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N° 276

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2017.

 

 

AVIS

 

 

PRÉSENTÉ

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2018,

 

 

TOME I

 

 

SANTÉ

 

 

PAR M. Francis VERCAMER,

 

Député.

——

 

 

 

 

Voir les numéros :

Assemblée nationale :  235, 273 (annexe n° 38).

 


 

 


—  1  —

SOMMAIRE

___

Pages

introduction

I. un budget en hausse

A. Les crÉdits destinÉs À la prÉvention, la sÉcuritÉ sanitaire et loffre de soins

1. Un effort demandé aux agences sanitaires

a. L’Agence nationale de sécurité du médicament

b. L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

c. L’Institut national du cancer

d. Le Haut conseil de la santé publique

2. Les autres actions du programme

B. Les crédits en faveur de la protection maladie

1. L’augmentation substantielle de la dotation à l’action Aide médicale d’État

2. Une stabilité de la dotation au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante

II. L’agence nationale de santé publique au cœur de la politique de prévention

A. Un atout pour promouvoir la prévention

1. Une approche de la prévention intégrée

a. Un nouvel élan donné à la prévention

b. Un nouveau modèle d’agence

2. Une approche de la prévention repensée

a. Le continuum entre épidémiologie et prévention

b. De nouveaux outils

B. Un atout à consolider

1. Une place à trouver au sein d’un paysage fragmenté

a. Un rôle d’appui et d’expertise

b. L’animation d’un réseau

c. Une articulation en devenir avec ses partenaires

2. La question du financement

a. Des ressources peu diversifiées

b. Un effort de rationalisation des dépenses

Travaux de la Commission

Examen des crédits

Contribution au rapport

Contribution du groupe du Mouvement Démocrate et apparentés

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES


—  1  —

 

   introduction

L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances fixe au 10 octobre la date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 66 % des réponses étaient parvenues.

 

Après une brève présentation des principales orientations budgétaires pour 2018, le rapporteur a souhaité consacrer la seconde partie de ses travaux à l’Agence nationale de santé publique (ANSP), apparue récemment dans le paysage des agences sanitaires.

Après un an d’existence, l’ANSP a mis en place ses instances de gouvernance et a conduit un premier programme de travail. Elle a pour ambition de devenir un acteur clé dans le domaine de la prévention et de la promotion de la santé en se positionnant comme une instance d’expertise et d’ingénierie.

Bien que l’ANSP ait renouvelé la démarche de promotion de la santé en privilégiant le continuum entre épidémiologie et prévention et ait mis en place de nouveaux outils, il lui reste à trouver sa place au sein d’un paysage fragmenté où de multiples acteurs concourent aux politiques de prévention. Son principal défi réside dans l’articulation de ses missions avec les autres acteurs de la prévention et particulièrement les agences régionales de santé. Enfin, la question du financement est cruciale car l’ANSP dépend essentiellement d’une subvention pour charges de service public et aucun crédit relatif à ses actions de prévention n’est sanctuarisé.

 


—  1  —

I.   un budget en hausse

Les moyens consacrés à la mission Santé du projet de loi de finances pour 2018 s’élèvent à 1,416 milliard d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 1,417 milliard d’euros en crédits de paiement (CP) ([1]) contre 1,264 milliard d’euros en AE et 1,265 milliard d’euros en CP en loi de finances initiale (LFI) pour 2017 soit une augmentation de 12 %. Les deux programmes connaissent une progression de leurs crédits.

La mission Santé se décompose en deux programmes :

– le programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins piloté par la direction générale de la santé représente environ 35 % des crédits de la mission. Les crédits affectés visent à développer la politique de prévention, à garantir la protection contre les risques sanitaires et à organiser une offre de soins de qualité sur tout le territoire. Ils comprennent principalement les subventions pour charges de service public des agences sanitaires et les crédits attribués à l’administration du ministère de la santé ;

– le programme 183 Protection maladie piloté par la direction de la sécurité sociale concentre 65 % des crédits. Il recouvre essentiellement les crédits affectés à l’aide médicale d’État (AME).

Le rapporteur tient à souligner que la mission Santé ne regroupe qu’une partie limitée des dépenses publiques en matière sanitaire.

En premier lieu, il convient de noter que les crédits de personnel qui concourent à la mise en œuvre des programmes de la mission et le financement des agences régionales de santé (ARS) figurent au programme 124 Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances. 113,1 millions d’euros seront reversés à la mission Santé, à savoir 109 millions d’euros pour le programme 204 et 1,3 millions d’euros pour le programme 183.

En deuxième lieu, les questions budgétaires liées aux politiques de santé publique, à l’offre de soins et à l’assurance maladie relèvent du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Par ailleurs, depuis quelques années, le périmètre de la mission a évolué et nombre de crédits ont été transférés à l’assurance maladie ; en 2015 le financement de la Haute Autorité de santé, de l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation et les crédits destinés à la formation médicale initiale ont été dévolus à l’assurance maladie. En 2017, le financement des fonds d’intervention régionaux a été, à son tour, transféré à l’assurance maladie. À compter de 2018, ce sont les crédits affectés à l’Agence de biomédecine et à l’École des hautes études de la santé publique qui relèveront aussi de l’assurance maladie. Le rapporteur s’interroge donc sur la cohérence à terme du périmètre du programme 204.

A.   Les crÉdits destinÉs À la prÉvention, la sÉcuritÉ sanitaire et l’offre de soins

Pour 2018, 484,8 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 486,1 millions d’euros en crédits de paiement (CP) seront alloués au programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins, à périmètre courant, contre 441,4 millions d’euros en AE et 442,7 millions d’euros en CP en LFI pour 2017 soit une progression de presque 10 % ([2]) des AE et CP. Presque 52 % des crédits sont consacrés à l’action Pilotage de la santé publique.

À périmètre constant, sans tenir compte du transfert de l’Agence de biomédecine et de l’École des hautes études de la santé publique à l’assurance maladie, le montant des AE s’élèverait à 508,2 millions d’euros et celui des CP à 509,1 millions d’euros pour 2018.

Malgré la diminution du périmètre du programme, les crédits progressent mais le rapporteur tient à relever que cette augmentation profite majoritairement aux frais de justice ; ainsi, les crédits de la politique de santé publique mise en œuvre en administration centrale diminuent d’environ 8 millions d’euros ([3]).

Par ailleurs, cette nouvelle diminution du périmètre que connaît ce programme accentue encore le déséquilibre avec le programme 183, ce que déplore le rapporteur.

CRÉDITS PROGRAMME 204 ‑ PÉRIMÈTRE COURANT

 

LFI 2017

PLF 2018

AE

CP

AE

CP

Politique de santé publique mise en œuvre en administration centrale

38,07

38,07

30,58

30,58

Opérateurs de prévention et sécurité sanitaire

344,60

344,60

325,96

325,96

Frais de justice

23,03

23,03

90,1

90,1

Opérateurs et organismes de l'offre de soins

31,0

32,30

33,5

34,8

Modernisation de l'offre de soins

4,71

4,71

4,7

4,7

Total

441,41

442,71

484,84

486,14

Source : DGS.

 

CRÉDITS PROGRAMME 204 – PÉRIMÈTRE CONSTANT

 

 

LFI 2017

PLF 2018

 

AE

CP

AE

CP

Politique de santé publique mise en œuvre en administration centrale

38,07

38,07

30,58

30,58

Opérateurs de prévention et sécurité sanitaire

344,60

344,60

349,33

349,33

Frais de justice

23,03

23,03

90,1

90,1

Opérateurs et organismes de l'offre de soins

31,0

32,30

33,5

34,8

Modernisation de l'offre de soins

4,71

4,71

4,7

4,7

Total

441,41

442,71

508,21

509,51

Source : DGS.

Sous la tutelle de la direction générale de la santé, ce programme se propose de :

– piloter le réseau des agences sanitaires ;

– développer des stratégies de santé publique, dont des actions en matière de prévention et d’éducation en santé, et assurer la sécurité sanitaire des populations face à des événements graves et des crises sanitaires ;

– réduire les inégalités sociales et territoriales de santé ;

– moderniser l’offre de soins et garantir sa qualité.

1.   Un effort demandé aux agences sanitaires

Les crédits alloués aux agences sanitaires du programme s’élèvent à 325,9 millions d’euros en AE et en CP contre 321,9 millions d’euros en AE et en CP en LFI pour 2017, en augmentation de 1,2 % si l’on se réfère au périmètre courant. En effet, l’Agence de Biomédecine et l’École des hautes études de santé publique ne font plus partie du programme.

En analysant l’évolution des subventions nettes ([4]), la progression entre 2017 et 2018 est de 4,5 %.

