Note n°

22

 

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Variations du développement génital : quelle prise en charge ?
Que dit la recherche biomédicale ?

__ Juin 2020


@iStock_boumenjapet

Résumé

    Les variations du développement génital regroupent des affections semblables sur le plan morphologique mais très différentes dans les mécanismes biologiques sous-jacents. Une prise en charge au cas par cas, collégiale et multidisciplinaire est nécessaire.

    Réduire la chirurgie à son intérêt esthétique néglige l’impact médical, sociétal et psychologique de l’atypie ; néanmoins, l’abstention thérapeutique jusqu’à l’adolescence est souhaitable dans un grand nombre de cas.

    La recherche dans ce domaine pâtit du manque de suivi des patients. Des données épidémiologiques pourraient être collectées par l’intermédiaire d’un registre national.

M. Jean-François Eliaou, Député

 


 

 

Les Notes scientifiques de l’Office  22 Variations du développement génital  juin 2020 - page 1

Si la détermination du sexe à la naissance est évidente pour la plupart des nouveau-nés, les organes génitaux externes peuvent dans certains cas prendre une grande variété d’apparences, intermédiaires entre les aspects typiquement féminin et masculin. Autrefois appelées « ambiguïté sexuelle », ces variations du dévelop-pement génital regroupent une très grande diversité de situations, qui, si elles peuvent paraître semblables du point du vue phénotypique (ce qui est observable), viennent de processus biologiques différents.

Depuis quelques décennies, la prise en charge médicale et la « pathologisation » de ces variations sont contestées par une partie du milieu associatif. Il est demandé qu’aucune intervention chirurgicale de normalisation de l’apparence des organes génitaux externes ne puisse avoir lieu sans le recueil du consentement de l’enfant, au nom de la liberté de chacun à disposer de son corps et du respect des droits fondamentaux. Cette demande est notamment soutenue par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe[i].

Bien que sensible à l’argument éthique et conscient des écueils des anciennes pratiques, le monde médical insiste sur la nécessité de ne pas empêcher ces interventions, qu’il serait erroné de réduire à leur rôle esthétique, comme le souligne aussi le Conseil d’État[ii].

Par la présentation de l’état des connaissances sur les variations du développement génital et de leur prise en charge actuelle, cette note a pour objectif d’en dégager les principaux enjeux législatifs, dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la bioéthique.

     Le développement génital

Chez l’homme, le développement du système uro-génital est gouverné en partie par les chromosomes sexuels – X et Y – et par des hormones. Chez l’embryon, certaines ébauches d’organes sont bipotentielles – elles peuvent se différencier en organes féminins comme en masculins. D’autres n’existent que dans un des deux sexes et régressent chez l’autre.

Les premières structures à se mettre en place sont les gonades, qui deviennent des testicules ou des ovaires. Ces glandes abritent les cellules germinales, qui produisent les spermatozoïdes et les ovocytes à partir de la puberté. La différenciation des gonades est un processus actif dans les deux sexes, qui nécessite l’implication de gènes portés par les chromosomes sexuels, induisant des voies de régulation spécifiques.

Les gonades produisent ensuite elles-mêmes les hormones qui participent à la différenciation des autres structures. Ainsi, en présence d’hormone antimül-lérienne, produite par le testicule, les canaux de Müller régressent chez le garçon, alors qu’ils se maintiennent chez la fille pour constituer les trompes et l’utérus. À l’inverse, les canaux de Wolff régressent chez la fille et deviennent les canaux déférents chez le garçon.

Les organes génitaux externes (OGE) masculins et féminins dérivent de structures embryonnaires bipotentielles. C’est l’action des hormones androgènes, issues ou dérivées d’hormones produites par les cellules de Leydig dans les testicules, qui induit la différenciation en OGE de type masculin. Sans ces androgènes, ils évoluent vers des structures féminines.

