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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX‑SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 octobre 2024
RAPPORT D’INFORMATION
DÉPOSÉ
en application de l’article 145 du Règlement
PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
valant avis sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens de France Médias Monde pour la période 2024-2028
ET PRÉSENTÉ
PAR MM. Alain DAVID et Jean-François PORTARRIEU
Députés
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SOMMAIRE
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Pages
A. La mise en œuvre réussie du prÉcÉdent Contrat d’objectifs et de moyens
1. France Médias Monde a accompli ses missions et accru ses audiences
2. Une gestion rigoureuse sous forte contrainte budgétaire
B. Des objectifs conformes aux dÉfis du groupe, Assortis d’indicateurs adaptÉS
1. La liberté d’informer : marque de fabrique internationale de la France
2. La transformation numérique et les évolutions des métiers
3. Des indicateurs de performance cohérents avec les enjeux du COM
4. Des projets de proximité nécessaires dans des zones stratégiques
c. Les perspectives de développement du « hub » de Bucarest
d. Un audiovisuel extérieur dont les enjeux de proximité sont aussi en France
1. Les projets de réforme de l’audiovisuel public méconnaissent les activités internationales de FMM
ANNEXE 1 : Comparaison des indicateurs du COM 2020-2023 et du projet de COM 2024-2028
ANNEXE 2 : Liste des personnes auditionnÉes et rencontrÉes par les rapporteurs
En application de l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ([1]), le Parlement a été destinataire du projet de contrat d’objectifs et de moyens (COM) entre l’État et France Médias Monde pour 2024-2028, sur lequel la commission des affaires étrangères a souhaité adopter un rapport valant avis.
Créé en 2009 comme société nationale de programme « en charge de l’audiovisuel extérieur », le groupe France Médias Monde regroupe trois médias : France 24 – chaîne de télévision d’information continue en français, en anglais, en arabe et en espagnol –, Radio France Internationale (RFI) – radio mondiale en français et seize autres langues – ainsi que Monte Carlo Doualiya – radio de service public en langue arabe.
Ces médias émettent à l’échelle du monde, en vingt-et-une langues et permettent à notre pays de toucher un public très large attiré par la singularité du traitement de l’information et par une approche multilingue. Dans un contexte de guerre informationnelle marqué par l’intensification des luttes d’influences et la multiplication des canaux de désinformation, France Médias Monde se fixe pour mission d’apporter une information libre, indépendante, vérifiée et équilibrée, et constitue, à ce titre, un important outil de rayonnement de la France.
Au regard de la situation géopolitique, ce projet de COM réaffirme la mission première de France Médias Monde, qui est de promouvoir les valeurs démocratiques au niveau mondial et de proposer une vision française de l’actualité internationale caractérisée par son indépendance. Ceci exige de doter le groupe des moyens et des leviers d’action indispensables pour lui permettre de poursuivre et de développer ses actions.
C’est à l’aune de ces enjeux que les rapporteurs ont examiné le projet de COM. Les stratégies de développement définies doivent permettre aux chaînes de France Médias Monde de demeurer attractives et doivent être assorties des moyens leur permettant tout à la fois d’assumer les coûts des transformations numériques et de garantir la qualité de l’emploi de leurs collaborateurs. France Médias Monde doit être en mesure de maintenir sa présence partout dans le monde tout en développant de nouveaux projets de proximité dans des zones particulièrement stratégiques : en Afrique, au Moyen-Orient et en Europe orientale.
S’ils approuvent les orientations de ce projet de COM, largement conformes aux priorités stratégiques du groupe, les rapporteurs appellent à la plus grande vigilance pour que la trajectoire de financement figurant dans ce contrat ne soit pas remise en cause par le projet de loi de finances pour 2025. À défaut, France Médias Monde ne serait tout simplement pas en mesure d’accomplir les projets essentiels prévus par le projet de COM et aurait les plus grandes difficultés pour maintenir ses activités actuelles dans de bonnes conditions.
En outre, les rapporteurs appellent la représentation nationale à définir, dès les prochaines semaines, un mode de financement pérenne des sociétés audiovisuelles publiques, en modifiant les dispositions de la loi organique relative aux lois de finances ([2]) qui obligent à mettre fin, dans le prochain budget, à l’affectation de ressources fiscales qui a remplacé, à l’été 2022 ([3]), l’ancienne contribution à l’audiovisuel public.
Manquer cette échéance exposerait les médias de l’audiovisuel public à une budgétisation sèche de leur financement, alors qu’une recette affectée est une garantie visible et incontestable de leur indépendance. Ce critère revêt une importance particulière pour les entités de France Médias Monde, un financement trop direct sur le budget de l’État les exposant au risque d’être requalifiées en médias d’État, au même titre que les médias propagandistes et à l’exact opposé de leur raison d’être et des objectifs assignés par le projet de COM.
Les rapporteurs appellent donc à faire en sorte que l’État, par son prochain budget, n’hypothèque pas gravement les perspectives bienvenues figurant dans le projet de COM 2024-2028 du groupe France Médias Monde.
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I. UN CONTRAT D’OBJECTIFS ET DE MOYENS qui rÉpond aux enjeux stratégiques de France MÉdias Monde (FMM)
En tant que « société nationale de programme en charge de l’audiovisuel extérieur » définie par la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ([4]), relevant des tutelles conjointes du ministère de la culture et du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, France Médias Monde regroupe aujourd’hui :
— la chaîne de télévision France 24, qui comprend quatre chaînes mondiales d’information internationale, en français, en anglais, en arabe et en espagnol. Ces chaînes émettent en continu dans 533 millions de foyers sur les cinq continents et sont présentes sur les plateformes, réseaux sociaux, sites et applications numériques ;
— Radio France internationale, qui émet en français et dans seize autres langues ([5]). RFI est distribuée au moyen de 133 relais FM et de radio numérique terrestre (DAB+), des ondes courtes, d’une trentaine de satellites, des plateformes et des réseaux sociaux, ainsi que de ses sites et applications propres. Ses programmes sont repris par 1 700 radios partenaires ;
— Monte Carlo Doualiya (MCD), radio française de service public en langue arabe, diffusée au Proche et Moyen-Orient ainsi qu’en Mauritanie et à Djibouti, à travers 28 relais FM mais aussi à travers des radios partenaires, sur le satellite, sur les plateformes et réseaux sociaux, ainsi que sur son site et son application propres.
A. La mise en œuvre réussie du prÉcÉdent Contrat d’objectifs et de moyens
Comme le prévoit l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, un contrat d’objectifs et de moyens (COM) signé entre l’État et FMM définit ses stratégies éditoriales et de développement, les axes d’amélioration de sa gestion financière et des ressources humaines, ainsi que les moyens permettant d’y parvenir.
Il en est de même pour les autres grandes sociétés de l’audiovisuel public : France Télévisions, Radio France, l’Institut national de l’audiovisuel public (INA) et la chaîne franco-allemande Arte.
1. France Médias Monde a accompli ses missions et accru ses audiences
Le précédent COM, sur le projet duquel la commission des affaires étrangères avait porté une appréciation favorable en février 2021 ([6]), couvrait la période 2020-2022 puis a été prorogé par avenant pour l’année 2023.
Le bilan du précédent COM est très positif et la quasi-totalité des cibles ont été atteintes, ainsi que l’attestent les appréciations favorables figurant dans le dernier rapport annuel établi, en novembre 2023, par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) sur l’exécution du cahier des charges de France Médias Monde ([7]).
Les axes stratégiques définis par le COM 2020-2022, prolongé en 2023
Le précédent COM comprenait cinq axes communs à six entreprises de l’audiovisuel public : proposer une offre de service public identifiée qui s’adresse à tous les publics et accélérer la transformation numérique ; développer les synergies et partenariats entre entreprises de l’audiovisuel public ; consacrer prioritairement les moyens disponibles à l’offre au public ; assurer la maîtrise de la masse salariale et optimiser la gestion pour garantir la soutenabilité économique ; être une entreprise de média exemplaire.
Il définissait ensuite cinq axes spécifiques à FMM : assurer des missions internationales plus essentielles que jamais et porter les valeurs démocratiques dans le monde ; promouvoir la francophonie dans un monde plurilingue ; développer l’innovation numérique au service d’une offre éditoriale ambitieuse ; assurer une présence mondiale tout en développant une stratégie régionalisée (Afrique, monde arabe, Europe, Amériques et Asie) ; optimiser la gestion de l’entreprise.
Il convient tout particulièrement de relever :
— le déploiement de la distribution des chaînes du groupe, France 24 couvrant par exemple 533 millions de foyers fin 2023 contre 404 millions en 2019, soit une évolution de + 32 % ;
— la progression des audiences : les médias de FMM touchaient 255,5 millions de contacts hebdomadaires en 2023, contre 207 millions en 2019, soit une progression de + 20 % en cinq ans. Cette performance doit d’autant plus être saluée qu’elle s’est inscrite dans un contexte marqué par la défiance croissante affichée, dans de nombreuses parties du monde, à l’égard des médias occidentaux, doublée de censures des médias français en Russie et dans les nouveaux régimes autoritaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger, conduisant à une perte d’audience de 7 millions d’auditeurs et téléspectateurs en Afrique ;
— la forte croissance des performances numériques : les médias du groupe ont plus de 3,7 milliards de vidéos vues et de démarrages audio en 2023, ce qui correspond à une empreinte numérique de 88 millions de contacts chaque semaine, en hausse de 20 % sur deux ans. On compte plus de 113 millions d’abonnés sur les réseaux sociaux des médias du groupe en 2023, France 24 s’imposant comme le premier média français sur Facebook et YouTube.
Le groupe a accru sa présence internationale tout en remplissant les objectifs fixés par le COM, parmi lesquels il convient tout particulièrement de relever :
— le renforcement des dispositifs de lutte contre la désinformation, notamment par la création d’une cellule de vérification et d’investigation numérique « InfoVérif », au sein de RFI, complétant celle des « Observateurs » de France 24 ;
— l’accroissement de l’offre plurilingue des chaînes du groupe, avec le passage à une diffusion 24 heures sur 24 de la version hispanophone de France 24 en Amérique latine, la mise en place, en 2022, quelques mois après le déclenchement de l’invasion russe, d’une offre d’information en ukrainien depuis Bucarest, et le lancement de nouvelles offres de RFI en langues africaines depuis une rédaction établie à Dakar dans le cadre du projet « Afri’Kibaaru » financé par l’Agence française de développement (AFD), et enfin un accroissement de l’offre pluri-médias arabophone autour de France 24 et MCD.
Enfin, FMM a accru ses partenariats avec les autres sociétés du service public audiovisuel, conformément à l’un des axes prioritaires du précédent COM.
Il s’agit de coopérations éditoriales à des projets communs à l’ensemble de l’audiovisuel public comme le site franceinfo : dont France 24 apporte un tiers des contenus, ou encore l’offre éducative Lumni et l’offre culturelle Cultureprim. Les chaînes du groupe ont également accentué leurs coopérations éditoriales bilatérales : avec France Télévisions, qui fournit 80 % des sujets de France 24 sur l’actualité française ; avec Radio France, dont l’application propre met désormais à disposition les podcasts de RFI ; ou encore avec l’INA, en matière de formation.
En outre les coopérations techniques ont été systématisées, notamment par des achats groupés. Au demeurant, les différents COM applicables au cours de la décennie 2010 avaient déjà initié la mutualisation d’infrastructures et de technologies et le développement de solutions de cybersécurité à l’échelle de l’ensemble de l’audiovisuel public.
2. Une gestion rigoureuse sous forte contrainte budgétaire
Le précédent COM s’inscrivait dans le contexte d’une trajectoire budgétaire préétablie prévoyant la diminution, entre 2018 et 2022, des dotations publiques de FMM, ramenées de 257,8 millions d’euros en 2018 à 254,3 millions d’euros en 2022, en baisse de 3,5 millions d’euros, comme le détaille le tableau ci-après.
Dotations publiques de France Médias Monde depuis le compte de concours financiers « Audiovisuel public » entre 2018 et 2022
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2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
Dotations inscrites en lois de finances (en millions d’euros) |
257,8 |
256,2 |
255,2 |
254,7 |
254,3 |
Compensation des effets fiscaux de la suppression de la contribution à l’audiovisuel public (non déductibilité de la TVA sur les achats et assujettissement à la taxe sur les salaires) |
8,4 |
Source : commission des affaires étrangères, d’après les documents budgétaires.
Pour assumer, dans ce cadre budgétaire extrêmement contraint, les hausses mécaniques de charges de l’ordre de 16 millions d’euros par an liées à l’inflation et aux revalorisations salariales, FMM a été conduit à mettre en œuvre un plan d’économies de 20 millions d’euros, comprenant un plan de départs volontaires de 30 personnels, le retrait de certains réseaux de distribution et une politique de modération salariale ne permettant qu’une prise en compte partielle des effets de l’inflation sur le pouvoir d’achat de ses collaborateurs.
Le groupe a atteint un résultat net à l’équilibre en 2022, maintenu en 2023, alors même que le précédent COM fixait seulement un objectif de solde négatif à - 0,5 million d’euros en 2022. Les rapporteurs soulignent que le plan d’économies conduit entre 2018 et 2022 a fait suite aux efforts financiers que l’entreprise avait réalisés lors de la constitution du groupe rassemblant trois médias au sein d’une même structure, dont des plans de départs volontaires importants en 2009 et 2012, et des économies sur l’ensemble des frais de fonctionnement.
Le groupe s’est par ailleurs efforcé d’accroître ses ressources propres, passées de 3,3 % à 5,1 % de l’ensemble de ses ressources, avec une progression des recettes publicitaires de diffusions numériques mais contrebalancée par le peu de perspectives supplémentaires offertes par des marchés nationaux de la publicité en diffusion linéaire, qui favorisent les médias généralistes locaux au détriment des médias d’information internationale qui touchent des publics plus restreints.
Durant la période d’application du précédent COM, les efforts de l’entreprise pour dégager des économies l’ont utilement conduite à renforcer la structure de ses achats et à fiabiliser ses indicateurs et états financiers. Cependant, FMM a disposé de trop peu de marges de manœuvre pour pouvoir renforcer suffisamment ses services de fonctions support et transverses qui disposent aujourd’hui de moyens techniques et numériques limités.
Les rapporteurs relèvent que les dotations de FMM ne comptent que pour 7 % de l’ensemble des contributions de l’État au secteur de l’audiovisuel public, alors même que le groupe rassemble trois médias qui produisent et diffusent leurs programmes à l’échelle du monde sur une grande diversité de supports.
En outre, les montants des dotations allouées à FMM doivent être mis en perspective avec les efforts consentis par nos principaux partenaires, dans un contexte de forte concurrence des opérateurs nationaux d’information internationale.
Les budgets des principaux homologues occidentaux de FMM sont en effet très supérieurs :
— la chaîne d’information allemande Deutsche Welle dispose, en 2023, de plus de 408 millions d’euros, pour une audience de 320 millions de contacts hebdomadaires. Il convient de relever qu’en 2012, FMM et Deutsche Welle disposaient de budgets équivalents : en dix ans, l’écart s’est considérablement creusé ;
— BBC World Service (hors BBC News) dispose d’un budget de 412 millions d’euros pour une audience de 318 millions de contacts hebdomadaires ;
— USA Global Media dispose, en 2024, de 820 millions d’euros pour une audience de 420 millions de contacts hebdomadaires répartis sur Voice of America, Radio Free Europe – Radio Liberty, Radio Free Asia, Radio y Televisión Martí, ainsi que sur les cinq médias des Middle East Broadcasting Networks (MBN).
Lors de leur audition par les rapporteurs, les responsables du ministère de la culture et du ministère de l’Europe et des affaires étrangères ont souligné que FMM constitue aujourd’hui le média de service public international au « coût contact » le plus faible, c’est-à-dire qui mobilise la plus faible somme sur une année pour toucher un contact hebdomadaire. Le rapport entre les dépenses opérationnelles annuelles de FMM et le nombre de ses contacts hebdomadaires s’élève ainsi à 1,09 euro en 2023, contre 1,27 euro pour Deutsche Welle, 1,29 euro pour BBC World Service et 1,95 euro pour USA Global Media.
Si les efforts de FMM permettant cette performance doivent être salués, les rapporteurs soulignent qu’on ne saurait se satisfaire d’une économie de court terme si elle conduit à priver le groupe des moyens de poursuivre son développement. Une information internationale française « à bas coût » expose en effet au risque de ne plus disposer de moyens suffisants pour répondre aux attentes du public existant et pour toucher de nouveaux publics.
