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N° 273

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2017

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2018
(n° 235),

 

TOME I

 

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Par M. Joël GIRAUD

Rapporteur général,

Député

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SOMMAIRE

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 Pages

introduction

FICHE N° 1 : Le contexte macroéconomique

I. Une reprise Économique confirmÉe

A. le redÉmarrage de la croissance

1. Une croissance qui accélère progressivement depuis 2012

2. Un contexte de long terme marqué par un ralentissement de la croissance

B. la fin de la menace dÉFLATIONniste

1. Une inflation qui se redresse

2. Un contexte de long terme marqué par un ralentissement de l’inflation

C. L’amÉlioration du taux de marge des entreprises

D. La progression de l’emploi et de la masse salariale

E. Une contribution nÉgative du commerce extÉrieur à la croissance

II. Les hypothÈses du Gouvernement

III. L’avis du Haut Conseil des finances publiques

FICHE N° 2 : Le dÉficit public (toutes administrations publiques confondues)

I. Le dÉficit public

A. L’Évolution du dÉficit public dans la pÉriode rÉcente

1. Les comptes publics sont en déficit depuis 1975

2. Le déficit public diminue lentement depuis le record atteint en 2009

3. La décomposition du déficit public par catégorie d’administration

a. L’État porte l’essentiel du déficit public

b. L’amélioration des finances des collectivités territoriales

c. L’amélioration des comptes de la sécurité sociale

B. La cible de dÉficit public pour 2018

II. Le dÉficit structuRel

A. Notion de dÉficit structurel

B. Les nouvelles hypothÈses de calcul du Gouvernement

C. Le dÉficit structurel pour 2017 et 2018

D. L’avis du Haut Conseil des finances publiques (HCFP)

FICHE N° 3 : Les prélèvements obligatoires

I. les prélèvements obligatoires jusqu’en 2016

A. L’Évolution

B. La structure

II. les prélèvements obligatoires en 2017 : une hausse de 0,3 point par rapport à 2016

A. Une baisse de 0,1 point au titre des mesures législatives

B. Une hausse due à l’évolution spontanée pour 0,4 point

III. Les prélèvements obligatoires en 2018

A. Une baisse de 0,4 point de PIB

1. Environ 4,5 milliards d’euros de baisse liée aux mesures antérieures

2. Environ 2 milliards d’euros de baisse liée aux mesures nouvelles

B. Une évolution de la structure des prélèvements obligatoires

FICHE N° 4 : LA DÉPENSE PUBLIQUE

I. une baisse historique de la part de dÉpense publique dans le produit intÉrieur brut

A. une baisse historique de la part de dÉpense publique dans la richesse nationale

B. Une maÎtrise prononcÉe de la dÉpense publique en 2018

II. une maÎtrise de la dÉpense publique applicable À tous les secteurs d’administration publique

A. une maÎtrise de la dÉpense des administrations publiques centrales

B. un inflÉchissement de la dÉpense des administrations de sÉCURITÉ sociale

C. une diminution en volume de la dÉpense des administrations publiques locales

FICHE N° 5 :  La dette publique

I. la stabilisation de la dette publique en 2017 et 2018

A. le prÉsent projet de loi prÉvoit une stabilisation du ratio de dette publique

1. Un ralentissement de la progression de la dette publique au cours des dernières années

2. La stabilisation du ratio d’endettement public en 2017 et 2018

B. le projet de loi de programmation des finances publiques prÉvoit un recul de la dette à compter de 2020

1. Un report du recul de la dette publique

2. Un recul de la dette publique concentré sur les administrations publiques locales et de sécurité sociale

3. L’application du critère de dette prévu par les textes européens

II. la poursuite de l’endettement de l’État, avec le maintien d’une charge de la dette À un faible niveau

A. la dette de l’État poursuit sa progression

1. Un ralentissement de la progression de l’encours de dette négociable de l’État

2. Le niveau et le mécanisme des primes à l’émission

B. la charge de la dette de l’État est maintenue À un niveau exceptionnellement faible

1. Un contexte favorable à une baisse de la charge de la dette

2. La perspective d’une remontée de la charge de la dette

FICHE N° 6 :  Le projet de loi de finances pour 2018  dans Le contexte europÉEN

I. Les normes de finances publiques

A. La norme relative au dÉficit excessif

B. La norme relative à l’Équilibre des comptes publics

C. La norme relative à l’ajustement structurel minimal

II. Le cycle annuel budgÉtaire

A. Le cadre juridique de la surveillance des finances publiques

1. Le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance

a. L’obligation d’élaborer un programme de stabilité ou de convergence

b. L’évaluation et le suivi des programmes de stabilité ou de convergence

2. Le volet correctif du pacte de stabilité et de croissance

B. Le semestre europÉEN

1. Contenu du semestre européen

2. Calendrier du semestre européen

a. Novembre de l’année N-1

b. Février de l’année N

c. Conseils européens de printemps

d. Avril de l’année N

e. Mai de l’année N

f. Juin et juillet de l’année N

C. Le semestre national

III. La nouvelle trajectoire des finances publiques

A. L’objectif de clÔture de la procÉdure de dÉficit excessif

B. L’ajustement structurel en DEÇÀ des rÈgles du volet prÉventif

FICHE N° 7 :  Le dÉficit de l’État

I. Le dÉficit budgÉtaire de l’État

A. Formation du solde budgÉtaire de l’État

B. Les principales Évolutions par rapport À 2017

II. Le dÉficit en comptabilitÉ nationale

A. Le passage du solde en comptabilitÉ budgÉtaire au solde en comptabilitÉ nationale

B. la part de l’État dans le dÉficit public

FICHE N° 8 :  Le volet fiscal du plf 2018

I. Les mesures fiscales en faveur des mÉnages

A. l’imposition des revenus

1. Ajustements de l’impôt sur le revenu (IR)

a. Indexation du barème de l’IR

b. Déductibilité de l’IR de la hausse de la CSG

c. Prorogation et aménagement du dispositif « Pinel »

d. Prorogation et aménagement du CITE

2. Suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité

3. Création d’un prélèvement forfaitaire unique

B. L’imposition du patrimoine

C. L’imposition locale

II. Les mesures fiscales concernant les entreprises

1. Les mesures sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), l’impôt sur les sociétés (IS) et la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE)

a. Suppression de la contribution de 3 % sur les revenus distribués

b. Baisse du taux de l’IS à 25 % en 2022

c. Suppression de l’encadrement de la déductibilité des charges financières afférentes à certains titres de participations

d. Aménagement de la TVA sur les services de presse en ligne

e. Exonération de TVA pour les psychothérapeutes et les psychologues

f. Exonération de TVA et d’IS en faveur des associations de service à la personne bénéficiant d’une autorisation

g. Aménagement du calcul et de la répartition de la CVAE

2. Les mesures d’attractivité de la place financière de Paris

3. Les mesures pour les petites entreprises

4. Les mesures qui anticipent l’allégement de cotisations patronales prévu pour 2019

III. les mesures fiscales Écologiques

FICHE N° 9 :  Les recettes de l’État

I. Les recettes fiscales

A. Passage des recettes fiscales brutes aux recettes fiscales nettes

B. PrÉsentation gÉNÉrale

1. Évolution générale de 2016 à 2017

2. Évolution générale de 2017 à 2018

a. La prévision d’évolution spontanée repose sur une élasticité des impôts à la croissance de 1,2 pour 2018

b. Les mesures fiscales entraîneront une baisse des recettes de 13 milliards d’euros

i. Les mesures nouvelles

3. Les mesures antérieures

4. Les mesures de périmètre

C. PrÉsentation par impÔt

1. La taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

a. En 2017

b. En 2018

2. L’impôt sur le revenu

a. En 2017

b. En 2018

3. L’impôt sur les sociétés

a. En 2017

b. En 2018

4. La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

a. En 2017

b. En 2018

5. Les droits de succession et de donation

II. Les recettes non fiscales du budget gÉnÉral

III. Les prÉLÈvements sur recettes

A. Le prÉLÈvement sur recettes en faveur de l’Union europÉenne

B. Le prÉLÈvement sur recettes en faveur des collectivitÉs territoriales

IV. prÈs de 100 milliards d’euros de dÉpenses fiscales pour 2018

FICHE N° 10 :  les dÉpenses de l’État

I. une Évolution maÎtrisÉe des dÉpenses de l’État

A. les nouvelles normes de dÉpenses de l’État illustrent les efforts entrepris

1. L’instauration de deux nouvelles normes de dépenses applicables à l’État

2. Les normes de dépenses de l’État font apparaître une faible augmentation des dépenses en 2018

B. la mise en place d’une maÎtrise de la masse salariale de l’État

1. Le retour à une orientation à la baisse des effectifs de l’État

2. Le rétablissement d’un jour de carence, par le présent projet de loi  de finances

3. La non-revalorisation du point d’indice de la fonction publique

II. Un budget de l’État traduisant les choix budgÉtaires  du gouvernement

A. un effort de sincÉritÉ budgÉtaire

1. Remédier aux biais de construction du budget, telles que les sous-budgétisations récurrentes

2. Abaisser le taux de mise en réserve des crédits de 8 % à 3 %

3. Instaurer une règle de stabilité des restes à payer sur le budget de l’État

B. une augmentation gÉnÉrale des plafonds de crÉdits de paiement du budget gÉnÉral

C. les principales augmentations de crÉdits des missions du budget gÉnÉral

1. Le renforcement des moyens du pôle régalien (+ 2,23 milliards d’euros)

2. La préparation de l’avenir (+ 3,07 milliards d’euros)

3. Un effort budgétaire en faveur de dispositifs de solidarité (+ 1,53 milliard d’euros)

D. les baisses significatives de crÉdits concentrÉes sur deux missions

1. La réforme de la politique du logement (– 1,73 milliard d’euros)

2. La refonte de la politique de l’emploi (– 1,5 milliard d’euros)

E. les mesures de pÉrimÈtre

AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES, SUR LES AVIS DU HAUT CONSEIL RELATIFS AU PROJET DE LOI DE PROGRAMMATION DS FINANCES PUBLIQUES ET AUX PROJETS DE LOI DE FINANCES ET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

AUDITION DE M. BRUNO LE MAIRE, MINISTRE DE L’ÉCONOMIE ET DES FINANCES, ET DE M. GERALD DARMANIN, MINISTRE DE L’ACTION ET DES COMPTES PUBLICS, SUR LE PROJET DE LOI DE PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES ET LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2018.

 


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   introduction

 

Le projet de loi de finances pour 2018, accompagné du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, examiné en même temps, constitue la traduction des engagements pris par le Président de la République durant la campagne électorale. Il vise, en premier lieu, à garantir le respect de nos engagements européens et, en particulier, de la règle des 3 % de déficit public. Cela représente un gage de sérieux budgétaire et de crédibilité auprès de nos partenaires européens.

Ainsi, le déficit public devrait s’établir à 2,9 % du produit intérieur brut (PIB) en 2017 et à 2,6 % en 2018, soit un niveau plus atteint depuis onze années. Cela permettrait à la France de sortir de la procédure de déficit excessif dont elle fait l’objet depuis 2009.

Ce sérieux budgétaire se fonde sur des hypothèses macroéconomiques prudentes, en ligne avec les prévisions des principales organisations internationales. Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a souligné le caractère prudent pour 2017 et raisonnable pour 2018 du scénario macroéconomique retenu par le présent projet de loi. Cela illustre une volonté de sincérité pour ce premier projet de budget de la législature et de la mandature, en rupture avec certains biais de construction dénoncés en juin dernier par le Cour des comptes.

Le retour à une forme de normalité budgétaire se réalise dans un contexte de croissance économique plus affirmée, avec une accélération du taux de croissance passant de 1,1 % en 2016 à 1,7 % en 2017 et en 2018.

Le présent projet de loi de finances marque, en second lieu, la volonté de profiter de cet environnement macroéconomique favorable pour diminuer les prélèvements obligatoires, afin de favoriser l’investissement des entreprises, les embauches et le pouvoir d’achat des ménages.

Ainsi, la taxe d’habitation est réduite de 30 % pour 80 % des ménages en 2018. La prime d’activité, l’allocation aux adultes handicapés sont revalorisées de façon substantielle au cours du quinquennat et à partir de 2018, toujours dans un objectif de gain de pouvoir d’achat. Ces mesures sont complétées par la revalorisation de l’allocation de solidarité aux personnes âgées et la suppression des cotisations maladie et chômage des salariés en contrepartie d’une hausse de la contribution sociale généralisée (CSG), autant de dispositions prévues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) est transformé en allégement de cotisations sociales pérenne à compter du 1er janvier 2019. La trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés (IS) est prolongée de 28 % à 25 % en 2022, au lieu d’un taux de 33,1/3 % actuellement et la contribution de 3 % sur les revenus distribués est supprimée. L’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) est remplacé par un impôt sur la fortune immobilière (IFI) et un prélèvement forfaitaire unique de 30 % est mis en place sur les revenus du capital, afin d’orienter l’épargne vers l’activité et l’investissement productif. Au total, les principales mesures relatives aux prélèvements obligatoires au sein du présent projet de loi représentent une diminution de 10,3 milliards d’euros.

La concomitance de la baisse du déficit public et des prélèvements obligatoires est rendue possible par un effort prononcé de maîtrise des dépenses publiques. Celles-ci devraient progresser très faiblement en 2018, conformément aux engagements exprimés par le Premier ministre lors de son discours de politique générale prononcé le 4 juillet dernier devant l’Assemblée nationale. Le Gouvernement souhaite réaliser une diminution inédite de plus de trois points de la part de dépenses publiques dans la richesse nationale sur la durée du quinquennat.

Cet objectif nécessite une véritable stratégie de transformation des politiques publiques. Le présent projet de loi de finances prévoit ainsi une réorientation de la politique de l’emploi, avec une réduction significative du nombre de contrats aidés, en lien avec l’accélération de l’activité et le dynamisme des créations d’emplois. Il vise également à engager une réforme globale des aides personnelles au logement, en préservant le pouvoir d’achat des allocataires et en améliorant leur accès au logement.

Le processus « Action publique 2022 », lancé par le Gouvernement, poursuit cet objectif de réforme profonde de l’État et des administrations publiques. Ce processus devrait donner lieu à l’identification de réformes structurelles et d’économies significatives et pérennes avant la fin du premier trimestre 2018. Le Grand plan d’investissement, présenté le 25 septembre dernier, devrait contribuer à la conversion de l’État à l’ère numérique. En outre, il représentera un effort de 57 milliards d’euros sur le quinquennat en faveur de la transition énergétique, de la société de compétence et d’ancrage de la compétitivité sur l’innovation.

Enfin, la maîtrise historique des dépenses publiques sur la durée du quinquennat devrait permettre de réduire le déficit public de plus de deux points de PIB. Cela aura pour effet un recul de la dette publique de cinq points de PIB sur la même période, limitant ainsi le risque d’une remontée de taux sur la charge de la dette.

 


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   FICHE N° 1 :
Le contexte macroéconomique

Les perspectives en matière de finances publiques sont dépendantes du contexte macroéconomique. Les objectifs fixés en termes de solde, recettes et dépenses publics doivent reposer sur un scénario macroéconomique crédible.

Les principaux indicateurs nécessaires à l’élaboration du budget

Le scénario macroéconomique qui préside à l’élaboration d’un projet de loi finances fait intervenir de nombreuses hypothèses macroéconomiques dont quatre sont particulièrement importantes.

Taux de croissance

La prévision de taux de croissance en volume (abstraction faite de la variation des prix) du produit intérieur brut (PIB) est l’une des plus importantes pour l’élaboration du budget de l’État. Le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), chargé d’apprécier le réalisme des prévisions macroéconomiques, consacre généralement, dans ses avis, la majeure partie de ses développements à l’appréciation de l’hypothèse de taux de croissance.

L’hypothèse de croissance permet de bâtir une prévision au titre des recettes fiscales. Le taux de croissance de l’année précédant celle du budget est aussi très important car l’exigibilité de certains impôts présente un décalage d’une année avec leur assiette.

Le taux de croissance en valeur du PIB, qui tient compte de la variation des prix, est également très important. C’est en effet le PIB en valeur qui figure au dénominateur pour le calcul du déficit public.

Inflation

La prévision d’inflation est prise en compte dans la prévision des recettes (impact immédiat sur les bases taxables de la taxe sur la valeur ajoutée, par exemple) et des dépenses (par exemple s’agissant des prestations indexées). L’inflation a également pour effet de réduire le rendement mesuré de certaines mesures d’économies tendancielles (telles que les mesures de « gel » des crédits budgétaires en exécution).

Les taux d’intérêt

La prévision de taux d’intérêt permet d’anticiper la charge de la dette de l’État.

Masse salariale privée

Une grande partie de l’évolution des prélèvements obligatoires (cotisations sociales, fraction principale de la contribution sociale généralisée – CSG –, et impôt sur le revenu) est liée à l’évolution de la masse salariale dans le secteur privé. Cet indicateur est dès lors essentiel pour la prévision de déficit public toutes administrations publiques confondues.

Le cadrage macroéconomique du présent projet de loi de finances est marqué par un contexte de reprise économique (I).

Le Gouvernement anticipe ainsi une croissance en volume du produit intérieur PIB de 1,7 % en 2017 et 2018, une reprise de l’inflation et une remontée progressive des taux d’intérêt (II).

Le HCFP a rendu un avis marqué par plusieurs appréciations positives sur ce scénario macroéconomique (III).

I.   Une reprise Économique confirmÉe

La présentation du présent projet de loi de finances s’inscrit dans un contexte de redémarrage de la croissance (A) et de disparition de la menace déflationniste (B). L’amélioration récente du taux de marge des entreprises a favorisé cette reprise économique (C). Elle s’est traduite par une progression de l’emploi et de la masse salariale (D). Les échanges extérieurs et la dégradation de la balance commerciale demeurent les principaux sujets de préoccupation sur la situation économique du pays (E).

A.   le redÉmarrage de la croissance

À court terme, la croissance accélère progressivement depuis 2012 (1). Cette bonne nouvelle doit être relativisée par le fait qu’à long terme la croissance économique ralentit (2).

1.   Une croissance qui accélère progressivement depuis 2012

La croissance du PIB a marqué un coup d’arrêt brutal en 2008 avec la crise financière. Le pays a connu une année de récession particulièrement forte en 2009. Après une phase de rattrapage en 2010 et 2011, la croissance a de nouveau marqué un coup d’arrêt en 2012.

À partir de 2012, la croissance du PIB s’est redressée progressivement jusqu’à dépasser 1 % à partir de 2015. L’année 2017 est ainsi la troisième année consécutive de croissance supérieure à 1 % du PIB, ce qui n’avait pas été le cas au cours des trois années précédentes.

Il est prévu que la croissance accélère en 2017. Dans son dernier point de conjoncture, l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) mentionne que « l’activité continuerait de progresser vigoureusement (+0,5 % par trimestre) et ce, dans tous les secteurs d’activité ». L’INSEE prévoit désormais une croissance du PIB en volume de 1,8 % pour 2017 ([1]).

Croissance en volume du produit intÉrieur brut depuis 2008

(en % d’évolution annuelle)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Croissance

0,2

– 2,9

2,0

2,1

0,2

0,6

0,9

1,1

1,2

1,8*

* prévision.

Source : Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE).

2.   Un contexte de long terme marqué par un ralentissement de la croissance

Sur longue période, on observe cependant un tassement de la croissance. Alors que celle-ci a été en moyenne de 2,4 % durant la décennie des années 1980, la croissance annuelle a baissé à 2 % durant les années 1990 puis 1,4 % durant les années 2000. Depuis 2010, elle n’est en moyenne que de 1,2 %.

Depuis 1974, la croissance annuelle n’a été inférieure à 1 % qu’à huit reprises. Mais sur ces huit années, cinq concernent la dernière décennie.

La croissance en france depuis 1974

(en % du PIB en volume)

(en grisé, les années où la croissance a été inférieure à 1 %)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Croissance

4,3

– 1,0

4,3

3,5

4,0

3,6

1,6

1,1

2,5

1,3

1,5

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Croissance

1,6

2,4

2,6

4,7

4,4

2,9

1,0

1,6

– 0,6

2,3

2,1

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Croissance

1,4

2,3

3,6

3,4

3,9

2,0

1,1

0,8

2,8

1,6

2,4

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Croissance

2,4

0,2

– 2,9

2,0

2,1

0,2

0,6

0,9

1,1

1,2

1,8*

* prévision

Source : INSEE.

Devant notre commission ([2]), Mme Odile Renaud-Basso, directrice générale du Trésor, a souligné l’existence d’une « tendance à la diminution de la croissance potentielle dans l’ensemble des pays développés ». Elle a expliqué cette situation « par plusieurs facteurs : non seulement l’héritage de la crise, avec des sujets dans un certain nombre de pays sur le fonctionnement du secteur bancaire et l’apurement de la situation de certains acteurs économiques, mais aussi, probablement, des facteurs plus structurants en lien avec le niveau de l’innovation et l’évolution de la productivité ». Selon cette dernière, « le ralentissement de la croissance potentielle, lié à celui de la productivité, pourrait s’expliquer par l’absence de révolutions industrielles  ou concernant les organisations de production  aussi importantes que dans le passé ».

B.   la fin de la menace dÉFLATIONniste

1.   Une inflation qui se redresse

Entre 2002 et 2012, à l’exception de l’année 2009, l’inflation se situait dans une fourchette de 1,5 % à 2,8 %. Elle ralentit fortement depuis 2012 jusqu’à devenir nulle en 2015. Elle est légèrement positive en 2016 avec une augmentation des prix de 0,2 %. Elle se redresserait en 2017 : « D’ici la fin de l’année, l’inflation resterait stable autour de + 1,0 %. » ([3])

Inflation en France

Année

Inflation

Année

Inflation

2002

1,9 %

2010

1,5 %

2003

2,1 %

2011

2,1 %

2004

2,1 %

2012

2,0 %

2005

1,7 %

2013

0,9 %

2006

1,7 %

2014

0,5 %

2007

1,5 %

2015

0,0 %

2008

2,8 %

2016

0,2 %

2009

0,1 %

2017

1,0 %*

* prévision.

Source : INSEE.

Sur le plan macroéconomique, le ralentissement, voire la disparition, de l’inflation pouvait faire naître des inquiétudes sur une possible déflation. Cette menace semble s’éloigner en grande partie grâce à la politique accommodante de la Banque centrale européenne.

L’assouplissement quantitatif (« quantitative easing »)
de la Banque centrale européenne

Le conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) a annoncé le 22 janvier 2015 un programme étendu d’achats d’actifs. La BCE achète contre de la monnaie de banque centrale, sur le marché secondaire, des obligations émises par les administrations centrales, les agences et les institutions européennes de la zone euro. Cette création monétaire vise à faire face aux risques d’une période trop prolongée de faible inflation.

Initialement prévu pour des achats d’actif de 60 milliards d’euros par mois, ce programme a été amplifié le 10 mars 2016 pour être porté à 80 milliards d’euros par mois jusqu’en mars 2017. Par ailleurs, il a été élargi à d’autres types d’actifs, dont des obligations d’entreprises de bonne qualité.

Les achats d’actifs devraient se poursuivre au moins jusqu’en décembre 2017, à un rythme désormais ramené comme précédemment à 60 milliards d’euros par mois.

Ce programme de rachat d’actifs porte sur un total de 2 300 milliards d’euros.

 

Devant notre commission ([4]), M. François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, a estimé que « nous avons vaincu ce risque de déflation dont il était beaucoup question à la fin de l’année 2015 et au début de l’année 2016 ».

L’INSEE a ainsi mesuré que, sur un an, les prix à la consommation ont augmenté de 0,9 % en août 2017 ([5]).

2.   Un contexte de long terme marqué par un ralentissement de l’inflation

Sur longue période, comme pour la croissance, on observe un tassement de l’inflation.

Alors que celle-ci a été en moyenne de 7,4 % durant la décennie des années 1980, l’inflation annuelle a baissé à 1,9 % durant les années 1990 puis 1,7 % durant les années 2000. Depuis 2010, elle n’est en moyenne que de 0,9 %.

L’INSEE a également relevé que « de 2002 à 2016, les prix à la consommation ont augmenté de 1,4 % en moyenne par an », soit une inflation « inférieure à celle des quinze années précédentes (+ 2,1 % en moyenne entre 1986 et 2001) » ([6]).

L’inflation en france depuis 1974

(en % d’évolution annuelle)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Inflation

13,7

11,8

9,6

9,4

9,1

10,8

13,6

13,4

11,8

9,6

7,4

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Inflation

5,8

2,7

3,1

2,7

3,6

3,4

3,3

2,3

2,1

1,7

1,9

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Inflation

2,0

1,2

0,6

0,5

1,7

1,6

2,0

2,1

2,1

1,9

1,6

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Inflation

1,5

2,8

0,1

1,5

2,1

2,0

0,9

0,5

0,0

0,2

1,0*

prévision

Source : INSEE.

C.   L’amÉlioration du taux de marge des entreprises

La confirmation de l’amélioration du taux de marge ([7]) des sociétés non financières (SNF) est un autre facteur favorable à prendre en compte. Le taux de marge s’est vivement redressé depuis le point bas atteint en 2013 (29,9 %), pour atteindre 31,8 % au quatrième trimestre 2016 selon l’INSEE ([8]). Cela résulte en grande partie des mesures de baisse du coût du travail, à travers la montée en charge du CICE et l’entrée en vigueur du premier volet des allégements de cotisations du pacte de responsabilité et de solidarité.

Le taux de marge des entreprises était de 32,7 % en moyenne avant la crise financière de 2008. Il a baissé de 2 points en moyenne après la crise financière et avant la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité. Durant les premières années de mise en œuvre du pacte, de 2014 à 2016, le taux de marge des entreprises s’est redressé de près de 2 points. Il demeure cependant inférieur à celui constaté avant la crise financière de 2008.

Taux de marge des entreprises par annÉe depuis 2002

(% de la valeur ajoutée)

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

32,5

32,4

32,5

32,4

32,7

33,5

33,1

30,9

31,6

31,2

30,2

29,9

30,4

31,4

31,8

Moyenne de 32,7 % avant la crise financière de 2008

Moyenne de 30,7 % soit 2 points de moins que sur la période précédente

+ 1,9 point depuis 2013

Source : INSEE.

D.   La progression de l’emploi et de la masse salariale

En 2016, l’économie française emploie en équivalents temps plein (EQTP) 26 millions de personnes, soit une hausse de 136 000 emplois EQTP après une hausse de 35 000 en 2015. Cette hausse provient quasi exclusivement des entreprises privées.

Emplois en France en 2016

Catégorie d’employeurs

Nombre d’emplois EQTP

Évolution annuelle

Entreprises privées

18,4 millions

+ 139 000

Administrations publiques

5,8 millions

– 5 000

Ménages et institutions sans but lucratif au service des ménages

1,8 million

+ 2 000

Total

26 millions

+ 136 000

Source : Rapport sur les comptes de la Nation de l’année 2016, annexe au Rapport économique, social et financier.

Le taux de chômage ressort en 2016 à 10,1 % de la population active. Il diminue de 0,3 point, pour la première fois depuis 2011, même s’il demeure nettement supérieur à celui constaté avant le déclenchement de la crise financière de 2008 (7,4 %).

Selon l’INSEE, « la hausse attendue de l’emploi serait légèrement supérieure à la hausse de la population active, si bien que le taux de chômage baisserait à nouveau à 9,4 % en fin d’année » 2017 ([9]).

Taux de chÔmage depuis 2011

(en % de la population active)

Année

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Taux de chômage

9,2

9,8

10,3

10,3

10,4

10,1

9,4*

* prévision.

Source : INSEE, enquêtes Emploi.

La masse salariée privée progresse dès lors de façon dynamique. En moyenne annuelle, la hausse de la masse salariale privée s’établit à 2,4 % en 2016, après 1,7 % en 2015 ([10]).

Cette progression se constate aussi sur les premiers de l’année 2017. La masse salariale est en hausse de 0,8 % au deuxième trimestre 2017, après une hausse de 1,3 % au trimestre précédent. Sur un an, elle progresse de 3,5 % ([11]).

E.   Une contribution nÉgative du commerce extÉrieur à la croissance

Le contexte de reprise économique est affecté par une contribution négative persistante du commerce extérieur à la croissance.

En 2016, le solde du commerce extérieur, c’est-à-dire la différence entre la valeur des exportations et des importations, a été déficitaire à hauteur de 48,4 milliards d’euros. Il a contribué négativement à la croissance pour 0,8 point de PIB.

Pour rappel, en 2015 et 2014, la contribution du commerce extérieur à la croissance avait également été négative (– 0,3 point de PIB en 2015 et – 0,5 point de PIB en 2014). Sur trois ans, le commerce extérieur a donc coûté 1,6 point de PIB à l’économie française.

Ce chiffre explique l’essentiel de l’écart de croissance constaté avec la zone euro, ce qui suscite une interrogation sur les capacités de l’appareil productif français à répondre à l’augmentation de la demande entraînée par la reprise économique.

Année

2014

2015

2016

Croissance zone euro

1,2

2,0

1,8

Croissance en France

0,9

1,1

1,2

Différence

0,3

0,9

0,6

1,8

Source : Commission européenne, prévisions économiques du 11 mai 2017 ; INSEE.

Selon une étude récente, une augmentation d’un euro de la demande conduirait ainsi à une augmentation du PIB de seulement 30 centimes d’euros en France, contre 46 centimes d’euros en Allemagne et 69 centimes d’euros en Espagne ([12]).

Balance commerciale

(en milliards d’euros)

Année

Exportations

Importations

Solde

2010

395,0

447,5

– 52,4

2011

428,6

503,1

– 74,5

2012

442,0

509,6

– 67,6

2013

436,2

498,0

– 61,8

2014

436,4

495,0

– 58,6

2015

455,4

500,8

– 45,3

2016

452,9

501,3

– 48,4

Source : direction générale des douanes et droits indirects.

Selon l’INSEE, « le commerce extérieur continuerait de peser sur la croissance française en 2017 mais moins fortement qu’en 2016 » ([13]).

Les faiblesses du commerce extérieur constituent le principal sujet de préoccupation du contexte macroéconomique dans lequel s’inscrit le présent projet de loi de finances.

II.   Les hypothÈses du Gouvernement

Dans son cadrage macroéconomique, le Gouvernement prend acte de l’accélération de la croissance en 2017, qui devrait s’élever à 1,7 % du PIB au lieu de 1,2 % du PIB en 2016 (1,1 % si on ne tient pas compte du 29 février). Il prévoit une stabilisation de la croissance en 2018.

Cette reprise serait alimentée notamment par la demande mondiale adressée à la France qui « accélérerait fortement à + 4,0 % en 2017 (après + 2,6 % en 2016), puis sa croissance serait stable en 2018 ». Ainsi, « le commerce extérieur cesserait progressivement de peser sur la croissance du PIB (contribution comptable de 0,0 pt en 2018 après – 0,8 pt en 2016 et – 0,4 pt en 2017) » ([14]).

Le Gouvernement anticipe également une reprise de l’inflation qui s’élèverait à 1 % en 2017 puis 1,1 % en 2018 après 0,2 % en 2016.

L’inflation pour 2018 serait notamment soutenue « par les mesures fiscales nouvelles sur l’énergie et le tabac ». Mais le pouvoir d’achat ne serait pas amputé. « Après le fort rebond de 2016 (+ 1,8 % après + 0,8 % en 2015), le pouvoir d’achat conserverait son dynamisme en 2017 (+ 1,7 %), grâce en particulier à des créations d’emplois marchands élevées (…) En 2018, le pouvoir d’achat resterait dynamique mais ralentirait à + 1,4 %. »([15])

Le Gouvernement prévoit aussi une remontée des taux d’intérêt, les taux longs devant s’élever à 1,1 % en 2017 et 1,85 % en 2018 après 0,37 % en 2016.

Principales hypothÈses macroÉconomiques du Gouvernement

(en % d’évolution annuelle)

Indicateur

2017

2018

Croissance en volume du PIB

1,7

1,7

Croissance en valeur du PIB

2,5

2,9

Inflation (indice des prix à la consommation)

1,0

1,1

Déflateur du PIB

0,8

1,1

Emploi total

1,0

0,5

Masse salariale

3,3

3,1

Consommation finale des ménages

1,3

1,4

Consommation finale publique

1,2

0,0

Formation brute de capital fixe (investissements)

3,0

3,9

Importations

3,6

3,6

Exportations

2,5

3,9

Taux courts (BTF 3 mois) en %

– 0,5

– 0,1

Taux longs (OAT à 10 ans) en %

1,1

1,85

Source : Gouvernement.

Les hypothèses de croissance du Gouvernement sont en ligne avec celles des principaux prévisionnistes.

PrÉvisions de croissance en volume du PIB pour la France

(en % d’évolution annuelle)

Institutions

2017

2018

Gouvernement

(projet de loi de finances pour 2018)

1,7

1,7

INSEE

Point de conjoncture, octobre 2017 (lien).

1,8

– 

Fonds monétaire international (FMI)

(Rapport France, 21 septembre 2017) (lien)

1,6

1,8

Commission européenne

(Prévisions économiques européennes, 11 mai 2017) (lien)

1,4

1,7

Banque de France

(Prévisions macroéconomiques France, juin 2017) (lien)

1,4

1,6

Source : commission des finances.

III.   L’avis du Haut Conseil des finances publiques

Aux termes de l’article 14 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques ([16]), le HCFP doit rendre un avis sur les prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent les projets de lois de finances ([17]).

L’avis du HCFP sur le scénario macroéconomique du présent projet de loi de finances comporte plusieurs appréciations positives ([18]).

Le HCFP a qualifié de « prudente » pour 2017 et « raisonnable » pour 2018 l’hypothèse de croissance en volume du PIB.

Il s’agit du qualificatif le plus laudatif employé jusqu’à présent pour qualifier la prévision de croissance de l’année relative au projet de loi de finances.

Rappel des prÉCÉdents avis du HCFP sur la prÉvision de croissance

Projet de loi de finances (PLF)

Qualificatif de la prévision de croissance
pour l’année du PLF

PLF 2014

« plausible »

PLF 2015

« optimiste »

PLF 2016

« atteignable »

PLF 2017

« optimiste »

Source : avis du Haut Conseil des finances publiques.

Dans le même sens, le HCFP a qualifié de « prudentes » les prévisions d’emploi et de masse salariale du Gouvernement. Il a estimé que les prévisions d’inflation étaient « raisonnables ».

Ces appréciations positives sont d’autant plus rassurantes qu’elles sont rares. En effet, les avis du HCFP sont souvent affectés d’un biais pessimiste. Par exemple, dans son avis relatif au projet de loi de finances pour 2017 ([19]), il avait qualifié d’« optimiste » une prévision de croissance de 1,5 % du PIB pour 2017 alors que celle-ci est désormais estimée à 1,7 %.

Le HCFP a émis toutefois une réserve sur le scénario macroéconomique du Gouvernement à propos de la contribution du commerce extérieur à la croissance qui serait neutre en 2018 après plusieurs années de contribution négative. Pour le HCFP, cette hypothèse est « optimiste ». Il a souligné que « les performances récentes des exportateurs français témoignent (…) des difficultés persistantes de l’appareil productif à bénéficier pleinement de la progression soutenue du commerce mondial ».

 


—  1  —

   FICHE N° 2 :
Le dÉficit public
(toutes administrations publiques confondues)

Les objectifs de déficit public, de déficit structurel et d’ajustement structurel sont au cœur du débat budgétaire, notamment en raison des engagements européens de la France.

 

Les engagements européens de la France en matière de réduction du déficit

Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) qualifie le déficit public d’« excessif » lorsqu’il dépasse 3 % du produit intérieur brut (PIB).

En outre, l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) pose le principe de l’équilibre ou de l’excédent des budgets des administrations publiques. Il limite le déficit structurel autorisé à – 0,5 point de PIB pour les États membres, comme la France, dont la dette dépasse 60 % du PIB. Les États membres doivent déterminer un objectif de moyen terme (OMT), défini en termes de solde structurel, compris entre – 0,5 point de PIB et l’excédent. Ils doivent également définir une trajectoire d’ajustement en vue d’atteindre l’OMT, étant précisé que le solde structurel doit converger vers l’OMT retenu d’au moins 0,5 point de PIB par an (et de plus de 0,5 point par an lorsque l’État membre possède une dette publique supérieure à 60 % du PIB).

L’article liminaire du présent projet de loi de finances comprend un tableau de synthèse mentionnant les objectifs de déficit public et de déficit structurel pour 2018.

Tableau de synthÈse de l’article liminaire

(en % du PIB)

Décomposition du solde public

Exécution 2016

Prévision d’exécution 2017

Prévision 2018

Solde structurel (1)

– 2,5

– 2,2

– 2,1

Solde conjoncturel (2)

– 0,8

– 0,6

– 0,4

Mesures exceptionnelles et temporaires (3)

– 0,1

– 0,1

– 0,1

Solde public (4 = 1 + 2 + 3)

– 3,4

– 2,9

– 2,6

Source : présent projet de loi de finances.

Article 7 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative
à la programmation et à la gouvernance des finances publiques

« La loi de finances de l’année, les lois de finances rectificatives et les lois de financement rectificatives de la sécurité sociale comprennent un article liminaire présentant un tableau de synthèse retraçant, pour l’année sur laquelle elles portent, l’état des prévisions de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques, avec l’indication des calculs permettant d’établir le passage de l’un à l’autre.

« Le tableau de synthèse de la loi de finances de l’année indique également les soldes structurels et effectifs de l’ensemble des administrations publiques résultant de l’exécution de la dernière année écoulée et des prévisions d’exécution de l’année en cours.

« Il est indiqué, dans l’exposé des motifs du projet de loi de finances de l’année, du projet de loi de finances rectificative ou du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, si les hypothèses ayant permis le calcul du solde structurel sont les mêmes que celles ayant permis de le calculer pour cette même année dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques. »

Le tableau de synthèse des soldes de l’article liminaire fixe un objectif de déficit public pour 2018 de 2,6 % du PIB (A).

Le déficit structurel serait ramené à 2,1 % du PIB, compte tenu d’un ajustement structurel de 0,1 point de PIB (B).

I.   Le dÉficit public

La mesure du solde public, exprimé en pourcentage de PIB, permet d’adopter une vision intégrée de l’ensemble des finances publiques et donc de porter une appréciation sur le résultat en comptabilité nationale de l’ensemble des administrations publiques, c’est-à-dire non seulement de l’État mais également des administrations publiques locales (APUL), des administrations de sécurité sociale (ASSO) et des divers organismes d’administration centrale (ODAC).

Elle permet aussi de vérifier si la France respecte ses engagements européens.

La comptabilité nationale est établie par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et s’inscrit dans un champ d’analyse macroéconomique. Elle s’appréhende comme une représentation quantifiée du fonctionnement et des résultats d’une économie nationale. Il s’agit d’une comptabilité d’engagements établie selon les règles du Système européen de comptes nationaux et régionaux (SEC 2010) résultant du règlement (UE) n° 549/2013 du 21 mai 2013 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans l’Union européenne.

Les résultats de la comptabilité nationale sont abondamment commentés, en particulier le niveau de déficit exprimé en pourcentage du produit intérieur brut (PIB) qui joue un rôle essentiel dans le cadre de la surveillance des finances publiques au niveau européen. Ce sont ainsi les résultats de la comptabilité nationale qui permettent de savoir si la France respecte au non la règle selon laquelle le déficit ne peut excéder 3 % du PIB prévue par le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

A.   L’Évolution du dÉficit public dans la pÉriode rÉcente

La France connaît un déficit public depuis 1975 (1). Le record de déficit public a été atteint en 2009, conséquence directe de la crise financière de 2008. Le déficit public diminue depuis de manière régulière mais à un rythme plutôt lent (2). L’État porte désormais l’essentiel du déficit public (3).

1.   Les comptes publics sont en déficit depuis 1975

Le dernier excédent public constaté date de 1974. Cette année-là, alors que les effets du premier choc pétrolier commencent à se faire sentir, les comptes publics affichent un solde légèrement positif de 0,1 % du PIB.

Depuis 1975, les comptes de la France sont en déficit.

Le dÉficit public depuis 1974

(en % du PIB)

(en grisé, les déficits supérieurs à 3 % du PIB)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Solde

0,1

– 2,8

– 1,6

– 1,1

– 1,8

– 0,5

– 0,4

– 2,4

– 2,8

– 2,8

– 2,7

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Solde

– 2,9

– 3,2

– 2,0

– 2,5

– 1,8

– 2,4

– 2,8

– 4,6

– 6,3

– 5,4

– 5,1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Solde

– 3,9

– 3,6

– 2,4

– 1,6

– 1,3

– 1,4

– 3,1

– 3,9

– 3,5

– 3,2

– 2,3

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Solde

– 2,5

– 3,2

– 7,2

– 6,8

– 5,1

– 4,8

– 4,0

– 3,9 

– 3,6

– 3,4

– 2,9*

* prévision du présent projet de loi de finance.

Source : INSEE.

La barre des 3 % de déficit public a été franchie à quatre périodes :

– une première fois, très brièvement, en 1986 ;

– une deuxième fois, pour une période de six années entre 1992 et 1997 ;

– une troisième fois, pour une période de quatre années entre 2002 et 2005 ;

– une quatrième fois, et il s’agit de la période tout à la fois la plus récente et la plus longue, entre 2008 et 2016 soit au total neuf années consécutives.

Entre 2002 et 2016, le déficit public annuel de la France a été supérieur à 3 % du PIB à treize reprises en quinze exercices.

Le retour sous la barre des 3 % du PIB est impératif pour permettre à la France de sortir de la procédure de déficit excessif dont elle fait l’objet depuis 2009.

La procédure de déficit excessif ouverte à l’encontre de la France

La France fait l’objet d’une procédure de déficit excessif depuis le 27 avril 2009. Le Conseil de l’Union européenne avait alors accordé un délai à la France jusqu’en 2012 pour corriger son déficit. Le 2 décembre 2009, le Conseil a accordé un nouveau délai à la France jusqu’en 2013. Le 21 juin 2013, ce délai a été reporté à 2015. Enfin, le 10 mars 2015, ce délai a été porté à 2017.

La France est le dernier État de la zone euro avec l’Espagne à faire l’objet d’une procédure de déficit excessif.

2.   Le déficit public diminue lentement depuis le record atteint en 2009

Le point le plus bas de solde effectif a été atteint en 2009, année qui a suivi la crise financière de 2008, avec un déficit record de 7,2 % du PIB. En 2017, il sera ramené à 2,9 % du PIB selon la prévision actualisée du présent projet de loi de finances. Le déficit public aura été réduit de 4,3 points de PIB en huit ans.

DÉficit public depuis 2007

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

En %
du PIB

2,5

3,2

7,2

6,8

5,1

4,8

4,0

3,9

3,6

3,4

2,9

2,6

En

milliards d’euros

49,5

63,5

138,9

135,8

105,0

100,4

85,4

84,4

78,7

75,9

nd

nd

Source : INSEE jusqu’en 2016, présent projet de loi de finances pour les années 2017 et 2018.

Sur les cinq derniers exercices pour lesquels les données d’exécution sont connues, soit sur la période 2012-2016, le déficit public a été réduit en moyenne de seulement 5 milliards d’euros par an, soit près de 25 milliards d’euros au total.

Les données qui figurent dans le tableau ci-dessous sont à jour des comptes nationaux annuels publiés par l’INSEE le 30 mai 2017.

Évolution des finances publiques sur la pÉriode 2012 à 2016

En milliards d’euros

(en % du PIB)

Agrégat

2012

2013

2014

2015

2016

 

PIB

2 086,9

+ 0,2 % 
en volume

2 115,3

+ 0,6 %
en volume

2 147,6

+ 0,9 %
en volume

2 194,2

+ 1,1 %
en volume

2 228,9

+ 1,2 %
en volume

 

Recettes publiques

1 085,6

(52,0 %)

1 119,9

(52,9 %)

1 142,0

(53,2 %)

1 165,3

(53,1 %)

1 181,2

(53,0 %)

dont prélèvements obligatoires*

914,7

(43,8 %)

946,8

(44,8 %)

958,9

(44,6 %)

975,0

(44,4 %)

990,7

(44,4 %)

dont crédits d’impôt enregistrés en recettes

14,6

(0,7 %)

13,7

(0,6 %)

21,3

(1,0 %)

25,8

(1,2 %)

25,8

(1,2 %)

dont autres recettes

158,4

(7,6 %)

161,5

(7,6 %)

163,9

(7,6 %)

166,7

(7,6 %)

166,7

(7,5 %)

 

Dépenses publiques

1 186,0

(56,8 %)

1 205,3

(57,0 %)

1 226,4

(57,1 %)

1 244,0

(56,7 %)

1 257,1

(56,4 %)

dont crédits d’impôt enregistrés en dépenses

16,6

(0,8 %)

15,9

(0,8 %)

25,4

(1,2 %)

32,4

(1,5 %)

31,3

(1,4 %)

dont dépenses hors crédits d’impôt

1 169,4

(56,0 %)

1 189,4

(56,2 %)

1 201,0

(55,9 %)

1 211,6

(55,2 %)

1 225,8

(55,0 %)

 

Déficit public

100,4

(4,8 %)

85,4

(4,0 %)

84,4

(3,9 %)

78,7

(3,6 %)

75,9

(3,4 %)

 

Dette publique

1 868,3

(89,5 %)

1 952,7

(92,3 %)

2 037,8

(94,9 %)

2 098,0

(95,6 %)

2 147,2

(96,3 %)

* Les prélèvements obligatoires comprennent 2,1 milliards de ressources propres traditionnelles de l’Union européenne jusqu’en 2014, 2,2 milliards pour 2015 et 2 milliards pour 2016, lesquelles ne sont pas comptabilisées dans les recettes totales.

Source : INSEE.

3.   La décomposition du déficit public par catégorie d’administration

a.   L’État porte l’essentiel du déficit public

La concentration du déficit public sur l’État s’est accentuée ces dernières années sous l’effet de deux tendances.

En premier lieu, le déficit des ASSO est passé de 23,2 milliards d’euros en 2010 à 2,9 milliards en 2016 soit une baisse de plus de 20 milliards d’euros. Les allégements de cotisations sociales décidées dans le cadre de politiques publiques de soutien à l’emploi sont compensés à la sécurité sociale par l’État.

En second lieu, les APUL connaissent un important ralentissement de leurs dépenses, ce qui leur a permis d’enregistrer un excédent de 3 milliards d’euros en 2016.

La part de l’État dans le déficit public est ainsi passée de 90 % en 2010 à près de 98 % en 2016.

DÉcomposition du solde public par sous-secteur d’administration

depuis 2007

(en milliards d’euros)

Année

solde public

 

État

ODAC

APUL

ASSO

2007

– 49,5

– 39,8

– 7,1

– 7,7

5,1

2008

– 63,5

– 65,4

– 2,7

– 9,5

14,0

2009

– 138,9

– 116,9

– 1,3

– 6,0

– 14,6

2010

– 135,8

– 121,7

10,9

– 1,7

– 23,2

2011

– 105,0

– 91,2

– 0,2

– 0,7

– 12,9

2012

– 100,4

– 81,6

– 2,6

– 3,5

– 12,7

2013

– 85,4

– 69,6

1,4

– 8,3

– 8,8

2014

– 84,4

– 74,6

2,6

– 4,6

– 7,8

2015

– 78,7

– 71,6

– 2,2

– 0,1

– 4,7

2016

– 75,9

– 74,1

– 1,9

3,0

– 2,9

Source : INSEE.

b.   L’amélioration des finances des collectivités territoriales

Comme l’a souligné le rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales ([20]), la diminution récente du déficit public « est en grande partie due aux administrations publiques locales ». Les dépenses des APUL ont diminué de 0,8 % en 2016, après une baisse de 0,9 % en 2015. Mais cette baisse provient essentiellement de la diminution des investissements qui reculent pour la troisième année consécutive (– 3,3 % en 2016, après – 9,7 % en 2015 et – 8,3 % en 2014).

Toutefois, si les APUL dégagent globalement une capacité de financement de 3 milliards d’euros en 2016, la situation est variable selon le niveau de collectivités. Ainsi, les régions ont un besoin de financement de 1,4 milliard d’euros.

Selon l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales, l’année 2017 devrait être marquée par une reprise de l’investissement.

c.   L’amélioration des comptes de la sécurité sociale

Les comptes des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale (ROBSS) se sont améliorés de manière continue depuis 2010. Ces régimes constituent l’essentiel de la catégorie des ASSO.

Ainsi, le déficit des ROBSS et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) s’est établi à 7 milliards d’euros au lieu de 22,6 milliards d’euros en 2011, en baisse de 15,6 milliards d’euros.

Évolution des dÉficits sociaux de 2011 à 2016

(en milliards d’euros)

Année

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Maladie

– 8,6

– 5,9

– 6,8

– 6,5

– 5,8

– 4,8

AT-MP*

– 0,2

– 0,2

+ 0,6

+ 0,7

+ 0,7

+ 0,8

Famille

– 2,6

– 2,5

– 3,2

– 2,7

– 1,5

– 1,0

Vieillesse

– 6,0

– 4,8

– 3,1

– 1,2

– 0,3

+ 0,9

FSV**

– 3,4

– 4,1

– 2,9

– 3,5

– 3,9

– 3,6

Sous-total Régime général + FSV**

 20,9

 17,5

 15,4

 13,2

 10,8

 7,8

Régimes obligatoires de base + FSV**

 22,6

 19,1

 16,0

 12,8

 10,3

 7,0

* accident du travail et maladie professionnelle.

** FSV = Fonds de solidarité vieillesse.

Source : Cour des comptes.

B.   La cible de dÉficit public pour 2018

La prévision actualisée de déficit public pour 2017 est de 2,9 % du PIB.

Une nouvelle réduction du déficit public de 0,3 point de PIB est prévue pour 2018. Celui-ci sera ainsi ramené à 2,6 % du PIB, soit le niveau de déficit public le plus bas depuis 2007.

La cible de déficit public pour 2018 est supérieure à celle prévue par les programmations de finances publiques qui avaient été élaborées sous la précédente législature.

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 ([21]) (LPFP 2014-2019) prévoyait en effet un déficit public de 1,7 % du PIB pour 2018. Le programme de stabilité transmis au mois d’avril 2017 à la Commission européenne s’engageait quant à lui sur un objectif de déficit public de 2,3 % du PIB pour 2018.

La prévision de déficit public est donc supérieure de 0,3 point à celle transmise à la Commission européenne en avril et de 0,9 point à celle de la loi de programmation des finances publiques en vigueur.

Mais le Gouvernement a proposé une nouvelle trajectoire de réduction du déficit public dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (PJLPFP 2018-2022).

La cible de déficit public pour 2018 est conforme à cette nouvelle trajectoire.

trajectoire de rÉduction du solde public

(en % du PIB)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde public

– 2,9

– 2,6

– 3,0

– 1,5

– 0,9

– 0,2

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

La programmation pluriannuelle des finances publiques

Deux types de documents juridiques fixent un cadre pluriannuel pour les finances publiques et déterminent une trajectoire de réduction des déficits public et structurel.

En droit interne, les lois de programmation des finances publiques sont prévues par l’article 34 de la Constitution et « s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques ». À ce titre, elles déterminent les trajectoires des soldes structurels et effectifs annuels. Leur contenu est précisé par la loi organique n° 2012‑1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

En droit européen, les programmes de stabilité ont été institués par le pacte de stabilité et de croissance du 7 juillet 1997 comme outil de la surveillance multilatérale des politiques économiques. Ils sont transmis chaque année au mois d’avril à la Commission européenne.

La tendance à la concentration du déficit public sur l’État doit s’accentuer en 2017 puis 2018. En effet, les finances de l’État sont touchées par un important programme de baisse d’impôts tandis que les finances sociales bénéficient de plusieurs augmentations de recettes.

Il est ainsi prévu que les administrations publiques centrales
– essentiellement l’État – portent la totalité du déficit public des administrations publiques.

dÉcomposItion du solde public par sous-secteur d’administration

(en points de PIB)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde effectif

– 2,9

– 2,6

– 3,0

– 1,5

– 0,9

– 0,2

Dont :

 

 

 

 

 

 

Administrations publiques centrales

 3,3

 3,3

 4,0

 2,7

 2,4

 1,9

Administrations publiques locales

0,1

0,1

0,2

0,3

0,6

0,8

Administrations de sécurité sociale

0,2

0,5

0,8

0,8

0,8

0,8

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

II.   Le dÉficit structuRel

A.   Notion de dÉficit structurel

Le déficit structurel est le déficit corrigé des effets du cycle économique. Il s’agit du déficit qui serait observé si le PIB était égal à son potentiel. Inversement, le déficit conjoncturel est le déficit lié à la conjoncture.

Autrement dit, le déficit comprend deux composantes : l’une liée à la conjoncture et l’autre indépendante de la conjoncture. La réduction de la composante structurelle est prioritaire dès lors que la composante conjoncturelle est censée se résorber d’elle-même en période d’amélioration de la conjoncture.

Le calcul de la composante conjoncturelle et structurelle du déficit fait intervenir les notions de croissance potentielle, de PIB potentiel et d’écart de production.

L’écart de production est égal à la différence entre le PIB effectif – qui est mesuré en comptabilité nationale – et le PIB potentiel.

Le PIB potentiel est une notion non observable en finances publiques ni en comptabilité nationale. Il s’agit d’une notion macroéconomique sujette à diverses mesures et interprétations. Il peut être défini « comme le niveau maximum de production que peut atteindre une économie sans qu’apparaissent de tensions sur les facteurs de production qui se traduisent par des poussées inflationnistes » ([22]).

Les hypothèses d’écart de production permettent de calculer précisément la composante conjoncturelle et la composante structurelle du déficit selon des modalités complexes définies dans l’annexe 2 du rapport annexé au PJLPFP 2018‑2022.

Une méthode simplifiée de calcul − appelée « règle du pouce » − consiste à considérer qu’en pratique, le solde conjoncturel est proche de la moitié de l’écart de production. Ceci s’explique par le fait que les postes sensibles à la conjoncture représentent, dans notre pays, près de la moitié du PIB et que l’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance du PIB est, en moyenne, de l’ordre de 1.

Le déficit structurel est ensuite calculé comme la différence entre le déficit effectif et le déficit conjoncturel corrigé des mesures ponctuelles et temporaires.

Concrètement, plus l’écart de production est creusé, plus la composante conjoncturelle du déficit est importante. Un écart de production négatif surestimé conduit à surestimer la composante conjoncturelle du déficit et à sous-estimer sa composante structurelle.

L’écart de production évolue chaque année à hauteur de la différence entre la croissance effective et l’hypothèse de croissance potentielle définie, au même titre que le PIB potentiel, comme la croissance maximale au-delà de laquelle apparaissent des tensions inflationnistes.

Par voie de conséquence, une surestimation de la croissance potentielle aboutit à creuser l’écart de production et à minorer le déficit structurel, et donc à minorer l’effort à accomplir pour respecter la règle d’équilibre des comptes du TSCG.

B.   Les nouvelles hypothÈses de calcul du Gouvernement

Le Gouvernement a modifié les hypothèses de calcul du solde structurel.

HypothÈses d’Écart de production, de croissance effective
et de croissance potentielle

(en % d’évolution annuelle, sauf précision contraire)

Année

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Croissance en volume du PIB

1,1

1,7

1,7

1,7

1,7

1,7

1,8

Croissance potentielle

1,2

1,25

1,25

1,25

1,25

1,30

1,35

Écart de production en % du PIB

– 1,5

– 1,1

– 0,7

– 0,2

+ 0,2

+ 0,6

+ 1,1

Source : rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Au cours de la précédente législature, les hypothèses de croissance potentielle et d’écart de production se sont progressivement éloignées de celles de la plupart des organismes internationaux, dont la Commission européenne. Il en a résulté une sous-estimation du déficit structurel qui a été dénoncée à plusieurs reprises par le HCFP.

Dans son dernier avis rendu au cours de la précédente législature, en date du 12 avril 2017 ([23]), le HCFP avait exposé de façon détaillée et pédagogique les raisons pour lesquelles les hypothèses d’écart de production et de croissance potentielle du précédent Gouvernement étaient « peu vraisemblables ». Il estimait « indispensable que la prochaine loi de programmation corrige ces estimations et fixe sur des bases réalistes les hypothèses d’écart de production et de croissance potentielle ».

Le HCFP avait en outre rappelé, à l’occasion de son avis rendu sur le projet de loi de règlement pour 2016, que le déficit structurel était « très vraisemblablement sous-estimé » ([24]), compte tenu du caractère peu vraisemblable des hypothèses de calcul retenues.

 

Le Rapporteur général souligne que le Gouvernement a tenu compte de l’avis du HCFP. Les hypothèses d’écart de production et de croissance potentielle ont été revues et sont désormais cohérentes avec celles des principales organisations internationales.

Le Gouvernement a abaissé l’estimation de la croissance potentielle d’environ 0,2 point en moyenne sur la période 2016-2020.

Comparaison de la nouvelle hypothÈse de croissance potentielle
avec la prÉcÉdente

(en % d’évolution annuelle, sauf précision contraire)

Année

2016

2017

2018

2019

2020

Hypothèse du programme de stabilité d’avril 2017

1,5

1,5

1,4

1,3

1,4

Hypothèse du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

1,2

1,25

1,25

1,25

1,25

Écart entre l’ancienne et la nouvelle hypothèse

– 0,3

– 0,25

– 0,15

– 0,05

– 0,15

Source : rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

L’hypothèse de croissance potentielle de 1,25 % sur la période 2017-2018 se situe à un niveau très proche de celle de la Commission européenne et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui l’estiment l’une et l’autre à 1,2 %.

HypothÈses de croissance potentielle pour la France

(en points de PIB)

Année

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Gouvernement

1,25

1,25

1,25

1,25

1,25

1,30

1,35

Commission européenne

1,1

1,2

1,2

1,2

1,1

1,1

1,1

Fonds monétaire international

1,0

1,1

1,2

1,3

1,4

1,5

1,5

OCDE

1,3

1,2

1,2

Source : Haut Conseil des finances publiques, avis n° HCFP-2017-3 du 24 septembre 2017 relatif au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Le Gouvernement a également nettement diminué l’hypothèse d’écart de production pour 2016. Alors que celle-ci était de – 3,1 % dans le programme de stabilité transmis en avril à la Commission européenne, elle a été plus que divisée par deux à – 1,5 % dans le PJLPFP 2018-2022 ([25]).

