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N° 1163

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 juillet 2018.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES

en conclusion des travaux de la Mission d’évaluation et de contrôle (MEC) (1)
sur le financement et le suivi de la mise en œuvre
des programmes de rénovation urbaine
 

 

ET PRÉSENTÉ PAR

Mme Nadia HAI et M. Rémi DELATTE,

 

Députés

——

Mme Amélie de MONTCHALIN et M. Patrick HETZEL

Présidents.

 

(1) La composition de cette mission figure au verso de la présente page.


 

La mission d’évaluation et de contrôle est composée de : Mme Amélie de Montchalin et M. Patrick Hetzel, co-présidents, Mme Nadia Hai et M. Rémi Delatte, co-rapporteurs, M. Éric Woerth, président de la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, M. Joël Giraud, rapporteur général, MM. Saïd Ahamada, Éric Alauzet, Jean-Noël Barrot, Éric Coquerel, François Cornut-Gentille, Jean-Paul Dufrègne, Mme Perrine Goulet, M. François Jolivet, Mme Lise Magnier, M. Jean-François Parigi, Mme Valérie Rabault, M. Benoît Simian.

 

 

 


 

SOMMAIRE

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Pages

Synthèse du rapport

Liste de propositions

Introduction

Première partie : La mixité sociale, un objectif législatif de la politique de rénovation urbaine difficile à mesurer

I. La mixité sociale, une notion plurielle et peu consensuelle

A. Une notion affirmée comme objectif de la politique de rénovation urbaine malgré une absence de définition juridique

1. Une réflexion riche sur la notion de mixité sociale qui n’a pas abouti à l’élaboration d’une définition juridique arrêtée

2. Un objectif placé au cœur de la politique de rénovation urbaine de façon non contraignante

B. Une notion polysémique

1. Des échanges entre les habitants d’un quartier indispensables pour favoriser la mixité sociale

2. Une mixité fonctionnelle nécessaire au développement des échanges entre les habitants des différents quartiers de la ville

3. Le débat autour des objectifs intrinsèques à la mixité sociale

II. Une Difficile appréhension statistique de la mixité sociale

A. Une évaluation annuelle de la politique de rénovation urbaine prévue par un Observatoire national

B. Des difficultés d’ordre méthodologique qui empêchent l’utilisation de tous les indicateurs statistiques disponibles

C. Une démarche d’évaluation à l’opportunité discutée

Deuxième partie : Des politiques de mixité sociale aux résultats incertains

I. des programmes centrés sur l’habitat et majoritairement financés par les acteurs du logement social

A. un cycle financier articulé autour des opérations de transformation de l’habitat

1. Des réalisations d’un niveau élevé, structurées autour de la transformation de l’habitat

a. Des réalisations élevées mais inférieures aux objectifs législatifs

b. Des opérations de démolition-reconstruction structurantes

2. Un cycle financier mettant en exergue un important besoin de financement à moyen terme

a. Un besoin de financement et un effet de levier importants

b. Des besoins cycliques, importants à moyen terme

B. Un financement par les acteurs du logement social qui a nécessité de nombreux ajustements

1. Un financement partenarial principalement assuré par les acteurs du logement social

a. Une part minoritaire de l’ANRU dans l’ensemble des financements de la rénovation urbaine

b. Une programmation financée aux deux tiers par les acteurs du logement social

2. Un cadre financier extrêmement évolutif

a. Quintuplement du PNRU et doublement du NPNRU

b. Retrait et retour de l’État

c. Une consolidation tardive du montage financier

3. Un financement à moyen terme consolidé, mais appelant à une vigilance élevée des parlementaires

a. Des réformes en cours susceptibles d’affecter les ressources des acteurs du logement

b. Une possible impasse de trésorerie à moyen terme

II. Une action sur le PARC de logements comme moyen privilÉgiÉ de mise en œuvre de la mixitÉ sociale

A. Une mixité sociale favorisée par une meilleure répartition des logements sociaux sur l’agglomération

1. Des objectifs quantitatifs de construction de logements sociaux

2. Une meilleure répartition des attributions de logements sociaux

3. Des objectifs de reconstitutions et de relogements hors QPV dans les opérations de rénovation urbaine

B. Une mixité sociale favorisée par la diversification de l’habitat

1. Un accès favorisé à la propriété privée

a. Un développement du locatif libre par les opérations de l’Association Foncière Logement (AFL)

b. L’accession sociale à la propriété

c. Des dispositifs de droit commun peuvent contribuer à l’accession à la propriété, de façon plus marginale

2. La diversification du logement social

3. Le cas des logements mixtes au sein d’un même immeuble

III. Le constat d’une utilisation insuffisante et restreinte de l’action sur l’offre de logements comme outil de mise en œuvre de la mixité sociale

A. Une répartition de l’offre de logement social dépendante de la volonté et de la coordination des acteurs locaux

1. La nécessité d’augmenter les relogements et les reconstitutions hors site

a. Des facteurs d’explication variés

b. Des observations de terrain qui confirment ce constat

2. Une hausse des loyers problématique pour le relogement des habitants sur site

B. Une diversification vers le logement privé limitée

1. Des opérations réussies du fait de spécificités locales et de l’importance des parcours résidentiels ascendants

2. Une diversification de l’habitat en deçà des objectifs fixés du fait de la difficulté à changer l’image des quartiers

a. Des investissements privés insuffisants et réalisés en frange des quartiers

b. Des contreparties peu utilisées par l’Association Foncière Logement

c. Une image des quartiers qui reste trop négative

C. Des effets réduits sur la composition sociale de la population des quartiers en rénovation urbaine

Troisième partie : vers une rénovation urbaine plus durable

I. PRENDRE en compte la diversité des territoires et des aspirations locales

A. Renforcer la prise en compte des attentes des habitants

1. Affirmer la participation citoyenne lors de la préparation et de la mise en œuvre des projets

a. Une extension de la participation des habitants consacrée par la loi de programmation de 2014

b. Une participation citoyenne à approfondir

2. Donner plus rapidement à voir des réalisations

a. Les protocoles de préfiguration : un temps d’études mobilisé pour faciliter une difficile jonction financière et administrative entre les programmes

b. Des mesures sont en cours de mise en œuvre pour rendre la procédure d’instruction plus efficace

B. Donner plus de souplesse aux élus locaux

1. Un investissement des élus locaux indispensable à la réussite des opérations de rénovation urbaine

2. La pertinence de la mise en place du GIP lorsque le portage politique est défaillant

II. Agir pour une rénovation urbaine durable

A. Maintenir la qualité de l’habitat pour éviter un « renouvellement éphémère »

1. Logement social : un droit d’alerte pour garantir l’entretien du bâti et des espaces communs

2. Logement privé : des garde-fous contre la dégradation des copropriétés

a. Un traitement lourd de l’habitat dégradé

b. Une nécessaire action préventive

B. Une meilleure articulation de la rénovation urbaine avec les politiques de droit commun nécessaire

1. Une interaction insuffisante avec les politiques de droit commun

2. Une action globale indispensable

a. Inciter les ministères à signer la deuxième génération des conventions interministérielles d’objectifs afin de mobiliser les crédits de droit commun vers les QPV

b. Relancer l’activité économique

i. Une action sur l’attraction de l’activité économique dans les quartiers en rénovation urbaine limitée

ii. Une situation dégradée des habitants des QPV face à l’emploi

c. Assurer une meilleure qualité de vie aux habitants des quartiers en rénovation urbaine

III. Renforcer la culture de l’évaluation

A. Une information de la représentation nationale à améliorer

1. Une démarche informative et évaluative incomplète

a. Une démarche informative insuffisante sur le financement et les réalisations

b. Une démarche évaluative des effets de la rénovation urbaine incomplète

2. Une information à améliorer

a. Un nécessaire renforcement de l’ONPV

i. Suivre des indicateurs représentatifs de la mixité sociale

ii. Renforcer les moyens de l’ONPV

b. Un rapport pour améliorer la connaissance du suivi physique et financier

i. Un rapport remis lors du « printemps de l’évaluation »

ii. Une nécessaire amélioration du suivi physique et financier

B. Affirmer le rôle de la représentation nationale

1. Garantir la présence de parlementaires dans le conseil d’administration de l’ANRU

2. Renforcer les procédures de contrôle et d’évaluation à l’Assemblée

a. Un suivi insuffisant

b. Une nécessité impérieuse

c. Un cadre à renforcer

EXAMEN EN COMMISSION

ANNEXE 1 : liste des personnes auditionnées

ANNEXE 2 : Déplacements de la mec

A. Déplacement à Marseille – 18 mai 2018

B. Déplacement à Trappes – 23 mai 2018

C. Déplacement à Boulogne-sur-Mer – 30 mai 2018

D. Déplacement à Bondy – 13 juin 2018

ANNEXE 3 : Le panier d'indicateurs NPNRU mis à disposition par l’Anru pour renseigner le tableau de bord de suivi des objectifs urbains


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Synthèse du rapport

Au cours des cinq mois qu’ont duré leurs travaux, les rapporteurs de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) sur le financement et le suivi de la mise en œuvre des programmes de rénovation urbaine ont mené une quinzaine d’auditions et ont effectué quatre déplacements sur des sites ayant fait l’objet d’opérations de rénovation urbaine.

Les rapporteurs ont souhaité concentrer leurs investigations sur l’atteinte de l’objectif législatif de mixité sociale, qui leur apparaît essentiel pour lutter contre l’accumulation des difficultés sociales et qui contribue au vivre-ensemble. Ils ont ainsi mené une réflexion de fond sur la complexité de la notion de mixité sociale et la diversité de ses dimensions, qui posent, par conséquent, des difficultés méthodologiques dans l’évaluation des résultats de la politique de rénovation urbaine.

À partir de ce premier constat et des informations recueillies, les rapporteurs ont tenté de faire un bilan physique et financier de la politique de rénovation urbaine menée dans le cadre du Programme national pour la rénovation urbaine (PNRU) et de dresser les perspectives de la mise en œuvre du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU). Au cours de cette démarche d’évaluation, les rapporteurs ont relevé que l’action menée essentiellement sur l’offre de logements, bien que significative, avait été insuffisante pour permettre une véritable modification de la composition sociale des habitants des quartiers ayant fait l’objet de programmes de rénovation urbaine. Les reconstitutions sur site ont en effet été trop nombreuses pour permettre une véritable mixité sociale. La diversification de l’habitat a été limitée par l’absence de changement d’image des quartiers et la hausse des loyers induite par les opérations de rénovation urbaine réduit l’accès aux logements sociaux rénovés. Surtout, la concentration des moyens sur une action essentiellement portée sur l’habitat ne permet pas d’appréhender l’ensemble des dimensions de la notion de mixité sociale, d’où une action intrinsèquement restreinte.

À ce titre, les rapporteurs ont entamé une réflexion sur la mise en œuvre d’une politique de rénovation urbaine élargie qui aurait des effets durables dans le temps, afin d’éviter la mise en œuvre récurrente de plans nationaux d’investissements massifs. Plusieurs pistes propositionnelles seront évoquées afin de maintenir la qualité de l’habitat et d’articuler plus efficacement la politique de rénovation urbaine avec la politique de droit commun, ces deux conditions étant un préalable à une action publique efficace. Enfin, les rapporteurs estiment qu’il est indispensable de renforcer l’évaluation de cette politique, afin de transmettre une information pertinente et complète aux citoyens et à la représentation nationale.

 

Liste de propositions

Renforcer l’évaluation de la rénovation urbaine

Proposition n° 1 : Renforcer les moyens de l’Observatoire national de la politique de la ville (ONPV) pour lui permettre d’approfondir son travail d’analyse et de mieux mettre en valeur ses riches productions, en consolidant ses effectifs et en sanctuarisant le budget dédié à ses études.

Proposition n° 2 : Accroître le nombre d’indicateurs mesurés, en prévoyant notamment le suivi d’un nombre restreint d’indicateurs, homogènes sur tout le territoire, pour mieux documenter l’évolution de la mixité sociale dans le rapport annuel de l’ONPV et enrichir les indicateurs de performance des documents budgétaires annexés au projet de loi de finances et au projet de loi de règlement et d’approbation des comptes

Proposition n° 3 : Prévoir la remise, lors du « printemps de l’évaluation », d’un rapport de suivi du financement et des réalisations de la rénovation urbaine élaboré sous la conduite du ministère en charge du logement pour mieux mettre en évidence l’articulation avec les financements et réalisations de droit commun.

Renforcer le rôle du Parlement dans le suivi et l’évaluation de la rénovation urbaine

Proposition n° 4 : Garantir la présence de parlementaires dans le conseil d’administration de l’ANRU, même si sa composition venait à être resserrée à moyen terme, afin de permettre à la représentation nationale d’avoir une vision sur les décisions stratégiques prises en matière de rénovation urbaine et d’effectuer un suivi sur la trajectoire budgétaire de cette politique publique.

Proposition n° 5 : Généraliser le principe du suivi des rapports d’évaluation, et notamment prévoir un mécanisme d’évaluation permanent de la rénovation urbaine par des rapports réguliers, permettant de mobiliser plus efficacement le travail évaluation de l’ONPV, du Gouvernement et des universitaires, et d’approfondir les thématiques dont l’importance est apparue majeure en cours d’enquête. Les rapporteurs soulignent le besoin particulier d’évaluations sur les trois thèmes suivants : action de l’État dans la lutte contre les copropriétés dégradées ; sécurité dans les quartiers prioritaires ; soutien à l’activité économique et au commerce dans les quartiers prioritaires.

Renforcer la prise en compte des aspirations des habitants

Proposition n° 6 : Poursuivre la démarche de développement des conseils citoyens dans les quartiers prioritaires, afin de garantir une prise en compte de leurs aspirations et besoins au plus près de leur vie quotidienne ;

Proposition n° 7 : Porter une attention particulière aux hausses de loyers à la suite des opérations de renouvellement urbain, par un suivi précis de l’évolution des loyers, afin de permettre aux habitants de revenir dans leurs quartiers d’origine. Évaluer au plus vite l’expérimentation menée par la métropole de Rennes de loyer unique dans le parc social.

Proposition n° 8 : Porter une attention particulière à la constitution d’espaces publics et d’espaces verts dans les opérations de renouvellement urbain, dont les rapporteurs ont constaté qu’ils manquaient trop souvent.

Renforcer la durabilité des investissements dans le long terme

Proposition n° 9 : Porter une attention particulière à la mise en œuvre du projet de loi ELAN dans la lutte contre les copropriétés dégradées, afin de mettre enfin un terme à la spirale de paupérisation, de dégradation du bâti et de disqualification sociale des quartiers environnants.

Proposition n° 10 : Inclure, pour tout achat d’un logement, le montant estimé des charges locatives mensuelles au calcul du ratio d’endettement établi pour l’octroi du prêt bancaire, afin d’assurer le paiement des charges locatives et éviter la formation de copropriétés dégradées.

Proposition n° 11 : Créer un droit d’alerte du maire auprès du préfet, en cas de constat d’une dégradation de l’entretien du parc social qui n’aurait pas été solutionnée par la concertation, par exemple dans le cadre de la gestion urbaine de proximité.

Proposition n° 12 : Systématiser la présence de gardiens d’immeuble dans le parc social et entamer une réflexion sur l’opportunité de généraliser, après un premier avertissement, la facturation des dégradations dans un immeuble, repérées par un gardien d’immeuble, sur le loyer versé.

Renforcer le soutien à l’activité économique dans les quartiers prioritaires

Proposition n° 13 : engager une réflexion sur un dispositif fiscal incitatif non pérenne approprié pour relancer l’emploi, articulé avec une action volontaire des collectivités locales dans ce domaine, qui peut passer par la mise en place d’outils dérogatoires au droit commun en matière d’urbanisme pour faciliter l’installation des entreprises.

Proposition n° 14 : Faire un état des lieux pour entamer une réflexion sur les dispositifs qui pourraient permettre un accompagnement des commerces affectés par une baisse de leur activité à cause des travaux induits par les opérations de rénovation urbaine.

Proposition n° 15 : Définir des objectifs de créations d’entreprises et d’emplois par territoire, pour que les futurs projets urbains soumis à l’ANRU intègrent cette dimension.


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   Introduction

Le 4 avril dernier, les modalités de financement du budget de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) dans le cadre du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) ont été arrêtées par un accord entre les bailleurs sociaux, Action logement et l’État. Conformément aux engagements du Président de la République, le montant de cette enveloppe budgétaire a été doublé, s’établissant ainsi à 10 milliards d’euros. Dans ce contexte de déclenchement imminent des opérations du NPNRU, il convient de faire le bilan du premier Programme national pour la rénovation urbaine (PNRU) lancé en 2004. Cette réflexion s’inscrit dans une actualité riche sur la politique de rénovation urbaine et sur la politique de la ville dans son ensemble. Ainsi, le rapport « Vivre ensemble, Vivre en grand, pour une réconciliation nationale » de Jean-Louis Borloo ([1]), les annonces du Président de la République dans son discours du 22 mai et notamment le lancement de l’opération « Cœur de quartier », mais aussi le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN), nous rappellent aujourd’hui toute la pertinence de ces sujets pour nos concitoyens.

La Mission d’évaluation et de contrôle (MEC) de l’Assemblée nationale s’est concentrée sur le financement et le suivi de la mise en œuvre des projets de rénovation urbaine lancés dans le cadre du Programme national pour la rénovation urbaine (PNRU) à partir de 2004 pour lequel plus aucune somme n’est engagée depuis 2015, bien que des crédits de paiement continueront à être décaissés jusqu’en 2021. L’objectif de ces travaux est de tirer les leçons des réussites et des échecs du PNRU afin de s’assurer de leur bonne prise en compte dans le cadre du déploiement, actuellement en cours, du NPNRU. En sus de l’évaluation physique et financière, les rapporteurs ont voulu mettre l’accent sur une démarche qualitative, afin d’apprécier l’atteinte de l’objectif de mixité sociale assigné à cette politique publique par le législateur. L’enjeu de la politique de rénovation urbaine est en effet, en définitive, de permettre aux habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) de vivre mieux et, ce faisant, de contribuer à ce que ces quartiers sortent d’une politique d’exception pour réintégrer le giron du droit commun.

La politique de rénovation urbaine s’appuie sur une transformation radicale du bâti, rendue nécessaire par la dégradation des logements sociaux construits dans l’urgence à la sortie de la Seconde Guerre mondiale. Touchée par une forte crise du logement, la France a en effet choisi la production de grands ensembles, sur le modèle de la charte d’Athènes (1933), qui ont rapidement vu leur état se détériorer du fait de l’utilisation de matériaux peu robustes et de la paupérisation de leurs habitants liée à la crise économique qui a débuté dans les années 1970. Dans les années 1990, la baisse des prix des logements anciens et des taux d’intérêt ont en outre favorisé la mobilité des locataires les plus solvables qui ont accédé à la propriété à l’extérieur de ces quartiers, ce qui a contribué à accroître les phénomènes de concentration de la pauvreté.

Après la circulaire Guichard de mars 1973 ([2]), qui a marqué la fin des grands ensembles et la volonté d’un nouvel urbanisme, la circulaire du 22 octobre 1998 a brisé un tabou en étant le point de départ d’une politique de démolition de ces derniers - bien que limitée dans un premier temps - sous la forme de Grands projets de ville (GPV). Ces GPV, intégrés aux contrats de ville, avaient pour objectif de concentrer des investissements massifs sur les territoires qui connaissent un cumul de difficultés, notamment par des actions portant sur la restructuration du bâti ou le désenclavement des quartiers.

La loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, élaborée sous l’impulsion de Jean-Louis Borloo, marque un tournant majeur dans la mise en œuvre de la politique de la ville. Elle crée notamment l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) sous le statut juridique d’un établissement public à caractère industriel et commercial afin de mettre en œuvre le Programme national pour la rénovation urbaine (PNRU). Ce programme, d’une ampleur considérable, tant dans ses objectifs que dans les moyens alloués, a permis de mobiliser les acteurs publics et privés afin de mettre en œuvre des opérations de restructuration lourdes, fondée sur des démolitions massives (objectif de 250 000 démolitions), suivies d’un nombre identique de reconstructions qui se veulent pérennes et diversifiées afin de répondre à l’objectif législatif de mixité sociale ajoutée par le législateur au cours des débats parlementaires ([3]). Un objectif de 400 000 réhabilitations de logements sociaux était également affiché.

L’ANRU a fonctionné comme un guichet unique permettant de financer une partie des projets de rénovation urbaine, en étroite collaboration avec d’autres acteurs essentiels à la mise en œuvre de cette politique publique. Sur les 47 milliards d’euros d’investissement réalisés entre 2004 et 2018, la contribution de l’ANRU s’établit à près de 12 milliards d’euros, soit 25,2 % de ce montant. L’essentiel du financement a été apporté par les bailleurs sociaux puis par les collectivités locales et les autres partenaires. L’ANRU a donc fonctionné comme un catalyseur et un levier puissant des projets de rénovation urbaine tout en déterminant un cadre réglementaire à leur réalisation que les élus locaux, indispensables porteurs des projets, ont dû respecter, afin d’obtenir les financements accordés par l’Agence.

La Participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC), fixée à 0,45 % de la masse salariale, versée par les employeurs pour contribuer au logement des salariés et gérée par Action Logement constitue la principale ressource de l’ANRU. La Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) participe également à ce financement (par le versement d’une fraction de la cotisation additionnelle à la caisse) tandis que l’État y a contribué à hauteur de 11,8 % des ressources cumulées.

Le NPNRU, créé par la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, prolonge cette action afin de permettre le financement de nouveaux projets, avec des règles de fonctionnement modifiées sur deux points principaux : d’une part, les porteurs de projet sont désormais les présidents des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et non plus les maires des villes concernées et, d’autre part, un protocole de préfiguration est prévu dans le cadre de la phase de pré-conventionnement. L’instruction des dossiers est quant à elle toujours confiée au préfet de département, en tant que délégué territorial de l’ANRU.

Le PNRU a sans aucun doute répondu à un besoin indispensable des zones urbaines sensibles (ZUS) au début des années 2000 et les rapporteurs saluent le travail effectué par tous les acteurs impliqués dans la politique de rénovation urbaine. Cette action était nécessaire et a été globalement positive compte tenu du souffle nouveau donné à la politique de la ville. Cependant, il apparaît difficile d’en mesurer tous les effets, de façon systématique et pertinente, ce qui pose des difficultés pour établir un bilan complet de cette politique publique. 

La nécessité de lancer le NPNRU souligne à la fois le succès du PNRU, considéré comme une formule pertinente et efficace, et ses limites. En effet, les montants engagés n’ont pas permis de résoudre la situation de tous les grands ensembles dégradés et ces opérations ont même pu conduire, parfois, à une concentration de la pauvreté dans les quartiers voisins. Certains quartiers rénovés, en outre, commencent déjà à se dégrader, interrogeant les conditions de durabilité des investissements réalisés. En outre, la complexification du processus décisionnel a conduit à l’allongement des délais de mise en œuvre des programmes.

La mixité sociale, objectif dont le projet de loi ELAN rappelle aujourd’hui la pertinence comme ligne directrice de la politique publique du logement et de la rénovation urbaine, ne semble pas avoir été suffisamment favorisée par le PNRU. La situation que connaissent aujourd’hui les quartiers prioritaires prouve que la concentration de l’action sur le bâti ne permet pas de résoudre ni d’appréhender la complexité des problèmes qui touchent les habitants de ces quartiers, notamment concernant les inégalités d’accès à l’emploi, à l’éducation ou à la mobilité.

Le constat général des rapporteurs est donc contrasté : un succès significatif du point de vue de l’ampleur des transformations opérées et de la satisfaction exprimée par les habitants, mais plutôt une situation d’échec concernant la création d’une réelle mixité sociale dans les quartiers prioritaires, même si celle-ci a été renforcée dans certains quartiers faisant l’objet d’opérations de rénovation urbaine. Ce constat rejoint celui formulé par Renaud EPSTEIN en 2012, « les opérations de rénovation urbaine n’ont eu qu’un effet limité en termes de mixité fonctionnelle et elles ne sont pas parvenues à rétablir la mixité sociale désirée, qu’on l’apprécie à l’échelle des quartiers, où la démolition-reconstruction a produit de la fragmentation résidentielle et de la ségrégation sociale, ou à l’échelle des agglomérations, où les écarts entre les quartiers prioritaires et leur environnement renseignés par l’ONZUS ont été en s’accroissant depuis 2003 ([4]) ».

Les rapporteurs soulignent l’importance de la mise en œuvre d’une politique de rénovation urbaine efficace, qui produise des effets pérennes, de façon à ne pas conduire à des plans massifs d’investissement répétés. Il est nécessaire de sortir de l’urgence, qui se traduit par une planification budgétaire précipitée, afin de mettre en place un modèle durable pour ces quartiers. Si la mise en œuvre du NPNRU a été mieux anticipée, les protocoles de préfiguration ayant permis de prendre le temps de définir des projets pertinents, l’enjeu est, maintenant que le financement du programme soit sécurisé, d’instruire rapidement les dossiers et de relancer les travaux.

Les rapporteurs ont privilégié une démarche de terrain afin d’apprécier les conséquences concrètes de la mise en œuvre de cette politique de rénovation urbaine très territorialisée, dont les objectifs et les réalisations varient d’un quartier à l’autre. Ce rapport n’a donc pas pour objectif d’être exhaustif mais plutôt de contribuer au débat actuel à partir de leurs principales observations et en s’appuyant sur des propositions opérationnelles.

Les rapporteurs ont donc souhaité partir de l’objectif législatif de mixité social, afin de mettre en lumière toute la complexité de cette notion, dont l’atteinte est difficile à mesurer. Ils ont ensuite esquissé une évaluation des résultats de la politique publique de rénovation urbaine, avant d’entamer une réflexion sur les pistes propositionnelles qui permettraient à la rénovation urbaine d’avoir des effets durables.


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Première partie : La mixité sociale, un objectif législatif de la politique de rénovation urbaine difficile à mesurer

La mixité sociale a été affirmée comme un objectif de la politique de rénovation urbaine par le législateur ([5]). Ainsi, il apparaît nécessaire de s’interroger sur la définition de cette notion, afin de mesurer si les objectifs initiaux ont été atteints. Dans cette démarche d’évaluation de la politique publique de rénovation urbaine, les rapporteurs se sont heurtés très rapidement à l’absence de consensus autour de la notion de mixité sociale (A), d’où des difficultés méthodologiques importantes pour en mener une évaluation pertinente (B).

 

Dans le cadre de leur développement, les rapporteurs utiliseront plusieurs notions dont il convient de préciser le contenu :

– les zones urbaines sensibles (ZUS) regroupent, entre 1996 et 2014, les 751 quartiers caractérisés par la présence de grands ensembles ou de quartiers d'habitat dégradé et par un déséquilibre accentué entre l'habitat et l'emploi ;

– les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) se substituent, depuis le 1er janvier 2015, aux zones urbaines sensibles et aux contrats urbains de cohésion sociale, par une approche qui repose sur l’identification des zones de concentration urbaine de populations à bas revenus ;

– enfin, les rapporteurs utilisent la notion de quartiers prioritaires pour désigner indistinctement les deux notions précédentes, afin de mentionner, de façon globale, les cibles prioritaires sur lesquelles l’action publique concentre ses moyens. Cette utilisation se justifie par la temporalité longue de la politique de rénovation urbaine.


I.   La mixité sociale, une notion plurielle et peu consensuelle

La mixité sociale s’est affirmée comme un objectif primordial de la politique de la ville ces dernières années. Pensée comme permettant de favoriser le vivre-ensemble et la cohésion sociale, elle apparaît en effet comme une condition nécessaire à la réalisation de programmes de rénovation urbaine ayant des effets durables dans le temps. Elle ne fait cependant l’objet d’aucune définition juridique et cristallise ainsi les débats politiques et académiques.

A.   Une notion affirmée comme objectif de la politique de rénovation urbaine malgré une absence de définition juridique

Malgré les nombreuses références législatives, la mixité sociale n’a jamais été définie dans un texte législatif ou réglementaire. Cette notion fait donc l’objet d’interprétations variées en fonction du contexte de son utilisation.

1.   Une réflexion riche sur la notion de mixité sociale qui n’a pas abouti à l’élaboration d’une définition juridique arrêtée

Comme le souligne Emmanuelle Deschamps, maître de conférence en droit public, dans un article de 2005 ([6]), les normes poursuivant l’objectif de mixité sociale « interviennent essentiellement dans le champ du logement : en d’autres termes, le droit de la mixité sociale est un droit du logement. Toute autre évocation par les textes législatifs et réglementaires fait presque figure d’anecdote […] Sur un plan sémantique, il faut savoir que les dispositifs qui poursuivent cet objectif font appel à un vocabulaire diversifié : mixité sociale, mais aussi équilibre social de l’habitat, diversité de la composition sociale, diversité et diversification de l’habitat, diversité de la population dans les quartiers, répartition équilibrée et diversifiée de l’offre de logements… ».

La mixité sociale émerge véritablement comme objectif de la politique urbaine dans la loi n° 91-662 du 13 juillet 1991 d’orientation pour la ville. Elle a vocation à favoriser « la cohésion sociale et (est) de nature à éviter ou à faire disparaître les phénomènes de ségrégation ([7])». Elle est ensuite explicitement affirmée dans la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU). L’objectif de mixité sociale justifie alors le rééquilibrage de la répartition des logements sociaux sur l’ensemble du territoire et la production de logements sociaux constitue donc l’outil préférentiel pour l’atteindre.

Les objectifs portés par la mixité sociale ont été déclinés dans les travaux préparatoires au projet de loi portant engagement national pour le logement :

« Les objectifs des politiques de mixité sont donc de deux ordres :

- il s'agit, d'une part, de limiter la concentration des publics défavorisés dans les quartiers en difficulté et y retenir ou attirer des populations plus aisées en y améliorant les conditions de vie ;

- il s'agit, d'autre part, de développer à l'échelle de la ville une offre de logements accessible aux populations défavorisées. ([8]) »

En effet, le but est d’éviter la concentration de la pauvreté dans les quartiers prioritaires qui conduit à la ghettoïsation de ces quartiers via des « effets de quartier», théorisés par Wilson (1987) ([9]). Selon lui, habiter dans un quartier défavorisé engendrerait un cumul de difficultés sociales. En outre, Gordon W. Allport, a établi, par sa théorie des contacts ([10]) que la proximité spatiale permettait la diminution des préjugés des membres du groupe majoritaire envers les groupes minoritaires, ce qui favorise le vivre-ensemble. Les classes moyennes joueraient également un rôle de modèle intégrateur vis-à-vis des classes populaires, par le capital social qu’elles apporteraient.

Les directions ministérielles tentent aujourd’hui de définir plus précisément la mixité sociale. Selon la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP), placée sous la double tutelle du ministère de la transition écologique et solidaire et du ministère de la cohésion des territoires, reçue en audition le 31 mai 2018, la mixité sociale est considérée comme « la coexistence de personnes aux ressources différentes associée à la qualité de vivre ensemble à l’échelle du quartier ». 

Plusieurs constats peuvent être faits à la suite de ces ébauches de définitions.

D’une part, la mixité sociale peut s’apprécier à différentes échelles : celle de l’immeuble, du quartier, de l’agglomération ou de l’aire urbaine, en fonction des objectifs qui lui sont assignés. Un consensus semble aujourd’hui se dégager autour de l’aire urbaine comme échelle pertinente avec une répartition équilibrée des populations en situation de pauvreté au niveau de l’intercommunalité. En effet, dans le cadre du NPNRU, c’est bien l’échelle intercommunale qui a été retenue pour favoriser le relogement et la reconstruction des logements sociaux.

D’autre part, la mixité sociale s’inscrit dans un objectif global de cohésion sociale. L’urbanisme est donc perçu comme le moyen de réalisation du vivre-ensemble. Les outils mentionnés, qui passent par le logement, peuvent ainsi apparaître limités et réducteurs pour atteindre cet objectif ambitieux et primordial.

Les chercheurs reçus en audition lors de la table-ronde du 29 mars réunissant Thomas Kirszbaum, Christine Lelevrier et Stéphanie Vermeersch, insistent sur les difficultés causées par l’absence de définition officielle de la mixité sociale : selon eux, toute tentative de définition nécessite des choix arbitraires concernant les critères retenus, qui conduisent à des résultats différents. Ces critères et l’échelle pertinente n’étant pas stabilisés, tout jugement évaluatif repose sur des fondements scientifiques inconstants. La mixité n’est donc pas un concept scientifique, mais plutôt une notion politique ou médiatique.

2.   Un objectif placé au cœur de la politique de rénovation urbaine de façon non contraignante

Bien que l’objectif de mixité sociale ait été introduit comme ambition donnée au Programme national pour la rénovation urbaine (PNRU) ([11]), aucune règlementation ne l’a décliné de manière opérationnelle et le choix des orientations des projets a été laissé à l’appréciation des porteurs de projet ([12]).

Les élus locaux, porteurs de projets, ont ainsi pu décider d’accroître la mixité sociale par des moyens et suivant des objectifs politiques locaux très différents et parfois antagonistes : reconstruction des logements sociaux hors des quartiers prioritaires (la seule règle étant que chaque logement détruit doit être reconstruit, « au sein des ZUS ou dans les agglomérations dont elles font partie ([13]) »), dispersion des familles précarisées dans le parc social ou attraction des investissements privés sur les espaces libérés. Les subventions sont simplement conditionnées à la recherche de la mixité sociale par le règlement général de l’ANRU du 21 mars 2007 : « L’octroi de subvention est conditionné par l’engagement des bailleurs sociaux à assurer aux ménages directement concernés par la démolition des relogements de qualité prenant en compte leurs besoins et leurs capacités financières dans la recherche permanente d’une mixité sociale sur site et hors site ([14])  ».

Atteindre l’objectif de mixité sociale est devenu un enjeu primordial dans le cadre du NPNRU, cette notion ayant été à la fois développée et réaffirmée à travers plusieurs textes.

Ainsi, la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine affirme la mixité sociale comme un objectif de la politique de renouvellement urbain, en l’incluant dans la liste des objectifs auxquels le NPNRU concourt : « Favoriser la pleine intégration des quartiers dans leur unité urbaine, en accentuant notamment leur accessibilité en transports en commun, leur mixité fonctionnelle et urbaine et la mixité de leur composition sociale ; elle veille à ce titre à la revitalisation et la diversification de loffre commerciale dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ([15]). »

Par ailleurs, le Comité interministériel pour la citoyenneté et l’égalité du 6 mars 2015 a établi de nouvelles priorités afin de contribuer à une meilleure répartition du parc social sur les territoires en favorisant la reconstitution hors site lors de la mise en œuvre du NPNRU.

Enfin, le règlement général de l’ANRU du 16 juillet 2015 a traduit ces nouvelles injonctions en indiquant dans son préambule que le NPNRU « vise à concentrer les moyens et ressources de l’Agence pour soutenir les investissements et les dépenses d’ingénierie directement liées permettant d’aboutir à une mutation des quartiers, et favoriser la mixité sociale et fonctionnelle en développant la diversité de l’habitat (statuts, typologie des bâtiments et des logements) et des fonctions (équipements, commerces, activités économiques). » Il précise également qu’il doit « permettre le maintien et le retour de salariés dans les quartiers rénovés, grâce à une attractivité restaurée et à la diversification des formes d’habitat et l’élargissement de la gamme des produits. »

Dans le cadre du PNRU, la mixité sociale a donc été principalement envisagée sous le prisme de la mixité résidentielle. Le NPNRU tente de corriger les distorsions induites par cette vision restrictive, en prenant en compte la réalité plurielle de la mixité sociale.


B.   Une notion polysémique

La notion de mixité sociale ne peut être réduite à son aspect résidentiel, bien que celui-ci ait une influence sur la diversification du peuplement du quartier. Les effets supposés de la mixité sociale ont en effet été remis en question par les chercheurs, Gérard Baudin n’hésitant pas à la qualifier d’ « utopie ([16])» lorsqu’elle est limitée à la concentration sur le spatial et l’habitat.

1.   Des échanges entre les habitants d’un quartier indispensables pour favoriser la mixité sociale

La mixité résidentielle ne crée pas forcément des échanges entre les habitants du quartier. Gérard Baudin souligne cette problématique :

« Or, en premier lieu, il ne suffit pas de voisiner pour avoir des échanges si ceux-ci ne sont pas assis sur des identités qui puissent être partagées et servir de référents, qu’ils ressortent du métier, de l’origine familiale ou géographique ou des rapports économiques par exemple. 

En second lieu, on sait aussi que la qualité de la cohabitation dans un même quartier ou la même cage d’escalier, varie en fonction de la signification accordée par chaque habitant sur le fait d’habiter (à) tel ou tel endroit : cela peut être pour lui une situation transitoire, espérée ou relégatrice et dévalorisée.

De plus, tout se passerait comme si les gens recherchaient la mixité. Or, ce principe n’est pas vérifié dans la réalité : on peut préférer être entre soi, entre gens du même monde. ([17]) »

En effet, des processus de distinction sociale se développent souvent entre les habitants de ces quartiers qui appartiennent à différentes classes sociales ([18]).

Au contraire, l’école, l’université, le lieu de travail et de loisirs sont des espaces plus efficaces pour favoriser la mixité sociale et les échanges entre les différentes classes sociales. Par conséquent, la mixité fonctionnelle est complémentaire de la mixité résidentielle pour garantir la réussite de la politique de mixité sociale.

2.   Une mixité fonctionnelle nécessaire au développement des échanges entre les habitants des différents quartiers de la ville

Recouvrant plusieurs réalités, la mixité sociale ne peut être atteinte qu’en multipliant les outils pour en favoriser toutes les formes. La mixité fonctionnelle est donc primordiale pour permettre la mixité sociale. En effet, les équipements, les commerces et l’activité économique sont essentiels dans les quartiers prioritaires et conditionnent le succès d’une opération de rénovation urbaine globale. L’idée est bien de favoriser l’implantation d’activités économiques dans les quartiers prioritaires, notamment de commerces et de services pour encourager les échanges. Cette mixité fonctionnelle se heurte aux mêmes difficultés méthodologiques que la mixité sociale : en l’absence de définition claire et d’échelle de référence, aucun objectif chiffré à atteindre n’est défini.

Les rapporteurs ont retrouvé cette volonté de promouvoir la mixité fonctionnelle dans le cadre du PNRU à Boulogne-sur-Mer ([19]) avec l’aide au développement de plusieurs commerces. Surtout, la construction de la Tour Sopra qui abrite des locaux pour des entreprises et des services dans le quartier en rénovation urbaine du Chemin-Vert a attiré leur attention. Cette tour offre un cadre de travail attractif grâce à la vue sur la côte et la mer, ce qui a motivé l’installation de l’entreprise Sopra Steria. L’établissement d’un restaurant d’insertion au rez-de-chaussée de cette Tour est en projet.