Ces constats ont été partagés par les tutelles de FMM à l’occasion de la préparation des budgets 2023 et 2024, comportant des dotations de l’État en hausse, à 263 puis 275 millions d’euros. Outre qu’il s’agissait de répondre à des besoins urgents pour permettre au groupe de faire face aux effets de l’inflation, cette hausse des crédits en fin de période du dernier COM visait à poser les bases d’une nouvelle trajectoire de moyens adaptée aux objectifs et aux stratégies définies dans le nouveau COM.
B. Des objectifs conformes aux dÉfis du groupe, Assortis d’indicateurs adaptÉS
Le projet de COM 2024-2028 couvre une période de cinq années, ce qui doit permettre à France Médias Monde de disposer d’une meilleure visibilité. Il s’articule autour de cinq grands axes stratégiques avec dix objectifs :
— cultiver la confiance avec les publics (axe 1), en proposant une information plurilingue internationale libre et indépendante partout dans le monde (objectif 1) et en luttant contre la désinformation et en contribuant à l’éducation aux médias et à l’information (objectif 2) ;
— accroître l’impact mondial de FMM en cultivant la proximité (axe 2), en renforçant ses capacités à atteindre des audiences internationales toujours plus larges (objectif 3), et en cultivant la proximité avec les publics à travers des projets de développement (objectif 4) ;
— mettre le numérique au cœur des enjeux de distribution et d’innovation (axe 3), en poursuivant l’adaptation des offres éditoriales à l’évolution des usages du numérique (objectif 5), et en adaptant l’organisation du groupe aux enjeux du numérique (objectif 6) ;
— agir en tant que grand groupe de service public exemplaire avec le sens du collectif (axe 4), en répondant à l’urgence écologique (objectif 7) et en poursuivant la politique d’inclusion et de responsabilité éthique (objectif 8) ;
— poursuivre une gestion rigoureuse et efficiente en s’adaptant aux enjeux de transformation (axe 5), en assurant les équilibres financiers de l’entreprise (objectif 9) et en adaptant le groupe à son développement (objectif 10).
La structure du nouveau COM diffère du précédent : il ne s’articule plus autour d’une partie commune aux sociétés de l’audiovisuel public puis d’une partie spécifique à FMM, mais est construit entièrement autour des missions du groupe, les coopérations, nombreuses, entre les sociétés de l’audiovisuel public étant déclinées tout au long du COM. Les rapporteurs saluent cette évolution dans laquelle ils voient une garantie de meilleure prise en compte par les tutelles des enjeux internationaux, si spécifiques, qui font le quotidien des médias de FMM.
Les grands axes du projet de COM constituent largement une reprise du « projet stratégique FMM 2023-2028 » ([8]), sur la base duquel, en janvier 2023, l’Arcom a renouvelé le mandat de Mme Marie-Christine Saragosse comme présidente-directrice générale. Ce projet est en effet articulé autour des thèmes de la confiance, de la proximité des publics à l’appui d’une envergure mondiale, du déploiement du numérique, d’une démarche collective des équipes et d’exigences fortes de gestion.
Dans un contexte de fortes tensions géopolitiques, de compétition informationnelle accrue et de climat de défiance à l’encontre des programmes d’information, la ligne directrice principale consiste à renforcer la crédibilité et la présence des médias de FMM à l’international en dotant le groupe des outils lui permettant de renouveler ses offres de contenus et ses implantations locales. Cette ambition paraît essentielle aux rapporteurs, afin de permettre à FMM de tenir son rang parmi les grands médias internationaux, en consolidant le périmètre de ses missions tout en développant de nouveaux projets stratégiques.
1. La liberté d’informer : marque de fabrique internationale de la France
Le premier axe du COM 2024-2028 vise à « cultiver la confiance avec les publics », ce qui exige que les médias de FMM continuent d’être reconnus comme libres et indépendants, ayant la déontologie, la rigueur et l’exigence comme guides constants.
Ainsi que le souligne l’Arcom dans son dernier rapport d’évaluation de la mise en œuvre du cahier des charges de FMM, le groupe « évolue dans un contexte difficile. Du seul fait de son statut public, il fait l’objet dans un nombre croissant de pays d’une mise en cause injustifiée de la légitimité de ses médias et de l’indépendance du travail de ses journalistes. La situation géopolitique nécessite de réaffirmer et de garantir sa mission première qui est de promouvoir les valeurs démocratiques au niveau mondial et de proposer une vision française de l’actualité internationale caractérisée par son indépendance. » ([9]).
Le projet de COM rappelle que la ligne éditoriale des médias de FMM consiste en rapporter des faits de manière documentée, vérifiée et équilibrée, conformément à la déontologie d’une presse indépendante dans une démocratie et aux principes défendus par la France dans le monde.
Les rapporteurs soulignent donc qu’il y a bien entière complémentarité entre la liberté éditoriale des chaînes de FMM et l’influence de la France, qui se fonde sur la promotion d’un modèle de liberté. C’est en tant que vecteur de pluralisme que les médias de FMM peuvent jouer un rôle de référence dans des bassins d’audience qui n’ont pas facilement accès à une information libre et professionnelle, et être ainsi une voix de la France porteuse de valeurs.
Loin des mauvais procès instruits parfois contre FMM d’être insuffisamment le relais de la diplomatie française ou au contraire de l’être trop, la force principale de notre audiovisuel extérieur réside bien dans sa liberté et son éthique professionnelles. Au demeurant, les rapporteurs soulignent que l’irrévérence du journalisme de qualité est, de longue date, une image de marque de la France : c’est un atout pour nos médias internationaux de service public qu’il serait contreproductif de chercher à étouffer en confondant information et communication.
Ce principe est d’ailleurs énoncé dans le préambule du cahier des charges de FMM, annexé à un décret du 25 janvier 2012 ([10]) qui indique que ses médias proposent une information internationale « caractérisée par son indépendance par rapport au pouvoir politique ». C’est parce qu’il ne subit aucune intervention éditoriale de la part du Gouvernement que le groupe FMM peut remplir les missions fixées par ce même cahier des charges, comme la promotion des valeurs des droits de l’homme, de la francophonie, de l’égalité femmes-hommes ou la sensibilisation des publics aux enjeux du développement durable.
La liberté des médias de FMM constitue donc une composante pleine et entière de la stratégie d’influence de la France, a fortiori face aux manipulations de l’information et aux tentatives de déstabilisation menées par des puissances autoritaires qui ont investi tous les domaines de la « guerre informationnelle » et y consacrent des moyens croissants.
L’investissement des puissances autoritaires dans la guerre informationnelle
La chaîne Russia Today (RT) dispose d’un budget environ quatre fois plus important que celui de France 24. Le budget de la chaîne russe cumulé avec celui du site d’information Sputnik était estimé à 430 millions d’euros en 2021. Les deux médias assurent une diffusion de leurs contenus en trente-deux langues.
En Afrique, l’activisme croissant de RT se double de financements publics russes à destination des médias locaux permettant de former des équipes entières de journalistes africains en Russie et de leur fournir des contenus clés en main en langue française.
Fin 2023, RT a ouvert un bureau à Alger pour déployer RT Arabic, dans le cadre d’une coopération avec la chaîne algérienne, AL24 News.
La Chine est présente à travers les chaînes de CGTN (français et anglais) et China Radio International, qui diffusent des contenus en cinquante langues et notamment en haoussa, kiswahili, français, anglais, arabe, portugais. Peu de données vérifiées sont disponibles, cependant le groupe aurait bénéficié d’investissements pluriannuels de plusieurs milliards d’euros.
En 2022, la Turquie a lancé le site d’information en français TRT Français, déclinaison de TRT, la radio-télévision publique turque, afin de prendre place dans le paysage médiatique francophone, en Afrique mais également en France, à destination de la communauté turcophone.
En mars 2023, s’est ajoutée TRT Africa, plateforme d’information numérique en quatre langues : swahili, anglais, haoussa et français.
Le projet de COM 2024-2028 prévoit donc que le groupe va continuer de saisir toutes les occasions pour réaffirmer le cadre de son indépendance et de sa déontologie, à l’exemple de la certification JTI (Journalism Trust Initiative) de Reporters sans frontières, obtenue en 2023 avec le score maximal de 100 % : sur la période du COM, FMM s’engage à renouveler cette certification qui arrivera à échéance en septembre 2025.
Sur ses antennes, FMM s’attache aussi à faire la transparence sur la manière dont ses rédactions et ses journalistes travaillent, à l’image d’une nouvelle émission Pourquoi RFI dit ça ?, ou encore du podcast original Témoins d’actu, désormais diffusé à l’antenne de RFI, où des journalistes présentent la manière dont ils ont couvert un fait d’actualité récent.
La démarche de transparence et d’exemplarité est un gage de succès dans les missions de lutte contre la désinformation, détaillées par l’objectif 2 du projet de COM. Une quinzaine de programmes des médias de FMM y sont déjà spécifiquement consacrés, en français et en langues étrangères, et bénéficient de l’appui de la cellule de vérification et d’investigation numérique de RFI, « InfoVérif » ainsi que des Observateurs de France 24, déjà mentionnés, qui œuvrent de façon transversale avec toutes les rédactions.
Le projet de COM indique que FMM va renforcer les coopérations avec les autres sociétés de l’audiovisuel public en matière de lutte contre la désinformation, notamment par une montée en puissance de franceinfo : sur les réseaux sociaux et l’agrégation des contenus communs autour d’une marque unique « Vrai ou faux », limitée cependant aux contenus en langue française.
Par ailleurs, le groupe va consacrer des moyens supplémentaires aux procédures internes de veille, d’alerte et de réponse aux opérations de désinformation qui manipulent les images, détournent l’identité des médias ou mettent en cause les institutions démocratiques à des fins de déstabilisation. Face aux attaques informationnelles issues des intelligences artificielles génératives, dites de « deepfake » et de « deepvoice », le groupe a formalisé des relations de travail systématiques avec Viginum, le service de vigilance et protection de l’État contre les ingérences numériques étrangères, ainsi qu’avec l’Arcom.
Enfin, le projet de COM consacre un volet aux actions communes des sociétés de l’audiovisuel public en matière d’éducation aux médias et à l’information, sous l’égide du ministère de l’éducation nationale, du ministère de la culture et du centre pour l’éducation aux médias et à l’information (CLEMI). Ces coopérations passeront par un label commun, l’organisation de webinaires communs et des interventions de journalistes auprès des élèves et enseignants : FMM y apportera son expertise internationale, tant en France qu’à l’étranger, où ses réseaux de correspondants et ses rédactions locales pourront intervenir, par exemple, dans les établissements de l’enseignement français à l’étranger.
La poursuite des projets de FMM financés par l’Union européenne
Le projet de COM prévoit la poursuite des projets bénéficiant de financements de l’Union européenne :
— ENTR, qui est une offre 100 % vidéo, 100 % réseaux sociaux à destination des jeunes européens, en dix langues : français, anglais, allemand, polonais, portugais, roumain, bulgare, néerlandais et, depuis 2024, en hongrois et en slovaque. Réalisé à partir des infrastructures de FMM et de Deutsche Welle, avec des partenaires en Roumanie, Pologne, Irlande et au Portugal, ENTR a cumulé plus de 117 millions de vidéos vues en 2023, soit plus du double qu’en 2022. Le co-financement de la direction générale de la commission européenne Connect a été renouvelé pour la période 2024-2025, à hauteur de 904 000 euros.
— InfoMigrants fruit d’une coopération entre FMM, Deutsche Welle et l’agence de presse italienne ANSA, qui est une offre numérique d’information destinée aux migrants en six langues : français, anglais, arabe, dari, pachtoune et bengali, accessible via son site propriétaire, des messageries telles que Viber et sur les réseaux sociaux. En 2023, InfoMigrants a enregistré 194 millions de vidéos vues (+160 % vs 2022). Le co-financement de la direction générale HOME a été renouvelé pour la période 2025-2026, à hauteur de 5 millions d’euros.
2. La transformation numérique et les évolutions des métiers
Le projet de COM 2024-2028 décline une stratégie de transformation numérique au travers de deux objectifs, l’un visant à adapter l’offre éditoriale aux usages numériques (objectif 5), l’autre visant à y adapter l’organisation de FMM (objectif 6). Cet enjeu constitue au demeurant un axe transversal de la stratégie du groupe, indispensable pour atteindre tant les objectifs d’impact mondial de ses médias (objectif 3) que de lutte contre les fausses informations (objectif 2).
Le projet de COM confirme la stratégie de FMM qui vise à maximiser la visibilité de ses contenus et de ses marques sur tous les grands carrefours d’audience numérique, incluant les réseaux sociaux et les plateformes, afin de peser là où sont présents les jeunes, là où les « infox » essaiment le plus et également là où la censure peut parfois être contournée.
Cette stratégie est dite « d’hyperdistribution raisonnée » dans la mesure où FMM veille à réduire le lien de dépendance à l’égard des géants du numérique et combine la distribution sur des plateformes tierces et sur des environnements propres. Ainsi, RFI a lancé en 2023 sa nouvelle application « Pure radio » et les sites et applications de France 24 sont actuellement en cours de refonte pour en améliorer le design et les parcours utilisateurs. Le groupe souhaite accroître le référencement naturel (SEO) afin de mieux guider les moteurs de recherche vers ses environnements propres. Pour ce qui est des contenus en langue française, FMM pourra également bénéficier des coopérations entre sociétés de l’audiovisuel public pour renforcer les passerelles entre leurs contenus complémentaires, à travers un algorithme de recommandations croisées ou « moteur de rebond ».
Dans son avis rendu sur le projet de COM ([11]), l’Arcom a souscrit pleinement à cette démarche, en soulignant qu’elle doit répondre, d’une part, à un enjeu d’intermédiation, de référencement et de découvrabilité des contenus et, d’autre part, à celui de la souveraineté éditoriale des programmes. L’Arcom recommande que FMM fédère ses homologues du DG8 ([12]), autour d’initiatives visant à accentuer leurs présences et leurs référencements dans les environnements numériques dits OTT, comme Netflix ou Prime Video, qui sont des opportunités de développement.
L’adaptation aux évolutions des modes de consommation numérique et aux réseaux sociaux ne signifie pour autant pas que le groupe va négliger la distribution classique dite « linéaire » qui continue d’être importante là où internet a un coût élevé : les audiences linéaires continueront d’être des indicateurs de premier plan pour mesurer l’impact des chaînes du groupe.
Moins qu’aucune autre, la stratégie de transformation numérique ne saurait se construire sans les femmes et les hommes des rédactions de FMM, tant parmi les journalistes que les personnels techniques, puisqu’il s’agit avant tout de les doter d’outils de travail qui sont les leviers de développement de l’entreprise. FMM devra donc disposer des moyens pour améliorer son organisation ainsi que la qualité des conditions de travail, en permettant notamment :
— d’accompagner l’évolution des métiers par la formation des journalistes et des techniciens à la production et à la diffusion numériques, en évolution constante, ainsi qu’aux enjeux de l’intelligence artificielle ;
— de réformer l’organisation du travail des journalistes au sein des rédactions de France 24. L’objectif est d’y stabiliser les équipes pour chaque tranche horaire afin de simplifier les planifications et de réduire la précarité, ce qui devra permettre, à terme, d’intégrer une cinquantaine de pigistes au sein des équipes permanentes de la chaîne ;
— de renforcer les équipes de journalistes dédiées aux réseaux sociaux ;
— de redimensionner les fonctions support et techniques, les éventuelles marges de manœuvre financières susceptibles d’être dégagées au cours de la période du COM devant y être affectées en priorité.
Enfin, la direction de FMM a confirmé aux rapporteurs son engagement à œuvrer à la prévention des risques professionnels et à la qualité du management, dans le cadre d’une démarche globale d’amélioration des parcours-métiers, ce qui est conforme à l’objectif 8 du projet de COM, consacré à la politique de ressources humaines en faveur de l’égalité professionnelle et de la diversité, et à l’objectif 10 visant à adapter l’entreprise à son développement. Les rapporteurs soulignent qu’ils y sont tout particulièrement attachés.
3. Des indicateurs de performance cohérents avec les enjeux du COM
Le projet de COM 2024-2028 maintient un grand nombre d’indicateurs du précédent contrat ce qui permet de suivre leur évolution sur le temps long. Les modifications ponctuelles sont conformes aux objectifs assignés à FMM.
Les principaux indicateurs d’audience ont été reconduits : ils mesurent la distribution des chaînes ainsi que le nombre de contacts ou la consommation des vidéos et des sons. La mesure est étendue au développement numérique de la radio (DAB+) et à la couverture des médias du groupe sur les réseaux sociaux.
L’indicateur des audiences en français et en langues étrangères est désormais suivi dans un périmètre global de contacts, et non plus au travers des seuls environnements propriétaires du groupe.
Dans son avis sur le projet de COM, déjà mentionné, l’Arcom recommande de décliner ces indicateurs d’audience par cibles et par médias, et de distinguer les audiences en français et en langues étrangères. Ces précisions pourront utilement être apportées dans les rapports annuels sur l’exécution du COM prévus par l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.
