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N° 1084

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 avril 2023.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi portant abrogation de l’obligation vaccinale contre la covid19
dans les secteurs médicaux, paramédicaux et d’aide à la personne
et visant à la réintégration des professionnels et étudiants suspendus

 

 

 

Par M. Jean-Victor CASTOR,

 

 

Député.

 

——

 

 

 

 

 

Voir le numéro : 991.


 


—  1  —

SOMMAIRE

___

Pages

Introduction

I. La suspension des professionnels mise en œuvre dans la lutte contre la covid19 est une mesure lourde de conséquences et mal appliquée

A. La mise en œuvre de l’obligation vaccinale contre la covid19

B. Des suspensions lourdes de conséquences pour les personnes concernées

C. Une mesure pénalisante pour notre système de soins

D. Une mesure mal appliquée

II. Alors que l’obligation vaccinale n’est scientifiquement plus justifiée, il est nécessaire de réintégrer les personnels suspendus

A. La Haute Autorité de santé préconise la levée de l’obligation vaccinale

B. La nécessaire réintégration des personnels suspendus

Commentaire des articles

Article 1er Abroger l’obligation vaccinale contre la covid19 prévue par la loi n° 20211040 du 5 août 2021

Article 2 Garantir aux agents publics réintégrés la conservation des droits à l’avancement dont ils disposaient au moment de leur suspension

Article 3 Gage financier

Examen en commission

ANNEXE  1 : Liste des personnes auditionnÉes par le rapporteur

annexe n° 2 : textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen de la Proposition de loi

 


—  1  —

Introduction

I.   La suspension des professionnels mise en œuvre dans la lutte contre la covid‑19 est une mesure lourde de conséquences et mal appliquée

La suspension pour non-respect de l’obligation vaccinale contre la covid‑19 est porteuse de lourdes conséquences, tant pour les personnes concernées que pour notre société.

A.   La mise en œuvre de l’obligation vaccinale contre la covid‑19

● La loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire a édicté une obligation vaccinale contre la covid‑19 pour les personnes travaillant dans les secteurs sanitaire, médico-social et de secours ([1]). Les personnes concernées par cette obligation professionnelle, définies selon une double approche fondée sur le lieu d’exercice de l’activité professionnelle et sur la nature de l’activité exercée, sont mentionnées au I de l’article 12 de la loi. Il s’agit notamment ([2]) :

– des professionnels des établissements ou services de santé et médico‑sociaux (médecins, infirmiers, laborantins, etc.) ;

– des professionnels de santé et à usage de titre, des personnes travaillant avec eux et des étudiants de ces professions (médecins et infirmiers libéraux, pharmaciens, ostéopathes, etc.) ;

– des personnels de la sécurité civile tels les sapeurs-pompiers ;

– des salariés à domicile auprès de personnes vulnérables ;

– des personnels de transport sanitaire et médical et des fournisseurs de certains matériels médicaux.

Des exceptions sont prévues concernant les personnes justifiant d’une contre‑indication médicale à la vaccination, celles qui n’interviennent que de façon ponctuelle dans les locaux où exercent des professionnels de santé et médico‑sociaux ainsi que, depuis la loi du 10 novembre 2021 ([3]), les personnels non médicaux des crèches et des autres établissements d’accueil du jeune enfant, de soutien à la parentalité et de protection de l’enfance.

● L’obligation vaccinale contre la covid‑19 a été mise en œuvre en plusieurs étapes.

À compter du lendemain de la publication de la loi du 5 août 2021 précitée et jusqu’au 14 septembre 2021 inclus, la satisfaction de l’obligation vaccinale pouvait être justifiée par la présentation :

– d’un certificat de statut vaccinal, d’un certificat de rétablissement à la suite d’une contamination ou d’un certificat médical de contre-indication à la vaccination ;

– du justificatif de l’administration des doses de vaccin ;

– d’un test de dépistage virologique négatif.

À compter du 15 septembre 2021, la présentation d’un test de dépistage virologique négatif était exclue du champ des justificatifs admis. La satisfaction de l’obligation vaccinale ne pouvait alors plus être justifiée que par la présentation des certificats précédemment mentionnés et, à défaut, du justificatif d’administration des doses vaccinales ([4]).

À compter du 30 janvier 2022, une dose de rappel était intégrée dans l’obligation vaccinale pour tous les professionnels soumis à l’obligation vaccinale. Depuis cette date, les personnels soumis à l’obligation vaccinale doivent :

– soit avoir suivi un schéma vaccinal complet intégrant la dose de rappel qui, depuis le 15 février 2022, est effectuée quatre mois maximum après le schéma de vaccination initial ;

– soit présenter un certificat de rétablissement valide (de plus de onze jours et de moins de quatre mois après l’infection à la covid‑19) ;

– soit présenter un certificat de contre-indication à la vaccination établi par un médecin.

B.   Des suspensions lourdes de conséquences pour les personnes concernées

● À l’échelle individuelle le manquement à cette obligation entraîne, comme le dispose l’article 14 de la loi précitée du 5 août 2021, une interdiction d’exercer l’activité professionnelle. Le non-respect de cette interdiction est passible d’une sanction pénale, en l’occurrence lamende prévue pour les contraventions de la cinquième classe ([5]). En conséquence, depuis le 15 septembre 2021, les professionnels concernés par l’obligation vaccinale sont, selon la loi, suspendus de leurs fonctions dès lors qu’ils ne respectent pas les conditions précitées.

Bien plus, si l’obligation vaccinale contre la covid‑19 se rapproche, dans son économie générale, d’autres vaccinations obligatoires ([6]), elle se singularise par son application étant donné que le professionnel concerné est déjà en poste.

● Dès lors, cette suspension est fortement pénalisante pour les personnes auxquelles elle s’applique.

Aux termes du deuxième alinéa du III de l’article 14 de la loi du 5 août 2021, la période de suspension « ne peut être assimilée à une période de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés ainsi que pour les droits acquis par l’agent public au titre de son ancienneté ». En cela, la suspension pour manquement à l’obligation vaccinale contre la covid‑19 est plus lourde de conséquences qu’une suspension de fonctions en cas de faute grave dans la fonction publique, laquelle est sans effet sur les droits à avancement d’échelon et de grade. Si la personne est titulaire d’un contrat à durée déterminée (CDD) et que le terme de ce dernier intervient pendant qu’elle est suspendue, le contrat prend fin. La suspension n’est compensée par aucune indemnisation, contrairement aux périodes de confinement qui ont vu la généralisation de l’accès au chômage partiel ([7]).

Dans ce contexte, l’avocat en droit social Kévin Charrier, auditionné par le rapporteur, met en lumière la « prison contractuelle » dans laquelle les personnels suspendus ont été enfermés. Sans perspective quant à leur réintégration et sans toutefois avoir été licenciés par leur employeur, ils se sont en effet trouvés dépourvus de ressources sans pouvoir prétendre à l’assurance chômage pour engager une reconversion.

En l’absence de réorientation, les personnes suspendues sont donc, dans les faits, sans revenu et dans l’incapacité d’exercer un métier qu’elles avaient pourtant choisi le plus souvent par vocation, depuis désormais près de dix-huit mois. Par ailleurs mises au ban et souvent rejetées, elles sont exposées aux risques de la misère humaine, économique et sociale. À cet égard, le rapporteur fait état des nombreux cas de grande pauvreté, d’isolement ou encore de recrudescence des violences intrafamiliales dont on lui a fait part.

● Les auditions du rapporteur révèlent en outre que la mise en œuvre de cette suspension a souvent été marquée par sa brutalité et son caractère largement dérogatoire au cadre habituellement prévu. S’apparentant à une mesure d’ordre public prise sur un fondement sanitaire, la suspension pour manquement à l’obligation vaccinale contre la covid‑19 ne présente aucune des garanties prévues en droit de la fonction publique ou en droit du travail.

Cette suspension intervient ainsi sans délai et sans limite de durée. L’employeur peut la notifier par tout moyen, en l’absence de passage devant un conseil disciplinaire ou de toute autre procédure contradictoire. Elle est gouvernée par un cadre juridique flou mis en place dans l’urgence et difficile à appréhender, y compris pour les employeurs.

En pratique, la mise en œuvre de cette mesure s’est traduite par des mises à l’écart brutales, parfois notifiées par simple voie orale et exécutées par une expulsion physique du lieu de travail au moyen des services de sécurité.

C.   Une mesure pénalisante pour notre système de soins

En plus de produire de lourdes conséquences à l’échelle individuelle, les suspensions résultant de la loi du 5 août 2021 affectent un système de soins déjà très fragile.

● Si les données relatives au nombre de personnes suspendues restent rares et incertaines, plusieurs milliers de nos concitoyens sont dans cette situation. Il en résulte une dégradation du service public. Le ministre de la santé et de la prévention indiquait, en juillet 2022, que 12 000 personnes étaient concernées dans le secteur sanitaire, toutes professions confondues, y compris les personnels techniques et administratifs ([8]). Lors de l’entrée en vigueur de l’obligation vaccinale, en octobre 2021, la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, rattachée au ministère de l’intérieur, faisait état de la suspension de 140 à 200 pompiers professionnels sur près de 42 000 personnels (0,3 %), ainsi que de 5 140 pompiers volontaires sur un effectif de 240 000 personnes (2,1 %).

● Dans un contexte de pénurie de ressources humaines, ces effectifs sont significatifs et leur absence accentue la difficile situation que connaissent nos établissements de santé et nos services de secours, alors que les personnels sont excessivement sollicités et insuffisamment nombreux. Des services entiers doivent parfois fermer faute de soignants. En septembre 2022, l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) recensait 18 % de lits fermés et un manque de 1 000 infirmiers, alors que les taux de fermeture des blocs opératoires se situaient entre 15 % et 20 % et pouvaient atteindre 50 % sur certains sites ([9]). Les personnels restants subissent un accroissement de leur charge de travail et une dégradation de leurs conditions d’exercice, pouvant conduire à une fréquence accrue d’accidents de travail.

● Outre‑mer, où la pénurie de professionnels était déjà chronique, les suspensions intervenues dans les secteurs sanitaire, social et médico-social entraînent une profonde désorganisation des services. Surtout, elles causent une rupture dans la prise en charge des patients alors que la brutalité de ces suspensions s’est souvent traduite par l’absence de transmission des dossiers de suivi.

En ce sens, l’obligation vaccinale résultant de la loi du 5 août 2021 agit comme un catalyseur dans les territoires déjà marqués par des situations sanitaires et sociales précaires. Les suspensions de personnels démultiplient les difficultés et exposent les patients à des risques accrus alors que la Guadeloupe, par exemple, est le second département le plus touché par les maladies cardiovasculaires ([10]), tandis que la mortalité infantile en Guyane est trois fois supérieure à la moyenne nationale ([11]).

 Bien plus, l’obligation vaccinale produira des effets néfastes sur le long terme : elle freine les vocations et elle a conduit à l’interruption du cursus de formation de nombreux étudiants. La France se prive de cette façon de professionnels en devenir, dont la formation prend plusieurs années, dans des secteurs déjà mal pourvus en ressources humaines.

D.   Une mesure mal appliquée

L’obligation vaccinale prévue par la loi du 5 août 2021 a des conséquences d’autant plus regrettables qu’elle connaît des incohérences manifestes dans son application.

 Ces incohérences portent d’abord sur le plan sanitaire et épidémiologique. Alors que des milliers de personnels étaient suspendus, le Gouvernement mettait en œuvre à l’été 2022, face à la pénurie de pompiers français, le mécanisme européen de protection civile pour faire appel au renfort de pompiers de quatre pays européens ([12]). Ces derniers n’étaient pourtant pas tous soumis à une obligation vaccinale, à l’image des pompiers allemands et autrichiens, qui n’y sont pas assujettis.

