour 2023, les violences contre les élus augmentent. Les démissions aussi. Dans mon département, entre l’incendie volontaire du domicile de l’ancien maire de Saint-Brevin-les-Pins en mars 2023 et les menaces de mort reçues par la maire de ma commune le mois dernier, il se passe peu de semaines sans qu’un élu soit agressé, d’une façon ou d’une autre. C’est chaque fois un choc et, chaque fois, il y a une prochaine fois.

Ces agressions contre les élus ont appelé une réponse de l’État, qu’il conviendra d’évaluer ; elles reçoivent aujourd’hui, une réponse de notre assemblée et demain, je l’espère, de notre société. En effet, ces violences ne doivent pas toucher seulement les premiers concernés, mais elles doivent susciter une mobilisation collective quant au rapport des citoyens avec leurs représentants et aux raisons de la colère et des violences.

Le groupe Écologiste-NUPES votera favorablement ce texte, sous réserve des amendements qui seront adoptés. J’en présenterai, pour ma part, plusieurs, mais je tiens à évoquer plus spécifiquement ici une proposition qui n’a pas été jugée recevable, visant à élargir le champ de l’automaticité de la protection fonctionnelle dont bénéficient les maires et les exécutifs pour appliquer cette protection à l’ensemble des élus locaux. En effet, si les violences contre les élus s’expriment en premier lieu contre les maires, les autres élus locaux n’en sont pas exempts. De fait, certaines des atteintes perpétrées ne visent pas tant la fonction exécutive qu’un élu identifié comme responsable, dans un contexte de défiance croissante envers les institutions politiques, pour la simple raison que cet élu croise le chemin d’un administré mécontent ou qu’il est chargé d’un dossier sujet à polémique. Élargir la protection fonctionnelle à tous les élus offre donc une garantie de prise en charge pour chacun et reconnaît le caractère parfois aléatoire des attaques.

Par ailleurs, votre texte suscite regret et lassitude face à la répétition des mêmes schémas apportant à chaque problème une réponse pénale. Il est certes fondamental d’affirmer clairement que les violences envers les élus, quelle qu’en soit la forme, ne sont pas tolérables dans notre société et notre démocratie, mais ne nous laissez pas croire que seule une aggravation des peines encourues permettra de les réduire. Cette méthode usuelle ne fait souvent que masquer certaines des raisons multifactorielles des agressions visant des élus : détresse sociale, état psychiatrique non pris en charge, addictions et pauvreté.

Les maires à portée de baffes sont des maires qui subissent le désengagement d’un État qui délaisse des pans entiers de notre système de vie en société et d’accompagnement des personnes les plus vulnérables.

Posons d’autres questions et formulons d’autres propositions que le code pénal. Cessons de réagir pour, enfin, agir, c’est-à-dire prévenir les situations qui conduisent à de la violence dans notre société et à de la rancœur contre toutes les personnes qui incarnent une institution. C’est sans doute la meilleure protection que nous puissions apporter aux élus locaux.

N’oubliez pas non plus que l’origine des violences qui ont visé Yannick Morez, ancien maire de Saint-Brevin-les-Pins – sa voiture brûlée et sa maison en feu, alors qu’il y dormait avec sa famille –, c’est l’extrême droite, qui utilise la violence pour imposer sa vision xénophobe contre l’installation d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile, dans une commune où jamais le moindre incident n’avait alimenté de mobilisation contre ce dernier. L’extrême droite se décomplexe, alors que ses thèmes et ses termes se répandent dans des médias ou dans les discours de certains responsables politiques.

Ce texte contient des mesures attendues, que le groupe Écologiste-NUPES soutient, mais il ne réglera pas tout. Surtout, il ne préviendra rien. Il nous reste du chemin à parcourir.

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). Monsieur le président, vous me pardonnerez le caractère brouillon de mon intervention. Peut-être ai-je mal dormi à cause de l’intervention qu’a faite hier le Premier ministre dans l’hémicycle… Ses propos m’ont d’ailleurs fait réfléchir sur une idée simple : en République, croit-on encore en la loi qui protège, en la loi qui régule, en la force de la loi, ou veut-on se libérer, au bout du compte, de toutes les règles qui prennent soin, au risque de voir la loi du plus fort l’emporter ?

La loi qui prend soin et qui protège concerne éminemment les élus locaux. Pendant plusieurs mois, ma collègue Violette Spillebout et moi-même avons posé un diagnostic lucide sur leur sort. Le plus beau mandat est celui de maire : c’est l’incarnation de la collectivité qui prend soin et de la démocratie de proximité. Les maires sont les urgentistes de la République : quand tout fout le camp, quand on a le sentiment que les décisions prises tout là-haut sont déconnectées de la réalité, le maire a les pieds sur terre et est en phase directe avec les habitants. Il est ainsi l’élu le plus apprécié des Français. Il est, le plus souvent, à portée de bises, mais il est aussi, malheureusement, depuis de trop nombreuses années, comme en témoignent les chiffres présentés, à portée de baffes et d’engueulade.

Les auditions que nous avons menées et les témoignages que nous avons recueillis renforcent notre conviction que l’intransigeance s’impose face aux gens qui déstabilisent ceux qui s’engagent au service des autres. Nous soutiendrons donc toutes les mesures visant à aligner les sanctions sur celles qui protègent les personnes dépositaires de l’autorité publique, ainsi que toutes les mesures visant à attribuer automatiquement la protection fonctionnelle, à préciser dans la loi le socle minimum des risques couverts par les contrats d’assurance ou à majorer les compensations d’État des frais de souscription des contrats. Il faut en effet donner aux urgentistes de la République le signal que l’État est à leurs côtés, à leur chevet, et que, par la loi, il a vocation à les protéger.

Les sénateurs n’ont évidemment considéré la question qu’à travers ce prisme – nous laissant peut-être ainsi la liberté de compléter le dispositif.

On ne protège efficacement que ceux qui sont utiles. Il nous faudra, dans les prochaines semaines, réfléchir à la manière dont nous pouvons renforcer le pouvoir d’agir des élus. Plus on est utile, efficace et capable de répondre aux besoins des gens, plus on est protégé et préservé. Il faudra recoudre les moyens de la démocratie locale.

Il faudra aussi inscrire dans le code général des collectivités locales un véritable statut de l’élu. Ma collègue rapporteure et moi-même avons travaillé dans ce sens, et j’espère que nous examinerons ce texte dans les prochaines semaines pour compléter utilement le socle qui nous est présenté aujourd’hui et, tout en veillant à ne pas creuser le fossé entre nos élus et nos concitoyens, renforcer le statut de l’élu et son pouvoir d’agir.

M. Paul Molac (LIOT). Les violences contre les élus sont inacceptables. S’attaquer aux élus, c’est, en quelque sorte, s’attaquer au contrat social et à la chose publique – c’est particulièrement vrai pour les élus locaux, qui ont un contact direct avec la population et qui sont la base de la cohésion sociale. Lors de la cérémonie des vœux d’un maire qui, précisément, démissionnait à cause des difficultés que sa commune connaissait, j’ai comparé les maires à des sous-officiers de la République, car une armée ne peut pas fonctionner sans de bons sous-officiers. Nous devons donc absolument protéger les maires, et le faire par différents moyens.

Cette proposition de loi comporte des mesures bienvenues. En effet, les maires sont souvent confrontés à des agressions, à des pressions et à du harcèlement, et 1 300 d’entre eux ont déjà démissionné. Les violences n’en sont évidemment pas la seule cause, et nous attendons aussi un statut de l’élu, mais cette proposition de loi va dans le bon sens. Dans un premier temps, elle fixe les peines au même niveau que celles qui s’appliquent en cas de violences envers les forces de l’ordre, mais ce n’est sans doute pas le plus important car, comme le disait Robert Badinter, un justiciable ne se promène pas avec le code pénal sous le bras.

La protection fonctionnelle automatique est, elle aussi, importante, car les maires rechignent à engager des frais pour leur commune, en particulier dans les petites communes, où chaque acte est scruté et où les maires ne s’attribuent même pas l’indemnité la plus élevée, de crainte d’être montrés du doigt. Cette protection fonctionnelle automatique assurée par l’État dans les communes de moins de 10 000 habitants est donc absolument nécessaire. Elle permettra aux maires des petites communes de porter plainte et d’être aidés. C’est, me semble-t-il, la seule façon de mettre un terme à une partie de ces actes qui les visent.

Comme l’ont dit certains collègues, ce texte ne résoudra pas tout, mais je ne crois pas qu’une loi puisse tout résoudre. Nous le voterons donc sans réserve, en attendant un véritable statut de l’élu.

Mme Emmanuelle Ménard (NI). J’étais, spontanément, assez dubitative face à cette proposition de loi, car je n’aime pas trop ce qui peut ressembler à un plaidoyer pro domo, mais il faut bien reconnaître qu’elle répond à une préoccupation croissante quant à la sécurité des élus locaux. Quelques chiffres : 32 % d’agressions en plus, essentiellement à l’encontre des maires, entre 2021 et 2022, selon le ministère de l’intérieur. Il s’agit principalement d’outrages, pour 50 %, de menaces pour 40 % et de violences volontaires pour 10 %. Selon d’autres chiffres intéressants, tirés d’un sondage Odoxa de novembre dernier pour Le Figaro, 64 % des Français pensent que la sécurité des maires est mal assurée et 61 % qu’ils pourraient aussi renoncer à une élection municipale, par crainte pour eux-mêmes ou pour leur famille. Ces chiffres sont éloquents.

La proposition de loi comporte des mesures variées, comme la modification de certains articles du code pénal pour accroître les sanctions en cas de violences contre les élus, des modifications visant à améliorer la prise en charge des élus victimes et des mesures visant à impliquer davantage les institutions dans la protection des élus. Ces mesures sont ciblées et spécifiques. Cependant, il est important de considérer plus largement leurs implications et d’assurer un équilibre entre sécurité et libertés civiles. Je me permettrai à cet égard quelques propositions.

Le texte, qui se concentre sur la réponse répressive et la protection après les agressions, pourrait être enrichi par des mesures préventives plus globales pour réduire les risques de violence à l’égard des élus.

La proposition de loi pourrait prévoir des systèmes de signalement et de réponse rapide pour les menaces ou incidents, qui permettraient une intervention rapide et efficace en cas de problème, comme cela se fait déjà dans certaines communes, par exemple pour les commerces ou les écoles.

Enfin, l’impact de la loi sur les libertés civiles, notamment la liberté d’expression, pourrait être davantage étudié pour nous assurer que les mesures proposées ne laissent pas de place à une interprétation abusive.

Je ne m’opposerai donc pas à ce texte, même si je pense qu’il nécessiterait davantage de précisions.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Ce débat est tout à fait légitime, et vous avez vous-même une entière légitimité pour parler des élus locaux et de leur protection. En effet, vous avez tous des expériences d’élus locaux et représentez la France – M. Rudigoz est maire du cinquième arrondissement de Lyon et conseiller métropolitain de Lyon, Mme Diaz conseillère municipale à Saint-Savin, dans la Haute Gironde, et conseillère régionale, M. Rome adjoint au maire de Lodève, dans l’Hérault, M. Gosselin maire de Remilly, dans la Manche, Mme Jacquier-Laforge conseillère municipale de Bilieu, dans l’Isère, M. Delautrette maire de Les Cars, dans la Haute-Vienne, et conseiller départemental, Mme Poussier-Winsback vice-présidente de la région Normandie et maire de Fécamp, en Seine-Maritime, M. Raux maire de Saffré, en Loire-Atlantique, M. Jumel maire de Dieppe, en Seine-Maritime, M. Molac conseiller régional de Bretagne et Mme Ménard conseillère municipale à Béziers, dans l’Hérault.

Nous pouvons donc, en tant que députés membres des différents groupes politiques, mener cette discussion en toute légitimité car, comme vous l’avez rappelé, vous tenez dans vos circonscriptions des réunions avec vos élus locaux pour évoquer les violences et entendre leur parole, vous soutenez ceux qui sont victimes de ces violences, vous êtes aux côtés de leurs familles et vous travaillez tous les jours sur ces questions avec les préfets.

Monsieur Rudigoz, vous évoquez la permanence de la menace et le fait que les questions ne soient traitées que partiellement dans la proposition de loi que nous examinons. Nous devrons en effet poursuivre le travail pour ce qui concerne la diffamation et l’affichage diffamatoire, et tout ce qui porte préjudice à la réputation des élus, faits qui sont parfois difficiles à qualifier. Nous y reviendrons dans nos débats, car nous devons mieux protéger les élus et leurs familles.

Madame Diaz, vous évoquez largement les démissions et les nombreuses élections partielles qui s’ensuivent. En effet, au moins 1 293 maires ont démissionné depuis 2020, soit trois fois plus qu’il y a vingt ans, ce qui est très significatif à l’approche des élections municipales de 2026.

Monsieur Rome, vous êtes le seul représentant de groupe qui ait affiché une opposition assez forte à cette proposition de loi. Vous êtes pourtant élu local et connaissez des élus victimes de ces violences.

Nous convenons avec vous qu’il faut accélérer les procédures et qu’il manque dans cette proposition de loi des dispositions permettant le bannissement ou la suspension des auteurs sur les réseaux sociaux. Nous y reviendrons dans le cadre du projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique (Sren), pour lequel la commission mixte paritaire ne s’est pas encore réunie. Peut-être faudra-t-il encore pousser plus loin, car le problème du harcèlement que subissent les élus sur les réseaux sociaux doit être particulièrement traité.

Quant au fait que les élus soient traités comme des personnes à part, c’est pour moi, à l’inverse de vous, un élément positif, car ils sont engagés et sacrifient une grande part de leur vie personnelle et de leur carrière pour se consacrer aux autres, à l’intérêt général et à la République. Il faut donc l’assumer, même s’il ne faut pas pour autant en faire des privilégiés. Sébastien Jumel et moi-même, au fil des auditions auxquelles nous avons procédé à propos des violences et des statuts, y avons veillé, comme vous le découvrirez dans nos propositions. N’oublions pas, cependant, que les élus protègent notre démocratie.

Enfin, vos propos très critiques sur les sanctions à appliquer aux violences envers les élus ne font honneur ni à ces derniers ni à ceux d’entre eux qui sont victimes. Souvent, en effet votre groupe conditionne la condamnation de la violence aux positions politiques des personnes concernées. Votre soutien aux élus victimes de violences n’est pas systématique, et il y a toujours un « mais » lorsqu’il est question d’élus de votre groupe, ce qui pourrait laisser croire que certains méritent la violence parce qu’ils ont défendu certains projets ou certaines propositions de loi dans leur commune.

Enfin, vous et vos amis avez, durant les débats de la fin de l’année dernière, sali les symboles de la République, insulté des ministres et fait mauvais usage de l’écharpe qui fait honneur à notre fonction de députés. Je regrette donc les propos que vous tenez en amont d’un débat qui se veut transpartisan.

Monsieur Gosselin, vous avez prononcé une phrase très forte en déclarant qu’il fallait libérer la parole, car de nombreux maires et élus n’osent pas déposer plainte. Notre débat de ce jour doit donc permettre aux élus et à leur famille d’oser dénoncer les violences. En la matière, rien n’est acceptable. Il ne doit y avoir ni fatalisme ni banalisation.