Le projet de COM maintient un indicateur qualitatif de perception qui recense les opinions favorables concernant l’expertise, l’objectivité et le caractère référent des médias du groupe dans les principales zones de diffusion. Cet indicateur n’est plus assorti de cibles de progression mais a été transformé en indicateur de suivi, ce qui paraît plus adapté à sa sensibilité aux tensions internationales et aux relations entre la France et les régimes autoritaires.
Les indicateurs de gestion ont été maintenus avec le suivi du résultat net, de la masse salariale et des ressources propres.
Les indicateurs en matière de responsabilités sociales de l’entreprise (RSE) sont maintenus. Le projet de COM comporte un index de l’égalité professionnelle femmes-hommes avec une mesure élargie de représentation sur l’ensemble des antennes. En matière d’inclusion et de lutte contre les discriminations, un plan d’action fixe l’objectif d’obtenir, en 2028 au plus tard, le label AFNOR diversité.
Les engagements environnementaux sont renforcés, avec la définition de cibles de baisse des émissions de gaz à effet de serre qui devront avoir diminué de 34 % en 2026 et de 36 % en 2028 par rapport aux niveaux constatés en 2019.
Enfin, les indicateurs communs au service public audiovisuel sont ajustés pour refléter les axes des coopérations prioritaires, avec un indicateur sur l’éducation aux médias et à l’information, un indicateur sur l’audience de franceinfo : et un indicateur relatif aux achats communs.
Le tableau présenté en annexe de ce rapport d’information comporte une présentation détaillée des indicateurs du projet de COM 2024-2028 et les compare aux indicateurs du précédent.
4. Des projets de proximité nécessaires dans des zones stratégiques
L’objectif 4 du projet de COM vise à ce que FMM « cultive la proximité avec les publics ».
Comme l’indique Marie-Christine Saragosse dans le projet stratégique « FMM 2023-2028 » ([13]), déjà mentionné, la proximité du groupe audiovisuel international avec ses publics réside dans l’interaction entre :
— les compétences des rédactions présentes au siège de FMM, plurilingues et riches d’une soixantaine de nationalités, disposant de spécialistes des différentes zones géographiques, de grands reporters susceptibles de se rendre sur le terrain à tout moment et de magazines qui se délocalisent également sur le terrain ;
— le réseau des correspondants, mondial et plurilingue, qui donne au groupe sa dimension internationale de terrain ;
— et enfin des implantations de proximité dédiées à certaines des langues pratiquées par le groupe, à Dakar (mandenkan et fulfulde), Lagos (haoussa), Nairobi (swahili), Bucarest (roumain), Phnom Penh (khmer) et Bogota (espagnol).
Ces rédactions délocalisées permettent en effet d’être de plain-pied avec les publics et en phase avec leur environnement culturel, linguistique, économique et géostratégique.
Afin de répondre à l’urgence internationale et aux multiples crises qui sont à l’œuvre à l’échelle mondiale, le projet de COM présente un plan de lancement de plusieurs nouvelles offres de proximité en Afrique, au Moyen-Orient et en Europe centrale et orientale, financés par des crédits alloués par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE) à partir du programme budgétaire 209 Solidarité avec les pays en développement, de la mission Aide publique au développement.
Lors de leur audition par les rapporteurs, les responsables du MEAE ont réaffirmé leur intention de maintenir le financement de ces projets qu’ils considèrent comme prioritaires, malgré les contraintes budgétaires constatées en 2024 et annoncées pour 2025, en ce qui concerne l’ensemble des crédits d’aide publique au développement. Outre 2,45 millions d’euros dès 2024, le projet de COM fait ainsi état d’une contribution du MEAE de 4,1 millions d’euros en 2025, portée à 4,9 millions d’euros à partir de 2026.
Dès la signature du COM, une convention pluriannuelle spécifique sera conclue entre FMM et le MEAE, précisant les modalités de financement jusqu’en 2028 ainsi que le reporting annuel qui permettra de suivre et d’évaluer ces projets.
a. En Afrique, la pérennisation des rédactions en langues africaines et le déploiement d’offres francophones de proximité
Initié en 2020 sur financements de l’Agence française de développement, le projet Afri’Kibaaru permet à FMM de disposer, à Dakar, d’une rédaction de RFI de 26 journalistes dans deux langues véhiculaires de l’Afrique de l’Ouest, le mandenkan et le fulfulde, pour deux heures de programmes par jour dans chaque langue. Ces programmes rencontrent de véritables succès d’audience : ils sont connus par 70 % des habitants des zones concernées, particulièrement les jeunes et les femmes, et les évaluations qualitatives sont très positives, permettant d’élargir les audiences de RFI à des publics qui étaient éloignés des médias français mais qui étaient en attente d’un traitement différent de l’actualité et des enjeux de société ([14]).
S’y ajoutent des actions de coopération et de renforcement des capacités des médias locaux, opérées par RFI en partenariat avec Canal France international (CFI), agence publique opérateur du MEAE pour la coopération dans les domaines des médias, devenu une filiale de FMM en 2017.
Après un premier financement de 15 millions d’euros entre 2020 et le printemps 2024, l’AFD a accepté de reconduire le projet en accordant 8,3 millions d’euros à RFI pour vingt-huit mois, jusqu’en juillet 2026, ce qui permettra d’élargir la zone de diffusion et de la rédaction numérique. La subvention attribuée à CFI est renouvelée pour 1,7 million d’euros.
Les contributions distinctes du MEAE, sur crédits du programme 209, vont permettre de développer deux nouveaux projets de proximité en Afrique.
Il s’agira, en premier lieu, d’un décrochage quotidien de France 24 en français, réalisé par des journalistes africains et proposant des contenus positifs sur « l’Afrique qui gagne », à destination des francophones de l’ensemble du continent, sur des sujets conçus par et pour les Africains.
L’offre éditoriale pourra s’appuyer sur le réseau des anciens de la Bourse Ghislaine Dupont et Claude Verlon, créée, en hommage aux deux journalistes de RFI assassinés, afin de soutenir la liberté d’informer en Afrique subsaharienne. Cette bourse a permis de fédérer et de former une communauté de 100 journalistes et 100 techniciens issus de toute l’Afrique francophone, qui ont été réunis en novembre 2023 à Abidjan pour célébrer la dixième année du dispositif. FMM a également pu constituer des viviers de talents dans les clubs RFI, regroupements d’auditeurs porteurs de projets associatifs, ainsi que parmi les contributeurs aux concours des petites ondes participatives (ePoP) consacrés aux changements climatiques et environnementaux, mis en place en collaboration avec l’Institut de recherche pour le développement (IRD).
Cette nouvelle rédaction de France 24 sera collocalisée avec la rédaction de RFI en langues africaines, au sein d’un « hub » établi dans de nouveaux locaux plus adaptés que les locaux actuels des équipes d’Afri’Kibaaru : un bail a été signé en juillet 2024 et le déménagement dans le nouveau siège est prévu en mars 2025.
En second lieu, le MEAE permettra à FMM de déployer une offre 100 % numérique à destination des jeunesses africaines, sur le modèle de l’ENTR européen (voir supra). Cet « ENTR panafricain » offrira des contenus d’information numérique et interactive, adaptés aux formats des réseaux sociaux. Ils viseront principalement les jeunes urbains ayant accès facilement à internet et particulièrement exposés à la désinformation. Sur des formats courts, des journalistes africains y traiteront des enjeux civiques, sociétaux, économiques, climatiques et culturels qui suscitent l’intérêt et l’engagement des jeunes Africains. L’offre sera largement francophone mais pourra comporter également des contenus en langues africaines. Cela permettra de toucher plus directement les jeunes générations qui construisent l’opinion publique de demain.
La direction de FMM a indiqué aux rapporteurs que la production éditoriale devrait pouvoir être lancée à la mi-2025. Un chef de projet vient d’être nommé au siège de FMM et, à Dakar, le futur rédacteur en chef de l’équipe numérique et le responsable administratif ont été recrutés.
L’Afrique, au cœur des succès d’audiences de RFI et France 24
Selon les données de l’enquête Africascope réalisée, à intervalles réguliers, par l’institut Kantar-TNS, l’Afrique francophone représente plus de la moitié des audiences hebdomadaires de RFI, pour près de 33 millions d’auditeurs en 2023, auxquels s’ajoutent 6,5 millions d’auditeurs en Afrique non francophone.
RFI figure parmi les cinq radios les plus écoutées quotidiennement, et en première place à Abidjan, Brazzaville et Libreville : 87 % des habitants déclarent la connaître et elle est écoutée chaque semaine par 37,6 % de la population, ainsi que par deux-tiers des cadres.
L’Afrique est le premier bassin d’audience de France 24, avec 46,8 millions de téléspectateurs en 2023 (+ 11 millions par rapport à 2019), dont 34,1 millions en Afrique francophone, en progression notable à Kinshasa et Brazzaville. Près d’un habitant sur deux, et plus de huit cadres sur dix, la regardent chaque semaine dans les huit métropoles couvertes par l’enquête Africascope.
La croissance démographique des pays d’Afrique permet de compenser les baisses subies suite à l’arrêt des diffusions hertziennes au Mali (- 1,3 million), au Burkina Faso (- 1,1 million) et au Niger (- 0,4 million).
Ainsi que l’établissent les indicateurs de suivi du précédent COM, la qualité de l’information de RFI et de France 24 est reconnue en Afrique : en 2022, les résultats d’opinions favorables évaluant les valeurs d’expertise, d’objectivité et de référence s’y établissent à plus de 75 %, soit 10 points de plus que dans la zone Maghreb par exemple.
b. À Beyrouth, une équipe de production numérique en langue arabe pour France 24 et Monte Carlo Doualiya
En 2023, l’audience hebdomadaire de MCD, mesurée dans 14 pays, s’établit à 7,6 millions d’auditeurs, en baisse de 1,7 million par rapport à 2022 et de 2,2 millions par rapport à 2019. Tout comme France 24, elle est impactée par l’instabilité de la zone et la forte polarisation des médias locaux, notamment au sujet du conflit entre Israël et le Hamas, alors que MCD veille à apporter une information vérifiée et équilibrée. Son émetteur de Tripoli a été par ailleurs coupé entraînant mécaniquement une baisse d’audience importante.
Afin de mieux adapter l’offre éditoriale de FMM en langue arabe à un paysage audiovisuel panarabe particulièrement concurrentiel, le MEAE s’est engagé à financer l’installation, à Beyrouth, d’un « hub » visant à renforcer la production numérique en langue arabe de France 24 et de MCD.
Une équipe composée d’une quinzaine de journalistes arabophones, arrimée aux rédactions de France 24 et de MCD basées à Paris, complétée par des profils techniques disposant de compétences numériques, produira des contenus dans tous les formats - en particulier sur les réseaux sociaux – et disséminera les contenus produits à Paris. Cette rédaction permettra d’enrichir les offres actuelles en couvrant des pays cibles du Proche et Moyen-Orient, dont le Liban, mais aussi l’actualité des pays du monde arabe vue depuis la région. Elles doteront les rédactions de FMM de nouvelles ressources pour lutter contre les « infox ».
FMM a créé, en juillet 2024, une filiale France Médias Monde Orient, enregistrée au registre libanais du commerce et des sociétés. Les locaux, situés au sein de l’École supérieure des affaires (ESA) de Beyrouth, seront prêts fin décembre 2024. La direction opérationnelle est en place et le recrutement des journalistes est en cours de finalisation, ce pôle devant être opérationnel au plus tard en janvier 2025.
La dégradation actuelle de la situation géopolitique au Proche-Orient atteste du caractère prioritaire de ce projet, tout en l’exposant à de nouveaux risques sécuritaires, que la direction de FMM comme les représentants du MEAE ont indiqué suivre avec attention.
c. Les perspectives de développement du « hub » de Bucarest
FMM dispose, depuis 1990, d’un ancrage historique en Europe centrale et orientale, avec la radio RFI România, qui rassemble 10,6 % des audiences hebdomadaires en Roumanie soit près de 500 000 auditeurs, avec 6,4 millions de visites sur ses environnements numériques en 2023.
Disposant d’une équipe de 26 personnes à Bucarest et de 2 journalistes au siège de FMM, RFI România assure tous les jours 13 heures de programmes en roumain, et diffuse les programmes de RFI en français le reste du temps, y compris sur le numérique.
Le projet « Europa+ » en collaboration avec l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) permet en outre de diffuser, trois fois par semaine, une revue de presse sur l’actualité des Balkans occidentaux, d’Europe centrale et orientale, et d’Asie centrale.
De nouveaux locaux ont été inaugurés en novembre 2023, qui accueillent également les équipes de rédaction en roumain du projet numérique européen ENTR.
À l’été 2022, quelques mois après l’invasion russe, FMM a pu adosser à la rédaction de RFI România un centre régional accueillant des journalistes ukrainiens.
En lien étroit avec le projet Yak Vdoma (« comme à la maison » en Ukrainien) offrants des résidences à des journalistes en exil, RFI a pu établir une rédaction en ukrainien forte de onze journalistes, dont une large majorité de femmes, qui propose une offre exclusivement numérique. Les contenus multimédias permettent de couvrir l’actualité de la guerre en Ukraine de manière indépendante, équilibrée et vérifiée, ainsi que l’actualité européenne et internationale et des diasporas ukrainiennes. L’offre rencontre une audience significative, avec 880 000 contacts hebdomadaires en 2023, et 2,6 millions d’utilisateurs sur Facebook en mai 2024.
Cette initiative a été financée par le MEAE à hauteur de 1,5 million d’euros sur deux ans, d’abord avec 500 000 euros de crédits d’urgence provenant du Centre de crise et de soutien sur le programme 105 Action de la France en Europe et dans le monde, de la mission Action extérieure de l’État, puis pour 1 million d’euros dans le cadre d’un Fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI) du programme 209.
Afin d’assurer la continuité de l’activité de la rédaction de RFI en ukrainien, le projet de COM prévoit une nouvelle dotation du MEAE, sur le programme 209, à hauteur de 800 000 euros en 2025, portés à 1 million d’euros à compter de 2026.
En outre, le projet de COM mentionne la possibilité de compléter le « hub » de Bucarest par une nouvelle offre de RFI en langue turque. Il s’agirait d’une offre numérique pour les contenus vidéo-mobiles et les réseaux sociaux afin de toucher la jeunesse de Turquie désireuse d’ouverture sur le monde mais également les turcophones des diasporas, qui constituent, parmi les immigrés européens, la nationalité avec la plus forte transmission de la langue d’origine entre générations, notamment en France.
FMM ne dispose cependant pas de garanties fermes de financement de ce projet, dont l’échéance est reportée a minima à 2026. Les rapporteurs soulignent l’importance qui s’y attache, dans un contexte d’interventionnisme croissant de la Turquie dans la guerre informationnelle et afin de favoriser les liens entre la France et les opinions turques favorables au modèle européen.
d. Un audiovisuel extérieur dont les enjeux de proximité sont aussi en France
Dans un rapport récent ([15]), la commission d’enquête du Sénat sur les politiques publiques face aux opérations d’ingérence étrangère appelle à renforcer l’audience de l’audiovisuel extérieur à destination des diasporas présentes sur notre territoire, cibles privilégiées pour les opérations d’influence et les campagnes de désinformation des régimes autoritaires. Les sénateurs formulent donc la recommandation de « rendre plus accessibles les offres de radio de FMM en langue étrangère sur le territoire français grâce à la radio numérique terrestre (DAB +) ».
Les rapporteurs constatent que le projet de COM prévoit cette possibilité, puisqu’il indique, à l’appui de l’objectif 1 de diffusion d’une information plurilingue internationale libre et indépendante partout dans le monde, que « FMM contribue, par son plurilinguisme et son ouverture sur le monde, à la cohésion sociale et au vivre-ensemble, et à ce titre le rôle de ses médias en français et en langues étrangères sur le territoire national pourra se développer grâce notamment à une stratégie de diffusion DAB+ ciblée, s’agissant de ses radios, en fonction des opportunités ».
Il convient de relever que FMM fait déjà l’objet, sur le territoire français, d’une diffusion hertzienne de RFI en français en Ile-de-France, ainsi que d’une diffusion en DAB+ à Lille, Lyon, Strasbourg, Marseille, Toulouse et Bordeaux. Depuis 2021, MCD est diffusée en DAB+ en Ile-de-France et à Marseille. France 24 est par ailleurs accessible en français, en anglais et en arabe dans 27,3 millions de foyers équipés d’un téléviseur et d’offres de câble, satellites et bouquets des fournisseurs d’accès internet. La chaîne en espagnol, plus récente, est disponible dans 11,8 millions de foyers sur deux bouquets de fournisseurs d’accès.
