Compte rendu
Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire
– Examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2023 (n° 273) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général). 2
– présences en réunion...........................34
Mardi
4 octobre 2022
Séance de 21 heures 15
Compte rendu n° 03
session ordinaire de 2022-2023
Présidence de
M. Éric Coquerel,
Président
— 1 —
La commission examine la première partie du projet de loi de finances pour 2023 (n° 273) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)
M. le président Éric Coquerel. Nous entamons l’examen des articles de la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2023. Sur les 1 486 amendements déposés, 1 170 sont à discuter, une fois enlevés les amendements irrecevables et ceux retirés avant discussion.
Le taux d’irrecevabilité, de 16 %, peut sembler élevé. Il l’est cependant significativement moins que les années passées, où il oscillait entre 21 % et 24 %. Je l’assume pleinement, ayant souhaité favoriser l’initiative parlementaire, tout en gardant la logique du contrôle de la recevabilité financière.
Ainsi, dans le cas d’amendements visant à instituer une nouvelle recette publique, j’ai considéré qu’une recette qualifiée de « redevance » ne constitue pas la preuve indubitable qu’elle n’est pas fiscale. De la sorte, l’amendement est recevable alors qu’il ne le serait pas s’il s’agissait d’une vraie redevance pour service rendu.
J’ai également considéré qu’un amendement augmentant le barème de l’amende pour non-respect de l’encadrement des loyers était une disposition non pas répressive mais de « rendement », ce que pouvait suggérer le changement proposé du bénéficiaire du produit de ces amendes.
Enfin, les amendements comprenant à la fois une partie de dispositif opérante et une autre inopérante ont été « sauvés » pour permettre de discuter la partie opérante.
De façon générale, la nouvelle architecture de la première partie du projet de loi de finances a été comprise, et les amendements fiscaux qui auraient auparavant dû être déposés en seconde partie l’ont bien été en première partie. Restent toutefois quelques erreurs de lecture de la réforme organique du 28 décembre 2021.
Les demandes de rapport au Gouvernement constituent la première d’entre elles : elles doivent toujours faire l’objet d’amendements déposés en seconde partie puisqu’il s’agit de dispositions relatives à l’information du Parlement sur les finances publiques, y compris s’il s’agit de rapports portant sur des mesures fiscales. Peuvent seules être déposées en première partie, les demandes de rapport se rattachant à un article introduisant des dispositions fiscales nouvelles.
Deuxième erreur, le dépôt en première partie d’amendements relatifs à des dispositifs de péréquation horizontale entre collectivités, de répartition des concours de l’État à ces collectivités ou de répartition de recettes fiscales entre collectivités sans modification des caractéristiques d’assiette et de taux de cette fiscalité. La nouvelle rédaction de l’article 34 de la loi organique relative aux finances publiques (Lolf) confirme que de telles dispositions conservent leur place en seconde partie. Ont été notamment concernés des amendements relatifs au partage des ressources tirées de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau (Ifer) entre les collectivités, au partage des fractions de taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA) affectées aux collectivités et aux services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) ou au partage des ressources entre la métropole du Grand Paris et les établissements publics territoriaux.
Les amendements ayant trait à des demandes de rapport ou à des dispositions concernant les collectivités, qui ne modifient pas la fiscalité locale ou les prélèvements sur recettes à leur profit, pourront être redéposés pour l’examen de la seconde partie. Soixante-quinze amendements irrecevables en première partie pourront ainsi trouver leur place en seconde partie, généralement sans avoir à être modifiés.
Une dernière erreur liée aux récentes réformes organiques concerne les amendements proposant d’instituer ou de prolonger des dispositifs d’exonération de cotisations et de contributions sociales. La réforme de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS) interdit que de tels dispositifs puissent désormais être institués, en dehors des lois de financement de la sécurité sociale, pour une durée supérieure à trois ans. Quelques amendements qui omettaient un tel bornage du dispositif qu’ils proposaient ont dû être déclarés irrecevables, mais il s’agit, là encore, d’une erreur aisément rectifiable d’ici à la séance publique.
Une autre catégorie d’erreurs nouvelles résulte de l’abrogation par une ordonnance du 21 décembre 2021 d’un certain nombre d’articles du code général des impôts et du code des douanes, recodifiés dans le nouveau code des impositions sur les biens et services, en vigueur depuis le 1er janvier 2022 – ce qui explique que les fameux gages tabacs et alcools ont dû être modifiés pour y faire référence. Plusieurs amendements ont néanmoins porté sur les articles en question : inopérants, ils ne pouvaient être mis en discussion. Leurs auteurs pourront, s’ils le souhaitent, les rectifier en vue de la séance.
J’ai également dû déclarer irrecevables des amendements qui n’étaient pas gagés. Leurs auteurs pourront les redéposer, assortis du bon gage, en vue de la séance publique. Sont concernés soixante amendements, certains relatifs au plafonnement de la hausse des bases des impôts locaux ou à la décorrélation des taux de taxe foncière et de taxe d’habitation sur les résidences secondaires, d’autres proposant de modifier les plafonds des taxes affectées.
Ne pourront, en revanche, bénéficier d’une seconde chance les vingt-neuf « cavaliers budgétaires » qui n’avaient aucun lien avec les lois de finances. Entrent dans cette catégorie des amendements relatifs à l’utilisation des tickets restaurant qui n’ont pas d’incidence sur l’avantage fiscal qui l’accompagne, ou des amendements relatifs au tarif des péages, qui n’abondent pas les comptes publics, ainsi que quelques amendements qui auraient pu ou dû trouver leur place dans le projet de loi de programmation des finances publiques.
Enfin, quelques amendements se sont heurtés à la jurisprudence habituelle, qui n’est pas propre aux lois de finances, de l’article 40 de la Constitution, à savoir l’impossibilité d’augmenter une charge publique. Il en va ainsi des amendements qui visent à instaurer une dotation budgétaire de l’État au profit de l’Agence de la transition écologique (Ademe), ou de ceux qui tendent à supprimer la modulation des allocations familiales en fonction du revenu, puisqu’ils accroîtraient les dépenses de prestations sociales. Il en va de même des amendements proposant d’étendre le bouclier tarifaire applicable aux plus petites collectivités, du fait de la compensation budgétaire en résultant, pour indemniser les fournisseurs d’électricité, ou encore des amendements qui visaient à élargir le public pouvant bénéficier du dispositif d’indemnisation de l’activité partielle, du fait du coût de celle-ci pour l’État comme pour l’Unedic. Seuls trente-deux amendements tendant à accroître une charge publique ont ainsi été déclarés irrecevables.
Sur les 240 amendements irrecevables, 166 pourraient donc être corrigés, soit en ajoutant un gage, soit en les déposant en seconde partie ou sur un autre texte, soit en visant une disposition non abrogée ou en bornant une exonération d’allégement social, de telle sorte qu’ils seraient discutés lors des discussions budgétaires de l’automne. Cela diminuerait d’autant le taux d’irrecevabilité.
S’agissant de l’organisation des travaux de notre commission, il semble possible de tenir les délais impartis, si chacun fait preuve, dès le début de la discussion, du respect des temps de présentation des amendements et s’attache à éviter les redondances lorsque des amendements identiques sont présentés. Hormis sur certains amendements qui font débat, je vous propose de limiter le temps de défense de l’amendement à une minute puis d’accepter une prise de parole pour et une contre.
Article liminaire : Prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques de l’année 2023, prévisions d’exécution 2022 et exécution 2021
Amendements I-CF234 de M. Charles de Courson, I-CF66 et I-CF67 de Mme Marie-Christine Dalloz (discussion commune).
M. Charles de Courson (LIOT). L’amendement I-CF234 tend à diminuer la prévision de solde structurel à moins 3,8 % du PIB, au lieu de moins 4 %, en réduisant la dépense publique. C’est une différence de 0,4 point par rapport à 2022, soit 10 milliards d’efforts. On n’arrivera pas à atteindre un solde structurel de moins 3 % en 2027 en ne le diminuant que de 0,2 point d’une année sur l’autre.
Mme Marie-Christine Dalloz (LR). L’amendement I-CF67, qui tend à modifier le solde structurel de moins 5 % à moins 2 % du PIB, est un amendement d’appel.
L’amendement I-CF66 vise à réaliser un effort supplémentaire de 0,2 point de PIB, de moins 4 % à moins 3,8 % du PIB. Le Haut Conseil des finances publiques estime que les mesures macroéconomiques du périmètre du budget sont peu crédibles : j’essaie de rendre crédible votre posture budgétaire.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le solde structurel est le résultat d’un calcul complexe incluant notamment le PIB potentiel et les PIB et soldes effectifs, il ne se décrète pas. Comme vous, nous n’avons qu’une envie, c’est de le diminuer. Nous l’avions d’ailleurs réduit en 2019, à moins 1,1 %. Le contexte, particulièrement difficile, nous oblige, hélas, à avoir une trajectoire plus douce que nous le souhaiterions.
Avis défavorable.
Mme Marie-Christine Dalloz (LR). On ne décrète pas le solde structurel, certes, mais on arrive à le réduire si l’on s’en donne les moyens – vous l’avez d’ailleurs fait, avez-vous dit, en 2019. Je ne comprends pas pourquoi aucune réforme de structure n’apparaît dans ce budget : c’est ce que la Commission européenne jugera.
M. Daniel Labaronne (RE). Pour ma part, ce qui m’étonne c’est que ces amendements ne définissent pas le PIB potentiel, puisque le solde structurel dépend de l’écart de production, donc de la différence entre le PIB effectif et le PIB potentiel.
La commission rejette successivement les amendements I-CF234, I-CF66 et I-CF67.
Amendements I-CF232 de M. Charles de Courson et I-CF68 de Mme Marie-Christine Dalloz (discussion commune).
M. Charles de Courson (LIOT). Selon le Haut Conseil des finances publiques, la dépense publique n’évolue pas en volume de moins 1,5 % mais augmente de 0,7 %. Cette différence s’explique pour 0,6 point par la référence du Gouvernement à l’indice des prix à la consommation hors tabac quand le HCFP se fonde sur l’indice des prix implicites du PIB. En outre, le Gouvernement inclut dans ses calculs des dépenses non reconductibles, liées notamment aux différentes crises que nous avons subies.
Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Tous les ans, on répète que la soutenabilité à moyen terme de nos finances publiques posera des difficultés – surtout avec la perspective d’une remontée des taux d’intérêt. La Commission européenne s’attachera avant tout aux résultats de 2022 et aux perspectives budgétaires pour 2023. Si l’on veut donner une vraie dynamique et que la France ne soit pas pénalisée pour déficit excessif, il faut travailler à la fois sur le solde structurel, avec des réformes structurelles, et sur le niveau de la dépense.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Dois-je déduire de vos amendements que vous ne soutiendrez pas ceux qui comportent des augmentations de dépenses ? J’ai vu qu’ils étaient nombreux émanant de vos groupes, contrairement aux amendements visant des recettes supplémentaires.
Le chiffre repris est celui défini par la LOLF – d’autres sont possibles. L’indicateur choisi par le HCFP est juste mais il se calcule hors dépenses exceptionnelles en 2022. De plus, il fait référence au volume des dépenses déflaté par les prix du PIB, qui est un indicateur plus sophistiqué que l’indice des prix à la consommation (IPC). Si on utilise l’IPC sur le périmètre hors dépenses exceptionnelles, on est plutôt à zéro de croissance en volume.
Avis défavorable.
M. Charles de Courson (LIOT). Vous reconnaissez donc que l’indice des prix à la consommation hors tabac n’est pas significatif.