Évolution des subventions nettes pour charges de service public des agences sanitaires du programme

 

Versements SCSP 2016

Versements prévus SCSP 2017 (actualisation septembre 2017)

Versements prévus SCSP 2018 (actualisation septembre 2017)

Variation 2018-2017
en €

Variation 2018-2017
en %

ABM

12 998 726 €

12 916 369 €

 

 

 

ANSES

12 749 315 €

13 315 992 €

13 978 719 €

662 727 €

4,98 %

ANSM

111 786 346 €

109 794 978 €

116 586 884 €

6 791 906 €

6,19 %

ANSP

82 897 077 €

141 682 749 €

148 055 053 €

6 372 304 €

4,50 %

EHESP

7 115 667 €

7 455 975 €

 

 

 

INCa

31 430 042 €

41 061 061 €

41 248 606 €

187 545 €

0,46 %

Total

258 977 173 

326 227 124 

319 869 262 

14 014 482 

4,58 %

Source : Questionnaire budgétaire.

Cette progression des subventions a pour contrepartie la participation aux efforts de redressement budgétaire demandé aux opérateurs de l’État.

Cette trajectoire d’effort budgétaire se matérialise par la signature d’un contrat d’objectifs et de performance (COP) avec la tutelle. À l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), ce dernier a été signé en 2015 et court jusqu’en 2018. À l’Agence nationale de santé publique, le COP est en cours d’élaboration. Quant à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), un nouveau contrat sera conclu pour la période 2018-2022.

Parmi les postes d’économies, figurent les frais de fonctionnement qui devront diminuer de 3 % et les frais de personnel. Ainsi, le plafond d’ETPT dans chaque agence sera diminué de 2,5 % ([5]). Le total des ETPT sous plafond qui était de 1 697 dans la LFI pour 2017 passera à 1 658 dans le présent projet de loi de finances pour 2018 soit 39 ETPT de moins.

Des efforts de mutualisation ont été demandés aux agences.

À la suite de plusieurs rapports plaidant pour un regroupement des agences sanitaires afin d’accroître leur efficacité, plusieurs ont fusionné. Le dernier regroupement en date est celui de l’Institut de veille sanitaire (InVS), de l’Institut national de prévention et d'éducation pour la Santé (INPES) de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) pour créer l’Agence nationale de santé publique (ANSP). Elle a désormais près d’un an d’existence. Cette dernière fera l’objet de la deuxième partie du rapport.

Par ailleurs, un système d’information financier et comptable commun à l’ANSP, à l’Institut national du cancer (INCa) et à l’ANSM a été mis en place. Des études évaluées à 20 000 euros en 2018 se poursuivront pour étudier la faisabilité d’une stratégie immobilière commune et la possibilité de regrouper sur un site unique un pôle produits et pratiques ([6]).

a.   L’Agence nationale de sécurité du médicament

L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) est une agence d’évaluation et d’expertise qui a pour mission principale d’évaluer les bénéfices-risques liés à l’utilisation des produits de santé. La loi de modernisation de notre système de santé ([7]) lui a attribué de nouvelles missions : certifier les logiciels d’aide à la prescription et à la dispensation, évaluer la méthodologie des essais interventionnels susceptibles de comporter des risques pour les patients et lutter contre les ruptures d’approvisionnement des médicaments. Par ailleurs, à la suite du prochain transfert de l’Agence européenne du médicament hors de la Grande Bretagne, la France pourrait récupérer des dossiers supplémentaires d’autorisations de mise sur le marché de médicaments.

La subvention nette pour charges de service public pour 2018 de l’ANSM est fixée à 116,5 millions d’euros en AE et en CP contre 109,7 millions d’euros en LFI pour 2017 soit une augmentation de 6,1 %.

Cette progression de la subvention est justifiée par son solde budgétaire déficitaire et l’érosion de son fonds de roulement.

Le programme d’économies, amorcé depuis 2015 se poursuit. S’agissant des locaux, les espaces ont été rationalisés afin de diminuer le coût des loyers. Quant aux achats, un plan d’actions pour 2018-2020 a été renouvelé afin de les optimiser.

Dans le budget initial 2017, les dépenses de fonctionnement s’élèvent à 26,3 millions d’euros en CP, soit une diminution de 6,2 % par rapport à 2016.

Le plafond d’emploi sous plafond est fixé à 935 ETPT dans le présent projet de loi de finances pour 2018 contre 955 ETPT en LFI pour 2017, soit une diminution de 20 ETPT. L’effort est moindre que pour les autres opérateurs car il tient compte de possibles missions supplémentaires liées au transfert de l’Agence européenne du médicament.

b.   L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) mène des actions de sécurité sanitaire dans le domaine de l’alimentation, de l’environnement et coordonne les plans santé au travail.

Sa subvention nette pour charges de service public s’établira à 13,9 millions d’euros en AE et en CP dans le présent projet de loi de finances pour 2018.

Le plafond d’emploi est géré par le programme 206 Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation.

c.   L’Institut national du cancer

L’Institut national du cancer (INCa) est le groupement d’intérêt public chargé de coordonner la lutte contre le cancer. À ce titre, il pilote le troisième Plan cancer (2014-2019). Pour 2018, ses dépenses sont estimées à 285 millions d’euros. Parmi les actions mises en exergue figureront la généralisation du dépistage du cancer du col de l’utérus et une plus grande sensibilisation de la population sur les facteurs de risque évitables.

Sa subvention nette pour charges de service public s’élèvera à 41,2 millions d’euros en AE et en CP dans le présent projet de loi de finances pour 2018.

Le plafond d’emploi, fixé en 2018 à 141 ETPT contre 145 ETPT en LFI pour 2017 sera en baisse de 4 ETPT.

d.   Le Haut conseil de la santé publique

Le Haut conseil de santé publique bénéficiera de 350 000 euros en AE et en CP dans le présent projet de loi de finances pour 2018 contre 570 000 euros en LFI pour 2017, soit une nette diminution de 38 %. Ces crédits correspondent principalement à des dépenses de soutien aux travaux scientifiques et techniques.

2.   Les autres actions du programme

Deux actions connaissent une forte augmentation, l’action n° 11 Pilotage de la politique de santé publique et l’action n° 19 Modernisation de l’offre de soins.

La progression marquée de l’action n° 11 tient aux crédits alloués au contentieux dont la dotation à lOffice national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM).

L’article 150 de la loi de finances initiale pour 2017 a instauré un dispositif d’indemnisation des victimes de la Dépakine et a abondé le programme 204 de crédits à hauteur de 10 millions d’euros en 2017. En effet, l’article L. 1142-23 du code de la santé publique a prévu que l’État verse à l’ONIAM une dotation pour faire face aux demandes d’indemnisation. En 2017, les dépenses de fonctionnement liées à l’activité du collège d’experts et aux frais d’expertise qui doivent évaluer le degré d’imputabilité des dommages au médicament sont estimées à 500 000 euros.

Pour 2018, une dotation de 77,7 millions d’euros en AE et en CP est prévue en fonction des prévisions suivantes : le coût total du contentieux lié à la Dépakine en année pleine serait estimé à environ 78 millions d’euros, décomposé comme suit, 70,7 millions d’euros au titre de l’indemnisation des victimes, 5 millions d’euros au titre des expertises et 2 millions d’euros au titre des dépenses de fonctionnement.

L’ONIAM recevra également une dotation de 3,7 millions d’euros au titre des contentieux liés aux accidents vaccinaux.

La totalité de la dotation s’élèvera donc à 81,4 millions d’euros en AE et CP dans le présent projet de loi de finances pour 2018.

Quant à l’action n° 19 Modernisation de l’offre de soins, sa progression est liée au soutien à l’agence de santé du territoire de Wallis et Futuna.

L’agence de santé du territoire de Wallis et Futuna doit faire face à une progression de ses dépenses en raison de la faiblesse de ses équipements, nombre de patients étant évacués vers le centre hospitalier universitaire de Nouméa, voire la métropole. Elle a ainsi accumulé une dette qui en 2014 s’est élevée à 21,5 millions d’euros. Un prêt à taux bonifié a été conclu avec l’Agence française de développement en 2015, ce qui a permis à l’agence de rembourser ses créanciers. Afin d’éviter que cette dette se reconstitue, la subvention versée à l’Agence a été revalorisée depuis 2015. Elle est de nouveau augmentée pour 2018 d’environ 8 %, passant à 34,3 millions d’euros en CP dans le présent projet de loi de finances pour 2018 contre 31,8 millions d’euros en CP dans la LFI pour 2017.

B.   Les crédits en faveur de la protection maladie

Pour 2018, 931, 7 millions d’euros d’autorisations en engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) seront alloués au programme 183 Protection maladie, contre 823, 2 millions d’euros en AE et en CP en loi de finances initiale (LFI) pour 2017 soit une augmentation de 13 %.

Piloté par la direction de la sécurité sociale, ce programme assure la protection face à la maladie dans des situations relevant de la solidarité nationale. Il comprend :

– l’aide médicale d’État, représentant 99 % des crédits du programme ;

– l’indemnisation des victimes de l’amiante.