L’écart de production est ainsi nettement moins creusé qu’estimé initialement par le précédent Gouvernement. Cette révision conduit à présenter un niveau de déficit structurel plus important pour 2016 soit 2,5 % du PIB au lieu de 1,6 % dans la dernière loi de règlement ([26]).

Cette nouvelle hypothèse d’écart de production est proche de celle de la Commission européenne (– 1,3 %).

C.   Le dÉficit structurel pour 2017 et 2018

En application des nouvelles hypothèses de calcul du Gouvernement et des prévisions de croissance, l’écart de production se résorberait en 2017 à – 1,1 % puis – 0,7 % en 2018.

Le déficit conjoncturel serait égal à environ la moitié de cet écart de production soit 0,6 % du PIB en 2017 puis 0,4 % du PIB en 2018 (« règle du pouce » précitée).

Les mesures exceptionnelles – essentiellement l’impact de contentieux – dégraderaient quant à elles le déficit public de 0,1 point de PIB.

Le déficit structurel s’obtient ensuite par différence entre la prévision de déficit public, d’une part, et le déficit conjoncturel et les mesures exceptionnelles, d’autre part.

Le déficit structurel serait ainsi de 2,2 % en 2017 et de 2,1 % en 2018.

Calcul du dÉficit structurel

(en % du PIB)

Année

Déficit public

(A)

Déficit conjoncturel

(B)*

Mesures exceptionnelles

(C)

Déficit structurel

(D=A– B– C)

2017

2,9

0,6

0,1

2,2

2018

2,6

0,4

0,1

2,1

* environ égal à la moitié de l’hypothèse d’écart de production.

Source : commission des finances.

La composante structurelle du déficit représenterait donc environ 80 % du déficit global.

L’ajustement structurel se limiterait à 0,1 point de PIB en 2018.

Ajustement structurel 2018

(en points de PIB)

Déficit structurel 2017 (A)

2,2

Déficit structurel 2018 (B)

2,1

Ajustement structurel (C=A– B)

0,1

Source : présent projet de loi de finances.

D.   L’avis du Haut Conseil des finances publiques (HCFP)

Le HCFP n’a pas expressément rendu un avis sur la prévision de déficit structurel pour 2017 et 2018. Toutefois, il a rendu deux avis plutôt favorables sur l’ensemble des hypothèses de calcul.

Le HCFP a rendu deux avis portant respectivement sur le projet de loi de programmation des finances publiques et le présent projet de loi de finances.

En premier lieu, dans son avis portant sur le PJLPFP 2018-2022 ([27]), le HCFP a relevé que les nouvelles hypothèses d’écart de production et de croissance potentielle du Gouvernement vont « dans le sens des observations formulées à plusieurs reprises ». Il juge ainsi l’hypothèse de croissance potentielle « plus réaliste ».

En second lieu, dans son avis portant sur le présent projet de loi de finances ([28]), il a considéré « que la prévision de croissance (1,7 % pour chacune des deux années) est prudente pour 2017 et raisonnable pour 2018 ».

Implicitement mais nécessairement, le HCFP n’a donc pas de réserves à formuler sur l’évolution de l’hypothèse d’écart de production pour 2017 et 2018. Il en va dès lors de même de l’estimation de la composante structurelle du déficit public.

En revanche, le HCFP a observé que l’ajustement structurel prévu pour 2018 se limitait à 0,1 point ce qui n’est pas conforme à la règle européenne d’ajustement structurel minimal de 0,5 point prévue par le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance.

 


—  1  —

   FICHE N° 3 :
Les prélèvements obligatoires

Les prélèvements obligatoires comprennent les impôts et cotisations sociales recouvrées par les administrations publiques et les institutions européennes.

I.   les prélèvements obligatoires jusqu’en 2016

A.   L’Évolution

Les prélèvements obligatoires sont, en tendance longue, orientés à la hausse.

Ils ont fortement augmenté entre 1974 et 1982 essentiellement en raison du développement de la protection sociale : les cotisations sociales ont augmenté de 4 points de PIB sur cette période, passant de 13,1 à 17,1 % du PIB. La barre des 40 % du PIB a été franchie en 1982.

Ils ont ensuite progressé par pallier selon trois périodes que l’on peut ainsi définir :

– tout d’abord, entre 1982 et 1995, les prélèvements obligatoires ont évolué dans une fourchette comprise entre 40 et 42 % du PIB, avec une moyenne de 41 % du PIB ;

– ensuite, de 1996 à 2012, ils ont oscillé entre 41 et 44 % du PIB, avec une moyenne de 42,4 % du PIB ;

– enfin, depuis 2013, ils ont franchi la barre des 44 % du PIB, avec une moyenne de 44,6 % du PIB.

Les prélèvements obligatoires depuis 1974

(en % du PIB)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Solde

33,5

35,1

37,1

37,1

37,0

38,7

39,4

39,6

40,1

40,8

41,6

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Solde

41,6

41,1

41,8

40,9

40,6

40,6

40,9

40,3

40,9

41,5

41,7

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Solde

42,8

43,0

42,9

43,6

42,8

42,5

41,9

41,8

41,9

42,5

42,8

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Solde

42,1

41,9

41,0

41,3

42,6

43,8

44,8

44,6

44,4

44,4

44,7*

* prévision actualisée du présent projet de loi de finances.

Source : INSEE.

La progression des prélèvements obligatoires est donc une tendance lourde. Le point le plus haut a été atteint en 2013 avec 44,8 % du PIB.

Les oscillations à la baisse et à la hausse ne sont pas corrélées à la couleur de la majorité politique. Les prélèvements obligatoires ont progressé de 2,8 points de PIB en quinze ans (2,6 points en dix ans) alors que des majorités parlementaires d’orientations différentes se sont succédées. La hausse a été de 1,7 point sur la période 2007-2012 et de 0,9 point sur la période 2012-2017.

PrÉlÈvements obligatoires

Année

En milliards d’euros

En % du PIB

2002

668,0

41,9

 

2007

819,5

42,1

 

2012

914,7

43,8

2013

946,8

44,8

2014

958,9

44,6

2015

975,0

44,4

2016

990,7

44,4

2017

Nd

44,7*

* prévision actualisée du présent projet de loi de finances.

Source : INSEE.

B.   La structure

Le tableau qui suit donne une répartition des prélèvements obligatoires telle que l’exécution pour 2016 la révèle pour chacun des sous-secteurs d’administration.

Décomposition des prélèvements obligatoires en 2016

(en milliards d’euros)

Fiscalité globale

Fiscalité par sous-secteur d’administration

Principaux impôts

Montant

 

619,2

État +

organismes divers d’administration centrale (ODAC) + Union européenne

 

309,3

TVA (part État)

144,4

Impôt sur le revenu (IR)

71,8

Impôt sur les sociétés (IS)

30,0

TICPE (part État)

15,9

Droits de succession et donation

12,5

Impôts transférés aux ODAC

13,1

Autres

21,6

Administrations publiques locales (APUL)

 

137,7

Taxe foncière (bâti et non bâti)

33,4*

CVAE-CFE-IFER

21,3*

Taxe d’habitation

18,8*

Taxe départementale sur les mutations à titre onéreux

9,6

TICPE (part APUL)

11,8

Versement transport

8,2*

Taxe sur les conventions d’assurance

7,0

Taxes d’enlèvement des ordures ménagères

5,8

Taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules

2,2

Autres

19,6

Administrations de sécurité sociale (ASSO)

 

172,2

CSG-CRDS

104,5

Taxe sur les salaires

13,5

Droits de consommation sur les tabacs

11,2

TVA (part ASSO)

11,7

Prélèvement social sur les revenus du patrimoine et les produits de placements

5,6

Forfait social

5,2

Contribution sociale de solidarité des sociétés

3,6

Prélèvement de solidarité de 2 %

2,5

Autres

14,4

 

Cotisations sociales

371,5

 

Total des prélèvements obligatoires

990,7

* INSEE.

Source : les données des deux premières colonnes sont issues de la comptabilité nationale de l’INSEE tandis que les données de la dernière colonne proviennent, sauf exceptions signalées par un astérisque, de données issues de la comptabilité budgétaire du présent projet de loi de finances, annexe Voies et moyens, tome I.

Les cotisations sociales représentent 38 % des prélèvements obligatoires et les impôts 62 %.

Le rendement des impôts est concentré sur six d’entre eux : taxe sur la valeur ajoutée (TVA), contribution sociale généralisée-contribution au remboursement de la dette sociale (CSG-CRDS), impôt sur le revenu, taxes foncières, impôt sur les sociétés, taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) ; ils représentent à eux seuls 425 milliards d’euros soit près de 70 % de la fiscalité.

II.   les prélèvements obligatoires en 2017 : une hausse de 0,3 point par rapport à 2016

En 2017, le taux de prélèvements obligatoires devrait à nouveau progresser pour atteindre 44,7 % du PIB, soit un niveau très proche du record de 2013.

La hausse par rapport à 2016 serait ainsi de 0,3 point de PIB. Elle s’expliquerait par deux mouvements contraires avec, d’une part, une diminution due aux mesures législatives de 0,1 point de PIB (1) et d’autre part, une augmentation de 0,4 point liée à une évolution spontanée nettement supérieure à l’évolution du PIB (2).

A.   Une baisse de 0,1 point au titre des mesures législatives

En 2017, l’ensemble des mesures législatives doivent contribuer à faire baisser les prélèvements obligatoires de 2,7 milliards d’euros soit environ 0,1 point de PIB selon le Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances. Il s’agit d’un solde net entre plusieurs mesures de baisse et plusieurs mesures de hausse.

À titre principal, il s’agit – pour les baisses – de la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (– 3,3 milliards d’euros) et – pour les hausses – de l’augmentation de la fiscalité écologique (+ 1,9 milliard d’euros) en lien avec une hausse de la fiscalité sur le gazole et la poursuite de la trajectoire de hausse du prix du carbone.

Principales mesures législatives sur les prélèvements obligatoires en 2017

(en milliards d’euros)

Mesures

Rendement

Mesures de baisse

 

Montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE)

– 3,3

Réduction d’impôt sur le revenu de 20 % pour certains ménages

– 1,1

Élargissement de la réduction de cotisation patronale famille

– 1,0

Baisse de l’impôt sur les sociétés (IS)

– 0,3

Réduction de contribution sociale généralisée (CSG) pour certains retraités

– 0,3

Mesures de hausse

 

Fiscalité écologique (dont trajectoire carbone et hausse de la fiscalité sur le gazole)

1,9

Réforme du cinquième acompte de l’impôt sur les sociétés

0,5

Renforcement de la taxe sur les transactions financières

0,4

Alignement progressif des cotisations des fonctionnaires sur celui des salariés du privé

0,2

Source : Rapport économique, social et financier.

B.   Une hausse due à l’évolution spontanée pour 0,4 point

L’évolution spontanée des prélèvements obligatoires devrait cependant être nettement plus élevée que prévu « en lien avec l’accélération de l’activité économique et de l’emploi ». L’élasticité à la croissance est désormais estimée à 1,3 ([29]) alors qu’elle aurait dû être égale à l’unité selon les prévisions sous-jacentes à la loi de finances pour 2017.

III.   Les prélèvements obligatoires en 2018

Le présent projet de loi de finances prévoit une baisse du taux de prélèvements obligatoires de 0,4 point de PIB (A). Une évolution de la structure des prélèvements obligatoires devrait également intervenir à la suite de la bascule de cotisations sociales sur la CSG et de l’attribution d’une fraction de TVA aux régions (B).

A.   Une baisse de 0,4 point de PIB

Le Gouvernement retient une hypothèse prudente d’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance égale à l’unité. Autrement dit, l’évolution spontanée des prélèvements obligatoires devrait être proportionnelle à celle du PIB si bien qu’elle n’aurait pas d’effet sur le taux de prélèvements obligatoires.

Dans le même temps, un important programme de baisse des prélèvements obligatoires est prévu pour un montant global de 6,7 milliards d’euros, selon le Rapport économique, social et financier, ce qui devrait entraîner une baisse de leur taux dans le PIB de 0,4 point.

Par ailleurs, la hausse des prélèvements obligatoires consécutive à la bascule de cotisations sur la CSG a vocation à être intégralement compensée, notamment par des baisses de cotisations ou des indemnités spécifiques. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a communiqué sur un chiffre de baisse des impôts plus important, soit 10,3 milliards d’euros ([30]) et non pas 6,7 milliards d’euros.

1.   Environ 4,5 milliards d’euros de baisse liée aux mesures antérieures

L’essentiel de cette baisse provient de mesures antérieures que le Gouvernement n’a pas proposé de remettre en cause (environ 4,5 milliards d’euros). Il s’agit principalement de la hausse du taux et de la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE).

Les mesures antÉrieures montant en charge en 2018

(en milliards d’euros)

Mesure

Montant

Mesures de baisse

 

Hausse du taux et montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE)

– 4,1

Élargissement du crédit d’impôt pour l’emploi de personnes à domicile

– 1,0

Contrecoups des acomptes prévus sur plusieurs impôts versés en 2017

– 0,8

Crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires (CITS)

– 0,6

Mesures de hausse

 

Fiscalité écologique (trajectoire carbone)

1,5

Alignement progressif des cotisations des fonctionnaires sur celui des salariés du privé

0,2

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome I.

2.   Environ 2 milliards d’euros de baisse liée aux mesures nouvelles

Les mesures nouvelles prévues par le présent projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 devraient avoir pour effet de diminuer les prélèvements obligatoires d’environ 2 milliards d’euros en 2018 selon les indications du Rapport économique, social et financier.

Principales mesures législatives nouvelles
sur les prélèvements obligatoires en 2018

(en milliards d’euros)

Mesures

Rendement

Mesures de baisse

 

Création de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) en remplacement de l’ISF

– 3,2

Dégrèvement de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages

– 3,0

Suppression de la contribution de 3 % sur les dividendes distribués

– 1,9

Mise en place d’un prélèvement forfaitaire unique

– 1,3

Baisse du taux de l’impôt sur les sociétés (IS)

– 1,2

Suppression de la quatrième tranche de la taxe sur les salaires

– 0,1

Mesures de hausse

 

Bascule de cotisations sur la contribution sociale généralisée (CSG)

4,5

Fiscalité écologique (hausse de la composante carbone, alignement de la fiscalité du gazole sur l’essence, verdissement du barème de la taxe sur les véhicules de société – TVS)

2,0

Fiscalité du tabac

1,7

Source : Rapport économique, social et financier.

L’incidence financière des mesures nouvelles devrait donc être conforme aux orientations de l’article 16 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Cet article fixe, en effet, un plancher annuel de l’incidence financière des mesures nouvelles en prélèvements obligatoires. L’incidence est appréciée une année donnée au regard de l’année précédente.

Plancher annuel de l’incidence budgétaire des mesures nouvelles
en prélèvements obligatoires

(en milliards d’euros)

Année

2018

2019

2020

Montant

– 5

– 9

– 7

Source : article 16 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Autrement dit, les mesures nouvelles – adoptées à compter du 1er juillet 2017 – ne doivent pas conduire à une baisse des prélèvements obligatoires de plus de 5 milliards d’euros en 2018, de plus de 9 milliards d’euros en 2019, et de plus de 7 milliards d’euros en 2020.

B.   Une évolution de la structure des prélèvements obligatoires

La bascule de cotisations sur la CSG devrait entraîner une évolution de la structure des prélèvements obligatoires.

Actuellement, les impôts représentent 62 % des prélèvements obligatoires et les cotisations sociales 38 %. Après la réforme, la part des impôts devrait atteindre 64 % tandis que celle des cotisations sociales devrait baisser à 36 %.

L’ensemble constitué par la CSG et la CRDS devrait en effet rapporter 130,9 milliards d’euros aux finances de la sécurité sociale au lieu de 105,8 milliards d’euros en 2017. Dans le même temps, le montant des cotisations sociales devrait diminuer de 18 à 20 milliards d’euros (selon les modalités de compensation retenues).

Cette réforme devrait également entraîner mécaniquement une baisse de la part de l’État dans l’ensemble de la fiscalité qui est actuellement d’environ 48 %, d’autant qu’une fraction de TVA sera attribuée aux régions en 2018 ([31]). La part de l’État dans l’ensemble de la fiscalité pourrait ainsi baisser à environ 45 %.

Partage du produit de la TVA en 2018

(en milliards d’euros)

Part État

152,8

Part sécurité sociale

10,0

part Région

4,1

Total

166,9

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

 


—  1  —

   FICHE N° 4 :
LA DÉPENSE PUBLIQUE

Lors de son discours de politique générale le 4 juillet dernier, le Premier ministre affirmait son objectif d’abaisser la dépense publique de 3 points de PIB sur la durée du quinquennat ([32]). Il souhaitait maintenir l’évolution de la dépense publique au rythme de l’inflation en 2018, soit un objectif d’évolution dit de « zéro volume ».

Conformément à ces engagements, le Gouvernement présente un projet de loi de finances pour 2018 dont la trajectoire des finances publiques repose en premier lieu sur une maîtrise prononcée de la dépense. Ainsi, le taux de croissance de la dépense publique, hors crédits d’impôt, évoluerait à un rythme de 0,5 % en volume, soit l’étiage des dernières années.

taux de croissance en volume de la dÉpense publique, hors crÉdits d’impÔt*

* Par convention, la dépense publique en volume correspond à la dépense publique déflatée de l’indice des prix à la consommation (IPCHT). En effet, il n’existe pas de prix de la dépense publique dans le cadre de la comptabilité nationale et une fraction importante de la dépense est indexée sur cet indicateur.

Source : INSEE et présent projet de loi de finances pour les années 2017 et 2018.

Le Gouvernement propose de mesurer l’évolution de la dépense publique en raisonnant en volume et non en valeur, afin de neutraliser les variations du taux d’inflation qui nuisent à la lisibilité des résultats et pour rendre mieux compte des efforts entrepris.

Si l’objectif annoncé par le Premier ministre d’une croissance nulle en volume de la dépense publique ne devrait pas être atteint en 2018, le Gouvernement prévoit dans le projet de loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2018 à 2022 un ralentissement inédit de l’évolution de la dépense publique sur la période.

Évolution de la dÉpense publique, hors crÉdits d’impÔt
prÉvue en la loi de programmation des finances publiques

(en %)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Taux de croissance en valeur (LPFP)

1,8

1,5

1,7

1,8

2,0

1,9

Taux de croissance en volume (LPFP)

0,8

0,5

0,6

0,4

0,2

0,1

Source : loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

En moyenne, la dépense publique avait progressé de 2,1 % en volume par an sur la période 2002-2008 et de 0,8 % sur la période 2010-2016. L’année 2009 a volontairement été neutralisée, compte tenu de sa valeur extrême pour partie due aux effets de la crise économique. Sur la période 2017-2022, le Gouvernement envisage de maintenir la progression de la dépense publique à un niveau annuel moyen de 0,4 %, soit un niveau historiquement bas sur une telle période.

Le Gouvernement ne propose pas de trajectoire d’évolution de la dépense publique y compris crédits d’impôt. Or, les crédits d’impôt sont désormais inclus dans le champ de la dépense publique et non plus comptabilisés comme des moindres recettes ([33]), conformément au système européen de comptabilité nationale dit « SEC 2010 », en vigueur depuis le 1er septembre 2014 ([34]).

I.   une baisse historique de la part de dÉpense publique dans le produit intÉrieur brut

A.   une baisse historique de la part de dÉpense publique dans la richesse nationale

Le Gouvernement souhaite engager une diminution historique de la part de la dépense publique dans la richesse nationale sur le quinquennat, représentant une baisse de 3,7 points de PIB entre 2017 et 2022.

Évolution de la part de dÉpense publique, hors crÉdits d’impÔts,
prÉvue en la loi de programmation

(en points de PIB)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Dépense publique, hors crédits d’impôt (LPFP)

54,6

53,9

53,3

52,5

51,8

50,9

Évolution de la dépense publique

– 0,7

– 0,6

– 0,8

– 0,7

– 0,9

Source : loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

En 2022, la part de la dépense publique, hors crédits d’impôt, s’élèverait à 50,9 % de la richesse nationale, soit un niveau plus atteint depuis 1991.

Évolution de la part de la dÉpense publique dans le produit intÉrieur brut, hors crÉdit d’impÔt depuis 1974

(en vert, les baisses de la part de dépense publique)

(en % du PIB)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Part

39,5

44,2

44,7

43,9

44,9

45,2

46,1

48,6

49,9

50,3

51,2

Évolution

0,4

4,7

0,5

– 0,8

1,1

0,2

0,9

2,5

1,3

0,4

0,9

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Part

51,9

51,4

50,8

50,1

49,0

49,6

50,7

52,0

54,6

54,0

54,2

Évolution

0,6

– 0,4

– 0,6

– 0,7

– 1,2

0,6

1,1

1,3

2,6

– 0,6

0,2

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Part

54,2

53,9

52,3

52,0

51,1

51,2

52,1

52,6

52,3

52,6

52,1

Évolution

0,1

– 0,3

– 1,6

– 0,3

– 0,9

0,1

0,9

0,5

– 0,3

0,3

– 0,5

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Part

51,7

52,2

55,9

55,6

55,1

56,0

56,2

55,9

55,2

55,0

54,6*

Évolution

– 0,4

0,5

3,6

– 0,3

– 0,5

0,9

0,2

– 0,3

– 0,7

– 0,2

– 0,4*

* prévision actualisée du projet de loi de finances pour 2018.

Source : INSEE.

La diminution de la part de la dépense publique, hors crédits d’impôt, dans la richesse nationale poursuivrait une trajectoire entamée en 2014, après une augmentation significative en 2008 et 2009.

part des dÉpenses publiques

(en % du PIB)

N.B. : s’agissant des dépenses publiques, y compris crédits d’impôt, le Gouvernement n’a fourni aucune information d’évolution pour 2017 et 2018.

Source : INSEE et calculs de la commission des finances sur la base du projet de loi de finances pour les années 2017 et 2018.

Ainsi, la diminution de la part de la dépense publique s’élèverait à 0,7 point de PIB entre 2017 et 2018, représentant environ 16 milliards d’euros selon le Gouvernement.

Celui-ci retient cet indicateur pour mesurer l’effort de réduction de la dépense publique, de préférence à la comparaison entre une évolution de la dépense publique constatée et une évolution tendancielle de la dépense publique. Cette méthode était utilisée par le précédent Gouvernement pour identifier ses efforts de maîtrise de la dépense publique. Néanmoins, elle n’est jamais apparue comme pleinement satisfaisante, compte tenu des nombreuses critiques relatives aux hypothèses de construction de cette évolution tendancielle ([35]).

Dès lors, il apparaît moins indispensable de quantifier les « économies » traduisant la maîtrise de la dépense publique que de vérifier le respect de la trajectoire du ratio de dépense publique par rapport au PIB. Celui-ci illustre un niveau de préférence collective pour la dépense publique. Le Rapporteur général se félicite de ce changement d’approche qui garantit un contrôle et un suivi comptable plus objectifs.

B.   Une maÎtrise prononcÉe de la dÉpense publique en 2018

La trajectoire retenue par le Gouvernement pour 2018 confirme l’inflexion du rythme d’évolution de la dépense publique, hors crédits d’impôt, constatée au cours des dernières années. L’augmentation moyenne annuelle du niveau de dépense publique a été quasiment divisée par deux entre la période 2010-2018 et la période 2002-2008.

Évolution du niveau de dÉpense publique, hors crÉdits d’impÔt

(en milliards d’euros)

Source : INSEE et calculs de la commission des finances sur la base du présent projet de loi de finances pour les années 2017 et 2018.

En 2018, la dépense publique devrait progresser à un rythme faible en deçà des moyennes des périodes précédentes.

Évolution annuelle de la dÉpense publique

(en milliards d’euros)

Année

Dépense publique,

y compris crédits d’impôt

Augmentation

annuelle

Dépense publique,

hors crédits d’impôt

Augmentation

annuelle

2002

833,8

42,7

831,2

40,5

2003

864,3

30,5

861,3

30,1

2004

898,6

34,2

895,2

34,0

2005

937,0

38,4

932,7

37,4

2006

972,8

35,8

966,1

33,4

2007

1 016,2

43,3

1 006,0

39,9

2008

1 057,6

41,4

1 042,5

36,5

2009

1 100,6

43,0

1 083,5

41,1

2010

1 128,0

27,4

1 110,4

26,9

2011

1 151,5

23,5

1 134,5

24,1

2012

1 186,0

34,5

1 169,5

35,0

2013

1 205,3

19,2

1 189,4

19,9

2014

1 226,4

21,1

1 201,0

11,6

2015

1 244,0

17,6

1 211,6

10,6

2016

1 257,0

13,1

1 225,7

14,1

2017 (p)

1 281,1

24,1

1 247,8

22,1

2018 (p)

1 303,7

22,6

1 266,5

18,7

Source : INSEE et calculs de la commission des finances sur la base du présent projet de loi de finances pour les années 2017 et 2018.

Toutefois, l’augmentation annuelle de la dépense publique en valeur apparaît en légère accélération en 2018 par rapport aux exercices 2014, 2015 ou 2016, compte tenu de la remontée prévisionnelle du taux d’inflation à 1 %.

II.   une maÎtrise de la dÉpense publique applicable À tous les secteurs d’administration publique

La maîtrise inédite de l’évolution de la dépense publique sur le quinquennat est logiquement déclinée à l’ensemble des secteurs d’administration publique.

Évolution de la dÉpense publique, hors crÉdits d’impÔt, par sous-secteur

(taux d’évolution, en volume)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Administrations publiques

0,8

0,5

0,6

0,4

0,2

0,1

Administrations publiques centrales

1,0

0,1

0,8

1,2

0,7

0,2

Administrations publiques locales

0,7

0,3

0,7

– 0,3

– 1,6

– 0,6

Administrations de sécurité sociale

0,6

0,9

0,4

0,1

0,6

0,4

Source : loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

En 2018, la dépense des administrations publiques centrales serait quasiment stabilisée en volume, puis celle-ci serait maintenue à un niveau moyen de progression de 0,7 % sur la période 2019-2022.

L’évolution en volume des dépenses des administrations de sécurité sociale serait fortement contenue à un rythme moyen de 0,5 % de 2018 à 2022.

Enfin, le champ des administrations publiques locales serait le secteur le plus mis à contribution, avec une dépense moyenne en volume en diminution de 0,3 % sur la période 2018-2002, en lien avec le cycle électoral.

A.   une maÎtrise de la dÉpense des administrations publiques centrales

La dépense des administrations publiques centrales recouvre la dépense de l’État et des organismes divers d’administration centrale (ODAC). Elle a augmenté de 124,5 milliards d’euros entre 2002 et 2016, soit une progression de 32 %.

Évolution de la dÉpense des administrations publiques centrales

(en milliards d’euros)

Année

Niveau de dépense

Évolution annuelle

Taux d’évolution en volume (en %)

2002

385,0

20,1

3,6

2003

388,2

3,2

– 1,3

2004

406,6

18,4

2,6

2005

415,4

8,8

0,5

2006

412,4

– 3,0

– 2,4

2007

431,9

19,5

3,2

2008

451,1

19,2

1,6

2009

465,3

14,2

3,1

2010

505,1

39,8

7,1

2011

478,6

– 26,5

– 7,3

2012

486,4

7,8

– 0,4

2013

487,2

0,7

– 0,7

2014

495,5

8,3

1,2

2015

502,6

7,1

1,4

2016

509,4

6,8

1,2

2017*

519,6

10,2

1

* Prévision.

Source : INSEE et calculs de la commission des finances.

Le rythme moyen de l’augmentation de la dépense des administrations publiques centrales s’est élevé à 9,6 milliards d’euros entre 2002 et 2016, pour un taux moyen d’évolution en volume de 0,9 %.

Compte tenu d’une remontée anticipée du taux d’inflation, l’évolution prévisionnelle de la dépense des administrations publiques centrales devrait être de 10,8 milliards d’euros entre 2018 et 2022.

Évolution prÉvisionnelle de la dÉpense
des administrations publiques centrales

(en milliards d’euros)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Niveau de dépense prévisionnel

525,3

535,3

549,2

562,7

573,7

Augmentation prévisionnelle

5,7

10,0

13,9

13,5

11,0

Taux d’évolution en volume (en %)

0,1

0,8

1,2

0,7

0,2

Source : calculs de la commission des finances, à partir des données du présent projet de loi de finances.

Néanmoins, le taux moyen d’évolution en volume de la dépense des administrations publiques centrales s’élèverait à 0,6 % sur la période.

B.   un inflÉchissement de la dÉpense des administrations de sÉCURITÉ sociale

La dépense des administrations de sécurité sociale a augmenté de 216,6 milliards d’euros entre 2002 et 2016, soit un rythme moyen d’augmentation de 15,7 milliards d’euros par an.

Évolution de La dÉpense des administrations de sÉCURITÉ sociale

(en milliards d’euros)

Année

Niveau de dépense

Évolution annuelle

Taux d’évolution en volume (en %)

2002

367,0

19,4

3,7

2003

386,3

19,3

3,2

2004

406,3

20,0

3,1

2005

426,6

20,3

3,3

2006

440,4

13,9

1,6

2007

462,9

22,4

3,6

2008

476,2

13,4

0,1

2009

497,1

20,9

4,3

2010

515,6

18,4

2,2

2011

532,4

16,8

1,2

2012

550,2

17,9

1,4

2013

562,2

12,0

1,3

2014

574,8

12,6

1,7

2015

578,2

3,4

0,6

2016

583,6

5,3

0,7

2017*

592,9

9,3

0,6

* Prévision.

Source : INSEE et calculs de la commission des finances.

La dépense des administrations de sécurité sociale a progressé en moyenne de 2,1 % en volume sur la période 2002-2016.

Ce rythme d’évolution devrait être fortement infléchi au cours du quinquennat, avec un taux moyen d’évolution en volume de 0,5 % entre 2018 et 2022.

Évolution prÉvisionnelle de la dÉpense des administrations
de sÉCURITÉ sociale

(en milliards d’euros)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Niveau de dépense prévisionnel

604,2

613,3

622,5

637,1

650,8

Augmentation prévisionnelle

11,3

9,1

9,2

14,6

13,7

Taux d’évolution en volume (en %)

0,9

0,4

0,1

0,6

0,4

Source : calculs de la commission des finances, à partir des données du présent projet de loi de finances.

L’augmentation annuelle moyenne des dépenses des administrations de sécurité sociale s’élèverait à 11,6 milliards d’euros.

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 décline cette trajectoire de faible évolution de la dépense, en fixant un objectif de diminution de la part des dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (ROBSS) par rapport au PIB sur le triennal 2018-2020. Ces dernières représentaient 475 milliards d’euros en 2015.

objectif de dÉpenses des ROBSS

(en % du PIB)

Année

2018

2019

2020

Objectif des dépenses des ROBSS

21,2

21

20,8

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

De nouveau, le Gouvernement propose un pilotage de la dépense en référence à l’évolution de la richesse nationale. Il s’agit de garantir que la dépense, en l’espèce des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, n’augmente pas à un rythme plus dynamique que l’évolution du PIB.

Par ailleurs, le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 fixe un objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (ONDAM) ambitieux pour les années 2018 à 2020.

oNDam

(en milliards d’euros courants)

Année

2018

2019

2020

ONDAM

195,2

199,7

204,3

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Cette évolution représente une augmentation annuelle moyenne maintenue à 2,3 % sur le triennal, soit un niveau faible par rapport à l’exécution de l’ONDAM.

Évolution des dÉpenses entrant dans le champ de l’ONDAM

(en %)

Source : rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, tome I, septembre 2017, page 17, et, pour les années 2018, 2019 et 2020, projet de loi de programmation des finances publiques.

En 2018, la trajectoire prévue par le Gouvernement représenterait le maintien d’un écart historique de 2,2 % par rapport à l’évolution tendancielle de ce périmètre de dépenses.

Écart entre l’exÉcution de l’ondam et l’Évolution tendancielle

(en %)

Source : rapports de la commission des comptes de la sécurité sociale.

C.   une diminution en volume de la dÉpense des administrations publiques locales

La dépense des administrations publiques locales recouvre la dépense des collectivités locales et la dépense des organismes divers d’administration locale. Celle-ci a augmenté de 92,5 milliards d’euros entre 2002 et 2016, à un rythme moyen de progression de 6,8 milliards d’euros par an.

Évolution de la dÉpense des administrations publiques locales

(en milliards d’euros)

Année

Niveau de dépense

Évolution annuelle

Taux d’évolution en volume (en %)

2002

155,8

9,9

4,9

2003

164,7

8,9

3,6

2004

179,7

15,0

7,0

2005

188,4

8,7

3,2

2006

199,8

11,4

4,3

2007

213,9

14,1

5,5

2008

223,2

9,4

1,6

2009

230,7

7,5

3,3

2010

229,8

– 0,9

– 1,9

2011

235,3

5,5

0,3

2012

244,0

8,6

1,7

2013

252,2

8,2

2,5

2014

252,6

0,4

– 0,3

2015

250,3

– 2,3

– 0,9

2016

248,2

– 2,1

– 1,0

2017*

252,4

4,2

0,7

* Prévision.

Source : INSEE et calculs de la commission des finances.

Le taux moyen d’évolution en volume de la dépense des administrations publiques locales s’est établi à 2,2 % sur la période 2002-2016. Selon la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, le taux moyen d’évolution en volume de celle-ci devrait être négatif à 0,3 % sur la période. Cela représente un effort majeur, en lien avec le cycle électoral et notamment les élections municipales prévues en 2020.

Évolution prÉvisionnelle de la dÉpense
des administrations publiques locales

(en milliards d’euros)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Niveau de dépense prévisionnel

255,7

260,3

263,2

263,6

266,6

Augmentation prévisionnelle

3,3

4,6

2,9

0,4

3,0

Taux d’évolution en volume (en %)

0,3

0,7

– 0,3

– 1,6

– 0,6

Source : calculs de la commission des finances, à partir des données du présent projet de loi de finances.

Ainsi, l’augmentation prévisionnelle moyenne de la dépense des administrations publiques locales s’élèverait à 2,8 milliards d’euros par an entre 2018 et 2022.

Le Gouvernement prévoit une quasi-stabilisation des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales sur le quinquennat.

Évolution des concours financiers de l’État
aux collectivitÉs territoriales

(en milliards d’euros courants)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Concours financiers de l’État aux collectivités territoriales

48,11

48,09

48,43

48,49

48,49

Source : article 13 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Les concours financiers de l’État comprennent :

– les prélèvements sur recettes de l’État établis au profit des collectivités locales ;

– les crédits du budget général relevant de la mission Relations avec les collectivités territoriales ;

– et le produit de l’affectation de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) aux régions, au Département de Mayotte et aux collectivités territoriales de Corse, de Martinique et de Guyane ([36]). Conformément à la loi de finances pour 2017, l’affectation de la fraction de TVA entrera en vigueur au 1er janvier 2018 en substitution à des dotations budgétaires ([37]).

Par ailleurs, le projet de loi de programmation des finances publiques fixe l’objectif d’évolution des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales et des groupements à fiscalité propre à 1,2 % sur la période 2018-2022.

objectif d’Évolution des dÉpenses des collectivitÉs territoriales
et groupements À fiscalitÉ propre

(en %, en valeur et à périmètre constant)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Dépenses de fonctionnement

1,2

1,2

1,2

1,2

1,2

Source : article 10 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Le besoin de financement de ces collectivités devrait diminuer de 2,6 milliards d’euros par an, soit 13 milliards d’euros au total sur la période.

objectif d’Évolution du besoin de financement des collectivitÉs territoriales et groupements À fiscalitÉ propre

(en milliards d’euros)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Réduction annuelle du besoin de financement

– 2,6

– 2,6

– 2,6

– 2,6

– 2,6

Réduction cumulée du besoin de financement

– 2,6

– 5,2

– 7,8

– 10,4

– 13

Source : article 10 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

En vertu du projet de loi de programmation des finances publiques, le Gouvernement souhaite instaurer un mécanisme de contractualisation entre l’État et les 319 principales collectivités territoriales en termes de nombre d’habitants, afin d’atteindre ces différents objectifs.

Enfin, il propose la création d’une règle prudentielle à l’article 24 du projet de loi de programmation des finances publiques. Celle-ci vise à définir des plafonds de ratio d’endettement par strate de collectivité, exprimé en nombre d’années d’endettement. Cette règle devrait compléter le mécanisme d’équilibre budgétaire dit de « règle d’or » applicable aux collectivités territoriales, prévu à l’article L. 1612‑4 du code général des collectivités territoriales.

 


—  1  —

   FICHE N° 5 :
La dette publique

Le présent projet de loi de finances prévoit une stabilisation du ratio de dette publique à 96,8 % du PIB en 2017 et 2018. Cette trajectoire est cohérente avec la diminution du déficit public, l’accélération de la croissance et la reprise de l’inflation.

Évolution de la dette publique

(en % du PIB)

p : donnée provisoire en 2016, puis prévision en 2017 et 2018.

sd : donnée semi-définitive.

Source : INSEE et présent projet de loi de finances pour les années 2017 et 2018.

Ces prévisions illustrent la fin d’une période d’endettement public dynamique à la suite de la crise économique et financière de 2008 et ralenti depuis 2013.

I.   la stabilisation de la dette publique en 2017 et 2018

A.   le prÉsent projet de loi prÉvoit une stabilisation du ratio de dette publique

1.   Un ralentissement de la progression de la dette publique au cours
des dernières années

En lien avec l’évolution du déficit public, la progression de la dette publique a tendance à ralentir au cours des dernières années.

Évolution de la dette publique

(en milliards d’euros)

Année

Encours de dette

Augmentation annuelle

2007

1 252,0

+ 58,7

2008

1 357,3

+ 105,3

2009

1 530,7

+ 173,4

2010

1 631,7

+ 101,0

2011

1 753,7

+ 122,0

2012

1 868,3

+ 114,6

2013

1 952,7

+ 84,4

2014

2 037,8

+ 85,1

2015 (sd)

2 098,0

+ 60,2

2016 (p)

2 147,2

+ 49,2

p : donnée provisoire.

sd : donnée semi-définitive.

Source : INSEE.

Ainsi, l’augmentation moyenne annuelle de l’encours de dette publique s’est élevée à 113 milliards d’euros entre 2007 et 2012, au lieu de 70 milliards d’euros entre 2013 et 2016.

2.   La stabilisation du ratio d’endettement public en 2017 et 2018

Les prévisions du projet de loi modifient celles trop optimistes proposées par le précédent Gouvernement, qui anticipait un recul du ratio de dette publique dès 2016.

prÉvisions du prÉCÉdent gouvernement

(en points de PIB)

Fondement

2015

2016

2017

Projet de loi de finances pour 2017

96,2

96,1

96,0

Source : projet de loi de finances pour 2017.

Selon le présent projet de loi de finances, le ralentissement de l’endettement public devrait se poursuivre au cours des années 2017 et 2018, avec une stabilisation du ratio de dette publique par rapport au PIB.

Évolution de la dette publique

(en points de PIB)

Année

Encours de dette

Augmentation annuelle

2007

64,3

– 0,1

2008

68,0

+ 3,7

2009

78,9

+ 10,9

2010

81,6

+ 2,7

2011

85,2

+ 3,6

2012

89,5

+ 4,3

2013

92,3

+ 2,8

2014

94,9

+ 2,6

2015 (sd)

95,6

+ 0,7

2016 (p)

96,3

+ 0,7

2017

96,8

+ 0,5

2018

96,8

0

p : donnée provisoire.

sd : donnée semi-définitive.

Source : INSEE et présent projet de loi de finances pour les années 2017 et 2018.

La stabilisation du ratio de dette publique par rapport au PIB résulte de deux effets complémentaires :

– un effet numérateur : le ralentissement de la progression de la dette ;

– et un effet dénominateur : l’accélération du rythme de croissance du PIB.

L’écart au solde stabilisant se réduirait progressivement sur les années 2016 à 2017, avant d’être négatif en 2018. Le solde stabilisant correspond au niveau de solde public à atteindre pour stabiliser le niveau de dette publique en points de PIB ([38]).

Écart au solde stabilisant

Année

2016

2017

2018

Écart au solde stabilisant le ratio d’endettement

1,9

0,6

– 0,1

Source : Rapport économique, social et financier, annexé au présent projet de loi de finances, page 116.

B.   le projet de loi de programmation des finances publiques prÉvoit un recul de la dette à compter de 2020

1.   Un report du recul de la dette publique

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 fixe une nouvelle trajectoire de dette publique sur la durée du quinquennat. Celle-ci prévoit également un report du recul de l’endettement par rapport aux trajectoires du précédent Gouvernement.

TRAJECTOIRE DE L’ENDETTEMENT PUBLIC

(en points de PIB)

Fondement

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019

97,7

97,0

95,1

92,4

Programme de stabilité́ d’avril 2017

96,0

96,0

95,9

94,7

93,1

Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

96,8

96,8

97,1

96,1

94,2

91,4

Endettement public constaté et prévu au sein du présent projet de loi de finances

96,3

96,8

96,8

Source : commission des finances.

La dette publique devrait atteindre un point haut à 97,1 % du PIB en 2019, en raison d’un solde public effectif retombant à 3 % du fait de la transformation du CICE en allégement de cotisations sociales pérenne.

Pour les années 2020 à 2022, le ratio de dette publique devrait ensuite refluer à un rythme relativement dynamique de 1,9 point de PIB par an.

Compte d’une hypothèse d’écart de production qualifiée d’« optimiste » à l’horizon 2022, le HCFP a souligné dans son avis que cela conduisait à faire l’hypothèse « d’une trajectoire de dette publique plus favorable » ([39]).

Ainsi, le rythme de réduction de la dette publique, prévu par le projet de loi de programmation, ne s’est jamais produit dans les séries publiées par l’INSEE. Les périodes de baisse de la dette publique sont d’ailleurs rares. Si la cible pour 2022 devait être atteinte, la dette publique reviendrait à un niveau inférieur à celui qui était le sien en 2013.

La dette publique depuis 1978

(en vert, les périodes de baisse de la dette publique)

(en pourcentage du PIB)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Solde

nd

nd

nd

nd

21,2

21,1

20,8

22,0

25,3

26,6

29,0

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Solde

30,6

31,2

33,5

33,5

34,3

35,4

36,3

40,0

46,3

49,6

55,8

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Solde

59,7

61,1

61,0

60,2

58,6

58,1

60,0

64,1

65,7

67,1

64,4

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Solde

64,3

68,0

78,9

81,6

85,2

89,5

92,3

93,9

95,6

96,3

96,8*

*prévision actualisée du projet de loi de finances pour 2018.

Source : INSEE.

2.   Un recul de la dette publique concentré sur les administrations publiques locales et de sécurité sociale

Le rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 détaille la contribution de chaque sous-secteur d’administration au désendettement public.

Évolution du ratio d’endettement par sous-secteur d’administration

(en points de PIB)

Année

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Ratio d’endettement au sens de Maastricht

96,3

96,8

96,8

97,1

96,1

94,2

91,4

Dont contribution des administrations publiques centrales (APUC)

77,3

78,5

79,5

81,4

82,0

82,0

81,3

Dont contribution des administrations publiques locales (APUL)

9,0

8,6

8,3

7,8

7,2

6,4

5,4

Dont contribution des administrations de sécurité sociale (ASSO)

10,1

9,7

9,0

7,9

6,8

5,8

4,7

Source : rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, page 34.

Le ratio de dette des administrations publiques centrales continuerait de progresser jusqu’en 2021 avec un point haut à 82 % du PIB, avant de diminuer en 2022.

Dès 2017, le ratio d’endettement des administrations publiques locales diminuerait, puis cette dynamique s’accélérerait progressivement jusqu’en 2022. Le rythme annuel moyen de diminution du ratio de dette des administrations publiques locales s’élèverait à 0,6 point de PIB.

Le ratio d’endettement des administrations de sécurité sociale diminuerait également dès 2017, avec un rythme annuel moyen de baisse de 0,9 point de PIB sur la période du quinquennat.

3.   L’application du critère de dette prévu par les textes européens

La France devrait être soumise à une règle transitoire concernant la réduction du ratio de dette publique entre 2018 et 2020, avant la pleine application des nouvelles règles du PSC relatives au critère de la dette publique ([40]). Celles-ci permettent à la France de ne pas être soumise à la procédure de déficit excessif, si son ratio de dette publique est supérieur à 60 % du PIB, mais que celui-ci « diminue suffisamment » ([41]).

La règle applicable en matière de dette publique

La réforme du pacte de stabilité et de croissance de 2011, issue du paquet législatif dit « six-pack », prévoit que la dette publique est excessive lorsqu’elle dépasse 60 % du PIB sauf si elle diminue suffisamment, c’est-à-dire si la part de la dette qui excède 60 % du PIB diminue d’au moins un vingtième par an en moyenne sur les trois dernières années*.

* Article 2 § 1 bis du règlement (CE)  1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs, dans sa version modifiée par le b) du paragraphe 2 de l’article 1er du règlement (UE)  1177/2011 du Conseil du 8 novembre 2011.

Selon la trajectoire prévue par le Gouvernement, le critère de dette imposerait une diminution moyenne du ratio de dette publique de 1,8 point de PIB par an, à compter de 2020.

II.   la poursuite de l’endettement de l’État, avec le maintien d’une charge de la dette À un faible niveau

A.   la dette de l’État poursuit sa progression

1.   Un ralentissement de la progression de l’encours de dette négociable de l’État

L’encours de la dette négociable de l’État a augmenté de 700 milliards d’euros entre 2007 et 2016, soit un rythme annuel moyen de progression de 74 milliards d’euros ([42]).

Évolution de la dette nÉgociable de l’État

(en valeur actualisée*, en milliards d’euros)

Année

Encours de dette

Augmentation annuelle

2007

920,7

44,1

2008

1 016,6

95,9

2009

1 148,0

131,4

2010

1 229,0

81

2011

1 313,0

84

2012

1 386,2

73,2

2013

1 457,2

71

2014

1 527,6

70,4

2015

1 576,4

48,8

2016

1 620,6

44,2

2017 (p)

1 696,9

76,3

2018 (p)

1 774,6

77,7

* nominal pour les titres à taux fixe ; nominal + supplément d’indexation à la date considérée pour les titres indexés.

p : prévision.

Source : INSEE et présent projet de loi de finances pour les années 2017 et 2018.

Toutefois, l’encours de la dette négociable de l’État a tendance à croître à un rythme ralenti depuis 2011. Le fort ralentissement de la progression de l’encours de dette négociable de l’État en 2015 et 2016 résulte d’une diminution du besoin de financement, en lien avec la baisse du déficit à financer et avec le niveau élevé de primes à l’émission.

2.   Le niveau et le mécanisme des primes à l’émission

Les primes à l’émission sont constatées lors de l’adjudication de titres, lorsque ces derniers proposent des taux supérieurs aux taux de marché.

Les primes et décotes à l’émission

Les émissions de titres génèrent des primes ou décotes, lorsque le taux facial de l’obligation (taux de coupon) diffère du taux issu de l’adjudication.

Ainsi, les souscripteurs versent une prime dans le cas où le taux facial est supérieur au taux d’adjudication. À l’inverse, ils bénéficient d’une décote si le taux facial de l’obligation est inférieur au taux d’adjudication.

Exemple : taux facial de l’obligation (3 %), taux issu de l’adjudication (1 %). Dans ce cas, l’émission du titre donnera lieu au versement d’une prime par les souscripteurs.

Le niveau des primes et décotes est calculé selon les méthodes actuarielles, afin de garantir, sur la durée de vie du titre, un niveau identique entre les versements issus du taux d’adjudication et le taux facial.

Les primes à l’émission s’observent principalement lors du ré-abondement de titres existants, correspondant à une politique d’émission mise en place en 2008. La réémission de titres existants permet d’éviter un trop grand nombre d’emprunts aux caractéristiques différentes et assure la liquidité des titres en circulation. En 2016, les émissions à partir de titres existants ont représenté 19 % des émissions de moyen et long terme, soit le niveau le plus faible depuis la mise en place de cette politique.

proportion des Émissions de titres à partir de titres existants

Année

Volume émis

(en milliards d’euros)

Proportion des émissions de l’année

Titres de référence*

Titres existants*

Pourcentage de titres de référence

Pourcentage de titres existants

2008

88,3

30,8

74,1 %

25,9 %

2009

102,3

64,0

61,5 %

38,5 %

2010

127,8

62,5

67,2 %

32,8 %

2011

111,6

76,1

59,5 %

40,5 %

2012

124,2

60,2

67,3 %

32,7 %

2013

127,0

48,2

72,5 %

27,5 %

2014

137,2

48,1

74,0 %

26,0 %

2015

133,6

68,6

66,1 %

33,9 %

2016

157

37

81 %

19 %

* hors titres indexés.

Source : AFT et Cour des comptes. Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2016, Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État, page 19 pour l’année 2016.

Compte tenu d’un contexte historique de faibles taux de marché, voire négatifs, les émissions de titres de l’Agence France Trésor ont toutefois donné lieu à des niveaux élevés de primes à l’émission, établis à 22,7 milliards d’euros en 2015 et 20,8 milliards d’euros en 2016.

primes À l’Émission nettes des dÉcotes

(en milliards d’euros)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017 *

2018 (p)

Primes à l’émission nettes

– 2,3

4,4

8,2

2,5

9,2

6

7,4

22,7

20,8

5,9

3

* À fin août 2017.

Source : Cour des comptes, rapports sur le budget de l’État en 2015 et en 2016.

Le présent projet de loi de finances prévoit une diminution significative du niveau des primes à l’émission au cours des exercices 2017 et 2018, en raison de la remontée des taux de marché et de la normalisation progressive de la politique monétaire de la Banque centrale européenne, qui maintenait à la baisse les taux d’intérêt. Ainsi, l’effet transitoire des primes à l’émission sur la dette devrait fortement s’amenuiser à compter de 2017.

L’effet transitoire des primes à l’émission sur la dette

Les primes à l’émission constituent des ressources de trésorerie (1), qui permettent de limiter le recours à l’endettement de l’année pour couvrir le besoin de financement de l’État. Dès lors, on constate une déconnexion temporaire entre le niveau de déficit et le niveau d’endettement.

Cependant, les primes à l’émission ont pour contrepartie le versement d’intérêts plus élevés sur la durée de vie du titre, qui augmentent la charge budgétaire de la dette sur cette période. Ainsi, la dette retrouve progressivement le niveau qu’elle aurait atteint si les émissions de titres avaient pu être réalisées exactement et systématiquement aux taux de marché, c’est-à-dire sans primes ou décotes à l’émission.

(1) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

Au sens de la comptabilité générale et de la comptabilité nationale « maastrichtienne », les primes et décotes à l’émission sont amorties de façon étalée sur toute la durée de vie du titre, la charge d’intérêt correspond dès lors au taux d’intérêt issu de l’adjudication. En revanche, la charge financière en comptabilité budgétaire correspond aux décaissements liés aux intérêts servis, conformément au taux de facial de l’obligation (taux de coupon). Ainsi, la charge de la dette est apparue plus faible en 2016 au sens de la comptabilité maastrichtienne (34,4 milliards d’euros) qu’en comptabilité budgétaire (40,3 milliards d’euros).

B.   la charge de la dette de l’État est maintenue À un niveau exceptionnellement faible

1.   Un contexte favorable à une baisse de la charge de la dette

Compte tenu de l’environnement de taux d’intérêt bas et de faibles taux d’inflation, la charge de la dette ([43]) a eu tendance à diminuer au cours des derniers exercices, malgré l’augmentation de l’encours de dette.

Ainsi, la charge de la dette a diminué de 4,9 milliards d’euros entre 2012 et 2016.

Évolution de la charge de la dette de l’État

(en milliards d’euros)

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017 (p)

2018 (p)

Charge de la dette et trésorerie de l’État

39,6

44,5

37,6

40,5

46,3

46,3

44,9

43,2

42,1

41,4

41,5

41,2

Source : lois de règlement et présent projet de loi de finances pour les années 2017 et 2018.

Le présent projet de loi de finances laisse inchangée à 41,5 milliards d’euros la prévision de charge de la dette de l’État pour l’exercice 2017. Il anticipe une réduction de la charge de la dette de l’État à 41,2 milliards d’euros en 2018.

Cela résulterait de quatre effets :

– un effet volume de + 0,7 milliard d’euros, lié à l’augmentation de l’encours de la dette négociable ;

– un effet taux de – 1,4 milliard d’euros, du fait de taux moyens issus des émissions de titres à moyen et long terme en 2017 moins élevés que ceux de la dette amortie la même année ;

– un effet inflation de + 0,1 milliard d’euros ;

– la variation de la charge due aux émissions et rachat de l’année de + 0,1 milliard d’euros.

Toutefois, la progression de l’encours de la dette de l’État et la perspective d’une remontée des taux d’intérêt rendent inéluctable un accroissement à terme de la charge de la dette.

2.   La perspective d’une remontée de la charge de la dette

L’Agence France Trésor a simulé un choc de taux de 1 % (100 points de base) sur la charge maastrichtienne de la dette négociable de l’État. Ainsi, elle relève que l’impact serait de 2,1 milliards d’euros au cours de la première année, 4,8 milliards d’euros au cours de la deuxième année et 19,1 milliards d’euros à un horizon de dix ans.

Le deuxième scénario examiné par l’Agence France Trésor consiste à étudier l’impact d’un choc de taux de 1 % simultanée à un choc de 0,5 % d’inflation. Celui-ci aurait un impact de 3,1 milliards d’euros au cours de la première année, 5,8 milliards d’euros au cours de la deuxième année et 19,6 milliards d’euros à un horizon de dix ans.

Cependant, l’impact sur le taux d’intérêt moyen de l’ensemble de la dette serait graduel, compte du refinancement progressif de la dette. En outre, le directeur général de l’agence a indiqué devant la commission des finances qu’une « augmentation de 100 points de base des taux qui serait le reflet d’une amélioration de la conjoncture économique se traduirait, de manière agrégée, par une baisse du déficit public. Il n’y aurait donc pas à s’inquiéter » ([44]).

Le Rapporteur général est attentif à la perspective d’une remontée des taux d’intérêt et de son impact sur la charge de la dette. Ces phénomènes doivent être envisagés avec sérieux et rendent d’autant plus impérieux la réduction du déficit public et le respect de la trajectoire des finances publiques prévu par le présent projet de loi de finances et le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

L’évolution de la dette de l’État et de sa charge sera étudiée plus en détail dans le cadre du rapport spécial relatif à la mission Engagements financiers de l’État annexé au présent rapport général, dont la rédaction est confiée à Mmes Dominique David et Bénédicte Peyrol, rapporteures spéciales.

 


—  1  —

   FICHE N° 6 :
Le projet de loi de finances pour 2018
dans Le contexte europÉEN

Le présent projet de loi de finances pour 2018 doit être replacé dans le contexte européen.

Les finances publiques nationales, en effet, sont soumises à des normes qui résultent des engagements européens pris par la France et font l’objet d’une surveillance par l’Union européenne (I).

Ces engagements sont mis en œuvre au niveau européen dans le cadre du cycle annuel budgétaire. La particularité afférente au cycle annuel budgétaire de cette année est que les engagements de la France ont été pris par le précédent Gouvernement et sous la législature précédente à l’occasion de la transmission du programme de stabilité au mois d’avril dernier (II).

Certes, les engagements pris par le précédent Gouvernement pour les années 2017 à 2020 tendaient à respecter l’ensemble des règles européennes sur les finances publiques. Mais ces engagements n’étaient pas documentés par des mesures concrètes.

Le Gouvernement a élaboré une nouvelle trajectoire de retour à l’équilibre contenue dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. Le présent projet de loi de finances pour 2018 en constitue la première annuité. La nouvelle trajectoire de réduction des déficits publics doit permettre à la France de sortir de la procédure de déficit excessif dès l’année prochaine. Pour préserver la croissance et pour permettre une mise en œuvre rapide du programme fiscal du Gouvernement, cette nouvelle trajectoire s’éloigne toutefois de certaines règles du volet préventif du programme de stabilité et de croissance (C).

I.   Les normes de finances publiques

Trois grandes catégories de normes chiffrées s’imposent à la France en matière de finances publiques.

A.   La norme relative au dÉficit excessif

En premier lieu, le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) prohibe les déficits excessifs évalués suivant deux critères : le déficit public et la dette publique. Le déficit public est excessif lorsqu’il dépasse 3 % du PIB. La dette publique est excessive lorsqu’elle dépasse 60 % du PIB. À défaut, l’État membre s’expose à l’ouverture d’une procédure de déficit excessif (PDE).

Le pacte de stabilité et de croissance

Le pacte de stabilité et de croissance (PSC), adopté en 1997, est entré en vigueur le 1er janvier 1999, jour de la création de l’euro. Il vise notamment à instaurer une surveillance des finances publiques nationales par l’Union européenne. Le but est d’éviter que des déficits excessifs d’un pays ne mettent en péril l’ensemble de l’économie européenne.

Le PSC est régi par deux règlements qui ont fait l’objet de plusieurs modifications :

– le règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dit « volet préventif » ;

– et le règlement (CE) n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs, dit « volet correctif ».

Le PSC a été réformé par le « six-pack », un ensemble de cinq règlements et une directive d’octobre 2011.

Le critère de dette est considéré comme respecté si celle-ci diminue suffisamment ([45]), c’est-à-dire d’au moins un vingtième par an – en moyenne sur les trois dernières années – de la fraction qui excède 60 % du PIB ([46]). Le « six-pack » de novembre 2011 prévoit une règle transitoire pour les PDE qui étaient en cours à la date de son adoption, ce qui est le cas de la France ; en vertu de cette règle transitoire, durant les trois années suivant le retour sous les 3 %, le respect du critère de dette est apprécié jusqu’en 2020 selon la progression du solde structurel, lequel doit évoluer de façon positive.

B.   La norme relative à l’Équilibre des comptes publics

En deuxième lieu, l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG) pose le principe de l’équilibre ou de l’excédent des budgets des administrations publiques. L’équilibre est réputé atteint lorsque le déficit structurel est inférieur à 0,5 point de PIB pour les États membres dont la dette dépasse 60 % du PIB, et à 1 point de PIB pour les autres États membres.

C.   La norme relative à l’ajustement structurel minimal

En troisième lieu, et pour respecter les règles précitées, les États membres doivent déterminer un objectif de moyen terme (OMT), défini en termes de solde structurel, compris entre – 0,5 point de PIB et l’excédent ([47]). Ils doivent également définir une trajectoire d’ajustement en vue d’atteindre l’OMT, étant précisé que le solde structurel doit converger vers l’OMT retenu d’au moins 0,5 point de PIB par an (et de plus de 0,5 point par an lorsque l’État membre possède une dette publique supérieure à 60 % du PIB).

La Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne peuvent cependant estimer que l’effort d’ajustement peut être plus limité en période de conjoncture économique défavorable ([48]).

Cette règle d’ajustement structurel est également encadrée par une règle en dépenses et en recettes. Ainsi, l’évolution des dépenses publiques est définie en fonction de la croissance potentielle estimée par la Commission. Enfin, les États n’ayant pas encore atteint leur OMT doivent compenser les réductions de recettes discrétionnaires par des réductions de dépenses équivalentes ([49]).

Normes de finances publiques applicables aux États membres
dont la dette publique excÈde 60 % du PIB

Normes

Modalités
de surveillance
et de sanction

Traité source

Limite du déficit structurel

à 0,5 % du PIB

Volet préventif
du PSC

TSCG

Trajectoire d’ajustement structurel supérieure

à 0,5 point de PIB par an

TSCG

+

TFUE

Limitation de l’augmentation annuelle des dépenses au taux de croissance potentielle sauf compensation par des mesures discrétionnaires en matière de recettes

Compensation des réductions de recettes par des réductions de dépenses (règle applicable aux États n’ayant pas encore atteint leur objectif budgétaire de moyen terme)

Réduction de la dette publique qui excède 60 % du PIB d’au moins un vingtième par an en moyenne sur trois ans

Volet correctif

du PSC

« Procédure pour déficit excessif »

Limite du déficit nominal

à 3 % du PIB

TFUE

Source : commission des finances.

II.   Le cycle annuel budgÉtaire

La surveillance des finances publiques (A) se déroule dans le cadre du cycle annuel budgétaire qui se décompose en un semestre européen (B) et un semestre national (C).

A.   Le cadre juridique de la surveillance des finances publiques

Le PSC constitue l’armature juridique de la surveillance des finances publiques. Il comporte un volet préventif et un volet correctif, tous deux assortis d’un régime de sanctions.

1.   Le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance

Le volet préventif s’articule autour du programme de stabilité (États de la zone euro) ou de convergence (États hors zone euro) que les États membres doivent transmettre à la Commission avant le 30 avril. Ces programmes font l’objet d’une évaluation et d’un suivi par les instances européennes.

a.   L’obligation d’élaborer un programme de stabilité ou de convergence

Les États membres déterminent, dans leur programme de stabilité ou de convergence, un OMT et une trajectoire d’ajustement, ainsi que les moyens mis en œuvre pour atteindre ces différents objectifs.

L’article 2 de la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 avait fixé un OMT de – 0,4 point de PIB pour 2019. Le programme de stabilité d’avril 2017 prévoyait également d’atteindre cet OMT en 2019 avec un ajustement structurel de 0,5 point par an sur la période 2017-2019.

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 fixe aussi un OMT de – 0,4 point de PIB mais pas la date de sa réalisation.

Ces programmes doivent reposer sur un scénario macroéconomique plausible.

Contenu obligatoire d’un programme de stabilitÉ ou de convergence

Objectif de moyen terme (OMT)

Solde structurel compris entre – 0,5 point de PIB et l’excédent

Trajectoire d’ajustement

− Au moins 0,5 point de PIB

− Supérieure à 0,5 point de PIB lorsque la dette publique est supérieure à 60 % du PIB

Moyens mis en œuvre

− Cadrage économique comprenant les principales hypothèses concernant l’évolution prévisible de l’économie et les variables économiques importantes

− Description des mesures budgétaires et des autres mesures de politique économique qui sont mises en œuvre et/ou envisagées pour réaliser les objectifs du programme

− Analyse de l’incidence que tout changement des principales hypothèses économiques aurait sur la situation budgétaire et la dette

Source : commission des finances.

En France, contrairement à d’autres États de l’Union européenne, le programme de stabilité ne fait pas l’objet d’un vote obligatoire par le Parlement.

b.   L’évaluation et le suivi des programmes de stabilité ou de convergence

La conformité de la trajectoire de chaque État membre au regard des recommandations européennes est évaluée dans les trois mois par la Commission européenne. L’État membre peut être invité à modifier son programme si le Conseil de l’Union européenne, agissant sur recommandation de la Commission, adopte une recommandation en ce sens ([50]).

Par ailleurs, durant la phase d’exécution, la Commission peut adresser aux États membres un avertissement en cas d’écart important par rapport à la trajectoire d’ajustement. Le Conseil peut alors adopter des recommandations lesquelles peuvent donner lieu, en l’absence d’actions suivies d’effet de la part de l’État membre, à des sanctions ([51]) consistant en un dépôt portant intérêts de 0,2 % du PIB.

À ce jour, la France n’a jamais fait l’objet d’un avertissement par la Commission européenne au titre d’un écart important entre la trajectoire d’ajustement transmise et la trajectoire exécutée. La France n’est donc pas exposée, à ce stade, à des sanctions au titre du volet préventif du PSC.

2.   Le volet correctif du pacte de stabilité et de croissance

L’ouverture d’une PDE est décidée par le Conseil de l’Union européenne sur recommandation de la Commission. L’État membre doit prendre des actions suivies d’effet et en rendre compte régulièrement à la Commission. En l’absence d’actions suivies d’effet, l’État membre peut être mis en demeure par le Conseil de corriger son déficit excessif et d’améliorer chaque année son solde structurel d’au moins 0,5 % du PIB ([52]). À l’issue de la procédure et en l’absence d’actions suivies d’effet, l’État membre s’expose à des sanctions pouvant aller de 0,2 % à 0,5 % du PIB ([53]).

La surveillance des finances publiques dans le cadre du PSC

Volet Préventif

Orientations du Conseil

Le Conseil adopte ses orientations généralement en février sur la base de l’examen annuel de la croissance élaboré par la Commission

Programme de stabilité ou programme de convergence

Ces programmes sont transmis par les États membres à la Commission avant le 30 avril

Évaluation et suivi

− Les programmes sont évalués dans les trois mois de leur transmission

− Un avertissement et des recommandations peuvent être adoptés en cas d’écart important avec la trajectoire d’ajustement

Volet correctif

Ouverture de la procédure pour déficit excessif

Sur décision du Conseil, agissant sur recommandations de la Commission, le Conseil adopte des recommandations en vue de la correction du déficit excessif

Actions suivies d’effet

− L’État membre remet un rapport sur les actions suivies d’effet qu’il a entreprises en vue de remédier au déficit excessif

− La Commission évalue les actions suivies d’effet

Mise en demeure

En l’absence d’actions suivies d’effet, le Conseil peut, sur recommandation de la Commission, adresser une mise en demeure

Sanctions

Sanction du volet préventif

Dépôt portant intérêts de 0,2 % du PIB

Sanctions du volet correctif

Dépôt ne portant pas intérêts de 0,2 % du PIB, voire amendes de 0,2 % du PIB à 0,5 % du PIB si l’État membre enfreint à plusieurs reprises les règles du volet correctif

Source : commission des finances.

B.   Le semestre europÉEN

1.   Contenu du semestre européen

Le semestre européen, instauré en 2011, est une période d’environ six mois qui permet un dialogue économique entre les instances européennes et les États membres. Son objet est de coordonner et de surveiller les politiques économiques et budgétaires des États membres ainsi que leurs réformes structurelles.

À ce titre, le semestre européen regroupe trois types de procédure de coordination.

Les trois axes de la coordination des politiques des États membres
durant le semestre europÉEN

Objet de la coordination

Cadre juridique de la coordination

réformes structurelles

stratégie « Europe 2020 »

politiques budgétaires – finances publiques

pacte de stabilité et de croissance (PSC)

politiques économiques

prévention des déséquilibres macroéconomiques (PDM)

Source : commission des finances.

Le semestre européen comprend ainsi ([54]) :

– la formulation et la surveillance de la mise en œuvre des grandes orientations des politiques économiques (GOPÉ) dans l’examen annuel de la croissance auquel procède la Commission européenne ;

– la formulation, et l’examen de la mise en œuvre, des lignes directrices pour l’emploi ;

– la présentation et l’évaluation des programmes de stabilité ou de convergence des États membres ;

– la présentation et l’évaluation des programmes de réforme nationaux des États membres ;

– la surveillance pour prévenir et corriger les déséquilibres macroéconomiques.

2.   Calendrier du semestre européen

a.   Novembre de l’année N-1

Le semestre européen est lancé par la Commission européenne avec la publication d’une série de documents (le « paquet » de novembre) qui sert de base à la discussion.

Le document le plus important est l’« examen annuel de la croissance » qui expose les grandes orientations des politiques économiques. Il est soumis à l’examen des autres institutions et alimente les discussions préalables au Conseil européen de printemps.

Novembre 2016 : le « triangle vertueux » prôné par la Commission européenne

Le 16 novembre 2016, la Commission européenne a publié son « examen annuel de la croissance 2017 » (1).

Ce document présente peu de nouveautés par rapport aux constats formulés les années précédentes. La Commission européenne a, de nouveau, invité les États membres à fonder leurs politiques économiques autour de trois priorités qu’elle qualifie de « triangle vertueux » : la relance de l’investissement, la poursuite des réformes structurelles et la conduite de politiques budgétaires responsables.

La stimulation de l’investissement nécessite, selon la Commission européenne, une amélioration du fonctionnement du secteur financier, une mobilisation accrue du Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI), ainsi qu’une levée de certains obstacles résultant de réglementations sectorielles et du fonctionnement des marchés du travail et des produits.

Les réformes structurelles prioritaires doivent porter, selon la Commission européenne, sur le marché du travail, la formation et la modernisation de l’État providence.

Au titre des politiques budgétaires, la Commission européenne appelle à des politiques différenciées selon la situation financière de l’État membre. Elle plaide pour que « les États membres disposant d’une marge de manœuvre budgétaire » utilisent « les moyens disponibles pour contribuer à stabiliser la demande ». Inversement, elle estime que « les États membres ne bénéficiant pas d’une telle marge devraient respecter les exigences du pacte de stabilité et de croissance ».

(1) Commission européenne, Examen annuel de la croissance 2017, 16 novembre 2016 (lien).

b.   Février de l’année N

La Commission publie, ensuite, en février, une série de rapports par pays analysant les politiques économiques des États membres.

Dans son rapport 2017 pour la France ([55]), la Commission européenne souligne les progrès accomplis par la France en matière de finances publiques. Elle relève, outre, la diminution du déficit public, que « la viabilité des régimes de retraite a été améliorée » et que « la réforme territoriale a créé un cadre permettant la réalisation de gains d’efficacité à l’échelon local ».

Toutefois, elle considère que les progrès sont plus limités « en ce qui concerne le renforcement et le recensement des économies et des gains d’efficacité générés par les revues de dépenses et les évaluations des politiques publiques ». Selon elle, les mesures budgétaires adoptées à la suite de ces revues « ont eu un rendement limité et n’ont pas permis jusqu’à présent d’améliorer sensiblement l’efficacité des dépenses publiques ».

L’analyse de la situation économique de la France

Dans son rapport 2017 pour la France (1), la Commission européenne constate que la croissance a légèrement diminué passant de 1,3 % en 2015 à 1,2 % en 2016. Elle prévoit une légère reprise de la croissance économique, avec une progression du produit intérieur brut (PIB) en volume de 1,4 % en 2017 et 1,7 % en 2018. Elle estime toutefois qu’« à long terme, la croissance devrait rester modérée, car la croissance potentielle de la France a baissé depuis la crise financière de 2008 ». Elle évalue la croissance potentielle de la France à seulement 1,2 % pour 2017 et 1,3 % pour 2018, au lieu de 1,1 % pour 2016. Il s’ensuit que, selon la Commission européenne, l’écart de production devrait se résorber en grande partie en 2017 et 2018.

Elle souligne, en particulier, que les « résultats à l’exportation restent modestes », la balance commerciale ayant contribué négativement à la croissance pour près d’un point de PIB en 2016.

À politiques inchangées, elle prévoit un déficit public de 2,9 % du PIB en 2017 et de 3,1 % en 2018. Elle anticipe une amélioration du solde structurel limitée à 0,2 point pour 2017.

(1) Commission européenne, Rapport 2017 pour la France, 22 février 2017 (lien).

c.   Conseils européens de printemps

Sur ces différentes bases, le Conseil européen définit les lignes directrices de l’Union européenne dont les États membres doivent tenir compte. Il peut également transmettre des orientations à certains membres.

Contrairement à l’année 2015, le Conseil européen n’a pas adressé de recommandations spécifiques à la France. Il a, en revanche, formulé des recommandations en vue d’améliorer la coordination des politiques économiques au sein de la zone euro ([56]).

Les recommandations concernant la politique économique de la zone euro

Le 10 mars 2017, sur la base des recommandations de la Commission, le Conseil de l’Union européenne a recommandé des politiques différenciées selon la situation macroéconomique de l’État membre. Ainsi, il a été recommandé :

– que les États membres qui présentent un déficit de la balance courante ou une dette extérieure élevée accroissent la productivité tout en contenant l’évolution des coûts salariaux unitaires ;

– qu’inversement, les États membres dont la balance courante affiche un excédent important mettent en œuvre en priorité des mesures, y compris des réformes structurelles et des mesures favorisant l’investissement, qui contribuent à renforcer leur demande intérieure et leur potentiel de croissance.

L’intérêt de cette analyse est d’appréhender la zone euro comme une entité économique globale afin de mieux coordonner les politiques budgétaires et économiques des États membres.

d.   Avril de l’année N

Les États membres de la zone euro transmettent ensuite, avant la fin avril, aux autorités européennes leur programme de stabilité (ou programme de convergence pour les autres États membres), ainsi que leur programme national de réforme.

le rÔle des États membres durant le semestre europÉEN

Document transmis par les États membres

Objet de la coordination

Programme de stabilité ou de convergence

Politiques budgétaires

Programme national de réforme

Politiques économiques et réformes structurelles

Source : commission des finances.

Le programme de stabilité de la France a été transmis en avril par le précédent Gouvernement. Il fixe des objectifs ambitieux tendant à respecter l’ensemble des engagements européens de la France mais il n’indique pas le détail des mesures à mettre en œuvre pour atteindre ces objectifs.

Objectifs de finances publiques du programme de stabilitÉ

(en % du PIB)

Année

2017

2018

2019

2020

Trajectoire de solde public

– 2,8

– 2,3

– 1,6

– 1,3

Trajectoire de déficit structurel

– 1,0

– 0,5

0,0

0,0

Trajectoire d’ajustement structurel

0,5

0,5

0,5

0,0

Trajectoire de dette publique

96,0

95,9

94,7

93,1

Source : programme de stabilité pour les années 2017 à 2020.

Ces objectifs devaient conduire :

– à sortir de la PDE par un retour du déficit public sous la barre des 3 % du PIB dès 2017 ;

– à respecter la règle, prévue par le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance (PSC), d’ajustement structurel minimal de 0,5 point de PIB tant que l’OMT n’est pas atteint ;

– et à atteindre, en 2019, l’équilibre structurel des comptes c’est-à-dire l’OMT (« règle d’or ») prévu par le TSCG.

Les objectifs ainsi définis avaient pour but de conformer la France à l’ensemble de ses engagements européens dès 2019.

Pour autant, la trajectoire d’ajustement structurel retenue par le précédent Gouvernement était moins contrainte que celle recommandée par le Conseil de l’Union européenne le 10 mars 2015. Ce dernier avait en effet recommandé un ajustement structurel de 0,9 point de PIB pour 2017. Le Gouvernement précédent avait décidé de ne pas suivre cette recommandation en raison de ses effets potentiellement récessifs.

e.   Mai de l’année N

La Commission publie ses recommandations stratégiques par pays en se fondant sur son évaluation des situations économiques et des programmes nationaux.

Par recommandation du 22 mai 2017, la Commission européenne a proposé au Conseil d’adresser un certain nombre de recommandations à la France ([57]).

Dans ce document, la Commission européenne rappelle que, selon ses prévisions du printemps 2017, le déficit nominal de la France devrait atteindre 3 % du PIB en 2017, « ce qui dépasse l’objectif recommandé par le Conseil ». Pour 2018, dans l’hypothèse de politiques inchangées, le déficit nominal « devrait atteindre 3,2 % du PIB » ce qui « suggère des risques entourant la correction durable du déficit excessif ».

Elle estime en conséquence que « la France doit se tenir prête à prendre des mesures supplémentaires pour assurer le respect des dispositions du pacte de stabilité et de croissance en 2017 et que des mesures supplémentaires seront nécessaires à partir de 2018 en vue de respecter ces dispositions ».

En résumé, la Commission européenne a recommandé à la France :

– sur le plan budgétaire, de réduire les dépenses publiques afin de ramener le déficit public sous la barre des 3 % du PIB dès 2017, d’accomplir d’importants efforts budgétaires pour 2018 et de réexaminer de manière exhaustive les différents postes de dépenses ;

– sur le plan fiscal, de baisser l’impôt sur les sociétés et de réduire les dépenses fiscales ;

– sur le plan social, de contenir les hausses du SMIC à proportion de la hausse de la productivité, et d’améliorer l’accès au marché du travail ;

– sur le plan réglementaire, d’alléger les normes applicables aux entreprises et d’accroître la concurrence en éliminant les obstacles à l’activité des professions réglementées.

Recommandation de recommandation du conseil concernant le programme national de réforme de la France pour 2017 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2017 (extraits)

« RECOMMANDE que la France s’attache, au cours de la période 2017-2018, à :

« 1. se conformer à la recommandation du conseil du 10 mars 2015 au titre de la procédure concernant les déficits excessifs. Poursuivre ensuite une politique budgétaire conforme aux exigences du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance, qui se traduise par d’importants efforts budgétaires pour 2018. Lors de l’adoption de mesures, il convient de prendre en considération l’objectif d’une orientation budgétaire qui contribue aussi bien à conforter la reprise actuelle qu’à garantir la viabilité des finances publiques de la France. Réexaminer de manière exhaustive les postes de dépenses dans le but de réaliser des gains d’efficacité qui se traduisent par des réductions de dépenses ;

« 2. consolider les mesures de réduction du coût du travail afin d’optimiser leur efficacité de manière budgétairement neutre et d’accroître leurs effets sur l’emploi et l’investissement ; élargir l’assiette globale de l’impôt et poursuivre la mise en œuvre de la diminution prévue du taux nominal de l’impôt sur les sociétés ;

« 3. améliorer l’accès au marché du travail des demandeurs d’emploi, notamment les travailleurs les moins qualifiés et les personnes issues de l’immigration, y compris en revoyant le système d’enseignement et de formation professionnels ; veiller à ce que les évolutions du salaire minimum soient compatibles avec la création d’emplois et la compétitivité ;

« 4. poursuivre la réduction des charges réglementaires pesant sur les entreprises, y compris en poursuivant le programme de simplification ; continuer à lever les barrières à la concurrence dans le secteur des services, y compris dans les services aux entreprises et les professions réglementées ; simplifier les programmes de soutien public à l’innovation et en améliorer l’efficience. »

f.   Juin et juillet de l’année N

Enfin, le Conseil adopte ses recommandations par pays en juin ou juillet, lesquels constituent l’aboutissement du semestre européen.

Le Conseil européen du 23 juin 2017 a ainsi approuvé les recommandations de la Commission européenne adressées à la France, ce qui a permis de clôturer le semestre européen 2017 ([58]).

L’institution d’un semestre européen a indéniablement amélioré la coopération entre les États membres et les institutions européennes, tout en renforçant le caractère multilatéral du processus.

C.   Le semestre national

À l’issue du semestre européen, les États membres doivent élaborer leur budget, selon leurs règles propres, en tenant compte des orientations de l’Union européenne.

Le semestre national est, du point de vue des procédures européennes, régit par le « two-pack » ([59]), c’est-à-dire un ensemble de deux règlements du 21 mai 2013 qui ont été adoptés en vue de renforcer la surveillance budgétaire de la zone euro :

– le règlement (UE) du Parlement européen et du Conseil n° 472/2013 du 21 mai 2013 qui a organisé une surveillance renforcée des États membres qui sollicitent une aide multilatérale ;

– et le règlement (UE) du Parlement européen et du Conseil n° 473/2013 du 21 mai 2013 qui a prévu l’obligation pour les États membres de se doter d’un organisme indépendant pour évaluer les hypothèses macroéconomiques des stratégies budgétaires.

Ce règlement a également transformé le semestre européen en un cycle budgétaire annuel, ce qui permet un approfondissement de l’échange d’informations et de la coordination entre les États membres et les institutions européennes.

Les États membres doivent ainsi envoyer leur « plan budgétaire » pour l’année suivante avant le 15 octobre. Les États membres faisant l’objet d’une procédure pour déficit excessif doivent également présenter un « programme de partenariat économique », conformément au TSCG. Ce programme décrit les mesures et les réformes structurelles engagées pour assurer une correction durable des déficits excessifs ([60]).

Documents à transmettre À la Commission europÉenne
avant le 15 octobre

Documents

Cadre juridique

Plan budgétaire

Suivi de la mise en œuvre du programme de stabilité

Programme de partenariat économique

Procédure pour déficits excessifs

Source : commission des finances.

La Commission donne son avis avant le 30 novembre et demande, le cas échéant, des modifications.

L’année dernière, la France avait communiqué à la Commission européenne comme plan budgétaire le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2017. Ce plan budgétaire a été jugé « globalement conforme » aux dispositions du PSC par la Commission européenne.

Commission européenne, 16 novembre 2016 (lien).

Pour ce qui est des États membres faisant l’objet d’une procédure de déficit excessif, l’avis de la Commission évalue si la correction du déficit est conforme aux recommandations du Conseil de l’Union européenne.

Cette évaluation se fait également sur la base d’un rapport sur l’action engagée en réponse à la recommandation issue de la procédure de déficit excessif, transmis par le pays concerné.

L’Eurogroupe, qui réunit les ministres des finances des États membres de la zone euro, examine, ensuite, les avis sur les projets de plans budgétaires ainsi que la situation et les perspectives budgétaires pour la zone euro dans son ensemble, sur la base d’une évaluation réalisée par la Commission, afin de disposer d’une vision agrégée du contexte budgétaire de la zone.

L’État membre transmet, enfin, sa loi de finances à la Commission avant la fin de l’année.

III.   La nouvelle trajectoire des finances publiques

La nouvelle trajectoire des finances publiques doit permettre une clôture de la procédure de déficit excessif dès l’année prochaine (A). Mais elle ne respecte pas certaines règles du volet préventif du programme de stabilité et de croissance (B).

Nouvelle trajectoire des finances publiques

(en points de PIB)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde effectif

– 2,9

– 2,6

– 3,0

– 1,5

– 0,9

– 0,2

Solde conjoncturel

– 0,6

– 0,4

– 0,1

0,1

0,3

0,6

Mesures ponctuelles
et temporaires

– 0,1

– 0,1

– 1,0

– 0,1

– 0,1

0,0

Solde structurel

– 2,2

– 2,1

– 1,8

– 1,6

– 1,2

– 0,8

Dette

96,8

96,8

97,1

96,1

94,2

91,4

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

A.   L’objectif de clÔture de la procÉdure de dÉficit excessif

La France avait déjà fait l’objet d’une PDE au titre des années 2002 à 2004. Elle fait l’objet d’une seconde PDE depuis le 27 avril 2009. Le Conseil de l’Union européenne avait alors accordé un délai à la France jusqu’en 2012 pour corriger son déficit.

Le dÉficit public de la France depuis 1999

(en % du PIB)

Année

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

PDE

Solde

– 1,6

– 1,3

– 1,4

– 3,1

– 3,9

– 3,5

– 3,2

– 2,3

– 2,5

– 3,2

 

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

PDE

Solde

– 7,2

– 6,8

– 5,1

–4,8

– 4,0

– 3,9 

– 3,6

– 3,4

– 2,9*

* prévision actualisée du présent projet de loi.

Source : INSEE.

Le 2 décembre 2009, le Conseil a prorogé le délai accordé à la France pour corriger son déficit jusqu’en 2013. Le 21 juin 2013, ce délai a été reporté à 2015. Enfin, le 10 mars 2015, ce délai a été porté à 2017.

L’Espagne est actuellement le dernier pays de la zone euro à faire l’objet d’une PDE avec la France. Rappelons qu’au plus fort de la crise, au titre de l’année 2010, 15 États de la zone euro ont fait l’objet simultanément d’une PDE.

Le Gouvernement a présenté une nouvelle trajectoire de finances qui doit permettre à la France de sortir de la PDE dès 2018 au titre de l’année 2017.

trajectoire de rÉduction du solde public

(en % du PIB)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde public

– 2,9

– 2,6

– 3,0

– 1,5

– 0,9

– 0,2

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Le présent projet de loi de finances prévoit en effet que le déficit public sera inférieur à 3 % du PIB tant en 2017 (2,9 %) qu’en 2018 (2,6 %).

Certes, il est prévu dans la nouvelle programmation un déficit public de 3 % du PIB en 2019. Mais celui-ci serait dû à hauteur d’un point de PIB à une mesure ponctuelle et temporaire que la Commission européenne devrait accepter de ne pas prendre en compte pour l’appréciation du niveau du déficit public. Il s’agit de la transformation du CICE en allégements de cotisations sociales patronales.

B.   L’ajustement structurel en DEÇÀ des rÈgles du volet prÉventif

La trajectoire proposée ne prévoit pas de retour à l’équilibre structurel à la fin du quinquennat alors que les programmations précédentes prévoyaient de respecter la règle d’équilibre prévue par le TSCG dès 2019.

Évolution du solde structurel et ajustement structurel

(en points de PIB potentiel)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde structurel

– 2,2

– 2,1

– 1,8

– 1,6

– 1,2

– 0,8

Ajustement structurel

0,2

0,1

0,3

0,3

0,4

0,4

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

L’ajustement structurel serait ainsi inférieur à la cible minimale de 0,5 % résultant du volet préventif du PSC. Pour 2018, le présent projet de loi de finances prévoit un ajustement structurel limité de 0,1 point.

Comparaison des trajectoires d’ajustement structurel

(en % de PIB)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Loi de programmation des finances publiques 2014-2019

0,5

0,5

0,6

Programme de stabilité 2017-2020

0,5

0,5

0,5

0,0

Projet de loi de programmation des finances publiques 2014-2019

0,2

0,1

0,3

0,3

0,4

0,4

Source : commission des finances.

Dans son avis sur le présent projet de loi, le HCFP a constaté « que les ajustements structurels prévus pour 2017 et 2018, qui seront soumis à l’appréciation de la Commission, ne sont pas conformes aux dispositions de l’article 5 du règlement européen n° 1466/97, qui prévoient un ajustement structurel supérieur à 0,5 point de PIB » ([61]).

La Commission européenne devra donner son avis sur la conformité du plan budgétaire de la France pour 2018 avant le 30 novembre de cette année. S’il est probable qu’elle constate un ajustement structurel inférieur aux règles du volet préventif du PSC, il est aussi probable qu’elle juge, comme l’an dernier, le projet budgétaire de la France « globalement conforme » au regard notamment des réformes structurelles qui ont été mises en œuvre et qui sont prévues.

 


—  1  —

   FICHE N° 7 :
Le dÉficit de l’État

Le déficit budgétaire de l’État est prévu pour 2018 à 82,9 milliards d’euros par l’article 28 du présent projet de loi de finances (I).

Le déficit de l’État, en comptabilité nationale, est toutefois moins important, puisqu’il est évalué à 75,5 milliards d’euros par le Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances (II).

La distinction entre comptabilité nationale et comptabilité budgétaire

La comptabilité budgétaire est destinée à enregistrer et suivre l’exécution des opérations du budget de l’État. La tenue d’une comptabilité budgétaire est prévue par l’article 27 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Il s’agit d’une comptabilité de trésorerie. L’article 28 de la LOLF précise ainsi que « les recettes sont prises en compte au titre du budget de l’année au cours de laquelle elles sont encaissées » et que « les dépenses sont prises en compte au titre du budget de l’année au cours de laquelle elles sont payées ». La LOLF prévoit une nomenclature des comptes du budget de l’État (budget général, budgets annexes et comptes spéciaux), une nomenclature par destination (mission, programme, action, sous-action) et une nomenclature par nature (titres, catégories).

La comptabilité nationale s’inscrit dans un champ d’analyse sensiblement plus vaste. Elle s’appréhende comme une représentation quantifiée du fonctionnement et des résultats d’une économie nationale. Il s’agit d’une comptabilité d’engagements établie selon les règles du système européen de comptes nationaux et régionaux (SEC 2010) résultant du règlement (UE) n° 549/2013 du 21 mai 2013 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans l’Union européenne. Les agrégats relatifs aux administrations publiques, et notamment celui relatif à leur besoin de financement (déficit), jouent un rôle essentiel dans le cadre de la surveillance des finances publiques au niveau européen.

I.   Le dÉficit budgÉtaire de l’État

Le déficit budgétaire de l’État a diminué chaque année de 2009 à 2016. Il a été divisé par deux sur cette période, passant de 138 milliards à 69,1 milliards d’euros.

Il se redresse toutefois en 2017 à hauteur de 7,4 milliards d’euros selon la prévision actualisée du présent projet de loi de finances. La hausse du déficit budgétaire de l’État devrait se poursuivre en 2018 à hauteur de 6,4 milliards d’euros supplémentaires. Sur la période 2016-2018, le déficit budgétaire de l’État s’aggraverait donc de 13,8 milliards d’euros.

Le dÉficit budgÉtaire de l’État depuis 2009

(en milliards d’euros)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Déficit budgétaire

138,0

113,8*

90,7

87,2

74,9

73,6*

70,5

69,1

76,5

82,9

* hors programmes d’investissements d’avenir (PIA).

Source : lois de règlement et présent projet de loi de finances.

A.   Formation du solde budgÉtaire de l’État

Le solde budgétaire de l’État est constitué par la somme du solde du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux.

En 2016, pour le budget général, les dépenses nettes, y compris les prélèvements sur recettes, se sont élevées à 376,2 milliards d’euros et les recettes nettes à 300,3 milliards. Le solde des budgets annexes et des comptes spéciaux était positif à hauteur de 6,8 milliards d’euros. Le déficit budgétaire de l’État ressortait ainsi à 69,1 milliards d’euros.

exÉcution 2016

(en milliards d’euros)

Dépenses (I)

376,2

Recettes (II)

300,3

Dépenses nettes du budget général

hors prélèvement sur recettes (PSR)

310,7

Recettes fiscales nettes

284,1

PSR au profit de l’Union européenne

19,0

Recettes non fiscales

16,2

PSR au profit des collectivités territoriales

46,5

Soldes des budgets annexes et comptes spéciaux (III)

+ 6,8

Déficit à financer

(I  II  III)

69,1

Source : loi de règlement pour 2016.

En 2017, le déficit budgétaire devrait progresser sous l’effet d’une augmentation des dépenses plus importantes que celle des recettes.

prÉvision actualisÉe pour 2017

(en milliards d’euros)

Dépenses (I)

384,8

Recettes (II)

303,1

Dépenses nettes du budget général

hors prélèvement sur recettes (PSR)

322,4

Recettes fiscales nettes

290,1

PSR au profit de l’Union européenne

17,9

Recettes non fiscales

13,0

PSR au profit des collectivités territoriales

44,5

Soldes des budgets annexes et comptes spéciaux (III)

+ 5,2

Déficit à financer

(I  II  III)

76,5

Source : présent projet de loi de finances.

Le déficit désormais prévu pour 2017 est supérieur à 7,2 milliards d’euros à celui prévu par la loi de finances initiale (69,3 milliards d’euros). L’écart provient notamment des dépassements sur diverses sous-budgétisations (2,4 milliards d’euros) et des recapitalisations des entreprises du secteur de l’énergie (2,1 milliards d’euros).

En 2018, les dépenses de l’État continueraient de progresser tandis que les recettes sont prévues en baisse.

prÉvision 2018

(en milliards d’euros)

Dépenses (I)

386,3

Recettes (II)

302,0

Dépenses nettes du budget général

hors prélèvement sur recettes (PSR)

325,8

Recettes fiscales nettes

288,8

PSR au profit de l’Union européenne

20,2

Recettes non fiscales

13,2

PSR au profit des collectivités territoriales

40,3

Soldes des comptes spéciaux (III)

+ 1,4

Déficit à financer

(I  II  III)

82,9

Source : présent projet de loi de finances.

B.   Les principales Évolutions par rapport À 2017

La dégradation du solde budgétaire en 2018 par rapport à 2017 s’explique ainsi par :

– une augmentation des dépenses de 1,5 milliard d’euros (voir fiche Dépenses de l’État) ;

– une diminution des recettes de 1,1 milliard d’euros (voir fiche Recettes de l’État) ;

– et une dégradation du solde annuel des comptes spéciaux de 3,8 milliards d’euros.

passage du solde 2017 actualisÉ au solde plf 2018

(en milliards d’euros)

 

2017

Prévision actualisée

Variation

2018

PLF

 

2017

Prévision actualisée

Variation

2018

PLF

Dépenses (I)

384,8

+ 1,5

386,3

Recettes (II)

303,1

 1,1

302,0

Dépenses nettes du budget général (hors PSR)

322,4

+ 3,4

325,8

Recettes fiscales nettes

290,1

– 1,3

288,8

Prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne

17,9

+ 2,3

20,2

Recettes non fiscales

13,0

+ 0,2

13,2

Prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales

44,5

– 4,2

40,3

Soldes des comptes spéciaux (III)

+ 5,2

 3,8

+ 1,4

Déficit à financer

(I  II  III)

76,5

+ 6,4

82,9

Source : commission des finances.

Les principaux facteurs d’évolution sur les recettes et les dépenses sont rappelés ici et détaillés dans les autres parties du présent rapport.

S’agissant des recettes, la baisse résulte de diminutions d’impôt dont le montant est supérieur à l’évolution spontanée du rendement. Les finances de l’État devraient perdre environ 10 milliards d’euros en 2018 par rapport à 2017 au titre des mesures fiscales dont 5,6 milliards d’euros au titre de mesures nouvelles prévues par le présent projet de loi de finances, et environ 4,5 milliards d’euros au titre de mesures prises sous la précédente législature.

effet des Principales mesures nouvelles sur les recettes de l’État en 2018

(en milliards d’euros)

Mesures

Rendement

Création de l’impôt sur la fortune immobilière en remplacement de l’impôt sur la fortune

– 3,2

Suppression de la contribution de 3 % sur les dividendes distribués

– 1,9

Mise en place d’un prélèvement forfaitaire unique (PFU)

– 1,3

Baisse du taux de l’impôt sur les sociétés

– 1,2

Alignement de la fiscalité du gazole sur l’essence

+ 0,8

Hausse de la composante carbone

+ 1,1

Total

 5,6

Source : Rapport économique, social et financier.

effet des Principales mesures antÉrieures sur les recettes de l’État en 2018

(en milliards d’euros)

Mesures

Rendement

Montée en charge et hausse du taux du CICE

– 4,1

Élargissement du crédit d’impôt pour l’emploi de personnes à domicile

– 1,0

Source : Rapport économique, social et financier.

S’agissant des dépenses, les principaux facteurs de hausse sont la rebudgétisation de la contribution exceptionnelle de solidarité (1,5 milliard d’euros) et la dynamique du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne (2,3 milliards d’euros).

II.   Le dÉficit en comptabilitÉ nationale

A.   Le passage du solde en comptabilitÉ budgÉtaire au solde en comptabilitÉ nationale

Plusieurs retraitements – exposés dans le Rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances – sont nécessaires pour passer du solde budgétaire (– 82,9 milliards d’euros) au solde en comptabilité nationale (– 75,5 milliards d’euros).

Cinq opérations expliquent la majeure partie de l’écart de 7,4 milliards d’euros entre les deux soldes.

ClÉs de passage du solde en comptabilitÉ budgÉtaire
au solde en comptabilitÉ nationale

Les retraitements qui dégradent le solde en comptabilité nationale

Les retraitements qui améliorent le solde en comptabilité nationale

Crédits d’impôts reportés (principalement le CICE)

– 2,2

Intérêts d’emprunt résultant de primes d’émission

+ 6,9

Remboursement de la dette de l’État à l’égard d’EDF

+ 1,6

Contentieux précompte mobilier

– 0,8

Prêts à des États étrangers

+ 1,4

Source : Rapport économique, social et financier.

Certaines recettes budgétaires ne sont pas considérées comme des recettes publiques.

Par exemple, 0,8 milliard d’euros de recettes au titre du contentieux relatif au précompte mobilier ont été soustraites en comptabilité nationale, malgré leur encaissement en comptabilité budgétaire, dans l’attente d’un jugement définitif de la Cour de justice de l’Union européenne.

Par ailleurs, certaines dettes de l’État sont traitées en dépenses publiques alors qu’elles ne donnent pas lieu immédiatement à des dépenses budgétaires.

Ainsi, les crédits d’impôt reportés sont considérés comme des dépenses publiques alors qu’ils ne sont pas comptabilisés en dépense budgétaire tant qu’ils n’ont pas été restitués ou imputés. Ceci conduit à majorer les dépenses de 2,2 milliards d’euros en comptabilité nationale par rapport à la comptabilité budgétaire, essentiellement en raison du CICE.

Certaines dépenses budgétaires ne sont pas des dépenses publiques.

Tel est le cas principalement des intérêts majorés versés en contrepartie des primes d’émission lors de l’adjudication de la dette du Trésor. Le solde en comptabilité nationale est amélioré de 6,9 milliards d’euros à ce titre en 2018.

De même, le remboursement de la dette de l’État à l’égard d’EDF, à hauteur de 1,6 milliard d’euros – qui donne lieu à des crédits de paiement sur le compte d’affectation spéciale Transition énergétique – ne constitue pas une dépense publique puisqu’elle éteint un passif.

Il va de même des prêts que la France accorde à des États étrangers (1,4 milliard d’euros). Ces dépenses budgétaires ouvrent droit à des créances et ne sont donc pas comptabilisées en dépenses publiques.

B.   la part de l’État dans le dÉficit public

Le déficit de l’État en comptabilité nationale demeure constant aux environs de 75 milliards d’euros depuis 2014 alors que le déficit public s’est réduit sur la même période.

PART DE L’État dans le dÉficit public depuis 2012

 

Année

Toutes administrations publiques confondues

(en milliards d’euros)

 

Part État

En milliards d’euros

En %

2012

– 100,4

– 81,6

81,2

2013

– 85,4

– 69,6

81,5

2014

– 84,4

– 74,6

88,3

2015

– 78,7

– 71,6

91,0

2016

– 75,9

– 74,1

97,6

 

 

Année

Toutes administrations publiques confondues (en points de PIB)

En point de PIB

En %

2017

– 2,9

– 3,2

110

2018

– 2,6

– 3,2

123

Source : INSEE jusqu’en 2016 ; Rapport économique, social et financier pour 2017 et 2018.

On observe, en effet, une tendance nette à la concentration du déficit public sur le déficit de l’État. La part de l’État dans le déficit public est ainsi passée de 81 % en 2012 à près de 98 % en 2016. Cette tendance doit s’accentuer en 2017 puis en 2018 en raison d’un important programme de baisse d’impôts dont le produit est affecté à l’État (ISF, impôt sur les revenus du capital, impôt sur les sociétés) ou qui font l’objet d’une compensation par l’État (dégrèvement de taxe d’habitation sur la résidence principale).

En 2017 et 2018, l’État devrait ainsi porter la totalité du déficit public. Son déficit sera même supérieur à celui du déficit public compte tenu des excédents des administrations publiques locales (0,1 point de PIB en 2017 et 2018) et des administrations de sécurité sociale (0,2 point de PIB en 2017 et 0,5 point de PIB en 2018).


—  1  —

   FICHE N° 8 :
Le volet fiscal du plf 2018

Le présent projet de loi de finances (PLF) comporte vingt-trois articles fiscaux. Ces différents articles sont commentés de manière approfondie dans les tomes 2 (pour les articles de première partie) et 3 (pour les articles de seconde partie) du présent rapport général.

Liste des articles fiscaux du PLF 2018

Article

Intitulé

 

Première partie du PLF (tome 2 du présent rapport général)

2

Indexation du barème de l’impôt sur le revenu (IR) sur l’inflation

3

Dégrèvement de la taxe d’habitation sur la résidence principale

4

Aménagement de l’assiette de taux réduit de TVA applicable aux services de presse en ligne

5

Exonération de TVA et d’IS : services à la personne

6

Extension de l’exonération de TVA applicable aux psychothérapeutes et psychologues

7

Aménagement des modalités de calcul et de répartition de la CVAE

8

Prorogation et aménagement du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE)

9

Trajectoire de la composante carbone pour la période 2018-2022 et conséquence en matière de tarifs des taxes intérieures de consommation

10

Augmentation des seuils des régimes d’imposition des micro-entreprises

11

Mise en œuvre du prélèvement forfaitaire unique

12

Création de l’impôt sur la fortune immobilière et suppression de l’ISF

13

Suppression de la contribution de 3 % sur les revenus distribués

14

Suppression du dispositif d’encadrement de la déductibilité des charges financières afférentes à l’acquisition de certains titres de participation

15

Modification de l’assiette de la taxe sur les transactions financières

24

Modification du barème du malus automobile

 

Seconde partie du PLF (tome 3 du présent rapport général)

38

Déductibilité de l’IR du supplément de contribution sociale généralisée (CSG) résultant de l’augmentation de son taux

39

Prorogation et recentrage de la réduction d’IR en faveur de l’investissement locatif (dispositif « Pinel »)

41

Diminution du taux normal de l’IS

42

Baisse du taux de CICE en 2018 et suppression du crédit d’impôt à compter de 2019

43

Suppression du crédit d’impôt de taxe sur les salaires

44

Suppression du taux supérieur de la taxe sur les salaires

45

Exonération de cotisation minimum de CFE des redevables réalisant un très faible chiffre d’affaires

47

Suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité

Source : présent projet de loi de finances.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 comporte aussi un volet fiscal important avec deux mesures principales : la hausse de la CSG de 1,7 point et la hausse du droit de consommation sur les tabacs d’un euro.

Par ailleurs, plusieurs mesures antérieures au présent projet de loi produiront des effets en 2018 pour un montant de 6,3 milliards d’euros sur les recettes fiscales nettes du budget général de l’État.

Les mesures antÉrieures montant en charge en 2018 (impact État)

(en milliards d’euros)

Mesure

Montant

Hausse du taux et la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

– 4,1

Élargissement du crédit d’impôt pour l’emploi de personnes à domicile

– 1,0

Contrecoups des acomptes prévus sur plusieurs impôts versés en 2017

– 0,8

Autres (net)

– 0,4

Total

 6,3

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

Les développements qui suivent portent uniquement sur le volet fiscal du présent projet de loi.

Hors fiscalité écologique, huit articles concernent plus particulièrement les ménages (I).

Les principales mesures fiscales pour les ménages

L’instauration d’un prélèvement forfaitaire unique (PFU) et d’une imposition sur la fortune immobilière (IFI) en remplacement de l’impôt sur la fortune (ISF) doit contribuer à libérer les énergies, favoriser l’activité économique et encourager la prise de risque. Dans le même temps, une mesure de justice et de soutien au pouvoir d’achat est prévue avec le dégrèvement de taxe d’habitation sur la résidence principale pour 80 % des ménages.

Treize articles portent sur la fiscalité des entreprises, hors fiscalité écologique (II).

Les principales mesures fiscales pour les entreprises

Il est ainsi prévu une baisse du taux de l’impôt sur les sociétés à 25 % par étape d’ici 2022 ainsi qu’une suppression de la contribution de 3 % sur les revenus distribués. L’attractivité de la place financière de Paris doit être renforcée par les aménagements proposés de la taxe sur les transactions financières (TTF) et de la taxe sur les salaires (TS). Plusieurs mesures spécifiques en faveur des petites entreprises sont également présentes dont le relèvement des plafonds des régimes de micro-entreprises et l’exonération de cotisation foncière des entreprises (CFE) minimum pour les redevables réalisant un faible chiffre d’affaires. En outre, la suppression du CICE et du crédit d’impôt de taxe sur les salaires (CITS) sont programmées dans le cadre de l’allégement de cotisations sociales qui doit les remplacer en 2019.

Enfin, deux articles modifient la fiscalité écologique – et concernent à ce titre tout autant les ménages que les entreprises – avec une hausse de la composante carbone comprise dans les tarifs des taxes intérieures de consommation ainsi qu’une modification du barème du malus automobile (III).

I.   Les mesures fiscales en faveur des mÉnages

Trois articles ont pour effet de diminuer la charge fiscale des ménages pour un montant global, par rapport à 2017, de 7,5 milliards d’euros pour 2018 et 11,7 milliards d’euros pour 2019.

Les mesures nouvelles de baisse d’impÔts pour les mÉnages

(en milliards d’euros)

Article

Intitulé

Montant

2018

Montant 2019

3

Dégrèvement de la taxe d’habitation sur la résidence principale

– 3

– 6,6

11

Mise en œuvre du prélèvement forfaitaire unique

– 1,3

– 1,93

12

Création de l’impôt sur la fortune immobilière et suppression de l’ISF

– 3,2

– 3,2

Total

– 7,5

– 11,73

Source : évaluations préalables des articles du projet de loi de finances.

Les cinq autres articles – pris isolément, et en l’état du droit – ont également pour effet de diminuer la charge fiscale des ménages par rapport à ce qui serait prévu pour les années à venir. Cependant, il s’agit soit d’indexation, soit de prorogation de dispositifs existants (avec quelques aménagements), soit encore de mesures consécutives à la bascule de cotisations sociales sur la CSG. In fine, ces cinq articles ne devraient donc pas avoir d’impact significatif à la hausse ou à la baisse sur la fiscalité des ménages.

Les mesures d’indexation ou de prorogation pour les mÉnages

Article

Intitulé

2

Indexation du barème de l’impôt sur le revenu (IR) sur l’inflation

8

Prorogation et aménagement du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE)

39

Prorogation et recentrage de la réduction d’IR en faveur de l’investissement locatif (dispositif « Pinel »)

Source : présent projet de loi.

Les mesures consÉcutives à la bascule de cotisations sur la CSG

Article

Intitulé

38

Déductibilité de l’IR du supplément de contribution sociale généralisée (CSG) résultant de l’augmentation de son taux

47

Suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité

Source : présent projet de loi de finances.

Ces différents articles ont trait à l’imposition des revenus (A), l’imposition du patrimoine (B) ou l’imposition locale (C).

A.   l’imposition des revenus

1.   Ajustements de l’impôt sur le revenu (IR)

a.   Indexation du barème de l’IR

L’article 2 indexe le barème de l’impôt sur le revenu (IR) sur l’inflation. Les différentes tranches sont revalorisées de 1 %. L’absence d’indexation aurait entraîné une hausse de l’IR de 1,1 milliard d’euros.

b.   Déductibilité de l’IR de la hausse de la CSG

L’article 38 majore de 1,7 point la part de la CSG déductible de l’impôt sur le revenu. Cette majoration de la part déductible correspond au montant de la hausse de la CSG prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Il est indiqué dans l’annexe Évaluations préalables du présent projet de loi de finances que cet article entraîne une diminution de l’IR de 3,9 milliards d’euros en 2019. Cependant, cet article est à mettre en relation avec les diverses mesures de compensations de la hausse de la CSG qui auront pour effet d’augmenter l’assiette imposable à l’IR (baisses de cotisations et indemnités compensatrices). À ce stade, l’impact sur l’IR de l’ensemble du dispositif de bascule des cotisations sur la CSG et des compensations n’est pas connu.

c.   Prorogation et aménagement du dispositif « Pinel »

L’article 39 proroge le dispositif « Pinel » pour quatre années, soit jusqu’au 31 décembre 2021. Toutefois, il recentre le dispositif dans les zones où la tension entre l’offre et la demande de logements est la plus forte (zones A, A bis, et B 1).

Le coût de la mesure est estimé à 6,9 milliards d’euros étalés sur les années 2019 à 2035. S’agissant d’un dispositif existant et prorogé, cet article ne devrait pas entraîner, à comportements constants, une modification du niveau de fiscalité des ménages.

d.   Prorogation et aménagement du CITE

L’article 8 proroge jusqu’au 31 décembre 2018 le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE).

Il réduit également l’assiette du CITE afin de le concentrer sur les mesures permettant de réaliser le plus efficacement des économies d’énergie.

En premier lieu, il réduit à compter du 27 septembre 2017 à 15 %, au lieu de 30 %, le taux du CITE puis supprime complètement l’éligibilité au CITE à compter du 28 mars 2018 pour les parois vitrées, les portes d’entrée donnant sur l’extérieur et les volets isolants. En second lieu, il exclut du CITE, pour les dépenses payées à compter du 27 septembre 2017, les dépenses d’acquisition de chaudières à haute performance énergétique les plus carbonées.

Des dispositions transitoires pour les dépenses payées jusqu’au 31 décembre 2018 sont prévues lorsqu’un devis a été accepté et un acompte a été payé avant la date de prise d’effet de réduction du taux ou d’exclusion de l’assiette du CITE.

Il est indiqué dans l’annexe Évaluations préalables du présent projet de loi de finances que cet article doit entraîner une hausse du rendement de l’IR de 115 millions d’euros en 2018 et une baisse de 875 millions d’euros en 2019 par rapport au droit existant puisque le crédit d’impôt devait expirer au 31 décembre 2017.

Toutefois, cette mesure ne devrait pas entraîner de baisse des prélèvements obligatoires des ménages, puisqu’il s’agit essentiellement d’une prorogation de crédit d’impôt – avec quelques aménagements visant à réduire son assiette.

2.   Suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité

L’article 47 supprime la contribution exceptionnelle de solidarité de 1 % prélevée sur les rémunérations de certains agents publics et de certains salariés d’employeurs du secteur public et parapublic. Cette mesure vise à compenser partiellement l’augmentation de la CSG.

Il est indiqué dans l’annexe Évaluations préalables du présent projet de loi de finances que cet article doit entraîner une baisse de fiscalité de 1,4 milliard d’euros. Toutefois, comme indiqué précédemment à propos de l’augmentation de la quote-part de déductibilité de la CSG de l’IR, l’impact net sur l’imposition des revenus de l’ensemble du dispositif de bascule des cotisations sur la CSG et des compensations n’est pas encore connu.

3.   Création d’un prélèvement forfaitaire unique

L’article 11 instaure un taux forfaitaire d’impôt sur le revenu de 12,8 % sur les revenus de capitaux mobiliers, les produits des contrats de l’assurance-vie (sauf pour les encours inférieurs à 150 000 euros), les gains de cessions de valeurs mobilières et certaines plus-values et créances entrant dans le champ d’application de l’exit tax.

L’option pour le barème de l’impôt sur le revenu demeure possible si elle est plus avantageuse.

Au taux forfaitaire de 12,8 % s’ajouteront les prélèvements sociaux de 17,2 % portant l’imposition au total à 30 %.

L’objectif poursuivi est de simplifier les dispositifs existants tout en orientant l’épargne française vers l’investissement dans les entreprises. Les produits de l’épargne populaires resteront exonérés.

Il est indiqué dans l’annexe Évaluations préalables du présent projet de loi de finances que cet article entraîne une diminution de fiscalité par rapport à 2017 de 1,3 milliard d’euros en 2018 et de 1,93 milliard d’euros en 2019.

B.   L’imposition du patrimoine

L’article 12 supprime l’ISF et crée en remplacement un impôt sur la fortune immobilière (IFI) à la charge des personnes physiques détenant un patrimoine immobilier supérieur à 1,3 million d’euros. Le barème sera identique à celui de l’actuel ISF (avec maintien de l’abattement de 30 % sur la résidence principale). Il devrait en résulter un allégement de fiscalité pour les ménages de 3,2 milliards d’euros.

C.   L’imposition locale

L’article 3 instaure un dégrèvement de taxe d’habitation sur la résidence principale des foyers dont les ressources n’excèdent pas 27 000 euros de revenu fiscal de référence pour une part, majorées de 8 000 euros pour les deux demi-parts suivantes, puis 6 000 euros par demi-part supplémentaire. Le dégrèvement sera de 30 % en 2018, 65 % en 2019 et 100 % en 2020.

Pour éviter les effets de seuil, le droit à dégrèvement sera dégressif pour les foyers dont les ressources n’excèdent pas 28 000 euros de revenu fiscal de référence (RFR) pour une part, majorées de 8 500 euros pour les deux demi-parts suivantes, puis 6 000 euros par demi-part supplémentaire.

Le dégrèvement s’applique dans la limite des taux et abattements en vigueur en 2017.

Cet article doit entraîner une baisse de fiscalité de 3 milliards d’euros en 2018, 6,6 milliards d’euros en 2019, puis 10,1 milliards d’euros à partir de 2020.

II.   Les mesures fiscales concernant les entreprises

Huit articles ont pour effet de diminuer la charge fiscale des entreprises pour un montant global, par rapport à 2017, d’au moins 3,5 milliards d’euros pour 2018 et d’au moins 5,6 milliards d’euros pour 2019.

Les mesures nouvelles de baisse d’impÔts pour les entreprises

(en milliards d’euros)

Article

Intitulé

Montant

2018

Montant 2019

6

Extension de l’exonération de TVA applicable aux psychothérapeutes et psychologues

– 0,014(1)

– 0,015(1)

10

Augmentation des seuils des régimes d’imposition des micro-entreprises

– 0,021(1)

– 0,021(1)

13

Suppression de la contribution de 3 % sur les revenus distribués

– 1,88(1)

– 1,88(1)

14

Suppression du dispositif d’encadrement de la déductibilité des charges financières afférentes à l’acquisition de certains titres de participation

Non chiffré

Non chiffré

15

Modification de l’assiette de la taxe sur les transactions financières

Non chiffré

Non chiffré

41

Diminution du taux normal de l’IS

– 1,45(2)

– 3,5(2)

44

Suppression du taux supérieur de la taxe sur les salaires

– 0,14(1)

– 0,08(1)

45

Exonération de cotisation minimum de CFE des redevables réalisant un très faible chiffre d’affaires

0(1)

– 0,085(1)

Total

– 3,505

– 5,581

Source : (1) évaluations préalables des articles du projet de loi de finances pour 2018 ; (2) calculs commission des finances par différence entre l’impact de la trajectoire de réduction du taux de l’IS résultant de la loi de finances pour 2017 et l’impact de la trajectoire de réduction du taux résultant du présent projet de loi de finances.

Deux articles suppriment des crédits d’impôt pour préparer leur remplacement par des allégements de cotisations sociales en 2019.

Les mesures prÉparatoires aux allÉgements de cotisations sociales

Article

Intitulé

42

Baisse du taux de CICE en 2018 et suppression du crédit d’impôt à compter de 2019

43

Suppression du crédit d’impôt de taxe sur les salaires

Source : présent projet de loi de finances.

Enfin, trois articles réalisent des aménagements techniques qui auront peu d’effet sur le niveau de prélèvements obligatoires des entreprises.

Les mesures techniques concernant les entreprises

Article

Intitulé

4

Aménagement de l’assiette de taux réduit de TVA applicable aux services de presse en ligne

5

Exonération de TVA et d’IS : services à la personne

7

Aménagement des modalités de calcul et de répartition de la CVAE

Source : présent projet de loi de finances.

1.   Les mesures sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), l’impôt sur les sociétés (IS) et la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE)

a.   Suppression de la contribution de 3 % sur les revenus distribués

L’article 13 supprime la contribution sur les montants distribués, jugée non conforme au droit européen. Son taux était de 3 %. Le gain fiscal pour les entreprises est de 1,88 milliard d’euros.

b.   Baisse du taux de l’IS à 25 % en 2022

L’article 41 prévoit une baisse du taux de l’IS à 25 % par paliers progressifs entre 2018 et 2022, ce qui permettra à la France d’être dans la moyenne européenne. Par rapport aux taux applicables en 2017, la trajectoire de réduction des taux doit permettre une baisse de fiscalité pour les entreprises de 1,45 milliard d’euros en 2018 et de 3,5 milliards d’euros en 2019.

c.   Suppression de l’encadrement de la déductibilité des charges financières afférentes à certains titres de participations

L’article 14 supprime le dispositif qui encadre la déductibilité des charges financières lorsque le pouvoir de décision sur les titres acquis ou le contrôle de la société cible ne sont pas effectivement effectués en France. Le rendement de la mesure n’a pas pu être chiffré par le Gouvernement.

d.   Aménagement de la TVA sur les services de presse en ligne

L’article 4 prévoit que l’assiette de la TVA au taux réduit sur les services de presse ligne soit limitée aux sommes versées par les fournisseurs d’accès à un réseau de télécommunication pour l’acquisition de ces services de presse. Ce dispositif permettra de sécuriser et clarifier les règles d’application du taux réduit de TVA sur les services de presse en ligne. Le rendement de cette mesure n’a pas pu être chiffré par le Gouvernement.

e.   Exonération de TVA pour les psychothérapeutes et les psychologues

L’article 6 prévoit l’exonération de TVA pour les psychothérapeutes et les psychologues enregistrés sur le système national des professionnels de santé. Le gain fiscal pour les professionnels concernés est évalué à 14 millions d’euros pour 2018 et 15 millions d’euros pour 2019.

f.   Exonération de TVA et d’IS en faveur des associations de service à la personne bénéficiant d’une autorisation

L’article 5 prévoit l’exonération de TVA et d’IS en faveur des associations de service à la personne qui exercent sur autorisation du conseil départemental. Avant la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement ([62]), ces associations devaient obtenir un agrément de l’État. Or, en l’état du droit, seules les associations bénéficiant de l’agrément bénéficient des exonérations. L’extension de l’exonération aux associations exerçant désormais sur simple autorisation est donc neutre budgétairement.

g.   Aménagement du calcul et de la répartition de la CVAE

L’article 7 aménage les modalités de calcul et de répartition de la CVAE pour les entreprises appartenant à un groupe à la suite d’une censure du Conseil constitutionnel ([63]).

Cet article assure une continuité avec les règles en vigueur avant la décision du Conseil constitutionnel. Elle évite une importante perte de recettes. Elle augmente marginalement (environ 40 millions d’euros) le rendement de la CVAE dans la mesure où la nouvelle règle consistant à prendre en compte les chiffres d’affaires des autres sociétés membres d’un groupe s’appliquera à un plus grand nombre d’entreprises qu’auparavant.

2.   Les mesures d’attractivité de la place financière de Paris

Deux mesures sont prévues pour renforcer l’attractivité de la place financière de Paris dans le contexte « post-Brexit ».

L’article 15 supprime l’élargissement prévu pour 2018 de l’assiette de la taxe sur les transactions financières (TTF) aux transactions infrajournalières. Le rendement de la mesure n’a pas pu être chiffré par le Gouvernement.

