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ÉTUDE d’impact

 

 

 

Projet de loi

relatif à la bioéthique

 

NOR : SSAX1917211L/Bleue-1

 

 

 

 

 

 

24 juillet 2019


Table des matières

 

Introduction générale

Tableau synoptique des consultations

Tableau synoptique des mesures d’application

Article 1er Etendre l’accès à l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes non mariées

Article 1er Clarifier la notion d’âge de procréer

Article 1er Lever l’interdiction du double-don de gamètes et laisser le choix entre accueil d’embryon et double don de gamètes

Article 2 Supprimer le recueil du consentement du conjoint pour le don de gamètes

Article 2 Autoriser sans l’encourager l’autoconservation de gamètes (et supprimer le dispositif d’autoconservation dans le cadre du don qui crée une contrepartie au don)

Article 3  Reconnaître les droits des enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur en leur permettant d’accéder à l’identité de leur donneur sans revenir sur le principe d’anonymat du don

Article 3 Gérer au niveau national les traitements de données relatifs aux tiers donneurs, à leurs dons et aux enfants nés de ces dons

Articles 4  Sécuriser l’établissement de la filiation des enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur réalisée par un couple de femmes

Article 5 Etendre le don croisé d’organes à plus de deux paires de donneurs/receveurs pour améliorer l’accès à la greffe

Article 6  Permettre le prélèvement de cellules souches hématopoïétiques sur un mineur ou un majeur protégé au bénéfice de ses père ou mère pour accroitre les possibilités de greffes intrafamiliales en l’absence d’autre alternative thérapeutique

Article 7 Renforcer les personnes sous mesure de protection de leurs biens dans l’exercice de leur citoyenneté en leur permettant de donner leur consentement au don

Article 8 Permettre la réalisation d’examens de génétique après le décès d’une personne au profit des membres de sa famille

Article 8 Organiser la transmission d’une information génétique dans certaines situations

Article 9 Organiser la transmission d’une information génétique dans les situations de rupture du lien de filiation biologique dans le strict respect de l’anonymat des personnes concernées

Article 10 Rénover l’information et le consentement des personnes à l’ère de la médecine génomique tout en maintenant un haut niveau de protection des personnes concernées

Article 11 Préserver une garantie humaine dans l’interprétation des résultats

Article 12 Encadrer les finalités de recours aux techniques d’enregistrement de l’activité cérébrale

Article 13 Encadrer les dispositifs de neuro-modulation

Article 14 Distinguer les régimes juridiques d’autorisation s’appliquant à l’embryon (maintien des conditions en vigueur) et aux cellules souches embryonnaires et article 15 Réguler, en recherche fondamentale, certaines utilisations des cellules souches pluripotentes induites

Article 14 Fixer une limite de développement des embryons en recherche

Article 16 Fixer une limite de conservation des embryons proposés à la recherche et non inclus dans un protocole après cinq ans

Article 17 Ménager la possibilité d’utilisation des outils de modification ciblée du génome en recherche fondamentale

Article 18 Encourager les « passerelles soin/recherches » par l’utilisation facilitée d’échantillons conservés à d’autres fins

Article 19 Reconnaître la médecine fœtale et rénover la définition du diagnostic prénatal

Article 19 Renforcer l’information de la femme enceinte et du couple

Article 20 Encadrer les interruptions volontaires partielles de grossesse multiple

Article 20 Supprimer le délai de réflexion dans l’interruption de grossesse pour raison médicale

Article 21 Clarifier les conditions d’interruption de grossesse pour raison médicale pour les mineures

Article 22 Permettre la greffe de tissu germinal pour rétablir une fonction hormonale

Article 23 Elargir les missions des conseillers en génétique

Article 24 Garantir une transmission sécurisée des résultats de génétique entre laboratoires

Article 25 Assurer, pour les patients concernés, la passerelle entre la génétique somatique et la génétique constitutionnelle

Article 26 Sécuriser l’utilisation du microbiote fécal

Article 27 Permettre la réalisation de médicament de thérapie innovante préparés ponctuellement dans le cadre d’une seule intervention médicale sous la responsabilité d’un établissement ou organisme autorisé au titre de l’article L. 4211-9-1 du code de la santé publique

Article 28 Diverses mises en cohérence

Article 29 Redéfinir la gouvernance bioéthique et favoriser un débat bioéthique permanent au sein de la société

Article 30 Simplification des missions de  l’Agence de la biomédecine

Article 30 Simplification des instances de  l’Agence de la biomédecine

Article 31 Extension et adaptation des dispositions de loi à Saint-Pierre-et-Miquelon, Mayotte, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna

Article 31 Adaptation du droit national au regard des nouveaux règlements européens 2017/745/UE et 2017/746/UE du 5 avril 2017

Article 31 Adaptation du droit national au regard du règlement (CE) n° 1394/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les médicaments de thérapie innovante

Article 32 Poursuivre une évaluation des lois de bioéthique à échéance régulière


Introduction générale

1. Le législateur a prévu la révision périodique du cadre bioéthique[1] pour débattre à intervalles réguliers de son périmètre au regard des avancées de la science et des évolutions de la société.

La dernière loi de bioéthique du 7 juillet 2011 prévoit, dans son article 47[2], un nouvel examen d'ensemble par le Parlement dans un délai maximal de sept ans, précédé de l’organisation d’états généraux confiée au Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé[3].

2. Ouvrant un nouveau processus de révision de la loi de bioéthique par le Parlement, le Comité consultatif national d’éthique a lancé des états généraux de la bioéthique en janvier 2018 en invitant à la fois les citoyens, profanes ou avertis, mais aussi les experts, à exprimer leurs opinions et à discuter ensemble. Véritable exercice de démocratie sanitaire (avec 270 débats publics, 150 auditions d’associations et de sociétés savantes, plus de 65 000 contributions recueillies sur le site Internet dédié, ainsi que la mise en place d’un comité citoyen pour accompagner le processus et se prononcer sur des sujets de leur choix), il a permis le déploiement d’une vaste consultation de la société. Le Comité consultatif national d’éthique a remis un rapport de synthèse des états généraux le 5 juin 2018[4].

D’autres travaux importants ont été rendus publics par la suite. Le 10 juillet 2018, à la suite de la saisine du Premier ministre, le Conseil d’Etat a remis son étude sur le cadrage juridique préalable au réexamen de la loi relative à la bioéthique[5]. Le 25 septembre 2018, l’avis n° 129 du Comité consultatif national d’éthique[6] a été rendu publique puis, le 25 octobre 2018, l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST)[7] a remis son évaluation de l’application de la loi de bioéthique du 7 juillet 2011 et du rapport de synthèse des états généraux de la bioéthique par. Enfin, le 15 janvier dernier, la Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, mise en place à l’Assemblée nationale a rendu son rapport[8].

A partir de ces travaux préparatoires[9], le Gouvernement  a travaillé au présent projet de loi dans un contexte marqué, d’une part, par des sauts technologiques inédits qui posent de nouvelles questions éthiques et nécessitent un accompagnement dans leurs utilisations et leurs applications et, d’autre part, la manifestation de revendications au nom de l’exercice d’une liberté qui ne porterait pas atteinte à autrui.

3. Le Gouvernement ne peut ignorer que la société française évolue vers plus d’ouverture et de tolérance mais aussi vers une radicalisation de certains groupes de pensée et, par ailleurs, que des marchés se développent, des pratiques prospèrent dans d’autres pays et que les frontières s’effacent.

Dans son ouvrage, le Gouvernement a souhaité dessiner un cadre permettant à la liberté de chacun de s'exprimer, dans le respect de l'intérêt collectif en cherchant ce point d’équilibre entre ce que la science propose, ce que la société revendique et les valeurs fondamentales qui soutiennent l’identité bioéthique de la France, pionnière en matière de législation dans le domaine de la bioéthique, tout en accordant une place particulière aux situations de souffrance voire de drame que rencontrent certaines personnes.

Les questions bioéthiques se caractérisent par leur complexité et le Gouvernement s’est attaché à tirer le fil de leurs implications, à court et à long terme, pour l’individu et pour la société.

Le projet de loi est articulé autour de six axes structurants.

Le premier de ces axes (Titre Ier) élargit l’accès aux technologies déjà disponibles en matière de procréation tout en continuant de les encadrer. Les mesures qu’il contient ouvrent des droits qui ne sont contraires à aucun principe bioéthique, et qui peuvent être exercés dans un cadre protecteur en particulier pour l’enfant à naître.

Le deuxième axe (Titre II) traduit le souhait du Gouvernement d’encourager la solidarité entre les personnes, notamment par le don d’éléments et produits du corps humain, sans renoncer au respect et à la protection des droits individuels.

L’appui à une diffusion de nouveaux progrès scientifiques et technologiques dans le respect des principes éthiques constitue le troisième axe du projet (Titre III).

Le quatrième axe (Titre IV) traduit la volonté du Gouvernement de soutenir une recherche libre et responsable, au service de la santé humaine. Pour encourager une recherche visant à mieux comprendre les mécanismes biologiques de la vie humaine dans une perspective médicale, il faut lever certains verrous juridiques et supprimer les contraintes infondées, tout en portant les valeurs éthiques françaises sur la scène de la recherche internationale.

La poursuite de l’amélioration de la qualité et de la sécurité des pratiques concernées par le champ bioéthique constitue un cinquième axe (Titre V).

Le dernier axe (Titre VI) regroupe les mesures qui permettront d’installer une gouvernance bioéthique adaptée au rythme des avancées des sciences et des techniques.

Un titre VII permet de prévoir plusieurs ordonnances[10].

Les grandes orientations du projet de loi du Gouvernement accordent de nouveaux droits, apportent les ajustements rendus nécessaires par les évolutions tant techniques et technologiques que sociétales, et s’intègrent à l’édifice bioéthique qui assure, depuis vingt-cinq ans en France, un équilibre entre le respect de la dignité de la personne humaine, l’autonomie de chacun et la solidarité de tous.

 


Tableau synoptique des consultations

Article

Objet de l’article

Consultations menées

1er

 

 

 

Etendre l’accès à l’AMP aux couples de femmes et aux femmes non mariées

 

Caisse nationale d’assurance maladie (avis du 2 juillet 2019)

Conseil central d’administration de la caisse nationale de la mutualité sociale agricole (avis du 26 juin 2019)

Union nationale des caisses d’assurance maladie

Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (avis du 3 juillet 2019)

Caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

2

 

 

 

Autoriser sans l’encourager l’autoconservation de gamètes (et supprimer le dispositif d’autoconservation dans le cadre du don)

 

Caisse nationale d’assurance maladie (avis du 2 juillet 2019)

Conseil central d’administration de la caisse nationale de la mutualité sociale agricole (avis du 26 juin 2019)

Union nationale des caisses d’assurance maladie

Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (avis du 3 juillet 2019)

Caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

3

Reconnaître les droits des enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur en leur permettant d’accéder à l’identité de leur donneur sous réserve de l’accord exprès de ce dernier sans revenir sur le principe d’anonymat du don des éléments et produits du corps humain

Gérer au niveau national les traitements de données relatifs aux tiers donneurs, à leurs dons et aux enfants nés de ces dons

 

 

 

 

 

Commission nationale de l'informatique et des libertés (délibération du 11 juillet 2019)

Conseil national de la protection de l'enfance

Agence de la biomédecine (avis du 26 juin 2019) 

 

 

 

4

Sécuriser l’établissement de la filiation des enfants nés d’assistance médicale avec tiers donneur réalisée par un couple de femmes

 

Conseil national d'évaluation des normes (avis du 11 juillet 2019)

Conseil supérieur du notariat (avis du 5 juillet 2019)

5

 

Etendre le don croisé d’organes à plus de deux paires de donneurs/receveurs pour améliorer l’accès à la greffe

 

Agence de la biomédecine (avis du 26 juin 2019) 

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

 

6

Permettre le prélèvement de cellules souches hématopoïétiques sur un mineur ou un majeur protégé au bénéfice de ses père et mère pour accroitre les possibilités de greffes intrafamiliales en l’absence d’autre alternative thérapeutique

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

Agence de la biomédecine (avis du 26 juin 2019) 

Conseil national de la protection de l'enfance

 

7

Renforcer les personnes sous mesure de protection de leurs biens dans l’exercice de leur citoyenneté en leur permettant de donner leur consentement au don

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

 

8

 

 

Permettre la réalisation d’examens de génétique après le décès d’une personne au profit des membres de sa famille

 

 

 

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

Agence de la biomédecine (avis du 26 juin 2019) 

Conseil national de l’Ordre des médecins (avis du 4 juillet 2019)

8

 

 

Organiser la transmission d’une information génétique dans certaines situations

 

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

Agence de la biomédecine (avis du 26 juin 2019) 

Conseil national de l’Ordre des médecins (avis du 4 juillet 2019)

9

Organiser la transmission d’une information génétique dans les situations de rupture du lien de filiation biologique dans le strict respect de l’anonymat des personnes concernées

Conseil nationale de la protection de l’enfance

Conseil national d’accès aux origines personnelles (avis du 26 juillet 2019)

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

 

 

10

Rénover l’information et le consentement des personnes à l’ère de la médecine génomique tout en maintenant un haut niveau de protection des personnes concernées

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

11

 

Préserver une garantie humaine en cas d’utilisation d’un traitement algorithmique de données massives

 

Commission nationale de l'informatique et des libertés (délibération du 11 juillet 2019)

 

Conseil national de l’Ordre des médecins (avis du 4 juillet 2019)

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

12

Encadrer les finalités de recours aux techniques d’enregistrement de l’activité cérébrale

 

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

13

 

Encadrer les dispositifs de neuromodulation

 

Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (avis du 8 juillet 2019)

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

14 et 15

Distinguer les régimes juridiques d’autorisation s’appliquant à l’embryon (maintien des conditions en vigueur) et aux cellules souches embryonnaires

Réguler, en recherche fondamentale, certaines utilisations des cellules souches pluripotentes induites

Fixer une limite de développement des embryons en recherche

 

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

 

Agence de la biomédecine (avis du 26 juin 2019) 

16

Fixer une limite de conservation des embryons proposés à la recherche et non inclus dans un protocole après 5 ans

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

Agence de la biomédecine (avis du 26 juin 2019) 

17

Ménager la possibilité d’utilisation des outils de modification ciblée du génome en recherche fondamentale

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

Agence de la biomédecine (avis du 26 juin 2019)

18

 

Encourager les passerelles soin/recherches par l’utilisation facilitée d’échantillons conservés à d’autres fins

Commission nationale de l'informatique et des libertés (délibération du 11 juillet 2019)

 

Commission nationale des recherches impliquant la personne humaine (avis du 4 juillet 2019)

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

19

Reconnaître la médecine fœtale et rénover la définition du diagnostic prénatal

 

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

 

19

Renforcer l’information de la femme enceinte et du couple

Agence de la biomédecine (avis du 26 juin 2019) 

Agence national de sécurité du médicament et des produits de santé (avis du 8 juillet 2019)

20

Encadrer les interruptions partielles de grossesse multiple

Supprimer le délai de réflexion dans l’interruption de grossesse pour raison médicale

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

21

Clarifier les conditions d’interruption de grossesse pour raison médicale pour les mineures

Conseil national de la protection de l'enfance

 

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

22

Permettre la greffe de tissu germinal pour rétablir une fonction hormonale

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

23

Elargir les missions des conseillers en génétique

Conseil national de l’Ordre des médecins (avis du 4 juillet 2019)

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

24

 

Garantir une transmission sécurisée des résultats de génétique entre laboratoires

 

Commission nationale de l'informatique et des libertés (délibération du 11 juillet 2019)

 

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

25

Assurer, pour les patients concernés, la passerelle entre la génétique somatique et la génétique constitutionnelle

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

 

 

26

 

Sécuriser l’utilisation du microbiote fécal

 

 

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

Agence national de sécurité du médicament et des produits de santé (avis du 8 juillet 2019)

27

Assouplir la possibilité de préparer des médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement

Haute autorité de santé (avis du 12 juillet 2019)

Agence national de sécurité du médicament et des produits de santé (avis du 8 juillet 2019)

28

Diverses mises en cohérence

Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (avis du 8 juillet 2019)

29

Redéfinir la place, le rôle et le fonctionnement du CCNE

Organiser et favoriser un débat bioéthique permanent au sein de la société

Comité national consultatif d’éthique (avis du 28 juin 2019)

30

Simplifier les missions de l’Agence de la biomédecine 

Rénover la Gouvernance de l’Agence de la biomédecine

Agence de la biomédecine (avis du 26 juin 2019) 

 


Tableau synoptique des mesures d’application

Article

Objet de l’article

Nature du texte d’application

Objet du texte d’application

Administration compétente

1er

Etendre l’accès à l’AMP aux couples de femmes et aux femmes non mariées

Clarifier la notion d’âge de procréer

Lever l’interdiction du double-don de gamètes et laisser le choix entre accueil d’embryon et double don de gamètes

Décrets en Conseil d’Etat (2)

 

-          Conditions d’âge requises pour bénéficier d’une assistance médicale à la procréation (après avis de l’Agence de la biomédecine)

-          Modification du 2° de l’article R. 160-17 du code de la sécurité sociale (ticket modérateur)

Ministère des solidarités et de la santé (DGS ; DSS)

2

Autoriser sans l’encourager l’autoconservation de gamètes (et supprimer le dispositif d’autoconservation dans le cadre du don)

Supprimer le recueil du consentement du conjoint pour le don de gamètes

Décret en Conseil d’Etat

 

Conditions d’âge pour être éligible à la mesure (après avis de l’Agence de la biomédecine)

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

3

Reconnaître les droits des enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur en leur permettant d’accéder à l’identité de leur donneur sous réserve de l’accord exprès de ce dernier sans revenir sur le principe d’anonymat du don des éléments et produits du corps humain

Gérer au niveau national les traitements de données relatifs aux tiers donneurs, à leurs dons et aux enfants nés de ces dons

Décrets en Conseil d’Etat (5)

 

 

Décret simple (1)

 

-          Modalités de recueil de l’identité des enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur  Durée de conservation des données par l’Agence de la biomédecine

-          Nature des données non identifiantes

-          Nature des pièces à joindre à la demande d’une personne née de don qui s’adresse à la Commission

-          Composition de la Commission ad’hoc

-          Date à partir de laquelle ne pourront être utilisés pour toute insémination et toute tentative d’assistance médicale à la procréation que les embryons proposés à l’accueil et les gamètes issus de dons réalisés à compter du premier jour du treizième mois à compter de la promulgation de la loi.

 

 

 

 

 

Ministère des solidarités et de la santé (DGS et DGOS)

4

Sécuriser l’établissement de la filiation des enfants nés d’assistance médicale avec tiers donneur réalisée par un couple de femmes

Décret en Conseil d’Etat (1)

Arrêté du ministre chargé de la Justice

Arrêté conjoint du ministère de la justice et du ministère de l'Économie et des Finances.

-          Adaptation réglementaire pour le nom et la délivrance de livret de famille (décret)

-          Modèle de livret de famille (arrêté)

-          Tarification de la déclaration de volonté devant notaire (arrêté conjoint)

Ministère de la Justice (DACS)

5

Etendre le don croisé d’organes à plus de deux paires de donneurs/receveurs pour améliorer l’accès à la greffe

Décrets en Conseil d'Etat (2)

-          Dispositions applicables au don croisé d'organes

-          Conditions de fonctionnement du comité donneur vivant

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

6

Permettre le prélèvement de cellules souches hématopoïétiques sur un mineur ou un majeur protégé au bénéfice de ses père et mère pour accroitre les possibilités de greffes intrafamiliales en l’absence d’autre alternative thérapeutique

Décret en Conseil d'Etat (1)

-          Modalités d’application de la mesure

 

8

Permettre la réalisation d’examens de génétique après le décès d’une personne au profit des membres de sa famille

Organiser la transmission d’une information génétique dans certaines situations

Décret en Conseil d'Etat (1)

 

Arrêté du ministre chargé de la santé pris sur proposition de l’Agence de la biomédecine

-          Modalités d’application de la mesure

-          Critères déterminant les situations médicales justifiant, chez une personne hors d’état d’exprimer son consentement ou décédée, la réalisation d’un examen des caractéristiques génétiques à des fins médicales

Ministère des solidarités et de la santé (DGS et DGOS)

9

Organiser la transmission d’une information génétique dans les situations de rupture du lien de filiation biologique dans le strict respect de l’anonymat des personnes concernées

Décrets en Conseil d’Etat (2)

-          Conditions de transmission des informations par le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles

-          Adaptation des dispositions en vigueur dans le cadre du don de gamètes

Ministère des solidarités et de la santé (DGCS)

10

Rénover l’information et le consentement des personnes à l’ère de la médecine génomique tout en maintenant un haut niveau de protection des personnes concernées

Décret en Conseil d’Etat (1)

Révision des dispositions réglementaires du champ concerné

 

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

13

Encadrer les dispositifs de neuromodulation

Si nécessaire, décret après avis de la Haute Autorité de santé

(Actes, procédés, techniques, méthodes et équipements ayant pour objet de modifier l’activité cérébrale et présentant un danger grave ou une suspicion de danger grave pour la santé humaine)

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

14

Distinguer les régimes juridiques d’autorisation s’appliquant à l’embryon (maintien des conditions en vigueur) et aux cellules souches embryonnaires

Fixer une limite de développement des embryons en recherche

Décret en Conseil d’Etat (1)

Modalités du nouveau régime juridique s’appliquant aux recherches portant sur les cellules souches embryonnaires

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

Ministère de l’Enseignement supérieur de la recherche et de l’innovation (DGRI)

15

Réguler, en recherche fondamentale, certaines utilisations des cellules souches pluripotentes induites

Décret en Conseil d’Etat (1)

Modalités du nouveau régime juridique s’appliquant aux recherches à partir de cellules souches pluripotentes induites

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

Ministère de l’Enseignement supérieur de la recherche et de l’innovation (DGRI)

16

Fixer une limite de conservation des embryons proposés à la recherche et non inclus dans un protocole après 5 ans

Décret en Conseil d’Etat (1)

Décret en Conseil d’Etat pris après avis de l’Agence de la biomédecine

-          Conditions de consultation des deux membres du couple ou de la femme (devenir des embryons)

-          Conditions de la poursuite de la conservation des embryons (intérêt particulier pour la recherche)

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

Ministère de l’Enseignement supérieur de la recherche et de l’innovation (DGRI)

18

Encourager les passerelles soin/recherches par l’utilisation facilitée d’échantillons conservés à d’autres fins

Décret simple

Modalités d’information des personnes et celles permettant l’expression de leur opposition (utilisation d’échantillons biologiques conservés à d’autres fins)

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

Ministère de l’Enseignement supérieur de la recherche et de l’innovation (DGRI)

19

Reconnaître la médecine fœtale et rénover la définition du diagnostic prénatal

Renforcer l’information de la femme enceinte et du couple

Décret en Conseil d’Etat (1)

 

 

 

 

 

Arrêtés du ministre chargé de la santé (5)

-          Modalités d’information de l’autre membre du couple

-          Bonnes pratiques relatives

-          aux centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal (sur proposition de l'Agence de la biomédecine)

-          aux examens de biologie médicale concourant au diagnostic prénatal (Sur proposition de l'Agence de la biomédecine et après avis de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé)

-          - au diagnostic préimplantatoire (sur proposition de l’Agence de la biomédecine)

-          aux modalités de réalisation des examens d'imagerie concourant au diagnostic prénatal (après avis de l’Agence de la biomédecine et de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé)

-          Critères médicaux justifiant la communication à la femme enceinte des caractéristiques génétiques fœtales sans relation certaine avec l’indication initiale de l’examen (sur proposition de l’Agence de la biomédecine)

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

23

Elargir les missions des conseillers en génétique

Décret en Conseil d’Etat (après avis de l’Académie nationale de médecine)

Modalités de mise en œuvre et notamment modalités de communication des résultats à la personne concernée par le médecin qualifié en génétique

 

 

Ministère des solidarités et de la santé (DGS et DGOS)

25

Assurer, pour les patients concernés, la passerelle entre la génétique somatique et la génétique constitutionnelle

Décret en Conseil d’Etat (1)

Modalités d’information des personnes avant la réalisation d’examens de génétique somatique

Ministère des solidarités et de la santé (DGS et DGOS)

26

Sécuriser l’utilisation du microbiote fécal

Décret (1)

Modalités d’application du chapitre (utilisation thérapeutique de selles d’origine humaine)

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

27

Assouplir la possibilité de préparer des médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement

Décret en Conseil d’Etat (1)

Conditions applicables à la préparation ainsi que type de médicaments concernés

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

29

Redéfinir la place, le rôle et le fonctionnement du CCNE

Organiser et favoriser un débat bioéthique permanent au sein de la société

Décrets simples (2)

 

Décret en Conseil d’Etat (1)

-          Liste des ministres proposant quinze personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence et de leur intérêt pour les problèmes d’éthique

-          Liste des organismes proposant quinze personnalités appartenant au secteur de la santé et de la recherche

-          Conditions de désignation des membres, notamment modalités de renouvellement par moitié et modalités du respect des règles de parité

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)

 

Ministère de l’Enseignement supérieur de la recherche et de l’innovation (DGRI)

31

Habilitations

Ordonnances (4)

 

Ministère des solidarités et de la santé (DGS)


Article 1er Etendre l’accès à l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes non mariées

1. État des lieux

1.1. Cadre général

Aux termes du premier alinéa de l’article L. 2141-1 du code de la santé publique, l'assistance médicale à la procréation (AMP) s'entend des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro, la conservation des gamètes, des tissus germinaux et des embryons, le transfert d'embryons et l'insémination artificielle.

Elle s’adresse actuellement à des couples formés d’un homme et d’une femme engagés dans un projet parental sans référence au statut matrimonial du couple ou à d’autres conditions de stabilité de l’union[11]. Le couple doit être vivant, en âge de procréer et avoir préalablement consenti à l’assistance médicale à la procréation devant le notaire :

« L'homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l'insémination. Font obstacle à l'insémination ou au transfert des embryons le décès d'un des membres du couple, le dépôt d'une requête en divorce ou en séparation de corps ou la cessation de la communauté de vie, ainsi que la révocation par écrit du consentement par l'homme ou la femme auprès du médecin chargé de mettre en œuvre l'assistance médicale à la procréation. » (deuxième alinéa de l’article L. 2141-2 du code de la santé publique).

Le premier alinéa de l’article précité dispose que :

« L'assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l'infertilité d'un couple ou d'éviter la transmission à l'enfant ou à un membre du couple d'une maladie d'une particulière gravité. Le caractère pathologique de l'infertilité doit être médicalement diagnostiqué. »

La démarche du couple est donc une démarche médicale. De fait, trois types de situations conduisent à mettre en œuvre les techniques d’assistance médicale à la procréation :

-          Une infertilité du couple dont le caractère pathologique doit être médicalement diagnostiqué ;

-          Le risque de transmission à l’enfant d’une maladie d’une particulière gravité (maladie génétique par exemple) ;

-          Le risque de transmission à l’un des membres du couple, lors de la conception de l’enfant, d’une maladie d’une particulière gravité (maladies virales comme l’infection par le VIH par exemple).

Par ailleurs, les techniques d’AMP sont représentées par :

-          L’insémination artificielle (insémination intra-utérine) réalisée par des gynécologues et le plus souvent précédée d’une stimulation ovarienne ; le sperme (le cas échéant provenant d’un tiers donneur) est préparé en laboratoire avant l’insémination ;

-          La fécondation in vitro (FIV) qui comporte les phases de stimulation ovarienne, ponction des follicules[12], préparation des gamètes (ovocytes et spermatozoïdes) en laboratoire, mise en fécondation, développement embryonnaire, transfert in utero de l’embryon cultivé in vitro 2 à 3 jours (jusqu’à 6 jours dans certains cas) ; la FIV classique (fécondation naturelle des gamètes mis en contact in vitro) se distingue de la fécondation par micro-injection des spermatozoïdes dans l’ovocyte[13], proposée dans certaines circonstances[14].

Les autres points saillants de l’encadrement de l’assistance médicale à la procréation peuvent être ainsi résumés :

-          Les embryons « surnuméraires » dont le développement est satisfaisant sont congelés pour être conservés (toutefois la mise en œuvre de l’AMP doit privilégier les pratiques et les procédés qui permettent de limiter le nombre d’embryons conservés[15]) ;

-          Un couple dont des embryons sont conservés ne peut bénéficier d’une nouvelle tentative de fécondation in vitro avant leur transfert, sauf si un problème de qualité affecte ces embryons[16]  ;

-          Un embryon conçu par AMP doit l’être avec des gamètes provenant d’au moins un des membres du couple et le double don de gamètes (don de spermatozoïdes et don d’ovocyte) est interdit[17] ;

-          En cas d’abandon du projet parental ou de décès, les deux membres du couple donneur ou le membre survivant peuvent consentir par écrit à ce que leurs embryons surnuméraires soient accueillis par un autre couple[18] (les modalités de l’accueil d’embryon sont précisées aux articles).

Enfin, le couple consent par écrit à l’assistance médicale à la procréation après plusieurs entretiens avec l’équipe clinico-biologique pluridisciplinaire d’AMP[19] qui permettent de délivrer au couple une information la plus complète possible ainsi que de vérifier s’il répond aux conditions d’éligibilité et, plus globalement, de recours aux techniques de procréation. L’équipe clinico-biologique pluridisciplinaire du centre dispose d’une marge de manœuvre sur l’acceptation du couple au regard des intérêts de l’enfant à naître.

Aux termes de l’arrêté du 30 juin 2017 modifié relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation :

« L’équipe pluridisciplinaire peut à tout moment différer ou refuser la prise en charge dans les limites fixées par la loi et le code de déontologie, dans la mesure où tout médecin doit tenir compte des avantages et inconvénients des différentes investigations et thérapeutiques possibles, et dans la mesure où les textes régissant l’AMP prévoient un délai de réflexion supplémentaire lorsque l’équipe le considère nécessaire. Les raisons en sont expliquées aux personnes concernées. »[20].


Résumé de l’activité et des résultats d’AMP en 2016[21]

 

 

Nombre de centres actifs*

Tentatives**

Grossesses échographiques

Accouchements

Enfants nés vivants

Statut vital des nouveau-nés inconnu

Intraconjugal

.

.

.

.

.

.

Insémination intra-utérine

180

49498

6285

5254

5688

16

FIV hors ICSI

100

19913

4193

3641

3847

229

ICSI

100

40722

8699

7646

7853

637

TEC

100

31693

7095

6080

6030

456

Spermatozoïdes de donneur

.

.

.

.

.

.

Insémination intra-utérine

90

2870

611

544

590

3

Insémination intra-cervicale

0

.

.

.

.

.

FIV hors ICSI

33

145

31

28

28

1

ICSI

86

872

208

189

208

13

TEC

79

510

132

116

109

12

Don d'ovocytes

.

.

.

.

.

.

FIV hors ICSI

6

50

13

12

13

0

ICSI

28

872

200

157

159

25

TEC

25

381

74

54

59

0

Accueil d'embryons

.

.

.

.

.

.

TEC

19

154

32

24

25

0

Non renseigné***

.

.

.

.

.

.

FIV hors ICSI

1

34

0

0

0

0

ICSI

1

15

0

0

0

0

TEC

1

1

0

0

0

0

Total

180

147730

27573

23745

24609

1392

*Centres actifs : centres ayant déclaré une activité et envoyé leur rapport d'activité à l'Agence en 2016
**Tentatives : cycles d'insémination artificielle (IIU, IIC) + ponctions d'ovocytes dans le cadre des fécondations in vitro (FIV, ICSI) + transferts d'embryons congelés (TEC) + mises en fécondation (don d’ovocytes)
***Non renseignée : origine du sperme non renseignée


L’activité d’assistance médicale à la procréation peut être ainsi synthétisée[22]  :

-          En 2016, 147 730 tentatives d’AMP ont été recensées, regroupant les inséminations (IIU pour inséminations intra-utérines), les fécondations in vitro (FIV avec ou sans micromanipulation dite ICSI) et les transferts d’embryons congelés (TEC) avec gamètes et embryons de différentes origines ;

-          Si le volume global des activités d’AMP évolue peu depuis 2013, on note toutefois que le nombre des TEC augmente chaque année, ce qui traduit l’évolution des pratiques avec le développement du transfert mono-embryonnaire et de la technique de vitrification embryonnaire, l’objectif poursuivi étant de limiter le nombre de grossesses multiples ;

-          Pour 96% des AMP, les tentatives (IIU, FIV hors ICSI, ICSI et TEC) sont réalisées avec les gamètes des deux membres du couple. Dans 4% des cas, les tentatives utilisent des spermatozoïdes, des ovocytes ou des embryons issus de don ;

-          Les inséminations artificielles (52 368 cycles), bien qu’en diminution, occupent toujours une large place au sein des activités d’AMP (35% de l’ensemble des tentatives). Principalement réalisées en intraconjugal, les inséminations intra-utérines font appel aux spermatozoïdes de donneur dans 5,5% des cas ;

-          En 2016, le recours à l’ICSI représente 68% de l’ensemble des tentatives de fécondation in vitro quelle que soit l’origine des gamètes utilisés ; ce taux est stable depuis 2013. On peut remarquer que la pratique d’ICSI reste majoritaire lorsqu’il est fait appel à des ovocytes ou des spermatozoïdes issus de don ;

-          Mise en œuvre dans 19 centres, l’activité d’accueil d’embryons reste minime avec 154 transferts embryonnaires en 2016 ;

-          Les différences observées sur les taux de grossesse et d’accouchement en fonction des techniques et de l’origine des gamètes sont davantage liées aux indications de ces différentes AMP (causes de l’infertilité, pathologies associées, etc.) qu’aux procédés eux-mêmes ;

-          Globalement les taux d’implantation embryonnaire semblent augmenter progressivement au cours de ces dernières années pour l’ensemble des techniques ;

-          Des chances de succès supplémentaires sont réellement offertes aux couples dès lors qu’il a été possible de conserver des embryons après la fécondation in vitro ; les couples pourront ainsi bénéficier d’un ou de plusieurs transferts embryonnaires supplémentaires ;

-          Selon l’INSEE, en 2016, 798 948 nouveau-nés ont vu le jour en France. Les enfants nés vivants, conçus après une AMP réalisée en 2016, au nombre de 24 609[23], représentent 3,1% des enfants nés de la population générale ;

-          Le nombre d’enfants conçus par AMP parmi les enfants nés chaque année en France augmente légèrement depuis 2009 (2,6% en 2009, 2,7% en 2010, 2,9% en 2013, 3,1% en 2014, 3,1% en 2015 et 2016). On estime qu’un enfant sur 32 est issu d’une AMP ;

-          Parmi les 26 355 enfants nés issus d’une AMP réalisée en 2016 :

-          Enfin 5% des enfants conçus par AMP sont nés grâce à un don (1 263 enfants).

Evolution du don de gamètes de 2013 à 2016[24]

 

 

2013

2014

2015

2016

Don de spermatozoïdes

 

 

 

 

Donneurs

 

 

 

 

Nombre de donneurs acceptés dont le sperme a été congelé dans l'année

268

242

255

363

Dons

 

 

 

 

Nombre de paillettes congelées dans l'année issues des donneurs acceptés dans l'année

11837

11316

12038

17841

Nombre de paillettes congelées/donneur

44.2

46.8

47.2

49.1

Nombre de paillettes utilisées dans l'année

8142

8409

7554

6710

Nombre de paillettes/grossesse

26.9

25.9

24.9

20

Nombre de paillettes en stock au 31 décembre de l'année

113219

90363

87660

89896

Couples receveurs

 

 

 

 

Nombre de demandes d'AMP avec spermatozoïdes de donneur dans l'année

2427

2278

2530

2209

Nombre de demandes d'AMP dans l'année/donneur accepté dans l'année

9.1

9.4

9.9

6.1

Nombre de couples ayant effectué au moins une tentative d'AMP avec les spermatozoïdes d'un donneur dans l'année

2459

2450

2382

1760

Don d'ovocytes

 

 

 

 

Donneuses

 

 

 

 

Ponctions réalisées dans l'année

454

500

540

746*

• Dons au cours d'une FIV/ICSI

8

16

14

32

• Non renseigné

0

0

1

13

% de dons au cours d'une FIV

1.8

3.2

2.6

4.3

Couples receveurs

 

 

 

 

Nouvelles demandes acceptées

1035

871

801

931

Couples ayant bénéficié d'une AMP avec don d'ovocytes

756

861

818

968

Couples en attente de don d'ovocytes au 31/12 de l'année

2673

2452

2516

2512

*En 2016, parmi les 746 ponctions en vue de don, 32 ont été faites dans le cadre d’une fécondation in vitro associées à un don


L’activité de don de gamètes peut être pour sa part  résumée de la façon suivante[25]:

-          Dans 4% des cas, les tentatives d’AMP font appel aux gamètes issus d’un don ;

-          L’activité de don d’ovocytes augmente régulièrement en France mais reste insuffisante pour répondre à la demande et satisfaire la liste des couples inscrits en attente ;

-          En 2016, 746 prélèvements d’ovocytes ont été effectués en vue de don ;

-          Dans les 29 centres actifs et autorisés pour l’activité de don d’ovocytes (19 régions), 922 tentatives de fécondations in vitro ont été réalisées pour des couples receveurs et 381 transferts d’embryons congelés issus de don d'ovocytes sont venus s’ajouter aux tentatives de fécondation in vitro la même année ;

-          Au total, en 2016, 1 147 transferts embryonnaires ont été réalisés pour 968 couples ayant bénéficié au cours de l’année d’au moins une tentative ;

-          259 enfants ont été conçus grâce à un don d'ovocytes ;

-          Le nombre de couples inscrits sur les listes d’attente de don d'ovocytes a beaucoup augmenté entre 2009 et 2013[26]. Il semble s’être stabilisé depuis 2014.

-          Un équilibre semble exister depuis 2014 entre les nouvelles demandes acceptées dans l’année et le nombre de couples ayant bénéficié d’au moins une tentative la même année ; en 2016, 931 nouvelles demandes ont été enregistrées et 968 couples ont pu bénéficier d’au moins une tentative ;

-          Concernant le don de spermatozoïdes, on constate en 2016 une augmentation du nombre de donneurs acceptés dans l’année avec, dans les 29 centres actifs autorisés pour le don de spermatozoïdes, 363 donneurs ont été acceptés et leur sperme congelé en 2016 ;

-          Le nombre de demandes d'AMP avec spermatozoïdes de donneur ainsi que le nombre de couples ayant effectué au moins une tentative d'AMP avec les spermatozoïdes d'un donneur ont diminué (principalement du fait d’une diminution du nombre d’Inséminations intra-utérines) par rapport aux années précédentes[27] ;

-          En 2016, 1 760 couples ont bénéficié d’au moins une tentative d’AMP avec les spermatozoïdes d’un donneur ;

-          Les précédents rapports de l’Agence de la biomédecine montrent que ce nombre n’a cessé de décroitre depuis les dix dernières années puisqu’il était de 2 880 couples en 2007[28] ;

-          En résumé, les 363 nouveaux donneurs de 2016 ont permis de congeler environ 18 000 nouvelles paillettes de sperme (les paillettes sont des petits tubes dans lesquels sont conservés les échantillons de sperme sachant qu’il il faut environ 20 paillettes par grossesse) ; ces 18 000 paillettes peuvent être mises en regard des 6 700 paillettes issues de donneurs utilisées en 2016 pour 1760 couples nécessitant un don de spermatozoïdes ;

-          Enfin, les délais d’attente pour une AMP avec don de spermatozoïdes sont en général inférieurs à un an[29] dans ce contexte de diminution des demandes.

1.2. Cadre constitutionnel

Dans sa décision n° 94-343/344 DC du 27 juillet 1994, le Conseil constitutionnel a considéré qu'aucune disposition du Préambule de la Constitution de 1946 ne fait obstacle à ce que les conditions du développement de la famille soient assurées par des dons de gamètes ou d'embryons dans les conditions prévues par la loi.

1.3. Cadre conventionnel

1.3.1 La Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine[30] (Convention d’Oviedo) comporte , un seul article en matière d’assistance médicale à la procréation ;  l’article 14 précise que  « l’utilisation des techniques d’assistance médicale à la procréation n’est pas permise pour choisir le sexe de l’enfant à naître, sauf en vue d’éviter une maladie héréditaire grave liée au sexe ».

1.3.2 L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme dispose que « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale » et son article 14 interdit la discrimination, notamment à raison de l’orientation sexuelle.

Dans un arrêt de Grande chambre rendu le 3 novembre 2011, S.H. c. Autriche n°57813/00, la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que « le droit des couples à concevoir un enfant et à recourir pour ce faire à la procréation médicalement assistée relève de la protection de l’article 8, pareil choix constituant une forme d’expression de la vie privée et familiale » mais a reconnu que les Etats bénéficient d’une large marge d’appréciation dans ce domaine au regard des « délicates interrogations d’ordre moral et éthiques » que suscite notamment la fécondation in vitro[31].

S’agissant de la fermeture de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes, la Cour a relevé, à l’occasion d’une affaire dans laquelle une femme voulait adopter l’enfant de sa conjointe, que le dispositif français d’assistance médicale à la procréation, en ce qu’il a une visée thérapeutique, ne peut pas être considéré « comme étant à l’origine d’une différence de traitement dont les requérantes seraient elles victimes », les couples de femmes ne se trouvant pas dans la même situation que les couples hétérosexuels infertiles[32].

En tout état de cause, bien qu’elle ait été saisie de cette question[33], la Cour n’a jamais eu l’occasion de statuer sur une affaire concernant directement l’accès des couples de femmes ou des femmes seules à l’assistance médicale à la procréation en France.

1.4. Éléments de droit comparé

1.4.1 En Europe, plusieurs Etats ont ouvert l’accès à l’AMP pour les couples de femmes et les femmes célibataires.

En Belgique, la loi du 6 juillet 2007 relative à la procréation médicalement assistée ne mentionne pas de restrictions à l’accès à l’AMP. Toutefois, la loi précise que chaque centre est libre de refuser une demande d’AMP (en indiquant par écrit les raisons médicales du refus ou en invoquant la clause de conscience). Ainsi, il n’y a pas de limitation légale du recours à l’AMP - ouverte aux personnes vivant seules, aux couples mariés ou non, hétérosexuels ou homosexuels - mais les centres élaborent leurs propres critères d’accès[34].

Au Danemark, il n’y a pas de restrictions à l’accès à l’AMP[35].

En Espagne, la loi n° 14 du 26 mai 2006 portant sur les techniques de procréation médicalement assistée autorise le recours à l’AMP pour les couples de femmes et les femmes célibataires (disposition similaire dans la loi de 1988) [36].

En Finlande, la loi sur les traitements d’assistance à la fertilité (laki hedelmöityshoidoista ; 1237/2006) est entrée en vigueur le 1er septembre 2007. La législation nationale repose sur les notions de « couple » et de « bénéficiaire du traitement ». Les dispositions de certains articles de la loi varient selon que le traitement est proposé à un couple ou à une femme non mariée ou ne vivant pas dans une relation comparable au mariage avec une personne de sexe opposé[37].

Aux Pays-Bas, la loi du 20 juin 2002 sur les embryons comporte peu de règles sur l’AMP. Les questions non abordées par cette loi sont réglées par d’autres textes, notamment la loi du 2 mars 1994 sur l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes qui interdit toute discrimination. Ainsi, ni l’état civil ni l’orientation sexuelle ne peuvent constituer des critères limitant l’accès à l’AMP. Le principe de base veut qu’aucune différence d’accès n’existe entre une femme célibataire et une femme homosexuelle. Toutefois, certains centres de FIV appliquent une politique de sélection plus stricte que d’autres[38].

Au Royaume-Uni, le Human Fertilisation and Embryology Act de 1990 n’interdit pas l’accès à l’AMP aux couples homosexuels ou aux femmes célibataires. Dans le HFE Act de 2008, en son article 13, la nécessité de prendre en compte le besoin de l'enfant d'avoir un père a été supprimée[39].

En Suède, la loi sur l’intégrité génétique est entrée en vigueur le 1er juillet 2006. Un changement à la législation, entré en vigueur le 1er avril 2016, autorise l’accès à l’AMP pour les femmes célibataires. Auparavant, l’accès à l’AMP était réservé aux couples stables. Les couples de femmes ont accès à l’AMP depuis 2005[40],[41],[42].

Certains pays européens ont ouvert l’accès à l’AMP pour les couples de femmes mais pas pour les femmes célibataires.

En Norvège, la loi relative à l’application de la biotechnologie dans la médecine humaine a été adoptée en 2003. Une modification de la législation, entrée en vigueur le 1er janvier 2009, autorise l’accès à l’AMP aux couples de femmes, mais pas aux femmes célibataires[43],[44].

En Autriche, l’accès à l’AMP est ouvert aux couples hétérosexuels et aux couples de femmes, mais pas aux femmes célibataires. Cela fait suite à une décision de la Cour constitutionnelle autrichienne, rendue publique le 17 janvier 2014, levant l’interdiction de l’accès à l’AMP pour les couples de femmes[45].

A l’inverse, certains pays européens ont ouvert l’accès à l’AMP pour les femmes célibataires mais pas pour les couples de femmes.

En Grèce, la loi 3305/2005 sur l’application de la procréation médicalement assistée stipule que toutes les personnes adultes ont un droit d’accès aux méthodes d’AMP. Elle ne fait toutefois spécifiquement référence qu’aux couples mariés hétérosexuels et aux femmes célibataires ou vivant en couple hétérosexuel. La loi ne mentionne pas les couples homosexuels, mais leur interdit indirectement l’accès aux services d’AMP[46].

En Russie, il n’existe pas de loi spécifique dans le domaine de l’AMP. L’accès à l’AMP n’est pas réservé aux couples hétérosexuels ; les femmes célibataires y ont également accès puisque, selon les dispositions réglementaires du ministère de la Santé, l’absence de partenaire sexuel constitue une indication de l’AMP[47].

Certains pays européens interdisent l’accès à l’AMP pour les couples de femmes et les femmes célibataires.

En Italie, la loi n° 40/2004 relative aux techniques de procréation médicalement assistée comporte des dispositions très restrictives. L’accès à l’AMP est réservé aux couples hétérosexuels, mariés ou menant une vie commune, dont les deux membres sont vivants et en âge de procréer. Le couple doit fournir un certificat médical attestant l’existence d’une stérilité ou d’une infertilité pour lesquelles il n’existe aucune autre solution possible[48].

En Pologne, la nouvelle législation sur les techniques de procréation assistée, adoptée en juin 2015 et entrée en vigueur le 1er novembre 2015, exclut les couples de femmes et les femmes célibataires de l’accès à l’AMP[49].

En Suisse, la loi fédérale sur la procréation médicalement assistée du 18 décembre 1998 est entrée en vigueur le 1er janvier 2001. L’accès à l’AMP est réservé aux couples hétérosexuels[50].

En Allemagne, la loi sur la protection de l'embryon (Embryonenschutzgesetz) entrée en vigueur en 1991 ne définit pas explicitement le cadre juridique de l’AMP ; aucune restriction relative aux bénéficiaires de l’AMP n’est évoquée dans la loi. La ligne directrice de l'Ordre fédéral des médecins allemands sur la reproduction assistée de 2006, proscrivant l’AMP pour les femmes célibataires et les couples de femmes, a été abrogée en 2018. Il en résulte, dans ces situations, une absence d’interdiction. La nouvelle directive de l’Association médicale allemande de 2018 ne contient plus de déclarations professionnelles. L’Association médicale allemande considère que les questions d’accès à l’AMP doivent être décidés politiquement. Actuellement, les directives des associations médicales régionales restent en vigueur et les différences de pratique selon les districts persistent[51],[52],[53].

En Irlande, les services d’AMP ne sont pas réglementés par une législation spécifique relative à la santé mais un projet de loi relatif à l’AMP était en cours d’élaboration en 2016. Conformément au principe d’égalité et de non-discrimination, il est proposé d’inclure dans la législation une disposition selon laquelle les services d’AMP doivent être accessibles à tous indépendamment du genre, de l’état matrimonial ou de l’orientation sexuelle, sous réserve de considération du bien-être de l’enfant à venir[54],[55].

1.4.2 En dehors de l’Europe, aux Etats-Unis, l’AMP est ouverte selon les États aux seuls couples hétérosexuels ou à toutes les femmes. Les Etats-Unis souffrent d’un manque de réglementation dans ce domaine. Au-delà du droit adopté par les États, la communauté scientifique et médicale adhère aux recommandations de bonnes pratiques (guidelines) élaborées par des autorités professionnelles indépendantes siégeant à un niveau fédéral (ASRM – American Society of Reproductive Medicine)[56],[57].

Au Canada, la loi sur la procréation assistée a été adoptée le 29 mars 2004. L’accès à l’AMP est ouvert aux couples de femmes et aux femmes célibataires dans toutes les provinces. Les restrictions d’accès ne doivent pas dépendre de l’orientation sexuelle ou du statut matrimonial des personnes. Dans la mesure où ils respectent le principe de non-discrimination, les centres et leurs médecins peuvent définir leurs propres politiques concernant l’acceptation des patients[58].

En Israël, l’accès à la FIV ne fait l’objet d’aucune restriction (réglementation de la FIV de 1987) [59].

2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1 La société française a évolué et le modèle familial contemporain ne se résume plus à une configuration unique[60].

A côté du mariage, de nouveaux modes de conjugalité se sont fait jour avec le pacte civil de solidarité et le concubinage. En outre, avec l’accroissement du divorce, de nouvelles configurations familiales ont émergé : la part des familles monoparentales ou recomposées a beaucoup augmenté ces vingt dernières années. Aujourd’hui, près de 60% des naissances ont lieu hors mariage. Par ailleurs, la reconnaissance des couples homosexuels, rendue possible « parce que dans l’esprit commun le couple en général s’était déjà redéfini autrement »[61], a permis l’apparition progressive des familles homoparentales.

Aujourd’hui, les couples de femmes qui revendiquent un accès à l’assistance médicale à la procréation invitent à une remise en question du modèle au sein duquel « les trois grandes composantes de la filiation (biologique, sociale/éducative et juridique/symbolique) » devaient obligatoirement se retrouver « rassemblées sur une seule tête masculine, le père, et une seule tête féminine, la mère »[62]

Désormais, il y a plusieurs manières de devenir parent. La parenté sociale occupe une place de plus en plus importante au côté de la parenté biologique alors que, dans les débats actuels, elles sont sans cesse opposées. Certains auteurs invitent à dépasser cette opposition en faisant l’hypothèse que « ce qui se passe aujourd’hui n’est ni une biologisation ni une mentalisation de la filiation » mais plutôt une « dématrimonialisation » de la filiation, indissociable d’une « remise en cause du principe de complémentarité hiérarchique des sexes »[63].

Cette évolution de la société qui distingue de plus en plus la parentalité de la conjugalité se traduit dans l’évolution des opinions. Depuis 2004, la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DRESS) demande à l’institut de sondages BVA de réaliser le « Baromètre d’opinion »[64] des Français. Les résultats[65] de la consultation 2018 ont été rendus publics en avril 2019.

Ainsi, en ce qui concerne l’assistance médicale à la procréation, 65 % des Français se disent favorables à ce que les couples de femmes puissent y recourir (31 % ne sont pas favorables et 4 % ne se prononcent pas). Un résultat en progression de dix points depuis 2014 et qui culmine à son plus haut niveau.

2.1.2 En matière d’adoption, le droit reconnait depuis longtemps la monoparentalité[66] et la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe leur a également ouvert l’adoption.  Comme l’a constaté le Conseil d’Etat, cette loi « en autorisant un égal accès à l’adoption de tous les couples mariés, a normalisé la situation des familles qui en sont issues. »[67].

Cette position a été confortée par la Cour de cassation qui, dans deux avis rendus le 22 septembre 2014[68], a estimé que le recours à l’insémination artificielle avec donneur à l’étranger, alors que la pratique est interdite en France, ne fait pas obstacle à l’adoption, en France, de l’enfant par la conjointe de la mère[69].

Si, comme l’a souligné le Conseil d’Etat[70], l’adoption (en tant qu’elle permet d’accueillir un enfant déjà né) doit être distinguée de la procréation médicalement assistée (qui vise à concevoir un enfant), il n’en reste pas moins que le législateur, le Conseil constitutionnel et les deux hautes juridictions ont considéré qu’aucun grand principe ni aucun droit fondamental ne faisait obstacle à ce qu’un enfant ait un seul parent ou deux parents de même sexe.

Le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes comme le défenseur des droits considèrent, par conséquent, que la question de la légitimité d’un projet mono ou homoparental a déjà été tranchée par les textes[71].

C’est, par conséquent, « au nom de l’égalité des projets parentaux » qu’est revendiquée la « liberté de procréer et de transmettre, en tant qu’expression de l’autonomie personnelle ».[72]

La majorité des membres du Comité consultatif national d’éthique considère d’ailleurs « qu’un maintien du statu quo législatif [dans les conditions d’accès à l’assistance médicale à la procréation] pourrait stigmatiser ces nouvelles formes familiales. »[73]

2.1.3 La situation actuelle apparait donc incohérente. Les grossesses qui résultent de ces procréations initiées hors du territoire national sont en effet suivies en France, les enfants naissent en France, leur filiation est légalement établie en France bien qu’une partie de la démarche a eu lieu dans l'illégalité à l'étranger[74].

En outre, ce passage des frontières, réservé aux femmes les plus aisées aboutit à une situation d’inégalité[75]. Plus encore, les femmes, qui restent exclues de l’assistance médicale à la procréation sur le territoire national, sont amenées à se rendre à l’étranger, le plus souvent en Belgique, en Espagne, aux Pays-Bas ou au Danemark, ou conduites à prendre des risques sanitaires pour fonder une famille.

Par ailleurs, les banques de sperme privées (comme Cryos basée au Danemark[76]) prétendent envoyer très régulièrement des paillettes de sperme de donneurs en France, soit chez des particuliers, soit chez des gynécologues qui contournent la loi pour inséminer des femmes non éligibles à l’assistance médicale à la procréation dans le cadre en vigueur[77]. Cela donne donc lieu à des inséminations hors la loi (même si le sperme utilisé a été contrôlé).

Il existe également des sites Internet (non liés à ces banques privées) où des hommes proposent leurs services aux femmes qui le souhaitent. Certaines femmes, enfin, font appel à des géniteurs inconnus par le biais de petites annonces.

Des femmes ont donc recours à des inséminations artificielles « artisanales » (qui ont lieu le plus souvent au domicile, sans médecin) sans connaitre l’origine du sperme acheté via Internet. Ces situations sont parfois assorties d’un défaut de suivi médical.

Il est dommageable que des femmes, qui n’ont pas accès à l’assistance médicale à la procréation en France et faute de pouvoir assumer des soins coûteux à l’étranger, n’aient pas d’autre choix que de se mettre en danger en ayant recours à des donneurs trouvés sur Internet dont ni les motivations, ni l’état de santé ne sont connus ni vérifiés. Ces situations aboutissent à une prise de risques sanitaires. En outre, le recours à de tels procédés est difficile à expliquer et à entendre pour l’enfant par la suite.

L’ouverture de l’accès à l’assistance médicale à la procréation à toutes les femmes est indissociable de la volonté du Gouvernement d’encadrer ces dérives et d’apporter la sécurité à ces familles en leur offrant des conditions de sécurité médicales et juridiques satisfaisantes.

2.1.4 Les données relatives à ces procréations non encadrées réalisées à l’étranger ou sur le territoire national sont éparses et non officielles de sorte qu’il est difficile de les préciser.

En particulier, s’il existe des données sur les soins réalisés à l’étranger via le Centre national des soins à l’étranger[78], elles ne sont pas disponibles pour les recours transfrontaliers à l’assistance médicale à la procréation des couples de femmes et des femmes seules qui ne sont aujourd’hui éligibles à aucune prise en charge dans ce cadre. Ainsi, si une partie des examens et des traitements préalables sont, parfois prescrits et, en tout état de cause, réalisés et pris en charge en France, l’assurance maladie ne peut identifier les situations concernées.

Le Comité consultatif national d'éthique dans son avis n° 126[79] fait mention de « deux à trois mille femmes françaises » qui passeraient les frontières chaque année pour accéder aux techniques d’assistance médicale à la procréation[80].

La fédération nationale des biologistes des laboratoires d'étude de la fécondation et de la conservation de l'œuf (BLEFCO), dans sa contribution aux Etats généraux de la bioéthique[81], rapporte que 85% des Françaises qui réalisent un « tourisme procréatif » sont prises en charge en Belgique. Elle précise que 2 288 couples de femmes français sont venus en Belgique en 2017 dans ce cadre.

Par ailleurs, une centaine d’enfants naitrait chaque année d’une assistance médicale à la procréation au bénéfice de femmes célibataires[82].

Le Pr. François Olivennes[83], quant à lui précise que « Des études effectuées à partir d’extrapolations de la situation en Belgique permettent d’estimer qu’en France 2 000 à 4 000 femmes par an seraient concernées » par une assistance médicale à la procréation hors du cadre national.

2.1.5 Si le Conseil d’Etat, dans son étude bioéthique, conclut qu’aucun argument juridique « n’impose de maintenir les conditions actuelles d’accès à l’AMP. »[84], il considère à l’inverse que les « ricochets du principe d’égalité ne semblent imposer la solution à retenir »[85].

Tout d’abord, considérant que l’invocation d’un droit à l’enfant étant sans portée[86], il a écarté, sur ce terrain, l’invocation de la méconnaissance du principe d’égalité (qui suppose l’existence préalable d’un droit).

Par ailleurs, il a considéré que les couples de femmes ou les femmes célibataires (ou toute autre situation que les couples hétérosexuels infertiles) ne pouvaient revendiquer un traitement analogue au nom du principe d’égalité ou de non-discrimination. En effet, « Eu égard à la finalité de compensation d’une infertilité pathologique que la loi assigne à la procréation médicalement assistée, [ces personnes] sont placées dans des situations différentes de celle des couples hétérosexuels infertiles puisque l’impossibilité de procréer à laquelle elles sont confrontées ne résulte pas d’une pathologie. »[87]. Dans un arrêt récent[88], la Haute juridiction administrative a confirmé cette position.

Toutefois, cette différence de traitement, qui repose sur une supposée différence de situation a été nuancée par d’autres avis[89] préparatoires à la révision bioéthique au regard de deux catégories d’arguments :

-          le fait, que, dans la pratique de l’assistance médicale à la procréation, le critère du caractère pathologique de l’infertilité ne soit pas toujours satisfait. En effet, dans 10 à 15%[90] des cas, aucune cause médicale à l’infertilité n’est identifiée (tous les travaux préparatoires sont convergents sur ce constat). Si une recherche des causes de l’infertilité est systématiquement réalisée, son caractère pathologique n’est pas toujours établi à l’issue de cette recherche. Or, ainsi que le précise le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes : « Cette configuration [où ce caractère pathologique n’est pas acquis] ouvre pourtant aux couples hétérosexuels le droit d’avoir recours à une AMP. »[91]

-          rappelant la présentation habituellement retenue dans le débat public sur l’accès à l’assistance médicale à la procréation qui oppose le « besoin médical » des couples hétérosexuels au « problème social » des couples de femmes et des femmes célibataires (« assistance sociétale à la procréation »), la Commission nationale consultative des droits de l’homme note que ces deux dimensions « se recoupent déjà en partie dans le cadre légal actuel de l’AMP. En effet, pour les couples à qui l’on propose les gamètes d’un tiers, la médecine de la reproduction ne remédie pas à une infertilité au sein du couple mais elle organise le recours aux gamètes d’un tiers pour la pallier. »[92]. Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes est sur la même ligne[93].

Autrement formulé, quand seul le recours à un tiers donneur de gamètes permet de pallier l’infertilité du conjoint, il s’agit autant d’une assistance médicale à la procréation que d’une assistance sociale qui est apportée au couple.

L’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques note de son côté : « Si [le désir d’enfant non réalisé] résulte d’une infertilité de caractère pathologique, l’assistance médicale à la procréation ne soignera pas, mais tendra à permettre de contourner le « blocage » physiologique, en utilisant le procédé le mieux adapté à la situation. S’il tient aux choix de vie, le « blocage » pourrait être également contourné en utilisant le procédé le mieux adapté, qui serait utilisé d’une façon identique à ce que son utilisation aurait été dans le cas d’une infertilité pathologique. »[94]

Ces approches conduisent à nuancer l’absence d’atteinte au principe d’égalité. En effet, elles ne font pas apparaître autant de différences entre la situation des couples hétérosexuels pour lesquels le recours à un tiers donneur est la seule solution pour procréer et la situation des couples de femmes et des femmes célibataires qui, dans le même objectif, ont également besoin d’un don de spermatozoïdes.

C’est également le point de vue des associations[95] qui martèlent que personne n’imaginerait dire aux femmes hétérosexuelles dont le conjoint est infertile qu’elles devraient se résoudre à ne pas avoir d’enfants ou à changer de partenaire. Ces associations considèrent ainsi que l’interdiction faite à une femme d’accéder à une technique procréative parce qu’elle est homosexuelle ou célibataire est une discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou le statut matrimonial.

Dans son avis n° 126[96], le Comité consultatif national d'éthique soutient, au demeurant, que « le maintien du cadre légal actuel - qui réserve l’IAD aux couples formés d’un homme et d’une femme (…) pourrait constituer une injustice de la part de la société à l’égard des demandeuses ».

2.1.6 Le Gouvernement souhaite que toutes les familles trouvent leur place dans la société et soient respectées.

La critique qui consiste à titrer une consécration d’un droit à l’enfant de l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation à toutes les femmes ne repose sur aucun argument sérieux. 

Il n’a jamais été question de reconnaître un tel droit qui, du reste, n’a « aucune consistance juridique dès lors qu’un enfant est une personne, un sujet de droit, et qu’il ne saurait être envisagé comme l’objet du droit d’un tiers »[97].

Un tel reproche avait déjà été exprimé lors l’ouverture du mariage et de l’adoption aux couples de même sexe. Conduit à se prononcer sur la constitutionnalité de la loi, le Conseil constitutionnel avait rappelé, dans sa décision, que l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe ne consacrait pas un droit à l’enfant, puisque ces couples sont soumis aux mêmes conditions que les autres pour adopter[98].

Le même raisonnement s’applique à l’extension de l’accès à l’assistance médicale à la procréation. Le cadre juridique impose des conditions aux couples hétérosexuels - qui ne disposent pas plus que les autres d’un droit à l’enfant (la naissance d’un enfant n’est d’ailleurs jamais garantie par les centres d’assistance médicale à la procréation). Ces conditions s’appliqueront pareillement aux couples de femmes et aux femmes célibataires (notamment la prise en compte de l’intérêt de l’enfant à naître déjà prévu à l’article L. 2141-10 du code de la santé publique).

De façon unanime, les travaux préparatoires à la révision bioéthique ont écarté ou condamné cette notion de droit à l’enfant et confirmé que l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation à toutes les femmes ne repose ni sur l’idée d’un droit à l’enfant, ni sur celle de créer ou de consacrer un tel droit.

Il apparait plutôt que la seule revendication est celle du droit au désir d’enfant. Or, le désir de parentalité n’a rien de spécifique, il est totalement indépendant de l’orientation sexuelle ou du statut matrimonial. Ainsi que le note le rapporteur de la mission d’information parlementaire : « la famille (…) reste « traditionnelle » au regard de l’irrépressible désir d’engendrement »[99].

Le Gouvernement est par ailleurs attaché au respect des droits de l’enfant et à la protection de l’enfance dont il a fait une priorité (loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant).

Dans son approche, le Conseil d’Etat, a estimé « que la notion juridique d’intérêt supérieur de l’enfant ne saurait faire obstacle à l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes et aux femmes seules[100] ».

Le Comité consultatif national d’éthique souligne que « La structure de la famille compte beaucoup moins que le soutien de l’environnement, la dynamique familiale, la qualité des relations entre parents et enfants ainsi qu’entre les parents eux-mêmes. »[101]. Les parents (qui peuvent être un père et une mère, deux mères ou une seule mère) insèrent l’enfant dans leur lignage et ainsi dans la continuité familiale ; ces lignages parentaux, l’existence de grands-parents, d’oncles/tantes, cousins/cousines… participent au cadre qui favorise et assure le développement de l’enfant.

 

L’essentiel apparait bien être l’affection, l’attention, le sentiment de sécurité qu’apportent le ou les parents et l’entourage familial ; la « bonne » famille est celle qui donne de l’amour à l’enfant, qui n’est pas dans la violence et lui apporte une sécurité. 

 

Or, ce n’est pas l’orientation sexuelle ou le statut matrimonial qui déterminent l’amour et les valeurs transmises à l’enfant mais le projet parental. La notion de « projet parental », « placée par la loi au cœur de l’AMP », « ne renvoie pas seulement à la demande des adultes » mais également « à l’intérêt de l’enfant, qui a toujours été placé au premier rang des préoccupations du législateur ».[102] A cet égard, il convient de noter que certains enfants, nés sans recours à l’assistance médicale à la procréation, n’ont pas nécessairement la chance d’être le fruit d’un projet parental.

 

Des études ont été menées depuis plus de quarante ans et, ainsi que le souligne le rapporteur de la mission d’information parlementaire, « aucun élément probant n’a jamais été apporté à l’appui des thèses qui agitent l’idée d’un enfant perturbé, malheureux ou entravé dans son développement par le fait qu’il grandirait dans un cadre familial « non traditionnel ». Toute personne qui se prévaut d’une démarche scientifique devra donc convenir, en toute honnêteté, que l’intérêt de l’enfant n’est pas menacé, en l’état des connaissances disponibles. »[103]

 

A ce propos, une étude anglaise[104] a permis de montrer que les enfants élevés par des femmes (célibataires ou couples de femmes) depuis l’enfance évoluent bien lorsqu’ils atteignent l’âge adulte : il n’existe aucune différence avec les familles traditionnelles en termes de qualité de la parentalité et d’adaptation psychologique de leurs enfants ; les relations familiales sont positives et on constate un meilleur bien-être psychologique (meilleure estime personnelle, moindre niveau d’anxiété, de dépression, d’hostilité et de consommation d’alcool) parmi les jeunes adultes élevés par des femmes comparés à ceux élevés dans des familles traditionnelles.

 

Enfin, ce n’est pas du côté de la structure familiale qu’il faut chercher une différence entre les enfants nés au sein de couples de femmes ou de femmes célibataires et les autres enfants, mais du côté de la société et des regards portés sur eux, des discours dont ils sont l’objet, de la perception de ce modèle dans la société[105].

2.1.7 Il n’est pas question de nier la place et le rôle du père dans la construction d’un enfant et le Gouvernement poursuit l’objectif de soutenir et d’encourager l’implication des pères à l’égard de leurs enfants. Mais il faut accepter, à côté d’une vision traditionnelle (altérité masculin/féminin), une autre conception.

La Commission nationale consultative des droits de l’homme rappelle « la distinction fondamentale qui existe entre les catégories juridiques de parenté, assimilées à des liens juridiques établis entre des personnes, et les catégories sociales de parentalité, susceptibles d’investissements psychologiques, imaginaires, marqués par la plus grande diversité. »[106]

Dans la même approche, le Comité consultatif national d’éthique a précisé dans son avis 126, que « Sous le terme de « père », revient s’unifier de manière complexe tout ce que les disjonctions propres à l’AMP amènent à séparer : le géniteur masculin (donneur de sperme), le père juridique reconnu selon les règles de filiation, la figure masculine par opposition au féminin, le double lignage généalogique par opposition à l’unicité des familles monoparentales, la différence au sein du couple, chacun de ces facteurs étant important pour l’enfant, sur un plan matériel, psychique et symbolique, dans la construction de soi, ainsi que pour la société dans son ensemble. »[107]

Or, en suivant ces distinctions, il apparait qu’aucun de ces facteurs important pour l’enfant et son développement n’est remis en cause par l’ouverture de l’accès à l’assistance médicale à la procréation aux femmes. En effet :

-          En ce qui concerne le donneur de gamètes

Si certaines personnes nées d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur expriment des difficultés (s’interrogent sur « leur » donneur), elles sont pour partie liées au secret qui a entouré les circonstances de leur conception et dont la révélation a pu être douloureuse. Un tel secret est moindre à l’égard d’enfants dont les deux parents sont de même sexe ou qui sont nés d’une mère célibataire. Pour le Comité consultatif national d'éthique, la technique d’assistance médicale à la procréation peut même s’avérer « parfois moins énigmatique que la sexualité des parents, et plus simple à expliquer. »[108]. Et par ailleurs, l’accès aux données non identifiantes et à l’identité du donneur de gamètes est prévu dans le présent projet de loi.

-          En ce qui concerne le père juridique

Ainsi que cela a été précisé, l’adoption est ouverte aux femmes célibataires et personne ne s’est offusqué de l’absence de référent paternel à leurs côtés ; cette réforme a été adoptée, la société reconnaissant qu’une femme seule peut prendre en charge un enfant et être un bon parent. Et, par ailleurs, l’adoption est également ouverte aux couples de même sexe, le législateur, le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation admettant ainsi qu’un enfant pouvait très bien avoir deux parents de même sexe.

-          En ce qui concerne la figure masculine (par opposition à féminine) 

Tout d’abord, le couple est moins « genré » qu’auparavant : chacun, dans un couple, s’investit en fonction de ses compétences ; parfois, selon les sujets, la femme tient le rôle traditionnellement paternel et l’homme le rôle classiquement maternel.

Par ailleurs, à côté d’une vision traditionnelle (altérité masculin/féminin), le Comité consultatif national d'éthique fait émerger une autre vision : « La fonction paternelle n’est pas identique ni réductible à la différence des sexes. Dans l’inconscient de l’enfant, le couple parental est formé d’un père et d’une mère plutôt que d’un homme et d’une femme. L’absence d’homme dans le foyer ne veut pas dire que l’enfant exclut la représentation symbolique du père, pas plus que la représentation de l’autre sexe. »[109]

-          En ce qui concerne la différence au sein du couple

Les enfants élevés par des couples de femmes peuvent tout à fait bénéficier d’une altérité des caractères et des positions parentales.

L’essentiel est que puisse fonctionner « la triangulation de la fonction paternelle[110] au terme d’une dynamique structurante marquée par un déplacement des investissements affectifs sur un autre personnage que la mère » estiment certains professionnels « Mais rien ne dit que cette fonction doive nécessairement être assumée par un homme. »[111]

Par ailleurs, le Comité consultatif national d’éthique souligne également « l’importance de tenir compte des repères sexués, symboliques et sociaux, au-delà du couple de femmes ou de la femme seule. »[112]. Les fonctions du père peuvent se distribuer entre plusieurs personnes. La famille ne se limite pas aux parents ou à la personne qui donne naissance à l’enfant. Une famille est constituée de grands-pères, de grands-mères, d’oncles, de tantes, de cousins, de cousines, de parrains et de marraines…

Enfin, affirmer qu’une famille formée d’un homme et d’une femme est nécessairement une bonne famille apparait risqué dans la mesure où les relations parfois conflictuelles au sein des couples hétérosexuels sont loin d’être toujours idéales et que les enfants peuvent en souffrir. « Comme l’ont souligné les psychologues et pédopsychiatres (…) toutes les constructions familiales sont à risque ».[113]

2.1.8 Depuis plusieurs dizaines d’années, des enfants sont conçus par assistance médicale à la procréation avec tiers donneur au sein de couples hétérosexuels et le principe de précaution n’a jamais été évoqué à leur endroit. Comment l’extension des techniques de procréation aux couples de femmes et aux femmes célibataires pourrait-elle être à l’origine d’un risque spécifique ?

Le Conseil d’État, dans son étude de juin 2018[114], considère non seulement que ce principe ne trouve pas à s’appliquer en l’espèce mais que, même si tel était le cas, il serait nécessaire de « fixer une contrainte de méthode au législateur, en lui imposant d’objectiver les risques encourus et les bénéfices attendus de chaque scénario en fonction des éléments disponibles au moment où la décision est prise, sans dicter ou exclure par avance telle ou telle option. Ce principe ne peut donc être utilement invoqué au soutien du maintien des conditions actuelles d’accès à l’AMP. »

2.1.9 La Commission nationale consultative des droits de l’homme note que « les évolutions de la médecine au 20ème siècle, avec la chirurgie réparatrice, puis la chirurgie esthétique, d’une part, et l’avortement d’autre part, laissent à penser qu’un acte médical n’est rien d’autre qu’un acte réalisé par un médecin. »[115]. L’Académie de médecine établit le même constat : « De la chirurgie plastique à la médecine sportive, nombreux sont les actes et les missions qui peuvent être confiés au médecin sans que la finalité soit de corriger un état pathologique ou de se substituer à une fonction défaillante. »[116]

Il convient également de rappeler que les techniques d’assistance médicale à la procréation ne soignent pas (ne guérissent pas les couples de leur infertilité) mais « agissent comme des techniques de parenté »[117], en particulier en cas de recours à un tiers donneur. Il en est de même lorsque l’indication de l’assistance médicale à la procréation est liée à l’âge de la femme sans autre cause médicale. Dans ces deux exemples, , s’il y a bien un acte médical, l’assistance apportée par le médecin est moins médicale que sociale. 

En outre, il est à nouveau rappelé que le caractère pathologique de l’infertilité exigé par la loi n’est pas toujours établi, ce qui n’empêche pas l’intervention de la médecine pour permettre à des couples infertiles sans cause médicale objective de procréer.

Au surplus, soigner, c’est non seulement prévenir, diagnostiquer et traiter, mais c’est aussi considérer les personnes dans leur entièreté physique, psychique, morale, culturelle, et sociale. La souffrance ressentie du fait d’une infécondité consécutive à des orientations personnelles, qui ne sont pas choisies, doit également être reconnue et prise en compte. 

Le Conseil national de l’ordre des médecins estime d’ailleurs que l’extension de l’assistance médicale à la procréation ne se heurte à aucun obstacle majeur face aux règles fondamentales de l’éthique du médecin.

Dans son avis du 20 septembre 2018[118] sur l’extension de l’assistance médicale à la procréation, il analyse qu’ « aucun article [du code de déontologie médicale] aujourd’hui ne permet de repousser une telle évolution au motif d’atteinte à la déontologie. »

Il détaille la mesure à l’aulne des quatre principes de l’éthique médicale[119] et conclut que « Les quatre principes ne seraient en aucun cas ébranlés par une éventuelle évolution de la loi en faveur des femmes seules ou homosexuelles en couple. »  

Enfin, dernier argument si besoin, le fait d’éviter que des femmes procèdent à des inséminations dangereuses pour elles apporte une valeur ajoutée médicale certaine.

2.1.10 L’ouverture de l’assistance médicale à la procréation sera sans incidence sur l’interdiction de la gestation pour autrui.

En effet, la gestation pour autrui se heurte à des objections spécifiques.

Elle est contraire au « respect de la personne humaine, [au] refus de l’exploitation de la femme, [au] refus de la réification de l’enfant, [à l’] indisponibilité du corps humain et de la personne humaine. »[120].

Elle s’oppose au principe de non-patrimonialité du corps humain lorsqu’elle est rémunérée. Et encore, le Conseil d’Etat précise-t-il que « l’argument tiré de ce que la gestation pour autrui pourrait être « éthique », c’est-à-dire pratiquée hors de toute finalité marchande, ne lève pas sa contrariété aux principes d’indisponibilité du corps humain et de l’état des personnes eu égard, notamment, à la difficulté de s’assurer du caractère désintéressé du geste de la mère porteuse. » [121].

Elle comporte des risques de violences « d’ordre économique, juridique, médical et psychique »[122] pour la gestatrice comme pour l’enfant alors que les techniques d’assistance médicale à la procréation sont exemptes de violence à l’égard d’un tiers.

Au regard du respect des quatre principes de l’éthique médicale : l’autonomie de la personne, la bienfaisance, l’absence de maltraitance, l’équité, M. Jean-Marie Faroudja, président de la section « Ethique et déontologie » du Conseil national de l’Ordre des médecins a déclaré : « les réponses sont très différentes si l’on s’interroge au sujet de l’AMP d’une part, au sujet de la gestation pour le compte d’autrui d’autre part. » [123].

En résumé, si l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation interroge la structure familiale, la gestation pour autrui questionne les grands principes éthiques.

2.1.11 Au vu de ces différents éléments, il apparait au Gouvernement que le cadre juridique actuel relatif à l’assistance médicale à la procréation, qui réserve l’assistance médicale à la procréation aux couples formés d’un homme et d’une femme, doit évoluer.

L’accès à l’assistance médicale à la procréation est ouvert aux femmes en couple et aux femmes célibataires sur le territoire national. 

2.2. Objectifs poursuivis

La règle nouvelle a pour objectif l’égal accès de toutes les femmes aux techniques d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur sans distinction liée au statut conjugal ou à l’orientation sexuelle.

Elle vise à apporter des conditions de sécurité médicales et juridiques pour protéger les familles monoparentales et homoparentales ayant recours à l’assistance médicale à la procréation.

3. Options possibles et dispositif retenu

Au regard des options qui se présentent à lui, le Gouvernement fait le choix d’ouvrir l’accès à l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes non mariées sans exclure aucune technique et sans introduire de clause de conscience spécifique qui ciblerait certains publics. Le critère médical d’infertilité, qui aujourd’hui conditionne l’accès à l’assistance médicale à la procréation, est supprimé. La prise en charge par l’assurance maladie reste identique et est étendu aux nouveaux publics éligibles.      

3.1. Public éligible : Femmes en couple de même sexe et femmes non mariées

La première option qui se présente est celle d’ouvrir l’accès aux techniques d’assistance médicale à la procréation aux seuls couples de femmes ou de l’ouvrir aussi aux femmes non mariées.

Le Conseil d’Etat a confirmé qu’ « aucun principe juridique n’interdit d’ouvrir l’AMP aux couples de femmes et aux femmes seules  et rien ne s’oppose à faire une  éventuelle distinction entre ces deux publics ».[124] 

Les deux situations ont en commun la nécessité du recours à un don de sperme et le fait qu’il n’y aura pas de père juridiquement institué dans la vie de l’enfant[125].

Comme cela a été souligné dans plusieurs travaux préparatoires à la révision bioéthique, dans la première situation, celle des couples de femmes désirant un enfant, deux personnes apportent des disponibilités complémentaires vis-à-vis des besoins, des aléas de la vie et de l’éducation de l’enfant. Elles insèrent l’enfant dans un double lignage. Dans le modèle monoparental, un seul parent est présent et un seul lignage est impliqué.

Cette situation n’est pas exceptionnelle. Le rapport de l’Insee[126] de 2015 indique qu’il existait, en France en 2013, 1,8 million de familles monoparentales sur 7,8 millions de familles au total (soit 23 %). Dans 85 % des cas, il s’agit d’une femme et pour 79 % d’entre elles, la situation résulte d’une séparation. Ces familles font l’objet d’interventions sociales prioritaires, la situation de monoparentalité apportant des contraintes reconnues, qui ne sont pas uniquement d’ordre financière.

Cependant, comme le souligne le Comité consultatif national d'éthique dans son avis n° 129[127], si « des études (…) s’accordent à souligner la plus grande vulnérabilité des familles monoparentales », elles portent, pour la plupart, sur des femmes avec enfant « devenues seules ». Et, comme le souligne Susan Golombok[128], les difficultés de ces enfants (problèmes émotionnels ou de comportement, moins bonne réussite scolaire[129]) sont moins directement liées à la monoparentalité en tant que telle, qu’à des facteurs tels que le désavantage socioéconomique[130], le manque de soutien social, les conflits entre les parents[131], la dépression parentale suite au divorce[132], etc.

Or, les familles monoparentales « par choix » pourraient se révéler fort différentes de celles pour lesquelles cette situation est subie. D’une part, parce que les mères célibataires par choix ont pris la décision active d’avoir un enfant seules et ont souvent mûrement réfléchi ce projet, à l’inverse de la situation de monoparentalité non programmée des mères « devenues seules ». D’autre part, parce que les facteurs de risque précédemment mentionnés ne les concernent a priori pas. En effet, les enfants de ces familles n’ont pas été exposés à des conflits parentaux et n’auront à vivre ni le choc psychologique de la séparation des parents, ni la dépression réactionnelle du parent avec lequel ils restent. En outre, les mères célibataires par choix exercent souvent une activité professionnelle leur assurant une sécurité financière et elles bénéficient d’un bon réseau de soutien social.[133]

Il convient également de noter que la plupart des mères célibataires par choix disent qu’elles auraient préféré avoir des enfants dans le cadre d’un schéma familial traditionnel ; elles se préoccupent de l’absence d’un père dans la vie de leur enfant et recherchent activement des personnes de leur entourage qui pourraient jouer ce rôle de modèle masculin.[134] A ce propos, l’association Mam’en solo a déclaré[135] : « Nous avons réfléchi à des référents, des parrains, des oncles, des tantes, des grands-parents. Nous n’élevons pas seules nos enfants »[136]. Le risque de situation de fusion à l’égard du seul parent, évoqué dans l’étude du Conseil d’Etat[137], ne peut être complètement exclu mais il peut être ainsi diminué.

Par ailleurs, par rapport aux mères en couple hétérosexuel qui ont recours à l’insémination artificielle avec donneur, les mères célibataires par choix ne sont pas exposées à l’expérience potentiellement stressante de l’infertilité de leur partenaire. Les mères en couple hétérosexuel seraient d’ailleurs plus susceptibles que les mères célibataires d’exprimer des sentiments neutres, ambivalents ou négatifs quant au fait d’avoir eu recours à un donneur[138]. Alors que les mères célibataires auraient plus tendance que les couples hétérosexuels à révéler à leurs enfants le recours à une insémination artificielle avec donneur, et ce à un âge plus précoce[139].

Comme le soulignent les Pr. François Olivennes[140] et Susan Golombok[141], il y a peu de données scientifiques concernant ces mères célibataires par choix.

Toutefois, les quelques études disponibles - qui ont comparé des familles de mère célibataire par choix à des familles biparentales hétérosexuelles, les deux types de famille ayant un ou des enfants conçus par don - semblent montrer que les relations au sein de ces familles monoparentales sont plutôt bonnes et que les enfants vont plutôt bien. Le point fort de ces études est que les enfants du groupe témoin (familles biparentales) ont également été conçus par insémination artificielle avec donneur, contrôlant ainsi le recours à la conception par donneur chez les mères célibataires par choix. 

Dans la première année de vie de l’enfant[142], il n’y a pas de différences en termes de bien-être psychologique des mères, d’implication émotionnelle, de liens avec leurs enfants, etc. Lorsque les enfants atteignent l’âge de 2 ans[143], les mères célibataires ne sont pas plus susceptibles d’éprouver un stress associé à la parentalité ou de présenter des symptômes d’anxiété ou de dépression, et on retrouve moins de problèmes émotionnels et de comportement chez leurs enfants. Lorsque les enfants ont entre 4 et 9 ans[144], il n’y a pas non plus de différences ni en termes de qualité de la parentalité (excepté moins de conflits mères-enfants dans les familles dirigées par des mères célibataires par choix, ce qui apparait comme un avantage) ni en termes de problèmes émotionnels et de comportement chez l’enfant.

Les adolescents conçus par don et élevés par une mère célibataire prévoient davantage de demander l’identité de leur donneur à l’âge de 18 ans que ceux élevés par deux parents.[145] Ceci dit, la majorité d’entre eux recherche leur donneur parce qu’ils éprouvent une forme de curiosité, et non parce qu’ils souhaiteraient une sorte de relation paternelle avec leur donneur ou qu’ils vivraient mal le fait d’être nés d’un don[146].

Le Comité consultatif national d'éthique, dans son avis n° 126, a émis des critiques à l’égard de ces études : « Il s’agit d’études anglaises qualitatives sur de petits effectifs et sur des enfants encore très jeunes. »[147] Dans son livre Modern Families, Susan Golombok pointe en premier lieu le fait que la validité scientifique des études sociologiques ou psychologiques n’avait rarement été autant questionnée. Ensuite, concernant la taille des échantillons, elle rappelle que les chercheurs ont réalisé plusieurs méta-analyses aboutissant toutes aux mêmes conclusions. Quant au soi-disant défaut de représentativité, elle considère cette critique comme non valide étant donné que le recrutement ne s’est pas fait sur la seule base du volontariat. Enfin, les études menées ont utilisé plusieurs modalités d’enquêtes (observations, entretiens, test psychologiques, questionnaires, etc.). Elle souligne à ce propos que : « Ce qui est frappant avec ces investigations menées en différents lieux pendant 40 ans, étant donnée la diversité des méthodes employées, c’est la cohérence des résultats. »

Les résultats de toutes ces études suggèrent que la monoparentalité en elle-même n’a pas de conséquences psychologiques préjudiciables pour ces enfants. Ainsi que cela a déjà été rappelé, la structure de la famille compte beaucoup moins que le soutien de l’environnement, la dynamique familiale, la qualité des relations entre parents et enfants.[148] Le lignage parental, même s’il est unique, participe au cadre qui favorise et assure le développement de l’enfant.

En outre, pour une plus grande sécurité, rien n’interdit à la femme qui s’apprête à être mère célibataire de désigner de façon officielle un tuteur qui s’engagera à prendre son relais au cas où, pour une raison ou une autre, elle serait empêchée, momentanément ou définitivement.[149] A cet égard, même si ce n’est pas l’option retenue, certains centres d’assistance médicale à la procréation en Belgique n’acceptent de prendre en charge les femmes célibataires qu’à condition qu’elles puissent indiquer une personne référente pouvant s’engager pour l’avenir[150].

Enfin, il parait opportun de rappeler à nouveau que les équipes médicales, lorsqu’elles sont confrontées à des demandes d’assistance médicale à la procréation qui leur semblent présenter des risques particuliers pour l’enfant à naître, peuvent, en l’état actuel du droit, différer la réalisation de l’acte en considération de l’intérêt de l’enfant[151]). Et qu’en tout état de cause, l’assistance médicale à la procréation est précédée « d'entretiens particuliers des demandeurs avec les membres de l'équipe médicale clinico-biologique pluridisciplinaire du centre, qui peut faire appel, en tant que de besoin, au service social institué au titre VI du code de la famille et de l'aide sociale ».

La Commission nationale consultative des droits de l’homme[152] « préconise l’ouverture de l’AMP aux femmes célibataires, tout en invitant les équipes pluridisciplinaires chargées d’apprécier l’intérêt de l’enfant à naître à être vigilantes à l’égard des motivations des personnes célibataires souhaitant accéder à une technique d’AMP. »

Dans ses avis n° 126 et 129, le Comité consultatif national d'éthique donne un avis favorable à l’ouverture de l’accès à l’assistance médicale à la procréation à toutes les femmes (incluant les femmes célibataires).

L’accès aux techniques d’assistance médicale à la procréation sera, par conséquent, ouvert aux couples de femmes et aux femmes non mariées.

3.2. Critère d’infertilité médicalement constatée

La question du maintien ou non de l’exigence du caractère pathologique de l’infertilité comme condition d’accès à l’assistance médicale à la procréation pour les couples hétérosexuels a été évoquée.

Le maintien de ce critère d’accès pour les couples hétérosexuels alors qu’il n’existera pas pour les femmes en couple ou non mariées – bien que certaines d’entre elles présenteront de tels problèmes aboutirait à créer une nouvelle inégalité, source potentielle de contentieux. 

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblé nationale[153] indique : « Le maintien du critère pathologique n’apparaît pas tenable dans la mesure où, déjà aujourd’hui, l’AMP apportée aux couples hétérosexuels ne s’appuie pas toujours sur des critères pathologiques. Il serait alors logique d’égaliser les conditions d’accès ».

Le Conseil d’Etat note : « Toutes les questions posées (…) ont en commun de revendiquer un assouplissement des conditions d’accès aux techniques d’AMP, ou d’en autoriser de nouvelles, ce qui aurait pour effet de supprimer la condition d’existence d’une pathologie. »[154]

Il s’interroge également sur les conséquences de cette suppression : « Si l’accès à l’AMP n’est plus conditionné par une infertilité, se pose alors la question du maintien de cette condition pour les couples hétérosexuels. Actuellement, les inconvénients, liés au caractère éprouvant de la technique de FIV et à ses risques, l’emportent sur les avantages mais, à terme, certains couples pourraient considérer que les progrès effectués en matière de DPI rendent cette technique comparativement moins aléatoire qu’une procréation charnelle. »[155]. Toutefois, les contraintes et les désagréments d’un parcours en assistance médicale à la procréation (a fortiori en fécondation in vitro, technique rendue nécessaire pour un diagnostic préimplantatoire) ne laissent pas présager d’un recours massif aux techniques d’assistance médicale à la procréation par des couples hétérosexuels qui pourraient procréer naturellement.

En tout état de cause, si la vérification de l’origine pathologique de l’infertilité ne peut plus constituer un critère d’accès, une évaluation médicale et psychologique préalable à toute assistance médicale à la procréation (qu’il s’agisse d’insémination artificielle ou de techniques plus lourdes) doit être maintenue pour tous les publics, notamment parce que toute contre-indication doit être écartée au regard de la balance bénéfices/risques.

Si les couples hétérosexuels continueront de relever d’un bilan d’infertilité classique (non pour objectiver l’existence d’une origine pathologique de leur infertilité mais pour adapter la prise en charge procréative et, le cas échéant, apporter des traitements complémentaires), les femmes en couple de même sexe ou non mariées bénéficieront également des entretiens et consultations préalables prévus à l’article L. 2141-10 du code de la santé publique.

Outre l’intérêt propre d’un temps de questions/réponses lors des entretiens avec l’équipe clinico-biologique, ces temps médicaux permettront d’identifier, au cas par cas (en fonction des éventuels risques personnels ou familiaux identifiés) et après un examen médical clinique, les examens complémentaires qui s’avèreront nécessaires avant de poursuivre la prise en charge. Il convient en effet de rappeler que les femmes concernées ne sont pas à l’abri d’anomalies de l’ovulation, d’obstruction des trompes de Fallope, d’obstacles mécaniques au niveau de l’utérus ou de maladies comme l’endométriose, toutes ces situations devant être connues et prises en compte pour la suite de la démarche.

Enfin les conditions d’âge pour accéder à l’assistance médicale à la procréation  concerneront tous les publics et s’appliqueront aux hommes et aux femmes quelle que soit leur situation.

Au total, si le caractère pathologique de l’infertilité n’est plus un critère d’accès, l’assistance médicale à la procréation s’inscrira toujours dans un parcours médical.

3.3. Techniques d’assistance médicale à la procréation 

La question de l’accès à toutes les techniques aujourd’hui disponibles en assistance médicale à la procréation (insémination artificielle, fécondation in vitro, accueil d’embryons) pour tous les publics éligibles est également posée.

Si le Comité consultatif national d'éthique, dans ses avis n° 126 et 129, n’évoque que la technique d’insémination artificielle, le Conseil d’Etat estime qu’ : « Il ne paraît pas pertinent de distinguer l’IAD, à laquelle il sera recouru le plus souvent, de la fécondation in vitro, ou même de l’accueil d’embryon. En effet, s’il est décidé d’ouvrir l’AMP aux couples de femmes et aux femmes seules, il paraîtrait incohérent de leur fermer l’AMP en cas de problèmes de fertilité physiologique. Or, le recours à une technique plutôt qu’à l’autre repose sur le seul état de santé de la femme. »[156]. En effet, la mise en évidence d’une obstruction tubaire bilatérale, par exemple, rendra nécessaire le recours à une fécondation in vitro.

Si l’insémination artificielle apparait comme une technique « légère » incitant à ce qu’elle soit privilégiée (« En toute circonstance, devrait être retenue la technique la plus légère possible » dit le Conseil d’Etat[157]), il convient néanmoins de préciser que les techniques de fécondation in vitro permettent de limiter le risque de grossesses multiples par le transfert d’un embryon unique, contrairement à l’insémination avec sperme de donneur. Or, la naissance d’un enfant unique chez les femmes célibataires doit également être prise en considération.

En outre, l’échec de plusieurs inséminations pourrait conduire à indiquer une fécondation in vitro (comme pour les couples hétérosexuels).

Dans le cadre des techniques utilisées, la question de l’accueil d’embryon constitue un point spécifique.

Si l’interdiction du double don de gamètes était maintenue, les femmes qui seraient dans l’incapacité de concevoir avec leurs propres ovocytes, devraient avoir recours à un accueil d’embryon. En effet, elles ne pourraient bénéficier, en sus d’un don de sperme, d’un don d’ovocyte.

En résumé, les nouveaux publics éligibles à l’assistance médicale à la procréation auront accès à toutes les techniques disponibles. L’indication de recourir à une technique plutôt qu’à une autre sera posée par l’équipe médicale.

3.4. Clause de conscience

La question de l’introduction d’une clause de conscience spécifique, c’est-à-dire la possibilité explicite qu’un médecin refuse de prendre en charge lui-même en assistance médicale à la procréation un couple de femmes ou une femme seule (tout en orientant ces personnes vers un confrère à même de le faire), a également été débattue.

Certaines sociétés savantes[158] l’ont évoqué sur le modèle de ce qui est prévu, par exemple, dans le cadre de l’interruption volontaire de grossesse pour laquelle l’article L. 2212-8 du code de la santé publique dispose :

« Un médecin ou une sage-femme nest jamais tenu de pratiquer une interruption volontaire de grossesse mais il doit informer, sans délai, lintéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens ou de sages-femmes susceptibles de réaliser cette intervention (…) Aucune sage-femme, aucun infirmier ou infirmière, aucun auxiliaire médical, quel quil soit, nest tenu de concourir à une interruption de grossesse. (…) »).

Le Conseil d’Etat considère que « s’il est toujours possible à un médecin d’opposer à une situation individuelle donnée la clause de conscience générique prévue par l’article R4127-47 du code de la santé publique, il paraît juridiquement impossible de créer une clause de conscience spécifique à l’AMP qui ciblerait certains publics. »[159].

Il est rappelé en effet que le code de déontologie médicale prévoit, de manière générale, que

« Quelles que soient les circonstances, la continuité des soins aux malades doit être assurée. Hors le cas durgence et celui où il manquerait à ses devoirs dhumanité, un médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles. Sil se dégage de sa mission, il doit alors en avertir le patient et transmettre au médecin désigné par celui-ci les informations utiles à la poursuite des soins. » (Article R. 4127-47 du code de la santé publique).

Le rapporteur de la mission d’information parlementaire[160], s’il considère également que l’introduction d’une clause de conscience spécifique ne saurait se concevoir dans le cadre de l’extension d’une assistance médicale à la procréation aux couples de femmes ou aux femmes seules car « Elle entrerait en contradiction avec l’article 7 du code de déontologie médicale (article R. 4127-7[161] du code de la santé publique) qui prohibe toute discrimination. », ajoute que « Le Dr Jean-Marie Faroudja, président de la section Éthique et déontologie du conseil national de l’ordre des médecins, a été on ne peut plus clair lors de son audition : « les médecins ne peuvent s’abriter derrière la clause de conscience pour opérer une discrimination » ».

Il n’y aura donc pas d’introduction d’une clause de conscience spécifique pour les médecins.

3.5. Prise en charge par l’assurance maladie

3.5.1 En France, les bilans et les soins liés l’infertilité, qui concernent donc les seuls couples hétérosexuels dont l’infertilité est médicalement constatée, sont pris en charge, sous condition d’entente préalable, à 100% avec exonération du ticket modérateur et ce jusqu'au 43ème anniversaire de la femme. 

Cette prise en charge se limite à une seule insémination artificielle par cycle, avec un maximum de six inséminations et quatre tentatives de fécondation in vitro pour obtenir une grossesse.

L'organisation et la prestation des soins de santé relèvent de la responsabilité des pays membres de l’Union européenne, celle-ci n’imposant pas de règles quant à la prise en charge financière de l’assistance médicale à la procréation. Elle diverge donc d'un pays à l'autre.

3.5.2 L’Agence de la biomédecine distingue les pays remboursant en partie les traitements d’assistance médicale à la procréation (Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Croatie, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Israël, Italie, Macédoine, Monaco, Monténégro, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Québec, République tchèque, Royaume-Uni, Russie, Serbie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Turquie) et ceux qui n’interviennent pas dans ce cadre (Irlande, Suisse, Ukraine, Chypre, Estonie, Lettonie, Luxembourg, Malte, Roumanie)[162].

En Autriche, un fonds a été mis en place pour couvrir environ 70 % des coûts liés à la fécondation in vitro et aux traitements, sous certaines conditions. Un des critères pour la prise en charge est notamment la stérilité de l’homme et/ou de la femme[163].

En Belgique, si la patiente est âgée de moins de 43 ans, les coûts liés à l’ensemble des activités de laboratoire requises pour la fécondation in vitro ne lui sont pas facturés et, depuis 2008, l’assurance-maladie invalidité octroie également un remboursement forfaitaire pour les spécialités pharmaceutiques utilisées dans le cadre d’une insémination[164].

En Espagne, l’existence d’un trouble de la capacité de reproduction, documents à l'appui, conditionne la prise en charge par le système national de santé. La limite d’âge pour les femmes est de 40 ans[165]

Au Royaume-Uni, l’accès au traitement dans le cadre du service de santé national (National Health Service ou NHS) n’est pas identique partout parce que les différents conseils de santé (« clinical commissioning groups » locaux) définissent les services de soins de santé à financer pour un groupe de population, appliquent leurs propres niveaux de prestation et critères de sélection. Le National Institute of Clinical Health and Excellence (NICE)[166] publie des recommandations[167] (prise en charge par le NHS de 3 cycles de fécondation in vitro pour les personnes remplissant les critères d’éligibilité) que les conseils de santé appliquent ensuite au niveau local. Puisqu’il s’agit de recommandations et non d’obligations, en pratique, les inégalités géographiques en termes d’accès sont importantes (« postcode lottery » ou loterie du code postal). Selon les conseils de santé, le nombre de cycles de fécondation pris en charge peut ainsi varier énormément.[168]

En Israël, les procédures d’AMP sont entièrement prises en charge jusqu’à la naissance de deux enfants. Toutefois, la limite d’âge a été posée à 45 ans[169].

En Suède, la prise en charge ne concerne que les fécondations in vitro à un embryon chez les femmes âgées de moins de 35 ans.[170] La situation peut être variable selon le comté mais, généralement, un certain nombre de tentatives d’assistance médicale à la procréation sont prises en charge (en conformité avec la recommandation nationale de l’Association suédoise des pouvoirs locaux et régionaux) [171].

En Norvège, tous les couples qui se voient proposer une assistance médicale à la procréation dans le cadre du système de santé national bénéficient d’une prise en charge partielle du traitement par le Système national de soins de santé. Dans la pratique, les centres privés peuvent proposer un traitement aux femmes âgées de plus de 40 ans alors que les centres relevant du système national de santé ne sont pas en mesure de donner la priorité à ces patientes[172].

3.5.3 Il est légitime de poser la question de l’extension de la prise en charge par l’assurance maladie des techniques d’assistance médicale à la procréation aux nouveaux publics qui y seront éligibles. Ainsi que le note le Conseil d’Etat, « La question de l’allocation la plus juste des ressources de l’assurance maladie se pose avec d’autant plus d’acuité dans un contexte de tension sur les finances publiques. ».[173].

Tout d’abord, le Comité consultatif national d'éthique indique, dans son avis n° 129[174], que : « Cette question [de la prise en charge] fait partie intégrante des aspects éthiques du sujet et la solution adoptée (prise en charge complète, ou différenciée sous conditions de ressources quel que soit le type de demande, financement par les mutuelles, ou autres) devra être soigneusement étudiée au regard des critères de justice. ».

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale[175] estime que « l’égalité des droits est un fort argument en faveur d’une prise en charge. », rappelant également qu’« Aujourd’hui, des parcours d’AMP sont remboursés alors même qu’aucune infertilité pathologique n’est clairement établie. ».

De son côté, la Commission consultative nationale des droits de l’homme[176] tranche : « le principe d’égalité ferait obstacle à une telle différence de traitement. » et le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes[177] recommande d’« Aligner la prise en charge financière des actes de PMA pour les couples de femmes et les femmes célibataires sur les modalités de prise en charge prévues pour les couples hétérosexuels (…) afin de garantir une égalité sociale d’accès à la technique ».

Pour le Conseil d’Etat « Il paraît exclu, pour des raisons juridiques, d’établir un régime différent de prise en charge au regard de la seule orientation sexuelle. Le seul critère pertinent serait la visée thérapeutique, à l’instar de ce qui existe pour distinguer la chirurgie esthétique de la chirurgie réparatrice. 

Toutefois, ce critère apparaît peu adapté dans la mesure où l’on observe aujourd’hui des prises en charge en AMP de situations qui ne répondent pas à proprement parler à l’exigence d’une infertilité « médicalement constatée », mais qui peuvent être par exemple banalement liées à l’âge. La mise en œuvre de l’AMP, dans ces conditions, ne s’inscrit pas dans un contexte pathologique. Organiser une prise en charge pour les uns et non pour les autres apparaîtrait dès lors périlleux. »[178].

Au regard de cette analyse et rappelant qu’une des priorités des politiques publiques est de chercher à limiter les inégalités sociales liées aux revenus, le Gouvernement ne peut ouvrir un droit qui serait réservé aux femmes les plus aisées[179]. Le Conseil d’Etat souligne d’ailleurs que « la solidarité étant une composante importante du modèle bioéthique français, l’équité commande de ne pas écarter les personnes les plus démunies de la prise en charge des techniques d’AMP »[180].

La question d’une distinction entre les couples hétérosexuels, d’une part, et les couples de femmes et les femmes non mariées, d’autre part, au regard de la seule exonération du ticket modérateur doit être analysée selon le même prisme tant juridique qu’éthique.

Par conséquent, le Gouvernement étendra la prise en charge de l’assistance médicale à la procréation selon les règles en vigueur pour les couples hétérosexuels à toutes les femmes.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1. Impacts juridiques

4.1.1 A titre liminaire, le terme "femme non mariée" a été choisi pour des raisons juridiques afin d'éviter l’application de la présomption de paternité pour le mari qui n'aurait pas consenti à l'assistance médicale à la procréation. Le problème ne se pose pas de la même façon pour un homme non marié puisqu'il n'est pas contraint, s'il n'a pas consenti à l'assistance médicale à la procréation, d'établir sa filiation avec l'enfant.

D'un point de vue pratique, ce terme est également apparu préférable à celui de "femme célibataire" ou de "femme ne vivant pas en couple" parce qu'il est davantage objectif et permet aux praticiens qui seront chargés de mettre en œuvre l'assistance médicale à la procréation de disposer d'un critère factuel. Il est également plus clair pour certaines femmes (veuves, divorcées ou toujours mariées mais séparées) qui pourraient ne pas savoir clairement si elles ont accès ou non à l’assistance médicale à la procréation.

La présente conduira à modifier le code de la santé publique.

Le premier alinéa de l’article L. 2141-2 de ce code sera abrogé. La fin du premier alinéa de l’article L. 2141-6 (« lorsque les techniques d'assistance médicale à la procréation au sein du couple ne peuvent aboutir ou lorsque le couple, dûment informé dans les conditions prévues à l'article L. 2141-10, y renonce ») et l’article L. 2141-7 sont par ailleurs supprimés.

En effet, toutes les conséquences doivent être tirées de la suppression du critère pathologique de l’infertilité[181].

Le deuxième alinéa de l’article L. 2141-6 est également modifié pour prendre en compte les nouvelles modalités de filiation.

L’article L. 2141-10 est modifié sur plusieurs points

-          le premier alinéa est toiletté pour mettre à jour les renvois (l’équipe médicale fait appel, en tant que de besoin, à un assistant de service social inscrit sur la liste mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 411-2 du code de l’action sociale et des familles) ;

-          ce premier alinéa est mis en cohérence et clarifié sur le fait que les entretiens particuliers du ou des demandeurs se font avec un ou plusieurs médecins de l’équipe clinico-biologique pluridisciplinaire du centre d’assistance médicale à la procréation (la formulation en vigueur laissait supposer que toute l’équipe devait être présente au moment de tels entretiens) ;

-          il précise qu’il doit être procédé à la vérification de la motivation des deux membres du couple ou de la femme non mariée et à leur évaluation médicale et psychologique ;

-          il est simplifié, deux items (1° et c) du 3°) renvoyant à l’information sur la possibilité d’adopter un enfant (a fortiori dans le contexte de chute du nombre d’enfants à adopter ; il est choisi de supprimer cette mention au 1° et de la laisser au c) du 3° ;

-          bien que les termes utilisés (« demande » et « à l’issue du dernier entretien ») conduisent à une certaine confusion, il se déduit des dixième et onzième alinéa de cet article que le consentement du couple à l’assistance médicale à la procréation, mentionné à l’article L. 2141-2, doit faire l’objet d’une confirmation par écrit après un délai de réflexion d’un mois ; il parait préférable de clarifier ces deux alinéas, d’utiliser le terme « consentement » et d’éviter la mention au « dernier entretien » qui a peu de sens, de dernier entretien ne pouvant être identifié en cours de démarche (nouvelle rédaction : « le consentement du couple ou de la femme est confirmé par écrit à l’expiration d’un délai de réflexion d’un mois après réalisation des étapes mentionnées au 1°, 2°, 3°, 4° et 5° ») ;

-          à l’avant dernier alinéa, il est précisé que le médecin qui, après concertation au sein de l'équipe clinicobiologique pluridisciplinaire, estime qu'un délai de réflexion supplémentaire est nécessaire aux demandeurs dans l'intérêt de l'enfant à naître, doit avoir participé aux entretiens avec le ou les demandeurs ;

-          au dernier alinéa, la mention aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité est supprimée pour mettre en cohérence le code de la santé publique avec le code civil (le pacte civil de solidarité est un contrat sans effet sur la filiation des enfants issus du couple, ce sur plan ce couple est considéré comme "non marié", comme les concubins).

Par ailleurs, une mise en cohérence de l’ensemble des dispositions concernées est effectuée (mention d’un couple sans précision de sa composition et ajout de la femme non mariée).

4.1.2 La présente mesure a également pour objet de modifier le code de la sécurité sociale.

La rédaction du 12° de l’article L. 160-14 du code de la sécurité sociale sera modifié pour ne renvoyer qu’aux investigations nécessaires au diagnostic de l’infertilité (terme préférable à celui de stérilité).

Il sera ajouté un 26° renvoyant au nouveau cadre de l’assistance médicale à la procréation :

4.1.3 S’agissant du droit de l’Union, le principe de libre circulation des personnes dans l’espace européen[182] n’empêche pas les Etats de déterminer, conformément à leur droit interne, les modalités d’accès aux techniques médicales concernées.

La directive 2011/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2011 relative à l’application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers, si elle consacre la jurisprudence de la CJUE relative au droit des patients à bénéficier d’un traitement médical dans un autre État membre que le leur, porte principalement sur le remboursement des frais engagés par une personne assurée qui reçoit des soins de santé transfrontaliers, « si les soins de santé en question font partie des prestations auxquelles la personne assurée a droit dans l’Etat membre d’affiliation ».

4.2. Impacts économiques et financiers

            4.2.1. Impacts sur les entreprises

Les centres d’assistance médicale à la procréation vont faire face à des demandes plus importantes émanant des nouveaux publics éligibles (dans une proportion et à un rythme qu’il est difficile d’anticiper). Toutefois, cette demande sera répartie sur l’ensemble des centres.

L’évaluation de la situation au plan médical sera beaucoup moins lourde pour les couples de femmes et les femmes non mariées que pour les couples hétérosexuels pour lesquels un bilan d’infertilité continuera d’être réalisé. 

L’augmentation du nombre de demandes d’assistance médicale à la procréation avec don de spermatozoïdes concernera plus spécifiquement les CECOS. Mais il est rappelé dans le même temps que ces centres seront allégés de leur mission de conservation et de gestion des données, qu’elles soient identifiants ou non, relatives aux donneurs de gamètes (qui incombera à l’Agence de la biomédecine).

            4.2.2. Impacts budgétaires

La Fédération des CECOS envisage une multiplication des demandes par deux ou trois[183].

Le Pr. François Olivennes[184], considère que « l’augmentation de l’âge des premières grossesses et le fait que de plus en plus de couples se séparent peut laisser penser que de plus en plus de femmes seules voudront des enfants [par le biais des techniques de procréation] ». Il précise recevoir « de plus en plus de ces femmes en consultation, entre cinq et dix par mois, contre deux par mois il y a quelques années. ». Cependant, il ne croit pas à une augmentation significative de la part des femmes célibataires : « Il s’agit en effet d’une démarche à laquelle peu de femmes aspirent, mais à laquelle elles se résolvent faute d’autre solution et non sans s’être posé toutes les questions qui se rattachent à cette situation. ».

Toute projection est délicate puisqu’il est impossible de prédire finement le nombre de couples et, a fortiori, le nombre de femmes célibataires qui solliciteront les centres d’assistance médicale à la procréation.

Néanmoins, à partir de l’enquête Familles et logements de l’Insee de 2011[185], de la dernière enquête santé et protection sociale (ESPS) de l’Irdes[186] et de la prise en compte de différents paramètres, le coût total annuel de l’ouverture de l’accès de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes célibataires peut être estimé entre 10 et 15 millions d’euros.

Il apparait donc que l’enjeu de la réforme est modeste pour les finances publiques puisqu’il représente 5 % du coût total de l’assistance médicale à la procréation aujourd’hui[187].

4.2.3.      Autres impacts

4.2.3.1.Conséquences sur le don de gamètes

Actuellement, les dons de spermatozoïdes couvrent la demande et la situation est considérée comme équilibrée.

Le Comité consultatif national d'éthique, dans son avis n° 126[188], a posé la question de la disponibilité limitée des ressources biologiques (gamètes issus de don) et, au-delà, celle du risque de « marchandisation » des produits du corps humain. Ces questions constituent, pour lui, un « point de butée qui ne peut être ni évacué, ni minimisé ».

A ce stade, aucune estimation fiable des nouveaux besoins en don ne peut être réalisée (ni le nombre de femmes qui solliciteront les centres d’assistance médicale à la procréation ni le nombre de nouveaux donneurs qui se manifesteront ne peuvent être approchés rigoureusement).

Dans ce contexte, plusieurs pistes pour améliorer la réserve en spermatozoïdes ont été évoquées. Parmi ces pistes, seront écartés (Cf. infra) la rémunération du don de gamètes, le recours aux gamètes conservés dans des banques étrangères ou l’instauration d’un ordre de priorité au sein des demandeurs.

Tout d’abord, si la gratuité légale du don en France participe certainement à la situation de tension actuelle voire de pénurie de gamètes, le Gouvernement exclut toute rémunération du don de gamètes et ce, même si le don de sperme ne porte pas atteinte à l’intégrité physique du donneur.

En France, l’ensemble des dons d’éléments et produits du corps humain est gratuit et placé hors du secteur privé à but lucratif pour se protéger de tout risque de dérive commerciale.

L’interdiction de tout profit dans ce domaine fait l’objet article 21 de la Convention dite d’Oviedo qui dispose que :

« Le corps humain et ses parties ne doivent pas être, en tant que tels, source de profit. »

Le Comité consultatif national d'éthique a constaté que l’expérience de pays, comme l’Espagne, qui « ont fait le choix d’augmenter l’offre de gamètes par la perspective d’une rémunération » (même si elle est présentée comme une indemnisation), « montre que l’argent gagné décide quelqu’un à faire ce qu’il ne voulait pas faire gratuitement, ce qui constitue une nouvelle figure de violence ».[189]

En autorisant la rémunération du don de gamètes, un véritable marché de la procréation pourrait se constituer. Et une fois le principe de la gratuité rompu sur les gamètes, celui sur les autres produits et éléments du corps humain, y compris les organes, pourrait être à son tour interrogé.

Le Gouvernement ne remettra donc pas en cause le principe de non commercialisation du corps humain et de ses éléments qui constitue l’un des piliers des lois de bioéthique, vise à protéger la dignité de la personne et contribue à la qualité et à la sécurité du don.

Par ailleurs, la Fédération des CECOS[190] a indiqué à plusieurs reprises qu’elle avait eu des échanges avec des représentants de la banque Cryos[191] (Danemark) qui se préparerait à la possibilité d’exporter des spermatozoïdes en France « dans un circuit légal ». Or, l’activité de cette banque étant purement commerciale, il lui sera impossible d’importer gratuitement des gamètes fussent-ils « éthiques » (au sens d’une non rémunération des donneurs) en France.

Certains pays, dont la Belgique, ont passé des accords avec des banques étrangères (notamment Cryos et Nordic Cryobank situées au Danemark) sélectionnées sur la base d’un cahier des charges précis incluant des conditions éthiques de recrutement des donneurs. Toutefois, ces paillettes sont achetées.

Mais le cas de la Belgique n’est pas celui de la France. En effet, dans ce pays, le poids des publics étrangers, s’il n’est pas précisément connu, pèse indéniablement sur les besoins nationaux.

En effet, au sein de l’Union européenne, le don de sperme est essentiellement réalisé dans trois pays : deux pays, le Danemark et la Belgique, qui ne représentent respectivement que 1 % et 2 % des naissances de l’Union européenne assurent 26 % et 20 % des dons de sperme de l’Union européenne, et l’Espagne, qui représente 8 % des naissances, assure 19 % des dons de sperme.

Au sein de l’Union européenne, l’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur se concentre donc dans quelques pays qui accueillent les européens qui ne peuvent accéder au don de gamètes chez eux. Cela aboutit à une très forte concentration du don dans ces pays, souvent de petite taille. Pour répondre à la demande de la population européenne, ces pays doivent recruter un nombre important de donneurs qui ne peut reposer sur le seul altruisme de la population locale.[192]

Il convient par ailleurs de noter que les centres belges de médecine de la reproduction qui recrutent les donneurs, ne sont autorisés à aucune publicité.[193]

Au final, le Gouvernement n’envisage pas de recourir à des banques étrangères.

Enfin, certains (en particulier certaines sociétés savantes) souhaitent qu’une priorité soit donnée aux couples hétérosexuels souffrant d’infertilité ayant une origine pathologique.

Le Comité consultatif national d'éthique, dans son avis n° 126[194], écarte cette option. Il considère en effet que « D’un point de vue juridique, la constitutionnalité de cette solution serait douteuse » et, « d’un point de vue pratique, il n’est pas non plus évident de savoir comment procéder : faudrait-il instaurer deux listes d’attente séparées ? De ce fait, sauf augmentation inattendue du nombre de donneurs de sperme, l’ouverture de l’IAD aux femmes en couple ou seules ne déboucherait que sur des occasions très rares pour celles qui le souhaiteraient de bénéficier effectivement d’un don de sperme. »  

Le Conseil d’Etat tranche la question : « Tous les couples ayant besoin d’un don de sperme pourraient être confrontés à un délai d’attente plus long, sans que l’on puisse juridiquement organiser un droit de priorité pour les couples hétérosexuels. »[195]

Le Gouvernement ne fixera donc aucune priorité de prise en charge qui serait discriminatoire pour les couples de femmes ou les femmes non mariées. Les droits ouverts doivent être effectifs.

Aujourd’hui déjà, les professionnels ont recours à des critères objectifs liés à l’âge de la femme ou à la durée de parcours du couple en assistance médicale à la procréation pour établir des priorités de prise en charge. Ces critères relèvent des bonnes pratiques professionnelles et il n’y a aucune raison de les modifier ou de les prévoir dans la loi.

4.2.3.2.Impact sur les délais d’attente

Si le risque de prolonger, pour tous ceux qui ont besoin d’un don de sperme, les délais d’attente existe, cette situation n’est ni avérée ni inéluctable. Elle repose, en effet, sur l’hypothèse d’une stagnation voire d’une diminution du nombre de donneurs. Or, ce nombre peut, au contraire, augmenter, l’adoption d’un nouveau modèle d’assistance médicale à la procréation plus en adéquation avec l’évolution de la société étant susceptible de susciter de nouvelles vocations.

En tout état de cause, le Gouvernement compte amoindrir cet éventuel impact par le renforcement des campagnes d’information et de recrutement de nouveaux donneurs conduites par l’Agence de la biomédecine[196].

Le Comité consultatif national d'éthique, dans son avis n° 126[197], insiste pour que soient menées des campagnes de promotion du don « énergiques, répétées dans le temps, dans le but d’augmenter les dons de sperme et de répondre aux besoins ».

Une (importante) marge de manœuvre existe. Il suffit, pour s’en convaincre, de constater les résultats du baromètre d’opinions sur les dons de gamètes de l’Agence de la biomédecine[198] : 85% des hommes et 79% des femmes en âge de donner se disent mal informés sur le don de gamètes. Cette tendance est encore plus marquée chez les 18-24 ans qui ne sont que 11% à se sentir bien ou suffisamment informés sur le sujet.

A cet égard, la suppression de la condition de procréation antérieure, couplée à d’autres facteurs comme la campagne nationale en faveur du don de l’Agence de la biomédecine, a eu un effet direct sur le recrutement de donneurs qui a augmenté de 42% entre 2015 et 2016[199].

Le guide pour la mise en œuvre du principe d’interdiction du profit relatif au corps humain et à ses parties provenant de donneurs vivants ou décédés du Comité de bioéthique du Conseil de l’Europe précise en outre que : « les activités de promotion peuvent être acceptables dès lors que les mesures impliquées sont des mesures « à vocation altruiste », qui sont considérées comme compatibles avec l’interdiction du profit. »[200].

Le Gouvernement renforcera donc les campagnes de dons de gamètes.

4.2.3.3.Gestion du stock de gamètes

La réforme n’entraîne pas de changement de finalité du don de gamètes qui permet la réalisation d’une assistance médicale à la procréation indépendamment de l’identification des bénéficiaires.

En tout état de cause, chaque ancien donneur garde la faculté de révoquer, s’il le souhaite, son consentement, comme l’autorise l’article L. 1244-2 du code de la santé publique qui prévoit que « le consentement peut être révoqué à tout moment jusqu’à l’utilisation des gamètes ».

4.3.      Impacts sociaux

La mesure envisagée étend un droit existant à toutes les femmes qu’elles soient en couple hétérosexuel, de même sexe ou non mariées. Elle réduit donc les inégalités entre les femmes qui résultaient du cadre actuel de l’assistance médicale à la procréation.

Si certains ont évoqué le risque de recours accru aux techniques médicales de procréation par des couples hétérosexuels non infertiles, il parait difficile de l’envisager dans le cadre actuel autrement que de façon marginale. En effet, les sujétions seraient majeures pour ces couples et non compensées par des bénéfices. En tout état de cause, les équipes clinico-biologiques d’assistance médicale à la procréation pourraient, sauf justification exceptionnelle, récuser de telles sollicitations.

S’agissant de la mesure relative à l’ouverture de l’accès aux données (identifiantes ou non) du donneur de gamètes par les enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur ne doit pas être considérée comme une conséquence nécessaire de l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes célibataires. Ce serait occulter le débat qui a eu lieu auparavant sur cette question pour les enfants issus d’un don de gamètes au sein d’un couple hétérosexuel.

Certes, la connaissance de ses origines est un élément structurant de l’identité des personnes et il est raisonnable d’anticiper le fait que les enfants issus d’une assistance médicale à la procréation réalisée au sein d’un couple de femmes ou au bénéfice d’une femme non mariée seront confrontés à un besoin de quête identitaire, plus ou moins pressant mais cette quête est également vraie dans l’absolu.

L’Académie de médecine note d’ailleurs que les pays qui ont autorisé l’accès à l’identité du donneur de gamètes ne l’ont jamais fait en lien avec l’ouverture de l’accès à l’assistance médicale à la procréation (et inversement, la Belgique, qui permet aux couples de femmes et aux femmes célibataires de procréer, a maintenu l’anonymat du don de gamètes) [201].

5.            Consultations et modalités d’application

5.1. Consultations

Ont été consultés 

-          La Caisse nationale d’assurance maladie ; elle a rendu son avis le 2 juillet 2019 ;

-          L’Union nationale des caisses d’assurance maladie ;

-          L’Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire ; elle a remis son avis le 3 juillet 2019 ;

-          Le Conseil central d’administration de la caisse nationale de la mutualité sociale agricole ; elle a transmis son avis le 26 juillet 2019 ;

-          La Caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants.

Enfin, la Haute autorité de la santé a été consultée en application du 6° de l’article L. 161-37 du code de la sécurité sociale. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

5.2.      Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La préparation et la publication du décret mentionné ci-dessous pouvant être anticipées, l’ouverture de l’accès à l’assistance médicale à la procréation sera effective le lendemain de la promulgation de la loi.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

Pour Saint-Pierre-et-Miquelon, sont applicables directement les dispositions du code de la sécurité sociale mentionnées au II, qui complètent l’article L. 160-14 dont l’application est déjà prévue à l’article 9 de l’ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses disposions relatives aux affaires sociales.

En revanche, ces mêmes dispositions du II du présent article visant la modification de l’article L. 160-14 du code de de sécurité sociale ne sont pas applicables à Mayotte, dont le régime d’assurance maladie régi par l’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre1996 a fixé des règles différentes pour la participation des assurés (article 20-2).

5.2.3.      Textes d’application

Le 2° de l’article R 160-17 du code de la sécurité sociale devra être complété par décret en Conseil d’Etat car actuellement l’exonération du ticket modérateur est prévue en cas d’infertilité et sous réserve de l’avis du service du contrôle médical. La consultation de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie en application et de l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire sera nécessaire pour avis.

Article 1er Clarifier la notion d’âge de procréer

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1 La notion d’« âge de procréer » est inscrite dans l’article L. 2141-1 du code de la santé publique et constitue l’une des conditions légales d’accès aux techniques d’assistance médicale à la procréation depuis les premières lois de bioéthique de 1994 :

« L'homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer et consentir préalablement au transfert des embryons ou à l'insémination »[202].

Les travaux préparatoires à la loi n° 94-954 du 19 juillet 1994 relative à la bioéthique montrent que cette notion relevait des « restrictions » « indiquées dans l'intérêt de l'enfant à naître, afin qu'il ne souffre pas des conséquences du recours à une assistance médicale ; elles sont également précisées dans l'intérêt de la femme, les techniques de stimulation ovarienne étant éprouvantes et peut être pas sans risque pour sa santé. Elles visent enfin à protéger la société eu égard au coût élevé pour la sécurité sociale des techniques d'assistance médicale la procréation »[203].

Selon le rapport d’information fait au nom de la mission parlementaire sur la révision des lois de bioéthique du 20 janvier 2010[204], « des préoccupations sociales et éthiques ont conduit à retenir la notion de couples « en âge de procréer ». Elle répond au souci d’éviter que les femmes ménopausées aient recours à l’assistance médicale à la procréation ».

S’il considère dans son étude de 2009[205] que ce critère répond « à la logique « biologique » du législateur et à la prise en compte des limites naturelles de la reproduction », le Conseil d’Etat analyse, dans de récentes décisions[206], que « la condition relative à l’âge de procréer, (…) revêt, pour le législateur, une dimension à la fois biologique et sociale ».

1.1.2 Les données d’âge de la mère et du père constatées en France, toutes naissances confondues (incluant les naissances après assistance médicale à la procréation), sont représentées dans le tableau qui suit.


Répartition des nouveau-nés de 2015 selon les âges de leurs parents (en %)

Âge de la mère

Âge du père

Ensemble

Moins de 30 ans

De 30 à 39 ans

De 40 à 49 ans

50 ans ou plus

Moins de 30 ans

23,9

17,0

1,7

0,2

42,8

De 30 à 39 ans

3,4

37,4

10,0

1,2

52,0

40 ans ou plus

0,1

1,3

3,2

0,6

5,2

Ensemble

27,4

55,7

14,9

2,0

100,0

Champ : France.

Source : Insee, statistiques de l'état civil.

La femme a un stock définitif d’ovocytes à la naissance, et ses capacités reproductives vont commencer à diminuer à partir de 35 ans, et ce drastiquement après 40 ans. L’âge moyen de la ménopause se situe aux alentours de 50 ans, mais la réserve ovarienne diminue bien plus précocement ainsi donc que la probabilité d’avoir naturellement un enfant.

Le pourcentage de grossesses non menées à termes (fausses couches) va également s’accroître avec l’âge. S’il est d’environ 12 % vers 25 ans, il atteint 20 % à 37 ans et 30 % à 43 ans.[207]

Toutefois, des femmes d’un âge avancé peuvent débuter une grossesse grâce à un don d’ovocytes (et une prise en charge spécifique) et, hors de France, des exemples défraient régulièrement la chronique[208].

Contrairement à l’ovogenèse (formation des ovules à partir des ovocytes) chez la femme, la spermatogenèse (formation des spermatozoïdes) est continue chez l’homme en bonne santé (le vieillissement chez l’homme n’entraîne pas systématiquement son arrêt). Même si le délai pour concevoir un enfant augmente avec l’âge du père (de 6 mois avant 30 ans, il passe à 32 mois à 50 ans et plus[209]) et que ce délai peut conduire à un recours accru à l’assistance médicale à la procréation à partir d’un certain âge, les exemples de paternité tardive ne sont pas rares, y compris en France, et indépendamment de toute assistance médicale à la procréation.

1.1.3 L’âge des pères concernés par une assistance médicale à la procréation n’est pas colligé par l’Agence de la biomédecine. En revanche, la répartition des âges des femmes en assistance médicale à la procréation est connue (et stable) :

Age des femmes en assistance médicale à la procréation

Source : Agence de la biomédecine, rapport médical et scientifique 2017

 

 

2016

Age à l'AMP

N

%

<30 ans

23677

21,1%

30 - 34 ans

38968

34,7%

35 - 37 ans

22258

19,8%

38 - 39 ans

11802

10,5%

40 - 42 ans

13689

12,2%

>=43 ans

1769

1,6%

Total renseigné

112163

100,00%

Non renseigné

2828

.

1.2. Cadre conventionnel

Dans deux décisions du 3 avril 2019[210], le Conseil d’Etat considère que le refus d’exportation de gamètes opposé aux requérants par l’Agence de la biomédecine au motif de leur âge (en lien avec les dispositions de l’article L. 2141-2 du code de la santé publique) « ne peut être regardé, eu égard aux finalités d’intérêt général que ces dispositions poursuivent et en l’absence de circonstances particulières propres au cas d’espèce, comme constituant une ingérence excessive dans l’exercice de son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. » et, par ailleurs, que « la mise en œuvre de l’article L. 2141-2 du code de la santé publique ne peut être regardée comme instaurant une discrimination dans l’exercice des droits protégés par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales entre des hommes du même âge prohibée par l’article 14 de cette convention, dès lors que ceux-ci sont placés dans une situation différente selon qu’ils procréent naturellement ou ont recours à une assistance médicale à la procréation. » 

1.3. Éléments de droit comparé

Une limite à l’âge maternel des femmes prises en charge en assistance médicale à la procréation est souvent mentionnée dans les sources disponibles. Elle reflète probablement l’ancienneté des données et des connaissances en matière de risques médicaux pour la femme à partir d’un certain âge.

Les données en matière de risques médicaux liés à l’âge du père sont relativement plus récentes, expliquant peut-être qu’elles ne soient pas encore beaucoup prises en compte. 

Il existe des limites d’âge dans plusieurs pays, y compris concernant les hommes[211] :

-                     Autriche : âge de la mère jusqu’à 40 ans, âge du partenaire jusqu’à 50 ans.

-                     Allemagne : les limites d’âge sont de 25 à 40 ans pour les femmes et de 25 à 50 ans pour les hommes.

-                     Belgique : âge maximum de la femme fixé à 42 ans.

-                     Espagne : femmes entre 18 et 40 ans et hommes entre 18 et 55 ans au début du bilan de l’infertilité.

-                     Croatie : pour les femmes jusqu’à 42 ans (âge naturel de procréation, estimé par le corps médical).

-                     Danemark : les femmes de plus de 45 ans ne peuvent bénéficier d’un traitement.

-                     Finlande : les procédures sont accessibles aux femmes jusqu’à 40 ans dans le système public de santé ; les femmes de plus de 40 ans sont également prises en charge si le pronostic est bon ; les frais sont remboursés par le régime d’assurance maladie jusqu’à l’âge de 43 ans ; pour les femmes plus âgées, la couverture d’assurance maladie est examinée au cas par cas au regard des données médicales de la patiente concernée.

-                     Luxembourg : âge limite de la femme fixé à 40 ans.

-                     Norvège : dans la pratique, les centres privés peuvent proposer un traitement aux femmes âgées de plus de 40 ans alors que les centres relevant du système national de santé (dans la plupart des cas, des centres hospitaliers) ne sont pas en mesure de donner la priorité à ces patientes (principalement en raison du faible rapport coût-efficacité du traitement).

-                     Suède : de manière générale, une femme âgée de plus de 40 ans ne pourra bénéficier du traitement à moins qu’elle ne dispose d’embryons congelés avant l’âge de 40 ans, auquel cas ils devront être utilisés avant qu’elle n’atteigne l’âge de 45 ans. Ce principe s’applique indépendamment de la prise en charge financière. L’autre parent ne doit pas être âgé de plus de 56 ans.

Par ailleurs, il n’y aurait aucune limite légale d’âge dans les pays suivants : Chypre, Hongrie, Italie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, Roumanie et Slovaquie[212].

2.             Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1 Sur la notion d’âge de procréer, l’étude du Conseil d’Etat de 2009[213] concluait : « L’équilibre actuel fondé sur l’articulation entre une loi posant une règle très générale et une pratique où l’appréciation est laissée aux médecins, paraît satisfaisante. Il est cependant impératif que soit mieux prise en considération l’incidence de l’âge de la femme – et même, à titre subsidiaire, de l’homme – sur la procréation, les études réalisées soulignant un grand déficit d’information en la matière : une certaine illusion technicienne fait croire que les limites naturelles peuvent désormais être aisément dépassées, ce qui n’est pas le cas et doit être réaffirmé. »

Dix ans plus tard, ce critère particulièrement large et imprécis pose des difficultés en pratique alors qu’il existe des arguments incontestables pour limiter l’âge du recours à l’assistance médicale à la procréation : les risques médicaux des paternités et des maternités tardives ainsi que les risques liés à l’écart d’âge entre les parents et  l’enfant.

2.1.2 De nombreux travaux ont documenté une atteinte de la spermatogenèse chez l’homme âgé : atteinte quantitative (nombre de spermatozoïdes produits) et qualitative (mobilité, formes anormales).

L’avis du conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine en date du 8 juin 2017[214] rapporte un lien entre l’augmentation de l’âge du père et la survenue de syndromes génétiques, de troubles neurodéveloppementaux de l’enfant, de schizophrénie (risque trois fois plus élevé lorsque le père est âgé de plus de 50 ans comparé aux pères de moins de 25 ans), d’autisme (risque multiplié par six si le père est âgé de plus de 50 ans comparé aux pères de moins de 29 ans).

Les données du séquençage nouvelle génération (nouvelle technique utilisée en génétique) ont démontré qu’un père de 20 ans transmet en moyenne 25 mutations génétiques à son enfant, un père de 40 ans environ 65, et un père de 60 ans environ 85 (chaque année supplémentaire ajoute en moyenne 2 nouvelles mutations à la descendance)[215].

En outre, certaines complications de la grossesse (fausses couches, prématurité) seraient également liées à l’âge du père.

2.1.3 L’âge est un déterminant important de la mortalité maternelle. En France, comparées aux femmes de 20 à 29 ans, les femmes de 40-44 et de plus de 45 ans ont un risque de décès respectivement multiplié par 4,9 et 7,9[216].

Par ailleurs, les grossesses tardives sont causes de morbidité. Chez les femmes de plus de 45 ans, les risques de survenue de pathologies cardiaques (infarctus x 5,4, arrêt cardiaque x 6,4, détresse cardiaque x 2,4), pulmonaires (embolie x 3,9, pneumonie x 1,4), thrombotiques (thrombose veineuse profonde x 3,7), rénales (insuffisance rénale x 3,0) et infectieuses (choc septique x 1,5) sont significativement augmentés[217].

Pour le fœtus, le risque d’anomalies chromosomiques augmente avec l’âge de la femme.  

Si le recours au don d’ovocytes permet, en principe, de s’affranchir d’un certain nombre de risques (les ovocytes proviennent de femmes plus jeunes, de moins de 37 ans en France), il ne permet pas de s’affranchir de l’âge de la femme concernée par la grossesse et donc des risques de morbidité-mortalité susmentionnés. 

En outre, le don d’ovocytes pourrait être source de difficultés spécifiques. En effet, comme le souligne le Conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine dans son avis précité relatif à l’âge de procréer, de nombreuses études suggèrent que les grossesses obtenues par dons d’ovocytes seraient plus à risque de complications par rapport aux grossesses obtenues avec des ovocytes autologues (fécondation in vitro ou grossesse spontanée). Le recours au don d’ovocytes augmente le risque de grossesse multiple[218], de prééclampsie[219],[220], d’hémorragies du post-partum[221], d’accouchement prématuré[222],[223] de faible poids de naissance[224],[225],[226], de césarienne[227] et d’hypertension artérielle gravidique[228]. Le don d’ovocytes serait donc un facteur de risque indépendant de complications obstétricales et périnatales. Sur la base de ces résultats, la maternité tardive associée au don d’ovocytes apparaît comme particulièrement à risque.

2.1.4 La responsabilité des professionnels qui interviennent dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation est également engagée vis-à-vis de l’enfant à naître.

L’article L. 2141-10 du code de la santé publique prévoit d’ailleurs que l’assistance médicale à la procréation « ne peut être mise en œuvre par le médecin (…) lorsque le médecin, après concertation au sein de l'équipe clinico-biologique pluridisciplinaire, estime qu'un délai de réflexion supplémentaire est nécessaire aux demandeurs dans l'intérêt de l'enfant à naître. »

Comme le rapporte le conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine dans son avis précité, des études ont montré que les parents âgés pouvaient expérimenter davantage de difficultés dans l’éducation de leurs enfants à l’adolescence[229].

Par ailleurs, la paternité tardive serait associée à d’autres risques[230],[231],[232],[233].  

En matière d’adoption, les textes n’imposent pas de limite d’âge supérieure pour une personne souhaitant adopter mais l’enquête psychosociale, réalisée pour toute demande d’agrément en vue d’adoption, évalue les capacités des parents candidats à assumer l’éducation d’un enfant : « Concernant l’adoption d’un enfant né en France, les conseils de famille confient rarement un nourrisson à un ou des parent(s) ayant plus de 40 ans. Certains pays étrangers prévoient un écart d’âge maximum entre parents et enfant et ne confient pas de nourrisson à des parents âgés de plus de 40 ans. »[234]. Il doit être accueilli par des adultes en mesure de l’accompagner jusqu’à un âge où il sera autonome. Or, la parentalité tardive réduit les chances que les deux parents soient vivants lorsque leurs enfants atteignent la majorité ou deviennent eux-mêmes parents[235]. En effet, pour un âge de 45 ans à la naissance de l'enfant, 5,5 % des femmes et 12,1 % des hommes seront décédés avant que l’enfant soit âgé de 18 ans[236]. Plusieurs études ont par ailleurs mis en évidence une association entre la perte d’un parent au cours de l’enfance et un risque accru de suicide chez l’enfant[237] et de répercussions sur la santé mentale à long terme[238].

En outre, la parentalité tardive augmente le risque pour les enfants de devoir s’occuper de leurs parents âgés ou malades à un âge relativement jeune[239].. 

Pourtant, malgré ces éléments factuels sur les risques médicaux des paternités et maternités tardives ainsi que sur les risques liés à l’écart d’âge entre les parents et l’enfant, les équipes médicales sont confrontées à des difficultés en pratique et il existe des contentieux contre l’Agence de la biomédecine reposant sur l’interprétation de la notion d’âge de procréer.

2.1.5 La notion d’ « âge de procréer », en ce qu’elle ne comporte pas de limite chiffrée, pose des difficultés d’application aux praticiens d’assistance médicale à la procréation, auxquels il revient d’apprécier si les membres des couples qui les consultent sont en « âge de procréer », et , le cas échéant, de leur imposer des limites. En outre, les différences éventuelles d’appréciation, d’une équipe médicale à l’autre (pour espérer de meilleurs résultats et être plus attractifs par exemple), sont susceptibles de créer des inégalités d’accès.

Pour les femmes, les professionnels font valoir les moins bons résultats avec l’élévation de l’âge et les risques des grossesses tardives pour la mère et l’enfant. Ils s’appuient, en pratique, sur la limite de fait que constitue l’interruption de la prise en charge par l’assurance maladie au 43ème anniversaire de la femme[240]. Si une telle limite ne définit pas « l’âge de procréer » pour les femmes, elle aboutit symboliquement à ce qu’il existe, en France, une limite à cet âge.

Pour les hommes, les équipes médicales sont plus en difficulté. Dans les faits, elles ne prennent pas en charge un couple dont le père est âgé de plus de 59/60 ans.

Il est symptomatique de constater qu’aucun texte réglementaire n’est venu préciser cette notion d’âge de procréer. Dans l’arrêté du 30 juin 2017 modifié relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation[241], le terme « âge de procréer » est mentionné à cinq reprises sans être précisé et, si l’âge des deux membres du couple apparait bien comme un critère limitant la prise en charge en assistance médicale à la procréation (plusieurs occurrences dont les extraits ci-dessous), aucune limite précise (ni même aucune « fourchette » permettant de prendre en compte les éventuelles différences clinico-biologiques individuelles) n’y figure.

Ainsi, l’arrêté précité stipule que : « Pour chaque couple et chaque tentative, la balance bénéfice-risque du recours à l’assistance médicale à la procréation est évaluée par l’équipe pluridisciplinaire. Elle prend en compte notamment l’âge de chaque membre du couple, la durée d’infertilité et les éventuels facteurs de risques de la stimulation ovarienne ou de la grossesse. » (II.2 de l’annexe de l’arrêté)

Ce constat témoigne de la gêne à préciser ce que le législateur entend par la formule « âge de procréer ».

Et cette difficulté se retrouve dans la prise en charge des personnes confrontées à une maladie ou un traitement potentiellement stérilisant qui peuvent, en application de l’article L. 2141-11 du code de la santé publique, bénéficier de la conservation de leurs gamètes ou tissus germinaux, en vue de la réalisation ultérieure, à leur bénéfice, d'une assistance médicale à la procréation, ou en vue de la préservation et de la restauration de leur fertilité.

En effet, l’arrêté précité mentionne que :

« La préservation de fertilité est réalisée en vue d'une assistance médicale à la procréation ou d'une greffe ultérieure dans un but de restauration de la fertilité. Quelles que soient les modalités de réutilisation des gamètes et des tissus germinaux, la prise en charge thérapeutique tient compte de la situation personnelle, de l’état de santé et de l’âge du patient. Elle est discutée au sein de l’équipe pluridisciplinaire, en tenant compte de la balance bénéfice/risque. » (IV.3 de l’annexe de l’arrêté)

La notion d’âge de procréer devrait intervenir pour exclure du dispositif les personnes au-delà d’un certain âge (par exemple, les hommes au-delà de 60 ans) et éviter les conservations de spermatozoïdes inappropriées mais néanmoins effectuées en l’absence de limite chiffrée opposable[242].

Il est à noter qu’il n’y a pas eu de difficulté dans l’arrêté précité pour préciser les âges limites pour les donneurs de gamètes dans le cadre de la démarche de « sélection du donneur ». Plus encore, des limites d’âge précises pour les membres du couple[243] qui n’ont plus de projet parental et destinent leurs embryons surnuméraires à l’accueil par un autre couple sont également explicitées dans cet arrêté :

-          Donneur de gamètes (V.2 de l’annexe de l’arrêté)

« Parmi les critères d’acceptation des donneurs et des donneuses figurent (…) l’âge au moment du recueil de gamètes : de 18 ans à moins de 38 ans s’il s’agit d’une donneuse et de 18 ans à moins de 45 ans s’il s’agit d’un donneur »

-          Couple donneur d’embryons (VI.2 de l’annexe de l’arrêté)

« Parmi les critères d’acceptation figurent (…) l’âge au moment de la conception des embryons qui doit être de moins de 38 ans pour la femme et de moins de 45 ans pour l’homme »

2.1.6 L’Agence de la biomédecine, qui délivre les autorisations d’exportation de gamètes en application de l’article L. 2141-11-1 du code de la santé publique, est confrontée à des recours devant les tribunaux. En effet, dans certains cas, l’exportation de gamètes est sollicitée pour passer outre la condition portant sur l’âge de procréer et permettre l’accès à l’assistance médicale à la procréation hors du territoire national[244].

2.2. Objectifs poursuivis

La règle envisagée par le Gouvernement permettra de supprimer la notion imprécise d’âge de procréer qui figure dans la loi et constitue une des conditions d’accès à l’assistance médicale à la procréation, au profit d’une interprétation incontestable de ce critère avec des limites d’âge fixées par décret en Conseil d’Etat et prenant en compte les risques médicaux des paternités et des maternités tardives, ainsi que les risques liés à l’écart d’âge entre les parents et l’enfant à naître.

Elle permettra d’harmoniser les pratiques des centres d’assistance médicale à la procréation et d’anticiper tout contentieux contre ces centres et contre l’Agence de la biomédecine fondé sur la notion d’âge de procréer.

3.             Options possibles et dispositif retenu

La première option envisagée par le Gouvernement est celle du Conseil d’Etat dans son étude précitée : « considérant que cette question a fait l’objet de décisions récentes qui ont confirmé la légalité du refus d’exportation de gamètes à deux couples dont les hommes étaient âgés de 68 et 69 ans, le Conseil d’Etat n’a pas préconisé de faire figurer des limites d’âge dans la loi mais estime qu’une recommandation de l’Agence de la biomédecine devrait être prise »[245].

Or, une recommandation de l’Agence de la biomédecine ne permettra pas de donner la sécurité juridique attendue (puisque les décisions de l’Agence font justement l’objet de contentieux).

En outre, la révision de la loi de bioéthique est bien l’occasion d’aligner le droit positif avec la jurisprudence la plus récente pour éviter tout nouveau contentieux dans l’avenir, voire toute évolution jurisprudentielle.

Enfin, il est nécessaire de clarifier les règles applicables en matière d'assistance médicale à la procréation et de savoir de façon incontestable comment doit être interprétée la loi de bioéthique dans ce domaine.