Madame Jacquier-Laforge, j’ai apprécié votre expression de « vocation républicaine ». Il faut en effet encourager les futurs candidats afin que, notamment dans les petites communes, où l’on cherche parfois jusqu’à quinze élus, nous trouvions des gens qui ont envie de s’engager et qui ne craignent pas les menaces que pourrait leur valoir l’exposition de leur famille et de leurs opinions sur les réseaux sociaux. Nous avons un grand défi collectif à relever en commun au cours de cette année 2024, dédiée aux élus locaux.

Monsieur Delautrette, vous évoquez à juste titre des sujets qui ne sont pas traités dans cette proposition de loi centrée sur les violences, comme le dégagement de la responsabilité politique et pénale des élus qui en assument une au titre de la commune, et non pas pour une erreur personnelle, ou les conflits d’intérêts. Sébastien Jumel et moi-même en avons été très soucieux et ces questions figureront parmi les propositions que nous vous soumettrons très prochainement.

Madame Poussier-Winsback, nous avons entendu que vous attendiez un texte plus complet et plus large. La proposition de loi qui suivra et l’étude que nous ferons sur le statut de l’élu devront englober toutes les questions qui ne sont pas traitées dans ce volet consacré aux violences. Vous avez raison de rappeler la nécessité de protéger les élus non en tant que personnes, mais bien comme incarnant un symbole démocratique et assurant le fonctionnement de notre démocratie.

Monsieur Raux, vous avez évoqué à très juste titre la question des moyens et des dotations des collectivités, qui n’est évoquée ni dans cette proposition de loi ni dans le rapport d’information que Sébastien Jumel et moi-même avons remis. Cette question ne peut pas être décorrélée, et les associations d’élus locaux ne manqueront pas de nous le rappeler au fil des débats.

Vous avez, enfin, insisté sur la lutte contre la discrimination et la xénophobie, dont nous savons tous l’importance. Lorsque les violences envers les élus sont animées de propos xénophobes, haineux, racistes ou discriminants, les sanctions doivent être aggravées et encore plus exemplaires. Nous y reviendrons.

Monsieur Jumel, nous avons su, ensemble, écouter et rassembler des opinions diverses pour formuler des propositions concrètes qui vont toutes dans le même sens. Renforçons le « pouvoir d’agir » – pour reprendre ce mot qui vous est cher – des maires et des élus locaux. Confisquer par la violence, les pressions et les intimidations leur pouvoir d’agir aux élus, c’est faire reculer le pouvoir politique, or le fonctionnement politique et démocratique de notre pays suppose une confiance des citoyens envers les élus.

Monsieur Molac, les élus incarnent en effet le contrat social que vous évoquez. Ils sont le lien entre le citoyen et les institutions, et nous devons les protéger.

Madame Ménard, vous avez très justement insisté sur la liberté d’expression et la réforme du droit de la presse, consacré par la loi de 1881, en rappelant les problèmes liés à la diffamation, aux injures et aux outrages. Pour m’y être frottée en examinant les amendements, je sais que cette question est très compliquée juridiquement. Bien que la proposition de loi comporte quelques mesures à cet égard, nous pourrions envisager de l’approfondir lors des états généraux de l’information, où il sera question de cette loi sur la liberté de la presse et la liberté d’expression.

Nous avons tous pour objectif de trouver de nouveaux citoyens engagés pour être candidats, et il sera beaucoup question ce matin de candidatures aux élections. Nous voulons tous libérer la parole face aux pressions et aux intimidations, formelles ou informelles, visant les élus locaux et protéger les familles de ces derniers. Nous voulons aussi accélérer les procédures, sans céder au fatalisme, à la banalisation ou à la peur de l’impunité face à ces violences, ni sombrer dans le doute en les affrontant et en agissant ensemble – ce qui est finalement le cœur de notre engagement politique.

Soyez rassurés : c’est aujourd’hui l’acte I, avec la lutte contre les violences envers les élus, et ce sera demain l’acte II, avec le texte relatif au statut de l’élu que Sébastien Jumel et moi-même vous proposerons, qui traitera des indemnités, des conflits d’intérêts et de la reconversion professionnelle après le mandat, et dans lequel nous pourrons aussi introduire des questions malheureusement irrecevables aujourd’hui, comme l’extension de la protection fonctionnelle aux élus sans délégation ou les droits de l’opposition. Nous n’oublierons pas, dans la loi qui suivra, des sujets que nous n’avons pu injecter aujourd’hui dans la proposition de loi du Sénat, afin de disposer d’un dispositif complet au service des élus locaux, des citoyens et de notre démocratie.

Titre IER : CONSOLIDER L’ARSENAL RÉPRESSIF EN CAS DE VIOLENCES COMMISES À L’ENCONTRE DES ÉLUS

Article 1er (art. 222-12, 222-13, 222-14-5, 222-47 et 222-48 du code pénal) : Aggravation des peines encourues pour des faits de violences commises à l’encontre des élus

Amendement de suppression CL17 de M. Sébastien Rome

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Nous avons vu augmenter ces dernières années tant l’arsenal répressif que le nombre d’agressions. S’en prendre à un élu, c’est d’abord s’en prendre à une personne et, qu’elle soit élue ou non, cela n’a pas lieu d’être. En outre, l’augmentation de l’arsenal répressif n’a pas fait baisser le nombre des agressions.

Souvent, s’en prendre à un élu, c’est aussi s’en prendre aux politiques qu’il mène, qu’il s’agisse du centre d’accueil de Saint-Brevin-les-Pins ou de René Revol, maire de Grabels, qui a subi une agression de la part de l’extrême droite pour avoir contesté une décision du maire de Béziers. Vous nous critiquez en raison de nos positions, mais notre groupe est peut-être aujourd’hui le plus menacé et le plus attaqué – je pense à Louis Boyard, à Raquel Garrido et à Jean-Luc Mélenchon.

Il ne faut pas confondre la fonction régalienne de l’État, qui est celle de la gendarmerie, de la police ou des pompiers, avec la fonction démocratique, qui est la nôtre. Confondre les deux relève d’une tendance oligarchique, et l’on incline alors à traiter les élus comme des gens à part. Notre fonction est démocratique : nous devons être avec les gens, au milieu d’eux. Il nous faut plus de démocratie. Les personnes qui ont la responsabilité de voter les lois ou d’administrer les communes ne doivent pas être à part, notamment dans les communes de petite taille, où tout le monde se connaît. C’est là que se posent les questions de médiation, tout à fait absentes de votre texte, et de rapidité des décisions de justice.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis, bien évidemment, très défavorable à la suppression de cet article, qui est un élément essentiel de la proposition de loi. La violence croissante envers les élus, en particulier des élus locaux, exige une réponse pénale très forte.

En outre, cette disposition qui figure dans la proposition de loi que nous examinons avait été largement adoptée au titre d’un amendement de notre collègue sénateur Marc-Philippe Daubresse à l’article 15 de la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), annulé pour raison de procédure.

S’agissant enfin des agressions subies par les élus de votre groupe, il n’y a pas lieu de faire un concours pour savoir qui a été le plus agressé en raison de ses convictions politiques. Comptez sur moi pour dénoncer toutes ces agressions. Qu’il s’agisse de M. Boyard, de Mme Garrido ou de M. Guiraud, il n’y a pas de conditionnalité au soutien des élus contre les violences. Le débat n’est pas là : nous devons les protéger tous.

Mme Edwige Diaz (RN). Pour le Rassemblement national, les agressions visant les élus locaux exigent une répression pénale forte. Or, on retrouve dans cet amendement de La France insoumise tout le champ lexical habituel de ce groupe, fermement opposé à la « surenchère pénale » et à la « répression pénale », ainsi que son déni idéologique car, selon lui, un renforcement des sanctions pénales ne résoudra en rien la crise démocratique.

J’ai la naïveté de m’étonner encore un peu de ces positions. La France insoumise est complètement déconnectée des réalités du terrain, mais aussi de ses sympathisants, à en juger par un sondage Odoxa de mai 2023, qui révèle que 57 % des sympathisants de La France insoumise sont favorables aux mesures de protection des élus.

Nous voterons donc résolument contre cet amendement de suppression.

M. Thomas Rudigoz (RE). Nous sommes également opposés à cet amendement incohérent. Les élus locaux n’ont peut-être pas la même fonction que les policiers et les gendarmes, mais n’oublions pas que les maires sont officiers de police judiciaire. Or ce sont eux qui, comme nous le constatons régulièrement, sont victimes de violences et d’intimidation, alors qu’ils n’ont, à la différence des gendarmes et des policiers, aucun moyen de défense. Il est donc tout à fait normal de renforcer notre arsenal pénal pour protéger ceux que j’ai appelés les « hussards de la démocratie », face à la défection croissante que nous constatons chez nos concitoyens qui ne veulent plus s’engager et chez nombre de maires qui démissionnent en cours de mandat. Nous devons montrer aux maires et aux élus qu’ils seront mieux protégés, qu’il s’agisse de la protection fonctionnelle ou du renforcement des sanctions applicables à ceux qui attenteraient à leur personne ou à leur honneur.

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Après l’agression que j’ai subie Gare du Nord, et dans ce contexte d’indignations à géométrie variable, j’attends encore des tweets de soutien – dont le vôtre, madame la rapporteure, qui sera le bienvenu si vous condamnez bien, comme d’habitude, toutes les violences, sans distinction aucune.

Si nous voulons élever le débat, il faut sortir de ces arguments et nous rappeler que, comme l’a dit mon collègue Sébastien Rome, l’augmentation des quanta de peine, dans tous les domaines où vous l’avez pratiquée, n’a pas produit les résultats que vous escomptiez, qu’il s’agisse des refus d’obtempérer ou des actes visant des policiers. Vous voulez maintenant aligner, pour ce qui concerne les élus, les quanta de peine sur ceux que nous avons déjà augmentés durant la précédente législature. Ces augmentations successives ne régleront pas le problème, et je maintiens donc une opposition de principe. Cela ne signifie pas qu’il ne doive pas y avoir de condamnation, mais l’état actuel du droit est déjà bien suffisant.

Peut-être l’effectivité même de la protection et de la répression mérite-t-elle aussi discussion. Ainsi, malgré de nombreuses relances formulées par mon conseil, j’attends toujours des nouvelles du parquet de Paris à propos de l’agression que j’ai subie, alors que la situation paraissait assez simple, puisque les faits ont eu lieu en plein hall de la Gare du Nord, surveillé par des caméras à 360 degrés. La célérité des enquêtes dépend donc encore, semble-t-il, de différents facteurs...

Nous avons d’ailleurs rendu à cette commission un rapport sur les moyens dont dispose la police judiciaire. Peut-être y a-t-il là des éléments qui permettront de protéger réellement les élus et de réprimer les auteurs d’infractions à leur encontre.

Il nous semble, à tout le moins, démagogique de se faire plaisir en augmentant les quanta de peine.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL42 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette (SOC). Cet amendement, déjà déposé par nos collègues socialistes du Sénat, vise à étendre le dispositif prévu à l’article 1er aux peines encourues en cas de meurtre, de violences ayant entraîné la mort, de violences aggravées et d’outrage lorsque ces crimes ou délits sont commis contre un élu. Nous n’ignorons pas que le code pénal prévoit déjà des peines aggravées lorsque de tels actes sont commis contre toute personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, mais l’application de ces peines à un maire ou à un adjoint au maire ne résulte que de la jurisprudence : nous souhaitons la graver dans le marbre de la loi.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je comprends dans quel esprit vous avez déposé cet amendement, mais deux problèmes se posent.

Tout d’abord, comme la rapporteure du texte au Sénat l’a rappelé, cette rédaction introduirait des doublons dans la définition du champ des aggravations de peine. La circulaire du 6 novembre 2019 rappelle clairement que l’ensemble des élus locaux, ainsi que les députés, ont soit la qualité de dépositaire de l’autorité publique, soit de personne chargée d’une mission de service public. Par conséquent, les élus sont déjà couverts par les dispositions du code pénal que vous souhaitez modifier.

Votre amendement semble également poser une difficulté technique. Le II propose une modification du troisième alinéa de l’article 1er qui reviendrait à exclure les élus du champ des articles 222-3, 222-8 et 222-10 du code pénal, c’est-à-dire à faire l’inverse de ce que vous souhaitez. Je me demande si vous ne vouliez pas modifier, en réalité, l’alinéa suivant.

Pour ces deux raisons, je vous propose de retirer votre amendement.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Je ne suis pas certain d’avoir compris toutes vos explications, mais je vous fais confiance. Nous nous repencherons sur la question en vue de la séance publique.

L’amendement est retiré.

Amendement CL7 de Mme Estelle Youssouffa et sous-amendement CL100 de Mme Sylvie Bonnet

Mme Estelle Youssouffa (LIOT). L’amendement vise à créer une interdiction du territoire national pour les étrangers reconnus coupables de violences à l’encontre des élus de la République, que ces violences aient entraîné ou non une incapacité de travail. Je pense notamment à l’agression subie fin décembre, à Mayotte, par le conseiller départemental Elyassir Manroufou et son frère. Les étrangers qui ont été condamnés pour cet acte n’ont subi aucune répercussion en matière de droit au séjour, et le conseiller départemental s’est plaint publiquement de devoir cohabiter avec les auteurs de l’agression, qui vivent à quelques mètres de chez lui.

Mme Sylvie Bonnet (LR). Mon sous-amendement vise à étendre l’application de la peine complémentaire d’interdiction du territoire aux étrangers coupables de violences à l’encontre d’un membre de la famille d’un élu local ou d’une personne dépositaire de l'autorité publique.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je vous propose de retirer l’amendement : il n’atteindrait pas le but qui lui est fixé et les cas envisagés sont déjà couverts.

L’article 1er prévoit très clairement une peine d’interdiction du territoire français en cas d’atteinte à un élu ou aux catégories particulièrement exposées à la violence dans le cadre du maintien de l’ordre qui sont énumérées à l’article 222-14-5 du code pénal. L’alinéa 3 de l’article 1er de la proposition de loi modifie, par ailleurs, les articles que vous visez pour en extraire les élus : la peine que vous proposez ne les concernerait donc pas. L’objet de proposition de loi est vraiment de mieux protéger les élus. Votre amendement correspond, en réalité, à un autre débat.

S’agissant du sous-amendement, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

En conséquence, le sous-amendement tombe.

Amendement CL68 de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback et sous-amendement CL106 de Mme Edwige Diaz, amendement CL4 de M. Vincent Seitlinger et sous-amendement CL101 de Mme Sylvie Bonnet (discussion commune)

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback (HOR). L’amendement d’appel que nous avons déposé porte sur nos collaborateurs : nous devons réfléchir à leur protection, car ils sont eux aussi de plus en plus victimes d’agressions.

Mme Edwige Diaz (RN). Mon sous-amendement vise à clarifier les personnes concernées. Il y a non seulement les collaborateurs d’élus, mais aussi ceux des groupes, au sein des conseils régionaux, départementaux, municipaux et communautaires.

