N° 273

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2017.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2018 (n° 235),

 

PAR M. Joël GIRAUD,

Rapporteur Général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 14
 

 

DÉfense :

 

BUDGET OPÉRATIONNEL DE LA DÉFENSE

 

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Olivier GAILLARD

 

Député

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPAles observations DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

données clés

Introduction

I. Un budget renforcé pour répondre aux besoins opérationnels et pour faire face À la multiplication des menaces

A. Des crédits en hausse de 1,76 milliard d’euros entre 2017 et 2018

1. Répartition des crédits entre les programmes et par titre

2. Les dépenses d’équipement

B. La trajectoire pluriannuelle (horizon 2022 et préparation de la LPM 2019-2025) : réparer, recapitaliser, régénérer

1. Une augmentation continue de l’effort de défense

2. La régénération des forces, objectif prioritaire

C. Une fin de gestion 2017 qui doit être maîtrisée

II. Le programme 178 Préparation et emploi des forces

1. Présentation de la dotation du programme en crédits directs et en crédits complets

2. Les opérations extérieures et leur financement

3. La nouvelle architecture de l’opération Sentinelle

4. L’enjeu de la préparation opérationnelle

5. Retrouver des capacités en matière de maintien en condition opérationnelle

6. Les dépenses fiscales associées au programme 178

III. Le programme 212 Soutien de la politique de la défense

1. Un effort de plus de 1 milliard d’euros

2. La poursuite de la hausse des effectifs

3. Un rattrapage attendu en matière d’infrastructures et d’immobilier

4. Les opérateurs

IV. Une attention accrue portée à La condition militaire

1. Des attentes grandissantes

2. Un renforcement des mesures salariales et indemnitaires, de l’action sociale et de la réhabilitation des infrastructures

Examen en commission

Personnes auditionnées par le rapporteur spécial

Annexe I : Documents de référence

Annexe II : Évolution des crédits du programme 112

 


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   PRINCIPAles observations DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

La stratégie de la France en matière de défense consiste en un haut niveau d’engagement, dans un cadre national ou au sein d’alliances ou de coalitions, pour faire face aux menaces contre le territoire national, aux trafics de migrants, aux agressions terroristes au Sahel ou au Levant. Il s’agit d’opérations souvent conjointes : opérations militaires à proprement parler, mais aussi interventions en amont par la formation, la fourniture de moyens et le soutien.

Les contrats opérationnels figurant dans le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 se sont trouvés dépassés par l’intensité de l’engagement. Le coût des opérations extérieures a été, de manière récurrente, sous-estimé.

Dans un tel contexte stratégique, l’enjeu budgétaire est double : renouer avec plus de sincérité et assurer une véritable remontée de l’activité et de la capacité opérationnelle des forces. C’est ce qui apparaît clairement dans les choix de ce budget pour 2018, qui entame une remontée en puissance des forces sans précédent depuis la fin de la Guerre froide. La trajectoire de hausse continue des crédits qui s’amorce aujourd’hui est un impératif, compte tenu des tendances inverses qui ont marqué la période précédente, notamment les déflations de personnel et l’insuffisance notoire des crédits pour le maintien du matériel en condition opérationnelle. Remarquons que dès 2016, en matière d’effectifs, une inflexion inédite avait eu lieu, avec une augmentation de 2 300 équivalents temps plein.

Les régulations budgétaires pratiquées en cours d’exercice 2017 (décret d’avance) ont répondu à l’objectif de repartir sur des bases budgétaires plus sincères pour 2018, objectif conforté par le rehaussement, pour 2018, de la provision au titre des surcoûts OPEX de 200 millions d’euros par rapport à la LPM. Une attention particulière doit être portée à la fin de gestion 2017 : un report de charges trop important mettrait, en effet, en péril l’exécution 2018.

Le budget des armées pour 2018 est aussi un budget de redéfinition du cadre budgétaire pour la nouvelle loi de programmation militaire 2019-2025. Le montant total des crédits de paiement du ministère inscrits dans le projet de loi de finances pour 2018 (toutes ressources, pensions comprises) s’élève à près de 45,36 milliards d’euros, contre 43,46 milliards en loi de finances initiale pour 2017.

La mission Défense de ce budget progresse fortement en 2018, avec 1,76 milliard d’euros d’abondement en crédits de paiement. Les crédits atteignent ainsi 34,20 milliards d’euros hors pensions, alors qu’ils s’élevaient à 32,44 milliards en LFI pour 2017, soit une augmentation de 5 %. De 42,24 milliards d’autorisations d’engagement ouvertes en LFI pour 2017, on passe à 47,18 milliards demandées pour 2018, soit une augmentation de 11,7 %. Après cette hausse en 2018, les crédits connaîtront une augmentation régulière de 1,7 milliard par an, jusqu’en 2022. En cinq ans, donc, le budget de la défense, pensions comprises, devrait passer de 40,6 à 49,2 milliards d’euros (+ 21 %), en ligne avec l’objectif global de le porter à 2 % du PIB en 2025.

Ces augmentations visent à répondre aux défis opérationnels que pose un environnement stratégique de plus en plus instable et incertain.

Le programme 178 recouvre l’entraînement et l’engagement opérationnel des forces et le maintien en condition opérationnelle (MCO) des matériels. Il bénéficie de la plus grande partie de l’action de soutien du ministère issue des programmes 146 et 212, et représente 68 % des dépenses prévisionnelles en crédits complets (29,3 milliards d’euros). Les autorisations d’engagement ouvertes en LFI pour 2017 étaient de 8,371 milliards d’euros, celles demandées pour 2018 s’élèvent à 8,818 milliards, soit une augmentation de 5,3 %. En crédits de paiement, on passe de 7,297 milliards d’euros ouverts en LFI pour 2017 à 8,066 milliards, soit une augmentation de 10,6 %.

Les crédits d’entretien programmé du matériel progressent de 450 millions d'euros pour s’établir à 3,9 milliards d’euros (recettes issues de cessions comprises) dans le PLF 2018. Cette hausse de 13 % par rapport à la LFI 2017 permettra une véritable montée en puissance des nouveaux matériels ainsi que l’entretien et le maintien en condition des matériels existants particulièrement sollicités en opérations.

Le programme 212 regroupe les fonctions de direction et de soutien mutualisées au profit du ministère de la défense. Placé sous la responsabilité du secrétaire général pour l’administration, il assure le pilotage et la coordination de politiques transversales (ressources humaines, finances, immobilier, logement, action sociale, systèmes d’information, achats…). Depuis 2015, il comprend l’intégralité des dépenses de personnel de la mission Défense. Les autorisations d’engagement ouvertes en LFI pour 2017 s’élevaient à 22,20 milliards d’euros, celles demandées pour 2018 s’élèvent 23,25 milliards, soit une augmentation de 4,8 %. En crédits de paiement, on passe de 21,90 milliards d’euros ouverts en LFI pour 2017 à 22,92 milliards, soit une augmentation de 4,7 %.

La hausse des effectifs est poursuivie, avec un renforcement des capacités de renseignement et de lutte dans le domaine de la cyberprotection.

Une attention particulière est accordée à l’infrastructure et à l’immobilier (augmentation de crédits de 23,2 % par rapport à la LFI 2017). Cette hausse est répartie principalement sur les programmes majeurs d’infrastructures, pour la plupart liés à des programmes d’armement tels que les sous-marins nucléaires d’attaque Barracuda, les avions militaires de transport et de ravitaillement (MRTT), les véhicules du programme Scorpion ; la dissuasion nucléaire ; la rénovation des infrastructures qui contribue directement à l’amélioration des conditions de vie du personnel ; les opérations d’adaptation capacitaire technico-opérationnelles qui financent les investissements générés par la remontée en puissance de la force opérationnelle terrestre et les besoins accrus de sécurité-protection. En lien direct avec les conditions de vie du personnel, les opérations d’adaptation capacitaire non technico-opérationnelle, ainsi que le logement familial, bénéficient d’une augmentation de crédits substantielle : respectivement + 131,2 % et + 76 % par rapport à la LFI 2017.

Le budget pour 2018 prévoit en outre une nouvelle augmentation de la subvention à l’Institution de gestion sociale des armées (IGESA), qui passe de 56,48 millions en exécution 2016 à 64,10 millions en LFI 2017 et à 68,28 millions en 2018, soit une augmentation de plus de 20 % en deux ans.

En résumé, le budget de la défense pour 2018 soutient des domaines essentiels pour le court terme (maintien en conditions opérationnelles, conditions de vie du personnel), mais aussi pour la préparation de l’avenir et l’autonomie stratégique du pays (développement du renseignement, renouvellement de la dissuasion nucléaire). Dans la perspective de la future loi de programmation militaire, il contribuera à resserrer les liens unissant les cinq fonctions : dissuasion, prévention, protection, intervention, connaissance et anticipation.