1.   L’augmentation substantielle de la dotation à l’action Aide médicale d’État

Mis en place depuis 2000, ce dispositif a vu ses dépenses progresser considérablement, les dépenses d’aide médicale d’État (AME) de droit commun sont ainsi passées de 540 millions d’euros pour 215 763 bénéficiaires en 2009 à 783,7 millions d’euros pour 311 310 personnes en 2016. La dotation globale pour 2018 est fixée à 923,7 millions d’euros en AE et CP contre 815,2 millions d’euros en AE et CP en LFI pour 2017 soit une progression de 13,1 %.

Le rapporteur regrette que cette augmentation des crédits aggrave le déséquilibre entre les programmes 183 et 204.

La Cour des comptes a relevé dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire pour 2016 ([8]) une sous-budgétisation des dépenses de l’AME de droit commun, même si elle apparaissait moins marquée que les années précédentes et a conclu à une sincérité de la programmation du programme 183 sujette à caution. C’est pourquoi, la forte augmentation des crédits figurant dans le présent projet de loi de finances pour 2018 participe d’une démarche visant à se rapprocher des dépenses réalisées que le rapporteur salue.

Évolution des dÉpenses au titre de l’aide mÉdicale de droit commun
et du nombre de ses bÉnÉficiaires entre 2009 et 2016

Année

Dépenses

Nombre de bénéficiaires
au 31 décembre

En millions d’euros

Évolution annuelle
(%)

Effectifs

Évolution annuelle
(%)

2009

540

13,3

215 763

6,5

2010

580

7,4

228 036

5,7

2011

609

4,9

208 974

 8,4

2012

581

– 4

252 437

20,8

2013

715

23

282 425

11,8

2014

759,9

6,2

294 298

3,4

2015

780,1

2,65

316 314

7,4

2016

783,7

0,4

311 310

– 1,5

Source : Questionnaire budgétaire.

L’AME se décompose en trois dispositifs distincts :

– l’AME de droit commun ([9]) bénéficie aux étrangers résidant en France depuis plus de trois ans en situation irrégulière sous condition de ressources ([10]). Elle prend en charge les dépenses de santé jusqu’à 100 % des tarifs maximum fixés par l’assurance maladie. Aucune avance de frais n’est demandée au bénéficiaire. La Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) gère les frais avant leur prise en charge par l’État. Pour 2018, les crédits s’élèveront à 882 millions d’euros, en forte augmentation par rapport à la LFI pour 2017 où ceux-ci s’élevaient à 772,5 millions d’euros ;

– l’AME soins urgents profite aux étrangers en situation irrégulière ne remplissant pas les conditions de résidence et nécessitant des soins urgents. L’État participe via une subvention forfaitaire qui permet à la CNAMTS de rembourser les soins dispensés par les hôpitaux. Son montant forfaitaire est de 40 millions d’euros et reste stable ;

– l’AME humanitaire ([11]) est accordée au cas par cas sur décision ministérielle pour des personnes nécessitant des soins hospitaliers et ne résidant pas habituellement en France. Ce dispositif peut donc bénéficier à des personnes de nationalité française ou étrangère.

Ce programme comprend également les évacuations sanitaires d’étrangers résidant à Mayotte et la prise en charge de soins pour les personnes en garde à vue. Le montant des crédits inscrits dans le présent projet de loi de finances pour 2018 s’élève à presque 1,7 million d’euros ([12]) contre 2,6 millions d’euros en LFI pour 2017.

L’AME sera désormais gérée par trois caisses d’assurance maladie, Paris, Bobigny et Marseille afin de centraliser les demandes, ce qui devrait permettre de renforcer les contrôles et de faire des économies de gestion. Par ailleurs, un nouvel indicateur n° 1.2 « Pourcentage de dossiers d’aide médicale contrôlés » figure dans le programme 183 dont l’objectif est le contrôle de 10 % des dossiers.

2.   Une stabilité de la dotation au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante

Le présent projet de loi de finances pour 2018 prévoit 8 millions d’euros pour le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA), soit une reconduction des crédits alloués en LFI pour 2017. Ce fonds est chargé d’assurer la réparation des préjudices subis par les victimes de l’amiante et leurs ayants droit que l’exposition ait été d’origine professionnelle ou environnementale. Ses ressources sont constituées majoritairement par une dotation de la branche accidents du travail, maladie professionnelle (AT-MP) de l’assurance maladie fixée dans la loi de financement de la sécurité sociale et d’une dotation de l’État fixée dans le présent programme. En effet, l’État prend en charge les victimes non professionnelles au titre de la solidarité nationale. Depuis 2002 et jusqu’au 31 décembre 2016 plus de 200 000 ([13]) offres d’indemnisation ont été proposées aux victimes directes et ayants-droits et les dépenses totales d’indemnisation se sont élevées à 5,2 millions d’euros. Le nombre de nouvelles demandes de victimes directes est orienté à la baisse et se situerait autour de 5 900  en 2017 et 5 760  en 2018. Il en est de même pour les ayants-droit, leurs demandes s’élèveraient à 12 600  en 2017 et 12 300  en 2018. Les dépenses d’indemnisation devraient s’établir autour de 332,5  millions d’euros en 2017 et 315,5  millions d’euros en 2018.

II.   L’agence nationale de santé publique au cœur de la politique de prévention

Prévue par l’article 166 de la loi de modernisation de notre système de santé ([14]) et créée par l’ordonnance du 14 avril 2016 ([15]) la nouvelle agence sanitaire, l’Agence nationale de santé publique (ANSP), a vu le jour le 1er mai 2016.

Issue de la fusion de trois agences, l’Institut de veille sanitaire (InVS), l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) et du groupement d’intérêt public Addictions Drogues Alcool Info Services (ADALIS), l’ANSP a pour ambition de devenir un centre de référence et d’expertise en santé publique ; elle s’inscrit dans la lignée des agences sanitaires anglo-saxonnes comme les « Centers for disease control » américains.

Deux idées sous-tendent cette fusion :

– parvenir à atteindre une taille critique et initier un effet de levier pour lui permettre d’améliorer ses activités de veille sanitaire, de prévention et de gestion des crises ;

– améliorer l’efficacité des politiques de santé publique, en favorisant un continuum entre la surveillance épidémiologique et les actions de prévention et d’éducation à la santé ainsi que la gestion des crises sanitaires. Selon les termes du directeur général de l’agence, M. François Bourdillon, « nous avons souhaité affirmer(), que l’on pouvait travailler dans une logique de marketing social, consistant à mettre en cohérence l’ensemble des actions de prévention issues des connaissances épidémiologiques sur les comportements. » ([16]).

La mission première de cette agence est de protéger la santé des populations. C’est pourquoi l’axe populationnel a été retenu pour cette fusion, ce qui permet de la différencier des autres agences telles que l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), chargée de surveiller la sécurité des produits, de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) qui évalue des risques ou de la Haute Autorité de santé à qui incombe de veiller à la qualité des pratiques.

A.   Un atout pour promouvoir la prévention

1.   Une approche de la prévention intégrée

L’ANSP est appelée à jouer un rôle clé dans la promotion des politiques de prévention. « L’axe populationnel vise à s’intéresser à l’état de santé des Français, à prioriser des actions grâce à nos données et connaissances et à faire en sorte d’agir au plus près de la population. » ([17]).

a.   Un nouvel élan donné à la prévention

S’inscrivant dans les orientations énoncées par le Premier ministre M. Édouard Philippe, lors de sa déclaration de politique générale le 4 juillet 2017, érigeant la prévention comme pivot de la Stratégie nationale de santé, la ministre des solidarités et de la santé Mme Agnès Buzyn a réaffirmé lors de son audition à l’Assemblée nationale : « Il s’agit de changer de paradigme dans la façon dont nous envisageons la santé de nos concitoyens, en passant d’un parcours de soins à un parcours de santé. Cette prévention suppose que nous menions des actions interministérielles de nature à favoriser la prise de conscience par l’ensemble de nos concitoyens de sa nécessité. » ([18]).

La Stratégie nationale de santé, en cours d’élaboration, réitère cette volonté de promouvoir une politique de prévention et de promotion de la santé intégrée tout au long de la vie et dans tous les milieux.

Selon le professeur Pierre Lombrail, ancien président de la Société française de santé publique ([19]), cette approche qui découle de la Charte d’Ottawa ([20]) doit être privilégiée. Il est préférable lorsque l’on élabore des politiques de prévention de privilégier la promotion de la santé plutôt que la prévention des maladies : «  Il vaut mieux prévenir les comportements à risque plutôt que de les dépister. » Cette démarche concerne la politique en matière de santé, mais aussi les politiques culturelles, scolaires, dans le domaine du logement ou de l’aménagement du territoire et passe donc par tous ces acteurs.