● Les auditions conduites par le rapporteur montrent en outre que la suspension pour manquement à l’obligation vaccinale n’a pas été mise en œuvre de manière uniforme sur le territoire national.

Dans une enquête publiée en avril 2022, Santé publique France relevait des disparités de couverture vaccinale en fonction des catégories de professionnels et des régions ([13]). Le taux de couverture vaccinale était ainsi, dans les établissements de santé (88,9 %), inférieur de plus de quatre points à celui observé dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad ; 93,8 %).

Le rapporteur constate que, d’une manière générale, l’obligation vaccinale a peu été mise en œuvre dans les territoires ultramarins, notamment pour prévenir l’affaiblissement d’une situation sanitaire déjà structurellement dégradée. Lors de son audition, la directrice d’établissements Guylène Mergerie a mis en lumière l’existence d’un système « à plusieurs vitesses » en Guyane, notamment en fonction du mode d’exercice des professionnels de santé. Pour les professionnels en exercice dit « libéral », elle observe une gestion nominative entraînant l’arrêt des financements des personnels non vaccinés, tandis que leurs homologues exerçant dans les établissements privés ont pu bénéficier d’une forme de tolérance et parfois rester en poste en raison de la nécessité de soutenir des établissements publics en grande difficulté.

La mise en œuvre de la suspension, malgré les risques pénaux, s’est par ailleurs révélée dépendante de la politique appliquée par les services des ressources humaines de chaque établissement. Le politiste et sociologue Frédéric Pierru, chargé de recherche au CNRS, révèle que des « centaines de soignants ne sont pas à jour dans un centre hospitalier universitaire de l’est de la France, dans lequel nous avons mené des entretiens, tandis qu’on peut se faire suspendre dans une structure psychiatrique voisine pour ne pas avoir pris la seconde dose » ([14]).

II.   Alors que l’obligation vaccinale n’est scientifiquement plus justifiée, il est nécessaire de réintégrer les personnels suspendus

La Haute Autorité de santé (HAS) a publié le 30 mars 2023 des recommandations favorables à la levée de l’obligation vaccinale contre la covid‑19 ([15]). Dès lors que les suspensions ne sont plus justifiées scientifiquement, il apparaît urgent de réintégrer les personnels concernés.

A.   La Haute Autorité de santé préconise la levée de l’obligation vaccinale

● Dans ses recommandations vaccinales rendues suite aux saisines de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale puis de la direction générale de la santé, la Haute Autorité de santé prend acte de l’évolution du contexte sanitaire et épidémique et préconise de lever l’obligation de vaccination contre la covid‑19. Elle appelle au respect des recommandations du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) sur les gestes barrières en milieu de soins. Elle recommande fortement la vaccination, y compris les rappels à distance de la primovaccination, pour les étudiants et professionnels des secteurs sanitaire et médico-social et les étudiants et professionnels des services de secours et d’incendie, en particulier pour les professions en contact régulier avec des personnes immunodéprimées ou vulnérables.

Pour établir ses recommandations, portant également sur la vaccination contre la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et l’hépatite B ([16]), la HAS a pris en considération les éléments suivants :

– les critères de mise en œuvre d’une obligation vaccinale, initialement proposés par le HCSP en 2016 ([17]) et repris par la HAS dans sa note de cadrage de janvier 2023, qui indiquent que toute décision de rendre ou de maintenir obligatoire une vaccination pour des professionnels de santé ne doit s’appliquer qu’à la prévention d’une maladie grave, et avec un risque élevé d’exposition pour le professionnel, et un risque de transmission à la personne prise en charge, et pour laquelle existe un vaccin efficace et dont la balance bénéfices/risques est largement favorable ;

– les mesures de prévention des infections associées aux soins en France ;

– les recommandations et obligations vaccinales à l’étranger.

Ces recommandations ont été rendues sur la base d’éléments purement médicaux et scientifiques, comme l’a souligné la présidente du collège de la Haute Autorité de santé Dominique Le Guludec lors de son audition par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, le 4 avril 2023 ([18]).

● En recommandant la levée de l’obligation vaccinale concernant la covid‑19, la HAS évolue notablement par rapport au précédent avis qu’elle avait rendu, le 21 juillet 2022 ([19]). Ce nouveau document souligne l’évolution favorable du contexte sanitaire, compte tenu notamment de la diminution de la pression épidémiologique, de la moindre virulence du variant actuel ainsi que de l’immunité collective acquise en raison de la couverture vaccinale et des infections.

Il indique que « l’ampleur des vagues épidémiques suivantes semble s’atténuer au fur et à mesure du temps avec des taux d’incidence pour 100 000 habitants observés à 1 466 au 31 mars, 1 348 le 10 juillet, 586 le 12 octobre et 645 le 10 décembre 2022 ». Il souligne que « les indicateurs sanitaires (hospitalisations, réanimation et décès) suivent la même tendance ».

Il relève également la moindre efficacité de la vaccination contre la covid‑19 qui, « en primovaccination et/ou en rappel, diminue dans les mois qui suivent l’administration ». Cette baisse de protection « varie selon l’âge (baisse de protection plus précoce chez les personnes de 80 ans et plus), les variants en circulation et selon le critère de jugement considéré (baisse de protection contre les infections plus précoce que contre les formes graves) ».

La Haute Autorité de santé note également que :

– la protection contre l’infection et/ou les formes symptomatiques diminue significativement au bout de quelques semaines selon l’apparition de variants échappant à la protection immunitaire, quel que soit l’âge des personnes ;

– la protection contre les formes graves se maintient à un niveau élevé en période Omicron (plus de 70 %) pendant au moins trois mois et diminue de façon très progressive ensuite.

Enfin, elle montre la très faible couverture vaccinale chez les professionnels de santé en ce qui concerne le rappel adapté au variant Omicron, estimée au 22 mars 2023 à 13,6 % chez ceux exerçant en Ehpad, 14,5 % parmi les libéraux, et 15 % pour ceux exerçant en établissement de santé. À cet égard, outre l’incohérence consistant à maintenir la suspension vaccinale au regard de ces taux, le rapporteur souligne la confusion qui persiste dans le nombre de doses requises pour satisfaire à l’obligation vaccinale. En effet, une forte distorsion apparaît aujourd’hui entre le schéma vaccinal complet dit « obligatoire », constitué d’une double dose de primo-vaccination et d’une dose de rappel, largement respecté chez les professionnels soumis à l’obligation vaccinale, et le schéma vaccinal dit « recommandé », constitué à ce jour de cinq ou six doses et très peu répandu, alors que lui-seul est censé garantir un bon niveau de protection sanitaire.

B.   La nécessaire réintégration des personnels suspendus

Dès lors que l’obligation vaccinale n’est plus scientifiquement justifiée, la réintégration des professionnels suspendus se présente comme une question politique, dont le législateur doit se saisir. Alors que l’urgence sanitaire liée à la covid‑19 s’est manifestement dissipée, et au regard de tous les éléments précités, la Représentation nationale est appelée à faire preuve de pragmatisme et, au service de l’intérêt général, à abroger le dispositif d’obligation vaccinale.

● Si la réintégration des personnels suspendus ne permettra pas de régler les problèmes structurels de recrutement que connaissent de nombreux secteurs, le retour des milliers de personnes concernées est crucial alors que nos systèmes de santé et de secours sont marqués par des pénuries. Dans une enquête conduite en avril et mai 2022 sur la situation des ressources humaines dans les établissements qu’elle représente ([20]), la Fédération hospitalière de France (FHF) observait que la « quasi-totalité (99 %) » des Ehpad publics connaît des difficultés de recrutement, de manière permanente ou ponctuelle. Ces difficultés concernent particulièrement les infirmiers en soins généraux, les établissements de santé hors centres hospitaliers universitaires (CHU) et les services de nuit.

De toute évidence, nous ne pouvons plus faire l’économie de professionnels dévoués, compétents et immédiatement mobilisables, dont la réintégration est préconisée par les autorités scientifiques.

● Le législateur gagnerait non seulement à réintégrer les personnels suspendus, mais aussi à faire preuve d’humanité et à réhabiliter ces personnes qui, à tort, ont été fortement stigmatisées.

Durant son audition précitée, le chercheur Frédéric Pierru, qui conduit une étude au long cours basée à ce jour sur plus de 80 entretiens et 300 témoignages écrits, a déclaré que « parler d’antivax à propos de ces personnes n’a strictement aucun sens ». Il observe que la décision de refuser la vaccination était dans l’immense majorité des cas guidée non par le complotisme, mais par la peur. Cette décision intervenait d’ailleurs souvent dans un contexte d’anxiété préexistante ([21]). Elle a généralement été prise, avec l’accord du conjoint, par des personnes qui font vacciner leurs enfants. La présidente du collectif Blouses blanches qui rassemble des personnels suspendus, Sonia Hamdouchy, a elle-même déclaré pendant son audition : « nous ne sommes pas complotistes, nous sommes juste des personnes altruistes qui avons peur ».

Acculées et dénigrées, y compris parfois par les pouvoirs publics, ces personnes ont ressenti leur suspension comme une injustice flagrante, renforcée par l’observation d’une inégale application de la mesure sur le territoire national, et alors même qu’elles étaient précisément celles qui avaient pris tous les risques pour soutenir le système de soins au début de la crise sanitaire.

● La France se singularise d’ailleurs par la persistance de la suspension des personnels non vaccinés, dont la réintégration fait l’objet d’une orientation partagée à travers le monde. Si certains pays ont mis en place, à différentes périodes et pour différentes catégories de professionnels, des obligations de vaccination contre la covid‑19, la plupart de ces obligations ont été levées depuis. La France est aujourd’hui, avec la Hongrie, l’un des derniers pays européens à ne pas avoir abrogé l’obligation vaccinale contre la covid‑19.

● Une majorité politique se dégage aujourd’hui en faveur de la réintégration des personnels suspendus. Plusieurs candidats à la dernière élection présidentielle s’étaient prononcés en ce sens, le Président de la République lui-même annonçant, le 29 avril 2022, que les soignants non vaccinés seraient réintégrés une fois terminée « la phase aiguë » de l’épidémie.

La France est l’un des derniers pays à ne pas avoir réintégré les personnels suspendus pour non-respect de l’obligation vaccinale

L’obligation vaccinale n’a pas été, dans de nombreux pays, la voie privilégiée dans la lutte contre l’épidémie de covid‑19. Elle n’a jamais été envisagée en Espagne, en Finlande, au Luxembourg, en Norvège, au Portugal, en Suède ni en Suisse, tandis que les dispositifs législatifs instaurant l’obligation vaccinale du personnel soignant contre la covid‑19 n’ont jamais été appliqués au Royaume-Uni et en Belgique ([22]).

Si, au cours de l’année 2021, plusieurs pays européens ont, comme la France, choisi d’instaurer une telle obligation, la plupart de ces pays l’ont désormais levée. L’Italie, qui était le premier pays européen à décider la suspension pour non-respect de l’obligation vaccinale, a levé cette obligation le 31 octobre 2022. En Autriche, l’obligation vaccinale est levée depuis le 16 décembre 2022 tandis qu’en Allemagne, l’obligation vaccinale votée jusqu’en décembre 2022 n’a pas été reconduite. En Grèce, une décision du Conseil d’État, allant à l’encontre de la décision formulée par le ministre de la Santé, a permis à 2 100 professionnels d’exercer à nouveau dès janvier 2023. Dans le reste du monde, l’obligation vaccinale a été levée dans la plupart des pays (Australie, Canada, États-Unis, Nouvelle-Zélande) entre juin et décembre 2022.