Selon le Haut Conseil, l’écart de 2,2 points s’explique pour au moins 0,6 point. Pour vous, l’erreur serait même de 1,5 point, puisque la croissance serait de zéro en volume. Je vois pourtant mal comment on atteindrait moins 1,5 % en volume alors que tout est prioritaire dans le budget et que la quasi-totalité des missions augmente. Quod erat demonstrandum.
C’est une erreur de dissimuler la dure réalité : la croissance des dépenses publiques est très supérieure à ce qu’annonce le Gouvernement.
La commission rejette successivement les amendements I-CF232 et I-CF68.
Amendement I-CF210 de Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie (LR). Le groupe Les Républicains propose bel et bien des diminutions de dépenses. Celles-ci passent notamment par un plan de sobriété bureaucratique. L’action publique peut être plus efficace et moins coûteuse, avec à la clé des économies substantielles obtenues de manière rationnelle et indolore pour la population : il s’agit de s’attaquer notamment à la bureaucratie ou « suradministration », qui coûte à notre pays 84 milliards de plus que dans les autres pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Monsieur de Courson, je ne cherche pas à cacher quoi que ce soit : nous avons pris la définition de la LOLF, et nous la respectons.
Quant à l’amendement, il vise en effet à économiser 20 milliards, selon un plan assez peu documenté, mais votre groupe en a déposé des centaines d’autres qui augmentent la dépense fiscale. Nous partageons l’objectif de réduire la dette ; mais il faut le faire de manière cohérente.
En 2023, comme en 2022, le Gouvernement a fait le choix de maîtriser le taux de prélèvements obligatoires, tout en prenant des mesures de dépenses pour protéger les entreprises et les ménages. Le budget est le résultat d’un équilibre, qui n’est peut-être pas tout à fait satisfaisant, mais c’est ce que l’on peut faire de mieux dans le contexte international que nous connaissons.
Avis défavorable.
M. Charles de Courson (LIOT). La ligne « principales dépenses d’investissement (en milliards d’euros) » résulte d’un amendement que j’avais fait adopter. Des 500 milliards que l’État dépense, il ne reste que 5 % d’investissement, soit 25 milliards.
M. Fabien Di Filippo (LR). S’il y a une leçon à tirer des trois dernières années, c’est bien que le « en même temps » a échoué, notamment en matière budgétaire, encore plus que le fameux « quoi qu’il en coûte ». Demain, on veut tous plus d’enseignants, de soignants, des carrières revalorisées. Si l’on veut en avoir les moyens, il faut être conscient des choix drastiques à opérer au sein de nos administrations, notamment dans les agences plus ou moins indépendantes qui gravitent autour des structures publiques ou dans les comités, plus ou moins utiles, que le président Macron, avec l’appui de la majorité, a multiplié durant son quinquennat, avec un résultat souvent inexistant. Si l’on ne s’y attaque pas, la dépense publique continuera de dériver alors que les agents seront de moins en moins bien payés et s’orienteront vers d’autres carrières.
M. Charles Sitzenstuhl (RE). On voit que nous allons assister à un concours de démagogie de la part des oppositions au sujet de la dépense publique. L’amendement est bavard et ne contient rien de concret. Certes, nous en partageons certains objectifs : lors de la LPFP, nous avons voté certains amendements concernant les agences. Au-delà, comment réaliser ces 20 milliards d’économies ? Il serait bon de préciser dans quelles missions, et ce que l’on réduira.
Un peu d’humilité, chers collègues : c’est bien sous le gouvernement de François Fillon et la présidence de Nicolas Sarkozy, à l’époque de l’Union pour un mouvement populaire (UMP), que la procédure pour déficit excessif a été engagée à l’encontre de la France.
La commission rejette l’amendement I-CF210.
Elle rejette l’article liminaire (amendement I-3189).
PREMIÈRE PARTIE : CONDITIONS GÉNÉRALES
DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE PREMIER : DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I - IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS
A – Autorisation de perception des impôts et produits
Article 1er : Autorisation de percevoir les impôts existants
La commission adopte l’article 1er non modifié.
Article 2 : Indexation sur l’inflation du barème de l’impôt sur le revenu pour les revenus de 2022 et des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source
Amendement I-CF1 de M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson (LIOT). L’amendement vise à moduler la revalorisation des tranches du barème de l’impôt sur le revenu, entre 4,4 % et 6,4 %, avec une moyenne à 5,4 %, en réévaluant davantage les tranches les plus basses, et moins les tranches les plus hautes. Le Gouvernement propose une réévaluation uniforme, de 5,4 % soit, en masse, l’augmentation de l’indice des prix hors tabac que nous connaîtrons en 2022. L’Insee a toutefois montré que l’impact de l’inflation n’est pas homogène : il est plus faible sur les hauts revenus, car la part de la consommation d’énergie et des frais alimentaires décroît en fonction du revenu.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’article 2 prévoit une mesure d’augmentation du pouvoir d’achat de l’ensemble des Français qui paient l’impôt sur le revenu. Lors de la précédente législature, nous avons accordé 5 milliards de baisses d’impôt aux tranches basses de l’impôt sur le revenu – certains foyers en sont d’ailleurs sortis. Une imposition additionnelle de 4 % sur les plus hauts revenus est par ailleurs prévue.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous soutiendrons cet excellent amendement, qui permet de compenser la faiblesse des salaires réels en cette période d’inflation. C’est un coup de pouce très intelligent.
S’agissant de l’amendement I-CF210, effectivement, les oppositions proposent des dépenses, et doivent trouver des recettes. Mais je ne comprends pas pourquoi vous rejetez l’amendement et refusez de nous prendre au mot. Travaillons ensemble pour dire quelles dépenses nous voulons couper, en particulier les dépenses stériles que Les Républicains ont évoquées : que chacun assume ses responsabilités ! En rejetant de telles propositions, vous restez seul, et dans une situation difficile.
Mme Christine Pires Beaune (SOC). Nos amendements à l’article 2 ont tous pour objet soit de rendre plus progressif l’impôt sur le revenu, soit de faire bénéficier les gens les plus modestes, qui entrent dans l’impôt sur le revenu, d’une revalorisation par rapport à l’inflation supérieure à celle de la dernière tranche.
Nous soutiendrons l’amendement I-CF1.
M. Mathieu Lefèvre (RE). Par ces amendements, vous rejoignez la majorité, qui propose une baisse massive de l’impôt sur le revenu en revalorisant son barème à hauteur de l’inflation, laquelle a été supérieure à l’évolution des salaires. Pour une personne touchant le Smic, cela représente 300 euros d’impôt en moins. Je rappelle que la majorité de François Fillon et celle de Jean-Marc Ayrault avaient gelé le barème de l’impôt sur le revenu en 2012 et 2013.
M. le président Éric Coquerel. Si les salaires étaient indexés sur l’inflation, l’État n’y perdrait pas et les salariés y gagneraient.
La commission adopte l’amendement I-CF1 (amendement I-3121) et l’article 2 ainsi modifié.
En conséquence, les amendements I-CF1167, I-CF488, I-CF1135, I-CF1179, I-CF58, I-CF579, I-CF 283, I-CF 69, I-CF217, I-CF293, I-CF569, I-CF34, I-CF589, I-CF846, I-CF989 tombent.
Article 3 : Aménagement du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu
La commission adopte l’article 3 non modifié.
Après l’article 3 :
Amendement I-CF1164 de M. Éric Coquerel.
Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il s’agit d’instaurer un impôt universel ciblé sur les paradis fiscaux, par le biais d’un mécanisme de fiscalité limitée étendue, qui existe déjà dans plusieurs pays européens. Une telle disposition permettrait de lutter contre l’exil fiscal, pour qu’un simple changement de résidence fiscale n’abolisse pas l’équité face à l’impôt et le droit à taxer de la France.
L’amendement introduit dans le code général des impôts un principe général d’imposition en fonction de la nationalité ou d’une durée de résidence en France significative, qui aurait vocation à s’appliquer à tous les impôts portant sur les revenus des personnes, y compris lorsqu’ils sont perçus dans un autre pays que la France, ce qui en ferait un impôt universel. Le dispositif cible les pays dont les taux d’imposition sur les revenus du travail, du capital ou du patrimoine sont inférieurs de plus de 50 % à ceux de la France.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne suis pas certain que vous ayez défendu le bon amendement, chère collègue. L’amendement qui est en discussion soumet à l’impôt sur le revenu (IR) pendant dix ans les Français qui ont vécu en France pendant trois années au cours des dix qui ont précédé leur changement de résidence vers un pays à faible imposition.
Notre régime fiscal est basé sur la domiciliation et non la nationalité. Vous instaurez une imposition fondée sur la nationalité, mais pour une durée limitée. Je ne suis pas certain que cette mesure s’appliquerait seulement aux expatriations dans les douze États non coopératifs. Le dispositif n’est pas conforme aux conventions internationales que nous avons ratifiées. Je crains, en outre, des effets de bord pour les contribuables expatriés qui souhaitent changer de vie.
M. le président Éric Coquerel. Cet amendement est inspiré de l’excellent rapport de la mission d’information relative à l’impôt universel, rédigé par notre collègue Mattei et moi-même.
L’amendement ne transforme pas un impôt fondé sur la résidence en France en impôt fondé sur la nationalité. Il reprend une idée appliquée par de nombreux autres États, y compris européens, qui consiste à dire que lorsqu’un contribuable disposant d’un certain niveau de revenu s’installe dans un État à la fiscalité avantageuse, il est tenu pendant quelques années de payer dans le pays d’origine un impôt compensant la différence de fiscalité. Cela implique certes de renégocier certaines conventions fiscales, mais avec un nombre limité d’États.
La commission rejette l’amendement I-CF1164.
Amendement I-CF1405 de M. Mathieu Lefèvre.
M. Mathieu Lefèvre (RE). Cet amendement traduit une des promesses figurant dans le programme du candidat Emmanuel Macron. Il s’agit de permettre aux personnes qui vivent en concubinage de faire une déclaration commune de revenus et de bénéficier des mêmes avantages fiscaux que les personnes mariées ou pacsées.
Je le dis d’emblée, l’amendement n’est pas parfait du point de vue rédactionnel et il prévoit une entrée en vigueur à compter de 2024. Néanmoins, il est important pour les membres du groupe Renaissance de souligner leur attachement à cette mesure.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet amendement présente une difficulté au regard de l’égalité, puisque les concubins disposeraient d’une option alors que les personnes mariées et ou pacsées ont l’obligation de faire une déclaration commune.
Ensuite, il fait fi du principe de solidarité fiscale qui implique que les époux ou partenaires d’un pacs sont solidaires de la dette liée aux impositions communes à l’IR. Le pacs et, surtout, le mariage ont des conséquences en termes de protection des personnes, avec des obligations d’assistance et d’aide mutuelle. Tel n’est pas le cas du concubinage.
Je crains le risque de fraude et le dispositif proposé coûte assez cher. On ne peut pas l’adopter, par cohérence avec notre discours sur l’état des finances publiques en 2023.
Ce sujet important mérite d’être étudié, peut-être dans le cadre d’une mission d’information ou d’un groupe de travail.
Demande de retrait.
M. Mathieu Lefèvre (RE). Je souscris aux arguments du rapporteur général, mais les obstacles techniques peuvent être surmontés à court ou à moyen terme. L’amendement propose une entrée en vigueur en 2024 ; cela pourrait être en 2025. Je retire l’amendement et je le déposerai en séance publique, pour que le Gouvernement nous fasse part des difficultés techniques et des moyens de les résoudre.
L’amendement I-CF1405 est retiré.
Amendement I-CF697 de M. Karim Ben Cheikh.
M. Karim Ben Cheikh (Écolo-NUPES). Il s’agit d’assimiler à une résidence principale la résidence détenue en France par des contribuables résidant en dehors de l’Union européenne (UE).
