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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUINZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2017.
AVIS
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES
SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2018 (n° 235)
TOME I
ANCIENS COMBATTANTS, MÉMOIRE ET LIENS AVEC LA NATION
PAR M. Philippe MICHEL-KLEISBAUER
Député
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Voir le numéro : 273 (annexe 7)
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SOMMAIRE
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Pages
I. Le programme 167 « Liens entre la nation et son armée »
A. la journée défense et citoyenneté
1. En attendant la rénovation du service national universel…
2. Une année charnière pour la DSNJ
1. La dernière année du cycle commémoratif de la Grande Guerre
2. La mémoire des OPEX, un devoir de vigilance
3. Un patrimoine mémoriel à rénover et à valoriser
II. Le programme 169 « reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant »
A. L’administration de la dette viagère
1. Les pensions militaires d’invalidité
B. L’action sociale et les droits liés aux pensions militaires d’invalidité
C. Les actions en faveur des harkis et rapatriés
D. L’effort fiscal et social de l’état
A. L’indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations
1. L’indemnisation des orphelins
2. L’indemnisation des victimes de spoliations
B. L’indemnisation des victimes d’actes de barbarie
Le Bleuet de France, l’heure du sursaut
I. Le Bleuet de France, une œuvre historique plus que jamais actuelle
A. Le Bleuet, cœur de la mémoire d’hier et d’aujourd’hui
B. l’heure des constats, une fleur encore trop méconnue
II. Le temps de l’action : visibilité, appropriation, distribution
A. Améliorer la visibilité du bleuet de france
1. La mobilisation du monde combattant et des victimes de guerre
2. La visibilité médiatique de l’insigne
a. Une refonte de la gouvernance du Bleuet de France
b. La poursuite des partenariats avec des groupes médiatiques
c. La poursuite des partenariats avec le monde du sport
d. Le soutien des collectivités publiques et du monde politique
e. L’établissement de partenariats avec de grands groupes français
3. La modernisation du message transmis
B. améliorer les canaux de distribution du Bleuet de France
2. Créer de nouveaux canaux de vente
I. Audition dE mme geneviève darrieussecq, SECRÉTAIRE D’ÉTAT AUPRÈS DE LA MINISTRE DES ARMÉES
II. audition de reprÉsentants d’ASSOCIATIONS D’ANCIENS COMBATTANTS
annexe : Liste des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis
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« L’état militaire exige en toute circonstance esprit de sacrifice, pouvant aller jusqu’au sacrifice suprême » énonce l’article premier de la loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires. Les militaires, appelés d’hier ou engagés d’aujourd’hui, placent ainsi leur vie au service de la Nation, et c’est ce qui fonde le droit à reconnaissance et à réparation qui irrigue l’ensemble des dispositions du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre. À l’heure où les contraintes budgétaires imposent aux autorités gouvernementales de faire des choix en matière de finances publiques, il convient de ne jamais l’oublier.
Le présent avis budgétaire s’intéresse aux crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », qui s’articule autour de trois programmes budgétaires complémentaires, dont les deux premiers relèvent de l’autorité du ministère des Armées :
– le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée », qui promeut la diffusion de l’esprit de défense au sein de la société civile et la relation entre la Nation et les forces armées en y incluant une dimension mémorielle ;
– le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », qui témoigne de la reconnaissance de la Nation à l’égard du monde combattant et des victimes de guerre et du terrorisme à travers les dispositifs d’intervention et de réparation dont ils bénéficient ;
– le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale », relevant du Premier ministre, qui rassemble trois dispositifs d’indemnisation en faveur de victimes de la Seconde Guerre mondiale ou de leurs ayants cause.
Si le projet de budget pour 2018 est en diminution par rapport à l’an passé en raison de l’attrition naturelle du nombre de bénéficiaires des dispositifs de reconnaissance et de réparation, il consolide les droits des anciens combattants en maintenant l’ensemble des dispositifs de reconnaissance et de réparation. Par ailleurs, il intègre deux mesures nouvelles, pour un montant de 6,55 millions d’euros :
– l’harmonisation des pensions entre les conjoints survivants de militaires rayés des contrôles avant le 3 août 1962 – pension selon taux normal du soldat – et ceux des militaires rayés des contrôles à compter du 3 août 1962 – pension selon le grade –, pour un coût estimé à six millions d’euros ;
– l’augmentation de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère en faveur des supplétifs rapatriés et leurs conjoints survivants, d’un montant de 100 euros par bénéficiaire, pour un coût de 550 000 euros.
Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2018 est résolument tourné vers l’avenir, par l’inscription de crédits ayant vocation à moderniser certains établissements et administrations, à affermir le lien armée-Nation dans l’attente de la refondation du service national universel voulue par le président de la République, et à conforter la politique des chemins de mémoire en cette dernière année du cycle commémoratif de la Grande Guerre.
D’une certaine manière, l’on pourrait ainsi dire que le projet de loi de finances pour 2018 est organisé, s’agissant de la mission « Anciens combattants, mémoire, liens avec la Nation », autour du triptyque suivant : conforter les dispositifs de reconnaissance et de réparation ; corriger certaines inégalités issues du passé ; concevoir l’avenir de ces politiques publiques.
La première partie du présent avis est donc consacrée à une analyse rigoureuse des crédits inscrits au sein de la mission budgétaire précitée.
Sa seconde partie, quant à elle, porte sur une thématique chère à votre rapporteur pour avis : le Bleuet de France. Fleur du souvenir portée en l’honneur de tous les morts pour la France, d’hier et d’aujourd’hui, des militaires blessés, des victimes d’actes de terrorisme et des pupilles de la Nation, le Bleuet de France demeure encore trop confidentiel, alors que le niveau d’engagement des forces armées comme la recrudescence des actes de terrorisme sur le territoire national ou à l’étranger rendent l’hommage de la Nation aux victimes militaires ou civiles pleinement actuel. En ce début de législature, votre rapporteur souhaite donc souligner l’importance du Bleuet, en rappelant son histoire et l’action de l’œuvre nationale du Bleuet de France (ONBF), et en identifiant quelques pistes susceptibles d’accroître sa visibilité et, à terme, sa réappropriation par l’ensemble de nos concitoyens.
Le rapporteur pour avis avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2017, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances. À cette date, 52 réponses sur 52 lui étaient parvenues, soit un taux de 100 %.
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Conforter, corriger, concevoir l’avenir : les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »
La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » s’articule autour de trois programmes budgétaires complémentaires, dont les deux premiers relèvent du ministère des Armées :
– le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée » ;
– le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » ;
– le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale ».
Le projet de budget pour 2018 des trois programmes de la mission s’élève à 2,46 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), soit une diminution de 79 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiales pour 2017. Cette évolution à la baisse résulte essentiellement de la diminution du nombre de bénéficiaires de la dette viagère – pensions militaires d’invalidité et retraite du combattant –, et tient compte de l’évolution favorable de certains dispositifs au profit des anciens combattants et de leurs ayants droit.
Évolution des crédits de la mission
(en millions d’euros)
|
(hors contribution de l’État au CAS Pensions) |
LFI 2015 |
LFI 2016 |
LFI 2017 |
PLF 2018 |
|
Plafond des CP |
2 747 |
2 613 |
2 540 |
2 461 |
Source : PAP 2017 et 2018.
L’exécution budgétaire de l’année 2017
Concernant le programme 167, les crédits inscrits en loi de finances initiale (LFI) pour 2017 s’élèvent à 38,1 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 38,3 millions d’euros en crédits de paiement.
La réserve de précaution, initialement de trois millions d’euros en AE et en CP, a été ramenée à 1,4 million d’euros en AE et à 1,9 million d’euros en raison de l’annulation de crédits intervenue sur le programme par décret d’avance du 20 juillet 2017. Outre ce mouvement, au 31 août 2017, il convient de souligner le report sur 2017 de 0,1 million d’euros en AE et en CP, d’un fonds de concours rattaché tardivement à la gestion 2016, concernant le remboursement par la Belgique des dépenses d’entretien des sépultures militaires belges en France. Il s’agit des seuls mouvements ayant modifié la ressource ouverte en LFI. Au 31 août 2017, les engagements comme les paiements du programme s’élèvent à 26 millions d’euros.
Concernant le programme 169, les crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2017 s’élèvent à 2 403,4 millions d’euros en AE et 2 398,4 millions d’euros en CP. Les mouvements ayant modifié la ressource ouverte en LFI sont les suivants : la levée partielle de la réserve de précaution de 25 millions d’euros en AE et en CP, crédits immédiatement annulés par le décret d’avance du 20 juillet 2017 pour couvrir une partie des dépenses des opérations extérieures et intérieures du ministère des Armées sur le programme 178, le transfert de crédits vers le programme 169, pour un montant de 1,3 million d’euros en AE et en CP, en raison du transfert de la tutelle de l’établissement Conseil national des communes « Compagnons de la Libération » (CNCCL) du ministère de la Justice vers le ministère des Armées ainsi que le report sur 2017 de 100 000 euros en AE et en CP, concernant une attribution de produits rattachée tardivement à la gestion 2016, qui fait actuellement l’objet d’un gel. Au 31 août 2017, les engagements du programme s’élèvent à 1 804 millions d’euros et les paiements à 1 777 millions d’euros.
I. Le programme 167 « Liens entre la nation et son armée »
Le programme 167 prévoit un budget de 42,99 millions d’euros en AE et 42,82 millions d’euros en CP, soit une augmentation respective de 12,86 % et de 11,82 %. Cette augmentation s’explique essentiellement par une hausse substantielle des ressources budgétaires dévolues à la politique de mémoire à la veille de la dernière année du cycle commémoratif du centenaire de la Grande Guerre, qui sera marquée par les cérémonies du 11 novembre 2018.
Évolution des crédits du programme 167 de 2016 à 2018
(en euros)
|
Mission |
LFI 2016 |
LFI 2017 |
PLF 2018 |
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AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
|||
|
P 167 |
Action 1 |
JDC |
15 099 200 |
15 299 200 |
15 503 766 |
15 710 000 |
14 787 483 |
14 624 062 |
|
Action 2 |
Politique de mémoire |
22 619 692 |
22 619 692 |
22 586 600 |
22 586 600 |
28 200 000 |
28 200 000 |
|
|
Total P167 |
37 718 892 |
37 918 892 |
38 090 366 |
38 296 600 |
42 987 483 |
42 824 062 |
||
Source : PAP 2017 et 2018.
Le programme 167 ne présente pas d’évolution de périmètre en 2018. Il est composé de deux actions couvrant deux domaines d’intervention : l’organisation de la journée défense et citoyenneté (JDC), assurée par la direction du service national et de la jeunesse (DSNJ), et la politique de mémoire mise en œuvre par la direction des patrimoines, de la mémoire et des archives (DPMA).
A. la journée défense et citoyenneté
La journée défense et citoyenneté, à l’organisation de laquelle est dédiée l’action 1 du programme 167, constitue l’un des éléments du parcours de citoyenneté conçu par le législateur à l’abandon de la conscription. L’article L. 111-2 du code du service national, tel qu’il résulte de la loi de 1997 sur le service national ([1]) dispose ainsi que « Le service national universel comprend des obligations : le recensement, l’appel de préparation à la défense et l’appel sous les drapeaux. Il comporte aussi des volontariats. » L’appel sous les drapeaux étant suspendu, ce parcours de citoyenneté comprend en fait trois étapes obligatoires : l’enseignement de défense dans le cadre scolaire, le recensement à l’âge de seize ans et l’appel de préparation à la défense, devenue journée défense et citoyenneté, entre le seizième et le dix-huitième anniversaire.
La JDC assure la diffusion de l’esprit de défense auprès des jeunes Français. Sa mise en œuvre relève de la direction du service national et de la jeunesse. Cette journée, dont le contenu n’a eu de cesse d’évoluer ces dernières années, a vocation à sensibiliser les jeunes aux droits et aux devoirs du citoyen, à détecter les jeunes en situation d’échec scolaire et à assurer, avec le concours des mairies, le recensement des jeunes citoyens.
1. En attendant la rénovation du service national universel…
L’avenir de la journée défense et citoyenneté est intimement lié à la refondation en cours du service national universel, dont le chantier a été lancé par le chef de l’État. En effet, depuis son élection à la présidence de la République, M. Emmanuel Macron a confirmé son projet de refonte du service national universel (SNU) évoqué durant la campagne, les modalités de ce dernier étant à déterminer. Lors du discours prononcé à l’Hôtel de Brienne le 13 juillet dernier, le président de la République a ainsi annoncé son intention de désigner une commission chargée de formuler des propositions « non pas [pour] remplacer des dispositifs qui, aujourd’hui, fonctionnent et, qu’il s’agisse de l’organisation militaire ou de l’organisation civile, permettent à des jeunes de trouver leur place dans la société, mais bien redonner un sens à ce service national universel dans un cadre que nous aurons à définir. »
Dans la foulée a été constituée une mission inter-inspections visant à recenser les dispositifs civils et militaires existants (JDC, service militaire adapté et service militaire volontaire, garde nationale, Établissement pour l’insertion dans l’emploi, service civique, etc.), les formations à la citoyenneté, les budgets déjà mis en œuvre, les travaux réalisés sur la question, les contraintes techniques, les besoins législatifs, les besoins d’encadrement, les capacités d’hébergement nécessaires. Une commission de haut niveau sera prochainement créée afin de préciser les modalités de mise en œuvre d’un tel service national, avant le lancement d’une expérimentation au début de l’année 2019.
Dans le même temps, la commission de la Défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale a créé une mission d’information sur le service national universel, dont les co-rapporteures sont Mmes Émilie Guerel et Marianne Dubois, qui présentera ses conclusions d’ici la fin de l’année 2017.
La journée défense et citoyenneté a donc vocation à évoluer dans le cadre de ce projet de société souhaité par la majorité présidentielle. Elle demeure néanmoins l’un des moments forts du parcours de citoyenneté dans l’attente de cette rénovation.
Pour l’année 2018, le montant de la dotation de l’action 1, fixée à 14,8 millions d’euros en AE et 14,6 millions d’euros en CP, se fonde sur une prévision de 804 000 jeunes participant à la JDC. L’action 1 du programme 167 ne comporte que des crédits de fonctionnement, dont 80 % ont trait aux dépenses d’alimentation et de transport des jeunes.