Cette option n’a donc pas été retenue.

La deuxième option consisterait à faire figurer dans la loi des limites chiffrées à l’âge de procréer.

Cette solution, qui ne permet guère de souplesse si les données de la science évoluaient et qui ne parait pas relever du domaine de la loi, n’a pas été retenue. 

La troisième option prévoit de renvoyer à un décret en Conseil d’Etat le soin de préciser les conditions d’âge requises pour bénéficier d’une assistance médicale à la procréation qui prendront en compte les risques médicaux de la procréation liés à l’âge ainsi que les risques liés à l’écart d’âge entre les parents et l’enfant à naître.

C’est cette dernière option qui a été retenue. Elle consiste à renvoyer à un décret en Conseil d’Etat le soin de préciser les conditions d’âge requises pour bénéficier d’une assistance médicale à la procréation.

4.             Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

La présente mesure a pour objet de modifier la rédaction de l’article L. 2141-2 du code de la santé publique pour supprimer la notion d’âge de procréer et renvoyer à un décret le soin de préciser les conditions d’âge requises pour bénéficier d’une assistance médicale à la procréation.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

La présente mesure allègera les centres clinico-biologiques d’assistance médicale à la procréation qui auront à se prononcer au regard de limites d’âge objectives. 

4.3.                       Impacts sociaux

La mesure participera à garantir l’intérêt de l’enfant à naître puisqu’il a été montré que les parents âgés pouvaient rencontrer davantage de difficultés dans l’éducation de leurs enfants à l’adolescence ou que la parentalité tardive modifiait les liens intergénérationnels. Elle permet que l’enfant soit accueilli par des adultes en mesure de l’accompagner jusqu’à un âge où il sera autonome.

5.             Consultation et modalités d’application

5.1.                       Consultation

L’Agence de la biomédecine est favorable à la mesure envisagée par le Gouvernement puisqu’elle note :

« Au total, cette disposition de la loi qui ne définit pas précisément l’âge de procréer, notamment chez l’homme, place les professionnels et l’Agence de la biomédecine en difficulté face aux demandes et augmente le risque de recours contentieux envers les établissements de santé, ou contre l’Agence de la biomédecine en cas de demande d’export, par des couples récusés en raison de l’âge. »

5.2.                       Modalités d’application

La présente mesure ne nécessite pas d’adaptation des acteurs ni de dispositions transitoires. Elle s’appliquera dès publication du décret mentionné en infra.

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

Les limites à l’âge de procréer seront fixées par décret en Conseil d’Etat (hommes 59 ans et femmes 43 ans - étant précisé que la prise en charge par l’assurance maladie s’interrompt au 43ème anniversaire de la femme).


Article 1er Lever l’interdiction du double-don de gamètes et laisser le choix entre accueil d’embryon et double don de gamètes

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1 En assistance médicale à la procréation (AMP) avec tiers donneur, le double don de gamètes (don de spermatozoïdes et don d’ovocytes) est interdit par le premier alinéa de l’article L. 2141-3 du code de la santé publique :

« Un embryon ne peut être conçu in vitro que dans le cadre et selon les objectifs d'une assistance médicale à la procréation telle que définie à l'article L. 2141-1. Il ne peut être conçu avec des gamètes ne provenant pas d'un au moins des membres du couple. »

1.1.2 En cas de « double infertilité », les couples relèvent de l’ « accueil d’embryon »[246]. Ce dispositif, encadré aux articles L. 2141-5 et L. 2141-6 du code de la santé publique, prévoit qu’en cas d’abandon du projet parental par un couple (ou de décès d’un de ses membres), ce couple dit donneur (ou son membre survivant) peut consentir par écrit à ce que ses embryons surnuméraires en cours de conservation soient accueillis par un autre couple.

Si l’accueil d’embryon a été introduit dès les premières lois de bioéthique de 1994, la pratique effective n’a débuté qu’en 2003-2004 comme le précise, dans son avis n° 90, le Comité consultatif national d’éthique[247].

Depuis la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, les consentements du couple (ou du membre survivant) donneur et du couple demandeur sont recueillis par le notaire et il a été mis fin aux « investigations permettant d'apprécier les conditions d'accueil que le couple est susceptible d'offrir à l'enfant à naître sur les plans familial, éducatif et psychologique » qui rapprochaient l’accueil d’embryon d’une procédure d’adoption.

1.1.3 L’offre d’embryons surnuméraires destinés à être accueillis dépasse le nombre de transferts d’embryons proposés à l’accueil chaque année.

Ainsi, l’activité reste modeste en 2016 avec 154 transferts réalisés chez 138 couples receveurs. Ces transferts ont conduit à la naissance de 25 enfants.

Comme au cours des années précédentes, la mise en œuvre effective reste très faible au regard du nombre d’embryons conservés et disponibles en théorie pour l’accueil. Au cours de l’année 2016, en effet, 704 couples ont proposé que leurs embryons soient accueillis et cela représente potentiellement 2 030 embryons conservés[248].

Abandon du projet parental de 2013 à 2016, quelle que soit l'année de congélation, pour les consentements signés dans l’année (Source Agence de la biomédecine)

 

2013

2014

2015

2016

 

Embryons

Couples

Embryons

Couples

Embryons

Couples

Embryons

Couples

Proposés à l'accueil

1900

596

1807

616

1528

534

2030

704

 

Accueil d’embryons de 2013 à 2016 (Source : Agence de la biomédecine)

 

2013

2014

2015

2016

Couples donneurs

.

.

.

.

Couples ayant confié leurs embryons à l'accueil

128

134

148

174

Couples dont les embryons ont été accueillis

170

131

137

142

Couples receveurs

.

.

.

.

Couples ayant bénéficié d'un accueil d'embryons

170

138

128

138

Nouveaux couples ayant eu un premier entretien spécifique en vue d’un accueil

150

112

114

90

1.2. Cadre constitutionnel

Dans une décision du 19 janvier 2012, la première chambre civile de la Cour de cassation a jugé qu’il n’y avait pas lieu à renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité à la Constitution de l’interdiction du double don de gamètes prévue par l’article L. 2141-3 du code de la santé publique, au motif que le Conseil avait déjà, dans sa décision n° 94-343/344 DC du 27 juillet 1994, déclaré cette disposition, alors codifiée à l’article L. 152-3 du code de la santé publique, conforme à la Constitution[249].

Cette décision de non-renvoi est sans incidence sur la présente mesure.

1.3. Éléments de droit comparé

1.3.1 Accueil d’embryons

L’accueil d’embryon est possible en Espagne, aux Pays-Bas, en Belgique, en Finlande, en Grèce, au Royaume-Uni ou encore en Pologne. Il n’est pas pratiqué en Italie, en Norvège, en Suède, en Suisse, en Autriche ou en Israël[250].

1.3.2 Double don de gamètes

En Belgique, le recours au double don de gamètes est autorisé[251].

Il est également possible en Espagne, en République Tchèque et au Portugal (trois pays où se rendent prioritairement les couples et les femmes célibataires) ainsi qu’en Grèce. Les tarifs des cliniques espagnoles ou tchèques varieraient entre 4000 et 7000 euros pour un double don (et de 1200 à 2000 euros pour un accueil d’embryon) [252].

Le recours au double don est également possible au Royaume-Uni[253].

En Suède, les dons d’ovocytes et de sperme sont autorisés mais il est interdit de combiner des dons d'ovules et des dons de sperme dans le même traitement[254].

En Slovénie, les procédures de procréation avec double don de gamètes sont interdites sur la base du principe selon lequel l’enfant issu d’une telle procédure devrait avoir des liens génétiques avec l’un au moins de ses parents[255].

En Allemagne, en Norvège et en Suisse, le don d’ovocytes est interdit, ce qui interdit de facto le recours au double don de gamètes[256][257].

2.             Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.                       Nécessité de légiférer

Les motifs ayant conduit le législateur à l’interdiction du double don de gamètes relèvent d’un contexte où coexistent une pénurie de gamètes et l’existence d’embryons surnuméraires qui ne font plus l’objet d’un projet parental et peuvent être accueillis par d’autres couples.

Dans son avis n° 90 du 24 novembre 2005[258], le Comité consultatif national d'éthique notait déjà : « On peut remarquer et s’étonner de ce que le double don de gamètes, aboutissant de fait à un don d’embryon, biologiquement équivalent à l’accueil d’un embryon abandonné, soit interdit par la loi, même si le processus décisionnel est différent. »

Or, l’activité d’accueil d’embryons, qui ne présente pourtant pas de difficulté technique particulière, ne s’est jamais développée à hauteur de ce qui était espéré.

« Le faible développement de cette activité est sans relation avec le nombre d’embryons potentiellement cédés à l’accueil par les couples après réalisation de leur projet parental : de nombreux embryons proposés à l’accueil sont conservés dans les centres d’AMP » précise l’Agence de la biomédecine dans son bilan d’évaluation de la loi de bioéthique du 7 juillet 2011[259].

Dans son rapport médical et scientifique[260], l’Agence de la biomédecine expose que l’activité d’accueil d’embryon reste modeste, en raison notamment de « la difficulté de la démarche pour les couples concernés, au plan psychologique, à la hauteur de la représentation qu’ils ont de ces embryons conservés, qu’ils soient en situation de donner comme d’accueillir des embryons, et au plan des démarches administratives imposées au couple. »

En effet, la dimension psychosociale de ce mode de procréation est à prendre en compte. Le Comité consultatif national d'éthique, dans son avis précité[261], considère que « Le don d’embryon est fortement connoté d’un sentiment d’abandon » [262].

Des pistes explicatives apparaissent dans l’enquête qualitative menée par deux sociologues[263] auprès de femmes françaises (en couple hétérosexuel ou célibataires) qui, s’étant adressées à des établissements situés hors du territoire national, ont eu le choix entre accueil d’embryon et double don de gamètes, et ont très majoritairement opté pour la deuxième solution[264].

Ces travaux font apparaitre que le double don est « plus simple à expliquer » à l’enfant qui est alors le fruit d’un « projet unique, sans histoire préalable et sans fratrie clandestine ». La crainte d’hériter d’une histoire inconnue et le poids du « spectre de l’abandon » pèsent également sur les motivations.

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale[265] reprend à son compte les enseignements de cette enquête : « du point de vue psychologique, les deux démarches ne semblent pas équivalentes. Dans un cas, celui du don d’embryon autorisé en France, le couple hérite d’un enfant potentiel conçu par d’autres. Dans le cas du double don, le couple reçoit les ovules et les spermatozoïdes étrangers l’un à l’autre et la rencontre fécondante tient à leur seule responsabilité » ; « alors que l’embryon donné a déjà une histoire, l’embryon issu d’un double don commence son histoire avec le ou les parents qui le souhaitent ».

Dans la même approche, le groupe d’études sur le don d’ovocytes (GEDO, société savante) écrit, dans sa contribution aux Etats généraux de la bioéthique[266] : « dans la situation du double don on assiste à une démarche positive de projection des donneuses d’ovocytes et des donneurs de spermatozoïdes et une seule démarche, un seul projet parental, celui des couples receveurs. Ici pas de deuil, pas de don ou d’abandon en vue d’accueil après clôture du projet parental initial ».

Par ailleurs, la levée de l’interdiction du double don de gamètes peut également se justifier au regard de critères médicaux.

En effet, les donneurs de gamètes sont plus jeunes que les donneurs d’embryons (même si des limites d’âge parental sont fixées pour ceux-ci dans l’arrêté du 30 juin 2017 modifié relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation[267]) et surtout sans problème connu d’infertilité qui pourrait être à l’origine de risques potentiels de complications obstétricales ou périnatales pour les receveurs.

En outre, le double don qui aboutit à la constitution de plusieurs embryons, dont certains peuvent être conservés, permet davantage de possibilités de transferts d’embryons ultérieurs et donc plus de chances de réussites en termes d’enfants vivants à terme.

La majorité des différentes instances qui se sont prononcées en amont de la révision bioéthique est favorable à la levée de l’interdiction du double don de gamètes.

C’était déjà la position du Comité consultatif national d'éthique dès 2005[268].

L’Agence de la biomédecine, dans son rapport sur l’application de la loi de bioéthique du 11 janvier 2018[269], relève que « l’interdiction du double don de gamètes peut soulever des incompréhensions, à la fois pour les professionnels qui sont amenés à traiter des cas de double infertilité masculine et féminine, et pour les couples potentiellement concernés. »

Le rapporteur de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques[270] juge « difficile et incohérent » de maintenir dans la loi l’interdiction du double don de gamètes « dans la mesure où des couples infertiles peuvent accueillir des embryons surnuméraires conçus par d’autres couples dans le cadre d’un projet parental ».

La Commission nationale consultative des droits de l’homme[271] recommande également de lever l’interdiction du double don de gamètes.

C’est aussi la préconisation du rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale[272] (Proposition n° 6 « Lever l’interdiction du double don de gamètes. »).

Le Conseil d’Etat, quant à lui, dans son étude préalable à la révision de bioéthique, renvoie la décision au législateur : « Le CCNE et l’agence de la biomédecine ont posé la question de la pertinence du maintien de l’interdiction du double de don de gamètes, d’ailleurs indépendamment de la question de l’ouverture de l’AMP. Il appartient au législateur de trancher en tenant compte du contexte de pénurie de gamètes, des risques attachés à la stimulation ovarienne et de l’existence de nombreux embryons surnuméraires. »

Enfin, si cette question de l’interdit du double don de gamètes n’est pas nouvelle, elle se pose spécifiquement dans le cadre de l’ouverture de l’accès à l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes non mariées.

Tout d’abord, le recours à un tiers donneur de spermatozoïdes étant systématique dans ce cas, toute difficulté à concevoir avec les propres ovocytes de la femme (ou des deux femmes) conduira, sans modification sur ce point, à indiquer un don d’embryon. Ces situations, en partie liées à l’âge de la femme, pourraient ne pas être rares.[273] 

Par ailleurs, si actuellement l’accueil d’embryon par des couples hétérosexuels apparait comme une dernière chance après un long et souvent douloureux parcours en assistance médicale à la procréation, les femmes en couple de même sexe ou les femmes célibataires seront majoritairement dans un projet initial de procréation, sans « antécédents » dans ce domaine.

Il parait souhaitable au Gouvernement que ces femmes aient le choix entre l’accueil d’embryon et le double don de gamètes, et que la première option ne leur soit pas imposée.

2.2.                       Objectifs poursuivis

La règle nouvelle envisagée par le Gouvernement a pour objectif de lever l’interdit sur le double don de gamètes et de permettre le recours à un don de spermatozoïdes et à un don d’ovocytes simultanément au cours de la même tentative de fécondation in vitro

Elle permettra d’offrir un réel choix aux couples ainsi qu’aux femmes entre un accueil d’embryon et un double don de gamètes compte tenu de la dimension psychosociale de l’accueil d’embryon.

3.             Options possibles et dispositif retenu

Le Gouvernement décide de lever l’interdiction du double-don de gamètes.

Il maintient néanmoins le dispositif actuel d’accueil d’embryons qui tient compte de l’existence d’embryons surnuméraires proposés à l’accueil par des couples qui n’ont plus de projet parental. Il considère que l’accueil d’embryons reste une solution tout à fait acceptable (pour des raisons de délai d’attente par exemple - ce délai étant plus court pour un accueil d’embryon que pour un double don de gamètes) dès lors qu’il relève d’un choix effectué librement par le couple ou la femme.

4.             Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

La rédaction de l’article L. 2141-3 du code de la santé publique sera modifiée pour supprimer l’interdiction du double don de gamètes.

Cela emportera des conséquences au niveau de l’article L. 2141-9 du même code qui encadre les déplacements d’embryons (entrée ou sortie du territoire national).

En effet, l’article L. 2141-9 dispose que :

« Seuls les embryons conçus avec les gamètes de l'un au moins des membres d'un couple et dans le respect des principes fondamentaux prévus par les articles 16 à 16-8 du code civil peuvent entrer sur le territoire où s'applique le présent code ou en sortir. Ces déplacements d'embryons sont exclusivement destinés à permettre la poursuite du projet parental de ce couple ; ils sont soumis à l'autorisation de l'Agence de la biomédecine. »

La mention aux embryons conçus avec les gamètes de l’un au moins des membres du couple est supprimée.

Par ailleurs, l’article est complété pour prévoir que l’autorisation délivrée soit soumise au respect des dispositions prévues au chapitre relatif à l’assistance médicale à la procréation en sus du respect des principes fondamentaux prévus par les articles 16 à 16-8 du code civil. 

En effet, le renvoi aux articles 16 à 16-8 du code civil permet de s’assurer du recueil du consentement du couple et du respect du principe de gratuité mais il ne couvre pas le respect des conditions qui sont prévues au Chapitre Ier du Titre IV du Livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique et portent sur le couple (l’âge de procréer par exemple).

La présente mesure aura enfin pour effet de modifier la rédaction de l’article L. 2141-10 du code de la santé publique et d’abroger l’article L. 2141-7 du même code.

4.2.                       Impacts sociaux

La réforme devrait avoir un impact limité sur les ressources en gamètes destinés au don.

En effet, le don de spermatozoïdes va bénéficier du renforcement des campagnes de don évoqué dans le cadre de l’ouverture de l’accès à l’assistance médicale à la procréation.

Par ailleurs, la possibilité d’un double don de gamètes ne devrait pas augmenter de manière sensible les besoins actuels en matière de don d’ovocytes au regard de la faible activité constatée en matière d’accueil d’embryons (138 couples en 2016). En outre, même si elle reste insuffisante, l’activité de don d’ovocytes augmente régulièrement en France (en 2016, 746 prélèvements d’ovocytes ont été effectués en vue de don contre 454 en 2013). L’augmentation est de 38% par rapport à 2015 et 85 % par rapport à 2011. La levée de la condition de procréation antérieure a eu un impact certain qui devrait se confirmer dans les prochaines années.

Enfin, l’autorisation de l’autoconservation ovocytaire avec la possibilité d’orienter secondairement les gamètes vers le don (si la femme y consent), également prévue par le projet de loi, permet d’envisager une amélioration sensible de la ressource en ovocytes en vue de don, toutefois à plus long terme.

4.3.                       Impacts sur les particuliers

Un véritable choix va pouvoir s’ouvrir pour les couples et les femmes relevant de cette situation entre un double don de gamètes et un accueil d’embryon.

5.             modalités d’application

La mesure s’applique dès le lendemain de la promulgation de la loi.

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

 


Article 2 Supprimer le recueil du consentement du conjoint pour le don de gamètes

1. État des lieux

1.1 L’article L. 1244-2 du code de la santé publique prévoit le recueil du consentement du conjoint du donneur de gamètes :

« Le consentement des donneurs et, s'ils font partie d'un couple, celui de l'autre membre du couple sont recueillis par écrit et peuvent être révoqués à tout moment jusqu'à l'utilisation des gamètes. ».

Chaque année, entre mille cinq cents et deux mille candidats au don (femmes et hommes) se présentent auprès de la trentaine de centres d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains (CECOS) qui maille le territoire national. Après examens, un peu plus de la moitié des candidats seront acceptés pour un don de gamètes[274]

1.2 La législation française est la seule en Europe à imposer le recueil du consentement du conjoint pour un don de gamètes[275].

2.            Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1 Bien que le rapport de l’IGAS[276] de 2011 notât que « La réflexion sur la primo-maternité[277] doit être associée à un examen de l’exigence juridique actuelle de recueillir le consentement du conjoint à l’acte de don. Dans les faits et d’après les témoignages recueillis, le projet est principalement assumé par la donneuse qui en porte les principales contraintes. Beaucoup de conjoints signent les formulaires sous la réserve qu’il s’agit d’abord du choix de leur compagne. Il ne parait pas logique de conserver cette obligation si celle portant sur la primo-maternité est levée. », le législateur, lors de la révision de bioéthique en 2011, a supprimé la condition de maternité (et paternité) antérieure mais a maintenu le recueil du consentement du conjoint.

Ce maintien est d’autant plus surprenant qu’en levant la condition de procréation antérieure, le législateur a abrogé le modèle retenu pour le don jusque-là, à savoir celui d’un couple, déjà parents, qui permet à un autre couple de le devenir (ce qui participait à justifier le consentement du conjoint).

La possibilité d’accès à l’identité du tiers donneur en assistance médicale à la procréation plaide pour la suppression de cette condition. En effet, les deux consentements n’auront pas (ou plus) la même portée - même en considérant que le partenaire puisse, d’une certaine manière, se sentir concerné par une demande d’accès à l’identité du donneur.

En tout état de cause, indépendamment de la mesure portant sur l’accès aux origines pour les enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur, le maintien du consentement du conjoint se pose en raison d’une révocation du don toujours possible à la suite d’une décision unilatérale de ce partenaire qui prive le donneur de la liberté de maintenir son don. L’interrogation sur le maintien de cette condition de consentement est renforcée dans le contexte de l’évolution de la société et de la stabilité des couples.

Au surplus, une autre difficulté résulte de la nécessité de recueillir le consentement du conjoint (qui découle de l’article L. 1244-2 du code de la santé publique) lorsqu’une personne, dont les gamètes sont conservés dans le cadre de la préservation de la fertilité ou lors d’une assistance médicale à la procréation en intraconjugal décide d’orienter ses gamètes vers le don (situations précisées aux articles R. 2141-17 et R. 2141-18 du code de la santé publique).

Dans son rapport sur l’application de la loi de bioéthique[278], l’Agence de la biomédecine considère que la condition de recueil du consentement du conjoint « ne paraît plus d’actualité. »

Les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques[279] se déclarent « favorables au maintien du consentement du conjoint ou du partenaire de vie comme préalable au don de gamètes d’une personne vivant en couple. En revanche, ce consentement ne saurait être révocable quel que soit le devenir de ce couple. ».

Toutefois leur argumentation[280], si elle légitime l’information et l’accord du partenaire, ne justifie pas la formalité de son recueil. En outre, il parait impossible de ne pas assortir tout consentement d’une possibilité de sa révocation.

2.2 La règle envisagée par le Gouvernement permettra de clarifier le cadre du don de gamètes, l’adapte aux évolutions de la société et le sécurise en permettant au seul donneur de gamètes de révoquer son consentement.

3.            Options possibles et dispositif retenu

3.1.                       Options envisagées

Une première option consisterait à remplacer, à l’article L. 1244-2 du code de la santé publique, le consentement du conjoint par une information de ce dernier qui serait réalisée par le candidat au don.

Toutefois, cette option ferait peser sur les équipes clinico-biologiques d’assistance médicale à la procréation une responsabilité puisque l’information du conjoint, ainsi prévue par la loi, garderait un caractère obligatoire. Or, comment vérifier l’existence d’un partenaire si le candidat au don ne souhaite pas le mentionner ? Comment s’assurer que la nécessité d’informer ce partenaire a été bien comprise ? C’est la raison pour laquelle, l’Agence de la biomédecine, consultée sur cette question, s’est déclarée favorable à la suppression du consentement du conjoint sans maintenir au niveau de la loi une mention à l’information de ce conjoint.

3.2.                       Option retenue

La suppression du consentement du conjoint sans maintenir dans la loi une mention à l’information de ce conjoint constitue l’option retenue par le Gouvernement. Ce choix réserve à la sphère privée du couple l’information, les échanges et la décision finale.

Par ailleurs, pour les anciens donneurs qui souhaiteront se manifester auprès de la Commission ad hoc (Cf. article 3) pour donner leur accord à un accès à leur identité (en cas de demande en ce sens par une personne née de leur dons), le consentement de l’éventuel conjoint (qui aurait exprimé son accord au moment du don) ne sera pas requis. Cela alourdirait inutilement la procédure étant précisé que, dans un certain nombre de cas, le conjoint au moment du don ne sera plus le partenaire du donneur. Il appartient au donneur d’informer en responsabilité son conjoint (s’il est toujours son partenaire) de sa démarche.


4.            Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1 La rédaction de l’article L. 1244-2 sera modifiée pour supprimer la mention au recueil du consentement du conjoint du couple.

4.2 Les CECOS[281] qui accueillent les candidats au don de gamètes et sont chargés du recueil du consentement du donneur mais également, le cas échéant, de celui de l’autre membre du couple seront déchargés de cette formalité.

Le gain de temps n’est pas significatif pour les équipes dans la mesure où l’information préalable était délivrée pour les deux membres du couple simultanément. Un allègement en termes de traçabilité est néanmoins attendu.

5.            modalités d’application

La mesure s’appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi.

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.


Article 2 Autoriser sans l’encourager l’autoconservation de gamètes (et supprimer le dispositif d’autoconservation dans le cadre du don qui crée une contrepartie au don)

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1 La possibilité pour une personne, homme ou femme, de conserver ses propres gamètes (spermatozoïdes après leur recueil ou ovocytes après leur prélèvement) en vue d’une utilisation ultérieure pour procréer est autorisée dans deux situations[282] :

-                      Lorsque la fertilité de cette personne est menacée par un traitement médical (telle une chimiothérapie) ou une pathologie susceptible d’altérer prématurément la fertilité (comme l’endométriose) en application de l’article L. 2141-11 du code de la santé publique[283].  La loi prévoit ainsi la conservation des gamètes ou des tissus germinaux chaque fois qu’une pathologie ou son traitement menace la fertilité, sans se prononcer sur le caractère malin de la pathologie en cause ; ainsi, le champ de la préservation de la fertilité s’étend aux pathologies non oncologiques[284] ;

-                      Lors d’un don de gamètes comme le prévoit l’article L. 1244-2[285] du code de la santé publique dans le cas où le candidat au don n’a pas encore eu d’enfants et demande à conserver pour lui-même une partie des gamètes obtenus dans le cadre du don. Cette faculté d’autoconservation d’une partie des gamètes dans le cadre du don, offerte aux seuls donneurs n’ayant pas procréé, a été ouverte par le législateur lors de la révision bioéthique intervenue en 2011 à la suite d’un amendement du rapporteur de la Commission spéciale de l’Assemblée nationale en première lecture ; la loi n’a pas précisé comment partager les gamètes obtenus et des règles de répartition ont dû être définies au niveau réglementaire (Cf. point « nécessité de légiférer ») ; les donneurs et les donneuses qui n’ont pas procréé et souhaitent conserver des gamètes pour eux-mêmes sont préalablement informés de ces conditions.

En outre, en assistance médicale à la procréation intraconjugale, dans certaines circonstances bien définies[286], une autoconservation peut être décidée par l’équipe clinico-biologique. Ces autoconservations ne sont a priori pas destinées à être poursuivies sur le long terme puisqu’elles sont réalisées au cours d’une prise en charge en assistance médicale à la procréation programmée.

En dehors de ces indications, toute autoconservation de gamètes est aujourd’hui interdite.

1.1.2 Au niveau national, les données relatives à la conservation des gamètes ne concernent que celles réalisées dans un cadre légal.

Préservation de la fertilité

Conservation de gamètes et de tissus germinaux en 2016 (Source : Agence de la biomédecine[287])

 

2016

Spermatozoïdes

.

Nombre de centres concernés

48

Nouvelles conservations (patients)

4727

Conservations au 31 décembre (patients)

53545

Ovocytes ou embryons

.

Nombre de centres concernés

40

Nouvelles conservations (patients)

1323

Conservations au 31 décembre (patients)

3292

Tissus testiculaires

.

Nombre de centres concernés

13

Nouvelles conservations (patients)

124

Conservations au 31 décembre (patients)

637

Tissus ovariens

.

Nombre de centres concernés

28

Nouvelles conservations (patients)

299

Conservations au 31 décembre (patients)

2845

Les points saillants de l’activité de préservation de la fertilité en France peuvent être ainsi résumés[288] :

-          Au cours de l’année 2016

Au total, au 31 décembre 2016, 60 319 patients disposaient de gamètes et/ou de tissus germinaux conservés en vue de préservation de la fertilité.

Conservation dans le cadre du don pour les donneuses n’ayant pas procréé[289]

En 2016, sur les 743 dons d’ovocytes, 147 (soit 20 %) l’ont été par des femmes nullipares. Deux classes d’âge sont surreprésentées chez les donneuses nullipares par rapport aux autres (18-25 ans et 25-29 ans).

Parmi les 147 donneuses n’ayant pas procréé, 93 étaient en don exclusif et une autoconservation n’a été souhaitée que par 51 femmes (soit 29%) et réalisée pour 46.

Parmi ces femmes, celles pour lesquelles plus de 5 ovocytes ont été obtenus ont fréquemment renoncé à une conservation pour elle-même quand un ou deux ovocytes seulement étaient disponibles pour l’autoconservation.

Au final, les donneuses nullipares qui ont souhaité et pu conserver pour elles-mêmes une partie des ovocytes obtenus dans le cadre du don, ont, en moyenne, 6,2 ovocytes vitrifiés dans le cadre de l’autoconservation.

Conservation dans le cadre du don pour les donneurs (hommes) n’ayant pas procréé

Pour les hommes, les données émanent d’un travail préliminaire réalisé par les CECOS[290] et sont à prendre avec précaution[291].

Parmi les 148 donneurs n'ayant pas procréé et dont le dossier a été accepté, 47% d'entre eux ont souhaité une autoconservation de sperme ; la moyenne d'âge est de 33,4 ans pour ceux qui ont demandé une autoconservation et de 34,4 ans pour ceux qui ne l'ont pas demandé ; leur situation familiale (célibataire ou en couple) ne semble pas influer sur leur décision.

Conservation au cours d’une assistance médicale à la procréation en intraconjugal

-          En 2016, selon les données fournies par l’Agence de la biomédecine, 5 507 patients ont bénéficié d’une conservation de spermatozoïdes au cours d’une prise en charge en assistance médicale à la procréation. Cette activité apparait stable au cours de ces dernières années ;

-          Ainsi en 2016, 3 872 tentatives d’assistance médicale à la procréation ont été réalisées avec des paillettes de spermatozoïdes conservés et 734 enfants en sont nés ;

-          Moins développée pour les ovocytes, l’autorisation de la technique de vitrification étant d’application plus récente, l’activité de conservation des ovocytes a concerné 812 patientes en 2016 ;

-          Dans 28 % des cas, seule une partie de la cohorte ovocytaire prélevée a été conservée, le reste de la cohorte ayant été mis en fécondation ;

-          En 2016, 615 tentatives d’ICSI (injection intracytoplasmique de spermatozoïde qui est une technique de fécondation in vitro dans laquelle le spermatozoïde est injecté dans l'ovocyte) et de transfert d’embryons congelés ont été réalisées avec des ovocytes préalablement vitrifiés et 84 enfants en sont nés.

1.2. Éléments de droit comparé

En Europe, la situation est loin d’être homogène. Selon les pays, l’autoconservation ovocytaire pour motif non médical peut être autorisée par la loi, ou bien tolérée en l’absence de loi spécifique, ou encore interdite par la loi. Aucun pays européen ne prend en charge par un financement public l’autoconservation ovocytaire lorsque le motif est non médical[292].

Au Royaume Uni, il est légal de conserver ses ovocytes depuis 2000 sous le contrôle de l’organisme de régulation, la Human Fertilization and Embryology Authority (HFEA). Cette autoconservation hors raisons médicales n’est pas prise en charge par le National Health Service (NHS).[293]

L’Espagne a autorisé simultanément l’autoconservation ovocytaire pour raison médicale et pour « convenance personnelle » par la loi n°14 du 26 mai 2006 portant sur les techniques de procréation médicalement assistée. Toute femme peut légalement faire congeler ses ovocytes (mais il est recommandé de le faire avant 35 ans). L’offre est majoritairement assurée par des cliniques privées qui recrutent une forte clientèle espagnole mais également étrangère.[294]

En Italie, les cliniques privées pratiquent l’autoconservation ovocytaire pour motif non médical au bénéfice de jeunes femmes souhaitant préserver leur fertilité tout en repoussant leur projet de maternité. Les coûts varient entre 600 à 4 000 euros (auxquels il faut ajouter entre 200 et 300 euros par an pour la conservation des ovocytes). Chaque année, environ 3 000 femmes auraient recours à cette pratique.[295]

Selon l’Académie nationale de médecine, l’autoconservation ovocytaire est autorisée par une loi ou bien tolérée par absence d’interdiction dans de nombreux pays européens, à l’exception de l’Autriche, de Malte et de la France qui n’autorisent pas cette pratique.[296] Ainsi, la majorité des pays proches de la France (Royaume Uni, Belgique, Italie, Espagne) autorise l’autoconservation ovocytaire.

Au demeurant, la European Society of Human Reproduction and Embryology (ESHRE) a rendu en 2012 un avis favorable à cette pratique, jugeant notamment que les arguments contre son autorisation n’étaient pas convaincants. Cependant, l’ESHRE recommande que cette congélation se fasse avant 35 ans. En 2012 et 2013 respectivement, la ESHRE et l’American Society for Reproductive Medicine (ASRM) ont supprimé le label « expérimental » pour la cryoconservation des ovocytes.[297],[298]

En dehors de l’Europe, l’autoconservation ovocytaire est légale notamment au Brésil, aux États-Unis, en Israël, au Canada et au Japon.[299]

Aux Etats-Unis, l’autoconservation ovocytaire hors raison médicale n’est pas interdite par la loi. Elle est réalisée dans des cliniques privées sans que l’Etat n’intervienne pour encadrer la technique ou la financer. Ces cliniques se livrent souvent à un marketing agressif (campagnes de promotion de type « Egg Freezing Parties »[300], comme la Three F’ : Fun, Fertility and Freeze).

La démarche peut également être financée par certaines entreprises comme Facebook, Google et Apple à leurs employées[301],[302] ainsi que par l’armée américaine dans le cadre de la couverture des risques professionnels potentiels relatifs à la fertilité. Aux Etats-Unis, l’ensemble de la procédure (stimulation hormonale, suivi médical, ponction des ovocytes, vitrification) coûte entre 10 000 et 15 000 dollars (auxquels il faut ajouter entre 500 et 1000 dollars par an pour la conservation des ovocytes).[303]

En Israël, l’autoconservation ovocytaire est autorisée par la loi depuis octobre 2011 dans le cadre de la Ovum Preserving Law[304]. Elle est réservée aux femmes entre 30 et 41 ans qui peuvent bénéficier de 4 stimulations ovariennes au maximum (jusqu’à l’obtention de 20 ovocytes). La conservation est assurée par période de 5 ans à l’issue de laquelle la femme se prononce sur sa poursuite ou non. L’âge maximal de récupération des ovocytes est fixé à 54 ans. L’offre est essentiellement le fait de cliniques privées. Seule une autoconservation pour raison médicale est prise en charge par la Health Maintenance Organization (HMO).

L’Académie nationale de médecine, dans son rapport sur la conservation des ovocytes[305] rapporte que :

-          La demande d’autoconservation semble avoir considérablement augmenté en Europe depuis quelques années. Elle est passée, dans l’étude espagnole multicentrique IVI (Institut de Valence contre l’Infertilité), de 2,9 % en 2010 à 24,2 % en 2015 (dont 42 demandes françaises), soit 1468 vitrifications pour indications non médicales. En 2015, la demande d’autoconservation pour palliation de l’infertilité liée à l’âge a été de 110 en Belgique et 110 aux Pays Bas ;

-          En Espagne, cette demande d’autoconservation provient pour 75.6% de célibataires hétérosexuelles, pour 23.9% de femmes en couple ayant des relations hétérosexuelles mais pas de projet de grossesse, et pour 0.4% d’homosexuelles ;

-          Au Symposium International Timefreezede mars 2015 sur la conservation des ovocytes, la demande d’autoconservation pour raison non médicale à la clinique Eugyn de Barcelone avait augmenté de 60%, l’âge des femmes effectuant la démarche était de 38-39 ans, dont 92% étaient célibataires, 96% à haut niveau de formation, 20% médecins et 56% françaises ;

-          Ces chiffres ont certainement encore évolué depuis.

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1 L’âge moyen de la première grossesse est passé de 24 ans en 1974 à 28,5 ans en 2015. La première grossesse intervient donc presque cinq années plus tard qu’il y a environ quarante ans[306]. Désormais, le premier enfant est conçu au moment où la fertilité de la femme est déjà en baisse.

En effet, la femme a un stock définitif d’ovocytes à la naissance et ses capacités reproductives (sa fertilité naturelle) vont diminuer avec l’âge, sensiblement à partir de 35 ans et drastiquement après 40 ans. L’âge moyen de la ménopause se situe aux alentours de 50 ans mais la réserve ovarienne – déterminant directement la probabilité d’avoir naturellement un enfant - diminue bien plus précocement.

La fertilité baisse avec l’âge essentiellement parce que les ovocytes se réduisent en quantité et en qualité mais aussi du fait d’un très fort taux de fausses couches et de complications obstétricales à un âge plus avancé. Le taux de conception (à 12 mois) est à 30 ans de 75,4 %, à 35 ans de 66 %, à 40 ans de 44,3 %. À 40 ans, près de 80 % des ovocytes soumis à fécondation sont aneuploïdes (nombre anormal de chromosomes), ce qui induit un taux de fausses couches spontanées d’environ 30 %[307].

L’augmentation constante de la durée de vie, en particulier ces dernières années (en 2017, l’espérance de vie en France atteint 79,5 ans pour les hommes et 85,4 ans pour les femmes[308]), ne se traduit pas par un allongement proportionnel de la durée de fertilité[309].


 

Évolution de l’âge moyen à l’accouchement, par rang de naissance de l’enfant

https://www.insee.fr/fr/statistiques/graphique/1281068/graphique1.jpg

Champ : France métropolitaine.

Source : Insee, statistiques d’état civil et estimations de population. Rangs de naissance redressés à partir des recensements 1968 à 2008 et de l’enquête annuelle de recensement 2011.

 

 

 

Répartition des premières naissances selon l’âge de la mère

https://www.insee.fr/fr/statistiques/graphique/1281068/graphique2.jpg

Note : Calculs d’après les taux de fécondité.

Lecture : En 2010, 8 % des premiers bébés ont une mère âgée de 28 ans. En 1967, c’était 4 %.

Champ : France métropolitaine.

Source : Insee, statistiques d’état civil et estimations de population. Rangs de naissance redressés à partir des recensements 1968,1990 et 2008 et de l’enquête annuelle de recensement 2011.

 

2.1.2 Avant la révision de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, le donneur de gamètes devait avoir déjà procréé pour pouvoir faire un don[310]. Cette obligation législative ne trouvait son équivalent dans aucun autre pays européen[311].

Au regard de l’autre condition qui pèse actuellement sur le don (le recueil du consentement du conjoint), il apparait que le modèle était alors celui d’un couple, déjà parent, qui permet à un autre couple de le devenir.

L’article 29 de la loi du 7 juillet 2011 susmentionnée a levé cette condition de procréation antérieure[312] en espérant ainsi l’élargissement du cercle des donneurs – essentiellement des donneuses d’ovocytes avec un rajeunissement des candidates au don (compte tenu du recul régulier de l’âge des femmes à la naissance de leur premier enfant[313]).

Le législateur a assorti la suppression du critère de paternité ou maternité antérieures de la possibilité d’autoconservation d’une partie des gamètes destinés au don (au bénéfice exclusif du donneur ou de la donneuse n’ayant pas procréé).

Les débats parlementaires sur cette question s’inscrivaient dans le contexte de la publication d’un rapport de l’IGAS portant sur le don d’ovocytes[314].

Or, ce rapport, qui renvoyait la décision au législateur dans le cadre de la révision des lois bioéthiques, précisait : « Dans l’hypothèse où les débats parlementaires inclineraient vers la levée de l’exigence de primo-maternité[315], la mission souhaite souligner deux points qui lui paraissent importants pour minimiser les risques de cette évolution :  – d’une part, il est essentiel de pouvoir proposer à la donneuse non mère de conserver, et donc vitrifier, ses propres ovocytes pour supprimer les risques futurs éventuels pour sa fertilité[316], – d’autre part, des mesures réglementaires et pratiques semblent nécessaires pour préserver les plus jeunes filles. »[317]

Suivant ces orientations, la suppression de la condition de procréation antérieure a été argumentée par la pénurie de don d’ovocytes dans un contexte de « tourisme procréatif », et la possibilité pour le donneur n’ayant pas procréé de conserver une partie des gamètes  à son bénéfice a été justifiée par la nécessaire compensation des contraintes liées au don d’ovocytes, notamment la prévention des cas de stérilité ultérieure, y compris en raison du don (femmes qui seraient « victimes de leur don »)[318].

2.1.3 Or, si la suppression de la condition de maternité ou paternité antérieures a eu un effet sur le recrutement des donneurs de gamètes[319], il apparait aujourd’hui que la possibilité pour le donneur n’ayant pas procréé de conserver une partie des gamètes à son bénéfice pose de nombreuses difficultés.

Tout d’abord, le risque allégué d’infertilité liée au don chez la donneuse est en réalité très faible. Par ailleurs, ce risque vaut également pour les femmes ayant déjà procréé qui souhaiteraient avoir d’autres enfants, ce qui conduit à une rupture d’égalité.

Surtout, de nombreuses critiques ont été formulées, dès 2012, à l’égard de ce dispositif[320], notamment en tant qu’il s’inscrit dans une logique de contrepartie constituant ainsi une entorse au principe de gratuité du don, ou encore, dans le cadre spécifique du don d’ovocytes, le fait qu’il génère une « illusion » chez la donneuse, les ovocytes vitrifiés pour elle-même pouvant ne jamais aboutir à une grossesse.

En effet, le législateur n’a pas tenu compte du nombre limité d’ovocytes prélevés à chaque cycle (10 en moyenne). Or, cette limite physiologique induit un effet pervers car, si les ovocytes étaient partagés à part égale entre le don et l’autoconservation, il y aurait diminution des ressources ovocytaires dédiées au don sans pour autant assurer de réelles chances de grossesse à la donneuse (il faudrait vitrifier au minimum 15 ovocytes pour avoir des chances acceptables de grossesse).

Des règles de répartition ont donc dû être définies, l’objectif premier devant rester le don de gamètes (les donneurs sont informés de ces conditions avant de consentir au don[321]). Elles ont été fixées comme suit : « jusqu’à 5 ovocytes matures obtenus, tous les ovocytes sont destinés au don et la conservation au bénéfice de la donneuse n’est alors pas réalisée ; de 6 à 10 ovocytes matures obtenus, au moins 5 ovocytes matures sont destinés au don ; au-delà de 10 ovocytes matures obtenus, au moins la moitié des ovocytes matures est dirigée vers le don »[322].

De ce fait, la disposition introduite par le législateur en 2011 a été contesté, notamment dans le cadre des travaux menés devant le Comité consultatif national d’éthique[323] à l’occasion des Etats généraux de la bioéthique, parfois qualifié de « leurre » et de « médicalement et éthiquement inacceptable »[324].

Par ailleurs, dans son rapport sur l’application de la loi bioéthique de 2011, l’Agence de la biomédecine écrit[325] : « Proposer au donneur ou à la donneuse le recueil et la conservation d'une partie de ses gamètes ou de ses tissus germinaux en vue d'une éventuelle réalisation ultérieure, à son bénéfice, d'une AMP peut poser des difficultés aux professionnels, à la fois pour s’assurer de la motivation des donneurs par le seul don et pour justifier auprès des donneuses ayant déjà procréé qu’elles n’aient pas accès à cette autoconservation. »

Le Conseil d’Etat, dans son étude de juin 2018[326], note également : « Un consensus se dégage pour considérer que le dispositif actuel d’autoconservation contre don est contraire au principe de gratuité du don. En effet, il consiste à inciter à donner ses ovocytes en créant une forme de contrepartie au don ». Il recommande « de supprimer l’autoconservation liée au don et de traiter la question de l’autoconservation ovocytaire indépendamment de la question du don ». 

Le Comité consultatif national d'éthique, dans son avis n° 129 de septembre 2018[327], exprime lui aussi une position critique sur cette disposition : « On peut considérer, dans cette situation, que la notion de « don gratuit » n’existe plus et qu’il s’agit d’un marché, marché par ailleurs biaisé, puisqu’il est difficilement possible d’estimer par avance le nombre d’ovocytes « en bon état » obtenus lors d’un prélèvement ». Il considère qu’il serait « plus juste de séparer clairement les deux démarches : un don gratuit et la prise en charge d’une conservation ovocytaire de précaution sous conditions ».

Les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques[328] estiment « que la législation actuelle incite les femmes jeunes n’ayant pas eu d’enfant, pour lesquelles la probabilité d’obtenir des ovocytes fécondables est élevée, à faire un don avec autoconservation alors qu’elles ont des chances non négligeables de pouvoir procréer naturellement. ». Ils suggèrent de « bien distinguer le don altruiste et gratuit d’ovocytes de la possibilité d’autoconservation d’ovocytes chez la femme n’ayant pas eu d’enfant. »

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale ajoute à ces constats des difficultés d’ordre matériel, « aucune base juridique ne prévoyant explicitement le financement de la conservation du don ». Il conclut également : « Il conviendrait en premier lieu de dissocier l’autoconservation du don » [329].

Le Défenseur des droits, dans son avis du 10 octobre 2018, demande également la suppression de cette mesure estimant que « compte tenu de la large priorité accordée au don, les chances pour les donneuses d’en conserver pour elles-mêmes sont quasi nulles » [330].

En outre, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, dans son avis relatif à l’assistance médicale à la procréation[331], dénonce une inégalité entre les femmes et les hommes induite par ce dispositif, les hommes pouvant plus facilement conserver leurs gamètes : « La question ne se pose évidemment pas dans les mêmes termes pour les donneurs de sperme, puisqu’ils peuvent, sans traverser les épreuves physiologiques et médicales auxquelles sont confrontées les femmes, préserver leurs spermatozoïdes. » Elle estime, par conséquent, que « La possibilité ouverte par la loi de 2011 de conserver une partie des gamètes issues d’un don n’est pas satisfaisante en l’état actuel de la réglementation ».

2.1.4 Si des techniques de conservation des spermatozoïdes ont été rapidement développées, elles n’étaient pas transposables aux ovocytes jusqu’à récemment. En effet, la congélation dite lente n’est pas adaptée aux gamètes féminins. Des cristaux se forment pendant le processus de baisse en température avec le risque de provoquer, lors de la décongélation, des déchirures de la cellule.

Il a donc fallu attendre la mise au point des techniques de vitrification (ou de congélation ultra-rapide), qui empêchent la formation de ces cristaux, pour envisager le développement de la congélation des ovocytes. Depuis, la vitrification ovocytaire s’est considérablement développée partout dans le monde.

En France, la technique de vitrification a été autorisée par la loi de 2011, sur la base des données rassurantes des autres pays européens. En effet, il a été montré que les taux de fécondation et de grossesse avec des ovocytes vitrifiés étaient quasi-égaux à ceux avec des ovocytes frais. Par ailleurs, les enfants nés d’ovocytes vitrifiés fécondés ne présentent pas plus d’anomalies. Ainsi, la vitrification est devenue la technique de référence qui doit être proposée en priorité en matière de préservation de la fertilité dans le cadre de l’article L. 2141-11 du code de la santé publique.

De fait, la vitrification d’ovocytes matures recueillis après stimulation ovarienne représente, avec la congélation de tissu ovarien (après ovariectomie par cœlioscopie), la technique la plus utilisée en matière de préservation de la fertilité féminine.

Il convient de préciser que la vitrification des ovocytes implique d’utiliser ultérieurement la technique d’ICSI (Injection intracytoplasmique de spermatozoïde) en cas de recours à l’assistance médicale à la procréation. 

2.1.5 Pour certains, l’évolution des comportements en matière de désir d’enfant serait liée à un défaut d’information sur la chute de la fertilité avec l’âge et qu’il suffirait que les femmes soient mieux informées pour qu’elles décident d’avoir leurs enfants plus jeunes.

D’une part, ce raisonnement s’apparente à une injonction à la maternité qui empiète sur la liberté individuelle des femmes à déterminer le moment auquel elles souhaitent avoir des enfants. D’autre part, même bien conduites, de telles campagnes d’information n’apporteront pas tous les résultats escomptés car les causes du recul de l’âge de la première maternité sont plurielles.

Le report de l’âge de la première maternité ne peut être imputé aux seules femmes. En effet, le report de la première grossesse procède moins de la volonté de femmes carriéristes que d’autres raisons extrinsèques. Comme en témoigne le Dr Joëlle Belaisch Allart, dans toutes les études « anglo-saxonnes, australiennes et américaines », « Quand on demande aux femmes pourquoi elles ont fait une autoconservation, elles répondent à 80 %, 85 % ou 86 % selon les études, qu’elles n’avaient pas rencontré le partenaire avec qui faire un enfant »[332]. Le même constat figure dans le rapport de l’Académie de médecine sur la conservation des ovocytes : « La raison largement dominante de la demande personnelle de conservation d’ovocytes est l’absence de partenaire »[333].

Le Conseil consultatif national de bioéthique de Belgique analyse quant à lui : « L’assimilation entre femmes qui congèlent leurs ovules et femmes uniquement attachées à leur carrière n’est pas seulement gratuite et dépourvue de fondements scientifiques, elle se déduit aussi directement de l’idée que le premier rôle de la femme doit être celui d’être mère »[334]

En somme, si l’âge de la première naissance recule parfois jusqu’à 35 voire 40 ans, « c’est moins le fait des seules femmes que celui d’un mouvement global qui concerne les hommes et les femmes, les femmes célibataires ou en couple, les couples entre eux, les couples qui se défont et se refont. »[335], conclut le Dr Joëlle Belaisch Allart.

Or, ce mouvement d’ampleur ne devrait pas s’inverser parce qu’il résulte de « changements considérables survenus dans le comportement socio-économique et reproductif au cours des dernières décennies. »[336]. Et l’auteur de citer « une combinaison complexe de raisons » telles que des aspirations scolaires et professionnelles plus étendues, des ruptures plus fréquentes dans les relations conjugales, la réalisation de « l’épanouissement personnel » par des voies autres que celles de la parentalité, les obstacles économiques à la réalisation d'une image « idéalisée » de la parentalité (avec des objectifs préalables en matière de logement ou de carrière).

Le Comité consultatif national d'éthique, dans son avis n° 129[337], estime également « les difficultés matérielles et les défauts d’organisation de la société qui peuvent détourner les femmes jeunes de la possibilité d’avoir des enfants ».

En tout état de cause, le recul de l’âge de la maternité ne doit pas être en soi systématiquement dénigré – sous réserve de rester compatible avec des impératifs de santé. Ainsi, l’Académie de médecine évoque le « gain théorique » des grossesses plus tardives avec des enfants qui naissent dans un contexte de stabilité des couples, de conditions socioéconomiques favorables, de meilleure préparation à la parentalité et de meilleure maturité psychologique[338]. Certains de ces arguments sont également mis en avant par le Comité consultatif de bioéthique de Belgique[339] : « À cela s’ajouteraient des études qui démontrent qu’une parentalité plus tardive peut également présenter des avantages. (…) de plus faibles pertes de revenus et des interruptions de carrière moins longues pour les mères[340], une plus grande stabilité́ du couple[341], de meilleures situations en termes de finances et de logement, un sentiment plus fort de détenir les compétences nécessaires à la réalisation du projet parental[342], voire des degrés de bonheur plus élevés des parents[343]».

2.1.6 Si un déni de la chute de la fertilité avec l’âge a pu être évoqué[344], ce déni peut aussi s’expliquer par une confiance excessive dans les techniques d’assistance médicale à la procréation[345].

Or, le taux de succès de l’assistance médicale à la procréation diminue avec l’âge de la femme.

Toutes les techniques (inséminations intra-utérines, fécondation in vitro, injection intra cytoplasmique de spermatozoïdes) voient leur taux de succès diminuer dès 35 ans : 30,1 % à 34 ans, 23,6 % à 38 ans, 16,5 % à 43 ans[346].

En revanche, le recours à un don d’ovocytes (gamètes plus jeunes) permet d’amoindrir cet effet de l’âge sur le taux de succès de la technique utilisée.

Quand les ovocytes pour la fécondation in vitro proviennent de donneuses (réglementairement âgées de moins de 37 ans), le taux de succès de l’assistance médicale à la procréation reste encore de 46 % au-delà de 40 ans[347].

Or, si le recours aux techniques d’assistance médicale à la procréation apparait inéluctable à partir d’un certain âge, il est de très loin préférable d’utiliser les ovocytes de la femme (conservés antérieurement) plutôt que ceux d’une donneuse (la femme étant alors exposée à une fréquence accrue de prééclampsies et de retards de croissance intra-utérins), a fortiori dans un contexte de pénurie d’ovocytes.

Dans ce cadre, l’autoconservation préalable des ovocytes relève bien d’une prévention de l’infertilité liée à l’âge et s’inscrit dans le champ médical.

2.1.7 Au plan technique, l’autoconservation ovocytaire suppose une stimulation ovarienne, puis un prélèvement chirurgical des ovocytes (sous anesthésie locale ou générale), et, enfin, une vitrification des ovocytes obtenus (avant qu’ils ne soient conservés dans l’azote liquide à – 196° jusqu’à leur utilisation). Un deuxième cycle peut s’avérer nécessaire pour obtenir au moins 15 à 20 ovocytes au total afin d’augmenter les chances de grossesse ultérieures.

S’agissant des risques médicaux liés à la stimulation et au prélèvement d’ovocytes, ils sont considérés comme « rares » par l’Académie de médecine et négligeables[348] par certains auteurs, ne menaçant pas la fertilité ultérieure et n’affectant pas les résultats de futures stimulations. Ces risques sont aujourd’hui estimés inférieurs à 1 %[349]. Par ailleurs, ce sont les mêmes risques auxquels les donneuses sont exposées aujourd’hui au bénéfice d’autres femmes. Il est difficilement soutenable d’accepter au plan médical qu’une femme (en l’absence de contre-indication et informée de tous ces risques) puisse consentir à les prendre pour d’autres femmes tout en lui interdisant de les prendre pour elle-même.

Les contributions aux Etats généraux de la bioéthique ont montré qu’il y a un consensus des professionnels de santé en faveur d’une légalisation de la pratique (de façon encadrée et sans l’encourager) qui est assimilée à une mesure de prévention face au vieillissement physiologique de la réserve ovocytaire. Par ailleurs, un sondage au sein du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) témoigne que 80 % des professionnels soutiennent la demande d’autoconservation. Les médecins eux-mêmes, qui sont particulièrement vigilants sur la balance bénéfices/risques, ne récusent donc pas l’autoconservation ovocytaire sur ce motif.   

2.1.8 L’effectivité de l’autonomie des femmes dans le cadre d’une possibilité d’autoconservation de leurs ovocytes fait l’objet d’un débat dont les travaux préparatoires à la révision bioéthique se sont faits l’écho.

A titre liminaire, il convient de rappeler que des articles de presse en 2014[350] ont fait état de propositions de financement d’une autoconservation ovocytaire par des entreprises américaines  à leur personnel féminin. L’argument avancé par ces sociétés était que ces femmes pourraient ainsi consacrer leur talent et leur énergie à leur travail, et remettre à plus tard leur éventuel projet de grossesse.

Dans les travaux préparatoires, certains ont donc noté que l’autoconservation ovocytaire pourrait se révéler être une contrainte sociale et professionnelle.

« Le risque qu’une telle mesure réduise, consciemment ou non, la liberté de la femme de pouvoir procréer pendant sa période de fertilité n’est pas mineur » note le Conseil d’Etat[351]. Le rapporteur de la mission d’information parlementaire évoque, quant à lui, une promesse émancipatrice portée par les techniques qui pourrait se heurter « à la réalité d’une organisation sociale pensée par et pour les hommes. »[352]. D’une manière plus générale, mais dans le même contexte d’émancipation des personnes, le Comité consultatif national d’éthique évoque la disponibilité des techniques qui pourrait aboutir, « de proche en proche, en une contrainte qui s’exprimerait sous la forme « puisque c’est possible, il faut le faire » »[353].

A contrario, l’autoconservation est apparue comme une mesure émancipatrice pour les femmes en leur permettant notamment de se libérer des contraintes liées à l’horloge biologique[354].

Le Comité consultatif national d’éthique considère que « Dans [le] contexte, la possibilité d’une autoconservation ovocytaire apparaîtrait comme un espace dans lequel la liberté des femmes pourrait s’exercer sans qu’elles compromettent leur maternité future »[355] et que « Par cette mesure, les femmes exercent aussi leur autonomie et leur liberté (vouloir ou ne pas vouloir), (…) ce choix s’effectuant en toute connaissance des difficultés de la procédure médicale. »[356]

Le Conseil d’Etat analyse que « La temporalité des cycles de vie a évolué (allongement de la durée des études et de la période d’insertion professionnelle, mais aussi de la vie amoureuse avant le projet d’enfant) alors que la période de fertilité d’une femme reste inchangée.  Dans ce contexte, l’autoconservation ovocytaire pourrait répondre à ces difficultés de décalage temporel. »[357].

En tout état de cause, l’initiative de certaines sociétés américaines encourage une vision des femmes selon laquelle travail et maternités sont incompatibles, la femme étant forcée de choisir. Elle ouvre également la porte à des pressions professionnelles accrues sur la maternité de la part de l’employeur[358] et conduit les femmes à soumettre leur désir d’enfant aux contraintes du marché du travail.

Une telle initiative (le financement par l’entreprise du report de la grossesse), présentée pourtant comme une mesure d’égalité entre les femmes et les hommes, n’est en réalité qu’une mesure d’asservissement des femmes aux intérêts de l’entreprise, en somme une mesure portant atteinte à cette égalité.

Ces initiatives, qui ont eu lieu aux Etats-Unis par des sociétés américaines, sont souvent mises en exergue à l’encontre de l’autoconservation ovocytaire par ceux qui s’opposent à son autorisation. Mais, le contexte français est différent de celui des Etats Uni et il est possible d’être à la fois favorable à l'autorisation de l’autoconservation ovocytaire (sous conditions) tout en étant opposé à de telles pratiques.

2.1.9 Si une maternité à partir des ovocytes vitrifiés ne pourra jamais être garantie, une étude de 2017 montre que congeler 10 ovocytes à 35 ans ou moins donne à la femme 69% de chances d’obtenir une naissance mais ce pourcentage tombe à 50% pour les femmes de 37 ans et à 30% pour celles de 40 ans[359].

 

L’Académie nationale de médecine rapporte, quant à elle, que : « Toutes indications confondues (dons, indications médicales et non médicales), ce sont les résultats internationaux après vitrification des ovocytes qui sont les plus explicites[360]. Ils indiquent que, globalement, lors d’une procédure de vitrification, le nombre d’ovocytes recueillis est de 8 à 13 par cycle, le taux de survie des ovocytes après dévitrification autour de 85 %, le taux de fécondation par ICSI[361] autour de 70 %, le taux global de grossesses autour de 40 %. »[362]

2.1.10 L’autoconservation d’ovocytes n’apparait contraire à aucun principe bioéthique.

 

Elle serait de nature à améliorer la réussite de l’assistance médicale à la procréation quand le moment serait venu de recourir à ces ovocytes (puisqu’ils seraient alors plus jeunes que la femme) ; cela éviterait, par conséquent « la multiplication des tentatives [d’assistance médicale à la procréation] infructueuses, éprouvantes pour le couple et couteuses pour l’assurance‐maladie »[363]. Ce point est développé dans la rubrique impacts.   

 

Cette autorisation aurait pour double effet, d’une part de réduire la demande de dons d’ovocytes (puisque les propres ovocytes de la femme conservés antérieurement seraient utilisés) et, d’autre part, d’augmenter le nombre d’ovocytes disponibles pour le don, dans l’hypothèse où, n’en ayant pas eu besoin, la femme les donnerait finalement pour qu’ils bénéficient à d’autres femmes.

2.2. Objectifs poursuivis

Au vu de ces différents éléments, le Gouvernement considère qu’une possibilité d’autoconservation peut être ouverte. Il ne s’agit ni d’inciter les femmes à recourir à une conservation de précaution de leurs ovocytes et encore moins de conforter une norme sociale selon laquelle une femme ne peut se réaliser sans devenir mère.

Il s’agit d’offrir cette possibilité aux femmes et aux hommes qui le souhaitent avec des conditions strictes d’accès et de mise en œuvre (notamment en termes de limites d’âge).

Ils seront pris en charge par l’équipe pluridisciplinaire des centres d’assistance médicale à la procréation. L’information qui sera délivrée en amont à la femme souhaitant conserver ses ovocytes devra être loyale, notamment sur les conditions de prélèvement, les chances de grossesse et les risques d’échec. L’absence de contre-indication à la stimulation hormonale et au prélèvement ovocytaire sera vérifiée dans tous les cas, ainsi que le contexte psychologique (existence d’une pression professionnelle ou commerciale). Un suivi médical du traitement et de ses éventuelles complications sera garanti.

Les arguments ne doivent pas être inversés : l’autoconservation des ovocytes ne sera jamais la cause du recul de l’âge de la première naissance - elle permet seulement d’en pallier les conséquences. Au surplus, laisser se développer de façon non contrôlée la conservation des ovocytes à l’étranger n’aidera en rien à éviter les grossesses tardives.

Enfin, le Gouvernement met fin au dispositif introduit en 2011 (autoconservation en cours de don de gamètes).

3.       Options possibles et dispositif retenu

Dans son avis n° 126, le Comité consultatif national d'éthique recommande d’encourager les maternités plus précoces plutôt que l’autoconservation des ovocytes. Il considère en effet qu’il appartient à la société de rechercher les « moyens permettant aux femmes, selon leur désir et leur choix de vie, de procréer naturellement et plus tôt, sans considérer comme inéluctable d’avoir à différer l’âge de la maternité »[364].

3.1. Le Gouvernement décide d’ouvrir l’autoconservation de gamètes aux femmes et aux hommes.

En effet, des risques procréatifs liés à l’âge sont également documentés chez les hommes. Ouvrir la faculté d’autoconservation des gamètes chez les femmes seulement conduirait à une discrimination envers les hommes.

3.2. Le Gouvernement souhaite ne pas encourager l’autoconservation de gamètes ; il enserre donc la réforme de conditions strictes d’accès en termes d’âge qui seront fixées par voie réglementaire mais peuvent d’ores et déjà être précisées.

Avant 32 ans, la femme a toutes les chances de procréer naturellement sans avoir besoin de recourir aux ovocytes qu’elle aurait conservés (78 % des femmes font leur premier enfant avant 35 ans). La balance bénéfices/risques ne serait donc pas favorable.

En revanche, au-delà de cet âge, et en particulier à partir de 33-35 ans, quand une femme, célibataire ou qui vient de rompre, est certaine de vouloir des enfants, le risque de recourir ultérieurement à une assistance médicale à la procréation est grand.

Par conséquent, la limite d’âge inférieure d’accès à la mesure est fixée à 32 ans et sera étendue aux hommes.

Pour garantir la qualité des gamètes prélevés ou recueillis, un âge supérieur est également retenu : celui des donneurs de gamètes soit 37 ans pour les femmes[365] et 45 ans pour les hommes.

Enfin, le Gouvernement, dans un souci de cohérence d’ensemble, choisit de faire correspondre la limite d’âge d’utilisation des ovocytes conservés avec celle de la prise en charge par l’assurance maladie de l’assistance médicale à la procréation, soit jusqu’au 43ème anniversaire de la femme[366]. Pour les hommes, l’âge de 59 ans sera retenu (il correspond également à l’âge limite en assistance médicale à la procréation).

3.3. Le Gouvernement souhaite réserver cette activité aux centres publics et privés à but non lucratif.

En effet, les gamètes non utilisés seront orientés, si la personne concernée y consent, vers le circuit du don. Or, le don de gamètes ne peut être mis en œuvre que dans les secteurs publics et privés à but non lucratif. Le transfert des gamètes vers le secteur du don sera ainsi facilité.

Par ailleurs, le Gouvernement est soucieux de ne pas inciter à cette autoconservation, tout profit devant être exclu de l’activité.

Si les sociétés savantes, notamment le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) et l’association de biologistes des laboratoires d'étude de la fécondation et de la conservation de l'œuf (BLEFCO), demandent que l’autoconservation ovocytaire soit possible dans tous les centres d’assistance médicale à la procréation, l’Académie de médecine[367] précise, quant à elle : « Pour éviter la malfaisance liée aux insuffisances d’équipement et/ou aux démarches mercantiles, seuls devraient être autorisés les centres publics à but non lucratifs, offrant toutes les garanties techniques de succès de conservation des ovocytes. ».

En outre, ces activités ne pourront être exercées dans le cadre de l’activité libérale prévue à l’article L. 6154-1 du code de la santé publique.

3.4. La question de la prise en charge des actes doit être tranchée au regard de différents paramètres.

3.4.1 Tout d’abord, dès lors que l’autoconservation est assimilée à une technique de prévention de l’infertilité́ liée à l’âge, et donc à de la médecine préventive, elle peut, pour partie au moins, être prise en charge par l’assurance maladie.

3.4.2 Par ailleurs, l’autoconservation ovocytaire est de nature à améliorer considérablement la réussite de l’assistance médicale à la procréation et à éviter la multiplication de tentatives infructueuses. Ainsi, la femme qui utilise ses ovocytes préalablement conservés lorsqu’elle recourt à une assistance médicale à la procréation subira moins de traitements invasifs (stimulations, prélèvements ovocytaires) pour une naissance qui arrivera plus vite et autorisera, le cas échéant, une deuxième naissance[368].

En somme, elle conduit à une meilleure efficience de l’assistance médicale à la procréation et un meilleur rapport coût-bénéfices-risques, ce qui rend légitime la couverture d’une partie des dépenses engagées au titre de l’autoconservation.

3.4.3 Financée par les femmes les plus aisées qui peuvent se rendre à l’étranger, au prix de plusieurs milliers d’euros, l’autoconservation est inaccessible aux femmes défavorisées. Il existe donc une discrimination par l’argent incompatible avec le principe éthique de justice.

Les travaux préparatoires à la révision sont convergents sur la question de la prise en charge.

Le Comité consultatif national d'éthique, dans son avis n° 129[369], estime que l’autoconservation ovocytaire « doit être intégralement prise en charge » arguant qu’il s’agit d’une « démarche de prévention en situation d’accompagnement médical ».

Le Conseil d’Etat justifie la prise en charge par la réduction espérée du nombre de parcours en assistance médicale à la procréation par femme, l’augmentation possible de la ressource en don d’ovocytes et la prévention des inégalités professionnelles entre les femmes et les hommes[370].

Le Défenseur des droits est favorable à une prise en charge par l’assurance maladie[371].

La Commission nationale consultative des droits de l’homme considère que les avantages attendus d’une autorisation de l’autoconservation ovocytaire justifient une prise en charge des frais par la sécurité sociale. « D’une part, ces autoconservations d’ovocytes favoriseront les chances de réussite d’une AMP réalisée ultérieurement. D’autre part, un système permettant de réorienter vers le don des gamètes qui ne seraient pas utilisés avant un âge donné – l’âge limite pour accéder à l’AMP, pourrait accompagner cette réforme. »[372].


L’Académie de médecine pousse le raisonnement plus loin encore : « l’infertilité liée à l’âge n’est pas une maladie, mais, comme bien d’autres, une pathologie liée au vieillissement. Les femmes qui n’en tiennent pas compte et qui, sur le tard désirent une grossesse, recourent à la FIV, peu efficace avec leurs propres ovocytes, obligeant à puiser dans la réserve insuffisante des ovocytes du don. Cette démarche « négligente » est prise en charge par l’Assurance Maladie. Pourquoi stigmatiser par le terme de « convenance » les femmes dont la lucidité les a conduites à conserver leurs ovocytes quand il était temps. »[373].

Parmi les options qui se présentent[374], le Gouvernement décide que l’acte sera remboursé par l’assurance maladie mais que le coût de la conservation annuelle restera à la charge de la personne concernée.

En effet, l’effort consenti est déjà important. La durée de conservation est aléatoire puisque certaines personnes n’auront jamais besoin d’utiliser leurs gamètes ainsi conservés. Certaines pourraient décider la destruction de leurs gamètes à l’issue de cette conservation (il parait impossible de contraindre à faire un don des spermatozoïdes ou des ovocytes non utilisés).

Enfin, le Gouvernement n’envisage pas un remboursement des frais engagés pour la conservation des gamètes dans le cas où, ne les ayant pas utilisés, les personnes décideraient de les orienter vers le don. En effet, la somme qui pourrait être conséquente, selon le nombre d’années concernées, s’apparenterait à une contrepartie au don. En outre, même si le risque parait mineur, un tel remboursement pourrait être susceptible d’inciter à conserver ses gamètes.

3.4.4 La personne dont les gamètes sont conservés sera consultée chaque année pour consentir par écrit à la poursuite de cette conservation. Si elle ne souhaite plus la maintenir, elle pourra consentir à ce que ses gamètes fassent l'objet d'un don, d'une recherche ou à ce qu'il soit mis fin à leur conservation. En l’absence de réponse de la personne durant dix années consécutives ou en cas de décès, il sera mis fin à la conservation des gamètes. 

3.4.5 Au regard des nombreuses critiques formulées et d’une position unanime contre le maintien de ce dispositif dans les travaux préparatoires, la suppression de la possibilité de conserver des gamètes pour soi-même au moment du don s’impose au Gouvernement.

A cet égard, il est rappelé qu’en lien avec l’article 21[375] de la Convention d’Oviedo, le récent guide pour la mise en œuvre du principe d’interdiction du profit relatif au corps humain et à ses parties provenant de donneurs vivants ou décédés du Comité de bioéthique du Conseil de l’Europe précise que « Les mesures à vocation non altruiste qui sont incompatibles avec l’interdiction du profit incluent les initiatives offrant des avantages en nature pour encourager les personnes qui n’auraient autrement pas envisagé de faire un don (…) »[376].

En revanche, l’ouverture du don aux personnes n’ayant pas procréé est maintenu. Rien n’empêche ces personnes de faire, à la suite d’un don, une deuxième démarche distincte pour conserver pour elles-mêmes leurs gamètes recueillis ou prélevés dans un cadre clair excluant toute contrepartie.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

La présente disposition remplacera l’actuel article L. 2141-12 du code de la santé publique par de nouvelles dispositions qui prévoient qu’une personne majeure qui répond à des conditions d’âge précisées par décret en Conseil d’Etat pris après avis de l’Agence de la biomédecine peut bénéficier, après une prise en charge médicale par l’équipe clinico-biologique pluridisciplinaire d’assistance médicale à la procréation évaluation médicale, du recueil ou du prélèvement et de la conservation de ses gamètes, en vue de la réalisation ultérieure, à son bénéfice, d'une assistance médicale à la procréation.

Le consentement écrit de l'intéressé est recueilli par écrit après information sur les conditions, les risques et les limites de la démarche et de ses suites. Il doit être confirmé après un délai de réflexion de trois mois. Seuls les établissements publics ou privés à but non lucratif autorisés à cet effet peuvent conserver les gamètes ainsi recueillis ou prélevés.

La personne dont les gamètes sont ainsi conservés est consultée chaque année pour consentir par écrit à la poursuite de cette conservation. Si elle ne souhaite plus la maintenir, elle consent par écrit à ce que ses gamètes fassent l'objet d'un don, à ce que ses gamètes fassent l'objet d'une recherche, à ce qu'il soit mis fin à la conservation de ses gamètes.

En l’absence de réponse de la personne durant dix années consécutives, il est mis fin à la conservation des gamètes. 

L’actuel article L. 2141-12 deviendra l’article L. 2141-13 du code de la santé publique.

La présente disposition conduira par ailleurs à la modification de la rédaction de l’’article L. 160-8 du code de la sécurité sociale pour préciser que la protection sociale contre le risque et les conséquences de la maladie comporte la couverture des frais relatifs aux actes et traitements liés à la préservation de la fertilité et à l’assistance médicale à la procréation, à l’exception de ceux afférents à la conservation des gamètes pour des assurés non atteints d’une pathologie altérant leur fertilité.

L’article L. 1244-2 du code de la santé publique sera modifié pour supprimer la faculté de conserver pour soi-même une partie des gamètes dans le cadre du don pour les donneurs n’ayant pas procréé (suppression du troisième alinéa).

Cette disposition est par ailleurs clarifiée : elle laisse en effet supposer qu’un principe de procréation antérieure demeure et qu’une dérogation est prévue pour une partie des donneurs.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

4.2.1.      Impacts sur les entreprises

Les Centres d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains (CECOS) gèreront les demandes d’autoconservation de gamètes comme ils gèrent actuellement les candidatures au don de gamètes. Ils conserveront également les gamètes et assureront leur traçabilité avec l’interrogation annuelle des personnes concernées. 

Chaque CECOS pourrait ainsi voir sa charge augmenter. Toutefois, ces demandes seront a priori réparties entre les 29 centres qui maillent le territoire.

En contrepartie, dans un certain nombre de cas, les femmes qui n’auront pas utilisé leurs ovocytes pourront les orienter vers le circuit du don. L’activité de don d’ovocytes et d’assistance médicale à la procréation avec don d’ovocytes serait ainsi dynamisée et les délais d’attente des couples concernés seraient raccourcis.

Par ailleurs, la suppression du dispositif établi en 2011 est de nature à alléger la charge des professionnels intervenant dans l’accueil des candidats au don de gamètes, étant rappelé que dans son rapport sur l’application de la loi de bioéthique de 2011[377], l’Agence de la biomédecine écrit que ce dispositif « peut poser des difficultés aux professionnels, à la fois pour s’assurer de la motivation des donneurs par le seul don et pour justifier auprès des donneuses ayant déjà procréé qu’elles n’aient pas accès à cette autoconservation. »

En revanche, la suppression de ce dispositif ne devrait pas avoir d’impact sur l’augmentation constatée du recrutement de donneurs eu égard aux donnés mentionnées au point « cade actuel » qui témoignent que la motivation des donneurs n’ayant pas procréé n’est pas, en priorité, l’autoconservation.

4.2.2.      Impacts budgétaires

Aucune société savante (la majorité est favorable au dispositif) ne se risque à avancer un taux de recours. L’une d’entre elles, le Groupe d’études sur le don d’ovocytes (GEDO), affirme néanmoins que « Peu de femmes y auraient recours en raison de la lourdeur du protocole, de l’incertitude d’en avoir le besoin, des chances aléatoires d’avoir un enfant »[378] (Cette société savante ajoute, par ailleurs, que « selon des études internationales [pays où la pratique est autorisée], moins de 10% des femmes sur une période de 7 à 8 ans ont demandé à récupérer leurs ovocytes. »)

Tout recours massif est à écarter. A ce propos, le Président du Comité consultatif national d’éthique s’est ainsi exprimé : « Sur cette question, faisons confiance aux femmes. Certaines jeunes femmes souhaiteront avoir accès, au nom de l’autonomie et de leur propre capacité, à l’autoconservation des ovocytes, tandis que d’autres ne le voudront pas ».[379]

Toute projection est délicate puisqu’il est impossible de prédire finement le nombre de femmes (entre 32 et 37 ans) et le nombre d’hommes (entre 32 et 45 ans) qui demanderont une autoconservation de gamètes.

Néanmoins, à partir de la nomenclature des actes de biologie médicale et de la prise en compte de différents paramètres, le coût total annuel de l’accès à l’autoconservation de gamètes (femmes et hommes) peut être estimé entre 10 et 15 millions d’euros.

Il est précisé que le coût annuel de l’autoconservation, qui restera à la charge des personnes est de 40,5 € (source : nomenclature des actes de biologie médicale).

4.3.                       Impacts sociaux

Mise en œuvre dans les conditions sus-précisées, la mesure devrait participer à renforcer l’égalité entre les femmes et les hommes.

En effet, l’autoconservation des ovocytes pourrait permettre de relâcher la pression à laquelle sont soumises les femmes, et de réduire l’impact de l’écart biologique entre les hommes et les femmes.

La Commission nationale consultative des droits de l’homme estime « que ce sont tout à la fois les principes d’égalité et de liberté qui plaident en faveur d’une reconnaissance de la possibilité d’une autoconservation de ses gamètes. »[380]. Le Conseil d’Etat considère que la faculté d’autoconservation ovocytaire peut également apparaître comme une mesure émancipatrice pour la femme qui serait ainsi libérée de l’horloge biologique.[381]

La suppression du dispositif mis en place en 2011 permettra également de rétablir une égalité entre les femmes et les hommes étant rappelé que la Commission nationale consultative des droits de l’homme, dans son avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, dénonce une inégalité entre les femmes et les hommes induite par ce dispositif, les hommes pouvant facilement conserver leurs spermatozoïdes par ce biais[382], ce qui n’est pas le cas pour les femmes.

4.4.                       Impacts sur les particuliers

La mesure ouvre un droit nouveau, sous certaines conditions (notamment d’âge), aux personnes qui souhaitent conserver leurs gamètes à un moment favorable afin de les utiliser ultérieurement si besoin (sous conditions également) pour réaliser leur projet parental.

4.5.                       Impacts environnementaux

La mesure pourrait à terme permettre d’éviter, ou du moins diminuer de manière significative, les déplacements hors frontières des couples qui recourent aux techniques de procréation avec don d’ovocytes hors du territoire national. D’une part, parce que ces femmes auront leurs propres ovocytes conservés antérieurement et, d’autre part, parce que la ressource en ovocytes pourrait être améliorée par ce biais (les femmes qui n’utiliseront pas leurs ovocytes pouvant les orienter vers le don) participant à diminuer les délais d’attente constatés aujourd’hui.

Elle permet également de diminuer les déplacements à l’étranger pour autoconservation.

5.       Consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

Ont été consultés 

- La Caisse nationale d’assurance maladie ; elle a rendu son avis le 2 juillet 2019 ;

- L’Union nationale des caisses d’assurance maladie ;

- L’Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire ; elle a remis son avis le 3 juillet 2019 ;

- Le Conseil central d’administration de la caisse nationale de la mutualité sociale agricole ; elle a transmis son avis le 26 juillet 2019 ;

- La Caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants.

Enfin, la Haute autorité de la santé a été consultée en application du 6° de l’article L. 161-37 du code de la sécurité sociale. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

5.2.                       Modalités d’application

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

Pour Saint-Pierre-et-Miquelon, seront applicables directement les dispositions du code de la sécurité sociale mentionnées au II, qui complètent l’article L. 160-8 dont l’application est déjà prévue à l’article 9 de l’ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses disposions relatives aux affaires sociales.

En revanche, ces mêmes dispositions du II  du présent article visant la modification de l’article L. 160-8 du code de de sécurité sociale ne seront pas applicables à Mayotte, dont le régime d’assurance maladie régi par l’ordonnance n° 96-1122 du  20 décembre1996 a fixé des règles différentes pour la participation des assurés (article 20-2).

Les conditions d’âge pour être éligibles à la mesure seront précisées par décret en Conseil d’Etat pris après avis de l’Agence de la biomédecine.


Article 3  Reconnaître les droits des enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur en leur permettant d’accéder à l’identité de leur donneur sans revenir sur le principe d’anonymat du don

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1. Dans environ 4% des cas[383], l’assistance médicale à la procréation nécessite le recours à un « tiers donneur » (donneur de spermatozoïdes, donneuse d’ovocytes ou couple donneur d’embryons).

De manière générale, le caractère anonyme du don d’éléments et produits du corps humain (quel qu’il soit) vient renforcer son caractère bénévole (sa gratuité) pour empêcher, sauf exceptions, que le receveur connaisse l’identité du donneur, et réciproquement.

L’anonymat du don permet ainsi d’éviter toute pression entre donneurs et receveurs et de limiter les risques de trafic.

En 1994, lors des premières lois de bioéthique, le principe d’anonymat qui prévalait déjà pour les autres dons a été étendu aux gamètes, le législateur souhaitant proposer un cadre commun de principe pour l’ensemble des produits et éléments du corps humain alors que, précise le Conseil d’Etat[384] « ce choix (…) n’avait rien d’évident et constituait aux yeux des parlementaires une solution par défaut. ». L’intérêt de l’enfant, expose l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques[385], était alors « compris comme résultant du bon épanouissement de sa famille – c’est-à-dire de lui-même et de ses parents et non de lui seul ».

1.1.2. Le principe d’anonymat du don d’éléments et produits du corps humain figure aux articles 16-8 du code civil et L. 1211-5 du code de la santé publique :

« Aucune information permettant d'identifier à la fois celui qui a fait don d'un élément ou d'un produit de son corps et celui qui l'a reçu ne peut être divulguée. Le donneur ne peut connaître l'identité du receveur ni le receveur celle du donneur. » (Article 16-8 du code civil)

« Le donneur ne peut connaître l'identité du receveur, ni le receveur celle du donneur. Aucune information permettant d'identifier à la fois celui qui a fait don d'un élément ou d'un produit de son corps et celui qui l'a reçu ne peut être divulguée.

Il ne peut être dérogé à ce principe d'anonymat qu'en cas de nécessité thérapeutique. » (Article L. 1211-5 du code de la santé publique)

Il est strictement interprété en dehors de l’accès - réservé au médecin - à des informations médicales non identifiantes en cas de nécessité thérapeutique.

Cette faculté est rappelée spécifiquement dans le chapitre relatif au don de gamètes :

« Un médecin peut accéder aux informations médicales non identifiantes en cas de nécessité thérapeutique concernant un enfant conçu à partir de gamètes issus de don. » (premier alinéa de l’article L. 1244-6 du code de la santé publique).

La nécessité thérapeutique couvre, dans le champ du don de gamètes, la prévention des risques de consanguinité pour deux personnes en couple issues d’AMP avec tiers donneur. C’est-à-dire qu’un médecin peut, à leur demande, vérifier qu’elles ne sont pas issues d’un même donneur et ce, sans remise en cause de l’anonymat.

Par ailleurs, lorsqu’une personne a procédé, antérieurement à la réalisation d’un examen de génétique, à un don de gamètes et que le diagnostic génétique suspecté est confirmé, cette personne peut autoriser son médecin à informer le centre d’assistance médicale à la procréation où elle a fait son don afin qu’il prévienne les enfants issus du don (cette procédure se déroule là encore sans rupture du principe d’anonymat).

« Lorsqu'est diagnostiquée une anomalie génétique grave dont les conséquences sont susceptibles de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins chez une personne qui a fait un don de gamètes ayant abouti à la conception d'un ou plusieurs enfants ou chez l'un des membres d'un couple ayant effectué un don d'embryon, cette personne peut autoriser le médecin prescripteur à saisir le responsable du centre d'assistance médicale à la procréation afin qu'il procède à l'information des enfants issus du don dans les conditions prévues au quatrième alinéa. » (Dernier alinéa de l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique)

Le principe d’anonymat concerne également l’accueil d’embryon[386] encadré aux articles L. 2141-5 et L. 2141-6 du code de la santé publique. Le couple accueillant l’embryon et celui ayant renoncé à son projet parental ne peuvent connaître leurs identités respectives sauf, à nouveau, en cas de nécessité thérapeutique.

Enfin, le principe d’anonymat s’étend, dans le cadre en vigueur, aux données non identifiantes que sont par exemple les caractéristiques physiques du donneur, sa situation familiale, son âge ou sa catégorie socio-professionnelle au moment du don.

1.1.3. Outre l’anonymat et la gratuité, les autres dispositions encadrant le don de gamètes ou d’embryon peuvent être ainsi résumées :

-          Le don est toujours révocable (jusqu’à utilisation des gamètes) ; le consentement du conjoint du donneur est également recueilli et peut être également révoqué jusqu’à utilisation des gamètes :

« Le consentement des donneurs et, s'ils font partie d'un couple, celui de l'autre membre du couple sont recueillis par écrit et peuvent être révoqués à tout moment jusqu'à l'utilisation des gamètes. » (Premier alinéa de l’article L. 1244-2 du code de la santé publique) ;

-          En cas d’AMP avec tiers donneur, c’est le notaire qui recueille le consentement du couple à l’AMP :

« Les époux, les partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou les concubins qui, pour procréer, recourent à une assistance médicale nécessitant l'intervention d'un tiers donneur doivent préalablement donner, dans les conditions prévues par le code civil, leur consentement au notaire. » (Dernier alinéa de l’article L. 2141-10 du code de la santé publique) ;

« Un couple répondant aux conditions prévues à l'article L. 2141-2 peut accueillir un embryon lorsque les techniques d'assistance médicale à la procréation au sein du couple ne peuvent aboutir ou lorsque le couple, dûment informé dans les conditions prévues à l'article L. 2141-10, y renonce.

Le couple demandeur doit préalablement donner son consentement à un notaire. Les conditions et les effets de ce consentement sont régis par l'article 311-20 du code civil. » (Premier alinéa de l’article L. 2141-6 du code de la santé publique) ;

-          Le double don de gamètes n’est pas autorisé :

« [Un embryon] ne peut être conçu avec des gamètes ne provenant pas d'un au moins des membres du couple. » (Premier alinéa de l’article L. 2141-3 du code de la santé publique) ;

-          Les activités d’AMP faisant intervenir un tiers donneur (c’est-à-dire les activités de sélection des donneurs, conservation, appariement et distribution des gamètes…) ne peuvent être pratiquées dans des structures privées à but lucratif :

« Les activités cliniques et biologiques d'assistance médicale à la procréation relatives aux gamètes en vue de don ne peuvent être pratiquées que dans des organismes et établissements de santé publics, ou dans des organismes et établissements de santé privés à but non lucratif. Aucune rémunération à l'acte ne peut être perçue par les praticiens au titre de ces activités. » (Troisième alinéa de l’article L. 2142-1 du code la santé publique) ;

-          La donneuse d'ovocytes doit être particulièrement informée des conditions de la stimulation ovarienne et du prélèvement ovocytaire, des risques et des contraintes liés à cette technique :

« La donneuse d'ovocytes doit être particulièrement informée des conditions de la stimulation ovarienne et du prélèvement ovocytaire, des risques et des contraintes liés à cette technique, lors des entretiens avec l'équipe médicale pluridisciplinaire. » (Deuxième alinéa de l’article L. 1244-7 du code de la santé publique) ;

-          Le donneur qui n’a pas procréé se voit proposer, s’il le souhaite, de conserver pour lui-même (pour une utilisation ultérieure dans le cadre d’une AMP) une partie de ses gamètes :

« Le donneur peut ne pas avoir procréé. Il se voit alors proposer le recueil et la conservation d'une partie de ses gamètes ou de ses tissus germinaux en vue d'une éventuelle réalisation ultérieure, à son bénéfice, d'une assistance médicale à la procréation, dans les conditions prévues au titre IV du livre Ier de la deuxième partie. Ce recueil et cette conservation sont subordonnés au consentement du donneur. » (Deuxième alinéa de l’article L. 1244-2 du code de la santé publique).

Les données relatives au donneur sont conservées dans des conditions strictes par les structures autorisées par les agences régionales de santé à mettre en œuvre les activités relatives au don de gamètes ; seuls certains praticiens peuvent avoir accès au dossier du donneur :

« Ce dossier est conservé pour une durée minimale de quarante ans et quel que soit son support sous forme anonyme. L'archivage est effectué dans des conditions garantissant la confidentialité.

Le donneur doit, avant le recueil ou le prélèvement des gamètes, donner expressément son consentement à la conservation de ce dossier.

Les informations touchant à l'identité des donneurs, à l'identification des enfants nés et aux liens biologiques existant entre eux sont conservées, quel que soit le support, de manière à garantir strictement leur confidentialité. Seuls les praticiens répondant aux critères mentionnés aux articles R. 2142-10 et R. 2142-11 pour exercer les activités mentionnées au premier alinéa ont accès à ces informations. » (11ème, 12ème et 13ème alinéa de l’article R. 1244-5 du code de la santé publique).

Il n’existe pas actuellement de fichier centralisé des donneurs et des dons. Ainsi, la Fédération française des centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS), structure associative qui regroupe au sein d’un réseau les différents CECOS du territoire national, si elle constitue un réseau national dans le domaine de l’AMP avec tiers donneur et de la préservation de la fertilité (en jouant notamment un rôle dans l’harmonisation des pratiques cliniques et biologiques, l’information, la formation des professionnels de santé et le développement des projets de recherche dans les domaines concernés) ne conserve pas de façon centralisée les données relatives aux donneurs et aux dons de gamètes[387].

Par ailleurs, l’article L. 2141-7 du code de la santé publique prévoit le cadre de mise en œuvre de l’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur de gamètes :

« L'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur peut être mise en œuvre lorsqu'il existe un risque de transmission d'une maladie d'une particulière gravité à l'enfant ou à un membre du couple, lorsque les techniques d'assistance médicale à la procréation au sein du couple ne peuvent aboutir ou lorsque le couple, dûment informé dans les conditions prévues à l'article L. 2141-10, renonce à une assistance médicale à la procréation au sein du couple. »

Enfin, le code civil précise qu’aucun lien de filiation entre l’auteur du don (tiers donneur et accueil d’embryons) et l’enfant issu d’une AMP n’est possible et aucune action en responsabilité ne peut être exercée à l’encontre du donneur.

La filiation entre l’enfant et les deux membres du couple ayant recours à l’AMP avec tiers donneur n’est pas contestable (sauf cas spécifiques, par exemple quand la preuve est faite que l’enfant n’est pas issu de l’AMP).

1.2. Cadre constitutionnel

Dès 1994, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la conformité à la Constitution des dispositions garantissant l’anonymat des tiers donneurs et interdisant aux enfants de connaître l’identité de ceux-ci.

Il a en effet validé comme étant conforme à la Constitution l’article 311-19 du code civil dans sa décision n° 94-343/344 DC du 27 juillet 1994 à l’occasion de l’examen de la première loi de bioéthique et a jugé « que les dispositions de cette loi n'ont eu ni pour objet ni pour effet de régir les conditions d'attribution de paternité en cas d'assistance médicale à la procréation ; qu'aucune disposition ni aucun principe à valeur constitutionnelle ne prohibe les interdictions prescrites par le législateur d'établir un lien de filiation entre l'enfant issu de la procréation et l'auteur du don et d'exercer une action en responsabilité à l'encontre de celui-ci »[388].

En 1994, il était notamment reproché à la loi de bioéthique le fait « que la possibilité d'avoir des enfants dont le parent naturel est un "tiers donneur" met en cause les droits de la famille tels qu'ils ont été conçus et garantis par le Préambule de la Constitution de 1946 ; que l'interdiction faite aux enfants qui seront nés d'une fécondation in vitro faisant intervenir un "tiers donneur" de connaître leur identité génétique et leurs parents naturels porte atteinte au droit à la santé de l'enfant et au libre épanouissement de sa personnalité »[389]. Dans le considérant n°11, le Conseil constitutionnel répond « qu'aucune disposition du Préambule de la Constitution de 1946 ne fait obstacle à ce que les conditions du développement de la famille soient assurées par des dons de gamètes ou d'embryons dans les conditions prévues par la loi ; que l'interdiction de donner les moyens aux enfants ainsi conçus de connaître l'identité des donneurs ne saurait être regardée comme portant atteinte à la protection de la santé telle qu'elle est garantie par ce Préambule ».

En 2012, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la question de l’accès aux origines dans le contexte de l’accouchement sous le secret. Saisi par le Conseil d’Etat d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité des articles L.147-6 et L.22-6 du code de l’action sociale et des familles qui encadrent le droit à l’accouchement sous le secret, le Conseil les a déclarés conformes à la Constitution, ces dispositions ne portant pas atteinte « au respect dû à la vie privée (ni) au droit de mener une vie familiale normale » [390].

Le commentaire de cette décision[391] permet de comprendre quelles sont les exigences constitutionnelles en matière de droit au respect à la vie privée et de droit à la vie familiale normale, et de mesurer l’écart qui existe entre ces exigences constitutionnelles et celles issues de la Convention européenne des droits de l’homme. Le commentaire de la décision explique en quoi « le droit au respect de la vie privée n’implique pas un droit d’accès aux origines » en précisant que le droit à la protection de la vie privée tel qu’il ressort de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 ne recouvre pas tout-à-fait le même sens que le droit au respect de la vie privée énoncé par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. En effet, le droit à la vie privée tel qu’il se dégage de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’Homme est « entendu de manière assez classique, comme une protection les intrusions publiques ou privées au sein de la sphère d’intimité de chacun », alors que la Cour européenne des droits de l’homme « retient une interprétation plus extensive » en exigeant « que chacun puisse établir les détails de son identité d’être humain ». Pareillement, « le droit pour toute personne de connaître ses origines ne trouve pas de fondement constitutionnel dans le droit de mener une vie familiale normale », parce que la conception de « droit constitutionnel à une vie familiale normale doit être entendu dans un sens concret (possibilité de vivre ensemble), plus que dans un sens proprement formel qui impliquerait une consécration en droit des liens biologiques ».

Dans cette décision, le Conseil constitutionnel conclut « qu'il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, de substituer son appréciation à celle du législateur sur l'équilibre ainsi défini entre les intérêts de la mère de naissance et ceux de l'enfant ». En faisant le choix du terme « intérêts de la mère et « intérêts de l’enfant » et non celui de « droits », le Conseil a souligné que ce qui est en jeu dans la question de l’accès aux origines est bien un « conflit d’intérêts » et non des « droits » résultant d’exigences constitutionnelles.

Ces décisions sont toutefois intervenues avant une décision très récente du 21 mars 2019 dans laquelle le Conseil est venu consacrer la notion de « protection de l’intérêt supérieur de l’enfant » en lui reconnaissant une valeur constitutionnelle sur le fondement des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946[392].

1.3. Cadre conventionnel

1.3.1. Plusieurs instruments internationaux témoignent d’une évolution vers une reconnaissance progressive d’un droit d’accès aux origines.

La Convention Internationale des Droits de l’Enfant de 1989 prévoit en son article 7 que l’enfant a, « dans la mesure du possible », le droit de connaître ses parents mais elle ne concerne que les enfants[393].

1.3.2. L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme dispose que « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale »[394].

La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme montre que l’accès aux origines relève d’un élément du droit au respect de la vie privé qui consiste donc également à la protection de son identité.

Dès 1989[395], la Cour reconnaît que le droit à la vie privée implique de pouvoir « établir les détails de son identité d’être humain » (elle affirme l’intérêt primordial pour une personne d’avoir accès à son dossier d’aide sociale pour connaître et comprendre son enfance et ses années de formation)[396].

Ainsi, l’article 8 protège le « droit à l’identité et à l’épanouissement personnel », qui inclut le droit d’accès aux informations permettant d’établir « quelques racines de son histoire »[397].

La Cour a jugé que l’obtention « des informations nécessaires à la découverte de la vérité concernant un aspect important de son identité personnelle, par exemple l'identité de ses géniteurs » contribuait à l'établissement des détails de l’identité et à l’épanouissement personnel, qui relèvent d’un « intérêt vital » protégé par l’article 8[398].

Dans l’arrêt de grande chambre Odièvre contre France[399] (qui concerne le cas d’un enfant né sous le secret et recherchant l’identité de sa mère de naissance), la Cour européenne des droits de l’homme considère que le droit au respect de la vie privée protège un droit à l’identité et à l’épanouissement personnel, dont contribuent l’établissement des détails de son identité d’être humain et l’intérêt vital à obtenir des informations nécessaires à la découverte de la vérité concernant un aspect important de son identité personnelle, dont l’identité de ses géniteurs[400]. Elle estime néanmoins que la législation française qui prévoit l’anonymat de l’accouchement sous X ne viole pas l’article 8 de la Convention en ce qu’elle tend à atteindre un équilibre et une proportionnalité suffisante entre les intérêts en cause.

Elle a également affirmé que les personnes ont un « intérêt vital »[401], protégé par la Convention, « à obtenir les informations qui leur sont indispensables pour découvrir la vérité sur un aspect important de leur identité personnelle »[402].

Cependant, comme en témoignent les arrêts de la Cour, ce droit de connaître ses origines n’est pas absolu et doit toujours être mis en balance avec les intérêts des autres parties concernées (juste équilibre entre les intérêts concurrents). Ainsi, la Cour a eu l’occasion de rappeler que l’expression « toute personne » dans l’article 8 vise aussi bien l’enfant qui a le droit de connaître ses origines que le géniteur qui a droit à protéger sa vie privée ainsi que celle de sa famille. Deux interprétations du même droit au respect de sa vie privée et familiale sont donc mises en concurrence s’agissant de l’accès aux origines, tant pour l’enfant né sous le secret vis-à-vis de sa mère de naissance[403] que pour l’enfant dont le géniteur présumé refuse de se soumettre à un test de paternité[404].

Au demeurant, la Cour reconnait une marge d’appréciation aux Etats-membres dans la mesure où il n’existe pas « de consensus au sein des États membres du Conseil de l’Europe[405], que ce soit sur l’importance relative de l’intérêt en jeu ou sur les meilleurs moyens de le protéger, en particulier lorsque l’affaire soulève des questions morales ou éthiques délicates »[406].

A ce jour, aucune des décisions de la Cour ne concerne spécifiquement le droit d’une personne conçue grâce à un don de gamètes d’accéder à des informations sur le donneur.

1.4. Éléments de droit comparé

1.4.1. Plusieurs pays européens reconnaissent le droit d’accès aux origines :

La Suède a été le premier au monde à reconnaitre le droit de connaître ses origines pour les personnes conçues par don. Le principe de l'anonymat des donneurs a été abandonné en mars 1985, lors de l’entrée en vigueur de la loi de 1984, garantissant aux enfants nés par insémination artificielle avec donneur le droit de connaître leurs origines. Le même droit a été reconnu en 2003 pour les enfants nés grâce à un don d'ovocytes. Ainsi, un enfant conçu par don a le droit, lorsqu’il atteint l’âge de 18 ans (ou avant si l’intéressé présente « une maturité suffisante »), de connaître l’identité de son donneur[407],[408],[409],[410].

En Suisse, la Constitution fédérale reconnaît depuis 1992 le droit de connaître ses origines génétiques. La loi fédérale du 18 décembre 1998 sur la procréation médicalement assistée et l'ordonnance prise pour son application organisent la collecte et la transmission des informations sur les donneurs. Dès l’âge de 18 ans, l’enfant peut demander à l'Office fédéral de l'état civil (OFEC) la communication des informations portant sur l'identité de son donneur. L’OFEC tient le registre des donneurs de sperme depuis l'entrée en vigueur de la loi en 2001 et a pu enregistrer les premières demandes d'information en 2019 (les premières personnes nées d'un don de sperme après le 1er janvier 2001 ayant atteint leur majorité) [411],[412],[413]. En mars 2018, le Conseil fédéral avait annoncé une révision partielle de l'ordonnance sur la procréation médicalement assistée visant à simplifier la procédure en permettant l’envoi des données relatives au donneur de sperme par courrier postal, directement au domicile des personnes concernées. En novembre 2018, le Conseil fédéral a décidé de faire entrer en vigueur cette modification de l’ordonnance le 1er janvier 2019[414],[415].

En Autriche, la loi du 4 juin 1992 relative à la médecine de la reproduction permet aux personnes issues d’un don de gamète d’accéder à l’identité du donneur ou de la donneuse dès l’âge de 14 ans[416],[417],[418],[419].

En Norvège, la loi de 2003 donne le droit aux personnes nées d’un don de sperme (conçues à partir de 2005) d’accéder à l’identité du donneur à partir de l’âge de 18 ans. La création d’un registre national d’identité des donneurs de sperme est prévue par la loi. Le don d’ovocytes est interdit[420],[421],[422].

Aux Pays-Bas, l’adoption de la loi du 25 avril 2002 sur les informations relatives aux donneurs en matière de procréation médicalement assistée a permis l’abandon du double régime du don de gamètes, qui permettait aux donneurs de choisir de rester anonyme ou non. Cette loi, qui s'applique aux dons postérieurs au 1er juin 2004, permettra aux enfants issus de ces dons d’accéder à des données non identifiantes dès 12 ans et à l’identité du donneur dès 16 ans. Lorsqu’un enfant conçu par don naît, le centre de fertilité doit recueillir et adresser à la Fondation les informations relatives au donneur[423],[424],[425].

Au Royaume-Uni, les enfants conçus par don peuvent accéder, à partir de 16 ans, à des données non identifiantes sur le donneur et ceux nés d’un don postérieur au 1er avril 2005 peuvent, à partir de 18 ans, accéder à l’identité du donneur en s’adressant à la HFEA (Human Fertilisation and Embryology Authority). Depuis 1991 (date de l’entrée en vigueur de la loi de 1990), la HFEA est chargée de tenir un registre contenant des informations sur les services d’assistance à la procréation réglementés au Royaume-Uni. Les enfants nés d’un don entre 1991 et 2005 peuvent accéder à l’identité du donneur, à condition que le donneur ait fait le choix de pouvoir être identifié. A partir de 18 ans, les personnes conçues par don peuvent s’inscrire dans un registre géré par la HFEA, le Donor Sibling Link, qui permet de prendre contact avec les personnes issues du même donneur[426],[427],[428],[429],[430].

En Finlande, depuis une loi de 2006, les personnes conçues par don peuvent accéder à l’identité du donneur à partir de 18 ans. L’autorité compétente tient un registre national des dons de gamètes et d’embryons[431],[432].

En Irlande, depuis la loi de 2015 (The Children and Family Relationships Act), une personne conçue par don peut demander, à partir de l’âge de 18 ans, l’accès à l’identité de son donneur, en s’adressant au ministère de la santé. Ce dernier gère le registre national des personnes conçues grâce à un don ; lorsqu’il ajoute une personne conçu par don dans le registre, il notifie l’information aux services d’état civil[433],[434],[435].

En Allemagne, la Cour constitutionnelle fédérale reconnaît depuis 1989 à toute personne le droit de connaître ses origines. La loi de 2017 consacre ce droit pour les personnes issues de don de sperme (le don d’ovocytes n’étant pas autorisé en Allemagne) et prévoit la création d’un registre centralisé pour conserver les informations. A partir de 16 ans, l’enfant conçu par don de sperme peut demander à connaître l’identité du donneur. Avant la loi de 2017, les directives de l’Ordre fédéral des médecins sur la procréation médicalement assistée recommandaient aux professionnels de conserver les informations sur les donneurs pour les enfants nés après 2007. Par conséquent, les personnes nées avant l’entrée en vigueur de la loi qui souhaitent connaître l’identité de leur donneur doivent s’adresser au médecin ou à l’établissement hospitalier ayant réalisé l’insémination[436],[437],[438],[439].

Au Portugal, dans une décision du 24 avril 2018, la Cour constitutionnelle a déclaré inconstitutionnel le régime de l’anonymat des donneurs de gamètes (régime en vigueur depuis la loi n° 32/2006 qui autorise notamment la divulgation d’informations de nature génétique, mais pas sur l’identité du donneur). Ce qui donne force de loi au droit de chacun de connaître ses origines génétiques. Le Parlement portugais doit à présent légiférer sur les dons de gamètes[440],[441],[442].

1.4.2. Certains pays européens permettent un accès partiel aux origines.

En Islande, depuis une loi de 1996, le donneur choisit au moment du don s’il souhaite rester anonyme ou non. S’il ne demande pas l’anonymat, l’institution doit conserver les informations sur son identité dans un dossier spécifique et les enfants issus de son don pourront, à partir de l’âge de 18 ans, accéder à ce dossier. Si le donneur a souhaité rester anonyme, l’enfant ne pourra pas obtenir les informations sur son identité[443],[444],[445].

En Belgique, la loi du 6 juillet 2007 relative à la procréation médicalement assistée pose le principe de l'anonymat tout en autorisant le don de gamètes non anonyme si celui-ci résulte d’un accord entre le donneur et le ou les receveurs. Le cas échéant, seuls les parents ont connaissance de l’identité du donneur[446],[447],[448],[449].

Au Danemark, la loi de 2006 sur la fécondation artificielle érigeait l'anonymat du don de gamètes en principe (ce texte ne s’appliquait qu’aux actes réalisés par des médecins ; les sages-femmes qui pratiquaient des inséminations artificielles n’étaient pas tenues au respect de ce principe). Depuis 2012, la loi autorise les parents à choisir ; en cas de recours à un donneur anonyme au moment du don mais qui accepte un accès ultérieur à son identité par l’enfant à naître, cet accès peut se faire à partir de l’âge de 18 ans. Ainsi, la possibilité pour un enfant conçu par don d’accéder à ses origines dépend du choix de ses parents[450],[451],[452].

1.4.3. Certains pays européens n’autorisent pas l’accès aux origines.

En Espagne, la loi n° 14 du 26 mai 2006 sur les techniques de reproduction humaine assistée érige l'anonymat du don de gamètes en principe. La loi prévoit la levée du secret à titre exceptionnel (en cas de nécessité pour la santé de l’enfant notamment) [453],[454].

En Pologne, en l’absence de dispositions légales spécifiques, l’anonymat du don de gamètes découle du secret médical qui lie le médecin envers le donneur et le receveur[455],[456].

En Grèce, l’identité du donneur ne peut en aucun cas être révélée (la loi adopte le principe de l’anonymat pour tout don). Seul l’accès aux informations médicales relatives au donneur est possible pour des raisons liées à la santé de l’enfant[457].

1.4.4. Aux Etats-Unis, les solutions varient en fonction des États mais aucun n’a légiféré sur cette question. Selon les banques de gamètes, les receveurs peuvent choisir entre un don anonyme ou non : ils consultent les profils fournis par les donneurs et font un choix sur catalogue à partir notamment de l’accord du donneur pour rencontrer l’enfant à sa majorité. Toutefois, même si le donneur avait choisi de rester anonyme, il est relativement facile pour les personnes américaines conçues par don de retrouver leurs origines génétiques, notamment via la réalisation de tests ADN auprès de sociétés commerciales[458],[459],[460],[461].

En Australie, l’accès aux origines est possible dans tous les États australiens depuis 2005 (à l’exception de l’État de Victoria où l’anonymat avait été supprimé en 1998). Quatre États ont adopté une législation spécifique, notamment l’État de Victoria où, depuis le 1er mars 2017, les personnes conçues par don, quelle que soit l’année de leur conception, peuvent accéder à l’identité de leur donneur, y compris si ce dernier n’a pas donné son accord. Les autres États disposent d’un guide de recommandations éthiques, établi au niveau fédéral. Les cliniques ont l’obligation de respecter ce guide pour obtenir leur accréditation[462],[463],[464]..

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1. La société a évolué depuis les premières lois de bioéthique posées en 1994 qui ont introduit l’anonymat du don de gamètes[465].

La France est un des rares pays à avoir opté pour un principe absolu d’anonymat du donneur à l’égard du couple infertile et de l’enfant[466].

« La vision française de l’anonymat est radicale : c’est une interdiction absolue, qui porte tant sur l’identité que sur les « données non identifiantes » (). Il est impossible pour l’enfant, même devenu adulte, de connaître l’identité du donneur. »[467].

Si le vote de 1994 a fait entrer les gamètes dans le même cadre que celui des autres éléments et produits du corps humain dans l’objectif d’assurer le caractère altruiste et volontaire du don, d’éviter ainsi toute pression et de limiter les risques de trafic, les débats montrent que le but poursuivi était également de protéger la famille légale[468], de maintenir « l’unité de la famille légale, qui pouvait ainsi choisir ou non de révéler l’existence d’un tiers donneur, sans que pèse sur cette révélation l’ombre d’un « père biologique » »[469].

Comme le détaille Irène Théry et Anne-Marie Leroyer[470] dans leur rapport de 2014 un lien direct a été institué entre le secret du mode de conception et l’anonymat du don, conforté par la création d’une filiation « pseudo-charnelle ». Il explique en partie le malaise parfois suscité par les personnes nées de don qui revendiquent de connaître leurs origines[471]

Le secret a donc été au cœur des règles juridiques posées en matière d’assistance médicale à la procréation avec don. « Tout le système, qu’il soit juridique – conditions d’accès, établissement de la filiation – ou médical, a été orienté vers l’idée que le secret n’appartient qu’aux parents et que c’est à eux de dire éventuellement à l’enfant comment il a été conçu et s’il a été conçu grâce à un don. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la médecine[472] a accompagné le mouvement juridique. »[473].

Toutefois, dans les débats ayant conduit à retenir l’anonymat strict du don de gamètes, « les parlementaires étaient déjà conscients du caractère imparfait du choix qu’ils faisaient » et considéraient qu’il faudrait probablement revoir le caractère irréversible de l’anonymat dès qu’un bilan pourrait être envisagé de l’expérience tant des couples que des enfants concernés[474].

En tout état de cause, vingt-cinq ans plus tard, l’importance de ce « ni vu, ni connu »[475], est désormais beaucoup moins sensible au regard des nouvelles familles au sein desquelles il n’est pas rare, à la faveur de la recomposition, que plusieurs adultes concourent à l’éducation des enfants[476].

Le Conseil d’Etat admet également que « la diversification des modèles familiaux tend à banaliser la dissociation entre filiation juridique et biologique et atténue aujourd’hui la dimension potentiellement déstabilisante de la revendication de l’accès aux origines. »[477].

S’agissant plus spécifiquement du secret sur le mode de procréation, le Comité consultatif national d'éthique indique, dans son rapport de synthèse des Etats généraux de la bioéthique[478], qu’un consensus sur la vérité due aux enfants quant à leur mode de conception s’est dégagé : « un consensus existe sur le fait de ne pas cacher aux enfants l’histoire de leur conception ». Par ailleurs, la Présidente de la fédération française des centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS) a indiqué de son côté : « Nous [CECOS] insistons pour que l’enfant reçoive cette information ; mais personne ne peut à l’heure actuelle vérifier que cela se traduit effectivement dans les faits »[479].

Enfin, le projet de loi déposé par le Gouvernement lors de la précédente révision bioéthique aménageait un droit d’accès aux origines pour les enfants concernés mais cette solution n’a finalement pas été retenue « les parlementaires craignant tout à la fois une confusion entre filiation biologique et filiation par le droit et l’éducation, une baisse du nombre de donneurs et enfin un risque d’occultation plus fréquente des circonstances de la conception de l’enfant. »[480].

Pour certains, cet échec s’explique par « la confusion qui fut entretenue sur la filiation (…). L’accusation faite aux jeunes de vouloir chercher des « parents », voire même de prôner une « biologisation de la filiation » fut omniprésente chez les défenseurs du statu quo. »[481].

2.1.2. Les recherches de sociologues et de psychologues ont montré que l’application radicale du principe d’anonymat édicté en 1994 comporte à long terme des effets préjudiciables sur l’enfant, essentiellement parce que ce dernier est privé d’une dimension de son histoire qui le concerne pourtant intimement (le donneur est, à tout le moins, un acteur d’hérédité pour les personnes nées de son don). Ainsi, « de nombreux psychologues témoignent des conséquences délétères d’une identité fondée sur l’effacement de l’intervention d’un tiers.[482] ».

Un certain nombre de personnes nées de don témoignent de leur souffrance : « À l’heure actuelle, c’est comme un deuil impossible à faire pour l’enfant issu du don de gamètes. Tant que la personne n’a pas vu le corps d’un proche décédé, elle ne peut faire son deuil. De même, tant que l’enfant n’a pas accès à ses origines, il porte ses interrogations »[483].

Pourtant, cette souffrance apparait souvent mal comprise : « [Nombreux sont ceux qui] ne parviennent pas à se représenter quel peut être le « drame » vécu par des enfants qui ont été voulus, attendus et souhaités par leurs deux parents. »[484].

Le Comité consultatif national d’éthique dans son avis n° 90 rappelle qu’ « Il importe (…) de se souvenir que la dissociation volontaire des dimensions biologiques et sociales de la filiation[485] ne doit pas masquer le fait que l’enfant, lui, hérite de fait de ces deux dimensions et de toute l’histoire qui a abouti à sa conception dans une unique filiation »[486]. Or, comme l’expose Irène Théry : « Par le seul effet de la loi, l’enfant sera interdit de pouvoir se situer complètement dans la chaîne de transmission de la vie humaine, chaîne qui pour lui fut répartie sur deux transmissions complémentaires : par ses parents, (et donc par la filiation) et par son donneur (qui par hypothèse ne s’inscrit pas dans la filiation). En supprimer arbitrairement une, c’est décider de priver la personne d’une partie d’elle-même. »[487].

C’est ce qu’illustrent régulièrement les témoignages de personnes nées de don de gamètes : « Pour nous autres enfants nés par PMA, notre donneur est constitutif du début de notre vie mais fait aussi partie de notre univers mental. »[488].

La connaissance du donneur apparait également importante pour les personnes nées de don dans le rapport avec une troisième génération : « C’est aussi un don d’hérédité que je vais transmettre à mes enfants qui transmettront eux-mêmes cette part d’inconnu » [489].

2.1.3. Le nombre de personnes potentiellement concernées – certains avancent que très peu d’enfants ressentent le besoin d’accéder à l’identité du donneur – n’est pas un argument en soi. Pas plus que leur stigmatisation qui accompagne souvent ces considérations[490].

De fait, les études sont difficiles à réaliser et peu de données sont disponibles sur le nombre potentiel de personnes issues d’une procréation avec tiers donneur souhaitant accéder à l’identité du donneur[491].

« Peu importe que la part des 70 000 enfants conçus avec l’aide d’un tiers donneur et souhaitant accéder à ses origines soit « faible » ou « élevée » – selon quel critère, d’ailleurs ? Une demande existe, dont la satisfaction ne nuirait en rien aux intérêts de ceux qui ne souhaitent pas accéder à leurs origines. » tranche le rapporteur de la mission d’information parlementaire[492].

2.1.4. La revendication d’accès aux origines personnelles est distincte, et même contradictoire, avec une supposée demande d’établir un lien de filiation.

Personne n’a jamais envisagé d’établir une quelconque filiation entre le tiers donneur et les personnes nées de son don. Cette question n’a jamais fait partie du débat sur « l’accès aux origines ». Cela a également été souligné lors des Etats généraux de la bioéthique, concernant l’anonymat du don, « un consensus existe (…) sur la distinction entre un donneur et un « père » » [493].

Dans tous les pays qui ont choisi la levée de l’anonymat des donneurs, celle-ci n’a eu aucune conséquence en matière de filiation.

A cet égard, il convient de rappeler que dans le cadre de l’accouchement dans le secret, l’article L. 147-7 du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la loi du 22 janvier 2002 relative à l'accès aux origines des personnes adoptées et pupilles de l'Etat dispose que

« L'accès d'une personne à ses origines est sans effet sur l'état civil et la filiation. Il ne fait naître ni droit ni obligation au profit ou à la charge de qui que ce soit. »

2.1.5. Pour certains psychanalystes, une ambiguïté de référence identitaire se produirait avec la connaissance de l’identité du donneur : « Le risque d’une levée de l’anonymat serait de créer une attirance fantasmatique constante vers cet ailleurs, qui empêcherait l’ici et le maintenant de la famille nécessaire à l’enfant pour s’originer à partir de lui. Cela favoriserait donc les échecs filiatifs, par une réification du lien biologique. »[494]. Le rapporteur de la mission d’information parlementaire cite également d’autres propos tenus lors des auditions qu’il a menées : « En dissociant la filiation biologique des deux autres piliers, l’AMP – comme l’adoption – requiert un renforcement du pilier psychique, qui doit être « cohérent et crédible si l’on veut pouvoir dépasser le lien du sang ». Un grand nombre de difficultés vient de l’« idéalisation du lien du sang », qui est bien souvent responsable des « échecs filiatifs ». L’anonymat permettrait donc, (…), « de ne pas donner trop de réalité au donneur » »[495].

Or, l’idée que le donneur et le parent seraient « deux figures rivales en compétition pour une seule place à prendre » est exactement ce que dénonce le rapport Filiation, origines, parentalité précité[496]. Dans ce modèle de représentation, détaillent les auteurs : « il n’y a aucune place pour la coexistence des parents et des donneurs. L’hypothèse est toujours celle de l’alternative, de l’exclusivité et de la rivalité. Or c’est justement dans le passage de la logique traditionnelle du « ou » (père ou donneur) à une nouvelle logique du « et » (parents et donneur) que s’inscrivent les jeunes générations qui revendiquent l’accès à leurs origines. »[497].

Il n’y a, en effet, pas d’ambiguïté du côté des personnes nées d’un don de gamètes. « Mon père, c’est celui qui m’a élevé. » témoigne l’une d’entre elles qui a rencontré son donneur « Face à la réalité, le fantasme disparait. »[498]. La « vraie » parentalité résulte bien du lien noué avec ceux qui les ont élevés, aimés, qui ont pourvu à leurs besoins et à leur éducation.

Ainsi que le précise Martine Gross, la distinction entre la dimension biologique – « être né de » – et la filiation instituée – « être fils ou être fille de » est assimilée. L’enfant peut être né grâce à l’intervention d’un donneur mais il reste le fils ou la fille de ceux ou celles qui se sont engagés à être ses parents[499].

D’une manière générale, la plupart des études montrent que les motivations des personnes nées de don à la connaissance de la dimension biologique de leur identité personnelle sont diverses mais qu’il s’agit principalement d’une démarche tendant à mieux se construire personnellement et psychologiquement et non de rechercher un autre père ou une autre mère.

L’accès aux origines n’emporte donc aucun risque que la « filiation » soit réduite à la parenté biologique.

En tout état de cause, comme le note le Comité consultatif national d'éthique dans son avis n° 90[500], si « le social n’est pas réductible au biologique », « le biologique ne peut être exclu du social »[501]. Et il existe un équilibre où ces deux dimensions peuvent être reconnues chacune pour ce qu’elles sont. Ainsi, s’il préconise d’« éviter de réduire plus ou moins consciemment l’enfant conçu, du moins dans les premiers stades de sa vie à sa seule dimension biologique », il recommande également d’ « éviter de survaloriser la projection mentale du désir d’enfant en négligeant la dimension corporelle de la conception » [502].

2.1.6. L’accès à l’identité du tiers donneur ne remet pas en cause le principe d’anonymat du don.

Le don de gamètes ne peut être assimilé aux autres dons d’éléments et produits du corps humain.

D’une part, il n’est pas destiné à soigner la personne ou le couple concerné de son infertilité (il pallie la fonction de reproduction de cette personne ou de ce couple). D’autre part, s’il implique initialement deux parties : le donneur et le receveur, trois catégories de personnes résultent du don car au donneur et au receveur, s’ajoute l’enfant né du don. Ainsi, « Le don d’organes sauve une vie, alors que le don de gamètes en crée une. »[503]. La place de cette troisième personne s’est peu à peu affirmée : « Les années passées depuis l’institutionnalisation de l’insémination artificielle avec tiers donneur ont vu apparaître un nouvel acteur, concerné au premier chef : l’enfant issu de ce don. »[504].

Or, le principe d’anonymat s’exerce entre le donneur et le receveur et l’enfant né du don n’est ni l’un ni l’autre. Il constitue un tiers tant à l’égard du donneur qu’à l’égard du receveur.

Il convient donc de distinguer d’emblée l’anonymat qui concerne les relations entre les donneurs et les receveurs et un droit d’accès à des informations (identifiantes ou non) qui concerne les relations entre les donneurs et les personnes nées du don[505].

A cet égard, comme le note le Comité consultatif national d’éthique dans son avis n° 90 : « le secret du mode de conception n’existe que pour l’enfant, le secret anonymat de la personne ressource concerne parents et enfants. »[506].

Dans son avis n° 126[507], il poursuit son approche : « Il faut distinguer le droit à l’accès à ses origines personnelles (« élément structurant de l’identité des personnes ») et le droit à l’anonymat garanti aux donneurs de sperme, ces deux normes ne devant pas être confondues  ».

Les Etats généraux de la bioéthique ont abouti au même constat : si « le débat persiste quant aux informations qui pourraient être dévoilées et leurs modalités d’accès », « la distinction est clairement faite entre une information non identifiante et le dévoilement de l’identité du donneur, ce qui n’est pas assimilé à la levée de l’anonymat. »[508].

2.1.7. Une autre difficulté est apparue avec le développement et l’accès facilité aux tests génétiques.

Le Conseil national consultatif d’éthique, dans son avis n° 129[509], affirme que « continuer à défendre l’anonymat à tout prix est un leurre à l’ère présente et future de la génomique et du « Big data » ».

Très populaires aux Etats-Unis et de diffusion plus récente en Europe, les tests génétiques « récréatifs » sont utilisés dans l’objectif de connaître les origines géographiques d’ancêtres immigrés et retrouver des parents plus ou moins éloignés avec lesquels il est possible d’entrer en contact. Aujourd’hui, plus de quinze millions de personnes figurent dans les quatre principales bases de données existantes[510] et ce nombre ne cesse de progresser.

Le système juridique français prohibe le recours à de tels tests dont la finalité n’est ni médicale, ni scientifique ni judiciaire (seules voies ouvertes à la réalisation d’examens de génétiques sur le territoire national). Ainsi, l’article 226-28-1du code pénal, dans sa rédaction issue de la loi de bioéthique du 7 juillet 2011 dispose que :

« Le fait, pour une personne, de solliciter l'examen de ses caractéristiques génétiques ou de celles d'un tiers ou l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques en dehors des conditions prévues par la loi est puni de 3 750 € d'amende. »

Néanmoins, le contournement du cadre national est aisé puisqu’il suffit de commander de tels tests via Internet à des sociétés implantées à l’étranger pour recevoir un kit discret à domicile. Après prélèvement de salive, le dispositif est retourné à l’étranger de façon tout aussi discrète. Les coûts sont de moins en moins prohibitifs. 

C’est ce que font certaines personnes nées d’assistance médicale avec tiers donneur en France. Les résultats arrivent quelques semaines plus tard avec l’identification des personnes qui, au sein de la base, partagent des fragments d’ADN avec elles. En consultant l’arbre généalogique de ces dernières, en général accessible sur Internet, et après un travail d’enquête génétique (et de déductions), les personnes nées d’assistance médicale à la procréation parviennent de plus en plus fréquemment à identifier leur donneur. 

D’après plusieurs communications dans la presse[511], une vingtaine de membres de l’association PMAnonyme aurait fait de tels tests. En avril 2019, quinze personnes auraient ainsi retrouvé leur donneur et cinquante-cinq autres personnes issues de ces mêmes donneurs auraient été identifiées.

Les associations[512] qui soutiennent ces démarches considèrent que les chances de retrouver un donneur augmentent chaque jour puisque quotidiennement de nouvelles personnes (de plus en plus souvent en provenance d’Europe y compris de France) effectuent des tests, enrichissent les bases étrangères et permettent l’apparition de nouveaux liens de parenté.

Le Président de l’association Origine prédit la survenue d’« une lame de fond »[513].

Or, les rencontres qui s’organisent entre donneurs et personnes nées du don dans ce cadre se font spontanément et sans accompagnement.

Dans sa contribution aux Etats généraux de la bioéthique[514], le Collège national des gynécologues-obstétriciens français (CNGOF) dénonce ces « dévoilements sauvages » qui ne sont pas évalués. Il considère par ailleurs que tout donneur de gamètes doit désormais, au préalable, être informé que de telles recherches de son identité sont possibles pour un consentement réellement éclairé de la portée de son geste.

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale[515] conclut : « La combinaison d’internet et de la génétique frappe de quasi caducité l’anonymat du donneur, quand bien même le législateur choisirait d’en maintenir strictement le principe. ».

Il apparait nécessaire de prévenir les dérives de l’évolution de ces technologies en encadrant la communication des informations.

2.1.8. Au regard du contexte et de l’ensemble des éléments du débat ci-dessus détaillés, le Gouvernement, s’il entend maintenir le principe d’anonymat et ne permettre ni au donneur ni au receveur de connaître leurs identités respectives au moment du don, pas plus qu’ultérieurement, souhaite compléter le cadre actuel de l’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur en accordant, aux seules personnes conçues par don anonyme, un droit d’accès à des informations relatives au donneur. Il souhaite plus exactement ne pas les priver par la loi de ces informations.

Le droit positif en matière d’anonymat n’est donc pas modifié.

Ainsi, le principe d’anonymat sera maintenu au moment du don (sauf, comme c’est déjà le cas, à l’égard de l’équipe médicale), sera maintenu à l’égard des receveurs (le couple qui porte le projet parental pour éviter toute démarche de sélection par ce couple[516]), sera maintenu à l’égard de la société et finalement à l’égard de toute personne autre que l’enfant qui sera le seul bénéficiaire de ce droit à l’âge de dix-huit ans. Il ne s’agit donc ni de cesser d’anonymiser les gamètes, ni de modifier les procédures de sélection des donneurs en permettant aux parents de les choisir.

Enfin, le Gouvernement ouvre aussi, sans condition, l’accès aux données non identifiantes relatives au donneur aux enfants nés du don dès leur majorité.

2.1.9. Ouvrir un droit n’oblige en rien à en faire usage. Le respect des personnes nées d’une assistance médicale avec tiers donneur qui ne souhaitent pas accéder à l’identité de ce donneur (ou à toute autre information le concernant) sera garanti puisque seules celles qui le souhaiteront pourront effectuer une démarche en ce sens.

Ainsi, les personnes nées de don disposeront d’un droit d’accès qu’elles seront libres d’exercer ou non (« il ne serait aucunement porté atteinte à la liberté de ne pas vouloir connaître ses origines »[517]).

Du reste, aucun des pays qui a reconnu un droit d’accès aux origines n’a imposé la communication à l’enfant de l’identité du donneur.

2.1.10. Cette évolution n’est pas une conséquence directe et nécessaire de l’ouverture de l’accès à l’assistance médicale à la procréation.

Certes, la connaissance de ses origines est un élément structurant de l’identité des personnes et il est raisonnable d’anticiper le fait que les enfants, ou certains d’entre eux, issus d’une assistance médicale à la procréation réalisée au sein d’un couple de femmes ou au bénéfice d’une femme non mariée seront confrontés à un besoin de quête identitaire, plus ou moins pressant.

Mais certains enfants nés de tiers donneur au sein de couples hétérosexuels revendiquent un droit d’accès à l’identité de leur donneur depuis longtemps déjà. Le débat sur ces questions qui a nourri les échanges parlementaires lors des précédentes révisions bioéthiques, et en particulier celle de 2011, ne peut ainsi être occulté.

La décision du Gouvernement d’ouvrir un nouveau droit aux personnes nées de procréation avec tiers donneur ne résulte pas d’un « effet domino »[518].

2.2. Objectifs poursuivis

La règle nouvelle a pour objectif d’ouvrir un nouveau droit aux personnes nées d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur[519] qui, à leur majorité, auront la possibilité, sans condition, d’accéder aux informations non identifiantes relatives au tiers donneur ainsi qu’à l’identité de ce dernier.

3.       Options possibles

Le Gouvernement, dans les options qu’il a retenues, a cherché le meilleur équilibre entre les droits et les intérêts des parties concernées : enfants/personnes nés d’un don, donneurs, parents légaux. Il a mis l’accent sur les droits de la personne conçue qui se trouve dans une position plus vulnérable. Le principe d’anonymat du don est maintenu ainsi qu’une filiation sécurisée pour les parents et pour l’enfant.

3.1. Modalités de mise en œuvre de la réforme concernant les nouveaux[520] tiers donneurs[521]

3.1.1. Trois options principales sont classiquement distinguées pour les nouveaux donneurs.

Schématiquement :

-          Dans la première option, l’accord du donneur à l’accès à son identité deviendrait une condition du don (le candidat qui, d’emblée, ne souhaiterait pas l’accès à son identité, ne pourrait faire un don) ; ce consentement au moment du don vaudrait donc une fois pour toute (le donneur ne serait pas réinterrogé en cas de demande d’accès à son identité) ;

-          Dans la deuxième option, le donneur aurait le choix, au moment du don, entre l’accord ou non à l’accès à son identité (quitte à changer d’avis dans l’intervalle le séparant d’une demande effective) ; 

-          Dans la troisième option, le donneur serait informé, au moment où il effectue le don, de la possibilité de demande d’accès ultérieur à son identité par les enfants qui naîtraient de son don mais son consentement exprès serait en tout état de cause sollicité au moment même de cette éventuelle demande.

 

Le Gouvernement souhaite écarter d’emblée l’hypothèse d’un double système (deuxième option) où les donneurs pourraient choisir, au moment du don, l’accès à leur identité ou non – même en admettant que certains d’entre eux pourraient évoluer favorablement entre leur don et le moment où un enfant né de ce don demanderait l’accès à leur identité (soit au moins dix-huit ans plus tard).

En effet, l’inconvénient principal de cette option serait « de créer ab initio deux catégories de donneurs » avec le risque que les futurs parents revendiquent de pouvoir choisir entre ces deux catégories, comme l’a noté le Conseil d’Etat dans son étude[522].

Un tel double système serait alors source d’une inégalité entre les enfants nés de don selon le choix opéré par leurs parents. Ainsi que le note le Comité consultatif national d'éthique dans son avis n° 90[523] : « L’existence d’enfants informés et non informés en fonction du seul souhait des parents est une question éthique dans la mesure où elle privilégie la liberté des parents et non celle des enfants et où elle créée nécessairement une discrimination. »

La troisième option n’exclut pas l’éventuel refus du donneur à l’accès à son identité au moment de la demande d’une personne née d’un don devenue majeure.. Elle est donc d’emblée inégalitaire pour les personnes nées de don.

Certains considèrent que, dans cette hypothèse, la transmission à la personne née d’un don d’informations non identifiantes pourrait répondre en partie à son attente. Toutefois, les demandeurs souhaitent, sinon pouvoir rencontrer leur donneur, à tout le moins se projeter dans une histoire - ce qui suppose des éléments de contexte qui ne seront pas toujours disponibles.

Dans son étude[524], le Conseil d’Etat considère que, parmi les options qui se présentent, le schéma qui paraît susciter « le moins d’inconvénients » est celui où « le donneur donnerait son consentement au moment de la demande formulée par le premier enfant né de son don. ». En effet dans le cadre de la première option, le consentement irrévocable est délivré au minimum 18 ans avant la demande émanant de la personne née du don.   

La Commission nationale consultative des droits de l’homme[525], le Défenseur des droits[526] et le rapporteur de la mission d’information parlementaire[527] sont favorables à cette option.

Toutefois, si elle apparait comme une solution équilibrée qui prend en compte l’ensemble des intérêts en présence, elle constitue surtout une solution de compromis qui expose la personne née de don à un refus d’accès à l’identité du donneur.

La première option, si elle peut apparaitre radicale, présente l’avantage majeur de placer tous les enfants issus de don sur un pied d’égalité.

Elle pourrait, pour une période transitoire au moins, déstabiliser le don mais, en réalité, toute réforme concernant le don (y compris celle consistant à recueillir l’accord du donneur au moment d’une demande effective d’accès à son identité) aura temporairement un effet sur le don de gamètes comme cela a été observé dans la plupart des pays qui ont modifié leur législation dans ce domaine.

Dans son avis n° 90 précité, le Comité consultatif national d'éthique a rappelé qu’ « Il faut chercher, dans la complexité de chaque type de situation, l’équilibre le plus adapté au bien de l’enfant […] » [528]. Dans son avis n° 129[529], il recommande de favoriser la levée du secret du mode de conception, de respecter l’anonymat entre les donneurs et les receveurs, de permettre que l’enfant ait accès à des informations non identifiantes en maintenant l’anonymat des donneurs et souhaite « que soit rendu possible la levée de l’anonymat des futurs donneurs de sperme, pour les enfants issus de ces dons. »

La rapporteure de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques[530] « estime nécessaire de conditionner la recevabilité de la candidature d’un donneur à son acceptation d’une communication des données identifiantes à la majorité de l’enfant né grâce au don. »[531]

Le Gouvernement retient cette option qui donne acte aux personnes nées d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur de la légitimité de leur demande d’accès à l’identité du donneur et ouvre un droit aux personnes nées de don qui sera effectif en pratique .

3.1.2. Le décès du donneur (entre son don et la demande d’une personne née du don) doit être pris en compte. Dans son étude[532], le Conseil d’Etat précise qu’en cas de refus ou de décès du donneur, « des données non identifiantes pourraient être portées à la connaissance de l’enfant comme le proposent les CECOS. ».

Dans le cadre de l’accouchement dans le secret, l’article L. 147-6 du code de l’action sociale et des familles prévoit que :

« Le conseil communique aux personnes mentionnées au 1° de l'article L. 147-2, après s'être assuré qu'elles maintiennent leur demande, l'identité de la mère de naissance :

(…)

-si la mère est décédée, sous réserve qu'elle n'ait pas exprimé de volonté contraire à l'occasion d'une demande d'accès à la connaissance des origines de l'enfant. Dans ce cas, l'un des membres du conseil ou une personne mandatée par lui prévient la famille de la mère de naissance et lui propose un accompagnement.

Si la mère de naissance a expressément consenti à la levée du secret de son identité ou, en cas de décès de celle-ci, si elle ne s'est pas opposée à ce que son identité soit communiquée après sa mort, le conseil communique à l'enfant qui a fait une demande d'accès à ses origines personnelles l'identité des personnes visées au 3° de l'article L. 147-2.

Le conseil communique aux personnes mentionnées au 1° de l'article L. 147-2, après s'être assuré qu'elles maintiennent leur demande, l'identité du père de naissance :

(…)

-si le père est décédé, sous réserve qu'il n'ait pas exprimé de volonté contraire à l'occasion d'une demande d'accès à la connaissance des origines de l'enfant. Dans ce cas, l'un des membres du conseil ou une personne mandatée par lui prévient la famille du père de naissance et lui propose un accompagnement.

Si le père de naissance a expressément consenti à la levée du secret de son identité ou, en cas de décès de celui-ci, s'il ne s'est pas opposé à ce que son identité soit communiquée après sa mort, le conseil communique à l'enfant qui a fait une demande d'accès à ses origines personnelles l'identité des personnes visées au 3° de l'article L. 147-2.

(…) »

Par cohérence avec l’option retenue par le Gouvernement (le consentement du donneur aura été donné au moment du don) le décès du donneur ne fera pas obstacle à la communication de son identité à la personne née de son don qui en ferait la demande.

3.2. Modalités de mise en œuvre de la réforme concernant les anciens[533] donneurs

A titre liminaire, il convient de préciser que les donneurs dont les gamètes ont été recueillis ou prélevés dans le cadre juridique actuel (ainsi que les couples ayant confié leurs embryons à l’accueil par un autre couple) ne peuvent relever du nouveau cadre envisagé, fût-il aménagé à leur endroit.

Le Conseil d’Etat[534] juge qu’ « il n’est constitutionnellement envisageable de porter une atteinte aux situations nées antérieurement que si la révélation de l’identité du donneur est subordonnée à son consentement exprès. »[535].

Il considère même que le simple fait de réinterroger les anciens donneurs – et ainsi de les informer que leur don a permis la naissance d’un enfant devenu majeur – n’est pas dénué d’impact, alors qu’il leur avait été garanti que leur don n’emporterait aucune conséquence pour eux.

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale reprend à son compte cette analyse[536].

La Commission nationale consultative des droits de l’homme[537] précise de son côté « rien ne s’opposerait à ce que soient sollicitées les personnes ayant réalisé un don sous le régime antérieur de l’anonymat, si un enfant issu d’un don en faisait la demande, en garantissant aux donneurs le droit de refuser la révélation d’informations identifiantes ». Les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques[538], rappelant que les donneurs ont reçu l’assurance de l’anonymat absolu et définitif, considèrent que « La moins mauvaise solution serait vraisemblablement d’interroger le donneur, et son partenaire au sein du couple, pour obtenir l’autorisation de répondre à la demande d’information. ».

Il se dégage donc des travaux préparatoires à la révision bioéthique un consensus sur la possibilité de ne pas exclure les anciens donneurs du dispositif, à condition qu’ils y consentent expressément, ce qui suppose qu’ils soient contactés spécifiquement à cet effet.

Cependant, les centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS) invoquent le manque de moyens pour réaliser des recherches et envoyer des courriers aux anciens donneurs : « Pour notre part, nous jugeons impossible aujourd’hui de retrouver les donneurs de spermatozoïdes des quarante dernières années. Chaque dossier demanderait de procéder à de véritables fouilles archéologiques pour lesquelles nous n’avons pas les moyens matériels et humains. » a déclaré la Présidente de la Fédération nationale des CECOS lors de son audition par l’Assemblée nationale[539].

La question apparait d’ailleurs dépasser celle des moyens : « Cela ne fait pas appel uniquement à la loi de bioéthique, mais aussi au code de déontologie médicale et à notre rôle de médecin. Lorsque nous avons rencontré ces donneurs, nous leur avons fait signer un consentement et nous nous sommes engagés à respecter l’anonymat qui leur était alors garanti. Je ne vois pas comment nous pourrions revenir sur cette parole donnée. Si des changements réglementaires interviennent, ce ne sont assurément pas les professionnels de santé qui recontacteront les donneurs : cette approche fait l’unanimité au sein de la Fédération des CECOS. Si l’Etat demande d’entrer à nouveau en contact avec les anciens donneurs, alors il lui appartiendra de gérer cette démarche. »[540]

Néanmoins, le Gouvernement ne peut exclure que des « anciens » donneurs consentent à ce que leurs données non identifiantes voire leur identité soient transmises aux personnes nées de leur don si ces dernières en faisaient la demande[541].

Il souhaite favoriser l’application d’un dispositif rétroactif où la seule solution véritablement respectueuse de chacun, en tenant compte des développements précédents, lui parait être celle où les anciens donneurs se manifestent, à leur initiative, auprès de la structure spécifique qui sera mise en place (Cf. infra, Commission ad hoc). Ils préciseront alors leur accord à la communication de leurs seules données non identifiantes ou de celles-ci et de leur identité aux personnes nées de leur don qui en feraient la demande.

3.3. Modalités de mise en œuvre de la réforme concernant les bénéficiaires[542]

3.3.1. L’option selon laquelle un organisme, fût-il d’Etat, détenant les informations et l’identité du donneur et celle des enfants nés de son don, adresserait à ces derniers, à leur majorité, un courrier les informant qu’il possède des données relatives aux circonstances de leur naissance leur laissant pour seule liberté de ne pas y donner suite ou de le faire au moment jugé opportun n’est pas retenu.

En effet, cette solution n’apparait pas respectueuse des droits et des intérêts en présence notamment du droit à la vie privée et du droit de ne pas savoir.

3.3.2. Les éventuels bénéficiaires de l’ouverture d’un accès à l’identité du donneur ne seront pas distingués en fonction du type de don (spermatozoïdes, ovocytes ou accueil d’embryons).

Tous sont concernés par la mesure dès qu’ils auront atteint l’âge de dix-huit ans, le Gouvernement retenant l’âge de la majorité pour ouvrir le droit d’accès tant aux informations non identifiantes qu’à l’identité du tiers donneur. En effet, ce délai permet à l’enfant de se construire au sein de sa famille légale et de conserver durant le même temps un strict anonymat au donneur.

Certaines situations s’avèreront plus complexes que d’autres.

Ainsi, en matière d’accueil d’embryons, la personne devenue majeure pourra accéder à l’identité du couple dont il est issu sous réserve de l’accord des deux membres de ce couple. Les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques s’interrogent à ce sujet[543]. Pour autant, il parait difficile, pour des raisons d’égalité, d’écarter ces personnes d’un droit d’accès à leurs origines.

Par ailleurs, les enfants nés d’un don réalisé à l’étranger dans des pays où le don de gamètes est anonyme se heurteront à un obstacle infranchissable.

3.3.3. Le droit d’accès à l’identité du tiers donneur n’est pas un droit de rencontre mais un droit à la connaissance d’une information. Par conséquent, il n’ouvre pas un droit à contacter le tiers-donneur ou à s’immiscer dans la famille de celui-ci (et inversement pour le donneur).

L’article 9 du code civil portant sur le respect de la vie privée aura vocation à s’appliquer pour protéger l’un comme l’autre :

« Chacun a droit au respect de sa vie privée.

« Les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité de la vie privée : ces mesures peuvent, s'il y a urgence, être ordonnées en référé. »

3.3.4 Il ne sera pas nécessaire d’apporter la preuve d’être né d’un don de gamètes ou d’embryon pour saisir la Commission. Certaines personnes peuvent avoir des doutes en ce sens sans révélation de leurs « origines » par leurs parents légaux.

Elles pourront s’adresser à la Commission en fournissant des éléments d’ordre administratif et en expliquant les raisons de leur démarche (les pièces à joindre à une demande adressée à la Commission seront fixées par décret en Conseil d’Etat).

S’il s’avérait toutefois que ces personnes ne soient pas nées d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur (après consultation de l’Agence de la biomédecine par la Commission), le rôle de la Commission prendra fin.

3.4. Modalités de mise en œuvre de la réforme concernant la communication des données

3.4.1. Le Gouvernement opte pour une liste de données non identifiantes qui seront renseignées par le donneur au moment du don.

La loi précise les principales rubriques de données concernées, outre l’âge du donneur : état général tel qu’il le décrit, caractéristiques physiques, situation familiale et professionnelle, pays de naissance, motivations du don.

Les informations non identifiantes seront fixées plus précisément par voie réglementaire (exemples : taille, poids, couleur des yeux, des cheveux, de la peau, signes particuliers, nombre et sexe de ses enfants, formation, profession, centres d’intérêt, …).

La Fédération des centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS), si elle souhaite maintenir le principe d’anonymat du don de gamètes, a évoqué dans le contexte des Etats généraux de la bioéthique[544] la possibilité de transmettre à l’enfant à sa majorité des données non identifiantes, sous forme d’une lettre du donneur, dans le but de l’« humaniser » et afin qu’il ne soit plus « une image abstraite bienfaisante mais un être humain ».

La proposition a été critiquée par le Groupe d’études sur le don d’ovocytes[545] dans sa contribution aux mêmes Etats généraux[546] : « les CECOS proposent « de transmettre à l’enfant une « lettre de motivation », lettre anonyme, dont le contenu ne sera pas connu et qui pourrait être préjudiciable à l’enfant et/ou à ses parents ; on imagine pour l’enfant dans ces conditions les interrogations voire les souffrances qu’une telle lettre à laquelle il lui sera interdit de répondre peut générer. On aura introduit un tiers dans la construction de la famille en sortant de l’anonymat sans donner véritablement l’accès à l’identité du donneur ».

Cette option envisagée par la Fédération des CECOS vaut surtout comme alternative à l’accès à l’identité du donneur. Le Gouvernement ayant fait le choix d’un accès pour tous les enfants, ne retient donc pas cette alternative.