Plusieurs questions demeurent cependant.

Concernant les OPEX, quel mécanisme pourrait mettre fin à la sous-estimation des surcoûts ? La loi de programmation militaire doit être orientée sur les menaces, les grands programmes incompressibles et les opérations certaines, mais elle doit aussi prendre en compte cette dimension.

Pour ce qui concerne l’opération Sentinelle, la nouvelle architecture, plus flexible et plus dynamique, participe de l’attention portée à la préparation opérationnelle et préfigure un travail accru sur les scénarios de crise (risques radiologiques, chimiques, et biologiques, notamment). Mais l’efficacité du dispositif dépend des exercices à grande échelle que voudront bien organiser les préfets.

En l’état actuel des prévisions, les effets de l’effort budgétaire en matière de ressources humaines ne seront véritablement perceptibles et significatifs qu’à l’horizon 2022, alors que la logique recommanderait qu’ils le soient plus tôt. S’il est une réponse aux défis opérationnels qui doit précéder les autres, c’est bien celle des ressources humaines. Compte tenu, par exemple, des difficultés à fidéliser les effectifs, tout particulièrement dans l’armée de l’air et la Marine, il conviendra de définir en programmation des objectifs précis. Ce constat inviterait donc à produire, d’ici à 2022, un effort budgétaire plus soutenu en termes de ressources humaines.

 

L’autonomie stratégique, axe fort de la future loi de programmation militaire, est fondamentale pour entrer dans la défense du XXIe siècle. La souveraineté numérique et des coopérations technologiques et industrielles équilibrées entre partenaires européens sont des priorités dès aujourd’hui. En parallèle, une meilleure articulation entre les aspects industriels et les aspects opérationnels du maintien en condition opérationnelle remédierait au déficit de disponibilité des matériels, tout en abaissant les coûts.

 


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   données clés

 


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   Introduction

L’année 2018 marquera un tournant pour la politique de défense de la France à deux titres principaux.

Tout d’abord, conformément aux engagements du Président de la République et de la ministre des armées, le Parlement sera saisi au premier semestre d’une nouvelle loi de programmation militaire (LPM) portant sur les années 2019 à 2025, soit une durée totale de sept ans. Une revue stratégique a été menée durant l’été afin de définir le cadre de l’élaboration de ce texte. Nous en connaissons les conclusions depuis le 13 octobre.

Ensuite, les crédits de la mission Défense prévus pour 2018 s’inscrivent dans une nouvelle trajectoire budgétaire qui a été définie jusqu’à 2022. Après la hausse de 1,76 milliard d’euros en 2018, ils connaîtront en effet une augmentation régulière de 1,7 milliard par an sur cette période. En cinq ans, donc, le budget de la défense devrait passer de 40,6 à 49,2 milliards d’euros (+ 21 %), en ligne avec l’objectif global de le porter à 2 % du PIB en 2025.

Ainsi se trouve pleinement assurée l’articulation entre la dernière année d’exécution de la loi de programmation votée en 2013 et la future LPM.

Alors que l’engagement de nos forces reste très intense en opérations extérieures comme sur le territoire national, il convenait de conforter nos capacités d’intervention immédiate, et c’est dans cette perspective que la provision destinée à financer les surcoûts au titre des opérations extérieures (OPEX) se trouve augmentée, de même que les crédits des programmes Préparation et emploi des forces (+ 10,6 % en crédits de paiement) et Soutien de la politique de la défense (+ 4,7 %), auxquels le présent rapport est plus spécifiquement consacré.

Mais l’intensité même de cet engagement depuis de nombreuses années commandait aussi de préparer sans attendre les moyens financiers qui permettront à nos armées de reconstituer leur potentiel opérationnel sur le long terme. C’est ce processus de régénération qu’entame le budget de la mission Défense pour 2018.

D’ores et déjà, de grandes lignes se dégagent en matière d’entretien programmé et de renouvellement du matériel, de cyberdéfense et de renseignement, d’infrastructures, de protection du combattant, mais aussi d’amélioration de la condition militaire. Ce premier budget de la législature permet d’aborder avec confiance les discussions que le Parlement consacrera à ces thèmes dans quelques mois.


I.   Un budget renforcé pour répondre aux besoins opérationnels et pour faire face À la multiplication des menaces

Dans son discours prononcé devant le Congrès le 3 juillet 2017, le Président de la République a dressé le tableau des menaces nouvelles ou résurgentes qui justifient la priorité donnée à l’effort de défense :

« La déflagration mondiale n’est plus le spectre que seuls les pessimistes brandissent : elle est pour les réalistes une hypothèse sérieuse. Les affirmations de puissance reviennent ou émergent. Les mouvements terroristes se développent dans de multiples régions, avec des moyens qui augmentent leur capacité de nuisance. Ils sont là, au sein même de nos sociétés. Les guerres régionales atteignent des degrés nouveaux de barbarie. Les alliances d’hier s’effritent, l’ordre multilatéral doute de lui-même, et les régimes autoritaires ou les démocraties illibérales fleurissent. L’espace cybernétique propage et amplifie les instruments de ces guerres du tout contre tous. La dérive du monde impose son rythme erratique, ses excès en tous genres, détruisant l’homme, le déracinant, effaçant sa mémoire, bousculant son imaginaire. »

C’est à partir de cette analyse globale que le chef de l’État définit la place et le rôle de notre outil militaire :

« Avec comme fils directeurs les principes d’indépendance et d’autonomie de décision, nos armées assureront les missions que je leur ai confiées : la dissuasion, clé de voûte de notre sécurité ; la protection de nos concitoyens et de nos intérêts ; l’intervention là où le respect du droit et la stabilité internationale sont menacés. (…)

« Les prochaines années seront pour nos armées celles d’un renouvellement stratégique et tactique. »

La revue stratégique de défense et de sécurité nationale menée par M. Arnaud Danjean vise avant tout à préparer ce renouvellement en identifiant les menaces et les vulnérabilités et en définissant les besoins pour y faire face. Le terrorisme djihadiste qui a frappé la France comme ses voisins européens se propage au gré des guerres civiles et des situations de chaos, profitant de la fragilité des États. Plus généralement, les risques climatiques et pandémiques, les trafics et la criminalité, l’interdépendance et l’interconnexion croissantes des populations, des services publics et des entreprises dans le cyberespace, multiplient les vulnérabilités et les causes de déstabilisation.

« Par leur simultanéité, leur complexité et leur dispersion géographique, les crises dans lesquelles les armées françaises sont engagées mettent leurs capacités et leurs ressources sous forte tension », résument les auteurs de la revue. Une remontée en puissance est donc nécessaire à plusieurs titres :

– sur le plan de l’autonomie stratégique, avec le renouvellement des deux composantes de la dissuasion nucléaire et la préservation d’un modèle d’armée complet et équilibré, disposant « de l’ensemble des aptitudes et des capacités nécessaires pour atteindre les effets militaires recherchés sur la totalité du spectre des menaces et engagements possibles ». La revue stratégie préconise à cet égard des efforts prioritaires en matière de renseignement et de moyens de commandement, d’entrée en premier, de combat et de soutien ;

– sur le plan technologique, pour ne pas s’exposer à un décrochage des capacités françaises et européennes par rapport aux autres grandes puissances militaires tant en matière d’armement et d’industrie de défense que dans le cyberespace, où l’enjeu de la souveraineté numérique est devenu crucial ; l’effort en faveur de la recherche et de l’innovation doit se trouver amplifié ;

– sur le plan des moyens humains, par un renforcement de l’attractivité des carrières et par la fidélisation des personnels, ce qui suppose notamment des mesures d’amélioration de la vie quotidienne des militaires.

A.   Des crédits en hausse de 1,76 milliard d’euros entre 2017 et 2018

Le projet de budget pour 2018 porte la marque de ce nouvel élan voulu par le Président de la République, puisque l’augmentation globale par rapport à la loi de finances initiale pour 2017 est de 1,76 milliard d’euros (+ 5 %) en crédits de paiement. Les autorisations d’engagement connaissent une hausse encore plus marquée de 4,94 milliards d’euros (+ 11,7 %), principalement au titre du programme 146 Équipement des forces.

Crédits de la mission Défense

(en euros)

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en LFI pour 2017

Demandées pour 2018

Évolution

Ouverts en LFI pour 2017

Demandés pour 2018

Évolution

42 244 243 391

47 182 037 119

+ 11,7 %

40 591 037 733

42 633 756 547

+ 5,0 %

Source : projet annuel de performances.

