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Document E1373
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un accord sous forme d'échange de lettres entre la Communauté européenne et la République de Malte modifiant l'accord créant une association entre la Communauté économique européenne et Malte


E1373 déposé le 16 décembre 1999 distribué le 24 décembre 1999 (11ème législature)
   (Référence communautaire : COM(1999) 0572 final du 10 novembre 1999, transmis au Conseil de l'Union européenne le 10 novembre 1999)

  • Travaux en Délégation

    Ce document a été examiné

  • Adoption par les instances communautaires

    Ce document a été adopté définitivement par les instances de l'Union européenne :

    Décision 2000/184/CE du Conseil, du 14 février 2000, relative à la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres entre la Communauté européenne et la République de Malte modifiant l'accord créant une association entre la Communauté économique européenne et Malte.
    (JO L 59 du 4 mars 2000) (Notification d'adoption publiée au JOLD du 07/03/2000 p.3579)

Base juridique :

Articles 133 et 300, paragraphe 2, première phrase, du traité CE.

Procédure :

Majorité qualifiée du Conseil.

Avis du Conseil d’Etat :

La proposition de décision porte sur un accord relevant de l’article 53 de la Constitution qui nécessiterait l’intervention du législateur en vue de la ratification. Elle touche à l’assiette et au taux de l’imposition (droits de douane), matière réservée au législateur par l’article 34 de la Constitution.

Commentaire :

Dans le cadre de l’achèvement de la première étape de l’accord d’association du 1er mars 1971 entre l’Union européenne et Malte et des efforts de libéralisation déployés par la Communauté à l’égard des pays méditerranéens, la Commission propose au Conseil de parvenir à la libéralisation complète des importations de produits textiles en provenance de Malte à partir du 31 décembre 1997 et de supprimer les plafonds tarifaires fixés par l’article 2 de l’annexe I de cet accord, modifié par l’article 5 du protocole additionnel à l’accord signé le 27 octobre 1977.

Les produits suivants, originaires de Malte, bénéficient de contingents communautaires annuels en exemption de droits de douane, dans la limite des volumes ci–après fixés pour l’année 1997 et augmentés annuellement de 5 %, sauf en cas de difficultés conjoncturelles :

– n° 55.05 – fils de coton non conditionnés pour la vente au détail :

1 200 tonnes

– n° 55.09 – autres tissus de coton :

100 tonnes

– n° 56.04 –  fibres textiles synthétiques et artificielles discontinues et déchets de fibres textiles synthétiques et artificielles (continues et discontinues), cardés, peignés ou autrement préparés pour la filature :

800 tonnes

– n° 60.05 – vêtements de dessus, accessoires du vêtement et autres articles de bonneterie non élastique ni caoutchoutée :

216 tonnes

– n° 61.01 – vêtements de dessus pour hommes et garçonnets

815 tonnes

En outre, un mémorandum d’accord paraphé le 29 novembre 1990 et prorogé jusqu’au 31 décembre 1997 a admis en franchise de droit, nonobstant les plafonds prévus ci–dessus, les importations de produits textiles maltais relevant de la catégorie 6 jusqu’à concurrence des contingents suivants :

catégorie 6 (1000 pièces)
(pantalons)

1996

1997

importations directes

importations TPP (trafic de perfectionnement passif)

14 200

10 334

14 800

10 850

 

Les échanges de produits textiles entre la France et Malte évoluent de la manière suivante :

 

1997
Import

1998
Import

Variation
1998/1997

1997
Export

1998
Export

Variation
1998/1997

1997
Solde

1998
Solde

Variation
1998/1997

Malte

37 720

58 971

56,34 %

27 109

39 783

46,75 %

– 10 611

– 19 188

80,8  %

Poids de Malte par rapport aux échanges textiles de la France avec l’Union européenne

0,07 %

0,11 %

 

0,06 %

0,08 %

 

0,26 %

0,54 %

 

Source : Douanes ; Unité : 1 000 francs

Ce texte a appelé, de la part du Rapporteur, les observations suivantes :

– sur la forme, il est regrettable que la Commission soumette au Conseil une proposition de décision sur un sujet aussi sensible pour l’emploi dans la Communauté sans fournir la moindre fiche financière ni les indications chiffrées sur les échanges de produits textiles entre Malte et l’Union européenne permettant de mesurer la portée réelle de la mesure proposée ;