L’article 41 supprime la tranche additionnelle de 20 % de la taxe sur les salaires applicable à la fraction des rémunérations annuelles excédant 152 279 euros. Le gain fiscal pour les entreprises concernées est d’environ 140 millions d’euros pour 2017 et 80 millions d’euros pour 2018.

Ces mesures doivent inciter à la relocalisation ou l’implantation en France d’activités à forte valeur ajoutée.

3.   Les mesures pour les petites entreprises

Deux mesures sont prévues pour soutenir les petites entreprises.

L’article 10 augmente les plafonds des régimes des micro-entreprises pour le porter à 170 000 euros pour les activités de vente et 70 000 euros pour les activités de prestations de services et les activités non commerciales. Le gain fiscal pour ces entreprises est évalué à 21 millions d’euros.

L’article 45 exonère de cotisation foncière des entreprises (CFE) minimum et des droits additionnels les redevables réalisant un chiffre d’affaires annuel qui n’excède pas 5 000 euros. Le gain fiscal pour les redevables concernés est évalué à 85 millions d’euros. Cette mesure mettra fin à la disproportion entre le montant de cotisation de CFE et le montant du chiffre d’affaires réalisé.

4.   Les mesures qui anticipent l’allégement de cotisations patronales prévu pour 2019

Le CICE et le crédit d’impôt de taxe sur les salaires (CITS) ont contribué à réduire le coût du travail et restaurer les marges des entreprises. Toutefois, le décalage – compris entre un et quatre ans – entre le versement du salaire et la perception du crédit d’impôt nuit à leur efficacité. C’est pourquoi il est prévu de les supprimer en 2019 et de les remplacer par des allégements de cotisations sociales patronales.

L’article 42 baisse d’un point le taux du CICE pour 2018, en le portant à 6 % au lieu de 7 %, puis le supprime à compter du 1er janvier 2019.

L’article 43 supprime le CITS à compter du 1er janvier 2019.

III.   les mesures fiscales Écologiques

Deux articles portent des mesures fiscales qui augmentent la fiscalité écologique, pour un montant global de 3,8 milliards d’euros en 2018.

La fiscalitÉ Écologique

(en milliards d’euros)

Article

Intitulé

Montant

2018

Montant 2019

9

Trajectoire de la composante carbone pour la période 2018-2022

3,7

6,5

24

Modification du barème du malus automobile

0,121

0,121

Total

3,821

6,621

Source : évaluations préalables des articles du projet de loi de finances pour 2018.

L’article 9 intègre dans les tarifs des taxes intérieures de consommation la nouvelle trajectoire carbone pour la période 2018-2022.

Valeur de la tonne de carbone pour la pÉriode 2018-2022

(en euros par tonne de dioxyde de carbone)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Valeur de la composante carbone

44,6

55

65,4

75,8

86,2

Cette augmentation du prix du carbone contribuera à contenir les émissions à un niveau compatible avec la mise en œuvre de l’accord de Paris sur le climat.

Par ailleurs, l’article 9 aligne en quatre ans la fiscalité applicable au gazole et à l’essence, soit une augmentation supplémentaire chaque année de la fiscalité sur le gazole de 2,6 centimes par litre.

Au total, l’article 9 devrait entraîner une hausse de la fiscalité par rapport à 2017 de 3,7 milliards d’euros en 2018, 6,5 milliards d’euros en 2019, 9,4 milliards d’euros en 2020, 12,2 milliards d’euros en 2021, et 14,2 milliards d’euros en 2022.

Enfin, l’article 24 opère une modification du barème du malus automobile de manière à favoriser l’achat de véhicules moins polluants. Il est prévu, à partir du 1er janvier 2018 :

– un abaissement du seuil d’application du malus à 120 grammes de CO2 par kilomètre au lieu de 127 grammes actuellement ;

– et une modification en conséquence du barème en maintenant une progressivité de 67 tranches d’un gramme chacune (au lieu de 66 tranches) allant de 50 euros pour les véhicules émettant 120 grammes de CO2 à 10 500 euros pour les véhicules émettant 185 grammes de CO2 ou plus.

 


—  1  —

   FICHE N° 9 :
Les recettes de l’État

Les recettes nettes du budget général de l’État sont prévues à 302 milliards d’euros en 2018 au lieu de 303,1 milliards d’euros en 2017 et 300,3 milliards d’euros en 2016.

Recettes nettes du budget gÉNÉral de l’État 2016-2018

(en milliards d’euros)

Recettes nettes du budget général de l’État

Exécution

2016

Prévision révisée

2017

Prévision

2018

Total

300,3

303,1

302,0

 impôt sur le revenu (IR)

71,8

72,6

72,7

impôt sur les sociétés (IS)

30,0

28,4

25,3

taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

144,4

150,5

152,8

taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

15,9

10,4

13,3

dont « autres recettes fiscales »

22,0

28,2

24,6

dont sous-total recettes fiscales nettes

284,1

290,1

288,8

dont recettes non fiscales

16,2

13,0

13,2

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

Après prise en compte des prélèvements sur recettes – qui sont en réalité des dépenses au sens de la comptabilité nationale – il est prévu que les recettes nettes hors fonds de concours du budget général s’établissent à 241,5 milliards d’euros en 2018 au lieu de 240,7 milliards d’euros en 2017.

Recettes nettes du budget gÉNÉral de l’État 2016-2018

(en milliards d’euros)

Recettes

Exécution

2016

Prévision révisée

2017

Prévision

2018

Recettes nettes du budget général de l’État (1)

300,3

303,1

302,0

Prélèvements sur recettes (2)

65,5

62,4

60,5

Recettes nettes de l’État hors fonds de concours (1  2)

234,8

240,7

241,5

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

Cette présentation – que l’on retrouve dans plusieurs documents de communication du Gouvernement ou encore dans l’exposé des motifs du présent projet de loi de finances – comporte plusieurs défauts qui nuisent à la compréhension des recettes de l’État.

Elle élude les recettes fiscales des budgets annexes et des comptes spéciaux et elle minore la catégorie « autres recettes fiscales » des dégrèvements et remboursements d’impôts locaux.

Les développements qui suivent sur les recettes fiscales retiendront donc, parallèlement à la présentation habituelle, une autre présentation plus conforme à la réalité économique et budgétaire des impositions affectées à l’État (I).

Les principales données budgétaires relatives aux recettes non fiscales (II), aux prélèvements sur recettes (III) et aux dépenses fiscales (IV) seront ensuite présentées successivement.

I.   Les recettes fiscales

L’analyse des recettes fiscales de l’État suppose au préalable d’indiquer les clés de passage des recettes fiscales brutes aux recettes fiscales nettes (A). Les recettes fiscales nettes sont ensuite présentées de façon générale (B) puis par principaux impôts (C).

A.   Passage des recettes fiscales brutes aux recettes fiscales nettes

Les recettes sont dites « nettes » car elles sont présentées après déduction des remboursements et dégrèvements afférents aux différents impôts affectés au budget de l’État. Ces remboursements et dégrèvements font l’objet d’une mission spécifique du budget général ([64]).

Remboursements et dégrèvements

En 2018, le montant des recettes fiscales brutes du budget général est prévu à 404 milliards d’euros. Les remboursements et dégrèvements devraient s’élever à 115,2 milliards d’euros, si bien que les recettes fiscales nettes du budget général s’établiraient à 288,8 milliards d’euros.

L’État procède à des remboursements et dégrèvements d’impôts pour diverses raisons : les régularisations de trop-versés lorsqu’un contribuable a payé plus d’acomptes que l’impôt réellement dû ; le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui place certaines entreprises en situation créditrice vis-à-vis de l’État lorsque le montant de la TVA collectée est inférieur au montant de la TVA déductible ; les crédits d’impôt lorsque ceux-ci dépassent le montant de l’impôt dû ; ou encore les corrections d’erreurs à la suite d’une réclamation ou d’un contentieux.

Les remboursements et dégrèvements se décomposent ainsi :

– 67,76 milliards au titre de la mécanique de certains impôts, dont 51,48 milliards d’euros au titre des crédits de TVA et 16,10 milliards d’euros de remboursements d’excédents d’impôt sur les sociétés ;

– 21,23 milliards d’euros au titre de soutien à des politiques publiques via des remboursements ou des crédits d’impôt qui excédent l’impôt dû ;

– 11,17 milliards d’euros au titre de la gestion des impôts (corrections d’erreurs, décisions de justice, remboursements par application des conventions fiscales internationales) ;

– et 15,05 milliards d’euros de remboursements et dégrèvements d’impôts locaux dont 6,86 milliards d’euros au titre de la taxe d’habitation au lieu de 3,72 milliards d’euros prévus pour 2017.

Les recettes fiscales nettes du seul budget général ne rendent pas compte du montant total des recettes fiscales nettes affectées à l’État.

Certes, le montant de 288,8 milliards d’euros est celui qui figure dans le tableau d’équilibre des ressources et des dépenses qui figure à l’article 28 du présent projet de loi de finances. Mais, sur un plan économique, cette présentation budgétaire est incomplète, le montant des recettes fiscales nettes perçues par l’État étant en réalité plus important.

Deux raisons expliquent cette différence entre la présentation retenue par les documents budgétaires et la réalité économique.

En premier lieu, la présentation budgétaire habituelle déduit du montant brut des recettes fiscales de l’État les dégrèvements et remboursements des impôts locaux. La Cour des comptes a critiqué cette présentation et recommandé que les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux ne soient plus déduits des recettes fiscales brutes de l’État ([65]). En effet, ceux-ci n’ont rien à voir avec la mécanique des impôts d’État : il n’est donc pas logique de les soustraire du rendement brut des impôts d’État. Selon la Cour des comptes, les dégrèvements et remboursements des impôts locaux devraient figurer en dépenses.

Cette observation de la Cour des comptes est d’autant plus pertinente que les dégrèvements des impôts locaux ont eu tendance à croître ces dernières années sous l’effet de plusieurs réformes. Cette tendance se poursuit avec le dégrèvement prévu sur la taxe d’habitation sur les résidences principales par l’article 3 du présent projet de loi de finances.

En 2018, les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux pris en charge par l’État sont prévus à 15 milliards d’euros au lieu de 11,9 milliards d’euros en 2017. En réintégrant ce montant aux recettes de l’État, la ligne « autres recettes fiscales nettes » ressortirait à 39,6 milliards d’euros au lieu de 24,6 milliards d’euros.

En second lieu, cette présentation budgétaire ne tient pas compte des recettes fiscales affectées en tout ou partie à différents budgets annexes et comptes spéciaux de l’État. Cette fraction de la fiscalité est donc souvent omise dans l’analyse politique et économique des comptes de l’État. Cette omission se justifie moins aujourd’hui compte tenu de l’importance que prennent certains de ces impôts, en particulier la fiscalité écologique affectée au compte d’affectation spéciale (CAS) Transition énergétique.

Pour 2018, le rendement de la fiscalité affectée aux budgets annexes et comptes spéciaux de la comptabilité budgétaire de l’État est prévu à 10,5 milliards d’euros, ce qui n’est pas négligeable, dont 7,2 milliards d’euros au titre d’une fraction de taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE) affectée au CAS Transition énergétique.

ImpÔts affectÉs À des budgets annexes et comptes spÉciaux de l’État

(en millions d’euros)

Budget annexe (BA)

Compte d’affectation spéciale (CAS)

Impôt affecté

Rendement 2018

BA

Contrôle et exploitation aériens

Taxe de l’aviation civile

422,4

CAS

Aides à l’acquisition de véhicules propres

Taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules

388,0

CAS

Développement agricole et rural

Taxe sur le chiffre d’affaires des exploitations agricoles

136

CAS

Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale

Contribution des gestionnaires de réseaux publics de distribution

360

CAS

Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage

Fraction du quota de la taxe d’apprentissage

1 632,7

CAS

Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

Fraction de la taxe d’aménagement du territoire

141,2

Contribution de solidarité territoriale

16,0

Taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires

226,0

CAS

Transition énergétique

Fraction du produit de la taxe intérieure sur les produits énergétiques

7 166,3

Fraction de la taxe intérieure sur les houilles, les lignites et les cokes

1

Total

10 489

BA : budget annexe.

CAS : compte d’affectation spéciale.

Source : données extraites des projets annuels de performances.

Au total, si l’on réintègre les recettes affectées aux budgets annexes et comptes spéciaux (10,5 milliards d’euros) ainsi que les dégrèvements et remboursements d’impôts locaux (15 milliards d’euros), le montant réel des recettes fiscales nettes de l’État ne serait donc pas de 288,8 milliards d’euros mais de 314,3 milliards d’euros.

Le montant consolidé des recettes fiscales affectées à l’État ne figure pourtant dans un aucun document budgétaire. Il serait possible d’améliorer l’information du Parlement en l’indiquant plus explicitement. De même, les droits de succession et de donation – qui constituent par ordre d’importance le cinquième impôt de l’État et dont le produit avoisine cette année celui de la TICPE affectée au budget général – mériteraient d’être mentionnés dans les tableaux de synthèse produits par le Gouvernement compte tenu du dynamisme important de leur rendement ([66]).

Le tableau qui suit reflète une image plus fidèle des recettes fiscales nettes de l’État.

Recettes fiscales nettes de l’État pour 2018

(en milliards d’euros)

Impôt

Montant

Taxe sur la valeur ajoutée (part État)

152,8

Impôt sur le revenu (IR)

72,7

Impôt sur les sociétés (IS)

25,3

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) (part État y compris CAS Transition énergétique)

20,5

Droits de mutation à titre gratuit entre vifs et par décès (droits de succession et donation)

12,9

« autres recettes fiscales »*

30,1

Total

314,3

* le rendement le plus important de la catégorie est celui de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) d’environ 6 milliards d’euros.

Source : commission des finances.

La présentation budgétaire habituelle est retenue dans l’analyse qui suit pour plus de clarté et surtout pour permettre la comparaison des données avec ceux des documents budgétaires du Gouvernement. Ponctuellement, et de manière explicite, cette présentation sera replacée dans le contexte économique du montant réel des recettes fiscales nettes de l’État.

Poids des impôts d’État dans l’ensemble de la fiscalité et des prélèvements obligatoires : près de la moitié de la fiscalité globale
et près d’un tiers des prélèvements obligatoires

Les dernières données d’exécution disponibles portent sur l’exercice 2016.

En 2016, les impôts, toutes administrations publiques confondues, ont représenté 619,2 milliards d’euros selon les chiffres détaillés des comptes nationaux annuels publiés par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) le 30 mai 2017.

L’INSEE a mesuré la fiscalité d’État en 2016 à 297,2 milliards d’euros selon les principes de la comptabilité nationale, soit 48 % de la fiscalité globale.

Les impôts affectés aux administrations publiques locales ont représenté, quant à eux, un rendement de 137,7 milliards d’euros en comptabilité nationale, soit 22 % de l’ensemble de la fiscalité. Les impôts affectés aux administrations de sécurité sociale ont eu un rendement de 172,2 milliards d’euros, soit 28 % de l’ensemble de la fiscalité. Les autres impôts ont été affectés à divers organismes d’administration centrale (ODAC) pour 10,1 milliards d’euros et à l’Union européenne pour 2 milliards d’euros.

Les cotisations sociales ont été de 371,5 milliards d’euros en 2016, ce qui porte le montant total des prélèvements obligatoires à 990,7 milliards d’euros. La fiscalité d’État représente 30 % de l’ensemble des prélèvements obligatoires.

B.   PrÉsentation gÉNÉrale

Les recettes fiscales nettes du budget général de l’État sont prévues :

– à 290,1 milliards d’euros en 2017, en hausse de 6 milliards d’euros par rapport à 2016 ;

– et à 288,8 milliards d’euros en 2018, en baisse de 1,3 milliard d’euros par rapport à 2017.

Recettes fiscales nettes du budget gÉNÉral de l’État depuis 2007

(en milliards d’euros)

Année

Montant

 

Année

Montant

2007

272,3

2013

284,0

2008

265,1

2014

274,3

2009

214,3

2015

280,1

2010

237,0

2016

284,1

2011

255,0

2017 prévision actualisée

290,1

2012

268,4

2018 prévision

288,8

Source : Gouvernement.

1.   Évolution générale de 2016 à 2017

Les recettes fiscales sont évaluées à législation constante en fonction de la croissance du PIB. Ceci permet de déterminer leur « évolution spontanée ». Puis, cette évaluation est corrigée des mesures fiscales (nouvelles et antérieures) et des mesures de périmètre devant produire des effets durant l’année faisant l’objet du projet de loi de finances.

En 2017, l’évolution spontanée des recettes fiscales nettes du budget général est prévue à 3,7 %, soit une hausse de 10,5 milliards d’euros.

Les mesures nouvelles, antérieures et de périmètre entraîneraient pour leur part une baisse de rendement de 4,5 milliards d’euros. Ces mesures seront examinées plus en détail à l’occasion de l’examen d’un éventuel projet de loi de finances rectificative pour 2017, et en tout état de cause à l’occasion du projet de loi de règlement des comptes pour 2017.

Au total, les recettes progresseraient donc de 6 milliards d’euros.

Des recettes fiscales nettes du budget gÉNÉral en 2016
aux recettes fiscales nettes du budget gÉNÉral en 2017

(en milliards d’euros)

Recettes fiscales

nettes 2016

Évolution

spontanée

Mesures

Recettes fiscales

nettes 2017

Nouvelles

Antérieures

Périmètre

284,1

+ 10,5

– 4,5

290,1

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

 

L’évolution spontanée

L’évolution spontanée du rendement d’un impôt correspond à l’évolution de son rendement à législation constante. Elle est liée aux variations démographiques et économiques. Il s’agit donc de l’évolution du rendement de l’impôt qui aurait été constatée si aucune mesure législative n’était intervenue au cours de l’année considérée.

Par exemple, si du fait de l’augmentation de la population et des revenus d’une année sur l’autre l’évolution spontanée d’un impôt est de 2 %, le rendement de celui-ci passera de 100 à 102 sans qu’un changement de législation ait été nécessaire.

Les mesures législatives

Les mesures législatives sont des changements de législation qui entraînent des baisses ou des hausses du rendement des impôts. Il peut s’agir de mesures dites « antérieures » si elles ont été adoptées avant la loi de finances initiale mais qui produisent néanmoins des effets au cours de l’année afférente à cette loi de finances. Il peut encore s’agir de mesures dites « nouvelles » si elles ont été adoptées lors de l’examen ou après l’examen de la loi de finances de l’année. Les mesures législatives ont pour effet de modifier la charge fiscale des contribuables.

L’examen du rendement des mesures législatives permet de mesurer l’impact des réformes fiscales décidées par le Parlement.

 

Les mesures de périmètre et de transfert

Les mesures dites de « périmètre » ou de « transfert » peuvent modifier la fraction du produit d’un impôt affecté à l’État lorsque la répartition de ce produit entre plusieurs administrations publiques est modifiée en cours d’année. Les mesures de périmètre ou de transfert ne modifient pas la charge fiscale des contribuables.

Par exemple, pour un impôt dont le rendement est de 100, si la fraction revenant à l’État passe de 90 % à 95 % (le solde revenant à une autre administration), ce dernier bénéficie d’un produit de 95 au lieu de 90, soit une hausse de 5. Inversement, l’autre administration subit une baisse de 5. Le montant payé par le contribuable n’est pas affecté par les mesures de périmètre et de transfert.

2.   Évolution générale de 2017 à 2018

En 2018, malgré une évolution spontanée de 3,5 % soit 11,4 milliards d’euros, les recettes fiscales nettes du budget général devraient diminuer de 1,3 milliard d’euros.

Cette évolution s’explique par d’importantes baisses d’impôt provenant tant des mesures antérieures (6,3 milliards d’euros) que des mesures nouvelles du présent projet de loi de finances (6,8 milliards d’euros). À l’inverse, les mesures de périmètre ont un effet positif sur le niveau des recettes du budget général de 0,3 milliard d’euros.

Des recettes fiscales nettes du budget gÉNÉral en 2017 aux recettes fiscales nettes du budget gÉNÉral en 2018

(en milliards d’euros)

Recettes fiscales

nettes 2017

Évolution

spontanée

Mesures

Recettes fiscales

nettes 2018

Nouvelles

Antérieures

Périmètre

290,1

+ 11,4

– 6,8

– 6,3

+ 0,3

288,8

– 13,0

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

a.   La prévision d’évolution spontanée repose sur une élasticité des impôts à la croissance de 1,2 pour 2018

En 2017, l’évolution spontanée des recettes fiscales est estimée à 3,7 % et la croissance du PIB en valeur à 2,5 %. Cela signifie que l’élasticité des recettes fiscales à la croissance serait égale à 1,5.

En 2018, l’évolution spontanée des recettes fiscales (11,4 milliards d’euros) serait de 3,5 % et la croissance du PIB en valeur de 2,9 %. Cela signifie que l’élasticité des recettes fiscales à la croissance diminuerait à 1,2.

Notion d’élasticité

L’élasticité du rendement d’un impôt est égale au rapport entre le taux d’évolution spontanée et le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) en valeur. Lorsque le rendement d’un impôt évolue dans les mêmes proportions que le PIB en valeur, son élasticité est égale à l’unité.

Par exemple, si la croissance du PIB est de 1 % et que l’élasticité est de 1, alors l’évolution spontanée de l’impôt est de 1 %. En revanche, si l’élasticité est de – 0,5, l’évolution spontanée est de – 0,5 % bien que le PIB ait crû en valeur de 1 %.

La structure de notre législation fiscale fait qu’en période de faible croissance, l’élasticité a tendance à être faible voire négative, tandis qu’en période de reprise l’élasticité est supérieure à l’unité. En effet, l’impôt sur le revenu est progressif et l’impôt sur les sociétés a pour assiette le bénéfice fiscal. Il s’ensuit que le rendement de ces impôts diminue ou progresse proportionnellement davantage que l’évolution des revenus et de l’activité économique.

À noter que les prévisions fiscales ne sont pas réalisées par l’application ex ante d’une hypothèse d’élasticité des recettes au taux de croissance prévu. Elles sont déterminées pour chaque impôt, sur la base d’un scénario macroéconomique établi par la direction générale du Trésor. Néanmoins, sur la base de ces prévisions, il en est déduit une élasticité attendue pour l’année suivante. L’élasticité est, en effet, égale au taux de croissance des recettes sur le taux de croissance du PIB en valeur.

L’hypothèse d’une élasticité de 1,2 pour 2018 est prudente compte tenu du contexte de reprise économique.

En moyenne, sur la période 2003-2018, l’élasticité des impôts à la croissance est proche de l’unité (1,1 précisément). Ceci est conforme à l’analyse généralement admise selon laquelle, à long terme, l’élasticité des impôts tend vers l’unité : l’évolution des assiettes fiscales agrégées doit normalement converger avec celle du PIB. Les « anomalies » de court terme – qui sont dues à des facteurs variés – sont ainsi effacées, en particulier s’agissant des années 2009 (+ 4,5) et 2013 (– 1,6). L’élasticité proche de l’unité tend aussi à démontrer que les stratégies d’évitement de l’impôt (évasion fiscale) ne sont pas plus importantes ces dernières années que par le passé.

ÉlasticitÉ des recettes fiscales sur la pÉriode 2003-2018

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

+ 0,1

+ 1,7

+ 1,5

+ 2,0

+ 1,3

+ 1,0

+ 4,5

+ 1,6

 

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Prévision

2018

Prévision

+ 1,6

– 0,2

– 1,6

– 0,4

+ 0,9

+ 1,1

+ 1,5

+ 1,2

Source : Gouvernement.

b.   Les mesures fiscales entraîneront une baisse des recettes de 13 milliards d’euros

i.   Les mesures nouvelles

Les mesures nouvelles du présent projet de loi de finances représentent un coût pour les finances du budget général de l’État de 6,8 milliards d’euros.

Pour les ménages, hors fiscalité écologique, il s’agit principalement du dégrèvement de la taxe d’habitation sur la résidence principale qui est compensée aux collectivités territoriales par l’État (– 3 milliards d’euros), de la création de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) en remplacement de l’ISF (– 3,2 milliards d’euros), et de la mise en œuvre du prélèvement forfaitaire unique (PFU)
(– 1,3 milliard d’euros).

Les mesures nouvelles de baisse d’impÔts pour les mÉnages (impact État)

(en milliards d’euros)

Article

Intitulé

Montant

2018

Montant 2019

3

Dégrèvement de la taxe d’habitation sur la résidence principale

– 3

– 6,6

11

Mise en œuvre du prélèvement forfaitaire unique

– 1,3

– 1,93

12

Création de l’impôt sur la fortune immobilière et suppression de l’ISF

– 3,2

– 3,2

Total

– 7,5

– 11,73

Source : évaluations préalables des articles du présent projet de loi de finances.

Les entreprises vont bénéficier également d’un important programme de baisse d’impôts de plus de 3,5 milliards d’euros avec principalement la suppression de la contribution de 3 % sur les revenus distribués (– 1,9 milliard d’euros) et la diminution du taux de l’impôt sur les sociétés (– 1,4 milliard d’euros).

Les mesures nouvelles de baisse d’impÔts pour les entreprises (impact État)

(en milliards d’euros)

Article

Intitulé

Montant

2018

Montant 2019

6

Extension de l’exonération de TVA applicable aux psychothérapeutes et psychologues

– 0,014(1)

– 0,015(1)

10

Augmentation des seuils des régimes d’imposition des micro-entreprises

– 0,021(1)

– 0,021(1)

13

Suppression de la contribution de 3 % sur les revenus distribués

– 1,88(1)

– 1,88(1)

14

Suppression du dispositif d’encadrement de la déductibilité des charges financières afférentes à l’acquisition de certains titres de participation

Non chiffré

Non chiffré

15

Modification de l’assiette de la taxe sur les transactions financières

Non chiffré

Non chiffré

41

Diminution du taux normal de l’IS

– 1,45(2)

– 3,5(2)

45

Exonération de cotisation minimum de CFE des redevables réalisant un très faible chiffre d’affaires

0(1)

– 0,057(1)

Total

– 3,365

– 5,473

Source : (1) évaluations préalables des articles du présent projet de loi de finances ; (2) calculs commission des finances par différence entre l’impact de la trajectoire de réduction du taux de l’IS résultant de la loi de finances pour 2017 et l’impact de la trajectoire de réduction du taux résultant du présent projet de loi de finances.

Ces baisses cumulées d’impôts d’environ 10,8 milliards d’euros ne sont que très partiellement compensées par la hausse de la fiscalité écologique résultant de la trajectoire carbone et de la modification du barème du malus automobile pour un rendement global de plus de 3,8 milliards d’euros.

La fiscalitÉ Écologique (impact État)

(en milliards d’euros)

Article

Intitulé

Montant

2018

Montant 2019

9

Trajectoire de la composante carbone pour la période 2018-2022

3,7

6,5

24

Modification du barème du malus automobile

0,121

0,121

Total

3,821

6,621

Source : évaluations préalables des articles du présent projet de loi de finances.

D’autres hausses plus modérées auront un effet positif sur les finances de l’État comme par exemple le recentrage du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) (+ 115 millions d’euros).

3.   Les mesures antérieures

Les mesures adoptées antérieurement au présent projet de loi de finances devraient, au titre de leur montée en charge, entraîner une baisse des recettes du budget général de 6,3 milliards d’euros. Il s’agit principalement de la hausse du taux et de la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (– 4,1 milliards d’euros), de l’élargissement du crédit d’impôt pour l’emploi de personnes à domicile (– un milliard d’euros) et d’une mesure plus technique liée aux contrecoups des acomptes prévus sur plusieurs impôts versés en 2017
(– 0,8 milliard d’euros).

Les mesures antÉrieures montant en charge en 2018 (impact État)

(en milliards d’euros)

Mesure

Montant

Hausse du taux et la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

– 4,1

Élargissement du crédit d’impôt pour l’emploi de personnes à domicile

– 1,0

Contrecoups des acomptes prévus sur plusieurs impôts versés en 2017

– 0,8

Autres (net)

– 0,4

Total

 6,3

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

4.   Les mesures de périmètre

Le présent projet de loi de finances contient plusieurs mesures de périmètre et portant sur des montants importants. Mais celles-ci se compensent en grande partie si bien que les mesures de périmètre ne modifieront que faiblement les recettes fiscales du budget général.

Les mesures de pÉRIMÈtre

(en milliards d’euros)

Mesure

Montant

Transfert de la sécurité sociale vers l’État au titre notamment de la récupération par ce dernier du gain net résultant de la bascule de cotisations sur la contribution sociale généralisée (CSG)

+ 4,3

Transfert d’une fraction de taxe sur la valeur ajoutée vers les régions

– 4,1

Rebudgétisation de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP)

+ 0,4

Plafonnement de diverses taxes affectées (article 19)

+ 0,4

Transfert d’une fraction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) à l’Agence de financement des infrastructures de France

– 0,3

Transfert d’une fraction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) au compte d’affectation spéciale Transition énergétique

– 0,3

Total

+ 0,3

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

C.   PrÉsentation par impÔt

Les cinq impôts les plus importants sont étudiés ci-après. Ils représentent 96 % des recettes fiscales du budget général, et plus de 90 % des recettes fiscales totales de l’État.

Principaux impÔts affectés À l’État en 2018

Impôt

Rendement

net

(en milliards d’euros)

Part des recettes fiscales du budget général de l’État

Part des recettes fiscales totales de l’État

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

152,8

52,9 %

48,6 %

Impôt sur le revenu (IR)

72,7

25,2 %

23,1 %

Impôt sur les sociétés (IS)

25,3

8,8 %

8,0 %

Taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE)

13,6 (BG)

20,5 (État)

4,7 %

6,5 %

Droits de succession et de donation

12,9

4,5 %

4,1 %

total

96 %

90,4 %

Source : commission des finances.

1.   La taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

La TVA est un impôt d’État partagé avec la sécurité sociale. Elle joue à ce titre un rôle de variable d’ajustement dans les transferts entre l’État et la sécurité sociale. À compter de 2018, elle sera également partagée avec les régions ([67]).

Rendement de la TVA depuis 2009

(en milliards d’euros)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Part État

118,5

127,3

131,9

133,4

136,3

138,3

141,8

144,4

150,5

Part sécurité sociale

8,4

8,5

10,1

10,6

9,2

12,7

11,8

11,7

11,4

Total

126,9

135,9

142,0

144,0

145,5

151,0

153,6

156,1

161,9

Source : Conseil des prélèvements obligatoires et présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

a.   En 2017

L’évolution spontanée de la TVA est attendue à 3,5 % pour 2017, soit légèrement plus que la croissance du PIB en valeur (2,5 %) si bien que son élasticité ressortirait à 1,4. L’évolution spontanée serait ainsi de 5,1 milliards d’euros et le gain net lié aux mesures d’environ 0,9 milliard d’euros.

Des recettes de TVA 2016 aux recettes de tva 2017 (part État)

(en milliards d’euros)

TVA 2016

Évolution

spontanée

Mesures

TVA 2017

Nouvelles

Antérieures

Périmètre

144,4

5,1

0,9

150,5

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

b.   En 2018

La part de TVA revenant à l’État pour 2018 est prévue à 152,8 milliards d’euros soit une hausse assez faible de 1,5 %.

Pourtant l’évolution spontanée est prévue à 2,9 %, soit 4,4 milliards d’euros, en ligne avec la croissance du PIB en valeur : l’élasticité serait ainsi égale à l’unité ce qui constitue une hypothèse prudente.

De même, si aucune mesure antérieure significative n’est prévue, une mesure nouvelle – liée à la hausse de l’assiette taxable résultant de l’augmentation de la TICPE – doit entraîner un accroissement du rendement de 0,4 milliard d’euros.

En revanche, une importante mesure de périmètre entre en vigueur avec le transfert aux régions d’une fraction de TVA de 4,1 milliards d’euros. Celle-ci est compensée en partie par un moindre transfert de 1,7 milliard d’euros dans le cadre des relations entre l’État et la sécurité sociale.

Des recettes nettes de TVA 2017 aux recettes nettes de tva 2018 (part État)

(en milliards d’euros)

TVA 2017

Évolution

spontanée

Mesures

TVA 2018

Nouvelles

Antérieures

Périmètre

150,5

+ 4,4

0,4

0

– 2,4

152,8

0,4

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

Partage du produit de la TVA en 2018

(en milliards d’euros)

Part État

152,8

Part Sécurité sociale

10,0

Part Région

4,1

Total

166,9

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

2.   L’impôt sur le revenu

L’impôt sur le revenu (IR) est affecté intégralement au budget général de l’État. Il a progressé de plus de 16 milliards d’euros depuis 2007.

Rendement net de l’IR depuis 2007

(en milliards d’euros)

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Rendement net

56,3

59,2

55,1

55,1

58,5

59,5

67,0

69,2

69,3

71,8

72,6

Source : lois de règlement et présent projet de loi de finances.

a.   En 2017

L’évolution spontanée de l’IR est attendue à 3 % pour 2017, soit 2,2 milliards d’euros.

Les mesures législatives devraient entraîner une baisse du rendement de l’IR de 1,4 milliard d’euros essentiellement en raison d’une baisse d’impôt sur le revenu en faveur des ménages ayant des revenus modestes ([68]).

Des recettes nettes d’IR 2016 aux recettes nettes d’IR 2017

(en milliards d’euros)

IR 2016

Évolution

spontanée

Mesures

IR 2017

Nouvelles

Antérieures

Périmètre

71,8

2,2

– 1,4

72,6

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

b.   En 2018

Le rendement de l’IR est prévu pour 2018 à 72,7 milliards, soit un niveau quasiment stable par rapport à 2016. Pourtant, l’évolution spontanée est prévue à 2,8 milliards soit 3,9 % portée par la reprise de l’activité et de l’emploi ainsi que par la progressivité du barème de l’IR.

Mais les mesures antérieures sont importantes et conduiront à faire baisser le rendement de l’IR de 1,4 milliard d’euros essentiellement en raison de l’élargissement du crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile.

Par ailleurs, la mise en place du prélèvement forfaitaire unique (PFU) sur certains revenus du capital et certaines plus-values entraînera une baisse de l’IR de 1,3 milliard d’euros.

Des recettes nettes d’IR 2017 aux recettes nettes d’IR 2018

(en milliards d’euros)

IR 2017

Évolution

spontanée

Mesures

IR 2018

Nouvelles

Antérieures

Périmètre

72,6

+ 2,8

– 1,3

– 1,4

0

72,7

– 2,7

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

3.   L’impôt sur les sociétés

Le rendement net de l’impôt sur les sociétés (IS) a été plus que divisé par deux en dix ans.

Rendement net de l’IS depuis 2007

(en milliards d’euros)

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Rendement net

63,3

62,6

55,1

51,4

53,0

41,3

47,2

35,3

33,5

30,0

28,4

Source : lois de règlement et présent projet de loi de règlement.

L’IS est affecté intégralement au budget général de l’État.

a.   En 2017

Pour 2017, l’évolution spontanée de l’IS est prévue à 8,4 % hors contentieux. Après prise en compte des contentieux, elle devrait s’élever à 3,6 % soit 1,1 milliard d’euros. Les mesures – essentiellement la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – devraient entraîner une baisse de l’IS de 2,7 milliards d’euros.

Des recettes nettes d’IS 2016 aux recettes nettes d’IS 2017

(en milliards d’euros)

IS 2016

Évolution

spontanée

Mesures

IS 2017

Nouvelles

Antérieures

Périmètre

30,0

1,1

– 2,7

28,4

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

b.   En 2018

Pour 2018, l’IS est attendu à nouveau en baisse à 25,3 milliards d’euros soit une diminution de 3,1 milliards d’euros.

L’évolution spontanée serait pourtant positive en raison de la hausse des bénéfices fiscaux consécutive à la reprise économique. Elle serait proche de 10 % à 2,8 milliards d’euros.

Mais les mesures de baisse pèseront à hauteur de près de 6 milliards d’euros sur le rendement de l’IS : 4,6 milliards d’euros en raison principalement de la hausse du taux et de la poursuite de la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, et 1,4 milliard d’euros en raison de la baisse du taux de l’IS prévue par le présent projet de loi de finances.

Des recettes d’IS 2017 aux recettes d’IS 2018

(en milliards d’euros)

IS 2017

Évolution

spontanée

Mesures

IS 2018

Nouvelles

Antérieures

Périmètre

28,4

+ 2,8

– 1,4

– 4,6

0

25,3

– 5,9

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

4.   La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) est partagée entre l’État et divers affectataires, dont les collectivités territoriales. Ces affectations permettent essentiellement de compenser des transferts de compétence.

Affectation de la TICPE 2016-2018

Année

2016

exécution

2017

Prévision d’exécution

2018

Prévision

État budget général

15 878

10 421

13 341

État Cas Transition énergétique

0

6 875

7 166

Sous-total État

15 878

17 296

20 507

Départements

6 281

6 432

6 538 

Régions (hors part Grenelle)

4 807

5 254

5 075 

Régions part Grenelle

607

569

615

Sous-total collectivités territoriales

11 695

 12 255

 12 228

Agence de financement des infrastructures des transports de France (AFITF)

766

735

1 076

Total

28 339

30 286

33 811

Source : réponse du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

a.   En 2017

Le rendement net de la TICPE revenant au budget général de l’État est prévu à seulement 10,4 milliards d’euros pour 2017 alors que le rendement global de la TICPE devrait être de 30,3 milliards d’euros.

Outre les transferts aux collectivités territoriales (pour près de 13 milliards d’euros), cela s’explique par le transfert d’une fraction importante (6,9 milliards d’euros) au CAS Transition énergétique. Cette mesure de périmètre est compensée en partie par la poursuite de la trajectoire carbone (+ 1,7 milliard d’euros).

Des recettes nettes de TICPE 2016 aux recettes nettes de tICPE 2017 (part État)

(en milliards d’euros)

TICPE 2016

Évolution

spontanée

Mesures

TICPE 2017

Nouvelles

Antérieures

Périmètre

15,9

+ 0,3

+ 1,7

– 6,9

10,4

– 5,2

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

b.   En 2018

Pour 2018, la part de TICPE du budget général de l’État est prévue à 13,3 milliards d’euros (la part globale de l’État étant de 20,5 milliards d’euros).

La variation par rapport à 2017 s’explique principalement par les mesures antérieures relatives à la trajectoire carbone (1,4 milliard d’euros) et par l’accélération de cette trajectoire prévue par le présent projet de loi de finances (0,9 milliard d’euros) ainsi que la première annuité de l’accélération de la convergence entre la fiscalité du gazole et de l’essence (+ un milliard d’euros). Elle s’explique aussi par les transferts supplémentaires de fraction du produit de la TICPE à l’AFITF (0,3 milliard d’euros) et au CAS Transition énergétique (0,3 milliard d’euros).

Des recettes de TICPE 2017 aux recettes de tICPE 2018 (part État)

(en milliards d’euros)

TICPE 2017

Évolution

spontanée

Mesures

TICPE 2018

Nouvelles

Antérieures

Périmètre

10,4

+ 0,2

+ 1,9

+ 1,4

– 0,6

13,3

+ 3,3

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1.

5.   Les droits de succession et de donation

Les droits de succession et de donation constituent un même impôt faisant l’objet de dispositions spéciales uniquement pour leur liquidation.

Leur rendement global est prévu à près de 13 milliards d’euros pour 2018, en hausse de plus de 40 % depuis 2012.

Rendement des droits de succession et de donation

(en milliards d’euros)

Année

2012

2013

2014

2015

2016

exécution

2017

prévision actualisée

2018

prévision

Droits de succession

7,7

8,5

8,9

10,6

10,7

11,5

11,3

Droits de donation

1,4

1,1

1,5

1,7

1,8

1,9

1,6

Total

9,1

9,6

10,4

12,3

12,5

13,4

12,9

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1, et lois de règlement.

II.   Les recettes non fiscales du budget gÉnÉral

En 2018, le produit des recettes non fiscales augmenterait légèrement de 0,2 milliard d’euros par rapport à 2017 pour s’établir à 13,2 milliards.

Selon l’état A annexé au projet de loi de finances, ces recettes non fiscales se décomposeraient en :

– 5,27 milliards d’euros de dividendes et recettes assimilées ;

– 2,44 milliards d’euros de produits du domaine de l’État ;

– 1,11 milliard d’euros de produits de la vente de biens et services ;

– 0,46 milliard d’euros de remboursements et d’intérêts des prêts, d’avances et d’autres immobilisations financières ;

– 1,58 milliard d’euros d’amendes, de sanctions, de pénalités, et de frais de poursuite ;

– et 2,37 milliards d’euros de produits divers.

III.   Les prÉLÈvements sur recettes

Il est prévu que les prélèvements sur recettes (PSR) diminuent de 1,9 milliard d’euros en 2018 par rapport à 2017.

Évolution des prÉLÈvements sur recettes

(en milliards d’euros)

Bénéficiaire du prélèvement sur recettes

2017

2018

Variation 2018/2017

Union européenne

17,9

20,2

+ 2,3

Collectivités territoriales

44,5

40,3

– 4,2

Total

62,4

60,5

 1,9

Source : présent projet de loi de finances.

A.   Le prÉLÈvement sur recettes en faveur de l’Union europÉenne

Le PSR en faveur de l’Union européenne augmenterait de 2,3 milliards d’euros pour s’établir à 20,2 milliards d’euros au lieu de 17,9 milliards d’euros en 2017. Cette augmentation s’explique en grande partie par le fait que le budget européen pour 2018 est le cinquième du cadre financier pluriannuel portant sur 2014-2020 et que, par conséquent, la mise en œuvre des programmes structurels et d’investissement atteindront leur vitesse de croisière, après un démarrage lent au cours des premières années.

B.   Le prÉLÈvement sur recettes en faveur des collectivitÉs territoriales

Le PSR en faveur des collectivités territoriales passerait de 44,5 milliards d’euros en 2017 à 40,3 milliards d’euros en 2018. Cette baisse s’explique principalement par le fait qu’une fraction du produit de la TVA de 4,1 milliards d’euros est substituée à plusieurs recettes actuellement allouées aux régions.

IV.   prÈs de 100 milliards d’euros de dÉpenses fiscales pour 2018

Le tome 2 de l’annexe relative aux évaluations des voies et moyens définit les dépenses fiscales comme « des dispositions législatives ou réglementaires dont la mise en œuvre entraîne pour l’État une perte de recettes et donc, pour les contribuables, un allégement de leur charge fiscale par rapport à ce qui serait résulté de l’application de la norme, c’est-à-dire des principes généraux du droit fiscal français ».

La notion de dépenses fiscales repose donc sur l’écart à la norme fiscale et englobe l’ensemble des réductions d’impôt (qui diminuent le montant de l’impôt dû) et des crédits d’impôt (qui entraînent, si le montant du crédit est supérieur à celui de l’impôt dû, une restitution en faveur du contribuable concerné).

Le présent projet de loi de finances prévoit des dépenses fiscales de près de 100 milliards d’euros pour 2018.

DÉpenses fiscales 2016-2018

(en milliards d’euros)

Année

2016

exécution

2017

prévision actualisée

2018

prévision

Dépenses fiscales

87,6

93,0

99,8

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 2.

Le coût total des dépenses fiscales augmenterait ainsi de 6,8 milliards d’euros par rapport à 2017 en raison principalement de la hausse du taux et de la montée en charge du CICE (+ 4,5 milliards d’euros) et de l’extension du crédit d’impôt pour emploi d’un salarié à domicile (+ un milliard d’euros).

coût budgétaire du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

(en milliards d’euros)

Année

2014

2015

2016

2017

prévision actualisée

2018

prévision

Dépense fiscale du CICE

6,6

12,5

12,9

16,5

21,0

Variation par rapport à l’année précédente

+ 6,6

+ 5,9

+ 0,4

+ 3,6

+ 4,5

Source : comité de suivi du CICE, rapport 2017, octobre 2017 (lien).

La hausse s’explique aussi par une raison technique – indépendante de toute volonté d’augmenter les dépenses fiscales – liée à l’accroissement de la fiscalité écologique consécutive à la mise en œuvre de la trajectoire carbone. En effet, la hausse de certains impôts entraîne mécaniquement une réévaluation à la hausse du coût des dépenses fiscales de restitutions de ces mêmes impôts à certains professionnels. Tel est le cas par exemple du remboursement d’une fraction de taxe intérieure de consommation sur le gazole utilisé par certains véhicules routiers ([69]).

Coût du remboursement de TICPE sur le gazole
de certains véhicules routiers

(en millions d’euros)

Année

2016

exécution

2017

prévision actualisée

2018

prévision

Dépense fiscale

425

758

1 137

Variation par rapport à l’année précédente

+ 333

+ 379

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 2.

 

Bien qu’il en soit dénombré 457 dans le tome 2 de l’annexe Évaluations des voies et moyens au présent projet de loi de finances, le coût des dépenses fiscales est en réalité concentré sur un faible nombre d’entre elles. Les 10 dépenses fiscales les plus coûteuses représentent à elles seules plus de 50 % du total.

Les 10 dÉpenses fiscales les plus coûteuses en 2018

(en millions d’euros)

Dépenses fiscales

Montant

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE)

21,0

Crédit d’impôt en faveur de la recherche (CIR)

5,8

Crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile

4,7

Abattement de 10 % sur les pensions

4,1

Taux de TVA de 10 % pour certains travaux de rénovation

3,6

Taux de TVA de 10 % sur les ventes à consommer sur place

2,7

Taux de TVA de 2,1 % sur les médicaments remboursables

2,5

Taux de TVA réduit pour certaines livraisons à soi-même

2,2

Taux réduit de taxe intérieure de consommation sur le gazole

2,0

Exonération des prestations familiales et autres allocations

1,9

Source : présent projet de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 2.

Avec 21 milliards en 2018, le CICE est la dépense fiscale la plus élevée.

L’évaluation des dépenses fiscales est parfois difficile à réaliser car leur coût dépend essentiellement des comportements qui seront adoptés par les bénéficiaires. Par exemple, le coût du crédit d’impôt développement durable (CIDD) – qui a existé jusqu’en 2014 avant que le CITE ne le remplace en 2015 – a dépassé les prévisions de 0,9 milliard d’euros en 2007, de 1,3 milliard d’euros en 2009, et de 0,3 milliard d’euros en 2016. Il est évalué à 1,56 milliard d’euros pour 2018.

PrÉvision et exécution du CIDD et du CITE depuis 2007

(en millions d’euros)

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015*

2016*

2017*

Prévision

1 000

2 400

1 500

2 600

1 950

1 400

650

660

890

1 400

1 670

Exécution

1 873

2 100

2 763

2 625

2 015

1 110

673

619

874

1 678

1 675

* Le CITE a remplacé le CIDD en 2015.

Source : annexe Évaluations des voies et moyens, tome 2, aux projets de loi de finances et, pour l’exécution 2016, Cour des comptes, Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2016 : recettes fiscales de l’État, mai 2017.

 

 


—  1  —

   FICHE N° 10 :
les dÉpenses de l’État

Le présent projet de loi de finances illustre à la fois la volonté d’une maîtrise accrue de la dépense de l’État et de choix forts en matière de politiques publiques.

I.   une Évolution maÎtrisÉe des dÉpenses de l’État

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 a prévu une trajectoire très maîtrisée de la dépense des administrations publiques centrales sur le quinquennat.

Évolution de la dÉpense des administrations publiques centrales,
hors crÉdits d’impÔt

(taux d’évolution, en volume)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Administrations publiques centrales

0,1

0,8

1,2

0,7

0,2

Source : loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

À ce titre, les dépenses de l’État seront fortement sollicitées afin d’évoluer à un niveau très faible sur la période et notamment à 0,6 % en volume en 2018 sur le champ de la nouvelle norme de dépenses pilotables de l’État.

A.   les nouvelles normes de dÉpenses de l’État illustrent les efforts entrepris

1.   L’instauration de deux nouvelles normes de dépenses applicables à l’État

L’article 8 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 vise à instaurer deux nouvelles normes de dépenses applicables à l’État : une norme sur les dépenses pilotables de l’État et un objectif de dépenses totales de l’État (ODETE).

Cette évolution a été inspirée par les travaux de la Cour des comptes qui recommandait la mise en place de deux nouvelles normes de dépenses de l’État ([70]) :

–une norme globale d’évolution des dépenses de l’État permettant d’appréhender l’ensemble des dépenses ;

– et une norme de gestion plus directement destinée à la maîtrise des dépenses par les gestionnaires publics.

Ainsi, ledit article du projet de loi de programmation prévoit que la norme de dépenses pilotables de l’État, comprend :

– les dépenses du budget général hors missions Remboursements et dégrèvements et Investissements d’avenir, hors la charge de la dette et hors les contributions au compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions ;

– les plafonds des taxes affectées à des tiers autres que les collectivités territoriales et la sécurité sociale ;

– les budgets annexes hors contributions au CAS Pensions ;

– les dépenses des CAS hors Pensions, Participations financières de l’État et hors programmes de désendettement, ou portant à titre principal sur des contributions aux collectivités territoriales ou des engagements financiers ;

– le compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public.

L’objectif de dépenses totales de l’État (ODETE), comprend outre l’agrégat précédent :

– les dépenses d’investissements d’avenir et la charge de la dette ;

– les prélèvements sur recettes à destination de l’Union européenne et des collectivités territoriales, ainsi que la fraction de taxe sur la valeur ajoutée affectée aux régions, au Département de Mayotte et aux collectivités territoriales de Corse, de Martinique et de Guyane ;

– le CAS Pensions et les programmes des comptes spéciaux portant à titre principal des contributions aux collectivités territoriales ou des engagements financiers.

Le Rapporteur général considère que cette évolution est légitime et pertinente, afin de mieux maîtriser les dépenses pilotables de l’État. Néanmoins, il regrette la complexité accrue dans la définition de ces deux nouveaux agrégats.

2.   Les normes de dépenses de l’État font apparaître une faible augmentation des dépenses en 2018

Le projet de loi de programmation définit la trajectoire d’évolution des deux normes de dépenses de l’État pour la période 2018-2022.

trajectoire des normes de dÉpenses de l’État

(en milliards d’euros courants)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

Norme de dépenses pilotables de l’État

256,9

258,6

259,7

261,6

263,6

Évolution en volume de la norme de dépenses pilotables (en %)

0,6

– 0,4

– 1,0

– 1,0

– 1,0

Objectif de dépenses totales de l’État

424,7

431,8

437,8

442,0

450,1

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Selon l’exposé des motifs du présent projet de loi de finances, l’évolution en volume sur le périmètre de la norme de dépenses pilotables de l’État a été de 1,0 % en 2016 et de 3,3 % en loi de finances initiale pour 2017 ([71]).

S’agissant de l’exercice 2018, les normes de dépenses de l’État sont déclinées de la façon suivante.

normes de dÉpenses de l’État

(en milliards d’euros)

Dépenses

LFI 2017

Format 2018

PLF 2018

Écart PLF 2018 / LFI 2017

(format 2018)

Crédits ministériels

236,0

240,5

4,5

Taxes affectées

9,3

9,0

– 0,3

Budgets annexes et comptes spéciaux

13,3

13,3

0

Retraitements des flux internes au budget de l’État

– 5,8

– 5,8

0

Norme de dépenses pilotables

252,8

256,9

4,1

Transferts aux collectivités territoriales

47,1

47,0

– 0,1

Dépenses du CAS Pensions (hors programme 743)

55,7

56,5

0,8

Autres dépenses de comptes d’affectation spéciale

1,5

1,8

0,3

Charge de la dette

41,5

41,2

– 0,3

Prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne

18,7

20,2

1,5

Investissements d’avenir

0,0

1,1

1,1

Objectif de dépenses totales de l’État

417,4

424,7

7,3

Source : présent projet de loi de finances.

Les dépenses pilotables de l’État augmentent de 4,1 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017 (au format 2018), soit un niveau très faible. La loi de finances initiale pour 2017 avait représenté une augmentation de 10,4 milliards d’euros sur le même périmètre par rapport à la loi de finances initiale pour 2016.

S’agissant des dépenses totales de l’État, celles-ci progressent de 7,3 milliards d’euros, principalement en raison de quatre facteurs :

– une augmentation des crédits ministériels de 4,5 milliards d’euros, notamment en lien avec l’effort de sincérité de la budgétisation du Gouvernement (Cf. infra) ;

– une augmentation des dépenses du CAS Pensions de 0,8 milliard d’euros, sous l’effet de la croissance tendancielle de la dépense de pensions ;

– une hausse du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne de 1,5 milliard d’euros ;

– et de la budgétisation du troisième programme d’investissements d’avenir (PIA 3), à hauteur de 1,1 milliard d’euros en 2018. Pour rappel, le précédent Gouvernement avait prévu 10 milliards d’euros en autorisations d’engagement de dotation du PIA 3, sans aucun crédit de paiement en 2017.

B.   la mise en place d’une maÎtrise de la masse salariale
de l’État

La masse salariale représente le principal poste de dépenses du budget de l’État, les dépenses de personnel s’élevaient à 123 milliards d’euros en 2016 ([72]). Le Gouvernement présente différentes mesures visant à mieux maîtriser l’évolution de cette dépense, apparue en nette accélération lors de l’exercice 2016 ([73]).

1.   Le retour à une orientation à la baisse des effectifs de l’État

Le présent projet de loi de finances prévoit d’orienter de nouveau à la baisse les effectifs de l’État (hors opérateurs), après trois exercices d’augmentation sensible des effectifs (+ 34 637 équivalents temps plein – ETP) entre 2015 et 2017.

La distinction entre les ETP et les ETPT

Les équivalents temps plein (ETP) correspondent aux effectifs physiques, c’est-à-dire aux agents rémunérés, corrigés de la quotité de temps travaillé.

Exemple : un agent à temps partiel, à 70 % (quotité de travail : 70 %) correspond à 0,7 ETP.

Les équivalents temps plein travaillés (ETPT) correspondent aux effectifs physiques pondérés par la quotité de travail des agents (temps plein, temps partiel, etc.) et la période d’activité sur l’année.

Exemple : un agent à temps partiel, à 70 %, qui a travaillé du 1er juillet au 31 décembre correspond à 0,35 ETPT (1 × 0,7 × 6 mois/12 mois = 0,35 ETPT).

Les consommations d’emplois, de même que l’autorisation du Parlement au moment de la loi de finances initiale, sont exprimées en ETPT. À l’inverse, les schémas d’emplois sont exprimés en ETP.

Les schémas d’emplois traduisent les flux d’entrées et de sorties, tandis que les plafonds d’emplois illustrent le stock d’emplois.

NB : depuis l’exercice 2015, les modalités de décompte des emplois sont homogènes entre l’État et ses opérateurs : la fixation d’un plafond d’emplois en ETPT et une trajectoire de schémas d’emplois en ETP.

En 2018, le schéma d’emplois (correspondant au solde des entrées et des sorties) devrait conduire à une diminution des effectifs de l’État de 324 ETP. Cela représente un retour à la tendance de diminution des effectifs de l’État, avec une baisse des emplois de 168 366 ETP entre 2007 et 2015.

Évolution du schÉma d’emplois de l’État

(en équivalents temps plein)

Source : commission des finances, à partir des projets de lois de règlement et du projet de loi de finances pour 2017.

Néanmoins, l’augmentation des effectifs de l’État au cours des trois derniers exercices aura un impact sur le plafond des autorisations d’emplois de l’État (budget général et budgets annexes), qui représente le stock des effectifs.

En 2018, celui-ci serait en augmentation à hauteur de 16 008 équivalents temps plein travaillé (ETPT) par rapport au niveau prévu en loi de finances initiale pour 2017.

Cela résulte principalement des éléments suivants :

– des mesures de transfert et de périmètre, à hauteur de 6 347 ETPT, correspondant à la transformation des contrats d’accompagnement d’élèves en situation de handicap (AESH) en contrats pérennes portés par le ministère de l’éducation nationale ;

– l’effet en année pleine des hausses d’effectifs intervenues en 2017 (+ 10 392 ETPT), dont 7 774 ETPT relèvent du ministère de l’éducation nationale.

Le tableau suivant détaille l’évolution des plafonds d’autorisations d’emplois pour l’État entre la loi de finances initiale pour 2017 et le présent projet de loi de finances. La comparaison des données est rendue difficile en raison des changements de dénomination et de périmètre ministériels, ce qui nuit à la qualité de l’information du Parlement.

Évolution des plafonds des autorisations d’emplois de l’État

(en équivalents temps plein travaillé)

Désignation du ministère ou du budget annexe

LFI 2017

Désignation du ministère ou du budget annexe

PLF 2018

Affaires étrangères et développement international

13 834

Action et comptes publics

126 536

Affaires sociales

10 225

Agriculture et alimentation

30 362

Agriculture, agroalimentaire et forêt

30 530

Armées

274 580

Aménagement du territoire, ruralité et collectivités territoires

281

Cohésion des territoires

573

Culture et communication

11 189

Culture

11 148

Défense

273 280

Économie et finances

13 137

Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

1 015 602

Éducation nationale

1 021 721

Environnement, énergie et mer

29 103

Enseignement supérieur, recherche et innovation

8 016

Économie et finances

141 302

Europe et affaires étrangères

13 530

Intérieur

285 374

Intérieur

287 325

Justice

83 216

Justice

84 969

Logement et habitat durable

12 288

Outre-mer

5 525

Outre-mer

5 505

Services du Premier ministre

11 536

Services du Premier ministre

11 631

Solidarités et santé

9 938

Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

9 523

Sports

0

Transition écologique et solidaire

40 805

Travail

9 251

Budget général

1 932 883

Budget général

1 948 952

Contrôle et exploitation aériens

10 679

Contrôle et exploitation aériens

10 677

Publications officielles et information administrative

763

Publications officielles et information administrative

704

Budgets annexes

11 442

Budgets annexes

11 381

Total général

1 944 325

Total général

1 960 333

Source : commission des finances.

Le plafond des autorisations d’emplois des opérateurs de l’État est en augmentation de 5 792 ETPT par rapport à la loi de finances pour 2017.

plafonds des emplois des opÉrateurs de l’État

(en équivalents temps plein travaillé)

Mission

PLAFOND

LFI 2017

PLF 2018

Action extérieure de l’État

6 846

6 765

Administration générale et territoriale de l’État

443

443

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

14 439

14 340

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

1 301

1 327

Cohésion des territoires

379

Culture

14 470

14 361

Défense

6 600

6 603

Direction de l’action du Gouvernement

611

597

Écologie, développement et mobilité durables

20 237

19 791

Économie

2 612

2 591

Égalité des territoires et logement

291

Enseignement scolaire

3 400

3 359

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

1 347

1 328

Immigration, asile et intégration

1 829

1 879

Justice

575

580

Médias, livre et industries culturelles

3 033

3 023

Outre-mer

127

127

Politique des territoires

96

Recherche et enseignement supérieur

259 352

259 376

Régimes sociaux et de retraite

337

319

Santé

2 253

1 658

Sécurités

267

267

Solidarité, insertion et égalité des chances

8 627

8 368

Sport, jeunesse et vie associative

580

580

Travail et emploi

48 161

55 558

Contrôle et exploitation aériens

812

812

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

34

41

Total

398 680

404 472

Source : loi de finances initiale pour 2017 et présent projet de loi de finances.