M. Jacques Olivier Dauberton, conseiller chargé de la sécurité sanitaire auprès du ministère chargé des solidarités et de la santé ([21]), a abondé dans ce sens en soulignant que les nouvelles orientations qui seraient mises en œuvre dans le cadre de la Stratégie nationale de santé privilégieraient la promotion de comportements favorables à la santé. C’est pourquoi les enfants en bas âge seraient ciblés afin que les bons réflexes soient assimilés jeunes. L’éducation à la santé des enfants passe par l’école où ce sujet est désormais enseigné mais aussi par des politiques menées par les communes en matière de restauration scolaire et d’apprentissage à la nutrition ainsi que de promotion du sport et des activités physiques.

Cette approche intégrée a été privilégiée par l’agence dès le début de la programmation de ses activités pour 2016. Il a été décidé d’intégrer les activités de prévention dans toutes les missions de l’agence.

Pour 2018, le programme de travail annuel de l’agence portera sur des actions de prévention et de promotion de la santé vis-à-vis des populations vulnérables, fragiles et précaires et plus précisément les enfants, les femmes enceintes, les populations d’outre-mer et les personnes placées sous main de justice.

C’est dans cette logique que l’ANSP a intégré, par exemple, la problématique des inégalités sociales et territoriales de santé dans l’ensemble de ses actions.

Dans son rapport de préfiguration ([22]), M. François Bourdillon relevait qu’il était pertinent d’observer la santé des populations en lien avec l’absence d’emploi. Dans le même esprit, il relevait que l’occupation d’un travail précaire devait conduire à des approches préventives différenciées.

b.   Un nouveau modèle d’agence

S’inscrivant dans cette approche transversale, la nouvelle agence se positionne comme un acteur global de la santé publique. Le directeur général de l’agence, M. François Bourdillon, a ainsi évoqué le souhait d’en finir avec le millefeuille et l’approche d’une agence par fonction ([23]).

Les missions de l’ANSP se concentrent autour de trois thématiques : veille épidémiologique, prévention et promotion de la santé, gestion des crises sanitaires.

L’article L. 1413-1 du code de la santé publique précise ces missions :

– l’observation épidémiologique et la surveillance de l’état de santé des populations ;

– la veille sur les risques sanitaires menaçant les populations ;

– la promotion de la santé et la réduction des risques pour la santé ;

– le développement de la prévention et de l’éducation pour la santé ;

– la préparation et la réponse aux menaces, alertes et crises sanitaires ;

– le lancement de l’alerte sanitaire.

Afin de mener à bien ses missions, l’agence a défini 5 axes stratégiques regroupant 28 programmes :

– déterminants de santé ;

– populations ;

– pathologies ;

– interventions et territoires ;

– infrastructures.

L’organisation de l’agence se veut ouverte à la société civile et transparente.

S’agissant de la gouvernance, elle introduit une innovation, la création d’un comité ouvert à la société civile, le comité d’orientation et de dialogue, afin de mieux appréhender les attentes et les enjeux de la société civile.

Cette volonté de transparence se traduit également dans les méthodes de travail. Les décisions sont collégiales et sont publiées ainsi que les délibérations et procès-verbaux des réunions des instances de gouvernance. Les comités d’experts sont constitués après appel à candidature. L’expertise sera collective et inscrite dans la charte de l’expertise.

Par ailleurs, les déclarations d’intérêt public des membres de l’agence sont rendues publiques.

La gouvernance

Selon l’article L. 1413-10 du code de la santé publique, un directeur général nommé pour une durée de trois ans renouvelable conduit les activités de l’agence. L’article R. 1413-15 du code de la santé publique précise ses missions : il propose les orientations stratégiques de l’agence au conseil d’administration, prépare les délibérations du conseil d’administration et en assure l’exécution, recrute, nomme et gère le personnel de l’établissement et a autorité sur l’ensemble des personnels. Il est l’ordonnateur principal des recettes et des dépenses du budget de l’agence.

Quatre instances constituent la gouvernance de l’agence.

Le conseil d’administration ([24]) composé de ving-huit membres est chargé de se prononcer sur les orientations stratégiques pluriannuelles de l’agence, de définir et de suivre sa programmation et d’arbitrer les moyens humains et financiers nécessaires à son fonctionnement. À ce titre il fixe le règlement intérieur de l’agence et les conditions d’emploi et de recrutement du personnel ainsi que les modalités de mise en œuvre des règles de déontologie. Enfin, il délibère sur la liste des membres du conseil scientifique, du comité d’éthique et de déontologie et du comité d’orientation et de dialogue.

Neuf membres représentent l’État (le ministère de la santé dispose de deux représentants tandis que ceux du travail, de la recherche, de l’environnement, de l’Éducation nationale, de la défense, du budget et de l’outre-mer détiennent une voix), 1 membre représente l’assurance maladie, quatre membres représentent des partenaires institutionnels (ARS, conférence nationale de santé, Institut national de la santé et de la recherche médicale et Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie), trois membres représentent des professionnels de santé, quatre membres les associations, deux élus les collectivités territoriales, et enfin siègent à ce conseil deux personnalités qualifiées et trois représentants du personnel de l’agence.

Quatre parlementaires devraient rejoindre le conseil d’administration à la suite de la loi du 24 février 2017 ([25]).

La durée du mandat des membres est de quatre ans renouvelable une fois et s’exerce à titre gracieux. Son président est nommé par décret et dispose d’une voix prépondérante en cas de partage égal des voix.

Le conseil se réunit au moins trois fois par an sur convocation de son président. Si le ministre chargé de la santé ou un tiers des membres du conseil le demande, la convocation est de droit dans le mois suivant la demande.

Les délibérations sont adoptées à la majorité des voix des membres présents ou représentés. Les membres représentant l’État disposent d’une prépondérance de voix : ainsi les représentants du ministre chargé de la santé disposent chacun de dix voix, tandis que celui du ministre chargé du budget bénéficie de quatre voix et les autres représentants des ministères de chacun deux voix. Le représentant de l’assurance maladie, quant à lui, détient trois voix. Le reste des membres a une voix.

Le conseil scientifique ([26]) constitué de vingt-sept membres, a pour tâche de veiller à la qualité et à la cohérence de la politique scientifique de l’agence. Il est chargé de donner un avis sur les orientations de recherche, d’études et de partenariat scientifique de l’agence.

Les membres sont nommés sur proposition du directeur général, pour une durée de quatre ans renouvelable une fois. Quatre de ses membres devront exercer ou avoir exercé à l’international.

Le comité d’éthique et de déontologie ([27]), composé de sept membres, nommés pour une durée de quatre ans, par décision du président du conseil d’administration est appelé à vérifier le respect des règles éthiques et déontologiques des membres de l’agence.

Le comité d’orientation et de dialogue ([28]) comprend au moins dix membres et au plus vingt membres, nommés par décision du président du conseil d’administration, pour une durée de quatre ans renouvelable une fois.

Ce comité a pour mission selon l’article R. 1413-25 du code de la santé publique de proposer des priorités et des orientations dans le programme de travail, de permettre à l’agence de contribuer aux débats publics sur les questions de santé publique. Il est une instance d’ouverture et de dialogue chargée de préciser les attentes de la société civile et participera de la démocratie sanitaire.

2.   Une approche de la prévention repensée

Auditionné le 18 mai 2016 par la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale en vue de sa désignation comme directeur général de l’ANSP, M. François Bourdillon, a affirmé vouloir rénover les moyens au service de la prévention. Cela passe par le développement d’une prévention fondée sur des données probantes, la mise en œuvre d’une stratégie de marketing social et la diffusion d’une nouvelle culture de l’évaluation.

a.   Le continuum entre épidémiologie et prévention

Selon les termes du directeur général de l’agence, M. François Bourdillon, « L’épidémiologie doit induire la prévention » ([29]).

Pour ce faire, l’agence qui dispose de bases de données déjà en place pour la réalisation des missions de l’ancienne agence l’InVS, sera destinataire de nombreuses informations de la part notamment des professionnels de santé, des services de santé au travail, ou des observatoires régionaux de la santé. ([30]).

Grâce à ces connaissances sur l’état de santé de la population, il sera plus aisé de définir des priorités dans le domaine de la prévention et de l’éducation à la santé.

Cette nouvelle démarche consiste à se fonder sur des bases scientifiques, des faits probants ou selon la terminologie anglo-saxonne « evidence based ».

Le directeur général de l’agence, M. François Bourdillon, a souligné que les actions de prévention qui seraient proposées devraient avoir fait préalablement la preuve de leur efficacité. Cette démarche, fondée sur une analyse de la littérature scientifique sur des données probantes, vise à identifier des programmes, les adapter le cas échéant, les déployer et enfin les évaluer.