M. Thibault Bazin (LR). Il est très positif de renforcer l’arsenal répressif lorsque des violences sont commises à l’encontre des élus, mais n’oublions pas ceux qui travaillent avec eux, les collaborateurs et les membres des cabinets, qui sont directement en relation avec les administrés. Ils peuvent accompagner les élus sur le terrain ou recevoir des gens et donc être, au même titre que les élus, la cible d’agressions et de menaces dans l’exercice de leurs fonctions.

Le maire de Richardménil m’a dit, récemment, que les agents d’accueil de la commune avaient été insultés, agressés verbalement, et que des agents qui s’occupaient de la voirie avaient été malmenés. On doit aussi les protéger. C’est en leur qualité de collaborateurs d’élus ou de collectivités qu’ils sont agressés. Il est important, alors que nous sommes en train de travailler sur un texte qui peut être consensuel, de n’oublier personne : à partir du moment où on est investi d’une mission de service public, il est important d’être protégé.

Mme Sylvie Bonnet (LR). Mon sous-amendement de précision permettra aux fonctionnaires qui travaillent aux côtés du maire d’être également protégés.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je comprends la philosophie qui vous anime : ceux qui entourent les élus sont parfois en contact direct avec le public et peuvent donc être la cible de menaces, d’insultes et de pressions, en particulier dans des communes de petite taille, où tout le monde se connaît.

Cependant, l’article 1er porte sur des dispositions très spécifiques, et récentes, du code pénal qui ont été adoptées pour certaines catégories de dépositaires de l’autorité publique, en particulier celles qui portent l’uniforme et sont donc identifiées comme des représentants des institutions. Au vu des violences régulièrement commises envers les élus, nous souhaitons inclure ces derniers dans la liste des professions concernées, mais l’esprit de la proposition de loi est de marquer une différence avec des collaborateurs ou des agents du service public.

Par ailleurs, la notion de collaborateur à laquelle les amendements font référence reste à définir, en fonction des types de contrat et de positionnement dans les collectivités. En revanche, les violences commises envers ces personnes peuvent être sanctionnées dans le cadre des dispositions de droit commun du code pénal – les peines prévues sont trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende si les violences ont entraîné une incapacité totale de travail (ITT) pendant plus de huit jours ou, sinon, une contravention de quatrième classe.

Par conséquent, demande de retrait ou avis défavorable en ce qui concerne ces amendements et sous-amendements.

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback (HOR). Je retravaillerai mon amendement d’ici à la séance publique afin d’apporter des précisions complémentaires.

M. Thibault Bazin (LR). Madame la rapporteure, j’entends ce que vous avez dit, notamment le fait que certains agents, comme ceux de l’administration pénitentiaire, sont visibles parce qu’en tenue : si des violences sont commises à leur encontre, on ne peut pas dire qu’on n’avait pas identifié leur qualité. Or les agents des communes portent de plus en plus des EPI (équipements de protection individuelle) dans l’espace public ou dans les bâtiments, ce qui conduit à une identification de ces agents. Il devient de plus en plus difficile de dire qu’on ne savait pas qu’ils étaient en mission de service public. Nous pourrions donc regarder d’ici à la séance comment ces personnes, agressées en qualité d’agent du service public, pourraient aussi bénéficier d’une protection.

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). Ce que disent les collègues est légitime, mais hors sujet. L’idée est d’établir une protection particulière pour les personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public.

Par ailleurs, le statut de la fonction publique permet déjà à l’employeur, en l’espèce au maire, d’accorder la protection fonctionnelle à ses agents et le droit du travail permet aussi à l’employeur de protéger son collaborateur s’il est mis en difficulté, bousculé dans l’exercice de ces missions.

Ces amendements me paraissent décalés par rapport au signal que nous devons envoyer au sujet des élus – ils exercent une mission particulière, au service de l’intérêt général.

Mme Raquel Garrido (LFI-NUPES). Le droit du travail ne permet pas seulement d’accorder une protection aux salariés : il oblige à le faire. Les députés que nous sommes sont ainsi tenus, en tant qu’employeurs, de prévenir, de réduire, voire d’éliminer, si possible, tout risque psychosocial pour nos collaborateurs, comme la violence à laquelle sont exposées en permanence les personnes qui gèrent pour nous les réseaux sociaux.

Ces amendements révèlent la gêne que suscite, chez les élus que nous sommes, l’idée de nous protéger en laissant de côté certaines personnes qui, elles, ne sont pas des élus. On voit bien la difficulté de l’exercice consistant à adopter des lois spéciales pour nous, alors que d’autres subissent le même type de conséquences, du fait de la détention d’une parcelle de pouvoir.

Nous devons tous, comme l’a dit Sébastien Rome, assumer pleinement notre responsabilité politique. Dans une démocratie, ce ne sont pas les élus qui disent aux gens quoi faire, mais les gens qui le disent aux élus. C’est le principe de la République, du gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Ces échanges nous font toucher du doigt le fait que nous donnons l’impression de demander une sorte de privilège refusé aux autres.

J’en profite pour remercier les collaborateurs qui travaillent avec nous et leur dire que nous avons pleinement conscience de ce à quoi ils sont exposés.

L’amendement CL68 est retiré.

En conséquence, le sous-amendement CL106 tombe.

La commission rejette successivement le sous-amendement CL101 et l’amendement CL4.

Amendement CL1 de M. Thibault Bazin

M. Thibault Bazin (LR). J’ai rencontré des élus locaux qui m’ont confié leur peur que des violences se poursuivent à l’expiration de leur mandat. Pouvons-nous leur assurer une forme de protection ? C’est possible à vie – même si ce n’est pas forcément à cela que j’appelle – pour certaines professions. Il faudrait protéger les anciens titulaires d’un mandat électif public dès lors qu’ils font l’objet de menaces ou de violences du fait de leurs anciennes fonctions électives. Des élus font même l’objet de menaces pour l’avenir, lorsqu’ils ne disposeront plus de la protection qui leur est propre actuellement. On entend dire : « Quand tu ne seras plus élu, je viendrai te chercher ».

Alors que l’engagement local souffre d’une crise des vocations, il faut appréhender dans le temps la question de la protection des élus. Mon amendement tend ainsi à compléter l’article 1er en étendant l’aggravation des peines encourues aux violences envers les anciens élus locaux en cas de lien avec leurs anciennes fonctions.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Merci, monsieur Bazin, pour cet amendement, auquel je suis favorable. Comme vous l’avez clairement précisé, il s’agirait de violences à l’encontre d’un ancien élu qui seraient motivées par des décisions prises ou des faits qui se sont produits dans le cadre de son ancien mandat. Cela ne semble donc pas élargir excessivement le champ de l’article 1er.

L’arrêt de la protection des élus à la fin de leur mandat a, par ailleurs, fait l’objet d’un amendement, malheureusement jugé irrecevable au titre de l’article 40, de notre collègue Cormier-Bouligeon, qui prévoyait l’extension de la protection fonctionnelle jusqu’à six ans après la fin du mandat pour des décisions prises pendant celui-ci. Nous espérons convaincre le Gouvernement de reprendre en séance cet amendement. Dès lors qu’il y a un fait générateur situé pendant l’exercice des fonctions antérieures et lié à elles, il faut le prendre en compte après le mandat.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Oui, il faut prendre en considération le fait qu’on peut être agressé en raison de décisions prises lorsqu’on était un élu. Néanmoins, dès lors que l’aggravation des peines ne retiendra pas la main des agresseurs, nous ne sommes pas favorables à l’amendement.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL18 de M. Sébastien Rome

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). C’est un amendement de repli par rapport à notre demande de suppression de l’ensemble de l’article. Les alinéas 5 à 7 sont en quelque sorte une dérive de la dérive, où l’on retrouve deux obsessions du libéralisme réactionnaire qui s’est exprimé hier, à savoir les étrangers et la liberté d’expression. Nous voulons supprimer les peines complémentaires qui seraient l’interdiction de participer à des manifestations sur la voie publique et, pour des étrangers, l’interdiction du territoire français – une manifestation de sans-papiers cocherait ainsi toutes les cases… Le Sénat tente d’introduire, par ces alinéas, une petite loi « immigration ». Or il faudrait arrêter de nous faire voter des dispositions qui pourraient être totalement inconstitutionnelles.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je crois que vous mélangez tout, cher collègue. On est loin d’une interdiction de manifester pour des sans-papiers ou d’une loi « immigration », et je suis, bien sûr, défavorable à cet amendement.

Il s’agit de faits extrêmement graves, que les violences concernent des élus ou des gendarmes, des policiers et des militaires dans l’exercice ou du fait de leurs fonctions, et les peines complémentaires qui sont proposées me paraissent complètement justifiées. Il faut, par ailleurs, assurer la cohérence du code pénal. Il est déjà possible de prononcer une peine complémentaire d’interdiction de séjour en cas de violences en réunion, sanctionnées par l’article 222-14-2 du code pénal, ou une peine complémentaire d’interdiction du territoire français pour des violences sur mineur telles que sanctionnées à l’article 222-14-1. L’échelle des peines est tout à fait cohérente, et nous ne faisons qu’ajouter une catégorie de victimes potentielles.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 1er modifié.

Après l’article 1er

Amendement CL66 de M. Éric Poulliat

M. Éric Poulliat (RE). Le phénomène de la violence contre les élus touche non seulement les personnes mais aussi, de plus en plus, les biens – des domiciles sont incendiés, des permanences parlementaires saccagées, etc. Lorsque l’atteinte à un bien porte préjudice à un élu, le code pénal prévoit un alourdissement des peines encourues, que l’atteinte commise présente ou non un danger pour les personnes. Si tous les élus sont concernés pour ce qui est des atteintes non dangereuses, par la mention de « personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public », ce n’est pas le cas pour les atteintes dangereuses : dans ce cas, la circonstance aggravante ne s’applique que s’il s’agit de personnes dépositaires de l’autorité publique. Les élus locaux qui ne font pas partie d’un exécutif local et les parlementaires ne sont donc pas couverts. Le présent amendement vise à remédier à cette situation en appliquant la même circonstance aggravante pour les atteintes dangereuses aux biens commises au préjudice de tous les élus, y compris les personnes chargées d’une mission de service public. Cet amendement est issu des préconisations du rapport de la mission d’information sur l’activisme violent que j’ai menée avec notre collègue Jérémie Iordanoff.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Merci pour votre proposition qui permettra de combler un vide juridique relatif aux atteintes dangereuses aux biens concernant des personnes chargées d’une mission de service public et qui démontre bien l’utilité des rapports d’information. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement. L’article 1er bis est ainsi rédigé.

Article 2 (art. 222‑33‑2‑2 du code pénal) : Création d’une peine de travail d’intérêt général en cas d’injure publique à l’encontre de personnes dépositaires de l’autorité publique ou de certains élus ainsi que d’une circonstance aggravante lorsque la victime de harcèlement est titulaire d’un mandat électif

Amendement CL65 de M. Thomas Rudigoz

M. Thomas Rudigoz (RE). Suivant la même logique qu’au premier alinéa du présent article, cet amendement permettra de prononcer une peine de travaux d’intérêt général (TIG) en cas d’outrage à un élu local.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Avis favorable. La proposition de loi comporte un vide : elle vise les injures, mais pas les outrages. Or en cas de diffamation ou d’insultes dans l’espace public ou privé, la qualification pénale est très importante, notamment pour les suites judiciaires qui peuvent être données par les procureurs.

M. Didier Paris (RE). Je soutiens l’amendement. Après une injure publique ou un outrage, il n’y a rien de mieux que des travaux d’intérêt général. C’est une forme de réparation extrêmement importante pour la population et pour l’élu lui-même.

Madame la rapporteure, vous avez évoqué la diffamation : son absence, s’agissant des TIG, est-elle un oubli de la part des sénateurs ? Le texte pourrait-il encore évoluer sur ce point en séance ? Le paradoxe est qu’on permettra le recours aux TIG, qui ne sont pas assez utilisés par les juridictions, pour des faits seulement punis d’amende, mais pas en cas de diffamation, qui est punie d’une peine de prison – cela correspondrait donc plus naturellement aux TIG.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Le texte issu du Sénat ne vise que les injures publiques, qui relèvent du droit de la presse. Nous ajoutons, dans le champ du code pénal, les outrages, en lien avec la fonction d’élu local, et on pourrait faire, de même, en effet, en ce qui concerne la diffamation. Il faut veiller à être très précis, je l’ai dit, dans les différents domaines du droit et pour les différentes infractions, afin que les plaintes déposées par les élus puissent être traitées et conduire à des peines d’une façon opérationnelle.

Les auditions que j’ai menées avec Sébastien Jumel ont révélé l’existence chez les élus d’une forte méconnaissance de leurs droits et de la façon dont ils doivent déposer plainte – tantôt ils écrivent au procureur, tantôt ils font une citation directe, tantôt ils s’adressent aux gendarmes, et tantôt ils ont un avocat, tantôt ils n’en ont pas. Il convient de renforcer la formation des élus en ce qui concerne l’exercice de leurs droits et les dépôts de plainte – il faut utiliser la bonne qualification pour que le meilleur traitement possible ait lieu ensuite.

Mme Raquel Garrido (LFI-NUPES). Le droit de la presse régule la liberté d’expression. Dans la tradition française, il est extrêmement protecteur de cette liberté. La procédure est donc compliquée quand il s’agit de limiter l’expression d’autrui, les délais de prescription sont extrêmement courts et la qualification des délits extrêmement rigoureuse. Il m’est arrivé de porter plainte contre quelqu’un qui avait injurié un parlementaire : la qualité de parlementaire n’a finalement pas été retenue, en raison du caractère général de l’insulte. La caractérisation est difficile sur le plan juridique et les tribunaux se montrent stricts.

Nous sommes d’accord pour éviter les trous dans la raquette législative en ce qui concerne la protection apportée et les limites de la liberté d’expression, notamment en matière d’injure, mais nous ne pensons pas que cela permettra, objectivement, à tout élu local de sortir du cadre général. Des gens devront tout simplement payer une amende parce qu’ils auront commis le délit de diffamation ou d’injure, publique ou non publique – je rappelle en effet que l’injure non publique, contraventionnelle et non correctionnelle, existe aussi.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL19 de M. Sébastien Rome

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Nous souhaitons supprimer l’ajout d’une circonstance aggravante en cas de harcèlement contre un élu. On peut déjà condamner les auteurs de harcèlement, notamment sur les réseaux sociaux. La question qui se pose est celle de la rapidité de la justice : c’est sur ce plan qu’il faut agir.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis totalement opposée à cet amendement. Réprimer le harcèlement envers les élus fait partie de mes priorités et de celles de beaucoup de collègues ici présents. Pour tout vous dire, nous souhaitons même aller plus loin en ce qui concerne le harcèlement en ligne, en prévoyant des peines complémentaires très précises – le travail que nous sommes en train de mener nous permettra peut-être d’intégrer d’autres éléments dans le texte la semaine prochaine, en lien avec le Gouvernement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL5 de M. Vincent Seitlinger et sous-amendement CL102 de Mme Sylvie Bonnet

M. Thibault Bazin (LR). L’amendement déposé par Vincent Seitlinger vise à inclure les collaborateurs des cabinets.

Mme Sylvie Bonnet (LR). Mon sous-amendement permettra de mieux prendre en compte les usages dans les territoires ruraux et de protéger toutes les personnes qui travaillent aux côtés des élus.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je vous demande un retrait. À défaut, avis défavorable à l’amendement et au sous-amendement. Cette proposition de loi a pour objectif de protéger les élus locaux. Je ne nie pas, bien sûr, les difficultés, les menaces, les pressions que peuvent subir certains de nos collaborateurs et certains agents de la fonction publique, comme les personnes à l’accueil des mairies ou d’autres institutions, mais ce n’est pas l’objet du texte.

