N° 273

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2017.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2018 (n° 235),

 

PAR M. Joël GIRAUD,

Rapporteur Général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 6
 

 

AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT

 

 

PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Marc Le FUR

 

Député

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SOMMAIRE

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Pages

Les CONSTATS ET les PROPOSITIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

données clés

PREMIÈRE PARTIE

A. L’Évolution globale des crÉdits

1. Les crédits de la mission augmentent sans compenser les annulations intervenues en juillet 2017

2. Le compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » est marqué par une augmentation substantielle des Prêts du Trésor

B. L’Évolution des différentes actions budgétaires

1. L’aide bilatérale est renforcée, conformément à la priorité annoncée du gouvernement

a. L’AFD voit ses moyens augmenter

b. L’aide liée est tirée par l’augmentation significative de Prêts du Trésor

c. Les crédits de la coopération technique augmentent mécaniquement avec le rebasage de masse salariale à Expertise France

d. L’aide humanitaire et alimentaire augmente pour prévenir toute sous-budgétisation

e. Les crédits de coopération décentralisée en légère baisse

f. Autres postes de dépenses bilatéraux

2. Aide multilatérale et communautaire

a. L’aide multilatérale voit les contributions aux Nations Unies diminuer

b. Coopération communautaire

3. Les allégements de dettes ne représentent plus une part significative de l’APD française

Deuxième partie : observations du rapporteur spécial

A. L’APD FRANçaise n’est pas à la hauteur de ses engagements internationaux

1. Contrairement à d’autres pays, la France n’est pas sur une trajectoire crédible d’atteinte de ses objectifs

2. La trajectoire présentée dans le PLF ne permet pas à ce stade d’aborder de manière crédible et efficace l’objectif de 0,55 % en 2022 affiché par le président de la République

B. La France doit concentrer ses efforts sur les pays les plus en difficulté

1. La France ne consacre que 0,09 % de son RNB aux pays les moins avancés

2. Si les objectifs d’aide aux « pays prioritaires » sont atteints, l’aide en leur faveur demeure trop faible

3. La préférence croissante pour les prêts conduit à défavoriser les pays les plus pauvres

4. La France entreprend des efforts pour rééquilibrer son aide vers les pays les plus défavorisés

C. Assurer un environnement propice aux retombées économiques pour la France

1. L’aide liée est strictement limitée au niveau international et ne représente qu’un poids marginal dans l’APD française

2. L’AFD, sans recourir à l’aide liée, assure des retombées économiques importantes pour les entreprises françaises

D. les taxes affectées à l’aide publique au développement

1. Deux taxes sont affectées à l’APD : la taxe sur les transactions financières et la taxe de solidarité sur les billets d’avion

2. Le PLF 2018 marque un point d’arrêt dans l’augmentation de l’affectation des taxes

3. En première lecture, l’Assemblée nationale a maintenu l’affectation d’une part de la TTF à l’AFD

Examen en commission

Personnes auditionnées

Annexes

Annexe 1 : Glossaire

Annexe 2 : Principaux textes généraux et engagements nationaux et internationaux d’orientation de l’aide française

Annexe 3 : Classement des bénéficiaires de l’APD établi par le CAD

Annexe 4 : Montants totaux d’APD nette versée par les 10 principaux pays contributeurs ces 3 dernières années

 


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   Les CONSTATS ET les PROPOSITIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

L’aide publique au développement (APD) de la France n’est pas à la hauteur de son engagement d’y consacrer 0,7 % de son revenu national brut (RNB). En 2016, elle ne représente, en effet, que 0,38 % de celui-ci.

Il est donc regrettable qu’une des premières décisions du gouvernement ait été d’annuler un montant significatif des crédits votés pour 2017 (136,2 millions d’euros de crédits de paiement et 158,0 millions d’euros d’autorisations d’engagement) : c’est une atteinte à la crédibilité de la France tant sur le terrain, où des projets en cours ont été abandonnés ou retardés, que sur la scène internationale. La France consacre moins à l’APD, relativement à sa richesse, que la Turquie. Pourquoi ne serions-nous pas capables d’atteindre les 0,7 % alors que le Royaume-Uni ou l’Allemagne y sont parvenus ?

À ces montants insuffisants s’ajoute une répartition inefficace de l’aide française. Contrainte par les économies budgétaires, la politique française s’est concentrée sur la distribution de prêts plutôt que de dons, défavorisant structurellement les pays les plus pauvres (Pays les Moins Avancés, PMA) alors qu’elle s’est engagée à leur consacrer de 0,15 % à 0,2 % de son RNB.

Pourtant, le développement des pays pauvres est un enjeu pour la France. Un enjeu diplomatique, alors que certaines puissances parmi lesquelles les États-Unis, la Chine mais aussi les pays scandinaves font du développement un puissant outil de soft power. Un enjeu de sécurité et de flux migratoires, car c’est la pauvreté de ces pays, et les conflits qu’elle engendre, qui provoquent le départ vers nos frontières et le terrorisme. Un enjeu économique et budgétaire enfin : les moyens consacrés à cette politique doivent permettre des retombées positives pour notre économie et nos entreprises.

Les six prochains mois seront cruciaux car une série d’événements contribueront à définir la doctrine française d’aide au développement du quinquennat : COP 23 ([1]) à Bonn du 6 au 17 novembre, CICID ([2]) le 5 février 2018, conférence nationale humanitaire en 2018.

Le Rapporteur spécial regrette que le projet de loi de finances ne permette pas de réaliser les objectifs annoncés, alors que le président de la République affiche de fortes ambitions (0,55 % du RNB consacré à l’APD en 2022, priorité à la croissance du bilatéral et des dons). L’augmentation du budget de la mission Aide publique a développement est réelle, mais ne permet ni de compenser l’annulation de crédits du mois de juillet, ni d’engager la France sur une trajectoire crédible pour atteindre les 0,55 % d’ici 2022.

En remettant à demain la réalisation de ses engagements, le gouvernement renonce à optimiser l’utilisation des deniers publics. Non seulement le besoin d’APD pour permettre le développement des pays pauvres croît à mesure que le temps s’écoule, mais de plus, une aide bien conçue et bien exécutée nécessite plusieurs années avant d’être décaissée. Par conséquent, sans remettre en cause la sincérité de l’exécutif, le Rapporteur spécial alerte sur la nécessité de prévoir dès maintenant les autorisations d’engagement nécessaires. Alors que les standards de qualité des projets de l’AFD sont une fierté de notre aide, il serait dommageable qu’ils risquent d’être sacrifiés au profit de dépenses précipitées et non stratégiques par manque de prévoyance.

Par conséquent, le Rapporteur spécial recommande :

 une augmentation conséquente des autorisations d’engagement permettant la réalisation des projets et l’atteinte des 0,55 % annoncés par le président de la République pour 2022 ;

 un rééquilibrage géographique de l’aide vers les PMA et les pays prioritaires avec une augmentation de l’aide en dons ;

 la coordination de la politique d’APD avec la poursuite des intérêts de la France. D’une part, la France doit renouer avec la logique de lien entre aide au développement et contrôle des migrations, à l’image du plan d’action de la Valette qui porte ses fruits en la matière au Niger. Le président de la République, lors de son interview télévisée le 15 octobre dernier, a ainsi affirmé : « Si nous n’avons pas une action avec l’Afrique, un vrai partenariat de développement, alors nous continuerons à avoir des migrations massives sans savoir y répondre de manière coordonnée ». D’autre part, les choix et les processus d’APD doivent permettre de continuer à créer un environnement favorable pour les entreprises françaises, et ne pas favoriser des entreprises, telles les entreprises chinoises, qui ne respectent pas les mêmes standards de qualité et les mêmes règles en matière de déliement de l’aide.

 


—  1  —

 

   données clés

 


—  1  —

 

   PREMIÈRE PARTIE

A.   L’Évolution globale des crÉdits

L’APD est constituée de ressources budgétaires, mais également d’annulations de dettes ou encore de taxes affectées. La mission Aide publique au développement au sens strict ne représente qu’un quart de l’aide comptabilisée par le Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE ([3]). Si l’on tient compte des aides à effet de levier (prêts bilatéraux de l’AFD, prêts du Trésor, ainsi que prêts à des institutions multilatérales de développement), bonifiées à partir des crédits du programme 110 et du programme 853, la mission APD entendue au sens large représente en moyenne près de la moitié des sommes que la France consacre à cette aide.

Aide publique française 2016 déclarée au CAD par catégorie

 

2015

2016

2017

2017*

Prévisions

2018*

Aide publique au développement résultant des crédits budgétaires

6 084

6 319

6 461

5 742

6 114

(i) dont mission APD (hors aide à effet de levier, hors C2D)

2 407

2 217

2 278

2 278

2 370

(ii) dont tous prêts de l’APD

1 665

1 799

1 916

1 197

1 360

(iii) dont Autres

2 011

2 303

2 267

2 267

2 384

y c ècolage du MESR et réfugiés

1 000

1 088

1 118

1 118

1 233

C2D décaissements

319

367

333

333

344

Opérations de prêts (RPE, FMI, AID, Fonds vert)

41

 359

142

464

661

Dont prêts concessionnels du Trésor (ex-RPE)

 152

 55

 38

187

117

Dont prêts AID et Fonds Vert

430

0

285

142

544

Prélèvements sur recettes CE (quote-part de budget communautaire)

1 153

1 519

1 568

1 568

1 531

Annulations de dettes, remboursements C2D refinancements nets (Club de Pans)

 124

 208

 178

 178

220

Dont annulation de dette

125

82

107

107

336

Dont refinancements nets

 31

 45

 52

 52

 51

Dont remboursement de C2d hors créances AFD

 218

 244

 233

 233

 65

Total État

7 473

7 638

8 326

7 929

8 870

Taxe de solidarité sur les billets d’avion

210

210

210

210

210

Taxe sur les transactions financières

140

377

822

822

798

Collectivités territoriales

57

83

83

83

83

Autres (agences eau, ressources propres AFD)

269

304

345

345

376

Total APD

8 149

8 612

9 786

9 390

10 338

APD en % du RNB (nouvelle série SEC 2010)

0,37 %

0,38 %

0,42 %

0,40 %

0,43 %

*Ces prévisions sont en équivalents-dons (pour les prêts bilatéraux au secteur public et multilatéraux), conformément à la nouvelle méthodologie du CAD qui s’appliquera sur les données 2018, déclarées en 2019.