En outre, de nombreux équipements ont été financés dans le cadre du PNRU. Par exemple, la salle de spectacle « Carré Sam » a entrainé une mixité culturelle indispensable avec des subventions importantes de la mairie qui permettent une production culturelle dynamique, à des prix attractifs. Les habitants du quartier ont pris l’habitude, de plus en plus, de fréquenter cette salle, aux côtés des habitants extérieurs plus habitués à fréquenter de tels lieux culturels. D’autres types d’équipements, tels des crèches ou des écoles ont été financés dans le cadre du PNRU : cela a par exemple été le cas à Marseille dans le quartier du Plan d’Aou. À Bondy, la plupart des écoles ont été réhabilitées dans le cadre du programme de rénovation urbaine.

Si la question des commerces et des équipements est souvent prise en compte dans les conventions, elle l’est néanmoins de manière insuffisante. En effet, une étude confiée à l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de
l’Île-de-France en 2011 a montré que la mixité fonctionnelle n’était pas un axe central des projets de rénovation urbaine avec des opérations menées de façon marginale. Ainsi, renforcer cette mixité fonctionnelle est apparu nécessaire, ce qui a été encouragé dans le cadre du NPNRU puisque le règlement général de l’ANRU du 16 juillet 2015 déclare que « favoriser la mixité fonctionnelle et consolider le potentiel de développement économique » mais aussi « renforcer l’ouverture du quartier et la mobilité des habitants ([20])» sont des objectifs incontournables des projets.

3.   Le débat autour des objectifs intrinsèques à la mixité sociale

Enfin, deux visions s’opposent sur les buts de la mixité sociale qui conditionnent les outils utilisés pour la mettre en œuvre. La mixité sociale doitelle permettre de lutter contre les tendances au regroupement dans les quartiers prioritaires ou doit-elle uniquement aboutir à une répartition équilibrée de la population sur le territoire en fonction de ses revenus ? Cette question découle sur une deuxième interrogation : souhaite-t-on la mise en œuvre d’une mixité « externe » ou « exogène » avec le retour des classes moyennes dans les quartiers aujourd’hui définis comme « prioritaires » ou doit-on défendre une mixité liée aux parcours résidentiels des ménages habitant ces quartiers, en luttant contre l’absence de mobilité subie ?

Lors de l’audition du 29 mars précitée, Thomas Kirszbaum a souligné la pertinence d’une mixité « endogène » : selon lui, les classes moyennes ne retourneront pas dans les QPV, ce qui n’est pas forcément source de difficulté en soi, car il défend l’idée selon laquelle la proximité endogamique permet aux habitants de trouver des ressources importantes pour leur intégration. D’ailleurs, les quartiers les moins mixtes sont aussi ceux qui regroupent les populations les plus riches, par exemple dans l’ouest parisien. Ainsi si la méthode privilégiée jusqu’ici a essentiellement été celle de la mixité « exogène », le chercheur recommande une approche « endogène » qui s’appuierait sur les classes moyennes déjà présentes dans ces quartiers en stabilisant les ménages les mieux dotés en ressources. Le rapport d’Hubert Dudebout « Ensemble, refaire la ville » énonçait déjà en 1983 : « Il n’est pas exclu, d’ailleurs que certains quartiers trouvent ainsi leur identité à travers une dominante ethnique, à l’image de certains quartiers populaires du passé, composés de migrants d’une même région. (...) Le refus de tenir compte de cette réalité est stérile, voire dangereux. Les institutions doivent assumer la réalité populaire de ces quartiers ([21] ) ».

Au cours de cette même audition, Stéphanie Vermeersch a, quant à elle, souligné que si cette « proximité communautaire » peut être bénéfique dans certains cas, elle ne doit pas être subie et elle dépend de la diversité des réseaux des personnes concernées. Elle a ainsi confirmé les limites de ce regroupement dans le cas d’un quartier paupérisé.

Les rapporteurs ont souhaité mettre en lumière ce débat qui pointe la complexité de la notion de mixité sociale et la multiplicité de ses dimensions.

 

II.   Une Difficile appréhension statistique de la mixité sociale

Au caractère polysémique de la notion de mixité sociale, qui la rend délicate à saisir, s’ajoute la difficile mesure des indicateurs qui permettraient de l’appréhender. Malgré la mise en place d’un Observatoire national, des limites inhérentes à l’élaboration des statistiques et des limites de pertinence à leur lecture font qu’il est compliqué de rendre compte de la mixité sociale.

A.   Une évaluation annuelle de la politique de rénovation urbaine prévue par un Observatoire national

En assignant à la rénovation urbaine une finalité sociale à atteindre par une action sur le stock de logement ([22]), la loi de 2003 précitée ([23]) invitait à adopter une approche statistique des effets de la rénovation urbaine. Elle listait d’ailleurs de nombreux indicateurs en annexe, devant être mesurés et suivis par l’Observatoire national des zones urbaines sensibles (ONZUS). Un renforcement du dispositif concernant la rénovation urbaine avait été envisagé par la création, au sein de l’ANRU, d’un comité d’évaluation et de suivi (CES), qui a publié à compter de 2004 de nombreuses analyses qualitatives.

Poursuivant cette ambition de suivi, la loi de 2014 précitée ([24]) a, d’un côté, supprimé l’annexe évoquée mais, de l’autre, précisé les objectifs de la politique de la ville et les compétences de l’observatoire en charge de leur suivi. Ainsi, cette loi a fusionné l’ONZUS et le CES dans un nouvel observatoire, l’Observatoire national de la politique de la ville (ONPV). Celui‑ci est chargé de la coordination des statistiques relatives aux quartiers prioritaires, mission accomplie dans le cadre d’une convention avec l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE).

Il est rendu compte du suivi de ces objectifs fixés par l’intermédiaire :

– de son rapport annuel, complété par des publications infra-annuelles (fiches techniques) afin de présenter un suivi national et thématique ;

– du site internet du SIG de la politique de la ville ([25]) qui donne accès à un atlas des quartiers prioritaires offrant une vision synthétique et comparative des indicateurs à plusieurs échelles et à un moteur de recherche permettant de consulter des bases de données statistiques détaillées et des fiches de synthèse thématiques locales.

B.   Des difficultés d’ordre méthodologique qui empêchent l’utilisation de tous les indicateurs statistiques disponibles

Les contraintes techniques d’élaboration des statistiques sont liées aux sources d’information mobilisées :

– lorsque sont exploités des fichiers administratifs, comme les enquêtes emploi, il est possible d’effectuer un suivi territorialisé très fin et régulier ;

– lorsque sont exploitées les données issues du recensement, il n’est plus possible d’effectuer un suivi annuel exhaustif des données pour tous les quartiers prioritaires, car le recensement n’est pas annuel ni opéré simultanément sur tous les territoires ;

– lorsque sont exploitées des enquêtes, il n’est pas non plus possible d’effectuer un suivi annuel sur tous les territoires, car un traitement statistique complexe est nécessaire, ce traitement emportant de nombreuses limites méthodologiques et un coût significatif.

En outre, ainsi que l’indiquait la direction du budget aux rapporteurs du CEC en 2010, « le traitement statistique de l’information relative à certains indicateurs est long, ce qui induit un décalage entre réalisation et évaluation de l’action » ([26]).

C.   Une démarche d’évaluation à l’opportunité discutée

La pertinence de la démarche, lorsque la mesure est techniquement possible, peut en outre être interrogée dans de nombreuses situations.

En premier lieu, les réalités dont les indicateurs rendent compte ne sont souvent intelligibles qu’au regard des situations très locales, ce qui rend leur agrégation à d’autres échelles et leur comparaison avec les mêmes indicateurs calculés sur d’autres territoires peu pertinentes. Ainsi, l’évolution du nombre de logements sociaux sur un territoire est techniquement mesurable de manière régulière à des échelles fines, mais une augmentation du nombre de logements sociaux dans un centre ancien marqué par des copropriétés dégradées n’a pas la même signification en termes de mixité sociale qu’une diminution du nombre de logements sociaux dans un grand ensemble, où ce type de logement est nettement prédominant. L’agrégation de cette donnée à l’échelle nationale ne permet en conséquence pas de caractériser une évolution positive ou négative en termes de mixité sociale.

En second lieu, la comparaison et la variation des indicateurs ne sont pas toujours pertinentes en raison de l’échelle de la rénovation urbaine qui, parce qu’elle est inférieure au quartier, les rend extrêmement sensibles à la conjoncture et ne permet pas de rendre compte de phénomènes souvent lisibles à des échelles encore plus fines. L’évolution comparée de la composition socio-professionnelle dans un IRIS ([27]) peut ainsi résulter de quelques déménagements liés à une mutation professionnelle ou un projet personnel sans lien avec l’attractivité du quartier ou la situation du bassin d’emploi concerné, ce qui ne permet pas de lui donner un sens dans une analyse en termes de mixité sociale. De même, des mouvements de concentration de la pauvreté peuvent apparaître à l’intérieur du même IRIS, à l’échelle d’un petit groupe d’immeubles, voire d’un seul immeuble ou palier d’immeuble, et ainsi échapper à la mesure statistique.

Ensuite, les évolutions à l’échelle d’un territoire ne sont pas nécessairement révélatrices des trajectoires des personnes, ce qui rend difficile l’établissement de conclusions de réussite ou d’échec des opérations de rénovation urbaine à l’aune de la seule comparaison d’indicateurs en début et en fin de projet. Le suivi de cohortes est indispensable pour apprécier ces trajectoires. Par exemple, le fait que l’évolution des indicateurs socioéconomiques avant et après une telle opération traduise une stagnation, voire une dégradation, peut signifier que la situation des personnes qui résidaient dans le quartier s’est améliorée grâce aux propositions de relogement qui leur ont été faites et qu’elles ont été remplacées dans le parc social du quartier par des personnes de situation socio-économique équivalente à leur situation d’origine ou plus dégradée.

Enfin, il est extrêmement complexe d’isoler les effets propres de la rénovation urbaine sur la mixité sociale, car celle-ci résulte principalement d’une part des effets d’autres politiques, spécifiques comme la politique de la ville, ou de droit commun dans tous les domaines et notamment dans le domaine social, et d’autre part d’éléments extérieurs à l’action directe de l’État sur ces territoires, comme l’évolution de la croissance économique, du taux de chômage ou du marché de l’immobilier.

En fin de compte, comme le soulignait une étude commandée dans le cadre de l’élaboration du rapport de 2010 précité,  le concept de mixité sociale, « aux yeux de maints chercheurs (mais également de maints praticiens locaux), n’en est pas un, et de ce fait ne se prête à aucune mesure objective. » ([28]). Aucune batterie d’indicateurs strictement scientifique ne peut donc être élaborée pour sa mesure. Lors d’une table-ronde organisée par les rapporteurs le 29 mars, il a ainsi été rappelé la nécessité de clarifier les intentions politiques sous-jacentes à ce concept pour qu’il puisse être déterminé ce que l’on souhaite mesurer.


—  1  —

 

Deuxième partie : Des politiques de mixité sociale aux résultats incertains

Dans la mesure où la loi de 2003 ([29]) a assigné à la rénovation urbaine une finalité sociale à atteindre par une action sur le stock de logement, cette seconde partie présente en premier lieu un panorama des conditions financières de réalisation des opérations (I), avant d’aborder la manière dont ces programmes ont été mis en l’œuvre à l’aune de cet objectif (II) et d’en présenter les principales limites (III). 

I.   des programmes centrés sur l’habitat et majoritairement financés par les acteurs du logement social

Le financement des actions mises en œuvre au titre de la rénovation urbaine permet de mettre en évidence deux caractéristiques fondamentales de cette politique publique : elle est articulée autour des opérations de démolition-reconstruction qui en constituent le cœur et elle est financée principalement par les acteurs du logement social.

A.   un cycle financier articulé autour des opérations de transformation de l’habitat

Parce qu’elle est structurée autour des opérations de démolition-reconstruction obéissant à un séquençage temporel spécifique, la rénovation urbaine nécessite des investissements forts et concentrés dans le temps, notamment en milieu de programmation.

1.   Des réalisations d’un niveau élevé, structurées autour de la transformation de l’habitat

Bien que les objectifs législatifs n’aient pas été atteints, notamment pour les opérations de démolition et de reconstruction, le niveau élevé de réalisations révèle leur place centrale dans l’économie générale des projets.

a.   Des réalisations élevées mais inférieures aux objectifs législatifs

Modifiée à plusieurs reprises ([30]), la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine de 2003 avait prévu qu’à l’horizon 2013, le PNRU aurait permis la démolition de 250 000 logements et autant de reconstructions, la réhabilitation de 400 000 logements et la résidentialisation de 400 000 autres. En 2016, le bilan était le suivant :

– 140 350 démolitions, soit 56 % de l’objectif législatif ;

– 115 700 constructions, soit 46,3 % de l’objectif législatif ;

– 309 580 réhabilitations, soit 77,4 % de l’objectif législatif ;

– 293 750 résidentialisations, soit 73,4 % de l’objectif législatif.

Au regard des autorisations d’engagement ouvertes, d’ici 2021, au total, 158 150 logements devraient être démolis, 137 800 construits, 336 620 réhabilités et 345 950 réhabilités. Le nombre de réalisations est donc élevé. Il serait toutefois intéressant de pouvoir disposer des données permettant de mesurer la contribution de ces réalisations à l’effort national dédié au logement social, et ce également de manière territorialisée pour discerner les zones tendues.

Opérations de démolition, construction, réhabilitation et résidentialisation réalisées par l’ANRU

Nombre de logements concernés par année entre 2004 et 2016

Source : Commission des finances, d’après l’ANRU

En douze ans de PNRU, il a été en moyenne démoli 11 700 logements et construit 9 600 logements chaque année, réhabilité 25 800 logements et procédé à 24 500 résidentialisations. Le nombre annuel d’opérations n’a toutefois pas été réparti de manière homogène dans le temps, ainsi que l’illustre le graphique ci‑dessus :

– suivant un séquençage assez logique, le programme a commencé par des démolitions, puis procédé à des constructions. Le nombre de ces dernières est devenu supérieur à celui des premières en 2012, année où le nombre de constructions et de démolitions a été le plus élevé, mais le nombre cumulé des démolitions est toujours resté supérieur à celui des constructions, si bien que le taux de reconstitution total devrait atteindre 87 % en 2021.


Taux de reconstitution depuis 2004 dans 15 agglomérations

L’agglomération de Paris (unité urbaine) représente près du tiers des interventions de l’Anru (en subventions engagées). Les quinze premières agglomérations sont indiquées dans le tableau ci-dessous.

 

Agglomération

Taux de reconstitution
de l’offre (constaté)

Taux de reconstitution
de l’offre (prévisionnel)

Paris

113 %

109 %

Lille (partie française)

106 %

92 %

Bordeaux

103 %

105 %

Lyon

142 %

105 %

Marseille – Aix-en-Provence

141 %

123 %

Toulouse

104 %

120 %

Nancy

97 %

84 %

Rouen

87 %

84 %

Douai - Lens

112 %

107 %

Valenciennes (parties française)

91 %

93 %

Strasbourg (partie française)

117 %

83 %

Saint-Étienne

79 %

85 %

Reims

82 %

82 %

Grenoble

107 %

107 %

Bourges

67 %

65 %

Taux de reconstitution de l’offre = nombre de logements PLUS-PLAI financés / nombre de logements financés en démolition

Source : Ministère de la cohésion des territoires, bilan 2015 des logements aidés

– suivant ce même séquençage, les résidentialisations sont intervenues surtout après les opérations de démolition-reconstruction. Le nombre a également été maximal en 2012, année après laquelle ce type d’opérations est passé au premier rang du total des réalisations ;

– enfin, le rythme des réhabilitations, moins lié au séquençage précédemment évoqué, a évolué de manière plus autonome, progressant de manière importante dès le début du programme et jusqu’en 2011, puis déclinant tout en restant nettement supérieur à celui des démolitions et reconstructions.

b.   Des opérations de démolition-reconstruction structurantes

Les opérations de démolition-reconstruction constituent une véritable rupture avec les politiques précédentes de rénovation urbaine, les démolitions ayant constitué, avant, un tabou. De même qu’elles structurent le séquençage du programme dans le temps, ces opérations structurent aussi la volumétrie des subventions versées par l’ANRU. Celles accordées à l’aménagement urbain ou aux équipements sont, quant à elles, d’une certaine manière, consécutives aux opérations de démolition et de reconstruction : tirant les leçons de l’échec des grands ensembles, les programmes de rénovation urbaine postérieurs à 2003 envisagent en effet la transformation du bâti au sein de projets globaux et dans un cadre financièrement intégré.

Ainsi, 43 % des 10,2 milliards d’euros de crédits de paiement versés par l’ANRU cumulés au titre du PNRU au 31 décembre 2017 ont subventionné des opérations de construction et de démolition, 16 % d’opérations d’aménagement, 12 % de réhabilitation, 12 % de construction d’équipements et 7 % de résidentialisations.

Répartition des subventions de l’ANRU par type d’opérations

En crédits de paiement au 31 décembre 2017

Source : Commission des finances, d’après l’ANRU

Ces montants de subvention peuvent être mis en regard des montants investis, qui sont ainsi répartis : 42,5 % au titre de la construction, 7,4 % au titre des démolitions, 14,5 % au titre de l’aménagement, 13,1 % au titre des réhabilitations, 9,4 % au titre des équipements et 4,3 % au titre des résidentialisations.

Suivre l’évolution annuelle comparée des subventions et des réalisations par type d’opération permet de mettre en évidence le fait d’une part que les montants annuels dédiés aux démolitions et aux reconstructions sont toujours supérieurs à ceux dédiés aux réhabilitations et résidentialisations, et d’autre part que le montant des subventions suit globalement dans le temps le nombre de réalisations. Un tel constat n’était pas évident, dans la mesure où le séquençage dans le temps du paiement des opérations ([31]) induit un décalage entre le paiement d’une opération et sa livraison.

Bien que le graphique permette instantanément de voir que le taux de subventionnement des résidentialisations est faible – colonnes correspondantes indiquant des valeurs faibles et courbe correspondante indiquant des valeurs élevés – ce séquençage des paiements dans le temps interdit, sur la base des chiffres communiqués aux rapporteurs, de calculer pour chaque année le montant moyen des subventions accordées par type d’opération. Suivre l’évolution d’un tel indicateur et le mettre en regard de l’évolution du coût des opérations contribueraient néanmoins utilement à permettre aux députés de se forger un jugement sur le niveau de subvention accordé par type d’opération.

Ce niveau peut jouer un rôle déterminant dans la mise en œuvre, ou non d’une opération. Ainsi que le rappelait la Caisse des dépôts et consignations aux rapporteurs, « d’un point de vue économique, la démolition et les réhabilitations déstabilisent les équilibres financiers des organismes de logement social et l’absence d’aide publique générerait des pertes comptables significatives. » Or, les démolitions sont dans de nombreux cas un préalable nécessaire à la construction.

Pour la durée du PNRU, le montant moyen de la subvention de l’ANRU, dont le taux prévu par le règlement général de l’ANRU est susceptible de faire l’objet de modulations en fonction du scoring financier du maître d’ouvrage et de la qualité du projet, était de :

– 15 349 euros par logement pour une démolition d’un coût moyen de 20 800 euros (soit 74 %) ;

– 18 047 euros pour une construction d’un coût moyen de 136 700 euros (soit 13 %) ;

– 3 753 euros pour une réhabilitation d’un coût moyen de 17 100 euros (soit 22 %).

Opérations de démolition, construction, réhabilitation et résidentialisation subventionnées par l’ANRU

Évolution du nombre de logements concernés et du montant de la subvention dédiée (*)

(*) Montant de la subvention en crédits de paiement

Source : Commission des finances, d’après l’ANRU

2.   Un cycle financier mettant en exergue un important besoin de financement à moyen terme

Cette place prédominante des opérations de démolition-reconstruction implique, au regard de leur coût, un besoin de financement important dont la caractéristique est d’être plutôt concentré en deuxième moitié de programmation.

a.   Un besoin de financement et un effet de levier importants

L’investissement total au titre du PNRU s’est élevé à 47 milliards d’euros. L’investissement au titre du NPNRU devrait être compris entre 20 milliards d’euros selon l’USH ([32]) et 40 milliards d’euros selon le CGET. Au total, le montant cumulé de l’investissement au titre des deux programmes pourrait donc atteindre 87 milliards d’euros pour la période 2004-2032.

La contribution de l’ANRU à cet investissement s’est élevée à 10,2 milliards d’euros en crédits de paiement au 31 décembre 2017, 11,7 milliards d’euros ayant été engagés avant l’échéance du programme sur les 12,3 milliards d’euros prévus par la loi en incluant des crédits du plan de relance économique en 2009-2010. 1,5 milliard d’euros reste donc à payer au titre du PNRU avant 2021, année à laquelle il est estimé que la totalité des paiements aura été réalisée. Ces chiffres appellent trois commentaires :

– le montant cumulé d’investissement et le montant cumulé de subvention de l’ANRU se situent à des niveaux élevés ;

– en 2021, il devrait rester un reliquat estimé à 600 millions d’euros si tous les crédits engagés sont consommés : le taux de consommation des crédits de l’Agence est malgré cela très satisfaisant, puisqu’il s’élève à 97,5 % ;

– l’effet de levier est important car près de 12 milliards d’euros auront permis l’investissement par d’autres partenaires de plus de 35 milliards d’euros, soit trois fois le montant des subventions.

Effet de levier et répartition des financements mériteraient une analyse territorialisée pour mettre en évidence les facteurs locaux de réussite et d’échec, qui sont déterminants dans la compréhension générale du programme. Les programmes nationaux de rénovation urbaine expriment en effet avant tout un soutien national à des projets construits, portés et financés localement. Bien que les données communiquées aux rapporteurs aient été insuffisantes pour cela, un regard sur le nombre de conventions permet de mettre en évidence une concentration accrue des moyens financiers entre les deux programmes :

– 399 conventions ayant été signées au titre du PNRU, le montant moyen des crédits engagés s’est élevé à près de 3 millions d’euros ;

– 209 protocoles de préfiguration ont été signés au 31 décembre 2017, les sept derniers devant l’être en 2018. Les six premières conventions ont été signées en 2017, 210 conventions restant à signer au titre du NPNRU, ce qui porterait le montant moyen des crédits engagés à 4,6 millions d’euros.

Le détail de la répartition des enveloppes au titre du NPNRU entre projets d’intérêt national et projets régionaux avait été fixé initialement selon un rapport de 80 % pour les premiers à 20 % pour les seconds. Toutefois, le partage définitif des enveloppes devrait être connu après que les mesures de réforme de l’instruction des conventions auront été mises en œuvre. Ces mesures prévoient en effet la possibilité de mieux financer un certain nombre de projets régionaux du fait du doublement de l’enveloppe dédiée au PNRU.

b.   Des besoins cycliques, importants à moyen terme

Les différences d’avancement des projets et leur phasage impliquent une répartition hétérogène des besoins de financement dans le temps. Le graphique ci-dessous met ainsi en évidence deux « bosses » de financement :

– au titre du PNRU, le montant des crédits dédiés au paiement des subventions par l’ANRU a approché ou dépassé 1 milliard d’euros par an entre 2009 et 2016, correspondant à un pic d’engagements entre 2007 et 2011 (un maximum d’engagements de 2,1 milliards d’euros est constaté en 2009 ainsi qu’un pic final en 2015) ;

– au titre du NPNRU, ce montant devrait dépasser 1 milliard d’euros entre 2023 et 2026, la chronique prévisionnelle des engagements, qui devrait s’achever en 2024, n’étant pas encore établie du fait du faible nombre de conventions signées.

Montant des subventions de l’ANRU pour la rénovation urbaine

En crédits de paiement (*)

(en millions d’euros)

(*) Réalisé pour la période 2004-2017, projections entre 2018 et 2031

Source : Commission des finances, d’après l’ANRU

Le graphique met aussi en évidence un creux entre 2017 et 2021, avec un palier de dépenses annuelles d’un montant avoisinant 600 millions d’euros. Ce palier correspond à la période de jonction entre PNRU et NPNRU, qui est également celle de la mise en œuvre des protocoles de préfiguration et de signature des conventions pluriannuelles :

 après un pic de paiements en 2016 succédant à la fin des engagements en 2015 au titre du PNRU, le montant des paiements décroit logiquement jusqu’en 2021, année à laquelle le programme aura été intégralement payé ;

– après une « année blanche » en 2017, lors de laquelle les premières conventions NPNRU venaient seulement d’être signées, et lors de laquelle les crédits ouverts par l’État au titre de la loi de finances pour 2017 ont été annulés ([33]), il est prévu jusqu’à 2021 une augmentation des paiements dédiés à ce programme égale à la diminution de ceux dédiés au PNRU.

B.   Un financement par les acteurs du logement social qui a nécessité de nombreux ajustements

Le niveau de financement exigé pour mener les opérations de rénovation urbaine rend nécessaire un financement partenarial, qui est majoritairement assuré par les acteurs du logement social et qui a fait l’objet de très nombreux ajustements quantitatifs et qualitatifs. L’incertitude sur le financement du NPNRU, désormais levée, appelle néanmoins à une vigilance de la représentation nationale pour que le programme puisse être mené à terme dans de bonnes conditions.

1.   Un financement partenarial principalement assuré par les acteurs du logement social

Le financement de la rénovation est structuré autour des subventions de l’ANRU, mais il est très majoritairement assuré par les acteurs du logement social, et notamment les bailleurs sociaux.

a.   Une part minoritaire de l’ANRU dans l’ensemble des financements de la rénovation urbaine

Sur 45,1 milliards d’euros de recettes dédiées à la rénovation urbaine au 31 décembre 2016, un quart provenait de l’ANRU, soit 10,1 milliards d’euros. Les recettes de l’ANRU provenaient elles-mêmes de différents financeurs :

– Action logement a versé 7,7 milliards d’euros au budget de l’ANRU, soit 82 % de ses recettes, au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC), selon des modalités prévues par des conventions passées avec l’État ;

– l’État a versé 846,4 millions d’euros de crédits budgétaires à l’Agence, complétés par 350 millions d’euros au titre du plan de relance et par 285 millions d’euros de recettes affectées au titre du Grand-Paris, soit au total 1,5 milliard d’euros représentant 14,7 % des recettes de l’ANRU ;

– la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) a versé 693,9 millions d’euros correspondant à une fraction des cotisations des bailleurs sociaux qu’elle perçoit au titre de l’article L. 452-4-1 du code de la construction et de l’habitation ;

– la Caisse des dépôts et consignations (CDC) a versé 44,2 millions d’euros dans le cadre d’une convention prévoyant le financement d’actions d’ingénierie et une contribution au fonctionnement de l’ANRU, indépendamment des prêts qu’elle a accordée aux maîtres d’ouvrages pour le financement de leurs opérations.

Le financement de la rénovation urbaine

Encaissements cumulés, au 31 décembre 2016, au titre du PNRU

(*) État, dont plan de relance, mais hors Grand-Paris

Source : Commission des finances, d’après le memo PNRU 2016 et le rapport annuel de performances 2016

b.   Une programmation financée aux deux tiers par les acteurs du logement social

Sur les mêmes 45,1 milliards d’euros de recettes dédiées à la rénovation urbaine au 31 décembre 2016, 75 % provenaient d’autres sources que l’ANRU dans le cadre du cofinancement des conventions pluriannuelles, notamment :

– des bailleurs sociaux pour un montant de 20,5 milliards d’euros, représentant 45 % des ressources du PNRU : ils ont financé les projets en mobilisant leurs fonds propres, pour un montant de 3 milliards d’euros, ou en empruntant, principalement à la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

La CDC a contribué de manière indirecte, mais significative au financement du PNRU pour un montant de 22,1 milliards d’euros de prêts, dont 18,6 milliards d’euros visant le secteur du logement social et 2,5 milliards d’euros de Prêts projets urbains (PPU) pour l’aménagement et l’équipement des autres quartiers prioritaires depuis la création de ce prêt en 2003.

– des collectivités territoriales pour un montant de 9,6 milliards d’euros, soit 22 %, notamment des communes et EPCI qui ont porté les projets (13 %), mais aussi d’autres collectivités dans le cadre, principalement, des contrats de plans État-régions (CPER).

L’addition des contributions d’Action logement et de la CGLLS dans le cadre du financement de l’ANRU à celles des bailleurs sociaux dans le cadre du financement direct des conventions met en évidence le fait que les deux tiers du financement du PNRU ont émané des acteurs du logement social.

2.   Un cadre financier extrêmement évolutif

L’ampleur de besoin de financement, qui s’est révélée progressivement, a nécessité une augmentation considérable des budgets initiaux qui s’est accompagnée de modifications de leur répartition entre financeurs en fonction du degré d’implication de l’État. Dans le contexte de la mise en œuvre du NPNRU, la recomposition induite par le doublement de l’enveloppe accompagnant la confirmation d’une participation de l’État a entraîné une consolidation tardive du financement du programme.

a.   Quintuplement du PNRU et doublement du NPNRU

Alors qu’en 2003, l’enveloppe dédiée au PNRU avait été fixée à 2,5 milliards d’euros, ce montant a été porté à 4 milliards d’euros deux ans après, puis 5 milliards d’euros l’année suivante, 6 milliards l’année d’après, puis doublé en 2009 et ainsi porté à 12 milliards d’euros. Le montant du budget initial dédié au PNRU a donc presque quintuplé en six ans.

Le financement du NPNRU, initialement fixé à 5 milliards d’euros en 2014, a été porté à 6 milliards d’euros en 2017 et à 10 milliards d’euros en 2018, soit un doublement en à peine quatre ans, pour un projet devant durer 10 ans (18 ans, si l’on tient compte des délais nécessaires pour payer les engagements pris jusqu’à 2024).

Lois et conventions de financement de la rénovation urbaine

 

Texte

Fin (*)

Financement

Objectifs de réalisations

Programme national pour la rénovation urbaine (PNRU)

2003

Loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine

2008

2,5 Mds euros

constructions : 200 000 réhabilitations : 200 000 résidentialisations : 200 000 démolitions : 200 000

2003

Convention État-UESL relative à l’intervention du 1 % Logement dans la politique de rénovation urbaine du 10 septembre 2003 (**)

2005

Loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale

2011

4 Mds euros

constructions : 250 000 réhabilitations : 400 000 résidentialisations : 400 000 démolitions : 250 000

2006

Loi n°2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement

2013

5 Mds euros

2007

Loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale

6 Mds euros

2009

Loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion

12 Mds euros

2009

Convention État-UESL relative à l’accompagnement du plan de cohésion sociale par le 1 % Logement et à l’application du plan de rénovation urbaine

2014

Loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine

2015

Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU)

2024

5 Mds euros

pas d’objectifs législatifs chiffrés

Convention quinquennale 2015-2019 du 2 décembre 2014 ÉtatAction Logement

2015

Convention tripartite État-ANRU-UESL du 2 octobre 2015 sur le NPNRU

2017

Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017

6 Mds euros

2018

Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018

10 Mds euros

Convention quinquennale 2018-2022 du 16 janvier 2018 ÉtatAction Logement

Protocole d’accompagnement État-Mouvement HLM 2018-2021

Avenant à la convention tripartite État-ANRU-UESL de 2015 (à venir)

 (*) Fin prévue des engagements financiers au titre du programme ;

(**) Précisée par la convention du 15 juillet 2004 entre l’État et l’UESL relative à l’intervention du 1 % Logement dans la location-accession, le logement locatif et la rénovation urbaine et par la convention du 27 octobre 2004 entre l’État et l’UESL relative à l’accompagnement du plan de cohésion sociale par le 1 % Logement.

Source : commission des finances

b.   Retrait et retour de l’État

Dans le cadre du financement partenarial prévu en 2003, il était prévu, à côté des contributions de l’Union d’économie sociale du logement (UESL, désormais Action logement), de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), une contribution de l’État. En 2009, ce dernier y a mis fin sous forme de crédits budgétaires, mais l’a poursuivie en 2009 et 2010 dans le cadre du plan de relance et entre 2011 et 2013 dans le cadre du Grand-Paris.

Cette modification a nécessité une réévaluation des contributions des autres financeurs et notamment de l’UESL ([34]). Alors que de 2004 à 2008 l’UESL‑Action Logement avait contribué au financement de l’Agence à un taux compris entre 40 % et 60 %, à compter de 2010 ce taux a atteint 80 % et même, après 2014, dépassé 95 %.

Lors de la mise en place du NPNRU, à l’inverse de 2003, aucune contribution de l’État n’était prévue. La convention quinquennale passée en 2015 avec Action logement prévoyait que les 5 milliards d’euros alloués au programme seraient versés par elle sous forme de subventions d’un montant de 4,2 milliards d’euros, intégrant les 600 millions d’euros de reliquat du PNRU, et d’équivalents-subventions d’un montant de 800 millions d’euros, correspondant au montant des bonifications de 2,2 milliards d’euros de prêts. Elle prévoyait aussi deux types de contreparties : d’une part, à titre gratuit, des terrains et droits à construire estimés à 12 500 logements et, d’autre part, des droits à réservation estimés à 20 000 logements.

La loi de finances pour 2017 a modifié cette situation en consacrant le retour de l’État, pour un montant d’un milliard d’euros. Le montant des crédits de paiement que l’État a prévu d’ouvrir à ce titre se répartirait ainsi : 15 millions d’euros en 2018, 2 millions d’euros en 2019, 35 millions d’euros en 2020, 50 millions d’euros en 2021, 75 millions d’euros en 2022 puis 130 millions d’euros jusqu’en 2027 et 150 millions d’euros en 2028. L’enjeu de cette contribution était notamment de faciliter le financement par l’ANRU d’opérations d’aménagement et d’équipement, contribuant au caractère global et intégré des projets.

c.   Une consolidation tardive du montage financier

Alors même que les modalités de ventilation des crédits résultant de l’augmentation de l’enveloppe d’un milliard d’euros n’avaient pas encore été actées, la loi de finances pour 2018 a de nouveau modifié le montant de l’enveloppe et prévu, en complément de la contribution de l’État dont le montant a été inscrit dans la loi, 4 milliards d’euros de contributions nouvelles. Or, ces contributions sont restées incertaines durant le printemps 2018, pour n’être réellement consolidées qu’au mois de mai :

– une augmentation de la contribution d’Action logement de 2 milliards d’euros, sous forme de subventions et de prêts bonifiés ;

 une contribution des bailleurs sociaux négociée entre l’État et l’Union sociale pour l’habitat (USH) d’un montant de 2 milliards d’euros, permise par une contribution complémentaire à celle déjà versée par l’intermédiaire de la cotisation versée par la CGLLS et indépendamment des financements accordés dans le cadre des conventions pluriannuelles.

Financement du NPNRU par l’ANRU

Enveloppe financière consolidée à 10 milliards d’euros (*)

(*) Le montant de 12,1 milliards d’euros auquel il est parfois fait référence intègre, en plus des bonifications considérées comme des « équivalents-subventions », 2,1 milliards d’euros de prêts.

Source : commission des finances, d’après l’ANRU

3.   Un financement à moyen terme consolidé, mais appelant à une vigilance élevée des parlementaires

En raison de la place prépondérante des acteurs du logement social dans le financement de la rénovation urbaine, une vigilance particulière des parlementaires est nécessaire à la fois sur le financement de ces acteurs et sur la capacité réelle à répondre aux besoins financiers à moyen terme.

a.   Des réformes en cours susceptibles d’affecter les ressources des acteurs du logement

La consolidation tardive du financement du doublement de l’enveloppe du NPNRU résulte en grande partie des conséquences incertaines que deux initiatives législatives sans lien direct avec la rénovation urbaine étaient susceptibles d’avoir sur les acteurs du logement social, qui sont ses principaux financeurs. Il s’est ainsi avéré nécessaire de trouver :

– un accord avec l’USH, qui s’est traduit par la signature du protocole d’accompagnement État-mouvement HLM 2018-2021, sur la compensation de mise en œuvre de la réduction des loyers sociaux (RLS) prévue en loi de finances pour 2018 et sur l’accompagnement de la réorganisation du tissu des organismes prévue par le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN).

En effet, ainsi que l’a expliqué la Caisse des dépôts et consignations (CDC) aux rapporteurs, « le futur projet de loi ELAN constituera a priori une évolution significative de l’environnement des bailleurs sociaux. Les différents impacts sont à ce stade difficilement mesurables mais une éventuelle tension sur la trésorerie des bailleurs cumulée à la possible réorganisation de l’ensemble du secteur (fusions, regroupements) ne manqueront d’influencer le rythme des programmes ANRU ». La CGLLS, qui organisera la péréquation entre les bailleurs, a indiqué qu’une baisse du chiffre d’affaires de certains bailleurs pourrait entraîner une diminution de leurs fonds propres : dans ce contexte, l’enjeu de la péréquation qu’elle est chargée de mettre en œuvre est d’éviter une diminution de l’investissement.

– un accord avec Action logement, qui sera formalisé prochainement dans un avenant à la convention tripartite de 2015 entre l’État, l’ANRU et l’UESLAction logement, sur la compensation de la diminution de l’assiette de la PEEC résultant de la modification prévue des seuils sociaux dans le projet de loi Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE). L’inquiétude était d’autant plus grande que la Cour des comptes avait déjà interrogé, dans son rapport de 2014, la soutenabilité du financement de la rénovation urbaine eu égard à sa dépendance à la PEEC ([35]).

Saluant les accords trouvés, qui permettent enfin le lancement du NPNRU, les rapporteurs appellent néanmoins à veiller à la bonne cohérence des textes les uns avec les autres, pour éviter les injonctions contradictoires.

b.   Une possible impasse de trésorerie à moyen terme

Les rapporteurs souhaitent soulever un point de vigilance. Le graphique ci‑dessous met en évidence une trésorerie négative de l’ANRU entre 2023 et 2030. Les années où les perspectives d’ouvertures de crédits de paiement les plus importantes ont été indiquées aux rapporteurs (elles dépasseront 1 milliard d’euros par an entre 2024 et 2027), le montant de la trésorerie serait négatif pour un montant compris entre 1 milliard d’euros et 2,3 milliards d’euros.

Une telle impasse potentielle de trésorerie, dont le montant cumulé pourrait atteindre 1,5 milliard d’euros si les hypothèses ayant conduit à l’élaboration des prévisions communiquées à vos rapporteurs se précisaient, aurait de lourdes conséquences, car l’ajustement devrait se faire soit par endettement, soit en réduisant l’envergure des projets. L’ANRU ne peut en effet affecter des sommes supérieures à celles dont elle dispose. Or, l’envergure des projets est une condition de la réussite de la rénovation urbaine.

L’endettement de l’Agence est en outre très encadré. Son statut d’organisme divers d’administration centrale (ODAC) ne lui permet pas d’emprunter à plus d’un an. Afin de permettre des ajustements de trésorerie, un complément de versement de ressources d’un maximum de 100 millions d’euros a été prévu par la convention tripartite avec Action logement de 2015. Ce complément a déjà été mobilisé en 2016 pour un montant de 60 millions d’euros et apuré en 2017, avec un coût de 300 000 euros pour l’ANRU. La convention tripartite 2018-2022 prévoit le versement d’un montant minimum de ressources annuel ainsi qu’un possible ajustement pluriannuel.