D:\Utilisateurs\malecompte\Mes documents\Mathilde-OPECST\ADG\Notes pr Eliaou\main-qimg-706fd143d74c56d87fd4568b058e7e8a.pngÉvolution des OGE masculins et féminins à 10 et 12 semaines de grossesse. Les mêmes tissus embryonnaires (identifié par leur couleur) donnent des structures tout à fait différentes.

La différenciation des organes génitaux externes dans un sexe ou dans l’autre intervient dès la 9e semaine de grossesse et se prolonge jusqu’au terme. À la naissance, seuls ceux-ci sont visibles, et c’est sur la base de leur observation que le sexe est déclaré[iii].

     Les variations du développement génital (VDG)

Les VDG constituent un ensemble très varié d’affections qui ont en commun d’aboutir à un phénotype non typiquement masculin ou féminin, ou bien un phénotype différent du sexe chromosomique ou gonadique. La connaissance des VDG a beaucoup évolué avec les techniques de biologie moléculaire et d’imagerie. En 2005, une conférence de consensus scientifique et médicale a instauré le terme « disorder of sex development (DSD) » pour qualifier toute variation du développement sexuel ou génital[iv].

L’origine des VDG peut être génétique – un gène muté est transmis d’une génération à l’autre – ou con-génitale et apparaître pendant la grossesse. Différents mécanismes biologiques peuvent en être la cause :

Les anomalies des chromosomes sexuels, survenant au moment de la production des gamètes ou dans les premières divisions cellulaires de l’embryon, sont à l’origine de VDG. En effet, les gènes impliqués dans le déterminisme sexuel et la différenciation du système urogénital sont portés par les chromosomes sexuels.

Ces anomalies peuvent concerner des chromosomes entiers : au lieu d’être de type XX ou XY, le caryotype peut être X ou XXY, en totalité ou de façon mosaïque[v]. Le mosaïcisme XY/X – la coexistence de cellules XY et de cellules X – entraîne un défaut de différenciation de la gonade appelé dysgénésie gonadique mixte, qui induit une sous-virilisation des OGE.

Des réarrangements peuvent aussi avoir lieu et provoquer l’échange de fragments de chromosomes entre eux. Ainsi, la translocation d’un fragment de chromosome Y contenant des gènes du déterminisme sexuel sur un chromosome X est une des causes du développement de gonades qui ont à la fois des caractéristiques d’ovaires et de testicules (ovotestis), et les androgènes produits par la glande virilisent les OGE.

Des mutations peuvent apparaître et affecter des gènes déterminants pour la différenciation des gonades. Si elle ne se différencie pas complètement en testicule, la gonade produit moins d’androgènes, ce qui entraîne le développement d’OGE atypiques.

L’altération d’autres gènes peut donner lieu à des VDG : ceux impliqués dans la synthèse, l’interaction hormones-récepteurs ou la dégradation des hormones nécessaires à la différenciation des OGE. Des mutations du récepteur des androgènes sont ainsi responsables d’une insensibilité à ces hormones chez les enfants XY. Dans ce cas, bien que la gonade produise des androgènes, les ébauches embryonnaires des OGE n’y sont pas sensibles et évoluent donc en structures féminines.

Chez les enfants XX, la VDG la plus fréquente est l’hyperplasie congénitale des surrénales, qui provient de la mutation d’un gène codant pour une enzyme impliquée dans la synthèse d’hormones stéroïdiennes, au niveau de la glande surrénale. Ce déficit enzymatique entraîne une surproduction d’androgè-nes surrénaliens et le développement d’OGE atypiques.

L’hyperplasie congénitale des surrénales est la seule maladie associée à une VDG qui constitue un risque vital, du fait du déséquilibre hormonal surrénalien[vi].

À long terme, les gonades non correctement différenciées sont qualifiées de dysgénésiques et présentent un risque de cancérogénicité[vii].

Au niveau des OGE, les différentes VDG peuvent donner lieu à de légères variations par rapport aux structures typiques d’un sexe ou de l’autre. Des variations plus prononcées peuvent être observées et sont associées à des troubles fonctionnels[viii].