L’enjeu est désormais de permettre, sur la période du COM 2024-2028, des déploiements dans des zones ciblées de RFI dans ses langues étrangères, par exemple le chinois, ainsi que de MCD.
La direction de FMM a indiqué aux rapporteurs avoir obtenu un avis favorable de l’Arcom afin de pouvoir diffuser RFI en DAB+ en Ile-de-France. Le surcoût de diffusion annuel serait de l’ordre de 40 000 euros.
Cela nécessite cependant de modifier l’article 7 du cahier des charges de FMM, annexé au décret du 22 janvier 2012 déjà mentionné, qui évoque expressément, concernant l’Ile-de-France, une diffusion « hertzienne terrestre en mode analogique » et non en mode numérique. Envisagée cet été, cette modification aurait excédé les compétences de la ministre de la Culture, chargée des affaires courantes au sein d’un gouvernement démissionnaire. La France disposant désormais d’un gouvernement de plein exercice, les rapporteurs forment le vœu que la ministre de la Culture puisse procéder à cette modification sans délai.
II. Un contrat d’objectifs et de moyens fragilisÉ par les incertitudes entourant le statut, les modalitÉs de financement et les niveaux de ressources de FMM
Si les rapporteurs saluent les perspectives tracées par le projet de COM, ils ne peuvent que déplorer les incertitudes qui entourent ses modalités concrètes de mise en œuvre, tant pour ce qui concerne les modalités futures du financement de FMM que les montants de crédits dont le groupe pourra effectivement disposer, ou encore en raison des effets perturbateurs des propositions récurrentes d’absorption dans un ensemble regroupant les autres sociétés de l’audiovisuel public.
A. Des incertitudes tenant aux projets de rÉforme de l’Audiovisuel public et aux retards pris pour en dÉfinir un mode de financement pÉrenne
1. Les projets de réforme de l’audiovisuel public méconnaissent les activités internationales de FMM
Alors que les travaux de conception de ce projet de COM ont été engagés dès le début de l’année 2023 dans l’objectif d’une signature au début 2024, sa transmission au Parlement a été retardée de plus de six mois par les débats entourant la proposition de loi du sénateur Laurent Lafon, relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle ([16])..
Cette réforme visait à unifier les sociétés nationales de programme autour d’une structure commune de gouvernance (holding) rassemblant France Télévisions, Radio France, l’INA et également France Médias Monde, à compter de janvier 2025. Au cours de l’examen du texte en première lecture à l’Assemblée nationale, les évolutions proposées par la ministre de la Culture Rachida Dati visaient en outre à procéder à une fusion au sein d’une société unique à compter de 2026.
Les rapporteurs rappellent que, grâce à l’intervention énergique de Jean-Louis Bourlanges, alors président de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, à laquelle s’étaient associés des commissaires de l’ensemble des groupes politiques, plusieurs amendements avaient été adoptés par la commission des affaires culturelles afin d’exclure FMM du périmètre de cette réforme. Lors de son audition devant la commission des affaires étrangères, le 15 mai 2024, Stéphane Séjourné, alors en charge du Quai d’Orsay, avait d’ailleurs indiqué que l’intention du Gouvernement, lors de l’examen du texte en séance publique, serait de confirmer l’exclusion de l’audiovisuel extérieur du champ de la réforme.
Cet engagement n’avait cependant pas été publiquement repris à son compte par la ministre de la Culture et la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin 2024 avait interrompu l’examen parlementaire avant le passage en séance publique.
Sans se prononcer sur le bien-fondé d’une réforme de la gouvernance de France Télévision ou de Radio France, les rapporteurs souhaitent rappeler les motifs de fond qui les conduisent à s’opposer aux perspectives de fusion de FMM au sein d’une entité unique de l’audiovisuel public. Cela exposerait en effet les chaînes de FMM à un risque important de dilution, effaçant leurs spécificités internationales telles que le plurilinguisme ou le fait de s’adresser à des publics internationaux aux usages très divers. Selon la « règle kilométrique de l’information » qui est une tendance naturelle déjà observée dans d’autres pays, un grand groupe audiovisuel généraliste est en effet structurellement tourné vers les enjeux nationaux, entraînant une relégation de ses équipes internationales.
Alors que FMM ne représente que 7 % du financement de l’audiovisuel public, ses chaînes et ses projets se retrouveraient marginalisés dans un ensemble plus vaste et potentiellement exposés à devenir une simple variable d’ajustement. Les rapporteurs rappellent en outre que le maintien de FMM en tant que société à part entière ne l’empêche nullement de poursuivre les nombreuses synergies, déjà mentionnées, avec les autres sociétés de l’audiovisuel public.
Les rapporteurs constatent que le projet de COM 2024-2028 ne fait pas mention d’un rattachement éventuel de FMM à une structure plus large. Dans son avis sur le projet de COM, l’Arcom indique cependant qu’elle considère que la « stratégie de convergence entre les sociétés de l’audiovisuel public demeure d’actualité » et rien n’indique, à ce stade, que le projet de fusion interrompu en juin dernier ne sera pas relancé.
La crédibilité du projet de COM transmis à la représentation nationale exige donc que le nouveau Gouvernement confirme ses intentions concernant l’autonomie de FMM au sein du service audiovisuel public.
2. Les conséquences de la suppression de la contribution à l’audiovisuel public ne sont toujours pas réglées
Après la suppression de la contribution à l’audiovisuel public par la loi de finances rectificative de l’été 2022, l’audiovisuel public a été financé, de manière transitoire en 2023 et 2024, par l’affectation d’une part de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Cependant, à compter du dépôt du projet de loi de finances pour 2025, ce mode de financement n’est plus autorisé sous l’effet d’une réforme de la loi organique relative aux lois de finances opérée en 2021 ([17]), qui a restreint fortement les situations dans lesquelles une telle affectation de taxe est possible.
En l’état actuel du droit, FMM ne pourra donc plus être financé, à partir de 2025, que sur des crédits budgétaires « classiques », susceptibles de subir des annulations infra-annuelles, contrairement aux dotations qui lui ont été versées jusqu’à présent à partir du compte de concours financier Avances à l’audiovisuel public.
Comme la direction de FMM l’a rappelé avec force aux rapporteurs, une budgétisation sèche du financement de FMM serait une marque de dépendance envers le pouvoir politique, alors qu’un financement par recette affectée est une garantie visible et incontestable de l’indépendance des médias de service public.
Dans son avis sur le projet de COM, l’Arcom rappelle en outre que le règlement européen sur la liberté des médias (EMFA – European Media Freedom Act), impose désormais aux États membres de veiller à ce que les fournisseurs de médias de service public disposent de ressources financières suffisantes et stables pour l’accomplissement de leur mission de service public, ces ressources devant être de nature à garantir leur indépendance éditoriale.
Au plan international, un financement lisible et pérenne par affectation de ressources est ainsi un critère distinctif entre les médias indépendants de service public, tels que ceux de FMM, et les opérateurs catégorisés comme des « médias d’État » dans certains pays ou par des distributeurs en ligne.
Le régulateur régional du Land de Berlin a par exemple alerté FMM, dès l’été 2022, sur l’obligation d’éloignement vis-à-vis de l’État (« Staasferne ») pour autoriser toute radiodiffusion. Il a prévenu FMM qu’en cas de budgétisation de ses moyens, il se verrait dans l’obligation de mettre un terme à l’attribution de fréquence dont RFI bénéficie dans la capitale de la République fédérale allemande depuis 1994 et qui a été renouvelée en 2023 sous la condition expresse d’un financement indépendant.
La budgétisation des ressources de l’audiovisuel public présenterait donc pour FMM un risque réputationnel considérable, qui serait sans nul doute opportunément utilisé pour alimenter les manipulations et tentatives de déstabilisation à son égard. FMM serait exposé au risque d’être qualifié de « média d’État » sur les réseaux sociaux et à des coupures arbitraires par des gouvernements hostiles, ce qui rejaillirait sur l’image et le rayonnement de la France.
La nature affectée du financement de FMM est donc une garantie essentielle pour maintenir ses positions dans le paysage audiovisuel mondial, et par la même occasion remplir les objectifs définis par le projet de COM 2024-2028.
Cette situation a motivé plusieurs initiatives parlementaires visant à maintenir un mode de financement indépendant de l’audiovisuel public.
Ainsi, en juin 2024, une commission spéciale avait été établie par la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale pour examiner une proposition de loi organique prévoyant d’étendre les prélèvements sur les recettes de l’État au profit des organismes du secteur audiovisuel public ([18]), à l’initiative des députés Quentin Bataillon, Bruno Studer et Jean-Jacques Gaultier. La dissolution de l’Assemblée nationale a cependant interrompu l’examen de ce texte, néanmoins redéposé par la députée Constance Le Grip dès le début de la nouvelle législature ([19]).
Au Sénat, une proposition de loi organique portant réforme du financement de l’audiovisuel public, déposée le 10 juillet 2024 ([20]), par les sénateurs Cédric Vial, Catherine Morin-Desailly, Roger Karoutchi et plusieurs de leurs collègues, vise en revanche à autoriser l’affectation de taxes aux organismes de l’audiovisuel public, permettant de maintenir le mode de financement actuel par affectation de TVA.
Alors que la différence d’approches entre l’Assemblée nationale et le Sénat exposait, en cas d’inertie gouvernementale, à un risque de blocage et à une « budgétisation par accident » de FMM en 2025, les rapporteurs se félicitent que le Gouvernement vienne tout juste d’engager, le 2 octobre dernier, la procédure accélérée en vue de l’examen de la proposition de loi organique sénatoriale, qui a été inscrite à l’ordre du jour du Sénat le 23 octobre prochain.
Les rapporteurs forment le vœu que la navette parlementaire permette de procéder au plus vite à la modification nécessaire de la LOLF, afin qu’il soit possible d’opérer, avant la fin de l’examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, aux ajustements requis pour maintenir un financement de France Médias Monde propre à garantir son indépendance. À défaut, l’atteinte des objectifs définis par le projet de COM 2024-2028 afin d’accroître la présence internationale et la crédibilité des chaînes du groupe serait grandement compromise.
B. Les risques que le contrat d’objectifs soit privÉ de moyens par le projet de loi de finances pour 2025
Le projet de COM est assorti d’une programmation prévisionnelle des ressources, résumée dans le tableau page suivante, qui repose en particulier sur trois sources de financements de l’État :
— la dotation « socle » de FMM, au titre de sa part dans les financements consacrés au secteur audiovisuel public ;
— une dotation spécifique, sur les crédits budgétaires d’un « Programme de transformation » créé par la loi de finances pour 2024 dans le but de financer des réformes de structure prioritaires de l’audiovisuel public, dont, concernant FMM, un programme de modernisation numérique ;
— et les autres financements, déjà mentionnés, sur crédits budgétaires du MEAE ou par financements de l’AFD sur appels à projets.
Programmation prévisionnelle des ressources de FMM figurant dans le projet de contrat d’objectifs et de moyens
Montants en millions d’euros
|
2024 |
2025 |
2026 |
2027 |
2028 |
Dotations publiques |
|||||
Dotation « socle » (Financement de l’audiovisuel public) |
269,2 |
276 |
281 |
287 |
292 |
Programme de transformation |
3,6 |
5 |
3 |
0 |
0 |
Crédits du MEAE (programme 209) |
2,5 |
4,1 |
4,9 |
4,9 |
4,9 |
SOUS-TOTAL |
275,3 |
285 |
289 |
292 |
297 |
Compensation des effets fiscaux de la fin du financement par la redevance audiovisuelle (non-déductibilité de la TVA sur les achats et assujettissement à la taxe sur les salaires) |
30 |
30,8 |
31,5 |
32 |
32,6 |
Total inscrit en loi de finances |
305,3 |
315,8 |
320,5 |
324 |
329,6 |
Autres ressources |
|||||
Publicités, parrainages |
5,6 |
5,8 |
6 |
6,2 |
6,4 |
Subventions des bailleurs internationaux sur appels à projet (dont Commission européenne pour ENTR et Infomigrants) |
3,2 |
3,2 |
3,2 |
3,2 |
3,2 |
Subventions de l’Agence française de développement (radios en langues africaines) |
3,2 |
3,2 |
3,2 |
3,2 |
3,2 |
Total autres ressources |
12 |
12,2 |
12,4 |
12,6 |
12,8 |
Source : commission des affaires étrangères, d’après le Contrat d’objectifs et de moyens 2024-2028 de France Médias Monde.
Alors que le projet de COM 2024-2028 présente une dotation « socle » en hausse moyenne de 2 % par an d’ici 2028, passant de 269,2 millions d’euros en 2024 à 292 millions d’euros en 2028, la direction de FMM a indiqué aux rapporteurs que cette trajectoire pourrait ne pas être tenue car, selon les lettres-plafonds préparatoires au projet de loi de finances pour 2025, la dotation publique de FMM serait amputée l’an prochain d’au moins 3,9 millions d’euros.
En outre, dès l’exécution du budget 2024, FMM a subi une diminution des crédits inscrits au titre du programme de transformation, dans l’attente desquels le groupe a pourtant engagé, sur fonds propres, d’importantes dépenses de modernisation numérique. Alors que 5 millions d’euros avaient été votés dans la loi de finances initiale, seul 1 million d’euros a été effectivement versé à ce jour. Si une première annulation de 1,4 million d’euros en début d’année ([21]) et a été prise en compte dans la programmation jointe au projet de COM, elle a été suivie, depuis lors, de l’interruption complète des versements de l’État, sans garantie de dégel des crédits correspondants à la fin de l’année. En outre, les arbitrages entourant le budget 2025 pourraient conduire à ramener à 2 millions d’euros les montants inscrits au prochain PLF, contre 5 millions d’euros mentionnés dans le projet de COM 2024-2028.
Les crédits effectivement attribués à FMM pourraient donc, entre 2024 et 2025, présenter des écarts de l’ordre de 7 à 10 millions d’euros par rapport à la trajectoire de moyens prévue par le projet de COM.
Une telle remise en cause de la programmation jointe au projet de COM aurait des conséquences graves sur les plans budgétaire et stratégique pour le groupe France Médias Monde, l’exposant à un risque réel de décrochage de ses performances dans le paysage audiovisuel et numérique mondial. En effet, la nature de l’activité du groupe et la rigidité de ses charges – alors même qu’il a déjà supporté de nombreuses économies depuis dix ans – ne lui permettent pas d’absorber durablement une telle baisse sur ses fonds propres, l’exposant à un déficit insoutenable de son résultat.
Les missions et le mode de fonctionnement de FMM le distinguent en effet fortement des autres entreprises de l’audiovisuel public, dont les budgets sont beaucoup plus élevés et qui disposent de marges de manœuvre plus importantes. Par exemple, contrairement aux chaînes qui diffusent des fictions, FMM ne peut pas s’adapter une baisse de ressources en accroissant les multidiffusions ou en réduisant les achats de programmes.
Le modèle du journalisme international exige au contraire la fabrication continue de programmes, produits pour l’essentiel en interne, dans des langues et sur des supports variés, pour aujourd’hui près de 200 heures de production quotidiennes. En tant qu’entreprise de main-d’œuvre dont la masse salariale représente plus de 55 % des charges et augmente mécaniquement chaque année, FMM ne pourra répondre à une baisse de ses dotations que par une réduction de ses équipes.
Après avoir procédé à plusieurs plans de départs volontaires au cours de la décennie 2010, FMM n’aura désormais d’autres ressources que de procéder à des licenciements économiques en organisant un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE). Cela reviendrait à priver l’entreprise de personnels hautement qualifiés et motivés, au risque d’appauvrir un outil très utile au rayonnement de la France.
La remise en cause de la trajectoire budgétaire du projet de COM irait à l’encontre des efforts déployés par FMM et ses équipes pour jouer pleinement leur rôle face aux urgences et défis internationaux. FMM ne pourra par exemple pas poursuivre le redémarrage de son plan d’investissement pour renouveler les régies de production et de diffusion TV et pour améliorer la distribution et le référencement de ses contenus numériques. La recherche d’économies en matière de distribution linéaire l’obligerait à dénoncer des contrats et à subir des dédits importants, tout en allant directement à l’encontre des objectifs d’audience assignés par le COM.
Il résulte ainsi de la structure du budget de FMM qu’une baisse des financements conduira mécaniquement l’entreprise à devoir réduire des pans entiers de son activité.
Si la remise en cause de la trajectoire inscrite dans le projet de COM se confirmait, il serait nécessaire de renoncer à certains des projets qu’il mentionne, voire à certaines missions de FMM. La question de savoir s’il faudra renoncer à des activités existantes en Afrique, dans le monde arabe ou en Amérique latine ne sera alors pas seulement rhétorique, et exposera la France à des pertes d’influence difficiles à rattraper.
