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N
° 4125

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2016.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2017 (n° 4061),

PAR Mme Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

——

ANNEXE N° 41

REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS

Rapporteur spécial : M. Dominique LEFEBVRE

Député

____

SOMMAIRE

___

Pages

Avant-propos 7

1. La mission Remboursements et dégrèvements se distingue des autres missions du budget général par le recours à des crédits évaluatifs 8

2. Cette mission permet de suivre l’ensemble des remboursements et dégrèvements d’impôts d’État et d’impôts locaux 10

3. Une telle vision, essentiellement comptable, n’a pas vocation à apporter une analyse économique des dispositifs fiscaux retracés dans la mission 11

4. La présentation budgétaire pourrait néanmoins être améliorée 12

5. Le respect du principe de sincérité budgétaire nécessite de pouvoir évaluer les dépenses de manière fiable, mais la prévision budgétaire peut s’avérer délicate… 15

6. … en particulier concernant le suivi des contentieux fiscaux 21

7. Le présent rapport analyse les crédits pour 2017, mais la mission devrait connaître d’importantes évolutions dès l’année suivante, en raison de la mise en place du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu 23

Partie I. Le programme 200 Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État 26

I. LA PRÉVISION BUDGÉTAIRE POUR 2017 26

A. LES CRÉDITS D’IMPÔT À DESTINATION DES PARTICULIERS 27

1. La sous-action 200-12-02 : les crédits d’impôt en matière d’impôt sur le revenu 27

2. La sous-action 200-12-06 : les remboursements et dégrèvements de contribution à l’audiovisuel public 31

B. LES CRÉDITS D’IMPÔT À DESTINATION DES ENTREPRISES 32

1. La sous-action 200-12-03 : les crédits d’impôt en matière d’impôt sur les sociétés 32

2. La montée en charge du CICE 34

II. LA PUBLICATION DES ADMISSIONS EN NON-VALEUR ET DES REMISES GRACIEUSES 36

III. UN ENJEU BUDGÉTAIRE MAJEUR : LES CONTENTIEUX FISCAUX EUROPÉENS 40

A. UN ENJEU DE PRÉVISION 40

1. L’enregistrement de la provision dans le compte général de l’État 40

2. Une prévision des dépenses annuelles au titre des contentieux fiscaux qui reste difficile 43

B. DES CONTENTIEUX FISCAUX QUI CONSTITUENT UN RISQUE BUDGÉTAIRE SIGNIFICATIF POUR LES FINANCES PUBLIQUES 44

1. Le contentieux précompte mobilier 44

2. Le contentieux OPCVM 47

3. Le contentieux de Ruyter 50

4. Le contentieux Stéria 55

5. Le contentieux Contribution de 3 % 57

Partie II. Le programme 201 Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux 62

I. LA PRÉVISION BUDGÉTAIRE POUR 2017 62

A. L’ACTION 201-01 : DES DÉGRÈVEMENTS D’IMPÔTS ÉCONOMIQUES EN LÉGÈRE AUGMENTATION 62

B. LES ACTIONS 201-02 ET 201-03 : DES DÉGRÈVEMENTS D’IMPÔTS DES PARTICULIERS EN NET RECUL 63

1. L’action 201-02 : les dégrèvements et compensations d’exonérations de taxe foncière 63

2. L’action 201-03 : les dégrèvements et compensations d’exonérations de taxe d’habitation 64

II. UNE PRÉSENTATION BUDGÉTAIRE QUI POURRAIT ÊTRE AMÉLIORÉE 65

A. L’ARCHITECTURE DU PROGRAMME 201 MÉRITERAIT D’ÊTRE ALIGNÉE SUR CELLE DU PROGRAMME 200 65

B. LES RESTITUTIONS DE CVAE DEVRAIENT S’IMPUTER SUR LES RECETTES DU COMPTE D’AVANCES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES 66

C. LES ADMISSIONS EN NON-VALEUR ET LES REMISES GRACIEUSES POURRAIENT ÊTRE PUBLIÉES DANS LES DOCUMENTS BUDGÉTAIRES 66

EXAMEN EN COMMISSION 69

ANNEXE : PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 71

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 10 octobre 2016, 58 % des réponses étaient parvenues à la commission des finances.

AVANT-PROPOS

Plus importante mission du budget général si l’on considère le montant des autorisations d’engagement et des crédits de paiement qui lui sont affectés – 108,9 milliards d’euros selon les prévisions du projet de loi de finances pour 2017, soit 25,5 % des dépenses brutes – la mission Remboursements et dégrèvements présente certaines particularités qui la différencient des autres dépenses de l’État.

Dotée de crédits évaluatifs et dépourvue de crédits de titre 2, elle a pour vocation de permettre une présentation claire et un suivi efficace des montants de remboursements et dégrèvements d’impôts d’État et d’impôts locaux, et des dispositifs fiscaux associés, qui viennent en atténuation des recettes fiscales brutes.

La mission Remboursements et dégrèvements regroupe ainsi les dépenses liées à des situations dans lesquelles l’État est amené à restituer des impôts, des taxes ou des contributions aux contribuables, ou dans lesquelles l’État ne recouvre pas certaines créances sur les contribuables.

Les raisons pour lesquelles l’État est amené à effectuer ces opérations sont très diverses et peuvent être classifiées en trois catégories :

– les sommes restituées en raison de la mécanique de l’impôt, qui s’explique par les modalités de recouvrement propres à certains impôts : l’État restitue certaines sommes, lorsque les montants déjà versés excèdent l’impôt dû, en matière d’impôt sur les sociétés par exemple, ou lorsque le montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible excède le montant collecté par une entreprise, notamment ;

– les sommes restituées en raison des politiques publiques, lorsqu’un contribuable bénéficie d’un crédit d’impôt qui dépasse l’impôt qu’il doit payer ;

– les raisons liées à la gestion de l’impôt, lorsque des corrections sont apportées après le calcul de l’impôt, à l’avantage du contribuable, à la suite d’une erreur matérielle, d’une contestation, ou d’un litige.

Sa présentation suit une logique essentiellement comptable, le projet annuel de performances s’attachant à prévoir et à enregistrer le plus fidèlement possible l’évolution de ces dépenses, dans le respect du principe de sincérité budgétaire, plutôt qu’à produire une analyse économique de ces mécanismes et en évaluer le bien-fondé.

Le présent avant-propos a pour objectif de resituer la mission Remboursements et dégrèvements au sein des dépenses du budget général de l’État, d’en présenter les spécificités, et d’en dégager les enjeux principaux, tant au niveau de la prévision que de la présentation. L’analyse des crédits affectés au programme 200 Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État, et au programme 201 Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux, sera traitée dans la suite du rapport.

Le Rapporteur spécial estime ainsi que :

– la mission Remboursements et dégrèvements se distingue des autres missions du budget général par le recours à des crédits évaluatifs ;

– cette mission permet de retracer de manière comptable l’ensemble des remboursements et dégrèvements d’impôts d’État et d’impôts locaux, mais une telle vision n’a pas vocation à apporter une analyse économique des dispositifs fiscaux retracés dans la mission ;

– la présentation budgétaire pourrait néanmoins être améliorée ;

– le respect du principe de sincérité budgétaire nécessite de pouvoir évaluer les dépenses de manière fiable, mais la prévision budgétaire peut s’avérer délicate, en particulier concernant le suivi des contentieux fiscaux ;

– le présent rapport porte sur l’analyse des crédits pour 2017, et la mission devrait connaître d’importantes évolutions dès l’année suivante, en raison de la mise en place du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.

1. La mission Remboursements et dégrèvements se distingue des autres missions du budget général par le recours à des crédits évaluatifs

Par exception à la règle du caractère limitatif des crédits, définie à l’article 9 de la loi n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), la mission Remboursements et dégrèvements est dotée de crédits dits « évaluatifs ».

L’existence des crédits évaluatifs s’explique par la nécessité pour l’État d’obtenir l’autorisation du Parlement pour ordonnancer des dépenses obligatoires, ou quasi obligatoires, mais dont le montant ne peut être précisément connu lors du vote du budget. Pour ces charges, les dépenses « s’imputent, si nécessaire, au-delà des crédits ouverts ». Afin de préserver la vigueur de l’autorisation parlementaire, la loi organique cantonne ces dépenses dans des programmes spécifiques, et délimite clairement leur périmètre : celles-ci ne peuvent concerner que les charges de la dette de l’État, les remboursements, restitutions et dégrèvements, et les charges résultant de la mise en jeu de la garantie de l’État.

Ainsi, au sein du budget général de l’État, les programmes Charges de la dette et trésorerie de l’État et Appels en garantie de l’État de la mission Engagements financiers de l’État sont exprimés en crédits évaluatifs, tandis que la mission Remboursements et dégrèvements est la seule à être entièrement constituée de tels crédits.

Crédits limitatifs et crédits évaluatifs dans la loi organique n° 2001-692
du 1er août 2001 relative aux lois de finances

Article 9. – Pour les dépenses de personnel, le montant des autorisations d’engagement ouvertes est égal au montant des crédits de paiement ouverts.

Les crédits sont limitatifs, sous réserve des dispositions prévues aux articles 10 et 24. Les dépenses ne peuvent être engagées et ordonnancées que dans la limite des crédits ouverts.

Les conditions dans lesquelles des dépenses peuvent être engagées par anticipation sur les crédits de l’année suivante sont définies par une disposition de loi de finances.

Les plafonds des autorisations d’emplois sont limitatifs.

Article 10. – Les crédits relatifs aux charges de la dette de l’État, aux remboursements, restitutions et dégrèvements et à la mise en jeu des garanties accordées par l’État ont un caractère évaluatif. Ils sont ouverts sur des programmes distincts des programmes dotés de crédits limitatifs.

Les dépenses auxquelles s’appliquent les crédits évaluatifs s’imputent, si nécessaire, au-delà des crédits ouverts. Dans cette hypothèse, le ministre chargé des finances informe les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances des motifs du dépassement et des perspectives d’exécution jusqu’à la fin de l’année.

Les dépassements de crédits évaluatifs font l’objet de propositions d’ouverture de crédits dans le plus prochain projet de loi de finances afférent à l’année concernée.

Les crédits prévus au premier alinéa ne peuvent faire l’objet ni des annulations liées aux mouvements prévus aux articles 12 et 13 ni des mouvements de crédits prévus à l’article 15.

Par son existence même, le régime des crédits évaluatifs représente une atteinte importante au principe de l’autorisation de la dépense par le Parlement : le Conseil d’État a ainsi rappelé que « le caractère évaluatif des crédits destinés à couvrir les dépenses relatives aux intérêts de la dette publique constitue une exception traditionnelle et nécessaire à la compétence du Parlement pour fixer de manière limitative les charges de l’État » (1).

Une autre caractéristique de la mission Remboursements et dégrèvements est que, malgré son enregistrement en dépenses en atténuation de recettes du budget général, celle-ci n’est pas prise en compte dans le périmètre des normes « zéro volume » et « zéro valeur », pour lesquelles les dépenses publiques sont entendues hors remboursements et dégrèvements.

Les normes « zéro volume » et « zéro valeur »

Ces deux normes visent à limiter la croissance des dépenses de l’État :

– la norme « zéro valeur » prévoit une stabilité en euros courants d’une année sur l’autre, applicable aux dépenses nettes du budget général de l’État (c’est-à-dire hors remboursements et dégrèvements), aux recettes affectées plafonnées, et aux prélèvements sur recettes au profil des collectivités territoriales de l’Union européenne ;

– la norme « zéro volume » autorise une évolution de la dépense au rythme de l’inflation, sur un périmètre élargi, qui comprend les dépenses couvertes par la norme « zéro valeur », le programme Charge de la dette, et le compte d’affectation spéciale Pensions.

En 2017, les montants de dépenses de l’État sous ces deux normes sont en progression par rapport aux niveaux fixés en 2016, de 3,4 milliards d’euros pour la norme « zéro valeur » et 2,5 milliards d’euros pour la norme « zéro volume », s’établissant respectivement à 298,6 et 388,3 milliards d’euros à périmètre constant.

Source : Tome 1 du rapport général de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finances pour 2017, n° 4125, octobre 2016.

2. Cette mission permet de suivre l’ensemble des remboursements et dégrèvements d’impôts d’État et d’impôts locaux

L’essentiel des dépenses retracées dans la mission laissent à l’administration une marge de manœuvre faible, voire nulle. Ainsi, au sein du programme 200, l’action n° 11 rassemble les remboursements et les restitutions étant strictement dus à la mécanique de l’impôt, tels que les restitutions d’excédents de versement compte tenu de l’impôt dû, tandis que l’action n° 12 permet de suivre les obligations fiscales restituées sous la forme de crédits d’impôts. Ces deux actions sont dotées de 85,5 milliards d’euros en 2017, soit 78,6 % des crédits de la mission. La sous-action n° 11-02, qui retrace les remboursements de crédits de TVA liés à la mécanique de l’impôt, représente 49 milliards d’euros, soit 48 % des crédits de la mission. L’administration effectue donc une gestion administrative et comptable de ces dépenses, strictement encadrée par la législation fiscale.

Le projet annuel de performances pour 2017 rappelle en effet que la mission « comporte deux programmes dont les stratégies similaires répondent à un objectif unique et commun (…) : permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits en matière de remboursements et dégrèvements d’impôts le plus rapidement possible, tout en garantissant le bien-fondé des dépenses au regard de la législation. L’amélioration de la qualité du service rendu se traduit, notamment pour les usagers professionnels, par une gestion plus souple de leur trésorerie qui améliore leur compétitivité ».

L’enjeu de la mission est donc de permettre une présentation claire et un suivi efficace des remboursements et dégrèvements relatifs aux différents impôts, dans le respect des principes de sincérité budgétaire et d’image fidèle.

À cette fin, le programme 200 « identifie les dépenses en atténuation de recettes ayant trait aux impôts d’État, retrace les dépenses budgétaires résultant de l’application des règles fiscales lorsqu’elles conduisent à la mise en œuvre de dégrèvements d’impôts, de remboursements ou restitutions de crédits d’impôt, de compensations prévues par des conventions fiscales internationales, et enregistre en outre un certain nombre d’opérations comptables liées aux remises gracieuses, annulations, admissions en non-valeur de recettes, ou aux remises de débets », tandis que, de manière similaire, le programme 201 « finance les dépenses correspondant aux dégrèvements d’impôts locaux, ainsi que celles liées à des opérations comptables ».

Les indicateurs de performance définis à l’échelle de la mission traduisent cette recherche d’amélioration de la qualité du service public à travers la réduction du délai de traitement des demandes transmises à l’administration : remboursement de crédit de TVA, restitution de trop-versé d’IS, taux de réclamation contentieuse en matière d’impôt sur le revenu et de contribution à l’audiovisuel public, notamment.

Dans cette perspective, la présentation budgétaire retenue vise à isoler les dépenses en atténuation de recettes portant sur les impôts d’État et les impôts locaux, afin de pouvoir les identifier clairement et d’obtenir une information détaillée à leur sujet.

3. Une telle vision, essentiellement comptable, n’a pas vocation à apporter une analyse économique des dispositifs fiscaux retracés dans la mission

La vision proposée par l’administration dans les documents budgétaires relatifs à la mission Remboursements et dégrèvements est donc essentiellement comptable, et non économique, puisque celle-ci s’attache à retracer fidèlement, et de manière synthétique, les remboursements, restitutions et dégrèvements relatifs à chaque impôt, mais pas à en évaluer l’efficacité, le coût total, ou la pertinence.

Ainsi, le présent projet annuel de performances n’a donc pas vocation à se substituer au tome II de l’Évaluation des voies et moyens, relatif aux dépenses fiscales, annexé à chaque projet de loi de finances. Ce document, publié chaque année et qui comporte deux cent cinquante à trois cents pages, « permet de donner une information exhaustive sur les dispositifs de “dépenses fiscales”, en détaillant notamment leur impact global sur les recettes du budget de l’État et en expliquant l’évolution de leur coût depuis le dernier projet de loi de finances ». Il présente, également, pour chaque dépense fiscale, l’objectif de politique publique poursuivi, la mission de rattachement, le nombre de bénéficiaires, ou encore la qualité de la prévision de son coût. Ces éléments constituent une masse d’information importante et utile au Parlement.

Ce projet annuel de performances n’a pas non plus pour objectif de remplacer le jaune budgétaire Transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales, qui rassemble et synthétise les informations relatives aux dégrèvements d’impôts locaux et à leur compensation financière, mais également aux concours de l’État aux collectivités, aux subventions des ministères ou à la fiscalité transférée, offrant ainsi un aperçu global et consolidé de ces transferts.

4. La présentation budgétaire pourrait néanmoins être améliorée

Cette vision comptable s’oppose ainsi à une autre approche, plus analytique, qui impliquerait de distinguer entre les remboursements et dégrèvements qui constituent une véritable dépense, ceux qui constituent une simple atténuation de recettes, et ceux qui ne peuvent être considérés ni comme l’une, ni comme l’autre.

Les remboursements et dégrèvements sont présentés en atténuation des recettes fiscales brutes du budget général de l’État dans le tableau d’équilibre du budget, qui figure à l’article 28 du présent projet de loi de finances. Cette présentation a le mérite de faire apparaître le montant des recettes fiscales brutes et nettes, tout en isolant clairement les remboursements et dégrèvements.

TABLEAU DE L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DU BUDGET
FIGURANT À L’ARTICLE 28 DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2017

(en millions d’euros)

 

RESSOURCES

CHARGES

SOLDES

       

Budget général

     

Recettes fiscales brutes / dépenses brutes

401 351

427 353

 

À déduire : Remboursements et dégrèvements

108 863

108 863

 

Recettes fiscales nettes / dépenses nettes

292 488

318 490

 

Recettes non fiscales

14 505

   

Recettes totales nettes / dépenses nettes

306 993

318 490

 

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des
collectivités territoriales et de l’Union européenne

63 258

   

Montants nets pour le budget général

243 735

318 490

– 74 755

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants

3 930

3 930

 

Montants nets pour le budget général, y compris
fonds de concours

247 665

322 420

 
       
       

Budgets annexes

     

Contrôle et exploitation aériens

2 135

2 135

 

Publications officielles et information administrative

192

177

+ 15

Totaux pour les budgets annexes

2 328

2 312

+ 15

Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants :

     

Contrôle et exploitation aériens

53

53

 

Publications officielles et information administrative

     

Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours

2 381

2 366

+ 15

       
       

Comptes spéciaux

     

Comptes d’affectation spéciale

76 804

76 143

+ 662

Comptes de concours financiers

127 225

126 894

+ 331

Comptes de commerce (solde)

   

+ 4 360

Comptes d’opérations monétaires (solde)

   

+ 59

Solde pour les comptes spéciaux

   

+ 5 412

       

Solde général

   

– 69 328

Source : projet de loi de finances pour 2017.