La faible diminution du niveau de ressources dédiées à cette journée – 0,7 million d’euros en AE et 1,1 million d’euros en CP – s’explique par la baisse du nombre de jeunes attendus en JDC l’an prochain et par l’arrêt du module de sécurité routière, le précédent gouvernement ayant décidé de recentrer la JDC sur les enjeux de défense selon les préconisations du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013.
Votre rapporteur pour avis tient néanmoins à souligner le coût global de la JDC est plus élevé que ne le laisse penser le seul montant inscrit à l’action 1 du programme 167. Il convient en effet de prendre en compte le coût de la masse salariale des personnels civils et militaires intervenant au sein de la chaîne du service national, ainsi que des animateurs intervenant en JDC. Dès lors, si le coût individuel de la JDC demeure maîtrisé (105 euros en 2017, 110 euros selon les prévisions pour l’année 2018), le coût total de cette journée est de 88,4 millions d’euros pour l’année 2018.
Face à l’ampleur de ces montants, votre rapporteur pour avis souhaite que soit menée une analyse fine de l’impact de la JDC, alors qu’un rapport d’information récent de la commission de la Défense nationale et des forces armées estimait que « la seule utilité réelle de la JDC est de détecter et d’orienter les jeunes décrocheurs qui ont quitté le système scolaire »([2]). À cet égard, il conviendrait sans nul doute d’appeler le ministère des Armées à une refonte des indicateurs de performance retenus dans le projet annuel de performance. Le taux de satisfaction des jeunes ayant effectué leur JDC est mesuré à l’aune de deux indicateurs, l’un portant sur la qualité de la prestation offerte par la DSNJ et par les armées, l’autre sur l’impact de la JDC sur l’image de la défense et des armées. Pour ce faire, les jeunes doivent répondre à deux questions formulées de manière peu objective et sincère :
– pour le premier indicateur, il s’agit de se positionner par rapport à l’affirmation suivante : « dans l’ensemble, je suis satisfait(e) de cette journée » ;
– pour le second indicateur, il est demandé aux jeunes de réagir à l’affirmation : « la JDC m’a donné une meilleure image de la défense et des armées ».
Il n’est donc pas étonnant que les taux de satisfaction des jeunes avoisinent les 90 %, et votre rapporteur pour avis ne peut que regretter que l’évaluation de la performance de la JDC repose sur de tels critères : comment juger une prestation « dans l’ensemble », c’est-à-dire nécessairement de manière gazeuse ? Comment craindre que des jeunes n’ayant la plupart du temps aucun contact avec les armées n’aient pas une meilleure image d’elles au terme d’une journée « libre » passée avec des jeunes de leur âge hors du carcan scolaire habituel ? Il y a là sans nul doute des pistes d’amélioration.
2. Une année charnière pour la DSNJ
Au-delà, l’année 2018 constituera une année charnière pour la direction du service national et de la jeunesse, instituée en mai 2017 ([3]) en remplacement de la direction du service national pour assurer la coordination de l’ensemble des dispositifs ministériels en faveur de la jeunesse. Cette direction regroupe dorénavant l’ensemble des missions du service national et de l’ancien délégué ministériel à la jeunesse et à l’égalité des chances. Elle assure en outre la tutelle du service militaire volontaire – volontariat militaire d’insertion (SMV-VMI). De plus, la commission armées-jeunesse (CAJ), dont le directeur du service national et de la jeunesse est le président, lui est adossée.
Premièrement, la direction poursuivra la dématérialisation des démarches liées à la journée défense et citoyenneté. Ainsi, grâce notamment au projet « MaJDC.fr » mené dans le cadre de la modernisation de l’action publique, les jeunes Français auront accès sur Internet à un espace sécurisé personnel avec davantage d’interactivité, où leur seront adressés tous les documents liés à la JDC (convocation, attestations justificatives) pour l’inscription au baccalauréat, à l’examen du permis de conduire ou à des concours administratifs.
Deuxièmement, elle pilotera la montée en puissance de l’expérimentation du service militaire volontaire, dont le financement est prévu au sein de la mission « Défense ».
L’action 2 du programme 167 est consacrée à la mise en œuvre de la politique de mémoire du ministère des Armées. Les ressources inscrites en PLF 2018 connaissent une forte hausse par rapport à la loi de finances initiales pour 2017, pour s’établir à 28,2 millions d’euros en AE comme en CP, soit une augmentation de près de 25 %.
La politique de mémoire prend de multiples formes :
– conduite d’actions commémoratives : organisation des cérémonies inscrites au calendrier commémoratif national et mise en place de saisons mémorielles autour des grands anniversaires événementiels ;
– mise en place d’actions pédagogiques et civiques : organisation du concours national de la Résistance et de la Déportation, soutien aux projets pédagogiques proposés par les établissements scolaires, promotion de l’enseignement de défense, publications et mise à disposition d’outils pédagogiques en partenariat avec les ministères chargés de l’éducation nationale et de l’agriculture, dans le cadre du protocole interministériel développant les liens entre la jeunesse, la défense et la sécurité nationale signé le 20 mai 2016 ;
– mise en valeur du patrimoine mémoriel : entretien, rénovation et valorisation des hauts lieux de la mémoire nationale et des sépultures de guerre, développement du tourisme de mémoire.
Conçue et conduite, pour le ministère des Armées, par la direction des patrimoines, de la mémoire et des archives, la politique de mémoire est aussi mise en œuvre par l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG) en tant qu’opérateur sur le territoire, chargé notamment d’assurer l’entretien des sépultures de guerre en France, ainsi qu’en Algérie, au Maroc et en Tunisie, et des hauts lieux de la mémoire nationale.
Votre rapporteur pour avis ne peut ici se livrer à une présentation exhaustive des actions conduites par le ministère des Armées dans le cadre de la politique de mémoire. Il a souhaité insister sur trois points qui lui semblent mériter une attention particulière.
1. La dernière année du cycle commémoratif de la Grande Guerre
De manière générale, le programme des commémorations est chaque année chargé, de nombreuses cérémonies étant organisées de manière annuelle et régulière. Il s’agit avant tout des cérémonies nationales. Onze journées sont ainsi prévues par différents textes législatifs. Votre rapporteur pour avis les liste ci‑dessous, en précisant le coût de l’organisation de chacune d’elles pour le ministère des Armées en 2017 :
– 19 mars, journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc – jour anniversaire du « cessez-le-feu » en Algérie (65 000 euros) ;
– 26 avril, journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation (10 000 euros) ;
– 8 mai, commémoration de la victoire de 1945 (103 000 euros) ;
– 11 mai, fête nationale de Jeanne d’Arc et du patriotisme (0 euro) ;
– 27 mai, journée nationale de la Résistance (0 euro) ;
– 8 juin, journée nationale d’hommage aux « morts pour la France » en Indochine (non significatif) ;
– 18 juin, journée nationale commémorative de l’appel du général de Gaulle le 18 juin 1940 à refuser la défaite et à poursuivre le combat contre l’ennemi (21 400 euros) ;
– 16 juillet, journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux « Justes » de France (157 300 euros) ;
– 25 septembre, journée nationale d’hommage aux harkis et autres membres des formations supplétives (10 000 euros) ;
– 11 novembre, commémoration de l’armistice de 1918 et hommage à tous les morts pour la France (150 000 euros) ;
– 5 décembre, journée nationale d’hommage aux « morts pour la France », aux rapatriés d’Afrique du Nord, aux personnes disparues, aux populations civiles victimes de massacres ou d’exactions et aux victimes civiles de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie (65 000 euros).
À ces journées nationales s’ajoute traditionnellement la cérémonie d’hommage à Jean Moulin, célébrée le 17 juin (7 500 euros en 2017).
Par ailleurs, l’année 2017 a été marquée par trois grands événements relatifs à la commémoration de la Première Guerre mondiale :
– 6 avril 2017, centenaire de l’entrée en guerre des États-Unis d’Amérique dans la Première Guerre mondiale ;
– 9 avril 2017, commémoration des batailles d’Arras et de la crête de Vimy ;
– 16 avril, avec les cérémonies officielles de l’offensive du Chemin des Dames.
Enfin, d’autres cérémonies ont été organisées au cours de l’année 2017, dont l’inauguration du Mémorial rénové du débarquement et de la libération de Provence qui s’est déroulée au mémorial du Mont-Faron, dans le Var, le 16 mars 2017, le lancement des travaux – déjà à l’arrêt – du mémorial en hommage aux soldats morts pour la France en opérations extérieures dans le jardin Eugénie-Djendi, situé au Parc André Citroën dans le 15e arrondissement de Paris ou encore la naturalisation de tirailleurs sénégalais.
L’année 2018 sera bien évidemment marquée par ces cérémonies nationales, et en particulier par la commémoration du centenaire de l’Armistice du 11 novembre 1918, qui constituera le cœur de ces hommages mémoriels. C’est pourquoi la Mission du centenaire de la Première Guerre mondiale 1914-2014 fera l’objet d’une dotation exceptionnelle de huit millions d’euros en 2018, soit une augmentation de 5,3 millions d’euros par rapport à 2017, au titre du financement des cérémonies du centenaire, notamment celle du 11 novembre 2018. Si le déroulement de cette journée commémorative n’a pas encore été arrêté par le Gouvernement, elle sera vraisemblablement l’occasion de rassembler l’ensemble des plus hautes autorités des pays ayant combattu durant la Grande Guerre, et de souligner le lien particulier qui lie la République fédérale d’Allemagne à la France depuis lors.
Au-delà, se pose la question de l’après-2018. En effet, après une séquence commémorative intense, le risque d’essoufflement est fort. Si l’on y prend garde, la politique de mémoire pourrait ainsi être « mise en panne », ce qui ne manquerait pas de porter préjudice à de nombreux territoires dont une partie de l’activité économique reposait ces dernières années sur ces chemins de la mémoire. Certes, la Mission du centenaire a été prolongée jusqu’en 2019 ([4]). Il lui appartiendra de définir les axes de mémoire à valoriser au-delà de l’année 2018, et en premier lieu les négociations internationales préalables à la signature du Traité de Versailles le 28 juin 1919. Votre rapporteur pour avis considère néanmoins qu’il est essentiel de s’interroger dès à présent sur les voies et moyens de poursuivre ces commémorations au-delà de cette date.
2. La mémoire des OPEX, un devoir de vigilance
L’année 2018 sera aussi riche d’événements commémorant les opérations extérieures. Ainsi par exemple du quarantième anniversaire de l’engagement de la France au sein de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL). La mémoire des OPEX est complexe, en raison de la diversité des conflits, qui se sont déroulés à des époques et sur des territoires très différents. Dès lors, les OPEX ne constituent pas un « lieu de mémoire » comme peuvent l’être Verdun, la Résistance, le Débarquement ou les appelés du service national, et il est d’autant plus difficile d’en commémorer le souvenir.
À ce titre, la commémoration des dix ans de l’embuscade d’Uzbin, en août 2018, devra faire l’objet de la plus vive attention de la part de l’État. L’embuscade d’Uzbin et les opérations de contre-offensive qui se sont déroulées les 18 et 19 août 2008 ont provoqué la mort de dix soldats français ainsi que celle d’un interprète afghan ; vingt-et-un soldats français ont été blessés ainsi que deux soldats de l’armée afghane. Cet engagement a eu de fortes répercussions en France, l’ensemble de nos concitoyens prenant soudainement conscience que l’on meurt encore à la guerre, et ressentant l’annonce des pertes comme un choc quasi personnel. Dès lors, il en va de l’honneur de notre Nation de rendre hommage à nos soldats morts ou blessés lors de ce combat, et à travers eux à l’ensemble des militaires qui aujourd’hui encore sont déployés en OPEX, au Levant comme au Sahel notamment.
Dans ce contexte, l’avenir du « monument OPEX » mérite la plus grande vigilance. Alors que la loi de finances initiale pour 2017 avait permis d’envisager la fin des rebondissements autour de ce monument, dont la construction a été envisagée dès 2011 conformément aux préconisations d’un groupe de travail présidé par le général d’armée Bernard Thorette, les choses sont aujourd’hui à l’arrêt. Pourtant, une dotation d’un million d’euros avait déjà été inscrite en loi de finances initiale pour 2013 pour l’édification d’un tel monument, et le président de la République François Hollande avait inauguré le lancement du chantier au printemps dernier.
D’après les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, une somme de 200 000 euros serait source de discorde entre l’État et la Ville de Paris, et responsable de l’arrêt des travaux… S’il est pour l’heure simplement préoccupant de voir la réalisation de ce monument à l’arrêt, un tel dédain sera bientôt indigne.
Au-delà, votre rapporteur pour avis a été alerté quant au recensement des soldats tués au combat auquel ce monument sera consacré. En effet, il semblerait que ne seront pris en compte que les militaires tués depuis 1963, date à laquelle le concept d’OPEX commence à se diffuser – auparavant, les interventions françaises se déroulaient majoritairement dans un cadre national – alors que de nombreux militaires sont morts en service à l’étranger au cours des années précédentes. S’il était ainsi décidé d’inscrire les noms de tous les morts en OPEX depuis la guerre de Corée, il faudrait ajouter, pour la période 1950-1962, 323 « Morts pour la France » ou 371 morts en service. S’il a été indiqué à votre rapporteur pour avis que la DPMA travaillait actuellement sur la question du recensement, il considère qu’il ne serait pas digne d’opérer un classement entre ces morts.
3. Un patrimoine mémoriel à rénover et à valoriser
L’entretien, la rénovation et la valorisation du patrimoine mémoriel du ministère des Armées constituent une exigence au regard du sacrifice de ceux qui sont tombés pour la France.
Le patrimoine mémoriel entretenu par le ministère des Armées
Ce patrimoine recouvre, d’une part, le domaine des sépultures perpétuelles des soldats « Morts pour la France », dont l’État doit assurer l’entretien à perpétuité et, d’autre part, les hauts lieux de la mémoire nationale.
En France, ainsi qu’en Algérie, au Maroc et en Tunisie, la mise en œuvre de l’entretien et de la rénovation des sites est assurée depuis 2010 par l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, chargé de la mise en œuvre de l’entretien, de la restauration et de la mise en valeur des sépultures de guerre et hauts lieux, qui demeurent propriété de l’État, placés sous la responsabilité du ministère des Armées. Les moyens nécessaires sont mis en place par la DPMA sur la base de la programmation arrêtée par cette dernière en concertation avec l’ONAC-VG.
À l’étranger, hors Afrique du Nord, la DPMA s’appuie sur les postes diplomatiques pour la gestion des sépultures.