En tant que membres de la commission des affaires étrangères, les rapporteurs considèrent comme inacceptable que des économies de quelques millions d’euros, hors de proportion avec les vrais enjeux de redressement des finances publiques, n’obligent la France à renoncer à des leviers d’influence qui sont tout à la fois relativement peu coûteux et plus nécessaires que jamais, compte tenu des urgences et de la concurrence internationales.
Les rapporteurs appellent donc la représentation nationale à veiller à ce que la loi de finances pour 2025, au terme de son examen prochain par le Parlement, permette de respecter la trajectoire de financements établie par le projet de COM 2024-2028 liant l’État à France Médias Monde.
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Lors de sa réunion du mercredi 9 octobre 2024, la commission a examiné l’avis sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens (COM) entre l’État et France Médias Monde pour la période 2024-2028.
M. le président Bruno Fuchs. En application des dispositions de l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le secrétaire général du gouvernement a transmis le 18 juin 2024 à notre Assemblée le projet de contrat d’objectifs et de moyens (COM) entre l’État et France Médias Monde (FMM), société en charge de l’audiovisuel extérieur.
Créée par loi du 5 mars 2009, elle regroupe trois médias : la chaîne de télévision France 24, ainsi que les radios Radio France internationale (RFI) et Monte Carlo Doualiya (MCD). La commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale accorde une importance toute particulière à FMM, à travers ses avis et les projets de COM déterminant ses moyens, dans la durée et au travers du vote annuel des dotations destinées aux avances à l’audiovisuel extérieur dans les projets de loi de finances (PLF).
M. Alain David, co-rapporteur pour avis sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens entre l’État et France Médias Monde pour la période 2024-2028. Nous vous présentons le projet de contrat d’objectifs et de moyens 2024-2028 entre l’État et France Médias Monde, le document-cadre qui définit les stratégies éditoriales et de développement de l’entreprise, ses objectifs de gestion et de ressources humaines et les moyens permettant d’y parvenir. L’enjeu est important, compte tenu de l’étendue des activités des chaînes du groupe et des contextes dans lesquels elles interviennent.
France 24 comprend quatre chaînes mondiales d’information internationale télévisée en français, en anglais, en arabe et en espagnol, émettant en continu dans plus d’un demi-milliard de foyers et en ligne. C’est aujourd’hui le premier média français sur Facebook et YouTube. Radio France internationale émet en français et dans seize autres langues dans le monde entier, avec 133 relais FM et de radio numérique terrestre, des ondes courtes, une trentaine de satellites, des plateformes, des réseaux sociaux, et ses sites et applications propres. Ses programmes sont repris par 1 700 radios partenaires. Enfin, Monte Carlo Doualiya (MCD), radio française de service public en langue arabe est diffusée principalement aux Proche et Moyen-Orients ainsi qu’en Mauritanie et à Djibouti.
Au total, leurs audiences dépassent 255 millions de contacts hebdomadaires, contre 207 millions en 2019, en progression de 20 %. Cette performance doit d’autant plus être saluée qu’elle s’est inscrite dans un contexte de défiance croissante, dans de nombreuses parties du monde, à l’égard des médias occidentaux, auquel se sont ajoutées les censures en Russie et dans les nouveaux régimes autoritaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger, faisant perdre 7 millions d’auditeurs et téléspectateurs au Sahel.
Les grands axes du projet de COM se fondent sur les acquis du précédent COM 2020-2022, prorogé par avenant pour 2023, et que j’avais eu l’honneur de présenter devant notre commission. Le bilan du précédent COM est très positif et la quasi-totalité des cibles ont été atteintes. Le groupe a rempli ses objectifs d’audience, non seulement en linéaire mais aussi numériques, avec 3,7 milliards de démarrages audio et vidéos en 2023.
Surtout, il a accompli ses missions de service public. Il a renforcé ses dispositifs de lutte contre la désinformation avec la cellule de vérification et d’investigation numérique « InfoVérif » au sein de RFI et les « Observateurs » de France 24. Il a accru l’offre plurilingue notamment en diffusant vingt-quatre heures sur vingt-quatre la version hispanophone de France 24 en Amérique latine, en mettant en place, à l’été 2022, quelques mois après le déclenchement de l’invasion russe, une offre d’information en ukrainien depuis Bucarest, et en lançant de nouvelles offres de RFI en langues africaines depuis une rédaction établie à Dakar.
Enfin, FMM a accru ses partenariats avec France Télévisions et Radio France, un des axes prioritaires du précédent COM, par des coopérations éditoriales, notamment sur le site Franceinfo mais cela est, par définition, limité aux contenus en langue française alors que 60 % de l’audience de FMM ne parle pas le français. Les coopérations techniques ont été systématisées, notamment par des achats groupés, mais les différents COM de la décennie 2010 avaient déjà fait avancer les mutualisations d’infrastructures et de technologies de l’audiovisuel public.
Le nouveau projet de COM couvre une période de cinq années, qui doit lui permettre de disposer d’une meilleure visibilité. Contrairement au précédent, ce COM ne s’articule pas autour d’une partie commune à l’audiovisuel public, puis d’une partie spécifique à FMM, mais il est construit entièrement autour des missions du groupe, les coopérations entre sociétés de l’audiovisuel public étant déclinées tout au long du COM. Nous saluons cette évolution, qui atteste d’une meilleure prise en compte des enjeux internationaux et du plurilinguisme, si spécifiques, qui font le quotidien des médias de FMM.
Le COM fixe cinq grands axes stratégiques avec dix objectifs, que nous détaillons dans le rapport, où nous analysons également les indicateurs de performance avec un tableau présentant les évolutions entre ce projet de COM et le précédent. Les objectifs sont conformes au projet stratégique FMM 2023-2028 sur la base duquel l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) a renouvelé l’an passé, pour cinq ans, le mandat de Marie-Christine Saragosse comme présidente-directrice générale de FMM.
La ligne directrice principale consiste à renforcer la crédibilité et la présence des médias de FMM à l’international, indispensables pour répondre à la concurrence croissante entre médias internationaux, aux tensions géopolitiques ainsi qu’aux manipulations de l’information et tentatives de déstabilisation menées par des puissances autoritaires qui ont investi tous les domaines de la « guerre informationnelle » et y consacrent des moyens considérables.
Le premier axe du COM vise donc à « cultiver la confiance avec les publics », ce qui exige que les médias de FMM continuent d’être reconnus comme libres et indépendants. Le COM rappelle la ligne éditoriale, qui consiste à rapporter des faits de manière documentée, vérifiée et équilibrée, conformément à la déontologie d’une presse indépendante dans une démocratie et aux principes défendus par la France dans le monde.
Nous souhaitons insister sur le fait que la liberté éditoriale des chaînes est entièrement complémentaire de l’influence de la France, qui se fonde sur la promotion d’un modèle de liberté. C’est en tant que vecteur de pluralisme que nos médias internationaux peuvent jouer un rôle de référence dans des bassins d’audience qui n’ont pas facilement accès à une information libre et professionnelle. Comme on dit en Afrique « Quand on veut avoir l’heure juste, on écoute RFI ». Nous récusons les mauvais procès qui accusent FMM d’être insuffisamment le relais de la diplomatie française ou, au contraire, de l’être trop. La force principale de nos chaînes réside dans la liberté et l’éthique professionnelle.
Le projet de COM fixe donc de nombreux objectifs en ce sens. FMM doit accroître la lutte contre la désinformation et engager une transformation numérique selon une « hyper-distribution raisonnée », afin que ses contenus soient encore plus visibles sur tous les grands carrefours d’audience. Cela concerne notamment les réseaux sociaux et les plateformes, afin de peser là où les jeunes sont présents, là où les « infox » essaiment le plus et là où la censure peut parfois être contournée.
Or il n’y a pas de liberté sans les moyens de la liberté. Je rappelle que le précédent COM s’est inscrit dans un contexte de baisse des contributions publiques – passées de 258 à 254 millions d’euros entre 2018 et 2022 –, qui a contraint FMM, pour absorber l’inflation, à réaliser 20 millions d’euros d’économies, dont un plan de départs volontaires, au retrait de certains réseaux de distribution et à une politique de modération salariale ne compensant que partiellement les effets de l’inflation sur le pouvoir d’achat des collaborateurs.
Malgré les efforts pour accroître ses ressources propres publicitaires, le groupe a désormais atteint la limite de ses marges de manœuvre et il n’a pas pu renforcer suffisamment ses services de fonctions support et transverses. Sans financements supplémentaires, FMM n’aura pas les moyens techniques et numériques pour relever les défis de la concurrence qui exigent des investissements importants. Il faut garantir la qualité des conditions de travail en accompagnant l’évolution des métiers au numérique et en réformant l’organisation des rédactions de France 24, pour stabiliser les équipes pour chaque tranche horaire, simplifier les planifications et réduire la précarité, ce qui devra permettre, à terme, d’intégrer une cinquantaine de pigistes.
Les dotations de FMM ne comptent que pour 7 % de l’ensemble des contributions de l’État à l’audiovisuel public, alors que nos homologues occidentaux disposent de dotations souvent bien plus élevées. Il y a dix ans, le budget de FMM était équivalent à celui de la Deutsche Welle ; il est aujourd’hui deux fois moins important. Il est également deux fois moindre que celui des chaînes internationales de la BBC et trois fois moindre que celui de son équivalent américain.
France Médias Monde est le média de service public international au « coût contact » le plus réduit, c’est-à-dire qui mobilise la plus faible somme sur une année pour toucher un contact hebdomadaire : 1,09 euro en 2023, contre 1,27 euro pour Deutsche Welle, 1,29 euro pour BBC World Service et presque 2 euros pour USA Global Media.
Certains peuvent s’en féliciter mais il faut veiller à ne pas faire trop d’économies de court terme si elles empêchent de poursuivre le développement. Une information internationale française « à bas coût » pourrait ne plus disposer de moyens suffisants pour répondre aux attentes du public existant et pour toucher de nouveaux publics. Il faut être clair sur nos priorités et savoir si nous concevons l’audiovisuel public exclusivement comme un sujet franco-français ou si nous sommes conscients qu’il est un outil de rayonnement international de la France.
À cet égard, le projet de COM est plutôt favorable puisqu’il prévoit que le groupe pourra engager de nouveaux projets éditoriaux pour mieux toucher certaines zones stratégiques en Afrique, au Moyen-Orient et en Europe centrale et orientale, financés par des crédits alloués directement par le Quai d’Orsay à partir du programme budgétaire 209 Solidarité avec les pays en développement : 2,45 millions d’euros dès 2024 puis 4,1 millions d’euros en 2025, portés à 4,9 millions d’euros en 2026. Les responsables du Quai d’Orsay ont confirmé leur intention de maintenir ces financements, qu’ils considèrent comme prioritaires, malgré les contraintes budgétaires constatées en 2024 et annoncées pour 2025.
En Afrique, France Média Monde va pouvoir renforcer son « hub » à Dakar. Les rédactions de RFI en langues africaines sont pérennisées et seront complétées par un décrochage quotidien de France 24 en français, réalisé par des journalistes africains et proposant des contenus positifs sur « l’Afrique qui gagne », à destination des francophones de l’ensemble du continent. Il y aura également une offre numérique interactive sur réseaux sociaux, en français et en langues africaines, pour les jeunes urbains très exposés à la désinformation.
À Beyrouth, une nouvelle rédaction va être dédiée à la production numérique en langue arabe de France 24 et de MCD. Elle est indispensable pour enrichir et mieux disséminer les contenus des rédactions présentes au siège. La situation actuelle au Proche-Orient atteste du caractère prioritaire de ce projet et l’expose à de nouveaux risques sécuritaires alors que le hub doit être inauguré, fin décembre, dans des locaux au sein de l’École supérieure des affaires de Beyrouth.
Enfin, à partir de son ancrage ancien à Bucarest avec la radio RFI Romania, France Média Monde a développé depuis l’été 2022, sur des crédits d’urgence du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, une rédaction de RFI en ukrainien accueillant des journalistes en exil. Le COM permet de poursuivre les activités en ukrainien et mentionne la possibilité d’ajouter une nouvelle offre numérique radio en langue turque, afin de toucher les publics de Turquie désireux d’ouverture sur le monde mais également les turcophones des diasporas. Ce projet est cependant reporté a minima à 2026, sans garanties fermes de financement.
Nous saluons donc globalement les objectifs du projet de COM dans la mesure où ils montrent l’intention du gouvernement de continuer à soutenir un outil très utile au rayonnement de la France. Il y a cependant parfois loin de la coupe aux lèvres en matière budgétaire, et c’est le point sur lequel il nous faudra être vigilants. En conséquence, mon groupe s’abstiendra sur ce dossier : nous approuvons le travail réalisé mais critiquons la manière dont l’État aborde ce dossier.
M. Jean-François Portarrieu, corapporteur pour avis sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens entre l’État et France Médias Monde pour la période 2024-2028. Il serait contreproductif de chercher à nous renier en confondant information et communication, surtout face à des concurrents et adversaires qui confondent journalisme et propagande et vont jusqu’à mener des opérations de désinformation en manipulant des images et des sources. Ces détournements mettent clairement en cause les institutions démocratiques à des fins de déstabilisation.
Si nous saluons tous deux les perspectives tracées par le COM, nous devons donc alerter sur le fait que ses modalités concrètes de mise en œuvre sont assombries par trois incertitudes. Je pense tout d’abord aux effets perturbateurs des propositions récurrentes de fusion de France Médias Monde dans un ensemble regroupant les autres sociétés de l’audiovisuel public.
Alors que les travaux de conception de ce projet de COM ont été engagés dès le début de l’année 2023 dans l’objectif d’une signature au début 2024, sa transmission au Parlement a été retardée de plus de six mois par les débats entourant au printemps dernier, la proposition de loi du sénateur Laurent Lafon, relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle.
Ce projet visait à rassembler France Télévisions, Radio France, l’Institut national de l’audiovisuel (INA) et également France Médias Monde autour d’une holding, en 2025. Grâce à l’intervention énergique de Jean-Louis Bourlanges, alors président de la commission des affaires étrangères, à laquelle s’étaient associés des membres de notre commission issus de l’ensemble des groupes politiques, plusieurs amendements avaient été adoptés par la commission des affaires culturelles afin d’exclure FMM du périmètre de ce projet. Auditionné ici même, Stéphane Séjourné avait indiqué que l’intention du Gouvernement était de confirmer cette exclusion, lors de l’examen du texte en séance publique. Cet engagement n’avait cependant pas été repris publiquement par la ministre de la Culture puis l’examen parlementaire a été interrompu dans la soirée du 9 juin.
Si nous ne nous prononçons pas sur le bien-fondé d’une réforme de la gouvernance de France Télévisions ou de Radio France et sur les économies qu’elle pourrait procurer, il existe des raisons de fond pour s’opposer au rattachement de FMM au sein d’une entité unique. Le projet de COM en lui-même ne fait pas mention d’un rattachement éventuel à une structure plus large, mais l’Arcom, dans l’avis qu’elle a rendu sur les différents projets de COM des sociétés de l’audiovisuel public, mentionne à nouveau cette possibilité. À ce stade, rien n’indique que le projet de fusion interrompu en juin dernier ne sera pas relancé. Nous considérons donc que la crédibilité du projet de COM exige que le nouveau Gouvernement confirme ses intentions concernant l’autonomie de FMM au sein du service public audiovisuel.
Les deux autres sujets d’incertitude sont budgétaires : il s’agit, d’une part, des modalités futures du financement de FMM et, d’autre part, des dotations dont il disposera effectivement pendant la durée du COM. Après la suppression de la redevance par la loi à l’été 2022, l’audiovisuel public a été financé, de manière transitoire, par l’affectation d’une part de taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Cependant, pour des raisons plus générales de présentation du budget, une réforme de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), opérée en 2021, antérieurement à la suppression de la redevance, a réduit les possibilités d’affecter des taxes à des entités autres que l’État ou la Sécurité sociale.
En l’état du droit, le projet de loi de finances pour 2025 devra prévoir que FMM, comme les autres sociétés audiovisuelles publiques, soit financée sur une mission budgétaire et non pas au travers de dotations versées sur le compte de concours financier Avances à l’audiovisuel public. Or un financement par recette affectée constitue une garantie visible et incontestable de l’indépendance des médias de service public, alors que les crédits budgétaires classiques, susceptibles de subir des annulations infra-annuelles, sont une marque de dépendance envers le pouvoir politique.
