N° 1658

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 juillet 2025.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 146 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, dE L’Économie gÉnÉrale
et du contrÔLE BUDGÉTAIRE

relatif à l’activité du Conseil économique, social et environnemental
et à la gestion de l’institution

ET PRÉSENTÉ PAR

M. Daniel LABARONNE,
rapporteur spécial

 



SOMMAIRE

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Pages

RECOMMANDATIONS du rapporteur spécial

INTRODUCTION

I. Le CESE, une institution consultative en quÊte de LÉgitimitÉ

A. Le CESE, un rÔle dÉfini mais peu visible

1. Les missions de conseil du CESE auprès des pouvoirs publics

2. La réforme de 2021

B. Une production d’avis encore limitÉe et peu influente

1. Des publications peu nombreuses

2. Des thématiques parfois éloignées des grands enjeux économiques et sociaux

C. Une rémunération des conseillerS qui interroge au regard de la charge d’activité

1. Une charge de travail réduite pour les conseillers

2. Une rémunération significative au regard de l’investissement demandé pour un grand nombre de conseillers

D. L’origine des saisines : une institution peu sollicitée

1. Peu de saisines de la part du gouvernement ou du Parlement

2. Une majorité d’auto-saisines signe d’un isolement institutionnel ?

E. Une dynamique à POURsuivre : les conventions citoyennes

II. Le CESE face au dÉfi de l’exemplaritÉ dÉmocratiquE

A. Les moyens budgÉtaires À la disposition du CESE

1. Une dotation revue à la baisse dans le cadre de la LFI 2025

2. Des efforts de transparence financière à poursuivre

B. Des conditions de travail des agents jugÉes trÈs favorables

1. La question du temps de travail

2. Des rémunérations élevées et des inégalités salariales entre les femmes et les hommes

C. L’entretien du palais d’Iéna : une responsabilité du CESE

1. Générer des ressources propres pour financer l’entretien du Palais d’Iéna

2. Le lancement des travaux de rénovation du Palais

TRAVAUX DE LA COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

 

 

 

 

 

 

 

 


   RECOMMANDATIONS du rapporteur spécial

Recommandation n° 1 : s’assurer que les thèmes des travaux réalisés par le biais d’auto-saisines reflètent bien l’ensemble du champ de compétences du Conseil économique, social et environnemental et les sujets de préoccupation des Français.

Recommandation n° 2 : réduire le nombre des excuses autorisées pour justifier l’absence d’un membre à une réunion d’une formation de travail ou à une séance plénière.

Recommandation n° 3 : modifier, au cours de la mandature actuelle, l’article 65 du règlement intérieur du CESE pour prévoir que la rémunération des membres augmente, jusqu’à un plafond, à mesure qu’ils sont présents lors des réunions de la formation de travail à laquelle ils sont rattachés et lors des séances plénières.

Recommandations n° 4 : mettre davantage en valeur la plateforme du CESE de dépôt des pétitions et de recueil des signatures à ces pétitions.

Recommandation n° 5 : rendre publics les comptes du CESE.

Recommandation  6 : intégrer les comptes du CESE au système Chorus qui assure l’exécution des dépenses et la tenue de la comptabilité de l’État.

Recommandation  7 : communiquer dans les temps à la direction du budget les éléments permettant de publier un rapport annuel de performances du programme 126 qui retrace l’exécution réelle des crédits par l’institution au cours de l’année écoulée.

Recommandation  8 : supprimer les douze jours « CESE » auxquels ont droit les agents du CESE.

Recommandation n° 9 : appliquer le cadre légal en matière de durée de travail et respecter les 35 heures de travail hebdomadaires.

Recommandation  10 : supprimer les primes spécifiques au CESE, hormis celles qui permettent de compenser une sujétion spéciale comme le fait de devoir travailler la nuit.

 

 


   INTRODUCTION

Il y a cent ans était créé le Conseil national économique qui avait pour fonction « d’étudier les problèmes intéressant la vie économique du pays, d’en rechercher les solutions et de proposer l’adoption de ces solutions aux pouvoirs publics » ([1]). Depuis, hormis sous le régime de Vichy, l’institution a revêtu différentes formes et noms, jusqu’à devenir, à la faveur de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, le Conseil économique, social et environnemental (CESE). Un titre lui est propre dans la Constitution – le titre XI – qui décrit notamment ses attributions ainsi que ses modalités de saisine.

Le CESE est composé de 175 membres désignés par des organisations représentatives de la société civile. Sa mission historique est de conseiller le Gouvernement et le Parlement dans l’élaboration des politiques publiques dans les champs qui relèvent de sa compétence : initialement les questions économiques, puis également celles liées au social, et, enfin, également celles liées à l’environnement. De façon beaucoup plus récente, l’institution est devenue une assemblée au sein de laquelle peut s’exprimer la participation citoyenne, notamment à travers l’organisation des conventions citoyennes.

L’institution a été réformée en dernier lieu par l’adoption de la loi organique n° 2021-27 du 15 janvier 2021, après l’avoir été précédemment par la loi organique n° 2010-704 du 28 juin 2010 qui avait tiré les conséquences de la révision constitutionnelle de 2008. La réforme de 2021 a notamment confié de nouvelles missions au CESE, modernisé ses modalités de saisines pour permettre aux citoyens de le saisir plus facilement et réduit le nombre de ses membres. La déontologie au sein de l’institution a également été renforcée.

Si cette réforme était bienvenue, elle n’a pas fait taire les critiques dont fait régulièrement l’objet le CESE, au premier rang desquelles celles relatives à son utilité et à sa contribution au débat public. Il est ainsi courant de lire dans la presse des articles qui appellent de façon pure et simple à supprimer l’institution ([2]). Plusieurs parlementaires ont également déposé des propositions de loi dans ce sens ([3]).

Face à ces critiques, le rapporteur spécial a cherché à démêler le vrai du faux parmi les reproches adressés au CESE et a souhaité, dans ces conditions, consacrer à cette institution ses travaux menés dans le cadre du Printemps de l’évaluation 2025. Il ressort de ses investigations que la mandature et l’équipe dirigeante actuelles, conscientes des reproches à l’encontre du CESE, ont entrepris plusieurs démarches bienvenues, qu’il s’agisse de la certification des comptes du CESE, d’un contrôle accru de l’absentéisme des membres ou du lancement d’un plan de rénovation du Palais d’Iéna où se réunissent les conseillers. L’organisation des conventions citoyennes depuis 2019 constitue également une source de travail supplémentaire pour les agents. Pour autant, le rapporteur spécial identifie toujours plusieurs axes d’amélioration. Deux problématiques majeures ont interpellé son attention, liées, pour l’une, à l’activité des conseillers et, pour l’autre, à la gestion administrative de l’institution.

Après avoir analysé l’étendue des publications du CESE et les conditions dans lesquelles ces publications étaient adoptées, le rapporteur spécial est en effet arrivé à la conclusion que les membres ne fournissaient qu’un investissement limité au titre de leur mandat. Si le rapporteur a conscience que les membres du CESE cumulent ce mandat avec un engagement professionnel ou syndical qui justifie leur présence au sein de cette institution, ce trop faible investissement est regrettable, surtout lorsqu’il est mis en regard du niveau de rémunération des conseillers. En outre, les conditions de travail des agents du CESE apparaissent extrêmement favorables, tant du point de vue de leurs rémunérations que de l’activité qui est attendue d’eux. Cela paraît inopportun dans un contexte de fortes contraintes budgétaires et au regard des efforts demandés aux Français. Le rapporteur spécial indique que, dans le cadre de ce travail d’évaluation, le CESE a soulevé des questions sur sa légalité, n’a pas répondu à certains courriers du député, et a établi des comparaisons qui ne semblent pas fondées entre conseillers et parlementaires. À l’issue de ses travaux, l’exigence du rapporteur spécial est la suivante : que l’exemplarité du CESE s’aligne sur celle attendue de toute institution publique, et que l’engagement de ses membres soit à la hauteur de la mission qui leur est confiée. Il formule plusieurs recommandations en ce sens.