Les sépultures perpétuelles
Les cimetières militaires, communément appelés « nécropoles nationales » en métropole, sont au nombre de 274. 740 000 corps y reposent, en tombes individuelles ou en ossuaires. 88 % de ces corps sont ceux de soldats de la guerre de 1914-1918. Notre-Dame-de-Lorette, dans le Pas‑de‑Calais est le plus grand cimetière (25 hectares, 20 058 corps en tombes et 20 000 en ossuaires), suivi par Fleury-devant-Douaumont (14 hectares, 16 000 corps). La Meuse, la Marne, l’Aisne, la Somme, la Meurthe-et-Moselle et la Moselle sont les départements qui rassemblent le plus de cimetières militaires (de vingt à quarante sites). Le Haut-Rhin, le Bas-Rhin, les Vosges et l’Oise en comptent chacun plus de dix.
Sont compris dans ce nombre les sept cimetières militaires étrangers qu’en l’absence de convention avec les États concernés, la DPMA entretient, à titre gracieux : un cimetière russe à Saint‑Hilaire-le-Grand (Marne), deux « Ex-Soviétiques » à Valleroy (Meurthe-et-Moselle) et à Noyers-Saint-Martin (Oise), un polonais à Urville-Langannerie (Calvados), un tchécoslovaque à Neuville-Saint-Vaast (Pas-de-Calais), un néerlandais à Orry-la-Ville (Oise) et un roumain à Soultzmatt (Haut-Rhin).
La DPMA entretient également quelque 2 200 carrés spéciaux des cimetières communaux, où se trouvent 115 000 sépultures perpétuelles concédées à l’État par les communes. Ce sont des carrés aménagés pour regrouper les soldats tombés à proximité, ou morts dans les hôpitaux de l’arrière. À Nancy, Dijon, Nice, Brest, Le Mans, chaque carré regroupe plus d’un millier de corps, tandis que celui de Châlons-en-Champagne en compte plus de 4 000.
La France assure aussi l’entretien d’un millier de cimetières français – dont 234 importants – dans 80 pays étrangers. Ils sont principalement situés en Belgique, en Italie, en Serbie, en Macédoine, en Grèce, en Turquie (Dardanelles), en Libye et en Afrique du Nord. 230 000 soldats « Morts pour la France » y sont inhumés.
Enfin, la DPMA a en charge la sauvegarde des sépultures des militaires morts en service hors guerre, dites « tombes de garnison », situées essentiellement dans les départements et collectivités d’outre-mer, ainsi que dans les anciennes colonies françaises.
Les hauts lieux de la mémoire nationale
Incarnant la mémoire des conflits auxquels la France a participé depuis 1870, les hauts lieux de la mémoire nationale (HLMN), propriété de l’État, sont placés sous la responsabilité du ministère des Armées et gérés par l’ONAC-VG.
Au nombre de sept jusqu’en 2013, le ministère de la Défense, a érigé en haut lieu, en vue des commémorations du centenaire de la Grande Guerre, deux sites ayant un caractère national et emblématique d’un aspect de ce conflit. Ils sont donc aujourd’hui au nombre de neuf, énumérés par l’arrêté du 20 mars 2014 :
- le cimetière national de Notre-Dame-de-Lorette, à Ablain-Saint-Nazaire (Pas-de-Calais), au titre des militaires morts pour la France aux côtés de leurs frères d’armes alliés (1914-1918) ;
- le cimetière national de Fleury-devant-Douaumont et la tranchée des baïonnettes (Meuse), au titre du sacrifice des soldats français de la Grande Guerre à Verdun, 1914-1918 ;
- l’ancien camp de concentration de Natzweiler-Struthof (Natzwiller, Bas-Rhin), au titre du système concentrationnaire nazi et de la résistance européenne (1933-1945) ;
- le Mont-Valérien (Suresnes, Hauts-de-Seine), au titre de la répression exercée par les autorités allemandes pendant l’Occupation (1940-1944) et de la France Combattante ;
- le mémorial des martyrs de la Déportation, dans l’Île de la Cité (Paris), au titre de la mémoire des déportés ;
- le mémorial de la prison de Montluc, à Lyon (Rhône), au titre de l’internement par le régime de Vichy et les autorités allemandes pendant l’Occupation (1940-1944) ;
- le mémorial du débarquement de Provence, au Mont-Faron (Toulon, Var), au titre du débarquement des 15 et 16 août 1944 et de l’armée de la Libération ;
- le mémorial des guerres en Indochine (Fréjus, Var), au titre de la Seconde Guerre mondiale en Indochine (1940-1945) et de la guerre d’Indochine (1946-1954), qui abrite également les sépultures perpétuelles des morts pour la France qui y sont inhumés ;
- le mémorial de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie, sur la promenade du Quai Branly, à Paris.
Fréquentés par près de 900 000 visiteurs en 2016, ils constituent à la fois des lieux de commémoration et de transmission, nombre d’entre eux étant pourvus d’espaces de visite et muséographiques.
Ces dernières années, l’accent s’est porté sur la restauration des cimetières nationaux de la guerre 1914-1918, qui étaient parmi les plus endommagés. Leur remise en état se déroule sur la base d’un programme pluriannuel établi pour la période 2011-2018, mis en œuvre dans le cadre des commémorations du centenaire de la Première Guerre mondiale.
S’agissant des sépultures de guerre, ont ainsi été achevés en 2017 la rénovation des nécropoles de Pontavert, Loupeigne et Vailly-sur-Aisne dans l’Aisne, et de Montceau-lès-Provins en Seine-et-Marne. De même, les travaux de rénovation des nécropoles d’Auberive, de Suippes-Ferme et de Saint-Jean sur Tourbe, dans la Marne, devraient être achevés d’ici la fin de l’année.
Par ailleurs, l’année 2017 a permis de lancer d’importantes opérations de rénovation dans la nécropole de Notre-Dame de Lorette, tandis qu’ont été lancés plusieurs chantiers dans la Somme, l’Oise, la Marne, l’Aisne et la Seine-et-Marne.
De plus, la restauration de différents carrés communaux a été entreprise, comme à Hirson dans le Nord, Saint-Dizier en Haute-Marne, Solesmes dans la Sarthe ou encore Roanne dans la Loire.
Enfin, dans le cadre du projet d’inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco des sites funéraires et mémoriels de la Première Guerre mondiale, le programme pluriannuel de rénovation des sites a été modifié afin d’effectuer en priorité les travaux nécessaires dans les nécropoles qui figurent sur la liste proposée à l’inscription. Ont ainsi été entamés, dès la fin de l’année 2016, les travaux de rénovation ou d’embellissement dans les nécropoles de Sarrebourg en Moselle, Cuts dans l’Oise, Notre-Dame de Lorette et Neuville-Saint-Vaast dans le Pas-de-Calais, Effry dans l’Aisne, Chauconin-Neufmontiers en Seine-et-Marne. En 2018, des travaux seront lancés à Rancourt dans la Somme, aux Éparges dans la Meuse, à Saint-Benoît la Chipotte et Saint-Dié des Vosges dans les Vosges et à Riche en Moselle.
S’agissant des hauts lieux de la mémoire nationale, les principaux travaux de restauration ont concerné tout d’abord le camp du Struthof et le centre européen du résistant déporté (CERD), situés dans le Bas-Rhin. En 2018, les chantiers majeurs concernent le mémorial, la chambre à gaz et les miradors, ainsi que les premiers travaux sur l’auberge située en face de la chambre à gaz, acquise par l’État en 2016.
Depuis les nouveaux aménagements muséographiques du Mont‑Valérien à Suresnes, dans les Hauts-de-Seine, inaugurés en 2010, le site accueille autour de 20 000 visiteurs par an. Aujourd’hui, le mémorial et la clairière constituent le théâtre de nombreuses cérémonies, en particulier celle qui commémore l’Appel du 18 juin 1940, et celles en mémoire des fusillés qui ont lieu au mois de juin et décembre. Différents chantiers sont prévus en 2018, comme la création d’une salle pédagogique qui permettra d’accueillir des classes d’élèves auxquels des personnels formés transmettront les valeurs civiques portées par ce lieu. De plus, la rénovation de la chapelle et des graffitis qu’elle abrite est devenue des plus urgente, tant ce patrimoine unique se détériore rapidement.
Le mémorial de la prison de Montluc à Lyon fait l’objet de projets d’extension. Si les travaux de rénovation du site engagés depuis 2010 ont permis de rendre accessibles au public l’accueil, le réfectoire et les cellules du bâtiment cellulaire où sont présentés, sur trois niveaux, des parcours individuels de détenus, la restauration du site se poursuivra en 2018.
Enfin, votre rapporteur pour avis tient à souligner la réussite des travaux de rénovation du mémorial du débarquement et de la libération en Provence du Mont-Faron à Toulon, dont l’inauguration a eu lieu le 16 mars 2017. Au cours des années venir, c’est l’autre haut lieu de la mémoire nationale varois, le mémorial des guerres en Indochine situé à Fréjus, qui devra faire l’objet de travaux de rénovation d’importance.
Votre rapporteur pour avis tient également à souligner l’urgence qu’il y a à mettre en œuvre des travaux de rénovation et de valorisation du mémorial du Pin de la Lègue situé à Fréjus, qui abrite les sépultures de 6 611 corps de soldats de toutes origines et de toutes armes tombés pour la France. À l’heure actuelle, une simple plaque leur rend discrètement hommage, et ils reposent là dans une quasi‑indifférence que l’on ne peut que dénoncer. Plus largement, c’est l’ensemble de la mémoire de l’armée noire dont la France doit se saisir. Il en va, aussi, de la cohésion nationale.
Les mémoriaux de « l’armée noire » en France
La mémoire de l’armée noire constitue encore l’un des parents pauvres de la mémoire nationale. Le nombre de monuments dédiés à ceux que l’on appelait les « tirailleurs sénégalais » témoigne d’ailleurs de ce relatif oubli. On compte ainsi :
- le Monument aux héros de l’Armée noire de Reims, construit en 1924, démonté par les Allemands durant la Seconde Guerre mondiale puis réinstallé depuis ;
- les monuments du Jardin d’agronomie tropicale de Paris ;
- le Mémorial de l’Armée noire, érigé à Fréjus en 1994 par l’association des Amis du musée des troupes de marine implanté, avec le concours du ministère des Armées et de la Ville de Fréjus. Ce monument est dédié « à toutes les troupes noires qui ont vaillamment servi sous le drapeau français depuis plus d’un siècle et dont Fréjus était la plus importante garnison » et porte une citation de Léopold Sédar Senghor : « Passants, ils sont tombés fraternellement unis pour que tu restes Français ».
- le Mémorial du Tirailleur, installé à l’initiative de l’association mémoire du tirailleur sénégalais (AMTS) en 2012 dans le carré d’Orient du cimetière du Trabuquet à Menton, où 1 137 tirailleurs sénégalais, malgaches, indochinois ont été inhumés de 1914 à 1920 ;
- le monument de Merfy dans la Marne ;
- la nécropole nationale de Chasselay, dite tata de Chasselay, située dans le Rhône, et où sont inhumés 194 tirailleurs massacrés par la division de SS allemande Totenkopf en juin 1940.
Plus largement, c’est la mémoire des troupes coloniales qui mériterait d’être davantage mise en valeur. C’est pourquoi votre rapporteur soutient pleinement l’initiative de l’association des amis du musée des troupes de marine, d’agrandir et de moderniser le musée dont elle a été à l’initiative. Cette association, créée en 1979 dans le but d’apporter son concours à la conservation, au développement, à la mise en valeur et au rayonnement du patrimoine culturel et artistique constitué par l’ensemble des collections entreposées au musée des troupes de marine à Fréjus, contribue aussi à la cohésion nationale, en rappelant à certains de nos concitoyens qui se sentent parfois exclus du « roman national » combien leurs aïeux ont leur légitime place dans l’histoire de France.
L’ensemble de ce patrimoine est par ailleurs l’objet d’une politique de valorisation, pour laquelle une dotation annuelle de 460 000 euros est allouée à l’ONAC-VG. Cette enveloppe a notamment permis la réalisation de plaquettes d’information, la conduite d’actions pédagogiques et mémorielles ou encore la mise en place d’expositions temporaires. Ces actions doivent être encouragées.
II. Le programme 169 « reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant »
Le programme 169 représente 94 % des ressources inscrites au sein de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », soit 2 317 millions d’euros en AE et 2 317,8 millions d’euros en CP. La baisse constatée, 3,36 %, reflète la baisse tendancielle des effectifs bénéficiaires des prestations du code des pensions militaires d’invalidité et victimes de guerre (CPMIVG) : pensions d’invalidité, retraite du combattant, dépenses médicales, dépenses complémentaires de sécurité sociale, etc.
Par ailleurs, le programme intègre les crédits liés aux trois mesures nouvelles instituées par le projet de loi de finances :
– une mesure d’harmonisation des pensions entre d’une part, les militaires titulaires d’une pension militaire d’invalidité rayés des contrôles avant le 3 août 1962 et leurs ayants cause (actuellement pensionnés au taux normal du soldat), et d’autre part les militaires titulaires d’une pension militaire d’invalidité rayés des contrôles depuis le 3 août 1962 et leurs ayants cause (pensionnés au taux du grade), pour un coût estimé à six millions d’euros. Cette mesure est inscrite à l’article 51 du PLF, rattaché à la présente mission ;
– une revalorisation de 100 euros de la rente versée au titre de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère en faveur des supplétifs rapatriés et leurs conjoints survivants pour un coût estimé à 0,55 million d’euros. Le financement de l’allocation de reconnaissance en faveur des rapatriés s’établit ainsi à 15,4 millions d’euros ;
– l’intégration sur le périmètre du programme de la subvention pour charges de service public (SCSP) du Conseil national des communes – « Compagnon de la Libération » en raison de son transfert en 2017 depuis le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental ». La SCSP s’élève à 1,3 million d’euros au PLF 2018.
Enfin, la subvention d’action sociale de l’ONAC-VG, sa subvention de fonctionnement et celle de l’Institution nationale des invalides (INI) demeurent stables. L’écart entre les AE et CP s’explique par la subvention d’investissement versée à l’INI (0,8 million d’euros en CP) dans le cadre de ses travaux d’infrastructure, engagés en 2017.