Il a ainsi cité l’exemple de la campagne menée en novembre 2016 et reconduite en 2017 pour participer à la lutte contre le tabagisme intitulée « Mois sans tabac » qui s’est inspirée d’une initiative britannique « Stoptober » mise en place depuis 2012 par les autorités sanitaires qui avait donné de bons résultats.

b.   De nouveaux outils

Une des missions de la nouvelle agence est de créer et de diffuser de nouveaux outils afin de rénover les approches dans le domaine de la promotion de la santé. Auditionnées, la Fédération nationale d'éducation et de promotion de la santé (FNES) ([31]) et la Société française de santé publique (SFSP) ([32]) ont insisté sur le besoin de formation des acteurs qui interviennent dans ce domaine, y compris pour les professionnels de santé. L’agence joue donc un rôle moteur auprès de ces partenaires.

Selon le professeur Pierre Lombrail, ancien président de la Société française de santé publique, l’élaboration de référentiels méthodologiques est primordiale. C’est pourquoi, l’ANSP collabore avec la SFSP afin d’élaborer un portail de recommandations.

La communication doit être également repensée. Le directeur général de l’agence, M. François Bourdillon, a déclaré vouloir en finir avec les grandes campagnes institutionnelles et préférer s’appuyer sur les nouveaux modes de communication numériques, tels les téléphones mobiles ou les réseaux sociaux ([33]).

L’utilisation du marketing social vise à utiliser les mêmes moyens que les groupes de pression qui se servent de la publicité pour promouvoir leurs produits. Ceci suppose de recruter des professionnels et de développer différentes formes de communication notamment numériques pour encourager l’éducation à la santé. La démarche se veut globale, elle intègre des brochures, un site web, une aide à distance, l’utilisation de réseaux sociaux mais aussi l’implication d’acteurs de terrain.

La mise en œuvre l’année dernière du dispositif précité supra intitulé « Mois sans tabac » s’est révélée concluante. La lutte contre le tabagisme est au centre des politiques de prévention des addictions. Le plan national de réduction du tabagisme 2014-2019 affiche des objectifs ambitieux ; il se fixe une réduction du tabagisme quotidien de 10 % sur la durée du programme et souhaite atteindre un taux de prévalence du tabagisme inférieur à 20 % en 2024. L’indicateur n° 1.3 du présent projet de loi de finances pour 2018 affiche un taux de prévalence de 26,6 % pour 2018. En 2017, ce taux s’est élevé à 27,4 % contre 28,7 % en 2016.

Pendant 28 jours, les fumeurs ont été accompagnés pour arrêter le tabac. Un kit a été distribué, une plateforme d’accompagnement répondait à leurs questions, des forums permettaient aux fumeurs d’échanger. Des actions de proximité étaient conduites par des acteurs locaux comme des associations et étaient relayées dans des espaces professionnels ou des espaces commerciaux.

En 2016,180 000 inscriptions ont été enregistrées sur le site « Tabac info services », le site internet a reçu 1,3 million de visites et 72 000 fumeurs se sont inscrits sur la nouvelle application d’accompagnement de ce site.

Une des conséquences a été le doublement de la consommation de substituts nicotiniques chaque mois par rapport à l’année précédente. 30 % de ces personnes auraient arrêté de fumer.

L’utilisation du numérique est également en cours d’expérimentation dans la prévention de la santé mentale. Une application « Stop blues » menée par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) mais financée et évaluée par l’ANSP propose des questionnaires d’auto-évaluation, une cartographie de l’aide de proximité et offre un plan de suivi et de soutien qui comprend des exercices de psychologie positive.

Le directeur général de l’agence, M. François Bourdillon, a également cité l’utilisation du site web « You Tube » afin de toucher un public jeune pour lutter contre le tabagisme et l’alcoolisme, en utilisant un humour de second degré et en s’adaptant à leur langage.

Enfin, le directeur général de l’agence a insisté sur la nécessité de diffuser une culture de l’évaluation. Il est nécessaire que les campagnes mises en œuvre fassent l’objet d’évaluations afin de vérifier la pertinence de leur approche et de l’utilisation des fonds publics. L’objectif est de suivre des indicateurs comme pour la vaccination, la mesure de la couverture vaccinale ou le suivi épidémiologique des maladies à prévention vaccinale.

Cette approche s’est concrétisée avec la campagne « Mois sans tabac » qui a fait la preuve de son succès. Des sondages ont démontré que cette campagne avait été visible et que les fumeurs l’avaient jugé incitative. Les ventes de traitements d’aide à l’arrêt dont les substituts nicotiniques, cités supra, ont augmenté de 36 % entre 2016 et 2017.

B.   Un atout à consolider

1.   Une place à trouver au sein d’un paysage fragmenté

De multiples acteurs concourent à la prévention, au risque de brouiller sa lisibilité. Institutionnels, collectivités territoriales, professionnels de santé et associations mènent des politiques de prévention sans que leurs actions soient suffisamment coordonnées.

a.   Un rôle d’appui et d’expertise

Agence technique, l’ANSP assure un rôle d’ingénierie pour les autres acteurs qui mènent des politiques plus généralistes. Sa place est donc conçue comme un appui pour les autres acteurs de la prévention grâce à son expertise, notamment dans le domaine épidémiologique. C’est pourquoi, selon Mme Anne Burstin, coauteur d’un rapport sur les perspectives d’organisation territoriale pour le nouvel Institut de santé publique sa crédibilité scientifique lui permettra de devenir un acteur incontournable ([34]).

Ce rôle d’appui en matière de veille et d’alerte sanitaire vis-à-vis des ARS a été clarifié et même consolidé par l’intégration des cellules interrégionales et régionales d’épidémiologie (CIRE) au sein de l’ANSP.

En effet, le champ de la veille et de l’alerte sanitaire était implanté au sein des ARS via les CIRE mais ces dernières étaient pilotées par l’ancienne agence sanitaire l’InVS.

Afin de disposer de relais au plus près des populations et de disposer d’un maillage territorial dans la surveillance épidémiologique, l’ANSP a désormais sous son autorité les CIRE. Cette organisation traduit également la volonté de renforcer l’action en santé publique en outre-mer.

Le directeur général de l’agence, M. François Bourdillon, l’a ainsi résumé : « Cette colonne vertébrale de l’épidémiologie nous confère la capacité de lancer des alertes dès que les premiers signaux sont identifiés, de professionnaliser au sein de chaque ARS le métier d’épidémiologie » ([35]).

Au nombre de 15, 12 en métropole et trois en outre-mer (Antilles, Guyane, Océan indien), ces cellules sont placées auprès des directeurs généraux des ARS. Elles permettent la mise en place d’un système national de veille, de surveillance et d’alerte au niveau régional. Elles assurent également un recueil de données de l’état de santé des populations et conduisent ainsi à l’élaboration d’indicateurs de santé régionaux.

Des conventions sont conclues entre l’ANSP et les ARS afin de préciser le fonctionnement et les missions des CIRE. Ces conventions préciseront notamment le programme de travail des CIRE, l’accès aux données détenues par l’ARS, la mise à disposition de productions de données régionalisées de surveillance ([36]).

L’ANSP est responsable de l’ensemble du recrutement de la gestion du personnel en poste au sein des CIRE. Le responsable de la CIRE est nommé par le directeur général de l’ANSP, après avis du directeur général de l’ARS concernée. Le transfert des personnels des CIRE à l’ANSP a été réalisé : 21 ETPT en 2016 et 21 ETPT en 2017 ont ainsi été intégrés à l’ANSP.

La CIRE établit un budget annuel, validé par le comité de pilotage qui fera l’objet d’un remboursement de l’ANSP à l’ARS concernée. En effet, cette dernière met à disposition de la CIRE les moyens de son fonctionnement, dont les bureaux et le matériel informatique. Le montant prévisionnel de ces remboursements est estimé à 1,5 million d’euros.

M. Jacques Olivier Dauberton, conseiller chargé de la sécurité sanitaire auprès du ministère chargé des solidarités et de la santé ([37]), a cité la pollution de la vallée de l’Arve, comme exemple réussi de coordination entre les CIRE et les ARS. L’ARS Auvergne- Rhône-Alpes a demandé à la CIRE une étude sur l’impact de la pollution de cette vallée sur la santé de ses habitants. Une étude épidémiologique a démontré que 70 % de l’origine de la pollution provenait du mode de chauffage à bois et 30 % de la circulation des camions. Suite à cette analyse, l’ARS a édicté des consignes lors de pics de pollution et a initié une sensibilisation auprès des élus pour modifier les modes de chauffage.

b.   L’animation d’un réseau

C’est dans cette logique d’expertise que l’ANSP constitue et anime un réseau de partenaires, constitué d’organismes chargés de la veille, de la surveillance et de la prévention de la santé. Il est composé :

– d’un réseau de centres nationaux de référence pour la lutte contre les maladies transmissibles ;

– d’un réseau national de santé publique organisé par l’agence. Ce réseau est défini comme « l’ensemble des organismes, structures, professionnels, auxquels l’agence peut recourir grâce à des collaborations structurées qu’il coordonne ou anime pour exercer ses différentes missions » ([38]).

