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N° 3988

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 mars 2021.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION de loi visant à l’accompagnement des enfants atteints de pathologie chronique ou de cancer,

 

 

Par Mme Béatrice DESCAMPS,

 

 

Députée.

 

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Voir le numéro :

Assemblée nationale : 3863 2e rect.

 

 

 

 


 

 

 


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SOMMAIRE

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 Pages

AVAnT-PROPOS

PRINCIPAUX APPORTS DE LA COMMISSION

COMMENTAIRES Des articles

Article 1er Ouverture d’un congé spécifique pour les parents lors de l’annonce d’une pathologie ou d’un cancer de leur enfant

Article 2 Information de la communauté éducative

Article 3 Présence obligatoire d’un personnel de médecine scolaire lors de la tenue d’un examen

Article 4 Gage financier

COMPTE RENDU DES TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. Discussion générale

II. examen des articles

Article 1er Ouverture d’un congé spécifique pour les parents  lors de l’annonce d’une pathologie ou d’un cancer de leur enfant

Article 2 Information de la communauté éducative

Après l’article 2

Article 3 Présence obligatoire d’un personnel de médecine scolaire  lors de la tenue d’un examen

Article 4 Gage financier

Titre

annexe : Liste des personnes auditionnées par la rapporteure

 


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   AVAnT-PROPOS

 

L’école républicaine s’efforce d’accueillir l’ensemble des élèves, qu’ils soient malades ou handicapés en leur proposant des aménagements adaptés à leurs besoins. Mais lorsque l’école inclusive est évoquée, l’on fait généralement référence aux élèves porteurs de handicap.

Or, en France, il y aurait entre 1,5 million et 4 millions d’enfants, adolescents et jeunes adultes âgés de 0 à 20 ans atteints de maladies chroniques – c’est-à-dire de longue durée, évolutives, ayant un retentissement sur la vie quotidienne. Leur vie et leur scolarité ne sont pas toujours impactées de la même façon, selon la maladie et sa gravité.

L’annonce du diagnostic provoque souvent un choc pour la famille et l’enfant. Celui-ci doit être en général hospitalisé et soumis à une série d’examens. Du jour au lendemain, leurs vies et leurs habitudes doivent changer, ils doivent s’adapter et réapprendre à vivre avec cette nouvelle donnée.

Afin d’être au plus près de leur enfant à ce moment difficile, pouvoir le suivre, l’accompagner mais aussi le soutenir et le rassurer, les parents ont besoin d’être disponibles. Tout comme lors de l’annonce d’un handicap, il faut qu’ils puissent bénéficier de jours d’absence, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Ces parents, comme l’ensemble des parents d’enfants malades ou handicapés, ont besoin de reconnaissance. Cette proposition de loi crée ainsi un nouveau droit à des congés pour événements familiaux lors de l’annonce de la survenue d’une pathologie chronique entraînant un apprentissage thérapeutique ou d’un cancer.

Si les maladies chroniques sont de mieux en mieux connues et soignées, leurs conséquences sur la vie privée et professionnelle peuvent être lourdes, même si elles tendent à se réduire. Des progrès ont été faits pour faciliter la vie des malades, mais il reste encore du travail. La proposition de loi visant à améliorer l’accès à certaines professions des personnes atteintes de maladies chroniques, adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale le 30 janvier 2020, va dans ce sens. Il faut également s’attaquer à cette question dès le plus jeune âge : c’est ce que vise à faire cette proposition de loi en se préoccupant de l’accompagnement des enfants malades dans le milieu scolaire.

Lors du retour de l’enfant à l’école, un cadre adapté doit être mis en place. L’enfant ne doit cependant pas être mis à part. Par prudence et excès de précaution, ces enfants sont souvent exclus de certaines activités scolaires ou périscolaires. Or, ces craintes sont généralement dues à la méconnaissance de la maladie de l’enfant ou aux préjugés qu’elle véhicule.

Afin de remédier à ce type de réaction, la présente proposition de loi prévoit la tenue d’une réunion d’information réunissant l’ensemble des intervenants scolaires et périscolaires lors du retour à l’école de l’enfant. Ce temps d’échange permettra à tous d’appréhender la réalité des répercussions de la maladie pour l’enfant sans lever le secret médical ni aller à l’encontre de la volonté des parents. Une documentation spécialisée sera également mise à la disposition des équipes.

L’enfant grandissant, il est amené à se présenter aux différents examens nationaux. S’il bénéficie d’un aménagement des épreuves dans le cadre notamment d’un plan individuel d’apprentissage ou d’un projet personnalisé de scolarisation, son centre d’examen est mis au courant de sa situation. Mais s’il ne dispose pas d’un tel aménagement et que son centre d’examen n’est pas son établissement habituel, aucune information n’est transmise. Or, ces jours d’examen, avec le stress, l’élève peut être mis en difficulté par sa maladie. Le surveillant peut être désemparé et un infirmier ou une infirmière scolaire n’est pas toujours présent.

Afin de rassurer l’ensemble des personnels encadrants, surveillants et examinateurs mais aussi les parents et surtout les élèves, la présente proposition de loi prévoit de généraliser la présence d’un médecin ou infirmier scolaire dans les centres d’examens pendant les épreuves.

 

 


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   PRINCIPAUX APPORTS DE LA COMMISSION

 

Lors de sa réunion du mercredi 17 mars 2021, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation a adopté la présente proposition de loi en opérant les modifications suivantes.

À l’article 1er, la commission a adopté trois amendements rédactionnels de la rapporteure.

À l’article 2, la commission a adopté dix amendements et sous-amendements, dont :

– un amendement de la rapporteure visant à modifier l’intitulé du chapitre II du titre Ier du livre Ier du code de l’éducation, afin d’y insérer les enfants et adolescents malades à côté de ceux en situation de handicap ;

– un amendement de la rapporteure ayant pour objet de rendre moins contraignant le délai de vingt-et-un jours pour la tenue de la réunion organisée avec l’équipe éducative après l’annonce du diagnostic ;

– un amendement de Mme Jacqueline Dubois précisant l’objet de cette réunion ;

– un amendement de Mme Dubois prévoyant la participation d’un représentant de la collectivité territoriale concernée.

La commission a adopté, sur proposition de Mme Dubois, une nouvelle rédaction de l’article 3. Désormais, il ouvre la possibilité d’indiquer dans le projet d’accueil individualisé (PAI), à la demande des parents ou de l’élève, si la présence d’un professionnel de santé est souhaitable lors d’un examen ou d’un concours.

La commission a également adopté un amendement de la rapporteure portant sur l’intitulé de la proposition de loi.

 

 

 


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   COMMENTAIRES Des articles

Article 1er
Ouverture d’un congé spécifique pour les parents lors de l’annonce d’une pathologie ou d’un cancer de leur enfant

Adopté avec modifications

L’article 1er prévoit la création d’un nouveau droit à des congés pour événements familiaux ou autorisation spéciale d’absence, pour l’annonce de la survenue chez un enfant d’une pathologie chronique entraînant un apprentissage thérapeutique ou d’un cancer. Ce droit est d’une durée de 2 jours.

I.   Le droit existant : l’absence de prise en compte spécifique

A.   POur les salariés du secteur privé

L’article L. 3142-1 du code du travail définit la liste des cas d’ouverture d’un droit à des congés pour évènements familiaux. Cette liste comporte cinq cas d’ouverture : le mariage du salarié ou la conclusion d’un pacte civil de solidarité, le mariage d’un enfant ; la naissance ou l’adoption d’un enfant ; le décès d’un proche ou l’annonce de la survenue d’un handicap chez un enfant. Ces cinq cas d’ouverture ne comportent donc pas l’annonce d’une pathologie chronique ou d’un cancer chez un enfant.

La rédaction en vigueur date de la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels dont l’article 9 a ouvert ce droit à des congés pour l’annonce de la survenue d’un handicap chez un enfant.

La durée de ces congés est précisée à l’article L. 3142-4 du même code qui institue, pour l’annonce de la survenue d’un handicap, un congé de deux jours. Cet article est d’ordre public, aucune clause contractuelle ne peut donc venir réduire les durées indiquées. En revanche, celles-ci peuvent être allongées par une convention ou un accord collectif, qu’il soit d’entreprise ou de branche.

Contrairement aux congés maladie, ces congés pour évènements familiaux ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale. C’est l’employeur qui en supporte le coût, l’article L. 3142-2 précisant que ces congés « n’entraînent pas [de] réduction de la rémunération et sont assimilés à du temps de travail effectif pour la détermination de la durée du congé payé annuel », leur durée « ne [pouvant] être imputée sur celle du congé payé annuel ». Ils sont accordés de droit, aucune condition d’ancienneté ou de type de contrat n’étant requise.

À côté de ce dispositif, d’autres mécanismes de solidarité nationale existent pour venir en aide aux parents d’enfants malades et leur permettre d’être à leurs côtés.

Tout d’abord, il y a le congé pour enfant malade prévu par l’article L. 1225‑61 du code du travail. Il est d’une durée de 3 jours maximum par an mais présente l’inconvénient majeur de ne pas être rémunéré.

Le congé de paternité et d’accueil si l’enfant est hospitalisé à sa naissance (articles L. 1225-35, D. 1225-8 et D. 1225-8‑1 du code du travail) est d’une durée de 30 jours. Il ne peut être pris qu’en cas d’hospitalisation immédiate de l’enfant après sa naissance dans une unité de soins spécialisés. C’est l’assurance maladie qui rémunère le salarié durant cette période.

Il existe également le congé de présence parentale (article L. 1225-62 du code du travail). Il n’est accordé que si la maladie, l’accident ou le handicap de l’enfant présente une particulière gravité rendant indispensable la présence soutenue des parents et des soins contraignants. D’une durée maximale de 310 jours ouvrés au cours d’une période de 36 mois, elle implique pour le parent de perdre son salaire et d’être rémunéré par l’allocation journalière de présence parentale (ce qui peut impliquer une perte de revenu). L’article 69 de la loi n° 2019-1446 de financement de la sécurité sociale pour 2020 a introduit la possibilité pour le salarié de prendre ce congé en temps partiel ou de façon fractionnée.

Enfin, la loi n° 2014-459 du 9 mai 2014 permettant le don de jours de repos à un parent d’un enfant gravement malade vient préciser le cadre dans lequel ces dons peuvent être faits.

La directive du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants traite également de ce sujet et des droits à congés pour événement familiaux mais elle n’a pas encore été transposée.