Les données non identifiantes relatives au donneur (et disponibles) seront obtenues par les personnes issues du don à leur majorité par l’intermédiaire de la Commission ad hoc (Cf. infra)

3.4.2. La création d’une structure dédiée mise en place par l’Etat s’impose pour la transmission des données non identifiantes et identifiantes aux demandeurs, pour accompagner les demandeurs comme les donneurs et, le cas échéant, pour les mettre en relation.

Le rapporteur de la mission d’information parlementaire, évoquant les modalités d’accès aux informations relatives au donneur, détaille : « Dans son étude, le Conseil d’État écarte l’hypothèse de confier cette mission aux CECOS. Ce point de vue est partagé par les parlementaires de la mission qui estiment nécessaire d’investir de ces attributions une instance spécifique, sur le modèle de ce qui existe aujourd’hui pour la levée de l’anonymat entourant l’adoption. Afin d’éviter toute rupture d’égalité, de faciliter les circuits administratifs et de permettre l’accès effectif à l’information, cette instance doit être unique, établie au niveau national. ».[547]

Il envisage alors deux hypothèses : la création d’une Commission ad hoc ou l’élargissement des missions de l’actuel Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP), qui est aujourd’hui le point d’accès aux origines personnelles des personnes nées dans le secret (sous X).

La Commission nationale consultative des droits de l’homme[548] note pour sa part : « Le CNAOP, fort de son expérience développée depuis 2002 en matière d’adoption, pourrait constituer un intermédiaire entre un enfant, désireux d’en savoir plus sur l’identité de son donneur, et ce dernier. Les enfants issus d’un don auraient ainsi la possibilité, en s’adressant au CNAOP, d’accéder à des informations relatives à leur donneur, tout en préservant, le cas échéant, le droit du donneur de ne pas acquiescer à la demande de levée de l’anonymat. »

3.4.3. Dans une première approche, le Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP), créé par la loi du 22 janvier 2002, pourrait sembler légitime pour remplir ce rôle dans la mesure où son objectif essentiel est, en effet, de faciliter l’accès aux origines personnelles.

Le dispositif s’adresse aux personnes pupilles de l’Etat ou adoptées qui ne connaissent pas l’identité de leurs parents de naissance car ceux-ci ont demandé la préservation du secret de leur identité lors de l’accouchement (nés sous X) ou lorsqu’ils ont confié l’enfant à un service départemental de l’aide sociale à l’enfance ou à un organisme autorisé pour l’adoption. Il s’adresse également aux parents de naissance qui, ayant demandé le secret de leur identité, peuvent à tout moment s’adresser au CNAOP pour lever ce secret ou, n’ayant donné aucun renseignement, décident de déclarer leur identité. Cette mission est assurée en liaison avec les départements, les collectivités d’outre-mer et les organismes autorisés pour l’adoption.

Après examen attentif, il s’avère cependant que le CNAOP intervient dans un contexte qui s’accorde mal avec la spécificité de la situation du don de gamètes.  La création d’une Commission ad hoc s’impose donc car elle ne peut être assimilée au CANOP même si elle peut tirer profit de son expérience.

En effet, la  situation tant juridique que psychologique des enfants issus d’un don de gamètes et de ceux qui ont été abandonnés ou confiés à leur naissance est radicalement différente.

De même, le « don » de gamètes, conçu comme un acte solidaire et responsable, ne place, en aucun cas, le donneur dans une situation de dilemme ou de détresse assimilable à celle qui caractérise l’abandon d’enfant.

Confier les missions propres au don de gamètes au CNAOP créerait un parallélisme infondé entre la situation des enfants nés sous X ou abandonnés et celle des enfants nés d’une assistante médicale à la procréation avec tiers donneur.

Des effets délétères pourraient en résulter tant pour les donneurs (en conférant une portée au don qui n’est pas légitime et qui peut constituer un frein à leur démarche) que pour les enfants nés d’AMP avec tiers donneur (en suggérant que leur situation est identique à celles des enfants relevant du CNAOP avec le risque de générer, par cet amalgame, un ressenti de « manque » et, par voie de conséquence, une souffrance inutile).

Enfin, du fait du rapprochement avec les problématiques spécifiques au don de gamètes et à l’assistance médicale à la procréation, la procédure de l’accouchement sous X pourrait s’en trouver déstabilisée.

Il convient également de préciser, même si l’argument n’est pas sur le même plan, que la composition actuelle du CNAOP ne lui permettrait pas d’examiner avec pertinence les demandes des enfants issus d’un don de gamètes. La spécificité de ces dernières demandes légitime la présence de représentants différents (par exemples : professionnels exerçant dans une structure autorisée à pratiquer les activités d’assistante médicale à la procréation relatives aux gamètes en vue de don, représentants de l’Agence de la biomédecine, représentants d’amodiations concernées, etc.). Le CNAOP devrait ainsi, pour s’adapter aux nouvelles problématiques de l’assistance médicale à la procréation, se scinder en deux commissions de composition distincte. Un tel fonctionnement générerait des coûts et limiterait de facto l’intérêt économique que représenterait la fusion des deux institutions.

3.4.4. A titre indicatif, des données relatives à l’activité du CNAOP sont précisées. Elles ne peuvent toutefois permettre de tirer des conclusions sur le nombre effectif de demandes qui seront adressés à la Commission ad hoc par des enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur.

En 2016 (dernières données disponibles), 201 personnes ont eu accès à l’identité d’au moins un de leurs parents de naissance par l’intermédiaire du CNAOP. Depuis 2002, 2 496 personnes ont eu accès à l’identité d’au moins un de leurs parents de naissance par l’intermédiaire du CNAOP.

En 2016 :

-          547 nouvelles demandes recevables ont été enregistrées

-          548 dossiers ont fait l’objet d’une clôture

 

Depuis 2002 :

-          7804 nouvelles demandes recevables ont été enregistrées

-          7940 dossiers ont fait l’objet d’une clôture

 

3.4.5. L’association Origine[549] propose la mise en place d’une « plateforme informatique d'échange anonyme ». Elle s’adresserait aux personnes conçues par tiers donneur qui souhaiteraient contacter leur(s) donneur(s) et les personnes conçues avec le même donneur. Sa vocation serait d’accompagner ces personnes dans l’accès à la connaissance de leurs origines. La gestion de cette plate-forme serait confiée à une « équipe pluridisciplinaire dédiée »[550] qui constituerait un institut dédié à l’accès aux origines.

Si les missions et les objectifs de la plate-forme et de l’organe pluridisciplinaire seront remplis par la Commission ad hoc et la base de données relative aux donneurs et aux dons hébergée et gérée par l’Agence de la biomédecine (à l’exception de la mise en relation des personnes issues d’un même donneur[551]), deux inconvénients majeurs apparaissent dans le dispositif envisagé par les associations :

-          « Les anciens donneurs seront recherchés et contactés de manière confidentielle » afin notamment de leur proposer de s’inscrire sur la plate-forme ; cette solution n’apparait pas protectrice de la vie privée des anciens donneurs (le Gouvernement fait le choix d’enregistrer leur accord à la suite d’une démarche volontaire de leur part) ;

-          « Pour établir les correspondances entre le(s) donneur(se)s et les individu(s) issu(s) de leurs dons et identifier les personnes issues du même donneur, un test ADN sera expédié à l’adresse renseignée par les volontaires qui s'inscriront sur la plateforme sous un pseudonyme. (…) Le test ADN sera envoyé au laboratoire et analysé » : le test mentionné est un test d’identification d’une personne par ses empreintes génétiques qui relève aujourd’hui de l’article 16-11 du code civil et de finalités précises[552] qui ne recouvrent pas la situation d’espèce ; il ne saurait être envisagé de légaliser un tel test génétique dans ces circonstances au regard des risques encourus (le Gouvernement prévoit d’établir le lien entre donneur et enfants à partir des données qui seront conservées, dans des conditions sûres, par l’Agence de la biomédecine et, pour les anciens donneurs, par les centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS)).

En outre, l’association prévoit la communication, aux personnes nées du don, de l’identité du donneur lorsque ce dernier est décédé y compris s’il s’agit d’un ancien donneur et en dépit de l’absence de consentement de ce dernier. 

Pour ces raisons, le Gouvernement n’a pas retenu la mise en place d’une telle plate-forme.

3.4.6. La réforme pourra être mise en œuvre dans des conditions sécurisées grâce à la mise en place, en parallèle, d’un fichier national des donneurs, des dons et des enfants nés de ces dons sous la responsabilité de l’Agence de la biomédecine. Ce dispositif est détaillé à l’article 3.2.

 

La Commission ad hoc sera saisie de demandes d’accès à des données non identifiantes relatives au tiers donneur et de demandes d’accès à l’identité du tiers donneur par des personnes nées d’assistance médicale à la procréation avec don. Elle sollicitera l’Agence de la biomédecine qui conservera ces données[553].

 

La Commission informera le tiers donneur, dans des conditions de nature à préserver son anonymat, de la démarche initiée par une personne majeure née de son don.

 

La Commission fera droit la demande qui lui a été soumise.

 

Le cas échéant, elle mettra en œuvre les moyens nécessaires pour retrouver les tiers donneurs afin de solliciter leur consentement et de le recueillir.

 

La commission se prononcera également, à la demande d’un médecin, sur le caractère non identifiant de certaines données préalablement à leur recueil.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

4.1.1.      Impacts sur l’ordre juridique interne

La présente mesure créera un chapitre III au Titre IV du Livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique.

Ce chapitre comportera neuf articles qui permettent notamment

-          de définir le tiers donneur ;

-          de poser le principe d’accès des enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur à leur majorité aux informations non identifiantes relatives au donneur, d’une part, et à l’identité de ce donneur, d’autre part  ;

-          de poser le principe d’un consentement exprès du donneur à l’accès à son identité préalablement au don  ;

-          de fixer les catégories de données non identifiantes ;

-          de préciser que le médecin recueille l’identité du donneur au moment du don et celle de chaque enfant né de ce donneur ;

-          de préciser que ces données sont transmises et conservées par l’Agence de la biomédecine ;

-          de préciser les modalités d’accès par l’enfant devenu majeur aux données non identifiantes et à l’identité du tiers donneur ;

-          de fixer la composition et les missions de la Commission ad hoc ;

-          de détailler les missions de cette Commission ;

-          de préciser que l’Agence de la biomédecine est tenue de communiquer les données qu’elle détient à la Commission sur demande de celle-ci.

Par ailleurs, la présente mesure créera un nouvel article 16-8-1 au Chapitre II du Titre Ier du Livre Ier du code civil.

La mesure modifiera également l’article 511-10 du code pénal (et par conséquent l’article L.1273-3 du code de la santé publique) pour exclure de l’incrimination pénale prévue par ces articles le cas que prévoient les dispositions de l’article 16-8-1 du code civil.

La mesure introduira un nouveau rôle à l’Agence de la biomédecine en ajoutant un 13° à l’article L. 1418-1 du code de la santé publique qui précise que l’agence sera chargée de gérer les traitements de données relatifs aux tiers donneurs, à leurs dons et aux enfants nés de ces dons, à l’exclusion des données médicales initiales ou recueillies ultérieurement au don.

Par ailleurs, la mesure conduira à préciser à l’article L. 1244-2 du code de la santé publique ainsi qu’à celui qui concerne les dons (« accueils ») d’embryons (article L. 2141-5 du code de la santé publique) que le tiers donneur est dûment informé des dispositions législatives et réglementaires relatives au don de gamètes et notamment du dispositif d’accès aux données non identifiantes et à l’identité du tiers donneur.

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

Lors de sa dernière session plénière, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté sa Recommandation[554],2156 (2019) – « Don anonyme de sperme et d’ovocytes : trouver un équilibre entre les droits des parents, des donneurs et des enfants » qui a été transmis au Comité des ministres[555]. Le Comité des ministres devra décider si ces recommandations doivent à terme devenir juridiquement contraignantes.

Le rapport adossé au projet de recommandations souligne que le principe d’anonymat des donneurs de gamètes est aujourd’hui remis en cause, car il pose un problème de santé publique (la personne conçue à l’issue d’un don ne peut être informée des antécédents médicaux de son donneur, et il existe des risques de consanguinité) ; il soulève la question éthique de la place de la personne née d’un don (l’accès à l’identité du donneur est un aspect essentiel de la construction identitaire), et ce principe devient obsolète en raison du développement des technologies génétiques (qui permettent d’avoir facilement accès à ses données génétiques et donc de retrouver son donneur).

La commission souligne toutefois que le droit de connaître ses origines doit être en équilibre avec les intérêts des autres parties impliquées (notamment des donneurs et des parents légaux).

Selon les parlementaires, l’identité du donneur et les informations sur les circonstances de la naissance ne devraient être révélées qu’au 16ème ou 18ème anniversaire de l’enfant (de préférence par l’État), et non pas au moment du don à la famille. La commission a aussi souligné que la levée de l'anonymat ne devrait avoir aucune conséquence juridique sur la filiation. S’agissant de dons faits dans le passé, la commission estime qu’il ne faut pas lever cet anonymat de manière rétroactive, sauf pour raisons médicales ou lorsque le donneur y a consenti.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

Il est difficile de prévoir combien de personnes se manifesteront auprès de la Commission ad hoc. En effet, le nombre de demandes susceptibles d’être adressées à cette commission, nombre qui conditionne en partie l’économie du dispositif, ne peut être raisonnablement approché.

D’une part, il n’est pas possible de connaître précisément le nombre d’enfants issus de techniques recourant à des gamètes issus de don (les associations estiment qu’en France, environ 70 000 enfants sont nés d’une insémination artificielle avec tiers donneur à ce jour) et, d’autre part, la part des enfants issus de don qui saisiront effectivement la Commission d’une demande d’accès à des informations relatives au donneur relève de l’inconnu.

Les personnes qui relèveront de plein droit du nouveau dispositif (personnes conçues à partir d’une date postérieure à la promulgation de la loi et qui sera fixée par voie réglementaire) ne pourront se manifester que dix-huit plus tard (au minimum).

Les personnes nées d’un « ancien » donneur et qui souhaiteront accéder à son identité sont difficiles à estimer. Si certains considèrent que l’immense majorité des 70 000 personnes conçues par don en France ne sont pas informées de leur mode de conception, aucune étude scientifique ne permet de l’étayer (Cf. point 4.4.2). L’association PMAnonyme recense, quant à elle, 169 personnes conçues par dons qui ont contacté ou adhéré à l’association et qui partagent ses objectifs.

Aujourd’hui, dans le domaine de l’accouchement dans le secret, le coût de fonctionnement de la Commission d’accès aux origines personnelles (CNAOP) est estimé à 30 323 € (dont 2 333 € de frais de déplacement des 17 membres incluant son Président et 27 990 € correspondant à un ETP affecté à la préparation des séances plénières)[556].

4.3.  Impacts sociaux

4.3.1. Si des rumeurs persistantes prévoient une baisse du nombre de donneurs en lien avec la présente mesure[557], ce risque se heurte à la réalité des faits.

En effet, une des principales controverses concernant la levée de l’anonymat est que celle-ci engendrerait une diminution du nombre de dons. Or, si une baisse transitoire du nombre de donneurs de gamètes a pu être observée juste après le changement législatif en question, la tendance semble ensuite s’inverser pour repartir à la hausse et dépasser les chiffres initiaux. Ce fut notamment le cas en Suède[558], en Australie[559], en Finlande[560] ou encore au Royaume-Uni[561].

En Suède, alors qu’une enquête réalisée peu après la levée de l’anonymat en 1984 révélait des chiffres alarmants, le nombre de donneurs devait finalement augmenter de 6% l’année suivant la mise en place du nouveau dispositif[562].

Au Royaume-Uni, les chiffres publiés par la Human Fertilisation and Embryology Authority montrent que, après une diminution transitoire entre 2005 et 2006, le nombre de donneurs a ensuite globalement augmenté. Entre 2005 et 2008, le nombre de donneurs avait déjà significativement augmenté et, au final, ce nombre a doublé depuis l’instauration de la nouvelle loi[563],[564].

Ainsi, si la levée de l’anonymat est susceptible d’avoir un impact initial sur le nombre de dons, il apparaît néanmoins exagéré de prévoir une baisse radicale à moyen et à long terme.

C’est également ce que confirme Mme Petra de Sutter dans son rapport : « L’argument systématiquement invoqué par les cliniques pratiquant les IAD est celui d’une baisse du nombre de donneurs en cas de levée de l’anonymat des dons. Cependant, les statistiques ne permettent pas de confirmer cet argument. (…) Les différentes études conduites permettent de constater une modification sensible du profil des donneurs, ceux-ci étant généralement plus âgés et ayant mieux mûri leur geste, et non une réduction de leur nombre. »[565].

Enfin, « les alarmes sur la chute éventuelle des dons de sperme qui pèsent si lourdement sur le débat français, portent non pas sur plusieurs milliers de personnes, comme on l’imagine souvent, mais sur de très petits chiffres : moins de 500 donneurs par an, en France comme au Royaume-Uni.  Sur de si petits effectifs, il est facile de comprendre que dans un pays de 66 millions d’habitants, la moindre campagne d’appel au don, si elle est bien faite, aura des résultats immédiats. » [566].

Par ailleurs, le Conseil consultatif national d’éthique évoque certains risques « un changement dans les motivations du don (qui existe déjà) et une modification du profil des donneurs ; un risque de tentation de recours au système marchand »[567].

Le Gouvernement n’a nullement l’intention de remettre en cause la gratuité du don des éléments du corps humain. Et il convient de noter que l’anonymat n’existe pas pour le donneur vivant d’organes (donneur et receveur se connaissent). Pour autant, contrairement aux craintes qui avaient été exprimées, l’absence d’anonymat n’a généré ni trafic ni rémunération illicite.

4.3.2. Les anciens donneurs pourront se manifester, à leur initiative, auprès de la Commission ad hoc.

Cela n’entraînera aucune surcharge de travail pour les centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS) qui n’auront pas à rechercher les anciens donneurs pour recueillir leur intention et leur éventuel consentement à la communication de donnés non identifiantes ou de leur identité aux personnes nées de leur don.

Le stock de gamètes (obtenus dans le cadre de la législation antérieure) sera utilisé avant une date suivant la promulgation de la loi qui sera fixée par voie réglementaire.

4.3.3. Un « effet domino » est peu probable sur les autres dons en raison de la spécificité des cellules reproductrices.

4.4. Impacts sur les particuliers

4.4.1. La mesure crée des droits nouveaux au bénéfice des personnes nées d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur. Elles pourront, si elles le souhaitent, obtenir des informations non identifiantes et des données identifiantes sur le tiers donneur  soit parce qu’elles relèveront du nouveau dispositif (personnes conçues après la promulgation de la loi) soit parce qu’issues d’anciens donneurs, ces derniers se seront manifestés auprès de la commission mise en place.

4.4.2. Il semblerait qu’une grande partie des enfants nés avec tiers donneur ne connaissent pas leur modalité de conception. « Sur les 70 000 personnes ainsi nées en France, 64 000 l’ignoreraient. »[568]

Pour des raisons évidentes, aucune étude n’a jamais été menée sur de grandes cohortes, en France comme à l’étranger, pour vérifier directement auprès des enfants la réalité de cette information.

En tout état de cause, faute de pouvoir l’étayer scientifiquement, il est difficile de se prononcer sur un risque d’aggravation de l’occultation des circonstances de la conception (qui supposerait déjà de connaitre sa part de réalité actuelle). Il est en revanche certain que cette question est agitée comme une menace par ceux qui s’opposent à toute évolution du cadre actuel de l’accès aux origines alors que ce supposé argument ne peut être pris en compte isolément et n’est donc pas décisif.

Les résultats de la première enquête nationale suédoise (qui date de janvier 2011) sur l’attitude des parents receveurs de dons (de sperme, d’ovocytes) à l’égard du secret sur le mode de conception de l’enfant montrent que « 90% des parents receveurs de dons interrogés déclarent qu’ils informeront l’enfant de son mode de conception, précisant qu’ils considèrent cela comme un devoir élémentaire « d’honnêteté » à son égard, et de respect de ses « droits » »[569] (les parents interrogés - échantillon représentatif de 564 personnes- reçoivent les gamètes qu’on leur propose dans les cliniques de fertilité agréées, et sont informés de la loi suédoise qui autorise l’accès à l’identité du donneur).

5.       Consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

La mesure repose en partie sur la mise en place de traitements de données relatifs aux donneurs et aux dons qui fait l’objet d’une mesure spécifique  dans la présente étude d’impact. La consultation de la CNIL et celle de l’Agence de la biomédecine sont mentionnées pour cette mesure spécifique. 

Le conseil national de la protection de l’enfance a également été consulté.

5.2.                       Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Des dispositions transitoires permettent d’organiser le passage vers la réforme.

Cf. schéma récapitulatif.

-          Les dispositions des articles L. 2141-5, L. 1244-2, L. 2143-3 et L. 2143-5, L. 2143-7 et L. 2143-8 (consentement du tiers donneur, données recueillies par les CECOS dans le cadre de la réforme au moment du don, modalités d’accès aux données non identifiantes et à l’identité du donneur, installation de la Commission ad hoc, obligation de communication des données à la Commission par l’Agence de la biomédecine) entrent en vigueur le premier jour du treizième mois suivant la promulgation de la loi ;

-          Les dispositions des articles L. 2134-4 (conservation des données) et L. 2143-6 (missions de la Commission) entrent en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 13ème jour suivant la promulgation de la loi ;

-          La réforme s’applique, quand elles seront majeures, aux personnes conçues par assistance médicale à la procréation avec tiers donneur à compter d’une date suivant la promulgation de la présente loi qui sera fixée par voie réglementaire ;

-          Les tiers donneurs dont les embryons ou les gamètes sont utilisés avant cette date (anciens donneurs) peuvent manifester auprès de la Commission leur accord à la transmission aux personnes majeures nées de leur don de leurs données non identifiantes d’ores et déjà détenues par les CECOS  ;

-          Les personnes majeures, conçues par assistance médicale à la procréation avec tiers donneur à partir des embryons ou des gamètes utilisés jusqu’à la date qui sera fixée par voie réglementaire (personnes nées des dons des anciens donneurs), peuvent se manifester, si elles le souhaitent, auprès de la Commission pour demander l’accès aux données non identifiantes et, le cas échéant, à l’identité de leur tiers donneur ;

-          La Commission fait droit à leur demande si le tiers donneur concerné s’est manifesté auprès de la Commission  ;

-          Les CECOS sont tenus de communiquer à la Commission sur sa demande les données qu’ils détiennent nécessaires à l’exercice des missions de celles-ci ;

-          Le point de départ des demandes des personnes nées des dons des anciens donneurs qui souhaitent accéder aux données non identifiantes et à l’identité de leur tiers donneur correspond au premier jour du treizième mois suivant la promulgation de la loi.


1

 



5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

5.2.3.      Textes d’application

Plusieurs décrets en Conseil d’Etat sont prévus :

-          Décret fixant les modalités de recueil de l’identité des enfants (modalités permettant au médecin du CECOS d’être destinataire des informations relatives à la grossesse résultant d’une assistance médicale à la procréation avec tiers donneur et à son issue) ;

-          Décret fixant la nature des données non identifiantes ;

-          Décret fixant la durée « limitée et adéquate et qui ne peut être inférieure à quatre-vingt ans » de conservation des données relatives aux donneurs, aux dons et aux enfants nés de ces dons ;

-          Décret fixant la nature des pièces à joindre à la demande d’une personne née de don ;

-          Décret fixant la composition de la Commission ad hoc.

Un décret simple fixera la date à partir de laquelle ne pourront être utilisés pour toute insémination et toute tentative d’assistance médicale à la procréation que les embryons proposés à l’accueil et les gamètes issus de dons réalisés à compter du premier jour du treizième mois à compter de la promulgation de la loi.

 


Article 3 Gérer au niveau national les traitements de données relatifs aux tiers donneurs, à leurs dons et aux enfants nés de ces dons

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1. Le principe du recueil d’un consentement exprès du donneur et sa révocation sont prévus par la loi. Le premier alinéa de l’article L. 1244-2 du code de la santé publique dispose ainsi que :

« (…) Le consentement des donneurs et, s'ils font partie d'un couple, celui de l'autre membre du couple sont recueillis par écrit et peuvent être révoqués à tout moment jusqu'à l'utilisation des gamètes. »

Il en va de même pour les couples confiant leurs embryons à l’accueil par un autre couple[570].

1.1.2. Le consentement à la conservation des données recueillies au moment du don ainsi que les modalités de conservation de ces données sont précisés au niveau réglementaire.

Le donneur de gamètes consent à la conservation de son « dossier »[571], les données relatives au donneur sont conservées dans des conditions strictes par les structures autorisées par les agences régionales de santé à mettre en œuvre les activités relatives au don de gamètes et seuls certains praticiens peuvent avoir accès au dossier du donneur :

« Ce dossier est conservé pour une durée minimale de quarante ans et quel que soit son support sous forme anonyme. L'archivage est effectué dans des conditions garantissant la confidentialité.

Le donneur doit, avant le recueil ou le prélèvement des gamètes, donner expressément son consentement à la conservation de ce dossier.

Les informations touchant à l'identité des donneurs, à l'identification des enfants nés et aux liens biologiques existant entre eux sont conservées, quel que soit le support, de manière à garantir strictement leur confidentialité. Seuls les praticiens[572] répondant aux critères mentionnés aux articles R. 2142-10 et R. 2142-11 pour exercer les activités mentionnées au premier alinéa ont accès à ces informations. » (11ème, 12ème et 13ème alinéa de l’article R. 1244-5 du code de la santé publique).

Il en va de même pour les couples confiant leurs embryons à l’accueil par un autre couple[573].

1.1.3. Le législateur, lors de la révision bioéthique du 7 juillet 2011, a cependant complété l’article L. 1244-6 du code de la santé publique par l’ajout de trois alinéas renvoyant, sans que cela n’ait rien de spécifique, aux prérogatives de la commission nationale de l’informatique et des libertés en matière de contrôle des traitements de données à caractère personnel et aux mesures prévues en cas de non-respect de ce cadre :

« En application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, toute personne, autorité publique, service ou organisme, et notamment les centres d'études et de conservation des œufs et du sperme humains, qui recueille et conserve des données à caractère personnel relatives aux donneurs de gamètes ou d'embryons, aux couples receveurs ou aux personnes issues des techniques d'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur est soumis au contrôle de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

Celle-ci contrôle les conditions dans lesquelles est effectué le recueil des données à caractère personnel à l'occasion des procréations médicalement assistées. La mise en place de tout traitement automatisé concernant ces données est soumise au respect des modalités de déclarations et d'autorisations préalables selon le type de données conservées, en application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée. La commission peut réaliser des contrôles sur place afin de s'assurer de la bonne conservation de ces données, quel qu'en soit le support.

En cas de non-respect de cette même loi, elle peut mettre en œuvre les mesures prévues aux articles 45 à 52 de ladite loi. »

Le rapport de la Commission spéciale de l’Assemblé nationale en première lecture[574] montre que le rapporteur entendait ainsi combler « un vide juridique » pouvant « potentiellement mettre en danger l’anonymat des donneurs et crée inutilement un sentiment de défiance à l’égard des CECOS ». Il précisait : « bien qu’il s’agisse de données à caractère personnel, la commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) n’en a jamais contrôlé l’utilisation. »

1.1.4. L’article L. 1244-4 du code de la santé publique dispose que :

« Le recours aux gamètes d'un même donneur ne peut délibérément conduire à la naissance de plus de dix enfants. »

Cette limite permet de contrôler le risque d’une élévation du niveau de consanguinité consécutive aux unions entre apparentés et sa conséquence l’augmentation de l’incidence des maladies héréditaires à transmission récessive[575]. Elle permet également de limiter le risque d’unions entre individus ignorant le lien génétique qui les relie à un même donneur[576].

Il n’existe pas actuellement de fichier national de données relatives aux donneurs, aux dons et aux enfants nés de ces dons. Ainsi, la Fédération française des centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS), structure associative qui regroupe au sein d’un réseau les différents CECOS du territoire national, si elle constitue un réseau national dans le domaine de l’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur et de la préservation de la fertilité (en jouant notamment un rôle dans l’harmonisation des pratiques cliniques et biologiques, l’information, la formation des professionnels de santé et le développement des projets de recherche dans les domaines concernés) n’est pas impliquée dans la conservation et la gestion des données relatives aux donneurs et aux dons de gamètes[577].

1.2. Éléments de droit comparé

L’Agence de la biomédecine indique que l’introduction dans certains États de dispositions législatives ou réglementaires levant l’anonymat des donneurs de gamètes a conduit à de nombreux changements dans la pratique du don et recommandations sur une éventuelle limitation du nombre de naissances pouvant être conduites avec les gamètes d’un même donneur[578].

Elle précise également que les limites introduites dans les législations sont calculées tantôt en nombre d’enfants nés suite à un don (par exemples, 6 enfants en Espagne, 8 en Suisse, 25 aux Etats-Unis), tantôt en nombre de familles pouvant être aidées par un seul donneur (par exemples, 2 familles en Slovénie, 3 en Autriche, 5 en Finlande, 6 en Belgique, 10 au Royaume-Uni).

Au Danemark, le nombre d’enfants est limité à 12 mais un nouveau don reste possible au-delà pour une famille qui aurait déjà des enfants nés de ce don. En Grèce, le nombre d’enfants issus des gamètes d’un même donneur ne doit pas être supérieur à 10 mais cette limite peut également être dépassée pour une naissance chez un couple qui aurait déjà eu un enfant issu des gamètes de ce donneur. En Allemagne, « Le médecin veillera à ce qu’un même donneur ne donne pas lieu à plus de dix grossesses » (Lignes directrices de l’Ordre fédéral des médecins). En Suède, il n’est pas recommandé qu’un même donneur conçoive plus de 12 enfants (2 enfants dans 6 familles)[579].

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1. Lors de la révision bioéthique du 7 juillet 2011, le rapporteur de la Commission spéciale de l’Assemblé nationale en première lecture notait que « les conditions de conservation des informations relatives aux donneurs par les CECOS ne sont pas satisfaisantes. Les auditions réalisées par la commission spéciale l’ont montré et il est apparu nécessaire de mieux les encadrer. (…) De fait, il semble que les conditions de conservation des informations relatives aux donneurs soient variables selon les CECOS. »[580].

S’il a souhaité préciser les conditions de conservation des informations relatives aux donneurs de gamètes par les centres d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains (CECOS), et à prévoir leur contrôle par la commission nationale informatique et libertés (CNIL), les débats montrent que le sujet relatif à la traçabilité des dons de gamètes et des enfants nés grâce à ces dons n’a pas été abordé.

Cette traçabilité relève également des CECOS[581].

La Fédération des CECOS, qui (ainsi que cela a été précisé au point cadre actuel) ne centralise pas les données relatives aux donneurs, aurait élaboré un système permettant aux centres de repérer les éventuels donneurs ayant effectué un don dans plusieurs centres mais ce système reste « artisanal » et fait également l’objet de critiques.

L’association PMAnonyme indique ainsi, dans le cadre de sa contribution[582] aux Etats généraux de la bioéthique, que « L’actuelle limite de 10 enfants par donneur n’a aucune effectivité qu’il n’existe aucune coordination entre les différents CECOS pour vérifier si un donneur n’a pas déjà donné dans un autre centre ».

Le phénomène de « serials donneurs »[583] existe et la seule présence de limites quantitatives aux enfants nés d’un même donneur ne permet pas de s’en prémunir.

2.1.2. Si le débat sur l’« accès aux origines » a accentué la problématique de la gestion des données relatives au donneur du fait qu’elle repose actuellement sur les CECOS sans fichier centralisé, la question existe indépendamment de ce débat.

La Présidente de la Fédération des CECOS, lors de son audition par la mission d’information de l’Assemblée nationale a ainsi précisé : « Nous souhaitons que soit constitué un registre national des donneurs et plus largement un registre national du don, géré en dehors des CECOS, par une entité indépendante qui se chargerait de la collecte des données identifiantes et non identifiantes. Les données médicales du don resteraient gérées par les équipes médicales. J’insiste ici sur le fait que les professionnels des CECOS ne souhaitent plus être les seuls garants de ces données identifiantes et non identifiantes et demandent que leurs activités soient recentrées sur le soin, pour une meilleure prise en charge des donneurs, des couples receveurs et des enfants issus du don (…) Cela permettrait notamment de respecter le nombre de ponctions par donneuses et d’éviter les donneuses itinérantes, qui pourraient être indirectement payées par les couples. Nous n’avons à l’heure actuelle aucun moyen pour le vérifier. »[584]

Elle a ainsi confirmé les souhaits exprimés par la Fédération des CECOS lors de sa contribution aux Etats généraux de la bioéthique[585] :

-          Mettre en place un registre national des donneurs de gamètes et d'embryons géré par un organisme d’Etat indépendant des centres mettant en œuvre le don

-          Assurer le respect des dispositions règlementaires concernant la limitation du nombre de naissances par donneur, le nombre de dons par donneuse, le suivi des donneuses au travers de ce registre

-          Ne plus faire reposer la gestion de l'anonymat des donneurs sur la seule responsabilité des professionnels des CECOS

-          Ne plus faire reposer la gestion et la conservation des données identifiantes et non identifiantes des donneurs sur la seule responsabilité des professionnels des CECOS

-          Appliquer les nouvelles dispositions règlementaires proposées ci-dessus y compris la mise en place du registre national des donneurs uniquement de manière prospective

2.1.3. Par ailleurs, le guide pour la mise en œuvre du principe d’interdiction du profit relatif au corps humain et à ses parties provenant de donneurs vivants ou décédés du Comité de bioéthique du Conseil de l’Europe précise que : « Des mesures devraient être mises en place pour minimiser le risque de dommage, pour les donneurs, éventuellement causé par le dispositif de don, par exemple grâce à des registres nationaux ou systèmes de traçabilité, afin de limiter la fréquence avec laquelle une même personne peut faire un don. »[586]

Il apparait donc que seule une base de données gérée au niveau national, permettrait, tout en garantissant l’anonymat du don, de suivre avec efficacité le nombre de dons individuels et le nombre d’enfants qui en sont issus.

Les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques[587] estiment, de leur côté, qu’: « il pourrait être proposé de mettre en place un registre national qui serait l’outil permettant la coordination et la gestion des donneurs de gamètes et qui pourrait contenir également les données identifiantes et non identifiantes de ces donneurs.»

2.1.4. Par ailleurs, une disposition du code de la santé publique qui n’est pas (et n’a jamais été) mise en œuvre et qui concerne justement la gestion du nombre d’enfants nés d’un même donneur doit être supprimée.

En effet, la première phrase du premier alinéa de l’article L. 1244-6 du code de la santé publique prévoit que :

« Les organismes, établissements et groupements de coopération sanitaire autorisés dans les conditions prévues à l'article L. 2142-1 fournissent aux autorités sanitaires les informations utiles relatives aux donneurs. »

La portée de cette phrase ne peut être comprise qu’à la lecture des travaux parlementaires relatifs à la loi de bioéthique de 1994. Le rapport de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale (première lecture) sur le projet de loi relatif à la bioéthique (en date du 12 janvier 1994) précise que « Le premier alinéa résulte du passage en 1ère lecture au Sénat du projet de loi de bioéthique de 1994 (art. L. 673-6 du code de la santé publique). Il tend à donner aux établissements de santé autorisés à recueillir, à conserver et à céder les gamètes les moyens d'appliquer les règles applicables en matière de prévention des risques de consanguinité qui limitent le nombre d'enfants pouvant être conçus à partir du sperme d'un même donneur. Elle prévoit que ces établissements transmettront aux autorités sanitaires les informations relatives aux donneurs, qui pourront être consultées avant une procréation médicalement assistée afin de vérifier que ce nombre maximal n'a pas été atteint. »

Cet objectif sera désormais assuré par la mise en place d’un fichier national des donneurs et des dons.

2.2. Objectifs poursuivis

La présente mesure aura pour objectif une gestion désormais nationale des données relatives aux donneurs, aux dons et aux enfants nés de don pour assurer le respect de l’article L. 1244-4 du code de la santé publique (naissance de dix enfants maximum par donneur) mais aussi la protection des donneurs et tout particulièrement des donneuses (respect du nombre de prélèvements par donneuses pour éviter les donneuses « itinérantes », qui pourraient être indirectement rémunérées par les couples).

Elle permettra de poser un cadre clair pour susciter la confiance des donneurs.

Elle permettra d’alléger la charge et la responsabilité qui pèsent sur les CECOS qui pourront se recentrer sur l’élargissement de leurs missions cœur de métier et notamment l’accueil des publics relevant d’une assistance médicale à la procréation.

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1. Le fichier centralisé de données relatives aux dons, aux donneurs et aux enfants nés de don doit être rattachée à un gestionnaire national.

Ainsi que cela a été précisé, la Fédération des CECOS est une structure associative qui n’a pas vocation à une telle mission (qu’elle ne revendique d’ailleurs pas).

L’Agence de la biomédecine, établissement public administratif de l'Etat, placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé, et compétente dans le domaine de la reproduction, apparait être le seul organisme susceptible d’assurer un tel rôle.

L’agence est justement déjà chargée de « mettre en œuvre un suivi de l'état de santé des donneurs d'organes et d'ovocytes, afin d'évaluer les conséquences du prélèvement sur la santé des donneurs » (6° de l’article L. 1418-1 du code de la santé publique), d’ « enregistrer l'inscription des patients en attente de greffe sur la liste mentionnée à l'article L. 1251-1, d'assurer la gestion de celle-ci et de celle du registre des paires associant donneurs vivants et receveurs potentiels ayant consenti à un don croisé d'organes ainsi que l'attribution des greffons, (…) » (7° de l’article L. 1418-1 du code de la santé publique), de « gérer le fichier des donneurs volontaires de cellules hématopoïétiques ou de cellules mononucléées périphériques pour les malades qui ne peuvent recevoir une greffe apparentée ; elle assure, en outre, l'interrogation des registres internationaux et organise la mise à disposition des greffons » (8° de l’article L. 1418-1 du code de la santé publique).

Elle a donc développé des compétences et acquis une expérience dans des domaines proches où elle gère des bases de données nominatives sensibles.

Dans son avis n° 129[588], le Comité consultatif national d'éthique considère d’ailleurs « comme essentielle la construction d’un cadre public fiable pour l’éventuelle levée de l’anonymat, avec des principes clairs inspirant la confiance à tous les acteurs (donneurs comme receveurs et enfants), des critères (la « levée » à un certain âge par exemple), un registre national, une information préalable. ». L’Agence de la biomédecine, forte d’une expérience de quinze ans dans le domaine de la procréation, est à même de susciter cette confiance.

Les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST)[589], qui « estiment indispensable l’établissement d’un registre national des donneurs », précise qu’il « pourrait être géré par l’Agence de la biomédecine ».

L’Agence de la biomédecine aura pour mission de conserver les données non identifiantes relatives aux tiers donneurs (donneurs de gamètes et couple confiant ses embryons à l’accueil par un autre couple) ainsi que leur identité et celles des enfants nés de leur don. Ces données auront été recueillies au préalable par les CECOS.

L’Agence de la biomédecine mettra en place un système lui permettant de vérifier que le nombre d’enfants nés par donneur respecte les dispositions de l’article L. 1244-4 du code de la santé publique (« Le recours aux gamètes d'un même donneur ne peut délibérément conduire à la naissance de plus de dix enfants. »)

3.2.  Dans le cadre de la réforme permettant l’accès des personnes nées d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur  aux données non identifiantes et à l’identité du tiers donneur, l’Agence de la biomédecine mettra à disposition de la Commission ad hoc les données que cette dernière sollicitera dans le cadre de ses missions.

Les données non identifiantes colligées par les CECOS et transmises à l’Agence de la biomédecine incluent l’état général du donneur au moment du don tel qu’il le décrit, étant rappelé que les donneurs sont sélectionnés au regard de critères médicaux et qu’ils sont a priori en « bonne santé » lorsqu’ils effectuent leur don.

Les données médicales transmises ultérieurement par le donneur ou par le médecin du donneur aux CECOS, de la même façon que les éventuelles informations médicales concernant un enfant né d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur, continueront d’être recueillies et gérées par les CECOS. Il leur appartiendra d’évaluer la nécessité d’une transmission de l’information médicale ainsi obtenue soit à la personne née du don soit au donneur en application du premier alinéa de l’article L. 1244-6 du code de la santé publique (complété par le projet de loi à cet effet).

Il est rappelé à cet égard qu’au moment du don, le donneur s’engage à communiquer des informations sur l’évolution de son état de santé (« Le formulaire de consentement (...) comprend également l’engagement à signaler à l’équipe médicale toute pathologie diagnostiquée portée à la connaissance du donneur ou de la donneuse a posteriori et susceptible de transmission par ses gamètes »[590].

Par ailleurs, la transmission spécifique d’une information médicale à caractère génétique dans le cadre du don de gamètes relève du dernier alinéa de l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique qui continuera à s’appliquer (étant précisé que le projet de loi complète le dispositif actuel sur ce point pour permettre également une information du donneur).

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

4.1.1.      Impacts sur l’ordre juridique interne

La présente mesure permettra de confier une nouvelle mission à l’Agence de la biomédecine en ajoutant un 13° à l’article L. 1418-1 du code de la santé publique qui précise les missions confiées à l’agence.

L’Agence de la biomédecine sera ainsi chargée de gérer les traitements de données relatifs aux tiers donneurs mentionnés à l’article L. 2143-1, à leurs dons et aux enfants nés de don.

La mesure modifiera également l’article L. 1244-6 du code de la santé publique et, dans le même sens, l’article L. 2141-6 du même code.

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

La Commission des questions sociales, de la santé et du développement durable a adopté à l’unanimité un projet de recommandation[591], en vue d’un débat à l’Assemblée.

Elle préconise que les Etats membres tiennent « un registre national des donneurs et des personnes conçues par don » afin de faciliter l'échange d'informations et d'imposer une limite supérieure au nombre de dons possibles par le même donneur.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

La charge pesant actuellement sur les centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS) sera allégé puisqu’ils n’auront plus à conserver et à gérer le traitement de données relatif aux données non identifiantes et à l’identité du donneur de gamètes. 

4.3.                       Impacts sur les services administratifs

En raison d’une application dans le temps en deux étapes de la réforme de l’accès aux origines, l’impact sur l’Agence de la biomédecine est également à différencier selon deux étapes.

Pour la première, l’agence doit mettre en place une base de données qui lui permettra de conserver et de suivre le nombre de dons par donneur, les données non identifiantes et l’identité des tiers donneurs ainsi que l’identité des enfants nés de ces tiers donneurs. 

Cette base nationale ne sera pas rétroactive[592] et seuls les nouveaux (au sens relevant du nouveau régime) tiers donneurs (et les nouveaux dons) seront concernés à l’exception toutefois des « anciens » donneurs qui se seront manifestés spontanément auprès de la Commission pour signifier leur accord à l’accès à leur identité ; l’Agence de la biomédecine conservera alors les données de ces donneurs pour simplifier les démarches en cas de demandes d’accès à leur identité par des personnes nés de leur don.

A titre d’illustration, il y a eu en 2016[593] : 363 donneurs de spermatozoïdes, 746 donneuses d’ovocytes et 174 couples confiant leurs embryons à l’accueil par un autre couple.

L’agence assurera le respect du cadre légal et réglementaire (notamment nombre d’enfants par donneur).

Le deuxième temps correspond à la mise en œuvre du dispositif d’accès aux données non identifiantes et à l’identité du donneur, quand les enfants nés des « nouveaux » donneurs seront majeurs (au minimum dix-huit ans après le démarrage du premier temps).

Dès lors (au minimum dix-huit ans après la publication du décret susmentionné), l’Agence de la biomédecine pourra être sollicitée par la Commission ad hoc pour transmettre à cette dernière les informations non identifiantes, le cas échéant, l’identité d’un tiers donneur en lien avec la demande d’un enfant né de son don et devenu majeur.

4.4.                       Impacts sur les particuliers

La mesure permet de sécuriser le dispositif de don de gamètes au bénéfice des donneurs.

5.       Consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

La mise en place de traitements de données relatifs aux donneurs et aux dons nécessite la consultation de la CNIL en application du a) du 4° du I de l’article 8 de la loi informatique et libertés.

La CNIL a été consultée. Sa délibération est en date du 11 juillet 2019.

L’Agence de la biomédecine a également été consultée. Elle a rendu son avis le 26 juin 2019.

Enfin, le Conseil national de la protection de l'enfance a été consulté.

5.2.                       Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Le premier temps susmentionné débutera après la promulgation de la loi dès que l’Agence aura mis en place sa base de données.

Le deuxième temps débutera au minimum dix-huit ans après le démarrage du premier temps.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

5.2.3.    Textes d’appliaction

Les décrets en Conseil d’Etat mentionnés à la mesure précédente (accès aux données non identifiantes et à l’identité du tiers donneur) sont rappelés :

-          Décret fixant les modalités de recueil de l’identité des enfants nés d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur) ;

-          Décret fixant la nature des données non identifiantes ;

-          Décret fixant la durée de conservation des données relatives aux donneurs, aux dons et aux enfants nés de ces dons ;

-          Décret fixant la nature des pièces à joindre à la demande d’une personne née de don ;

-          Décret fixant la composition de la Commission ad hoc.

Un décret simple fixera la date à partir de laquelle ne pourront être utilisés que les embryons proposés à l’accueil et les gamètes issus de dons des « nouveaux » tiers donneur.  

 

 


Articles 4  Sécuriser l’établissement de la filiation des enfants nés dassistance médicale à la procréation avec tiers donneur réalisée par un couple de femmes

1.             État des lieux

1.1.                       Cadre général

1.1.1 Cadre légal actuel de l’établissement de la filiation

Actuellement, la filiation hors adoption est établie dans les conditions prévues par le titre VII du livre premier du code civil, sur le modèle de la vraisemblance biologique. Elle est établie à l'égard de la mère qui accouche par sa simple désignation dans l’acte de naissance de l’enfant (article 311-25), et à l’égard du père, soit par le jeu de la présomption de paternité s’il est marié avec la mère de l’enfant (article 312), soit, s’il ne l’est pas, par une reconnaissance volontaire qu’il doit effectuer devant l’officier de l’état civil ou le notaire avant ou après la naissance de l’enfant (article 316). De façon marginale, la filiation est également établie par la possession d'état (article 317).

Le droit commun de la filiation est construit sur le modèle biologique, ou plus exactement, sur le modèle de la vraisemblance biologique. La présomption de paternité découle de ce que, dans le mariage, les époux s’obligent à une communauté de vie : on peut présumer que le mari qui partage la vie quotidienne de son épouse est effectivement le père des enfants qui naissent pendant la période du mariage ou dans les semaines qui suivent sa dissolution. Hors mariage, comme il n’y a pas d’obligation mutuelle à une communauté de vie, on ne peut rien présumer de la paternité, c’est donc à l’homme de « reconnaître » qu’il est le père de l’enfant. La possession d’état obéit au même paradigme : le notaire délivre un acte de notoriété permettant d’établir la filiation au vu d’un ensemble de preuves et de témoignages qui attestent de ce que la personne qui revendique l’état de parent se conduit comme tel à l’égard de l’enfant ; toutefois, l’acte de notoriété ne fait foi que jusqu’à preuve du contraire : preuve que la femme qui se prévaut de la maternité n’a pas accouché ou preuve que l’homme n’est pas le père.

La contestation d’une filiation ou l’établissement forcé d’une filiation reposent également sur la preuve biologique : preuve de l’accouchement pour la mère et preuve génétique pour le père. De ce paradigme de la vraisemblance biologique découlent des principes structurant la filiation de droit commun et permettant ainsi l’éventuelle contestation des filiations légalement établies : il ne peut coexister deux filiations de même sexe pour un même enfant et l’enfant ne peut avoir que deux filiations au plus: une dans la branche paternelle et une dans la branche maternelle[594].

S’agissant des enfants nés à l’issue d’une procédure d’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur, leur filiation est établie dans les mêmes conditions, le législateur ayant fait le choix, en 1994, de privilégier pour ces familles le modèle de la vraisemblance biologique.

Toutefois, l’article 311-19 du code civil interdit tout établissement de filiation avec le tiers donneur[595]. Cette interdiction ne dépend pas de l’anonymat du donneur (qui est protégé par ailleurs[596]). En effet, l’article 311-19 du code civil ne fait pas référence à cet anonymat ce qui signifie que, si par extraordinaire, l’enfant et le donneur venaient à se connaître, et quand bien même le donneur prouverait son lien génétique avec l’enfant, tout établissement de filiation entre eux serait interdit.

En outre, de façon dérogatoire aux règles du droit commun, la filiation est établie sur la base du consentement à l’assistance médicale à la procréation donnée au préalable devant le notaire par les deux membres du couple. Ce consentement a pour effet de « sceller » la filiation paternelle ultérieure, la « verrouillant » puisqu’il interdit toute action judiciaire en établissement ou en contestation de cette filiation et contraint l’homme non marié qui a consenti à l’assistance médicale à la procréation à reconnaître l’enfant qui en est issu, sa paternité pouvant être judiciairement déclarée (article 311-20 du code civil).

Les dispositions du titre VIII du livre 1er du code civil prévoient par ailleurs que la filiation peut être établie par adoption de l’enfant. L’adoption, simple ou plénière, n’est ouverte qu’aux couples mariés. La loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 a ouvert le mariage et l’adoption aux couples de personnes de même sexe qui peuvent, depuis lors, soit adopter ensemble un enfant, soit chacun, adopter l’enfant de son conjoint.

Lorsqu’un enfant a déjà une filiation établie, l’adoption est actuellement la seule voie possible qui permette à une personne de même sexe que le parent, de devenir parent à son tour de cet enfant. La loi du 17 mai 2013 susmentionnée a en effet introduit dans le code civil un article 6-1 qui interdit  aux couples de même sexe l’application des règles de droit commun de la filiation inscrites dans le titre VII du livre Ier du code civil afin de conserver le modèle de la vraisemblance biologique sur lequel ont été construites les règles de la filiation de ce titre VII[597].

1.1.2 Situation des couples de femmes ayant actuellement recours à une assistance médicale à la procréation à l’étranger

En l’absence d’ouverture de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes, il n’existe aucune règle de droit organisant spécifiquement la filiation des enfants dans ces situations.

Toutefois, pour répondre aux demandes de plus en plus fréquentes des couples de femmes ayant eu recours à cette pratique à l’étranger, la Cour de cassation, dans deux avis du 22 septembre 2014, a estimé que « le recours à l’assistance médicale à la procréation, sous la forme d’une insémination artificielle avec donneur anonyme à l’étranger, ne fait pas obstacle au prononcé de l’adoption par l’épouse de la mère de l’enfant né de cette procréation dès lors que les conditions légales de l’adoption sont réunies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant ».

Ainsi validée par la Cour de cassation, la voie de l’adoption a immédiatement connu un réel succès chez les couples de même sexe puisque, entre le mois de septembre 2014 et le mois de mai 2019, 2.713 requêtes en adoption plénière et 251 requêtes en adoption simple ont été déposées auprès les juridictions françaises[598]. Même si toutes les demandes n’ont pas pour origine une assistance médicale à la procréation effectuée à l’étranger, ces chiffres donnent toutefois un ordre de grandeur des demandes en établissement de la filiation de la part des couples de femmes.

Au fur et à mesure des années, l’augmentation du nombre de femmes, seules ou en couple, se rendant à l’étranger pour y pratiquer une assistance médicale à la procréation, a suscité des demandes de plus en plus en nombreuses devant les juridictions françaises pour que la conjointe ou la concubine de la mère puisse établir un lien de filiation avec l’enfant dès la naissance de celui-ci, sans passer par la procédure d’adoption. Les juridictions françaises ont notamment eu à connaître de plusieurs demandes d’établissement de filiation soit par possession d’état, soit par reconnaissance volontaire. Dans un avis du 7 mars 2018, la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation s’est appuyée sur l’article 6-1 du code civil pour refuser l’établissement de la filiation par possession d’état à une mère d’intention dans un couple de femmes[599].

Les couples de femmes non mariées ne peuvent pas, en l’état du droit, être parents ensemble d’un enfant.

Actuellement, l’adoption n’étant autorisée que pour les couples mariés, ouvrir l’assistance médicale à la procréation à toutes les femmes nécessite une évolution des règles de la filiation.

1.2.                       Cadre constitutionnel

En matière de filiation et en matière d’état des personnes en général, l’exigence constitutionnelle fondamentale est en premier lieu l’égalité : les personnes doivent pouvoir faire établir, conserver et protéger leur état à partir du moment où elles se trouvent dans des conditions identiques. La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789 fait référence à trois reprises au principe d'égalité mais c’est surtout le principe d’égalité tel qu’il se dégage de son article 1er (« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit »), et de son article 6 (« La loi doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ») qui trouve à s’appliquer dans le domaine de la filiation et de l’état des personnes.

Par ailleurs, les alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 énoncent le principe selon lequel d’une part « la nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement » et d’autre part garantit à l’enfant notamment la sécurité matérielle. Le Conseil constitutionnel a tiré de cet alinéa 10 le droit de mener une vie familiale normale qui « doit être entendu dans un sens concret (possibilité de vivre ensemble), plus que dans un sens proprement formel qui impliquerait une consécration en droit des liens biologiques »[600].

Le Conseil constitutionnel n’a jamais eu à connaître de l’égalité des filiations puisque ni la loi du 3 janvier 1972 réformant la filiation, ni celle du 8 janvier 1993 relative à l’état civil, la famille, les droits de l’enfant et le juge aux affaires familiales, ni la loi du 18 juin 2003 sur le nom de famille ni celle du 3 décembre 2001 sur les successions ne lui ont été déférées. Toutefois, la combinaison du principe d’égalité, du droit à vivre une vie familiale normale et la protection de l’intérêt supérieur de l’enfant qui vient d’être consacrée[601] ne laisse pas de doute quant à l’exigence de garantie de l’égalité des enfants indépendamment des modes d’établissement des liens de filiations.

Toutefois, dans un considérant de principe repris depuis 1979[602], le Conseil décide que le principe d'égalité « ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ». Une rupture d’égalité est donc admissible si les situations sont objectivement différentes ou si le législateur rapporte un « intérêt général » qui se dégage de la loi elle-même.

La décision n° 2013-669 du 17 mai 2013 a été l’occasion pour le Conseil constitutionnel de rappeler, en matière de filiation, que le principe d’égalité impose une égalité des droits dans une même situation et non une similitude dans l’établissement de la filiation.

Ainsi, le Conseil constitutionnel rappelle que le choix du mode d’établissement de la filiation, et notamment la prise en compte de la différence entre les couples de personnes de même sexe et les couples formés d'un homme et d'une femme pour choisir ce mode de filiation (en l’occurrence l’adoption pour les couples de même sexe), relève du législateur qui a compétence exclusive pour fixer les règles relatives à l'état et à la capacité des personnes en application de l'article 34 de la Constitution[603].

Par la suite, dans les considérants n° 50 et n° 51, le Conseil constitutionnel précise quelle est l’application du principe d’égalité en matière de filiation en indiquant d’une part que « le principe d'égalité impose que les enfants adoptés en la forme plénière bénéficient, dans leur famille adoptive, des mêmes droits que ceux dont bénéficient les enfants dont la filiation est établie en application du titre VII du livre Ier du code civil », et d’autre part que « aucune exigence constitutionnelle n'impose (…) que les liens de parenté établis par la filiation adoptive imitent ceux de la filiation biologique ».

De l’ensemble de ces dispositions, il peut être déduit qu’en matière de filiation, le principe d’égalité impose que tous les enfants aient les mêmes droits, autrement dit que tous les modes de filiation produisent les mêmes effets, mais n’impose pas que tous les enfants bénéficient du même mode d’établissement de filiation.

Enfin, le considérant n° 51 de la même décision souligne que, si « la liberté proclamée par l'article 2 de la Déclaration de 1789 implique le respect de la vie privée, toutefois, aucune exigence constitutionnelle n'impose […]que le caractère adoptif de la filiation soit dissimulé » et que « par suite, le grief tiré de ce que la possibilité d'une adoption par deux personnes de même sexe porterait atteinte (…) au droit à la protection de la vie privée doit être écarté ». Le mode de filiation ne peut pas, en lui-même, porter atteinte à la protection de la vie privée, sous prétexte qu’il viendrait signaler l’orientation sexuelle des parents.

1.3.                       Cadre conventionnel

Dans l’arrêt X. et autres c/ Autriche du 19 février 2013, la Cour européenne de droits de l’homme a reconnu l’égalité des couples de personnes de même sexe et des couples de personnes de sexe différent à l’égard de la parentalité, voyant dans l’interdiction d’adopter opposée aux couples de personnes de même sexe une discrimination et une violation du droit au respect de la vie privée et familiale[604].

Toutefois, il n’y a pas de discrimination lorsqu’un mode de filiation est réservé aux couples hétérosexuels mariés et interdit aux couples de même sexe, la Cour estimant que la situation d’un couple composé de deux femmes n’est pas comparable à celle d’un couple hétérosexuel  marié en ce qui concerne les mentions à porter sur l’acte de naissance d’un enfant[605].

1.4.                       Éléments de droit comparé

Dix Etats membres de l’Union européenne ont expressément ouvert l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes : l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, Malte, les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni et la Suède. Dans tous les cas, la femme qui accouche est la mère de l’enfant et dans tous les pays, le nombre de filiations pour un même enfant est limité à deux. L’établissement de la filiation pour la conjointe ou la concubine de la mère est organisé de façon très différente selon les pays.

1.4.1 Établissement par adoption 

Les Pays-Bas, la Suède et la Finlande, prévoient que le lien de filiation avec la conjointe, la partenaire ou la concubine de la mère est établi par adoption[606]. Dans ces pays, à la différence de la France, le mariage n’est pas une condition pour adopter. Aux Pays-Bas, s’agissant d’un couple de femmes ayant construit ensemble un projet parental, la demande d’adoption peut être faite pendant la grossesse et jusqu’aux six mois de l’enfant ; dans le premier cas, l’adoption, si elle est prononcée, rétroagit au jour de la naissance de l’enfant.

1.4.2 Établissement par extension aux couples de femmes du régime de droit commun prévu pour les couples de sexes différents 

La Belgique est le seul pays de l’Union européenne à avoir opéré une transposition complète des règles de la filiation de droit commun pour les adapter aux couples de femmes[607]. L’épouse de la mère devient la « co-parente » par le jeu de la présomption de co-maternité si l’enfant est né pendant le mariage ou dans les trois cents jours qui suivent sa dissolution ou son annulation. Si le couple n’est pas marié, la femme qui a consenti avec la mère à l’assistance médicale à la procréation devient co-parente par la reconnaissance de l’enfant, avant ou après sa naissance ; la reconnaissance est subordonnée au consentement de la mère[608]. L’absence de lien génétique entre la co-parente et l’enfant nécessite néanmoins une adaptation des règles de contestation du lien de filiation qui ne peuvent pas reposer sur la preuve du lien biologique mais sur la preuve du consentement à l’assistance médicale à la procréation. Ce consentement est obligatoire et prend la forme d’une convention passée entre les parents d’intention et le centre médical avant d’entamer la procédure de procréation. Cette convention sert de moyen de preuve non seulement en cas de contestation mais également pour établir la paternité ou la co-maternité du parent d’intention non marié qui ne voudrait finalement plus reconnaître l’enfant. Si le donneur est connu[609] et qu’il veut revendiquer sa paternité, il dispose d’un an à compter de la naissance de l’enfant pour contester en justice la filiation co-maternelle. La Belgique n’a pas autorisé l’accès aux origines pour l’enfant.

L’Autriche n’ayant pas autorisé le mariage pour les couples de même sexe, les règles de la filiation ont dû être adaptées aux couples de femmes unies dans le cadre d’un partenariat enregistré, seules autorisées depuis 2015 à recourir à l’assistance médicale à la procréation. La partenaire de la femme qui a accouché est parent par présomption si l’enfant est né au moins 300 jours après le début du partenariat, ou si elle l’a reconnu[610].

1.4.3 Établissement fondé sur le consentement exprès à l’assistance médicale à la procréation

Le Danemark qui a le taux le plus élevé au monde de recours à l’assistance médicale à la procréation avec tiers donneur, a adopté le 1er décembre 2013 un amendement à la loi sur l’enfance qui permet d’organiser la filiation d’un enfant né par assistance médicale à la procréation au sein d’un couple de femmes. Si le donneur est anonyme, l’épouse ou la concubine de la mère est parent de l’enfant dès la naissance, si elle a préalablement consenti par écrit à l’assistance médicale à la procréation et si ce consentement contient une déclaration par laquelle elle s’engage à être le parent de l’enfant. Si le donneur est connu mais qu’il ne veut pas être père de l’enfant, l’épouse ou la concubine de la mère devient parent de l’enfant dans les mêmes conditions que dans le cas précédent. En revanche, si le donneur est connu et qu’il souhaite être reconnu comme le père de l’enfant, il consent, avec le couple de femmes à ce que son lien de filiation soit établi ; l’épouse ou la compagne de la mère est alors la belle-mère de l’enfant, le Danemark ne reconnaissant que deux liens de filiation possibles pour un même enfant.

Malte est le dernier Etat membre à avoir ouvert l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes[611]. La loi prévoit que tout enfant né d’une assistance médicale à la procréation est l’enfant des parents d’intention qui ont consenti par écrit avant la procédure de procréation, sans qu’il y ait besoin d’un autre acte. L’établissement de la filiation est le même que le couple soit de même sexe ou de sexes différents, et qu’il y ait ou non intervention d’un tiers donneur.

En Catalogne, depuis la loi du 29 juillet 2010, tous les couples, mariés ou non, de même sexe ou de sexes différents ayant recours à une assistance médicale à la procréation avec tiers donneur sont soumis au même régime : l’enfant est celui de la femme qui accouche et de l’homme ou de la femme qui a consenti expressément avec elle à l’assistance médicale à la procréation. La présomption de paternité a donc été abandonnée pour le mari, lorsqu’il y a recours à une assistance médicale à la procréation avec tiers donneur.

1.4.4 Systèmes mixtes 

En Espagne, la loi du 26 mai 2006 a ouvert l’assistance médicale à la procréation à toutes les femmes mais n’a pas étendu aux couples de femmes les règles de la filiation de droit commun. La présomption n’est pas applicable à l’épouse de la mère qui doit faire une déclaration de consentement à devenir parent avant ou après la naissance. Pour les couples de femmes non mariées, seule la voie de l’adoption permet à la compagne de la mère d’établir sa filiation, même si elle est à l’origine du projet parental avec la mère. 

En Grande-Bretagne, le Human Fertilisation and Embryology Act adopté en 2008 permet d’étendre la présomption de parenté à deux femmes unies par un partenariat enregistré pour devenir ensemble les parents légaux de l’enfant né pendant leur union. S’agissant de deux concubines, le lien de filiation est établi avec la compagne de la mère aux termes d’une convention passée entre elles ; leurs deux noms apparaissent alors sur le certificat de naissance. En l’absence de convention, la partenaire de la mère peut solliciter du juge l’exercice de l'autorité parentale et / ou peut entamer une procédure d’adoption.

Au Portugal, la loi du 20 juin 2016 a étendu le recours aux techniques de la procréation médicalement assistée aux couples de femmes et aux femmes seules et prévoit l’établissement de la filiation sans distinction entre les couples de même sexe ou de sexes différents. La filiation est établie par présomption si le couple est marié ; la présomption s’applique également au concubin s’il présente le consentement conjoint à l’assistance médicale à la procréation, donné avant le commencement de la procédure de procréation.

2.             Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.                       Nécessité de légiférer

Aux termes de l’article 34 de la Constitution : « la nationalité, l'état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux et les successions » ressortent du domaine de la loi. Il est nécessaire de légiférer au regard du choix d’ouvrir l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes puisqu’actuellement l’adoption constitue le seul moyen pour une femme d’établir une filiation avec l’enfant de sa conjointe et que l’adoption n’est ouverte qu’aux couples mariés.

2.2.                       Objectifs poursuivis

Les objectifs poursuivis dans la présente adaptation du droit de la filiation sont multiples.

Il s’agit tout d’abord de permettre aux deux membres du couple de femmes de devenir légalement les parents de l’enfant issu de l’assistance médicale à la procréation qu’elles ont voulu ensemble, et ce, dès la naissance de l’enfant, de la même façon et dans le même trait de temps afin que l’une ne soit pas, davantage que l’autre ou l’une avant l’autre, considérée comme parent de l’enfant.

Le deuxième objectif que doit s’efforcer de respecter toute réforme du droit de la filiation est celui de l’égalité : égalité entre les couples de personnes de même sexe et couples de personnes de sexe différent, entre les couples mariés et les couples non mariés, mais aussi égalité entre les enfants qui, quel que soit leur mode de conception ou la façon dont leur filiation a été établie doivent pouvoir jouir des mêmes droits.

Un troisième objectif enfin est celui de l’effectivité du  droit de connaître leurs origines, ouvert par le présent projet de loi, aux enfants issus d’un don. Cet accès aux origines, qui ne remet pas en cause l’anonymat du don, n’est autorisé qu’aux enfants devenus majeurs. Pour que ce droit soit effectif, il faut que ces enfants puissent être en mesure de savoir qu’ils sont issus d’un don. Cette exigence pourrait conduire à repenser le droit de la filiation non seulement au regard de l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes, mais également au regard du droit de tous les enfants issus d’un don à connaître leurs origines, ce qui de facto ne limiterait pas l’adaptation du droit de la filiation aux seuls enfants nés au sein d’un couple de femmes, mais amènerait également à inclure dans la réflexion tous les enfants issus d’un don, qu’ils soient nés dans un couple hétérosexuel, dans un couple de femmes, ou d’une femme seule.

A ces objectifs s’ajoute l’impératif de ne pas déconstruire le droit commun de la filiation structurant et opérant pour plus de 99% des naissances[612].

3.             Options

3.1.                       Options envisagées et non retenues

            L'adoption

L'établissement de la filiation à l’égard du parent d’intention par la voie de l'adoption de l’enfant du conjoint présente un certain nombre d’avantages. L’adoption constitue le mode d’établissement de la filiation privilégié en l'absence de lien biologique puisqu’elle repose sur la volonté de la personne de devenir parent de l'enfant et consacre un projet parental. L’adoption plénière entraîne entre les enfants et les adoptants, les mêmes droits et devoirs que lorsque la filiation est établie selon par présomption ou reconnaissance ; les adoptants sont les parents de l’enfant sans aucune restriction.

L’adoption est ouverte aux couples de même sexe depuis la loi n°2013-404 du 17 mai 2013 et a été consacrée, concernant les couples de femmes ayant eu recours à une assistance médicale à la procréation à l’étranger, par la Cour de cassation en 2014. Cette option présente donc le double avantage de ne pas rendre nécessaire une modification de la loi et de ne pas impliquer de bouleversements symboliques en matière de filiation puisqu’elle est déjà mise en œuvre dans des situations similaires de fait.

Cette option nécessiterait néanmoins une modification du droit de l’adoption pour l’ouvrir aux couples non mariés qui ne sont pas autorisés à adopter actuellement. En choisissant cette option, sans modification de la loi, le législateur ne pourrait donc pas apporter de réponse à toutes les femmes. L’ouverture de l’adoption aux couples non mariés serait également nécessaire pour éviter toute discrimination entre les couples non mariés, à raison de leur orientation sexuelle.

Toutefois, même avec ces aménagements, cette option présente plusieurs inconvénients incompatibles avec les objectifs poursuivis.

En premier lieu, l’adoption de l’enfant du conjoint est une procédure judiciaire qui suppose, d’une part le consentement du parent de l’enfant (article 348-1 du code civil), et d’autre part un délai entre la demande et la décision[613], ce qui peut avoir pour effet d’insécuriser la filiation de l'enfant à l'égard de la mère d’intention, notamment en cas de décès de la mère ou de séparation précoce du couple intervenant avant la décision d’adoption. Si la question du refus de la mère de consentir à l'adoption de son enfant par sa conjointe pourrait être réglée par un recours au juge en cas de refus abusif (article 348-6 du code civil), le décès du parent entraîne en revanche une insécurité pour l’enfant envers lequel le parent d’intention qui ne l’a pas encore adopté, n’a aucun droit ni aucune obligation.

Par ailleurs, il n’existe pas de procédure en établissement « forcé » de la filiation par adoption ; donc rien ne peut contraindre une épouse, ayant pourtant consenti à l’assistance médicale à la procréation, à adopter l’enfant de sa conjointe. Instaurer un tel mécanisme d’établissement judiciaire de la filiation, à l’instar du dispositif prévu actuellement par le code civil pour un père qui refuse de reconnaître son enfant issu d’une procréation assistée à laquelle il a consenti, apparaît incohérent au regard de ce qu'est l'adoption, à savoir, un acte d'élection, ainsi qu'au regard de l'appréciation souveraine laissée au tribunal statuant en matière d'adoption.

Les instances qui se sont exprimées sur la question des modes d’établissement de la filiation à l’égard de deux femmes lors des travaux préparatoires à la révision de la loi de bioéthique[614] se sont toutes unanimement déclarées opposées au maintien de l’adoption dans cette situation. Chacune de ces instances a souligné l’inadaptation de ce mode de filiation pour les couples de femmes qui font et réalisent ensemble leur projet parental par assistance médicale à la procréation. La question d’une éventuelle réforme de l’adoption pour permettre, d’une part de l’étendre aux couples non mariés et d’autre part, de réduire les délais de son prononcé n’a même pas été abordée.

Cette option n’est pas retenue par le Gouvernement.

            La possession d'état

L'article 317 du code civil prévoit que la filiation peut être établie par un acte de notoriété délivré par le notaire qui constate un lien de parenté manifeste entre l'enfant et la personne qui sollicite cette possession d'état. La filiation par possession d’état est établie après avoir constaté la réunion d’un certain nombre de faits et de témoignages qui attestent que celui qui veut établir légalement sa filiation se comporte aux yeux de tous comme le parent de l’enfant, qu’il contribue activement à son éducation et son entretien que l’enfant considère l’adulte comme son parent (article 311-1 du code civil). Ce mode de filiation n’est pas soumis à la condition du mariage, ni même de la vie commune.

Toutefois, cette option n’a pas été retenue parce qu’elle ne correspond pas à l’attente sociale exprimée par les couples de femmes.

En effet, pour être reconnue, la possession d’état nécessite une certaine temporalité puisqu’elle a pour vocation de reconnaître juridiquement un lien qui préexiste de fait entre l’adulte et l’enfant. La possession d’état ne vise pas à établir un lien de filiation fondé sur la seule volonté de celui ou celle qui la réclame. Il y aurait donc une certaine incohérence à établir une possession d’état au jour de la naissance de l’enfant[615]. Or, la demande des couples de femmes est justement de pouvoir devenir parents en même temps et ce, dès la naissance de l’enfant.

Par ailleurs, la possession d’état apparaît inadaptée en cas de séparation du couple avant l’établissement du lien de filiation puisque l’ex-compagne, vivant séparée et ne disposant pas de l'autorité parentale sur l’enfant pourrait avoir beaucoup de difficultés à démontrer sa possession d’état et donc à faire établir sa filiation.

            L’application des règles de la filiation biologique aux couples de femmes

Il s’agirait d'une part d’adapter, pour les rendre applicables aux couples de femmes, les règles exposées au titre VII du livre Ier du code civil, relatives à l'établissement de la filiation par présomption dans le cas des couples mariés et par reconnaissance volontaire dans le cas des couples non mariés, et d'autre part, de faire bénéficier les couples de femmes du même mécanisme de protection de leur filiation en la rendant insusceptible de contestation et en empêchant tout lien de filiation avec le donneur.

A l’instar des couples hétérosexuels, les couples de femmes ayant recours à une assistance médicale à la procréation avec tiers donneur feraient part au notaire, dans les conditions garantissant le respect de leur vie privée, de leur consentement à cette procédure ainsi qu'aux conséquences qu'elle entraîne en matière de filiation. Ce consentement aurait, comme pour les couples hétérosexuels, l’effet de sceller la filiation d’intention en interdisant toute action judiciaire aux fins d’établissement ou de contestation de la filiation co-maternelle, sauf à démontrer que l'enfant né n'est pas issu de l'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur. La filiation maternelle s’établirait à l’égard de la femme qui accouche par sa désignation dans l’acte de naissance et à l’égard de l’autre femme, soit par présomption de co-maternité si elle est mariée avec la mère, soit par un acte de reconnaissance volontaire, fait avant ou après la naissance. La compagne non mariée de la mère pourrait voir sa co-maternité judiciairement déclarée et sa responsabilité engagée envers la mère et l’enfant en cas de carence dans la reconnaissance.

La Commission nationale consultative des droits de l’homme est favorable à cette option car elle y voit le dispositif le plus égalitaire et le moins discriminant puisqu’il revient à appliquer le même régime à tous. Néanmoins, elle reconnaît que cela revient à « donner à la présomption et à la reconnaissance un sens différent de celui qu’ils ont traditionnellement en droit de la filiation, à savoir le reflet de la réalité biologique »[616].

Cette option, qui peut apparaître au premier abord relativement simple, s’avère en réalité très complexe à mettre en œuvre, et heurte certains principes structurants du droit de la filiation.

En effet, étendre aux couples de femmes des règles de la filiation exposées dans le titre VII du livre Ier du code civil nécessiterait de revoir en profondeur tout le système de filiation. Cela exigerait de revenir sur l’interdiction d’établir une double filiation de même sexe selon les modes d’établissement dévolus à la filiation d’apparence biologique, or, c’est cette interdiction (qui se conçoit dans le code civil comme une « impossibilité ») qui permet de pouvoir contester une filiation.

Par ailleurs, cette option ne reflète pas le véritable fondement de la construction familiale homoparentale, à savoir la volonté commune de devenir parents.

Ce dispositif fonctionne en effet par imitation des règles d’établissement de la paternité. Toutefois, l’imitation ne peut être que factice. La présomption de co-maternité ne peut pas avoir le même sens que la présomption de paternité qui repose sur l’apparence, celle de la vraisemblance du lien biologique entre le mari de la mère et son enfant. Une présomption de co-maternité ne peut être qu’une simple présomption de la volonté d’être parent. Elles n’ont pas le même sens et ne peuvent pas être contestées de la même façon : la présomption de paternité se combat par la preuve biologique, tandis que la présomption de co-maternité ne pourrait être combattue que par la preuve de l’absence d’implication dans le projet parental. De façon plus générale, cela reviendrait à faire coexister dans le même dispositif d’établissement de la filiation un modèle de vraisemblance biologique et un modèle de volonté.

Comme le souligne le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée Nationale, la présomption de co-maternité « constitue une fiction en mimant les modalités classiques d’établissement de la filiation, qui reposent sur la vraisemblance, le sens de la présomption et de la reconnaissance étant de refléter une vérité biologique alors qu’il conviendrait de clarifier ces modalités pour valoriser le projet parental et de donner toute sa place au don »[617]. Cela revient à « condamner » d’emblée ce type de filiation en ne lui reconnaissant pas toute sa place, à égalité avec la filiation construite sur la vraisemblance biologique.

Le Conseil d’Etat a également rejeté cette option dans son Etude adoptée en assemblée générale le 28 juin 2018 en indiquant que « cette solution apparaît en contradiction avec la philosophie des modes d’établissement classiques de la filiation qui reposent sur la vraisemblance, le sens de la présomption et de la reconnaissance étant de refléter une vérité biologique. Le Conseil d’État attire l’attention sur le fait qu’elle conduirait à une remise en cause des principes fondateurs du droit de la filiation fixés par le titre VII du livre 1er du code civil qui régit l’ensemble des situations. » [618]

3.2.                       Option retenue : l’etablissement de la filiation par declaration de volonte d’être parent

Cette option consiste en la création, dans le livre Ier du code civil à la suite du titre VII, d'un titre VII bis consacré à un dispositif spécifique fondé sur la volonté et l'engagement des couples  qui consentent à l'assistance médicale à la procréation et à devenir parents de l'enfant qui en est issu.

Le dispositif de filiation repose sur une déclaration commune anticipée faite devant le notaire en même temps que le consentement à l’assistance médicale à la procréation, par laquelle chacun s’engage à devenir le parent légal de l’enfant à naître. Cette déclaration permet de consacrer le projet parental du couple. Elle est reçue en la forme authentique par le notaire après que celui-ci ait informé le couple de ses conséquences sur le plan de la filiation.

Le notaire conserve la déclaration commune de volonté originale au rang de ses minutes et chaque auteur de la déclaration se voit remettre une copie. La simple remise d’une des copies à l’officier d’état civil au plus tard lors de la déclaration de naissance de l’enfant suffit ensuite à établir la filiation à l’égard de chacun des auteurs de la déclaration de volonté. L’officier de l’état civil l’indique dans l’acte de naissance de l’enfant, comme c’est le cas pour tous les autres modes d’établissement de filiation.

Aucun lien de filiation ne peut être établi avec le donneur. La filiation légalement établie à l'égard de chacun des parents ayant déclaré leur volonté ne peut être contestée, sauf à démontrer que l'enfant n'est pas issu de la procréation assistée à laquelle il a été consenti. La filiation par déclaration de volonté emporte les mêmes droits et devoirs envers l’enfant pour chacun de ses auteurs.

Cette option permet de rendre compte du projet parental clairement exprimé par un couple de femmes, sans le « couler » dans un moule de vraisemblance biologique qui ne lui correspond pas.  La filiation répond à la vérité du désir partagé d’être parents, et inscrit l’enfant dans la vérité de son histoire.

Cette option de l’établissement de la filiation par déclaration anticipée de volonté peut elle-même être subdivisée en deux sous-options, selon que l'on étend ce mode d'établissement de la filiation spécifique à tous les couples ainsi qu’à la femme non mariée qui ont recours à l'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur ou qu'on le réserve aux couples de femmes.

Etendre ce dispositif à toutes les personnes ayant recours à un tiers donneur, couples de femmes et couples hétérosexuels infertiles, mais aussi femmes non mariées, présente une certaine cohérence puisqu’à un mode de procréation correspond un mode de filiation.

Cette indication du mode d’établissement de la filiation dans l’acte de naissance ne constitue pas une nouveauté : tous les modes d’établissement sont déjà indiqués, explicitement ou implicitement dans l’acte de naissance de l’enfant[619]. Cela ne peut donc pas être regardé comme une discrimination des couples de femmes à raison de leur orientation sexuelle ou des couples hétérosexuels ayant recours à un tiers donneur à raison de leur infertilité.

Le revers de cette cohérence est que ce mode d’établissement de filiation par déclaration anticipée de volonté vient nécessairement signaler qu’il y a eu recours à un tiers donneur, ce qui a une incidence différente qu’il s’agisse d’un couple hétérosexuel ou d’une femme seule, ou qu’il s’agisse d’un couple de femmes. Si l’intervention du tiers donneur relève de l’évidence s’agissant d’un couple de femmes, elle ne l’est pas s’agissant de la femme seule ; quant au couple hétérosexuel, l’intervention d’un tiers donneur est l’indice d’une infertilité, voire d’une pathologie. En effet, même si l’infertilité ne constitue plus une condition d’accès à l’assistance médicale à la procréation, il n’en reste pas moins que, s’agissant des couples hétérosexuels, c’est cette situation d’infertilité qui continuera dans les faits de motiver leur démarche. L’indication de la déclaration anticipée de volonté dans l’acte de naissance de l’enfant pourrait alors venir révéler aux yeux des tiers cette situation d’infertilité du couple, ce qui pourrait avoir pour ces couples, comme le souligne le Conseil d’Etat, « un impact symbolique d’autant plus important que cela distingue les couples hétérosexuels ayant eu besoin d’un don de gamètes des autres couples hétérosexuels dont la pathologie est surmontable par des techniques d’AMP endogènes, la FIV ICSI notamment »[620].

Par ailleurs, si le secret de la conception vis-à-vis des enfants n’est pas à encourager, il n’en demeure pas moins que la révélation de cette vérité d’ordre intime et privé relève de la responsabilité des parents tant que l’enfant est mineur. En effet, durant la minorité, la protection de l’enfant qui inclut le choix du moment de la révélation des circonstances de sa naissance et les modalités de cette information, est avant tout l’affaire des parents.

Enfin, étendre le dispositif de la déclaration de volonté à toutes les personnes ayant recours à un tiers donneur contraindrait à modifier le cadre actuel de l’établissement de la filiation pour les couples hétérosexuels qui ont recours à un tiers donneur. Or, rien ne vient juridiquement justifier ce changement pour ces couples. Certes, la filiation établie à l’égard du père qui n’a pas fourni ses gamètes est une fiction juridique, toutefois, cette fiction reste dans la vraisemblance qui fonde la présomption et la reconnaissance : elle n’entre pas en contradiction avec ces modes de filiation et ne risque pas non plus de priver un homme de sa filiation (comme ce peut être le cas pour une reconnaissance de complaisance par exemple) puisque le donneur est anonyme et qu’aucun lien de filiation ne peut de toute façon être établi à son égard. De surcroît, lorsque le don anonyme est un don d’ovocytes, le père légal est aussi le père biologique et les deux parents entrent donc totalement dans les conditions prévues par le titre VII.

Parce que la modification de l’établissement de la filiation pour les couples hétérosexuels ayant recours à un tiers donneur ne présente aucun caractère de nécessité et pour éviter de troubler inutilement la paix des familles, le Gouvernement a fait le choix de ne pas retenir le dispositif de la déclaration de volonté pour ces couples.

Il ne le retient pas non plus lorsqu’une femme non mariée décide d’avoir recours seule à une assistance médicale à la procréation. Cette orientation permet, comme le soulignent le Conseil d’Etat et la Mission d’information de l’Assemblée Nationale, de ne pas verrouiller la branche paternelle et de ne pas empêcher l’établissement ultérieur d’une seconde filiation par reconnaissance[621]. Si une autre femme souhaitait par la suite établir une filiation avec l’enfant, elle devrait avoir recours à l’adoption.


Réserver le dispositif de la déclaration de volonté aux seuls couples de femmes, sans modifier le mode d’établissement de la filiation qui s’applique depuis 1994 aux couples hétérosexuels qui ont recours à un tiers donneur ne constitue pas une rupture d’égalité, d’une part parce que les couples de femmes et les couples hétérosexuels n’étant pas dans la même situation au regard de la vraisemblance de leur filiation, la différence de traitement est justifiée[622], et d’autre part parce que la filiation créée par la déclaration de volonté emporte exactement les mêmes droits et devoirs pour les enfants vis-à-vis de leurs parents que ceux qui découlent de la filiation établie selon les règles du titre VII.

Le Gouvernement choisit donc de tirer toutes les conséquences nécessaires, mais seulement celles-là, de l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes, en créant une possibilité pour elles d’établir simultanément leur filiation à l’égard de l’enfant qu’elles ont voulu ensemble au moyen d’une déclaration anticipée de volonté.

Ce dispositif de la déclaration anticipée de volonté, qui prend place dans un nouveau titre VII bis du livre premier du code civil, entre le titre VII dévolu à la vraisemblance biologique et le titre VIII consacré à l’adoption, permet de reconnaître pleinement le projet parental du couple de femmes sans pour autant modifier le cadre actuel de l’établissement de la filiation pour les couples hétérosexuels qui ont recours à un tiers donneur.

4.             Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

S’agissant de la filiation pour les couples de femmes, le principal impact dans le code civil consistera en la création, entre le titre VII et le titre VIII du livre premier du code civil, d’un nouveau titre VII bis intitulé : « De la filiation par déclaration anticipée de volonté d’être parent ».

Les articles 310 et 358 sont abrogés et remplacés par un unique article principiel, le nouvel article 6-2 inséré à la fin du titre préliminaire.

La rédaction de l’article 311-20 du code civil est modifiée.

Quelques articles du code civil sont enfin modifiés par coordination (l’article 353-2, l’article 357 et l’article 372).

4.2.                       Impacts économiques et financiers :

            4.2.1 Impacts sur les auxiliaires de justice et officiers publics ministériels

L’avis du comité consultatif national d’éthique du 15 juin 2017 évoque le chiffre de deux à trois mille femmes françaises qui se rendraient chaque année à l’étranger pour y subir une insémination ou recourir à une fécondation in vitro, ce qui laisse entrevoir un doublement des demandes en matière de recueil de consentement et, par conséquent, entre 4 000 et 5 000 déclarations de volonté enregistrées chez les notaires chaque année (tous couples et femmes non mariées confondus).

Ces chiffres restent un ordre de grandeur incertain mais donnent une idée de la nouvelle charge qui pèsera sur les notaires en charge de recueillir le consentement et de recevoir la déclaration de volonté.

 Le dispositif de la déclaration de volonté ne s’appliquant pas aux couples hétérosexuels , il n’y aura aucun changement les concernant puisque le recueil du consentement a déjà été transféré au notaire par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

L’impact pour les notaires est donc faible mais leur rôle sera essentiel pour informer les couples sur les règles de filiation.

            4.2.2 Impacts sur les particuliers

Actuellement le recueil du consentement à l’assistance médicale à la procréation par le notaire coûte la somme de 76,92 euros hors taxe. Cet acte a été exonéré des frais d’enregistrement par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation des moyens de la justice pour la période 2018-2022.

La déclaration anticipée de volonté sera reçue en même temps et fera l’objet d’une tarification par arrêté.

4.3.                       Impacts sur les collectivités territoriales

Ces nouvelles dispositions n’auront pas d’impact sur les officiers d’état civil puisque la création de ce nouveau mode d’établissement de filiation ne modifie pas la façon de l’enregistrer au moment de la déclaration de naissance : la déclaration sera indiquée dans l’acte comme le sont la reconnaissance ou la mention du mariage des parents.

Par ailleurs, il est peu probable que l’ouverture de l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes non mariées entraîne un nombre beaucoup plus élevé de déclarations de naissance. En effet, les femmes qui se rendent actuellement à l’étranger dans les pays qui autorisent cette pratique reviennent accoucher en France et les naissances sont donc d’ores et déjà enregistrées par les officiers d’état civil français.

4.4.                       Impacts sociaux

En 2015, le Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes a rendu un avis dans lequel il recommande l’extension de l’accès à la procréation médicalement assistée à toutes les femmes sans discrimination et la possibilité d’une « déclaration commune anticipée de filiation » pour tous les couples ayant recours à une procréation médicalement assistée[623].

4.5.                       Impacts sur les particuliers 

La déclaration anticipée de volonté n’entraînera aucun impact sur les couples de personnes de sexe différent ayant recours à une procréation médicalement assistée avec l’intervention d’un tiers donneur. En revanche, dans les couples de femmes, la compagne non mariée de la mère pourra devenir légalement le parent de l’enfant et l’épouse le deviendra plus rapidement que par la procédure d’adoption. La filiation de l’enfant né d’une assistance médicale à la procréation au sein d’un couple de femmes se trouvera sécurisée.

5.             Consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

Le Conseil national pour l’évaluation des normes a rendu un avis le 11 juillet 2019.

Consulté le 15 juin 2019, le Conseil supérieur du notariat a par ailleurs rendu un avis le 5 juillet 2019.

5.2.                       Modalités d’application

            5.2.1 Application dans le temps

Ces dispositions entreront en vigueur au lendemain de la publication de la loi conformément à l’article 1er du code civil.

            5.2.2 Application dans l’espace

S’agissant de dispositions en matière d’état des personnes, elles s’appliqueront de plein droit en France métropolitaine, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à la Réunion, ainsi qu’à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, et à Saint-Pierre et Miquelon.

            5.2.3 Textes d’application

Les dispositions législatives d’extension de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules nécessitent une adaptation réglementaire pour le nom et la délivrance de livret de famille (décrets n°2004-1159 du 29 octobre 2004 et n° 74-449 du 15 mai 1974).

Par voie de conséquence, l’arrêté fixant le modèle de livret de famille devra également être modifié.

Concernant le recueil de la déclaration de volonté devant notaire, il s’agit d’un nouvel acte nécessitant une tarification de cet acte notarié par arrêté conjoint du ministère de la justice et du ministère de l'Économie et des Finances.

 

 

 


Article 5 Etendre le don croisé d’organes à plus de deux paires de donneurs/receveurs pour améliorer l’accès à la greffe

1.             État des lieux

1.1.                       Cadre Général

1.1.1        La greffe d’organes, de tissus ou de cellules permet de soigner des malades et blessés, d’éviter des traitements lourds, parfois de prendre en charge des handicaps ou enfin de sauver des vies. La technique chirurgicale et médicale est de mieux en mieux maîtrisée et les situations dans lesquelles une greffe est recommandée sont de plus en plus nombreuses. Ainsi le nombre de patients en attente de greffe nouvellement inscrits sur le registre national croît chaque année, comme le montre le tableau ci-dessous :

Evolution du nombre de nouveaux inscrits 2008-2017 (Source Agence de Biomédecine)

_

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Cœur

508

485

463

515

530

546

570

622

574

545

Cœur-poumons

45

24

23

18

24

19

17

13

14

8

Foie

1372

1466

1580

1532

1724

1822

1790

1757

1826

1899

Intestin

20

7

7

11

8

5

2

3

2

3

Pancréas

116

125

119

93

119

127

129

131

116

130

Poumon

277

276

272

325

334

377

362

382

360

425

Rein

3731

3907

4172

4028

4346

4555

4793

4843

5269

5280

Total

6069

6290

6636

6522

7085

7451

7663

7751

8161

8290

1.1.2        Pour répondre à ce besoin, l’activité de greffe en France est organisée autour du prélèvement sur donneur en état de mort encéphalique et sur donneur vivant pour certains organes. Le cadre législatif pour le don du vivant a évolué depuis les premières lois de bioéthique.

Le don du vivant est depuis 1994, une source complémentaire de greffons pour les personnes nécessitant une greffe rénale et de manière beaucoup moins développée une greffe hépatique. En 1994, la première loi de bioéthique a réservé le don d’organe par une personne vivante au père ou à la mère du receveur. La loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique a étendu cette possibilité de don au conjoint, aux frères ou sœurs, aux fils ou filles, aux grands-parents, aux oncles ou tantes, aux cousins germains et cousines germaines ainsi qu’au conjoint du père ou de la mère du receveur. C’est dans cette loi que le prélèvement et la greffe d’organe ont été déclarés priorité nationale (article L. 1231-1-A du code de la santé publique). Enfin, la loi n° 2011-814 relative à la bioéthique du 7 juillet 2011, dans son article 7, a permis d’élargir le don du vivant à toute personne apportant la preuve d'une vie commune d'au moins deux ans avec le receveur. Cette loi a également étendu les possibilités de prélèvement sur donneur vivant en autorisant le don croisé d’organes. Celui-ci intervient entre deux paires donneurs-receveurs lorsque le don n’est pas possible au sein de chaque paire en raison d’une incompatibilité de groupes sanguins ou pour des raisons immunologiques. Le donneur d’une paire A donne alors un rein au receveur d’une paire B, et vice-versa. Aux termes du troisième alinéa de l’article L. 1231-1 du code de la santé publique, le nombre de paires donneurs-receveurs incluses dans le programme est actuellement limité à deux.

1.1.3        En 2017, 16% des greffes rénales ont été réalisées à partir de greffon de donneur vivant mais seules une dizaine de greffes se sont faites dans le cadre d’un don croisé.

Les greffes réalisées chaque année sont loin de satisfaire les besoins. Pour les greffes rénales, 3543 greffes ont été réalisés en 2018 alors plus de 5000 nouveaux patients supplémentaires sont inscrits annuellement ces dernières années.

Le recours au don croisé peine à se développer alors même qu’il doit permettre d’apporter une réponse à des patients en impasse immunologique et que les expériences étrangères montrent tout leur intérêt. Il répond au constat que malgré la présence d’un volontaire au don au sein de leur entourage, il existe dans plus de la moitié des cas une incompatibilité entre le donneur et le receveur.

Ainsi, seules 10 greffes dans le cadre d’un don croisé ont été effectuées entre 2014 et 2016 (4 en 2014, 2 en 2015 et 4 en 2016)[624].

Greffes réalisées par organe de 2014 à 2018

 (source : Agence de la biomédecine)

 

2014

2015

2016

2017

2018

Greffes cardiaques

423

471

477

467

448

Greffes cardio- pulmonaires

13

8

13

6

9

Greffes pulmonaires

327

345

371

378

372

Greffes hépatiques

 (dont à partir de donneurs vivants)

1 280

(12)

1 355

 (15)

1 322

 (5)

1 374

 (18)

1 323

 (14)

Greffes rénales

 (dont à partir de donneurs vivants)

3 232

(514)

3 486

(547)

3 615

 (576)

3 782

(611)

3 543

(537)

Greffes pancréatiques

79

78

90

96

78

Greffes intestinales

3

3

3

2

3

TOTAL

(dont à partir de donneurs vivants)

5 357                 

(526)

5 746                        

(562)

5 891                     

(581)

6 105         

(626)

5 781            

(551)

 

1.1.4        La protection du donneur vivant est assurée par la mise en place d’une procédure comportant trois étapes essentielles que sont l’information du donneur sur la procédure et ses impacts potentiels, le recueil de son consentement auprès du Président du tribunal de grande instance et l’autorisation de son prélèvement par un comité d’experts dit « comité des donneurs vivants ».

Le comité des donneurs vivants est un élément clef dans la sécurisation du parcours du donneur et sa protection.

Sa mission est de vérifier que le donneur est libre de sa décision et qu’il est informé des risques et conséquences éventuelles, sans pour autant porter d’appréciation médicale. Il autorise en fin de processus l’autorisation du prélèvement.

Aux termes de l’article L. 1231-3 du code de la santé publique, le comité d’experts est composé de médecins, d’un psychologue et d’une personne qualifiée dans le domaine des sciences humaines et sociales. Cette composition est adaptée dans un contexte pédiatrique en intégrant, dans cette hypothèse, une personne qualifiée dans le domaine de la psychologie de l’enfant et un pédiatre dès lors que des prélèvements sont effectués chez des mineurs (dans le cas des prélèvements de cellules souches hématopoïétiques).

Actuellement, les comités des donneurs vivants sont répartis sur le territoire en neuf comités dont la zone géographique est prévue par arrêté. Pour faciliter l’organisation de ces comités, dans l’intérêt tant des donneurs que des receveurs, la mise en place d’une liste nationale d’experts est proposée.

1.2.                       Cadre constitutionnel

Les articles 16 et suivants du code civil instaurent un statut du corps humain qui est une partie intégrante du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine.

Deux principes encadrent plus particulièrement l’utilisation du corps humain : les principes d’inviolabilité et de non-patrimonialité. Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain (article. 16-1 du code civil) et le corps humain et ses éléments ne peuvent faire l’objet de transactions financières (articles. 16-5 et 16-6 du code civil).

Si ces principes n’ont pas valeur constitutionnelle en eux même, ils sont nécessaires à la mise en œuvre de la sauvegarde  de la dignité humaine[625] qui est un principe à valeur constitutionnelle dans la décision n° 94343/344 du Conseil constitutionnel du 27 juillet 1994, portant sur les lois relatives, respectivement, au respect du corps humain et au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal.

Toutefois, l’atteinte à l’intégrité corporelle est possible sous réserve de deux conditions cumulatives, d’une part, en cas de nécessité médicale pour la personne ou, à titre exceptionnel, dans l’intérêt thérapeutique d’autrui, avec son consentement préalable, d’autre part (article. 16-3 du code civil).

Le principal risque associé au don d’organes entre personnes vivantes et partant de l’extension des hypothèses de don croisé d’organes est d’alimenter un trafic d’organes ce qui contreviendrait au principe de non-patrimonialité du corps humain. Pour s’en prémunir, le dispositif envisagé ne remet pas en cause l’exigence d’un lien affectif ou de parenté entre le donneur et le receveur, meilleure garantie de la gratuité du don. De surcroit, l’Agence de la biomédecine reste seule compétente pour assurer la gestion du registre des paires associant donneurs vivants et receveurs potentiels ayant consenti à un don croisé d'organes. Enfin, les garanties procédurales de recueil du consentement et d’autorisation du prélèvement, qui sont particulièrement exigeantes dans le souci de protéger le donneur vivant de toute pression et de s’assurer du caractère volontaire et éclairé de façon pleine et loyale de son don, restent inchangées.

Par conséquent, le principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine et les principes qui en découlent ne sont aucunement remis en cause par le projet du Gouvernement de développer le don croisé d’organes entre des donneurs et des receveurs autorisés au titre du premier et deuxième alinéa de l’article L. 1232-1 du code de la santé publique.

1.3. Cadre conventionnel

1.3.1 Conseil de l’Europe :

Ratifiée par la France en 2011, une convention du Conseil de l’Europe est dédiée à la protection des droits de l'homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine[626].

Cette convention affirme la primauté de l'intérêt et du bien-être de l'être humain sur le seul intérêt de la société ou de la science (article. 2). Elle engage les Etats à assurer un accès équitable à des soins de santé de qualité appropriée (article. 3), exige le consentement libre et éclairé de la personne avant toute intervention médicale (article. 5) et prend des mesures de protection des personnes n'ayant pas la capacité de consentir (article. 6) et des personnes souffrant d'un trouble mental (article. 7). Elle pose encore le droit à l'information et au respect de la vie privée s'agissant des informations relatives à la santé (article. 10).

Le prélèvement d’organes et de tissus sur un donneur vivant ne peut intervenir qu'avec son consentement exprès, dans l'intérêt thérapeutique du receveur et en l'absence d'autre possibilité comme un prélèvement sur donneur décédé (article. 19). Enfin, le corps humain et ses parties ne doivent pas être une source de profit (article. 21).


1.3.2 Union Européenne[627] :

L’Union Européenne ne dispose pas de compétence dans le domaine de la biomédecine. Cependant, outre les avis du Groupe européen d'éthique pour les sciences et les technologies nouvelles et la Charte des droits fondamentaux de l’Union, de nombreux textes de droit dérivé portent sur le domaine de la biomédecine.

Aux termes du premier article de la Charte « Aucun des droits inscrits dans la Charte ne peut être utilisé pour porter atteinte à la dignité humaine ». Ainsi, aucune des libertés de circulations inscrites dans la Charte ne peut déroger aux principe de la dignité humaine ou au droit à l’intégrité physique ou mentale dans le domaine de la médecine et de la biologie de la santé[628].

Pour assurer ces droits, la Charte prévoit le respect du principe de consentement, l'interdiction des pratiques eugéniques, l'interdiction de l'utilisation du corps comme source de profit et la prohibition du clonage humain reproductif (article 3 alinéa 2).

En matière d’utilisation des éléments du corps humain, le droit dérivé reprend indirectement ces principes dans les directives « tissus et cellules humains » et « organes humains »[629] en laissant néanmoins une latitude aux Etats membres pour organiser leur système[630].

Le projet du Gouvernement respecte le droit de l’Union.

1.4.                       Éléments de droit comparé

Plusieurs pays ont développé la pratique des dons croisés. Il s’agit principalement des Etats suivants : Allemagne, Autriche, Belgique, Canada, Corée du Sud, Espagne, États-Unis, Italie, Japon, Malte, Norvège, Pays-Bas, Portugal, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Slovaquie et Suisse.

Les Etats-Unis autorisent le don croisé d’organes depuis 2007 sans restreindre le nombre de paires impliquées[631] ou imposer la simultanéité des opérations chirurgicales. Toutefois, les pratiques sont diversifiées selon les centres de greffe[632]. Les échanges de greffons entre plus de deux paires sont réalisés de façon successive sans limite de temps et de façon simultanée entre deux paires[633]. Les Etats-Unis n’ont pas recours aux greffons issus d’une personne décédée dans le don croisé d’organes mais recourent à un donneur altruiste, sans lien avec un receveur, pour initier la chaîne de dons, aussi qualifié de « bon samaritain »[634].

Le don croisé d’organes est pratiqué depuis 2003 aux Pays-Bas[635]. Le Protocole national d’échange de greffons rénaux[636] prévoit un nombre maximal de quatre paires[637] et la simultanéité des opérations chirurgicales de prélèvement et de greffe[638]. Certains programmes de don croisé recourent à un donneur altruiste pour le premier échange d’organes[639].

S’agissant du Royaume-Uni, le droit anglais ne prévoit pas de limite au nombre de paires incluses dans un don croisé d’organes[640]. Si la simultanéité des opérations n’est pas mentionnée dans la loi, le ministère de la santé [641] fixe un objectif de réalisation des opérations en même temps, sauf circonstances exceptionnelles[642]. Les greffons issus d’une personne décédée ne sont pas utilisés dans le cadre des dons croisés, la chaîne pouvant être initiée par un donneur altruiste[643].

2.             Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.                       Nécessité de légiférer

Le don croisé est une stratégie essentielle pour les patients au statut immunologique complexe.

Malgré des initiatives de l’Agence de la biomédecine et des acteurs de terrain pour le développer, seules 10 greffes rénales ont pu être réalisées dans le cadre d’un don croisé entre 2014 et 2016.

Des options non législatives pour relancer le programme de don croisé (communication et information, concertations avec les professionnels, développement d’échanges internationaux comme l’accord passé entre l’Agence de la biomédecine et la Suisse -Swiss Transplant- etc.) ont été explorées, sans succès.

Le développement du don croisé dépend aujourd’hui d’une rénovation de son cadre.

Cette rénovation nécessite des modifications législatives, pour élargir le nombre de paires éligibles, permettre de faciliter l’appariement par l’introduction d’un donneur décédé et assouplir la condition de « simultanéité » aujourd’hui très strictement définie c’est-à-dire qu’elle correspond à la réalisation simultanée des opérations chirurgicales de prélèvement et de greffe.

L’encadrement de la procédure menant au don du vivant repose sur un comité d’experts chargé d’informer de manière exhaustive les donneurs sur les conditions de leur don et ses conséquences, puis d’autoriser le prélèvement après que le président du tribunal de grande instance ait recueilli le consentement du donneur.

Or aujourd’hui, malgré le nombre de membres et suppléants défini par zone géographique pour composer les comités, il peut être difficile de mobiliser les experts et donc de réunir les comités donneurs vivants. Cette organisation régionalisée alourdit la procédure, l’allonge et peut représenter un facteur d’anxiété voire même de démobilisation pour les donneurs du fait de son absence de souplesse.

Pour simplifier le fonctionnement des comités, en garantir la composition, gage de vision pluridisciplinaire nécessaire à la protection du donneur du point de vue éthique et en faciliter l’accès pour les donneurs, il paraît nécessaire d’en revoir le fonctionnement en supprimant la notion de liste par ressort géographique au profit d’une liste arrêtée au niveau national. Ainsi, à l’instar de ce qui existe aujourd’hui pour les cas d’urgence vitale, l’Agence de la biomédecine pourrait composer les comités en désignant au sein de cette liste nationale, cinq membres disponibles en respectant les exigences de compétences.

La faculté de réunir de manière facile et rapide des comités est également indispensable pour accompagner le développement du don du vivant.

Pour y parvenir, il convient de modifier les dispositions législatives actuelles.

2.2.                       Objectifs poursuivis

La mesure proposée par le Gouvernement vise à dynamiser le don croisé en augmentant les possibilités d’appariement entre les donneurs et les receveurs pour des malades ayant des difficultés d’accès à un greffon compatible. Elle permet de répondre plus largement à la demande croissante de greffe pour des patients en stade d’insuffisance rénale chronique terminale qui affecte une part croissante de la population française et représente un enjeu majeur de santé publique.

La Haute autorité de santé a estimé dans son évaluation médico-économique de l’insuffisance rénale chronique terminale en octobre 2014 que le développement de la transplantation rénale est la stratégie de prise en charge la plus efficiente[644].

Par ailleurs, la mesure envisagée par le Gouvernement simplifiera l’organisation et le fonctionnement des comités des donneurs vivants et permet de pallier les difficultés de mobilisation de ses membres tout en garantissant un égal accès territorial des donneurs à ces comités.

3.             Options possibles et dispositif retenu

3.1.                       Options envisagées

Plusieurs évolutions sont envisagées pour développer le don croisé. Elles concernent le nombre de paires de donneurs-receveurs, la simultanéité des prélèvements et la nature des greffons inclus dans la chaîne.

Il n’a pas été établi avec certitude de longueur optimale des chaînes de paires. Cependant, de nombreuses simulations, sollicitant l’expertise de mathématiciens de haut niveau (SE Gentry, Fields Medal), montrent que l’augmentation du nombre de paires accroit les possibilités de combinaison c’est-à-dire les chances d’accès à la greffe pour des patients immunologiquement complexes.

Les chaînes de grande longueur (jusqu’à 30, 40, 60 donneurs – receveurs) ont été décrites, dans les pays où elles sont autorisées mais restent en pratique exceptionnelles. Il faut prendre en compte le fait que la réalisation de très grandes chaînes (>20) augmente les risques de rupture de chaîne, le délai de transplantation et la complexité logistique. En conséquence la taille souhaitable semble se situer entre 4 et 6 [Gentry, 2009]. Dans d’autres équipes de recherche, des simulations avec des chaînes de trois, non simultanées, ont également obtenu des résultats très favorables [De Klerk 2010]. En pratique, l’expérience américaine, rapportées en 2017 portant sur 1 748 transplantations de ce type, indique un nombre moyen de 4,6 paires indiquant que les chaînes de deux paires, trois paires et quatre paires sont de loin les plus fréquentes [Cowan et al, 2017].

Options possibles en termes d’élargissement de chaîne de don croisé :

-          ouvrir à 3 paires de donneurs-receveurs ;

-          ouvrir à 4 paires de donneurs-receveurs ;

-          ouvrir à « n » paires c’est-à-dire ne pas fixer de limites à la chaîne.

Pour les raisons qui seront exposées au point 3.2, c’est l’option intermédiaire qui a été retenue. 

 

Au lancement du programme de don croisé, la simultanéité des opérations chirurgicales de prélèvement et de greffe a été retenue comme moyen de prévenir le risque de survenue de contre-indication médicale ou de rétractation de l’un des donneurs, après la greffe de son proche.

Il convient de rappeler dans les faits qu’aujourd’hui, seules les opérations chirurgicales de prélèvement sont réalisées simultanément ; celles de greffe, compte tenu notamment de l’impératif de respect de l’anonymat conduisant à prélever le donneur et greffer le receveur dans des endroits différents, imposent des contraintes logistiques donc de temps dus aux transports des organes vers le receveur. Cependant, l’opération de greffe doit impérativement être réalisée dans un délai contraint par la durée maximale de conservation du greffon.  Pour le rein, elle est estimée à environ 21 heures. Le respect de cette durée s’impose pour garantir l’intégrité des greffons et la réussite de la greffe.

Actuellement, la simultanéité des interventions chirurgicales dans des établissements de santé différents entraine de lourdes contraintes logistiques : réservation des salle d’opération, mobilisation des équipes chirurgicales d’anesthésie, paramédicale, de soins post-opératoires immédiats qui nuit à la faisabilité de la procédure. Toutefois, la séparation des lieux dans lesquels interviennent ces différentes opérations chirurgicales est une garantie essentielle du respect de l’anonymat entre chacune des paires de donneurs-receveurs. De manière logique, la difficulté organisationnelle à réaliser des interventions chirurgicales simultanées augmente avec le nombre de paires impliquées.

Une des pistes pour améliorer la faisabilité du don croisé est donc d’assouplir les conditions de simultanéité. La question qui en résulte est celle d’un risque potentiellement majoré de rupture de chaîne. A ce propos, la littérature internationale la plus récente rapporte que lorsque les conditions de non simultanéité ne sont pas imposées dans le recours au don croisé, le taux de remords est évalué à 1,7 % des chaînes [Cowan, 2017] (contre 5 % dans une étude de 2009 [Gentry, 2009]).

Options possibles en termes de délai de réalisation des opérations de prélèvement et de greffe :

-          maintien de la condition de la simultanéité ;

-          assouplissement de la condition de la simultanéité en fixant un délai « raisonnable » tenant compte des contraintes organisationnelles ;

-          supprimer toute condition de délai de réalisation.

Comme cela sera expliqué, l’option intermédiaire a été privilégiée.

Le receveur d’organes engagé dans un processus de don croisé d’organes est avant tout un patient en attente de greffe, et à ce titre, inscrit sur la liste nationale qui recense toutes les personnes dans cette situation et qui ont vocation à bénéficier d’un greffon prélevée sur une personne décédée.

Les personnes qui se voient proposer l’inscription dans un don croisé, sont des personnes dont la comptabilité immunologique est complexe. Le recours au don croisé doit donc être vu comme une chance supplémentaire pour ces receveurs potentiels de bénéficier d’un greffon compatible.

Actuellement le don croisé est limité à deux paires de donneurs-receveurs, ce qui limite dans les faits les possibilités d’appariement. Pour trouver les compatibilités, des cycles d’appariement trimestriel sont lancés et reposent sur une modélisation mathématique de la chaîne en fonction des données immunologiques de chacun.

La difficulté apparaît lorsque les paires engagées dans le don croisé sont constituées mais que l’appariement entre les couples de donneurs-receveurs montre une impasse pour l’un des receveurs. Actuellement, l’ensemble de la chaîne de don croisé est dans ce cas remis en cause.

Pour pallier ces situations délicates tant pour les couples de donneurs-receveurs qui se sont engagés dans un processus exigeant en ayant un espoir de voir aboutir un greffe plus rapidement, que pour les équipes soignantes, la solution est de maximiser les possibilités d’appariement. Cette solution peut venir de l’introduction dans le processus de don croisé, d’un organe prélevé sur une personne décédée.

Ainsi, au moment du lancement du cycle d’appariement tenant compte des statuts immunologiques de chacune de paires de donneurs-receveurs, il est inclus une recherche de compatibilité à partir d’un greffon issu d’une personne décédée. Si la compatibilité avec un organe issu d’une personne décédée est trouvée pour le receveur en impasse, alors la chaîne de don croisé peut être lancée et aboutir. Dans ce cas, la chaîne de don croisé débute par la mise à disposition de l’organe issu d’une personne décédée qui donne le top départ pour les opérations de prélèvement et de greffe consécutives.

Le recours à un organe issu d’une personne décédée au sein d’une chaîne de don croisé peut aussi s’entendre comme une solution pour se prémunir d’une rupture de la chaîne dans l’hypothèse d’un retrait de dernier moment d’un donneur.

La possibilité de l’introduction d’un greffon issu d’une personne décédée dans le recours au don croisé a été mentionnée par le Conseil d’Etat, le Conseil consultatif national d’éthique et l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

L’autre alternative pour dépasser les situations d’impasse immunologique d’un des receveurs de la chaîne consisterait à introduire un donneur vivant « altruiste » c’est-à-dire sans lien de parenté, ni lien affectif stable, au sein de la chaîne de don croisé. Cette pratique a cours au niveau international dans certains pays.

Cette option a été exclue car elle risquerait de fragiliser les principes éthiques défendus par la France, et fondateurs du corpus juridique de la bioéthique : l’anonymat, le bénévolat et la gratuité. En effet, l’ouverture du don d’organe au donneur altruiste poserait la question de la motivation du donneur et notamment de sa possible rémunération, du choix par ce dernier du receveur qu’il entend aider et mettrait en exergue le risque de pression morale et financière qui pourrait être exercée sur le donneur avec les dérives possibles pouvant à l’extrême aller jusqu’au trafic d’organes.

Le conseil d’Etat l’a rappelé au travers de son avis : « le régime du prélèvement d’organes sur donneur doit rester précautionneux pour ne pas heurter les principes d’inviolabilité et de non patrimonialité du corps humain. En particulier, il formule un avis réservé sur la proposition d’autoriser un « don solidaire » sans aucun lien affectif, y compris pour induire une « chaîne de dons » sous la forme de dons croisés.

Options concernant la diversification des types de greffon au sein du don croisé :

-          Initiation de la chaîne par un donneur altruiste,

-          Introduction d’un organe issu d’une personne décédée ;

La seconde option est retenue.


En ce qui concerne la composition et le mode de fonctionnement des comités des donneurs vivants, l’objectif est d’en simplifier les modalités afin que les personnes engagées dans un don du vivant puissent y avoir accès dans des délais raisonnables et au plus près de leur domicile, avec un niveau d’expertise, d’écoute et d’indépendance garantissant le respect de la procédure conduisant à l’autorisation d’un prélèvement sur une personne vivante.

Nombre de réunions des comités

Nombre d'auditions

Décisions comités

 

 

Autorisation

Information

Refus

263

611

459

139

3

Source : Agence de la biomédecine

Parmi les options possibles pour simplifier les modalités de constitution de comité, il pourrait être fait le choix de modifier la composition et de réduire le nombre d’experts à mobiliser à 3 contre 5 aujourd’hui. Cependant la composition actuelle, par son caractère pluridisciplinaire médical, psychologique et éthique, apparaît comme une garantie de protection du donneur engagé dans un don du vivant.

L’autre option consiste à conserver la composition actuelle mais à supprimer la contrainte liée à une organisation reposant sur des listes fixées par ressort territorial. L’ABM serait alors en capacité de composer les comités à partir d’une liste nationale d’experts.

Options concernant les comités des donneurs vivants :

-          Modifier et restreindre la composition des comités ;

-          Supprimer la condition de liste de membres établie selon un ressort territorial au profit d’une liste nationale.

La présente mesure du projet de loi retient la seconde option uniquement.

3.2.                       Option retenue

L’option retenue pour renforcer le programme de dons croisés et améliorer ainsi l’accès à la greffe consiste à :

-          Etendre le don croisé à un maximum de quatre paires de donneurs-receveurs ;

-          Assouplir la condition de simultanéité en encadrant le délai de réalisation des opérations de prélèvement des organes dans un intervalle de temps de 24 heures ;

-          Ouvrir la possibilité de recourir à un organe issu d’une personne décédée dans le cadre du don croisé notamment en cas d’impasse immunologique pour un receveur, ou pour pallier le retrait d’un donneur.

Cette option s’appuie sur les trois leviers principaux pour dynamiser le recours au don croisé et permet un équilibre entre l’amélioration des résultats des dons croisés par l’optimisation des possibilités d’appariement, la recherche d’amélioration des conditions organisationnelles des opérations chirurgicales de prélèvement et de greffe tout en maintenant la garantie de protection accordée au donneur et receveur engagés dans le don croisé.

L’ouverture à quatre paires au maximum de donneurs receveurs engagés dans le don croisé est retenue au vue des expériences internationales rapportées, et tient compte des capacités organisationnelles des équipes hospitalières françaises. C’est un choix rationnel qui ouvre de manière raisonnée la chaîne dans l’objectif de favoriser la comptabilité immunologique entre les donneurs et les receveurs et accroître ainsi les chances de greffe.

L’assouplissement de la condition de simultanéité des opérations de prélèvement et de greffe par la fixation d’un délai de 24 heures pour la réalisation de l’ensemble des opérations de prélèvement s’appuie sur les retours d’expérience des professionnels de santé et les comparaisons internationales. L’Agence de la Biomédecine a recueilli les observations des équipes médicales et des sociétés savantes qui convergent sur le constat d’une impossibilité à faire croitre le recours au don croisé en France dans les conditions actuelles de réalisation (certains mentionnant même le caractère dissuasif du cadre actuel). Or, il faut rappeler que le don croisé offre de vraies perspectives tout particulièrement pour les patients immunisés.

Par ailleurs, les exemples internationaux montrent que la majorité des pays réalisant des dons croisés n’exige pas des conditions de simultanéités (Australie, Canada, Royaume Uni, Etats-Unis) ou prévoit des aménagements (Pays-Bas)[645].

Le Conseil d’Etat relève que « le caractère contraignant de la simultanéité des interventions explique qu’[elles] soient peu pratiquées. Il semble pourtant que l’obligation de simultanéité des prélèvements pourrait être quelque peu assouplie »[646].

La souplesse introduite est strictement cadrée par un délai impératif qui reste court, 24 heures, et s’accompagnera de garanties pour préserver le receveur du risque éventuel de rupture de la chaîne de don croisé.

En premier lieu, il convient de rappeler que le donneur qui s’engage dans un don croisé, le fait au bénéfice de son proche qui recevra grâce à ce dernier un organe dans un délai plus court.

Par ailleurs, l’ensemble du processus est aujourd’hui d’ores et déjà encadré pour prévenir le risque de retrait d’un donneur et s’appuie sur une information détaillée sur le prélèvement et les risques spécifiques du don croisé d’organes délivrée par un comité d’experts, le recueil du consentement devant une autorité judiciaire, une autorisation au prélèvement donné par le comité d’experts, un suivi médical et psychologique rapproché commençant plusieurs mois avant la date prévisionnelle de l’opération, et une absence totale d’information au donneur (comme au receveur) de son rang au sein de la chaîne de don croisé.

L’évolution des conditions de réalisation du don croisé sera accompagnée d’un renforcement de ce processus, notamment concernant les modalités d’informations et d’entretiens préalables du donneur vivant et du receveur pour garantir en toute transparence leur parfaite compréhension sur les modalités de réalisation du don croisé et ses conséquences. Ces éléments seront précisés par voie règlementaire. Ce dispositif permettra ainsi de limiter le risque de désistement du donneur en dessous du taux de désistement rapporté dans la littérature médicale de 1,7% des chaînes.

Par ailleurs, au-delà de ces éléments d’encadrement, il est proposé de prévoir explicitement les modalités de prise en charge d’un receveur engagé dans un don croisé, confronté à un échec de greffe consécutif au désistement d’un donneur problème médical ou révocation du consentement). Ainsi, dans cette situation, il est prévu que l’Agence de la biomédecine soit informée sans délai de l’échec de la procédure, afin qu’elle puisse procéder à l’attribution d’un greffon issue d’une personne décédée au receveur concerné, en appliquant les règles de répartition visées à l’article L. 1231-1B du code de la santé publique, c’est-à-dire des règles d’équité visant à tenir compte de la situation particulière dans laquelle est placé un receveur en situation d’échec dans un don croisé.

Pour rappel, les règles d'attribution des organes permettent d'assurer une répartition la plus équitable possible tout en recherchant le meilleur receveur. Ces règles appelées « score » tiennent compte des contraintes techniques liées au prélèvement, au transport des organes et au maintien de la viabilité du greffon. Ces règles de répartition et d’attribution relèvent des missions confiées par la loi à l’Agence de la biomédecine (article L. 1418-1-7 du code de la santé publique) et donnent lieu à un arrêté fixé par le ministre chargé de la santé.

Certains patients sont prioritaires : les enfants, les receveurs dont la vie est menacée à très court terme, les receveurs pour lesquels la probabilité d’obtenir un greffon est très faible du fait de caractéristiques morphologiques ou immunogénétiques particulières. L’inscription du receveur dans une catégorie prioritaire peut s’effectuer selon des modalités pouvant comporter le recours au collège d’experts, qui détermine les indications de priorisation tout en garantissant le principe général d’équité sous-tendant la répartition des greffons.

En d’autres termes, le receveur inscrit dans un don croisé pour lequel la greffe n’a pu aboutir dans ce cadre, se verra classé dans une catégorie prioritaire du fait de l’échec de la procédure de don croisé. L’Agence de la biomédecine avec le recours à des experts recherchera le greffon disposant de la meilleure compatibilité possible (compatibilité des groupes sanguins ABO et compatibilité HLA pour s'assurer que le receveur n'a pas d'anticorps dirigé contre le candidat au don). Le receveur inscrit dans un don croisé est également déjà inscrit sur la liste nationale des receveurs en attente de greffe. Il aura par conséquent plus de chance d’accéder plus rapidement à la greffe du fait de son classement prioritaire.

En conséquence, les garanties ainsi apportées au receveur permettent un équilibre entre sa protection et celle du donneur pour lequel la révocation du consentement, même in extremis en bout de procédure, représente une garantie tout aussi fondamentale.

L’Agence de la biomédecine a par ailleurs mis en évidence le fait que pour les candidats à la greffe de rein pour lesquels se sont manifestés un volontaire au don au sein de leur entourage, il existe dans plus de la moitié des cas une incompatibilité entre le donneur et le receveur. Le recours au don croisé est proposé dans ces situations où le receveur est en impasse immunologique.

Cependant, même en élargissant la chaîne de don de deux paires à quatre paires, une situation d’incompatibilité pour un des receveurs peut survenir.

Dans ces conditions, le recours à un donneur décédé, conformément aux articles L. 1232-1 et suivants du code de la santé publique, permet de multiplier les possibilités d’appariement au sein d’une chaîne de don croisé, et par voie de conséquence d’assurer le succès de toutes les greffes prévues.

La chaîne de don est initiée grâce au greffon issu du donneur décédé et donne le départ du délai de 24 heures pour la réalisation des opérations de prélèvement sur les donneurs compatibles avec les trois receveurs restant. Le donneur non compatible n’est pas prélevé.

Le receveur en impasse immunologique est greffé ainsi que les trois autres receveurs engagés au maximum dans le don croisé. Au total, le lancement de la chaîne de don croisé, permise grâce à l’introduction du greffon issue d’une personne décédée, permet de réaliser jusqu’à quatre greffes là où sans recours à ce greffon, l’ensemble de la chaîne de don croisé aurait été mis en échec.

L’option ainsi proposée s’appuie également sur les avis rendus par diverses autorités et organes consultatifs :

Ainsi, le Comité consultatif national d’éthique dans sa contribution relative à la révision de la loi bioéthique « juge souhaitable une évolution de la législation concernant les dons de reins croisés entre deux paires de donneurs pour autoriser la mise en place d’une chaîne de donneurs successifs, éventuellement initiée avec un rein d’un donneur décédé, tout en s’assurant du respect du consentement éclairé des donneurs comme des patients à greffer »[647].

Le Conseil d’Etat estime que « l’obligation de simultanéité pourrait être quelque peu assouplie » et que « l’initiation d’une chaîne de dons par un don post mortem soulèverait moins d’objections de principe que l’introduction d’un donneur vivant dépourvu de tout lien affectif avec l’un des receveurs »[648].

L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques est favorable à « l’extension de la chaîne de dons croisés à titre expérimental, par exemple sur trois ans, avec une organisation et une évaluation confiées à l’Agence de la biomédecine. L’évaluation pourrait notamment prendre en compte la comparaison des résultats en fonction de l’ajout ou non, en début de chaîne, d’un don à partir d’un prélèvement post mortem »[649].

Le rapporteur de la mission de l’Assemblée nationale est favorable à l’établissement de chaînes de donneurs (plusieurs paires de donneurs/receveurs) en supprimant le verrou de la simultanéité.

En juillet 2018, la société francophone de néphrologie dialyse et transplantation a indiqué être favorable au recours de dons croisés à plusieurs paires mais aussi à son élargissement en prévoyant des cascades où le nombre de paires dans l’appariement est multiple. Elle soutient également l’introduction d’un donneur décédé dans la chaîne. La Société francophone de transplantation estime que plusieurs possibilités sont ouvertes : extension à plusieurs paires, constitution de chaînes et recours au donneur altruiste.

Concernant les comités d’experts (donneurs vivants), l’option retenue consiste à supprimer la notion de liste fixée par ressort territorial au profit d’une liste nationale qui permettra ainsi à l’Agence de la biomédecine de constituer les comités à partir des experts inscrits cette liste, et gagner ainsi en souplesse et rapidité en cas d’indisponibilités de certains membres.

La composition reste contrainte en termes de compétences des experts à mobiliser pour garantir le regard pluridisciplinaire du comité.

La procédure ainsi retenue est celle aujourd’hui prévue par la loi dans les situations d’urgence vitale. Elle deviendrait la procédure de droit commun.

4.             Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

4.1.1.    Impacts sur l’ordre juridique interne

Le présent article modifiera la rédaction des articles L. 1231-1, L. 1231-3 et L. 1231-4 du code de la santé publique.

4.1.2.    Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

Cette mesure est conforme au droit de l’Union européenne, à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine relatifs à la transplantation et aux tests génétiques à des fins médicales (convention d’Oviedo) et à son protocole additionnel relatif à la transplantation d’organes et de tissus qui prévoit notamment en son article qu’ « un organe ou des tissus ne peuvent être prélevés sur un donneur vivant qu'après que la personne concernée y a donné son consentement libre, éclairé et spécifique, soit par écrit soit devant une instance officielle. », bien que la France ne l’ait pas encore ratifié et par lequel elle n’est donc pas liée.

En effet, cette mesure respecte les principes du consentement libre et éclairé du donneur, du droit à l'information et de la gratuité du don. Par ailleurs, le prélèvement d’organes et de tissus sur un donneur vivant ne peut intervenir qu'avec son consentement exprès, dans l'intérêt thérapeutique du receveur.  

4.2.                       Impacts économiques et financiers 

4.2.1.    Impacts budgétaires

Le financement de l’activité de prélèvement et de greffe est assuré par l’assurance maladie au sein de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie. Une politique de financement incitative est mise en œuvre pour inciter les établissements de santé autorisés, à pratiquer tous les types de prélèvements, notamment sur les donneurs vivants, conformément aux orientations retenues par la France en matière de diversification des sources de greffons pour faciliter l’accès à la greffe.

Les dépenses hospitalières théoriques consacrées aux activités concourant à la transplantation, reconstituées par l’Agence de la biomédecine couvrent le recensement des donneurs, les prélèvements d’organes, les hospitalisations pour greffe et post-greffe (suivi et rejets). Ces montants s’élèvent en 2018 au total à 275,2 M€ pour la transplantation (pré-greffe et greffe, pour environ 6 000 greffes tout organe confondu et 3 567 s’agissant du rein) et 61 M€ pour la post-greffe, soit au total 337,2 M€.

Au sein des dépenses de transplantation, l’Agence de la biomédecine estime que le coût du prélèvement des donneurs vivants est aujourd’hui limité à 1,9M€.

Par ailleurs, du point de vue médico-économique, la comparaison effectuée par la Haute Autorité de Santé en 2014 dans son rapport d’évaluation sur la stratégie de prise en charge de l’insuffisance rénale chronique terminale en France, montre que la transplantation rénale représente en moyenne une économie de 300 à 400 € par mois sur les coûts de prise en charge de cette pathologie.

4.3.                       Impacts sur les services administratifs

Cette mesure générera un surcroît d’activité administrative pour l’Agence de la biomédecine, les comités d’experts donneurs vivants et les tribunaux. Cependant, compte tenu du nombre de dons croisés espérés (20 paires), qui restera modéré, ce surcroît d’activité sera soutenable à organisation et effectif constants.  

Elle nécessitera également de la part des établissements de santé une plus grande coordination et planification de leurs activités de greffe.

4.4.                       Impacts sociaux

Certains patients souffrant d’insuffisance rénale chronique terminale peuvent être reconnus travailleurs handicapés. Dès lors, l’accès à la greffe et son succès représentent une perspective de retour à l’emploi pour les personnes concernées.

5.             consultations et modalités d’application

L’Agence de la biomédecine. Elle a rendu son avis le 26 juin 2019.

La Haute autorité de santé a été consultée et a rendu un avis le 12 juillet 2019.

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

La mesure n’est pas directement applicable et nécessite des dispositions règlementaires (décret en conseil d’Etat).

Les conditions temporelles de réalisation des opérations chirurgicales, de recours à un greffon issus d’un donneur décédé ainsi que d’information du donneur et receveur seront en effet précisées par décret en Conseil d’Etat.


Article 6  Permettre le prélèvement de cellules souches hématopoïétiques sur un mineur ou un majeur protégé au bénéfice de ses père ou mère pour accroitre les possibilités de greffes intrafamiliales en l’absence d’autre alternative thérapeutique

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1 Les cellules souches hématopoïétiques sont des cellules pluripotentes qui ont la capacité de se multiplier puis de se différencier en lignées cellulaires. C’est ainsi que toutes les cellules sanguines (hématies, polynucléaires, monocytes, lymphocyte et plaquettes) sont issues de ces souches indifférenciées. L’hématopoïèse est le mécanisme complexe par lequel les cellules souches hématopoïétiques s’engagent dans un processus de différenciation cellulaire qui conduit à la production des différentes lignées cellulaires composant le sang.

Les greffes de cellules souches hématopoïétiques sont utilisées pour traiter des hémopathies malignes (lymphomes, leucémies), certaines tumeurs telles que le cancer du sein mais aussi certains déficits, tels que les aplasies médullaires, les déficits immunitaires ou les hémoglobinopathies. Les cellules souches hématopoïétiques proviennent du patient lui-même (greffe autologue) ou d’un donneur (greffe allogénique). Elles rétablissent des lignées cellulaires sanguines perturbées par certaines maladies sur la moelle osseuse et compensent ainsi les effets délétères de la chimiothérapie.

Les cellules souches greffées proviennent soit d'un prélèvement de moelle osseuse du patient lui-même ou d’un donneur apparenté (intrafamilial) ou non, soit d'un prélèvement dans le sang du patient lui-même ou d’un donneur apparenté ou non après administration d’un facteur de croissance hématopoïétique permettant de sortir les cellules de la moelle osseuse vers le sang. Les cellules souches greffées peuvent également provenir de sang placentaire, appelé aussi sang de cordon.

1.1.2 Le rapport sur l’application de la loi de bioéthique produit par l’Agence de la biomédecine mentionne le volume chiffré de l’activité de prélèvements et les greffes de cellules souches hématopoïétiques pour les années 2017 et 2018 :

Ce même rapport illustre également l’évolution de la répartition des différents types de greffe de 2008 à 2018 :

Données de greffes de cellules souches hématopoïétiques 2017-2018 et répartition par type de donneur (source Agence de la biomédecine)

1.1.3 Ainsi, depuis la loi de bioéthique de 2011, la greffe intrafamiliale haplo-identique de cellules souches hématopoïétiques permet d’augmenter les possibilités de trouver des donneurs de cellules souches hématopoïétiques au sein de la famille du patient (don intrafamilial), et s’est considérablement développée en France et dans le monde. Ce type de greffe représente une nouvelle alternative thérapeutique pour les cliniciens.

L’Agence de la biomédecine enregistre autour de 5 000 greffes par an (autogreffe + allogreffes). En dehors des greffes autologues (le patient est aussi le donneur du greffon), on distingue pour les allogreffes (le donneur du greffon est différent du patient) à la fois les donneurs intrafamiliaux (donneurs apparentés) et les donneurs de registre (donneurs non apparentés).

Au total, 47 % des allogreffes sont réalisées à partir de donneurs compatibles trouvés dans la sphère familiale et 53 % à partir de donneurs compatibles inscrits sur des registres.

1.1.4 La notion de compatibilité pour une greffe est étroitement liée au degré de similitude entre les molécules du système HLA (Human leucocyte antigen) du donneur et du receveur. En effet, ces molécules sont responsables de la reconnaissance du soi et du non-soi. La compatibilité HLA entre le donneur et le receveur en réduisant la réponse immunologique contre le non soi (réponse allo génique) constitue un élément crucial du succès de la greffe de cellules souches hématopoïétiques (on cherche à éviter le rejet du greffon). Alors qu’il existe plus de 10 000 molécules HLA décrites à ce jour, six molécules sont prises en compte pour la compatibilité de la greffe de cellules souches hématopoïétiques : HLA-A, -B, -C et HLA-DR, -DQ, -DP. Pour chacune d’entre elle, un individu présente une part provenant de la mère et une part provenant du père (allèle), soit 12 molécules distinctes.

Ainsi, le meilleur donneur est le frère ou la sœur strictement identique au receveur pour les 12 allèles HLA (greffe géno-identique : un frère et une sœur ont 25 % de chance d’être géno-identique). En l'absence de donneur géno-identique, il est d’abord recherché un donneur non apparenté phéno-identique 10/10, c'est-à-dire identique pour les dix allèles des cinq gènes HLA-A, -B, -C, -DRB1 et -DQB1 (pas de prise en compte de DP).

1.1.5 L’enjeu concerne aujourd’hui les patients qui n’ont pas de donneur HLA compatible, que ce soit dans la famille ou dans les registres de donneurs volontaires. En effet, en l’absence de donneur de registre compatible (HLA 10/10), Il faut recourir à un donneur dit « alternatif » : soit un donneur volontaire moins compatible (9/10), soit une unité de sang placentaire, soit enfin un donneur apparenté à moitié compatible (haplo-identique). Les greffes haplo identiques consistent donc à recourir à un donneur intrafamilial qui ne partage qu’un seul des deux haplotypes avec le receveur (« haplo » signifiant à moitié). On transplante ainsi chez le patient, les cellules souches hématopoïétiques d'un proche à moitié identique (6/12), provenant généralement du père ou de la mère ou d’un frère ou d’une sœur. Cette stratégie thérapeutique se développe progressivement. Ainsi, l’Agence de la biomédecine a enregistré en 2016, 1985 allogreffes de cellules souches hématopoïétiques dont 582 allogreffes apparentées HLA identiques, 316 allogreffes apparentées haplo-identiques (contre 30 en 2011) et 1 060 allogreffes non apparentées.

Le développement des greffes haplo identiques permet la réalisation des greffes dans les populations faiblement représentés dans les registres de donneurs et de réaliser des greffes dans les populations avec des fratries réduites (ex: Chine). Aussi, ce type de greffe permet un accès à la greffe pour des patients n’ayant pas de donneur compatible sur les registres français et internationaux.

Par ailleurs, le recours à ce type de greffe est rendu possible par une modification des protocoles de greffe.

En effet, l’essor important de ces greffes tient à une amélioration des procédures permettant une diminution de la réaction du greffon contre l’hôte, et de la mortalité liée à la greffe. Ces progrès sont liés au fait de pouvoir utiliser des greffons de CSH non manipulés (pas de soustraction des cellules T) chez des patients recevant du cyclophosphamide à forte dose en post-greffe. Ce médicament immunosuppresseur diminue la réponse allogénique in vivo et permet donc cette greffe non HLA compatible. Ainsi, le développement de l'utilisation de cyclophosphamide à forte dose dans les suites immédiates de la greffe remet en question les indications respectives des greffes dites alternatives (donneur volontaire 9/10, familiales haplo-identiques, sang placentaire).

Cette nouvelle technique de conditionnement (préparation du patient à la greffe), basée sur des traitements immunosuppresseurs post-injection du greffon ouvre des perspectives pour les malades qui ne trouvent pas forcément un donneur compatible, ni auprès du registre international, ni au sein des fratries qui sont de plus en plus petites. La notion de famille est plus large en haplo-identique et augmente la probabilité de trouver un donneur. Tous les patients peuvent avoir a priori un donneur.

1.1.6 Le don par des mineurs de cellules souches hématopoïétiques dans le contexte intrafamilial

La loi bioéthique de 1994 a interdit par principe le prélèvement de cellules souches hématopoïétiques sur un mineur (article L. 1241-2 du code de la santé publique). Cependant, l’article 12 de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique, a assoupli ce principe d’interdiction en introduisant la possibilité de prélèvement de cellules souches hématopoïétiques de moelle osseuse au bénéfice des frères et sœurs en l’absence d’autre thérapeutique, et à titre exceptionnel, au bénéfice des neveux et nièces, cousins germains et oncles et tantes. Il n’était en revanche prévu aucune dérogation à l’interdiction de prélèvement de cellules souches hématopoïétiques dans le sang périphérique.

L’article 17 de la loi bioéthique n° 2011-814 du 7 juillet 2011 a harmonisé l’encadrement éthique et médico-technique du prélèvement des cellules souches hématopoïétiques quel que soit le type de prélèvement (moelle osseuse ou sang périphérique) en étendant le principe de dérogation au prélèvement dans le sang périphérique.

Le consentement au prélèvement d’un mineur doit être exprimé par chacun des titulaires de l’exercice de l’autorité parentale.

Le comité d’experts chargé de la délivrance de l’autorisation de prélèvement prévu à l’article L. 1231-3 du code de la santé publique doit apprécier la justification médicale de l’opération et s’assurer que les conditions de réalisation du prélèvement ne comportent aucun risque pour la santé du mineur. Il s’assure que son poids, son âge et sa taille permettent de réaliser ce type de prélèvement sans nuire à sa santé. Il vérifie au préalable que tous les moyens ont été mis en œuvre pour trouver un donneur majeur suffisamment compatible pour le receveur.  

Le comité d’experts entend le mineur si son âge et son degré de maturité le permettent. Il contrôle auprès du mineur apte à exprimer sa volonté, que ce dernier n’exprime aucun refus du prélèvement. Le refus empêche le prélèvement.

1.1.7 Le don des majeurs protégés dans le contexte intrafamilial

Comme pour les mineurs, en 1994, a été posé le principe d’interdiction de prélèvement de cellules souches hématopoïétiques des majeurs faisant l’objet d’une mesure de protection légale (majeurs protégés). Toutefois, une dérogation à ce principe a été introduite en l’absence de solution thérapeutique pour les frères et les sœurs par l’article 12 de la loi 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique. L’article L. 1241-4 code de la santé publique autorise en effet le prélèvement, à titre exceptionnel, au bénéfice de ses neveux, nièces, cousins germains, oncles, tantes en l’absence de solution thérapeutique approprié. Ce système dérogatoire a évolué en parallèle et selon le même rythme que celui applicable aux mineurs. Toutefois, des modalités spécifiques du recueil du consentement sont prévues et diffèrent selon le degré de protection du majeur.

En effet, s’agissant d’un prélèvement de cellules souches hématopoïétiques au bénéfice de son frère ou de sa sœur, deux procédures distinctes sont mises en œuvre :

        Pour une personne en tutelle, le prélèvement est autorisé par le juge des tutelles après avoir entendu, la personne elle-même si elle est en état de s’exprimer, le tuteur et le comité d’experts prévu à l’article L. 1231-3 du code de la santé publique ;

        Pour les personnes en curatelle ou sauvegarde de justice, si le juge des tutelles estime que la personne est apte à consentir, le prélèvement est autorisé par le comité d’experts après que ce majeur ait reçu toutes les informations sur la procédure du prélèvement et les conséquences possibles et ait donné son consentement au juge des tutelles, encadrement identique à celui applicable au prélèvement de cellules souches hématopoïétiques chez des donneurs vivants comme prévu à l’article L. 1241-2 du code de la santé publique..

S’agissant d’un prélèvement de cellules souches hématopoïétiques au bénéfice de son cousin germain ou de sa cousine germaine, de son oncle ou de sa tante, de son neveu ou de sa nièce : seule une personne protégée en curatelle ou de sauvegarde de justice peut faire l’objet d’un tel prélèvement dans la mesure où le juge des tutelles estime que la personne est apte à consentir.

1.1.8 Mission de l’Agence de la biomédecine concernant le suivi des donneurs de cellules souches hématopoïétiques

En parallèle de l’évolution de la loi sur l’encadrement des dérogations portant sur les prélèvements de cellules souches hématopoïétiques, l’article 2 de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique a créé l’Agence de la biomédecine avec des compétences dans les domaines de la greffe, de la reproduction, de l'embryologie et de la génétique humaines. L’Agence de la biomédecine est notamment chargée :

-          de mettre en œuvre un suivi de l'état de santé des donneurs d'organes et d'ovocytes, afin d'évaluer les conséquences du prélèvement sur la santé des donneurs.

-          de gérer le fichier des donneurs volontaires de cellules souches hématopoïétiques ou de cellules mononucléées périphériques pour les malades qui ne peuvent recevoir une greffe apparentée.

1.2. Cadre constitutionnel

Les articles 16 et suivants du code civil instaurent un statut du corps humain qui est une partie intégrante du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine.

Deux principes encadrent plus particulièrement l’utilisation du corps humain : les principes d’inviolabilité et de non-patrimonialité. Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain (art. 16-1 du code civil) et le corps humain et ses éléments ne peuvent faire l’objet de transactions financières (arts. 16-5 et 16-6 du code civil).

Si ces principes n’ont pas valeur constitutionnelle en eux même, ils sont nécessaires à la mise en œuvre de l’exigence constitutionnelle de sauvegarde de la dignité humaine[650] (Décision n° 94-343-344 DC du 27 juillet 1994).

Toutefois, l’atteinte à l’intégrité corporelle est possible sous réserve de deux conditions cumulatives, d’une part, en cas de nécessité médicale pour la personne ou, à titre exceptionnel, dans l’intérêt thérapeutique d’autrui, avec son consentement préalable, d’autre part (art. 16-3 du code civil).

S’agissant du prélèvement de cellules souches hématopoïétiques sur mineur, il convient en outre de rappeler que, par sa décision n° 2018-768 QPC du 21 mars 2019 sur les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l'âge, le Conseil constitutionnel a consacré une exigence constitutionnelle de protection de l'intérêt supérieur de l'enfant déduit des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946. Le Conseil constitutionnel a jugé que le recours à un examen radiologique osseux pour déterminer l’âge d’une personne doit être entourée de garanties et qu'il appartient aux autorités administratives et judiciaires compétentes de donner leur plein effet à l'ensemble de ces garanties. Le Conseil a relevé que, toutefois, seule l'autorité judiciaire peut décider de recourir à un tel examen, après s’être assurée du respect du caractère subsidiaire de cet examen. En outre, cet examen ne peut intervenir qu'après que le consentement éclairé de l'intéressé a été recueilli.

1.3. Cadre conventionnel

Conseil de l’Europe :

La France a formulé une réserve à la Convention d’Oviedo[651] portant sur la liste des bénéficiaires d’un prélèvement de CSH sur un mineur ou un majeur protégé.  L’article 20. 2 de la Convention ne permet de prélever des tissus régénérables sur un mineur que lorsque le receveur est un frère ou une sœur du donneur. La France a déclaré qu'elle appliquera cette possibilité également lorsque le receveur est un cousin ou une cousine germaine, un oncle ou une tante, un neveu ou une nièce, ainsi que le permet l'actuel article L. 1241-3 du code de la santé publique «  Cette extension qui ne remet pas fondamentalement en cause le principe posé à l'article 20 de la Convention est apparue justifiée au législateur français d'un point de vue médical (risque bénin pour le donneur mais bénéfice important pour le receveur) d'autant que des garanties éthiques et de protection du donneur supplémentaires sont prévues dans le dispositif »[652].

Union européenne :

L’Union Européenne ne dispose pas de compétence dans le domaine de la biomédecine. Cependant, outre les avis du Groupe européen d'éthique pour les sciences et les technologies nouvelles et la Charte des droits fondamentaux de l’Union, de nombreux textes de droit dérivé portent sur le domaine de la biomédecine.

Aux termes du premier article de la Charte « Aucun des droits inscrits dans la Charte ne peut être utilisé pour porter atteinte à la dignité humaine ». Ainsi, aucune des libertés de circulations inscrites dans la Charte ne peut déroger aux principes de la dignité humaine ou au droit à l’intégrité physique ou mentale dans le domaine de la médecine et de la biologie de la santé[653].