Alors que le budget 2017 hors pensions dépassait de 1,1 milliard le montant prévu en loi de programmation militaire initiale et de 400 millions celui de la LPM actualisée de 2015, la différence entre les crédits de 2018 et les prévisions s’élève à 2,6 milliards (LPM initiale) et 1,6 milliard (LPM actualisée), ainsi que le tableau ci-dessous le montre.

comparaison avec la lpm initiale et la lpm actualisée

(en milliards d’euros, hors pensions)

 

2017

2018

 

LPM

Initiale (1)

LPM actualisée (2)

LFI 2017

LPM initiale (1)

LPM actualisée (2)

PLF 2018

Ressources totales

31,6

32,3

32,7

31,8

32,8

34,4

Dont équipement

17,1

17,3

17,3

17,4

17,7

18,5

Dont fonctionnement (3)

3,5

3,4

3,5

3,5

3,5

3,6

(1) Loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale.

(2) Loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.

(3) Hors dotation Opex

Source : ministère des armées.

Parallèlement, le projet de loi de finances pour 2018 relève le plafond d’emplois de la mission de 1 300 ETPT, le portant à 274 580 ETPT. Le plafond d’emploi des opérateurs reste stable.

Évolution globale des emplois de 2017 à 2018

 

LFI 2017

PLF 2018

Numéro et intitulé du programme

ETPT

dont ETPT opérateurs rémunérés par le programme

ETPT rémunérés par les opérateurs

ETPT

dont ETPT opérateurs rémunérés par le programme

ETPT rémunérés par les opérateurs

Sous plafond

hors plafond

Total

sous plafond

hors plafond

Total

144 – Environnement et prospective de la politique de défense

5 121

563

5 684

5 117         

622

5 739

178 – Préparation et emploi des forces

351

40

391

354           

40

394

212 – Soutien de la politique de la défense

273 280

7

1 128

48

1 176

274 580

1 132           

59

1 191

Total

273 280

7

6 600

651

7 251

274 580

6 603         

721

7 324

Source : projets annuels de performances.

Enfin, la prévision de ressources issues de fonds de concours et d’attributions produits est relativement stable (+ 1,06 %), comme le montre le tableau ci-dessous.

Fonds de concours et attributions de produits attendus en 2018

(en euros)

Programme

144

178

212

146

Total

FDC et ADP 2017

87 908

356 411 156

303 772 298

73 310 105

733 581 467

FDC et ADP 2018

130 000

376 499 788

297 998 724

66 701 743

741 330 255

Source : projet annuel de performances.

1.   Répartition des crédits entre les programmes et par titre

Le tableau ci-dessous fait apparaître la priorité donnée par le gouvernement aux dépenses d’investissement (+ 17,6 % en CP et + 28,1 % en AE), alors que les dépenses de fonctionnement reculent de 1,2 % en CP. Les dépenses de personnel progressent de 3 %, en ligne avec le ressaut des effectifs et la poursuite d’un engagement opérationnel intense.

Évolution des crédits de la mission Défense de 2017 à 2018

(en euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé du programme et du titre

Ouvertes en LFI pour 2017

Demandées pour 2018

Évolution

Ouverts en LFI pour 2017

Demandés pour 2018

Évolution

144 / Environnement et prospective de la politique de défense

1 531 777 442

1 443 116 886

– 5,8 %

1 335 954 898

1 395 651 759

+ 4,5 %

178 / Préparation et emploi des forces

8 371 711 089

8 817 980 528

+ 5,3 %

7 297 016 947

8 066 880 474

+ 10,6 %

212 / Soutien de la politique de la défense

22 200 505 911

23 259 946 255

+ 4,8%

21 906 694 074

22 927 979 172

+ 4,7 %

146 / Équipement des forces

10 140 248 949

13 660 993 450

+ 34,7 %

10 051 371 814

10 243 245 142

+ 1,9 %

Total pour la mission

dont :

42 244 243 391

47 182 037 119

+ 11,7 %

40 591 037 733

42 633 756 547

+ 5,0 %

Titre 2. Dépenses de personnel

19 761 298 845

20 369 236 933

+ 3,0 %

19 761 298 845

20 369 236 933

+ 3,1 %

Autres dépenses :

22 482 944 546

26 812 800 186

+ 16,1 %

20 829 738 888

22 264 519 614

+ 6,9 %

Titre 3. Dépenses de fonctionnement

11 633 432 995

11 836 306 907

+ 1,7 %

11 819 769 252

11 680 950 232

– 1,2 %

Titre 5. Dépenses d’investissement

10 548 043 398

14 667 735 316

+ 28,1 %

8 705 486 084

10 239 189 305

+ 17,6 %

Titre 6. Dépenses d’intervention

263 644 780

294 903 467

+ 10,6 %

286 110 179

305 673 339

+ 6,8 %

Titre 7. Dépenses d’opérations financières

37 823 373

13 854 496

– 173,0 %

18 373 373

38 706 738

+ 110,7 %

Source : PLF 2018.

2.   Les dépenses d’équipement

Réparties principalement entre les programmes 146 et 178, elles sont portées à 18,5 milliards d’euros, soit une hausse globale de 1,2 milliard d’euros.

La ventilation des crédits, telle que retracée ci-dessous, fait apparaître un effort particulièrement soutenu (+ 450 millions d’euros) pour l’entretien programmé du matériel (EPM) et pour les infrastructures (+ 330 millions d’euros, soit une hausse de 28,2 %) :

Parmi les livraisons d’armement attendues en 2018 figurent notamment :

– 9 stations sol de communication haut débit par satellite COMCEPT, la mise à niveau de 2 avions de guet aérien Hawkeye, 1 satellite d’observation optique du système MUSIS ;

– 1 frégate multi-missions (FREMM) ; 1 bâtiment multi-missions (B2M) ; 2 bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers (BSAH) ;

– 3 avions de combat Rafale neufs et un Rafale Marine F1 rétrofité au standard F3 ;

– 2 avions de transport A400M Atlas, 8 avions pour la formation modernisée et l’entraînement différencié des équipages de chasse (FOMEDEC), 1 avion de transport C-130J, 1 avion de type multi-rôle transport tanker (MRTT) Phénix, 1 avion léger de surveillance et de reconnaissance (ALSR) ;

– 5 hélicoptères de combat Tigre, 10 hélicoptères de transport NH90 ;

– 40 véhicules porteurs polyvalents terrestres (PPT), 3 véhicules blindés multi-rôles lourds (VBMR lourds), 3 véhicules blindés légers (VBL) régénérés, des véhicules forces spéciales, 500 véhicules légers tactiques polyvalents non protégés (VLTP NP) ;

– 12 missiles ASTER 15 pour les frégates FREMM, 69 missiles air-air Meteor.

Les principales commandes concernent :

– 1 sous-marin nucléaire d’attaque Barracuda ;

– 3 avions MRTT Phénix, la rénovation mi-vie de 55 avions de combat Mirage 2000D, la rénovation de 3 avions de patrouille maritime Atlantique 2 ;

– 26 radars tactiques (MURIN) pour les forces terrestres, la rénovation de 4 postes d’exploitation du système d’aide à l’interprétation multicapteurs (SAIM), 79 modules projetables du système d’information des armées (SIA) ;

– 1 200 véhicules légers tactiques polyvalents non protégés (VLTP NP), la rénovation de 50 chars Leclerc.

Seront également lancés en réalisation les programmes OMEGA (opération de modernisation des équipements de positionnement par satellites – GNSS – des armées), CUGE (capacité universelle de guerre électronique) et successeur MICA (missile d’interception, de combat et d’autodéfense).

B.   La trajectoire pluriannuelle (horizon 2022 et préparation de la LPM 2019-2025) : réparer, recapitaliser, régénérer

1.   Une augmentation continue de l’effort de défense

Sur le plus long terme, l’effort de défense connaîtra une hausse linéaire jusqu’en 2022 :

Source : ministère de la défense.

Cette trajectoire est conforme à l’objectif de porter le budget de la défense, pensions comprises, à 2 % du produit intérieur brut (objectif partagé par les pays membres de l’OTAN et exprimé dans la déclaration du sommet du pays de Galles en septembre 2014) à l’horizon 2025. Les crédits de la mission Défense représenteront en 2018 1,81 % du PIB nominal calculé sur la base des prévisions de croissance et d’inflation de la loi de programmation des finances publiques 2018-2022.

Il convient de préciser qu’il ressort de ces prévisions que le PIB réel pourrait connaître, entre 2017 et 2022, une augmentation de l’ordre de 17 %.