B.   pour les agents de la fonction publique

Le II de l’article 21 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires prévoit les « autorisations spéciales d’absence liées à la parentalité et à l’occasion de certains évènements familiaux », équivalent des droits à congés pour le secteur privé. Tout comme pour les salariés, « ces autorisations spéciales d’absence n’entrent pas en compte dans le calcul des congés annuels ».

La loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a réformé cet article 21 afin d’y apporter plus de cohérence, le régime des autorisations spéciales d’absence étant précédemment régi par diverses circulaires (instruction FP n° 7 du 23 mars 1950 pour l’application des dispositions du statut général des fonctionnaires relatives aux congés annuels et autorisations exceptionnelles d’absence, circulaire n° 1475 du 20 juillet 1982 relative aux autorisations d’absence pouvant être accordées aux agents publics pour soigner un enfant malade ou pour en assurer momentanément la garde…). Le dernier alinéa du II de l’article 21 précité dispose qu’« un décret en Conseil d’État détermine la liste des autorisations spéciales d’absence et leurs conditions d’octroi et précise celles qui sont accordées de droit ». Ce décret est en cours d’élaboration et il sera commun aux trois fonctions publiques.

La circulaire n° 1475 du 20 juillet 1982 précitée prévoit des autorisations d’absence rémunérées pour les parents d’un enfant ou qui ont un enfant à charge, pour le soigner ou en assurer momentanément la garde. Ces autorisations sont cependant accordées sous réserve des nécessités de service.

La réforme introduite par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels et permettant d’ouvrir le droit à des congés pour l’annonce de la survenue d’un handicap chez un enfant n’a, pour l’heure, pas été étendue à la fonction publique. La rapporteure regrette cela, ces jours étant importants pour les parents. Cependant, un dispositif similaire au secteur privé de deux jours d’autorisation d’absence à l’occasion de l’annonce de la survenue d’un handicap chez l’enfant est prévu dans le cadre du projet de décret relatif aux autorisations d’absence.

Le décret n° 2015-580 du 28 mai 2015 permet à un agent public civil le don de jours de repos à un autre agent public. Ainsi, les parents d’un enfant gravement malade peuvent bénéficier, sous conditions, d’un don de jours et être rémunérés pendant leur absence.

Le congé de présence parentale existe également dans la fonction publique. Le décret n° 2020-1492 du 30 novembre 2020 portant diverses dispositions relatives au congé de présence parentale et au congé de solidarité familiale dans la fonction publique a transposé aux agents publics les modifications intervenues dans le secteur privé en faveur des salariés.

II.   Les modifications proposées : l’ouverture d’un droit à des congés spécifiques

L’article 1er de la proposition de loi crée un nouveau cas d’ouverture de droit à des congés et autorisation spéciale d’absence pour les parents à l’annonce de la survenue d’une pathologie chronique entraînant un apprentissage thérapeutique ou d’un cancer.

Ce nouveau droit est accolé au droit à des congés pour l’annonce de la survenue d’un handicap chez un enfant et en reprend sa durée de 2 jours minimum.

La rapporteure a conscience de la multiplication des cas d’ouverture de droit à des congés et de ce que cela implique, mais elle souhaite que ces parents soient reconnus dans la loi et que leurs difficultés soient prises en compte. Ce congé pourrait ainsi leur permettre de suivre leur enfant à l’hôpital lors de l’annonce du diagnostic. Ils seraient immédiatement disponibles et ne perdraient pas leur salaire ni leurs jours de congés, jours qui leur sont fortement utiles pour accompagner l’enfant et réapprendre à vivre avec sa pathologie.

L’alinéa 1 vise ainsi à inscrire ce nouveau droit dans le code du travail aux articles L. 3142-1 (liste des d’ouverture du droit à des congés) et L. 3142-4 (durée de ces droits, en l’occurrence 2 jours) du code du travail, à la suite du cas de l’annonce de la survenue d’un handicap chez l’enfant.

L’alinéa 2 vise quant à lui, à étendre ce droit aux agents de la fonction publique afin qu’ils bénéficient eux aussi immédiatement de ce nouveau cas d’autorisation spéciale d’absence. Il modifie le II de l’article 21 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

Les auditions ont confirmé la vision de la rapporteure sur la nécessité de circonscrire le champ d’ouverture de ce nouveau droit. En effet, la définition de pathologie chronique est assez vaste et englobe de nombreuses maladies.

Maladie chronique

Selon le Ministère des Solidarités et de la Santé, une maladie chronique est une maladie de longue durée, évolutive, avec un retentissement sur la vie quotidienne. Elle peut générer des incapacités, voire des complications graves.

En 2012, 37 % des plus de 15 ans, soit 19 millions de personnes étaient atteintes d’une maladie chronique, dont 13 millions avec un impact important dans leur vie courante. L’impact de la maladie sur la vie quotidienne dépasse largement les domaines de la santé et du soin.

Ainsi, afin de réduire les cas pouvant permettre l’ouverture de ce nouveau droit à des congés, la rapporteure a précisé « une pathologie chronique entraînant un apprentissage thérapeutique ou d’un cancer ». L’apprentissage thérapeutique renvoie à l’idée d’un traitement médicamenteux lourd et à la nécessité d’être hospitalisé. Il comporte également l’idée d’apprentissage : l’enfant doit apprendre à utiliser et suivre (afin d’être autonome) son traitement mais aussi vivre avec. Par exemple, l’enfant diabétique doit certes apprendre à se piquer mais il doit également apprendre à gérer son alimentation (quantité suffisante pour garantir sa croissance mais choix des aliments en fonction de sa glycémie).

Les cancers étant compris dans les maladies chroniques mais pouvant être exclus du champ des pathologies chroniques entraînant un apprentissage thérapeutique, la rapporteure a souhaité les ajouter, le choc et l’accaparement des parents étant très importants.

L’objet de l’alinéa 3 est de préciser la liste de ces maladies par décret. Par cette restriction des maladies chroniques, la rapporteure estime ainsi parvenir à un équilibre, englobant les maladies telles que l’épilepsie ou le diabète mais excluant l’asthme ou les allergies même si elle reste consciente des limites qu’une liste implique.

La rapporteure est également consciente du nombre réduit de jours que cela représente (4 jours en additionnant les congés des deux parents). Cela constitue cependant une avancée par rapport au droit existant et des conventions ou accords de branches ou d’entreprises pourront ensuite venir étendre cette durée comme c’est le cas pour d’autres droits à congés pour événements familiaux.

Ce nouveau droit représente également une avancée financière pour ces parents qui voyaient leur rémunération suspendue s’ils prenaient des congés pour enfant malade. Ce congé pourra venir s’additionner à celui-ci mais il pourra surtout retrouver sa fonction première et permettre à ces parents d’être auprès de leurs enfants lorsque ceux-ci tombent malades.

Ces jours pourraient ainsi, malgré leur nombre réduit, permettre aux parents d’être au plus près de leur enfant lors de premiers examens.

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Article 2
Information de la communauté éducative

Adopté avec modifications

L’article 2 rend obligatoire la tenue d’une réunion d’information lors du retour de l’enfant à l’école dans un délai de 21 jours et met à disposition du personnel scolaire et périscolaire une documentation spécialisée.

I.   Le droit existant

L’article L. 351-4 du code de l’éducation dispose qu’un entretien est organisé avant la rentrée scolaire entre « les parents ou les représentants légaux de l’enfant ou de l’adolescent en situation de handicap […][et] le ou les enseignants qui en ont la charge ainsi qu’avec la personne chargée de l’aide individuelle ou mutualisée.[…] Il porte sur les modalités de mise en œuvre des adaptations et aménagements pédagogiques préconisés dans le projet personnalisé de scolarisation » (PPS).

Pour ce qui est des projets d’accueil individualisés (PIA) pour raison de santé, une circulaire du 10 février 2021 a actualisé et précisé leur mise en œuvre. Cette circulaire précise notamment le rôle de chacun des intervenants lors du retour ou de l’arrivée d’un enfant bénéficiant d’un PIA.

 

Aménagements pédagogiques (PAI, PPRE, PAP, PPS)

 

 Pour les élèves à besoins éducatifs particuliers, il existe différents aménagements pédagogiques définis par le code de l’éducation : PAI, PPRE, PAP et PPS.

– Le PAI : projet d’accueil individualisé

Il concerne les élèves atteints d’un trouble de santé invalidant tel qu’une maladie chronique (asthme ou diabète par exemple), une allergie ou une intolérance alimentaire. 99 744 élèves ont bénéficié d'un PAI en 2013-2014, dont 43 697 nouveaux. L'asthme et l'allergie sont à l'origine de 63 % des PAI demandés, suivis du diabète et de l'épilepsie.

– Le PPRE : programme personnalisé de réussite éducative

Ce programme concerne les élèves qui ont des difficultés importantes dans l’acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture et qui risquent de ne pas maîtriser les compétences de fin de cycle. Il peut aussi concerner les élèves intellectuellement précoces.

– Le PAP : plan d’accompagnement personnalisé

Sont concernés tous les élèves dont les difficultés persistantes sont la conséquence d’un trouble spécifique des apprentissages et pour lesquels des aménagements et adaptations de nature pédagogique sont nécessaires afin qu'ils puissent poursuivre leur parcours scolaire dans les meilleures conditions.

– Le PPS : projet personnalisé de scolarisation

Sont concernés les élèves en situation de handicap.

 

En général, les enfants atteints de pathologie chronique bénéficient d’un PAI et sont parfois inscrits à une maison départementale des personnes handicapées (MDPH) si leur pathologie est d’une particulière gravité ou intensité.

 

La circulaire précitée indique que les représentants légaux sont « responsables de la communication des informations du PAI et de la transmission du matériel et des médicaments afférents aux différentes structures susceptibles d'accueillir leur enfant ».

Le directeur ou le chef d'établissement « informe l'équipe de l'école ou de l'établissement, y compris les remplaçants, des PAI existants, et peut désigner une personne « ressource » chargée de la mise en place pédagogique du PAI et de son suivi. » Avec les responsables de collectivités, ils « organisent l'information à destination de l'ensemble de leur personnel concerné, afin d'expliciter les traitements et les gestes à prodiguer aux enfants atteints de troubles de la santé. Des réunions d'information sont réalisées le plus tôt possible avec l'aide du médecin et/ou de l'infirmier de l'éducation nationale, du service de protection maternelle et infantile ou de la structure collective. »

La circulaire précise bien qu’« il est essentiel d'informer l'ensemble des personnels concourant à l'accueil des enfants et adolescents bénéficiant d'un PAI. En effet, la prise de connaissance des PAI concerne tous les personnels, y compris d'éventuels remplaçants enseignants ou animateurs. »

La rapporteure constate qu’il existe déjà des dispositions invitant les parents et l’équipe éducative à échanger ainsi qu’avec le personnel de médecine scolaire. Mais il ressort des auditions que ces entretiens peuvent parfois se faire bien après le retour à l’école, laissant s’écouler plusieurs mois avant qu’une réunion ait lieu. De même, il arrive que seulement certains personnels soient informés de la situation de l’élève et non l’ensemble des intervenants. Malgré ces invitations, il subsiste de nombreux préjugés sur les pathologies dont souffrent les enfants. Ces préjugés entraînent des peurs, des craintes de mal faire ou de mettre l’élève en danger et par volonté de bien faire, l’élève se retrouve bien souvent privé de certaines activités comme les sorties scolaires alors qu’il pourrait parfaitement y participer sans se retrouver en danger.