Source : Document de politique transversale « Politique française en faveur du développement » pour 2018

Le Rapporteur spécial souligne qu’il est dommageable que la réduction d’impôt pour dons à des organismes d’intérêt général (Art. 200 du CGI) ne soit pas comptabilisée lorsqu’elle s’applique à des organismes intervenant en matière d’aide au développement, et ne puisse donc être prise en compte dans l’APD française. Il sera attentif à l’avancement du dialogue entre le Trésor la DGFip à ce sujet.

1.   Les crédits de la mission augmentent sans compenser les annulations intervenues en juillet 2017

En 2018, le périmètre de la mission évolue de manière marginale et technique. D’une part, des mesures de transfert de personnel sont intervenues, pour un montant total de 18 396 417 euros. D’autre part, certaines actions auparavant budgétées sont progressivement transférées vers le Fonds de solidarité pour le développement, à l’instar des aides budgétaires globales (ABG).

Les crédits de la mission augmentent de 94,4 millions d’euros en CP en 2018 par rapport aux crédits ouverts en loi de finances 2017 (+ 3,6 %), principalement grâce à l’augmentation de la contribution de la France au Fonds européen de développement (FED) (action 7 programme 209).

En 2017, les AE ont connu une forte hausse du fait de la reconstitution des deux principaux fonds multilatéraux auxquels contribue la France, l’Association Internationale de Développement (AID, guichet concessionnel de la Banque mondiale) et le Fonds africain de développement (FAD, guichet concessionnel de la Banque africaine de développement) à hauteur de respectivement 1 060 millions d’euros et 381 millions d’euros (action 1 programme 110). La baisse des AE en 2018 (‑ 1 122,9 millions d’euros, soit – 29,5 %) n’est donc pas significative, car elle résulte essentiellement de ces reconstitutions en 2017.

De la même manière, l’analyse de l’évolution des crédits de paiement doit être prudente, une partie importante d’entre eux résultant mécaniquement des engagements pris les années précédentes.

La mission Aide publique au développement est constituée de deux programmes gérés chacun par un ministère différent. Le programme 110 Aide économique et financière au développement relève du ministère de l’Économie et des finances ; le programme 209 Solidarité à l’égard des pays en développement est de la responsabilité du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.

évolution des crédits de la mission depuis 2016

(en millions d’euros)

 

2016 (Exécution)

2017 (LFI)

2018 (PLF)

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

P 110

303,8

891,0

2 142,5

966

840,5

961,4

P 209

1 581,3

1 555,0

1 663,5

1 639,0

1 842,6

1 738,3

Total mission (*)

1 885,1

2 446

3 806,0

2 605,0

2 683,1

2 699,7

Évolution totale par rapport à N – 1

 

 

+ 102,0 %

+ 6,5 %

– 29,5 %

+ 3,6 %

(*) Pour l’exécution 2016, on raisonne à périmètre constant (programmes 110 et 209 uniquement).

Sources : RAP 2016, LFI 2017, PLF 2018.

On constate que la hausse des CP pour 2018 est inférieure au montant des crédits annulés en 2017 par le décret d’avance du 20 juillet 2017 (136,2 millions d’euros en CP et 158,0 millions d’euros en AE). Le gouvernement n’a donc pas fait le choix de compenser cette annulation par des crédits plus importants en 2018.

2.   Le compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » est marqué par une augmentation substantielle des Prêts du Trésor

Après plusieurs années de baisse, le programme 851 voit ses crédits augmenter afin de soutenir l’export des entreprises françaises. 100 millions d’euros supplémentaires sous forme de prêts concessionnels seront ainsi engagés. De plus, 500 millions d’euros de prêts du Trésor seront ouverts en AE à destination de l’Iran pour y financer de grands projets, alors que le marché bancaire est défaillant à répondre à cette demande.

Évolution des crédits du compte de concours financiers depuis 2016

(en millions d’euros)

 

AE Exécution 2016

CP Exécution 2016

AE LFI 2017

CP LFI 2017

AE PLF 2018

CP PLF 2018

Programme 851

Prêts à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France

258,8

191,1

300

300

900

453,1

Programme 852

Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France

553,7

553,7

148

148

268,5

268,5

Programme 853

Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers

195

0

1 552

250

545

1 033

Programme 854

Prêts à des États étrangers dont la monnaie est l’euro

0

0

0

0

0

0

Sources : Rapport annuel de performances 2016, LFI 2017, PLF 2018.

B.   L’Évolution des différentes actions budgétaires

Cette partie regroupe les crédits par action et sous-action situés dans des programmes différents de la mission Aide publique au développement et du compte de concours financiers Prêts aux États étrangers concourant à la même thématique.

1.   L’aide bilatérale est renforcée, conformément à la priorité annoncée du gouvernement

La programmation budgétaire marque une volonté de renforcer l’aide bilatérale directe, bien que de manière insuffisante (voir A. et B. de la deuxième partie du rapport).

a.   L’AFD voit ses moyens augmenter

L’Agence française de développement (AFD) est le principal acteur de la mise en œuvre de la politique d’aide au développement française. Elle met en œuvre environ 80 % des projets de l’aide bilatérale française.

Évolution des moyens budgétaires de l’AFD

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

2017

2018

2017

2018

Subventions projets et ONG de l’AFD (*)
(action 2 du programme 209)

333,3

399,8

 

304,8

289,7

Bonification des prêts outre-mer
(action 2 du programme 110)

0

0

12,0

8,4

Bonification de prêts dans les États étrangers
(action 2 du programme 110)

315

370

191

184,5

Ressource à condition spéciale (RCS) (uniquement fonctionnement courant de l’AFD)
(programme 853)

502

520

0

208

Rémunération de l’AFD (dons projets, assistance technique, ONG, C2D, crédits délégués)
(action 2 du programme 209)

35,7

34,5

35,7

34,5

Rémunération de l’AFD pour les opérations réalisées pour le compte de l’État
(action 2 du programme 110)

3

3

3

3

Total (évolution par rapport à N - 1)

1 189

1 327,2 (+11,6 %)

546,6

728,1 (+33,2)

(*) Le PAP 2018 ne fait pas la distinction entre les subventions projets à destination des ONG (qui transitent par l’AFD) et celles mises en œuvre strictement par l’AFD.

Sources : RAP 2016, PAP 2017, PLF 2018.

La programmation est marquée par une augmentation importante des crédits permettant à l’AFD de bonifier ses prêts à l’étranger (+ 55 millions d’euros sur le programme 110 et + 43 millions d’euros sur le programme 853). Elle correspond à la progression de la réalisation de l’objectif fixé par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) de novembre 2016 d’une hausse de 4 milliards d’euros en 2020 par rapport à 2016 (pour atteindre 12,4 milliards d’euros) du volume d’octrois de prêts de l’AFD aux États étrangers. La cible d’activité du Groupe est de 10,28 milliards d’euros pour 2017, soit une croissance de 9 %. De plus, les AE de l’aide-projet de l’AFD (dont ceux que l’AFD délègue ensuite aux ONG) augmentent de 20 %, marquant également la priorité donnée par le gouvernement à l’aide bilatérale directe.

Il convient de rappeler qu’avec l’annulation de crédits à l’occasion du décret d’avance de juillet 2017, l’AFD a subi une coupe de 136,5 millions d’euros en AE et de 118,2 millions d’euros en CP.

b.   L’aide liée est tirée par l’augmentation significative de Prêts du Trésor

Évolution des moyens budgétaires dédiés à l’aide liée

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

2017

2018

2017

2018

Prêts du Trésor (programme 851) (1)

300

900

300

453,1

FASEP (action 2 du programme 110)

18,3

18,3

21,5

20,8

Évaluation préalable et appui pour le montage des projets (RPE et FASEP)
(action 2 du programme 110)

0,3

0,45

0,3

0,45

Rémunération de Natixis (action 2 du programme 110)

3,4

3,15

3,4

3,15

Total (évolution par rapport à N– 1)

322

921,9
(+ 186,3 %)

325,2

477,5
(+ 46,8 %)

(1) Y compris prêts non concessionnels.

Sources : RAP 2016, PAP 2017, PLF 2018.

L’augmentation des crédits en AE est la conséquence de l’augmentation des Prêts du Trésor (+ 600 millions d’euros). Il faut cependant la nuancer : 500 des 600 millions d’euros correspondent à des prêts non-concessionnels (à destination de projets en Iran) et ne sont pas éligibles à la comptabilisation en APD. Le C. de la deuxième partie du rapport précise le cadre de l’aide liée et les objectifs de cette politique.

c.   Les crédits de la coopération technique augmentent mécaniquement avec le rebasage de masse salariale à Expertise France

Évolution des moyens budgétaires dédiés à la coopération technique

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

2017

2018

2017

2018

Dotation Expertise France

(action 2 du programme 110)

4,5

4,25

4,5

4,25

Expertise France

(action 2 du programme 209)

12,7

26,3

12,7

26,3

Programme de renforcement des capacités commerciales (action 2 du programme 110)

0

0

1,5

4,5

Bourses

(action 2 du programme 209)

5,8

5,8

5,8

5,8

Échanges d’expertise

(action 2 du programme 209)

2,4

2,4

2,4

2,4

Volontariat international

(action 2 du programme 209)

19,2

18,2

19,2

18,2

Canal France International (action 2 du programme 209)

9,5

7,5

9,5

7,5

Total (évolution par rapport à N - 1)

54,1

64,5
(+ 19,2 %)

55,6

69,0
(+ 24,1 %)

Sources : RAP 2016, PAP 2017, PLF 2018.