L’ANRU a indiqué aux rapporteurs que les hypothèses seraient révisées au fur et à mesure des signatures de conventions pluriannuelles locales et que « les discussions avec les financeurs en vue de préparer les conventions de financement pour la période 2023-2028 seront déterminantes pour s’assurer qu’il n’y aura pas d’impasse de trésorerie. » Le CGET, puis le secrétaire d’État auprès du ministre de la Cohésion des territoires, ont confirmé aux rapporteurs que le financement du NPNRU était maîtrisé, précisant que l’ANRU avait su par le passé gérer des situations analogues.

Évolution de la trésorerie de l’ANRU
Évolution comparée du montant des subventions versées au titre de la rénovation urbaine et du niveau de la trésorerie de l’Agence (*)

(en millions d’euros)

(*) Le montant des subventions correspond aux crédits de paiement exécutés avant 2017, et prévisionnels dès 2018.

Source : Commission des finances, d’après l’ANRU

II.   Une action sur le PARC de logements comme moyen privilÉgiÉ de mise en œuvre de la mixitÉ sociale

Renforcer la mixité sociale dans les quartiers rénovés, ce qui correspond à la volonté du législateur, nécessite de définir les outils pertinents favorisant d’une part une répartition équilibrée des différents publics éligibles à un logement social afin de mettre en œuvre une politique de peuplement pertinente, et, d’autre part la mixité résidentielle par l’attraction des classes moyennes. Il s’agit là en effet, de promouvoir respectivement les deux versants de la mixité sociale, par la répartition des logements sociaux ou par la diversification de l’habitat. Toutefois, s’accorder sur les objectifs est nécessaire à la définition des outils les plus adaptés et efficaces.

Ainsi, le règlement général de l’ANRU du 16 juillet 2015, affirme que la diversité de l’habitat doit être recherchée au sein du quartier pour « favoriser les parcours résidentiels positifs, répondre aux attentes des habitants et permettre l’accueil de catégories de populations différentes ([36]) ». Celle-ci peut être mise en œuvre par « la construction de logements privés (y compris en accession sociale) mais aussi au sein du parc de logement locatif social ».

Le règlement général souligne également la nécessité des reconstructions hors site, la déconcentration du logement social dans les quartiers devant « permettre un rééquilibrage du parc social à l’échelle de l’agglomération ». Les exceptions à ce principe doivent être « limitées et justifiées par le contexte local et par la contribution des réponses proposées à l’objectif d’équilibre social et territorial de l’habitat et des populations ».

Enfin, les rapporteurs insistent sur la nécessité de prendre en compte le taux de progression de la mixité sociale afin de mesurer l’effort des élus locaux.


A.   Une mixité sociale favorisée par une meilleure répartition des logements sociaux sur l’agglomération

La mixité résidentielle passe par une répartition plus équilibrée du parc social sur le territoire de l’agglomération. Ce rééquilibrage est favorisé par des contraintes quantitatives en termes de construction de logements sociaux, une action sur l’attribution des logements sociaux et des objectifs de dispersion des résidents les plus pauvres lors des opérations de rénovation urbaine pour éviter la concentration de la pauvreté.

1.   Des objectifs quantitatifs de construction de logements sociaux

Le rééquilibrage de la répartition des logements sociaux passe d’abord par des règles contraignantes en termes de construction de logements sociaux à l’échelle de chaque commune.

Ainsi, l’article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) a imposé un quota de 20 % de logements sociaux aux communes de plus de 3 500 habitants – et de 1 500 habitants en Île-de-France – appartenant à des agglomérations ou intercommunalités de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants. Cette obligation a été renforcée par la loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 puisque le quota est porté à 25 % de logements sociaux d’ici 2025.

En outre, les sanctions prononcées par les préfets à l’encontre des communes carencées ont été alourdies par les lois n° 2013-61 du 18 janvier 2013, n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) et n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté.

2.   Une meilleure répartition des attributions de logements sociaux

Cette répartition passe également par une attribution équilibrée des logements sociaux sur critères sociaux à l’échelle intercommunale. Ainsi, la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, a créé une conférence intercommunale du logement ([37]), coprésidée par le préfet et le président de l’EPCI, qui permet un pilotage de la politique d’attribution des logements à l’échelle intercommunale, ce qui est indispensable à la mise en œuvre d’une politique de peuplement efficace et vectrice de mixité sociale. La loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté rend cette conférence obligatoire pour les territoires qui ont des obligations de mixité sociale ([38]). Les orientations relatives aux attributions de logements sociaux sont déclinées pour les publics prioritaires, certains secteurs géographiques prioritaires et pour les personnes relogées dans le cadre des opérations de rénovation urbaine. La loi relative à l’égalité et à la citoyenneté crée également une convention d’attribution intercommunale ([39]) qui répartit les attributions arrêtées par la CIL entre les bailleurs sociaux. Une instruction du ministère de la cohésion des territoires, en date du 14 mai 2018 ([40]), portant sur les règles d’attribution de logements sociaux en QPV, a rappelé que la conférence intercommunale du logement (CIL) et la convention intercommunale d’attribution (CIA) constituaient des leviers essentiels en faveur de la mixité sociale. Ces instances ont en effet vocation à éviter le relogement systématique des populations défavorisées dans les QPV.

D’après les premières évaluations du Gouvernement, 208 CIL étaient créées fin 2017 dont 185 s’étaient déjà réunies. Cependant, moins de 1 % des EPCI pour lesquels la réforme est obligatoire ont élaboré et signé leur convention intercommunale du logement, même si le travail d’élaboration semble être en cours. Une attention particulière devra donc être portée sur cette réalisation.

Afin de faciliter cet objectif de mixité sociale, la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté a mis en place deux mesures contraignantes concernant l’attribution des logements sociaux :

– elle impose aux bailleurs de réserver 25 % des attributions de logements sociaux en dehors des QPV aux 25 % des demandeurs les plus pauvres et à des ménages relogés dans le cadre des opérations de renouvellement urbain ;

– elle prévoit que 50 % des attributions de logements sociaux dans les QPV soient au bénéfice des ménages les moins défavorisés.

Concernant la première disposition, la loi permet que ce pourcentage puisse éventuellement être adapté à la baisse ou à la hausse, dans le cadre de la conférence intercommunale du logement réunie par l’EPCI, sous réserve de l’approbation du préfet. Par une circulaire du 14 mai 2018, le gouvernement a donné instruction aux préfets de n’accepter d’approuver qu’à titre exceptionnel une adaptation à la baisse de l’objectif et de subordonner cette approbation à des considérations rigoureusement objectives et démontrées.

Le projet de loi ELAN, adopté en première lecture le 12 juin 2018 à l’Assemblée nationale comprend deux dispositions ayant des répercussions sur l’attribution des logements sociaux. D’une part, il supprime la possibilité d’adaptation à la baisse de l’objectif des 25 % d’attributions hors QPV au 1er quartile des ménages les plus défavorisés. Si l’objectif n’est pas atteint, le préfet peut procéder à des attributions en faveur des ménages les plus pauvres à due concurrence de l’écart constaté. D’autre part, le texte sanctuarise l’objectif de 50 % d’attributions aux ménages les moins défavorisés dans les QPV en interdisant la diminution de cet objectif et en actant la possibilité de l’augmenter par les conférences intercommunales du logement.

Le suivi de l’application de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté ne sera mis en œuvre à l’Assemblée nationale qu’en 2019 mais le Gouvernement a établi un premier bilan. Ainsi, la part des attributions de logements hors QPV aux ménages du 1er quartile a progressé de deux points, passant de 14,6 % à 16,5 %. 75 % des attributions de logements sont faites en faveur des 2e, 3e et 4e quartiles dans les QPV et seulement 3,6 % des attributions en QPV sont en faveur du public DALO.

3.   Des objectifs de reconstitutions et de relogements hors QPV dans les opérations de rénovation urbaine

Les reconstitutions hors site et les relogements hors des quartiers prioritaires contribuent à la dispersion des publics les plus précaires, concentrés dans les quartiers faisant l’objet de rénovation urbaine.

Si ces mesures ont été encouragées par le PNRU pour favoriser la mixité sociale, aucun objectif contraignant n’est venu les accompagner. Ainsi, pour remédier aux insuffisances constatées dans le cadre du premier programme concernant cette politique, le Comité interministériel pour la citoyenneté et l’égalité du 6 mars 2015 a défini deux nouveaux objectifs pour NPNRU, traduits dans le règlement général de l’ANRU du 16 juillet 2015 : la reconstruction des logements démolis en dehors des QPV et la limitation de la construction de logements sociaux dans les quartiers où leur part dépasse déjà 50 %.

Il convient de signaler alors que ces deux priorités ont été formalisées sous formes d’indicateurs dans les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances pour 2018 :

– le taux de reconstitution hors QPV des logements sociaux démolis dans le cadre du NPNRU ;

– le taux de reconstitution, hors commune comptant plus de 50 % de logements sociaux, des logements sociaux démolis dans le cadre du NPNRU.

L’échelle intercommunale a d’ailleurs été réaffirmée comme échelle pertinente de la production des logements sociaux dans le cadre de la politique de renouvellement urbain. L’article 3 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine affirme en effet que : « La production de logements locatifs sociaux financée dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain s'effectue dans les unités urbaines auxquelles appartiennent les quartiers concernés par ce programme. »

B.   Une mixité sociale favorisée par la diversification de l’habitat

La mixité résidentielle peut être favorisée par une diversification de l’habitat, l’objectif est alors d’attirer des classes moyennes extérieures au quartier. Cette diversification peut aussi profiter aux classes moyennes déjà présentes dans le quartier qui accèdent à la propriété au cours de leur parcours résidentiel. Cet outil a été développé dans le cadre du PNRU, de façon non contraignante : « La diversification de l’offre de logement est l’outil principal d’amélioration de la mixité sociale lorsqu’elle donne au quartier une réelle attractivité pour des catégories de population différentes ([41]) ». Elle devait être notamment favorisée par la libération d’emprises foncières grâce aux démolitions prévues.

La diversification de l’habitat recouvre les deux secteurs du logement : elle concerne à la fois le logement privé et le logement social.

1.   Un accès favorisé à la propriété privée

a.   Un développement du locatif libre par les opérations de l’Association Foncière Logement (AFL)

Des terrains et droits à construire, estimés à environ 19 000 logements (entre 15 et 35 % des droits rendus disponibles), ont été cédés gratuitement à l’Association foncière logement (AFL), en tant que contrepartie de la contribution d’Action logement au financement du PNRU, sur lesquels l’AFL réalise des logements en locatif libre à destination des salariés des entreprises cotisant à Action Logement. Ces contreparties sont identifiées dans le cadre des conventions pluriannuelles de rénovation urbaine mais ces droits à construire pour le logement sont en moyenne de 25 % dans la limite de 50 % des droits rendus disponibles par le projet de rénovation urbaine ([42]). Cependant, face au constat d’une difficulté pour l’AFL de faire valoir ces contreparties, du fait de la diminution de ses capacités d’investissement, les modalités de mobilisation de ces contreparties ont été modifiées. Ainsi, certaines contreparties non utilisées ont été reprises par des comités interprofessionnels du logement (CIL) avec un objectif maintenu de diversification de l’habitat.

 

b.   L’accession sociale à la propriété

Elle recouvre deux dispositifs qui permettent l’accession à la propriété des ménages modestes.

D’une part, un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 5,5 %, a été mis en place pour toutes les opérations de construction dans les quartiers faisant l’objet d’un programme de rénovation urbaine ou dans un périmètre de 500 mètres autour de ces quartiers, lorsque ces logements sont vendus en tant que résidence principale à des personnes physiques dont les ressources ne dépassent pas de plus de 11 % les plafonds du PLS ([43]) . Depuis le 1er janvier 2014, dans le cadre du NPNRU, ce périmètre a été réduit à 300 mètres. La loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 a étendu cette aide fiscale à l’ensemble des quartiers prioritaires de la politique de la ville faisant l’objet d’un contrat de ville ou d’une convention pluriannuelle de renouvellement urbain. En contrepartie, l’acquéreur ne peut revendre son bien avant une durée de dix ans, sauf cas particulier. Cette dépense fiscale a représenté un coût de 140 millions d’euros pour l’année 2017.

D’autre part, la construction de logements destinés à l’accession sociale à la propriété a été prévue dans le cadre du PNRU. Ces opérations bénéficient de la TVA à taux réduit mais aussi de la prime ANRU (10 000 à 15 000 euros par logement) ([44]). Ces opérations doivent être inscrites dans un projet de rénovation urbaine faisant l’objet d’une convention pluriannuelle. Elles sont souvent réalisées en cœur de quartier et ont pour objectif de favoriser les parcours résidentiels des habitants des quartiers. Ces aides sont cumulables avec d’autres dispositifs pour favoriser l’accès à la propriété tels que  le prêt à taux zéro doublé en zone ANRU entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2010, le prêt social de location-accession ([45]) et le prêt à l’accession sociale ([46]), accordés sous condition de ressources. Elles sont également cumulables avec l’APL accession, versée chaque mois à l’organisme prêteur, en déduction des échéances de prêt. Suite au vote de l’article 126 de la loi de finances 2018, le dispositif de l’APL accession a été supprimé dans les zones tendues pour l’achat de logements neufs, mais maintenu pour celui de logements anciens et en zone 3 ([47]). D’après l’ANRU, 17 % des logements en diversification soit environ 15 000 logements ont été programmés en accession sociale à la propriété ([48]).

c.   Des dispositifs de droit commun peuvent contribuer à l’accession à la propriété, de façon plus marginale

L’accession libre à la propriété dans les QPV reste envisageable mais elle est limitée, notamment à cause de l’image des quartiers concernés, ce qui a d’ailleurs conduit à mettre en place des dispositifs fiscaux incitatifs. Cette accession peut être favorisée par les dispositifs de droit commun, notamment le dispositif Pinel qui permet une réduction d’impôt sur l’investissement locatif.

Le dispositif du locatif intermédiaire, créé par l’ordonnance n° 2014‑159 du 20 février 2014 relative au logement intermédiaire, permet à des ménages non éligibles au logement social mais dont les ressources sont insuffisantes pour accéder aux logements du parc privé, de louer ou d’acheter des logements dont les loyers sont plafonnés à 20 % en dessous des prix du marché.

2.   La diversification du logement social

La diversification de l’offre de logement social au sein des QPV contribue à la diversification de l’habitat. En effet, il existe plusieurs types de logements sociaux, adaptés au niveau de ressources des ménages. Ainsi, les Prêts locatifs aidés d’intégration (PLAI) sont destinés aux ménages les plus démunis tandis que les ménages bénéficiaires des Prêts locatifs à usage social (PLUS) ont des ressources plus importantes ; les ménages les plus aisés parmi les bénéficiaires d’un logement social sont quant à eux concernés par les Prêts locatifs sociaux (PLS). La diversification des logements sociaux permet d’accroître la diversité des situations des ménages résidant dans les QPV en ayant une influence sur leurs plafonds de ressources. C’est pourquoi la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite SRU, définit des objectifs qualitatifs de construction des logements sociaux : les logements sociaux construits doivent être répartis entre les logements très sociaux ou PLAI (30 % minimum), les PLUS et les PLS (30 % maximum).

Dans le cadre du PNRU, le choix a été fait de favoriser la reconstitution des logements sous la forme de PLUS construction démolition (PLUS-CD), qui présentent des caractéristiques similaires au PLUS, ce qui correspond donc à un logement social intermédiaire. Ils comprenaient un accompagnement spécifique lié aux opérations de démolition et ont pour objectif de reloger les familles à des loyers proches de ceux initiaux avant démolition. La subvention accordée par l’Agence s’établit à un taux de 17 % ou 22 % sous une condition de relogement des ménages dans le neuf ([49]). Au 31 décembre 2016, 53 % des logements subventionnés par l’ANRU dans le cadre de la reconstitution de l’offre étaient des PLUS-CD.

Cependant, le bilan de cette mesure s’est révélé peu probant et les difficultés d’application de cette règle de majoration des financements de la production de logement social PLUS à condition de relogement dans le neuf ont conduit à sa suppression dans le cadre du NPNRU. Une nouvelle mesure l’a remplacée : le principe d’une indemnité pour minoration de loyer à tout organisme HLM qui accueille un ménage dans un logement neuf dont le relogement est rendu nécessaire par le programme de renouvellement urbain, si le montant du loyer est inférieur ou égal au loyer-plafond utilisé pour le calcul de son APL. Cela permettra de limiter les restes à charge des ménages relogés.

Le supplément de surloyer (SLS), introduit par la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement et instauré en 2009, permet également de réguler la présence dans le parc social des ménages dont les revenus dépassent les plafonds de ressources pour l’attribution d’un logement social. Le plafonnement de ce surloyer est passé de 20 % des ressources du ménage à 30 % par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté. Cependant, le SLS n’est pas applicable dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ([50]) afin de maintenir les ménages les plus aisés dans ces territoires.

Enfin, le groupe Action Logement bénéficie d’un droit de réservation estimé à 33 000 logements sociaux cofinancés par l’ANRU. Une convention signée le 1er octobre 2009 entre l’État et Action logement accorde à ce dernier des réservations, pour une durée de trente ans, sur 40 % des 25 % des logements réservés au préfet sur l’ensemble des programmes bénéficiant d’un financement de l’ANRU dans le cadre du PNRU (soit 10 % du nombre global de logement financés en reconstitution et réhabilitation). Ainsi, les salariés du secteur privé, sous condition de ressources, peuvent accéder plus facilement à des logements sociaux, ce qui permet d’accroître la diversité des situations des ménages face à l’emploi au sein d’un même immeuble.

3.   Le cas des logements mixtes au sein d’un même immeuble

La mixité sociale peut être favorisée au sein d’un même immeuble par la production de logements sociaux et privés. Ce procédé a été utilisé par la ville de Trappes. S’il permet une proximité spatiale plus forte, plusieurs acteurs rencontrés ont souligné les risques de « tri » effectué par les bailleurs sociaux qui privilégient les ménages les plus proches du plafond de ressources dans les attributions de logements sociaux et de tension entre bailleurs sociaux et les syndicats de copropriété sur l’entretien du bâti. Ces immeubles mixtes relèvent du régime de la propriété privée, ce qui limite la capacité d’action de l’État en cas de constitution de copropriétés dégradées.

III.   Le constat d’une utilisation insuffisante et restreinte de l’action sur l’offre de logements comme outil de mise en œuvre de la mixité sociale

L’action sur le stock de logements a été utilisée comme principal outil pour atteindre l’objectif de mixité sociale dans le cadre du PNRU mais apparaît insuffisante au regard des résultats de mixité sociale obtenus. De plus, son utilisation a parfois été limitée en raison des arbitrages rendus par les acteurs concernés, qui ont souvent fait de la mixité sociale un objectif de second rang, l’objectif principal reposant sur la transformation du bâti dans les QPV.

Si cette action a permis d’obtenir certains résultats tangibles, les évaluations du PNRU en soulignent également les limites. Une étude menée par le Laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques (LIEPP) de Sciences Po, en collaboration avec l’ONZUS puis l’ONPV a conclu à un effet positif de la rénovation urbaine sur la période 2003-2013 sur la composition des logements dans les quartiers concernés ([51]) . En effet, elle met en avant une baisse de 3,4 points du taux de logements sociaux dans ces quartiers qui s’explique par la démolition d’environ 15 % du parc social et la construction de 40 000 logements privés, ces tendances étant très variables selon les quartiers. Ces évolutions restent modestes mais ne reposent que sur une partie du PNRU, les opérations s’échelonnant jusqu’en 2020.

Ainsi, l’ANRU a mis en place des objectifs plus contraignants lors de l’instauration du NPNRU : en effet, dans son règlement général du 16 juillet 2015, l’ANRU a conditionné ses subventions à la non-reconstruction sur site des immeubles démolis et à la limitation de la construction de logements sociaux dans les quartiers où leur part dépasse déjà 50 %.


A.   Une répartition de l’offre de logement social dépendante de la volonté et de la coordination des acteurs locaux

La meilleure répartition de la construction et de l’attribution des logements sociaux hors des quartiers prioritaires passe par une coopération entre bailleurs sociaux pour éviter la reconcentration des populations défavorisées dans ces deux espaces. Surtout, elle doit être effectuée au niveau de l’agglomération, pour une répartition équilibrée des publics les plus en difficulté. La coopération à l’échelle intercommunale est donc primordiale pour la mise en œuvre de la mixité sociale.

1.   La nécessité d’augmenter les relogements et les reconstitutions hors site

Le premier constat des opérations de rénovation urbaine menées dans le cadre du PNRU est celui d’une reconstruction des immeubles démolis et d’un relogement des habitants majoritairement sur site ou dans d’autres quartiers prioritaires de la politique de la ville. En effet, une enquête de l’ONPV ([52]) portant sur le relogement de 83 500 ménages entre 2003 et 2016, concernés par 322 projets (sur les 399 menés dans le cadre du PNRU), a montré que 46 % des ménages étaient relogés sur site. Parmi les ménages relogés hors site, 14 % le sont dans une autre ZUS. Ainsi, 60 % des ménages relogés dans le cadre d’un programme de rénovation urbaine l’ont été dans un quartier prioritaire.

La Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) a souligné, au cours de son audition du 31 mai, le manque d’anticipation de la reconstitution des logements, ce qui a entraîné un problème d’accès pour les demandeurs extérieurs aux quartiers prioritaires ou le retard du projet, d’où l’objectif affirmé de reconstitution le plus en amont possible dans le cadre du NPNRU.

Elle a également fait valoir que les collectivités n’ont pas suffisamment saisi l’opportunité du PNRU pour répartir de manière plus équilibrée les logements sociaux sur le territoire de l’agglomération, notamment dans les communes SRU. Seulement 17 % de la reconstitution s’est faite dans des communes déficitaires en logements sociaux d’après la loi SRU et 7 % dans des communes déficitaires en logements sociaux hors ZUS sur la période 2002-2016.

a.   Des facteurs d’explication variés

Plusieurs explications à ce phénomène peuvent être avancées. D’abord, l’échelle administrative de mise en œuvre du PNRU était la commune, ce qui conduisait à privilégier des solutions communales. Or, certaines communes sont presque entièrement classées en territoire prioritaire, notamment en Seine-Saint-Denis où 40 % de la population résidait, en 2017, dans un tel quartier selon l’Insee ([53]). En outre, d’autres communes disposent, notamment en proche banlieue parisienne, de réserves foncières réduites soit que leur territoire soit déjà en totalité ou quasi-totalité bâti, soit qu’une partie de leur territoire soit classée ou non constructible. Les observations des rapporteurs les poussent à émettre l’hypothèse que, dans certains cas, le confinement des populations pauvres sur certaines parties du territoire n’ait pas été suffisamment enrayé par les élus.

Ensuite, le profil de certains locataires, dont les ressources sont très limitées, a conduit les bailleurs à effectuer un relogement vers la seule offre abordable disponible, soit principalement vers des bâtiments anciens des quartiers prioritaires ou équivalents. Les chiffres fournis par l’ANRU soulignent cette problématique : seulement 14 % des logements locatifs sociaux dont la reconstruction a été financée par l’ANRU dans le cadre du PNRU en métropole sont des PLAI tandis que 33 % sont des PLUS et 53 % des PLUS construction démolition (PLUS‑CD). Le NPNRU tente de remédier à cette problématique et fixe un objectif de reconstitution des logements sociaux de type PLAI destinés aux ménages les plus modestes à hauteur de 60 % afin de compenser l’offre à bas loyer supprimée dans le cadre du projet de rénovation urbaine.

Le relogement des familles nombreuses pose également des difficultés puisque les logements reconstitués dans le cadre du PNRU sont des logements plus petits que les logements détruits et par conséquent, moins adaptés à leurs besoins. Ainsi, l’offre de logement pour les populations les plus défavorisées se situe dans des bâtiments non rénovés des quartiers prioritaires, ce qui nuit à la mixité sociale et conduit à un effet structurel de reconcentration des poches de pauvreté dans les quartiers prioritaires ou les quartiers voisins. L’enquête précitée de l’Insee indique en outre qu’en Île-de-France, les logements susceptibles d’accueillir ces familles sont situés loin du cœur de l’agglomération parisienne, ce qui aggrave leurs difficultés.

Cet effet a été accentué par des partenariats insuffisants entre les bailleurs sociaux, chaque bailleur s’étant chargé de reloger dans son parc social les habitants concernés par les démolitions. Il pose la question de l’absence de production d’une offre adaptée aux publics défavorisés hors des quartiers prioritaires.

b.   Des observations de terrain qui confirment ce constat

Les rapporteurs ont fait le constat lors de la plupart de leurs déplacements des difficultés à mettre en œuvre une véritable politique de reconstitution hors site après les opérations de rénovation urbaine.

Ainsi, à Boulogne-sur-Mer ([54]), seulement 17 % des ménages concernés par le programme de rénovation urbaine du quartier du Chemin-Vert mis en œuvre à partir de 2004, ont été relogés en dehors de leur quartier d’origine : 798 logements ont été reconstruits dont 634 logements locatifs sociaux sur site, 46 logements en accession sur site et 118 logements sociaux hors site. Cela représente donc un taux de reconstruction hors site de 15 % seulement environ.

Les acteurs locaux soulignent plusieurs spécificités locales qui expliquent ce résultat limité : un tissu urbain particulièrement dense et une rareté du foncier dans la commune d’où un parc locatif tendu. Surtout, les élus locaux n’ont pas souhaité défendre la mixité sociale comme objectif prioritaire de leurs programmes de rénovation urbaine, prenant en compte la volonté des habitants qui ont exprimé leur souhait de rester dans leur quartier. Le projet de rénovation urbaine négocié dans le cadre du NPNRU bénéficie d’ailleurs de dérogations accordées par l’ANRU concernant les règles de reconstruction hors site.

De même, les opérations de rénovation urbaine n’ont pas corrigé l’inégale répartition des logements sociaux sur le territoire marseillais. À titre d’illustration, seulement 14 % des publics les plus pauvres ont bénéficié de l’attribution d’un logement social hors ZUS au niveau de la métropole Aix-Marseille Provence ([55]).

A contrario, la métropole du Grand Nancy a mis en place un processus de relogement favorisant la mixité sociale par le bas en appliquant la règle des trois tiers : sur les 1 238 familles relogées, un tiers l’a été dans le quartier, un tiers dans la ville et un tiers au niveau de l’intercommunalité. Les rapporteurs estiment que ce mode de fonctionnement est particulièrement pertinent.

Certes, le sentiment d’appartenance des habitants à un quartier et leur volonté de ne pas le quitter est une variable qu’il est indispensable de prendre en compte dans la mise en œuvre de la mixité sociale. La mixité sociale ne peut être faite en contradiction avec les besoins exprimés des habitants des quartiers prioritaires. Ainsi, de nombreuses villes ont mis en place un « droit au retour » des habitants relogés dans des quartiers différents lors des opérations de rénovation urbaine. Cela a par exemple été le cas à Bondy où une cinquantaine de familles ont souhaité être relogées sur site. Les opérations de rénovation urbaine menées dans la ville montrent que le respect des attentes des habitants et la reconstruction peuvent être conciliés puisque 55 % des reconstructions ont été effectuées hors site. De plus, alors que 40 % des ménages ont été relogés sur site, 42 % de l’ensemble des ménages relogés l’ont été hors quartier prioritaire : 71 % des ménages relogés hors site l’ont été hors ZUS.

Un suivi des cohortes d’habitants prend ici toute sa pertinence puisqu’il permettrait de mesurer le nombre d’habitants qui reviennent se loger dans leur quartier d’origine, plusieurs mois ou années après les opérations de rénovation urbaine.

2.   Une hausse des loyers problématique pour le relogement des habitants sur site

La volonté des habitants d’être relogés sur site après opération de rénovation urbaine peut cependant être contrariée par la hausse des loyers induite par l’amélioration de la qualité des logements. À titre d’exemple, les loyers ont fortement augmenté dans le quartier du Chemin-Vert à Boulogne-sur-Mer après l’opération urbaine, passant de 3,25 €/m² à 5 €/m² en moyenne soit une hausse de 53 %. Le taux d’effort des ménages relogés est passé de 7 % à 10 %, sachant que 56 % des ménages ont été relogés dans le neuf ou le conventionné inférieur à 5 ans.

Le relogement dans le parc social prend en compte la situation financière des locataires : la commission d’attribution des logements estime le taux de reste à charge maximum entre 30 et 33 % selon la Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) reçue en audition le 31 mai par les rapporteurs. Ainsi, l’accès aux logements neufs ou réhabilités dont les loyers ont augmenté peut être limité pour les habitants les plus défavorisés des quartiers ayant fait l’objet d’opérations de rénovation urbaine.

Ainsi, les rapporteurs soulignent la nécessité de suivre de façon précise l’évolution des loyers dans les quartiers rénovés et de veiller à ce que l’augmentation des loyers n’entraîne pas la reconstitution de poches de pauvreté dans les quartiers voisins.

Dans le cadre du NPNRU, l’ANRU a prévu une indemnité pour minoration de loyer aux bailleurs sociaux qui limitent les hausses de loyer des ménages relogés dans des logements locatifs sociaux neufs ou conventionnés depuis moins de cinq ans ([56]). Si cette mesure va dans le bon sens, elle ne permet pas de toucher l’ensemble des publics concernés (elle ne s’applique par exemple pas aux ménages qui souhaitent revenir dans leur quartier d’origine après les travaux de rénovation urbaine) et surtout, elle reste facultative. Les bailleurs sociaux ne sont, en effet, pas contraints d’opter pour un relogement des ménages avec minoration de loyer.

De plus, l’habilitation par ordonnance prévue dans le projet de loi ELAN donnera la possibilité au Gouvernement de prendre des mesures permettant aux bailleurs sociaux de mettre en œuvre, à titre expérimental, une politique des loyers qui prenne mieux en compte la capacité financière des ménages nouveaux entrant dans le parc social. Cette mesure est intéressante mais apparaît limitée puisqu’elle ne concerne pas les ménages qui sont déjà dans le parc social ou relogés dans le cadre d’une opération de rénovation urbaine. Un travail approfondi sur le périmètre de cette ordonnance et les mesures opérationnelles permettant de la mettre en œuvre est donc nécessaire pour accroître la mobilité dans le parc social, ce qui correspond à l’esprit du projet de loi ELAN.

Enfin, un amendement introduit dans la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté a prévu la possibilité pour les intercommunalités de mettre en place des expérimentations de loyer unique à tous les logements sociaux de même type, dans l’ensemble du parc social d’une agglomération, quelles que soient leur année de construction et leur localisation ([57]). La métropole de Rennes s’est lancée dans ce chantier à partir de 2017, en espérant qu’il permette d’agir sur la structure de l’offre et, ainsi, d’accroître la mixité sociale. Les rapporteurs souhaitent une évaluation, dès que possible, de cette mesure, qui leur semble aller dans le bon sens, afin d’en évaluer toute la pertinence.

B.   Une diversification vers le logement privé limitée

Bien que non imposée, la diversification de l’offre d’habitat vers le logement privé a été privilégiée par les porteurs des projets de rénovation urbaine menés dans le cadre du PNRU.

Selon l’enquête menée par le LIEPP ([58]), la moyenne nationale du taux de diversification vers le logement privé est de 4,3 % sur la période 2003-2013 soit un total de 40 000 logements privés construits. Bien que significatifs, ces résultats sont limités puisqu’ils sont inférieurs aux objectifs fixés par les différentes conventions.

De plus, le taux de diversification de l’habitat vers le logement privé est très différent selon les quartiers puisque dépendant de la volonté politique des porteurs de projets de porter cet objectif de mixité sociale. Ainsi, l’enquête du LIEPP montre que ce taux est supérieur à 15 % seulement dans 28 quartiers ayant fait l’objet d’un projet de rénovation urbaine et de moins de 5 % dans 407 quartiers.

1.   Des opérations réussies du fait de spécificités locales et de l’importance des parcours résidentiels ascendants

Les opérations de diversification de l’habitat réussies ont reposé sur deux facteurs relevés par les rapporteurs au cours de leurs déplacements. Le premier est celui de l’attractivité des territoires concernés, ce qui a été le cas de Bondy ([59]) grâce à son insertion dans la Métropole du Grand Paris. En effet, les opérations de rénovation urbaines menées dans la ville ont permis la livraison de 745 logements au titre de la diversification de l’offre et 89 logements construits sur site au titre des contreparties de l’Association Foncière Logement.

Par exemple, dans le quartier Noue Caillet, visité par les rapporteurs, 48 logements ont été construits au titre des contreparties de l’AFL et 256 au titre de la diversification de l’offre de logement. Dans le cadre du NPNRU, 549 logements seront construits en diversification de l’offre et 324 par Action Logement. Bondy a réussi à mêler logements sociaux et investissements privés au sein des différents quartiers pour créer une réelle vie de quartier.

Le second est celui des parcours résidentiels ascendants au sein des quartiers. En effet, le développement de la mixité sociale repose également sur la capacité d’offrir un logement de meilleure qualité aux habitants du quartier en ascension sociale. Le succès de la diversification de l’habitat à Trappes, dont le taux de logements sociaux est passé de 76 % à 56 % entre 2006 et 2016, repose majoritairement sur ces parcours résidentiels. Les 1 300 logements neufs en accession libre et sociale réalisés ont principalement bénéficié aux trappistes.

Ainsi, le profil des acheteurs dans les quartiers prioritaires est souvent celui d’habitants de ces quartiers : les parcours résidentiels ascendants sont donc plus importants que le nombre d’arrivées de nouvelles classes moyennes. Le rapport de l’ONZUS a mis en évidence le poids des parcours résidentiels dans l’accession sociale à la propriété dans les quartiers prioritaires : 30 % des ménages acheteurs sont originaires du quartier et 60 à 70 % de la commune ([60]). Ainsi, l’accession sociale n’a pas véritablement permis d’attirer de nouveaux habitants et de favoriser la mixité sociale. Le rapport précité souligne que de nouveaux habitants ont accédé à la propriété dans moins d’un tiers des territoires concernés par les opérations d’accession sociale.

2.   Une diversification de l’habitat en deçà des objectifs fixés du fait de la difficulté à changer l’image des quartiers

a.   Des investissements privés insuffisants et réalisés en frange des quartiers

Si les investissements privés dans les quartiers prioritaires ont été importants, ils sont restés inférieurs aux objectifs fixés par les porteurs de projets. Ainsi, seulement 40 000 logements privés ont été construits sur un objectif agrégé au niveau national de 80 000 logements ([61]) fixé dans les différentes conventions locales. De plus, pour les logements déjà construits, le rapport de l’ONZUS précité souligne que la commercialisation reste difficile dans 35 % des quartiers, la plupart situés en zone tendue ([62]).

Au cours de leurs déplacements, les rapporteurs ont par exemple constaté que moins d’un tiers des engagements financiers pour la diversification de l’offre de logements ont été réalisés dans le quartier du Plan d’Aou à Marseille. Ce premier projet lancé dans le cadre du PNRU à Marseille, dont la convention a été signée le 22 juin 2005, a été financé à hauteur de 116 millions d’euros dont 24,2 millions d’euros par l’ANRU. Si la plupart des engagements étaient tenus en avril 2018, cela n’est pas le cas concernant l’attraction des investissements privés. Un autre exemple marseillais est celui de la cité de la Savine, toujours à Marseille, lancé en 2009, dont aucun logement destiné à la diversification de l’offre d’habitat n’a été réalisé.             

Boulogne-sur-Mer a également connu des difficultés dans la mise en œuvre de la diversification du logement au sein des quartiers prioritaires. Si les 46 logements en accession sur site ont été construits conformément aux objectifs fixés, seuls 5 logements ont été commercialisés. 34 logements ont été transformés avec l’accord de l’ANRU en PLS afin de poursuivre l’objectif initial de mixité sociale. Actuellement, 15 logements sont loués et 7 sont maintenus à la vente.

De plus, les investissements privés ont souvent été réalisés en frange des ZUS d’où la réduction du périmètre de construction éligible au taux de TVA réduit dans le cadre du NPNRU ([63]). Cet investissement éloigné des cœurs de quartier entraine de fait une reconstitution du phénomène de ségrégation socio-spatiale des populations.

b.   Des contreparties peu utilisées par l’Association Foncière Logement

L’AFL n’a que peu fait valoir ses contreparties : l’AFL s’est engagée à réaliser seulement 10 448 logements (dont seulement 4 405 avaient été livrés en juin 2015) soit un peu plus de la moitié de ce qui était prévu et renonce ainsi à des contreparties financières équivalentes à 9 700 logements ([64]). Ainsi, dans le cadre du NPNRU, ces contreparties foncières ont été diminuées à 12 500 logements.

De plus, seulement 5 500 réservations ont été contractualisées entre 2009 et 2015, sur des contreparties d’environ 33 300 logements, d’où une diminution des droits de réservation dans le cadre du NPNRU, estimés à 20 000 logements.

À Boulogne-sur Mer, l’AFL n’a pas fait valoir ses contreparties sur le terrain qui lui a été attribué. Par conséquent, une emprise foncière située sur la façade maritime et pouvant accueillir environ 60 logements est donc laissée en friche. Les acteurs locaux pointent l’absence de changement d’image du Chemin-Vert comme facteur d’explication à ce manque d’investissements privés mais surtout les ressources trop faibles des habitants pour favoriser des parcours résidentiels ascendants qui passeraient par l’accession à la propriété.

c.   Une image des quartiers qui reste trop négative

Les acteurs rencontrés ont souligné le problème de temporalité qui sous-tend la diversification de l’offre de logement : il est en effet nécessaire de changer l’image des quartiers avant de faire l’accession sociale à la propriété.

Ce changement d’image est souvent lent et n’a pas encore eu lieu dans plusieurs quartiers ayant fait l’objet d’opérations de rénovation urbaine. Il peut être favorisé par des étapes intermédiaires dans la diversification de l’habitat, notamment par le développement du locatif libre, ce qui a fonctionné de façon satisfaisante dans le quartier du Plan d’Aou à Marseille. Un quartier dont l’image reste dégradée décourage en effet les investisseurs : dans les quartiers Nord de Marseille, l’Association Foncière Logement a renoncé à faire valoir certaines de ces contreparties du fait d’un manque d’attractivité des terrains.