Pour assurer ces droits, la Charte prévoit le respect du principe de consentement, l'interdiction des pratiques eugéniques, l'interdiction de l'utilisation du corps comme source de profit et la prohibition du clonage humain reproductif (article 3 alinéa 2).

En matière d’utilisation des éléments du corps humain, le droit dérivé reprend indirectement ces principes dans les directives « tissus et cellules humains » et « organes humains »[654] en laissant néanmoins une latitude aux Etats membres pour organiser leur système [655].

Le droit de l’Union européenne s’abstient de définir la liste des bénéficiaires potentiels d’un don d’organes, de tissus ou de cellules.

1.4. Éléments de droit comparé

En Allemagne[656], la loi autorise le don de moelle osseuse chez les mineurs quand certaines conditions sont réunies. Le don de moelle osseuse doit être destiné à un relatif du premier degré ou à un de ses frères et sœurs. Le don de la personne mineure ne peut avoir lieu que si la personne destinataire du don souffre d’une maladie qui menace sa vie et que si aucun autre donneur majeur compatible n’a pu être trouvé. La personne mineure doit se faire expliquer l’importance de l’intervention dans des termes qu’elle est capable de comprendre et doit donner son accord dans la mesure où elle en est capable. L’accord de son responsable légal est aussi nécessaire. Dans le cas où le don de moelle osseuse du mineur doit être réalisé au bénéfice d´un parent du 1er degré, le représentant légal du mineur doit obtenir une décision du tribunal familial.

En Espagne, la loi[657] établit qu'un don de tissus d'une personne vivante mineure ou d’un majeur protégé ne peut être réalisé que lorsqu'il s'agit de cellules souches hématopoïétiques ou d'autres tissus pouvant se régénérer et lorsqu'ils servent au traitement d'une maladie vitale. Le don de CSH est donc autorisé dans le cadre familial. Le consentement au prélèvement doit être donné par le représentant légal du mineur ou de la personne incapable.

Aux Etats-Unis d’Amérique, le prélèvement de CSH sur un mineur au bénéfice d’un membre de sa famille n’est pas interdit par le droit fédéral. L’Académie américaine de pédiatrie (American Academy of Pediatrics) s’est prononcée en faveur du prélèvement de CSH sur des enfants au bénéfice de membres proches de la famille sous cinq conditions[658] :

2.             Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1 Concernant le don de cellules souches hématopoïétiques par un mineur ou un majeur protégé

La liste des bénéficiaires d’un don de cellules souches hématopoïétiques par un mineur ou un majeur faisant l’objet d’une mesure de protection légale fixée par les articles L. 1241-3 et L. 1241-4 du code de la santé publique a été établie à une époque où les greffes haplo-identiques (semi- compatibles) n’étaient pas pratiquées. Elle se limite aujourd’hui à la fratrie, cousins germains, neveux, oncles et tantes.

Or, le développement de la pratique médicale des greffes haplo-identiques qui élargit les possibilités de trouver un donneur compatible au sein d’un cadre intra-familial, représente pour certains patients la seule thérapeutique possible. Aussi, l’élargissement des bénéficiaires aux père et mère, en mettant en œuvre toutes les mesures de préservation de l’intérêt du mineur ou de la personne protégée, correspond à un gain de chance d’année de vie pour les personnes malades et une adaptation au progrès médical.

Concernant les majeurs protégés, il convient également d’ouvrir la possibilité de prélèvement de cellules souches hématopoïétiques dans le sang périphérique, celui-ci constituant un geste plus médical simple pour le donneur que l’anesthésie générale requise par le prélèvement de moelle osseuse. De plus, la balance bénéfice/risque de l’utilisation de facteurs de croissance, s’agissant d’adultes est en faveur de ce type de prélèvement.

Le Conseil d’Etat[659] a estimé qu’ « une réflexion pourrait être engagée sur l’intérêt d’ouvrir la possibilité d’un don ascendant d’un mineur vers l’un de ses parents : l’agence de la biomédecine indique en effet qu’avec le développement de la greffe intrafamiliale haplo-identique, la configuration du don ascendant (du mineur vers les parents) se présente parfois ».

Le rapport au nom de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques sur l’évaluation de l’application de la loi n° 2001-814 du 7 juillet 2001 relative à la bioéthique mentionne qu’une « extension du prélèvement de cellules souches hématopoïétiques vers un ascendant pose un problème juridique ». En effet, le parent (mère et père) malade est également un des détenteurs de l’autorité parentale qui doit exprimer son consentement devant le président du tribunal de grande instance. Il est en quelque sorte « juge et partie » et dans ce cas l’absence de pression vis-à-vis du donneur pourrait être difficile à prouver[660].

Il faut également prendre en compte les évolutions du code civil introduites en 2007 qui tendent à renforcer l’autonomie et la prise de décision des majeurs protégés dans tous les actes qui touchent à leurs biens et à leur personne et qui font l’objet d’une mesure de la présente loi relative à la rénovation des modalités de consentement au don des majeurs protégés.

En conséquence les dispositions des articles L. 1241-3 et L. 1241-4 du code de la santé publique doivent être modifiées.

2.2.2 Concernant le suivi des donneurs de cellules souches hématopoïétiques

Les donneurs non apparentés bénéficient d’un suivi annuel mis en place par le Registre France Greffe Moelle depuis 1994 pour la moelle, et depuis 2000 pour les cellules souches hématopoïétiques. Ce suivi a été repris par l’Agence de la biomédecine en vertu de sa mission de gestion du fichier des donneurs volontaires de cellules souches hématopoïétiques (8° de l’article L. 1418-1).

Les donneurs intrafamiliaux sont, eux, gérés par les équipes de greffe en charge des receveurs. A ce jour, il est complexe, pour ces équipes, d’organiser un suivi rigoureux et systématique, à la fois par manque de moyens (ressources humaines et temps), mais aussi du fait de la difficulté à recontacter les donneurs.

Par ailleurs, comme prévu par le plan d’actions 2017-2021 pour le prélèvement et la greffe de cellules souches hématopoïétiques, l’Agence de la biomédecine a engagé avec la société francophone de greffe de moelle et de thérapie cellulaire une réflexion sur l’organisation du suivi des donneurs apparentés pour s’assurer que les prélèvements ont été réalisés avec toute la qualité et la sécurité requises pour garantir la protection et la santé des donneurs. L’utilisation de facteurs de croissance lors d’un prélèvement dans le sang périphérique, devenue la modalité principale de prélèvement de cellules souches hématopoïétiques, rend encore plus nécessaire un suivi à long terme de l’état de santé des donneurs.

En conséquence, il convient de modifier l’article L.1418-1 8° afin de permettre à l’Agence de la biomédecine de réaliser le suivi de l’ensemble des donneurs de cellules souches hématopoïétiques. 

2.2. Objectifs poursuivis

La mesure envisagée vise à accroitre les possibilités de greffes de cellules souches hématopoïétiques intrafamiliale dans le contexte du développement des greffes haplo-identiques. Ces greffes sont pratiquées dans le traitement de maladies graves du sang. Elle vise également à renforcer l’autonomie et le consentement du majeur protégé tout en garantissant un même niveau de protection.

Enfin, compte tenu du développement des greffes haplo-identiques, il est essentiel que l’Agence de la biomédecine intègre dans ses missions le suivi de l’état de santé des donneurs de cellules souches hématopoïétiques apparentés et non apparentés.

3.             Options possibles et dispositif retenu

3.1.                       Options envisagées

Pour autoriser la possibilité de prélèvement des mineurs ou majeurs protégés au bénéfice des parents, deux dérogations peuvent être envisagées :

        option 1 : étendre la liste des bénéficiaires prioritaires (frère et sœur) aux père et mère en l’absence d’autre thérapeutique.

        option 2 : étendre la liste des bénéficiaires subsidiaires (collatéraux) aux père et mère en l’absence d’autre thérapeutique approprié.

3.2.                       Option retenue

Dans le souci de concilier les intérêts des patients receveurs et la nécessaire protection renforcée du mineur donneur ou majeur protégé donneur vis-à-vis de ses parents, la mesure vise à autoriser par dérogation, en l’absence de solution thérapeutique appropriée, le prélèvement de cellules souches hématopoïétiques sur ces personnes au bénéfice des père et mère en les incluant dans la liste des bénéficiaires subsidiaires collatéraux (option 2). Elle est également justifiée par le fait que le bénéficiaire père ou mère a plus de chance de recevoir une greffe de cellules souches hématopoïétiques compatible de sa fratrie que de ses enfants.

3.2.1 Concernant le prélèvement d’un mineur

Compte tenu de la vulnérabilité du mineur et de ce que le don au profit de ses père ou mère est susceptible de créer un conflit d’intérêt entre lui et ses parents, le président du Tribunal de grande instance désigne un administrateur ad hoc conformément à l’article 388-2 du code civil pour représenter le mineur en lieu et place de ses représentants légaux devant le tribunal de grande instance chargé d’autoriser le prélèvement. Ainsi le tribunal de grande instance se prononce après avoir entendu le mineur s’il est discernant, l’administrateur ad hoc et après avis du comité d’experts. Toutefois, il y a lieu de spécifier que les frères, sœurs, collatéraux ou ascendants ne pourront pas être désignés comme administrateur ad hoc pour prévenir également tout conflit d’intérêt.

Dans le cas de la désignation d’un administrateur ad hoc, l’information sur les risques encourus par le donneur et les conséquences éventuelles d’un tel prélèvement sont délivrées à l’administrateur ad hoc dans les mêmes conditions que les parents. La désignation d’un administrateur ad hoc ne fait pas obstacle à l’expression personnelle de son refus par le mineur discernant, ce refus entrainant l’arrêt de la procédure.

3.2.2 Concernant le prélèvement d’une personne faisant l'objet d'une mesure de protection juridique avec représentation à la personne

Deux types de procédure d’autorisation pourront être mises en œuvre en fonction de la faculté de consentir de la personne protégée :

-          Si le juge des tutelles constate que la personne a la faculté de consentir, la procédure habituelle de droit commun s’applique (information par le comité d’experts, recueil du consentement par le président du Tribunal de grande instance et autorisation par le comité d’experts).

-          Dans le cas contraire, le juge des tutelles pourra autoriser le prélèvement après avis de la personne chargée de la mesure de protection et du comité d’experts. Si le bénéficiaire est l’un des parents ou la personne chargée de la mesure de protection, le juge désignera un administrateur ad hoc comme pour les mineurs avec les mêmes précautions vis-à-vis des ascendants et des collatéraux. Le juge des tutelles pourra autoriser le prélèvement après avoir recueilli l’avis du comité d’expert et de l’administrateur ad hoc.

Au vu de ces nouvelles possibilités d’extension de prélèvement de cellules souches hématopoïétiques sur mineur ou majeur protégé, il convient également de mettre en cohérence les infractions pénales prévues à l’article L. 1271-4 du code de la santé publique et l’article L. 511-5 du code pénal réprimant le non-respect des conditions de prélèvement chez un mineur ou chez une personne vivante majeure faisant l'objet d'une mesure de protection juridique avec représentation à la personne, prévues par les articles L. 1241-3 et L. 1241-4 du code de la santé publique.

3.3.3 Concernant les missions de l’Agence de la biomédecine

Enfin s’agissant des missions de l’Agence de la biomédecine portant sur le suivi de l’état de santé des donneurs, à la différence des donneurs d’organes et des donneuses d’ovocytes (article L. 1418-1 du code de la santé publique), la loi ne prévoit pas le suivi de l’état de santé des donneurs de cellules souches hématopoïétiques apparentés afin d’évaluer les conséquences du prélèvement sur leur santé. Par souci de cohérence mais aussi dans l’intérêt des donneurs et de leur protection, il convient d’étendre cette mission de suivi aux donneurs de CSH apparentés et non apparentés.

4.             Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

4.1.1.    Impacts sur l’ordre juridique interne

La présente mesure nécessitera de modifier la rédaction des articles L. 1241-3, L.1241-4 et L. 1271-4 du code de la santé publique et de l’article L. 511-5 du code pénal.

Le suivi des donneurs de cellules souches hématopoïétiques s’ajoutera aux missions de l’Agence de la biomédecine et figurera au 6° de l’article L. 1418-1 du code de la santé publique.

4.1.2.    Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

La Convention pour la protection des Droits de l'Homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine (Convention sur les Droits de l'Homme et la biomédecine, DH-BIO), dite « convention d’Oviedo » puisqu’elle a été ouverte à la signature le 4 avril 1997 à Oviedo (Espagne), est le seul instrument juridique contraignant international pour la protection des droits de l’Homme dans le domaine biomédical. Elle comporte quatre protocoles additionnels dont un protocole relatif à la transplantation d'organes et de tissus d'origine humaine (STE n° 186). La France n’a pas ratifié ce protocole additionnel par lequel elle n’est donc pas liée.

Il sera toutefois indiqué que ce protocole prévoit dans son article 14 que le prélèvement de tissus régénérables sur une personne qui n'a pas la capacité de consentir peut être autorisé si les conditions suivantes sont réunies :

-          on ne dispose pas d'un donneur compatible jouissant de la capacité de consentir ;

-          le receveur est un frère ou une sœur du donneur ;

-          le don doit être de nature à préserver la vie du receveur ;

-          l'autorisation du représentant, d'une autorité ou d'une personne ou instance désignée par la loi a été donnée spécifiquement et par écrit et en accord avec l'instance compétente ;

-          le donneur potentiel n'y oppose pas de refus.

Par ailleurs, son article 15 prévoit que ces conditions ne s'appliquent pas aux cellules dès lors qu'il est établi que leur prélèvement n'implique pour le donneur qu'un risque minimal et une contrainte minimale.

Ainsi les mesures d’extension de prélèvement envisagées ne contreviendraient pas aux dispositions du Protocole additionnel à la Convention sur les Droits de l'Homme et la Biomédecine relatif à la transplantation d'organes et de tissus d'origine humaine.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

Le nombre de prélèvements et donc de greffes susceptibles d’être effectués dans cette situation peut être estimé à 50 par an, si l’on ne met pas de plafond en termes de limite d’âge du donneur pédiatrique potentiel. Si l’on introduit un seuil pour l’âge du donneur mineur pas avant 15 ans, ce nombre serait de l’ordre d’environ 15 par an.

La consultation de la base Diamant[661] permet d’estimer le tarif en groupe homogène de séjours d’une greffe de cellules souches hématopoïétiques. 4 233 greffes ont été réalisées en 2018 pour un montant environ de 178 millions d’euros. La mesure proposée aura par conséquent un impact mineur sur les dépenses de l’Assurance maladie, estimé à 631 000 euros sur l’hypothèse des données financière de 2018 et une volumétrie de 15 greffes annuelles.

4.3.  Impacts sur les services administratifs

4.3.1 Concernant l’impact d’un élargissement du cadre dérogatoire du prélèvement de cellules souches hématopoïétiques

Ce travail repose essentiellement sur les personnels des services hospitaliers d’allogreffes, chargés en particulier d’informer la famille et le donneur sollicité pour un don et d’organiser le prélèvement.

Par ailleurs, chaque dossier devra être examiné en comité donneur vivant, ce qui implique un travail supplémentaire pour l’Agence de la biomédecine, qui les organise, et pour les experts qui y participent. Les présidents de TGI ou le juge de tutelle auront aussi à connaître de ces dossiers. Toutefois, l’impact de cette mesure devrait être négligeable au vu du nombre de donneurs supplémentaires.

4.3.2 Concernant le suivi de l’état de santé des donneurs de cellules souches hématopoïétiques

Selon l’Agence de la biomédecine, la mesure concernera 900 donneurs par an, répartis dans 39 centres de greffe en moyenne, chaque centre devrait en moyenne suivre 22 donneurs par an.

La mesure aura également un impact sur l’Agence de biomédecine. Elle implique notamment une modification du système d’information qui permettrait d’alerter les centres greffeurs à 1 an, 3 ans, 5 ans et 10 ans de la date anniversaire du don intrafamilial effectué (à condition que l’Agence de la biomédecine dispose de cette information) de la nécessité de contacter le donneur concerné afin d’obtenir un suivi de son état de santé. Il s’agirait ensuite d’un travail administratif pour le service d’allogreffe (contact avec les donneurs eux-mêmes ou avec leur médecin traitant le cas échéant).

Toutes les personnes protégées ne sont pas des personnes handicapées mais les personnes handicapées peuvent bénéficier d’une mesure de protection lorsque l’altération de leurs facultés mentales ou corporelles sont de nature à empêcher l’expression de leur volonté.

Cette mesure devrait avoir un impact limité mais cependant accroit le pouvoir décisionnel des personnes protégées faisant le choix d’un geste altruiste tant pour leurs proches que pour les patients en général.

5.             consultations et modalités d’application

L’Agence de la biomédecine a été consultée. Elle a rendu son avis le 26 juin 2019.

La Haute autorité de santé a été consultée et a rendu un avis le 12 juillet 2019.

Le Conseil national de la protection de l’enfance a été consulté.

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

Les dispositions ne seront pas immédiatement applicables et nécessitent des adaptations réglementaires.

Les dispositions législatives d’extension de prélèvement de cellules souches hématopoïétiques chez des personnes fragiles sont encadrées par les articles R. 1241-16 à R. 1241-19 du code de la santé publique pour le prélèvement de cellules souches hématopoïétiques chez les mineurs. Ces dispositions nécessitent une adaptation réglementaire pour prendre en compte le rôle de l’administrateur ad hoc pour représenter le mineur en lieu et place de son père et de sa mère, dans le processus qui conduit à une autorisation éventuelle de prélèvement de cellules souches hématopoïétiques

S’agissant du prélèvement de cellules souches hématopoïétiques chez les majeurs protégés, les dispositions précisées par les articles R.1241-5 à 1241-15 devront être mises en cohérence avec les dispositions du code civil en clarifiant les termes de « personne majeure faisant l’objet d’une mesure de protection » et en introduisant l’administrateur ad hoc dans la procédure dans la mesure où la personne chargée de la mesure de protection peut être un des parents.

Ces mises en cohérence pourront être rassemblées en un seul et même décret.

La nouvelle mission de l’Agence de la biomédecine relative au suivi de l’état de santé des donneurs de cellules souches hématopoïétiques imposera de modifier les dispositions de l’article R. 1418-3 du code de la santé publique pour intégrer ce suivi.

 


Article 7 Renforcer les personnes sous mesure de protection de leurs biens dans l’exercice de leur citoyenneté en leur permettant de donner leur consentement au don

1.             État des lieux

1.1.                       Cadre général

La loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 a posé le principe d’interdiction au don d’organes du vivant, au don de sang ainsi qu’au don de tissus ou de cellules pour le majeur protégé. Ce principe d’interdiction a été modifié l’article 12 de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique pour permettre, à titre dérogatoire, de prélever des cellules souches hématopoïétiques sur les majeurs faisant l’objet d’une mesure de protection légale, au bénéfice de leur frère ou sœur et à titre exceptionnel, et en l’absence d’autre solution thérapeutique, au bénéfice des cousins/cousines, oncles/tantes, neveux/nièces. L’intervention de l’autorité judiciaire recueillant le consentement, et du comité d’experts délivrant l’information sur la procédure de don et son autorisation, est modulée suivant le niveau de protection (curatelle, sauvegarde de justice, tutelle) et d’aptitude à consentir du majeur.

 

L’article 425 du code civil, issu de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007, a consacré le principe dégagé antérieurement par la jurisprudence de la protection de la personne autant que de ses intérêts patrimoniaux.

 

Cette loi consacre les grands principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité des mesures de protection et la personne vulnérable au cœur du dispositif de protection.

 

Les principes se déclinent comme suit :

-          la proportionnalité induit que la mesure de protection est individualisée et graduée en fonction du degré d’altération des facultés personnelles de l’intéressé ;

-          le principe de subsidiarité signifie que la mesure n’est ordonnée par le juge que s’il ne peut être pourvu aux intérêts du majeur par les règles de droit commun ;

-          enfin, le principe de nécessité implique que le prononcé de la mesure de protection doit être motivé et limitée dans le temps.

 

L’accompagnement de ces principes se traduit dans les textes par l’introduction d’un droit de la personne protégée à recevoir une information complète et adaptée afin de lui permettre de prendre seule les décisions la concernant lorsque son état le lui permet (article 457-1 du code civil).

 

Par ailleurs, l’article 458 du code civil écarte la notion d’assistance et de représentation de la personne pour les actes « strictement personnels » et donne une liste non exhaustive de ces actes parmi lesquels figurent la déclaration de naissance et la reconnaissance d’un enfant, les actes de l’autorité parentale relatifs à la personne de l’enfant, la déclaration du choix ou du changement de nom de l’enfant, le consentement donné à sa propre adoption ou à celle de son enfant. Si l’état de la personne protégée ne lui permet pas de consentir seule, ces actes ne pourront être accomplis au nom de celle-ci.

 

Hors le domaine de ces actes strictement personnels, la personne protégée prend également seule, en principe, les décisions relatives à sa personne.

 

Ce n’est que si son état ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle éclairée que le juge ou, le cas échéant le conseil de famille, peut prévoir qu’elle bénéficiera d’une assistance voire d’une représentation.

 

L’article 9 de la loi de programmation n° 2018-2022 et de réforme pour la justice du 23 mars 2019 a modifié l’article 459 du code civil de façon à préciser qu’en cas de tutelle à la personne et d’habilitation familiale, la personne en charge de la protection à la personne du majeur le représentera, y compris pour les actes portant gravement atteinte à l’intégrité corporelle. Désormais, le juge intervient, sauf urgence, uniquement en cas de désaccord entre le majeur et la personne en charge de sa protection, pour autoriser l'un ou l'autre à prendre la décision, à leur demande ou d'office.

Cette évolution s’inscrit dans la poursuite des travaux de la rapporteure spéciale des Nations Unies concernant l’application de la convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées, et du rapport de la mission interministérielle confiée à Madame Anne Caron-Déglise en 2018 sur la protection juridique des majeurs, comme déjà précisé dans la présentation de la mesure visant à autoriser le prélèvement de cellules souches hématopoïétiques d’un majeur protégé au bénéfice de ses parents.

1.2.                       Cadre constitutionnel

Les articles 16 et suivants du code civil instaurent un statut du corps humain qui est une partie intégrante du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine.

Deux principes encadrent plus particulièrement l’utilisation du corps humain : les principes d’inviolabilité et de non-patrimonialité. Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain (art. 16-1 du code civil) et le corps humain et ses éléments ne peuvent faire l’objet de transactions financières (arts. 16-5 et 16-6 du code civil).

Si ces principes n’ont pas valeur constitutionnelle en eux même, ils sont nécessaires à la mise en œuvre de l’exigence constitutionnelle de sauvegarde de la dignité humaine[662].Toutefois, l’atteinte à l’intégrité corporelle est possible sous réserve de deux conditions cumulatives, d’une part, en cas de nécessité médicale pour la personne ou, à titre exceptionnel, dans l’intérêt thérapeutique d’autrui, avec son consentement préalable, d’autre part (art. 16-3 du code civil).

Le principal danger du don d’organes entre personnes vivantes et partant de l’extension du nombre de paires incluses dans un don croisé d’organes est d’alimenter un trafic d’organes ce qui contreviendrait au principe de non-patrimonialité du corps humain. Or, la mesure ne remet pas en cause l’exigence d’un lien affectif ou de parenté entre le donneur et le receveur, meilleure garantie de la gratuité du don. De surcroit, l’Agence de la biomédecine reste seule compétente pour assurer la gestion du registre des paires associant donneurs vivants et receveurs potentiels ayant consenti à un don croisé d'organes. Enfin, les garanties procédurales de recueil du consentement et d’autorisation du prélèvement restent inchangées.

Par conséquent, le principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine et les principes qui en découlent ne constituent pas un obstacle aux intentions du Gouvernement de développer le don croisé d’organes entre des donneurs et des receveurs autorisés au titre du premier et deuxième alinéa de l’article L. 1232-1 du code de la santé publique.

1.3.                       Cadre conventionnel

La Convention relative aux droits des personnes handicapées (CIDPH) a été adoptée par l’Assemblée générale de l’ONU, le 13 décembre 2006. Ratifiée par la France, elle est entrée en vigueur le 20 mars 2010. Elle a pour objet de promouvoir, protéger et assurer la pleine et égale jouissance de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales par les personnes handicapées, sans discrimination d’aucune sorte fondée sur le handicap.

La convention dite d’Oviedo du Conseil de l’Europe, ratifiée par la France en 2011, est dédiée à la protection des droits de l'homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine[663].

Seule norme juridique contraignante au niveau international, la convention affirme la primauté de l'intérêt et du bien-être de l'être humain sur le seul intérêt de la société ou de la science (article 2). Elle engage les Etats à assurer un accès équitable à des soins de santé de qualité appropriée (article 3), exige le consentement libre et éclairé de la personne avant toute intervention médicale (article 5) et prend des mesures de protection des personnes n'ayant pas la capacité de consentir (article 6) et des personnes souffrant d'un trouble mental (article 7). Elle pose encore le droit à l'information et au respect de la vie privée s'agissant des informations relatives à la santé (article 10).

Selon la Cour européenne des droits de l’homme, la restriction ou la privation de la capacité juridique est susceptible de constituer une violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme (droit au respect de la vie privée et familiale) en référence, notamment, aux principes concernant la protection juridique des majeures formulés par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe dans sa recommandation n° R (99) 4 du 29 février 1999, sur les principes concernant la protection juridique des majeurs incapables, adoptée le 23 février 1999

La Recommandation (2006) 5 du Comité des Ministres aux Etats membres sur le Plan d’Action du Conseil de l’Europe pour la promotion des droits et de la pleine participation des personnes handicapées à la société vise à améliorer la qualité de vie des personnes handicapées en Europe 2006-2015.

L’Union Européenne ne dispose pas de compétence dans le domaine de la biomédecine. Cependant, outre les avis du Groupe européen d'éthique pour les sciences et les technologies nouvelles et la Charte des droits fondamentaux de l’Union, de nombreux textes de droit dérivé portent sur le domaine de la biomédecine.

Aux termes du premier article de la Charte « Aucun des droits inscrits dans la Charte ne peut être utilisé pour porter atteinte à la dignité humaine ». Ainsi, aucune des libertés de circulations inscrites dans la Charte ne peuvent déroger au principe de la dignité humaine ou au droit à l’intégrité physique ou mentale dans le domaine de la médecine et de la biologie de la santé[664].

Pour assurer ces droits, la Charte prévoit le respect du principe de consentement, l'interdiction des pratiques eugéniques, l'interdiction de l'utilisation du corps comme source de profit et la prohibition du clonage humain reproductif (article 3 alinéa 2).

En matière d’utilisation des éléments du corps humain, le droit dérivé reprend indirectement ces principes dans les directives « tissus et cellules humains » et « organes humains »[665] en laissant néanmoins une latitude aux Etats membres pour organiser leur système[666].

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.                       Nécessité de légiférer

L’interdiction des dons d’organes ou de cellules du vivant du majeur protégé est ressentie comme une discrimination. Il est donc proposé de la limiter aux seuls majeurs faisant l’objet d’une mesure protection juridique à la personne.

Cette réforme est nécessaire pour mettre en cohérence les dispositions du code de la santé publique avec les dispositions du code civil.

 

Des modifications de niveau législatif sont donc rendues nécessaires pour préciser les modalités de consentement des majeurs protégés.

2.2.                       Objectifs poursuivis

L’objectif poursuivi par le Gouvernement est de mettre en cohérence le régime des consentements des personnes protégées du code de la santé publique avec les dispositions du code civil.

3.       Options possibles et dispositif retenu

La mesure proposée a pour objet d'harmoniser le régime des consentements des personnes protégées avec les dispositions du code civil en précisant la terminologie retenue s’agissant des majeurs protégés, en lieu et place de l’usage général des termes « personne majeure faisant l’objet d’une mesure de protection ». Cette clarification permet ainsi de limiter l’interdiction de don aux personnes qui font l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation à la personne. Les personnes ayant une assistance pour leurs biens que ce soient les personnes sous sauvegarde de justice, sous curatelle, sous tutelle aux biens mais aussi celles dont le mandat de protection future et l’habilitation familiale ne sont pas étendus aux actes personnels relèvent désormais du droit commun applicable en matière de consentement au don. En effet, dans ces derniers cas, le majeur protégé peut, seul, exprimer un consentement éclairé.

En conséquence :

1-     Concernant le don d’organe 

Pour le don du vivant : le don pourra être ouvert dans les conditions du droit commun aux personnes faisant l'objet d'une mesure de protection juridique sur leurs biens uniquement.

Pour le don post mortem : toutes les personnes faisant l’objet d’une protection juridique rentreront dans le régime du droit commun à savoir le consentement présumé au don d’organes, sauf s’ils ont fait part de leur refus conformément aux dispositions prévues par l’article L. 1232-2. L’autorisation substitutive du tuteur n’est en effet plus adaptée aux évolutions de la protection juridique des majeurs puisque l’article 418 du code civil, issu de la réforme de 2007, prévoit que le décès du majeur protégé met fin à la mission du tuteur.  En outre, cette disposition qui prévoit l’intervention systématique du tuteur après le décès de la personne concernée fait primer la volonté d’un tiers sur celle du majeur protégé, même dans l’hypothèse où une personne de confiance aurait été désignée puisque ce texte spécial déroge à l’article 1111-6 du code de la santé publique.

2-     Concernant le prélèvement d’organe dans l’intérêt thérapeutique de la personne à l’occasion d’une intervention chirurgicale 

Les personnes faisant l’objet d’une protection juridique sur leurs biens relèveront du régime du droit commun c’est-à-dire qu’en l’absence d’opposition de leur part le prélèvement pourra être réalisé. Pour les personnes faisant l’objet d’une protection juridique avec représentation à la personne, la non opposition au prélèvement devra être recherchée auprès des personnes chargées de l’exercice de la mesure de protection.

3-     Concernant le don de tissus ou de cellules ou de tout produit du corps 

Le don pourra être ouvert aux personnes faisant l'objet d'une mesure de protection juridique sur leurs biens. Le cas particulier des modalités de don de cellules souches hématopoïétiques (CSH) des majeurs protégés fait l’objet d’une mesure de la présente loi pour autoriser le prélèvement de cellules souches hématopoïétiques d’un majeur protégé au bénéfice de ses parents.

Il convient également de mettre en cohérence les infractions pénales relatives au prélèvement d’un organe, d’un tissu ou des cellules sur une personne majeure faisant l’objet d’une mesure de protection juridique.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

4.1.1.      Impacts sur l’ordre juridique interne

La présente mesure nécessitera de modifier les articles L. 1241-2, L.1231-2, L. 1232-2, L.1235-2 et les sanctions pénales prévues aux articles L. 1272-2 du code de la santé publique et 511-5 du code pénal.

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

Cette mesure est conforme au droit de l’Union européenne, à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine relatifs à la transplantation et aux tests génétiques à des fins médicales (convention d’Oviedo) et à son protocole additionnel relatif à la transplantation d’organes et de tissus qui prévoit notamment en son article qu’ « un organe ou des tissus ne peuvent être prélevés sur un donneur vivant qu'après que la personne concernée y a donné son consentement libre, éclairé et spécifique, soit par écrit soit devant une instance officielle. », bien que la France ne l’est pas encore ratifié et par lequel elle n’est donc pas liée.

En effet, cette mesure respecte les principes du consentement libre et éclairé du donneur, du droit à l'information et de la gratuité du don. Par ailleurs, le prélèvement d’organes et de tissus sur un donneur vivant ne peut intervenir qu'avec son consentement exprès, dans l'intérêt thérapeutique du receveur.  

4.2.                       Impacts sociaux

Toutes les personnes protégées ne sont pas des personnes handicapées mais les personnes handicapées peuvent bénéficier d’une mesure de protection lorsque l’altération de leurs facultés mentales ou corporelles sont de nature à empêcher l’expression de leur volonté.

Cette mesure accroit le pouvoir décisionnel des personnes faisant l’objet d’une mesure de protection juridique limitée à leurs biens, dans le choix d’un geste altruiste tant pour leurs proches que pour les patients en général.

Cette mesure participe au renforcement de l’autonomie de la personne protégée et à la prise en compte de sa volonté.

5.       CONSULTATION ET modalités d’application

La Haute autorité de santé a été consultée et a rendu un avis le 12 juillet 2019.

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

 


Article 8 Permettre la réalisation d’examens de génétique après le décès d’une personne au profit des membres de sa famille

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1. Le résultat d’un examen des caractéristiques génétiques réalisée chez une personne concerne potentiellement les membres de sa famille (ou certains d’entre eux).

Ainsi que le précise notamment le rapporteur de la mission d’information sur la précédente révision des lois de bioéthique[667] : « Le contenu d’une information génétique présente le caractère très singulier de ne pas renseigner seulement sur l’état de santé de la personne qui s’est soumise au test mais aussi sur celui de ses parents, ascendants, collatéraux ou descendants. »

C’est la raison pour laquelle ce résultat n’appartient pas à la seule personne ayant fait l’examen, mais concerne également des tiers, les membres de sa famille potentiellement concernés.

L’intérêt du tiers, note dès 2001 le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé[668], « peut être la connaissance de son statut par rapport à cette anomalie génétique, la possibilité lui étant donnée de pouvoir entreprendre une surveillance préventive ou de se soumettre à une thérapeutique dans un but curatif, ou encore de choisir de ne pas la transmettre à sa descendance. »

Le dispositif dit d’information de la parentèle, prévu à l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique, résulte de ce caractère particulier de l’information génétique et des enjeux qui lui sont attachés.

1.1.2. Le consentement à un examen des caractéristiques génétiques à des fins médicales est encadré par l’article 16-10 du code civil qui dispose que :

« (…) Le consentement exprès de la personne doit être recueilli par écrit préalablement à la réalisation de l'examen, après qu'elle a été dûment informée de sa nature et de sa finalité. Le consentement mentionne la finalité de l'examen. Il est révocable sans forme et à tout moment. »

En l’absence du recueil d’un consentement écrit de la personne, cet examen ne peut être réalisé. Cette interprétation stricte des textes est liée à l’existence d’une incrimination pénale qui prévoit que :

« Le fait de procéder à l'étude des caractéristiques génétiques d'une personne (…), sans avoir préalablement recueilli son consentement dans les conditions prévues par l'article 16-10 du code civil est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende » (article 226-25 du code pénal).

1.1.3 L’article L. 1211-2 du code de la santé publique encadre la réalisation des autopsies médicales. Cet article précise que « les autopsies sont dites médicales lorsqu'elles sont pratiquées (…) dans le but d'obtenir un diagnostic sur les causes du décès » et prévoit qu’ « elles doivent être pratiquées conformément aux exigences de recherche du consentement ». Cette disposition renvoie ainsi à l’article 16-10 du code civil lorsqu’un examen des caractéristiques génétiques est envisagé dans le cadre d’une autopsie médicale. 

Si l’article L. 1211-2 du code de la santé publique précise également qu’« à titre exceptionnel, [les autopsies] peuvent être réalisées malgré l'opposition de la personne décédée, en cas de nécessité impérieuse pour la santé publique et en l'absence d'autres procédés permettant d'obtenir une certitude diagnostique sur les causes de la mort », la réalisation d’examens des caractéristiques génétiques après le décès d’une personne ne relève pas à l’évidence du cadre de la « nécessité impérieuse pour la santé publique ».

1.1.4 Il se déduit des articles susmentionnés que le droit actuel ne permet pas de réaliser un examen des caractéristiques génétiques d’une personne à des fins médicales après son décès quelles que soient les circonstances. Il convient toutefois de préciser qu’il n’existe pas de données disponibles sur le nombre potentiel de situations concernées puisqu’en l’absence de cadre légal, ces pratiques, si elles existent, ne sont pas colligées[669].

1.1.5 Le V de l’article L. 1110-4 du code de la santé publique encadre notamment la transmission, à la famille ou aux proches d’une personne malade, d’informations leur permettant « d'apporter un soutien direct » à celle-ci en cas de diagnostic ou de pronostic grave. Ces informations sont délivrées sous la responsabilité d’un médecin sans contrevenir au secret professionnel (médical). Le même V encadre également la transmission, aux ayants droit, au concubin ou au partenaire lié par un pacte civil de solidarité d’une personne décédée, d’informations « nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt ou de faire valoir leurs droits ». Cette transmission d’informations n’est pas contraire au secret professionnel (médical).

1.2. Cadre conventionnel

L’article 12 de la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine de 1997 autorise des tests prédictifs de maladies génétiques ou permettant soit d'identifier le sujet comme porteur d'un gène responsable d'une maladie soit de détecter une prédisposition ou une susceptibilité génétique à une maladie qu'à des fins médicales ou de recherche médicale, et sous réserve d'un conseil génétique approprié.

En principe, une intervention sur une personne n'ayant pas la capacité de consentir ne peut être effectuée que pour son bénéfice direct (article 6).

Cependant, l’article 10 du Protocole additionnel à la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales de 2008, précise « un test génétique sur une personne n’ayant pas la capacité de consentir ne peut être effectué que pour son bénéfice direct », sous réserve de l’article 13 du Protocole.

Cet article 13 autorise à titre exceptionnel et dérogatoire aux deux articles cités précédemment, qu’un test génétique puisse être effectué sur une personne n’ayant pas la capacité de consentir, au bénéfice de membres de sa famille si plusieurs conditions sont réunies :

« A titre exceptionnel et par dérogation aux dispositions du paragraphe 1 de l’article 6 de la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine et de l’article 10 du présent Protocole, la loi peut permettre qu’un test génétique soit effectué sur une personne n’ayant pas la capacité de consentir, au bénéfice de membres de sa famille, si les conditions suivantes sont réunies :

a)     Le test a pour but de permettre au(x) membre(s) de la famille concerné(s) de retirer un bénéfice préventif, diagnostique ou thérapeutique qui, de manière indépendante, a été évalué comme important pour leur santé, ou d’effectuer un choix éclairé en matière de procréation ;

b)     Le bénéfice recherché ne peut être obtenu sans la réalisation de ce test ;

c)      Les risques et les contraintes résultant de l’intervention sont minimaux pour la personne qui se soumet au test ;

d)     Le bénéfice attendu a été évalué de manière indépendante comme étant significativement supérieur aux risques pour la vie privée pouvant être liés à la collecte, l'utilisation ou la communication des résultats du test ;

e)      L’autorisation du représentant de la personne n’ayant pas la capacité de consentir, d’une autorité ou d’une personne ou instance désignée par la loi a été donnée ;

f)       La personne n’ayant pas la capacité de consentir est, en fonction de ses capacités de compréhension et de son degré de maturité, associée à la procédure d’autorisation. Si cette personne y oppose un refus, le test ne doit pas être effectué. »

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1 Dans l’hypothèse où un examen des caractéristiques génétiques d’une personne après son décès s’avèrerait utile voire vitale pour les membres de sa famille, ni l’article 16-10 du code civil (consentement) ni l’article L. 1211-2 du code de la santé publique (autopsie médicale) ne permettent de le réaliser.

Or, au plan médical, l’intérêt d’un tel examen (sur une personne décédée dans l’intérêt des membres de sa famille) est bien étayé.

 

Deux contextes médicaux sont à citer en particulier :

 

-          La nécessité de comprendre les causes du décès d’une personne

C’est le cas, par exemple, lors du décès subit de sujets jeunes pour lesquels une pathologie cardiaque d’origine génétique est suspectée (en lien avec des anomalies génétiques responsables de cardiomyopathies ou d’arythmies héréditaires)[670]. Si l’identification de la cause sous-jacente du décès (présence de mutations causales) pourrait sauver la vie d’autres membres de la famille[671], cette démarche diagnostique ne peut être mise en œuvre aujourd’hui, faute du consentement préalable de la personne décédée à la réalisation d’un examen de génétique ;

 

-          La nécessité d’identifier une mutation familiale responsable de cancers héréditaires 

Les onco-généticiens sont conduits de plus en plus fréquemment à prendre en charge des personnes (asymptomatiques au moment de la consultation) présentant une histoire familiale de cancers. Or, en l’absence de cas index en vie dans la famille (personne atteinte de ce cancer familial), l’identification précise de la mutation familiale en cause nécessite d’accéder au dossier et aux prélèvements (conservés) de la personne décédée qui en était porteuse - l’objectif étant de réaliser, sur un échantillon biologique conservé de cette personne, un panel de gènes de prédisposition au cancer pour identifier, le cas échéant, l’anomalie génétique familiale causale. La personne qui consulte pourrait ainsi être testée pour la mutation familiale concernée et, selon les cas, rassurée ou prise en charge. Il en est de même pour les autres membres de sa famille potentiellement concernés qui se présenteraient. Mais cette approche ne peut être mise en œuvre aujourd’hui, ici encore faute de disposer du consentement préalable du cas familial décédé à la réalisation d’un examen de génétique. Elle se heurte également aux conditions fixées au V de l’article L.  1110-4 du Code de la santé publique (Cf. infra).

Il apparait donc nécessaire de faire évoluer le cadre actuel pour prendre en compte ces situations et éviter une perte de chance pour les personnes potentiellement concernées[672] étant précisé que la connaissance exacte de la mutation familiale en cause est nécessaire pour les tester.

Il convient de préciser encore que l’article 15 du Protocole additionnel à la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales n’exclut pas de telles situations à condition qu’elles soient prévues par la loi : 

« Un test génétique pour le bénéfice d’autres membres de la famille ne peut être entrepris sur des échantillons biologiques :

-          soit prélevés sur le corps d’une personne décédée,

-          soit prélevés de son vivant sur une personne décédée depuis lors,

que si le consentement ou l’autorisation requis(e) par la loi a été obtenu(e). »

L’Agence de la biomédecine, dans son rapport sur l’application de la loi de bioéthique de 2011[673] précise :

« Aujourd’hui, l’accès aux caractéristiques génétiques d’une personne après son décès n’est autorisé que si cette personne a donné préalablement son autorisation. Cela fait obstacle à des diagnostics post-mortem utiles en termes de prévention pour la famille de la personne décédée (par exemple en cas de maladie cardiaque génétique, cause de mort subite de sujets jeunes).

Le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, dans son avis n° 129, est favorable à l’autorisation des examens génétiques sur un prélèvement du patient décédé, sauf si un refus a été exprimé de son vivant.

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale préconise d’« Autoriser les examens post mortem impliquant la parentèle dans le cadre d’une autopsie, immédiatement après le décès, ou ultérieurement, à partir d’échantillons prélevés sur le patient et conservés. » tout en appelant à prendre en compte « respect de la volonté du défunt, respect du secret médical et solidarité familiale »[674].

Rappelant que le Sénat a adopté, en première lecture, une proposition de loi[675] permettant la réalisation d’examens des caractéristiques génétiques sur une personne décédée à la demande d’un membre de la famille potentiellement concerné et en l’absence d’opposition exprimée de son vivant par cette personne, les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques se prononcent également sur la question : la rapporteure a approuvé la proposition de loi sénatoriale lors de son examen par le Sénat et le rapporteur n’y est pas défavorable en appelant à une réflexion sur l’éventualité d’une absence de consentement de la personne décédée.

2.2 Le même objectif (éviter une perte de chance pour les membres de la famille potentiellement concernés) conduit également à faire évoluer le cadre juridique actuel pour prendre en compte les situations où la personne concernée par l’examen génétique n’est pas décédée mais se trouve hors d’état d’exprimer sa volonté.

Il s’agit donc de permettre la réalisation d’un examen des caractéristiques génétiques d’une personne hors état d’exprimer sa volonté au bénéfice des membres de sa famille (et non seulement dans son propre intérêt comme le prévoit le deuxième alinéa de l’article L. 1131-1 du code de la santé publique).

Des exemples[676] figurent dans le rapport explicatif du Protocole additionnel à la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales. Le cas d’une personne atteinte de démence de type Alzheimer (et hors d’état d’exprimer son consentement) pour laquelle une origine génétique serait suspectée peut également illustrer les difficultés du cadre juridique actuel. En effet, un examen génétique pour confirmer l’hypothèse et prendre en charge les membres de la famille (de façon préventive et diagnostique pour ceux qui le souhaiteraient) ne peut être réalisé aujourd’hui dès lors que les résultats de cet examen n’apporteraient rien de plus pour la prise en charge médicale de la personne elle-même.

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1. La prise en compte des deux situations sus évoquées (réalisation d’un examen des caractéristiques génétiques chez une personne qui n’est pas en mesure d’exprimer sa volonté – qu’elle soit décédée ou non - dans l’intérêt des membres de sa famille potentiellement concernés) implique d’introduire une dérogation à l’article 16-10 du code civil. En effet, cet article prévoit actuellement un consentement exprès à la réalisation d’un examen des caractéristiques génétiques.

Cette dérogation doit être particulièrement circonscrite.

Ainsi, le respect des conditions posées à l’article 13 du protocole précité doit être assuré lorsqu’il s’agit d’une personne hors d’état de manifester sa volonté sans être décédée[677].

De manière générale, le dispositif envisagé doit, respecter la volonté et la dignité de la personne qui n’est pas en état d’exprimer sa volonté ou qui est décédée.

3.2. La première condition à satisfaire est l’absence d’opposition antérieure de cette personne à la réalisation d’un tel examen.

Cette vérification peut être réalisée, selon les cas, auprès de la personne de confiance mentionnée à l'article L. 1111-6 du code de la santé publique, de la famille ou, à défaut, d’un proche ou, le cas échéant, auprès de la personne chargée d’une mesure de protection juridique à la personne.

3.3. Plusieurs autres conditions doivent être réunies pour qu’un examen de génétique puisse être réalisé sur une personne après son décès.

Tout d’abord, l’examen doit être réalisé à partir d’échantillons de cette personne déjà conservés ou prélevés dans le cadre d’une autopsie à des fins médicales (il n’est pas question d’exhumer une personne décédée).

Par ailleurs, il apparait nécessaire, pour circonscrire au maximum la réalisation d’examens génétiques, de fixer par arrêté du ministre chargé de la santé, pris sur proposition de l’Agence de la biomédecine, les critères déterminant les situations médicales justifiant, chez une personne hors d’état d’exprimer sa volonté ou décédée, la réalisation d’un examen des caractéristiques génétiques à des fins médicales dans l’intérêt des membres de sa famille potentiellement concernés. 

L’anomalie génétique considérée doit être responsable d’une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins.

En outre, l’examen ne doit être réalisé que si au moins un membre de la famille potentiellement concerné manifeste son intérêt en ce sens.

Le dispositif envisagé doit également garantir une prise en charge adaptée et protectrice des membres de la famille potentiellement concernés, en respectant les étapes suivantes :

Premièrement, le médecin qui prend en charge la personne hors d’état d’exprimer sa volonté, ou qui intervient dans le cadre de l’autopsie d’une personne décédée pour laquelle une origine génétique est suspectée, ou encore qui est sollicité par un ou plusieurs membres d’une famille potentiellement concernés, informe ces personnes ou ces membres qu’il suspecte une cause génétique à l’origine du décès de la personne ou du tableau clinique qu’elle présente (ou a présenté).

Deuxièmement, il précise aux membres de la famille potentiellement concernés qu’ils peuvent accepter la réalisation de l’examen génétique chez la personne décédée ou hors d’état de manifester sa volonté. L’examen est effectué dès lors qu’un membre a donné son accord par écrit. Le refus d’une personne à la réalisation de l’examen vaut pour elle-même mais ne fait pas obstacle à la mise en œuvre de l’examen dès lors qu’un autre membre de la famille a donné son accord pour qu’il soit réalisé.

Lorsque l’accès au dossier médical et aux échantillons biologiques conservés de la personne décédée s’avère nécessaire, le médecin, quand il n’est pas celui de cette personne et intervient dans l’intérêt d’autres personnes, sollicite cet accès auprès de l’établissement qui les conserve.

Troisièmement, dans le respect du droit de ne pas savoir, le sens du résultat de l’examen (confirmation ou non de l’hypothèse du médecin, c’est-à-dire de l’origine génétique du décès de la personne ou du tableau clinique qu’elle présente ou a présenté donc présence ou absence de l’anomalie génétique suspectée) est rendu accessible à tous les membres de la famille potentiellement concernés qui le souhaitent sans obligation aucune.

Quatrièmement, le médecin, selon les cas[678] et le sens du résultat, prend directement en charge les personnes qui souhaitent alors bénéficier pour elles-mêmes d’un examen de leurs caractéristiques génétiques ou les invite à se rendre à une consultation de génétique. 

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

Un nouveau chapitre préliminaire sera créé au Titre Ier du Livre III de la Ière partie du code de la santé publique.

La présente mesure :

-          Créera les articles L 1130-4 et L. 1130-6 au sein de ce nouveau chapitre ;

-          Complètera l’article L. 1110-4 du code de la santé publique pour prévoir l’accès du médecin au dossier et aux échantillons biologiques conservés d’une personne décédée dans les circonstances envisagées et met en cohérence l’article L. 1111-7 du code de la santé publique dont l’avant-dernier alinéa reprend pour partie le V de l’article L. 1110-4 ;

-          Modifiera la rédaction de l’article L. 1211-2 du code de la santé publique.

4.2.                       Impacts sur les particuliers

Les mesures envisagées par le Gouvernement permettront une prise en charge adaptée des personnes confrontées à une maladie génétique familiale identifiée (ou susceptible de l’être) dans leur entourage. Elles permettront d’éviter toute perte de chance pour ces personnes ; étant entendu que le dispositif envisagé est celui qui parait le plus équilibré entre l’intérêt du ou des bénéficiaires directs et le respect de la vie privée de la personne testée (éventuellement décédée).

5.       Consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

L’Agence de la biomédecine a été consultée. Elle a remis son avis le 26 juin 2019.

Le Conseil national de l’Ordre des médecins a rendu un avis le 4 juillet 2019.

5.2.                       Modalités d’application

La mise en œuvre effective de la mesure nécessitera que soit publié l’arrêté du ministre chargé de la santé, pris sur proposition de l’Agence de la biomédecine, qui doit fixer les critères déterminant les situations médicales justifiant, chez une personne hors d’état d’exprimer son consentement ou décédée, la réalisation d’un examen des caractéristiques génétiques à des fins médicales dans l’intérêt des membres de sa famille potentiellement concernés.

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

Un décret d’application précisant le dispositif ainsi que l’arrêté susmentionné  sont nécessaires avant la mise en œuvre effective des nouvelles mesures.

Article 8 Organiser la transmission d’une information génétique dans certaines situations

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1. Le premier alinéa de l’article L. 1131-1 du code de la santé publique dispose que

« L'examen des caractéristiques génétiques d'une personne ou son identification par empreintes génétiques sont régis par les dispositions du chapitre III du titre Ier du livre Ier du code civil et par les dispositions du présent titre, sans préjudice des dispositions du titre II du présent livre. ».

L'examen des caractéristiques génétiques d'une personne ou son identification par empreintes génétiques est donc encadré par les dispositions du chapitre III du titre Ier du livre Ier du code civil qui traite de l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne et de l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques (en particulier par l’article 16-10 du code civil) et par celles du titre III du livre Ier de la première partie du code de la santé publique qui porte sur l’examen des caractéristiques génétiques, l’identification par empreintes génétiques et la profession de conseiller en génétique. Les dispositions du titre II du livre Ier de la première partie du code de la santé publique, qui renvoient aux recherches impliquant la personne humaine, peuvent également s’appliquer lorsque l’examen des caractéristiques génétiques est réalisé à des fins de recherche.

1.1.2. Le deuxième alinéa de cet article dispose que :

 « Toutefois, lorsqu'il est impossible de recueillir le consentement de cette personne ou, le cas échéant, de consulter la personne de confiance mentionnée à l'article L. 1111-6, la famille ou, à défaut, un de ses proches, l'examen ou l'identification peuvent être entrepris à des fins médicales, dans l'intérêt de la personne. »

Il s’en déduit qu’un examen des caractéristiques génétiques ou une identification par empreintes génétiques peut être effectué chez une personne qui ne peut exprimer sa volonté, sous certaines conditions et notamment dès lors que cet examen est réalisé dans son intérêt.

1.1.3. L’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique décrit le dispositif d’information des membres de la famille potentiellement concernés.

Cette information est réalisée par la personne chez laquelle le diagnostic d’une anomalie génétique pouvant être responsable d'une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins a été établi, le cas échéant, par le médecin prescripteur de l’examen.

Ainsi, les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 1131-1-2 prévoient respectivement que :

« La personne est tenue d'informer les membres de sa famille potentiellement concernés dont elle ou, le cas échéant, son représentant légal possède ou peut obtenir les coordonnées, dès lors que des mesures de prévention ou de soins peuvent leur être proposées. »

« Si la personne ne souhaite pas informer elle-même les membres de sa famille potentiellement concernés, elle peut demander par un document écrit au médecin prescripteur, qui atteste de cette demande, de procéder à cette information. »

Il n’existe aujourd’hui aucune mention explicite aux personnes hors d’état d’informer elles-mêmes leurs apparentés ou de consentir expressément à ce que le médecin le fasse. Une partie de ces personnes est représentée par celles visées au deuxième alinéa de l’article L. 1131-1 susmentionné.

1.2. Cadre conventionnel

L’Article 6[679] de la Convention pour la protection des droits de l’Homme et de la dignité de l’être humain (Convention d’Oviedo) prévoit la protection des personnes n'ayant pas la capacité de consentir à une intervention dans le domaine de la santé.

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1. Dans son avis n°124, le Comité consultatif national d’éthique note la difficulté à comprendre le premier alinéa de l’article L. 1131-1 du code de la santé publique : « Cette règle [de l’obligation pour le médecin de recueillir le consentement préalable de la personne], qui était répétée dans l’article L. 1131-1 alinéa 1 du code de la santé publique, a disparu dans la version issue de la loi de la loi du 6 août 2004 relative à la bioéthique[680] ; dorénavant il est seulement indiqué que l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne est régi à la fois par le code civil et par les dispositions du code de la santé publique le concernant. Ce seul visa rend difficile la compréhension de l’alinéa 2 qui suit et qui prévoit des exceptions à cette règle de principe, faute qu’elle soit explicitée. »[681]

Une clarification globale de l’alinéa s’impose pour que la loi soit intelligible par tous et en tout premier lieu par les professionnels qui auront à l’appliquer.

2.1.2. Le deuxième alinéa de l’article L. 1131-1 du code de la santé publique n’est pas conforme aux modalités requises pour le recueil du consentement d’une personne hors d’état de l’exprimer.

En effet, il prévoit de consulter la personne de confiance mentionnée à l'article L. 1111-6 du code de la santé publique, la famille ou, à défaut, un de ses proches, mais sans caractériser l’objectif de la démarche – étant précisé que ces personnes ne peuvent en aucun cas consentir en lieu et place de l’intéressée.

Or, la consultation de la personne de confiance, de la famille ou à défaut d’un proche ne peut s’envisager que pour vérifier l’absence d’opposition antérieure de l’intéressée à un tel examen.

En outre, en l’espèce, les modalités de recueil du consentement sont dérogatoires à l’article 16-10 du code civil et cela doit être précisé.

2.1.3. Si un examen des caractéristiques génétiques peut être effectué chez une personne en l’absence d’expression de sa volonté, sous certaines conditions et notamment dès lors que cet examen est réalisé dans son intérêt, la loi reste silencieuse sur la mise en œuvre du dispositif d’information de la parentèle dans de telles circonstances.

2.1.4. De la même façon, la loi reste silencieuse sur la mise en œuvre du dispositif d’information de la parentèle lorsque la personne décède après la réalisation de l’examen (et la phase d’amont du dispositif) mais avant d’avoir eu communication des résultats (ou avant d’avoir pu informer les membres de sa famille) et que ces derniers confirment l’existence d’une anomalie génétique pouvant être responsable d'une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins.

Au regard du texte actuel, le médecin ne peut procéder lui-même à cette information sans avoir reçu le consentement écrit de la personne avant son décès et, en tout état de cause, il ne dispose pas nécessairement, dans de telles circonstances, des coordonnées des membres de la famille potentiellement concernés.

Il est donc également nécessaire d’aménager l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique pour prévoir les modalités d’information de la parentèle lorsque la personne décède avant la remise des résultats (ou avant d’avoir pu informer les membres de sa famille) et que ces derniers confirment l’existence d’une anomalie génétique pouvant être responsable d'une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins.

2.1.5. Il convient de clarifier la formule utilisée par le législateur qui évoque à l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique une « anomalie génétique grave dont les conséquences sont susceptibles de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins ».

En effet, ce n’est pas l’anomalie génétique qui est grave (cela n’a pas de sens) mais ses éventuelles conséquences et les mesures de prévention ou de soins portent sur l’affection liée à l’anomalie génétique en cause.

Il est donc préférable, comme l’a fait le décret d’application du dispositif d’information de la parentèle[682], d’utiliser les termes plus rigoureux d’« anomalie génétique pouvant être responsable d'une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins ».

2.2. Objectifs poursuivis

La présente mesure a pour objet d’expliciter le premier alinéa de l’article L. 1131-1 du code de la santé publique et de mettre en cohérence son deuxième alinéa.

Elle a également pour objet d’expliciter les modalités d’information des membres de la famille potentiellement concernés dans les situations où la personne n’est pas en mesure d’informer elle-même ses apparentés ou d’autoriser le médecin à le faire (il s’agit en particulier des personnes visées au deuxième alinéa de l’article précité).

La règle nouvelle a enfin pour objectif de prévoir les modalités d’information des membres de la famille lorsque la personne qui a réalisé un examen de génétique décède avant la remise des résultats (ou avant d’avoir pu informer les membres de sa famille) et que ceux-ci confirment l’existence d’une anomalie génétique pouvant être responsable d'une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins.

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1. Une mention explicite au consentement de la personne est retenue pour clarifier le premier alinéa de l’article L. 1131-1 du code de la santé publique.

3.2. Par dérogation à l’article 16-10 du code civil, en l’absence de consentement exprès de la personne et préalablement à la réalisation d’un examen de génétique dans son intérêt, le médecin s’assurera qu’elle ne s’y est pas opposée antérieurement, auprès de la personne de confiance mentionnée à l'article L. 1111-6 du code de la santé publique, de la famille ou, à défaut, d’un proche ou, le cas échéant, auprès de la personne chargée d’une mesure juridique de protection à la personne.

Il en va de même pour la réalisation d’une identification par empreintes génétiques à des fins médicales en l’absence de consentement exprès de la personne (en l’espèce par dérogation à l’article 16-11 du code civil).

3.2.3. Seul le médecin peut se substituer à la personne hors d’état d’exprimer sa volonté et informer les membres de sa famille potentiellement concernés. Cependant, contrairement au dispositif subsidiaire prévu au quatrième alinéa[683] de l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique, la personne n’est pas, dans cette situation, en capacité d’« habiliter » par écrit le médecin à transmettre l’information à sa place. 

L’article L. 1131-2-1 du code de la santé publique doit donc être complété. Le choix est fait de rester le plus près possible de l’esprit du texte actuel. Ainsi, si la personne fait l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation à la personne ou est hors d’état d’exprimer sa volonté et que l’examen est réalisé dans son intérêt, le médecin procèdera à l’information des membres de sa famille potentiellement concernés dont il possède les coordonnées et les invitera à se rendre à une consultation de génétique (à moins qu’il ne soit en mesure de les prendre en charge lui-même).

Les membres de la famille dont le médecin possède les coordonnées sont ceux qui sont mentionnés au dossier de soins (dossier médical prévu à l’article L.1111-4 du code de la santé publique ou au dossier de soins infirmiers prévu à l’article R.4311-3 du même code), ce qui correspond en général aux « personnes à joindre en cas de problème », sous réserve qu’il s’agisse bien de membres de la famille potentiellement concernés. Ainsi, si la seule personne à contacter n’a pas de lien génétique avec le sujet de l’examen ou n’est pas concernée, même indirectement, le dispositif prend fin.

Le médecin n’a donc pas à rechercher des coordonnées qui ne sont pas déjà disponibles. Il n’a pas non plus à identifier les membres de la famille potentiellement concernés en l’absence d’aide de la part de la personne qui va bénéficier de l’examen. Le périmètre de sa responsabilité s’arrête aux personnes expressément mentionnées au dossier médical ou de soins et qui ont un intérêt direct à connaître le résultat de l’examen (« membres de la famille potentiellement concernés »).

3.2.4. Le même dispositif s’appliquera aux personnes qui décèdent avant le résultat ou avant d’avoir pu informer les membres de sa famille potentiellement concernés.

Toutefois, si la personne, avant la réalisation de l’examen, avait indiqué ne pas souhaiter transmettre (ni par elle-même ni par le médecin) l’information aux membres de sa famille en cas de confirmation du diagnostic, le dispositif prend fin.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

Un nouveau chapitre préliminaire sera créé au Titre Ier du Livre III de la Ière partie du code de la santé publique.

La mesure modifiera le premier alinéa de l’article L. 1131-1 du code la santé publique pour l’expliciter. Il deviendra l’article L. 1130-1 du nouveau chapitre.

Elle mettra en cohérence le deuxième alinéa de l’article L. 1131-1 du code la santé publique en visant la dérogation à l’article 16-10 du code civil. Il deviendra l’article L. 1130-3 du nouveau chapitre.

La mesure restructurera et complètera l’article L. 1131-1-2 du code la santé publique (qui deviendra dans la nouvelle numérotation l’article L. 1131-1) par l’ajout de deux alinéas (personne hors d’état d’exprimer sa volonté et personne qui décède avant le résultat).

Enfin, trois occurrences seront modifiées à l’article L. 1131-1-2 du code la santé publique (qui deviendra dans la nouvelle numérotation l’article L. 1131-1).

5.       Consultations et modalités d’application

Le Conseil national de l’ordre des médecins a été consulté. Il a transmis son avis le 4 juillet 2019.

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

L’agence de la biomédecine a été consultée et a rendu un avis le 26 juin 2019.

La présente mesure sera mise en application le lendemain de la promulgation de la loi.

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

Article 9 Organiser la transmission d’une information génétique dans les situations de rupture du lien de filiation biologique dans le strict respect de l’anonymat des personnes concernées

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1. Le résultat d’un examen des caractéristiques génétiques réalisé chez une personne concerne potentiellement les membres de sa famille (ou certains d’entre eux). C’est la raison pour laquelle ce résultat n’appartient pas à la seule personne ayant fait l’examen.

De ce caractère particulier de l’information génétique et des enjeux qui lui sont attachés résulte le dispositif dit d’information de la parentèle, précisé[684] à l’article L. 1131-1-2[685] du code de la santé publique, qui prévoit un système obligatoire d’information des membres de la famille potentiellement concernés lorsqu’une anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique ou de soins, est diagnostiquée chez une personne.

1.1.2. La procédure s’articule ainsi :

-          Il appartient à la personne qui a réalisé l’examen d’informer directement les membres de sa famille potentiellement concernés dont elle possède ou peut obtenir les coordonnées, dès lors que des mesures de prévention, y compris de conseil génétique ou de soins, peuvent leur être proposées (troisième alinéa de l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique : « La personne est tenue d'informer les membres de sa famille potentiellement concernés ») ;

-          Au préalable (avant la réalisation de l’examen), le médecin prescripteur doit informer la personne des risques encourus par les membres de sa famille potentiellement concernés en cas de silence de sa part (premier alinéa de l’article précité) ;

-          Le médecin prévoit avec la personne, dans un document écrit, les modalités de l’information destinée aux membres de la famille potentiellement concernées (premier alinéa de l’article précité) ;

-          Le diagnostic établi, le médecin consigne l’information par écrit dans un résumé qui est remis au patient (pour faciliter la délivrance de l’information à la parentèle), lequel en atteste (deuxième alinéa de l’article précité) ;

-          Lorsque la personne a demandé, avant la réalisation de l’examen, à être tenue dans l’ignorance du diagnostic ou a refusé de transmettre elle-même l’information à toute ou partie des membres de sa famille potentiellement concernés, elle peut autoriser, par écrit, le médecin à utiliser la procédure d’information « indirecte » de ces derniers (premier et quatrième alinéa de l’article précité) ;

-          Dans cette hypothèse, la personne est tenue de communiquer au médecin les identités et coordonnées des intéressés dont elle dispose (quatrième alinéa de l’article précité) ;

-          Le diagnostic établi, le médecin transmet alors à ces intéressés un courrier portant à leur connaissance l’existence d’une information médicale à caractère familial susceptible de les concerner et les invite à se rendre à une consultation de génétique, sans dévoiler ni le nom de la personne ni l’anomalie génétique concernée ni les risques associés (quatrième alinéa de l’article précité).

1.1.3. Un alinéa spécifique (sixième alinéa de l’article susmentionné) est consacré à la procédure particulière d’information qui peut être mise en œuvre lorsque la personne qui va réaliser l’examen a procédé, antérieurement à l’examen, à un don de gamètes (ou, avec son conjoint, à un don d’embryon) qui a abouti à la naissance d’un ou plusieurs enfants.

Dans cette hypothèse, et si le diagnostic suspecté est confirmé, la personne peut autoriser le médecin prescripteur à saisir le médecin responsable du centre d’assistance médicale à la procréation concerné[686] afin qu’il procède à l’information des enfants issus du don. En effet, en l’espèce, il n’y a pas d’information directe possible (principe d’anonymat du don de gamètes).

Ce dispositif est doublement dérogatoire à la procédure déclinée aux premiers alinéas de l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique. D’une part, il permet la transmission de l’information « familiale » par-delà la rupture du lien de filiation biologique (de façon indirecte en raison du principe d’anonymat du don) et, d’autre part, il exempte la personne (le donneur) de l’obligation d’informer (elle « peut » autoriser le médecin à saisir le responsable du centre d’assistance médicale à la procréation ; si elle ne le fait pas, sa responsabilité ne sera pas engagée).

1.1.4. La loi du 22 janvier 2002 relative à l’accès aux origines des personnes adoptées et pupilles de l’Etat a pour but de faciliter l’accès aux origines de ces personnes. Elle a confirmé la réversibilité du secret qui reste liée à l’accord exprès de la mère de l’enfant. Tout en conservant la possibilité d’accoucher anonymement, la loi tend ainsi à limiter les obstacles légaux et administratifs opposés à l’accès aux origines personnelles.

1.1.5 Cette loi a également institué (article L. 147-1 du code de l’action sociale et des familles) un Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP), instance nationale de médiation destinée à favoriser, sur demande d’un enfant devenu majeur, le rapprochement des parties concernées et à résoudre des dilemmes dans des situations difficiles.

L’article L. 222-6 du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la loi du 22 janvier 2002, prévoit que « Toute femme qui demande, lors de son accouchement, la préservation du secret de son admission et de son identité par un établissement de santé est informée des conséquences juridiques de cette demande et de l'importance pour toute personne de connaître ses origines et son histoire. Elle est donc invitée à laisser, si elle l'accepte, des renseignements sur sa santé et celle du père, les origines de l'enfant et les circonstances de la naissance ainsi que, sous pli fermé, son identité. »

Le même article précise que cette femme est informée de la possibilité qu'elle a de lever à tout moment le secret de son identité et qu'elle peut à tout moment donner son identité sous pli fermé (si elle ne l’a fait plus tôt) ou compléter les renseignements qu'elle a donnés (y compris médicaux) au moment de la naissance.

Les établissements de santé et les services départementaux ainsi que les organismes autorisés et habilités pour l'adoption communiquent au Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP), sur sa demande, une copie des éléments relatifs à l'identité notamment[687] de la femme qui a demandé le secret de son identité et, le cas échéant, de la personne qu'elle a désignée à cette occasion comme étant le parent de l'enfant, ainsi que tout renseignement ne portant pas atteinte au secret de cette identité et concernant la santé des père et mère de naissance, les origines de l'enfant et les raisons et circonstances de sa remise au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un organisme autorisé et habilité pour l'adoption (article L. 147-5 du code de l’action sociale et des familles).

Enfin, la loi du 22 janvier 2002 prévoit la mise en place d’un réseau de correspondants départementaux, désignés par le Président du conseil départemental.

1.2. Cadre constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 mars 2012 par le Conseil d'État, dans les conditions prévues par l'article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles L. 147-6 et L. 222-6 du code de l'action sociale et des familles.

D'une part, le Conseil constitutionnel a relevé que, par l’article L. 222-6 du code de l’action sociale et des familles, le législateur a entendu éviter le déroulement de grossesses et d'accouchements dans des conditions susceptibles de mettre en danger la santé tant de la mère que de l'enfant, et prévenir les infanticides ou les abandons d'enfants. Il a ainsi poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé. D’autre part, par l'article L. 147-6 du code de l’action sociale et des familles, le législateur a entendu faciliter la connaissance par l'enfant de ses origines personnelles.

Les articles L. 147-6 et L. 222-6 du code de l’action sociale et des familles ont donc été déclarés conformes à la Constitution.

1.3. Cadre conventionnel

1.3.1. L’Article 18 du Protocole additionnel à la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales[688] prévoit que :

« Lorsque les résultats d’un test génétique réalisé sur une personne peuvent être pertinents pour la santé d’autres membres de sa famille, la personne ayant fait l’objet du test doit en être informée. »

Le rapport explicatif de ce protocole[689] précise les principes d’information des membres de la famille[690].

1.3.2. Le dispositif d’accouchement dans le secret a été validé par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH). Une ressortissante française née sous X, qui réclamait devant la CEDH le droit d'accéder à ses origines par la levée du secret de sa naissance en invoquant deux articles de la Convention européenne des droits de l'homme (l’article 8 sur le droit au respect de la vie privée et familiale et l’article 14 sur l'interdiction de la discrimination), a été déboutée par la Cour[691]. Cette dernière a en effet estimé que la législation française relative à l’accouchement sous X ne violait pas ces articles de la Convention européenne des droits de l’homme car elle tendait à atteindre un équilibre et une proportionnalité suffisante entre les intérêts en cause.

1.4. Éléments de droit comparé

D’après le rapport Barèges du 12 novembre 2010[692], si peu de pays reconnaissent la possibilité pour les mères d'accoucher sans communiquer leur identité[693], la plupart des États en Europe et dans le monde acceptent ou proposent un « accouchement dans le secret » ou une procédure similaire[694].

 

Seules la France, l'Italie et le Luxembourg (sur lequel la mission n'a pu avoir d'informations plus détaillées) autorisent l'accouchement dans le secret et sans communication de l'identité de la mère.

En Italie, le recueil des données personnelles et médicales (mère et enfant) est réalisé comme suit :

-          une fiche médicale recueille toutes les informations nécessaires (pour l’enfant et la mère) comme pour chaque nouveau-né ; celles concernant la santé de la mère « seront couvertes par le secret » et conservées dans le certificat d'assistance à l'accouchement dans les archives de l’hôpital (avec une copie de la fiche médicale contenant les informations sur l’identité de la mère) sous pli fermé ; ce lien obligatoire entre les deux documents permet techniquement de remonter au nom et au prénom de la mère.

-          La seule possibilité d’accéder à la fiche médicale, contenant le nom de la mère biologique, est limitée par le délai de conservation des archives « cent ans après leur formulation » ; toutefois une dérogation est possible à cette interdiction « si les précautions nécessaires sont faites pour préserver l'anonymat ».

2.             Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1. Si le sixième alinéa de l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique permet à une personne, chez laquelle un diagnostic génétique a été réalisé et qui a procédé antérieurement à un don de gamètes (ou, avec son conjoint, à un don d’embryon), d’autoriser le médecin prescripteur de l’examen à saisir le médecin responsable du centre d’assistance médicale à la procréation concerné afin que ce dernier procède à l’information des personnes nées du don, rien n’est prévu dans l’hypothèse inverse.

Or, en cas de diagnostic d’une anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique ou de soins, chez une personne née d’un don (de gamètes ou d’embryons), il est tout aussi important que le donneur en soit également informé pour son bénéfice direct et celui de sa famille.

Un dispositif réciproque de celui déjà existant doit donc être introduit. Afin de respecter le principe d’anonymat du don, l’information transitera également par le médecin responsable du centre d’assistance médicale à la procréation concerné.

2.1.2. Le dispositif d’information de la parentèle ne peut être mis en œuvre lorsque le lien de filiation biologique a été rompu (par l’effet de la loi ou par l’effet d’une décision judiciaire) en dehors de la dérogation susmentionnée, qui permet, si la personne y consent, l’information des enfants nés d’un don de gamètes (ou d’un don d’embryons). En effet, dans ces situations de rupture du lien de filiation biologique (dont relève l’accouchement dans le secret), les dispositions de l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique ne trouvent pas à s’appliquer étant rappelé que le troisième alinéa de cet article dispose que « la personne est tenue d'informer les membres de sa famille potentiellement concernés dont elle ou, le cas échéant, son représentant légal possède ou peut obtenir les coordonnées » et que le quatrième alinéa précise « qu’elle communique au médecin les coordonnées des membres de sa famille dont elle dispose ».

Or, dans ces situations (dont relève l’accouchement dans le secret), par hypothèse, la personne qui va réaliser l’examen ne détient ni ne peut obtenir les coordonnées de ses « descendants » potentiellement concernés.

2.1.3. Le Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP) a été saisi, depuis la loi de bioéthique du 7 juillet 2011, de plusieurs situations dans lesquelles la question de la transmission d’une information médicale d’ordre génétique se posait. Dans un cas, la mère de naissance, chez laquelle un diagnostic génétique avait été réalisé, a entrepris une démarche auprès du CNAOP pour que l’enfant né dans le secret en soit informé. Dans un autre cas, la démarche était inverse, un médecin, après avoir diagnostiqué une anomalie génétique chez un enfant né dans le secret, sollicitait le CNAOP pour l’information de la mère de naissance (notamment en raison des mesures médicales possibles au bénéfice de l’éventuelle « fratrie » de l’enfant).

Dans ces situations, la transmission éventuelle de l’information aux intéressés ne peut être réalisée sur le fondement de l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique.

2.1.4 Il est précisé que les « renseignements » portant sur la santé de la mère ou du père de naissance, mentionnés à l’article L. 222-6 du code de l’action sociale et des familles, sont facultatifs et qu’une éventuelle affection d’origine génétique n’est pas nécessairement connue au moment de l’accouchement (même si les renseignements peuvent être complétés par la suite). Mais surtout, pour accéder à ces éventuelles informations médicales, l’enfant doit effectuer une démarche active. Enfin, la transmission d’informations de l’enfant à la mère de naissance n’est pas envisagée.

2.1.5 Pour assurer et sécuriser la transmission d’une information médicale d’ordre génétique, qui peut être majeure voire vitale pour la personne née dans le secret comme pour la mère de naissance et ses éventuels autres descendants, le cadre législatif actuel doit être complété. Ce d’autant plus qu’aucune levée du secret de l’accouchement n’est nécessaire pour atteindre cet objectif : la transmission de l’information médicale d’ordre génétique peut être organisée de manière à ne nécessiter aucun contact direct entre la mère et l’enfant et aucune révélation sur les identités respectives.

2.2. Objectifs poursuivis

La règle envisagée complétera le dispositif en vigueur en prévoyant que le donneur de gamètes ou d’embryons puisse également, sans rompre le principe d’anonymat, être destinataire d’une information médicale d’ordre génétique lorsqu’une anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique ou de soins, est diagnostiquée chez une personne née de son don.

Elle a également pour objet de permettre la transmission, sans rupture du secret, d’une information médicale d’ordre génétique du parent de naissance à la personne née dans le secret, et inversement, en cas de diagnostic, chez l’un ou chez l’autre, d’une anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique ou de soins.

3.             Options possibles et dispositif retenu

3.1. Pour garantir le secret professionnel (médical), l’information détaillée sur l’anomalie génétique en cause et, le cas échéant, les risques associés ne peuvent transiter que de médecin à médecin. Les médecins du parent de naissance et de l’enfant né dans le secret doivent par conséquent être mis en relation sans rupture du secret de l’accouchement.

Cette mise en relation nécessite un intermédiaire tenu au secret professionnel.

3.2. L’intervention des correspondants départementaux (désignés par le Président du conseil départemental dans chaque département dans le cadre du dispositif d’accouchement dans le secret) a été évoquée, dans le cas où le diagnostic génétique est fait chez un parent de naissance, pour établir un contact avec l’enfant né dans le secret afin de l’inviter à se rendre à une consultation de génétique (le généticien ainsi consulté obtiendrait, du correspondant départemental, les coordonnées du médecin ayant fait le diagnostic chez le parent de naissance). Toutefois, cette solution, qui ne vaut que dans un sens (l’intervention du CNAOP étant nécessaire dès lors qu’il faudrait identifier le parent de naissance), est apparue complexe à mettre en œuvre de façon homogène et éloignée des missions de ces professionnels locaux.

3.3. L’option retenue permet d’assurer la transmission effective de l’information médicale d’ordre génétique répondant aux critères de l’article L.1131-1-2 du code de la santé publique (anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique ou de soins) du parent de naissance à l’enfant né dans le secret, et inversement.

Tout d’abord, la personne chez laquelle le diagnostic est réalisé peut consentir à une telle transmission qui ne revêtira pas un caractère obligatoire. Ce choix s’inscrit dans celui fait par le législateur en 2011 pour le don de gamètes  la personne peut autoriser le médecin prescripteur à saisir le responsable du centre d'assistance médicale à la procréation afin qu'il procède à l'information des enfants issus du don »).

Dans le respect du secret de l’accouchement, le Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP), fort de son expérience dans le domaine, apparait le mieux placé pour assurer le rôle d’intermédiaire qui identifierait, selon les cas, l’enfant né dans le secret ou le parent de naissance.

Le médecin généticien dit prescripteur, qui établit un diagnostic génétique (anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant de mesure de prévention, y compris de conseil génétique ou de soins) chez un parent de naissance ou un enfant né dans le secret, saisira le CNAOP (par écrit pour des questions de traçabilité et de sécurité) en lui donnant les informations utiles pour l’identification du destinataire de l’information mais sans lui apporter aucune précision de nature médicale. 

Le CNAOP ne devrait pas rencontrer de difficulté pour identifier l’enfant né dans le secret (sauf exception qui pourrait être liée à une date erronée de l’accouchement dans le dossier). En revanche, la recherche du parent de naissance pourrait s’avérer plus complexe puisque l’expérience acquise en matière d’accès aux origines dans le contexte de l’accouchement dans le secret montre que, dans environ un tiers des cas, il n’y a aucun élément identifiant dans les dossiers du Conseil départemental et de la maternité. Dans ces situations, la procédure sera, de fait, interrompue.

3.4. La procédure se déclinera comme suit (elle est aussi proche que possible du dispositif en matière de don de gamètes) :

-          Si le diagnostic génétique est posé chez un parent de naissance et que cette personne a autorisé le médecin prescripteur à saisir le CNAOP pour identifier la personne née dans le secret :

-          La procédure est identique mais inversée si le diagnostic génétique est fait chez une personne née dans le secret qui souhaite que l’information médicale d’ordre génétique soit transmise au parent de naissance.

4.             Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

Un chapitre préliminaire sera créé au Titre Ier du Livre III de la Ière partie du code de la santé publique.

Pour une meilleure lisibilité, le dispositif dérogatoire qui concerne l’information de la parentèle en cas de don de gamètes (dernier alinéa de l’article L. 1131-1-2) fera l’objet d’un article spécifique qui remplacera les dispositions actuelles de l’article L. 1131-1-1 du code de la santé publique

Des nouvelles dispositions qui remplaceront les actuelles dispositions de l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique déclineront les modalités de transmission d’une information médicale d’ordre génétique en cas d’accouchement dans le secret.

La mesure complètera l’article L. 147-1 du code de l’action sociale et des familles pour prévoir la nouvelle mission du CNAOP.

Enfin, elle ajoutera à l’article L. 147-2 du code de l’action sociale et des familles un 5° qui prévoira que le CNAOP peut recevoir la demande écrite d’un médecin prescripteur d’un examen de génétique dans le cadre du nouveau dispositif.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

L’ajout d’une nouvelle mission au Conseil national de l’accès aux origines personnelles (CNAOP), qui n’apparait pas éloignée de celles qui lui sont confiées actuellement et ne nécessite pas de compétences supplémentaires, se fera à moyens constants. D’autant que le nombre de cas annuels devrait être faible (à ce jour moins de cinq cas ont été signalés).

4.3.                       Impacts sur les particuliers

La mesure crée un nouveau droit pour les enfants nés dans le secret de l’accouchement. Elle leur permettra d’avoir connaissance d’informations génétiques les concernant et de bénéficier ainsi de mesures de prévention et de soins.

5.             Consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

L’article D. 148-1 du code de l’action sociale et des familles prévoit que :

« Le Conseil national de la protection de l'enfance favorise la coordination des acteurs de la protection de l'enfance. A cette fin :

1° Il propose au Gouvernement les orientations nationales de la protection de l'enfance dans le but de construire une stratégie nationale ;

2° Il assiste le Gouvernement en rendant des avis sur toutes les questions qui concernent la protection de l'enfance et peut de sa propre initiative proposer aux pouvoirs publics, après évaluation, les mesures de nature à améliorer les interventions en protection de l'enfance ;

3° Il contribue à orienter les études stratégiques, les travaux de prospective et d'évaluation menés dans le champ de la protection de l'enfance ;

4° Il promeut la convergence des politiques menées au niveau local en s'appuyant sur les expériences conduites au niveau territorial comme à l'étranger ;

5° Il formule des recommandations dans le champ de la formation initiale et continue des professionnels de la protection de l'enfance.

En outre, le Conseil national de la protection de l'enfance est consulté sur les projets de texte législatif ou réglementaire portant à titre principal sur la protection de l'enfance.

Il peut être saisi par le Premier ministre, le ministre chargé des familles et de l'enfance et les autres ministres concernés de toute question relevant de son champ de compétences.

Il peut se saisir de toute question relative à la protection de l'enfance. »

Le Conseil national de la protection de l'enfance a été consulté.

Par ailleurs, l’article L. 147-1 du code de l’action sociale et des familles dispose que :

« Un Conseil national, placé auprès du ministre chargé des affaires sociales, est chargé de faciliter, en liaison avec les départements et les collectivités d'outre-mer, l'accès aux origines personnelles dans les conditions prévues au présent chapitre.

Il assure l'information des départements, des collectivités d'outre-mer et des organismes autorisés et habilités pour l'adoption sur la procédure de recueil, de communication et de conservation des renseignements visés à l'article L. 147-5, ainsi que sur les dispositifs d'accueil et d'accompagnement des personnes à la recherche de leurs origines, des parents de naissance et des familles adoptives concernés par cette recherche ainsi que sur l'accueil et l'accompagnement des femmes demandant le bénéfice des dispositions de l'article L. 222-6.

Il émet des avis et formule toutes propositions utiles relatives à l'accès aux origines personnelles. Il est consulté sur les mesures législatives et réglementaires prises dans ce domaine.

Il est composé d'un magistrat de l'ordre judiciaire, d'un membre de la juridiction administrative, de représentants des ministres concernés, d'un représentant des conseils départementaux, de trois représentants d'associations de défense des droits des femmes, d'un représentant d'associations de familles adoptives, d'un représentant d'associations de pupilles de l'Etat, d'un représentant d'associations de défense du droit à la connaissance de ses origines, et de deux personnalités que leurs expérience et compétence professionnelles médicales, paramédicales ou sociales qualifient particulièrement pour l'exercice de fonctions en son sein. »

Le Conseil national de l’accès aux origines personnelles (CNAOP) a été consulté. Il a rendu son avis le 26 juin 2019.

Enfin, la Haute autorité de santé a été consultée. Elle a transmis son avis le 12 juillet 2019.

5.2.                       Modalités d’application

5.2.1.    Application dans le temps

L’entrée en vigueur de la mesure est différée dans l’attente du décret d’application permettant de préciser la procédure et l’adaptation des acteurs.

5.2.2.    Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

5.2.3.    Textes d’application

Un décret en Conseil d’Etat complètera les dispositions prévues aux articles R. 1131-20-1 du code de la santé publique et suivants pour compléter le dispositif en cas de  don de gamètes.

Un décret en Conseil d’Etat permettra de préciser la procédure et l’adaptation des acteurs en cas d’accouchement dans le secret.

 


Article 10 Rénover l’information et le consentement des personnes à l’ère de la médecine génomique tout en maintenant un haut niveau de protection des personnes concernées

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1. L'article 16-10 du code civil dispose que :

« L'examen des caractéristiques génétiques d'une personne ne peut être entrepris qu'à des fins médicales ou de recherche scientifique.

« Le consentement exprès de la personne doit être recueilli par écrit préalablement à la réalisation de l'examen, après qu'elle a été dûment informée de sa nature et de sa finalité. Le consentement mentionne la finalité de l'examen. Il est révocable sans forme et à tout moment ».

Ces dispositions ont été introduites dans le code civil lors de la révision des lois de bioéthique du 6 août 2004[695], pour adapter les dispositions en matière de consentement avec les exigences de l’article 5 de la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine[696], aux termes desquels :

« Une intervention dans le domaine de la santé ne peut être effectuée qu'après que la personne concernée y a donné son consentement libre et éclairé.

« Cette personne reçoit préalablement une information adéquate quant au but et à la nature de l'intervention ainsi que quant à ses conséquences et ses risques.

« La personne concernée peut, à tout moment, librement retirer son consentement. » 

Le rapport explicatif de la Convention précitée apporte les précisions suivantes :

« Le consentement du patient ne peut être libre et éclairé que s'il est donné à la suite d'une information objective du professionnel de la santé responsable, quant à la nature et aux conséquences possibles de l'intervention envisagée ou de ses alternatives et en l'absence de toute pression de la part d'autrui. (…) »[697]

« Le consentement peut revêtir des formes diverses: il peut être exprès ou bien implicite; le consentement exprès peut être verbal ou adopter la forme écrite. L'article 5, qui est général et recouvre des situations très différentes, n'exige pas une forme particulière. Celle-ci dépendra pour beaucoup de la nature de l'intervention. (…) »[698]

La réalisation d’un examen des caractéristiques génétiques est donc apparue au législateur bioéthique de 2004 comme relevant d’un consentement exprès de la personne, notamment au regard de ses implications pour cette personne et d’une finalité qui devait être précise pour garantir son caractère libre et éclairé.

L’article 9 du Protocole additionnel à la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales[699] confirme que le consentement à un examen génétique doit être consigné par écrit[700].

Enfin, les modalités de consentement (exprès et par écrit) prévues par l’article 16-10 du code civil concernent la réalisation d’examens des caractéristiques génétiques dans des finalités médicales ou de recherche scientifique. Dans ce dernier cas, les examens sont également soumis aux dispositions du titre II du Livre Ier de la première partie du code de la santé publique (recherches impliquant la personne humaine).

En revanche, les modalités de consentement à la réalisation d’examens des caractéristiques génétiques à des fins de recherche scientifique quand ils sont réalisés à partir d’échantillons conservés à d’autres fins relèvent d’un régime de non opposition de la personne dûment informée du projet de recherche  (modalités dérogatoires à l’article 16-10 du code civil).

1.1.2. Conformément à l’article R. 1131-1 du code de la santé publique, l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne à des fins médicales a pour objet :

-          Soit de poser, de confirmer ou d'infirmer le diagnostic d'une maladie à caractère génétique chez une personne (confirmer le diagnostic d’une affection génétique chez un sujet malade) ;

-          Soit de rechercher les caractéristiques d'un ou plusieurs gènes susceptibles d'être à l'origine du développement d'une maladie chez une personne ou les membres de sa famille potentiellement concernés (préciser les statuts des apparentés et le risque encouru par un enfant né ou à naître, ou à déterminer si un sujet à risque est ou non porteur du gène responsable avant que n’apparaissent les premiers symptômes) ;

-          Soit d'adapter la prise en charge médicale d'une personne selon ses caractéristiques génétiques (identification de facteurs de risque génétique ayant un impact sur la prise en charge thérapeutique de la personne, c’est la pharmacogénétique).

En application de l’article 16-10 du code civil, le périmètre de l'information délivrée à la personne qui se soumet à l'examen est précisé à l'article R. 1131-4 du code de la santé publique[701] :

« Préalablement à l'expression écrite de son consentement, la personne est informée des caractéristiques de la maladie recherchée, des moyens de la détecter, du degré de fiabilité des analyses ainsi que des possibilités de prévention et de traitement. En outre, elle est informée des modalités de transmission génétique de la maladie recherchée et de leurs possibles conséquences chez d'autres membres de sa famille. »

La personne qui consent à un examen des caractéristiques génétiques le fait donc pour une finalité déterminée de l’examen (« la maladie recherchée ») et pour les informations « désirées » qui correspondent au motif de l’examen.

Cette interprétation de l’article 16-10 du code civil est stricte, d’autant qu’elle est le support d'une incrimination pénale. En effet, l’article 226-25 du code pénal dispose que :

« Le fait de procéder à l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne à des fins autres que médicales ou de recherche scientifique, ou à des fins médicales ou de recherche scientifique, sans avoir recueilli préalablement son consentement dans les conditions prévues par l'article 16-10 du code civil, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »

1.1.3 En France, les examens des caractéristiques génétiques à des fins médicales sont réalisés uniquement dans des laboratoires autorisés par les agences régionales de santé (en application de l’article L. 1131-2-1 du code de la santé publique) par des praticiens agréés par l’Agence de la biomédecine (en application de l’article L. 1131-3 du code de la santé publique).

1.1.4. En quelques années, la pratique clinique en génétique est passée de l’utilisation d’examens ciblés à celui d’examens de séquençage à haut débit ou de séquençage complet du génome.

En effet, les technologies actuelles et notamment les méthodes de séquençage haut débit[702] permettent d’explorer le génome dans sa globalité.

Ces méthodes sont d’ores et déjà utilisées en France et appelées à se développer notamment dans le cadre du plan France médecine génomique 2025[703].

Dans son rapport médical et scientifique[704], l’Agence de la biomédecine analyse que « La génétique moléculaire est en train de vivre une révolution technologique avec l’utilisation des séquenceurs de nouvelles générations. En pratique, pour de très nombreuses maladies pouvant impliquer plusieurs gènes ou pour les pathologies qui partageaient une « porte d’entrée » clinique identique, les laboratoires testaient les gènes les uns après les autres avant l’arrivée de cette technologie. Avec le séquençage massif parallèle les laboratoires ont pu développer des panels. Un panel est un ensemble de gènes testés pour une indication. Ainsi, lorsqu’un prélèvement nécessite plusieurs examens différents afin de poser un diagnostic il devient possible de les réaliser en une seule analyse. »

Ainsi :

-          Si 8 laboratoires ont réalisé des analyses d’exomes[705] en 2015, ils étaient 13 en 2017 ;

-          Alors qu’en 2013 seuls 55 laboratoires avaient réalisé des examens en utilisant des séquenceurs de nouvelles générations, ils ont été 94 à le faire en 2017 ;

-          En 2017, environ 65 736 examens résultant de l’utilisation des séquenceurs de nouvelles générations ont été rendus aux prescripteurs soit 15,8% de l’ensemble des examens de génétique moléculaire (hors pharmacogénétique) (contre 9,3% en 2015).

1.2. Cadre conventionnel

Trois articles de la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine méritent d’être cités :

-          L’article 5 qui prévoit que la personne reçoit préalablement une information adéquate quant au but et à la nature de l'intervention « ainsi que quant à ses conséquences et ses risques » ;

-          Deux articles du Protocole additionnel à la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales

« Le consentement aux tests visés à l’article 8, paragraphe 2, doit être consigné par écrit. »

1.3. Éléments de droit comparé

Dans son « Encadrement international de la bioéthique »[707], l’Agence de la biomédecine précise qu’« il n’existe pas de définition commune concernant les tests génétiques et différentes approches peuvent être identifiées (de la plus large à la plus technique) sans pour autant distinguer les tests génétiques de l’information génétique qui doit être délivrée aux patients ».

Elle indique également que, « dans la plupart des cas, les tests génétiques sont définis dans un document qui n’a pas de valeur juridique contraignante. La plupart des lois ou des normes juridiques existantes contiennent différents concepts ou terminologies sans pour autant définir la notion de tests génétiques ».

Toujours selon la même source :

-          À l’heure actuelle, très peu de pays ont adopté une législation spécifique quant aux tests génétiques. L'accès à ces tests est donc peu réglementé. Quelques pays ont adopté des lois couvrant les différents domaines d’application de la génétique (médical, judiciaire, emploi et assurances), notamment l’Autriche, la Suisse et le Portugal. 

-          La plupart du temps, les dispositions relatives à la génétique sont éparses : on en trouve dans des lois couvrant le champ général de la bioéthique (France), dans des lois relatives au droit des patients (Danemark) ou encore relatives à la protection des données personnelles (Allemagne[708]). 

-          L’accès aux tests génétiques est plus ou moins libre selon les pays. Si la majeure partie des tests génétiques sont proposés dans le cadre des systèmes nationaux de santé, des offres de tests accessibles sans intermédiaire médical sont apparues dans certains pays.

-          Dans le domaine de la génétique médicale, les tests génétiques ne peuvent être effectués qu’après une prescription médicale (comme en France) en Allemagne, en Suisse et au Portugal notamment alors qu’en Belgique, au Royaume-Uni, en Grèce et en Slovénie, ils sont en accès libre. Aux États-Unis, des tests génétiques sont accessibles sans prescription médicale et sont facturés par les laboratoires.

Par ailleurs, la règlementation européenne relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro[709] (les tests génétiques relèvent de ces dispositifs) traite des aspects de sécurité et de qualité mais ne prévoit aucune disposition sur les conditions d’utilisation et d’exploitation des résultats des examens concernés.

Au niveau international, la question des découvertes fortuites apparaît très peu dans les textes juridiques[710].

La recommandation du Conseil de l’Europe R (92) 3 du Comité des ministres aux États membres sur les tests et le dépistage génétique à des fins médicales mentionne les découvertes fortuites. Elle indique dans son principe 11 que « Conformément à la législation nationale, les découvertes inattendues ne peuvent être communiquées à la personne testée que si elles ont une importance clinique directe pour celle-ci ou pour sa famille » et précise que la communication de ces découvertes à la famille ne devrait être autorisée que si la personne refuse expressément de les avertir alors que leur vie est en danger[711].

La Société Européenne de Génétique Humaine[712] a publié des recommandations sur le séquençage complet du génome dans le système de soins. Elle précise que lorsque l’utilisation de ces techniques est envisagée, un protocole doit être mis en place pour guider la communication des découvertes incidentes. Elle recommande également la communication de l’information si la détection d’un variant non sollicité dans la prescription est révélateur d’une maladie grave qui permet des mesures de préventions ou de soins et de recontacter le patient si une nouvelle preuve d’utilité clinique surgit de l’analyse initiale du patient, mais après que la question diagnostique ait été réglée[713].

Enfin, dans les réponses apportées par les conseillers aux affaires sociales interrogés sur le cadre bioéthique national, il apparait qu’en Italie le comité national de bioéthique s’est interrogé sur les découvertes fortuites dans le cadre d’analyses génomiques (avis rendu le 17 mars 2016[714]).

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1. Si les nouvelles techniques utilisées en génétique relèvent (comme tout examen de génétique) d’une justification en termes de nécessité (besoin de résoudre un problème clinique) et de proportionnalité (équilibre des avantages et inconvénients pour le patient) et si, comme l’indique l’Agence de la biomédecine[715], « elles sont un plus, pour toutes les maladies pour lesquelles la cause génétique n’est pas identifiée avec comme objectif de diminuer l’errance diagnostique », elles comportent néanmoins un certain nombre d’inconvénients.

Pour l’Agence de la biomédecine, ces inconvénients sont de deux ordres : 

-          D’une part, l’interprétation d’une mutation pathogène par rapport à une simple variation du génome est complexe car cette notion évolue au fur et à mesure de l’avancée des connaissances[716] ;

-          D’autre part, ces nouvelles technologies augmentent considérablement le risque de découverte incidente, c’est-à-dire de diagnostiquer des pathologies non recherchées initialement et posent la question de la conduite à tenir face au résultat.

Si la question des informations incidentes n’est pas nouvelle (les techniques médicales d’imagerie[717] et de biologie les suscitaient déjà), le séquençage est une technique avec laquelle on change d’échelle en matière de productions de données et qui génère, par nature, un nombre élevé d’informations génétiques « incidentes », non ciblées et non sollicitées.

Dans son avis n°  124, le Comité consultatif national d’éthique distinguait déjà plusieurs types d’informations produites par les nouvelles techniques en génétique « l’information génétique donne lieu à une série d’informations de nature et de pertinence différentes. Il y a les informations désirées, pour lesquelles l’examen a été prescrit et sollicité ; il y a les informations pertinentes, mais non sollicitées (incidentes et/ou secondaires) ; il y a les informations disponibles dont la pertinence et l’utilité cliniques ne sont pas encore établies mais qui le seront peut-être à terme. Or, le séquençage à haut-débit, qui lit l’ensemble du génome, générera nécessairement un nombre élevé d’informations non ciblées. Par ailleurs, parmi ces informations, il en est qui ne sont pas strictement individuelles mais familiales, et qui sont donc utiles à l’entourage familial du patient. »[718].

Ainsi, les découvertes incidentes peuvent ne pas avoir de rapport avec l’indication de la prescription mais avoir une conséquence clinique connue. Cette conséquence clinique peut être susceptible de mesures de prévention ou de soins. Dans d’autres cas, la signification de la variation du génome qui est découverte peut être inconnue.[719]

2.1.2. Le cadre et la portée de l’article 16-10 du code civil sont interrogés par ces découvertes incidentes. 

En effet, porter à la connaissance d’une personne les anomalies génétiques découvertes de manière incidente, alors que la finalité de l'examen auquel elle a consenti concernait une autre anomalie génétique, contrevient à la lettre de l'article 16-10 du code civil : la personne a consenti à une finalité précise et non aux conséquences collatérales éventuelles de l’examen.

Dans son étude de 2009 sur la révision des lois de bioéthique, le Conseil d’Etat rappelait que si les règles juridiques applicables à l’examen des caractéristiques génétiques, qui s’appuient sur les principes de réalisation des tests sur la base du consentement exprès de la personne (article 16-10 du code civil), d’information complète sur les résultats (article L. 1111-2 du code de la santé publique), de non-discrimination et de non-stigmatisation en raison des caractéristiques génétiques (article 16-13 du code civil, article 225-1 et suivants du code pénal), faisaient consensus, on pouvait déjà s’interroger sur la portée du consentement prévu par l’article 16-10 à l’aune des évolutions techniques permettant, à partir d’un examen réalisé dans une finalité précise, de mettre en évidence de multiples informations sur les caractéristiques génétiques de la personne, bien que ces informations n’aient pas été spécifiquement recherchées, et que, dès lors, il pouvait être de l’intérêt de la personne de les connaître[720].

Par ailleurs, saisi en 2013 du projet de décret relatif aux conditions de mise en œuvre de l'information de la parentèle dans le cadre d'un examen des caractéristiques génétiques à finalité médicale[721], prévu par la loi de bioéthique du 7 juillet 2011, le Conseil d’Etat constatait[722] :

« Les règles juridiques très strictes qui encadrent les conditions de recours et de réalisation des examens des caractéristiques génétiques sont régies à la fois par le code civil (article 16-10) et le code de la santé publique (L. 1131-1, R. 1131-4). Elles exigent que le consentement d’une personne à un examen des caractéristiques génétiques soit donné pour une finalité déterminée, excluant ainsi que puisse être effectué un examen génétique dont le champ excèderait celui résultant du consentement de l’intéressé. Or, les nouvelles méthodes d’investigation (notamment la méthode dite du séquençage) donnent lieu de plus en plus souvent à la découverte d’anomalies génétiques non recherchées, dites anomalies incidentes. Cette occurrence n’est régie par aucune disposition législative et se règle, dans la pratique, au sein du colloque singulier entre le médecin et son patient.

« (…), il a semblé que le décret ne pouvait, sans risquer de méconnaître la lettre de l’article 16-10 du code civil, prévoir explicitement un dispositif obligeant une personne à informer sa parentèle de l’existence d’une anomalie génétique grave découverte incidemment, alors que son consentement n’aura été donné que pour rechercher une autre anomalie et qu’au surplus, le fait de réaliser un examen des caractéristiques génétiques en dehors des finalités prédéterminées est sanctionné pénalement (article 226-25 du code pénal). »

Le Conseil d’État appelait dès lors l’attention du Gouvernement « sur la nécessité d’adapter les termes de l’article 16-10 du code civil et de l’article R. 1131-4 du code de la santé publique pris pour son application qui apparaissent, compte tenu des évolutions scientifiques, partiellement obsolètes et empêchent de prévoir de façon explicite une information de la parentèle conforme aux objectifs légitimes de prévention et de soins. »

2.1.3. Face à une augmentation des examens des caractéristiques génétiques conduisant à des découvertes incidentes et dans l’attente de la révision de l’article 16-10 du code civil, l’arrêté du 27 mai 2013 définissant les règles de bonnes pratiques applicables à l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne à des fins médicales[723] a été élaboré sur proposition de l’Agence de la biomédecine et de la Haute autorité de santé en application de l’article L. 1131-2 du code de la santé publique.

Tout en rappelant le cadre en vigueur auquel il devait rester fidèle (« Le droit en vigueur, pour protéger le patient d'informations inutiles, angoissantes ou dont la révélation n'est pas désirée, n'est pas en faveur de la transmission d'informations autres que celle initialement recherchée et pour laquelle le patient a consenti à la réalisation de l'examen », Point B.7.1), l’arrêté précité a renvoyé provisoirement au colloque singulier et au médecin la charge de déterminer au cas par cas la conduite à tenir.

Cet arrêté a également introduit dans l’information délivrée préalablement à la personne la mention d’un « risque éventuel d’identification de caractéristiques génétiques sans relation directe avec la prescription ». Il s’est toutefois abstenu d’introduire explicitement la notion de consentement à la révélation de ces éventuelles découvertes incidentes dans les développements relatifs au consentement (Point A.3.2 « Le consentement »), ne la mentionnant qu’à la fin du point B.7.1 (« Le résultat »[724]).

Pour autant, les recommandations que cet arrêté formule ne peuvent être que provisoires. En effet, après avoir conseillé le médecin confronté à pareille situation « de prendre l’attache d’un médecin œuvrant au sein d’une équipe pluridisciplinaire rassemblant des compétences cliniques et génétiques[725] », le texte précise :

« Le médecin pourrait être amené à informer le patient des résultats ayant une conséquence clinique connue et en rapport avec l’indication de la prescription. Il pourrait également informer le patient des résultats ayant une conséquence clinique connue, sans rapport avec l’indication de la prescription, en cas d’identification d’une anomalie génétique dont les conséquences sont susceptibles de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins. En tout état de cause, la délivrance d’une telle information ne pourra se faire qu’avec le consentement exprès du patient. »

Dans un domaine aussi complexe, évolutif et périlleux que celui de la génétique, ces recommandations (qui revêtent donc un caractère « recommandatoire ») ne peuvent suffire.

2.1.4. La portée de l’article 16-10 du code civil doit être revue pour permettre à la personne, si elle y a consenti, d’avoir connaissance de résultats médicaux incidents présentant un intérêt médical pour elle-même ou les membres de sa famille sans s’affranchir de l’esprit de l’article 5 de la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine qui vise à protéger la personne et assurer son consentement libre et éclairé. 

2.1.5 La question des découvertes incidentes à l’occasion d’un examen des caractéristiques génétiques d’une personne concerne la réalisation de cet examen dans des finalités médicales mais également dans des finalités de recherche scientifique.

2.2. Objectifs poursuivis

La règle envisagée par le Gouvernement permettra sous conditions, et notamment sous réserve d’un consentement libre et éclairé, d’informer la personne, à l’occasion d’un examen génétique réalisé pour une autre finalité, de découvertes génétiques incidentes utiles au plan médical, c’est-à-dire dont la connaissance lui permettrait - ou aux membres de sa famille- de bénéficier de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins.  Elle permettra donc de transmettre au patient une information ayant un impact potentiel sur sa santé ou celle des membres de sa famille, y compris sa descendance, tout en le protégeant d’informations inutiles.

Elle adaptera le cadre prévu par l’article 16-10 du code civil aux nouvelles technologies en maintenant un haut niveau de protection du patient qui reste, in fine, seul à décider de la communication d’une information incidente (après une information adaptée et complète).

Elle ne permettra pas la recherche volontaire par le laboratoire de données dites secondaires.

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1.                       Options envisagées

La solution n’est pas de nature réglementaire. Il y aurait une contradiction à dire, dans un premier temps, par voie législative, que tout examen génétique suppose le consentement de la personne à la finalité de cet examen et, dans un second temps, par voie réglementaire, que si l'examen a dépassé sa finalité (découvertes incidentes), il n’y a pas nécessité d’un nouveau recueil de consentement. Cela reviendrait in fine à autoriser un champ plus large à l'examen génétique que celui pour lequel la personne a donné son consentement.

Deux pistes d’évolutions de la législation peuvent être évoquées, l’une envisageant une nouvelle[726] dérogation à l’article 16-10 du code civil tandis que l’autre consisterait à étendre, dans les termes de l’article 16-10, le champ du consentement afin que celui-ci mentionne, non seulement la finalité de l’examen, mais aussi la possibilité d’identification d’anomalies génétiques incidentes. C’est cette dernière piste qui a été privilégiée, dès lors que la première remettrait plus largement en cause le principe même du consentement et viderait de sens l’article 16-10 du code civil.

Par finalité de l’examen, il faut entendre son indication s’il s’agit de finalités médicales, son objectif s’il s‘agit de finalités scientifiques.

Cette évolution apparait conforme à l’article 5 de la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine.

3.2.                       Option retenue

Le cadre envisagé n’est pas celui de la recherche systématique (volontaire) de certaines mutations à l’occasion d’un examen des caractéristiques génétiques (problématique des données secondaires et des gènes dits actionnables) mais de découvertes incidentes de résultats sans rapport avec l’indication de la prescription ou l’objectif de la recherche.

Le rapporteur des travaux de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques[727] estime que « Ne devraient être communiquées aux patients que les informations portant sur les caractéristiques génétiques relevant du motif de la consultation et de l’objet de la prescription, ainsi que la réalisation de l’analyse génétique ». La rapporteure de ces travaux, quant à elle, estime « envisageable de réexaminer la notion de finalité de l’examen génétique pour permettre l’information du patient sur une anomalie génétique découverte incidemment, dès lors qu’elle pourrait faire l’objet de mesures de prévention ou de soins, tout en respectant le droit de ne pas savoir. »

L’intérêt médical pour la personne ou les membres de sa famille doit rester au centre des préoccupations. Les découvertes doivent être susceptibles de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins pour la personne ou les membres de sa famille. Ainsi, les variations de signification inconnue (données rendues disponibles par la technique mais dont la pertinence et l’utilité clinique ne sont pas encore établies), les variants prédisposant à une maladie à révélation tardive pour laquelle aucune mesure de prévention ou de soins ne peut être proposée ainsi que les variations génétiques dans des gènes de vulnérabilité et comportant un pronostic aléatoire ne sont pas concernés.

Ce cadre correspond à celui identifié par le Conseil d’Etat dans son étude bioéthique[728] : « seules doivent être en principe communiquées [les informations] ayant une valeur informative scientifiquement avérée et un intérêt médical. En somme, une telle approche revient à dévoiler à la fois les informations qui font écho au motif ayant justifié le test et celles qui, découvertes incidemment, exposent le patient à un risque grave contre lequel il peut, à titre préventif ou curatif, d’emblée lutter. »

Les modifications retenues de l’article 16-10 ont été guidées par deux principes : le droit de savoir (quand l’information présente un intérêt médical pour la personne ou les membres de sa famille) et le droit de ne pas savoir prévu par l’article L.  1111-2 du code de la santé publique.

La personne peut refuser la révélation de tout ou partie des caractéristiques génétiques sans relation avec l’indication initiale de l’examen. Toutefois, elle doit être informée au préalable des risques qu’un refus ferait courir aux membres de sa famille potentiellement concernés dans le cas où une anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins était diagnostiquée de façon incidente[729].

Son consentement reste révocable en tout ou partie sans forme et à tout moment.

Enfin, les modalités de communication à la personne des résultats révélés incidemment relèvent du cadre des recherches impliquant la personne humaine (titre II du Livre Ier de la première partie du code de la santé publique) quand les finalités sont de recherche scientifique ou du cadre des examens des caractéristiques génétiques à des fins médicales (titre III du Livre Ier de la première partie du code de la santé publique) quand les finalités sont médicales.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

La mesure envisagée modifiera la rédaction de l’article 16-10 du code civil.

Elle créera trois parties distinctes au sein de cet article :

(I) Définition, modalités de consentement et finalités de l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne ;

(II) Informations délivrées à la personne avant le recueil de son consentement,  modalités de communication des résultats de l’examen à la personne ;

(III) Dispositions s’appliquant en cas d’examen des caractéristiques génétiques à des fins de recherche scientifique réalisé à partir d’échantillons prélevés à d’autres fins (renvoi au nouvel article L. 1130-5 du code de la santé publique).

La mesure précisera notamment :

-          que seules les caractéristiques génétiques constitutionnelles d’une personne sont concernées par cet article ;

-          que la personne doit être au préalable informée :

4.2.                       Impacts sur les particuliers

Les personnes, pour lesquelles un examen des caractéristiques génétiques recourant à des techniques susceptibles de produire des informations incidentes est indiqué, pourront, si elles le souhaitent, avoir connaissance de ces informations dans un cadre protecteur et harmonisé. Elles jouiront ainsi d’une plus grande autonomie pour prendre une décision éclairée et être associé pleinement aux décisions qui les concernent.

5.       consultation et modalités d’application

5.1.                       Consultation

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

5.2.                       Modalités d’application

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

La présente mesure nécessitera une révision des mesures réglementaires en vigueur (articles R. 1131-1 et suivants et notamment de l’article R. 1131-4 du code de la santé publique).


Article 11 Préserver une garantie humaine dans l’interprétation des résultats

1.             État des lieux

1.1. La notion d’intelligence artificielle a été définie en 1956, à l’occasion de la conférence organisée à l’université américaine de Darmouth autour de chercheurs en sciences cognitives, par le scientifique M. Minsky comme « la science qui consiste à faire faire aux machines ce que l’homme ferait moyennant une certaine intelligence ». Cette science suscitait alors autant d’attentes que de craintes, la plupart des spécialistes prédisant le développement d’une intelligence semblable à celle de l’homme dans les vingt années à venir. Si les résultats obtenus dans les années 1970 ont amené à nuancer cette perspective, l’intelligence artificielle connaît un regain d’intérêt sur la période actuelle[730].

En effet, depuis une dizaine d’années, d’importants progrès en matière d’intelligence artificielle ont été réalisés notamment avec le développement de méthodes d’apprentissage machine (« machine learning »), reposant sur l’association de très grandes bases de données (données massives) à une puissance et une vitesse de calcul sans précédent. Selon la Commission de réflexion sur l'éthique de la recherche en sciences et technologies du numérique, l’apprentissage machine repose sur « une approche statistique permettant de découvrir des corrélations significatives dans une masse importante de données pour construire un modèle prédictif quand il est difficile de construire un modèle explicatif »[731].

La constitution de bases de données massives relatives à la santé est en effet désormais possible à partir de données recueillies lors de la prise en charge du patient (à des fins sanitaires et/ou médico-sociales), notamment à travers le système national des données de santé[732] qui va être élargi par la création d’une Plateforme nationale des données de santé[733], mais également en dehors de toute relation de soins, notamment au travers d’objets connectés.

De nombreuses applications fondées sur l’exploitation des données massives et sur des dispositifs d’intelligence artificielle se développent rapidement dans le secteur sanitaire et médico-social, au niveau de la prise en charge individuelle des personnes.

L’intelligence artificielle est par exemple mise au service d’outils qui permettent d’améliorer l’efficacité et la précocité des diagnostics[734], de fournir une aide aux décisions thérapeutiques ou d’améliorer le suivi de l’évolution de la maladie et la prévention des rechutes. Des dispositifs robotiques interviennent également de façon efficace dans la réalisation d’actes chirurgicaux.

L’intelligence artificielle est également utilisée au niveau collectif, à des fins de recherche, mais aussi de suivi et d’anticipation des risques sanitaires (par exemple dans l’analyse des signaux faibles en matière de pharmacovigilance ou de suivi épidémiologique), ou encore de pilotage du système de santé, par exemple pour fluidifier les parcours de soins.

Le rapport « Donner un sens à l’intelligence artificielle »[735] de Cédric Villani, remis en mars 2018, résume ainsi que l’intelligence artificielle « permet en effet de mieux détecter les symptômes et de faire un suivi prédictif du déploiement d’une maladie, d’exploiter les résultats d’analyse (imagerie médicale…), de soumettre de nouvelles hypothèses de diagnostic et de formuler des propositions thérapeutiques plus personnalisées. Elles peuvent aussi améliorer la détection des effets secondaires d’un médicament lors des phases d’essais cliniques, et donc in fine avoir un impact positif sur l’innovation pharmacologique (meilleur ciblage thérapeutique, accélération et sécurisation de la mise des médicaments sur le marché, etc.). En matière de recherche médicale, les technologies d’IA facilitent l’exploration des publications scientifiques et l’analyse des résultats de recherches fondamentales grâce à la fouille automatique de données ».

1.2. Se pose toutefois la question de la maîtrise finale des décisions diagnostiques, préventives ou thérapeutiques prises à partir des conclusions tirées par des applications d’intelligence artificielle compte tenu, d’une part, des limites résiduelles des algorithmes utilisés au regard de la variabilité des situations individuelles spécifiques de chaque personne, d’autre part, des conséquences potentielles de ces décisions.

L’avis n° 129 du comité consultatif national d’éthique préconise d’inscrire le « principe fondamental d’une garantie humaine du numérique en santé » au niveau législatif. Le comité consultatif national d’éthique souligne qu’une telle garantie pourrait notamment être assurée « par la reconnaissance de préserver la maîtrise finale du professionnel de santé, en interaction avec le patient, pour prendre les décisions appropriées en fonction de chaque situation spécifique. » Le comité consultatif national d’éthique estime également que toute personne doit pouvoir être informée préalablement du recours à un algorithme d’aide à la décision médicale dans son parcours de prise en charge en santé.

Dans le même sens, l’étude du Conseil d’Etat recommande de « préserver l’autonomie décisionnelle du médecin, qui est au fondement de la relation de confiance l’unissant avec le patient »[736]. Le Conseil d’État préconise de consacrer explicitement l’interdiction d’un diagnostic établi uniquement par un système d’intelligence artificielle sans intervention d’un médecin, en s’inspirant de l’article 10 de la loi du 6 janvier 1978, qui prévoit qu’aucune décision produisant des effets juridiques à l’égard d’une personne ne peut être prise sur le seul fondement d’un traitement automatisé des données. Le rapport de la mission d’information parlementaire propose également d’introduire un principe législatif de garantie humaine du numérique en santé, dont la mise en œuvre concrète pourrait être précisée par des recommandations de bonnes pratiques de la Haute autorité de santé[737].

Dans son avis n° 130 rendu public le 29 mai 2019, le Comité national consultatif national d’éthique revient longuement sur l’importance de cette garantie humaine, qui implique que chaque patient soit informé de tout recours à un traitement algorithmique de données massives. Dans la recommandation n° 4 de cet avis, le comité estime « que les résultats obtenus (par l’utilisation d’un tel traitement) ne peuvent être validés que par une garantie humaine »[738].

    2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1. Le développement d’algorithmes issus de l’intelligence artificielle dans la prise en charge des personnes soulève des questions relatives à la place respective de l’algorithme, du patient et du professionnel de santé. Le risque identifié est que le caractère « scientifique/mathématique » de la conclusion produite par un algorithme paraisse devoir s’imposer de façon indiscutable aussi bien au professionnel de santé qu’au patient.

Le risque peut être majoré lorsque la règle de décision utilisée par l’algorithme est mal ou difficilement explicable, parce que le praticien maîtrise mal cette nouvelle technologie, voire qu’il devient impossible de l’expliquer, par construction, pour certains modes d’apprentissage de l’intelligence artificielle (« deep learning »), pour lesquels l’algorithme développé par le traitement reste opaque (« boîte noire »).

Certaines études ont montré que l’efficacité des dispositifs d’intelligence artificielle pouvait égaler voire dépasser celle des meilleurs opérateurs humains pour certaines tâches spécifiques, notamment pour la reconnaissance d’images ou de signaux (interprétation des dispositifs « d’imagerie » ou d’électrocardiogrammes par exemple), ou pour le développement et la mise en œuvre de règles de décision multicritères.

La validité des conclusions produites par ces dispositifs peut toutefois être limitée par des défauts ou biais (volontaires ou non) liés à leur développement et/ou aux bases sur lesquelles s’est réalisé l’apprentissage, mais aussi par les limites des informations effectivement prises en compte au regard des particularités spécifiques propres à chaque situation clinique.

2.1.2. Qu’elles soient fondées sur les compétences et l’expérience d’un professionnel, sur des recommandations développées par des dispositifs d’expertise ou sur un dispositif d’intelligence artificielle, les orientations préventives, diagnostiques ou thérapeutiques doivent dans tous les cas être confrontées aux caractéristiques spécifiques de chaque situation et de chaque patient. Même si les algorithmes basés sur des données massives permettent une meilleure segmentation des conclusions, en fonction d’un plus grand nombre de caractéristiques, que les protocoles prenant en compte un plus petit nombre d’informations, les « prédictions » réalisées restent au niveau de groupes, ou de sous-groupes, au sein desquels il peut persister une certaine hétérogénéité. Ces conclusions doivent également pouvoir être confrontées à la variabilité des attentes et des préférences des patients eux-mêmes vis-à-vis des différents types de résultats qui peuvent être obtenus.

Il convient en conséquence de prévoir que les résultats rendus par un dispositif d’intelligence artificielle dans le cadre d’une décision préventive, diagnostique ou thérapeutique sont remises au patient par un professionnel de santé susceptible de les remettre en perspective par rapport aux autres informations (notamment cliniques) dont il peut disposer. Cela permet de garantir que la décision finale, qui s’appuie sur ces dispositifs, est prise par le médecin/professionnel de santé et le patient lui-même, notamment aux fins de respect du principe législatif de consentement éclairé aux soins.

La présente mesure ne remet pas en cause les possibilités de recourir à des dispositifs d’aide au diagnostic ou d’orientation préventive ou thérapeutique performants, non plus que la place de dispositifs médicaux intégrant des éléments d’intelligence artificielle (par exemple de pacemakers ou de dispositifs de délivrance de médicaments dont le déclenchement est conditionné par l’interprétation, par un dispositif programmé, de signaux biologiques ou physiologiques), pour autant que les indications, la programmation et l’utilisation de ces dispositifs restent sous le contrôle de décisions médicales.

2.2. Objectifs poursuivis

L’objectif de la présente mesure, tout en rappelant qu’une décision médicale ne peut pas résulter du seul résultat d’un traitement automatisé, est d’assurer la protection aussi bien du patient que du professionnel de santé, afin de garantir qu’in fine la meilleure décision a pu être prise ou que l’acte le plus approprié a pu être mis en œuvre. En effet, le colloque singulier entre le patient et son médecin doit être préservé et il semble indispensable que les dispositifs d’intelligence artificielle restent un appui à une décision humaine sans s’y substituer.

Cette mesure permettra aussi, par a contrario, de préciser que l’utilisation de traitement algorithmique basé sur des données de santé recueillies en dehors d’un cadre médical ne peut donner lieu à aucune décision automatique préventive, diagnostique et a fortiori thérapeutique.  

La mesure visera également à conforter le droit à l’information du patient à l’occasion de l’utilisation de tels dispositifs, et à garantir la traçabilité des données qu’ils utilisent, ainsi que l’accès par les professionnels de santé aux informations contenues dans ces dispositifs.

    3. Options possibles et dispositif retenu

3.1.                       Options envisagées

Dans son avis n° 129, le comité consultatif national d’éthique a formulé d’autres préconisations relatives à l’intelligence artificielle, mais qui ne nécessitent pas de mesures législatives dans le cadre de la présente loi[739].

Il en est ainsi de la préconisation de mettre en œuvre des procédés de vérification régulière - ciblée et aléatoire - des options de prise en charge proposées par les algorithmes d’aide à la décision, qui devrait être assurée dans le cadre de la certification des dispositifs médicaux dans lesquels ces algorithmes sont intégrés.

Le comité consultatif national d’éthique propose également le recueil explicite d’un consentement éclairé. Toutefois, le consentement libre et éclairé aux soins constitue un droit déjà inscrit dans le code de la santé publique. La formalisation d’un recueil explicite du consentement en cas de recours à un algorithme, alors même que les dispositifs faisant appel à l’IA se diffusent rapidement dans de nombreux secteurs de la pratique médicale semble donc inutile, et serait en fait difficilement praticable. Elle exposerait de plus au risque de renforcer la perception du caractère exceptionnel de dispositifs échappant au contrôle humain, alors même que nous proposons, au contraire, de rappeler qu’il ne peut s’agir que de dispositifs d’aide à la décision médicale, et que la décision finale doit être prise dans le cadre de l’interaction entre professionnel de santé et patient.

Enfin, le comité consultatif national d’éthique et la mission d’information parlementaire recommandent d’aménager la capacité de recueillir un deuxième regard médical humain à la demande d’un patient ou d’un professionnel de santé, en prévoyant notamment la définition d’un nouveau cas d’ouverture de la télémédecine. En pratique, l’aide à l’interprétation ou à la validation des conclusions proposées par un algorithme est actuellement possible dans le cadre des finalités de la télémédecine définies par l’article L. 6316-1 du code de la santé publique et des actes définis par l’article R. 6316-1.

3.2.                       Option retenue

La présente mesure tirera les conclusions des recommandations susmentionnées, pour consacrer au niveau législatif le principe d’une garantie humaine en prévoyant que, lorsqu’un algorithme d’aide à la décision à visée préventive, diagnostique ou thérapeutique est utilisé, les résultats sont rendus au patient par un professionnel de santé, qui l’informe de l’utilisation de cet algorithme et de ses modalités d’action. La mesure prévoit également que l’adaptation des paramètres d’un dispositif automatisé pour prendre une telle décision concernant un patient nécessite l’intervention d’un professionnel de santé. Enfin, la mesure prévoit une traçabilité des données utilisées par ces traitements ou dispositifs et des actions qui en résultent, ainsi qu’un accès pour les professionnels de santé concernés.

4.            Analyse des impacts des dispositions envisagées

La mesure ajoutera un article L. 4001-3 au sein du chapitre Ier du titre préliminaire du livre préliminaire de la quatrième partie du code de la santé publique, portant sur les professionnels de santé.

Cette mesure est par ailleurs conforme au considérant 71 et à l’article 22 du règlement général sur la protection des données, qui indique que « La personne concernée a le droit de ne pas faire l'objet d'une décision fondée exclusivement sur un traitement automatisé, y compris le profilage, produisant des effets juridiques la concernant ou l'affectant de manière significative de façon similaire. »

5.            Consultations et modalités d’application

5.1.      Consultations

Le Conseil national de l’ordre des médecins et la Haute autorité de santé ont été consultés et ont rendu leurs avis respectivement les 4 et 12 juillet 2019.

La Commission nationale de l’informatique et des libertés a été consultée et s’est prononcée par délibération n° 2019-097 du 11 juillet 2019.

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

5.2.      Modalités d’application

Cette mesure entrera en vigueur dès le lendemain de la publication de la loi.

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.


Article 12 Encadrer les finalités de recours aux techniques d’enregistrement de l’activité cérébrale

1.            État des lieuX

1.1. Cadre général

1.1.1. Les neurosciences se définissent par l’étude du fonctionnement du système nerveux depuis les aspects les plus élémentaires (moléculaires, cellulaires, synaptiques) jusqu’à ceux, plus fonctionnels, qui portent sur les comportements ou les processus mentaux. Elles constituent une vaste famille de disciplines de recherche, rassemblant des spécialités cliniques (neurologie, psychiatrie, psychologie, neurochirurgie etc.) et fondamentales.

Le développement de la neuro-imagerie a révolutionné la pratique clinique et permis une acquisition exponentielle de connaissances sur le cerveau. Les nouvelles techniques d’imagerie par résonance magnétique en particulier permettent l’étude du cerveau, non seulement au plan morphologique et biochimique mais aussi au plan fonctionnel, en visualisant l’activation du cerveau lors de tâches diverses (motrices, sensorielles, cognitives etc.) ou même d’états psychologiques (peur, angoisse, plaisir, satisfaction etc.).

Les avancées de la recherche en neurosciences ouvrent de vastes perspectives thérapeutiques, mais présentent d’importants enjeux éthiques, notamment liés aux risques de leur utilisation à des fins d’amélioration de l’humain, de persuasion ou de modification de la personnalité, qui interrogent les principes d’autonomie, d’intégrité, d’équité et de vie privée.

1.1.2. Face à ces risques éthiques, la loi du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique a limité l’usage des techniques d’imagerie cérébrale à des fins médicales, de recherche scientifique ou dans le cadre d’expertise judiciaire[740]. Cette même loi a prévu qu’un arrêté définisse les règles de bonnes pratiques applicables à la prescription et à la réalisation des examens d'imagerie cérébrale à des fins médicales, prenant en compte les recommandations de la Haute autorité de santé[741].  

1.2. Cadre conventionnel

Le groupe de travail « Biotechnologies, Nanotechnologies et Technologies Convergentes » de l’Organisation de coopération et de développement économiques conduit, depuis début 2018, un important travail d’élaboration de recommandations favorisant le développement responsable de l’innovation en neuro-technologies. Partant du constat que l’évolution des neurotechnologies constitue une véritable opportunité pour améliorer la santé humaine et renforcer les capacités de diagnostic et de traitement des troubles neurologiques, ce groupe de travail s’est donné pour mission d’identifier les questions éthiques et sociétales qui en découlent, compte tenu de la centralité du cerveau et des fonctions cognitives dans les principes de dignité, d’autonomie, de liberté de pensée, d’identité humaines et de vie privée.

De telles recommandations, si elles ne sont pas juridiquement contraignantes ni opposables en droit interne, peuvent toutefois servir de points de référence pour l’élaboration des législations nationales, pour chaque pays qui le souhaite.

La France est particulièrement attentive aux travaux menés dans ce cadre, afin de s’assurer que les principes qui seront définis ne s’alignent pas sur le « moins-disant éthique » pour parvenir à un accord international.

2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.Nécessité de légiférer

L’article 16-14 du code civil vise « les techniques d’imagerie cérébrale », sans préciser si elles englobent à la fois l’imagerie cérébrale anatomique, qui peut permettre de déceler des anomalies éventuellement susceptibles de contribuer à expliquer un comportement particulier, et l’imagerie cérébrale fonctionnelle, qui permet de visualiser l’activation de certaines zones du cerveau lors de l’exécution de tâches motrices, sensorielles, cognitives et émotionnelles. Or, le comité consultatif national d’éthique, dans son avis 129 du 25 septembre 2018 met en garde contre le détournement ou la surinterprétation des usages de l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle en dehors du cadre médical ou scientifique. En 2018, comme en 2012[742], le comité recommande de « ne pas succomber à la fascination des images obtenue en IRMf[743]» et rappelle être très défavorable à son utilisation dans le domaine judiciaire, en particulier comme « détecteur de mensonge » pour statuer sur la culpabilité d’une personne, ainsi que dans « d’autres applications « sociétales » telles que le neuro-marketing (étude des réponses cérébrales lors de la présentation de produits de consommation), la sélection à l’embauche ou la demande de certains assureurs souhaitant disposer de l’IRMf[744] de leurs futurs assurés. »

De la même manière, l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, dans son rapport du 25 octobre 2018, constate qu’« en l’état actuel de la législation, il demeure un risque d’emploi abusif, quant à leur valeur prédictive réelle et étayée, des techniques d’imagerie cérébrale fonctionnelle dans le cadre des expertises judiciaires » et appelle, conformément aux conclusions de son rapport du 13 mars 2012[745], à ce que soient mieux précisés le cadre et la finalité du recours à ces techniques.

Les travaux préparatoires de l’article 16-14 du code civil traduisent l’intention claire du législateur de réserver l’usage de l’imagerie cérébrale dans le cadre judiciaire afin « d’objectiver l’existence d’un préjudice ou d’un trouble psychique » permettant d’évaluer la responsabilité d’un prévenu sur le fondement de l’article 122-1 du code pénal.

Compte tenu de ces risques, une mesure législative visant à interdire l’imagerie cérébrale par fonctionnelle dans le domaine judiciaire apparaît nécessaire.

Afin de couvrir les évolutions technologiques intervenues depuis la loi de 2011, il est également opportun de substituer aux termes « techniques d’imagerie cérébrale » les termes plus généraux de « techniques d’enregistrement de l’activité cérébrale », conformément à la préconisation du Conseil d’Etat.

Enfin, les données issues de l’enregistrement de l’activité cérébrale sont très sensibles et invasives au regard du principe de protection de la vie privée. Les discriminations fondées sur ces données sont d’ores et déjà interdites puisqu’elles se fondent sur l’état de santé au sens de l’article 225-1 du code pénal.

La présente mesure renforce la protection des personnes en prévoyant que les discriminations fondées sur ces données cérébrales sont interdites y compris « lorsqu'elles consistent en des opérations ayant pour objet la prévention et la couverture du risque décès, des risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou des risques d'incapacité de travail ou d'invalidité » (article 225-3 du code pénal), au même titre que les discriminations fondées sur la prise en compte de tests génétiques prédictifs ou des conséquences sur l’état de santé d’un don d’organes.

2.2.Objectifs poursuivis

L’objectif de la présente mesure est de préserver la dignité et la vie privée des personnes, d’une part, en garantissant que l’imagerie cérébrale fonctionnelle ne sera pas utilisée dans le domaine judiciaire, et d’autre part, que les discriminations fondées sur les données issues de l’enregistrement de l’activité cérébrale soient réprimées.

3. Options possibles et dispositif retenu

3.1. Options envisagées

Il a été envisagé de préciser les finalités justifiant le recours à l’enregistrement des données cérébrales dans le champ judiciaire aux fins d’évaluer un préjudice ou d’établir l’existence d’un trouble mental, psychique ou neuropsychique. Toutefois, l’interdiction de l’imagerie cérébrale fonctionnelle dans ce domaine suffit à écarter les risques de dérives pointés par le comité consultatif national d’éthique et l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

3.2. Option retenue

La présente mesure interdit expressément le recours à l’imagerie cérébrale fonctionnelle dans le cadre d’expertises judiciaires, puisqu’elle n’est aujourd’hui pas assez fiable pour être utilisée à cette fin.

Elle tire la conséquence des évolutions technologiques depuis 2011 et procède au remplacement des termes « imagerie cérébrale », devenus trop restrictifs, par les termes « enregistrement de l’activité cérébrale ».

Enfin, l’interdiction des discriminations fondées sur l’état de santé, prévue à l’article 225-1 du code pénal, couvre d’ores et déjà les discriminations fondées sur les données issues de l’enregistrement de l’activité cérébrale. Toutefois, l’article 225-3 du même code prévoit que cette interdiction n’est pas applicable aux discriminations fondées sur l’état de santé « lorsqu’elles consistent en des opérations ayant pour objet la prévention et la couverture du risque décès, des risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou des risques d'incapacité de travail ou d'invalidité », à l’exception des discriminations fondées sur la prise en compte de tests génétiques prédictifs ou sur les conséquences sur l’état de santé d’un don d’organes altruiste. Il y a lieu d’ajouter à ces exceptions les discriminations fondées sur la prise en compte des données cérébrales, qui ont potentiellement une valeur prédictive, afin qu’elles soient interdites y compris en matière d’assurance.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La mesure modifiera les intitulés du chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code civil et du titre III bis du livre Ier de la première partie du code de la santé publique. Elle révisera également l’article 16-14 du code civil et l’article 225-3 du code pénal.

5. Consultation et modalités d’application

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

Cette mesure est d’application immédiate.

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

 


Article 13 Encadrer les dispositifs de neuro-modulation

1. État des lieux

1.1 Se sont développées des techniques de modification du fonctionnement cérébral, dites techniques « neuro-modulatrices ». Certaines sont anciennes, comme les médicaments (psychostimulants, anxiolytiques etc.), et d’autres plus récentes, qu’il s’agisse de dispositifs médicaux destinés à la stimulation transcrânienne au moyen de courants électriques, magnétiques ou électromagnétiques ou à la stimulation cérébrale profonde, ou qu’il s’agisse de thérapies cellulaires pour lutter par exemple contre des maladies neurodégénératives, comme la maladie de Parkinson.

1.2 En 2011[746], le législateur a investi le champ des neurosciences, en limitant l’usage des techniques d’imagerie cérébrale à des fins médicales, de recherche scientifique ou dans le cadre d’expertise judiciaire.[747]

Toutefois, aucune disposition législative spécifique n’encadre l’utilisation des techniques de modification du fonctionnement cérébral, dites « neuro-modulatrices ».

Lorsque ces techniques de neuro-modulation consistent en des médicaments ou des dispositifs médicaux, elles sont respectivement couvertes par les dispositions de droit commun relatives aux médicaments (titre II du livre Ier de la cinquième partie du code de la santé publique) ou aux dispositifs médicaux (titre I du livre II de la même partie). Ces techniques doivent également faire l’objet de recherches impliquant la personne humaine dès lors qu’elles entrent dans le champ du titre II du livre Ier de la première partie du code de la santé publique[748]. Toutefois, il existe de nouveaux équipements de neuro-modulation qui n’entrent pas dans ces catégories.

1.3 Des études conduites sur les techniques nouvelles, initialement développées pour étudier ou traiter des états pathologiques, ont permis l’observation d’effets « sur la mémoire, l’éveil, la concentration, le calcul, le raisonnement, l’humeur, l’état émotionnel et la cognition sociale. »[749]

Des équipements visant à modifier l’activité cérébrale de sujets sains en vue d’améliorer leurs capacités cérébrales, d’augmenter la concentration, le bien-être, le sommeil, les perceptions ou d’améliorer leur humeur, sont désormais disponibles sur internet à bas coût, et ce malgré la difficulté d’évaluer leur innocuité.

Lorsque ces équipements sont « destinés à la stimulation cérébrale transcrânienne au moyen de courants électriques ou de champs magnétiques ou électromagnétiques afin de modifier l'activité neuronale du cerveau », ils entrent dans le champ du règlement 2017/745/UE relatif aux dispositifs médicaux, même s’ils n’ont pas de destination médicale, en application du point 6 de son annexe XVI.

Pour pouvoir être mis sur le marché, ou mis en service, ces dispositifs devront répondre aux exigences fixées par le règlement relatif aux dispositifs médicaux à compter de sa date d’application obligatoire, le 26 mai 2020, ou, si elle est postérieure, à la date d’application des spécifications communes mentionnées à l’article 9 du règlement. Leur conformité devra être attestée par l’intervention d’un organisme notifié en fonction de la classe du risque dudit produit, au même titre qu’un dispositif médical.

1.44 Toutefois, d’autres équipements de neuro-modulation sans finalité médicale n’entrent pas dans le champ du règlement relatif aux dispositifs médicaux, car ils ne répondent pas à la définition du point 6 de l’annexe XVI. Ces équipements peuvent relever du champ de la directive 2014/35/UE dite « basse tension » ou de la directive 2014/53/UE relative aux équipements radioélectriques dite « RED », lorsqu’ils intègrent un module radio de type « WIFI ». Ils doivent alors respecter les règles relatives à la sécurité générale des produits, qui fait l’objet de contrôles conduits par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, et relève du réseau d’alerte européen RAPEX, qui permet de procéder au rappel ou au retrait de produits.

Certains de ces équipements de neuro-modulation font également l’objet de normes harmonisées, internationales ou nationales, dont le respect apporte une présomption de conformité aux objectifs de sécurité fixé par la directive « Basse Tension » ou la directive « équipements radioélectriques ».

2. Nécessité de légiférer objectifs poursuivis et option retenue

2.1 Les nouveaux équipements de neuro-modulation sans finalité médicale sont susceptibles de présenter des risques sur la santé des consommateurs. En effet, ces dispositifs, même s’ils ne sont pas toujours invasifs peuvent être « interventionnels » et ne sont pas des produits comme les autres. Leurs effets, à court terme ou à long terme, sont aujourd’hui encore insuffisamment évalués.

Par ailleurs, les équipements de neuro-modulation pourraient donner lieu à des dérives contraires aux principes de dignité et d’intégrité de la personne humaine, de protection de la vie privée et de non-discrimination, par exemple s’ils sont utilisés pour influencer les décisions ou les comportements d’une personne à des fins commerciales.

2.2 En conséquence, le recours à la loi est rendu nécessaire par l’atteinte qu’une telle interdiction porte à la liberté de commerce et d’industrie. Au-delà du respect des exigences des textes européens précités, il y a lieu de confier au ministre chargé de la santé le pouvoir d’interdire par décret, après avis de la Haute autorité de santé, tout dispositif qui présenterait un danger grave ou une suspicion de danger grave pour la santé humaine.

2.3 Sans cette option législative l’habilitant à interdire ces équipements, le ministre chargé de la santé ne pourrait que faire des campagnes d’informations sur les risques.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La présente mesure modifiera l’intitulé du titre V du livre Ier de la première partie du code de la santé publique et y insèrera un nouvel article L. 1151-4. La liste des missions de la Haute autorité de santé, fixée à l’article L. 161-37 du code de la sécurité sociale, sera en conséquence complétée par celle de rendre l’avis mentionné à ce nouvel article L. 1151-4 du code de la santé publique ainsi que l’avis mentionné à l’article L. 1151-3 du même code[750] pour remédier à un oubli au moment de la création de cet article[751].

La faculté d’interdiction d’un produit de neuro-modulation dangereux pour la santé humaine ne présente aucune contrariété avec le droit de l’Union européenne.

En effet, dans le cas des dispositifs à finalité non médicale entrant dans le champ du règlement relatif aux dispositifs médicaux, ce pouvoir d’interdiction ne remet pas en cause les procédures prévues par les articles 94 « Evaluation des dispositifs dont on suspecte qu’ils présentent un risque inacceptable ou une autre non-conformité », 95 « Procédure applicable aux dispositifs présentant un risque inacceptable pour la santé et la sécurité » et  98 « Mesures préventives de protection de la santé».

De même, pour les autres produits, l’interdiction d’un dispositif dangereux se ferait sans préjudice de la clause de sauvegarde, prévue aux articles 19 et 20 de la directive « basse tension » et aux articles 40 et 41 de la « directive relative aux équipements radioélectriques », qu’un Etat membre peut déclencher en cas de non-conformité d’un produit aux exigences qu’elle fixe.

Par ailleurs, la notification à la Commission européenne au titre de la directive 2015/1535 des textes pris en application de cet article L. 1151-4 nouveau du code de la santé publique fera l’objet d’un examen au cas par cas.

Enfin, selon l’article 168 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’Union européenne doit venir compléter les politiques des Etats membres en matière de protection de la santé[752].

4. Consultations et modalités d’application

4.1. Consultations

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et la Haute autorité de santé ont été consultées et ont rendu leurs avis respectivement les 8 et 12 juillet 2019.

4.2. Modalités d’application

4.2.1. Application dans le temps

Cette mesure est d’application immédiate.

4.2.2. Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

4.2.3. Textes d’application

La présente mesure pourra donner lieu à des décrets pris par le ministre chargé de la santé, après avis de la Haute autorité de santé.


Article 14 Distinguer les régimes juridiques d’autorisation s’appliquant à l’embryon (maintien des conditions en vigueur) et aux cellules souches embryonnaires

Article 15 Réguler, en recherche fondamentale, certaines utilisations des cellules souches pluripotentes induites

1.             État des lieux

1.1. Cadre général[753]

1.1.1 Les cellules souches sont douées de deux capacités importantes : l’auto-renouvèlement qui est la capacité de se multiplier à l’infini par simple division (en produisant d’autres cellules souches parfaitement identiques) et la pluripotence qui est la capacité de donner naissance à tous les types de cellules spécialisées de l’organisme.

1.1.2 Les cellules souches embryonnaires sont prélevées sur des embryons (au niveau de la masse cellulaire interne[754]) entre le 5eme et le 7eme jour de leur développement après une fécondation in vitro (stade blastocyste).

L’extraction de ces cellules les « gèle » dans leur état de pluripotence (qui est transitoire et fugace in vivo puisque ces cellules se différencient rapidement pour constituer, à terme, les différents tissus et organes). In vitro, dans des conditions de culture très précises, cette pluripotence peut se perpétuer à l’identique de façon indéfinie au cours des divisions cellulaires successives. Elle permet d’obtenir des lignées de cellules souches embryonnaires.

Toutefois, en changeant les conditions de culture et en sélectionnant des milieux spécifiques (combinaisons de molécules et de substrats), la différenciation de ces cellules peut être déclenchée et orientée dans une voie tissulaire donnée (cellules spécialisées de type neurones, cellules cardiaques, etc.).

Ces propriétés (auto-renouvèlement et pluripotence) font des cellules souches embryonnaires des candidats incontournables dans les traitements de thérapie cellulaire (en cas de défaillance d’organes ou de tissus).

Depuis 1998, plusieurs centaines de lignées de cellules souches embryonnaires ont été dérivées et caractérisées dans le monde, et sont utilisées par de très nombreux laboratoires.

Ces cellules pluripotentes ne doivent pas être confondues avec les cellules totipotentes de l’embryon (jusqu’à ce que le développement de l’embryon atteigne huit cellules) qui pourraient, chacune prise isolément, constituer un embryon humain, mais qui ne peuvent techniquement pas être mise en culture.

1.1.3 Les cellules souches pluripotentes induites sont obtenues en reprogrammant une cellule somatique différenciée vers un état de pluripotence[755]. Les lignées cellulaires ainsi obtenues présentent des propriétés proches mais non identiques à celles des cellules souches embryonnaires et sont capables de se différencier in vitro en tout type cellulaire. Les fibroblastes de la peau sont fréquemment utilisés comme source de cellules souches pluripotentes induites, nécessitant une biopsie cutanée. Les cellules du sang et les cellules épithéliales urinaires sont aussi des sources de cellules intéressantes en raison de leur accessibilité. 