Expertise France est l’opérateur en charge de la coopération technique. Les crédits qui lui sont alloués augmentent de manière importante en raison d’un transfert de 14,2 millions d’euros, correspondant au montant de la masse salariale et des coûts annexes des experts techniques internationaux transférés à Expertise France au cours de l’année 2017. La subvention d’équilibre est renouvelée en baisse, de 1,1 million d’euros contre 1,5 million d’euros l’année précédente.

d.   L’aide humanitaire et alimentaire augmente pour prévenir toute sous-budgétisation

Évolution des moyens budgétaires dédiés à l’aide humanitaire et alimentaire

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

2017

2018

2017

2018

Fonds d’urgence humanitaire

(action 2 du programme 209)

12,9

30

12,9

30

Aide alimentaire
(action 2 du programme 209)

37,1

35,2

37,1

35,2

Total (évolution par rapport à N - 1)

50

65,2
(+ 30,4 %)

50

65,2
(+ 30,4 %)

Sources : RAP 2016, PAP 2017, PLF 2018.

En 2017, le total des dépenses engagées sur le Fonds humanitaire d’urgence (FHU) pour financer l’action humanitaire du Centre de crise et de soutien s’est élevé à 24 millions d’euros, deux fois le montant de la programmation initiale. En 2018, la budgétisation est donc plus proche des dépenses constatées.

e.   Les crédits de coopération décentralisée en légère baisse

Évolution des moyens budgétaires de la coopération décentralisée

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

2017

2018

2017

2018

Coopération décentralisée

(Action 2 du programme 209)

9,3

8,8
(– 5,4 %)

9,3

8,8
(– 5,4 %)

Sources : documents budgétaires.

Ces crédits budgétaires viennent cofinancer des projets des collectivités territoriales, dont les dépenses propres en matière d’APD sont comptabilisées distinctement sur la base des déclarations de celles-ci. En 2016, 83 millions d’euros ont été déclarés au CAD au titre des collectivités territoriales.

Principales collectivités territoriales contributrices à l’APD

(en pourcentage de l’APD des collectivités territoriales, hors aide aux réfugiés)

La ville de Paris

13,1 %

Le Syndicat des eaux d’Île-de-France

5,4 %

Le Conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes

4,7 %

Le Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine

4,5 %

Le Conseil départemental des Yvelines

4,1 %

Le Service public de l’assainissement francilien

3,9 %

Le Conseil départemental des Hauts-de-Seine

3,7 %

Le Conseil régional d’Île-de-France

3,6 %

Le Conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur

3,4 %

Le Conseil régional du Grand-Est

3,2 %

Source : Rapport annuel 2016 sur l’aide publique au développement des collectivités territoriales, ministère de l’Europe et des Affaires étrangères

f.   Autres postes de dépenses bilatéraux

Évolution des autres postes de dépenses bilatéraux

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

2017

2018

2017

2018

Fonds français pour l’environnement mondial (action 2 du programme 110)

0

0

23

23,5

Aides budgétaires globales
(action 2 du programme 110)

37

10

37

10

Dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel
(action 2 du programme 209)

0,3

0,3

0,3

0,3

Dotations pour opérations aux établissements dotés de l’autonomie financière (EAF)
(action 2 du programme 209)

0,4

0,4

0,4

0,4

Autres moyens bilatéraux d’influence
(action 2 du programme 209)

8,9

9,3

8,9

9,3

Fonds de solidarité prioritaire
(action 2 du programme 209)

34

34

32,3

34

Fonds Pacifique
(action 2 du programme 209)

1,5

1,4

1,5

1,4

Aide budgétaire post-conflit et sortie de crise (action 2 du programme 209)

22,3

21,1

22,3

21,1

Total

104,5

76,5
(– 26,8 %)

125,7

100
(– 20,5 %)

Sources : RAP 2016, PAP 2017, PLF 2018.

La baisse de 27 millions d’euros des crédits d’aides budgétaires globales est la conséquence de leur transfert progressif vers le fonds de solidarité pour le développement (FSD), qui prévoit de les financer à hauteur de 50 millions d’euros.

2.   Aide multilatérale et communautaire

Les contributions de la France à l’action européenne et multilatérale représentent 58 % des crédits de la mission (62 % des crédits du programme 209 et 51,3 % des crédits du programme 110).

a.   L’aide multilatérale voit les contributions aux Nations Unies diminuer

Évolution des moyens budgétaires dédiés à l’aide multilatérale

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

2017

2018

2017

2018

Aide économique et financière multilatéral (action 1 du programme 110)

1 452,3

430,9

586,6

594,4

Contributions volontaires aux Nations Unies (action 5 du programme 209)

99,1

94,0

99,1

94,0

Jeunes experts associés (action 5 du programme 209)

3,5

3,3

3,5

3,3

Francophonie (loyer) (action 5 du programme 209)

0,4

0,4

6,1

6

Francophonie (hors loyer)

47,4

47,4

47,4

47,4

Total (évolution par rapport à N - 1)

1 602,7

576
(– 64 %)

742,7

745,1
(+ 0,3 %)

Sources : RAP 2016, PAP 2017, PLF 2018.

Résultant d’engagements de la France envers ces institutions, les crédits de l’action 1 du programme 110 ne sont pas pilotables annuellement. Seules les périodes de renégociation pour la reconstitution des fonds, intervenant à des échéances régulières, permettent à la France de faire évoluer ses engagements. C’est notamment le cas, cette année, de la contribution française au Fonds pour l’environnement mondial, dont les négociations pour la septième reconstitution sont en cours et aboutiront en juin 2018. La baisse des AE s’explique mécaniquement par la reconstitution de fonds importants en 2017 ([4]).

Par ailleurs, l’action 5 Coopération multilatérale, qui comprend principalement les contributions volontaires au Nations Unies et à la promotion de la francophonie, voit ses crédits baisser. Alors qu’elles ont été divisées par deux entre 2007 et 2015, date à laquelle la France a augmenté de 50 millions d’euros ses contributions pour répondre aux besoins liés à la crise des réfugiés, les contributions aux Nations Unies connaissent en effet une nouvelle baisse de 5 millions d’euros.

Contributions volontaires aux agences onusiennes depuis 2012

(en millions d’euros et en pourcentage des crédits du P 209)

 

Exécution 2012

Exécution 2013

Exécution 2014

Exécution 2015

Exécution 2016

LFI 2017

Contributions aux Nations unies

64

3 %

67

4 %

71

4,10 %

145

8,70 %

110,7

7,12 %

99,11

6,00 %

Sources : Réponse au questionnaire budgétaire.

b.   Coopération communautaire

L’action 7 Coopération communautaire du programme 209 porte la contribution de la France au FED. Elle représente 46,1 % du programme. L’augmentation des crédits de 105 millions d’euros (+ 14,5 %) correspond à une décision du Conseil de novembre 2016 d’accélérer les décaissements au titre du 11e FED. En effet, le retard pris au démarrage (ratification en février 2015) et une hausse des engagements des projets en 2015 rendent une augmentation des besoins de décaissements plus forte les années suivantes. La volatilité des contributions au FED, soulignée à plusieurs reprises par la Cour des Comptes, continue donc de marquer la programmation budgétaire.

Avec une clé de répartition de 17,81 %, la France est le deuxième contributeur au FED derrière l’Allemagne et sa contribution s’élève à 5,43 milliards d’euros sur l’ensemble du cycle financier (l’enveloppe du 11e FED s’élevant à 30,5 milliards d’euros sur la période 2014-2020).

Crédits inscrits en loi de finance initiale
et effectivement consommés (2012-2017)

(en millions d’euros)

Année

Crédits prévus en LFI

Crédits ouverts en LFR

Crédits consommés

2012

790

0

576

2013

689

0

637

2014

681

20,5

641

2015

704

0

598

2016

700,8

0

703,8

2017

742,4

745,9 (1)

2018 (PLF)

849,9

(1) Prévision d’exécution réévaluée suite à la modification du plafond décidée par le Conseil de l’UE.

Sources : Réponse au questionnaire budgétaire.

La contribution française passera donc de 742,4 millions d’euros en 2017 ([5]) à 849,9 millions d’euros en 2018 (dont 9,5 millions d’euros de reliquat issus des 8e et 9e FED qui viennent en déduction de la contribution française appelée en 2018), 879,8 millions d’euros en 2019 et 2020 et enfin 883,1 millions d’euros en 2021, soit une hausse de 19 % sur le quinquennat (+ 140 millions d’euros), sur la base des plafonds indicatifs mentionnés dans la communication de la Commission européenne du 24 mai 2017.

3.   Les allégements de dettes ne représentent plus une part significative de l’APD française

La France met en œuvre des traitements de dette en faveur des pays les moins avancés (PMA) et des pays à revenu intermédiaire, dans le cadre international et bilatéral.

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

2017

2018

2017

2018

Compensation à l’AFD des annulations de dette bilatérale (action 3 du programme 110)

0

0

37,6

29,5

Compensation des annulations de la dette multilatérale (action 3 du programme 110)

330,3

0

66

74,5

Contrats de désendettement et de développement (C2D) (action 2 du programme 209)

53,2

48,4

53,2

48,4

Consolidation de dettes des PPTE (programme 852)

148

268,5

148

268,5

Total (évolution par rapport à N  1)

531,5

316,9
(– 40,5 %)

304,8

420,9
( +38 %)

Sources : RAP 2016, PAP 2017, PLF 2018.

Alors que, dans le cadre de l’ « Initiative Pays pauvres très endettés » (IPPTE), des annulations de dettes multilatérales sont à prévoir jusqu’à 2030, les annulations bilatérales ont connu leur terme, ce qui explique l’absence de programmation en AE.