Il n’existe pas de registre national qui fasse état de l’incidence des VDG dans la population. Une tentative de quantification à partir des données médico-administratives de la sécurité sociale a été proposée mais les médecins s’accordent sur le caractère imprécis de la méthode, dû à l’hétérogénéité des pratiques de codage à l’hôpital[ix].

Des estimations peuvent être données, appuyées par des données d’incidence obtenues à l’étranger. Alors que l’hypospade et la cryptorchidie de tous types anatomiques sont fréquents et concerneraient, respectivement, une naissance sur 300 et une sur 100[x], l’hyperplasie congénitale des surrénales est plus rare : une naissance sur 14 000. La dysgénésie gonadique mixte concernerait une naissance sur 10 000, et le trouble ovotesticulaire, une sur 100 000[xi].

La question sémantique reflète le débat sociétal : le corps médical préfère parler d« anomalies du développement génital » pour refléter au mieux la malformation génitale congénitale sous-jacente. Selon les médecins, la notion de « variation » correspond aux différences non pathologiques relevant de la variabilité interindividuelle en population générale. Dès lors qu’il y a une anomalie par rapport à l’embryologie et/ou la physiologie du développement génital, et qu’elle est source de troubles fonctionnels et, potentiellement, de handicap et de troubles psychoaffectifs, il est justifié de se placer dans le registre médical étant donné la vocation de la pratique médicale à « s’inscrire dans une démarche de réduction de la souffrance et d'augmentation de l'épanouissement personnel ».

Une partie du monde associatif estime que parler de « variations » est moins stigmatisant. Cela correspond au souhait d’une prise en charge « dépathologisée » excluant toute intervention médicale chez l’enfant en l’absence de risque vital et d’une meilleure acceptation du corps par une meilleure inclusion dans la société. Néanmoins, l’autre partie du monde associatif préfère le registre pathologique pour parler de ces différences et souhaite la normalisation de l’apparence des OGE.

Une petite partie du corps médical s’inscrit dans une démarche volontariste d’apaisement et d’écoute du milieu associatif, et privilégie le terme « variation », recommandé par le Défenseur des droits[xii].

     L’état de la recherche biomédicale sur les VDG

La recherche clinique et fondamentale sur les VDG se concentre sur plusieurs aspects :

L’étude du génome des personnes atteintes de VDG a permis d’identifier de nouveaux gènes impliqués dans le déterminisme sexuel et dans les mécanismes de l’infertilité. Une grande variabilité interindividuelle de la présentation d’une mutation d’un gène a été mise en évidence : on retrouve des mutations du gène NR5A1 à la fois chez des hommes sans VDG avec infertilité, chez des femmes XY et des hommes XX[xiii]. Cette mauvaise corrélation entre génotype et phénotype, pour l’instant non élucidée, est la conséquence vraisemblable du caractère multigénique[xiv], voire multifactoriel du développement génital.

L’hypothèse d’une origine environnementale a été émise suite à l’augmentation de l’incidence des VDG au cours des dernières décennies. En effet, chez l’animal, le perturbateur endocrinien distilbène a des effets délétères sur le développement génital et conduit à une hausse de l’incidence des hypospades[xv]. Chez l’homme, l’incidence des hypospades est plus élevée chez les enfants de femmes exposées à la molécule in utero, suggérant une action épigénétique[xvi]. L’incidence serait également plus grande chez les enfants susceptibles d’être plus exposés à des produits chimiques par la profession d’un parent[xvii].

D’autres travaux privilégient l’hypothèse du décalage de l’âge de la mère[xviii] ou celle de la hausse de l’indice de masse corporelle[xix].

La recherche clinique étudie également la qualité de vie des personnes porteuses de VDG, car elles sont plus sujettes aux troubles psychologiques tels qu’anxiété, dépression et phobie sociale[xx]. Les déterminants principaux sont le type de VDG, le caractère atypique des OGE, le sentiment de différence et l’insatisfaction vis-à-vis de son corps[xxi]. Les interventions chirurgicales, parfois itératives, et leurs conséquences éventuelles, peuvent également être la source de mal-être[xxii].