évolution des crédits du programme 169 de 2016 à 2018
(en euros)
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Mission « Anciens combattants » |
LFI 2016 |
LFI 2017 |
PLF 2018 |
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|
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
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P169 |
Action 1 |
Administration de la dette viagère |
1 946 320 000 |
1 946 320 000 |
1 889 350 000 |
1 889 350 000 |
1 817 900 000 |
1 817 900 000 |
|
Sous‑action 10 |
PMI‑VG et allocs |
1 189 720 000 |
1 189 720 000 |
1 141 350 000 |
1 141 350 000 |
1 074 000 000 |
1 074 000 000 |
|
|
Sous‑action 11 |
Retraite du combattant |
756 600 000 |
756 600 000 |
748 000 000 |
748 000 000 |
743 900 000 |
743 900 000 |
|
|
|
||||||||
|
Action 2 |
Gestion des droits PMI |
153 050 000 |
153 050 000 |
143 700 000 |
143 700 000 |
136 000 000 |
136 000 000 |
|
|
Sous‑action 21 |
SMG et appareillage |
56 250 000 |
56 250 000 |
55 300 000 |
55 300 000 |
52 400 000 |
52 400 00 |
|
|
Sous‑action 22 |
Rembt transport SNCF |
3 300 000 |
3 300 000 |
3 200 000 |
3 200 000 |
2 700 000 |
2 700 000 |
|
|
|
Sous‑action 23 |
Rembt prestations SECU |
93 500 000 |
93 500 000 |
85 200 000 |
85 200 000 |
80 900 000 |
80 900 000 |
|
|
||||||||
|
Action 3 |
Solidarité |
357 121 357 |
357 121 357 |
353 058 642 |
348 058 642 |
345 560 945 |
346 360 945 |
|
|
Sous‑action 31 |
Maj. Rentes mutualistes |
261 700 000 |
261 700 000 |
252 000 000 |
252 000 000 |
247 400 000 |
247 400 000 |
|
|
Sous‑action 32 |
Subventions associations |
673 000 |
673 000 |
658 010 |
658 010 |
260 000 |
260 000 |
|
|
Sous‑action 33 |
Indemnités, pécules et voyages |
110 000 |
110 000 |
110 000 |
110 000 |
50 000 |
50 000 |
|
|
Sous‑action 34 |
Action sociale ONAC |
25 400 000 |
25 400 000 |
26 400 000 |
26 400 000 |
26 400 000 |
26 400 000 |
|
|
Sous‑action 35 |
SCSP ONAC |
57 149 214 |
57 149 214 |
56 801 489 |
56 801 489 |
58 027 168 |
58 027 168 |
|
|
Sous‑action 36 |
SCSP INI |
12 089 143 |
12 089 143 |
17 089 143 |
12 089 143 |
12 089 143 |
12 889 143 |
|
|
Sous-action 37 |
CNCCL - Subventions (nouveau) |
Sans objet |
Sans objet |
Sans objet |
Sans objet |
1 334 634 |
1 334 634 |
|
|
|
||||||||
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Action 7 |
Actions en faveur des rapatriés |
17 500 000 |
17 500 000 |
17 270 000 |
17 270 000 |
17 570 000 |
17 570 000 |
|
|
Total P 169 |
2 473 991 357 |
2 473 991 357 |
2 403 378 642 |
2 398 378 642 |
2 317 030 945 |
2 317 830 945 |
||
Source : PAP 2017 et 2018.
A. L’administration de la dette viagère
L’action 1 finance les prestations versées au titre des pensions militaires d’invalidité (PMI) et de la retraite du combattant. Son budget proposé pour 2018 s’établit à 1 817,9 millions d’euros et reflète la baisse tendancielle des effectifs bénéficiaires des PMI et de la retraite du combattant.
La retraite du combattant, non réversible, est accordée aux titulaires de la carte du combattant âgés de 65 ans ou de 60 ans sous des conditions énumérées dans le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre.
Les montants des PMI et de la retraite du combattant sont calculés en nombre de points d’indice (point PMI) dont la valeur évolue selon les variations de « l’indice de traitement brut-grille indiciaire », publié conjointement par l’INSEE et la DGAFP.
Le rapport constant
Le « rapport constant » désigne l’évolution proportionnelle des traitements des fonctionnaires d’une part, et des pensions militaires d’invalidité ou de la retraite du combattant d’autre part.
Dans le cadre d’une réforme visant à simplifier ces mécanismes, la loi de finances initiale pour 2005 a modifié l’article L. 8 bis du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, relatif à la fixation de la valeur du point d’indice applicable aux PMI et à la retraite du combattant.
Cet article dispose qu’« à compter du 1er janvier 2005, un rapport constant est établi entre les pensions et les traitements bruts de la fonction publique de l’État. En cas d’évolution de l’indice d’ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l’État, tel qu’il est défini par l’institut national de la statistique et des études économiques, la valeur du point de pension est modifiée proportionnellement à l’évolution de cet indice, à la date de cette évolution ».
Par ailleurs, l’article R. 1 du CPMIVG prévoit que la valeur du point de PMI est fixée par un arrêté conjoint du ministre des Armées et du ministre chargé du Budget. Le cas échéant, les bénéficiaires des pensions militaires d’invalidité et de la retraite du combattant reçoivent un rappel.
Cette refonte de la procédure de fixation du rapport constant permet d’appliquer plus rapidement les nouvelles valeurs du point aux PMI et à la retraite du combattant.
Le fondement de ces évolutions est un indice INSEE des traitements bruts de la fonction publique qui tient compte des évolutions du point de la fonction publique, de l’indice minimum et des attributions de points uniformes.
Depuis 2010, « l’indice des traitements de la fonction publique » de l’INSEE, qui servait jusqu’alors au calcul de la valeur du point de PMI dans le cadre du rapport constant, a été remplacé par « l’indice de traitement brut - grille indiciaire », publié conjointement par l’INSEE et le service statistique de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP). Ce nouvel indice, trimestriel, est mis à jour à trimestre échu. L’indice « PMI » reflète l’évolution de cet indice de référence.
Compte tenu de l’augmentation de la valeur du point d’indice de la fonction publique (de 0,6 % au 1er juillet 2016 et de 0,6 % au 1er février 2017), et de la mise en œuvre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) qui revalorise les grilles indiciaires, le « rapport constant » a permis une revalorisation sensible de la valeur du point PMI, en la portant à 14,12 euros au 1er juillet 2016 (arrêté du 28 février 2017) et à 14,40 euros au 1er janvier 2017 (arrêté du 1er août 2017).
Pour le ministère des Armées, ces revalorisations successives se traduisent par un effort financier supplémentaire, sur la période 2017-2018, de 51,40 millions d’euros qui se répartit de la façon suivante :
- pour les pensions militaires d’invalidité : 31,5 millions d’euros dont 3,2 millions d’euros au titre des rappels de 2016 ;
- pour la retraite du combattant : 19,9 millions d’euros dont deux millions d’euros au titre des rappels de 2016.
Alors que les associations représentatives des anciens combattants demandent depuis de nombreuses années la constitution d’une commission tripartite associant l’État, les parlementaires et les associations d’anciens combattants afin de réévaluer ce rapport constant et la valeur du point PMI, votre rapporteur pour avis estime qu’il serait pertinent de mener, plus largement, une analyse fine de l’ensemble des dispositifs de reconnaissance et de réparation afin de les moderniser.
1. Les pensions militaires d’invalidité
Les pensions d’invalidité sont concédées aux ayants droit pour indemniser la gêne fonctionnelle consécutive aux maladies ou aux blessures reconnues imputables au service ou à un fait de guerre. Elles sont versées à titre militaire ou de victime civile. Les pensions d’ayants cause sont concédées, sous certaines conditions, aux conjoints survivants, orphelins et ascendants d’un militaire décédé au combat ou d’un invalide pensionné.
Le financement des pensions militaires d’invalidité est inscrit à la sous‑action 10, qui inclut cette année l’alignement sur le régime en vigueur depuis le 3 août 1962 du calcul des PMI des militaires radiés des contrôles avant cette date et de leurs ayants cause. En projet de loi de finances pour 2018, le coût de cette mesure est estimé à six millions d’euros et la dotation globale de la sous‑action s’élève à 1 074 millions d’euros, soit une diminution de 67,35 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.
Pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre – évolution depuis 2012
(Situation au 31 décembre de l’année considérée)
|
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Invalides |
Conjoints et orphelins |
Ascendants |
Total |
Taux d’évolution |
|
2012 |
195 562 |
81 305 |
3 926 |
280 793 |
-4,8 % |
|
2013 |
186 614 |
76 570 |
3 730 |
266 914 |
-4,9 % |
|
2014 |
179 027 |
72 100 |
3 541 |
254 668 |
-4,6 % |
|
2015 |
170 755 |
67 234 |
3 771 |
241 360 |
-5,2 % |
|
2016 |
163 860 |
63 179 |
3 246 |
230 285 |
-4,6 % |
Source : DGFIP, service des retraites de l’État, base des PMIVG 2016.
La tendance à la diminution des effectifs observée les années précédentes se poursuit. En effet, les « nouveaux » bénéficiaires ne sont pas aussi nombreux que ceux qui, bénéficiaires de pensions militaires d’invalidité au titre de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre d’Algérie, chaque année nous quittent.
À l’heure de l’élaboration du présent avis, les plus grands invalides, bénéficiaires de pensions égales ou supérieures à 100 %, représentent 9 009 personnes, soit 5,5 % des anciens combattants titulaires d’une pension d’invalidité. À l’inverse, les pensions inférieures ou égales à 55 % sont au nombre de 130 770, soit 79,8 % de l’ensemble des pensions d’invalides, les titulaires d’une pension d’invalidité inférieure à 30 % représentant 51,9 % de l’effectif.
La carte du combattant ouvre droit, au titre du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, à l’âge de 65 ans, voire dès 60 ans, à la retraite du combattant. Au 31 décembre 2016, le nombre de retraites du combattant versées au 31 décembre 2016 s’élève à 1 058 947.
Répartition des bénéficiaires de la retraite du combattant
par âges et conflits au 31 décembre 2016
|
Conflit |
Effectifs |
Âge |
Effectifs |
|
Première Guerre mondiale |
1 320 |
100 ans et plus |
1 791 |
|
Seconde Guerre mondiale |
78 852 |
de 95 à 99 ans |
11 665 |
|
Algérie |
879 413 |
de 90 à 94 ans |
38 704 |
|
Hors guerre |
21 212 |
de 85 à 89 ans |
59 953 |
|
Indochine |
7 023 |
de 80 à 84 ans |
415 026 |
|
Non déterminés |
71 127 |
de 75 à 79 ans |
500 839 |
|
TOTAL |
1 058 947 |
de 70 à 74 ans |
25 060 |
|
|
|
de 65 à 69 ans |
5 554 |
|
|
|
moins de 65 ans |
355 |
|
|
|
TOTAL |
1 058 947 |
Source : ministère des Armées.
Le versement de la retraite du combattant fait l’objet en 2018 d’une dotation d’un montant de 743,9 millions d’euros, soit une diminution de 4,1 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, inscrite à la sous-action 11. Cette évolution à la baisse des ressources budgétaires n’est que le reflet de la diminution naturelle du nombre de bénéficiaires.
Cette année, la dotation prend également en compte l’extension en année pleine des augmentations de deux points au 1er janvier 2017 (50 points) et de deux points au 1er septembre 2017 (52 points). Le Gouvernement a en effet souhaité, il faut le souligner, pleinement assumer les décisions de revalorisation de la retraite du combattant prise par le précédent gouvernement en fin d’année 2016. Le montant annuel de la retraite du combattant est donc de 720 euros depuis le 1er janvier 2017 et de 748,80 euros depuis le 1er septembre 2017. Le coût budgétaire de l’augmentation de deux points au 1er septembre 2017 est estimé à 3,7 millions d’euros en 2017. En 2018, le coût de l’extension en année pleine de cette mesure s’élèvera à 25,2 millions d’euros selon les informations recueillies par votre rapporteur pour avis.
nombre de retraites du combattant en paiement depuis 2012
|
Années |
Effectifs au 1er janvier |
Attributions en cours de l’année |
Extinctions au cours de l’année |
Effectifs au 31 décembre |
Solde |
|
2012 |
1 287 388 |
16 303 |
65 997 |
1 237 694 |
- 49 694 |
|
2013 |
1 237 694 |
18 327 |
55 836 |
1 200 185 |
-37 509 |
|
2014 |
1 200 185 |
17 058 |
58 076 |
1 159 167 |
- 41 018 |
|
2015 |
1 159 167 |
11 395 |
61 566 |
1 108 996 |
-50 171 |
|
2016 |
1 108 996 |
8 741 |
58 790 |
1 058 947 |
-50 049 |
|
Prévision 2017 |
1 058 947 |
6 700 |
57 600 |
1 008 047 |
-50 900 |
|
Prévision 2018 |
1 008 047 |
6 161 |
59 000 |
955 208 |
-52 839 |
Source : ministère des Armées.
S’agissant de l’année 2018, le règlement quasi définitif des demandes de carte du combattant présentées suite à la mise en œuvre de la disposition de la « carte à cheval », qui a élargi les droits à la carte du combattant au titre de l’Afrique du Nord (AFN) aux services effectués au-delà du 2 juillet 1962, aura pour effet une forte baisse du nombre de nouvelles retraites du combattant. En effet, si en 2016, 4 220 cartes du combattant avaient été attribuées au titre de l’AFN, les attributions pour ces opérations en 2017 ne devraient guère dépasser les 2 600. Au 1er juillet 2017, 1 319 cartes ont été attribuées contre 2 506 un an plus tôt.
Si les années 2017 et 2018 verront une augmentation du nombre de cartes du combattant délivrées sur le fondement de l’article 87 de la loi de finances pour 2015 relatives à l’attribution de la carte du combattant aux militaires justifiant d’une présence de quatre mois en opération extérieure, cette mesure aura de faibles conséquences en matière de retraite du combattant compte tenu de l’âge des militaires concernés.
La campagne double
En substituant à l’expression « aux opérations effectuées en Afrique du Nord », l’expression « à la guerre d’Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc », qualifiant le conflit en Algérie de « guerre », la loi n° 99-882 du 18 octobre 1999 a créé une situation juridique nouvelle. Il en a découlé que les personnes exposées à des situations de combat au cours de la guerre d’Algérie étaient susceptibles de bénéficier de la campagne double.