La circulaire dispose également que « des documents d'accompagnement sont disponibles sur Eduscol et sur Chlorofil. » Mais cette documentation n’est constituée que de fiches sur les conduites à tenir en cas d’urgence en fonction des pathologies. De plus, une telle documentation est présente dans le PAI.

Ainsi, des échanges ont lieu entre les différents intervenants, la famille, la médecine scolaire et les différents membres de l’équipe scolaire et périscolaire. Cependant, l’ensemble de ces mesures ne s’applique qu’aux enfants ayant un PAI. Or, tous les enfants ayant une maladie chronique entraînant un apprentissage thérapeutique ou un cancer n’ont pas de PAI. Certains se retrouvent ainsi dans une situation difficile où la famille doit informer l’établissement scolaire des difficultés de l’enfant sans que cette information ne soit formalisée ni forcément communiquée à l’ensemble des intervenants tant en temps scolaire que périscolaire.

II.   Les modifications proposées : l’instauration d’une réunion d’information obligatoire et le dÉveloppement d’une documentation spÉcialisée

L’alinéa 1 de l’article 2 propose de formaliser ces échanges à travers la tenue d’une réunion rassemblant l’ensemble des intervenants. Le but de cette réunion est d’informer l’ensemble des personnes de la réalité de la situation et de ses conséquences. Sans aller à l’encontre du secret médical, ces échanges évoqueraient les répercussions de la pathologie pour l’enfant et permettraient à chacun de lever ses a priori sur la maladie et d’ainsi permettre qu’il n’y ait plus d’autolimitation par crainte ou préjugés. Cette réunion permettrait également de faire comprendre au mieux les impacts de la maladie ou des traitements pour l’enfant. L’enfant bénéficierait ainsi d’une meilleure scolarité et les enseignants ou les encadrants seraient rassurés. L’enfant pourrait par exemple participer aux sorties qui auraient pu lui être refusées par crainte et l’enseignant serait en mesure de déceler les difficultés de l’enfant quand par exemple son traitement le ralentit.

Afin de respecter la volonté des parents, cette réunion ne se tiendra qu’avec leur consentement – de même que le PAI ne peut se faire si les parents le refusent.

Cette réunion regroupe les parents de l’enfant, le directeur ou chef d’établissement, l’enseignant ou le professeur principal. D’autres professionnels accompagnant l’enfant sur le temps scolaire ou périscolaire peuvent prendre part à cette réunion. La présence d’un professionnel de santé ou de la médecine scolaire est recommandée.

La présence de la médecine scolaire n’est que recommandée car, consciente des difficultés qu’elle rencontre, la rapporteure et auteure de la présente proposition de loi ne voulait pas qu’une réunion ne puisse avoir lieu faute de disponibilité d’un membre de la médecine scolaire.

De même, cette réunion ne sera organisée que lors du changement d’établissement de l’enfant ou lors de son retour après le diagnostic. Le but est de permettre d’informer l’ensemble des acteurs lors de l’arrivée de l’enfant.

Cette réunion doit se tenir dans un délai de 21 jours. Ce délai peut certes paraître court mais il y va du bien-être de l’enfant. Ces trois semaines laissent le temps à l’ensemble des acteurs pour s’organiser sans attendre trop longtemps. La tenue d’une telle réunion après plusieurs mois aurait moins d’intérêt et risquerait de mettre l’enfant ainsi que l’ensemble des intervenants dans une position difficile en cas de survenance d’une crise ou d’un problème.

Contrairement aux dispositions actuelles, cette réunion est étendue à l’ensemble des enfants souffrant d’une pathologie chronique et non seulement à ceux bénéficiant d’un PAI. Cependant, comme pour le droit à des congés institué à l’article 1er, cette prescription ne doit pas être générale, car cela risquerait de nuire au dispositif. Afin de remédier à cela, cette réunion est limitée à l’annonce du diagnostic ou à l’arrivée de l’enfant dans l’établissement.

L’alinéa 2 de cet article précise qu’une documentation permettant un suivi adapté est accessible aux équipes pédagogiques, sa nature sera précisée par décret. Cette documentation serait à la disposition des enseignants et leur permettrait de mieux connaître la maladie dont souffre l’enfant ainsi que les réactions à avoir. De plus, celle-ci serait accessible à tout moment pour permettre à l’enseignant de s’y référer en cas de doute et de réagir au mieux. Celle-ci pourrait par exemple être disponible sur la plateforme « cap école inclusive » en créant un nouvel onglet dédié aux maladies chroniques et aux cancers.

Comme la réunion d’information, cette documentation permettrait à l’enseignant de comprendre et de connaître au mieux la pathologie de l’enfant qui se trouve dans sa classe. Cela lui permettrait également d’expliquer et de pouvoir répondre au mieux aux autres enfants afin qu’ils puissent tous comprendre et ne pas avoir de craintes infondées.

L’attention de la rapporteure a été attirée au cours des auditions sur la difficulté rencontrée par les familles ainsi que les établissements scolaires à faire intervenir des professionnels libéraux au sein des établissements pour prodiguer des soins à l’enfant.

Le fait de recevoir les soins directement dans l’établissement permet à l’élève de s’absenter moins longtemps de sa classe, en gagnant le temps du trajet par exemple. Cela lui permet de bénéficier d’une meilleure scolarité en limitant au minimum le nombre d’heures de classe perdues. De même, pour la famille et l’établissement, c’est plus simple car ils n’ont pas à organiser le déplacement de l’enfant ni sa sortie pour motifs médicaux, celui-ci restant dans l’enceinte de l’établissement. Dans les établissements où cela se pratique, ces soins sont en général organisés pendant les heures de repas ou d’études de l’élève afin de le pénaliser le moins possible. L’établissement met pour cela à disposition du professionnel une salle.

Or, selon la circulaire du 8 août 2016 sur le parcours de formation des élèves en situation de handicap dans les établissements scolaires, « les soins par des professionnels libéraux se déroulent prioritairement dans les locaux du praticien ou au domicile de la famille. Lorsque les besoins de l'élève nécessitent que les soins se déroulent dans l'établissement scolaire, c'est-à-dire lorsqu'ils sont indispensables au bien-être ou aux besoins fondamentaux de l'élève, ce besoin est inscrit dans le PPS. »

Ainsi, si les soins ne sont pas inscrits dans le PPS ou si l’élève ne dispose pas d’un PPS, celui-ci ne peut bénéficier de soins au sein de l’établissement. Les directeurs d’école ou chefs d’établissements sont d’autant plus frileux à l’idée de signer des conventions avec les professionnels libéraux par crainte de poursuites par les ordres pour avoir favorisé un seul professionnel.

La rapporteure regrette que malgré l’intérêt reconnu par l’ensemble des parties, cette possibilité ne soit pas plus ouverte.

 

*

Article 3
Présence obligatoire d’un personnel de médecine scolaire lors de la tenue d’un examen

Adopté dans une nouvelle rédaction

L’article 3 vise à rendre obligatoire la présence d’un personnel de médecine scolaire lors de la tenue des examens nationaux.

I.   Le droit existant : un maillage territorial difficile par la mÉdecine scolaire

Aujourd’hui, il y a environ 1 000 médecins scolaires et 8 000 infirmiers et infirmières avec des disparités territoriales assez fortes : le nombre d’enfants pour un médecin varie de 7 000 à 32 000. La répartition des infirmiers et infirmières scolaires est schématiquement la suivante : il y en a deux dans les lycées importants, un dans les lycées moyens et petits, un par collège et son secteur voire un pour deux collèges si le nombre d’élèves est vraiment réduit. Cela dépend également de la présence ou non d’un internat dans l’établissement, auquel cas la présence d’une infirmière est obligatoire.

Lors des examens, les centres d’examen, notamment s’ils ne sont pas l’établissement habituel de l’élève, sont prévenus des demandes d’aménagement des épreuves. Cependant, s’il n’y a pas de demande d’aménagement faite, comme c’est le cas pour certains PAI, le centre d’examen n’est pas prévenu de l’arrivée d’un élève ayant un plan d’accompagnement et pouvant faire une crise, notamment lors de ces journées fortes en stress.

II.   Les dispositions proposées : la présence obligatoire d’un personnel de médecine scolaire lors des examens

L’article 3 vise à rendre obligatoire la présence d’un médecin ou d’un infirmier scolaire lors de la tenue du brevet général et professionnel, du baccalauréat général, technologique et professionnel, du certificat d’aptitude professionnelle et du brevet d’études professionnelles.

Cette présence systématique permettrait de couvrir l’ensemble des centres d’examen et non seulement ceux où au moins un élève bénéficie d’un aménagement dans le cadre d’un PAI ou PPS, comme c’est en général le cas aujourd’hui.

Elle rassurerait ainsi les familles, les encadrants et examinateurs mais surtout les élèves car tous ceux souffrant d’une maladie chronique ne disposent pas d’un PAI ou PPS avec aménagement des épreuves. Cette présence constituerait une réelle sécurité pour tous, les personnels médicaux sachant réagir en cas de difficultés que le stress provoqué par ces examens peut déclencher.

Il ressort cependant des auditions que ce dispositif serait difficile à mettre en place.

Ces examens se font au niveau national, sur des périodes parfois longues et avec des épreuves pratiques hors de l’enceinte de l’établissement. Il s’avère impossible de garantir la présence lors de chaque épreuve de chaque examen d’un personnel de médecine scolaire.

Par ailleurs, cette présence n’est pas forcément nécessaire, les élèves se présentant à ces examens étant déjà suffisamment âgés pour maîtriser leur traitement et anticiper certaines de leurs réactions.

Consciente de ces difficultés, la rapporteure souhaite déposer un amendement pour remplacer le texte proposé par une disposition rendant obligatoire la communication du PAI au centre d’examen sauf opposition des parents.