La recherche est particulièrement limitée par la faible incidence des VDG sévères et par le manque de suivi des formes les plus bénignes. La mise en place d’un registre national, en coopération avec un registre international[xxiii], permettrait le suivi de cohortes.

     La prise en charge médicale

Selon la présentation de la VDG, les interventions médicales sont plus ou moins invasives et ont pour objectif de restaurer une fonctionnalité[xxiv] et de réduire l’atypie. Il peut s’agir de chirurgie, pour reconstruire un hypospade postérieur accompagné de troubles fonctionnels importants ou de risques d’infections, pour réduire la taille du clitoris ou aboucher le vagin au périnée. Les médecins insistent sur l’amélioration des pratiques depuis plusieurs décennies et l’amélioration de la connaissance même des tissus. Ces chirurgies demeurent lourdes et à haut risque de complications[xxv].

L’hormonothérapie est employée pour substituer les hormones surrénaliennes, pour bloquer ou amplifier la virilisation des OGE ou pour permettre la féminisation des caractères sexuels secondaires à la puberté.

Lorsqu’une VDG est diagnostiquée à la naissance ou plus tard dans l’enfance, les différentes possibilités thérapeutiques y compris l’abstention temporaire ou « permanente » sont proposées aux parents. Ce sont les parents qui prennent ces décisions, en accord avec l’équipe médicale tant que l’enfant n’est pas en âge (variable en fonction des individus) de prendre une décision avisée. La décision doit être éclairée par la compréhension de l’anomalie, des risques de complication encourus et par l’accompagnement psychologique de l’enfant et de ses parents.

À l’exclusion des VDG à risque élevé de cancérisation, de graves anomalies fonctionnelles (ex : reconstruction d’un hypospade associée à plus de complications si elle est tardive[xxvi]) ou d’infections récidivantes, il n’existe pas d’études cliniques suffisamment étayées pour trancher entre abstention et intervention chirurgicale, ni de décider du moment de cette intervention.

Concernant l’abstention thérapeutique, une partie du corps médical s’inquiète du manque de recul sur la capacité de la société à être inclusive et à permettre un épanouissement des personnes porteuses de VDG, mais aussi sur la capacité des parents à soutenir leur enfant. En effet, certains parents sont désemparés par la découverte d’un nouveau-né avec des OGE atypiques, alors que l’investissement des parents dans leur enfant est « le meilleur rempart au développement de conséquences psycho-affectives ». En France, l’expérimentation de l’abstention thérapeutique commence, à l’initiative de médecins-chercheurs, afin de mieux apprécier ses avantages. Une telle approche est encouragée en Suisse et en Allemagne.

Pour ces raisons, le corps médical estime qu’il ne faut pas instaurer de limite d’âge pour les interventions médicales chez les enfants porteurs de VDG. Dans la mesure où les troubles fonctionnels associés aux VDG apparaissent pour partie lors de la vie sexuelle, il semble néanmoins raisonnable d’attendre que les adolescents en fassent la demande, pour que les interventions soient souhaitées et non subies.

Les VDG étant associées à un risque plus élevé de troubles psychoaffectifs, une prise en charge psy-chologique des parents et des enfants est primordiale, qu’il y ait intervention médicale ou non. Le suivi de l’enfant doit se faire sur le long terme car le sentiment de satisfaction avec son corps change au cours de la vie, notamment en fonction de la vie sexuelle.

     L’organisation de la prise en charge

En France, plusieurs centres hospitaliers universitaires (CHU) prenant en charge les VDG se sont organisés en  réseau de référence, dans le cadre du plan maladie rares[xxvii]. Leurs équipes multidisciplinaires se réunissent régulièrement pour étudier les cas de façon collégiale[xxviii].

Si une systématisation de la prise en charge selon des critères établis par une autorité de santé est difficilement concevable, étant donné l’hétérogénéité de la présentation des VDG et des contextes familiaux, un cadre déontologique peut être fixé. C’est l’objet de l’article 21 bis du projet de loi relatif à la bioéthique, qui inscrit dans la loi l’obligation d’information des parents par le corps médical et d’orientation des enfants dans un des centres de référence pour leur prise en charge. Cette mesure vise à éviter toute décision unilatérale et à privilégier la prise en charge par des praticiens dont c’est la spécialité.