La commission rejette successivement le sous-amendement et l’amendement.

Amendement CL36 de M. Emeric Salmon

Mme Edwige Diaz (RN). Cet amendement a pour objet d’étendre l’infraction prévue par l’article 222-33-2-2 du code pénal non seulement aux faits commis à l’encontre du titulaire d’un mandat électif, comme le prévoit la proposition de loi, mais aussi aux faits concernant un candidat à un mandat électif public pendant la période sensible, et même cruciale, de la campagne électorale.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Avis défavorable, pour deux raisons. Tout d’abord, la proposition de loi renforcera déjà très significativement la protection des candidats à une élection, notamment grâce à l’article 10, qui leur étendra le bénéfice de la protection fonctionnelle, ce qui permettra de répondre à de nombreuses attaques, pouvant correspondre, notamment, à du harcèlement, et de prendre en charge les frais de protection. Par ailleurs, votre amendement devrait au moins préciser le lien entre le fait que le candidat est harcelé et sa participation à une campagne électorale, afin d’éviter qu’un harcèlement antérieur ne soit plus fortement sanctionné à partir du moment où la personne concernée entre en campagne. Il faut sanctionner toutes les formes de harcèlement, comme le fait déjà le code pénal. Si nous voulons renforcer la sanction dans le cadre d’une candidature à une élection, il faut bien expliciter le fait que le harcèlement doit être motivé par la situation de candidat de la victime.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 2 modifié.

Article 2 bis (nouveau) (art. 65-5 [nouveau] de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) : Allongement des délais de prescription des délits d’injure et de diffamation publiques commis à l’encontre des personnes mentionnées à l’article 31 et au premier alinéa de l’article 33 de la loi de 1881

Amendement CL104 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout, rapporteure. L’article 2 bis répond à une véritable nécessité : les élus locaux sont encore trop souvent confrontés à l’inadaptation des délais dérogatoires résultant de la loi de 1881 sur la liberté de la presse : les possibilités d’action judiciaire contre les délits de presse sont enserrées dans des délais bien trop courts pour être tenables. Par ailleurs, les évolutions technologiques – les réseaux sociaux, internet et, demain, l’intelligence artificielle – favorisent la persistance de la diffusion des contenus injurieux et diffamatoires dans l’espace public et leur accessibilité dans le temps. Lutter contre les nouvelles formes de violences et d’injures, notamment en ligne, doit être notre priorité, et j’espère que nous pourrons traiter cette question plus en profondeur dans le cadre de la proposition de loi relative au statut de l’élu. En attendant, l’extension du délai de prescription proposée par le Sénat, dont je salue le travail, me paraît essentielle. Je rappelle à cet égard que le délai de prescription est de six ans pour le délit d’outrage.

L’article 2 bis pose néanmoins de petites difficultés d’interprétation relatives à son champ d’application. Je souhaite préciser, par mon amendement, que l’allongement du délai de prescription s’applique lorsque la victime est un élu ou un candidat à une élection au moment des faits.

M. Didier Paris (RE). Je salue les efforts de mise en cohérence de Mme la rapporteure : je comprends parfaitement son amendement. Néanmoins, l’approche suivie dans cet article me pose une difficulté. Je trouve qu’il est un peu inconséquent de dire qu’il faut absolument protéger les élus – nous sommes d’accord sur tous les bancs pour le faire – et en même temps de vouloir allonger le délai de prescription. En réalité, on devrait presque faire l’inverse : il faut que les parquets, que l’ensemble des acteurs en mesure de mettre en marche l’action publique le fassent rapidement, efficacement, vigoureusement, compte tenu des attaques dont les élus sont victimes.

Par ailleurs, il faut se livrer à une réflexion approfondie à chaque fois que l’on envisage de modifier la loi de 1881 sur la liberté de la presse, qui est un texte très particulier. Je ne doute pas que les sénateurs l’aient fait, mais je ne suis pas certain que, pour notre part, nous y ayons suffisamment réfléchi. Toucher au délai de prescription relatif à un élément déterminé de la loi entraînerait des difficultés au regard des autres délais de prescription qui continuent à s’appliquer en matière de presse. Je crains que l’on ne déséquilibre la loi de 1881 et que l’on n’aille à l’encontre de l’objectif politique visé. Je ne suis pas favorable à l’article 2 bis.

Mme Raquel Garrido (LFI-NUPES). Sur le plan du droit, il faut bien distinguer la situation du candidat et celle de l’élu. Dans le premier cas, il s’agit non seulement de protéger le candidat mais aussi de permettre le bon déroulement de l’élection. C’est pourquoi notre droit prévoit des délais procéduraux très courts – vingt-quatre à quarante-huit heures – pour répondre à des attaques infondées en période électorale. La célérité est, en ce domaine, essentielle. L’extension de la prescription des délits d’injure publique et de diffamation à six mois lorsque la victime est un candidat pourrait être contre-productive ou, à tout le moins, vaine, car, si la justice se prononce une fois l’élection passée, le bon déroulement de la campagne et du scrutin en aura pâti.

Pour les élus, la prescription de droit commun est de trois mois. Il existe toutefois des prescriptions spéciales pour des délits tels que les injures à caractère raciste, qui mettent en cause non seulement l’honneur de la personne mais aussi la société entière.

Cet amendement ne vise pas seulement à protéger l’intérêt de l’élu mais aussi celui de la société, puisqu’il a pour objet de permettre à l’élu d’effectuer le mandat qui lui a été confié par les citoyens. Il faut toutefois avoir à l’esprit que cela risque d’entraîner des demandes d’allongement de la prescription en matière d’infractions à la liberté de la presse. Nous estimons que, dans une société libre et démocratique, la liberté d’expression doit être protégée.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. L’extension du délai de prescription n’a évidemment pas pour objet de ralentir le cours de la justice : nous souhaitons tous que les infractions puissent être signalées et poursuivies rapidement. Cet amendement a pour seule finalité de permettre à un élu d’agir lorsqu’il prend connaissance, à l’issue du délai de prescription – qui est actuellement de trois mois –, d’une injure ou d’une diffamation, par exemple sur un réseau social ou sur un blog. Nous souhaitons conserver la célérité de la procédure, en particulier pendant les campagnes électorales.

Je partage votre préoccupation concernant l’équilibre de la loi de 1881. Le travail qui est mené dans le cadre des états généraux de l’information sur la mutation de l’information doit nous conduire à réfléchir à la manière dont on traite la liberté d’expression sur les réseaux sociaux.

M. Philippe Gosselin (LR). Il faut en effet éviter de juger les moyens d’aujourd’hui sur la base des textes d’hier. Cela étant, on ne doit toucher aux délais de prescription que d’une main tremblante. On a tendance, à l’heure actuelle, à les allonger, dans l’intérêt des victimes et des personnes mises en cause, mais, à l’exception de cas particuliers, tels que les violences intrafamiliales ou les viols, ce n’est pas toujours souhaitable. À l’origine, la prescription avait pour objet, d’une certaine façon, de protéger la société. Il faut maintenir l’équilibre – qui est complexe – entre la nécessité de défendre les victimes – ce qui me conduit à soutenir pleinement le texte – et la préservation de l’économie de la loi de 1881. Le délai de trois mois permet une réaction rapide, en particulier lors des élections. Je ne suis pas certain qu’il soit utile d’aller au-delà. Je continue à m’interroger sur cet amendement.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL77 de Mme Marie Pochon

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). L’amendement vise à porter à trois ans le délai de prescription des délits d’injure publique et de diffamation. Le délai de trois mois est souvent trop court pour permettre à un élu de porter plainte. Nous saluons son extension à un an. Cependant, en cas de harcèlement moral, par exemple, le délai d’un an peut paraître encore trop bref pour permettre à la victime de documenter la réitération des propos ou des comportements et de témoigner de l’évolution de sa santé mentale et physique. En portant le délai à trois ans, on desserrerait l’étau dans lequel est pris l’élu local.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Comme cela a été précédemment exposé, il nous faut trouver un équilibre en la matière. À cet égard, le délai d’un an est satisfaisant. Trois ans, c’est trop long. Défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 2 bis modifié.

Article 2 ter (nouveau) (art. 223‑1‑1 du code pénal) : Création d’une circonstance aggravante en cas d’atteinte à la vie privée et familiale d’un candidat à un mandat électif public pendant la durée de la campagne électorale

Amendement de suppression CL20 de M. Sébastien Rome

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Cet amendement vise à supprimer l’article 2 ter. Les candidats aux élections sont certes surexposés tout au long de la campagne et peuvent subir des violences, à l’instar de leur famille. Toutefois, si les agressions physiques sont inacceptables, le code électoral prévoit une liberté d’expression renforcée dans le cadre du débat démocratique. Si la justice doit être en mesure de condamner rapidement les auteurs de certains faits, il faut éviter la surenchère proposée par le texte.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis très défavorable à cet amendement. La liberté d’expression ne saurait autoriser l’atteinte illégitime à la vie privée, y compris à celle d’un candidat. Nous souhaitons que les candidats et leur famille soient protégés. L’article 2 ter ne doit pas être considéré isolément. La proposition de loi forme un tout. L’article 10, par exemple, assure une protection très forte des candidats. Les volets préventif et répressif sont complémentaires et aussi essentiels l’un que l’autre. Avis défavorable.

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). Je n’en doute pas, Sébastien Rome est un élu qui a les pieds sur terre et qui est bien ancrée dans son territoire. Il peut donc comprendre qu’un candidat ou un élu engage sa famille, qui doit être protégée. En effet, si nous sommes armés pour supporter les coups, même ceux en dessous de la ceinture, qui nous sont portés, tel n’est pas le cas de nos enfants et de nos conjoints. Il me semble essentiel de protéger la vie privée si l’on veut éviter de décourager l’engagement citoyen.

Mme Edwige Diaz (RN). Je suis étonnée par cet amendement. Chacun connaît la crise des vocations en matière d’engagement citoyen. Un certain nombre de communes, on le sait, n’ont pas de candidat à la fonction de maire. Les raisons de ce phénomène tiennent, entre autres, à la crainte de s’exposer et de voir sa vie privée mise en cause. Nous considérons au RN que l’atteinte à la vie privée et familiale des candidats est inacceptable et doit être sévèrement punie. On remarque, une fois de plus, que les élus de La France insoumise-NUPES préfèrent détourner le regard. Nous serons défavorables à cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL71 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Cet amendement vise à étendre le champ de la circonstance aggravante aux atteintes à la vie privée des proches des candidats et des élus. Là encore, je salue le travail du Sénat. L’article 223-1-1 du code pénal sanctionne la révélation, la diffusion ou la transmission, par quelque moyen que ce soit, d’informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d’une personne permettant de l’identifier ou de la localiser aux fins de l’exposer ou d’exposer les membres de sa famille à un risque direct d’atteinte à la personne ou aux biens que l’auteur ne pouvait ignorer. Il s’agit de cibler une personne en vue de la commission de violences de nature politique. Le droit actuel sanctionne déjà plus durement ces faits lorsque la victime est un élu. L’article 2 ter étend ces sanctions aggravées aux actes commis contre un candidat. Je souhaite explicitement inscrire dans la loi que ces sanctions aggravées s’appliquent également lorsque la victime est un proche d’un candidat à une élection, qu’il s’agisse de ses enfants, de ses parents ou de son conjoint, notamment.

M. Jean-François Coulomme (LFI-NUPES). L’article 2 ter, et en particulier cet amendement, sont attachés au nom de Mme Spillebout, qui a été déboutée d’une plainte qu’elle avait portée contre le magazine Médiacités. Ce dernier avait largement évoqué des faits liés à des membres de sa famille. Nous sommes des personnages publics et, à ce titre, nous savons que nous sommes exposés à ce genre de choses. Que cela vous plaise ou non, nous devons supporter le même traitement médiatique que celui dont peut faire l’objet toute personnalité publique. Je ne suis pas favorable à ce que l’on accorde un traitement de faveur aux élus, surtout pendant les périodes électorales, au cours desquelles on cherche à connaître les candidats.

M. Philippe Gosselin (LR). Il ne s’agit pas d’accorder un traitement de faveur, mais d’éviter un lynchage ! Il est facile de s’attaquer aux conjoints, à la famille, de semer le trouble. On n’a pas besoin de cela en période électorale. On ne peut pas vous laisser dire ce que vous avez dit. Je souscris totalement aux propos de Sébastien Jumel. Certes, nous avons peut-être le cuir un peu tanné. Mais pensons aux milliers de candidats, dans les communes, qui constituent le tissu de la démocratie et veillons, non à les placer au-dessus des lois mais à les protéger, eux et leur famille. Vos propos constituent une incitation à une forme de haine et de lynchage que je désapprouve totalement.

M. Thomas Rudigoz (RE). Les propos qu’a tenus M. Coulomme sont absolument aberrants et dénotent un point de vue à géométrie variable. À Lyon, une de vos collègues de la NUPES a porté plainte à la suite de la divulgation de l’adresse d’une députée et a obtenu, à juste titre, gain de cause au tribunal. Il est essentiel de protéger la vie privée et familiale de ceux qui sont engagés dans le débat démocratique.

Mme Raquel Garrido (LFI-NUPES). Il faut établir une distinction très nette entre les personnes titulaires d’un pouvoir politique, qui doivent agir de manière transparente et rendre des comptes, et leur entourage, qui n’est pas soumis à ces obligations et peut faire l’objet d’une curiosité mal placée, voire d’actes de malveillance. Les proches des personnes engagées en politique doivent bénéficier d’une protection renforcée.

L’amendement fait la part des choses puisqu’il traite de la famille des candidats. Il prend en compte la nature des attaques actuelles, qui peuvent prendre la forme d’un lynchage en ligne. La question est de savoir s’il faut à chaque fois ajouter une disposition spécifique, étant rappelé que la vie privée est protégée par l’article 9 du code civil.

Par ailleurs, on peut se demander si les dispositions proposées éviteront à la victime de devoir engager plusieurs procédures – les unes au titre des infractions de presse, soumises à une prescription courte, les autres, relatives à la protection de la vie privée, auxquelles sont attachés des délais de prescription plus longs. Peut-être, ce faisant, renforceront-elles la protection des parties civiles ?