Lors des auditions, il est apparu que cette pratique n’était pas généralisée et qu’il existait de fortes disparités d’une académie à l’autre. Cette information sur les difficultés médicales des enfants ne serait donc plus limitée aux seuls élèves bénéficiant d’aménagement des épreuves. La transmission du PAI devrait se faire en amont des épreuves afin que l’infirmier du centre d’examen puisse en prendre connaissance auparavant.

*

Article 4
Gage financier

Adopté sans modification

L’article 4 permet de compenser en recettes les charges que pourrait entraîner l’application de la présente proposition de loi pour les finances publiques.

Cet article a pour objet d’assurer la recevabilité financière de la présente proposition de loi au regard de l’article 40 de la Constitution. Il prévoit que les charges qui pourraient résulter pour l’État, les collectivités territoriales et la sécurité sociale de l’application de la présente loi seront compensées à due concurrence par, respectivement, une taxe additionnelle sur les bières, une taxe additionnelle sur le tabac et une taxe additionnelle sur les boissons sucrées. Cette compensation en recettes est nécessaire pour permettre le dépôt de la présente proposition de loi.

 

 


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   COMPTE RENDU DES TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.   Discussion générale

La Commission des Affaires culturelles et de l’Éducation examine la proposition de loi lors de sa réunion du mercredi 17 mars 2021 ([1]).

M. le président Bruno Studer. Mes chers collègues, notre ordre du jour appelle l’examen de la proposition de loi visant à l’accompagnement des enfants porteurs de pathologie chronique ou de cancer, déposée par notre collègue Béatrice Descamps, qui en est également la rapporteure. Mme Descamps a effectué un travail approfondi sur ce sujet qu’elle connaît bien, et entendu une vingtaine d’organisations en audition. Cette proposition de loi est inscrite à l’ordre du jour de la journée réservée du groupe UDI, jeudi 25 mars.

Trente-sept amendements ont été déposés, dont cinq ont été déclarés irrecevables : deux au titre de l’article 40 de la Constitution et trois au titre de l’article 45. Le sujet traité par cette proposition de loi est l’accompagnement des enfants malades dans leur parcours scolaire.

Après avoir examiné ce texte, nous passerons à l’examen, au titre de l’article 88 du Règlement, des amendements déposés en séance sur la proposition de loi visant à démocratiser le sport en France, dont l’examen devrait débuter en séance cet après-midi.

Madame la rapporteure, je vous laisse la parole, pour une dizaine de minutes.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. L’objet de cette proposition de loi peut paraître simple, mais il est tellement important : améliorer et faciliter l’accompagnement des enfants atteints d’une maladie chronique ou d’un cancer. L’annonce de ce diagnostic est toujours un moment difficile et douloureux pour les familles. Si certaines pathologies peuvent être suivies sans hospitalisation et sans besoin d’apprentissage thérapeutique – je rappelle que la définition de la maladie chronique est très large – pour d’autres, l’hospitalisation immédiate est indispensable. Parents et enfants doivent alors comprendre et apprendre à gérer cette maladie, apprendre à repérer certains signes, à administrer certains traitements, à utiliser du matériel médical, à faire une injection, à utiliser un lecteur de glycémie. Les parents doivent être disponibles pour leur enfant pour le suivi de sa maladie, mais aussi pour le rassurer, le consoler parfois, l’écouter, l’accompagner et apprendre en même temps que lui. En l’espace d’un instant leur vie change, la vie de la famille change.

Pour tout cela, il faut que les parents soient disponibles immédiatement. C’est l’objet du premier article de cette proposition de loi : permettre à ces parents de prendre un congé sur le modèle du droit à des congés pour l’annonce de la survenue d’un handicap. Il s’agirait d’étendre ce droit à l’annonce de la survenue d’une pathologie chronique entraînant un apprentissage thérapeutique ou d’un cancer. Ce congé d’une durée de deux jours permettrait aux parents de s’occuper de leur enfant sans que cette absence ne soit décomptée de leurs congés payés ni qu’ils perdent une partie de leur salaire comme c’est le cas avec les congés pour garde d’enfant malade. Ceci étant dit, ces congés seront bien utiles, malheureusement, par la suite, pour ces familles. Je voudrais aussi rappeler ici combien l’annonce d’une maladie chez l’enfant est un choc pour les parents, un choc psychologique, et combien il me paraît tout simplement juste que l’on fasse mention de ces enfants et de ces parents dans la loi.

Mais l’enfant est aussi, le plus souvent, selon son âge, un élève. Les articles suivants de ce texte concernent donc plus spécifiquement l’élève, donc le temps scolaire et périscolaire. Rappelons d’ailleurs ici que l’article L. 111-1 du code de l’éducation dispose que le système éducatif « veille à la scolarisation inclusive de tous les enfants, sans aucune distinction ». Or, lorsque l’on regarde de plus près, on se rend compte combien, en la matière, la diversité territoriale est grande. Le retour à l’école pour ceux qui le peuvent est une nouvelle étape pour l’élève et ses parents. C’est aussi naturellement un moment angoissant pour les enseignants. Les questions sont nombreuses, les images erronées aussi parfois. Les enseignants ont besoin de connaître et comprendre les conséquences, les répercussions que la maladie ou son traitement peuvent avoir sur la scolarité de l’élève – son attention, sa concentration, sa fatigabilité – pour adapter au mieux leur pédagogie, et afin que l’élève bénéficie, si cela s’avère nécessaire et quand cela s’avère nécessaire, d’un accompagnement individualisé.

Bien sûr, un projet d’accueil individualisé (PAI) est généralement mis en place pour ces élèves. Ce document écrit vise à faciliter l’accueil des élèves ayant des problèmes de santé en leur permettant de suivre une scolarité normale tout en bénéficiant, par exemple, de leur traitement ou régime alimentaire particulier. Ce document, je veux ici le souligner, a connu une évolution très positive avec la circulaire de février dernier. Le PAI est un document essentiel, mais reste un document écrit, qui ne rassure pas toujours complètement l’enseignant et ne répond pas forcément à l’entièreté de ses questions.

Il me paraît donc essentiel qu’une réunion soit organisée le plus vite possible. C’est ce que propose l’article 2 : un échange avec l’ensemble des personnes impliquées dans la vie de l’élève. Cet échange doit porter sur les conséquences possibles de la maladie – ou de son traitement, je le répète – sur sa scolarité ou sur son comportement en classe, et non sur la maladie elle-même : le secret médical doit être préservé. Comme toujours quand il s’agit des enfants, les parents doivent consentir à cette réunion ; s’ils ne le souhaitent pas, malheureusement, l’échange ne pourra avoir lieu. Cette réunion doit aussi permettre à chaque intervenant de lever ses doutes, ses craintes, de comprendre mieux la réalité de la situation. Trop d’enfants souffrent, par exemple, de ne pouvoir participer à certaines activités scolaires ou périscolaires. Cela peut être tout à fait justifié, mais cela aussi résulter de la peur, de la précaution du personnel encadrant, ce que l’on peut comprendre : les enseignants, les accompagnants, sont des humains et les craintes sont tout à fait normales. Savoir se réunir en mettant l’élève au centre des réflexions, pour sa plus grande réussite, son épanouissement, tout en le protégeant, cela trouve toute sa place dans notre école de la confiance.

Le second alinéa de ce deuxième article va également en ce sens en mettant à la disposition des équipes pédagogiques une documentation permettant un suivi adapté. L’idée n’est pas de faire des fiches de conduite à tenir en cas d’urgence – cela existe déjà dans le PAI ; l’idée est de mettre à la disposition des intervenants de la documentation thématique pour comprendre et mieux appréhender les impacts de la maladie sur la scolarité de l’élève tout en donnant des pistes pédagogiques.

Cette attention particulière à la situation des élèves malades doit notamment être portée au moment des examens nationaux. Ce sont pour eux des moments stressants et anxiogènes. Ces examens sont importants et viennent sanctionner une partie de leur cursus. Leur pathologie ne doit pas les empêcher de réussir. Certains disposent pour cela d’aménagements des épreuves, mais ce n’est pas le cas de tous les élèves atteints d’une pathologie. Afin de rassurer ces derniers, mais aussi l’ensemble des élèves, les encadrants et les parents, il est proposé de généraliser la présence d’un infirmier ou d’une infirmière le jour des épreuves. Je proposerai également que le PAI soit transmis aux centres d’examens avec accord des responsables légaux ou de l’élève lui-même s’il est majeur.

Je voudrais, pour terminer, dire que si travailler sur ce sujet a été pour moi une évidence, elle a été confortée par les très nombreux témoignages que j’ai reçus depuis l’été dernier, quand j’ai fait un appel à témoignages pour mieux comprendre encore, entendre, écouter, et qui vont au-delà de ce que j’imaginais. Donc je remercie ici tous ces professionnels de santé, ces professionnels de l’éducation nationale, ces jeunes eux-mêmes, ces parents, avec qui j’ai pu discuter longuement, ainsi bien sûr que toutes les personnes que nous avons auditionnées ces dernières semaines.

Cette proposition concerne à la fois les enseignants, les enfants et les parents. Je voudrais également dire que je conçois vraiment ma proposition comme une véritable première étape de la reconnaissance par la loi des enfants atteints de maladie chronique, étape importante, qui en appellera sans doute d’autres. Ces enfants et leur famille ne choisissent pas de vivre ce bouleversement. Les enseignants ne veulent laisser personne sur le bord du chemin. En votant cette proposition de loi, nous pouvons les aider, les uns et les autres, nous pouvons choisir de ne pas faire de la maladie un frein à la scolarité ni à l’épanouissement de nos enfants. Nous pouvons franchir donc ici un pas supplémentaire pour une véritable égalité des chances. Je vous remercie.

M. le président Bruno Studer. Merci madame la rapporteure. Nous allons passer aux orateurs des groupes.

Mme Jacqueline Dubois. La proposition de loi présentée aujourd’hui par Béatrice Descamps et le groupe UDI s’inscrit dans la continuité des améliorations que nous portons depuis bientôt quatre ans en faveur d’une école plus inclusive. Elle s’intéresse aux conséquences parfois complexes de la découverte d’une pathologie chronique ou d’un cancer chez un enfant ou un adolescent, et vise un meilleur accompagnement des enfants porteurs et de leurs parents dès l’annonce de la maladie, en s’attachant à créer au plus vite un contexte scolaire et périscolaire favorable.