Les parlementaires, aussi bien à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, se sont largement saisis de la question de l’obligation vaccinale, tant à travers des initiatives législatives visant la réintégration des personnels concernés qu’au moyen de leurs prérogatives de contrôle. À l’Assemblée nationale, l’examen le 24 novembre 2022 en séance publique d’une précédente proposition de loi, rapportée par la vice-présidente Caroline Fiat, a montré que nombreux sont les députés favorables à la réintégration ([23]).

Il est désormais temps d’engager le « travail de réintégration » annoncé par le Président de la République dans un entretien publié le 7 juin 2022 ([24]).


—  1  —

   Commentaire des articles

Article 1er
Abroger l’obligation vaccinale contre la covid19 prévue par la loi n° 20211040 du 5 août 2021

Supprimé par la commission

L’article 1er abroge l’obligation vaccinale prévue par la loi du 5 août 2021, permettant aux professionnels et étudiants suspendus pour manquement à cette obligation de reprendre leur activité.

I.   Le droit en vigueur

● Le dispositif prévu au IV de l’article 12 de la loi précitée du 5 août 2021 prévoit que la suspension de l’obligation vaccinale contre la covid‑19 intervient au moyen d’un décret. Elle peut ne concerner qu’une partie des catégories de personnes y étant soumises.

● Un avis de la Haute Autorité de santé (HAS) est toutefois prévu préalablement à ce décret, celle-ci se prononçant à partir de « l’évolution de la situation épidémiologique et des connaissances médicales et scientifiques ».

Afin d’évaluer ces éléments, la HAS peut être saisie par :

– le ministre chargé de la santé ;

– le Comité de contrôle et de liaison covid‑19 (CCL-COVID) ([25]) ;

– la commission permanente chargée des affaires sociales de l’Assemblée nationale ou du Sénat. Sur ce fondement, la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a saisi la HAS, le 6 octobre 2022, au sujet de l’obligation vaccinale dont font l’objet les sapeurs-pompiers professionnels et bénévoles.

● La loi du 5 août 2021 disposait initialement que l’avis de la HAS était consultatif, la levée de l’obligation vaccinale demeurant à la discrétion du Gouvernement.

Le législateur, par la loi du 30 juillet 2022 ([26]), a modifié le IV de l’article 12 de la loi précitée pour rendre cet avis contraignant. Depuis lors, si la HAS constate que l’obligation vaccinale n’est plus justifiée au regard de la situation sanitaire, le Gouvernement est tenu de la suspendre par décret.

Le Gouvernement se trouve donc aujourd’hui lié par les recommandations vaccinales publiées par la HAS le 30 mars 2023. Le ministre de la santé François Braun a indiqué que le Gouvernement suivrait « rapidement » l’avis de la HAS en concertant « les fédérations hospitalières et les ordres des professions de santé pour définir les modalités de mise en œuvre » avant l’entrée en vigueur de cette décision.

Dans un communiqué publié le 30 mars 2023, la Fédération hospitalière de France (FHF) a réagi à la publication des recommandations de la HAS et aux annonces du ministre, dont elle a déclaré prendre acte ([27]). Elle a annoncé échanger prochainement avec le Gouvernement afin de préparer les prochaines étapes de la réintégration des soignants non-vaccinés à l’hôpital public.

II.   Le dispositif proposé

● L’article 1er de la présente proposition de loi abroge le chapitre II de la loi précitée, c’est-à-dire ses articles 12 à 19 relatifs à l’obligation vaccinale contre la covid‑19.

À la lumière des avis scientifiques, des retours d’expérience et de la situation sanitaire et sociale, il ouvre la voie à une réintégration des personnels suspendus. Ce faisant, il marque la fin d’un dispositif dérogatoire, exceptionnel, aux conséquences lourdes, mis en œuvre durant une période d’urgence à présent révolue. Il renoue avec une logique visant à convaincre plutôt qu’à contraindre.

Le dispositif proposé se distingue en cela d’une réintégration par décret, qui n’abrogerait pas le dispositif législatif en vigueur.

● En abrogeant l’obligation vaccinale contre la covid‑19 prévue par le législateur, cet article sécurise la réintégration des personnels suspendus pour manquement à cette obligation.

À court terme, il prive le Gouvernement de toute latitude concernant le contenu du décret précité et les modalités de réintégration des soignants, garantissant la bonne application de la volonté exprimée par le législateur dans la loi du 30 juillet 2022. Il envoie un message clair aux personnels concernés en contribuant à l’apaisement des relations.

À plus long terme, il dissipe toute crainte d’une seconde suspension brutale, qui pourrait résulter d’un nouvel avis de la HAS entraînant un nouveau décret. Il apaise de ce fait les personnels concernés en leur garantissant un retour durable et serein. Il sécurise également les employeurs en leur offrant la certitude de ne pas avoir à procéder à une réintégration de courte durée, ni à organiser de nouvelles suspensions dans l’urgence.

À cet égard, le rapporteur souligne qu’une telle abrogation ne prive en rien le législateur de sa capacité à gérer la situation sanitaire en cas de regain épidémique. Dans l’hypothèse d’une nouvelle crise, le législateur sera de nouveau mobilisé et en mesure de mettre en place les mesures qu’il juge les plus adaptées.

● Le rapporteur entend les inquiétudes quant à la réintégration pratique de personnels suspendus depuis près de dix-huit mois, et souligne la nécessité de garantir un retour dans les meilleures conditions. Dans cette perspective, il appelle le Gouvernement à déployer la campagne de communication et les directives les plus adaptées à ce retour.

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*     *

Article 2
Garantir aux agents publics réintégrés la conservation des droits à l’avancement dont ils disposaient au moment de leur suspension

Rejeté par la commission

L’article 2 dispose que les agents publics réintégrés conservent les droits à l’avancement dont ils disposaient au moment de leur suspension.

I.   Le droit en vigueur

L’article 14 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire dispose qu’un agent public ne peut plus exercer son activité dès lors qu’il manque à l’obligation vaccinale contre la covid‑19. La deuxième phrase du deuxième alinéa du III de cet article 14 précise que la période de suspension « ne peut être assimilée à une période de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés ainsi que pour les droits acquis par l’agent public au titre de son ancienneté ».

En conséquence, comme l’a rappelé le sociologue Frédéric Pierru durant son audition, les agents publics suspendus n’auront, à leur réintégration, acquis aucun droit à l’avancement durant leur période de suspension.

II.   Le dispositif proposé

L’article 2 de la présente proposition de loi préserve autant que possible la progression de carrière des personnels réintégrés. Pour ce faire, il dispose que les agents publics conservent le droit à l’avancement qu’ils possédaient avant la suspension de leur contrat de travail en application de l’article 14 de la loi du 5 août 2021.

Le droit à l’avancement constitue en effet l’une des garanties prévues en droit de la fonction publique, qu’il appartient au législateur de préserver. À cet égard, l’article L. 522-1 du code général de la fonction publique énonce, dans le cas de la fonction publique territoriale, que « l’avancement des fonctionnaires comprend l’avancement d’échelon et l’avancement de grade ». L’article L. 522-2 du même code ajoute que l’avancement d’échelon est accordé de plein droit en fonction de l’ancienneté et se traduit par une augmentation de traitement, tandis que l’article L. 522-4 spécifie que l’avancement de grade a lieu de façon continue d’un grade au grade immédiatement supérieur.

Les droits à l’avancement d’échelon et à l’avancement de grade seront ainsi maintenus tels qu’ils l’étaient avant la suspension du contrat de travail, afin de ne pas pénaliser davantage ces agents publics. Si cette mesure est en réalité déjà satisfaite par le cadre législatif en vigueur, une telle mention explicite la volonté du législateur auprès des personnels réintégrés, de façon à encourager les retours dans les meilleures conditions.

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Article 3
Gage financier

Rejeté par la commission

Cet article prévoit de gager la charge pour l’État, les organismes de sécurité sociale et les collectivités territoriales, liée à l’application de la proposition de loi, par une majoration de l’accise sur les tabacs.

La présente proposition de loi, qui prévoit la réintégration des personnels suspendus pour manquement à l’obligation vaccinale contre la covid‑19 en spécifiant que les agents publics réintégrés conservent les droits à l’avancement dont ils disposaient au moment de leur suspension, est de nature à accroître les charges supportées par l’État, les organismes de sécurité sociale et les collectivités territoriales.

Le présent article prévoit de compenser ces charges, à due concurrence, par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

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   Examen en commission

Au cours de sa réunion du mercredi 12 avril 2023, la commission a examiné la proposition de loi portant abrogation de l’obligation vaccinale contre la covid19 dans les secteurs médicaux, paramédicaux et d’aide à la personne et visant à la réintégration des professionnels et étudiants suspendus (n° 991) (M. Jean-Victor Castor, rapporteur) ([28]).

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous examinons ce matin la proposition de loi portant abrogation de l’obligation vaccinale contre la covid19 dans les secteurs médicaux, paramédicaux et d’aide à la personne, et visant à la réintégration des professionnels et étudiants suspendus. Le groupe Gauche démocrate et républicaine - NUPES a demandé l’inscription de ce texte à l’ordre du jour des séances qui lui sont réservées le jeudi 4 mai prochain.

M. Jean-Victor Castor, rapporteur. Ce texte porte sur un sujet qui, à sa simple évocation, soulève les réactions les plus extrêmes. Comment pourrait-il en être autrement ? La question de la réintégration des personnels suspendus par la loi votée en urgence le 5 août 2021 est éminemment sensible, parce qu’elle est une des conséquences de la pandémie, laquelle nous a tous profondément et durablement bouleversés, séparés, clivés.

Aujourd’hui, il est de notre responsabilité de législateurs de favoriser l’apaisement et de lever les incompréhensions. Ce n’est pas la première proposition de loi déposée en ce sens, mais il n’a échappé à personne que le contexte a changé. D’abord, nous connaissons depuis plusieurs mois, fort heureusement, une diminution de l’épidémie ; les variants sont de moins en moins virulents. Ensuite, le recul et l’observation scientifique des vaccins tendent à démontrer un affaiblissement de leur efficacité dans le temps. Enfin, la Haute Autorité de santé (HAS) a recommandé le 30 mars dernier la levée de l’obligation vaccinale contre la covid19. Le Gouvernement a indiqué qu’il suivrait rapidement cet avis et prendrait un décret pour réintégrer les soignants.

Toutefois, le maintien de cette proposition de loi se justifie à plus d’un titre. D’abord, le décret ne ferait que suspendre l’obligation vaccinale contre la covid‑19. Or, comme nous l’avons précisé dans l’exposé des motifs de la proposition de loi et dans le rapport qui vous est présenté, si le principe de l’obligation vaccinale – y compris contre la covid – n’est pas, en soi, problématique, les modalités de son application, telles qu’elles sont prévues par la loi d’août 2021, sont sources de difficultés. Le périmètre de l’obligation vaccinale instituée par la loi de 2021 est en effet incohérent : il conduit à une application à géométrie variable indigne d’un État de droit.

Les errements de la loi de 2021 sont explicables par le contexte et l’urgence dans lesquels elle a été votée. À présent, la situation a évolué. Nous ne pouvons pas nous satisfaire d’une suspension de l’obligation par décret : il faut, par parallélisme des formes, abroger la loi. Si la décision était prise par décret, cela laisserait ouverte la possibilité de réactiver la loi de 2021 dans les mêmes termes, sans tenir compte de l’expérience et des connaissances acquises. Abroger la loi signifierait au contraire redonner au Parlement toute la place qui lui revient, en lui laissant, le cas échéant, le pouvoir et le temps de débattre afin de voter un nouveau texte, mieux pensé. Nous devons nous emparer à nouveau du sujet.