évolution du PIB réel et du PIB nominal en foncTion des prévisions
de croissance et d’inflation

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Croissance PIB

1,7

1,7

1,7

1,7

1,7

1,8

Déflateur PIB

0,8

1,1

1,25

1,5

1,75

1,75

PIB réel en milliards d’euros

2 266,79

2 323,77

2 389,27

2 460,26

2 539,62

2 630,57

PIB nominal en milliards d’euros

2 284,93

2 349,33

2 419,14

2 497,16

2 584,06

2 676,61

Source : commission des finances d’après les données du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Par ailleurs, la comparaison des dépenses de défense des différents pays en fonction de leur PIB se heurte à des questions de périmètre. Pour ce qui concerne la France, on doit considérer que certaines missions relevant du périmètre de la mission Sécurité, notamment en ce qui concerne la Gendarmerie nationale, sont partie intégrante de l’effort de défense – et sont d’ailleurs comptabilisées comme telles dans d’autres pays de l’OTAN.

2.   La régénération des forces, objectif prioritaire

Auditionnés par votre Rapporteur, les chefs d’état-major des forces terrestres, navales et aériennes ont insisté sur l’importance déterminante de la prochaine LPM. L’exécution des deux précédentes programmations s’est traduite par d’importantes restructurations – réforme de la carte militaire et création des bases de défense notamment – et, jusqu’en 2015, par une déflation continue des effectifs. Dans le même temps, l’engagement opérationnel des forces armées sur de multiples théâtres n’a pas connu de relâche, mettant en péril le renouvellement capacitaire nécessaire pour répondre aux nouveaux enjeux de sécurité nationale et internationale.

L’intensité des engagements depuis plus d’une décennie a provoqué l’usure accélérée des matériels. La mobilisation des militaires en opérations extérieures et intérieures entraîne des difficultés croissantes à leur préparation opérationnelle. Aussi l’hypothèse d’une baisse importante des capacités d’intervention de notre pays ne peut-elle être exclue.

Dès lors, les nouveaux moyens mis à la disposition des armées doivent permettre d’atteindre un triple objectif :

– réparer les parcs de matériels et les infrastructures mis à mal par une utilisation trop intensive ;

– recapitaliser en renouvelant les équipements et en assurant la formation des personnels pour répondre aux nouveaux enjeux de sécurité ;

– régénérer les forces armées dans l’objectif d’assurer un modèle d’armée complet et équilibré et de préserver l’autonomie stratégique de la France.

C.   Une fin de gestion 2017 qui doit être maîtrisée

L’année budgétaire 2017 a été marquée par un important mouvement de crédits au sein de la mission Défense. En effet, dans le cadre de l’effort de redressement du budget de l’État pour l’exercice 2017, le décret n° 2017-1182 du 20 juillet 2017 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance a annulé 850 millions d’euros sur le programme 146 et a ouvert 643,2 millions sur le programme au titre du financement des opérations extérieures.

Cette annulation a conduit le ministère des armées à reporter ou à étaler l’exécution de certains programmes d’équipement. Il est également escompté que 700 millions d’euros mis en réserve en début d’exercice soient progressivement dégelés.

Cependant, la maîtrise de la fin de l’exercice est conditionnée au financement des surcoûts engendrés par les opérations extérieures et les missions intérieures (OPEX-MISSINT). En octobre, le ministère des armées établissait la prévision de dépenses pour ces opérations en 2017 à 1 528 millions d’euros, dont 202,9 millions pour MISSINT et 1 325,50 millions pour les OPEX. Ce montant de 1 528 millions se décompose en 408 millions de titre 2 et 1 120 millions de hors titre 2. Si l’on déduit les dotations budgétaires figurant dans la LFI pour 2017 (450 millions pour OPEX et 41 millions pour le titre 2 des MISSINT), 43 millions de remboursements attendus d’organismes internationaux et 643 millions déjà reçus dans le cadre du décret d’avance du 20 juillet 2017, le surcoût restant à couvrir serait de 352 millions d’euros. Aux termes de l’article 4 de la loi relative à la programmation militaire pour les années 2013 à 2019, c’est un financement interministériel qui doit intervenir en gestion pour les dépenses de cet ordre.

Le tableau ci-dessous retrace, du point de vue du ministère des armées, la répartition des financements des OPEX :

SURCOÛTS DES OPEX ET FINANCEMENT

 

2014 (2)

2015

2016

LFI 2017

Surcoûts des OPEX (1)

Loi de finances initiale

450

450

450

450

Coûts non prévus par la LFI

668

666

722

 

Total Surcoûts

1 118

1 116

1 172

 

Financement des surcoûts des OPEX non prévus en LFI

Décrets d’avance

611

625

686

643,2

dont : « gage » sur des crédits d’équipement

400

200

0

 

dont « gage » sur des annulations de crédits de ministères civils

211

425

0

 

Crédits ouverts en LFR

 

 

 

 

Autres (dont fonds de concours)

54

40

36

 

Total

665

666

722

 

(1) Périmètre : le surcoût des OPEX jusqu’en 2014 relève en totalité du programme 178. Depuis le 1er janvier 2015, les dépenses de titre 2 sont rattachées au programme 212, les dépenses hors titre 2 restant dans le programme 178.

(2) Le décret d’avance (DA) 2014 a permis de couvrir les surcoûts en interministériel à hauteur de 611 M€. Dans le même temps, la mission Défense a participé au financement des dépenses urgentes interministérielles (dont les OPEX) à hauteur de 400 M€. 3 M€ de reliquat ont été financés par redéploiement de crédits HT2 au sein du programme 178.

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Dans ce contexte de tension sur la fin de l’exercice, un volume excessif de reports de charges sur l’année 2018 est à craindre. Ce report s’est établi à environ 3,1 milliards d’euros à la fin de 2016 pour l’ensemble de la mission. Bien que reposant sur des hypothèses favorables (dégel de 700 millions d’euros de crédits sur le programme 146, financement interministériel des surcoûts OPEX sans contribution supplémentaire du budget des armées), les prévisions du ministère sont particulièrement alarmantes, puisque le report connaîtrait une hausse de 12 % par rapport à la fin de 2016.

Estimation du report de charges de 2017 sur 2018

Source : réponses au questionnaire budgétaire.

Le programme 146 avait pourtant connu des progrès notables : les reports de charges au titre de l’équipement des forces étaient passés de 2,34 milliards d’euros fin 2014 à 1,98 milliard fin 2015 et 1,74 milliard fin 2016. Une régression se traduirait par une augmentation du volume des pénalités de retard dues aux industriels. Elle porterait également atteinte au principe de sincérité budgétaire et mettrait en péril l’exécution du budget 2018.

II.   Le programme 178 Préparation et emploi des forces

1.   Présentation de la dotation du programme en crédits directs et en crédits complets

Le programme 178, placé sous la responsabilité directe du chef d’état-major des armées, occupe une place centrale dans le dispositif de défense en ce sens que ses quatre objectifs (assurer les fonctions stratégiques de connaissance-communication, de prévention, de protection, d’intervention) correspondent, avec la dissuasion, à la totalité des fonctions stratégiques assignées aux forces armées par le Livre blanc de 2008 et qui sont reprises dans le Livre blanc de 2013.

Pour 2018, les crédits de paiement de ce programme connaissent la plus forte augmentation (+ 10,6 %) au sein de la mission Défense.

Évolution des crédits du programme 178 par actions

(en millions d’euros)

Source : ministère de la défense.

Dans une présentation en crédits complets, qui permet de mesurer la globalité de la dépense – en incluant, notamment, la masse salariale et les dépenses d’infrastructure – pour chaque action de politique publique, on constate une augmentation beaucoup plus importante en valeur absolue.

Évolution DES CP du programme 178
en crédits directs et en crédits complets

(en milliers d’euros)

 

Numéro et intitulé du programme et de l’action

PLF 2017
crédits directs

(y.c. FDC et ADP)

PLF 2018

crédits directs

(y.c. FDC et ADP)

Variation 2017-2018(2) crédits directs

PLF 2017 crédits complets

(y.c. FDC et ADP)

PLF 2018 crédits complets

(y.c. FDC et ADP)

Variation 2017-2018

crédits complets

P178 – Préparation et emploi des forces

7 653 420

8 443 380

789 960  + 10,3%

27 562 838

29 338 202

1 775 364+ 6,4%

P178_01 – Planification des moyens et conduite des opérations

484 606

530 357

45 571

+ 9,4 %

2 041 906

2 221 853

179 947

+ 8,8 %

P178_02 – Préparation des forces terrestres

1 241 860

1 331 910

90 050

+ 7,3 %

11 160 597

11 893 299

732 702

+ 6,6%

P178_03 – Préparation des forces navales

2 034 267

2 268 869

234 602

+ 11,5 %

5 840 967

6 167 795

326 828

+ 5,6%

P178_04 – Préparation des forces aériennes

2 078 553

2 235 222

156 669

+ 7,5 %

6 133 418

6 410 525

277 107

+ 4,5%

P178_05 – Logistique et soutien interarmées

1 504 134

1 642 023

137 889

+ 9,2 %

1 856 543

1 915 386

58 843

+ 3,2%

P178_06 – Surcoûts liés aux opérations extérieures

310 000

435 000

125 000

+ 40,3 %

488 406

688 344

199 938

+ 40,9 %

P178_07 – Surcoûts liés aux opérations intérieures

 

 

non dotée en crédits directs

41 000

41 000

Sources : PLF 2017 et 2018.