Pourtant, dans sa note d’exécution budgétaire (NEB) pour 2015 portant sur la mission Remboursements et dégrèvements (2), la Cour des comptes estime que ces dépenses devraient recevoir un traitement et une présentation différents :

– certains remboursements et dégrèvements devraient être enregistrés en déduction des recettes fiscales brutes et non en dépense : il s’agit des dépenses relevant de la mécanique de l’impôt, qui « augmentent artificiellement l’ampleur des dépenses d’intervention de l’État, [et] devraient être comptabilisées directement en minoration des recettes », et des dépenses relevant de l’action Politiques publiques, qui « ne recensent que les fractions des crédits d’impôt qui sont restituées aux contribuables [et] qui, à elles seules, n’ont pas de signification » ;

– à l’inverse, les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux « constituent de vraies dépenses pour l’État », et « la Cour recommande depuis 2011 de ne pas les déduire des recettes fiscales brutes dans la présentation du tableau d’équilibre des ressources et des dépenses qui figure dans les lois de finances » ;

– enfin, selon la Cour, certaines dépenses n’ont « pas de réalité » et ne peuvent pas être classées dans l’une de ces deux catégories : dans certaines situations (admission en non-valeur, remise de débets, dation en paiement, notamment), « alors même qu’aucune recette n’est réalisée, l’apurement comptable de la créance nécessite l’enregistrement d’une recette comme si la créance était recouvrée et, pour ne pas déséquilibrer le budget de l’État, cette recette “artificielle” est compensée par l’enregistrement d’une dépense, tout aussi artificielle, dans la mission Remboursements et dégrèvements ». La Cour estime que ces opérations ne devraient pas être retracées dans la comptabilité budgétaire, car elles ne correspondent à aucun mouvement de trésorerie.

Ces observations sont pertinentes, et le Rapporteur spécial souligne que l’architecture budgétaire de la mission pourrait effectivement être améliorée. Il est néanmoins nécessaire de distinguer selon les situations.

Concernant la première catégorie définie par la Cour des comptes, relative aux actions Mécanique de l’impôt et Politiques publiques, et qui fait l’objet de la recommandation n° 1 de la NEB pour 2015, le Rapporteur spécial souligne que la présentation actuellement retenue par le Gouvernement permet au Parlement d’obtenir des informations utiles. La contraction des recettes brutes et des remboursements et dégrèvements ne dégrade pas particulièrement la lisibilité de l’ensemble du tableau, mais la contraction des recettes brutes et des remboursements et dégrèvements aurait nécessairement pour conséquence d’amoindrir l’information transmise au Parlement au sujet de l’impôt.

À l’occasion de son audition par le Rapporteur spécial, l’administration fiscale a également ajouté que les systèmes d’information ne permettaient pas, en l’état, d’identifier précisément les remboursements et dégrèvements occasionnés par chaque impôt. L’information présentée pourrait dès lors se révéler inexacte.

Le Rapporteur spécial estime donc que cette présentation, qui intègre les actions relatives à la mécanique de l’impôt ainsi qu’aux politiques publiques, est satisfaisante, tout comme sa présentation en atténuation de recettes dans le tableau d’équilibre du budget général.

En revanche, les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux, qui s’élèvent à près de 12 milliards d’euros en 2017, constituent de véritables dépenses de l’État. Dans la lignée de la recommandation n° 2 de la Cour, le Rapporteur spécial considère que de tels transferts aux collectivités territoriales ne devraient pas être présentés en déduction des recettes fiscales brutes, même si leur suivi au sein de la mission Remboursements et dégrèvements n’est pas remis en cause.

Les arguments soulevés par l’administration sont compréhensibles, mais ne permettent pas de justifier la présentation actuellement retenue concernant les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux :

– l’administration considère qu’à l’instar des prélèvements sur recettes (PSR) au profit des collectivités locales, les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux devraient être déduits des recettes brutes ; la Cour souligne que cette présentation n’est pas justifiée, car les PSR sont déduits après le calcul des recettes fiscales nettes de l’État (voir tableau présenté ci-dessus) ;

– l’administration soutient que le rattachement des remboursements et dégrèvements d’impôts locaux aux dépenses dégraderait la lisibilité des dépenses et affaiblirait leur pilotage budgétaire ; la Cour rappelle que, si cet argument a pu présenter une véritable pertinence du fait de l’évolution heurtée de ces sommes au moment de la réforme de la taxe professionnelle, ces variations se sont stabilisées, puisqu’entre 2011 et 2015, la variation annuelle des dépenses du programme 201 a été inférieure à 1,6 % en exécution) ;

– l’administration souligne que certains remboursements et dégrèvements d’impôts locaux, tels que les restitutions de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), relèvent de la mécanique de l’impôt, et ne peuvent ainsi être assimilés à de véritables dépenses ; la Cour estime que ces restitutions devraient, en l’espèce, être enregistrées sur le compte d’avances aux collectivités territoriales et non sur le budget général ;

– enfin, l’administration rappelle que les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux sont comptabilisés en moindres recettes en comptabilité nationale ; la Cour accepte cet argument, mais souligne que les conventions de la comptabilité nationale ne s’imposent pas à la comptabilité budgétaire.

Les autres recommandations formulées par la Cour des comptes, qui ne sont pas strictement liées à l’architecture et à la présentation budgétaire, mais présentent un intérêt certain, seront abordées dans la suite du rapport.

5. Le respect du principe de sincérité budgétaire nécessite de pouvoir évaluer les dépenses de manière fiable, mais la prévision budgétaire peut s’avérer délicate…

Comme le rappelle la Cour des comptes dans un référé portant sur les prévisions de recettes fiscales de l’État et transmis au ministre de l’économie et des finances en 2013 (3), « la qualité des prévisions de recettes fiscales a une influence déterminante sur la sincérité des projets de lois de finances. Pour que l’information du Parlement soit satisfaisante et pour que la crédibilité de la programmation budgétaire soit assurée, ces prévisions doivent reposer sur une organisation rigoureuse et des méthodes transparentes ».

La qualité de la prévision des dépenses pour l’année à venir constitue un enjeu d’autant plus important au niveau de la mission Remboursements et dégrèvements que cette mission, qui est dotée de crédits évaluatifs, finance des dépenses contraintes, pour laquelle l’administration ne dispose que d’une très faible marge de manœuvre. Il est nécessaire pour l’administration comme pour le Parlement de disposer, dès le vote de la loi de finances, d’une évaluation fiable des dépenses auxquelles l’État devra nécessairement consentir au cours de l’année.

La fiabilité de la prévision est au cœur du principe de sincérité budgétaire, inscrit à l’article 47-2 de la Constitution, selon lequel « les comptes des administrations sont réguliers et sincères », et précisé par l’article 32 de la loi organique relative aux lois de finances de 2001.

Le principe de sincérité budgétaire dans la loi organique n° 2001-692
du 1er août 2001 relative aux lois de finances

Titre III : Du contenu et de la présentation des lois de finances

Chapitre Ier : Du principe de sincérité

Article 32. – Les lois de finances présentent de façon sincère l’ensemble des ressources et des charges de l’État. Leur sincérité s’apprécie compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler.

Article 33. – Sous réserve des dispositions de l’article 13 de la présente loi organique, lorsque des dispositions d’ordre législatif ou réglementaire sont susceptibles d’affecter les ressources ou les charges de l’État dans le courant de l’année, les conséquences de chacune d’entre elles sur les composantes de l’équilibre financier doivent être évaluées et autorisées dans la plus prochaine loi de finances afférente à cette année.

La sincérité s’apprécie donc au regard « des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler ». Dans sa décision du 25 juillet 2001 relative à la LOLF (4), le Conseil constitutionnel a tiré de cette formule une conséquence concrète : s’agissant des lois de finances en général, la sincérité est « l’absence d’intention de fausser les grandes lignes de l’équilibre » (5). L’appréciation du juge constitutionnel, assez générale, tient ainsi compte des « aléas » inhérents aux prévisions de recettes ou des « incertitudes particulières » liées à une situation économique dégradée (6).

Le Conseil constitutionnel a néanmoins rappelé que, ne disposant pas d’un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, il ne lui appartenait pas « d’apprécier le montant des autorisations d’engagement et des crédits de paiement votés » (7).

Dans son référé de 2013 portant sur les prévisions de recettes fiscales de l’État, la Cour a considéré que l’impact budgétaire des écarts entre les élasticités des recettes fiscales prévue et constatée entre 2003 et 2012 était « significatif », ajoutant que « s’il ne représente que 1,7 % du montant annuel des recettes fiscales, il est en effet d’un ordre de grandeur voisin de la croissance annuelle moyenne de ces recettes sur cette période à législation constante (2,8 % par an) ».

Le Rapporteur spécial a effectué la comparaison entre les prévisions de recettes fiscales et de remboursements et dégrèvements, et les montants enregistrés en exécution depuis 2012. Il constate que de tels écarts demeurent.

Sur les quatre dernières années la prévision de recettes fiscales brutes a le plus souvent été optimiste, et les remboursements et dégrèvements, surévalués. Le Rapporteur spécial relève que les écarts les plus importants en pourcentage affectent l’évaluation des remboursements et dégrèvements : en 2013, les remboursements et dégrèvements exécutés ont été inférieurs de près de 10 % à la prévision initiale. L’exécution des recettes fiscales nettes est en revanche assez proche de la prévision.

ÉCARTS CONSTATÉS PAR RAPPORT AUX PRÉVISIONS

(en milliards d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

 

LFI

LR

Écart

en Mds€

(en %)

LFI

LR

Écart

en Mds€

(en %)

LFI

LR

Écart

en Mds€

(en %)

LFI

LR

Écart

en Mds€

(en %)

Recettes fiscales brutes

360,4

359,0

– 1,4

(– 0,4)

394,8

370,2

– 24,6

(– 6,2)

386,4

370,4

– 16,0

(– 4,1)

378,6

383,3

+ 4,8

(+ 1,3)

– Remboursements
et dégrèvements

85,4

90,6

+ 5,1

(+ 6,0)

96,2

86,2

– 9,9

(– 10,3)

102,1

96,1

– 5,9

(– 5,8)

99,5

103,2

+ 3,7

(+ 3,7)

= Recettes fiscales nettes

274,9

268,4

– 6,5

(– 2,4)

298,6

284,0

– 14,6

(– 4,9)

284,4

274,3

– 10,0

(– 3,5)

279,1

280,1

+ 1,0

(+ 0,4)

Source : lois de finances.

Ces écarts s’expliquent par la méthodologie suivie par l’administration pour évaluer les recettes fiscales et les remboursements et dégrèvements. Lors de son audition par le Rapporteur spécial, l’administration a rappelé les modalités de calcul utilisées. Ainsi, la mission Remboursements et dégrèvements ne fait pas l’objet d’une prévision en tant que telle. La prévision des recettes fiscales nettes est ainsi déterminante. Les services évaluent dans un premier temps le montant des recettes fiscales nettes ; les remboursements et dégrèvements sont ensuite simulés à partir de ce premier travail, pour aboutir aux recettes fiscales brutes.

La direction du budget a également rappelé qu’elle concentrait ses analyses sur le montant des recettes fiscales nettes, qui lui permet de calculer le solde budgétaire.

Au sein du programme 200, qui représente 89 % des crédits de la mission pour 2017, l’évaluation des différentes actions pose des difficultés plus ou moins importantes selon les actions :

– l’action n° 12, relative aux politiques publiques, est celle qui présente le moins de difficultés, les dépenses fiscales étant relativement stables au cours du temps ;

– l’action n° 13, consacrée à la gestion de l’impôt, bénéficie également d’une certaine stabilité de la dépense, malgré des difficultés récurrentes concernant le suivi des contentieux fiscaux (qui sera abordé dans le point n° 6 du présent avant-propos) ;

– l’action n° 11, qui retrace les dépenses dues à la mécanique de l’impôt, est la plus complexe à modéliser pour les services. Pour la taxe sur la valeur ajoutée et pour l’impôt sur les sociétés, l’administration analyse l’évolution d’un agrégat économique qui influence directement la dynamique de chaque impôt (assiette des emplois taxables pour la taxe sur la valeur ajoutée, bénéfice net pour l’impôt sur les sociétés), et évalue, à partir de l’évolution attendue de cet agrégat, le montant des remboursements et dégrèvements à effectuer. Chaque impôt présente néanmoins des difficultés spécifiques : la concentration de l’assiette de l’impôt sur les sociétés affecte la fiabilité de l’évaluation car le comportement inattendu d’une seule grande entreprise peut faire dévier significativement la prévision, tandis qu’en matière de taxe sur la valeur ajoutée, le modèle inclut le rythme de traitement des dossiers par l’administration.

La méthodologie employée pour évaluer les crédits de l’action n° 11 – Mécanique de l’impôt, en matière de taxe sur la valeur ajoutée et d’impôt sur les sociétés

Prévision des remboursements et dégrèvements de TVA

La prévision de la TVA est fondée sur la notion de TVA de période d’affaires (proche de celle de la comptabilité nationale), qui évolue d’une année à l’autre en fonction de la croissance estimée des emplois taxables. La TVA budgétaire est ensuite déduite de la TVA de période d’affaires par application d’un décalage comptable.

Dans le programme 200, qui retrace les remboursements et dégrèvements (R&D) d’impôts d’État, les R&D de TVA sont répartis dans deux sous actions : les remboursements et restitutions liés à la mécanique de l’impôt (200-11-02) et les R&D liés à la gestion des produits de l’État (200-13-04).

La prévision des remboursements et restitutions liés à la mécanique de l’impôt relatifs à la TVA est opérée en trois étapes successives :

– Étape 1 : Détermination de l’enveloppe globale des remboursements de crédits de TVA (RCTVA) ;

– Étape 2 : Détermination de l’enveloppe utile des RCTVA ;

– Étape 3 : Prise en compte des rythmes de traitement par les services fiscaux.

Étape 1 : Détermination d’une enveloppe globale des remboursements de crédits de TVA (RCTVA)

L’enveloppe de crédits est ici considérée au sens large, regroupant les crédits de TVA demandés en remboursement comme ceux reportés en fin d’année, qu’il s’agisse de dépôts à temps ou de dépôts tardifs.

Dans ce contexte, l’exploitation de la chronique de cet agrégat sur série longue, corrigée d’éventuels effets comportementaux perturbateurs (dépôts effectués de manière tardive par rapport à leur date théorique), permet d’établir un modèle économétrique construit à partir des données des comptes trimestriels de l’Insee.

L’évolution des dépôts de demandes de remboursements de crédits de TVA résulte de l’application de ce modèle aux prévisions macro-économiques inscrites dans la note de conjoncture de l’Insee.

Étape 2 : Détermination de l’enveloppe utile des RCTVA

Lors du dépôt d’une déclaration faisant apparaître un crédit de TVA, les entreprises arbitrent entre le report de ce crédit sur la déclaration de TVA suivante ou la demande de remboursement de cette créance.

Les conséquences budgétaires ne sont pas les mêmes, la demande de remboursement se traduisant par une dépense budgétaire, à l’inverse du report de crédit.

Dans ce contexte, la transposition budgétaire de la masse de crédits dégagés est modulée par la propension au report, par les contribuables, de ces crédits.

Pour les prévisions, les propensions retenues correspondent à celles observées par le passé.

Étape 3 : Prise en compte des rythmes de traitement par les services fiscaux

Les dépenses budgétaires dépendent des rythmes de traitement des dossiers par l’administration fiscale.

Les hypothèses régissant le traitement des demandes de remboursement de crédit de TVA sont regroupées dans des matrices de rythmes d’ordonnancement (délai entre la date de dépôt de la demande de remboursement et celle de son ordonnancement) d’une part, et des matrices de paiement (délai entre la date l’ordonnancement et celle du paiement), d’autre part.

Les rythmes sont prévus sur la base de ceux constatés au cours des années passées.

Nota bene : La prévision des remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l’État consiste, pour sa part, à reporter les montants observés antérieurement.

Prévision des remboursements d’excédents d’acompte d’IS

Chaque année, une prévision est faite, à partir d’hypothèses macro-économiques, de l’évolution du montant de l’impôt sur les sociétés au titre d’un exercice donné.

Pour chaque entreprise, la liquidation de l’impôt (au mois de mai pour le plus grand nombre) conduit à faire une comparaison entre l’impôt net des imputations de crédits et les acomptes versés (constat d’un excédent de versement ou d’un complément à verser).

D’un point de vue macro-économique, le niveau du solde net d’impôt sur les sociétés relatif audit exercice est donc partagé entre :

– un solde brut, pour les entreprises débitrices au moment de la liquidation de leur exercice ;

– des restitutions d’excédents d’impôt sur les sociétés (REIS), pour les entreprises créditrices au moment de la liquidation de leur exercice.

Cette répartition est opérée au regard des ratios observés par le passé.

La prévision au titre d’un exercice donné est ensuite transposée en prévision budgétaire en mobilisant des poids constatés par le passé.

Concrètement, il s’agit de partager, d’une part, le solde brut versé au titre de N entre N et N+1 et, d’autre, part les REIS restitués au titre de N entre N et N+1.

Les dépenses comptabilisées dans la sous-action 200-11-01 correspondent aux REIS budgétaires de l’année concernée.

L’attention est appelée sur la difficulté à prédire le niveau de ces restitutions.

De manière générale, ce niveau est d’autant plus élevé que le résultat fiscal des entreprises se dégrade entre les deux années concernées.

Par ailleurs, à niveau d’évolution donnée de l’impôt entre deux années, le montant des restitutions est d’autant plus élevé que l’écart type est grand.

Il est notamment possible qu’en dépit d’une augmentation de l’impôt spontané entre deux années, les REIS progressent concomitamment.

Source : DGFiP, bureau GF-3C, chargé des statistiques fiscales.

Lors de son audition par le Rapporteur spécial, l’administration fiscale a ainsi rappelé que les recettes de taxe sur la valeur ajoutée étaient les plus difficiles à évaluer.

Le tableau suivant détaille les écarts constatés entre les différentes actions et sous actions du programme 200, depuis 2012.

ÉCARTS CONSTATÉS ENTRE LA PRÉVISION ET L’EXÉCUTION
AU SEIN DU PROGRAMME 200, DEPUIS 2012

(en millions d’euros et en %)

 

2012

2013

2014

2015

 

en M€

en %

en M€

en %

en M€

en %

en M€

en %

Action 11

2 077

3,5 %

– 7 182

– 11,0%

– 1 562

– 2,4 %

3 139

4,9 %

Sous-action 11-01

1 501

14,2 %

– 1 746

– 14,2 %

489

3,5 %

2 164

14,7 %

Sous-action 11-02

295

0,6 %

– 5 392

– 10,3%

– 2 177

– 4,4 %

1 023

2,1 %

Sous-action 11-03

281

173,5 %

– 173

– 49,4%

19

10

Sous-action 11-04

 

129

 

107

77,0 %

– 58

– 24,7 %

Action 12

– 1 042

– 12,1 %

– 118

– 1,8 %

– 2 222

– 16,1 %

998

7,9%

Sous-action 12-01

– 8

– 0,4 %

– 46

– 2,4 %

231

13,4 %

124

6,7 %

Sous-action 12-02

173

10,7 %

406

38,6 %

177

9,2 %

214

9,9 %

Sous-action 12-03

– 959

– 29,9 %

– 506

– 21,1 %

– 2 655

– 29,8 %

558

7,4 %

Sous-action 12-04

– 226

– 21,5 %

83

11,8 %

45

6,3 %

107

17,9 %

Sous-action 12-05

4

 

0,0 %

– 1

– 25,0 %

– 2

– 66,7 %

Sous-action 12-06

– 27

– 5,1 %

– 54

– 9,9 %

– 19

– 3,6 %

– 3

– 0,6 %

Action 13

2 907

42,8 %

– 731

– 5,4 %

– 2 189

– 17,1 %

– 458

– 3,9 %

Sous-action 13-01

– 455

– 18,4%

– 95

– 3,9 %

– 214

– 9,2 %

– 124

– 5,3 %

Sous-action 13-02

714

200,0 %

230

25,1 %

42

3,7 %

295

31,1 %

Sous-action 13-03

– 496

– 43,1 %

– 1 008

– 25,4%

– 1 440

– 48,5 %

– 941

– 40,0 %

Sous-action 13-04

1 474

279,2 %

200

9,5 %

–  328

– 14,3 %

50

2,3 %

Sous-action 13-05

289

78,7 %

123

22,3 %

– 272

– 40,3 %

– 4

– 0,9 %

Sous-action 13-06

– 317

– 25,3 %

– 142

– 19,7 %

124

21,5 %

109

17,6 %

Sous-action 13-07

1 686

366,5 %

85

4,5 %

326

16,5 %

406

19,3 %

Sous-action 13-08

12

5,7 %

– 124

– 12,4 %

– 427

– 49,0 %

– 249

– 33,6 %

Total
programme 200

3 942

5,2 %

– 8 031

– 9,4 %

– 5 973

– 6,6 %

3 679

4,2 %

Source : réponses aux questionnaires.