En ce sens, ce texte rejoint l’objectif de la circulaire interministérielle du 10 février 2021, qui actualise les modalités d’élaboration et d’application du projet d’accueil individualisé pour raison de santé, et dont les principes généraux rappellent premièrement, les priorités données à la sécurité, au bien-être, à l’intérêt de l’enfant et de l’adolescent, quelle que soit sa pathologie, physique ou psychique, et ses conséquences ; deuxièmement, le suivi scolaire et pédagogique assuré par l’établissement d’affectation, quel que soit son état de santé, en coordination avec l’ensemble des acteurs pour faciliter sa scolarisation et, après une absence, son retour avec éventuellement une reprise progressive des cours ; enfin, la prise en compte de tous les aspects de la vie de l’élève durant les différents temps de présence dans l’établissement.

La situation des enfants et adolescents atteints de maladie chronique ou de cancer est donc déjà prévue. Mais nous partageons la volonté de simplifier la vie de ces élèves et de rendre leur parcours scolaire plus serein. Nous nous associerons à cette proposition de loi qui renforce la place du projet d’accueil individualisé mentionné aujourd’hui dans la partie réglementaire du code de l’éducation, à l’article D. 351-9.

J’émettrais plusieurs propositions pour préciser la rédaction du texte à travers des amendements déposés au nom du groupe La République en marche. Je tiens à remercier la rapporteure pour les échanges constructifs que nous avons eus à ce sujet. Le nombre d’élèves porteurs de maladie chronique, physique ou psychique, allergies, asthme, diabète, épilepsie, drépanocytose, troubles anxieux, syndromes dépressifs, augmente régulièrement. Par exemple, depuis vingt ans, le diabète de type 1 progresse de 3 à 4 % par an et apparaît de plus en plus précocement, notamment chez les enfants de moins de cinq ans. En 2019, il concernait environ 15 cas sur 100 000 enfants de moins de 15 ans en France. De même, chaque année, 2 500 enfants et adolescents sont diagnostiqués d’un cancer ; un enfant sur 440 développe un cancer avant l’âge de 15 ans. Le nombre de ces cancers augmente de 1 à 2 % par an en Europe depuis trente ans. L’annonce de la maladie bouleverse le quotidien de la famille.

La proposition de loi que nous étudions aujourd’hui comporte une avancée à l’article premier, en ouvrant droit à deux jours de congés aux parents, après la découverte d’un cancer ou de certaines pathologies chroniques, lorsqu’il y a apprentissage de gestes thérapeutiques, sur le modèle des droits accordés lors de l’annonce d’un handicap d’un enfant. Nous sommes favorables à une telle mesure, qui paraît juste et appropriée dans de telles circonstances.

L’article 2 prévoit une réunion dans l’établissement scolaire après l’annonce de la maladie ou l’arrivée de l’élève afin d’envisager ses conséquences et les aménagements nécessaires. Nous y sommes favorables, avec quelques modifications : la tenue de réunion peut bénéficier à la mise en œuvre du projet d’accueil individualisé, sans que celle-ci ne soit obligée de se mettre en place sous 21 jours comme le demande la proposition de loi. Un assouplissement de cette contrainte, tout en en conservant l’objectif, a été préféré, en accord avec la rapporteure, afin de tenir compte des emplois du temps des professeurs et des professionnels de santé.

Enfin, à l’article 3, la présence systématique d’un personnel de santé sur l’ensemble des sessions d’examen et concours ne semble pas répondre à l’objectif d’accompagner les élèves bénéficiaires d’un PAI. Elle est, de plus, compliquée, voire impossible, à mettre en œuvre, ce qui pourrait compromettre la validité des examens. C’est pour cela que l’article ne semble pas adéquat en l’état.

Ainsi, le groupe La République en Marche soutiendra cette proposition de loi, qui correspond aux engagements forts de la majorité et du Gouvernement en faveur d’une école inclusive. Je vous remercie.

M. Frédéric Reiss. Le groupe Les Républicains soutiendra cette proposition de loi du groupe UDI. De nombreuses études montrent l’augmentation de la prévalence de maladies chroniques chez les enfants. L’école accueille depuis longtemps des enfants malades ou handicapés en application des textes réglementaires selon lesquels ces enfants bénéficient des mêmes conditions de scolarisation que les autres et la communauté éducative met tout en œuvre pour qu’il en soit ainsi.

Ces dernières années, la question de l’école inclusive est revenue plusieurs fois dans le débat. Notre groupe avait par exemple déposé une proposition de loi pour mieux prendre en charge les enfants en situation de handicap. Le tollé provoqué par son rejet avait conduit le Gouvernement à faire son mea culpa et en inclure certaines dispositions dans la loi pour l’école de la confiance.

Des textes existent pour l’accueil des enfants malades, une circulaire de février dernier clarifie l’ensemble des dispositifs d’accueil personnalité. Notre rapporteure les a rappelés en indiquant qu’entre 1,5 et 4 millions d’enfants seraient atteints de maladies chroniques et que chaque année, environ 2 500 enfants sont diagnostiqués atteints d’un cancer.

La vie des parents s’en trouve bouleversée. Ils doivent vivre avec et s’adapter dans des conditions difficiles. Cela suppose des aménagements quant aux heures de cours, aux menus, à la prise de médicaments. Cela se traduit souvent par des difficultés dues aux idées reçues ou aux maladresses de l’entourage ou des enseignants.

Ces maladies chroniques et ces cancers donneront désormais droit à deux jours de congé, qui permettront aux familles d’assimiler la nouvelle et d’en évaluer les conséquences. Notre groupe est favorable à l’article 1er de la proposition de loi.

Nous sommes plus réservés sur les autres dispositions, même si leur intention est bonne. La réunion proposée à l’article 2 peut en effet être très positive pour l’information de tous et déterminante pour la suite de la scolarité de l’enfant.

En revanche, l’article 3 qui prévoit la présence d’un médecin ou d’un infirmier scolaires lors des examens nous semble utopique compte tenu de la réalité. Un rapport de la Cour des comptes d’avril 2020 mettait encore en lumière le très faible taux d’encadrement des médecins scolaires. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la rapporteure a déposé un amendement pour se limiter à la présence d’infirmières. Une variante pourrait aussi être la désignation d’un médecin référent, non physiquement présent mais joignable.

Mme Sandrine Josso. Le sujet de la proposition de loi est particulièrement important et difficile. Ayant moi-même vécu ce type d’épreuve, je pense que ce texte est opportun. Il vient compléter des dispositions qui ont été adoptées ces dernières années, qui montrent que la politique du Gouvernement est très active dans ce domaine. Je pense par exemple au vote de la loi sur la fin de la discrimination sur le marché du travail des personnes atteintes de maladie chronique. Cette proposition de loi vise à apporter un soutien aux parents et porte sur la question de la scolarisation des enfants malades.

Sur ces problématiques, de nombreuses associations interviennent depuis longtemps. Je pense aux services d’éducation spéciale et de soins à domicile, les SESSAD, qui ont pour ambition d’aider les enfants dans leur milieu. De même les accompagnants des élèves en situation de handicap, AESH, sont aussi des acteurs incontournables d’aide à l’inclusion. Nous pouvons nous féliciter du chemin parcouru même s’il reste beaucoup à faire. L’ambition du Gouvernement de créer un grand service public de l’école inclusive est un enjeu de taille. La loi pour une école de la confiance a permis d’engager une transformation profonde en faveur des enfants handicapés.

La proposition de loi permet d’aller plus loin. L’article 1er qui vise à instaurer un congé spécifique est pertinent car l’annonce de la maladie ou du handicap est un bouleversement qui prend du temps pour être assimilé. L’article 2 est intéressant mais il faudrait y associer le personnel médical et les associations pour une compréhension des différents enjeux. Nous sommes d’accord sur les objectifs de l’article 3 mais il nous semble, en l’état, trop contraignant. Le groupe MoDem souligne les réelles avancées en matière de prise en charge des enfants malades.

Mme Michèle Victory. Je remercie notre rapporteure d’avoir l’ambition politique de mettre à l’agenda de notre assemblée ce sujet important. La maladie chronique et le cancer bouleversent la situation des familles et l’institution scolaire a un rôle à jouer pour l’épanouissement des enfants malades. Votre proposition de loi pose la question du rôle joué par l’institution scolaire pour les accompagner dans ces circonstances qui bouleversent leur quotidien.

Vous abordez plusieurs sujets. S’agissant des congés donnés aux parents, il n’y a pour le moment rien qui existe au moment de l’annonce de la maladie, à la différence des congés donnés lors d’un PACS, par exemple, alors que chacun sait les efforts que cela suppose pour rebondir et pouvoir épauler son enfant. Ce congé est indispensable. Vous proposez une réunion entre l’équipe encadrante et les familles pour permettre d’organiser le retour de l’enfant pour un meilleur accueil et cela est positif car c’est un moment essentiel. Il faut que cela se passe dans les meilleures conditions possibles, pour les uns et les autres. Nous sommes également en faveur de la présence d’un médecin ou d’un infirmier en salle d’examen, qui permettra de rassurer les enfants et peut-être de diminuer les taux d’échec.

Nous proposerons quelques amendements pour enrichir la proposition. Il nous paraît par exemple souhaitable que le congé soit de quatre jours et non de deux, par parallélisme avec les congés octroyés pour le mariage par exemple. Nous regrettons que nos amendements sur les personnels de santé aient été déclarés irrecevables. Les enseignants sont très sollicités, il faudrait formaliser les réunions proposées pour les inclure dans les emplois du temps, voire prévoir des formations. Il faudrait aussi renforcer les effectifs catastrophiques des professionnels de santé au sein de l’école et revaloriser les métiers de la médecine scolaire. Sans cela, toute ambition risque d’être vaine. Les dernières discussions budgétaires ont cependant été éclairantes sur ces sujets et il conviendrait que le Gouvernement évolue.

M. Benoît Potterie. Cette proposition de loi s’inscrit dans un mouvement de reconnaissance des enfants malades et nous la saluons. Les problèmes de santé nous concernent tous. Les maladies chroniques et les cancers touchent de nombreux enfants. Leur scolarisation a progressé ces dernières années, elle a notamment triplé depuis 2005 mais cela reste un enjeu majeur. Cette proposition de loi renforce le travail récent de M. Paul Christophe sur le congé de présence parentale et nous soutenons ce texte qui complète les dispositions existantes sur l’annonce d’un handicap. Nous sommes également d’accord avec les dispositions proposées sur l’aménagement du parcours scolaire. Quant à l’article 3, nous nous interrogeons sur les risques juridiques possibles de recours contre la validité des examens et nous proposerons une rédaction plus souple et adaptée à la situation médicale de l’enfant. Ce texte est un pas en avant en faveur de la solidarité. Nous le voterons.