1.1.4 Si les cellules souches pluripotentes induites ont des capacités proches à celles des cellules souches embryonnaires, elles ne peuvent s’y substituer, en raison de caractéristiques encore incomplètement comprises, d’une efficacité potentiellement moindre en termes de différenciation et d’une incertitude sur leur innocuité. Reprogrammer une cellule est un processus artificiel qui force la cellule à adopter un destin et un comportement qui ne sont initialement pas les siens.

Ainsi que l’expose l’Agence de la biomédecine dans son bilan de l’application de la précédente loi de bioéthique : « Actuellement, les [cellules souches pluripotentes induites] ne peuvent être encore considérées comme une alternative fiable aux [cellules souches embryonnaires], compte tenu, entre autres, de leur instabilité génétique et des marques épigénétiques liées au processus de reprogrammation. La communauté scientifique considère notamment que les [cellules souches embryonnaires] sont des « gold standard » de pluripotence et que toute recherche impliquant des cellules pluripotentes devrait inclure les [cellules souches embryonnaires] comme référence.  Ainsi, la communauté des chercheurs ne pense pas qu’il faille opposer la recherche sur les [cellules souches embryonnaires] à la recherche sur les [cellules souches pluripotentes induites], ou qu’un type cellulaire soit une alternative à l’autre. Elle considère en revanche que ces deux types cellulaires sont complémentaires et doivent pouvoir être utilisés en parallèle. »[756].

Elle ajoute dans son rapport au Parlement : « Un autre point non résolu est que si toutes les [cellules souches embryonnaires] sont dérivées d’un même stade de développement (blastocyste), les [cellules souches pluripotentes induites] peuvent être obtenues de sources cellulaires extrêmement variées et d’individus d’âges très différents, sans que l’on connaisse bien encore le retentissement de ces paramètres. De plus, elles sont extrêmement hétérogènes quant à leur degré de pluripotence : nous ne disposons pas encore de critères robustes permettant de distinguer la qualité des [cellules souches pluripotentes induites]. » [757].

La masse de résultats accumulés à ce jour permet de conclure que les cellules souches pluripotentes induites ne sont pas strictement équivalentes aux cellules souches embryonnaires.

1.1.5 Les apports liés à l’étude des cellules souches embryonnaires sont réels permettant ainsi « un bond en avant considérable dans notre connaissance des gènes et des réseaux moléculaires qui définissent et contrôlent non seulement l’état pluripotent, mais aussi engagent une cellule souche dans un programme de cellule différenciée. »[758].

Par ailleurs, le nombre croissant d’essais cliniques utilisant des cellules dérivées de cellules souches embryonnaires illustre le potentiel thérapeutique de ces cellules et la finalité médicale des recherches menées.

Dans son rapport au Parlement, l’Agence de la biomédecine précise que « treize essais cliniques sont en cours dans le monde dans des pathologies utilisant des précurseurs dérivés de [cellules souches embryonnaires]. Les essais cliniques en cours en 2015 concernent trois types de maladie : rétinienne, cardiaque post-ischémie et diabète. Ces trois maladies représentent un problème majeur de santé publique. Les deux premières n’ont pas de possibilités thérapeutiques alternatives. La troisième a une alternative de substitution, la greffe d’îlots pancréatiques qui pallie l’absence d’insuline, mais malgré des progrès considérables au cours des dernières années, elle demeure en cours de développement. En France, le premier essai clinique utilisant des précurseurs cardiogéniques dérivés de [cellules souches embryonnaires] dans une indication cardiovasculaire a débuté en 2014. Il est mené par le professeur Philippe Menasché et son équipe. »[759].

Elle ajoute également qu’il est encourageant de remarquer la publication récente dans des journaux très prestigieux de plusieurs articles rapportant des succès indiscutables dans quatre voies de différenciation ayant un intérêt thérapeutique majeur[760].

La Société Française de Thérapie Cellulaire et Génique précise que les cellules souches embryonnaires « non génétiquement manipulées (par opposition aux cellules somatiques reprogrammées à la pluripotence ou « iPSC ») permettent en effet d’acquérir de nouvelles connaissances sur le développement normal et pathologique humain, mais aussi concernant les maladies génétiques rares en servant de modèle cellulaire et en autorisant le test des médicaments. Ces cellules souches embryonnaires humaines peuvent également être utilisées en thérapie cellulaire, pour régénérer un organe ou produire des substances nécessaires à rétablir une fonction biologique. Elles constituent un réservoir inépuisable de cellules qu’il est possible de différencier en cellules d’intérêt thérapeutique pour le patient. »[761].

1.1.6 Évoquant des retards accumulés ces dernières années par la France dans le domaine de la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires, les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques   estiment « crucial, étant donné les enjeux en termes de connaissances scientifiques mais également de potentiel thérapeutique, d’établir les conditions promouvant ce type de recherche dans notre pays. »[762].

De son côté, le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale note que « La recherche sur ces cellules souches a longtemps été freinée en France, d’où un retard progressivement constitué par rapport aux pays les plus avancés dans ce domaine »[763] en soulignant la finalité médicale de ces recherches qui visent à « soigner des gens en éliminant des maladies graves dont l’origine est génétique ou en développant la médecine régénérative et la thérapie cellulaire. »[764].

Marc Peschanski[765] déclare : « La France paie encore aujourd’hui le retard que nous avons pris [entre 1998 et 2004] et qui a empêché de nombreux techniciens, des ingénieurs, des thésards et des chercheurs de se former. (…) Il y a donc aujourd’hui en France beaucoup moins d’équipes qui se consacrent aux cellules souches qu’en Grande-Bretagne, en Israël, en Belgique, aux États-Unis ou en Espagne, mais nous occupons dans la recherche translationnelle et le passage à la clinique une position avancée que nous voulons conserver. La révision des lois de bioéthique doit donc être l’occasion de nous donner les moyens d’aller jusqu’à la découverte de médicaments ou de traitements permettant de soigner les patients. Il est clair en effet que, d’ici la prochaine révision (…) la recherche aura débouché sur la mise à disposition de nouveaux traitements sur le marché. » [766].

La nécessité, pour des équipes de recherche, qui passent déjà un temps important dans des tâches administratives, de se lancer dans un processus lourd de demande d’autorisation dans un contexte législatif et réglementaire qu’elles (et parfois leur organisme de recherche) maîtrisent mal conduit à ce que nombre d’entre elles, y compris de très haut niveau, restent en dehors de ce domaine très prometteur.

1.1.7 Le cadre juridique qui s’applique à la recherche sur l’embryon ne faisant pas l’objet d’un projet parental a été modifié à plusieurs reprises depuis les premières lois de bioéthique qui, en 1994, interdisent toute recherche sur l’embryon :

« (…) Toute expérimentation sur l'embryon est interdite. (…) »[767]

Lors de la révision bioéthique du 6 août 2004, un régime dérogatoire de recherches a été introduit pour une durée limitée à cinq ans ; il porte sur l’embryon mais il est étendu aux cellules souches embryonnaires (étant considéré lors des débats qu’elles ne peuvent être obtenues autrement qu’en effectuant un prélèvement sur l’embryon) :

« La recherche sur l'embryon humain est interdite.

(…)

Par dérogation au premier alinéa, et pour une période limitée à cinq ans à compter de la publication du décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 2151-8, les recherches peuvent être autorisées sur l'embryon et les cellules embryonnaires (…) »[768]

Lors de la révision bioéthique du 7 juillet 2011, un régime dérogatoire pérenne de recherches sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires a été retenu. En revanche, le principe d’interdiction est maintenu et il est étendu aux cellules souches embryonnaires et aux lignées de cellules souches embryonnaires.

« I.- La recherche sur l'embryon humain, les cellules souches embryonnaires et les lignées de cellules souches est interdite.

II.- Par dérogation au I, la recherche est autorisée (…) »[769]

La loi du 6 août 2013, d’initiative parlementaire, lève l’interdiction de principe de toute recherche sur l’embryon et sur les cellules souches embryonnaires et instaure un régime d’autorisations encadrées.

« I.- Aucune recherche sur l'embryon humain ni sur les cellules souches embryonnaires ne peut être entreprise sans autorisation. (…) »[770]

L’autorisation accordée aux protocoles de recherche est délivrée par l’Agence de la biomédecine pour une durée maximale de cinq ans sur la base du respect de quatre critères.

-                     La pertinence scientifique[771] du projet doit être établi ;

-                     La recherche doit s’inscrire dans une finalité médicale[772] ;

-                     En l’état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à ces embryons ou ces cellules souches embryonnaires ;

-                     Le projet de recherche – ainsi que « les conditions de mise en œuvre du protocole – doivent respecter les principes éthiques relatifs à la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires[773].

Ces critères et les autres conditions fixées par l’article L. 2151-5 du code de la santé publique[774] s’appliquent qu’il s’agisse d’embryons humains ou de cellules souches embryonnaires humaines[775].

L’Agence de la biomédecine délivre par ailleurs dans le champ de la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires deux autres catégories d’autorisation :

-          Celle permettant la conservation d'embryons ou de cellules souches embryonnaires à des fins de recherche[776] ;

-          Celle permettant l'importation ou l’exportation de cellules souches embryonnaires aux fins de recherche[777].

Dans son bilan de l’application de la précédente loi de bioéthique, l’Agence de la biomédecine expose que « la procédure d’instruction des dossiers d'examen des demandes d’autorisation, de suivi et de contrôle pour l’importation ou la conservation de lignées de cellules et les protocoles de recherche (…) est guidée par deux impératifs majeurs, la qualité de l’expertise scientifique et la garantie du respect des principes éthiques »[778].

L’expertise scientifique s’appuie sur un comité d’experts et l’expertise éthique sur le conseil d'orientation[779]. Parallèlement à l’expertise scientifique, la mission d’inspection de l’agence[780] établit un rapport sur les conditions matérielles et techniques de la demande d’autorisation de protocole de recherche ou de conservation (qualification du personnel, conditions de transport, modalités de conditionnement, sécurité des personnes). Chaque projet, accompagné des rapports d’expertise scientifique et du rapport de la mission d’inspection de l’Agence, est étudié par deux membres du conseil d’orientation, qui émet un avis. La décision de l’Agence de la biomédecine et l’avis de son conseil d’orientation sont communiqués aux ministres chargés de la santé et de la recherche[781].

Par ailleurs, chaque équipe autorisée est inspectée sur place par la mission d’inspection de l’agence dans l’année qui suit le dépôt de son premier rapport annuel[782].  Il s’agit de contrôler la conformité des activités de recherche et de conservation aux éléments du dossier soumis à l’autorisation. En cas de demande de renouvellement des autorisations délivrées, l’Agence procède systématiquement à l’inspection de l’équipe qui souhaite prolonger la durée de son protocole de recherche ou la durée de son autorisation de conservation.

Enfin, le régime de recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires est assorti de sanctions pénales[783].

1.1.8 S’agissant des recherches sur des embryons destinés à être transférés in utero, le V de l’article L. 2151-5 dispose que :

« V.- Sans préjudice du titre IV du présent livre Ier, des recherches biomédicales menées dans le cadre de l'assistance médicale à la procréation peuvent être réalisées sur des gamètes destinés à constituer un embryon ou sur l'embryon in vitro avant ou après son transfert à des fins de gestation, si chaque membre du couple y consent. Ces recherches sont conduites dans les conditions fixées au titre II du livre Ier de la première partie. »

Ces recherches sont soumises à une autorisation de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé prévue au deuxième alinéa de l’article L1125-3 du code de la santé publique :

« Ne peuvent également être mises en œuvre qu'après autorisation expresse de l'autorité compétente mentionnée à l'article L. 1123-12 les recherches impliquant la personne humaine menées dans le cadre de l'assistance médicale à la procréation mentionnées au V de l'article L. 2151-5. »

Ces recherches portent sur les activités cliniques et biologiques d'assistance médicale à la procréation comme le précise l’article R. 1125-14 du code de la santé publique qui dispose qu’elles « s'entendent des recherches qui respectent les conditions fixées au titre II du livre Ier de la première partie du présent code sous réserve des dispositions particulières prévues par la présente section. ».

1.1.9 Depuis 2004 (jusque-là, les recherches sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires étaient interdites), 323 décisions concernant des protocoles de recherche, de conservation ou d’importation de lignées cellulaires, ayant donné lieu à 292 autorisations, 14 refus et 17 retraits ou fins de recherche ont été dénombrées[784] ;

-          92 protocoles de recherche ont été autorisés (dont certains après révision du projet) et 8 refusés, parmi lesquels un protocole à visée cosmétologique et un impliquant la création d’embryons in vitro ;

-          Le nombre de protocoles sur l’embryon humain autorisés depuis 2005 est de 19 : 11 protocoles ont ainsi été autorisés entre 2006 et 2008, dont la majorité visait à dériver de nouvelles lignées de cellules souches embryonnaires en France, et un seul entre 2009 et 2013 ; depuis lors, le nombre de demandes a augmenté, avec 7 autorisations délivrées entre 2014 et 2017 à 6 équipes ;

-          Depuis 2005, 79 protocoles de recherche sur les cellules souches embryonnaires ont été autorisés ; l’essentiel des demandes concerne des lignées importées ou dérivées en France à partir d’embryons issus de diagnostic préimplantatoire ; ces lignées ont été, dans la très grande majorité des cas, dérivées il y a plus de 10 ans ; depuis 2008, de plus en plus de projets utilisent les cellules souches embryonnaires comme contrôle de pluripotence des cellules souches pluripotentes induites.

L’Agence de la biomédecine tient à jour sur son site la liste des protocoles de recherche sur l’embryon et les cellules embryonnaires autorisés[785].

1.2. Cadre constitutionnel

Dès les premières lois de bioéthique de juillet 1994, le Conseil constitutionnel a été conduit à statuer sur les dispositions prises par le législateur concernant l’embryon.

Dans sa décision n° 94343/344 DC du 27 juillet 1994 portant sur les lois relatives, respectivement, au respect du corps humain et au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, le Conseil, jugeant ces lois conforme à la constitution, a entériné le fait que ni le principe du respect de tout être humain dès le commencement de sa vie, ni celui d'égalité, accordés aux personnes, n’était applicable à l’embryon.

Par sa décision n° 2013-674 DC du 1er août 2013, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la loi tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires.

Le Conseil constitutionnel a jugé cette loi conforme à la Constitution.

Il a relevé que les conditions fixées par la loi relative à la recherche sur l'embryon, qui ne sont ni imprécises ni équivoques, ne sont pas contraires à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi. Le Conseil constitutionnel a jugé que, si le législateur a modifié certaines des conditions permettant l'autorisation de recherche sur l'embryon humain et sur les cellules souches embryonnaires à des fins uniquement médicales, afin de favoriser cette recherche et de sécuriser les autorisations accordées, il a entouré la délivrance de ces autorisations de recherche de garanties effectives. Il a jugé que ces dispositions ne méconnaissent pas le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine.

Enfin, par sa décision n° 2015-727 DC du 21 janvier 2016, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la loi de modernisation de notre système de santé et a jugé conforme à la Constitution le paragraphe III de l'article 155 qui permet, dans le cadre de l'assistance médicale à la procréation et avec le consentement des membres du couple, la réalisation de recherches biomédicales sur des gamètes destinés à constituer un embryon ou sur un embryon in vitro avant ou après son transfert à des fins de gestation.

1.3. Cadre conventionnel

Si la Cour européenne des droits l’homme s’est prononcée à quelques reprises dans des affaires concernant l’embryon ou le fœtus, notamment dans l’affaire Vo c. France (CEDH, Gde Ch, 8 juillet 2004, n° 53924/00) jugeant que le fœtus n’est pas protégé par le droit à la vie garanti par l’article 2 de la convention européenne des droits de l’homme et que « le point de départ du droit à la vie relève de la marge d’appréciation des états », elle n’a été amenée à statuer sur une question touchant la recherche sur l’embryon que dans un seul cas. Il s’agit de l’affaire Parrillo c. Italie (CEDH, Gde Ch, 27 août 2015, n° 46470/11) qui concernait l’interdiction opposée par la loi italienne à Mme Parrillo de faire don à la recherche d’embryons issus d’une fécondation in vitro, ne faisant plus l’objet d’un projet parental. Dans la logique de sa décision antérieure susmentionnée, la Cour a estimé que l’Italie devait bénéficier sur cette question délicate d’une ample marge d’appréciation.

La marge d’appréciation des Etats en matière de recherche sur l’embryon demeure la clé de voûte du cadre institué par le Conseil de l’Europe, laissant à la France la faculté de décision permise par l’article 18 de la convention d’Oviedo.

Cet article dispose :

  1. Lorsque la recherche sur les embryons in vitro est admise par la loi, celle-ci assure une protection adéquate de l'embryon.
  2. La constitution d'embryons humains aux fins de recherche est interdite.

1.4. Éléments de droit comparé

L’Agence de la biomédecine distingue classiquement quatre catégories de législation en matière de recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires : permissive, permissive avec restriction, restrictive, interdiction.

 

-          Au sein des pays qualifiés de « permissifs »[786], le Royaume-Uni n’impose aucune condition pour les recherches impliquant des lignées de cellules souches embryonnaires déjà établies ; 

-          Dans les pays dont le régime peut être qualifié de permissif avec restrictions[787] (dont la France relève), les Pays-Bas ne soumettent pas à autorisation les recherches sur les lignées de cellules souches embryonnaires préexistantes ;

-          Certaines législations « restrictives »[788] interdisent les recherches sur l’embryon (donc la dérivation de lignées de cellules souches embryonnaires) mais permettent les recherches utilisant des lignées importées avec, éventuellement, des conditions concernant la date de dérivation des lignées. C’est le cas de l’Allemagne, qui, si elle interdit les recherches sur l’embryon et sur les cellules souches embryonnaires, autorise à titre dérogatoire et exceptionnel la recherche sur les lignées de cellules souches importées, à condition que ces lignées aient été établies avant le 1er février 2002. Les conditions d’importation des lignées ont été étendues en avril 2008 à celles établies avant le 1er mai 2007, soit plusieurs centaines de lignées contre une vingtaine auparavant. Le diagnostic préimplantatoire étant interdit en Allemagne, l’importation et l’utilisation de lignées de cellules souches embryonnaires obtenues à partir d’embryons issus de diagnostic préimplantatoire le sont également. En Italie, la recherche sur l’embryon est interdite mais la loi permet cependant l’importation de lignées établies avant le mois de juillet 2001, ainsi que la recherche sur ces lignées.

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1. Une fois les cellules souches embryonnaires obtenues, qui vont proliférer de manière illimitée en laboratoire pendant des années, et qui pourront être distribuées dans de nombreux autres laboratoires, les questions éthiques concernant leur utilisation ne sont pas celles de l’embryon.

En effet, les cellules souches embryonnaires n’ont plus le potentiel pour reconstituer un embryon humain (après avoir été extraites de l’embryon originel et cultivées in vitro, elles sont incapables de former un nouvel embryon) alors que les recherches sur l’embryon portent sur un organisme vivant qui continue d’évoluer. Ainsi que le précise le Comité consultatif national d’éthique dans son avis n° 129, les cellules souches embryonnaires « n’ont rien du caractère symbolique de « personne potentielle » attribué à l’embryon »[789].

Par ailleurs, la plupart des lignées de cellules souches embryonnaires utilisées dans les protocoles de recherche ont été dérivées (à partir d’un embryon ne faisant plus l’objet d’un projet parental) il y a plusieurs années (20 ans pour les premières d’entre elles, encore très utilisées). Le travail sur ces lignées n’est pas différent de celui portant sur toute autre lignée de cellules d’origine humaine.

2.1.2 Pourtant, comme cela a été mis en exergue par les sociétés savantes et les instances qui se prononcées dans le cadre des travaux préparatoires à la révision bioéthique, la loi française continue à les considérer comme des éléments assimilables à l’embryon et à les soumettre au même encadrement rigoureux.

La French society for stem cell research (FSSCR), dans sa contribution[790] aux Etats généraux de la bioéthique, considère que « le maintien des CSEh dans le périmètre de la loi est scientifiquement injustifié et qu’une fois la décision de destruction d’un embryon surnuméraire pour la recherche autorisée et la lignée de CSEh fabriquée, l’usage qu’il est fait de la lignée ne relève plus de la problématique de la recherche sur l’embryon. L’utilisation des CSEh pour la recherche doit donc sortir du périmètre de la loi sur la recherche sur l’embryon comme cela est d’ailleurs le cas dans la plupart des pays européens ayant légiféré sur la recherche sur l’embryon humain. »

La Société Française de Thérapie Cellulaire et Génique précise[791] que « Lutilisation de cellules souches embryonnaires a soulevé des problèmes éthiques car leur prélèvement nécessite la destruction d’un embryon. Mais, cette question éthique relève plus de la recherche sur l’embryon (c’est à dire quel embryon et dans quelles conditions serait-il légitime de détruire un embryon pour la recherche) que d’une problématique spécifique des cellules souches embryonnaires. En effet, une fois la décision de destruction d’un embryon pour la recherche actée, l’usage qu’il est fait des cellules qui en sont issues (pour une analyse immédiate ou pour obtenir des cellules souches embryonnaires), ne relève plus de la problématique de la recherche sur l’embryon. ».

L’Académie des sciences, souligne[792] que « la loi met sur le même plan les recherches sur l’embryon humain, notamment en vue d’obtenir de nouvelles lignées de CSEh, et l’utilisation de lignées existantes dont la plupart ont été dérivées à la fin des années 1990 et qui sont incapables de reproduire un nouvel organisme », considère que « ces deux catégories de recherche ne peuvent être considérées comme équivalentes : les recherches sur l’embryon impliquent sa destruction, ce qui soulève des questionnements éthiques, alors que l’utilisation de CSEh, déjà existantes, n’implique pas de manipulation de l’embryon. »

2.1.3 Ces mêmes sociétés savantes et instances prônent un allègement du régime juridique portant sur les cellules souches embryonnaires.

Le Comité consultatif national d'éthique , dans son avis n° 129, appelle à distinguer deux situations : « d’une part, les protocoles de recherche visant à dériver de nouvelles lignées de CSEh à partir d’embryons préimplantatoires en France, ce qui représente une recherche sur l’embryon justifiant une autorisation ; d’autre part, la recherche sur des lignées déjà établies, en France ou à l’étranger (ce qui requiert une autorisation d’importation) - et on peut questionner dans ce cas la justification des contraintes du régime juridique qui leur sont appliquées, en comparaison du simple régime déclaratif auquel sont soumises toutes les autres lignées cellulaires. » [793]. Le Comité consultatif national d'éthique considère qu’il est « légitime de ne pas soumettre les [cellules souches embryonnaires humaines] au régime juridique de l’embryon, mais à une simple déclaration. » [794].

Les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques notent : « Il est donc possible d’explorer les caractéristiques des cellules embryonnaires et de les utiliser pour les recherches scientifiques sans être obligé de les extraire de nouveaux embryons. Cette possibilité ne trouve pas de traduction dans le régime encadrant la recherche sur les cellules souches embryonnaires, laquelle relève expressément depuis la loi du 7 juillet 2011, d’un régime unique des recherches sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires. »[795]. Ils préconisent « Un assouplissement vers un régime déclaratif »[796][797].

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale considère également que « ces milliards de cellules n’ont plus rien à voir avec l’embryon duquel elles dérivent. ».[798] Il recommande d’ « assouplir le régime juridique de la recherche relative au maintien et à l’utilisation des lignées de cellules souches déjà existantes. »[799].

La French society for stem cell research ajoute que « cette libéralisation des conditions de la recherche aura pour effet de faciliter considérablement le travail des équipes de recherches françaises dans le domaine des CSEh. »

2.1.4 Le Conseil d’État dans son étude n’a pas identifié d’obstacle juridique à une distinction des régimes de recherche respectifs. Il a estimé « qu’une réflexion pourrait être amorcée pour distinguer les recherches conduites sur l’embryon surnuméraire de celles conduites sur les lignées de cellules souches embryonnaires humaines déjà existantes » précisant que « la piste d’un régime distinct, et assoupli, pour les lignées de cellules souches embryonnaires humaines, déjà privilégiée par plusieurs pays européens, gagnerait à être explorée » [800].

Une simplification du régime juridique qui s’applique aux cellules souches embryonnaires n’entre pas en contrariété avec les dispositions de la Convention pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine (Convention d’Oviedo), signée par la France le 4 avril 1997 et ratifiée le 13 décembre 2011. En effet, cette Convention mentionne exclusivement l’embryon dans son article 18 (« Lorsque la recherche sur les embryons in vitro est admise par la loi, celle-ci assure une protection adéquate de l'embryon. »).

2.1.5 Les cellules souches pluripotentes induites méritent une attention particulière dans certaines voies de recherche.

Le fait de pouvoir, à partir de cellules différenciées adultes, obtenir des cellules reprogrammées vers la pluripotence puis de les différencier vers toutes sortes de cellules spécialisées a ouvert le champ de la recherche fondamentale et clinique, au même titre que pour les cellules souches embryonnaires.

De même, les applications du potentiel « pluripotent » des cellules souches pluripotentes induites (partagé avec les cellules souches embryonnaires) font émerger de nouvelles interrogations éthiques. En effet, comme le souligne le Comité consultatif national d'éthique, « leur caractère pluripotent rend possible la production de cellules éthiquement sensibles. ». Il cite à l’appui l’obtention possible de gamètes. Il poursuit : « Se pose donc pour la première fois la question des valeurs éthiques qui pourraient être transgressées dans l’utilisation de ce potentiel pluripotent, alors même que [ces cellules] sont considérées comme ne suscitant pas de questions éthiques majeures parce qu’elles évitent la symbolique embryonnaire » [801].

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale est sur la même ligne : « le recours aux cellules iPS n’est pas plus exempt d’interrogations éthiques que l’usage des cellules souches embryonnaires. En effet, d’une part, ce sont des cellules génétiquement modifiées, et d’autre part, elles peuvent être sources de gamètes et, partant, d’êtres humains génétiquement modifiés. »[802].

Si l’obtention de gamètes à partir des cellules souches pluripotentes induites n’est pas encore d’actualité chez l’homme, elle n’est pas considérée comme impossible (progrès récents sur l’induction de la différenciation de ces cellules en gamètes) et suscite de l’intérêt et des espoirs. Le Conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine[803], qui liste les voies de recherche et d’applications envisagées, les assortit des risques et des questions éthiques qu’elles suscitent :

-          « En recherche fondamentale, cela permettrait l’étude de la gamétogenèse et de la fécondance des gamètes mais la problématique de création d’embryons à des fins de recherche, aujourd’hui strictement interdite, resurgirait ;

-          L’utilisation [de cellules souches pluripotentes induites] différenciées en cellules germinales à des fins thérapeutiques pourrait ouvrir de nouvelles perspectives à des patients infertiles. Toutefois, l’origine même des gamètes, issus de cellules « reprogrammées », peut faire craindre des risques élevés pour la santé de l’enfant à naître ;

-          La production de spermatozoïdes issus [de cellules souches pluripotentes induites] de femmes ou d’ovocytes issus [de cellules souches pluripotentes induites] d’hommes, si elle était techniquement envisageable un jour, poserait de nouvelles questions éthiques liées aux conséquences d’un engendrement qui s’affranchirait de la distinction entre homme et femme. »

L’autre voie de cette recherche fondamentale consiste à développer des systèmes de culture en trois dimensions aboutissant à des structures « gastruloïdes » (hyper-prolifération du tissu trophoblastique et, à l’intérieur, formation d’un épiblaste, avec une microcavité pro-amniotique, qui ressemblent structurellement à un embryon).

En tout état de cause, aujourd’hui, ces cellules ne bénéficient pas d’un encadrement spécifique. Leur utilisation en recherche est soumise au régime commun applicable à l’utilisation des éléments et produits du corps humains à des fins scientifiques fixé au livre II de la première partie du code de la santé publique, notamment à son article L. 1243-3. L’article L. 1243-3 du code de la santé publique prévoit la déclaration au ministère chargé de la recherche des activités de  préparation et conservation d’éléments ou produits du corps humain, y compris la constitution de collections d’échantillons biologiques humains, pour les besoins de programmes de recherche. La recherche sur ces cellules peut également relever de la recherche impliquant la personne humaine régie par les articles L. 1121-1 et suivants du code de la santé publique lorsqu’elle nécessite le prélèvement de patients ou de volontaires sains, réalisé spécifiquement pour les besoins de la recherche.

C’est ce que rappelle le Conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine dans son avis[804], la recherche fondamentale recourant à des cellules souches pluripotentes induites est peu encadrée. Il s’agit dans tous les cas d’un régime déclaratif commun aux cellules du corps humain. La recherche clinique fait l’objet d’un encadrement plus contraignant, qui est celui des recherches sur la personne (et nécessite le respect de principes éthiques, le respect de conditions d’expérience du médecin qui assure la direction de la recherche, de conditions matérielles et techniques adaptées, ainsi que de règles ou recommandations de bonnes pratiques, la nécessité d’un avis favorable du comité de protection des personnes et d’une autorisation de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé).

2.1.6 Au regard des éléments qui précèdent, le Gouvernement, s’il maintient sans le modifier le régime juridique qui s’applique aux recherches sur l’embryon, décide de modifier le cadre actuel :

-          en soumettant les recherches sur les cellules souches embryonnaires à un régime différent et allégé ;

-          en encadrant certaines finalités des recherches utilisant des cellules souches pluripotentes induites.

2.1.7 Les recherches encadrées au V de l’article L. 2151-5 du code de la santé publique, qui portent sur l’embryon (ou sur les gamètes avant de constituer un embryon) dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation et prévoient le transfert de cet embryon in utero pour aboutir à la naissance d’un enfant, sont radicalement différentes de celles qui sont visées aux I à IV de ce même article et concernent des recherches sur des embryons ne faisant plus l’objet d’un projet parental et ne pouvant être transférés in utero.

S’il existe des raisons historiques à la présence de cette catégorie de recherches sur l’embryon à cet article L. 2151-5 du code de la santé publique, il n’est pas souhaitable de les maintenir dans un chapitre qui traite exclusivement d’embryons ne faisant plus l’objet d’un projet parental. Elles ont clairement vocation à figurer au chapitre relatif à l’assistance médicale à la procréation.

A l’occasion de ce déplacement, la disposition sera toilettée sur la forme. Les termes « recherches biomédicales » ne sont plus en vigueur. Le terme recherches sera préféré à celui de recherches impliquant la personne humaine. Si ce sont bien les dispositions de ce Titre qui s’appliquent en l’espèce, il parait préférable de ne pas juxtaposer les mots « personne humaine » et « embryon » (qui n’a pas le statut de personne). Par ailleurs, les termes « in vitro » sont supprimés puisque l’embryon « après son transfert » (donc in utero) est également concerné.

2.1.8 Il apparait que les articles L.2151-5 à -7 du code de la santé publique recourent à des termes différents pour renvoyer aux principes éthiques auxquels la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires doivent se soumettre.

-          Le 4° de l’article L. 2151-5 dispose que : « Le projet et les conditions de mise en œuvre du protocole respectent les principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires. » ;

-          Le premier alinéa de l’article L. 2151-6 prévoit que : « L'importation de cellules souches embryonnaires aux fins de recherche est soumise à l'autorisation préalable de l'Agence de la biomédecine. Cette autorisation ne peut être accordée que si ces cellules souches ont été obtenues dans le respect des principes fondamentaux prévus par les articles 16 à 16-8 du code civil. » ;

-          Le deuxième alinéa de l’article L. 2151-7 dispose que : « La délivrance de l'autorisation est subordonnée au respect des dispositions du titre Ier du livre II de la première partie du présent code, des règles en vigueur en matière de sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site et des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, ainsi qu'au respect des règles de sécurité sanitaire. ».

Plus concrètement :

-          Le 4° de l’article L.2151-5 précise que le projet de recherche doit respecter les « principes éthiques relatifs à la recherche sur l’embryon », c’est-à-dire les principes posés ou mentionnés au Titre V « Recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires » ; ces principes peuvent être ainsi résumés :

-          L’article L.2151-6 exige le respect des « principes fondamentaux prévus par les articles 16 à 16-8 du code civil » ; ces principes peuvent être ainsi résumés :

-          L’article L.2151-7 renvoie aux « principes généraux mentionnés au titre Ier du livre II de la première partie du présent code » ; ce titre définit les principes généraux applicables au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain (articles L.1211-1 et suivants du code de la santé publique), parmi lesquels figurent :

Ainsi, il ressort des développements qui précèdent que les principes auxquels renvoient les articles L. 2151-5, L. 2151-6 et L. 2151-7 du code de la santé publique ont en référence commune les « principes fondamentaux prévus par les articles 16 à 16-8 du code civil ».

L’article L. 2151-5 du code de la santé publique nécessite en outre le respect d’autres principes (« les principes éthiques relatifs à la recherche sur l’embryon ») traduits sous forme d’interdits et, conformément à la décision du Conseil constitutionnel n° 2013-674 DC qui inclut parmi les principes éthiques applicables à la recherche sur l’embryon, le respect des principes éthiques du titre Ier du livre II de la première partie du code de la santé publique. Le 4° de l’article L. 2151-5 doit donc également renvoyer aux « principes éthiques du présent titre » et « à ceux du titre Ier du livre II de la première partie du partie du présent code ».

2.1.9 L’intitulé du Titre V du Livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique (qui comporte un chapitre unique) est « Recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires ».

Si ce Titre concerne exclusivement l’embryon humain et les cellules souches embryonnaires humaines, il convient de remarquer qu’à certains articles du chapitre unique qui le compose est apposé le qualificatif « humain » après le terme embryon (notamment au premier alinéa de l’article L. 2151-2, aux articles L. 2151-3 et L. 2151-4, au premier alinéa de l’article L. 2151-5, …) sans que cela ne soit systématique (l’adjectif est absent au deuxième alinéa de l’article L. 2151-2, des autres alinéas de l’article L. 2151-5 ou encore de l’article L. 2151-7).

Quant aux cellules souches embryonnaires, elles ne sont jamais qualifiées d’humaines.

Cette situation pourrait créer des a contrario, a fortiori au regard du développement de voies de recherches qui concernent l’embryon animal.

Il apparait donc préférable d’expliciter le champ de ce chapitre.

Pour éviter des répétitions et des risques d’oubli, le choix est fait d’apporter les précisions utiles au libellé du Titre concerné.

2.2.                       Objectifs poursuivis

La règle nouvelle tire les conséquences de la différence de nature entre l’embryon et les cellules souches embryonnaires qui, si elles en sont issues, ne conduisent pas au même questionnement éthique. L’objectif est d’établir clairement la différence entre un embryon et des cellules souches embryonnaires et d’alléger le régime juridique qui s’applique aux recherches sur ces cellules afin de faciliter le travail des équipes de recherche françaises et donner un nouvel élan à cette recherche.

En corollaire, la mesure va permettre d’alléger la charge qui pèse sur l’Agence de la biomédecine, tout en conservant néanmoins un contrôle sur les protocoles de recherche portant sur les cellules souches embryonnaires et certains protocoles de recherche recourant aux cellules souches pluripotentes induites.

La présente mesure aboutira également, de facto, à supprimer un des critères d’autorisation des recherches sur les cellules souches embryonnaires (en l'état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à ces cellules souches embryonnaires).

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1.                       Régime s’appliquant aux cellules souches embryonnaires

Le Comité consultatif national d'éthique, dans son avis n° 129[805], a évoqué la possibilité que la loi « au lieu de définir avec précision ce qui est autorisé ou interdit – institue le cadre et définisse des garde-fous, des limites à ne pas franchir et délègue à une instance ad hoc la responsabilité d’évaluer de façon rigoureuse, mais avec une marge d’interprétation importante, les modalités de réalisation et ses éventuelles applications d’un projet de recherche. »[806].

En Belgique, la loi est très permissive et des comités éthiques locaux affiliés à chacune des universités aident les équipes de recherche à monter leur projet et à percevoir les limites à ne pas dépasser[807].

Mais une telle piste est difficilement envisageable aujourd’hui en France. 

Plusieurs options permettant, au moins en théorie, d’alléger le régime juridique des recherches sur les cellules souches embryonnaires se présentent.

La première option consiste à maintenir le principe d’un régime d’autorisation pour la recherche sur l’embryon et celle sur les cellules souches embryonnaires avec desserrement de certaines conditions lorsqu’il s’agit de cellules souches embryonnaires. Cette option ne répondrait pas aux attentes des chercheurs et n’apporterait pas la souplesse et la simplification attendues.

La deuxième option, à l’inverse, consiste à supprimer tout régime juridique spécifique pour les recherches effectuées sur les cellules souches embryonnaires en considérant qu’elles relèvent du régime commun de la recherche sur cellules en culture. Toutefois, il apparait difficile de justifier que les cellules souches embryonnaires sont des cellules « ordinaires » au regard de leur spécificité puisqu’elles sont pluripotentes et disposent de potentiels évolutifs que n’ont pas les autres cellules. Ce n’est d’ailleurs pas la demande des chercheurs. Ce sont justement ces spécificités (pluripotence) qui justifient que les cellules souches pluripotentes induites, qui n’ont pas la même origine mais disposent des mêmes propriétés, soient également partiellement encadrées.

La troisième option, consiste à distinguer clairement deux régimes juridiques : un régime d’autorisation sous conditions pour la recherche sur les embryons (celui qui existe aujourd’hui) et un régime de déclaration pour la recherche sur les cellules souches embryonnaires, l’Agence de la biomédecine restant dans les deux cas l’opérateur compétent. C’est cette option qui a été retenue.

Les protocoles de recherche conduits sur les cellules souches embryonnaires sont soumis à déclaration à l’Agence de la biomédecine préalablement à leur mise en œuvre. Seule cette agence, à laquelle le législateur a confié un rôle majeur en matière de recherches sur l’embryon, peut assurer cette mission.

Les cellules souches embryonnaires concernées restent celles dérivées d’embryons dans le cadre d’un protocole de recherche sur l’embryon, autorisé en application de l’article L. 2151-5 ou celles importées à des fins de recherche dans les conditions prévues à l’article L. 2151-6.

Le directeur général de l'Agence de la biomédecine s'oppose, dans un délai fixé par voie réglementaire, à la réalisation du protocole de recherche dans des conditions équivalentes à celles en vigueur[808] (pour l’autorisation de ces recherches) :

-          si la recherche fondamentale ou appliquée ne s’inscrit pas dans une finalité médicale ;

-          si la pertinence scientifique de la recherche n’est pas établie ;

-          si le protocole et ses conditions de mise en œuvre ne respectent pas les principes éthiques ;

-          si l’origine des cellules souches embryonnaires n’est pas celle sus-précisée.

Les recherches ne peuvent débuter qu’en l’absence d’opposition du directeur général de l’Agence, à l’expiration du délai réglementaire susmentionné.

Le directeur général de l'Agence de la biomédecine peut à tout moment suspendre ou interdire les recherches qui ne répondent plus à ces exigences.

Il prend l’avis de son Conseil d’orientation lorsque le protocole a pour objet la différenciation de ces cellules souches embryonnaires en gamètes ou l’agrégation de ces cellules avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires (Cf. infra). 

Enfin, il est prévu des dispositions transitoires permettant de considérer un dossier de demande d’autorisation déposé et en cours d’instruction, avant l’entrée en vigueur de la loi, comme recevable au titre de la déclaration de protocole, lorsque la loi entrera en vigueur. Ces dispositions fixent également un délai d’instruction spécifique pour ce type de dossier.

3.2.                       Régime s’appliquant aux cellules souches pluripotentes induites

Outre le statu quo, la première option consiste à faire entrer toute recherche portant sur les cellules souches pluripotentes induites dans le nouveau régime déclaratif mis en place pour les cellules souches embryonnaires. Cette option, outre qu’elle exposerait l’Agence de la biomédecine à une inflation de déclarations qui ne lui permettrait d’exercer aucun contrôle utile, apporterait des contraintes injustifiées à cette catégorie de cellules et aux chercheurs qui les utilisent. 

En effet, ainsi que le précise l’Agence de la biomédecine, « les cellules souches pluripotentes induites sont d’ores et déjà un outil incomparable de modélisation de maladies humaines (plus de 150 lignées issues de maladies différentes) et de criblage en pharmacologie ou toxicologie (voir plus loin), avec des résultats tangibles. »[809]

La deuxième option consiste à soumettre à déclaration à l’Agence de la biomédecine les seules recherches conduites à partir de cellules souches pluripotentes induites ayant pour objet la différentiation de ces cellules en gamètes ou l’agrégation de ces cellules avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires. C’est cette option qui cible les recherches considérées comme sensibles qui a été retenue. Cette nouvelle obligation ne se substitue pas à l’obligation d’effectuer les démarches prévues, par ailleurs, à l’article L. 1243-3 du code la santé publique ou, le cas échéant à l’article L. 1121-1 du code la santé publique (cf. point 2.1.5).

Les protocoles de recherche conduits sur des cellules souches pluripotentes induites ayant pour objet la différentiation de ces cellules en gamètes ou l’agrégation de ces cellules avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires, sont soumis à déclaration à l’Agence de la biomédecine préalablement à leur mise en œuvre.

Après avis de son Conseil d’orientation, le directeur général de l'Agence de la biomédecine s'oppose à la réalisation d’un protocole de recherche si le protocole et ses conditions de mise en œuvre ne respectent pas les principes fondamentaux prévus par les articles 16 à 16-8 du code civil et les principes éthiques de la recherche sur l’embryon (prévu au Titre V du Livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique).

Les recherches ne peuvent débuter qu’en l’absence d’opposition du directeur général de l’Agence, à l’expiration du délai réglementaire susmentionné.

Après avis de son Conseil d’orientation, le directeur général de l'Agence de la biomédecine peut à tout moment suspendre ou interdire les recherches qui ne répondent plus à ces exigences.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

4.1.1.      Impacts sur l’ordre juridique interne

La présente mesure modifiera l’intitulé du Titre V du Livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique en ajoutant le qualificatif « humain » après embryon et après cellules souches embryonnaires ainsi que la rédaction des articles L. 2151-5, L. 2151-6 et L. 2151-7 du code de la santé publique. Il est ajouté à l’intitulé la mention : « et les cellules souches pluripotentes induites ».

Cette mesure conduira à déplacer le V de l’article L. 2151-5 au chapitre 1er du Titre IV du Livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique en créant un article L. 2141-3-1, à adapter la rédaction de l’article L. 1125-3 du code de la santé publique, des articles L. 1418-1, L. 2163-6 et L. 2163-7 du code la santé publique, des articles 511-19 et 511-19-2 du code pénal ; enfin à insérer un nouvel article L. 2151-7.

La présente disposition aboutit à ce que

En outre, des sanctions pénales sont prévues en cas de manquement aux nouvelles obligations relatives à l’exercice de certaines recherches portant sur les cellules souches pluripotentes induites.

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

La directive 2004/23/CE du 31 mars 2004 relative au don et à l’utilisation de tissus et cellules humains et ses directives techniques, transposées dans le droit national en 2008, encadrent tout le processus et toutes les étapes qui vont de la collecte des tissus ou cellules jusqu'à leur cession en vue d'une greffe ou de la fabrication de produits manufacturés. Elles englobent dans leur champ d’application les gamètes et les cellules souches embryonnaires humaines. Toutefois, ces directives ne portent pas atteinte au pouvoir des États membres d’autoriser ou non le don et l’utilisation de cellules germinales et des cellules embryonnaires. Elles ne prennent ainsi aucun parti sur le statut de l’embryon.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

La maîtrise de la connaissance, et donc de la manipulation, des cellules souches pluripotentes ouvre un vaste champ de recherche, et bouleverse d’ores et déjà la vision à long terme de la thérapie cellulaire. Les applications dépassent largement la seule transplantation de cellules à but substitutif - objectif encore lointain et incertain - et concernent dans l’immédiat le support de modélisation de maladies humaines, le criblage de molécules pharmaceutiques et l’évaluation de la toxicité de molécules diverses, dont les médicaments.

Le domaine des cellules souches pluripotentes est un domaine extrêmement prometteur, à la fois pour l’industrie pharmaceutique et pour la médecine régénératrice.

Les enjeux sont énormes indique l’Agence de la biomédecine : « la communauté scientifique internationale, académique comme industrielle, l’a bien compris, ce d’autant qu’à terme, il est probable que se mettra en place une gestion internationale des ressources en cellules thérapeutiques. La vigueur de la compétition dans ce domaine en témoigne, ainsi que les moyens mis en jeu et la participation d’intervenants nouveaux et extrêmement dynamiques que sont les pays asiatiques. L’accumulation rapide des résultats qui caractérise la période actuelle s’explique aussi par le développement concomitant de technologies d’analyse sophistiquées et puissantes, qui représentent également un enjeu économique. »[810].

Dans ces conditions, une perte de compétitivité par rapport aux autres acteurs[811] (Etats-Unis, Chine) dans le domaine des médicaments de thérapie innovante aurait des conséquences désastreuses[812], y compris en termes d’accès à ces soins de haut niveau pour les patients français.

5.       Consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

L’Agence de la biomédecine, dans son bilan d’application de la loi de 2011, indique clairement : « La loi soumet au même régime l’utilisation d’embryons, éventuellement dans le but d’obtenir de nouvelles lignées, et celle de lignées existantes. Toutefois, ces deux catégories ne sont pas équivalentes, et, de fait, dans plusieurs pays européens, la législation les distingue. La création de lignées et les recherches sur l’embryon impliquent la destruction d’un embryon, ce qui pose d’évidentes interrogations éthiques. À l’inverse, les lignées de cellules souches embryonnaires existantes ne disposent pas des propriétés organisatrices qui leur permettraient de reproduire un nouvel organisme. Les lignées déjà dérivées et standardisées étant utilisées par des laboratoires renommés partout dans le monde, l’interrogation éthique persiste, mais semble d’une autre nature. »[813]

 

L’Agence de la biomédecine a été consultée. Elle a rendu son avis le 26 juin 2019.

 

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a transmis son avis le 12 juillet 2019.

5.2.                       Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La mise en œuvre des présentes mesures entrera en vigueur avec la publication du décret en Conseil d’Etat mentionné en infra.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret en Conseil d’Etat doit préciser les modalités des nouveaux régimes juridiques s’appliquant aux recherches portant sur les cellules souches embryonnaires ainsi qu’à certaines recherches à partir de cellules souches pluripotentes induites.

 


Article 14 Fixer une limite de développement des embryons en recherche

1.             État des lieux

1.1.                       Cadre général

La loi, et notamment l’article L. 2151-5 du code de la santé publique, ne définit pas de limite à la durée de culture in vitro des embryons humains inclus dans un protocole de recherche (embryons surnuméraires provenant d’un couple n’ayant plus de projet parental et ayant consenti à les proposer à la recherche).

Jusqu’à très récemment[814], l’Agence de la biomédecine, qui délivre les autorisations de recherche sur l’embryon en application de l’article L. 2151-5 du code de la santé publique, n’avait pas été confrontée à des protocoles prévoyant une durée de culture de l’embryon in vitro supérieure à sept jours. 

1.2.                       Éléments de droit comparé

D’après les travaux de l’Agence de la biomédecine[815] et ceux du Conseil d’Etat dans son étude[816], la plupart des pays ont apporté, de façon explicite, des précisions sur cette durée de culture de l’embryon in vitro.

Le Royaume-Uni, qui a mis en place très tôt un cadre légal (Human Fertilisation and Embryology Act du 01 novembre 1990, modifié en 2001 et 2008), autorise les recherches sur l’embryon pendant quatorze jours, à compter de la fusion des gamètes.

La Suède est un des premiers pays à avoir légiféré sur la recherche sur l’embryon (1991) et à l’avoir autorisée, sur des embryons de moins de quatorze jours uniquement.

En Bulgarie, ces activités sont régies par la loi n° 70/10 d’août 2004 qui permet l’utilisation des embryons surnuméraires dans la limite du quatorzième jour de leur développement.

En Espagne, les lois n° 35/1988 du 22 novembre 1988, n° 45/2003 du 21 novembre 2003 et n° 14/2007 du 3 juillet 2007 autorisent, sous conditions, la recherche sur des embryons surnuméraires ne faisant plus l’objet d’un projet parental. La loi espagnole fixe à quatorze jours le statut de pré-embryon, limite à partir de laquelle la recherche n’est plus possible.

La Hongrie a assoupli en 2008 sa législation qui limitait la recherche aux lignées importées. Les recherches utilisant des embryons surnuméraires de moins de quatorze jours et des lignées de cellules issues de ces embryons sont désormais possibles.

En Norvège, la loi relative à l’application des biotechnologies en médecine humaine, qui prévoyait depuis 1994 un régime d’interdiction stricte, a été amendée en 2007. Depuis le 1er janvier 2008, les recherches sur les embryons surnuméraires et sur les cellules souches embryonnaires sont autorisées sous conditions dont la limite de quatorze jours.  

En Belgique, la loi du 03 avril 2003 relative à la recherche sur les embryons humains in vitro permet des recherches jusqu’au quatorzième jour.

Il en est de même pour le Danemark (lois n° 460 du 10 juin 1997 modifiée en 2006, n° 427 du 10 juin 2003 et n° 240 du 05 avril 2004) et les Pays-Bas (Act Containing Rules Relating to the Use of Gametes and Embryos (Embryos Act), 20 juin 2002, Staatsblad 338, 02 juillet 2002, modifié en 2013).

En Australie[817], les recherches peuvent également être menées dans la limite de quatorze jours sur des embryons surnuméraires. Il en est de même au Canada, en Slovénie, Grèce, Croatie, Chypre, Portugal, Estonie et Islande[818].

Au final, seules la République tchèque (qui autorise depuis 2006 la recherche sur les embryons surnuméraires) et la Suisse (Loi fédérale relative à la recherche sur les cellules souches embryonnaires du 19 décembre 2003) ont limité à sept jours la durée de culture in vitro des embryons surnuméraires.

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.                       Nécessité de légiférer

Dans son avis n° 67[819] sur l'avant-projet de révision des lois de bioéthique, émis le 27 janvier 2000, le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé abordait cette question de la limite au développement in vitro des embryons et, considérant que « l'implantation de l'embryon dans l'utérus » constitue un événement significatif, il proposait de retenir comme limite « la fin du stade pré-implantatoire, c'est-à-dire au moment où l'embryon acquiert la capacité à s'implanter dans l'utérus ».

Il recommandait donc de ne pas poursuivre le développement d’un embryon in vitro au-delà de la fin du stade préimplantatoire, soit sept jours après la fécondation. 

Si la loi n’a jamais fixé de durée, cette recommandation du Comité consultatif national d'éthique constitue, de fait, une barrière symbolique.

Dix ans plus tard, dans son avis n° 112 du 21 octobre 2010[820], le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, notant que « de telles recherches pourraient théoriquement être poursuivies aussi longtemps que le développement d’un embryon in vitro est (ou sera demain) techniquement possible » puisque rien dans la loi n’interdit cette éventualité, appelait de ses vœux l’introduction d’une limite temporelle maximale dans la loi.

Cette solution n’a pas été retenue au moment de la révision des lois de bioéthique du 7 juillet 2011.

Comme cela est détaillé plus haut (point droit comparé), de nombreux pays ont retenu une limite de quatorze jours en raison d’un consensus international (dit de Warnock)[821] datant de 1984, qui a retenu cette limite, la considérant comme éthiquement acceptable.

Cette limite correspond, en effet, à un évènement majeur du développement embryonnaire : la gastrulation[822]. Cet événement aboutit à la mise en place des trois feuillets embryonnaires qui vont être à l’origine de l’ensemble des organes : l’ectoderme (à l’origine de la peau et du système nerveux), le mésoderme (qui formera les muscles ou le squelette) et l’endoderme (à l’origine du tube digestif ou des voies respiratoires). La séparation de ces trois feuillets aboutit à la formation de la ligne primitive, qui donnera plus tard (au dix-neuvième jour) l’ébauche du tube neural et les futures cellules nerveuses.

La limite de quatorze jours est donc regardée comme marquant l’apparition des premières ébauches du système nerveux central.

Par ailleurs, la formation de jumeaux peut encore se produire jusqu’au quatorzième jour de développement de l’embryon (au-delà, il est impossible qu’un embryon ayant le même patrimoine génétique apparaisse).

Jusqu’à très récemment, les techniques de culture d’embryons in vitro ne permettaient pas de dépasser la limite de sept jours de développement.

Mais la situation a évolué en 2016 puisque deux équipes de recherche (l’une au Royaume-Uni et l’autre aux États-Unis) ont publié des modèles expérimentaux permettant de cultiver des embryons in vitro jusqu’à treize jours. Si les embryons ont été volontairement détruits à ce stade, l’une des équipes a déclaré qu’il semblait techniquement envisageable de dépasser la limite des quatorze jours.

Dans son rapport sur l’application de la loi de bioéthique[823], l’Agence de la biomédecine estime que « cette question de la durée de culture autorisée pourrait se poser bientôt en France, des équipes de recherche étant en capacité de mettre en œuvre les techniques précédemment décrites. » Elle ajoute : « L’enjeu de connaissance sur le développement embryonnaire est considérable ».

Il convient en effet de préciser que de telles recherches présentent un intérêt majeur pour la connaissance du développement de l’embryon et de la période d’implantation de cet embryon  qui ne peuvent être étudiés autrement.

Ces recherches permettent également d’améliorer la détermination des critères (morphologiques notamment) permettant d’identifier les embryons ayant les meilleures chances d’implantation dans l’utérus.

Couplées à l’utilisation d’outils de modification ciblée du génome, ces recherches permettent encore l’étude des rôles de différents gènes dans le développement physiologique de l’embryon. La cohérence et la puissance de l’utilisation de ces outils d’édition génomique avec une durée d’étude s’étendant au-delà du 7ème jour post-fécondation sont à souligner.

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale[824] confirme que « L’allongement de 7 à 14 jours de la durée maximale de culture est motivé par la possibilité ainsi offerte de comprendre le développement des modèles cellulaires issus de la deuxième semaine de développement. Il est nécessaire de pousser les recherches lorsque les cellules commencent à se différencier pour mieux comprendre leur évolution. »

L. David argumente[825] : « Au septième jour, les cellules pluripotentes, encore très précoces, ne peuvent pas encore produire d’ébauches de tissus différenciés ; elles ne sont pas spécialisées et peuvent tout faire. Or, il est nécessaire d’accéder à ce qui se passe ensuite pour produire des cellules de foie destinées à être injectées à des patients souffrant d’insuffisance hépatique aigüe et en état de surdose de paracétamol, par exemple, ou encore pour produire des cellules de la rétine, des cellules neuronales et tout autre type de cellule. C’est cette partie que nous peinons à comprendre chez l’homme et qui nécessite dans certains cas de disposer de modèles cellulaires issus de la deuxième semaine de développent. »

Au regard de ces évolutions, le Conseil d’État, dans son étude du 28 juin 2018[826], a estimé « nécessaire de fixer dans le droit positif une durée maximale de culture [des embryons] in vitro. »

Il précise que « le législateur pourrait fixer luimême cette limite, dès lors qu’elle apparaît constituer un élément important des garanties effectives entourant la recherche sur l’embryon, plutôt que de laisser à l’Agence de la biomédecine – et in fine au juge administratif devant lequel serait immanquablement contestée cette décision – la responsabilité d’un choix structurant et éthiquement délicat. ».

2.2.                       Objectifs poursuivis

La règle nouvelle aura pour objet de fixer dans la loi une durée maximale de culture de l’embryon in vitro dans le cadre d’un protocole de recherche pour apporter une sécurité juridique et éviter toute dérive. Au-delà de cette durée, il sera mis fin au développement de l’embryon.

 

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1.                       Options envisagées

Le statu quo ou la fixation d’une limite dans une recommandation de l’Agence de la biomédecine sont écartés.

En effet, ainsi que l’expose le  Conseil d’Etat dans son étude de juin 2018 d’une part,  la fixation d’une limite apporte des garanties effectives à la recherche sur l’embryon qui justifient que cette limite soit de niveau législatif et, d’autre part, le risque de contentieux est certain si la décision est laissée à l’appréciation de l’Agence de la biomédecine, créant une nouvelle insécurité juridique préjudiciable à la recherche.

3.2.                       Option retenue

Le Conseil d’Etat, dans son étude précitée, ne se prononce pas sur la durée à retenir.

De son côté, le Comité consultatif national d'éthique dans son avis n° 129[827] souhaite que le nouvel encadrement législatif afférent à la recherche sur l’embryon soit précisé et clarifié, notamment sur la limite temporelle au temps de culture de l’embryon. Il ajoute : « une limite tacite et respectée jusqu’à maintenant par les scientifiques est celle du 14ième jour ».

Les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques[828] sont « favorables à élargir dans la loi le délai de culture in vitro des embryons destinés à la recherche à 14 jours, correspondant approximativement au début de la différenciation du système nerveux central et périphérique à partir de l’ectoderme ».

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale[829] « souscrit à l’idée de permettre un allongement de la durée de culture de l’embryon sur lequel sont effectuées des recherches. En revanche, il estime qu’une limite de 14 jours apparaît aussi arbitraire que la durée de 7 jours préconisée par le CCNE. Rien n’interdirait de retenir une durée quelque peu supérieure pour autant qu’une justification scientifique existe et que, bien sûr, l’embryon en question ne soit pas dévolu à une progression jusqu’au stade fœtal[830]. »

La limite consensuelle et éthiquement acceptable de quatorze jours à la culture in vitro de l’embryon dans le cadre d’un protocole de recherche est retenue.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

La présente mesure aura pour objet de modifier le IV de l’article L. 2151-5 du code de la santé publique pour faire figurer explicitement une durée maximale de développement de l’embryon in vitro dans le cadre d’un protocole de recherche. Cette durée sera fixée à 14 jours.

4.2.                       Impacts sur les services administratifs

L’Agence de la biomédecine, qui délivre les autorisations de recherche sur l’embryon en application de l’article L. 2151-5 du code de la santé publique, pourra examiner des protocoles prévoyant une durée de culture de l’embryon in vitro supérieure à sept jours et, le cas échéant, les autoriser sans s’exposer à des contentieux longs, coûteux et préjudiciables à la recherche.

5.       Consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

L’Agence de la biomédecine a été consultée. Elle a rendu son avis le 26 juin 2019.

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a remis son avis le 12 juillet 2019.

5.2.                       Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La mesure sera applicable le lendemain de la promulgation de la loi.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

 


Article 16 Fixer une limite de conservation des embryons proposés à la recherche et non inclus dans un protocole après cinq ans

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1 La fécondation in vitro comprend plusieurs étapes cliniques et biologiques : stimulation ovarienne, prélèvement des follicules qui contiennent les ovocytes, préparation des gamètes (ovocytes et spermatozoïdes) en laboratoire, mise en fécondation des gamètes (par simple contact ou par une manipulation qui consiste à injecter directement un spermatozoïde dans l’ovocyte), développement d’un ou plusieurs embryons, transfert d’un ou deux embryons en général.

Quand le nombre d’embryons obtenus est supérieur au nombre d’embryons transférés, les embryons « surnuméraires » dont le développement est satisfaisant sont congelés pour d’éventuels transferts in utero ultérieurs.

L’Agence de la biomédecine[831] indique que la pratique de la congélation embryonnaire et la part des embryons congelés dépendent du nombre d’ovocytes recueillis et donc de l’âge des patientes, des taux de fécondation et de la qualité des embryons obtenus mais aussi des stratégies de transfert, de culture prolongée et de congélation propres à chaque centre.

En 2016[832], 42% des prélèvements ovocytaires en vue de fécondation in vitro ont été suivis d’une congélation embryonnaire. La part des embryons congelés représente 25% des embryons obtenus. La congélation de l’ensemble de la cohorte embryonnaire a été réalisée dans 9,3% des cas. La majorité de ces embryons (76,4%) ont été vitrifiés.

Toujours selon les travaux de l’Agence de la biomédecine, cette part des congélations embryonnaires augmente progressivement au cours des dernières années.

Au 31 décembre 2016, on dénombrait 223 836 embryons conservés pour 74 387 couples.

1.1.2 L’article L. 2141-4 du code de la santé publique règle le devenir des embryons surnuméraires cryoconservés, en particulier lorsque le couple concerné ne nourrit plus de projet parental :

« I.- Les deux membres du couple dont des embryons sont conservés sont consultés chaque année par écrit sur le point de savoir s'ils maintiennent leur projet parental.

« II.- S'ils n'ont plus de projet parental ou en cas de décès de l'un d'entre eux, les deux membres d'un couple, ou le membre survivant, peuvent consentir à ce que :

« 1° Leurs embryons soient accueillis par un autre couple dans les conditions fixées aux articles L. 2141-5 et L. 2141-6 ;

« 2° Leurs embryons fassent l'objet d'une recherche dans les conditions prévues à l'article L. 2151-5 ou, dans les conditions fixées par cet article et les articles L. 1121-4 et L. 1125-1, à ce que les cellules dérivées à partir de ceux-ci entrent dans une préparation de thérapie cellulaire à des fins exclusivement thérapeutiques ;

« 3° Il soit mis fin à la conservation de leurs embryons.

« Dans tous les cas, le consentement ou la demande est exprimé par écrit et fait l'objet d'une confirmation par écrit après un délai de réflexion de trois mois. En cas de décès de l'un des membres du couple, le membre survivant ne peut être consulté avant l'expiration d'un délai d'un an à compter du décès, sauf initiative anticipée de sa part.

« III.- Dans le cas où l'un des deux membres du couple consulté à plusieurs reprises ne répond pas sur le point de savoir s'il maintient ou non son projet parental, il est mis fin à la conservation des embryons si la durée de celle-ci est au moins égale à cinq ans. Il en est de même en cas de désaccord des membres du couple sur le maintien du projet parental ou sur le devenir des embryons.

« IV.- Lorsque les deux membres d'un couple, ou le membre survivant, ont consenti, dans les conditions prévues aux articles L. 2141-5 et L. 2141-6, à l'accueil de leurs embryons et que ceux-ci n'ont pas été accueillis dans un délai de cinq ans à compter du jour où ce consentement a été exprimé par écrit, il est mis fin à la conservation de ces embryons. »

Il convient de préciser qu’au 2° du II, la possibilité de faire des recherches dans les conditions fixées par les articles L. 1121-4 et L. 1125-1 du code de la santé publique, c’est-à-dire des recherches biomédicales (devenues des recherches impliquant la personne humaine), a été insérée par la loi du 7 juillet 2011 pour permettre d’utiliser des cellules souches embryonnaires issues d’embryons ne faisant plus l’objet d’un projet parental dans une préparation de thérapie cellulaire.

1.1.3 Chaque année, des relances sont faites par les centres d’assistance médicale à la procréation pour interroger les couples sur leur souhait de poursuivre ou non la conservation de leurs embryons.

En pratique, tous les couples pour lesquels des embryons sont conservés sont interrogés annuellement sur le maintien de leur projet parental et, le cas échéant, sur le devenir des embryons. En cas de non-réponse à un premier courrier, il est nécessaire de renouveler l’interrogation du couple, notamment au moyen d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception après avoir vérifié les adresses disponibles dans les différents dossiers du couple au sein de l’établissement. Après deux courriers sans réponse ou retournés au centre d’assistance médicale à la procréation avec la mention « n’habite pas à l’adresse indiquée», le praticien peut mettre fin à la conservation des embryons si ceux-ci sont conservés depuis plus de cinq ans[833].

Pour les embryons surnuméraires en cours de conservation au 31 décembre 2016[834] :

-          Un projet parental était en cours pour 72,5% d’entre eux, situation de loin la plus fréquente (160 442 embryons pour 53 947 couples concernés) ; ces embryons sont alors destinés à être décongelés/dévitrifiés et transférés, dans les mois ou années qui suivent pour la poursuite du projet parental ;

-          Dans 12,7% des cas (29 620 embryons pour 9447 couples concernés), les couples n’ont plus de projet parental et les embryons pourront être accueillis par un autre couple ou donnés pour la recherche si les couples y consentent ; ainsi, au cours de l’année 2016

Ces embryons sont de fait conservés dans les centres d’assistance médicale à la procréation où ils ont été congelés tant que la mise en œuvre de l’accueil d’embryons ou de la recherche n’est pas effective ;

-          Pour 14,6% des embryons conservés (33 774 embryons pour 10 993 couples concernés), les couples ne répondent pas aux relances annuelles ou ne sont pas en accord quant à leur devenir ; dans ces situations, conformément au III de l’article L. 2141-4 précité, il est mis fin à la conservation de ces embryons dès lors que ceux-ci sont conservés depuis au moins cinq ans.

1.2. Éléments de droit comparé

La durée de stockage des embryons varierait d'un pays à l'autre, d’un à deux ans (au Chili) jusqu'à dix ans (en Israël ou en Australie) voire quinze ans (au Royaume-Uni avec renouvellement de l'autorisation tous les cinq ans). Il n’existe aucun consensus sur la période de conservation des embryons mais la plupart des pays ont choisi cinq ans[835].

2.       Nécessité de légiférer, OPTIONS ENVISAGEES et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1 Si la loi prévoit la destruction des embryons proposés à l’accueil par d’autres couples mais qui n’ont pas été accueillis dans un délai de cinq ans ainsi que la destruction des embryons pour lesquels les couples ne répondent pas aux relances annuelles ou ne sont pas en accord quant à leur devenir, rien n’est prévu pour les embryons proposés à la recherche mais qui n’ont pas été inclus dans un protocole de recherche au-delà d’un certain délai.

Or, il existe une asymétrie entre le nombre d’embryons proposés à la recherche et les besoins réels en la matière.

Ainsi, en 2016[836], les 2 855 embryons proposés à la recherche (ce nombre est relativement constant ces dernières années) ont fait passer le nombre total d’embryons conservés et proposés à la recherche à 19 354. Ce « stock » est, lui aussi, relativement constant depuis quelques années, traduisant le fait que le nombre d’embryons donnés chaque année à la recherche par les couples qui n’ont plus de projet parental est à peu près équivalent à celui des embryons effectivement inclus dans un protocole de recherche la même année.

Les embryons proposés à la recherche et non utilisés sont conservés (parfois depuis de nombreuses années) par les centres d’assistance médicale à la procréation, ce qui représente un coût de stockage et une charge de travail importante puisque leur traçabilité doit continuer à être assurée. Ce « stock » d’embryons donnés à la recherche constituant une charge de plus en plus lourde pour ces centres, il nécessite d’être régulé.

Rappelant que « Moins de 10 % des 20 000 embryons proposés à la recherche et conservés dans les centres d’assistance médicale à la procréation sont effectivement utilisés » et que « Les centres d’assistance médicale à la procréation souhaiteraient pouvoir mettre fin à leur conservation, passé un délai de cinq ans, comme il est prévu pour les embryons ne s’inscrivant plus dans un projet parental ou destinés à l’accueil sans avoir pu être accueillis », les rapporteurs de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques[837] recommandent de « se préoccuper dans le cadre de la loi du devenir des embryons congelés qui n’ont pas été réimplantés au cours d’un projet parental et, en particulier, de fixer un délai maximal de conservation de ces embryons. »

Dans son étude du 28 juin 2018[838], le Conseil d’État estime qu’une « telle disposition n’apparaît pas soulever d’obstacle juridique ni éthique dans la mesure où les embryons surnuméraires donnés à la recherche sont, par hypothèse, ceux pour lesquels les couples concernés ont renoncé à tout projet parental et consenti à ce qu’ils soient détruits ».

2.1.2 Ainsi que cela a été précisé (au point cadre général), les embryons proposés à la recherche sont de fait conservés dans les centres d’assistance médicale à la procréation où ils ont été congelés tant que la mise en œuvre de la recherche n’est pas effective.

Or, les établissements de santé, les laboratoires de biologie médicale et les organismes, autorisés par les agences régionales de santé en application de l’article L. 2142-1 du code de la santé publique à mettre en œuvre les activités de conservation des embryons dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation[839], le sont à des fins de soins.

Ils ne disposent pas de l’autorisation prévue au premier alinéa de l’article L. 2151-7 du code de la santé publique :

« Tout organisme qui assure, à des fins de recherche, la conservation d'embryons ou de cellules souches embryonnaires doit être titulaire d'une autorisation délivrée par l'Agence de la biomédecine. ».

La situation des établissements de santé, laboratoires de biologie médicale et organismes précités qui conservent, dans des finalités qui ne sont plus de soins (d’assistance médicale à la procréation), des embryons proposés à la recherche et non encore inclus dans un protocole de recherche doit être régularisée.

2.1.3 Les cellules dérivées de cellules souches embryonnaires qui sont utilisées en thérapie cellulaire répondent désormais à la définition de médicament de thérapie innovante telle qu’elle figure à l’article 2 du règlement (CE) n° 1394/2007 du parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les médicaments de thérapie innovante et modifiant la directive 2001/83/CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004.

« Article 2

Définitions

(…)

a) « médicament de thérapie innovante » : l’un des médicaments à usage humain suivants:

-          Un médicament de thérapie génique tel que défini dans l’annexe I, partie IV, de la directive 2001/83/CE,

-          Un médicament de thérapie cellulaire somatique tel que défini dans l’annexe I, partie IV, de la directive 2001/83/CE,

-          Un produit issu de l’ingénierie tissulaire tel que défini au point b) ;

b) « produit issu de l’ingénierie tissulaire » : un produit :

-          Qui contient des cellules ou tissus issus de l’ingénierie cellulaire ou tissulaire, ou en est constitué, et

-          Qui est présenté comme possédant des propriétés lui permettant de régénérer, réparer ou remplacer un tissu humain, ou est utilisé chez l’être humain ou administré à celui-ci dans ce but.

(…)

c) sont considérés comme « issus de l’ingénierie cellulaire ou tissulaire » les cellules ou tissus qui répondent à au moins l’une des conditions suivantes :

-          Les cellules ou tissus ont été soumis à une manipulation substantielle, de façon à obtenir des caractéristiques biologiques, des fonctions physiologiques ou des propriétés structurelles utiles à la régénération, à la réparation ou au remplacement recherchés. Les manipulations énumérées à l’annexe I, en particulier, ne sont pas considérées comme des manipulations substantielles,

-          Les cellules ou les tissus ne sont pas destinés à être utilisés pour la (les) même(s) fonction(s) essentielle(s) chez le receveur et chez le donneur ;

(…) »

Les cellules souches embryonnaires subissent des manipulations substantielles, qui ne sont pas énumérées à l’annexe I dudit règlement[840].

Dès lors, le produit fini qui en résulte répond à la définition de médicament de thérapie innovante.

A titre d’exemple, le Comité des thérapies innovantes, mis en place par le règlement précité, a classé comme médicament de thérapie innovante les produits suivants :

-          Les cellules viables de type hépatocytes dérivées de cellules souches embryonnaires humaines destinées au traitement des maladies métaboliques hépatiques congénitales comme le syndrome de Crigler-Naijar 1 et l'insuffisance hépatique aiguë induite par intoxication médicamenteuse telle que le paracétamol, dans une recommandation de classification du 21mars 2016[841] ;

-          Les cellules épithéliales pigmentaires de la rétine dérivées de cellules souches embryonnaires humaines, destinées au traitement de la DMLA et de la dystrophie maculaire de Stargardt, dans une recommandation de classification 17 février 2015[842].

Or, la disposition actuelle du 2° du II de l’article L. 2141-4 du code de la santé publique ne permet l’utilisation des cellules souches embryonnaires dans le cadre de recherches que pour des préparations de thérapie cellulaire.

Pour tenir compte de la nouvelle catégorie de produits que sont les médicament de thérapie innovante et dans la mesure où de plus en plus de recherches utilisent des cellules souches embryonnaires qui ont la caractéristique d’être pluripotentes et peuvent se différencier en de multiples types de cellules, qui peuvent elles-mêmes être transformées en médicaments de thérapie innovante destinés à traiter, prévenir ou diagnostiquer une maladie ou à régénérer, réparer ou remplacer des cellules, des tissus ou des organes humains, il convient de permettre que les cellules souches embryonnaires issues d’embryons ne faisant plus l’objet d’un projet parental puissent être utilisées en tant que médicament de thérapie innovante dans le cadre de recherches impliquant la personne humaine.

2.2. Objectifs poursuivis

2.2.1 La règle nouvelle envisagée par le Gouvernement permettra de mettre fin à la conservation des embryons qui ne font plus l’objet d’un projet parental et sont proposés par les couples concernés à la recherche, mais ne sont pas inclus dans un protocole de recherche après un délai de conservation de cinq ans. Le « stock » d’embryons concernés pourra être régulé à partir du registre des embryons.  

L’article R. 2142-34 du code de la santé publique[843] prévoit, en effet, que tout établissement de santé, tout organisme, tout groupement de coopération sanitaire ou tout laboratoire autorisé à conserver des embryons tienne un registre des embryons sur lequel figure notamment les dates de fécondation et de congélation des embryons ainsi que les informations relatives au devenir de chaque embryon, notamment les dates et résultats de la consultation annuelle des membres du couple sur le maintien de leur projet parental[844].

2.2.2 La règle nouvelle régularisera la situation des centres d’assistance médicale à la procréation qui conservent des embryons à des fins de recherche sans y être autorisées en application de l’article L. 2151-7 du code de la santé publique.

2.2.3 Enfin, les cellules dérivées de cellules souches embryonnaires pourront être utilisés dans des préparations de thérapie cellulaire mais également en tant que médicament de thérapie innovante dans une finalité qui reste thérapeutique.

3.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

3.1.                       Impacts juridiques

La présente mesure aura pour objet de modifier la rédaction de l’article L. 2141-4 du code de la santé publique ainsi que celle de l’article L. 2151-7 du code de la santé publique afin de prévoir que les établissements de santé, laboratoires de biologie médicale et organismes, autorisés par les agences régionales de santé à conserver des embryons dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation, puissent également les conserver à des fins de recherche lorsque ces embryons ont été proposés à la recherche par les couples concernés mais que ces embryons n’ont pas encore été inclus dans un protocole de recherche.

3.2.                       Impacts économiques et financiers

La mesure permettra d’alléger la charge qui pèse sur les centres d’assistance médicale à la procréation en termes de gestion des embryons proposés à la recherche (conservation, traçabilité). Au regard des données disponibles, il n’est pas possible de chiffrer préalablement les économies qu’entraînera la présente mesure.

4.       Consultations et modalités d’application

4.1.                       Consultations

La haute autorité de santé a été consultée. Elle a transmis son avis le 12 juillet 2019.

L’Agence de la biomédecine a été consultée. Elle a rendu son avis le 26 juin 2019.

4.2.                       Modalités d’application

4.2.1.      Application dans le temps

Devenir des embryons surnuméraires proposés par les couples à la recherche et non inclus dans un protocole de recherche  

L’intérêt de cette mesure concerne essentiellement le stock d’embryons donnés à la recherche et non inclus dans un protocole de recherche depuis cinq ans ou plus.

La question pourrait se poser d’un régime transitoire supposant, par exemple, de contacter tous les couples concernés avant de mettre fin à la conservation de leurs embryons.

Mais il n’y a pas lieu de prévoir la rétroactivité de la mesure.

En effet, ces embryons ne font plus l’objet d’un projet parental et les couples qui ont consenti à ce qu’ils soient donnés à la recherche ont indirectement consenti à ce qu’ils soient mis fin à leur conservation puisque tout protocole de recherche conduit à la destruction de l’embryon.

Le Conseil d’Etat, dans son étude précitée[845], conforte cette analyse : « Si une telle option était retenue, il ne serait pas nécessaire de prévoir un régime transitoire pour les embryons actuellement stockés. ».

Par conséquent, une disposition transitoire du projet de loi permet de mettre fin à la conservation des embryons non inclus dans un protocole de recherche depuis cinq ans ou plus.

Elle est assortie de la possibilité de conserver certains embryons qui présenteraient un intérêt spécifique pour la recherche tenant au stade de développement de l’embryon (exemple : embryons congelés ou vitrifiés à un stade précoce de leur développement).

La disposition transitoire prévoit que les établissements autorisés au titre de l’article L. 2142-1 qui conservent des embryons susceptibles de comporter un intérêt particulier pour la recherche tenant au stade de développement de l’embryon, le signalent à l’Agence de la biomédecine qui se prononce sur la poursuite de la conservation, au regard de cet intérêt.

Conservation des embryons proposés à la recherche et non inclus dans un protocole de recherche

La mesure entrera en vigueur le lendemain de la promulgation de la loi.

4.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

4.2.3.      Textes d’application

Un décret en Conseil d’Etat précisera les conditions de consultation des deux membres du couple ou de la femme quant au devenir des embryons.

Un décret en Conseil d’Etat pris après avis de l’Agence de biomédecine fixera les critères d’intérêt mentionnés dans la disposition transitoire.

 


Article 17 Ménager la possibilité d’utilisation des outils de modification ciblée du génome en recherche fondamentale

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1 La recherche sur l’embryon est enserrée dans plusieurs interdits qui figurent au code de la santé publique et au code civil, dont la majorité a été introduite lors de la révision bioéthique du 6 août 2004.

Sont ainsi interdits :

-          Toute intervention ayant pour but de faire naître un enfant génétiquement identique à une autre personne vivante ou décédée (article 16-4 du code civil ; 3ème alinéa et article L. 2151-1 du code de la santé publique) ;

-          La conception in vitro d'embryon ou la constitution par clonage d'embryon humain à des fins de recherche (article L. 2151-2 du code de la santé publique) ; cet article posant concrètement 2 interdits :

-          Toute constitution par clonage d'un embryon humain à des fins thérapeutiques (article L. 2151-4 du code de la santé publique) ;

-          La conception ou la constitution par clonage ou l’utilisation d'embryon humain à des fins commerciales ou industrielles (article L. 2151-3 du code de la santé publique).

Ces interdits sont assortis de sanctions pénales[846].

Par ailleurs, le dernier alinéa de l’article 16-4 du code civil dispose que :

« Sans préjudice des recherches tendant à la prévention et au traitement des maladies génétiques, aucune transformation ne peut être apportée aux caractères génétiques dans le but de modifier la descendance de la personne. »[847]

Ce cadre a été complété lors de la révision bioéthique du 7 juillet 2011 par l’ajout de deux nouveaux interdits portant sur la création d'embryons transgéniques ou chimériques (article L. 2151-2 du code de la santé publique).

Ils résultent de l’adoption, dès le stade de l’examen en commission des affaires sociales du Sénat (première lecture), d’un d’amendement de son rapporteur, M. Alain Milon, visant à compléter l’article L. 2151-2 du code de la santé publique.

1.1.2 En l’absence de débat sur l’introduction de ces nouveaux interdits et de définition des termes utilisés, le rapport de la commission des affaires sociales à l’Assemblée nationale en deuxième lecture[848] participe à éclairer l’objectif et la portée de ces interdits[849].

Dans ce rapport, les embryons transgéniques sont définis comme « des embryons dans le génome desquels une ou plusieurs séquences d’ADN exogène, c’est-à-dire n’appartenant pas à l’embryon lui-même, ont été ajoutées. Cette – ou ces séquences – d’ADN exogène peuvent être d’origine humaine ou animale. Dans tous les cas, il y a modification du patrimoine génétique de l’embryon, puisque l’ADN de celui-ci a été modifié. »

S’agissant des embryons chimériques, le rapport précise : « on désigne par le terme chimères des organismes contenant des cellules d’origine différente, mais sans mélange des matériels génétiques. Cette catégorie recouvre en fait deux réalités différentes :

-          Les embryons auxquels ont été rajoutés, à des stades très précoces, quelques cellules pluripotentes d’origine externe. Cette technique, très employée chez l’animal, permet d’étudier le développement de ces cellules dans l’embryon puisqu’on peut facilement les identifier ;

-          Les cybrides, qui sont des embryons créés en introduisant le noyau d’une cellule somatique humaine dans un ovocyte animal, un choc chimique ou électrique déclenchant ensuite le développement embryonnaire sans fécondation (développement parthénogénétique) »

L’analyse du rapporteur est la suivante :

« La question de savoir si les dispositions de l’article 16-4 du code civil, qui disposent que « nul ne peut porter atteinte à l’intégrité de l’espèce humaine » et que « sans préjudice des recherches tendant à la prévention et au traitement des maladies génétiques, aucune transformation ne peut être apportée aux caractères génétiques dans le but de modifier la descendance de la personne » suffisent à faire obstacle à la création d’embryons transgéniques ne reçoit pas de réponse assurée. En effet, dans la mesure où l’embryon est utilisé dans un travail de recherche et donc détruit à un stade très précoce de son existence, il n’est pas ici question d’une quelconque perpétuation des éventuelles modifications génétiques effectuées sur l’embryon. De plus, la mention « sans préjudice des recherches tendant à la prévention et au traitement des maladies génétiques » n’implique-t-elle pas que des recherches peuvent aboutir à la création d’embryons transgéniques ?

« De la même façon, il n’est pas certain que les dispositions actuelles de l’article L. 2151-2 du code de la santé publique, qui prohibent la constitution par clonage d’embryon humain à des fins de recherche interdisent déjà la constitution de cybrides. Tout dépend en effet de savoir si l’on considère, comme les britanniques, que les embryons cybrides créés sont humains. Le matériel génétique est certes presque entièrement humain mais pas l’ADN des mitochondries de l’ovule, celui-ci n’intervenant toutefois pas dans le développement génétique de l’embryon. »

Il conclut ainsi : « Ces fortes incertitudes militeraient donc plutôt pour l’inscription dans la loi de l’interdiction de la création d’embryons transgéniques ou chimériques. »

1.1.3 La modification ciblée du génome (ou ingénierie du génome)[850] consiste à ajouter, enlever, modifier une ou quelques bases dans une séquence d’ADN. Si la séquence correspond à un gène, la conséquence en sera la modification d’expression de ce gène, soit son « invalidation », soit la modification de la séquence protéique de la protéine qu’il code et dans certains cas le changement d’activité ou de localisation ou de durée de vie ou au contraire la correction d’une fonction altérée, selon le contexte biologique. 

La stratégie n’est pas nouvelle. Une nouvelle technique, CRISPR-Cas9[851], système de défense utilisé par des bactéries contre des virus, est toutefois venue détrôner toutes les autres approches, et ce pour quatre raisons : précision, rapidité, fiabilité, faible coût. Contrairement à d’autres techniques de modification ciblée du génome, elle est applicable relativement facilement par un laboratoire de recherche utilisant déjà des techniques moléculaires.

CRISPR-Cas9 est en quelque sorte un ciseau moléculaire capable d’induire une cassure double brin de l’ADN en un site choisi du génome grâce à une séquence guide (séquence « CRISPR »). Une fois l’ADN coupé très précisément, il est possible d’apporter en cet endroit la modification permettant d’obtenir le résultat poursuivi (invalidation de l’expression du gène ou changement de la séquence du gène, par exemple pour « corriger » une mutation pathologique).

Les applications sont multiples et cette technique est aujourd’hui couramment utilisée pour modifier le génome de cellules somatiques[852] chez l’animal et chez l’homme. Les génomes de cellules souches embryonnaires et de cellules souches pluripotentes reprogrammées (iPS) – y compris humaines - ont déjà également été modifiés par ces systèmes.

Depuis le début de l’année 2015, la discussion principale concerne l’embryon (stade une cellule, zygote) et les cellules germinales (précurseurs de l’ovocyte et précurseurs des spermatozoïdes) puisque toute modification génétique de ces cellules serait transférée à la descendance en cas de transfert in utero de l’embryon modifié.

Pour la suite, la seule question abordée, qui fera l’objet de la mesure, concerne l’application de la nouvelle technologie à l’embryon qui ne fait plus l’objet d’un projet parental[853] (dans le cadre de la recherche). L’application, toujours dans un cadre de recherche, de la technologie aux cellules de la lignée germinale n’aurait d’intérêt que si elle était suivie d’une fécondation de ces cellules. Or, elle aboutirait à la création d’un embryon pour la recherche, franchissant ainsi une ligne rouge[854].

1.1.4 Sans autre précision, le terme de chimère désigne des organismes contenant des cellules d’origines différentes, sans mélange de matériel génétique. Les embryons chimériques sont obtenus par transfert de cellules extérieures au sein d’un embryon avant organogénèse.

Le Conseil consultatif national d’éthique dans son avis n° 129 précise qu’une « chimère » indique la coexistence dans un même organisme de deux types de cellules originaires de deux organismes différents génétiquement (une greffe d’organe ou de cellules par exemple)[855].

Pour la suite, la seule question abordée, qui fera l’objet de la mesure, concerne les embryons humains[856] ne faisant plus l’objet d’un projet parental et conservés dans le cadre de la recherche et l’insertion de cellules d’une autre origine dans ces embryons.

1.2. Cadre conventionnel

La Convention pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine ou Convention d’Oviedo, signée le 4 avril 1997 et ratifiée le 13 décembre 2011 par la France, dispose, dans son article 13, que :

« Une intervention ayant pour objet de modifier le génome humain ne peut être entreprise que pour des raisons préventives, diagnostiques ou thérapeutiques et seulement si elle n'a pas pour but d'introduire une modification dans le génome de la descendance. »

1.3. Éléments de droit comparé

1.3.1 Modification ciblée du génome[857] 

C’est en Chine, où la législation est plus permissive, que, pour la première fois en 2015, six embryons humains ont été modifiés génétiquement, à l’aide du système CRISPR-Cas9[858], dans le cadre d’un projet de recherche. L’expérimentation a porté sur des embryons fécondés non viables (détruits au bout de deux jours) et visait à modifier le gène responsable d’une maladie du sang. Ces travaux avaient été validés par un comité local d’éthique et subventionnés par le ministère chinois de la Science et de la Technologie.

Le 1er février 2015, le Royaume-Uni, qui n’a pas ratifié la convention d’Oviedo, a autorisé pour la première fois des manipulations génétiques d’embryons humains à des fins de recherche avec l’utilisation de la même méthode CRISPR-Cas9. La Human Fertilisation and Embryology Authority britannique a ainsi délivré une autorisation à un projet de recherche fondamentale visant à inactiver un gène impliqué dans le développement embryonnaire précoce sur des embryons humains cédés à la recherche. Cette étude a fait l’objet d’une publication dans la revue Nature en septembre 2017.

Un projet utilisant la technique CRISPR-Cas 9 sur l’embryon humain a été autorisé en Suède, après avis favorable du Comité d’éthique de l’Institut Karolinska.

Aux Etats-Unis, une équipe de chercheurs internationaux a publié en août 2017 les résultats d’une étude utilisant la technique de CRISPR-Cas9 chez l’embryon humain. L'expérience a consisté à corriger, chez 58 embryons, une mutation génétique directement liée à la survenue d'une pathologie cardiaque, la cardiomyopathie hypertrophique. Les résultats ont fait l’objet d’une polémique étant donné le très faible taux d’erreurs constaté, comparé aux expériences ci-dessus.

Les premiers nouveaux-nés dont l’ADN a été manipulé à un stade très précoce après fécondation in vivo sont nés en Chine en novembre 2018, fruit d’expériences menées par M. He Jiankui (un troisième enfant est attendu au printemps 2019). Au-delà de leur caractère évidemment disruptif, ces travaux ont immédiatement provoqué un tollé dans la communauté scientifique internationale, car de nombreuses précautions élémentaires, à la fois techniques et éthiques, ont en outre été négligées. Ils ne peuvent se placer dans la perspective de l’évolution des recherches en cours et sembleraient plutôt relever d’une initiative individuelle aux motifs scientifiques incertains.

Une carte permettant de visualiser au niveau international les régimes juridiques s’appliquant aux techniques de modification ciblée du génome a été établie en août 2015[859]. Elle a été reproduite et commentée dans un document de l’Inserm dont elle extraite[860].

Législation internationale comparée.

-          Rouge : pays interdisant par la loi toute modification de la lignée germinale.

-          Rose : pays où l’interdiction est l’objet d’une recommandation (guidelines).

-          Gris clair : pays avec une règlementation restrictive.

-          Gris sombre : pays où la réglementation est ambiguë.

A noter que la Grande-Bretagne ici indiquée en rouge a adopté une législation en 2015 autorisant une sorte de modification de la lignée germinale comme conséquence du don de mitochondries.

1.3.2 Chimères[861]

Parmi les pays interdisant la création de chimères peuvent être cités : Belgique, Canada, Corée du Sud, Nouvelle-Zélande ;

Parmi les pays autorisant la création de chimères, peuvent être mentionnés : Danemark, Royaume-Uni, États-Unis, Inde, Japon, Chine ;

La création de chimères animales est autorisée au Danemark si elle a pour objectif de faire progresser les connaissances de la thérapie médicale et sous réserve d’obtenir une autorisation préalable délivrée par un comité spécialisé ;

Le Royaume-Uni a été le premier pays au monde à légaliser cette pratique qui doit néanmoins être nécessaire et indispensable pour être autorisée. Le Human Fertilization and Embryology Act a de nouveau été révisé en 2008, apportant en particulier des précisions sur la notion d’embryons chimériques comme les hybrides cytoplasmiques (noyaux humains placés dans des ovocytes animaux énucléés) sur lesquels des recherches peuvent être autorisées.

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1 L’interdiction de création d’embryons transgéniques et chimériques est devenue incohérente au regard de l’avancée des techniques.

Les notions d’embryons transgéniques et chimériques n’ont pas été définies par le législateur.

Il ressort des précisions qui figurent dans le rapport de la Commission des affaires sociales précité que l’interdiction figurant au deuxième alinéa de l’article L. 2151-2 du code de la santé publique  La création d'embryons transgéniques (…) est interdite. ») viserait à interdire l’ajout de séquences d’ADN exogènes dans le génome d’un embryon humain y compris dans le cadre des recherches prévues à l’article L. 2151-5 du code de la santé publique, c’est-à-dire suivies d’une destruction de l’embryon[862].

S’agissant de l’interdit portant sur la création d’embryons chimériques, il interdirait notamment l’ajout de cellules exogènes à un embryon humain dans le cadre des recherches prévues à l’article L. 2151-5 du code de la santé publique.

Dans son bilan d’application de la loi de bioéthique, l’Agence de la biomédecine indique « La loi interdit la création d'embryons transgéniques ou chimériques, sans définir ces notions, alors qu’en quelques années, on a assisté à un bouleversement des connaissances et techniques, notamment en matière de génétique. L’instruction de dossiers de demandes d’autorisation peut conduire l’Agence à s’interroger sur l’interprétation de ces notions. Pour des raisons tant éthiques que de sécurité juridique, il conviendrait de clarifier ce que recouvrent ces notions et ce que le législateur entend prohiber. »[863]

Dans son avis n° 129, le Comité consultatif national d’éthique analyse que ces interdits « concernent des approches expérimentales précises (embryons transgéniques, embryons chimériques) » mais que « leur libellé – qui utilise des termes scientifiquement très précis - n’est plus interprétable dans le contexte scientifique actuel. »[864]

Ainsi, poursuit-il, le terme « transgénique » a une signification très précise – qui est l’introduction dans le génome d’une séquence d’ADN étrangère à l’organisme concerné. Or, la technique de modification ciblée du génome inclut la transgenèse mais ne s’y limite pas. La loi n’est donc pas explicite sur l’utilisation possible d’un tel outil en recherche.

Le Conseil d’Etat, dans son étude, confirme en tout point cette lecture. Il admet tout d’abord que « Cette notion (embryons transgéniques) est – sur le plan scientifique – claire : elle désigne des embryons dans le génome desquels une ou plusieurs séquences d’ADN exogène, cest-à-dire n’appartenant pas à l’embryon, ont été ajoutées ». Il analyse que le législateur en 2011 a bien entendu reprendre cette définition. Mais, ajoute-t-il, cette définition se heurte désormais à l’évolution des techniques. En effet, ainsi compris, cet interdit s’applique à l’édition génique qui aurait pour objet de remplacer et/ou d’insérer une nouvelle séquence d’ADN mais ne fait pas obstacle aux recherches ayant pour objet exclusif de supprimer ou d’inactiver un fragment du génome. Il conclut donc à l’incohérence de cet interdit, devenu asymétrique au regard de l’avancée des techniques[865].

Le rapporteur de la mission d’information de l’Assemblé nationale relève également cette incohérence : « Le droit autorise actuellement la suppression de certains gènes pathologiques mais non leur modification ou leur remplacement. »[866]

2.1.2 L’article 13[867] de la Convention d’Oviedo (interventions sur le génome humain) comme l’article 16-4[868] du code civil ne s’opposent pas à une utilisation des outils de modification ciblée du génome dès lors qu’elle reste cantonnée à la recherche.

Le rapport explicatif de la Convention d’Oviedo permet d’expliciter la portée de l’article 13[869].

Il expose d’abord que « La principale inquiétude est que l'on arrive un jour à modifier intentionnellement le génome humain afin de produire des individus ou des groupes entiers dotés de caractéristiques particulières et de qualités souhaitées. »

Il précise que « Dans tous les cas, toute intervention ayant pour objet de modifier le génome humain doit avoir une raison préventive, diagnostique ou thérapeutique ». Et donc se rattacher à une maladie ou à une affection.

Il pose ensuite que « Les interventions ayant pour but d'introduire une modification dans le génome de la descendance sont interdites. Sont donc prohibées en particulier les modifications génétiques des spermatozoïdes ou des ovules destinés à la fécondation. »

Puis, ayant posé cette interdiction de modifications du génome dès lors que la naissance d’un enfant amené à les transmettre à son tour est envisagé, il précise que cette interdiction ne s’applique pas à « la recherche médicale ayant pour but d'introduire des modifications génétiques dans des spermatozoïdes ou des ovules non destinés à la fécondation » à condition de disposer de « l'approbation d'un comité d'éthique ou de toute autre instance compétente. »

Le Conseil d’Etat confirme que les stipulations de l’article 13 de la convention d’Oviedo ne s’opposent pas à une utilisation des outils de modification du génome nécessairement cantonnée à la recherche puisqu’opérer des modifications génétiques transmissibles à la descendance est interdit.[870]

Le Comité consultatif national d’éthique confirme dans son avis n 129[871] que « le Code civil et la convention d’Oviedo[872], dans leur libellé actuel, ne s’opposent pas aux modifications du génome dans certaines indications de recherche, mais les assortissent de restrictions de finalité ».

A cet égard, il est noté que si l’article 13 de la Convention précise qu’une « intervention ayant pour objet de modifier le génome humain ne peut être entreprise que pour des raisons préventives, diagnostiques ou thérapeutiques », l’article 16-4 du code civil évoque les « recherches tendant à la prévention et au traitement des maladies génétiques ». Or le champ visé est bien le même : celui de la finalité médicale (qui comprend la prévention, le diagnostic et le traitement) et concerne toute affection (au-delà des maladies génétiques).

2.1.3 Les modifications du génome dans le cadre d’un protocole de recherche (où tout transfert ultérieur de l’embryon in utero est interdit) et celles qui impliqueraient la modification du patrimoine génétique de la descendance (dans un but thérapeutique) si l’embryon modifié était transféré in utero dans le but de faire naitre un enfant doivent être distinguées.

L’académie de médecine[873] si elle ouvre la porte à une utilisation de la technique chez l’embryon à des fins de recherche, souligne l’importance d’interdire toute modification du génome nucléaire à visée reproductive dans l’espèce humaine[874].

Le comité d’éthique de l’Inserm est sur la même ligne[875]. S’il préconise d’« Encourager une recherche dont l’objectif est d’évaluer l’efficacité et l’innocuité de la technologie CRISPR et des autres technologies d’édition du génome récemment publiées, dans des modèles expérimentaux pouvant permettre au cas par cas de déterminer la balance bénéfice/risque d’une application thérapeutique y compris éventuellement sur des cellules germinales et l’embryon. Cette information est essentielle pour pouvoir définir, dans le futur, ce qui pourrait être autorisé chez l’homme en termes d’approches thérapeutiques. », il recommande également de « Respecter l’interdiction de toute modification du génome nucléaire germinal à visée reproductive dans l’espèce humaine, et n’appuyer aucune demande de modification des conditions légales avant que les incertitudes concernant les risques ne soient clairement évaluées, et avant qu’une concertation élargie incluant les multiples partenaires de la société civile n’ait statué sur ce scénario. ».

2.1.4 L’utilisation des techniques de modification ciblée du génome présente un intérêt fondamental pour la recherche.

Cette technologie suscite des espoirs immenses que la recherche doit confirmer.

Il existe un large consensus international pour au minimum attendre, avant d’envisager tout transfert in utero d’embryons ainsi modifiés, l’obtention d’un corpus solide de connaissances quant aux conditions d’utilisation de ces techniques (innocuité,  réflexions éthiques, bonnes pratiques). En revanche, leur intérêt en recherche fondamentale (sur des embryons destinés à être détruits), notamment pour étudier le rôle d’un gène particulier dans le développement d’un organisme ou dans le fonctionnement d’un organe est confirmée dans tous les pays.

Ainsi, toute recherche sur l’embryon peut avoir un intérêt à utiliser cette technologie dès lors qu’elle implique la modulation de l’activité d’un gène ou le marquage/traçage des cellules issues de l’embryon.

Lors de l’atelier « Recherche sur l’embryon et cellules souches embryonnaires » organisé par le Comité consultatif national d’éthique le 15 mai 2018, il a été précisé : « Sur le plan scientifique, il est évident que l’on a besoin de connaissances accrues sur le développement de l’embryon humain, notamment dans les étapes précoces. (…) Une recherche scientifique fondamentale apporterait des connaissances capitales sur les premières étapes du développement, sur le rôle spécifique de certains gènes et de leurs cibles. Ceci devrait permettre la mise au point de l’édition du génome avec fiabilité, avant d’espérer une utilisation thérapeutique qui pourrait trouver sa légitimité dans les maladies héréditaires monogéniques graves, dans les cas où le DPI est impossible, et pour guérir certaines stérilités, notamment masculines, puisque l’on dispose de plus en plus d’un panel de gènes mis en cause »[876]

La société française de thérapie cellulaire et génique (SFTCG), si elle refuse d’entrevoir « toute application médicale de l’édition du génome embryonnaire et germinal, via notamment CRISPR-Cas9, en l’état actuel des connaissances »[877], estime nécessaire de pouvoir procéder à des activités de recherche fondamentale sur ces mêmes embryons à l’aide de stratégies similaires[878].


2.1.5 Le maintien d’un interdit, même mal calibré, serait préjudiciable à la recherche française.

Les interdits actuels ne permettent pas aux équipes françaises, pourtant d’un niveau internationalement reconnu, de travailler sur les derniers développements de la recherche sur l’embryon, porteurs de grandes promesses aux niveaux cognitif mais aussi thérapeutique.

En France, moins de dix équipes de recherche travaillent sur l’embryon humain. C’est trois fois moins qu’en Belgique. Faute de pouvoir utiliser la technique, les équipes françaises seront disqualifiées et mettront un terme à tous leurs travaux.

Certaines recherches vont se développer rapidement dans d’autres pays : le développement des solutions techniques et thérapeutiques (notamment dans le domaine des maladies génétiques) - qui doivent encore être confirmées mais qu’il est légitime d’attendre de ces recherches, va échapper à la France avec des conséquences possibles en termes d’accès des patients français à ces futures avancées. La puissance de la technique CRISPR-Cas9 en terme d’accès à la connaissance des modalités de développement de l’embryon précoce, par exemple, mettra hors-jeu les équipes de recherche ne pouvant pas l’utiliser.[879]

Il est indispensable de revitaliser le domaine de la recherche en France, pour lequel il existe une forte compétence insuffisamment mise à contribution.

Les enjeux de compétitivité de la France dans ce domaine sont majeurs.

Au regard des éléments de débat ci-dessus détaillés, le Gouvernement considère que la possibilité d’utilisation des outils de modification ciblée du génome doit être clarifiée et autorisée en recherche fondamentale - c’est-à-dire à l’exclusion de tout essai clinique et de tout risque de transmission des caractéristiques modifiées.

2.1.6 Une clarification s’impose en ce qui concerne la constitution de chimères à partir d’un embryon humain.

La modification d’un embryon humain par adjonction de cellules provenant d’autres espèces doit être explicitement interdite.

L’ajout de cellules humaines ne provenant pas de cet embryon présente un intérêt dans le cadre de la recherche, particulièrement sur la qualification de nouveaux types de cellules pluripotentes, domaine de pointe en fort développement où certaines équipes françaises excellent, et doit être poursuivi (étant rappelé que l’embryon est détruit à l’issue de la recherche).

2.2.                       Objectifs poursuivis

La règle envisagée par le Gouvernement aura pour objet

-          De clarifier des termes qui figurent dans le code de la santé publique mais ne sont plus intelligibles dans le contexte scientifique actuel ;

-          De sécuriser les autorisations de recherche délivrées par l’Agence de la biomédecine (l’instruction de dossiers de demandes d’autorisation a déjà conduit l’agence à s’interroger sur l’interprétation de ces notions) ;

-          De permettre la présence des équipes françaises dans la compétition internationale pour le bénéfice, à terme, des patients français.

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1 Modification ciblée du génome

Ainsi que l’a précisé le Conseil d’Etat dans son étude précitée de 2018, si le législateur entend autoriser les recherches relatives à la modification ciblée du génome appliquée à l’embryon, l’interdit instauré en 2011, par souci de cohérence, « gagnerait à être levé » (pour les recherches autorisées en application de l’article L. 2151-5 du code de la santé publique).

Le Gouvernement supprime donc l’interdit introduit en 2011. L’article 16-4 du code civil suffit à lui seul pour faire obstacle à toute expérimentation visant la transformation des caractères génétiques dans le but de modifier la descendance.

3.2 Chimères

 

L’interdiction de création d’embryon chimérique continue à s’appliquer dès lors qu’elle concerne la modification d’un embryon humain par adjonction de cellules provenant d’autres espèces.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

La règle nouvelle :

-          Supprimera les deux interdits mentionnés par l’article L. 2151-2 du code de la santé publique devenus inintelligibles (« La création d'embryons transgéniques ou chimériques est interdite. ») ;

-          Remplacera l’interdiction de création d’embryons chimériques par l’interdiction de la modification d’un embryon humain par adjonction de cellules provenant d’autres espèces ;

-          Mettra en cohérence l’article 16-4 du code civil avec l’article 13 de la Convention d’Oviedo.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

A long terme, si l’enjeu économique des applications de cette technologie est certain (en particulier dans le domaine végétal et animal), les impacts économiques de leur utilisation sur l’embryon sont plus sujets à question et restent liés aux progrès technologiques, mais aussi éthiques apportés aux questions actuelles.

4.3.                       Impacts sur les services administratifs

La clarification des interdits va sécuriser les autorisations délivrées par l’Agence de la biomédecine, permettant d’éviter de longs et couteux contentieux et de prévenir un effet de censure de la part des chercheurs.

4.4.                       Impacts sur les particuliers

Les progrès apportés par l’utilisation des outils de modification ciblée du génome en matière de recherche sur l’embryon, en particulier concernant l’étude du développement de l’embryon précoce, sont susceptibles de modifier les pratiques d’assistance médicale à la procréation (utilisation de milieux de culture par exemple, ou stade de congélation de l’embryon) au bénéfice des personnes concernées.

5.       consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a transmis son avis le 12 juillet 2019.

L’Agence de la biomédecine a été consultée (avis du 26 juin 2019).

5.2.                       Modalités d’application

La mesure est mise en application le lendemain de la promulgation de la loi.

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.


Article 18 Encourager les « passerelles soin/recherches » par l’utilisation facilitée d’échantillons conservés à d’autres fins

1.             État des lieux

1.1. L’article 16-10 du code civil[880] prévoit le recueil d’un consentement exprès (par écrit) pour tout examen des caractéristiques génétiques d’une personne. 

Toutefois, dans le cadre de la recherche, l’article L. 1131-1-1 du code de santé publique[881] prévoit que l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne à des fins de recherche scientifique peut être réalisé à partir d'éléments du corps de cette personne prélevés à d'autres fins, lorsque cette personne, dûment informée de ce projet de recherche, n'a pas exprimé son opposition.

L’article L. 1131-1-1 du code de santé publique a été introduit par amendement au cours de l’examen par le Sénat de la proposition de loi dite JARDE (loi n°2012-300 du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine). Il est entré en vigueur en novembre 2016 à la suite de la publication du décret n° 2016-1537 du 16 novembre 2016.

Le régime allégé de consentement est fondé sur une absence d’opposition de la personne aux nouvelles finalités d’utilisation de ses échantillons biologiques en cours de conservation moyennant une information préalable de cette personne. Seule l’impossibilité de retrouver la personne peut faire obstacle à cette obligation d’information. Dans ce cas, le comité de protection des personnes[882] s’assure que « la personne ne s’était pas opposée à l’examen de ses caractéristiques génétiques » et émet un avis sur l’intérêt scientifique de la recherche.

1.2. Il convient de rappeler que la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique avait complété le régime juridique des prélèvements d’éléments du corps humain ou de collecte de ses tissus (régime de consentement préalable) prévu à l’article L. 1211-2 du code de la santé publique[883], en encadrant juridiquement l’utilisation en vue d’une fin médicale ou scientifique autre que celle pour laquelle les éléments ou produits ont été prélevés ou collectés.

Le régime juridique ainsi prévu était fondé non plus sur le principe de l’autorisation expresse mais sur la possible opposition exprimée par la personne préalablement informée de cette nouvelle finalité.

Toutefois, les dispositions de cet article n’étaient pas applicables dans le cas d’une utilisation ultérieure portant sur les caractéristiques génétiques des éléments conservés. Cette utilisation demeurait, en effet, soumise aux dispositions de l’article 16-10 du code civil (régime du consentement exprès préalable). 

Dans son étude préparatoire à la révision de la loi de bioéthique de 2011[884], considérant que la situation était préjudiciable pour la recherche, le Conseil d’État avait suggéré d’instituer un régime propre à l’utilisation ultérieure des éléments portant sur les caractéristiques génétiques des éléments conservés : régime d’information avec possibilité d’opposition auquel il ne pourrait être dérogé qu’en cas d’impossibilité de retrouver les personnes concernées avec précision sur les modalités d’informations dans le cas où les résultats de la recherche devraient être portés à la connaissance des intéressés. Il s’agissait ainsi de transposer l’article L. 1211-2 du code de la santé publique.

Cette suggestion du Conseil d’État n’a pas trouvé sa traduction juridique dans la loi bioéthique n°2011-814 du 7 juillet 2011, mais dans celle du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine.

1.3. La loi n° 94-548 du 1er juillet 1994 relative au traitement des données nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés a complété cette dernière en créant un chapitre consacré aux traitements informatisés de données nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé. Au sein de ce nouveau chapitre, le dispositif prévoyait l’obligation de recueillir le consentement éclairé et exprès des personnes préalablement à la mise en œuvre d’un traitement automatisé de données ayant pour fin la recherche dans le domaine médical, dans le cas où cette recherche nécessite le recueil de prélèvements biologiques identifiants.

L’article 8 de la loi du 6 janvier 1978 susmentionnée pose le principe de l’interdiction de tout traitement de données génétiques, au même titre que les données biométriques ou les données de santé. Seul le consentement exprès permet d’y déroger compte tenu de la finalité de la recherche[885].

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a d’abord considéré que les dispositions de l’article L. 1131-1-1 du code de la santé publique devaient être interprétées conformément à la Loi Informatique et libertés qui prévoit un consentement éclairé et exprès avant tout recueil de prélèvements biologiques identifiants[886].

Une telle interprétation contredisait celle figurant dans les travaux préparatoires à la loi du 5 mars 2012 et celle du Conseil d’État dans son étude de 2009[887].

La loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles a finalement expressément prévu, dans son article 16, que pour les recherches réalisées en application de l’article L. 1131-1-1 du code de la santé publique, le principe du consentement préalable ne s’applique plus.

Ainsi l’article 75 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, modifiée par la loi n°2018-493 du 20 juin 2018, dispose que :

« Dans le cas où la recherche nécessite l'examen des caractéristiques génétiques, le consentement éclairé et exprès des personnes concernées doit être obtenu préalablement à la mise en œuvre du traitement de données. Le présent article n'est pas applicable aux recherches réalisées en application de l'article L. 1131-1-1 du code de la santé publique. »

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1. Les dispositions encadrant l’examen des caractéristiques génétiques à des fins scientifiques sont contraignantes à l’égard des recherches génétiques envisagées sur des collections d’échantillons biologiques existantes[888], constituées à partir d’échantillons prélevés dans le cadre du soin ou de la recherche (sur une maladie donnée par exemple).

En effet, le texte en vigueur prévoit que la personne « dûment informée [du] projet de recherche, n'a pas exprimé son opposition ».

Cette formulation, qui vise à respecter les impératifs éthiques et à protéger la personne dans le domaine de la génétique, n’est pas de nature à encourager la recherche. Elle suppose, en effet, de revenir vers la personne pour tout projet de recherche – ce qui est impossible en pratique.

Elle complexifie la lisibilité de la réglementation applicable aux collections d’échantillons biologiques en recherche qui sont soumises à l’article L. 1243-3[889] du code de la santé publique (déclaration de préparation, conservation et constitution de collections d’échantillons pour les besoins de programmes de recherche – étant précisé que le terme « programme » est plus large que celui de « projet »).

Cette difficulté prend une acuité particulière dans le cadre du plan France médecine génomique 2025[890] soutenu par le Gouvernement et dont les enjeux pour la médecine de demain sont majeurs. 

La question posée est celle du consentement éclairé de la personne dans ce domaine et du degré de précision avec lequel doit lui être exposée la finalité poursuivie. Il s’agit de concilier le droit à l’information des intéressés avec les nécessités de la recherche alors même que l’intérêt au plan scientifique et, à plus long terme, thérapeutique de mener de telles recherches apparait majeur.

Le Gouvernement a donc décidé d’élargir, de façon maîtrisée et notamment en l’assortissant de nouvelles garanties, la portée de la non opposition de la personne à l’utilisation de ses échantillons biologiques en cours de conservation.

2.1.2. Par ailleurs, la notion de « personne non retrouvée » qui figure à l’article L. 1131-1-1 du code de la santé publique est également sujette à interprétation. Certains considèrent que les personnes décédées relèvent de ce champ alors que pour d’autres la réalisation d’un examen de génétique après le décès d’une personne contrevient à l’article 16-10 du code civil et relève de l’article 226-25 du code pénal[891], ce qui crée une insécurité juridique pour les chercheurs.

L’enjeu est important dans la mesure où les collections d’échantillons biologiques en cours de conservation peuvent être anciennes et concerner des personnes, pour partie, décédées.

2.1.3. Les solutions envisagées par le Comité consultatif national d’éthique et le Conseil d’Etat concernent les données génétiques (obtenues après recherche) et le consentement lié à l’utilisation de ces données (et non directement la question du consentement à l’utilisation des échantillons en cours de conservation qui est encadré à l’article L. 1131-1-1 du code de la santé publique).

Elles sont toutefois résumées ci-après.

Constatant dans son avis n° 129[892] que « De plus en plus de projets de recherches ont besoin de données massives génomiques afin de répondre à des questions scientifiques et/ou médicales » et que « Les consentements éclairés actuels sont très restrictifs sur les objectifs des études et sur les méthodologies utilisées pour atteindre cet objectif » le Comité consultatif national d’éthique propose « la rédaction de consentements éclairés élargis qui mentionnent de façon explicite les objectifs de la collecte des données en ne ciblant plus une maladie donnée (celle pour laquelle la personne participe initialement) mais un ensemble de projets de recherche qui recevront des accords de comités d’éthique. ». Il ajoute que « Cette mise à disposition des données plus élargie nécessite une instance assurant la sécurité des données, ainsi que l’évaluation et le suivi des projets. » 

Dans son étude bioéthique[893], le Conseil d’Etat note que les données génétiques ont vocation à être utilisées pour de multiples recherches, qui n’étaient pas nécessairement anticipées au moment où l’individu a consenti à ce que ses données soient collectées : « Le dilemme ainsi noué oppose ce qui se présente comme deux exigences contradictoires – à savoir, respecter les impératifs éthiques d’une part, et encourager les nouvelles pratiques scientifiques, d’autre part ».

Le Conseil d’Etat considère que « La résolution de ce dilemme suppose de définir ce qu’est, en matière de données génétiques, un consentement éclairé, et le degré de précision avec lequel doit être exposée la finalité poursuivie. ».

Il exclut un « consentement général » donné une fois pour toutes (« Un champ aussi large, peu protecteur, apparaît contradictoire avec les dispositions du code civil, qui exige que le consentement soit donné après que la personne a été « dûment informée » de la nature et de la finalité de l’examen. ») et estime que les conditions ne sont pas réunies pour un « consentement en continu » permettant aux individus de valider, projet de recherche par projet de recherche, la réutilisation de leurs données (« Un tel consentement dynamique (…) présuppose toutefois la mise en place de plateformes dédiées et l’implication pérenne des personnes dont les données sont recueillies - deux conditions non réunies en l’état »).

Le Conseil d’Etat évoque la piste d’un « consentement par délégation » : une fois le consentement initial obtenu pour une finalité précise, la possibilité de réutiliser les données de l’individu serait subordonnée à l’avis d’un « courtier honnête » qui pourrait être un comité de protection des personnes et au respect par le protocole de recherche d’exigences renforcées. Le Conseil d’État estimerait dans cette hypothèse nécessaire, « d’une part, de permettre aux personnes concernées de fixer, lors de l’expression de leur consentement initial, des « lignes rouges » (…) et, d’autre part, de les mettre en mesure d’accéder à une information claire et permanente sur les utilisations de leurs données afin qu’elles puissent exercer, à tout moment, leur droit de retrait. »

2.2.                       Objectifs poursuivis

La mesure a pour objet de faciliter la recherche nécessitant des examens de génétique sur des collections d’échantillons biologiques conservés en desserrant le périmètre du consentement donné par la personne tout en assortissant cet assouplissement de garanties au bénéfice de la personne.

Elle permettra également de prévoir une articulation réaliste et protectrice en matière de retour vers la personne (en cas d’informations utiles pour sa santé), d’expliciter la notion de personne « non retrouvée » et, plus globalement, de clarifier l’article.

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1. Le Gouvernement substitue à la notion de « projet de recherche » celle de « programme de recherches » en précisant la définition d’un programme de recherche comme un ensemble d’activités de recherche organisées en vue de faciliter et d’accélérer les découvertes dans un domaine scientifique déterminé.

Une possibilité de contrôle permanent de la mise en application de la nouvelle règle est décidée par le Gouvernement qui prévoit que le ministre chargé de la recherche et, pour les organismes relevant de sa compétence, le directeur général de l'agence régionale de santé peuvent demander à tout moment à l'organisme de recherche des informations leur permettant de s'assurer que les activités sont bien poursuivies dans le respect des dispositions en vigueur et notamment de celles prévues par le nouvel article L. 1130-5 du code de la santé publique.

Toujours dans l’objectif de sécuriser l’ouverture de la portée du consentement de la personne, un décret fixe les modalités d’information des personnes et celles permettant l’expression de leur opposition.

3.2. Plusieurs clarifications et précisions sont apportées aux dispositions en vigueur

-          Les missions des comités de protection des personnes sont explicitées lorsque la personne ne peut être retrouvée ou qu’elle est décédée ou qu’elle est hors d’état d’exprimer sa volonté ;

-          Les limites de l’opposition de la personne à l’utilisation de ses échantillons en cours de conservation (après qu’elle ne s’y est pas opposée) sont précisées (tant qu’il n’y a pas eu de manipulation de l’élément concerné en raison de la recherche) ;

-          Les modalités d’information et de retour vers la personne en cas de découverte de caractéristiques génétiques pouvant être responsable d'une affection grave justifiant de mesures de prévention ou de soins à son bénéfice sont détaillées ; il est ainsi précisé que , le cas échéant, ces caractéristiques sont confirmées par un laboratoire autorisé en génétique moléculaire ;

-          Les modalités de consentement sont précisées lorsqu’il s’agit de mineurs ou de majeures protégés.

3.3. S’agissant de l’utilisation des données, aucun changement sur le fond n’est opéré. Dans le champ de l’article 16-10 du code civil, la personne doit donner son consentement éclairé et exprès préalablement à la mise en œuvre du traitement de données. Dans le champ du nouvel article L. 1130-5 du code de la santé publique, la personne, dument informée, peut s’opposer à la mise en œuvre du traitement de données.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

4.1.1.      Impacts sur l’ordre juridique interne

Un nouveau chapitre préliminaire sera créé au Titre Ier du Livre III de la Ière partie du code de la santé publique.

La présente mesure créera l’article L. 1130-5 qui modifiera l’article L. 1131-1-1 du code de la santé publique (certaines dispositions en vigueur sont clarifiées et d’autres sont modifiées).

Elle modifiera également l’article L. 1243-3 du code de la santé publique notamment pour définir un programme de recherches.

Enfin, elle ajustera l’article 75 de la loi  78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, remplaçant la référence à l’article L. 1131-1-1 par la référence à l’article L. 1130-5 créé

4.1.2.      Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

La recommandation de 2004 du Comité des ministres aux Etats membres sur la recherche utilisant du matériel biologique d’origine humaine[894] prévoit dans son Chapitre VI des dispositions analogues[895].

4.2.                       Impacts sur les services administratifs

La mesure prévoit que, lorsque la personne ne peut être retrouvée, qu’elle est décédée ou qu’elle est hors d’état d’exprimer sa volonté et qu’en conséquence il est impossible de procéder à son information, un comité de protection des personnes est saisi par le responsable de la recherche scientifique. Il évalue les éléments justifiant de la situation (impossibilité d’information de la personne). Il se prononce sur l’opportunité de l’examen des caractéristiques génétiques de la personne au regard de cette situation ainsi que sur la pertinence éthique et scientifique de la recherche.

Les dispositions actuelles prévoient déjà l’intervention d’un comité de protection des personnes lorsque la personne ne peut pas être retrouvée. Le comité doit alors s’assurer que la personne ne s'était pas opposée à l'examen de ses caractéristiques génétiques et émettre un avis sur l'intérêt scientifique de la recherche.

En 2018 (données non disponibles avant), il y a eu 9 dossiers de dérogation à l’obligation d’information soumis à un comité de protection des personnes mais ils concernent globalement les situations visées aux articles L.1211-2 et L.1131-1-1 du code de la santé publique (sans distinction possible). Trois dossiers ont été soumis depuis 2019.

L’impact pour les comités de protection des personnes n’est donc pas significatif et n’a aucune raison de le devenir.

5.       Consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

La Commission nationale des recherches impliquant la personne humaine a été consultée. Elle a transmis son avis le 4 juillet 2019.

La commission nationale de l’informatique et des libertés a été consultée. Sa délibération date du 11 juillet 2019.

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

5.2.                       Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La mesure sera mise en œuvre dès la publication du décret prévu en infra. Dans l’attente, les dispositions en vigueur continuent à s’appliquer.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret fixera les modalités d’information des personnes et celles permettant l’expression de leur opposition.

 


Article 19 Reconnaître la médecine fœtale et rénover la définition du diagnostic prénatal

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1. Le diagnostic prénatal trouve une assise juridique au I de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique qui dispose que

« I. Le diagnostic prénatal s'entend des pratiques médicales, y compris l'échographie obstétricale et fœtale, ayant pour but de détecter in utero chez l'embryon ou le fœtus une affection d'une particulière gravité. »

La succession d’étapes de la « démarche de diagnostic prénatal », qui va de l’identification d’un risque au diagnostic d’une pathologie fœtale relevant, le cas échéant, d’une interruption de grossesse pour raison médicale en passant par les phases de confirmation diagnostique et de précision pronostique, ainsi que les modalités d’information et de recueil du consentement de la femme enceinte tout au long de ce parcours sont précisées aux points II, III, IV, V et VI suivants du même article[896].

1.1.2. Ces dernières années ont vu l’avènement de nouvelles techniques en médecine et en chirurgie qui ont notamment permis d’envisager la chirurgie autrement que par un abord direct (« à ciel ouvert ») avec exposition du champ opératoire au chirurgien.

L’essor de l’endoscopie et de la chirurgie micro-invasive a permis d’immenses progrès tant dans le diagnostic que dans la thérapie, et ce dans tous les domaines de la médecine (cardiologie, orthopédie, gynécologie…). La haute précision des examens d’imagerie a permis au praticien de surveiller l’évolution des pathologies de manière non invasive et de documenter les facteurs influençant le processus évolutif. Cette évolution a touché toutes les spécialités médicales, y compris celles qui concernent le domaine prénatal où, par exemple, l’échographie obstétricale et fœtale permet d’obtenir des images du fœtus in utero en temps réel et en haute définition.

Ces progrès concernent également l’amélioration des connaissances en matière d’évolution des malformations pendant la vie fœtale.

La majorité des pathologies fœtales évolue lentement au cours de la grossesse sans mettre en jeu le pronostic vital du fœtus. Dans ces conditions, la prise en charge consiste, d’une part, à établir le diagnostic pour pouvoir informer les parents sur le pronostic prévisible pendant la grossesse et la période néonatale (voire à plus long terme) et, d’autre part, à surveiller l’évolution de la pathologie et à préparer la naissance et l’accueil du nouveau-né dans une structure adaptée.

Depuis 2013, l’Agence de la biomédecine rend compte des grossesses poursuivies avec une pathologie sans particulière gravité au moment de la prise en charge en plus des grossesses poursuivies avec une pathologie fœtale curable dans la perspective d’une prise en charge périnatale[897]. Cette catégorie porte donc globalement sur toutes les grossesses poursuivies dans la perspective d’une prise en charge périnatale, ou avec des pathologies sans particulière gravité au moment de l’examen du dossier par le centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal.

Pour quelques pathologies bien définies (cœlosomies[898], fentes labiales ou labio-palatines, pieds bots, hernies diaphragmatiques, la plupart des cardiopathies et des uropathies, syndrome transfuseur-transfusé), des protocoles de prise en charge médicochirurgicale sont établis par la plupart des équipes. Pour d’autres pathologies (allo-immunisation, pathologie infectieuse, retard de croissance intra-utérin…) pour lesquelles il n’y a pas nécessairement d’indication chirurgicale, il s’agit surtout d’assurer une prise en charge médicale durant la période prénatale, mais aussi dès la naissance pour prévenir certaines complications en organisant le suivi pédiatrique.

Cette situation représente la partie la plus importante de l’activité des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal. En 2016, 16 950 femmes (sur 33 154 dont le dossier a été examiné au total par un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal) et 17 039 fœtus étaient concernés. 

Dans 61,2% (n=10 435) des cas, la pathologie prise en charge était malformative, alors qu’elle était génétique ou chromosomique dans 2,8% (n=477) des cas.

L’enfant était vivant au 28e jour après sa naissance dans la plupart des cas (74,2% ; n=12 636). Les issues défavorables, telles que les morts fœtales in utero et les morts néonatales, étaient minoritaires (3,6% ; n=617).

Enfin, il faut comptabiliser toutes les grossesses adressées à un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal pour lesquelles

-          L’examen du dossier a conclu à l’absence de pathologie (demande d’avis sur prise médicamenteuse, surveillance rassurante suite à une situation à la limite de la physiologie…) ;

-          L’examen du dossier n’a pas permis de confirmer la présence d’une pathologie fœtale (investigations complémentaires en cours au moment de l’interruption spontanée de grossesse, fausse couche spontanée…).

Cette catégorie ne peut être exhaustive et son analyse, par ailleurs, doit être faite avec précaution, précise l’Agence de la biomédecine. 

Pour 64,9% (n=3 920) des grossesses examinées, la pathologie a été finalement non confirmée après expertise.

L’enfant était vivant à la naissance dans la plupart des cas (73,3% ; n=4 425), alors que les issues défavorables, telles que les morts fœtales in utero et les morts néonatales, étaient peu fréquentes (1,0% ; n=62).

1.1.3. A côté de ces situations, d’autres pathologies fœtales présentent un potentiel évolutif rapide pendant la grossesse, pouvant mener à l’aggravation du pronostic voire à la mort fœtale ou néonatale en l’absence de traitement. Dans ces situations, l’équipe médicale pluridisciplinaire (obstétriciens, échographistes, pédiatres de différentes spécialités) doit évaluer la balance bénéfice-risque entre la poursuite de la grossesse avec l’aggravation de la pathologie fœtale ou l’induction de la naissance avec des risques majeurs liés à la prématurité. Certaines équipes ont peu à peu développé des techniques permettant d’intervenir sur la maladie de l’enfant sans pour autant le faire naître. C’est ainsi que la thérapie fœtale in utero a vu le jour.

L’invention de la fœtoscopie (introduction d’une fibre optique et d’instruments dans l’utérus à travers la paroi abdominale maternelle par une ou deux mini-incisions) et du guidage par échographie de gestes à l’aiguille a permis de diminuer considérablement les risques liés aux gestes de thérapie fœtale in utero et d’éviter les interventions à utérus ouvert. Ces procédures restent cependant réservées à quelques situations pathologiques sévères et sont offertes dans quelques établissements dotés d’un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal qui a développé de telles pratiques.

Quelques exemples de médecine fœtale :

-          Transfusion in utero (dans le cordon ombilical)

Elle vise à corriger une anémie fœtale sévère (notamment liée à des incompatibilités sanguines, principalement d’origine rhésus entre mère et fœtus, ou à des infections)

-          Laser sur le placenta (« syndrome transfuseur-transfusé »)

Dans un tiers des grossesses gémellaires, la grossesse est monochoriale, ce qui signifie que les deux fœtus partagent un seul placenta. Normalement, ils le font équitablement.

Cependant, il arrive (10 à 15 % des cas) que des communications anormales entre les circulations sanguines des deux fœtus aboutissent à un déséquilibre. C’est le syndrome transfuseur-transfusé. Le fœtus dit « donneur » (qui va cesser de se développer) va alors envoyer une grande partie de son volume sanguin vers son jumeau dit « receveur » (dont le cœur est alors mis en danger). Sans traitement, le pronostic est catastrophique, avec une issue fatale pour les deux jumeaux dans 90% des cas. Le traitement in utero consiste à atteindre puis coaguler un par un les vaisseaux qui passent d’un fœtus à l’autre.

-          Obturation de la trachée

La hernie diaphragmatique est un défaut de fermeture du diaphragme (muscle séparant le thorax de l’abdomen) ayant pour conséquence l’ascension des organes abdominaux dans le thorax et, en conséquence, un défaut de développement des poumons (qui n’ont plus assez d’espace pour se développer). Une occlusion de la trachée permet de limiter les conséquences de la malformation : après immobilisation du fœtus, l’opérateur introduit le fœtoscope dans la cavité utérine, puis dans la trachée du fœtus en passant par sa bouche ; un ballonnet y est ensuite introduit puis gonflé juste en dessous des cordes vocales ; il a pour effet d’augmenter la pression et le volume des poumons favorisant leur développement ;

-          Drainages (de plèvre, de kystes, de vessie, autres)

L’Agence de la Biomédecine a comptabilisé les gestes à visée thérapeutique effectués en 2016 en lien avec un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal[899] :

-          Exsanguino-transfusions et transfusions in utero : 230

-          Drainages amniotiques : 593

-          Autres drainages (pleuraux, urinaires, péritonéaux, autres) : 124

-          Traitement par laser du syndrome transfuseur/transfusé : 288

-          Amnio-perfusions ou injections intra-amniotiques : 153

-          Chirurgie fœtale par fœtoscopie : 36

-          Chirurgie fœtale ouverte : 3

-          Exit procédure (prise en charge du nouveau-né tant que celui-ci est encore relié à sa mère par le cordon ombilical) : 13

Dans toutes ces situations, la démarche de diagnostic prénatal permet d’informer les parents sur le pronostic à attendre, de les accompagner et de préparer au mieux la naissance de l’enfant dans une structure adaptée avec, si nécessaire, des équipes prêtes à le prendre en charge dès les toutes premières minutes de vie[900] ou à mettre en place des mesures visant à préserver le pronostic[901].

1.2. Éléments de droit comparé

D’après les informations collectées par le Comité bioéthique du Conseil de l’Europe[902], dans tous les pays ayant répondu, le recours au diagnostic génétique prénatal est possible, même en l’absence d’une réglementation spécifique, à l’exception de l’Irlande. En Irlande, le « droit à la vie de l’enfant à naître » est garanti par la Constitution.

-          En Autriche, le diagnostic génétique prénatal est réglementé par une « loi sur la technologie du gène » ; le diagnostic prénatal est limité au diagnostic et à la prédisposition à une maladie, une équipe médicale détermine s’il peut être effectué, il l’est uniquement dans les centres médicaux spécialement agréés ;

-          En Allemagne, la loi sur les tests génétiques humains (loi sur le diagnostic génétique) du 31 juillet 2009 réglemente le secteur ; elle prévoit que le diagnostic génétique prénatal ne puisse être effectué qu’à des fins médicales et uniquement si le diagnostic est pertinent pour la santé de l’embryon ou du fœtus pendant la grossesse ou après la naissance ou si le diagnostic est pertinent pour le traitement médicamenteux de l’embryon ou du fœtus ; le diagnostic génétique prénatal ne peut être effectué que par un médecin et avec le consentement éclairé préalable de la mère et un conseil génétique détaillé avant et après le diagnostic génétique ;

-          La Grèce a adopté une loi sur « le planning familial et autres dispositions » et elle a également défini des conditions spécifiques pour le diagnostic prénatal (loi 1609/1986 sur l’interruption artificielle de la grossesse / protection de la femme ; décret ministériel 1561/1980 sur l’interruption de la grossesse / les anomalies congénitales ; décret ministériel 2799/1987 sur les conditions pour le diagnostic prénatal) ; la législation précise, entre autres, les conditions nécessaires pour pratiquer un avortement en cas d’indications d’un trouble génétique, au terme du diagnostic prénatal, les conditions dans lesquelles le diagnostic prénatal est effectué, le but du diagnostic prénatal, par exemple la détection d’indices de la présence chez l’embryon d’anomalies graves susceptibles d’entraîner une pathologie grave à la naissance, les questions relatives à la diffusion et l’application des connaissances nouvelles en matière de génétique et de planning familial, ainsi que les questions d’éducation dans ces domaines, le consentement recueilli par écrit ;

-          Au Danemark, le diagnostic prénatal est régi par la loi sur la reproduction artificielle, adoptée en 1997 et révisée en janvier 2015 ainsi qu’en mars 2016. Il existe également des directives apportées par la Société Danoise pour la Sécurité des Patients quant à l’utilisation du diagnostic prénatal ;

-          En Norvège (loi sur l’application de la biotechnologie en médecine humaine), le diagnostic prénatal peut être proposé dans les cas suivants :  lorsque la femme est âgée de 38 ans ou plus au terme prévu de la grossesse ; lorsque la femme ou le père (biologique) a eu dans le passé un fœtus ou un enfant atteint d’une maladie ou d’une anomalie graves ; lorsqu’il y a un risque élevé de maladie grave pour le fœtus ou l’enfant et que celle-ci peut être identifiée par un diagnostic ; si la femme enceinte prend des médicaments susceptibles d’affecter la santé du fœtus ;  si l’échographie fait apparaître des signes d’anomalie chez le fœtus ; dans des situations précises, si la femme enceinte est dans une situation difficile et ne sera pas en mesure de prendre en charge un enfant  atteint d’une maladie ou d’une anomalie graves ; une évaluation des risques – au moyen d’un examen échographique et, si nécessaire, d’une analyse biochimique du sérum maternel – sera tout d’abord effectuée, et peut être suivie d’une procédure invasive ;

-          En Pologne, les instruments juridiques spécifiques sont : la loi du 7 janvier 1993 sur le planning familial, la protection de fœtus humain et conditions d’admissibilité de l’interruption de grossesse, le règlement du Ministre de la Santé du 21 décembre 2004 sur les prestations médicales, y compris les tests de dépistage et les périodes, au cours desquelles ses prestations sont effectuées, le Code de l’Ethique Médicale du 20 septembre 2003 ;

-          En Fédération de Russie, l’arrêté du ministère de la Santé sur « l’amélioration des diagnostics prénataux et la prévention des maladies héréditaires et congénitales » contient des dispositions spécifiques. ;

-          En Suisse (loi fédérale du 8 octobre 2004 sur l’analyse génétique humaine, LAGH), le législateur n'a pas voulu fixer les indications admissibles pour une analyse prénatale. Il a opté pour la solution indiquant ce qui ne doit pas être recherché par une telle analyse. Il est ainsi interdit d'effectuer des analyses prénatales visant à rechercher des caractéristiques de l'embryon ou du fœtus qui n'influencent pas directement sa santé ou visant à déterminer le sexe dans un but autre qu'un diagnostic (cf. art. 11 LAGH). La notion de "caractéristiques qui n'influencent pas directement sa santé" n'est volontairement pas définie. Le terme "directement" exclut les indications psychosociales. Une analyse génétique prénatale ne peut être prescrite que par un médecin ayant une formation postgrade adéquate ou par un médecin qui, dans le cadre d'une formation postgrade exerce sous la surveillance d'un médecin ayant une formation postgrade adéquate (cf. art. 13, al. 2, LAGH). L'analyse ne peut être effectuée que dans un laboratoire disposant d'une autorisation de l'Office fédéral de la santé publique (cf. art. 8, al. 1, LAGH).

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.                       Nécessité de légiférer

Si la révision de la loi de bioéthique de 2011 a conduit le législateur à revoir la rédaction de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique pour préciser et organiser la succession d’étapes de la « démarche de diagnostic prénatal » dans l’objectif de garantir une meilleure information et un meilleur accompagnement de la femme enceinte, la définition du diagnostic prénatal n’a pas été modifiée dans son esprit[903] à cette occasion et seul l’ajout de l’échographie prénatale au sein des pratiques de diagnostic prénatal est à noter.

La suite de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique évoque cependant, depuis la révision de 2011, les possibilités de prévention, de soin ou de prise en charge adaptée du fœtus ou de l'enfant né. En effet, le III de l’article prévoit que la femme enceinte/le couple reçoit, dès lors qu’un risque pour le fœtus est avéré, « des informations sur les caractéristiques de l'affection suspectée, les moyens de la détecter et les possibilités de prévention, de soin ou de prise en charge adaptée du fœtus ou de l'enfant né. ».

Plus globalement, la définition actuelle du diagnostic prénatal n’apparait plus adaptée à la réalité des pratiques.

Elle se contente de renvoyer à une « affection d’une particulière gravité » faisant ainsi un lien direct avec les critères requis pour une interruption de grossesse pour motif médical. L’article L 2213-1 du code de la santé publique, qui précise les conditions pour cette interruption de grossesse pour motif médical, prévoit, en effet, qu’il doit exister une « forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic » (3ème alinéa).

Or, l’interruption de grossesse pour motif médical n’est pas l’objectif premier du diagnostic prénatal qui, par le diagnostic d’une pathologie fœtale ou obstétricale ainsi que sa surveillance, vise d’abord à réduire la mortalité et la morbidité périnatale, les handicaps d’origine périnatale et la mortalité maternelle.

Dans son avis n° 107 du 15 octobre 2009, le Conseil consultatif national d’éthique estimait que : « Si le DPN peut conduire à éviter la naissance d’enfants atteints de maladies graves et incurables, il est essentiel que son objectif thérapeutique continue d’être expressément indiqué dans la loi toutes les fois qu’il s’agit de pathologies curables dont la prise en charge en période fœtale ou néonatale est possible. »[904].

En outre, dans son avis n° 129[905], le Conseil consultatif national d’éthique recommande explicitement que : « La définition du diagnostic prénatal [soit] modifiée pour être plus en accord avec les pratiques et possibilités thérapeutiques actuelles. »

La Fédération française des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal indique dans sa contribution aux Etats généraux de la bioéthique : « Notre spécialité a beaucoup évolué en vingt-quatre ans et cette définition nous paraît restrictive et suggère que peu ou pas de traitements sont disponibles et que l’interruption de grossesse est la seule issue. »

De fait, la médecine fœtale contribue, avec l’accompagnement médical des grossesses à risque, l’adaptation du lieu de naissance, la préparation de l’accueil du nouveau-né et les traitements, y compris chirurgicaux, apportés dès la naissance de l’enfant, aux succès de la démarche de diagnostic prénatal qui participent à la légitimer.

Pour toutes ces raisons, la définition actuelle du diagnostic prénatal doit être revue et rééquilibrée en prenant en compte ses objectifs réels et en mentionnant explicitement la médecine fœtale dont la définition doit également être introduite[906].

Par ailleurs, l’échographie obstétricale et fœtale n’est plus la seule technique d’imagerie du fœtus au sein des pratiques de diagnostic prénatal. En effet, d’autres techniques d’imagerie complètent désormais les moyens utilisés dans le domaine prénatal. Ainsi, les examens d’imagerie fœtale par résonance magnétique (IRM) et tomodensitométrie (ou scanner), dont l’objectif est d’étudier certains organes ou certaines structures du fœtus ou de ses annexes (de façon différente et complémentaire à l’échographie), se sont développés[907]. Les régions anatomiques les plus souvent explorées en IRM sont le système nerveux central, le thorax et l’abdomen du fœtus. La TDM explore le squelette fœtal.

2.2.                       Objectifs poursuivis

La règle envisagée par le Gouvernement a pour objet de mettre en cohérence la définition du diagnostic prénatal qui, actuellement, ne prend pas en compte les objectifs de la démarche en termes de soins apportés et de prise en charge adaptée du fœtus y compris de médecine fœtale.

Elle permettra également de définir cette dernière et d’élargir le champ des examens d’imagerie relevant des pratiques de diagnostic prénatal qui dépasse la seule échographie fœtale.

3.       Options possibles et dispositif retenu

Toute référence à une affection d’une particulière gravité pourrait être supprimée. Il y aurait cependant des risques à procéder de la sorte, risques bien exposés dans une audition de la mission d’information de l’Assemblée nationale : « la disparition de la notion de gravité expose à deux risques : une multiplication de demandes de diagnostic non fondées pour des particularités fœtales mineures et une judiciarisation en cas de maladie non détectée car non détectable. »[908]

Dans son étude bioéthique, le Conseil d’Etat précise justement : « la finalité du DPN[909] telle qu’elle résulte de la loi (détecter in utero chez l’embryon ou le fœtus une affection d’une particulière gravité) gagnerait en revanche à être préservée, ce qui fait obstacle à ce que le DPNI[910] soit mobilisé pour dépister des affections ne présentant pas de telles caractéristiques. »

Le choix qui est fait est celui de rester au plus près de la définition actuelle tout en la modifiant pour la rééquilibrer en prenant en compte les possibilités de soins et de prise en charge qui se sont développées et en mentionnant explicitement la médecine fœtale.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

La présente mesure modifiera la rédaction du I de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique

L’amélioration des diagnostics prénataux, par l’identification de pathologies au stade prénatal et surtout par la prise en charge adaptée et précoce du fœtus ou de l’enfant né, contribuera par ailleurs à réduire la morbidité périnatale et les handicaps d’origine périnatale.

5.       consultation et modalités d’application

5.1.                       Consultation

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

5.2.                       Modalités d’application

La mesure est applicable le lendemain de la promulgation de la loi.

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

 


Article 19 Renforcer l’information de la femme enceinte et du couple

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1. La loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique a modifié, dans son article 20, l’article L. 2131-1 du code de la santé publique pour préciser et organiser la succession d’étapes de la « démarche de diagnostic prénatal » qui concerne potentiellement toute femme enceinte dans l’objectif de garantir une meilleure information et un meilleur accompagnement de la femme enceinte et du couple. 

Ainsi :

-          L’échographie obstétricale et fœtale a été expressément mentionnée dans les pratiques médicales de diagnostic prénatal ; elle est, en effet, devenue le premier moyen de diagnostic prénatal ;

-          Les différences d’encadrement entre les examens de biologie médicale de diagnostic prénatal et ceux d’imagerie (échographie obstétricale et fœtale), dont les conséquences sur le plan éthique sont similaires, ont été réduites notamment par l’introduction d’une information et d’un consentement exprès de la femme enceinte à la réalisation d’une échographie obstétricale et fœtale ;

-          La délivrance d’une information claire, loyale et adaptée à l’issue de laquelle la femme enceinte demande et consent, par écrit, à la réalisation des examens prénataux relevant de la démarche de diagnostic prénatal a été mise en exergue ;

-          La sécurité juridique des professionnels de l’échographie prénatale (médecin, sage-femme) a été renforcée par la précision de leur champ de responsabilités.

L’organisation de la prise en charge médicale et psychologique des femmes enceintes et des couples, en particulier lorsqu’ils sont confrontés à une suspicion d’anomalie fœtale, a été formalisée et plusieurs étapes dans le cheminement diagnostique ont été distinguées, toutes restant facultatives pour la femme enceinte.

1.2. En 2016[911], 24 496 examens de cytogénétique et 2 581 examens de génétique moléculaire ont été réalisés à partir de cellules ou de tissus prélevés sur le fœtus in utero ou ses annexes (placenta, liquide amniotique).

Le nombre de caryotypes fœtaux réalisés en 2016 a diminué de 22 % en nombre absolu par rapport à 2015 : de 31 422 à 24 496, une diminution de 20% si on rapporte cette activité au nombre de naissances (4,0 % à 3,2 % des naissances). L’amniocentèse reste en 2016 la modalité de prélèvement la plus fréquente. Elle est réalisée pour presque 71 % des examens de cytogénétique, alors que la biopsie de villosités choriales est réalisée dans 28 % des cas, le prélèvement de sang fœtal reste exceptionnel (0,84 %).

L’évolution des anomalies chromosomiques diagnostiquées par caryotype fœtal montre que le nombre de diagnostics prénatals de trisomies 21 a diminué (N=1 910 en 2016 contre N=1 938 en 2015), néanmoins la fréquence des cas rapportés au nombre de naissances reste stable (0,25%). Inversement, les taux de trisomies 18 et trisomies 13 diagnostiqués augmentent de plus de 10% entre 2015 et 2016 (respectivement +12,2% et +11,7%).