Le décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010 portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d’Afrique du Nord a accordé ce droit aux militaires d’active et aux appelés pour toute journée durant laquelle ils ont pris part à une action de feu ou de combat ou ont subi le feu. L’application du décret ne pouvait néanmoins être différente de la date d’entrée en vigueur de la loi de 1999. Celle-ci n’étant pas rétroactive, le bénéfice de la campagne double n’a pu être appliqué qu’aux seuls fonctionnaires et assimilés dont les pensions de retraite ont été liquidées à compter du 19 octobre 1999 (date d’entrée en vigueur de la loi du 18 octobre 1999 précitée).
De fait, cette mesure ne pouvait s’appliquer aux pensions liquidées antérieurement au 19 octobre 1999, puisque ce n’est qu’à compter de cette date qu’a été reconnu officiellement l’état de guerre en Afrique du Nord, qui seul permet l’attribution de la campagne double. Ce principe a été confirmé par le Conseil d’État, dans sa décision n° 366253 du 13 juin 2013.
L’article 132 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 a étendu le bénéfice de la campagne double aux fonctionnaires civils et aux militaires ayant participé à des actions de feu et de combat en Afrique du Nord entre 1952 et 1962, titulaires d’une pension concédée au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite avant le 19 octobre 1999.
En application de cette disposition, 55 112 euros ont été versés, en 2016, à 152 bénéficiaires. Au cours du premier semestre 2017, 224 bénéficiaires se sont vus verser un montant total de 82 156 euros. Cette mesure est financée à partir du compte d’affectation spéciale « Pensions » / Programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité ».
Par ailleurs, il est apparu que la rédaction de l’article 132 de la loi de finances pour 2016 excluait du champ d’application de la mesure les régimes spéciaux qui reconnaissent le principe de la bonification de campagne. Pour répondre à la volonté du Gouvernement, une disposition a été inscrite dans la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017 afin de permettre aux ressortissants des régimes de retraite considérés, dont les droits à pension ont été liquidés avant l’entrée en vigueur de la loi du 18 octobre 1999, de bénéficier, comme les ressortissants du CPCMR, de la campagne double.
Aujourd’hui, alors que de nombreuses associations représentatives d’anciens combattants sollicitent une extension du bénéfice de la campagne double, votre rapporteur pour avis appelle, comme il l’a fait au sujet du rapport constant, à une remise à plat des différents dispositifs existants en vue de leur rationalisation. Il souhaite que l’année 2018, dernière année du cycle commémoratif du centenaire de la Première Guerre mondiale, soit l’occasion de poursuivre le travail de modernisation du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, au bénéfice de ses ressortissants.
B. L’action sociale et les droits liés aux pensions militaires d’invalidité
Il sera ici question des crédits des actions 2 « Gestion des droits liés aux pensions militaires d’invalidité » et 3 « Solidarité ».
L’action 2 « Gestion des droits PMI », dotée de 136 millions d’euros en PLF 2018, recouvre les droits accessoires ouverts aux titulaires d’une pension militaire d’invalidité. Il s’agit :
– des soins médicaux gratuits et appareillages, conformément aux articles L. 115 et L. 128 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, qui disposent que l’État doit prendre à sa charge les diverses prestations médicales ainsi que les appareils et accessoires nécessités par les infirmités donnant lieu à pension. Le montant inscrit en PLF 2018 est de 52,4 millions d’euros. Cette évolution à la baisse (-2,9 millions d’euros par rapport à la LFI 2017) s’explique par une diminution du nombre de bénéficiaires malgré une relative augmentation des coûts de santé ;
– des réductions sur les transports, c’est-à-dire les réductions tarifaires de 50 % à 75 % pour les pensionnés dont le taux d’invalidité est d’au moins 25 % et la gratuité pour l’accompagnateur des plus grands invalides. La dotation 2018 s’établit à 2,7 millions d’euros, en baisse de 500 000 euros par rapport à la LFI 2017 ;
– du financement du régime de sécurité sociale des pensionnés de guerre, qui prend en charge les pensionnés invalides à 85 % et plus qui ne détiennent pas déjà la qualité d’assuré social. La dotation 2018 de cette sous-action 23 s’élève à 80,9 millions d’euros, en baisse de 4,3 millions d’euros par rapport à la LFI 2017. Cette dotation tient compte d’un trop versé prévisionnel de 5,29 millions d’euros constitué en 2017, qui en raison des règles de paiement des factures à la caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés, devrait minorer la consommation budgétaire 2018.
L’action 3 « Solidarité » concerne les prestations et avantages particuliers couverts au titre de la solidarité envers les pensionnés ou aux titulaires d’un titre d’ancien combattant et victime de guerre. Elle couvre également les subventions pour charges de service public des deux opérateurs : l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre et l’Institution nationale des invalides. En PLF 2018, l’action 3 est financée à hauteur de 346,4 millions d’euros, en baisse de 1,7 million d’euros par rapport à la LFI 2017.
Les modalités de mise en œuvre de la solidarité
La mise en œuvre de la politique de solidarité revêt plusieurs modalités.
Premièrement, il s’agit du financement des majorations légales et spécifiques des rentes mutualistes auxquelles les anciens combattants peuvent souscrire, dont le financement est assuré par la sous-action 31.
La retraite mutualiste du combattant a été créée par la loi du 4 août 1923, qui a posé pour la première fois le principe du versement d’une majoration financée par l’État en plus de la rente normalement constituée par les anciens combattants et leurs ayants cause du conflit 1914-1918. Après la Seconde Guerre mondiale, plusieurs dispositions législatives ont permis successivement aux anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale, engagés sur des théâtres d’opérations extérieures en Indochine, en Corée et en Afrique du Nord notamment, de bénéficier des mêmes dispositions que leurs prédécesseurs pour se constituer une retraite mutualiste. Finalement, le décret n° 95-410 du 18 avril 1995 a étendu le bénéfice de la retraite mutualiste du combattant à tous les titulaires du titre de reconnaissance de la Nation. La retraite mutualiste du combattant, devenue rente mutualiste du combattant, bénéficie par ailleurs du régime de majoration légale institué par la loi du 4 mai 1948. Ainsi, les contribuables anciens combattants peuvent, chaque année, déduire de leur revenu imposable, dans la limite d’un plafond, les versements effectués en vue de la constitution d’une rente donnant lieu à majoration de l’État. Cette rente bénéficie, en plus de la majoration légale attachée à toute rente viagère, d’une majoration spécifique de l’État de 12,5 % à 60 % selon le titre détenu et sa date d’obtention. Le total formé par la rente et la majoration spéciale de l’État est limité à un plafond, dit « plafond majorable ». Le plafond donnant lieu à majoration de la retraite mutualiste du combattant est fixé à 125 points d’indice des pensions militaires d’invalidité, soit 1 800 euros au 1er janvier 2017.
La rente mutualiste se cumule avec toutes les autres pensions et retraites. Elle est exonérée d’impôt pour sa part inférieure au plafond légal. Au-delà de ce plafond, le régime fiscal est celui de l’assurance-vie. De manière pratique, les organismes mutualistes versent les majorations aux souscripteurs et sont remboursés l’année suivante par l’État. En conséquence, la prévision budgétaire 2018, d’un montant de 247,4 millions d’euros repose sur les montants prévisionnels qui seront servis en 2017 par les organismes débiteurs.
Deuxièmement, la sous-action 32 retrace le financement des subventions de fonctionnement versées à des associations du monde combattant. Le montant de cette subvention, à hauteur de 260 000 euros est en baisse par rapport aux crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2017.
Troisièmement, la sous-action 33 retrace la prise en charge des frais de voyages sur les tombes des « Morts pour la France ». Ces prestations sont financées par l’ONAC-VG qui reçoit à cet effet une subvention du ministère des Armées. La dotation a été réduite à 50 000 euros en 2018, contre 110 000 euros en 2017 en raison du niveau de dépense effectivement réalisée par l’ONAC-VG à ce titre en 2016.
Quatrièmement, la sous-action 34, dotée d’un budget de 26,4 millions d’euros, supporte la subvention d’action sociale versée par le ministère des Armées à l’ONAC-VG pour remplir sa mission de solidarité envers les anciens combattants et victimes de guerre. La dotation est inchangée par rapport à 2017 et permet la mise en œuvre de l’action sociale de l’Office dont les priorités, définies par le conseil d’administration, sont d’accorder une attention particulière aux ressortissants les plus isolés et les plus démunis, d’améliorer l’accompagnement de la quatrième génération du feu et, notamment, des militaires blessés en opération, et de renforcer la prise en charge les victimes du terrorisme et, en particulier, des nouveaux pupilles de la Nation, en augmentation sensible depuis 2015 (181 pupilles en 2016 dont 134 au titre des attentats de 2015 et 2016).
Les subventions pour charges de service public aux opérateurs publics
L’action 7 assure également le financement des subventions pour charges de service public des trois opérateurs rattachés au programme 169.
La sous-action 35 retrace le montant de la subvention pour charges de service public (SCSP) allouée à l’ONAC-VG. Elle s’élève à 58 millions d’euros, en augmentation de 1,2 million d’euros par rapport à 2017. Cette augmentation résulte du rattachement du service central des rapatriés à l’Office qui interviendra le 1er janvier 2018. Ce rattachement est la dernière étape de la décision du Comité interministériel de la modernisation de l’action publique du 17 juillet 2013 de confier à l’ONAC-VG le rôle de guichet unique pour l’ensemble des dispositifs en faveur des rapatriés.
La sous-action 36 finance les subventions et dotations allouées à l’Institution nationale des invalides (INI). Le montant de la subvention, 12,1 millions d’euros, est identique aux années précédentes mais intègre toutefois une dotation complémentaire de 800 000 euros en CP au titre de l’appui à la mise en œuvre du nouveau projet d’établissement de l’INI. Les travaux, estimés à 15 millions d’euros, ont été engagés en 2017, à partir d’une subvention ministérielle de cinq millions d’euros, l’Institution se finançant en partie sur son fonds de roulement.
Enfin, le transfert de la tutelle du Conseil national des communes « Compagnon de la Libération » du programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » au programme 169 en gestion 2017 s’est traduit par la création en PLF 2018 d’une sous-action 37 « CNCCL – Subventions » au sein de l’action 3 « Solidarité ». Le montant de cette subvention est de 1,3 million d’euros. Le CNCCL est un établissement public administratif créé par la loi n° 99-418 du 26 mai 1999 et qui a succédé au conseil de l’Ordre de la libération par décret n° 2012-1253 du 14 novembre 2012. La présidence de son conseil d’administration est assurée, à tour de rôle, par le maire de l’une des cinq communes titulaires de la Croix de la libération (Nantes, Grenoble, Paris, Vassieux-en-Vercors, Île de Sein).
C. Les actions en faveur des harkis et rapatriés
Les crédits retracés à l’action 7 financent les dispositifs en faveur des rapatriés et des harkis. Il s’agit des dispositifs suivants :
– l’allocation de reconnaissance, instituée par la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, qui représente 88 % des crédits ;
– l’allocation viagère, instituée par l’article 133 de la loi de finances pour 2016, au profit des conjoints et ex-conjoints des anciens membres de formations supplétives ;
– les autres mesures en faveur des rapatriés, tels que des aides à la formation professionnelle, des aides au désendettement, des aides spécifiques aux conjoints survivants, des remboursements de cotisations retraites complémentaires ou encore des mesures de sauvegarde du toit familial.
La gestion de l’ensemble de ces dispositifs a été confiée à l’ONAC-VG, qui constitue aujourd’hui le guichet unique à destination des harkis et rapatriés. Cette évolution administrative, engagée sous le quinquennat précédent, s’est traduite par une rationalisation des structures chargées antérieurement de la mise en œuvre de ces dispositifs, et par une simplification corrélative des procédures et des circuits de traitement des aides et prestations.
La dotation inscrite en PLF 2018, d’un montant de 17,57 millions d’euros, inclut la revalorisation de 100 euros de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère, inscrite à l’article 50 du PLF, rattaché à la présente mission. Sur ce total, 15,37 millions d’euros sont prévus au titre du financement de l’allocation de reconnaissance, versée à 5 855 bénéficiaires, et 2,2 millions d’euros pour les autres dispositifs en faveur des harkis et rapatriés. Parmi ces derniers, on peut notamment citer des aides au désendettement des rapatriés installés, pour un montant de 600 000 euros, des aides à la formation pour les enfants des anciens supplétifs, représentant un montant de 300 000 euros environ, des aides à la formation professionnelle, des aides spécifiques aux conjoints survivants, des remboursements de cotisations de retraites complémentaires, des mesures de sauvegarde du toit familial ou encore des subventions aux associations de harkis, pour un montant de 240 000 euros.
Le plan d’action en faveur des harkis
Sous la précédente législature, un plan d’action a été élaboré en faveur des harkis, en concertation avec les représentants des associations d’anciens supplétifs et leurs familles, au sein d’une structure permanente de dialogue, le « G12 harki ». Présenté par le Premier ministre le 25 septembre 2014, il comprend dix mesures pour améliorer la reconnaissance et les réparations accordées aux harkis et à leurs familles.
La mise en œuvre du volet « reconnaissance » du plan d’action s’est traduite par l’organisation d’actions éducatives et culturelles – expositions et témoignages présentés par l’ONAC‑VG dans les établissements scolaires, les préfectures et les lieux culturels – visant à faire connaître l’histoire des harkis, par le recueil de témoignages oraux de harkis, la création d’un lieu de mémoire et de recueillement au mémorial de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie, situé quai Branly à Paris, la transformation en lieux de mémoire des anciens hameaux de forestage qui accueillirent plus de 10 000 harkis, conjoints et enfants de harkis après 1962, ainsi que par la recherche et l’identification des lieux d’inhumation spécifiques des harkis et de leurs enfants morts à l’intérieur des camps et enterrés de manière anonyme.
La mise en œuvre du volet « réparation » s’est traduite par la mise en place de comités régionaux de concertation placés sous la présidence des préfets qui entretiennent un dialogue avec les représentants des harkis, le déploiement de mesures favorisant l’insertion professionnelle des enfants de harkis, la revalorisation de l’allocation de reconnaissance de 167 euros au 1er janvier 2015, puis de 100 euros au 1er janvier 2017 et au 1er janvier 2018 et celle de l’allocation viagère créée par la loi de finances pour 2016 au profit des conjoints survivants de harkis, de 100 euros au 1er janvier 2017 de nouveau de 100 euros au 1er janvier 2018.