Si l’urgence imputable à la pandémie a affaibli le Parlement, elle a aussi abîmé notre société. Élaborer un décret en s’appuyant sur des consultations qui continueraient à diviser les citoyens ne contribuerait pas à la réconciliation. On a besoin de la parole apaisée, dépassionnée et pragmatique de la représentation nationale pour ouvrir un nouveau chapitre du monde post-covid.

Cette proposition de loi n’est pas la première à traiter du sujet mais, étant défendue par deux députés guyanais, elle s’intéresse avec une acuité particulière aux réalités ultramarines. Loin des explications fantasmées de l’Hexagone, les auditions de professionnels de santé – soignants et personnels de direction – ont permis de contextualiser les raisons sociétales et scientifiquement explicables de la défiance en outre‑mer face à ce vaccin en particulier. Les incohérences nées d’une application de la loi sourde et aveugle aux réalités locales n’ont fait qu’aggraver cette défiance au détriment des malades.

Comment expliquer en effet qu’avant la loi de 2021, et particulièrement pendant les premières vagues de covid, la télémédecine ait été largement encouragée, ce qui a permis, par exemple, d’assurer le suivi des patients dans l’archipel guadeloupéen alors que l’île de Marie‑Galante, faute de cardiologue sur place, était totalement bloquée ? Comment expliquer que l’application de la loi ait conduit à interdire aux médecins d’intervenir en téléconsultation, c’est-à-dire sans aucun lien physique avec les patients, au motif qu’ils n’étaient pas vaccinés ? Comment donner confiance aux populations alors que, comme nous l’ont montré les auditions, du fait de l’impossibilité d’appliquer l’obligation vaccinale aux Antilles et en Guyane, les effets des mesures ont différé d’un territoire à l’autre, d’une fonction à l’autre, d’un établissement à l’autre ? Certains en ont ressenti de l’injustice, d’autres ont perçu ces règles comme une forme de harcèlement, tous ont vu leur confiance dans les institutions s’éroder.

Compte tenu de cet état de fait, il nous a été proposé de présenter une proposition de loi qui ne concernerait que l’outre‑mer, mais procéder ainsi serait injuste et indigne de notre mandat. En effet, si les incohérences imputables à l’obligation vaccinale posée par la loi de 2021 sont plus visibles en outre‑mer, elles sont tout aussi réelles dans l’Hexagone.

Par exemple, alors que l’été approche, comment ne pas rappeler que, pour combattre les derniers feux de forêt, et alors que des pompiers français étaient suspendus du fait de l’obligation vaccinale, il a été fait appel à des pompiers européens qui, eux, n’y étaient pas assujettis ? Comment expliquer que les psychologues scolaires soient soumis à l’obligation et non les enseignants, alors que les uns et les autres sont en présence du même public ? La même interrogation se pose pour les personnels administratifs et techniques des structures de santé partout en France. De toute évidence, le périmètre d’application de l’obligation vaccinale par la loi de 2021 est problématique.

Si le nombre de professionnels suspendus en France peut paraître dérisoire, une absence peut suffire à ébranler toute la chaîne, dans un système déjà exsangue où la présence de chacun compte. Le renfort rapide de professionnels formés et compétents sera un tel soulagement pour les structures concernées qu’il faut relativiser l’argument selon lequel le retour de personnels suspendus pourrait susciter des frustrations au sein des équipes.

Compte tenu du manque criant de personnels soignants, la réintégration de ces professionnels ne constituera pas la solution miracle, mais l’abrogation de la loi permettrait d’éviter une aggravation à long terme de la désertification médicale. En effet, de nombreux jeunes initialement tentés par les professions de santé s’en détournent aujourd’hui. Si l’obligation vaccinale n’en est pas l’unique raison, elle fait toutefois partie des raisons invoquées.

Le dernier avis de la HAS fait état de la très faible couverture vaccinale des professionnels de santé s’agissant du rappel adapté au variant Omicron : selon les estimations, elle concerne, au 22 mars 2023, 13,6 % de ceux qui exercent en Ehpad, 14,5 % des libéraux et 15 % de ceux qui exercent en établissement de santé.

Au vu de ces chiffres, il paraît incohérent de maintenir la suspension vaccinale. De surcroît, une confusion persiste dans le nombre de doses requises pour satisfaire à l’obligation vaccinale : en effet, le nombre de doses obligatoires diffère du nombre de doses recommandées. Le même flou règne quant à la durée d’efficacité du vaccin entre deux doses.

Les auditions nous ont apporté de précieux éclaircissements sur le profil des personnes suspendues. Alors que celles-ci sont habituellement cataloguées comme antivax et complotistes, la réalité est beaucoup plus nuancée. Le refus de la vaccination contre la covid doit être replacé dans un contexte d’incertitude et d’anxiété généralisées, où les ordres et contrordres se sont succédé et où les informations de toute nature ont été déversées en flots continus. Dans ce cadre, le fait de contraindre au lieu de convaincre a sans doute contribué à radicaliser les positions des personnes présentées comme antivax comme de celles dites provax.

Nous avons le devoir moral et politique d’apprécier la question de l’obligation vaccinale imposée en 2021 dans sa globalité, en tenant compte de ses incohérences mais aussi des drames humains qu’elle a engendrés. Les récits de séparations, d’enfants placés, de patrimoines familiaux bradés, sont autant d’histoires dramatiques relayées au cours des auditions. La violence dans l’application de la mesure est apparue clairement. Les règles élémentaires de notre droit social se sont trouvées bafouées. Des personnes se sont retrouvées suspendues du jour au lendemain, sans entretien préalable avec leur hiérarchie, parfois même sans notification officielle. Des médecins suspendus n’ont pas même pu transmettre les dossiers de leurs patients. De nombreux cabinets de professionnels libéraux – kinésithérapeutes, sages‑femmes, ostéopathes, podologues... – ont été fermés.

C’est la première fois qu’en France, des professionnels salariés mais aussi libéraux se retrouvent suspendus et privés de revenus pour une période indéterminée, sans que la moindre mesure disciplinaire ne soit prononcée. Paradoxalement, le fait que le refus de la vaccination contre le covid‑19 ne soit pas considéré comme une faute a privé ces professionnels de toute voie de recours, de toute indemnité et les a enfermés dans de véritables prisons contractuelles.

En tant que législateurs, nous ne pouvons laisser perdurer de telles situations. Ce n’est pas le fait de réintégrer ces professionnels qui enverrait, comme on l’entend, un mauvais signal, mais bien plutôt le maintien de la loi de 2021, en dépit de ses incohérences. Soyons à la hauteur de notre mandat.

Le covid a mis le monde en suspens. Il est temps, aujourd’hui, de sortir de cet état de suspension et de se réapproprier nos institutions et nos valeurs. La France est aujourd’hui, avec la Hongrie, l’un des derniers pays européens à ne pas avoir abrogé l’obligation vaccinale contre le covid‑19. Faisons en sorte que les professionnels français ne soient pas les derniers à demeurer suspendus.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Jean-François Rousset (RE). La science et la raison doivent continuer à guider notre décision, comme cela a été le cas depuis le début de la pandémie. La vaccination contre la covid‑19 a été au cœur de la stratégie de lutte contre la pandémie. On a d’abord incité à la vaccination les personnes vulnérables puis les plus de 12 ans et les personnes âgées. Compte tenu de l’évolution de la pandémie, la loi du 5 août 2021 a imposé l’obligation vaccinale à une liste de professionnels, en particulier dans le domaine de la santé. L’efficacité de cette stratégie a été reconnue par la HAS, dans sa recommandation du 30 mars dernier. Les chiffres sont clairs : le pourcentage de professionnels travaillant en Ehpad ayant reçu une première dose de vaccin était passé de 76 à 91,5 % en deux mois.

Constatant que l’épidémie était devenue peu virulente, la HAS a proposé que la vaccination contre la covid ne soit plus obligatoire mais seulement fortement recommandée. Cette position ne peut être instrumentalisée pour décrédibiliser l’action publique entreprise dans le contexte de la crise sanitaire.

Nous avons toujours suivi les recommandations des autorités sanitaires et nous continuerons à le faire. Le ministre de la santé, François Braun, a ainsi récemment annoncé la prochaine réintégration, par un texte réglementaire, des professionnels non vaccinés. C’est la voie de la raison. Cela laisse la possibilité d’instaurer à nouveau et rapidement cette obligation dont l’efficacité a été prouvée, si les avis scientifiques l’estiment nécessaire.

C’est la raison pour laquelle nous sommes opposés à l’abrogation de la loi. En effet, personne n’est capable de nous dire si l’épidémie pourrait reprendre mais, dans une telle hypothèse, nous aurions besoin de cet outil législatif qui permettrait une forte réactivité.

Nous voterons donc contre la proposition de loi.

M. Frédéric Falcon (RN). Emmanuel Macron et sa majorité ont mis au ban de la société des milliers de soignants, de militaires et de pompiers, alors que ces professions manquent cruellement d’effectifs. L’obligation vaccinale a été une stratégie de diversion du Gouvernement pour détourner les Français de sa gestion calamiteuse de la crise du covid, qui a mis en lumière l’effondrement avancé de l’hôpital. Il serait indécent de vous rappeler la longue liste des États qui n’ont jamais instauré une telle obligation. Citons tout de même la Suède, la Finlande, la Norvège, le Portugal et l’Espagne. D’autres pays, comme le Royaume‑Uni, ne l’ont jamais réellement appliquée. D’autres encore, comme le Canada, les États‑Unis, l’Australie et la Nouvelle‑Zélande, l’ont abrogée depuis des mois.

La France est le dernier pays à s’arc‑bouter sur ce narratif irrationnel. Les études scientifiques ont beau prouver que le vaccin n’empêche pas la transmission et que la maladie décline, vous persistez à tenir votre discours dogmatique. Le Gouvernement se retranche derrière l’avis de la HAS, dont l’indépendance est sujette à caution. En effet, ses membres sont nommés par le ministre de la santé ainsi que par les présidents de l’Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique, social et environnemental. Le président de cette instance, quant à lui, est nommé par le Président de la République, comme le fut Mme Buzyn avant son entrée au Gouvernement. Le législateur n’a pas à se soumettre à une communauté d’experts mais doit agir dans l’esprit du droit et des valeurs de la République. La France n’a jamais reconnu autant d’experts autoproclamés et ne s’est jamais aussi mal portée.

Le Rassemblement national s’est toujours opposé à l’obligation vaccinale. Nous avons déposé la seule proposition de loi prévoyant une réintégration sans condition assortie d’une indemnisation. Chers collègues de la NUPES, sans votre sectarisme, les suspendus auraient pu être réintégrés dès le 12 janvier 2023, lors de notre niche parlementaire.

Bien entendu, nous voterons cette proposition de loi, mais que de temps perdu, que de vies sacrifiées, chers collègues de la majorité et des groupes d’opposition, sur l’autel de vos egos et de vos intérêts politiques !