Le programme 852 Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France comprend les traitements de dette conclus dans le cadre du Club de Paris, en particulier dans le cadre de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (IPPTE). Les crédits, en hausse de 120 millions d’euros par rapport à la LFI 2017, correspondent pour l’essentiel au traitement de la dette de l’Irak, de la Somalie et du Zimbabwe. Le traitement de la dette de ces deux derniers États n’est cependant pas certain. Le report du traitement de la dette de la Somalie à plusieurs reprises a augmenté son coût pour les finances publiques (56,7 millions d’euros en 2017, dont 7,3 millions d’euros d’intérêts de retard selon la Cour des Comptes).

Il convient de noter la dégradation de l’indicateur de soutenabilité de la dette pour les pays bénéficiaires de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (IPPTE) (de 75 % en 2015 à 68 % en 2017), notamment du fait de l’effondrement du prix des matières premières.

Enfin, si les crédits dédiés aux contrats de désendettement et de développement (C2D) sont en baisse, il convient de noter que l’imputation budgétaire sur le programme 209 ne correspond qu’aux seuls remboursements du capital des créances portées par l’AFD. La « part État » des C2D, non imputée sur le programme, augmente, passant de 298,2 millions d’euros en 2017 à 323,3 millions d’euros en 2018.

Entre 1996 et 2011, la France avait annulé 17 milliards d’euros de dettes dues par les pays éligibles à l’initiative PPTE, dont 7,8 milliards d’euros dans le cadre du Club de Paris et 9,2 milliards d’euros dans un cadre bilatéral. Sur la période 2004-2009, les annulations de dette ont représenté en moyenne 23 % de l’APD française. Elles sont désormais beaucoup moins significatives.

Évolution des annulations et rééchelonnements nets de dette en volumes et part dans l’APD bilatérale

(en millions d’euros)

 

Annulations et rééchelonnements nets de dette

Total APD bilatérale nette

Part des annulations et des rééchelonnements de dette dans l’APD française bilatérale nette

2012

1 147

6 168

19 %

2013

524

5 122

10 %

2014

23

4 909

0 %

2015

125

4 650

3%

2016 (1)

79

5 003

2%

(1) Données provisoires, en cours de vérification par l’OCDE.

Sources : réponse au questionnaire budgétaire ; OCDE (Cad 2a) et DG Trésor.


—  1  —

 

   Deuxième partie : observations du rapporteur spécial

A.   L’APD FRANçaise n’est pas à la hauteur de ses engagements internationaux

1.   Contrairement à d’autres pays, la France n’est pas sur une trajectoire crédible d’atteinte de ses objectifs

En 2002, lors de la Conférence internationale sur le financement du développement à Monterrey, au Mexique, les pays riches se sont engagés à consacrer au développement 0,7 % de leur revenu national brut (RNB).

La France est loin de remplir cet engagement. En 2016, elle n’a consacré que 0,38 % de son RNB à l’APD. Pourtant, cet objectif ne semble pas inatteignable. D’une part, la France en a déjà été plus proche par le passé, comme en 2010, où presque 0,5 % du RNB a été consacré à l’APD. Ce recul de l’APD française se vérifie non seulement en part du RNB, mais aussi en valeur absolue. Il s’agit donc non pas d’une moindre priorité donnée à l’APD, mais du choix d’en faire un poste d’économies budgétaires.

évolution de l’APD française entre 2000 et 2016

Source : OCDE.

D’autre part, certains pays ont atteint leurs objectifs, parmi lesquels la Suède (0,9 % de RNB consacré à l’APD), la Turquie (0,8 %) ou le Royaume-Uni (0,7 %).

Pays ayant atteint 0,7 % de leur RNB consacré à l’APD

Pays

APD en % RNB

Émirats Arabes Unis

1,1

Norvège

1,1

Luxembourg

1,0

Suède

0,9

Turquie

0,8

Danemark

0,8

Allemagne

0,7

Royaume-Uni

0,7

Pays-Bas

0,7

Source : OCDE.

D’autres pays qui n’ont pas encore respecté leurs engagements ont contrairement à la France fait l’effort d’augmenter leur participation, et ce malgré des conjonctures économiques au moins aussi défavorables. C’est le cas de l’Italie, dont l’APD est passée de 0,14 % du RNB en 2012 à 0,26 % en 2016, ou encore de l’Espagne qui, après avoir vu son engagement chuter conséquemment à la crise de 2008, est passé de 0,16 % en 2012 à 0,33 % en 2016.

Il convient cependant de préciser que les dépenses relatives à l’aide aux réfugiés lors des douze premiers mois de séjours sont comptabilisées, ce qui explique en partie le niveau de l’aide de l’Allemagne (les dépenses en faveur des réfugiés représentent un quart de son aide, +8 points entre 2015 et 2016) ou de l’Italie (35 % de l’aide, + 10 points), tandis que cette dépense est moins significative en France (4,6 % de l’APD, + 0,5 point).

Cette situation n’est pas sans conséquence sur l’influence de la France dans le monde. La politique étrangère de la France repose traditionnellement le trépied dit des « trois D » : diplomatie, défense et développement. Ces dernières années, on constate que l’effort budgétaire en faveur du développement a largement été sacrifié par rapport aux autres piliers.

évolution base 100 de l’effort budgétaire envers les « trois D » (1)

Titre : Evolution base 100 des "3D"

(1) En 2016, la déclaration d’APD de la France à l’OCDE représentant 8,6 milliards d’euros, tandis que la mission « Action extérieur de l’État » représentant 3,3 milliards d’euros et la mission « Défense » 41,1 milliards d’euros.

Sources : RAP 2016, LFI 2017, PLF 2018, réponse au questionnaire budgétaire.

Il en résulte, d’une part, l’affaiblissement de la position de donneur de la France qui fragilise sa capacité à imposer ses priorités sur la scène internationale en affaiblissant sa légitimité et d’autre part, le risque de perdre de l’influence dans les pays bénéficiaires de l’aide au profit d’autres puissances plus présentes.

2.   La trajectoire présentée dans le PLF ne permet pas à ce stade d’aborder de manière crédible et efficace l’objectif de 0,55 % en 2022 affiché par le président de la République

Le président de la République a affiché sa volonté de porter l’effort budgétaire de la France, dans le contexte de nécessaire redressement des finances publiques, à 0,55 % du RNB d’ici 2022. Cet objectif, salué par la communauté du développement, est ambitieux mais raisonnable. Le Rapporteur spécial souligne cependant le manque de crédibilité de cette annonce au regard de la programmation budgétaire proposée par le gouvernement à l’occasion du projet de loi de finances présenté au Parlement.

En effet, selon le think tank indépendant IDDRI et l’ONG Action Santé Mondiale, en l’absence de l’augmentation de l’affectation de la TTF (orientation choisie par le gouvernement), « satisfaire l’engagement d’une APD atteignant 0,55 % du RNB en 2022, impliquerait une hausse de la mission APD d’environ 536 millions d’euros en 2018. La mission APD atteindrait 6,6 milliards en 2022 contre 2,6 milliards en 2017, soit une augmentation de 21 % par an sur cette période » ([6]). Au total, il s’agirait d’augmenter l’APD française d’environ 5 milliards d’euros par rapport à 2016 pour atteindre les 0,55 % en 2022.

projection de l’augmentation de l’APD totale pour atteindre les 0,55 % du RNB

Source : Action Santé Mondiale et IDDRI (2017) d’après les données budgétaires.

L’augmentation réelle des crédits de la mission APD de 94,4 millions d’euros en CP (+ 3,6 %), soit plus de 5 fois moins que le nécessaire selon la projection, et des AE données à l’AFD pour engager de nouveaux projets (+ 178,5 millions d’euros) en 2018 par rapport aux crédits ouverts en loi de finances 2017 est donc largement insuffisante au regard de l’objectif fixé. La trajectoire présentée par le gouvernement de porter les crédits de la mission à 3,1 milliards d’euros d’ici 2020 l’est tout autant.

Quand bien même le gouvernement ne ferait que reporter son effort à l’après 2020, il s’agirait d’un choix inefficace pour deux raisons. D’une part, en matière de développement, investir plus tôt permet d’économiser des dépenses supplémentaires plus tard. La Revue stratégique de défense et de sécurité nationale 2017 insiste ainsi sur l’importance du rôle préventif joué par le développement. D’autre part, la grande majorité de l’aide implique un rythme de décaissement pluriannuel. Ainsi, pour les dons-projets, les décaissements s’effectuent généralement sur cinq ans ; les prêts de l’AFD, eux, s’étalent en moyenne sur quinze ans. Retarder les engagements retarde donc d’autant plus les décaissements qui sont effectivement comptabilisés en APD et mène à une double impasse : soit renoncer à tenir la promesse de 0,55 %, soit effectuer des dépenses précipitées avec des actions au décaissement immédiat, sans qu’elles fassent l’objet d’une réflexion stratégique globale et pertinente.


—  1  —

 

B.   La France doit concentrer ses efforts sur les pays les plus en difficulté

En plus d’engager les efforts nécessaires à une augmentation conséquente et rapide de son APD, la France doit veiller à ce qu’elle soit destinée aux pays en ayant le plus besoin. Elle est liée par deux engagements en la matière.

1.   La France ne consacre que 0,09 % de son RNB aux pays les moins avancés

Reconnaissant les besoins des pays les moins avancés (PMA), les pays développés ont adopté en 2001 (Programme d’Action de Bruxelles pour les PMA) un objectif qui a été renouvelé en 2011 visant à allouer 0,15 à 0,20 % du revenu national brut (RNB) des donateurs à l’APD pour les PMA. Le plan d’action d’Addis Abeba de 2015 et l’Agenda 2030 réaffirment cet objectif.

La France est loin de remplir cet engagement. En 2015, elle ne consacrait que 0,09 % de son RNB aux PMA, soit 27 % de son aide – autant que pour les Pays à revenu intermédiaire tranche supérieure (PRITS), la dernière catégorie de pays éligibles à l’APD. Elle était pourtant à 0,13 % en 2010. Là encore, d’autres pays, tels la Suède (0,26 %) ou le Royaume-Uni (0,22 %) prouvent que l’atteinte de cette cible est possible.