Au fil des années, depuis 2010, on observe une augmentation de la fréquence des diagnostics d’anomalies chromosomiques déséquilibrées à l’issue d’un caryotype (7,1% en 2010 contre 16,0% en 2016 alors que le nombre de prélèvements est passé de 55 594 en 2010 à 24 496 en 2016) ce qui témoigne d’une meilleure indication des prélèvements invasifs. Un peu moins de la moitié (46,1%) des diagnostics d’anomalies chromosomiques déséquilibrées sont faits sur biopsie de villosités choriales, c’est-à-dire précocement au cours de la grossesse. Néanmoins, on observe une variabilité selon les anomalies : celles qui donnent le plus souvent des signes d’appel échographiques (trisomies 18, 13 et syndrome de Turner) sont en majorité faites sur biopsie de villosités choriales, c’est-à-dire au premier trimestre de la grossesse. Un peu plus de 57% des diagnostics de trisomie 21 sont réalisés sur liquide amniotique, donc au 2ème trimestre de la grossesse. 

En 2016, les principales indications qui ont conduit à la réalisation du caryotype fœtal sont « les signes d’appel échographiques » (47,7 % en comptant à la fois l’épaisseur de la clarté nucale augmentée et les autres signes) et « le risque évalué par les marqueurs sériques seuls » (37,5 %). Néanmoins, le nombre de cas où l’indication du caryotype est « le risque évalué par les marqueurs sériques seuls » diminue d’année en année il était de 48,2 % jusqu’en 2014 puis 43,8 % en 2015 et 37,5 % en 2016.

Toujours en 2016, l’activité de diagnostic prénatal en génétique moléculaire a concerné 2 581 fœtus pour 307 maladies génétiques différentes. 

Ces maladies sont, pour la plupart, extrêmement rares. Ainsi, les 21 maladies les plus fréquentes représentent plus de 73% des examens réalisés. De manière attendue en raison de sa fréquence parmi les maladies rares, la mucoviscidose est la maladie la plus souvent diagnostiquée dans le cadre d’un diagnostic prénatal par la génétique moléculaire. De très nombreuses maladies génétiques sont si rares qu’elles ne sont l’objet que de quelques diagnostics par an. L’Agence de la biomédecine estime qu’avec les nouvelles techniques d’étude de l’ADN (séquençage de nouvelle génération), le diagnostic des maladies rares va encore se diversifier. 

Dans deux tiers des cas l’examen est prescrit dans le cadre d’un antécédent familial. Il s’agit du diagnostic d’une maladie génétique familiale pour laquelle la proportion de fœtus atteints correspond au risque de récurrence attendu de la maladie. Dans les autres cas, c’est un signe d’appel échographique spécifique d’une maladie qui motive le diagnostic moléculaire. L’Agence de la biomédecine note qu’entre 2012 et 2016, 353 recherches d’amyotrophie spinale ont été réalisées sur signe d’appel échographie alors qu’aucun diagnostic n’a été posé. Inversement, sur la même période les signes d'appel échographique ont conduit à la réalisation de 131 examens pour l’indication de sclérose tubéreuse de Bourneville avec 105 diagnostics posés.

Lorsque le diagnostic de la maladie génétique est avéré, la grossesse est le plus souvent interrompue, compte tenu de la gravité des affections et de la connaissance familiale de la maladie.

1.3. Depuis la loi de bioéthique de 2011 susmentionnée, les techniques utilisées ont évolué.

En particulier, la technique d’analyse chromosomique sur puce à ADN[912] (ACPA), technique d’étude des chromosomes qui permet de détecter des anomalies chromosomiques non visibles sur le caryotype standard (puisque 10 à 100 fois plus petites) ainsi que des délétions ou insertions de grands fragments d’ADN, est désormais utilisée de plus en plus souvent en période prénatale.

Cette technique, qui permet de déterminer s’il existe ou non des régions du génome en excès ou perdues (variations du nombre de copies d’ADN), offre deux fois plus de possibilités de trouver la cause des anomalies que la réalisation d’un caryotype standard.

L’objectif de son utilisation est donc de mettre en évidence un déséquilibre chromosomique qui échapperait au simple caryotype et permettrait d’expliquer le motif de prescription de l’examen (dans la majorité des cas, la prescription est liée à la présence de « signes d’appel » échographiques[913]). 

Le recours à cet examen complémentaire relève d’une étape du cheminement diagnostique qui correspond au IV de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique (« En cas de risque avéré, de nouveaux examens de biologie médicale et d'imagerie à visée diagnostique peuvent être proposés par un médecin, le cas échéant membre d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, au cours d'une consultation adaptée à l'affection recherchée. »).

L’Agence de la biomédecine observe une montée en charge continue de l’utilisation de ces analyses chromosomiques sur puce à ADN en prénatal avec 5 899 examens en 2016 contre 913 en 2012.

1.4. Les variations (caractéristiques génétiques) révélées par analyse chromosomique sur puce à ADN peuvent relever de trois catégories différentes :

1) Variation pathogène ou causale (responsable des anomalies observées chez le fœtus) ; il est alors nécessaire d’étudier également les chromosomes des parents (en vue d’un conseil génétique pour de futures grossesses) ;

2) Variation sans signification ; il existe, en effet, chez toutes les personnes, des pertes ou des gains de matériel chromosomique dans certaines régions du génome : ce sont des variations « bénignes » qui n’ont pas de conséquences médicales (et ne sont pas mentionnées dans le compte rendu) ;

3) Variation pour laquelle il est difficile voire impossible de conclure (résultat incertain) ; il est alors nécessaire d’étudier les chromosomes des parents.

Dans tous les cas où il s’avère nécessaire de réaliser des examens des caractéristiques génétiques chez les parents, l’article L.  1131-1-2 du code de la santé publique, qui encadre le dispositif d’information de la parentèle, a vocation à s’appliquer. Ainsi, en cas de diagnostic d’une anomalie génétique pouvant être responsable d'une affection grave justifiant des mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins, le couple pourrait être amené à informer d’autres membres de sa famille.

Par ailleurs, comme l’analyse chromosomique sur puce à ADN explore l’ensemble du génome, il est possible qu’elle détecte une anomalie sans rapport avec les signes échographiques observés chez le fœtus, mais qui peut ou pourra avoir des conséquences médicales chez le futur enfant.

De manière générale, l’intérêt sur le plan médical (pour le fœtus) de la variation observée, et son impact potentiel pour la grossesse en cours, déterminent le périmètre des informations qui sont restituées et expliquées aux parents.

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.                       Nécessité de légiférer

Les informations obtenues par le biais des nouvelles techniques (puces à ADN) - surtout si le résultat reste incertain - sont potentiellement anxiogènes. Leur bonne compréhension doit être assurée alors que la femme enceinte ou le couple, confronté à une possible anomalie fœtale, est en situation de vulnérabilité.

Dans le cadre des Etats généraux de la bioéthique, certaines sociétés savantes ont pointé ces difficultés. L’Association des cytogénéticiens de langue française[914] a appelé l’attention sur l’interprétation et le rendu des résultats incertains (variants dont la signification/la conséquence clinique est inconnue) qui peuvent conditionner les décisions prises en prénatal. Cette société savante note également que la découverte de résultats génétiques anormaux, mais sans rapport avec l’indication initiale, crée des situations très délicates, cette question pouvant se poser en prénatal avec une information qui concerne un futur enfant non décisionnaire.

Dans son avis n° 107[915], constatant que « La portée du dépistage anténatal n’est pas perçue par une part importante de femmes enceintes », le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé considère que « la qualité de l’information des couples demeure un élément crucial au vu des conséquences qui peuvent résulter d’une amniocentèse ou d’une biopsie du trophoblaste, et du fait que cette information peut conduire ou non au choix d’une interruption médicale de grossesse ».

La femme enceinte devra être informée que les examens qui lui sont proposés, notamment quand il s’agit de recourir à des analyses chromosomiques sur puce à ADN,  peuvent révéler des caractéristiques génétiques fœtales sans relation certaine avec l’indication initiale de l’examen et que, dans ce cas, des investigations supplémentaires, notamment des examens des caractéristiques génétiques de chaque parent, peuvent être proposées avec déclenchement possible du dispositif d’information des membres de la famille potentiellement concernés.

Le médecin prescripteur devra communiquer les résultats directement à la femme enceinte et à l’autre membre du couple et leur donner toute l'information nécessaire à leur compréhension. S’il l’estime nécessaire, il pourra les adresser à un médecin qualifié en génétique (s’il ne l’est pas lui-même).

Pour assurer des pratiques homogènes et de qualité sur le territoire national, des recommandations de bonnes pratiques relatives aux critères médicaux justifiant la communication à la femme enceinte des caractéristiques génétiques fœtales sans relation certaine avec l’indication initiale de l’examen, devront être édictées.

2.2.                       Objectifs poursuivis

La règle envisagée par le Gouvernement a pour objet de garantir un consentement éclairé de la femme enceinte qui doit bénéficier d’une information précise et complète lorsque, dans une deuxième étape de la démarche de diagnostic prénatal (en cas de risque avéré), certains examens de génétique portant sur le fœtus lui sont proposés.

Cette règle sera assortie d’une base légale prévoyant un arrêté du ministre chargé de la santé permettant de fixer, sur proposition de l’Agence de la biomédecine, les critères médicaux justifiant la communication à la femme enceinte des caractéristiques génétiques fœtales sans relation certaine avec l’indication initiale de l’examen.

Elle permettra également d’assurer une information de l’autre membre du couple sur les résultats obtenus. En effet, si le diagnostic prénatal a la particularité de concerner une femme enceinte et son fœtus la plaçant au centre du dispositif (c’est elle qui prend toutes les décisions relatives à sa grossesse), il est toutefois recommandé d’impliquer le plus souvent possible le couple, en particulier lors du rendu des résultats.

3.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

3.1.                       Impacts juridiques

La mesure complétera le VI de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique et lui ajoutera un IX.  

La mesure créera également un nouvel article L. 2131-1-2 qui prévoit la base légale de l’ensemble des arrêtés du ministre chargé de la santé dans le domaine du diagnostic prénatal et préimplantatoire

3.2.                       Impacts sur les particuliers

La mesure renforcera l’information des femmes enceintes et contribuera à leur choix éclairé sur la suite du processus diagnostique.

4.       Consultations et modalités d’application

4.1.                       Consultations

L’Agence de la biomédecine a été consultée. Elle a rendu son avis le 26 juin 2019.

L’Agence nationale du médicament et des produits de santé a été consultée. Elle a transmis son avis le 8 juillet 2019.

4.2.                       Modalités d’application

4.2.1.      Application dans le temps

Cette mesure est d’application immédiate. En particulier, l’arrêté du ministre chargé de la santé envisagé ne sera pas requis pour sa mise en œuvre dans la mesure où des recommandations de sociétés savantes sont déjà disponibles et applicables[916].

4.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

4.2.3.      Textes d’application

Un décret en Conseil d’Etat fixe les modalités d’information de l’autre membre du couple, prévues aux III et au second alinéa du VI de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique.

Un arrêté du ministre chargé de la santé, pris sur proposition de l’Agence de la biomédecine, fixe les critères médicaux justifiant la communication à la femme enceinte des caractéristiques génétiques fœtales sans relation certaine avec l’indication initiale de l’examen. Il s’appuiera sur les recommandations disponibles des sociétés savantes.

Les différentes recommandations de bonnes pratiques fixées par arrêté et prévues par le nouvel article L. 2131-1-2 ont déjà été publiées. Elles seront, le cas échéant, révisées.

 


Article 20 Encadrer les interruptions volontaires partielles de grossesse multiple

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1 Les interruptions volontaires partielles de grossesses multiples consistent à interrompre, de façon sélective, le développement, en cas de grossesses multiples, d’un ou plusieurs embryons ou fœtus sans interrompre le processus de développement des autres embryons ou fœtus et hors situation de pathologies maternelles ou fœtales relevant aujourd’hui de l’interruption de grossesse pour motif médical[917].

Elles sont dénommées par les professionnels « réductions embryonnaires ou fœtales ».

Les interruptions volontaires partielles de grossesses multiples sont en général réalisées[918] lors du premier trimestre d'une grossesse multiple dite de haut rang (triplés, quadruplés ou plus...) voire, dans certains cas, d’une grossesse gémellaire, entre 11 et 14 semaines d'aménorrhée[919].

Elles sont effectuées principalement pour diminuer les risques liés aux grossesses multiples de haut rang au cours de la grossesse (prématurité[920], décès d'un ou de plusieurs fœtus in utero[921], retard de croissance intra-utérin) ou à plus long terme (risques essentiellement liés à la prématurité : paralysie cérébrale[922], difficultés d’apprentissage, retard du langage et du développement, troubles du comportement, maladies pulmonaires chroniques, etc.)[923].

De fait, une revue des différentes études sur le sujet[924] fait apparaître que le taux d’accouchement très prématuré (avant 28 semaines d’aménorrhée) et prématuré (avant 32 semaines d’aménorrhée) est significativement diminué après réduction embryonnaire (respectivement 2,9 % et 8,9 % après réduction contre 9,8 % et 25,1 % en l’absence de réduction)[925].

La pratique vise également à réduire chez la femme enceinte les risques liés à une grossesse multiple, en particulier d’hypertension artérielle, de prééclampsie (complication de la grossesse avec hypertension artérielle, troubles rénaux et hépatiques, puis neurologiques pouvant aboutir au décès en l’absence de prise en charge adaptée), de rupture utérine, d'hémorragie, de complications cardiovasculaires graves et de dépression du post-partum. Ces risques augmentent avec chaque fœtus supplémentaire[926].

Exemples de situations pour lesquelles une réduction embryonnaire peut être indiquée :

-          Il peut s’agir d’une femme enceinte ayant une malformation utérine ou une incompétence du col de l’utérus[927] ou un antécédent d’accouchement prématuré ou de prééclampsie sévère ; dans ces circonstances, la survenue d’une grossesse multiple, y compris gémellaire, augmente le risque d’issue défavorable de cette grossesse (fausse couche tardive, accouchement très prématuré) même avec la pratique d’un cerclage du col de l’utérus ; une réduction embryonnaire, en diminuant le volume de l’utérus, diminue ces risques ;

-          Il peut s’agir d’une femme enceinte ayant des antécédents cardiaques ou respiratoires ; or, la grossesse demande un travail accru du cœur et des poumons, d’autant plus important qu’elle est multiple ; dans certaines circonstances, cette femme enceinte pourra supporter une grossesse mono-fœtale mais pas une grossesse multiple.

1.1.2 La pratique des réductions embryonnaires permet également d'éviter les complications sociales et psychologiques liées aux grossesses multiples. En effet, le taux de divorce est très élevé chez les parents de triplés et les dépressions du post-partum beaucoup plus nombreuses[928].

A cet égard, le temps nécessaire pour s’occuper de triplés de 6 mois et de l’intendance associée a été évalué à 197,5 heures par semaine[929] (alors qu’il y a 168 h dans une semaine…).

1.1.3 La pratique des réductions embryonnaires est ancienne, d’abord décrite en France[930] puis aux Etats-Unis[931].

Elle s’est installée dans les années 1980 puis 1990 avec l’augmentation des grossesses multiples liée au développement des médicaments inducteurs de l’ovulation et des techniques d’assistance médicale à la procréation.

1.1.4 Les interruptions volontaires partielles de grossesses multiples ne relèvent pas des deux cadres légaux qui existent aujourd’hui en matière d’interruption volontaire de grossesse. En effet, le Titre Ier[932] du Livre II (Interruption volontaire de grossesse) de la deuxième partie[933] du code de la santé publique comporte, outre  un chapitre premier (« Principe général ») et un chapitre IV (« Dispositions communes »), deux chapitres :

-          Interruption de grossesse pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse (chapitre II) ;

-          Interruption de grossesse pratiquée pour motif médical (chapitre III).

Au sein du Chapitre II, le premier alinéa de l’article L. 2212-1 du code de la santé publique dispose que :

« La femme enceinte qui ne veut pas poursuivre une grossesse peut demander à un médecin ou à une sage-femme l'interruption de sa grossesse. Cette interruption ne peut être pratiquée qu'avant la fin de la douzième semaine de grossesse. »

Au sein du Chapitre III, l’article L. 2213-1[934] du même code encadre l’interruption de grossesse pratiquée pour motif médical qui relève de deux situations :

-          Soit la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme ;

-          Soit il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic.

1.1.5 Pour ces deux cadres légaux, les données de 2016 sont les suivantes :

-          211 900 interruptions volontaires de grossesse ont été réalisées en France, dont 197 800 en Métropole. Leur nombre est en légère baisse pour la troisième année consécutive. Le taux de recours est de 13,9 IVG pour 1 000 femmes âgées de 15 à 49 ans en Métropole et de 25,2 dans les départements et régions d’outre-mer.[935]

-          7 366 attestations de particulière gravité en vue d'une interruption de grossesse pour motif médical ont été déclarées par les centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal : 7 045 pour motif fœtal et 321 pour motif maternel. Le taux de l’ensemble des attestations délivrées pour 1 000 naissances vivantes était de 9,54. Concernant les attestations pour motif fœtal, le taux était de 9,12, en augmentation de 4,7% par rapport à 2012[936].

1.1.6 Si des progrès significatifs ont été réalisés en matière d’assistance médicale à la procréation avec fécondation in vitro (où la pratique désormais est de ne transférer que deux embryons voire un seul dans certaines indications) et que des recommandations fixées par arrêté du ministre chargé de la santé[937] encadrent également les stimulations ovariennes réalisées en ville pour éviter une hyperstimulation et limiter au maximum les causes d’amont des réductions embryonnaires, la survenue de grossesses multiples nécessitant un tel geste persiste et ne pourra jamais disparaître.

D’autant que les pratiques ne sont pas seules en cause. Ainsi, en fécondation in vitro, il n’est pas exceptionnel qu’un embryon se divise après son transfert in utero pour donner une grossesse gémellaire (grossesse gémellaire après transfert d’un seul embryon dont le caractère monochorial[938] atteste de la division de l’embryon après transfert).

In fine, les bonnes pratiques professionnelles en médecine de ville comme en centres d’assistance médicale à la procréation, éventuellement renforcées, ne permettront jamais à elles-seules d’éviter totalement la survenue de situations relevant d’une réduction embryonnaire.

1.1.7 Le Comité consultatif national d’éthique ne s’est prononcé qu’une fois sur cette question, dans son avis n° 24 du 24 juin 1991[939]. S’il pointe le mauvais pronostic obstétrical des grossesses multiples pour les enfants et pour les femmes, il note également son mauvais pronostic familial.

Même si les extraits suivants datent de 1991, ils restent d’actualité et éclairent le sujet :

« Des études faites à l'INSERM, par des pédiatres, montrent que les problèmes posés aux familles par des naissances multiples (3 et au-dessus) sont réels et lourds. Les problèmes sont d'ordre psychologique. Les mères, même les mieux organisées, ont la sensation intense d'être incapables de faire face aux événements. Elles sont débordées sur le plan matériel ; un exemple : pour les triplés 18 biberons sont à préparer et à donner à raison d'une demi-heure par biberon, c'est-à-dire plus de 9 h 00 de travail seulement pour nourrir les enfants. Elles sont débordées sur le plan éducatif : il leur faut apprendre à connaître trois enfants ou davantage simultanément. Elles regrettent de ne pouvoir le faire pour chacun avec autant de soin, de présence, qu'elles le souhaiteraient, de n'avoir pas le temps de les bercer. Elles ont l'impression d'être devenues des machines à élever. Paradoxalement, elles rêvent d'avoir un seul enfant qu'elles pourraient élever tranquillement. Ces mères se sentent aussi dépossédées d'elles-mêmes : aucun temps libre ne leur reste pour elles-mêmes (…) Ces problèmes n'épargnent pas les pères : quelques-uns abandonnent avant la naissance ; sur 49 triplés dont s'occupe la CAF de Paris, trois sont de familles monoparentales ; un certain nombre, au bout de 2 à 3 ans, ne tolèrent plus cette vie et s'en vont (…) Les problèmes sont d'ordre économique et financier, aggravés par la disparition d'un salaire ; si la mère travaillait, il lui est impossible de continuer son travail à l'extérieur. Les problèmes sont aussi d'ordre social. L'isolement est grand : Il est difficile de se déplacer avec 3 ou 4 enfants : ne serait-ce que pour aller au jardin public, ou faire accepter 3 enfants dans une crèche (…) Les aides spécifiques, face à ces problèmes, sont minimes (…) ».

Le Comité consultatif national d’éthique dans l’avis précité rapporte que, dans la très grande majorité des cas, cette technique est proposée par le médecin à la patiente mais, dans certains cas, c’est la femme elle-même qui s’estime en situation de détresse et qui, ne se sentant pas capable d’élever plusieurs enfants en même temps, demande une réduction embryonnaire au médecin. Le Comité consultatif national d’éthique insiste sur le fait que cette décision est toujours difficile à prendre tant pour la future mère que pour le médecin.

1.1.8 Le risque principal de la réduction embryonnaire est la survenue d’une fausse couche (perte de tous les embryons ou fœtus) souvent tardive (2 semaines ou plus après le geste dans 87,5% des cas[940]). Il dépend du nombre initial d’embryons[941] et du nombre d’embryons dont le développement est stoppé. Il est toutefois à rapprocher des pertes spontanées des grossesses multiples[942].

Des conséquences psychologiques et éthiques pour la famille[943] sont également à signaler (pour le couple et le ou les enfants « survivants ») mais également pour le corps médical. Un soutien psychologique est mis en place avant et après une réduction embryonnaire.

1.1.9 Jusqu’en 2013, l’Agence de la biomédecine colligeait auprès des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal (CPDPN) le nombre de réductions embryonnaires réalisées dans l’année et en rendait compte dans son rapport médical et scientifique annuel. Cette donnée n’y figure plus depuis.

Les données 2008 à 2012 (non disponibles ensuite) montraient une stabilité dans le nombre de réductions embryonnaires réalisées en centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal (CPDPN) : respectivement pour les années 2008 à 2012 : 191, 192, 182, 192 et 174. Toutefois, les réductions embryonnaires réalisées en dehors des CPDPN n’étaient pas colligées et le nombre total de gestes au niveau national n’était pas connu.

Le rapport médical et scientifique de l’Agence de la biomédecine continue néanmoins de rendre compte de la pratique dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation[944].

De manière générale, il précise : « Le taux des accouchements multiples est en diminution progressive avec, en 2016, 13,2 % d’accouchements multiples après FIV et ICSI. On note toutefois, malgré le recours à des réductions embryonnaires, 20 accouchements de triplés après FIV, ICSI et TEC réalisés en 2016. Après insémination, on signale également 14 accouchements de triplés bien que les pratiques de stimulation ovarienne devraient tenir compte du risque de grossesses multiples et le cycle annulé en cas de dépassement de l’objectif fixé en termes de nombre de follicules en développement. »

A partir des tableaux figurant dans le rapport médical et scientifique de l’Agence de la biomédecine[945], le nombre de réductions embryonnaires en 2016 selon la technique (fécondation in vitro simple ou avec micromanipulation, transfert d’embryons congelés) et selon le nombre d’embryons transférés peut être ainsi résumé :

 

Nombre d'embryons transférés

Fécondation in vitro simple

Nombre de réductions embryonnaires

Fécondation in vitro simple ou avec micromanipulation

Nombre de réductions embryonnaires

Transfert d’embryons congelés

Nombre de réductions embryonnaires

1

6952

2

13899

9

21656

7

2

7197

16

14546

31

9790

17

3

570

3

1451

11

221

1

4 ou plus

57

0

100

0

10

0

Total

14776

21

29996

51

31677

25

Au final, 97 réductions embryonnaires ont été colligées par l’Agence de la biomédecine pour l’année 2016 dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation. Les réductions embryonnaires hors fécondation in vitro et transfert d’embryons congelés ne sont pas connues.

1.2. Cadre conventionnel

Dans l’arrêt de grande chambre A, B et C contre Irlande de 2010 (n° 25579/05), la Cour européenne des droits de l’homme reconnait une marge d’appréciation étendue pour les Etats membres pour définir les circonstances dans lesquelles ils autorisent l’avortement, au regard de l’absence de consensus incontestable entre eux[946].

1.3. Éléments de droit comparé

1.3.1 Les réductions embryonnaires sont pratiquées dans de nombreux pays, même si elles ne sont pas toujours explicitement citées ou autorisées par la législation nationale, comme en témoigne le tableau qui suit[947] extrait de travaux réalisés en 2004 :

 

 

Autorisée par la loi ou permise par des lignes directrices

Interdite, non pratiquée

Non mentionnée

Europe

Allemagne

X

 

 

Autriche

 

 

X (pratiqué)

Belgique

X

 

 

Bulgarie

X

 

 

Danemark

X

 

 

Espagne

 

 

X (pratiqué)

Finlande

 

X

 

France

 

 

X (pratiqué)

Grèce

 

 

X (pratiqué)

Hongrie

X

 

 

Irlande

 

X

 

Italie

 

 

X (pratiqué)

Norvège

 

X

 

Pays-Bas

 

 

X (pratiqué)

Pologne

 

X

 

Portugal

 

X

 

Royaume Uni

X

 

 

Suède

X

 

 

Suisse

X

 

 

Hors Europe

Canada

 

 

X (pratiqué)

Chine

X

 

 

Egypte

X

 

 

Etats Unis

X

 

 

Israël

X

 

 

Japon

 

X (exceptions)

 

Turquie

 

 

X (pratiqué)

 

1.3.2 En Espagne, la loi[948] précise que, lors de la délivrance des traitements d’assistance médicale à la procréation, il faut limiter le nombre d’embryons transférés dans le but d’éviter la pratique de réduction embryonnaire. Cette dernière n’est, de ce fait, pas interdite mais considérée comme un « ultime recours ».

Au Royaume Uni, la pratique est encadrée par la section 37 (5) du HFEA 1990 (loi sur l’assistance médicale à la procréation) qui amende l’Abortion Act 1967 (loi sur l’avortement) afin d’y inclure la réduction embryonnaire selon certaines conditions communes à l’IVG[949].

 

En Italie, en vertu de la loi sur la procréation médicalement assistée, il est interdit de procéder à la réduction embryonnaire de grossesses multiples, sauf dans les cas prévus par la loi n° 194 du 22 mai 1978 (loi sur l’interruption volontaire de grossesse).[950]

1.3.3 S’agissant des réductions embryonnaires lors de grossesses gémellaires, plusieurs articles de la littérature scientifique en font mention, notamment aux Etats-Unis, au Royaume Uni ou en Australie. Le Collège américain des Obstétriciens et Gynécologues (ACOG), dans son avis de septembre 2017 sur la pratique[951], différencie la réduction embryonnaire dans les grossesses gémellaires des autres réductions embryonnaires, en les considérant essentiellement sur le plan médical.

Quand la pratique de réduction embryonnaire est autorisée, le nombre d’embryons à partir duquel elle peut intervenir procède in fine d’une évaluation de la situation par le médecin ou l’équipe pluridisciplinaire (y compris pour les grossesses gémellaires).

1.3.4 En Australie, l’interdiction de la prise en compte du sexe des fœtus lors du geste est claire : les recommandations éthiques interdisent une telle sélection[952]. Aux Etats Unis, l’avis du Collège américain des Obstétriciens et Gynécologues de septembre 2017 précité précise que l’information sur le sexe des fœtus [si elle est connue] ne doit pas intervenir dans le choix des embryons dont le développement est arrêté.[953]

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.                       Nécessité de légiférer

Alors qu’elle présente des risques, la pratique de réduction embryonnaire, qui existe sur le territoire national, est réalisée dans un vide juridique complet. Le Comité consultatif national d’éthique, dans son avis précité, indiquait déjà qu’« une disposition législative devrait être élaborée pour encadrer ces réductions ».

En effet, il ne s’agit pas d’une interruption médicale de grossesse puisqu’en l’espèce, il n’existe pas une « forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic » et ce geste n’est pas non plus envisagé « au motif que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme ».

Par ailleurs, a contrario de l’interruption volontaire de grossesse avant la 14ème semaine d’aménorrhée, la réduction embryonnaire ou fœtale concerne une femme qui désire avoir un enfant. En outre, la grossesse, à proprement parler, n'est pas interrompue. Ce qui est véritablement interrompu, c'est le développement de cet (ces) embryon(s) ou de ce (ces) fœtus.

Les praticiens qui réalisent des réductions embryonnaires s’exposent donc à des contentieux majeurs lorsqu’ils réalisent de tels gestes qui comportent au surplus des risques.

Trois types de procédures pourraient être concernées : des procédures en responsabilité médicale soit devant le tribunal administratif s'agissant d'une structure publique, soit au civil, s'agissant d'une structure privée ou de l'engagement de la responsabilité personnelle d'un médecin. Dans cette hypothèse, les données disponibles portent sur les actions en responsabilité médicale en général et il est impossible de distinguer entre les faits générateurs et donc de savoir si des réductions embryonnaires sont en cause. Il pourrait également s'agir de poursuites pénales.

2.2.                       Objectifs poursuivis

La règle nouvelle a pour objet de prévoir un encadrement spécifique des pratiques de réductions embryonnaires (interruption du développement d'un ou plusieurs embryons/fœtus en cas de grossesse multiple), qui n'entrent pas dans le cadre légal de l’interruption de grossesse pour raison médicale et ne répondent pas non plus au cadre de l'interruption volontaire de grossesse réalisée avant la 14ème semaine d’aménorrhée.

L’objectif est double : il s’agit de cadrer les pratiques actuelles en précisant les conditions requises pour effectuer de tels gestes et de protéger les praticiens qui les réalisent aujourd’hui en dehors de tout cadre légal.

3.       Options possibles et dispositif retenu

Pour encadrer la pratique des réductions embryonnaires, il convient de s’inspirer des conditions relatives aux interruptions de grossesse pour motif médical précisées à l’article L. 2213-1 du code de la santé publique (que le motif concerne l’état de santé de la femme ou celui du fœtus).

Ainsi, une équipe pluridisciplinaire doit d’abord se concerter. Cette équipe comprend au moins un médecin qualifié en gynécologie-obstétrique et membre d’un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, un médecin choisi par la femme enceinte, et un médecin qualifié en psychiatrie ou, à défaut, un psychologue.

Elle rend son avis consultatif au vu des conditions médicales (notamment obstétricales), le cas échéant, psychologiques de la grossesse. En effet, ces paramètres doivent être pris en compte pour évaluer les conditions de la poursuite de la grossesse.

Deux médecins, membres de l’équipe pluridisciplinaire, doivent attester, après que cette équipe a rendu son avis consultatif, que les conditions susmentionnées sont réunies.

L’interruption, sur demande de la femme, doit être pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse. En effet, l’existence d’une grossesse multiple est connue avant ce stade ainsi que l’ensemble des paramètres permettant d’évaluer la situation.

Enfin, lors de sa réalisation, aucun critère relatif aux caractéristiques des embryons ou des fœtus, y compris leur sexe, ne peut être pris en compte.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

La mesure restructurera et modifiera la rédaction de l’article L. 2213-1 du code de la santé publique pour introduire le cadre légal à la réalisation d’une interruption volontaire partielle d’une grossesse multiple hors pathologie maternelle ou fœtale.

En conséquence, l’article est séquencé en trois parties.

Le I reprend l’existant (interruption de grossesse envisagée au motif que la poursuite d’une grossesse met en péril grave la santé de la femme, interruption de grossesse envisagée au motif qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic).

Le II est consacré aux réductions embryonnaires. Il prévoit que, lorsqu’elle permet de réduire les risques d’une grossesse dont le caractère multiple met en péril la santé de la femme, des embryons ou des fœtus, l’interruption volontaire partielle d’une grossesse multiple peut être pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse si deux médecins, membres d’une équipe pluridisciplinaire, attestent, après que cette équipe a rendu son avis consultatif, que les conditions médicales, notamment obstétricales et psychologiques sont réunies. Il est également précisé qu’aucun critère relatif aux caractéristiques des embryons ou des fœtus, y compris leur sexe, ne peut être pris en compte pour l’interruption volontaire partielle d’une grossesse multiple.

Enfin, le III dispose que, dans tous les cas (I et II), préalablement à la réunion de l'équipe pluridisciplinaire compétente, la femme concernée ou le couple peut, à sa demande, être entendu par tout ou partie des membres de ladite équipe.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

Il est raisonnable d’espérer qu’une réduction de la prématurité et de la grande prématurité se traduise par une réduction des coûts liés à l’hospitalisation néonatale et aux conséquences médicales à long terme.

En France, le coût de la prise en charge des 60000 à 65000 enfants (dont 10000 grands prématurés, entre 26 et 32 semaines) qui naissent prématurément chaque année est estimé à 1,5 milliards d’euros, mais ce chiffre ne prend pas en compte les coûts secondaires ni les soins post-hospitalisation à long terme.[954].

Le forfait GHS d’un nouveau-né entre 1000 et 1499 g était en France en 2011 de 4032,74 euros, avec un supplément journalier de séjour en réanimation néonatale de 922,98 euros[955].

Dans sa thèse[956], soutenue en 2016, Madame Soilly a calculé le coût moyen du séjour hospitalier d’un prématuré entre 28 et 32 semaines à 34682 euros pour une durée moyenne de séjour de 44 jours.

 

 

[957]

4.3.                       Impacts sociaux

La prématurité est à l’origine de handicaps. Le suivi à l’âge de 5 ans des grands prématurés de la cohorte Epipage[958] a montré que 9 % de ces anciens prématurés présentaient une paralysie cérébrale, 32 % un score cognitif (équivalent au quotient intellectuel) inférieur à 85 et 12 % un score inférieur à 70 et 1% une déficience visuelle sévère. Ce suivi à long terme a également mis en évidence une proportion significativement plus élevée des scores de troubles du comportement chez les anciens prématurés.

4.4.                       Impacts sur les particuliers

En fixant le cadre qui s’applique aux réductions embryonnaires, la mesure permet de délimiter le périmètre de la responsabilité des médecins conduits à réaliser ce type de geste.

5.       consultation et modalités d’application

5.1.                       Consultation

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

5.2.                       Modalités d’application

La mesure est mise en application le lendemain de la promulgation de la loi.

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

 


Article 20 Supprimer le délai de réflexion dans l’interruption de grossesse pour raison médicale

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1 Toute femme enceinte qui souhaite une interruption de grossesse pour raison médicale dans le cadre d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic affectant le fœtus, doit bénéficier, hors urgence médicale, de la proposition d’un délai de réflexion d'au moins une semaine avant de prendre la décision de poursuivre ou d'interrompre sa grossesse.

L’article L.  2213-1 du code de la santé publique, qui encadre la réalisation d’interruption volontaire de grossesse pour raison médicale prévoit, en effet, que :

« (…) Lorsque l'interruption de grossesse est envisagée au motif qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic, l'équipe pluridisciplinaire chargée d'examiner la demande de la femme est celle d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal. Lorsque l'équipe du centre précité se réunit, un médecin choisi par la femme peut, à la demande de celle-ci, être associé à la concertation. Hors urgence médicale, la femme se voit proposer un délai de réflexion d'au moins une semaine avant de décider d'interrompre ou de poursuivre sa grossesse (…) »

1.2 Ce délai de réflexion a été introduit par amendement parlementaire à l’Assemblée nationale lors de la révision de la loi de bioéthique de 2011 en miroir du délai de réflexion existant en matière d'interruption volontaire de grossesse avant la 14ème semaine d’aménorrhée (12ème semaine de grossesse) qui était alors en vigueur.

Les débats ont à l’époque été particulièrement nourris[959].

Il est noté qu’il ne s’applique pas à l’interruption de grossesse pour motif médical quand elle est liée à la santé de la femme mise en péril grave par la poursuite de la grossesse (situation encadrée au deuxième alinéa de l’article L. 2213-1[960])

1.3 En 2016, 7 366 attestations de particulière gravité en vue d'une interruption médicale de grossesse ont été déclarées par les centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal : 7 045 pour motif fœtal et 321 pour motif maternel.

La principale indication des attestations était liée à une malformation fœtale (43,4%), suivie de près par les indications chromosomiques (40,3%), les trois autres indications (géniques, infectieuses, et autres causes fœtales) représentant respectivement 6,8%, 1,2% et 8,3% des cas.

1.2. Cadre constitutionnel

A l’occasion de la décision n°  2015-727 DC du 21 janvier 2016 sur la loi de modernisation de notre système de santé, le Conseil constitutionnel a considéré que la suppression du délai de réflexion d’une semaine entre la demande de la femme d'interrompre sa grossesse et sa confirmation écrite ne rompt pas l’équilibre que le respect de la Constitution impose entre, d'une part, la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme de dégradation et, d'autre part, la liberté de la femme qui découle de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789[961].

En outre, le Conseil constitutionnel précise qu'aucune exigence de valeur constitutionnelle n'impose de façon générale le respect d'un délai de réflexion préalablement à la réalisation d'un acte médical ou chirurgical.

1.3. Cadre conventionnel

Contrairement à l’article 4 de la Convention américaine relative aux droits de l’homme, qui énonce que le droit à la vie doit être protégé « en général à partir de la conception », l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme est silencieux sur les limites temporelles du droit à la vie et, en particulier, il ne définit pas qui est la « personne » dont « la vie » est protégée par la Convention (Vo c. France, n° 53924/00, § 75, 8 juillet 2004).

La Cour considère que faute de consensus européen sur la définition scientifique et juridique des débuts de la vie, le point de départ du droit à la vie relève de la marge d’appréciation qu’elle estime généralement devoir être reconnue aux États dans ce domaine (Vo c. France, § 82).

Dans l’affaire Vo c. France, où la requérante avait dû subir un avortement thérapeutique en raison d’une faute médicale, la Cour a jugé inutile d’examiner le point de savoir si la fin brutale de sa grossesse entrait ou non dans le champ d’application de l’article 2, dans la mesure où, à supposer même que celui-ci s’appliquerait, les exigences liées à la préservation de la vie dans le domaine de la santé publique n’avaient pas été méconnues par l’État défendeur[962] (§ 85).

Dans l’affaire Evans c. Royaume-Uni (n°633905, 10 avril 2007), où la requérante se plaignait de ce que la législation britannique permettait à son ancien compagnon de retirer son consentement au stockage et à l’utilisation d’embryons créés par le couple, la Cour a constaté que le droit britannique ne reconnaissait pas à l’embryon la qualité de sujet de droit autonome et ne l’autorisait pas à se prévaloir – par personne interposée – du droit à la vie garanti par l’article 2, et qu’un embryon ne bénéficiait donc pas du droit à la vie au sens de l’article 2 (§§ 54-56).

1.4. Éléments de droit comparé

L'interruption de grossesse (quel qu’en soit le motif donc y compris s’il est médical) résulte de dispositions spécifiques en Irlande, en Italie et en Suède[963] et de dispositions pénales (Code pénal) en Belgique, en Suisse et en Allemagne.

L’interruption de grossesse pour raison médicale est possible afin de préserver la vie de la femme enceinte (ce qui correspond au deuxième alinéa de l’article L. 2213-1 précité) :

-          En Allemagne et en Belgique, au-delà des 12 semaines à compter de la conception ;

-          En Irlande, sous réserve de l'obtention de l'agrément de deux médecins ;

-          En Italie, au-delà de 90 jours d'aménorrhée ;

-          En Pologne, lorsque la grossesse constitue une menace pour la santé de la femme enceinte et tant que le fœtus n'a pas la faculté de vivre ;

-          En Suède, après la fin de la 18e semaine, avec l'accord de la direction générale de la Santé ;

-          En Suisse « le danger devant être d'autant plus grave que la grossesse est avancée ».

Dans ces mêmes pays, l'interruption de grossesse pour raison médicale est possible en cas de maladie incurable du fœtus (ce qui correspond au troisième alinéa de l’article L. 2213-1 précité) :

-          En Belgique, au-delà des 12 semaines à compter de la conception ;

-          En Italie durant les 90 premiers jours d'aménorrhée ;

-          En Pologne, lorsque les examens prénataux ou d'autres éléments médicaux montrent l'existence d'une forte probabilité de handicaps lourds et irréversibles du fœtus, qui n'a pas la faculté de vivre hors de l'organisme de la femme, ou d'une maladie incurable menaçant sa vie ;

-          En Suède après la fin de la 18e semaine, avec l'accord de la direction générale de la Santé ;

-          En Allemagne, en vertu de l'interprétation faite de la loi[964].

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.                       Nécessité de légiférer

Le délai de réflexion, introduit par le législateur en 2011, dans le cadre d’une interruption de grossesse pour motif médical en lien avec l’état de santé du fœtus pose plusieurs problèmes.

2.1.1 Tout d’abord, une incertitude persiste sur le point de départ de ce délai proposé à la femme enceinte. Il est, en général, compris comme débutant au moment où la femme enceinte exprime explicitement, à un membre du centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, sa demande d’interruption de grossesse pour raison médicale, après que l’équipe pluridisciplinaire qui la prend en charge, lui a fourni, au fil de cet accompagnement et des résultats obtenus, l’ensemble des éléments médicaux diagnostics et pronostics (qui attestent, par ailleurs, que les critères d’une telle interruption sont remplis).

Or, les débats de 2011 laissent supposer que certains parlementaires faisaient coïncider le point de départ de ce délai avec une annonce, qui serait ponctuelle, du diagnostic.

En réalité, s’il est essentiel que la femme dispose du temps nécessaire pour mûrir sa décision, cette dernière est toujours le point d’aboutissement de tout un processus préalable qui comporte :

-          Des actes techniques d’imagerie et de biologie médicale et des consultations successives permettant de l’informer, au fur et à mesure des résultats, de manière claire, loyale et adaptée, notamment en lui fournissant, chaque fois, des informations sur les différentes possibilités de prise en charge, dont l’interruption de la grossesse ou un accompagnement, le cas échéant, palliatif ;

-          Des temps privilégiés d’écoute et de dialogue ;

-          Un accompagnement pluridisciplinaire.

2.1.2 La confirmation de la particulière gravité et de l’incurabilité de la pathologie fœtale ne survient jamais de façon brutale.

A partir de cette confirmation, un temps, variable pour chaque femme (/couple), est toujours respecté par l’équipe du centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal pour lui permettre de réfléchir, de rencontrer d’autres personnes (professionnels, psychologues, religieux, etc.) avant que sa décision, quelle qu’elle soit, soit prise. Les médecins, sages-femmes, psychologues de l’équipe pluridisciplinaire adaptent cette période de réflexion en fonction des situations et des demandes des femmes (/des couples).

L’interruption de grossesse n’est jamais réalisée le jour même de la demande, ni le lendemain. Son organisation demande toujours un délai de quelques jours, mis à profit pour effectuer la consultation pré-anesthésique et pour prendre les traitements[965] qui vont commencer à préparer l’utérus.

De plus, les équipes des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal connaissent l’importance de la temporalité dans l’élaboration du processus de deuil qui se met en place au moment de l’interruption de la grossesse, et, a contrario, l’effet délétère de la précipitation à réaliser cette interruption.

2.1.3 La disposition introduite par la révision bioéthique de 2011 contraint les médecins des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal, à l’issue de la démarche (ce qui peut prendre plusieurs semaines) ayant conduit à confirmer le diagnostic et le pronostic fœtal et ayant permis à la femme enceinte de se positionner, à l’informer de la possibilité d’un délai de réflexion qui apparait alors comme supplémentaire suggérant qu’elle n’a peut-être pas assez réfléchi aux conséquences de sa décision.

Si la formulation retenue par le législateur en 2011 pourrait paraitre non contraignante (le délai de réflexion étant proposé et non imposé, et la femme restant libre de l’accepter ou non), il s’avère, en réalité, que ce dispositif est coercitif.

En effet, il oblige le médecin à proposer obligatoirement à la femme ce délai légal qui fait donc irruption dans le colloque singulier et la relation de confiance qui s’est nécessairement installée entre le médecin/l’équipe et la femme. Cette proposition peut-être à l’origine d’un sentiment de culpabilité chez la femme et interfère dans son libre-arbitre.

2.1.4 Il n’y a pas d’étude spécifique portant sur les suites données par les femmes à la proposition de ce délai supplémentaire de réflexion (introduit en 2011) qui permettrait d’objectiver les pratiques. Si l’Agence de la biomédecine collige le nombre de grossesses poursuivies avec une pathologie fœtale qui auraient pu faire délivrer une attestation de particulière gravité en vue d'une interruption de grossesse pour motif médical[966], aucun lien n’est établi avec le délai qui est aujourd’hui systématiquement proposé à la femme enceinte. Mais les praticiens interrogés indiquent que, dans les faits, la femme (/le couple), lorsqu’elle a pris sa décision, ne sollicite qu’exceptionnellement ce délai supplémentaire et qu’à leur connaissance, aucune décision de poursuite de la grossesse n’est prise au cours d’un éventuel délai de réflexion.

2.1.5 Par ailleurs, dans le cadre d'une interruption volontaire de grossesse avant la 14ème semaine d’aménorrhée, la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a supprimé le délai d’une semaine qui était prévu par l’article L. 2212-5 du code de la santé publique – après des débats également nourris.

Dans sa rédaction antérieure à cette loi, cet article prévoyait que :

« Si la femme renouvelle, après les consultations prévues aux articles L. 2212-3 et L. 2212-4, sa demande d'interruption de grossesse, le médecin doit lui demander une confirmation écrite ; il ne peut accepter cette confirmation qu'après l'expiration d'un délai d'une semaine suivant la première demande de la femme, sauf dans le cas où le terme des douze semaines risquerait d'être dépassé. Cette confirmation ne peut intervenir qu'après l'expiration d'un délai de deux jours suivant l'entretien prévu à l'article L. 2212-4, ce délai pouvant être inclus dans celui d'une semaine prévu ci-dessus. ».

La nouvelle rédaction a supprimé ce délai d’une semaine :

« Si la femme renouvelle, après les consultations prévues aux articles L. 2212-3 et L. 2212-4, sa demande d'interruption de grossesse, le médecin ou la sage-femme doit lui demander une confirmation écrite. Cette confirmation ne peut intervenir qu'après l'expiration d'un délai de deux jours suivant l'entretien prévu à l'article L. 2212-4. ».

L’ensemble de ces raisons justifie la suppression du délai de réflexion introduit par le législateur en 2011.

2.2.                       Objectifs poursuivis

La nouvelle règle, en supprimant le délai prévu à l’article L. 2213-1 du code de la santé publique, permet de respecter la temporalité individuelle de chaque décision d’interruption de grossesse pour raison médicale et de supprimer une contrainte inutile pour l’équipe pluridisciplinaire. Elle vise également à témoigner la confiance dans les choix, toujours difficiles, auxquels sont soumis les femmes et les couples placés dans de telles situations.

3.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

3.1 La présente mesure modifiera la rédaction de l’article L. 2213-1 du code de la santé publique pour supprimer le délai de réflexion proposé de façon systématique à la femme enceinte souhaitant solliciter une interruption de grossesse pour raison médicale alors que le fœtus est atteint d’une maladie d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic.

3.2 La suppression de la proposition systématique d’un délai de réflexion va simplifier le travail des équipes pluridisciplinaires qui accompagnent les femmes enceintes confrontées à une interruption de grossesse pour raison médicale.

L’équipe pluridisciplinaire pourra ainsi davantage se consacrer à l’accompagnement humain des femmes et des couples concernés plutôt qu’aux explications relatives au délai de réflexion imposé par les textes en vigueur.

4.       CONSULTATION ET modalités d’application

4.1.                       Consultation

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

4.2.                       Modalités d’application

La mesure est d’application immédiate.

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

 


Article 21 Clarifier les conditions d’interruption de grossesse pour raison médicale pour les mineures

1.             État des lieux

1.1 L’article L. 2213-2 du code de la santé publique encadre les modalités de réalisation de l’interruption volontaire de grossesse pratiquée pour motif médical, en procédant par renvoi au chapitre relatif à l’interruption pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse (qui relève des mêmes Titre, Livre et Partie) :

« Les dispositions des articles L. 2212-2 et L. 2212-8 à L. 2212-10 sont applicables à l'interruption volontaire de la grossesse pratiquée pour motif médical. Toutefois, l'interruption volontaire de grossesse pour motif médical ne peut être pratiquée que par un médecin. »

1.2 L’article L. 2212-7 du code de la santé publique, qui encadre les modalités de consentement de la femme mineure à une interruption volontaire de grossesse[967], se trouve exclu du renvoi opéré par l’article L. 2213-2 du même code.

Si l’article de « droit commun » concernant la femme mineure et le secret à l’égard de ses parents (article L. 1111-5[968] du code de la santé publique) a a priori vocation à s’appliquer (la « sauvegarde de la santé » de la femme mineure étant en jeu) lorsque l’IVG est pratiquée pour motif médical, l’exclusion du renvoi à l'article L. 2212-7 par celui qui encadre la réalisation de l’interruption de grossesse pour motif médical, fragilise cette interprétation.

Dans ce contexte, les équipes des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal, confrontées à de telles situations, se sont interrogées à plusieurs reprises sur la position à adopter et ont sollicité l’avis du service juridique de leur établissement. Ce dernier s’est parfois adressé au Juge des enfants.

Il apparait ainsi nécessaire de mentionner explicitement (par un article ou un renvoi clair) la possibilité de réaliser une interruption de grossesse pour raison médicale chez une femme mineure qui désire garder le secret à l’égard de ses parents.

En outre, le renvoi à l’article L.2212-9 du code de la santé publique, opéré par l’article L. 2213-2 du code de la santé publique, est particulièrement maladroit, cet article disposant, en effet, que :

« Tout établissement dans lequel est pratiquée une interruption de grossesse doit assurer, après l'intervention, l'information de la femme en matière de régulation des naissances. »

La femme enceinte qui doit subir une interruption de grossesse pour raison médicale ne relève évidemment pas d’un conseil en matière de régulation des naissances.

En sus de cette erreur, une lecture adaptée des articles relatifs à l’interruption de grossesse avant la douzième semaine de grossesse doit être systématiquement réalisée en cas de motif médical. Ce qui demande un certain effort.

Il apparait donc nécessaire de mettre en cohérence les renvois actuels.

1.3 En 2016, 7 366 attestations de particulière gravité en vue d'une interruption médicale de grossesse ont été déclarées par les centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal : 7 045 pour motif fœtal et 321 pour motif maternel.

La principale indication des attestations était liée à une malformation fœtale (43,4%), suivie de près par les indications chromosomiques (40,3%), les trois autres indications (géniques, infectieuses, et autres causes fœtales) représentant respectivement 6,8%, 1,2% et 8,3% des cas.

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

La règle envisagée clarifie la situation de la femme mineure concernée par une interruption de grossesse pour raison médicale et qui désire garder le secret à l’égard de ses parents. Elle permet également de mettre en cohérence les renvois auxquels il est procédé à l’article L. 2213-2 du code de la santé publique.

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1.                       Options envisagées

Deux options s’offraient au Gouvernement:

-          Continuer de procéder par renvoi en clarifiant les articles qui s’appliquent ;

-          Reprendre intégralement les articles relatifs à l’interruption volontaire de grossesse, le cas échéant en les adaptant, pour une meilleure lisibilité et pour éviter toute ambiguïté liée à des modifications ultérieures au sein des dispositions auxquelles il serait renvoyé.

3.2.                       Option retenue

Le choix opéré est celui d’une reprise intégrale, le cas échéant adaptée, des articles qui s’appliquent.

Il n’y a aucune modification sur le fond sinon la clarification de la situation de la femme mineure qui désire garder le secret à l’égard de ses parents et se fait alors accompagner dans sa démarche par la personne majeure de son choix.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

La présente mesure modifiera le chapitre III du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code de la santé publique, est ainsi modifié :

L’article L. 2213-2 est remplacé par les dispositions permettant de clarifier le consentement de la femme mineure non émancipée concernée par une interruption volontaire de grossesse pour motif médical.

Un nouvel article L. 2213-2-1 est inséré pour préciser que l’interruption de grossesse pour motif médical ne peut être pratiquée que par un médecin et ne peut avoir lieu que dans un établissement de santé, public ou privé.

Un nouvel article L. 2213-2-2 est inséré pour préciser qu’un médecin n'est jamais tenu de pratiquer une interruption de grossesse pour motif médical mais il doit informer, sans délai, l'intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens susceptibles de réaliser cette intervention.

4.2.                       Impacts sociaux

La mesure permettra explicitement l’accueil et la prise en charge de la femme mineure qui relève d’une interruption de grossesse pour motif médical et souhaite garder le secret à l’égard de ses parents.

5.       consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

Le Conseil nationale de la protection de l’enfance a été consulté.

5.2.                       Modalités d’application

La mesure est applicable dès le lendemain de la promulgation de la loi. 

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.


Article 22 Permettre la greffe de tissu germinal pour rétablir une fonction hormonale

1.             État des lieux

1.1.                       Cadre général

L’article L. 2141-11 du code de la santé publique dispose que :

« Toute personne dont la prise en charge médicale est susceptible d'altérer la fertilité, ou dont la fertilité risque d'être prématurément altérée, peut bénéficier du recueil et de la conservation de ses gamètes ou de ses tissus germinaux, en vue de la réalisation ultérieure, à son bénéfice, d'une assistance médicale à la procréation, ou en vue de la préservation et de la restauration de sa fertilité. Ce recueil et cette conservation sont subordonnés au consentement de l'intéressé et, le cas échéant, de celui de l'un des titulaires de l'autorité parentale, ou du tuteur, lorsque l'intéressé, mineur ou majeur, fait l'objet d'une mesure de tutelle. (…) ».

Cette disposition permet aux personnes atteintes d’une pathologie qui menace leur fertilité ou exposées à un traitement potentiellement stérilisant de préserver leur fertilité dans un premier temps, dans l’objectif de réaliser une assistance médicale à la procréation ou de restaurer une fonction procréative dans un second temps.

La préservation de la fertilité consiste à recueillir ou prélever les gamètes (en particulier les spermatozoïdes chez l’homme) ou les tissus germinaux (en particulier les tissus ovariens[969] chez la femme) puis à les congeler pour les conserver (cryoconservation).

Ultérieurement, si des gamètes ont été conservés et que la personne appartient à un couple qui forme un projet parental, ces gamètes peuvent être utilisés dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation (insémination artificielle ou fécondation in vitro). Si ce sont des tissus ovariens qui ont été congelés, ils peuvent être greffés dans l’objectif de restaurer la fonction procréative et de permettre une grossesse[970].

Données (Source[971])

Au cours de l’année 2016, selon le rapport médical et scientifique de l’Agence de la biomédecine,

-          Du côté masculin :

-          Du côté féminin :

Au total, au 31 décembre 2016, 60 319 patients disposaient de gamètes et/ou de tissus germinaux conservés en vue de la préservation de la fertilité ; dans 89% des cas, il s’agit de spermatozoïdes conservés.

Même si la réutilisation des gamètes et tissus germinaux conservés reste très limitée[972], en 2016, 862 tentatives d’assistance médicale à la procréation ont été réalisées avec des spermatozoïdes ainsi conservés et 188 enfants sont nés (40 tentatives réalisées avec des ovocytes conservés et naissance de deux enfants).

S’agissant des tissus ovariens, 2 845 patientes sont concernées au 31 décembre 2016. Une vingtaine de greffes en moyenne ont lieu chaque année[973], suivies de tentatives d’assistance médicale à la procréation[974]. Elles ont abouti à la naissance d’un enfant vivant en moyenne chaque année[975].  

1.2.                       Éléments de droit comparé

Dans certains Etats, dont le Danemark ou l’Allemagne, il est proposé de réaliser une greffe de tissus ovariens (prélevés et conservés dans le cadre de la préservation de la fertilité) non pour procréer mais pour restaurer une fonction hormonale endocrine chez ces patientes qui ont été confrontées à une maladie ou à un traitement potentiellement stérilisant et qui n’ont pas ou plus de désir d’enfant[976].

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1 Dans le cadre juridique en vigueur, lorsque les tissus ovariens d’une femme sont conservés en application de l’article L. 2141-11 du code de la santé publique, ils ne peuvent ensuite être utilisés – en l’occurrence greffés chez cette femme - que pour restaurer sa fertilité, c’est à dire lui donner la possibilité de procréer. 

Or, parmi ces femmes, certaines n’ont pas ou plus de projet d’enfant alors que la greffe de tissus ovariens présente également un intérêt pour le rétablissement d'une fonction hormonale, indépendamment de tout objectif de procréation.

En effet, la fonction de procréation et la fonction hormonale de l’ovaire sont liées à la même structure : le follicule ovarien. Le tissu ovarien, lorsqu’il est greffé, s’il permet d’envisager une grossesse, restaure également la fonction endocrine (sécrétion d’hormones) de l’ovaire.

Les premiers résultats de la greffe d’ovaire ont d’ailleurs montré le rétablissement de la fonction endocrine avant de prouver son efficacité pour restaurer la fertilité[977]. Il a été également démontré que l’autogreffe de cortex ovarien (partie de l’ovaire qui contient la réserve de follicules) pouvait induire une puberté[978].  

Pour autant, dans le cadre normatif en vigueur, la seule alternative pour rétablir une fonction hormonale ovarienne est l’administration de traitements hormonaux per os ou percutanés (traitement substitutif).

Bien que ces traitements utilisent des hormones « naturelles », avec une séquence mimant celle d’un cycle naturel, l’imprégnation hormonale reste différente de celle résultant d’un cycle physiologique. De plus, ces traitements hormonaux ne substituent pas les androgènes physiologiquement produits par les ovaires. Enfin, la prise de ces traitements hormonaux, parfois pendant plusieurs décennies, est contraignante.

Les témoignages des patientes, colligés par le Groupe de recherche et d’étude sur la cryoconservation de l’ovaire et du testicule (GRECOT), sont explicites. Après une greffe d’ovaire, elles rapportent que la qualité de vie grâce aux hormones sécrétées par leur ovaire n’a rien de comparable à celle sous traitement hormonal substitutif.

Au final, l’autorisation d’une nouvelle finalité à la greffe de tissu ovarien rend nécessaire une modification de la loi qui encadre strictement les objectifs de préservation de la fertilité.

2.1.2 L’article L. 2141-11 du code de la santé publique ne prévoit pas les modalités d’interrogation régulière des personnes concernées afin de les solliciter sur le devenir des gamètes et tissus germinaux ainsi conservés et d’assurer leur traçabilité. Pas plus qu’il ne prévoit la destruction possible de ces gamètes et tissus germinaux dans certaines conditions.

L’arrêté du 30 juin 2017 modifiant l’arrêté du 11 avril 2008 modifié relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation, sur le fondement du II et du III de l’article R. 2141-19[979] du code de la santé publique[980], prévoit au point IV.5 de son annexe que :

-          Le centre qui conserve les gamètes ou les tissus germinaux interroge chaque année la personne concernée sur son souhait de poursuivre la conservation. La personne peut renoncer à l’autoconservation en consentant au don de gamètes, au don pour la recherche ou à l’arrêt de la conservation

-          Le centre met fin à la conservation des gamètes et des tissus germinaux en cas de décès de la personne ou si la personne concernée n’est plus en âge de procréer.

Toutefois, si cet arrêté a organisé lors de sa dernière révision (juin 2017) les modalités d’interrogation régulière des personnes concernées afin de les solliciter sur le devenir des produits conservés et d’assurer leur traçabilité, les professionnels hésitent à détruire les gamètes et tissus germinaux de crainte que leur responsabilité ne puisse être engagée.

Or la situation devient de plus en plus critique car l’activité de préservation de la fertilité est en plein développement avec une augmentation régulière du nombre de personnes concernées alors même que la cible (toutes les personnes qui pourraient bénéficier de cette conservation préventive) n’est pas encore atteinte.

Une autre sérieuse difficulté concerne les gamètes et tissus germinaux pour lesquels la personne est « perdue de vue ». Elle n’a pas pu être prévue par le décret précité faute de base légale et a justifié un ajout au point IV.2 de l’arrêté précité (« En signant le consentement, le patient et/ou son représentant légal s’engage à tenir l’équipe informée de tout changement sur sa situation personnelle et son adresse et à répondre aux courriers adressés annuellement par le laboratoire »).

Au regard de ce qui précède, il apparait nécessaire de prévoir au niveau de la loi, comme c’est le cas pour les embryons conservés par les CECOS[981] (III de l’article L. 2141-4[982] du code de la santé publique), la destruction des gamètes et des tissus germinaux en cas de décès de la personne ou en l’absence de réponse de la personne sur leur devenir après un délai de relances annuelles.

2.2.                       Objectifs poursuivis

La règle envisagée par le Gouvernement permettra aux patientes, dont le cortex ovarien a été cryoconservé dans le but de préserver leur fertilité et qui n’ont plus ou pas de désir d’enfant, de pouvoir bénéficier d’une autogreffe de ce tissu pour restaurer une fonction endocrine.

Elle a également pour objet de prévoir la destruction des gamètes et des tissus germinaux conservés dans le cadre de la préservation de la fertilité en l’absence de réponse de la personne sur leur devenir après un délai de relances annuelles.

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1 Le Gouvernement fait le choix d’élargir les finalités de la greffe de tissu germinal prélevé et conservé dans le cadre de la préservation de la fertilité, qui sont fixées par la loi. Cette nouvelle finalité permettra de rétablir une fonction hormonale naturelle chez des femmes qui n’ont pas ou plus de projet procréatif.  

Cette autogreffe ne pourra être réalisée que si la patiente le souhaite (et donne un consentement éclairé) et sur indication médicale. Elle sera discutée au sein de l’équipe pluridisciplinaire clinico-biologique d’assistance médicale à la procréation (en tenant compte de la balance bénéfices/risques). Elle pourrait se faire par voie sous-cutanée, réduisant ainsi les risques opératoires.

La règle est étendue aux tissus germinaux masculins (tissus testiculaires) dans la mesure où la conservation de tissus testiculaires est déjà réalisée aujourd’hui en application de l’article L. 2141-11 du code de la santé publique. Toutefois, l’état des connaissances scientifiques est moins avancé, même si les résultats des recherches menées dans ce domaine sont prometteurs[983].

3.2 Le délai au-delà duquel les gamètes et tissus germinaux conservés en application de l’article L. 2141-11 du code de la santé publique pourront être détruits en l’absence de réponse de la personne est fixé à 10 ans. Il est donc deux fois plus long que pour les embryons au regard des risques de perte définitive des chances de procréation avec ses propres gamètes ou tissus germinaux en cas de destruction.

Cette disposition ne pourra concerner que les gamètes et tissus germinaux d’une personne majeure au départ de la période de dix ans. Les dix années d’absence de réponse devront être consécutives.

Les titulaires de l'autorité parentale d'une personne mineure, dont les gamètes ou les tissus germinaux sont conservés, sont contactés chaque année par écrit pour recueillir les informations utiles à la conservation dont un éventuel changement de coordonnées. Ainsi, il ne peut être mis fin à la conservation des gamètes ou des tissus germinaux d'une personne mineure qu'en cas de décès.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

La présente mesure modifiera la rédaction de l’article L. 2141-11 du code de la santé publique.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

Si le nombre de greffes de tissus ovariens est susceptible d’augmenter, il convient de rappeler que la technique est peu invasive et mobilisera des moyens restreints.

Il est difficile à ce stade de prévoir le nombre de femmes qui demanderont à bénéficier de cette autogreffe pour restaurer une fonction hormonale. La congélation d'ovaire s'adresse aux patientes qui ont un risque très élevé d'insuffisance ovarienne après les traitements. Au 31 décembre 2016, 2 845 patientes avaient des tissus ovariens conservés[984]. Potentiellement, toutes ces patientes pourraient être candidates à une greffe de leur cortex ovarien pour rétablir une fonction endocrine. Mais d’autres facteurs interviendront (âge, contexte) et les indications devront être posées par l’équipe médicale concernée.

4.3.                       Impacts sur les particuliers

La mesure envisagée constituera un nouveau droit pour les personnes ayant bénéficié d’une conservation de tissu germinal dans le cadre d’une pathologie cancéreuse par exemple. Elles pourront bénéficier d’une greffe de ce tissu pour restaurer une fonction endocrine et non plus seulement pour envisager d’avoir un enfant.

5.       consultation et modalités d’application

5.1.                       consultation

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.


5.2.                       Modalités d’application

5.2.1.             Application dans le temps

Restauration d’une fonction hormonale

La technique de greffe de tissus ovariens est déjà utilisée dans le but de restaurer la fertilité après maladie ou traitement potentiellement stérilisant. Seules les indications du recours à cette technique seront modifiées. Il n’y a donc pas lieu de prévoir une application différée dans le temps sur ce point.

Devenir des gamètes et tissus germinaux conservés

Une disposition transitoire prévoit, qu’en cas de décès de la personne, il est mis fin à la conservation des gamètes et tissus germinaux conservés à la date de promulgation de la présente loi.

5.2.2.             Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

 

 


Article 23 Elargir les missions des conseillers en génétique

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1 La profession de conseiller en génétique a été créée par la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. Le Sénat, en deuxième lecture, a adopté un amendement du Gouvernement visant à créer cette profession, le ministre chargé de la santé ayant précisé à l’époque que la génétique trouvait son prolongement dans la création de cette nouvelle catégorie d'auxiliaire médical qui s'inspire d'exemples étrangers.

En effet, alors que la spécialité de génétique médicale était encore relativement récente (1995), les besoins des couples et des familles confrontés à un examen de génétique s’étaient avéré très importants en termes d’informations et d’accompagnement et les généticiens ne pouvaient y faire face seuls.

L’article L. 1132-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi du 9 août 2004 susmentionnée, a défini les missions du conseiller en génétique[985].

1.1.2 Le conseiller en génétique intervient sur prescription médicale et sous la responsabilité d’un médecin qualifié en génétique, pour délivrer des informations, donner des conseils et prendre en charge les personnes et leur famille confrontées à la réalisation d’un examen de génétique ou au résultat d’un tel examen.

Ces professionnels sont ainsi chargés de « traduire » les données complexes de la génétique en informations compréhensibles et utiles aux patients pour un conseil génétique non directif. Ils apportent, dans le domaine de la génétique médicale, une aide au consentement éclairé des patients et ils les accompagnent dans leur parcours de soins.

Outre le conseil génétique, les conseillers en génétique sont également chargés de l’évaluation et de la gestion du risque, de la réalisation d’arbres généalogiques, du contact et de l’information des familles, de la prise en compte des dimensions sociales, psychologiques, culturelles, légales et éthiques, etc.

1.1.3 La formation et le diplôme de conseiller en génétique ne sont délivrés que par une seule université française : la faculté de médecine d'Aix-Marseille II qui propose un Master « pathologie humaine » avec une spécialisation « conseil en génétique et médecine préventive ». Pour y être admis, il faut au préalable avoir suivi un cursus médical (avoir obtenu un diplôme de sage-femme ou validé la troisième année de médecine, de pharmacie ou d'odontologie). La formation est également ouverte aux étudiants de professions paramédicales (infirmier, psychologue ou kinésithérapeute) et aux étudiants des filières scientifiques, en particulier dans le domaine de la génétique et de la biologie. Cette formation dure deux ans.

Les conseillers en génétique (actuellement, 155 sont en poste) ont un exercice salarié au sein d’une équipe pluridisciplinaire et travaillent en binôme avec un médecin généticien dans les domaines de la génétique et de la médecine prédictive. Ils exercent en milieu hospitalier, en particulier dans les centres de référence labellisés maladies rares, les centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal[986] et les centres de lutte contre le cancer.

1.1.4 Les généticiens médicaux sont au nombre de 251 en 2017. La majorité d’entre eux exercent à l’hôpital (227 soit 90%)[987].

Le nombre de généticiens médicaux augmente légèrement depuis quelques années : ils étaient 223 en 2013, 233 en 2014, 239 en 2015, 248 en 2016 et 251 en 2017[988].

L’activité de génétique moléculaire est en augmentation constante, passant d’environ 358 000 personnes ayant bénéficié d’un examen de génétique en 2013 à plus de 410 000 en 2017. Le nombre de maladies recherchées a été pratiquement multiplié par trois dans la même période.


 

Résumé de l’activité de génétique moléculaire de 2013 à 2017 (Source : Agence de la biomédecine)

 

2013

2014

2015

2016

2017

Génétique moléculaire

 

 

 

 

 

Nombre d'individus testés

357 841

397 798

379 960

367 724

410 801

Nombre de maladies différentes recherchées

1 274

1 355

1 514

3 053

3 157

Nombre d'examens réalisés

430 152

481 532

407 904

438 838

443 438

Analyse chromosomique par puces

 

 

 

 

 

Nombre de dossiers rendus

14 406

14 711

16 543

17 831

18 022

1.2. Cadre conventionnel

L’article 12 de la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine de 1997 autorise des tests prédictifs de maladies génétiques permettant soit d'identifier le sujet comme porteur d'un gène responsable d'une maladie soit de détecter une prédisposition ou une susceptibilité génétique à une maladie. Ces tests sont réalisés à des fins médicales ou de recherche médicale, et sous réserve d'un conseil génétique approprié.

L’article 8 du Protocole additionnel à la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales de 2008 dispose que lorsqu’un test génétique est envisagé, la personne concernée doit bénéficier au préalable d’une information appropriée portant notamment sur les buts et la nature du test, ainsi que sur les implications de ses résultats. Pour les tests génétiques prédictifs, la personne concernée doit également disposer d’un conseil génétique approprié. Cet article prévoit que la forme et l’étendue de ce conseil génétique doivent être déterminées en fonction des implications des résultats du test et de leur signification particulière pour la personne concernée ou les membres de sa famille et pour des choix en matière de procréation. En outre, le conseil génétique doit être délivré de façon non directive.

Ni la Convention ni le Protocole additionnel ne prévoient les qualifications du professionnel qui délivre l’information et le conseil génétique aux personnes concernées.

1.3. Éléments de droit comparé

1.3.1 Il y aurait seulement 7 000 conseillers en génétique dans le monde, répartis dans une trentaine de pays, dont plus de 60% en Amérique du Nord.[989]

 

Des normes pédagogiques et de compétences professionnelles ont été établies en Europe[990] ainsi qu’aux États-Unis[991] mais les programmes de formation qui existent dans un certain nombre de pays ne sont conformes à aucune norme internationale spécifique.

1.3.2 En 2012, une étude européenne dénombrait 494 conseillers en génétique et 122 infirmières en génétique pour une population concernée de 319 millions d’habitants, dont 300 conseillers en génétique au Royaume-Uni et 75 en France[992]

 

Le Royaume-Uni est le premier pays européen à se doter de conseillers en génétique dans les années 1980. Des programmes de formation ont été lancés à Manchester en 1992 et à Cardiff en 2000[993] ; ces modèles inauguraux de programme de formation ont ensuite été suivis par d’autres pays européens[994]. Le Royaume-Uni a également une longue tradition d'enregistrement professionnel dans le domaine du conseil génétique[995].

 

Ces dernières décennies, le rôle des conseillers en génétiques en Europe a considérablement évolué et leur degré d’autonomie s’est renforcé.[996] Toutefois, en Europe, la profession de conseiller en génétique est marquée par une grande hétérogénéité : au niveau des prérequis professionnels (infirmière, sage-femme, psychologue, etc.), au niveau de la formation, et dans la pratique du conseil génétique. L’organisation des services de génétique clinique, bien établis en Europe, peut donc s’avérer très différente d’un pays à l’autre[997].

 

La composante théorique des programmes de formation est en général relativement similaire d’un pays à l’autre. En revanche, la préparation à la pratique clinique semble moins bien abordée et plus hétérogène[998]. Cela pourrait expliquer les disparités observées en termes de rôle et de degré d’autonomie[999].

 

Alors qu’en France et au Royaume-Uni, la délivrance du conseil génétique est habituellement partagée entre le personnel médical et les conseillers en génétique[1000], certains conseillers en génétique (en Suède par exemple) ne seraient pas activement impliqués dans la délivrance d’un conseil génétique[1001] ; une étude suédoise met en évidence une sous-utilisation potentielle des conseillers en génétique dans certains cas par rapport à d’autres pays[1002].

 

Selon une enquête française[1003], le rôle du conseiller en génétique dépend directement de la relation de confiance établie avec le généticien médical qui se sentira plus ou moins en capacité de déléguer certaines tâches, d’accepter que les rôles respectifs puissent être redéfinis.

 

Le Comité européen de génétique médicale (European Board of Medical Genetics), créé en 2012, développe et promeut des normes pédagogiques et de compétences professionnelles applicables aux conseillers en génétique en Europe. Il comprend trois sous-comités dont celui des infirmières et des conseillers en génétique (Genetic Nurses and Genetic Counsellors).

 

L’objectif de ce sous-comité est d’évaluer les programmes d’enseignement proposés en Europe pour la formation des conseillers en génétique et de vérifier leur compatibilité avec les standards européens[1004]. Jusqu’ici, des programmes de master n’ont été validés que dans cinq pays européens : au Royaume-Uni (Manchester et Cardiff), en France (Marseille), en Espagne (Barcelone), au Portugal (Porto) et en Roumanie[1005]. Le Master proposé par la faculté de médecine d’Aix-Marseille II a donc été l’un des premiers programmes d’enseignement approuvé par l’European Board of Medical Genetics.

 

Avec l’aval de la Société européenne de génétique humaine (European Society of Human Genetics), le Comité européen de génétique médicale propose un système d'enregistrement européen pour les infirmières et conseillers en génétique depuis 2013 (évaluation et enregistrement de ceux qui sont jugés compétents)[1006].

 

La plupart des pays européens ne dispose pas encore de systèmes d’enregistrement nationaux, ni d'associations nationales spécifiques, ni de lignes directrices pour guider la formation et la pratique.[1007] Ce qui légitime d’autant plus cette approche européenne afin de faciliter la création de master dans les pays qui ne disposent pas d’enseignement spécifique.

 

En Europe, la plupart des conseillers en génétique travaillent généralement au sein d’équipes multidisciplinaires dans des services de génétique clinique. Les conseillers en génétique peuvent aussi exercer de façon autonome dans le cadre de spécialités non génétiques comme la cancérologie, par exemple. De plus en plus de conseillers en génétique exercent aussi en indépendants dans des cabinets privés, comme au Royaume-Uni par exemple[1008]

 

1.3.3 Dans certains Etats situés en dehors de l’Union européenne, des infirmières et conseillers en génétique travaillent depuis au moins 35 ans, et la tradition d’enregistrement professionnel est parfois très ancienne comme aux Etats-Unis, au Canada (Canadian Association of Genetic Counsellors) ou en Australie[1009].

 

Aux Etats-Unis, le premier programme de formation destiné aux conseillers en génétique a été créé en 1969 à New York. Un système d’accréditation a été instauré par l’American Board of Genetic Counselling (ABGC) en 1993. Aujourd’hui, il y aurait plus d’une trentaine de programmes de formation agréés par l'ABGC[1010].

 

Des systèmes d’enregistrement et de certification des conseillers en génétique existent également en Afrique du Sud[1011] et en Israël[1012].

 

En Amérique du Nord, au Canada et en Afrique du Sud, les conseillers en génétique sont de plus en plus employés par des laboratoires[1013]

 

1.3.4 Très peu de pays ont adopté une législation spécifique en matière de tests génétiques. L'accès à ces tests est donc peu réglementé[1014].

 

En Allemagne, en Suisse et au Portugal notamment, les tests génétiques ne peuvent être effectués qu’après une prescription médicale, alors qu’en Belgique, au Royaume-Uni, en Grèce et en Slovénie, ils sont en accès libre.

 

Aux États-Unis, des tests génétiques sont accessibles sans prescription médicale et sont facturés par les laboratoires.

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

Les besoins en matière de génétique (accueil, conseil spécialisé, prise en charge et suivi) augmentent régulièrement et ne peuvent que poursuivre cette progression dans les années à venir comme en témoigne les données précisées au point 1.1.4.

Or, comme cela a déjà été mentionné, les médecins qualifiés en génétique ne pourront à eux seuls répondre à cette demande en augmentation.

Si l’intervention des conseillers en génétique apporte un soutien apprécié et reconnu dans le domaine de l’information et de l’accompagnement des personnes, les médecins qualifiés en génétique souhaiteraient étendre, toujours sous leur autorité, le rôle du conseiller en génétique à d’autres tâches que celles prévues actuellement par la loi, notamment à la prescription de certains examens de génétique.

Les défis de l’organisation de la génétique de demain nécessitent des transformations des modèles professionnels. La complémentarité entre les professions médicales et non médicales doit être organisée pour faire face à l’augmentation des besoins mais aussi pour garantir la qualité et la sécurité des pratiques, comme cela existe pour les infirmiers[1015], les orthoptistes[1016] ou les manipulateurs d’électroradiologie médicale[1017] (MERM).

Dans tous les cas, les patients rencontreront le médecin généticien (qui reste seul habilité à communiquer le résultat à la personne conformément à l’article L. 1131-1-3 du code de la santé publique) mais la mesure permet que, dans certains cas, le résultat de l’examen (prescrit par le conseiller en génétique en amont) soit déjà disponible lors de cette consultation au bénéfice du patient (réduction des délais d’attente et d’incertitude).

Le Comité consultatif national d'éthique, dans son avis 129[1018], se prononce en faveur de cette possibilité de prescrire par les conseillers en génétique. Le Conseil d’État, dans son étude sur la révision de la loi de bioéthique du 28 juin 2018[1019], « préconise de réfléchir dès à présent à un élargissement du rôle de conseiller en génétique (…) à de nouvelles tâches. »

2.2. Objectifs poursuivis

La règle envisagée par le Gouvernement a pour objet de permettre aux conseillers en génétique de compléter l’aide qu’ils apportent déjà aux médecins généticiens en prescrivant certains examens de génétique pré et postnatals dans des conditions fixées par voie réglementaire.

L’objectif est à la fois de soulager les médecins généticiens et de réduire les délais d’attente pour les patients concernés.

3.       Options possibles et dispositif retenu

Si, dans les trois exemples d’auxiliaires médicaux sus-précisés, la complémentarité entre professions médicales et non médicales intervient seulement au niveau réglementaire, la possibilité de prescrire un examen de génétique qui est un examen de biologie médicale par un professionnel de santé non médecin relève du domaine de la loi.

En effet, la prescription (de médicaments, d’examens radiologiques ou biologiques, de traitements physiques ou d’actes de kinésithérapie) est un acte purement médical qui ne peut être délégué que par la loi (exemple récent des auxiliaires médicaux autorisés par la loi du 21 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé à exercer en pratique avancée, article L. 4301-1 du code de la santé publique). Les conditions de cette délégation seront renvoyées au niveau réglementaire.

Dans tous les cas, les résultats seront communiqués à la personne concernée par le médecin sous la responsabilité duquel le conseiller en génétique agit dans des conditions précisées par décret en Conseil d’Etat après avis de l’Académie nationale de médecine.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1. Impacts juridiques

La présente mesure modifiera la rédaction de l’article L. 1132-1 du code de la santé publique pour prévoir que le conseiller en génétique puisse prescrire certains examens de biologie médicale (examens des caractéristiques génétiques pré et post natals).

Par ailleurs, pour que les conseillers en génétique puissent prescrire sans encourir d’infraction au titre de l’exercice illégal de la médecine, l’article L. 4161-1 du code de la santé publique doit également être modifié[1020]. Son dernier alinéa doit être complété pour exclure des dispositions de l’article les conseillers en génétique qui prescriront des examens de génétique en application de l’article L. 1132-1 du même code.

S’agissant des textes sur la biologie médicale, l’article L. 6211-8 du code de la santé publique précise :

« Un examen de biologie médicale est réalisé sur le fondement d'une prescription qui contient les éléments cliniques pertinents. (…) »

Cet article ne qualifiant pas le prescripteur, il n’est donc pas nécessaire d’y apporter des modifications.

4.2. Impacts sur les particuliers

La mesure favorisera la prise en charge des personnes concernées par un examen de génétique avec un accès facilité dans certaines circonstances prévues par le protocole.

5.       Consultations et modalités d’application

5.1. Consultations

Le Conseil national de l’Ordre des médecins a été consulté. Il a rendu son avis le 4 juillet 2019.

La Haute autorité de santé a été consultée. Elle a transmis son avis le 12 juillet 2019.

L’Agence de la biomédecine est favorable à cette mesure. Elle précise dans son rapport sur l’application de la loi de bioéthique du 11 janvier 2018[1021] :

« Il s’agirait en particulier de pouvoir déléguer, au cas par cas, la prescription d’examens de génétique prénatals ou postnatals. Actuellement, le conseiller en génétique peut procéder à l’information d’une personne en amont de la prescription, mais ne peut pas prescrire l’examen pour lequel il apporte cette information. »

5.2. Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

Les conseillers en génétique exercent déjà dans les consultations de génétique et les centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal) Il s’agit de prévoir un élargissement de leurs missions mais sans que cela ne nécessite d’adaptation spécifique en termes de formation initiale ou complémentaire. Il n’y a donc pas lieu de prévoir une application différée dans le temps de la présente disposition, sous réserve du point 5.2.3.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

5.2.3.      Textes d’application

Un décret en Conseil d’Etat (après avis de l’Académie nationale de médecine) doit préciser les modalités de mise en œuvre de la règle nouvelle pour autoriser le conseiller en génétique à prescrire des examens de biologie médicale avant que la personne consulte le médecin qualifié en génétique ainsi que les modalités de communication des résultats à la personne concernée par le médecin qualifié en génétique.

 


Article 24 Garantir une transmission sécurisée des résultats de génétique entre laboratoires 

1.             État des lieux

1.1 Un examen de biologie médicale se décompose en trois phases qui sont définies à l’article L. 6211-2 du code de la santé publique :

« Un examen de biologie médicale se déroule en trois phases :

1° La phase pré-analytique, qui comprend le prélèvement d'un échantillon biologique sur un être humain, le recueil des éléments cliniques pertinents, la préparation, le transport et la conservation de l'échantillon biologique jusqu'à l'endroit où il est analysé ;

2° La phase analytique, qui est le processus technique permettant l'obtention d'un résultat d'analyse biologique ;

3° La phase post-analytique, qui comprend la validation, l'interprétation contextuelle du résultat ainsi que la communication appropriée du résultat au prescripteur et, dans les conditions fixées à l'article L. 1111-2, au patient, dans un délai compatible avec l'état de l'art. »

1.2 Les examens des caractéristiques génétiques à des fins médicales sont exclusivement réalisés dans des laboratoires de biologie médicale autorisés par les Agences régionales de santé en application de l’article L. 1131-2-1 du code de la santé publique par des praticiens agréés par l’Agence de la biomédecine en application de l’article L. 1131-3 du même code.

Toutefois, comme souvent en biologie médicale, plusieurs laboratoires peuvent intervenir en amont de la phase analytique (processus technique permettant l'obtention du résultat d'analyse et réalisé, en l’espèce, par le laboratoire autorisé). C’est le cas notamment si le prélèvement est effectué dans un laboratoire différent qui doit alors transmettre l’échantillon biologique au laboratoire autorisé.

L’article L. 1131-1-3 du code de la santé publique prévoit que « seul le médecin prescripteur [d’un examen des caractéristiques génétiques] est habilité à communiquer les résultats à la personne concernée ».

Le laboratoire de biologie médicale, en l’occurrence celui qui a réalisé le prélèvement, ne peut donc remettre directement le résultat à la personne concernée, comme c’est le cas pour la majorité des examens de biologie médicale. 

Cette dérogation est justifiée par le fait que le résultat d’un examen de génétique intéresse la personne mais également les membres de sa famille potentiellement concernés, et qu’il convient d’éviter une remise inadéquate d’informations potentiellement angoissantes ou dont les implications pour la personne ou pour des tiers pourraient être mal interprétées. La restitution du résultat doit se faire dans le cadre d’une consultation médicale individuelle par le médecin qui a prescrit l’examen.

Données[1022] :

Laboratoires ayant déclaré une activité de génétique postnatale en 2017

 

2017

Nombre de laboratoires avec une activité de cytogénétique

63

Nombre de laboratoires avec une activité de génétique moléculaire

191

avec une activité à autorisation non limitée

125

avec une activité à autorisation limitée

66

Nombre total de laboratoires*

225

 

 

*Certains laboratoires proposent une activité de génétique moléculaire et de cytogénétique.

 

Résumé de l’activité de génétique postnatale 2017

 

2017

Cytogénétique

 

Nombre d'individus testés

67 761

Nombre total d'analyses

78 308

Génétique moléculaire (y compris pharmacogénétique)

 

Nombre d'individus testés

410 801

Nombre de maladies différentes recherchées

3 157

Nombre d'examens réalisés

443 438

Analyse chromosomique par puces

 

Nombre de dossiers rendus

18 022

 

1.3 Les examens de biologie médicale de diagnostic prénatal sont exclusivement réalisés dans des laboratoires de biologie médicale autorisés par les Agences régionales de santé, en application du VII de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique, et par des praticiens « en mesure de prouver leur compétence », en application du même alinéa.

Le résultat des examens de biologie médicale permettant d'évaluer le risque que l'embryon ou le fœtus présente une affection susceptible de modifier le déroulement ou le suivi de la grossesse (examens mentionnés au II de cet article[1023]), doit être rendu à la femme enceinte par le seul prescripteur de ces examens (qui peut-être médecin ou sage-femme), conformément au III de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique :

« III. - Le prescripteur, médecin ou sage-femme, communique les résultats de ces examens à la femme enceinte et lui donne toute l'information nécessaire à leur compréhension. »

Données[1024] :

Résumé de l’activité prénatale 2016

 

Nombre de laboratoires

Nombre de fœtus étudiés

Nombre de diagnostics positifs

Cytogénétique

60

24 496

3 923

Génétique moléculaire

65

 

 

ž  Prélèvements invasifs(a)

50

2 581

524

ž  Prélèvements non invasifs(b)

14

21 161(c)

425(d)

Biologie infectieuse

47

 

 

ž  Parasitologie seule

24

1 080

81

ž  Virologie seule

29

5 006

191

Biochimie fœtale et marqueurs sériques

 

 

 

ž  Maladies héréditaires sur antécédent familial

3

16

2

ž  Hormonologie

3

53

39

ž  Défaut de fermeture du tube neural

8

1 310

98

ž  Marqueurs sériques

85

659 493(c)

26 869(d)

(a) Diagnostic réalisé à partir de prélèvements sur tissus annexiels, embryonnaires ou fœtaux

(b) Dépistage d'aneuploïdies sur ADN fœtal libre circulant dans le sang maternel

(c) Nombre de femmes testées

(d) Nombre de femmes considérées à risque

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1. Nécessité de légiférer

2.1.1 Les examens des caractéristiques génétiques relèvent de principes spécifiques dérogatoires au droit commun (notamment en termes d’information et de consentement du patient, de rendu des résultats, d’information des membres de la famille potentiellement concernés). Ces principes et dérogations sont précisés au code civil (notamment à l’article 16-10 qui porte sur le consentement à un examen de génétique) ainsi qu’au Chapitre Ier du Titre III du Livre Ier de la première partie du code de la santé publique. Les enjeux de confidentialité sont forts.

Or, si une dérogation existe pour la transmission du résultat de génétique au patient par le prescripteur exclusivement (Article L.  1131-1-3 du code de la santé publique), rien n’est prévu spécifiquement, sinon le droit commun, pour la transmission du résultat au prescripteur par le laboratoire de biologie médicale.

Quand plusieurs laboratoires interviennent, les dispositions qui s’appliquent aujourd’hui sont celles de l’article L 6211-19 du code de la santé publique qui, dans son II, dispose que :

« II. - Le laboratoire de biologie médicale qui transmet des échantillons biologiques à un autre laboratoire n'est pas déchargé de sa responsabilité vis-à-vis du patient.

« La communication appropriée du résultat d'un examen de biologie médicale dont l'analyse et l'interprétation ont été réalisées par un autre laboratoire de biologie médicale est, sauf urgence motivée, effectuée par le laboratoire qui a transmis l'échantillon conformément aux dispositions du 3° de l'article L. 6211-2. Celui-ci complète l'interprétation dans le contexte des autres examens qu'il a lui-même réalisés. »

Par conséquent, « sauf urgence motivée » (ce qui n’est pas le cas habituel des examens de génétique, la majorité ne revêtant pas de caractère d’urgence), c’est le laboratoire « intermédiaire » (qui est intervenu pour transmettre l’échantillon au laboratoire autorisé pour que ce dernier réalise la phase analytique) qui doit communiquer le résultat, une fois qu’il est disponible, au prescripteur.

L’objectif du II de l’article L. 6211-19 du code de la santé publique est que ce laboratoire « intermédiaire » complète, le cas échéant, l’interprétation qu’il a reçue du (ou des) laboratoire(s) ayant réalisé la phase analytique, au regard de l’ensemble des résultats qu’il a vocation à centraliser.

Or, en présence d’un examen des caractéristiques génétiques, cette intermédiation pose problème :

-          Elle ne se justifie pas par la remise directe du résultat au patient par le laboratoire « intermédiaire » (la proximité avec le patient aurait pu le justifier)  ; en effet, l’article L. 1131-1-3 précité exclut la remise directe du résultat au patient par le biologiste ;

-          Le laboratoire de premier niveau n’a pas l’expertise pour compléter l’interprétation du résultat (il s’agit d’un examen hautement spécialisé et l’ensemble du contexte médical est transmis, avec le consentement écrit de la personne, au laboratoire autorisé qui réalise la phase analytique) ;

-          Le médecin prescripteur a besoin d’échanger avec le laboratoire spécialisé (qui a réalisé la phase analytique), seul à même de lui apporter les précisions utiles ;

-          Les résultats de génétique sont hautement sensibles et il convient d’éviter la multiplication d’intermédiaires détenteurs de ces résultats pour éviter tout risque de communication directe au patient par erreur ou de communication de résultats « incidents » non souhaités à ce patient… ; étant précisé que les nouvelles techniques utilisées en génétique démultiplient ces risques.

Dans cette matière, le circuit de transmission des résultats au prescripteur, dès lors que plusieurs laboratoires interviennent, ne peut relever du droit commun.

Ainsi que le note le Comité consultatif national d'éthique dans son avis n° 124[1025] : « les règles qui gouvernent l’examen des caractéristiques génétiques sont caractérisées par le souci de ne pas traiter le test génétique comme un « banal » examen de biologie médicale ».

Par conséquent, il faut permettre aux laboratoires spécialisés (autorisés par les agences régionales de santé pour réaliser des examens des caractéristiques génétiques) de transmettre directement les résultats de ces examens au prescripteur - ce qui nécessite une dérogation explicite aux dispositions législatives régissant le domaine de la biologie médicale (articles L 6211-1 et suivants du code de la santé publique), comme c’est déjà le cas pour le rendu du résultat au patient par le médecin prescripteur exclusivement.

Cette dérogation visera également l’article L. 6211-11 du code de la santé publique qui énonce une responsabilité du laboratoire initial (celui qui a transmis l’échantillon) :

« Le biologiste-responsable du laboratoire de biologie médicale auquel le patient s'est adressé conserve la responsabilité de l'ensemble des phases de l'examen de biologie médicale, y compris lorsque l'une d'elles, dans les cas prévus au présent titre, est réalisée, en tout ou en partie, par un autre laboratoire de biologie médicale que celui où il exerce, ou en dehors d'un laboratoire de biologie médicale. ».

Enfin, cette dérogation explicite mettra fin à toute ambiguïté dans les pratiques actuelles[1026].

2.1.2 La situation est identique pour les examens de biologie médicale de diagnostic prénatal.

Aujourd’hui, la transmission du résultat au prescripteur relève du droit commun et incombe au laboratoire auquel la femme enceinte s’est adressée pour le prélèvement (et non à celui qui a réalisé la phase analytique de l’examen).

Toutefois, une difficulté supplémentaire apparait dans le domaine prénatal.

En effet, s’il existe une dérogation pour le rendu des résultats des examens de biologie médicale permettant d'évaluer le risque que l'embryon ou le fœtus présente une affection susceptible de modifier le déroulement ou le suivi de la grossesse[1027] (le II de l’article L. 2131-1 précité prévoit que ces résultats sont rendus exclusivement par le médecin ou la sage-femme qui a prescrit les examens), rien n’est précisé pour le rendu des résultats des examens mentionnés au IV du même article, qui sont principalement représentés par des examens de génétique (cytogénétique et génétique moléculaire) réalisés après prélèvement fœtal in utero (amniocentèse ou choriocentèse) :

« IV. - En cas de risque avéré, de nouveaux examens de biologie médicale et d'imagerie à visée diagnostique peuvent être proposés par un médecin, le cas échéant membre d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, au cours d'une consultation adaptée à l'affection recherchée. ».

Il est donc nécessaire de prévoir au niveau de la loi le rendu des résultats de ces examens de biologie médicale par le médecin (le cas échéant membre d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal) qui les a prescrits. Ce dernier délivrera à la femme enceinte toute l’information nécessaire à la bonne compréhension de ces résultats, notamment concernant leurs conséquences potentielles pour la suite de sa prise en charge (étant précisé que les résultats de ces examens pourront conduire la femme à solliciter une interruption de grossesse pour raison médicale).

2.2. Objectifs poursuivis

2.2.1 La présente mesure concerne à la fois les examens de génétique réalisés en post-natal chez une personne (examens des caractéristiques génétiques), encadrés aux articles L. 1131-1 et suivants du code de la santé publique, et les examens de génétique réalisés en prénatal sur l’embryon ou le fœtus in utero, encadrés aux articles L. 2131-1 et suivants du code de la santé publique.

Si l’objectif de la mesure est identique pour les deux champs considérés (et concerne les modalités de transmission des résultats des examens de génétique), elle conduit à distinguer les deux situations au regard des spécificités de leur encadrement respectif. 

2.2.2 La règle nouvelle a pour objet de permettre aux laboratoires, autorisés par les agences régionales de santé à réaliser des examens de génétique (tant dans le domaine postnatal que prénatal), de transmettre directement les résultats, qu’ils ont validés et interprétés de façon contextuelle, au prescripteur de l’examen (médecin ou sage-femme, seuls habilités à restituer ces résultats au patient).

La règle nouvelle a également pour objet de permettre que le résultat d’un examen de biologie médicale de diagnostic prénatal soit restitué à la femme enceinte par le prescripteur de l’examen.

Dans tous les cas, l’objectif est de garantir une transmission sécurisée des résultats de génétique du laboratoire spécialisé au prescripteur et du prescripteur au patient.

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1.                       Options envisagées

La transmission directe au prescripteur des résultats des examens de génétique par le laboratoire de biologie médicale autorisé à les réaliser ainsi que le rendu des résultats des examens de biologie médicale de diagnostic prénatal à la femme enceinte par le prescripteur dérogent aux dispositions qui régissent la biologie médicale (Livre II de la sixième partie du code de la santé publique) et doivent être prévus au niveau de la loi.

3.2.                       Option retenue

Il reviendra au laboratoire autorisé, qui transmet le résultat au prescripteur, d’informer systématiquement le laboratoire de proximité (celui qui a réalisé le prélèvement et transmis l’échantillon biologique au laboratoire autorisé) de l’effectivité de cette transmission. Cette information se fait sans révélation du résultat afin de renforcer la confidentialité en matière de génétique.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

La présente mesure complétera l’article L. 1131-1-3 du code de la santé publique (examens des caractéristiques génétiques d’une personne à des fins médicales) et le VII de l’article L. 2131-1 (examens de diagnostic prénatal).

La présente mesure complètera également le VII de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique pour que le rendu des résultats à la femme enceinte des examens de biologie médicale à visée diagnostique (prévus au IV) soit réalisé par le médecin qui les a prescrits.

4.2.                       Impacts économiques et financiers

La nouvelle organisation n’a pas d’impact économique et financier supplémentaire pour les laboratoires concernés puisque la transmission des résultats est déjà effectué aujourd’hui. La nouvelle organisation aboutit seulement, dans les faits, à modifier le destinataire des résultats. 

4.3.                       Impacts sur les particuliers

La mesure permettra de renforcer la confidentialité des résultats des examens de génétique au bénéfice des patients concernés et d’assurer un rendu des résultats par le prescripteur. Sa maîtrise du contexte de prescription et de l’ensemble des paramètres de la situation assure une protection optimale des personnes.

5.       Consultations et modalités d’application

5.1.                       Consultations

La commission nationale de l’informatique et des libertés a été consultée et a rendu une délibération le 11 juillet 2019.

La Haute autorité de santé a été consultée. Son avis a été rendu le 12 juillet 2019.

La consultation de la Commission nationale de biologie médicale (CNBM) n’est prévue à l’article L. 6213-12 que pour des textes de niveau infra-législatif[1028] :

« Les arrêtés et décisions mentionnés aux articles L. 6211-3, L. 6211-22, L. 6211-23, L. 6213-2 et L. 6213-3 sont pris après avis d'une commission, comportant notamment des professionnels, dont la composition, les conditions de consultation et les attributions sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

Par ailleurs, dans son rapport sur l’application de la loi de bioéthique du 11 janvier 2018[1029], l’Agence de la biomédecine indique :

« La loi de 2013 sur la biologie médicale constitue une évolution majeure de la législation en matière d’examens des caractéristiques génétiques. Sa stricte application est délicate compte tenu de l’encadrement de la prescription, la réalisation et la communication du résultat des examens génétiques prévu par la loi de bioéthique. Celle-ci prévoit en particulier que l’examen ne peut être réalisé que par un laboratoire de biologie médicale autorisé et par un praticien agréé, et que le résultat doit être communiqué au médecin prescripteur, seul habilité à communiquer les résultats à la personne concernée.

La loi sur la biologie médicale exige du laboratoire qui effectue un prélèvement qu’il rende le résultat de l’analyse, même s’il ne réalise ni l’analyse ni son interprétation. Pour les examens des caractéristiques génétiques, cela s’oppose aux dispositions de la loi de bioéthique : un résultat de génétique hautement sensible peut être rendu par un praticien non agréé et un laboratoire non autorisé.

La généralisation de l’examen du génome entier accentue l’enjeu de confidentialité du résultat et de compétence du praticien signant un résultat d’examen des caractéristiques génétiques.»

5.2.                       Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La mesure est mise en application le lendemain de la promulgation de la loi.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

 

 

 

 


Article 25 Assurer, pour les patients concernés, la passerelle entre la génétique somatique et la génétique constitutionnelle

1.             État des lieux

1.1. Cadre général

1.1.1 Les examens de génétique à des fins médicales, qui sont régis dans le code de la santé publique par les articles L. 1131-1 et suivants, sont ceux qui portent sur les caractéristiques génétiques héritées ou acquises à un stade précoce du développement prénatal.

Ils concernent les caractéristiques génétiques constitutionnelles de la personne qui sont transmissibles à sa descendance et peuvent concerner d’autres personnes au sein de sa famille.

Les laboratoires qui réalisent ces examens sont accrédités (comme tout laboratoire de biologie médicale[1030]) et, en outre, autorisés par l’Agence régionale de santé en application de l’article L. 1131-2-1 du code de la santé publique. Les praticiens qui interviennent sont agréés individuellement par l’Agence de la biomédecine en application de l’article L. 1131-3 du code de la santé publique.


 

Données[1031] :

Laboratoires ayant déclaré une activité de génétique postnatale en 2017

Nombre de laboratoires avec une activité de cytogénétique

63

Nombre de laboratoires avec une activité de génétique moléculaire

191

avec une activité à autorisation non limitée

125

avec une activité à autorisation limitée

66

Nombre total de laboratoires*

225

 

 

*Certains laboratoires proposent une activité de génétique moléculaire et de cytogénétique.

 

Résumé de l’activité de génétique postnatale 2017

 

Cytogénétique

 

Nombre d'individus testés

67 761

Nombre total d'analyses

78 308

Génétique moléculaire (y compris pharmacogénétique)

 

Nombre d'individus testés

410 801

Nombre de maladies différentes recherchées

3 157

Nombre d'examens réalisés

443 438

Analyse chromosomique par puces

 

Nombre de dossiers rendus

18 022

 

1.1.2 Les modifications génétiques dites « somatiques » ne concernent pas toutes les cellules de l’organisme. Elles sont acquises par quelques-unes au cours de la vie (par exemple lors de la cancérogenèse) et sont absentes des gamètes et, par conséquent, non transmissibles à la descendance.

Les tests moléculaires innovants visent à identifier d'éventuelles mutations génétiques dans les tumeurs des patients. Ils contribuent à orienter ou à participer au diagnostic et à la stratégie de traitement, à déterminer la possibilité pour un malade d'accéder à une thérapie ciblée, ou encore à suivre la maladie résiduelle.

L’identification d’altérations génétiques au sein des cellules cancéreuses a permis la mise en évidence de nouveaux paramètres (biomarqueurs moléculaires) aujourd’hui indispensables pour le diagnostic, la classification, le choix et la surveillance du traitement d’un nombre croissant de cancers (actuellement, plus de la moitié des thérapies ciblées autorisées disposent d’un biomarqueur conditionnant leur prescription)[1032].

Les biomarqueurs de génétique somatique peuvent être regroupés en cinq catégories selon leur finalité[1033].

Ainsi, par exemple, l’analyse du génome d’une tumeur cherche à définir une « signature » propre à un cancer particulier. L’objectif est à la fois d’affiner la compréhension du processus tumoral et de guider une prise en charge thérapeutique ciblée sur le profil génétique de la tumeur en cause. Elle débouche directement sur la recherche de molécules thérapeutiques ciblant ces anomalies et permet également l’identification des patients susceptibles d’y répondre.

Les laboratoires qui réalisent ce type d’examen sont soumis aux dispositions relatives à la biologie médicale[1034]) et ils doivent être accrédités par le Comité français d’accréditation (COFRAC) suivant les critères de la norme ISO 15189 (norme de qualité internationale de référence pour les laboratoires de biologie médicale)[1035].

Les premières thérapies ciblées ont été autorisées dans les années deux mille et sont venues compléter un arsenal thérapeutique jusqu’alors limité, représenté en grande partie par les chimiothérapies conventionnelles. Les thérapies ciblées relèvent de la « médecine de précision ».[1036]

Données :

-          83 000 patients ont bénéficié d’un test pour l’accès à une thérapie ciblée en 2016 ;

-          35 000 tests ont été réalisés en 2016 par des techniques de séquençage de nouvelle génération (NGS pour Next Generation Sequencing) qui sont capables de séquencer simultanément un grand nombre de gènes, voire le génome complet dans le cadre du plan France médecine génomique 2025 ;

-          Il existe aujourd’hui 30 thérapies ciblées associées à un biomarqueur moléculaire.

1.2. Éléments de droit comparé

Dans la plupart des Etats, les tests génétiques sont définis dans un document qui n’a pas de valeur juridique contraignante. La plupart des lois ou des normes juridiques existantes contiennent différents concepts ou terminologies sans pour autant définir la notion de tests génétiques[1037].

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.                       Nécessité de légiférer

L’intérêt pour les examens portant sur les modifications génétiques somatiques ne cesse de s’accroître. Or, de plus en plus souvent, à la faveur des nouvelles technologies utilisées (séquençage de nouvelle génération) et des objectifs de médecine personnalisée poursuivis, les investigations sur une tumeur font suspecter (voire détectent indirectement) des anomalies génétiques constitutionnelles (qui portent sur toutes les cellules de l’organisme et sont transmissibles)[1038].

Elles débouchent alors sur des examens de génétique constitutionnelle à des fins médicales permettant de les confirmer.

Par ailleurs, l’étude des caractéristiques génétiques des cellules tumorales (génotypage) peut aboutir à la découverte de prédispositions constitutionnelles aux cancers, mais également d’anomalies génétiques constitutionnelles « incidentes » et, en l’espèce, non liées à la tumeur.

Les dispositions en vigueur relatives aux examens des caractéristiques génétiques à des fins médicales inscrites au code civil et au code de la santé publique (modalités d’information de la personne, recueil de son consentement, conseil génétique, dispositif d’information de la parentèle…), qui sont protectrices pour la personne et les membres de sa famille potentiellement concernés, concernent exclusivement les examens de génétique constitutionnelle et ne s’appliquent pas aux examens de génétique somatique.

Le rapport de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) relève également cette différence de régime : « La formalisation écrite du consentement est requise pour une analyse génétique constitutionnelle portant sur les caractéristiques héréditaires d’une personne. Elle ne l’est pas pour une analyse génétique somatique, par exemple portant sur les gènes des cellules tumorales en vue du diagnostic et de l’adaptation des traitements aux caractéristiques de la tumeur. Or, de la même façon, une analyse génétique somatique peut conduire à révéler incidemment la présence d’anomalie(s) génétique(s) ou de gène(s) de prédisposition présent(s) dans toutes les cellules saines de l’organisme du patient (donc de nature constitutionnelle) sans lien direct avec la pathologie ayant motivé la prescription et la réalisation de l’analyse. La question se pose donc d’une adaptation éventuelle du régime du consentement en cas d’examen génétique somatique, dès lors que l’analyse tumorale peut apporter incidemment des informations de nature constitutionnelle. »[1039].

Pour mieux protéger les patients confrontés à un examen de génétique somatique susceptible de révéler des caractéristiques génétiques constitutionnelles, notamment dans le cadre d’une prise en charge en oncologie, il apparait indispensable que le patient reçoive, en amont, une information lui permettant de se préparer au risque de découverte d’anomalies génétiques constitutionnelles.

La confirmation de telles anomalies et la prise en charge globale du patient, y compris au regard du dispositif d’information des membres de sa famille potentiellement concernés, devront alors être assurées par un généticien, dans ce qu’il pourrait être convenu d’appeler « la filière de génétique constitutionnelle » (parcours de soins bien organisé et assuré par des professionnels compétents en matière de génétique constitutionnelle).

L’Association nationale des praticiens de génétique moléculaire, qui réunit les généticiens moléculaires en charge des analyses des caractéristiques génétiques des personnes à visée de diagnostic dans les domaines des maladies génétiques rares et de l’oncogénétique, a préconisé cette approche dans sa contribution aux Etats généraux de la bioéthique :

« L’utilisation [des nouvelles techniques de séquençage] en génétique somatique conduit de fait à l’établissement des caractéristiques génétiques constitutionnelles des personnes.

"En pratique, il s’agit donc de préciser que la réalisation d’examens de génétique constitutionnelle est, dans tous les cas, réservée aux laboratoires autorisés et la prise en charge des patients dans ce cadre doit être assurée par des professionnels agréés à cet effet. Aucun examen de génétique constitutionnelle, y compris dans un objectif secondaire, ne peut être réalisé dans un laboratoire ou par un professionnel qui ne répondent pas aux conditions sus précisées. Ainsi, dès lors qu’un examen de génétique constitutionnelle s’avère indiqué, le patient doit être « référé » à la filière constitutionnelle. Toutefois, la question de l’information du patient en amont doit être également prise en compte. En s’engageant dans la réalisation d’examens de génétique somatique, il doit savoir que ces examens pourront déboucher sur la prescription et la réalisation d’examens des caractéristiques génétiques constitutionnelles, ces derniers pouvant également concerner sa famille et relever du dispositif d’information de la parentèle. »[1040].

2.2.                       Objectifs poursuivis

La règle envisagée par le Gouvernement aura pour objet d’introduire des garanties au bénéfice des patients concernés par des examens de génétique somatique (notamment en oncologie) susceptibles de révéler des caractéristiques génétiques constitutionnelles alors que ces derniers relèvent aujourd’hui du droit commun des examens de biologie médicale.

Ces patients exprimeront ainsi un consentement parfaitement éclairé à la réalisation de ces examens dès lors qu’ils seront susceptibles de révéler des caractéristiques génétiques constitutionnelles et seront pris en charge et accompagnés de façon spécifique et spécialisée si une anomalie génétique constitutionnelle est ainsi  suspectée.

3.       Options possibles et dispositif retenu

3.1.                       Options envisagées

L’extension d’une partie des garanties prévues initialement par le législateur pour les personnes confrontées à un diagnostic génétique constitutionnel aux personnes concernées par certains examens de génétique somatique doit être prévue au niveau de la loi.

Par ailleurs, seule une base légale permettra ensuite de préciser les contraintes nouvelles qui s’exerceront avant certains examens de génétique somatique (information d’amont, orientation d’aval) au bénéfice des patients concernés.

3.2.                       Option retenue

Il apparait indispensable de définir au niveau de la loi ce que sont les examens des caractéristiques génétiques constitutionnelles[1041] pour permettre de distinguer ces derniers des examens de génétique somatique.

Après cette définition, la loi précise les contraintes qui s’appliquent à la réalisation de certains examens de génétique somatique en matière d’information préalable et de prise en charge éventuelle de la personne à l’issue des résultats.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.                       Impacts juridiques

Au nouveau chapitre préliminaire du Titre III du livre Ier de la première partie du code de la santé publique seront insérés :

- un article L. 1130-1 qui permettra, dans son premier alinéa, de définir l’examen des caractéristiques génétiques constitutionnelles à des fins médicales d’une personne et, dans son deuxième alinéa, de préciser les dispositions qui s’appliquent à un tel examen ;

- un article L. 1130-2 qui introduira des garanties au bénéfice des personnes pour lesquelles certains examens de génétique somatiques sont prescrits.

La mesure aboutira également à reprendre le 1° de l’article L. 1131-6 du code de la santé publique qui prévoit un décret en Conseil d’Etat pour préciser les conditions dans lesquelles peuvent être prescrits et réalisés un examen des caractéristiques génétiques d'une personne ou son identification par empreintes génétiques à des fins médicales. Cette disposition sera, tout d’abord, mise en cohérence et complétée par les conditions dans lesquelles pourront être prescrits les examens de génétique somatique.

4.2.                       Impacts sur les particuliers

La mesure assure une prise en charge protectrice des personnes confrontées à des examens de génétique somatique (dans le domaine de l’oncologie en particulier).

5.       Consultation et modalités d’application

5.1.                       Consultation

La haute autorité de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 12 juillet 2019.

L’Agence de la biomédecine est favorable à la mesure envisagée : « Dès lors que l’examen tumoral apporte des informations constitutionnelles, directement ou incidemment, il conviendrait de réfléchir aux conditions dans lesquelles la génétique médicale pourrait prendre le relais de la génétique biologique pour que le patient puisse bénéficier des conditions de protection et d’information prévues pour la génétique constitutionnelle. Se pose ainsi également la question de l’information éclairée du patient et de son consentement exprès à l’examen de génétique somatique, en amont de celui-ci, dès lors qu’il peut conduire à une information constitutionnelle. »[1042].

5.2.                       Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

La mise en application nécessite des précisions réglementaires et des règles de bonnes pratiques professionnelles. La construction d’une interface entre oncologues et généticiens doit être poursuivie (incluant, par exemple, une formation des oncologues concernés aux problématiques et à l’information du patient en matière de génétique constitutionnelle). Les conseillers en génétique pourraient également avoir un rôle charnière dans ce cadre.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’applique en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

5.2.3.    Textes d’application

Les modalités concrètes d’information des personnes avant la réalisation d’examens de génétique somatique (portant sur la tumeur) et d’interface entre les généticiens et les oncologues doivent être précisées par décret en Conseil d’Etat.

 

 


Article 26 Sécuriser l’utilisation du microbiote fécal

  1. État des lieux

La transplantation de microbiote fécal consiste à introduire des selles d’un ou de plusieurs donneurs sains dans le tube digestif d’un patient receveur afin de rééquilibrer la flore intestinale altérée de ce dernier. Cette approche thérapeutique suscite un intérêt grandissant notamment dans les infections réfractaires aux traitements antibiotiques conventionnels comme l’infection à Clostridium difficile.

En effet, dans certaines situations pathologiques, le microbiote intestinal est déséquilibré et présente une composition modifiée avec une perte de diversité. Une dysbiose (déséquilibre de l'écosystème) du microbiote intestinal apparaît par conséquent comme un facteur de prédisposition à certaines maladies telles que la maladie de Crohn, les rectocolites hémorragiques ou encore l’obésité.

Ainsi, s’agissant d’un écosystème complexe, la connaissance plus approfondie du microbiote et les moyens efficaces pour le rééquilibrer ou le modifier afin d’influer sur l’évolution de pathologies associées à une dysbiose restent à l’heure actuelle un enjeu important. En France, le microbiote fécal n’a pas de statut particulier et ne fait pas l’objet d’un encadrement juridique.

Toutefois, dans la mesure où le microbiote fécal est utilisé à visée curative à l’égard de maladies humaines, il doit être considéré comme un médicament conformément à l’article L. 5111-1 du code de la santé publique, qui définit un médicament comme « toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ou animales, ainsi que toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l’homme ou chez l’animal ou pouvant leur être administrée, en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique. […] ».

A ce stade du développement de ce produit et en l’absence d’autorisation de mise sur le marché, celui-ci peut être utilisé dans le cadre législatif et réglementaire applicable aux préparations magistrales et hospitalières (article L. 5121-1 du code de la santé publique), ou aux médicaments expérimentaux dans le cadre d’un essai clinique (article L. 5121-1-1 du code de la santé publique).

Au niveau européen, il existe une grande hétérogénéité sur la qualification du microbiote fécal (médicament, tissu ..) qui fait l’objet de discussion à l’Agence européenne du médicament au sein du groupe Ema’s Innovation Task Force[1043]. Plusieurs essais cliniques utilisant le microbiote fécal comme médicament expérimental ont été autorisés par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. C’est pourquoi, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a réuni un comité scientifique spécialisé temporaire concernant la transplantation de microbiote fécal. Elle a aussi élaboré des recommandations intitulée « La transplantation de microbiote fécal et son encadrement dans les essais cliniques » en mars 2014, réactualisées deux fois[1044]

Concernant les indications thérapeutiques, à ce jour, seule l'infection récidivante à Clostridium difficile est validée par des études en phase avancée de développement.

Les infections à Clostridium difficile (et particulièrement celles réfractaires à un traitement antibiotique conventionnel) sont parmi les pathologies les plus étudiées, s'agissant d'un modèle d’altération écologique du microbiote par des facteurs iatrogènes (antibiotiques). De récentes recommandations internationales proposent ce traitement dans les infections à Clostridium difficile multirécidivantes. En France, des préparations magistrales de transplantation de microbiote fécal sont utilisées notamment dans cette indication.

D'autres pathologies représentent des cibles potentielles, telles que par exemple les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin, les complications liées aux traitements antibiotiques, cytotoxiques ou de greffe prescrits dans le cadre de pathologies onco-hématologiques (leucémie par exemple), des troubles fonctionnels intestinaux, de l'obésité, des maladies métaboliques et auto-immunes…). La transplantation de microbiote fécal peut également représenter une indication dans certains contextes tels que le portage de bactéries multirésistantes. Compte tenu de l’intérêt grandissant pour ce nouveau produit de santé, et des essais cliniques en cours, un cadre juridique spécifique s’impose pour la collecte de selles, matières premières utilisées à des fins thérapeutiques dans le cadre de la transplantation de microbiote fécal et ce, en vue d’assurer la sécurité sanitaire des médicaments qui en sont issus.

  1. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

Les selles ne sont pas considérées comme un élément constitutif du corps humain en tant que tel en ce qu’elles sont le résultat du processus de digestion et sont donc issues d’une transformation effectuée par le corps humain en vue de leur élimination par celui-ci. Elles sont entre autre constituées de cellules mortes, de bactéries et de virus. Elles constituent donc la matière première de départ pour la fabrication de microbiote fécal. De ce fait, le microbiote n’est pas soumis à la règlementation applicable aux produits et éléments du corps humain dans le code de la santé publique à l’instar des cellules, tissus, organes, sang et gamètes.

Pour autant, la transplantation de microbiote fécal doit être encadrée, notamment pour prévenir le risque de transmission d'agents infectieux pathogènes au receveur.

Il est donc nécessaire de créer un cadre juridique pour les centres de collecte de selles à des fins thérapeutiques, qui serviront à la préparation du microbiote fécal. Le centre de collecte est un établissement qui organise la sélection clinique et biologique des donneurs et la collecte de la matière fécale.

  1. Options possibles et dispositif retenu

Il est proposé d’une part, de mettre en place un système de déclaration auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, des centres de collecte de selles et d’autre part, que soient fixées par décision du Directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé des règles de bonnes pratiques de collecte (incluant la sélection clinique et biologique des donneurs), de contrôle, de conservation, de traçabilité et de transport des selles, à l’instar des autres bonnes pratiques portant sur les produits de santé.

En ce qui concerne la sélection clinique, un questionnaire associé à un entretien permettra de diminuer la probabilité d’une transmission d’agents pathogènes (infectieux et autres). Cela est déjà mis en place dans le cadre des essais cliniques qui appliquent les recommandations de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé intitulées « la transplantation de microbiote fécal et son encadrement dans les essais cliniques » datant de mars 2014.

En ce qui concerne la sélection biologique qui est une étape majeure de sécurité sanitaire, celle-ci sera réalisée par voie règlementaire et s’appuiera sur les recommandations précitées de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé sur un échantillon de sang et de selles du donneur. 

La liste des agents infectieux à dépister, ainsi que les techniques de diagnostic ou de dépistage, sont évolutives et seront réévaluées en fonction des données disponibles et des avancées technologiques. La liste tient compte à la fois de la probabilité du risque de transmission d’agents infectieux, des moyens disponibles pour dépister ces agents sur des selles moulées issues de personnes asymptomatiques et de la gravité d’une éventuelle transmission au receveur.

  1. Analyse des impacts des dispositions envisagées
    1. Impacts juridiques

4.1.1 Impacts sur l’ordre juridique interne

La création d’un cadre juridique spécifique à la collecte de selles aura des effets sur le code de la santé publique dans lequel il sera créé un chapitre XI intitulé « Recueil de selles d’origine humaine destinées à une utilisation thérapeutique » dans la 5ème partie « produits de santé », livre premier « produits pharmaceutiques », titre III « autres produits et substances pharmaceutiques réglementées » considérant que les selles ne font pas partie des éléments et produits du corps humain ;

La reconnaissance juridique de ce nouveau produit impliquera également de modifier le champ des compétences de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé à l’article L. 5311-1du code de la santé publique, afin de l’élargir à la collecte des selles d’origine humaine.

4.1.2 Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

A ce jour, il n’existe aucune réglementation européenne sur la collecte de selles à des fins thérapeutiques. A cet égard, dans le cadre de l’évaluation des directives européennes relatives au sang, tissus et cellules menée en 2017 sous l’égide de la Commission européenne, l’absence de réglementation sur la collecte de selles a été soulignée par différentes organisations ayant participé à la consultation publique organisée par la Commission européenne et considérée comme une lacune

4.2  Impacts économiques et financiers

Les centres de collecte devront désormais respecter un cadre légal imposant une déclaration préalable à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et respecter des règles de bonnes pratiques relatives à la collecte pour partie déjà existante.

L’utilisation de ce produit dans le cadre d’une stratégie thérapeutique est très récente, et en conséquence, il n’existe pas d’estimation sur le coût complet d’une collecte de selles.

4.3  Impacts sur les services administratifs

Cette mesure implique un travail administratif supplémentaire pour l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et pour les Agences régionales de santé dont il est difficile d’estimer l’impact actuellement.

Les Agences régionales de santé n’interviennent pas dans cette nouvelle réglementation car une pharmacie à usage intérieur qui collecte des selles devra come tous les autres établissements ou organismes qui collectent adresser une déclaration à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, déclaration qui est indépendante de l’autorisation qui leur est délivrée par les Agences régionales de santé pour les activités mentionnées aux articles L. 5126-1 et suivants du code de la santé publique. Les Agences régionales de santé n’auront pas à intervenir sur les aspects relatifs à la collecte de selles. En revanche, si les pharmacies à usage intérieur réalisent des préparations magistrales de microbiote fécal, cette activité, comme toute préparation magistrale, sera gérée par les Agences régionales de santé.

5          Consultations et modalités d’application

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 8 juillet 2019.

La Haute autorité de santé a rendu un avis le 12 juillet 2019.

La mesure envisagée n’est pas d’application directe car elle nécessite l’adoption de mesure réglementaire.

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

Les modalités d’application du nouveau chapitre créé seront déterminées par décret en Conseil d’Etat. Des règles de bonnes pratiques relatives à la collecte, au contrôle, à la conservation, à la traçabilité et au transport des selles (incluant la sélection clinique des donneurs) seront prises par décision du Directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.


Article 27 Permettre la réalisation de médicament de thérapie innovante préparés ponctuellement dans le cadre d’une seule intervention médicale sous la responsabilité d’un établissement ou organisme autorisé au titre de l’article L. 4211-9-1 du code de la santé publique

  1. État des lieux

1.1.  Cadre général

La loi n° 2011-302 du 22 mars 2011 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques a introduit les médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement dans le corpus législatif français, suite aux dispositions de l’article 28 du règlement (CE) n°1394/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les médicaments de thérapie innovante, et modifiant la directive 2001/83/CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004.

Ce règlement communautaire a posé la définition des médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement, tout en les excluant de son champ d’application, en laissant aux Etats membres le soin d’encadrer ces produits en termes d’exigences de qualité et de sécurité.

Ces produits sont destinés à être préparés au sein d’un établissement de santé pour un patient donné et ne font pas l’objet d’une mise sur le marché comme tout autre médicament.

L’introduction de cette nouvelle catégorie de médicaments définis à l’article L. 5121-1 17° du code de la santé publique comme « tout médicament tel que défini dans le règlement (CE) n° 1394/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, concernant les médicaments de thérapie innovante (MTI) et modifiant la directive 2001/83/CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004, fabriqué en France selon des normes de qualité spécifiques et utilisé dans un hôpital en France, sous la responsabilité d'un médecin, pour exécuter une prescription médicale déterminée pour un produit spécialement conçu à l'intention d'un malade déterminé» a eu des conséquences sur les catégories de produits existants auparavant.

En effet, certains produits qui étaient qualifiés de préparations de thérapie cellulaire répondent désormais à la définition de médicament de thérapie innovante, en raison des manipulations substantielles qu’ils subissent, ou de leurs utilisations dans des fonctions différentes chez le donneur et le receveur.

L’annexe I du règlement (CE) n°1394/2007 ne définit pas les modifications substantielles mais énumère uniquement des manipulations qui ne sont pas considérées comme substantielles à savoir le découpage, le broyage, le façonnage, la centrifugation, le trempage dans des solutions antibiotiques ou antimicrobiennes, la stérilisation, l'irradiation, la séparation, la concentration ou la purification de cellules, la filtration, la lyophilisation, la congélation, la cryoconservation, et la vitrification.

La préparation de ce type de produits doit être faite dans un établissement ou organisme y compris dans un établissement de santé autorisé au titre de l’article L. 4211-9-1 du code de la santé publique.

Il existe aujourd’hui des établissements de santé ne disposant pas de l’autorisation prévue à l’article L. 4211-9-1 du code de la santé publique, qui dépose auprès de l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé, des demandes d’autorisation d’essai clinique pour des médicaments de thérapie innovante, y compris ceux préparés ponctuellement.

Concernant ces derniers, les médecins investigateurs engagés dans les essais cliniques, souhaitent, dans l’intérêt du patient, que l’ensemble des opérations de prélèvement des cellules/tissus, de préparation et d’administration du produit fini soit fait dans le cadre d’une seule et même intervention médicale réalisée au bloc opératoire, sans passer par un établissement ou organisme dédié à la préparation et ce, afin d’éviter par exemple que le patient fasse l’objet de deux anesthésies (l’une pour le prélèvement et l’autre pour l’administration).

Or cette pratique malgré son intérêt pour la santé du patient n’est pas autorisée actuellement.

1.2.  Cadre conventionnel

Les Etats-membres ont exclu les médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement du champ d’application de la directive européenne instituant un code relatif aux médicaments à usage humain[1045] pour permettre leur délivrance sans passer par le système complexe d’autorisation de mise sur le marché.  Ces médicaments sont néanmoins soumis au droit de l’Union européenne.

En premier lieu, la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne[1046] et la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne[1047] ont érigé le principe de sauvegarde de la dignité humaine en principe général du droit communautaire, principe qui figure également dans la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine[1048]. Il comprend notamment, dans le cadre de la médecine et de la biologie, le consentement libre et éclairé du donneur et du receveur [1049] et l'interdiction de l'utilisation du corps comme source de profit[1050]. Comme tout médicament, les médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement sont également soumis au principe de précaution[1051] qui impose aux Etats membres de prendre des mesures de protection sans attendre que la réalité du risque soit avérée.

En deuxième lieu, fabriqués à partir de cellules ou de tissus humains, les médicaments biotechnologiques nécessitent des prélèvements dont la qualité et la sécurité doivent être contrôlés pour prévenir la transmission de maladies au receveur. Les étapes du don, de l’obtention et du contrôle des tissus et des cellules sont encadrées par la directive « tissus et cellules humains » [1052].

 

Enfin, les médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement doivent respecter des normes nationales de traçabilité, de pharmacovigilance et de sécurité sanitaire au moins équivalentes à celles prévues par le Règlement CE n° 1394/2007 concernant les médicaments de thérapie innovante [1053].

  1. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.  Nécessité de légiférer

Pour encadrer la réalisation de médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement dans le cadre d’une seule intervention médicale sous la responsabilité d’un établissement ou organisme autorisé au titre de l’article L. 4211-9-1 du code de la santé publique, il convient d’en prévoir l’autorisation par la loi.

Par ailleurs, pour être en conformité avec l’article 3.7 de la directive 2001/83/CE qui impose que la fabrication des médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement soit autorisée par l’autorité compétente de l’État membre et que « les États membres veillent à ce que les exigences nationales de traçabilité et de pharmacovigilance, ainsi que les normes de qualité spécifiques mentionnées au présent paragraphe, soient équivalentes à celles prévues au niveau communautaire pour les médicaments de thérapie innovante pour lesquels une autorisation est nécessaire en application du règlement (CE) n° 726/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments », et en cohérence avec l’autorisation délivré par l’Agence nationale de la sécurité des médicaments et des produits de santé en vertu de l’article L. 5121-1 17° du code de la santé publique, il convient que les médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement dans le cadre d’une seule intervention médical soient autorisés par ladite agence après avoir évalué leur qualité, leur sécurité et leur efficacité.

2.2.  Objectifs poursuivis

La mesure envisagée par le Gouvernement vise à renforcer la sécurité du patient et à faciliter les innovations thérapeutiques à partir d’éléments et produits du corps humain. L’autorisation de réaliser des médicaments de thérapie innovante au cours d’une seule intervention médicale permet ainsi d’éviter des actes inutiles et potentiellement néfastes pour la santé des patients (anesthésie), tout en permettant la diffusion de nouvelles thérapeutiques.

  1. Options possibles et dispositif retenu

Deux options peuvent être présentées :

Une première option consisterait à étendre le champ de l’autorisation prévue à l’article L. 4211-9-1 à tous les établissements de santé disposant de blocs opératoires afin de permettre le cas échéant la réalisation de médicament de thérapie innovante préparé ponctuellement ne faisant pas l’objet de manipulation substantielle, lorsqu’un patient leur est adressé pour prélèvement de tissus et cellules, et administration du produit final.

Cette option est inefficiente car elle conduirait à saupoudrer les autorisations de réalisation de médicament de thérapie innovante préparé ponctuellement à un grand nombre d’établissements de santé, et nuirait par voie de conséquence à la sécurité des conditions de réalisations devant entourée la fabrication de tels produits.

Une seconde option reviendrait à modifier la loi pour que les établissements ou organismes autorisés au titre de l’article L. 4211-9-1 du code de la santé publique puissent confier, sous leur responsabilité, à un établissement de santé non autorisé au titre de ce même article, la préparation de médicament de thérapie innovante préparé ponctuellement ne faisant pas l’objet de manipulation substantielle, lorsque cette préparation peut être réalisée pour le patient au cours de la même intervention médicale que celle nécessaire au prélèvement des tissus ou cellules composant ledit médicament, et à l’administration de ce dernier au même patient.

C’est cette dernière option qui a été retenue car elle apporte toutes les garanties en termes de respect des bonnes pratiques de fabrication des médicaments concernés puisque cette dernière sera effectuée sous la responsabilité d’un établissement ou organisme autorisé à ce titre, et en termes de sécurité des patients.

  1. Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.  Impacts juridiques

4.1.1       Impacts sur l’ordre juridique interne

Le régime d’autorisation pour la fabrication des médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement à partir de prélèvements de cellules et produits du corps humain réalisé au cours d’une même intervention médicale nécessite une mise en cohérence avec les dispositions de l’article L. 1242-1 du code de la santé publique relatif aux autorisations de prélèvements des tissus et des cellules.

En effet, les autorisations mentionnées à l’article L. 1242-1 du code de la santé publique ne sont pas exigées pour les établissements prélevant des tissus ou cellules destinés à fabriquer un médicament de thérapie innovante préparé ponctuellement lorsque cette dernière intervient au cours d’une même intervention médicale, puisque dans ce cas précis, le prélèvement s'inscrit dans l'activité de soins incluant la greffe du produit fini.

Pour cette raison, les prélèvements des éléments et produits du corps humain mentionnés à l’article L. 1211-8 du code de la santé publique et ceux du II de l’article L. 4211-9-1 du code de la santé publique utilisés dans le cadre d’une seule et même intervention médicale sont exclus du champ d’application de l’article L. 1242-1 du code de la santé publique.

L’article L. 1241-2 du code de la santé publique est donc modifié en ce sens.

Toutefois, afin d’encadrer cette pratique, l’article L. 4211-9-1 du code de la santé publique est modifié en créant un I pour rassembler les dispositions actuellement en vigueur, et insérant un II visant à prévoir que la préparation et l’administration de médicament de thérapie innovante préparé ponctuellement au cours d’une seule et même intervention médicale par un établissement de santé, ne pourra avoir lieu que sous la responsabilité d’un établissement ou organisme autorisé en vertu du premier ou quatrième alinéa du I de ce même article, et moyennant la passation d’un contrat entre les parties.

Le II de l’article L. 4211-9 du code de la santé publique ainsi créé, prévoit également que la pertinence de la préparation et l’administration au cours d’une seule et même intervention seront vérifiées par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé au moment de l’autorisation dudit médicament conformément aux dispositions de l’article
L.5121-1-17 du code de la santé publique, ou de l’autorisation de la recherche impliquant la personne humaine.

4.1.2       Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

Cette mesure est compatible avec le règlement (CE) n°1394/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les médicaments de thérapie innovante et modifiant la directive 2001/83/CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004 puisqu’un fabricant autorisé par l’autorité compétente, à savoir l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé prend la responsabilité de la fabrication des produits.

4.2.  Impacts sur les services administratifs

Cette mesure est sans impact sur les moyens de fonctionnement de l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé puisque les autorisations délivrées au titre de l’article L. 4211-9-1 du code de la santé publique pour la préparation de médicament de thérapie innovante préparé ponctuellement couvriront les nouvelles modalités prévues.

En matière de contrôle du respect des bonnes pratiques de fabrication, l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé intervient dans les locaux de la personne responsable notamment via une revue documentaire réalisée lors de l'inspection des structures de fabrication des médicaments de thérapie innovante préparé ponctuellement. Les Agences régionales de santé assureront ce contrôle sur les blocs opératoires des établissements de santé.

  1. Consultations et modalités d’application

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a rendu un avis le 8 juillet 2019, tout comme la Haute autorité de santé, le 12 juillet 2019.

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

L’alinéa 3 de l’article L. 4211-9-1 sera complété pour que soit précisé par décret en Conseil d’Etat, les conditions applicables à la préparation de médicament de thérapie innovante préparé ponctuellement dans le cadre de la même intervention médicale que celle incluant le prélèvement et l’administration, ainsi que le type de médicaments concernés.


Article 28 Diverses mises en cohérence 

1. Etats des lieux, objectifs poursuivis et necessite de legiferer

1.1Base légale de l’arrêté de bonnes pratiques en assistance médicale à la procréation

Le dernier alinéa de l’article L. 2141-1 du code de la santé publique dispose que :

« Un arrêté du ministre chargé de la santé, pris sur proposition de l'Agence de la biomédecine, définit les règles de bonnes pratiques applicables à l'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur. »

Pris en application de cet article et des articles R.2142-24[1054] et R.2142-27[1055] du code de la santé publique, l’arrêté du 30 juin 2017 modifiant l’arrêté du 11 avril 2008 modifié relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation encadre les activités d’assistance médicale à la procréation avec ou sans tiers donneur.

L'arrêté de bonnes pratiques en assistance médicale à la procréation hors tiers donneur doit également être prévu au niveau législatif.

La question de savoir si un décret peut légalement renvoyer à un arrêté le soin de fixer des règles de bonnes pratiques a déjà été évoqué par le Conseil d’Etat[1056].

L’objectif de la mesure envisagée est donc d’ajuster la base légale pour qu’elle couvre l’ensemble du champ de l’assistance médicale à la procréation.

1.2 Toilettage de l’article L. 2141-1 du code de la santé publique

1.2.1 Dans le cadre des procédés et techniques utilisés en assistance médicale à la procréation, l’article 31 de la loi de bioéthique du 7 juillet 2011 a prévu, à l’article L. 2141-1 du code de la santé publique, que :

« L'Agence de la biomédecine remet au ministre chargé de la santé, dans les trois mois après la promulgation de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, un rapport précisant la liste des procédés biologiques utilisés en assistance médicale à la procréation ainsi que les modalités et les critères d'inscription des procédés sur cette liste. »

Par ailleurs, cette même loi a prévu explicitement l’autorisation de la vitrification ovocytaire au quatrième alinéa de ce même article :

« La technique de congélation ultra-rapide des ovocytes est autorisée. »

1.2.2 Le rapport visé au premier alinéa de l'article L. 2141-1 du code de la santé publique a été remis par l’Agence de la biomédecine. Il a permis de publier le décret n° 2012-360 du 14 mars 2012 relatif aux procédés biologiques utilisés en assistance médicale à la procréation et l’arrêté du 18 juin 2012 fixant la liste des procédés biologiques utilisés en assistance médicale à la procréation[1057] (liste des procédés biologiques d’assistance médicale à la procréation régulièrement utilisés à la date du 9 juillet 2011).

Par ailleurs, la liste des procédés biologiques régulièrement utilisés en assistance médicale à la procréation et des techniques visant à améliorer les procédés biologiques autorisés a été rendue publique par l’agence (liste du 11 mai 2012 amendée le 6 novembre 2013)[1058]. Elle légitime la vitrification des gamètes, des embryons et des zygotes (points 5 et 6).

Les deux développements précisés au point précédent et codifiés à l’article L. 2141-1 du code de la santé publique peuvent être supprimés. C’est l’objectif de la mesure.

1.3 Décrets d’application relatifs aux conditions d’implantation et de fonctionnement de certaines activités de soin

Le 4° de l’article L. 1131-6 du code de la santé publique prévoit que sont déterminées par décret en Conseil d'Etat :

« 4° Les conditions que doivent remplir les laboratoires de biologie médicale mentionnés à l'article L. 1131-2-1 pour être autorisés à pratiquer l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne ou son identification par empreintes génétiques à des fins médicales. »

Le 2° de l’article L. 2131-5 du code de la santé publique prévoit que sont déterminées par décret en Conseil d'Etat :

« 2° La nature des examens de biologie médicale destinés à établir un diagnostic prénatal et les conditions dans lesquelles ils peuvent être pratiquées dans les établissements publics de santé et les laboratoires de biologie médicale autorisés ; »

Le 2° de l’article L. 2142-4 du code de la santé publique prévoit que sont déterminées par décret en Conseil d'Etat :

« 2° Les conditions de fonctionnement et d’implantation que doivent remplir les établissements, les organismes, les groupements de coopération sanitaire et les laboratoires mentionnés aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article L. 2142-1 pour être autorisés à exercer des activités d'assistance médicale à la procréation ; »

Aux termes des dispositions des articles L.6123-1 et l.6124-1 du code de la santé publique, les conditions d’implantations des activités de soins sont fixées par décret en Conseil d’Etat et les conditions techniques de fonctionnement sont fixées par décret simple.

La rédaction des articles L. 1131-6, L. 2131-5 et L. 2142-4 du code de la santé publique n’est pas en adéquation avec les articles précités.

Dans un objectif de cohérence entre les différentes bases légales des trois activités de soins concernées (assistance médicale à la procréation, diagnostic prénatal, examens des caractéristiques génétiques), il apparait nécessaire d’harmoniser les rédactions. C’est le premier objectif de la mesure.

Par ailleurs, il apparait préférable de scinder en deux le 2° de l’article L. 2131-5 du code de la santé publique qui renvoie à deux domaines différents : celui de la nature des examens de biologie médicale destinés à établir un diagnostic prénatal et celui des conditions que doivent remplir les établissements publics de santé et les laboratoires de biologie médicale pour être autorisés au diagnostic prénatal. C’est le second objectif de la mesure.

1.4 Base légale des sanctions administratives dans le domaine des examens des caractéristiques génétiques

Dans le domaine de l’assistance médicale à la procréation et du diagnostic prénatal, les articles L. 2142-3 du code de la santé publique[1059] et L. 2131-3 du même code[1060] prévoient que toute violation constatée dans un établissement, un groupement de coopération sanitaire ou un laboratoire des prescriptions législatives et réglementaires applicables aux examens concernés entraîne la suspension ou le retrait de l’autorisation dans les conditions fixées à l'article L. 6122-13.

Le retrait de l'autorisation est également encouru en cas de violation des prescriptions fixées par l'autorisation ou si le volume d'activité ou la qualité des résultats sont insuffisants.

Il n’existe pas d’équivalent dans le domaine des examens des caractéristiques génétiques.

Il n’existe aucune base légale pour punir la violation dans un établissement, un groupement de coopération sanitaire ou un laboratoire des prescriptions législatives et réglementaires applicables aux examens des caractéristiques génétiques à des fins médicales (suspension ou le retrait de l’autorisation prévue à l'article L. 1131-2-1, dans les conditions fixées à l'article L. 6122-13). Le même constat s’impose en cas de violation des prescriptions fixées par l'autorisation ou si le volume d'activité ou la qualité des résultats sont insuffisants.

La mesure a donc pour objet d’introduire cette base légale manquante.

1.5 Sanctions pénales en lien avec l’activité d’accueil d’embryon

Les articles L. 2162-6 du code de la santé publique[1061] et 511-25 du code pénal[1062] prévoient les sanctions pénales en lien avec l’activité d’accueil d’embryons.

Les articles L. 2162-6 du code de la santé publique et 511-25 du code pénal n’ont pas été mis en cohérence avec les modifications introduites par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice dans le domaine de l’accueil d’embryon (suppression du consentement du couple receveur devant le juge et suppression de la faculté de diligenter une enquête sociale par le juge).

L’objectif de la présente mesure est d’y procéder.

1.6 Contrôle douanier en matière de tissus et cellules d’origine humaine et certaines décisions prises par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé

Les tissus et les cellules sont des produits très sensibles sur le plan de la sécurité sanitaire.  Ils nécessitent une sélection clinique et biologique préalable des donneurs afin d’éviter toute transmission de pathologies aux patients receveurs ainsi que des règles de préparation et de conservation rigoureuses permettant de garantir leur qualité, leur innocuité et leurs effets thérapeutiques. La vérification de ces exigences s’impose avec une particulière acuité lorsque ces produits sont importés de pays tiers régis par d’autres réglementations que la législation européenne sur ces produits.

Les services des douanes contrôlent les tissus et cellules importés et exportés au sein de l’Union européenne. La loi du 23 février 2017 ratifiant l'ordonnance n° 2016-966 du 15 juillet 2016 a modifié l’architecture des dispositions relatives aux importations et exportations de tissus et cellules en créant un article L. 1245-5-1 du code de la santé publique portant sur les tissus et cellules utilisés notamment à des fins de fabrication de médicaments et de diagnostic in vitro et à des fins de recherche.

La loi de bioéthique du 7 juillet 2011, a également modifié le champ de l’article L. 2151-6 du code la santé publique limitant la procédure d’autorisation d’importation ou d’exportation prévue à cet article aux seules cellules souches embryonnaires humaines.

Ces deux évolutions législatives n’ont pas été intégrées au code des douanes :

-          au 11° du point 4 de l’article 38 du code des douanes qui précise les éléments et produits du corps devant être contrôlés par le service des douanes lors des opérations d’importation et d’exportations et notamment les organes, tissus et leurs dérivés, cellules, gamètes et tissus germinaux issus du corps humain ainsi qu'aux préparations de thérapie cellulaire et aux échantillons biologiques mentionnés aux articles L. 1235-1, L. 1243-1, L. 2141-11-1 et L. 1245-5 du code de la santé publique.

-          au 12° du point 4 de l’article 38 du code des douanes mentionnant le contrôle des tissus ou cellules embryonnaires ou fœtaux prévus à l'article L. 2151-6 du code de la santé publique.

 

Par ailleurs, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a le pouvoir de suspendre ou retirer certaines autorisations dans le domaine des tissus et cellules portant sur les activités de prélèvement, de conservation, de préparation, de greffe et d’administration réalisée sur le territoire national, conformément aux dispositions de l’article L. 1245-1 du code de la santé publique. Or, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ne dispose pas aujourd’hui de base légale pour asseoir les mêmes pouvoirs, s’agissant des activités d’import et d’export dans les domaines des tissus et cellules, alors même que s’y attache un enjeu de sécurité sanitaire important.

En effet, l’article L. 1245-1 du code de la santé publique ne mentionne pas dans son champ d’application, les autorisations relatives à l’importation et l’exportation des tissus et cellules en provenance ou à destination des Etats non membres de l’union européenne ou non partie à l’Espace économique européen, prises en application de l’article L. 1245-5 du code de la santé publique, ni celles relatives à l’importation de tissus et cellules destinés à la fabrication de spécialités pharmaceutiques) mentionnées à l’article L. 1245-5-1 II 1er alinéa.

Seules des dispositions réglementaires, et notamment l’article R. 1245-7 alinéa 2 du code de la santé publique relatif aux les autorisations d’importation et d’exportation en provenance ou à destination des Etats non membres de l’Union Européenne, fondent le directeur général de l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé à modifier, suspendre ou retirer en tout ou partie lesdites autorisations, ce qui fragilise juridiquement les décisions prises.

Les modifications du code de la santé publique introduites par la loi du 23 février 2017 ratifiant l'ordonnance n° 2016-966 du 15 juillet 2016, et par la loi de bioéthique du 7 juillet 2011, dans le champ du contrôle des activités d’import/export en matière de tissus et cellules, imposent de modifier le code des douanes pour asseoir les pouvoirs de contrôles de la Direction générale des douanes et droits indirects, et ce afin de garantir un haut niveau de protection de la santé humaine et de la sécurité de ces produits.