 

 

 

 

 

 

 

 

I.   Le CESE, une institution consultative en quÊte de LÉgitimitÉ

A.   Le CESE, un rÔle dÉfini mais peu visible

1.   Les missions de conseil du CESE auprès des pouvoirs publics

La mission historique et principale du CESE consiste à conseiller, à travers la publication de différents travaux, le Gouvernement et le Parlement dans la définition des politiques qui présentent un enjeu économique, social ou environnemental. À cette fin, les articles 69 et 70 de la Constitution prévoient trois modes de saisine du CESE, auxquels s’ajoute la possibilité pour le CESE de s’autosaisir prévue par la loi organique du 28 juin 2010. Ces différents types de saisine peuvent être résumés ainsi :

– la saisine obligatoire : le Premier ministre a l’obligation de saisir le CESE sur les projets de loi de programmation à caractère économique, social et environnemental ;

– la saisine facultative : le Premier ministre peut saisir le CESE sur tout projet de loi, d’ordonnance, de décret, ainsi que sur les propositions de loi entrant dans le domaine de sa compétence ainsi que sur les projets de loi de programmation définissant les orientations pluriannuelles des finances publiques ; le président de l’Assemblée nationale, le président du Sénat ou le Premier ministre peuvent également saisir le CESE sur tout « problème » de caractère économique, social ou environnemental ou de demande d’avis ([4]) ; 

– la saisine citoyenne : le CESE peut, depuis la mise en œuvre de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 par la loi organique du 28 juin 2010, être saisi par voie de pétition de toute question relevant de son champ de compétence ;

– l’auto-saisine : depuis l’adoption de la loi organique du 28 juin 2010, le CESE peut, de sa propre initiative, appeler l’attention du Gouvernement et du Parlement sur les réformes qui lui paraissent nécessaires.

Au-delà de cette mission historique qui incombait également aux institutions qui ont précédé le CESE, ce dernier participe aujourd’hui activement au recueil de la parole citoyenne. Cette mission se manifeste notamment par l’organisation des différentes conventions citoyennes qui réunissent pendant plusieurs mois des dizaines de citoyens censés représenter la diversité de la société française dans le but de formuler de propositions sur un sujet donné. De manière plus générale, le CESE a vocation à représenter les différentes composantes de la société civile organisée (syndicats, associations, entreprises, etc.) et, de ce fait, à assurer une meilleure prise en compte de ses intérêts dans l’élaboration des politiques publiques par les pouvoirs publics. Aujourd’hui, le CESE est ainsi composé de 52 représentants des salariés, de 52 représentants des entreprises, des exploitants agricoles, des artisans, des professions libérales, des mutuelles, des coopératives et des chambres consulaires, de 45 représentants au titre de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative et, enfin, de 26 représentants au titre de la protection de la nature et de l’environnement.

2.   La réforme de 2021

La loi organique n° 2021-27 du 15 janvier 2021 relative au Conseil économique, social et environnemental a réformé l’organisation et les missions du CESE. Après la révision constitutionnelle de 2008 qui avait étendu son champ de compétence et ses modalités de saisines et avait été déclinée dans un texte organique en 2010, il s’agissait, selon l’exposé des motifs du projet de loi à l’origine de la loi organique de 2021, « de faire de cette Assemblée le carrefour des consultations publiques ».

La loi organique de 2021 a ainsi créé la possibilité, pour le CESE, d’organiser des consultations publiques sur des sujets économiques, sociaux ou environnementaux soit de sa propre initiative, soit à la demande du Gouvernement ou du président de l’Assemblée nationale ou de celui du Sénat. Des garanties ont été prévues afin de s’assurer que les citoyens participant à ces consultations, tirés au sort, soient par exemple représentatifs de la société ou correctement informés au sujet des thèmes sur lesquels ils ont vocation à s’exprimer. Toujours dans l’objectif d’associer davantage les citoyens, la loi organique a également modifié le droit de pétition auprès du CESE. Les pétitions et signatures peuvent, depuis l’adoption de cette loi, être adressées par internet à l’institution, et non plus exclusivement au format papier. L’âge pour signer une pétition a par ailleurs été abaissé à 16 ans, contre 18 ans auparavant. Surtout, le seuil de signatures nécessaires pour que le CESE puisse être saisi à être réduit de 500 000 à 150 000.

L’autre volet majeur de la réforme concernait les membres du CESE. L’objectif du projet de loi était de renforcer leur représentativité de la société civile et les obligations déontologiques auxquelles ils étaient soumis. Le nombre de conseillers a été réduit, de 233 à 175, et l’institution s’est vue dans l’obligation de se doter d’un code de déontologie et d’un organe chargé de cette question. La loi organique a également prévu que les conseillers remettent un rapport annuel d’activité qui a vocation à être rendu public et déclarent leurs intérêts. Si le rapporteur spécial considère que toutes ces orientations s’inscrivent dans le bon sens, il émet encore plusieurs réserves quant à la façon dont l’institution met en œuvre ses missions. Il développe ces réserves ci-dessous.

B.   Une production d’avis encore limitÉe et peu influente

1.   Des publications peu nombreuses

La réalisation des missions précitées se fait au travers de la publication par le CESE de différentes sortes de travaux. Ainsi, le rapport d’activité du CESE qui porte sur l’année mai 2022 – mai 2023 souligne que l’institution a adopté et publié 29 travaux. Le rapport d’activité mai 2023 – mai 2024 indique, quant à lui, que 27 travaux ont été adoptés et publiés. Ces travaux revêtent différentes formes. Les avis constituent l’essentiel des travaux publiés par le CESE. Ils s’articulent généralement autour de deux parties : une analyse du sujet sur lequel porte la saisine et des préconisations destinées à résoudre des problématiques identifiées. De façon plus marginale, des déclarations, c’est-à-dire des textes portés par le Bureau du CESE, des résolutions – des textes courts du CESE, appelant à porter son attention sur un thème d’actualité –, des contributions et des études sont également publiées. Ainsi, entre mai 2023 et mai 2024, sur les 27 travaux rendus publics par le CESE, outre une large majorité d’avis (22), on dénombre deux déclarations, deux résolutions et une contribution.

L’analyse de ces différentes publications montre qu’elles présentent des tailles très inégales de l’une à l’autre. Si certaines d’entre elles comportent plusieurs centaines de pages, d’autres ne tiennent que sur quelques pages. Ainsi, une déclaration du CESE sur la « situation démocratique » ([5]) ne consiste qu’en une dizaine de paragraphes. De même, une déclaration ([6]) du 1er avril 2025 ne comprend qu’une centaine de mots. Le rapporteur a également pu constater, comme l’indique le CESE, que les résolutions consistent bien en des textes courts, puisque pour plusieurs d’entre elles, le texte de la résolution stricto sensu repose sur quelques pages seulement. Dans ces conditions, le rapporteur spécial estime que seuls les avis permettent de rendre compte de l’activité du CESE en termes de publications de fond destinées à éclairer les pouvoirs publics. Or, au cours des deux dernières années, 44 avis ont été publiés, mobilisant 75 membres en qualité de rapporteurs, soit en moyenne 22 avis et 38 rapporteurs par an. Rapporté au nombre de formations de travail, cela signifie 2 à 3 avis par an pour chacune d’entre elles ; le rapporteur spécial estime que cette contribution au débat public est relativement faible et qu’un plus grand nombre de membres pourraient endosser des fonctions de rapporteurs. Par ailleurs, même dans le cas de publications substantielles, le rapporteur ne peut que s’étonner du faible nombre d’auditions menées eu égard à l’importance des sujets abordés. Ainsi, le rapporteur a été surpris de constater que seules six auditions avaient été organisées pour rédiger une étude ([7]) sur la santé au travail, ce qui lui paraît relativement modeste étant donné les problématiques soulevées par un tel sujet.