évolution de l’aPD française à destination des PMA

 

2011

2012

2013

2014

2015

En millions d’euros

2 597

1 969

2 446

1 924

2 143

En part de l’APD

28 %

21 %

29 %

24 %

27 %

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

L’aide aux PMA a diminué de 17 % entre 2011 et 2015 malgré une hausse significative de 24 % entre 2012 et 2013 permettant de revenir en 2015 à un niveau proche de celui de 2011 (27 %). En comparaison, les montants d’aide aux PRITS n’ont diminué que de 10 % entre 2011 et 2015.

2.   Si les objectifs d’aide aux « pays prioritaires » sont atteints, l’aide en leur faveur demeure trop faible

D’autre part, la France a défini une liste de 17 pays prioritaires (ex-pays pauvres prioritaires, PPP), dont la liste depuis 2017 est la suivante : Bénin, Burkina Faso, Burundi, Comores, République Centrafricaine, Djibouti, Éthiopie, Guinée, Haïti, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, République Démocratique du Congo, Sénégal, Tchad et Togo. Ce sont aussi des PMA.

 

Cette liste correspond à une priorité française issue de la proximité historique et politique de ces pays avec la France. Le Gouvernement a décidé lors du CICID du 31 juillet 2013 d’y concentrer au moins la moitié des subventions de l’État (subventions budgétaires de la mission Aide publique au développement) et les deux tiers de celles mises en œuvre par l’AFD. Cette décision a été de nouveau été approuvée lors du CICID du 30 novembre 2016.

Si l’AFD a dépassé depuis 2015 l’objectif fixé par son contrat d’objectifs et de moyens d’au moins 67 % du montant des subventions ([7]) destinées aux pays pauvres et prioritaires, ces subventions ne représentent, en fait, que 5 % de l’activité de l’AFD. En 2015, les pays pauvres prioritaires n’étaient destinataires que 17 % de l’APD française, contre 23 % en 2011.

3.   La préférence croissante pour les prêts conduit à défavoriser les pays les plus pauvres

Comme le montre le graphique ci-dessous, l’aide bilatérale est devenue moins favorable aux PMA que l’aide multilatérale.

Part respective de l’aide bilatérale et de l’aide multilatérale
dans l’aide aux PMA

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

L’insuffisance des efforts de la France envers les pays ayant le plus besoin d’APD est notamment la conséquence de la préférence française pour les prêts.

Entre 2003 et 2015, les dons ont en moyenne représenté 67 % de l’APD brute française : c’est 15 points de moins que pour l’ensemble des pays du CAD. La croissance des prêts par rapport aux dons a commencé en 2008 : leur part est passée de 9 % en 2007 à 32 % en 2015, alors qu’elle restait relativement stable (de 9 % à 12 %) chez l’ensemble des donneurs du CAD.

Évolution de la répartition entre dons et prêts

Sources : OCDE, CAD 1 et CAD 2a.

Les prêts présentent en effet l’avantage de pouvoir, grâce à l’effet de levier, maximiser le montant de l’aide tout en minimisant son coût budgétaire. Ce choix de l’État est manifesté par l’indicateur 2.1 du programme 110 qui rend compte de l’effet de levier (montant d’aide au développement apportée par l’AFD sous forme de prêt par euro de subvention de l’État). Or, la recherche de l’effet de levier maximum a un effet sur les pays destinataires de cette aide. En effet, plus le pays est considéré comme sûr, plus l’effet de levier pourra être fort. Ainsi, en 2016, l’effet de levier des PMA bénéficiaires de prêts était de 7,5, contre 55 pour les pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure (PRITS). La recherche de l’effet de levier conduit donc à aider davantage les pays les plus sûrs au détriment des pays les plus vulnérables que sont les PMA.

Effet de levier pour les prêts octroyés par l’AFD déclarables en APD

* La répartition par type de pays a été établie à partir du classement pays du CAD / OCDE et des évolutions annuelles de ce classement : liste 2009-2010, liste 2011, liste 2012-2013 et liste 2014-2016 (rappelées en Annexe 3). Les chiffres présentés ci-dessus ne recouvrent donc pas les mêmes périmètres géographiques en fonction des années puisque le classement de certains pays a évolué d’une année sur l’autre. La liste actualisée des pays par catégorie est présentée en annexes.

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

De plus, les prêts ne sont structurellement pas un outil favorable aux pays les plus en difficulté. Ils financent en effet des projets de long terme (les prêts de l’AFD s’étalent sur une quinzaine d’années) alors que les pays les plus vulnérables ont souvent davantage besoin d’un soutien rapide, direct et flexible.

Par conséquent, les PMA ne sont bénéficiaires que de 17,2 % des engagements en prêts, alors qu’ils sont bénéficiaires de 76,8 % des engagements en dons-projets.

En privilégiant la croissance des prêts sur celle des dons pour minimiser l’impact budgétaire de son aide, la France prend donc le risque de faire la politique de ses instruments plutôt que d’avoir les instruments de sa politique.

Il convient cependant de noter que la réforme de la comptabilisation des prêts ([8]) sera un peu plus favorable aux prêts aux PMA. Selon une note du Trésor, « la gradation de la prime en fonction du niveau de revenu permettra à un bailleur, pour un même prêt, d’enregistrer plus d’aide s’il fait ce prêt à un PMA ou à un PFR que s’il le fait à un PRI. Il s’agit d’un changement dans la structure des incitations données aux bailleurs, qui devrait conduire au rééquilibrage de leur portefeuille de prêts, lorsque cela est possible, vers le financement de projets de développement durable dans les pays les plus pauvres, et de contribuer ainsi à l’atteinte de l’objectif, pris par de nombreux bailleurs, de consacrer entre 0,15 % et 0,20 % du RNB aux PMA sous forme d’aide publique au développement » ([9]).

L’aide française déserte-elle le Sahel ?

L’aide française est insuffisante au regard des enjeux que représentent ces pays

Les États du Sahel sont récipiendaires de 4 milliards d’euros d’APD par an des différents pays et institutions contributeurs, auxquels s’ajoute 1,5 milliard d’euros de dépenses militaires des pays occidentaux pour la région. Ils illustrent le déséquilibre de l’aide française. Malgré l’enjeu démographique, sécuritaire et migratoire que cette région représente pour l’Europe et la France, celle-ci ne lui consacre qu’à peine 5 % de son APD (482 millions d’euros d’engagements de l’AFD en 2016 dont 76 millions d’euros provenant de ressources déléguées par d’autres bailleurs, soit 406 millions d’euros).

Autorisations d’engagement de l’AFD sur les cinq dernières années au Sahel

(en millions d’euros)

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

L’APD de la France consacrée au Sahel est donc inférieure de 29 % au coût de la seule opération Barkhane (572,6 millions d’euros en 2015). Or, si les dépenses militaires sont indispensables, elles doivent s’accompagner, pour cesser de l’être, de dépenses conséquentes en faveur du développement.

ÉVOLUTION COMPARÉE DES DÉPENSES FRANÇAISES AU SAHEL SUR LE PLAN MILITAIRE ET DE L’AIDE AU DÉVELOPPEMENT PROGRAMMABLE

Source : rapport « Allier sécurité et développement – Plaidoyer pour la Sahel » de la Ferdi, 2016.

Cette situation est nettement différente pour d’autres pays. La part du Sahel dans l’aide programmable (c’est-à-dire fléchée par le donateur vers un pays ou une région) de la France est passée de 10 % en 2006 à 4 % en 2014, malgré l’augmentation du volume de l’aide. La part que les États-Unis consacrent au Sahel a, elle, augmenté.

De plus, même dans cette région, la France favorise les prêts aux dons : ces derniers ne représentent qu’un tiers de l’APD française dans la région environ. Au contraire, les versements multilatéraux sont à 73 % en dons ; les États-Unis, devenus premier bailleur bilatéral depuis 2009, ne délivrent que des dons.

Enfin, le rythme des décaissements des dons y est particulièrement lent, du fait de la fragilité des États : il est ainsi de l’ordre de 10 % par an au Mali. L’AFD se mobilise cependant pour pouvoir intervenir plus rapidement et en urgence, notamment après les interventions militaires.

Il convient cependant de noter que la France n’est pas la seule à s’investir insuffisamment au Sahel. Ces pays sont parfois qualifiés « d’orphelins de l’aide », car le nombre de bailleurs, au-delà des montants, y est largement inférieur (quelques pays seulement).

Il est toutefois prévu un engagement plus important pour 2017 et 2018, avec des prévisions d’engagements de l’AFD pour les six pays sahéliens à environ 1 150 millions d’euros sur 2017 et 2018, soit un montant annuel moyen de 575 millions d’euros par an (+ 25 % par rapport aux engagements annuels moyens sur les cinq dernières années).

L’Alliance pour le Sahel

Sous l’impulsion de la France, l’Alliance pour le Sahel, plateforme de bailleurs (UE, Allemagne, France, Banque mondiale, Banque Africaine de Développement, PNUD), a été lancée le 13 juillet dernier pour une meilleure coordination de l’aide dans la zone, avec des résultats rapides et concrets.

Les partenaires ont convenu :

 de se concentrer sur un nombre restreint de secteurs clés : (i) employabilité des jeunes ; (ii) développement rural, agriculture et sécurité alimentaire ; (iii) climat (accès à l’énergie, énergie verte, eau) ; (iv) gouvernance ; (v) appui à un retour des services de base et à la décentralisation ;

 d’apporter un soutien à l’ensemble des pays du G5 Sahel, avec un accent particulier sur les zones les plus vulnérables, et les zones transfrontalières prenant en compte les zones des pays voisins du G5 ;

 de la nécessité de responsabiliser les pays partenaires sur les réformes et les actions attendues de leur part pour permettre l’atteinte des objectifs de développement assignés à l’Alliance ;

 de fixer des objectifs ciblés (pertinents et pas trop nombreux) et chiffrés (calibrés, mesurables et réalistes), accompagnés d’échéances claires pour une redevabilité conjointe (partenaires et pays) sur l’ensemble des secteurs prioritaires ;

 d’accélérer les procédures et les circuits de décaissements pour avoir un impact rapide sur le terrain et une visibilité pour les populations, notamment par l’utilisation de modalités de mise en œuvre innovantes et plus efficaces.