Afin de sécuriser juridiquement les décisions du directeur général de l’Agence nationale du médicament et des produits de santé sur les activités d’import et d’export des tissus et cellules d’origine humaine, il convient de prévoir ses pouvoirs au niveau de la loi, en miroir de ce qui existe pour les tissus et cellules prélevés, conservés et préparés sur le sol national.

La présente mesure a pour objectif :

-          d’introduire dans le 11° du 4. de l’article 38 du code des douanes un renvoi à l’article L. 1245-5-1 afin de redonner une base légale au contrôle par les services des douanes, des tissus et cellules utilisés notamment à des fins de fabrication de médicaments et de diagnostic in vitro et à des fins de recherche ;

-          d’harmoniser les dispositions du 12° du 4. de l’article 38 du code des douanes au nouveau de champ de l’article L. 2151-6 portant uniquement sur les cellules souches embryonnaires humaines, les tissus. Les importations ou exportations de tissus ou cellules fœtales mentionnées actuellement au 12° relèvent du régime général applicable aux tissus et cellules prévu au 11° ;

-          de donner force de loi aux décisions de l’Agence nationale de sécurité des médicaments et produits de santé prises dans le cadre du contrôle des autorisations d’importations et d’exportation, en insérant à l’article L. 1245-1 du code de la santé publique, la référence aux articles L. 1245-5 et L. 1245-5-1 qui prévoient des autorisations d’importation et d’exportation.

2. Analyse des impacts des dispositions envisagées

2.1 Impacts juridiques

2.1.1 Impacts sur l’ordre juridique interne

Les règles envisagées modifieront :

-          Au sein du code de la santé publique

-          Au sein du code pénal

-          Au sein du code des douanes

Elles créeront l’article L. 1131-2-2 au code de la santé publique.

2.1.2 Articulation avec le droit international et le droit de l’Union européenne

S’agissant du contrôle douanier en matière de tissus et cellules d’origine humaine et certaines décisions prises par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’article 27 de la directive 2004/23/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à l'établissement de normes de qualité et de sécurité pour le don, l'obtention, le contrôle, la transformation, la conservation, le stockage et la distribution des tissus et cellules humains prévoit que « Les États membres déterminent le régime de sanctions applicables aux violations des dispositions nationales prises en application de la présente directive et prennent toutes les mesures nécessaires pour assurer l'application de ces sanctions. Ces sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. »

La directive prévoit par ailleurs à l’article 9 les mesures applicables pour l’importation et l’exportation de tissus et cellules.

La mesure législative proposée est donc en conformité avec le droit de l’Union européenne.

2.2  Impacts économiques et financiers

La mesure concernant le contrôle douanier en matière de tissus et cellules d’origine humaine et certaines décisions prises par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé n’a pas d’impact sur les entreprises puisqu’il s’agit de mesure de mise en cohérence : l’autorisation d’importation/exportation pour les tissus/cellules d’origine humaine est prévue par les articles L. 1245-5 et L. 1245-5-1 du code de la santé publique. L’autorisation d’importation et exportation des cellules souches embryonnaires est mentionnée à l’article L. 2151-6 du même code.

2.3 Impacts sur les services administratifs

La mesure concernant le contrôle douanier en matière de tissus et cellules d’origine humaine et certaines décisions prises par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ne présente pas d’impact sur les moyens de l’Agence nationale de la sécurité des médicaments et des produits de santé la pratique puisque des décisions de suspension, de retrait ou de modifications des autorisations d’importation et d’exportation sont d’ores et déjà prises sur un fondement réglementaire. La sécurisation juridique de ces décisions évite cependant des risques contentieux.

Il n’est pas possible d’évaluer précisément l’impact de la mesure sur le fonctionnement des services des douanes qui effectuaient les contrôles des produits et éléments du corps humain lors d’importation et d’exportation ; mesure permettant avant tout d’en sécuriser juridiquement la portée.

3. consultation et modalités d’application

3.1 Consultation

L’Agence nationale du médicament et des produits de santé a été consultée. Elle a rendu son avis le 8 juillet 2019.

3.2 Modalités d’application

L’ensemble des présentes mesures seront applicables le lendemain de la promulgation de la loi.

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

Article 29 Redéfinir la gouvernance bioéthique et favoriser un débat bioéthique permanent au sein de la société

1.             État des lieux

1.1.                       Cadre général

La France a été le premier pays à se doter d’un comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé.

Créé par décret du 23 février 1983[1063], et consacré au niveau législatif par la loi du 29 juillet 1994[1064], ce comité a « pour mission de donner des avis sur les problèmes éthiques et les questions de société soulevés par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé. »[1065]. Il a vocation à alimenter les réflexions de la société sur les questionnements bioéthiques.

Depuis 2011[1066], le comité consultatif national d’éthique est chargé d’organiser le débat public, sous forme d’états généraux sur « Tout projet de réforme sur les problèmes éthiques et les questions de société soulevés par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé » et, en l’absence de projet de réforme, au moins une fois tous les cinq ans[1067]. Le comité initie les états généraux et en assure la synthèse « qu’il présente devant l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui procède à son évaluation, en faisant ressortir les éléments scientifiques indispensables à la bonne compréhension des enjeux de la réforme envisagée. »

Les états généraux « réunissent des conférences de citoyens choisis de manière à représenter la société dans sa diversité. Après avoir reçu une formation préalable, ceux-ci débattent et rédigent un avis ainsi que des recommandations qui sont rendus publics. Les experts participant à la formation des citoyens et aux états généraux sont choisis en fonction de critères d'indépendance, de pluralisme et de pluridisciplinarité. »[1068]. Ils ont pour ambition d’éviter la confiscation par les « experts » de questions qui intéressent l’ensemble des citoyens, pour les laisser exprimer leurs opinions et d’instaurer un dialogue entre des positions parfois antagonistes, en amont de l’élaboration du projet de loi par le Gouvernement et de son examen parlementaire.

A cet édifice national, s’ajoute le rôle dévolu aux espaces de réflexion éthique régionaux qui organisent, en lien avec le comité, la consultation citoyenne et le débat public en région[1069] .

Les rapides progrès de la science et des technologies, le phénomène de convergence entre celles-ci et le développement accéléré de nouvelles disciplines, comme l’intelligence artificielle, entrainant une extension du champ du questionnement bioéthique, amènent à s’interroger tant sur le périmètre de la loi de bioéthique que sur les instances compétentes pour accompagner ses évolutions.

1.2.                       cadre conventionnel

La Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine du 4 avril 1997, dite convention d’Oviedo, ratifiée par la France par la loi du 7 juillet 2011 et opposable en droit interne depuis le 1er avril 2012, dispose, en son article 28, que : « Les Parties à la présente Convention veillent à ce que les questions fondamentales posées par les développements de la biologie et de la médecine fassent l'objet d'un débat public approprié à la lumière, en particulier, des implications médicales, sociales, économiques, éthiques et juridiques pertinentes, et que leurs possibles applications fassent l'objet de consultations appropriées. »

Par ailleurs, la Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l'homme de l’UNESCO du 19 octobre 2005 met l’accent sur l’importance du débat public en matière de prise de décisions et de traitement des questions de bioéthique, en prévoyant : « 2. Un dialogue devrait être engagé de manière régulière entre les personnes et les professionnels concernés ainsi que la société dans son ensemble. /3. Des possibilités de débat public pluraliste et éclairé, permettant l’expression de toutes les opinions pertinentes, devraient être favorisées » (article 18).

Elle prône également la mise en place de « comités d’éthique indépendants, pluridisciplinaires et pluralistes (…) pour: (c) évaluer les progrès scientifiques et technologiques, formuler des recommandations et contribuer à l’élaboration de principes directeurs sur les questions relevant de la présente Déclaration ;/(d) favoriser le débat, l’éducation ainsi que la sensibilisation et la mobilisation du public en matière de bioéthique. » (article 19).

Enfin, elle appelle les Etats à « s’efforcer de favoriser l’éducation et la formation en matière de bioéthique à tous les niveaux, et d’encourager les programmes d’information et de diffusion des connaissances concernant la bioéthique » (article 23).

1.3.                       Éléments de droit comparé

De nombreux pays européens se sont dotés d’une instance consultative nationale dédiée aux questions de bioéthique, à l’instar du Comité consultatif national d’éthique en France.

1.3.1 Belgique[1070]

Le Comité consultatif de Bioéthique de Belgique a été créé par un accord de coopération en 1993. Il s’agit de l’instance consultative officielle belge, qui est indépendante. Ce comité a pour mission de rendre des avis sur les problèmes soulevés par la recherche et ses applications dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé et d’informer le public et les Autorités sur ces problèmes. A cette fin, il doit organiser une conférence biannuelle destinée au grand public au cours de laquelle les questions importantes qui s’y rapportent sont abordées publiquement. Dans le cadre de sa mission d’information, le Comité tient la presse informée de ses avis, publie des ouvrages, élabore des fiches pédagogiques et tient à jour son site internet.

Le mandat des membres du comité est de 4 ans, renouvelable. Celui du président est d’un an.

1.3.2 Suisse[1071]

La Commission nationale d'éthique dans le domaine de la médecine humaine a été créé par ordonnance en 2000. Il s’agit d’un comité d’experts indépendants qui a pour mission d'informer sur l'état de la recherche médicale, d'évaluer les retombées sociales et les enjeux éthiques des biotechnologies dans la médecine humaine tout en menant une réflexion éthique globale.

La commission doit en particulier informer le public et encourager le dialogue public sur des questions éthiques ; élaborer des recommandations en matière de pratique médicale ; signaler les lacunes et les problèmes d’exécution des législations ; conseiller, à leur demande, le Parlement, le Conseil fédéral et les cantons et élaborer, à la demande du Conseil fédéral, des expertises sur des questions particulières. Enfin, elle peut procéder à des manifestations et à des auditions publiques.

Le Conseil fédéral nomme le président et les autres membres de la commission pour une durée de quatre ans, renouvelable trois fois.


 

1.3.3 Luxembourg[1072]

La Commission Consultative Nationale d'Ethique pour les sciences de la Vie et de la Santé a été créée en 1988. Sa mission consiste à étudier, soit de sa propre initiative, soit à la demande du Gouvernement, les aspects éthiques des problèmes soulevés dans le domaine des sciences de la vie et de la santé et les solutions et moyens à mettre en œuvre. Elle doit respecter plusieurs exigences : la pluridisciplinarité systématique des recherches et débats, le débat pluraliste, le consensualisme des avis et le débat régulier avec la société civile et les instances politiques. La Commission doit informer le public sur la nature et l'objet des problèmes bioéthiques et entrer en discussion avec la société civile. A cette fin, elle publie régulièrement ses avis et organise une journée nationale d’éthique annuelle pour susciter, alimenter et animer un débat public consacré aux problèmes de bioéthique.

Ses membres sont nommés pour des mandats de cinq ans renouvelables une fois.

1.3.4 Allemagne[1073]

Le Comité Allemand d’Ethique est indépendant et a été créé en 2007. Il traite des questions relatives à l’éthique, à la société, aux sciences, à la médecine et au droit, et les conséquences de la recherche et du développement pour les individus et la société, en particulier dans le domaine des sciences de la vie et de leur application à l’homme.

Il doit informer le public et encourager le débat dans la société avec les différents groupes sociaux, en organisant des événements publics, tels que les soirées « Forum de Bioéthique » et sa journée annuelle, des auditions et des réunions publiques.

Il prépare des opinions et recommandations pour les actions politiques et législatives et coopère avec les comités d’éthique des autres pays et les organisations internationales.

Les membres du Comité sont nommés pour quatre ans, renouvelable une fois. Le président est élu pour quatre ans, renouvelable une fois.

1.3.5 Royaume Uni[1074]

Pour pallier l’absence d’instance nationale responsable de l’évaluation des enjeux éthiques des développements de la biomédecine et des biotechnologies, le Comité Nuffield de Bioéthique, organisme caritatif indépendant, a été créé en 1991.

Il identifie et définit les questions éthiques soulevées par les récentes avancées dans la recherche biomédicale, pour répondre aux préoccupations publiques. Il doit promouvoir la compréhension et le débat public sur ces questions.

Le Comité choisit les sujets sur lesquels il souhaite rapporter ; il peut établir un groupe de travail dédié et une consultation publique est organisée pour obtenir les avis d’une grande variété de personnes pour alimenter le rapport.

Le président est nommé pour cinq ans. Les autres membres sont nommés pour trois ans, renouvelable une fois.

1.3.6 Espagne[1075]

Le Comité de Bioéthique d’Espagne a été créé en 2007. Il s’agit d’une instance consultative collégiale et indépendante, dédiée aux enjeux sociaux et éthiques de la biomédecine et des sciences de la vie. Sa mission, en collaboration avec les autres comités étatiques ou locaux ayant des fonctions dans ce domaine, est de produire des rapports et recommandations pour les autorités publiques ou de son propre chef, d’établir les principes généraux pour la production de codes de bonnes pratiques dans la recherche scientifique et de représenter l’Espagne dans les réunions et organismes internationaux de bioéthique.

Ses membres ont un mandat de quatre ans renouvelable une fois. Le renouvellement des membres se fait par moitié tous les deux ans. Le mandat du président est de deux ans, renouvelable une fois.

2.            Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1.      Nécessité de légiférer

Si les questions posées par les progrès de la connaissance dans les domaines traditionnels de la bioéthique (procréation, génétique, diagnostics pré-implantatoires etc.) demeurent au cœur de la réflexion du comité consultatif national d’éthique, celui-ci a élargi sa réflexion à d’autres thèmes tels que la fin de vie, l’impact sur la santé du numérique ou de l’environnement. C’est également le cas des espaces de réflexion éthique régionaux qui ont d’ores et déjà investi ces champs.

Dans son avis n° 105 du 9 octobre 2008[1076], le comité consultatif national d’éthique, relevant les questions posées par les découvertes des neurosciences ou par les nanotechnologies, s’interrogeait déjà sur cette question du périmètre des lois de bioéthique, appelant à concevoir une réflexion éthique « sur la vie en général – et non uniquement sur la vie humaine en particulier – comme un ensemble où les différentes espèces vivantes interagissent les unes avec les autres et sur leur environnement, pour le respect de la biodiversité, socle de la conservation harmonieuse du vivant ».

Dans son avis n° 129 du 25 septembre 2018[1077], le comité a préconisé une meilleure prise en compte dans les réflexions interdisciplinaires des questions relevant du champ « santé et environnement ». Par ailleurs, il s’est emparé de la question de l’intelligence artificielle et du numérique par la mise en place d’un groupe de travail « flash », et souligne la nécessité de conduire une réflexion éthique sur les enjeux éthiques issus des usages et innovations du numérique, au-delà du champ santé. Il propose d’apporter sa contribution à la préfiguration d’un « CCNE[1078]-numérique », « tout en traitant en son sein et en partenariat avec les instances spécifiques déjà existantes (par exemple, le CERNA[1079]), les questions autour du numérique en santé. ».

Le rapport de la mission d’information parlementaire, déposé le 15 janvier 2019, recommande également d’« élargir le champ de la loi relative à la bioéthique aux nouveaux domaines qui la concernent, comme l’intelligence artificielle, le numérique en santé, l’environnement et, plus largement, les questions de société. »[1080]

En conséquence, il apparaît aujourd’hui nécessaire d’élargir le périmètre du comité consultatif national d’éthique « aux conséquences sur la santé des progrès de la connaissance dans tout autre domaine »[1081].

Afin de pouvoir adapter plus facilement les travaux du comité à ce périmètre élargi, la mesure prévoit de renvoyer à un décret le soin de fixer, d’une part, la liste des ministres qui proposent les quinze personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence et de leur intérêt pour les problèmes d’éthique et, d’autre part, la liste des organismes qui proposent les quinze personnalités appartenant au secteur de la recherche et de la santé. Ces listes seront établies de façon à couvrir les domaines de compétence du comité, mentionnés à l’article L. 1412-1 du code de la santé publique.

 

Le débat public est au cœur des préoccupations en bioéthique. « (…) Si on demande aux citoyens de s’exprimer sur la possibilité ou non, de transgresser certains principes, c’est une exigence éthique que d’éclairer leur choix, notamment par une haute qualité de l’information. Aujourd’hui encore, dans l’esprit de beaucoup, la science semble imposer son rythme propre à la réflexion éthique (…). Or les questions auxquelles doit répondre la loi de bioéthique ne trouveront pas la solution en se basant sur les seuls éléments de connaissances scientifiques. »[1082].

 

Le processus de débat public passe notamment aujourd’hui par la réunion ponctuelle d’états généraux. Or, ceux-ci ne sont pleinement adaptés aux réformes partielles et ne sont pas suffisant pour permettre l’appropriation des sujets par les citoyens. La compréhension par les citoyens des enjeux soulevés par les avancées scientifiques dans le domaine des sciences de la vie et de la santé, et leur participation à la réflexion éthique, nécessite un débat public en continu et sur tout le territoire.

 

De plus, les derniers états généraux ont montré la nécessité d’examiner et d’apporter les solutions appropriées aux questions éthiques qui se posent entre deux révisions d’ensemble, sans renoncer à prévoir une périodicité pour ces dernières. L’enjeu est donc de mieux articuler récurrence des révisions globales des lois de bioéthique et intercurrence, chacun des deux dispositifs devant associer la société dans son ensemble.

2.2.      Objectifs poursuivis

La présente mesure aura pour objet de conforter la tenue d’un débat démocratique pérenne portant sur les questionnements éthiques résultant des progrès scientifiques et technologiques, en prenant en compte leur rapidité et leur transdisciplinarité, et d’encourager la participation du public à ce débat, en renforçant l’information et la formation des citoyens.

Elle visera également à permettre au comité consultatif national d’éthique de se prononcer sur de nouveaux enjeux, ayant des répercussions sur la santé, mais se trouvant en dehors de son périmètre actuel.

3.            Options possibles et dispositif retenu

La présente mesure élargit le périmètre du comité consultatif national d'éthique afin qu’il puisse se saisir de questions transdisciplinaires de santé publique, qui impliquent de s’ouvrir à d’autres domaines que ceux de la biologie, de la médecine et de la santé.

Afin que la composition du comité puisse couvrir ce périmètre élargi, il est prévu de renvoyer au décret, d’une part, la liste des ministres qui proposent les quinze personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence et de leur intérêt pour les problèmes d’éthique et, d’autre part, la liste des organismes qui proposent quinze personnalités appartenant au secteur de la recherche et de la santé, ces listes étant définies de façon à couvrir les domaines de compétence du comité.

Cet ajustement de la composition du comité préserve la pluralité des courants philosophiques et spirituels et le respect de la parité femmes-hommes. Par ailleurs, le renouvellement par moitié des membres du comité est inscrit au niveau législatif[1083], afin de préserver la continuité de ses travaux, qui nécessitent la présence d’une mémoire et d’une culture.

La mesure prévoit également de sous-tendre la révision régulière des lois de bioéthique par un débat public « en continu », organisé par le comité consultatif national d’éthique, en lien avec les espaces de réflexion éthique régionaux.

Enfin, le mandat du président du comité et celui des autres membres sont alignés sur une même durée de trois ans renouvelable une fois. Jusqu’alors, le mandat des membres était de quatre ans renouvelables une fois et celui du président était de deux ans, sans limite de renouvellement.

4.            Analyse des impacts des dispositions envisagées

4.1.      Impacts juridiques

La mesure aura pour objet de modifier la rédaction des articles L. 1412-1, L. 1412-1-1, L. 1412-2 et L. 1412-5 du code de la santé publique.

4.2.      Impacts économiques et financiers

La mise en œuvre du débat public en continu sera prise en charge par le comité consultatif national d’éthique et les espaces de réflexion éthique régionaux, ces derniers étant financés par une mission d’intérêt général attribuée aux centres hospitaliers universitaires qui les abritent.

5.            Consultations et modalités d’application

5.1.      Consultations

Cette mesure, qui a été construite à partir des avis rendus par le Conseil d’Etat, le comité consultatif national d’éthique et la mission d’information parlementaire, n’appelle aucune consultation obligatoire.  

Le comité consultatif national d’éthique a été consulté et a rendu son avis le 28 juin 2019.

5.2.      Modalités d’application

5.2.1.      Application dans le temps

L’entrée en vigueur des dispositions du présent article a lieu au lendemain de la publication de la loi, sauf s’agissant de celles modifiant l’article L. 1412-2 du code de la santé publique, relatives à la composition du comité et à la durée du mandat, qui entreront en vigueur le 26 décembre 2021.

Des dispositions transitoires sont prévues pour permettre aux membres du comité nommés en remplacement de ceux dont le mandat expire après la publication de la présente loi, d’être renommés, à compter du 26 décembre 2021, pour un premier mandat dans le nouveau comité, sans que leur précédent mandat ne soit comptabilisé.

5.2.2.      Application dans l’espace

Le présent article du projet de loi s’appliquera en France métropolitaine et dans les collectivités d’outre-mer régies par l’article 73 de la Constitution, ainsi qu’à Saint Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon.

5.2.3.      Textes d’application

Deux décrets simples seront pris pour l’application l’article L. 1412-2 modifié du code de la santé publique : un décret fixant la liste des ministres proposant les quinze personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence et de leur intérêt pour les problèmes d’éthique, et un décret fixant la liste des organismes proposant les quinze personnalités appartenant au secteur de la santé et de la recherche.

Par ailleurs, un décret en Conseil d’Etat est prévu en application de l’article L. 1412-5 du code de la santé publique, afin de préciser les conditions de désignation des membres, notamment les  modalités de respect des règles de parité et de renouvellement par moitié de l’instance.


Article 30 Simplification des missions de
l’Agence de la biomédecine

 

1.             État des lieux

L’Agence de la biomédecine est un établissement public administratif créé par la loi de bioéthique du 6 août 2004.

L’Agence compte 244,5 ETP et dispose d’un budget de 69 M€.

Depuis sa création, l’Agence joue un rôle de premier plan dans quatre domaines : le prélèvement et la greffe d’organes et de tissus, le prélèvement et la greffe de cellules souches hématopoïétiques, l’assistance médicale à la procréation, l’embryologie et la génétique humaines. Sa conception est originale : rassembler dans un même établissement des compétences scientifiques, statistiques et pratiques de haut niveau, et porter un regard sur les questions éthiques. L’Agence est en outre l’opérateur principal de l’attribution des greffons et de plusieurs autres maillons de la chaine de la transplantation.

Le législateur a notamment confié à l’Agence le soin d’évaluer les activités liées aux nanobiotechnologies, de mettre à disposition du public des informations sur les tests génétiques en accès libres et d’informer en permanence le Parlement et le Gouvernement sur le développement des neurosciences.

Or, l’Agence ne dispose d’aucune compétence dans ces trois champs, qui demeurent très périphériques à son cœur de missions.

2.            Nécessité de légiférer ET objectifs poursuivis

L’Agence de la biomédecine n’est pas en mesure de s’entourer des compétences ou de l’expertise en biotechnologie ou en nanobiotechnologie, qui n’est pas en lien ni direct ni évident avec ses champs de compétence.

Certes, l’Agence traite des perspectives en matière d’organes artificiels dans son rapport au Parlement et au Gouvernement sur le développement des connaissances et des techniques, mais il s’agit d’une partie très spécifique du très vaste domaine des nanobiotechnologies.

Les neurosciences n’ayant aucun lien avec le prélèvement et la greffe, la procréation, l’embryologie et la génétique humaines, l’Agence n’est pas en mesure de se doter de l’expertise nécessaire pour assurer efficacement cette mission. Depuis 2011, la contribution de l’Agence n’a pu aller au-delà de la production de trois rapports : Imagerie cérébrale : information du patient (2013) ; Etat des connaissances sur le développement des traitements pharmacologiques de l’autisme (2014) ; Les interfaces cerveau – machine dans la correction du handicap (2015).

Enfin, l’élaboration d’un référentiel des examens génétiques vendus sur Internet s’avère très complexe à mettre en œuvre et contraindrait l’agence à se doter de compétences qui ne relèvent pas de son cœur de métier. Par ailleurs, élaborer un tel référentiel revient à légitimer ces tests en accès libre alors qu’il est interdit de solliciter l'examen de ses caractéristiques génétiques ou de celles d'un tiers en dehors des conditions prévues par la loi[1084].

La présente mesure conduira à modifier la rédaction de l’article L. 1418-1 du code de la santé publique pour supprimer ces missions.

3.            Consultation

L’Agence de la biomédecine a été consultée. L’avis a été rendu le 26 juin 2019.


Article 30 Simplification des instances de
l’Agence de la biomédecine

 

1.      État des lieux

L’Agence de la biomédecine est administrée par un conseil d’administration dont la composition est définie par les articles L. 1418-3 et R. 1418-6 du code la santé publique.

L’Agence est en outre assistée par un conseil d’orientation dont la composition est définie par les articles L. 1418-4 et R. 1418-19 du code la santé publique.

La composition de ces instances doit être adaptée.

D’une part, le conseil d’administration comprend, depuis la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, des représentants d'associations d'usagers du système de santé agréées au titre de l'article L. 1114-1, mais plus de représentants des associations de donneurs d’organe, qui n’ont pas vocation à être agréées. En effet, seules les associations représentant les usagers du système de santé au sein des instances hospitalières et de santé publique peuvent faire l'objet d'un agrément, ce qui n’est pas le cas des associations de donneurs qui ne remplissent pas ce critère de représentativité pour être agréées.

Le conseil d’administration est également régi par un principe de parité qui prévoit que les blocs des institutions et des personnalités qualifiées soient de même taille.

En outre, la composition du conseil d’administration est la suivante :

Cette composition, fondée sur une parité entre les membres de droit et les autres représentants, rend difficile toute modification de la composition du conseil d’administration de l’Agence de la biomédecine.

D’autre part, suite à une coquille aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 1418-4 du code de la santé publique, le conseil d’orientation comprend non pas six députés et sénateurs mais huit.

2.      Nécessité de légiférer ET objectifs poursuivis

L’ajout de représentants d’associations de donneurs d’organes au sein du conseil d’administration de l’agence, la suppression de la répartition par moitié de représentants institutionnels et par moitié de personnalités qualifiées au sein de ce conseil et la suppression de deux parlementaires au sein de son conseil d’orientation nécessitent la modification des articles L. 1418-3 et L. 1418-4 du code de la santé publique.

Parmi les parties prenantes les plus importantes intervenant dans les domaines de compétence de l’Agence figurent notamment les associations de promotion du don et des associations de patients agréées au niveau national. Dans un souci de représentativité, il est souhaitable, afin que tous les intérêts puissent être utilement représentés, que ces associations siègent au conseil d’administration de l’Agence, comme cela est par exemple le cas pour les associations de promotion du don de sang au conseil d’administration de l’Etablissement français du sang, et au conseil d’orientation.

La mesure vise à introduire plus de souplesse dans la composition du conseil d’administration, en prévoyant qu’il comporte une majorité de représentants institutionnels, et à permettre une meilleure représentation des associations de promotion du don au conseil d’administration et au conseil d’orientation.

3.      analyse des IMPACTS des dispositions envisagées

En sus de la modification de l’article L. 1418-3 du code de la santé publique, l’inclusion de représentants d’associations de donneurs d’organes au conseil d’administration implique de modifier l’article R. 1418-6 du même code.

En sus de la modification de l’article L. 1418-4 du code de la santé publique, la réduction de 8 à 6 du nombre de parlementaires au conseil d'orientation de l’Agence et l’inclusion de représentants d’associations de donneurs d’organes impliquent de modifier l’article R. 1418-19 du même code.

4.      Consultation et modalités d’application

4.1  Consultation

L’Agence de la biomédecine a été consultée. L’avis a été rendu le 26 juin 2019.

4.2  Modalités d’application dans le temps

Les dispositions modifiant la composition du conseil d’orientation entreront en vigueur le 22 juin 2021. Les mandats des membres arrivant à expiration avant cette date sont prorogés jusqu’à celle-ci.

Les dispositions modifiant la composition du conseil d’administration entreront en vigueur au prochain renouvellement de cette instance.

Les autres dispositions entrent en vigueur au lendemain de la publication de la loi.


Article 31 Extension et adaptation des dispositions de loi à Saint-Pierre-et-Miquelon, Mayotte, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna

1.             État des lieux

Le développement de techniques scientifiques ou médicales, dans des domaines tels que les neurosciences, l’intelligence artificielle ou la recherche génétique, appelle un accompagnement législatif garantissant leur usage dans le respect de la protection de la vie privée des personnes et de leur dignité. De même, les évolutions sociétales sur la procréation médicale assistée ou l’autoconservation des gamètes mettent en jeu des questions de filiation et d’accès aux origines personnelles.

Ces évolutions, mais aussi le renforcement des règles qui leur sont applicables, doivent être définies et déclinées aux collectivités ultramarines selon leur statut particulier. Il revient à l’Etat de fixer les règles de fond portant sur le respect du corps humain au sens des articles 16-1 et suivants du code civil, les garanties des libertés publiques et la recherche. La combinaison entre les compétences de l’Etat et celles de ces collectivités s’apprécie en fonction de la finalité de chaque règle.

La loi du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique a été étendue et adaptée par l’ordonnance du 18 avril 2012 aux îles de Wallis et Futuna, à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française. En revanche, la loi du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine) n’a pas fait l’objet d’extension. Ce retard doit également être comblé pour donner toute la mesure des dispositions nouvelles, voire rendre possible leur application.

La présente mesure d’habilitation s’inscrit dans le cadre de l’article 38 de la Constitution du 4 octobre 1958, qui permet au gouvernement « de demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. 

2. Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

2.1 Nécessité de légiférer

Les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte, qui relèvent du principe d’identité législative, disposent néanmoins d’un régime particulier de sécurité sociale, au titre desquels la prise en charge de certains actes prévus par la loi peut appeler des adaptations.

La Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna sont régies par le principe de spécialité législative ce qui implique l’extension formelle des dispositions pour qu’elles y trouvent application. Les dispositions du projet de loi portant sur les matières applicables de plein droit, par exception à ce principe, telles que « Nationalité, état et capacité des personnes, notamment actes de l’état civil, filiation », lorsqu’elles relèvent de la compétence de l’Etat, ne peuvent trouver effet sans extension préalable des nouveaux droits ouverts en matière de procréation médicale assistée relevant du code de la santé publique. Elles peuvent également requérir des adaptations.

Par ailleurs, l’encadrement du consentement des personnes, y compris mineurs ou majeurs protégés, vise à garantir le respect des principes prévus aux articles 9-16 et suivants du code civil, voire d’une liberté publique, sans modifier le régime de protection des personnes.

En outre, le statut institutionnel particulier de chacune de ces trois collectivités prévoit une répartition de compétence normative entre l’Etat et les institutions locales, qui rend nécessaire une application différenciée, notamment dans les matières touchant au droit civil, au droit de la santé, à la recherche, au droit pénal ou à la procédure civile ou pénale.

Or, ces réflexions sont difficiles à mener dans le temps du débat parlementaire qui porte sur les mesures de fond.

Il apparaît donc, souvent a posteriori que nombre de mesures n’ont pas été suffisamment évaluées par rapport aux contextes locaux et que leur mise en œuvre pâtisse d’un manque d’adaptation. Ces adaptations, parfois simplement formelles sont néanmoins nécessaires pour désigner, par exemple, l’autorité qui a la charge de son exécution. Elles peuvent également prévoir des modalités organisationnelles ou plus fondamentales en terme de compétence normative.  

2.2 Objectifs poursuivis

La présente demande d’habilitation à légiférer par ordonnance a pour objectif d’assurer, à ces territoires, comme sur le reste du territoire français, les garanties fondamentales relatives à la protection et à la dignité des personnes, en tenant compte de leurs spécificités tant institutionnelles que géographiques. Elle s’inscrit donc dans un cadre plus général d’égalité de traitement et d’amélioration de l’effectivité du droit applicable aux collectivités ultramarines.

Elle doit permettre, dans un délai raisonnable fixé par l’habilitation, de prendre en compte les évolutions sociétales ou techniques en médecine ou en science soulevant des questions éthiques.

Le recours à une ordonnance permet de recueillir l’avis des collectivités et d’étayer le choix des mesures prises par l’Etat au titre de sa compétence, dans des domaines aux frontières souvent complexes. Le délai supplémentaire donné par l’habilitation permet d’assurer un travail précis d’analyse pour respecter la répartition normative voulue par le constituant, entre l’Etat et ces collectivités.

Il permet aussi d’opérer une actualisation normative et ainsi d’améliorer l’intelligibilité du droit et sa cohérence par la suppression, le cas échéant, d’adaptations obsolètes.

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’analyse de l’impact de chacune des mesures envisagées sera effectuée dans la fiche d’impact relative aux dispositions de l’ordonnance prise dans le cadre de cet article d’habilitation. Les différents impacts – sociaux, économiques et financiers, sur les administrations, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes et, sur la jeunesse seront développés à la lumière des contours définitifs de chacune des dispositions proposées.

4. modalités d’application

Un délai d’habilitation de dix-huit mois apparaît nécessaire au Gouvernement pour les mesures prévues au présent article.

 

 


Article 31 Adaptation du droit national au regard des nouveaux règlements européens 2017/745/UE et 2017/746/UE du 5 avril 2017

1.             État des lieux

1.1 Dans le cadre des Etats généraux de la bioéthique, ont été abordés le développement des objets connectés, sous l’angle des données de santé et des risques d’atteintes à la vie privée, la question de l’intelligence artificielle et des robots, et de la responsabilité des professionnels de santé dans l’utilisation de ces nouvelles technologies.

Autant de préoccupations qui trouvent un écho dans le domaine des dispositifs médicaux et dans le domaine des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro , notamment dans la perspective de la mise en œuvre des deux nouveaux règlements européens relatifs aux dispositifs médicaux (règlement 2017/745/UE) et aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (règlement 2017/746/UE), qui ont été adoptés le 5 avril 2017.

1.2 Fondés sur les articles 114 et 168 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, les règlements 2017/745/UE et 2017/746/UE harmonisent les dispositions régissant la mise sur le marché et la mise en service sur le marché de l’Union européenne de dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, et de leurs accessoires, qui peuvent alors bénéficier du principe de libre circulation des marchandises. 

Cette nouvelle réglementation européenne a également pour objectif de fournir un cadre réglementaire propice à l’innovation et à la compétitivité du secteur européen de ces dispositifs.

Cette réglementation européenne vise aussi à renforcer les règles applicables à la sécurité et aux performances des dispositifs médicaux et des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (au total, entre 800 000 et 2 millions de produits seraient commercialisés en France) édictées dans les années 1990 , en introduisant de nombreuses évolutions, parmi lesquelles le renforcement du rôle des organismes notifiés (chargés de l’évaluation de conformité pour l’octroi de la certification CE des dispositifs), et de leur surveillance par les autorités compétentes, ainsi qu’une transparence accrue sur les informations disponibles au travers de la base de données Eudamed. Le développement des nouvelles technologies de santé s’accompagne d’une exigence qualitative concernant ces nouveaux dispositifs. Le patient ne doit pas subir l’innovation, elle doit constituer pour lui un réel bénéfice.

Par ailleurs, les règlements européens 2017/745/UE et 2017/746/UE ont également pour objectif d’améliorer la fiabilité des données collectées dans le cadre des investigations cliniques réalisées pour les dispositifs médicaux les plus à risque tels que les dispositifs implantables ou d’études de performance réalisées pour les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro préalablement à leur mise sur le marché. Pour les dispositifs médicaux, ils visent en outre à assurer une meilleure prise en compte des produits fabriqués à l’aide de dérivés de tissus ou de cellules d’origine humaine non viables ou rendus non viables, en les intégrant dans le champ d’application du règlement, pour autant que ceux-ci correspondent à la définition du dispositif médical.

De plus, le règlement 2017/745/UE a également vocation à s’appliquer aux produits énumérés à l'annexe XVI du règlement qui, sont des dispositifs sans finalité médicale, et devront répondre aux mêmes exigences que les dispositifs médicaux. Leur conformité à ces exigences devra être attestée par l’intervention d’un organisme notifié en fonction de la classe du risque dudit produit, au même titre qu’un dispositif médical. Il s’agira notamment des « produits destinés à être totalement ou partiellement introduits dans le corps humain par un moyen invasif chirurgical en vue de modifier l'anatomie ou de fixer des parties anatomiques, à l'exception des produits de tatouage et des piercings » et des « équipements destinés à la stimulation cérébrale transcrânienne au moyen de courants électriques ou de champs magnétiques ou électromagnétiques afin de modifier l'activité neuronale du cerveau ». 

Les règlements européens susmentionnés prônent leur attachement au respect des droits fondamentaux reconnus par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, notamment la protection de la dignité humaine et de l’intégrité de la personne. Ces principes immuables et premiers irriguent le projet de loi bioéthique.  

2.      objectifs poursuivis et Nécessité de légiférer

2.1 Les règlements européens étant d’application directe, il n’est pas nécessaire de les transposer dans le droit national.

Pour autant, les principes d’effet direct du droit européen et de sécurité juridique imposent d’adapter la législation française afin d’éviter de maintenir dans l’ordre juridique national des dispositions obsolètes.

L’adaptation du code de la santé publique aux règlements européens susmentionnés constitue ainsi une démarche obligatoire afin de permettre l’adéquation du droit français et du droit européen. La plupart des dispositions actuelles du code de la santé publique relatives aux dispositifs médicaux ou aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro résultent de la transposition des directives européennes relatives à ces dispositifs. Elles seront donc abrogées.

Subsisteront les dispositions relatives aux modalités nationales retenues pour atteindre certains objectifs fixés par ces règlements et pour la réalisation desquels une marge de manœuvre est laissée aux Etats membres, comme par exemple les dispositions relatives à l’organisation nationale des investigations cliniques impliquant des dispositifs médicaux, les obligations de déclaration pour les distributeurs ou encore les sanctions pénales.

Pour réaliser ce toilettage et ces adaptations du droit national, le moyen le plus approprié et le plus couramment utilisé pour l’application de règlements européens consiste en une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance.

2.2              Il apparaît donc opportun d’intégrer dans la présente loi l’habilitation nécessaire au Gouvernement pour adapter les dispositions législatives actuelles relatives aux dispositifs médicaux et aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro en vue de l’entrée en application des règlements 2017/745/UE et 2017/746/UE, qui vont à terme constituer l’environnement juridique propre au secteur des dispositifs médicaux et des dispositifs médicaux de diagnostic in vitro.

3.        Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’analyse de l’impact de chacune des mesures envisagées sera effectuée dans la fiche d’impact relative aux dispositions de l’ordonnance prise dans le cadre de cet article d’habilitation. Les différents impacts – sociaux, économiques et financiers, sur les administrations, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes et, sur la jeunesse seront développés à la lumière des contours définitifs de chacune des dispositions proposées.

4.        modalités d’application

4.1. Application dans le temps

Sur l’application du règlement 2017/745/UE, adopté le 5 avril 2017 et d’application obligatoire le 26 mai 2020, le calendrier de la mise en œuvre des nouveaux règlements est aujourd’hui connu et peut être décliné. La date du 26 mai 2020 marquera, pour les dispositifs médicaux, l’abrogation des directives, sauf quelques dispositions transitoires. Ces dispositions transitoires entreront en application à cette date. Les dispositifs médicaux mis sur le marché devront être conformes au règlement 2017/745/UE. 

Le règlement 2017/746/UE pour les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro a été adopté le 5 avril 2017 et entrera en application le 26 mai 2022.

Des dispositions transitoires sont également prévues pour ce règlement. Enfin, des textes d’application de la future ordonnance seront à prévoir.

Un délai d’habilitation de douze mois apparaît nécessaire au Gouvernement pour les mesures prévues au présent article.

4.2.  Application dans l’espace

Les règlements 2017/745/UE et 2017/746/UE sont applicables au sein des 28 Etats membres de l’Union européenne. 

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution et dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi afin :

1° d’apporter aux dispositions des livres II à IV de la cinquième partie du code de la santé publique applicables aux dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostic in vitro  les adaptations rendues nécessaires par l’entrée en application le 26 mai 2020 du règlement (UE) n° 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux, modifiant la directive 2001/83/CE, le règlement (CE) n° 178/2002 et le règlement (CE) n° 1223/2009 et abrogeant les directives du Conseil 90/385/CEE et 93/42/CEE, et par l’entrée en application du règlement (UE) 2017/746 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et abrogeant la directive 98/79/CE et la décision 2010/227/UE de la Commission, afin de :

- mettre en cohérence le système national de matériovigilance et de réactovigilance avec les exigences européennes,

- renforcer le rôle de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé en tant qu’autorité compétente nationale,

- préciser les modalités de traçabilité des dispositifs médicaux, notamment au sein des établissements de santé,

- et procéder à toutes les mesures de coordination, d’abrogation et de simplification nécessaires ;

2° d’apporter aux dispositions du titre II du livre Ier de la première partie du code de la santé publique, relatives aux recherches impliquant la personne humaine, les adaptations rendues nécessaires par l’entrée en application le 26 mai 2020 du règlement (UE) n° 2017/745 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux, modifiant la directive 2001/83/CE, le règlement (CE) n° 178/2002 et le règlement (CE) n° 1223/2009 et abrogeant les directives du Conseil 90/385/CEE et 93/42/CEE, et l’entrée en application du règlement (UE) 2017/746 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro et abrogeant la directive 98/79/CE et la décision 2010/227/UE de la Commission, afin de préciser les modalités de réalisation des investigations cliniques qui devront être réalisées en application des règlements et de procéder à toutes les mesures de coordination, d’abrogation et de simplification nécessaires.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chaque ordonnance.

Article 31 Adaptation du droit national au regard du règlement (CE) n° 1394/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les médicaments de thérapie innovante

1.             État des lieux

1.1.                       Cadre général

La loi n° 2011-302 du 22 mars 2011 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques a introduit les médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement dans le paysage législatif français, faisant suite aux dispositions de l’article 28 du règlement (CE) n°1394/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les médicaments de thérapie innovante, et modifiant la directive 2001/83/CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004.

Ce règlement communautaire a défini les médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement tout en les excluant de son champ et a laissé aux Etats membres le soin d’encadrer ces produits pour leur assurer des exigences de qualité et de sécurité.

L’introduction de cette nouvelle catégorie de médicaments définis à l’article L. 5121-1 17° du code de la santé publique comme « tout médicament tel que défini dans le règlement (CE) n° 1394/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, concernant les médicaments de thérapie innovante et modifiant la directive 2001/83/CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004, fabriqué en France selon des normes de qualité spécifiques et utilisé dans un hôpital en France, sous la responsabilité d'un médecin, pour exécuter une prescription médicale déterminée pour un produit spécialement conçu à l'intention d'un malade déterminé » a eu des conséquences sur les catégories de produits existants auparavant telles que les catégories de préparations de thérapie génique, de thérapie cellulaire xénogénique et les produits de thérapie cellulaire.

Le règlement (CE) n° 1394/2007 rappelle le respect des droits fondamentaux reconnus par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et de la convention du Conseil de l’Europe, notamment la protection de la dignité humaine et de l’intégrité de la personne. Ces principes immuables et premiers irriguent le projet de loi bioéthique.

Il apparaît donc nécessaire de prévoir dans la présente loi de bioéthique une mesure habilitant le Gouvernement à mettre en cohérence les dispositions législatives actuelles relatives aux préparations de thérapie génique, de thérapie cellulaire xénogénique et aux produits de thérapie cellulaire.

1.2.                       Cadre constitutionnel

La présente mesure d’habilitation s’inscrit dans le cadre de l’article 38 de la Constitution du 4 octobre 1958, qui permet au gouvernement « de demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. ».

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

L’adaptation du code de la santé publique au règlement européen (CE) n°1394/2007 et plus précisément son article 28, s’avère nécessaire pour permettre l’harmonisation de la législation française au droit européen en matière de médicaments de thérapie innovante et de médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement.

2.1 Les catégories de préparations de thérapie génique définies au 12°[1085] de l’article L. 5121-1 du code de la santé publique et de thérapie cellulaire xénogénique définies au 13°[1086] du même article correspondent aux médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement. Ce sont des catégories de médicaments préparés en petite série pour un malade déterminé.

L’exposé des motifs de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique, précisait que le cadre juridique introduit pour les préparations de thérapie génique et de thérapie cellulaire xénogénique répondait à des impératifs de deux ordres : d’une part, permettre le développement de telles préparations par des petites structures, telles que les opérateurs hospitalo-universitaires, dépourvues de statut d’établissement pharmaceutique, à l’instar de ce qui était déjà autorisé pour les préparations de thérapie cellulaire ; d’autre part, contribuer à favoriser l'accès des patients à ces thérapies en favorisant l'émergence de produits à fort potentiel thérapeutique, dans des indications plus rares, développés par des opérateurs universitaires et hospitalo-universitaires.

Or, en pratique, depuis la publication de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 et jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, il n’y a pas eu de préparation de thérapie génique, ni de préparation de thérapie cellulaire xénogénique sur le marché français, et aucune autorisation pour ce type de produit n’a été demandée puisque ces produits étaient tous au stade des essais cliniques. Désormais, ces préparations répondent à la définition des médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement et sont autorisées sous ce statut.

2.2 Pour ce qui concerne les produits de thérapie cellulaire, l’article L. 1243-1 du code de la santé publique qui les définit, n’est plus tout à fait en conformité avec le règlement (CE) n°1394/2007. En effet, cet article dispose « A l'exception des produits sanguins labiles, sont des produits cellulaires à finalité thérapeutique les cellules humaines utilisées à des fins thérapeutiques autologues ou allogéniques, quel que soit leur niveau de transformation, y compris leurs dérivés.

Lorsque ces produits cellulaires à finalité thérapeutique sont des spécialités pharmaceutiques ou d'autres médicaments fabriqués industriellement, ils sont régis par les dispositions du titre II du livre Ier de la cinquième partie. Dans les autres cas, ce sont des préparations de thérapie cellulaire régies par les dispositions du présent chapitre, y compris lorsque les cellules humaines servent à transférer du matériel génétique. »

Or, les cellules servant à transférer du matériel génétique, et donc génétiquement modifiées, doivent être considérées comme des médicaments de thérapie innovante et non des préparations de thérapie cellulaire dans la mesure où l'introduction de matériel génétique au niveau cellulaire constitue une modification substantielle, au regard de l’annexe I du règlement susmentionnée. 

A cet égard, il convient de rappeler que les critères pour qualifier un produit de médicament de thérapie innovante sont notamment le fait que les cellules ou tissus ont été soumis à une manipulation substantielle, ou le fait que les cellules ou les tissus ne soient pas destinés à être utilisés pour la même fonction essentielle chez le receveur et chez le donneur.

Désormais ces produits répondront à la définition des médicaments de thérapie innovante.

3.       Options possibles et dispositif retenu

Le règlement européen n°1394/2007 ne nécessite pas de mesure de transposition au niveau national. Mais il appartient au législateur français de le faire appliquer en le mettant en cohérence avec les dispositions nationales.

L’article 197 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose qu’en matière de coopération administrative, la mise en œuvre effective du droit de l’Union par les Etats membres, qui est essentielle au bon fonctionnement de l’Union, est considéré comme une question d’intérêt commun.

Le recours à la procédure d’ordonnance fixée par l’article 38 de la Constitution du 4 octobre 1958 est destiné à permettre cette mise en conformité du droit national.

Le projet d’ordonnance aura pour objet de mettre à jour le code de la santé publique en supprimant les catégories des préparations de thérapie génique et de thérapie cellulaire xénogénique de la règlementation française et leurs mentions dans la mesure où les médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement englobent ces produits, et de restreindre le champ des produits cellulaires à finalité thérapeutique en excluant les produits thérapeutiques cellulaires dont les cellules servent à transférer du matériel génétique.

4.       Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’analyse de l’impact de chacune des mesures envisagées sera effectuée dans la fiche d’impact relative aux dispositions de l’ordonnance prise dans le cadre de cet article d’habilitation. Les différents impacts – sociaux, économiques et financiers, sur les administrations, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes et, sur la jeunesse seront développés à la lumière des contours définitifs de chacune des dispositions proposées.

5.       modalités d’application

5.1.                       Application dans le temps

Le règlement (CE) n°1394/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les médicaments de thérapie innovante et modifiant la directive 2001/83/CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004 est applicable depuis le 30 décembre 2008.

Suite à l’adoption de ce règlement et de son article 28, la loi n° 2011-302 du 22 mars 2011 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques a introduit les médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement dans le code de la santé publique.

Le règlement s’imposant et ne nécessitant pas de mesure de transposition, il convient d’achever l’harmonisation de ses dispositions avec le code de la santé publique.

Un délai d’habilitation de douze mois apparaît nécessaire au Gouvernement pour les mesures prévues à cet article.

5.2.                       Textes d’application

Des textes d’application de la future ordonnance pour la mise en cohérence des dispositions règlementaires seront à prévoir.

Article 32 Poursuivre une évaluation des lois de bioéthique à échéance régulière

1.             État des lieux

1.1 Depuis la création du premier corpus législatif bioéthique par la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, chaque loi de bioéthique a été accompagnée d’une clause dite « de rendez-vous », initialement prévue dans un délai de cinq ans en 1994[1087] et 2004[1088], puis dans un délai porté à sept ans en 2011[1089], en conséquence du délai effectivement écoulé depuis la dernière loi.

Si cette clause ne contraint pas juridiquement le législateur, elle traduit sa conscience du rythme rapide des évolutions scientifiques, techniques et sociétales et de la nécessité d’y adapter régulièrement le cadre législatif bioéthique.

1.2 Le fait d’avoir une loi de bioéthique révisée périodiquement est une spécificité française. En effet, les autres pays adoptent des lois thématiques sur un sujet de bioéthique précis tel que, par exemple, l’assistance médicale à la procréation, avec le Human Fertilisation and Embryology Act 2008 au Royaume Uni et la Ley 14/2006, de 26 de mayo, sobre técnicas de reproducción humana asistida en Espagne, la loi fédérale relative à la recherche sur les cellules souches embryonnaires de 2003 en Suisse ou encore la loi sur le prélèvement et la transplantation d’organes de 1986 en Belgique, sans que des clauses de réexamens soient prévues par ces législateurs.

2.       Nécessité de légiférer et objectifs poursuivis

La présente loi prévoit une clause de réexamen périodique qui relève du niveau législatif, traduisant le même souci qu’en 1994, 2004 et 2011 de prendre en compte le caractère très évolutif des avancées scientifiques et technologiques soulevant des questions éthiques.

Le modèle français fondé sur une révision périodique des lois de bioéthique, précédée d’une évaluation de leur application par l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques et d’un débat public sous la forme d’Etats généraux, doit être conservé. C’est à la fois un « élément essentiel de notre démocratie sanitaire »[1090] et une garantie de la prise en compte des évolutions scientifiques, technologiques et sociétales, dont le rythme s’intensifie. Une telle clause permet ainsi d’assurer un cadre législatif actualisé et pertinent pour répondre aux enjeux éthiques posé par l’avancée du savoir scientifique.

3.             Options possibles et analyse des impacts des dispositions envisagees

Le Conseil d’Etat a évoqué comme option possible de supprimer la clause de rendez-vous précédée d’états généraux, accusée, d’une part, de « jouer un rôle de catalyseur des revendications, d’exacerbation des passions et de cristallisation des positions »[1091] et, d’autre part, d’être en retard par rapport au rythme, plus rapide, des avancées scientifiques et techniques.

 

Toutefois, le principe d’un réexamen périodique de la loi de bioéthique demeure souhaitable. Il présente l’avantage de mobiliser tous les acteurs intéressés (experts, citoyens, décideurs) pour une réflexion globale sur l’ensemble des sujets bioéthiques. Une telle révision régulière favorise une vision transversale sur les questionnements bioéthiques à un instant et, en conséquence, des réponses cohérentes tenant compte de « l’effet domino » que certains choix peuvent impliquer.

 

Par ailleurs, le comité consultatif national d’éthique, comme la mission d’information parlementaire, a préconisé de fixer à cinq ans le délai de réexamen de la loi de bioéthique, afin de « prendre en compte l’accélération des avancées scientifiques et des technologies biomédicales, dans un contexte de mondialisation des enjeux de santé et de recherche, ainsi que les nouvelles demandes de la société induites par ces innovations ».[1092]

 

Toutefois, ce délai apparaît trop court pour permettre d’évaluer efficacement l’application de la loi par l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui intervient une année en amont, ramenant ainsi à quatre ans la période d’application.

4.       modalités d’application

L’entrée en vigueur de ces dispositions est immédiate.

1

 


[1] Loi n° 94-548 du 1er juillet 1994 relative au traitement des données nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ; loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain ; loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal.

[2] Article 47 de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique

« I. - La présente loi fait l'objet d'un nouvel examen d'ensemble par le Parlement dans un délai maximal de sept ans après son entrée en vigueur.

II. - Elle fait en outre l'objet, dans un délai de six ans, d'une évaluation de son application par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. »

[3] Article L1412-1-1 du code de la santé publique

« Tout projet de réforme sur les problèmes éthiques et les questions de société soulevés par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé doit être précédé d'un débat public sous forme d'états généraux. Ceux-ci sont organisés à l'initiative du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, après consultation des commissions parlementaires permanentes compétentes et de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. L'avis des commissions compétentes et de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques inclut une appréciation sur l'opportunité, pour le Gouvernement, de mobiliser, dans les conditions prévues à l'article L. 121-10 du code de l'environnement, le concours de la Commission nationale du débat public.

A la suite du débat public, le comité établit un rapport qu'il présente devant l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui procède à son évaluation, en faisant ressortir les éléments scientifiques indispensables à la bonne compréhension des enjeux de la réforme envisagée.

En l'absence de projet de réforme, le comité est tenu d'organiser des états généraux de la bioéthique au moins une fois tous les cinq ans. »

[4] Comité consultatif national d'éthique, Rapport de synthèse des États généraux de la bioéthique et opinions du Comité citoyen, « Quel monde voulons-nous pour demain ? », 5 juin 2018

[5] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018

[6] Comité consultatif national d'éthique, avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018 ; étant précisé que le Comité consultatif national d'éthique a rendu un an plus tôt son avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017.

[7] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018

[8] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique. Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019

[9] Ces travaux ont également été éclairés par les rapports de l’Agence de la biomédecine : Rapport d’information au Parlement et au Gouvernement 2017 ; Rapport sur l’application de la loi de bioéthique 2018 ; Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique - Actualisation 2018 ; Rapport médical et scientifique 2017. S’agissant de ce dernier rapport, publié en septembre 2018, il contient les données qui portent sur l’année n-2 donc 2016 (dernières données disponibles qui figurent dans l’étude d’impact) à l’exception des données de génétique post-natale qui portent sur l’année 2017.

[10] Et notamment une ordonnance, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi, afin de modifier, en tant que de besoin, les codes et les lois non codifiées pour les mettre en cohérence avec les dispositions de la présente   loi   et   des   ordonnances   prises   pour   son   application.  

[11] Ces conditions ont été supprimées par la loi relative à la bioéthique du 7 juillet 2011 (dans sa rédaction antérieure à cette loi, l’article L. 2141-2 prévoyait que l’homme et la femme formant le couple devaient être « mariés ou en mesure d'apporter la preuve d'une vie commune d'au moins deux ans »)

[12] Le follicule est une formation à la surface de l’ovaire contenant l’ovocyte

[13] Dite ICSI pour Intra Cytoplasmic Sperm Injection

[14] Notamment en cas d’anomalies spermatiques

[15] Article L. 2141-1 du code de la santé publique.

[16] Article L. 2141-3 du code de la santé publique.

[17] Article L. 2141-3 du code de la santé publique.

[18] Articles L. 2141-5 et L. 2141-6 du code de la santé publique.

[19] Article L. 2141-10 du code de la santé publique.

[20] Point II.2. de l’annexe de l’arrêté)

[21] Source : Agence de la biomédecine

[22] D’après le rapport médical et scientifique de l’Agence de la biomédecine

[23] Selon l’Agence de la biomédecine, ce nombre est vraisemblablement sous-estimé en raison des 1 392 enfants nés après AMP réalisée en 2016 dont le statut vital n’a pas été renseigné dans les données transmises.

[24] Source : Agence de la biomédecine

[25] D’après le rapport médical et scientifique de l’Agence de la biomédecine

[26] L’Agence de la biomédecine invite à la prudence. En effet, ces listes n’étant pas toujours mises à jour. Pour augmenter ses chances d’être pris en charge, un même couple a pu s’inscrire dans plusieurs centres, avoir réalisé son projet parental ailleurs, en France ou à l’étranger, ou encore avoir interrompu sa démarche. De même, certains couples se dirigent d’emblée vers un don d’ovocytes à l’étranger sans avoir préalablement été inscrits sur les listes d’attente d’un centre autorisé en France.

[27] L’Agence de la biomédecine précise que ces diminutions sont majorées par le manque d’exhaustivité des données recueillies, mais d’autres facteurs peuvent intervenir. L’évolution sera à surveiller lors des prochains bilans.

[28] Cette diminution peut s’expliquer en partie par la montée en charge des ICSI, notamment pour les pathologies masculines sévères qui condamnaient auparavant à l’échec les tentatives de conception intraconjugale.

[29] Toutefois, certaines catégories de population peuvent être confrontées à des délais plus longs lorsqu’elles présentent des spécificités, notamment ethniques, rendant plus difficiles les appariements entre les caractéristiques physiques des donneurs et receveurs

[30] Cette Convention a été signée par la France le 4 avril 1997 etratifiée le 13 décembre 2011.Elle est entrée en vigueur sur le territoire national le 1er avril 2012 (JORF n°0157 du 7 juillet 2012 p.11138 - Décret n° 2012-855 du 5 juillet 2012 portant publication de la convention pour la protection des droits de l'homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine : convention sur les droits de l'homme et la biomédecine, signée à Oviedo le 4 avril 1997).

[31] Grande chambre, 3 novembre 2011, S.H. c. Autriche, n°57813/00

[32] 15 mars 2012, Gas et Dubois c. France, n°25951/07 (Invoquant l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 8, les requérantes alléguaient avoir subi un traitement discriminatoire fondé sur leur orientation sexuelle et portant atteinte à leur droit au respect de la vie privée et familiale).

[33] La Cour a été saisie d’une telle affaire mais, les requérantes n’ayant pas épuisé toutes les voies de recours en France, une décision d’irrecevabilité a été rendue (Arrêt Charron et Merle-Montet c/ France du 16 janvier 2018, n°22612/15)

[34] Conseil d’État, Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ?, Étude du Conseil d’État : Annexe 6, 28 juin 2018 ; Comité de bioéthique (DH-BIO), Réponses des Etats membres au questionnaire sur l’accès à la PMA, sur le droit à la connaissance de ses origines pour les enfants nés après PMA et sur la maternité de substitution, Strasbourg : Conseil de l’Europe, 15 novembre 2018. URL : https://rm.coe.int/inf-2016-4-map-replies-f/1680939b91 ; Service des Etudes juridiques, « Étude de législation comparée n° 193 - L’accès à l’assistance médicale à la procréation », 2009. URL : https://www.senat.fr/lc/lc193/lc193.html.

[35] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit. (note 11) ; Agence de la biomédecine, Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique, 2016 : [s.n.], Actualisation 2018.

[36] Conseil d’État, op. cit. (note 11) ; Service des Etudes juridiques, op. cit.

[37] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit. (note 11) ; Agence de la biomédecine, op. cit.

[38] Service des Etudes juridiques, op. cit. (note 11) ; Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[39] Conseil d’État, op. cit. ; Service des Etudes juridiques, op. cit.

[40] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit. ; Agence de la biomédecine, op. cit.

[41] Contributions des conseillers pour les affaires sociales (CAS) – Délégation aux affaires européennes et internationales - Octobre 2016

[42] Anna-Lena Wennberg, Kenny A. RodriguezWallberg, Ian Milsom et Mats Brännström, « Attitudes towards new assisted reproductive technologies in Sweden: a survey in women 30–39 years of age », Acta Obstetricia et Gynecologica Scandinavica, vol. 95, no 1, 2016, p. 3844.

[43] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[44] « 40 år med assistert befruktning », Tidsskrift for Den norske legeforening, 2019. URL : https://tidsskriftet.no/2019/01/leder/40-ar-med-assistert-befruktning. Consulté le 10 avril 2019.

[45] Conseil d’État, op. cit. (note 11) ; Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[46] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[47] Ibid. ; Agence de la biomédecine, op. cit.

[48] Conseil d’État, op. cit. (note 11) ; Service des Etudes juridiques, op. cit. (note 11) ; Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[49] Tracie L. Wilson, « Unravelling orders in a borderless Europe? Cross-border reproductive care and the paradoxes of assisted reproductive technology policy in Germany and Poland », Reproductive Biomedicine & Society Online, vol. 3, 1 décembre 2016, titre du fascicule : Brocher Symposium: Perspectives on Access to Reproductive Healthcare, p. 4859.

[50] Conseil d’État, op. cit. (note 11) ; Service des Etudes juridiques, op. cit. (note 11) ; Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[51] Conseil d’État, op. cit.

[52] Contributions des conseillers pour les affaires sociales (CAS) – Délégation aux affaires européennes et internationales - Octobre 2016

[53] « LSVD bLOG » Was ändert sich durch die neue Richtlinie der Bundesärztekammer zur Entnahme und Übertragung von menschlichen Keimzellen im Rahmen der assistierten Reproduktion? », 6 juin 2018. URL : http://www.lsvd-blog.de/?p=17114. Consulté le 10 avril 2019.

[54] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[55]https://www.independent.ie/life/family/lesbian-couples-will-be-able-to-register-as-babys-parents-37811438.html

[56] Contributions des conseillers pour les affaires sociales (CAS) – Délégation aux affaires européennes et internationales - Octobre 2016

[57] Agence de la biomédecine, op. cit.

[58] Conseil d’État, op. cit. (note 11) ; Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[59] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[60] Benoit Bastard, « Famille et intervention sociale », Le Journal des psychologues, n° 292, n° 9, 21 novembre 2011, p. 22-25.

[61] Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, Paris : Odile Jacob, 2014

[62] Ibid.

[63] Ibid.

[64] Il s’agit d’un outil de référence pour analyser l’évolution de l’opinion des Français sur leur santé, sur la protection sociale (assurance maladie, retraite, famille, handicap-dépendance, pauvreté-exclusion) ainsi que sur les inégalités sociales et la cohésion sociale. L’enquête existe depuis 2000.

[65] Les données ont été collectées en face-à-face du 15 octobre au 1er décembre 2018, auprès d’un échantillon de 3037 personnes, représentatif de la population âgée de 18 ans ou plus résidant en France métropolitaine (méthode des quotas). Pour faciliter la lecture, le terme « Français » désigne ici les personnes âgées de 18 ans ou plus vivant en France métropolitaine, qu’elles soient de nationalité française ou non.

[66] Depuis la loi n° 66-500 du 11 juillet 1966 portant réforme de l'adoption pour l’adoption plénière

[67] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 48.

[68] Cass., Avis, 22 septembre 2014, n° 15010 et 15011. 

[69] Certaines juridictions avaient estimé que, lorsque des femmes recouraient à une insémination artificielle avec donneur anonyme faite à l’étranger, elles commettaient une fraude à la loi justifiant que la demande d’adoption de l’enfant par l’épouse de la mère soit rejetée. Dans deux avis, la Cour de cassation écarte la solution fondée sur la fraude à la loi en matière d’insémination artificielle avec donneur anonyme pratiquée à l’étranger. En effet, en France, certes sous conditions, cette pratique médicale est autorisée : dès lors, le fait que des femmes y aient eu recours à l’étranger ne heurte aucun principe essentiel du droit français.

[70] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 50.

[71] « L’ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes célibataires poserait la question de la légitimité d’un projet mono ou homoparental – notons que la validité des projets parentaux des couples hétérosexuels n’est jamais interrogée. Dans les textes cette question a déjà été tranchée. L’adoption est ouverte aux personnes célibataires depuis 1966 et à tous les couples depuis 2013 » Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, Contribution au débat sur l’accès à la PMA, Avis n°2015-07-01-SAN-17 adopté le 26 mai 2015 ;

« La loi française autorise l’adoption par les couples de même sexe et par les personnes célibataires. Un couple de femmes comme une femme célibataire peut donc avoir un projet parental » Défenseur des droits, Avis du défenseur des droits n°18-23, 10 octobre 2018

[72] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 47.

[73] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 27.

[74] A cet égard, il convient de noter qu’aucune disposition pénale ne vise expressément les femmes seules ou en couple qui auraient eu recours à une insémination avec donneur anonyme ; seule la violation des principes de gratuité ou d’anonymat du don est susceptible d’être poursuivie pénalement.

[75] Les associations rapportent des coûts de plusieurs milliers d’euros qui supposent souvent des sacrifices financiers pour les personnes concernées et, en tout état de cause, restent inaccessibles pour beaucoup

[76] Dont la première page du site précise « la plus grande banque de sperme du monde » https://dk-fr.cryosinternational.com/

[77] Régulièrement interrogé par des médias nationaux, la banque Cryos a indiqué qu’en 2016, ses paillettes seraient à l’origine de 246 grossesses dans l’hexagone

[78] Le CNSE instruit les demandes d’entente préalable de soins à l’étranger notamment dans le cadre des procédures d’assistance médicale à la procréation et publie un rapport annuel d’activité. En 2015, 1 265 accords de prise en charge et 222 refus ont été notifiés et les montants remboursés ont atteint 1,6 M€. Les dossiers pris en charge concernaient à titre principal les soins reçus en Espagne (72 % des dossiers) et en République Tchèque (22 % des dossiers).

[79] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 27.

[80] L’association Gay-lib, dans sa contribution aux Etats généraux de la bioéthique estime, en effet, qu’entre deux à trois mille femmes françaises ont recours aux techniques d’aide à la procréation dans les pays limitrophes (Belgique, Espagne, Pays-Bas).

[81] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[82] C’est ce qu’a indiqué la Présidente de l’association Mam’en solo, Mme NOZAIN, lors de son audition par la mission d’information de l’Assemblée nationale http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/cr-bioethique/18-19/c1819022.pdf (Compte rendu 22 page 12)

[83] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 25, 3 octobre 2018, pp. 6-7.

[84] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 52.

[85] Ibid, page 15

[86] « Une telle notion n’ayant pas de consistance juridique dès lors qu’un enfant est une personne, un sujet de droit, et qu’il ne saurait être envisagé comme l’objet du droit d’un tiers » Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 50.

[87] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 51.

[88] Conseil d'État, N° 421899, 28 septembre 2018

[89] Notamment celui du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, Contribution au débat sur l’accès à la PMA, Avis n°2015-07-01-SAN-17 adopté le 26 mai 2015 et celui de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018

[90] Les chiffres varient selon les sources. Sur son site, l’assurance maladie indique « Il arrive aussi que la stérilité reste inexpliquée (environ 15 % des cas) » ; https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/sterilite-pma-infertilite/comprendre-sterilite

[91] Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, Opus cité, page 19

[92] Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018, p. 9.

[93] « La PMA avec donneur devient alors un palliatif admis par la société à l’infertilité du couple. Elle est un traitement social, une proposition d’« arrangement social » et non médicale. (…) Le droit a en effet cherché à « neutraliser » l’« arrangement social » en le faisant passer pour une procréation charnelle », Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, Contribution au débat sur l’accès à la PMA, Avis n°2015-07-01-SAN-17 adopté le 26 mai 2015 http://haut-conseil-egalite.gouv.fr/IMG/pdf/hce_avis_no2015-07-01-san-17-2.pdf (page 20)

[94] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 68.

[95] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[96] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 27.

[97] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 50.

[98] « Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions contestées n'ont ni pour objet ni pour effet de reconnaître aux couples de personnes de même sexe un « droit à l'enfant » ; qu'elles ne soustraient pas les couples de personnes de même sexe aux règles, conditions et contrôles institués en matière de filiation adoptive (…) ; » (Conseil Constitutionnel, Décision n° 2013-669 DC du 17 mai 2013, considérant 52)

[99] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, page 43

[100] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 55.

[101] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p.28.

[102] Claire LEGRAS, « Le projet parental suffit-il ? », Laennec, Tome 60, n° 1, février 2012, p. 24-37.

[103] « Toutes les études portées à la connaissance du rapporteur, sans exception et quel que soit le pays où elles ont été conduites, révèlent que le devenir des enfants conçus par AMP et élevés par un couple homosexuel ou par une femme seule ne pose pas de difficultés. Mme Golombok a directement confirmé à la mission qu’« il apparaît très clairement que les enfants qui grandissent dans un foyer de couples de lesbiennes ne sont pas différents de ceux qui grandissent dans une famille dite traditionnelle. Leur bien-être psychologique est tout à fait comparable, ainsi que leur développement en matière de genre. Il n’y a pas de différence qui tende à montrer que ce dernier soit affecté par le comportement des parents » » Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, p. 42

[104] Susan Golombok et Shirlene Badger, « Children raised in mother-headed families from infancy: a follow-up of children of lesbian and single heterosexual mothers, at early adulthood », Human Reproduction (Oxford, England), vol. 25, no 1, janvier 2010, p. 150157.

[105] Voir à ce propos le rapport de la consultation nationale des 6-18 ans réalisé par Unicef France en 2014 : « Ce n’est donc pas du modèle familial lui- même que naît la souffrance, mais de la manière dont il est vécu et regardé par la société et par les tensions, l’isolement et la solitude qu’il génère. »

 https://www.unicef.fr/sites/default/files/userfiles/Consultation_2014.pdf

[106] Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018, p. 10.

[107] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 26

[108] Idem, p. 21.

[109] Idem, p. 22.

[110] Les travaux des historiens, des anthropologues, des psychanalystes s’accordent pour considérer qu’une des caractéristiques de la fonction paternelle est de mettre des limites à la relation mère-enfant, de la « trianguler ». C’est dans le cadre de cette triangulation que le complexe d’Œdipe ouvre une situation conflictuelle dont l’issue est l’identification et le refoulement.

[111] « PMA : pas de père, pas d’inquiétudes », Libération.fr, 5 juillet 2017.

[112] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p.27.

[113] Académie nationale de médecine, Ouverture de l’Assistance médicale à la procréation avec sperme de donneur à des indications non médicales, Séance du 27 mai 2014 ; Bull. Acad. Natle Méd., 2014, 198, nos 4-5, 951-971, séance du 27 mai 2014 (page 961)

[114] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 53.

[115] Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018, p. 9. (Note de bas de page n° 18)

[116] Bull. Acad. Natle Méd., 2014, 198, nos 4-5, 951-971, séance du 27 mai 2014 (page 962)

[117] Contribution aux Etats généraux de la bioéthique de Laurence Brunet, Jérôme Courduriès, Michelle Giroux et Martine Gross, d’après leur rapport « Le recours transnational à la reproduction assistée avec don. Perspectives franco-québécoises et comparaison internationale » http://www.gip-recherche-justice.fr/wp-content/uploads/2017/11/14-20-Rapport-final-Novembre-2017.pdf

[118] Conseil national de l’ordre des médecins, Avis du 20 septembre 2018 : « Extension de l’AMP : l’éthique et la déontologie médicales ne sauraient permettre de s’opposer à cette demande sociétale », URL :  https://www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/cnom_amp.pdf

[119] « L’autonomie de la personne. Celle-ci doit être respectée, tout comme celle du médecin : laisser à la femme le libre-choix, laisser au médecin le choix de sa réponse, en respectant le principe de non-discrimination ;

La bienfaisance. Répondre à une demande d’AMP, c’est répondre à la souffrance d’une personne. Cette souffrance, le médecin doit l’entendre au même titre que les autres, avec empathie et disponibilité ;

L’absence de malfaisance. Accompagner dans un tel projet, s’empêcher de tout prosélytisme, écouter, conseiller : le médecin ne saurait être malfaisant sauf s’il opposait un refus catégorique ;

La justice. Comment apprécier l’inégalité de possibilités lorsque l’on sait que certaines femmes peuvent mener à bien ce qui leur tient tant à cœur parce qu’elles en ont les moyens, celui de se déplacer hors de nos frontières ou de faire face à des frais divers ? »

[120] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 40.

[121] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 17.

[122] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 34.

[123] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 13, 19 septembre 2018, p. 3.

[124] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 57.

[125] Toutefois, dans le cas des femmes célibataires, un conjoint rencontré plus tard pourrait devenir un père légalement reconnu par la suite

[126] Rapport Insee 2015. Couples et familles. www.insee.fr

[127] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 122.

[128] Susan Golombok, Modern Families, UK : Cambridge University Press, 12 mars 2015, 283 p.

[129] E. M. Hetherington et M. Stanley-Hagan, « The adjustment of children with divorced parents: a risk and resiliency perspective », Journal of Child Psychology and Psychiatry, and Allied Disciplines, vol. 40, no 1, janvier 1999, p. 129140.

[130] J. Pryor et B. Rodgers, Children in Changing Families: Life After Parental Separation, Malden : Blackwell Publishing, 2001 ; Paul R. Amato, « The impact of family formation change on the cognitive, social, and emotional well-being of the next generation », The Future of Children, vol. 15, no 2, 2005, p. 7596.

[131] Pryor et Rodgers, op. cit. (note 85).

[132] E. M. Hetherington et M. Stanley-Hagan, « Parenting in divorced and remarried families. », in Handbook of parenting: Being and becoming a parent, M. H. Bornstein (Ed.), Mahwah, NJ, US : Lawrence Erlbaum Associates Publishers, 2002.

[133] Clare Murray et Susan Golombok, « Going it alone: solo mothers and their infants conceived by donor insemination », The American Journal of Orthopsychiatry, vol. 75, no 2, avril 2005, p. 242253.

[134] Sophie Zadeh, Tabitha Freeman et Susan Golombok, « Ambivalent identities of single women using sperm donation », Revue internationale de psychologie sociale, Tome 26, no 3, 2013, p. 97123 ; Jane D. Bock, « Doing the Right Thing? Single Mothers by Choice and the Struggle for Legitimacy », Gender and Society, vol. 14, no 1, 2000, p. 6286. JSTOR.

[135] Lors de son audition par la mission d’information de l’Assemblée nationale http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/cr-bioethique/18-19/c1819022.pdf

[136] « Les mamans solos, elles, ne sont pas seules : (…) l’enfant est intégré dans une famille élargie, avec un parrain, des oncles, un grand-père, des amis, des institutions. Ces mamans sont particulièrement attentives au fait que l’enfant interagisse avec les autres. Les mamans solos et leurs enfants ne se sentent pas amputés d’un père, car ils ont construit dès le départ un équilibre familial incluant ces données. Les différentes études le démontrent : ce n’est pas le format de la famille qui compte, mais la qualité des interactions avec les enfants. Les anti-PMA pensent qu’il est presque criminel qu’un enfant naisse sans un père à ses côtés ; nous considérons pour notre part que ce type de considération sur nos familles est davantage susceptible de faire souffrir nos enfants que l’absence d’un père »

[137] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 57.

[138] Tabitha Freeman, Sophie Zadeh, Venessa Smith et Susan Golombok, « Disclosure of sperm donation: a comparison between solo mother and two-parent families with identifiable donors », Reproductive Biomedicine Online, vol. 33, no 5, novembre 2016, p. 592600.

[139] C. Murray et S. Golombok, « Solo mothers and their donor insemination infants: follow-up at age 2 years », Human Reproduction (Oxford, England), vol. 20, no 6, juin 2005, p. 16551660 ; Murray et Golombok, op. cit. (note 88).

[140] François Olivennes, « Assemblée nationale ~ Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique - Compte rendu n° 25 », 3 octobre 2018. URL : http://www.assemblee-nationale.fr/15/cr-bioethique/18-19/c1819025.asp.

[141] S. Golombok, « Assemblée nationale ~ Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique - Compte rendu n° 17 », 20 septembre 2018. URL : http://www.assemblee-nationale.fr/15/cr-bioethique/17-18/c1718017.asp.

[142] Murray et Golombok, op. cit. (note 88).

[143] Murray et Golombok, op. cit. (note 94).

[144] Susan Golombok, Sophie Zadeh, Susan Imrie, Venessa Smith et Tabitha Freeman, « Single mothers by choice: Mother-child relationships and children’s psychological adjustment », Journal of family psychology: JFP: journal of the Division of Family Psychology of the American Psychological Association (Division 43), vol. 30, no 4, 2016, p. 409418.

[145] J. E. Scheib, M. Riordan et S. Rubin, « Adolescents with open-identity sperm donors: reports from 12-17 year olds », Human Reproduction (Oxford, England), vol. 20, no 1, janvier 2005, p. 239252.

[146] D. R. Beeson, P. K. Jennings et W. Kramer, « Offspring searching for their sperm donors: how family type shapes the process », Human Reproduction (Oxford, England), vol. 26, no 9, septembre 2011, p. 24152424.

[147] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 68.

[148] S. Golombok, Parenting: What really counts?, London : Routledge, 2000.

[149] Cette solution a d’ailleurs été évoquée par Valérie Depadt dans son audition par la mission d’information de l’Assemblée nationale http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/cr-bioethique/17-18/c1718001.pdf

[150] Bull. Acad. Natle Méd., 2014, 198, nos 4-5, 951-971, séance du 27 mai 2014 (page 957)

[151] Article L. 2141-10 du code de la santé publique.

[152] Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018, p. 10.

[153] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 86.

[154] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 46.

[155] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 67.

[156] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 57.

[157] Ibid.

[158] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[159] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 66.

[160] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 87.

[161] Article R4127-7 du code de la santé publique

« Le médecin doit écouter, examiner, conseiller ou soigner avec la même conscience toutes les personnes quels que soient leur origine, leurs mœurs et leur situation de famille, leur appartenance ou leur non-appartenance à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, leur handicap ou leur état de santé, leur réputation ou les sentiments qu'il peut éprouver à leur égard.

Il doit leur apporter son concours en toutes circonstances.

Il ne doit jamais se départir d'une attitude correcte et attentive envers la personne examinée. »

[162] Agence de la biomédecine, Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique, actualisation 2018, page 35

[163] Comité de bioéthique du Conseil de l’Europe (DH-BIO), Réponses des Etats membres au questionnaire sur l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA), sur le droit à la connaissance de ses origines pour les enfants nés après PMA et sur la maternité de substitution, 15 novembre 2018, pages 59 et 60 https://rm.coe.int/inf-2016-4-map-replies-f/1680939b91

[164] Ibid

[165] Ambassade de France en Espagne. Service des Affaires Sociales. Questionnaire bioéthique. Décembre 2017.

[166] Agence nationale qui exerce une mission de conseil en matière de santé et de prise en charge médico-sociale.

[167] https://www.nice.org.uk/guidance/cg156

[168] Ambassade de France au Royaume-Uni. Service des Affaires Sociales. Questionnaire bioéthique. Décembre 2017

[169] DH-BIO Opus cité

[170] Ambassade de France en Suède. Service régional affaires sociales et santé. Questionnaire bioéthique. Octobre 2015

[171] DH-BIO, Opus cité

[172] DH-BIO, Opus cité

[173] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 64.

[174] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 122.

[175] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, pp. 72-73.

[176] Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018, p. 11.

[177] Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, « Contribution au débat sur l’accès à la PMA », Avis n°2015-07-01-SAN-17 adopté le 26 mai 2015, p. 24.

[178] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 64.

[179] Etant rappelé que les montants concernés ne pourraient être assumés par une grande majorité du public cible en l’absence de prise en charge

[180] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 64.

[181] Etant précisé que l’article L. 2141-7 dispose que :

« L'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur peut être mise en œuvre lorsqu'il existe un risque de transmission d'une maladie d'une particulière gravité à l'enfant ou à un membre du couple, lorsque les techniques d'assistance médicale à la procréation au sein du couple ne peuvent aboutir ou lorsque le couple, dûment informé dans les conditions prévues à l'article L. 2141-10, renonce à une assistance médicale à la procréation au sein du couple. »

Et le premier alinéa de l’article L.2141-6 précise que :

« Un couple répondant aux conditions prévues à l'article L. 2141-2 peut accueillir un embryon lorsque les techniques d'assistance médicale à la procréation au sein du couple ne peuvent aboutir ou lorsque le couple, dûment informé dans les conditions prévues à l'article L. 2141-10, y renonce. »

[182] Article 21 TFUE

[183] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 23, 3 octobre 2018, p. 4.

[184] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 25, 3 octobre 2018, pp. 10-11.

[185] https://www.insee.fr/fr/metadonnees/source/operation/s1385/presentation

[186] https://www.irdes.fr/recherche/enquetes/esps-enquete-sur-la-sante-et-la-protection-sociale/actualites.html

[187] Le coût total de l’assistance médicale à la procréation pour l’assurance maladie avoisine les 300 millions d’euros.

[188] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, pp. 26-27.

[189] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 24.

[190] Centre de conservations des œufs et du sperme humains.

[191] Cryos vendrait des centaines de milliers de paillettes de sperme par an dans plus de 50 pays. Le prix de deux paillettes de sperme provenant d’un donneur anonyme serait d’environ 200 €, il atteindrait plus de 600 € si le donneur n’est pas anonyme

[192] https://www.ined.fr/fichier/s_rubrique/28078/556_population.societes.juin.2018.amp.france.fr.fr.pdf

[193] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 57, 6 novembre 2018, p. 12.

[194] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 24.

[195] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 66.

[196] L’Agence de la biomédecine est chargée par la loi de promouvoir le don de gamètes. Elle le fait, d’une part, en continu avec deux sites Internet d’information dédiés (don d’ovocytes et don de spermatozoïdes) et, d’autre part, ponctuellement chaque année lors d’une campagne d’information et de recrutement (sur deux semaines) avec deux spots radios et une campagne web (qui donnent la parole à des donneurs).

[197] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 28.

[198] Étude réalisée par l’institut Viavoice pour l’Agence de la biomédecine. Terrain téléphonique réalisé du 27 août au 3 septembre 2018 auprès d’un échantillon de 1039 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus (https://www.agence-biomedecine.fr/IMG/pdf/dp_national_complet.pdf)

[199] Rapport d’activité médical et scientifique 2016 de l’Agence de la biomédecine

[200] Conseil de l’Europe, Guide pour la mise en œuvre du principe d’interdiction du profit relatif au corps humain et à ses parties provenant de donneurs vivants ou décédés, mars 2018, p. 9., URL : https://rm.coe.int/guide-financial-gain/16807bfc9b

 

[201] Bull. Acad. Natle Méd., 2014, 198, nos 4-5, 951-971, séance du 27 mai 2014 (page 964)

[202] Rédaction issue de la dernière révision bioéthique (loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011)

[203] Rapport n° 236 (1993-1994) de M. Jean CHÉRIOUX, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 12 janvier 1994 (https://www.senat.fr/rap/1993-1994/i1993_1994_0236.pdf, page 70)

[204] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision des lois de bioéthique, 20 janvier 2010, p. 34., URL : http://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i2235-t1.asp

[205] Étude du Conseil d’État, La révision des lois de bioéthique, 6 mai 2009, p. 37., URL :http://www.conseil-etat.fr/content/download/1177/3559/version/1/file/etude-bioethique_ok.pdf

[206] CE, 3 avril 2019, M. et Mme C, n° 420468 ; CE, 3 avril 2019, M. et Mme B, n° 420469

[207] Avis du Conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine relatif à l’âge de procréer (séance du 08 juin 2017) p.10

[208] Le record serait de 70 ans en Inde et peut-être 82 ans au Vietnam.

[209] Hassan MA, Killick SR. Effect of male age on fertility: evidence for the decline in male fertility with increasing age. Fertil Steril 2003;79 Suppl 3:1520-7

[210] CE, 3 avril 2019, M. et Mme C, n° 420468 ; CE, 3 avril 2019, M. et Mme B, n° 420469

[211] Réponses des Etats membres au questionnaire sur l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA), sur le droit à la connaissance de ses origines pour les enfants nés après PMA et sur la maternité de substitution, COMITÉ DE BIOÉTHIQUE (DH-BIO), 15 novembre 2018, https://rm.coe.int/inf-2016-4-map-replies-f/1680939b91

[212] Agence de la biomédecine: Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique (actualisation 2018)

[213] Étude du Conseil d’État, La révision des lois de bioéthique, 6 mai 2009, p. 37., URL :http://www.conseil-etat.fr/content/download/1177/3559/version/1/file/etude-bioethique_ok.pdf

[214]https://www.agence-biomedecine.fr/IMG/pdf/2017-co-18_age_de_procre_er_version_finale_14_juin_2017.pdf

[215] Kong A, Frigge ML, Masson G, et al. Rate of de novo mutations and the importance of father's age to disease risk. Nature 2012;488:471-5

[216]http://www.epopé-inserm.fr/wp-content/uploads/2015/01/Les-morts-maternelles-en-France-2007-2009-Rapport-du-CNEMM.pdf

[217] Grotegut CA, Chisholm CA, Johnson LN, Brown HL, Heine RP, James AH. Medical and obstetric complications among pregnant women aged 45 and older. Plos ONE 2014;9:e96237

[218] C. Le Ray, S. Scherier, O. Anselem, A. Marszalek, V. Tsatsaris, D. Cabrol et F. Goffinet, « Association between oocyte donation and maternal and perinatal outcomes in women aged 43 years or older », Human Reproduction (Oxford, England), vol. 27, no 3, mars 2012, p. 896901.

[219] Anna Blázquez, Désirée García, Amelia Rodríguez, Rita Vassena, Francesc Figueras et Valérie Vernaeve, « Is oocyte donation a risk factor for preeclampsia? A systematic review and meta-analysis », Journal of Assisted Reproduction and Genetics, vol. 33, no 7, juillet 2016, p. 855863.

[220] Pourya Masoudian, Ahmed Nasr, Joseph de Nanassy, Karen Fung-Kee-Fung, Shannon A. Bainbridge et Dina El Demellawy, « Oocyte donation pregnancies and the risk of preeclampsia or gestational hypertension: a systematic review and metaanalysis », American Journal of Obstetrics and Gynecology, vol. 214, no 3, mars 2016, p. 328339.

[221] Sarah Nejdet, Christina Bergh, Karin Källén, Ulla-Britt Wennerholm et Ann Thurin-Kjellberg, « High risks of maternal and perinatal complications in singletons born after oocyte donation », Acta Obstetricia Et Gynecologica Scandinavica, vol. 95, no 8, août 2016, p. 879886.

[222] Mariano Mascarenhas, Sesh Kamal Sunkara, Belavendra Antonisamy et Mohan S. Kamath, « Higher risk of preterm birth and low birth weight following oocyte donation: A systematic review and meta-analysis », European Journal of Obstetrics, Gynecology, and Reproductive Biology, vol. 218, novembre 2017, p. 6067.

[223] Mohan Shashikant Kamath, Belavendra Antonisamy, Mariano Mascarenhas et Sesh Kamal Sunkara, « High-risk of preterm birth and low birth weight after oocyte donation IVF: analysis of 133,785 live births », Reproductive Biomedicine Online, vol. 35, no 3, septembre 2017, p. 318324.

[224] Mascarenhas et al., op. cit. (note 5).

[225] M. Storgaard, A. Loft, C. Bergh, U. B. Wennerholm, V. Söderström-Anttila, L. B. Romundstad, K. Aittomaki, N. Oldereid, J. Forman et A. Pinborg, « Obstetric and neonatal complications in pregnancies conceived after oocyte donation: a systematic review and meta-analysis », BJOG: an international journal of obstetrics and gynaecology, vol. 124, no 4, mars 2017, p. 561572.

[226] Kamath et al., op. cit. (note 6).

[227] Theoni B. Tarlatzi, Romain Imbert, Beatriz Alvaro Mercadal, Isabelle Demeestere, Christos A. Venetis, Yvon Englert et Anne Delbaere, « Does oocyte donation compared with autologous oocyte IVF pregnancies have a higher risk of preeclampsia? », Reproductive Biomedicine Online, vol. 34, no 1, janvier 2017, p. 1118.

[228] Masoudian et al., op. cit. (note 3).

[229] Relation plus marquée par la honte ou la violence chez les adolescents dont le père a plus de 70 ans, avec, chez les filles, une plus grande culpabilité et surprotection (Rossi AS. Baltes PB,  Brim G. Aging and parenthood in the middle years, Life Span Development and Behavior , 1980 New York, USA Academic Press (pg. 137-205))

[230] K. N. Javaras, M. E. Rickert, L. M. Thornton, C. M. Peat, J. H. Baker, A. Birgegård, C. Norring, M. Landén, C. Almqvist, H. Larsson, P. Lichtenstein, C. M. Bulik et B. M. D’Onofrio, « Paternal age at childbirth and eating disorders in offspring », Psychological Medicine, vol. 47, no 3, février 2017.

[231] Magdalena Janecka, Claire M. A. Haworth, Angelica Ronald, Eva Krapohl, Francesca Happé, Jonathan Mill, Leonard C. Schalkwyk, Cathy Fernandes, Abraham Reichenberg et Frühling Rijsdijk, « Paternal Age Alters Social Development in Offspring », Journal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, vol. 56, no 5, mai 2017. ;

[232] Sukanta Saha, Adrian G. Barnett, Stephen L. Buka et John J. McGrath, « Maternal age and paternal age are associated with distinct childhood behavioural outcomes in a general population birth cohort », Schizophrenia Research, vol. 115, no 23, décembre 2009.

[233] Brian Miller, Antti Alaräisänen, Jouko Miettunen, Marjo-Riitta Järvelin, Hannu Koponen, Pirkko Räsänen, Matti Isohanni et Brian Kirkpatrick, « Advanced paternal age, mortality, and suicide in the general population », The Journal of Nervous and Mental Disease, vol. 198, no 6, juin 2010.

[234] http://adoption.gouv.fr/Les-reponses-aux-questions-posees.html

[235] Zweifel, J.E. Last chance or too late? Counseling prospective older parents. in: S.N. Covington (Ed.) Fertility counseling: clinical guide and case studies. Cambridge University Press, Cambridge, U.K; 2015: 150–163

[236] L. Schmidt, T. Sobotka, J. G. Bentzen et A. Nyboe Andersen, « Demographic and medical consequences of the postponement of parenthood », Human Reproduction Update, vol. 18, no 1, 1 janvier 2012, p. 2943.

[237] Mikael Rostila et Jan M. Saarela, « Time Does Not Heal All Wounds: Mortality Following the Death of a Parent », Journal of Marriage and Family, vol. 73, no 1, 2011, p. 236249 ; Bray, I., Gunnell, D., and Smith, G.D. Advanced paternal age: how old is too old?. J Epidemiol Community Health. 2006; 60: 851–853

[238] Berg, L., Rostila, M., and Hjern, A. Parental death during childhood and depression in young adults—a national cohort study. Child Psychol Psychiatry. 2016; 57: 1092–1098 ; Rostila, M. and Saarela, J.M. Time does not heal all wounds: mortality following the death of a parent. J Marriage Fam. 2011; 73: 236–249

[239] Zweifel, J.E., Covington, S.N., and Applegarth, L.D. “Last-chance kids”: a good deal for older parents—but what about the children. Sexual Reprod Menopause. 2012; 4: 4–12; Paula Fomby, Patrick M. Krueger et Nicole M. Wagner, « Age at childbearing over two generations and grandchildren’s cognitive achievement », Research in Social Stratification and Mobility, vol. 35, 1 mars 2014, pp..7188

[240] L’Union nationale des caisses d’assurance maladie, dans sa décision du 11 mars 2005, a fixé une limite à la prise en charge de l’assistance médicale à la procréation qui s’interrompt au jour du 43ème anniversaire de la femme. Elle s’est fondée sur les très mauvais résultats de l’assistance médicale à la procréation au-delà de cet âge (rapport bénéfice/risque négatif).

[241] Arrêté du 30 juin 2017 modifiant l’arrêté du 11 avril 2008 modifié relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation

https://www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.do?id=JORFTEXT000035138350

[242] Ainsi, par exemple, dans un des jugements de la Cour administrative d’appel de Versailles du 5 mars 2018 (n° 17VE00824 et 17VE00826), il apparait que les spermatozoïdes du requérant ont été recueillis dans le cadre de la préservation de la fertilité, en application de l’article L. 2141-11 du code de la santé publique, en 2014 alors qu’il était âgé de 67 ans (né en 1947).

[243]Age au moment de la conception de ces embryons

[244] V. par exemple, CE, 3 avril 2019, M. et Mme C, n° 420468 ; CE, 3 avril 2019, M. et Mme B, n° 420469

[245] Il est rappelé que, par deux arrêts de sa formation plénière du 5 mars 2018, la cour administrative d’appel de Versailles a fait droit aux requêtes d’appel formées par l’Agence de la Biomédecine contre deux jugements du tribunal administratif de Montreuil du 14 février 2017. Par ces jugements, le tribunal administratif avait annulé les décisions de l’Agence de la Biomédecine refusant à deux couples l’autorisation d’exportation de gamètes. Les décisions litigieuses de l’Agence de la Biomédecine, fondées sur l’article L. 2141-2 du code de la santé publique, avaient été opposées au motif qu’au sein de chacun des couples en cause les deux hommes, âgés respectivement de 68 et 69 ans, ne pouvaient plus être regardés comme étant encore « en âge de procréer » au sens de cette disposition législative. Ces deux affaires sont actuellement pendantes devant le Conseil d’Etat.

La cour, se référant à l’intention du législateur de préserver notamment l’intérêt de l’enfant à naître retient que l’ « âge de procréer » doit être entendu comme étant celui au cours duquel les capacités procréatives de l’homme et de la femme ne sont pas encore altérées par le vieillissement. Relevant qu’au-delà de 59 ans les capacités procréatives de l’homme sont généralement altérées compte tenu du risque statistiquement accru de malformations et autres complications médicales, la cour juge que l’âge au-delà duquel les capacités procréatives de l’homme sont susceptibles d’être altérées par le vieillissement est d’environ 59 ans.

Dès lors que les dispositions du code de la santé publique interdisent que les gamètes déposés en France puissent faire l’objet d’une exportation, s’ils sont destinés à être utilisés à l’étranger à des fins non autorisées par la législation française, la cour en a déduit que l’Agence de la biomédecine a pu légalement refuser les autorisations d’exportation à l’étranger qui étaient demandées, aux seules fins d’y pratiquer une AMP non autorisée en France.

[246] Un couple peut accueillir un embryon « lorsque les techniques d'assistance médicale à la procréation au sein du couple ne peuvent aboutir ou lorsque le couple, dûment informé dans les conditions prévues à l'article L. 2141-10, y renonce » (article L. 2141-6 du code de la santé publique).

[247] « La loi dite de bioéthique a défini en 1994 (article L152-4 et 5) les possibilités de réalisation de l’accueil d’embryon. Ce n’est pourtant qu’en 1999 que paraît le décret 99-925 insérant dans le Code de la Santé Publique une section intitulée Accueil de l’embryon (articles R 2141-2 à 13) qui précise les modalités de prise en charge. (…) la mise en œuvre de cette activité a tardé pour plusieurs raisons. Un temps de réflexion a été pris par les centres pour réfléchir aux questions posées par la dimension psychosociale de ce mode de procréation et pour définir un cadre biologique et génétique à l’attribution et l’appariement de ces embryons. L’absence de moyens humains et matériels attribuée aux centres nouvellement agréés pour la gestion de ce don n’a pas contribué à favoriser leur mise en place. La pratique effective de cette activité a débuté en 2003-2004 et les premières naissances ont eu lieu en 2004. » Avis n° 90 (L’accès aux origines, anonymat et secret de la filiation) https://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/publications/avis090.pdf (page 15)

[248] Source : Agence de la biomédecine, Rapport médical et scientifique, Activité d'Assistance Médicale à la Procréation 2016

[249] 1re Civ., 19 janvier 2012, QPC n°11-40.089, Bull, 2012, I, n°11 (La requérante se plaignait de ce qu’ayant bénéficié en Espagne d’une fécondation in vitro avec les gamètes d’un donneur et d’une donneuse (double don de gamètes autorisé en Espagne et non en France), elle s’était heurtée à un refus de prise en charge par la caisse primaire d’assurance maladie.)

[250] Comité de bioéthique (DH-BIO), Réponses des Etats membres au questionnaire sur l’accès à la PMA, sur le droit à la connaissance de ses origines pour les enfants nés après PMA et sur la maternité de substitution, Strasbourg : Conseil de l’Europe, 15 novembre 2018.

URL : https://rm.coe.int/inf-2016-4-map-replies-f/1680939b91

[251] Agence de la biomédecine, Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique, 2016 : [s.n.], Actualisation 2018.

[252] Martine Gross et Dominique Mehl, « Infertilité : double don de gamètes ou don d’embryon ? », Dialogue, n° 222, no 4, 2018, p. 93106.

[253] A policy audit on fertility Analysis of 9 EU Countries, [s.l.] : [s.n.], mars 2017. URL : https://www.eshre.eu/~/media/sitecore-files/Publications/PolicyAuditonFertilityAnalysis9EUCountriesFINAL16032017.pdf?la=en.

[254] Service régional Affaires sociales et Santé pour les pays Nordiques - Stockholm Contributions des conseillers pour les affaires sociales (CAS) Octobre 2016

[255] Comité de bioéthique (DH-BIO), Réponses des Etats membres au questionnaire sur l’accès à la PMA, sur le droit à la connaissance de ses origines pour les enfants nés après PMA et sur la maternité de substitution, Strasbourg : Conseil de l’Europe, 15 novembre 2018. URL : https://rm.coe.int/inf-2016-4-map-replies-f/1680939b91.

[256] Ibid.

[257] Agence de la biomédecine, op. cit.

[258] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 90 : « Accès aux origines, anonymat et secret de la filiation », 24 novembre 2005, p. 15.

[259] Agence de la biomédecine : Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, p. 37.

[260] Agence de la biomédecine : Rapport médical et scientifique 2017, URL : https://www.agence-biomedecine.fr/annexes/bilan2017/donnees/procreation/01-amp/synthese.htm

[261] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 90 : « Accès aux origines, anonymat et secret de la filiation », 24 novembre 2005, p. 15.

[262] Il estime également que « la connaissance de l’abandon forcé du projet parental initial pour un autre projet parental (…) laisse un vide à combler dans la construction de l’histoire familiale de celui qui en est issu. », « qu’un tel parcours impose à l’enfant une trop grande dissociation de parenté » et conclut « Il est à craindre que l’on fasse porter à l’enfant des contraintes psychologiques dont le retentissement est difficile à évaluer. » (Ibid, page 19 et page 22)

[263] Dominique Mehl et Martine Gross, « Infertilité : double don de gamètes ou don d’embryon ? », Dialogue, n° 222, Éditions Erès, janvier 2019.

[264] Dominique Mehl et Martine Gross, dans leur article précité, rapporte également les données d’une clinique espagnole, orientée vers l’assistance médicale à la procréation et qui recrute largement des ressortissants étrangers notamment français. Lorsque le choix est offert entre accueil d’embryon ou double don de gamètes, et alors même que les coûts sont en faveur de l’accueil d’embryons (1200 à 2000 € versus 4000 à 7000 €), les couples ou les femmes célibataires optent largement pour la deuxième possibilité : 17 versus 109 pour les couples hétérosexuels, 40 versus 188 pour les femmes célibataires, 1 versus 19 pour les couples de femmes (données de 2017).

[265] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 61.

[266] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[267] Couple donneur d’embryons (VI.2 de l’annexe de l’arrêté) : « Parmi les critères d’acceptation figurent (…) l’âge au moment de la conception des embryons qui doit être de moins de 38 ans pour la femme et de moins de 45 ans pour l’homme »

[268] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 90 : « Accès aux origines, anonymat et secret de la filiation », 24 novembre 2005

[269] Agence de la biomédecine : Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, p. 34.

[270] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 61.

[271] Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018

[272] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019

[273] Il n’est d’ailleurs pas exclu que certaines de ces femmes aient préféré attendre une évolution législative plutôt que de se rendre dans un pays frontalier pour réaliser leur projet procréatif (ou n’ont pas eu les moyens de le faire) au risque de perdre leurs chances de procréer avec leurs propres ovocytes.

[274] 746 donneuses et 363 donneurs en 2016

[275] Inspection générale des affaires sociales, Etat des lieux et perspectives du don d’ovocytes en France, Mars 2011 (page 16) ; ce rapport ne traitant que des dons d’ovocytes l’a précisé dans ce cadre mais il en est de même pour le don de spermatozoïdes (la France est le seul pays exigeant le consentement du conjoint du donneur ou de la donneuse de gamètes)

https://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/114000113.pdf

[276] Inspection générale des affaires sociales, Etat des lieux et perspectives du don d’ovocytes en France, Mars 2011

[277] A nouveau, ce rapport ne traitant que des dons d’ovocytes l’a précisé dans ce cadre mais le raisonnement est identique pour le don de spermatozoïdes

[278] Agence de la biomédecine, Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, p. 36.

[279] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 119.

[280] « Que la personne ait procréé ou non, un donneur célibataire et un donneur vivant en couple ne se trouvent pas dans la même situation. En n’imposant plus de recueillir l’accord de l’autre membre du couple, quel surcroît d’efficacité viserait on ? S’agirait-il de retenir le candidat au don dont le partenaire s’opposerait à sa démarche ? Si, lors de son entretien préalable au don, le candidat demande conseil sur la démarche à tenir vis-à-vis de l’information et du consentement de son partenaire, on n’imagine pas qu’il lui soit répondu, soit de taire son intention à son partenaire de vie, soit de ne pas tenir compte de son désaccord. En éludant cette question au moment de la sélection des candidats, ne risque-t-on pas de la voir surgir plus tardivement dans le processus de don, le consentement à ce dernier étant révocable à tout moment jusqu’à l’utilisation des gamètes ? Il reste sans doute de meilleure pratique de rechercher l’accord du partenaire de vie en tant que critère d’éligibilité du donneur vivant en couple. »

[281] Centre d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains

[282] Le terme « autoconservation » est utilisé pour la suite pour décrire de telles situations

[283] Article L. 2141-11 du code de la santé publique.

« Toute personne dont la prise en charge médicale est susceptible d'altérer la fertilité, ou dont la fertilité risque d'être prématurément altérée, peut bénéficier du recueil et de la conservation de ses gamètes ou de ses tissus germinaux, en vue de la réalisation ultérieure, à son bénéfice, d'une assistance médicale à la procréation, ou en vue de la préservation et de la restauration de sa fertilité. Ce recueil et cette conservation sont subordonnés au consentement de l'intéressé et, le cas échéant, de celui de l'un des titulaires de l'autorité parentale, ou du tuteur, lorsque l'intéressé, mineur ou majeur, fait l'objet d'une mesure de tutelle.

Les procédés biologiques utilisés pour la conservation des gamètes et des tissus germinaux sont inclus dans la liste prévue à l'article L. 2141-1, selon les conditions déterminées par cet article. »

[284] Exemples : chirurgies ovariennes répétées pour pathologies tumorales bénignes, baisses de réserve ovarienne idiopathiques ou induites, etc.

[285] Article L. 1244-2 du code de la santé publique.

« Le donneur doit avoir procréé. Le consentement des donneurs et, s'ils font partie d'un couple, celui de l'autre membre du couple sont recueillis par écrit et peuvent être révoqués à tout moment jusqu'à l'utilisation des gamètes.

Il en est de même du consentement des deux membres du couple receveur.

Lorsqu'il est majeur, le donneur peut ne pas avoir procréé. Il se voit alors proposer le recueil et la conservation d'une partie de ses gamètes ou de ses tissus germinaux en vue d'une éventuelle réalisation ultérieure, à son bénéfice, d'une assistance médicale à la procréation, dans les conditions prévues au titre IV du livre Ier de la deuxième partie. Ce recueil et cette conservation sont subordonnés au consentement du donneur. »

[286] Selon l’arrêté du 30 juin 2017 modifiant l’arrêté du 11 avril 2008 modifié relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation :

« Certaines situations rencontrées en cours de prise en charge en AMP peuvent conduire à conserver des ovocytes pour une mise en fécondation différée : échec de recueil ou de prélèvement de spermatozoïdes le jour du prélèvement ovocytaire, refus de la conservation des embryons par le couple, risque de syndrome d’hyperstimulation ovarienne sévère, toute affection intercurrente faisant surseoir à la mise en fécondation et au transfert embryonnaire. Selon les situations, la conservation peut concerner toute la cohorte ovocytaire ou une partie de cette cohorte.

« La conservation de spermatozoïdes est envisagée dans différentes situations : le prélèvement chirurgical de spermatozoïdes, en vue d’une tentative d’ICSI (injection intracytoplasmique de spermatozoïde) différée ou synchrone mais avec des spermatozoïdes en excès, le risque d’un échec de recueil de sperme, le risque d’une azoospermie le jour de la tentative dans le contexte d’une cryptozoospermie, l’existence d’une infection virale, toute autre situation médicale ou non médicale intervenant en cours de prise en charge du couple en AMP (contraintes professionnelles attestées, réquisitions (police, armée…)). »

[287] Rapport médical et scientifique

[288] D’après la synthèse effectuée par l’Agence de la biomédecine

https://www.agence-biomedecine.fr/annexes/bilan2017/donnees/procreation/01-amp/pdf/amp.pdf

[289] Source : note interne du 13 février 2019 de l’Agence de la biomédecine communiquée à la DGS

[290] Centre d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains

[291] Elles prennent en compte les résultats de 22 CECOS ; en outre, ce premier bilan est incomplet, puisqu'il ne prend pas en compte la réalisation effective de ces dons et donc leur efficacité réelle

[292] F. Shenfield, J. de Mouzon, G. Scaravelli, M. Kupka, A. P. Ferraretti, F. J. Prados et V. Goossens, « Oocyte and ovarian tissue cryopreservation in European countries: statutory background, practice, storage and use », Human Reproduction Open, vol. 2017, no 1, 29 mars 2017.

URL : https://academic.oup.com/hropen/article/2017/1/hox003/3092404

[293] J. Wise, « UK lifts ban on frozen eggs », BMJ (Clinical research ed.), vol. 320, no 7231, 5 février 2000, p. 334.

[294] Ambassade de France en Espagne - Service des Affaires Sociales - Décembre 2017

[295] Ambassade de France en Italie, la Conseillère pour les Affaires Sociales, Questionnaire de la DGS, Janvier 2018

[296] Rapport sur la conservation des ovocytes - Académie nationale de médecine – 13 juin 2017

[297] Practice Committees of American Society for Reproductive Medicine et Society for Assisted Reproductive Technology, « Mature oocyte cryopreservation: a guideline », Fertility and Sterility, vol. 99, no 1, janvier 2013, p. 3743.

[298] ESHRE Task Force on Ethics and Law, W. Dondorp, G. de Wert, G. Pennings, F. Shenfield, P. Devroey, B. Tarlatzis, P. Barri et K. Diedrich, « Oocyte cryopreservation for age-related fertility loss », Human Reproduction (Oxford, England), vol. 27, no 5, mai 2012, p. 12311237.

[299] Rapport sur la conservation des ovocytes - Académie nationale de médecine – 13 juin 2017

[300] http://eggfreezingparty.com/ 

[301] Mark Tran, « Apple and Facebook offer to freeze eggs for female employees », The Guardian, sect. Technology, 15 octobre 2014. URL : https://www.theguardian.com/technology/2014/oct/15/apple-facebook-offer-freeze-eggs-female-employees. Consulté le 2 avril 2019.

[302] Miriam Zoll, Heidi Mertes et Janesh Gupta, « Corporate giants provide fertility benefits: have they got it wrong? », European Journal of Obstetrics, Gynecology, and Reproductive Biology, vol. 195, décembre 2015, p. A1-2.

[303] Ambassade de France aux Etats-Unis, la Conseillère pour les Affaires Sociales, Compléments Bioéthique, décembre 2017

[304] https://www.health.gov.il/English/Topics/fertility/ovum_preserving/Pages/ovum_preserv.aspx (site du ministère de la santé)

[305] Rapport sur la conservation des ovocytes, Académie nationale de médecine, 13 juin 2017, p 8 et 9

[306] Insee Première, n° 1642, mars 2017, URL : https://www.insee.fr/fr/statistiques/2668280

[307] Bulletin de l’Académie nationale de médecine, 2017, Tome 201, Nos 4-5-6, Rapport « La conservation des ovocytes », p. 552., URL : http://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2018/05/2017_4_5_6.pdf

[308] Institut national d'études démographiques, « L’espérance de vie en France », URL : https://www.ined.fr/fr/tout-savoir-population/graphiques-cartes/graphiques-interpretes/esperance-vie-france/

[309] Contrairement à ce que pourrait suggérer le titre d’un article de magazine féminin « 40 ans, c'est le nouveau 30 ans ? » https://www.marieclaire.fr/,femme-40-ans,20258,438267.asp

 

[310] Article L. 1244-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 :

« Le donneur doit avoir procréé. Son consentement et, s'il fait partie d'un couple, celui de l'autre membre du couple sont recueillis par écrit et peuvent être révoqués à tout moment jusqu'à l'utilisation des gamètes.

Il en est de même du consentement des deux membres du couple receveur. »

[311] Comme le notait le rapport de l’IGAS (Etat des lieux et perspectives du don d'ovocytes en France, février 2011) qui précisait que cette condition était encouragée par certains pays tels que le Royaume-Uni dans son code des bonnes pratiques sans toutefois l’exiger et qu’en Belgique, certains centres tels que l’hôpital Erasme à Bruxelles pouvaient également refuser les donneuses nullipares lorsqu’elles viennent pour un don direct (page 16)

[312] A la suite d’un amendement du rapporteur en Commission spéciale de l’Assemblée Nationale en première lecture du projet de loi

[313] La conséquence de l’âge plus avancé des donneuses françaises se traduisant par un moins bon résultat du don exprimé en nombre de grossesses par prélèvement

[314] IGAS, Rapport « Etat des lieux et perspectives du don d'ovocytes en France », Tome 1, février 2011, URL :https://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/114000113.pdf

[315] Le rapport ne traitait que de la question du don d’ovocytes ; la mesure a été élargie au don de spermatozoïdes lors des débats bien que les risques soient différents

[316] Pour la mission ces risques consistaient en : « risque physiologique d’infertilité d’abord, dans des cas très rares, risque psychologique plus fréquemment, soit si la donneuse ne peut avoir d’enfants de son côté et spécule sur ceux qui pourraient être nés du don, soit si elle en a un jour et est perturbée par l’idée de ces « autres enfants » mis au monde par une autre femme. » (IGAS, Rapport « Etat des lieux et perspectives du don d'ovocytes en France », Tome 1, février 2011, p. 42.)

[317] Ibid., p. 42.

[318] La mesure a été étendue au don de spermatozoïdes par souci de symétrie en séance plénière en première lecture à l’Assemblée nationale ; supprimée à chaque examen par le Sénat, la mesure a été réintroduite à l’examen suivant par l’Assemblée Nationale (le Gouvernement s’en remettant à la sagesse du législateur) ; elle a finalement été retenue en Commission mixte paritaire.

[319] Il participe de l’augmentation des dons constatée en 2016 avec 42 % de donneurs et 38 % de donneuses en plus par rapport à 2015 (étant précisé que le décret d’application de la mesure a été publié le 13 octobre 2015).

[320] Notamment « Commentaires de la Fédération des CECOS relatifs au don de gamètes et à l'autoconservation pour le donneur » (2012), Avis du Conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine du 6 juillet 2012

[321] Le décret du 13 octobre 2015 (article R1244-2 du code de la santé publique) et l’arrêté du 24 décembre 2015 ont précisé les modalités de l’information qui doit être délivrée au donneur préalablement au don. Il doit ainsi être informé sur :

-          L’évaluation préalable de la faisabilité du don ;

-          L’existence de règles de répartition des gamètes entre ceux conservés et ceux donnés (au moins la moitié des ovocytes matures pour le don et impossibilité de conservation en cas de quantité insuffisante) ;

-          L’éventualité d’une impossibilité de conservation des gamètes à son bénéfice en cas d’obtention d’une quantité insuffisante de gamètes ;

-          Les chances ultérieures de procréation à partir des gamètes conservés à son bénéfice ;

-          Le fait que l’utilisation des gamètes conservés ne pourra se faire que dans les conditions de recours à l’AMP.

[322] Arrêté du 24 décembre 2015 pris en application de l'article L. 2141-1 du code de la santé publique et modifiant l'arrêté du 3 août 2010 modifiant l'arrêté du 11 avril 2008 relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d'assistance médicale à la procréation

[323] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[324] Bulletin de l’Académie nationale de médecine, 2017, Tome 201, Nos 4-5-6, Rapport « La conservation des ovocytes », p. 561.

[325] Agence de la biomédecine : Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, p. 36.

[326] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, pp. 88-89.

[327] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 117-118.

[328] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 55.

[329] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 67.

[330] Avis du Défenseur des droits n°18-23, 10 octobre 2018, p. 8.

[331] Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018, p. 14.,

URL :https://www.cncdh.fr/sites/default/files/181120_avis_relatif_a_lassistance_medicale_a_la_procreation_pour_envoi_mail_.pdf

 

[332] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 34, 17 octobre 2018, p. 14.

[333] Bulletin de l’Académie nationale de médecine, 2017, Tome 201, Nos 4-5-6, Rapport « La conservation des ovocytes », p. 563.

[334] Compte-rendu du rapport du Comité Consultatif National d’Ethique de Belgique : « Quels sont les problèmes éthiques relatifs à la conservation des gamètes humains en vue d’un usage autologue différé, sans indication médicale, dont le « social freezing » d’ovule ? », 24 octobre 2011

[335] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 34, 17 octobre 2018, p. 7.

[336] Traduction de Lockwood, GM. « Social egg freezing : the prospect of reproductive ‘immortality’ or a dangerous delusion ?», Reproductive BioMedicine Online, 2011

[337] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 118.

[338] Bulletin de l’Académie nationale de médecine, 2017, Tome 201, Nos 4-5-6, Rapport « La conservation des ovocytes », p. 560.

[339] Rapport du Comité consultatif de Bioéthique de Belgique, Avis n°57 du 16 décembre 2013 relatif aux aspects éthiques de la congélation des ovules en prévision d’une infertilité liée à l’âge, pp. 19-20.

[340] Miller A R, Motherhood delay and the human capital of the next generation. The American Economic Review 2009, 99(2): 154-158.

[341] Sobotka T, Oocyte cryopreservation as an insurance strategy: a socio-demographic viewpoint.

Proceedings of the 1st International Symposium on Social Egg Frezing, Barcelona, 5-28, 2013.

[342] Mills M, Rindfuss R R, McDonald P, te Velde E & on behalf of the ESHRE Reproduction Society Task Force.

(2011). Why do people postpone parenthood? Reasons and social policy incentives. Human Reproduction Update, 17(6), 848-860.

[343] Myrskylä M and Margolis R, workpaper, Max Planck Institute for Demographic Research 2012: Before and after the kids.

[344] Notamment chez les femmes les plus diplômées (Virtala, A. ; Vilska, S. ; Huttunen, T. ; Knuttu, K. « Childbearing, the desire to have children and awareness about the impact of age on female fertility among Finnish university students. » European Journal of Contraception and Reproductive Health Care. 2011, 16, 108–111)

[345] Lampic, C. ; Svanberg, A.S. ; Karlström, P. ; Tydén, T. « Fertility awareness, intentions concerning childbearing and attitudes towards parenthood among female and male academics. » Human Reproduction. 2006, 21, 558–584.

Maheshwari, A. ; Porter, M. ; Shetty, A. et al. « Women’s awareness and perceptions of delay in childbearing. » Fertility and Sterility. 2008, 90, 1036-1042.

Bretherick, K.L. ; Fairbrother, N. ; Avila, L. ; Harbord, S.H. ; Robinson, W.P. « Fertility and aging : Do reproductive-aged Canadian women know what they need to know ? » Fertility and Sterility, 2010, 93(7), 2162-2168.

[346] Bulletin de l’Académie nationale de médecine, 2017, Tome 201, Nos 4-5-6, Rapport « La conservation des ovocytes », p. 552.

[347] Ibid., p. 552, citant : US Department of Health and Human Services Centers for Disease Control and prevention. 2012 Asssisted Reeproductive Technologye National Summary Report.

[348] J. Bellaisch-Allart, E. Daraï, G. Levyetal (Commission d’Éthique du Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français), Réflexions sur les indications sociétales de la préservation de la fertilité féminine : l’autoconservation des ovocytes, Médecine de la Reproduction, Gynécologie Obstétrique 2013;15:111-18

[349] Bodri D, Guillén JJ, Polo A, Trullenque M, Esteve C, Coll O. Complications related to ovarian stimulation and oocyte retrieval in 4052 oocyte donor cycles. Reprod Biomed Online. 2008, 17(2) : 237-43.

[350] Le Monde, « La vie privée surgelée », 24 octobre 2014

https://www.lemonde.fr/m-actu/article/2014/10/24/facebook-et-apple-jettent-un-froid-sur-la-maternite_4511114_4497186.html

[351] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 90.

[352] Rapport de la mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, p. 68.

[353] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126, p. 19.

[354] Voir également égalité femmes/hommes

[355] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126, p. 17.

[356] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 120.

[357] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 91.

[358] Une femme à l’égard de qui l’entreprise offre les moyens de décaler de nombreuses années son état de grossesse est-elle vraiment libre de le refuser, ou prend-elle au contraire un risque supplémentaire pour sa carrière si elle ne jouit pas de « l’avantage » offert par son employeur ?

[359] Goldman RH, Racowsky C, Farland LV, Munné S, Ribustello L, Fox JH Predicting the likelihood of live birth for elective oocyte cryopreservation: a counseling tool for physicians and patients. Hum Reprod. 2017 ; 32(4) : 853-859

[360] Ana Cobo, J.A.Garcia-Velasco, A.Coello et al. Oocyte vitrification as an efficient option for elective fertility preservation. Fertil Steril 2016 ; 105 :755-64. ; Stoop D, Cobo A and Silber S Fertility preservation for age-related fertility decline The Lancet. 2014 ; 384 :1311-19.

[361] Injection intracytoplasmique de spermatozoïde

[362] Bulletin de l’Académie nationale de médecine, 2017, Tome 201, Nos 4-5-6, Rapport « La conservation des ovocytes », pp. 554-555.

[363] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 90.

[364] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 17.

[365] Autoriser l’autoconservation au-delà de cet âge serait donner de faux espoirs à la femme surtout si sa réserve ovarienne est basse. Il est rappelé que les chances d’obtenir une naissance en congelant 10 ovocytes tombent à 50% pour les femmes de 37 ans et 30% pour celles de 40 ans.

[366] Etant rappelé que les risques des grossesses augmentent après 38 ans, l’âge de 45 ans constituant un cap au-delà duquel les grossesses deviennent à haut risque en raison du vieillissement de l’utérus et du système vasculaire (donc indépendamment de l’âge des ovocytes qui, en tout état de cause, à cet âge, ne peuvent pas être ceux de la femme sinon s’ils ont été conservés auparavant). C’est également ce que confirme l’Académie nationale de médecine qui fait le constat suivant : « Jusqu’à 45 ans les femmes peuvent espérer une grossesse non compliquée. Entre 45 et 50 ans, la pathologie gravidique augmente de fréquence : prééclampsie, diabète gestationnel, obésité, utérus cicatriciels, grossesses multiples, avec un taux de césariennes de 30 % à 90 %. Même si le risque global est faible (8/100.000 naissances), la mortalité maternelle est 15 fois plus élevée après 45 ans, car les comorbidités augmentent avec l’âge. » (Bulletin de l’Académie nationale de médecine, 2017, Tome 201, Nos 4-5-6, Rapport « La conservation des ovocytes », p. 552.)

[367] Bulletin de l’Académie nationale de médecine, 2017, Tome 201, Nos 4-5-6, Rapport « La conservation des ovocytes », p. 559.

[368] Avec l’autoconservation, le parcours de la femme en assistance médicale à la procréation pourrait être réduit d’environ deux ans. Par exemple, une femme qui débute une nouvelle relation à 35 ou 36 ans et qui souhaite avoir un enfant, consultera après quelques mois en cas d’échec. Des stimulations ovariennes et des inséminations artificielles seront effectuées en première intention puis, en l’absence de résultats, elle sera placée vers 38/40 ans en liste d’attente pour un don d’ovocytes. Dans le meilleur des cas, elle deviendra mère à 42 ou 43 ans. Le parcours total aura duré de cinq à sept ans la conduisant à devoir renoncer à une deuxième tentative. La même femme qui aurait conservé ses ovocytes plus jeunes pourrait espérer une première naissance vers 38/40 ans et envisager une deuxième grossesse dans les mêmes conditions.

[369] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 119. (note de bas de page n° 136)

[370] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 92.

[371] Avis du Défenseur des droits n°18-23, 10 octobre 2018, p. 7.

[372] Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018, p. 15.

[373] Bulletin de l’Académie nationale de médecine, 2017, Tome 201, Nos 4-5-6, Rapport « La conservation des ovocytes », p. 563.

[374] Absence totale de remboursement, prise en charge totale ou partielle par la solidarité nationale avec une distinction possible de l’acte initial (stimulation ovarienne pour les femmes, recueil ou prélèvement des gamètes, congélation) et de l’étape de conservation.

[375] Article 21 – Interdiction du profit

« Le corps humain et ses parties ne doivent pas être, en tant que tels, source de profit. »

[376] Conseil de l’Europe, Guide pour la mise en œuvre du principe d’interdiction du profit relatif au corps humain et à ses parties provenant de donneurs vivants ou décédés, mars 2018, p. 10., URL : https://rm.coe.int/guide-financial-gain/16807bfc9b

[377] Agence de la biomédecine : Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, p. 36.

[378] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[379] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 18, 25 septembre 2018, p. 17.

[380] Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018, pp. 14-15.

[381] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 90.

[382] « La question ne se pose évidemment pas dans les mêmes termes pour les donneurs de sperme, puisqu’ils peuvent, sans traverser les épreuves physiologiques et médicales auxquelles sont confrontées les femmes, préserver leurs spermatozoïdes. », Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018, p. 14

[383] Rapport médical et scientifique de l’Agence de la biomédecine (élaboré à partir des données agrégées transmises annuellement par les centres d’assistance médicale à la procréation en application de l’article L. 2142-2 du code de la santé publique).

Plus largement, les données chiffrées sur les dons de gamètes sont accessibles, dans cette étude d’impact, dans la partie dédiée à l’ouverture de l’accès à l’assistance médicale à la procréation.

[384] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 95. 

[385] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques: L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 62.

[386] En cas d’abandon du projet parental ou de décès, les deux membres du couple donneur ou le membre survivant peuvent consentir par écrit à ce que leurs embryons surnuméraires soient accueillis par un autre couple (don d’embryon)

[387] Sur son site Internet (https://www.cecos.org/node/4205), il est précisé que la Fédération française des CECOS a pour objet :

-          d’assurer la coordination des centres répartis sur le territoire afin d’harmoniser les pratiques de prise en charge des patients,

-          de promouvoir la réflexion et la recherche dans le champ de la reproduction humaine et dans les champs propres aux activités des CECOS,

-          de participer à l’amélioration de la qualité et à l’évaluation des pratiques des différents centres,

-          d’aider chaque centre dans la prise de décision, notamment dans les cas difficiles, afin d’optimiser la prise en charge des patients,

-          de favoriser les échanges entre les centres et entre le personnel des centres, en proposant notamment des formations de tous les personnels médicaux et paramédicaux,

-          de promouvoir les échanges nationaux et internationaux,

-          d’informer le public sur les missions des CECOS et particulièrement la procréation par don et la préservation de la fertilité.

[388] Paragraphes 15 à 17.

[389] Considérant n°8

[390] Décision QPC n°2012-248 du 16 mai 2012

[391]https://www.conseil-constitutionnel.fr/sites/default/files/as/root/bank_mm/decisions/2012248qpc/ccc_248qpc.pdf

[392] Décision n°2018-768 QPC du 21 mars 2019, Examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge

[393] « De surcroît, l’article 8 de la CIDE énonce le droit de l’enfant de préserver son identité, y compris ses relations familiales, sans ingérence illégales. Elle poursuit en prévoyant que les États doivent accorder une assistance et une protection appropriées pour que l’identité de l’enfant soit rétablie aussi rapidement que possible. » précise Pétra Sutter (Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Rapports et études, Don anonyme de sperme et d’ovocytes : trouver un équilibre entre les droits des parents, des donneurs et des enfants, De Sutter, Petra, 21 janvier 2019). Elle cite également « dans le domaine assez proche de l'adoption internationale », l’article 30 de la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale : « 1. Les autorités compétentes d'un État contractant veillent à conserver les informations qu'elles détiennent sur les origines de l'enfant, notamment celles relatives à l'identité de sa mère et de son père, ainsi que les données sur le passé médical de l'enfant et de sa famille. 2. Elles assurent l'accès de l'enfant ou de son représentant à ces informations, avec les conseils appropriés, dans la mesure permise par la loi de leur État. »

[394] « 1.  Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

 2.  Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »

[395] CEDH, 7 juillet 1989, Gaskin c. Royaume-Uni, n° 10454/83

[396] La Cour insiste « sur la nécessité de préserver un juste équilibre entre l’intérêt général, qui peut exiger la confidentialité de données pour la bonne marche du service public de l’aide à l’enfance, et les intérêts de l’individu qui conduisent à autoriser son accès aux renseignements relatifs à sa vie privée. Elle relève ainsi que ce principe de proportionnalité n’est respecté que s’il existe un organe indépendant apte à décider de la pesée des intérêts en présence. » (Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle)

[397] CEDH, 25 septembre 2012, Godelli c. Italie, n° 33783/09

[398] CEDH, 7 février 2002, Mikulić c. Croatie, n° 53176/99

[399] CEDH, 13 février 2003, Odièvre c. France, n° 42326/98

[400] « La naissance, et singulièrement les circonstances de celle-ci, relève de la vie privée de l'enfant, puis de l'adulte, garantie par l'article 8 de la Convention qui trouve à s'appliquer »

[401] « L’intérêt que peut avoir un individu à connaître son ascendance ne cesse nullement avec l’âge, bien au contraire. Le requérant a d’ailleurs démontré un intérêt authentique à connaître l’identité de son père, puisqu’il a tenté tout au long de sa vie d’acquérir une certitude à cet égard. Un tel comportement suppose des souffrances morales et psychiques, même si elles ne sont pas médicalement constatées »

[402] CEDH, 13 juillet 2006, Jäggi c. Suisse, n ° 58757/00.

[403] Arrêt Odièvre c. France précité

[404] CEDH, 2 juin 2015, Canonne c. France, n°22037/13

[405] Certains considèrent toutefois que la Cour européenne des droits de l’homme pourrait, dans son appréciation des atteintes portées au droit de la vie privée et familiale protégé par l’article 8 de la Convention européenne, restreindre la marge d’appréciation des États au regard du nombre croissant d’États du Conseil de l’Europe ayant évolué en faveur d’un accès aux origines, témoignant d’un consensus de plus en plus large (Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, p. 224)

[406] CEDH, 10 avril 2017, Evans c. Royaume Uni n° 6339/05 ; 2- février 2002, Fretté c. France, n° 36515/97.

[407] http://ijls.ie/wp-content/uploads/2016/12/Vol_7_Issue_1_Article_1_DonnaLyons22-12-2016.pdf

[408] Service des Etudes juridiques, « Étude de législation comparée n° 186 - L’anonymat du don de gamètes », 2008. URL : https://www.senat.fr/lc/lc186/lc186_mono.html#toc1.

[409] PMAnonyme, « Comment ça se passe à l’étranger ? », 2018. URL : http://pmanonyme.asso.fr/?page_id=2279.

[410] Comité de bioéthique (DH-BIO), Réponses des Etats membres au questionnaire sur l’accès à la PMA, sur le droit à la connaissance de ses origines pour les enfants nés après PMA et sur la maternité de substitution, Strasbourg : Conseil de l’Europe, 15 novembre 2018. URL : https://rm.coe.int/inf-2016-4-map-replies-f/1680939b91.

[411] Conseil d’État, Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ?, Étude du Conseil d’État : Annexes, p. 242, 28 juin 2018.

[412] https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/20001938/index.html

[413] Service des Etudes juridiques, op. cit.

[414]https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques/communiques-conseil-federal.msg-id-69962.html

[415]https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/communiques/communiques-conseil-federal.msg-id-72901.html

[416]https://www.ris.bka.gv.at/GeltendeFassung.wxe?Abfrage=Bundesnormen&Gesetzesnummer=10003046&%20

[417] Conseil d’État, op. cit.

[418] PMAnonyme, op. cit.

[419] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[420] PMAnonyme, op. cit.

[421]https://web.archive.org/web/20140404020537/http://lovdata.no:80/dokument/NL/lov/2003-12-05-100#KAPITTEL_2

[422] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[423] Service des Etudes juridiques, op. cit.

[424] PMAnonyme, op. cit.

[425] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[426] Conseil d’État, op. cit.

[427] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[428] Service des Etudes juridiques, op. cit.

[429] https://www.hfea.gov.uk/donation/donors/rules-around-releasing-donor-information/

[430] PMAnonyme, op. cit.

[431] Ibid.

[432] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[433] http://www.irishstatutebook.ie/eli/2015/act/9/enacted/en/print

[434] PMAnonyme, op. cit. (note 3).

[435] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit. (note 4).

[436] PMAnonyme, op. cit.

[437] Service des Etudes juridiques, op. cit.

[438] http://www.bgbl.de/xaver/bgbl/start.xav?startbk=Bundesanzeiger_BGBl&jumpTo=bgbl117s2513.pdf 

[439] La Libre.be, « L’Allemagne met fin à l’anonymat des donneurs de sperme », 26 mai 2017. URL : https://www.lalibre.be/actu/international/l-allemagne-met-fin-a-l-anonymat-des-donneurs-de-sperme-59285db6cd702b5fbecd4d87.

[440] PMAnonyme, op. cit.

[441] https://shifter.sapo.pt/2019/02/doacao-de-gametas-confidencial-mas-pouco/

[442] http://assembly.coe.int/nw/xml/News/News-View-FR.asp?newsid=7208&lang=1

[443] PMAnonyme, op. cit.

[444]https://www.government.is/media/velferdarraduneyti-media/media/acrobat-enskar_sidur/Act_No_55_1996_on_Artificial_Fertilisation_etc_as_amended.pdf

[445] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[446] https://www.ieb-eib.org/fr/pdf/l-20070706-pma.pdf

[447] PMAnonyme, op. cit.

[448] Conseil d’État, op. cit.

[449] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[450] PMAnonyme, op. cit.

[451] Service des Etudes juridiques, op. cit.

[452] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[453] Service des Etudes juridiques, op. cit.

[454] Conseil d’État, op. cit.

[455] Agence de la biomédecine, Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique, 2016 : [s.n.], Actualisation 2018.

[456] Comité de bioéthique (DH-BIO), op. cit.

[457] Ibid.

[458] Conseil d’État, op. cit.

[459] https://www.donorsiblingregistry.com/

[460] PMAnonyme, op. cit. (note 3).

[461] Agence de la biomédecine, op. cit.

[462] PMAnonyme, op. cit.

[463]https://www.aph.gov.au/Parliamentary_Business/Committees/Senate/Legal_and_Constitutional_Affairs/Completed_inquiries/2010-13/donorconception/report/c02

[464] https://www.varta.org.au/regulation/history-victorian-art-regulation

[465] La pratique du don de gamètes existait déjà et dépendait alors des règles mises en place par les centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS ; structures crées en février 1973 pour organiser et rationaliser l’insémination artificielle par tiers donneur). Les CECOS avait fait reposer le dispositif sur un don bénévole, volontaire et anonyme pour le couple receveur.

[466] En revanche, le principe de l’anonymat n’est que relatif à l’égard des acteurs médicaux. L’identité du donneur, les données le concernant sont connues des CECOS comme le prévoit le dernier alinéa de l’article R. 1244-5 du code de la santé publique : « Les informations touchant à l'identité des donneurs, à l'identification des enfants nés et aux liens biologiques existant entre eux sont conservées, quel que soit le support, de manière à garantir strictement leur confidentialité. Seuls les praticiens répondant aux critères mentionnés aux articles R. 2142-10 et R. 2142-11 pour exercer les activités mentionnées au premier alinéa ont accès à ces informations. »

[467] Étude du Conseil d’État : « La révision des lois de bioéthique », 9 avril 2009, p. 52

[468] Ce choix permettait également de dissimuler une infertilité d’origine masculine qui pouvait, aux yeux de la société de l’époque, être assimilée à un défaut de virilité.

[469] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 95.

[470] Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, Paris : Odile Jacob, 2014.

[471] « « Quelles raisons psychiques inconscientes peuvent-ils donc avoir pour s’en prendre à leur propre « filiation » et venir troubler la paix des familles ? » C’est tout le drame, depuis des décennies, des affrontements sociaux autour de l’accès aux origines » (Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, p. 202)

[472] Les médecins qui procèdent à l’appariement des donneurs et des receveurs s’assurent également de la compatibilité des groupes sanguins entre l’enfant et ses parents si ces derniers le souhaitent.

[473] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 6, 6 septembre 2018, p. 3.

[474] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 32, 16 octobre 2018, p. 7. 

[475] Selon l’expression de la sociologue Irène Théry

[476] Voir évolution de la société à l’article 1

[477] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 97.

[478] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), Rapport de synthèse – Opinions du comité citoyen, juin 2018, p. 126.

[479] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 23, 3 octobre 2018, p. 9.

[480] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 96.

[481] Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, p. 203.

[482] Étude du Conseil d’État : « La révision des lois de bioéthique », 9 avril 2009, p. 55

[483] Audrey Kermalvezen, auteur du livre Mes origines : une affaire d’Etat, entretien, URL : http://pmanonyme.asso.fr/?p=2445 

[484] Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, p. 219

[485] Qui résulte de l’assistance médicale avec tiers donneur

[486] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 90 : « Accès aux origines, anonymat et secret de la filiation », novembre 2005, p. 23.

[487] Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, p.221

[488] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 32 (audition de M. Arthur Kermalvezen, co-fondateur de l’association Origines), 16 octobre 2018, p. 6.

[489]Article « Audrey Kermalvezen soulève les paradoxes du don de gamètes », 18 décembre 2015 (genetique.org)

[490] « Une minorité à problèmes » habile à « se faire valoir médiatiquement », mais qui ferait mieux de se faire « psychanalyser » extrait du débat bioéthique de 2011 (I. Théry, Des humains comme les autres Paris, éditions de l’EHESS, 2010, pp. 67-68)

[491] « Une étude américaine de 2017 constate que sur un échantillon de jeunes adultes américains, issus d’un programme de don de sperme avec identité du donneur accessible, 40 % ont demandé à avoir accès à l’identité du donneur (Scheib, J. (2017, 02). Who requests their sperm donor's identity? The first ten years of information releases to adults with open-identity donors. Fertil Steril). Il ressort d’une autre étude américaine de 2010 que 65 % des personnes conçues avec donneur de sperme considèrent que ce dernier constitue la moitié de ce qu’ils sont, que 70 % d’entre eux se sont déjà demandé à quoi pouvait ressembler la famille de leur donneur et 69 % si la famille de leur donneur voudrait les connaître (Karen Clark, Norval Glenn et Elizabeth Marquardt, (2010, 01). My Daddy's Name is Donor: A Pathbreaking New Study of Young Adults Conceived Through Sperm Donation). Il est donc raisonnable de penser qu’au moins une personne sur deux conçue par don cherche à connaître ses origines, d’où l’importance pour ces personnes d’avoir accès à certaines informations à propos de leurs géniteurs. » (Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Rapports et études, Don anonyme de sperme et d’ovocytes : trouver un équilibre entre les droits des parents, des donneurs et des enfants, De Sutter, Petra, 21 janvier 2019 http://website-pace.net/documents/19855/5665827/20190128-DonationRights-FR.pdf/a2e1bcf6-5d40-4948-8ee2-4c3232961f4b)

« Une étude anglaise de 2015 portant sur une cohorte de 419 personnes conçues par don révèle que 46 % d’entre elles sont très favorables ou favorables à l’accès à l’identité du donneur ou, du moins, de la personne qui a participé à leur conception, 33 % sont neutres et 21 % seulement hostiles à un système d’open identity. (…) une étude anglaise réalisée en 2010 par Mme Susan Golombok [montre que] Sur une population d’enfants conçus par don et participant à un programme d’open identity, c’est-à-dire se sachant en mesure d’accéder à leurs origines, 77 % d’entre eux souhaitent l’accès à l’identité du donneur. On y apprend aussi qu’une majorité de donneurs ne voient aucune difficulté à répondre à l’attente des personnes issues de leur don. » (Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu de l’audition de M. Bres, Président de l’association PMAnonyme, n° 35, 17 octobre 2018, pp. 12-13.)

[492] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 53.

[493] Rapport de synthèse du Comité consultatif national d’éthique – Opinions du Comité citoyen, p. 126.

[494] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 60, 7 novembre 2018, p. 10. 

[495] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Rapport, p. 52

[496] Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, p. 211.

[497] Ibid, p.217

[498] « Nés par don de gamètes, ils pistent leurs origines », Le Monde, 17 août 2018 par Gaëlle Dupont

[499] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 31, 16 octobre 2018, p. 3.

[500] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 90 : « Accès aux origines, anonymat et secret de la filiation », novembre 2005, p. 7.

[501] « Le biologique ou le génétique n’est pas un fondement neutre sur lequel se bâtirait une personnalité qui ne devrait qu’aux seules relations culturelles, aux seuls échanges sociaux, d’être ce qu’elle est. Pour une part impossible d’estimer avec exactitude, certes, mais sûrement importante, il détermine cette personnalité… Le corps me renvoie à ceux qui m’ont précédé et de qui je tiens. Il est « patrimoine » ». (Citant JL. Bruguès).

[502] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 90 : « Accès aux origines, anonymat et secret de la filiation », novembre 2005, p. 21.

[503] Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Rapports et études, Don anonyme de sperme et d’ovocytes : trouver un équilibre entre les droits des parents, des donneurs et des enfants, De Sutter, Petra, 21 janvier 2019 http://website-pace.net/documents/19855/5665827/20190128-DonationRights-FR.pdf/a2e1bcf6-5d40-4948-8ee2-4c3232961f4b

[504] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 51 (le rapporteur citant Mme Dominique Mehl)

[505] « L’anonymisation concerne les relations donneurs/receveurs, alors que l’accès aux origines concerne les relations donneurs / personne née du don (majeure) » (Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, p.226)

[506] Comité consultatif national d’éthique (CCNE), avis n° 90

[507] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 126 sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation, 15 juin 2017, p. 21.

[508] Rapport de synthèse du Comité consultatif national d’éthique – Opinions du Comité citoyen, p. 126.

[509] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 126.

[510] 23andme, AncestryDNA, MyHeritage et Family Tree DNA

[511] Dont Le Monde, « Les tests génétiques récréatifs permettent à des personnes conçues par don anonyme de trouver leur donneur ou des demi-frères et sœurs. » 16.08.2018 Gaëlle Dupont

[512] PMAnonyme, Origines

[513] Audition Arthur Kermalvezen (association Origines) par la mission d’information de l’Assemblée nationale (Compte-rendu n° 32, page 10)

[514] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[515] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 52.

[516] « Il convient de souligner l’importance de conserver l’anonymat des donneurs et donneuses avant la conception de l’enfant, d’une part car l’anonymat et la gratuité vont de pair, d’autre part car la levée de l’anonymat avant la conception favorise les démarches de sélection des donneurs par les candidats à l’AMP. » expose la Commission nationale consultative des droits de l’homme (Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018).

[517] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 53.

[518] Selon l’expression du Conseil d’Etat : « Toute révision de lois de bioéthique est un exercice juridiquement semé d’embûches, qui relève de l’art du mikado, sur lequel plane en outre l’ombre de la théorie des dominos :  il est souvent difficile d’apporter une modification ponctuelle sans ébranler l’édifice dans son ensemble. » Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 11.

[519] Don de spermatozoïdes, d’ovocytes ou d’embryons

[520] Au sens de ceux relevant de la réforme

[521] De spermatozoïdes, d’ovocytes ou d’embryons

[522] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, pp. 99-100.

[523] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 90 : « Accès aux origines, anonymat et secret de la filiation », novembre 2005, p. 24.

https://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/publications/avis090.pdf

[524] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 101.

[525]https://www.cncdh.fr/sites/default/files/181120_avis_relatif_a_lassistance_medicale_a_la_procreation_pour_envoi_mail_.pdf (page 19) « Compte tenu du caractère complexe et sensible de la question et de la légitimité des divers intérêts en présence (…) de faire évoluer le régime actuel en retenant le principe d’une levée de l’anonymat, à confirmer ultérieurement par le donneur. »

[526] https://juridique.defenseurdesdroits.fr/doc_num.php?explnum_id=18013 (page 6) ; il est favorable à la mise en place d’un régime « qui permettrait de combiner, d’une part, l’accès de tout enfant lors de sa majorité à des informations non identifiantes et, d’autre part, la possibilité d’une levée totale de l’anonymat à la demande de l’enfant majeur avec le consentement du donneur qui devra être recueilli au moment du don. »

[527] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 55. Il considère qu’il faut organiser l’accès à des données non identifiantes dans tous les cas et l’accès à des données identifiantes chaque fois que le donneur et la personne née d’une assistance médicale à la procréation le souhaitent. Il précise : « Ceci ouvrirait la voie à une rencontre avec le donneur ou à la délivrance d’informations relatives à sa vie personnelle, sous réserve de son consentement préalable. Dans cette hypothèse, il conviendrait d’informer le donneur, au moment du don de la possibilité que l’anonymat soit levé dans le futur. Il faudrait ensuite recueillir son consentement exprès lorsqu’une demande d’accès à sa vie personnelle serait formulée. L’accès aux données non identifiantes serait également prévu, notamment pour prévoir l’hypothèse du décès du donneur. »

[528] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 90 : « Accès aux origines, anonymat et secret de la filiation », novembre 2005, p. 23.

[529] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 127.

[530] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 120.

[531] Le rapporteur envisage deux possibilités au moment du don : « soit la donneuse ou le donneur accepte que toute son identité soit révélée à la majorité de l'enfant à naître, si celui-ci a été averti par ses parents et s’il en formule la demande ; soit la donneuse ou le donneur refuse et l’enfant à naître au moment de sa majorité, ayant été averti par ses parents et s’il le demande, pourra avoir uniquement accès aux données non identifiantes (…) de la donneuse ou du donneur. »

[532] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 101.