Le groupe LFI considère que les élus doivent rendre des comptes mais qu’il n’est pas acceptable que la vie privée soit attaquée.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Monsieur Coulomme, je vous remercie d’avoir posé très clairement le débat. J’ai en effet intenté un recours contre une personne malveillante. N’ayant pas obtenu gain de cause en première instance, j’ai fait appel : attendons la décision de la justice. De quoi parlez-vous, en réalité ? Dites-le franchement : on m’a menacée de diffuser, pendant la campagne municipale de Lille, des photos pornographiques qui, prétendument, me représentent avec diverses personnes. Ces photos n’existent pas mais cela a créé une rumeur. Or, la rumeur, vous le savez, a tué des élus. Je continuerai de me battre pour mes droits de femme et pour les droits de toutes les femmes et de tous les hommes dont la probité, la vie personnelle sont mises en cause. Je crois avoir prouvé, depuis deux ans que je suis députée, que je m’investis sur la question de la violence faite aux élus, notamment au côté de Sébastien Jumel, de manière transpartisane. Soyez assuré que mon procès sera terminé lorsque cette loi entrera en application.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL70 de Mme Violette Spillebout et sous-amendement CL103 de Mme Sylvie Bonnet

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Cet amendement a pour objet de créer une circonstance aggravante lorsque l’atteinte à la vie privée est portée contre une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public, titulaire d’un mandat électif public ou candidate à un tel mandat. Il complète l’article 2 ter dans le même esprit, concernant un autre type d’atteinte à la vie privée. Il s’agit de cas dans lesquels il est volontairement porté atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui, soit en captant, enregistrant ou transmettant, sans consentement, des images – vidéos ou photos – ou des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel, soit en captant, enregistrant ou transmettant, par quelque moyen que ce soit, la localisation en temps réel ou en différé d’une personne sans le consentement de celle-ci. Ces faits sont déjà punis d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. Je souhaite que le juge puisse prononcer des peines aggravées.

Mme Sylvie Bonnet (LR). Le sous-amendement vise à protéger les familles des élus et des candidats en créant une circonstance aggravante lorsqu’elles sont victimes d’une atteinte à la vie privée.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Favorable. Je vous remercie pour cette précision.

M. Rémy Rebeyrotte (RE). Hier, la ministre de l’éducation nationale, aujourd’hui, la rapporteure : il faut conseiller à La France insoumise d’arrêter de s’ériger en tribunal et de cesser de traîner des ministres et des députés dans la boue au moyen d’attaques ad hominem. La priorité est de ne pas alimenter, contrairement à ce que vous faites, la machine à insulter et diffamer les élus.

M. Jean-François Coulomme (LFI-NUPES). Je ne crois pas que ce soit La France insoumise qui ait créé les circonstances dans lesquelles votre ministre de l’éducation s’est complètement disqualifiée. Ses propos, qui expriment clairement son mépris pour l’éducation publique, permettent à la France entière de constater l’inadéquation de cette personne à la fonction. Notre groupe n’est nullement responsable de la dégradation de l’image de votre ministre auprès des Français et des professionnels de l’éducation.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.

Elle adopte l’article 2 ter modifié.

Après l’article 2 ter

Amendement CL43 de Mme Mélanie Thomin

Mme Cécile Untermaier (SOC). Nous avons adopté de nombreux textes sur le statut de l’élu au cours des dernières années, mais ils sont tellement éparpillés qu’on ne sait plus exactement ce que recouvre ce statut. La priorité doit être d’insérer un corpus législatif, comportant un titre particulier, au sein du code général des collectivités territoriales (CGCT). L’amendement vise à ajouter une circonstance aggravante lorsque l’élu est menacé pour faire barrage à un projet d’intérêt public.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je vous propose de retirer votre amendement car il me paraît satisfait par l’article 433-3 du code pénal, qui réprime le fait d’user de menaces ou de pressions pour faire renoncer à un projet politique.

Mme Cécile Untermaier (SOC). Je retire l’amendement, mais je rappelle que les maires de Callac, Saint-Brévin-les-Pins, Beyssenac et Bélâbre ont démissionné à la suite des menaces dont ils ont fait l’objet.

L’amendement est retiré.

 

Titre II : AMÉLIORER LA PRISE EN CHARGE DES ÉLUS VICTIMES DE VIOLENCES, AGRESSIONS OU INJURES DANS LE CADRE DE LEUR MANDAT OU D’UNE CAMPAGNE ÉLECTORALE

Article 3 (art. L. 2123-35, L. 2573-10, L. 3123-29 et L. 4135-29 du code général des collectivités territoriales) : Octroi automatique de la protection fonctionnelle aux maires, aux élus municipaux les suppléant ou ayant reçu délégation, victimes de violences, de menaces ou d’outrages

Amendements CL3 et CL6 de M. Thibault Bazin

M. Thibault Bazin (LR). L’amendement CL3 vise à imposer à tout établissement public de coopération intercommunale (EPCI) d’accorder une protection fonctionnelle à son président et à ceux de ses vice-présidents ayant reçu délégation, lorsqu’ils sont victimes de violences, de menaces ou d’outrages à l’occasion ou du fait de leurs fonctions. En effet, un nombre croissant de présidents ou de vice-présidents d’EPCI n’exercent aucune fonction exécutive au sein d’une commune. L’amendement CL6 inclut les élus des EPCI ayant reçu une délégation.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je vous propose de retirer vos amendements. En effet, ils sont satisfaits par plusieurs articles du CGCT, qui prévoient que les dispositions relatives à la protection fonctionnelle applicables aux élus municipaux s’appliquent aussi aux élus municipaux membres des EPCI. En outre, l’article 6 de la proposition de loi contient des dispositions qui visent à combler le vide juridique concernant les membres des communautés de communes. Si une lacune demeurait, nous serions prêts à étudier la question en vue de la séance.

M. Thibault Bazin (LR). Je retire les amendements. Je précise que j’avais déposé des amendements de même nature, qui ont été jugés irrecevables, concernant les membres du conseil départemental. Pourrait-on vérifier qu’il n’y a pas de lacune juridique les concernant ?

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Nous allons y veiller : c’est notre objectif commun. N’hésitez pas à retransmettre vos propositions d’amendements afin que nous puissions en discuter avec le Gouvernement avant le passage en séance, les 6 et 7 février.

Les amendements sont retirés.

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement CL34 de Mme Edwige Diaz.

La commission adopte l’article 3 non modifié.

Après l’article 3

Amendements CL52 de M. Paul Molac et CL38 de M. Éric Pauget (discussion commune)

M. Paul Molac (LIOT). L’amendement CL52 vise à inscrire les sommes nécessaires à la protection fonctionnelle des élus dans la liste des dépenses obligatoires de la commune. Cela rendrait ce droit plus effectif, tant pour les élus que pour les agents. Cet amendement est issu d’une proposition de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF).

M. Éric Pauget (LR). L’amendement CL38, issu d’une proposition de l’AMF, vise à s’assurer de l’effectivité de la protection fonctionnelle en rendant cette dépense obligatoire et en garantissant les crédits afférents.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Demande de retrait. En effet, la commune a l’obligation d’assurer les dépenses de protection fonctionnelle des élus exerçant des fonctions exécutives. Vos amendements sont donc satisfaits, et les associations d’élus peuvent être rassurées. Nous verrons si nous réussissons à étendre la liste des bénéficiaires de la protection la semaine prochaine.

M. Éric Pauget (LR). Je retire mon amendement, mais sachez que l’AMF nous demande expressément d’inscrire cette disposition. Cela mérite d’être retravaillé en vue de la séance.

M. Paul Molac (LIOT). Je retire également mon amendement. Cela étant, si l’AMF nous l’a demandé, c’est qu’il y a une difficulté.

Les amendements sont retirés.

Article 4 (art. L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales) : Élargissement du dispositif de compensation par l’État des coûts liés à l’obligation de contracter une assurance pour la protection des élus municipaux

Amendements de suppression CL89 de Mme Violette Spillebout, CL22 de M. Sébastien Rome, CL32 de Mme Edwige Diaz et CL83 de M. Jean-Claude Raux

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Il faut éviter les lois inutilement bavardes. L’article 4 étend aux communes de moins de 10 000 habitants la compensation par l’État des coûts liés à l’obligation de contracter une assurance pour couvrir le risque associé à la protection fonctionnelle des élus. Or, cette disposition, qui est de nature à sécuriser les finances des collectivités territoriales, est contenue à l’article 247 de la loi de finances pour 2024, qui est entré en vigueur au 1er janvier. D’après la direction générale des collectivités locales (DGCL), 2 216 communes supplémentaires peuvent désormais bénéficier de cette compensation, ce qui représente un coût annuel supplémentaire pour l’État d’environ 300 millions. Je vous propose donc de supprimer l’article 4.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Nous avions relevé que cette disposition était satisfaite. Cela étant, nous sommes favorables à un certain nombre d’articles, au sein du titre II, qui visent à accompagner les élus et non à aggraver les peines.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 4 est supprimé.

Article 5 (art. L. 2 123-35 du code général des collectivités territoriales) : Compétence de l’État dans l’octroi de la protection fonctionnelle aux élus agissant en qualité d’agent de l’État

Amendement CL51 de M. Paul Molac

M. Paul Molac (LIOT). Cet amendement vise à préciser que, lorsqu’il souhaite bénéficier de la protection fonctionnelle, l’élu municipal agissant en qualité d’agent de l’État doit adresser sa demande au préfet.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis favorable à cet amendement. L’article 5 clarifie le droit en précisant que l’État accorde aussi sa protection aux élus qui sont victimes de violences lorsqu’ils agissent en qualité d’agent de l’État. Dans les faits, c’était déjà le cas, mais cela constitue une clarification utile. Vous souhaitez ajouter que, dans ce cas de figure, l’élu municipal adresse sa demande au préfet. Cette précision renforcera la rapidité et l’efficacité de la procédure.

M. Philippe Gosselin (LR). Cela n’apporte pas seulement un surcroît d’efficacité mais marque aussi la prise en compte du dédoublement fonctionnel. Le maire est en effet à la fois agent de l’État dans la commune et président de l’exécutif. Je suis tout à fait favorable à cette précision.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 5 modifié.

Article 6 (art. L. 5214-8 et L. 5842-21 du code général des collectivités territoriales) : Application des dispositions relatives à la protection fonctionnelle et à l’amoindrissement de la responsabilité des élus locaux aux élus des communautés de communes

La commission adopte l’article 6 non modifié.

Après l’article 6

Amendement CL45 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette (SOC). Cet amendement vise à limiter l’engagement de la responsabilité pénale personnelle des élus pour homicide ou blessure involontaire aux cas de manquement délibéré à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement. Si les élus locaux doivent évidemment assumer une responsabilité personnelle en cas de dommage lié à un manquement de leur part, ils ne sauraient être tenus responsables pénalement de manquements à des obligations de prudence ou de sécurité qui ne seraient pas manifestement délibérés. Nous proposons également de permettre la recherche de la responsabilité pénale d’une collectivité locale en tant que personne morale dans tous les cas et non plus seulement pour les faits commis dans le cadre d’activités susceptibles de délégations de service public.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. La question de la responsabilité pénale des élus est un sujet très important, notamment lorsqu'ils sont les auteurs indirects du délit. Nous pensons typiquement à l'histoire du maire dont la responsabilité pénale serait engagée automatiquement par la chute d'un panneau de basket consécutive à un défaut d’entretien et qui blesserait quelqu’un.

La loi Fauchon du 10 juillet 2000 a institué un régime de responsabilité pénale spécifique pour les auteurs indirects de délits, qu’ils soient ou non élus. Ainsi, depuis 2000, lorsqu’ont lieu des délits non intentionnels, la responsabilité pénale n'est applicable que dans deux cas de figure : soit l’auteur a violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement ; soit trois éléments sont réunis : l’existence d’une « faute caractérisée », l’exposition d’autrui à un risque que l’auteur ne pouvait ignorer du fait de cette faute, la gravité particulière de ce risque. Vous souhaitez supprimer ce deuxième cas. Je tiens à vous rassurer. D’abord ce régime de responsabilité pénale fait l'objet d'un large consensus dans son application et semble bien accepté par tous. Selon le rapport 2022 de l’observatoire de la SMACL (la Société mutuelle d'assurance des collectivités locales) des risques de la vie territoriale, les infractions non intentionnelles faisant l’objet de poursuites sont marginales : nous n’en comptons que cinquante-six pendant la période 2014-2020, soit 3 % des poursuites pénales contre les élus. Cela montre que l’objectif d’allégement de la responsabilité des décideurs publics locaux que poursuivait la loi Fauchon a été atteint.

En outre, la jurisprudence fait apparaître que le juge apprécie avec justesse l'application de ces dispositions légales. Pour déterminer l'existence d'une faute caractérisée, il examine le degré de connaissance du risque par l'élu. Il apprécie aussi in concreto si ce dernier a accompli les diligences normales, le degré de gravité de la faute et son lien avec le dommage.

Enfin, si cette loi a été conçue pour les élus locaux, sa portée est générale : elle concerne toutes les personnes physiques qui commettent un délit non intentionnel. Il semblerait donc disproportionné de modifier l'ensemble du régime de responsabilité pénale en cas de faute indirecte.

Je demande le retrait de cet amendement.

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). Je souscris pour ma part à l’esprit et à la lettre de l’amendement. J’ai en tête quelques cas d’élus auxquels on a cherché querelle alors qu’ils n’avaient commis aucune faute.

Je vous soumets un exemple : dans une rue piétonne, le conducteur d’un camion de ramassage des poubelles roule en marche arrière. Une personne fragile, saoule, se jette alors sous ce camion et meurt écrasée. Le maire a été mis en examen et a dû faire la démonstration que, à chaque fois qu’un conducteur de camion benne avait pris son poste, il s’était assuré que les dispositions du code de la route lui avaient été rappelées.

Certes, on peut considérer que le juge, faisant usage de sa liberté d’appréciation, considérera in fine qu’aucune faute n’a été commise. Il n’en demeure pas moins que la mise en examen d’un élu sur un tel fondement peut le déstabiliser lorsqu’il doit engager sa responsabilité.

M. Philippe Gosselin (LR). La loi Fauchon est intervenue après la mise en cause de plusieurs maires s’agissant de différents équipements collectifs. Elle répondait à un vrai besoin. Vous avez raison, madame la rapporteure, de souligner que, aujourd'hui, après une période de flottement la jurisprudence est plutôt favorable et honnêtement entendue.

Quelques cas problématiques demeurent néanmoins. L’amendement permettrait d’écarter toute difficulté. Je le soutiens donc.

M. Stéphane Delautrette (SOC). La rédaction proposée ne sort pas de notre chapeau : elle a fait l’objet d’un travail avec l’Association des maires de France (AMF) et l’Association des petites villes de France (APVF). Je l’avais d’ailleurs reprise dans la proposition de loi visant à améliorer l’attractivité des mandats locaux que nous avons déposée en novembre.

Il existe encore des situations problématiques que l’adoption de cet amendement permettrait d’éviter. Je ne le retirerai donc pas.

La commission rejette l’amendement.

Article 7 (art. L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales) : Mesure de coordination

Amendement CL98 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout, rapporteure. L'article L. 127-1 du code des communes de la Nouvelle Calédonie renvoie, comme l'article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales, à l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, abrogé par ordonnance le 1er mars 2022, pour les modalités d'application de la protection fonctionnelle prise en charge par l'État, quand l'élu agit en qualité d'agent de l'État.