Une rencontre entre chefs d’États européens et chefs d’États sahéliens aura lieu en marge du Sommet européen du 14 décembre prochain afin d’avancer sur ce projet.

4.   La France entreprend des efforts pour rééquilibrer son aide vers les pays les plus défavorisés

Cependant, la France entreprend des efforts à tous les niveaux pour que l’APD soit davantage dirigée vers les pays prioritaires et les PMA.

Au niveau national, outre le dépassement des objectifs de l’AFD envers les pays prioritaires, la concentration des moyens du Fonds de solidarité pour les projets innovants (FSPI) l’instrument aide-projet du MAE qui succède au Fonds de solidarité prioritaire (FSP) d’au moins 50 % des autorisations d’engagements sur les pays prioritaires est un signe positif.

Au niveau européen, la France parvient à faire valoir ses intérêts. Ainsi, sur la période 2014-2020, environ 19 % des ressources du FED (soit 5,8 milliards d’euros) sont octroyées aux pays prioritaires (21,75 % en 2015), et cinq des pays prioritaires figurent parmi les 10 pays les plus aidés par le FED.

Enfin, les principales institutions multilatérales auxquelles contribue la France sont très fortement orientées vers les PMA. Il s’agit en particulier l’Association internationale de développement (AID) et le Fonds africain de développement (FAD), qui sont respectivement les guichets de financement concessionnel de la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement, et qui représentent près de la moitié des CP du programme et en constituent les deux principales contributions multilatérales. Selon l’indicateur 1.1 du PAP, 64 % de l’aide de ces fonds étaient affectés aux PMA en 2016 (contre 58 % en 2015). La France a également obtenu, à l’occasion de la reconstitution de l’AID, que parmi les objectifs de l’AID figure l’affectation à l’Afrique subsaharienne de la majorité des ressources de l’AID ([10]).             


—  1  —

 

C.   Assurer un environnement propice aux retombées économiques pour la France

Si l’objectif premier de l’APD doit être d’aider les pays à se développer, cette dépense conséquente pour le budget de l’État représente également des opportunités pour les entreprises françaises. Celles-ci disposent en effet d’un savoir-faire en matière d’expertise et de technique particulièrement important dans de nombreux secteurs cruciaux pour le développement.

C’est dans cette perspective que se sont construits les instruments de l’aide liée, qui ne représentent aujourd’hui qu’une part marginale de l’aide française conformément aux engagements internationaux. La France doit cependant continuer à veiller à intégrer les intérêts économiques du pays dans sa politique de développement en associant les entreprises françaises dans ses processus et en luttant contre la concurrence déloyale. Il n’est en effet pas normal que la France finance des projets dont l’appel d’offres est remporté notamment par des entreprises chinoises ne respectant pas les mêmes standards de qualité, alors même que l’essentiel des financements chinois sont, eux, liés.

1.   L’aide liée est strictement limitée au niveau international et ne représente qu’un poids marginal dans l’APD française

C’est dans l’objectif d’allier les intérêts des pays donateurs comme bénéficiaires que sont conçus les instruments de l’aide liée. Ces outils conditionnent l’aide à des achats de biens et services fournis par des entreprises françaises. Les deux outils de l’aide liée française sont les prêts du Trésor (ex-Réserve pays émergents, RPE) qui peuvent être concessionnels (et ainsi comptabilisés en APD) ou non-concessionnels, et le Fonds d’études et d’aide au secteur privé (FASEP). Ils sont cependant strictement circonscrits par des engagements internationaux auxquels la France a souscrit.

a.   Les limitations à l’aide liée auxquelles est contrainte la France sont très restrictives

Différents textes internationaux ont pour objet d’éliminer l’usage de l’aide liée. Le texte de référence est l’« Arrangement sur les crédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public ». Les maturités de plus de 10 ans, ainsi que les différés de remboursement, sont interdits. Les taux de référence au-dessous desquels les crédits sont considérés comme subventionnés sont définis par des règles précises mais complexes. De plus, des contraintes dénommées « Disciplines » d’Helsinki introduites en 1991 viennent préciser les limitations. Elles ouvrent notamment la possibilité de prêts liés à condition de présenter une concessionnalité minimum de 35 %.

En plus de « l’Arrangement », il existe l’« Accord sur la transparence des crédits d’APD non liée », approuvé en 2004, qui arrête de façon complémentaire les modalités de mise à disposition du public de l’information liée aux appels d’offres relatifs aux financements notifiés dans le cadre de l’Arrangement, pour les concours d’aide non liée. Cet accord fait aussi l’objet de notifications ex post.

Enfin, les pays membres du CAD ont adopté en 2001 la « Recommandation sur le déliement de l’aide publique au développement aux pays les moins avancés (PMA) », étendue en 2008 aux pays pauvres très endettés (PPTE) non PMA, dans laquelle ils s’engagent à délier leurs concours à ces pays « dans la plus grande mesure possible », quelques exceptions étant toutefois prévues :

– la coopération technique « pure » (pas l’ingénierie accompagnant les investissements) ;

– l’aide alimentaire ;

– le soutien général aux ONG (mais les projets ONG donnant lieu à des appels d’offres doivent être déliés).

Par ailleurs, la Déclaration de Paris, le Programme d’action d’Accra et le Document du Partenariat de Busan sur l’efficacité de l’aide, endossés par la totalité des membres du CAD et par de nombreux autres donateurs, mentionnent l’engagement d’appliquer les dispositions de la Recommandation le plus largement possible, y compris dans les pays et les secteurs où elles n’ont pas un caractère contraignant. La France, parmi d’autres pays (l’Allemagne, l’Australie, la Finlande, l’Irlande, le Japon, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse) a délié son aide au-delà de la recommandation.

Selon le CAD de l’OCDE, la part de l’aide bilatérale globale déliée est ainsi passée de 46 % à 82 % de 1999 à 2008.

b.   Les outils de l’aide liée française

La France, et en particulier l’AFD, applique l’ensemble des préconisations auxquelles a souscrit la France en matière de déliement. Cependant, elle profite des exceptions légales pour pérenniser deux outils.

Le premier est les prêts du Trésor, inscrits au programme 851 de la mission Prêts à des États étrangers. L’utilisation de ces crédits doit respecter les règles de l’OCDE en matière de crédits à l’exportation. À titre d’exemple, en 2016, des protocoles ont notamment été signés sur des projets de montants importants tels qu’avec le Sénégal (matériel roulant du train express régional (TER) reliant Dakar à Diamniadio). Il convient de noter que le taux d’exécution des Prêts du Trésor a chuté ces dernières années : 99,9 % en 2013, 75 % en 2014 et 35 % en 2015.

Le deuxième outil d’aide liée est le FASEP, qui finance des études de faisabilité ou de l’assistance technique par des entreprises françaises en amont de projet de développement. Un club de suivi regroupe des entreprises françaises intéressées par l’étude et le projet sous-jacent. Les crédits dédiés à ces outils ne représentent qu’une part minime de l’APD française (moins de 5 % en 2016).

En effet, outre le respect de ses engagements internationaux, la France soutient la dynamique de déliement de l’aide pour de multiples raisons :

– éviter le surcoût lié à des restrictions sur les fournisseurs : en améliorant la compétitivité du processus d’appel d’offres, le déliement doit permettre d’obtenir de meilleurs prix, ou à l’inverse de plus grandes quantités pour le même budget. Selon l’OCDE, l’aide « liée » peut accroître les coûts d’un projet de développement de 15 à 30 % ;

– mieux cibler les programmes d’aide : en réduisant les contraintes d’usage du côté du donateur, le déliement doit permettre de mieux s’aligner sur les priorités et modalités de mise en œuvre du pays bénéficiaire ;

– contribuer au développement du tissu économique local et régional : en permettant aux fournisseurs locaux et régionaux d’accéder aux marchés financés par l’aide, le déliement leur ouvre de nouvelles perspectives et/ou les confronte à une compétition accrue qui les pousse à devenir plus compétitifs.

– ouvrir davantage de projets pour les entreprises françaises grâce à la réciprocité (par exemple, les volumes d’activité de la JICA et de la coopération allemande (GIZ et KfW) atteignaient respectivement 19 milliards d’euros et 9,9 milliards d’euros en 2015) et à l’effet de levier grâce aux cofinancements. Ainsi, si les prêts aux PRITI et PFR non PMA et non PPTE étaient liés, le montant de ces concours pour le même coût État serait trois fois plus faible en volume selon le Trésor.

C’est également pour ces raisons que MEDEF International, rencontré par le Rapporteur spécial dans le cadre de son rapport, a indiqué être favorable au déliement de l’aide.

2.   L’AFD, sans recourir à l’aide liée, assure des retombées économiques importantes pour les entreprises françaises

a.   L’AFD s’efforce d’assurer un cadre normatif et concurrentiel permettant aux entreprises françaises d’être compétitives sur les appels d’offres

L’AFD ne pratique pas d’aide liée mais veille à créer à travers son action un environnement favorable à des retombées économiques positives pour les entreprises françaises. Il s’agit notamment d’une des orientations de la « Stratégie française pour l’aide multilatérale 2017-2021 ».

Premièrement, l’AFD oriente son activité de préférence dans les secteurs où le savoir-faire des entreprises françaises permet de répondre aux besoins des pays bénéficiaires de l’APD. Les infrastructures sont ainsi le premier secteur d’activité de l’Agence.