Ainsi, le manque d’investissement privé est essentiellement lié à un problème de demande externe. Les investissements privés interviennent en effet dans un deuxième temps, une fois les opérations de démolition, reconstruction et réhabilitation réalisées – ce qui conduit à une amélioration de l’image du quartier – sous réserve de l’existence d’une demande solvable. Aussi, il est nécessaire d’attendre la fin de l’opération d’investissements privés pour évaluer l’atteinte de l’objectif de mixité auquel l’investissement privé contribue (quantitatif par le nombre d’arrivées et qualitatif par le renforcement de l’attractivité ou le mélange des populations permis). La plupart de ces opérations étant encore en cours aujourd’hui, il est nécessaire de nuancer le premier bilan établi, tout en faisant preuve de clairvoyance à propos de la capacité limitée d’attraction des quartiers rénovés.

Enfin, il est nécessaire de souligner que l’offre de logements proposée n’a pas toujours été adaptée aux quartiers avec un manque d’articulation entre la question du logement et des conditions d’installation de populations nouvelles, en lien avec la tranquillité publique ou l’attractivité scolaire.


C.   Des effets réduits sur la composition sociale de la population des quartiers en rénovation urbaine

Le rapport du LIEPP met en avant plusieurs constats concernant l’impact des programmes de rénovation urbaine sur la composition sociale des habitants des quartiers concernés ([65]).

Premièrement, si la concentration de la pauvreté dans les quartiers prioritaires a été accrue entre 2003 et 2013, cette hausse a été moins forte dans les quartiers ayant fait l’objet de programmes de rénovation urbaine. Ainsi, l’étude montre que le PNRU a permis une diminution moyenne de 1,2 point de la proportion des ménages du premier quartile dans les quartiers concernés comparativement aux autres ZUS. Cette tendance a majoritairement concerné les ménages les plus pauvres puisque la diminution s’est concentrée sur le premier décile des ménages (– 1,1 point). Le PNRU a également permis un accroissement marginal des ménages du premier quartile dans les quartiers concernés (+ 0,3 point). De plus, le PNRU expliquerait une légère diminution de la proportion de familles monoparentales dans les ZUS.

Deuxièmement, le PNRU a induit une hausse de la proportion des ménages pauvres dans le parc de logements privés dans les quartiers en rénovation urbaine (+ 1,2 point). Cependant, ces ménages sont moins pauvres que ceux logés dans le parc social, d’où un impact sur la baisse générale de la pauvreté dans les quartiers en rénovation urbaine.

Ces premiers résultats en termes de peuplement des quartiers sont positifs mais très limités. En effet, les ordres de grandeur des taux d’évolution sont réduits, d’où la nécessité d’accentuer les ambitions en termes de mixité sociale.

L’enquête montre également que les réussites en termes de diversification du peuplement des quartiers en rénovation urbaine sont concentrées dans les 142 quartiers, soit le quart des quartiers concernés par le PNRU, dans lesquels les démolitions ont été les plus nombreuses. Une action d’ampleur, qui comprend une réelle modification de l’offre de logements, basée sur une vision politique ambitieuse, permet donc d’agir plus efficacement sur le peuplement du quartier. Elle est favorisée par les reconstitutions hors site et hors quartiers prioritaires, ainsi que par l’attraction d’investisseurs privés.


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Troisième partie : vers une rénovation urbaine plus durable

La question de la durabilité des effets de la politique de rénovation urbaine est au cœur des préoccupations des citoyens et des représentants de la nation, puisqu’elle permet d’en apprécier l’efficacité. Les rapporteurs ont identifié trois axes propositionnels afin d’améliorer l’impact de l’action publique sur le long terme. D’une part, il est nécessaire d’écouter plus largement les citoyens et les élus locaux impliqués (I) et, d’autre part, de garantir la durabilité de l’habitat et de mieux articuler cette action sur le bâti avec les politiques de droit commun (II). Enfin, une évaluation performante de cette politique publique est indispensable pour pouvoir rendre compte de ses effets, puis, agir sur des leviers efficaces d’amélioration (III).

I.   PRENDRE en compte la diversité des territoires et des aspirations locales

La politique de rénovation urbaine est une politique nationale, déclinée au niveau local. À ce titre, elle doit pouvoir être suffisamment souple pour s’adapter à la diversité des situations des territoires et aux attentes spécifiques des habitants d’un quartier.

Au cours de leurs travaux, il est apparu aux rapporteurs que la prise en compte des attentes des habitants pouvait être renforcée, ce qui passe par une relance rapide des opérations tandis que la confiance entre les élus locaux et l’État nécessite d’être réaffirmée.

A.   Renforcer la prise en compte des attentes des habitants

Les études réalisées par l’ANRU ont mis en évidence une très grande satisfaction des habitants interrogés. Les rapporteurs ont néanmoins été sensibles à deux voies d’amélioration possible : l’amélioration de la participation citoyenne et l’accélération de l’instruction des dossiers pour donner à voir rapidement de l’ambition collective pour les quartiers prioritaires.

1.   Affirmer la participation citoyenne lors de la préparation et de la mise en œuvre des projets

La mise en œuvre du PNRU a mis en évidence très rapidement la nécessité d’une participation active des habitants. Dans une note de 2006 sur le sujet ([66]), le comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU avait souligné que la carence participative était source d’un « malaise croissant » : les habitants « se plaignent de ne pas être consultés, parfois même d’être désinformés ou manipulés. Ils ont le sentiment d’être exclus du processus d’élaboration et de décision des projets », entraînant la radicalisation du discours de certains acteurs associatifs et la « multiplication des collectifs anti-démolitions ». La participation apparaît donc clairement comme une condition de l’acceptabilité de projets urbains qui, par leur nature et par leur ampleur, bouleversent la vie des habitants et créent de fortes incertitudes dans leurs trajectoires individuelles et collectives, notamment du fait des nécessaires relogements dans le cas d’opérations de démolition.

a.   Une extension de la participation des habitants consacrée par la loi de programmation de 2014

Dans leur rapport de 2013, Marie-Hélène Bacqué et Mohamed Mechmache avaient souligné l’extension progressive dans la loi d’une « injonction participative » ([67]) au travers notamment du droit à l’information ([68]), de la démocratisation de la procédure des enquêtes publiques ([69]), de l’obligation d’associer la population à toute action d’aménagement et à l’élaboration des documents d’urbanisme et de la mise en place de conseils de quartier ([70]). Dans le même temps, ils relevaient des insatisfactions nombreuses sur les formes prises par cette participation.

La loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine a en conséquence décidé de mettre en place, dans chaque quartier prioritaire, un conseil citoyen composé d’habitants tirés au sort et de représentants d’associations et acteurs locaux participant à toutes les instances de pilotage du contrat de ville, « y compris celles relatives aux projets de renouvellement urbain ». Ce principe de participation a été confirmé et étendu par une ordonnance de 2015 relative à l’urbanisme ([71]).

L’ambition de coconstruction des projets portée par la loi de 2014 est aussi inscrite dans règlement général de l’ANRU de 2015 qui dispose que les habitants « sont associés à toutes ses étapes » : « partage du diagnostic préalable, élaboration du projet, suivi des réalisations, évaluation des résultats du projet », et que les porteurs de projets doivent prévoir « les moyens nécessaires pour soutenir le dialogue participatif sur les quartiers et reconnaître la maîtrise d’usage des habitants », « en s’appuyant notamment sur les conseils citoyens et les maisons du projet ».

b.   Une participation citoyenne à approfondir

Le rapport d’application de la loi de programmation de 2014 ([72]) pointe néanmoins un certain nombre d’interrogations et de limites :

– interrogation en termes de qualité de la représentation : certains conseils ont été établis à l’échelle communale et non du quartier ce qui pourrait diminuer le caractère de proximité de l’instance ; dans certaines communes, des membres du conseil ont été choisis hors des quartiers prioritaires, ce qui pourrait diluer la représentativité ;

– limite à l’autonomie des conseils dans certaines communes : des programmes de travail ont parfois été assignés aux conseils par les élus communaux ; les fonds de participation des habitants gérés par les préfets sont insuffisamment mobilisés, malgré leur utilité pour financer la structuration des instances et la formation des conseillers.

D’après le CGET ([73]), 1157 conseils citoyens étaient opérationnels au premier trimestre 2017 sur 1284 quartiers prioritaires. Mais 15 % des quartiers prioritaires ne comptaient pas encore de conseil citoyen et 56 % des conseils seulement pouvaient être considérés comme actifs. 52 % de ceux installés en 2016 n’étaient en outre pas encore en capacité de se réunir sans participation des pouvoirs publics. Or, lorsque l’implication des collectivités se prolonge dans le portage du conseil, cela tend à limiter leur autonomie. De plus, du fait de la technicité des sujets, l’avis des services de l’État ou des collectivités tend à avoir un poids considérable lors des débats. Dans la plupart des cas, enfin, les conseils sont davantage chargés de relayer les informations que de prendre part aux décisions. Ils restent rarement impliqués dans les arbitrages financiers.

Les études du CGET arrivaient au constat du caractère vertueux du portage du conseil par une association et de l’existence d’une charte. Elles soulignaient la nécessité, en plus des formations des habitants, de rendre les éléments techniques accessibles à ces derniers pour favoriser l’engagement.

Le secrétaire d’État auprès du ministre de la Cohésion des territoires, Julien Denormandie, lors de son audition du 4 juillet, a d’ailleurs souligné que l’engagement citoyen était en diminution dans les conseils par rapport aux premiers temps de leur constitution et qu’il était nécessaire de mieux valoriser leur apport et de montrer aux personnes engagées l’aboutissement de leurs propositions.

Lors de leurs déplacements, il a été indiqué aux rapporteurs des exemples de réussite dans la mise en place de la participation des habitants, comme celui de Miramas, mais aussi des carences. Les rapporteurs ont ainsi rencontré le conseil citoyen du Chemin Vert lors de leur déplacement à Boulogne-sur-Mer, créé en 2016, après le lancement du projet de rénovation urbaine dans le quartier de Transition. Les représentants des citoyens ont souligné l’incohérence de certaines réalisations (lampadaires mal situés par exemple) dans ce projet auquel ils n’ont pas été associés. Ils ont cependant un rôle d’animation des actions de la politique de la ville mises en œuvre dans leur quartier (contrats de ville et GUP). Si la mise en place du conseil citoyen a permis d’élaborer un projet qui correspond mieux aux attentes des habitants pour les quartiers de Aiglon et Triennal qui font l’objet d’une convention dans le cadre du NPNRU, les représentants des habitants regrettent les retards pris dans la mise en œuvre du projet et le manque d’information dont ils disposent au sujet du calendrier de réalisation. Enfin, le conseil citoyen a fait valoir l’importance de l’accompagnement de la mairie puisque celle-ci a mis en œuvre des formations pour aider les habitants à se saisir de la possibilité donnée de participer à la détermination du projet de rénovation de leur quartier. Cet accompagnement semble avoir porté ses fruits puisque le conseil citoyen, initialement adossé à une maison des associations, s’est ensuite constitué en association et fonctionne de façon autonome aujourd’hui.

 Il est, selon les rapporteurs, symptomatique d’une carence de participation des habitants que peu d’espaces verts et de jeu pour les enfants aient été prévus dans les projets de plusieurs quartiers qu’ils ont visités : de tels espaces sont certes moins structurants dans l’économie générale d’une programmation que les opérations de construction et de démolition, mais ils sont néanmoins essentiels à la qualité de vie des habitants. Aussi, ils considèrent qu’il est nécessaire de contribuer au renforcement de la structuration des conseils citoyens et à une participation effective des habitants. Cette participation active ne pourrait se trouver que renforcée par le développement d’espaces communs de proximité propices aux échanges et à la convivialité, à l’instar des locaux dédiés aux réunions des amicales de locataires, dont le rôle dans la vie de quartier est fondamental. Aussi, les rapporteurs plaident pour la généralisation de la mise à disposition des habitants de tels locaux et appellent à un soutien accru de ces amicales.

2.   Donner plus rapidement à voir des réalisations

Prendre en compte les besoins des habitants implique aussi nécessairement d’agir pour résoudre les problèmes identifiés. Le PNRU a d’ailleurs débuté par des actions visibles et, notamment, par de rapides démolitions. Malgré l’ampleur du projet, plus de la moitié des conventions (242 sur 399) avaient ainsi été signées avant 2007, dans un contexte il est vrai marqué par des violences urbaines en 2005. Le NPNRU commence lui par des études dans le cadre des protocoles de préfiguration. Il essuie à ce titre une critique importante, celle de « l’absence de grues » dans des quartiers où l’urgence sociale rappelée par l’appel de Grigny ([74]) justifierait une action rapide et d’ampleur. Pour Jean-Louis-Borloo, la rénovation urbaine s’est même totalement arrêtée il y a quatre ans : « l’ambition originelle s’est perdue. La bureaucratie a progressivement pris le pas sur la dynamique de projets. » ([75]) Cet avis est partagé par les auteurs de l’appel de Grigny, qui dénoncent un « fonctionnement trop complexe et bureaucratisé ».

a.   Les protocoles de préfiguration : un temps d’études mobilisé pour faciliter une difficile jonction financière et administrative entre les programmes

Première étape de la procédure de conventionnement rénovée en 2014, les protocoles de préfiguration sont une phase de conception des projets visant à prendre le temps nécessaire à l’établissement de diagnostics territoriaux approfondis et surtout à la consultation des habitants. L’analyse des causes de la sous-exécution des crédits, du retard de certains projets et d’un niveau de réalisations moins élevé que celui prévu par la loi met en exergue une préparation parfois insuffisante des projets conventionnés au début du PNRU, du fait de la très grande rapidité de la mise en place du programme. Une consultation effective des habitants, dont il a été assez unanimement regretté le manque lors de la mise en place du PNRU, nécessite de plus d’être pensée dans le temps long et accompagnée.

Afin que la phase d’études et de concertation ne ralentisse pas les opérations dont le financement est le plus urgent, le règlement général de l’ANRU de 2015 a prévu la possibilité d’un pré-conventionnement. Dans le cadre des 116 protocoles intercommunaux examinés en 2016, a ainsi été acté la démolition de 10 700 logements, la réhabilitation de 3 000 logements et la reconstruction en dehors des quartiers concernés de plus de 2 300 logements.

Lors de la table ronde du 17 mai réunissant des représentants d’associations d’élus, il a néanmoins été souligné une insuffisante anticipation du tuilage entre PNRU et NPNRU, qui a transformé les protocoles en documents d’une trop grande exhaustivité et complexité. Ce dévoiement d’une procédure considérée positivement semble résulter d’une double difficulté de jonction entre les deux programmes :

– une difficulté de jonction administrative, car le démarrage du NPNRU, exercice impliquant une forte mobilisation, s’effectue avec les mêmes équipes des porteurs de projets, bailleurs et des services de l’État que celles qui assurent la clôture du PNRU, non moins mobilisatrice ;

– une difficulté de jonction financière, car les acteurs chargés de financer la clôture du PNRU sont les mêmes que ceux chargés de financer le démarrage du NPNRU, sur la base de ressources identiques.

Une troisième difficulté résulte quant à elle, ainsi que l’a rappelé le secrétaire d’État, de l’incertitude qui pesait sur la volumétrie de l’enveloppe dédiée au programme.

Dès lors que le financement du NPNRU est désormais sécurisé sur la base d’une enveloppe d’un montant de 10 milliards d’euros et d’un calendrier de décaissements connu à moyen terme, les porteurs de projets sont en capacité de déterminer l’envergure à donner à leurs projets pour les finaliser et les autres partenaires de l’Agence disposent de la visibilité suffisante pour s’engager financièrement. Aussi, alors qu’aucun projet n’avait été engagé entre mai 2017 et mai 2018, le secrétaire d’État a indiqué la validation, depuis le mois de mai, de financements d’un montant de 1,6 milliard d’euros. La situation n’est donc plus bloquée.

b.   Des mesures sont en cours de mise en œuvre pour rendre la procédure d’instruction plus efficace

Dans ce contexte l’enjeu est maintenant de combler le retard pris en accélérant la validation des projets pour permettre les premières mises en chantier. Une réflexion, à laquelle les élus ont été associés, a été engagée en novembre 2017 par l’ANRU en vue de déterminer les modalités partagées d’une simplification des procédures d’instruction pour redonner de la souplesse à la gestion du PNRU. Le conseil d’administration de l’Agence a approuvé, le 28 mars 2018, deux axes de simplification.

Le premier axe s’articule autour de l’ambition de faciliter le passage du protocole de préfiguration à la convention au plus près des territoires et des projets. Il se décline dans les trois directions suivantes :

– redonner de la souplesse au modèle de contractualisation en permettant, en lien avec les élus, de démarrer les actions d’une maturité suffisante sur les territoires où cela est possible ;

– repenser le positionnement des délégations territoriales de l’Agence en clarifiant les critères relatifs aux orientations et dérogations pour favoriser des prises de décisions déconcentrées sur les projets régionaux ;

– revoir les formats de discussion entre les porteurs de projets, l’Agence et ses partenaires pour rendre plus efficace le processus de concertation.

Dans ce cadre, afin que les décisions puissent être prises dans les meilleurs délais, plusieurs dizaines de projets ont d’ores et déjà été identifiés par les services de l’État en vue d’une instruction déconcentrée et rapide des dossiers d’une maturité suffisante.

Le second axe vise à améliorer et faciliter le financement des projets dans un cadre sécurisé et se décline autour des trois axes suivants :

– améliorer les modalités de prise en charge des opérations réalisées par les bailleurs en approchant les taux de subventionnement des besoins constatés sur le terrain ;

– intervenir plus efficacement sur les copropriétés dégradées ;

– agir au bon niveau d’ambition sur les quartiers régionaux en améliorant les conditions de subvention de certains projets régionaux.

Les rapporteurs soulignent l’importance des démarches engagées par l’ANRU dans la voie de la déconcentration de l’instruction. Les délégués territoriaux ont en effet une connaissance très fine de la situation propre à chaque territoire et sont au contact direct des élus. Cependant, les rapporteurs ne sont pas favorables à une déconcentration totale de l’octroi des financements du fait du caractère contraint de l’enveloppe budgétaire qui justifie un arbitrage des priorités par l’Agence à l’échelle nationale.

Enfin, dans le but de répondre aux difficultés de jonction administrative entre PNRU et NPNRU, le ministre a indiqué que les besoins en effectifs supplémentaires des services seraient examinés au regard des modifications apportées par la réforme. En effet, en rationalisant l’organisation du travail dans le sens d’une prise de décision au niveau pertinent et avec une efficacité accrue, celle-ci pourrait alléger les besoins sur certaines tâches et ainsi permettre des redéploiements de moyens.


B.   Donner plus de souplesse aux élus locaux

 

Au cours des travaux de la MEC, les élus locaux rencontrés ont régulièrement soulevé le problème de la complexité des procédures et du manque de souplesse qui leur était accordé. S’ils saluent unanimement le travail de l’ANRU, ils aimeraient pouvoir avoir davantage de marge de manœuvre dans la détermination des projets. Les rapporteurs ont fait le constat d’un engagement très fort des élus locaux dans les projets de rénovation urbaine et soulignent le caractère indispensable de leur dynamisme pour la mise en œuvre d’opérations réussies.

1.   Un investissement des élus locaux indispensable à la réussite des opérations de rénovation urbaine

Les communes et leurs groupements détenant la compétence d’urbanisme, les élus locaux se sont vus confier un rôle primordial dans la mise en œuvre des programmes de rénovation urbaine. En tant que porteur de projet, le maire dans le cadre du PNRU, ou le président de l’établissement public de coopération intercommunal (EPCI) dans le cadre du NPNRU, élabore le projet de rénovation urbaine et est responsable du montage du dossier de candidature soumis à l’ANRU. Une volonté politique forte est donc nécessaire à la mise en place d’une opération réussie.

L’atteinte de l’objectif de mixité sociale est d’autant plus grande que le portage du projet s’est effectué au niveau de l’agglomération. En effet, si l’implication du maire est indispensable du fait de sa connaissance de la ville et de sa proximité avec les habitants, la coopération entre l’échelon communal et intercommunal permet des relogements et des reconstitutions de l’offre plus équilibrés. Ainsi, le projet du Grand Nancy a fait l’objet d’un portage d’agglomération et une solidarité des 20 communes qui la composent, notamment avec le prélèvement d’un point de fiscalité. Ce projet, qui représente un investissement global de 525,3 millions d’euros, a permis de dédensifier le logement social avec l’application d’une règle des « trois tiers » : un tiers des reconstitutions a été fait sur site, un autre tiers sur la commune concernée et le dernier, au niveau de l’agglomération. Cette démarche a également été engagée par la Métropole de Lyon à partir d’une convention Habitat d’agglomération signée en 2005 qui a fixé des règles de reconstitution du logement à l’échelle de l’agglomération. La part de reconstitutions réalisées dans les communes concernées a été fixée en fonction de logements locatifs sociaux (LLS) soit : 50 % pour les communes de plus de 40 % de LLS, 75 % pour les communes entre 20 et 40 % de LLS et 100 % pour les communes de moins de 20 % de LLS.

À ce titre, le pilotage par l’intercommunalité dans le cadre du NPNRU apparaît comme une plus-value pour atteindre l’objectif de mixité sociale. Il est également plus cohérent puisqu’il permet d’articuler les programmes de rénovation urbaine avec tous les documents stratégiques (programmes locaux d’habitat, conférence intercommunale du logement, plan local d’urbanisme intercommunal) élaborés à l’échelle de l’agglomération. Cette coopération permet de renforcer la pertinence des projets de rénovation urbaine par une technicité et une compétence renforcées des acteurs.

Les élus locaux dynamiques et impliqués ont besoin d’une plus grande souplesse de la part de l’État dans le cadre de la mise en œuvre de leur projet de rénovation urbaine. Tous ont souligné le poids des démarches administratives et la contrainte des règles imposées par l’ANRU, surtout avec la mise en place du NPNRU. Si l’ANRU est une agence indispensable pour eux, elle devrait sortir de son « carcan administratif et technocratique ([76]) ». Surtout, les élus soulignent la nécessité d’un plus grand accompagnement et d’un soutien technique plus important de l’État local. Les rapporteurs pointent la nécessité d’un dialogue plus fluide entre les élus et les services déconcentrés de l’État, ainsi que de l’importance d’une indulgence plus grande envers les élus.

Une confiance renforcée entre les partenaires de la rénovation urbaine apparaît indispensable aujourd’hui. Elle passe par une sanctuarisation des engagements financiers de l’État et de l’ANRU mais aussi par la stabilisation du cadre réglementaire pour les bailleurs sociaux, une fois le projet de loi ELAN voté. Ces engagements financiers doivent être fermes en fonction des objectifs sur lesquels ils ont été fondés.

Les rapporteurs soutiennent également la décision prise lors du conseil d’administration de l’ANRU du 25 mai 2018 d’adapter les modalités de contractualisations en permettant aux agglomérations de conventionner soit à l’échelle de l’agglomération soit en plusieurs vagues, quartier par quartier mais aussi à plusieurs étapes pour un même quartier (cœur de projet phasage, capacités financières). L’ANRU accepte désormais des lignes globales sur des opérations encore non intégralement identifiées ou sur une « maille » de contractualisation plus large et pré-conventionne des opérations en avance de phase pour les projets nécessitant encore du temps de construction et de maturation. Cette souplesse permettra aux élus dont les projets sont déjà élaborés, de lancer rapidement les opérations de renouvellement urbain.

2.   La pertinence de la mise en place du GIP lorsque le portage politique est défaillant

Lorsque les porteurs de projets sont défaillants et font face à des difficultés de mise en œuvre des programmes de rénovation urbaine, une action dynamique de l’État est particulièrement essentielle. Il a alors un rôle moteur dans la détermination du projet.

L’impulsion donnée par l’État peut être réalisée sous la forme d’un Groupement d’intérêt public (GIP) ([77]). Ce partenariat public permet généralement de rassembler l’ensemble des partenaires concernés, soit les élus locaux (ville et agglomération, département et région), l’État déconcentré, les bailleurs sociaux et la Caisse des dépôts et consignations. Généralement, le GIP assure le pilotage stratégique des projets ainsi que la mutualisation des financements et le management des projets.

Par exemple, à Marseille, le choix a été fait de créer le GIP Marseille Rénovation Urbaine (MRU) face aux difficultés de coordination entre les élus locaux. Le GIP MRU comprend une équipe de 25 personnes, dirigée par Nicolas Binet, que les rapporteurs ont rencontré lors de leur déplacement à Marseille le 18 mai ([78]). Ce GIP n’a pas empêché le retard du conventionnement et la sous-consommation des crédits, liés à un portage politique insuffisant, mais il a certainement permis de l’atténuer. De plus, le GIP a permis de contrer le cloisonnement des organisations et a apporté de la transversalité à l’action publique.

Si cette organisation semble indispensable dans certains cas, elle peut aussi limiter l’implication de la collectivité territoriale concernée puisque le pilotage de la rénovation urbaine est fait au niveau du conseil d’administration du GIP, comme cela a été le cas à Marseille. Les élus locaux peuvent apprendre de cette forme d’organisation en intégrant la coopération nécessaire aux programmes de rénovation urbaine mais ils peuvent aussi ne pas se saisir des moyens d’accroître leur autonomie. En outre, le GIP a pu entraîner un biais dans le pilotage des projets puisqu’il a raisonné comme un comité de pilotage pour l’ensemble des projets et non pas par convention. Avec la mise en place du NPNRU, l’utilisation du GIP se marginalise puisque le pilotage se fait désormais à l’échelle intercommunale, ce qui favorise la coopération et le dynamisme des élus locaux, même s’il peut apparaître toujours pertinent lorsque les élus locaux sont réticents à mettre en œuvre cette politique publique.

L’organisation sous la forme d’un GIP a permis l’émergence des acteurs intercommunaux dans la politique de rénovation urbaine. Par exemple à Trappes, le GIP, créé en 2002 intégrait l’EPCI de Saint Quentin en Yvelines au conseil d’administration du GIP. Cependant, la gouvernance et la conduite du projet étaient centrées sur le projet de Trappes et le GIP présidé par le maire de Trappes. La mise en place du NPNRU conduit donc à un véritable renforcement du rôle de l’intercommunalité avec un pilotage global et mutualisé mais aussi une articulation avec des politiques intercommunales portant sur l’habitat, le développement économique, l’environnement et la politique de la ville.

II.   Agir pour une rénovation urbaine durable

La question de la durabilité est inscrite au cœur même de la démarche de la rénovation urbaine. La nécessité de démolir des immeubles de construction relativement récente, dans le cas des « grands ensembles », interroge en effet sur la manière de mobiliser les deniers publics et invite à penser hors de l’urgence et en grand angle. Une rénovation urbaine durable est une rénovation qui prévient la dégradation du bâti et qui pense les transformations du bâti dans leur environnement social, économique et culturel afin de favoriser le vivre ensemble.

A.   Maintenir la qualité de l’habitat pour éviter un « renouvellement éphémère »

La méthode de la rénovation urbaine et notamment l’institution de protocoles de préfiguration comme temps d’étude et de coconstruction des projets est révélatrice d’une prise de conscience progressive, depuis la circulaire Guichard ([79]), de la nécessité de penser dans le temps long et d’envisager les projets dans leur environnement. Cette prise de conscience au stade de la conception des projets doit être renforcée dans l’ensemble du parc public et privé de logement par une démarche de prévention de la dégradation des espaces collectifs et urbains et du bâti.

1.   Logement social : un droit d’alerte pour garantir l’entretien du bâti et des espaces communs

Les rapporteurs ont constaté durant leurs enquêtes de terrain l’inégal entretien du parc social en fonction des communes et des bailleurs, que cet entretien soit celui des espaces communs intérieurs ou extérieurs ou celui du bâti. Tandis que ces espaces contribuent à la qualité du cadre de vie des habitants, manquer à leur entretien participe d’une perte d’attractivité du quartier qui atténue, voire peut remettre en cause les effets positifs d’un projet de rénovation urbaine. Un insuffisant entretien du bâti accroît quant à lui le coût des travaux de réhabilitation qui ne manqueront pas d’intervenir à terme.

Le sociologue Michel BONETTI ([80]) a ainsi observé en début de PNRU des dégradations sur plusieurs sites emblématiques de la rénovation urbaine dès l’achèvement des premières opérations : « Dégradations dans les halls fraîchement réhabilités, des trous dans les grillages des nouvelles clôtures, voire leur arrachement pur et simple, la saleté persistante des abords des immeubles, la prolifération des encombrants et des détritus, l’apparition de nouveaux cheminements à travers les haies ou les espaces verts, le stationnement sauvage et l’accumulation d’épaves dans les parkings récemment réaménagés... La multiplication de ces dégradations et leur accumulation au fil du temps finira au bout de quelques années par recréer un univers paupérisé » ([81]).

Pour lui, de telles dégradations sont liées à une insuffisante prise en compte lors de la conception des projets de la gestion urbaine de proximité (GUP), entendue comme démarche interpartenariale basée sur l’articulation, la coordination et l’adaptation des interventions de chaque acteur au service de l’amélioration du cadre et de conditions de vie des habitants. Depuis ce constat, la GUP s’est consolidée. Dans une étude récente, le CGET relevait ainsi que « la réactivité des services municipaux et des bailleurs sociaux face aux dégradations et incivilités s’est ainsi nettement améliorée » avec pour conséquence positive une consolidation de « l’appropriation par les habitants de leur quartier rénové et de ses nouveaux équipements » ([82]).

Les rapporteurs saluent la consolidation des politiques mises en place de GUP et appellent à leur renforcement. Ils ont toutefois deux sujets d’inquiétude : en premier lieu, certains bailleurs demeurent défaillants dans l’entretien de leur parc et leur responsabilité doit pouvoir être engagée ; en second lieu, la réduction des recettes des bailleurs sociaux résultant de la réduction des loyers sociaux prévue dans la loi de finances pour 2018 pourrait avoir pour conséquence, à court et moyen terme, de provoquer des reports de travaux ou une diminution de la qualité de l’entretien des espaces communs.

Aussi, les rapporteurs seraient favorables à la création d’un droit d’alerte du maire, interlocuteur privilégié de proximité, en cas de constat d’une dégradation de l’entretien du parc social qui n’aurait pas été solutionnée par la concertation. Ce droit s’exercerait auprès du préfet qui pourrait intervenir dans le cadre des conventions d’utilité publique signées avec les bailleurs. Ces conventions, qui portent sur « l’état du service rendu », notion qui intègre l’état technique du bâti et des espaces extérieurs et l’état des parties communes et des équipements communs ([83]), sont en effet appréciées par le préfet qui peut décider de sanctions financières lorsqu’elles ne sont pas respectées.


2.   Logement privé : des garde-fous contre la dégradation des copropriétés

Prévenir la dégradation des logements et notamment des copropriétés privées est, pour les rapporteurs, inhérent à l’objectif de durabilité des investissements réalisés au titre de la rénovation urbaine. Les effets d’un projet de rénovation urbaine dans un quartier ne peuvent en effet être maintenus dans le temps si le parc privé se dégrade et affecte de manière consécutive son attractivité.

Or, le rapport Vivre ensemble, vivre en grand ([84])  a dressé le double constat suivant :

– « 100 000 logements sont dans des copropriétés en difficulté et en très grande difficultés. Pour eux, le redressement est possible à condition de renforcer massivement les plans de sauvegarde, OPAH et ORCOD, soutiens financiers, déclenchements des procédures, capacités juridiques et judiciaires, administrations. À défaut, elles basculeront dans l’irréversible, inacceptable, le développement des marchands de sommeil. » ;

– « 20 000 logements sont dans des copropriétés en une situation irréversible. La grande majorité se trouve dans et au milieu des sites de rénovation urbaine créant un trouble manifeste et majeur. Les acteurs locaux ont pour l’essentiel perdu le contrôle, les délais sont trop longs, la mobilisation des acteurs difficile, le relogement complexe, l’équation financière parfois impossible. Il n’y a pas de pilote car ce sont des sites orphelins. »

a.   Un traitement lourd de l’habitat dégradé

Le traitement des conséquences de la dégradation de l’habitat est extrêmement lourd du fait de son coût important et de la nécessité de concilier l’intérêt général résultant d’une action publique rapide et efficace d’amélioration de l’habitat avec la préservation du droit de propriété tel que garanti par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Cette conciliation implique en effet l’existence d’une vaste palette de procédures graduées inscrivant dans un temps long à très long les réponses à des difficultés souvent urgentes.

Quoique l’action sur l’habitat privé dégradé ne soit pas a priori le « cœur de métier » de l’ANRU, mais celui de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), cette première agence intervient dans des quartiers où la problématique de l’habitat indigne et des copropriétés dégradées est posée avec force. Une convention entre les deux agences ([85]) prévoit un partage entre elles des compétences dans deux cas de figure.

En ce qui concerne les interventions sur les copropriétés fragiles et en difficulté, la convention prévoit la répartition suivante :

– les actions visant à accompagner les copropriétaires privés dans le redressement ou la consolidation des copropriétés relèvent de l’ANAH : aides aux travaux de réhabilitation, à la gestion, à la résidentialisation, au portage de redressement, à la scission sans suppression du statut de copropriété ; réalisation de diagnostics, ingénierie de redressement, ingénierie d’Opah Copropriétés, de plan de sauvegarde, de programme opérationnel de prévention et d’accompagnement des copropriétés/Popac ;

– les actions visant à mettre fin au statut de la copropriété ou à modifier profondément et durablement sa structure ou son fonctionnement en vue de la réalisation d’un programme de renouvellement urbain relèvent de l’ANRU : démolition de copropriétés, transformation en monopropriété, transformation en logements sociaux, portage massif, restructuration des espaces et des équipements des ensembles immobiliers complexes ou des copropriétés, accompagnement social des copropriétaires et habitants pendant les périodes transitoires d’acquisition des logements, et autres types d’opérations.

En ce qui concerne les interventions sur l’habitat ancien dégradé, la convention prévoit la répartition suivante :

– les actions visant à améliorer l’habitat existant notamment en luttant contre l’habitat indigne et la précarité énergétique relèvent de l’ANAH : aides aux travaux, ingénierie d’opérations programmées. En revanche, pour ces quartiers, l’ANAH ne finance pas d’actions de recyclage ;

– les actions visant à recycler l’habitat dégradé via des opérations de restructuration foncière ou immobilière relèvent de l’ANRU. Dans les autres QPV, l’ensemble des opérations d’amélioration et de recyclage de l’habitat dégradé relève de l’ANAH dans le respect de son règlement général.

Ces actions sont en voie d’être encore renforcées. Dans le projet de réforme de l’instruction des conventions par l’ANRU, il est proposé de faire évoluer le taux de base de la subvention pour le recyclage et le portage massif de 50 % à 80 %, d’encourager la constitution d’ORCOD-IN ([86]) sur les sites de Marseille, de Nîmes voire de Montpellier et de mieux communiquer sur les complémentarités des financements des deux agences. Le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique ([87]) prévoit plusieurs dispositions, dont une partie sera prise par ordonnance, pour lutter contre l’habitat indigne, les marchands de sommeil et la dégradation des propriétés et, notamment, à son article 59, la facilitation de la mise en place des ORCODIN (1), outil le plus puissant applicable pour traiter des îlots dégradés. 

b.   Une nécessaire action préventive

Les conséquences d’une dégradation de l’habitat pour ses occupants ainsi que la longueur, la lourdeur et le coût des opérations pour rétablir une situation digne enjoignent un renforcement des actions préventives. À cet égard, vos rapporteurs souhaitent soulever un point de vigilance concernant la vente des logements sociaux prévue à l’article 29 du projet de loi ELAN précité :

– il est prévu une information des acquéreurs du logement relativement aux charges locatives associées au bien : vos rapporteurs pensent qu’une telle information est indispensable, mais qu’elle pourrait s’avérer insuffisante pour éviter des difficultés financières futures. Aussi, ils préconisent que, pour tout achat, le montant estimé des charges locatives mensuelles soit intégré au calcul du ratio d’endettement établi pour l’octroi du prêt bancaire ;

– des gardes-fous ont été prévus en cas de vente en bloc, c’est-à-dire par lot de plusieurs logements, à des personnes morales. Toutefois, une fois le logement public entré dans le parc privé, le risque d’une paupérisation de la copropriété pourra survenir. En outre, de telles ventes pourraient avoir des effets sur le respect de l’esprit de la loi SRU ([88]) auquel les rapporteurs sont très attachés. En conséquence, ils souhaitent que des bilans soient régulièrement transmis à la représentation nationale sur l’application de la mesure et plus particulièrement sur le suivi des logements vendus.

B.   Une meilleure articulation de la rénovation urbaine avec les politiques de droit commun nécessaire

La politique de rénovation urbaine doit être pensée dans sa globalité pour avoir des effets durables dans le temps. À ce titre, elle doit nécessairement s’articuler avec les politiques de droit commun menées dans les quartiers prioritaires, qui traitent à la fois de la cohésion sociale et du développement économique.

1.   Une interaction insuffisante avec les politiques de droit commun

Le PNRU a prévu la possibilité de financer des opérations contribuant à la diversification fonctionnelle dans les quartiers, notamment par le biais de subventions des équipements publics ou à vocation économique. Les chiffres 2016 de l’enquête livraison de l’ANRU soulignent la part limitée de ces subventions. En effet, les opérations relatives à l’habitat ont représenté 66 % des investissements et 60 % des subventions de l’ANRU.

Le règlement général de l’ANRU de 2007 précise que le projet de rénovation urbaine doit notamment permettre « de diversifier les fonctions urbaines à travers un rééquilibrage des fonctions commerciales, économiques, sociales et culturelles par rapport à l’habitat ([89]) ». Il prévoit donc la possibilité de subventionner à hauteur de 20 % à 35 % la construction, l’extension ou la réhabilitation des équipements publics de proximité ainsi que des équipements à finalité économique et locaux locatifs. L’agence subventionne également la construction, l’extension ou la réhabilitation des équipements publics exceptionnels à hauteur de 10 à 15 %.

Le rapport de l’ONZUS a dressé le bilan de ces investissements. En 2013, les opérations d’équipements publics représentent 9 % des investissements et 11 % de la subvention ANRU, l’ANRU subventionnant en moyenne les équipements à hauteur d’un tiers de leur valeur (918 millions d’euros) ([90]). D’après le graphique suivant fourni par l’ANRU, les équipements scolaires sont les équipements qui concentrent le plus d’investissements.


Source : ANRU

Si l’ONZUS souligne un bilan positif de ces investissements, il apparaît qu’ils ont été trop peu nombreux et insuffisamment articulés avec la politique de droit commun pour permettre une action globale sur la mixité sociale. Ce manque d’articulation a été souligné par le rapport du comité d’évaluation et de suivi (CES) de l’ANRU de 2009 : « parmi ces insuffisances figurent la faible prise en compte de la parole et l’expertise d’usage des habitants, le cantonnement des projets aux limites administratives des quartiers et la coordination inefficace de la rénovation urbaine avec la politique de la ville et les politiques de droit commun ([91]) ».