L'amendement propose donc d'effectuer la coordination prévue par l'article 7, c'est-à-dire de renvoyer aux nouveaux articles L. 134-1 à L. 134-12 du code général de la fonction publique qui traitent de la protection fonctionnelle des agents publics, afin que cette dernière soit complète et pertinente.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL90 de Mme Violette Spillebout.

Elle adopte l’article 7 modifié.

Article 8 (art. L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales): Prise en charge des restes à charge ou des dépassements d’honoraires au titre de la protection fonctionnelle

La commission adopte l’article 8 non modifié.

Article 9 (art. L. 252-3 [nouveau] du code des assurances) : Faculté de saisine du bureau central de tarification par les élus pour l’assurance des permanences électorales et des lieux accueillant des réunions électorales

La commission adopte l’amendement rédactionnel CL93 de Mme Violette Spillebout.

Amendement CL39 de Mme Élodie Jacquier-Laforge

Mme Élodie Jacquier-Laforge (Dem). Cet amendement vise à couvrir un cas de figure qui ne l’est pas encore : celui d’un élu dont le contrat d’assurance de la permanence aurait été résilié à l’initiative de la compagnie d’assurance concernée sans raison valable, et qui aurait des difficultés à en souscrire un nouveau auprès d’une autre compagnie d’assurance du fait de sa radiation. L’amendement permettra à un élu rencontrant ce problème de saisir le Bureau central de tarification (BCT) afin de continuer d’être assuré. Il comble ainsi un vide juridique.

Même si ce n’est pas le sujet du jour, je rappelle que certaines collectivités ne sont actuellement pas assurées puisque leurs contrats ont été résiliés et qu’elles doivent s’assurer elles-mêmes. Nous devons nous mobiliser pour mettre fin à de telles situations.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je propose le retrait de cet amendement, qui est d’ores et déjà satisfait, si vous faites bien référence à l'assurance de la permanence ou du local accueillant des réunions électorales. En effet, l'article 9 permet à tout élu ou candidat, après le refus d'au moins deux compagnies d’assurance, de saisir le BCT pour qu'il fixe le tarif auquel une entreprise d'assurance est tenue de garantir le risque à couvrir.

Si toutefois vous faites référence à d’autres types d’assurances, alors votre amendement n’est pas assez précis pour que je sois favorable à son adoption.

L’amendement est retiré.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL94, CL91 et CL92 de Mme Violette Spillebout.

Elle adopte l’article 9 modifié.

Article 10 (art. L. 52‑18‑1, L. 52-18-2 et L. 52-18-3 du code électoral) : Élargissement du bénéfice de la protection fonctionnelle aux candidats aux élections et remboursement des frais de sécurisation engagés par les candidats

Amendement CL95 de M. Jean-Claude Raux.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Il s’agit par cet amendement d’inscrire les dispositions du présent article dans le chapitre du code électoral consacré aux dépenses électorales. Il est issu des recommandations du rapport d’information de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur le statut de l’élu local de M. Jumel et de Mme Spillebout.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. L’argument est bon mais je suis défavorable à l’amendement. En effet, la création d'un chapitre V ter nous a été recommandée par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) elle-même. Les articles que nous créons concernent tous les candidats alors que les dispositions du chapitre V bis ne s'adressent qu'à certains d'entre eux – ceux qui sont soumis à une obligation de dépôt de compte de campagne, c'est-à-dire qui se présentent dans des communes de plus de 9 000 habitants.

J'ajoute que je proposerai en séance un amendement technique précisant quelles dispositions du chapitre V bis ont vocation à s'appliquer dans le cadre du chapitre V ter.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL72 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Il importe de préciser la notion de candidat à une élection. Cet amendement propose de la définir, au sens du chapitre V ter que nous créons.

Plusieurs éléments de définition, élaborés avec la CNCCFP, me paraissent devoir être retenus pour justifier d’une protection fonctionnelle ou du remboursement de dépenses de sécurité : une durée maximale de six mois jusqu’à l'élection, de sorte qu’il soit impossible de déclarer des dépenses antérieures au début de cette période ; un signe officiel de candidature pendant cette période de six mois – soit une déclaration publique du candidat, soit la déclaration d'un mandataire financier ; l’enregistrement auprès de la préfecture de la candidature ; et, enfin, la participation effective du candidat à l'élection.

Je suis tout à fait ouverte à des améliorations de cette définition en séance publique afin de la rendre encore plus opérante, mais il me paraît important que nous posions ces premiers jalons dès à présent.

La commission adopte l’amendement.

Amendements CL73 de Mme Violette Spillebout et CL96 de M. Jean-Claude Raux (discussion commune)

Mme Violette Spillebout, rapporteure. L’amendement CL73, également élaboré avec la CNCCFP, précise la date à laquelle s'achève la période pendant laquelle le candidat peut bénéficier de la protection fonctionnelle et du remboursement de ses dépenses de sécurité. Cette période doit s'achever à la date de la tenue du tour des élections auquel il prend part et non à la date de dépôt, plus tardive, de son compte de campagne.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Je retire l’amendement CL96 au profit de l’amendement CL73 de Mme la rapporteure.

L’amendement CL96 est retiré.

La commission adopte l’amendement CL73.

En conséquence, les amendements identiques CL24 de M. Sébastien Rome et CL47 de M. Stéphane Delautrette tombent.

Amendement CL25 de M. Sébastien Rome

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES).  L’amendement CL24 tendait à supprimer la prise en charge des dépenses de sécurité personnelles et privées des candidats au titre des frais de campagne. L’amendement CL25 prévoit qu’un candidat inquiété dans le cadre de sa campagne électorale sera protégé par des fonctionnaires de police ou de gendarmerie. La protection par des services de sécurité privés concernera davantage les élus des grandes villes.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis défavorable à votre amendement, bien que vous fassiez plusieurs constats pertinents. La nécessité de protéger un candidat ou un élu n’a rien à voir avec la taille de la ville dans laquelle il officie mais tout avec l’intensité de la menace qui pèse sur lui ou sur sa famille. Certes, on peut imaginer qu’une telle menace soit plus forte dans une grande ville, mais elle peut tout à fait exister ailleurs. J’en veux pour preuve ce qui est arrivé à la maire de Plougrescant, une commune de 1 200 habitants, qui a fait l’objet une tentative d’homicide – les freins de sa voiture ont été sectionnés – devant son domicile, en raison d’un projet municipal. La violence est en mutation et notre proposition de loi tend à le prendre en compte.

Notez qu’il est déjà possible, dans les cas de menace les plus graves, et notamment pour les élections présidentielles, par exemple, que la sécurité des candidats soit prise en charge par les services de l’État directement. Cela passe par une évaluation de la situation par la préfecture et par une saisine de l'UCLAT (unité de coordination de la lutte anti-terroriste). Un officier de protection peut être mis à la disposition de l'élu dans les cas les plus graves.

Notre proposition de loi prévoit des dispositions répondant à des menaces de moindre intensité mais nécessitant tout de même de prendre des mesures – poster un gardien devant un local de campagne régulièrement dégradé ou installer un dispositif de vidéoprotection au domicile du candidat dont la famille est visée, par exemple.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). L’élu bien ancré dans son territoire pense que votre proposition suscitera parmi les élus le sentiment, déjà bien connu, d’être abandonnés par l’État. Aucun maire, aucun candidat de petite commune ne songera à recourir à des services privés de protection plutôt que de s’adresser à la gendarmerie locale. C’est l’État qui doit intervenir.

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). Dans les petites communes, l’obligation de déposer un compte de campagne n’existe pas. Il est donc évident qu’un candidat ou un élu menacé dans le cadre de sa campagne, dans une telle commune, saisira le procureur de la République ou le sous-préfet et devra faire l’objet d’une protection assurée par la police ou la gendarmerie.

Avec l’amendement CL74, il sera possible, par exemple, d’assurer la sécurité d’un meeting qui est organisé dans un contexte difficile. En période électorale, la force publique n’est pas en mesure d’assurer la sécurité de tous les événements de la campagne. Il est donc nécessaire d’ouvrir la possibilité de prendre en charge, au titre des frais de campagne, les dépenses de sécurité inhérentes à l’exercice d’une démocratie apaisée.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL74 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Là encore, cet amendement procède d’un travail de fond effectué avec la CNCCFP pour rendre encore plus précise la proposition de loi du Sénat.

Certaines dépenses de sécurité sont déjà prises en charge par le biais des remboursements effectués au titre des comptes de campagne. Il s'agit notamment des dépenses ayant trait à la sécurité des réunions électorales ; à la sécurité lors des déplacements et déambulations électoraux du candidat ; aux déplacements des agents de sécurité ; concernant les permanences électorales, aux caméras de surveillance et aux prestations de contre-mesure ; enfin aux prestations de sécurité informatique.

Mon amendement vise à sécuriser juridiquement la doctrine de la CNCCFP. Nous créons des droits supplémentaires – en particulier au profit des élus n’ayant pas l’obligation de déposer de compte de campagne – mais ces droits supplémentaires ne doivent fragiliser ni le droit et la jurisprudence existants, ni les pratiques de la CNCCFP.

Je profite de cet amendement pour préciser que je souhaite élargir le champ des dépenses prises en charge, notamment pour que la protection du domicile personnel et des proches puisse être remboursée. L'article 40 m'empêche de déposer de tels amendements mais j'ai demandé au Gouvernement de le faire en séance. Je profite de cette réunion pour le réaffirmer solennellement.

M. Stéphane Delautrette (SOC). La raison pour laquelle nous proposions, par l’amendement CL47, de supprimer la prise en charge par l’État des frais engagés par les candidats pour leur sécurité personnelle à l’occasion de leur campagne était précisément que cette prise en charge était impossible pour les élus en exercice. Je suis donc satisfait d’entendre les propos de Mme la rapporteure. Nous devrons l’accompagner dans sa tentative de convaincre le Gouvernement d’agir sur ce point.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL105 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Cet amendement précise le mécanisme de mise en œuvre du remboursement des dépenses de sécurité des candidats menacés. Il prévoit la mise en place d'un référentiel national et une évaluation de l'intensité de la menace par le préfet. Cela me paraît, ainsi qu’à la CNCCFP et aux préfets que nous avons auditionnés, la méthode la plus pertinente puisqu'elle permet de répondre au plus près, de manière pragmatique, aux besoins du candidat, par des évaluations équitables et transparentes répondant à un niveau de menace inférieur à ceux qui requerraient l’intervention de l’UCLAT.

La commission adopte l’amendement.

L’amendement CL84 de M. Jean-Claude Raux est retiré.

Amendement CL37 de Mme Edwige Diaz

Mme Edwige Diaz (RN). Alors que nous nous accordons tous sur l’importance des dispositions proposées, l’article 10 n’entrerait en vigueur qu’un an après la promulgation du texte. C’est beaucoup trop tard. Les élections municipales approchent et nous avons déployé des dispositifs visant à assurer la sécurité des candidats. Plus tôt la loi s’appliquera, mieux ce sera.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis défavorable à cet amendement. Le délai d'entrée en vigueur voté par nos collègues sénateurs me paraît de bon sens pour permettre la mise en œuvre de ces mesures et notamment la prise des textes réglementaires.

Appliquer ce dispositif immédiatement aux élections européennes ne nous semble pas envisageable. En revanche, le texte a bien pour objectif la protection de l’engagement des élus et un choc d’attractivité qui permettra aux candidats d’être rassurés et nombreux dans toutes nos communes, pour les prochaines élections municipales. Ces dispositions contribueront donc à la protection du débat démocratique en 2026.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 10 modifié.

Titre III : RENFORCER LA PRISE EN COMPTE DES RÉALITÉS DES MANDATS ÉLECTIFS LOCAUX PAR LES ACTEURS JUDICIAIRES ET ÉTATIQUES

Article 11 (art. 43 du code de procédure pénale) : Dépaysement des affaires mettant en cause un maire ou un adjoint au maire dans l'exercice de leur mandat

Amendement CL48 de M. Stéphane Delautrette

Mme Cécile Untermaier (SOC). Cet amendement appelle plutôt un débat qu’une décision. Il a pour objet de renforcer l’information des élus en imposant au procureur de la République territorialement compétent d’agir dans un délai permettant à l’élu de vivre plus facilement dans son territoire. L’élu ayant déposé une plainte du fait de dommages subis dans le cadre de ses fonctions devra être informé des suites données à cette plainte dans un délai de trois mois.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis favorable à votre amendement sur le fond, mais sa rédaction me paraît poser des difficultés techniques dans le détail desquelles je ne rentrerai pas. Je vous propose donc de le retirer et de le retravailler pour la séance. En tout état de cause, l’information des maires sur le bilan du traitement de la répression des atteintes aux élus est primordiale au regard de notre objectif.

Mme Cécile Untermaier (SOC). La Chancellerie a publié une circulaire demandant aux procureurs d’agir rapidement. Cette circulaire a eu des effets concrets dans les territoires, que j’ai pu observer par moi-même.

Nous devons pouvoir agir sans considérer qu’un dispositif législatif distinguant le traitement par la justice de la plainte d’un élu de celui qu’elle ferait de la plainte de quelqu’un qui ne le serait pas pose un problème constitutionnel. Nous devons examiner ce point avec le concours de la Chancellerie, qui émet quelques réserves à cet égard, mais qui a la volonté de garantir le soutien apporté aux élus.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 11 non modifié.

Article 12 (L. 132‑3 du code de la sécurité intérieure) : Renforcement de l’information du maire sur les suites judiciaires données aux infractions constatées sur son territoire

Amendements identiques CL54 de M. Sébastien Jumel et CL75 de Mme Violette Spillebout

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). Lors des auditions que nous avons organisées, force est de constater que la fluidité de l’information ayant trait au suivi des plaintes déposées par les élus est un sujet de préoccupation. Des départements ou des parquets ont mis en place des conventions tripartites améliorant cette fluidité. L’amendement tend à généraliser ce dispositif vertueux.

Mme Violette Spillebout (RE). Mon avis est favorable. Je me suis d’ailleurs permis de déposer un amendement identique.

La commission adopte les amendements.

Elle adopte l’article 12 modifié.

Après l’article 12

Amendement CL80 de Mme Marie Pochon

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Dans le souci de renforcer les relations entre les maires et le parquet, cet amendement tend à établir la possibilité d’associer le procureur de la République territorialement compétent à l’écriture des conventions passées entre les maires et l’État relatives aux actions et informations ayant trait à l’insécurité.

Il s’agit tout simplement d’inviter le parquet à la table de discussion, ce qui pourra mener, selon les besoins des communes, à des pratiques nouvelles, telles qu’en cite la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) dans le rapport d’information de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur le statut de l’élu local. Elle cite par exemple l’organisation de réunions d’information annuelles à destination des maires par le parquet de Valenciennes ou encore l’établissement par le parquet d’Amiens d’un protocole facilitant les contacts.

A minima, cette mesure permettra aux maires de prendre connaissance du référent élu au sein du parquet, ce qui contribuera à renforcer la compréhension et la prévention des situations d’insécurité.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis très favorable à l’ensemble de votre démonstration sur la nécessité d’établir un lien plus fort entre élus locaux et procureur. Je vous propose néanmoins de retirer cet amendement au profit des amendements identiques CL54 et CL75 qui poursuivent le même objectif.