Cette hausse résulte essentiellement de mesures de périmètre (+ 7 249 ETPT), dont l’entrée dans le champ des opérateurs de l’établissement public chargé de la formation professionnelle des adultes (AFPA), qui représente 7 710 ETPT.

Pour autant, les effectifs des opérateurs de l’État devraient diminuer à hauteur de 1 276 ETP en 2018, selon le schéma d’emplois prévu par le présent projet de loi de finances. Les principales créations et suppressions d’emplois concernent les opérateurs :

– du ministère de la transition écologique et solidaire (– 496 ETP), concernant notamment Voies navigables de France, les Agences de l’eau, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, Météo-France, l’Institut national de l’information géographique et forestière et le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement ;

– du ministère du travail (– 347 ETP), concernant principalement Pôle emploi ;

– du ministère des solidarités et de la santé (– 272 ETP), concernant principalement des agences régionales de santé ;

– du ministère de l’agriculture et de l’alimentation (– 95 ETP), concernant l’Agence de services et de paiement, FranceAgrimer et l’Institut français du cheval et de l’équitation ;

– et du ministère de l’intérieur (+ 57 ETP), dont 35 ETP à l’Office français de l’immigration et de l’intégration et 15 ETP à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides.

Au total, les effectifs de l’État (ministères et opérateurs) diminueraient de 1 600 ETP au cours de l’exercice 2018. Le Gouvernement a confirmé le maintien d’un objectif de réduction de 120 000 emplois au sein de la fonction publique sur le quinquennat (dont a priori 50 000 emplois pour la fonction publique d’État). Toutefois, il souhaite mener au préalable un examen des missions et des politiques publiques avant de définir une trajectoire de diminution des effectifs ([74]).

2.   Le rétablissement d’un jour de carence, par le présent projet de loi
de finances

Conformément à l’engagement du ministre de l’action et des comptes publics, l’article 48 du présent projet de loi de finances prévoit le rétablissement d’un jour de carence pour la prise en charge des congés de maladie des personnels du secteur public.

La loi de finances pour 2012 ([75]) avait institué une journée de carence pour les personnels du secteur public, afin notamment :

– de réduire l’absentéisme de courte durée pour raison de santé ;

– et de faire converger les cadres juridiques applicables au secteur public et au secteur privé, où les salariés supportent trois jours de carence avant de pouvoir bénéficier des indemnités journalières de maladie versées par l’assurance maladie.

La loi de finances pour 2014 avait abrogé le jour de carence applicable aux personnels du secteur public ([76]).

Selon le rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin dernier, l’instauration d’un jour de carence paraît avoir eu pour effet de faire baisser les arrêts maladie de courte durée, tandis que son abrogation aurait eu l’effet inverse ([77]). L’évaluation préalable de l’article 48 du présent projet de loi de finances cite une étude de 2015 du courtier en assurance Sofaxis, qui conclut que l’instauration d’un jour de carence a entraîné la diminution de la moitié du nombre d’arrêts maladie ordinaires courts entre 2011 et 2013 parmi un échantillon d’agents de la fonction publique territoriale.

Ainsi, le rétablissement du jour de carence devrait générer une économie de 270 millions d’euros en année pleine toutes administrations publiques confondues, dont 108 millions d’euros au titre de la fonction publique d’État. La Cour des comptes avait estimé l’économie potentielle à 0,4 milliard d’euros en juin dernier.

3.   La non-revalorisation du point d’indice de la fonction publique

Le Gouvernement s’est également engagé à geler le point d’indice de la fonction publique ([78]).

Depuis 2010, celui-ci avait été gelé avant de connaître une augmentation en deux temps, de 0,6 % le 1er juillet 2016 et de 0,6 % le 1er février 2017.

Le gel du point d’indice devrait entraîner, en tendance, une économie évaluée à 2 milliards d’euros par an toutes administrations publiques confondues, selon la Cour des comptes ([79]).

II.   Un budget de l’État traduisant les choix budgÉtaires
du gouvernement

A.   un effort de sincÉritÉ budgÉtaire

1.   Remédier aux biais de construction du budget, telles que les sous-budgétisations récurrentes

En juin dernier, la Cour des comptes a relevé que la loi de finances initiale pour 2017 comportait des sous-budgétisations à hauteur de 4,2 milliards d’euros ([80]).

principales sous-budgétisations identifiÉes par la cour des comptes

(en milliards d’euros)

Missions

Motif

Montants

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

Refus d’apurement communautaire

0,4

Influenza aviaire

0,2

Travail et emploi

Contrats aidés

0,3 à 0,6 (selon le nombre final)

Plan de formation

0,5

Prime à l’embauche

0,2

Défense

Opérations extérieures

0,5 à 0,7

Opérations intérieures

0,2

Solidarité, insertion et égalité des chances

Allocation aux adultes handicapés (AAH)

0,3

Prime d’activité

0,4

Enseignement scolaire

Masse salariale, au titre du GVT

0,2

Transformation de contrats aidés en contrats d’accompagnement des enfants en situation de handicap

0,2

Immigration, asile et intégration

Allocation pour demandeur d’asile

0,15

Égalité des territoires et logement

Aides personnalisées au logement (APL)

0,1

Hébergement d’urgence

0,1

Écologie, développement et mobilité durables

Compensation fret à SNCF Réseau

0,1

Source : Cour des comptes.

Le Gouvernement a décidé d’accroître la sincérité des budgétisations du projet de loi de finances pour 2018, ce dont le Rapporteur général ne peut que se féliciter.

À ce titre, les crédits des missions suivantes progresseront :

– la mission Défense, la dotation au titre des opérations extérieures (OPEX) est portée à 650 millions d’euros en 2018, au lieu de 450 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2017 ; cette provision sera augmentée de 200 millions d’euros par an, pour atteindre 1,1 milliard d’euros en 2020 ;

– la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, porte pour la première fois en 2018 une provision pour risques et aléas, en particulier pour gérer les refus d’apurement communautaire, dotée de 300 millions d’euros ;

– la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, prévoit une trajectoire de dépense relative à la prime d’activité de 5,14 milliards d’euros en 2018, tenant également compte d’une revalorisation exceptionnelle de son montant forfaitaire de 20 euros au 1er octobre 2018, les crédits dévolus à l’allocation aux adultes handicapés (AAH) progressent de 683 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, intégrant également la mesure de revalorisation mensuelle de 50 euros à compter du 1er novembre 2018 ;

– la mission Enseignement scolaire tient compte de la transformation des contrats uniques d’insertion (CUI) et contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) en contrats d’accompagnement d’élèves en situation de handicap (AESH) aux rentrées 2016 et 2017, représentant une augmentation des crédits de 209 millions d’euros ;

– la mission Immigration et asile prévoit une augmentation de 45 % des crédits destinés au financement de l’allocation pour demandeurs d’asile (ADA), à hauteur de 318 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017 (220 millions d’euros), avec une hausse prévisionnelle de 10 % de la demande d’asile en 2018 ;

– et la mission Cohésion des territoires intègre une augmentation des crédits dévolus à l’action Hébergement et logement adapté de 13,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2017 (soit 225 millions d’euros), en particulier pour le financement de l’hébergement d’urgence.

2.   Abaisser le taux de mise en réserve des crédits de 8 % à 3 %

En 2018, le Gouvernement prévoit de réduire de 8 % à 3 % le taux de mise en réserve des crédits, hors dépenses de personnel (titre 2), en autorisations d’engagement (AE) et en crédits de paiement (CP). Le taux de mise en réserve des crédits de personnel sera maintenu à 0,5 % en AE et en CP.

Le taux de mise en réserve des crédits, autrement dénommé réserve de précaution est un dispositif prévu et encadré au III de l’article 14 et au 4° bis de l’article 51 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ([81]). Celui-ci consiste à rendre indisponibles des crédits pour les responsables de programmes dotés de crédits limitatifs. On parle de « gel » de crédits, voire de « surgel » de crédits lors de mises en réserve supplémentaires intervenues en cours de gestion.

La réserve de précaution répond à une double logique :

– une logique d’« auto-assurance » destinée à responsabiliser les gestionnaires en cas d’aléas de gestion ;

– et une logique de modération du rythme de consommation des crédits.

Le taux de mise en réserve a été progressivement accru au cours des dernières années. La loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 ([82]) prévoyait, pour chaque programme, un taux de mise en réserve d’au moins 0,5 % sur les crédits ouverts pour les dépenses de personnel et d’au moins 5 % sur les crédits ouverts pour les autres dépenses. Dès le projet de loi de finances pour 2013, le Gouvernement a appliqué un taux de mise en réserve supérieur de 6 % pour les crédits autres que de personnel.

L’article 12 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 ([83]) a relevé le taux minimal de crédits mis en réserve à 6 % pour les crédits autres que de personnel, ces derniers devant être mis en réserve à hauteur d’au moins 0,5 %.

Depuis 2015, le Gouvernement applique un taux de mise en réserve des crédits à un plus haut historique de 8 % pour les crédits autres que de personnel. En outre, le Gouvernement a procédé à une mise en réserve des crédits reportés d’un exercice à l’autre en 2016 et en 2017, ce qui représente une pratique inédite depuis l’entrée en vigueur de la LOLF en 2006. Ainsi, le Gouvernement informait la rapporteure générale en avril 2017 d’un montant de réserve de précaution sur les crédits du budget général à 12,5 milliards d’euros en AE et 12,2 milliards d’euros en CP ([84]).

Du point de vue du Gouvernement, cette pratique avait pour but de sécuriser l’exécution du budget de l’État en disposant d’un outil de régulation budgétaire représentant des masses financières significatives.

Toutefois, cette pratique a eu pour inconvénient de limiter la portée du vote du Parlement en loi de finances initiale et de nuire à la qualité de son contrôle et de son suivi de l’exécution du budget général de l’État. La Cour des comptes a par ailleurs relevé que « la réserve de précaution est en principe destinée à faire face aux aléas de gestion, son utilisation a été progressivement détournée de cet usage, puisqu’elle sert de plus en plus à absorber des sous-budgétisations initiales » ([85]). Enfin, le niveau élevé de crédits mis en réserve entrait en contradiction avec l’esprit de la LOLF destinée à responsabiliser les gestionnaires ([86]).

Ainsi, le Rapporteur général se félicite de la décision prise par le Gouvernement d’abaisser le taux de crédits mis en réserve à 3 % à compter de l’exercice 2018. Cela met fin à une pratique qui apparaissait à maints égards comme contestable.

3.   Instaurer une règle de stabilité des restes à payer sur le budget de l’État

L’article 14 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 pose le principe de stabilisation du montant des restes à payer de l’État pour chacune des années 2018 à 2022, par rapport au niveau atteint en 2017.

La notion de restes à payer désigne les autorisations d’engagement non couvertes par des crédits de paiement. Cela correspond aux reports de charges d’un exercice budgétaire à l’autre, pratique croissante et critiquée à plusieurs reprises par la Cour des comptes, au titre du principe de sincérité ([87]).

Ainsi, les restes à payer (y compris fonds de concours) sur le budget général ont progressé de 6,5 milliards d’euros pour atteindre 100,9 milliards d’euros fin 2016, soit un niveau inédit depuis l’entrée en vigueur de LOLF ([88]). La Cour des comptes relevait que 20,3 milliards d’euros devraient faire l’objet de paiements dès 2017.

La règle de stabilité introduite par le projet de loi de programmation est inédite et représente un effort de sincérité supplémentaire de la part du Gouvernement, afin de ne pas transférer des charges sur les exercices postérieurs. Le Rapporteur général salue cette disposition, qui favorise le travail de suivi et de contrôle du Parlement.

B.   une augmentation gÉnÉrale des plafonds de crÉdits
de paiement du budget gÉnÉral

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 présente la trajectoire des crédits alloués aux missions du budget général, hors contributions au compte d’affectation spéciale Pensions ([89]).

Cette présentation illustre l’évolution des crédits, dits pilotables, au sein du budget général.

plafonds de crÉdits de paiement du budget gÉnÉral,
hors contributions au compte d’affectation spÉciale pensions

(en milliards d’euros, à périmètre constant)

Année

LFI 2017

format 2018

2018

Écart 2018 / LFI 2017 format 2018

Action et transformation publiques

0

0,02

0,02

Action extérieure de l’État

2,86

2,86

0

Administration générale et territoriale de l’État

2,5

2,14

-0,36

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

2,79

3,19

0,4

Aide publique au développement

2,59

2,68

0,09

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

2,54

2,46

– 0,08

Cohésion des territoires

18,26

16,53

– 1,73

Conseil et contrôle de l’État

0,51

0,52

0,01

Crédits non répartis

0,02

0,41

0,39

Culture

2,7

2,73

0,03

Défense

32,44

34,2

1,76

Direction de l’action du Gouvernement

1,38

1,38

0

Écologie, développement et mobilité durables

9,91

10,39

0,48

Économie

1,65

1,63

– 0,02

Engagements financiers de l’État (hors dette)

0,55

0,58

0,03

Enseignement scolaire

50,01

51,29

1,28

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

8,11

8,13

0,02

Immigration, asile et intégration

1,1

1,38

0,28

Investissements d’avenir

0

1,08

1,08

Justice

6,72

6,98

0,26

Médias, livre et industries culturelles

0,57

0,56

– 0,01

Outre-mer

2,02

2,02

0

Pouvoirs publics

0,99

0,99

0

Recherche et enseignement supérieur

26,69

27,4

0,71

Régimes sociaux et de retraite

6,31

6,33

0,02

Relations avec les collectivités territoriales

3,35

3,66

0,31

Santé

1,24

1,42

0,18

Sécurités

13,09

13,3

0,21

Solidarité, insertion et égalité des chances

17,67

19,2

1,53

Sport, jeunesse et vie associative

0,8

0,89

0,09

Travail et emploi

16,68

15,18

– 1,5

Total

236,05

241,53

5,48

NB : hors charge de la dette et hors mission Remboursements et dégrèvements.

Source : commission des finances, à partir des données de l’article 12 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Au total, les crédits alloués au budget général apparaissent en augmentation de 5,48 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

C.   les principales augmentations de crÉdits des missions
du budget gÉnÉral

1.   Le renforcement des moyens du pôle régalien (+ 2,23 milliards d’euros)

En 2018, le pôle dit « régalien » (missions Défense, Justice et Sécurités) bénéficiera d’une augmentation de crédits, hors contributions au CAS Pensions, de 2,23 milliards d’euros.

La mission Défense connaîtra une augmentation de crédits de 8,6 milliards d’euros sur le quinquennat, conformément à l’engagement du Président de la République de porter l’effort en matière de défense à 2 % du PIB à l’horizon 2025. En 2018, cela se traduira notamment par une hausse de 327 millions d’euros en faveur de l’infrastructure de défense, 200 millions d’euros destinés au renforcement de la protection des forces et la création de 518 emplois bénéficiant principalement au renseignement et à la cyberprotection.

Les crédits de la mission Justice seront accrus de 0,3 milliard d’euros en 2018 et de 1,5 milliard d’euros entre 2019 et 2020. Il s’agit de renforcer les moyens du service public de la justice et de répondre à l’effort de création de 6 500 emplois supplémentaires sur la durée du quinquennat, dont 1 000 dès 2018 (732 emplois en faveur de l’administration pénitentiaire, 148 emplois dans les juridictions, 40 emplois au sein de la protection judiciaire de la jeunesse et 80 emplois au sein du secrétariat général). Par ailleurs, cet effort budgétaire financera la création de 15 000 places de prison supplémentaires à l’horizon 2027.

La mission Sécurités bénéficiera d’augmentations régulières de crédits sur le quinquennat, afin de financer 10 000 emplois supplémentaires au sein des forces de sécurité sur le quinquennat, dont 2 000 dès 2018 (1 400 emplois pour la police nationale et 500 emplois pour la gendarmerie nationale).

2.   La préparation de l’avenir (+ 3,07 milliards d’euros)

En 2018, les crédits de la mission Enseignement scolaire progresseront de 1,28 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, hors contributions au CAS Pensions. Cela illustre le caractère prioritaire de l’éducation pour le Gouvernement. Ainsi, cette hausse de crédits permettra notamment le financement du dédoublement des classes de CP et CE1 situées dans les réseaux d’éducation prioritaire à compter de la rentrée 2017. La rémunération des personnels exerçant dans les établissements des réseaux d’éducation prioritaire renforcés (REP+) sera progressivement revalorisée de 3 000 euros nets au cours des trois prochaines années scolaires.

Les crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur augmenteront de 0,71 milliard d’euros en 2018, afin de soutenir la priorité du Gouvernement en faveur de la recherche, de l’enseignement supérieur et de l’accompagnement des étudiants.

Le Gouvernement a décidé de doter la mission Investissements d’avenir de 1,08 milliard d’euros en crédits de paiement en 2018, contrairement au précédent Gouvernement qui n’avait prévu aucun crédit de paiement sur cette mission créée en 2017. Cette mission budgétaire correspond au PIA 3, qui sera pleinement intégré au « Grand plan d’investissement » présenté fin septembre. Les crédits financeront les trois axes du PIA 3, le soutien des progrès de l’enseignement supérieur et de la recherche, la valorisation de la recherche et l’accélération de la modernisation des entreprises.

Le « Grand plan d’investissement »

Le 25 septembre dernier, le Premier ministre a détaillé les ambitions et le contenu du « Grand plan d’investissement » (GPI), à la suite de la remise du rapport de Jean Pisani-Ferry sur les moyens et la répartition de ce plan.

Le GPI mobilisera 57 milliards d’euros sur la durée du quinquennat, répartis de la façon suivante :

– 24 milliards d’euros de crédits budgétaires nouveaux ;

– 12 milliards d’euros de réorientation de crédits existants vers les finalités du plan d’investissement ;

– 11 milliards d’euros d’instruments financiers (prêts, garanties, fonds propres) ;

– et 10 milliards d’euros issus de l’intégration du PIA 3, dont 6 milliards d’euros de subventions et 4 milliards d’euros de fonds propres.

L’impact sur la dépense publique s’élèvera à 30 milliards d’euros, représentant les crédits budgétaires nouveaux et les subventions du PIA 3.

Le GPI ne doit pas s’entendre comme des dépenses d’investissement au sens de la comptabilité nationale, c’est-à-dire de formation brute de capital fixe (FBCF), mais comme des dépenses d’investissement, au sens large, à savoir en faveur de la formation, du capital humain, ou de la transition écologique.

Ainsi, le GPI s’articulera autour de quatre axes prioritaires :

– accélérer la transition écologique (20 milliards d’euros) ;

– édifier une société de compétences (15 milliards d’euros) ;

– ancrer la compétitivité sur l’innovation (13 milliards d’euros) ;

– construire l’État de l’âge numérique (9 milliards d’euros).

Le GPI devrait bénéficier aux collectivités territoriales à hauteur de 10 milliards d’euros et aux outre-mer à hauteur d’un milliard d’euros.

Contrairement aux PIA, les moyens du GPI seront inscrits dans les crédits des ministères, avec une garantie de stabilité et d’exonération des régulations budgétaires.

Néanmoins, les ministères devront instaurer les procédures de sélection, de suivi et d’évaluation ex post des projets, mises en œuvres pour les PIA par le Commissariat général à l’investissement.

L’échelonnement des engagements du GPI n’a pas précisément été communiqué par le Gouvernement, toutefois un graphique page 28 du rapport de M. Pisani-Ferry présente à titre indicatif le séquençage des actions du plan d’investissement sur la durée du quinquennat.

L’article 26 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 prévoit qu’est jointe au projet de loi de finances de l’année une annexe générale relative au GPI, incluant le détail des mesures financées.

3.   Un effort budgétaire en faveur de dispositifs de solidarité (+ 1,53 milliard d’euros)

Les crédits de la mission Solidarité, égalité des chances et insertion seront accrus de 1,53 milliard d’euros en 2018. Cela correspond notamment à la revalorisation de la prime d’activité de 20 euros à compter du 1er octobre 2018, pour une revalorisation de 80 euros par mois sur la durée du quinquennat. L’allocation aux adultes handicapés (AAH) sera également revalorisée à 860 euros en 2018, puis 900 euros en 2019, pour un coût de 2 milliards d’euros sur le quinquennat.

Cette revalorisation des deux dispositifs précités s’inscrit dans une démarche plus générale, qui inclut également la revalorisation de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) de 100 euros d’ici 2020, dont une première augmentation de 30 euros dès avril 2018.

D.   les baisses significatives de crÉdits concentrÉes sur deux missions

L’effort de maîtrise de la dépense de l’État porte essentiellement sur deux missions Cohésion des territoires et Travail et emploi avec une diminution de crédits de 3,23 milliards d’euros, en raison de modifications profondes des politiques menées. Cela s’inscrit dans une stratégie de réformes structurelles destinées à produire des économies budgétaires, conformément au processus « Action publique 2022 ».

Action publique 2022

Le Gouvernement a décidé de lancer en 2017 un processus de réforme de l’État et des administrations publiques, dénommé processus « Action publique 2022 ». Ce processus sera placé sous l’autorité du Premier ministre, avec l’appui du ministre de l’action et des comptes publics.

Un comité action publique 2022 (CAP2022) sera créé et composé d’économistes, de personnalités qualifiées françaises ou étrangères issues de la société civile, de hauts fonctionnaires et d’élus locaux, afin d’identifier les réformes structurelles et les économies significatives et pérennes envisageables sur l’ensemble du périmètre des administrations publiques.

Ce comité travaillera sur :

– des propositions formulées par les ministères ;

– cinq chantiers transversaux parallèles (la simplification administrative, la transformation numérique, la rénovation du cadre des ressources humaines, l’organisation territoriale des services publics et la modernisation de la gestion budgétaire et comptable).

Un forum de l’action publique sera organisé afin d’associer les usagers et les agents du service public à la rénovation de l’action publique.

Les conclusions du Comité action publique 2022 seront dévoilées avant la fin du premier trimestre 2018, et celles qui seront sélectionnées donneront lieu à des plans de transformation ministériels.

1.   La réforme de la politique du logement (– 1,73 milliard d’euros)

L’article 52 du présent projet de loi de finances prévoit une réforme des aides au logement, afin d’assurer une meilleure maîtrise des loyers et un meilleur accès au logement des ménages aux revenus les plus modestes. Cette réforme devrait s’appuyer sur deux leviers, le niveau des loyers et le volume global des aides versées.

En 2018, cette réforme devrait produire une économie de 1,7 milliard d’euros sur les aides personnelles au logement (APL) versées, via une réduction de loyer de solidarité (RLS) pour les locataires aux revenus les plus modestes, la mise en extinction du dispositif d’APL accession et la non-application au 1er octobre 2018 de la révision annuelle du barème de calcul des APL.

En 2019, les aides au logement devraient être calculées sur la base des revenus les plus récents des allocataires afin de mieux prendre en compte la réalité de leur situation.

2.   La refonte de la politique de l’emploi (– 1,5 milliard d’euros)

Les crédits budgétaires de la mission Travail et emploi sont indissociables des réformes de la politique de l’emploi. Ainsi, le Gouvernement a présenté et adopté en Conseil des ministres les ordonnances réformant le droit du travail le 22 septembre dernier, prises en application de la loi d’habilitation du 15 septembre 2017 ([90]).

Les crédits du GPI financeront à hauteur de 14,6 milliards d’euros l’investissement dans les compétences sur le quinquennat, visant à accroître les moyens de la formation et à atteindre le seuil de 100 000 bénéficiaires de Garantie jeunes dès 2018. Le Gouvernement prépare diverses réformes relatives à l’apprentissage, la formation professionnelle, l’assurance-chômage et aux régimes de retraites.

En parallèle, les crédits de la mission budgétaire seront réduits de 1,5 milliard d’euros en 2018, principalement en raison de la diminution du volume de contrats aidés à 200 000 sur l’exercice 2018. À titre de comparaison, 460 000 contrats aidés avaient été financés au cours de l’exercice 2016 et la loi de finances initiale pour 2017 a prévu des crédits budgétaires à hauteur de 280 000 contrats.

Évolution du nombre de contrats aidÉs

(en nombre de contrats)

Source : projets de lois de finances et projets de loi de règlement, annexes budgétaires.

E.   les mesures de pÉrimÈtre

Le présent projet de loi de finances prévoit plusieurs mesures techniques de changement de périmètre par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, pour un montant total de 1,05 milliard d’euros sur le champ de l’objectif de dépenses totales de l’État (ODETE).

mesures de changements de pÉRIMÈtre

Mesures de périmètre

Projet de loi de finances pour 2018

Modification du champ du plafonnement des taxes et ressources affectées (à partir de 2012)

188 millions d’euros

Plafonnement de taxes affectées au Fonds de prévention des risques naturels majeurs ; élargissement des taxes affectées aux agences de l’eau et baisse de plafond sur ces mêmes taxes

Suppression, budgétisation de taxes et autres recettes affectées ou modifications de la répartition entre taxes et autres recettes affectées et crédits budgétaires - Autres ajustements liés à une évolution de la fiscalité

0,8 million d’euros

Assujettissement à la taxe sur les salaires à la suite de transferts d’équivalents temps plein d’État vers deux opérateurs du ministère de la défense ; nouvel assujettissement des établissements publics à caractère industriel et commercial (secteur recherche et enseignement supérieur) à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

Modification de la répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales ou compensation par le budget de l’État de la suppression ou de l’allégement d’impôts locaux

 91,2 millions d’euros

Dotation globale de décentralisation (DGD) de continuité territoriale Corse remplacée par une affectation de TVA

Clarification de la répartition des compétences entre l’État et des tiers (administrations de sécurité sociale et opérateurs, notamment)

955,3 millions d’euros

Rebudgétisation du fonds de solidarité ; arrêt de la compensation par l’État des exonérations de cotisation pour les exploitants agricoles ; unification du financement de l’Agence de la biomédecine (ABM), de l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) et de l’École des hautes études en santé publique (EHESP) ; transfert du financement des frais de santé des détenus ; mise à disposition d’agents contractuels de la direction générale de l’offre de soins (DGOS) ; financement de postes de chefs de clinique universitaires de médecine générale

Paiement de loyers budgétaires

1 million d’euros

Réévaluation des surfaces d’un immeuble domanial par la direction de l’immobilier de l’État (DIE) et ajustement du loyer budgétaire en conséquence

Mesures de périmètre relatives aux prélèvements sur recettes en faveur des collectivités territoriales ou en faveur de l’Union européenne

 1,6 million d’euros

Recentralisation sanitaire

Incidence totale sur les dépenses de l’État

1 052,3 millions d’euros

Source : présent projet de loi de finances.

 


—  1  —

   AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES, SUR LES AVIS DU HAUT CONSEIL RELATIFS AU PROJET DE LOI DE PROGRAMMATION DS FINANCES PUBLIQUES ET AUX PROJETS DE LOI DE FINANCES ET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Lors de sa réunion du 27 septembre 2017, la commission a entendu M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques, sur les avis du Haut Conseil relatifs au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 et aux projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

M. le président Éric Woerth. Créé à la fin de l’année 2012, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) émet un avis sur les prévisions macroéconomiques et l’estimation du produit intérieur brut (PIB) potentiel sur lesquelles repose le projet de loi de programmation des finances publiques. Il émet également un avis sur les prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposent le projet de loi de finances (PLF) de l’année et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) de l’année.

M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques. Monsieur le président, monsieur le Rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de m’avoir invité à m’exprimer devant votre commission, en tant que président du HCFP, pour vous présenter les principales conclusions des deux avis adoptés par le Haut Conseil le 24 septembre dernier. Le premier porte sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, le second sur les projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Je suis accompagné des membres du secrétariat permanent du Haut Conseil : François Monier, rapporteur général, Vianney Bourquard, rapporteur général adjoint, Paul Bérard et Vladimir Borgy, rapporteurs.

Je voudrais tout d’abord saisir cette occasion, devant votre commission récemment formée, pour procéder à une rapide mise en perspective de nos travaux.

Comme vous le savez, le HCFP est une jeune institution, installée en 2013. Elle est née du traité qui a réformé, en 2012, la gouvernance économique et budgétaire de l’Union européenne, plus particulièrement celle de la zone euro, en réponse aux crises des dettes souveraines. La France a rapidement adapté son organisation et ses règles à ce nouvel ordre budgétaire, notamment à travers la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

Les dix-neuf pays membres de la zone euro et la plupart des autres pays de l’Union ont désormais mis en place des comités budgétaires indépendants. Si leurs missions précises et leurs contours institutionnels diffèrent bien sûr selon les États, ils visent tous à apprécier le réalisme des prévisions macroéconomiques et des trajectoires de finances publiques associées aux textes financiers.

Si le Haut Conseil est une jeune institution, il a déjà rendu un nombre important d’avis. Nous vous présentons en effet ce matin nos vingt et unième et vingt-deuxième avis depuis 2013. Nous avons donc rendu en moyenne à peu près cinq avis par an.

En tant que Premier président de la Cour des comptes, j’ai l’honneur de présider cette instance qui comprend dix autres membres ; cinq sont des personnalités qualifiées désignées par les présidents respectifs de l’Assemblée nationale et du Sénat, par le président des commissions des finances respectives de ces deux assemblées, ainsi que par celui du Conseil économique, social et environnemental. Quatre sont des magistrats de la Cour des comptes. S’y ajoute le directeur général de l’Institut national de la statistique et des études économiques, membre de droit.

Nos avis s’appuient sur l’ensemble des informations disponibles. Elles sont pour partie publiques ; c’est notamment le cas de la majorité des prévisions économiques. Une autre partie des informations, portant notamment sur les finances publiques, nous sont communiquées par les administrations dans le cadre d’une procédure écrite, puis orale. Nous réalisons en outre des auditions de personnalités qualifiées et des représentants d’instituts de prévision.

Ce matin, nous rendons public non pas un mais deux avis. Je les aborderai successivement, en commençant par celui relatif à la programmation des finances publiques.

C’est seulement la deuxième fois que le Haut Conseil se prononce sur un projet de loi de programmation des finances publiques. La première fois, c’était en 2014, sur le projet de programmation pour 2014 à 2019. Aux termes de l’article 13 de la loi organique du 17 décembre 2012, trois missions nous incombent en la matière : nous devons tout d’abord apprécier l’estimation du PIB potentiel proposée par le Gouvernement ; nous devons ensuite nous prononcer sur les prévisions macroéconomiques associées à ce projet ; enfin, nous devons examiner la cohérence de la programmation envisagée au regard de l’objectif d’équilibre structurel à moyen terme retenu et des engagements européens de la France.

Ces trois missions structurent la présentation de notre avis.

Je commencerai par l’estimation de PIB potentiel. Le PIB potentiel se définit usuellement comme la production soutenable, c’est-à-dire celle pouvant être réalisée sans engendrer d’effets inflationnistes ou désinflationnistes. La croissance potentielle, elle, correspond à la croissance de ce PIB potentiel. Entre le PIB potentiel et le PIB effectif, celui que l’on constate, il existe un écart, dit « écart de production ». Il permet de mesurer la position de l’économie dans le cycle. Cet écart de production est négatif dans les périodes d’activité médiocre, comme celle que nous vivons depuis une dizaine d’années, depuis la crise financière. Dans ce cas, il nous permet donc de prendre la mesure de la capacité de rebond du pays. À l’inverse, un écart positif est constaté dans les périodes de bonne conjoncture mais permet d’anticiper un ralentissement de la croissance.

Appliqué au domaine des finances publiques, l’écart de production permet d’identifier la composante conjoncturelle du déficit ; ce solde conjoncturel traduit l’impact du cycle économique et la sensibilité des différentes composantes du budget, notamment en recettes, à la conjoncture. Le solde structurel se calcule, lui, par différence, et correspond à la part du solde budgétaire qui est indépendante de la position de l’économie dans le cycle et qui résulte donc directement des orientations de la politique budgétaire.

Ces deux notions d’écart de production et de croissance potentielle ne sont pas des données statistiques ou comptables. Elles procèdent d’estimations – et, en matière d’estimations, il y a toujours des marges d’appréciation. L’ampleur exceptionnelle de la crise financière et les difficultés à apprécier ses conséquences sur l’économie invitent à considérer les écarts de production avec prudence. Ainsi, ces derniers font dans les faits l’objet d’importantes révisions ex post. Les incertitudes sur l’écart de production se transmettent, par construction, à la mesure du solde structurel, qui dépend également de la sensibilité des recettes à la croissance.

Je vous dis que tout ceci est incertain et fragile, mais la mesure du solde structurel n’en est pas moins indispensable pour faire la part dans l’amélioration ou la détérioration des soldes budgétaires de ce qui relève de la politique budgétaire elle-même et de ce qui relève de la conjoncture.

J’en arrive aux estimations du Gouvernement. L’estimation de l’écart de production de 2016 est sensiblement réduite par rapport à celle qui était retenue dans le programme de stabilité d’avril 2017 : - 1,5 % du PIB au lieu de - 3,1 %. Selon cette estimation, nous sommes au-dessous du PIB potentiel, mais nous en sommes moins éloignés que dans les évaluations antérieures.

Cette forte révision à la baisse va dans le sens des observations formulées à plusieurs reprises par le Haut Conseil selon lesquelles cet écart était largement surestimé dans les textes financiers des dernières années. Or quand l’écart de production négatif est surestimé, cela veut dire que le déficit structurel est minoré. La révision opérée par le Gouvernement conduit à rehausser sensiblement l’estimation du déficit structurel, à 2,5 points de PIB en 2016 au lieu de 1,5 dans les estimations précédentes.

La nouvelle estimation de l’écart de production se situe dans la partie basse des évaluations des organisations internationales. Le Haut Conseil la juge plus réaliste. En augmentant l’estimation du déficit structurel, elle révèle en tout cas la nécessité d’un effort accru pour redresser les finances publiques, à partir du moment où c’est la part structurelle qui est plus importante que la part conjoncturelle.

Les hypothèses de croissance potentielle du Gouvernement sont révisées à la baisse également pour les années 2017 à 2020 par rapport au programme de stabilité du mois d’avril 2017 : 1,25 % pour chacune des quatre années au lieu de taux compris entre 1,3 % et 1,5 %. Ce scénario se situe dans la moyenne des estimations disponibles. Le Haut Conseil considère qu’il constitue une base raisonnable pour asseoir la programmation des finances publiques à moyen terme.

J’en viens à présent à la deuxième mission prévue par la loi organique : l’appréciation des prévisions macroéconomiques associées au projet de loi de programmation pour la période de 2018 à 2022.

J’insisterai ici davantage sur le moyen terme. Je reviendrai plus précisément sur les années 2017 et 2018 dans la suite de mon intervention sur le PLF et le PLFSS pour 2018.

Le Gouvernement retient des taux de croissance du PIB peu différenciés sur toute la période, autour de 1,7 %. Par rapport aux projections de moyen terme présentées au mois d’avril dernier dans le programme de stabilité 2017-2020, les prévisions de croissance sont légèrement relevées pour 2017, à 1,7 % au lieu de 1,5 %, pour 2018, à 1,7 % au lieu de 1,5 %, et pour 2019, à 1,7 % au lieu de 1,6 %. La prévision est inchangée pour 2020, à 1,7 %.

Le Haut Conseil observe que le scénario de croissance du Gouvernement conduit à une fermeture de l’écart de production négatif à l’horizon 2020 puis à un écart de production positif et croissant en fin de période.

Compte tenu des tendances à l’œuvre, la croissance devrait en effet être supérieure à son rythme potentiel en 2017 et 2018, pour la première fois depuis 2011. L’écart de production est donc en voie de réduction. Sa fermeture totale au cours de la période de projection est vraisemblable en l’absence de nouvelle crise majeure. Le scénario de croissance du Gouvernement n’appelle donc pas d’observations à l’horizon de 2020.

En revanche, le passage à un écart de production positif en fin de période constitue une hypothèse plutôt optimiste. Même si on ne peut pas exclure qu’un tel scénario de croissance effective se réalise, il comporte un plus grand degré d’incertitude. L’hypothèse de croissance retenue dans le scénario pour les années 2021 et 2022, si elle est neutre sur la trajectoire de solde structurel présentée, conduit toutefois à réduire le déficit effectif affiché et à présenter une trajectoire de dette publique plus favorable.

J’en viens à la troisième mission du Haut Conseil : se prononcer sur la cohérence de la programmation avec l’objectif à moyen terme d’une part et les engagements européens de la France d’autre part.

Dans notre avis, nous présentons la nature de ces engagements européens. Ils résultent du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire de 2012, que j’évoquais en introduction, mais également du Pacte de stabilité et de croissance, ainsi que des règlements européens.

Je rappelle que la France est, après l’Espagne, le pays de la zone euro dont le déficit public est le plus élevé. Ces deux pays étaient les seuls de la zone euro à connaître encore en 2016 des déficits supérieurs à 3 % et sont depuis hier les deux seuls à demeurer dans la procédure de déficit excessif, la Grèce en étant sortie – ou sur le point d’en sortir.

À cet égard, la trajectoire présentée par le Gouvernement respecte la recommandation faite à la France depuis 2015 par le Conseil de l’Union européenne de ramener son déficit effectif au-dessous de 3 points du PIB en 2017.

Sous réserve, bien sûr, de l’appréciation de la Commission européenne et du Conseil, la France pourrait alors sortir de la procédure de déficit excessif en 2018 et entrer dans le volet préventif du Pacte de stabilité et de croissance. Dans ce cadre, le déficit structurel, dont je vous ai parlé tout à l’heure, doit être réduit jusqu’à atteindre l’objectif de moyen terme, fixé à 0,4 point de PIB par le projet de loi de programmation.

Sur ce point, le Haut Conseil souligne que la trajectoire envisagée s’écarte des engagements européens de la France en retenant un ajustement structurel annuel inférieur à celui qui est prévu par les règles européennes. Le règlement européen n° 1466/97 prévoit en effet un ajustement structurel supérieur à 0,5 point de PIB par an pour les États membres qui n’ont pas atteint leur objectif à moyen terme et dont la dette est supérieure à 60 % du PIB. Or l’ajustement structurel n’est que de 0,3 point de PIB en moyenne entre 2018 et 2022 dans la trajectoire présentée par le Gouvernement. Il est même limité à 0,1 point en 2018. Une conséquence de cet effort limité est de repousser l’atteinte de l’objectif de moyen terme de solde structurel au-delà de l’horizon de la programmation.

Lorsqu’ils examinent la programmation d’un État membre, la Commission et le Conseil disposent toutefois de marges de flexibilité. Ils peuvent tenir compte de la mise en œuvre de réformes structurelles majeures ou de circonstances inhabituelles pour les autoriser à s’écarter temporairement de leur trajectoire d’ajustement. Le Haut Conseil ne saurait bien sûr préjuger de l’issue de cet examen.

J’en arrive désormais à notre second avis.

Comme chaque année en septembre, le Haut Conseil était également appelé à se prononcer sur les prévisions macroéconomiques associées au PLF et au PLFSS pour 2018 ainsi que sur la cohérence de ces projets avec les orientations pluriannuelles de solde structurel.

J’évoquerai tout d’abord les prévisions macroéconomiques.

Dans un contexte européen favorable, l’activité en France s’est sensiblement redressée au cours des trois derniers trimestres à la faveur d’une demande intérieure tirée par l’investissement des entreprises et les dépenses des ménages, et d’une contribution moins négative des échanges extérieurs à la croissance. De plus, les résultats des enquêtes de conjoncture, dont l’amélioration se poursuit, indiquent des perspectives d’activité favorables à court terme. Pour 2017, l’acquis de croissance au deuxième trimestre est de 1,4 %, si bien qu’une croissance de 0,4 % aux troisième et quatrième trimestres, après une croissance de 0,5 % sur les trois derniers trimestres, suffirait pour atteindre la prévision du Gouvernement à 1,7 %. En conséquence, le Haut Conseil considère que cette prévision est prudente.

Pour 2018, le scénario du Gouvernement repose sur le maintien de la dynamique actuelle de l’environnement international et sur une progression toujours soutenue de la demande intérieure. La prévision de 1,7 % est proche de celles des organisations internationales et du Consensus Forecasts. Le Haut Conseil considère que cette prévision est raisonnable.

En outre, le Haut Conseil estime que les prévisions d’emploi et de masse salariale du Gouvernement pour 2017 et 2018 sont prudentes, tandis que les prévisions d’inflation pour ces deux années sont raisonnables.

Au total, le Haut Conseil considère que le scénario macroéconomique retenu par le Gouvernement est prudent pour l’année 2017, et qu’il est raisonnable pour 2018.

J’en arrive à la cohérence des PLF et PLFSS avec les orientations pluriannuelles de solde structurel.

Dans l’attente de la promulgation de la loi de programmation portant sur les années 2018 à 2022, la loi de programmation pour la période 2014-2019 reste en vigueur.

Toutefois, l’appréciation de la cohérence avec la loi pour la période 2014-2019 a largement perdu de sa signification. Le Haut Conseil avait souligné en juin dernier, dans son avis sur le projet de loi de règlement pour 2016, que « la loi de programmation de 2014 ne fournissait plus un cadre pertinent pour une juste appréciation de la trajectoire des finances publiques » en raison notamment du caractère « peu vraisemblable » des hypothèses de PIB potentiel.

Au-delà, la cohérence de l’article liminaire du PLF avec les orientations pluriannuelles de solde structurel présentées dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour la période 2018-2022 est assurée par construction, puisque les deux projets ont été construits et sont présentés simultanément. Il serait surprenant qu’ils ne soient pas cohérents !

Je voudrais un instant insister sur l’ajustement et l’effort structurel en 2017 et 2018.

L’ajustement structurel, c’est-à-dire la variation du solde structurel, serait faible : 0,2 point en 2017 et 0,1 point en 2018. Il en est de même pour l’effort structurel – 0,1 puis 0,2 point de PIB. L’effort structurel représente la partie de l’ajustement structurel directement liée à un effort en dépense ou à des mesures nouvelles de prélèvements obligatoires. En 2018, il résulterait d’un effort sensible sur les dépenses, de 0,4 point de PIB, quasiment compensé par des mesures nouvelles de baisse de prélèvements obligatoires, représentant 0,3 point de PIB.

Comme je vous l’indiquais dans la présentation de l’avis relatif au projet de loi de programmation des finances publiques, le Haut Conseil constate que les ajustements structurels prévus pour 2017 et 2018 s’écartent des engagements européens de la France. Ces ajustements structurels seront soumis à la Commission et au Conseil, dont j’ai évoqué les marges de flexibilité dans l’appréciation il y a quelques instants.

Enfin, le Haut Conseil s’est attaché à identifier les risques qui affectent les prévisions de recettes et de dépenses pour 2017 et 2018 sur la base des informations dont il dispose.

À cet égard, permettez-moi une remarque préalable. Depuis l’audit des finances publiques de la Cour des comptes publié en juin dernier, un certain nombre d’informations nouvelles sont apparues. Le Haut Conseil prend naturellement en compte dans son appréciation l’ensemble de ces informations nouvelles. Elles concernent en particulier l’amélioration sensible de la conjoncture économique ainsi que les recettes fiscales effectivement constatées. En outre, l’actuel Gouvernement a pris au cours de l’été des mesures de correction en dépenses à la suite de cette publication.

Pour ce qui est des recettes fiscales, le Gouvernement a révisé à la hausse l’estimation de leur montant en 2017 par rapport au programme de stabilité d’avril, ce qui conduit à une élasticité de ces recettes au PIB de 1,3 pour 2017 contre 1 avant l’été. Les prélèvements sociaux, notamment, ont été revus à la hausse en lien avec un relèvement d’un demi-point de la prévision de masse salariale. Le Haut Conseil considère que, au vu des rentrées fiscales des derniers mois, les recettes tirées des prélèvements obligatoires en 2017 pourraient être supérieures à ce qui est attendu dans le PLF. Par exemple, les recettes de TVA, avec une croissance de plus de 5 % à champ constant sur les sept premiers mois de l’année, apparaissent plus dynamiques que prévu.

Pour l’année 2018, les mesures nouvelles représentent environ 7 milliards d’euros de baisses nettes des prélèvements obligatoires. Ces mesures correspondent à la somme des décisions prises par le précédent Gouvernement qui ont un effet en 2018 et de celles prises par l’actuel Gouvernement dans le PLF pour 2018 : l’accroissement du taux du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), la baisse de l’impôt sur les sociétés, l’exonération d’une fraction de la taxe d’habitation, la transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI) notamment. Elles sont partiellement compensées par des hausses de fiscalité, parmi lesquelles l’accroissement de la fiscalité énergétique et celle du tabac, et par le calendrier 2018 de la bascule des cotisations salariales sur la contribution sociale généralisée (CSG).

Sous réserve des incertitudes portant sur le chiffrage des mesures nouvelles, le Haut Conseil estime que l’hypothèse d’élasticité des recettes au PIB retenue pour 2018
– supposée égale à 1 en 2018 après 1,2 en 2016 et 1,3 en 2017 – et, donc, la prévision des recettes tirées des prélèvements obligatoires sont prudentes.

Le Haut Conseil relève que les objectifs de maîtrise de la dépense pour 2018 sont plus exigeants que ceux des années précédentes : 1,6 % en valeur contre 1,8 % en 2017 et 0,5 % en volume contre 0,8 % l’année précédente.

Il note un effort de budgétisation plus réaliste sur le budget de l’État, notamment en ce qui concerne l’allocation aux adultes handicapés, la prime d’activité, l’hébergement d’urgence et l’aide médicale de l’État, même si restent encore quelques sous-budgétisations, relatives notamment aux opérations extérieures (OPEX) et aux apurements communautaires. Sur ces deux points, quoique plus réaliste qu’au cours des dernières années, la budgétisation n’est pas encore totalement réaliste.

Le Haut Conseil souligne toutefois que des risques significatifs pèsent sur la réalisation des économies prévues dans le champ des administrations publiques. C’est par exemple le cas pour les collectivités territoriales. Leurs dépenses, et plus largement celle des administrations publiques locales, décéléreraient de 1,8 % en valeur en 2017 à 1,2 % en 2018 sous l’effet de la mise en place de contrats passés entre les représentants de l’État et des plus grandes collectivités territoriales. Cet objectif repose sur un pari : celui que la démarche contractuelle conduira à un infléchissement substantiel des dépenses.

Des risques existent également dans le champ social. Le respect de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, fixé à 2,3 % dans le scénario du Gouvernement, nécessitera un quantum d’économies supérieur à ce qui a été réalisé au cours des dernières années.

Pour l’État, le Gouvernement fait reposer sa prévision sur des économies substantielles, en particulier sur les aides au logement ou sur les contrats aidés, qui méritent d’être concrétisées.

Au total, la prévision d’un déficit de 2,9 % du PIB en 2017 peut être considérée comme plausible tandis que celle d’un déficit de 2,6 % en 2018 est atteignable.

Je souhaite, pour conclure, souligner que dans la mesure où le niveau du déficit structurel pour 2018 est élevé et sa réduction prévue faible, il est tout à fait nécessaire, effectivement, de respecter les objectifs de maîtrise de la dépense, et ce même si les recettes venaient à être meilleures que prévu, ce qui ne doit pas être exclu. C’est l’intérêt de raisonner en termes structurels : il ne faut pas que l’amélioration de la conjoncture, qui a effectivement des effets positifs sur le solde effectif, fasse oublier les efforts nécessaires à la réduction du déficit structurel, d’autant que l’on sait que c’est un peu le problème de la France.

M. Gilles Carrez. Dans son édition de ce matin, le journal Les Échos indique avoir reçu dès hier l’avis du Haut Conseil et en fait une présentation détaillée. Jusqu’à présent, notre commission des finances était la première saisie. Je proteste ! Cela devient une habitude : notre commission découvre de plus en plus souvent les informations dans les journaux. Soit l’avis a été communiqué par le Haut Conseil, procédé que je réprouverais, soit c’est le fait du Gouvernement. Quoi qu’il en soit, c’est tout à fait anormal, et il me semble que c’est une première.

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Je me souviens que des membres de cette commission, qui en font toujours partie, accusaient sans preuves, il n’y a pas si longtemps, le HCFP d’avoir été à l’origine d’indiscrétions sur de précédents avis. Cela avait suscité à la fois mon émotion et ma colère. Cela dit, l’avis est transmis à de nombreuses personnes. Nous avons tenu plusieurs réunions au cours des huit derniers jours. La dernière a duré de 16 heures vendredi dernier 22 septembre à 6 heures le lendemain matin, et a repris dimanche après-midi. Nous avons transmis nos avis au Conseil d’État, au Gouvernement et aux différentes administrations. Le nombre de destinataires est tel que vous pouvez comprendre que des indiscrétions ont pu être commises.

Mme Valérie Rabault. Je soutiens notre ancien président Gilles Carrez, et je souhaite, monsieur le président du HCFP, que vous puissiez répondre à sa question : oui ou non, l’avez‑vous transmis aux Échos ?

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Non.

M. le président Éric Woerth. Si nous faisons la chasse aux fuites, chers collègues, nous allons y passer beaucoup de temps, car l’ensemble du projet de loi de finances a fuité dans Les Échos, Le Figaro et je ne sais quels autres journaux. J’ai cru comprendre que ce n’était pas nouveau, et nous découvrirons tout à l’heure un projet de loi de finances dont nous avons déjà connaissance par la presse.

M. Joël Giraud, Rapporteur général. Monsieur, le président du Haut Conseil, je tiens en premier lieu à vous remercier de contribuer à l’éclairage de nos débats sur le projet de loi de finances, afin qu’ils ne soient pas biaisés. À ce titre, les avis du Haut Conseil sont pour nous primordiaux.

Ma première question est quasiment une question de sémantique, qui porte sur votre appréciation de la prévision de croissance. Vous qualifiiez l’an dernier d’ « optimiste » une prévision de croissance de 1,5 % du PIB pour 2017 ; elle devrait finalement s’élever à 1,7 % prévision que vous jugez cette fois-ci « prudente ». Pour 2018, vous considérez que la prévision est « raisonnable ». Pouvez-vous confirmer qu’il s’agit de l’appréciation la plus laudative que le Haut Conseil ait eu à délivrer sur une prévision de croissance de l’année sur laquelle porte un PLF ? Si tel est le cas, cela doit nous rassurer, car le Haut Conseil n’est pas connu pour être une institution faisant preuve d’un indéfectible optimisme.

Ma deuxième question m’est suggérée par votre double casquette de président du Haut Conseil et de Premier président de la Cour des comptes ; elle porte sur la prévision de déficit public pour 2017 et pour 2018 puisque, contrairement aux années précédentes, vous ne vous êtes pas prononcé officiellement sur ce point.

Il y a un an, le Haut Conseil des finances publiques avait rendu un avis qui jugeait « incertain » le retour du déficit sous les 3 % et « improbable » l’atteinte de l’objectif de la loi de finances. Cet été, auditionné en tant que Premier président de la Cour des comptes par notre commission, vous estimiez que le déficit public pour 2017 devrait s’élever à 3,2 % du PIB. J’aimerais connaître en ce début d’automne votre appréciation sur la prévision actualisée de déficit public pour 2017, qui est de 2,9 % du PIB, et m’assurer de la sorte que le président du Haut Conseil n’a pas un avis différent de celui du Premier président de la Cour des comptes.

Ma troisième question, quant à elle, porte sur les recettes. À l’inverse du rythme normal des saisons, il semble que la météo budgétaire se soit nettement améliorée depuis cet été. Vous estimez que les recettes pour 2017 pourraient être supérieures à ce qui est prévu par la loi de finances initiale. La TVA notamment rentre dans les caisses à un rythme très appréciable, supérieur de plus de 5 % à celui de l’année dernière. On peut regretter que l’audit de la Cour des comptes de l’été dernier n’en ait pas tenu compte. Il était même pointé, en page 52, « un risque de surestimation de la TVA ». Cela étant, comment interprétez-vous ces surcroîts de recettes ? Pensez-vous que des surcroîts similaires pourraient être constatés sur les cotisations sociales, compte tenu de la reprise de l’activité ?

M. Jean-René Cazeneuve. Afin de respecter la trajectoire de réduction de 3 points de PIB sur cinq ans de notre dépense publique, notre majorité prévoit de limiter la croissance des dépenses de fonctionnement des 319 plus grandes collectivités à 1,2 % au cours des cinq prochaines années. Ce ralentissement doit conduire à améliorer les capacités d’autofinancement des collectivités locales et contribuer à leur désendettement.

Vous parlez d’un pari, d’un risque ; nous pensons, nous, que c’est une mesure nécessaire car, depuis 2014, les dépenses d’investissement des collectivités ont lourdement chuté alors que les dépenses de fonctionnement ont été difficilement contenues. Afin de renouer avec un cercle vertueux pour nos territoires et la commande publique, l’État maintiendra en 2018, 1,7 milliard d’euros de subventions d’investissement aux collectivités, ce qui n’est pas négligeable.

Pensez-vous qu’il existe une marge de manœuvre qui permettrait d’améliorer le ratio investissement/fonctionnement dans le futur ? Il s’agit en effet de faire preuve de discernement dans la politique d’investissements, puisque certains d’entre eux peuvent également engendrer des dépenses de fonctionnement.

Pensez-vous qu’une loi de finances propre aux collectivités locales permettrait d’assurer une programmation et un suivi plus efficace de leurs dépenses d’investissement et de fonctionnement ?

Mme Véronique Louwagie. En premier lieu, je tiens à m’associer aux propos de Gilles Carrez et de Valérie Rabault sur le fait que certains médias ont été destinataires avant les membres de la commission des finances des conclusions du Haut Conseil. C’est non seulement désagréable mais cela contribue à un affaiblissement du Parlement. Je suggère donc, monsieur le président, que vous adressiez un courrier au ministre pour lui faire part de notre mécontentement.

Ma première question portera sur la programmation des finances publiques. Vous donnez l’alerte sur les conséquences découlant de l’hypothèse de croissance avancée par le Gouvernement. Si vous jugez l’estimation intermédiaire réaliste et susceptible de fournir une base de programmation raisonnable, vous indiquez en revanche que l’hypothèse d’un écart de production positif et croissant en fin de période – c’est-à-dire après 2020 – est plutôt optimiste. Cette hypothèse conduit, selon vous, à améliorer la trajectoire de la dette publique. Quel serait selon vous l’impact sur la dette publique d’une fermeture de cet écart de production après 2020, en lieu et place d’un écart positif de 1,1 % en 2022 ?

Vous jugez les prévisions de croissance pour 2017 et 2018 prudentes et raisonnables, mais vous soulignez qu’elles ne sont pas conformes aux règles européennes, qui prévoient un ajustement structurel supérieur à 0,5 point de PIB par an. Selon vous, aurait-il été possible de proposer pour 2018 un ajustement structurel plus important que l’ajustement structurel retenu, lequel nous oblige à repousser notre objectif de moyen terme jusqu’en 2023 ?

Vous indiquez que des « risques significatifs » pèsent sur la réalisation des économies prévues dans le champ des administrations publiques. Un risque, c’est déjà important ; s’il est significatif, doit-on considérer que nous nous engageons dans une voie à l’issue plus qu’incertaine ?

Enfin, ma dernière question porte sur les dépenses des collectivités territoriales et plus largement sur celles des administrations publiques locales. Au sujet de leur décélération de 1,8 % en valeur en 2017 à 1,2 % en 2018, vous employez le terme de pari. Si je ne connaissais pas le sérieux et les qualités d’expertise du Haut Conseil, je penserais que vous êtes joueur. Mais je sais que ce n’est pas le cas. Or un pari, c’est une spéculation sur l’éventualité de tel ou tel événement. Est-ce à dire que vous avez un doute sérieux sur les résultats attendus de la contractualisation entre l’État et certaines collectivités ?

M. Mohamed Laqhila. La sincérité du budget de l’État est devenue un débat politique, parfois houleux, malgré toutes les structures indépendantes qui sont censées le contrôler.

L’an dernier, vous rappeliez le caractère trop optimiste des prévisions budgétaires. Aujourd’hui, le Gouvernement présente un projet de loi de finances qui semble plus réaliste que les précédents. C’est primordial car la transparence et la sincérité de nos comptes sont les seuls moyens de restaurer la confiance dans notre économie.

Pouvez-vous nous assurer que le Haut Conseil juge atteignable l’objectif de passer le déficit sous les 3 % du PIB ? Pour cela, le Gouvernement table sur une accélération des rentrées fiscales et des cotisations. Estimez-vous que cela soit suffisant ?

Enfin, les économies de fonctionnement prévues reposant pour une part essentielle sur l’effort des collectivités locales, estimez-vous que l’État est en mesure de réduire le déficit structurel ainsi que la dette ?

M. Charles de Courson. Les travaux du Haut Conseil mettent en lumière, si besoin était, que l’on a volontairement, ces dernières années, surestimé l’écart de production, et que la majorité précédente a délibérément minoré le solde structurel, pour faire croire qu’elle redressait les finances publiques. Or vos analyses montrent que le déficit structurel ne se redressait pas.

Tout en recommandant de manier le concept d’écart de production avec précaution, dans la mesure où les spécialistes divergent sur son estimation, le Haut Conseil émet des doutes sur les prévisions gouvernementales, qui tablent sur une annulation, puis une inversion, de l’écart. En effet, l’estimation du PIB potentiel faite par le Gouvernement semble négliger un petit détail : ce n’est pas tout de disposer de facteurs de production ; encore faut-il qu’ils soient capables de produire des biens adaptés au marché, dans des conditions de rentabilité. Puisque vous expliquez par ailleurs que l’inversion de l’écart de production se produit à chaque cycle, ce qui n’est pas le cas dans les chiffres de ces dix dernières années, doit-on en tirer la conclusion que ces chiffres étaient erronés ? Enfin, pourriez-vous nous préciser sur quoi s’appuient vos doutes concernant l’apparition d’un écart positif après 2020 ?

Vous rappelez que nos engagements internationaux nous obligent à réduire de 0,5 point par an notre déficit structurel, ce dont, comme sous le quinquennat précédent, nous sommes très loin, puisque le Gouvernement prévoit une baisse de 0,1 ou 0,2 pour l’an prochain et que les baisses prévues pour les années qui suivent n’atteignent jamais 0,5 point. Comment pensez-vous que va réagir la Commission européenne ?