En effet, les contrats urbains de cohésion sociale (CUCS), qui ont remplacé les contrats de ville à partir de 2007, n’ont pas atteint leur objectif d’articulation de l’ensemble des outils et des politiques publiques existantes, notamment celle de la rénovation urbaine, ce qui a débouché sur un manque de cohérence de l’action menée dans les QPV ([92]). Ce manque de cohérence entre les CUCS et les projets de rénovation urbaine est lié, selon l’ONZUS, à plusieurs facteurs : le déploiement sur des échelles territoriales différentes, des diagnostics non partagés, des calendriers de définition et de mise en œuvre non-convergents et des équipes projets distinctes. En outre, deux agences nationales distinctes avaient été instaurées, l’ANRU pour la politique de rénovation urbaine et l’Acsé pour les actions liées aux CUCS, ce qui contribué à renforcer la séparation entre le volet urbain et le volet social de la politique de la ville.

Cependant, les rapporteurs soulignent le caractère déterminant de l’action dans l’humain des associations qui ont permis de faire le lien, dans le cadre du PNRU puis du NPNRU, entre le volet social de la politique de la ville et la politique de rénovation urbaine.

Ce constat d’échec partagé a conduit à la refonte des dispositifs afin de permettre la synergie de ces deux politiques publiques. La nouvelle génération de projets de renouvellement urbain s’inscrit donc désormais dans les contrats de ville. Cette nouveaux contrats de ville globaux, conclus à l’échelle intercommunale pour 6 ans (2014-2020), déterminent et regroupent les actions en termes de développement économique, de cohésion sociale et de renouvellement urbain.

2.   Une action globale indispensable 

Si l’articulation avec la politique de la ville est nécessaire pour une action efficace et concertée, la politique de rénovation urbaine doit également être accompagnée d’un renforcement de toutes les politiques de droit commun en faveur des quartiers prioritaires. Cela passe par une mobilisation plus forte des crédits de droit commun dans les QPV, une action volontaire sur le développement de l’emploi dans les quartiers et une réflexion à poursuivre sur le cadre de vie de ces territoires. Ces actions contribueront au changement de l’image des quartiers et, ainsi, à la mise en œuvre d’une mixité sociale affirmée.

L’opération « cœur de quartier, » annoncée par le Président de la République dans son discours du 22 mai 2018, s’inscrit dans cette logique. Pensé comme le pendant du dispositif « cœur de ville » mis en œuvre dans les villes moyennes, « cœur de quartier » a pour objectif d’aider les collectivités à mettre en œuvre des projets globaux, qui mettent l’accent sur les politiques de l’emploi, du développement économique et de la mobilité. Si les mesures opérationnelles contenues dans ce dispositif n’ont pas encore été déclinées par le Gouvernement, le secrétaire d’État à la cohésion des territoires, reçu en audition le 4 juillet par la MEC, a rappelé la philosophie du dispositif et son engagement à le mettre en œuvre rapidement.

a.   Inciter les ministères à signer la deuxième génération des conventions interministérielles d’objectifs afin de mobiliser les crédits de droit commun vers les QPV

Face au constat de la dégradation de la situation dans les QPV et de la nécessité de mobiliser les crédits de droit commun en faveur de ces territoires, le Gouvernement a mobilisé l’ensemble des ministères sur le sujet, par la circulaire du 30 novembre 2012 relative à l'élaboration de conventions d'objectifs pour les quartiers populaires entre le ministre de la ville et les ministres concernés par la politique de la ville. Ainsi, douze conventions interministérielles d’objectifs en faveur des quartiers prioritaires ont été signées entre le ministère chargé de la ville et les ministères concernés par la politique de la ville pour la période 2013-2015. Elles prévoyaient un renforcement des moyens et une adaptation des actions conduites dans ces quartiers.

Ces conventions, arrivées à échéance, ont vocation à être renouvelées par une nouvelle génération de conventions, conformément aux annonces du Premier ministre dans la circulaire du 12 janvier 2016 relative à l'élaboration des conventions interministérielles d'objectifs 2016-2020. Ces nouvelles conventions doivent amplifier la mobilisation de chaque ministère avec la nomination d’un référent ministériel qui effectue le suivi des engagements et des résultats des actions en faveur des QPV tandis que des comités techniques font la liaison avec le CGET. Les préfets de région sont chargés, en tant que responsables du pilotage des politiques publiques et des budgets opérationnels de programme déconcentrés, du déploiement territorialisé des conventions. Le comité d’administration régional effectuera a minima un examen annuel des effets de ces conventions. Cependant, seulement 5 conventions ont été signées à ce jour. Les rapporteurs rappellent donc la nécessité de faire signer ces conventions par les ministères concernés.

b.   Relancer l’activité économique

L’activité économique est un préalable à la durabilité de l’action publique de rénovation urbaine dans les quartiers prioritaires. D’une part, elle permet d’accroître la situation des ménages qui résident dans ces quartiers, ce qui contribue à une mixité sociale « endogène » et, d’autre part, elle permet de changer l’image des quartiers, notamment par l’instauration des commerces, vecteurs d’une véritable « vie de quartier ».

i.   Une action sur l’attraction de l’activité économique dans les quartiers en rénovation urbaine limitée

Le bilan du développement économique dans les quartiers en rénovation urbaine est très mitigé.

Le rapport de 2016 de l’ONPV souligne la hausse du stock d’établissements implantés dans les QPV en 2014 (passant de 171 700 au 1er janvier 2014 à 189 500 au 1er janvier 2015) ([93]). Cependant, le nombre d’installations au cours de l’année 2015 dans les QPV est en baisse de 5 % alors qu’il progresse de 0,9 % dans les aires environnantes. La croissance des stocks mesurée sur l’année 2015 devrait donc être moins importante que celle de l’année précédente. En outre, le taux de vacance du tissu commercial est supérieur dans les QPV (35 % contre 10,4 % dans les centres-villes) ([94]).

Le rapport de l’ONZUS sur l’évaluation du PNRU a souligné la faiblesse de l’investissement du programme sur cette thématique : « les opérations d’investissement relatives aux équipements commerciaux représentent 1 % du total des investissements et 1 % du total des subventions ([95]) ». Seule la moitié des conventions prévoit des opérations concernant des espaces commerciaux pour un montant représentant moins de 2 % de l’ensemble des crédits alloués. Le rapport d’information de François Goulard et François Pupponi estime même que « la réflexion sur le développement d’activités économiques et artisanales est le « parent pauvre » des projets, sauf dans quelques sites dont la zone franche urbaine apparaît dynamique ([96]) ».

Le rapport de 2016 du CGET ([97]) sur le sujet met en évidence un bilan quantitatif plutôt positif avec une hausse de l’offre de locaux financée par les projets de rénovation urbaine par rapport à l’offre initiale. En revanche, ces opérations ont principalement été des transferts d’activité ou des réhabilitations de locaux d’où un accroissement de l’offre commerciale très limité. L’étude montre le rôle réel, bien que limité, de la rénovation urbaine dans la dynamisation de l’offre économique : « dans un tiers des quartiers, la moitié de l’augmentation du nombre d’établissements observée entre 2003 et 2013 est due à la production d’immobilier économique dans le cadre des projets de rénovation urbaine ». Les élus locaux se sont emparés de la question des services de proximité et ses opérations ont très souvent été couronnées de succès, bien qu’un point de vigilance ait été relevé concernant le manque d’articulation avec l’offre économique déjà présente à proximité des quartiers concernés. Le bilan est également mitigé concernant l’offre qualitative des commerces, avec une présence forte des commerces alimentaires « discount » qui ont un impact limité sur la diversification de l’offre commerciale. Ainsi, le PNRU a pu marginalement redynamiser les commerces de proximité mais n’a pas permis l’émergence d’un véritable projet de développement économique.

Plusieurs dispositifs ont été mis en place dans le cadre des politiques de la ville afin de favoriser l’activité économique dans les quartiers prioritaires.

D’une part, le dispositif des zones franches urbaines (ZFU), créé par la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville, prévoyait des exonérations fiscales d’impôts sur les bénéfices et d’impôts locaux et des exonérations de cotisations sociales pour les entreprises qui se créent ou s’implantent dans une des 100 zones franches urbaines. Ces zones franches correspondent à des QPV qui cumulent les difficultés, l’objectif étant de créer de l’emploi dans ces territoires. Ce dispositif a été réformé par la loi de finances rectificative pour 2014 en « ZFU-Territoires entrepreneurs » afin d’en réduire l’effet d’aubaine. Depuis le 1er janvier 2015 et jusqu’au 31 décembre 2020, dans les 100 ZFU-TE, les entreprises qui s’y créent ou s’y implantent ne peuvent plus bénéficier que d’une exonération d’impôt sur les bénéfices (dont le plafond a été abaissé, passant de 100 000 euros à 50 000 euros afin de cibler les petites entreprises) pendant les 8 ans qui suivent le début de l’activité sous condition d’une clause d’embauche locale renforcée ([98]).

D’autre part, afin de favoriser le développement des commerces dans les QPV, des exonérations temporaires de cotisation foncière des entreprises (CFE) et de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pendant 5 ans sont accordées de droit aux commerces de proximité, c’est-à-dire aux microentreprises (moins de 10 salariés et chiffre d’affaire inférieur ou égal à 2 millions d’euros) ayant une activité commerciale, depuis le 1er janvier 2015. Le bénéfice de ces exonérations a été étendu par l’article 50 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2016 aux établissements du secteur qui comptent moins de 50 salariés et présentent un chiffre d’affaire annuel n’excédant pas 10 millions d’euros, implantés dans les QPV, afin d’attirer des surfaces commerciales de taille moyenne.

Les rapporteurs soulignent l’intérêt de ces dispositifs pour l’attraction des activités économiques dans les QPV. Le dispositif des ZFU-TE ayant vocation à s’éteindre du fait de son impact limité sur l’activité économique (effet d’aubaine très fort), les rapporteurs souhaitent qu’une réflexion soit engagée sur un dispositif fiscal incitatif non pérenne approprié pour relancer l’emploi. Ce dispositif doit être articulé avec une action volontaire des collectivités locales dans ce domaine, qui peut passer par la mise en place d’outils dérogatoires au droit commun en matière d’urbanisme pour faciliter l’installation des entreprises.

Le rapport de l’ONZUS précité pointait l’absence de coordination entre les équipes du PNRU et des ZFU, ainsi que l’entraînement marginal du PNRU sur la politique de soutien aux entreprises. Les rapporteurs espèrent que cette problématique a bien été prise en compte dans le cadre du NPNRU, la mise en place du dispositif réformé ZFU-territoires entrepreneurs et des exonérations fiscales pour les TPE et PME ayant une activité commerciale. 

Dans le cadre du NPNRU, l’ANRU a mis l’accent sur le développement économique des quartiers, nouvel objectif incontournable des projets ([99]). 600 millions d’euros sont également prévus pour les opérations immobilières visant les entreprises.

Les rapporteurs ont relevé plusieurs pratiques favorisant l’activité des commerces de proximité au cours de leurs déplacements. À Bondy par exemple, par le biais d’appels à projets respectant les conditions énoncées par une Charte d’installation des enseignes, les bailleurs sociaux concernés ont mis en concours l’attribution de baux commerciaux sur leurs locaux. De plus, certains d’entre eux ont mis en place une pro-ratisation du calcul du montant du loyer, ajustable périodiquement, au regard du chiffre d’affaires réalisé par le nouveau commerce.

Les rapporteurs saluent également l’action bénéfique de l’Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (Epareca), créé par la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville qui accompagne les collectivités, sous certaines conditions, dans la mise en œuvre des projets visés à l’article L. 720-5 du code de commerce, soit globalement la réhabilitation, la restructuration ou la démolition-reconstruction des locaux commerciaux dans les quartiers prioritaires.

Enfin, les rapporteurs souhaitent qu’une réflexion soit entamée par le Gouvernement sur les dispositifs budgétaires et fiscaux qui pourraient permettre un accompagnement des commerces affectés par une baisse de leur activité à cause des travaux induits par les opérations de rénovation urbaine.

ii.   Une situation dégradée des habitants des QPV face à l’emploi

Dans son rapport annuel de 2017 ([100]), l’ONPV a mis en avant les difficultés des habitants des QPV face à l’emploi, comparativement aux habitants des aires urbaines environnantes. Ainsi, au 1er janvier 2016, le taux de chômage dans les QPV est de 25,3 % contre 9,9 % dans les unités urbaines englobantes. Le taux d’inactivité est de 41,8 % contre 27,9 % dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes. Les contrats de travail sont globalement plus précaires, les indépendants moins nombreux et le sous-emploi plus important. Les jeunes sont particulièrement affectés par cette situation : le taux de ni en éducation, ni emploi, ni en formation, est près de deux fois et demie supérieur dans les quartiers prioritaires que celui des jeunes résidant dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes.

Afin d’inclure cette problématique dans le cadre de la politique de rénovation urbaine, l’ANRU a adopté une charte nationale d’insertion en février 2005 qui a inscrit l’obligation de consacrer au moins 5 % des heures travaillées dans le cadre des investissements du projet de rénovation urbaine et 10 % des emplois créés dans le cadre de la GUP ou de la gestion des équipements, à l’insertion professionnelle des habitants des zones urbaines sensibles (ZUS). Ces chartes sont ensuite déclinées par des chartes locales.

Dans son rapport annuel de 2017, l’ONPV fait un bilan de l’application de cette mesure ([101]), à partir des enquêtes menées par l’ANRU. Ainsi, au 31 décembre 2016, 25,2 millions d’heures d’insertion ont été réalisées, ce qui concerne 63 000 bénéficiaires. Dans près de trois quarts des projets, le nombre d’heures effectué est supérieur aux seuils prévus. Six mois après leur entrée dans le dispositif, 38 % des bénéficiaires occupent un emploi, 31 % sont dans un parcours vers l’emploi, 23 % sont demandeurs d’emploi et 8 % sont dans une autre situation. Si ces résultats sont encourageants, ils restent insuffisants, d’où l’adoption d’une nouvelle charte d’insertion dans le cadre du NPNRU qui a pour objectif de mieux articuler cette clause avec la politique locale d’accès à l’emploi et à la formation professionnelle pour permettre des parcours durables vers l’emploi.

De plus, tout en sachant que la question du chômage dans les quartiers prioritaires ne sera pas résolue par l’entreprenariat, même si elle peut contribuer à augmenter le taux d’emploi, les rapporteurs ont souhaité insister sur l’importance de favoriser la création d’entreprise par les habitants des QPV. En effet, ils ont fait le constat d’un manque d’accompagnement des entrepreneurs des quartiers prioritaires. Si le statut d’auto-entrepreneur, créé par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, a favorisé l’émergence de l’entreprenariat dans les quartiers, il est nécessaire d’améliorer l’efficacité de l’action des services de l’emploi dans la mise en œuvre opérationnelle d’un projet entrepreneurial. L’Agence France entrepreneur, anciennement Agence pour la création d'entreprise (APCE), créée en 1996, a un rôle essentiel dans l’information des entrepreneurs, qui pourrait utilement être complété par une offre d’accompagnement tout au long du processus de création de l’entreprise. Par exemple, la ville de Bondy a instauré, dans le cadre du PNRU, un incubateur de projets innovants, qui fonctionne bien (près de 100 start-ups créées et accompagnées, ce qui représente environ 260 ETPT) mais presque aucune entreprise créée n’est restée sur le territoire du fait d’une offre d’accompagnement pour les cinq premières années de vie de l’entreprise insuffisante, ce qui réduit l’impact du développement de l’entreprenariat sur la courbe de chômage des quartiers prioritaires. Les rapporteurs proposent ainsi de définir des objectifs de créations d’entreprises et d’emplois par territoire, pour que les futurs projets urbains soumis à l’ANRU intègrent cette dimension indispensable à la cohésion sociale.

c.   Assurer une meilleure qualité de vie aux habitants des quartiers en rénovation urbaine

i.   L’enjeu primordial de la sécurité et tranquillité publique

Depuis la loi du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, aucun objectif législatif en matière de sécurité n’est défini pour les projets de rénovation urbaine. Par conséquent, le règlement général de l’ANRU du 20 mars 2007 ne définit pas la sécurité publique comme un objectif premier de l’agence. Les thèmes de la sécurité ou de la tranquillité publique sont uniquement étudiés selon la cohérence entre le projet de rénovation et la politique de la ville puis du contrat de ville à partir de 2015, ce que rappelle le règlement général de l’ANRU du 16 juillet 2015. L’agence s’assure néanmoins de l’articulation entre les dispositifs du contrat de ville et le projet de renouvellement urbain, en conditionnant son aide à la nécessaire cohérence entre le projet et l’amélioration de la sécurité et la tranquillité ([102]).

Cependant, un besoin réel de politiques en faveur d’une meilleure sécurité au sein des QPV est observé. En effet, les QPV se caractérisent par une délinquance spécifique et plus importante que la moyenne nationale, ce que soulignent les enquêtes de l’ONPV : les QPV sont touchés par 7,5 faits de violences physiques sur les personnes en QPV contre une moyenne de 4 sur l’ensemble du territoire pour 1 000 habitants ([103]). Si cette statistique doit être nuancée en raison de la corrélation entre niveau de délinquance et taille de l’unité urbaine, les QPV se caractérisent par une délinquance spécifique : les infractions à la législation sur les stupéfiants, les violences avec ou sans vol et les dégradations sont plus importantes que dans les unités urbaines qui les englobent. Dans certains quartiers dégradés, les services publics de l’État ont même fait valoir leur droit de retrait, du fait d’une insécurité trop forte pour exercer leur activité.

Le PNRU puis le NPNRU ont favorisé le développement de la gestion urbaine de proximité dans les projets de renouvellement urbain afin d’améliorer le cadre de vie des quartiers rénovés. Cependant, le volet « tranquillité » n’a que peu été introduit dans les conventions PNRU et GUP, l’action sur l’habitat ayant été considérée comme l’outil préférentiel pour lutter contre la délinquance. L’action menée sur l’habitat a permis de désenclaver les quartiers et de les ouvrir plus largement. Des séparations entre les espaces privé et public ont aussi été privilégiées afin de renforcer le sentiment de sécurité. Aucune étude n’a permis de prouver la diminution de l’insécurité dans les quartiers concernés par les opérations de rénovation urbaine mais les acteurs rencontrés par les rapporteurs au cours de leurs déplacements ont souligné une amélioration générale du cadre de vie des personnes et une diminution des interventions de police. Cependant, des problématiques liées aux trafics illicites et à la dégradation des espaces publics persistent.

Une meilleure prise en compte de la sécurité et de la tranquillité publique dans le cadre des projets de renouvellement urbain est nécessaire, ce qui passe notamment par la mise en œuvre d’une gestion urbaine de proximité pertinente. Lors de leur visite à Boulogne-sur-Mer, les rapporteurs ont constaté qu’une gestion urbaine de proximité dynamique permettait d’améliorer la sécurité des quartiers rénovés. De plus, les bailleurs sociaux sont apparus comme des acteurs majeurs pour améliorer la sécurité publique, notamment par l’embauche de gardiens d’immeuble capables de constater les dégradations causées par les locataires. Le coût de ces dégradations est directement facturé sur les loyers versés par les locataires responsables dans le quartier du Chemin Vert de Boulogne-sur-Mer. Les rapporteurs souhaitent qu’une réflexion soit entamée sur la généralisation de ce dispositif.

Les rapporteurs ont fait le choix de traiter cette problématique primordiale de façon modeste, estimant qu’elle mériterait d’être approfondie dans les rapports ultérieurs sur le sujet.

ii.   Porter une attention particulière à l’enjeu de mixité scolaire

Les équipements scolaires peuvent faire l’objet de subventions de l’ANRU en tant qu’équipements de proximité, dans le cadre du PNRU et du NPNRU. Comme mentionné ci-dessus, si les opérations de financement des équipements de proximité sont limitées, les équipements scolaires sont tout de même privilégiés, représentant 42 % d’entre elles, ce qui montre l’importance du sujet pour les porteurs de projet. Un projet de rénovation urbaine peut avoir un second impact sur les établissements scolaires en modifiant le nombre d’élèves qui fréquentent l’établissement et la composition sociale de ce public.

La mixité scolaire, indispensable à la formation d’une véritable mixité sociale et utilisée comme critère de définition de cette dernière par l’ONPV ([104]), n’a pas été renforcée par le PNRU d’après le rapport du CES de l’ANRU de 2009 sur le sujet ([105]). Les cartes scolaires ont en effet été conçues dans un objectif de proximité à l’habitat et non dans une logique de mixité sociale. Les établissements situés dans les QPV sont particulièrement affectés par cette absence de mixité sociale du fait d’une politique de peuplement à l’efficacité encore limitée et des difficultés de recomposition de la carte scolaire basée sur la venue d’élèves qui ne résident pas dans le QPV ou sur une reconstitution des équipements en bordure de quartier.

Lors de leur déplacement à Boulogne-sur-Mer, les rapporteurs ont rencontré le principal du collège Langevin qui leur a fourni un bilan sur l’évolution de la composition sociale des élèves de son établissement, situé en QPV mais à l’extérieur de la cité, dans un sas pavillonnaire, ce qui permet de placer le collège dans une situation d’extériorité par rapport à la vie du quartier. Ainsi, depuis le programme de rénovation urbaine, le profil sociologique des élèves a changé : étant entendu que le nombre d’élèves a diminué de 35 % entre 2009 et 2016, ce qui est comparable à l’évolution sur l’ensemble du territoire boulonnais, le nombre d’enfants issus des classes sociales favorisées ou très favorisées est devenu marginal (0,3 % contre 6 % auparavant) tandis que le nombre d’élèves issus des classes moyennes a augmenté, passant de 8,5 % à 14,5 %. Le nombre d’élèves issus des familles les plus défavorisés a stagné à 85 %. S’il n’est évidemment pas possible de dresser un constat général à partir de la situation très spécifique de ce collège, les effets en termes de mixité scolaire ont, dans ce territoire très spécifique, été plutôt limités, avec une disparition des élèves issus des familles les plus défavorisées, même si le départ moins important en proportion des classes moyennes, a permis de stabiliser la part des élèves issus des classes les plus défavorisées.

Les rapporteurs estiment qu’une véritable politique locale favorisant la mixité scolaire dans les QPV, mais aussi plus largement dans l’ensemble du territoire, est indispensable pour renforcer la mixité sociale et permettre à la politique de rénovation urbaine d’avoir des effets durables.

iii.   La mobilité, une priorité pour les habitants des quartiers prioritaires

D’après le rapport 2017 de l’ONPV, les habitants des quartiers de la politique de la ville présentent un plus faible niveau de mobilité que les habitants d’autres unités urbaines : la part d’immobiles y est de 3 à 4 points plus importante, les habitants y effectuent en moyenne moins de déplacement la semaine et si la distance parcourue par les résidents des QPV est inférieure, le temps qu’ils y consacrent est identique ([106]). La vitesse de déplacement est donc plus faible dans les QPV. De plus, les ménages sont moins motorisés et sont moins souvent en possession du permis. L’étude précitée montre également que cette immobilité touche plus fortement les femmes.

Cette moindre mobilité limite l’accès aux bassins d’emploi des habitants des quartiers prioritaires. Ainsi, M. Augustin de Romanet, président-directeur général du groupe Aéroports de Paris regrettait, devant la commission du développement durable, le 4 juillet 2018, la séparation entre la zone économique de Roissy et les territoires urbains environnants, à l’instar de Goussainville, du fait de l’absence de desserte par les transports publics de ces deux zones.

L’enjeu de la desserte des quartiers notamment par les transports en commun est donc primordial. Le règlement général de l’ANRU pour le PNRU inclut la question de la mobilité dans la partie consacrée à « l’intégration du développement durable à la démarche du projet » qui mentionne « l’amélioration de la desserte, notamment en transports en commun et en liaisons douces (piétons et vélos) en prenant en compte les enjeux de sécurité routière » ([107]) comme objectif des projets de rénovation urbaine. Cependant, le rapport du CES de l’ANRU sur le sujet ([108])  souligne que cette thématique ne relève pas de l’action directe de l’ANRU mais plutôt de la partie « effet de levier » induit par l’action de l’Agence.

Le désenclavement des quartiers a fait partie des objectifs de nombreux projets de rénovation urbaine, comme l’ont par exemple vu les rapporteurs à Boulogne-sur-Mer où le projet de rénovation urbaine a permis au quartier de Transition d’être mieux desservi par les transports publics.

Cependant, la mobilité des habitants des QPV restant très limitée, comme le souligne l’enquête précitée de l’ONPV, l’ANRU a replacé cette thématique au cœur des objectifs des opérations de rénovation urbaine du NPNRU, dans son règlement général du 16 juillet 2015 : « Les projets doivent contribuer à l’intégration des quartiers dans leur environnement et faciliter les déplacements et l’accessibilité des habitants et usagers du quartier, en particulier par l’amélioration et la diversification des modes de transport et la qualité de la desserte en transports en commun (pistes cyclables, transports collectifs, liaisons piétonnes). ([109]) »

Les rapporteurs saluent la prise en compte de cette donnée essentielle à l’amélioration du cadre de vie des habitants des QPV et indispensable à leur accès à l’emploi.


III.   Renforcer la culture de l’évaluation

Penser de manière durable la rénovation urbaine implique de porter un regard sur les réalisations et leurs effets de manière transversale, territorialisée et dans le temps long. La démarche de durabilité est donc indissociable de la démarche d’évaluation, car seule une évaluation approfondie permet au législateur de contrôler l’action du Gouvernement et de proposer, si besoin, les inflexions rendues nécessaires. Aussi, les rapporteurs considèrent qu’il est non seulement possible et également éminemment souhaitable d’améliorer l’information au Parlement et d’associer ses membres à la gouvernance de l’ANRU, véritable pivot de la mise en œuvre de la politique de rénovation urbaine.

A.   Une information de la représentation nationale à améliorer

Permettre un regard plus approfondi du Parlement sur la mise en œuvre de la politique de rénovation urbaine rend nécessaire l’amélioration de son information.

1.   Une démarche informative et évaluative incomplète

Malgré de très récentes améliorations, l’information disponible est toujours lacunaire concernant les données relatives au suivi physique et financier du programme et la démarche évaluative demeure incomplète.

a.   Une démarche informative insuffisante sur le financement et les réalisations

Avoir une vue complète du financement et du suivi de la rénovation urbaine nécessite de mobiliser une documentation éparse, partielle et dont une partie est désormais datée. Une telle complexité rend très laborieux le contrôle et l’évaluation du dispositif. Ainsi, dans son rapport de 2012 sur la politique de la ville, la Cour des comptes constatait ainsi que « la connaissance des résultats de la rénovation urbaine demeure incomplète ».

L’information est en premier lieu dispersée. Comprendre le cadre de financement du programme nécessite la consultation de plusieurs textes de loi, de plusieurs conventions de financement nationales passées avec les différents partenaires de l’ANRU ([110]), du règlement général de l’Agence, qui précise les règles d’éligibilité des projets à un financement et les modalités de subventionnement des différentes opérations ([111]), et également des conventions pluriannuelles locales qui offrent la seule vue consolidée et territorialisée de la planification des investissements prévus par les partenaires de l’ANRU.

L’information relative au suivi financier et aux réalisations est délivrée dans des publications institutionnelles de l’ANRU, à l’instar du « Mémo PNRU 2016 » ou de l’« annexe financière » de 2014, dans les projets annuels et rapports annuels de performances, annexés respectivement au projet de loi de finances et au projet de loi de règlement, et dans plusieurs rapports de la Cour des comptes : deux rapports publics thématiques ([112]), un rapport remis au Sénat, en application du 2° de l’article 58 alinéa 2 de la loi organique n° 2001‑692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) ([113]) et un chapitre de la seconde partie du rapport public annuel 2016 ([114]).

Une synthèse est désormais réalisée par l’ONPV dans le rapport annuel, ce qui constitue une amélioration considérable, mais son caractère demeure encore trop partiel pour permettre une évaluation approfondie. Il en est de même pour les publications institutionnelles de l’ANRU qui n’ont, pas plus que le rapport de l’ONPV, vocation à permettre une telle évaluation. De fait, l’approche des différents documents donnant à voir de la rénovation urbaine répond à leurs objectifs fonctionnels et, de ce fait, demeure partielle : les documents budgétaires présentent ainsi uniquement les comptes de l’ANRU en tant qu’opérateur de l’État, ainsi que les prévisions d’ouverture et l’exécution des crédits budgétaires dans leurs grandes masses ([115]) ; les notes d’exécution budgétaire et rapports de la Cour des comptes analysent les conditions de la mise en œuvre des crédits de l’État et, de ce fait, de même que les documents budgétaires, ne présentent pas de vision réellement consolidée de la maquette financière dans le temps long.

La mise en regard analytique des informations de prévision budgétaire et de réalisation de la dépense est donc difficile. Les travaux ayant effectué cet exercice sont en outre désormais datés. Le rapport le plus exhaustif qui ait été réalisé, celui du Conseil d’orientation de l’ONZUS ([116]), date ainsi de 2013. Le dernier rapport de la Cour des comptes ayant consacré des développements approfondis à la rénovation urbaine date pour sa part de 2014, soit également avant la fin des engagements au titre du PNRU et la mise en place du NPNRU.


b.   Une démarche évaluative des effets de la rénovation urbaine incomplète

De manière tout à fait paradoxale, comme le soulignait déjà le rapport de François Pupponi et François Goulard présenté en 2010 au nom du comité d’évaluation et de contrôle (CEC), alors que la politique de la ville a été un terrain privilégié des premières démarches évaluatives engagées en France et que les évaluations sont nombreuses, ces travaux n’ont pas permis la formation de jugements quant à la qualité de la politique mise en place. Dans son rapport de 2012 sur la politique de la ville, la Cour des comptes constatait pour sa part que les évaluations relatives à la politique de la ville ne sont pas « centrées sur l’impact des actions »

Dans le contexte de la difficile appréhension statistique des effets de la rénovation urbaine précédemment décrite, un appareil d’analyse critique est indispensable pour donner un sens aux indicateurs mesurés au regard de considérations parfois très locales. Aussi, rendre possible une évaluation centrée sur l’impact des actions nécessiterait de disposer d’un corpus d’études locales et thématiques très approfondi, pour ne pas dire exhaustif. Or, ce corpus n’existe pas, bien que l’ONPV s’attache à valoriser les études locales en lien avec les thèmes abordés dans ses rapports.

La mise en cohérence des travaux nécessiterait par ailleurs un effort accru de planification, exercice qui se heurte à deux difficultés :

– en premier lieu, la recherche universitaire, dont l’analyse de la mise en œuvre de certaines politiques publiques peut constituer un axe de travail, est indépendante ; or, mise à part la vaste étendue des champs disciplinaires à mobiliser pour réaliser des études transversales, les hypothèses et questionnements à partir desquels les chercheurs élaborent leurs travaux ne sont pas toujours ceux des responsables politiques et administratifs en charge de mettre en œuvre et d’évaluer les politiques publiques ([117]) ;

– en second lieu, l’évaluation locale par les porteurs de projets manque de cohérence pour pouvoir être utilement mise en valeur par l’ONPV : « pour être exploitables au niveau national, il faudrait que ces évaluations locales aient une forme identique expliquant bien le contexte politique et géographique du projet, son calendrier, les choix réalisés tout au long du processus, l’appréciation par les acteurs et les habitants : lorsque la capitalisation d’évaluations locales semble intéressante pour le niveau national, les évaluations nationales des terrains choisis sont analysées en complément d’entretiens qualitatifs avec les acteurs ».

2.   Une information à améliorer

a.   Un nécessaire renforcement de l’ONPV

Comme le rapport de 2010 précité ([118]) le rappelait à propos de l’ONZUS, son successeur, l’ONPV, n’est pas une instance d’évaluation chargée de formuler un jugement sur la politique de la ville et des propositions en vue de son amélioration. Les rapporteurs approuvent ce constat et saluent la très grande qualité des travaux de l’ONPV, dont ils estiment que le renforcement doit en conséquence s’orienter dans les deux directions suivantes : un ciblage de quelques indicateurs représentatifs de la mixité sociale et un renforcement de ses moyens.

i.   Suivre des indicateurs représentatifs de la mixité sociale

Il est nécessaire pour le législateur d’avoir une idée claire de l’atteinte des objectifs fixés par la loi. Aussi, bien que la mixité sociale soit un concept politique et difficile à mesurer, les rapporteurs sont favorables à ce que les différentes réalités qu’elle évoque soient illustrées par un petit nombre d’indicateurs consensuels. Ils prolongent en ce sens la demande formulée par les rapporteurs du comité d’évaluation et de contrôle de 2010 de prévoir le suivi d’une batterie homogène d’indicateurs sur tout le territoire dans une optique comparative.

L’ONPV a indiqué aux rapporteurs que le suivi de tels indicateurs était envisageable en vue d’un enrichissement des indicateurs budgétaires du projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances. Les indicateurs actuels sont les suivants :

– taux de couverture des démolitions par des reconstructions (en zones de tension A et A bis) dans le cadre du PNRU ;

– taux de couverture des démolitions par des reconstructions (en zones de tension A et A bis) dans le cadre du NPNRU ;

– taux de reconstitution hors QPV des logements sociaux démolis dans le cadre du NPNRU ; taux de reconstitution, hors commune comptant plus de 50 % de logements sociaux, des logements sociaux démolis dans le cadre du NPNRU ;

– taux de reconstitution de l’offre de logement en prêt locatif aidé d’intégration (PLAI) dans le cadre du NPNRU.

Ces indicateurs pourraient être complétés par les indicateurs suivants :

– sur la mixité sociale : écart de la part des catégories socio-professionnelles supérieures (cadres) dans la population active entre les quartiers prioritaires et l’unité urbaine environnante ; écart de la part des élèves de parents de classes sociales favorisées entre les quartiers prioritaires et l’unité urbaine environnante ;

– sur la mixité fonctionnelle : ratio emplois/population en emploi (population au lieu de travail/population au lieu de résidence) ; accessibilité à pied aux commerces ; part du logement social ;

– sur l’amélioration du cadre de vie : desserte par les transports en commun : nombre d’arrêts marqués par les bus, tram, métros au sein du quartier en 24 heures ; satisfaction des habitants concernés par un PRU ; consommation énergétique des logements impactés par le projet.

Une telle démarche pourrait être approfondie en prévoyant de manière systématique, et non optionnelle, le suivi dans le cadre des conventions pluriannuelles de certains indicateurs représentatifs de la mixité sociale utilisables par l’ONPV. En effet, l’ANRU met actuellement à disposition des porteurs de projets une liste d’indicateurs (en annexe 3) qu’il leur est possible d’utiliser au regard des objectifs de leur projet. Or, l’analyse des six premières conventions signées montre que ces indicateurs sont peu ou pas retenus et que, lorsqu’ils le sont, ils font l’objet de méthodologies de mesure variables. Une amélioration des conditions de subventionnement des évaluations pourrait être utilement envisagée afin de renforcer les moyens d’évaluation à disposition des porteurs de projets dans cet objectif.

ii.   Renforcer les moyens de l’ONPV

L’ONPV, enfin, rencontre actuellement trois principales difficultés dans la production d’information :

– ses effectifs ne lui permettent pas de répondre à tous les besoins et un renforcement de ces équipes permettrait d’accroître l’information statistique sur les quartiers prioritaires et la rénovation urbaine. Il a été indiqué aux rapporteurs que trois ETP supplémentaires affectés à l’Observatoire – un ETP de statisticien, un ETP de statisticien/informaticien et un ETP d’évaluateur – permettraient de mieux rendre compte dans le rapport annuel du suivi des objectifs législatifs et qu’un à deux ETP en plus de ces derniers – de géomaticien/statisticien – permettraient de faire évoluer le site de SIG de la politique de la ville pour mieux identifier par territoire les données statistiques ;

– son statut freine actuellement la collecte des informations statistiques nécessaires à la production des indicateurs : l’ONPV ne compte pas parmi les services statistiques ministériels (SSM) prévus par l’arrêté du 8 août 2017 ([119]) et n’est donc pas placé sous le régime prévue par la loi de 1951 ([120]), ce qui l’oblige à passer des conventions avec lesdits services et limite son accès à l’information. Il apparaît en outre indispensable que l’ONPV puisse accéder au système national d’enregistrement de la demande de logement social (SNE) du ministère en charge du logement pour effectuer un suivi des relogements, et que les besoins de données statistiques identifiés par le récent rapport de Jean‑Louis Borloo soient satisfaits ;

– son budget limite le nombre d’études quantitatives et qualitatives qu’il est en capacité de financer, dont le caractère indispensable à la démarche d’évaluation de la performance a pourtant été indiqué par les rapporteurs précédemment. À cet égard, il a été indiqué aux rapporteurs d’une part qu’il pourrait être pertinent d’encourager le recours aux subventions de l’Agence pour les besoins d’évaluations commandées localement par les porteurs de projet, mais aussi d’accroître les moyens propres de l’ONPV pour approfondir son travail thématique et territorial. Il a été indiqué que la programmation de deux à trois études qualitatives par an sur la rénovation urbaine était pertinente, le coût d’une étude étant estimé entre 300 000 euros et 450 000 euros, mais pouvant dépasser un million d’euros lorsqu’il s’agit de décliner à l’échelle des quartiers prioritaires des enquêtes statistiques effectuées sur un échantillon représentatif de ménages. Les rapporteurs trouveraient pertinent que le budget dédié à ces études puisse être sanctuarisé.

b.   Un rapport pour améliorer la connaissance du suivi physique et financier

L’incomplétude, la dispersion et l’insuffisante actualisation des informations précédemment soulignées concernant le suivi annuel des principaux agrégats financiers et des réalisations sont responsables d’un insuffisant éclairage des débats parlementaires. Les rapporteurs demandent en conséquence la remise régulière d’un rapport par le Gouvernement, dont l’élaboration pourrait nécessiter un renforcement des moyens de l’ANRU et des services déconcentrés.

i.   Un rapport remis lors du « printemps de l’évaluation »

Les députés ont, a minima, besoin de disposer chaque année des informations leur permettant de juger si le niveau des AE et des CP que l’État ouvre est susceptible d’être suffisant. Cela suppose d’avoir connaissance du niveau annuel des investissements de l’ensemble des cofinanceurs dans le temps long, de leurs conditions de financement, et que ce niveau d’investissement soit mis en lien avec le niveau des objectifs et des réalisations par grands types d’opérations pour la même période.

De manière plus ambitieuse, un suivi physique et financier territorialisé et analytique permettrait de caractériser les différences de niveau d’investissement et d’avancement entre les projets et d’en expliquer les causes. De plus, dans la mesure où les opérations de la rénovation urbaine sont principalement des opérations touchant au logement, les informations relatives à la rénovation urbaine doivent être mise en lien avec les financements et réalisations relatives au logement. La situation des marchés foncier ou du logement, l’état de l’offre et de la demande des entreprises du bâtiment, l’évolution de la situation économique d’un bassin d’emploi, par exemple, sont autant de paramètres qu’il est nécessaire de prendre en considération pour comprendre les dynamiques territoriales et évaluer la réussite ou non de la politique de rénovation urbaine et le niveau des moyens qui lui ont été dédiés.