Le Rapporteur spécial salue les efforts accomplis par l’administration fiscale pour renforcer et fiabiliser les outils d’évaluation économique. Il rappelle que l’existence d’écarts entre prévision et exécution reste inévitable du fait de la difficulté à obtenir des prévisions macroéconomiques exactes, de la multiplicité des dispositifs fiscaux, de la diversité des contribuables. Il souligne néanmoins que si la qualité des prévisions semble a atteint un niveau satisfaisant, l’administration doit rester vigilante afin de préserver cette efficacité.

6. … en particulier concernant le suivi des contentieux fiscaux

Cet exercice s’avère particulièrement délicat pour l’administration lorsqu’il s’agit d’estimer le coût à venir des contentieux fiscaux. Ces contentieux opposent l’État à certains contribuables, personnes physiques comme personnes morales, qui réclament la restitution de sommes indûment reçues, le plus souvent après qu’une disposition législative a été déclarée inconstitutionnelle ou contraire au droit de l’Union européenne.

Actuellement, cinq affaires présentent un risque financier important pour l’État : il s’agit des contentieux dits « Précompte », « OPCVM », « Stéria », « de Ruyter » et « Contribution de 3 % ». Les origines juridiques de chaque contentieux, l’historique et l’actualité de la procédure, ainsi que les enjeux budgétaires relatifs à chaque contentieux seront détaillés dans la suite de ce rapport (voir le III de la partie I relative au programme 200).

La question de la juste évaluation du coût des contentieux fiscaux n’est pas nouvelle. En 2013, dans son référé relatif aux contentieux communautaires précompte mobilier et OPCVM (8), la Cour des comptes relevait « plusieurs dysfonctionnements s’agissant du contentieux OPCVM », et avançait que « le risque de décaissement, pourtant recensé dans la comptabilité générale de l’État depuis l’exercice 2008, n’a pas été considéré à temps en loi de finances ainsi que dans la trajectoire des finances publiques du programme de stabilité, nuisant à la sincérité de ces exercices ».

Dans le cadre de ses travaux, le Rapporteur spécial a effectivement constaté que des écarts récurrents existaient entre l’évaluation préalable de la dépense et l’exécution budgétaire (voir le A du III de la partie I). Néanmoins, cette prévision a été prudente, l’administration ayant eu tendance à surévaluer les perspectives de décaissement pour l’État.

Ces écarts, qui attestent du caractère difficilement prévisible du coût budgétaire annuel des contentieux fiscaux pour les finances publiques, s’expliquent par différents facteurs.

Lors de son audition par la commission des finances de l’Assemblée nationale, le directeur général des finances publiques, M. Bruno Parent, a souligné que l’administration avait « beaucoup de difficultés à évaluer [ce qu’elle devait] inscrire à titre de provisions pour une année budgétaire donnée » (9). Pour expliquer ces décalages persistants, M. le directeur général a précisé que « trois acteurs différents sont en effet en présence, dont l’action combinée détermine le niveau de la dépense effective, quand elle s’observe » :

– le juge, d’abord : l’administration ne peut prévoir quand il va se prononcer, ni, bien entendu, dans quel sens, et des incertitudes pèsent donc sur les cas les plus compliqués et les plus litigieux ;

– le justiciable, ensuite : une fois qu’une juridiction lui a donné raison, la complexité des affaires est parfois telle qu’il doit monter un dossier, ce qui implique de produire les pièces attestant qu’il remplit bien les conditions d’éligibilité au remboursement ;

– l’administration, enfin : la capacité de traitement des services fiscaux n’est pas illimitée, et face au nombre très important des dossiers, les délais peuvent en être rallongés.

Sur ce sujet, le Rapporteur spécial demande au Gouvernement de mieux appliquer l’article 104 de la loi de finances pour 2014, qui prévoit un mécanisme d’information automatique du Parlement, tous les six mois, sur les lettres de mise en recouvrement et les avis motivés de la Commission européenne dans le cadre de la procédure de recours en manquement, pouvant avoir une incidence sur les finances de l’État. Cet article avait été inséré par amendement parlementaire, à l’initiative de la précédente Rapporteure spéciale de la mission Remboursements et dégrèvements, Mme Eva Sas. Ces dispositions, adoptées il y a bientôt trois ans, n’ont pas encore été appliquées.

L’article 104 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013
de finances pour 2014

Article 104. – Les commissions permanentes chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat sont informées, sur une base semestrielle, de la teneur des lettres de mise en recouvrement et des avis motivés envoyés par la Commission européenne dans le cadre de la procédure prévue à l’article 258 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et qui peuvent avoir une incidence sur les finances de l’État. Ces commissions sont également destinataires d’une évaluation de cette incidence financière.

Ces lettres et avis sont communiqués aux présidents et aux rapporteurs généraux de ces commissions, à leur demande, en application de l’article 57 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. Sauf accord du Gouvernement, les documents transmis en application du présent alinéa ne peuvent être rendus publics.

Lorsqu’il recourt à une dérogation prévue par le droit européen en matière fiscale, le Gouvernement en informe les commissions permanentes chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Les travaux menés par le Rapporteur spécial ont mis en évidence la difficulté à évaluer préalablement le risque de contentieux lors de l’adoption d’une disposition fiscale nouvelle, en raison de la complexité du droit, de l’évolution de son interprétation, et des changements de la jurisprudence. Le service juridique de la direction générale des finances publiques a notamment présenté au Rapporteur spécial le cas d’une disposition fiscale qui, au moment son adoption, avait été considérée comme compatible avec le droit européen au regard de la jurisprudence, mais qui, quelques années plus tard, a fait l’objet d’une question préjudicielle. Le Rapporteur spécial appelle néanmoins le Gouvernement et le Parlement à maintenir leur vigilance, afin de limiter au mieux le risque de contentieux fiscal.

7. Le présent rapport analyse les crédits pour 2017, mais la mission devrait connaître d’importantes évolutions dès l’année suivante, en raison de la mise en place du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu

Dans le cadre de la mise en place du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, inscrit à l’article 38 du projet de loi de finances pour 2017, le Gouvernement a prévu la mise en œuvre, en 2018, d’un mécanisme ad hoc exceptionnel de transition, appelé « crédit d’impôt de modernisation du recouvrement » (CIMR).

Ce crédit d’impôt permettra la transition entre le système actuel de recouvrement de l’impôt, caractérisé par un décalage d’un an entre la perception des revenus et leur paiement, et celui proposé par le Gouvernement, qui assure la contemporanéité du paiement de l’impôt.

À politique fiscale inchangée – seul le mode de recouvrement évolue, les dispositifs fiscaux actuellement en vigueur ne seront pas modifiés par cette réforme –, le montant des dépenses retracées par la mission Remboursements et dégrèvements devrait connaître une importante augmentation.

L’évaluation préalable de l’article 38, annexée au projet de loi de finances pour 2017, précise le fonctionnement du CIMR.

Le projet de réforme du Gouvernement prévoit que l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2017 sera dans un premier temps liquidé dans les conditions habituelles à l’été de l’année 2018 – à l’instar, par exemple, de l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2016, qui sera liquidé à l’été de l’année 2017, selon les règles actuellement en vigueur. Préalablement, chaque foyer fiscal aura déclaré l’intégralité des revenus perçus lors de l’année 2017, indépendamment des conséquences potentielles de la mise en œuvre du prélèvement à la source, prévue à compter du 1er janvier 2018.

À la suite de la liquidation de l’impôt sur le revenu théorique, dû au titre de l’année 2017, issue du barème progressif de l’impôt sur le revenu – et, le cas échéant de la décote et de la réduction d’impôt en faveur des ménages modestes et moyens prévue au b du 4 de l’article 197 du code général des impôts par le projet de loi de finances pour 2017 –, les réductions d’impôt acquises lors de cette même année s’imputeront dans la limite de l’impôt sur le revenu théoriquement dû, sans pouvoir excéder ce dernier. Les crédits d’impôt acquis lors de cette même année s’imputeront eux aussi selon les règles actuellement en vigueur et ouvriront droit, le cas échéant, à restitution.

À l’issue de cette liquidation sera appliqué le crédit d’impôt de modernisation du recouvrement, calculé par l’administration fiscale, correspondant à l’impôt sur le revenu brut, c’est-à-dire avant imputation des éventuelles réductions et crédits d’impôt, afférent aux revenus non exceptionnels perçus lors de l’année 2017 et concernés par le prélèvement à la source prévu par le projet de réforme du Gouvernement à compter du 1er janvier 2018.

Le CIMR permettra donc :

– d’annuler l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2017 afférent aux revenus non exceptionnels perçus lors de l’année 2017 et concernés par le prélèvement à la source. Le contribuable pourra ainsi bénéficier pleinement des effets du prélèvement à la source dès l’entrée en vigueur de celui-ci ;

– de maintenir le bénéfice des réductions et crédits d’impôt acquis au titre de l’année 2017, préservant ainsi le niveau de soutien aux ménages et aux différents secteurs sociaux et économiques liés à l’existence de ces avantages fiscaux au titre de cette même année.

L’évaluation préalable précise que le CIMR sera restituable. Le coût du CIMR est estimé par l’administration fiscale à 69,7 milliards d’euros, dont une partie sera supportée par le programme 200 en 2018. À partir de 2019, le montant des restitutions au titre de l’impôt sur le revenu devrait diminuer, et s’établir à un niveau légèrement supérieur aux ouvertures actuelles de crédit.

Interrogée à ce sujet, l’administration fiscale a indiqué avoir démarré sa réflexion, et a souligné que d’importants travaux de modélisation seront nécessaires avant de pouvoir évaluer précisément le montant des remboursements et dégrèvements d’impôt sur le revenu retracés au sein de la mission, à partir de 2018.

Exemples de restitutions opérées suite à la mise en place du crédit d’impôt de modernisation du recouvrement (CIMR)

Exemple 1 :

Soit un foyer fiscal dont tous les revenus sont soumis au prélèvement à la source et dont l’impôt est décomposé de la manière suivante :

– Impôt avant réduction de 50 ;

– Crédit d’impôt de 60.

Selon la législation applicable jusqu’aux revenus 2016, ce foyer se fait restituer 10, ce montant étant comptabilisé en dépense du programme 200.

Au titre des revenus 2017, le CIMR viendra « annuler » l’impôt à payer avant réduction. Ce foyer se fera donc restituer 60.

À partir des revenus 2018, les acomptes versés viendront s’imputer sur l’impôt final, contribuant, dans la même perspective, à une augmentation des dépenses du programme 200.

Exemple 2 :

Soit un foyer fiscal dont tous les revenus sont soumis au PAS et dont l’impôt est décomposé de la manière suivante :

– Impôt avant réduction de 50 ;

– Réduction de 20 ;

– Crédit d’impôt de 60.

Sans le prélèvement à la source, ce foyer se fait restituer 30, ce montant étant comptabilisé en dépense du programme 200.

Supposons qu’en 2018, le foyer ait acquitté 50 d’acomptes. À l’été 2019, les acomptes versés seront intégralement remboursés, portant le total des remboursements de 30 à 80.

En d’autres termes, la réduction et le crédit d’impôt seront remboursés dans leur intégralité.

Source : DGFiP, bureau GF-3C, chargé des statistiques fiscales.

PARTIE I. LE PROGRAMME 200
REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS D’IMPÔTS D’ÉTAT

I. LA PRÉVISION BUDGÉTAIRE POUR 2017

La dépense du programme 200 est attendue en augmentation d’environ 4,5 milliards d’euros entre 2016 et 2017 (+ 4,8 %). Le tableau suivant présente les crédits du programme 200 depuis 2012.

ÉVOLUTION PLURIANNUELLE DES CRÉDITS DU PROGRAMME 200

(en millions d’euros)

 

Exécution 2012

Exécution 2013

Exécution 2014

Exécution 2015

Prévision 2016 (révisée)

Prévision 2017

Variation / prog. (1)

Action 11

61 800

57 868

62 395

66 617

67 771

69 757

44,5 %

Sous-action 11-01

12 097

10 554

14 523

16 898

16 581

17 174

13,3 %

Sous-action 11-02

49 260

47 008

47 607

49 532

51 000

52 419

31,8 %

Sous-action 11-03

443

177

19

10

10

– 0,2 %

Sous-action 11-04

129

246

177

180

164

– 0,4 %

Action 12

7 592

6 515

11 597

13 613

13 018

15 785

62,0 %

Sous-action 12-01

2 222

1 882

1 951

1 962

55

– 1,2 %

Sous-action 12-02

1 794

1 459

2 108

2 372

2 636

2 628

– 0,2 %

Sous-action 12-03

2 244

1 894

6 267

8 058

8 853

11 519

59,7 %

Sous-action 12-04

825

787

760

706

834

1 120

6,4 %

Sous-action 12-05

4

3

3

1

1

3

0,0 %

Sous-action 12-06

503

490

508

514

639

515

– 2,8 %

Action 13

9 703

12 827

10 638

11 279

11 711

11 421

– 6,5 %

Sous-action 13-01

2 015

2 320

2 106

2 236

2 298

2 348

1,1 %

Sous-action 13-02

1 071

1 145

1 187

1 245

1 357

1 317

– 0,9 %

Sous-action 13-03

654

2 967

1 527

1 413

1 627

1 627

0,0 %

Sous-action 13-04

2 002

2 300

1 972

2 200

2 200

2 200

0,0 %

Sous-action 13-05

656

675

403

452

600

500

– 2,2 %

Sous-action 13-06

938

578

702

729

716

716

0,0 %

Sous-action 13-07

2 146

1 970

2 296

2 513

2 400

2 200

– 4,5 %

Sous-action 13-08

221

872

445

491

513

513

0,0 %

Total programme 200

79 095

77 210

84 630

91 509

92 500

96 963

100,0 %

(1) Les données présentées dans la colonne « Variation / prog. » correspondent à la part que représente la variation de chaque action et sous-action par rapport à la variation totale du programme entre 2016 et 2017. Ainsi, la variation de la sous-action 11-02 explique 31,8 % de la variation totale du programme. Un sens de variation positif signifie que les crédits du programme et de l’action, ou la sous-action, évoluent dans le même sens, tandis qu’à l’inverse, un sens de variation négatif signifie que les crédits du programme et de l’action, ou la sous-action, évoluent en sens contraire.

Source : réponses aux questionnaires.

Cette augmentation résulterait principalement des effets :

– de l’augmentation prévue à hauteur d’environ 3 milliards d’euros des dépenses de la sous-action 200-12-03 (Politiques publiques – IS) du fait des remboursements en 2017 de la créance résiduelle du CICE millésimé 2013 ;

– de la hausse anticipée à hauteur d’environ 1,4 milliard d’euros des dépenses de la sous-action 200-11-02 (Mécanique de l’impôt – TVA) au regard de la croissance des emplois taxables (prévue à 2,4 % entre les deux années) ;

– de l’augmentation prévue à hauteur d’environ 0,6 milliard d’euros des dépenses de la sous-action 200-11-01 (Mécanique de l’impôt – IS) du fait des effets cumulés :

• d’une évolution légèrement moins dynamique du bénéfice fiscal attendue entre 2015 et 2016 ;

• d’une hausse tendancielle des imputations de créances de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) sur l’IS brut, générant un surplus de remboursements d’excédents ;

• et d’une augmentation attendue en 2017 des remboursements de créances de reports en arrière de déficit.

Ces effets ne devraient être que partiellement compensés par l’incidence de la suppression en 2017 des remboursements de contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés.

A. LES CRÉDITS D’IMPÔT À DESTINATION DES PARTICULIERS

1. La sous-action 200-12-02 : les crédits d’impôt en matière d’impôt sur le revenu

Sur l’ensemble de la législature, les dépenses de la sous-action n° 200-12-02 (Politiques publiques – IR) ont connu une hausse significative. Entre 2016 et 2017, les dépenses ont assez peu évolué, dans un contexte d’assez grande stabilité de la législation applicable.

ÉVOLUTION DE LA SOUS-ACTION 200-12-02 :
CRÉDITS D’IMPÔT EN MATIÈRE D’IMPÔT SUR LE REVENU

(en millions d’euros)

 

Exécution 2012

Exécution 2013

Exécution 2014

Exécution 2015

Prévision
2016

(révisée)

Prévision 2017

Sous-action
200-12-02 : IR

1 794

1 459

2 108

2 372

2 636

2 628

Variation (M€)

– 335

+ 649

+ 264

+ 264

– 8

Variation (%)

– 18,7 %

+ 44,5 %

+ 12,5 %

+ 11,1 %

– 0,3 %

Source : réponses aux questionnaires.

Les principaux dispositifs fiscaux donnant lieu à restitution d’impôt sur le revenu, retracés dans l’action 200-12-02, sont présentés dans le tableau suivant. Seule la part restituée est retracée dans la mission Remboursements et dégrèvements : la somme de la part restituée et de la part imputée représente le montant total de la dépense fiscale occasionnée par le dispositif, qui figure dans le tome II des Voies et moyens.

Par souci de lisibilité, seuls les crédits d’impôts dont la part restituée est supérieure à 20 millions d’euros ont été présentés : pour 2017, le montant total de la part restituée de ces crédits d’impôts représente 95 % du total de la sous-action.