Concernant enfin les recettes et la fiscalité, le Haut Conseil affirme ne pas être en mesure de se prononcer sur le chiffrage des recettes. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi, alors que l’on sait par exemple que la fiscalité sur le tabac n’engendrera pas de recettes supplémentaires mais, au contraire une baisse ?

Sur la véracité et l’effort de sincérité, vous pointez deux cas de sous-budgétisation : d’une part les OPEX, dont le budget a été augmenté de 200 millions d’euros alors qu’il en faudrait 350 à 450 millions pour parvenir à une somme avoisinant le milliard d’euros nécessaire ; d’autre part, les apurements communautaires, dont j’aimerais que vous nous rappeliez le montant.

Mme Valérie Rabault. Vous interroger sur l’avis du Haut Conseil, alors que nous ne disposons pas encore du projet de loi de finances ni du projet de loi de programmation pluriannuelle, est un exercice assez baroque. En révisant le scénario de croissance potentielle des années précédentes, le Gouvernement a fait le choix de considérer que toutes les difficultés économiques de notre pays étaient d’ordre structurel. Pour autant, les corrections envisagées sont très en deçà de ce qui est exigé par la Commission européenne. Dans la mesure où vous affirmez que les prévisions du Gouvernement sont proches de celles de la Commission européenne, diriez-vous, comme lui, que nos difficultés sont avant tout structurelles ?

En ce qui concerne les dépenses, vous recommandiez, coiffé de votre casquette de Premier président de la Cour des comptes, d’arrêter de faire des prévisions de dépenses par rapport à la tendance. Or nous ne sommes ici que dans la tendance ! Le Haut Conseil doute d’ailleurs de la réalisation de l’objectif de réduction de 16 milliards d’euros, dont nous n’avons pas le détail. Selon vous, dans quel domaine en particulier cet objectif pourrait ne pas être atteint ?

Dans votre avis sur le projet de loi de programmation pluriannuelle, vous constatez que la dépense publique augmenterait en moyenne de 1,8 % par an en valeur sur la période 2018-2020, ce qui est un rythme supérieur à celui des années 2014-2016, où elle a augmenté en moyenne de 1 % par an. Vous reconnaissez donc que le freinage des dépenses publiques a été extrêmement important sur les années 2014-2016, puisque l’augmentation a été quasiment deux fois moindre que celle envisagée pour la période 2018-2022.

Quant aux recettes, vous reconnaissez qu’elles ont été plus importantes que ce qui était envisagé. Je regrette que cela n’ait pas figuré dans le dernier rapport de la Cour des comptes, mais je suis ravie que vous le disiez aujourd’hui.

M. Jean-Paul Dufrègne. Il n’y a rien de nouveau dans cet avis du Haut Conseil, si ce n’est une énième piqûre de rappel. On y retrouve les préconisations habituelles sur la nécessité de davantage de rigueur et d’un « effort accru ». Mais pour qui ? Certainement pas pour les 320 000 ménages qui paient l’ISF et s’apprêtent à recevoir un cadeau. C’est bien le sens de vos préconisations, qui dispensent les riches de tout effort, mais passent plutôt par une forte baisse des aides au logement, la suppression brutale des contrats aidés ou encore une mise sous tutelle des collectivités, notamment des communes, qui voient leurs principales recettes dynamiques encadrées. Nous n’approuvons donc pas ces mauvais conseils, qui vont encore creuser les inégalités dans notre pays. Tout le monde aux ordres ! Circulez, il n’y a rien à voir !

M. le président Éric Woerth. Si je résume vos conclusions, monsieur le président du Haut Conseil, vous soulignez qu’un effort est fait pour mettre un terme aux sous-budgétisations systématiques, ce qui est une bonne chose.

Vous indiquez également que les prévisions macroéconomiques sont crédibles, et que le Gouvernement a donc fait un effort de sincérité.

Vous insistez sur deux points majeurs, au premier rang desquels les incertitudes croissantes concernant les dépenses. Je m’associe à la question qui vous a été posée au sujet des 16 milliards d’euros de réduction de dépenses, sur lesquels les ministres ont largement communiqué dans la presse. Ce montant n’est pas repris dans l’avis du Haut Conseil, sans doute parce que ce n’est précisément que de la communication. Qu’en est-il réellement et avez-vous une opinion sur ce sujet ?

Vous pointez d’autre part la faiblesse de l’ajustement structurel de 0,1 point l’an prochain. Quelles conclusions peut-on en tirer, sinon le fait que nous ne respecterons pas nos engagements européens et que nous n’atteindrons pas nos objectifs de moyen terme ? Qu’en déduire sur notre capacité à réduire notre déficit ?

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Certaines de vos questions s’adressent davantage au Gouvernement qu’au Haut Conseil des finances publiques. D’ailleurs, monsieur Dufrègne, nous ne délivrons pas de préconisations en tant que telles, mais raisonnons à partir des engagements pris par les pouvoirs publics, au travers des traités et des règlements européens, qui s’imposent à la France, ou dans le cadre des lois de programmation ou des lois de finances ; nous sommes en démocratie, et vous les avez donc approuvés.

Le Haut Conseil ne préconise donc nullement d’accroître les mesures de rigueur, mais rappelle que, si la majorité veut respecter les engagements pris, il faudra être exigeant sur le respect de la trajectoire. Pour les orientations que cette dernière implique ou pour son rythme, cela relève du pouvoir politique, et il n’appartient ni au Haut Conseil ni à la Cour des comptes d’en décider.

Monsieur le Rapporteur général, j’ignore s’il s’agit de l’appréciation la plus laudative jamais délivrée par le Haut Conseil, car nous ne raisonnons pas en ces termes. La question n’est pas de savoir si notre avis va plaire et si nos remarques sont des compliments
– ce n’est d’ailleurs pas la première fois que nous estimons des hypothèses plausibles ou prudentes. Nous raisonnons à partir de données qui nous sont fournies par le Gouvernement et les administrations, données que nous confrontons aux analyses d’autres observateurs de la vie économique et resituons dans l’environnement européen et international.

Je vous rassure par ailleurs : il n’y a aucun problème de cohérence entre le président du Haut Conseil et le Premier président de la Cour des comptes. Il faut toujours garder à l’esprit le moment dans lequel une institution ou une juridiction s’exprime, et il est toujours plus facile de raisonner avec six ou douze mois de recul.

La plupart des conjoncturistes estimaient en septembre 2016 que les hypothèses du Gouvernement étaient plutôt optimistes. S’ils avaient suivi l’ensemble des conjoncturistes, le Haut Conseil, lors de son examen du programme de stabilité, et la Cour des comptes dans le cadre de son audit auraient, eux aussi, considéré ces hypothèses comme optimistes. Or nous les avons qualifiées de plausibles. On ne pouvait évidemment pas exclure le fait que l’une d’entre elles ne se réalise pas, mais nous avons écarté cette probabilité et validé ces hypothèses. La Cour a estimé que le véritable problème de nos finances publiques n’était pas un problème de recettes mais un problème de dépenses. Tout ce que nous avons dit à l’époque reste pertinent et se trouve d’ailleurs confirmé par le projet de loi de finances pour 2018. On ne peut donc parler de divergence dans nos observations.

D’ailleurs, l’ensemble des conjoncturistes ont aujourd’hui révisé leurs prévisions à la hausse, car certains risques ont disparu, ceux notamment attachés au Brexit, dont les économistes avaient surestimé les conséquences sur l’année 2017. Cela ne signifie pas que, marginalement ces conséquences ne pourront pas se faire sentir en 2018 sur les économies européennes mais, à l’instar d’autres difficultés conjoncturelles, les risques majeurs ont été écartés.

L’appréciation que nous portons sur l’estimation des recettes pour 2018 est donc positive. Nous pensons même que ces recettes peuvent être supérieures à celles prévues par le projet de loi de finances pour 2018. Il peut y avoir de bonnes surprises.

Il est vraisemblable que l’élasticité de ces recettes sera de 1,3 pour 2017 – ce qui est rare –, après 1,2 en 2016. Pourtant, si le Gouvernement précédent avait tablé sur une élasticité de 1,3 pour cette année, tout le monde aurait légitimement estimé que c’était une prévision beaucoup trop optimiste. Il s’agit de paramètres qui se constatent a posteriori. S’il vaut mieux de bonnes que de mauvaises nouvelles, ce surcroît de recettes ne doit néanmoins pas dispenser de continuer de faire des efforts en matière de dépenses, à moins de compromettre toute amélioration structurelle.

Mais est-ce que tout le déficit est structurel ? Non. D’ailleurs, dans la nouvelle estimation du Gouvernement, nous ne trouvons pas cette croyance que tout serait structurel.

En 2016, le déficit structurel est passé de 1,5 % à 2,5 %, mais sur un déficit total de 3,4 %. Tout n’est donc pas structurel ; la conjoncture joue aussi son rôle. Le Gouvernement nous paraît avoir une estimation réaliste. En tout cas, elle est plus conforme à l’ensemble des hypothèses qui sont retenues par les organisations internationales de ce point de vue-là, alors que de vraies divergences existaient au sujet de l’écart de production entre les chiffres de la France et ceux de pratiquement tous ces organismes, voire de beaucoup d’instituts de conjoncture.

Ce n’est pas le rôle du Haut Conseil que d’exprimer un avis sur chacune des hypothèses de recettes présentées par le Gouvernement. Il n’en a ni les moyens, ni le temps et ce n’est pas ce qui lui est demandé. Vous interrogerez tout à l’heure le ministre sur le sérieux des hypothèses qui sont les siennes. Quant à nous, nous n’avons pu entrer dans le calcul de nouvelles estimations, surtout lorsqu’il s’agit de nouvelles recettes. Il y a toujours un élément d’appréciation de la part des services.

J’en viens à la dépense. Mme Rabault a raison si l’on raisonne en termes de valeur, mais la trajectoire de maîtrise de la dépense – si l’on raisonne en termes de volume – est sans doute un peu plus exigeante pour l’avenir qu’elle ne l’était par le passé. Si l’on veut respecter l’ensemble des équilibres, cela nécessite de respecter scrupuleusement cette trajectoire exigeante.

Nous considérons que de nombreux risques existent, à travers les collectivités territoriales, à travers les économies réalisées sur le budget de l’État, à travers un quantum plus important d’économies à réaliser dans le budget de la sécurité sociale. Cela doit être concrétisé, mais la question se pose de savoir si tous ces efforts pourront vraiment l’être. Le Gouvernement aura à apporter la preuve que ces engagements pourront être tenus dans l’année.

Nous ajoutons un codicille, en attirant l’attention sur le fait que de bonnes recettes ne doivent pas conduire à se dispenser du respect de la trajectoire de dépenses, pour améliorer le solde structurel. L’ajustement structurel, tel qu’il est présenté, ne correspond pas, formellement, aux engagements de la France, à savoir 0,5 point de PIB. Monsieur de Courson, ces engagements ont été respectés en 2011, en 2012 et en 2013, et même au-delà, mais grâce à des recettes plus importantes. Il est certes plus difficile de tenir cet engagement en agissant sur les dépenses qu’en augmentant le niveau des recettes et des prélèvements obligatoires.

Tel est notre constat. Notre mission est d’apprécier la cohérence des chiffres vis‑à‑vis des engagements européens de la France. Mais la Commission et le Conseil de l’Union européenne peuvent avoir leur propre marge d’appréciation. Je ne peux vous répondre pour la Commission et pour le Gouvernement, auxquels il appartient de dialoguer. Comme je le disais dans cette enceinte, avec le Haut Conseil et avec la Cour des comptes, vous ne pouvez pas passer de compromis, car nous raisonnons à partir de textes et d’engagements pris. Entre deux autorités politiques, par exemple un gouvernement national et la Commission, les choses sont différentes, vous pouvez passer des compromis, il y a toujours une marge d’appréciation. La réponse ne peut cependant être que politique.

Quant à l’hypothèse d’un écart de production positif en fin de période, il est toujours possible de la faire. Ce peut être l’objet d’un grand débat entre économistes. Le Haut Conseil estime cependant que cette hypothèse serait plutôt optimiste. Elle repose sur le raisonnement qui veut, qu’à moyen terme, les hypothèses soient généralement établies à partir des contraintes d’offre, et non de demande, la dynamique des éléments de demande étant plus difficilement prévisible à cet horizon. Honnêtement, au-delà de 2020 ou 2021, personne n’en sait rien ; nous entrons dans un débat entre économistes.

Cela peut cependant avoir des conséquences. Le Gouvernement fait l’hypothèse que, après la fermeture de l’écart de production, la demande sera plus dynamique que l’offre. Si cette hypothèse est neutre pour le calcul du déficit structurel, ce n’est pas vrai pour le déficit effectif. L’écart est de 0,6 point dans le sens favorable. Il en va de même pour la trajectoire de la dette publique, dont l’évolution est présentée sous un jour plus favorable, de l’ordre de 1 à 1,5 point.

Mme Bénédicte Peyrol. Monsieur le président du Haut Conseil, vous étiez venu nous voir en juillet, en votre qualité de Premier président de la Cour des comptes, pour nous présenter votre rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques. Dans ce rapport, il était pointé le détournement de la réserve de précaution. En principe destinée à faire face à des aléas de gestion, elle avait vu son usage détourné pour faire face à des sous‑budgétisations. Aujourd’hui, nous voyons la volonté du Gouvernement de rebudgétiser ce qui avait été sous-budgétisé, ce qui témoigne d’une volonté de sincérité.

Vous parlez de la maîtrise des dépenses. Cette réserve en est un outil. Un plancher est fixé dans la loi. Auriez-vous une recommandation, quant à la fourchette de taux, pour que cette maîtrise des dépenses soit effective ?

M. Patrick Hetzel. Je n’aborderai qu’un point, celui du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Dans votre analyse, vous soulignez que « des risques significatifs existent sur la réalisation des économies prévues dans le champ des administrations publiques ». Pouvez-vous nous détailler les risques précisément identifiés par vous, quelle est leur nature ? Sur cette base, nous pourrons interroger les ministres tout à l’heure.

Mme Amélie de Montchalin. Nous vous avions reçu ici pour votre première audition, pendant laquelle nous avions échangé sur le manque de sincérité de la budgétisation de l’exercice 2017, le soi-disant « volontarisme politique » des prévisions macroéconomiques qui ont prévalu depuis des années, et d’un certain irréalisme sur l’estimation de l’écart de production.

Nouvelle majorité, nous souhaitons conduire un exercice sincère et sérieux sur l’ensemble du quinquennat. Nous souhaitons ne pas avoir un recours excessif à la réserve de précaution afin de garantir une exécution budgétaire non polluée par de la régulation budgétaire permanente. Nous souhaitons être lucides sur nos perspectives de croissance et d’inflation. Nous souhaitons surtout être réalistes quant à l’écart de production et donc à l’ampleur des réformes structurelles à mener, en s’appuyant sur un environnement conjoncturel solide, qui soutient ces réformes, au lieu de croire qu’il les rendrait accessoires.

J’en viens à ma question. Nous voulons être moteurs d’une certaine rupture. Retrouvez-vous, dans les documents qui vous ont été transmis, ces éléments de rupture, à la fois dans le pilotage et dans la philosophie budgétaire ?

M. Jean-Noël Barrot. Je rejoins les réflexions de mes collègues, pour me féliciter de la sincérité des hypothèses du projet de loi de finances. Elle tranche avec l’insincérité soulignée lors de votre dernier passage devant notre commission.

Je voudrais revenir moi aussi sur la question de la qualité des prévisions. L’année dernière, la prévision de 1,5 % du PIB était jugée un peu élevée, car elle était supérieure aux prévisions du moment, tandis que celle de 1,7 % est cette année jugée prudente. Lorsque l’on fait des estimations et des prévisions, l’on y ajoute en général un écart-type, en tout cas une marge d’erreur. Peut-on savoir quelle est la marge d’erreur de ces prévisions ? Est-on dans une zone de risque ? Plus généralement, pouvez-vous nous donner une idée de l’écart constaté entre ces précédentes prévisions macroéconomiques et ce qui s’est réellement produit ?

Mme Marie-Christine Dalloz. S’agissant tout d’abord de l’ajustement structurel et de l’avis du Haut Conseil relatif au projet de loi de programmation des finances publiques, vous nous dites qu’il appartiendra au Gouvernement d’aller négocier avec la Commission européenne. Mais nous devons réduire de 0,5 point et nous ne sommes qu’à 0,1 point, alors même que nous nous trouvons dans une conjoncture économique favorable. Voilà où est le vrai delta, le vrai danger qui pèse sur la loi de programmation des finances publiques.

S’agissant ensuite du projet de loi de finances, je parlerai d’abord des recettes. Vous nous dites que leur élasticité s’établit à 1,3, selon toute probabilité. Je l’entends, mais suis quant à moi inquiète. Alors que la consommation des ménages et des administrations publiques est étale, voire en régression par rapport aux années antérieures, je vois mal comment les recettes de TVA pourraient augmenter. Je ne comprends pas cette augmentation significative, alors que la consommation est atone.

Quant aux dépenses, le tendanciel national aurait conduit à 36 milliards d’euros d’augmentation de la dépense, sans la correction annoncée. Du fait que des économies sont annoncées pour 16 milliards d’euros, les dépenses n’augmentent cependant que de 20 milliards d’euros. Cela correspond à une augmentation de 1,6 % sur la masse des dépenses. Voilà ce qui explique le dérapage constaté du déficit global, non en taux, mais en masse. Voilà, n’est-ce pas, ce que vous entendez par « risque significatif existant ».

Mme Christine Pires Beaune. J’aborderai quatre points, qui ne concernent que l’avis sur le projet de loi de finances et le pro.

Premièrement, le 5 juillet 2017, vous dénonciez devant nous des « sousbudgétisations structurelles », notamment pour les ministères des finances et de l’agriculture. Même s’il y a du mieux, je constate, comme vous, en 2018, des sous-budgétisations, qui conduiront inéluctablement à des décrets d’avance. Or la réserve baisse de 8 % à 3 %.

Deuxièmement, vous soulignez le ralentissement prévu de l’emploi marchand en 2018. Mais dans votre analyse des perspectives de l’UNEDIC, vous prévoyez un niveau de chômage identique pour 2018. Est-ce à dire que les ordonnances modifiant le code du travail n’auront aucune conséquence en 2018 sur l’évolution du taux de chômage ?

Troisièmement, la mécanique de la réforme de la taxe d’habitation semble claire, mais elle pose tout de même beaucoup de questions, au-delà de la perte d’autonomie fiscale pour les collectivités, du fait d’un risque d’appauvrissement du lien entre le citoyen et sa commune. Que pensez-vous, par exemple, de l’idée d’instaurer un ticket modérateur ?

Quatrièmement, j’en viens au pari sur la démarche contractuelle et aux risques significatifs que vous dénoncez, s’agissant de la réalisation des économies. La démarche contractuelle me semble pertinente, mais une vraie démarche contractuelle est fondée sur des engagements de part et d’autre. Or, à ce stade, nous ne connaissons pas les contreparties prévues. Je reste donc, comme ma collègue Véronique Louwagie, inquiète sur les conséquences de ces contractualisations sur le niveau de la dépense publique.

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Certaines des questions posées ne sont pas de celles auxquelles il m’appartient de répondre. Ainsi en est-il de la question sur l’autonomie fiscale. C’est une question à poser au Gouvernement, car nous entrons ici dans le débat politique.

D’autres questions relèvent aussi plutôt du Premier président de la Cour des comptes ; or ce n’est pas en cette qualité que je parle ici devant vous ce matin. Il reste encore à la Cour des comptes à se prononcer sur le budget pour 2018. Elle ne pourra le faire que dans le cadre de son rapport sur les perspectives des finances publiques en 2018. Elle apportera un certain nombre d’éléments là-dessus. Je ne suis donc pas en mesure de répondre avec précision à certaines questions.

De même, la réserve relève d’un arbitrage du Gouvernement. Nous n’avons pas parlé de détournement à son sujet, mais seulement observé que, selon la loi organique relative aux lois de finances, la réserve est destinée à faire face à des aléas ou à des imprévus. Or elle était devenue une réserve tenant compte d’un certain nombre de sous-budgétisations qui ont eu tendance à augmenter, au fil du temps. Tel est le constat que nous faisions. Aujourd’hui, il reste encore des sous-budgétisations, mais elles sont moins importantes dans le projet de loi de finances pour 2018 que dans celui de l’an dernier. Même sur les apurements communautaires et sur les OPEX, quoiqu’il ne faille pas exclure encore des sous‑budgétisations, il y a cependant un affichage de crédits plus important que dans le projet de loi de finances pour 2017.

Nous n’avons pas non plus à apprécier la sincérité budgétaire. Jamais la Cour des comptes n’a d’ailleurs remis en cause la sincérité de la loi de finances. Nous avons seulement dit qu’il pouvait y avoir des biais de construction qui pouvaient affecter la sincérité en certaines circonstances. Devant la commission des affaires sociales, j’exposerai tout à l’heure les biais de construction qui affectent la sincérité de l’ONDAM. Nous avons à apprécier le réalisme des projections.

S’agissant des marges d’erreur, nous savons que l’économie n’est pas une science exacte. En période normale – à supposer qu’on puisse donner une définition de ce terme –, je dirais que cette marge avoisine 0,5 point. Mais il n’en va pas de même en période de retournement. Ainsi, en 1993, puis en 2009, l’écart s’est relevé beaucoup plus grand, s’élevant à 2 à 3 points de PIB, d’ailleurs dans un sens défavorable.

Cela dit, un écart est aussi possible dans l’autre sens, comme une sous-estimation des recettes. Souvenons-nous de la fameuse « cagnotte » et du débat, en 1999 et 2000, quand la croissance avait été fortement sous-estimée. Il faut pouvoir l’apprécier. Le passé doit nous permettre d’être plus prudent et de faire des prévisions plus ajustées. Bien sûr, plus l’année passe, plus l’on est en mesure de conforter un certain nombre de prévisions.

Dans le projet de loi de finances pour 2018, les prévisions nous paraissent tout à fait prudentes ou réalistes, y compris sur la TVA, car il y a des effets prix et des effets de structure. Le ministre pourra vous répondre sur ce point.

S’agissant de l’emploi, le Gouvernement anticipe un ralentissement des créations d’emploi en 2018, car des dispositifs de soutien disparaîtront, tels le CICE, le pacte de responsabilité ou encore les embauches PME. Là aussi, les hypothèses nous paraissent plutôt prudentes et réalistes.

M. Éric Alauzet. Je me réjouis du changement de doctrine au sujet de la ventilation des déficits structurel et conjoncturel. Nous avons eu souvent ce débat ici, et il trouve enfin une concrétisation cette année. Je suis satisfait, car il ne s’agit pas d’une querelle d’école ou d’une question d’appréciation. Au contraire, les conséquences sont très concrètes. D’une part, cela engage notre regard sur la nature, le diagnostic et l’analyse de ces déficits. D’autre part, cela indique des solutions différentes. Car, si l’essentiel du déficit est d’origine conjoncturelle, il suffit d’attendre un retour de conjoncture. Mais si les deux tiers en sont d’origine structurelle, cela change tout. Quoi qu’il en soit, nous devons faire ce travail d’approfondissement et d’analyse.

De ce fait, cela doit‑il changer notre regard sur le passé, c’est-à-dire sur la nature de ce qui a été fait en matière de réduction du déficit structurel, l’effort étant peut-être moins important qu’on ne l’a cru ? À l’inverse, pour l’avenir, les efforts à fournir seront sans doute plus importants, car il est plus difficile de réduire le déficit structurel que le déficit conjoncturel.

M. Jacques Marilossian. Quand les experts parlent de déficit public, ils se réfèrent toujours à un chiffre de 3 % du PIB. Mais, moi, je ne sais pas ce que c’est que le PIB ! Je sais mieux ce qu’est un budget, où dépenses et recettes se font face.

En 2017, le projet de loi de finances prévoyait 307 milliards d’euros de recettes et 382 milliards d’euros de dépenses. À mes collègues qui cherchent à nous donner des leçons, je voudrais rappeler qu’en 2006-2007, ces mêmes dépenses étaient proches de 300 milliards d’euros. Elles ont atteint 383 milliards d’euros, soit plus qu’aujourd’hui, dès 2010, année où le déficit s’est établi à 110 milliards d’euros, suite à des baisses d’impôt. Revenons au présent, ces 70 milliards de déficit représentent 25 % de déficit par rapport aux recettes. Pour un Français qui gagne 1 600 euros, cela représente 2 000 euros de dépenses, soit 400 euros de plus que son salaire mensuel. Et 11 % de ces dépenses sont affectés au seul service et remboursement de la dette !

Dans votre avis, vous évoquez avec diplomatie la « forte dynamique de certaines dépenses sur les années à venir, comme sur la charge de la dette ou sur la défense, imposera un effort accru sur d’autres postes ».

En 2017, les cinq postes les plus importants, c’est-à-dire la défense, l’enseignement, la recherche, la charge de la dette et les transferts aux collectivités, représentent à eux seuls 200 milliards d’euros, soit 52 % des dépenses. Par ailleurs, sur les trente et une missions du budget général, vingt ont des dépenses inférieures à 5 milliards d’euros.

Qu’appelez-vous donc un « effort accru » ? Est-ce un rabot général ou des mesures très ciblées, et sur quelles missions ? Vous paraît-il vraiment réaliste de conduire une trajectoire vers un déficit nul du budget général de l’État, à un horizon 2022 ou 2025, en se fondant uniquement sur la réduction des dépenses ?

M. Jean-Louis Bricout. Je vous remercie, monsieur le président du Haut Conseil, de votre analyse, qui vous pousse à annoncer une bonne nouvelle, celle de la hausse des recettes en 2017. Pour autant, pourriez-vous qualifier d’insincère cette prévision de recettes pour 2017 ?

Je comprends aussi, en vous écoutant, qu’il y a, selon vous, des risques significatifs sur les objectifs à atteindre en matière d’économies sur les dépenses dans le champ des administrations publiques. Vous soulignez d’abord, globalement, un effort historique, en rappelant quelques chiffres sur ce qui a été consenti : entre 2000 et 2008, la progression des dépenses était de l’ordre de 2,2 % ; entre 2011 et 2016, de l’ordre de 0,8 à 0,9 % ; en 2018, l’on passe à 0,5 %, soit un effort tout de même significatif.

Les inquiétudes se focalisent sur la contractualisation, forme de dialogue de gestion visant à contenir l’augmentation des dépenses des grandes collectivités à 1,2 %. Permettez-moi de partager vos inquiétudes sur ces économies réelles. Cela me paraît en effet difficile. D’abord, cela a un effet cumulatif avec les autres baisses de dotations que nous avons déjà pu rencontrer. En outre, elles sont soumises à des charges qui sont, pour une bonne part, souvent incompressibles. Elles sont déjà, comme on l’entend souvent dire, « à l’os ».

Cela me paraît difficile aussi parce que ceux qui prônent un effort conséquent aujourd’hui sont les mêmes qui criaient au loup hier, lorsque le Gouvernement annonçait des baisses de dotation. Cela me paraît un peu contradictoire.

Concernant la masse salariale privée, qui progresserait de 3,3 % en 2017 et 3,1 % en 2018, vous nous dites que les indicateurs conjoncturels laissent penser que l’emploi devrait ralentir. Le Gouvernement anticipe un ralentissement prononcé. Certes, cela relève d’une certaine prudence. Mais cela contredit les ambitions affichées par le Gouvernement en matière d’emploi. Avez-vous des précisions à nous apporter ?

Pourrions-nous parler, peut-être, d’insincérité en termes de vocabulaire ?

M. Daniel Labaronne. Monsieur le président du Haut Conseil, à la page 5 de votre avis relatif au PLF et au PLFSS vous écrivez que, s’agissant des échanges extérieurs, le scénario du Gouvernement – qui table sur une contribution neutre à la croissance – vous apparaît optimiste. Qu’est-ce qui vous laisse penser, d’un point de vue macroéconomique, que la contribution des échanges extérieurs au PIB pourrait éventuellement être négative ?

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Ce sont les performances récentes des exportateurs qui nous font douter d’une contribution neutre à la croissance. Les performances des exportateurs français peuvent s’améliorer mais, pour l’heure, elles témoignent de difficultés plutôt persistantes de l’appareil productif français à bénéficier pleinement de la progression soutenue du commerce mondial. Notre inquiétude se fonde sur les résultats des années précédentes. C’est là où les réformes structurelles peuvent avoir des effets positifs sur la capacité de l’appareil productif français à répondre à une augmentation mondiale de la demande.

Pour le reste, nous ne parlons pas d’insincérité, en effet, au risque de décevoir. Ce n’est pas le sujet. S’agissant des recettes, je répète que les hypothèses nous apparaissent tout à fait prudentes et raisonnables. En ce qui concerne la dépense, plusieurs constats nous poussent à exprimer des interrogations. La trajectoire est plus exigeante et il est difficile de faire des économies : d’une part, il faut faire preuve de beaucoup de conviction ; d’autre part, certaines économies programmées peuvent reposer soit sur un pari avec les collectivités territoriales, soit sur des décisions qui ne sont pas encore complètement concrétisées. Nous avons donc des interrogations sur ce point.

Pour réviser à la hausse le déficit structurel, monsieur Alauzet, il faudra en effet consentir davantage d’efforts à l’avenir. À cet égard, nous répétons ce que nous avions déjà dit dans nos précédents avis. Le Gouvernement fait preuve d’un plus grand réalisme quand il fait apparaître cet effort structurel à réaliser de façon plus soutenue. Cela correspond, nous semble-t-il, davantage à la réalité de la situation des finances publiques françaises.

Les objectifs à moyen terme dont nous parlons se réfèrent à l’ensemble des administrations publiques : État, sécurité sociale et collectivités territoriales. Il faut reconnaître que l’État a tendance à prendre une grande partie des déficits ; il lui arrive notamment de compenser certaines décisions prises en matière de sécurité sociale.

M. le président Éric Woerth. Il compense ses propres décisions.

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Il lui arrive même de les surcompenser ! Dans les lois de financement de la sécurité sociale, il faudrait d’ailleurs clarifier certains points concernant les relations – dans les deux sens – entre l’État et la sécurité sociale. Il y a tout un travail à faire.

Le nouveau Gouvernement propose-t-il une rupture dans les approches budgétaires ? Ce n’est pas à moi de répondre à cette question. La Cour des comptes dira si tout cela se concrétise, au fil de ses futurs rapports.

Dans le domaine de l’emploi, je ne vois pas non plus d’insincérité dans les prévisions. Les chiffres donnés pour l’année 2017 me paraissent plutôt prudents et réalistes, compte tenu des nombreux éléments dont nous disposons d’ores et déjà, notamment en ce qui concerne la masse salariale. Pour 2018, il nous semble plutôt prudent d’anticiper un certain ralentissement même si le solde reste positif et doit contribuer à l’amélioration de la situation de l’emploi. Selon les projections du Gouvernement, le solde positif est moins important en 2018 qu’en 2017 tout en demeurant positif.

M. Marc Le Fur. Nous nous intéressons à la croissance mais aussi à l’emploi. Autrefois, on créait un lien statistique entre le taux de croissance et le taux d’amélioration de l’emploi. Aujourd’hui, peut-on dire des choses de cette nature ? On a l’impression d’avoir une croissance non créatrice d’emploi. Comment faire en sorte que la croissance soit plus créatrice d’emploi ? Quels ont pu être les effets des efforts dans ce sens, comme le CICE ?

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Vous avez un tableau qui fait apparaître qu’il y a un lien entre le retour de la croissance et l’augmentation de la masse salariale.

M. Marc Le Fur. Sur l’emploi, ce n’est pas si spectaculaire !

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Les chiffres ne sont pas non plus spectaculaires. Les effets sont progressifs mais ce tableau montre qu’il y a bien un lien.

M. Marc Le Fur. Nous avons un Gouvernement qui n’est pas passionné par le logement, c’est le moins que l’on puisse dire. Il veut réduire certaines aides au logement : il remet en cause la carte un peu étendue des aides au logement locatif et le prêt à taux zéro. Or le secteur du logement crée de l’activité et de l’emploi tout en étant peu coûteux en importations car c’est d’abord l’économie nationale qui en bénéficie. Pourriez-vous nous dire quelle est la part du logement dans l’activité et dans la croissance ? Quel pourrait être l’effet de mesures aussi défavorables que celles qui nous sont annoncées sur le logement ?

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Je n’ai pas à commenter des décisions politiques. Le Gouvernement annonce des économies dans ce secteur mais aussi une hausse des constructions de logements.

Dans notre pays, il y a des marges de progression en ce qui concerne l’efficacité et l’efficience de la dépense publique dans tous les secteurs, y compris celui du logement. Comme j’ai eu l’occasion de vous le dire lors de ma présentation de l’audit, nous avons un niveau de dépenses publiques qui est ce qu’il est et qu’il ne m’appartient pas de commenter. Cela étant, je peux dire que les résultats obtenus ne sont pas à la hauteur de ce niveau de dépenses. On peut avoir une action publique plus efficace, plus efficiente, sans dépenser autant et même en dépensant moins, en mettant fin à certains doublons ou à des effets d’aubaine qui existent dans pratiquement tous les secteurs.

À la Cour des comptes, nous espérons que votre commission va entrer dans l’exécution. C’est à travers l’exécution que vous appréciez la réalité d’une politique budgétaire et d’une politique publique.

M. François Pupponi. Pour ma part, je suis d’accord sur le fait qu’il faille rentrer dedans, y aller. Encore faut-il le faire intelligemment. On peut annoncer des constructions nouvelles et donc des recettes nouvelles. Mais quelle est la sincérité de ces recettes nouvelles dues aux constructions nouvelles ? Le PLF, qui est proposé et que vous analysez, prévoit des recettes nouvelles sur de nouvelles constructions alors que le choix qui est fait en matière d’aides personnalisées au logement (APL) risque d’entraîner une baisse des constructions. Avez-vous pris en compte ce phénomène pour mesurer la réalité et la sincérité des recettes annoncées en matière de TVA ou d’impôt sur les sociétés dus à la construction ?

M. le président du Haut Conseil des finances publiques. Nous n’avons évidemment pas examiné chaque mesure mais nous avons identifié un risque en ce qui concerne la concrétisation réelle des économies dans ces domaines.

M. le président Éric Woerth. Il me reste à vous remercier, monsieur le président, pour toutes les réponses que vous nous avez apportées.

 


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   AUDITION DE M. BRUNO LE MAIRE, MINISTRE DE L’ÉCONOMIE ET DES FINANCES, ET DE M. GERALD DARMANIN, MINISTRE DE L’ACTION ET DES COMPTES PUBLICS, SUR LE PROJET DE LOI DE PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES ET LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2018.

Lors de sa réunion du 27 septembre 2017, la commission a entendu M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances, M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, et M. Benjamin Griveaux, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances, sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 et le projet de loi de finances pour 2018.

M. le président Éric Woerth. Cette audition, qui se tient à l’issue du Conseil des ministres, est donc absolument traditionnelle à ceci près qu’elle porte cette année sur la présentation de deux textes : le projet de loi de finances (PLF), mais aussi le projet de loi de programmation des finances publiques.

M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances. Je suis très heureux de vous retrouver pour cette présentation du projet de loi de finances pour 2018. Je vais vous présenter le cadre général de ce PLF ; Gérald Darmanin présentera ensuite les grandes articulations, les réductions de dépenses, les principaux choix budgétaires qui ont été faits. Puis nous répondrons à toutes vos questions.

Je voudrais insister sur les trois grandes orientations politiques du PLF pour 2018.

Première orientation : la sincérité, en particulier en ce qui concerne les perspectives de croissance qui sous-tendent cet exercice budgétaire et les suivants. Comme vous l’avez vu, le Fonds monétaire international (FMI), l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) font pour la France des prévisions de croissance qui sont supérieures à la proposition de 1,7 % que nous avons retenue pour 2017 comme pour 2018.

Il aurait été beaucoup plus simple pour nous de prendre des perspectives de croissance plus élevées et d’avoir des réductions de dépenses publiques moins importantes dans l’exercice budgétaire à venir. Avec Gérald Darmanin et Benjamin Griveaux, j’ai fait un choix différent, celui de la sincérité. Nous nous sommes appuyés sur des évaluations de croissance solides et honnêtes, qui sont confortées par l’augmentation des créations d’emplois dans le secteur marchand – 300 000 créations cette année –, par les perspectives d’investissement dans le secteur marchand, qui repartent à la hausse, et par la confiance des entrepreneurs.

Cette sincérité est saluée par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), qui a estimé que notre évaluation de croissance pour 2018 était solide et raisonnable. Elle se traduit par un objectif et un cap très clairs pour le quinquennat, qui tiennent en trois chiffres : cinq, trois et un, qui correspondent à la baisse respective, en points de PIB, de la dette publique, de la dépense publique et des prélèvements obligatoires d’ici à 2022. La baisse des prélèvements obligatoires s’effectuera à parts égales entre les ménages et les entreprises puisque nous voulons que cette perspective budgétaire bénéficie à tous les Français, sans exception.

Deuxième orientation : l’audace au service du redressement économique de notre pays. Cette audace se traduit par trois choix cohérents : la baisse des dépenses publiques, la baisse des impôts et le soutien à l’innovation.

La baisse des dépenses publiques est indispensable car leur niveau est plus élevé en France que dans les pays de l’Union européenne et même de l’OCDE. Ces dépenses publiques ne produisent pas les effets attendus. Au niveau qu’elles ont atteint, si elles produisaient les effets attendus, nous devrions avoir le plein emploi, une croissance forte et un excédent commercial. Or nous constatons l’inverse. Augmenter la dépense publique est un remède qui a été essayé par tous les gouvernements – de gauche comme de droite – depuis des années et il n’a donné aucun des résultats attendus. Nous vous proposons autre chose : la baisse des dépenses publiques, au service de l’investissement, de l’innovation, de la relance de la croissance. Cette baisse va nous permettre d’atteindre 2,9 % de déficit public dès 2017 – je rappelle que nous partions de 3,2 % et même de 3,4 % en ajoutant toutes les dépenses engagées.

Grâce aux efforts accomplis, le déficit public sera de 2,9 % en 2017 et de 2,6 % en 2018, c’est-à-dire que nous tenons nos engagements européens. Ce choix de la baisse de la dépense publique doit permettre à notre pays de sortir de la procédure pour déficit public excessif dont il fait l’objet depuis 2009. Avec l’Espagne – qui est en voie d’en sortir –, la France est le dernier État membre de l’Union européenne à être sous le coup de cette procédure. C’est une honte pour notre pays – qui a été à l’origine du projet européen – d’être dans cette situation. La France n’a pas vocation à rester le dernier État faisant l’objet d’une procédure pour déficit public excessif. À cet égard, je tiens à vous signaler les propos de M. Pierre Moscovici, commissaire européen aux affaires économiques et financières, à la fiscalité et aux douanes. Ce matin, il a salué la réduction des dépenses publiques engagée par le Gouvernement et indiqué que cette évolution devait permettre à la France de sortir de cette procédure l’année prochaine.

Nous avons aussi décidé de baisser les impôts d’un montant de 10 milliards d’euros
– 6 milliards pour les ménages et 4 milliards pour les entreprises. Cette baisse des impôts doit libérer des capacités de croissance dans notre pays. Elle doit permettre de rendre à l’économie productive l’argent dont elle a besoin pour se développer. La mise en place du prélèvement forfaitaire unique à 30 %, la baisse de l’impôt sur les sociétés – ramené de 33,3 % à 25 % en cinq ans – et la suppression de l’ISF sur les valeurs mobilières vont rendre à l’économie productive les moyens de financement dont elle a besoin.

Ce choix, nous l’assumons totalement. Dans une économie de rupture où nos entreprises ont besoin de moyens de financement et où nous devons être plus attractifs pour les investissements étrangers, il était nécessaire d’alléger la fiscalité sur le capital. On ne peut pas avoir des entreprises qui investissent, qui innovent et qui créent des emplois avec une fiscalité confiscatoire sur le capital. On ne peut pas demander aux jeunes générations d’être entreprenantes, de créer des entreprises et d’innover, tout en leur disant que, si elles réussissent, la taxation sur le capital leur retirera le produit de leur travail. Alléger la fiscalité sur le capital, c’est un choix de rupture en faveur de la croissance, des entrepreneurs, de l’emploi et donc de tous les Français.

Troisième choix d’audace : nous soutenons l’innovation en décidant de maintenir et de sanctuariser le CICE, en étant prêts à étudier son déplafonnement dans les années à venir et en mettant en place un fonds pour le financement de l’innovation de rupture, doté de 10 milliards d’euros. Créé dans le courant de l’année 2018, ce fonds sera abondé par la cession d’actifs de l’État dans l’économie concurrentielle.

Voilà les trois choix d’audace que nous voulons faire et qui se reflètent dans ce PLF.

Troisième grande orientation politique : le principe de justice, car nous n’oublions pas ceux qui ont le plus de difficultés dans notre pays. Nous voulons alléger les impôts de ceux qui en paient trop. Nous commençons à supprimer un tiers du montant de la taxe d’habitation pour 80 % des redevables dès 2018. Nous mettons en place un crédit d’emploi à domicile destiné à ceux qui ne paient pas d’impôt sur le revenu. Les ménages modestes et non imposables, qui veulent embaucher quelqu’un pour s’occuper de leurs parents malades ou garder leurs enfants, n’ont accès à aucun avantage fiscal pour ce faire. À l’avenir, ils pourront embaucher quelqu’un et toucher un chèque du Trésor public pour alléger la charge de cet emploi à domicile.

Mme Valérie Rabault. Cette mesure, c’est nous qui l’avons fait adopter !

M. le ministre de l’économie et des finances. Certaines mesures existent sur le papier, sont adoptées mais ne sont pas financées. Nous permettons de financer des mesures qu’il nous aurait été plus simple de retirer. Nous avons décidé de les maintenir par souci de justice et d’attention aux plus fragiles. Vous aurez la budgétisation, pour 2018, d’un crédit d’impôt. Pour notre part, nous finançons nos décisions.

Cette justice se lit aussi dans les mesures destinées à compenser des augmentations de fiscalité que nous assumons totalement – je pense à la fiscalité sur le diesel et à la convergence entre le prix de ce carburant et celui de l’essence, qui vont nous permettre d’amorcer la transition écologique. Pour compenser ces hausses, nous allons créer un chèque transport. Nous allons aussi permettre à certains professionnels, tels les chauffeurs de taxi, les transporteurs routiers ou les pêcheurs, de bénéficier d’allégements concernant cette fiscalité de la transition écologique.

Voilà les grands axes de ce PLF et le cadre économique dans lequel il s’inscrit. La croissance est meilleure et solide, raison de plus pour accélérer. Nous entrons dans un monde où l’investissement et l’innovation sont la clef des créations d’emploi et de la réussite. Nous assumons l’allégement de la fiscalité sur le capital. Nous savons qu’il y a encore des inégalités importantes entre les territoires et entre les personnes ; nous les compensons. La justice, l’audace, la volonté de sincérité, tels sont les trois éléments qui caractérisent ce PLF pour 2018.

M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics. Ce budget est placé sous le signe de la transformation et vise à défendre le pouvoir d’achat. Je me permettrai d’en souligner quelques points avant de laisser une large place au débat.

Le budget n’est qu’un outil – certes très important – qui vient concrétiser les décisions de politiques publiques. Ce sont bien les politiques publiques qui commandent le budget et non l’inverse. M. le ministre de l’économie et des finances vient de rappeler les principes généraux de ce budget : il s’agit de passer d’un modèle de société qui encourage la rente et qui exclut un grand nombre de nos compatriotes à un autre modèle qui encourage la mobilité. On ne redresse pas une économie sans aider ceux qui veulent s’en sortir et réussir. Il faut que le travail paie. Notre budget est celui de la feuille de paie, nous y reviendrons à propos du pouvoir d’achat. Il faut protéger les plus faibles et passer d’une société qui favorisait la subvention à une société qui favorise l’investissement.

 

Ce budget a été établi pour accompagner les transitions ; il est éminemment politique puisqu’il traduit des choix. Citons le grand plan d’investissement qui va être doté de moyens nouveaux – 700 millions d’euros en autorisations d’engagement, dont 200 millions pour le seul budget 2018 – destinés notamment à accompagner la transformation numérique de nos administrations, en particulier de la justice. Ce budget doit donc permettre les transitions écologique, économique et sociale, ainsi que l’application du nouveau pacte conclu avec les collectivités locales. Nous avons décidé de faire porter la maîtrise des dépenses publiques sur les 319 plus grosses collectivités et non sur les innombrables communes rurales et villes moyennes de notre pays.

Il s’agit de faire des choix, non de donner des coups de rabot. Nous engageons des transformations de politiques publiques très profondes qui dépassent largement les crédits budgétaires, notamment en matière de travail et de logement. Dans les domaines régaliens de l’État, comme l’éducation et la défense, les budgets sont en forte hausse. Conformément aux engagements du Président de la République, le budget des armées va augmenter de 1,7 milliard d’euros chaque année et l’aide au développement devrait atteindre 0,55 % du PIB en 2022.

Nous avons aussi choisi de ne pas diminuer de manière homothétique le nombre des emplois publics. Un gros effort a été consenti en ce qui concerne la masse salariale de l’État, puisque 1 600 emplois ont été supprimés alors que 14 000 emplois avaient été créés au cours de la dernière année budgétaire. Nous avons décidé de ne pas faire une simple division par cinq pour en arriver à la suppression de 120 000 emplois publics durant le quinquennat. Nous souhaitons poser d’abord la question des missions avant d’aborder celle des moyens puis celle des emplois publics. Le programme « Action publique 2022 », lancé par le Premier ministre, se concrétisera dès le prochain budget. Ce programme destiné à moderniser l’État et l’ensemble des administrations publiques aura des conséquences en termes budgétaires et d’emplois publics.

Notre budget est celui du pouvoir d’achat. Si le budget est une affaire de spécialistes, il concerne aussi les Français ; nous devons exprimer les choses en euros et pas seulement en milliards d’euros. Dans le livret du pouvoir d’achat qui vous a été remis, vous trouverez la traduction concrète – sous forme d’augmentation d’allocations ou de baisse d’impôts – de nombreuses dispositions prévues durant le quinquennat. Il résume ce que nous allons redonner aux Français : dégrèvement de la taxe d’habitation, suppression de cotisations, généralisation du chèque énergie, augmentation de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), augmentation du minimum vieillesse, aide très particulière aux familles monoparentales. Dès 2018, un couple de smicards qui paie actuellement la taxe d’habitation aura 380 euros d’augmentation de pouvoir d’achat. À la fin du quinquennat, ce même couple aura l’équivalent de plus d’un treizième mois en gain de pouvoir d’achat grâce à la redistribution dont nous reparlerons lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).

Le budget est sincère et sérieux : les hypothèses retenues sont raisonnables ; elles se situent dans le consensus des économistes. Je me suis laissé dire que M. Migaud l’a souligné ce matin, lorsque vous l’avez auditionné. Nous avons rebudgétisé les insincérités constatées dans le dernier budget. En fait, l’insincérité a été une constante depuis de nombreuses années. À l’exception des opérations extérieures (OPEX), qui vont bénéficier d’un rattrapage durant le quinquennat, nous avons rebudgétisé 4,5 milliards d’euros, afin de pouvoir répondre aux interrogations légitimes sur la sous-budgétisation chronique, notamment pour ce qui est de l’hébergement d’urgence, de l’AAH et du ministère de l’agriculture. Nous avons proposé au Président de la République et au Premier ministre d’appliquer un gel de 3 % à ce budget, ce qui devrait favoriser les directeurs de programme. Nous voulons vous démontrer ainsi que nous croyons à la sincérité de notre budget et rendre aux ministres le grand pilotage de leur politique publique.

Enfin, ce budget est celui des promesses tenues. Toutes les promesses de la majorité parlementaires sont inscrites dans ce budget et dans la trajectoire quinquennale. Nous inversons une courbe, celle de la dépense publique : la part de la dépense publique dans la richesse nationale décroît de 0,7 point, passant de 54,6 % à 53,9 %, ce qui est inédit depuis la période où Dominique Strauss-Kahn était à Bercy. La croissance étant à cette époque bien supérieure à ce qu’elle est actuellement, on peut mesurer l’effort extrêmement important que nous avons accompli pour diminuer la dépense publique. Si la croissance économique continue sur sa lancée, nous pouvons imaginer une décrue des dépenses publiques.

Nous avons décidé de lutter d’une façon inédite contre une dépense publique qui, malheureusement, a réduit les capacités de transformation de notre pays. Nous avons quasiment tenu l’engagement que le Premier ministre vous avait fait : toutes administrations publiques confondues, les dépenses augmentent de 0,5 % en volume. Nous avons encore du travail à faire. Nous avons choisi la transformation mais pas la rigueur. Je rappelle que ce taux de 0,5 % d’augmentation de la dépense publique en volume n’avait pas été vu depuis quinze ans et qu’il est deux fois moins élevé que celui observé au cours de la période 2010-2016.

Notre dette est stabilisée pour la première fois depuis 2006 et elle devrait avoir baissé de cinq points à la fin de ce quinquennat. Ainsi que l’a annoncé M. le ministre de l’économie et des finances, le montant des baisses d’impôts atteint 10 milliards d’euros et les prélèvements obligatoires diminuent de 0,3 point dans ce budget 2018. Le déficit est réduit de 0,3 point par rapport à 2017. Précisons que lorsque nous avons pris nos fonctions, la Cour des comptes a indiqué que le déficit, toutes administrations publiques confondues, était de 3,4 %. Nous avons donc fait un effort considérable pour tenir nos promesses et respecter les engagements de la France.

M. le président Éric Woerth. Avant de donner la parole au Rapporteur général, je vais faire quelques observations et poser quelques questions.

Tout d’abord, je me réjouis de l’effort de sincérité qui se manifeste dans le document qui nous a été distribué. Lors de nos différentes réunions, nous avions évoqué la sous‑budgétisation chronique et habituelle de certaines dépenses : l’AAH, la prime d’activité, les OPEX, etc. Certains points ont été corrigés, ce qui est une bonne chose, tout comme le fait que la réserve de précaution soit maintenue à un taux qui en fait réellement une réserve de précaution.

Deuxième élément positif : les agrégats économiques – la croissance du PIB, la masse salariale, l’élasticité, l’inflation et autres – sont confirmés par le Haut Conseil des finances publiques. C’est donc un budget sincère au sens où il ne contient pas à ce stade de biais de construction, si j’ai bien compris ce que disait son président, M. Didier Migaud, au sujet des précédents exercices.

Je m’étonne néanmoins que le premier budget présenté par cette majorité ne respecte pas les engagements européens de la France. Il me semble qu’on devrait plutôt essayer d’y coller dans un premier budget : ces engagements sont majeurs. Souvent, ils n’ont pas été respectés alors qu’ils devraient l’être ; aujourd’hui, la conjoncture économique le permet davantage. Je m’étonne donc du manque de respect des engagements européens de la France dans ce budget et bien plus encore dans votre programmation budgétaire.

Vous avez évoqué à plusieurs reprises un budget de « grande rupture », mais je suis plutôt d’avis qu’il s’agit d’un budget de petite continuité. Cela me conduit à vous poser quelques questions.

D’abord, vous annoncez une augmentation considérable du déficit de l’État, qui atteindrait 83 milliards d’euros, soit à peu près 4 points de PIB, ce qui est considérable. Cela représente 14 milliards de plus que dans la loi de finances initiale pour 2017 et 7 milliards supplémentaires par rapport aux prévisions d’exécution pour 2017. Je comprends qu’il y a probablement l’effet des rebasages que je viens d’évoquer, mais cela ne suffit pas à expliquer la différence avec les prévisions d’exécution budgétaire pour cette année. Il y a donc un dérapage tout à fait considérable du déficit de l’État.

Ma question est de savoir par quel miracle comptable, ou par quelle bonne nouvelle concernant les collectivités locales et la sécurité sociale, on arrive à revenir à 2,6 % de PIB de déficit en 2018. Vous nous direz peut-être que les collectivités locales ou la sécurité sociale sont plus vertueuses que l’État lui-même... Merci, en tout cas, pour la réponse précise que vous pourrez apporter sur ce sujet.

Alors que tout va mieux dans l’économie, en France comme en Europe et dans le reste du monde, vous révisez à la baisse vos ambitions pour la maîtrise de la dépense. Vous aviez indiqué que ce serait zéro en volume et vous faites 0,5. Ce n’est pourtant pas la dégradation de la conjoncture qui peut l’expliquer : elle devrait vous amener à faire mieux. Vous expliquez que vous allez réaliser 16 milliards d’euros d’économies, contre 20 milliards précédemment annoncés, sans préciser comment vous calculez ces 16 milliards d’euros. Nous avons interrogé tout à l’heure le Haut Conseil, qui n’avait pas pu regarder cette question. Où sont ces 16 milliards et comment sont-ils calculés ? Quelles sont vos hypothèses sur ce sujet ? Et surtout, pourquoi un tel relâchement dans l’effort de maîtrise de la dépense ? La conjoncture conduirait plutôt à un rehaussement, sans parler d’austérité, terme qui n’a pas de sens devant un tel niveau de dépenses publiques. Pourquoi ces revirements, et où sont ces fameuses économies ?

Dans votre communication générale – nous verrons bien ce qu’il en est dans les textes, dont nous disposons tout juste depuis cinq minutes –, pourquoi faites-vous reposer la quasi-intégralité de l’effort de réduction des dépenses sur seulement deux d’entre elles : le logement et les contrats aidés ? C’est un peu court : cela ne peut pas expliquer l’ensemble de l’effort que vous dites réaliser en ce qui concerne les dépenses.

Ensuite, pourquoi stopper la baisse tendancielle des effectifs ? M. Darmanin a indiqué qu’il y a eu 14 000 emplois de plus en 2017. C’est sans doute un dérapage tardif et extrêmement dommageable du précédent exécutif, mais il y avait une baisse tendancielle depuis des années : les gouvernements qui ont précédé ceux de M. Hollande avaient réduit d’environ 150 000 les effectifs au sein de l’État. À cela s’ajoute le sentiment au sein de la population que nous allons réduire les effectifs dans la fonction publique. Ce n’est pas agir contre elle, mais lui donner au contraire la capacité d’évoluer dans son statut ou ses méthodes de travail, surtout à l’ère du numérique. Or vous annoncez une stabilité des effectifs pour l’État, ou quasiment aucune diminution. Vous nous dites que l’on verra plus tard, en fonction des missions. Mais on a toujours procédé ainsi. La vérité est que vous n’avez pas voulu ouvrir un front supplémentaire avec la fonction publique. Pourquoi n’avez-vous pas eu ce courage ?

Même observation pour les prélèvements obligatoires : vous nous dites que vous réalisez 10 milliards d’euros de baisse, mais en fait non, car c’est hors CSG. Je sais bien que nous parlons aujourd’hui du projet de loi de finances, mais les prélèvements obligatoires vont au-delà. La vérité est que vous augmentez la CSG dès maintenant et que les baisses de cotisations sociales ont lieu en deux temps. En net de CSG, cela représente en réalité 7 milliards d’euros de réduction d’impôts. Ces baisses ne sont pas suffisantes pour les Français dans le climat actuel et il y a par ailleurs beaucoup de petites hausses : pour les ménages modestes et ruraux, je pense notamment au carburant et au livret A, mais il n’y a pas que ça.

S’agissant de la compétitivité, pourquoi un tel changement de pied ? Pourquoi parlez-vous toujours du pouvoir d’achat et plus jamais de la compétitivité ? Vous présentez par ailleurs un « livret du pouvoir d’achat », mais ce n’est pas le livret A : il va subir au contraire de plein fouet le différentiel d’inflation. Le prélèvement forfaitaire unique (PFU) est une bonne chose, mais ce n’est pas une rupture. C’est un retour en arrière – d’ailleurs judicieux. Quant à l’impôt sur les sociétés, M. Hollande avait déjà fait voter une baisse tendancielle et je suis heureux que ce soit confirmé. On peut être d’accord
– de temps en temps...

Mais les entreprises vont subir une augmentation du coût du travail : c’est votre réforme du CICE, dont le taux va passer de 7 % à 6 %. Cela représente plus de 3 milliards d’euros. Pourquoi ce changement de cap et pourquoi augmenter les charges des entreprises quand on a, au contraire, besoin de les réduire ?

Je vous remercie par avance des réponses que vous pourrez apporter.

M. Joël Giraud, Rapporteur général. Ce projet de budget fait la vérité, c’est vrai, sur les chiffres : vérité sur les dépenses, avec la fin des sous-budgétisations récurrentes depuis des années, et que dénonçait la Cour des comptes ; vérité aussi sur le montant réel du déficit structurel, avec une révision radicale des hypothèses de calcul. En tant que Rapporteur général, je ne peux que m’en féliciter, car il ne peut y avoir de débat parlementaire sincère et éclairé sans fiabilité des chiffres présentés. Le Laudate Dominum du président du Haut Conseil des finances publiques est à ce titre révélateur.

Certes, le déficit budgétaire de l’État est en hausse, et j’ai bien entendu ce qu’a dit le président de la commission, mais cela s’explique par le fait que les baisses d’impôt concernent surtout les finances de l’État, tandis que les hausses, en particulier celles relatives à la CSG et au tabac, bénéficient à la sécurité sociale. Cela ne traduit donc pas une mauvaise gestion de l’État, bien au contraire. L’essentiel est que l’indicateur du déficit public, toutes administrations confondues, soit en baisse, nous permettant de sortir de la procédure de déficit excessif dès 2017. Les ministres l’ont déjà rappelé, mais il est parfois utile d’enfoncer quelques clous.

Ma première question porte sur la loi de programmation, et plus particulièrement sur la trajectoire des finances locales. Il est prévu des économies tendancielles de 13 milliards d’euros et une baisse du besoin de financement d’un même montant, alors que ces administrations sont aujourd’hui légèrement excédentaires : à la fin de la programmation en 2022, les administrations locales seraient en excédent de 0,8 % du PIB. Concrètement, qu’est‑ce que cela signifie ? Faut-il comprendre que les collectivités locales disposeront de ressources ou de fonds de roulement qu’elles n’auraient pas le droit d’utiliser pour respecter la programmation ? Comment cela va-t-il se combiner avec le principe d’autonomie de ces collectivités ?