M. Emmanuel Fernandes (LFI - NUPES). Il est plus que temps de réintégrer les professionnels suspendus pour cause de non-vaccination contre la covid‑19. À ce jour, bien qu’il n’existe aucun chiffre exhaustif, nous savons que plusieurs milliers de personnes sont toujours concernées par cette suspension. Empêchées d’exercer leur métier et, bien souvent, leur vocation, ostracisées, mises au placard et non rémunérées, ces milliers de personnes vont enfin voir le bout du tunnel. Beaucoup d’entre elles auront connu plus d’un an et demi de souffrances, de détresse psychologique, de perte de sens, voire de goût à la vie, et de grande précarité. Dans les outre‑mer, le manque criant de personnels, notamment dans le secteur de la santé, rend la situation encore plus insupportable et accroît la défiance, déjà grande, entre la population et les pouvoirs publics.

Dans le cadre de la niche parlementaire de La France insoumise, ma collègue Caroline Fiat avait défendu une proposition de loi qui visait à réintégrer les personnels non vaccinés. Ce texte allait trouver une majorité dans l’hémicycle mais la minorité présidentielle, et, plus particulièrement, le Gouvernement, par un jeu d’obstruction jusqu’alors jamais vu au cours d’une journée de niche, a empêché le vote, imposant de pénibles mois de pénitence supplémentaires à toutes les personnes concernées.

Aujourd’hui, nous devons nous saisir du texte proposé par nos collègues du groupe GDR - NUPES pour mettre enfin un terme au cauchemar des personnels suspendus, en abrogeant l’obligation vaccinale relative à la covid‑19, suivant ainsi l’avis de la HAS du 16 février dernier. C’est notre rôle, et même notre devoir de législateurs. Seule l’adoption de la proposition de loi garantira que tous les professionnels et étudiants actuellement suspendus bénéficieront de la levée de l’obligation vaccinale et donc d’une réintégration.

N’attendons plus, il y a urgence : prenons nos responsabilités, n’envoyons pas aux personnels suspendus un nouveau message d’abandon, qui serait dramatique.

Mme Josiane Corneloup (LR). La proposition de loi déposée par le groupe GDR - NUPES vise à abroger l’obligation vaccinale contre la covid‑19 imposée aux soignants en 2021. La loi relative à la gestion de la crise sanitaire du 5 août 2021 a soumis à cette obligation les étudiants et les professionnels des secteurs sanitaires et médico-sociaux. À cette période, la France connaissait une épidémie au plus haut. Contrairement à la proposition de loi de Mme Fiat, qui a été discutée en novembre dernier et fait l’objet d’une obstruction parlementaire organisée par la majorité, le texte en discussion vise à abroger le chapitre de la loi de 2021 relatif à l’obligation vaccinale.

Actuellement, le Gouvernement peut imposer ou lever cette obligation par décret. C’est ce qu’il compte faire, à la suite du récent avis de la HAS, qui préconise la levée de l’obligation. En abrogeant ces dispositions, le Parlement priverait de base légale toute nouvelle obligation vaccinale, mais uniquement contre le covid.

Depuis plus de deux ans, une certaine opacité persiste quant au nombre de soignants suspendus. Toutefois, les conséquences sont majeures, tant pour les personnes elles-mêmes que pour les établissements de santé. La suspension des professionnels en raison du non-respect de l’obligation vaccinale les a plongés dans une grande précarité : non seulement ils sont privés de salaire, mais ils ne peuvent pas bénéficier des allocations chômage. Quant aux établissements, ils se sont vu dans l’obligation de fermer un certain nombre de lits et de déprogrammer des interventions chirurgicales.

Aujourd’hui, il est prouvé que la vaccination ne limite ni la contamination ni la transmission du covid. Après trois années marquées par la crise, le monde commence à tourner la page. Ainsi, aux États‑Unis, Joe Biden a entériné, le 10 avril, la fin de l’état d’urgence nationale lié au covid. En France, depuis le 1er février 2023, si une personne a des symptômes ou est testée positive au covid, elle n’est plus obligée de s’isoler.

La levée de l’obligation vaccinale soulève toutefois des questions. Comment organiser le retour des personnels au sein des services ? Qu’en sera-t-il de leurs salaires perdus ?

Pour les raisons que j’ai exposées et conformément à la position adoptée par le groupe Les Républicains en novembre 2022, nous voterons cette proposition de loi.

M. Philippe Vigier (Dem). Nous appelons à suivre les préconisations de la HAS, qui a indiqué, le 30 mars dernier, que l’on pouvait lever l’obligation vaccinale. Le Gouvernement a toujours dit que, le moment venu, lorsque la HAS se prononcerait sur la réintégration des soignants, il se conformerait à son avis. Certes, monsieur Falcon, on peut toujours mettre en doute l’indépendance des autorités indépendantes...

Madame Corneloup, je ne suis pas d’accord avec vous lorsque vous dites que la vaccination ne protège pas : je pourrai vous soumettre quelques études scientifiques. Nous devons protéger nos soignants. N’oublions pas qu’un certain nombre d’entre eux, qui étaient au front, sont décédés des suites du covid. On nous a reproché, au début, de ne leur fournir aucune protection, pas même les plus élémentaires. Puis, lorsque les vaccins ont été disponibles, on nous a dit qu’il ne fallait surtout pas instituer d’obligation vaccinale. Heureusement qu’on l’a appliquée !

Pensez-vous que l’on reviendra, un jour, sur la vaccination obligatoire contre l’hépatite pour pouvoir travailler en milieu hospitalier ? Quelqu’un est-il prêt à défendre une proposition de loi allant en ce sens ? Cela nous offrirait l’occasion d’examiner les arguments scientifiques, qui sont éclairants.

Je peux comprendre le sentiment de défiance ressenti par la population des Antilles, à la suite, notamment, du drame de la chlordécone, mais nous voulons garder la possibilité de demander aux soignants de se faire vacciner, si le besoin s’en fait à nouveau sentir.

Mme Sandrine Rousseau (Ecolo - NUPES). Le 5 août 2021, la loi relative à la gestion de la crise sanitaire a imposé aux soignants de présenter un schéma vaccinal complet avant le 15 octobre de cette même année, sous peine d’être suspendus. Depuis, la réintégration des personnels non vaccinés a fait l’objet de multiples débats dans notre assemblée. En Europe, de nombreux pays ont mis fin à l’obligation vaccinale des soignants. Le 30 mars dernier, la HAS a remis un rapport ouvrant la voie à la levée de cette obligation.

Nous soutiendrons la proposition de loi de nos collègues du groupe GDR - NUPES, qui s’inscrit dans le prolongement de la loi du 30 juillet 2022, laquelle a prévu la possibilité de réintégrer les personnels suspendus en cas d’avis favorable de la HAS. En effet, nous sommes très régulièrement interpellés dans nos circonscriptions sur le manque de personnels de santé, depuis de nombreux mois, dans les hôpitaux, les établissements de santé, les Ehpad, les centres médico-psychologiques. Dans les outre‑mer, où le personnel suspendu est proportionnellement plus nombreux, la situation est encore plus inquiétante.

Par ailleurs, nous ne pouvons rester sourds aux difficultés rencontrées par les professionnels de santé suspendus depuis presque vingt mois, sans rémunération, qui se trouvent dans une situation parfois très difficile, individuellement et socialement. Il est essentiel de trouver des solutions pour ces personnels, sur lesquels nous avons pu compter pendant la crise du covid. La première est d’assurer leur réintégration. Parce qu’ils sont exposés à des personnes particulièrement fragiles et vulnérables, les personnels de santé ont bien évidemment un devoir d’exemplarité. Grâce à la voie ouverte par la recommandation de la HAS, celui‑ci peut impliquer l’acceptation de protocoles et de mesures de protection particulières ainsi que l’incitation à la vaccination, mais pas l’obligation vaccinale.

Pour toutes ces raisons, nous voterons la réintégration du personnel soignant non vacciné.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Je ne reviendrai pas sur les incohérences de la gestion de la crise sanitaire ni sur la philosophie qui l’a inspirée, car ce n’est pas le sujet. Il s’agit, non pas de faire preuve d’une forme d’orgueil politique, mais simplement de répondre à une question qui se pose en des termes renouvelés, puisque la HAS a récemment recommandé un changement des règles. La loi de 2021 était une législation d’exception adoptée dans une période d’exception. Puisque nous en sommes sortis, il nous semble nécessaire que le Parlement délibère à nouveau sur ce point. Si nous devions connaître, à l’avenir, une crise d’une nature comparable, nous pourrions en délibérer une nouvelle fois, en tirant les leçons du passé. La question qui nous est posée est la suivante : continue-t-on à laisser le Gouvernement décider en tout temps de ce qu’il faut faire ou reprend-on nos droits de parlementaires en mains ?

Par ailleurs, les personnes suspendues se sont retrouvées dans une zone de non-droit créée spécifiquement pour elles. Il faudra engager des discussions avec les organisations syndicales pour régler ces problèmes.

M. Paul-André Colombani (LIOT). Je me fais aujourd’hui le porte-parole de mon groupe mais, avant tout, de mes collègues ultramarins. Il est important que nos débats se terminent autrement qu’en novembre dernier, où nous avions été empêchés d’aller au terme de nos discussions. Il faut dire que, depuis, la donne a changé. L’avis rendu, il y a quelques jours, par la HAS est clair : l’obligation vaccinale peut être levée, compte tenu du faible niveau de l’épidémie et du fort taux de vaccination dans la population et parmi les professionnels de santé.

Nous appelons toutefois à continuer d’encourager la vaccination. Notre groupe rappelle que l’épidémie de covid19 n’est pas terminée et insiste sur la nécessité de ne pas diminuer les moyens de lutte. Sans relativiser les risques et la dangerosité de l’épidémie, il nous faut toutefois reconnaître que, grâce au fort taux de vaccination de la population, nous ne sommes plus dans la situation du début de la crise sanitaire. Cela étant, l’amélioration de l’état des connaissances nous a appris que la vaccination n’empêche pas nécessairement la transmission. Les décisions qui ont été prises au plus fort de la crise doivent être actualisées à l’aune de ces informations.

L’avis récent de la HAS ouvre la porte à la réintégration des soignants suspendus. Nous continuons à penser que, compte tenu de la situation de nos établissements de santé, nous ne pouvons nous priver d’aucun soignant. En outre‑mer, particulièrement, nous n’avons pas su répondre à leur inquiétude. Leur suspension a parfois été brutale. En Guadeloupe, pas moins de 346 professionnels de santé ont été suspendus, dont 150 pour le seul centre hospitalier universitaire (CHU). Renoncer à ces personnels précieux, c’est aussi participer à distordre le lien de confiance entre l’État et ces derniers et alimenter la spirale de désaffection envers ces métiers si importants. Il est temps de trouver une sortie à la crise sanitaire et sociale qui s’est enracinée depuis de longs mois.

Oui, la vaccination est nécessaire. Mais nous ne devons pas diminuer nos efforts dans la lutte contre l’épidémie. Cela étant, nous considérons que le moment est venu d’abroger la loi. L’adoption de mesures par décret ne serait pas suffisante. C’est pourquoi nous voterons en faveur de cette proposition de loi.

M. Arthur Delaporte (SOC). Nous débattons de cette proposition de loi dans un contexte particulier puisque la HAS, dans son avis du 29 mars, a préconisé, en dehors d’une obligation vaccinale, que tous les efforts doivent être faits pour maintenir une couverture vaccinale élevée chez les professionnels de santé. Elle a également recommandé de faire évoluer le cadre juridique afin qu’une telle obligation soit fondée sur des critères liés à la catégorie professionnelle et aux actes à risque susceptibles d’être réalisés plutôt qu’à une liste d’établissements.