– sur le fond, la libéralisation complète des importations textiles serait prématurée et déséquilibrée, dans la mesure où Malte vient seulement de rentrer à nouveau dans le processus d’élargissement et où les négociations d’adhésion devraient conduire l’Union européenne à obtenir des améliorations sur des dossiers d’actualité, comme l’assainissement des pavillons de complaisance. Le dernier Conseil d’association du printemps 1998 avait décidé d’accélérer la libéralisation des échanges et d’aboutir au libre–échange en trois ans, mais le contexte a évolué depuis. Cette libéralisation ne paraît pas non plus satisfaisante sur le plan technique, puisque, contrairement à ce qu’avait demandé la France lors de la définition du mandat de négociation, l’accord supprimerait tout document aux frontières et ne prévoirait pas de surveillance douanière pour éviter le réétiquetage des produits achetés dans d’autres pays méditerranéens et transitant par Malte pour entrer dans la Communauté en franchise de droits.

Ce texte survient après toute une série d’autres sur lesquels la Délégation a eu l’occasion d’exprimer son refus à la fin de l’année dernière et soulève à nouveau la question de la cohérence de la stratégie menée par l’Union européenne , compte tenu de la situation très difficile du secteur du textile et de l’habillement en Europe et singulièrement en France.

Ces textes successifs, qui sont toujours présentés individuellement comme ayant un impact mineur sur l’emploi communautaire, sont un goutte–à–goutte qui ronge l’emploi, le plus souvent féminin, peu qualifié, dans des régions où il n’y a que fort peu de postes de substitution pour ces travailleurs. Commence alors l’engrenage de la déstructuration du tissu familial, social et urbain à laquelle les élus désespèrent de pouvoir porter remède autrement que par des palliatifs.

Lors de son audition par la Délégation le 21 décembre 1999, le ministre délégué chargé des affaires européennes a rappelé que la France avait décidé de s’abstenir dans le cadre de la procédure écrite prévue à la fin 1999 pour l’adoption, à la majorité qualifiée, de ces accords textiles et il a indiqué que le ministère compétent effectuerait une étude globale de l’impact des accords de l’Union européenne portant sur le textile.

Plus généralement, il convient d’observer que la Commission a jusqu’à maintenant poussé à une libéralisation extrême des échanges communautaires avec les pays tiers, avec l’accord des Etats membres – pour simplifier – de « l’Europe du Nord », qui s’exerce le plus souvent au détriment des productions les plus fragiles et des régions les plus pauvres de « l’Europe du Sud ». La Délégation exprime ses réserves sur le fait que les produits textiles et d’autres productions comme les fruits et légumes servent systématiquement de monnaie d’échange au processus de libéralisation du commerce extérieur mené par la Communauté européenne.

A cet égard, une telle dérive pourrait appeler des corrections sur deux points :

– il conviendrait d’instaurer des procédures d’examen des accords commerciaux permettant de les resituer dans une approche globale de la stratégie commerciale européenne et de les étudier par rapport à des indicateurs généraux définis par produit, par secteur, par pays et par région du monde ;

– lors de la réforme institutionnelle, il conviendrait de veiller à ce que les règles de majorité qualifiée et de pondération des voix conduisent à un meilleur équilibre entre les Etats membres doctrinalement libre-échangistes et les autres.

Conclusion :

A l’occasion de l’examen de ce texte par la Délégation, le Président Alain Barrau a estimé qu’il pourrait appeler les mêmes réticences que celles formulées précédemment par la Délégation à propos d’une série d’accords sur le commerce de produits textiles, sur laquelle elle avait refusé de lever la réserve parlementaire. Il a toutefois souligné que, Malte étant un pays candidat à l’Union européenne, la Délégation pourrait prendre sur le projet d’accord qui lui est soumis une position nuancée.

Mme Marie–Hélène Aubert, Présidente du groupe d’amitié France–Malte et chargée par la Délégation du suivi des négociations d’adhésion avec Malte, a approuvé l’analyse du Président Alain Barrau. L’adhésion de Malte à l’Union européenne est l’objet d’un vif débat qui oppose les conservateurs maltais, favorables à cette perspective, et les travaillistes, qui y sont hostiles, un référendum devant intervenir en 2002. L’affaire de l’Erika, en soulevant le problème des pavillons de complaisance maltais, a alimenté les critiques locales contre l’Union européenne, la défense du transport maritime étant un thème mobilisateur. Il serait donc malvenu de compliquer ce débat et d’aviver la contestation du processus d’adhésion.

La Délégation a donc accepté ce texte.