La comptabilité analytique permet de mettre en exergue le poids budgétaire des forces terrestres, intensément sollicitées à la fois dans le cadre de l’opération Barkhane et dans celui de l’opération Sentinelle, et qui connaissent une hausse importante des leurs effectifs.

2.   Les opérations extérieures et leur financement

Le financement du surcoût des opérations extérieures bénéficie, dans le référentiel financier de la LPM 2014-2019, d’une dotation de 450 millions d’euros. Le projet de loi de finances pour 2018 porte cette dotation à 650 millions d’euros, renouant ainsi avec les niveaux fixés pour 2011, 2012 et 2013.

Votre rapporteur salue cette initiative qui améliore la lisibilité et la sincérité du budget de la défense. S’il est souhaitable que la solidarité interministérielle intervienne pour le financement des OPEX afin de manifester la participation de la nation tout entière à la défense de ses intérêts vitaux, il n’en reste pas moins que cette solidarité peut se concilier avec l’exigence constitutionnelle de sincérité budgétaire et s’opérer, au moins en partie, dès les arbitrages rendus lors de la phase de préparation du projet de loi de finances.

Pour 2018, les surcoûts seront conditionnés par la nature des opérations poursuivies ou engagées, leur format, leur niveau et les modes opératoires retenus. Les décisions en la matière, dans un contexte de forte tension sécuritaire sur le territoire national comme à l’étranger, sont étroitement liées à des évolutions ou des événements dont la prévisibilité est faible. Lors de la discussion du prochain projet de loi de programmation militaire, il conviendra donc de poursuivre la réflexion sur les dispositifs capables de réduire les effets de distorsion produits par la contradiction inévitable entre l’incertitude opérationnelle et les principes de spécialité et d’universalité budgétaires.

On voit cependant dans le tableau ci-dessous que la marge de financement à trouver en 2018 sera probablement moins importante que les années précédentes.

Surcoût des Opérations extérieures (Opex)

(Opex DGGN incluses jusqu’en 2008 – montant au 31 juillet pour 2017)

(en millions d’euros)

Source : ministère des armées.

Pour rappel, les surcoûts des OPEX en 2016 ont été largement tributaires des opérations Barkhane (51 %) et Chammal (32 %).

SURCOÛTS DES OPEX en 2016

(en millions d’euros)

 

 

2016

 

PROGRAMME

212

178

178

TOTAL

PAYS/ZONE

OPEX/TITRE

Titre 2

Titre 3

Titre 6

Coût

Kosovo

TRIDENT(1)

0,1

/

0,5

0,6

Bosnie

ALTHEA (2)

/

/

1,5

1,5

RCI

CORYMBE (3)

7,0

9,9

/

16,9

Sahel

BARKHANE (4)

142,8

451,3

/

594,1

EUTM MALI

0,5

0,2

1,8

2,5

RCA

SANGARIS (5)

20,6

62,5

/

83,1

EUMAM RCA / EUTM RCA (6)

1,9

0,6

1,3

3,8

Océan Indien

ATALANTE (7)

1,9

1,1

0,6

3,6

Océan Indien

HERACLES MER

4,8

18,0

4,3

26,9

Liban

DAMAN

29,6

19,5

/

49,1

Levant

CHAMMAL

68,0

307,8

/

375,8

AUTRES OPÉRATIONS

5,1

4,5

2,0

11,6

TOTAL OPEX

282,1

875,4

12,0

1 169,5

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

(1) L’engagement des forces françaises dans l’opération Trident a cessé en 2014, hormis une participation à l’état-major. En outre, la France continue à contribuer auprès de l’OTAN au budget militaire de l’opération.

(2) La participation de la France à cette opération de l’UE se limite à une contribution financière aux coûts communs.

(3) CORYMBE + CALAO/ONUCI.

(4) MINUSMA regroupée avec BARKHANE

(5) SANGARIS + ESN RCA + MINUSCA. L’opération SANGARIS a pris fin le 31 octobre 2016. L’ESN RCA lui a succédé en fin d’année 2016.

(6) Le 16 juillet 2016, l’opération EUMAM RCA est remplacée par EUTM RCA.

(7) ATALANTA (opération de l’UE) y compris le volet français de l’opération consistant à fournir des équipes de protection embarquées (EPE) à certains navires.

3.   La nouvelle architecture de l’opération Sentinelle

Si la nouvelle architecture de l’opération Sentinelle ne se traduit par aucune réduction d’enveloppe, elle emporte en revanche des enjeux importants en termes d’efficacité de la dépense publique.

Dans sa configuration actuelle, le dispositif Sentinelle déploie 7 000 hommes en permanence, avec la possibilité de mobiliser immédiatement 3 000 effectifs supplémentaires pour faire face à des événements prévus ou imprévus (grands rassemblements festifs ou sportifs, situations de crise, augmentation de la menace).

Le nouveau schéma propose une organisation plus dynamique :

– le déploiement permanent ne concernera plus que 3 000 hommes répartis dans les lieux particulièrement sensibles, notamment les sites touristiques ;

– un autre ensemble de 3 000 hommes évoluera en fonction du rythme de vie de la population et sera sollicité pour les grandes manifestations programmées (compétitions sportives, foires, marchés de Noël, etc.) ;

– enfin, une réserve stratégique de 3 000 militaires est destinée à être déployée en cas de crise majeure.

Ce schéma permettra un travail accru sur les scénarios de crise, notamment dans des territoires où l’armée n’est plus présente en permanence, ou encore en matière de protection contre les risques radiologiques, chimiques et biologiques.

Il est souhaitable que les préfets mettent à profit le nouveau dispositif pour planifier des exercices de grande échelle consacrés à différents types de menace.

4.   L’enjeu de la préparation opérationnelle

La préparation opérationnelle pâtit à la fois des contraintes de l’engagement des effectifs en opérations et des difficultés récurrentes rencontrées en matière de disponibilité des matériels. Malgré certains progrès, elle est restée inférieure aux objectifs de montée en puissance fixés par le Livre blanc. L’indicateur 5.1 du programme 178, « Niveau de réalisation des activités et de l’entraînement », en témoigne.

Niveau de réalisation des activités et de l’entraînement

 

Unité

2015
Réalisation

2016
Réalisation

2017
Prévision PAP 2017

2017
Prévision actualisée

2018
Prévision

2019
Cible

Jours d’activités par homme Terre « JPO » (anciennement « JPAO »)

jours

64

72

81

81

81

Entre 70 et 80

Heures de vol par pilote d’hélicoptère Terre

heures

146

154

164

164

173

180

Heures de vol par pilote de chasse Air

heures

154

163

164

164

170

173

Heures de vol par pilote de transport Air

heures

239

220

267

242

280

302

Heures de vol par pilote d’hélicoptère Air

heures

159

164

191

170

194

194

Jours de mer par bâtiment Marine

jours

91 (104)

92 (107)

96 (105)

96 (105)

99 (108)

100 (110)

Heures de vol par pilote de chasse Marine

heures

193 (236)

230 (263)

180 (220)

180 (220)

180 (220)

180 (220)

Heures de vol par pilote d’hélicoptère Marine

heures

218

224

220

218

220

220

Heures de vol par pilote de patrouille maritime Marine

heures

336

348

340

345

340

350

Les chiffres entre parenthèses représentent les jours de mer des grands bâtiments et les heures de vol des chasseurs de l'aéronautique navale qualifiés « nuit ».

Source : annexe au PLF 2018.

La reconstruction du capital opérationnel de l’armée de terre revêt une importance particulière, car l’engagement sur le territoire national dans le cadre de l’opération Sentinelle a provoqué des pertes de savoir-faire. La relance de la préparation opérationnelle, engagée en 2017, sera effective en 2018. Cette action voit ses crédits augmenter de 83 millions d’euros en crédits de paiement.

Plus généralement, l’objectif est de renforcer les savoir-faire critiques nécessaires à l’autonomie d’intervention et au rôle de nation cadre.