J’ai aussi une interrogation sur le rendement de la hausse de la fiscalité sur le tabac. Elle est évaluée à 0,5 milliard d’euros dans le rapport annexé, ce qui me paraît bien faible pour une hausse d’un euro, à moins que beaucoup de gens ne s’arrêtent de fumer – ce qui, d’ailleurs, me conviendrait parfaitement dans le cadre des politiques de santé publique. Comment cette évaluation a-t-elle été élaborée ?

J’observe que les comptes de concours financiers sont déficitaires en raison des prêts à l’Agence française de développement (AFD). Peut-on avoir des précisions sur la nature des opérations envisagées ?

J’en viens maintenant aux questions fiscales.

La mise en place du PFU dans le domaine de l’assurance vie conduit à alourdir, pour l’avenir, la fiscalité sur les plus gros contrats détenus depuis plus de huit ans, mais aussi à l’alléger sur ces mêmes contrats lorsqu’ils sont rachetés avant quatre ans. La lisibilité indéniable qui est liée à la mise en place du PFU peut-elle s’instaurer en laissant de côté un objectif de détention longue des actions ? Dans le même ordre d’idées, les abattements pour durée de détention sont supprimés pour l’avenir. Ne craignez-vous pas que cela conduise à une plus grande instabilité des placements de nos concitoyens ?

Quant à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), certaines sources évoquent comme produit total, après réforme, un montant de 850 millions d’euros. Confirmez-vous ce chiffrage ? Compte tenu du coût, ne serait-il pas opportun, comme certains le suggèrent, d’augmenter certaines taxes qui existent déjà sur des signes extérieurs de richesse ? La mise en place de l’IFI s’accompagnera de la suppression du dispositif dit « ISF-PME », ce qui pourrait avoir un impact important sur le financement des start-up. Ne vous semble-t-il pas opportun de mettre en place un dispositif de sortie « en douceur » qui permettrait, pour un temps de tuilage à déterminer, de continuer à inciter les contribuables les plus fortunés à investir dans le capital des PME ? Les comportements fiscaux sont parfois un peu lents en France et relèvent plus de la Vespa Piaggio que d’un Spyder... Les dispositifs de tuilage peuvent donc être utiles.

Vous avez annoncé une mesure concernant l’utilisation de la TVA réduite sur la presse en ligne par les opérateurs téléphoniques. Un journal satirique, aux pieds palmés et paraissant le mercredi, évoque un manque à gagner de 660 millions d’euros pour l’État, voire de 1,2 milliard d’euros si l’ensemble des opérateurs suivent. Quelles sont les mesures prévues ? De combien de millions d’euros est-il question ? Dispose-t-on au moins d’un ordre de grandeur ?

La question de la compensation des exonérations de taxe foncière en faveur du logement social fait l’objet de débats réguliers en loi de finances. Fait nouveau, ces compensations ne vont pas faire l’objet d’une minoration accrue cette année. À combien chiffrez-vous le choix ainsi opéré en faveur des collectivités locales ? Quel est, dans le projet de loi de finances pour 2018, le taux de minoration des compensations d’exonération de taxe foncière ?

Je termine avec les questions relatives au logement. Nous sommes conscients de l’effet inflationniste des aides personnalisées au logement (APL) sur le niveau des loyers. J’ai même vu des business plans d’entreprises de construction qui intègrent l’APL étudiante comme élément de solvabilité du projet de résidence, ce qui est tout de même un comble. Cela étant, on a parfois du mal à saisir de quelle manière la baisse des APL va se traduire concrètement en baisse de loyers effective et pérenne. Quelles sont les pistes pour y parvenir ?

De même, je m’interroge sur des mesures telles que le recentrage du prêt à taux zéro (PTZ) et du dispositif « Pinel » ou la possible extinction du « Censi-Bouvard ». Il faut sortir « en sifflet » de certains dispositifs si l’on ne veut pas désespérer certains bailleurs, notamment ruraux. Je pense à l’équilibre de certaines opérations, comme la restructuration des sites de défense, qui dépend de niches susceptibles de disparaître, mais aussi à l’économie touristique des régions de montagne, au sein desquelles les opérations de réhabilitation des résidences de tourisme sont indispensables. Les dispositifs concernés ont fait l’objet de réorientations dans le cadre d’une loi de décembre 2016, puis d’une annonce faite par l’actuel Gouvernement au mois d’août dernier, en comité interministériel du tourisme.

Je vous remercie d’apporter quelques précisions sur les adaptations possibles.

M. le ministre de l’économie et des finances. Merci d’avoir reconnu, monsieur le président, la sincérité de notre budget. C’est une singularité qui mérite d’être notée : il n’y a pas, en effet, de biais de construction et, oui, c’est un budget sincère.

J’ai plus de mal à vous suivre sur la question des engagements européens de la France. Je rappelle que nous aurons des déficits publics sous la fameuse barre des 3 % en 2017, à 2,9 %, et qu’ils passeront très en dessous en 2018, à 2,6 %. La dernière fois que nous avons respecté nos engagements en matière de déficit public, c’était sous Dominique de Villepin, en 2007.

Tu n’oublieras pas, cher Éric, qu’il y a eu un nouveau Président de la République l’année suivante : il est allé à Bruxelles, au conseil des ministres des finances, un peu ébahis de voir arriver un Président de la République – personnellement, je tiens mon banc dans cette instance sans avoir besoin d’être remplacé par le chef de l’État –, pour expliquer que tous ces engagements européens n’avaient absolument aucune importance et qu’il n’était pas question que la France les respecte. À partir de 2008, les déficits publics français ont commencé à se creuser. Nous n’avons donc pas de leçons à recevoir sur ce sujet (Applaudissements sur plusieurs bancs).

M. le président Éric Woerth. Je voudrais rappeler que l’on applaudit en séance publique si l’on veut, mais pas en commission, sans quoi nous aurons bientôt des sifflements ou des huées...

M. le ministre de l’économie et des finances. Je me permets d’insister, car c’est un sujet dépassant les querelles politiciennes. Avec le Président de la République et le Premier ministre, nous avons fait un choix qui est difficile. Quand vous arrivez aux responsabilités dans la situation qui a été très clairement décrite par la Cour des comptes, à savoir un déficit public évalué à 3,2 % du PIB en 2017, repasser à 2,9 % implique un effort important, qui a été demandé à tous les Français. Nous revendiquons le fait de tenir nos engagements européens, y compris en matière de déficit structurel.

J’ai bien noté dans l’avis du Haut Conseil des finances publiques qu’il y avait une interrogation sur ce dernier point et je veux y répondre : nous ferons 0,1 point d’ajustement structurel en 2018 car, comme j’ai eu l’occasion de l’expliquer aux membres de la Commission européenne, nous réalisons en parallèle des réformes structurelles sur le marché du travail et, demain, sur la formation et l’assurance chômage, qui viendront compléter les efforts de réduction de la dépense publique et nous permettre de tenir nos engagements en matière de déficit structurel.

S’agissant des prélèvements obligatoires, si l’on raisonne du 31 décembre 2017 au 31 décembre suivant, il y a bien 10 milliards d’euros de baisse d’impôt, mais si l’on considère la moyenne de l’année 2018, on arrive en effet à 7 milliards, parce que nous réalisons en deux temps l’exonération des charges sociales sur l’assurance chômage et l’assurance maladie. J’assume totalement ce choix : sinon, nous n’aurions pas respecté nos engagements européens. La sincérité consiste aussi à garder un équilibre entre la baisse de la dépense, qui est nécessaire, et les allégements d’impôts qui le sont tout autant et que nous réalisons simultanément.

S’agissant des carburants, je veux être totalement transparent : nous avons décidé la convergence entre la fiscalité du diesel et celle de l’essence, pour des raisons qui tiennent à la protection de l’environnement et à toutes les découvertes sur le caractère nocif du diesel. Cette convergence représente une augmentation de 2,6 centimes d’euros par litre de diesel sur l’année 2018. À cela s’ajoute l’augmentation du prix du carbone, que nous assumons aussi, car on ne peut pas dire que l’on veut la transition écologique et garder le même prix pour la tonne de carbone. Cela va se traduire par une augmentation du prix du litre de diesel de 5 centimes en 2018. L’augmentation totale devrait donc tourner autour de 7 centimes d’euros l’année prochaine.

Nous avons parfaitement conscience de la charge que cela représente pour le consommateur et nous avons pris, je l’ai dit, toutes les mesures d’accompagnement nécessaires : le chèque transport, l’exonération des professionnels concernés et la prime à la transition pour les véhicules anciens, afin de permettre le rachat d’un véhicule neuf dans de meilleures conditions. Mais on ne peut pas vouloir une évolution des comportements sans avoir une fiscalité qui les oriente. La meilleure preuve que les Français l’ont compris, c’est que 70 % des achats de véhicules neufs concernaient le diesel il y a cinq ans, contre désormais 50 %. J’annoncerai d’ici à la fin de l’année un plan d’accompagnement pour l’industrie du diesel et les sous-traitants liés à cette filière, afin que les milliers d’emplois concernés puissent être accompagnés et ne subissent pas cette augmentation de la fiscalité.

Je précise la trajectoire en ce qui concerne la baisse de l’impôt sur les sociétés : en 2018, nous ramènerons à 28 % le taux d’imposition sur les 500 000 premiers euros de bénéfices réalisés. Nous avons fait ce choix, qui était d’ailleurs inscrit dans les précédents projets de loi de finances, je le reconnais bien volontiers, de manière à ne pas faire de perdants chez les petites et moyennes entreprises.

Quant au CICE, nous faisons passer son taux de 7 % à 6 %, puis nous basculerons en 2019 vers un allégement de charges pérenne. Je sais que beaucoup d’entreprises nous disent qu’elles vont perdre de l’argent avec cette bascule, mais vous me permettrez de faire plusieurs observations. D’abord, nous réinjectons des liquidités considérables, notamment avec la suppression de l’ISF sur les valeurs mobilières et avec le PFU. Nous assumons donc le fait que nous ne relèverons pas le taux du CICE. On ne peut pas nous dire d’un côté que nous donnons trop aux entreprises, et de l’autre pas assez. Soyons cohérents. Ensuite, un crédit d’impôt peut toujours être remis en cause d’une année à l’autre si vous, parlementaires, le décidez. Un allégement de charges a, en revanche, un immense mérite : il est pérenne et beaucoup plus difficile à remettre en cause. Je crois en une fiscalité stable, car l’efficacité est là. Je préfère donc graver dans le marbre un allégement de charges plutôt que de m’en tenir à un crédit d’impôt.

Enfin je note, mais c’est tout le charme de la vie politique française, que ce sont les mêmes qui ont dénoncé à cor et à cri la complexité du CICE, demandant la transformation de ce qu’ils présentaient alors comme une usine à gaz en allégement de charges pérenne et qui aujourd’hui, une fois que nous le faisons, nous disent qu’ils veulent revenir au CICE.

M. le président Éric Woerth. Permettez-moi un mot, monsieur le ministre. Quand c’est injuste, en général, on dit qu’on assume. C’est simple comme argument, mais souvent un peu court.

Les engagements européens de la France, nous l’avons vu ce matin avec le président Migaud, ne sont pas respectés, qu’il s’agisse de la trajectoire des finances publiques, du niveau de déficit structurel ou du fait d’atteindre l’objectif de moyen terme. Tout cela peut sembler très technique, mais ce sont des indicateurs absolument majeurs pour l’équilibre de nos finances publiques. Ils ne sont pas respectés et l’écart a même plutôt tendance à s’accroître.

Je rappelle aussi que nous étions dans le même gouvernement en 2007-2008. Tu étais solidaire de ces mesures.

M. Jean-Louis Bourlanges. Je ne comprends pas que vous interveniez constamment dans le débat, monsieur le président, alors que nous avons un Rapporteur général.

M. le président Éric Woerth. Je souhaite simplement rappeler qu’il y a eu en 2008 une crise qui a profondément influé sur le niveau économique de la France.

Enfin, je n’ai pas du tout dit que c’est une mauvaise chose de transformer le CICE en allégement de charges. Vous avez raison de le faire. Je conteste la réduction du crédit d’impôt, ce qui n’est pas tout à fait pareil.

M. le ministre de l’économie et des finances. Nous n’allons pas prolonger inutilement cette passe d’armes. Je pourrais peut-être enlever ma casquette de ministre et remettre celle de diplomate pour gérer les relations entre la commission et son président, mais je ne pense pas que ce soit mon rôle. Seulement, je tiens à la vérité des faits, qui sont têtus. D’abord, je n’étais pas au gouvernement en 2008. Ensuite, avec Dominique de Villepin, nous avons laissé des déficits publics en meilleur état qu’au cours des dix années précédentes. Troisième fait, nous devrions sortir de la procédure de déficit public excessif l’année prochaine, ce qui n’est pas arrivé depuis neuf ans. Je rappellerai les faits chaque fois que ce sera nécessaire. La vérité est têtue elle aussi et elle est bonne dans un débat budgétaire.

Je reprends mes réponses au Rapporteur général.

S’agissant de l’assurance vie, il y a déjà suffisamment d’incitations à la détention d’actifs longs. Nous maintenons les abattements au-delà de huit ans, à hauteur de 4 600 euros pour une personne seule et de 9 200 euros pour un couple. Aurions-nous pu instaurer une fiscalité dérogatoire pour les contrats dont l’encours est de 150 000 euros ou plus pour une personne seule ou de 300 000 euros ou plus pour un couple, afin d’inciter à la détention d’actifs plus risqués ? Les assureurs nous l’ont proposé, mais nous n’avons pas été suffisamment convaincus de la réalité de l’investissement en actifs risqués, et nous avons considéré en outre que cela reviendrait à créer une niche fiscale objectivement favorable aux seuls contrats d’assurance vie les mieux garnis, qui ne représentent que 4 % des contrats si l’on raisonne en nombre et non en encours. Nous avons estimé que cela n’aurait pas été juste pour 96 % des détenteurs et nous n’avons donc pas retenu cette formule.

Oui, nous supprimons l’ISF-PME. Là aussi, il faut regarder attentivement les avantages et les inconvénients : nous le faisons tout simplement parce qu’un rapport de la Cour des comptes, datant de 2015 et très précis, montre que ce dispositif constitue une niche fiscale qui profite aux PME en ayant le moins besoin et permet à des intermédiaires de vivre grassement des commissions versées. Comme nous n’avons pas vocation à multiplier les niches fiscales, nous avons décidé de remettre en cause l’ISF-PME. Si d’autres solutions plus intéressantes peuvent être trouvées pour les PME, pourquoi pas, mais je crois que nous faisons déjà beaucoup pour elles dans notre politique fiscale, en particulier l’allégement de la fiscalité sur le capital.

L’IFI a une base claire, qui est l’immobilier de jouissance et non celui utilisé pour travailler. Un bon impôt est stable et simple. Je ne recommande pas de le complexifier en rajoutant une taxe sur les yachts, les voitures de luxe ou, pourquoi pas, les caves à vin et les bijoux : on aurait du mal à s’en sortir. En revanche, si l’on veut montrer que l’on n’accepte pas que la fiscalité soit trop légère sur certains biens de luxe et si l’on est prêt à la durcir sur la base de l’existant, pourquoi pas ? Je suis ouvert à ce débat. Il existe, par exemple, des droits de francisation sur les navires de plaisance, qui ne sont pas d’un montant très élevé. Si vous avez des propositions sur le sujet, ça ne me dérange pas. Il y a aussi un malus de 10 000 euros pour les véhicules rejetant plus de 190 grammes de CO2 dans l’atmosphère, les Ferrari, Bentley ou Porsche, et l’on peut parfaitement envisager de le renforcer : ça ne me dérange pas non plus. Il existe donc d’autres options ayant pour immenses mérites que la base fiscale existe déjà, que l’on évite de créer un risque fiscal et que cela envoie, en effet, un message clair sur la justice de nos choix.

M. le ministre de l’action et des comptes publics. Je commencerai par répondre aux questions posées par M. le président de la commission. La sincérité de ce budget, que vous avez saluée, est un motif de satisfaction pour nombre de parlementaires qui, durant des années, se sont efforcés d’identifier les sous-budgétisations, exerçant en cela leur mission de contrôle. Pour ma part, je veux également rendre hommage à l’ensemble des services du ministère des finances, en particulier la direction du budget, qui ont beaucoup travaillé sur cette question.

Le déficit de l’État augmente cette année, mais pour des raisons tout à fait avouables, que nous assumons pleinement.

La première de ces raisons est la « sincérisation » des comptes. Devoir faire aujourd’hui 4,5 milliards d’euros d’économies pour compenser les sous-budgétisations ayant eu lieu précédemment, cela ne passe évidemment pas inaperçu, mais nous voulions en finir avec les mauvaises habitudes. Pour ce qui est de la baisse de 10 milliards d’euros des impôts, c’est bien l’État qui consent cet effort. L’année prochaine, la sincérisation des comptes et la baisse des impôts vont se traduire par une augmentation du déficit pour l’État, mais par une diminution du déficit pour l’ensemble des administrations publiques – or, c’est le critère essentiel pour vous, parlementaires, mais aussi pour la Commission européenne. Il me semble d’ailleurs un peu paradoxal de vous entendre saluer la sincérisation du budget et souhaiter une baisse plus importante des impôts, mais sans faire de propositions d’économies.

Les dépenses de l’État augmentent de 0,5 % en volume cette année : nous nous écartons donc un peu de la norme « zéro volume ». Cependant, lutter contre la dépense publique n’a jamais été chose facile, comme le savent tous ceux qui s’y sont essayés, et il ne faut pas perdre de vue que nous faisons bien mieux que tout ce qui a été fait au cours des sept dernières années en réussissant à diminuer la dépense publique de 0,7 point de PIB, soit 16 milliards d’euros. Je me refuse à établir une comparaison tendancielle : c’est bien à la richesse de la production nationale que nous devons comparer la dépense publique, et non à des dépenses hypothétiques.

Vous avez évoqué une « petite rupture », ce qui ne me paraît pas correspondre à la politique ambitieuse de transformation du logement et du travail du Gouvernement. Nous avons fait le choix de ne pas recourir à l’habituelle politique du rabot, consistant à appliquer à tous les budgets des diminutions homothétiques, et pour ma part je suis très heureux d’être un ministre dont le budget est en baisse, car je pense que cela n’empêche pas d’être un bon ministre. La définition de priorités par le Gouvernement ne doit pas systématiquement se traduire par une augmentation du budget, et il est heureux qu’il n’en soit pas ainsi, car ce serait un jeu sans fin où les dépenses publiques ne seraient pas près de baisser !

Pour ce qui est des effectifs, je veux souligner que les 1 600 suppressions de postes équivalents temps plein correspondent à des suppressions nettes, c’est-à-dire au chiffre résultant de la compensation entre, d’une part, les 4 600 suppressions auxquelles il est procédé et, d’autre part, les augmentations d’effectifs qui avaient été promises par le Président de la République et la majorité parlementaire, notamment dans les secteurs de la justice, de la police et de la gendarmerie. En tout état de cause, on ne peut parler de simple « tendance à la baisse » quand on passe de la création de 14 000 postes en 2017 à une diminution de 1 600 postes en 2018 – et à vous entendre tenir ces propos, j’en viens presque à me demander si vous n’êtes pas en train de devenir un défenseur du bilan de François Hollande !

Je répète que la diminution d’effectifs pour 2018 ne résulte pas d’une opération arithmétique consistant à répartir sur cinq ans la diminution de 120 000 postes de fonctionnaires annoncée par la Président de la République : nous ne souhaitons pas supprimer un grand nombre d’emplois publics sans avoir préalablement engagé des discussions avec les organisations syndicales sur les effectifs, mais aussi sur la rémunération, la considération, la formation et l’accompagnement des fonctionnaires – des aspects qui, de notre point de vue, méritent tous d’être améliorés –, ainsi que sur leurs missions et leurs moyens, des points sur lesquels le Parlement aura également son mot à dire.

Personne ne peut nous accuser d’avoir été laxistes avec les agents publics. Il faut commencer par reconnaître qu’ils accomplissent un travail extrêmement important et que les différentes fonctions publiques constituent des environnements très différents les uns des autres. De même, les différentes catégories de fonctionnaires sont soumises à des conditions de travail très variables. Chacun connaît l’abnégation des agents de catégorie C, qui accomplissent souvent un travail très difficile tout en étant peu rémunérés et en bénéficiant d’un plus faible niveau de prévoyance que d’autres. Sans doute ne sommes-nous pas d’accord sur la politique à appliquer en matière de fonction publique mais, pour ma part, j’ai eu le courage de dire aux fonctionnaires, dès le début de ma prise de fonctions, que nous rétablissions le jour de carence et que nous n’augmentions pas le point d’indice.

J’en viens aux questions qui m’ont été posées par le Rapporteur général, en commençant par celle portant sur les collectivités locales. Je constate que ni vous ni M. le président n’avez souligné que nous avions mis fin à la continuelle baisse de dotations des collectivités locales, qui constituait une très mauvaise façon de gérer les territoires, car elle ne correspondait pas à la relation normale, de nature contractuelle, qui doit exister entre l’État et les collectivités locales – ce dont tous les élus locaux se plaignaient depuis longtemps.

Nous avons choisi de mettre en place, non pas 2,5 milliards d’euros de baisses de dotations, mais 2,5 milliards d’euros de non-dépenses tendancielles, car nous considérons que chacun doit participer à la maîtrise de la dépense publique. Lorsque j’étais moi-même à la tête d’un exécutif municipal, je déplorais que, du fait des baisses de dotations et des charges supplémentaires, la réduction des dépenses publiques soit assumée par la commune plutôt que par l’État. Pour la première fois cette année, nous augmentons un peu les dotations au lieu de les diminuer, nous n’imposons pas de charges supplémentaires – nous avons même rétabli la dotation affectée à la délivrance de cartes d’identité sécurisées, « c’est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup »... – et nous avons choisi de laisser aux communes la liberté d’organisation en matière de rythmes scolaires, en préservant, pour les communes qui décideraient de maintenir les rythmes scolaires décidés par le précédent gouvernement, le fonds de soutien au développement des activités périscolaires.

Nous faisons le choix de la liberté pour les territoires et nous considérons que les 319 plus importantes collectivités, dont certaines vont disposer d’énormes ressources supplémentaires, puisque nous concrétisons l’attribution d’un point de TVA aux régions, votée dans le cadre de la précédente loi de finances – le sort des départements reste encore à régler, ce qui nécessitera d’engager une réflexion à ce sujet avec le ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, et le ministre de la cohésion des territoires, Jacques Mézard –, ont les moyens de lutter contre le tendanciel. Par exemple, si une grosse collectivité a aujourd’hui des dépenses de fonctionnement à un niveau 100 et avait prévu de passer tendanciellement à 102,5, elle devra faire l’effort de se cantonner aux environs de 101,2 : c’est en procédant de cette manière que nous parviendrons à réaliser 2,6 milliards d’euros d’économies.

Nous aurons évidemment un grand débat sur la question des dotations, de la péréquation et des contrats avec les collectivités locales. Nous avons fait le pari de l’intelligence territoriale, qui suscite une grande attente parmi les élus locaux. Très courageusement, les petites villes de France ont noté ce changement de paradigme, qui constitue pour elles une grande transformation.

Au Rapporteur général, qui considère que nous avons peut-être sous-estimé les recettes du tabac, je veux d’abord dire que le Gouvernement continue à soutenir la lutte contre le tabagisme engagée par les gouvernements précédents, en augmentant encore la fiscalité sur les produits du tabac. Les recettes ne sont peut-être pas aussi importantes que nous le souhaiterions, mais nous y voyons justement un effet sur la consommation de l’augmentation constante des prix du tabac depuis des années. À l’inverse de ce que vous avez fait, vous auriez pu considérer que nous avions prévu des recettes un peu trop importantes... en fait, l’estimation de 500 millions d’euros de recettes fiscales sur le tabac me paraît prudente et conforme aux objectifs que nous avons fixés en concertation avec la ministre de la santé. J’ajoute que nous avons engagé une réflexion avec les buralistes en vue d’un accompagnement de l’effort de diversification de leurs activités – je pense à celles liées à La Française des jeux, mais aussi à la détection des trafics illégaux de tabac, par exemple.

Pour ce qui est de la TVA, estimant anormal d’appliquer un taux de TVA réduit à la presse écrite sans en faire bénéficier également la presse en ligne, nous proposons d’appliquer le taux de TVA réduit sur la consommation de la presse, quel que soit son support. Il est très difficile d’évaluer précisément les conséquences budgétaires de cette mesure, qui est avant tout une mesure d’équité et de bon sens.

Enfin, nous avons fait le choix de ne pas diminuer les aides personnalisées au logement pour nos concitoyens en 2018, ce qui sera possible grâce à une disposition de la loi de finances qui consistera à demander aux bailleurs sociaux – puisque ce sont eux qui perçoivent les APL – de diminuer les loyers. Globalement, les nouvelles mesures fiscales relatives aux loyers ne feront aucun perdant et même quelques gagnants – mais nous aurons l’occasion d’en reparler dans le cadre du débat budgétaire.

Mme Amélie de Montchalin. Après des décennies où beaucoup a été dit, mais où finalement peu a été fait par rapport aux annonces et aux ambitions, certes louables, affichées par les ministres qui se sont succédé dans les fonctions qui sont maintenant les vôtres, vous nous présentez aujourd’hui, monsieur le ministre, un budget de rupture au service des Français, de leur avenir et de notre crédibilité.

La première rupture est celle d’un budget mettant fin à des années d’hypocrisie, durant lesquelles les responsables politiques ont, tout en parlant sans arrêt de « choc d’offre », laissé notre industrie perdre en compétitivité, nos très petites entreprises (TPE) et nos petites et moyennes entreprises (PME) s’enfoncer dans les difficultés, et nos entrepreneurs, nos agriculteurs, nos commerçants et nos indépendants faire face à une fiscalité qui les décourageait de faire croître leurs entreprises.

La deuxième rupture est avec ceux qui n’ont fait que brandir leur fibre sociale en étendard, sans avoir vraiment revalorisé le pouvoir d’achat et les conditions de vie matérielles des classes moyennes et des salariés, dont le travail et les efforts ne sont pas payés à leur juste valeur.

La troisième rupture, enfin, est une rupture de méthode sur les dépenses, puisque nous sortons de la logique comptable du rabot pour nous attaquer à tout ce qui est inefficace, à tous les domaines où les Français payent des impôts sans que cela serve concrètement à quelque chose. Il est étonnant de voir que ceux qui ont appelé de leurs vœux ce genre de réformes critiquent aujourd’hui notre décision de diminuer les dépenses consacrées au logement et aux contrats aidés, dont l’inefficacité dans la lutte contre le mal-logement et dans l’amélioration de l’insertion professionnelle est pourtant évidente.

Messieurs les ministres, quels sont selon vous, les principaux obstacles que nous devons vaincre ensemble pour que l’esprit de rupture et l’impulsion que vous donnez aujourd’hui puissent produire tous leurs effets pendant cinq ans au service de tous les Français, afin de créer plus d’emplois et de permettre enfin à la France de se transformer en profondeur ?

Mme Véronique Louwagie. Ce matin, le Haut Conseil des finances publiques a indiqué que les prévisions de croissance étaient réalistes, prudentes et raisonnables, et vous avez vous-même qualifié ces prévisions de « solides », monsieur Le Maire. Si nous pouvons effectivement nous réjouir de ces hypothèses de croissance, je voudrais préciser que le Haut Conseil n’a pas qualifié le budget de sincère : ce n’est qu’aux prévisions de croissance qu’il a appliqué ce qualificatif. Interrogé ce matin, son président nous a déclaré qu’il lui était impossible de se prononcer sur les dépenses, celles-ci n’étant pas suffisamment documentées. L’avis souligne même, en ce qui concerne les dépenses, des risques significatifs sur la réalisation des économies prévues dans le champ des administrations publiques – c’est dire que le Haut Conseil ne croit pas forcément aux hypothèses de dépenses. Pour ce qui est de la diminution de 2 % en valeur des dépenses des collectivités territoriales prévue pour 2018, censée résulter de la mise en place du nouveau dispositif de contractualisation entre l’État et certaines collectivités, le HCFP émet un doute sur les résultats attendus de cette mesure, puisqu’il parle de « pari sur le dispositif ».

Le déficit, en hausse de 14 milliards d’euros, soit 20 %, va atteindre 82,9 milliards d’euros en 2018 alors qu’il était de 69,1 milliards d’euros en 2016 : il n’avait pas atteint ce niveau depuis 2013, ce qui mérite d’être souligné. Vous aviez initialement pour ambition de réduire les dépenses de 20 milliards d’euros, mais vous avez renoncé à cet objectif dès le premier exercice et ne parlez plus désormais que d’une réduction de 16 milliards. Alors que la Cour des comptes avait critiqué, en 2017, le fait que l’effort de réduction des déficits repose essentiellement sur la sécurité sociale et sur les collectivités territoriales, nous constatons aujourd’hui que cette tendance se poursuit : sur les 16 milliards d’euros de réductions de dépenses, 5,5 milliards concernent la sécurité sociale et 2,8 milliards les collectivités territoriales, ce qui représente déjà 8,3 milliards d’euros et donne un peu le sentiment que l’État préfère imposer des efforts aux autres plutôt qu’à lui-même, ce qui est regrettable.

Certes, il est difficile de faire bouger les lignes quand on a un déficit de 70 milliards d’euros sur un budget de 300 milliards – où les charges d’intérêts et les contributions européennes tiennent une place non négligeable –, mais ce budget donne tout de même l’impression d’un certain saupoudrage. On fait un peu moins pour les retraités, pour les générations futures – en augmentant la dette – et pour les riches rentiers, et un peu plus pour les riches entrepreneurs et pour les travailleurs... Au total, il est difficile de considérer ce budget comme un budget de rupture, car on n’y trouve pas de réformes structurelles de l’État – par exemple celle qui consisterait en un recentrage de l’État sur ses principales missions –, ce qui fait que le solde structurel prévu pour 2020 reste négatif, tout comme le solde conjoncturel. En fait, seules deux diminutions des dépenses de l’État sont identifiées dans ce budget – les aides au logement pour 1,7 milliard et les contrats aidés pour 1,5 milliard –, et on se demande bien où sont les autres.

M. Mohamed Laqhila. Monsieur le ministre, depuis quarante-trois ans, la France aligne des exercices budgétaires déficitaires, le dernier exercice dans le vert remontant à 1974. Aujourd’hui, la situation n’est pas seulement préoccupante, elle est plus qu’alarmante : nos dépenses publiques sont les plus importantes de l’Union européenne, nous affichons l’un des taux de prélèvements obligatoires les plus élevés en Europe, ainsi qu’un endettement excessif.

Notre situation financière ne permet pas de résorber le déficit. La France est-elle donc condamnée à rester bloquée à un niveau excessif de déficit ? Personnellement, je ne pense pas que ce soit une fatalité, à condition que des décisions courageuses soient prises. C’est le cas de certaines de celles que vous présentez aujourd’hui, pour lesquelles vous avez parlé d’« audace ».

Parmi ces décisions, celle consistant à supprimer l’ISF me paraît relever du bon sens, pour au moins trois raisons. D’abord, l’ISF dissuade les investisseurs des placements à risques dans les actions ; par ailleurs, il freine le développement des entreprises, qui n’ouvrent pas leur capital à des investisseurs extérieurs ; enfin, il encourage la fuite des talents hors de nos frontières.

Tout le monde dit depuis longtemps que l’ISF est un mauvais impôt, qui rapporte peu et coûte très cher à notre pays. Je vous dis donc bravo, monsieur le ministre, pour le courage politique dont vous faites preuve et que personne, ni à gauche ni à droite, n’avait eu avant vous. Cette mesure m’inspire deux questions. Premièrement, si vous redonnez une capacité d’investissement aux contribuables français en transformant l’ISF en IFI, êtes-vous certain qu’ils réinjecteront cet argent dans notre économie et, le cas échéant, avez-vous prévu des mesures d’incitation et quantifié les effets de cette mesure ? Deuxièmement, en orientant le nouvel impôt sur le patrimoine immobilier des ménages, ne craignez-vous pas un ralentissement du marché de la construction qui, conformément à l’adage « quand le bâtiment va, tout va », est l’un des secteurs les plus créateurs de richesses et d’emplois non délocalisables ?

M. Charles de Courson. Messieurs les ministres, le diagnostic que je porte sur votre projet est très simple. Je relève tout d’abord une sincérité fortement améliorée, mais inachevée – pour ce qui est de la défense, vous ne mettez que 200 millions d’euros sur les OPEX alors qu’il faudrait entre 600 et 650 millions d’euros ; de même, il faudrait prévoir quelques centaines de millions d’euros supplémentaires pour les contentieux communautaires. Cependant, vous allez dans le bon sens – ce qui nous change de ce qui s’est fait au cours des années précédentes –, notamment en vous fondant sur des hypothèses prudentes, comme l’a indiqué à juste titre le Haut Conseil des finances publiques.

Par ailleurs, vous réalisez des économies notables, mais également insuffisantes, et consistant aux trois quarts à baisser les prélèvements obligatoires, une mesure certes indispensable, mais qui se traduit par une réduction du déficit structurel limitée à 0,1 point, puisque l’on passe d’une prévision de 2,2 % du PIB en 2017 à 2,1 % en 2018.

J’ai trois questions à vous poser. Premièrement, tel Diogène, je cherche les 20 milliards d’euros d’économies promis dans le débat d’orientation budgétaire, où il était alors question de 10 milliards d’euros sur le budget de l’État, de 7 milliards d’euros sur la sécurité sociale et de 3 milliards d’euros sur les collectivités territoriales. Aujourd’hui, globalement, les dépenses publiques de l’État, de la sécurité sociale et des collectivités territoriales, qui devaient respecter la norme « zéro volume », augmentent de 0,5 %, après avoir augmenté de 0,8 % en 2017 – certes, il y a un progrès de 0,3 point, ce qui représente environ 7 milliards d’euros, mais il manque encore une dizaine de milliards d’euros.

S’agissant des collectivités territoriales, vous continuez à comptabiliser une espérance de 3 milliards d’euros de réductions que vous n’atteindrez jamais, puisque les contrats mis en œuvre à partir de 2018 ne produiront pas leurs effets avant 2019. Cela risque de poser un vrai problème car il va se trouver, parmi les 319 plus importantes collectivités locales, quelques-unes qui vont refuser de signer, ce qui va vous faire perdre deux ans. Comme je vous l’ai déjà dit, j’estime qu’il aurait fallu continuer la baisse de la dotation globale de fonctionnement (DGF) à 2 % ou 3 %, et la moduler en fonction des performances, c’est-à-dire des efforts de réduction des dépenses accomplis – je précise que nos collègues de gauche ont fait bien pire en atteignant 9 %, mais indifférenciés.

En ce qui concerne la sécurité sociale, je veux souligner que nous assistons à une accélération des dépenses, puisque les chiffres que vous nous avez donnés font apparaître une augmentation de 2 % pour 2018, contre 1,9 % en 2017. Pouvez-vous nous donner le détail des économies effectives, c’est-à-dire des décisions prises qui auront pour effet de réaliser des économies – je pense notamment au rétablissement du jour de carence ? Pour ma part, je pense que nous nous situons aux alentours de 7 à 8 milliards d’euros d’économies réelles.

Deuxièmement, pour ce qui est de la transformation de l’ISF en IFI, pouvez-vous nous dire si, oui ou non, l’immobilier d’entreprise est inclus dans l’IFI, et à combien vous estimez le produit de cet impôt ? À ce sujet, on entend dire toutes sortes de choses : certains parlent de 2,2 milliards d’euros, d’autres de 900 millions d’euros seulement.

Troisièmement, pourriez-vous nous expliquer comment la flat tax va s’appliquer à l’assurance vie pour les encours supérieurs à 150 000 euros ? Est-ce uniquement sur les contrats futurs, ou également sur les contrats passés ?

Mme Valérie Rabault. Messieurs les ministres, vous avez parlé de sincérité en évoquant votre budget. Alors qu’au sein de la commission des finances, la sincérité passe par les chiffres, le document que vous nous avez remis est un peu décevant de ce point de vue, car il n’indique jamais le montant en milliards d’euros que représentent les différentes mesures composant le budget. À la page 42, on ne sait pas combien l’article 9, consacré à la fiscalité écologique, est censé rapporter en milliards d’euros – c’est-à-dire combien il va coûter aux contribuables, autrement dit aux ménages et aux entreprises qui en payent les deux tiers ; la même question se pose à la page 49 avec l’article 11, consacré à la taxation des plans d’épargne logement à compter du 1er janvier 2018 ; elle se pose encore à la page 75 avec l’article 13, portant sur la taxation des dividendes. Pourriez-vous nous indiquer les chiffres correspondants à ces trois articles ?

Par ailleurs, le ministère des finances utilise le logiciel MESANGE, qui permet, pour chaque nouvelle mesure fiscale mise en œuvre, de déterminer avec précision quel va être son impact sur la croissance économique et le nombre de créations d’emplois. Sachant que vous disposez des données fournies par ce logiciel, je souhaite que la sincérité dont vous vous prévalez vous conduise à faire connaître ces données à la commission des finances. À défaut, j’invite notre Rapporteur général à réitérer la démarche que j’avais moi-même entreprise en 2014 – certains se souviennent peut-être qu’usant des pouvoirs qui m’étaient conférés par l’article 57 de la loi organique relative aux lois de finances, j’avais fait une visite surprise à Bercy afin que ces données me soient communiquées.

Par ailleurs, vous avez évoqué la modification de la fiscalité des PME, votée sous le précédent quinquennat. À ce sujet, pouvez-vous nous confirmer que vous maintenez le taux réduit à 15 % pour les 38 120 premiers euros de résultat net des entreprises, ainsi que son extension à l’ensemble des PME, résultant d’un amendement voté par la commission des finances ainsi que par l’Assemblée elle-même ?

Pour ce qui est du petit « Livret du pouvoir d’achat » que vous nous avez remis, nous aurons certainement tous à cœur de le compléter, car si ce livret détaille les mesures qui créent du pouvoir d’achat, il ne fait nullement mention des mesures qui, à l’inverse, ont pour effet de l’amputer ! Ainsi, quand vous faites passer la taxe d’aménagement du territoire de 42 millions d’euros à 141,2 millions d’euros, vous vous gardez bien d’indiquer que le montant de cette taxe, qui se situe actuellement entre 2 000 et 3 000 euros à la charge de toute personne faisant construire une maison, va désormais être compris entre 5 000 et 6 000 euros – sur ce point, chacun pourra se reporter à la page 92 du projet de loi de finances.

Enfin, vous avez indiqué que vous souhaitiez compenser la hausse de la CSG pour les fonctionnaires. Est-ce à dire que cette compensation sera payée par les collectivités locales ?

M. Éric Coquerel. Il faut reconnaître une chose à M. Le Maire : il assume pleinement la politique qu’il veut mettre en place, reposant sur l’idée qu’il faut avantager les revenus du capital afin de favoriser l’investissement et l’emploi. Pour ma part, j’y vois plutôt une continuité – sur ce point, je suis en désaccord avec lui, et me rangerais plutôt du côté de M. Woerth –, puisque cette politique constitue une parfaite application du « théorème » du chancelier ouest-allemand Helmut Schmidt, qui expliquait, dans les années 1980, que « les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain ». Or, si en France les profits ont bien été engrangés, on attend toujours les investissements – qui ont même diminué –, ainsi que les emplois – le chômage n’a pas cessé d’augmenter. Rien ne montre, même les dernières notes du FMI en 2015, que le fait d’avantager les revenus du capital favorise l’investissement productif si cette politique n’est pas assortie de conditions
– ce serait même plutôt l’inverse.

Notre deuxième point de désaccord est l’idée selon laquelle il faudrait forcément obéir à la règle d’or, et baisser les recettes et les dépenses de l’État – comme si les dépenses de l’État n’étaient pas aussi des recettes. Ce point m’inspire plusieurs réflexions et questions.

Sur la fiscalité, l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) note que la fiscalité que vous proposez va avantager les 10 % des Français les plus riches, à hauteur de 2,6 milliards d’euros – une somme dont la moitié va profiter aux 1 % les plus riches. Pouvez-vous nous dire à quoi il sert d’avantager encore plus ceux qui, depuis trente ans, n’ont cessé de voir leurs revenus s’accroître ? Comment attendre une relance de la consommation en donnant toujours plus à ceux qui ont déjà largement assez ?

Vous annoncez que la flat tax va coûter environ 1,5 milliard d’euros, mais sans faire de perdants. Sur ce point, l’OFCE note que, si on ne veut pas faire de perdants, la mesure coûtera en réalité 4 milliards d’euros. Pouvez-vous donc nous préciser où sont les perdants éventuels de cette mesure avantageant surtout les gros épargnants et, dans l’hypothèse où il n’y aurait pas de perdants, si la mesure ne va pas coûter plus cher que prévu ?

En matière de pouvoir d’achat, je m’interroge sur des mesures qui vont avoir pour effet de pénaliser ceux que vous appelez « les retraités les plus aisés » – c’est-à-dire, en fait, ceux percevant plus de 1 200 à 1 350 euros par mois, soit à peine plus que le SMIC, ce qui montre à quel point votre appellation est surréaliste ! La même question se pose pour les fonctionnaires et tous ceux qui vont voir leur aide personnalisée au logement diminuer.

Le Premier ministre nous a parlé hier d’un plan d’investissement de 56,3 milliards d’euros, censé faire passer la pilule d’un budget d’austérité. Or, cette somme comprend 12 milliards d’euros de crédits redéployés, 11 milliards d’euros de mises à disposition par instruments financiers et 10 milliards d’euros provenant d’un plan d’investissement mis en place par le précédent gouvernement : on arrive donc en réalité à seulement 24 milliards d’euros d’argent frais, soit deux fois moins que ce qui avait été annoncé par le Président de la République lors de sa campagne. En outre, il s’agit de crédits dont nous ne savons pas comment ils seront réalisés – comme chacun le sait, les crédits annoncés ne sont pas toujours réalisés, et je pense que le Parlement devra exercer un contrôle vigilant sur ces crédits au cours du quinquennat.

Enfin, quand vous annoncez 16 milliards d’euros de baisses des dépenses, nous ne voyons pas l’intérêt dans la situation actuelle de baisser aussi drastiquement les crédits consacrés au logement – de 1,4 à 1,8 milliard d’euros –, à l’emploi, aux transports et à la santé. Le Premier ministre nous a assuré, hier, qu’on ne toucherait pas aux collectivités territoriales. En réalité, on voit bien que pour les 319 plus importantes, c’est bien un effort de 13 milliards d’euros, venant s’ajouter à ceux déjà accomplis au cours des années précédentes, qui va leur être réclamé, et qui n’est rien d’autre qu’une baisse des dotations des collectivités les plus importantes. Cela est d’autant plus préoccupant que vous avez expliqué, vendredi dernier, que les 319 collectivités territoriales avec lesquelles l’État va contractualiser – régions, départements, intercommunalités de plus de 150 000 habitants et communes de plus de 50 000 habitants – se verraient appliquer des mesures très contraignantes et très restrictives si elles ne respectaient pas la règle d’or en matière de déficit, ce qui constitue une forme de menace à leur encontre.

M. Fabien Roussel. Votre projet de budget, c’est « Au bonheur des riches » ! C’est un budget pour les riches, dicté par les riches, quand les Français sont appelés à se serrer la ceinture. Les entreprises et les plus fortunés vont bénéficier, au minimum, selon les chiffres que vous avancez, de plus de 9 milliards d’euros de cadeaux fiscaux : suppression de l’ISF pour les 340 000 familles les plus riches, baisse des taxes sur le capital et sur les dividendes, baisse de l’impôt sur les sociétés, suppression de la taxe sur la quatrième tranche des salaires. N’en jetez plus, ils vous disent merci !

Votre budget est soumis à l’Europe de Bruxelles et aux dispositions du traité de Maastricht depuis vingt-cinq ans. Ce sont 9 milliards d’euros de cadeaux aux plus riches, mais également 16 milliards d’euros d’économies imposées aux Français, qu’ils soient salariés, jeunes, retraités ou collectivités. Vous faites ces économies sur le dos des missions de l’État : l’emploi, le logement, les transports. Quoi que vous puissiez dire, votre politique va se traduire par la baisse des aides au logement et par la suppression de près de 200 000 contrats aidés. C’est le plus grand plan social jamais réalisé dans notre pays et vous en êtes responsables ! Au lieu de supprimer ces emplois, transformez-les en contrats à durée indéterminée (CDI) ! Sortez-les de la précarité !

Ces économies signifient par ailleurs la suppression de 120 000 postes de fonctionnaires sur cinq ans et le gel de leur salaire. Avec tout cela, la courbe du chômage ne risque pas de se redresser...

Les économies sont réalisées sur le dos de nos aînés, qui, pour plusieurs millions d’entre eux, supporteront une hausse brutale de la CSG. Cela représente 375 euros en moins par ménage.

Les économies réalisées sur notre système de santé et nos hôpitaux publics sont tout aussi dangereuses.

Enfin, vous baissez les budgets de nos collectivités. La suppression de la taxe d’habitation représente une mise sous tutelle de nos communes et leur mort programmée.

Monsieur le ministre, si vous cherchez des moyens, de l’argent, vous le savez, nous avons des propositions et nous en ferons au cours de ce débat budgétaire. Si votre budget, ce sont « les riches d’abord », pour nous, c’est « l’humain d’abord ». Pourquoi n’avez-vous pas fait le choix d’investir fortement dans la lutte contre l’évasion fiscale, qui coûte 60 à 80 milliards d’euros au budget de la Nation ? Il est temps de faire sauter le verrou de Bercy et de condamner avec la plus grande fermeté ceux qui trichent et qui volent quand les Français, eux, doivent se serrer la ceinture. Au lieu de supprimer des emplois dans les services des impôts ou des douanes comme vous le prévoyez, embauchez ! Cela rapporte sept fois plus que cela ne coûte.

Nous vous proposerons bien sûr de maintenir et d’augmenter l’ISF ainsi que le nombre de tranches d’impôt sur le revenu. Pourquoi ne pas avoir conditionné le versement des aides publiques aux entreprises – telles que le CICE et le crédit d’impôt recherche (CIR) – à des créations d’emplois ou à des investissements en France ? La situation d’Alstom ou de STX s’apparente à une grande braderie. Ce sont nos bijoux de famille qui passent sous pavillon étranger ! Pour conclure, nous vous proposerons de taxer plus fortement les revenus financiers, ceux du capital, pour inciter les actionnaires à investir et à produire en France plutôt qu’à spéculer.

M. le ministre de l’économie et des finances. Madame de Montchalin, vous m’interrogez sur les obstacles que nous rencontrons. Nous venons de les entendre... C’est le conservatisme idéologique, l’incapacité à imaginer quelque chose de neuf pour notre pays, ce sont toujours ces mêmes mots, ces mêmes idées, et, dans le fond, toujours les mêmes propositions : dépenser l’argent que l’on n’a pas pour finir par appauvrir le pays. Voilà ce qui empêche la France de réussir depuis des années ! C’est tellement facile d’avoir la main sur le cœur et rien dans le portefeuille. Cela s’appelle le socialisme. Ce n’est pas ce que nous voulons pour notre pays. Nous proposons autre chose.

Pour répondre à M. Coquerel : effectivement, assumons nos divergences. Je vous laisse bien volontiers soutenir Éric Woerth. Je préfère que nous soyons en opposition démocratique. Nous pensons que l’on n’a jamais essayé de favoriser l’investissement, l’innovation, la création d’entreprise et de richesse dans notre pays. Il vaut mieux créer des richesses avant de redistribuer. Vous avez cité Helmut Schmidt. J’affirme que son théorème a fonctionné. L’Allemagne a créé des emplois. Les choix faits par ce pays il y a quelques années – même si ce n’est pas notre modèle – lui ont permis de devenir la première puissance économique en Europe, alors que la France a été reléguée.

Nous ne poursuivrons pas dans la voie de l’appauvrissement de notre pays et de sa relégation à cause de vieilles lunes qui ne marchent pas. Nous ne poursuivrons pas dans la voie de l’alourdissement des déficits et nous ne laisserons pas à nos enfants une dette qui, demain, quand les taux d’intérêt auront remonté, sera insupportable. L’argent que vous réclamez pour les plus modestes, les écoles, les universités, la santé, les hôpitaux, les infirmières partira en fumée lorsque l’augmentation des taux d’intérêt rendra impossible le remboursement de la dette.

Je vous le dis avec beaucoup de conviction, monsieur Coquerel, car vous n’avez pas le monopole du cœur dans cette commission ! Vous n’avez pas le monopole de l’humain ! Il n’y a pas d’un côté d’affreux technocrates qui, sans âme et sans cœur, essaient de gérer correctement le budget de la France, et, de l’autre, des Insoumis qui seraient les seuls à avoir une sensibilité et une attention aux plus faibles. Je conteste formellement votre analyse.

STX, Alstom : là encore, la ligne de partage est bien là, entre ceux qui pensent que notre industrie pourra s’en sortir seule face à la Chine ou aux États-Unis, et ceux qui croient qu’il vaut mieux regrouper les forces européennes pour constituer, comme nous avons su le faire avec Airbus, des géants industriels dotés des meilleures capacités des grandes nations européennes, en préservant l’emploi et les sites industriels.

Je suis heureux de voir que le maire de Belfort, M. Damien Meslot, a salué ce matin l’accord entre Alstom et Siemens. Il est davantage concerné que vous par Alstom, l’emploi et le site industriel ! C’est peut-être la preuve que cet accord est un bon accord pour l’industrie française, l’industrie européenne et l’emploi.

Madame Louwagie, vous avez raison, le Haut Conseil des finances publiques a salué la sincérité du budget, et pas uniquement la sincérité des prévisions du Gouvernement. Il a indiqué que la croissance potentielle était plus forte que l’hypothèse retenue. Il note également que l’écart de production, élément décisif de la construction du budget, est plus réaliste, à 1,5 point de PIB au lieu de 3,1. Les recettes lui semblent estimées de manière moins optimiste, avec une élasticité de 1, contre 1,3 en 2017. Il estime aussi que la budgétisation de certains postes habituellement litigieux – je pense en particulier au sujet, naturellement très sensible, des contrats aidés – est sincère et correcte.

J’insiste sur ces points : on peut contester les choix politiques d’un budget, avec toute la vivacité nécessaire. C’est ce qui fait la richesse du débat. Mais, si on le fait sur la base de prévisions honnêtes, cela facilite grandement le débat.

Monsieur Laqhila, j’ai bon espoir que nous sortions l’an prochain de la procédure pour déficit excessif et que nous mettions fin à une décennie durant laquelle la France a été incapable de remplir ses engagements européens. Ce moment sera une libération pour notre pays, tant vis-à-vis de ses partenaires européens et des investisseurs que vis-à-vis des générations futures. Nous n’avons pas à mettre sur le dos de ces dernières nos erreurs passées ou présentes.

Pour répondre à votre question concernant l’IFI, je rappelle que rien ne change : le niveau des taux, la base, l’abattement pour la résidence principale seront maintenus à leur niveau actuel.

Monsieur de Courson, j’ai déjà répondu concernant le déficit structurel. Nous estimons que les réformes structurelles engagées aboutiront à un déficit structurel effectivement légèrement inférieur à ce que la Commission européenne aurait pu nous demander à la base. J’ai engagé des discussions avec cette dernière, afin d’expliquer nos hypothèses et notre choix prudent, de 0,1 plutôt que de 0,2. Nous verrons quelles seront les conclusions de la Commission, mais il me semble que nous avons réussi à les convaincre. Au minimum, nous devions atteindre l’écart entre 0,6 et 0,5, soit 0,1, ce qui correspond exactement à ce que nous faisons. Nous verrons ensuite en 2019. Aurions-nous pu faire plus ? Peut-être. J’estime que notre choix est raisonnable au regard des réformes de structure engagées depuis plusieurs mois.

Le PFU sur les contrats d’assurance vie s’appliquera pour tous les versements postérieurs à aujourd’hui, 27 septembre 2017, date du Conseil des ministres. En cas de rachat effectué à compter de 2018, le PFU s’appliquera aux produits, à hauteur de la fraction d’encours supérieure à 150 000 euros. Je rappelle qu’il s’agit de la limite fixée par Emmanuel Macron lorsqu’il était candidat à la Présidence de la République. L’engagement est donc rigoureusement respecté.

Madame Rabault, vous m’interrogez sur l’impact de nos décisions. Je ne fais pas du Modèle économétrique de simulation et d’analyse générale de l’économie, dit « MESANGE », l’alpha et l’oméga de l’évaluation des politiques publiques, mais je suis prêt à ce que nous mettions en place les moyens d’une analyse et d’une évaluation objectives des choix fiscaux de rupture que nous avons effectués – PFU, baisse de l’impôt sur les sociétés, suppression de la part mobilière de l’ISF –, et de leurs résultats en termes de croissance et d’emploi. Les Français ont besoin de transparence. Ils ont besoin de savoir quelle est l’efficacité de ces politiques, d’autant plus que nous faisons un choix politique majeur.

Je vous confirme le maintien du taux d’impôt sur les sociétés de 15 % pour les PME, sur la fraction de leurs bénéfices n’excédant pas 38 120 euros nets. Ce maintien est fondamental pour les PME et les TPE. En revanche, le régime ne sera pas étendu.

Je pense avoir répondu suffisamment clairement à M. Coquerel.

M. Éric Coquerel. Vous n’avez répondu à aucune de mes questions !

M. le ministre de l’économie et des finances. Je voudrais simplement apporter un éclairage plus concret sur certains points. Nous allons augmenter l’AAH de 100 euros par mois, en deux temps. Nous allons baisser massivement la taxe d’habitation pour les plus modestes. La prime d’activité augmentera de 80 euros par mois d’ici la fin du quinquennat. Le minimum vieillesse va aussi augmenter. Dans le grand plan d’investissement que vous évoquez, 15 milliards d’euros sont consacrés à la formation de tous ces jeunes qui n’ont ni emploi, ni qualification, et qui n’arrivent pas à trouver leur place dans la société française. J’estime que ces mesures, inscrites dans le budget et dans le projet de loi de programmation des finances publiques, sont justes et qu’elles répondent aux attentes des plus faibles.

Je conteste totalement l’idée qui pointe dans l’éditorial récent d’un grand journal du soir. Cela ne correspond pas à la réalité de ce que nous faisons. Les derniers déciles de revenus de la population française verront leur situation s’améliorer grâce à nos décisions. Par ailleurs, je pense que la politique de relance de l’activité, de développement de la croissance, de soutien aux entrepreneurs et de libération des énergies économiques de ce pays sera la réponse au chômage de masse en France.

M. le ministre de l’action et des comptes publics. Madame Louwagie, vous nous avez interpellés en indiquant que seul le taux de croissance était sincère. Je vous renvoie à la première page de l’avis du Haut Conseil des finances publiques : il note qu’« un effort visant à une budgétisation plus réaliste a été effectué sur le budget de l’État ». Cela va donc plus loin. Je le prends comme un encouragement à la sincérité, mais également un encouragement aux rapporteurs, afin qu’ils vérifient un certain nombre de points...

Monsieur de Courson, vous évoquez les apurements communautaires : tous, en tout cas tous ceux que nous connaissons et qui représentent potentiellement 300 millions d’euros de dérives par rapport à l’an passé, ont été budgétisés, même si des risques ou des événements exceptionnels peuvent toujours consommer de nouveaux crédits. Tout ce qui était dans les cartons du ministère de l’agriculture est intégré au budget présenté aujourd’hui, y compris les contentieux. Nous aurons l’occasion d’y revenir lors du débat sur le budget de l’agriculture, qui a connu une grande dérive au cours de ces dernières années, de l’ordre – de mémoire – de 7 milliards d’euros. Ce point a été soulevé par la Cour des comptes dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, qui faisait le bilan du dernier quinquennat.

En revanche, je suis moins d’accord avec Mme Louwagie. On peut réfléchir sur le déficit de l’État. Nous avons exposé pourquoi ce déficit était malheureusement en progression : nous « sincérisons » ce budget – on ne peut nous accuser et nous féliciter dans une même phrase pour notre vertu ! – tout en proposant des baisses d’impôt. Je comprends que, pour certains d’entre vous, ces baisses ne sont encore pas suffisantes.

Je vous rappelle que seul le déficit toutes administrations publiques confondues compte. Nous en reparlerons à l’occasion du PLFSS. Il y avait peut-être, par le passé, des relations particulières entre la Sécurité sociale et l’État. Désormais, il faut que chacun paie ce qu’il doit payer. Ainsi, nous serons sincères et pourrons discuter et contrôler les budgets. Il est surtout important que la trajectoire du déficit soit rigoureusement tenue.

Beaucoup nous ont reprochés d’avoir pris des mesures de régulation cet été. Or, désormais, tout le monde trouve formidable que l’on soit potentiellement à 2,9 % de déficit en janvier ou février 2018. Il a fallu passer un été tumultueux pour passer un automne plus sympathique !

Si je comprends bien, si le professeur de Courson était amené à noter notre copie, il indiquerait « bien, mais peut mieux faire ». Je prends cela comme un encouragement. J’invite l’homme d’expérience qu’est M. de Courson à ne pas confondre le taux d’évolution des dépenses publiques et la part des dépenses publiques dans le PIB. Nous l’avons dit dès la construction de ce budget, nous souhaitons comparer la part des dépenses publiques dans le PIB. Pour la première fois depuis plus de quinze ans, elle baisse de 0,7 point, soit 16 milliards d’euros, mais tout dépendra de la richesse produite l’année prochaine. Cette comparaison me paraît plus sérieuse, plus efficace, et sans doute plus indiscutable que les tendanciels sur lesquels nous passerions beaucoup de temps à discuter. Il ne manque pas 10 milliards d’euros. Il manque éventuellement 4 milliards d’euros par rapport aux 20 milliards d’euros que vous imaginez. Avec un taux croissance de 1,7 %, voire un peu plus l’année prochaine, ce sera évidemment une dépense publique rapportée au PIB moins importante. Nous baissons la dépense publique et nous le faisons pas par rapport à une tendance dont l’évolution peut être discutée par tous.

J’entends les mots du président Woerth et ceux de Mme Louwagie et de M. de Courson : nous n’en ferions pas assez ? Attention à ne pas mourir en bonne santé non plus ! Il s’agit de la plus importante économie de dépenses publiques réalisée depuis une quinzaine d’années. Nous stabilisons la dette – ce n’était pas arrivé depuis 2006. Nous réalisons des réformes structurelles dans les secteurs du travail et du logement – qui ne seraient finalement qu’anecdotiques ? Je constate une différence entre ce que l’on entend ici et dans l’hémicycle. Je comprends que, désormais, une partie de l’opposition souhaite que nous rétablissions la baisse des dotations. J’attends avec intérêt l’amendement parlementaire ! Il est dommage que vous n’ayez pas énoncé cette idée avant les élections sénatoriales, cela aurait été plus clair pour les grands électeurs... Je ne voudrais pas causer de discorde. Je trouve simplement dommage que les débats en commission des finances se déroulent après les élections sénatoriales...