2.   Des thématiques parfois éloignées des grands enjeux économiques et sociaux

En parcourant les différents avis publiés, le rapporteur spécial n’a pu que constater un tropisme dans les thèmes d’étude retenus, au profit des questions environnementales et au détriment des questions économiques. Ainsi, sur les 19 avis publiés entre mai 2024 et juin 2025, près de la moitié concerne de façon directe ou directe l’environnement (évaluation des politiques publiques environnementales, montée des eaux, protection de l’Océan, restauration de la nature…). Sans remettre en cause l’importance capitale des enjeux environnementaux, le rapporteur spécial appelle à une approche plus équilibrée dans le choix des thématiques, afin de mieux refléter la diversité des attentes citoyennes. Il considère que les questions économiques, pourtant au cœur des préoccupations de nombreux concitoyens, ne doivent pas être en retrait dans les travaux du CESE. Le président du Conseil a d’ailleurs reconnu que ce volet aurait pu être davantage développé durant la mandature. Ce double constat va à l’encontre de la vocation du CESE qui est précisément, comme son nom l’indique, de s’intéresser aux sujets économiques, sociaux et environnementaux. Le tableau ci-dessous illustre ce biais dans le choix des thématiques retenues.

Questions abordées par les travaux ([8]) du CESE
sur la période mai 2022 – mai 2023

Thématiques

Nombre de travaux

Environnement

7

Économie et finances

2

Affaires sociales et santé

1

Travail et emploi

2

Droits des femmes et égalité

1

Affaires européennes et internationales

3

Société

3

Territoire, Agriculture et alimentation

2

Éducation, culture et communication

3

Source : rapporteur spécial, d’après le rapport d’activité du CESE.

 

Recommandation n° 1 : s’assurer que les thèmes des travaux réalisés par le biais d’auto-saisines reflètent bien l’ensemble du champ de compétences du CESE et les sujets de préoccupations des Français.

En outre, même lorsque les intitulés des travaux peuvent laisser penser que les questions économiques y occupent une place centrale, ce n’est pas toujours le cas. Le rapporteur spécial s’étonne qu’un avis ([9]) sur les « modèles productifs » aborde de nombreux questionnements contemporains mais passe sous silence un élément fondamental, le travail, qui n’est envisagé ni comme facteur de production, ni comme levier stratégique. Celui-ci n’est évoqué que de manière périphérique à travers les conditions de travail, les relations de travail, la psychologie au travail ou encore le réenchantement du travail dans une approche « humano-centrée ». Le rapporteur spécial considère que le CESE n’adopte pas dans un tel cas une approche équilibrée et se demande où sont représentées, dans cet avis, les personnes qui considèrent le travail comme au cœur des politiques productives et comme une force structurante et une ressource décisive pour notre avenir économique, social et environnemental.

C.   Une rémunération des conseillerS qui interroge au regard de la charge d’activité

1.   Une charge de travail réduite pour les conseillers

La principale activité des membres du CESE au titre de leur mandat consiste en leur participation à la formation de travail dont ils relèvent et aux sessions plénières. Les formations de travail se réunissent une demi-journée par semaine. Deux séances plénières d’une demi-journée chacune ont généralement lieu toutes les deux semaines. Autrement dit, l’investissement cumulé pour « siéger » au sein des différentes instances de l’institution représente un peu plus de quatre jours par mois. Le rapporteur précise que le rôle des conseillers ne se limite pas à leur présence en formations de travail et en séance plénière puisque certains conseillers assument par exemple également des fonctions de rapporteurs. Il rappelle par ailleurs que les conseillers continuent d’exercer une activité professionnelle en parallèle de leur mandat. Cette présence minimale attendue interroge toutefois grandement le rapporteur spécial au regard de la rémunération que perçoivent les conseillers (voir infra) et de la participation parfois faible à ces réunions. Le rapporteur a ainsi relevé que les avis sont régulièrement adoptés par à peine 130 votants, ce qui signifie que près d’un cinquième des conseillers sont en moyenne absents lors de ces scrutins. Lorsqu’il s’est ouvert de ce constat aux équipes du CESE, il a été profondément surpris d’apprendre que l’institution visait un taux de présence moyen compris entre 75 % et 80 %. Autrement dit, l’institution se satisfait de l’absence d’un quart des conseillers, et ce, alors même que les membres du CESE sont rémunérés pour leur mandat. Cette présence des membres est par ailleurs à analyser à l’aune du fait qu’aucune séance plénière n’est prévue entre le 10 juillet et le 10 septembre 2025 et que les membres ont droit à une absence injustifiée par trimestre.

 

NOMBRE DE VOTANTS LORS DES DIX DERNIERS AVIS ADOPTÉS ([10])

 

Thématiques

Nombre de votes

1

110

2

132

3

123

4

121

5

121

6

137

7

129

8

121

9

134

10

117

Source : rapporteur spécial, d’après les avis du CESE.

Face à ces constats, l’institution répond que l’activité attendue de la part des conseillers ne se résume pas à leur participation aux réunions des formations de travail et aux sessions plénières et ne saurait être appréciée sous ce seul angle. Les membres peuvent en effet être amenés à endosser le rôle de rapporteurs, à prendre part à des groupes de travail ad hoc, à représenter le CESE au sein d’organismes extérieurs ou à participer à l’action européenne et internationale du CESE. Le rapporteur spécial reconnaît tout cela mais ne se satisfait pour autant pas des arguments avancés dans la mesure où les activités décrites ne mobilisent pas tous les conseillers et ne mobilisent même, en réalité, qu’une minorité d’entre eux. Ainsi, comme cela a été indiqué précédemment, en moyenne 38 conseillers assurent le rôle de rapporteur par an, ce qui signifie que près de 140 ne remplissent pas ce rôle. De même, le CESE a précisé au rapporteur spécial qu’à ce jour cinquante membres siègent au sein d’organismes extérieurs. Il peut s’agir d’instituts et centres de recherche comme le Centre de Recherche pour l'Étude et l'Observation des Conditions de Vie, de comités consultatifs comme le Comité national de la biodiversité ou encore de commissions consultatives comme la Commission des comptes de la Sécurité sociale. À nouveau, une minorité des conseillers est donc concernée.

Le bilan annuel d’activité publié par les membres permet de rendre compte de cette faible activité. Pour la première fois cette année, l’ensemble des membres du CESE a en effet été invité à établir un bilan individuel d’activité, en application de l’article 22 de l’ordonnance du 29 décembre 1958, tel qu’il résulte de la loi organique du 15 janvier 2021, qui prévoit que « Les membres du Conseil économique, social et environnemental remettent au président un rapport de leur activité annuelle. Ce rapport est rendu public sur le site internet du Conseil. ». L’analyse de ces bilans annuels va dans le sens des propos du rapporteur spécial : l’investissement des membres se limite très souvent à leur participation à la formation de travail dont ils relèvent et à des interventions en plénières. Plusieurs de ces bilans annuels en font état ([11]). Par ailleurs, si le rapporteur spécial salue cette initiative il déplore très fortement qu’il ait fallu attendre 2025 pour appliquer une disposition en vigueur depuis 2021. Le temps pris pour mettre en œuvre cette disposition prévue par la loi organique est selon lui révélateur du peu de cas porté à l’investissement des membres et des lenteurs de cette institution.

 

Chronologie de la mise en place du bilan annuel d’activité

La loi organique du 15 janvier 2021 a modifié l’article 22 de l’ordonnance du 29 décembre 1958. Cet article, qui dispose désormais que les membres du Conseil « remettent au président un rapport de leur activité annuelle », ce rapport étant « rendu public sur le site internet du Conseil », est en vigueur depuis le 1er avril 2021.

Cette loi a également prévu la création, au sein de l’institution, d’une instance en charge de la déontologie, à qui est revenu le soin de piloter ce projet. Le collège de déontologie a été installé le 24 mars 2022.