Dans les rares cas de difficultés d’assignation de sexe (25 à 50 enfants par an), l’examen par une équipe pluri-disciplinaire doit avoir lieu dans les meilleurs délais car la déclaration du sexe à l’état civil s’effectue dans les 5 jours suivant la naissance. C’est aussi une forte demande des familles à la naissance de leur enfant.

Des erreurs de détermination du sexe à la naissance, notamment dans le cas de l’hyperplasie congénitale des surrénales, ont encore lieu chaque année[xxix]. Pour le bien-être de ces personnes, il serait important de faciliter la procédure de rectification et que celle-ci ne soit plus mentionnée sur l’acte d’état-civil.

Conclusions

La grande diversité des mécanismes biologiques à l’origine de variations du développement génital et la mauvaise corrélation entre génotype et phénotype ne permettent pas d’édicter des règles pour systématiser leur prise en charge et justifient de ne pas contraindre la pratique médicale par l’instauration d’un âge limite ou la nécessité de recueillir le consentement de l’enfant. L’adaptation de la prise en charge au cas par cas est aussi justifiée par la diversité des contextes familiaux.

Néanmoins, fixer un cadre déontologique avec une obligation d’information, de collégialité de la prise de décision thérapeutique[xxx] et d’orientation systématique des enfants porteurs de VDG vers un centre de référence, viendra utilement diminuer le risque de décision unilatérale ou non éclairée.

Des moyens doivent être accordés aux centres de référence de façon à ce que chaque enfant et sa famille puisse bénéficier d’un soutien psychologique, qu’une intervention ait été décidée ou non.

La diversité des mécanismes biologiques, la rareté des cas sévères et la difficulté de suivre au long terme les cas les plus bénins entravent la recherche, alors que des recommandations de prise en charge fondées sur l’evidence-based medicine sont souhaitées, pour guider la décision d’intervenir ou pas. La mise en place d’un registre national ainsi que la mise à disposition de personnel qualifié pour la recherche clinique auprès des centres de référence est nécessaire pour que la recherche avance et apporte des réponses.

En l’absence de consensus sur la nature des conditions médicales qui doivent faire l’objet d’un suivi par un centre de référence, ceux-ci, en lien avec les autorités de santé compétentes, devraient définir le spectre des VDG qui doivent être examinées de façon collégiale.

 

Sites Internet de l’OPECST :

http://www.assemblee-nationale.fr/commissions/opecst-index.asp

http://www.senat.fr/opecst/


 

 

Personnes consultées*

– Une représentante de l’association Amihe (Association maison intersexualité et hermaphrodisme Europe).

– Mme Anu Bashamboo, chercheuse à l’Institut Pasteur, éditrice-en-chef de la revue scientifique Sexual development

– M. Rémi Besson, professeur de chirurgie pédiatrique, chirurgien urologue pédiatre au Centre de référence des maladies rares du développement génital de Lille.

Mme Claire Bouvattier, endocrinologue pédiatre et coordinatrice du Centre de référence des maladies rares du développement génital de Paris-Bicêtre.

Mme Laurence Brunet, juriste, spécialiste du droit de la famille, auteure d’un chapitre d’ouvrage intitulé « La mention du sexe à l’acte de l’état civil : enjeux et chausse-trappes » et chargée de mission au Centre de référence des maladies rares du développement génital de Paris-Bicêtre.

– Deux représentants de l’association Collectif intersexes et allié·e·s.

– Une représentante de l’association GSSIA (Groupe de soutien du syndrome de l’insensibilité aux androgènes et assimilés).

M. Nicolas Kalfa, professeur d’urologie, chirurgien pédiatre et coordinateur du Centre de référence des maladies rares du développement génital de Montpellier, président de la Société d’urologie pédiatrique. 