La FNES en fait partie. Elle regroupe l’ensemble des instances régionales d'éducation et de promotion de la santé (IREPS) de France qui mènent en région, y compris en Outre-mer, des actions de prévention et d’éducation à la santé. Leur mission première est une mission de formation, de conseil méthodologique et d’élaboration d’outils auprès notamment des écoles, des entreprises, des maisons de retraite. Elle joue un rôle d’interface avec l’ANSP et participera avec l’agence à des actions de recherche interventionnelle.

Avec la Société française de santé publique, l’ANSP élabore un guide de recommandations méthodologiques.

Enfin, l’agence assume ce rôle d’expert vis-à-vis de l’école ou des collectivités territoriales. Elle a ainsi noué un partenariat avec l’Éducation nationale afin de construire des outils pédagogiques pour les enseignants mais aussi pour les élèves. Quant aux relations avec les collectivités territoriales, le département de prévention et de promotion de la santé de l’ANSP participe au Comité d’animation des Protection maternelle et infantile (PMI) des départements.

c.   Une articulation en devenir avec ses partenaires

Si dans sa mission de veille et d’alerte sanitaire, les relations de l’ANSP avec les ARS semblent clarifiées, il n’en reste pas moins que l’articulation d’une autre de ses missions, la prévention et la promotion de la santé, avec les actions menées dans ce domaine par les ARS, doit faire ses preuves. Il en est de même s’agissant de la coordination avec les autres agences sanitaires et l’assurance maladie.

Les ARS sont soucieuses de conserver leur autonomie sur les politiques de santé menées en région et particulièrement s’agissant des politiques de prévention et de promotion de la santé. En effet, la loi de 2009 ([39]) leur a assigné expressément la mission de définir dans les projets régionaux de santé leur stratégie de prévention et de promotion de la santé et d’animer la commission de coordination des politiques publiques dans le champ de la prévention

L’article R. 1413-1 du code de la santé publique énonce, cependant, que l’ANSP « contribue à la préparation et à l’évaluation des projets régionaux de santé mentionnés à l’article L. 1434-1 ». Cette mission est confirmée au 9° de cet article qui précise que l’ANSP « exerce une fonction d’expertise et d’appui en matière de promotion de la santé, de prévention et d’éducation pour la santé ».

Afin de clarifier au mieux l’articulation des missions de l’agence et des ARS, le décret relatif à la création de l’agence a prévu que les relations de l’agence avec les directeurs généraux des ARS seront régies par une convention ([40]) Au 15 septembre 2017, dix conventions ont été signées sur un total de dix-sept.

Un arrêté a fixé un modèle de convention type signée entre le directeur général de l’ANSP et le directeur général de l’ARS ([41]). Néanmoins, il est significatif que la majeure partie des points de cette convention concerne le fonctionnement des CIRE cité supra et la réserve sanitaire. S’agissant des missions de prévention et de promotion de la santé, l’article 4 de cette convention précise que l’expertise en prévention et promotion de la santé de l’agence est fournie à la demande de l’ARS, ce qui sous-entend que l’ARS reste pilote dans ce domaine : « L'agence fournit à l'ARS, à sa demande, les recommandations de bonnes pratiques, les référentiels et tutoriels, les stratégies d'intervention fondées scientifiquement, voire d'innovation et apporte son aide méthodologique en tant que de besoin, et dans le respect de ses moyens et priorités. » ([42])

Ainsi, dans la convention signée entre l’ARS Hauts-de-France et l’ANSP, aucun chapitre sur la prévention et la promotion de la santé n’y figure.

S’agissant des relations avec les autres agences, seules celles avec l’INCa figurent dans le décret relatif à la création de l’agence. Il y est indiqué : l’agence « assure conjointement avec l’Institut national du cancer et dans le cadre de leurs missions respectives, le pilotage et le financement des registres des pathologies cancéreuses » ([43]).

Un accord cadre a été signé pour la période 2016-2019 afin de mieux structurer ce partenariat.

S’agissant du registre des pathologies cancéreuses, une convention a fixé la répartition du financement, l’ANSP y contribue à hauteur de 22 % et l’INCa à hauteur de 78 %.

Dans les faits, des actions en commun sont menées dans le cadre de la lutte contre le tabagisme. L’INCa a associé l’agence dans son appel à projets « Priorité tabac » et elles ont travaillé à l’identification des actions en prévention les plus probantes.

Un comité de coordination, le comité d’animation du système d’agence (CASA), qui désormais dispose d’une base législative ([44]) est censé opérer cette coordination entre toutes les agences sanitaires. Présidé par le directeur général de la santé, il doit veiller à la complémentarité de leurs actions. Néanmoins, il se réunit ponctuellement et par thématiques.

Quant aux relations avec l’assurance maladie, elles sont déséquilibrées puisque cette dernière est le financeur des actions de prévention. Dans le cadre de la lutte contre le tabagisme, le renouvellement du dispositif « Tabac info service » a été élaboré conjointement (e-coaching, applications mobiles) mais le financement a été réalisé par le fonds prévention de la CNAMTS, le Fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaire (FNPEIS).

2.   La question du financement

Les ressources de l’ANSP dépendent entièrement de la dotation versée par l’État qui doit permettre à l’agence de mener à bien toutes ses missions et non pas seulement celles liées à la prévention. C’est pourquoi, l’ANSP a mené un effort de rationalisation de ses dépenses.

a.   Des ressources peu diversifiées

90 % des ressources de l’agence proviennent d’une subvention pour charges de service public de l’État ([45]).

Pour 2018, le présent projet de loi de finances prévoit une subvention nette de charges de service publique ([46]) d’environ 148 millions d’euros, contre 141,6 millions en LFI pour 2017.

Ses autres ressources sont issues de recettes fiscales qui restent limitées. La taxe sur les jeux est plafonnée à 5 millions d’euros. Quant à la taxe sur les dépenses de promotion, ses recettes sont minimes en raison d’un mécanisme d’exonération. L’article L. 2133-1 du code de la santé publique prévoit que si les annonceurs et promoteurs de produits gras, sucrés et salés souhaitent déroger à cette contribution de 1,5 % assise sur le montant annuel des sommes payées pour la diffusion des messages publicitaires, ils doivent faire figurer une information de caractère sanitaire sur ces messages.

C’est pourquoi il semble préférable au rapporteur d’accroître la diversité des ressources de l’ANSP et notamment de lui faire bénéficier d’autres recettes fiscales. Il pourrait être également judicieux de revoir le mécanisme de la taxe sur les dépenses de promotion.

agence nationale de la santé publique
Répartition des dépenses par destination pour 2017

Source : Questionnaire budgétaire.

L’agence assume d’autres missions que celles de la prévention comme la gestion des crises sanitaires, la veille et l’alerte sanitaire ce qui réduit d’autant les ressources disponibles pour ses actions de prévention et de promotion de la santé, qui pâtissent de la priorité donnée à l’urgence. De plus, les actions de prévention ne produisent que des effets à long terme et sont donc moins visibles.

Même si dans le budget 2017, presque 53 millions de CP ont été dépensés pour des actions de prévention et ont représenté 43,1 % des CP, les interventions d’urgence représentent environ 22 % des CP et la veille sanitaire presque 19 % des CP. Ainsi pour 2017, la gestion du cyclone Irma a entraîné des dépenses de 1,9 million d’euros en l’espace d’une quinzaine de jours.

Jusqu’en 2017, l’ANSP recevait de l’assurance maladie un transfert pour ses missions de promotion de la santé, de réduction des risques de la santé ainsi que pour le développement de la prévention et de l’éducation pour la santé, ce qui permettait de sanctuariser des crédits pour la prévention. Cette dotation a été abrogée par la loi 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 afin d’unifier le financement de l’agence.

C’est pourquoi, le rapporteur plaide pour un financement pérenne des actions de prévention. Il a proposé dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, un amendement demandant qu’une réflexion soit conduite sur l’opportunité de créer un sous-objectif prévention dans l’Objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM).

L’exemple de la gestion du fonds tabac est significatif. Créé en 2016 au sein de la CNAMTS, il a pour mission de contribuer au financement d’actions dans le domaine de la lutte contre le tabagisme. L’article 1er du décret ([47]) précise que ses actions sont mises en œuvre notamment par l’ANSP et l’INCa.