Sur le plan international, un financement lisible et pérenne par affectation de ressources est un critère qui distingue les médias indépendants de service public, comme FMM, et les opérateurs catégorisés comme des « médias d’État » comme la chaîne russe Russia Today (RT) ou les médias chinois ou turcs. Le régulateur régional du Land de Berlin a alerté FMM, dès l’été 2022, sur l’obligation d’éloignement vis-à-vis de l’État prévue par la législation du Land pour autoriser toute radiodiffusion. Il a prévenu FMM qu’en cas de budgétisation de ses moyens, il se verrait dans l’obligation de mettre un terme à l’attribution de fréquence dont RFI bénéficie à Berlin depuis 1994 et qui a été renouvelée en 2023 sous la condition expresse d’un financement indépendant.
La budgétisation des ressources de l’audiovisuel public présenterait donc pour FMM un risque réputationnel considérable, ce qui compromettrait les objectifs définis par le projet de COM pour accroître la présence internationale et la crédibilité des chaînes du groupe. Il est donc indispensable de procéder, au plus vite, à une réforme technique et ciblée du texte de la LOLF, qui doit intervenir avant la fin de l’année pour être prise en compte à temps dans le débat budgétaire, avant l’adoption définitive de la loi de finances en 2025. Nous nous félicitons donc que le Gouvernement vienne tout juste d’engager la procédure accélérée en vue de l’examen d’une proposition de loi organique déposée par les sénateurs, qui vise à permettre de maintenir le mode de financement actuel par affectation de taxe.
Si l’horizon semble s’éclaircir concernant le mode de financement de FMM, le prochain budget pourrait cependant être beaucoup moins favorable s’il ne permet pas de respecter la programmation prévisionnelle des ressources mentionnée dans le COM. Alors que la dotation « socle » de FMM est censée connaître une hausse modérée mais indispensable de 2 % par an en moyenne d’ici 2028, passant de 269 à 292 millions d’euros entre 2024 et 2028, le PLF pourrait prévoir une dotation amputée de 4 millions d’euros. S’y ajoute le fait que Bercy n’a pas tenu, à ce stade, les engagements pris l’an dernier par l’État dans le cadre d’une enveloppe budgétaire distincte, dénommée « Programme de transformation », destinée à l’ensemble de l’audiovisuel public et dont une petite partie était fléchée vers FMM pour lancer des investissements numériques.
Au vu de ces promesses, le groupe a engagé des dépenses importantes sur ce qu’il lui reste de fonds propres mais, alors que 5 millions d’euros avaient été votés dans la loi de finances initiale (LFI) pour 2024, seul 1 million d’euros a été effectivement versé à ce jour. Une première annulation de 1,4 million d’euros a été prise en compte dans la programmation jointe au projet de COM mais, depuis lors, Bercy a interrompu tous les versements sans aucune garantie de dégel à la fin de l’année. En outre, alors que le projet de COM prévoit 5 millions d’euros pour le programme de transformation en 2025, seuls 2 millions d’euros pourraient être inscrits au PLF.
Les crédits effectivement attribués à FMM pourraient donc, entre 2024 et 2025, présenter des écarts de l’ordre de 7 à 10 millions d’euros par rapport à la trajectoire de moyens du COM, engendrant des conséquences graves pour le groupe, avec un risque réel de décrochage des performances. Du fait de ses activités, FMM n’a pas les mêmes capacités que d’autres sociétés audiovisuelles pour absorber des baisses de ressources, alors même que son budget est bien moins élevé.
Le modèle du journalisme international de FMM exige en effet de fabriquer en continu des programmes, produits pour l’essentiel en interne, dans des langues et sur des supports variés, pour aujourd’hui près de 200 heures de production quotidiennes. Contrairement aux chaînes qui diffusent des fictions, FMM ne peut pas ajuster ses activités à la baisse en augmentant les multidiffusions ou achetant moins de programmes. FMM est d’abord une entreprise de main-d’œuvre dont la masse salariale représente plus de 55 % des charges et augmente mécaniquement chaque année.
La direction du groupe nous a confirmé qu’elle ne pourra répondre à une baisse de ses dotations que par une réduction de ses équipes, c’est-à-dire par des licenciements économiques, envisageant même un plan de sauvegarde de l’emploi. Si la remise en cause de la trajectoire du COM se confirmait, il serait nécessaire de renoncer à certains des projets, voire à certaines missions de FMM. Est-ce le moment de se détourner des activités existantes en Afrique, dans le monde arabe ou en Amérique latine pour quelques millions d’euros en obligeant la France à renoncer à des vecteurs d’influence aussi précieux que les équipes de France 24, RFI et MCD ?
Alain David et moi-même souhaitons que la loi de finances pour 2025, au terme de son examen par le Parlement, permette de respecter la trajectoire de financement établie par ce projet de COM 2024-2028. Je sais que mon co-rapporteur Alain David y veillera tout particulièrement, en tant que rapporteur budgétaire de notre commission sur l’audiovisuel extérieur.
M. le président Bruno Fuchs. Je souligne à mon tour la nécessité de disposer de modes de financement assurés à long terme pour nos médias, et notamment France Médias Monde, au minimum pour cinq ans. La question de la liberté éditoriale est plus compliquée à traiter, notamment en Afrique, où un média public est très souvent un média d’État. À ce sujet, il semble pertinent, tout en garantissant naturellement la liberté journalistique, de sensibiliser la rédaction à l’impact de certains propos sur l’image de la France. Je pense par exemple à l’interview récente de Robert Bourgi sur certaines antennes. De tels événements sont très rares mais produisent des effets importants.
Enfin, le groupe FMM est très clairement lié à la France. Or dans certains pays africains, les relations avec la France sont confrontées à des difficultés. Une réponse peut résider dans des partenariats avec des médias locaux, régionaux ou nationaux.
Je cède à présent la parole aux orateurs des groupes.
Mme Maud Petit (Dem). Je vous remercie pour la qualité de votre rapport. France Médias Monde agit dans un contexte d’urgence internationale liée à la guerre de l’information, pour porter une information libre et indépendante, modèle ayant tendance à se raréfier à l’échelle de la planète.
Malgré l’impact de la censure dont sont victimes les médias du groupe dans certains pays – Russie, Mali, Burkina Faso, Niger, notamment –, celui-ci est parvenu à stabiliser son audience hebdomadaire à 255,5 millions de personnes dans le monde en 2023. Il fait également état d’un record de 3,7 milliards de sons lancés et de vidéos vues, et de communautés qui ont franchi les 113 millions d’abonnés sur les réseaux sociaux. FMM accroît donc sa présence internationale tout en remplissant les objectifs fixés par les COM.
Nous tenons à le saluer, en nous associant aux alertes formulées sur les incertitudes budgétaires et les incidents de changement de gouvernance de l’audiovisuel public. Le groupe Les Démocrates a rappelé l’importance du financement dédié, prévisible et pérenne de FMM, en tant que garantie de son indépendance. Cette question revêt une sensibilité particulière eu égard au risque pour ses chaînes et antennes d’être perçues comme des médias d’État dans certains pays, risque pouvant conduire à remettre en question les modalités de leur distribution.
Alors que le projet de COM 2024-2028 présente une dotation socle en hausse moyenne de 2,2 % par an d’ici à 2028, cette trajectoire pourrait ne pas être tenue et la dotation publique pourrait être amputée l’an prochain d’au moins 3,9 millions d’euros dans le PLF 2025. Les spécificités de ce groupe international, qui a déjà fusionné radio, télévision et numérique, il y a une dizaine d’années seulement, et qui ne pèse que 7 % du budget de l’audiovisuel public, tout en s’adressant au reste du monde en vingt-et-une langues, seraient nécessairement affaiblies. Chers collègues, il nous faut donc protéger ce qui fait la force de notre audiovisuel public extérieur en œuvrant pour nous assurer que la trajectoire du COM sera tenue.
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Comme nous l’avons indiqué, le coût contact par téléspectateur ou par auditeur de FMM est remarquable, puisque la performance du groupe dans ce domaine est bien meilleure que celle de ses concurrents. France Médias Monde fait mieux, avec beaucoup moins.
M. Alain David, rapporteur pour avis. Depuis 2017, nous déplorons des coups de rabot successifs, qui fragilisent l’entreprise. Sa masse salariale a dû être réduite à plusieurs reprises pour faire face à ces diminutions budgétaires. De telles actions rendent difficile la gestion du personnel, notamment des jeunes journalistes qui veulent pourtant s’investir dans le groupe.
M. le président Bruno Fuchs. Sans assurance sur la stratégie, il est effectivement difficile de se projeter vers l’avenir.
M. Bertrand Bouyx (HOR). Je vous remercie pour votre rapport et votre exposé. Je souhaite revenir sur la guerre d’influence et sur les moyens qui y sont dédiés par la France, notamment à travers FMM. Ses moyens sont insuffisants, ce qui est inacceptable lorsque l’on sait combien la Russie, avec Spoutnik ou RT, propage des fausses nouvelles et mène une propagande éhontée contre la France et nombre de nos alliés européens. La démocratie a un coût, qu’il faut assumer. Pouvez-vous évoquer à nouveau les moyens à disposition de FMM ?
M. Alain David, rapporteur pour avis. FMM est un vecteur important du rayonnement de la France dans le monde et des valeurs que nous voulons diffuser, comme l’égalité, le droit des femmes, la laïcité. Simultanément, d’autres concurrents comme la Russie ou la Turquie ont pour objectif de se développer sur des territoires dans lesquels nous sommes présents, par exemple sur les plans économique et humanitaire.
Plus nous arriverons à promouvoir un certain nombre de valeurs et à aider un certain nombre de pays dans leur développement, plus leurs populations seront enclines à demeurer dans leurs territoires. Mais il est certain que des pays sabordent notre engagement. Il suffit pour s’en convaincre de voir ce qui s’est passé au Sahel, avec RT. Nous ne devons pas nous laisser déstabiliser mais continuer à rayonner dans ces régions, de façon à poursuivre le travail que nous avons engagé.
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. La guerre informationnelle est de plus en plus féroce sur le continent africain. Ainsi, des journalistes de RFI nous ont-ils appris que RT y finance des colloques en langue française sur le thème de la « désinformation occidentale ». Nous ne sommes pas parvenus à connaître dans le détail les sources de financement de RT, au-delà du livre Un média d’influence d’État : Enquête sur la chaîne russe RT, du chercheur Maxime Audinet. Ce dernier raconte ainsi l’histoire de la chaîne, qui est née au milieu des années 2000, sous l’impulsion de Vladimir Poutine, et qui ne cesse de progresser grâce à des financements d’État. RT est une hydre et les journalistes de France Médias Monde sont très inquiets.
M. le président Bruno Fuchs. Malheureusement, la désinformation ne frappe pas que l’Afrique. En Moldavie et Géorgie, qui connaîtront prochainement des élections, la campagne de désinformation des chaînes russes vis-à-vis de l’Europe est particulièrement massive. Les Moldaves et Géorgiens nous demandent de les aider à lutter contre celle-ci mais nous n’y accordons pas suffisamment de moyens.
M. Jean-Paul Lecoq (GDR). Je remercie les rapporteurs pour leur travail et rappelle qu’Alain David alerte sur ces sujets depuis des années. Malheureusement, comme le disait déjà Marielle de Sarnez, nous sommes aujourd’hui « à l’os ». À un moment donné, il faut cesser de réduire les financements.
S’agissant de RT, j’ai regretté que la France ait censuré cette chaîne au moment où la Russie a envahi l’Ukraine, ne serait-ce que pour mesurer son niveau de propagande. Or lorsque l’on censure, on perd la connaissance de l’adversaire. Je pense donc qu’il s’agit là d’une erreur.
Lorsque le Printemps arabe a eu lieu en Tunisie, je me souviens que France 24 était la chaîne la plus regardée par les Tunisiens, qui considéraient que la vérité ne pouvait se trouver que sur cette chaîne, alors même que la France avait une relation particulière avec Ben Ali. La qualité de la chaîne et du travail des journalistes était reconnue par tous.
En conclusion, mon groupe est totalement favorable à la publication de ce rapport et nous espérons que le Gouvernement saura entendre ce que disent les parlementaires à ce sujet.
M. Alain David, rapporteur pour avis. Vous avez raison de le souligner. Les parlementaires n’ont pas été consultés au sujet de l’interdiction de RT ; la décision a été prise dans les hautes sphères. La pluralité d’expression est malgré tout nécessaire, même si la situation est à double tranchant. La propagande constamment employée par RT peut choquer mais nous poursuivons ce combat de rayonnement de la France, tout en conservant l’indépendance éditoriale de ce média, qui est essentielle pour pouvoir diffuser nos valeurs dans certains pays.
Mme Christelle D'Intorni (UDR). Il y a deux jours, nous avons commémoré l’anniversaire des massacres du 7 octobre. Depuis un an, la guerre continue au Proche-Orient, les actes antisémites ont explosé en France. En 2023, avant les attaques terroristes du 7 octobre, France 24 a sanctionné quatre de ses journalistes. Trois autres journalistes ont écopé d’un rappel à l’ordre en raison de messages hostiles à Israël publiés sur les réseaux sociaux. La collaboration avec une quatrième journaliste freelance a été rompue car elle avait publié des messages antisémites particulièrement choquants : « Si seulement Hitler était Libanais », « Levez-vous, Monsieur Hitler, levez-vous. Il y a des personnes qui ont besoin d’être brûlées », « Il incombe à chaque Palestinien de tuer un Juif et l’affaire est close ».
Selon le Journal du dimanche, le problème ne serait pas entièrement réglé, puisqu’il a révélé que des opinions militantes pro-palestinienne et frôlant l’antisémitisme demeuraient au sein de la chaîne France 24. De tels comportements sont inconciliables avec le COM de FMM, qui prône la lutte contre la désinformation, l’éducation aux médias et à l’information, et un groupe de service public « exemplaire ».
Messieurs les rapporteurs, avez-vous pu interroger la direction de France Médias Monde sur la résurgence d’idéologies antisémites ou de prises de position hostiles à Israël par ses journalistes ? Pourriez-vous nous détailler les mesures qui ont été prises pour préserver la neutralité et la crédibilité de la chaîne France 24 ?
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Ces faits ont été évoqués devant notre commission par Marie-Christine Saragosse elle-même, lorsqu’elle a été auditionnée. Parmi les journalistes de langue arabe en question, l’une était une correspondante avec laquelle France Médias Monde a cessé toute collaboration, et les autres ont été sanctionnés conformément au code de déontologie.
M. Alain David, rapporteur pour avis. Ces journalistes ont été effectivement sanctionnés comme ils devaient l’être. La direction de France Médias Monde a repris le contrôle. Ses journalistes sont dispersés dans le monde entier et de nationalités différentes. Cet épisode souligne la nécessité de rappeler la déontologie et les règles d’or du journalisme. Mais il s’agit d’un incident regrettable, qui a été sanctionné. Ces cas sont très rares et ne sont pas d’ordre structurel.
M. le président Bruno Fuchs. Je partage ces propos. Des garanties existent et lorsque des dérapages individuels voient le jour, ils sont sanctionnés. La gouvernance de la chaîne permet de procéder très rapidement à des sanctions.
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. J’ajoute que la chaîne n’a jamais cherché à étouffer l’affaire.
M. Sébastien Chenu (RN). Monsieur le président, au préalable, je souhaite évoquer la règle du « tourniquet » à l’œuvre à la commission, qui constitue un changement par rapport à la mandature précédente où le groupe le plus important pouvait évidemment s’exprimer en premier. Pourriez-vous regarder ce sujet de près ?
Sur le fond, je remercie les rapporteurs pour le travail effectué. J’ai eu le plaisir et le bonheur de servir France 24 dans une vie précédente, et je connais la qualité des professionnels qui font ces médias, lesquels constituent un bel outil permettant de promouvoir la France, ses valeurs, son rayonnement, son mode d’expression et la culture du débat, qui n’est évidemment pas celle à l’œuvre dans d’autres pays.
Je souhaite vous soumettre une réflexion sur la nécessaire exemplarité en matière de neutralité, d’impartialité, ou d’indépendance éditoriale. Mme D’Intorni a ainsi évoqué un certain nombre de prises de position très politisées de la part de certains journalistes, qui ont prêté le flanc à des polémiques. En politique intérieure, quelques polémiques ont également émaillé, ces derniers mois, l’activité de FMM.
Or, philosophiquement, ce média doit être au service de la France. Il faut veiller à ne pas abîmer ou affaiblir notre pays. Pour ma part, je regrette que les institutions de notre pays aient pu être pointées du doigt. Si d’autres nous sabordent, nous devons également veiller à ne pas nous saborder nous-mêmes.
Ensuite, sur le plan financier, 279 millions d’euros représentent une belle somme. La nécessaire coopération entre les médias semble en bonne voie. En revanche, dans le domaine des partenariats public-privé, des opérations demeurent à initier. Enfin, la Cour des comptes a par ailleurs relevé des irrégularités sur la commande publique, sur des absences de mise en concurrence. Or un euro des Français consacré à France Médias Monde doit être un euro utile pour la France et les Français.