M. Grégory Labille. L’objectif de cette proposition de loi est de sécuriser l’accueil et d’améliorer la gestion du changement qui découle de la maladie ou du handicap. Des milliers d’enfants sont concernés chaque année mais la connaissance des gestes à accomplir est faible. Il y a des dispositifs pour les parents, mais ils ne sont pas suffisamment protecteurs au plan salarial ni en ce qui concerne la possibilité de prendre un congé. Cette proposition de loi est une grande avancée en ce sens. Nous débattrons de sa durée, mais poser le principe de ce congé est d’ores et déjà essentiel quant à l’accompagnement qui est désormais proposé.

En outre, le texte évoque l’apprentissage thérapeutique qui permet de travailler sur la question des emplois du temps. Si les enfants concernés sont souvent d’une grande maturité, il est important de rassurer les familles. La réunion parents-équipe éducative est très positive, notamment en ce qui concerne les gestes éventuels à accomplir. Les professeurs et toute l’équipe éducative ont besoin aussi d’être rassurés quant aux effets des maladies des enfants. Une formation continue serait pertinente. Quant à l’encadrement des examens, il y a certaines limites sans doute au texte proposé, mais on pourra s’inspirer de pratiques locales existantes.

M. François Ruffin. Votre proposition reprend le flambeau porté par MM. Guy Bricout et Paul Christophe sur ces questions. Vous faites un petit pas pour permettre la prise de deux jours de congés à l’annonce de la maladie d’un enfant, c’est un minimum, mais il s’agit d’aller vers un statut de parent protégé pendant tout le temps de la maladie de l’enfant, pas seulement lors de l’annonce. Qu’à un calvaire humain terrible, ne s’ajoute pas d’angoisse financière. En effet, la maladie d’un enfant se traduit généralement pour sa famille par une baisse des revenus et une hausse des dépenses.

Le politique peut agir pour sécuriser les parents pour que ne s’ajoute pas la peur de perdre son logement et son emploi. De nombreux témoignages de familles montrent que la maladie de l’enfant se traduit souvent par la perte du travail, des déplacements pour se rendre dans des centres de soins, pour lesquels les familles bénéficient au mieux de certificats de complaisance de la part de leurs médecins. Un statut protégé devrait exister. La fédération Grandir sans cancer, propose un statut de « parent protégé », avec emploi protégé, protection vis-à-vis des créanciers et garantie sociale, pour que les cotisations soient maintenues. Votre proposition est un petit pas qui s’ajoute à d’autres, mais l’horizon est autrement ambitieux. Il ne porte pas sur des milliards d’euros, c’est un minimum humain pour ne pas alourdir le calvaire des parents.

M. Bertrand Pancher. Je remercie la rapporteure pour le travail effectué avec humanité, écoute et modestie. Lutter contre toute souffrance devrait être la vocation principale de tout responsable politique : sans pouvoir les supprimer toutes, il nous faut les atténuer chaque fois que possible. Ce texte y veille, en permettant à des familles qui doivent faire face à de terribles nouvelles de mieux concilier vie personnelle et vie professionnelle. Des préoccupations similaires avaient conduit à l’élaboration de la proposition de loi de notre collègue Paul Christophe comme à l’examen de celle présentée par nos collègues de l’UDI relative à l’instauration d’un congé de douze jours pour le deuil d’un enfant mineur.

Votre proposition de loi vise à instaurer, de façon tout à fait légitime, un congé de deux jours minimum lors du dépistage d’une pathologie grave chez un enfant, comme cela existe en matière de handicap. Votre proposition de loi porte également sur l’inclusion de ces élèves à l’école. Si des efforts importants ont été consentis en ce qui concerne les enfants en situation de handicap, des marges de progrès importantes demeurent, notamment en raison du manque de moyens consacrés aux accompagnants des élèves en situation de handicap. On constate encore trop souvent des déperditions d’informations entre les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et l’Éducation nationale en ce qui concerne la mise en place d’une aide humaine. Par ailleurs, les pôles inclusifs d’accompagnement localisés sont loin de faire l’unanimité : ils aggraveraient même les conditions de travail des AESH, qui doivent accompagner un nombre croissant d’enfants.

Nous réaffirmons la nécessité de garantir le droit à une scolarisation adaptée pour tous les élèves, qu’ils souffrent d’un handicap ou d’une pathologie chronique, et déplorons le fait qu’en raison d’un manque de connaissances et de moyens, certains élèves soient écartés d’activités scolaires et périscolaires. C’est pourquoi nous souscrivons pleinement aux dispositions prévues par votre proposition de loi qui permettront d’améliorer l’information des équipes éducatives et l’implication des familles. Nous réitérons toutefois nos inquiétudes en ce qui concerne l’article 3, relatif à la médecine scolaire, inquiétudes aggravées par le contexte sanitaire. Toutefois, nous soutiendrons pleinement cette proposition de loi.

Mme Karine Lebon. Je vous remercie de ce texte qui nous permet de répondre à un problème concret rencontré par de trop nombreuses familles chaque année. L’annonce aux parents de la maladie de leur enfant est toujours un moment extrêmement difficile. Si nous ne pouvons leur éviter ce choc, nous pouvons tenter de faciliter un peu ce moment. C’est l’objet de l’article 1er qui vise à instaurer un congé spécifique lors de l’annonce d’une pathologie chronique ou d’un cancer chez l’enfant. Nous le soutenons pleinement.

Concernant le reste du texte, il est clair que la crise sanitaire a remis sur le devant de la scène la question de la prise en charge à l’école des enfants porteurs de pathologie chronique ou de cancer. Les pédiatres ont fortement conseillé le retour de ces élèves à l’école pour leur bien-être et leur développement tout en invitant à une vigilance particulière pour les enfants porteurs de maladies respiratoires sévères. Mais la communauté éducative, devant un protocole lourd et contradictoire, a été démunie face à la prise en charge de ces élèves.

Nous sommes favorables à cette loi qui a pour objectif d’aller vers une école toujours plus inclusive en lui accordant les moyens de s’adapter au mieux aux besoins spécifiques des élèves porteurs de pathologie chronique ou de cancer.

Aujourd’hui, des aménagements existent déjà, par exemple pour les épreuves ou les menus de substitution. Mais les parents d’élèves ont constaté que la communauté éducative manquait d’éléments sur ce que ces enfants étaient, ou non, en capacité de faire. Pour y remédier, cette proposition de loi vise à organiser une réunion dès l’arrivée de l’enfant porteur d’une maladie chronique ou d’un cancer, afin de coordonner l’action de l’équipe éducative et de mieux s’adapter aux besoins de l’élève. Elle propose aussi de rendre obligatoire la présence d’un personnel de médecine scolaire lors de la tenue des examens nationaux.

Nous sommes favorables à toutes les mesures portées par ce texte, mais il va de soi qu’elles ne seront pas efficaces sans les moyens humains et financiers dans nos écoles. Or, 1 800 suppressions de postes sont prévues à la rentrée prochaine. Conjuguées aux baisses drastiques de dotation horaire globale, ces nouvelles suppressions nous incitent à la plus grande prudence quant à la bonne réalisation de cette nouvelle mission.

Élue de La Réunion, je suis souvent confrontée au désarroi de parents lorsque leur enfant doit être pris en charge dans l’Hexagone. J’ai d’ailleurs une pensée particulière pour Kerane, 12 ans, atteint d’une tumeur au cerveau et qui arrive à Paris aujourd’hui, accompagné de ses parents, pour se faire soigner. Pour lui et pour tous ces petits malades, la scolarité n’est pas la moindre des difficultés créées par l’éloignement. Il n’existe guère de dispositifs pour qu’ils restent aussi des élèves.

L’application réelle de la loi de 2005 qui consacrait déjà le droit à l'éducation pour tous les enfants doit nous éclairer sur ce nécessaire investissement. Manque d’AESH, pénurie de places dans le médico-social, manque d’enseignants formés font que, seize ans plus tard, l’école inclusive est un projet encore fragile. Oui, une mission supplémentaire au cœur de l’école doit être accompagnée d’un renforcement de la présence d’adultes en milieu scolaire.

Pour toutes ces raisons, nous voterons en faveur de ce texte éminemment nécessaire, avec une conviction accrue si l’amendement que nous présentons est adopté.

Mme Emmanuelle Anthoine. Plusieurs centaines d’adolescents sont frappés chaque année par un cancer alors qu’ils s’apprêtaient à suivre des études supérieures et à passer des concours. Leur vie bascule du jour au lendemain et ils doivent alors affronter une période longue, qui voit alterner traitements et hospitalisations, peu propice à la poursuite d’études du fait de l’inadaptation du système à leur situation particulière. Comment leur éviter cette double peine et faire en sorte que la scolarité universitaire prenne mieux en compte la situation de ces étudiants porteurs de maladies chroniques ?

M. Jean-Pierre Vigier. L’annonce d’une pathologie lourde chez un enfant nécessite souvent l’arrêt de l’activité de l’un des parents. Il convient d’accompagner au mieux l’enfant dans le combat qu’il doit mener contre la maladie et qui peut durer des mois, voire des années. La présence de ses parents est alors primordiale. Si l’octroi de deux jours de congé au moment de l’annonce du diagnostic constitue une avancée réelle, nous pourrions aller encore plus loin. Pourquoi ne pas ajouter à ce congé spécifique une indemnisation du parent qui serait contraint de cesser son activité professionnelle ? Pourquoi ne pas allonger la durée du congé que vous entendez mettre en place, deux jours me paraissant insuffisants pour permettre à la famille de s’organiser et d’appréhender la maladie ?

M. le président Bruno Studer. Madame la rapporteure, vous faites assurément œuvre utile par ce texte.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. J’ai appréhendé ce travail comme une première étape, que je voulais rapide. Vous avez été nombreux à faire le parallèle avec l’école inclusive et le domaine du handicap dans lequel beaucoup de progrès ont été faits. Mais précisément, beaucoup des enfants atteints de maladies chroniques n’entrent pas dans le champ du handicap et ne bénéficient pas des dispositifs existants. C’est pourquoi il est nécessaire de les leur étendre.

Madame Anthoine, le suivi des étudiants atteints de cancers ou de maladies chroniques est effectivement compliqué. J’ai pu le constater dans le département du Nord en échangeant avec des associations de parents. Au niveau universitaire, un véritable travail reste à mener tant pour les étudiants en situation de handicap que pour ceux atteints de maladies chroniques.

Pour répondre à notre collègue Vigier, le congé de présence parentale, dont la durée peut être de 310 jours, est distinct de celui que je propose.