D. L’effort fiscal et social de l’état
Par ailleurs, un certain nombre de dépenses fiscales portées par le programme 169 concourent à la politique en faveur du monde combattant. Ainsi, la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » recense six dépenses fiscales, dont la nature et le coût sont précisés dans le tableau ci-dessous.
(en millions d’euros)
|
Libellé |
Chiffrage pour 2016 |
Chiffrage pour 2017 |
Chiffrage pour 2018 |
|
Déduction des versements en vue de la retraite mutualiste du combattant |
37 |
37 |
34 |
|
Demi-part supplémentaire pour les contribuables (et leurs veuves) de plus de 74 ans titulaires de la carte du combattant |
520 |
550 |
550 |
|
Exonération de la retraite du combattant, des pensions militaires d’invalidité, des retraites mutuelles servies aux anciens combattants et aux victimes de guerre et de l’allocation de reconnaissance servie aux anciens membres des formations supplétives de l’armée française en Algérie (harkis) et à leurs veuves |
190 |
175 |
175 |
|
Exonération des indemnités versées aux victimes des essais nucléaires français et à leurs ayants droit |
Non significatif |
Non significatif |
Non significatif |
|
Exonération de droits de mutation pour les successions des victimes d’opérations militaires ou d’actes de terrorisme |
Non chiffrable |
Non chiffrable |
Non chiffrable |
|
Réduction de droits en raison de la qualité du donataire ou de l’héritier |
Non significatif |
Non significatif |
Non significatif |
Source : ministère des Armées.
Le coût total des dépenses fiscales chiffrées est évalué à 759 millions d’euros pour 2018. Dans un contexte budgétaire contraint, le Gouvernement a fait le choix de conserver les mesures fiscales actuellement en vigueur en faveur des anciens combattants. Il s’agit d’un acte fort, confortant des dispositifs créés au profit des anciens combattants en reconnaissance de leurs sacrifices, au titre du droit à réparation pour services rendus à la Nation et compte tenu du faible montant des pensions versées. Ainsi, à titre d’exemple, l’exonération fiscale de la retraite du combattant et des pensions militaires d’invalidité est directement issue de la loi du 31 mars 1919 qui institue un droit à réparation pour les anciens combattants et victimes de guerre.
III. Le programme 168 « indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale »
Le programme 158, placé sous la responsabilité du Premier ministre, assure le financement de dispositifs d’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie commis durant la Seconde Guerre mondiale. Trois dispositifs ont été institués en ce sens par le pouvoir réglementaire :
– le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 a créé un dispositif d’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait de législations antisémites. Si l’activité de la commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations (CIVS) connaît un net ralentissement, de nouvelles demandes continuent néanmoins à être enregistrées et s’ajoutent aux dossiers encore à l’instruction ;
– le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 a créé un dispositif d’indemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. L’activité demeure stable, et l’on constate un net ralentissement du dépôt de nouveaux dossiers ;
– le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 a créé un dispositif d’indemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie. L’activité demeure soutenue, pour lequel les services enregistrent encore de nouvelles demandes.
L’instruction des dossiers est réalisée par la commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations pour les spoliations, et pour l’aide aux orphelins par le département reconnaissance et réparation de l’ONAC-VG, situé à Caen. Les décisions accordant ou refusant des mesures de réparation financière sont prises par le Premier ministre, tandis que la mise en paiement est confiée à l’ONAC-VG par les trois décrets.
Évolution des crédits du programme 158 de 2017 à 2018
(en euros)
|
Mission |
LFI 2017 |
PLF 2018 |
||||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
|||
|
P 158 |
Action 1 |
Indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation |
46 444 098 |
46 444 098 |
46 414 864 |
46 414 864 |
|
Action 2 |
Indemnisation des victimes d’actes de barbarie durant la seconde guerre mondiale |
54 356 374 |
54 356 374 |
54 385 809 |
54 385 809 |
|
|
Total P158 |
100 800 472 |
100 800 472 |
100 800 673 |
100 800 673 |
||
Source : PAP 2018.
A. L’indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations
1. L’indemnisation des orphelins
Le décret du 13 juillet 2000 institue une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. Ce dispositif prévoit l’indemnisation des personnes, mineures de moins de vingt‑et‑un ans au moment des faits, dont le père ou la mère a été déporté à partir de la France dans le cadre des persécutions antisémites durant l’Occupation et a trouvé la mort en déportation. Le bénéfice de ce décret échappe aux personnes qui perçoivent une indemnité viagère versée par la République fédérale d’Allemagne ou par la République d’Autriche à raison des mêmes faits.
Pour ces orphelins, la mesure de réparation prend la forme, au choix du bénéficiaire, d’une indemnité en capital de 27 440,82 euros ou d’une rente viagère mensuelle dont le montant est revalorisé chaque année de 2,5 % depuis le 1er janvier 2009 en application du décret n° 2009-1005 du 24 août 2009. Cette rente s’élèvera à 585,44 euros en 2018, contre 571,16 euros en 2017.
D’octobre 2000, début de la campagne d’indemnisation, au 30 juin 2017, le service instructeur a enregistré 17 632 demandes, 14 312 décisions ont été transmises, 13 632 décisions d’indemnisation ont été prises et 680 rejets ont été notifiés. Sur les 13 632 indemnisations accordées, 6 638 l’ont été sous forme de capital (49 %) et 6 994 sous forme de rente viagère (51 %).
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Nombre de |
Nombre de bénéficiaires indemnisés |
coût complet (en millions d’euros) |
|
2000 |
12 135 |
4 000 |
24,994 |
|
2001 |
3 465 |
7 800 |
163,445 |
|
2002 |
1 072 |
845 |
50,690 |
|
2003 |
278 |
256 |
44,801 |
|
2004 |
195 |
201 |
39,789 |
|
2005 |
121 |
125 |
37,789 |
|
2006 |
112 |
112 |
38,374 |
|
2007 |
34 |
55 |
36,958 |
|
2008 |
19 |
18 |
35,722 |
|
2009 |
40 |
35 |
36,102 |
|
2010 |
44 |
28 |
36,330 |
|
2011 |
30 |
49 |
37,189 |
|
2012 |
31 |
22 |
36,475 |
|
2013 |
19 |
25 |
36,716 |
|
2014 |
14 |
10 |
36,359 |
|
2015 |
8 |
25 |
36,590 |
|
2016 |
12 |
22 |
36,212 |
|
2017 |
3 |
4 |
17,898 |
|
total au 30/06/2017 |
17 632 |
13 632 |
782,433 |
|
Source : Ministère des Armées. |
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Le coût total des aides financières accordées aux orphelins de parents victimes de persécutions antisémites s’élève, au 30 juin 2017, à 782,43 millions d’euros. Par ailleurs, un accord a été signé entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des États Unis d’Amérique, le 8 décembre 2014 à Washington, afin d’assurer l’indemnisation de certaines victimes de la Shoah déportées depuis la France mais non couvertes par les programmes français d’indemnisation. Cet accord a conduit au transfert, en novembre 2015, de 60 millions de dollars à partir des crédits ouverts sur le programme 158 ([5]). Le coût total du dispositif s’élève donc à 838,23 millions d’euros au 30 juin 2017.
À ce jour, l’essentiel des demandes a été traité, la direction des missions de l’ONAC-VG, chargée d’instruire les demandes reçues au titre de ce décret, n’enregistre plus qu’un nombre restreint de nouvelles demandes : 14 en 2014, 8 en 2015, 12 en 2016.
C’est pourquoi les ressources inscrites en PLF pour 2018 s’élèvent à 37,2 millions d’euros, dont 36,9 millions au titre de l’arrérage annuel destiné aux 5 249 crédirentiers attendus sur l’exercice et 300 000 euros au titre des décisions nouvelles attendues sur le prochain exercice.
2. L’indemnisation des victimes de spoliations
Dans la foulée de la remise du rapport Mattéoli au Premier ministre en 1998, le décret du 10 septembre 1999 a institué auprès de ce dernier une commission d’indemnisation des victimes de spoliations, chargée « de rechercher et de proposer les mesures de réparation, de restitution ou d’indemnisation appropriées ». Cette commission propose au Premier ministre les mesures de réparation, de restitution ou d’indemnisation pour des préjudices consécutifs aux spoliations de biens.
Les indemnités accordées peuvent être mises à la charge de l’État français ou, en application des accords de Washington du 21 mars 2001, imputées sur les fonds du Fonds social juif unifié lorsqu’il s’agit d’indemniser des avoirs bancaires.
Entre le mois d’octobre 2000, qui marque le début de la campagne d’indemnisation, et le 30 juin 2017, 23 937 dossiers ont été transmis aux services du Premier ministre, dont 22 028 proposent une indemnisation mise à la charge de l’État français et 1 909 portent rejet ou désistement. Au 30 juin 2017, 21 855 recommandations ont été traitées par le Premier ministre et concernent, compte tenu des partages successoraux, 47 991 bénéficiaires qui perçoivent des indemnités uniquement sous la forme d’un capital.
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|
Nombre de recommandations |
Nombre de |
Coût complet (en millions d’euros) |
|
2000/2001 |
726 |
1 576 |
13,655 |
|
2002 |
1 883 |
4 353 |
35,729 |
|
2003 |
2 117 |
4 719 |
53,378 |
|
2004 |
1 970 |
4 465 |
46,208 |
|
2005 |
2 381 |
5 290 |
44,039 |
|
2006 |
2 560 |
5 345 |
66,232 |
|
2007 |
2 712 |
5 565 |
59,337 |
|
2008 |
1 872 |
4 119 |
51,257 |
|
2009 |
1 318 |
3 090 |
27,590 |
|
2010 |
939 |
2 104 |
14,654 |
|
2011 |
927 |
1 998 |
17,220 |
|
2012 |
974 |
2 119 |
11,697 |
|
2013 |
470 |
972 |
7,792 |
|
2014 |
333 |
728 |
7,609 |
|
2015 |
352 |
847 |
7,553 |
|
2016 |
231 |
512 |
4,791 |
|
Du 01/01 au 30/06/2017 |
90 |
189 |
2,162 |
|
Total au 30/06/2017 |
21 855 |
47 991 |
470,903 |
|
Source : ministère des Armées. |
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Le coût total des aides financières accordées aux victimes de spoliations s’élève au 30 juin 2017 à 470,90 millions d’euros. Si l’activité de la CIVS diminue, le projet de loi de finances pour 2018 prévoit une dotation de sept millions d’euros pour les 350 dossiers attendus au coût moyen de 20 000 euros, calculé sur l’ensemble des indemnités allouées en seize années de campagne, ainsi que sur les coûts prévisionnels des dossiers à fort enjeu financier dont l’instruction est susceptible d’arriver à terme en 2018. Bien entendu, ce coût moyen traduit mal la grande diversité des patrimoines spoliés, et ainsi les disparités considérables entre les indemnités accordées.
Votre rapporteur pour avis tient par ailleurs à souligner que les requêtes présentées à la CIVS peuvent mentionner la spoliation de biens culturels mobiliers et, dans certains cas plus rares, d’œuvres d’art. En dépit d’une amélioration des outils de recherches et d’un enrichissement des connaissances, les enquêtes concernant les œuvres d’art se révèlent souvent infructueuses du fait du manque d’information, de l’imprécision des requêtes et de l’absence de photographies, de listes certifiées et même d’indices. En revanche, si l’œuvre est localisée, la CIVS entame des pourparlers avec le détenteur actuel afin de tenter d’obtenir sa restitution. Parmi les dernières œuvres restituées, il est ainsi possible de mentionner la restitution à son ayant droit du Portrait de Jacopo Foscarini de G. Moroni, le 5 mai 2015. Ce tableau de Moroni avait été retrouvé dans les réserves du Louvre, où il était conservé depuis 1951.
B. L’indemnisation des victimes d’actes de barbarie
Le décret du 27 juillet 2004 instaure une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale. Ce dispositif prévoit l’indemnisation de toute personne, dont le père ou la mère, de nationalité française ou étrangère, a été déporté, à partir du territoire national, durant l’Occupation dans les conditions prévues aux articles L. 272 et L. 286 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre. Le bénéfice de cette indemnisation est également ouvert aux personnes, mineures de moins de vingt-et-un ans au moment des faits, dont le père ou la mère, de nationalité française, a, durant l’Occupation, été exécuté dans les circonstances définies aux articles L. 274 et L. 290 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre. En revanche, ce dispositif d’indemnisation n’est pas ouvert aux personnes qui perçoivent une indemnité viagère versée par la République fédérale d’Allemagne ou par la République d’Autriche à raison des mêmes faits.
Pour ces orphelins, la mesure de réparation prend la forme, au choix du bénéficiaire, d’une indemnité en capital de 27 440,82 euros ou d’une rente viagère mensuelle dont le montant est revalorisé chaque année de 2,5 % depuis le 1er janvier 2009 en application du décret n° 2009-1005 du 24 août 2009. Cette rente s’élèvera à 585,44 euros en 2018, contre 571,16 euros en 2017.
D’août 2004, date du début de la campagne d’indemnisation, au 30 juin 2017, le service instructeur a enregistré 34 032 demandes, 26 719 décisions ont été transmises, 22 655 décisions d’indemnisation ont été prises et 4 064 rejets ont été notifiés. Sur les 22 655 indemnisations accordées, 13 837 l’ont été sous forme de capital (61 %) et 8 818 sous forme de rente viagère (39 %).
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Nombre de |
Nombre de bénéficiaires |
coût complet (en M€) |
|
2004 |
20 755 |
1 999 |
|
|
2005 |
4 021 |
12 000 |
207,481 |
|
2006 |
2 260 |
4 736 |
190,561 |
|
2007 |
2 056 |
1 231 |
61,686 |
|
2008 |
1 091 |
496 |
56,653 |
|
2009 |
1 229 |
926 |
65,168 |
|
2010 |
818 |
507 |
55,839 |
|
2011 |
419 |
277 |
55,400 |
|
2012 |
583 |
150 |
53,734 |
|
2013 |
295 |
93 |
50,992 |
|
2014 |
260 |
54 |
51,270 |
|
2015 |
110 |
104 |
52,131 |
|
2016 |
100 |
58 |
51,616 |
|
Du 01/01 au 30/06/2017 |
35 |
24 |
25,568 |
|
Total au 30/06/2017 |
34 032 |
22 655 |
978,099 |
|
Source : Ministère des Armées. |
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Le coût total des aides financières accordées aux orphelins de parents victimes d’actes de barbarie s’élève au 30 juin 2017 à 978,099 millions d’euros.