5.   Retrouver des capacités en matière de maintien en condition opérationnelle

En corrélation avec la préparation opérationnelle, la disponibilité des matériels reste une priorité. Les taux figurant dans les annexes aux projets de loi de finances sont préoccupants, notamment en ce qui concerne les flottes d’hélicoptères, les moyens de guet aérien et de patrouille et surveillance maritimes, la composante frégates de la Marine nationale et les véhicules blindés de l’armée de terre. Une meilleure articulation entre les aspects industriels et les aspects opérationnels du MCO permettrait sans doute de remédier à certaines difficultés et d’abaisser les coûts.

Disponibilité des matériels
par rapport aux exigences des contrats OPÉRATIONNELS

(en pourcentage)

 

 

2015 Réalisation

2016 Réalisation

2017

Prévision PAP

2017

2017
Prévision actualisée

2018 Prévision

2019 Cible

Armée de terre Char Leclerc

93

83

90

100

96

96

Armée de terre AMX 10 RCR

70

66

65

74

72

70

Armée de terre VAB

74

77

75

75

73

71

Armée de terre VBCI

86

83

75

75

75

75

Armée de terre Pièces de 155 mm

78

82

85

85

75

61

Armée de terre Hélicoptères de manœuvre

42

42

52

50

58

60

Armée de terre Hélicoptères d'attaque ou de reconnaissance

59

59

59

62

66

71

Marine nationale Porte-avions

90

95

11

21

31

95

Marine nationale SNA

73

89

61

70

88

73

Synthèse autres bâtiments de la marine

72

76

81

79

80

75

Marine nationale Composante frégates

58

51

65

53

53

55

Marine nationale Chasse

77

73

67

67

67

69

Marine nationale Hélicoptères

55

59

56

54

55

55

Marine nationale Guet aérien, Patrouille et surveillance maritimes

54

57

55

55

56

57

Armée de l'air Avions de combat

86

92

90

93

96

99

Armée de l'air Avions de transport tactique

68

61

72

74

80

88

Armée de l'air Avions d'appui opérationnel

93

86

90

90

93

97

Armée de l'air Avions à usage gouvernemental

100

104

100

90

95

100

Armée de l'air Hélicoptères de manœuvre et de combat

76

74

80

80

85

90

Armée de l'air Système sol-air moyenne portée

86

83

90

85

100

100

Source : annexes aux PLF 2017 et 2018.

6.   Les dépenses fiscales associées au programme 178

Ces dépenses sont de deux ordres.

Premièrement, l’exonération des indemnités versées aux réservistes en période d’instruction, aux personnes accomplissant un service civique ou une autre forme de volontariat (17° de l’article 81 du code général des impôts). La forte progression de cette dépense (40 millions d’euros en 2015, 47 millions en 2016, 62 millions en prévision 2017 et 65 millions en prévision 2018) traduit notamment la montée en puissance de la Garde nationale.

La Garde nationale réunit les réserves opérationnelles des armées et de la gendarmerie nationale et la réserve civile de la police nationale. Elle repose aujourd’hui sur un vivier de 70 000 réservistes et devrait en compter 85 000 à la fin de 2018. Pour les armées, l’objectif est de disposer d’un vivier de 40 000 réservistes (environ 35 000 aujourd’hui) effectuant en moyenne 36,5 journées d’activité sur l’année (contre 31,8 en 2016).

En 2017, 28,5 millions d’euros en T2 ont été consacrés en cours de gestion, en sus de la dotation prévue en LFI (113,5 millions d’euros en T2), au renforcement de la réserve opérationnelle décidé dans le cadre de la création de la Garde nationale. En 2018, la dotation allouée à la réserve opérationnelle est fixée à 159 millions, de façon à traduire l’atteinte des cibles fixées par le Conseil de défense et la mise en œuvre de la prime de fidélisation et des prestations sociales (aide au financement du permis de conduire, allocation d’études) créées par le décret n° 2017-328 du 14 mars 2017.

Deuxièmement, l’exonération de l’impôt sur le revenu des indemnités versées aux militaires au titre de leur participation aux opérations visant à la défense de la souveraineté de la France et à la préservation de l'intégrité de son territoire, engagées ou renforcées à la suite des attentats commis sur le territoire national en 2015 (23°bis de l’article 81 du code général des impôts). Cette disposition a été introduite par amendement au projet de loi de finances pour 2017 afin de prendre en compte l’engagement et la suractivité des militaires participant à l’opération Sentinelle. Son coût estimé est de 24 millions d’euros en 2017 et de 27 millions en 2018.

III.   Le programme 212 Soutien de la politique de la défense

1.   Un effort de plus de 1 milliard d’euros

Les crédits du programme 212 passent de 21,907 milliards dans la LFI pour 2017 à 22,928 milliards demandés pour 2018 en crédits de paiement, et de 22,201 milliards à 23,260 milliards en autorisations d’engagement. On trouvera le détail des évolutions par action en annexe au présent rapport.

Les crédits de titre 2 (dépenses de personnel) augmentent de 608 millions (+ 3,08 %) en CP et les crédits de titre 5 (dépenses d’investissement) augmentent de 457 millions en CP (+ 41,6 %). Les dépenses de fonctionnement et d’intervention connaissent en revanche une baisse.

2.   La poursuite de la hausse des effectifs

Le tableau ci-dessous retrace l’évolution des effectifs sur douze ans. La déflation entre 2006 et 2018 est de 50 000 ETPT, mais la remontée depuis 2015 représentera plus de 11 000 ETPT en 2018.

Évolution des effectifs de la mission Défense

(en ETPT)

Source : annexes aux PLR 2006-2016 et aux PLF 2017 et 2018.

Par rapport à la LPM 2014-2019 initiale, la moindre déflation est de 29 050 ETPT.

trajectoire des effectifs de la défense

(en ETPT)

Annuités

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Total

LPM 2014-2019

(loi du 18 décembre 2013)

– 7 881

– 7 500

– 7 397

– 7 397

– 3 500

0

– 33 675

Trajectoire actualisée

(loi du 28 juillet 2015)

– 8 007

0

2 300

– 2 600

– 2 800

– 3 818

– 14 925

Trajectoire actualisée

(Conseil de défense du 6 avril 2016)

– 8 007

0

2 300

400

200

182

– 4 925

Trajectoire

– 8 007

0

2 300

400

500

182

– 4 625

Source : ministère des armées.

Dans l’armée de terre, en particulier, la manœuvre 2017-2018 se traduira par la fin de la montée en puissance de la force opérationnelle terrestre (FOT) à 77 000 hommes, conformément à la trajectoire fixée par l’actualisation 2015 de la LPM (soit 11 000 hommes de plus que le contrat opérationnel initial, issu du Livre blanc de 2013).

En matière de renseignement et de cyberdéfense, les effectifs avaient déjà progressé de près de 1 800 emplois entre 2014 et 2017. En 2018, les services de renseignement se renforceront de 850 postes pour atteindre 9 000 ETP. Les effectifs de cyberdéfense atteindront pour leur part 2 200 postes, soit un quasi-doublement en cinq ans, avec un objectif de 2 600 postes à terme. Hors masse salariale, 30 millions d’euros en CP sont consacrés dans le programme 178 à la cyberdéfense et à la cyberprotection au niveau de l’état-major des armées.

3.   Un rattrapage attendu en matière d’infrastructures et d’immobilier

L’action 4 Politique immobilière voit ses crédits portés à 2 116,08 millions d’euros en AE, soit + 23,2 % par rapport à la LFI pour 2017 (1 717,38 millions), et à 1 744,16 millions en CP, soit + 30,2 % par rapport à la LFI pour 2017 (1 339,79 millions). Le budget de la politique immobilière sera complété par les recettes issues de cessions immobilières du ministère, ce dernier disposant en effet d’un droit à consommer de 140 millions d’euros sur le CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État.

Cette action est destinée à la création ou à l’adaptation de l’infrastructure d’accueil des matériels rattachés aux programmes d’armement, à la rénovation ou la remise aux normes et au maintien en condition du patrimoine immobilier. Il est également consacré aux opérations permettant le renforcement de la protection des emprises. Depuis la LFI 2016, l’action 4 intègre les crédits relatifs à l’entretien des bases de défense qui relevaient auparavant du programme 178 Préparation et emploi des forces.