 

 

 

 


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II.   examen des articles

La commission en vient à l’examen des articles.

Article 1er
Ouverture d’un congé spécifique pour les parents
lors de l’annonce d’une pathologie ou d’un cancer de leur enfant

Amendement AC22 de la rapporteure

La commission adopte l’amendement.

Amendements AC14 de Mme Michèle Victory et AC7 de M. François Ruffin (discussion commune)

Mme Michèle Victory. Le présent amendement propose de porter à quatre jours la durée du congé parental prévu, soit la durée du congé octroyé pour la conclusion d’un pacte civil de solidarité. Bien que les deux évènements ne soient pas comparables, il me semble qu’octroyer quatre jours pour permettre aux parents de faire face à une nouvelle qui va les marquer à vie n’est en rien excessif, bien au contraire.

M. François Ruffin. Je partage l’argumentation de ma collègue. Si l’on accorde quatre jours de congés lors d’un évènement heureux, on peut a fortiori accorder le même congé en cas d’évènement malheureux… C’est déjà peu pour s’organiser et faire face au commencement d’un long chemin de croix.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Deux jours, c’est peu, je vous l’accorde. Mais j’ai souhaité, par cette proposition de loi, étendre un droit existant, dans un premier temps. Je donnerai dès lors un avis de sagesse à l’amendement AC7, et un avis défavorable à l’amendement AC14 en raison d’un défaut rédactionnel.

M. Jean-Pierre Vigier. Certes, deux jours, c’est peu mais c’est une première étape. Adopter cet article permet déjà d’enclencher une démarche sur le sujet.

M. François Ruffin. Avec deux jours, vous ouvrez la porte et nous insisterons pour obtenir plus par la suite ! Je comprends qu’il s’agit plus d’un avis de prudence que de sagesse.

La commission rejette les amendements AC 14 et AC 7.

Amendement AC23 de la rapporteure

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC24 de la rapporteure

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 1er ainsi rédigé.

Article 2
Information de la communauté éducative

Amendement AC32 de la rapporteure

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. C’est un amendement de cohérence.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC5 de Mme Maud Petit

Mme Maud Petit. Il s’agit d’inscrire le projet d’accueil individualisé (PIA) dans la loi.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Je sais, par votre travail, l’importance que vous accordez à la situation des enfants, notamment malades. Je pense toutefois que votre amendement sera satisfait par un amendement de Mme Dubois, qui mentionne le PAI, et ainsi le fera entrer dans la loi. Pourquoi pas demander l’avis du ministre en séance, mais pour l’heure je demande un retrait de cet amendement.

L’amendement est retiré.

Amendement AC34 de la rapporteure

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Je ne suis pas revenue, après vos interventions diverses, sur le sujet de l’article 3. J’aurais pu, en effet, le supprimer. Il me paraissait cependant important de le laisser, en l’amendant, pour dire qu’il est important de réfléchir sur le sujet. Le présent amendement propose de généraliser la communication des PAI aux centres d’examen. Cela se fait déjà dans certains rectorats, notamment dans le Nord. La rectrice adresse un courrier au chef d’établissement, qui s’adresse aux familles pour obtenir le transfert du PAI de l’enfant qui passe le bac. Cette transmission du PAI me semble importante, pour les élèves qui ont des problèmes de santé sans pour autant bénéficier d’aménagements de scolarité.

Mme Cécile Rilhac. Votre amendement pose le problème du secret médical. Cependant, en tant que chef d’établissement et professeure d’EPS, je peux dire, par expérience, qu’il est indispensable de connaître les problèmes de santé des enfants qui ne bénéficient pas de projet personnalisé de scolarité (PPS) lorsqu’ils sont à l’extérieur. Je pense notamment aux élèves diabétiques ou asthmatiques. Il me semble cependant essentiel de recueillir, comme vous le prévoyez, l’accord de l’élève majeur et de la famille pour cette transmission.

M. Frédéric Reiss. Dans mon intervention initiale, je parlais d’une « rédaction utopique » pour l’article 3 de votre proposition de loi. Mais avec les précisions que vous apportez par amendement à l’article 2, avec le transfert du PAI au centre d’examen, avec l’accord des représentants légaux ou de l’élève s’il est majeur, cette critique n’a plus lieu d’être.

Mme Jacqueline Dubois. Je comprends l’intention de la rapporteure, mais il me semble essentiel d’avoir l’avis du ministre sur cette question ; notamment pour savoir comment il est possible de communiquer ce PAI dans le respect du secret médical. Ces conditions peuvent-elles être mentionnées dans le PAI lui-même ? Mais peut-être cela relève-t-il plutôt du niveau réglementaire ? Face à cette incertitude, nous serons défavorables à votre amendement si vous ne le retirez pas.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Il est important de préciser que le PAI comprend une partie qui ne sera lue qu’en cas d’urgence. Le secret médical sera donc respecté. Ce que vous proposez est intéressant, Mme Dubois. Mais lorsque les PAI sont établis, on est souvent loin de la période d’examen ; il n’est pas certain qu’en entrant en seconde, on soit en mesure de prévoir ces modalités dans la rédaction du PAI.

Mme Jacqueline Dubois. Une réunion des équipes est prévue l’année de l’examen de l’enfant bénéficiant d’un PAI, selon les termes de la circulaire du 10 février 2021 ; c’est à ce moment qu’il faudrait prévoir cela.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Je sais que nous reviendrons sur ce sujet en séance, mais je maintiens mon amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC31 de la rapporteure

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. C’est un amendement de cohérence.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC28 de la rapporteure

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Cet amendement vise à élargir le champ du titre V du livre III de la deuxième partie du code de l’éducation, pour ajouter aux enfants en situation de handicap les enfants malades.

Mme Jacqueline Dubois. Je souhaite rebondir sur cet amendement, ainsi que sur l’un de vos amendements ultérieurs. Votre formulation me semble trop vague, trop large.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Je vais le retirer, et y retravailler, sachant qu’il est indispensable de modifier l’intitulé du titre V, qui ne convient plus.

L’amendement est retiré.

Amendement AC21 de Mme Jacqueline Dubois

L’amendement est retiré.

Amendement AC15 de Mme Jacqueline Dubois, qui fait l’objet du sous-amendement AC25 de la rapporteure

Mme Jacqueline Dubois. L’objectif de cet amendement est de préciser que le consentement doit être celui des responsables légaux ou de l’élève s’il est majeur. La circulaire interministérielle du 10 février 2021, qui concerne le projet d’accueil individualisé pour raison de santé, explicite les questions de confort et de santé des enfants présentant un handicap invalidant (gestion des examens, informations, réunion avec les acteurs éducatifs, aménagements divers etc.). Compte tenu de la priorité du Gouvernement et de notre majorité de créer une école inclusive, de créer un continuum des temps de l’enfant, il est nécessaire de soutenir cette disposition ainsi réécrite.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Mon sous-amendement modifie votre texte pour éviter une répétition.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.

Amendement AC16 de Mme Jacqueline Dubois

Mme Jacqueline Dubois. L’objectif de cet amendement est d’apporter une précision sur l’objet de la réunion organisée après l’arrivée d’un enfant dans un établissement ou de l’annonce du diagnostic de la pathologie chronique. Il s’agit de préciser que la réunion porte uniquement sur les modalités de la mise en œuvre du projet d’accueil individualisé. Il s’agit de garantir le respect du secret médical et de rassurer les familles quant à la nature des échanges avec les parties prenantes de la réunion.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC26 de la rapporteure

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Dans le cadre de cet article 2, j’étais partie, de façon un peu restrictive peut-être, sur l’idée d’un enfant diagnostiqué en cours d’année scolaire, dont il faudrait organiser le retour à l’école. Une durée de 21 jours me semblait ainsi cohérente. Mais je n’avais pas intégré le cas d’un changement d’établissement, avec une rentrée scolaire au collège par exemple. Les établissements peuvent alors avoir plusieurs PAI à gérer en même temps, auquel cas le délai des 21 jours peut être un peu court. La problématique est la même lors de l’entrée au lycée. Mon amendement vise ainsi à faire de ces 21 jours un objectif souhaitable mais non contraignant.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC27 de la rapporteure

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Cet amendement vise à ajouter le mot « cancer » qui n’apparaissait pas dans la rédaction initiale de l’article 2.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC17 de Mme Jacqueline Dubois

Mme Jacqueline Dubois. Cet amendement propose d’associer, si nécessaire, à la réunion portant sur les modalités de la mise en œuvre du projet d’accueil individualisé, un représentant de la collectivité territoriale compétente. L’idée de cet amendement est de garantir un continuum d’accompagnement pour les enfants présentant une maladie chronique ou atteints de cancer sur les temps périscolaires : cantine, transport…

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC10 de Mme Michèle Victory

Mme Michèle Victory. Cet amendement vise à rendre systématique la présence d’un professionnel de santé à la réunion préparant l’arrivée de l’enfant dans l’établissement. La présence d’un professionnel de santé, par l’expertise qu’il apporte, semble en effet indispensable à la bonne organisation de l’arrivée de l’enfant au sein de l’établissement. Il nous semble qu’elle ne peut pas être simplement recommandée. En France aujourd’hui, il n’existe qu’un médecin scolaire pour 12 572 élèves et un infirmier pour 1 300 élèves. Le rôle de la médecine scolaire est crucial au sein d’un établissement scolaire, et il l’est d’autant plus quand cet établissement accueille un élève porteur d’une pathologie chronique. Il nous semble ainsi important d’affirmer dans la loi l’importance de la médecine scolaire, pour le sujet qui nous préoccupe aujourd’hui.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Je partage votre préoccupation. Mais je ne veux pas que l’absence de l’infirmière ou du médecin scolaire soit un obstacle à la tenue de cette réunion, précisément en raison de ce manque de professionnels. Je rappelle par ailleurs que le PAI est validé par un médecin scolaire. En outre, la réunion ne vise pas tant à parler de la maladie que de ses conséquences sur la scolarité.