L’ONAC-VG continuant d’enregistrer un nombre significatif de nouvelles demandes – 260 en 2014, 110 en 2015, 100 en 2016 – la dotation inscrite en PLF pour 2018 s’élève à 54,1 millions d’euros, dont 52,8 millions au titre de l’arrérage annuel destiné aux 7 515 crédirentiers attendus sur l’exercice et 1,3 million destinés aux décisions nouvelles prévues.
— 1 —
Le Bleuet de France, l’heure du sursaut
Fleur du souvenir portée en l’honneur de tous les morts pour la France, d’hier et d’aujourd’hui, des militaires blessés, des victimes d’actes de terrorisme et des pupilles de la Nation, le Bleuet de France est aujourd’hui encore trop méconnu. L’ancienneté des deux conflits mondiaux explique en partie le manque d’appropriation de ce symbole et, alors que dans les années 1950, le Bleuet était vendu partout en France, sa signification même a parfois été oubliée. La place de la Guerre d’Algérie dans la mémoire nationale comme l’éloignement géographique des conflits armés a pu aussi expliquer, un temps, une sorte de désaffectation des Français pour leur fleur du souvenir. D’une certaine manière, le Bleuet serait ainsi trop lié à la Première Guerre mondiale, et alors que le dernier poilu est décédé en 2008, ne serait plus « d’actualité ».
Pourtant, le niveau d’engagement des forces armées, tant à l’extérieur que sur le territoire national comme la recrudescence des actes de terrorismes sur le territoire national ou à l’étranger rendent l’hommage de la Nation aux victimes militaires ou civiles pleinement actuel.
Pour le Bleuet de France, l’heure du sursaut est arrivée !
Si le Bleuet a connu un certain regain de visibilité ces dernières années, grâce au soutien du monde du sport, de certains médias et de responsables politiques, il faut aller plus loin, en engageant l’ensemble de la population française, à l’instar des Britanniques s’agissant du poppy. Ce dont manque le Bleuet de France, c’est avant tout de visibilité préalable indispensable à sa réappropriation par la population française. Pour ce faire, il convient avant tout de diffuser plus amplement ce symbole, et d’expliquer davantage sa signification et les actions que les fonds collectés à son profit permettent de conduire.
C’est pourquoi votre rapporteur pour avis a décidé de consacrer la seconde partie de son rapport au Bleuet de France, afin de rappeler son histoire, de souligner l’action de l’Œuvre nationale du Bleuet de France (ONBF) et d’identifier quelques pistes d’actions permettant de faire du Bleuet de France le symbole de l’hommage de la Nation à celles et ceux qui sont tombés pour la France, au nom de la France, et à leurs familles.
I. Le Bleuet de France, une œuvre historique plus que jamais actuelle
A. Le Bleuet, cœur de la mémoire d’hier et d’aujourd’hui
Le Bleuet de France est né durant la Première Guerre mondiale, à l’initiative de Charlotte Malleterre, fille du commandant de l’Hôtel national des Invalides, le général Gustave Léon Niox, et épouse du général Gabriel Malleterre, et de Suzanne Leenhardt, infirmière-major de l’hôpital militaire des Invalides, veuve d’un capitaine d’infanterie coloniale tué en 1915.
Le choix du bleuet comme fleur du souvenir trouve plusieurs sources d’explication. D’abord, comme le coquelicot – choisi par les Britanniques pour remplir cet office – le bleuet pousserait sur les terres retournées des champs de bataille de l’Est et du Nord de la France. Il s’agit ainsi d’une fleur marquant la victoire de la vie sur les déchirements et les destructions de la guerre, et les bleuets parsemés étaient parmi les seuls témoignages de la vie, les seules touches colorées dans la boue des tranchées.
De plus, le terme « bleuet » désignait les conscrits de la « Classe 15 » vêtus des premiers uniformes de couleur « bleu horizon » acquis par le ministère de la Guerre pour remplacer le pantalon garance fourni aux premiers poilus. La désignation sous le terme de « bleuet » des plus jeunes des soldats est attestée par de nombreux poèmes et chansons, comme en témoigne cet extrait de Bleuets de France d’Alphonse Bourgoin (1916) :
« Les voici les p’tits « Bleuets »
Les Bleuets couleur des cieux
Ils vont jolis, gais et coquets,
Car ils n’ont pas froid aux yeux.
En avant partez joyeux ;
Partez, amis, au revoir !
Salut à vous, les petits « bleus »,
Petits « bleuets », vous notre espoir ! »
Tandis que le bleu horizon devient le symbole du « poilu », le terme « bleuet » continue de désigner les soldats nouvellement déployés et habillés, dont l’uniforme était ainsi de couleur plus vive que ceux des poilus marqués par la boue, les combats, le sang et la crasse.
Alors que de nombreux soldats reviennent mutilés des champs de bataille et sont soignés à l’Hôtel national des Invalides, Charlotte Malleterre et Suzanne Leenhardt créent dès 1916 des ateliers de confection de bleuet, afin d’occuper les blessés, de leur proposer une activité de rééducation et de leur procurer un revenu, contribuant ainsi à leur réinsertion professionnelle. À partir de pétales en tissu et d’étamines découpées dans des journaux, ces soldats fabriquaient les premiers bleuets en 1918, en souvenir des jeunes recrues de la classe 1915 à l’uniforme bleu horizon. Ces insignes étaient ensuite vendus, le produit de la vente étant versé aux militaires blessés. Le bleuet devient ainsi rapidement le symbole de la jeunesse française sacrifiée.
Source : Bleuet de France.
Au sortir de la Grande Guerre, le Bleuet devient la fleur non officielle du souvenir, et est ainsi vendu par les anciens combattants mutilés de guerre, à l’occasion des journées de commémoration ou de la fête nationale. En septembre 1920, la Fédération interalliée des Anciens combattants soutient l’initiative de Louis Fontenaille, président de l’association Mutilés de France, de reconnaître le Bleuet de France comme fleur symbolique des « Morts pour la France ». Alors que les ventes de bleuets sont essentiellement concentrées à Paris, la décision de Gaston Doumergue, président de la République, d’accorder en 1928 son haut patronage au Bleuet de France, a pour conséquence de généraliser les ventes à l’ensemble du pays.
Source : Bleuet de France.
Quelques années plus tard, à l’occasion du 11 novembre 1934, des fleurs de bleuet fabriquées par les anciens combattants sont officiellement proposées aux Parisiens sur la voie publique. Cette opération est un franc succès, puisque près de 128 000 fleurs sont ainsi vendues. Dès 1935, l’État décide de la vente officielle du Bleuet chaque 11 novembre partout en France. Un deuxième jour de collecte sera ensuite institué, le 8 mai, à compter de 1957, en hommage aux militaires ayant participé à la Deuxième Guerre mondiale.
Si le Bleuet de France est par la suite devenu plus confidentiel, la gestion de l’Œuvre nationale du Bleuet de France a été confiée à l’ONAC-VG en 1991, au même où le législateur a reconnu aux victimes d’actes de terrorisme le statut de victimes civiles de guerre ([6]), et par conséquent la qualité de ressortissantes de l’ONAC-VG, bénéficiaires des aides apportées par l’ONBF.
Aujourd’hui, l’apparition de nouveaux conflits, l’émergence d’une quatrième génération du feu de plus en plus engagée et la perpétration d’attentats terroristes touchant des Français a élargi le champ des personnes auquel le port d’un bleuet rend hommage. Par ailleurs, le Bleuet témoigne aussi de la solidarité de la Nation à l’égard de ses pupilles. Ce statut, créé par la loi du 27 juillet 1917, est plus que jamais d’actualité : en 2016, 181 jugements d’adoption ont été prononcés contre 56 l’année précédente, reflétant l’impact des vagues d’attentats qui ont endeuillé notre pays en 2015 et 2016. En juillet 2017, déjà 68 adoptions ont été prononcées durant les six premiers mois de l’année, dont 56 liées au terrorisme. De manière plus globale, depuis la guerre d’Algérie, 2 682 pupilles ont été adoptées, dont 382 liées aux actes de terrorisme.
B. l’heure des constats, une fleur encore trop méconnue
Le déficit de visibilité du Bleuet de France est particulièrement criant au regard de la popularité du poppy britannique.
Le poppy
Le coquelicot partage la même histoire que le bleuet : évoqué dans un poème du lieutenant-colonel John McCrae, médecin du Corps de santé royal canadien ayant participé à la seconde bataille d’Ypres, en Belgique, le coquelicot est devenu la fleur officielle du souvenir au sein du Commonwealth à compter de 1921.
Le poppy est bien plus populaire dans les pays du Commonwealth et en particulier au Royaume-Uni que le bleuet en France. Plusieurs raisons peuvent être invoquées : les fonds récoltés par la Royal British Legion constituent quasiment l’intégralité des financements à destination des anciens combattants des forces armées britanniques ; le poppy bénéficie d’un large soutien politique – la Royal British Legion ne porte le nom royal que depuis 1971, mais bénéficie du patronage du monarque depuis sa création en 1921 – au niveau des plus hautes autorités de l’État, ainsi que d’un soutien de la part des grands « leaders d’opinion » ; la population s’est emparée du symbole, le détourne et le personnalise toujours avec respect, lui donnant ainsi une image moderne ; de grandes manifestations sont organisées en faveur du poppy, tant au niveau local – le London poppy day par exemple – qu’au niveau national (concerts, compétitions sportives, expositions, performances) et le coquelicot peut être acheté partout, dans la rue comme dans des magasins partenaires.
C’est ainsi l’appropriation du poppy par la population et sa large diffusion qui permet à la Royal British Legion de récolter 151,3 millions de livres en 2016, dont 47,6 millions à l’occasion du seul Poppy Appeal, la période de collecte qui court de la fin du mois d’octobre au 11 novembre.
Dès lors, l’exemple britannique doit être une source d’inspiration pour le Bleuet de France.
Au-delà de l’insigne, c’est l’action de l’Œuvre nationale du Bleuet de France qui est méconnue. Les fonds collectés par l’ONBF – entre 1,2 et 1,5 million d’euros selon les années – permettent d’apporter un soutien complémentaire et individualisé aux personnes bénéficiaires : versement d’aides financières aux ressortissants les plus nécessiteux, aides accordées aux pupilles de la Nation, notamment pour le financement de leur scolarité et de leurs études supérieures et pour l’accompagnement de leur vie quotidienne, actions de solidarité envers les soldats déployés en OPEX (financement de prothèses bioniques pour les blessés, participation aux rencontres militaires blessures et sport ou encore soutien de la confection des colis de Noël), aides au maintien à domicile des ressortissants de l’ONAC-VG les plus âgés en situation de dépendance, amélioration des conditions de séjour dans les maisons de retraite labellisées Bleuet de France. C’est ainsi que l’ONBF contribuera au financement de l’équipement nécessaire à un militaire blessé qui se reconstruit par le sport, afin de lui permettre de participer aux Jeux paralympiques ou aux Invictus games. C’est ainsi que le Bleuet contribuera au financement d’une licence de pilote que passera un pupille de la Nation. C’est ainsi que le Bleuet donnera un coup de pouce à un ressortissant en difficulté, en finançant le remplacement d’un appareil d’électroménager ou en aidant de manière ponctuelle à payer un loyer.
Par ailleurs, des fonds sont consacrés au financement de centaines manifestations mémorielles à caractère culturel et pédagogique dans toute la France pour transmettre la mémoire combattante aux jeunes générations : concours scolaires, expositions, représentations théâtrales et cinématographiques, voyages pédagogiques sur les lieux de mémoire.
Au-delà, le Bleuet de France contribue à l’insertion sociale des personnes handicapées, la fabrication des 300 000 fleurs étant confiée aux établissements du secteur du travail protégé et adapté (STPA), qui regroupe les établissements de travail pour adultes en situation de handicap, au nombre de 2 100 sur le territoire.
II. Le temps de l’action : visibilité, appropriation, distribution
Le Bleuet de France a assurément connu un regain de visibilité au cours des dernières années. Le soutien, certes irrégulier, des présidents de la République, des ministres chargés de la Défense et des Anciens combattants comme des parlementaires et des élus locaux a évidemment joué un rôle. Le Bleuet a surtout bénéficié de l’exposition permise par des partenariats établis avec des fédérations sportives ou des acteurs du monde sportif – fédération française de rugby, fédération française de football, ligue de football professionnelle et clubs de football professionnels, plus ponctuellement monde du basketball, du hockey sur glace ou du football américain – comme par le soutien de plusieurs journalistes ou animateurs de télévision.
Toutefois, ce soutien demeure trop ponctuel et irrégulier. Le principal défi est d’amener la population française à se réapproprier le bleuet. C’est cette réappropriation, permise par une meilleure visibilité du symbole et de son message, qui permettra d’accroître les montants collectés et ainsi d’approfondir les actions de solidarité et de mémoire mises en place, imposant la constitution d’un réseau de distribution plus dense.
Votre rapporteur pour avis a donc conduit de multiples entretiens afin d’identifier de pistes d’action permettant de diffuser le Bleuet de France. Il en liste ainsi quelques-unes ci-dessous, en espérant pouvoir compter sur la mobilisation de tous au service du Bleuet, en hommage à ceux qui ont sacrifié une partie d’eux‑mêmes au nom de la France. Bien sûr, il est conscient du fait que la plupart de ces actions dépendent de l’engagement des acteurs concernés auprès du Bleuet, seuls ces derniers pouvant juger pleinement de leur faisabilité. De plus, les pistes évoquées ci-dessous ont avant tout pour objectif de nourrir de futurs travaux sur le Bleuet de France, et constituent ainsi une base de travail pour les mois à venir. Elles devront donc être précisées avec chacun des acteurs concernés.
Votre rapporteur pour avis ne souhaite en effet pas se limiter à la publication du présent rapport, mais bien prendre à bras-le-corps le Bleuet, et travailler à sa réappropriation en collaboration avec le Gouvernement, le monde associatif, les entreprises, collectivités territoriales et simples citoyens qui souhaiteront également s’investir à son profit.
A. Améliorer la visibilité du bleuet de france
Pour que les Français s’approprient de nouveau le Bleuet de France, il convient d’assurer sa visibilité. Au-delà de la fleur, c’est la diffusion des valeurs civiques et morales attachées au Bleuet de France et l’hommage rendu aux militaires morts pour la France, aux militaires blessés, aux victimes d’actes de terrorisme et aux pupilles de la Nation qui importe.