L’amendement est retiré.

Article 13 (supprimé) (L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales) : Espace de communication réservé au procureur de la République dans les bulletins municipaux

Amendement CL76 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout, rapporteure. J'ai souhaité déposer cet amendement de rétablissement de l'article 13 qui avait été supprimé au Sénat contre l'avis de la rapporteure. Il me semble en effet que tout ce qui peut favoriser une meilleure information des maires et de nos concitoyens quant aux suites judiciaires données aux affaires de la commune est de nature à accroître la confiance dans la justice. L'article 13 va précisément dans ce sens. Nous l'amenderons peut-être en séance publique, mais la démarche semble avoir toute sa place dans cette proposition de loi.

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Cet amendement pose une question de fond : que sont les affaires de la commune ? S’agit-il des affaires dans lesquelles la commune s’est elle-même portée partie civile parce qu’elle est touchée par des dégradations ou que ses élus sont concernés ? Ou s’agit-il de n’importe quelle affaire pénale concernant un des administrés de la commune ? Ce n’est pas la même chose ! Je ne suis pas favorable à ce que les maires aient connaissance de toutes les procédures judiciaires qui se déroulent dans leurs communes.

Dans le moment politique que nous vivons, sous couvert de bons sentiments, les maires deviennent les réceptacles de toutes sortes d’informations, fournies notamment par des services de renseignement. Il en a été ainsi de l’identité de personnes fichées dans le FSPRT (Fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste). On prévoit à présent que les maires puissent exclure les enfants harceleurs de leurs communes.

Je pense pour ma part que le maire ne doit pas tout et ne peut pas tout. Chacun doit rester dans son rôle.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Il y a erreur sur la cible, qui n’est autre que les habitants des communes. Publier une information dans le bulletin d’une commune, c’est s’assurer que l’ensemble des habitants y ait accès. Lorsque le procureur de la République fait une conférence de presse et rend publiques des informations, il est contraint par le code de procédure pénale qui ne l’autorise à divulguer que certains types d’informations et l’oblige à en garder d’autres secrètes. Les obligations légales et déontologiques qui s’appliquent à lui en vue d’une publication dans le bulletin d’une commune sont identiques.

Il est seulement question de rendre plus accessible le suivi des plaintes judiciaires relatives à la vie de la commune. Au regard des nombreuses expressions que nous avons pu entendre aujourd'hui et qui se sont accordées sur la nécessité d’un rapprochement entre élus, citoyens et justice, de procédures judiciaires plus rapides et d’une meilleure connaissance des suites données aux plaintes, je crois que cet amendement promeut une juste transparence.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 13 est ainsi rétabli.

Article 14 (L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales) : Composition des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance et obligation annuelle de présence de certains membres

Amendement CL57 de M. Sébastien Jumel

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). Cet amendement est le premier d’une série d’amendements issus du travail que j’ai mené avec Mme la rapporteure sur la nécessaire densification du rôle du maire dans l’animation des contrats locaux de prévention de la délinquance ou des contrats locaux de sécurité, afin de donner de la substance au binôme préfet-maire dans la gestion des problématiques afférentes.

L’amendement CL57 vise à assortir la création d’un conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) de la désignation d’un agent coordinateur auprès du maire pour faciliter l’exercice de cette mission d’animation.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis favorable à votre amendement, qui va dans le sens des préconisations de Stéphane Peu et Rémy Rebeyrotte, formulées dans le cadre de leur mission flash de 2020 sur l’évolution et l’amélioration des conseils de sécurité et de prévention de la délinquance (CSPD). Leur rapport soulignait, en effet, « le rôle central joué par les coordonnateurs dans le succès de ces CSPD ».

J'émets néanmoins une petite réserve dans la mesure où il me semble, en examinant le rapport de nos collègues, que la difficulté constatée tient à des problèmes de recrutement et, en particulier, de statut, de formation et d’attractivité de ces postes, que l'obligation de désigner un agent ne suffira pas à résoudre.

Avis néanmoins favorable, votre amendement allant, comme je le disais, dans le bon sens.

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Je suis également favorable à cet amendement, car même certaines petites intercommunalités n’ont pas les moyens financiers de se doter d’un tel coordinateur à temps plein ou à temps partiel. Pourtant, il est nécessaire de mettre en place un suivi pour que les CLSPD ne soient pas seulement des coquilles vides, comme c’est le cas dans de nombreux endroits.

Cela étant, nous ne pourrons pas faire l’économie d’un débat sur la nécessaire clarification des rôles des différents acteurs. Dans les CLSPD siègent le représentant de la collectivité concernée, commune ou intercommunalité, divers acteurs locaux, des policiers et des gendarmes et, du moins sur le papier, le parquet. Mais ce dernier n’est pas souvent représenté dans les CSPD en raison de la faiblesse de ses moyens. Or c’est le garde des Sceaux, et donc les procureurs de la République, qui conduisent la politique pénale, selon notre Constitution. Je ne voudrais pas que le ministère de l’intérieur, les policiers et les gendarmes, soient finalement amenés à conduire la politique pénale, ce qui serait un non-sens constitutionnel.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL26 de M. Sébastien Rome

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Les CLSPD ont pour principe d’agir en faveur non seulement de la répression mais aussi de la prévention. À ce titre, cet amendement tend à faire des représentants d’associations, travaillant dans les domaines de la prévention, de l’aide aux victimes ou encore de l’action sociale, des membres de droit des CISPD (conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance) et des CLSPD.

Mme Violette Spillebout (RE). Mon avis est défavorable. Il est néanmoins intéressant de se poser la question du fonctionnement des CLSPD. Vous faites bien de rappeler le rôle des associations et des établissements, qui doivent être intégrés par les maires et les procureurs au fonctionnement des CLSPD.

Toutefois, faire de certains de leurs membres, dont la liste ne peut être précisément établie en fonction des situations locales, des membres de droit des CLSPD risque de rigidifier leur fonctionnement, qui doit demeurer à l’échelon local et préserver ses capacités d’adaptation.

Je tiens à souligner que notre responsabilité collective est certes de légiférer pour garantir la présence du parquet, des élus locaux et des associations dans les CLSPD, mais aussi de permettre que soient bel et bien organisées des réunions, qui fassent l’objet de comptes rendus et permettent l’établissement de plans d’action. À Lille, le CLSPD ne s’est pas réuni depuis deux ans.

Avis défavorable, donc.

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). L’amendement fait des représentants d’association des membres de droit des CLSPD en laissant une grande latitude dans leur désignation. Ces conseils ne doivent pas se résumer à un dialogue entre la préfecture et le maire – un trilogue quand le parquet est représenté. La société civile y a toute sa place, c’est l’essence même des CLSPD.

Alors que nous assistons à une explosion des groupes locaux de traitement de la délinquance (GLTD), qui sont à la main du parquet, nous devons nous assurer que chacun reste dans son rôle pour ne pas entretenir la concurrence entre les dispositifs,

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL27 de M. Sébastien Rome

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Pour rapprocher les citoyens des décisions publiques et des élus, il est proposé de désigner des citoyens tirés au sort comme membres de droit des CLSPD. J’en ai fait l’expérience concluante dans ma commune.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Avis favorable. Il est essentiel de mettre l’usager au cœur des politiques publiques. Nous ne le faisons pas suffisamment au niveau local. L’usager doit être associé dès la conception et pas seulement dans les derniers mois, lorsque le projet est soumis à la concertation.

La sécurité est une préoccupation quotidienne des habitants. Dans ma ville, j’avais souhaité que les conseillers de quartier prennent part aux réunions du CLSPD et cela m’a été refusé. L’évolution de la gouvernance est donc bienvenue. Il faudra certainement préciser par décret les modalités de la participation des citoyens.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL55 de M. Sébastien Jumel

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). L’amendement a pour objet d’autoriser la présence de droit d'un représentant des groupes locaux de traitement de la délinquance (GLTD) au sein des CLSPD pour garantir la fluidité de l’information.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis favorable à cet amendement comme à toutes les propositions de M. Jumel. Il y est écrit « le cas échéant », mais il conviendra sans doute de préciser, en vue de la séance, les cas dans lesquels la présence d’un représentant du GLTD est admise.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL58 de M. Sébastien Jumel

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). Afin de combler une lacune juridique, l’amendement vise à associer au conseil les maires des communes de moins de 5 000 habitants limitrophes de la commune dotée d’un CLSPD. En effet, cela se pratique déjà, notamment à Dieppe.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis favorable à l’amendement, d'autant plus que l’association des maires de communes de moins de 5 000 habitants est présentée comme une possibilité, en tant que de besoin et selon les particularités locales.

La sécurité n’a pas de frontière. Pourtant nous connaissons les difficultés que posent parfois les frontières municipales à la police lancée à la poursuite d’un délinquant à travers une agglomération. Des conventions doivent être signées pour y remédier.

M. Ugo Bernalicis (LFI-NUPES). Je suis dubitatif. Soit il faut créer un conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance (CISPD) dont le territoire coïncide avec le périmètre d’intervention de la police ; soit il faut revoir l’organisation de proximité de la police nationale pour l’adapter à la géographie communale.

La commission adopte l’amendement.

Amendements CL29 et CL28 de M. Sébastien Rome

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). L’amendement CL29 a pour but de rendre publics les comptes rendus des réunions des CLSPD tandis que le CL28 vise à ouvrir au public lesdites réunions. Ce sont deux bonnes manières de raffermir le lien entre la République et les citoyens.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis défavorable aux deux amendements. Vous connaissez mon attachement à la transparence des débats, mais les échanges au sein des CLSPD portent souvent sur des informations de sécurité confidentielles. Il me semble donc dangereux de rendre public le contenu des discussions. Il faut laisser au maire le soin d’informer la population sur les sujets traités par le CLSPD.

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). Nous ne connaissons sans doute pas les mêmes CLSPD. Celui que j’ai présidé s’intéressait à la politique générale de sécurité et de prévention, pas à des cas particuliers. Lorsqu’une vingtaine de représentants sont autour de la table, il est difficile de garantir la confidentialité.

M. Éric Poulliat (RE). Il existe des CSLPD-R, dédiés à la radicalisation, sujet sur lequel la discrétion est de mise.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. L’ordre du jour des CLSPD varie peut‑être selon les communes. Il est important que l’activité et les objectifs des conseils donnent lieu à un compte rendu annuel devant le conseil municipal. Je vous invite à déposer un amendement en séance en ce sens. Trop souvent, les acteurs de la sécurité se renvoient la balle et déplorent le manque de coordination. Il faut mettre en lumière les efforts qui sont faits pour y remédier.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CL56 de M. Sébastien Jumel

M. Sébastien Jumel (GDR-NUPES). Il s’agit de reconnaître aux maires des communes d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) le statut de membre du CISPD.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis favorable à l’amendement, contrairement à la rapporteure du Sénat qui a écarté dans son rapport cette hypothèse en raison de l'obligation de présence de chacun des maires au moins une fois par an. Cette contrainte me paraît pouvoir être surmontée. Les maires des communes de l'EPCI sont les premiers concernés, les habitants leur seront reconnaissants de leur participation.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 14 modifié.

Après l’article 14

Amendement CL99 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination juridique, destiné à garantir l'application de la future loi dans les territoires ultramarins.

La commission adopte l’amendement. L’article 15 est ainsi rédigé.

Amendements CL87 et CL88 de Mme Violette Spillebout, amendement CL15 de M. François Cormier-Bouligeon

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Puisque l’article 40 de la Constitution m'empêche de proposer l’extension de la protection fonctionnelle, les amendements visent à appeler l’attention du Gouvernement sur le sujet. Il s’agit donc de demander un rapport au Gouvernement sur l’opportunité d’élargir la protection fonctionnelle à tous les élus locaux, y compris ceux qui n’exercent pas de fonctions exécutives, dans l’amendement CL87, et aux conjoints, enfants et ascendants directs des conseillers départementaux et régionaux victimes de menaces ou violences dans l’amendement CL88.

La protection fonctionnelle serait alors accordée après délibération de l’organe délibérant par la collectivité territoriale, et non de façon automatique comme pour les élus qui exercent des fonctions exécutives.

M. Jean Terlier (RE). L’amendement CL15 vise également à demander un rapport sur l’opportunité de l’extension de la protection fonctionnelle aux anciens élus durant les six années suivant la cessation de leur mandat.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis favorable à l’amendement CL15. Il est indispensable d’étendre la protection fonctionnelle à l’issue du mandat. Nous sommes malheureusement contraints par l’article 40 mais j’espère que nous pourrons trouver une solution en séance pour étendre la protection fonctionnelle. Si le gouvernement ne nous donne pas satisfaction, je reprendrai ces mesures dans la proposition de loi que je prépare avec Sébastien Jumel sur le statut de l’élu.

La commission adopte d’abord les amendements CL87 et CL88, l’article 16 étant ainsi rédigé. Puis elle adopte l’amendement CL15. L’article 17 est ainsi rédigé.

Amendements CL49 de M. Stéphane Delautrette, CL64 de M. Thomas Rudigoz et CL86 de M. Jean-Claude Raux (discussion commune)

M. Stéphane Delautrette (SOC). L’amendement tend à demander un bilan annuel des atteintes contre les élus locaux et des suites judiciaires données aux plaintes déposées. Cet outil de suivi nous permettrait d’adapter la législation selon les retours du terrain.

M. Thomas Rudigoz (RE). Il s’agit de demander la remise, dans un délai d’un an après la promulgation de la loi, d’un rapport recensant l’ensemble des actions menées pour lutter contre les violences faites aux élus et leurs conséquences. Le rapport comprendrait aussi un bilan des suites données aux plaintes déposées par les élus pour des faits de violences.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). Le rapport d’information sur le statut de l’élu local de Mme Spillebout et M. Jumel a mis en lumière des failles dans l’application territoriale du plan national de prévention et de lutte contre les violences aux élus, présenté en juillet. En outre, les moyens du centre d'analyse et de lutte contre les atteintes aux élus semblent insuffisants pour agir sur l’ensemble du territoire.

Il est donc proposé de demander un rapport au Gouvernement sur la mise en œuvre de ces deux dispositifs.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Il est important que la proposition de loi contribue à redonner confiance aux élus, à les protéger, et à leur montrer que la justice fait son travail. Nous partageons tous la préoccupation exprimée dans ces amendements de disposer d’informations précises sur les violences contre les élus et les réponses qui y sont apportées, qu’il s’agisse des actions engagées ou de suites judiciaires. Pour des raisons rédactionnelles et de périmètre, ma préférence ira à l’amendement CL64 mais ils seront tous satisfaits.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Je maintiens mon amendement qui impose une fréquence annuelle du rapport.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je vous invite à déposer un amendement en séance sur ce point.

L’amendement CL86 ayant été retiré, la commission rejette l’amendement CL49. Puis elle adopte l’amendement CL64. L’article 18 est ainsi rédigé.

Amendement CL23 de M. Sébastien Rome

M. Sébastien Rome (LFI-NUPES). L’amendement vise à demander un rapport évaluant le coût pour les communes de l’obligation de souscrire un contrat d’assurance pour couvrir les frais liés à la protection fonctionnelle des élus. Nous sommes opposés à la surenchère, qu’elle soit pénale ou le fait des assurances.