M. le président Bruno Studer. C’est donc un avis défavorable de la rapporteure sur cet amendement qui nous invite à suivre avec attention les conclusions du Grenelle de l’éducation sur la médecine scolaire.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC13 de Mme Michèle Victory

Mme Michèle Victory. Nous voulons préciser que cette réunion est assimilée à du temps de travail pour les équipes, car nous savons qu’elles sont très sollicitées. Il faut que cela soit prévu dans les emplois du temps des enseignants.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Je partage votre préoccupation, mais il me semble que cela relève plutôt du niveau réglementaire. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC18 de Mme Jacqueline Dubois, qui fait l’objet d’un sous-amendement AC29 de la rapporteure

Mme Jacqueline Dubois. Cet amendement rappelle l’objet de la réunion avec les familles et l’équipe enseignante, laquelle trouve toute son utilité pour créer un cadre d’apprentissage le plus serein possible pour les élèves porteurs d’un cancer ou d’une maladie chronique. Les discussions porteront notamment sur les conséquences de la maladie sur la concentration, la fatigue, l’énervement, ou encore, le besoin de repos. Cet amendement est important car il délimite le partage des informations sur la maladie des élèves entre l’équipe pédagogique et les acteurs du monde de l’école. Le secret médical ne peut être partagé, sauf lorsque les responsables légaux en expriment la volonté ; ce sont les conséquences et non le diagnostic qui doivent être connues pour l’aménagement du cadre d’accueil positif.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Je propose des modifications afin d’être plus juridique dans les termes, et plus concis, de façon à ne pas déborder sur le domaine réglementaire.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sous-amendé.

En conséquence, l’amendement AC19 tombe.

La commission adopte l’article 2 ainsi modifié.

Après l’article 2

Amendement AC9 de Mme Sandrine Josso

Mme Sandrine Josso. Le retour d’un enfant à l’école après une hospitalisation au titre d’une pathologie chronique ou d’un cancer est souvent difficile. Il est souvent exposé à des questions de la part des autres élèves, qui ne savent pas toujours comment se comporter avec lui. Afin de favoriser la réintégration de l’enfant au sein du milieu scolaire, le présent amendement propose qu’un intervenant du monde associatif ou du secteur médical puisse organiser un échange au sein de la classe afin d’expliquer, de façon pédagogique, la situation aux autres enfants.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Il faut bien évidemment mettre tout en œuvre pour faciliter le retour d’un enfant à l’école, que ce soit pour lui ou pour les autres enfants. La réunion prévue à l’article 2 est justement destinée à donner aux enseignants les informations nécessaires afin qu’ils puissent ensuite expliquer la situation aux élèves de la classe. L’intervention d’un professionnel de santé ou d’un membre d’association est possible et se fait habituellement en binôme avec l’enseignant. En conséquence, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

Amendement AC12 de Mme Michèle Victory

Mme Michèle Victory. Cet amendement vise à prévoir la formation des enseignants et équipes pédagogiques aux pathologies chroniques chez l’enfant. Les différentes auditions menées ont souligné un véritablement manque sur ce sujet. Il s’agit d’un besoin réel, qui pourrait être traité par une sensibilisation en formation initiale puis par des modules plus spécifiques pendant la carrière, en fonction de la situation particulière des enseignants. Ce type de formation doit être clairement visé dans le code de l’éducation.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. De fait, comme le signalent les parents, les enseignants ne sont pas correctement formés sur ce sujet. Mais il s’agit d’une question complexe, difficile à traiter par le biais d’un amendement à cette proposition de loi. La formation initiale n’est pas nécessairement adaptée ; cela relèverait plutôt de la formation continue.

Quant à moi, j’ai simplement prévu la fourniture d’une documentation pour les enseignants concernés. Il me semble difficile d’aller au-delà dans le cadre de ce texte. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AC8 de M. François Ruffin

M. François Ruffin. Cet amendement propose une expérimentation qui consisterait à mettre en place un accompagnement scolaire en présentiel pour les enfants atteints de pathologie chronique ou de cancer, ne pouvant pas suivre une scolarité dans leur établissement scolaire ou dans l’établissement de santé. Des enseignants mis à disposition pourraient ainsi se rendre au domicile des jeunes pour les accompagner dans leurs études.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Vous soulevez un sujet important pour la poursuite d’étude et le maintien du lien des enfants malades avec l’école. Ce que vous proposez existe déjà avec les Services d’assistance pédagogique à domicile (Sapad). Ces dispositifs, gérés par les services académiques, sont parfois compliqués à mettre en œuvre et d’une efficacité variable selon les territoires mais ils existent et consistent le plus souvent à ce que des enseignants se déplacent au domicile de l’enfant. Mon avis est donc défavorable.

M. François Ruffin. Si la rapporteure estime que notre amendement est satisfait, je le retire.

M. le président Bruno Studer. Cela me rappelle des pratiques que j’ai exercées lorsque j’étais enseignant…

L’amendement est retiré.

Amendement AC1 de Mme Elsa Faucillon

Mme Karine Lebon. Il s’agit d’une demande de rapport visant à évaluer la manière dont les services de l’éducation nationale prennent en compte le nombre d’enfants à besoins spécifiques pour l’attribution des heures et des postes d’enseignement. Comme je l’ai dit dans mon intervention liminaire, 1 800 suppressions de postes sont prévues à la rentrée prochaine et nous considérons qu’une mission supplémentaire au cœur de l’école doit être accompagnée d’un renforcement des moyens humains.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. La question des effectifs est bien évidemment un critère important, et c’est souvent un élément mis en avant par les chefs d’établissement lorsqu’ils argumentent sur la carte scolaire pour éviter les fermetures. Mais je ne pense pas que le rapport soit un outil pertinent pour travailler sur le sujet. Avis défavorable même si je comprends l’importance de votre préoccupation.

La commission rejette l’amendement.

Article 3
Présence obligatoire d’un personnel de médecine scolaire
lors de la tenue d’un examen

Amendement AC20 de Mme Jacqueline Dubois

M. le président Bruno Studer. Il s’agit d’un amendement de rédaction globale qui fera tomber l’amendement de la rapporteure s’il est adopté.

Mme Jacqueline Dubois. Il est important de répondre aux besoins réels des enfants malades plutôt que de généraliser un système qui pourrait être difficile à mettre en œuvre et risquerait d’être mal réparti. Garantir la présence d’un médecin sur l’ensemble de la session d’examens est un dispositif compliqué qui pourrait même compromettre la validité de la tenue des examens. C’est pourquoi nous proposons de l’adapter à un besoin spécifique, qui pourrait être précisé dans le projet d’accueil individualisé. Celui-ci pourrait ainsi mentionner que la présence d’un professionnel de santé est souhaitable lors des examens.

Mme Béatrice Descamps, rapporteure. Mes propos précédents ont laissé entendre que je serais favorable à cet amendement car j’ai conscience que le dispositif prévu par l’article est difficilement applicable. Ce que vous proposez est déjà très intéressant pour l’accompagnement des élèves pendant leur temps d’examen. Avis favorable.

M. Frédéric Reiss. Personnellement, je préférais l’amendement AC34 de la rapporteure, rejeté à l’article 2.

M. le président Bruno Studer. Vous pourrez toujours vous rapprocher de Mme la rapporteure et de Mme Dubois d’ici la séance publique.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement AC33 de la rapporteure tombe et l’article 3 est ainsi rédigé.

Article 4
Gage financier

La commission adopte l’article sans modification.

Titre

La commission adopte l’amendement rédactionnel AC35 de la rapporteure puis le titre de la proposition de loi, modifié.

La commission adopte ensuite, à l’unanimité, l’ensemble de la proposition de loi, modifiée.

*

*     *

En conséquence, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 Texte adopté par la commission :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b3988_texte-adopte-commission#

 Texte comparatif :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion-cedu/l15b3988-compa_texte-comparatif.pdf

 


—  1  —

   annexe :
Liste des personnes auditionnées par la rapporteure

(par ordre chronologique)

  Table ronde des associations :

 Association Aides aux Jeunes Diabétiques (AJD)  Mme Caroline Choleau, directrice

 Epilepsie France 59-62 – Dr Simone Fortier, référente

 Eva pour la vie – M. Stéphane Vedrenne, président

  Table ronde des parents d’élèves :

 Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public (PEEP) – M. Laurent Zameczkowski, membre du conseil d’administration

 Association des parents d’élèves de l’enseignement libre (APEL nationale) – M. Christophe Abraham, secrétaire général adjoint et Mme Sabrina de Luca, membre du Bureau national

 Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques (FCPE) – Mme Christelle Carron, vice-présidente

 Union nationale des associations autonomes de parents d’élèves (UNAAPE) – M. Patrick Salaün, président

  Table ronde des syndicats d’enseignants :

 Syndicat national unitaire des instituteurs, des professeurs des écoles et PEGC (SNUipp-FSU)  Mmes Agnès Duguet et Véronique Osika, secrétaires nationales

 Syndicat des enseignants de l’Union nationale des syndicats autonomes (SE-UNSA) – Mme Audrey Lalanne, déléguée nationale et M. Nicolas Anoto, délégué national

 Syndicat national des enseignements du second degré  Fédération syndicale unitaire (SNES-FSU) – Mme Valérie Sipahimalani, membre

 Syndicat général de l’éducation nationale-Confédération française démocratique du travail (SGEN-CFDT)  M. Dominique Bruneau, secrétaire fédéral

  Table ronde des syndicats des directeurs d’école, chefs d’établissements et recteurs :

 Syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale (SNPDEN-UNSA)  Mme Lydia Advenier, membre de l’exécutif syndical national

 Indépendance & Direction (Syndicat indépendant des personnels de direction de l’Éducation Nationale) (IDFO) – M. Julien Giovacchini, délégué syndical

  Table ronde des représentants de la médecine scolaire :

 Syndicat national des médecins scolaires et universitaires (SNMSU–UNSA Éducation) – Dr Marianne Barré, secrétaire générale du SNMSU

 Syndicat national autonome des médecins de l’Éducation nationale (SNAMSPEN/SGEN-CFDT)  Dr Patricia Colson, secrétaire générale, et Dr Dominique Aguir, membre du bureau national

 La société française des médecins de l’Éducation nationale (SOFMEN) – Dr Frédérique Denat, présidente, et Dr Frédérique Nouri, vice-présidente

  Ministère de l’Éducation nationale, Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO)  M. Didier Lacroix, chef du service de l’accompagnement des politiques éducatives, M. Benoit Rogeon, ‎chef de bureau de la santé et de l’action sociale et Mme Brigitte Moltrecht, médecin de l’éducation nationale, conseillère technique auprès de la DGESCO

  Ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion – Direction générale du travail (DGT)  Mme Émilie Saussine, cheffe du bureau des relations individuelles du travail et M. Bruno Campagne, son adjoint

 

La rapporteure a également reçu une contribution écrite de la
Direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP).

 

 

 

 

 


([1]) https://videos.assemblee-nationale.fr/video.10505722_6051bcabde40e.commission-des-affaires-culturelles--accompagnement-des-enfants-porteurs-de-pathologie-chronique-ou-17-mars-2021