Ce n’est qu’en décembre 2023, soit près de trois ans après l’entrée en vigueur de la loi, que le collège de déontologie a transmis au président du CESE un avis portant modèle de bilan annuel de mandat des membres, le Bureau du CESE ayant souhaité disposer d’un modèle de déclaration commun à tous les membres du Conseil.

Cet avis a été présenté par le président du collège de déontologie aux membres du Bureau à l’occasion de leur réunion du 2 avril 2024. Le texte a été discuté en Bureau puis adopté le 16 avril 2024. Le modèle de rapport annuel d’activité a ensuite été diffusé à l’ensemble des membres du CESE en mai 2024. Ce n’est qu’en juin 2025 que les premiers rapports ont été publiés sur le site du CESE, soit quatre ans après l’entrée en vigueur de la disposition prévoyant la rédaction de tels rapports. Le rapporteur spécial s’interroge sur ce délai de mise en œuvre d’une loi organique, d’autant qu’il s’agit d’un document tout à fait simple appelant les membres à renseigner des items précisant les instances auxquelles ils prennent part ou leurs contributions aux travaux du CESE au cours de l’année écoulée (le conseiller a-t-il été rapporteur par exemple) et à la vie de l’institution plus généralement.

2.   Une rémunération significative au regard de l’investissement demandé pour un grand nombre de conseillers

Les conseillers du CESE perçoivent une rémunération en contrepartie de leur mandat. Selon l’article 1er du décret n° 59-602 du 5 mai 1959 relatif à la rémunération et aux indemnités des membres du Conseil économique, social et environnemental, cette rémunération est égale au tiers de l’indemnité parlementaire. Selon l’article 2 de ce même décret, cette rémunération est complétée par une indemnité de fonction calculée par jour de présence. Le montant mensuel de cette indemnité varie selon les fonctions exercées par les membres au sein de l’institution : ainsi, il ne peut être supérieur pour le président du Conseil, à cinq quarts de l’indemnité parlementaire, pour les membres du bureau et les présidents de formation de travail, au quart de l’indemnité parlementaire et, pour les autres membres, à deux onzièmes de l’indemnité parlementaire. Sur la base de ces différentes dispositions, les différentes rémunérations mensuelles possibles sont égales :

– pour un membre, à 2 498,37 euros nets par mois ;

– pour un membre siégeant au Bureau ou présidant une formation de travail, à 2 822,74 euros nets par mois ;

– pour le président, à 7 784,19 euros nets par mois.

Compte tenu de l’investissement décrit précédemment, le rapporteur spécial invite à engager une réflexion approfondie sur l’adéquation des niveaux de rémunération actuellement pratiqués des conseillers du CESE à leur activité réelle. Il tient à rappeler que le salaire net médian s’élève, en France, à 2 183 euros nets par mois en équivalent temps plein pour les salariés du secteur privé, et à 2 260 euros nets mensuels dans la fonction publique ([12]).

La rémunération des conseillers peut certes varier en fonction de leur présence en séances plénières et lors des formations de travail. L’article 65 du règlement intérieur du CESE indique ainsi que « L’indemnité prévue par l’article 1er du décret précité peut être réduite selon des modalités arrêtées par le Bureau sur proposition des questrices et des questeurs, en cas de présence insuffisante aux séances plénières et formations de travail ». Cette présence insuffisante est appréciée grâce à la réalisation d’un émargement des membres pour chaque réunion des formations de travail et chaque plénière. Bien que récente ([13]), le rapporteur salue la mise en place d’un contrôle de l’absentéisme des membres et relève que des pénalités liées au défaut de présentéisme sont bien prélevées aux membres concernés. Il déplore toutefois que cette pénalité ne concerne que l’indemnité de fonction. En effet, à côté de leur rémunération les membres du CESE perçoivent également une indemnité représentative de frais qui a pour but de couvrir les frais engagés par les conseillers dans le cadre de l’exercice de leur mandat. Elle s’élève à 593,20 euros pour les membres habitant en Île-de-France et à 988,66 euros pour l’ensemble des autres membres ([14]). Le rapporteur spécial déplore surtout qu’un champ trop large d’excuses soit accepté. Le rapporteur spécial estime ainsi que le fait d’occuper la fonction de rapporteur ne devrait pas permettre d’être exonéré de présence en formation de travail ou en plénière. Il invite à rapprocher la liste des excuses acceptées de celles autorisées pour les parlementaires. Plusieurs excuses tolérées correspondent aujourd’hui aux activités auxquelles peuvent prendre part les membres du CESE en leur qualité de conseiller ou parce que ces activités ont un rapport avec le CESE. Les parlementaires sont aussi désignés pour siéger, en leur qualité de parlementaire, dans différentes instances ; pour autant, la participation à ces instances ne constitue pas une excuse valable pour ne pas être présent en commission ou en séance selon l’article 1er de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique autorisant exceptionnellement les parlementaires à déléguer leur droit de vote. Sur cette base, le rapporteur spécial considère que les membres du CESE ne devraient être autorisés à être absents que dans les cas suivants ([15]) :

– maladie, accident ou événement familial grave empêchant le membre du CESE de se déplacer ;

– service militaire accompli en temps de paix ou en temps de guerre ;

– présidence d’organismes paritaires ;

– cas de force majeure appréciés par décision de la Présidence.

 

Recommandation n° 2 : réduire le nombre des excuses autorisées pour justifier l’absence d’un membre à une réunion de formation de travail ou à une séance plénière.

Le président du CESE a indiqué au rapporteur spécial qu’une réflexion était engagée pour revoir la manière dont s’appliquent les pénalités en cas d’absentéisme. À l’heure actuelle, à partir d’un certain nombre d’absences non justifiées, l’institution soustrait à la rémunération de base un montant proportionnel au nombre d’absences non justifiées rapporté au nombre de réunions ou séances. L’idée serait désormais d’inverser la façon de procéder et qu’une partie de la rémunération des membres soit indexée sur leur présence effective. Des propositions doivent être formulées en ce sens pour le début de la prochaine mandature. Le rapporteur spécial estime qu’un tel système serait bienvenu. Il juge toutefois qu’une telle réforme peut être menée sans attendre la prochaine mandature et invite à modifier le règlement intérieur du CESE en ce sens.

 

Recommandation n° 3 : modifier, au cours de la mandature actuelle, l’article 65 du règlement intérieur du CESE pour prévoir que la rémunération des membres augmente, jusqu’à un plafond, à mesure qu’ils sont présents lors des réunions des formations de travail et séances plénières

D.   L’origine des saisines : une institution peu sollicitée

1.   Peu de saisines de la part du gouvernement ou du Parlement

Pour rappel, pour s’emparer d’un sujet, le CESE doit être saisi. Il existe quatre types de saisines :

– la saisine gouvernementale ;

– la saisine parlementaire ;

– la saisine citoyenne ;

– la saisine d’initiative (dans ce cas, le CESE s’auto-saisit).

Dans les faits, les saisines réalisées par les pouvoirs publics sont peu nombreuses. Ainsi, entre 2019 et 2024, le CESE a été saisi 27 fois, dont 24 fois par le Gouvernement et 3 fois par le Sénat, soit 4,5 fois par an en moyenne. Le CESE indique que l’institution atteint bien la cible fixée par l’indicateur de performance 1.1 Origine des saisines du rapport annuel de performances du programme 126 qui fixe à 25 % la part des travaux devant résulter d’une saisine parlementaire ou gouvernementale. Toutefois, ceci n’est vrai que pour l’année 2023. Surtout, c’est oublier que ce ratio est influencé par le nombre total de travaux réalisés par l’institution. Autrement dit, cette part est mécaniquement plus élevée si le CESE s’auto-saisit peu. Or, le rapporteur spécial a déjà eu l’occasion de montrer que la quantité de travaux publiés par l’institution était relativement peu élevée.