La diffusion du Bleuet de France passe par plusieurs actions : un rassemblement de l’ensemble du monde combattant et des victimes de guerre autour du même symbole, une meilleure visibilité médiatique de l’insigne, régulière et large, une modernisation du message transmis.
1. La mobilisation du monde combattant et des victimes de guerre
De l’aveu général, le monde combattant dans son ensemble est fortement mobilisé autour du Bleuet de France. Associations d’anciens combattants et de mémoire – notamment le Souvenir français – auditeurs de l’Institut des hautes études de la défense nationale (IHEDN), réservistes, nombreux sont les acteurs du monde combattant participant régulièrement aux opérations de collecte au profit du Bleuet.
Ainsi, le collège du Bleuet de France, émanation du conseil d’administration de l’ONAC-VG, compte des représentants de tous les bénéficiaires du Bleuet de France, y compris donc des représentants de la quatrième génération du feu. Ensuite, le Bleuet de France contribue financièrement à des actions en faveur des militaires actuellement déployés en opération – comme dans le cadre de l’opération « Colis de Noël » montée avec l’association Solidarité défense, qui a permis la constitution de 11 500 colis adressés à des militaires en OPEX. Enfin, les militaires participent grandement aux opérations de collecte en faveur du Bleuet de France.
Cela ne semble néanmoins pas suffisant.
Pour donner un élan au Bleuet de France, il faut que l’ensemble du monde combattant se rassemble sous sa bannière. Les associations représentatives des Anciens combattants comme les associations de mémoire font déjà beaucoup, votre rapporteur pour avis le sait bien. Néanmoins, elles sont fort nombreuses et conduisent souvent leurs propres opérations de collecte. Il en va de même s’agissant des associations d’entraide comme Solidarité défense ou propres à chaque armée, qui développent leurs propres actions de solidarité (Terre Fraternité, les Ailes brisées, Association pour le Développement des Œuvres Sociales de la marine, Fondation des œuvres sociales de l’air, etc.).
Il en ressort parfois une dispersion des messages, dont découle une dilution des fonds collectés. Certaines associations récoltent un montant considérable de fonds tandis que d’autres périclitent. Il semble temps de réunir l’ensemble des acteurs autour du Bleuet, qui constitue un formidable symbole, unique, ancré dans l’histoire et s’adressant tant aux anciens combattants qu’aux militaires d’active, aux victimes d’actes de terrorisme et aux pupilles de la Nation.
Dans un premier temps, il pourrait être envisagé d’associer tous les présidents de ces différentes associations au collège du Bleuet de France, afin de leur permettre de développer davantage de cofinancements pour certaines actions ou de mettre en place des opérations de communication croisées.
Dans un deuxième temps, il faut encore davantage concentrer les moyens et le réseau de l’ensemble de ces différentes associations au moment des périodes de collecte, afin de disposer d’une force de frappe beaucoup plus importante qu’aujourd’hui.
Dans un troisième temps, votre rapporteur pour avis en est convaincu, il pourrait être envisagé de rassembler l’ensemble des associations sous une entité unique. Alors que nombre de personnes s’interrogent sur l’organisation future du monde combattant, un regroupement de toutes les associations au sein d’une structure du Bleuet de France, qui pourrait prendre la forme d’une association ou d’une fondation, présenterait plusieurs intérêts. D’abord, chaque association conserverait son identité propre, puisqu’il ne s’agirait évidemment pas de les dissoudre mais bien de les intégrer au sein d’une sorte de fédération. Ensuite, cette organisation permettrait de mutualiser les moyens de communication, les réseaux territoriaux comme les ressources humaines au moment des collectes. Enfin, une telle évolution garantirait à l’ensemble des associations du monde combattant une levée de fonds plus importante, leur permettant toujours d’orienter, selon des mécanismes à déterminer, les aides vers leurs ressortissants. C’est cette logique qui a conduit à la constitution de la Royal British Legion au Royaume-Uni, avec le succès que l’on connaît.
2. La visibilité médiatique de l’insigne
Plusieurs types d’actions peuvent être envisagés.
a. Une refonte de la gouvernance du Bleuet de France
Il pourrait être envisagé de profiter d’une refonte de la gouvernance pour associer des personnalités médiatiques au cercle des ambassadeurs du Bleuet de France. En effet, le Bleuet de France peut compter sur la mobilisation de certains de ses ressortissants, pleinement investis dans la médiatisation autour du Bleuet de France. Ce réseau d’ambassadeurs est essentiel mais pourrait gagner à être conforté, selon deux modalités :
– adjoindre aux ambassadeurs « naturels » du Bleuet de France, des personnalités médiatiques (sportifs, journalistes, animateurs, etc.) qui accepteraient de porter l’insigne lors des périodes de collecte ou lors de leurs apparitions télévisées ;
– nommer un ambassadeur exceptionnel annuel, qui s’engagerait auprès du Bleuet de France durant une année. Cet engagement supposerait de rencontrer quelques ressortissants du Bleuet de France, d’assister à certaines commémorations, de porter l’insigne et d’assurer sa diffusion. Cette personnalité pourrait se voir remettre en début d’année un objet symbolisant le Bleuet de France, qu’elle transmettrait à son successeur sa mission effectuée.
b. La poursuite des partenariats avec des groupes médiatiques
Pour l’heure, des actions ont été réalisées de manière ponctuelle, au gré des soutiens de certains journalistes ou animateurs. Ces actions ont permis d’assurer une visibilité certaine au Bleuet de France, et ainsi d’accroître le montant des dons par « à-coups ». Il convient aujourd’hui d’aller plus loin, sur le modèle des partenariats mis en place avec des associations comme Sidaction. Pourraient ainsi être encouragés : le port par les journalistes et animateurs du Bleuet les semaines précédant le 8 mai et le 11 novembre, ou a minima le 8 mai et le 11 novembre ; la promotion du Bleuet de France lors de ces deux journées et des retransmissions de compétitions sportives associant le Bleuet de France ([7]) ; la valorisation du Bleuet de France à l’occasion de reportages dédiés ; la diffusion du symbole du Bleuet de France de manière fixe sur les écrans de télévision les 8 mai et 11 novembre.
Bien entendu, de telles initiatives supposent l’adhésion des journalistes et animateurs, dont il convient de respecter la liberté éditoriale. Votre rapporteur pour avis a reçu des représentants du groupe France Télévisions, avec lesquels l’ONBF avait déjà établi des partenariats. Dès cette année, le groupe devrait conduire des actions assurant la visibilité du Bleuet de France, notamment à l’occasion de la journée du 11 novembre, qui verra la diffusion du match de rugby opposant le XV de France aux All Blacks. Le port du Bleuet sera ainsi proposé aux journalistes intervenant en plateau lors de la matinale, tandis que la diffusion du match le soir permettra de souligne l’action du Bleuet de France. Une telle décision est à saluer, et votre rapporteur pour avis tient d’ailleurs à remercier ses interlocuteurs pour leur écoute et leurs propositions. La réalisation de clips vidéos destinées à être diffusées sur les chaînes de télévision, avec l’appui du syndicat national de la publicité télévisée, constitue ainsi une piste intéressante. Il a d’ailleurs été porté à l’attention de votre rapporteur pour avis que plusieurs acteurs et actrices sont prêts à contribuer à la réalisation de tels clips, permettant ainsi de toucher une part importante de la population.
Pourrait également être envisagé l’instauration de partenariat avec des sociétés de production, dont certaines émissions ou jeux télévisés pourraient être dédiées au Bleuet de France.
De telles initiatives doivent bien sûr être encouragées, confortées et généralisées au cours des années suivantes.
c. La poursuite des partenariats avec le monde du sport
De nombreuses actions ont déjà été menées par le passé.
Ainsi, la Fédération française de rugby s’est associée au Bleuet de France à compter de l’année 2014, les joueurs du XV de France portant le Bleuet floqué sur l’épaule droite des maillots. Votre rapporteur pour avis se réjouit que ce partenariat ait été reconduit pour les années à venir. De plus, depuis 2012, plusieurs clubs de rugby portent le Bleuet de France à l’occasion des commémorations du 11 novembre. L’Union Bordeaux-Bègles, le Biarritz‑Olympique-Pays-Basque, le SU Agenais, l’US Dax et le Stade Montois Rugby participent à la promotion du Bleuet. Dès 2013, certains des adversaires qui affrontaient ces cinq équipes ont accepté de s’associer à ce travail de mémoire. Ainsi le bleuet a pu se voir sur les maillots du Racing Métro 92, du RC Toulon, de ASM Clermont Auvergne ou encore de l’US Carcassonne.
La Fédération française de football (FFF) a également soutenu le Bleuet de France au cours des années précédentes, les joueurs de l’équipe masculine ayant porté le Bleuet lors des hymnes nationaux à plusieurs reprises en novembre 2014 et en novembre 2016 notamment, tandis que le personnel d’encadrement a porté l’insigne durant tout le match. En novembre 2014, une charte a été signée entre le ministère de la Défense et la FFF pour favoriser l’insertion des soldats blessés par le football.
Un partenariat fructueux avait également été noué avec la Ligue de football professionnel. En 2013, plusieurs clubs ont porté le Bleuet de France (Montpellier HSC, Stade Rennais FC, Stade Malherbe Caen, AS Saint-Étienne, FC Lorient, Le Havre AC et l’AS Nancy-Lorraine). En 2014, grâce à ces clubs pionniers et en particulier Montpellier, Rennes et Caen, la Ligue de football professionnel a inscrit la promotion du Bleuet de France au programme officiel des sensibilisations des journées de championnat de Ligue 1 et de Ligue 2. C’est ce qui a conduit les 40 clubs professionnels à porter le Bleuet de France sur leurs maillots en novembre 2014. Ces sensibilisations ont été accompagnées de nombreux événements dans plusieurs stades de France : collectes, des coups d’envoi fictifs, mais aussi des stands d’information et des relais publicitaires sur les outils des stades ont été diffusés. L’opération a été rééditée en 2015 pour les clubs professionnels français. À chaque fois, les journalistes et les encadrants des clubs portaient eux aussi le Bleuet de France. Malheureusement, ce partenariat n’a pas été reconduit par la suite.
En cyclisme, l’équipe professionnelle de la FDJ a porté le Bleuet de France durant la saison 2014. La Loterie nationale, ancêtre de la FDJ, avait en effet été créée en 1933 par l’État et l’association des « Gueules cassées » pour venir en aide aux blessés de la guerre 14-18 et aux calamités agricoles.
D’autres initiatives ont par ailleurs été menées avec des clubs de basketball, de hockey-sur-glace et de football américain.
Il est indispensable de nouer d’autres partenariats avec d’autres fédérations sportives – basketball, ski, handball et l’ensemble des disciplines olympiques notamment. La Fédération française de ski constitue un cas spécifique car nombre d’athlètes sont par ailleurs militaires (Martin Fourcade, Anaïs Bescond, Tessa Worley).
Plusieurs actions pourraient être conduites comme le port de l’insigne sur les maillots ou sur les tenues d’entraînement, ou la réalisation de coups d’envoi symbolique des matchs par un bénéficiaire du Bleuet de France.
De plus, l’ONBF a établi une relation particulière avec le Centre national des sports de la Défense, qui constitue un lien naturel entre le monde du sport et les armées. Le Bleuet a notamment accompagné de nombreux militaires blessés qui se sont reconstruits par le sport, et ont pu participer aux Jeux paralympiques ou aux Invictus games. La délégation française a d’ailleurs porté le Bleuet lors de la dernière édition de ces jeux, organisée à Toronto en septembre 2017. Dans ce cadre, le Bleuet doit miser encore davantage sur l’armée des champions.
d. Le soutien des collectivités publiques et du monde politique
Dès sa prise de fonction, le nouveau président de la République a arboré le Bleuet de France lors des cérémonies du 8 mai. Il convient à ce titre de noter que les prédécesseurs de M. Emmanuel Macron, les présidents François Hollande et Nicolas Sarkozy, portaient régulièrement un bleuet lors des cérémonies auxquelles ils participaient. Chacun se souvient ainsi de la commémoration de la bataille de Vimy, le 9 avril dernier, au cours de laquelle le président Hollande portait bleuet et poppy, le Premier ministre canadien, M. Justin Trudeau, ainsi que les princes du Royaume-Uni Charles, William et Harry, portant quant à eux le seul poppy.
Le soutien du président de la République est essentiel pour assurer la visibilité et la légitimité du Bleuet de France.
Par ailleurs, les membres du Gouvernement et les parlementaires doivent être des ambassadeurs naturels du Bleuet de France et porter l’insigne au moment de la campagne de novembre.
Enfin, la diffusion du Bleuet de France doit pouvoir compter sur la mobilisation des collectivités territoriales. La mairie de Paris est attentive à la promotion du Bleuet de France et il convient de se réjouir de l’engagement dont elle fait preuve en vue du 11 novembre 2018. En effet, votre rapporteur pour avis a été informé de la décision de Mme Anne Hidalgo, maire de Paris, d’organiser un événement majeur en novembre 2018, avec la couverture du Parvis de l’Hôtel de ville de bleuets éphémères. Un tel événement, qui n’est pas sans rappeler le Poppy memorial réalisé en 2014 à Londres, qui avait vu 888 246 coquelicots de céramiques plantés au pied de la Tour de Londres, en hommage aux morts britanniques durant la Première Guerre mondiale.
D’autres actions pourraient également être facilement mises en œuvre, comme l’illumination des monuments parisiens en bleu le 11 novembre – à ce titre, l’Assemblée nationale devrait montrer l’exemple. Plus largement, les régions, départements, métropoles et communes doivent faire davantage au profit du bleuet de France : organisation d’événements de promotion et de collecte au profit du Bleuet de France, actions de communication au moment des commémorations, facilitation des opérations de collecte.
e. L’établissement de partenariats avec de grands groupes français
À l’instar des actions entreprises outre-Manche, les grands groupes français pourraient être associés à la promotion du Bleuet de France. Votre rapporteur a ainsi rencontré des représentants de la RATP, de la SNCF comme du groupe La Poste. Il convient de souligner que ces entreprises ont pour la plupart déjà conduit des actions au profit du Bleuet de France, par la réalisation de timbres par exemple, ou la mise à disposition d’espaces publicitaires.
Exemples de timbres réalisés par La Poste
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