Pour éclairer nos travaux, notre groupe c’est toujours exclusivement fondé sur les recommandations de cette autorité scientifique indépendante. En conséquence, nous souscrivons à la levée de l’obligation vaccinale des personnels soignants, à l’instar de ce qu’ont fait nos voisins européens comme le Royaume-Uni, l’Italie, la Belgique et l’Allemagne mais, comme la HAS, nous demandons une évolution du cadre juridique et non une abrogation.

La suspension des personnels soulève trois questions fondamentales. Est-elle proportionnée, compte tenu de la pénurie de soignants et de la crise que connaît l’hôpital public – je pense en particulier aux territoires ultramarins ? Quels moyens sont-ils déployés pour que ces personnels puissent être réorientés ? Enfin, quid du scepticisme des soignants à l’endroit d’un vaccin qui a permis de sauver des milliers de vies ? La situation de l’hôpital public est inquiétante ; le travail de nos soignants est insuffisamment pris en compte ; nous nous devons de restaurer la confiance, parfois brisée, avec eux.

En tout état de cause, ce texte va plus loin que l’avis de la HAS puisqu’il propose d’abroger le cadre juridique permettant une telle obligation et non de lever la seule obligation vaccinale. La Fédération hospitalière de France et l’Académie de médecine craignent de surcroît des effets de bord si une telle suppression devait être trop brutale.

Bref, nous souscrivons à plusieurs objectifs, que j’ai évoqués et qui sont ceux de la gauche, mais nous préfèrerions que le Gouvernement lève cette obligation par voie réglementaire, ce que nous lui demandons d’ailleurs solennellement de faire car, à ce stade, la suspension des soignants n’a plus lieu d’être. En outre, nous lui demandons de prendre toutes les mesures nécessaires pour mieux l’anticiper en favorisant la reconversion des professionnels suspendus, de manière à ne laisser aucun soignant sur le bord du chemin.

Pour toutes ces raisons, notre groupe s’abstiendra.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous en venons aux interventions des autres députés.

Mme Isabelle Valentin (LR). Depuis le 15 septembre 2021, les professionnels des secteurs médicaux, paramédicaux, d’aide à la personne et les pompiers qui ne souhaitaient pas se faire vacciner contre la covid ont été suspendus de leurs fonctions. Plusieurs services d’urgence ont été fermés faute de personnels, la pénurie touchant tous les secteurs de la santé, de l’aide à domicile et les Ehpad. La charge de travail s’accroît et les conditions d’exercice se dégradent. Les directions d’établissement, quant à elles, se tournent vers des salariés moins diplômés, moins bien formés et l’intérim médical se développe afin d’assurer la continuité des soins.

La suspension des personnels de santé non vaccinés devait être temporaire. Or, la France est l’un des derniers pays européens à ne pas l’avoir abrogée. Est-il opportun de continuer à se priver d’un vivier de professionnels de santé immédiatement disponible ? Dans quelles conditions pourront-ils réintégrer leurs services ?

M. Éric Alauzet (RE). Je comprends le prisme particulier adopté par le rapporteur, lié au territoire qu’il représente et, plus généralement, aux territoires ultramarins. Néanmoins, sa proposition de loi ne me semble pas pertinente pour trois raisons.

Tout d’abord, elle est inutile, dès lors qu’un décret lèvera l’obligation vaccinale suite à l’avis formulé par la HAS. Cette proposition de loi me paraît donc relever de l’affichage.

Ensuite, vous n’évoquez pas les problèmes que soulève cette réintégration. Les discussions que j’ai eues dans mon CHU montrent que les choses seront compliquées. Les 99 % de soignants et de non-soignants qui se sont fait vacciner – et je les en remercie – soit de bon gré, conscients qu’ils étaient de leurs responsabilités, soit suite à une obligation à laquelle ils se sont résolus en raison de ce même sens des responsabilités, n’accueilleront pas forcément à bras ouverts les « résistants » à la vaccination. Nous avons donc besoin d’un peu de temps.

Enfin, une abrogation interdirait le retour d’une obligation vaccinale, possibilité qui doit être maintenue. Le taux de vaccination, grâce à l’obligation, a bondi ; les vaccinés sont moins contaminants et moins malades que ceux qui ne le sont pas.

M. Yannick Neuder (LR). La levée de l’obligation vaccinale est de bonne politique, comme l’a été l’obligation au plus fort de l’épidémie dans le pays de Pasteur où, paradoxalement, le taux de vaccination est relativement faible.

Je tiens à relever certaines hypocrisies qui ont eu cours sous le couvert de la science.

Tout d’abord, des personnels malades du covid mais peu symptomatiques ont été renvoyés dans un certain nombre de services alors que des soignants en bonne santé mais non vaccinés ne pouvaient pas travailler.

Ensuite, nous savons que le vaccin n’est plus efficace six mois après son injection et qu’un rappel est nécessaire, lequel aurait donc dû être obligatoire.

De plus, la HAS a répondu à la question qui lui a été posée concernant le statut vaccinal dans son ensemble mais ce n’était pas celle‑ci qu’il convenait de poser. Elle a dû étudier ce qu’il en était de la vaccination contre l’hépatite B, contre la diphtérie-tétanos-poliomyélite et la covid. Par rapport aux autres pays européens, six mois supplémentaires ont donc été nécessaires pour répondre à cette question simple, en fin de compte, qu’était la réintégration de soignants non vaccinés contre le covid.

Enfin, la pénurie de personnels soignants est telle que je doute de la pression exercée par ceux qui sont vaccinés sur ceux qui ne le sont pas. Personne ne demandera le statut vaccinal d’un personnel qui vient en renfort ! L’état de nos services d’urgence et du secteur médico-social est si catastrophique qu’il n’est pas sain de chercher un alibi fallacieux à la non‑réintégration des personnels non vaccinés.

M. Stéphane Viry (LR). La HAS a fait son travail en formulant un avis et des recommandations. Il est certes toujours possible de considérer qu’ils sont tardifs ou trop timorés mais ils nous invitent à faire évoluer le cadre juridique de l’obligation vaccinale.

En la matière, pas de politicaillerie ! Nous avons vécu une sale période : une épidémie, des morts, un épuisement des personnels de santé, l’état que l’on sait de notre système de santé, un État de droit malmené, poussé à ses ultimes limites, un régime d’exception dont nul ne peut se satisfaire, des entraves aux principes généraux du droit et aux libertés publiques, une perte de confiance de plus en plus répandue en la science, le complotisme, des violences à l’égard de ceux qui ne votaient pas comme il le fallait... Nous devons maintenant en sortir en faisant confiance à la science et en suivant les recommandations de la HAS.

Cette proposition de loi n’est pas opportuniste mais nécessaire. Nous devons donc faire preuve de responsabilité.

M. Thibault Bazin (LR). Le contexte a évolué depuis le dépôt de cette proposition de loi puisque la HAS a formulé un avis et que le ministre de la santé a souhaité, il y a une semaine, que la réintégration des soignants non vaccinés se passe « le moins mal possible ». Il a également précisé qu’il lancerait une concertation avec les syndicats de médecins, les fédérations hospitalières et les ordres professionnels pour en définir les contours.

Ne conviendrait-il pas de se concentrer sur ces derniers ? Comment le retour de ces personnels qui, pour la plupart, n’ont pas exercé depuis deux ans, sera-t-il organisé ? Nous savons que des questions humaines se poseront, tant pour eux que pour ceux qui les accueilleront. Des questions se poseront également en matière de cohésion, de droit du travail, de parcours professionnels, de remises à niveau. Compte tenu de ce contexte, avez-vous réfléchi à une évolution de votre proposition de loi, à l’intégration d’éléments législatifs permettant d’envisager les contours de cette réintégration ?

M. Elie Califer (SOC). Chaque fois que je m’exprime sur ce sujet, je pense à la crise si difficile que nous avons traversée, qui a profondément meurtri notre pays. Avec plus de 1 000 morts, mon territoire a payé un lourd tribut. Cette crise, qui a divisé et affaibli les équipes de soin, a surtout fragilisé un système de santé déjà éprouvé.

Quasiment tous les États européens ont répondu à cette lourde question qu’est celle de la réintégration des personnels suspendus. Pourquoi la France chercherait-elle à trouver des subterfuges pour la faire traîner alors que nous ne sommes plus en état d’urgence sanitaire depuis le 1er août 2022 ?

Le Président de la République avait déclaré que nous étions en guerre. Ce fut en effet le cas, avec une médecine de catastrophe généralisée et des dégâts considérables. La paix, désormais, nous impose de reconstruire, de fortifier et de moderniser notre système de santé afin qu’une telle situation ne se reproduise jamais. Tel est notre devoir de parlementaires. Ce texte permet un dénouement favorable à la crise. Il appartiendra aux différentes instances et institutions, dont le Parlement, de trouver les solutions globales qui s’imposent mais il est grand temps de mettre un terme à cette suspension.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq (RE). La pandémie a reculé grâce au vaccin et au grand nombre de personnes qui se sont fait vacciner. Si la question d’une réintégration des personnels non vaccinés se pose, suite à l’avis favorable de la HAS, c’est bien parce que d’autres se sont fait vacciner. Nous avons beaucoup trop laissé colporter des discours antivax, antiscientifiques et complotistes ! Nous devons réaffirmer l’importance scientifique de la vaccination, qui nous a permis de triompher du virus.

Un problème ne manquera pas de se poser pour tous les soignants qui ont fait l’effort de se faire vacciner, plus ou moins volontairement, face à la réintégration de ceux qui ont campé sur des positions infondées.

Il convient de suivre l’avis de la HAS, comme le ministre de la santé s’est engagé à le faire, mais il faut le faire par la voie réglementaire en maintenant la possibilité législative de réintroduire une obligation si, par malheur, la situation devait évoluer défavorablement.

Je voterai des deux mains contre cette proposition de loi.

Mme Caroline Fiat (LFI - NUPES). Personne n’a jamais prétendu que le vaccin avait été inutile.

Je suis stupéfaite de la méconnaissance de ces questions. Le retour des personnels suspendus sur leur lieu de travail serait compliqué ? Mais ils y sont déjà revenus systématiquement après avoir contracté le virus puisqu’ils étaient considérés comme immunisés pendant quatre mois en vertu de la loi que vous avez votée ! Les personnels qui les ont accueillis et que j’ai interrogés se sont tous félicités de ne travailler que deux week-ends sur quatre au lieu de trois !

La loi, en pleine pandémie, a disposé de l’obligation vaccinale. Soit. La pandémie, maintenant, est derrière nous et c’est à la loi, non au règlement, de disposer de la réintégration des personnels. Si la situation devait se dégrader à nouveau, eh bien, vous avez voté une fois, vous revoterez ! Ne soyez pas si pessimistes ! Même si vous êtes beaucoup moins nombreux, croyez en l’avenir !

Je remercie donc M. le rapporteur pour sa proposition de loi.

M. le rapporteur. J’espérais que ce débat ne susciterait pas la polémique. Hélas...

Nous aurions pu imaginer circonscrire une telle proposition de loi aux outre‑mer mais elle n’aurait pas été juste tant de nombreuses personnes, des soignants et des non‑soignants, sont également concernées dans l’Hexagone. Même si d’aucuns prétendent que tel n’est pas le cas, nous ne disposons pas de chiffres officiels. Il n’en reste pas moins que des professionnels de santé ont fermé leur cabinet, que d’autres ont démissionné...

Cette proposition de loi a été déposée le 16 mars, la HAS a rendu son avis le 30 mars et, dans la foulée, le ministre de la santé a assuré qu’il le suivra. Pourquoi, néanmoins, avoir peur du parallélisme des formes ? Vous avez voté une loi d’obligation vaccinale : votons une loi d’abrogation et analysons en profondeur la situation afin de corriger ce qui doit l’être ! En tant que parlementaires, nous ne pouvons pas laisser au seul pouvoir exécutif l’organisation de la réintégration des soignants.