Deuxièmement, l’AFD finance le Fonds d’Expertise Technique et d’Échanges d’Expériences (FEXTE) réabondé à hauteur de 40 millions d’euros en 2017. Le FEXTE recueille des projets élaborés par les acteurs de terrain, parmi lesquels les entreprises françaises, correspondant aux demandes des pays éligibles et finance de l’assistance technique, des expertises, de la formation, des études…

Troisièmement, l’AFD lutte contre les pratiques de concurrence déloyale dans les appels d’offres qu’elle finance. En 2013, l’AFD a élaboré le document « Directives pour la passation des marchés financés par l’AFD dans les États étrangers », qui précise et rend opposable aux bénéficiaires de ses financements les exigences de l’Agence en matière de passation des marchés et de respect des bonnes pratiques internationales (sur lesquelles elles sont construites).

Les Directives spécifient le type et les modalités de contrôles que l’AFD exerce. Elles visent à prévenir les cas de concurrence déloyale concernant notamment les normes sociales et environnementales, ainsi que les offres anormalement basses. L’évaluation du dispositif réalisée en 2015 montre qu’elle a concerné des marchés de travaux dont l’impact environnemental et social était considéré comme significatif ou fort et pour lesquels ce nouveau dispositif avait été utilisé (travaux publics dans les secteurs des transports, de l’énergie, de l’eau et de l’assainissement, principalement en Afrique subsaharienne). Plus des deux tiers des gagnants des appels d’offres sont des entreprises françaises.

b.   Grâce à cet effort, les retombées de l’APD pour les entreprises françaises sont conséquentes

En 2016, 84 % des projets vivants de l’AFD à travers le monde ont impliqué au moins un acteur économique français, soit 730 projets sur les 869 recensés. Cet indicateur est en hausse de trois points par rapport à 2015.

La moyenne des parts de marché (en montant) des entreprises françaises dans les appels d’offres internationaux ces trois dernières années s’établit à 56 %. En élargissant l’analyse à d’autres types de marchés (attribués en gré à gré ou avenant à des entreprises françaises, de parts financées en pari passu par les bailleurs cofinanciers sur des marchés remportés par les entreprises françaises et de marchés indirects), ce sont ainsi de retombées françaises supplémentaires à ajouter, portant le chiffre global des retombées via marché, directes et indirectes, à 2 693 millions d’euros pour 2016 (contre 1 534 millions d’euros en 2015).

Enfin, il faut ajouter à ces montants les autorisations d’engagement AFD en appui aux investissements et projets portés par des acteurs français (143 millions d’euros) et les octrois de PROPARCO en faveur d’intérêts français.

D.   les taxes affectées à l’aide publique au développement

1.   Deux taxes sont affectées à l’APD : la taxe sur les transactions financières et la taxe de solidarité sur les billets d’avion

Deux taxes affectées concourent à l’aide publique au développement française. La plus ancienne est la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA), dite « taxe Chirac », prévue à l’article 302 bis K du code général des impôts (CGI), créée par la loi de finances rectificative pour 2015 en date du 31 décembre 2005. Elle est assise sur le nombre de passagers et le fret embarqués en France sur chaque vol commercial. Son produit est affecté au FSD dans la limite d’un plafond de 210 millions d’euros. Pour 2018, la part non-affectée reversée à l’État devrait s’élever à 7 millions d’euros.

La seconde est la taxe sur les transactions financières (TTF), prévue à l’article 35 ter ZD du CGI, créée par la loi de finances rectificative pour 2012 en date du 8 février 2012. Elle est assise sur les opérations d’achat d’actions de sociétés françaises au 1er janvier de l’année d’imposition. À l’occasion du PLF pour 2017, le plafond d’affectation du produit de la taxe au FSD a été porté de 260 à 528 millions d’euros, assorti d’une affectation à l’AFD dans la limite de 270 millions d’euros. Pour 2018, la part non-affectée reversée à l’État devrait s’élever à 693 millions d’euros.

Évolution des taxes affectées depuis 2013

(en millions d’euros)

 

 

2013

2014

2015

2016

2017

2018

TSBA

Part FSD

185

204

210

210

210

210

TTF

Part FSD

60

100

140

260

528

798

Part AFD

-

-

-

268

270

0

Total affecté

145

304

350

738

1 008

1 008

Source : documents budgétaires.

2.   Le PLF 2018 marque un point d’arrêt dans l’augmentation de l’affectation des taxes

La Cour des comptes et le Rapporteur spécial de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale ont souligné à de multiples reprises que l’augmentation de l’affectation de ces taxes affectées venait davantage compenser la baisse des crédits que s’y ajouter, entraînant une débudgétisation progressive de la mission.

Évolution respective des crédits de la mission APD et des taxes affectées

(en millions d’euros)

Source : documents budgétaires.

La programmation 2018 marque donc une évolution significative, car les ressources budgétaires augmentent sans que l’affectation des taxes ne soit augmentée.

Alors que près de la moitié de la taxe sur les transactions financières (46,5 %) n’est pas affectée, le Rapporteur spécial souligne qu’une affectation plus importante du produit serait un moyen efficace d’augmenter l’APD française sans pour autant remettre en cause l’attractivité de la France que pourrait induire une évolution de l’assiette de la taxe.

3.   En première lecture, l’Assemblée nationale a maintenu l’affectation d’une part de la TTF à l’AFD

À deux reprises (PLF pour 2016 et PLF pour 2017), le Parlement a adopté une affectation d’une part de la TTF à l’AFD. Contournée en 2016, elle a été mise en œuvre pour la première fois en 2017 avec 270 millions d’euros versés au titre de la TTF à l’AFD.

Les 270 millions d’euros de TTF reçus par l’AFD ont été affectés comme suit :

• 91 millions d’euros pour la « Facilité vulnérabilité » permettant des interventions à impact rapide dans les pays en crise (Sahel, Proche-Orient, République centrafricaine) ;

• 96 millions d’euros de dons projets axés sur les secteurs prioritaires climat et éducation ;

• 45 millions d’euros pour des aides budgétaires globales affectés aux pays les plus vulnérables, en particulier dans le Sahel ;

• 15 millions d’euros pour le Fonds d’expertise technique ;

• 3 millions d’euros pour la facilité de financement des collectivités territoriales (FICOL) ;

• 20 millions d’euros correspondant à la rémunération de l’AFD, qui lui permet de couvrir les coûts d’instruction et de mise en œuvre de ces projets.

L’article 19 du PLF pour 2018, dans sa version initiale, revenait sur cette disposition en supprimant la part de TTF affectée à l’AFD et en la transférant au FSD, en portant le plafond à ce dernier à 798 millions d’euros. Le Rapporteur spécial regrette l’acharnement de l’exécutif à ne pas vouloir accorder de part d’affectation de la TTF à l’AFD. Alors que l’action de l’AFD, de par sa gouvernance, est transparente, le FSD agit beaucoup plus comme une « boîte noire » qui échappe au contrôle, notamment, des parlementaires. Par conséquent, le Rapporteur spécial se félicite de la suppression des dispositions revenant sur l’affectation d’une part de la TTF à l’AFD en première lecture. Le Rapporteur spécial rappelle d’ailleurs que selon le Conseil des prélèvements obligatoires ([11]), c’est l’adossement du FSD à l’AFD qui justifie qu’il bénéficie de l’affectation de taxes malgré le fait qu’il ne constitue pas une personnalité morale.

schéma de financement en 2018

 

 


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   Examen en commission

Après l’audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères, et de M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères (voir le compte rendu de la commission élargie du 27 octobre 2017 à 15 heures ([12])), la commission examine les crédits de la mission Aide publique au développement et le compte spécial Prêts à des États étrangers.

Article 29 et état B : Crédits du budget général

La commission examine l’amendement IICF212 de M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur, rapporteur spécial. Cet amendement d’appel propose de majorer les autorisations d’engagement de la mission afin de tenir compte du rythme de décaissement des projets engagés dans le cadre de l’aide publique au développement.

L’amendement IICF212 est retiré.

Suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, la commission adopte les crédits de la mission Aide publique au développement.

Article 31 et état D : Crédits des comptes d’affectation spéciale et des comptes de concours financiers

 

La commission examine ensuite les crédits du compte de concours financiers Prêts à des États étrangers.

Suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, elle adopte les crédits du compte de concours financiers.

 

 

 

 


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   Personnes auditionnées

ACTED : M. Frédéric de Saint-Sernin, directeur général délégué, ancien ministre

Coordination Sud : M. Philippe JAHSHAN, président, président de Solidarité Laïque, M. Gautier CENTLIVRE, chargé de mission plaidoyer

ONE : Mme Maé KURKJIAN, chargée de plaidoyer

AIDES : M. Marc DIXNEUF, directeur général, M. Enzo POULTRENIEZ, responsable plaidoyer

Action Santé Mondiale : M. Bruno RIVALAN, directeur exécutif adjoint

IDDRI : Mme Julie VAILLÉ, chercheure senior

MEDEF International : M. Philippe GAUTIER, directeur général de MEDEF International, M. Bruno BENSASSON, président Conseil de chefs d’entreprise « Institutions Financières internationales » de MEDEF International, M. Antoine de GAULLIER, chargé de projet

Direction générale du Trésor : M. Cyril ROUSSEAU, sous-directeur « Affaires financières multilatérales et développement », M. Pierre GAUDIN, chef du bureau « Aide publique au développement », Mme Sandrine MÉNARD, cheffe du bureau « Aide-projet », M. Antoine MALANDAIN, adjoint au chef du bureau « Afrique subsaharienne et Agence française de développement »

Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères : M. Jean-Yves LE DRIAN, ministre, M. Jean-Marc CHÂTAIGNER, envoyé spécial au Sahel, M. Emmanuel PUISAIS-JAUVIN, directeur général adjoint de la mondialisation, M. Rémi MARÉCHAUX, directeur d’Afrique et de l’océan Indien, M. Cyrille PIERRE, directeur du développement durable, M. Daniel VOSGIEN, délégué aux programmes et aux opérateurs à la Direction générale de la mondialisation, M. Thomas MICHELON, délégué adjoint aux programmes et aux opérateurs à la Direction générale de la mondialisation