[533] Au sens relevant du cadre juridique prévalant avant la réforme

[534] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 98.

[535] Le seul Etat qui ait aboli complètement et rétroactivement l’anonymat est l’Etat de Victoria en Australie

[536] « Pour les personnes conçues antérieurement à l’application de la loi nouvelle, le risque d’inconstitutionnalité d’une levée rétroactive est trop important, à moins de prévoir le consentement exprès du donneur. » (Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 54)

[537] Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018

[538] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques: L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 65.

[539] http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/cr-bioethique/18-19/c1819023.pdf (page 7)

[540] Même source page 10.

[541] A cet égard, Mme Petra de Sutter indique dan son rapport : « certains donneurs – en particulier à un moment ultérieur de leur vie et s’ils n’ont pas eux-mêmes fondé de famille – apprécient d’avoir des contacts avec les enfants/adultes issus du don et sont désireux d’établir une relation avec eux » (Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Rapports et études, Don anonyme de sperme et d’ovocytes : trouver un équilibre entre les droits des parents, des donneurs et des enfants, De Sutter, Petra, 21 janvier 2019)

[542] Personnes nées d’une assistance médicale à la procréation avec tiers donneur

[543] « On peut s’interroger sur les conséquences d’un tel accès aux informations identifiantes relatives aux origines génétiques quant à la possibilité même de l’accueil d’embryon. (…) S’agissant de frères ou sœurs génétiques de l’enfant ou des enfants du couple, issus des embryons créés pour l’assistance médicale à la procréation et ayant permis la naissance d’un ou de plusieurs enfants, « recueillis » par un autre couple, quel pourrait être le « ressenti » psychologique des parents génétiques auxquels l’un de ceux-ci, devenu majeur, issu de l’un de ces embryons « abandonnés », demanderait l’accès aux données identifiantes ? » (Rapport précité, page 65-66).

[544] Plusieurs articles du 17 avril 2018 relaient cette position de la fédération des CECOS

[545] Cette société savante souhaite que l’anonymat du don de gamètes reste la référence mais que le législateur permette de répondre à la demande de certains couples qui souhaitent un don non anonyme

[546] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[547] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 56.

[548] Commission nationale consultative des droits de l’homme, Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation, 20 novembre 2018

[549] En lien avec l’association Mam’en Solo et en concertation notamment avec l’inter-LGBT et le Pr René Frydman

[550] Médecins (dont généticiens et psychiatres), psychologues, psychanalystes, juristes, ainsi que des représentants des donneurs, des parents bénéficiaires d’un don de gamètes et des personnes conçues par don.

[551] A cet égard, dans son rapport, Mme Petra de Sutter indique « j’estime qu’il n’est pas dans l’intérêt [des personnes nées de don] d’avoir bien plus de demi-frères ou demi-sœurs que la norme. » (Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Rapports et études, Don anonyme de sperme et d’ovocytes : trouver un équilibre entre les droits des parents, des donneurs et des enfants, De Sutter, Petra, 21 janvier 2019)

[552] 1° Dans le cadre de mesures d'enquête ou d'instruction diligentées lors d'une procédure judiciaire ; 2° A des fins médicales ou de recherche scientifique ; 3° Aux fins d'établir, lorsqu'elle est inconnue, l'identité de personnes décédées ; 4° Dans les conditions prévues à l'article L. 2381-1 du code de la défense.

[553] Ces données auront été recueillies, au préalable, par le médecin au moment du consentement au don de gamètes ou du consentement à l’accueil d’embryon.

[554] Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Rapports et études, Don anonyme de sperme et d’ovocytes : trouver un équilibre entre les droits des parents, des donneurs et des enfants, De Sutter, Petra, 21 janvier 2019 http://website-pace.net/documents/19855/5665827/20190128-DonationRights-FR.pdf/a2e1bcf6-5d40-4948-8ee2-4c3232961f4b

[555] Ce dernier est convenu de communiquer cette Recommandation au Comité de bioéthique (DH-BIO), au Comité européen sur la transplantation d'organes (CD-P-TO), au Comité ad hoc pour les droits de l'enfant (CAHENF) et au Comité européen de coopération juridique (CDCJ), pour information et commentaires éventuels d’ici le 25 juin 2019.

[556] Source : Direction générale de la cohésion sociale

[557] Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, p. 211

[558] K. Daniels et O. Lalos, « The Swedish insemination act and the availability of donors », Human Reproduction (Oxford, England), vol. 10, no 7, juillet 1995, p. 18711874.

[559] Damian H. Adams, Shahid Ullah et Sheryl de Lacey, « Does the removal of anonymity reduce sperm donors in Australia? », Journal of Law and Medicine, vol. 23, no 3, mars 2016, p. 628636.

[560] http://www.helsinkitimes.fi/themes/themes/health-a-wellbeing/4302-sperm-donors-increasing-2.html

[561] U. Shukla, B. Deval, M. Jansa Perez, H. Hamoda, M. Savvas et N. Narvekar, « Sperm donor recruitment, attitudes and provider practices--5 years after the removal of donor anonymity », Human Reproduction (Oxford, England), vol. 28, no 3, mars 2013, p. 676682.

[562] Irène Théry, Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, Ministère des affaires sociales et de la santé, Ministère délégué chargé de la famille : Annexe au chapitre 8, p. 241-2, 2014.

[563] Ibid.

[564] Egg and sperm donation in the UK, 2012–2013, October 2014, The Human Fertilisation and Embryology Authority. http://pmanonyme.asso.fr/wp-content/uploads/2014/03/Egg-and-sperm-donation-in-the-UK-HFEA-report.pdf

[565] Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Rapports et études, Don anonyme de sperme et d’ovocytes : trouver un équilibre entre les droits des parents, des donneurs et des enfants, De Sutter, Petra, 21 janvier 2019

[566] Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, p. 213

[567] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 126

[568] Chiffre déduit d’une étude européenne de 2002 qui conclut que « seulement 8,6 % des enfants conçus par [assistance médicale à la procréation] avec tiers donneur le savaient » (Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Compte rendu n° 32, 16 octobre 2018, p. 14.)

[569] Irène Théry et Anne-Marie Leroyer (dir.), Filiation, origines, parentalité - Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle, p. 214

[570] Article L. 2141-5 du code de la santé publique

[571] Article R. 1244-5 du code de la santé publique : 

« (…) Le dossier du donneur contient, sous forme rendue anonyme :

1° Les antécédents médicaux personnels et familiaux nécessaires à la mise en œuvre de l'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur ;

2° Les résultats des tests de dépistage sanitaire prévus aux articles R. 1211-25 et R. 1211-26 ;

3° Le nombre d'enfants issus du don ;

4° S'il s'agit d'un don de sperme, la date des dons, le nombre de paillettes conservées, la date des mises à disposition et le nombre de paillettes mises à disposition ;

5° S'il s'agit d'un don d'ovocyte, la date de la ponction et le nombre d'ovocytes donnés ;

6° Le consentement écrit du donneur et, s'il fait partie d'un couple, celui de l'autre membre du couple ;

7° S'il s'agit d'un donneur n'ayant pas encore procréé : l'attestation qu'il s'est soumis à l'entretien prévu au III de l'article R. 1244-2 et la mention, le cas échéant, d'une conservation d'une partie de ses gamètes en vue d'une éventuelle réalisation ultérieure à son bénéfice d'une assistance médicale à la procréation dans les conditions prévues au titre IV du livre Ier de la deuxième partie du présent code.(…) »

[572] Les praticiens « répondant aux critères mentionnés aux articles R. 2142-10 et R. 2142-11 » sont ceux des centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (CECOS).

[573] Articles R. 2141-7 et R. 2141-8 du code de la santé publique

[574] Rapport fait au nom de la Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la bioéthique (n° 2911), M. Jean LEONETTI, 26 janvier 2011. http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rapports/r3111-tI.pdf (pages 44, 45)

[575] Deux apparentés peuvent avoir éventuellement reçu d’un ancêtre commun une mutation dans un gène et concevoir alors un enfant homozygote pour ce gène muté avec un risque sur quatre de transmission à chaque grossesse.

[576] Toutefois, il est rappelé que la « nécessité thérapeutique » prévue au premier alinéa de l’article L. 1244-6 couvre, dans le champ du don de gamètes, la prévention des risques de consanguinité pour deux personnes en couple issues d’AMP avec tiers donneur. C’est-à-dire qu’un médecin peut, à leur demande, vérifier qu’elles ne sont pas issues d’un même donneur et ce, sans remise en cause de l’anonymat.

[577] Sur son site Internet (https://www.cecos.org/node/4205), il est précisé que la Fédération française des CECOS a pour objet :

-          d’assurer la coordination des centres répartis sur le territoire afin d’harmoniser les pratiques de prise en charge des patients,

-          de promouvoir la réflexion et la recherche dans le champ de la reproduction humaine et dans les champs propres aux activités des CECOS,

-          de participer à l’amélioration de la qualité et à l’évaluation des pratiques des différents centres,

-          d’aider chaque centre dans la prise de décision, notamment dans les cas difficiles, afin d’optimiser la prise en charge des patients,

-          de favoriser les échanges entre les centres et entre le personnel des centres, en proposant notamment des formations de tous les personnels médicaux et paramédicaux,

-          de promouvoir les échanges nationaux et internationaux,

-          d’informer le public sur les missions des CECOS et particulièrement la procréation par don et la préservation de la fertilité.

[578] Agence de la biomédecine, Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique, actualisation 2018, page 52

[579] Comité de bioéthique du Conseil de l’Europe (DH-BIO), Réponses des Etats membres au questionnaire sur l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA), sur le droit à la connaissance de ses origines pour les enfants nés après PMA et sur la maternité de substitution, 15 novembre 2018, pages 59 et 60 https://rm.coe.int/inf-2016-4-map-replies-f/1680939b91

[580] Rapport fait au nom de la Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la bioéthique (n° 2911), M. Jean LEONETTI, 26 janvier 2011. http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rapports/r3111-tI.pdf (pages 44, 45)

[581] Vingt-neuf CECOS sont répartis sur le territoire national.

[582] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[583] Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Rapports et études, Don anonyme de sperme et d’ovocytes : trouver un équilibre entre les droits des parents, des donneurs et des enfants, De Sutter, Petra, 21 janvier 2019 http://website-pace.net/documents/19855/5665827/20190128-DonationRights-FR.pdf/a2e1bcf6-5d40-4948-8ee2-4c3232961f4b

 

[584] Compte rendu de l’audition du Professeur RIVES, http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/cr-bioethique/18-19/c1819023.pdf (pages 4 et 14)

[585] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[586] https://rm.coe.int/guide-financial-gain/16807bfc9b (considérant 25, page 7)

[587] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 120.

[588] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 127.

[589] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 120.

[590] Arrêté du 30 juin 2017 modifiant l’arrêté du 11 avril 2008 modifié relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation

[591] Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Rapports et études, Don anonyme de sperme et d’ovocytes : trouver un équilibre entre les droits des parents, des donneurs et des enfants, De Sutter, Petra, 21 janvier 2019 http://website-pace.net/documents/19855/5665827/20190128-DonationRights-FR.pdf/a2e1bcf6-5d40-4948-8ee2-4c3232961f4b

[592] Les données détenues actuellement par les CECOS, qui concernent les anciens (au sens relevant de l’ancien cadre juridique) tiers donneurs et leurs dons continueront d’être gérées par les centres.

[593] Source : Agence de la biomédecine

[594] L’article 320 dispose que « tant qu’elle n’a pas été contestée en justice, la filiation légalement établie fait obstacle à l’établissement d’une autre filiation qui la contredirait ».

[595] L’article 311-19 dispose que « En cas de procréation médicalement assistée avec tiers donneur, aucun lien de filiation en peut être établie entre l’auteur du don et l’enfant tissu de la procréation.

Aucune action en responsabilité ne peut être exercée à l’encontre du donneur. »

[596] Article 16-8 du code civil

[597] L’article 6-1 dispose que « le mariage et la filiation adoptive emportent les mêmes effets, droits et obligations reconnus par les loi, à l’exclusion de ceux prévus au titre VII du livre Ier du présent code, que les époux ou les parents soient de sexe différent ou de même sexe ».

[598] Source : Bilan de la dépêche de la Direction des affaires civiles et du sceau du 14 février 2019 sollicitant auprès des Procureurs généraux des éléments chiffrés relatifs aux procédures d’adoption de l’enfant de la conjointe au sein des couples de même sexe depuis le mois de septembre 2014, Ministère de la justice, Direction des affaires civiles et du sceau, Sous-direction du droit civil. Sur les 2964 requêtes, seuls 35 refus de prononcer l’adoption ont été enregistrés.

[599] Cour de cassation, 1ère Chambre civile, avis n°17-70.039 du 7 mars 2018

[600] Commentaire de la décision QPC n°2012-248 du 16 mai 2012 relative à l’accès aux origines dans le cadre de l’accouchement sous le secret.

[601] Décision 2018-768 QPC du 21 mars 2019

[602] Décision n° 79-107 DC du 12 juillet 1979

[603] Considérant n°49 : « Considérant, en premier lieu que, d'une part, en permettant l'adoption par deux personnes de même sexe ou au sein d'un couple de personnes de même sexe, le législateur, compétent pour fixer les règles relatives à l'état et à la capacité des personnes en application de l'article 34 de la Constitution, a estimé que l'identité de sexe des adoptants ne constituait pas, en elle-même, un obstacle à l'établissement d'un lien de filiation adoptive ; qu'il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, pour l'établissement d'un lien de filiation adoptive, de la différence entre les couples de personnes de même sexe et les couples formés d'un homme et d'une femme »

[604] Arrêt de Grande chambre X. et autres c/ Autriche du 19 février 2013, n° 19010/07

[605] Arrêt Boeckel et Gessner-Boeckel c/ Allemagne du 7 mai 2013. Deux femmes liées par un partenariat civil enregistré, se plaignaient du refus d’inscrire l’une comme parent sur l’acte de naissance de l’enfant né de sa compagne pendant la durée du partenariat, comme c’est le cas pour le mari qui fait jouer la présomption de paternité.

[606] Aux Pays-Bas, le conjoint ou le partenaire de même sexe peut également, sans faire établir sa filiation, se voir attribuer l'autorité parentale sur l’enfant par décision judiciaire.

[607] Loi du 6 juillet 2007 relative à la procréation médicalement assistée et à la destination des embryons surnuméraires et des gamètes qui ouvre l’assistance médicale à la procréation pour les couples de femmes et l’assistance médicale à la procréation post-mortem procède, s’agissant de la filiation, par simple renvoi aux dispositions du code civil qui ont, à cette occasion, été aménagées pour permettre la filiation de même sexe.

[608] La reconnaissance d’un enfant est soumise au consentement de la mère de l’enfant, que le couple soit de même sexe ou de sexes différents.

[609] Hors les cas d’assistance médicale à la procréation encadrée par la loi

[610] Article 144 du code civil général, De la filiation du père et de l’autre parent (Allgemeines bürgerliches Gesetzbuch, § 144, Abstammung vom Vater und vom anderen Elternteil).

[611] L’Embryo Protection Act a été adopté le 19 juin 2018

[612] Les naissances d’enfants issus d’une assistance médicale à la procréation avec l’intervention d’un tiers donneur représente environ 0,15% du total des naissances.

[613] L’article 345 du code civil prévoit un délai de présence de six mois au foyer avant de pouvoir engager la procédure d’adoption de l’enfant. A ce délai de six mois, doit s’ajouter le délai de procédure judiciaire (environ 4,5 mois en moyenne actuellement).

[614] Elles sont seulement au nombre de trois : le Conseil d’Etat dans son Etude intitulée « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? » adoptée le 28 juin 2018, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) dans un avis du 20 novembre 2018 relatif à l’assistance médicale à la procréation et la mission d’information de l’Assemblée Nationale sur la révision de la loi relative à la bioéthique dans son rapport remis le 15 janvier 2019.

[615] Il faut néanmoins souligner que cette solution peut être employée s’agissant des pères qui décèdent avant la naissance de l’enfant lorsqu’ils ne sont pas mariés avec la mère (la présomption de paternité ne joue pas) et lorsqu’ils n’ont pas effectué de reconnaissance ante natale. Il s’agit néanmoins d’un mode d’établissement dès la naissance de l’enfant très marginal (moins de dix par an actuellement).

[616] Avis relatif à l’assistance médicale à la procréation du 20 novembre 2018, page 13

[617] Rapport d’information n°1572,  page 82.

[618] Conseil d’Etat, section du rapport et des études, « Etude à la demande du Premier ministre, Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », page 61.

[619] La reconnaissance est mentionnée explicitement et la présomption se déduit de l’indication du mariage des parents

[620] Conseil d’Etat, section du rapport et des études, « Etude à la demande du Premier ministre, Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », page 62

[621] Cette reconnaissance, faite selon les dispositions de l’article 316 du code civil, sera une reconnaissance « de complaisance » permise par le droit mais néanmoins fragile puisqu’elle ne peut résister à une contestation qui, en l’espèce pourrait être sollicitée par la mère ou par l’auteur de la reconnaissance dans le cadre d’une séparation par exemple.

[622] L’indication de la déclaration anticipée de volonté sur l’acte de naissance de l’enfant n’emporte pas par exemple les mêmes conséquences au regard de la vie privée s’agissant d’un couple de femmes que s’agissant d’un couple hétérosexuel.

[623] Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, avis n°2015-07-01-SAN-17 du 26 mai 2015, http://www.haut-conseil-egalite.gouv.fr/IMG/pdf/hce_avis_no2015-07-01-san-17-2.pdf

 

[624] Bilan d’application de la Loi Bioéthique de 2011, Agence de la Biomédecine 2018.

[625] Les principes de primauté de la personne humaine, d’inviolabilité, d’absence de caractère patrimonial du corps humain etc. n’ont pas valeur constitutionnelle mais permettent « d’assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine » (Conseil constitutionnel 27 juill. 1994, n° 94-343/344-DC). « d’assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine » (Conseil constitutionnel 27 juill. 1994, n° 94-343/344-DC).

[626] Convention pour la protection des Droits de l'Homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine, signée en 1997. Cette dernière a été complété depuis par quatre protocoles additionnels dont un protocole sur les transplantations d'organes et des tissus d'origine humaine (2002) non encore ratifié par la France. Ce protocole pose des restrictions au prélèvement d'organes sur donneurs vivants. L'article 9 affirme le caractère subsidiaire par rapport aux prélèvements sur personne décédée, tandis que l'article 11, alinéa 2, interdit le prélèvement « s'il existe un risque sérieux pour la vie ou la santé du donneur ».

[627] Ce que dit le droit de l'Union dans le domaine de la bioéthique (et inversement), Estelle Brosset, Revue de l'Union européenne 2019 p. 30.

[628] Les libertés de circulation et les principes sus mentionnées sont des droits fondamentaux.

[629] Dir. n° 2004/23/CE du Parlement européen et du Conseil, 31 mars 2004, relative à l'établissement de normes de qualité et de sécurité pour le don, l'obtention, le contrôle, la transformation, la conservation, le stockage et la distribution des tissus et cellules humains ; Dir. n° 2010/45/UE du Parlement européen et du Conseil, 7 juill. 2010, relative aux normes de qualité et de sécurité des organes humains destinés à la transplantation.

[630] Par exemple, l’article 13 de la « directive organes humain » et l’article 12 de la « directive tissus-cellules humain » posent un objectif de gratuité du don mais s’abstiennent d’organiser l’étape du don ; l’article 13 de la même directive renvoie au droit national la définition des modalités d’obtention du consentement du donneur.

[631] S. 2048 — 98th Congress: National Organ Transplant Act.

www.GovTrack.us. 1983. October 25, 2018 https://www.govtrack.us/congress/bills/98/s2048

[632]  A nonsimultaneous, extended, altruistic-donor chain ; Rees MA, KopkeJE, Pelletier RP , et al. , N Engl J Med,  2009, vol.  360  (pg. 1096-1101) https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/19279341

[633] The Roles of Dominos and Nonsimultaneous Chains in Kidney Paired Donation S. E. Gentrya,b, R. A. Montgomerya, B. J. Swiharta and D. L. Segeva, , American Journal of Transplantation 2009; 9: 1330–1336 Wiley Periodicals Inc. https://pdfs.semanticscholar.org/107a/1d167d3d1c47883a1d51bf9e3529c2b1e954.pdf

[634] A nonsimultaneous, extended, altruistic-donor chain ; Rees MA,   KopkeJE,  Pelletier RP , et al. , N Engl J Med,  2009, vol.  360 (pg. 1096-1101)

[635] Cross-over transplantation: a new national programme for living kidney donation M. de Klerk, J.N.M. IJzermans, L.W. Kranenburg, M.T. Hilhorst, J.J. van Busschbach en W. Weimar

[636]  The Dutch national living donor kidney exchange program ; de Klerk M, Keizer KM, Claas FH, Witvliet M, Haase-Kromwijk BJ, Weimar W. Am J Transplant. 2005 Sep;5(9):2302-5 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16095513

[637] The Dutch living donor kidney exchange, VBHC Prize 2019 http://vbhcprize.com/the-dutch-living-donor-kidney-exchange/

[638] The Dutch national living donor kidney exchange program ; de Klerk M, Keizer KM, Claas FH, Witvliet M, Haase-Kromwijk BJ, Weimar W. Am J Transplant. 2005 Sep;5(9):2302-5 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16095513

[639] Altruistic Donor Triggered DominoPaired Kidney Donation for Unsuccessful Couples from the KidneyExchange Program ; J. I. Roodnat W. Zuidema J. Van De Wetering M. De Klerk R. A. M. Erdman E. K. Massey M. T. Hilhorst J. N. M. IJzermans W. Weimar ; American Journal of Transplantation 2010; 10: 821–827 Wiley Periodicals Inc. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20199504

[640] Human Tissue Act 2004  https://www.legislation.gov.uk/ukpga/2004/30/contents

Human Tissue (Scotland) Act 2006 ; https://www.legislation.gov.uk/asp/2006/4/contents

Donation of solid organs and tissues for transplantation ; Code of Practice ; HTA, Human Tissue Authority, 3 April 2017 https://www.hta.gov.uk/sites/default/files/Code%20F%20-%20Organs%20for%20tx%20Final_0.pdf

[641] UK Living Kidney Sharing Schemes, Paired/Pooled Donation ; Non-directed Altruistic Donor Chains ; Your questions answered ; NHS Blood and Transplant  https://nhsbtdbe.blob.core.windows.net/umbraco-assets/1432/27514-uk-living-kidney-sharing-schemes.pdf

[642] UK Living Kidney Sharing Schemes, Paired/Pooled Donation ; Non-directed Altruistic Donor Chains ; Your questions answered ; NHS Blood and Transplant  https://nhsbtdbe.blob.core.windows.net/umbraco-assets/1432/27514-uk-living-kidney-sharing-schemes.pdf

[643] Donation of solid organs and tissues for transplantation ; Code of Practice ; HTA, Human Tissue Authority, 3 April 2017

[644] https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1776908/fr/insuffisance-renale-chronique-terminale-la-transplantation-strategie-la-plus-efficiente

[645] Rapport de l’Agence de la biomédecine « Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique », actualisation 2016.

[646] Etude du conseil d’Etat, « révision de la loi bioéthique, quelles options pour demain ? » adoptée en Assemblée générale le 28 juin 2018

[647] Avis 129 du Comité consultatif national d’éthique, « Contribution à la révision de la loi de bioéthique » du 25 septembre 2018.

[648] Etude du conseil d’Etat, « révision de la loi bioéthique, quelles options pour demain ? » adoptée en Assemblée générale le 28 juin 2018

[649] Rapport au nom de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques sur l’évaluation de l’application de la loi n02011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique.

[650] Les principes de primauté de la personne humaine, d’inviolabilité, d’absence de caractère patrimonial du corps humain etc. n’ont pas valeur constitutionnelle mais permettent « d’assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine » (C. const. 27 juill. 1994, n° 94-343/344-DC). « d’assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine » (C. const. 27 juill. 1994, n° 94-343/344-DC).

[651] Convention pour la protection des Droits de l'Homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine

[652] Réserve consignée dans l'instrument de ratification déposé le 13 décembre 2011 - Or. fr.

« La France appliquera la dérogation prévue à l'article 20.2 autorisant à titre exceptionnel le prélèvement de tissus régénérables sur les personnes n'ayant pas la capacité de consentir, aux personnes mineures non seulement lorsque le receveur est un frère ou une sœur du donneur mais également lorsque le receveur est un cousin ou une cousine germaine, un oncle ou une tante, un neveu ou une nièce.

La législation française (loi n° 2004-800 du 6 août 2004 complétée par la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011) est aujourd'hui moins restrictive que la Convention. Elle étend la possibilité du don de cellules souches hématopoïétiques prélevées dans la moelle osseuse à d'autres niveaux de parentèle et autorise, en particulier, le prélèvement sur un mineur, au bénéfice non seulement des frères et sœurs mais également au bénéfice des cousins ou cousines, des oncles ou tantes, des neveux ou nièces. Cette extension qui ne remet pas fondamentalement en cause le principe posé à l'article 20 de la Convention est apparue justifiée au législateur français d'un point de vue médical (risque bénin pour le donneur mais bénéfice important pour le receveur) d'autant que des garanties éthiques et de protection du donneur supplémentaires sont prévues dans le dispositif. »

[653] Les libertés de circulation et les principes sus mentionnées sont des droits fondamentaux

[654] Dir. n° 2004/23/CE du Parlement européen et du Conseil, 31 mars 2004, relative à l'établissement de normes de qualité et de sécurité pour le don, l'obtention, le contrôle, la transformation, la conservation, le stockage et la distribution des tissus et cellules humains ; Dir. n° 2010/45/UE du Parlement européen et du Conseil, 7 juill. 2010, relative aux normes de qualité et de sécurité des organes humains destinés à la transplantation.

[655] Par exemple, l’article 13 de la « directive organes humain » et l’article 12 de la « directive tissus-cellules humain » posent un objectif de gratuité du don mais s’abstiennent d’organiser l’étape du don ; l’article 13 de la même directive renvoie au droit national la définition des modalités d’obtention du consentement du donneur.

[656] Transplantationsgesetz TPG https://www.gesetze-im-internet.de/tpg/BJNR263100997.html#BJNR263100997BJNG000802310

[657] https://www.boe.es/boe/dias/2014/07/05/pdfs/BOE-A-2014-7065.pdf

[658] Children as Hematopoietic Stem Cell Donors, COMMITTEE ON BIOETHICS, Pediatrics Feb 2010, 125 (2) 392-404; DOI: 10.1542/peds.2009-3078 ; AMERICAN ACADEMY OF PEDIATRICS http://pediatrics.aappublications.org/content/125/2/392.long

[659] Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? Conseil d’Etat, étude adoptée en assemblée générale le 28 juin 2018

[660]http://www2.assembleenationale.fr/content/download/72567/741096/version/1/file/RAPPORT+Bio%C3%A9thique+oct+2018+final.pdf

[661] : Source DGOS/Base diamant/données PMSI

[662] Les principes de primauté de la personne humaine, d’inviolabilité, d’absence de caractère patrimonial du corps humain etc. n’ont pas valeur constitutionnelle mais permettent « d’assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine » (C. const. 27 juill. 1994, n° 94-343/344-DC). « d’assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine » (C. const. 27 juill. 1994, n° 94-343/344-DC).

[663] Convention pour la protection des Droits de l'Homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine, signée en 1997. Cette dernière a été complété depuis par quatre protocoles additionnels dont un protocole sur les transplantations d'organes et des tissus d'origine humaine (2002) non encore ratifié par la France. Ce protocole pose des restrictions au prélèvement d'organes sur donneurs vivants. L'article 9 affirme le caractère subsidiaire par rapport aux prélèvements sur personne décédée, tandis que l'article 11, alinéa 2, interdit le prélèvement « s'il existe un risque sérieux pour la vie ou la santé du donneur ».

[664] Les libertés de circulation et les principes sus mentionnées sont des droits fondamentaux

[665] Dir. n° 2004/23/CE du Parlement européen et du Conseil, 31 mars 2004, relative à l'établissement de normes de qualité et de sécurité pour le don, l'obtention, le contrôle, la transformation, la conservation, le stockage et la distribution des tissus et cellules humains ; Dir. n° 2010/45/UE du Parlement européen et du Conseil, 7 juill. 2010, relative aux normes de qualité et de sécurité des organes humains destinés à la transplantation.

[666] Par exemple, l’article 13 de la « directive organes humain » et l’article 12 de la « directive tissus-cellules humain » posent un objectif de gratuité du don mais s’abstiennent d’organiser l’étape du don ; l’article 13 de la même directive renvoi au droit national la définition des modalités d’obtention du consentement du donneur.

[667] Rapport d’information d’Alain Claeys et Jean Léonetti de l’Assemblée nationale au nom de la mission d’information sur la révision des lois bioéthiques, 20 janvier 2010

[668] Comité consultatif national d’éthique, avis sur les consentements en faveur d’un tiers n° 70, 13 décembre 2001.

[669] Dans son rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi relative à l’autorisation d’analyses génétiques sur personnes décédées, Mme Catherine DEROCHE indique : « les pratiques médicales se caractérisent par une certaine hétérogénéité : ainsi que cela a été indiqué à votre rapporteure au cours des auditions, si les professionnels refusent en général de pratiquer un test génétique post mortem du fait de l’encadrement légal insuffisant, certains biologistes acceptent au contraire de le réaliser, même en l’absence d’accord d’un proche. » (Sénat, Rapport n° 523, 30 mai 2018)

[670] Malgré les campagnes de sensibilisation aux gestes qui sauvent et la mise en place de défibrillateurs automatiques dans les lieux publics, la mortalité en cas d’arrêt cardiaque reste supérieure à 95%. Chez les patients de plus de 45 ans, la mort subite est, le plus souvent, la complication d’une maladie cardiaque déjà connue ou d’un infarctus du myocarde. A l’inverse, chez les sujets jeunes, les morts subites surviennent majoritairement chez des personnes n’ayant jamais eu de symptômes. Des études ont montré que près de 50% des morts subites du sujet jeune étaient liées à des causes héréditaires et génétiques.

[671] La mort subite risque de survenir chez d’autres membres de la famille. Etablir le diagnostic et faire le dépistage de la maladie au sein de la famille est décisif car cela permet la mise en place d’une prévention qui fera quasiment disparaître le risque de mortalité.

[672] En outre, identifier la cause de la mort subite permet une meilleure acceptation du décès par les familles et apaise l’angoisse que d’autres membres de la famille subissent le même sort.

[673] Source : Agence de la biomédecine, Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, p. 46.

[674] Rapport mission d’information de l’Assemblée nationale, Proposition 23 page 184

[675] http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl17-273.html

[676] Il s’agit par exemple du cas d’une personne n’ayant pas la capacité de consentir et atteinte d’un cancer considéré comme ayant une base génétique. La réalisation d’un test génétique permettant d’identifier la mutation génétique impliquée peut ne pas modifier la façon dont le cancer de cette personne sera traité. Il pourra en revanche fournir des informations qui pourront être utilisées pour l’analyse des caractéristiques génétiques des autres membres de la famille afin de déterminer s’ils sont susceptibles de développer le même cancer. Si la même mutation est retrouvée chez certains d’entre eux, ceux-ci pourront faire l’objet de contrôles plus fréquents afin de permettre une détection à un stade précoce de l’apparition de la maladie.

[677] Rappel des conditions de l’article 13 : bénéfice préventif, diagnostique ou thérapeutique direct pour les membres de la famille, nécessité de la réalisation de ce test, risques et contraintes résultant de l’intervention minimaux pour la personne qui se soumet au test, bénéfice attendu significativement supérieur aux risques pour la vie privée de la personne qui se soumet au test, autorisation du représentant de la personne n’ayant pas la capacité de consentir donnée, association de cette personne au consentement en fonction de ses capacités de compréhension et de son degré de maturité, pas de réalisation de test en cas d’opposition de cette personne.

[678] Le médecin en charge des différentes étapes précisées peut-être celui qui prend en charge la personne hors d’exprimer son consentement ou celui qui intervient dans le cadre de l’autopsie d’une personne décédée ou encore celui qui est sollicité par des membres de la famille potentiellement concernés (onco-généticien par exemple qui aura besoin d’accéder à des échantillons biologiques conservés de la personne décédée).

[679] 1. Sous réserve des articles 17 et 20, une intervention ne peut être effectuée sur une personne n'ayant pas la capacité de consentir, que pour son bénéfice direct.

2. Lorsque, selon la loi, un mineur n'a pas la capacité de consentir à une intervention, celle-ci ne peut être effectuée sans l'autorisation de son représentant, d'une autorité ou d'une personne ou instance désignée par la loi.

L'avis du mineur est pris en considération comme un facteur de plus en plus déterminant, en fonction de son âge et de son degré de maturité.

3. Lorsque, selon la loi, un majeur n'a pas, en raison d'un handicap mental, d'une maladie ou pour un motif similaire, la capacité de consentir à une intervention, celle-ci ne peut être effectuée sans l'autorisation de son représentant, d'une autorité ou d'une personne ou instance désignée par la loi.

La personne concernée doit dans la mesure du possible être associée à la procédure d'autorisation.

4. Le représentant, l'autorité, la personne ou l'instance mentionnés aux paragraphes 2 et 3 reçoivent, dans les mêmes conditions, l'information visée à l'article 5.

5. L'autorisation visée aux paragraphes 2 et 3 peut, à tout moment, être retirée dans l'intérêt de la personne concernée.

[680] Dans sa rédaction antérieure à cette loi, la disposition comprenait deux alinéas :

« L’examen des caractéristiques génétiques d'une personne ou son identification par empreintes génétiques, lorsqu'elle n'est pas réalisée dans le cadre d'une procédure judiciaire, ne peut être entrepris qu'à des fins médicales ou de recherche scientifique et qu'après avoir recueilli son consentement.

« Lorsque cet examen ou cette identification est effectué à des fins médicales, le consentement est recueilli par écrit. Les examens ou identifications à des fins de recherche scientifique sont régis par les dispositions du titre II du présent livre. »

[681] Comité consultatif national d’éthique dans son avis n°124, page 64, note de bas de page n°143

[682] Décret n° 2013-527 du 20 juin 2013 relatif aux conditions de mise en œuvre de l'information de la parentèle dans le cadre d'un examen des caractéristiques génétiques à finalité médicale.

[683] « Si la personne ne souhaite pas informer elle-même les membres de sa famille potentiellement concernés, elle peut demander par un document écrit au médecin prescripteur, qui atteste de cette demande, de procéder à cette information. »

[684] Il a été introduit par la loi de bioéthique du 6 août 2004 puis modifié (clarifié et simplifié) lors de la révision des lois de bioéthique du 7 juillet 2011

[685] Article L. 1131-1-2 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de la loi n°2011-814 du 7 juillet 2011

« Préalablement à la réalisation d'un examen des caractéristiques génétiques d'une personne, le médecin prescripteur informe celle-ci des risques qu'un silence ferait courir aux membres de sa famille potentiellement concernés si une anomalie génétique grave dont les conséquences sont susceptibles de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins était diagnostiquée. Il prévoit avec elle, dans un document écrit qui peut, le cas échéant, être complété après le diagnostic, les modalités de l'information destinée aux membres de la famille potentiellement concernée afin d'en préparer l'éventuelle transmission. Si la personne a exprimé par écrit sa volonté d'être tenue dans l'ignorance du diagnostic, elle peut autoriser le médecin prescripteur à procéder à l'information des intéressés dans les conditions prévues au quatrième alinéa.

« En cas de diagnostic d'une anomalie génétique grave, sauf si la personne a exprimé par écrit sa volonté d'être tenue dans l'ignorance du diagnostic, l'information médicale communiquée est résumée dans un document rédigé de manière loyale, claire et appropriée, signé et remis par le médecin. La personne atteste de cette remise. Lors de l'annonce de ce diagnostic, le médecin informe la personne de l'existence d'une ou plusieurs associations de malades susceptibles d'apporter des renseignements complémentaires sur l'anomalie génétique diagnostiquée. Si la personne le demande, il lui remet la liste des associations agréées en application de l'article L. 1114-1.

« La personne est tenue d'informer les membres de sa famille potentiellement concernés dont elle ou, le cas échéant, son représentant légal possède ou peut obtenir les coordonnées, dès lors que des mesures de prévention ou de soins peuvent leur être proposées.

« Si la personne ne souhaite pas informer elle-même les membres de sa famille potentiellement concernés, elle peut demander par un document écrit au médecin prescripteur, qui atteste de cette demande, de procéder à cette information. Elle lui communique à cette fin les coordonnées des intéressés dont elle dispose. Le médecin porte alors à leur connaissance l'existence d'une information médicale à caractère familial susceptible de les concerner et les invite à se rendre à une consultation de génétique, sans dévoiler ni le nom de la personne ayant fait l'objet de l'examen, ni l'anomalie génétique, ni les risques qui lui sont associés.

« Le médecin consulté par la personne apparentée est informé par le médecin prescripteur de l'anomalie génétique en cause.

« Lorsqu'est diagnostiquée une anomalie génétique grave dont les conséquences sont susceptibles de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins chez une personne qui a fait un don de gamètes ayant abouti à la conception d'un ou plusieurs enfants ou chez l'un des membres d'un couple ayant effectué un don d'embryon, cette personne peut autoriser le médecin prescripteur à saisir le responsable du centre d'assistance médicale à la procréation afin qu'il procède à l'information des enfants issus du don dans les conditions prévues au quatrième alinéa. »

[686] Du centre où a eu lieu le don de gamètes ou du centre qui conserve les embryons destinés à l’accueil

[687] Cette procédure concerne également l’identité de la ou des personnes qui ont demandé la préservation du secret de leur identité lors de l'admission de leur enfant comme pupille de l'Etat ou de son accueil par un organisme autorisé et habilité pour l'adoption ; des auteurs de l'enfant dont le nom n'a pas été révélé à l'officier de l'état civil lors de l'établissement de l'acte de naissance.

[688]https://rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=0900001680084838; il a été signé par la France le 13 décembre 2011

[689]https://rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=09000016800d38c3

[690] 138. Les résultats de certains tests génétiques peuvent être pertinents pour la santé d’autres membres de sa famille. La personne concernée doit en avoir été informée avant la réalisation du test en accord avec les dispositions de l’article 8 du présent Protocole.

139. Lorsque l’analyse des résultats du test en confirme la pertinence pour la santé des membres de sa famille, la personne sur laquelle le test a été effectué doit en être avertie et être sensibilisée à l’importance que revêt l’accès des intéressés à une telle information. Cette sensibilisation pourra intervenir à un moment approprié, en fonction notamment de la situation clinique de la personne et des éventuelles décisions concernant sa santé que les résultats du test permettraient de prendre.

140. Pour la communication de cette information aux membres de la famille, des dispositions appropriées devraient être prévues, tenant compte des règles de confidentialité et de protection de la vie privée des différentes personnes concernées (personne sur laquelle le test a été effectué et membres de sa famille). Le choix de la ou des procédures est laissé aux Etats. Si la personne sur laquelle le test a été effectué ne peut ou ne souhaite pas contacter directement les membres de sa famille, du matériel approprié ou une lettre à leur transmettre peut lui être donné. La création d’une instance intermédiaire chargée de contacter les membres de la famille de la personne concernée peut être envisagée pour répondre au souhait de cette dernière de les informer sans toutefois pouvoir être identifiée comme source de cette information. Autre exemple, la possibilité de prévoir qu’une instance compétente, après une évaluation comparative des intérêts respectifs des personnes concernées, puisse décider de la communication ou non des informations concernées aux membres de la famille.

141. Les personnes informées de l’importance pour leur santé des résultats d’un test effectué sur un membre de leur famille devraient être invitées à consulter un médecin et, dès lors qu’un test génétique visé à l’article 8 paragraphe 2 est envisagé, elles devront pouvoir disposer d’un conseil génétique approprié.

[691] Arrêt de grande chambre Odièvre contre France de 2003 (n° 42326/98)

[692] https://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/114000057.pdf (page 25)

[693] Dans la majorité des pays, l'acte de naissance de l'enfant comporte nécessairement le nom de la mère.

[694] C’est le cas en Allemagne, Autriche, Belgique, Etats-Unis, République Tchèque et Suisse.

[695] Dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 1994, le deuxième alinéa de l’article 16-10 précisait seulement :

« Le consentement de la personne doit être recueilli préalablement à la réalisation de l'étude [génétique des caractéristiques d’une personne]. »

[696] https://rm.coe.int/168007cf99

[697] Paragraphe 35, page 7

[698] Paragraphe 36, page 7

[699] https://rm.coe.int/1680084838

[700] Article 9 :

« Un test génétique ne peut être effectué qu’après que la personne concernée y a donné son consentement libre et éclairé.

« Le consentement aux tests visés à l’article 8, paragraphe 2, doit être consigné par écrit. »

[701] Dans sa rédaction issue du décret n°2008-321 du 4 avril 2008

[702] Dites NGS pour Next Sequencing Generation 

[703] Ce plan, piloté par AVIESAN et soutenu par l’État, a pour ambition de « positionner la France dans le peloton de tête des grands pays engagés dans la médecine génomique » https://solidarites-sante.gouv.fr/systeme-de-sante-et-medico-social/recherche-etinnovation/france-genomique

[704] https://www.agence-biomedecine.fr/annexes/bilan2017/accueil.htm

[705] Ensemble des gènes (exons) du génome qui codent pour la synthèse des protéines

[706] Le rapport explicatif indique que « par utilité clinique, on entend la valeur des résultats du test pour guider la personne concernée dans ses choix s’agissant des stratégies de prévention ou de traitement. Elle constitue donc un élément particulièrement important de décision quant à l’opportunité de proposer un test génétique. » (page 9)

[707] Agence de la biomédecine, Encadrement international de la bioéthique, Mise à jour 2018

[708] L’Allemagne a adopté en 2009 une loi spécifique sur les tests génétiques (entrée en vigueur le 1er février 2010). Elle renforce notamment le consentement et vise à prévenir tout abus ou discrimination dans le recours à des analyses génétiques et l’utilisation des données qui en sont issues. Elle concerne le droit du travail et des assurances, les tests de paternité, les tests prénataux, le dépistage de prédispositions.

[709] La réglementation européenne relative aux dispositifs médicaux vient d’être profondément révisée. Ainsi, deux nouveaux règlements distincts, l’un pour les dispositifs médicaux, l’autre pour les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, seront respectivement applicables d’ici 3 et 5 ans (Publication au JOUE le 5 mai 2017 : Règlement (UE) 2017/745 sur les dispositifs médicaux et Règlement (UE) 2017/746 sur les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro)

[710] Anna Pigeon, Les enjeux de l’utilisation des technologies de séquençage du génome dans le cadre du soin in Cahiers, droit, sciences & technologies, pages 75-88

[711] Ibid.

[712] La société européenne de la génétique humaine est une organisation à but non lucratif visant à promouvoir la recherche en génétique humaine et médicale, et à regrouper les scientifiques qui partagent cet objectif. Elle rassemble en particulier des chercheurs qui travaillent en Europe et cherche à faciliter les contacts entre eux. https://www.eshg.org/index.php?id=home

[713] Recommendations of the European Society of Human Genetics on Whole-genome sequencing in health care, European Journal of Human Genetics, 2013, p. 580-584.

[714] Cet avis propose de nouvelles lignes directrices à destination des laboratoires et centres de génétique afin de les aider à gérer ces « découvertes fortuites », dans un contexte marqué par une évolution rapide des technologies de séquençage du génome. Le comité a, dans ce cadre, réaffirmé l’objectif premier des tests diagnostiques, qui est de fournir un diagnostic au patient, alors même que les évolutions technologiques rendent la frontière entre recherche et application clinique plus floue.

[715] Agence de la biomédecine, Rapport d’information au Parlement et au Gouvernement sur le développement des connaissances et des techniques, page 40

[716] Ainsi, une variation du génome considérée aujourd’hui comme « normale » pouvant être considérée demain comme pathogène dans un contexte particulier, ou l’inverse

[717] Exemple des explorations scanographiques abdominales en urgence conduisant à un nombre important de découverte d’ « incidentalomes »

[718] Avis n° 124, Réflexion éthique sur l’évolution des tests génétiques liée au séquençage de l’ADN humain à très haut débit, 21 janvier 2016, https://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/publications/ccne_avis_124.pdf (page 34)

[719] Anna Pigeon, Les enjeux de l’utilisation des technologies de séquençage du génome dans le cadre du soin in Cahiers, droit, sciences & technologies, pages 75-88

[720] Conseil d’Etat, La révision des Lois de bioéthique IV. Examen des caractéristiques génétiques : respecter la volonté des personnes et renforcer leur information,  La documentation française, 2009, page 68.

[721] Décret n°2013-527 du 20 juin 2013 relatif aux conditions de mise en œuvre de l'information de la parentèle dans le cadre d'un examen des caractéristiques génétiques à finalité médicale

[722] Conseil d’Etat, Section sociale, Extrait du registre des délibérations, Assemblée générale du 28 mars 2013, II

[723] https://www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.do?id=JORFTEXT000027513617

[724] « En tout état de cause, la délivrance d’une telle information ne pourra se faire qu’avec le consentement exprès du patient. »

[725] Equipe mentionnée à l’article R. 1131-5 du code de la santé publique

[726] Dans le cadre de la recherche, l’article L.1131-1-1 du code de santé publique s’inscrit déjà dans une dérogation à l’article 16-10 du code civil et prévoit que l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne à des fins de recherche scientifique puisse être réalisé à partir d'éléments du corps de cette personne prélevés à d'autres fins, lorsque cette personne, dûment informée de ce projet de recherche, n'a pas exprimé son opposition. L’article L. 1131-1-1, a été introduit par amendement au cours de l’examen par le Sénat de la proposition de loi Jardé adoptée le 5 mars 2012. Il est entré en vigueur en novembre 2016 à la suite de la publication du décret n° 2016-1537 du 16 novembre 2016.

[727] M. Jean-François Eliaou, député et Mme Annie Delmont-Koropoulis, sénatrice, Rapport au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques sur l’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique. (Pages 19 et 20)

[728] Conseil d’Etat, Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? 10 juillet 2018 (page 154)

[729] Le dispositif d’information de la parentèle, prévu par l’article L. 1131-1-2 du code de la santé publique prévoit qu’elle soit informée des mêmes risques avant la réalisation d’une examen des caractéristiques génétiques à des fins médicales 

[730] Conseil d’Etat, « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », remis au Premier ministre en juin 2018, page 192.

[731] Rapport « Éthique de la recherche en apprentissage machine », juin 2017

[732] Article L. 1461-1 du code de la santé publique.

[733] Article 11 du projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé, en cours d’examen parlementaire.

[734] Par exemple en matière d’oncologie (exemple de Therapixel, qui a fait valoir en juin 2017 que son réseau de neurones était plus performant qu’une équipe médicale), de cardiologie, de radiologie, d’ophtalmologie (exemple d’une autorisation donnée en avril 2018 par les autorités sanitaires étatsuniennes pour le système d’intelligence artificielle autonome de diagnostic de la rétinopathie diabétique nommé IDx-DR)…

[735] https://www.aiforhumanity.fr/pdfs/9782111457089_Rapport_Villani_accessible.pdf (p. 194 à 203).

[736] Conseil d’Etat, « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », remis au Premier ministre en juin 2018, p. 192 à 209.

[737] Propositions n° 43 et 44 du rapport d'information de M. Jean-Louis Touraine fait au nom de la mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, n ° 1572, remis le 15 janvier 2019.

[738] Avis n° 130 du Comité consultatif national d’éthique, « Données massives (big data) et santé : une nouvelle approche des enjeux éthiques », rendu public le 29 mai 2019 (p. 86).

[739] Avis n° 129 du comité consultatif national d’éthique relatif à la révision de la loi de bioéthique, pages 109-110.

[740] Cet encadrement des finalités de l’emploi des techniques d’imagerie cérébrale est prévu à l’article 16-14 du chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code civil, qui dispose : « Les techniques d'imagerie cérébrale ne peuvent être employées qu'à des fins médicales ou de recherche scientifique, ou dans le cadre d'expertises judiciaires. Le consentement exprès de la personne doit être recueilli par écrit préalablement à la réalisation de l'examen, après qu'elle a été dûment informée de sa nature et de sa finalité. Le consentement mentionne la finalité de l'examen. Il est révocable sans forme et à tout moment. »

[741] Ces dispositions sont prévues à l’article L. 1134-1 du code de la santé publique, qui est l’unique article composant le titre III bis intitulé « Neurosiences et imagerie cérébrale » de la première partie de ce code.

[742] CCNE, 12 décembre 2013, avis n° 122, Recours aux techniques biomédicales en vue de «neuro-amélioration» chez la personne non malade : enjeux éthiques.

[743] Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle

[744] Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle

[745] Rapport sur l’impact et les enjeux des nouvelles technologies d’exploration et de thérapie du cerveau, MM. Claeys et Vialatte, députés, 13 mars 2012 : http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-off/i4469.pdf

[746] Article 45 de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique.

[747] Cet encadrement des finalités de l’emploi des techniques d’imagerie cérébrale est prévu à l’article 16-14 du chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code civil, qui dispose : « Les techniques d'imagerie cérébrale ne peuvent être employées qu'à des fins médicales ou de recherche scientifique, ou dans le cadre d'expertises judiciaires. Le consentement exprès de la personne doit être recueilli par écrit préalablement à la réalisation de l'examen, après qu'elle a été dûment informée de sa nature et de sa finalité. Le consentement mentionne la finalité de l'examen. Il est révocable sans forme et à tout moment. »

[748] Conformément à l’article L. 1121-1 du code de la santé publique, « (…) Il existe trois catégories de recherches impliquant la personne humaine :

1° Les recherches interventionnelles qui comportent une intervention sur la personne non justifiée par sa prise en charge habituelle ;

2° Les recherches interventionnelles qui ne comportent que des risques et des contraintes minimes, dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ;

3° Les recherches non interventionnelles qui ne comportent aucun risque ni contrainte dans lesquelles tous les actes sont pratiqués et les produits utilisés de manière habituelle. (…) »

[749] CCNE, 12 décembre 2013, avis n° 122, Recours aux techniques bio-médicales en vue de «neuro-amélioration» chez la personne non malade : enjeux éthiques.

[750] Article L. 1151-3 du code de la santé publique : « Les actes à visée esthétique dont la mise en œuvre présente un danger grave ou une suspicion de danger grave pour la santé humaine peuvent être interdits par décret après avis de la Haute Autorité de santé. Toute décision de levée de l'interdiction est prise en la même forme. »

[751] Par l’article 61 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

[752] « 1. Un niveau élevé de protection de la santé humaine est assuré dans la définition et la mise en œuvre de toutes les politiques et actions de l'Union. L'action de l'Union, qui complète les politiques nationales, porte sur l'amélioration de la santé publique et la prévention des maladies et des affections humaines et des causes de danger pour la santé physique et mentale. (…) ».

[753] Dans tous les développements qui suivent, il n’est question que de cellules souches humaines (qu’elles soient embryonnaires ou pluripotentes induites).

[754] Le blastocyste, au cinquième jour suivant la fécondation, est constitué d’une couche cellulaire externe et d’une masse cellulaire interne. Le prélèvement des cellules de la masse interne (cellules souches pluripotentes) conduit à la destruction de l’embryon.

[755] Travaux de l’équipe japonaise de Shinya Yamanaka (2006), prix Nobel 2012 pour cette découverte

[756] Agence de la biomédecine : Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, p. 56.

[757] Agence de la biomédecine : Rapport d’information au Parlement et au Gouvernement, décembre 2017, p. 57.

[758] Ibid., p. 53.

[759] Agence de la biomédecine : Rapport d’information au Parlement et au Gouvernement, décembre 2017, p. 55.

[760] « Démonstration que des cardiomyocytes issus de CSEh sont fonctionnels in vivo (activité électrique), succès de la différenciation de CSEh en neurones auditifs (surdités), premiers résultats de différenciation en cellules épithéliales respiratoires, et confirmation de l’obtention de neurones moteurs capables d’envoyer des prolongements axonaux sur de très longues distances et de s’intégrer dans un réseau fonctionnel (un espoir pour les lésions de la moelle épinière). » Ibid., p. 54.

[761] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[762] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 86.

[763] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 145.

[764] Ibid., p. 142.

[765] M. Peschanski, directeur scientifique de l’Institut des cellules souches pour le traitement et l’étude des maladies monogéniques (I-Stem à Evry)

Parmi les essais cliniques qui pourraient voir le jour avec des cellules dérivées de cellules souches embryonnaires, deux protocoles du laboratoire I-Stem à Evry peuvent être cités : l’un vise à produire des kératinocytes qui seront utilisés pour construire un substitut épidermique, pansement transitoire pour des lésions cutanées ; l’autre à produire des cellules de l’épithélium rétinien pigmentaire destinées à être greffées sous forme de patch dans des pathologies rétiniennes.

[766] Table ronde sur les cellules souches et sur les embryons, 9 octobre 2018, http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/cr-bioethique/18-19/c1819029.pdf (page 10)

[767] Article L. 152-8 du code de la santé publique

« La conception in vitro d'embryons humains à des fins d'étude, de recherche ou d'expérimentation est interdite.

Toute expérimentation sur l'embryon est interdite.

A titre exceptionnel, l'homme et la femme formant le couple peuvent accepter que soient menées des études sur leurs embryons.

Leur décision est exprimée par écrit.

Ces études doivent avoir une finalité médicale et ne peuvent porter atteinte à l'embryon.

Elles ne peuvent être entreprises qu'après avis conforme de la commission mentionnée à l'article L. 184-3 ci-dessous dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat.

La commission rend publique chaque année la liste des établissements où s'effectuent ces études, ainsi que leur objet. »

[768] Article L. 2151-5 du code de la santé publique

[769] Article L. 2151-5 du code de la santé publique

[770] Article L. 2151-5 du code de la santé publique

[771] Qualité scientifique de l’équipe, solidité du protocole et de l’argumentation scientifique (titres, diplômes, expérience, pérennité de l’organisme, locaux, matériels, équipements, procédés et techniques, faisabilité du protocole, sécurité, qualité et traçabilité des embryons et cellules, etc.)

[772] Cette finalité englobe le but de traiter la maladie mais également de la prévenir ou de la diagnostiquer

[773] Agence de la biomédecine : Dossier de demande d’autorisation – Recherche sur l’embryon et les CSEH, p. 15., URL : https://www.agence-biomedecine.fr/IMG/doc/20180103_modeleda_recherchecseh.doc

[774] Article L. 2151-5 du code de la santé publique :

« I.-Aucune recherche sur l'embryon humain ni sur les cellules souches embryonnaires ne peut être entreprise sans autorisation. Un protocole de recherche conduit sur un embryon humain ou sur des cellules souches embryonnaires issues d'un embryon humain ne peut être autorisé que si :

1° La pertinence scientifique de la recherche est établie ;

2° La recherche, fondamentale ou appliquée, s'inscrit dans une finalité médicale ;

3° En l'état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à ces embryons ou ces cellules souches embryonnaires ;

4° Le projet et les conditions de mise en œuvre du protocole respectent les principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires.

II.-Une recherche ne peut être menée qu'à partir d'embryons conçus in vitro dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation et qui ne font plus l'objet d'un projet parental. La recherche ne peut être effectuée qu'avec le consentement écrit préalable du couple dont les embryons sont issus, ou du membre survivant de ce couple, par ailleurs dûment informés des possibilités d'accueil des embryons par un autre couple ou d'arrêt de leur conservation. A l'exception des situations mentionnées au dernier alinéa de l'article L. 2131-4 et au troisième alinéa de l'article L. 2141-3, le consentement doit être confirmé à l'issue d'un délai de réflexion de trois mois. Le consentement des deux membres du couple ou du membre survivant du couple est révocable sans motif tant que les recherches n'ont pas débuté.

III.-Les protocoles de recherche sont autorisés par l'Agence de la biomédecine après vérification que les conditions posées au I du présent article sont satisfaites. La décision de l'agence, assortie de l'avis du conseil d'orientation, est communiquée aux ministres chargés de la santé et de la recherche qui peuvent, dans un délai d'un mois et conjointement, demander un nouvel examen du dossier ayant servi de fondement à la décision :

1° En cas de doute sur le respect des principes éthiques ou sur la pertinence scientifique d'un protocole autorisé. L'agence procède à ce nouvel examen dans un délai de trente jours. En cas de confirmation de la décision, la validation du protocole est réputée acquise ;

2° Dans l'intérêt de la santé publique ou de la recherche scientifique, lorsque le protocole a été refusé. L'agence procède à ce nouvel examen dans un délai de trente jours. En cas de confirmation de la décision, le refus du protocole est réputé acquis.

En cas de violation des prescriptions législatives et réglementaires ou de celles fixées par l'autorisation, l'agence suspend l'autorisation de la recherche ou la retire. L'agence diligente des inspections comprenant un ou des experts n'ayant aucun lien avec l'équipe de recherche, dans les conditions fixées à l'article L. 1418-2.

IV.- Les embryons sur lesquels une recherche a été conduite ne peuvent être transférés à des fins de gestation.

V.- Sans préjudice du titre IV du présent livre Ier, des recherches biomédicales menées dans le cadre de l'assistance médicale à la procréation peuvent être réalisées sur des gamètes destinés à constituer un embryon ou sur l'embryon in vitro avant ou après son transfert à des fins de gestation, si chaque membre du couple y consent. Ces recherches sont conduites dans les conditions fixées au titre II du livre Ier de la première partie. »

[775] Etant rappelé que la première phrase du premier alinéa de l’article L. 2151-5 du code de la santé publique dispose que : « Aucune recherche sur l'embryon humain ni sur les cellules souches embryonnaires ne peut être entreprise sans autorisation. Un protocole de recherche conduit sur un embryon humain ou sur des cellules souches embryonnaires issues d'un embryon humain ne peut être autorisé que si (…). »

[776] Article L. 2151-7 du code de la santé publique

« Tout organisme qui assure, à des fins de recherche, la conservation d'embryons ou de cellules souches embryonnaires doit être titulaire d'une autorisation délivrée par l'Agence de la biomédecine.

La délivrance de l'autorisation est subordonnée au respect des dispositions du titre Ier du livre II de la première partie du présent code, des règles en vigueur en matière de sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site et des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, ainsi qu'au respect des règles de sécurité sanitaire.

En cas de non-respect des dispositions mentionnées au deuxième alinéa, l'Agence de la biomédecine peut, à tout moment, suspendre ou retirer l'autorisation.

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé est informée des activités de conservation d'embryons ou de cellules souches embryonnaires à des fins de recherche réalisées sur le même site que des activités autorisées par elle en application de l'article L. 1243-2.

Les organismes mentionnés au premier alinéa ne peuvent céder des embryons ou des cellules souches embryonnaires qu'à un organisme titulaire d'une autorisation délivrée en application du présent article ou de l'article L. 2151-5. L'Agence de la biomédecine est informée préalablement de toute cession. »

[777] Article L. 2151-7 du code de la santé publique

« L'importation de cellules souches embryonnaires aux fins de recherche est soumise à l'autorisation préalable de l'Agence de la biomédecine. Cette autorisation ne peut être accordée que si ces cellules souches ont été obtenues dans le respect des principes fondamentaux prévus par les articles 16 à 16-8 du code civil.

L'exportation de cellules souches embryonnaires aux fins de recherche est soumise aux mêmes conditions que l'importation définie au précédent alinéa. »

[778] Agence de la biomédecine : Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, p. 55.

[779] L’avis du Conseil d’orientation est prévu au III de l’article L. 2151-5 du code de la santé publique

[780] La mission d’inspection de l’agence est prévue à l’article L. 1418-2 du code de la santé publique

« Pour l'accomplissement des missions prévues aux 4°, 10° et 11° de l'article L. 1418-1, l'agence désigne parmi ses agents des inspecteurs chargés des contrôles et investigations y afférents et peut demander aux autorités administratives compétentes de l'Etat ou aux établissements publics concernés de faire intervenir leurs agents habilités à contrôler l'application des dispositions législatives et réglementaires visant à préserver la santé humaine.

Ces inspecteurs peuvent être assistés par des experts désignés par le directeur général de l'agence.

Les dispositions des articles L. 1421-2, L. 1421-3 et L. 1427-1 sont applicables aux inspecteurs de l'agence.

L'agence est destinataire des rapports de contrôle et d'inspection concernant les activités relevant de sa compétence. »

[781] Conformément au III de l’article L. 2151-5 du code de la santé publique

[782] Le rapport annuel de l’équipe autorisée est prévu à l’article R. 2151-8 du code de la santé publique :

« Toute recherche autorisée au titre de l'article L. 2151-5 est placée sous la direction d'une personne responsable désignée par la demande mentionnée à l'article R. 2151-6.

La personne responsable de la recherche adresse au directeur général de l'agence de la biomédecine un rapport annuel. Elle lui fait parvenir le rapport final de la recherche dès l'achèvement de celle-ci. Ces rapports contiennent en particulier les informations relatives à la destination des embryons et des cellules souches embryonnaires ayant fait l'objet du protocole.

Le directeur général de l'agence peut à tout moment demander à la personne responsable de la recherche de rendre compte de l'état d'avancement des travaux. »

[783] Code pénal : articles 214-1 à 214-4, 511-1, 511-1-1, 511-17 à 511-19-3 ; Code de la santé publique : articles L. 2163-1 à L. 2163-8

[784] Source : Agence de la biomédecine

[785] https://www.agence-biomedecine.fr/IMG/pdf/internet_tableauprotocolesrech.pdf

[786] En Europe : Belgique, Royaume-Uni, Suède. Dans le reste du monde : Russie, Ukraine, Israël, Égypte, Chine, Taiwan, Singapour, Japon, Corée du Sud…

[787] En Europe : Bulgarie, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Islande, Norvège, Pays-Bas, Portugal, République tchèque, Slovénie, Suisse. Dans le reste du monde : Australie, Brésil, Canada, Inde, Nouvelle-Zélande

[788] Allemagne, Hongrie, Italie

[789] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », p. 52.

[790] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[791] Ibid.

[792] Ibid.

[793] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », p. 52.

[794] Ibid., p. 54.

[795] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 82.

[796] « Un assouplissement vers un régime déclaratif, assorti de la traçabilité des lignées de cellules souches embryonnaires et des cellules différenciées qui en sont dérivées, ainsi que de la transparence garantie par une publication au Journal Officiel permettrait de tenir compte de la différence entre, d’une part, la recherche sur l’embryon ou la création de nouvelles lignées de cellules souches embryonnaires, qui conduisent à la destruction de l’embryon et d’autre part, les recherches menées à partir de lignées de cellules souches embryonnaires existantes et établies ne disposant pas des propriétés leur permettant de reproduire un nouvel organisme. »

[797] Ibid., p. 85.

[798] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 148.

[799] Ibid., p. 149.

[800] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 183.

[801] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », p. 52.

[802] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 147.

[803] Agence de la biomédecine, Avis du Conseil d’orientation, Les cellules souches pluripotentes induites (iPS) : état des lieux, perspectives et enjeux éthiques, séance du 11 février 2016, p. 25-26.

[804] Ibid., p. 46.

[805] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », p. 59.

[806] Il poursuit : « Cette instance pourrait ainsi faire coïncider garantie des principes éthiques et temporalité des avancées scientifiques. On pourrait imaginer qu’elle puisse être sollicitée à la demande pour évaluer les protocoles de recherche soumis par les scientifiques. Cette instance pourrait être en appui des chercheurs, face à la diversité des législations nationales – notamment en Europe - et la difficulté qu’elle entraîne pour une recherche qui fait intervenir des collaborations internationales. »

[807] C. Martinat, Table ronde sur les cellules souches et sur les embryons, 9 octobre 2018, http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/cr-bioethique/18-19/c1819029.pdf (page 14)

[808] Seul le critère « En l'état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à des cellules souches embryonnaires » n’est pas repris conformément aux développements du point « nécessité de légiférer » qui montrent que les cellules souches embryonnaires restent le « gold-standard » (ne seront jamais détrônées par les cellules souches pluripotentes induites). Par ailleurs, la non reprise de ce critère traduit également le fait que les cellules souches embryonnaires ne relèvent pas de la problématique de la recherche sur l’embryon.

[809] Agence de la biomédecine : Rapport d’information au Parlement et au Gouvernement, décembre 2017, p. 56.

[810] Agence de la biomédecine : Rapport d’information au Parlement et au Gouvernement, décembre 2017, p. 51.

[811] Liée à tout retard, tout frein au développement académique ou industriel dans ce domaine

[812] A l’instar du domaine des CART cells, réelle innovation en immunothérapie que la France n’a pas pu développer elle-même ; le coût pris en charge par l’assurance maladie est transféré aux USA (Gilead) ou en Suisse (Novartis).

[813] Agence de la biomédecine : Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, p. 56-57.

[814] Une demande d’autorisation vient d’être déposée.

[815] Agence de la biomédecine : Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique (actualisation 2018), pp. 64-7.

[816] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 184.

[817] Prohibition of Human Cloning for Reproduction Act (2002), consolidé le 20/09/2017 ; Research Involving Human Embryos Act(2006) modifié

[818] Loi sur la procréation assistée et la recherche connexe, L.C. 2004, ch. 2 ; orientations conditionnant le financement public ; Lignes directrices en matière de recherche sur les cellules souches pluripotentes humaines, bureau de l'éthique des Instituts de recherche en santé

[819] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 67, 27 janvier 2000

[820] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 112 : Une réflexion éthique sur la recherche sur les cellules d’origine embryonnaire humaine, et la recherche sur l’embryon humain in vitro, p. 51.

[821] Le rapport Warnock a fait suite aux travaux d’un comité présidé par Mary Warnock, philosophe membre de la chambre des Lords. Le comité avait été rassemblé en 1982, suite aux premières naissances issues de fécondation in vitro, pour aborder l’ensemble des questions éthiques, légales et sociétales découlant de ces progrès médicaux. Le processus ayant mené aux recommandations du rapport reste comme un modèle de consultation publique (plus de 300 organisations et individus ont été auditionnés, comité comportant une majorité de non-scientifiques et présidé par une non-scientifique). Bien qu’étant essentiellement connu comme fixant la règle des 14 jours, le rapport traite l’ensemble des questions soulevées par l’avènement des techniques de fécondation in vitro et l’accès possible à l’embryon préimplantatoire (don de gamètes, sélection des sexes, anonymat des donneurs, congélation des embryons, consentement au don d’embryons pour la recherche…).

[822] Gastrulation : ensemble des mouvements qui mettent en place les trois feuillets fondamentaux de l’embryon.

[823] Agence de la biomédecine : Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, p. 59.

[824] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 144.

[825] L. David, Table ronde sur les cellules souches et sur les embryons, 9 octobre 2018, http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/cr-bioethique/18-19/c1819029.pdf (page 16)

[826] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 184.

[827] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », p. 51.

[828] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 76.

[829] Mission d’information de l’Assemblée nationale : Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 144.

[830] Soit environ 8 semaines après la fécondation

[831] https://www.agence-biomedecine.fr/annexes/bilan2017/donnees/procreation/01-amp/pdf/amp.pdf (page 18)

[832] Même source

[833] Arrêté du 30 juin 2017 modifié modifiant l’arrêté du 11 avril 2008 modifié relatif  aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation

[834] Même source

[835] Rapport de l'International Federation of Fertility Societies (IFFS) qui compare la situation de l'assistance médicale à la procréation dans 49 pays à partir des réponses à un questionnaire recueillies auprès de plus de deux mille centres d'AMP.

[836] https://www.agence-biomedecine.fr/annexes/bilan2017/donnees/procreation/01-amp/pdf/amp.pdf (page 48)

[837] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 79.

[838] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 185.

http://www.conseil-etat.fr/content/download/1177/3559/version/1/file/etude-bioethique_ok.pdf

[839] Article L. 2141-1 du code de la santé publique : « L'assistance médicale à la procréation s'entend des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro, la conservation des gamètes, des tissus germinaux et des embryons, le transfert d'embryons et l'insémination artificielle. (…) »

[840] Annexe 1, Manipulations visées à l’article 2, paragraphe 1, point c), premier tiret : découpage, broyage, façonnage, centrifugation, trempage dans des solutions antibiotiques ou antimicrobiennes, stérilisation, irradiation, séparation, concentration ou purification de cellules, filtration, lyophilisation, congélation, cryoconservation, vitrification.

[841]  http://www.ema.europa.eu/ema/pages/includes/document/open_document.jsp?webContentId=WC500204692

[842] http://www.ema.europa.eu/ema/pages/includes/document/open_document.jsp?webContentId=WC500183709

[843] Article R2142-34

« Le registre d'embryons que doit tenir tout établissement de santé, tout organisme, tout groupement de coopération sanitaire ou tout laboratoire autorisé à conserver des embryons doit mentionner :

1° L'identité du couple qui est à l'origine de l'embryon et, le cas échéant, le code européen unique du don ou le code d'anonymisation du donneur de gamètes dans le cas d'un embryon conçu avec recours à un tiers donneur ;

2° Le nombre d'embryons conservés pour chaque couple ;

3° Le lieu et les dates de fécondation et de congélation ;

4° Les indications précises du lieu de conservation des embryons dans les conteneurs dans la pièce affectée à cet effet ;

5° Le cas échéant, les lieux de conservation antérieure ;

6° Les informations relatives au devenir de chaque embryon, notamment les dates et résultats de la consultation annuelle des membres du couple sur le maintien de leur projet parental et la date de décongélation de chaque embryon ;

7° En cas d'accueil d'embryon, le code européen unique du don. »

[844] Les questions de traçabilité sont également détaillées dans l’arrêté du 30 juin 2017 modifié modifiant l’arrêté du 11 avril 2008 modifié relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques d’assistance médicale à la procréation au point I.1.5 (Traçabilité et identito-vigilance).

[845] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, pp. 185-186.

[846] Code pénal : articles 214-1 à 214-4, 511-1, 511-1-1, 511-17 à 511-19-3 ; Code de la santé publique : articles L. 2163-1 à L. 2163-8

[847] La portée de cet article sera discutée au point « nécessité de légiférer » en lien avec l’article 13 de la Convention d’Oviedo

[848] http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rapports/r3403.pdf (page 113)

[849] Il y est également précisé que « L’article 23 A reprend textuellement une des recommandations figurant en fin du rapport de MM. Le Gall et Ardaillou, mises en annexe de l’avis adopté le 29 mars 2011 par l’Académie nationale de médecine ». Pour autant, la consultation de ce rapport ne permet pas de retrouver ces recommandations (Bull. Acad. Natle Méd., 2011, 195, no 3, 733-740, séance du 29 mars 2011) http://www.academie-medecine.fr/avis-sur-le-projet-de-loi-relatif-a-la-bioethique-adopte-a-lassemblee-nationale-en-premiere-lecture-le-15-fevrier-2011/)

[850] Les développements du point 1.1.3 ont été rédigés à partir de la note du Comité d’éthique sur la saisine concernant les questions liées au développement de la technologie CRISPR-Cas9

[851] Clustered regularly interspaced short palindromic repeat

[852] Toutes les cellules de l’organisme à l’exception de celles de la lignée germinale (précurseurs de l’ovocyte et précurseurs des spermatozoïdes)

[853] Certains embryons surnuméraires ont été congelés à un stade très précoce (zygotes) ; la plupart l’ont été à un stade plus tardif, l’application de la technologie aboutit alors à la constitution de deux populations cellulaires -l’une modifiée et l’autre non, ce mosaïsme restant néanmoins d’intérêt pour les chercheurs.

[854] « La conception in vitro d'embryon ou la constitution par clonage d'embryon humain à des fins de recherche est interdite. » (Article L. 2151-2 du code de la santé publique)

[855] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p.56

[856] Le Chapitre 1er du Titre V du Livre Ier de la deuxième partie du code ne concerne que les embryons humains

[857] Agence de la biomédecine, Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique, Actualisation 2018, pp.73 et74

[858] Clustered regularly interspaced short palindromic repeat ; pour plus de précision, Cf. point « nécessité de légiférer »

[859] Ishii T. Germline genome-editing research and its socioethical implications Trends in Molecular Medicine, August 2015, Vol. 21, No. 8

[860] Note du Comité d’éthique sur la saisine concernant les questions liées au développement de la technologie CRISPR-Cas9

https://www.inserm.fr/sites/default/files/2017-10/Inserm_Saisine_ComiteEthique_Crispr-Cas9_Fevrier2016.pdf

[861] Agence de la biomédecine, Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique, Actualisation 2018, pp.71 et72.

[862] Même s’il s’agit d’un embryon surnuméraire existant et donné à la recherche, l’application de la technique conduit de fait à « créer » un nouvel embryon par transgenèse (modifier le génome d’un embryon pendant le temps de l’expérimentation aboutit à créer un embryon transgénique)

[863] Agence de la biomédecine, Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, 11 janvier 2018, p. 56.

[864] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p.56

[865] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p.159

[866] Mission d’information de la Conférence des présidents sur la révision de la loi relative à la bioéthique, Rapport d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, 15 janvier 2019, p. 153.

[867] « Une intervention ayant pour objet de modifier le génome humain ne peut être entreprise que pour des raisons préventives, diagnostiques ou thérapeutiques et seulement si elle n'a pas pour but d'introduire une modification dans le génome de la descendance. »

[868] « Sans préjudice des recherches tendant à la prévention et au traitement des maladies génétiques, aucune transformation ne peut être apportée aux caractères génétiques dans le but de modifier la descendance de la personne. »

[869] Texte intégral

89. Les progrès de la science, en particulier dans la connaissance du génome humain et ses applications, font naître des perspectives très positives mais aussi des interrogations voire de grandes inquiétudes. Alors que les développements dans ce domaine peuvent apporter de grands bénéfices à l'humanité, un mauvais usage de ces évolutions pourrait faire courir un danger non plus seulement à l'individu, mais à l'espèce elle-même. La principale inquiétude est que l'on arrive un jour à modifier intentionnellement le génome humain afin de produire des individus ou des groupes entiers dotés de caractéristiques particulières et de qualités souhaitées. La réponse que la Convention apporte à ces craintes, à l'article 13, présente plusieurs aspects.

90. Dans tous les cas, toute intervention ayant pour objet de modifier le génome humain doit avoir une raison préventive, diagnostique ou thérapeutique. Sont interdites les interventions ayant pour objet de modifier les caractères génétiques ne se rapportant pas à une maladie ou à une affection.

Aussi longtemps que la thérapie génique somatique est au stade de la recherche, son application n'est autorisée que sous réserve du respect des normes de protection prévues aux articles 15 et suivants.

91. Les interventions ayant pour but d'introduire une modification dans le génome de la descendance sont interdites. Sont donc prohibées en particulier les modifications génétiques des spermatozoïdes ou des ovules destinés à la fécondation. La recherche médicale ayant pour but d'introduire des modifications génétiques dans des spermatozoïdes ou des ovules non destinés à la fécondation n'est admissible que si elle est effectuée in vitro et avec l'approbation d'un comité d'éthique ou de toute autre instance compétente.

92. L'article n'exclut pas pour autant des interventions qui, ayant un but somatique, auraient pour effet secondaire non voulu d'affecter la lignée germinale. Tel peut être le cas, par exemple, de certains traitements du cancer par radiothérapie ou chimiothérapie qui peuvent affecter l'appareil reproducteur de la personne soumise à ce traitement.

[870] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p.160.

[871] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p.56.

[872] Sous-entendu les articles 13 de la Convention d’Oviedo et 16-4 du Code civil

[873] Académie nationale de médecine, Modifications du génome des cellules germinales et de l’embryon humains. (Information), janvier 2016, pp. 11 et 12.

http://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2016/02/Rapport-modification-du-gènome-27-01-16.pdf

[874] Elle conclut son avis : « Le groupe de travail est en accord avec l’esprit de la loi qui fait clairement la distinction entre toute intervention qui viserait à modifier les caractères génétiques de la descendance et une recherche qui ne conduit pas à la naissance d’un enfant dont les caractéristiques génétiques auraient été modifiées. La première situation, qui pourrait être la conséquence d’une modification du génome de cellules germinales ou d’embryons humains suivie du transfert in utero de ces derniers, n’a pas lieu d’être actuellement. En revanche, la recherche ne conduisant pas à la naissance d’un enfant devrait être autorisée y compris si elle est faite sur des cellules germinales ou des embryons humains. Le groupe de travail estime enfin que les recherches dans ce domaine devraient être soutenues quand elles sont scientifiquement et médicalement pertinentes. »

[875] Note du Comité d’éthique sur la saisine concernant les questions liées au développement de la technologie CRISPR-Cas9

[876] Synthèse des échanges réalisés lors de l’atelier  « Recherche sur l’embryon et cellules souches embryonnaires » Paris –15 mai 2018 ; Les recherches du futur : les modifications du génome (Yves Le Bouc) https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/media/default/0001/01/9f42087c9c8a8db5242379012a4aafc411e0a0bc.pdf

[877] Contribution aux Etats généraux de la bioéthique https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[878] « Autoriser pour la recherche dans un cadre règlementaire strict l’utilisation des embryons humains surnuméraires ne faisant plus l’objet de projet parental nous permettra d’expérimenter une nouvelle génération de nucléases, plus spécifiques, mais aussi de mettre en place des stratégies de contrôle de la spécificité de ces approches. Il ne faut pas s’interdire la possibilité de réussir un jour à soigner par l’édition du génome germinal des maladies génétiques jusqu’à présent incurables. »

[879] L’accès à des modèles animaux ne contrebalance que très faiblement ce problème, l’originalité du modèle humain en termes de développement précoce étant de plus en plus reconnue.

[880] Article 16-10 du code civil :

« L'examen des caractéristiques génétiques d'une personne ne peut être entrepris qu'à des fins médicales ou de recherche scientifique.

Le consentement exprès de la personne doit être recueilli par écrit préalablement à la réalisation de l'examen, après qu'elle a été dûment informée de sa nature et de sa finalité. Le consentement mentionne la finalité de l'examen. Il est révocable sans forme et à tout moment. »

[881] Article L1131-1-1 du code de la santé publique

« Par dérogation à l'article 16-10 du code civil et au premier alinéa de l'article L. 1131-1 du présent code, l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne à des fins de recherche scientifique peut être réalisé à partir d'éléments du corps de cette personne prélevés à d'autres fins lorsque cette personne, dûment informée de ce projet de recherche, n'a pas exprimé son opposition. Lorsque la personne est un mineur ou un majeur en tutelle, l'opposition est exprimée par les titulaires de l'autorité parentale ou le tuteur. Lorsque la personne est un majeur hors d'état d'exprimer son consentement et ne faisant pas l'objet d'une tutelle, l'opposition est exprimée par la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6, à défaut de celle-ci, par la famille ou, à défaut, par une personne entretenant avec l'intéressé des liens étroits et stables.

Il peut être dérogé à l'obligation d'information prévue au premier alinéa lorsque la personne concernée ne peut pas être retrouvée. Dans ce cas, le responsable de la recherche doit consulter, avant le début des travaux de recherche, un comité de protection des personnes qui s'assure que la personne ne s'était pas opposée à l'examen de ses caractéristiques génétiques et émet un avis sur l'intérêt scientifique de la recherche.

Lorsque la personne concernée a pu être retrouvée, il lui est demandé, au moment où elle est informée du projet de recherche, si elle souhaite être informée en cas de diagnostic d'une anomalie génétique grave.

Le présent article n'est pas applicable aux recherches dont les résultats sont susceptibles de permettre la levée de l'anonymat des personnes concernées. »

[882] Prévus au Chapitre III (Comités de protection des personnes et autorité compétente) du Titre II (Recherches impliquant la personne humaine) du Livre Ier (Protection des personnes en matière de santé) de la première partie du code de la santé publique.

[883] Article L1211-2 du code de la santé publique

« Le prélèvement d'éléments du corps humain et la collecte de ses produits ne peuvent être pratiqués sans le consentement préalable du donneur. Ce consentement est révocable à tout moment.

L'utilisation d'éléments et de produits du corps humain à une fin médicale ou scientifique autre que celle pour laquelle ils ont été prélevés ou collectés est possible, sauf opposition exprimée par la personne sur laquelle a été opéré ce prélèvement ou cette collecte, dûment informée au préalable de cette autre fin. Lorsque cette personne est un mineur ou un majeur sous tutelle, l'opposition est exercée par les titulaires de l'autorité parentale ou le tuteur. Il peut être dérogé à l'obligation d'information lorsque celle-ci se heurte à l'impossibilité de retrouver la personne concernée, ou lorsqu'un des comités consultatifs de protection des personnes mentionnés à l'article L. 1123-1, consulté par le responsable de la recherche, n'estime pas cette information nécessaire. Toutefois, ces dérogations ne sont pas admises lorsque les éléments initialement prélevés consistent en des tissus ou cellules germinaux. Dans ce dernier cas, toute utilisation pour une fin autre que celle du prélèvement initial est interdite en cas de décès de l'intéressé. (…) »

[884] Conseil d’Etat. La révision des lois de bioéthique. Étude adoptée par l’assemblée  générale plénière  le 9 avril 2009

[885] Article 8 de la loi Informatique et libertés

« I. - Il est interdit de traiter des données à caractère personnel qui révèlent la prétendue origine raciale ou l'origine ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses ou philosophiques ou l'appartenance syndicale d'une personne physique ou de traiter des données génétiques, des données biométriques aux fins d'identifier une personne physique de manière unique, des données concernant la santé ou des données concernant la vie sexuelle ou l'orientation sexuelle d'une personne physique.

II. - Dans la mesure où la finalité du traitement l'exige pour certaines catégories de données, ne sont pas soumis à l'interdiction prévue au I :

1° Les traitements pour lesquels la personne concernée a donné son consentement exprès, sauf dans le cas où la loi prévoit que l'interdiction visée au I ne peut être levée par le consentement de la personne concernée ;

(…) »

[886] Commission nationale de l’informatique et des libertés, Les données génétiques, La documentation française 2017, p. 115 et 116

[887] Dans son étude du 6 mai 2009 préparatoire à la révision de la loi de bioéthique de 2011 et concernant le traitement automatisé des données, le Conseil d’État recommandait de ne déroger à l’exigence de consentement exprès qu’en cas de recherche ne permettant pas d’obtenir des données à caractère identifiant sur les personnes concernées.

[888] En application de l’article L. 1243-3 du code de la santé publique, « les termes " collections d'échantillons biologiques humains " désignent la réunion, à des fins scientifiques, de prélèvements biologiques effectués sur un groupe de personnes identifiées et sélectionnées en fonction des caractéristiques cliniques ou biologiques d'un ou plusieurs membres du groupe, ainsi que des dérivés de ces prélèvements. »

[889] Article L. 1243-3 du code de la santé publique :

« Tout organisme qui en a fait la déclaration préalable auprès du ministre chargé de la recherche peut, pour les besoins de ses propres programmes de recherche, assurer la conservation et la préparation à des fins scientifiques de tissus et de cellules issus du corps humain ainsi que la préparation et la conservation des organes, du sang, de ses composants et de ses produits dérivés. Ces activités incluent la constitution et l'utilisation de collections d'échantillons biologiques humains. Lorsque l'organisme est un établissement de santé, la déclaration est faite conjointement au ministre chargé de la recherche et au directeur général de l'agence régionale de santé territorialement compétent.

(…) »

[890] Ce plan ambitieux, piloté et soutenu par l'Etat, vise à positionner, dans moins de dix ans, la France dans le peloton de tête des grands pays engagés dans la médecine génomique. S’il répond à un enjeu de santé publique en termes diagnostiques, pronostiques et thérapeutiques, ce plan ambitionne également de faire émerger une filière médicale et industrielle nationale en médecine génomique et d’exporter ce savoir-faire.

[891] Article 226-25 du code pénal

« Le fait de procéder à l'examen des caractéristiques génétiques d'une personne à des fins autres que médicales ou de recherche scientifique, ou à des fins médicales ou de recherche scientifique, sans avoir recueilli préalablement son consentement dans les conditions prévues par l'article 16-10 du code civil, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »

[892] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », septembre 2018, p. 66.

[893] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, pp. 139 à 142.

[894] Rec(2006)4 du Comité des Ministres aux Etats membres sur la recherche utilisant du matériel biologique d’origine humaine (adoptée par le Comité des Ministres le 15 mars 2006, lors de la 958e réunion des Délégués des Ministres)

[895] Extraits du Chapitre VI (Utilisation de matériels biologiques dans le cadre d’un projet de recherche)

« Article 21 – Règle générale

La recherche utilisant du matériel biologique ne devrait être entreprise que si elle relève du champ du consentement donné par la personne concernée. La personne concernée peut faire des restrictions quant aux conditions de l’utilisation de son matériel biologique.

Article 22 – Matériels biologiques identifiables

1.i. Lorsque l’utilisation proposée de matériels biologiques identifiables dans un projet de recherche ne relève pas du champ du consentement éventuellement donné auparavant par la personne concernée, des efforts raisonnables devraient être faits pour joindre la personne afin d'obtenir un consentement à l'utilisation proposée.

1. ii. S’il n’est pas possible de joindre la personne concernée au moyen d'efforts raisonnables, ces matériels biologiques ne devraient être utilisés dans le projet de recherche que sous réserve d'une évaluation indépendante portant sur le respect des conditions suivantes :

a. la recherche présente un intérêt important sur le plan scientifique ;

b. les buts de la recherche ne peuvent être raisonnablement atteints en utilisant du matériel biologique pour lequel un consentement peut être obtenu ; et

c. aucune opposition expressément formulée par la personne concernée à une telle utilisation à des fins de recherche n’est connue.

2. La personne concernée peut librement refuser son consentement à l’utilisation dans un projet de recherche de son matériel biologique identifiable, ou le retirer à tout moment. Le refus de donner son consentement ou le retrait du consentement ne devrait pas avoir pour conséquence de faire subir à la personne concernée une forme quelconque de discrimination, en particulier en ce qui concerne son droit à recevoir des soins médicaux. »

[896] Suite de l’article L. 2131-1 du code de la santé publique

« II. - Toute femme enceinte reçoit, lors d'une consultation médicale, une information loyale, claire et adaptée à sa situation sur la possibilité de recourir, à sa demande, à des examens de biologie médicale et d'imagerie permettant d'évaluer le risque que l'embryon ou le fœtus présente une affection susceptible de modifier le déroulement ou le suivi de sa grossesse.

III. - Le prescripteur, médecin ou sage-femme, communique les résultats de ces examens à la femme enceinte et lui donne toute l'information nécessaire à leur compréhension.

En cas de risque avéré, la femme enceinte et, si elle le souhaite, l'autre membre du couple sont pris en charge par un médecin et, le cas échéant ou à sa demande, orientés vers un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal. Ils reçoivent, sauf opposition de leur part, des informations sur les caractéristiques de l'affection suspectée, les moyens de la détecter et les possibilités de prévention, de soin ou de prise en charge adaptée du fœtus ou de l'enfant né. Une liste des associations spécialisées et agréées dans l'accompagnement des patients atteints de l'affection suspectée et de leur famille leur est proposée.

IV. - En cas de risque avéré, de nouveaux examens de biologie médicale et d'imagerie à visée diagnostique peuvent être proposés par un médecin, le cas échéant membre d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, au cours d'une consultation adaptée à l'affection recherchée.

V. - Préalablement à certains examens mentionnés au II et aux examens mentionnés au IV du présent article, le consentement prévu au quatrième alinéa de l'article L. 1111-4 est recueilli par écrit auprès de la femme enceinte par le médecin ou la sage-femme qui prescrit ou, le cas échéant, qui effectue les examens. La liste de ces examens est déterminée par arrêté du ministre chargé de la santé au regard notamment de leurs risques pour la femme enceinte, l'embryon ou le fœtus et de la possibilité de détecter une affection d'une particulière gravité chez l'embryon ou le fœtus.

VI. - Préalablement au recueil du consentement mentionné au V et à la réalisation des examens mentionnés aux II et IV, la femme enceinte reçoit, sauf opposition de sa part dûment mentionnée par le médecin ou la sage-femme dans le dossier médical, une information portant notamment sur les objectifs, les modalités, les risques, les limites et le caractère non obligatoire de ces examens.

En cas d'échographie obstétricale et fœtale, il lui est précisé en particulier que l'absence d'anomalie détectée ne permet pas d'affirmer que le fœtus soit indemne de toute affection et qu'une suspicion d'anomalie peut ne pas être confirmée ultérieurement. »

[897] Source : Agence de la biomédecine, rapport médical et scientifique, activité des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal

[898] Anomalies de fermeture de la paroi abdominale

[899] Source : Agence de la biomédecine, rapport médical et scientifique, activité des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal

[900] Exemples : laparoschisis (défaut de fermeture de la paroi abdominale), transposition des gros vaisseaux, retour veineux pulmonaire anormal total (cardiopathies)

[901] Exemples : sondage urinaire pour les obstacles vésicaux, aspiration œsophagienne pour les atrésies de l’œsophage, régimes adaptés pour les anomalies innées du métabolisme

[902] Comité de bioéthique (DH-BIO), Document de base sur le diagnostic préimplantatoire et prénatal. Situation clinique. Situation juridique, Strasbourg : Conseil de l’Europe, mai 2018. URL : https://rm.coe.int/inf-2015-6-f-dpi-dpn/1680939b6c

[903] Avant la loi de bioéthique de 2011, le diagnostic prénatal était déjà défini à l’article L. 2131-1 du code de la santé publique dans des termes similaires : « Le diagnostic prénatal s'entend des pratiques médicales ayant pour but de détecter in utero chez l'embryon ou le fœtus une affection d'une particulière gravité. ».

[904] Avis n°107 Avis sur les problèmes éthiques liés aux diagnostics anténatals : le diagnostic prénatal (DPN) et le diagnostic préimplantatoire (DPI) https://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/publications/avis_107.pdf (page 26)

[905] http://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/publications/avis_129_vf.pdf (pages 71 et 72)

[906] Aujourd’hui, la médecine fœtale est définie au niveau réglementaire au V. de l’article R.2131-1 du code de la santé publique : « V. -La médecine fœtale s'entend de la prise en charge adaptée ou des traitements apportés au fœtus en cas de pathologie. »

[907] En 2016, 3 653 IRM et 418 scanners ont été effectués (Source : Agence de la biomédecine)

[908] M. Jean-Paul Bonnefont, professeur de génétique à l’Université Paris-Descartes, Institut hospitalo-universitaire Imagine (unité mixte de recherche 1163), médecin praticien hospitalier et directeur de la Fédération de génétique médicale,

[909] Diagnostic prénatal

[910] Diagnostic prénatal non invasif

[911] Source : Agence de la biomédecine, Rapport annuel d’activité, activités de diagnostic prénatal 2016

https://www.agence-biomedecine.fr/annexes/bilan2017/donnees/diag-prenat/01-diag_prenat/pdf/dpn.pdf

[912] Acide désoxyribonucléique

[913] Par exemple : retard de croissance intra-utérin sans cause, malformations mais aussi « petits » signes isolés, etc…

[914] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[915] Avis sur les problèmes éthiques liés aux diagnostics anténataux : le diagnostic prénatal (DPN) et le diagnostic préimplantatoire (DPI), 15 octobre 2009 https://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/publications/avis_107.pdf  (pages 7 et 8)

[916] Guide des bonnes pratiques de l’analyse chromosomique sur puce à ADN (ACPA) en période prénatale, Septembre 2013 http://www.eaclf.org/docs/ACPA/guide%20bonnes%20pratiques%20ACPA%20DPNv1.pdf

[917] La pratique est à différencier de celle des interruptions dites sélectives de grossesse qui sont proposées lorsqu’une anomalie répondant aux termes de la législation sur l’interruption de grossesse pour raison médicale (notamment critères de particulière gravité et d’incurabilité de la pathologie) est découverte chez un fœtus d’une grossesse multiple et que la femme enceinte demande une interruption de grossesse pour ce fœtus uniquement. Les interruptions sélectives de grossesse sont généralement réalisées plus tard dans la grossesse, après une démarche de diagnostic prénatal.

[918] Elles sont réalisées par injection directe dans le cœur du fœtus de chlorure de potassium ou de lidocaïne, par ponction trans-abdominale de la femme enceinte, sous contrôle échographique

[919] Wimalasundera RC, Seminars in Fetal & Neonatal Medicine, 2010 ; 15 : 327 -335.

En effet, à ce stade de la grossesse, le risque d’arrêt spontané de l’un des fœtus (« vanishing twin ») est dépassé ; par ailleurs, les techniques échographiques permettent de caractériser avec précision le type de placentation (le préalable incontournable de la réduction embryonnaire comme de l’interruption sélective de grossesse est de connaître avec précision le type de placentation, c’est-à-dire le nombre de placentas, qui peut être différent du nombre de fœtus, grâce à une échographie spécialisée faite uniquement au premier trimestre de la grossesse) ; si plusieurs fœtus partagent le même placenta, le geste demande la mise en œuvre de techniques spécifiques avec abord par fœtoscopie du cordon ombilical.

[920] « Les jumeaux ont un risque très élevé de prématurité et de faible poids à la naissance. […] En France, en 2003, le taux de prématurité était de de 44,3 % chez les jumeaux au lieu de 5 % chez les singletons, soit un risque près de neuf fois plus élevé. Les taux de grande prématurité (avant 32 semaines) étaient respectivement de 5,4 % et 0,7 % dans les deux groupes. (Blondel B.et coll, J Gynécol Obstet Biol Reprod, 2009 ; 38 S1 : 7-17)

[921] Pour 5,59 % des grossesses gémellaires, 16,88 % des grossesses triples et 29,15 % des grossesses quadruples l’accouchement a lieu avant 29 semaines d’aménorrhée Le décès d’un fœtus est constaté dans 2,42 % des grossesses gémellaires, 6,25 % des grossesses triples, 7,96 % des grossesses quadruples (Luke B et coll, Am. J. Obstet. Gynecol., 2008, 198 (4) : 401.e1-401.e10)

[922] Une infirmité motrice cérébrale (à 1 an) est constatée chez 2,3 ‰ des grossesses simples, 12,6 ‰ des grossesses gémellaires et 44,8 ‰ des grossesses triples (Evans MI et coll., Fetal Diagn Ther, 2014, 35 : 69-82)

[923] ACOG Committee Opinion No. 719, Obstet Gynecol, 2017, 130 : e158 – e163

[924] Wimalasundera RC, Seminars in Fetal & Neonatal Medicine, 2010 ; 15 : 327 -335

[925] Une thèse de médecine consacrée au sujet en 2016 (Lyon, L. Delecour) a comparé 31 grossesses triples réduites et 52 grossesses triples non réduites ; elle a confirmé la diminution de la grande prématurité en cas de réduction embryonnaire (3,2 % contre 30,8 %), mais une tendance (non significative) à l’augmentation de la prématurité (48,4 % contre 28,8 %).

[926] ACOG Committee Opinion No. 719, Obstet Gynecol, 2017, 130 : e158 – e163

[927] Ouverture prématurée de col de l’utérus au cours de la grossesse (risque de fausse-couche)

[928] Jena AB et coll., Obstet Gynecol,. 2011 ; 117 :892-7 ; ACOG Committee Opinion No. 719, Obstet Gynecol, 2017, 130 : e158 – e163

[929] Bryan E, BJOG, 2003 ; 110 Suppl 20 : 24-8.

[930] Dumez Y. et coll., Contrib Gynecol Obstet, 1986 ; 15 : 50

[931] Evans MI et coll., Obstet Gynecol, 1988 ; 71 : 289-296

[932] « Dispositions générales », le Titre II étant consacré aux dispositions pénales

[933] Santé sexuelle et reproductive, droits de la femme et protection de la santé de l'enfant, de l'adolescent et du jeune adulte

[934] « L'interruption volontaire d'une grossesse peut, à toute époque, être pratiquée si deux médecins membres d'une équipe pluridisciplinaire attestent, après que cette équipe a rendu son avis consultatif, soit que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, soit qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic.

Lorsque l'interruption de grossesse est envisagée au motif que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, l'équipe pluridisciplinaire chargée d'examiner la demande de la femme comprend au moins quatre personnes qui sont un médecin qualifié en gynécologie-obstétrique, membre d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, un praticien spécialiste de l'affection dont la femme est atteinte, un médecin choisi par la femme et une personne qualifiée tenue au secret professionnel qui peut être un assistant social ou un psychologue. Le médecin qualifié en gynécologie-obstétrique et le médecin qualifié dans le traitement de l'affection dont la femme est atteinte doivent exercer leur activité dans un établissement de santé.

Lorsque l'interruption de grossesse est envisagée au motif qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic, l'équipe pluridisciplinaire chargée d'examiner la demande de la femme est celle d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal. Lorsque l'équipe du centre précité se réunit, un médecin choisi par la femme peut, à la demande de celle-ci, être associé à la concertation. Hors urgence médicale, la femme se voit proposer un délai de réflexion d'au moins une semaine avant de décider d'interrompre ou de poursuivre sa grossesse.

Dans les deux cas, préalablement à la réunion de l'équipe pluridisciplinaire compétente, la femme concernée ou le couple peut, à sa demande, être entendu par tout ou partie des membres de ladite équipe. »

[935] Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, Etudes et Résultats n° 1013, juin 2017

 https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/er_1013.pdf

[936] Agence de la biomédecine, Rapport médical et scientifique, Rapport d'activité annuel des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal 2016

[937] Arrêté prévu à l’article L. 2141-1 du code de la santé publique (arrêté du 22 juin 2015 qui définit les règles de bonnes pratiques applicables à la stimulation ovarienne, y compris lorsqu’elle est mise en œuvre indépendamment d’une technique d’assistance médicale à la procréation ; cet arrêté définit les règles qui visent à réguler la stratégie thérapeutique dans ce domaine).

[938] Un seul placenta

[939] https://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/publications/avis024.pdf

[940] Chaveeva P et coll, Fetal Diagn Ther 2013;34:199–205

[941] Risques de fausses couches liées au geste : 4,5 % pour les grossesses initialement triples, 8 % pour les quadruples, 11 % pour les quintuples et 15 % pour les grossesses de 6 fœtus ou plus.

[942] Une revue des différentes études sur le sujet (Wimalasundera RC, Seminars in Fetal & Neonatal Medicine, 2010 ; 15 : 327 -335) fait apparaître l’absence de différence significative pour le risque de fausse couche (avant 24 semaines d’aménorrhée) entre les grossesses triples réduites à deux fœtus et les grossesses triples non réduites (respectivement 7 et 7,4 %).

[943] Garel M, Fertil Steril. 1997, 67: 1162-5.

[944] https://www.agence-biomedecine.fr/annexes/bilan2017/donnees/procreation/01-amp/pdf/amp.pdf

[945] Tableaux AMP 21, AMP 28 et AMP 32, Rapport Opus cité pages 30, 36, 39

[946] https://www.ieb-eib.org/fr/pdf/cedh-affaire-a-b-et-c-c-irlande.pdf

[947] In Fertil Steril, 2004 ; 81 (5, Suppl. 4) : 35-36

[948] Ley 45/2003, de 21 de noviembre, por la que se modifica la Ley 35/1988, de 22 de noviembre, sobre Técnicas de Reproducción Asistida

[949] Section 5 (2) :

« For the purposes of the law relating to abortion, anything done with intent to procure a woman’s miscarriage (or, in the case of a woman carrying more than one foetus, her miscarriage of any foetus) is unlawfully done unless authorised by section 1 of this Act and, in the case of a woman carrying more than one foetus, anything done with intent to procure her miscarriage of any foetus is authorised by that section if–

(a)the ground for termination of the pregnancy specified in subsection (1)(d) of that section applies in relation to any foetus and the thing is done for the purpose of procuring the miscarriage of that foetus, or

(b)any of the other grounds for termination of the pregnancy specified in that section applies »

[950] COMITE DE BIOETHIQUE (DH-BIO), Réponses des Etats membres au questionnaire sur l’accès à la PMA, sur le droit à la connaissance de ses origines pour les enfants nés après PMA et sur la maternité de substitution, Strasbourg : Conseil de l’Europe, 15 novembre 2018. URL : https://rm.coe.int/inf-2016-4-map-replies-f/1680939b91

[951] ACOG Committee Opinion No. 719, Obstet Gynecol, 2017 ; 130 : e158 – e163

[952] « Ethical guidelines provide that sex selection by wathever means is not permissible » « guidelines outlaw sex selection » (Davis C et coll., J Law Med, 2014 ; 22 : 155-173)

[953] « should not be withheld from the pregnant woman who requests it » et « the physician should randomly select the fetus to be reduced » ; mais il est également précisé : « the use of sex alone as a consideration in determining which fetus to reduce, poses ethical challenges that are beyond the scope of this Committee Opinion ».

[954] Question écrite n° 10647 de M. Yannick Vaugrenard (J.O. Sénat ; 27/02/2014, p 504)

[955] Arrêté du 1er mars 2011, annexe I (J.O. du 2 mars2011) (GHS 5826 et suivants)

[956] Anne-Laure Soilly. Evaluation économique de la prématurité : une première année de vie aux enjeux majeurs : le cas de la France. Economies et finances. Université de Bourgogne, 2016. Français. NNT : 2016DIJOE003

[957]  Anne-Laure Soilly. Evaluation économique de la prématurité : une première année de vie aux enjeux majeurs : le cas de la France. Economies et finances. Université de Bourgogne, 2016. Français. NNT : 2016DIJOE003‌

[958] Ancel PY et coll, BEH 16-17, 4 mai 2010, 198 - 200

[959] Quelques extraits (parlementaires s’y opposant) : « Après avoir imposé aux femmes enceintes, dont le fœtus est potentiellement porteur d’une maladie particulièrement grave, la communication d’une liste d’associations agréées, afin que ces associations exercent sur elles une pression visant à les dissuader de recourir à une interruption médicale de grossesse, on cherche, avec cet amendement, à instaurer un délai d’une semaine durant lequel on va encore exercer sur elles une pression sociale. Cela me paraît irrespectueux à l’égard des femmes concernées, qui se trouvent souvent dans un état de détresse, et pour tout dire, cela me paraît même constituer une forme de cruauté mentale. Rien ne justifie cette cruauté supplémentaire, surtout quand on sait les difficultés et les délais auxquels sont déjà confrontées les femmes souhaitant une interruption médicale de grossesse. » (Mme Aurélie Filippetti , Assemblée nationale, première lecture) ; « Il s’agit là, selon nous, d’un manque de respect vis-à-vis d’une femme bouleversée à l’annonce d’une nouvelle particulièrement grave. Pensez-vous que cette femme va prendre une décision le jour même, voire le lendemain ? Le choix qu’elle devra faire, en concertation, dans la majorité des cas, avec l’autre membre de son couple, sera réfléchi. Surtout, il sera effectué dans la douleur. Le législateur n’a pas à prévoir de tels mécanismes. Ces réflexions doivent relever de la sphère privée, car elles sont profondément intimes. Se voir offrir un délai de réflexion à un moment d’une exceptionnelle gravité nous semble totalement inapproprié. » (M. Jean-Pierre Godefroy, Sénat, première lecture) ; « Cet article est absolument scandaleux ! Il fait peser sur la femme susceptible d’avorter – et ce n’est jamais de gaieté de cœur qu’une telle décision est envisagée – une pression supplémentaire. « Encore un moment, monsieur le bourreau », puisque cette femme va tuer un être vivant ! Telle est là la signification de cet article, qui est absolument ignoble. » (M. Jean-Pierre Michel, Sénat, première lecture) ; « Il ne faut en effet pas perdre de vue que le parcours du diagnostic prénatal tel que visé à l’article 9 de ce projet de loi est composé de plusieurs étapes : les femmes, les couples découvrent tout d’abord le risque d’anomalie ou de maladie ; cette dernière se précise ensuite, et, en cas de risque avéré, de nouveaux examens de biologie médicale à visée diagnostique peuvent être proposés, pour déboucher au final sur une consultation médicale avec un membre d’un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal. Durant ces différentes étapes, les femmes enceintes ont tout loisir de s’interroger, avec leur partenaire, sur le sort qu’elles entendent réserver à leur grossesse. » (M. Guy Fischer, Sénat, première lecture) ; « À qui s’adresse donc l’injonction ? Au médecin, dont on sous-entend qu’il serait susceptible de ne pas le faire ? Vous prétendez que la femme demeure libre d’accepter ou non le délai. Il s’agit donc en fait d’une obligation cachée, la rédaction signifiant en fait que « la femme enceinte doit observer un délai de réflexion ». Soit cette formule ambiguë est parfaitement inutile – la loi a en effet pour finalité non pas de délivrer de petites indications mais d’énoncer des règles –, soit elle vise à asséner un coup de semonce aux médecins afin qu’ils imposent le délai de réflexion, ce qu’ils ne font pas forcément en pratique ; dans ce dernier cas, il faudrait plutôt écrire que « la femme doit se voir proposer » » (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, Sénat, première lecture).

[960] « Lorsque l'interruption de grossesse est envisagée au motif que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, l'équipe pluridisciplinaire chargée d'examiner la demande de la femme comprend au moins quatre personnes qui sont un médecin qualifié en gynécologie-obstétrique, membre d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, un praticien spécialiste de l'affection dont la femme est atteinte, un médecin choisi par la femme et une personne qualifiée tenue au secret professionnel qui peut être un assistant social ou un psychologue. Le médecin qualifié en gynécologie-obstétrique et le médecin qualifié dans le traitement de l'affection dont la femme est atteinte doivent exercer leur activité dans un établissement de santé. »

[961] Extraits

41. Considérant que l'article 82 modifie l'article L. 2212-5 du code de la santé publique pour supprimer le délai d'une semaine entre la demande de la femme d'interruption de sa grossesse et la confirmation écrite de cette demande ;

42. Considérant que les sénateurs requérants soutiennent que l'article 82 méconnaît le principe suivant lequel tout acte chirurgical doit être précédé d'un délai de réflexion ;

43. Considérant, d'une part, qu'en supprimant le délai d'une semaine entre la demande de la femme d'interrompre sa grossesse et la confirmation écrite de cette demande, le législateur n'a pas rompu l'équilibre que le respect de la Constitution impose entre, d'une part, la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme de dégradation et, d'autre part, la liberté de la femme qui découle de l'article 2 de la Déclaration de 1789, dès lors que l'article L. 2212-5 du code de la santé publique dans sa rédaction résultant de l'article 82 fait obstacle à ce que la demande d'interruption de grossesse et sa confirmation écrite interviennent au cours d'une seule et même consultation ;

44. Considérant, d'autre part, qu'aucune exigence de valeur constitutionnelle n'impose de façon générale le respect d'un délai de réflexion préalablement à la réalisation d'un acte médical ou chirurgical ; que, par suite, l'article 82, qui ne méconnaît aucune exigence constitutionnelle, doit être déclaré conforme à la Constitution ;

[962] Voir aussi Mehmet Şentürk et Bekir Şentürk c. Turquie, n° 13423/09, § 109, 9 avril 2013).

[963] Source : Sénat, Étude de législation comparée n° 280 - juillet 2017 - L'interruption volontaire de grossesse (http://www.senat.fr/lc/lc280/lc280_mono.html#toc48)

[964] Une loi de 1995 a supprimé l'anomalie fœtale du nombre des cas pouvant justifier une IVG. Toutefois, selon un commentateur du Code pénal allemand, « ces cas doivent être "pris en compte" au titre de l'indication médicale prévue [état de santé de la femme]. Cette inclusion dans l'indication "médicale" peut s'expliquer par le fait que ce cas survient dans une situation de conflit similaire à la détresse dans laquelle la femme enceinte voit dans le fait de porter à terme et de s'occuper d'un enfant handicapé une charge exceptionnelle équivalente à un surmenage psychique au sens de l'indication "médicale" et dont l'acceptation ne peut pas être exigée en vertu de l'ordre juridique »

[965] Si la femme changeait d’avis, ces traitements n’entraîneraient aucune conséquence délétère pour le fœtus et la poursuite de la grossesse

[966] En 2016, 1 263 femmes ont choisi de poursuivre leur grossesse avec une pathologie fœtale grave pour laquelle le centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal aurait pu délivrer, si ces femmes en avaient fait la demande, une attestation de particulière gravité ouvrant la possibilité d'une interruption médicale de grossesse. Après avoir augmentée ces dernières années (810 en 2012, 928 en 2013, 1189 en 2014, 1296 en 2015), la fréquence de cette situation est restée stable en 2016 par rapport à 2015 (Source : Agence de la biomédecine, Rapport médical et scientifique, Activité relative aux centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal 2016)

 

[967] Article L. 2212-7 du code de la santé publique

« Si la femme est mineure non émancipée, le consentement de l'un des titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant, du représentant légal est recueilli. Ce consentement est joint à la demande qu'elle présente au médecin ou à la sage-femme en dehors de la présence de toute autre personne.

Si la femme mineure non émancipée désire garder le secret, le médecin ou la sage-femme doit s'efforcer, dans l'intérêt de celle-ci, d'obtenir son consentement pour que le ou les titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant, le représentant légal soient consultés ou doit vérifier que cette démarche a été faite lors de l'entretien mentionné à l'article L. 2212-4.

Si la mineure ne veut pas effectuer cette démarche ou si le consentement n'est pas obtenu, l'interruption volontaire de grossesse ainsi que les actes médicaux et les soins qui lui sont liés peuvent être pratiqués à la demande de l'intéressée, présentée dans les conditions prévues au premier alinéa. Dans ce cas, la mineure se fait accompagner dans sa démarche par la personne majeure de son choix.

Après l'intervention, une deuxième consultation, ayant notamment pour but une nouvelle information sur la contraception, est obligatoirement proposée aux mineures. »

[968] Article L. 1111-5 du code de la santé publique

« Par dérogation à l'article 371-1 du code civil, le médecin ou la sage-femme peut se dispenser d'obtenir le consentement du ou des titulaires de l'autorité parentale sur les décisions médicales à prendre lorsque l'action de prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement ou l'intervention s'impose pour sauvegarder la santé d'une personne mineure, dans le cas où cette dernière s'oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l'autorité parentale afin de garder le secret sur son état de santé. Toutefois, le médecin ou la sage-femme doit dans un premier temps s'efforcer d'obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, le médecin ou la sage-femme peut mettre en œuvre l'action de prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement ou l'intervention. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d'une personne majeure de son choix.(…) »

[969] La technique consiste à prélever un ovaire ou un fragment d’ovaire (par coelioscopie ou au cours d’une intervention chirurgicale), puis à conserver dans l’azote liquide, sous forme de fragments, la partie de l’ovaire (cortex) qui contient la réserve de follicules.

[970] Après guérison, l’utilisation des fragments d’ovaire décongelés peut se faire par greffe de ces fragments de tissu ovarien pour obtenir une grossesse spontanée ou, après stimulation hormonale, une grossesse par fécondation in vitro (une autre technique est en cours de mise au point et laisse envisager une réalisation dans le futur : la culture de fragments de tissu ovarien en laboratoire afin d’obtenir des ovocytes pour une grossesse par fécondation in vitro). La première naissance a été obtenue en 2004 et une centaine de naissances a été rapportée à ce jour.

[971] https://www.agence-biomedecine.fr/annexes/bilan2017/donnees/procreation/01-amp/pdf/amp.pdf

[972] Selon les explications de l’Agence de la biomédecine

-          Certains patients, encore très jeunes, ne sont pas en situation de faire une demande de restauration de la fertilité

-          Les techniques de préservation et de restauration ne sont pas toutes stabilisées, d’autres enfin gardant un caractère expérimental sans application clinique possible encore à ce jour (tissus testiculaire chez le garçon prépubère)

-          Dans certains cas, la fertilité n’a pas été altérée par la pathologie et ses traitements et il n’est pas nécessaire de recourir à l’utilisation des gamètes préalablement conservés

[973] 10 en 2013, 12 en 2014, 31 en 2015 et 20 en 2016

[974] 5 en 2013, 6 en 2014, 9 en 2015 et 28 en 2016

[975] 1 en 2013, 1 en 2014, 1 en 2015 et 0 en 2016

Au total, 42 grossesses et 32 naissances (dont 4 en France) ont été décrites dans le monde ; ce chiffre augmente rapidement en raison du développement de cette technique (source : https://www.cecos.org)

[976] Jensen AK, Kristensen SG, Macklon KT, Jeppesen JV, Fedder J, Ernst E, Andersen CY. Outcomes of transplantations of cryopreserved ovarian tissue to 41 women in Denmark. Hum Reprod. 2015; 30(12):2838-45

[977] Oktay K, Karlikaya GG, Aydin BA. Ovarian cryopreservation and transplantation: basic aspects. Mol Cell Endocrinol. 2000 ;169(1-2) :105-8.

[978] Donnez J, Dolmans MM, Demylle D, Jadoul P, Pirard C, Squifflet J, Martinez-Madrid B, van Langendonckt A.

Livebirth after orthotopic transplantation of cryopreserved ovarian tissue. Lancet. 2004 ;364(9443):1405-10.

[979] « II.-La personne majeure, dont les gamètes ou les tissus germinaux sont conservés pour la préservation de la fertilité, en application de l'article L. 2141-11, est consultée chaque année par écrit sur le point de savoir si elle maintient cette modalité de conservation.

« Si elle ne souhaite plus la maintenir, elle peut alors consentir en application de l'article L. 1211-2 :

« 1° A ce que ses gamètes fassent l'objet d'un don en application du chapitre IV du titre IV du livre II de la première partie du code après vérification des conditions précisées à la présente section ; si elle fait partie d'un couple, le consentement de l'autre membre du couple est également recueilli en application de l'article L. 1244-2 ;

« 2° A ce que ses gamètes ou ses tissus germinaux fassent l'objet d'une recherche dans les conditions des articles L. 1243-3 et L. 1243-4 ;

« 3° A ce qu'il soit mis fin à la conservation de ses gamètes ou de ses tissus germinaux.

« Dans tous les cas, le consentement est exprimé par écrit au moyen du document de consultation mentionné au premier alinéa du II et fait l'objet d'une confirmation par écrit après un délai de réflexion de trois mois à compter de la date de signature du consentement initial. Le consentement est révocable jusqu'à l'utilisation des gamètes ou des tissus germinaux ou jusqu'à ce qu'il soit mis fin à leur conservation.

« III.-Il est mis fin à la conservation des gamètes ou des tissus germinaux en cas de décès de la personne. Il en est de même si, n'ayant pas répondu à la consultation selon les modalités fixées par l'arrêté prévu aux articles R. 2142-24 et R. 2142-27, elle n'est plus en âge de procréer.

Les modèles de consultation annuelle de la personne et de confirmation du consentement sont fixés par décision du directeur général de l'Agence de la biomédecine. »

[980] L’article a été créé par le décret n° 2016-273 du 4 mars 2016 relatif à l'assistance médicale à la procréation

[981] Centre d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains

[982] « III.-Dans le cas où l'un des deux membres du couple consultés à plusieurs reprises ne répond pas sur le point de savoir s'il maintient ou non son projet parental, il est mis fin à la conservation des embryons si la durée de celle-ci est au moins égale à cinq ans. Il en est de même en cas de désaccord des membres du couple sur le maintien du projet parental ou sur le devenir des embryons. »

[983] Chez le garçon avant le début de la puberté ou chez l’adolescent ou l’adulte chez qui le sperme ne peut être obtenu par masturbation une biopsie testiculaire peut être réalisée sous anesthésie afin de recueillir et conserver du tissu testiculaire dans lequel il peut être retrouvé soit des cellules germinales (avant le stade de spermatozoïde) soit des spermatozoïdes. Chez le garçon, s’il n’y a pas encore de spermatozoïdes, le tissu testiculaire conservé pourra ensuite soit permettre la réintroduction de cellules germinales dans le testicule à distance des traitements, soit permettre l’obtention de spermatozoïdes après culture et maturation in vitro. Ces dernières techniques d’utilisation ne sont pas encore au point mais la conservation permettra l’utilisation de ces cellules probablement dans quelques années. Par contre, actuellement, chez l’adolescent ou l’adulte l’isolement des spermatozoïdes à partir de tissu testiculaire permet leur utilisation lors de fécondation in vitro après décongélation. (source : https://www.cecos.org

[984] Source : rapport médical et scientifique de l’Agence de la biomédecine 

[985] « Le conseiller en génétique, sur prescription médicale et sous la responsabilité d'un médecin qualifié en génétique, participe au sein d'une équipe pluridisciplinaire :

1° A la délivrance des informations et conseils aux personnes et à leurs familles susceptibles de faire l'objet ou ayant fait l'objet d'un examen des caractéristiques génétiques à des fins médicales défini à l'article L. 1131-1, ou d'une analyse aux fins du diagnostic prénatal défini à l'article L. 2131-1 ;

2° A la prise en charge médico-sociale, psychologique et au suivi des personnes pour lesquelles cet examen ou cette analyse est préconisé ou réalisé.

La profession de conseiller en génétique est exercée dans les établissements de santé publics et privés autorisés à pratiquer des examens des caractéristiques génétiques à des fins médicales ou des activités de diagnostic prénatal, ainsi que dans les centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal. »

[986] Ils sont explicitement mentionnés dans la composition des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal qui figure à l’article R. 2131-12 du code de la santé publique.

[987] Source DREES, Open data

[988] Même source

[989] Christine Patch et Anna Middleton, « Genetic counselling in the era of genomic medicine », British Medical Bulletin, vol. 126, no 1, 01 2018, p. 2736.

[990] Heather Skirton, Christine Patch et Marie-Antoinette Voelckel, « Using a community of practice to develop standards of practice and education for genetic counsellors in Europe », Journal of community genetics, vol. 1, no 4, décembre 2010, p. 169173.

[991] Accreditation Council for Genetic Counseling (ACGC). Standards of accreditation for graduate programs in genetic counseling. 2013 ; URL : https://www.gceducation.org/wp-content/uploads/2018/12/Standards-Final-approved-Feb-2013.pdf

[992] Cristophe Cordier, Debby Lambert, Marie-Antoinette Voelckel, Ulrika Hosterey-Ugander et Heather Skirton, « A profile of the genetic counsellor and genetic nurse profession in European countries », Journal of Community Genetics, vol. 3, no 1, janvier 2012, p. 1924.

[993] Heather Skirton, Lauren Kerzin-Storrar, Chris Barnes, Georgina Hall, Mark Longmuir, Christine Patch, Gillian Scott et Jan Walford-Moore, « Building the genetic counsellor profession in the United Kingdom: two decades of growth and development », Journal of Genetic Counseling, vol. 22, no 6, décembre 2013, p. 902906.

[994] Cordier et al., « A profile of the genetic counsellor and genetic nurse profession in European countries », op. cit. (note 4).

[995] Heather Skirton, Lauren Kerzin-Storrar, Christine Patch, Chris Barnes, Penny Guilbert, Claire Dolling, Ann Kershaw, Elizabeth Baines et Dianne Stirling, « Genetic counsellors: a registration system to assure competence in practice in the United kingdom », Community Genetics, vol. 6, no 3, 2003, p. 182183.

[996] Milena Paneque, Clara Serra-Juhé, Rebecka Pestoff, Christophe Cordier, João Silva, Ramona Moldovan et Charlotta Ingvoldstad, « Complementarity between medical geneticists and genetic counsellors: its added value in genetic services in Europe », European journal of human genetics: EJHG, vol. 25, no 8, 2017, p. 918923 ; Milena Paneque, Ramona Moldovan, Christophe Cordier, Clara SerraJuhé, Irene Feroce, Inga Bjørnevoll, Debby Lambert et Heather Skirton, « Genetic Counselling Profession in Europe », in ELS, Atlanta : American Cancer Society, 2016, p. 16 ; Rebecka Pestoff, Charlotta Ingvoldstad et Heather Skirton, « Genetic counsellors in Sweden: their role and added value in the clinical setting », European journal of human genetics: EJHG, vol. 24, no 3, mars 2016, p. 350355 ; C. Cordier, N. Taris, A. De Pauw, H. Sobol, N. Philip et M.-A. Voelckel, « French professionals in genetic counselor careers », Journal of Genetic Counseling, vol. 22, no 6, décembre 2013, p. 844848.

[997] Heather Skirton, Christophe Cordier, Charlotta Ingvoldstad, Nicolas Taris et Caroline Benjamin, « The role of the genetic counsellor: a systematic review of research evidence », European journal of human genetics: EJHG, vol. 23, no 4, avril 2015, p. 452458.

[998] C. Ingvoldstad, M. Seven, N. Taris, C. Cordier, M. Paneque et H. Skirton, « Components of genetic counsellor education: A systematic review of the peer-reviewed literature », Journal of Community Genetics, vol. 7, no 2, avril 2016, p. 107118.

[999] Paneque et al., « Complementarity between medical geneticists and genetic counsellors », op. cit. (note 8).

[1000] Skirton et al., « Building the genetic counsellor profession in the United Kingdom », op. cit. (note 5).

[1001] Pestoff et al., op. cit. (note 8).

[1002] Skirton et al., « The role of the genetic counsellor », op. cit. (note 9).

[1003] Christophe Cordier, Nicolas Taris, Ramona Moldovan, Hagay Sobol et Marie-Antoinette Voelckel, « Genetic professionals’ views on genetic counsellors: a French survey », Journal of Community Genetics, vol. 7, no 1, janvier 2016, p. 5155.

[1004] Heather Skirton, Sivia Barnoy, Charlotta Ingvoldstad, Ingrid van Kessel, Christine Patch, Anita O’Connor, Clara Serra-Juhe, Barbara Stayner et Marie-Antoinette Voelckel, « A Delphi study to determine the European core curriculum for Master programmes in genetic counselling », European Journal of Human Genetics, vol. 21, no 10, octobre 2013, p. 10601066.

[1005] https://www.ebmg.eu/880.0.html

[1006] Milena Paneque, Ramona Moldovan, Christophe Cordier, Clara Serra-Juhé, Irene Feroce, Debby Lambert, Inga Bjørnevoll et Heather Skirton, « Development of a registration system for genetic counsellors and nurses in health-care services in Europe », European journal of human genetics: EJHG, vol. 24, no 3, mars 2016, p. 312314.

[1007] Skirton et al., « The role of the genetic counsellor », op. cit. (note 9).

[1008] Skirton et al., « Building the genetic counsellor profession in the United Kingdom », op. cit. (note 5).

[1009] A. R. McEwen, M. A. Young et S. A. Wake, « Genetic counseling training and certification in Australasia », Journal of Genetic Counseling, vol. 22, no 6, décembre 2013, p. 875884.

[1010] Christophe Cordier, Insertion and Integration of the profession of genetic counsellors in France., PhD Thesis, Strasbourg University, France, 2013.

[1011] Jennifer G. R. Kromberg et Amanda Krause, « Human genetics in Johannesburg, South Africa: past, present and future », South African Medical Journal = Suid-Afrikaanse Tydskrif Vir Geneeskunde, vol. 103, 12 Suppl 1, 11 octobre 2013, p. 957961.

[1012] Michal Sagi et Wendy R. Uhlmann, « Genetic counseling services and training of genetic counselors in Israel: an overview », Journal of Genetic Counseling, vol. 22, no 6, décembre 2013, p. 890896.

[1013] Patch et Middleton, op. cit. (note 1).

[1014] Source : Agence de la biomédecine, Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique, actualisation 2018

[1015] Article R4311-7 du code de la santé publique

« L'infirmier ou l'infirmière est habilité à pratiquer les actes suivants soit en application d'une prescription médicale qui, sauf urgence, est écrite, qualitative et quantitative, datée et signée, soit en application d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par un médecin : [détail des actes] »

[1016] Article R4342-1-2 du code de la santé publique

« Le protocole organisationnel permet à un orthoptiste de participer à la prise en charge de patients suivis par un médecin ophtalmologiste signataire de ce protocole.

« Il peut concerner : [détail des actes] »

[1017] Article R4351-2-1 du code de la santé publique

« Le manipulateur d'électroradiologie médicale est habilité à réaliser, sous la responsabilité du médecin mentionné à l'article R. 4351-1, en application soit d'une prescription médicale individuelle, soit d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par ce médecin, les actes et activités suivants [détail des actes] »

[1018] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 129 : « Contribution du Comité consultatif national d'éthique à la révision de la loi de bioéthique », p. 75.

[1019] Étude du Conseil d’État : « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? », 28 juin 2018, p. 152.

[1020] Article L4161-1 du code de la santé publique

Exerce illégalement la médecine :

1° Toute personne qui prend part habituellement ou par direction suivie, même en présence d'un médecin, à l'établissement d'un diagnostic ou au traitement de maladies, congénitales ou acquises, réelles ou supposées, par actes personnels, consultations verbales ou écrites ou par tous autres procédés quels qu'ils soient, ou pratique l'un des actes professionnels prévus dans une nomenclature fixée par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l'Académie nationale de médecine, sans être titulaire d'un diplôme, certificat ou autre titre mentionné à l'article L. 4131-1 et exigé pour l'exercice de la profession de médecin, ou sans être bénéficiaire des dispositions spéciales mentionnées aux articles L. 4111-2 à L. 4111-4, L. 4111-7, L. 4112-6, L. 4131-2 à L. 4131-5 ;

2° Toute personne qui se livre aux activités définies au 1° ci-dessus sans satisfaire à la condition posée au 2° de l'article L. 4111-1 compte tenu, le cas échéant, des exceptions apportées à celle-ci par le présent livre et notamment par les articles L. 4111-7 et L. 4131-4-1 ;

3° Toute personne qui, munie d'un titre régulier, sort des attributions que la loi lui confère, notamment en prêtant son concours aux personnes mentionnées aux 1° et 2°, à l'effet de les soustraire aux prescriptions du présent titre ;

4° Toute personne titulaire d'un diplôme, certificat ou tout autre titre de médecin qui exerce la médecine sans être inscrite à un tableau de l'ordre des médecins institué conformément au chapitre II du titre Ier du présent livre ou pendant la durée de la peine d'interdiction temporaire prévue à l'article L. 4124-6 à l'exception des personnes mentionnées aux articles L. 4112-6 et L. 4112-7 ;

5° Tout médecin mentionné à l'article L. 4112-7 qui exécute des actes professionnels sans remplir les conditions ou satisfaire aux obligations prévues audit article.

Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux étudiants en médecine ni aux sages-femmes ni aux pharmaciens biologistes pour l'exercice des actes de biologie médicale, ni aux pharmaciens qui effectuent des vaccinations, ni aux physiciens médicaux, ni aux infirmiers ou gardes-malades qui agissent comme aides d'un médecin ou que celui-ci place auprès de ses malades, ni aux auxiliaires médicaux exerçant en pratique avancée en application de l'article L. 4301-1, ni aux personnes qui accomplissent, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat pris après avis de l'Académie nationale de médecine, les actes professionnels dont la liste est établie par ce même décret.

[1021] Agence de la biomédecine : Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, pp. 45-46.

[1022] Source : Agence de la biomédecine

[1023] Il s’agit essentiellement des examens de biochimie - dosage des marqueurs sériques maternels de trisomie 21 fœtale- et, plus récemment, des examens portant sur l’ADN fœtal libre circulant dans le sang maternel

[1024] Source : Agence de la biomédecine

[1025] Comité consultatif national d'éthique (CCNE), avis n° 124 : Réflexion éthique sur l’évolution des tests génétiques liée au séquençage de l’ADN humain à très haut débit, 21 janvier 2016, p. 63.

[1026] En témoigne l’arrêté du 27 mai 2013 définissant les règles de bonnes pratiques applicables à l’examen des caractéristiques génétiques en application de l’article L. 1131-2 du code de la santé publique. Dans le paragraphe qu’il consacre au sujet (point 7.2.a), il énonce d’abord que la transmission du résultat au prescripteur est faite par le laboratoire qui réalise la phase analytique de l’examen puis, un peu plus loin, que cette transmission est faite par le laboratoire qui a réalisé le prélèvement (et transmis l’échantillon). Cette contradiction doit être levée.

[1027] Examens de biochimie (dosage des marqueurs sériques maternels de trisomie 21 fœtale) et, plus récemment examens portant sur l’ADN fœtal libre circulant dans le sang maternel

[1028] L’article R6213-15 du code de la santé publique précise :

« La commission mentionnée à l'article L. 6213-12 est dénommée Commission nationale de biologie médicale. Elle est placée auprès du ministre chargé de la santé.

La Commission nationale de biologie médicale est consultée sur les projets d'arrêté et de décision mentionnés aux articles L. 6211-3, L. 6211-22, L. 6211-23, L. 6213-2 et L. 6213-2-1.

Elle peut être consultée sur les projets de décret relatifs aux conditions et modalités d'exercice des biologistes médicaux et peut être saisie, pour avis, par le ministre chargé de la santé sur toutes autres questions portant sur cette matière.

Elle est également compétente pour l'examen des demandes mentionnées aux articles L. 6213-2 et L. 6213-2-1 ainsi qu'au V de l'article 9 de l'ordonnance n° 2010-49 du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale. »

[1029] Agence de la biomédecine : Rapport sur l’application de la loi de bioéthique, janvier 2018, pp. 46-47.

[1030] Par le Comité français d’accréditation (COFRAC) suivant les critères de la norme ISO 15189 (norme de qualité internationale de référence pour les laboratoires de biologie médicale)

[1031] Source : Agence de la biomédecine, Rapport médical et scientifique

[1032] Source : Institut national du cancer, les thérapies ciblées https://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/Les-therapies-ciblees

[1033] Les biomarqueurs prédictifs déterminants l'accès à une thérapie ciblée ; les biomarqueurs permettant d’orienter le processus diagnostique ; les biomarqueurs contribuant au diagnostic, en complémentarité de paramètres cliniques, morphologiques et biologiques ; les marqueurs pronostiques participants à l’orientation du traitement des patients ; les marqueurs de suivi de la maladie résiduelle.

[1034] Y compris lorsqu’il s’agit d’examens réalisés par des médecins spécialistes qualifié en anatomie et cytologie pathologiques.

[1035] Articles L. 6211-1 et suivants du code de la santé publique.

[1036] Médecine qui repose sur des traitements développés sur les bases d'une meilleure connaissance des mécanismes biologiques conduisant à l'apparition et au développement des tumeurs. Elle a pour objectif de proposer au patient un traitement adapté aux anomalies de sa tumeur.

[1037] Source : Agence biomédecine, Encadrement juridique international dans les différents domaines de la bioéthique, actualisation 2018 (page 57)

[1038] Ainsi, par exemple, dans les tumeurs de l’ovaire la recherche de mutations des gènes BRCA1 et BRCA2 peut être prescrite dans le cadre d’une thérapie ciblée. L’existence d’une mutation BRCA au niveau du génome des cellules tumorales concerne, dans la majorité des cas, les autres cellules (elle est constitutionnelle). Il s’agit alors d’une prédisposition héréditaire majeure au cancer du sein et de l’ovaire, qui concerne la personne mais également les membres de sa famille potentiellement concernés.

[1039] Rapport au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) : L’évaluation de l’application de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique, 25 octobre 2018, p. 18.

[1040] https://etatsgenerauxdelabioethique.fr/pages/contributions-des-auditions

[1041] Dans le droit en vigueur, la définition des examens des caractéristiques génétiques à des fins médicales est précisée au premier alinéa de l’article R. 1131-1 : « L'examen des caractéristiques génétiques d'une personne ou son identification par empreintes génétiques à des fins médicales consiste à analyser ses caractéristiques génétiques héritées ou acquises à un stade précoce du développement prénatal. »

[1042] Agence de la biomédecine, Rapport sur l’application de la loi de bioéthique du 11 janvier 2018

[1043] https://www.ema.europa.eu/en/human-regulatory/research-development/innovation-medicines

[1044] http://www.ansm.sante.fr/S-informer/Points-d-information-Points-d-information/La-transplantation-de-microbiote-fecal-et-son-encadrement-dans-les-essais-cliniques-Point-d-Information

[1045] Article 3.7 de la Directive 2001 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, modifiée par le Règlement (CE) n° 1394/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les médicaments de thérapie innovante et modifiant la directive 2001/83/CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004. 

[1046] Article 3 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

[1047] Par exemple : Cour de Justice des Communautés Européennes, 9 oct. 2001, affaire C-377/98, Pays-Bas c/ Parlement, Rec. CJCE I-7079, pt 70. « Il appartient à la Cour, dans son contrôle de la conformité des actes des institutions aux principes généraux du droit communautaire, de veiller au respect du droit fondamental à la dignité humaine et à l'intégrité de la personne. ».

[1048] Article 1er, alinéa 1er de la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine.

[1049] Cour de Justice des Communautés Européennes, 9 oct. 2001, affaire C-377/98, Pays-Bas c/ Parlement, Rec. Cour de Justice des Communautés Européennes I-7079, points 70 puis 78 à 80.

[1050] Article 3 alinéa 2 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Il est à noter que, l’interdiction posée par la Charte des droit fondamentaux et la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine de faire du corps humain et de ses parties une source de profit, ne vaut que pour ses parties « en tant que tels ».

[1051] Par exemple : Cour de Justice de l’Union Européenne, 3 dec.2015, affaire C-82/15, PP Nature-Balence Lizenz Gmbh, pts 21 à 24 ; Cour de Justice de l’Union Européenne, 11 juill. 2013, no C602/11, France c/ Commission ; Tribunal de Première Instance des Communautés Européennes, 26 novembre 2002, affaire. T-74/00, Rec. Cour de Justice des Communautés Européennes, II, p. 4945.

[1052] Directive 2004/23/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à l'établissement de normes de qualité et de sécurité pour le don, l'obtention, le contrôle, la transformation, la conservation, le stockage et la distribution des tissus et cellules humains.

[1053] Article 28. 2 du Règlement CE n° 1394/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les médicaments de thérapie innovante et modifiant la directive 2001/83/CE ainsi que le règlement (CE) n° 726/2004.

[1054] Article R. 2142-24 du code de la santé publique :

L'établissement de santé ou l'organisme doit respecter les règles de bonnes pratiques définies par arrêté du ministre chargé de la santé, pris sur proposition du directeur général de l'Agence de la biomédecine après avis de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Ces règles tiennent compte des recommandations de la Haute Autorité de santé conformément aux dispositions du 2° de l'article L. 161-37 du code de la sécurité sociale.

[1055] Article R. 2142-27 du code de la santé publique.

L'établissement de santé, l'organisme, le groupement de coopération sanitaire ou le laboratoire doit respecter les règles de bonnes pratiques définies par arrêté du ministre chargé de la santé, pris sur proposition du directeur général de l'Agence de la biomédecine après avis de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Ces règles tiennent compte des recommandations de la Haute Autorité de santé conformément aux dispositions du 2° de l'article L. 161-37 du code de la sécurité sociale.

[1056] En Assemblée générale, lors de l’examen du projet de loi relatif à la bioéthique (2011), il a considéré que « le renvoi à un arrêté ministériel pris sur proposition de l'Agence de la biomédecine de règles de bonnes pratiques en matière médicale opposables aux établissements et aux praticiens, par exception au principe selon lequel, en vertu de l'article 21 de la Constitution, le titulaire du pouvoir réglementaire est le Premier Ministre, doit figurer dans la loi » (Fiche de Jurisprudence Assemblée générale (Section sociale) - 14 octobre 2010 - Projet de loi relatif à la bioéthique - N° 384509 - M. Jean-Marc Sauvé, président - M. François Stasse Mme Pascale Fombeur M. Nicolas Agnoux, rapporteur.)

[1057] 1. Préparation de sperme en vue d’assistance médicale à la procréation ;

2. Fécondation in vitro sans micromanipulation ;

3. Fécondation in vitro avec micromanipulation ;

4. Congélation des gamètes

5. Congélation des tissus germinaux ;

6. Congélation des zygotes et des embryons ;

7. Maturation in vitro des ovocytes.

[1058] 1. IMSI (Technique d’amélioration du procédé de fécondation in vitro avec micromanipulation) ;

2. Éclosion assistée dans le cadre de la Fécondation in vitro avec micromanipulation

3. Culture embryonnaire prolongée en milieu défini dans le cadre de la fécondation in vitro avec ou sans micromanipulation ;

4. Sélection des spermatozoïdes vivants avant fécondation in vitro avec micromanipulation ;

5. Vitrification des gamètes (technique d’amélioration du procédé de congélation des gamètes) ;

6. Vitrification des embryons et zygotes (technique d’amélioration du procédé congélation des embryons).

7. Prélèvement du globule polaire (technique d’amélioration du procédé de fécondation in vitro avec ou sans micromanipulation) : décision de la directrice générale de l’Agence de la biomédecine du 6 novembre 2013

[1059] Article L2142-3 du code de la santé publique

Toute violation constatée dans un établissement, un organisme, un groupement de coopération sanitaire ou un laboratoire, et du fait de celui-ci, des prescriptions législatives et réglementaires applicables à l'assistance médicale à la procréation, entraîne le retrait temporaire ou définitif des autorisations prévues à l'article L. 2142-1, dans les conditions fixées à l'article L. 6122-13.

Le retrait de l'autorisation est également encouru en cas de violation des prescriptions fixées par l'autorisation ou si le volume d'activité ou la qualité des résultats sont insuffisants.

[1060] Article L2131-3 du code de la santé publique

Toute violation constatée dans un établissement ou un laboratoire, et du fait de celui-ci, des prescriptions législatives et réglementaires applicables au diagnostic prénatal entraîne le retrait temporaire ou définitif des autorisations prévues à l'article L. 2131-1.

Le retrait de l'autorisation d'un établissement ou d'un laboratoire est également encouru en cas de violation des prescriptions fixées par l'autorisation ou si le volume d'activité ou la qualité des résultats est insuffisant.

Le retrait ne peut intervenir qu'après un délai d'un mois suivant une mise en demeure adressée par l'autorité administrative à l'établissement ou au laboratoire concerné et précisant les griefs. En cas de violation grave des dispositions du présent titre, l'autorisation peut être suspendue sans délai à titre conservatoire.

[1061] Article L2162-6 du code de la santé publique

« Comme il est dit à l'article 511-25 du code pénal ci-après reproduit :

" I Le fait d'exercer les activités nécessaires à l'accueil d'un embryon humain dans les conditions fixées à l'article L. 2141-6 du code de la santé publique :

1° Sans s'être préalablement assuré qu'a été obtenue l'autorisation judiciaire prévue au deuxième alinéa dudit article ;

2° Ou sans avoir pris connaissance des résultats des tests de dépistage des maladies infectieuses exigés au sixième alinéa du même article ;

3° Ou en dehors d'un établissement autorisé conformément aux dispositions du septième alinéa du même article, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.

II Est puni des mêmes peines le fait de divulguer une information nominative permettant d'identifier à la fois le couple qui a renoncé à l'embryon et le couple qui l'a accueilli. " »

[1062] Article 511-25 du code pénal

« I. – Le fait d'exercer les activités nécessaires à l'accueil d'un embryon humain dans des conditions fixées à l'article L. 2141-6 du code de la santé publique :

1° Sans s'être préalablement assuré qu'a été obtenue l'autorisation judiciaire prévue au deuxième alinéa dudit article ;

2° Ou sans avoir pris connaissance des résultats des tests de dépistage des maladies infectieuses exigés au sixième alinéa du même article ;

3° Ou en dehors d'un établissement autorisé conformément aux dispositions du septième alinéa du même article,

est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.

II. – Est puni des mêmes peines le fait de divulguer une information nominative permettant d'identifier à la fois le couple qui a renoncé à l'embryon et le couple qui l'a accueilli. »

[1063] Décret n° 83-132 du 23 février 1983 portant création d'un Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé.

[1064] Loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal.

[1065] Article L. 1412-1 du code de la santé publique.

[1066] Loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique.

[1067] Article L. 1412-1-1 du code de la santé publique.

[1068] Article L. 1412-3-1 du code de la santé publique.

[1069] Article L. 1412-6 du code de la santé publique.

[1070] https://www.health.belgium.be/fr/comite-consultatif-de-bioethique-de-belgique

[1071] https://www.nek-cne.admin.ch/de/nek-cne-startseite/

[1072] https://cne.public.lu/fr.html

[1073] https://www.ethikrat.org/

[1074] http://www.nuffieldbioethics.org/

[1075] http://www.comitedebioetica.es/

[1076] http://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/publications/avis_105_ccne.pdf

[1077] http://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/avis_129_vf.pdf

[1078] Comité consultatif national d’éthique

[1079] Commission de réflexion sur l’éthique de la recherche en sciences et technologies du numérique d’Allistene

[1080] Proposition n° 58, p. 285

[1081] Extrait de l’avis 129 précité à la note 4, p. 153

[1082] Extrait de l’avis 105 précité à la note 3, p. 2

[1083] Il relevait jusqu’alors de l’article R. 1412-3 du code de la santé publique : « Le comité est renouvelé par moitié tous les deux ans. (…) »

[1084]Article 226-28-1 du code pénal

Le fait, pour une personne, de solliciter l'examen de ses caractéristiques génétiques ou de celles d'un tiers ou l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques en dehors des conditions prévues par la loi est puni de 3 750 € d'amende.

 

[1085] Préparation de thérapie génique, tout médicament autre que les spécialités pharmaceutiques et les médicaments fabriqués industriellement mentionnés à l'article L. 5121-8, servant à transférer du matériel génétique et ne consistant pas en des cellules d'origine humaine ou animale. Ces préparations sont préparées à l'avance et dispensées sur prescription médicale à un ou plusieurs patients. Elles font l'objet d'une autorisation de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé pour une indication thérapeutique donnée. Cette autorisation peut être assortie de conditions particulières ou de restrictions d'utilisation. Elle peut être modifiée, suspendue ou retirée;

[1086] Préparation de thérapie cellulaire xénogénique, tout médicament autre que les spécialités pharmaceutiques et les médicaments fabriqués industriellement mentionnés à l'article L. 5121-8, consistant en des cellules d'origine animale et leurs dérivés utilisés à des fins thérapeutiques, y compris les cellules servant à transférer du matériel génétique, quel que soit leur niveau de transformation. Ces préparations sont préparées à l'avance et dispensées sur prescription médicale à un ou plusieurs patients. Elles font l'objet d'une autorisation de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé pour une indication thérapeutique donnée. Cette autorisation peut être assortie de conditions particulières ou de restrictions d'utilisation. Elle peut être modifiée, suspendue ou retirée..

[1087] Article 21 de la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal

[1088] Article 40 de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique.

[1089] Article 47 de la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique.

[1090] Avis 129 du CCNE