Interrogé sur le faible nombre de saisines gouvernementales et parlementaires, le CESE a indiqué que ce nombre « ne pouvait en aucun cas être le seul indicateur de l’intérêt manifesté par les pouvoirs publics pour le CESE ». L’institution a ainsi mis en avant que les différentes conventions citoyennes et la dimension citoyenne des états généraux de l’information avaient été organisées par le CESE à la demande des pouvoirs publics. L’institution estime également que les publications du CESE sont « très régulièrement » citées par les députés et sénateurs dans le cadre des travaux parlementaires. Ainsi, les travaux du CESE ont été cités 777 fois à l’appui d’amendements déposés par des députés au cours de la XVIe législature. Enfin, selon l’administration du CESE, le président du CESE entretient des « liens étroits » avec le Parlement, le Gouvernement et la présidence de la République ([16]). Le rapporteur spécial n’est pas satisfait par ces explications. Il rappelle notamment qu’au cours de la XVIe législature, 99 115 amendements ont été déposés. Moins d’un pourcent des amendements déposés par les députés au cours de cette législature faisaient ainsi mention des travaux du CESE.

2.   Une majorité d’auto-saisines signe d’un isolement institutionnel ?

Faute de saisines parlementaires ou gouvernementales, les travaux issus du CESE sont pour l’écrasante majorité le fruit d’auto-saisines. Ainsi, sur la période mai 2022 – mai 2023, 29 travaux ont été publiés par le CESE dont seulement deux à la suite de saisines externes ([17]), soit 93 % de travaux issus d’auto-saisines. Au-delà des pouvoirs publics, les citoyens ont également la capacité de saisir le CESE par le biais de pétitions. Cela résulte de l’entrée en vigueur de la loi organique mettant en œuvre la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Or, aucune pétition n’a jamais rempli les conditions fixées pour procéder à une telle saisine. Seule une pétition a atteint le nombre de signatures nécessaires pour saisir le CESE, en 2013, mais le Bureau du CESE avait refusé de l’examiner. Il s’agissait d’une pétition en opposition au projet de loi relatif à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe. Alors que la décision du bureau du CESE avait été contestée en justice, le Conseil d’État lui avait donné raison, considérant que « si le CESE peut être régulièrement saisi par voie de pétition d’une question à caractère économique, social ou environnemental alors même qu’un projet de loi qui n’est pas sans lien avec celle-ci est soumis au Parlement, il ne peut être saisi aux fins de donner un avis sur un projet de loi que par le Gouvernement. » ([18]) La réforme de 2021 a abaissé le nombre de signatures nécessaires pour saisir le CESE, de 500 000 à 150 000, sans que cela ne permette pour le moment à une pétition de franchir ce seuil.

Interrogée par le rapporteur spécial sur les efforts mis en place par l’institution pour faire connaître cette modalité particulière de saisine, l’administration du CESE a indiqué que le CESE avait mis en place sa propre plateforme de recueil des pétitions depuis 2023 ([19]). Depuis cette date, près de 150 pétitions ont été déposées, récoltant au total près de 7 000 signatures. Le CESE estime que « si ces chiffres sont trop faibles pour [le] saisir, ils témoignent toutefois d’un réel intérêt des pétitionnaires pour les débouchés que peut offrir l’institution. » Le rapporteur spécial ne partage pas tout à fait ce point de vue. Les chiffres communiqués signifient qu’en moyenne 47 signatures sont apportées à chaque pétition. Le rapporteur spécial considère que ces résultats sont loin de répondre aux attentes, bien au contraire. Ils sont par ailleurs à analyser au regard du coût de cette plateforme. Le coût de lancement de la plateforme s’est élevé à 84 075 euros. Le coût de gestion de la plateforme atteint, quant à lui, environ 38 500 euros par an. Étant donné son coût, une plus grande visibilité doit être accordée à cette plateforme. Le rapporteur spécial a par exemple été surpris de constater que le lien internet vers la plateforme n’apparaissait ni sur la description du compte de l’institution sur le réseau social pour lequel elle compte le plus d’abonnés, ni sur la publication épinglée de ce compte.

Recommandation n° 4 : mettre davantage en valeur la plateforme du CESE de dépôt des pétitions et de recueil des signatures à ces pétitions.

Le CESE a également indiqué procéder à une veille active des pétitions en tout genre, sans que ces pétitions ne soient forcément adressées au CESE ou, quand elles le sont, ne remplissent pas les conditions officielles de saisine. Cette veille vise à s’emparer des sujets portés par ces pétitions quand bien même elles ne parviennent pas à franchir le seuil des 150 000 signatures. Ainsi, depuis 2017, le CESE a adopté dix avis et résolutions sur des sujets issus de pétitions citoyennes comme les déserts médicaux, le recyclage, le bien-être animal ou encore le handicap. Le rapporteur spécial salue cette façon de procéder.

E.   Une dynamique à POURsuivre : les conventions citoyennes

La démocratie participative est de plus en plus prégnante au CESE. Depuis 2019, l’institution organise notamment des conventions citoyennes. Alors que la convention citoyenne pour le climat avait été annoncée par le Président de la République, cette pratique a été formalisée par la réforme du CESE en 2021. Un article 4-3 a été introduit dans l’ordonnance organique du 29 décembre 1958 : « Pour l’exercice de ses missions, le Conseil économique, social et environnemental peut, à son initiative ou à la demande du Premier ministre, du président de l’Assemblée nationale ou du président du Sénat, recourir à la consultation du public dans les matières relevant de sa compétence. »

Deux conventions citoyennes ont été organisées jusqu’à aujourd’hui, une sur le climat et l’autre sur la fin de vie. Une troisième a été annoncée en mai par le Président de la République sur les temps des enfants. Ses conclusions devraient être rendues à la fin de l’année.

Concrètement, ces conventions sont généralement composées de 150 personnes ([20]) tirées au sort et dont le panel est censé être représentatif de la diversité de la population française. Elles ont vocation à répondre à une question, souvent en proposant des mesures destinées à corriger une problématique identifiée par les pouvoirs publics. Les questions posées pour les trois conventions précitées sont ou étaient les suivantes :

– « Comment réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40 % d’ici 2030, dans un esprit de justice sociale ? » ;

– « Le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ou d’éventuels changements devraient-ils être introduits ? » ;

– « Comment mieux structurer les différents temps de la vie quotidienne des enfants afin qu'ils soient plus favorables à leurs apprentissages, à leur développement et à leur santé ? »

Ces conventions sont organisées en trois temps, répartis sur plusieurs sessions. Une première phase d’acculturation doit permettre aux citoyens de se familiariser avec le sujet de la convention et ses enjeux, notamment en rencontrant des parties prenantes. Une deuxième phase de délibération permet aux citoyens de confronter leurs points de vue. La convention se conclut enfin par une phase d’harmonisation et d’adoption des travaux.

CALENDRIER DE LA CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT

 

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Source : site internet de la Convention citoyenne pour le climat.

Le rapporteur spécial trouve extrêmement bienvenu de confier cette mission au CESE et appelle à consolider ce rôle. L’institution a d’ores et déjà procédé à la création d’une direction dédiée à la participation citoyenne en charge non seulement de l’organisation des conventions citoyennes mais, plus globalement, de l’ensemble des dispositifs associant des citoyens. En ce qui concerne spécifiquement la question des conventions citoyennes, le rapporteur spécial considère qu’il est tout à fait pertinent de solliciter des citoyens sur des enjeux qui trouvent un fort écho dans le débat public et pour lesquelles des réponses restent à définir.