– M. Kenneth McElreavey, chercheur à l’Institut Pasteur, éditeur de la section pathologie de la revue Sexual development

– M. François Medjkane, pédopsychiatre au Centre de référence des maladies rares du développement génital de Lille.

– M. Benjamin Moron-Puech, maître de conférences en droit privé à l’Université Paris II Panthéon-Assas, spécialiste du droit des minorités.

– M. Pierre Mouriquand, professeur de chirurgie pédiatrique, chirurgien pédiatre urologue et coordinateur du Centre de référence des maladies rares du développement génital de Lyon.

– Deux représentantes de l’association Surrénales, association de patients atteints d’affections liées aux glandes surrénales.

* NB : Les personnes consultées ont, dans certains cas, exprimé des opinions divergentes sur un ou plusieurs aspects de la note.

Coordination scientifique de Mme Mathilde Lecompte, conseillère scientifique

 


Rapport d’information établi par Mmes Maryvonne Blondin et Corinne Bouchoux pour la Délégation au droit des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes sur les variations du développement sexuel : lever un tabou, lutter contre la stigmatisation et les exclusions. Février 2017.

[i] « Promouvoir les droits humains et éliminer les discriminations à l’égard des personnes intersexes » Conseil de l’Europe, résolution 2191 du 12/10/2017 ; http://assembly.coe.int/nw/xml/XRef/Xref-XML2HTML-fr.asp?fileid=24232&lang=fr.

[ii] Étude du Conseil d’État demandée par le Premier Ministre et adoptée le 28 juin 2018 « Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ? » ; https://www.conseil-etat.fr/ressources/etudes-publications/rapports-etudes/etudes/revision-de-la-loi-de-bioethique-quelles-options-pour-demain.

[iii] L’observation visuelle est complétée d’une palpation des bourrelets scrotaux pour vérifier la présence de testicules.

[iv] La conférence a mis en place une classification listant les différentes possibilités phénotypiques de chaque sexe chromosomique, en lien avec le phénomène biologique sous-jacent. On distingue ainsi 5 groupes principaux très différents les uns des autres :

[NB : 46 indique que le caryotype comporte bien 46 chromosomes ; 45 signifie qu’un chromosome est manquant ; 47 qu’il y a un chromosome surnuméraire]

– les ADG 46, XX essentiellement représentées par les hyperplasies surrénales congénitales (HSC) par déficit en 21 hydroxylase ;

– les ADG 46, XY beaucoup plus hétérogènes qui recouvrent des sous-groupes très différents :

– les ADG mosaïques en particulier représentées par les 45X/46, XY qui sont probablement les situations les plus difficiles à résoudre ;

– les ovo-testicular DSD pour lesquelles cohabitent à la fois des structures masculines et féminines et dont le caryotype est le plus souvent 46, XX ou mosaïque ;

– les ADG « non-hormonales/non-chromosomiques » représentées essentiellement par les exstrophies, certaines anomalies caudales, les aphallies et certains micropénis très sévères.

Bouvattier, C., et P. Mouriquand. « Prise en charge des anomalies du développement génital pour les nuls ». Annales d’Endocrinologie, 33e congrès SFE, 77, no 4 (1 septembre 2016): 248. https://doi.org/10.1016/j.ando.2016.07.045.

[v] La présence d’un seul chromosome sexuel (X) est décrite dans le syndrome de Turner. Ce syndrome est associé à un développement incomplet du système uro-génital féminin (https://www.orpha.net/data/patho/Pub/fr/Turner-FRfrPub44v01.pdf). Un caryotype à deux chromosomes X et un Y relève du syndrome de Klinefelter, caractérisé par un moindre développement des testicules qui entraîne une stérilité, et, éventuellement, une augmentation du volume des glandes mammaires (https://www.orpha.net/data/patho/Pub/fr/Klinefelter-FRfrPub362.pdf). Le mosaïcisme se dit d’un organisme dont les cellules n’ont pas toutes le même nombre de chromosomes. Ce phénomène découle d’une erreur dans la répartition des chromosomes au cours des premières divisions cellulaires de l’embryon.