J’entends la chansonnette sur l’accueil des personnels non vaccinés mais vous rendez-vous compte de ce qui s’est passé ? Une loi comportant des dispositions aussi coercitives n’a pu être votée qu’en raison du caractère exceptionnel de la situation. Vous rendez-vous compte des drames humains qui ont eu lieu ? Des familles se sont déchirées, des enfants ont été placés !

L’esprit de cette proposition de loi est étranger à toute polémique. Il s’agit de faire en sorte que le Parlement se saisisse à nouveau de la question, alors que nous ne sommes plus en état d’urgence.

La Corse, considérée comme un désert médical, compte six cents médecins de ville. La Guyane, dont la population est à peu près équivalente, en compte cent cinquante, dont la moitié partira à la retraite d’ici deux à trois ans. De plus, un grand nombre de nos jeunes ne veulent pas embrasser les carrières de santé en raison de l’obligation vaccinale, laquelle est d’ailleurs sujette à caution puisque, selon la HAS, 13 % à 15 % seulement des personnels sont à jour de leur rappel et sont donc protégés – si l’on admet que ce vaccin est efficace. Telle est la réalité ! Nous n’en serions pas là si les Français avaient parfaitement confiance dans ce Gouvernement.

Article 1er : Abroger l’obligation vaccinale contre la covid19 prévue par la loi n° 20211040 du 5 août 2021

Amendement de suppression AS6 de M. Jean-François Rousset.

M. Jean-François Rousset (RE). La question de la réintégration des soignants ne se pose plus et ne soulève que des problèmes de temps et d’organisation.

De plus, il m’est difficile d’entendre que tous les malheurs que nous avons connus s’expliquent par la vaccination alors que c’est plutôt l’inverse. Les populations qui ont souffert sont celles qui n’ont pas été vaccinées. Le nombre de morts, dans les hôpitaux ou les Ehpad, au début de la crise, s’explique par l’absence tout vaccin.

Il n’est pas possible d’hypothéquer l’avenir en abrogeant définitivement l’obligation vaccinale. En cas d’évolution défavorable de l’épidémie, nous serons très heureux que la loi nous permette de vacciner à grande échelle avec un vaccin efficace : 97 % des personnes vaccinées ne sont pas mortes.

M. le rapporteur. Avis évidemment défavorable.

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). On essaie de réinstaurer un faux débat entre un camp du bien et un camp du mal ; or, il me semble dommageable de ne pas pouvoir discuter sereinement de la stratégie sanitaire que nous devons déployer en fonction des différentes étapes.

Sans doute devrions-nous faire un état des lieux sur les vaccins contre le covid, d’autant plus qu’une question se pose – dont la représentation nationale devrait se saisir – s’agissant de leur production et de leur commande. Un suivi a eu lieu pendant la crise sanitaire et les questions qui ont été soulevées ne sont pas toutes résolues. La vaccination nous a certes permis de faire face à un certain nombre de problèmes sanitaires mais certains d’entre eux demeurent, dont ne traite d’ailleurs pas ce texte.

M. Yannick Neuder (LR). Personne ne critique la stratégie vaccinale qui a été déployée et qui a montré son efficacité, même si des discours obscurantistes demeurent, en effet, à propos de la vaccination. Néanmoins, notre retard pour lever l’obligation vaccinale par rapport aux autres pays européens contribue à donner le sentiment que nous cacherions quelque chose.

Je regrette que la question posée à notre HAS ne lui ait pas permis de formuler rapidement un avis alors qu’elle est identique à celles de l’Espagne, de l’Allemagne ou de l’Italie, lesquelles ont pu donner une réponse scientifique en quelques semaines, de manière que l’obligation vaccinale soit levée dès le mois de janvier. Chez nous, de telles longueurs ne peuvent qu’aggraver la défiance, ce qui est très dangereux pour notre cohésion nationale.

Levons vite cette obligation vaccinale qui n’est plus du tout d’actualité ! Permettons aux pompiers et aux soignants de travailler !

Par ailleurs, ne faisons pas de procès d’intention : personne ne viendra chercher querelle à qui que ce soit dans les services de soin tant ils sont en tension. Offrez cette soupape aux établissements médico-sociaux et aux hôpitaux !

Mme Caroline Fiat (LFI - NUPES). Notre groupe s’opposera évidemment à cet amendement de suppression. Je rappelle que pour l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il faut convaincre plutôt que contraindre. Si les soignants se vaccinent dès qu’ils commencent leur formation, c’est parce qu’on leur explique les bienfaits de la vaccination et que les vaccins employés existent depuis plusieurs dizaines d’années. Dans le cas du covid‑19, il s’agit d’un nouveau vaccin. Qui plus est, vous avez initialement décidé de ne vacciner que les soignants de plus de 50 ans, faute de disposer d’assez de vaccins. Il ne faut pas oublier de telles énormités !

Les soignants sont assez intelligents pour qu’on puisse les convaincre des bienfaits de la vaccination. Forcer quelqu’un est le meilleur moyen de l’inciter à ne pas faire ce qu’on lui demande : l’approche de l’OMS n’est peut-être pas infondée !

M. Frédéric Falcon (RN). Plusieurs amendements que nous avons déposés et qui visent à indemniser les soignants ont été systématiquement rejetés par le président de la commission des finances au titre de l’article 40 de la Constitution, alors qu’ils sont parfaitement financés. Cela pose question et nous allons mener notre enquête.

Je vous invite par ailleurs à cesser de politiser la science, qui appartient aux scientifiques – ce que nous ne sommes pas. En mélangeant les choses, vous créez de la défiance chez les Français et alimentez ce que vous appelez complotisme.

Monsieur Alauzet, on compte peut-être 99 % de soignants vaccinés, mais la question est bien plus large. Tandis que vous, chers collègues de la majorité, êtes élus dans de grandes villes, moins exposées à ces problèmes (Exclamations sur divers bancs), ma circonscription est un désert médical, où certains villages, comme Portel-des-Corbières, n’ont plus de médecin depuis l’instauration de cette obligation vaccinale, ce qui est une catastrophe. Certains établissements, Ehpad ou hôpitaux, ferment les yeux sur cette obligation pour éviter que leurs effectifs n’atteignent un niveau dramatique. L’Espagne, toute proche, est un bel exemple du contraire : sans obligation ni passe sanitaire, tout se passe très bien.

Nous voterons, bien évidemment, contre cet amendement de suppression.

M. Philippe Vigier (Dem). Notre groupe votera évidemment cet amendement.

J’invite notre collègue du Rassemblement national à venir visiter mon territoire. Il y verra ce qu’est un désert médical et je serai heureux de lui montrer les difficultés auxquelles nous sommes confrontés.

Par ailleurs, il faut maintenir la prévention et conserver l’outil. J’entends déjà les reproches qui s’exprimeraient ici si l’épidémie devait reprendre !

Enfin, il faut respecter les autorités indépendantes et suivre leurs avis, sans quoi il n’est plus d’autorités indépendantes, ce qui n’est pas notre conception de la politique.

M. Éric Alauzet (RE). M. Rousset a justement souligné qu’il s’agissait moins ici de la réintégration des soignants, qui aura lieu de toute façon, que, contrairement à ce qu’affirme M. Dharréville, d’une résurgence du débat sur la vaccination. Si nous sommes du côté des 99 % de Français qui se sont fait vacciner, de bon gré pour la plupart et contre leurs convictions profondes pour certains autres qui ont toutefois suivi la règle, il faut voter l’amendement et supprimer l’article.

Mme Nicole Dubré-Chirat (RE). C’est parce que la démarche incitative initialement adoptée en faveur de la vaccination de la population et des soignants s’est révélée inefficace que l’obligation vaccinale a été instaurée, à la différence de tous les autres pays européens, où le taux de vaccination est beaucoup plus élevé qu’en France sans que l’obligation ait été nécessaire.

Par ailleurs, le pourcentage de soignants à réintégrer est négligeable à l’échelle du territoire. Du reste, les chiffres avancés intègrent souvent des personnels administratifs et logistiques, mélangés aux soignants. Sur mon territoire, par exemple, certains soignants ont été accompagnés pour un départ anticipé à la retraite qui leur évitait la réintégration. Les personnels restants sont donc ceux qui refusent toute vaccination.

Je fais partie des soignants qui ont connu le tétanos et la tuberculose, maladies éradiquées grâce à la vaccination. Les propositions de loi remises sur le tapis expriment un message très négatif à propos de la vaccination, qui n’est déjà pas toujours très bien perçue en France.

Mme Rachel Keke (LFI - NUPES). Le refus de la vaccination tient au traitement de la crise du covid‑19 par le Gouvernement. Confrontés à beaucoup de doutes et de mensonges, les gens ont eu peur d’être vaccinés. Lors du premier voyage que j’ai effectué après mon élection, à la Martinique, j’ai constaté la gravité de la situation à l’hôpital de La Meynard. Faute de réintégrer les soignants, ceux-ci sont trop peu nombreux, si bien que les patients, même vaccinés, sont condamnés à mourir faute de personnel pour poser ne serait-ce qu’une perfusion. Cet hôpital est le couloir de la mort – j’y ai vu des patients rester une semaine dans le couloir sans perfusion ni médecin, parce que les soignants sont débordés. Nous devons donc voir comment réintégrer ces derniers pour s’occuper des malades qui souffrent.

M. Frédéric Valletoux (HOR). Le groupe Horizons votera cet amendement de suppression et est résolument opposé à la manière ambiguë dont la question est posée et dont la dernière intervention est un nouveau témoignage. Favoriser ainsi, sans le dire ni l’assumer, le sentiment antivax qui a traversé le pays est très malsain vis-à-vis des soignants, des Français et de tous ceux qui ont fait face à l’obligation vaccinale.

Pour les soignants, cette obligation est plus large que pour la moyenne des Français. Par ailleurs, ce n’est pas la première fois que la France applique des campagnes de vaccination obligatoire pour les soignants. Enfin, des mois d’information et de pédagogie ont accompagné la diffusion de ces nouveaux vaccins. Tout cela dessine un paysage apaisé et construit.

Le fait que certains soignants soient hermétiques et réticents à la notion de vaccin pose des questions quant à leur rapport à la médecine et à leur présence dans des services médicaux. Il faut cesser de dire qu’on a tué sciemment des gens dans les hôpitaux à l’occasion du covid‑19, comme on l’entend dire et comme l’a affirmé voilà quelques jours un brillant député, citant l’exemple de la Guadeloupe. Cette ambiguïté est malsaine.

Je regrette que nos amis du groupe GDR participent à ce populisme malsain qui diffuse dans l’opinion des idées qu’il faudrait tuer. La France est le pays de Pasteur et nous devons faire confiance à la médecine et aux autorités de santé.

M. Jean-François Rousset (RE). Je voudrais tordre le cou à une contrevérité. Élu d’une commune de 630 habitants dans un territoire très rural, je pense pouvoir parler de la ruralité et du manque de médecins. J’ai participé à une campagne de vaccination du mois de juin au mois de décembre 2021 et toutes les personnes que j’ai vues, notamment des personnes âgées défavorables à la vaccination, en ont finalement compris l’intérêt après en avoir discuté.

J’ai aujourd’hui une pensée pour tous les soignants qui ont accepté de se faire vacciner très tôt, prenant le risque de recevoir sans en connaître les risques un nouveau vaccin à ARN messager, fruit d’une recherche enfin aboutie. Par respect pour ces soignants, nous devons permettre la vaccination. Personne ne sait ce que sera demain l’épidémie et les leçons du passé doivent nous servir.