LES DISPOSITIFS FISCAUX À DESTINATION DES PARTICULIERS

Sous-action 200-12-02 : Crédits d’impôt en matière d’impôt sur le revenu

(en millions d’euros)

Dispositif

Nombre de bénéficiaires 2015
(en millions)

Exécution 2015

Prévision 2016 (révisée)

Prévision 2017

En % de la sous-action (1)

Part restituée

Part imputée

Part restituée

Part imputée

Part restituée

Part imputée

Crédit d’impôt pour la transition énergétique

0,66

344

530

680

990

680

990

25,9 %

Crédit d’impôt égal au prélèvement forfaitaire obligatoire

12,7

623

3 495

598

3 304

595

3 290

22,6 %

Crédit d’impôt pour frais de garde des enfants âgés de moins de six ans

1,86

461

714

510

695

523

712

19,9 %

Crédit d’impôt au titre de l’emploi d’un salarié à domicile pour les contribuables exerçant une activité professionnelle ou demandeurs d’emploi depuis au moins trois mois

1,51

250

1 736

275

1 750

275

1 750

10,5 %

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

0,4

206

574

231

651

237

671

9,0 %

Crédit d’impôt sur le revenu au titre des intérêts d’emprunt supportés à raison de l’acquisition ou de la construction de l’habitation principale

1,10

271

492

160

260

76

124

2,9 %

Crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage

0,06

38

27

30

20

30

20

1,1 %

Crédit d’impôt au titre des cotisations versées aux organisations syndicales représentatives des salariés

1,646

25

127

28

126

28

128

1,1 %

Crédit d’impôt pour dépenses d’équipements de l’habitation principale en faveur de l’aide aux personnes

0,04

20

21

25

23

25

23

1,0 %

Crédit d’impôt en faveur des entreprises agricoles utilisant le mode de production biologique

0,01

19

4

22

5

22

5

0,8 %

Total

2 489

2 559

2 770

2 491

2 673

2 489

94,8 %

(1) Cette colonne présente la part que représente la somme restituée au titre de chaque dispositif, par rapport au montant total des crédits affectés pour la sous-action.

Source : réponses aux questionnaires.

Depuis 2015, les principales évolutions législatives ayant eu des conséquences sur le montant des dépenses de la sous-action sont les suivantes :

– le crédit d’impôt pour la transition énergétique (ex-crédit d’impôt sur le revenu applicable aux dépenses d’équipements visant à améliorer la qualité environnementale de l’habitation principale), inscrit à l’article 200 quater du code général des impôts : l’article 3 de la loi de finances pour 2015 a réorienté le dispositif vers les dépenses permettant de contribuer à la transition énergétique, et a simplifié les modalités d’application de l’avantage en supprimant le mécanisme du bouquet de travaux mis en place fin 2013 et en adoptant un taux unique pour l’ensemble des dépenses. De nouvelles dépenses ont été ajoutées à la liste de celles ouvrant droit au crédit d’impôt, et son taux a été porté à 30 % pour l’ensemble des dépenses (contre 15 % à 25 % auparavant) ;

– le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt pour l’habitation principale : la diminution entre 2015 et 2016, puis entre 2016 et 2017, du coût du crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt pour l’habitation principale résulte de l’abrogation du crédit d’impôt prévue par l’article 90 de la loi de finances pour 2011, cette suppression s’inscrivant dans le cadre plus large de la réforme visant à renforcer le dispositif du prêt à taux zéro.

Les dépenses liées au crédit d’impôt en faveur de la compétitivité et de l’emploi connaissent également une augmentation significative (+ 20 millions d’euros).

Les montants relatifs autres dispositifs retracés dans la sous-action sont stables.

En particulier, le coût du crédit « prélèvement forfaitaire obligatoire » est stable par rapport en 2016, en très légère diminution (– 17 millions d’euros, soit – 0,4 %).

Conformément à la loi de finances pour 2013, les revenus du capital ont basculé d’une imposition forfaitaire au barème de l’impôt sur le revenu.

L’option pour le prélèvement forfaitaire libératoire a donc été supprimée pour les produits de placement à revenu fixe et pour les revenus distribués perçus à compter du 1er janvier 2013. Ces revenus sont désormais imposés au barème progressif, après application d’un prélèvement forfaitaire obligatoire (PFO) non libératoire effectué lors de leur versement. Le taux du prélèvement est fixé à 24 % sur les produits de placement à revenu fixe et à 21 % sur les revenus distribués. Les contribuables remplissant certaines conditions de revenus peuvent demander à être dispensés de ce prélèvement.

Lors du dépôt de la déclaration de revenus, les contribuables appartenant à un foyer fiscal qui a perçu un montant annuel de produits de placement à revenu fixe n’excédant pas 2 000 euros peuvent opter pour leur imposition au taux forfaitaire de 24 % au lieu de l’imposition au barème.

L’option pour le prélèvement forfaitaire libératoire a toutefois été maintenue pour les produits des bons ou contrats de capitalisation et d’assurance vie.

Lors de l’établissement de la déclaration de revenus, le PFO ouvre droit à un crédit d’impôt correspondant au montant du prélèvement forfaitaire obligatoire (représentatif d’un acompte sur l’impôt dû) effectué sur les produits de placement à revenu fixe au taux de 24 % et sur les revenus distribués au taux de 21 % à compter du 1er janvier 2013, lors de leur versement.

Ce crédit d’impôt est afférent à des revenus soumis au barème de l’impôt sur le revenu ou, s’agissant des intérêts d’un montant inférieur à 2 000 euros, imposables sur option au taux de 24 %.

Si le montant du crédit d’impôt excède l’impôt dû, l’excédent est restitué.

Le tableau suivant présente l’évolution du coût du crédit d’impôt « prélèvement forfaitaire obligatoire » depuis 2013.

COÛT DU CRÉDIT D’IMPÔT « PRÉLÈVEMENT FORFAITAIRE OBLIGATOIRE »

(en millions d’euros et en millions de foyers)

 

Exécution 2013

Exécution 2014

Prévision 2015

Exécution 2015

Prévision 2016

Prévision

2017

PFO

3 226

4 527

4 374

4 185

4 025

4 326

CI PFO

3 998

4 396

4 118

3 902

3 885

Nombre de foyers concernés

13,26

12,76

Source : réponses aux questionnaires.

L’augmentation anticipée du PFO entre 2016 et 2017 résulte essentiellement de l’extension du champ d’application de l’acompte à verser le 15 octobre.

Selon l’administration fiscale, le nombre de bénéficiaires du PFO n’est pas connu, ce prélèvement étant opéré à la source par des tiers (établissements bancaires et sociétés d’assurance essentiellement). Les données présentées correspondent aux bénéficiaires du crédit d’impôt PFO en 2015 et 2014 (au titre des revenus 2014 et 2013) ayant procédé à leur déclaration de revenus dans les délais légaux.

2. La sous-action 200-12-06 : les remboursements et dégrèvements de contribution à l’audiovisuel public

La sous-action n° 200-12-06 retrace les remboursements et dégrèvements de contributions à l’audiovisuel public, qui regroupe essentiellement les dégrèvements en faveur des personnes de condition modeste et les dégrèvements au titre des « droits acquis ».

Le tableau suivant présente les dépenses de cette sous-action depuis 2012. Les crédits pour 2017 devraient connaître une diminution significative, et revenir à leur niveau de 2015.

ÉVOLUTION DE LA SOUS-ACTION 200-12-06 :
DÉGRÈVEMENTS DE CONTRIBUTION À L’AUDIOVISUEL PUBLIC

(en millions d’euros)

 

Exécution 2012

Exécution 2013

Exécution 2014

Exécution 2015

Prévision
2016

(révisée)

Prévision 2017

Sous-action
200-12-06 : CAP

503

490

508

514

639

515

Variation (M€)

– 13

+ 18

+ 6

+ 125

– 124

Variation (%)

– 2,6 %

+ 3,7 %

+ 1,2 %

+ 24,3 %

– 19,4 %

Source : réponses aux questionnaires.

L’article 1605 bis du code général des impôts accorde dans son 2° un dégrèvement d’office de contribution à l’audiovisuel public (CAP) en faveur des bénéficiaires d’exonération ou de dégrèvements de taxe d’habitation.

Sont concernés par cette dépense :

– les personnes exonérées ou dégrevées de la taxe d’habitation en application des 2° et 3° du II de l’article 1408, des I et IV de l’article 1414, de l’article 1414 B lorsqu’elles remplissent les conditions prévues au I de l’article 1414 et de l’article 1649 ;

– les contribuables non bénéficiaires d’exonération ou d’un dégrèvement de contribution à l’audiovisuel public, dont le revenu fiscal de référence est nul.

Dans ce contexte, la dépense fiscale (c’est-à-dire la somme de la part restituée, enregistrée dans la mission Remboursements et dégrèvements, et de la part imputée sur l’impôt) correspondante s’est élevée à 511 millions d’euros en 2014, à 470 millions en 2015, et est prévue à 575 millions pour 2016 et à 533 millions pour 2017.

La diminution du montant de dégrèvement de CAP entre 2014 et 2015 s’explique par la baisse entre les deux années du nombre de foyers concernés. Des foyers ayant bénéficié de l’article 28 de la première loi de finances rectificative pour 2014 ont reçu un avis de TH-CAP à l’automne 2015. Seule une partie de ces foyers a été dégrevée fin 2015 au titre de la CAP 2015, le montant total des dégrèvements correspondants ayant été estimé à 30 millions d’euros.

Par ailleurs, l’augmentation du montant de dégrèvement de CAP entre 2015 et 2016 s’explique par le vote de l’article 75 de la loi de finances pour 2016, qui a conduit à opérer en 2016 :

– des dégrèvements automatiques de CAP 2015, pour un montant total estimé à 50 millions d’euros ;

– des dégrèvements sur rôle de CAP 2016, pour un montant total estimé à 80 millions d’euros.

En outre, l’article 1605 bis du code général des impôts ouvre également, dans son 3°, le dégrèvement d’office de contribution à l’audiovisuel public aux bénéficiaires d’exonération de taxe d’habitation au titre des droits acquis.

Le nombre de bénéficiaires a fortement augmenté entre 2014 et 2015. Parmi les bénéficiaires 2015 figurent en effet une partie des bénéficiaires de l’article 28 de la loi de finances rectificative au titre de 2014 (et donc qui bénéficiaient d’un dégrèvement CAP au titre de droit commun), qui ont été taxés au titre de la TH en 2015 et ont bénéficié du dispositif de dégrèvement CAP au titre des droits acquis.

Le nombre de bénéficiaires a fortement diminué entre 2015 et 2016, l’article 75 de la loi de finances pour 2016 ayant conduit à opérer des dégrèvements de CAP au titre de droit commun (et non plus au titre des droits acquis). De manière plus marginale, la diminution projetée des dénombrements tient compte de l’attrition tendancielle de la population concernée.

Dans ce contexte, la dépense fiscale correspondante s’est élevée à 29 millions d’euros pour 2014 et à 47 millions pour 2015. Elle est prévue à 17 millions pour 2016 et à 14 millions pour 2017.

B. LES CRÉDITS D’IMPÔT À DESTINATION DES ENTREPRISES

1. La sous-action 200-12-03 : les crédits d’impôt en matière d’impôt sur les sociétés

Sur l’ensemble de la législature, les dépenses de la sous-action n° 200-12-03 (action Remboursements et dégrèvements liés à des politiques publiques, sous-action crédits d’impôt en matière d’impôt sur les sociétés) ont été multipliés par cinq. Entre 2016 et 2017, les dépenses connaîtront une nouvelle hausse, sous l’effet de la montée en charge du CICE, principalement.

ÉVOLUTION DE LA SOUS-ACTION 200-12-03 :
CRÉDITS D’IMPÔT EN MATIÈRE D’IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS

(en millions d’euros)

 

Exécution 2012

Exécution 2013

Exécution 2014

Exécution 2015

Prévision
2016

(révisée)

Prévision 2017

Sous-action
200-12-03 : IS

2 244

1 894

6 267

8 058

8 853

11 519

Variation (M€)

– 350

+ 4 373

+ 1 791

+ 795

+ 2 666

Variation (%)

– 15,6 %

+ 230,9 %

+ 28,6 %

+ 9,9 %

+ 30,1 %

Source : réponses aux questionnaires.

Les principaux dispositifs fiscaux donnant lieu à restitution d’impôt sur les sociétés, retracés dans l’action 200-12-03, sont présentés dans le tableau suivant.

Le Rapporteur spécial rappelle que seule la part restituée est retracée dans la mission Remboursements et dégrèvements : la somme de la part restituée et de la part imputée représente le montant total de la dépense fiscale occasionnée par le dispositif, qui figure dans le tome II des Voies et moyens.

Par souci de lisibilité, seuls les crédits d’impôt dont la part restituée est supérieure à 20 millions d’euros ont été présentés : pour 2017, le montant total de la part restituée des crédits d’impôt détaillés ci-dessous représente 98,5 % du total de la sous-action.

LES DISPOSITIFS FISCAUX À DESTINATION DES ENTREPRISES

Sous-action n° 200-12-03 : Crédit d’impôt en matière d’impôt sur les sociétés

(en millions d’euros)

Dispositif

Nombre de bénéficiaires 2015
(en millions)

Exécution 2015

Prévision 2016 (révisée)

Prévision 2017

En % de la sous-action (1)

Part restituée

Part imputée

Part restituée

Part imputée

Part restituée

Part imputée

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

542 627

4 076

6 676

4 478

6 250

7 039

6 700

61,1 %

Crédit d’impôt en faveur de la recherche

15 667

3 340

1 744

3 658

1 752

3 708

1 787

32,2 %

Crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage

85 651

157

56

130

100

130

100

1,1 %

Crédit d’impôt pour dépenses de production d’œuvres cinématographiques

176

64

2

68

2

115

5

1,0 %

Prêt à taux zéro et prêt à taux zéro renforcé- PTZ+

730

217

848

110

765

110

765

1,0 %

Crédit d’impôt pour dépenses de production d’œuvres audiovisuelles

176

56

5

58

6

108

12

0,9 %

Crédit d’impôt pour dépenses de production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles engagées par des entreprises de production exécutives

14

12

< 0,5

9

< 0,5

47

5

0,4 %

Crédit d’impôt famille

2 790

42

39

42

39

42

39

0,4 %

Crédit d’impôt pour investissement en Corse

2 100

31

17

28

21

28

21

0,2 %

Crédit d’impôt pour dépenses de conception de nouveaux produits exposés par les entreprises exerçant les métiers de l’art

1 556

21

4

21

4

21

4

0,2 %

Total

8 016

9 391

8 602

8 939

11 348

9 438

98,5 %

(1) Cette colonne présente la part que représente la somme restituée au titre de chaque dispositif, par rapport au montant total des crédits affectés pour la sous-action.

Source : réponses aux questionnaires.

L’administration précise que seule la partie des dépenses afférente aux entreprises à l’impôt sur les sociétés figure dans le tableau suivant pour ce qui concerne les dispositifs également applicables aux entreprises individuelles soumises à l’impôt sur le revenu, dans le cas du crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage notamment.

Les dispositifs fiscaux connaissent une assez grande stabilité dans le temps, en raison de la stabilité de législation. En revanche, la part restituée du crédit d’impôt pour dépenses de production d’œuvres cinématographiques et celle du crédit d’impôt pour dépenses de production d’œuvres audiovisuelles connaissent un quasi-doublement entre 2016 et 2017.

2. La montée en charge du CICE

Selon les informations fournies par l’administration fiscale, le coût budgétaire total du CICE, tel que retracé dans la présente mission, devrait atteindre 11,3 milliards d’euros contre 7 milliards en 2015 et 4,6 milliards en 2014.

Si les dépenses liées à la mise en œuvre du CICE sont principalement imputables à la mise en œuvre d’une nouvelle politique publique (action 2), cette mise en œuvre a également un effet direct sur la dépense liée à la mécanique de l’impôt (action 1) selon les principes illustrés dans l’encadré ci-dessous.

Elles impactent les lignes concernant l’impôt sur le revenu ou l’impôt sur les sociétés suivant le mode d’imposition choisi par la société concernée.

Exemples de répartition des crédits budgétaires du CICE entre mécanique de l’impôt et mise en œuvre d’une politique publique

Exemple n° 1 :

– Le montant d’IS exigible avant mise en œuvre du CICE est de 100 ;

– Le montant de la créance de CICE est de 90. La somme des acomptes déjà versés est de 20 ;

– La créance peut être imputée sur l’IS en totalité. L’IS après imputation de créance s’élève donc à 10 (100-90), et est inférieur à la somme des acomptes versés (20).

– Dans ce cadre, la société bénéficie d’un remboursement d’excédent d’acomptes de 10. Ce remboursement est opéré au titre de la mécanique de l’impôt.

Exemple n° 2 :

– Le montant d’IS exigible avant mise en œuvre du CICE est de 100 ;

– Le montant de la créance de CICE est de 150. La somme des acomptes déjà versés est de 20 ;

– L’entreprise n’est pas éligible au remboursement immédiat. La créance est donc imputée à hauteur de 100 sur l’IS. Les 50 restants feront l’objet d’un report sur les années suivantes, qui seront également imputés (et ne seront donc pas pris en compte dans la présente mission) ;

– La société doit en outre bénéficier d’un remboursement d’excédent d’acomptes de 20. Ce remboursement est opéré au titre de la mécanique de l’impôt.

Exemple n° 3 :

– Les hypothèses sont les mêmes que dans l’exemple n° 2 mais l’entreprise est éligible à un remboursement immédiat.

– Elle bénéficiera donc d’une restitution d’acomptes de 20 au titre de la mécanique de l’impôt et d’un remboursement de 50 au titre de la mise en œuvre d’une politique publique.

Le tableau suivant présente la répartition indicative du coût du CICE sur différentes sous-actions sur programme 200.

RÉPARTITION ESTIMÉE DU COÛT DU CICE SUR LES DIFFÉRENTES SOUS-ACTIONS
DU PROGRAMME 200

(en millions d’euros)

 

Exécution

2014

Prévision LFI 2015

Exécution au 1/9/2015

Prévisions 2016

Exécution au 1/9/2016

Prévisions 2017

Coût du CICE sur la ligne 11-01 (IS)

2 466

4 006

3 611

3 750

4 010

4 020

Coût du CICE sur la ligne 12-02 (IR)

76

206

195

231

214

237

Coût du CICE sur la ligne 12-03 (IS)

2 104

4 076

3 207

4 478

3 573

7 039

Coût du CICE sur la ligne 13-01 (IR)

nd

nd

nd

nd

nd

nd

Coût total du CICE sur le programme 200 (1)

4 646

8 288

7 013

8 459

7 797

11 296

(1) Compte non tenu du coût du CICE sur la ligne 200-13-01.

Source : réponses aux questionnaires.

L’administration fiscale a néanmoins précisé au Rapporteur spécial que :

– le système d’information de la direction générale des finances publiques permettait de connaître la créance totale de CICE imputée sur l’impôt brut, mais pas de ventiler ce total entre imputation effective sur l’impôt et création ou augmentation du montant des restitutions d’excédents d’impôt sur les sociétés. La répartition estimée est de 60 % de restitutions d’excédents d’IS et de 40 % d’imputation sur le solde ;

– les montants indiqués en matière d’impôt sur les sociétés ne tiennent pas compte des imputations des créances sur les acomptes qui n’impactent pas le programme 200 ;

– il n’existe pas de suivi spécifique des contentieux relatifs au CICE qui donneraient lieu à des remboursements comptabilisés à la sous-action 200-13-01.

II. LA PUBLICATION DES ADMISSIONS EN NON-VALEUR ET DES REMISES GRACIEUSES

Dans sa note d’exécution budgétaire (NEB) pour 2015 portant sur la mission Remboursements et dégrèvements (10), la Cour des comptes recommandait la publication :

– d’une part, des admissions en non-valeur par année de prise en charge comptable de la créance, et par impôt, dans le PAP et dans le RAP (recommandation n° 4) ;

– d’autre part, des informations détaillées sur les remises gracieuses accordées sur les différents impôts, dans le RAP (recommandation n° 6).