M. le président Bruno Fuchs. Quand la parole d’un groupe est forte, quelle que soit sa place, elle est entendue. Mais, en lien avec le bureau, j’essaierai de voir comment nous pouvons tenir compte de votre proposition.
M. Alain David, rapporteur pour avis. La direction générale est bien consciente de ces difficultés. La rédaction dispose de journalistes dans le monde entier et, de temps en temps, il peut arriver qu’une expression déroge aux règles déontologiques. Le fonctionnement de France Médias Monde est complexe mais la direction est vigilante quant au devoir de neutralité, particulièrement dans les périodes compliquées que nous traversons, et elle intervient systématiquement pour faire respecter les règles.
M. Sébastien Chenu (RN). La rationalisation des hubs à l’international constitue une opportunité mais aussi un investissement, dont nous devons pouvoir mesurer les résultats, concrètement.
Mme Amélia Lakrafi (EPR). Je me joins à mes collègues pour vous féliciter des éclairages de votre rapport. Il faut tout d’abord saluer la performance de FMM, qui atteint presque tous les objectifs du précédent COM dans un contexte budgétaire assez contraint. Je ne peux que constater, dans ma circonscription, la montée en puissance de la bataille informationnelle que livrent à la France des régimes autoritaires au moyen de divers médias surfinancés.
Toutes les méthodes sont bonnes pour dénigrer l’image de notre pays et fragiliser la crédibilité de notre parole. À cet égard, l’ouverture d’un bureau de la chaîne RT à Alger est significative. France 24 et RFI représentent les entités les plus connues du groupe FMM et aussi, en conséquence, les plus attaquées dans les pays qui nous sont hostiles. Je souhaite donc ici saluer le travail réalisé, dans un contexte compliqué par les équipes FMM. Pour lutter contre la désinformation ou ceux qui les accusent d’être de simples propagandistes de la France, FMM mise avant tout sur la crédibilité de ses rédactions.
Je suis parfaitement sensible aux craintes exprimées par nos rapporteurs concernant l’évolution des ressorts budgétaires de FMM qui conditionnent la bonne atteinte des objectifs. Mais je souhaite vous interroger sur le risque porté à la réputation du groupe en raison d’une budgétisation pure et simple d’une partie des ressources du groupe, autrefois perçues via la contribution à l’audiovisuel public. Sur le terrain, France Médias Monde et, plus globalement, l’audiovisuel français sont accusés de relayer la « propagande » française. Si un financement par prélèvement sur la TVA est bien retenu, de quelle manière le groupe FMM pourrait-il selon vous mieux faire valoir son indépendance auprès de ceux qui la dénigrent ?
Par ailleurs, dans le contexte que nous connaissons tous depuis un an au Proche-Orient, où en est la réalisation du projet de produits numériques en langue arabe conduit avec l’École supérieure des affaires (ESA) de Beyrouth, un établissement d’enseignement dont je ne peux que saluer la grande qualité et dont je salue ici le personnel ?
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. S’agissant du projet hub à Beyrouth, le contrat de location avec l’ESA a été noué. Cependant, la direction de France Médias Monde organise les équipes mais la situation au Liban est malheureusement loin d’être stabilisée.
S’agissant du financement de FMM, l’affectation de recettes doit être maintenue, pour éviter une « budgétisation » du groupe par l’État. La menace de suppression de la licence par le Land de Berlin, déjà évoquée, en souligne la nécessité.
M. Alain David, rapporteur pour avis. En Algérie, la chaîne Al Jazeera bénéficie d’une audience très importante et RT vient effectivement d’y installer un bureau. Nul n’ignore que RT œuvre pour dénigrer la politique que nous menons, notamment au Moyen-Orient. Mais il faut faire face, en s’assurant que FMM soit plus présente en Afrique du Nord. Jean-Paul Lecoq, a évoqué l’audience de France 24 en Tunisie lors du Printemps arabe. Les Tunisiens n’avaient plus confiance dans Al Jazeera, qui était en quelque sorte réduite à faire de la propagande en faveur du gouvernement tunisien. Lors de cet épisode, France 24 était une voix reconnue, en particulier par la jeunesse.
M. Arnaud Le Gall (LFI-NFP). Je souhaite en préambule saluer l’investissement des équipes de France Médias Monde qui, dans leur immense majorité, produisent une information libre, indépendante et surtout fiable. Je partage les propos qui soulignent l’insuffisance des moyens. Il faut, a minima, que nous nous assurions que le COM soit respecté, sinon augmenté.
La budgétisation représente un danger. Dans certains pays, un média public est automatiquement considéré comme un média « aligné ». Nous devons aussi défendre l’idée de médias publics « à la française », non alignés sur l’État et le Gouvernement. France Médias Monde dispose d’un ancrage très solide, notamment en Afrique. Par exemple, RFI est la radio la plus écoutée à Brazzaville, à Libreville, à Abidjan, notamment parce qu’elle fournit des émissions de qualité où les gens reçoivent des informations correctes et apprennent, y compris dans des domaines qui n’ont rien à voir avec la situation politique, par exemple les conseils en matière de santé.
Il faut bien veiller à ne pas transformer FMM en contre-propagande. La contre-propagande doit s’effectuer sur un autre terrain et par d’autres canaux. La lutte contre la propagande russe en Afrique et les succès qu’elle peut y connaître – ce qui pose entre parenthèses la question de notre politique en Afrique – doit passer par les canaux cyber, des cellules de contre-propagande, mais surtout pas par nos médias publics, qui y perdraient beaucoup.
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Je partage totalement votre point de vue sur la qualité des contenus, notamment de RFI. Récemment, j’ai pu assister en direct sur FMM à une émission remarquable, Priorité santé, animée par Caroline Paré. Cette émission, qui invite les meilleurs spécialistes pour apporter des conseils de santé publique, obtient un succès d’audience incroyable dans un certain nombre de pays africains. Par ailleurs, France Médias Monde produit la plupart de ses contenus, parfois en partenariat, soit environ 200 heures chaque jour de programmes de qualité.
Mme Pascale Got (SOC). Je souhaite saluer l’engagement de FMM en faveur de la transition écologique et sociétale ; plusieurs des mesures du COM visent d’ailleurs à réduire l’empreinte carbone dans l’activité du groupe. Le nouveau COM insiste également sur l’inclusion et la diversité, en lien avec les objectifs du groupe en matière de représentation des minorités et de l’égalité des genres, tant à l’écran que dans les équipes.
Nous devons bien sûr rester vigilants sur la question des financements. L’impréparation de la suppression de la contribution à l’audiovisuel en 2022 a provoqué aujourd’hui le péril d’une budgétisation des moyens de FMM, qui pourrait d’ailleurs entraîner des pertes de fréquence de diffusion dans des pays disposant de lois très claires sur la séparation entre les médias et les autorités publiques, notamment l’Allemagne. Au-delà de la manifeste dichotomie entre les objectifs et les moyens de France Médias Monde, comment le Parlement peut-il agir pour éviter des conséquences éventuelles du financement de FMM par le budget de l’État ?
M. Alain David, rapporteur pour avis. Il existe effectivement un plan d’action contre les discriminations, qui fixe un certain nombre d’objectifs à atteindre au plus tard en 2028 pour obtenir le label Afnor. La même volonté d’égalité hommes-femmes se traduit également en matière salariale. Au quotidien, la direction s’efforce d’agir. Enfin, les émissions de gaz à effet de serre devront avoir diminué de 34 % en 2026 et de 36 % en 2028 par rapport au niveau constaté en 2019.
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Les crédits effectivement attribués à France Médias Monde pourraient, entre 2024 et 2025, présenter des écarts de l’ordre de 7 à 10 millions d’euros. Compte tenu de la situation internationale et des tensions que traverse le monde, il nous paraît totalement inopportun de ne pas donner à France Médias Monde, entreprise qui a déjà fourni des efforts conséquents ces dernières années, les ressources nécessaires pour exécuter le COM préalablement signé.
M. Jean-Louis Roumégas (ÉcoS). La suppression de la contribution à l’audiovisuel public, la réforme de fusion des médias publics, et sans doute la baisse des dotations prévues au PLF 2025 sont autant de coups portés au groupe France Médias Monde, outil pourtant indispensable au rayonnement de la France. Ses résultats sont positifs en termes d’audience, d’empreinte numérique, mais aussi de déploiement.
Le succès de la chaîne réside dans sa ligne éditoriale et les valeurs qu’elle porte : une information libre, indépendante et vérifiée. Elle offre le pluralisme et lutte contre la désinformation grâce à des centaines de journalistes présents sur les cinq continents. Je tiens donc à saluer le travail de ses équipes de journalistes.
La redéfinition de la gouvernance du groupe et l’incertitude financière risquent de remettre en question ce travail. Nous nous opposons pour ces raisons à l’intégration de FMM au sein d’une entité fusionnée, au même titre que les rapporteurs, mais aussi à une budgétisation sèche de FMM, une telle dépendance financière à l’égard de l’État risquant d’affecter la capacité du groupe à respecter les objectifs du COM 2024-2028.
La stabilité financière, l’indépendance éditoriale et la réputation de FMM sont compromises. Dans le contexte de guerre informationnelle et de tentative de déstabilisation menée par les États autoritaires, en particulier la Russie, il est pourtant essentiel de protéger et de garantir le travail indépendant du groupe par un système de financement pérenne et stable, et donc par un financement par recettes plutôt que par crédits budgétaires.
N’était-il finalement pas plus simple de conserver la contribution à l’audiovisuel public ?
M. Alain David, rapporteur pour avis. La redevance a été supprimée d’une manière bien trop hâtive, sans prendre en considération les conséquences à court, moyen et long termes. Nous avons essayé de formuler des solutions dans notre rapport. Je suis allé notamment découvrir le système suédois, un système original dont nous pourrions nous inspirer. Mais il nécessite d’abord la mise en place d’une véritable stratégie, en compagnie des syndicats et un certain nombre de forces vives de notre pays, pour lui permettre de garder son indépendance. Ce fonctionnement de l’audiovisuel suédois nous semblait particulièrement original mais le ministère de la culture n'a pas fait part d’un grand intérêt.
La solution de la TVA, qui a été sur le moment perçue comme la solution la plus propice de récupérer de l’argent et le distribuer, n’est plus d’actualité. Il faudra trouver des solutions de compensation ; l’État doit faire preuve d’imagination. Le Sénat a bien travaillé dans ce domaine et nous avons transmis un certain nombre d’idées, pour sauvegarder l’indépendance.
M. le président Bruno Fuchs. Il existe un décalage entre la vision politique que l’on destine à un groupe ou une chaîne d’information et son métier. On voudrait qu’ils soient la voix de la France mais, comme Jean-Louis Roumégas l’a rappelé à l’instant, la force du modèle de FMM réside dans l’éditorial. Peut-être est-il possible, par le dialogue, de trouver des moyens pour que cette vision et ce modèle ne soient pas si éloignés.
Ensuite, France 24 doit aussi pouvoir être vue en France, par les Français. À cet effet, il faut œuvrer auprès de l’Arcom.
Je cède à présent la parole aux députés intervenant à titre individuel.
Mme Éléonore Caroit (EPR). Je souhaite revenir sur les coupes budgétaires dont le groupe FMM a fait l’objet en 2024 et qui devraient, si l’on en croit votre rapport, se poursuivre dans le prochain PLF. Vous expliquez qu’en 2024, FMM a déjà subi une réduction des crédits inscrits au titre du programme de transformation. Sur les 5 millions d’euros qui étaient initialement prévus, seulement 1 million a été effectivement versé à ce jour. Par ailleurs, la dotation publique de FMM serait amputée d’environ 3,9 millions d’euros l’an prochain. En conséquence, les crédits effectivement alloués à FMM pourraient, entre 2024 et 2025, enregistrer un écart de l’ordre de 7 à 10 millions d’euros par an, par rapport à ce qui était prévu au COM.
Si ces coupes budgétaires se confirment, FMM devra renoncer à une partie de ses activités en Afrique, dans le monde arabe et en Amérique latine. Le groupe joue pourtant un rôle essentiel en tant que porte-voix de notre diversité culturelle et linguistique, en contribuant au rayonnement international de la France et de ses valeurs démocratiques. Je suis particulièrement préoccupée par les prévisions de ces suppressions, notamment en Amérique latine, où France 24 propose une diffusion vingt-quatre heures sur vingt-quatre de sa version hispanophone. Pouvez-vous nous en dire davantage sur ces coupes budgétaires et sur les projets de suppressions de postes, notamment en Amérique latine ?
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Les crédits de transformation portent sur un point important du contrat d’objectifs et de moyens : les efforts de numérisation. Nous regrettons que pour quelques millions d’euros, FMM soit privé de ressources nécessaires à l’accomplissement de son COM.
M. Alain David, rapporteur pour avis. Il ne faut pas non plus alarmer les hispanophones : la direction ne nous a pas dit qu’elle fermerait la rédaction de France 24 à Bogota.
Mme Marine Hamelet (RN). Les médias du groupe FMM participent activement à porter la voix de la France à l’international mais la liberté journalistique conduit certains des médias à tenir des positions contestables. Nous l’avons vu tout à l’heure, à travers notamment le site InfoMigrants, piloté en partie par FMM et financé par les contribuables français et des États de l’Union européenne. Nos compatriotes mahorais, victimes d’une invasion migratoire et d’une situation sécuritaire dramatique, sont à certains moments dépeints comme d’horribles xénophobes qui s’en prennent gratuitement aux migrants illégaux. Un autre article se permet d’insulter les onze millions d’électeurs du Rassemblement national en les traitant « d’idiots ».
La liberté journalistique est une valeur essentielle mais elle ne doit pas conduire à insulter les Français qui financent ces médias, ni à jouer contre notre camp sur la scène internationale en offrant une caisse de résonance, à des discours anti-France. Messieurs les rapporteurs, un travail de réflexion sur la ligne éditoriale de FMM a-t-il été entamé pour assurer la tenue de discours a minima respectueux des Français et utiles pour notre diplomatie ?
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Le site InfoMigrants fournit essentiellement des informations pour lutter contre les passeurs. Par ailleurs, il fait l’objet d’un financement de l’Union européenne.
Mme Sylvie Josserand (RN). Notre collègue a évoqué tout à l’heure les messages à caractère antisémite sur les réseaux sociaux de quatre journalistes arabophones. Joëlle Maroun, journaliste correspondante au Liban, a ainsi indiqué : « C’est à chaque Palestinien de tuer un Juif et l’affaire est close ». Dans votre réponse, Monsieur le rapporteur, Monsieur le président, vous avez indiqué qu’il ne s’agissait pas d’un sujet structurel mais d’un incident « regrettable » contre lequel la chaîne avait réagi.
Face à de telles dérives, avez-vous pu, Messieurs les rapporteurs, prendre connaissance et nous expliciter les garanties qu’offre le processus de recrutement des journalistes pour une information « indépendante et équilibrée » ? Des contrôles a priori ont-ils été mis en œuvre à la suite de ces affaires, d’autant plus que les messages étaient anciens et qu’ils auraient pu être détectés lors du recrutement de ces journalistes ?
M. Alain David, rapporteur pour avis. La direction générale de France Médias Monde a sanctionné lourdement ces dérapages regrettables et détestables et a agi en prenant de nouvelles orientations. L’immense majorité des journalistes produit un travail remarquable, dans le respect des règles déontologiques.
M. Marc de Fleurian (RN). Ce COM cite à peine les objectifs de FMM pour les territoires anglophones, du Sud comme du Nord. Or le rayonnement de la langue et de la culture française se heurte à la concurrence de la diffusion à tendance hégémonique de la langue anglaise, par le biais des chaînes généralistes privées, des plateformes de diffusion en ligne et de sociétés de production, dont le contenu peut aller jusqu’à heurter frontalement les intérêts français. Cette concurrence freine la progression de l’audience des médias francophones, malgré une hausse de la population parlant français sur la même période.
Le retrait de la distribution payante aux États-Unis pour un passage au « tout numérique », annoncé dans le précédent COM a-t-il été mené à bien ? Quels en sont les résultats ?
Enfin, existe-t-il une stratégie véritablement ambitieuse de rayonnement porté par FMM vis-à-vis des populations anglophones ou sujettes à l’influence grandissante de l’anglophonie ?
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Nous ne sommes pas les porte-parole de FMM mais, lors des différentes auditions, nous avons relevé la volonté de la direction de France Médias Monde d’élargir son audience. Celle-ci se heurte malheureusement à une difficulté : les ressources disponibles. Enfin, j’estime également que FMM doit également être diffusée auprès du monde anglophone.