Ces conventions citoyennes mobilisent à la fois les membres et les agents du CESE. En ce qui concerne les agents, ces derniers sont chargés de l’ensemble de l’organisation pratique des conventions. Cette organisation représente une charge de travail nouvelle. Le CESE assure par exemple l’indemnisation des citoyens tirés au sort pour participer aux travaux, la prise en charge des frais de transport, d’hébergement et de restauration des participants ou encore la tenue des sessions de travail, qui ont généralement lieu durant le week-end. La convention citoyenne sur la fin de vie a ainsi représenté vingt-sept jours de travail étalés sur neuf week-ends. De leur côté, les conseillers sont impliqués de différentes manières. Ils sont notamment représentés au sein des comités de gouvernance des différentes conventions. Le comité de gouvernance de la convention citoyenne sur les temps de l’enfant comporte par exemple six membres du CESE sur un total de quatorze membres. Ces comités sont essentiellement chargés d’arbitrer les aspects méthodologiques de chacune des étapes de ces conventions. Un collège de garant est également mis en place pour chaque convention. Ce collège veille au respect des principes suivants : la sincérité  notamment des informations fournies dans la phase d’acculturation –, l’égalité, par exemple dans les prises de parole lors des échanges, la transparence, en premier lieu des délibérations, et enfin l’impartialité.

II.   Le CESE face au dÉfi de l’exemplaritÉ dÉmocratiquE

A.   Les moyens budgÉtaires À la disposition du CESE

1.   Une dotation revue à la baisse dans le cadre de la LFI 2025

La loi de finances initiale (LFI) pour 2025 ([21]) a doté le programme 126, qui porte les crédits du CESE, de 34,4 millions d’euros, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement. Cette dotation est en nette diminution par rapport aux enveloppes budgétaires des dernières années qui accordaient à l’institution une dotation d’environ 45 millions d’euros. Toutefois, l’ensemble de la différence entre ces deux montants ne traduit pas une perte sèche. En effet, la loi du 14 avril 2023 de financement rectificative de la Sécurité sociale pour 2023 a clôturé plusieurs régimes spéciaux de retraite, dont celui des anciens membres du CESE ‑ ce qui a eu des conséquences sur la dotation accordée au CESE. Depuis l’entrée en vigueur de cette réforme au 1er septembre 2023, les nouveaux membres du CESE cotisent au régime général, dont ils relèveront pour leur pension. Aussi, à compter du 1er janvier 2025, c’est la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) qui assure le financement de la Caisse de retraite des anciens membres du CESE, qui sort du périmètre de la dotation et du budget du CESE. Ce financement représente environ 8 millions d’euros par an. Le reste de la différence provient bien d’une réduction des crédits de fonctionnement du CESE, dont l’enveloppe a été réduite d’un peu plus de 2 millions d’euros, passant de 9,1 à 6,7 millions d’euros. Si le rapporteur spécial reconnaît qu’il s’agit d’une diminution substantielle, il souscrit à cette baisse des crédits alors que l’ensemble des administrations publiques doivent fournir des efforts significatifs dans le contexte budgétaire actuel.

Par ailleurs, le rapporteur spécial a été étonné de constater que le budget du CESE soit resté inchangé à partir de 2021, alors même que la réforme de l’institution, qui est entrée en vigueur en avril 2021, a porté le nombre de ses membres de 233 à 175, soit une diminution de 25 %. La loi de finances initiale pour 2021 dotait ainsi le CESE de 44,4 millions d’euros en AE comme un CP, soit un montant absolument égal à celui prévu par la LFI 2020. Ce montant a par la suite été maintenu quasiment à l’identique, de même que le nombre d’emplois de l’institution qui n’a pas varié.

Interrogée par le rapporteur spécial sur ces moyens constants face à un nombre de conseillers significativement réduit, l’administration du CESE a mis en avant plusieurs éléments. Elle a d’abord souligné que l’activité du CESE, en matière de publications, n’avait pas diminué et que le nombre d’avis adoptés était même en progression. Étant donné le volume de la publication du CESE sur lequel le rapporteur spécial a déjà eu l’occasion de s’exprimer, cela ne peut que le laisser dubitatif quant à l’activité de publication observée avant la réforme, qui plus est rapportée au nombre de membres. L’administration du CESE a également mis en avant la part croissante prise par les travaux liés à la participation citoyenne. Elle a aussi indiqué que les équipes étaient mobilisées par de nouveaux contrôles (la certification des comptes, le contrôle systématique des frais de mandats, le contrôle systématique de l’absentéisme des membres) et par la mise en œuvre d’un plan pluriannuel d’investissement. Si le rapporteur spécial souscrit à ces nouvelles orientations, qu’il commentera dans la suite du présent rapport, il ne peut que s’interroger sur l’emploi des ressources avant le développement de ces nouvelles missions. Même si l’évolution des crédits des différents programmes de la mission budgétaire Conseil et contrôle de l’État fait apparaître que la dynamique de la dépense est bien moins importante du côté du CESE que du côté des autres institutions couvertes par le programme, il semble difficile de comparer l’évolution de l’activité de cette institution et celle des autres institutions.

Il convient enfin de noter que la dotation de l’État n’épuise pas l’ensemble des moyens financiers du CESE qui perçoit également des ressources propres. Le rapporteur spécial aura l’occasion de revenir sur ce point.

2.   Des efforts de transparence financière à poursuivre

La transparence de la situation financière du CESE s’est améliorée au cours des dernières années sous l’effet d’évolutions réglementaires et de la volonté de la nouvelle équipe dirigeante. En raison du statut particulier que lui confère la Constitution, le CESE bénéficie d’une certaine autonomie financière qui ne s’étend pas jusqu’à l’autonomie complète dont bénéficient les pouvoirs publics comme les chambres parlementaires et le Conseil constitutionnel. Cette autonomie le distingue toutefois du fonctionnement des ministères ou des autres structures étatiques. Ce régime sui generis est défini dans le décret du 10 mai 2017 relatif au régime administratif et financier du CESE. Il prévoit par exemple que les comptes du CESE sont tenus par un trésorier qui n'est pas soumis aux dispositions applicables aux comptables publics telles que définies par plusieurs articles du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique. L’article 12 du décret du 10 mai 2017 a prévu l’établissement d’un compte annuel et sa transmission à la Cour des comptes. Il dispose par ailleurs que « les comptes du Conseil économique, social et environnemental sont soumis à une certification annuelle », sans désigner l’instance chargée de cette mission. En 2021, le président du CESE et le Premier président de la Cour des comptes sont convenus de confier à un conseiller maître honoraire, assisté par un cabinet de commissaire aux comptes indépendants, le soin de réaliser cette mission d’audit des comptes du CESE. Le rapporteur spécial salue vivement cette décision, d’autant plus que les comptes 2024 ont été approuvés sans réserve en avril 2025. Il estime toutefois que la transparence financière du CESE pourrait être accrue à plusieurs égards.

Le rapporteur déplore tout d’abord que les comptes du CESE ne soient pas rendus publics. L’administration du CESE a certes indiqué au rapporteur que « les comptes du CESE, exhaustifs, complets et lisibles, [donnent] la vision complète de sa situation financière », mais cette qualité de l’information mérite un large degré de publicité. À titre de comparaison, l’Assemblée nationale publie, pour chaque exercice, ses états financiers, le rapport de certification de la Cour des comptes, le rapport du collège des questeurs à la commission spéciale chargée de vérifier et d’apurer les comptes et des éléments détaillés sur le budget. Le rapporteur spécial déplore également que le rapport annuel de performances, publié chaque année en avril au moment de la présentation du projet de loi relatif aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes, ne permette pas de constater la réalité de l’exécution des crédits dont dispose le CESE.