[vi] L’hyperplasie congénitale des surrénales avec perte de sel est la seule affection pour laquelle il existe un risque vital. Pour cette raison, l’hyperplasie congénitale des surrénales, dans sa forme principale, la déficience en 21 hydroxylase, est dépistée de façon systématique à la naissance, en France par dosage de son produit, la 17-hydroxy-progestérone. Cette affection est néanmoins bien connue et se stabilise avec un traitement à base de corticoïdes.

[vii] Mouriquand, et al. « Surgery in Disorders of Sex Development (DSD) with a Gender Issue: If (Why), When, and How? » Journal of Pediatric Urology 12, no 3 (juin 2016): 139‑49. https://doi.org/10.1016/j.jpurol.2016.04.001.

[viii] La cryptorchidie (testicules non descendus) ou l’hypospade antérieur (méat urinaire sur la face inférieure de la verge) lorsque le phénotype est masculin, ou de clitoris hypertrophié lorsque le phénotype est féminin sont des variations bénignes. L’hypospade antérieur est distingué de l’hypospade postérieur par une position du méat très proche de l’extrémité de la verge. L’hypospade postérieur est associé à des déficits fonctionnels plus importants que l’hypospade antérieur. Des variations plus prononcées peuvent être observées, par exemple, dans les stades les plus avancées de virilisation chez les enfants XX atteints d’hyperplasie congénitale des surrénales, où la partie supérieure du vagin ne s’abouche pas au périnée mais à l’urètre.

[ix] Lors de son audition par la Commission spéciale Bioéthique du Sénat le 12 décembre 2019, Benjamin Moron-Puech, juriste, a communiqué les résultats de ses recherches visant à quantifier les opérations chirurgicales pratiquées, en France, ayant pour but de corriger des variations du développement génital. D’après ses recherches, un total de près de 5 000 opérations chirurgicales ont réalisées au cours de l’année 2017, selon les bases de données de la Caisse nationale d’assurance maladie (registre Sniiram). Les médecins interrogés par l’Office ont mis en garde contre une interprétation erronée de ces données, du fait que d’un praticien à l’autre et d’un hôpital à l’autre, les actes ne sont pas codés de la même façon.

[x] Ces données concernent hypospades et cryptorchidies de tous les types anatomiques (hypospades antérieurs et postérieurs ; cryptorchidies vraies – abdominales, inguinale et supra-scrotale – et ectopiques – fémorale, pré-scrotale, etc.), et isolés ou associés avec d’autres phénotypes.

[xi] Ces affections sont cependant très rares et peuvent être sous-diagnostiquées, ainsi, il est difficile d’en connaître la prévalence exacte ; https://www.orpha.net/consor4.01/www/cgi-bin/Disease_Search.php?lng=EN&data_id=2037.

[xii] Avis du Défenseur des droits n°17-04, 20 février 2017 ; https://juridique.defenseurdesdroits.fr/doc_num.php?explnum_id=18576.

[xiii] Bashamboo, et al. « Human Male Infertility Associated with Mutations in NR5A1 Encoding Steroidogenic Factor 1 ». American Journal of Human Genetics 87, no 4 (8 octobre 2010): 505‑12. https://doi.org/10.1016/j.ajhg.2010.09.009.

[xiv] L’expression d’un gène peut dépendre de nombreux autres gènes ; on parle d’effet du « fonds génétique » ou « genetic background ».

[xv] Stewart, et al. « In Utero Exposure to Both High- and Low-Dose Diethylstilbestrol Disrupts Mouse Genital Tubercle Development ». Biology of Reproduction 99, no 6 (1 décembre 2018): 1184‑93. https://doi.org/10.1093/biolre/ioy142.

[xvi] Kalfa, et al. « Prevalence of Hypospadias in Grandsons of Women Exposed to Diethylstilbestrol during Pregnancy: A Multigenerational National Cohort Study ». Fertility and Sterility 95, no 8 (30 juin 2011): 2574‑77. https://doi.org/10.1016/j.fertnstert.2011.02.047.