Nos compatriotes établis hors de France ont de plus en plus le sentiment de ne pas être des Français à part entière. Une politique encourageant le maintien d’un lien pérenne avec le territoire national serait un signal fort à leur envoyer.
Ils sont souvent obligés de renoncer à une résidence en France faute de moyens suffisants. C’est donc dans un souci de plus grande justice sociale entre Français que nous formulons cette proposition. Pour un Français établi hors de France, disposer d’une résidence en France veut dire beaucoup. C’est aussi le droit d’avoir accès à un compte bancaire sans entrave, à un crédit ou encore d’obtenir des places à l’école pour ses enfants en cas de retour urgent sur le territoire national.
J’espère qu’une majorité sera favorable à cet amendement qui vise enfin à mieux prendre en compte les trois millions de Français établis hors de France.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis un peu surpris par votre amendement, qui inciterait les non-résidents à conserver des logements vacants en France. Cela ne correspond pas à notre volonté de lutter contre cette vacance, et donc contre l’artificialisation des sols. L’amendement conduirait à une perte de recettes fiscales et le dispositif ne prévoit pas de distinction en fonction de l’éloignement du pays de résidence.
Avis défavorable.
M. Charles de Courson (LIOT). Cet amendement présente l’inconvénient d’exonérer de taxe d’habitation les détenteurs de ces logements, qui sont considérés comme des résidences secondaires s’ils ne sont pas occupés. En outre, si ces personnes vendent leur bien, elles ne paieront aucun impôt sur les plus-values. Quel est le coût de cette mesure ?
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’amendement entraîne des pertes de recettes, mais leur montant n’est pas connu en l’absence d’étude d’impact.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Cette question est souvent soulevée par les Français établis à l’étranger, qui ont besoin de maintenir un lien avec le territoire national, notamment s’ils sont obligés de revenir. La question mérite d’être étudiée – en particulier pour favoriser la mobilité – mais il faudrait encadrer le dispositif en prévoyant une durée de détention. Le dispositif pourrait être amélioré d’ici à la séance publique.
La commission rejette l’amendement I-CF697.
Amendements I-CF495 de M. Nicolas Sansu et I-CF1009 de M. David Guiraud (discussion commune).
Mme Karine Lebon (GDR-NUPES). Il s’agit de mettre fin à l’avantage fiscal dont bénéficie le capital.
Depuis 2017, les baisses d’impôts ont surtout concerné les impôts des riches, avec notamment la suppression de l’imposition au barème de l’IR des revenus du capital, remplacée par une imposition à taux unique – la flat tax. Celle-ci coûterait plusieurs milliards d’euros à l’État, du fait de la transformation de certains revenus en dividendes.
Cette flat tax a largement participé à l’accroissement des inégalités et son résultat est pourtant loin d’être convaincant. Les études réalisées par France Stratégie et l’Institut des politiques publiques (IPP) n’ont pas permis de démontrer un quelconque lien entre l’instauration de la flat tax et l’investissement.
M. David Guiraud (LFI-NUPES). Entre juin 2020 et juin 2021, le patrimoine des 500 Français les plus riches a augmenté de 30 %. Le prélèvement forfaitaire unique (PFU), combiné à la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), est l’un des principaux responsables de cette augmentation des inégalités.
À l’heure où la plupart des Français des classes populaires et des classes moyennes ont du mal à remplir leur frigo, il faut montrer que la question de la répartition des richesses est encore posée dans ce pays. Les plus riches doivent contribuer davantage à la solidarité nationale, ne serait-ce que pendant la crise. À défaut, le message envoyé consiste à dire aux plus pauvres de se débrouiller, tandis que les plus riches reçoivent des cadeaux fiscaux. Qu’on ne nous dise pas qu’il y a plus de rentrées fiscales grâce au PFU, parce que c’est une mauvaise nouvelle : cela souligne l’augmentation des dividendes au détriment des salaires et des investissements. C’est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer le PFU.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce que vous proposez a été fait en 2013, avec pour conséquences une hausse d’impôts et un effondrement des recettes. La mise en place du PFU a permis d’obtenir les effets inverses : baisser les taux d’imposition permet parfois de bénéficier d’une forte élasticité sur les recettes et sur l’assiette. Ce n’est peut-être pas une évidence pour tout le monde, mais les dividendes irriguent l’économie. Il faut que les entreprises en distribuent pour permettre aux épargnants de les réinvestir. C’est absolument nécessaire pour l’économie.
La flat tax s’est généralisée en Europe et l’abroger nous placerait dans une situation concurrentielle inégale. L’entreprise a déjà été taxée avant de distribuer du dividende. La flat tax est une deuxième imposition.
Les chiffres que vous avez présentés mêlent patrimoine individuel et patrimoine professionnel. Si on les distingue, on obtient des résultats très différents.
Avis défavorable.
M. Daniel Labaronne (RE). Nous débattrons des avantages de la flat tax en séance publique. Elle a permis le financement d’investissements, la relocalisation d’activités industrielles en France et le retour d’un certain nombre d’émigrés fiscaux – et ce tout en augmentant les recettes fiscales.
Mais, de grâce, qu’on ne torde pas le rapport de France Stratégie rendu dans le cadre du comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital en fonction des arguments pour ou contre le PFU. Il faut aborder avec objectivité les conclusions de ce rapport.
M. David Guiraud (LFI-NUPES). Vous évacuez un peu vite une discussion de fond : fait-on jouer les mécanismes de solidarité nationale selon lesquels chacun reçoit selon ses besoins et contribue selon ses moyens ? On peut tourner les choses dans tous les sens, mais les plus grandes fortunes ne contribuent pas à hauteur de leurs moyens, surtout dans le contexte de crise actuelle.
Je le répète, ce type de dispositif fiscal a tendance à augmenter la rémunération des actionnaires en favorisant la distribution de dividendes, au détriment des salaires et des investissements. Ce n’est ni juste socialement, ni efficace économiquement. Il faut revenir à la réalité. Certes il y a davantage de recettes, mais ce n’est pas une bonne nouvelle, car elles sont issues d’une injustice et d’un système économique inefficace.
La commission rejette successivement les amendements I-CF495 et I-CF1009.
Amendement I-CF1464 de M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). On peut discuter du taux de la flat tax, en tout cas cet impôt présente l’avantage de la simplicité.
L’amendement propose de créer un statut de l’investisseur immobilier avec application du PFU pour les revenus fonciers en contrepartie d’un engagement de location du bien immobilier pendant plus d’un an – avec un encadrement des loyers et l’exigence du respect d’un niveau de performance énergétique de catégorie D.
Il s’agit d’attirer une partie de l’épargne des Français vers l’immobilier. Le secteur public ne pourra pas tout faire en matière de logement. Les revenus fonciers sont assujettis à l’IR – avec un barème allant jusqu’à 45 % –, auquel il faut ajouter 17,2 % au titre des contributions sociales, la taxe foncière et éventuellement l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). Le dispositif proposé vise à inciter les investisseurs de manière encadrée, avec des loyers plafonnés et une exigence de respect de l’environnement.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je peux comprendre le souhait de parallélisme des formes, mais le PFU vise à alléger la fiscalité de l’épargne financière, pas à changer les règles d’imposition des revenus fonciers. Je ne suis pas certain que le PFU soit avantageux en matière de revenus locatifs, car il ne serait pas possible de déduire les charges foncières. D’autres dispositifs incitent les propriétaires à louer leur bien, comme Loc’Avantages qui permet de bénéficier de la réduction d’impôt créée par la loi de finances pour 2022.
L’amendement prévoit que le propriétaire pourrait opter pour le PFU, ce qui se traduirait par une perte de recettes pour l’État.
Demande de retrait.
M. Marc Le Fur (LR). Je crois pouvoir dire que notre groupe soutiendra cet amendement.
Il y a différents types d’investissements : dans les entreprises et dans l’immobilier. Or on constate un décalage très sensible dans leur traitement fiscal. On peut parfaitement imaginer un système similaire au PFU pour les investissements fonciers. Il faut d’autant plus le faire que les investisseurs fonciers subissent de multiples injustices par rapport aux investisseurs mobiliers, qu’il s’agisse de l’IFI ou des craintes qui concernent l’augmentation de la taxe foncière – on évoque une augmentation de 7 %, bien supérieure à l’évolution des différents revenus des propriétaires.
Il faut en finir avec l’illusion selon laquelle les propriétaires immobiliers sont nécessairement de gros propriétaires. Nous avons souvent à faire à des personnes très modestes, pour lesquels les loyers constituent un complément de revenu indispensable.
M. François Jolivet (HOR). Je voudrais dire tout le bien que je pense de cet amendement, qui ouvre un débat sur l’absence de statut de propriétaire bailleur et sur l’opportunité d’une imposition forfaitaire pour amortir l’investissement immobilier. Je suis désireux d’entendre le ministre sur ce sujet lors de la séance publique.
À titre personnel, je voterai pour cet amendement et j’espère que mes collègues du groupe Horizons feront de même.
M. Charles de Courson (LIOT). Le PFU ne concerne que les valeurs mobilières. Pourquoi les valeurs immobilières n’en bénéficient-elles pas ? Lors des débats sur l’instauration du PFU, on nous a fait valoir que l’immobilier constituait une rente. Pourtant, les obligations sont la définition même de la rente ! Je ne voterai pas pour l’amendement de notre collègue Mattei, mais il soulève un vrai problème – d’autant que l’on assiste à une chute de la construction de logements. Le dispositif proposé ne pourrait-il pas être conditionné à la construction de nouveaux logements, pour attirer des investisseurs privés ?
La commission rejette l’amendement I-CF1464.
Amendement I-CF1455 de M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Cet amendement est lié à l’apport en société par l’entrepreneur individuel.
La loi du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante protège le patrimoine personnel d’un entrepreneur individuel. Ce texte très important améliore la sécurité juridique.
En revanche, les aspects fiscaux ne sont pas définitivement réglés. Si l’entrepreneur individuel a opté pour l’imposition des bénéfices à l’impôt sur les sociétés (IS), l’article 151 octies du code général des impôts permet d’imposer les plus-values en report d’imposition. Cela peut être désavantageux car cela fige le montant dû, même lorsque l’entreprise perd de sa valeur. L’amendement vise à limiter l’imposition de la plus-value en report d’imposition au montant résultant de la compensation avec les éventuelles moins-values réalisées sur la cession des titres.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. En effet, mais si la valeur de l’entreprise augmente pendant la période de report d’imposition, l’impôt dû ne sera pas modifié.
Transformer le report en sursis signifie qu’on ne calcule la plus-value qu’une fois cédés les titres reçus en échange. Or, si la plus-value d’apport d’un fonds de commerce est toujours une plus-value professionnelle, la plus-value de cession des titres peut être imposée selon les règles qui concernent les particuliers.
De fait, l’amendement présente l’inconvénient de mélanger deux règles d’assiette, différentes selon qu’elles concernent les plus-values professionnelles ou les plus-values des particuliers.
Avis défavorable.
Mme Véronique Louwagie (LR). Il s’agit en fait d’un problème de temporalité. Dans une première période, on constate une plus-value qui n’est pas soumise à impôt car elle bénéficie d’un sursis. Ensuite, on peut constater une moins-value entre la valeur initialement retenue et la valeur de réalisation. De manière pragmatique, il faudrait pouvoir tenir compte de la valeur initiale et de la valeur finalement constatée. L’amendement permet cette compensation.
La commission rejette l’amendement I-CF1455.