En effet, comme le relevait déjà le rapporteur spécial ([22]), les crédits du CESE sont réputés intégralement consommés dès le début de l’exercice dès lors qu’ils ont été virés sur le compte au Trésor détenu par le CESE, quel que soit leur niveau réel d’exécution. Cette spécificité empêche la direction du budget de disposer d’une vision exacte de la réalité des dépenses, « l’analyse de la situation du CESE dépendant de la transmission, par l’institution, de documents ad hoc avec, parfois, plusieurs mois de retard » ([23]). Enfin, comme le rappelle la Cour des comptes ([24]), « la non-intégration du CESE dans Chorus et de ses agents dans le dispositif de paie de l’État ainsi que la non-publication de ses comptes limitent la capacité de connaître sa situation financière, en cours et en fin d’exercice ». Le CESE a indiqué au rapporteur spécial avoir pris contact avec la direction générale des finances publiques afin d’évaluer la possibilité d’intégrer les comptes du CESE à Chorus. Cette solution permettrait de saisir l’intégralité des comptes du CESE dans les comptes de l’État, et non de procéder à une intégration partielle comme actuellement via les services du Premier ministre. Le rapporteur spécial recommande de mener à bien cette réforme et de publier un rapport annuel de performance représentatif de l’exécution réelle des crédits par le CESE. Cela suppose, pour le CESE, de transmettre à la direction du budget certaines données plus tôt.

 

Recommandation n° 5 : rendre publics les comptes du Conseil économique, social et environnemental.

 

Recommandation n° 6 : intégrer les comptes du CESE au système Chorus qui assure l’exécution des dépenses et la tenue de la comptabilité de l’État.

 

Recommandation n° 7 : communiquer dans les temps à la direction du budget les éléments permettant de publier un rapport annuel de performances du programme 126 qui retrace l’exécution réelle des crédits par l’institution au cours de l’année écoulée.

B.   Des conditions de travail des agents jugÉes trÈs favorables

1.   La question du temps de travail

Les agents du CESE bénéficient d’un régime particulièrement avantageux en ce qui concerne les jours pendant lesquels ils peuvent ne pas travailler (hors week-end). Ils peuvent ainsi bénéficier de :

– congés annuels : 25 jours

– RTT : 11 jours

– jours « CESE » : 12 jours

– fermeture administrative entre Noël et le jour de l’an : 6 jours.

Cela représente au total 54 jours. Au-delà de ces 54 jours, les agents peuvent bénéficier de 8 jours de récupérations horaires en raison du système d’horaires variables.

Le rapporteur ne peut que s’étonner d’un régime aussi favorable et avoir du mal à en identifier l’ensemble des justifications. Que représentent par exemple les jours « CESE » ? Pourquoi la fermeture administrative entre Noël et le jour de l’an donne-t-elle lieu à six jours de repos supplémentaires plutôt que de comptabiliser ces jours dans les congés autorisés ? Si le rapporteur spécial comprend totalement que chaque administration ou entreprise puisse accorder des jours supplémentaires par rapport au cadre minimum légal en fonction du contexte, le cas du CESE lui paraît disproportionné. Il invite donc l’institution à réduire le nombre de jours supplémentaires dérogatoires accordés aux agents.

Recommandation n° 8 : supprimer les douze jours « CESE » auxquels ont droit les agents du CESE.

Dans ces conditions, la Cour des comptes relevait déjà en 2014 ([25]) que le temps de travail des agents du CESE « reste inférieur à la durée légale ». Si l’institution indique que ses agents effectuent bien 1 607 heures au cours de l’année, ce quota semble difficilement pouvoir être atteint compte tenu du nombre annuel de jours de congés, auxquels s’ajoutent les 104 samedis et dimanches ainsi que les jours fériés. Pour parvenir aux 1 607 heures annuelles, l’administration du CESE comptabilise les jours fériés parmi les jours travaillés. L’administration du CESE a indiqué que des discussions devaient s’ouvrir bientôt avec les représentants du personnel sur ce sujet. Le rapporteur spécial invite la direction du CESE à faire en sorte que ces discussions aboutissent au plus vite.

Recommandation n° 9 : appliquer le cadre légal en matière de durée de travail et respecter les 35 heures de travail hebdomadaires.

2.   Des rémunérations élevées et des inégalités salariales entre les femmes et les hommes

Le régime extrêmement avantageux en termes de temps de travail l’est également sur le plan des rémunérations. En moyenne, la rémunération mensuelle brute d’un agent du CESE s’élève à 5 879 euros. Pour rappel, le salaire net médian s’élève à 2 183 euros nets par mois en équivalent temps plein en France pour les salariés du secteur privé, et à 2 260 euros nets dans la fonction publique. Le rapporteur spécial s’interroge sur les éléments pouvant justifier une telle différence de traitement, notamment au regard de la durée de travail constatée. L’analyse des dix rémunérations les plus élevées au sein de l’institution est aussi riche d’enseignements. Celles-ci représentent un total de 1 419 517 euros bruts annuels, soit en moyenne 11 829 euros par mois.

S’il est vrai que les dix plus hautes rémunérations observées dans certains ministères (intérieur, économie et finances, ministères sociaux, …) sont supérieures, le rapporteur spécial trouve la comparaison audacieuse : il considère en effet que le niveau de responsabilités de la directrice du budget ou du directeur général de la police nationale n’est pas comparable à celui d’un cadre dirigeant du CESE. Par ailleurs, c’est oublier que les administrations citées comprennent des dizaines de milliers d’agents, contre 154 pour le CESE. Enfin, c’est oublier à nouveau la question du temps de travail.

Le niveau de rémunération des agents s’explique par le fait qu’elle est composée, pour une très large part, de primes et d’indemnités, dont certaines sont « sans équivalent dans la fonction publique » ([26]), comme le relevait la Cour des comptes. Malgré ce constat formulé il y a dix ans, ces primes demeurent, par exemple l’indemnité spéciale d’assemblée et la prime de fin d’année, deux primes spécifiques au CESE qui ont représenté respectivement un coût total de 1 647 309 euros et de 761 983 euros en 2024. Le rapporteur a également été surpris de constater qu’il existe une prime de retraite. En 2024, cette prime a été versée à deux agents à l’occasion de leur départ en retraite pour un montant total de 23 629 euros, soit 11 814,50 euros en moyenne par agents. Le rapporteur spécial invite à supprimer la quasi-intégralité des primes spécifiques au CESE et à ne conserver que celles qui se justifient par des contraintes particulières, par exemple l’indemnité de suggestions spéciales que perçoivent les chauffeurs et secrétaires de cabinet de l’équipe dirigeante ou l’indemnité de permanence de nuit.

Recommandation n° 10 : supprimer les primes spécifiques au CESE sauf celles qui permettent de compenser une sujétion spéciale comme le fait de devoir travailler la nuit.

En matière de rémunération enfin, les femmes perçoivent des salaires ou traitements en moyenne 10 % inférieurs à ceux de leurs collègues hommes. L’administration du CESE a indiqué au rapporteur spécial que cet écart reflète en partie l’âge des agents du CESE, les femmes du CESE étant globalement plus jeunes que les hommes. Toutefois, cette seule explication ne saurait suffire. Il appartient désormais au CESE de traduire ses engagements en actes concrets. À ce titre, plusieurs mesures sont annoncées : actions de sensibilisation et de formation des encadrants, promotion de l’égal accès aux postes de responsabilité, encadrement des primes et indemnités. Le rapporteur spécial appelle de ses vœux une mobilisation rapide et résolue pour faire de l’égalité salariale une réalité effective au sein de l’institution.

RÉmunérations des agents du CESE

 (en euros mensuels bruts)  

Catégorie

Catégorie hiérarchique

Femmes

Hommes

Moyenne générale

Fonctionnaire A+

 

9 274

10 407

10 124

Fonctionnaire A

 

6 380

6 892

6 597

Fonctionnaire B

 

4 663

4 629

4 645

Fonctionnaire C

 

4 344

4 312

4 324

Total fonctionnaire

 

5 634

6 059

5 879

Contractuels

A+

8 377

11 127

8 927

 

A

4 657

4 860

4 728

 

B

3 279

4 610

3 611

 

C

2 467

3 086

2 931

Total contractuel

 

5 146

5 291

5 193

Total général

 

5 440

5 913

5 678

Source : CESE.