La hausse significative en matière d’investissement est principalement consacrée :

– aux programmes majeurs d’infrastructure pour 400,2 millions d’euros (380 millions pour les seuls programmes liés à des programmes d’armement), soit une augmentation de 7,3 % par rapport à la LFI pour 2017, afin notamment de faire face aux besoins du sous-marin nucléaire d’attaque Barracuda, de l’aéronef MRTT, des véhicules du programme Scorpion, des INBS (installations nucléaires de base secrètes) et de la rénovation électrique du port de Brest ;

– à la dissuasion nucléaire, pour 114 millions d’euros, soit une augmentation de 31,9 % par rapport à la LFI 2017, afin de faire face aux dépenses d’infrastructures consacrées à la composante sous-marine de la dissuasion (l’Île Longue, port militaire de Brest…) ;

– à la maintenance lourde et au maintien en condition, pour 332,9 millions d’euros, soit une augmentation de 95 % par rapport à la LFI pour 2017, pour répondre à la nécessité d’intensifier l’effort sur la rénovation du patrimoine immobilier du ministère des armées, dont l’état impacte directement les conditions de vie du personnel ;

– aux opérations d’adaptation capacitaire technico-opérationnelles, pour 363,5 millions d’euros, soit une augmentation de 29,5 % par rapport à la LFI 2017 : ces crédits financent les investissements générés par la remontée en puissance de la force opérationnelle terrestre (FOT) et les besoins accrus de sécurité-protection ;

– aux opérations d’adaptation capacitaire non technico-opérationnelles pour 115,8 millions d’euros, soit une augmentation de 131,2 % par rapport à la LFI 2017 (57 millions), afin de faire face aux dépenses liées à la condition de vie du personnel (hébergement des cadres célibataires, restauration) et aux conditions de travail (création de locaux à usage de bureau, notamment en métropole mais aussi outre-mer et à l’étranger) ;

– au logement familial, pour 61,6 millions d’euros (avec notamment le plan « Familles », doté à hauteur de 15 millions d’euros), soit une augmentation de 76 % par rapport à la LFI 2017 : conclusion et renouvellement de conventions auprès de bailleurs, constructions, acquisitions, entretien des logements domaniaux.

4.   Les opérateurs

L’ECPAD (Établissement de communication et de production audiovisuelle de la défense) voit ses crédits progresser du fait d’une dotation en fonds propres de 3,5 millions d’euros, destinée à financer les travaux d’infrastructure du fort d’Ivry, l’annuité 2018 du plan de sauvegarde numérique défini dans son contrat d’objectifs et de performances et les prochaines évolutions de la plateforme d’images.

S’agissant du Musée de l’armée, la subvention pour charges de service public augmente en raison des surcoûts liés au fonctionnement du nouveau centre de documentation et au projet d’extension des espaces à la période postérieure à 1945. La dotation en fonds propres contribue à financer les études préalables liées à ce projet, ainsi que la fin de travaux de rénovation et le renouvellement de l’intégralité des équipements et de la muséographie incluant les droits de l’Historial Charles de Gaulle.

Pour ce qui est du Musée national de la marine, une importante dotation en fonds propres est prévue en 2018 pour permettre la poursuite du financement de la rénovation du site de Chaillot.

crédits des opérateurs du programme 2012

(en milliers d’euros)

Opérateurs

Réalisation
2016

LFI 2017

PLF 2018

Progression
2017-2018

ECPAD

17 272

17 352

21 976

26,65 %

Musée de l'air et de l'espace

9 305

6 428

6 216

– 3,3 %

Musée de l'armée

10 641

8 565

9 698

13,23 %

Musée national de la marine (CP)

14408

6 566

16 597

152,77 %

SHOM (Service hydrographique et océanographique de la Maine)

40 071

41 020

41 700

1,65 %

Source : annexe au PLF 2018.

Il faut enfin relever que l’École navale, constituée depuis le 1er janvier 2017 en établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPCSP) rattaché au programme 178, voit sa dotation globale augmentée de 3,6 %, à 31,56 millions d’euros.

IV.   Une attention accrue portée à La condition militaire

Dans une période de remontée des effectifs et de recrutement, la question de la condition militaire prend une importance toute particulière. La mobilité géographique et professionnelle, l’exigence de disponibilité constante, les longues périodes en opérations ou en manœuvres loin de sa base, toutes ces caractéristiques font la singularité du métier de soldat. Elles sont aussi la condition de l’efficacité des armées.

En tout premier lieu, l’amélioration de la condition militaire passe par une prise en compte la vie familiale. Changer de base tous les deux ou trois ans, cela signifie, pour la famille, de nombreux déménagements, des changements de mode de garde des enfants, d’école, d’environnement. Il est souvent difficile pour le conjoint d’exercer un métier. Enfin, cette mobilité est un handicap important pour accéder à la propriété d’un logement.

Au-delà de l’action indemnitaire et sociale du ministère des armées, une action interministérielle est souhaitable. Il serait utile, par exemple, d’impliquer les grands employeurs publics (ministères chargés de l’éducation nationale, de la santé) et les collectivités territoriales dans l’amélioration de la situation des conjoints de militaires au regard de l’emploi.

1.   Des attentes grandissantes

Dans un l’important rapport qu’il a consacré en juin 2015 aux perspectives de la condition militaire ([1]), le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire (HCECM) a notamment mené une étude approfondie sur les aspirations des acteurs de la défense nationale :

« Les attentes et les préoccupations des militaires portent essentiellement sur leur vie quotidienne. Elles sont pour la plupart récurrentes. Les questions salariales, bien que rarement mises en avant, ne peuvent pas ne pas être évoquées. En outre, les transformations sociétales en cours incitent à identifier des attentes nouvelles, spécifiques aux nouvelles générations. »

Le HCECM distingue quatre préoccupations majeures :

● Le sentiment d’une insuffisante considération par rapport à celle accordée aux autres catégories sociales, sentiment alimenté tout à la fois par la très grave déficience du logiciel de paye Louvois, par les réformes conduites ces deux dernières décennies ([2]), par la perte de certains avantages et par la diminution du nombre de militaires en valeur absolue comme par rapport à d’autres catégories professionnelles ou sociales.

● Les préoccupations liées aux moyens de préparation à la mission et à l’infrastructure.

● Les interrogations de nombreux militaires sur leur avenir immédiat ou à moyen terme et leurs perspectives de carrière.

● La vie familiale et sociale dans tous ses aspects.

Le Haut Conseil considère que la question des rémunérations doit être posée. Il souligne également l’attachement aux particularités de l’état militaire, qui doit faire l’objet d’une plus grande reconnaissance symbolique et matérielle. Enfin, il met l’accent sur la nécessité, pour l’institution, de prendre en compte les besoins et des aspirations des générations dites Y et Z, celles des digital natives, qui constituera la majorité de l’effectif militaire à l’horizon 2020-2025.

Dans ce cadre général, les orientations du PLF pour 2018 marquent une progression notable.

2.   Un renforcement des mesures salariales et indemnitaires, de l’action sociale et de la réhabilitation des infrastructures

Il convient tout d’abord de relever que 2018 est la deuxième annuité de la transposition aux militaires du protocole « Parcours professionnels, carrières, rémunérations » (PPCR) applicable à la fonction publique, actée en Conseil de défense du 6 avril 2016. Après une première phase de transformation d’une partie des primes en rémunération indiciaire, la seconde phase se traduira par la revalorisation indiciaire de la grille.

Pour 2017, ces mesures statutaires représentent un coût de 72 millions d’euros. En 2018, le montant prévisionnel est de 82 millions d’euros.

Autre réponse budgétaire aux attentes des militaires : le plan « Familles » annoncé par le Président de la République le 20 juillet dernier à Istres. Ce plan, doté pour 2018 de 17,2 millions d’euros en AE et 15 millions en CP, vise principalement à améliorer le logement et les conditions de vie des familles de militaires.

Il permet notamment une nouvelle augmentation de la subvention à l’Institution de gestion sociale des armées (IGESA) dans le PLF pour 2018. Cette subvention passe ainsi de 56,48 millions en exécution en 2016 à 64,10 millions en 2017 et à 68,28 millions en 2018, soit une augmentation de plus de 20 % en deux ans.

La hausse est destinée en particulier :

– à accroître l’accès aux gardes d’enfants, en accroissant les réservations de berceaux auprès de prestataires externes (crèches) et en développant les offres de garde en horaires atypiques ;

– à améliorer l’accès par voie numérique aux dispositifs mis en place au profit des ressortissants et de leurs familles ;

– à abonder les aides à la mobilité et au logement, notamment en direction des personnels affectés par des restructurations (allocation spécifique pour l’acquisition et aide financière à la location).

Par ailleurs, le poste « Soutien aux structures », qui couvre l'ensemble des dépenses liées au soutien et à l'entretien courant des immeubles gérés par l'IGESA, tels que les maisons d’enfants à caractère social (MEACS), les établissements sociaux et familiaux, les centres de vacances, est en augmentation de 8 % en AE et en CP (2,01 millions d’euros) par rapport au PLF pour 2017.