Article additionnel après l’article 3 : Imposition de la rémunération des fonctions techniques des associés professions libérales dans la catégorie des traitements et salaires
Amendement I-CF101 de Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Marie-Christine Dalloz (LR). L’amendement vise à régler la question du traitement fiscal de la rémunération perçue en contrepartie de ses fonctions techniques par l’associé d’une société ayant pour objet l’exercice d’une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, et qui exerce dans cette société.
La doctrine administrative considère que la rémunération des fonctions techniques de ces associés relève de la catégorie des traitements et salaires, tandis que le Conseil d’État classe cette rémunération dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC).
Il s’agit de mettre fin à cette insécurité juridique en prévoyant que la rémunération de ces fonctions techniques soit traitée fiscalement comme des traitements et salaires.
L’amendement prévoit également l’application du dispositif aux gérants de ces sociétés, ainsi qu’à leurs gérants minoritaires. L’amendement I-CF102 qui suit est un amendement de repli, qui limite le bénéfice du dispositif aux seuls associés.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les professionnels concernés, qui ont été abondamment consultés, souhaitent une imposition au titre des BNC en raison de l’absence de lien de subordination qui lui est associée – ce qui correspond d’ailleurs à l’esprit de la loi du 31 décembre 1990.
L’article 62 du CGI est lié à la qualité de gérant et il ne saurait devenir le régime d’imposition de droit commun des professionnels indépendants, quelle que soit la forme de la société dans laquelle ils exercent et qu’ils en soient gérants ou pas.
C’est la raison pour laquelle une modernisation de la doctrine fiscale est en cours, conformément aux souhaits des professionnels.
Avis défavorable.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). On ne peut que soutenir cet amendement, car la jurisprudence est à l’origine d’une véritable insécurité juridique. Le dispositif proposé n’entraîne pas d’effet d’aubaine fiscale ou sociale. Je ne comprends pas les réticences envers cet amendement de bon sens.
La commission adopte l’amendement I-CF101 (amendement I-3122).
En conséquence, l’amendement I-CF102 de Mme Marie-Christine Dalloz tombe.
Après l’article 3 :
Amendement I-CF1226 de M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson (LIOT). L’article 12 de la loi de finances de 2022 a ajouté un nouvel alinéa à l’article 63 du CGI, qui introduit dans les bénéfices agricoles les revenus tirés des activités agricoles ayant un intérêt écosystémique.
Afin de préciser les contours de cette nouvelle rédaction, le Bulletin officiel des finances publiques (Bofip) énonce que les revenus issus de la vente de tonnes de carbone captées dans le cadre d’un projet forestier ayant reçu le Label bas-carbone sont considérés comme des bénéfices industriels et commerciaux (BIC). Cela n’est pas conforme à l’esprit de la disposition que nous avons votée et l’amendement propose d’indiquer clairement que ces revenus font partie des bénéfices agricoles. Il s’agit d’encourager la labellisation bas-carbone, qui en est à ses débuts, pour un coût dérisoire.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les revenus tirés de la coupe du bois sont soumis à trois régimes d’imposition différents. Ils sont en principe soumis au forfait forestier. Cependant, dès que le bois fait l’objet d’une transformation, ces revenus sont imposables dans la catégorie des bénéfices agricoles, voire des BIC, en fonction de la nature de la transformation.
Je ne vois pas quel est l’intérêt d’offrir une option pour le forfait forestier au détriment des bénéfices agricoles, avec un coût supplémentaire pour les finances publiques.
Avis défavorable.
M. Charles de Courson (LIOT). Je crains que le rapporteur général n’ait pas bien compris mon amendement. La modification de l’article 63 que nous avons votée conduit à considérer les revenus tirés des activités agricoles ayant un intérêt écosystémique comme une prolongation de l’activité agricole. Les traiter comme des BIC est infondé et rend plus compliquées les déclarations de revenus.
La commission rejette l’amendement I-CF1226.
L’amendement I-CF160 de M. Stéphane Peu est retiré.
Amendement I-CF527 de Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement vise à définir le régime fiscal applicable aux personnes qui bénéficient d’attributions de jetons gratuits d’actifs numériques. Il permet d’adapter le droit à cette pratique, en tenant compte de ses spécificités. Le dispositif a été revu en tenant compte des observations qui avaient été formulées lorsque j’avais déposé un amendement similaire à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2022. Le dispositif est ainsi désormais limité aux seuls actifs numériques émis par l’entreprise elle-même.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne suis pas favorable à ce que l’on crée des incitations fiscales à l’acquisition ou à la distribution de cryptomonnaies. Il y a un fort risque que la dépense fiscale alimente une bulle. C’est une nouvelle niche fiscale.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement I-CF527.
Amendement I-CF920 de M. Jean-Philippe Tanguy.
M. Philippe Schreck (RN). Il s’agit de supprimer le dispositif prévu par le 1° de l’article 81 du CGI, qui institue ce que l’on a coutume d’appeler la niche fiscale des journalistes.
Cet amendement s’inscrit dans la lutte contre les niches fiscales, qui n’ont plus de raison d’être dès lors qu’elles ne produisent aucune incitation économique directe et qu’elles n’ont plus pour objet que la préservation d’avantages que l’on pourrait considérer comme catégoriels. Cette mesure d’économie – que certains journalistes ont déclaré accepter et dont ils comprennent la philosophie – est bien entendu sans incidence sur la nécessaire liberté de la presse. Le maintien d’un tel dispositif s’apparente à une injustice, au moment où les efforts demandés aux Français nécessitent de tendre vers l’égalité devant l’impôt.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Dans la loi de finances pour 2019, nous avons décidé de soumettre cet avantage à des conditions de ressources : au-dessus d’un certain niveau de revenus, l’abattement ne s’applique plus. Par ailleurs, l’activité de journaliste possède certaines spécificités ; elle suppose des frais professionnels importants. Enfin, nous n’avons pas revalorisé le montant de l'abattement ni celui de son plafonnement au fil du temps. Cette disposition fiscale dérogatoire perd donc chaque année un peu de son impact effectif.
Avis défavorable.
M. Charles de Courson (LIOT). C’est un débat ancien. Nous avons discuté à de nombreuses reprises, en commission des finances, des abattements spécifiques dont bénéficient certaines catégories – à une époque, il y avait aussi, par exemple, celui des tailleurs de pipe de Saint-Claude.
Le cas des journalistes est complexe. Les patrons de presse ont, de fait, intégré cet avantage dans la détermination des salaires. Cela n’est pas convenable, mais c’est ainsi. Quand j’avais essayé de faire adopter un amendement comparable, il y a vingt-cinq ans, le Syndicat national des journalistes (SNJ) et des patrons de presse avaient souligné les difficultés du secteur et présenté cet avantage comme une forme d’aide à la presse. C’est choquant, je vous le concède.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). C’est un exemple typique : d’un côté, on nous dit que les niches fiscales doivent être supprimées car il faut trouver des ressources, et, de l’autre, on maintient un avantage fiscal qui ne correspond à aucune réalité. Les journalistes n’ont pas plus de frais que n’importe quel autre Français prenant sa voiture pour aller travailler. Si un journaliste engage des frais particuliers, sa rédaction doit les lui rembourser, ou bien il faut qu’il opte pour la déduction des frais réels.
J’entends ce que dit Charles de Courson, mais l’argument n’est pas valable : ce n’est que l’explication d’un avantage dont jouit une caste de privilégiés qui estime qu’elle doit en faire payer le prix par les contribuables. C’est d’ailleurs très dangereux pour la démocratie : nos concitoyens ne comprennent pas cette niche fiscale qui n’a aucune base rationnelle et ils ont l’impression que certaines professions, par l’influence qu’elles exercent, peuvent négocier des avantages fiscaux que les gens normaux n’ont pas. Mettons fin à cette mascarade !
M. Mathieu Lefèvre (RE). Mon groupe est très opposé à cet amendement qui consiste à revenir sur un avantage qui ne date pas d’il y a un an ou deux mais remonte aux années 1930. Les journalistes n’exercent pas un métier comme les autres, et un grand nombre d’entre eux sont payés à la pige. Par ailleurs, comme le disait le rapporteur général, un consensus avait été trouvé en 2019 pour plafonner cet avantage fiscal. Il est hors de question d’y revenir. Enfin, c’est un élément constitutif de la liberté de la presse, à laquelle nous sommes tous attachés.
M. Charles Sitzenstuhl (RE). Je suis extrêmement choqué par les termes employés par notre collègue du Rassemblement national, qui a parlé d’une « caste de privilégiés ». Mais cela tombe bien : demain, le Front national fêtera ses 50 ans. Ses députés nous rappellent ce qu’ils sont réellement.
La commission rejette l’amendement I-CF920.
Article additionnel après l’article 3 : Relèvement du plafond d’exonération des titres-restaurant à 6,50 euros
Amendements identiques I-CF296 de M. Marc Le Fur et I-CF344 de M. Charles de Courson, amendement I-CF887 de M. Jean-Philippe Tanguy (discussion commune).
M. Marc Le Fur (LR). Il s’agit de relever la valeur faciale des titres-restaurant de 11,84 euros à 13 euros, afin de soutenir le pouvoir d’achat des salariés, sachant que l’on constate une hausse générale des prix, en particulier de ceux de l’alimentation. C’est l’occasion à la fois de faire le point sur les décisions qui ont été prises et sur les nouvelles avancées que l’on peut espérer en la matière.
M. Charles de Courson (LIOT). Les prix des produits alimentaires ont augmenté de 11,7 % cette année. En outre, depuis près dix ans, la valeur faciale des titres-restaurant n’avait pas été réévaluée. La hausse que nous proposons consiste à la porter de 11,84 à 13 euros. Certes, un effort a déjà été consenti, mais il faut tenir compte du fait que les titres-restaurants sont utilisés par certaines personnes très modestes pour s’acheter des aliments, pas seulement pour aller au restaurant.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous avions présenté des amendements comparables cet été : les arguments sont toujours les mêmes, et Charles de Courson les a fort bien rappelés.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ma réponse sera, elle aussi, la même que lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2022. Nous avons revalorisé de manière anticipée les tickets restaurant. Nous avons même élargi l’indexation sur l’inflation à l’ensemble des modes de restauration pour les salariés, ce qui est plus favorable à ces derniers que l’augmentation de ce que vous appelez le prix facial des tickets restaurant.
L’indexation sur l’inflation est automatique. Outre celle qui a été votée au mois d’août, une nouvelle revalorisation aura lieu en janvier. Il n’y a donc pas de perte pour les salariés. Il est vrai que l’on peut discuter de l’indice sur lequel la réévaluation est fondée. Les tickets restaurant ne servent pas seulement à acheter des produits alimentaires : ils sont utilisés le plus souvent dans des restaurants. Or, dans le prix payé, entrent aussi, notamment, le service et le coût de l’immobilier. L’indice que nous utilisons me paraît le bon. Par ailleurs, si nous adoptions ces amendements, ils auraient un coût fiscal important pour l’État.
M. David Guiraud (LFI-NUPES). Il ne faudrait pas que cette mesure conduise à mettre de côté la question de l’augmentation des salaires, qui demeure à nos yeux une bataille essentielle ; mais, au vu de l’augmentation des prix de l’alimentation, nous soutiendrons les amendements identiques. D’ailleurs, s’il a été beaucoup question des prix de l’énergie – notamment de l’électricité et du gaz – et que le Gouvernement a prévu de nombreuses mesures à cet égard, peu de dispositions visent à contenir les dépenses d’alimentation. Or les prix ont augmenté significativement depuis le covid, y compris dans la restauration rapide, où l’on observe des hausses supérieures à 1,50 euro, alors qu’il s’agit de produits que consomment de nombreuses personnes, comme les kebabs achetés au coin de la rue, à proximité de leur entreprise. Ce sont souvent les seuls produits que les travailleurs, notamment ceux qui sont employés sur des chantiers, peuvent trouver pour se restaurer rapidement.