Le Rapporteur spécial estime que ces informations méritent d’être publiées, et encourage l’administration à suivre les recommandations de la Cour. Ces informations ont été communiquées au Rapporteur spécial par le biais des réponses aux questionnaires transmis aux administrations, et sont reproduites ci-dessous.

Le Rapporteur spécial rappelle néanmoins que l’analyse des admissions en non-valeur n’est pertinente que s’il est possible de suivre, d’année en année, l’évolution du millésime de chaque créance. La publication des admissions en non-valeur devra être renouvelée chaque année pour que cette initiative présente un véritable intérêt.

Le tableau suivant présente les admissions en non-valeur (ANV) portant sur les impôts d’État (programme 200) ainsi que sur les impôts locaux (programme 201).

MONTANT DES ANV EN 2015 PAR CATÉGORIE D’IMPÔTS
ET PAR ANNÉE DE PRISE EN CHARGE

(en euros)

 

IR

ISF

IS

AIE

TH

TF

TP

TLV

Total

1982

1 203

1 203

1983

303 124

303 124

1984

1 130

1 130

1985

82 964

1 822

84 786

1986

60 219

-

60 219

1987

21 430

644

22 074

1988

503

61 686

1 280

-

426

63 896

1989

80 322

985 389

69 423

917

5 889

1 141 940

1990

870 351

-

34 286

1 965

66 538

1 072

974 212

1991

1 357 780

1 883 214

207 862

2 816

55 058

23 216

3 529 946

1992

1 582 864

2 648

174 061

6 536

34 514

105 777

1 906 400

1993

517 632

101 179

45 973

8 985

77 363

20 014

771 147

1994

10 156 320

2 475

993 486

16 822

50 206

128 132

–-

11 347 442

1995

6 240 020

311 567

1 476 574

13 720

64 491

443 057

8 549 428

1996

2 831 258

3 314 540

266 781

28 069

156 562

227 198

6 824 408

1997

2 045 209

1 062 757

283 499

36 878

190 197

202 033

3 820 573

1998

2 342 732

96 616

760 001

87 620

268 793

138 737

3 694 500

1999

3 471 081

1 711 029

554 403

150 130

364 120

404 618

353

6 655 733

2000

3 989 772

288 459

453 785

141 746

408 835

1 134 965

6 417 561

2001

34 552 415

2 762 116

12 985 751

193 172

596 507

859 861

51 949 821

2002

7 646 714

1 671 779

1 623 541

236 747

707 315

1 108 229

598

12 994 923

2003

12 539 421

2 286 116

1 974 840

378 602

1 127 738

963 787

62

19 270 567

2004

8 820 009

1 500 921

1 330 185

565 041

1 712 658

1 868 769

242

15 797 825

2005

8 327 237

-

1 979 458

858 807

2 296 239

2 385 043

1 099

15 847 882

2006

14 148 958

44 839

2 788 294

1 205 582

2 953 949

2 851 952

2 384

23 995 957

2007

22 328 417

3 624 133

1 792 188

4 558 773

6 058 910

4 227

38 366 648

2008

17 451 000

3 019 957

2 862 278

5 516 426

6 404 370

9 261

35 263 292

2009

23 535 409

4 220 309

4 792 120

7 133 947

10 309 082

8 506

49 999 373

2010

28 459 734

4 632 504

7 679 642

9 949 283

545 097

21 103

51 287 362

2011

56 013 841

7 268 062

13 192 276

13 749 526

45 549

90 269 254

2012

65 164 379

7 059

9 738 005

24 908 016

20 136 958

51 268

120 005 685

2013

75 410 984

13 707 829

54 208 089

30 404 823

286 552

174 018 277

2014

80 194 259

1 821

23 201 789

109 668 816

64 521 788

446 104

278 034 577

2015

18 682 837

1 751 924

649 041

22 843

21 106 645

Exercice courant

18 682 837

1 751 924

649 041

22 843

21 106 645

Exercice précédent

80 194 259

1 821

23 201 789

109 668 816

64 521 788

446 104

278 034 577

Exercices antérieurs

410 333 003

7 059

18 108 761

74 216 750

113 368 763

102 580 815

36 190 233

431 204

755 236 587

Tous exercices

509 210 099

8 880

18 108 761

99 170 464

223 686 620

167 125 446

36 190 233

877 307

1 054 377 810

Source : réponses aux questionnaires

Concernant la publication des informations détaillées sur les remises gracieuses, l’administration fiscale a transmis au Rapporteur spécial les deux tableaux ci-dessous, qui ventilent ces données par catégorie d’impôts, le premier tableau concernant des dénombrements, le second étant relatif aux dépenses ordonnancées, mais exprime sa réserve sur cette initiative. Elle rappelle notamment que :

– ces données concernent exclusivement l’assiette de l’impôt et non pas les recouvrements ;

– ces données correspondent au suivi de l’activité de la DGFiP, et ont été constituées par agrégation d’informations issues de différentes applications informatiques de la DGFiP. S’agissant de données collectées à seule fin statistique, leur fiabilité est sans doute moins grande que celle de données comptables.

DEMANDES CONCERNANT LES DÉGRÈVEMENTS GRACIEUX
SUR LES IMPÔTS D’ÉTAT EN 2015

(en nombre de demandes)

Impôt

Flux cumulé 2015

Traité cumulé 2015

Impôt sur le revenu

200 779

202 069

Impôt sur les sociétés et autres impôts d’État

2 218

2 469

Droits d’enregistrement

13 778

14 106

Taxes sur le chiffre d’affaires

157 221

155 376

Total impôts d’état et taxes assimilées

373 996

374 020

Total fiscalité directe locale (1)

665 605

664 290

Contribution à l’audiovisuel public

363 008

366 195

Total juridiction gracieuse

1 402 609

1 404 505

(1) La ventilation des remises gracieuses relatives aux impôts locaux est détaillée dans le C du II de la partie II.

Source : réponses aux questionnaires.

DÉGRÈVEMENTS GRACIEUX SUR LES IMPÔTS D’ÉTAT EN 2015

(en euros)

 

Dégrèvement gracieux

Impôt

Droits

Pénalités

Total

Impôt sur le revenu (y compris CSG et cotisations sociales)

35 622 644

38 677 462

74 300 106

Plus-values immobilières

70 128

239 560

309 688

Taxe sur les locaux vacants

213 250

213 250

Impôt sur les sociétés

32 921 198

15 658 907

48 580 105

Autres impôts directs d’État

12 741 487

22 779 165

35 520 652

Taxe sur les salaires

1 224 571

4 031 372

5 255 943

Droits d’enregistrement

295 447

22 937 021

23 232 468

Taxes sur le chiffre d’affaires

2 453 160

201 577 110

204 030 270

Total impôts d’État

85 541 885

305 900 597

391 442 482

Total impôts locaux (1)

129 444 354

3 511 925

132 956 279

Contribution à l’audiovisuel public des particuliers

26 768 460

167 570

26 936 030

Contribution à l’audiovisuel public des professionnels

6 846

224 535

231 381

Total général

241 761 545

309 804 627

551 566 172

(1) La ventilation des remises gracieuses relatives aux impôts locaux est détaillée dans le C du II de la partie II.

Source : réponses aux questionnaires.

III. UN ENJEU BUDGÉTAIRE MAJEUR : LES CONTENTIEUX FISCAUX EUROPÉENS

A. UN ENJEU DE PRÉVISION

1. L’enregistrement de la provision dans le compte général de l’État

Le risque de décaissement fait l’objet d’une provision enregistrée dans le compte général de l’État. Cette provision est réévaluée chaque année.

D’après les informations recueillies par le Rapporteur spécial, la provision enregistrée est prudente. Le risque est évalué en fonction du montant des droits contestés, auxquels l’administration applique un taux de dégrèvement : plus le risque d’un dénouement favorable pour l’État est élevé, plus le risque est faible, et plus le montant provisionné sera bas.

Ainsi, l’administration évalue statistiquement le risque pour les finances publiques à partir de la base informatique « Ericka », qui recense l’ensemble des contentieux fiscaux en cours. Les contentieux sont répartis en trois catégories, qui font chacun l’objet d’une évaluation spécifique :

– les contentieux à forts enjeux, lorsque les montants contestés sont supérieurs ou égaux à 50 millions d’euros : pour ces contentieux, le risque est évalué individuellement, pour chaque affaire ;

– les contentieux de série (ou de masse) : l’administration évalue le risque global que représente l’ensemble des affaires relevant du même contentieux de série, et applique un taux de dégrèvement identique à toutes les affaires relevant de ce contentieux ;

– les autres contentieux : l’administration dispose de séries statistiques qui lui permettent d’évaluer le taux de dégrèvement appliqué de manière historique. Ce taux est appliqué mécaniquement, pour l’ensemble des autres contentieux.

Cette méthodologie semble satisfaisante, la Cour des comptes ayant certifié le modèle d’évaluation et de suivi des contentieux utilisé par l’administration fiscale dans son dernier acte de certification des comptes (11).

En 2012, la Cour relevait néanmoins des dysfonctionnements dans la comptabilisation des provisions pour litiges fiscaux liés aux contentieux de série, l’administration fiscale ne prenant en compte que les litiges fiscaux déclarés, « sans tenir compte du risque de contestation de masse que ces litiges déclarés rendent, dans certains cas, probables au titre de l’impôt considéré et des contribuables concernés ».

Cette réserve a été levée deux années plus tard, au motif que ces sommes représentaient un faible risque pour les finances publiques. La Cour relève ainsi que « le producteur des comptes a apporté à la Cour des éléments probants permettant d’établir qu’au moment de l’arrêté des comptes de l’État de 2013, les réclamations contentieuses non déclarées mais susceptibles d’être introduites dans le cadre de ces contestations de masse déjà identifiées représentaient un enjeu financier non significatif » (12).

L’évaluation de la provision pour risques
au titre des contentieux fiscaux de série

À l’occasion de la certification des comptes de l’État pour 2011, la Cour a émis une réserve portant sur l’évaluation de la provision pour risques au titre des contentieux fiscaux de série :

« 231. Le montant de la provision pour risques au titre des contentieux fiscaux de série est sous-évalué au 31 décembre 2011.

« 232. Les provisions pour risques comptabilisées au bilan de l’État s’élèvent à 13,2 Md€ au 31 décembre 2011 contre 12,6 Md€ à fin 2010. Les provisions pour litiges fiscaux, qui en représentent une part prépondérante, s’établissent à 9,5 Md€ à cette date.

« 233. Pour déterminer ce montant, le producteur des comptes n’a considéré que les litiges fiscaux déclarés, sans tenir compte du risque de contestation de masse que ces litiges déclarés rendent, dans certains cas, probables au titre de l’impôt considéré et des contribuables concernés.

« 234. Le risque de décaissement nait, en effet, pour l’État au moment où il a recouvré un impôt qui n’était pas dû, et non pas uniquement lorsqu’une réclamation contentieuse ou un recours juridictionnel est, éventuellement, déposé.

« 235. À titre d’exemple, le producteur des comptes a d’ailleurs comptabilisé par le passé plusieurs provisions pour risques et charges en matière fiscale ou dans d’autres domaines, qui visaient justement à couvrir un risque de contestation probable, en application du principe de prudence :

« − ainsi, la provision pour charges au titre de la récupération sur TVA sur les péages supportés entre 1996 et 2000 a été comptabilisée dans la balance d’ouverture des comptes de l’État de 2006, puisqu’il était très probable que la plus grande partie des entreprises concernées demanderaient à faire jouer en leur faveur le mécanisme de déduction, prévu au Code général des impôts ;

« − de même, la provision pour contentieux de série liée à la demande d’une nouvelle liquidation de la pension au titre de la bonification pour enfant, avait été comptabilisée dans les comptes de l’État de 2008, pour l’ensemble de la population potentiellement concernée et pas uniquement pour les seules demandes déclarées de révision de pension. »

Cette réserve a été levée deux ans plus tard.

Source : Cour des comptes, Certification des comptes de l’État pour l’exercice 2011, mai 2012.

Le Rapporteur spécial estime ainsi que la méthodologie actuellement utilisée par l’administration fiscale permet de fiabiliser l’évaluation du risque de manière suffisante.

Dans la comptabilité générale de l’État, la provision relative aux contentieux fiscaux figure à deux lignes du bilan :

– la provision pour litiges fiscaux représente le risque financier pour l’État au titre d’impôts, taxes et contributions ayant déjà été payés par le contribuable. En cas de dénouement défavorable à l’État, ces montants donneront lieu à restitution au contribuable ;

– la provision pour dépréciation de créances fiscales représente le risque financier au titre d’impôts, taxes et contributions n’ayant pas encore donné lieu au paiement par le contribuable. En cas de dénouement défavorable à l’État, la créance fiscale sera annulée à hauteur du montant d’impôt qui n’aurait pas dû être notifié au contribuable.

Cette répartition fait l’objet d’une évaluation statistique, et non comptable.

D’après les informations transmises par l’administration fiscale, le montant de la provision pour litige fiscaux a augmenté de 76 % entre le 31 décembre 2012 et le 31 décembre 2015, pour s’établir à 21 milliards d’euros, principalement en raison des contentieux à forts enjeux (+ 4 milliards d’euros) et des contentieux de série (+ 3,7 milliards).

LA COMPTABILISATION DU RISQUE LIÉ AUX CONTENTIEUX FISCAUX
DANS LA COMPTABILITÉ GÉNÉRALE DE L’ÉTAT

(en millions d’euros)

 

31/12/2012

31/12/2013

31/12/2014

31/12/2015

Contentieux à forts enjeux (hors i.m.)

778

3 766

4 594

4 822

Contentieux de série (hors i.m.)

7 053

6 430

6 945

10 760

Autres contentieux (hors i.m.)

1 602

1 587

1 836

1 811

Intérêts moratoires

2 524

2 855

2 933

3 650

Provision pour litiges fiscaux

11 957

14 638

16 308

21 044

Source : direction générale des finances publiques.

En revanche, l’administration fiscale n’a pas été en mesure de transmettre les données relatives au montant et à la ventilation de la provision pour dépréciation de créances fiscales au titre des contentieux fiscaux.

2. Une prévision des dépenses annuelles au titre des contentieux fiscaux qui reste difficile

Comme le Rapporteur spécial a eu l’occasion de l’expliquer dans l’avant-propos à ce rapport (voir le point n° 6), on constate des écarts significatifs entre les prévisions de remboursement des sommes indûment perçues et l’exécution.

La prévision est très prudente : les décaissements ont été inférieurs de 2,1 milliards d’euros au montant inscrit en LFI en 2014, et de 1,4 milliard en 2015. En 2016, selon l’estimation révisée transmise par l’administration fiscale, les décaissements effectifs devraient être inférieurs de près d’un milliard d’euros à la prévision initiale.

Le tableau suivant présente l’impact des principaux contentieux ainsi que les recettes associées à ces affaires, en comptabilité budgétaire et en comptabilité nationale.

IMPACT DES PRINCIPAUX CONTENTIEUX EN COMPTABILITÉ NATIONALE
ET BUDGÉTAIRE NETTE, INCLUANT LES RECETTES

(en milliards d’euros)

 

2007-2013 Exécuté

LFI 2014

2014 Révisé

2014 Exécuté

LFI 2015

2015 Révisé

2015 Exécuté

LFI

2016

2016 révisé

PLF 2017

OPCVM (comptabilité nationale et budgétaire)

– 0,35

– 2,0

– 0,7

– 0,8

– 1,75

– 1,75

– 0,7

– 1,75

– 1,0

– 1,0

– Dont remboursement des sommes indûment perçues

– 0,29

– 1,51

– 0,55

– 0,66

– 1,43

– 1,48

– 0,6

– 1,42

– 0,8

– 0,8

– Dont intérêts moratoires

– 0,06

– 0,49

– 0,12

– 0,14

– 0,32

– 0,27

– 0,1

– 0,33

– 0,2

– 0,2

Contentieux précompte :

 

1. Comptabilité nationale

0,0

– 1,0

0,0

0,0

– 0,42

0

0

0

0

0

2. Comptabilité budgétaire nette

– 0,96

– 1,0

– 0,14

0,09

– 0,35

0,048

0,06

0,67

0,78

0

– Dont remboursement des sommes indûment perçues

– 0,92

– 0,83

– 0,11

0

– 0,28

0

0

– 0,09

0

0

– Dont intérêts moratoires

– 0,22

– 0,17

– 0,03

0

– 0,07

0

0

– 0,02

0

0

– Dont recettes

0,18

0

0

0,09

0

0,048

0,06

0,78

0,78

0

De Ruyter (État)

 

0

– 0,05

– 0,005

– 0,2

– 0,05

– 0,1

Stéria

 

– 0,34

– 0,34

– 0,3

Total comptabilité budgétaire

– 1,31

– 2,77

– 0,84

– 0,71

– 2,1

– 1,75

– 0,66

– 1,62

– 0,6

– 1,4

Total comptabilité nationale

– 0,35

– 2,77

– 0,73

– 0,80

– 2,17

– 1,80

– 0,71

– 2,29

– 1,39

– 1,40

Source : réponses aux questionnaires.

L’administration rappelle que les écarts constatés entre les sommes enregistrées en comptabilité nationale et celles enregistrées en comptabilité budgétaire pour le même contentieux tiennent aux règles applicables :

– la comptabilité nationale enregistre les flux sur la base des droits constatés, c’est-à-dire au moment de la naissance, de la transformation, de la disparition ou de l’annulation d’une valeur économique, d’une créance ou d’une obligation. Lors de procédures judiciaires, le moment de l’enregistrement de la créance est l’année où la décision définitive est prononcée ;

– la comptabilité budgétaire enregistre les flux sur la base des prévisions des variations de trésorerie qui affectent l’État.

Une condamnation de l’État à restituer un impôt payé par le contribuable, en première instance faisant l’objet d’un recours non suspensif, pourra donc être enregistrée en comptabilité budgétaire, mais ne le sera pas en comptabilité nationale.

B. DES CONTENTIEUX FISCAUX QUI CONSTITUENT UN RISQUE BUDGÉTAIRE SIGNIFICATIF POUR LES FINANCES PUBLIQUES

Cinq contentieux présentent actuellement des enjeux majeurs pour les finances publiques. L’administration évalue l’enjeu financier global des quatre premiers contentieux (précompte mobilier, OPCVM, Stéria, de Ruyter) à environ une dizaine de milliards d’euros environ. Le coût éventuel du récent contentieux relatif à la contribution de 3 % ne peut être évalué précisément à ce stade.

1. Le contentieux précompte mobilier

a. Les origines de l’affaire

Le contentieux relatif au précompte mobilier porte sur la compatibilité avec le droit européen de l’ancien régime de l’avoir fiscal et du précompte mobilier.

Il sanctionne, sur le fondement de la liberté de circulation des capitaux, un avantage fiscal réservé aux sociétés françaises dans le cadre d’une lecture jugée trop hexagonale du régime mère-fille.

La contrariété du dispositif de l’avoir fiscal au droit de l’Union européenne

Le dispositif incriminé avait été instauré en 1965 (1). Les sociétés bénéficiaient d’un avoir fiscal quand elles percevaient des dividendes déjà soumis à l’impôt sur les sociétés, et payaient un précompte quand elles reversaient des dividendes qui n’avaient pas été soumis à l’IS, notamment ceux qui relevaient du régime « mère-fille ». Toutefois, les dividendes reçus de sociétés exerçant dans des pays membres de l’Union européenne ne donnaient pas droit à avoir fiscal, alors que la redistribution des dividendes reçus de filiales européennes donnait lieu à « précompte ».