En conséquence, les rapporteurs sont favorables à l’élaboration d’un rapport annuel d’évaluation de suivi physique et financier confié au ministère chargé du logement, afin que les données de l’ANRU puissent être consolidées avec celles des autres cofinanceurs des programmes, analysées et mises en perspectives au regard des réalisations et des évolutions de la politique du logement. Ce rapport pourrait avec pertinence être remis au Parlement lors de la présentation de la loi de règlement en Conseil des ministres, afin de contribuer à la démarche d’évaluation, voulue par l’Assemblée nationale dans le cadre du « printemps de l’évaluation », lors des commissions d’évaluation des politiques publiques.

 

Guide méthodologique d’évaluation ([121])

 

La méthodologie d’évaluation adoptée par l’ONZUS et inspirée des propositions des trois inspections générales ([122]) paraît aux rapporteurs répondre aux préoccupations de tout travail d’évaluation des politiques publiques. Elle repose sur les questionnements suivants :

– Pertinence : les objectifs attribués à la politique publique permettent-ils de répondre aux besoins identifiés ? La restructuration des quartiers permet-elle d’améliorer la mixité sociale et le développement durable dans ces quartiers et, plus largement, de réduire les inégalités sociales et les écarts de développement de ces quartiers ?

– Effectivité : les actions prévues par la politique publique ont-elles eu lieu, et avec quelle ampleur ? Comment le PNRU s’est-il déployé sur le territoire national ? Quel est son niveau d’avancement ? Cela correspond-il aux actions programmées initialement ?

– Impact : parmi les effets observés des actions menées, lesquels sont directement attribuables à ces actions ? Quels sont les effets propres des interventions menées au titre du PNRU ? Trois niveaux d’observation des effets peuvent être d’ores et déjà distingués : impact sur les habitants, impact sur le cadre de vie, et impact sur le quartier au sein de son agglomération, sans oublier les interactions entre elles.

– Efficience : les ressources mises à disposition de la politique publique ont-elles été mobilisées de façon optimale au regard des résultats obtenus ? Le modèle opératoire et économique du PNRU est-il efficient ? L’effet levier attendu a-t-il été effectif ? Quelles sont les vertus et les limites du modèle de gouvernance mis en place par le PNRU ?

– Efficacité : les effets observables de la politique publique correspondent-ils aux objectifs initiaux ? Les actions mises en place au titre du PNRU ont-elles mené à une restructuration des quartiers permettant de les inscrire durablement dans une dynamique à la fois de réduction des écarts par rapport au reste des agglomérations et de plus grande mixité sociale ?

 

– Utilité : les effets observables de la politique publique correspondent-ils à une satisfaction des besoins auxquels répond cette politique ? Les actions mises en place au titre du PNRU ont-elles mené à une amélioration ressentie comme telle de la mixité sociale et du développement durable dans les quartiers concernés, voire à une réduction des inégalités sociales et des écarts de développement de ces quartiers ?

– Cohérence interne : les actions mises en œuvre sont-elles cohérentes avec les objectifs attribués à la politique publique ? Les déclinaisons locales du programme national sont-elles conformes aux objectifs nationaux ? En particulier, les spécificités locales en termes d’urbanisme, d’intégration au fonctionnement des marchés immobiliers et de différents segments du parc ont-elles été correctement prises en compte ?

– Cohérence externe : comment la politique publique évaluée est-elle articulée avec les autres politiques publiques ? Entre-t-elle en conflit, ou bien est-elle articulée efficacement ? Comment le PNRU s’articule-t-il avec les autres politiques nationales, en particulier avec la politique de la ville dans son ensemble et avec la politique du logement ?

– Durabilité : les effets observables de la politique publique sont-ils temporaires ou durables ? Les effets provoqués par les opérations de rénovation urbaine sont-ils durables à court, moyen et long terme ?

ii.   Une nécessaire amélioration du suivi physique et financier

Les lacunes actuelles de l’information disponible résultent également d’un manque de moyens des services déconcentrés et de l’ANRU pour produire l’information.

Le cadre législatif et réglementaire confie en effet au préfet, délégué territorial de l’ANRU, la mission d’effectuer un suivi physique et financier de chaque convention et de produire des évaluations ([123]). Or, comme l’a indiqué aux rapporteurs la préfète déléguée à l’égalité des chances de la Seine‑Saint‑Denis, les effectifs des services instructeurs ([124]) permettent un suivi très resserré des projets au moyen de fiches de suivi régulièrement actualisées, ainsi que durant les comités techniques et les « revues de projets ». Ils ne permettent par contre pas d’évaluer chaque convention annuellement. L’important travail de préparation et d’instruction des conventions lié à l’accélération du processus de conventionnement dans les deux prochaines années devrait aggraver la situation à effectifs constants.

Bien que le rapport d’information sur l’évaluation de l’action de l’État dans l’exercice de ses missions régaliennes en Seine-Saint-Denis ([125]) ait mis en exergue l’amplitude particulière de la pénurie d’effectifs dans ce département de manière générale, il a été fait état d’un constat identique pour les services instructeurs d’autres départements. Il a été indiqué que de nombreux services seraient soumis à une importante pression dans les prochains mois soit pour permettre une déconcentration de l’instruction des conventions de rénovation urbaine, procédure dont tous les termes ne sont pas encore arrêtés soit, conséquence de la modification de la géographie prioritaire, parce qu’ils n’avaient pas encore en charge la gestion d’opérations d’une telle nature.

Les effectifs de l’ANRU sont également mis sous forte pression du fait de la jonction entre le PNRU et le NPNRU et de la cyclicité structurelle de son activité. Une convention d’objectifs et de performances (COP) est en cours de préparation pour préciser, dans ce contexte, les moyens alloués à l’Agence. Lors de son audition le 4 juillet, le secrétaire d’État auprès du ministre de la Cohésion des territoires a indiqué qu’une réflexion était en cours pour fluidifier la gestion des effectifs de l’Agence. Il a précisé qu’une solution pourrait consister à passer l’Agence sous comptabilité privée.

Par ailleurs, l’instruction des conventions de rénovation urbaine par les services déconcentrés de l’État, en outre, est encore effectuée pour quelques mois au moyen du système d’information AGORA ([126]). Mis en place avec le PNRU pour permettre la gestion opérationnelle d’une procédure nouvelle, ce système d’information a fait l’objet d’observations de la Cour des comptes concernant trois points : une affectation des crédits mal articulée entre quartier et convention, une disjonction entre suivi financier et suivi physique et une insuffisante intégration des données administratives et comptables. Ce premier point avait déjà été mis en évidence dans le rapport de l’ONZUS de 2013 précité, qui soulignait que l’absence d’identification des crédits à l’échelle du quartier rendait difficile le suivi de leur affectation par niveau de priorité ([127]). Selon la Cour, en conséquence, la fonction « d’aide à la décision » du système AGORA devait être améliorée.

Tenant compte de ces observations, l’ANRU poursuit la refonte de son système d’information pour l’adapter aux règles financières du NPNRU. Les rapporteurs soulignent la nécessité, à ce stade, de prendre en compte non seulement les besoins opérationnels liés à la mise en œuvre des conventions, mais également ceux liés à l’évaluation et au contrôle parlementaire en prévoyant les conditions d’une communication de l’information plus complète et plus rapide à des formats exploitables. Cela s’intègrerait, de manière plus générale, dans une démarche d’open data permettant une connaissance plus complète du financement de la rénovation urbaine, en lien avec le SIG de la politique de la ville et avec le travail réalisé dans le cadre des conventions interministérielles d’objectifs visant à une identification territorialisée plus précise des crédits de droit commun.

L’ANRU s’est également engagée dans la voie de la dématérialisation de plusieurs procédures. Les rapporteurs soulignent l’intérêt d’une telle démarche pour faciliter le suivi dans le temps des indicateurs choisis par les porteurs de projet. Au regard des difficultés liées à la collecte des informations dans le cadre des enquêtes livraisons, ils soulignent également l’intérêt de la dématérialisation pour faciliter la transmission des informations et permettre un suivi plus régulier de l’avancement des projets.

B.   Affirmer le rôle de la représentation nationale

L’amélioration de l’information aux parlementaires demeurerait peu utile si le Parlement ne se dotait pas des procédures pertinentes pour l’exploiter. Les rapporteurs proposent en ce sens d’introduire des parlementaires au conseil d’administration de l’ANRU et de renforcer les dispositifs de contrôle et d’évaluation internes à l’Assemblée.

1.   Garantir la présence de parlementaires dans le conseil d’administration de l’ANRU

Le conseil d’administration de l’ANRU règle, par ses délibérations, les affaires de l’établissement ([128]). Il se réunit au moins deux fois par an. Parmi ses nombreuses compétences :

– il approuve le cadre financier des interventions de l’Agence, notamment les conventions avec l’État, la Caisse des dépôts et consignations et Action logement, et vote le budget de l’Agence ;

– il établit les règlements généraux qui définissent les modalités et les conditions d’attribution des concours financiers de l’établissement et adopte les règlements comptables et financiers ;

– il approuve les conventions pluriannuelles de rénovation urbaine et se prononce sur le volet renouvellement urbain des contrats de ville.

Il est actuellement composé de trente-six membres, pour moitié représentant les différents ministères impliqués : dix-huit représentants de l’État, quatre représentants des collectivités territoriales, huit représentants d’organismes intervenant dans la politique du logement social, cinq personnalités qualifiées en matière de politique de la ville et un représentant des organisations nationales représentatives des locataires. Les personnalités qualifiées peuvent être des parlementaires. C’est ainsi que le député François Pupponi, précédent Président de l’Agence, a été choisi parmi les membres du conseil d’administration non pas en sa qualité de député, mais en celle de personnalité qualifiée.

Dans la mesure où la rénovation urbaine, bien qu’elle ne soit pas financée à titre principal par l’État, est une politique publique dont les objectifs sont déterminés par la loi dans l’intérêt général et dont la mise en œuvre est assurée par un opérateur de l’État, il apparaît nécessaire aux rapporteurs que des parlementaires soient associés aux délibérations du conseil d’administration. Une telle prérogative leur permettrait d’être avertis des principales échéances et décisions relatives à la rénovation urbaine. Elle leur permettrait surtout de pouvoir surveiller la trajectoire financière de l’Agence et l’efficience de la dépense publique – l’engagement de l’État, minoritaire dans l’ensemble des financements, s’élève tout de même à 1 milliard d’euros – qui sont placées au cœur de l’examen de la loi de finances.

Les rapporteurs ont donc été particulièrement attentifs à l’examen de la proposition de la loi visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination qui a été déposée par le Président de l’Assemblée nationale le 30 mars dernier. Le 12 juin 2016, le Sénat a adopté en première lecture une version modifiée de cette proposition de loi et a notamment transformé l’ANRU en organisme extraparlementaire (article 40 bis) en garantissant la présence de parlementaires ès qualité dans son conseil d’administration. La commission mixte paritaire du 4 juillet a abouti à un accord et adopté l’article 40 bis dans sa rédaction issue du Sénat. Les rapporteurs sont très satisfaits de l’aboutissement de cette initiative sénatoriale qui va dans le sens de leurs conclusions.

Toutefois, lors de son audition le 4 juillet, le secrétaire d’État auprès du ministre chargé de la Cohésion des territoires a explicité sa volonté de voir la composition du conseil d’administration de l’Agence resserrée dans un souci d’efficacité. Dans cette hypothèse, les rapporteurs souhaiteraient néanmoins que la présence de parlementaires soit garantie.

2.   Renforcer les procédures de contrôle et d’évaluation à l’Assemblée

Le suivi et l’évaluation de la rénovation urbaine sont d’ores-et-déjà opérés à l’Assemblée nationale, mais dans des conditions qui paraissent aux rapporteurs encore insuffisantes du point de vue tant de leur approfondissement que de leur régularité.

a.   Un suivi insuffisant

Un suivi budgétaire est assuré chaque année dans le cadre des rapports spéciaux de la commission des finances lors de l’examen des projets de loi de finances et de loi de règlement. Toutefois, le format de ces rapports ne permet pas d’y consacrer de longs développements ni, chaque année, d’effectuer son évaluation qualitative approfondie.

Suivi et évaluation de la rénovation urbaine peuvent également faire ponctuellement l’objet d’avis budgétaires de la commission des affaires économiques, compétente au fond concernant les politiques du logement et de la ville, et de rapports d’information à l’initiative tant des commissions souhaitant approfondir un aspect de sa mise en œuvre, que de la Présidence de l’Assemblée dans le cadre d’un travail mené conjointement par plusieurs commissions ou par le comité d’évaluation et de contrôle. Ainsi, un rapport d’information d’octobre 2010 précité et le rapport de suivi qui a été établi un an après ([129]) consacrent de longs développements à la rénovation urbaine et surtout à l’évaluation de la politique de la ville, problématiques approfondies et complétées par le présent rapport. Toutefois, aucun rapport n’a depuis été dédié au sujet.

b.   Une nécessité impérieuse

Créer les conditions d’une évaluation approfondie et régulière de la rénovation urbaine semble aux rapporteurs un enjeu majeur. L’Assemblée apparaît dans cet objectif être la seule instance pertinente de synthèse des travaux des autres institutions et de la recherche en vue d’aboutir à la production d’un jugement. En effet, ainsi que précédemment indiqué, l’ONPV n’est pas une instance d’évaluation ([130]) au sens plein du terme. Le Gouvernement doit au Parlement une information complète, notamment financière, mais il ne peut être son seul évaluateur. La Cour des comptes dispose d’une compétence d’évaluation, mais son approche est avant tout financière, ce qui ne permet pas d’appréhender la politique de rénovation urbaine dans toutes ses dimensions. Les chercheurs, enfin, répondent à des questions d’ordre scientifique qui ne sont pas nécessairement celles qui préoccupent les responsables politiques et administratifs.

Dépasser la synthèse administrative par une association du monde de la recherche apparaît aux rapporteurs d’autant plus nécessaire qu’il reste à combler une « relative étanchéité entre les décideurs politiques et les acquis des recherches (Simon, 2001) », et que « tout [semble] avoir été dit sur la mixité depuis trente ans sans véritable prise sur les orientations de l’action publique (Lelévrier, 2005b). » ([131]) De plus, il convient d’éviter un écueil qualifié par les chercheurs de technocratique reposant sur l’idée « qu’il suffirait de parfaire le système d’objectifs et d’indicateurs de la LOLF pour accomplir le programme évaluatif du texte organique [qui] se heurte à des problèmes bien connus des sciences sociales. Il ne suffit pas de décliner les politiques publiques en programmes, assortis d’objectifs précis et d’indicateurs de résultats pour dépasser les blocages passés de l’évaluation. » ([132]).

c.   Un cadre à renforcer

Actuellement, le Règlement de l’Assemblée nationale ne prévoit pas d’autre structure pérenne que les commissions permanentes, la commission des affaires européennes, l’OPECST et le CEC, les missions d’information devant être nécessairement temporaires.

Le travail d’évaluation continue appelé par vos rapporteurs pourrait en conséquence trouver un aboutissement au travers d’un mécanisme permettant de prévoir dans un rapport le calendrier et les conditions de son suivi pluriannuel, mécanisme que le Règlement rend aujourd’hui possible, mais qui nécessite un portage politique volontariste.

Ce suivi devrait notamment permettre d’approfondir les thématiques dont l’investigation a révélé une importance particulière. À cet égard, vos rapporteurs souhaiteraient que la réflexion puisse être approfondie à l’occasion du suivi de leur rapport dans les trois directions suivantes :

– les enjeux de sécurité et de tranquillité des habitants ;

– les mesures que le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) prévoit concernant les copropriétés dégradées, et notamment celles prises dans le cadre de l’ordonnance prévue à l’article 60 de sa rédaction issue de la première lecture à l’Assemblée nationale ;

– la revitalisation économique des cœurs de quartier, qui sera prévue par le plan « cœur de quartier ».

 


–  1  –

 

   EXAMEN EN COMMISSION

La commission examine le rapport de la mission d’évaluation et de contrôle sur le financement et le suivi de la mise en œuvre des programmes de rénovation urbaine (Mme Nadia HAI et M. Rémi DELATTE, rapporteurs).

M. le président Éric Woerth. Nous entamons ce matin l’examen des travaux de contrôle et d’évaluation qui ont été lancés en début d’année. L’objectif est que notre commission ait pu se saisir de l’ensemble de ces rapports d’ici la fin du mois de septembre, avant le début de l’examen du projet de loi de finances pour 2019.

Il s’agit notamment des travaux de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC), qui s’est penchée cette année sur trois sujets : l’évaluation du financement public de la recherche dans les universités ; les outils publics encourageant l’investissement privé dans la transition écologique ; le financement et le suivi de la mise en œuvre des programmes de rénovation urbaine.

Pour ce troisième thème de travail, Nadia Hai est associée à un de nos collègues de la commission des affaires économiques, Rémi Delatte, auquel je souhaite la bienvenue pour cette réunion.

M. Patrick Hetzel, co-président de la mission d’évaluation et de contrôle. Je voudrais d’emblée insister sur le fait que le travail réalisé par les rapporteurs a été un travail très exhaustif pour le délai imparti. La mission d’évaluation et de contrôle (MEC) l’a approuvé à l’unanimité.

Mme Nadia Hai, rapporteure. Avec Rémi Delatte, membre de la commission des affaires économiques, nous avons mené depuis la fin du mois de février une investigation au nom de la MEC sur le suivi et l’évaluation du financement des programmes de rénovation urbaine.

Pendant ces cinq mois, nous n’avons pas cherché à dresser un bilan exhaustif de cette politique essentielle, ce qui aurait été impossible dans un temps aussi réduit, mais plutôt à déterminer la manière dont elle peut être encore améliorée.

Nous avons donc adopté une démarche résolument pragmatique et de terrain. Nous avons voulu que ce rapport soit, en quelque sorte, un carnet d’observations, enrichi des données factuelles et juridiques indispensables à un débat politique de qualité sur le sujet.

Nous espérons qu’il permettra d’ouvrir le débat largement, car notre optique a été de décloisonner le sujet au maximum sans pour autant aboutir à un rapport à tiroirs, constitué d’une succession de focus.

Nous n’avons pas limité notre enquête au suivi des crédits de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU). Nous avons choisi d’ouvrir la perspective en évaluant la performance globale de la politique de rénovation urbaine au regard de l’objectif de mixité sociale qui lui a été assigné par la loi.

La notion de mixité sociale est au cœur du débat politique, ce qui nous a paru justifier qu’on y prête une attention particulière. Mais c’est aussi une notion dont les contours sont incertains et qui, de ce fait, est aussi assez politique.

Évaluer la performance de la rénovation urbaine au regard de l’objectif de mixité est de ce fait une gageure : il est impossible de déterminer des critères objectifs, valables sur tous les territoires, pour la mesurer. Et quand bien même cela aurait été possible, les méthodes d’élaboration des statistiques comportent elles-mêmes des limites difficilement dépassables.

Mais ce n’est pas une mission impossible. L’Observatoire national de la politique de la ville (ONPV) nous a ainsi fait des propositions pour alimenter les travaux d’évaluation par des indicateurs statistiques.

À ce stade de la discussion, je voudrais, en mon nom et en celui de Rémi Delatte – mais je pense que tous les membres de nos commissions ici présents voudront bien s’y associer –, saluer la qualité remarquable des productions de l’ONPV, constitué d’une toute petite équipe.

Les productions de cet observatoire sont une excellente base de travail pour l’évaluation de l’atteinte par la rénovation urbaine de l’objectif de mixité sociale. En augmentant ses moyens et en valorisant mieux ses productions sur le site du système d’information géographique de la politique de la ville, il serait possible d’aller plus loin et d’améliorer considérablement encore l’information de la représentation nationale, mais aussi des élus locaux et des citoyens de manière plus générale.

L’information pourrait et devrait aussi être améliorée concernant les données financières. C’est là le second volet indispensable de la mesure de la performance de la politique de rénovation urbaine.

Aujourd’hui, et nos observations rejoignent celles de la Cour des comptes sur ce point, l’information est éparse et incomplète. Si l’on considère que les deux dernières grandes synthèses sur le sujet datent de 2013 et 2014, c’est-à-dire avant la fin du programme national de rénovation urbaine (PNRU) et le début du nouveau programme national de rénovation urbaine (NPNRU), on peut même ajouter que ces informations sont désormais datées.

Nous portons donc la demande d’un rapport de suivi du financement et des réalisations de la rénovation urbaine. Nous considérons que ce rapport serait d’autant plus riche qu’il révèlerait l’articulation entre les politiques de rénovation urbaine et du logement. Il pourrait donc être utilement remis par le ministre en charge du logement lors du printemps de l’évaluation. Cette proposition a d’ailleurs été favorablement accueillie par le secrétaire d’État Julien Denormandie.

L’analyse des données communiquées par l’ANRU a permis de mettre en évidence quelques constats et de soulever un point de vigilance.

Premier constat : l’ANRU a consommé la plupart des crédits qui lui ont été alloués. La dépense des crédits a été très efficace.

L’enveloppe du PNRU est passée de 2,5 milliards d’euros en 2003 à 12 milliards d’euros en 2009, complétés par 350 millions d’euros dans le cadre du plan de relance. Au total, 11,7 milliards d’euros ont été engagés. Des crédits de paiement d’un montant de près de 2 milliards d’euros resteront ouverts jusqu’en 2021 pour achever les travaux engagés tardivement.

 

Ces chiffres font apparaître l’existence d’un reliquat de 600 millions d’euros de crédits non engagés. Ce montant est à la fois important et faible. Important car il est incompréhensible, au regard des enjeux qui ont justifié la mise en place du NPNRU, que toute l’enveloppe n’ait pas été consommée. Et dans le même temps, assez faible si l’on considère que l’on parle ici d’un investissement total de 47 milliards d’euros, tous financeurs confondus, et que la programmation s’est inscrite sur plus de dix ans.

Le NPNRU semble tirer les conséquences des facteurs à l’origine de ce reliquat, notamment par la mise en place de protocoles de préfiguration, qui sont des temps d’étude et de concertation. Rémi Delatte évoquera plus longuement la réforme des procédures, qui va dans le sens d’une accélération des démarches et d’une souplesse accrue pour les élus, maintenant que cette phase d’études est bien lancée et que le financement des programmes est consolidé.

Car le deuxième constat, c’est en effet que la jonction financière et administrative entre le PNRU et le NPNRU n’a pas été simple. On a demandé aux mêmes équipes et aux mêmes financeurs de gérer à la fois la fin du PNRU et le démarrage du NPNRU.

Le résultat a été un retard dans la mise en œuvre opérationnelle du NPNRU. Jean‑Louis Borloo le soulignait dans son rapport : il n’y a pas encore de grues dans les quartiers NPNRU, alors que l’urgence sociale est là.

Rappelons en effet l’historique du rôle de l’État dans le processus de rénovation urbaine. Dans le cadre du financement partenarial prévu en 2003, il était prévu une contribution de l’État. En 2009, ce dernier y a mis fin sous forme de crédits budgétaires, mais l’a poursuivie en 2009 et 2010 dans le cadre du plan de relance et, entre 2011 et 2013, dans le cadre du Grand Paris.

Cette modification a nécessité une réévaluation des contributions des autres financeurs et notamment de l’Union d’économie sociale pour le logement (UESL) qui a contribué au financement de l’Agence à un taux qui a atteint 80 % et même, après 2014, a dépassé 95 %.

Lors de la mise en place du NPNRU, à l’inverse de 2003, aucune contribution de l’État n’était prévue.

L’enveloppe initiale du NPNRU, de 5 milliards d’euros, rendait difficile la construction de projets d’ampleur suffisante. L’État a abondé cette enveloppe de 1 milliard d’euros en loi de finances pour 2017 pour faciliter, notamment, la mise en place de projets globaux, intégrant aménagement des espaces et équipements.

Puis l’enveloppe a été doublée en loi de finances pour 2018, passant ainsi de 5 à 10 milliards d’euros. Notre assemblée l’a d’ailleurs voté. C’est un acte politique fort en faveur de la rénovation urbaine.

Dans ce contexte, vos rapporteurs ont également souhaité clarifier l’impact des réformes en cours susceptibles d’affecter les ressources des acteurs du logement, notamment le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) et le projet de loi pour un plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), et ont pu constater, au vu des accords trouvés, que le NPNRU pourra être lancé sans difficulté, tout en exhortant à rester vigilant quant à la cohérence des textes les uns avec les autres, afin d’éviter les injonctions contradictoires.

Débuter les travaux au plus vite est une priorité absolue. Toutefois, il sera nécessaire de s’assurer que les crédits dont l’ANRU aura besoin chaque année pour financer les projets pourront être débloqués pour ne pas les ralentir.

Cela m’amène au point de vigilance que je mentionnais et qui porte sur la trésorerie de l’ANRU.

En l’état actuel des projections financières, en effet, les chiffres communiqués à vos rapporteurs font apparaître une possible impasse de trésorerie cumulée de 1,5 milliard d’euros. La trésorerie sera négative toutes les années où le besoin de financement sera le plus élevé.

Cela pose bien sûr la question de la chronique des paiements de l’État. Cela pose aussi la question du cofinancement du programme à moyen terme. Sur ces deux points, le secrétaire d’État Julien Denormandie, ainsi que l’ANRU et le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), ont confirmé que la situation était maîtrisée.

Les besoins financiers seront réévalués avec les partenaires de l’ANRU au fur et à mesure de la mise en œuvre du NPNRU.

Ce point de vigilance montre à quel point il est nécessaire que le Parlement suive avec précision la trajectoire financière de l’ANRU.

Nous saluons en conséquence l’initiative de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative aux organismes extraparlementaires, qui prévoit l’entrée de deux parlementaires au conseil d’administration de l’ANRU.

Toujours dans le sens d’un renforcement du contrôle parlementaire, nous souhaitons, en interne à l’Assemblée nationale, la mise en place d’un mécanisme de suivi des rapports d’évaluation pour en actualiser les conclusions et approfondir les thématiques qui n’auraient pas pu l’être précédemment.

La satisfaction des habitants résultant de l’amélioration du cadre de vie permis par la rénovation urbaine est clairement ressortie des déplacements et des auditions.

Nous avons néanmoins souhaité relayer la préoccupation des habitants relative à la hausse des loyers, souvent imputée lors de l’intégration des logements rénovés sans qu’ils soient préalablement avertis ; nous avons formulé une proposition quant à la prise en compte de cet aspect dans le calcul d’endettement du financement par prêt bancaire, afin de prévenir la dégradation des copropriétés.

La rénovation urbaine a d’ores et déjà permis de transformer de manière substantielle des quartiers entiers. Porter une attention particulière à la programmation financière est indispensable, mais cela doit toujours se faire avec une boussole : celle des aspirations des habitants qui y résident. C’est tout le cœur de la démarche de notre rapport.

M. Rémi Delatte, rapporteur. Après l’aspect financier présenté par ma collègue Nadia Hai, notre rapport aborde les observations et propositions concernant la mixité sociale et la mise en œuvre d’une rénovation urbaine plus durable – tout simplement parce que c’est la condition de son efficacité.

Nous ne pouvons imaginer devoir engager des programmes d’interventions massifs tous les dix ans ; notre objectif doit être l’entrée des quartiers prioritaires dans le droit commun, et il s’appréciera au regard de la mixité sociale.

Nadia Hai l’a dit, la mixité sociale est une notion difficile à saisir, qui se comprend avant tout à l’échelle locale, dans chaque quartier. Nous avons donc visité des quartiers de profils différents, afin d’observer les convergences et les divergences des dynamiques territoriales.

Développer la mixité sociale ne peut se limiter à son aspect résidentiel. À travers l’action de l’ANRU, mais aussi au-delà, il nous faut une véritable action sur le bâti, grâce à plusieurs outils.

Le premier est celui de la répartition des logements sociaux sur le territoire de l’agglomération, favorisée par l’esprit de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) et par des objectifs de reconstitutions et de relogements hors des quartiers prioritaires lors des opérations de rénovation urbaine.

L’attribution des logements sociaux a été favorisée à l’échelle intercommunale et des règles sont venues l’encadrer pour développer la mixité sociale dans les quartiers. À ce titre, la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté impose aux bailleurs de réserver 25 % des attributions de logements sociaux en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) aux 25 % des demandeurs les plus pauvres et à des ménages relogés dans le cadre des opérations de renouvellement urbain. Elle impose également que 50 % des attributions de logements sociaux dans les QPV soient au bénéfice des ménages les moins défavorisés.

Le deuxième axe est celui de la diversification de l’habitat pour favoriser l’accès à la propriété des ménages modestes dans les quartiers prioritaires.

Plusieurs dispositifs ont été prévus, tels que la TVA à 5,5 %, des quotas de logements destinés à l’accession sociale ou des contreparties foncières cédées à l’association Foncière Logement. La diversification du logement social dans les quartiers en rénovation urbaine a aussi été utilisée pour accroitre la diversité de la composition sociale des ménages.

Malgré tout ce qui a été entrepris pour développer la mixité, notre constat est fortement nuancé. En effet, les reconstitutions et relogements des ménages concernés ont été effectuées majoritairement sur site ou dans d’autres quartiers prioritaires de la commune.

Plusieurs explications peuvent être avancées : une mise en œuvre des projets à l’échelle de la commune, des réserves foncières réduites, ou l’impossibilité, pour certains profils de locataires, à se loger dans une offre de logements certes neuve, mais plus chère.

C’est pourquoi nous encourageons le Gouvernement à poursuivre son action de mise en œuvre de mesures permettant la minoration des hausses de loyers et nous aimerions qu’un suivi plus fin de ces évolutions de loyers soit mis en place. Rennes, par exemple, expérimente un loyer unique sur tout le parc social ; nous souhaitons une évaluation rapide du dispositif pour envisager sa généralisation.

De plus, malgré des résultats significatifs, la diversification vers le logement privé est restée en deçà des objectifs fixés, essentiellement parce que l’image de ces quartiers tarde à changer. Les études menées ont donc logiquement montré un impact limité des opérations de mixité sociale sur la composition de la population des quartiers en rénovation urbaine.

Bien entendu, ces limites au développement de la mixité ne peuvent être comprises que si l’on sort des crédits de l’ANRU et du prisme de la politique de l’habitat, des constructions et démolitions, pour élargir le champ de vision. Le projet de rénovation urbaine doit s’inscrire dans son environnement et faire partie d’une action globale de la politique de la ville. Le NPNRU, par les protocoles de préfiguration et par son pilotage à l’échelle intercommunale, va dans le bon sens. Ce sont en effet toutes les politiques publiques qui doivent être mobilisées pour relever ces quartiers prioritaires, et faire en sorte qu’ils n’aient plus à l’être.

Le financement d’équipements publics de qualité est primordial et contribue à renforcer la mixité sociale. De même, le projet de renouvellement urbain doit être complémentaire d’une action volontaire sur le développement de l’activité économique dans les quartiers prioritaires, qui passe par des dispositifs incitatifs adaptés. On sait, en effet, que l’accès à l’emploi est la condition première de l’amélioration de la situation des habitants des quartiers prioritaires.

Nous proposons à cet effet un dispositif fiscal incitatif et adapté qui permettrait, en complément de mesures dérogatoires au droit commun pour les collectivités – je pense par exemple au droit de l’urbanisme –, une plus forte attractivité des quartiers en matière économique.

Enfin, il nous paraît indispensable de porter une attention particulière aux enjeux de la mixité scolaire, de la mobilité et de la sécurité dans la mise en œuvre des opérations de renouvellement urbain.

Penser une rénovation urbaine durable, c’est aussi éviter une dégradation plus rapide du bâti issu de ces opérations. Cela implique de lutter contre les incivilités du quotidien dans le cadre de la gestion urbaine de proximité. Cela peut passer – et nous avons été convaincus de cela lors de notre déplacement à Boulogne-sur-Mer – par la généralisation de la présence de gardiens dans le parc social, et par une extension de leur capacité à facturer directement sur les loyers les dégradations causées. Cela passe, également, par la mise en œuvre d’un droit d’alerte du maire, auprès du préfet qui dispose le cas échéant d’un pouvoir de sanction en cas de carence d’entretien de la part d’un bailleur.

Cela implique aussi de prévenir la dégradation des copropriétés privées. Les opérations de requalification des copropriétés dégradées d’intérêt national (ORCOD-IN) sont un outil très puissant en la matière. Le projet de loi ELAN prévoit un renforcement du dispositif comme d’ailleurs de la lutte contre les marchands de sommeil. L’ANRU elle-même va améliorer son financement pour faciliter le recyclage des ilots dégradés.

Mais basculer dans le surendettement peut aussi être très rapide. Aussi, nous proposons à titre préventif que le montant des charges locatives associées à un bien immobilier soit intégré au calcul du taux d’endettement bancaire rendant possible son acquisition.

Que l’on aborde la question des copropriétés dégradées ou de la sécurité et de la revitalisation économique, sur laquelle des annonces sont attendues prochainement, il apparaît clairement que le rapport mérite des approfondissements.

Ma collègue Nadia Hai évoquait à l’instant la possibilité de faire un suivi des rapports d’évaluation. L’étude des thèmes que j’ai abordés, à savoir la sécurité, l’emploi ou la lutte contre les copropriétés dégradées, trouverait toute sa place dans un suivi de notre rapport, mais il pourrait tout autant être envisagé de les traiter dans le cadre de missions d’informations ou de travaux futurs de la MEC.

Dernier point sur lequel nous voulions insister : une meilleure prise en compte des aspirations des habitants. Le sujet est revenu fréquemment lors de nos déplacements : il est aujourd’hui indispensable de mieux prendre en compte les attentes des habitants des quartiers prioritaires. Nous avons été frappés de la faible place prise par les espaces verts et de jeux pour enfants dans les projets que nous avons vus : cela peut sembler anecdotique, mais c’est pour nous symptomatique d’une insuffisante participation des habitants. Car ils sont de toute évidence les mieux placés pour connaître les besoins de leur quartier.

Dans ce sens, nous souhaitons un renforcement des conseils citoyens mis en place en 2014, ce qui passe notamment par un meilleur accompagnement des habitants qui y participent et une meilleure prise en compte de leurs interventions.

Mais prendre en compte les aspirations des habitants, c’est aussi, et peut-être même surtout, reprendre rapidement les opérations de rénovation urbaine. Nadia Hai indiquait que, désormais, les incertitudes financières sont levées et que le NPNRU peut repartir.

L’ANRU a décidé de simplifier les procédures et de redonner de la place aux élus. C’est là où ces derniers sont impliqués qu’on observe les meilleurs résultats. Il sera désormais possible de lancer les actions des projets qui seront les plus avancées, même si la totalité de la programmation n’est pas ficelée. L’instruction des dossiers de financement d’un plus grand nombre de projets régionaux sera déconcentrée. Un certain nombre de réunions surabondantes seront supprimées. Tout le processus retrouvera ainsi la souplesse attendue des élus locaux.

Nous ne pouvons que saluer ces démarches, qui permettront de remettre des grues dans les quartiers où l’urgence sociale le rend nécessaire pour améliorer le cadre de vie de leurs habitants.

Je conclurai volontiers dans les mêmes termes que ma collègue, en insistant sur le fait que la rénovation urbaine doit avant tout être placée au service des habitants des quartiers prioritaires.

L’efficacité de la dépense publique, comme de la politique publique de rénovation urbaine et des sujets qu’elle couvre, ne saurait se limiter à l’épaisseur d’un rapport, à un catalogue de bonnes intentions ou à des budgets énormes – oserais-je dire au pognon « de dingue » qu’on y met. Le curseur doit rejoindre celui de l’humain. C’est ce que j’appelle une « impérieuse ingérence du cœur ».

M. le président Éric Woerth. Je vous remercie pour cette double présentation à la fois exhaustive et synthétique.

Mme Amélie de Montchalin, co-présidente de la mission d’évaluation et de contrôle. Je voulais féliciter nos deux rapporteurs pour leur travail sur la rénovation urbaine qui montre bien qu’à partir d’une question budgétaire, on peut tirer le fil de bien d’autres sujets : aménagement, vie collective, éducation, emploi, développement économique... Pour fonctionner, un territoire a non seulement besoin de logements, mais aussi de nombreuses autres infrastructures, afin d’atteindre la mixité sociale que nous souhaitons tous.

J’ai été très intéressée par la partie de votre rapport qui concerne l’investissement durable et tous les outils nouveaux à renforcer pour que la rénovation ne soit pas la rénovation d’un jour, mais bien la capacité à offrir une qualité de vie et d’habitat qui reste à un bon niveau sur le temps long. Ainsi votre travail sur les copropriétés dégradées, sur les alertes et l’inclusion des charges d’entretien dans les frais financiers me semble extrêmement important pour que la dépense publique soit aussi efficace dans le temps que lorsque les nouveaux immeubles fleurissent et sortent de terre.

À Massy, où je suis élue, les nouveaux immeubles poussent comme des champignons au milieu des plus anciens. À l’intérieur de ces derniers, le bâtiment est souvent assez bien entretenu ; mais la maintenance extérieure laisse à désirer, car il n’existe pas de budget correspondant. Pourriez-vous nous apporter des précisions sur ces besoins de maintenance et de rénovation au long cours ?

M. Patrick Hetzel, co-président de la mission d’évaluation et de contrôle. Je salue le travail considérable qui a été présenté. Il apporte une contribution à un double niveau : d’abord sur le sujet de fond de la rénovation urbaine, ensuite sur le renforcement du rôle du Parlement en matière de suivi : parmi les quinze propositions formulées par les deux rapporteurs, cinq catégories d’actions sont préconisées, dont un renforcement de l’évaluation de la rénovation urbaine et un renforcement du rôle du Parlement dans le suivi et l’évaluation de la rénovation urbaine. Je lis ainsi dans ce rapport, en creux, un plaidoyer en faveur de la mission d’évaluation et de contrôle du Parlement. Cela mérite d’être souligné. Nous passons beaucoup de temps à être législateurs, mais nous avons aussi intérêt à nous saisir de ces problématiques d’évaluation et de contrôle, qui nous offrent une capacité d’action importante, si nous savons poser un regard suffisamment critique et distancié.

Cela va dans le sens du « printemps de l’évaluation » que vous avez voulu organiser, monsieur le président. Ce rapport montre que nous ne pouvons nous contenter d’examiner à un instant « t » la question de la rénovation urbaine, mais que nous devons au contraire les mettre en perspective et en assurer le suivi. C’est à cette condition que nous mettrons, comme parlementaires, l’exécutif sous tension permanente.

M. Christophe Jerettie. Je vous poserai cinq questions.

Premièrement, du fait de l’amortissement des travaux effectués, des hausses de loyer ont lieu. Est-ce que les financements spécifiques, tels que les prêts locatifs aidés d’intégration (PLAI) ou les prêts locatifs à usage social (PLUS) sont, à cet égard, bien coordonnés aux travaux ou doivent-ils être encore améliorés ?