Mme Sandrine Rousseau (Ecolo - NUPES). Cette discussion construit des murs et renforce la division. Il faut féliciter les soignants qui se sont fait vacciner tout de suite et respecter le choix contraire qu’on fait certains et qui est une forme de liberté. Au nom de quoi considère-t-on que les angoisses ou l’inquiétude de ces personnes face à un vaccin sont illégitimes ?

En outre, l’obligation vaccinale n’a pas été gérée. On a laissé les hôpitaux gérer seuls les personnes qui étaient parties et les services s’organiser sans elles, et on a laissé les non-vaccinés tout seuls, sans statut ni suivi, tandis que Macron disait qu’il avait très envie de les emmerder.

Ce n’est pas seulement par interdiction ou par obligation qu’on gère une situation, mais aussi par l’accompagnement et par de véritables politiques publiques visant les personnes concernées. Cela a cruellement fait défaut et nous nous opposerons donc à cet amendement.

M. le rapporteur. Comme je l’ai dit, cette proposition de loi n’était pas destinée à soulever une polémique. Je ne suis cependant pas surpris que cette polémique soit venue du premier intervenant, qui a soulevé la question de la vaccination. Les polémiques viennent donc du camp du Gouvernement, et c’est malheureux.

Je le redis, une majorité du personnel des hôpitaux – presque 85 % – travaille sans présenter le schéma vaccinal complet recommandé. Selon les chiffres de la HAS, 15 % des soignants, en profession libérale ou dans les établissements publics, ont reçu la quatrième ou la cinquième dose : on accepte donc de mettre face à des patients des personnels qui ne sont pas couverts par une efficacité vaccinale – à moins que vous ne puissiez me dire que le vaccin reste efficace indéfiniment ! Il s’agit donc, non pas de remettre sur la table la question de la vaccination, mais de redonner au Parlement la possibilité de traiter la question en se fondant sur le meilleur retour d’expérience et en étudiant posément cette question. Pour ma part, je ne peux pas faire confiance au Gouvernement et lui laisser la main pour décider par décret comment cela se fera.

De fait, c’est le Gouvernement qui déterminera le moment de la réintégration. Il nous a été dit qu’au moment où l’obligation vaccinale sera abrogée, les personnels suspendus devront immédiatement retrouver leur poste, ce qui est normal en droit, mais vous dites que vous ne savez pas où sont ces personnes. Pensez-vous donc qu’elles reviendront sur un claquement de doigts ? Comment la publicité sera-t-elle faite ?

La HAS a donné un avis qui tient compte de l’état de l’épidémie, des connaissances sur le virus et de l’efficacité des vaccins. Nous ne vous demandons pas de traiter la question de la vaccination, car ce serait détourner le sujet, mais de dire si nous permettons au Parlement de reprendre la main, plutôt que de la laisser au Gouvernement, d’autant plus que nous n’avons aucune certitude quant à la façon dont les choses se dérouleront.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 1er est supprimé.

Article 2 : Garantir aux agents publics réintégrés la conservation des droits à l’avancement dont ils disposaient au moment de leur suspension

La commission rejette successivement les amendements rédactionnels AS7, AS9 et AS8 de M. Jean-Victor Castor.

Puis elle rejette l’article 2.

Après l’article 2

Amendement AS5 de M. Dino Cinieri.

M. Dino Cinieri (LR). L’obligation de vaccination contre le covid‑19 a eu des conséquences importantes pour les personnels suspendus et les étudiants qui ont dû arrêter leurs études dans le milieu médical, ainsi que pour les membres des services de police et de gendarmerie et pour les pompiers. Il convient d’en mesurer l’ampleur et d’envisager une indemnisation du préjudice causé.

M. le rapporteur. Avis favorable.

M. Fabien Di Filippo (LR). Je rappelle les mots de la présidente de la commission technique des vaccinations de la HAS : « Nous pensons que presque toute la population qui n’est pas à risque de forme grave a déjà été au contact au moins une fois avec le virus, que ce soit par l’infection ou la vaccination. Actuellement, ne circulent que des sous-variants de la famille Omicron, avec des conséquences sanitaires très limitées. Par ailleurs, l’immunité cellulaire est ancrée pour longtemps, donc tant qu’il y a une circulation à bas bruit d’un virus peu virulent, la stratégie vaccinale n’a pas à viser la population en général. »

Il faut prendre la situation comme elle est. Certaines suspensions qui ont duré deux ans sont des sanctions très fortes. Or la réalité décrite par la HAS est très loin de ce que nous ont décrit les députés de la majorité, qui agitent des peurs qui n’ont plus lieu d’être.

La commission rejette l’amendement.

Article 3 : Gage financier

Amendements AS10 de M. Jean Victor Castor et AS2 de M. Frédéric Falcon (discussion commune).

M. Frédéric Falcon (RN). Mon amendement vise à substituer à la nouvelle taxe sur le tabac proposée par le texte une taxe sur les superprofits engrangés durant la période du covid‑19. C’est une fâcheuse habitude que de toujours taxer le tabac, car il s’agit d’une dépense contrainte. En outre, ces taxes mettent en difficulté le réseau des buralistes et accroissent le trafic de tabac.

La commission rejette successivement les deux amendements.

Puis elle rejette l’article 3.

La commission ayant supprimé ou rejeté tous les articles de la proposition de loi, l’ensemble de celle-ci est rejeté.

*

*     *

L’ensemble des articles de la proposition de loi ayant été rejeté, le texte est considéré comme rejeté par la commission.

En conséquence, aux termes de l’article 42 de la Constitution, la discussion en séance publique aura lieu sur le texte initial de cette proposition de loi.

 

 

 


—  1  —

ANNEXE  1 :
Liste des personnes auditionnÉes par le rapporteur

(Par ordre chronologique)

       M. Frédéric Pierru, sociologue et politiste, chargé de recherche au CNRS

       Association collectif blouses blanches  Mme Sonia Hamdouchy, présidente, et Mme Ikram El Mabrouk et M Bernard Chabaud, membres

       Dr Mona Hedreville, cardiologue

       Haute Autorité de santé (HAS) – Mme Elisabeth Bouvet, membre du collège, et Mme Patricia Minaya Flores, cheffe du service Évaluation en santé publique et évaluation des vaccins

       Guyane santé  Mme Guylène Mergerie, directrice

       M. Kévin Charrier, avocat

 


—  1  —

annexe n° 2 :
textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen de la Proposition de loi

    

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire

12 à 19 [Abrogés]

 

 


([1]) Loi n° 2021‑1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, chapitre II, articles 12 à 19.

([2]) Une présentation détaillée du champ de l’obligation vaccinale professionnelle contre la covid‑19 figure dans le rapport n° 4389 de JeanPierre Pont (pages 41 à 47), déposé le 21 juillet 2021, sur le projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire, examiné en première lecture à l’Assemblée nationale.

([3]) Loi n° 2021-1465 du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire, article 5.

([4]) Pour la période courant du 15 septembre au 15 octobre 2021, une mesure de tolérance temporaire permettait toutefois la présentation du justificatif d’administration d’une dose de vaccin de façon à admettre les personnes engagées dans un parcours vaccinal sans que celui-ci soit encore abouti, sous réserve de présenter également un test de dépistage négatif.

([5]) Article 16 de la loi du 5 août 2021 précitée et articles R. 3116‑1 et R. 3116‑2 du code de la santé publique.

([6]) Telles que celles prévues à l’article L. 3111 4 du code de la santé publique concernant la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et l’hépatite B.

([7]) Si le revenu de solidarité active (RSA) a pu par la suite être accordé aux personnes suspendues, aucune des exceptions formulées à l’article L. 262-4 du code de l’action sociale et des familles ne leur étant applicable, cette éligibilité reste peu connue et a été contestée par certains présidents de conseil départemental.

([8]) Assemblée nationale, commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, compte rendu n° 2 de la séance du mardi 5 juillet 2022.

([9]) Assistance publique-Hôpitaux de Paris, « 30 pistes d’actions pour les 12 prochains mois. Cadre d’élaboration collective d’un plan de travail de l’AP-HP », septembre 2022.

([10]) Agence régionale de santé de la Guadeloupe, projet régional de santé, cadre d’orientation stratégique 20182028.

([11]) Insee, Insee analyses Guyane, n° 27, « La démographie guyanaise toujours aussi dynamique », 16 janvier 2018.

([12]) Ce mécanisme mis en place en 2001 permet aux pays participants de renforcer leur coopération en matière de protection civile, en vue d’améliorer la prévention, préparation et réaction aux catastrophes.

([13]) Santé publique France, « Quelle est la couverture vaccinale contre la COVID19 chez des professionnels exerçant dans le domaine de la santé et des résidents en ESMS. », point au 21 avril 2022.

([14]) « Il est urgent d’arrêter les suspensions des non-vaccinés à l’hôpital », tribune publiée sur le site du journal Marianne, 18 juillet 2022.

([15]) HAS, Obligations et recommandations vaccinales des professionnels : Actualisation des recommandations et obligations pour les étudiants et professionnels des secteurs sanitaire, médicosocial et en contacts étroits avec de jeunes enfants, 30 mars 2023.

([16]) Un second volet consacré aux vaccinations actuellement recommandées pour les professionnels (coqueluche, grippe, hépatite A, rougeole, oreillons, rubéole et varicelle) devrait être publié par la HAS en juillet 2023.

([17]) HCSP, avis des 27 septembre et 7 octobre 2016 relatif aux obligations vaccinales des professionnels de santé.

([18]) L’audition est en ligne sur le portail vidéos de l’Assemblée nationale.

([19]) Dans son avis n° 2022.0044/AC/SESPEV du 21 juillet 2022, le collège de la Haute Autorité de santé considérait ainsi que les données n’étaient « pas de nature à remettre en cause l’obligation vaccinale des personnels des secteurs sanitaire et médico-social qui concourt à une meilleure protection des personnes soignées ou accompagnées, au premier rang desquelles les plus vulnérables ».

([20]) Fédération hospitalière de France, enquête RH avril/mai 2022.

([21]) À cet égard, le docteur Mona Hedreville a souligné durant son audition le contexte « d’anxiété majeure » et le « vent de terreur » caractérisant les Antilles lors de la mise en œuvre de l’obligation vaccinale, lié notamment à des causes externes telles que la contamination au chlordécone.

([22]) HAS, op. cit.

([23]) Proposition de loi n°322, de Mme Caroline Fiat et plusieurs de ses collègues, portant réintégration du personnel des établissements de santé et de secours non-vacciné grâce à un protocole sanitaire renforcé.

([24]) « Nous réintégrerons les soignants suspendus quand les autorités scientifiques nous diront qu’on peut le faire sans faire repartir l’épidémie. », propos publiés sur le site du quotidien France-Antilles le 7 juin 2022.

([25]) Prévu au VIII de l’article 11 de la loi du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

([26]) Loi n° 2022‑1089 du 30 juillet 2022 mettant fin aux régimes d’exception créés pour lutter contre l’épidémie liée à la covid‑19, article 4.

([27]) FHF, La FHF prend acte de l’avis favorable de la HAS pour la réintégration des soignants non-vaccinés, et continue de fortement recommander la vaccination, communiqué du 30 mars 2023.

([28])  https://videos.assemblee-nationale.fr/video.13264838_6436555f4ba37.commission-des-affaires-sociales--abrogation-de-l-obligation-vaccinale-contre-la-covid19-dans-les--12-avril-2023