Ce système de l’avoir fiscal et du précompte avait initialement pour objectif, non seulement d’atténuer le phénomène de double imposition des revenus distribués (au niveau de l’entreprise et au niveau de l’actionnaire), mais aussi de rendre plus attractive la place financière de Paris.

Ce dispositif a été supprimé par la loi de finances pour 2004 (2) mais seulement à compter du 1er janvier 2005. Les raisons avancées à l’époque pour justifier cette suppression étaient non seulement de nature budgétaire mais également de nature juridique – la conformité du dispositif au droit communautaire étant déjà perçue comme douteuse.

Ces doutes ont été confirmés par l’arrêt Manninen de la CJCE en date du 7 septembre 2004, sanctionnant un dispositif similaire du droit fiscal finlandais.

(1) Loi n° 65-566 du 12 juillet 1965 modifiant l’imposition des entreprises et des revenus de capitaux mobiliers.

(2) Article 93 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004.

Les craintes exprimées au moment de la suppression du dispositif se sont révélées fondées dès les premiers jugements rendus sur des recours introduits avant la suppression du dispositif. L’État a ainsi été condamné dès 2006 par différents tribunaux administratifs et cours administratives d’appel à rembourser 1,1 milliard d’euros à plusieurs sociétés entre 2006 et 2008.

Les premières décisions rendues par le tribunal administratif et la cour administrative d’appel de Versailles, respectivement en décembre 2006 et en mai 2008, ont concerné les sociétés Accor et Rhodia, qui ont donc constitué les dossiers « pilotes » de ce contentieux. Le juge a estimé que le dispositif de l’avoir fiscal et du précompte mobilier désavantageait les sociétés mères françaises ayant des filiales établies dans un autre État membre de l’Union européenne par rapport à celles qui avaient des filiales établies en France, et était donc constitutif d’une restriction à la liberté de circulation des capitaux prohibée par l’article 56 du traité instituant la communauté européenne (actuel article 63 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, ou TFUE).

Dans le même temps, les tribunaux administratifs de Paris et Cergy-Pontoise ont examiné cinq autres requêtes, et par des jugements intervenus en 2007 et 2008, ont intégralement donné satisfaction aux sociétés requérantes. À la suite d’un pourvoi en cassation formé par l’État, le Conseil d’État a saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour avis préjudiciel. Rendu le 15 septembre 2011 (13), ce dernier a confirmé la non-conformité du dispositif au droit communautaire et demandé le remboursement des sommes indûment perçues par l’État, auxquelles doivent s’ajouter des intérêts moratoires. La Cour a néanmoins laissé au Conseil d’État le soin de trancher un certain nombre de questions relatives au quantum du litige.

Sur la base de ce renvoi préjudiciel, le Conseil d’État a rendu ses décisions (14) le 10 décembre 2012 dans les deux affaires dont il était saisi. Les décisions du Conseil d’État sont largement favorables à la position défendue par l’État en ce qui concerne les modalités de calcul du montant de précompte dont les sociétés peuvent revendiquer la restitution.

Ces arrêts concluent, en effet, au reversement par les deux sociétés d’une part substantielle des sommes qui leur avaient été restituées en exécution des jugements du tribunal administratif de Versailles de décembre 2006.

b. Les décisions juridictionnelles internes prises à ce stade sont favorables à l’État

Selon les informations transmises par le Gouvernement, les juridictions nationales de premier et second rangs ont désormais examiné tous les dossiers relevant de ce contentieux qui étaient pendants en décembre 2012, dans un sens globalement favorable aux intérêts de l’État français.

Ainsi, en 2014, les tribunaux administratifs de Cergy-Pontoise et de Montreuil ont examiné quatorze affaires et la cour administrative d’appel de Paris s’est prononcée dans cinq affaires concernant quatre sociétés, pour lesquelles l’administration avait fait appel des décisions des juges de première instance représentant un enjeu global de près de 2,7 milliards d’euros.

Les décisions rendues ont abouti, en 2014, à un solde positif pour le Trésor de 652 millions d’euros.

En 2015 et 2016, aucun décaissement n’a été enregistré au titre de ce contentieux de série.

La quasi-totalité de ces décisions récentes font toutefois l’objet d’un appel ou d’un pourvoi en cassation à l’initiative des sociétés requérantes.

c. L’issue de ce contentieux demeure néanmoins incertaine

Ces résultats favorables aux finances de l’État français, ne peuvent cependant être considérés comme définitifs. En effet, un ensemble de six sociétés a déposé une plainte en juillet 2013 devant la Commission européenne à l’encontre des arrêts du Conseil d’État précités, en vue d’obtenir une nouvelle saisine de la CJUE. L’instruction de cette procédure par les services de la Commission est toujours en cours.

La Commission européenne, donnant suite à la plainte déposée contre les arrêts du Conseil d’État du 10 décembre 2012, a fait parvenir au gouvernement français le 26 novembre 2014 une mise en demeure à laquelle le Gouvernement a répondu le 25 février 2015.

Par un avis motivé n° 2014/4092 du 28 avril 2016, les services de la Commission ont fait savoir au Gouvernement que sa réponse ne les satisfaisait pas et ont réitéré l’intégralité de leurs griefs à l’encontre des deux arrêts du Conseil d’État.

La réponse du Gouvernement, confirmant le bien-fondé de l’analyse de la juridiction suprême française, a été adressée à la Commission le 28 juin 2016.

À ce stade, si la Cour de justice de l’Union européenne était saisie, cela aurait pour effet de reporter l’issue définitive de l’ensemble du litige à un horizon beaucoup plus lointain, probablement vers 2019 ou 2020.

S’agissant des conséquences budgétaires de cette saisine, celles-ci sont difficiles à chiffrer à ce stade puisque l’intégralité des principes posés par le Conseil d’État, y compris s’agissant des modalités de calcul des crédits d’impôt dont peuvent bénéficier les sociétés concernées, font l’objet de critiques de la part des sociétés plaignantes relayées par la Commission.

Il est impossible d’anticiper quelle serait l’analyse de la Cour de justice de l’Union européenne sur chacune de ces questions qui, par ailleurs, n’impactent pas l’ensemble des dossiers avec la même acuité.

d. Les enjeux financiers

Depuis l’apparition de ce contentieux, la prévision de ses conséquences a constitué un exercice particulièrement complexe, compte tenu du fait que le montant des restitutions à opérer dépend de décisions des juridictions nationales.

À ce stade cet enjeu global s’est traduit par des décaissements effectifs nets de 870 millions d’euros (2007-2016).

Si la CJUE venait à être saisie, la quasi-totalité des sommes contestées depuis l’origine de ce contentieux en 2005 serait à nouveau en risque à l’horizon 2020.

2. Le contentieux OPCVM

a. Les origines de l’affaire

Ce contentieux porte sur la retenue à la source appliquée aux dividendes de source française perçus par des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) non résidents jusqu’au mois de juillet 2012.

Entre 1978 et 2012, les OPCVM établis à l’étranger étaient soumis à un prélèvement à la source de 25 %, puis de 30 %, sur les dividendes qu’ils percevaient des sociétés françaises alors que les OPCVM français en étaient exonérés.

Compte tenu du nombre très important de réclamations, déposées par des OPCVM et des fonds de pensions étrangers – plus de 10 000 –, et d’instances pendantes devant le tribunal administratif (TA) de Montreuil après les premières décisions de rejet, représentant environ 1 500 instances, une procédure concertée (juridiction, DGFiP et cabinets d’avocats) a été mise en œuvre, visant à isoler une dizaine de dossiers « types », représentatifs des différentes situations pour les faire juger, puis à appliquer la solution ainsi retenue à l’ensemble des réclamations et des instances gelées dans l’attente du jugement de ces dossiers types.

C’est dans ce cadre que, conformément à l’avis du Conseil d’État rendu le 23 mai 2011 à la demande du TA de Montreuil, ce tribunal a posé, le 1er juillet 2011, à la CJUE deux questions préjudicielles en vue de déterminer si le régime français en cause était contraire à la liberté de circulation des capitaux à l’encontre des OPCVM étrangers.

Dans un arrêt du 10 mai 2012 (15), celle-ci a donné raison aux fonds de placement étrangers sur le fondement d’une certaine interprétation de l’article 63 du TFUE, la CJUE considérant que cette taxation différenciée constituait une restriction à la liberté de circulation des capitaux garantie par cet article.

À la suite de cette décision, le régime fiscal applicable aux dividendes payés à des OPCVM étrangers a été amendé par l’article 6 de la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 du 18 août 2012. À compter d’août 2012, les dividendes payés à des OPCVM étrangers comparables aux OPCVM français échappent à la retenue à la source du 2 de l’article 119 bis du code général des impôts.

Toutefois, compte tenu des incertitudes prévalant alors sur les organismes de placement collectif éligibles à cette exonération, les établissements payeurs ont, dans un premier temps continué de prélever la retenue à la source.

b. Le traitement du contentieux

Compte tenu du nombre très important des dossiers à traiter (plus de 12 000), les contentieux OPCVM sont désormais traités directement :

– par le tribunal administratif de Montreuil pour les affaires parvenues au stade contentieux. Le tribunal a ainsi commencé, en 2013, à régler par voie d’ordonnances de non-lieu à statuer les dossiers faisant l’objet d’une décision d’admission ;

– par la direction générale des finances publiques (DGFiP), pour les réclamations restées au stade administratif postérieurement à la décision de la CJUE, c’est-à-dire à compter de la fin 2012.

c. Le rebondissement européen de 2014 et l’issue du contentieux

L’arrêt de la CJUE du 10 avril 2014 dans l’affaire Emerging Markets (16) a conduit à étendre le nombre des dossiers à traiter, dans la mesure où il a imposé à la France de prendre en compte les réclamations des fonds d’investissement des pays tiers.

Le traitement à réserver aux demandes émanant des OPCVM établis en dehors de l’Union européenne et de l’Espace économique européen était en effet suspendu à la position qui serait retenue par la Cour de justice de l’Union européenne dans une affaire concernant au premier chef la Pologne.

Dans cet arrêt, la CJUE a considéré que l’exclusion du bénéfice de l’exonération d’impôt sur les dividendes des fonds résidents de pays tiers est également constitutive d’une restriction à la libre circulation des capitaux.

Selon elle, la circonstance selon laquelle les fonds établis dans des pays tiers ne sont pas soumis au cadre réglementaire harmonisé de l’UE instauré par la directive OPCVM 85/611/CEE – dont les exigences sont reprises par la loi polonaise – ne saurait suffire à justifier le maintien d’une différence de traitement.

La Cour a ainsi jugé qu’un État membre ne pouvait, par principe, exclure du bénéfice d’une exonération de retenue à la source les dividendes versés au profit de fonds d’investissement établis dans un pays tiers lié à l’État membre de la source par un dispositif d’assistance administrative mutuelle en matière fiscale.

La décision de la CJUE contraint par conséquent l’administration à envisager pour l’ensemble de ces fonds un examen au cas par cas de leurs réclamations pour examiner la comparabilité de leur fonctionnement à des fonds français.

Un tel examen, nécessitant le recours à l’assistance administrative, allongera considérablement les délais de traitement de ces affaires.

Or, il résulte des dossiers d’ores et déjà examinés par les services de la DGFiP, en charge du traitement de ces contentieux, que l’examen des réclamations est un exercice minutieux et chronophage, qui implique que les dossiers soient suffisamment documentés par les entités requérantes en vue de justifier leurs prétentions.

La mise en conformité avec l’arrêt Emerging Markets a été opérée par l’article 58 de la dernière loi de finances rectificative pour 2014.

Il apparaît néanmoins que les dossiers présentant les plus forts enjeux concernent désormais des OPCVM établis en dehors de l’Union européenne. L’examen des dossiers les concernant pose toujours des difficultés en vue de déterminer les éléments pertinents devant être retenus en vue de s’assurer de leur comparabilité, étant précisé que la juridiction ne s’est pas encore prononcée sur ces affaires.

d. Le stock de dossiers restant à traiter et les enjeux financiers

En 2015, le TA de Montreuil, qui est également tributaire de la complétude des dossiers, a continué à se prononcer essentiellement par voie d’ordonnances de non-lieu à statuer dans le cadre de la procédure convenue entre les parties aux termes de l’instruction. L’administration examine les éléments apportés par le fonds à l’appui de sa requête, détermine de manière concertée avec ce dernier le quantum de restitution justifiée et le fonds se désiste devant le juge de sa requête pour le surplus avant que l’affaire ne soit enrôlée.

En 2015, 2 324 dossiers ont été examinés (1 805 réclamations et 519 affaires devant la juridiction) au regard d’un stock de plus de 12 900 au 1er janvier 2015. Au cours des huit premiers mois de l’année 2016 il s’établit à 1 749 (dont 1 449 réclamations et 300 affaires devant la juridiction) pour un stock au 1er janvier 2016 de 14 435 affaires.

Les restitutions opérées en 2015 s’élèvent à 715,2 millions d’euros (dont 595,6 millions de droits) et à près de 297 millions (dont 238 millions de droits) au 1er septembre 2016.

En 2015, l’examen de ces affaires a conduit à une décision de rejet total ou partiel, et à des réductions spontanées ou des désistements de la part des requérants à hauteur de 42,3 % des sommes initialement réclamées (contre 22,5 % en 2013 et 23,5 % en 2014). Cette proportion s’établit à plus de 28 % au titre des huit premiers mois de 2016.

3. Le contentieux de Ruyter

a. Les origines de l’affaire

M. Gérard de Ruyter est un ressortissant hollandais établi en France depuis 1994 et soumis à ce titre au régime des résidents fiscaux français. Depuis 1996, il est salarié d’une société établie aux Pays-Bas. Au titre des années 1997 à 2004, M. de Ruyter a déclaré en France des revenus composés de salaires, de revenus de capitaux mobiliers, de bénéfices industriels et commerciaux et de rentes viagères. Son salaire était exclusivement de source néerlandaise.

En tant que résident fiscal en France, M. de Ruyter y était assujetti à l’impôt sur le revenu sur la totalité de ses revenus, y compris les rentes viagères. Ces dernières étaient soumises en outre à la CSG, à la CRDS, au prélèvement social de 2 % et, à compter de l’année 2003, à la contribution additionnelle de 0,3 % s’ajoutant à ce prélèvement.

M. de Ruyter a contesté le fait de payer deux fois les prélèvements sociaux, dans un premier temps devant les juridictions nationales : les recours formés devant les tribunaux administratifs de Marseille et de Nîmes ont toutefois été rejetés. En appel, la cour administrative d’appel de Marseille a infirmé les jugements de première instance et l’a déchargé des diverses cotisations sociales appliquées aux rentes viagères qu’il avait acquittées entre 1997 et 2004. Cette solution était fondée, en substance, sur le fait que M. de Ruyter avait déjà été assujetti à des contributions sociales sur ces revenus aux Pays-Bas. Par voie de conséquence, la perception de contributions sociales additionnelles en France constituait une entrave à ses droits à la libre circulation.

Le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État s’est pourvu contre les arrêts de la cour administrative d’appel devant le Conseil d’État, lequel les a annulés au motif que la juridiction en question avait commis une erreur de droit lorsqu’elle avait jugé que les contributions en cause enfreignaient le droit du contribuable de se déplacer librement dans l’Union, sans rechercher si l’Union avait adopté des mesures tendant à mettre fin à une telle situation de double imposition.

Devant le Conseil d’État, M. de Ruyter a soutenu que, en vertu de l’interdiction du cumul des législations applicables consacrée à l’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71, il devrait uniquement être soumis à la législation régissant la sécurité sociale aux Pays-Bas. Le ministre a au contraire affirmé en substance que le lien qui existe entre la CSG, la CRDS, le prélèvement social et la contribution additionnelle, d’une part, et la législation sur la sécurité sociale, d’autre part, ne suffit pas à entraîner l’application de ce règlement.

Considérant que l’issue du pourvoi dépendait de l’interprétation du champ d’application du règlement n° 1408/71, le Conseil d’État a demandé à la Cour de statuer à titre préjudiciel sur la question suivante :

« Des prélèvements fiscaux sur les revenus du patrimoine tels que la [CSG], la [CRDS], le prélèvement social de 2 % et la contribution additionnelle à ce prélèvement [de 0,3 %] présentent-ils, du seul fait qu’ils participent au financement de régimes obligatoires français de sécurité sociale, un lien direct et pertinent avec certaines des branches de sécurité sociale énumérées à l’article 4 du règlement [n° 1408/71] et entrent-ils ainsi dans le champ de ce règlement ? »

b. La solution de l’arrêt du 26 février 2015

Dans ses conclusions du 21 octobre 2014, l’avocate générale Mme Eleanor Sharpston a appelé la Cour à répondre positivement à la question posée par le Conseil d’État :

« Des contributions prélevées sur les revenus du patrimoine telles que la contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine (CSG), la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), le prélèvement social de 2 % et la contribution additionnelle à ce prélèvement, en cause au principal, présentent un lien direct et suffisamment pertinent avec les lois françaises qui régissent les branches de sécurité sociale énumérées à l’article 4 du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non-salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, dans sa rédaction modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996 et à nouveau modifiée par le règlement n° 1992/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006. Elles relèvent ainsi du champ d’application matériel de ce règlement. »

Comme celle-ci l’indique dans son analyse, la CJUE avait déjà jugé en 2000 que la CSG et la CRDS perçues par la France spécifiquement sur les revenus d’activité et de remplacement ont un lien direct et suffisamment pertinent avec les lois qui régissent les branches de sécurité sociale énumérées à l’article 4, si bien qu’elles relèvent du champ d’application matériel du règlement n° 1408/71.

Par conséquent, le prélèvement de telles contributions sur les revenus d’activité et de remplacement des travailleurs qui résidaient en France, mais qui étaient soumis à la législation de sécurité sociale d’un autre État membre (en général parce qu’ils exerçaient une activité professionnelle dans ce dernier État), a été jugé incompatible tant avec l’interdiction du cumul des législations applicables en matière de sécurité sociale, consacrée à l’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71, qu’avec la libre circulation des travailleurs et la liberté d’établissement garanties par le traité.

Dans son arrêt du 26 février 2015, la CJUE a suivi les recommandations de l’avocate générale, en rappelant que le principe de l’unicité de la législation applicable en matière de sécurité sociale vise à éviter les complications qui peuvent résulter de l’application simultanée de plusieurs législations nationales et à supprimer les inégalités de traitement qui, pour les personnes se déplaçant à l’intérieur de l’Union, seraient la conséquence d’un cumul partiel ou total des législations applicables.

Dans son considérant 38, l’arrêt précise donc que l’application des dispositions du règlement n° 1408/71 ne saurait être limitée aux revenus que ces personnes tirent de leurs relations de travail, sous peine de créer des disparités dans l’application de l’article 13 de ce règlement en fonction de l’origine des revenus que celles-ci perçoivent.