Deuxièmement, étant urbaniste de formation, je me demande s’il ne serait pas opportun de financer les projets urbains dont vous parlez, c’est-à-dire l’urbanisation au-delà du seul logement, grâce à un outil spécifique, comme la Caisse des dépôts et consignations le fait pour les logements.

Troisièmement, la facturation des dégradations constitue en effet une difficulté. La refacturation est un moyen complexe pour recouvrer la dette éventuelle ; les sommes engagées sont parfois élevées. D’autres voies seraient-elles envisageables ?

Quatrièmement, il faut élargir les quartiers, notamment dans le domaine de l’éducation. J’ai rencontré un professeur d’université qui sortait des quartiers difficiles. L’objectif était pour lui, non pas de faire revenir l’école dans le quartier, mais de sortir l’école du quartier et retourner y travailler ensuite. Je pense qu’un outil sur le sujet pourrait être envisagé.

Cinquièmement, pourriez-vous nous donner plus d’éléments sur le dispositif fiscal incitatif non pérenne que vous évoquez ?

M. le président Éric Woerth. Vous n’avez pu en effet lire le rapport avant la réunion. La question s’est déjà posée ce matin à la réunion de la MEC, comme la semaine dernière à propos d’un rapport « 58 2 » de la Cour des comptes. Nous réaborderons la question au sein du bureau de la commission. Certes, il serait bon que tout le monde ait pu lire un rapport que nous examinons. Mais il serait mauvais, d’un autre côté, qu’un rapport soit publié avant d’avoir été autorisé, même si les cas de refus de publication sont très rares.

Mme Christine Pires Beaune. Je serais favorable à ce que nous changions notre façon de faire sur ce point.

Vous avez parlé d’une impasse de trésorerie de 1,5 milliard d’euros pour l’ANRU. Je la mets en parallèle avec les annulations de crédits de juillet 2017, tant en crédits de paiement (CP) qu’en autorisations d’engagement (AE). Quand nous avions examiné le projet de loi de finances en commission élargie, le Gouvernement s’était engagé à apporter 1 milliard d’euros supplémentaires à l’ANRU. Pouvez-vous nous donner des assurances pour les années qui viennent ? Car les chiffres annoncés à l’époque par le rapporteur étaient bien insuffisants pour respecter l’engagement présidentiel et des coupes budgétaires sont encore annoncées pour 2019.

Sur le terrain, avez-vous mis un coup de projecteur sur la situation outre-mer ? J’imagine que les problèmes s’y posent de manière peut-être plus cruciale encore.

M. Jean-Paul Dufrègne. Comment la politique d’aide au logement peut-elle impacter la mixité sociale ? Après un premier coup de rabot sur ce programme, l’été dernier, il se murmure que le second coup de lame est en préparation.

Les programmes ANRU entraînent souvent des hausses de loyer, pour équilibrer les opérations. Si les aides personnalisées au logement (APL) n’atténuent pas ces augmentations, n’y a-t-il pas un risque de voir les familles quitter les quartiers en rénovation, en totale contradiction avec les objectifs mêmes de mixité sociale ?

Mme Véronique Louwagie. Au travers des quinze propositions formulées, nous nous rendons compte que, pour rétablir de la proximité, il faut rétablir une communication transversale entre tous les acteurs.

La politique du logement a connu au moins un échec, comme vous le relevez : « l’offre de logement pour les populations les plus défavorisées se situe dans les bâtiments non rénovés des quartiers prioritaires ». Cela constitue un souci pour nous. Une politique adéquate doit corriger cela. Les politiques de rénovation aboutissent en effet ainsi à des situations qui ne favorisent pas du tout la mixité sociale.

Dans votre douzième proposition, vous préconisez de systématiser la présence de gardiens d’immeubles dans le parc social, en particulier pour répondre aux dégradations. Mais avez-vous évoqué le problème des nuisances de voisinage qui polluent la vie de quartier ? Quelquefois, une seule famille peut polluer l’ambiance d’un immeuble, notamment par des tapages nocturnes, ce qui pousse certaines familles à quitter l’immeuble. Comme maire, j’ai fait l’expérience qu’on ne dispose que de peu de moyens pour répondre à ces comportements. Avez-vous pris en considération cet aspect ?

M. Saïd Ahamada. Tout le monde s’accorde sur le fait que concentrer tous les logements sociaux en un même endroit conduit à une non-mixité sociale. Malgré les objectifs ambitieux du PNRU, la dose de logements privés prévue dans les différentes opérations ne suffit pas à renverser la tendance.

Ne faudrait-il pas se demander comment supprimer les ghettos et les cités présents sur nos territoires ? La qualité de logement social ne devrait pas être décelable pour un passant anonyme. Une des clefs de la réussite des prochains programmes sera de ne plus être capable de faire la différence entre ce qui est un logement social et ce qui ne l’est pas.

Au-delà de la mixité sociale, il faut d’ailleurs plutôt mettre l’accent sur la mixité d’activité et la mixité de publics. Prenons l’exemple de l’îlot Allard à Marseille, qui mêle logements sociaux, logements privés, administrations, entreprises. Ainsi se crée un cercle vertueux, qui fait que tous les publics se rencontrent. L’absence de mixité sociale se trouve ainsi résolue.

C’est pourquoi l’intitulé de « rénovation urbaine » ne me semble pas refléter ce qu’il faudrait faire. Je préférerais qu’on parle d’inclusion urbaine. La rénovation urbaine invite en effet à imaginer une reconstruction à l’identique, même si ce n’est pas le cas finalement. Or, l’objectif assigné aujourd’hui ne doit pas être celui-là.

M. Jean-Louis Bourlanges. Très intéressant et très documenté, ce rapport fait aussi preuve d’une grande honnêteté intellectuelle, car vous ne cachez pas votre perplexité devant un certain nombre de problèmes conceptuels que vous avez raison de souligner. Mais, si vous ne vous sentez pas en mesure d’offrir une interprétation des priorités, fût-elle provisoire et partielle, comment apprécier la nature des politiques menées ?

Votre rapport est d’abord une évaluation des évaluations. Vous montrez ce faisant combien il est utile d’arriver à une vision claire des choses, tant en matière de moyens que de concepts. Nous restons cependant sur notre faim, tant vos propositions sont raisonnables. Il leur manque, à mon sens, d’être rattachées à un socle. Je voudrais par exemple mieux comprendre l’articulation entre rénovation urbaine et mixité sociale, l’une et l’autre ne poursuivant pas forcément les mêmes objectifs.

De manière générale, j’apprécie qu’on hiérarchise objectifs et moyens. Faut-il d’abord mettre en avant les problèmes de mixité au sens strict du terme ? Ou des problèmes de présence des services sociaux ou de sécurité de l’environnement ? L’efficacité ne peut s’apprécier qu’à ce prix.

Il en va de même des moyens. Quelle est la part de la contrainte législative et de l’incitation financière ? Je comprends que vous ne vous substituiez pas au législateur. Mais faute d’avoir défini dès le départ une politique donnée, avec ses objectifs, on peine à apprécier le résultat. Je crois que la rénovation urbaine devrait être davantage goal-minded, ou ciblée. Il serait alors possible d’évaluer l’adéquation des objectifs poursuivis et des moyens mis en œuvre.

Mais votre honnêteté – votre prudence – nous laisse un peu sur notre faim.

M. Éric Alauzet. La question essentielle est bien celle des hommes et des femmes qui habitent ces banlieues. Cela dit, si l’on parle souvent des attentes et des besoins des habitants, il faut aussi se demander comment ceux-ci pourraient s’impliquer davantage dans la transformation et l’entretien de leurs quartiers, pour en devenir de véritables acteurs plutôt que de rester dans un rôle passif de consommateurs – ce qui, au-delà du bâtimentaire, nous conduit à faire le lien avec d’autres enjeux tels que le parcours éducatif, de formation et d’emploi, mais aussi le vivre ensemble et la citoyenneté dans la République. À mon sens, le fait que les habitants ne participent pas suffisamment à la vie de leurs quartiers – quand ils le font, il est rare qu’ils persévèrent – n’est que le reflet du manque d’implication des citoyens dans la vie démocratique.

M. Éric Coquerel. Nous sommes favorables à la construction de logements sociaux dits « diffus », c’est-à-dire que nous souhaitons que tout nouveau programme de construction comprenne des logements sociaux. Le logement social n’est pas synonyme de ghetto, même si cette idée est dans l’air du temps, et nous devons éviter un tel raccourci pouvant conduire à pénaliser les villes qui feraient « trop » de logements sociaux, car ce type d’habitat permet la mixité, notamment entre les différentes formes qu’il peut prendre.

Pour ce qui est de l’efficacité de la dépense publique, je remarque qu’il s’agit là d’un nouveau terme, fréquemment utilisé pour justifier une diminution de celle-ci. L’image d’un puits sans fond, souvent utilisée pour décrire la politique de la ville, ne doit pas nous faire oublier qu’elle n’est mise en œuvre que pour réparer les inégalités dont souffrent certains territoires – sur ce point, je vous renvoie à l’excellent rapport d’information de notre collègue François Cornut-Gentille sur l’évaluation de l’action de l’État dans l’exercice de ses missions régaliennes en Seine-Saint-Denis.

J’estime important que les citoyens puissent s’exprimer mais, au-delà des conseils de citoyens, il faudrait également privilégier la piste de l’amicale de locataires : il serait bon que chaque immeuble comprenne un espace permettant aux locataires de se réunir et de s’organiser – dans le cadre d’une amicale ne dépendant pas forcément de la municipalité, afin que cette organisation puisse constituer un contre-pouvoir utile.

Si les bâtiments font souvent l’objet de dégradations de la part des habitants, il ne faut pas perdre de vue que le mauvais état des immeubles est également dû en grande partie à l’utilisation de matériaux de basse qualité pour leur construction ; de ce point de vue, je ne pense pas que la politique de compensation des APL par les bailleurs sociaux, qui fait peser une nouvelle charge sur eux, soit de nature à améliorer les choses.

Enfin, j’appelle votre attention sur le fait que l’amiante est encore très présent dans les immeubles construits dans les quartiers populaires au cours des années 1960, 1970 et 1980. Aujourd’hui, des travaux sont effectués dans les appartements sans même que les locataires soient prévenus de leur dangerosité, et sans que soient prises les précautions mises en œuvre lors de grands chantiers – je pense notamment à celui du campus de Jussieu. Le désamiantage coûte cher lorsqu’il est effectué dans les règles, mais je pense que nous devrions nous saisir de ce problème sans tarder car, à défaut, nous risquons de devoir faire face dans les années à venir à un nouveau scandale sanitaire dont les habitants des grands ensembles feront les frais.

M. Jean-René Cazeneuve. Je suis un peu étonné par la proposition 15 ayant pour objet de définir des objectifs de créations d’entreprises. Si nous reconnaissons tous l’importance de l’activité économique et de l’emploi pour décloisonner les quartiers, il ne faut pas perdre de vue qu’une fois définis, les objectifs doivent être portés. Or, le rapport ne dit rien à ce sujet : s’agit-il d’une réserve foncière, ou la réalisation de ces objectifs sera-t-elle confiée à une personne en particulier ?

Mme Sarah El Haïry. Un schéma directeur d’accompagnement de la mixité sociale, qui rendrait cet objectif lisible, se fait toujours attendre, et je trouve cela dommage. Je voulais saluer la qualité de la définition de la mixité sociale.

Plusieurs propositions visent à replacer l’humain au centre des préoccupations, ce qui me paraît essentiel : il s’agit notamment de redonner aux élus locaux une vraie capacité d’action, mais aussi de renforcer la présence des gardiens d’immeubles, une mesure qui n’est pas gage de mixité, mais de lien social – le rôle du gardien d’immeuble est bien plus important qu’on ne l’imagine dans l’équilibre du territoire et de ces quartiers en particulier. Enfin, le droit d’alerte des élus me semble particulièrement intéressant, car les rénovations urbaines sont d’autant plus pertinentes qu’elles s’accompagnent d’un renforcement des moyens d’action des élus.

M. Julien Aubert. L’un des défauts de ce rapport est qu’il évoque la mixité sociale sans que cette notion soit définie, alors que la signification de ce terme fourre-tout, couramment utilisé en politique, n’est pas très claire. Cela me conduit à me demander si nous ne devrions pas nous fixer un autre objectif.

Notre collègue Éric Coquerel nous a expliqué qu’il fallait accorder des moyens importants à la rénovation urbaine, mais lorsque je lis, à la page 32 du rapport, que le montant cumulé de l’investissement au titre des deux programmes atteint 87 milliards d’euros, je me dis qu’il est urgent de s’interroger sur l’objectif que l’on poursuit et sur l’efficacité des moyens mis en œuvre. Même si le rapport concerne essentiellement la rénovation urbaine, nous savons que le logement social existe également en milieu rural, et il serait intéressant de voir comment les offices d’HLM peuvent, dans les conditions actuelles, maintenir une politique de lien social et d’aménagement du territoire dans des territoires un peu éloignés des centres-villes – je m’intéresse particulièrement à cette situation, qui constitue l’un des angles morts de nos politiques, parce qu’elle se rencontre dans mon département.

Certaines des propositions du rapport sont frappées au coin du bon sens, en particulier celle relative au renforcement de la présence des gardiens d’immeubles. Une telle mesure n’est pas basée sur une approche quantitative, mais plutôt sur la dimension humaine au sein des quartiers, et doit permettre que la politique de rénovation soit accompagnée d’un véritable réinvestissement par les habitants et d’un rétablissement du lien au sein des grands ensembles. Les acteurs concernés attendent des mesures de cette nature, du type de celles déjà prévues dans le cadre de la loi ELAN, consistant par exemple à favoriser la mixité sociale en permettant à des policiers d’avoir accès au logement social.

Mme Bénédicte Peyrol. Je salue la vision globale du rapport sur le sujet complexe de la rénovation urbaine, et j’en profite pour évoquer la question de l’emploi dans les QPV, plus particulièrement celle de l’articulation des moyens dédiés à cette problématique. Ainsi, j’aimerais savoir, d’une part, comment l’intervention de l’Agence France Entrepreneur (AFE) se combine avec celle de Pôle emploi, et s’il n’y a pas parfois des redondances auxquelles il conviendrait de mettre fin ; d’autre part, comment s’articulent l’action du public et celle du privé – je pense aux nombreuses associations et fondations qui soutiennent l’entreprenariat dans les QPV.

Enfin, pour ce qui est de l’intervention de l’État, je sais qu’il existe dans l’Allier une déléguée chargée de la politique de la ville : pouvez-vous nous préciser quelle est, selon vous, l’efficacité de l’intervention de l’État par ce moyen ?

Mme la rapporteure. Au sujet de l’impasse de trésorerie évoquée par Mme Pires Beaune, je vais faire un rappel portant sur les annulations effectuées. Celles-ci, qui ne résultent pas de la volonté de diminuer un budget, mais du fait qu’il n’y avait pas eu de dépenses en 2017, étaient de 15 millions d’euros en CP et de 100 millions d’euros en AE. Les paiements effectués par l’État s’élèveront à 15 millions d’euros en 2018, à 25 millions en 2019, à 35 millions en 2020, à 50 millions en 2021, à 75 millions en 2022 et à 130 millions en 2023 : il est impossible de déterminer ce qui se passera au cours des années suivantes, ce qui explique l’impasse de trésorerie. Toutefois, nous avons eu à ce sujet plusieurs échanges, notamment avec l’ANRU, le CGET et le secrétaire d’État à la cohésion des territoires, d’où il ressort que des accords ont été trouvés afin de maîtriser cette impasse de trésorerie. L’Agence a déjà eu à régler une impasse de trésorerie dans le cadre du PNRU, et est assez confiante sur ce qui va se passer à partir de 2023. Nous avons été confortés dans l’explication qui nous a été donnée par la signature intervenue entre l’Union sociale pour l’habitat (USH) et l’État, mais cette question mérite d’être suivie et pourrait faire l’objet du suivi du rapport.

M. Hetzel a évoqué la pertinence de la mission d’évaluation et de contrôle. La mise en perspective du contrôle et de l’évaluation est au cœur de nos recommandations, c’est pourquoi nous demandons que le Gouvernement produise un rapport dans le cadre de chaque « printemps de l’évaluation ». Par ailleurs, une mission d’information pourrait approfondir toutes les thématiques qui n’ont pas pu l’être faute de temps, et le suivi du contrôle budgétaire pourrait être effectué grâce à l’entrée de deux parlementaires au conseil d’administration de l’ANRU.

M. Jerretie s’est interrogé sur la possibilité de financer l’urbanisation au-delà de la rénovation urbaine au sens où on l’entend habituellement. C’est justement l’un des objectifs du NPNRU que de financer, au-delà du bâti d’habitat, la construction d’infrastructures telles que des gymnases ou d’autres espaces publics, et nous l’évoquons largement dans notre rapport.

Pour ce qui est de la scolarité, nous préconisons dans notre rapport de favoriser la mobilité afin de désenclaver les quartiers.

M. Jerretie nous a aussi interrogés sur la coordination des différents leviers de financement. Si nous ne sommes pas en mesure de répondre très précisément à cette question, je rappelle que l’objectif de l’ANRU est de développer la mixité sociale. Le projet de loi ELAN, qui apporte de vraies réponses sur ce point, mériterait également d’être suivi dans son application.

M. Dufrègne a soulevé la question des APL, qui concerne principalement les bailleurs sociaux, puisque la compensation qu’il leur est demandé d’effectuer va se traduire par une diminution de leurs recettes, et suscite des inquiétudes dans les zones où les populations sont les plus pauvres. Les garanties offertes par l’État à ce sujet nous semblent avoir convaincu si l’on considère qu’une convention a été signée entre les bailleurs sociaux et l’État pour le NPNRU. Nous suivrons cette question avec une attention particulière.

Les problèmes de sécurité évoqués par Mme Louwagie ne concernent pas seulement les QPV. Certaines mesures sont mises en œuvre dans les quartiers rénovés : ainsi, l’installation de gardiens d’immeubles qui a été décidée, notamment à Boulogne-sur-Mer, doit permettre de prévenir les dégradations liées au bâti et le sentiment d’insécurité qui peut en résulter. Au-delà des préconisations de la mission d’évaluation et de contrôle, l’une des tâches confiées à la police de sécurité du quotidien consistera justement à se rendre dans les quartiers et à y établir le contact avec les populations afin de prévenir les actes susceptibles d’accroître l’insécurité. Enfin, quarante quartiers vont faire partie du dispositif de reconquête républicaine. La thématique de la sécurité mérite de se voir accorder une attention particulière, soit en donnant lieu à une mission d’information, soit en étant suivie dans le cadre du présent rapport.

Notre collègue Alauzet a évoqué la participation des habitants à la vie des quartiers dans le cadre de la démocratie participative, et plus précisément des conseils citoyens, mis en œuvre par la loi de programmation de 2014. Il existe à l’heure actuelle 1 157 conseils citoyens, créés dans 1 284 quartiers prioritaires : il reste environ 15 % de quartiers ne disposant pas d’un conseil citoyen, et nous encourageons ces quartiers à se doter le plus rapidement possible d’un tel conseil. Cela dit, 56 % seulement des 1 157 conseils créés sont actifs dans les décisions prises. Il convient donc de faire en sorte de replacer les citoyens au cœur du dispositif grâce à une meilleure information et une meilleure participation, afin de les rendre décisionnaires sur la conduite des travaux.

Je laisserai Rémi Delatte répondre aux questions relatives à l’emploi, et me contenterai d’indiquer sur ce point que des dispositifs existent déjà en matière de rénovation urbaine, dans le cadre des zones franches urbaines (ZFU) et des exonérations liées au commerce de proximité. Nous estimons qu’avant de renforcer ces dispositifs, il convient d’en évaluer les effets sur la dynamisation économique des quartiers, ce qui pourrait être fait dans le cadre du suivi du rapport.

M. Coquerel a évoqué le risque de considérer le logement social comme un ghetto. Ce n’est absolument pas le sens de notre rapport. Je rappelle que la loi « Égalité et citoyenneté » a renforcé la mixité obligeant les bailleurs à attribuer 25 % des logements sociaux en dehors des QPV aux 25 % des ménages les plus pauvres et, à l’inverse, en réservant 50 % d’attribution de logements sociaux dans les QPV aux moins défavorisés – ces dispositions en faveur de la mixité se trouvent d’ailleurs renforcées par le projet de loi ELAN.

Notre rapport ne traite pas non plus de la question de l’amiante.

M. Éric Coquerel. C’est dommage !

Mme la rapporteure. Les questions relatives à l’amiante se rattachent à l’entretien du bâti et constituent un dossier à part entière, dont le traitement ne relevait pas de la mission sur le financement et le suivi de la mise en œuvre des programmes de rénovation urbaine qui nous a été confiée.

M. Éric Coquerel. Je ne pense pas que l’on puisse parler de rénovation urbaine sans évoquer l’amiante : quand vous refaites le hall d’un immeuble construit il y a trente ou quarante, par exemple, vous êtes inévitablement confronté à cette question.

M. le président Éric Woerth. Cependant, ce n’était pas l’angle d’approche du rapport de la MEC.

Mme la rapporteure. Effectivement, nous n’avions pas à traiter de la rénovation urbaine elle-même, mais des programmes financiers qui lui sont liés.

M. Éric Coquerel. J’ai bien compris, mais je regrette qu’il en soit ainsi, car les programmes de rénovation devraient prévoir dès le départ la nécessité de procéder au désamiantage dans le respect des normes en vigueur : aujourd’hui, les bailleurs sociaux affirment ne pas avoir les moyens de le faire. Il va falloir s’attaquer à ce problème sans tarder car, à défaut, nous allons devoir faire face dans les années à venir à une explosion du nombre de cas de cancers dus à l’amiante dans les immeubles concernés, ce qui constituera un nouveau scandale sanitaire.

Mme la rapporteure. Vous avez parfaitement raison de souligner l’importance de cette problématique, mais je vous répète que notre rapport n’avait pas vocation à en traiter. Tout ce que je peux vous dire à ce sujet, c’est que les nouveaux programmes de rénovation urbaine de l’ANRU intègrent une dimension « transition énergétique et développement durable ».

Mme El Haïry a évoqué la nécessité de replacer l’humain au cœur du dispositif, mais aussi de faire participer les élus à l’élaboration de la stratégie des programmes de rénovation urbaine. Le Gouvernement s’est d’ores et déjà engagé sur cette voie, qui ne doit surtout pas être vue comme une forme de désengagement de l’État.

M. le rapporteur. Mme de Montchalin a eu mille fois raison d’insister sur la soutenabilité des opérations de renouvellement urbain : c’est un point qui nous paraît tout à fait déterminant pour garantir le bien vivre ensemble dans la durée. Rien n’est pire que de constater, au bout d’un certain temps, un désengagement des acteurs locaux, qu’il s’agisse des bailleurs ou des équipes municipales : cela entraîne systématiquement une dépréciation de la qualité des opérations engagées, qui s’opère au détriment des habitants. Pour éviter cela, la réalisation des programmes doit s’accompagner d’une animation, réalisée en mettant à contribution les habitants et les associations. Là où les élus, en particulier les équipes municipales, ont été très impliqués, on constate des résultats très positifs dans la durée.

M. Hetzel a raison de rappeler en quoi consiste notre mission d’évaluation et de contrôle. Conscients de la responsabilité qui nous incombe, Nadia Hai et moi-même avons souhaité que les parlementaires soient représentés au sein de l’ANRU, et nous avons été rejoints par une récente décision législative en ce sens.

Je veux dire à M. Jerretie que le projet urbain est en partie financé par l’ANRU, au-delà du logement : c’est notamment le cas au sein du NPNRU. Comme d’autres collègues, vous avez souligné l’intérêt de mettre en place des gardiens d’immeubles, un projet qui nous semble effectivement pouvoir jouer un rôle déterminant en matière de cohésion sociale. Les gardiens déjà en place, qui contribuent de manière évidente au bien vivre ensemble, sont d’ailleurs spontanément venus à notre rencontre pour en témoigner. J’ajoute qu’ils assurent un travail essentiel de prévention de la délinquance et des dégradations.

Plusieurs d’entre vous ont évoqué les dispositifs économiques. Certains dispositifs fiscaux existent déjà dans les quartiers prioritaires, notamment celui des zones franches urbaines, qui ont évolué pour devenir des zones franches urbaines – territoires entrepreneurs (ZFU-TE), ouvrant droit à des exonérations d’impôt sur les bénéfices durant huit ans afin d’éviter l’effet d’aubaine. Pour des raisons de disponibilité budgétaire, il n’est pas garanti que ce dispositif puisse être pérennisé, et il devra être procédé à une évaluation. Nous souhaitons qu’il puisse être assuré une certaine offre de services dans les quartiers et, si cela est déjà prévu pour les commerces, avec des dispositifs d’exonération d’impôts locaux et de cotisation foncière sur le bâti pour les commerces de proximité, nous estimons qu’il convient d’aller au-delà en étendant ce dispositif à toutes les entreprises, partant du principe que l’emploi crée, lui aussi, une dynamique dans les quartiers – pas seulement pour la population qui y réside, mais pour l’ensemble de l’agglomération.

Mme Louwagie a souligné la nécessité d’une bonne communication entre les acteurs, ce qui est effectivement déterminant. Aujourd’hui, la gouvernance se situe plutôt au niveau intercommunal mais, pour les zones où les élus sont moins impliqués, il nous a semblé intéressant de développer les groupements d’intérêt public (GIP). Si ceux-ci sont déjà en place dans plusieurs secteurs, ils ont parfois été abandonnés parce qu’ils pouvaient apparaître comme un dispositif un peu lourd par rapport à une gouvernance exercée par le président d’intercommunalité ou le maire. En tout état de cause, le GIP présente l’avantage déterminant de permettre une coordination avec les élus, les acteurs locaux – notamment les bailleurs – et l’État. Il est essentiel que les délégués du préfet dans le cadre de la politique de la ville puissent être impliqués, car ils ont aussi un rôle de co-animateurs et de régulateurs à jouer dans les opérations de rénovation urbaine.

La difficulté à définir la notion de mixité sociale a été évoquée. Pour nous, la mixité sociale est aussi la mixité fonctionnelle, architecturale – un quartier est composé de logements sociaux, intermédiaires, mais aussi privés, et c’est ce brassage qui permet la diversité des populations.

Je suis d’accord avec M. Ahamada pour considérer que le terme « rénovation » est un peu obsolète et laisse imaginer que les seules opérations entreprises ont pour objet de reconstituer l’existant. Pour ma part, je préfère utiliser le mot « renouvellement » (employé par le passé), qui montre bien la volonté de renouveler l’image d’un quartier – une entreprise nécessitant du temps, ce qui est souvent un obstacle à l’investissement privé.

Je remercie M. Bourlanges d’attester de notre honnêteté et je regrette qu’il soit resté sur sa faim, ce qui s’explique par le fait que le sujet abordé est très vaste, mais aussi en raison de l’importance des moyens financiers à mobiliser : aujourd’hui, la contrainte budgétaire que l’on connaît oblige à faire des choix. Il est un principe, rappelé par nombre d’entre vous, et que nous ne devons jamais perdre de vue, à savoir le fait que l’humain doit rester au cœur de nos préoccupations.

M. Jean-Louis Bourlanges. À la page 21 de votre rapport, vous expliquez très bien les différentes conceptions de la mixité sociale. Ce que je voulais dire, c’est qu’il aurait pu être intéressant d’exploiter cette percée conceptuelle, par exemple en suggérant d’affecter plus ou moins de moyens en fonction du niveau de mixité sociale de chaque zone considérée.

M. le rapporteur. Je vous remercie pour cette précision, et j’appelle votre attention sur le fait que notre rapport contient une évaluation de la politique de la ville s’inspirant de votre suggestion.

Vous avez été nombreux à évoquer le rôle que peuvent jouer les citoyens. Le conseil des citoyens est une instance de nature à permettre une meilleure implication de leur part. Pour notre part, nous estimons essentiel qu’ils soient associés le plus en amont possible, dès le stade de la conception du programme de rénovation – le seul risque étant qu’ils éprouvent une certaine impatience, du fait de la complexité et de la lourdeur des procédures, donc du temps nécessaire pour la mise en œuvre des programmes de rénovation. Nous préconisons également que l’implication des citoyens se fasse dans la durée, et qu’ils puissent, au-delà de la fin de l’opération de rénovation de leur quartier, se faire les évaluateurs de la réussite de cette opération.

Pour encourager la constitution des amicales de locataires, nous avons souhaité que les immeubles comportent des locaux associatifs de locataires, et pas uniquement dans les logements sociaux. Là où les équipes municipales s’engagent, notamment dans la réalisation d’équipements de proximité, on a une meilleure implication des publics, mais aussi et surtout une meilleure réaction des élus.

Pour ce qui est des objectifs de créations d’entreprises évoqués par M. Cazeneuve, une expérience très intéressante a été menée à Bondy, avec la mise en place d’un incubateur de projets. Certes, tout le monde n’a pas la capacité ou l’envie de créer une entreprise, et il est parfois nécessaire que des entreprises extérieures viennent s’installer dans les quartiers prioritaires, mais il me semble important d’apporter aux entrepreneurs de ces quartiers non seulement un accompagnement en matière de création d’entreprise, mais aussi un suivi, une fois l’entreprise créée. La puissance publique ou privée a vocation à intervenir à ce niveau, par exemple en mettant à disposition des locaux pouvant abriter une pépinière d’entreprises, ce qui peut éviter que certaines start-up se délocalisent très rapidement au prétexte qu’elles ne trouvent pas l’environnement qui leur est nécessaire – comme cela a malheureusement été le cas à Bondy.

Mme la rapporteure. Je veux préciser à M. Cazeneuve qu’il n’y a pas d’objectifs chiffrés de créations d’emplois dans les quartiers prioritaires. Certains objectifs ont été définis dans le cadre du PNRU, notamment en termes de réalisation, de démolition ou de construction, mais ils n’ont malheureusement pas été atteints, et on a alors renoncé à l’élargissement des objectifs que prévoyait le NPNRU – avec la prise en compte de critères tels que l’évaluation de la mobilité ou la création d’emplois. Ne traiter le dossier des quartiers prioritaires que sous l’angle de la rénovation urbaine me paraît insuffisant compte tenu du fait que le Gouvernement est en train de mettre en place des dispositifs de droit commun – emplois francs, opérations « cœur de quartier » et « cœur de ville » – qui auront vocation à faire l’objet d’une évaluation.

Par ailleurs, si nous n’avons pas fait de focus sur les territoires d’outre-mer, ce n’est pas par manque d’intérêt, mais par manque de temps. Nous avons évoqué cette question avec M. Nicolas Grivel, directeur général de l’ANRU, dans le cadre d’un suivi de rapport.

En application de l’article 145 du Règlement, la commission autorise la publication du rapport de la mission d’évaluation et de contrôle.

 

 

 


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   ANNEXE 1 : liste des personnes auditionnées
 

Auditions du 15 mars 2018

Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET)

– M. Sébastien JALLET, commissaire délégué à l’égalité des territoires et directeur de la ville et de la cohésion urbaine ;

– Mme Isabelle KAMIL, cheffe du bureau du renouvellement urbain, du cadre de vie et de la prévention de la délinquance.

Caisse des dépôts et consignations

– M. Hammou ALLALI, directeur du département ville, immobilier et tourisme de la direction des investissements et du développement local ;

– Mme Marie LOSSET, responsable du pôle conception et adaptation de l’offre logement social à la direction du fonds d’épargne ;

– M. Éric LE MAREC, membre du département ville, immobilier et tourisme de la direction des investissements et du développement local ;

– M. Rodolphe MASSON, responsable secteur public et projets complexes à la direction des fonds d’épargne ;

– M. Philippe BLANCHOT, directeur des relations institutionnelles.

Action logement Groupe

– M. Bruno ARCADIPANE, président ;

– M. Jean-Baptiste DOLCI, vice-président d’Action Logement, vice-président de l’ANRU ;

– M. Bruno ARBOUET, directeur général ;

– M. Yanick LE MEUR, directeur général de Foncière Logement ;

– Mme Valérie JARRY, directrice des relations institutionnelles.


Auditions du 29 mars 2018

Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS)

– Mme Catherine Aubey-Berthelot, directrice générale ;

– M. Philippe Hourez, secrétaire général.

Agence nationale de la rénovation urbaine (ANRU)

– M. Nicolas Grivel, directeur général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine

Table-ronde de chercheurs sur le thème de la rénovation urbaine

– M. Thomas KIRSZBAUM, chercheur associé à l’Institut des Sciences sociales du Politique (ISP) ;

– Mme Christine LELÉVRIER, professeure à l'École d'urbanisme de Paris (EUP ; université Paris Est Créteil) et chercheur au Lab’Urba ;

– Mme Stéphanie VERMEERSCH, chargée de recherche en sociologie urbaine au CNRS.

Auditions du 17 mai 2018

Observatoire national de la politique de la ville (ONPV)

– M. Jean-François CORDET, président de l’ONPV ;

– Mme Stéphanie MAS, cheffe du bureau de l’observation des territoires en politique de la ville.

Ministère de l’Intérieur, direction de la modernisation et de l’action territoriale

– M. Laurent BUCHAILLAT, sous-directeur de l’administration territoriale du ministère de l’Intérieur

Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité

– Mme Hélène GEOFFROY, maire de Vaulx-en-Velin ;

– M. Sylvain BELLION, responsable du service Ville Urbanisme Habitat Transport ;

– Mme Charlotte DE FONTAINES, chargée des relations avec le Parlement.

Assemblée des communautés de France

– Mme Anne TERLEZ, vice-présidente de la communauté d’agglomération de Seine-Eure ;

– M. Nicolas PORTIER, délégué général ;

– Mme Claire DELPECH, responsable questions finances, fiscalité et logement ;

– Mme Montaine BLONSARD, chargée des relations avec le Parlement.

France urbaine

– M. Jean-Pierre HURPEAU, vice-président délégué à la politique de la Ville et à la rénovation urbaine de la métropole du Grand Nancy et maire de Jarville-la-Malgrange ;

– M. Emmanuel HEYRAUD, directeur cohésion sociale et développement urbain ;

– M. Frédéric VIEL, directeur général des services de la métropole du Grand Nancy en charge du pôle Solidarité et Habitat ;

– Mme Chloé MATHIEU, responsable des relations avec le Parlement.

Auditions du 31 mai 2018

Ministère de la Transition écologique et solidaire, Ministère de la cohésion des territoires, direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages

– Mme Claire LEPLAT, adjointe au sous-directeur des politiques de l’habitat

Union sociale pour l’Habitat (USH)

– Mme Marianne LOUIS, secrétaire générale ;

– Mme Francine ALBERT, conseillère pour les relations avec le Parlement.

Table-ronde de promoteurs immobiliers

– M. Bernard CHANTEUX, directeur des relations institutionnelles de Bouygues immobilier ;

– M. Fabrice DESREZ, directeur général du groupe Les Nouveaux Constructeurs ;

– M. François-Xavier SCHWEITZER, directeur de l’habitat social de Nexity.

Audition du 28 juin 2018

– M. Nicolas GRIVEL, directeur général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine

Audition du 4 juillet 2018

– M. Julien DENORMANDIE, secrétaire d’État auprès du ministre de la Cohésion des territoires

 

 


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   ANNEXE 2 : Déplacements de la mec

Dans le cadre des travaux menés par la MEC, les rapporteurs ont souhaité se rendre dans certains quartiers ayant fait l’objet de programmes de rénovation urbaine, afin d’apprécier les résultats concrets de ces opérations.

A.    Déplacement à Marseille – 18 mai 2018

– Visite des quartiers Nord de Marseille faisant l’objet d’opérations de rénovation urbaine : la Castellane, le Plan d’Aou, Kallisté, Solidarité, la Savine, les Flamands, Picon-Busserine, Saint-Paul, Malpassé avec M. BINET, directeur du Groupement d’intérêt public (GIP) Marseille Rénovation Urbaine et M. BERGE, chef du service Habitat à la préfecture des Bouches-du-Rhône ;

Rencontre avec Mme FRUCTUS, vice-présidente de la métropole Aix Marseille–Provence et présidente du GIP Marseille Rénovation Urbaine ;

Réunion de travail en préfecture avec les services de l’État (direction départementale des territoires et de la mer des Bouches-du-Rhône  et direction départementale et régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale) et Mme ASSIDON, préfète déléguée pour l’égalité des chances.

 

La ville de Marseille a engagé un vaste projet de rénovation urbaine dans le cadre du PNRU qui concerne 14 quartiers répartis sur l’ensemble de la commune pour un coût total de 1,2 milliard d’euros auquel l’ANRU a participé à hauteur de 303 millions d’euros. Les rapporteurs estiment que ce montant est limité compte-tenu de l’ampleur des enjeux sur le territoire marseillais mais il s’explique par des spécificités locales.

Les différents projets sont particulièrement concentrés sur les quartiers des 14ème et 15ème arrondissements (quartiers Nord) et dans le centre-ville. Les projets de rénovation dans les quartiers Nord visaient à corriger la dégradation des immeubles HLM depuis leur création et les principaux dysfonctionnements urbains. La diversification et la dédensification de l’habitat, le désenclavement des quartiers et le soutien à l’activité économique ont constitués le cœur des objectifs des projets. D’autre part, la rénovation du quartier  centre-nord vise à créer un centre-ville attractif en rénovant des îlots de logement sociaux et en développant l’activité économique par la création du centre d’affaires de la Joliette.

Les projets de rénovation urbaine de la ville de Marseille se caractérisent par une réalisation incomplète des objectifs contenus dans la convention PNRU. Ces difficultés sont en partie liées à la pluralité des acteurs concernés par les projets de rénovation entre la commune, le GIP Marseille Rénovation Urbaine et EuroMéditerranée. Le déficit de portage politique à Marseille a nécessité la constitution du GIP pour mettre en œuvre les projets à partir de 2009 et explique la sous-consommation des crédits accordés par l’ANRU. La coordination complexe entre les élus de la ville centre, pauvre en ressources fiscales, et les élus de l’intercommunalité pose également problème dans le cadre du passage de l’échelle de la ville à celle de la métropole pour le pilotage des projets de rénovation urbaine, prévu par le NPNRU.

Les rapporteurs ont pu observer des résultats de la politique de rénovation urbaine inférieurs aux attentes que suscite un programme aussi ambitieux. L’inégale répartition des logements sociaux sur le territoire de Marseille n’a pas été corrigée par les opérations de rénovation urbaine. À titre d’illustration, seulement 14 % des publics les plus pauvres ont bénéficié de l’attribution d’un logement social hors QPV au niveau de la métropole Aix-Marseille Provence. En outre, les objectifs de diversification de l’habitat ont rarement été atteints du fait d’un problème de temporalité souligné par les acteurs locaux : le changement d’image des quartiers faisant l’objet de programmes de rénovation urbaine n’ayant pas encore eu lieu, il est très difficile d’attirer des investisseurs privés.