Mme Violette Spillebout, rapporteure. Je suis favorable même si la référence à une réévaluation du montant des compensations de l’État me gêne un peu.

Nous ignorons ce que représentera le surcoût lié à une extension de la protection fonctionnelle. Le rapport permettra d’avoir une idée plus précise des coûts et des compensations éventuelles.

La commission adopte l’amendement. L’article 19 est ainsi rédigé.

La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de loi, adoptée par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires (n° 1713) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 


—  1  —

 

   Personnes entendues

   M. Marc Tschiggfrey, adjoint à la directrice

   M. Sébastien Audebert, chef du bureau des élections politiques

   M. Christophe Bernard, sous-directeur des élus locaux et de la fonction publique territoriale

   M. Laurent Stirnemann, chef du bureau des élus locaux, du recrutement et de la formation des personnes territoriaux

   Mme Elise Barbe, sous-directrice de la négociation et de la législation pénales

   Mme Mathilde Barrachat, adjointe au chef de bureau de la législation pénale spécialisée

   Aude Morel, cheffe du bureau de la politique pénale générale

   M. Stéphane Rouvé, préfet des Côtes-d’Armor

   M. Fabrice Rigoulet-Roze, préfet de Loire-Atlantique

   M. Jean-Philippe Vachia, président

   Mme Sylvie Calvès, secrétaire générale

 

 

 

CONTRIBUTIONS ÉCRITES ADRESSÉES

 

 


([1]) Cevipof Sciences Po, « Des maires engagés mais empêchés », enquête 2023 sur les maires de France (cinquième volet), novembre 2023.

([2]) L’amendement CL1 de M. Thibault Bazin est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL1.pdf  

([3]) Article numéroté 7 bis dans le cadre de la discussion parlementaire  

([4])   Circulaire CRIM n° 2019/1590/A22 relative au traitement judiciaire des infractions commises à l’encontre des personnes investies d’un mandat électif et au renforcement des échanges d’informations entre les élus locaux et les procureurs de la République, 6 novembre 2019, consultable en ligne : https://www.justice.gouv.fr/sites/default/files/migrations/portail/bo/2019/20191129/JUSD1931746C.pdf

([5])  Le quatrième alinéa de l’article 322-3 du code pénal punit de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende la destruction, la dégradation ou la détérioration d’un bien appartenant à autrui lorsqu’elle est commise au préjudice d’une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public en vue d’influencer son comportement dans l’exercice de ses fonctions. L’article 322-8 du même code punit de vingt ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d’amende la destruction, la dégradation ou la détérioration d’un bien appartenant à autrui par l’effet d’une substance explosive, d’un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes lorsqu’elle est commise en raison de la qualité de personne dépositaire de l’autorité publique de la personne propriétaire ou utilisatrice du bien.

([6])  Les cinquième et sixième alinéas de l’article 221-4 du même code prévoient la réclusion criminelle à perpétuité lorsque le meurtre est commis sur une personne dépositaire de l’autorité publique ou une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur.

([7])  Le troisième alinéa de l’article 221-5 du même code punit de la réclusion criminelle à perpétuité l’empoisonnement lorsqu’il est commis sur une personne dépositaire de l’autorité publique ou une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur.

([8])  Les cinquième et sixième alinéas de l’article 222-3 du même code punissent de vingt ans de réclusion criminelle le fait de soumettre à des tortures ou à des actes de barbarie une personne dépositaire de l’autorité publique ou une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur.

([9])  Décision n° 2022-846 DC du 19 janvier 2023, Loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, considérants 66 et 67, consultable en ligne : https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2023/2022846DC.htm

([10]) Au moment de la publication du présent rapport, la décision du Conseil constitutionnel sur le projet de loi « immigration » vient d’être rendue publique et le texte n’est pas promulgué. Le dossier législatif est consultable en ligne :  https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/dossiers/DLR5L16N47118?etape=16-CMP

([11]) L’amendement CL1 de M. Thibault Bazin est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL1.pdf  

([12]) L’amendement CL66 de M. Eric Poulliat est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL66.pdf

([13]) L’amendement CL65 de M. Thomas Rudigoz est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL65.pdf

([14]) Article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse

([15]) L’outrage est défini à l’article 433-5 du code pénal comme « les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l'envoi d'objets quelconques adressés à une personne chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie ». Il est sanctionné par une amende de 7 500 euros. Lorsqu'il est adressé à une personne dépositaire de l'autorité publique, à un sapeur-pompier ou à un marin-pompier dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses missions, l'outrage est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Le même article prévoit d’autres circonstances aggravantes – lorsque les faits ont lieu dans un établissement scolaire et lorsqu’il est commis en réunion (voir supra).

([16]) Art. R 621-2 du code pénal  

([17])  Définies notamment à l'article 1er de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire

([18]) Article 433-5 du code pénal

([19]) L’amendement CL65 de M. Thomas Rudigoz est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL65.pdf

([20]) Groupe Socialiste, Écologiste et Républicain

([21]) Amendements identiques COM-10 de la rapporteure (consultable en ligne :  https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-10.html) et COM-3 rect de M. Bourgi (consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-3.html)

([22]) L’amendement CL 104 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL104.pdf

([23]) Groupe Socialiste, Écologiste et Républicain

([24]) Amendements identiques COM-10 de la rapporteure (consultable en ligne :  https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-10.html) et COM-3 rect de M. Bourgi (consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-3.html)

([25]) L’amendement CL 104 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL104.pdf

([26]) Amendements identiques COM-11 de la rapporteure (consultable en ligne :  https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-11.html)

([27]) L’amendement CL71 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL71.pdf

([28]) L’amendement CL70 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL70.pdf

([29]) Le sous-amendement CL103 de Mme Sylvie Bonnet est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL103.pdf

([30]) Amendements identiques COM-11 de la rapporteure (consultable en ligne :  https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-11.html)

([31]) L’amendement CL71 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL71.pdf

([32]) L’amendement CL70 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL70.pdf

([33]) Le sous-amendement CL103 de Mme Sylvie Bonnet est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL103.pdf

([34]) CE, 26 avr. 1963, Centre hospitalier de Besançon, n° 42783.

([35])  Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, dite loi Le Pors.

([36])  CE, 5 mai 1971, Sieur Gillet, n° 79494.

([37]) Ces articles ont été introduits dans le CGCT par la loi n° 96-393 du 13 mai 1996 relative à la responsabilité pénale pour des faits d'imprudence ou de négligence.

([38])  CE, 26 avr. 1963, Centre hospitalier de Besançon, n° 42783.

([39])  Conseil d’État, 3ème - 8ème chambres réunies, 08 juillet 2020, 427002 ; ou par exemple circulaire du 2 novembre 2020 visant à renforcer la protection des agents publics face aux attaques dont ils font l’objet dans le cadre de leurs fonctions qui utilise uniquement la notion de poursuites « judiciaires ».

([40]) Pour les EPCI, uniquement les vice-présidents suppléants.

([41])  Issu de l’article 101 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité.

([42]) Le lecteur est invité à se référer au commentaire de l’article 6 de la présente proposition de loi pour de plus amples informations sur l’applicabilité de la protection fonctionnelle dans les EPCI.

([43])  CAA Marseille, 3 février 2011, req. n° 09MA01028.

([44])  CE, 8 juillet 2009, n° 317291.

([45])  Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 9 juillet 2014, 38037.

([46])  CE, Sect., 8 juin 2011, M. A., n° 312700.

([47])  CAA Versailles, 20 déc. 2012, Cne de Servan,n°11VE02556 ; CAA Marseille, 14 mars 2014, Cne de Marsillargues, n°12MA01582 ; TA Lille, 12 Octobre 2021, n° 1909928.

([48])  Assemblée nationale, M. Sébastien Jumel et Mme Violette Spillebout rapport d’information n° 2019 sur le statut de l’élu, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, 20 décembre 2023, pp 87-89.

([49])  Loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

([50])  Article L. 242-1 du code des relations entre le public et l’administration.

([51])  Amendements CL89 de Mme Violette Spillebout (https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL89.pdf), CL22 de M. Sébastien Rome (https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL22.pdf), CL32 de Mme Edwige Diaz (https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL32.pdf), et CL83 de M. Jean-Claude Raux (https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL33.pdf).

([52])  Loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

([53])  Loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

([54])  Loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

([55]) L’amendement CL51 de M. Paul Molac est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL51.pdf 

([56])  Loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits non intentionnels.

([57])  Les amendements CL98 et CL90 de votre rapporteure sont consultables en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL98.pdf ; https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL90.pdf.

([58])  CE, 8 juillet 2009, n° 317291.

([59]) Par exemple, une circulaire du 5 mai 2008 n° 2158 relative à la protection fonctionnelle des agents publics de l’État de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) recense, sans être exhaustive, une liste variée de prestations susceptibles d’être mises en œuvre pour la protection fonctionnelle des agents publics de l’État. Par analogie, ces prestations sont aussi susceptibles d’être prises en charge par la commune pour la protection fonctionnelle de ses élus.

([60])  Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 9 juillet 2014, 38037.

([61])  Amendements CL93, CL94, CL91 et CL92.

([62])  Ce retrait d’agrément est prévu à l’article L. 321-1 du code des assurances pour les entreprises d'assurance et de réassurance ayant leur siège social en France et à l’article L. 321-7 pour les entreprises ayant leur siège social dans la Confédération helvétique et l’article L. 321-9-1 pour les entreprises.

([63])  L’amendement COM-15 de la rapporteure, consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-15.html    

([64]) L’amendement CL72 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL72.pdf  

([65]) L’amendement CL73 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL73.pdf  

([66])  L’amendement CL74 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL74.pdf

([67]) L’amendement CL105 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne :  https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL105.pdf

([68]) Le Conseil d’État fait de cette protection des agents publics, en 1963, un principe général du droit

([69]) Amendement COM-15 de la rapporteure, consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-15.html  

([70]) L’amendement CL72 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL72.pdf  

([71]) L’amendement CL73 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL73.pdf  

([72])  L’amendement CL74 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL74.pdf

([73]) L’amendement CL105 de Mme Violette Spillebout est consultable en ligne :  https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL105.pdf

([74]) Voir le rapport de M. Eric Woerth n° 5107 relatif à l’application de l’article 40 de la Constitution, en particulier page 59. Le rapport est consultable en ligne :  https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_fin/l15b5107_rapport-information#

([75])  Amendement COM-16 de la rapporteure consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-16.html

([76]) Conseil constitutionnel, décision n° 2011-156 QPC du 22 juillet 2011

([77])  Amendement n° COM-16 de la rapporteure consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-16.html

([78]) Rapport n° 7 de Mme Catherine Di Falco, sénateur, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale sur la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires, 5 octobre 2023, consultable en ligne : https://www.senat.fr/rap/l23-007/l23-0071.pdf

([79]) Ces amendements sont consultables en ligne : amendements CL54 de M. Sébastien Jumel et CL75 de Mme Violette Spillebout.

([80]) Ces amendements sont consultables en ligne : amendements CL54 de M. Sébastien Jumel et CL75 de Mme Violette Spillebout.

([81]) Amendement n° 9 de MM. Bourgi et Kerrouche, consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/2023-2024/8/Amdt_9.html

([82])  Amendement n° CL76 de Mme Violette Spillebout, consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL76.pdf

([83]) Amendement n° 9 de MM. Bourgi et Kerrouche, consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/2023-2024/8/Amdt_9.html

([84])  Amendement n° CL76 de Mme Violette Spillebout, consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL76.pdf

([85]) L’amendement est consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-17.html  

([86]) Amendement CL57 de M. Sébastien Jumel

([87]) Amendements CL55, CL56 et CL 58 de M. Sébastien Jumel et CL27 de M. Sébastien Rome

([88]) Loi n° 2021-646 du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés, consultable en ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043530276 

([89]) Décret n° 2002-999 du 17 juillet 2002 relatif aux dispositifs territoriaux de sécurité et de coopération pour la prévention et la lutte contre la délinquance

([90]) Loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance

([91])  loi n° 2021-646 du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés, consultable en ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043530276 

([92])  Ce coordinateur peut être un membre du conseil municipal ou un agent public territorial

([93]) Les conclusions des rapporteurs de cette mission « flash » sur l’évolution et l’amélioration des conseils de sécurité et de prévention de la délinquance sont consultables en ligne : https://www2.assemblee-nationale.fr/content/download/320250/3118057/version/1/file/Texte+de+la+communication+de+la+mission+flash+.pdf

([94])  Les membres de droit des CLSPD identifiés par l’article 14 de la proposition de loi sont les suivants :

« 1° Le représentant de l’État territorialement compétent ;

« 2° Le procureur de la République territorialement compétent ;

« 3° Le cas échéant, le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, compétent en matière de dispositifs locaux de prévention de la délinquance et auquel la commune appartient, ou son représentant.

([95])  Les membres facultatifs des CLSPD sont les suivants : a) Des représentants des services de l’État désignés par le représentant de l’État dans le département ; b) Des représentants d’associations, d’établissements ou d’organismes œuvrant notamment dans les domaines de la prévention, de la sécurité, de l’aide aux victimes, du logement, des transports collectifs, de l’action sociale ou des activités économiques, désignés par le président du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance après accord des responsables des organismes dont ils relèvent.

 En tant que de besoin et selon les particularités locales, des maires des communes et des présidents des établissements publics de coopération intercommunale intéressés ainsi que des personnes qualifiées peuvent être associés aux travaux du conseil.

([96]) L’amendement est consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2022-2023/648/Amdt_COM-17.html  

([97]) Rapport de Mme la sénatrice Catherine Di Folco sur la proposition de loi, déposé le 5 octobre 2023 et consultable en ligne : https://www.senat.fr/rap/l23-007/l23-007.html   

([98]) L’amendement n° 20 de la rapporteure est consultable en ligne : https://www.senat.fr/amendements/2023-2024/8/Amdt_20.html  

([99]) Amendement CL57 de M. Sébastien Jumel, consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL57.pdf

([100]) Amendement CL55 de M. Sébastien Jumel, consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL55.pdf  

([101]) Amendement CL58 de M. Sébastien Jumel, consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL58.pdf  

([102]) Amendement CL56 de M. Sébastien Jumel, consultable en ligne :  https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL56.pdf

([103]) Amendement CL27 de M. Sébastien Rome, consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL27.pdf

([104]) Amendement CL99 de Mme Violette Spillebout, consultable en ligne :  https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL99.pdf

([105]) Amendement CL59 de M. Philippe Dunoyer, consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL59.pdf  

([106])  Amendement CL87 et CL88 de Mme Violette Spillebout, consultables en ligne :  https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL87.pdf ; https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL88.pdf

 

([107])  Amendement CL15 de M. François Cormier-Bouligeon, consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL15.pdf  

([108])  Amendement CL64 de M. Thomas Rudigoz, consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL64.pdf  

([109]) Amendement CL23 de M. Sébastien Rome, consultable en ligne : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/1713/CION_LOIS/CL23.pdf