M. Michel Guiniot (RN). Dans le COM, des indicateurs sont particulièrement dérangeants et même réalisés « à la louche ». Dans l’objectif 2 sur l’éducation à l’information, il paraît paradoxal de voir qu’aucune information n’est faite sur les projections de FMM. Pour un organisme qui aurait besoin de 305 millions d’euros d’argent public, le détail de ces objectifs dans le contrat paraît extrêmement léger. L’indicateur 2.1 sur la couverture hebdomadaire indique que l’audience sera croissante, sans fournir aucun détail. L’indicateur 2.2 sur les étudiants et enseignants touchés par FMM n’a pour seule mention que « progression en 2024-2027 ». Il en est de même pour l’indicateur 9.1 sur les résultats nets. Comment peut-il indiquer que les résultats sont à l’équilibre de 2025 à 2028, alors qu’il indique un déficit net de 1,4 million entre 2023 et 2024 ?
En revanche, rien n’est évoqué pour les indicateurs qui peuvent être pertinents et intéressants. Par exemple, l’absence d’indicateurs pour les audiences en français et en langues étrangères, qui font l’objet pourtant une recommandation de l’Arcom, n’est visiblement pas prise en compte. En conclusion, ce contrat ne fait état que de peu d’objectifs, alors qu’il demande beaucoup de moyens. À sa lecture, je me suis perdu face au manque de transparence. En a-t-il été de même pour vous, Messieurs les rapporteurs ?
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Nous estimons que les objectifs stratégiques de ce COM sont clairs, même si des indicateurs peuvent certainement être affinés. Je rappelle quand même que le contrat d’objectifs et de moyens a été validé et cosigné par FMM et l’Arcom, qui a considéré que la grille d’indicateurs était pertinente. Mais on peut toujours faire au mieux… avec moins.
M. Alain David, rapporteur pour avis. Notre rapport indique à ce titre que « Ces précisions pourront utilement être apportées dans les rapports annuels sur l’exécution du COM prévu par l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 […] ». Ces précisions seront fournies et publiées au fur et à mesure.
M. Stéphane Rambaud (RN). Comme nous le savons tous, la France n’est pas seulement une langue ou une culture mais une idée, une vision du monde, qui résonnent bien au-delà de nos frontières. Aujourd’hui, nous devons porter ce message auprès des jeunes de la Francophonie. Grâce à l’hyper distribution raisonnée, FMM dispose d’un bel outil pour renforcer sa présence sur les plateformes numériques. Mais au-delà de la technologie, le contenu importe. Nous devons diffuser l’image d’une France fière de ses valeurs, ouverte sur le monde mais surtout tournée vers l’avenir.
Ces jeunes en Afrique, au Moyen-Orient, en Europe de l’Est, ont besoin de messages de vérité et d’espoir. Ils attendent non seulement des mots de notre part mais aussi un engagement concret pour les aider à construire chez eux un avenir meilleur. Comment France Médias Monde, à travers ce dispositif, peut-elle diffuser cette image positive de la France, un pays qui les comprend, qui les soutient et qui les invite à forger un futur prospère chez eux, tout en conservant un lien fort avec la Francophonie ?
M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Selon moi, FMM s’efforce de véhiculer une certaine image de la France, notamment ces valeurs qui conditionnent notre liberté d’expression. Il faut continuer à défendre un journalisme libre et indépendant. Cela passe par l’attribution de moyens nécessaires, dans un monde où les médias de propagande prennent de plus en plus de poids.
M. Alain David, rapporteur pour avis. Je rappelle que France Médias Monde conduit également des actions d’éducation aux médias auprès des élèves et des enseignants, soit 83 000 personnes en 2023, avec une cible future de 150 000.
M. Frédéric Petit (Dem). De nombreux pays de ma circonscription ont été mentionnés aujourd’hui. De même, la seule journaliste au monde à être allée enquêter à Koursk est la correspondante à Kiev de FMM.
Ensuite, j’estime que les montants dévolus à France Médias Monde ne représentent pas une grande somme d’argent au regard des enjeux. Dès 2005, les Russes ont réécrit leur stratégie militaire et y ont introduit l’idée de guerre hybride. De notre côté, nous disposons d’une loi de programmation militaire (LPM). Notre commission doit sortir du blocage de la discussion avec le ministère de la culture. Faisons-en un vrai outil adapté au monde.
Enfin, je rappelle que cette commission a souhaité voir harmonisés les différents COM des opérateurs contribuant à l’action extérieure. Je souhaite que cette démarche aboutisse à établir une loi de programmation de l’action extérieure de la France et de son influence au cours de cette mandature.
M. le président Bruno Fuchs. Je remercie nos rapporteurs pour leur travail. Les deux projets éditoriaux et politiques doivent trouver un équilibre.
Conformément à l’article 145 du Règlement de l’Assemblée nationale, à l’issue des échanges, la commission autorise la publication du rapport d’information qui lui a été présenté.
ANNEXE 1 :
Comparaison des indicateurs du COM 2020-2023 et du projet de COM 2024-2028
COM 2020-2023 (10 objectifs et 17 indicateurs) |
PROJET DE COM 2024-2028 (10 objectifs et 16 indicateurs) |
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Objectifs et indicateurs |
Objectifs et indicateurs |
Évolutions du COM 2024-2028 |
Objectif 1 : Proposer une offre de service public identifiée qui s’adresse à tous les publics et accélérer la transformation numérique |
Objectif 1 : Proposer une information plurilingue internationale libre et indépendante partout dans le monde |
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Indicateur 1.1– Volume de contacts hebdomadaires pour FMM |
Indicateur 1.1 (suivi) – Opinions favorables évaluant les valeurs d’expertise, d’objectivité et de référence |
Indicateur reconduit mais transformé en indicateur de suivi, sans fixation de cibles, au regard de sa dimension déclarative et de sa sensibilité aux tensions internationales et aux relations entre la France et les régimes autoritaires. |
Indicateur 1.2 – Audience numérique (consommation des vidéos/ sons) |
Indicateur 2.1 – Couverture hebdomadaire de franceinfo : |
Indicateur reconduit : Comme pour le précédent COM, il s’agit d’un indicateur commun au service audiovisuel public, fourni à FMM par les directions des études de France Télévisions et Radio France |
Objectif 2 : Développer les synergies et partenariats entre entreprises de l’audiovisuel public |
Objectif 2 : Lutter contre la désinformation et contribuer à l’éducation aux médias et à l’information |
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Indicateur 2.1 – Audience des offres communes du service public |
Indicateur 2.2 – Nombre d’élèves et d’enseignants touchés par les actions d’EMI menés par l’audiovisuel public |
Nouvel indicateur : Indicateur commun à l’audiovisuel public |
Indicateur 2.2 – Part des heures de formation mutualisée |
Objectif 3 : Développer l’impact mondial des médias de FMM et sa capacité à atteindre des audiences internationales toujours plus larges |
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Indicateur 2.3 – Groupement d’achats actifs dans l’année |
Indicateur 3.1 – Présence internationale |
Indicateur reconduit : Comme pour le précédent COM, il s’agit des objectifs en matière de distribution télévisuelle (foyers et chambres d’hôtel) et radio sans fixation de cibles compte tenu des phénomènes de censures : suivi des audiences FM et ajout du DAB+ ; suivi des radios partenaires. Afin de refléter la dimension numérique, ajout du suivi du nombre d’abonnés réseaux sociaux. |
Objectif 3 : Consacrer prioritairement les moyens disponibles à l’offre au public |
Indicateur 3.2 – Volume de contacts hebdomadaires pour FMM |
Indicateur reconduit selon la méthodologie du précédent COM. |
Indicateur 3.1 – Indicateur d’efficience |
Indicateur 3.3 (suivi) – Audiences des offres en langue française et en langues étrangères ; volumes de contacts (broadcast et numérique incluant les environnements tiers) |
Indicateur reconduit mais ajusté pour suivre le volume de contacts (linéaire+ numérique incluant les environnements tiers) tant en français qu’en langues étrangères |
Objectif 4 : Assurer la maîtrise de la masse salariale et optimiser la gestion pour garantir la soutenabilité économique |
Objectif 4 : Cultiver la proximité avec les publics |
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Indicateur 4.1 – Résultat opérationnel récurrent |
Indicateur 4.1 – Plan d’action marquant dans le temps les différentes étapes de déploiement des quatre nouveaux projets de proximité |
Nouvel indicateur : Indicateur sous forme de plan d’action reflétant le déploiement des quatre nouveaux projets de proximité |
Indicateur 4.2 – Évolution de la masse salariale et des effectifs |
Objectif 5 : Poursuivre l’adaptation des offres éditoriales de FMM à l’évolution des usages du numérique |
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Indicateur 4.3 – Ressources propres |
Indicateur 5.1 – Audience numérique (consommation des vidéos/ sons) |
Indicateur reconduit selon la méthodologie du précédent COM |
Objectif 5 : Être une entreprise de média exemplaire |
Objectif 6 : Poursuivre l’adaptation de l’organisation de FMM aux enjeux du numérique |
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Indicateur 5.1 – Égalité entre les femmes et les hommes |
Objectif 7 : Être à la hauteur de l’urgence écologique |
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Indicateur 5.2 – Évolution de l’empreinte carbone des émissions directes et indirectes exprimée en tonne équivalent CO2 |
Indicateur 7.1 – Baisse des émissions de gaz à effets de serre (GES) des scopes 1, 2 et des déplacements (scope 3) |
Indicateur reconduit mais renforcé par la fixation de cibles de baisse des émissions de GES, alors que le précédent COM prévoyait seulement un plan d’action . |
Indicateur 5.3 – Actions en faveur de la diversité et de l’emploi des personnes handicapées |
Indicateur 7.2 – Politique d’achats responsables |
Nouvel indicateur, commun à l’audiovisuel public, visant à renforcer le suivi de la politique de Responsabilité sociale de l’Entreprises (RSE) |
Objectif 6 : Assurer des missions internationales plus essentielles que jamais et porter les valeurs démocratiques dans le monde |
Objectif 8 : Poursuivre une politique d’inclusion et de responsabilité éthique |
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Indicateur 6.1 – Opinions favorables évaluant les valeurs d’expertise, d’objectivité et de référence |
Indicateur 8.1 – Égalité entre les femmes et les hommes |
Indicateur reconduit selon la méthodologie du précédent COM concernant l’index d’égalité professionnelle et la représentation des expertes et intervenantes sur les antennes. Ajout dans ce COM du suivi de la représentation globale des femmes sur les antennes de FMM et pas seulement des expertes. |
Objectif 7 : Promouvoir la francophonie dans un monde plurilingue |
Indicateur 8.2 – Plan d’action diversité et inclusion |
Indicateur reconduit avec un plan d’action en matière de diversité et inclusion. Un objectif de labellisation est fixé au terme du COM. |
Indicateur 7.1 – Audiences des offres en langue française et en langues étrangères |
Objectif 9 : Assurer les équilibres financiers de l’entreprise |
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Objectif 8 : Développer l’innovation numérique au service d’une offre éditoriale ambitieuse |
Indicateur 9.1 – Résultat net récurrent |
Indicateur reconduit mais ajusté car le résultat net récurrent remplace le résultat opérationnel. En effet, le résultat opérationnel n’est pas apparu comme l’indicateur le plus à même d’évaluer la performance financière de l’entreprise en termes de résultat, car structurellement en perte, mais compensé en général par les produits financiers, ce qui permet de préserver un résultat net annuel à l’équilibre. |
Indicateur 8.1 – Déploiement de projets servant la transformation numérique |
Indicateur 9.2 – Masse salariale |
Indicateur reconduit concernant le suivi de la masse salariale mais suppression du suivi des emplois à temps plein (ETP) comme c’était déjà le cas pour les autres sociétés de l’audiovisuel public. |
Objectif 9 : Assurer notre présence mondiale tout en développant une stratégie régionalisée |
Indicateur 9.3 – Ressources propres |
Indicateur reconduit selon la méthodologie du précédent COM. |
Indicateur 9.1 – Présence internationale des médias de FMM – distribution TV et radio |
Objectif 10 : Adapter l’entreprise à son développement |
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Objectif 10 : Optimiser la gestion de l’entreprise |
Indicateur 10.1 – Achats communs
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Nouvel indicateur, commun aux sociétés de l’audiovisuel public. |
Indicateur 10.1 – Optimisation de la gestion |
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Source : commission des affaires étrangères d’après les réponses de FMM au questionnaire des rapporteurs
ANNEXE 2 :
Liste des personnes
auditionnÉes et rencontrÉes par les rapporteurs
● Ministère de l’Europe et des affaires étrangères
— M. Emmanuel Lebrun-Damiens, directeur de la diplomatie culturelle à la direction générale de la mondialisation
— M. Aurélien Chanquin Torres, adjoint à la sous-directrice de la culture et des médias
— Mme Marguerite Hitier, responsable du pôle médias et cinéma
— Mme Aurélie Lachkar, rédactrice secteur audiovisuel public et privé
● Ministère de la culture
— M. Ludovic Berthelot, chef du service des médias, direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC)
— Mme Armelle Boucher, adjointe au chef du bureau du secteur audiovisuel public
— Mme Maïté Lamothe, chargée de tutelle audiovisuel public
● France Médias Monde
— Mme Marie-Christine Saragosse, présidente-directrice générale
— M. Roland Husson, directeur général en charge du pôle ressources
— M. Thomas Legrand-Hedel directeur de la communication et des relations institutionnelles
● Visite du siège de France Médias Monde, et rencontre des équipes de rédaction de :
— Radio France international (RFI) dont M. Jean-Marc Four, directeur et M. Juan Gomez, présentateur de l’émission Appels sur l’actualité
— France 24, dont Mme Vanessa Burgraff, directrice
— Monte Carlo Doualiya (MCD)
([1]) Article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication (lien).
([2]) II de l’article 2 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, dans sa rédaction résultant de l’article 3 de la loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques (lien).
([4]) IV de l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, établi par l’article 7 de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public à la télévision (lien).
([5]) Anglais, cambodgien, chinois, espagnol, haoussa, mandingue, fulfulde, portugais, brésilien, khmer, kiswahili, persan, roumain, russe, vietnamien et, depuis 2022, ukrainien.
([6]) Assemblée nationale, 3 février 2021. Rapport d’information n°3832 de M. Alain David valant avis sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens de France Médias Monde pour la période 2020-2022. (lien).
([7]) Conformément à l’article 48 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, l’Arcom établit chaque année un rapport relatif au respect par la société nationale de programme France Médias Monde des obligations qui figurent dans son cahier des charges. Le dernier rapport, portant sur l’année 2022, a été rendu public en novembre 2023 (lien).
([8]) Marie-Christine Saragosse. Janvier 2023. FMM 2023-2028. Cultiver la confiance dans un monde défiance. 39 p (lien).
([9]) Arcom. novembre 2023. Rapport sur l’exécution du cahier des charges de France Médias Monde, année 2022, p. 4 (lien).
([10]) Décret n° 2012-85 du 25 janvier 2012 fixant le cahier des charges de la société nationale de programme en charge de l'audiovisuel extérieur de la France.
([11]) Arcom. avis n° 2024-06 24 juillet 2024 relatif aux projets de contrats d’objectifs et de moyens de France Télévisions, Radio France et France Médias Monde pour la période 2024-2028. p. 18 (lien).
([12]) Le DG8 rassemble France Médias Monde, BBC World, USAGM, Deutsche Welle, ABC Australia, CB Radio Canada, NHK World Japan et SSR.
([13]) Marie-Christine Saragosse. op. cit. p. 19.
([14]) Les rapporteurs renvoient aux analyses détaillées présentées à l’automne 2023 par leur collègue Estelle Youssouffa, alors rapporteure pour avis des crédits de FMM au projet de loi de finances pour 2024, et qui figurent dans le rapport d’information n°1715 du 11 octobre 2023 (lien). p. 41 à 46.
([15]) Sénat, rapport n°739 déposé le 23 juillet 2024 par MM. Dominique de Legge et Rachid Temal. Lutte contre les influences étrangères malveillantes. Pour une mobilisation de toute la Nation face à la néo-guerre froide. tome 1. P. 279- 280.
([16]) Sénat, proposition de loi n°132 adoptée en première lecture par le Sénat le 13 juin 2023 (lien), puis examinée en première lecture par la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale avec l’adoption d’un texte le 15 mai 2024 (lien).
([17]) II de l’article 2 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, dans sa rédaction résultant de l’article 3 de la loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques (lien).
([18]) Assemblée nationale, proposition de loi organique n°2616 enregistrée le 10 mai 2024 relative à l’extension des prélèvements sur les recettes de l’État au profit des organismes du secteur audiovisuel public (lien).
([19]) Assemblée nationale, proposition de loi organique n°5 enregistrée le 20 juillet 2024 relative à l’extension des prélèvements sur les recettes de l’État au profit des organismes du secteur audiovisuel public (lien).