La commission adopte les amendements identiques I-CF296 et I-CF344 (amendement I-3123).
En conséquence, l’amendement I-CF887 tombe.
Après l’article 3 :
Amendement I-CF889 de M. Jean-Philippe Tanguy.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Là encore, nous avons présenté un amendement comparable cet été. Je réitère les arguments de bon sens que j’avais donnés à l’époque, et qui n’avaient pas été contestés de manière convaincante par le rapporteur général, pourtant de bonne foi d’habitude.
L’inflation touchant les produits alimentaires est supérieure à l’augmentation de l’indice général des prix : plus de 10 % sur l’année pour la première, contre 5 % à 6 % pour la seconde, selon les spécialistes de l’agroalimentaire et de la grande distribution. Il est logique d’indexer le ticket restaurant non pas sur la hausse générale des prix mais sur l’évolution des prix de l’alimentation, car une part importante des coûts des restaurants est liée aux produits alimentaires.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous venons d’augmenter l’avantage fiscal lié aux tickets restaurant dans des proportions beaucoup plus importantes que ne le permettrait votre amendement. Par ailleurs, la hausse des prix dans la restauration était de 4,7 % à la fin du mois d’août, autrement dit moins que l’inflation. Les tickets restaurant ne servent pas seulement à acheter des produits en épicerie ou au supermarché : ils sont aussi utilisés pour des achats dans la restauration rapide, pour les sandwichs et le snacking. On ne saurait donc indexer leur prix exclusivement sur l’évolution des prix des produits alimentaires. Pour ces raisons, je ne vois pas pourquoi nous changerions d’indice.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement I-CF889.
Amendement I-CF1205 de Mme Charlotte Leduc.
M. Florian Chauche (LFI-NUPES). Avec cet amendement d’appel, nous reprenons une proposition formulée par de nombreuses associations, comme la Fédération des usagers de bicyclette, qui consiste à créer les conditions effectives d’un cumul du forfait mobilité durable avec la participation de l’employeur à l’abonnement de transports en commun. Le cumul est certes possible mais, plafonné fiscalement à 500 euros par an et par salarié, ce montant est trop faible pour permettre un véritable cumul : dans de nombreuses régions françaises présentant des zones de faible ou moyenne densité, le plafond est déjà atteint quand on a souscrit un abonnement TER. En Île-de-France, le passe Navigo annuel coûte plus de 800 euros ; il ne reste donc pas grand-chose.
Les Français utilisent de plus en plus les mobilités douces et alternent entre le train, le vélo et la trottinette. C’est une bonne chose ; il faut encourager l’intermodalité. Nous proposons donc d’exclure du calcul de l’avantage fiscal le montant annuel de la participation de l’employeur à l’abonnement de transports en commun.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Si j’étais taquin, je vous rappellerais que vous n’aviez pas voté l’augmentation du forfait mobilité durable au mois d’août. Or vous proposez désormais une nouvelle hausse. Je m’en réjouis car cela veut dire que le dispositif a montré son utilité. Toutefois, nous avons déjà largement augmenté l’avantage fiscal pour les entreprises. En outre, il faut se donner le temps de mesurer l’effet de la mesure adoptée au mois d’août.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement I-CF1205.
Amendement I-CF322 de M. Fabien Di Filippo.
M. Fabien Di Filippo (LR). Cet été, le plafond pour la défiscalisation des heures supplémentaires a été relevé. Nous proposons d’aller au bout de la logique en le supprimant totalement.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le relèvement pérenne du plafond a été acté cet été. En outre, d’une manière générale, il n’est pas très bon de ne pas plafonner du tout une dépense fiscale, car cela peut donner lieu à des abus. Restons-en à cette règle de bon sens.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement I-CF322.
Amendements I-CF42 de Mme Émilie Bonnivard et I-CF592 de M. Fabrice Brun (discussion commune).
M. Dino Cinieri (LR). Si l’État, les collectivités territoriales et l’assurance maladie ont déjà œuvré pour inciter les jeunes médecins à s’implanter dans les zones sous-médicalisées en instaurant des aides financières et matérielles, des bourses et des exonérations fiscales, les résultats ne sont que trop peu visibles. Les professionnels de santé demeurent peu enclins à contribuer spontanément au rééquilibrage de la démographie médicale. Il ne s’agit pas d’opposer inutilement service public hospitalier et activités privées salariales, il convient de trouver les modalités permettant de garantir l’égalité entre les territoires et le maintien des médecins libéraux exerçant en zone rurale. L’amendement vise donc à étendre l’incitation fiscale aux praticiens hospitaliers.
M. Fabrice Brun (LR). La démographie médicale est tendue au niveau national, mais la situation est très diverse selon les territoires. Je vous renvoie à la dernière étude de l’Association des maires ruraux de France, qui met en évidence un écart d’un à six en matière d’accès aux soins selon que l’on vit dans une métropole ou dans une zone rurale ou périphérique.
Il faut améliorer les soins et faciliter l’installation de professionnels de santé, qu’il s’agisse de généralistes et de spécialistes libéraux ou de praticiens hospitaliers. L’amendement vise à étendre aux praticiens hospitaliers l’exonération de charges prévue pour les généralistes s’installant dans une zone de revitalisation rurale.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous partageons tous le constat. Le déficit de médecins ne se limite pas, d’ailleurs, aux territoires ruraux : on l’observe tout particulièrement dans certains quartiers prioritaires de la politique de la ville, ainsi que dans des métropoles.
Nous avons pris plusieurs mesures au cours de la précédente législature pour augmenter le temps de médecin effectif. Le PLFSS pour 2023 comporte une disposition qui consiste à instaurer une année supplémentaire pour les internes de médecine générale et les incite à s’installer dans les territoires ruraux. Cela permettra d’augmenter de manière très significative le nombre de médecins. La mesure que vous proposez, quant à elle, coûte cher, puisqu’elle consiste dans une exonération de l’impôt sur le revenu pendant cinq ans. Qui plus est, elle risque de créer une compétition entre les territoires, sans pour autant augmenter le nombre de médecins. J’y suis donc défavorable.
M. Philippe Brun (SOC). Cet amendement poursuit la logique qui est à l’œuvre depuis de nombreuses années et que je ne connais que trop, puisque je vis dans l’Eure, qui est le principal désert médical de France, qui consiste à trouver des palliatifs. D’abord, on a acheté des cabinets médicaux pour que des médecins s’installent. Ensuite, on a financé la secrétaire de ces médecins et proposé à ces derniers d’être salariés. On en arrive maintenant à créer des niches fiscales. Bientôt, on défiscalisera aussi le chocolat et le beurre pour inciter les médecins à s’installer dans les campagnes !
On le voit bien, nous sommes arrivés au bout de la logique de l’incitation financière. Il faut désormais réguler l’installation des médecins. Plutôt que de voter des mesures d’exonération fiscale et de créer des niches fiscales, je vous invite à apporter votre soutien à la proposition de loi transpartisane que sont en train de rédiger nos collègues membres du groupe de travail piloté par Guillaume Garot : ce texte apportera enfin une solution à la désertification médicale.
M. Fabrice Brun (LR). Toutes les mesures qui ont été prises pour accroître le nombre de médecins, par exemple la suppression du numerus clausus, et à favoriser l’implantation de médecins dans les territoires ruraux, telle l’année supplémentaire pour les internes – idée qui émanait d’ailleurs de mon groupe –, sont évidemment les bienvenues, mais vous ne semblez pas mesurer l’urgence de la situation pour nos concitoyens : dans certains territoires ruraux et périphériques, dans certains quartiers prioritaires de la politique de la ville, il n’y a plus d’équité dans l’accès aux soins. Toute mesure, incitative aujourd’hui, coercitive peut-être demain, est bonne à prendre.
M. le président Éric Coquerel. La préoccupation est la même dans des circonscriptions comme la mienne, en Seine-Saint-Denis. Cela dit, entre la baisse d’impôt et la hausse des salaires, on peut se demander quelle solution entraîne le plus de dépenses fiscales. Quoi qu’il en soit, la question que vous soulevez est légitime.
La commission rejette successivement les amendements I-CF42 et I-CF592.
Amendement I-CF767 de M. Pierre Morel-À-L’Huissier.
M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement vise à encourager les médecins ayant exercé en zone rurale et qui sont partis à la retraite à poursuivre un peu leur activité, le temps que de jeunes médecins viennent les remplacer, en les exonérant fiscalement pendant cinq ans.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Là encore, si nous partageons tous le même objectif, votre proposition me paraît un peu excessive : une exonération de 100 % consisterait à subventionner directement ces médecins. Un avantage important leur est d’ores et déjà conféré dans le cadre du cumul emploi-retraite. Par ailleurs, l’examen d’une telle mesure doit faire l’objet d’une discussion au sein de la commission des affaires sociales, dans le cadre de l’examen du PLFSS. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement I-CF767.
Amendement I-CF1041 de Mme Lisa Belluco.
Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Les transports sont responsables de 31 % des émissions de gaz à effet de serre ; 95 % de ces émissions proviennent des transports routiers, et la moitié de ce chiffre est due à la voiture individuelle. Les véhicules les plus lourds sont les plus consommateurs de carburant – à ce titre, nous demanderons un jour l’interdiction des SUV, notamment – et les plus émetteurs de gaz à effet de serre entre autres produits polluants, sans parler de la pollution sonore.
Nous proposons de rendre ces véhicules moins attractifs dans le but d’en réduire le nombre en circulation. L’amendement a ainsi pour objet de moduler le niveau des frais de déplacement déductibles de l’impôt sur le revenu en fonction des émissions de CO2 et de la masse en ordre de marche des véhicules de tourisme. Cette proposition, émanant de la Convention citoyenne pour le climat (CCC), n’a pas été retenue dans la loi « climat et résilience », mais elle est en cohérence avec certaines des évolutions fiscales découlant des travaux de la CCC et inscrites dans la loi de finances pour 2021.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre objectif et je le partage, mais je ne pense pas que la réponse que vous proposez soit la bonne. Dans la logique du barème kilométrique, il doit y avoir un rapport entre le coût effectif pour la personne et le niveau de l’abattement. Par ailleurs, il existe déjà une bonification du barème pour les véhicules électriques. En outre, cette disposition se traduirait par une perte de pouvoir d’achat importante pour un très grand nombre de Français. Enfin, le barème kilométrique a été revalorisé de 10 % au mois de janvier pour tenir compte de la hausse de l’inflation. Avis défavorable.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Il s’agit d’un amendement antipauvres ; nous voterons contre. Les véhicules thermiques sont des trappes à pauvreté : plus les ménages sont modestes, plus leur véhicule est ancien, plus ils consomment et plus ils polluent. Ces personnes sont victimes de leur situation précaire ; ils n’en sont absolument pas responsables. Avec cet amendement, on pénaliserait ces Français. Je m’étonne que la NUPES propose un amendement à ce point antisocial.
Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). On entend régulièrement l’argument de la mesure antipauvres. Or les véhicules les plus lourds sont aussi, en général, les plus chers.
La commission rejette l’amendement I-CF1041.
Article additionnel après l’article 3 : Extension du régime fiscal des opérations de remembrement aux échanges d'immeubles ruraux intervenant dans le territoire d'une AOC
Amendements identiques I-CF88 de Mme Marie-Christine Dalloz, I-CF612 de M. Fabrice Brun et I-CF1247 de M. Grégoire de Fournas.
Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Nous sommes partis d’un constat très simple : les appellations d’origine contrôlée (AOC) couvrent souvent des territoires larges, qui dépassent le périmètre de la commune et du canton. Or le dispositif fiscal incitant au remembrement prévoit que les parcelles concernées doivent être situées soit dans le même canton, soit dans un canton et dans une commune limitrophes. Les remembrements, nécessaires, sont également onéreux. Dès lors, ils ne se font pas. Nous vous proposons donc de modifier le dispositif pour rendre efficient l’ensemble du territoire d’une AOC. La France est le pays des vins : allons jusqu’au bout de cette démarche, soyons cohérents !
M. Fabrice Brun (LR). Dans notre pays, les exploitations agricoles sont souvent confrontées au problème du morcellement foncier ; c’est le fruit de l’histoire. Pour y remédier, il est possible de procéder à des remembrements, c’est-à-dire des échanges de parcelles. Or, quand il s’agit d’AOC, ces échanges de terres peuvent dépasser les limites d’une commune ou d’un canton et d’une commune limitrophes, ce qui n’est pas prévu par le droit fiscal.
Nous avons travaillé sur le sujet avec la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie de vin à appellations d’origine contrôlée (CNAOC). L’amendement vise à exonérer les exploitations agricoles de la taxe sur la publicité foncière, notamment. Certes, cela se traduira par une diminution de recettes fiscales, mais les entreprises viticoles verront baisser leurs coûts de production : elles y gagneront donc en compétitivité. L’opération sera également bénéfique sur le plan de la transition écologique, car les remembrements éviteront des déplacements, ce qui signifie qu’il faudra moins d’énergie pour produire nos magnifiques vins de France.
M. Philippe Lottiaux (RN). Le territoire des AOC présente effectivement des spécificités dont il faut tenir compte. Nous proposons donc simplement de mettre en cohérence le dispositif fiscal avec ces spécificités, de manière à faciliter les remembrements.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous proposez d’assouplir les critères d’un régime fiscal principalement réservé aux opérations de remembrement agricole pilotées par le département. La difficulté tient au fait que vous l’élargiriez à des parcelles situées en dehors du département, ce qui supprimerait le pilotage. Vous élargiriez donc la niche fiscale sans possibilité de contrôle.
Avis défavorable.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Ce sont pourtant des amendements de bon sens, purement techniques, et dont le coût pour les finances publiques serait dérisoire. Il s’agit d’une mesure de simplification. Alors que le monde agricole est en souffrance, accepter de simplifier ce régime serait une manière d’envoyer un bon signal.
Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Monsieur le rapporteur général, vous nous dites qu’aucun contrôle ne sera possible, mais les opérations resteront dans le périmètre d’une même AOC, lequel est parfaitement défini. Il ne s’agit pas de rassembler plusieurs AOC.
La commission adopte les amendements identiques I-CF88, I-CF612 et I-CF1247 (amendement I-3124).
Article additionnel après l’article 3 : Prorogation pour deux ans de l'exonération de plus-values immobilières des cessions d’immeubles au profit d’organismes en charge du logement social
Amendements identiques I-CF148 de M. Stéphane Peu, I-CF206 de M. Michel Castellani, I-CF239 de M. Charles de Courson et I-CF1102 de M. Aurélien Taché, amendement I-CF358 de M. Charles de Courson (discussion commune).
M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Cet amendement vise à préciser le régime d’exonération des plus-values constatées à l’occasion de la cession d’un immeuble lorsque l’acquéreur s’engage à faire du logement social. Les opérations d’acquisition-amélioration, c’est-à-dire l’achat d’immeubles anciens afin de les transformer en logements sociaux, ont été exclues de l’exonération en 2020 ; nous proposons de les réintroduire.
L’amendement a également pour objet de calculer le montant de l’exonération au prorata de la surface des logements sociaux prévue et achevée par rapport à la surface totale des constructions prévue par le permis de construire.
M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit d’aménager le régime permettant au particulier cédant un bien immobilier à un organisme HLM de bénéficier d’une exonération d’impôt sur la plus-value réalisée – l’objectif étant évidemment de soutenir la création de logements sociaux. Ce régime, institué en 2005 pour une durée de deux ans, a été reconduit à sept reprises. Il est proposé de le pérenniser afin d’éviter de créer, tous les deux ou trois ans, une situation d’incertitude.
Nous souhaitons aussi corriger la rédaction de l’article visé en prévoyant que l’exonération soit calculée au prorata de la surface habitable des logements sociaux que le cessionnaire s’est engagé à réaliser et à achever par rapport à la surface totale des constructions mentionnée dans le permis de construire.
M. Charles de Courson (LIOT). J’ajoute l’élément suivant : le régime a été renouvelé sept fois, chaque fois pour deux ans, et comme nous tardions à le faire, tout était bloqué pendant les six derniers mois. Nous proposons donc de pérenniser le dispositif, ce qui évitera les incertitudes en fin de période et nous évitera des rafales d’amendements tous les deux ans.
Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’idée est effectivement de pérenniser ce dispositif et d’y inclure les bâtiments anciens. Ces mesures permettront de soutenir la construction de logements sociaux.
M. Charles de Courson (LIOT). L’amendement I-CF358 propose une variante : il s’agirait de pérenniser le dispositif jusqu’en 2027, ce qui correspond à la fin théorique de notre mandat.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Pérenniser une disposition régulièrement reconduite est tentant, mais contraire à une règle que nous nous sommes fixée, notamment dans le cadre de la Lolf. Borner une mesure fiscale offre l’occasion de s’interroger régulièrement sur son coût et sur l’intérêt de la proroger. Par ailleurs, le bornage de cette mesure a un effet incitatif sur le lancement de programmes de construction.
Je suis favorable à une nouvelle reconduction de cette disposition pour deux ans, d’autant que nous avons clarifié, dans le cadre de la loi de finances pour 2021, l’obligation pour les organismes HLM de réaliser et d’achever la construction de logements sociaux dans un délai de dix ans. Ne changeons pas un dispositif qui fonctionne !
Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Ce dispositif ne fonctionne pas. La nécessité de le reconduire bloque les opérations six mois avant l’échéance. Nous proposons de le fluidifier et de le solidifier, pour sécuriser les opérations des organismes de logement social.
M. Mathieu Lefèvre (RE). Le bornage des dépenses fiscales a précisément pour objet de produire un effet sur les comportements des agents économiques. Il ne faut jamais oublier que les dépenses fiscales résultent de taux d’imposition trop élevés.
Par ailleurs, nous sommes tombés d’accord ce matin, lors de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, sur la nécessité de borner les dépenses fiscales dans le temps. Ces amendements contredisent cet accord. Nous y sommes défavorables. La prorogation de deux ans proposée par M. le rapporteur général est une solution de compromis.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Monsieur le rapporteur général, devons-nous en déduire que vous déposerez un sous-amendement à cet effet en séance publique ?
M. Charles de Courson (LIOT). Cela ne fera jamais que la huitième fois que cette disposition est prorogée ! Monsieur le rapporteur général, je vous propose de rectifier l’amendement I-CF358 dès à présent.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. J’émets un avis favorable à l’amendement I-CF358 rectifié par un sous-amendement I-CF1492 substituant l’année « 2024 » à l’année « 2027 ».
Les amendements I-CF206 et I-CF239 sont retirés.
La commission rejette les amendements identiques I-CF148 et I-CF1102.
Elle adopte le sous-amendement I-CF1492 du rapporteur général et l’amendement I-CF358 ainsi rectifié (amendement I-3175).
Après l’article 3 :
Amendement I-CF947 de M. Nicolas Thierry.
Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit de corriger notre régime fiscal pour éviter que les communes aient un intérêt financier à artificialiser les bois communaux. Les forêts sont des écosystèmes précieux, mis à mal par le changement climatique, les incendies et l’artificialisation des sols. Une commune peut céder un bois communal pour construire et urbaniser, sans compensation écologique, sans taxation spécifique ni pénalité. Pire, les communes peuvent avoir un intérêt à céder des bois communaux pour en retirer des recettes fiscales.
Nous proposons d’assujettir la cession de bois communaux au droit commun en matière de plus-values immobilières, sauf si l’acquéreur s’engage à conserver la vocation forestière des parcelles. Le produit de cet impôt serait attribué au Fonds stratégique de la forêt et du bois (FSFB).
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne vois pas pourquoi les communes devraient être imposées sur la vente d’une forêt communale. L’usage auquel est destiné un terrain est fixé dans le cadre du plan local d’urbanisme (PLU). Avis défavorable.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je trouve cet amendement un peu bizarre. En règle générale, les communes sont propriétaires de leurs bois depuis plus de trente ans. Elles demeureraient donc exonérées de l’impôt sur les plus-values immobilières.
La commission rejette l’amendement I-CF947.
Amendements I-CF533 de M. Fabrice Brun et I-CF1301 de Mme Sabrina Sebaihi (discussion commune).
M. Fabrice Brun (LR). L’amendement I-CF533 vise à exonérer les plus-values immobilières d’impôt sur le revenu au terme de quinze ans de détention d’un bien immobilier. Cette mesure a fait ses preuves en matière de fluidité du marché avant 2012. Nous la défendons régulièrement depuis lors.
Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). La pression foncière se fait de plus en plus sentir dans les villes. L’amendement I-CF1301 vise à décourager la rétention foncière des terrains à bâtir, par le biais d’un mécanisme analogue à celui de la taxe sur les logements vacants (TLV) et de la taxe d’habitation sur les logements vacants (THLV). Il s’agit d’augmenter l’impôt de 4 % au-delà de la cinquième année de détention et de 6 % au-delà de la vingt-deuxième, soit un doublement de l’impôt sur les plus-values immobilières au titre de l’impôt sur le revenu. Il s’agit de libérer les terrains conservés de façon excessive.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ces deux amendements portent sur le même sujet mais sont opposés : les uns veulent accélérer l’exonération des plus-values immobilières, les autres veulent l’étaler. Le régime en vigueur est satisfaisant. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements I-CF533 et I-CF1301.
Article additionnel après l’article 3 : Suppression de l’abattement pour durée de détention sur les plus-values immobilières de cessions d’immeubles situés dans les communes où est appliquée la taxe sur les logements vacants
Amendement I-CF1193 de M. Paul-André Colombani.
M. Michel Castellani (LIOT). Il vise à supprimer l’abattement sur les plus-values réalisées au titre des cessions de biens immobiliers situés dans des communes confrontées à une pression immobilière élevée. Il s’agit de s’attaquer directement aux comportements spéculatifs prédateurs et aux profits réalisés à la revente de résidences secondaires. Ce phénomène affecte de nombreuses régions en France, tout particulièrement la Corse, plus particulièrement encore certaines régions de Corse, où il ravage tout, tant le sol que la société.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je partage votre point de vue. Le Gouvernement s’apprête à faire évoluer le zonage s’agissant des zones tendues. La Corse devrait être tout entière concernée, ce qui devrait permettre d’y appliquer partout la taxe sur les logements vacants (TLV) et d’y majorer la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS).
Cette réponse, qui consiste à tenir compte non seulement des zones tendues mais aussi des zones très touristiques, qui feront l’objet de critères de définition, me semble être la bonne. Je détaillerai tout cela dans l’hémicycle.
Je propose le retrait de l’amendement au profit de la solution sans doute plus ambitieuse qui sera proposée.
M. Michel Castellani (LIOT). Monsieur le rapporteur général, j’ai pris bonne note de vos propos. Nous espérons avancer sur cette question. Toutefois, je ne puis retirer un amendement dont je ne suis pas le premier signataire.
M. le président Éric Coquerel. Je soutiens l’amendement. Les propos de M. le rapporteur général me satisfont d’autant plus que, lors de la dernière législature, une proposition de loi relative à la taxation des résidences secondaires, examinée dans le cadre d’une niche parlementaire, a été adoptée.