Énergies pour l’Afrique : M. Jean-Louis BORLOO, président et ancien ministre

Partenariat mondial pour l’éducation : Mme Alice ALBRIGHT, directrice générale

Ministère de l’intérieur : M. Michel AMIEL, chef adjoint du service des affaires internationales et européennes, Mme Mona DEBBOUN, chargée de mission au service des affaires internationales et européennes

Agence française de développement : M. Rémy RIOUX, directeur général, M. Charles TROTTMANN, directeur de cabinet du directeur général, Mme Zolika BOUABDALLAH, chargée des relations avec le Parlement


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   Annexes

Annexe 1 : Glossaire

ABG : Aide budgétaire globale

AFD : Agence française de développement

AID : Association Internationale de Développement

APD : Aide publique au développement

C2D : Contrat de désendettement et de développement

CAD : Comité d’aide au développement

CICID : Comité interministériel de la coopération internationale et du développement

EAF : Établissement doté de l’autonomie financière

FAD : Fonds africain de développement

FASEP : Fonds d’études et d’aide au secteur privé

FED : Fonds européen de développement

FEXTE : Fonds d’Expertise Technique et d’Échanges d’Expériences

FHU : Fonds humanitaire d’urgence

FSD : Fonds de solidarité pour le développement

FSP : Fonds de solidarité prioritaire

FSPI : Fonds de solidarité pour les projets innovants

IPPTE : Initiative « pays pauvres très endettés »

PMA : Pays les moins avancés

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement

PPP : Pays pauvres prioritaires

PRITS : Pays à revenu intermédiaire tranche supérieure

RNB : Revenu national brut

TSBA : Taxe de solidarité sur les billets d’avion

TTF : Taxe sur les transactions financières

 

 

 

 

Annexe 2 : Principaux textes généraux et engagements nationaux et internationaux d’orientation de l’aide française

Loi n° 2014-773 d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale promulguée le 7 juillet 2014.

Elle définit les orientations de la politique d’aide publique au développement de la France et fixe comme objectifs :

– la lutte contre la pauvreté et ses conséquences en termes de santé, d’éducation ou de nutrition ;

– la préservation de la planète, notamment en mettant l’accent sur la lutte contre le changement climatique ;

– la promotion des valeurs de la démocratie et de l’État de droit, les droits de l’Homme, l’égalité entre les femmes et les hommes, la responsabilité sociale et environnementale des entreprises et le travail décent.

Elle fait du développement durable des pays en développement, dans ses trois composantes économique, sociale et environnementale, la finalité de la politique de développement. Elle réaffirme la priorité donnée à l’Afrique subsaharienne et à la rive sud de la Méditerranée pour l’aide publique au développement française. Elle affirme que la France reprendra une trajectoire ascendante vers les objectifs internationaux qu’elle s’est fixés dès lors qu’elle renouera avec la croissance.

CICID de novembre 2016

Le CICID a particulièrement réaffirmé la priorité accordée à l’Afrique, continent auquel seront consacrés au moins 20 milliards d’euros de financement entre 2014 et 2018, et la concentration de l’effort sur les pays les moins avancés, en particulier dans l’espace francophone, ainsi que sur les pays prioritaires de l’aide française. Les priorités thématiques de l’aide française, notamment dans les domaines de la lutte contre le changement climatique, de la santé et de l’éducation ont été rappelées. Le CICID a également confirmé l’engagement présidentiel d’augmenter de 4 milliards d’euros les capacités d’intervention du groupe AFD, dont 2 Md€ consacrés à la lutte contre le changement climatique, et de près de 400 millions d’euros les dons d’ici 2020.

Agenda 2030

Adopté le 25 septembre 2015 par les chefs d’État et de Gouvernement réunis lors du Sommet spécial sur le développement durable, l’Agenda 2030 fixe 17 objectifs de développement durable (ODD) déclinés en 169 cibles pour répondre aux défis de la mondialisation en se fondant sur les 3 composantes - environnement, social et économie - du développement durable.

Conférence internationale de Monterrey

Il s’agit de la première conférence internationale sur le financement du développement, tenue du 18 au 22 mars 2002. Elle s’est tenue deux ans après l’adoption des objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Au terme de cette conférence, plus de 170 pays se sont engagés à accroître le développement au sein des pays les plus pauvres du monde. Le « consensus de Monterrey » issu de cette conférence reposait sur six piliers complémentaires : mobilisation des ressources nationales, investissements directs étrangers et autres apports du secteur privé, renforcement du commerce international, accroissement de la coopération financière et technique, réduction de la dette extérieure et cohérence d’ensemble.

Conférence internationale d’Addis Abeba

Il s’agit de la troisième conférence internationale sur le financement du développement tenue 13 au 16 juillet 2015. Le programme d’action d’Addis-Abeba, adopté à son issue, reflète les engagements en matière d’APD et le rôle de l’ensemble des acteurs – publics, privés, locaux et internationaux - dans le financement du développement durable et dans la réalisation de l’agenda 2030. Plusieurs priorités françaises sont reflétées dans le texte :

– les ressources domestiques sont mises en avant et identifiées comme sources principales de financement (stable et pérenne) pour le développement durable ;

– il valorise du rôle des sciences, des technologies et de l’innovation dans le développement durable et renforcement des capacités dans ces domaines ;

– il souligne l’importance des financements innovants et des autres mécanismes de mixage qui visent à maximiser l’effet de levier des financements versés aux pays du Sud ;

– il reconnaît l’importance des entités locales ;

– il accorde une attention particulière aux pays les plus vulnérables et dans le besoin, en particulier aux pays les moins avancés (PMA).

Initiative Pays Pauvres Très Endettés

La communauté internationale a reconnu en 1996 que la situation d’endettement extérieur d’un certain nombre de pays très pauvres, la plupart situés en Afrique, était devenue extrêmement difficile et avait un impact négatif sur leurs perspectives de développement. L’initiative pays pauvres très endettés (PPTE) est fondée sur une action coordonnée de la communauté internationale, y compris les institutions multilatérales de développement (Banque mondiale, Fonds monétaire international, banques régionales de développement), visant à réduire le poids de la dette extérieure à un niveau soutenable. L’initiative PPTE a été renforcée en septembre 1999.

Résolutions Dakar I et Dakar II

Décisions bilatérales d’annulation des créances d’APD sur certains pays d’Afrique subsaharienne concrétisées respectivement dans des dispositions des lois de finances pour 1990 et 1995.

 


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Annexe 3 : Classement des bénéficiaires de l’APD établi par le CAD

 

En gris : changements par rapport à la liste précédente.

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Annexe 4 : Montants totaux d’APD nette versée par les 10 principaux pays contributeurs ces 3 dernières années

(en millions de dollars)

2014

2015

2016*

 

APD nette en valeur

En % du RNB

 

APD nette en valeur

En % du RNB

 

APD nette en valeur

En % du RNB

États-Unis

33 096

0,19

États-Unis

30 986

0,17

États-Unis

33 589

0,18

Royaume-Uni

19 306

0,70

Royaume-Uni

18 545

0,70

Allemagne

24 670

0,70

Allemagne

16 566

0,42

Allemagne

17 940

0,52

Royaume-Uni

18 013

0,70

France

10 620

0,37

Japon

9 203

0,20

Japon

10 368

0,20

Japon

9 483

0,20

France

9 039

0,37

France

9 501

0,38

Suède

6 233

1,09

Suède

7 089

1,40

Pays-Bas

4 988

0,65

Pays-Bas

5 573

0,64

Pays-Bas

5 726

0,75

Suède

4 870

0,94

Norvège

5 086

1,00

Norvège

4 278

1,05

Italie

4 856

0,26

Australie

4 382

0,31

Canada

4 277

0,29

Norvège

4 352

1,11

Canada

4 240

0,24

Italie

4 003

0,28

Espagne

4 096

0,33

*Données préliminaires pour l’année 2016 pour permettre la comparaison entre les différents pays, les données définitives 2016 ne seront disponibles que fin 2017.

Source : OCDE (CAD 1)

 

 


([1]) Conférence climat de l’ONU 2017 à Bonn

([2]) Comité interministériel de la coopération internationale et du développement

([3]) Les dépenses d’aide publique au développement répondent à une classification établie par le Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE, auquel participe la France, qui est l’organe mesurant l’APD sur la base de la déclaration annuelle des pays.

([4]) Les AE du programme connaissent tous les ans une forte variation en raison de la pluriannualité des engagements, notamment des deux principaux postes que sont l’Association internationale pour le développement et le Fonds africain de développement, qui ont été reconstitués en 2017.

([5]) Le plafond décidé par le Conseil de l’Union européenne est à 745,9 millions d’euros mais sera diminué de 3,5 millions d’euros de reliquat issus des 8e et 9e FED.

([6]) Note Trajectoire d’Aide Publique au Développement vers 0,55 % du RNB alloué à l’APD en 2022.

([7]) 69 % en 2015, 74 % en 2016.

([8]) Seule la part concessionnelle des prêts est comptabilisée comme APD par le CAD. En 2014, ce dernier a entériné une réforme de la comptabilisation de cette part. Auparavant, tout prêt dont l’élément-don était supérieur à 25 % était entièrement déclarable en APD, indépendamment de ses conditions financières. Désormais, on mesurera un « équivalent-don » selon un « taux d’actualisation » qui dépendra du niveau de revenu du pays bénéficiaire et ne sera plus uniforme.

([9]) Trésor-Eco, Les nouvelles règles pour les prêts d’aide publique au développement : quels enjeux ?, n° 161, mars 2016.

([10]) Il faut cependant noter deux limites à cet indicateur : d’une part, il ne reflète pas la contribution de tous les fonds multilatéraux auxquels contribue la France ; d’autre part, parmi les cinq premiers pays bénéficiaires des prêts concessionnels et dons de chacun de ces deux fonds, on ne trouve aucun pays prioritaire de l’aide de la France.

([11]) Conseil des prélèvements obligatoires, « La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes », juillet 2013.

([12]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/commissions_elargies/