C.   L’entretien du palais d’Iéna : une responsabilité du CESE

1.   Générer des ressources propres pour financer l’entretien du Palais d’Iéna

En vertu d’une convention passée avec l’État, le CESE dispose de la possibilité de générer des recettes issues de la valorisation du Palais d’Iéna qui lui sont réaffectées. En contrepartie, la dotation budgétaire allouée en loi de finances ne comporte plus de crédits relatifs aux dépenses d’investissement ([27]), les ressources propres devant être utilisées exclusivement pour l’entretien du Palais d’Iéna. En 2024, ces recettes ont représenté 4,2 millions d’euros. L’institution a su habilement mettre en valeur ce chef-d’œuvre architectural imaginé par l’architecte Auguste Perret et classé aux monuments historiques. Le site internet du CESE comporte ainsi une page en faveur de la location des espaces du Palais d’Iéna proposant d’accueillir « cocktails, dîners, forums, conférences ou séminaires » ([28]). Une brochure présente plus en détail les possibilités offertes par l’institution en la matière, qui va jusqu’à proposer de mettre à disposition l’hémicycle du palais. Outre les recettes issues de la valorisation du Palais d’Iéna, par exemple en accueillant des défilés de mode, ces ressources propres proviennent également depuis 2020 du mécénat.

Le rapporteur spécial salue le caractère innovant de ces démarches qui permettent d’autofinancer l’entretien d’un tel bâtiment en préservant les comptes publics et estime que d’autres institutions gagneraient à s’inspirer de ces initiatives. Il regrette néanmoins que les équipes dirigeantes précédentes aient tardé à employer cet argent dans l’entretien du Palais d’Iéna alors même qu’il s’agit d’une responsabilité du CESE. L’abondante trésorerie dont disposait à la fin de l’année 2024 l’institution en témoigne : les réserves de l’assemblée s’élevaient en effet à cette date à 26,4 millions d’euros ([29]).

2.   Le lancement des travaux de rénovation du Palais

Après avoir fortement négligé l’entretien du Palais d’Iéna – les dépenses d’investissement s’élevaient en 2019, 2020 et 2021 à 700 000 euros – l’institution semble avoir pris la mesure de l’obligation qui lui incombe. Les dépenses d’investissement sont en effet en hausse depuis 2022. Surtout, un plan pluriannuel d’investissement a été élaboré en 2023. Ce plan doit permettre de mobiliser près de 26 millions d’euros entre 2023 et 2028 afin de rénover le Palais d’Iéna, de l’adapter aux réglementations en vigueur, par exemple en matière d’accès des personnes à mobilité réduite, mais aussi de réduire son empreinte environnementale. Le rapporteur spécial salue le lancement de ce plan. Il constate par ailleurs, dans la mesure où six millions d’euros de dépenses ont déjà été engagés en 2023 et 2024, et compte tenu du montant des réserves du CESE, que la trésorerie de l’institution devrait bien permettre de couvrir les dépenses d’investissement projetées. Le rapporteur spécial accueille positivement cette nouvelle gestion.

La réalisation des travaux devrait priver l’institution de ressources propres pendant un temps. Des solutions alternatives ont bien été pensées, comme la mise à disposition à des particuliers ou à des entreprises du toit du Palais d’Iéna. À l’occasion d’un déplacement au CESE, le rapporteur spécial a constaté que ce rooftop ne sera toutefois végétalisé et restauré qu’à compter du mois de septembre 2025, ce qui prive le CESE de recettes issues de sa valorisation au cours de l’été 2025, alors même que la période est propice à la location d’un tel espace. Le rapporteur spécial regrette que cela n’ait pas été davantage anticipé.


   TRAVAUX DE LA COMMISSION

Lors de sa réunion de 9 heures, le mercredi 2 juillet 2025, la commission, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu M. Daniel Labaronne, rapporteur spécial des crédits de la mission Conseil et contrôle de l’État, sur son rapport sur l’activité du CESE et la gestion de l’institution, présenté en application de l’article 146, aliéna 3, du règlement de l’Assemblée nationale.

La commission a autorisé, en application de l’article 146, alinéa 3, du Règlement, la publication du rapport d’information.

L’enregistrement audiovisuel de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale. Le compte rendu sera bientôt consultable en ligne.

 

 

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*    *

    


   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 Conseil économique, social et environnemental

M. Thierry Beaudet, président

Mme Amélie Figeac, directrice administrative et financière, trésorière

 

 

 

 

 

 

 

 

 


([1]) Article 1er du décret du 16 janvier 1925 portant constitution d’un conseil national économique.

([2]) Voir par exemple François Miguet, « Budget  2025 : et si on supprimait… le CESE », Le Point, le 9  octobre  2024.

([3]) Voir par exemple la proposition de loi constitutionnelle tendant à supprimer le Conseil économique, social et environnemental déposé par M. Jean-Louis Masson au Sénat le 9  juin  2023 ou la proposition de loi constitutionnelle visant à supprimer le Conseil économique, social et environnemental déposé par M. Philippe Juvin à l’Assemblée national le 16  octobre 2024.

([4]) Article 2 de l’ordonnance n° 58-1360 du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique, social et environnemental.

([5]) CESE, Déclaration du Bureau du CESE sur la situation démocratique, mars 2023.

([6]) CESE, Déclaration du Bureau du CESE « Affaiblir le dialogue civil reviendrait à affaiblir la démocratie », avril 2025.

([7]) CESE, Prévention en santé au travail – Défis et perspectives, avril 2025.

([8]) Ne sont pris en compte ici que les travaux de fond issus des formations de travail et non les déclarations du Bureau.

([9]) CESE, Nos modèles productifs face aux enjeux de transformation : quels défis pour l’avenir ?, mars 2025.

([10]) Chiffres au 23 juin 2025.

([11]) Les rapports annuels d’activité sont disponibles sur les fiches individuelles de chaque conseiller qui sont accessibles ici : https://www.lecese.fr/decouvrir-cese/conseillers.

([12]) Montants fournis par l’INSEE respectivement pour les années 2023 et 2022.

([13]) Les pénalités sont appliquées de manière systématique tous les trimestres depuis le 4e trimestre 2023. Selon l’administration du CESE, « elles l’étaient auparavant de manière plus ponctuelle ».

([14]) Les membres reversent à la fin d’année au CESE la quote-part de cette indemnité qui n’a pas été utilisée.

([15]) Des dispositions spécifiques pourraient être prévues pour les représentants résidant dans des territoires d’outre-mer en raison de leur éloignement géographique.

([16]) En 2024, 7 rencontres ont eu lieu entre le Président du CESE et le Président de la République et ses conseillers, 4 rencontres avec le Premier ministre et ses conseillers, 27 rencontres avec des ministres en exercice, 15 rencontres avec la Présidente de l’Assemblée nationale et des députés et 6 rencontres avec le président du Sénat et des sénateurs.

([17]) Il s’agissait de deux saisines gouvernementales.

([18]) CE, 15 déc. 2017, Brillault et autres.

([19]) https://petitions.lecese.fr.

([20]) 130 pour la convention citoyenne sur les temps des enfants, 184 pour celle sur la fin de vie et 150 pour celle pour le climat.

([21]) Loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025.

([22]) Tome II du rapport fait au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire sur le projet de loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l’année 2024, juin 2025.

([23]) Cour des comptes, Analyse de l’exécution budgétaire 2024 – Mission Conseil et contrôle de l’État, avril 2025.

([24]) Ibid.

([25]) Cour des comptes, « La gestion du Conseil économique, social et environnemental : une volonté de réforme, des efforts à poursuivre », Rapport public annuel, 2014.

([26]) Ibid.

([27]) La dernière subvention pour charges d’investissement était ouverte au titre de l’exercice 2018 et s’établissait à 850 000 euros.

([28]) https://www.lecese.fr/palais-iena/evenement.

([29]) Il convient toutefois de préciser que ce montant ne provient pas exclusivement de l’accumulation de ressources propres puisqu’il comporte un produit constaté d’avance de 4 millions d’euros liés à l’absence d’organisation en 2024 d’une convention citoyenne. Ce montant servira à financer la convention citoyenne sur les temps de l’enfant.