Pour notre part, nous avons toujours porté le même discours politique, qui consiste à croire dans les territoires. Je sais que vous y croyez également tous puisque vous êtes issus de ces territoires. Maintenant, si chacun est déresponsabilisé et augmente la dépense publique, alors, viendra le moment où, devant la commission des finances – je regarde le rapporteur spécial –, nous poserons la question des dotations aux collectivités. Mais prenons le pari de l’intelligence et considérons que chacun peut maîtriser la dépense publique. Tous les élus locaux espèrent la diminuer. Nous voulons encourager l’investissement local. C’est pourquoi nous proposons des mécanismes de « bonus » et de « malus », comme je les appelle. Les bonus en investissement seront versés à ceux qui réussiront à contractualiser.

Madame Rabault, je tiens à vous rassurer. J’espère que nous ne rejouerons pas Pierre et le Loup, à force d’annoncer un certain nombre de mauvaises nouvelles. Je suis prêt à débattre de notre « Livret du pouvoir d’achat » et suis heureux que notre discussion politique se focalise sur ce document que nous vous avons fourni. Cela signifie que la bataille est déjà en partie gagnée.

Il n’y a pas de taxe d’aménagement du territoire qui serait un impôt déguisé ou qui n’aurait pas été présentée comme telle. Nous allons simplement baisser la taxe sur les recettes des trains à grande vitesse (TGV) par décret. Nous allons financer les trains d’équilibre du territoire (TET) sur les fonds de l’Agence de financement des infrastructures de transport en France (AFITF), via une taxe sur les sociétés d’autoroutes. Les usagers ne sont donc pas concernés ! Je ne vois pas en quoi M. Michu, qui touche le SMIC, est concerné par la taxe TGV, mais nous aurons l’occasion d’en reparler.

Nous aurons également l’occasion d’en débattre, mais je vous indique que l’État compensera intégralement l’augmentation de la CSG pour la fonction publique territoriale, comme c’est le cas pour la fonction publique hospitalière. C’en est fini des transferts de charges. Nous voulons entretenir un rapport de confiance avec les collectivités locales. Le montant de la compensation est de 3 milliards d’euros, toutes fonctions publiques confondues.

Monsieur Coquerel, la taxe d’habitation est injuste. Une personne touchant le même revenu paie davantage si elle habite un logement social dans ma commune, Tourcoing, que ce qu’elle paierait à Neuilly-sur-Seine, pour prendre deux exemples extrêmes. Vous ne pouvez pas trouver cela juste, ce serait assez incohérent avec votre discours politique... Je crois qu’il est temps de redonner du pouvoir d’achat à nos concitoyens – la suppression sera réalisée par dégrèvement, les collectivités locales sont ainsi rassurées – et de réfléchir ensemble – si le président de la commission des finances souhaite se saisir de ce sujet tout à fait passionnant – au renouveau de la fiscalité locale. Posons-nous la question suivante : la taxe d’habitation et la taxe foncière permettent-elles aujourd’hui aux collectivités de disposer de bonnes ressources ? Le Président de la République a fait un certain nombre de propositions sur ce sujet.

Monsieur Roussel, je vous remercie. Même si nous ne sommes pas d’accord et même si, dans votre circonscription, que je connais bien, il n’y a pas de collectivité concernée par le contrat, vous avez fait des propositions. Ce ne sont pas les nôtres, elles sont parfois irréalistes, mais je constate que, parmi les membres de l’opposition, M. Roussel est le seul à avoir indiqué où il comptait trouver de l’argent. J’attends donc le prochain budget et la discussion parlementaire pour connaître les nombreuses propositions d’économies qu’il ne manquera pas de nous faire.

Mme Stella Dupont. Messieurs les ministres, je vous remercie pour cette présentation. Je regrette l’esprit politicien qui anime certains de nos collègues au sein de cette commission. La France ne va pas bien – dette, déficit, chômage massif – même si les signes de la reprise sont là. Les responsabilités de cette situation dégradée sont plurielles. Nous savons tous ici que, sans rigueur et sans transformation profonde, tout risque de nous sauter à la figure au premier frémissement à la hausse des taux d’intérêt. L’exercice entrepris par notre majorité, afin de trouver le juste équilibre entre effort et justice, tout en sortant enfin de la zone rouge d’un déficit dépassant les 3 % du PIB, est exigeant. Vos appels respectifs à laver « plus blanc que blanc » au regard des critères européens, parallèles à vos critiques concernant nos décisions de baisse de dépenses, alors que vous n’en proposez pas d’autres, laissent perplexe... Je vous invite tous à la cohérence et à l’humilité.

Ma question concerne les mesures envisagées pour redonner du pouvoir d’achat aux citoyens les plus fragiles, notamment par la revalorisation de l’AAH et de la prime d’activité. Vous nous avez rappelé brièvement le calendrier, je vous en remercie. Pourriez-vous nous indiquer où en sont les discussions sur la mise en place du versement social unique, sujet important ?

M. Marc Le Fur. Je me réjouis que vous transformiez le CICE en baisse de charges. C’est une bonne chose. Nous pouvons parfaitement comprendre que cela ne se fasse pas en 2018, mais en 2019. Je me réjouis également que vous ayez insisté sur le fait que cette baisse de charges devra surtout bénéficier aux salaires les plus modestes. C’est effectivement pour ces salaires que la décision d’embauche est conditionnée au coût de l’emploi.

J’entends bien vos arguments sur les déficits et leur caractère structurel ou non structurel. Mais, tout de même, l’an prochain, le déficit sera bel et bien de 82,9 milliards d’euros ! C’est 13,6 milliards de plus que le solde indiqué dans le projet de loi de finances pour 2017, soit une augmentation du déficit de l’ordre de 20 %. Objectivement, le déficit augmente donc sensiblement...

Je suis très inquiet de votre attitude à l’égard du logement et du vocabulaire que vous utilisez. Le Président de la République a ainsi parlé de « rente », terme perçu comme négatif. Monsieur le ministre, vous évoquez un « investissement de jouissance ». Je ne suis pas d’accord. Ce sont tout simplement des investissements, qui génèrent de l’activité et de l’emploi. Ils présentent par ailleurs un autre intérêt majeur : ils ne sont pas créateurs de déficit car ils font appel à de la main d’œuvre et des matériaux français. Nous prenons un grand risque en pénalisant ainsi le logement, en particulier si, comme vous l’avez prévu, le prêt à taux zéro disparaît sur 95 % du territoire.

Enfin, je tiens à insister sur l’augmentation du prix du gazole : c’est une baisse de pouvoir d’achat de 3,7 milliards d’euros pour nos compatriotes. Monsieur le ministre, vous indiquez que cela ne concerne que 50 % des véhicules. Mais vous raisonnez sur le flux ! En termes de stock, 75 % des véhicules sont concernés. Or les conducteurs qui utilisent le plus leur véhicule, ceux, donc, qui consomment le plus car leur domicile est loin de leur travail, sont massivement au gazole... Je vous invite à la plus grande prudence sur ce sujet.

M. Jean-Noël Barrot. Avec mes collègues de la majorité, je veux me féliciter d’un budget qui tient à réconcilier justice et efficacité et qui s’attaque en particulier, enfin, à des politiques dont on savait depuis longtemps qu’elles étaient inefficaces, comme la politique du logement. Sur le marché du travail, sur le marché des capitaux, vous voulez susciter, messieurs les ministres, un choc de confiance et vous faites le pari que les politiques portées par le Gouvernement produiront des effets sur la durée du quinquennat, pour sortir la France de l’ornière et faire reculer le chômage.

Ce pari, les Françaises et les Français sont prêts à le faire avec vous, avec nous. Ils le feront d’autant plus volontiers que nous aurons l’humilité d’évaluer nos réformes et d’en tirer les conséquences. Les mesures d’attractivité de la place financière de Paris produiront-elles leurs effets ? L’allégement de la fiscalité de l’épargne conduira-t-elle à une réorientation de l’épargne des Français vers les entreprises françaises ?

Bien sûr, l’Assemblée nationale et cette commission joueront leur rôle d’évaluation et de contrôle. Mais comment le Gouvernement fera-t-il le bilan de la politique de transformation dont vous nous présentez la traduction budgétaire aujourd’hui ?

M. Olivier Gaillard. Ma question concerne les allocations de solidarité que sont le revenu de solidarité active (RSA), la prestation de compensation du handicap (PCH) et l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). Le financement de ces allocations n’est pas compensé par l’État depuis de nombreuses années. De ce fait, elles pèsent sur les finances locales et contribuent au déséquilibre financier de nombreux départements, surtout ceux qui cumulent forts besoins sociaux et pression démographique, alors même que les dotations ont longtemps été en baisse. Il faut donc saluer cette année la stabilité des dotations. Où en est, cependant, la réflexion sur la mise en place d’un fonds national de péréquation horizontale ? Qu’en est-il du fond d’urgence pour les départements en 2018 ?

M. Philippe Vigier. Je tiens à souligner la sincérité de ce budget, comme cela a été fait à plusieurs reprises. C’est nouveau : nous étions habitués à avoir des budgets sincères dans les collectivités tandis que l’État prenait beaucoup de libertés. J’ai néanmoins plusieurs questions à poser.

S’agissant de l’IFI, confirmez-vous que l’immobilier d’entreprise en sera exclu ? Il faut être tout à fait clair.

Comment la compensation de la CSG sera-t-elle assurée pour les fonctionnaires territoriaux ? Les communes devront-elles apporter des indemnités complémentaires, et que se passera-t-il pour les agriculteurs ?

J’ai bien entendu M. Darmanin nous expliquer que les dépenses des collectivités seraient réduites de 3 milliards l’an prochain, mais il aurait fallu mettre en place le bonus-malus dès cette année. L’année 2018 sera neutralisée, et je ne vois pas comment vous arriverez à ces 3 milliards d’économies.

Monsieur Le Maire, le commissaire aux participations de l’État nous a expliqué que les 10 milliards d’euros pour l’innovation s’élevaient en fait à 500 millions. Il y a un fossé entre ces deux chiffres : quelle sera la somme investie pour transformer l’économie française ?

Enfin, M. Darmanin nous suggérait de faire des propositions pour réduire les dépenses, j’en ai une à lui faire. Ce budget prévoit 1 276 équivalents temps plein (ETP) de moins dans la fonction publique. Comme vous avez prévu 100 000 à 120 000 ETP en moins sur le quinquennat, il fallait diminuer dès cette année. Une réforme des fonctions publiques est-elle prévue de manière à avoir moins de fonctionnaires, mieux payés, et moins de dépenses publiques ?

M. le ministre de l’économie et des finances. Monsieur Le Fur, la question du gazole est dans notre ligne de mire. Sans répéter les éléments de soutien que nous avons apportés, je rappelle juste que nous avons mis en place une prime pour un changement de véhicule. Nous avons parfaitement conscience que la proportion de 50 % de véhicules diesel ne concerne que les véhicules neufs : c’est pourquoi cette prime va permettre aux Français de changer plus facilement leurs véhicules anciens, qui sont en général ceux qui rejettent le plus de particules dans l’atmosphère.

Je souhaite répondre précisément à la question sur l’IFI et l’immobilier d’entreprise. L’assiette sera composée du patrimoine immobilier net détenu directement ou indirectement, gardé en jouissance ou loué à des tiers. En revanche, les biens immobiliers qu’un redevable affecte à son activité économique, ou qu’une entreprise affecte à son activité économique, sont hors de l’assiette. Enfin, ceux qui ont souscrit à des foncières immobilières et qui souhaiteraient s’exonérer de l’IFI par ce biais ne pourront pas le faire, car cela n’entre pas dans le cadre d’une utilisation professionnelle ni de la création de richesse. Ce dispositif nous paraît juste et efficace.

S’agissant du fonds pour l’innovation de rupture, il sera doté de 10 milliards d’euros, issus de cessions d’actifs de l’État, et c’est le rendement de ce fonds, de l’ordre de 200 à 300 millions d’euros, qui financera de manière régulière l’innovation de rupture. Le double intérêt est que ce fonds permettra de financer l’innovation que les entreprises ne peuvent pas financer, et qu’il s’agira d’une ressource pérenne, ce qui est essentiel pour l’innovation de rupture.

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Le projet de loi de finances est l’un des instruments qui va nous permettre d’améliorer l’attractivité financière de la place parisienne. Ce n’est pas le seul. Des éléments importants au regard des enjeux liés à l’attractivité financière de la place de Paris ont été apportés dans le cadre des ordonnances réformant le marché du travail. Dans le document que nous vous présentons se trouvent des éléments sur lesquels Bruno Le Maire et moi avions été interrogés avant la pause estivale par les banques, les fonds, les acteurs et les opérateurs de marché, sur le cadencement, l’ampleur de la baisse de la pression fiscale et l’ampleur des réformes.

La baisse graduelle de l’impôt sur les sociétés à 25 %, la mise en place de la flat tax de 30 %, la modification de l’ISF et sa transformation en IFI, ou encore les modifications qui réduisent le coût du travail telles que le basculement du CICE sur des allégements de charges pérennes ou la suppression de la quatrième tranche de la taxe sur les salaires, qui passe de 20 % à 13,5 %, constituent un ensemble d’éléments sur lesquels nous étions attendus par la communauté financière dans la stratégie de relocalisation.

Cette stratégie de relocalisation n’intervient pas uniquement parce que le Brexit se profile en mars 2019. Le projet qui a été construit par le candidat Macron et que le Gouvernement met en œuvre ne repose pas sur un facteur exogène – la sortie de l’Union d’un de ses membres principaux –, mais sur une transformation bien plus importante. Avec le travail, qui a fait l’objet de longs débats, le capital, qui fait l’objet de ce texte, et demain la question de la formation professionnelle, nous aurons finalement modifié les trois facteurs de la croissance économique. Si nous arrivons à avancer suffisamment rapidement sur ces trois fronts, c’est l’alchimie de ces trois facteurs qui permettra d’assurer une meilleure attractivité de la place de Paris.

Quelques annonces ont déjà eu lieu : HSBC a annoncé la relocalisation d’environ un millier d’emplois, l’assureur américain Chubb a annoncé qu’il installait son siège européen à Paris, et je suis certain que nous verrons des relocalisations dans les semaines et les mois à venir, parce que nous aurons fait ces réformes, et aussi, je tiens à le souligner, parce que l’ensemble des acteurs de la place reconnaît la qualité du système de régulation français.

M. le ministre de l’action et des comptes publics. Sur la question de l’allocation unique, nous sommes au début d’un énorme chantier. Nous allons déjà essayer de « contemporanéiser » les allocations, c’est le cas pour le logement en 2019 suite à l’annonce de Julien Denormandie, secrétaire d’État auprès du ministre de la cohésion des territoires. Actuellement, les allocations logement sont données de manière différée. Nous parlerons de ce chantier de l’allocation unique dans le cadre du PLFSS, mais nous sommes au début d’un travail administratif et numérique très important pour y arriver.

Sur la CSG, monsieur Vigier, j’ai effectivement dit que l’État allait la compenser pour la fonction publique territoriale, pour tous les employeurs. Nous allons ouvrir un certain nombre de négociations avec les syndicats de la fonction publique. Parmi les idées avancées, il y a celle de supprimer certaines cotisations salariales, comme le 0,9 % auquel sont assujettis les fonctionnaires des catégories A et B et le 0,75 % dû par les contractuels, ainsi que les cotisations employeur, avec une règle permettant aux collectivités de verser la compensation en sachant que l’État la remboursera. Nous en reparlerons lors du débat budgétaire.

S’agissant des collectivités locales, je suis intéressé par la discussion autour de la mise en place dès cette année du bonus-malus. Nous n’avons pas fait ce choix, mais le Parlement est souverain. Nous considérons que si nous devions appliquer le malus dans l’année, il faudrait constater les comptes et avoir une discussion extrêmement fine ; or l’administration française a un peu de mal à savoir au mois de septembre ou d’octobre si les élus ont fait évoluer la dépense publique. Cela dépend des projets et de beaucoup d’autres facteurs. Par ailleurs, si l’on met en place le malus, cela se fait soit en retenant une partie de la DGF, soit en ne compensant pas fiscalement ce à quoi les collectivités ont droit au nom des exonérations, deux sujets de grand énervement pour les élus.

Nous avons plutôt fait le pari de l’intelligence, mais si le Rapporteur général, un rapporteur spécial ou vous-même présentiez des amendements pour mettre en place ce malus dès cette année, ce serait de votre responsabilité, et le Gouvernement s’en remettrait à la sagesse du Parlement pour saluer ce courage politique qui vous honore, mais qui n’a pas été retenu avant les élections sénatoriales...

Nous souhaitons ouvrir ce débat sur le bonus en investissement et le malus en dotation en 2019. Nous faisons donc effectivement un pari avec les collectivités territoriales. Il est difficile de dire qu’il ne faut pas baisser les dotations et faire confiance aux élus et de nous reprocher de le faire.

Enfin, pour les agriculteurs, nous en parlerons lors du PLFSS, mais l’idée est qu’ils reviennent dans un régime d’indépendants. Des exonérations non pérennes étaient prévues ; nous y reviendrons et je m’engage à apporter toutes les précisions avec le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.

M. Philippe Chassaing. Je souhaite intervenir au sujet de l’innovation technologique. Je pense à titre personnel que la politique économique ne se résume pas à la question des emplois aidés.

Nous savons que les innovations technologiques auront des conséquences positives sur la croissance et l’emploi, ma question porte sur la politique économique à mettre en œuvre. D’une part, comment les PME vont pleinement profiter de ces grappes d’innovations ? Et comment favoriser des gains de productivité issus de ces évolutions technologiques ?

Mme Émilie Bonnivard. Pouvez-vous nous faire connaître votre estimation des dépenses fiscales pour 2018 ? Comment ont-elles été prises en compte dans les arbitrages sur les moyens budgétaires affectés à chaque ministère ?

S’agissant du plan d’investissement de 57 milliards d’euros, quelle proportion concerne le budget 2018 ? Quelle sera la part des cessions d’actifs de l’État ? Paradoxalement, si ce plan d’investissement concerne la transition écologique et énergétique, rien n’est prévu pour les infrastructures de transport, notamment le fret, alors que le chantier du Lyon-Turin est en cours et que chacun sait que l’AFITF n’est pas en état de couvrir les engagements sur le transport ferroviaire. Quel sera l’effort budgétaire de l’État sur cette infrastructure en 2018 ?

Enfin, après le transfert des compétences économiques aux régions dans la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (« NOTRe »), l’engagement avait été pris de créer un fonds de compensation des transferts de charges économiques des départements aux régions s’élevant à 450 millions d’euros en 2018. Ces 450 millions d’euros sont-ils bien budgétés dans le PLF ? Sans cela, ce serait une perte nette pour le financement de nos entreprises et l’accompagnement de notre économie sur les territoires.

M. Jean-Louis Bricout. Après l’audition du président du Haut Conseil des finances publiques, il faut reconnaître qu’il ne semble pas y avoir d’insincérité dans votre budget. Le problème n’est pas là : votre budget n’est pas insincère, il est plutôt inhumain. C’est le budget des riches, ou plutôt des très riches. Un budget pour les gens et les territoires qui vont très bien. D’ailleurs, les déclinaisons de certains dispositifs sont bien différentes selon les territoires. Il suffit de prendre l’exemple de la baisse brutale des emplois aidés pour s’en convaincre. Les territoires oubliés, en difficulté, sont particulièrement affectés, ainsi que les personnes les plus éloignées de l’emploi – j’en ai reçu quelques-unes et c’était assez prégnant. Les collectivités pauvres verront leur masse salariale exploser et leurs projets d’investissement repoussés ; elles dépendent de l’économie de proximité. Vous parlez de favoriser l’investissement : je pense que ce ne sera pas le cas.

Là où il y a des inégalités – je pense aux territoires ruraux et de banlieue structurellement fragiles –, vos politiques viennent les renforcer. La situation du logement est critique, l’insalubrité provoque d’importants dégâts que les maires doivent gérer, les marchands de sommeil prospèrent face à des locataires souvent démunis. Pour autant, vous diminuez les APL, et le Gouvernement auquel vous appartenez propose de renforcer la ghettoïsation sociale par des choix de construction qui sont loin d’être toujours cohérents.

Quelles mesures pour nos retraités les plus pauvres qui bénéficient déjà du dégrèvement de taxe d’habitation dans certaines collectivités ? Avec votre mesure sur la taxe d’habitation, vous faites perdre tout dynamisme fiscal aux collectivités. Par ailleurs, il y aura aussi de grosses inégalités entre collectivités, certaines garderont un pouvoir de taux très important car il y aura peu d’exonérés, comme à Neuilly, quand d’autres dépendront à 100 % des dotations d’État, car plus personne ne paiera la taxe d’habitation. Est-ce là votre conception de la justice sociale, fiscale et territoriale ? Incontestablement, nous n’avons pas la même.

M. François Jolivet. Une politique du logement s’inscrit, par nature, dans un temps long, pluriannuel. Je voudrais savoir en quoi la trajectoire que vous présentez dans la loi de programmation traduit le plan logement annoncé la semaine dernière par le ministre de la cohésion territoriale.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je reviens sur le sujet abordé par Marc Le Fur : l’augmentation assez forte du déficit – environ 20 % par rapport à l’année dernière si l’on regarde le solde final. La dette va progresser de 75 milliards d’euros pour l’année 2018, s’ajoutant aux 120 milliards d’amortissement pour atteindre des émissions à hauteur 195 milliards.

Comment la progression de 200 millions de la DGF annoncée par le Premier ministre sera‑t‑elle ventilée entre chaque niveau de collectivité territoriale ?

Les 319 collectivités qui vont être mises à contribution dans le cadre d’un conventionnement, devront réduire leurs dépenses de 1,2 %. Est-ce hors inflation, ou inflation comprise ?

Dix départements bénéficiaient du fonds d’urgence pour financer les dépenses d’aide sociale, le RSA et l’APA notamment. Vous supprimez ce fonds d’urgence : est-ce à dire que des garanties pérennes au financement des allocations individuelles de solidarité vont être trouvées pour ces départements, et dans ce cas quelles pistes sont envisagées ?

M. François Pupponi. Vous parlez de sincérité et vous avez raison : ce budget est plus sincère que les précédents, mais il demeure un manque de transparence, en particulier sur les collectivités locales. Dans cette commission, nous réclamons depuis des années que vous indiquiez à quel niveau se situent les compensations. D’un côté, on plafonne les dotations, mais de l’autre on diminue les compensations aux collectivités locales. L’année dernière elles n’étaient que de 12 % sur les impôts locaux, et cette année vous allez baisser la compensation pour la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP). À combien de centaines de millions, voire de milliards d’euros, situe-t-on le manque de recettes pour les collectivités locales ?

La péréquation est quasiment arrêtée : le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) n’évoluera pas, le fonds de solidarité des communes d’Ile-de-France (FSRIF) non plus, la dotation de solidarité urbaine (DSU) évoluera moins que les autres années, mais vous allez réduire les dépenses des collectivités locales de 13 milliards. Cette baisse sera-t-elle « péréquée » ? Allons-nous demander les mêmes efforts aux communes les plus pauvres et aux plus riches ?

Quant au logement, avez-vous évalué la perte de recettes fiscales causée par la baisse des constructions ? Quand on prélève 1,7 milliard sur les bailleurs sociaux et que l’on limite le PTZ et le dispositif « Pinel » aux zones les plus tendues, là où le PTZ et le « Pinel » étaient le moins utilisés, il y aura un ralentissement de la construction de logements. Vous parlez de choc d’offre ; malheureusement les acteurs du secteur estiment que la construction va diminuer. Avez-vous évalué le montant des impôts et le nombre d’emplois perdus ?

M. Jean-Paul Mattei. Je souhaite féliciter le Gouvernement pour sa présentation de ce projet de loi de finances. Simplification, pérennité, visibilité, immédiateté, et même rétroactivité, ce qui peut choquer les juristes, mais j’aime qu’un texte soit appliqué dès lors qu’il est voté – nous en avons l’habitude en matière d’assurances.

Sur le PFU, de manière assez adroite mais conforme à la réglementation, vous décortiquez ces 30 % en 17,2 % pour la CSG et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), et 12,8 % pour l’aspect fiscal. C’est une révolution – je rappelle que des mesures prises en 2008 en matière de taxation des plus-values n’ont jamais été appliquées : le fameux article 150-0 D bis du code général des impôts. La mesure sera donc immédiatement applicable. Je pense que le taux de 12,8 % pourrait très bien être porté à 14,5 % au titre de la solidarité, ce qui situerait le prélèvement forfaitaire à 31,7 %, mais c’est peut-être une marotte.

En ce qui concerne l’IFI, l’immobilier de jouissance est celui dont on profite, que l’on loue pour soi-même. Mais il y a aussi de l’immobilier actif, qui est structurant pour le territoire. Nous parlons de transition énergétique et d’aménagement du territoire : je pense qu’il serait intéressant d’avoir des foncières taxées à l’impôt sur les sociétés, qui pourraient être de vrais outils de développement et des agents de développement économique. Il faut bien que les start-up aient des sièges sociaux. Je sais qu’ils sont exonérés, mais nous pourrions imaginer des investisseurs dans les sièges sociaux et des installations industrielles qui ne sont pas forcément liées à l’activité, et favoriser cette activité. Cela mérite de réfléchir sur cette nouvelle forme d’investissement, qui serait totalement professionnel.

M. le ministre de l’action et des comptes publics. Pour les départements, il y avait un fonds d’urgence, exceptionnel. Nous savons tous qu’il ne faut pas régler la question des mineurs isolés ou du RRSA avec des fonds qui avoisinent 120 millions d’euros. Ce n’est pas une bonne façon de fonctionner lorsque l’on connaît les différences entre départements. Nous n’avons pas renouvelé ce fonds, mais nous avons consacré respectivement 50 et 60 millions d’euros aux mineurs isolés et à l’aide sociale à l’enfance (ASE). Le montant reste donc le même, mais il est maintenant constitué de subventions pérennes. Par ailleurs, une discussion plus large se tient dans le cadre de la conférence nationale des territoires sur la recentralisation du RSA et sur les mineurs isolés. Je souligne ici que les droits de mutation augmentent de 10 % – c’est une ressource particulière pour les départements même si tous ne sont pas dans le même cas – et le RSA diminue de 4 % au niveau national. Il faut désormais avoir une discussion plus profonde avec l’ensemble des départements.

Je ne reviendrai pas sur le déficit : pour la première fois, nous allons passer sous la barre de 3 % toutes administrations publiques confondues. Il y a quelque chose d’un peu hypocrite à nous reprocher de ne pas faire de baisses d’impôt et de faire une présentation trop sincère. Le déficit est la réalité du budget que nous vous présentons : il est important de voir la baisse importante de ce déficit toutes administrations publiques confondues.

Monsieur Pupponi, nous pourrons approfondir la discussion sur la péréquation dans l’hémicycle. Il appartient aux parlementaires, s’ils le souhaitent, d’augmenter la péréquation, qui s’élève, de mémoire, à 180 millions d’euros.

Madame Dalloz, la DGF n’augmente pas de 200 millions d’euros, mais de 100 millions, et l’ensemble des concours aux collectivités territoriales augmente de 300 millions en plus de la DGF. Notre volonté est que les associations d’élus, avec les maires, sous l’autorité du Parlement, définissent les grandes lignes. Il appartient à l’administration déconcentrée de l’État d’en faire une adaptation intelligente. Les villes les plus en difficulté, celles qui ont des dépenses de fonctionnement du fait de l’augmentation du nombre d’habitants, celles qui ont des projets d’infrastructures qui peuvent être accompagnés par l’État dans des contrats de plan, seront prises en compte. Nous devons faire des économies au point de vue national. Nous faisons le pari du pacte girondin, plutôt que de décider depuis la place Beauvau ou Bercy de la baisse des dotations, contrairement aux pratiques du quinquennat précédent.

Enfin, sur le plan d’investissement, 7,5 milliards sont prévus l’an prochain, 10 milliards en 2019, 13 milliards en 2020 et 2021, et 11 milliards en 2022, soit un total de 57 milliards.

M. le ministre de l’économie et des finances. Sur la dépense fiscale, vous aurez tous les détails dans le fascicule sur les voies et moyens. Les cessions d’actifs ne sont pas prévues dans le budget, mais par convention. Les dépenses fiscales sont en légère augmentation pour deux raisons, d’une part la hausse du taux du CICE qui va passer de 6 % à 7 %, et d’autre part la transformation de la réduction d’impôts pour services à la personne en crédit d’impôt, dont j’ai parlé précédemment.

S’agissant des remarques sur le caractère « inhumain » du budget, je répète qu’il faut regarder attentivement ce qui figure dans les décisions du budget et dans le grand plan d’investissement. Vous verrez que cette remarque n’est pas honnête. L’augmentation du nombre de places dans les établissements pour l’insertion dans l’emploi (EPIDE), pour accompagner les gamins qui passent dans ces établissements qui ont prouvé leur efficacité ; l’accompagnement des enfants déscolarisés, qui n’ont ni diplômes, ni qualification, ni emploi ; ce sont autant de mesures très concrètes pour les populations les plus fragiles. Nous y faisons attention, et nous pensons que rétablir la bonne santé des comptes publics et créer plus de richesses dans notre pays permettra d’avoir les moyens financiers d’aider ceux qui sont les plus en difficulté, sans systématiquement alourdir la dépense publique et, au bout du compte, les impôts.

Le PFU se compose effectivement de 15,5 % de prélèvements sociaux, soit 17,2 % avec la CSG, auxquels s’ajoute une fiscalité de 12,8 % pour atteindre les 30 % convenus entre le candidat à la Présidence de la République et les Français. C’est ce qui a été validé par les élections et c’est pourquoi nous nous en tenons à 30 %. Ce chiffre a le mérite d’être simple et clair, donc efficace.

Mme Christine Pires Beaune. Sur l’ISF et l’IFI, pouvez-vous nous spécifier combien de foyers vont payer l’IFI, combien payaient l’ISF, combien rapporte l’ISF aujourd’hui et combien rapportera l’IFI demain, et nous donner un classement par décile ?

S’agissant de la flat tax, les revenus du capital financier pourront être imposés au taux de 30 %. En 2018, les dividendes seront donc soit imposés au taux de 30 %, soit à la tranche marginale : l’option sera offerte aux contribuables. Si nos calculs sont bons, seuls les contribuables imposés aux tranches marginales de 41 % et 45 % auront intérêt à opter pour la flat tax. Confirmez-vous ce chiffre, et pouvez-vous nous dire combien de foyers seraient concernés par celle-ci ?

Pour les collectivités territoriales, je salue le maintien des aides à l’investissement, que ce soit la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) ou la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL). Je ferai des propositions sur la répartition de ces aides afin qu’elles aillent là où nous en avons le plus besoin. Je salue aussi le maintien des dotations, car je n’ai pas changé d’avis : la baisse uniforme des dotations était une bêtise. Vouloir que les plus grosses collectivités, donc celles qui contribuent le plus fortement à la dépense publique, contribuent à la maîtrise de la dépense publique me semble plutôt intelligent. Ma question rejoint celle de la Cour des comptes : comment allez-vous vous assurer du respect de ces conventions, comment allez-vous amener les 319 collectivités à signer ces conventions, et que se passe-t-il en 2019 si les conventions ne sont pas respectées ?

En ce qui concerne les pactes métropolitains, un engagement du Premier ministre avait été pris l’an dernier pour les six nouvelles métropoles qui existent depuis le 1er janvier 2017. Il existe des pactes métropolitains pour les quinze métropoles, mais les six nouvelles ne bénéficient pas de ce pacte. Cet engagement du Premier ministre Bernard Cazeneuve sera-t-il tenu dans le projet de loi de finances ?

Dernier point, sur la réforme de la taxe d’habitation. À partir de 2018, si les taux sont augmentés, confirmez-vous que cette augmentation sera bien payée par les contribuables, qu’il n’y aura pas de compensation, et qu’au terme de votre réforme, il y aura toujours une taxe d’habitation à payer pour tout le monde ?

M. Xavier Roseren. Hier, lors de la séance de questions au Gouvernement, la ministre Jacqueline Gourault a clarifié les mesures fiscales relatives aux collectivités territoriales, permettant de mettre fin aux discours mensongers et improductifs, puisque les dotations ne baisseront pas en 2018.

En ce qui concerne la gestion des dépenses publiques des collectivités territoriales, un pacte de confiance sera proposé aux 319 grandes collectivités. Les petites communes, notamment rurales, ne seront pas affectées par cette procédure de contractualisation. On ne peut que souligner la prise en compte par le Gouvernement de la réalité de terrain et des difficultés rencontrées localement par certaines de ces petites collectivités.

Cependant, une inquiétude demeure en ce qui concerne le FPIC, qui a pour vocation de redistribuer les richesses et assurer une égalité entre tous les territoires. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce fonds ? Son montant actuel, d’un milliard d’euros, sera-t-il maintenu ? Enfin, les critères de prélèvement et de reversement sont-ils inchangés ?

M. Éric Coquerel. J’aurais préféré ne pas avoir à reprendre la parole, mais je n’ai guère été satisfait par les réponses apportées, puisque, de réponse, il n’y eut point. Certes, monsieur Le Maire, nos avis divergent, mais cela ne vous empêche pas de répondre aux questions précises que nous posons, d’autant qu’à moins d’un remaniement ministériel l’occasion se renouvellera au cours des prochaines années... Et ce n’est pas commettre une agression que de faire état de la continuité d’une politique, mais je vous accorde que c’est une continuité – en pire !

Remarquez par ailleurs que je n’ai pas employé de formules polémiques, je n’ai pas parlé de « monopole du cœur ». Si j’avais voulu être polémique, j’aurais d’ailleurs plutôt dit que vous avez beaucoup de cœur pour les revenus du capital.

M. le président Éric Woerth. Un tel discours relève plutôt de la séance publique, cher collègue...

M. Éric Coquerel. Je réponds, monsieur le président, aux propos tenus tout à l’heure, qui étaient sans rapport avec les questions posées, que je réitère donc. Certes, M. Darmanin, et je l’en remercie, a répondu à une question sur la taxe d’habitation, mais je ne l’avais pas posée !

Mes questions sont très précises. Le montant du plan d’investissement est estimé à 56,3 milliards d’euros, mais au terme de nos calculs qui prennent en compte des redéploiements des crédits existants et d’instruments financiers, nous parvenons au montant de 24 milliards d’euros. Qu’en dites-vous ?

Je vous ai également posé une question très précise sur la flat tax. Vous annoncez un coût pour le Trésor public de 1,5 milliard d’euros, mais l’OFCE parle plutôt de 4 milliards. Que répondez-vous ?

Quant au pouvoir d’achat des retraités, selon vous, est-il juste et efficace de réduire celui des retraités qui gagnent 1 350 euros par mois ?

Dernière question, car je ne répéterai pas toutes celles posées tout à l’heure, comment une réduction de 1,8 milliard d’euros des crédits alloués à la politique du logement et une réduction de 1,5 milliard d’euros des crédits alloués à l’emploi pourront-elles relancer efficacement l’activité ?

M. Nicolas Forissier. Mes collègues Marc Le Fur et Philippe Vigier ont déjà évoqué deux des trois sujets que je vais aborder.

Le Gouvernement a pris l’engagement de réduire l’emploi public de 120 000 unités. Si la réduction n’est que de 1 276 cette année, quelle sera la méthode du Gouvernement pour parvenir à une réduction de 30 000 par an au cours de chacun des quatre prochains exercices ? Comment nous garantir que l’objectif sera atteint ?

S’agissant de la fiscalité du gazole, je suis très préoccupé. L’alignement prévu pénalisera considérablement les habitants des territoires ruraux et ceux des périphéries des grandes agglomérations. Obligés de se déplacer en voiture, ils sont incités depuis des années à opter pour des véhicules roulant au gazole. Quelle compensation envisagez-vous pour ces populations qui comptent parmi celles dont les revenus sont les plus faibles ?

Enfin, parmi les mesures fiscales visant à favoriser l’investissement dans les entreprises – amorçage, capital-risque, etc. –, le dispositif ISF-PME va disparaître, au contraire des mesures applicables en matière d’impôt sur le revenu. J’ai cru comprendre, messieurs les ministres, que cette suppression est justifiée par le grand nombre d’intermédiaires qui en profiteraient, mais l’argument est loin de me convaincre. Les organismes collectant de l’ISF-PME pour le réinvestir dans des entreprises de croissance, des start-up ou des entreprises traditionnelles, qui ont d’autant plus besoin de moyens pour se développer que les banques ne leur en accordent pas suffisamment, jouent un rôle extrêmement important, y compris pour accompagner les entreprises, et ce pendant plusieurs années. Je l’ai moi-même constaté. Je suis donc très préoccupé, d’autant que ce dispositif ISF-PME n’est pas remplacé par un dispositif IFI-PME. Le Gouvernement semble pourtant soucieux de soutenir l’investissement.

M. Michel Castellani. Le Gouvernement recevra dans quelques jours les élus de Corse. Vous savez que l’instauration de la collectivité unique de Corse entraînera une fusion des budgets respectifs de la collectivité territoriale de Corse et des deux conseils départementaux. Las, l’application de diverses formules que je qualifierai de technocratiques conduit à une perte de plusieurs millions d’euros, totalement et objectivement injustifiable, qu’il conviendra de corriger.

J’appelle également votre attention sur l’importance des fonds d’investissement de proximité (FIP) Corse. Les entreprises ont besoin de ces investissements, facteurs d’emploi et d’activité. Nous agirons donc, si nécessaire, pour que le FIP soit maintenu dans sa configuration actuelle.

Je rappelle enfin qu’il existe en Corse une opinion majoritaire favorable à une dévolution fiscale, afin que la Corse maîtrise pleinement ses budgets. Nous souhaitons pouvoir en parler dans le cadre plus large de l’examen d’une loi spécifique, que nous appelons de nos vœux et qui devrait être élaborée conjointement par les services du Gouvernement et la représentation territoriale de Corse.

Je vous assure, messieurs les ministres, que nous sommes pleinement conscients des difficultés de votre tâche, et nous mesurons à quel point votre marge de manœuvre est étroite. Nos revendications, outre qu’elles procèdent strictement d’un esprit de justice, seraient satisfaites à moyens constants. Nous souhaitons donc vivement que le Gouvernement réponde favorablement à cette demande de justice que relaie la majorité territoriale. La Corse l’attend.

M. Benoit Simian. Messieurs les ministres, à l’heure où vous faites le pari du « pacte girondin », ma collègue Anne-Laure Cattelot et moi-même sommes rapporteurs spéciaux chargés des crédits relatifs aux infrastructures de transports collectifs et ferroviaires, dont vous venez d’évoquer le financement. Nous souhaiterions donc vous interpeller. À l’heure du lancement des assises de mobilité, nous nous retrouvons, en fait de financement des infrastructures, dans une impasse budgétaire et de nouvelles ressources doivent être envisagées : la taxation des poids lourds en transit, via une taxe régionalisée, dont l’instauration serait soutenue par plusieurs régions, ou encore le transfert aux collectivités, notamment les régions, de la compétence de certains axes, actuellement exercée au niveau national, avec la possibilité d’instaurer un péage. Cela permettrait de lever des ressources supplémentaires pour les collectivités pour de nombreux projets. Qu’en pensez-vous ?

Par ailleurs, quelle part du produit de la hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) – à hauteur de 2,6 centimes par litre chaque année pendant quatre ans – sera affectée à l’AFITF ? La ministre chargée des transports vient d’évoquer le fléchage de 200 millions d’euros de crédits en faveur des transports du quotidien. C’est heureux, mais pouvez-vous nous donner davantage de précisions ?

M. Fabrice Le Vigoureux. Ma question est relative au programme d’investissements d’avenir. Sur 10 milliards d’euros, 4 milliards sont budgétés pour les prochaines années. Un volet très important concerne les parcours étudiants en premier cycle et les innovations en la matière. Comment cela s’articule-t-il avec le grand plan d’investissement qui vient d’être annoncé ? Celui-ci est très axé sur la compétence, l’économie de la connaissance et du savoir, autant d’éléments centraux de notre projet.

M. Jean-Paul Dufrègne. Nous souhaitons une réponse précise sur les modalités de compensation de l’exonération de taxe d’habitation pour les communes. Le dispositif permettra-t-il aux communes de percevoir ce qu’elles auraient perçu en appliquant leurs taux sur les bases ? Permettra-t-il donc le maintien de la dynamique des bases ? Et comment l’évolution des taux sera-t-elle encadrée, si elle l’est ?

Je m’associe aux deux questions qui ont été posées sur l’avenir des allocations individuelles de solidarité versées par les départements. Leur charge continue de s’alourdir, et nous n’avons pas vraiment de réponse à ce sujet.

Enfin, en feuilletant ce PLF, je suis tombé sur l’article 15, qui tend à abroger l’article 62 de la loi de finances pour 2016, lequel prévoyait d’élargir l’assiette de la taxe sur les transactions financières aux transactions intrajournalières à compter du 1er janvier 2018. Cette abrogation est justifiée dans l’exposé des motifs par la complexité de mise en œuvre d’une telle mesure, qu’a mise en avant la Cour des comptes. N’est-ce pas baisser les bras un peu vite ? Compte tenu des derniers progrès numériques et technologiques, je pense qu’il doit être facile de trouver les dispositifs permettant de lever une taxe qui rapporterait à l’État une recette supplémentaire non négligeable dans le contexte actuel.

Mme Sarah El Haïry. Je me félicite de la pérennisation du budget du service civique, dont je suis la rapporteure spéciale. Je m’interroge cependant sur la suppression de l’une des quatre taxes affectées au Centre national pour le développement du sport (CNDS), soit un montant de 130 millions d’euros, présentée comme une mesure de clarification et de rationalisation – ce que j’entends. Mais comment, dans ces conditions, les actions liées à la préparation des Jeux olympiques seront-elles financées, sachant que le CNDS, au moment de l’Euro 2016, avait bénéficié de recettes affectées supplémentaires ?

M. le ministre de l’économie et des finances. Madame Pires Beaune, l’ISF concernait 330 000 redevables, pour une recette de 4,1 milliards d’euros. L’IFI devrait rapporter 850 millions d’euros pour un nombre de redevables qui devrait diminuer d’environ de 40 %, soit approximativement 150 000 personnes.

Concernant les revenus du capital, les contribuables pourront bien choisir entre le PFU et le barème. L’option du barème peut être intéressante pour les personnes qui ne sont pas imposables à l’impôt sur le revenu, ainsi que pour celles qui perçoivent des dividendes, cas dans lequel s’applique un abattement de 40 %. En revanche, pour les contribuables qui bénéficient d’un abattement sur les plus-values en raison de la durée de détention, il pourra être plus intéressant, selon les cas, de choisir le PFU.

Je voudrais répondre aussi précisément à M. Coquerel, car je ne voudrais pas qu’il quitte cette salle avec le sentiment que je ne lui ai pas apporté de réponses. Je plaide également pour que nous placions nos relations dans les années à venir sous le signe du respect mutuel.

Le grand plan d’investissement représente 57 milliards d’euros, dont 20 milliards pour la transition écologique, 15 milliards pour les compétences et la formation, 13 milliards pour l’innovation et 9 milliards pour la réforme de l’État et le développement du numérique dans l’administration. Ce plan regroupe des mesures nouvelles mais aussi – nous ne nous en cachons pas – le redéploiement de crédits antérieurement affectés : il intègre notamment dans le volet innovation les mesures du troisième programme d’investissements d’avenir (PIA3) et leur financement.

Nous évaluons le coût du PFU à 1,3 milliard d’euros pour 2018 et à 1,9 milliard pour 2019 ; l’OFCE l’évalue, lui, à 4 milliards d’euros. Dès lors que nous opérons des choix fiscaux nouveaux, qui rompent avec les pratiques antérieures, une évaluation est nécessaire. Elle permettra de déterminer si les estimations faites par nos services étaient ou non réalistes. Plus généralement, en matière fiscale, l’évaluation et la transparence seront toujours bienvenues pour juger de la pertinence et de l’efficacité des politiques publiques.

S’agissant du pouvoir d’achat des retraités, je rappelle que nous faisons un choix politique capital en augmentant le minimum vieillesse pour aider ceux qui sont le plus en difficulté.

En matière d’emploi, nous devons faire des efforts, et le budget reflète en effet notre choix de réduire le nombre de contrats aidés. Il faut néanmoins dépasser cette lecture strictement budgétaire. Si nous réduisons le financement des emplois aidés, c’est que nous estimons – et toutes les enquêtes nous confortent – que, dans le secteur privé, les emplois aidés constituent un considérable effet d’aubaine pour les chefs d’entreprise, qui, pour la plupart, auraient de toute façon créé ces emplois que nous finançons avec l’argent du contribuable. Vous devriez, monsieur Coquerel, être sensible à cet argument.

Dans le secteur public, nous estimons que les emplois aidés ont du sens pour les publics les plus fragiles et les plus éloignés de l’emploi. C’est la raison pour laquelle nous maintenons un volant de 200 000 emplois, que nous finançons. J’y insiste, car il ne s’agit pas, comme cela a souvent été fait par le passé, d’inscrire dans le budget des centaines de milliers d’emplois aidés, sans avoir de quoi les financer.

J’ai déjà répondu au sujet de l’ISF-PME. C’est un choix que j’assume totalement. Nous estimons en effet que l’ISF-PME est une niche fiscale qui n’a pas profité aux PME qui en avaient le plus besoin. Nous ne sommes pas les seuls à le dire, c’est aussi l’opinion de la Cour des comptes.

Par ailleurs notre politique, qu’il s’agisse de nos choix budgétaires ou de la future loi sur la transformation des entreprises, à laquelle je vous invite à participer l’an prochain, vise précisément à soutenir les PME et à améliorer leur financement pour leur permettre de se transformer en entreprises de taille intermédiaire.

M. le secrétaire d’État. Monsieur Dufrègne, je vous confirme que la taxe sur les transactions financières intrajournalières adoptée l’an dernier et qui devait entrer en application au 1er janvier 2018 sera abrogée. Nous considérons en effet que si la France était la seule à mettre en place un tel mécanisme, cela aurait un effet très dissuasif sur les grandes banques et les grands fonds, alors que, dans le cadre du Brexit, nous nous efforçons de renforcer l’attractivité financière de la place de Paris.

En revanche, le taux de la taxe sur les transactions financières a été porté de 0,2 % à 0,3 % en 2017, et cette hausse n’est pas remise en cause. Avec le produit de la « taxe Chirac » sur les billets d’avion, c’est à peu près 1 milliard d’euros qui seront ainsi consacrés à l’aide publique au développement.

M. le ministre de l’action et des comptes publics. Madame El Haïry, je suis personnellement très attaché au CNDS, qui constitue, avec les fédérations, une bonne source de financement du sport. Cependant, si nous voulons assainir la gouvernance du sport, il importe de clarifier son financement. N’ayez néanmoins aucune crainte pour les Jeux olympiques. Nous évaluons les besoins et il est probable qu’ils feront l’objet d’une ligne budgétaire spécifique, qu’accompagnera sans doute une loi olympique.

En ce qui concerne la péréquation, chacun aura l’occasion de s’exprimer lors du débat parlementaire. Il faudra quoi qu’il en soit remettre cette question sur la table, ainsi que celle des valeurs locatives, dans le cadre d’une refonte globale de la fiscalité locale.

Quant à la taxe d’habitation, je rappelle que le mécanisme retenu n’est pas l’exonération mais le dégrèvement. Voilà qui devrait rassurer les collectivités locales, qui conserveront la liberté de déterminer leurs taux, sachant toutefois que, pour toute hausse ou baisse de ces taux intervenant après 2017, il n’y aura aucune compensation de l’État, à charge pour les élus de se justifier devant leurs administrés. Nous espérons en tout cas que ces trois années de dégrèvement permettront d’amorcer le débat sur la fiscalité locale dans notre pays.

Enfin, le système de bonus-malus appliqué aux collectivités locales devrait faire l’objet d’un débat de fond dans l’hémicycle. Les collectivités ont leur idée sur la question, j’ai la mienne, qui consisterait à envisager une dotation d’investissement pour les collectivités ayant respecté leur contrat. Pour les autres en effet, pourquoi ne pas envisager un système de malus ? Certains nous encouragent à le mettre en place dès 2018 ; nous pensons qu’il est préférable d’attendre 2019, mais je vous propose d’en reparler au moment de la discussion budgétaire.

M. le président Éric Woerth. Nous vous remercions, messieurs les ministres, pour cette présentation.

 


([1]) INSEE, Point de conjoncture, octobre 2017 (lien).

([2]) Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, réunion du 26 juillet 2017 (lien).

([3]) INSEE, Point de conjoncture, octobre 2017 (lien).

([4]) Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, réunion du 19 juillet 2017 (lien).

([5]) INSEE, Informations rapides, 31 août 2017 (lien).

([6]) INSEE, Insee Focus, n° 87, 24 mai 2017 (lien).

([7]) Le taux de marge est égal au rapport entre l’excédent brut d’exploitation et la valeur ajoutée.

([8]) INSEE, Comptes nationaux trimestriels-base 2010 (lien).

([9]) INSEE, Point de conjoncture, octobre 2017 (lien).

([10]) Agence centrale des organismes de sécurité sociale, Acoss Stat, n° 246, mars 2017 (lien).

([11]) Agence centrale des organismes de sécurité sociale, Acoss Stat, n° 253, septembre 2017 (lien).

([12]) Natixis, « La capacité ou l’incapacité de l’appareil productif à répondre à la progression de la demande sont une caractéristique centrale des économies », Flash Économie, 27 juin 2017 (lien).

([13])  INSEE, Point de conjoncture, octobre 2017 (lien).

([14]) Rapport économique, social et financier.

([15]) Rapport économique, social et financier.

([16]) Loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

([17]) Voir compte rendu, reproduit dans le présent rapport général, de l’audition par la commission des finances de M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publics, le 27 septembre 2017.

([18]) Haut Conseil des finances publiques, avis n° HCFP-2017-3 du 24 septembre 2017 relatif au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (lien).

([19]) Haut Conseil des finances publiques, avis n° HCFP-2016-3 du 28 septembre 2016 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2017 (lien).

([20]) Les finances des collectivités locales en 2017, septembre 2017 (lien).

([21]) Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

([22]) Banque de France (lien).

([23]) Haut Conseil des finances publiques, avis n° 2017-1 du 12 avril 2017 relatif aux prévisions macroéconomiques associées au programme de stabilité pour les années 2017 à 2020 (lien).

([24]) Haut Conseil des finances publiques, avis n° HCFP-2017-2 du 21 juin 2017 relatif au solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement de 2016 (lien).

([25]) Le solde conjoncturel pour 2016 est ainsi révisé à – 0,8 % du PIB, soit environ la moitié de la nouvelle hypothèse d’écart de production conformément à la « règle du pouce » précitée.

([26]) Loi n° 2017-1206 du 31 juillet 2017 de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2016.

([27]) Haut Conseil des finances publiques, avis n° HCFP-2017-3 du 24 septembre 2017 relatif au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (lien).

([28]) Haut Conseil des finances publiques, avis n° HCFP-2017-4 du 24 septembre 2017 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2018 (lien).

([29]) Rapport économique, social et financier.

([30]) Tableau des principales mesures nouvelles figurant dans le rapport annexé au projet de loi programmation, page 29. À noter que ce tableau contient une évaluation du rendement de la hausse de la fiscalité sur le tabac différente de celle mentionnée dans le Rapport économique, social et financier soit 0,5 milliard d’euros au lieu de 1,7 milliard d’euros.

([31]) Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, article 149, II.

([32])  Discours prononcé à l’Assemblée nationale, le 4 juillet 2017 (lien).

([33]) Karine Berger, Olivier Carré, Rapport d’information sur le nouveau système européen de comptabilité nationale, Assemblée nationale, XIVe législature, n° 2237, 2 octobre 2014 (lien).

([34]) Règlement (UE) n° 549/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans l’Union européenne.

([35]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2015 Résultats et gestion, mai 2016, page 99 notamment.

([36]) Prévue à l’article 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([37]) Article 13 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([38]) Pour une croissance du PIB en valeur de 5 % et une dette de 60 % du PIB (seuil fixé par le pacte de stabilité et de croissance), le déficit stabilisant s’établit à 3 % (autre seuil fixé par le pacte de stabilité et de croissance).

([39]) Haut Conseil des finances publiques, avis n° HCFP-2017-3 du 24 septembre 2017 relatif au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (lien).

([40]) La règle transitoire s’applique aux États qui étaient en procédure de déficit excessif au moment de l’adoption du « six-pack » en novembre 2011. Celle-ci est applicable durant les trois années suivant le retour sous les 3 % de déficit public.

([41]) Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), article 126, 2, b).

([42]) La dette négociable de l’État correspond à la dette contractée sous forme d’instruments financiers échangeables sur les marchés financiers (obligations et bons du Trésor). À l’inverse, la dette non négociable correspond aux dépôts de certains organismes (collectivités territoriales, établissements publics, etc.) sur le compte du Trésor, qui constituent également un moyen de financement de l’État.

([43]) Communément désignée ainsi, la charge de la dette vise précisément les crédits budgétaires relevant de la charge de la dette et de la trésorerie de l’État.

([44]) Compte rendu n° 16 de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, mercredi 20 septembre 2017, séance de 11 heures.

([45]) Ces règles sont aujourd’hui codifiées à l’article 126 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) et précisées par le protocole n° 12 sur la procédure concernant les déficits excessifs.

([46]) Article 2 § 1 bis du règlement (CE) n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs, dans sa version modifiée par le b) du paragraphe 2 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1177/2011 du Conseil du 8 novembre 2011.

([47]) Le seuil de – 0,5 point de PIB défini par l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) prime sur le seuil de – 1 point de PIB défini par l’article 2 bis du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dans sa version modifiée par le paragraphe 8 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1175/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011.

([48]) Article 5, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dans sa version modifiée par le paragraphe 8 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1175/2011 précité.

([49]) Idem.

([50]) Article 5, paragraphe 2, du règlement précité.

([51]) Article 6 du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dans sa version modifiée par le paragraphe 9 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1175/2011 précité.

([52]) Article 5, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs, dans sa version modifiée par le paragraphe 6 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1177/2011 précité.

([53]) Article 12 du règlement précité, dans sa version modifiée par le paragraphe 11 de l’article 1er du règlement (UE) n° 1177/2011 précité.

([54]) Article 2 bis du règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, dans sa version modifiée par le paragraphe 3 de l’article 1er du règlement n° 1175/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011.

([55]) Commission européenne, Rapport 2017 pour la France, 22 février 2017 (lien).

([56]) Conseil de l’Union européenne, recommandation concernant la politique économique de la zone euro, 10 mars 2017(lien).

([57]) Commission européenne, recommandation de recommandation du conseil concernant le programme national de réforme de la France pour 2017 et portant avis du conseil sur le programme de stabilité de la France pour 2017, 22 mai 2017 (lien).

([58])  Conclusions du Conseil européen du 23 juin 2017 (lien).

([59]) Le « paquet de deux » en français.

([60]) Jusqu’à présent, la France a choisi de communiquer à la Commission européenne le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances, lequel fait office tout à la fois de plan budgétaire et de programme de partenariat économique.

([61])  Haut Conseil des finances publiques, avis n° HCFP-2017-4 du 24 septembre 2017 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2018 (lien).

([62]) Loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement.

([63]) Conseil constitutionnel, décision n° 2017-629 QPC du 19 mai 2017, Société FB Finance [Taux effectif de la CVAE pour les sociétés membres de groupes fiscalement intégrés].

([64]) Pour la dernière loi de finances, voir M. Dominique Lefebvre, rapporteur spécial, Rapport sur le projet de loi de finances pour 2017, annexe 41 : Remboursements et dégrèvements, Assemblé nationale, XIVe législature, n° 4125, 13 octobre 2015 (lien).

([65]) Cour des comptes, Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2016, mission Remboursements et dégrèvements, mai 2017. La Cour recommande de « modifier la présentation du tableau d’équilibre des ressources et des dépenses dans les lois de finances en déduisant des recettes fiscales brutes de l’État les seuls remboursements et dégrèvements relatifs à des impôts d’État pour la détermination des recettes fiscales nettes ».

([66]) Il en va de même la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) – sixième impôt de l’État par l’importance budgétaire avec près de 6 milliards d’euros – dont la prévision pour 2018 n’est indiquée dans aucun document budgétaire, cet impôt étant globalisé avec les autres taxes intérieures de consommation.

([67]) Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, article 149, II.

([68]) Réduction de 20 % de l’impôt sur le revenu des foyers à revenus modestes et moyens, prévue par l’article 2 de la loi de finances pour 2017.

([69]) Article 265 septies du code des douanes.

([70]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2015 Résultats et gestion, mai 2016, pages 141 et suivantes.

([71]) Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

([72]) Annexe au projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2016, Recettes et dépenses du budget de l’État par section.

([73]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2016 Résultats et gestion, mai 2017, pages 136 et suivantes.

([74]) Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, compte rendu n° 5, séance de 12 heures 15, mercredi 12 juillet 2017, propos du ministre de l’action et des comptes publics.

([75]) Lo n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, article 105.

([76]) Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, article 126.

([77]) Cour des comptes, La situation et les perspectives des finances publiques, juin 2017, notamment page 151.

([78]) Assemblée nationale, commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, compte rendu n° 5, séance de 12 heures 15, mercredi 12 juillet 2017, propos du ministre de l’action et des comptes publics.

([79]) Cour des comptes, rapport précité, page 152.

([80]) Cour des comptes, La situation et les perspectives des finances publiques, juin 2017, pages 62 et suivantes.

([81]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

([82]) Loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

([83]) Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

([84]) Courrier du secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics, en date du 7 avril 2017.

([85]) Cour des comptes, La situation et les perspectives des finances publiques, juin 2017, notamment page 66.

([86]) Damien Cazé, « L’application de la LOLF pour les responsables de programme », in Revue française de finances publiques, n° 137, février 2017, page 71.

([87]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2016 Résultats et gestion, mai 2017, pages 43 et suivantes.

([88]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

([89]) Les contributions au CAS Pensions correspondent à la contribution employeur à la charge de l’État prévue au 1° de l’article L. 61 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

([90]) Loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.