J’attends que le Gouvernement fasse ses preuves sur ce point. La situation dans les zones touristiques est absolument insupportable, notamment pour les personnes qui y résident, qui ne peuvent plus habiter leur lieu de vie en raison de la folie immobilière.
M. Bertrand Sorre (RE). Je souscris à la proposition d’ouvrir ce débat dans l’hémicycle. Il s’agit d’une attente très forte de nos concitoyens et des élus locaux.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). La question de l’abattement sur les plus-values immobilières pour durée de détention se pose de façon récurrente. Je présenterai ultérieurement un amendement d’appel à ce sujet.
Il ne faut pas confondre la taxation des stocks et celle des flux. Les stocks sont grevés par la taxe foncière et la taxe d’habitation. La taxation des flux que sont les plus-values me semble bien plus pertinente.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’adoption de l’amendement induira un alourdissement significatif de la fiscalité des plus-values immobilières.
La commission adopte l’amendement I-CF1193 (amendement I-3125).
Après l’article 3 :
Amendements I-CF487 et I-CF526 de Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie (LR). Un détenteur de cryptoactif ne peut imputer ses pertes sur une plus-value de même nature que sur la même année. Or, pour de nombreux autres types de revenus, il est possible de les imputer sur plusieurs années. J’ai défendu l’an dernier un amendement similaire, permettant un report des pertes jusqu’à dix ans. Le Gouvernement ayant jugé cette disposition excessive, je propose un délai de trois ans.
L’amendement I-CF526 prévoit une mesure d’aide à la conformité, visant à pallier une difficulté en matière de calcul avec précision des plus-values en cryptoactifs.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne souhaite pas que nous adoptions des incitations fiscales à la détention, à l’acquisition ou à la distribution de cryptomonnaies. Une telle dépense fiscale risque fort d’alimenter une bulle.
Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements I-CF487 et I-CF526.
Amendement I-CF485 de Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement de repli vise, à défaut de la création d’un régime similaire à celui de l’apport-cession en cas d’investissement d’actifs numériques dans une entreprise, à inciter les investisseurs en cryptoactifs à rapatrier leurs plus-values, qui sont dormantes dans l’économie réelle, en leur allouant un avantage fiscal s’ils investissent dans des PME, dont le besoin de financement est le plus net.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les gains issus de la cession d’actifs numériques bénéficient d’ores et déjà d’un régime fiscal adapté. Ils peuvent être investis dans d’autres secteurs. L’amendement ajoute un avantage fiscal.
Avis défavorable.
M. David Guiraud (LFI-NUPES). Je ne suis pas spécialiste des cryptoactifs, mais l’étalement sur dix ans des pertes en la matière n’est autre que du boursicotage, que nous ne souhaitons pas favoriser.
Quant à l’investissement des plus-values réalisées en cryptomonnaies, qui seraient dormantes dans l’économie réelle, j’aimerais savoir combien cela représente ; à mon avis, pas grand-chose. Les plus-values réalisées en cryptomonnaies sont le plus souvent réinvesties directement dans ce secteur.
Je ne sais pas ce qu’est l’ADAN, qui apparaît dans l’exposé sommaire de l’amendement. Madame Louwagie, j’aimerais obtenir quelques éclaircissements sur cet organisme qui vous a suggéré l’amendement.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je ne suis pas non plus spécialiste des cryptomonnaies mais, puisque nous avons examiné plusieurs amendements à ce sujet, je me demande s’il n’y aurait pas là un sujet d’étude pour notre commission, afin que nous soyons à la page sur ce sujet important. M. le rapporteur général peut-il préciser le régime fiscal applicable aux plus-values ainsi réalisées ainsi que l’avantage fiscal supplémentaire qu’apporterait l’amendement de Mme Louwagie ?
M. le président Éric Coquerel. Une mission d’information présidée par M. Éric Woerth a été conduite sur ce sujet lors de la dernière législature, et un rapport de suivi des conclusions de cette mission d’information a été présenté en toute fin de législature.
Mme Véronique Louwagie (LR). L’acronyme ADAN désigne l’Association pour le développement des actifs numériques. Il ne s’agit pas d’étaler les pertes sur dix ans, mais de compenser les plus-values avec des moins-values réalisées au cours des années antérieures. Des dispositions analogues s’appliquent aux revenus mobiliers et aux revenus fonciers.
La commission rejette l’amendement I-CF485.
L’amendement I-CF1461 de M. Jean-Paul Mattei est retiré.
Article additionnel après l’article 3 : Elargissement, pour les entreprises solidaires d’utilité sociale, des investissements satisfaisant, dans le cadre du régime d’apport cession, à la condition de remploi économique de la plus-value en report d’imposition
Amendements identiques I-CF264 de M. Charles de Courson et I-CF1162 de Mme Anne-Laurence Petel.
M. Charles de Courson (LIOT). Cet amendement vise à s’assurer que toutes les entreprises solidaires d’utilité sociale (ESUS) bénéficient du remploi des produits de cession.
Lors d’une cession de titres de société, un chef d’entreprise peut bénéficier d’un report d’imposition ou d’une exonération sur la plus-value de cession, à condition qu’il réinvestisse le produit de cette cession. Ce dispositif vise à stimuler l’investissement en encourageant les investisseurs à remployer rapidement leur capital. Malheureusement, les ESUS telles qu’Habitat et Humanisme ou Les 3 colonnes n’en bénéficient pas.
Mme Anne-Laurence Petel (RE). Ces amendements sont proposés par le collectif FAIR, issu de la fusion de Finansol et de l’iiLab. Les sociétés à prépondérance immobilière sont exclues du dispositif de remploi des produits de cession. Il s’agit d’introduire une exception pour les ESUS.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet avantage économique ne me semble ni nécessaire ni adapté pour ce secteur, à quelques exceptions près. Je vous propose de retravailler l’amendement d’ici à l’examen du texte dans l’hémicycle. Il s’agit d’un avantage fiscal significatif.
M. Charles de Courson (LIOT). Les ESUS à prépondérance immobilière sont des entreprises qui lèvent de l’argent sous forme de dons ou de prêts sans intérêt pour acheter des logements et les mettre à la disposition des plus défavorisés de nos concitoyens. Il est aberrant qu’elles ne bénéficient pas du dispositif de remploi des produits de cession.
À Reims, des ESUS à prépondérance immobilière ont réussi à réhabiliter des logements et à les revendre pour réinvestir dans des bâtiments plus grands. Il s’agit des logements de nos concitoyens les plus misérables, et non de logements intermédiaires ou même de logements très sociaux. Il n’est pas logique de les taxer.
La commission adopte les amendements identiques I-CF264 et I-CF1162 (amendement I-3126).
Après l’article 3 :
Amendement I-CF83 de Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Véronique Louwagie (LR). Il s’agit de redonner aux TPE-PME, dont les besoins de financement sont importants, des dispositifs incitatifs d’investissement dont elles bénéficiaient avant 2017.
En matière de moins-values de cession de valeurs mobilières, le seul dispositif qui existe aujourd’hui est l’imputation sur des plus-values de cessions de valeurs mobilières. L’amendement tend à ouvrir l’imputation sur le revenu global, de sorte à avoir un dispositif à peu près équivalent à celui des déficits fonciers, qui sont imputables sur le revenu global dans la limite de 10 700 euros par an.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. C’est un peu fromage et dessert ! On ne peut pas bénéficier de l’avantage de la flat tax sur les plus-values et, en cas de moins-value, de l’avantage offert par leur imputation sur le revenu global, fût-ce à concurrence de 10 700 euros. Avis défavorable.
Mme Véronique Louwagie. Ce n’est pas tout à fait fromage et dessert. Si l’on veut inciter les particuliers à investir dans les entreprises, il faut accepter qu’ils bénéficient de l’imputation sur le revenu global des pertes résultant des risques qu’ils ont pris.
M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). J’ai du mal à comprendre. On nous a vendu la suppression de l’ISF comme une solution pour favoriser les investissements dans les entreprises, notamment les PME. Maintenant que nous savons que cela ne marche pas, on nous propose une deuxième disposition censée produire le même effet. Comme elle ne marchera pas, on nous en proposera une troisième. Peut-être y a-t-il juste un problème de logique ! Bien entendu, nous sommes contre l’amendement.
La commission rejette l’amendement I-CF83.
Amendement I-CF94 de Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Véronique Louwagie (LR). Il s’agit d’augmenter le plafond de l’abattement fixe sur les plus-values de cession de titres des sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés, dont bénéficient notamment les dirigeants de PME partant à la retraite. Il est de 500 000 euros depuis plusieurs années. Nous proposons de le porter à 700 000 euros.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ce plafond a été augmenté en 2018. L’abattement est appliqué après imputation des moins-values aux plus-values. Cet avantage fiscal, très significatif, couvre la grande majorité des cessions lors de départs en retraite. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement I-CF94.
Amendement I-CF1446 de M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Cet amendement, défendu jadis par Charles de Courson, porte sur la durée et le mode de détention des titres de société imposés à l’IS ouvrant droit à l’abattement applicable lors du départ à la retraite de leur détenteur. Ce dernier doit les avoir détenus, personnellement ou familialement, pendant au moins cinq ans et à hauteur d’au moins 25 %.
Dans les professions libérales, cette disposition empêche les jeunes associés de monter au capital. Il s’agit de ramener à 5 % le seuil de détention nécessaire pour bénéficier de cette incitation fiscale ancienne et au fonctionnement satisfaisant.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends ce qui motive l’amendement, mais son coût fiscal est élevé. Avis défavorable.
M. Charles de Courson (LIOT). Il s’agit d’un vrai problème. Peut-être l’amendement de notre ami Mattei pousse-t-il le bouchon un peu loin ! Ne pourrait-on pas parvenir à un compromis entre 25 % et 5 % ? Si chaque associé possède 5 % des parts, c’est qu’ils sont vingt, ce qui est assez rare ; à 25 %, ils sont quatre au plus, et souvent trois. Un seuil de 10 % ou 15 % me semble satisfaisant.
La commission rejette l’amendement I-CF1446.
Amendement I-CF467 de Mme Véronique Louwagie.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.
M. David Guiraud (LFI-NUPES). J’ai pu sembler, tout à l’heure, faire une intervention d’australopithèque. La première fois que j’ai entendu parler de cryptomonnaies et de NFT, c’est à propos d’individus qui, ayant produit des images de singes portant des casquettes, avaient fait passer leur valeur de 300 euros à 300 000 euros. Bravo, mais attention ! Les gens pourraient se rendre compte un jour qu’une image de singe avec une casquette ne vaut peut-être pas 300 000 euros.
Or ces pratiques spéculatives se développent à grande échelle. Si elles ont rapporté de l’argent à des investisseurs, elles n’en rapportent plus autant. La valeur de ces monnaies est très fluctuante.
Les jeunes sont la cible de pratiques commerciales très agressives. Quelques secondes sur Instagram ou TikTok suffisent pour trouver des vidéos incitant à investir dans des machines à miner les bitcoins et les cryptomonnaies. Il faut acheter un ventilateur, puis un deuxième, puis un troisième, et finalement une usine de ventilateurs, ce que personne ne peut se permettre. Comme dans le monde des paris sportifs, des jeunes finissent ruinés.
Il faut donc mettre un coup d’arrêt aux amendements à ce sujet et prendre un peu de hauteur. L’ADAN est maintenant pour moi un peu plus qu’un acronyme, mais je ne sais toujours pas de quoi il s’agit.
Nous devons faire attention. Le développement des cryptomonnaies pose problème. Des pratiques à risque se développent dans ce secteur, notamment au sein de la jeunesse.
Mme Véronique Louwagie (LR). Mes amendements portent sur des questions de fiscalité, qui d’ailleurs faisaient l’objet de l’essentiel du rapport de la mission d’information présidée par Éric Woerth. S’agissant de nouvelles techniques et de nouvelles procédures, il convient d’en définir la fiscalité.