Il a été alimenté en 2017 par un prélèvement sur la part du droit de consommation sur les tabacs versé à la CNAMTS. En 2018, il bénéficiera d’une contribution sociale prélevée sur le chiffre d’affaires des distributeurs de produits de tabac. Le produit des recettes fiscales est versé à la CNAMTS et fait partie du FNPEIS qui décide de l’utilisation des fonds. Un conseil de gestion auquel participe le directeur général de l’ANSP est chargé d’identifier les actions principales à financer et de donner son avis sur celles qui devront être financées. Cet avis est rendu à la majorité des membres présents et le président a voix prépondérante. Cet espace est donc conçu comme un lieu de concertation, néanmoins il reste aux mains des représentants de l’assurance maladie.

Dans les faits, aucune agence sanitaire, notamment l’ANSP et l’INCa, n’a perçu l’année dernière de financement direct de ce fonds, alors même que la lutte contre le tabagisme a été érigée en priorité et que l’ANSP pilote la campagne « Mois sans tabac ». Le FNPEIS a financé lui-même l’opération de communication « Mois sans tabac » à hauteur de 927 500 euros ([48]) ainsi que le coaching « Tabac info service » à hauteur de 596 000 euros ([49]).

b.   Un effort de rationalisation des dépenses

Face aux contraintes budgétaires, l’agence s’est pliée aux efforts demandés aux opérateurs de l’État ([50]).

De plus, elle a mis à profit la fusion des agences pour opérer une rationalisation de certaines dépenses.

Ainsi s’agissant du personnel, le plafond d’emploi s’élèvera à 582 ETPT pour 2018, contre 597 ETPT en 2017 soit la suppression de 15 ETPT. Si l’on se réfère au total des effectifs de l’agence depuis 2016, résultant de l’intégration des ETPT des 3 agences, du GIP et des CIRE s’élevant à 604 ETPT, force est de constater que la création de la nouvelle agence a contribué à une rationalisation des effectifs.

évolution des ETPT sous plafond de l’ANSP

 

2016

2017

2018

2019

GIP Adalis

36

ANSP

ANSP

ANSP

EPRUS

30

INPES

127

InVS (y compris CIRE)

411

Total

604

597

582

567

Source : DGS.

S’agissant des systèmes d’information, l’effort d’harmonisation et de mutualisation semble encourageant. Ainsi, grâce au projet Système d'information finance des agences sanitaires (SIFAS), la nouvelle agence a pu élaborer et mettre en service un système financier unique. La gestion des postes de travail est unifiée. Reste à fusionner la gestion de la documentation et des archives et à repenser le site internet

Enfin, à la suite de la fusion des trois agences, il a été décidé de regrouper la nouvelle agence sur un même lieu, à savoir le site de l’InVS à Saint- Maurice, dont l’État est propriétaire. Un nouveau bâtiment dont le coût est estimé à 14,5 millions d’euros est en cours de construction qui devrait être livré en 2019. Le montant total de l’opération se chiffrerait à 19 millions d’euros. Cette opération devrait toutefois profiter au budget de l’État puisque la mutualisation des charges de fonctionnement ou d’exploitation, la suppression des loyers des deux agences, l’INPES et l’EPRUS ainsi que de leurs charges fiscales permettraient un gain de 2,2 millions d’euros par an à l’ANSP.


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   Travaux de la Commission

Examen des crédits

À l’issue de l’audition, en commission élargie, de Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé (voir le compte rendu de la commission élargie du 7 novembre à 21 heures ([51])), la commission des affaires sociales examine, pour avis, les crédits pour 2018 de la mission « Santé » sur le rapport de M. Francis Vercamer.

Mme la présidente Brigitte Bourguignon. Nous allons passer à l’examen des amendements sur la mission « Santé ».

La Commission examine l’amendement n° II-AS67 de Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Cet amendement porte sur la remise d’un rapport d’information faisant un bilan de l’aide médicale d’État (AME).

L’AME resurgit régulièrement dans le débat public. Objet de tous les fantasmes chez les partisans d’une droite dure, son existence même est régulièrement remise en cause. Si le Gouvernement actuel a décidé de la conserver, nous aimerions assurer sa pérennisation dans le temps. Pour cela, un rapport d’information permettra de tordre le cou aux idées fausses et de mettre à plat cette question. Quelle est l’efficacité de l’AME en termes de pathologies soignées ? Quelle est la satisfaction des bénéficiaires de cette aide ? Comment pourrait-on la compléter, l’améliorer ? Quelle serait la situation si elle était supprimée, tant pour les personnes qui bénéficient actuellement de cette aide, que pour le reste de la population, qui pourraient être les victimes collatérales de la propagation de certaines épidémies, ce qui serait inévitable si nous prenons la décision de ne plus soigner certaines personnes présentes sur notre territoire ? Toutes ces questions sont primordiales et devront être traitées.

En outre, nous pensons que le Gouvernement ne cible pas les bons indicateurs de performance concernant cette AME. En effet, l’un des deux indicateurs de performance sur l’AME est le « Pourcentage des dossiers d’aide médicale de l’État contrôlés » (l’autre étant le « Délai moyen d’instruction des demandes d’AME »), avec une cible pour 2020 de 12 % des dossiers contrôlés (contre 10 % actuellement). Donc selon le Gouvernement, plus il y aurait de contrôles effectués pour surveiller que les bénéficiaires de l’AME y ont bien droit, plus l’AME serait considérée comme « performante » ? Cela nous laisse perplexes... Plutôt que de contrôler des personnes qui de toute façon ont besoin d’être soignées, ne pourrait-on pas imaginer des indicateurs de performance concernant la santé des personnes bénéficiant de l’AME, la protection effective dont ils bénéficient, etc. ? C’est en tout cas pour répondre à ces questions que nous faisons cette demande de rapport d’information.

Ce rapport pourra être rédigé par un groupe de travail associant quatre représentants de l’administration, à savoir un membre de l’Inspection générale des finances (IGF), deux membres de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et un membre de l’Inspection générale de l’administration et quatre représentants d’associations engagées pour la protection des droits fondamentaux des femmes, hommes et enfants présents sur notre territoire mais ne remplissant pas la condition de régularité du séjour exigée pour l’admission à la protection universelle maladie.

M. Francis Vercamer, rapporteur pour avis. L’aide médicale d’État a déjà fait l’objet de nombreux rapports dont notamment en 2010 celui de l’IGAS et l’IGF qui ont publié une analyse de l’évolution des dépenses au titre de l’AME et en 2015 celui de MM. Claude Goasguen et Christophe Sirugue dans le cadre du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques. Ce ne serait donc qu’un rapport de plus, c’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

M. Jean-Louis Touraine Cette demande de rapport est déjà satisfaite. En effet dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 à l’article 44 ter, nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur l’accès financier aux soins des personnes en situation de handicap et des personnes en situation de précarité. Ce rapport portera notamment sur les restes à charge en santé liés au handicap, le niveau des avances de frais et le renoncement aux soins pour motif financier, afin d’identifier les mesures à prendre pour réduire les inégalités sociales d’accès à la santé pour les personnes fragiles. Je suis donc défavorable à l’amendement.

Mme Caroline Fiat Vous n’avez pas répondu, M. le rapporteur. Ma demande de rapport portait sur les indicateurs de performance relatifs à l’AME.

La Commission rejette l’amendement n°II-AS67

La Commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Santé » sans modification.

 

 


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   Contribution au rapport

Contribution du groupe du Mouvement Démocrate et apparentés

Les priorités de la mission « Santé » du projet de loi de finances (PLF) pour 2018 viennent pleinement compléter celles du projet de loi de financement de la sécurité sociales (PLFSS) pour 2018.

Des réformes ambitieuses ont été entreprises par le Gouvernement dans le cadre du PLFSS pour 2018, qui a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 31 octobre 2017. Elles visent à simplifier notre système d’assurance maladie et instituer la prévention au cœur de la politique de santé, cette mission vient garantir l’accès aux soins pour l’ensemble des citoyens français.

Trois maîtres mots: prévention, simplification et modernisation.

  1. Prévention

Le premier axe de cette mission vise à renforcer la prévention, par une contribution à la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé.

En fléchant les missions et les financements de chacun des acteurs, nationaux et régionaux, le Gouvernement se dote d’une méthodologie de projet efficiente pour favoriser l’accès aux soins à tous et partout.

Comme l’a rappelé Madame la Ministre à l’occasion de l’examen de cette mission en commission élargie, il serait réducteur de donner une seule analyse des lignes budgétaires dédiées à la prévention de cette mission Santé. L’étude évoquée par madame la Ministre commandée à la DRESS devrait nous permettre d’avoir une vision beaucoup plus exhaustive des sommes réellement engagées par l’Etat pour la prévention, en gardant toutefois à l’esprit que la prévention est multidimensionnelle donc difficile à chiffrer.

On peut toutefois noter que les crédits affectés aux actions de promotion et de prévention de santé dans cette mission santé du PLF 2018 restent, dans le cadre d’un budget général contraint, à un niveau quasi équivalent à 2017 voire pour certains en augmentation, comme la santé mentale.