Les rapporteurs ont été particulièrement marqués par le phénomène des copropriétés dégradées, très présent à Marseille. En effet, le logement privé dégradé joue un rôle de logement social sur le territoire marseillais. Les primo-arrivants les plus modestes connaissent généralement un premier logement dans une copropriété dégradée avant d’obtenir un logement social, ce qui est caractéristique de la population de Marseille centre-nord. Une procédure dérogatoire au droit commun sur ce territoire afin d’intervenir plus rapidement est une piste qui mériterait d’être étudiée pour corriger des dysfonctionnements urbains qui ne peuvent être traités par la rénovation urbaine.

 

B.   Déplacement à Trappes – 23 mai 2018

Réunion de travail avec les services de l’agglomération de Saint Quentin en Yvelines

– M. BAUD, directeur de l’habitat et de la rénovation urbaine, directeur général adjoint du service de l’aménagement du territoire ;

– M. MOGA, chef de projet rénovation urbaine, direction de l’habitat et de la rénovation urbaine, directeur général adjoint du service de l’aménagement du territoire ;

Réunion de travail à la mairie de Trappes :

– M. MALANDAIN, maire de Trappes ;

– M. BARBIER, responsable de la direction de l'urbanisme et de l'aménagement urbain de la ville de Trappes ;

– M. JAURREY, directeur de cabinet du maire de Trappes ;

Visite du centre-ville de Trappes et des quartiers Jean Macé, Henri Barbusse et Cocteau.

 

La commune de Trappes a connu un développement urbain de spécialisation sociale et spatiale qui a fracturé la ville entre le centre-ville attractif et les quartiers de barres HLM destinés presque exclusivement à l’habitation. Le PNRU a permis le financement d’un premier projet de rénovation urbaine dès novembre 2003 dont l’objectif était de diversifier l’habitat et de rendre une cohérence urbaine à la commune. Le coût du projet s’est élevé à 340 millions d’euros, dont 74 millions ont été financés directement par l’ANRU.

Trappes connaissait, avant le projet de rénovation, un taux très élevé de logement social d’environ 76 % concentré dans le centre-ville, le quartier des Merisier et la plaine de Neauphle. Le projet de rénovation urbaine visait à réduire ce taux à hauteur de 66 %.

Les principaux objectifs du projet étaient donc de diversifier l’habitat et d’opérer une restructuration de l’unité urbaine par :

– la démolition-construction de 737 logements avec une reconstitution hors site de 50 % ;

– la diversification de l’habitat par la vente de 1 363 logements dont 911 en accession sociale en juillet 2013 ;

– l’enfouissement de la route nationale et l’aménagement d’un plateau urbain ;

– le changement d’image des quartiers rénovés ;

– la construction d’une zone d’activité commerciale (l’Aérostat) ;

– une meilleure desserte en transports en commun.

Lors de leur visite, les rapporteurs ont pu observer la réussite globale du projet de rénovation urbaine de la commune de Trappes. Les engagements pris dans la convention PNRU ont été respectés à l’exception de l’enfouissement de la route nationale qui constitue encore une rupture entre le centre-ville et les quartiers rénovés. Le taux de logement social de la ville a été réduit davantage que l’objectif initial et atteint 56 % grâce à la diversification de l’habitat opérée. La politique d’accession à la propriété a bénéficié en majorité aux trappistes, à travers une mobilité interne au quartier grâce à la constitution d’une nouvelle offre de logements.

Cependant, les rapporteurs soulèvent un résultat mitigé de la politique de relogement sur la commune de Trappes malgré une bonne coordination interbailleurs. En effet, le taux de relogement à Trappes atteint 95 %. Un engagement plus important de l’intercommunalité afin d’équilibrer le relogement entre Trappes et les communes voisines aurait permis d’obtenir de meilleurs résultats de mixité sociale.

Le maire de Trappes a souligné l’importance de la proximité et la connaissance du territoire pour la réussite des projets de rénovation urbaine. Il regrette l’introduction de protocoles de préfiguration et la multiplication des études supplémentaires nécessaires alors que le projet NPNRU de la ville est déjà construit.

 

C.   Déplacement à Boulogne-sur-Mer – 30 mai 2018

Réunion à la mairie de Boulogne-sur-Mer :

– M. CUVILLIER, maire de Boulogne sur Mer et président de la communauté d’agglomération du boulonnais ;

– Mme HINGREZ, vice-présidente de la communauté d’agglomération du boulonnais ;

– M. VENNIN, sous-préfet de Boulogne-sur-Mer ;

– M. SMITH, sous-préfet en charge de la politique de la ville ;

– M. MASSELIN, délégué du préfet en charge des quartiers prioritaires

– M. CHARTON, Directeur général de l’Office Habitat du Littoral

Visite du quartier rénové de Transition et rencontre du Conseil citoyen du Chemin-vert.

Réunion à la sous-préfecture de Boulogne-sur-Mer avec les services de l’État animée par M. VENNIN, sous-préfet de Boulogne-sur-Mer et M. SMITH, sous-préfet en charge de la politique de la ville :

– M. JUBLIN, commissaire divisionnaire, chef du District de Boulogne sur Mer

– M. RAUX, principal du collège Langevin de Boulogne sur Mer

– Mme BAUMLIN, cheffe du service Habitat et Renouvellement Urbain, DDTM 62 à Arras

 

La ville de Boulogne-sur-Mer a mené un projet de rénovation urbaine sur le quartier du Chemin Vert, classé Zone urbaine sensible lors de l’élaboration du projet en 2004. Ce quartier, représentant un quart de la population de la commune, concentrait des difficultés économiques importantes avec un fort taux de chômage et de bénéficiaires de minima sociaux.

L’objectif du projet de rénovation urbaine était de pallier les difficultés de logements construits dans les années 1950 pour une période « transitoire » qui a malheureusement perduré pendant 50 ans. Le coût total du projet de rénovation s’est élevé à 167 millions d’euros dont une participation de l’ANRU d’environ 40 millions d’euros.

 

Le projet de rénovation visait une rénovation complète du bâti et le développement d’une mixité fonctionnelle ambitieuse :

– la démolition-reconstruction de 746 logements ;

– le relogement de 600 personnes ;

– la construction d’équipements publics culturels, sportifs et à vocation sociale ;

– le développement économique du quartier par l’introduction de cellules commerciales.

Le projet de rénovation urbaine à Boulogne-sur-Mer est aujourd’hui intégralement terminé. La qualité de l’habitat a été améliorée et la mixité fonctionnelle a été développée. Cependant, la situation sociale des habitants du quartier n’a pas été modifiée et les instruments favorisant la mixité sociale ont été sous-utilisés. En effet, le relogement à l’extérieur du quartier n’a pas constitué un axe du projet pour la municipalité et les reconstructions ont prioritairement été effectuées sur site. Seulement 17 % des ménages ont été relogés hors du QPV. Le projet négocié dans le cadre du NPNRU bénéficie d’ailleurs de dérogations accordées par l’ANRU concernant les règles de reconstruction hors site.

Les rapporteurs ont constaté les difficultés du relogement à l’extérieur du quartier rénové liées à un attachement fort des habitants à leur quartier. Néanmoins, le relogement dans le quartier rénové peut être compliqué en raison de la hausse des loyers due à l’amélioration de la qualité des logements. À ce titre, les rapporteurs soulignent la nécessité de suivre l’évolution des loyers dans les quartiers rénovés et de veiller à ce que l’augmentation des loyers n’entraîne pas la reconstitution de poches de pauvreté dans les quartiers voisins.

La rencontre du conseil citoyen a confirmé l’importance de la consultation des habitants du quartier pour définir le contenu des projets de rénovation et de l’implication des habitants dans la gestion du quartier après la réalisation du projet. La gestion urbaine de proximité constitue un outil majeur pour la réussite de la rénovation urbaine et la pérennité des résultats obtenus.

 

 

 

 

 

D.   Déplacement à Bondy – 13 juin 2018

– Réunion à la mairie avec Mme THOMASSIN, maire de Bondy,
Mme UNAL, déléguée générale adjointe au projet de rénovation urbaine et à la politique de la ville de la mairie de Bondy, M. GRIVEL, directeur général de l’ANRU, et M. RANGER, directeur des relations institutionnelles de l’ANRU ;

– Visite des quartiers rénovés dans le cadre du PNRU à Bondy : De Lattre de Tassigny, 14 juillet et Noue Caillet ;

– Réunion de travail à la préfecture avec Mme BENRABIA, préfète déléguée à l’égalité des chances de Seine Saint Denis.

La ville de Bondy a inscrit son projet de rénovation urbaine dans une stratégie de long-terme visant à intégrer la commune dans la métropole du Grand Paris à horizon 2030. Le projet de rénovation dans le cadre du PNRU a permis un investissement total de 395 millions d’euros, dont 90 millions d’euros de la part de l’ANRU principalement dans les quartiers de Noue Caillet, 14 juillet et de Lattre de Tassigny. Le projet initial prévoyait une forte diversification de l’habitat par une démolition importante et une faible reconstruction sur site des logements sociaux.

La convention PNRU, signée en 2006, fixait en conséquence des objectifs ambitieux de diversité de l’habitat et d’aménagement:

– destruction de 1 296 logements pour 1 334 constructions, dont 55 % hors site ;

– 529 logements de diversification de l’offre ;

– création d’une place de centre-ville commerciale de 17 000 m².

Le projet de rénovation urbaine de Bondy a été en grande partie réalisé. L’action sur le bâti est une réussite et la diversification de l’offre de logement a été favorisée par l’intervention d’opérateurs privés. La mixité sociale a également été favorisée par la reconstruction hors site des logements sociaux à hauteur de 55 %. En outre, ces exigences ont été conciliées avec les attentes des habitants : 40 % des ménages ont été relogés sur site à leur demande et un « droit au retour » des habitants des quartiers a été instauré. L’effort a porté sur les ménages relogés hors site puisque 71 % des ménages relogés hors site l’ont été hors ZUS.

Le premier projet de rénovation urbaine de Bondy sera prolongé par un projet dans le cadre du NPNRU afin de corriger certaines défaillances et étendre la rénovation à de nouveaux quartiers. En effet, la stratégie de l’intercommunalité dans le cadre du NPNRU devrait orienter les opérations vers la dédensification des logements sociaux et un développement plus important de la mixité fonctionnelle, particulièrement par l’installation de commerces au cœur des quartiers. Par ailleurs, les futures opérations devraient se concentrer sur le quartier de la future gare du Grand Paris Express du pont de Bondy touché par le phénomène des copropriétés dégradées et amplifier la politique de diversification de l’offre de logement.

Les rapporteurs ont également rencontré la préfète déléguée à l’égalité des chances de la Seine Saint Denis qui a attiré leur attention sur plusieurs problématiques spécifiques au département. En Seine Saint Denis, 40 % de la population vit en QPV aujourd’hui d’où des stratégies de mixité sociale particulièrement complexes à mener. L’image des quartiers étant dégradée, l’arrivée de classes moyennes extérieures est limitée. Une politique de mixité endogène consistant à inciter les personnes à rester dans leur quartier dans des logements de qualité supérieure est la seule solution envisageable.

Les rapporteurs ont constaté que certaines difficultés des projets de rénovation urbaine en Seine Saint Denis mériteraient une action résolue de l’État. Une cinquantaine de copropriétés dégradées, dont une vingtaine dans un état catastrophique, ont été dénombrées dans le département. La lutte contre les copropriétés dégradées constitue un angle mort des politiques de rénovation urbaine alors que ces logements constituent fréquemment un logement social de fait.             

 


–  1  –

 

   ANNEXE 3 : Le panier d'indicateurs NPNRU mis à disposition par l’Anru pour renseigner le tableau de bord de suivi des objectifs urbains

 

N° indicateur

Indicateur

- Nom de l'indicateur

- Détail du calcul

- sources mobilisées

Ce que l'indicateur contribue à mesurer

1

Diversité des statuts de logement : nombre de résidences principales dans le quartier

Total de résidences principales du quartier

(source : INSEE - Recensement de la Population (RP), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Élargir les parcours résidentiels et prendre en compte la diversité des besoins en logement sur le quartier

2

Diversité des statuts de logement : part de logements locatifs sociaux parmi les résidences principales du quartier

Part de logements locatifs sociaux parmi les résidences principales du quartier

(source : INSEE - Recensement de la Population (RP), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Élargir les parcours résidentiels et prendre en compte la diversité des besoins en logement sur le quartier

3

Diversité des statuts de logement : part de logements privés parmi les résidences principales du quartier

Part de logements privés parmi les résidences principales du quartier

(source : INSEE - Recensement de la Population (RP), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Élargir les parcours résidentiels et prendre en compte la diversité des besoins en logement sur le quartier

4

Diversité des statuts de logement : part des logements locatifs privés parmi les résidences principales du quartier

Part de logements locatifs privés parmi les résidences principales du quartier

(source : INSEE - Recensement de la Population (RP), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Élargir les parcours résidentiels et prendre en compte la diversité des besoins en logement sur le quartier

5

Diversité des statuts de logement : part des logements occupés par des propriétaires parmi les résidences principales du quartier
Part de logements occupés par des propriétaires parmi les résidences principales du quartier
(source : INSEE - Recensement de la Population (RP), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Élargir les parcours résidentiels et prendre en compte la diversité des besoins en logement sur le quartier

6

Équilibre de l'offre de logements locatifs sociaux à l'échelle de l'agglomération

Part des logements locatifs sociaux de l’agglomération présente sur le quartier

(source : INSEE - Répertoire du Parc Locatif Social (RPLS), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Contribuer au rééquilibrage de l'offre de logements locatifs sociaux à l'échelle de l'agglomération en prenant en compte la tension de marché

7

Offre locative abordable dans le quartier

Part des logements locatifs sociaux du quartier dont les loyers sont inférieurs aux plafonds PLAI

(source: Répertoire du Parc Locatif Social (RPLS), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Contribuer au rééqulibrage de l'offre de logements locatifs sociaux à l'échelle de l'agglomération en maintenant une offre locative abordable et en posant la question de sa concentration dans le quartier

8

Répartition de l'offre locative abordable à l'échelle de l'agglomération

Part des logements locatifs sociaux de l’EPCI ayant des loyers inférieurs aux plafonds PLAI présents sur le quartier

(source: Répertoire du Parc Locatif Social (RPLS), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Contribuer au rééqulibrage de l'offre de logements locatifs sociaux à l'échelle de l'agglomération en maintenant une offre locative abordable et en posant la question de sa concentration dans le quartier

9

Équilibre de l'offre de petits logements à l'échelle de l'agglomération

Part des résidences principales T1 et T2 de l’EPCI présentes dans le quartier

(source: INSEE - Recensement de la Population (RP), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Renforcer l'offre structurellement manquante en petits logements

10

Équilibre de l'offre de grands logements à l'échelle de l'agglomération

Part des résidences principales T5 et + de l'EPCI présentes dans le quartier

(source: INSEE - Recensement de la Population, agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Renforcer l'offre structurellement manquante en grands logements

N° indicateur

Indicateur
- Nom de l'indicateur

- Détail du calcul

- sources mobilisées

Ce que l'indicateur contribue à mesurer

11

Densité de logements du quartier

Nombre de logements à l’hectare dans le quartier

(source: INSEE - Recensement de la Population (RP), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Lutter contre l'étalement urbain, contribuer à la compacité des agglomérations.
Permettre d'adapter la densité du quartier en prenant en compte les différentes réalités qu'elle recouvre (espaces bâtis, non bâtis, taille des unités de logement, ...) et contribuer à améliorer l'efficience des services, commerces et transports

12

Densité de surface bâtie au sol du quartier

Surface bâtie au sol ramenée à la surface du quartier

(source: données renseignées localement selon la méthode établie par l'ANRU, agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Lutter contre l'étalement urbain, contribuer à la compacité des agglomérations.
Permettre d'adapter la densité du quartier en prenant en comptes les différentes réalités qu'elle recouvre (espaces bâtis, non bâtis, taille des unités de logement, ...) et contribuer à améliorer l'efficience des services, commerces et transports

13

Couverture de l’offre commerciale dans le quartier

Nombre de commerces dans le quartier / 100 ménages, pondéré en fonction du type de commerce

(source: Epareca - État des lieux 2015 pour les quartiers d'intérêt national, données renseignées localement selon la méthode établie par Epareca et l'ANRU pour les quartiers d'intérêt régional et pour le suivi de l'indicateur, agrégation pour l'ensemble des polarités du territoire vécu)

Proposer une offre commerciale adaptée aux besoins et aux attentes des habitants et usagers

14

Diversité de l’offre commerciale dans le quartier

Poids des commerces de première nécessité parmi l'ensemble des commerces du quartier

(source: Epareca - Etat des lieux 2015 pour les quartiers d'intérêt national, données renseignées localement selon la méthode établie par Epareca et l'ANRU pour les quartiers d'intérêt régional et pour le suivi de l'indicateur, agrégation pour l'ensemble des polarités du territoire vécu)

Proposer une offre commerciale adaptée aux besoins et aux attentes des habitants et usagers

15

Offre de services dans le quartier

Nombre de services publics et privés du quartier pour 1 000 habitants, pondéré en fonction du type de service

(source: INSEE - Base Permanente des Equipements (BPE), INSEE - Recensement de la Population (RP), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Améliorer si nécessaire la gamme de services et d'équipements de proximité indispensables, voire s'engager dans une gamme de niveau supérieur

16

Offre d'équipements dans le quartier

Nombre d’équipements publics de proximité du quartier pour 1 000 habitants, y. c. les équipements scolaires

(source: INSEE - Base Permanente des Equipements (BPE), INSEE - Recensement de la Population (RP), agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Améliorer si nécessaire la gamme de services et d'équipements de proximité indispensables, voire s'engager dans une gamme de niveau supérieur

17

Fonction économique du quartier

Surface de plancher du quartier dédiée à l'activité économique

(source: données renseignées localement selon la méthode établie par l'ANRU, agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Maintenir ou développer une fonction économique dans le quartier lorsque cela est envisageable

18

Desserte du quartier en transports collectifs lourds

Part des logements du quartier situés à moins de 500 m d’un transport collectif lourd (tramway, métro, BHNS)

(source: INSEE - Recensement de la Population (RP), données renseignées localement selon la méthode établie par l'ANRU, agrégation pour les IRIS sélectionnés)

Diversifier les modes de transport

19

Qualité de la desserte du quartier en transports collectifs

Nombre d'arrêts marqués par les bus, tram, métros au sein du quartier en 24h

(source: données renseignées localement selon la méthode établie par l'ANRU, agrégation des IRIS sélectionnés)

S'assurer que l'offre de transports collectifs soit adaptée aux besoins des habitants, en fréquence et en amplitude horaire

20

Consommation énergétique des logements impactés par le projet

Estimation de la consommation énergétique moyenne des logements impactés par le projet

(source: données renseignées localement selon la méthode établie par l'ANRU, agrégation des IRIS sélectionnés)

Mesurer la contribution du projet aux objectifs de réduction de la consommation énergétique de l'agglomération

 


 

N° indicateur

Indicateur
- Nom de l'indicateur

- Détail du calcul

- sources mobilisées

Ce que l'indicateur contribue à mesurer

21

Consommation énergétique des logements locatifs sociaux du quartier

Estimation de la consommation énergétique moyenne des logements locatifs sociaux du quartier

(source: données renseignées localement selon la méthode établie par l'ANRU, agrégation des IRIS sélectionnés)

Améliorer la performance énergétique des logements locatifs sociaux du quartier

22

Contribution à la réduction des émissions de gaz à effet de serre du quartier

Part des logements locatifs sociaux du quartier raccordée à une source d’énergie renouvelable

(source: Répertoire du parc locatif social (RPLS), données renseignées localement selon la méthode établie par l'ANRU, agrégation des IRIS sélectionnés)

Participer aux objectifs globaux de réduction des gaz à effets de serre du quartier

23

Adaptation au changement climatique

Part des surfaces imperméabilisées par rapport à la surface totale du quartier

(source: données renseignées localement selon la méthode établie par l'ANRU, agrégation des IRIS sélectionnés)

Contribuer à la réduction des phénomènes d'îlots de chaleur, en lien avec la végétalisation.
Contribuer à la réduction du risque d'inondation

 


([1])  Jean-Louis Borloo, rapport Vivre ensemble, vivre en grand – pour une réconciliation nationale, 2018.

([2]) Circulaire du 21 mars 1973 relative aux formes d’urbanisation dits « grands ensembles » et à la lutte contre la ségrégation sociale par l’habitat.

([3]) Amendement n° 74 de Rodolphe THOMAS sur le projet de loi n° 950 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

([4]) R. Epstein, « ANRU : mission accomplie ? » dans J. Donzelot, A quoi sert la rénovation urbaine, PUF, 2012

([5])   Amendement n° 74 de Rodolphe THOMAS sur le projet de loi n° 950 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine

([6]) Emmanuelle Deschamps, Approche critique et juridique des normales relatives à la mixité sociale, dans le champ du logement, Caisse nationale d’allocations familiales, 2005, in Informations sociales 2005/5 n° 125 pages 48 à 61.

([7])  Article 1er de la loi n° 91-662 du 13 juillet 1991d’orientation pour la ville.

([8])  Gérard Hamel, Rapport fait au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire sur le projet de loi portant engagement nationale pour le logement, n°2771, 21 décembre 2005 : http://www.assemblee-nationale.fr/12/rapports/r2771.asp.

([9])  Wilson, The Truly Disadvantaged : The Inner City, the Underclass, and Public Policy, University of Chicago Press,  1987.

([10]) G. W Allport, The Nature of Prejudice, Doubleday anchor books, 1954.

([11])  Amendement n° 74 de Rodolphe THOMAS sur le projet de loi n° 950 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

([12])  Annexe 1 de la loi n° 2003-710 du 1 août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, abrogée par la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine : « Les choix arrêtés pour chacun des sites relèvent des responsabilités locales et la loi n'a pas pour objet de leur assigner des objectifs précis. ».

([13])  Annexe 1 de la loi n° 2003-710 du 1 août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, abrogée par la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

([14])  Arrêté du 20 mars 2007 portant approbation du règlement général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (JO 3 avril 2007).

([15])  Article 1 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

([16])  G. Baudin, La mixité sociale : une utopie urbaine et urbanistique. Revue du CREHU, 2001, pp.10.

([17])  Ibid.

([18]) S. Faure, « De quelques effets sociaux des démolitions d'immeubles. Un grand ensemble hlm à Saint-Étienne », Espaces et sociétés, vol. 124-125, no. 1, 2006, pp. 191-206.

([19]) Annexe déplacements.

([20])  Arrêté du 7 août 2015 portant approbation du règlement général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine relatif au nouveau programme national de renouvellement urbain (JO 14 août 2015).

([21])  H. Dubedout, Ensemble refaire la ville, rapport au Premier ministre, janvier 1983.

([22]) ONZUS, rapport sur l’évaluation du PNRU « Dix ans de Programme national  de rénovation urbaine : Bilan et perspectives », 2013, paragraphe 71 et suivants.

([23])  Loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

([24])  Loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

([25])  Ci-après, le lien du site Internet du Système d’information géographique (SIG) de la politique de la ville : https://sig.ville.gouv.fr/.

([26]) Thomas KIRSZBAUM et Renaud EPSTEIN, Synthèse de travaux universitaires et d’évaluation de la politique de la ville, 2010, p.223.

([27]) Ilots Regroupés pour l'Information Statistique. Les IRIS constituent la brique de base en matière de diffusion de données infra-communales de l’Insee. Ils doivent respecter des critères géographiques et démographiques et avoir des contours identifiables sans ambigüité et stables dans le temps. Un IRIS de population compte entre 1 800 et 5 000 habitants.

([28]) Thomas KIRSZBAUM et Renaud EPSTEIN, Synthèse de travaux universitaires et d’évaluation de la politique de la ville, 2010, p.33

([29])  Loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine

([30]) Voir le tableau Principaux textes de programmation de la rénovation urbaine

([31])  Dans le cadre du PNRU, en effet, une fois l’engagement effectué, une avance de 15 % (30 % dans le cadre du plan de relance) était accordée au maître d’ouvrage avant le lancement des travaux suivie, en fonction de leur avancement, de paiements correspondant à 70 % de la subvention, puis du versement après la livraison du solde de la subvention.

([32]) USH, brochure du 78ème congrès de l’Union du 26 au 28 septembre 2017 : Les HLM en chiffres, p.16.

([33])  Le décret n° 2017-1182 du 20 juillet 2017 portant ouverture et annulation de crédits à titre davance a annulé 100 millions d’euros d’autorisations d’engagements et 15 millions d’euros de crédits de paiement.

([34]) Décret n° 2009-746 du 22 juin 2009 relatif aux emplois de la participation des employeurs à l’effort de construction pris pour l'application de l'article L. 313-3 du code la construction et de l’habitation

([35])  Cour des comptes, juin 2014, L’Agence nationale pour la rénovation urbaine, p.110 et suivantes

([36])  Arrêté du 7 août 2015 portant approbation du règlement général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine relatif au nouveau programme national de renouvellement urbain (JO 14 août 2015)

([37]) Article 97 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové

([38]) Article 70 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté : cela comprend les territoires des EPCI tenus de se doter d’un PLH (programme local de l’habitat) ou ayant la compétence en matière d’habitat, et ayant au moins un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV). La métropole du Grand Paris et la ville de Paris sont également concernés.

([39]) Article 70 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté

([40]) Instruction du Gouvernement du 14 mai 2018 relative aux orientations en matière d’attributions de logements sociaux situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

([41])  Annexe de l’arrêté du 31 janvier 2005 portant approbation du règlement général de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine

([42]) Convention du 1er octobre 2009

([43])  Article 28 de la loi n°2006-872 du 13  juillet 2006 portant Engagement national pour le logement

([44])  Cette prime correspond à une subvention versée par l’ANRU à des opérations d'accession à la propriété menées par des personnes morales qui réalisent des logements pour les céder à des personnes physiques sans condition de revenus mais qui s'engagent à les occuper à titre de résidence principale pendant au moins cinq ans. Le prix de vente de ces logements est plafonné.

([45])  Ce prêt est consenti à un organisme HLM, SEM ou un promoteur privé pour financer la construction ou  l’acquisition de logements neufs qui feront l’objet d’un contrat de location-accession.

([46])  Le prêt d'accession sociale (PAS) est accordé aux ménages par une banque ou un établissement financier ayant passé une convention avec l'État pour financer la construction ou l'achat d'un logement, avec ou sans travaux d'amélioration

([47])  Article L. 351-2 du code de la construction et de l’habitation

([48])  ONZUS, rapport sur l’évaluation du PNRU « Dix ans de Programme national  de rénovation urbaine : Bilan et perspectives », 2013

([49])  Arrêté du 20 mars 2007 portant approbation du règlement général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (JO 3 avril 2007).

([50])  Article *R441-31 du Code de la construction et de l'habitation

([51]) N. Guyon, Rapport du LIEPP, Étude des effets de la rénovation urbaine sur l’évolution du bâti et du peuplement dans les quartiers ciblés entre 2003 et 2013, décembre 2016

([52])  A. Vanderstocken, « Le relogement dans le cadre du programme national de rénovation urbaine », rapport annuel 2017 de l’ONPV.

([53])  Insee, Les quartiers de la politique de la ville en Île-de-France, n° 57, 17 mars 2017

([54])  Annexe déplacements.

([55])  Annexe déplacements.

([56]) Arrêté du 7 août 2015 portant approbation du règlement général de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine relatif au nouveau programme national de renouvellement urbain, titre II, paragraphe 2.1.3.2.

([57]) Amendement n°591 sur le projet de loi n°3679 relatif à l’égalité et à la citoyenneté

([58])  N. Guyon, Rapport du LIEPP, Étude des effets de la rénovation urbaine sur l’évolution du bâti et du peuplement dans les quartiers ciblés entre 2003 et 2013, décembre 2016

([59])  Annexe déplacements.

([60])  ONZUS, rapport sur l’évaluation du PNRU « Dix ans de Programme national  de rénovation urbaine : Bilan et perspectives », 2013.

([61]) ANRU, PNRU, les chiffres 2012, 2013

([62])  ONZUS, rapport sur l’évaluation du PNRU « Dix ans de Programme national  de rénovation urbaine : Bilan et perspectives », 2013

([63])  Décret n° 2014-549 du 26 mai 2014 portant incorporation au code général des impôts de divers textes modifiant et complétant certaines dispositions de ce code

([64]) Convention entre l’État, l’ANRU,  l’UESL, Action Logement et l’AFL du 14 janvier 2014.

([65])  N. Guyon, Rapport du LIEPP, Étude des effets de la rénovation urbaine sur l’évolution du bâti et du peuplement dans les quartiers ciblés entre 2003 et 2013, décembre 2016.

([66])  Comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU, juin 2006, Note sur la participation des habitants

([67]) Marie-Hélène BACQUÉ et Mohamed MECHMACHE, rapport au Ministre délégué chargé de la ville, Pour une réforme radicale de la politique de la ville – Ca ne se fera pas sans nous, juillet 2013, p.12

([68]) L’article 8 de la Convention d’Aarhus prévoit les conditions de la participation du public, qui correspondent aux débats organisés par la Commission nationale du débat public. Un droit à l’information des habitants et prévu à l’article L. 2141‑1 Le code général des collectivités territoriales. Les procédures prévues par le code de l’urbanisme et le code général des collectivités territoriales sont nombreuses et renvoient à une terminologie variée : association, concertation, consultations, référendum d‘initiative populaire, référendum local, création de comités consultatifs d’intérêt communal.

([69]) Les dispositions relatives aux enquêtes publiques sont essentiellement codifiées aux articles L. 123-1 à L. 123-19 du code de l’environnement et L. 11-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique

([70]) L’article  L. 2143‑1 du code général des collectivités territoriales prévoit une mise en place de ces conseils obligatoire dans les communes de plus de 80 000 habitants et facultative les communes de 20 000 à 79 999 habitants

([71])  L’ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l'urbanisme a prévu aux articles L. 103-2 à L. 103-6 de ce code que les projets d’aménagement ou de construction ayant pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie et les projets de renouvellement urbain « font l’objet d’une concertation associant, pendant toute la durée de l’élaboration du projet, les habitants »

([72]) Rapport d’information n° 3735 du 11 mai 2016 sur la mise en application de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, déposé par M. Pupponi et M. Sordi

([73]) CGET-ONPV, Fiches techniques Conseils citoyens : les plus actifs sont également les plus autonomes ; Les conseils citoyens : acteurs des contrats de ville ?,  Rapport annuel 2017, 2018

([74]) Appel lancé le 16 octobre 2017 à l’issue des États généraux de la politique de la ville, http://bleublanczebre.fr/lappel-de-grigny/ ; la proposition 8 est relative à l’ANRU.

([75]) Jean-Louis Borloo, rapport Vivre ensemble, vivre en grand – pour une réconciliation nationale, 2018, p.16

([76]) Propos de Anne Terlez, représente de l’Assemblée des communautés de France, vice-présidente de la communauté d’agglomération de Seine-Eure, audition du 27 mai 2018

([77])  Les règles de création et de dissolution, d'organisation et de fonctionnement des GIP ainsi que les modalités de mise en œuvre de leur nouveau statut sont fixées par le chapitre II de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, modifié par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

([78]) Annexe déplacements.

([79]) Circulaire du 21 mars 1973 relative aux formes d’urbanisation dites « grands ensembles » et à la lutte contre la ségrégation sociale par l’habitat

([80])  Michel Bonetti, Chronique de la dégradation annoncée des opérations de rénovation urbaine liée au déficit de gestion urbaine, Laboratoire de sociologie urbaine générative, CSTB, avril 2007

([81])  Cité dans Comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU, Rénovation urbaine 2004-2008 – Quels moyens pour quels résultats ?, 2008, p.61

([82]) Voir CGET, Effets de la rénovation urbaine sur la gestion urbaine de proximité et la tranquillité publique, Synthèse, septembre 2016, p.16.

([83]) Voir DGALN-DHUP, Guide de rédaction des conventions d’utilité sociale pour la période 2018-2023, 1er août 2017.

([84]) Jean-Louis Borloo, rapport Vivre ensemble, vivre en grand – pour une réconciliation nationale, 2018, p.18

([85]) Convention de partenariat entre l’Anah et l’Anru dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain du 26 novembre 2014.

([86])  Opérations de requalification des copropriétés dégradées d’intérêt national

([87])  Texte adopté par l’Assemblée nationale, en première lecture, du projet de loi n° 846 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, TA n° 123

([88])  La loi no 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains

([89]) Arrêté du 20 mars 2007 portant approbation du règlement général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, article 1 du titre III.

([90]) ONZUS, rapport sur l’évaluation du PNRU « Dix ans de Programme national  de rénovation urbaine : Bilan et perspectives ».

([91]) CES de l’ANRU, rapport 2009, p11.

([92]) L’objectif de cohérence des projets de rénovation urbaine avec la politique de la ville a été affirmé par l’arrêté du 20 mars 2007 portant approbation du règlement général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, paragraphe 1.2  du titre III : « Les projets de rénovation urbaine constituent une composante parmi d’autres de la politique de la ville menée sur les territoires prioritaires et, à ce titre, doivent être cohérents avec les orientations du projet de développement social et urbain défini dans le cadre des contrats urbains de cohésion sociale. En ce sens, ils doivent concourir à la stratégie globale développée dans ce cadre pour, à la fois, améliorer la vie quotidienne des habitants des quartiers prioritaires et changer le statut et l’image de ces quartiers. ».

([93]) ONPV, rapport annuel de 2016, 2017, p134

([94]) Ibid., p.138

([95])  ONZUS, rapport sur l’évaluation du PNRU « Dix ans de Programme national  de rénovation urbaine : Bilan et perspectives », 2013, p93

([96])  Rapport d’information n° 2853, de François PUPPONI et François GOULARD, Quartiers défavorisés ou ghettos inavoués : la République impuissante, 21 octobre 2010, p135

([97])  CGET, Effets de la rénovation urbaine sur le développement économique et l’emploi, 2016

([98])  Deux conditions sont prévues : (1) au moins 50 % des salariés en contrat à durée indéterminée ou en contrat à durée déterminée d'au moins 12 mois doivent résider dans une ZFU ou un QPV de l'unité urbaine dans laquelle est située la ZFU ; (2) au moins 50 % des salariés embauchés à compter du 1er janvier 2015 en CDI ou en CDD d'au moins 12 mois depuis l'implantation de l'entreprise résident dans une ZFU ou un QPV de l'unité urbaine dans laquelle est située la ZFU.

([99])  Arrêté du 7 août 2015 portant approbation du règlement général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine relatif au nouveau programme national de renouvellement urbain, Préambule.

([100]) ONPV, rapport annuel 2017, 2018.

([101])  Alexis Vanderstocken, « Les bénéficiaires des clauses d’insertion dans le cadre du PNRU », ONPV, rapport annuel 2017, 2018

([102])  Article 3.1 du règlement général de l’ANRU du 16 juillet 2015.

([103]) Julien Pramil, « Délinquance enregistrée par les services de police et de gendarmerie », ONPV, rapport annuel 2017, 2018.

([104]) Référentiel en construction sur la mixité sociale.

([105]) CES de l’ANRU, «La place de l’école dans le cadre des projets de rénovation », octobre 2009.

([106]) Nicola Juste, « La mobilité quotidienne », ONPV, rapport 2017, 2018.

([107])  Arrêté du 20 mars 2007 portant approbation du règlement général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine.

([108]) CES de l’ANRU, rapport final « La mobilité et la qualité urbaine dans le cadre des projets de rénovation urbaine », octobre 2009.

([109])  Arrêté du 7 août 2015 portant approbation du règlement général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine relatif au nouveau programme national de renouvellement urbain.

([110]) Voir le tableau du a du 2 du B du I de la deuxième partie.

([111]) Arrêté du 7 août 2015 portant approbation du règlement général de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine relatif au nouveau programme national de renouvellement urbain.

([112])  Cour des comptes : juillet 2012, La politique de la ville, une décennie de réformes ; février 2017, Le logement social face au défi de l’accès des publics modestes et défavorisés.

([113]) Cour des comptes, juin 2014, L’Agence nationale pour la rénovation urbaine.

([114]) Cour des comptes, Rapport public annuel 2016, tome II – La politique de la ville : un cadre rénové, des priorités à préciser.

([115]) Entre 2009-2017, période pendant laquelle l’État n’a plus participé au financement des programmes, l’information n’est disponible que dans la rubrique dédiée aux opérateurs de l’État ; avant et après, elle est également inscrite dans le détail par action : en 2017, à l’action 4 du programme 147 Politique de la ville.

([116]) ONZUS, rapport sur l’évaluation du PNRU « Dix ans de Programme national  de rénovation urbaine : Bilan et perspectives ».

([117]) Thomas KIRSZBAUM et Renaud EPSTEIN, Synthèse de travaux universitaires et d’évaluation de la politique de la ville, 2010, p.7.

([118]) Ibid, p. 221.

([119])  Arrêté du 8 août 2017 modifiant la liste des services statistiques ministériels.

([120])  Loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques.

([121]) ONZUS, rapport sur l’évaluation du PNRU « Dix ans de Programme national  de rénovation urbaine : Bilan et perspectives ».

([122])  Annexe à la circulaire du Premier ministre du 7 janvier 2013 relative à la modernisation de l’action publique, Guide de cadrage méthodologique des politiques publiques.

([123]) Article 11 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine ; article 12 du décret n° 2004-123 du 9 février 2004 relatif à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine.

([124]) En principe, les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) ; en Île-de-France la direction régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement (DRIHL).

([125]) Rapport n° 1014 déposé par le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques et présenté par François CORNUT-GENTILLE et Rodrigue KOKOUENDO sur l’évaluation de l’action de l’État dans l’exercice de ses missions régaliennes en Seine-Saint-Denis, mai 2018.

([126]) Le système d’Instruction outillée et dématérialisée de l’Anru (IODA) devrait être opérationnel mi-2019.

([127]) Conseil d’orientation de l’ONZUS, ibid, p.48, points 116 à 120.

([128])  Articles 10 à 11 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine ; articles 2 à 5 du décret n° 2004-123 du 9 février 2004 relatif à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine

([129]) Rapport d’information n° 2853, de François Pupponi et François Goulard, Quartiers défavorisés ou ghettos inavoués : la République impuissante, 21 octobre 2010 et rapport d’information n° 3969 sur la mise en œuvre des conclusions du rapport d’information n° 2853 du 21 octobre 2010 sur l’évaluation des aides aux quartiers défavorisés, 17 novembre 2011.

([130]) Thomas KIRSZBAUM et Renaud EPSTEIN, Synthèse de travaux universitaires et d’évaluation de la politique de la ville, 2010, p. 221.

([131]) Ibid, p.57.

([132]) Ibid, p.22.