[xvii] Kalfa, et al. « Is Hypospadias Associated with Prenatal Exposure to Endocrine Disruptors? A French Collaborative Controlled Study of a Cohort of 300 Consecutive Children Without Genetic Defect ». European Urology 68, no 6 (décembre 2015): 1023‑30. https://doi.org/10.1016/j.eururo.2015.05.008.

[xviii] Carlson, et al. « Maternal and Fetal Risk Factors Associated with Severity of Hypospadias: A Comparison of Mild and Severe Cases ». Journal of Pediatric Urology 5, no 4 (1 août 2009): 283‑86. https://doi.org/10.1016/j.jpurol.2008.12.005.

[xix] Cependant, cette hypothèse a été validée par certains travaux (Akre, et al. « Maternal and Gestational Risk Factors for Hypospadias ». Environmental Health Perspectives 116, no 8 (1 août 2008): 1071‑76. https://doi.org/10.1289/ehp.10791) et invalidée par d’autres (Adams, et al. « No Association between Maternal Pre-Pregnancy Obesity and Risk of Hypospadias or Cryptorchidism in Male Newborns ». Birth Defects Research Part A: Clinical and Molecular Teratology 91, no 4 (2011): 241‑48. https://doi.org/10.1002/bdra.20805).

[xx] Les travaux menés suggèrent qu’elles souffrent de troubles psychoaffectifs de façon similaire (en intensité) aux personnes ayant une maladie chronique. Vries, et al. « Mental Health of a Large Group of Adults With Disorders of Sex Development in Six European Countries ». Psychosomatic Medicine 81, no 7 (2019): 62940. https://doi.org/10.1097/PSY.0000000000000718.

[xxi] Bohet, et al. « Mental Health Status of Individuals with Sexual Development Disorders: A Review ». Journal of Pediatric Urology 15, no 4 (août 2019): 356‑66. https://doi.org/10.1016/j.jpurol.2019.04.010.

[xxii] Roen, Katrina. « Intersex or Diverse Sex Development: Critical Review of Psychosocial Health Care Research and Indications for Practice ». The Journal of Sex Research 56, no 4‑5 (13 juin 2019): 511‑28. https://doi.org/10.1080/00224499.2019.1578331.

[xxiii] Par exemple, avec le registre international I-DSD ; https://home.i-dsd.org/.

[xxiv] Il s’agit des fonctions urinaires et sexuelles et de la fertilité.

[xxv] Il est estimé que le taux de complications (qu’elles soient bénignes ou sévères) pour la reconstruction d’un hypospade est de 50 %.

[xxvi] Garnier, et al. « Late Surgical Correction of Hypospadias Increases the Risk of Complications: A Series of 501 Consecutive Patients ». BJU International 119, no 6 (2017): 942‑47. https://doi.org/10.1111/bju.13771.

[xxvii] Notamment le Centre de référence des pathologies gynécologiques rares (http://www.maladiesrares-necker.aphp.fr/pgr/), le Centre de référence des maladies endocriniennes de la croissance et du développement (http://crmerc.aphp.fr/) et le Centre de référence des maladies rares du développement génital (https://www.developpement-genital.org/).

[xxviii] Il s’agit des Réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP) nationales, organisées de façon mensuelle entre les quatre centres. Des participants extérieurs sont invités à y présenter des cas également.

[xxix] En effet, car le phénotype d’une petite fille avec hyperplasie congénitale des surrénales peut être le même qu’un garçon présentant un hypospade et une cryptorchidie. Mouriquand, et al. « Surgery in Disorders of Sex Development (DSD) with a Gender Issue: If (Why), When, and How? » Journal of Pediatric Urology 12, no 3 (juin 2016): 13949. https://doi.org/10.1016/j.jpurol.2016.04.001.

[xxx] La collégialité fait partie des mesures recommandées dès 2005, par la conférence de consensus. Elle implique la présence de spécialiste de plusieurs disciplines : pédiatrie, néonatalogie, chirurgie, urologie, psychiatrie, génétique médicale.