L’Institution de gestion sociale des armées (IGESA)

Créé en 1966, l’IGESA est un établissement public national dont la mission est la mise en œuvre de la politique sociale du ministère des armées, qui assure sa tutelle.

Ses activités s'articulent autour de trois domaines principaux :

– le soutien à la vie professionnelle, notamment à travers des actions sociales collectives ;

 le soutien à la vie personnelle et familiale : secours et aide ménagère à domicile, prêts sociaux, aide à la location, garde d'enfants, accueil dans les établissements sociaux ;

– les vacances et le temps libre (maisons familiales, séjours d'enfants).

Près de 380 000 ressortissants bénéficient de ses prestations.

Une évaluation récente de la Cour des comptes détaille les nombreux atouts de cet établissement, tout en formulant plusieurs recommandations pour en améliorer la gestion et pour renforcer la qualité et le nombre des prestations offertes.

En outre, les autorisations d’engagement au titre de l’opération programmée Réalisation de logements familiaux passent de 60,19 millions d’euros en 2017 à 72,84 millions en 2018, et les crédits de paiements de 65,18 à 72,01 millions.

Plus généralement, l’augmentation des crédits consacrés aux infrastructures en 2018 aura un impact direct sur les conditions de vie et de travail du personnel. La réalisation du plan d’urgence pour les infrastructures de vie (plan « Infra Condipers ») établi pour la période 2014-2021 s’en trouvera facilitée, étant entendu que les travaux programmés pour 2018-2021 représentent 57 % des 627 millions d’euros initialement prévus.


—  1  —

 

   Examen en commission

Après l’audition de Mme Florence Parly, ministre des armées, (voir le compte rendu de la commission élargie du 2 novembre 2017 à 21 heures ([3])), la commission des finances examine les crédits de la mission Défense.

M. François Cornut-Gentille, Rapporteur spécial pour les crédits relatifs à la Préparation de l’avenir, ayant indiqué qu’il s’abstenait, et suivant l’avis favorable de M. Olivier Gaillard, Rapporteur spécial pour les crédits relatifs au Budget opérationnel de la défense, la Commission adopte les crédits de la mission Défense.

 

 

*

*   *


—  1  —

 

   Personnes auditionnées par le rapporteur spécial

 

Ministère des armées

– Général Jean-Pierre Bosser, chef d’état-major de l’armée de terre ;

– Amiral Christophe Prazuck, chef d’état-major de la marine ;

– Général André Lanata, chef d’état-major de l’armée de l’air ;

– M. Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l’administration.

 

Ministère de l'action et des comptes publics

– M. François Desmadryl, sous-directeur chargé de la cinquième sous-direction de la direction du budget, et M. Quentin Comet, chef du bureau Défense et mémoire.


—  1  —

 

   Annexe I :
Documents de référence

 

Documents budgétaires

Annexe au projet de loi de finances pour 2018 : https://www.performance-publique.budget.gouv.fr/documents-budgetaires/lois-projets-lois-documents-annexes-annee/exercice-2018/projet-loi-finances-2018-mission-defense#resultat

Document de politique transversale « Défense et sécurité nationale » : https://www.performance-publique.budget.gouv.fr/sites/performance_publique/files/farandole/ressources/2018/pap/pdf/DPT/DPT2018_defense.pdf

 

Cour des comptes

Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2016 : https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/NEB-2016-Defense.pdf

Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2015 : https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/NEB-2015-Defense.pdf

 

Revue stratégique de défense et de sécurité nationale 2017

http://www.defense.gouv.fr/content/download/514684/8664656/file/2017-RS-def1018.pdf

Haut comité d’évaluation de la condition militaire

La condition des militaires engagés dans les missions de protection du territoire national et de la population (rapport 2016) : http://www.defense.gouv.fr/portail/vous-et-la-defense/evaluation-de-la-condition-militaire/hcecm/publications/les-rapports-thematiques/10e-rapport-mai-2016

Perspectives de la condition militaire 2015-2025 (rapport 2015) : http://www.defense.gouv.fr/portail/vous-et-la-defense/evaluation-de-la-condition-militaire/hcecm/publications/les-rapports-thematiques/9eme-rapport-juin-2015


—  1  —

 

   Annexe II :
Évolution des crédits du programme 112

(en euros)

Numéro et intitulé de l'action / sous action

AE

 

CP

 

2017

2018

%

2017

2018

%

04 - Politique immobilière

1 717 379 499

2 116 075 850

23,22

1 339 785 093

1 744 159 477

30,18

05 - Système d'information, d'administration et de gestion

126 196 962

148 334 258

17,54

146 897 177

137 674 951

– 6,28

06 - Politique des ressources humaines

141 851 703

152 084 778

7,21

141 851 703

153 030 778

7,88

08 - Politique culturelle et éducative

25 710 389

30 204 867

17,48

25 964 056

37 557 109

44,65

10 - Restructurations

63 768 223

75 043 754

17,68

61 260 449

66 537 610

8,61

11 - Pilotage, soutien et communication

364 300 290

368 965 815

1,28

429 636 751

419 782 314

– 2,29

50 - Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France - Personnel travaillant pour le programme "Environnement et prospective de la politique de défense"

531 542 292

566 928 497

6,66

531 542 292

566 928 497

6,66

51 - Prospective de défense - Personnel travaillant pour le programme "Environnement et prospective de la politique de défense"

25 702 225

25 360 000

– 1,33

25 702 225

25 360 000

– 1,33

52 - Relations internationales

86 440 115

86 781 445

0,39

86 440 115

86 781 445

0,39

53 - Préparation et conduite des opérations d'armement - Personnel travaillant pour programme "Équipements des forces"

1 899 094 275

2 006 818 874

5,67

1 899 094 275

2 006 818 874

5,67

54 - Planification des moyens et conduite des opérations - Personnel travaillant pour le programme "Préparation et emploi des forces"

1 217 188 520

1 277 121 631

4,92

1 217 188 520

1 277 121 631

4,92

55 - Préparation des forces terrestres - Personnel travaillant pour le programme "Préparation et emploi des forces"

6 866 799 415

7 219 727 909

5,14

6 866 799 415

7 219 727 909

5,14

56 - Préparation des forces navales - Personnel travaillant pour le programme "Préparation et emploi des forces"

2 416 844 649

2 344 368 999

– 3,00

2 416 844 649

2 344 368 999

– 3,00

57 - Préparation des forces aériennes - Personnel travaillant pour le programme "Préparation et emploi des forces"

2 555 533 552

2 502 981 670

– 2,06

2 555 533 552

2 502 981 670

– 2,06

58 - Logistique et soutien interarmées - Personnel travaillant pour le programme "Préparation et emploi des forces "

2 439 170 879

2 561 678 041

5,02

2 439 170 879

2 561 678 041

5,02

59 - Surcoûts liés aux opérations - Personnel travaillant pour le programme "Préparation et emploi des forces"

211 000 000

286 000 000

35,55

211 000 000

286 000 000

35,55

60 - Politique immobilière - Personnel travaillant pour l'action "Politique immobilière"

453 569 189

465 905 863

2,72

453 569 189

465 905 863

2,72

61 - Action sociale, chômage et pensions

307 526 987

307 787 556

0,08

307 526 987

307 787 556

0,08

62 - Politique culturelle et éducative - gestion et communication des archives historiques de la défense - Personnel travaillant pour l'action "Politique culturelle et éducative"

35 688 082

38 172 825

6,96

35 688 082

38 172 825

6,96

63 - Restructurations - RH

114 242 221

72 820 420

– 36,26

114 242 221

72 820 420

– 36,26

64 - Pilotage, soutien - Personnel travaillant pour l'action "Pilotage, soutien"

416 126 973

403 535 283

– 3,03

416 126 973

403 535 283

– 3,03

65 - Journée défense et citoyenneté - Personnel travaillant pour le programme "Liens entre la Nation et son armée"

69 658 263

81 663 582

17,23

69 658 263

81 663 582

17,23

66 - Rayonnement et contribution extérieure

24 117 672

24 326 444

0,87

24 117 672

24 326 444

0,87

67 - Pilotage, soutien et communication - dépenses de personnels des cabinets et des organismes rattachés / RH

91 053 536

97 257 894

6,81

91 053 536

97 257 894

6,81

 


([1]) Perspectives de la condition militaire – Pour une politique globale de la condition militaire.

([2]) « Nombre de militaires estiment avoir subi plus de contraintes qu’aucune autre catégorie de la fonction publique. »

([3])  http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/commissions_elargies/