  1. Simplification

De plus, avec ce PLF pour 2018, le Gouvernement prolonge ses efforts de simplification des acteurs :

  1. Modernisation

Les moyens permettant de moderniser les systèmes d’information (SI) de notre système de soins nous semblent limités.

Il est prévu dans l’action n°19 de s’assurer de l’assistance à maître d’ouvrage pour le développement de SI, et notamment pour le projet hôpital numérique.

En décembre 2017, la Commission des Affaires Sociales et la mission d’évaluation et de  contrôle  des  lois  de  financement  de  la  sécurité sociale (MECSS) de l’Assemblée nationale ont saisi la Cour des comptes d’une demande d’enquête sur les achats hospitaliers. La Cour, qui a présenté son rapport en juin 2017, a alors posé clairement le problème d’une « évolution inaboutie de la fonction d’achat pour les 878 établissements médicaux publics ».

Ce manque de définition du rôle et de la fonction achat est ainsi que des outils de gestion et de suivi ont s’expliquent par l’absence généralisée du SI traitant du processus d’achat.

Nous souhaitons que le gouvernement puisse se donner les moyens d’aider réellement les établissements hospitaliers, comme l’observe la cour des Comptes.

Dans le cadre de cette mission « Santé » du PLF pour 2018, l’Agence National de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé (ANSM) a été missionnée pour poursuivre le renforcement des démarches achats.

On peut s’étonner de cette mission confiée à l’ANSM, dont l'objectif principal est de garantir la sécurité du médicament et des autres produits de santé.

L’agence est une agence d’évaluation avant et après la mise sur le marché, de contrôle des produits en laboratoires, d’inspection sur les sites de production, de distribution en gros ou d’essais cliniques...bien loin d’une fonction achat !

Si l’ANSM doit pouvoir contribuer aux différents plans et programmes de santé engagés par les pouvoirs publics, cette contribution doit se situer à la marge de ses activités. En effet, les autorisations de mise sur le marché de médicaments (AMM), dont l’agence est en charge, constituent des enjeux de santé publique majeurs (affaire du Médiator, Levothyrox...), et dont le nombre de dossiers, dans le contexte du Brexit notamment, va s’accroitre.

C’est pourquoi, nous proposons de renforcer d’un million d’euros supplémentaires les dépenses de fonctionnement de l’action n°19 - objectif « conception des politiques d’offre de soins et actions de modernisation » pour doter les établissements médicaux publics d’un SI traitant réellement du processus d’achat.

 

Dans un contexte financier tendu, définir des crédits pour la mission Santé du PLF 2018, comme pour le PLFSS, est un acte difficile pour le Gouvernement, tant il est complexe de « choisir » d’abonder ou de diminuer des actions nécessaires aux bien-être de la population.

Cette même complexité se retrouve dans le vote qui nous incombe à nous, parlementaires. Un exemple illustre parfaitement ce propos : l’AME. D’aucuns auraient souhaité qu’elle puisse être diminuée ne voyant pas la nécessité de prendre en charge la santé des étrangers, sous-tendant l’idée que celle-ci puisse se faire au détriment de nos concitoyens.

Mais, comme l’a rappelé à juste titre le docteur Buzyn, prendre en charge ces populations constitue non seulement un acte humanitaire, mais également économique au vue des montants que couteraient une dégradation encore plus importante de leur santé, mais également au vue de la dangerosité que cela pourrait constituer pour les populations en cas d’épidémie.

La Santé compte parmi les sujets complexes pour lesquels retenue et constructivité doivent guider notre action parlementaire.

 

 

 


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ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

 

       FNES – Mme Christine Ferron, déléguée générale, et M. Christian Delcourte, secrétaire général

       Société française de santé publique (SFSP)  Pr Pierre Lombrail, ancien président et trésorier adjoint

       Agence régionale de santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes  M. Jean-Yves Grall, directeur général

       Agence nationale de santé publique (ANSP) – M. François Bourdillon, directeur général, et M. Mili Spahic, directeur de cabinet

       Ministère des solidarités et de la santé – Direction générale de la santé (DGS) – Mme Anne-Claire Amprou, directrice générale adjointe de la santé, Mme Anne-Marie Horellou, cheffe de la division des Agences de santé, du partenariat et de la concertation, M. Jérôme Baron, chef de la division des Ressources, Mme Zinna Bessa, sous-directrice de la santé des populations et de la prévention des maladies chroniques, M. Hervé Creusvaux, chargé de mission ANSP

       Inspection générale des affaires sociales (IGAS)  Mme Anne Burstin, inspectrice générale

       Mutualité fonction publique  M. Serge Brichet, président, Mme Dominique Combe, trésorière générale, M. Didier Quercioli, secrétaire général, Mme Laurence Tribillac, directrice Influence & Métiers, Mme Angéline Seguy, responsable Pôle Influence

       Ministère des solidarités et de la santé – M. Jacques-Olivier Dauberton, conseiller chargé de la sécurité sanitaire

       Agence régionale de santé (ARS) Hauts de France  Mme Monique Ricomes, directrice générale

 

 


([1]) Crédits directs sans prise en compte des crédits du programme 124.

([2]) + 9,8 %.

([3]) 7,4 millions d’euros.

([4]) La subvention nette pour charges de service public intègre la mise en réserve de 3 %.

([5]) Excepté pour l’Agence nationale de sécurité du médicament.

([6]) Ce site regrouperait l’Agence de biomédecine, l’ANSM, l’INCa, l’EFS, l’INTS et la HAS.

([7]) Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

([8]) Cour des comptes, Mission santé note d’analyse de l’exécution budgétaire, 2016.

([9]) Article L. 251-1 du code de l’action sociale et des familles.

([10]) 8 723 euros, plafond annuel de ressources pour une personne seule au 1er avril 2017 en France métropolitaine.

([11]) Article L. 251-2 du code de l’action sociale et des familles.

([12]) 1,68 million d’euros.

([13]) 201 167 offres.

([14]) Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

([15]) Ordonnance n° 2016-462 du 14 avril 2016 portant création de l'Agence nationale de santé publique.

([16]) Audition du 18 mai 2016 par la Commission des affaires sociales en application de l’article L. 1451-1 du code de la santé publique.

([17]) Audition du 18 mai 2016 précitée.

([18]) Audition conjointe de la commission des affaires sociales avec la commission des affaires culturelles et de l’éducation, de Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, et de Mme Laura Flessel, ministre des sports, sur le thème « Activités physiques, activités sportives et santé » du 26 septembre 2017.

([19]) Audition du 20 septembre 2017.

([20]) La Charte d’Ottawa adoptée le 12 novembre 1986 sous l’égide de l’OMS désigne les actions qui ont pour but de donner aux individus davantage de maîtrise de leur propre santé et davantage de moyens de l’améliorer.

([21]) Audition du 11 octobre 2017.

([22]) M. François Bourdillon, Agence nationale de santé publique, Rapport de préfiguration, juin 2015.

([23]) Audition du 26 septembre 2017.

([24]) Article L. 1413-9 du code de la santé publique.

([25]) Loi n° 2017-228 du 24 février 2017 ratifiant l'ordonnance n° 2016-462 du 14 avril 2016 portant création de l'Agence nationale de santé publique et modifiant l'article 166 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

([26]) Article L. 1413-11 du code de la santé publique.

([27]) Article L. 1413-11 du code de la santé publique.

([28]) Article L. 1413-11 du code de la santé publique.

([29]) Audition du 18 mai 2016 précitée.

([30]) Article L. 1413-7 du code de la santé publique.

([31]) Audition du 19 septembre 2017.

([32]) Audition du 20 septembre 2017.

([33]) Audition du 18 mai 2016 précitée.

([34]) Audition du 27 septembre 2017.

([35]) Audition du 18 mai 2016 précitée.

([36]) Article R. 1413-44 du code de la santé publique.

([37]) Audition du 11 octobre 2017.

([38]) Article L. 1413-3 du code de la santé publique.

([39]) Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

([40]) Article R.1413-44 du code de la santé publique.

([41]) Arrêté du 28 novembre 2016 relatif à la convention type prévue par l'article R. 1413-44 du code de la santé publique.

([42]) Chapitre 7 de l’article 4 de la convention type.

([43]) Article R. 1413-1 du code de la santé publique.

([44]) Article L. 1411-5-1 du code de la santé publique.

([45]) Article L. 1413-12 du code de la santé publique.

([46]) La subvention nette intègre la réserve de précaution de 3 %.

([47]) Décret n° 2016-1671 du 5 décembre 2016 portant création d'un fonds de lutte contre le tabac.

([48]) 927 497euros.

([49]) 595 996 euros.

([50]) Baisse de 2,5 % du plafond d’emploi pour tous les opérateurs de l’État.et diminution de 5 % de leurs frais de fonctionnement.

([51])  http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/commissions_elargies/cr/