Cet arrêt constitue donc une extension du principe déjà posé en 2000 s’agissant des revenus du travail aux revenus du capital. Il vient mettre un terme entre la divergence d’interprétation qui s’était installée entre le juge national et européen sur la nature fiscale de ces prélèvements.

c. Les conséquences en droit interne

Dans son arrêt de Ruyter du 27 juillet 2015, le Conseil d’État a repris les termes de la décision C-623/13 de la CJUE du 26 février 2015 selon laquelle les personnes affiliées à un régime de sécurité sociale dans un des pays entrant dans le champ d’application territorial des règlements communautaires sur la sécurité sociale – États membres ainsi que le Liechtenstein, la Norvège, l’Islande et la Suisse – ne peuvent être assujetties en France à des prélèvements sociaux sur leurs revenus du patrimoine. Le même raisonnement est transposable aux produits de placement.

En France, l’arrêt du 26 février 2015 a essentiellement été interprété à l’aune des revenus fonciers des non-résidents (donc des Français de l’étranger, par le biais notamment de la location de leur logement éventuellement conservé en France) et des plus-values immobilières de ces personnes (liées à la vente d’un immeuble), car la soumission aux prélèvements sociaux de ces revenus dits « du patrimoine » a été opérée dans le cadre de la première loi de finances rectificative pour 2012. Pourtant, l’arrêt visait précisément les revenus de placement perçus depuis l’étranger par une personne résidant fiscalement en France.

Les prélèvements sociaux sur les revenus du capital

Les prélèvements sociaux sur les revenus du capital, au taux global de 15,5 %, visent les personnes fiscalement domiciliées en France, y compris lorsqu’elles ne sont pas soumises à l’impôt sur le revenu. Depuis 2012, les non-résidents sont soumis à ces mêmes contributions sur leurs revenus fonciers et plus-values immobilières de source française.

Les revenus du capital comprennent :

– les revenus du patrimoine, c’est-à-dire les revenus fonciers, les rentes viagères constituées à titre onéreux ainsi que certains revenus de capitaux mobiliers et plus-values mobilières ;

– les revenus de placement, c’est-à-dire la plupart des revenus mobiliers (produits de placements à revenu fixe, les dividendes, les produits de bons ou contrats de capitalisation et d’assurance vie), les plus-values immobilières, les revenus de l’épargne salariale, les revenus de l’épargne logement, les gains ou rentes viagères issues d’un PEA.

De ce fait, deux catégories de personnes sont concernées par l’arrêt :

– la première catégorie concerne les résidents fiscaux de France (qui peuvent en réalité être de nationalité étrangère) ; cette catégorie peut concerner les frontaliers français travaillant à l’étranger (350 000 personnes) et 400 000 personnes installées en France qui reçoivent des revenus du capital de l’étranger ;

– la seconde catégorie concerne les non-résidents fiscaux français affiliés hors de France. Le cas général, pour la population concernée ici, concerne les affiliés à un régime de sécurité sociale hors de France mais dans l’Union européenne.

En termes de méthodologie, le principal problème a consisté à identifier, au sein de la catégorie des non-résidents fiscaux affiliés hors de France, la proportion des personnes concernées par l’arrêt de Ruyter. Selon les estimations du Gouvernement, 70 % de la catégorie des non-résidents fiscaux affiliés hors de France serait affiliée dans un autre État membre.

Par la suite, dans un arrêt B. du 19 juillet 2016, le Conseil d’État a été amené à préciser que la contribution additionnelle au prélèvement social, fixée au taux de 1,1 % au titre des années 2009 et 2010 sur lesquelles portait le litige qui lui était soumis, étant spécifiquement affectée au financement d’une prestation qui ne relève pas du champ d’application du règlement européen sur la sécurité sociale, elle ne doit donc pas faire l’objet d’un remboursement. Par analogie de raisonnement, la même solution devrait être appliquée pour le prélèvement de solidarité de 2 % qui a succédé à la contribution additionnelle à compter du 1er janvier 2013, et dont l’affectation budgétaire était identique jusqu’au 1er janvier 2015.

d. Les enjeux financiers

Au 1er septembre 2016, le nombre de réclamations reçues s’élevait à 52 810, dont 24 818 avaient été traitées.

En l’absence d’estimation fiable du montant des prélèvements sociaux acquittés par des non-résidents, l’évaluation du coût du contentieux est réalisée à partir des litiges déclarés. Elle distingue les restitutions à effectuer au titre des prélèvements sur les revenus du patrimoine qui incombent à l’État, de celles à effectuer au titre des prélèvements sur les plus-values immobilières et les revenus de placement à la charge du budget de la sécurité sociale.

Pour l’année 2015, le montant provisionné dans le budget de l’État au titre de ce contentieux est de 240 millions d’euros, dont 25 millions d’intérêts moratoires. L’estimation du coût des litiges relevant du budget de la sécurité sociale est de 216 millions d’euros, dont 18 millions d’intérêts moratoires. Initialement, le coût global a donc été évalué à 456 millions d’euros.

Compte tenu des dossiers déjà traités, ce coût global a été révisé à la baisse à 300 millions d’euros, dont 200 millions en 2016 et 100 millions en 2017.

Le tableau ci-dessous présente la prévision pour 2016 et 2017 en comptabilité nationale et en comptabilité budgétaire :

ESTIMATION DU COÛT DU CONTENTIEUX DE RUYTER

(en millions d’euros)

 

2016

2017

État

– 50

– 100

Sécurité sociale

– 150

Total

– 200

– 100

Source : réponses aux questionnaires.

4. Le contentieux Stéria

a. Les origines de l’affaire

Plusieurs sociétés mères françaises ont introduit des réclamations en vue d’obtenir la restitution de l’impôt sur les sociétés payé à raison de la quote-part de frais et charges afférente aux dividendes de source communautaire qu’elles perçoivent de filiales détenues à au moins 95 %.

Le contentieux porte sur le fait que la neutralisation de la quote-part de 5 % représentative des frais et charges au moment de la réception, par une société mère française, de dividendes par ailleurs exonérés, est limitée à ceux provenant de sociétés intégrées fiscalement.

Or, le périmètre d’une telle intégration ne s’appliquait qu’aux filiales établies en France, dont les résultats entraient dans le champ de l’impôt sur les sociétés français, les dividendes de source communautaire demeurant imposés sur la base de cette quote-part de 5 %.

b. Les décisions juridictionnelles

Par une décision du 29 juillet 2014, la cour administrative d’appel de Versailles a saisi la Cour de justice de l’Union européenne de la question préjudicielle suivante au regard de la liberté d’établissement :

« L’article 43 du traité CE devenu l’article 49 du TFUE relatif à la liberté d’établissement doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que la législation relative au régime français de l’intégration fiscale accorde à une société mère intégrante la neutralisation de la réintégration de la quote-part de frais et charges forfaitairement fixée à 5 % du montant net des dividendes perçus par elle des seules sociétés résidentes partie à l’intégration, alors qu’un tel droit est refusé, en vertu de cette législation, pour les dividendes qui lui sont distribués par ses filiales implantées dans un autre État membre qui, si elles avaient été résidentes, y auraient été objectivement éligibles, sur option ? ».

Dans l’arrêt du 2 septembre 2015 précité, la CJUE, après avoir considéré que le fait d’exclure du bénéfice d’un tel avantage une société mère qui détient une filiale établie dans un autre État membre est de nature à rendre moins attrayant l’exercice par cette société mère de sa liberté d’établissement, en la dissuadant de créer des filiales dans d’autres États membres, a invalidé le mécanisme français contesté et répondu à la question posée par le juge d’appel français de la manière suivante :

« L’article 49 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation d’un État membre relative à un régime d’intégration fiscale en vertu de laquelle une société mère intégrante bénéficie de la neutralisation de la réintégration d’une quote-part de frais et charges forfaitairement fixée à 5 % du montant net des dividendes perçus par elle des sociétés résidentes parties à l’intégration, alors qu’une telle neutralisation lui est refusée, en vertu de cette législation, pour les dividendes qui lui sont distribués par ses filiales situées dans un autre État membre qui, si elles avaient été résidentes, y auraient été objectivement éligibles, sur option. »

Par ses décisions du 21 juin 2016 (17), la cour de renvoi a jugé qu’il résulte de l’interprétation donnée par la CJUE dans son arrêt C-384/16 du 2 septembre 2015 que l’administration n’est pas fondée à refuser à une société mère intégrante le bénéfice de la neutralisation de la quote-part pour frais et charges, instituée par l’article 223 B du code général des impôts en faveur des groupes fiscalement intégrés, à raison des dividendes qui lui sont distribués par ses filiales établies dans un autre État membre pour autant que ces filiales, si elles avaient été résidentes, auraient été objectivement éligibles au régime d’intégration fiscale, sur option, en vertu de l’article 223 A du code général des impôts.

L’article 40 de la loi de finances rectificative pour 2015, tirant les conséquences de cette jurisprudence supprime, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016, la neutralisation de la quote-part de frais et charges afférente aux dividendes versés entre sociétés d’un même groupe et abaisse à 1 % le taux de la quote-part de frais et charges afférente aux dividendes éligibles au régime mère-fille que perçoivent les sociétés membres d’un groupe d’autres membres ou de sociétés établies dans un autre État de l’Union ou de l’Espace économique européen qui, si elles étaient établies en France, rempliraient les conditions pour être membre de ce groupe, en application des articles 223 A ou 223 A bis, autres que celle d’être soumise à l’impôt sur les sociétés en France.

Pour les affaires relevant des dispositions légales antérieures, l’instruction des demandes impose à l’administration de vérifier que les conditions d’éligibilité au régime d’intégration fiscale posées par les articles 223 A et suivants du code général des impôts sont satisfaites par la filiale située dans un autre État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen pour que les distributions en litige soient totalement exonérées, y compris de quote-part de frais et charges.

Ainsi que l’ont confirmé les décisions de la cour précitées, il incombe au contribuable, seul à même de pouvoir apporter des éléments pertinents en ce sens, de justifier non seulement du respect des conditions fixées pour l’exercice de cette option mais aussi de l’origine et du montant des distributions susceptibles d’ouvrir droit au bénéfice de la neutralisation de la quote-part pour frais et charges, sous réserve que la production des éléments de preuve ne s’avère pas pratiquement impossible ou excessivement difficile. Il lui appartient de justifier du bien-fondé de sa demande et de conserver les pièces propres à asseoir ses prétentions.

Les services doivent ainsi demander aux sociétés réclamantes ou requérantes, quand elles ne l’ont pas déjà fait, de justifier précisément leurs prétentions financières.

c. Les enjeux financiers

Au 22 août 2016, les décaissements opérés au titre de ce contentieux s’élevaient à 243 millions d’euros, intérêts moratoires compris, 32 % des enjeux recensés ayant déjà été dégrevés.

À cette même date, 257 affaires étaient en cours, dont 38 dossiers pendants devant les juridictions administratives et 219 au stade de la réclamation, pour un enjeu en droits de 499 millions d’euros.

Les informations disponibles conduisent à évaluer le coût total à 1 milliard d’euros environ, dont 0,34 milliard en 2016 et 0,3 milliard en 2017, mais l’administration fiscale insiste sur le fait qu’à ce stade, il est difficile de déterminer avec précision le coût potentiel définitif de ce contentieux.

5. Le contentieux Contribution de 3 %

a. Les origines de l’affaire

L’article 6 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 a instauré une contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés, codifiée à l’article 235 ter ZCA du code général des impôts, due par les sociétés passibles de l’impôt sur les sociétés au titre des montants qu’elles distribuent et mettent en paiement à compter du 17 août 2012.

Depuis, un certain nombre de réclamations a été enregistré. Elles visent à obtenir la restitution de cette contribution au motif principal soit de son inconstitutionnalité, soit de sa contrariété avec les articles 49 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) ainsi qu’avec les articles 4 et 5 de la directive 2011/96/UE du 30 novembre 2011 relative au régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales.

Différents griefs sont soulevés dans ces réclamations :

– une différence de traitement opérée au détriment des filiales de sociétés établies dans un autre État membre de l’Union européenne par rapport aux succursales ;

– une différence de traitement défavorable à l’égard des filiales françaises détenues à au moins 95 % par une société mère non-résidente ;

– une contradiction de l’article 235 ter ZCA avec les articles 4 et 5 de la directive « mère-fille ».

b. Les procédures juridictionnelles

i. Au regard du grief d’inconstitutionnalité

Par une décision rendue le 27 juin 2016 sur demande de la société Layher, le Conseil d’État a renvoyé au Conseil constitutionnel la question de la conformité à la Constitution des dispositions du I du E de l’article 6 de la loi de finances rectificative pour 2012 n° 2012-958 du 16 août 2012, codifiées à l’article 235 ter ZCA du code général des impôts, en tant qu’elles exonèrent de contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés les montants distribués « entre sociétés du même groupe au sens de l’article 223 A » du code précité.

La société Layher soutenait, en effet, que l’article 235 ter ZCA du code général des impôts introduisait une différence de traitement entre les distributions réalisées au sein d’un groupe intégré et celles effectuées en dehors de ce cadre, alors même que les conditions objectives d’application du régime de l’intégration, en termes de détention de capital et de durée des exercices, étaient remplies, cette différence de traitement n’étant justifiée ni par une différence objective de situation, au regard de l’objet de la contribution, ni par aucune raison d’intérêt général.

Par suite, l’exposante soutenait qu’il y avait atteinte aux principes constitutionnels d’égalité devant la loi fiscale et devant les charges publiques.

Par une décision du 30 septembre 2016, rendue suite à la question prioritaire de constitutionnalité posée par le Conseil d’État, le Conseil constitutionnel a jugé que la différence de traitement ainsi instituée entre les sociétés d’un même groupe réalisant, en son sein, des distributions, selon que ce groupe relève ou non du régime de l’intégration fiscale, n’est justifiée ni par une différence de situation, ni par un motif d’intérêt général.

Le Conseil constitutionnel a, par conséquent, déclaré contraires à la Constitution les mots : « entre sociétés du même groupe au sens de l’article 223 A » figurant au 1° du paragraphe I de l’article 235 ter ZCA du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015.

Mais, constatant qu’il revient au seul législateur de choisir les modifications qui lui apparaissent nécessaires pour remédier à l’inconstitutionnalité constatée, le Conseil constitutionnel a reporté au 1er janvier 2017 l’abrogation des dispositions contestées.

Bien que cette décision n’emporte par elle-même aucune conséquence financière, un arbitrage devra être effectué d’ici le 1er janvier 2017. Plusieurs solutions sont envisageables, et notamment :

– le statu quo, qui aurait pour conséquence d’alourdir fortement la fiscalité des groupes français bénéficiant actuellement de l’exonération ;

– l’abrogation de l'article 235 ter ZCA, ce qui allègerait la fiscalité pesant sur les entreprises mais priverait l’État du produit de la taxe, qui a rapporté 2,2 milliards d’euros en 2015 ;

– une solution intermédiaire : la taxe serait maintenue, et les règles permettant l’exonération seraient modifiées, afin d’assurer la constitutionnalité du dispositif, tout en en stabilisant le produit.

Cette dernière solution, qui permettrait de préserver les ressources de l’État sans alourdir la fiscalité pesant sur les entreprises, semble avoir la faveur du Gouvernement, comme l’a rappelé le secrétaire d’État au budget et aux comptes publics M. Christian Eckert, lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2017 (18).

Le Gouvernement devrait proposer une évolution du dispositif dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2016. Ses contours n’ayant pas été définis, le Rapporteur spécial restera vigilant quant aux conséquences économiques et financières de cette proposition.

ii. Au regard des griefs tirés du droit communautaire et de son articulation avec la constitutionnalité de la mesure

Les entités requérantes relèvent, tout d’abord, que la redistribution par une société française de dividendes perçus de ses filiales implantées dans d’autres États membres de l’Union européenne serait exonérée de retenue à la source, par application de la directive mère-fille, alors que la redistribution de dividendes en provenance de filiales françaises ou établies hors de l’UE serait assujettie à la contribution additionnelle, ce qui générerait une discrimination à rebours.

La contrariété des dispositions de l’article 235 ter  ZCA avec les articles 4 ou 5 de la directive 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents n’apparaît pas certaine et suppose préalablement réglée une difficulté sérieuse d’interprétation desdits articles.

Par suite, la question prioritaire de constitutionnalité ne peut être regardée comme sérieuse en l’état. C’est ce qu’a jugé le Conseil d’État par une décision du 27 juin 2016 :

« 12. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’appréciation de la compatibilité entre les dispositions contestées et la directive du 30 novembre 2011 dépend de la réponse aux questions suivantes :

« 1° L’article 4 de la directive 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011, et notamment son paragraphe 1, sous a), s’oppose-t-il à une imposition telle que celle prévue à l’article 235 ter ZCA du code général des impôts, qui est perçue à l’occasion de la distribution de bénéfices par une société passible de l’impôt sur les sociétés en France et dont l’assiette est constituée par les montants distribués.

« 2° En cas de réponse négative à la première question, une imposition telle que celle prévue à l’article 235 ter ZCA du code général des impôts doit-elle être regardée comme une « retenue à la source » dont sont exonérés les bénéfices distribués par une filiale en vertu de l’article 5 de la directive.

« 13. Considérant que les questions énoncées au point 12 soulèvent une difficulté sérieuse d’interprétation du droit de l’Union européenne ;

« 14. Considérant que, selon la réponse qui sera donnée aux questions énoncées ci-dessus, il appartiendra au juge de l’excès de pouvoir, soit de juger que les dispositions contestées doivent être regardées comme incompatibles avec la directive du 30 novembre 2011, en tant qu’elles ne prévoient pas de règles spécifiques pour les redistributions de bénéfices reçus par une société mère française d’une filiale établie dans l’Union européenne relevant du régime mère-fille, soit de juger qu’elles ne sont pas incompatibles avec la directive, compte tenu, le cas échéant, de la possibilité d’en donner une interprétation conforme aux objectifs de la directive ; que, tant que l’interprétation des articles 4 et 5 de la directive n’aura pas conduit le juge à écarter l’application des dispositions contestées aux distributions mentionnées ci-dessus, aucune différence dans le traitement fiscal des distributions n’est susceptible d’en résulter au détriment des distributions par une société mère française de bénéfices d’origine française ou extracommunautaire ; qu’ainsi, en l’état, la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ne peut être regardée comme revêtant un caractère sérieux. ».

L’analyse de la CJUE ne sera très vraisemblablement pas connue avant l’horizon 2018.

Si celle-ci validait la position soutenue par les sociétés requérantes, les conséquences en seraient doubles :

– d’une part, dans le cadre transfrontalier communautaire, la contribution ne pourrait plus être exigée ;

– d’autre part, ceci étant posé, le dispositif aboutirait incontestablement à une discrimination à rebours à l’encontre des situations purement domestiques qui, si elle n’est pas d’ores et déjà réglée par la décision à intervenir dans le dossier Layher, pourra donner lieu à une nouvelle saisine du Conseil constitutionnel qui, cette fois-ci, ne pourra que constater l’inégalité de traitement générée par l’application du droit communautaire à l’encontre des situations domestiques et invalider ce qui subsistera du dispositif entre sociétés d’un même groupe fiscal.

c. Les enjeux financiers

À fin juillet 2016, les enjeux identifiés en droits sont de 4,3 milliards d’euros. Toutefois, le risque global encouru par l’État est sans doute plus élevé sur cette taxe dont le rendement annuel est de l’ordre de 1,8 milliard d’euros.