La commission rejette l’amendement I-CF467.
Amendement I-CF1465 de M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Cet amendement d’appel vise à révolutionner la fiscalité des plus-values immobilières, notamment en supprimant la clause relative à une durée de détention. La plus-value est exonérée après vingt-deux ans de détention au titre de l’impôt sur le revenu (IR) et après trente ans au titre des prélèvements sociaux. Je propose d’appliquer au prix d’achat le coefficient d’érosion monétaire et la flat tax aux plus-values.
La rétention foncière, résidence principale mise à part, entrave la circulation des biens immobiliers. Il faudrait compléter l’amendement avant son examen en séance publique, en prévoyant son application au 1er janvier 2024 pour les terrains non bâtis et au 1er janvier 2025 pour les terrains bâtis, ce qui permettrait d’approfondir et d’adapter la nécessaire réflexion sur une imposition devenue obsolète.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis favorable à une telle réflexion, pour laquelle une étude d’impact, dont nous ne disposerons pas la semaine prochaine, serait utile. Cette modification assez lourde présente une logique et une cohérence avec les positions antérieures de notre collègue Mattei.
M. Jean-Paul Mattei. Je retire l’amendement pour le retravailler, et si possible échanger avec le Gouvernement, d’ici à l’examen du texte en séance publique.
L’amendement I-CF1465 est retiré.
Amendements identiques I-CF198 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF366 de M. Charles de Courson, I-CF599 de M. Fabrice Brun et I-CF1238 de M. Grégoire de Fournas
Mme Véronique Louwagie (LR). En cette période d’inflation importante, il s’agit d’indexer les plafonds d’exonération des plus-values des petites entreprises sur l’indice mensuel des prix à la consommation. Ces plafonds sont actuellement de 250 000 euros pour les commerces et de 90 000 euros pour les entreprises de services.
M. Charles de Courson (LIOT). Nous oublions très souvent de prévoir ces mécanismes d’indexation. Dix ans plus tard, nous nous réveillons et réévaluons alors de 30 % à 40 % pour tenir compte de l’évolution des prix. L’indexation évite de telles réévaluations et la commission des finances y est, en général, favorable.
M. Fabrice Brun (LR). Les plafonds seraient réévalués chaque 1er janvier, en application de l’indice mensuel des prix à la consommation, et arrondis à l’euro le plus proche.
M. Philippe Lottiaux (RN). Il faut, en effet, réévaluer de temps en temps.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ces plafonds ont été réévalués en 2018, et ils le sont régulièrement. L’indexation sur l’inflation apporterait de la complexité. Avis défavorable.
M. Charles de Courson (LIOT). C’est précisément pour éviter ces réévaluations régulières – que parfois l’on oublie – que nous proposons une indexation !
M. Jean-Paul Mattei (Dem). L’année dernière, nous avons réévalué le plafond d’exonération en cas de cession d’entreprises individuelles prévu à l’article 238 quindecies du code général des impôts – il est passé à 500 000 euros. L’effort est donc important, même si persiste un débat sur l’intégration, ou non, des stocks dans ce montant. On utilise plus rarement l’article 151 septies du même code.
La commission rejette les amendements identiques I-CF198, I-CF366, I-CF599 et I-CF1238.
Amendements identiques I-CF343 de Mme Véronique Louwagie, I-CF624 de M. Fabrice Brun, I-CF689 de M. Fabien Di Filippo et I-CF1281 de M. Charles de Courson
Mme Véronique Louwagie (LR). Il s’agit également de revaloriser pour tenir compte de l’inflation. Sont cette fois concernés les seuils relatifs aux exonérations de plus-values pour les exploitations agricoles.
M. Fabrice Brun (LR). L’exonération des plus-values permet aux exploitations agricoles d’investir, de renouveler leur matériel et de faire face aux transitions écologique, sanitaire et alimentaire que connaît l’agriculture.
M. Fabien Di Filippo (LR). Cette revalorisation est nécessaire, légitime et justifiée du fait des conséquences de l’inflation et de la guerre des concentrations qui touche les exploitations, alors que leur résultat moyen n’augmente pas.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre volonté de soutenir les agriculteurs, qui vivent une période difficile. Mais ils peuvent également bénéficier d’un régime beaucoup plus favorable en cas de départ à la retraite, puisque les articles 151 septies A et 238 du code général des impôts prévoient une exonération totale jusqu’à 500 000 euros et partielle jusqu’à un million d’euros.
Il convient de conserver une différence fiscale entre cession simple et cession pour départ à la retraite. En outre, je suis réticent à l’idée de créer une différence d’imposition des plus-values entre agriculteurs et petits commerçants.
Avis défavorable.
La commission rejette les amendements identiques I-CF343, I-CF624, I-CF689 et I-CF1281.
Amendement I-CF48 de Mme Véronique Louwagie
Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement, similaire à celui déjà présenté par notre collègue Jean-Paul Mattei, porte sur l’imposition des plus-values réalisées lors de mises en société par des entrepreneurs individuels. En l’état du droit, lorsqu’ils ont bénéficié d’un report d’imposition, ces entrepreneurs ne peuvent compenser leurs éventuelles plus-values avec les moins-values réalisées dans un second temps.
Il vous est donc proposé de limiter l’imposition de la plus-value en report d’imposition au montant résultant de la compensation avec les éventuelles moins-values réalisées sur la cession des titres.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends votre objectif mais l’amendement pose un problème juridique : la différence de nature fiscale entre plus-value professionnelle et moins-value particulière ne permet pas l’imputation de l’éventuelle moins-value réalisée lors de la cession des titres de la société soumise à l’IS sur la plus-value d’apport professionnelle dont l’imposition est placée en report, puisque chaque catégorie de revenu est déterminée selon des règles d’assiette qui lui sont propres.
M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je soutiens cet amendement, mieux rédigé que les miens. Bien sûr, l’administration fiscale explique qu’on ne peut pas compenser des plus-values imposables à l’impôt sur le revenu avec des plus-values imposables à l’IS. Mais il s’agit ici de moins-values sur titres, donc cela doit fonctionner.
Si j’apporte mes parts dans une société et que je revends plus cher, il est logique que je sois imposé sur la totalité de ma plus-value. Mais ce ne devrait pas être le cas lorsqu’il y a moins-value, sinon l’entrepreneur qui se met en société est pénalisé par rapport à celui qui reste en entreprise individuelle. Il faut faire preuve de cohérence fiscale, d’autant que nous avons voté l’option à l’IS pour les entreprises individuelles l’an passé. Je vous propose donc d’y réfléchir.
La commission rejette l’amendement I-CF48.
Amendement I-CF339 de M. Fabien Di Filippo
M. Fabien Di Filippo (LR). Il s’agit de faire peser l’impôt sur le revenu sur le salaire net, et non plus sur le net fiscal. En l’état du droit, les Français paient l’impôt sur le revenu sur de l’argent qu’ils ne touchent pas. Ce système de double imposition est difficilement compréhensible. Ce serait une mesure de bon sens au moment où l’on veut revaloriser le travail, et atténuer les effets de l’inflation pour que les Français retrouvent du pouvoir d’achat.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons déjà revalorisé les tranches du barème de l’impôt sur le revenu. En outre, votre proposition aurait des conséquences très lourdes sur le rendement de l’impôt.
Il y a des raisons historiques à la distinction entre dispositifs de déductibilité au sein de la CSG. La première part, voulue par Michel Rocard en 1991, portait sur l’ensemble des revenus et intégrait la notion de double fiscalité. Les augmentations ultérieures de CSG ont remplacé des cotisations déjà déductibles du revenu imposable ; elles sont, logiquement, déduites de l’assiette de l’impôt sur le revenu et ne répondent pas à la logique de double imposition, laquelle se retrouve d’ailleurs partout sous la forme de la TVA.
Avis défavorable.
M. Fabien Di Filippo (LR). Je comprends parfaitement la philosophie originelle de la double imposition, mais ne la partage pas. Vous avez raison, il s’agit d’une proposition dont le coût est estimé à 2,7 milliards d’euros, mais je vous propose de ne pas généraliser l’expérimentation qui vise à automatiser le versement du RSA, qui va coûter près de 3 milliards. Faisons œuvre utile : revalorisons le travail, non l’assistanat.
La commission rejette l’amendement I-CF339.
Amendements I-CF252 de M. Fabien Di Filippo, I-CF749 et I-CF745 de M. François Jolivet (discussion commune)
M. Fabien Di Filippo (LR). Alors que les temps vont être très difficiles pour le secteur du bâtiment et que nous cherchons par tous les moyens à réduire le nombre de passoires thermiques et de logements insalubres, il s’agit de permettre aux bailleurs réalisant des travaux de rénovation énergétique de déduire de leur revenu global l’intégralité du montant des travaux, en supprimant le plafond de 10 700 euros.
M. François Jolivet (HOR). Il s’agit de doubler le déficit foncier pour les travaux de rénovation énergétique permettant d’améliorer la classe de performance énergétique des logements classés E, F et G loués et souvent occupés par des ménages modestes – ceux des quatre premiers déciles de revenus. Cela permettrait de réduire les charges des locataires tout en luttant contre les gaz à effet de serre.
L’amendement I-CF745, de repli, conditionne le doublement du déficit foncier à l’application de plafonds de ressources et de loyer aux logements concernés.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vos propositions me semblent excessives. L’amendement de M. Di Filippo ne comporte plus aucun plafond de dépenses. Quant à ceux de M. Jolivet, le coût reste significatif. Il ne faut pas confondre les instruments disponibles. Pour les travaux de rénovation énergétique, les bailleurs peuvent recourir à la réduction d’impôt Loc’Avantages, ou aux aides de MaPrimeRénov.
M. François Jolivet (HOR). Seuls les propriétaires bailleurs particuliers sont visés.
La commission rejette successivement les amendements I-CF252, I-CF749 et I-CF745.
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mardi 4 octobre 2022 à 21 heures 15
Présents. - M. Franck Allisio, M. David Amiel, Mme Christine Arrighi, M. Christian Baptiste, M. Karim Ben Cheikh, M. Manuel Bompard, M. Mickaël Bouloux, M. Fabrice Brun, M. Philippe Brun, M. Frédéric Cabrolier, M. Michel Castellani, M. Jean-René Cazeneuve, M. Florian Chauche, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jocelyn Dessigny, M. Fabien Di Filippo, Mme Alma Dufour, Mme Stella Dupont, M. Luc Geismar, Mme Félicie Gérard, M. Daniel Grenon, M. David Guiraud, Mme Nadia Hai, M. Alexandre Holroyd, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Marc Le Fur, Mme Constance Le Grip, Mme Karine Lebon, M. Pascal Lecamp, Mme Charlotte Leduc, M. Mathieu Lefèvre, Mme Patricia Lemoine, Mme Véronique Louwagie, Mme Lise Magnier, M. Louis Margueritte, M. Denis Masséglia, M. Bryan Masson, M. Jean-Paul Mattei, M. Damien Maudet, M. Kévin Mauvieux, Mme Marianne Maximi, M. Benoit Mournet, Mme Christine Pires Beaune, M. Christophe Plassard, M. Robin Reda, M. Sébastien Rome, M. Xavier Roseren, M. Alexandre Sabatou, M. Michel Sala, M. Emeric Salmon, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, M. Philippe Schreck, M. Charles Sitzenstuhl, M. Bertrand Sorre, M. Jean-Philippe Tanguy, M. Jean-Marc Tellier
Assistaient également à la réunion. - M. Dino Cinieri, Mme Anne-Laurence Petel, M. Jean-Pierre Taite