PARTIE II. LE PROGRAMME 201
REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS D’IMPÔTS LOCAUX

I. LA PRÉVISION BUDGÉTAIRE POUR 2017

Entre le scénario révisé pour 2016 et la prévision 2017, les dépenses du programme 201 devraient diminuer de 357 millions d’euros (soit environ 3 %), cette évolution s’expliquant, pour les trois quarts, par le recul des remboursements et dégrèvements de taxe d’habitation, les crédits l’action 201-03 reculant en effet de 274 millions d’euros.

Les dégrèvements d’impôts économiques connaissent une évolution positive (+ 73 millions, soit + 1,1 %), tandis que les impôts pesant sur les ménages, taxe foncière et taxe d’habitation, reculent de manière significative
(– 379 millions d’euros, soit – 7,3 %).

Le tableau suivant présente les crédits du programme 201 depuis 2012.

ÉVOLUTION PLURIANNUELLE DU PROGRAMME 201 DEPUIS 2012

(en millions d’euros)

 

 Exécution

2012

Exécution

2013

Exécution

2014

Exécution

2015

Prévision

2016

(révisée)

Prévision 2017

Variation / prog. (1)

201-01 

6 829

6 868

6 480

6 307

6 533

6 606

– 20,4 %

201-02

838

844

985

990

1 185

1 080

29,4 %

201-03

3 364

3 488

3 556

3 797

4 006

3 732

76,8 %

201-04

435

445

481

582

532

481

14,3 %

Programme 201

11 466

11 645

11 502

11 676

12 256

11 899

100,0 %

(1) Les données présentées dans la colonne « Variation / prog. » correspondent à la part que représente la variation de chaque action par rapport à la variation totale du programme entre 2016 et 2017. Ainsi, la variation de l’action 201-02 explique 29,4 % de la variation totale du programme. Un sens de variation positif signifie que les crédits du programme et de l’action évoluent dans le même sens, tandis qu’à l’inverse, un sens de variation négatif signifie que les crédits du programme et de l’action évoluent en sens contraire.

Source : réponses aux questionnaires.

A. L’ACTION 201-01 : DES DÉGRÈVEMENTS D’IMPÔTS ÉCONOMIQUES EN LÉGÈRE AUGMENTATION

Les principaux dégrèvements retracés dans l’action n° 201-01 sont les suivants :

– le plafonnement de la taxe professionnelle (TP) en fonction de la valeur ajoutée (article 1647 B sexies du code général des impôts) ;

– le plafonnement de la contribution économique territoriale (CET) en fonction de la valeur ajoutée (article 1647 B sexies du code général des impôts) ;

– le crédit d’impôt zones de restructuration défense (article 1647 C septies du code général des impôts) ;

– le dégrèvement barémique (article 1586 quater I du code général des impôts) ;

– le dégrèvement transitoire (article 1647 C quinquies B du code général des impôts)

– le dégrèvement de CVAE.

Le tableau suivant présente la décomposition des dépenses de l’action n° 1 depuis 2012. Le Rapporteur spécial souligne que les remboursements et dégrèvements retracés dans l’action 201-01 sont caractérisés par une grande stabilité au cours du temps. L’augmentation des crédits prévue entre 2016 et 2017 (+ 73 millions, soit + 1,1 %).

L’ÉVOLUTION DES DÉGRÈVEMENTS ÉCONOMIQUES DEPUIS 2012

(en millions d’euros)

 

Exécution 2012

Exécution

2013

Exécution

2014

Exécution

2015

Prévision

2016

Prévision 2017

Plafonnement à la valeur ajoutée TP

272

143

12

12

Plafonnement à la valeur ajoutée CET

937

868

1 068

1 041

1 112

1 158

Dégrèvement barémique

3 696

3 687

3 962

3 953

4 143

4 225

Restructuration défense

350

1

0

3

3

3

Écrêtement des pertes

1

182

92

28

0

0

Restitution CVAE

759

1 190

807

763

775

720

Autres dégrèvements

814

797

539

507

500

500

Total action 201-01

6 829

6 868

6 480

6 307

6 533

6 606

Source : réponses aux questionnaires.

B. LES ACTIONS 201-02 ET 201-03 : DES DÉGRÈVEMENTS D’IMPÔTS DES PARTICULIERS EN NET RECUL

1. L’action 201-02 : les dégrèvements et compensations d’exonérations de taxe foncière

Le montant de l’action 2 du programme 201 correspond, pour le foncier bâti, aux dégrèvements suivants :

– vacance d’une maison normalement destinée à la location ;

– dégrèvement de 100 euros pour les contribuables âgés de 65 ans et de moins de 75 ans et ne bénéficiant pas d’une exonération totale de taxe sur le foncier bâti.

S’agissant du foncier bâti, différents dispositifs existent suivant la nature du terrain :

– dégrèvement en faveur des jeunes agriculteurs installé depuis moins de six ans et bénéficiaires de la dotation jeune agriculteur ou de certains prêts ;

– dégrèvement pour perte de récolte liée à des situations exceptionnelles (gel, inondations, tempête, sécheresse, pollution) ;

– dégrèvement en cas de perte d’un immeuble non bâti faisant suite à un élément extraordinaire (inondation ou avalanche pour l’essentiel).

Le tableau suivant montre le total de taxe foncière pris en charge par l’État depuis 2012.

DÉGRÈVEMENTS DE TAXE FONCIÈRE

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016 (e)

2017 (e)

Produit perçu par les collectivités (1)

35 047

36 414

37  328

38 674

40 196

41 734

Coût à la charge des redevables
(1) + (2) + (3) – (4)

35 797

37 160

37 933

39 209

40 588

42 286

Frais d’assiette et de recouvrement (2)

584

603

603

635

655

676

Frais de dégrèvements et non-valeurs

(y compris les reversements pour dégrèvements indus) (3)

1 005

987

987

890

922

956

Dégrèvements (sans les non-valeurs) (4)

839

844

985

990

1 185

1 080

Compensations

538

502

436

344

331

nc

Recette nette allouée aux collectivités

35 585

36 916

37 764

39 018

40 526

nc

Coût à la charge des redevables

35 797

37 160

37 933

39 209

40 588

42 286

Montant net pris en charge par l’État

– 212

– 244

– 169

– 191

– 62

nc

Source : réponses aux questionnaires.

2. L’action 201-03 : les dégrèvements et compensations d’exonérations de taxe d’habitation

Les dégrèvements de taxe d’habitation enregistrent en 2017 une diminution de 274 millions d’euros, pour s’établir à 3 732 millions d’euros ; cette augmentation est de 367 millions par rapport à la LFI 2012.

Ce montant correspond au plafonnement de la taxe d’habitation (TH) en fonction du revenu prévu à l’article 1414 A du code général des impôts. Les contribuables, autres que ceux qui sont totalement exonérés en application de l’article 1414 du code général des impôts – cette exonération faisant l’objet d’une compensation aux collectivités par le biais d’une dotation budgétaire qui ne fait pas partie des dotations pouvant être soumises à minoration dans le cadre de l’enveloppe normée – peuvent bénéficier d’un plafonnement de leur cotisation de TH correspondant à la fraction de leur cotisation excédant 3,44 % de leur revenu fiscal de référence (RFR), qui est diminué d’un abattement dont le montant varie selon le nombre de part du quotient familial.

Le dégrèvement partiel ou total est lié :

– à l’occupation effective du local imposé à la TH à titre d’habitation principale ;

– au fait que le redevable n’est pas soumis à l’impôt de solidarité sur la fortune ;

– au respect d’un plafond de RFR.

Le tableau ci-dessous montre le total de la TH prise en charge par l’État, qui assume entre 20 et 25 % du produit de cette taxe, depuis 2012.

DÉGRÈVEMENTS DE TAXE D’HABITATION

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016 (éval.)

2017 (éval.)

Produit des émissions au profit des collectivités

19 841

20 618

20 950

22 107

22 378

23 076

Frais d’assiette et de recouvrement

208

215

223

225

228

235

Frais de dégrèvements et non-valeurs (y compris les reversements pour dégrèvements indus)

301

315

343

360

362

371

Dégrèvements (sans les non-valeurs)

3 364

3 488

3 556

3 797

4 006

3 732

Compensations

1 281

1 255

1 276

1 454

1 174

nc

Recette nette allouée aux collectivités

21 122

21 873

22 226

23 561

23 552

nc

Coût à la charge des redevables

16 986

17  660

17 960

18 894

18 962

19 950

Montant net pris en charge par l’État

4 136

4 213

4 266

4 667

4 590

nc

Source : réponses aux questionnaires.

II. UNE PRÉSENTATION BUDGÉTAIRE QUI POURRAIT ÊTRE AMÉLIORÉE

A. L’ARCHITECTURE DU PROGRAMME 201 MÉRITERAIT D’ÊTRE ALIGNÉE SUR CELLE DU PROGRAMME 200

Dans sa note d’exécution budgétaire (NEB) pour 2015 portant sur la mission Remboursements et dégrèvements (19), la Cour des comptes recommandait l’alignement de l’architecture du programme 201 sur celle du programme 200. Il s’agit d’adopter la répartition en trois catégories selon la nature de la dépense (mécanique de l’impôt, politiques publiques, gestion de l’impôt) et non selon la nature du prélèvement (recommandation n° 3).

Lors de son audition par le Rapporteur spécial, l’administration fiscale a rappelé que si une telle évolution pouvait s’avérer souhaitable, celle-ci ne pourrait être réalisée dans un futur proche. En effet, cette amélioration nécessite des développements importants au niveau du système d’information utilisé par la direction générale des finances publiques, et les moyens en personnel actuellement disponibles ne permettent que d’entretenir ce système et d’effectuer des développements mineurs.

Le Rapporteur spécial soutient cette initiative, qui permettrait une meilleure lisibilité des documents budgétaires, et estime qu’elle devrait être réalisée à moyen terme.

B. LES RESTITUTIONS DE CVAE DEVRAIENT S’IMPUTER SUR LES RECETTES DU COMPTE D’AVANCES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La Cour recommandait également de ne plus enregistrer les restitutions de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en dépenses du programme 201, et de les déduire des recettes du compte d’avances aux collectivités territoriales, pour aligner les recettes sur les sommes à reverser aux collectivités territoriales (recommandation n° 5).

Le Rapporteur spécial considère que cette recommandation est justifiée. L’administration, qui est également d’accord sur le principe, a annoncé que son application était en cours.

Elle précise que « la complexité de cette instruction tient au fait que la substitution d’un schéma de réduction de recettes sur le compte de concours financier à un schéma de constatation de dépense sur un programme de la mission Remboursements et dégrèvements doit appréhender à la fois le volet opérationnel de traitement des restitutions de CVAE par les Services des impôts des entreprises, et le volet national de traitement de comparaison entre les déclarations et les encaissements constatés. Dans l’attente d’une analyse complète, cette évolution ne peut pas être envisagée au mieux, en fonction des difficultés que l’analyse complète soulèverait, avant le 1er janvier 2017 (elle ne peut être mise en œuvre en cours d’année) ».

C. LES ADMISSIONS EN NON-VALEUR ET LES REMISES GRACIEUSES POURRAIENT ÊTRE PUBLIÉES DANS LES DOCUMENTS BUDGÉTAIRES

Comme pour le programme 200, le Rapporteur spécial estime que les informations relatives d’une part, aux admissions en non-valeur et, d’autre part, aux remises gracieuses accordées sur les différents impôts, mériteraient d’être publiées dans les documents budgétaires (voir le II de la partie I).

Les tableaux ci-dessous présentent ces informations. Comme le Rapporteur spécial a déjà eu l’occasion de le rappeler, cette initiative prendra tout son intérêt lorsque la quantité d’informations disponibles sera suffisamment importante pour pouvoir effectuer des comparaisons pluriannuelles.

Le tableau relatif aux admissions en non-valeur présenté au II de la partie I comprend les informations relatives à la fiscalité locale.

Les deux tableaux suivants présentent des informations détaillées relatives aux demandes gracieuses.

DEMANDES CONCERNANT LES DÉGRÈVEMENTS GRACIEUX
SUR LES IMPÔTS D’ÉTAT EN 2015

(en nombre de dossiers)

Impôt

Flux cumulé 2015

Traité cumulé 2015

Taxes foncières

149 068

143 064

Taxe d’habitation et taxes annexes

494 792

496 217

Taxe professionnelle et autres taxes locales

155

182

CFE, CVAE, IFER et autres taxes pro

21 590

24 827

Total fiscalité directe locale

665 605

664 290

Total impôts d’État et taxes assimilées

373 996

374 020

Total contribution à l’audiovisuel public

363 008

366 195

Total juridiction gracieuse

1 402 609

1 404 505

(1) La ventilation des remises gracieuses relatives aux impôts d’État est détaillée dans le II de la partie I.

Source : réponses aux questionnaires.

DÉGRÈVEMENTS GRACIEUX SUR LES IMPÔTS D’ÉTAT EN 2015

(en euros)

 

Dégrèvement gracieux

Impôt

Droits

Pénalités

Total

Taxes foncières et taxes annexes

33 174 641

595 983

33 770 624

Taxe d’habitation et taxes annexes

87 750 502

87 750 502

Taxe d’habitation sur les logements vacants

137 732

137 732

TP Plafonnement par rapport à la valeur ajoutée

Taxe professionnelle et taxes annexes (hors PVA)

2 042 038

210 112

2 252 150

CET Plafonnement VA

409 312

409 312

CFE, CVAE, IFER et autres taxes pro (hors PVA)

5 902 293

2 701 887

8 604 180

Autres taxes locales

27 836

3 943

31 779

Total impôts locaux

129 444 354

3 511 925

132 956 279

Total impôts d’État

85 541 885

305 900 597

391 442 482

Contribution à l’audiovisuel public des particuliers

26 768 460

167 570

26 936 030

Contribution à l’audiovisuel public des professionnels

6 846

224 535

231 381

Total général

241 761 545

309 804 627

551 566 172

(1) La ventilation des remises gracieuses relatives aux impôts d’État est détaillée dans le II de la partie I.

Source : réponses aux questionnaires.

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics (voir le compte rendu de la commission élargie du 3 novembre 2016 à 15 heures (20)), la commission examine les crédits des missions Engagements financiers de l’État, Remboursements et dégrèvements et Investissements d’avenir ainsi que des comptes spéciaux Participations financières de l’État, Participation de la France au désendettement de la Grèce et Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics et l’article 56, rattaché.

Suivant l’avis favorable de M. Dominique Lefebvre, rapporteur spécial, la commission adopte les crédits de la mission Remboursements et dégrèvements.

*

* *

ANNEXE :
PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Direction générale des Finances publiques (DGFiP)

– M. Audran Le Baron, chef du service de la gestion fiscale

– M. Brice Lepetit, chef du bureau GF-3C, bureau chargé des statistiques fiscales

– M. Christophe Despons, adjoint au chef du bureau GF-3C

– M. Patrice Laussucq, sous-directeur de la sous-direction JF-2 au service juridique

– M. Éric Fancelli, adjoint au chef du bureau JF-2B, bureau chargé du contentieux relatif aux impôts des sociétés

Direction du budget

– M. Pascal Lefèvre, chef du bureau 1 BR chargé des recettes

– Mme Sophie Clarens, adjointe au chef du bureau  1 BR

Cour des comptes

– M. Guilhem Blondy, conseiller référendaire

– M. Louis-Paul Pelé, rapporteur

– M. Olivier Papin, expert de certification

– M. Thierry Clappier, expert de certification

© Assemblée nationale

1 () Conseil d’État, Section des finances, 21 décembre 2000, n° 365546, Avis « Réforme de la loi organique relative aux lois de finances ».

2 () Cour des comptes, Mission Remboursements et dégrèvements. Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2015, mai 2016.

3 () Cour des comptes, référé n° 68282, relatif aux prévisions de recettes fiscales de l’État, 16 décembre 2013.

4 () Conseil constitutionnel, décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001, Loi organique relative aux lois de finances.

5 () Le contrôle est plus strict lors de l’examen de la loi de règlement : le Conseil constitutionnel considère ainsi que « la sincérité de la loi de règlement s’entend en outre comme imposant l’exactitude des comptes ».

6 () Conseil constitutionnel, décision n° 2009-599 DC du 29 décembre 2009, Loi de finances pour 2010 : « 5. Considérant, d’une part, qu’il ne ressort pas des éléments soumis au Conseil constitutionnel que les évaluations de recettes pour 2010 soient entachées d’une volonté délibérée de les sous-estimer, compte tenu des aléas inhérents à leur évaluation et des incertitudes particulières relatives à l’évolution de l’économie en 2010 ; que, d’autre part, en application du 10° du paragraphe I de l’article 34 de la loi organique du 1er août 2001 susvisée, le paragraphe IV de l’article 67 de la loi déférée dispose que les éventuels surplus des impositions de toutes natures “sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit budgétaire ».

7 () Décision précitée, considérant n° 7.

8 () Cour des comptes, référé n° 66865, relatif aux contentieux communautaires précompte mobilier et OPCVM, 30 mai 2013.

9 () Audition de M. Bruno Parent, directeur général des finances publiques, sur le bilan et les perspectives des contentieux fiscaux entraînant une condamnation de l’État, par la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, le mardi 15 mars 2016 à 16h30, session ordinaire de 2015-2016, compte rendu n° 66.

10 () Cour des comptes, op. cit.

11 () Cour des comptes, Certification des comptes de l’État pour l’exercice 2015, mai 2016, § 242 : « Comme chaque année, un suivi des réserves ou des parties de réserve levées au cours des exercices précédents a été réalisé, concernant notamment : (…) les contentieux fiscaux de série et les passifs non financiers résultant d’accords bien définis (…) ».

12 () Cour des comptes, Certification des comptes de l’État pour l’exercice 2013, mai 2014, § 53 à 56.

13 () Arrêt Ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique contre Accor SA, affaire C-310/09.

14 () CE 10 décembre 2012, Ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique c/ société Rhodia, n° 317074, et c/ société Accor, n° 317075.

15 () Arrêt dans les affaires jointes C-338/11 Santander Asset Management SGIIC SA / Directeur des résidents à l’étranger et des services généraux et C-339/11 à C-347/11 Santander Asset Management SGIIC SA e.a. / Ministre du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État.

16 () CJUE, affaire C-190/12, Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company vs Dyrektor Izby Skarbowej w Bygoszczy.

17 () Notamment CAA Versailles 22 juin 2016 n° 12VE03691, Société Sopra Steria Group.

18 () Lors de la deuxième séance du jeudi 20 octobre 2016, à l’occasion de l’examen de l’amendement n° 752 de M. de Courson, M. Christian Eckert, secrétaire d’État, a ainsi rappelé: « Nous traiterons cette question dans le projet de loi de finances rectificative car nous ne pouvons pas nous priver de 2,2 milliards d’euros de produit. L’autre solution aurait consisté à supprimer l’intégration fiscale lorsque la distribution a lieu à l’intérieur d’un groupe, ce qui aurait ponctionné les entreprises à hauteur de 3,5 milliards. Cela aurait fait du bien aux finances publiques mais ce n’est pas non plus ce que souhaitait le Gouvernement. Nous travaillons donc actuellement sur le sujet, en lien avec les représentants des grands groupes et des entreprises, pour être franc, afin de trouver une solution équilibrée qui sera décrite lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative. Plusieurs solutions s’offrent à nous mais je ne veux pas les évoquer aujourd’hui»

19 () Cour des comptes, op. cit.

20 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2017/commissions_elargies/