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Document E2743 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux médicaments utilisés en pédiatrie, modifiant le règlement (CEE) n° 1768/92, la directive 2001/83/CE et le règlement (CE) n° 726/2004.
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Base juridique : Article 95 du Traité instituant la Communauté européenne. Procédure : Codécision (article 251 du Traité). Avis du Conseil d'Etat : Ayant entre autres objets la création d'un système d'autorisation de mise sur le marché propre aux médicaments à usage pédiatrique, cette proposition de règlement comporte des dispositions qui sont de nature législative. Contenu et portée : Faisant suite à un mémorandum présenté par la présidence française en juillet 2000 et à la résolution du Conseil du 14 décembre 2000, cette proposition de règlement vise à combler les lacunes des actuelles règles communautaires sur le médicament, qui ne comprennent aucune disposition spécifique aux remèdes pédiatriques. En conséquence, la moitié des médicaments actuellement administrés aux enfants n'a pas fait l'objet d'une évaluation pour une utilisation pédiatrique. En effet, seuls les médicaments les plus courants, notamment les antipyrétiques, contre la fièvre, les antibiotiques et les antalgiques, ainsi que les vaccins, sont actuellement diffusés sous une forme évaluée pour les enfants et dont on est sûr qu'elle leur est réellement adaptée. Les autres substances, qui concernent les maladies les plus rares et les plus graves, n'ont été développées et évaluées que pour l'adulte. N'ayant pas été évaluées pour l'enfant, ni les posologies précises adaptées à cette population spécifique ni les éventuels effets secondaires indésirables ne sont scientifiquement connus. Ces produits sont ainsi utilisés en dehors des prescriptions de l'autorisation de mise sur le marché. Cette situation est d'autant plus délicate que ne sont à exclure ni les risques d'effets indésirables ni les accidents, dont les plus graves sont certes rares mais toujours dramatiques, en cas de surdosage. A l'inverse, les sous-dosages peuvent être la cause d'échecs thérapeutiques. Selon les médecins, l'enfant n'est pas un petit adulte pour lequel il suffit d'interpoler et de diminuer proportionnellement les doses. C'est un être humain aux soins duquel les grands principes scientifiques et médicaux s'appliquent, mais qui a son métabolisme propre. D'une certaine manière, chaque enfant auquel on administre un produit qui n'a pas été préalablement évalué pour un usage pédiatrique, fait actuellement l'objet d'un essai clinique. L'exemple des antidépresseurs, administrés aux adolescents sans avoir été évalués sur eux et qui entraînent en définitive une augmentation du taux de suicide, fournit un exemple particulièrement éclairant des carences du dispositif actuel. Il en est de même des médicaments destinés à lutter contre l'hypertension, parfois administrés aux nourrissons. Une telle situation est d'autant moins admissible que, dans le même temps, les médicaments vétérinaires sont, eux, évalués. Elle résulte de plusieurs facteurs. Il faut d'abord évoquer l'insuffisance de la recherche, pour des raisons historiques et éthiques. L'absence de méthodologie appropriée aux investigations pédiatriques provient pour une large part de la grande réticence, largement partagée, à procéder à des évaluations cliniques sur de jeunes enfants. Mais, il ne faut pas non plus méconnaître les éléments économiques. Bien que 20 % de la population de l'Union ait moins de seize ans, soit 100 millions de personnes, et que les besoins des pays tiers doivent être pris en considération, le marché est généralement considéré comme étroit, par les acteurs concernés, pour les pathologies les moins courantes. Les évaluations cliniques chez les mineurs, qui doivent parfois intervenir selon les différentes tranches d'âge, sont, en effet, importantes et assez longues. Par ailleurs, la présentation pharmaceutique, ou galénique, doit être spécifique, de manière à permettre une administration rapide et sûre, selon des critères plus exigeants que pour l'adulte. Pour les nourrissons et les bébés, par exemple, le comprimé n'est pas envisageable, compte tenu du risque, mortel, de fausse-route et d'étouffement. Ce dilemme, parmi les éléments d'ordre économique, entre l'amélioration de la qualité des soins et l'éthique, se pose dans les mêmes termes à l'ensemble des pays développés. Il a notamment été évoqué au niveau international, dans le cadre des conférences d'harmonisation ( ICH )( 1) auxquelles participent notamment les Etats-Unis et le Japon. C'est pour le résoudre que les Etats-Unis ont institué en 1997 la Pediatric exclusivity . La Food and Drug Administration établit avec un laboratoire le cadre d'une évaluation pédiatrique de médicaments existants mais utilisés sans donnée chez l'enfant. Si les conditions prévues pour les essais sont ultérieurement remplies, le laboratoire bénéficie d'une exclusivité supplémentaire de six mois sur la substance active, le princeps, comme sur la forme pédiatrique. Par ailleurs, la Pediatric Rule oblige les laboratoires à déposer un dossier de demande d'autorisation de mise sur le marché à la fois pour les enfants et pour les adultes, sauf pour les pathologies qui ne concernent que ces derniers. En contrepartie de ces études supplémentaires, elle prolonge de 6 mois la protection des brevets pharmaceutiques ou des exclusivités existantes, si un nombre substantiel d'enfants est concerné ou si le produit étudié représente un important progrès sur le plan thérapeutique. Plusieurs centaines d'études pédiatriques ont ainsi été menées. Aussi, afin de contribuer à l'amélioration de la santé des jeunes enfants dans les pays de l'Union et de permettre aux laboratoires européens d'y contribuer plus efficacement dans le reste du monde, notamment dans les pays en développement, mais également aux Etats-Unis et au Japon, la présente proposition de la Commission prévoit-elle un dispositif similaire incitant les laboratoires pharmaceutiques à effectuer les recherches nécessaires et organisant un contrôle des études entreprises. Son architecture s'articule, pour l'essentiel, selon trois axes : - la création d'une instance d'expertise, le comité du médicament pédiatrique, au sein de l'Agence européenne du médicament, chargée notamment d'évaluer les besoins thérapeutiques des enfants ; - l'obligation d'évaluer, dans le cadre d'un plan d'investigation pédiatrique, l'ensemble des médicaments nouveaux susceptibles d'être utilisés chez l'enfant et la création d'une nouvelle prescription pédiatrique, spécifique, pour les médicaments anciens ; - la prolongation, à titre d'incitation, des droits de propriété intellectuelle ou des exclusivités commerciales, pour les médicaments ayant fait l'objet d'un tel plan d'investigation. I.- La création, au sein de l'Agence européenne des médicaments, d'un comité pédiatrique, chargé de veiller à l'évaluation de l'ensemble des médicaments susceptibles d'être utilisés chez l'enfant devrait permettre le développement d'une culture pédiatrique pour le médicament en Europe A.- Tout nouveau médicament susceptible d'être administré à l'enfant, dans les pays européens, devra faire l'objet d'un plan d'investigation pédiatrique, avant la délivrance de l'autorisation de mise sur le marché Afin que les médicaments puissent être administrés sous une forme adaptée aux enfants, la Commission propose de compléter, sans en modifier la substance, la procédure d'autorisation de mise sur le marché (AMM), dont doit nécessairement faire l'objet tout médicament, en rendant obligatoire une évaluation de son utilisation chez l'enfant. Serait ainsi exigée pour les nouveaux médicaments la réalisation d'un plan d'investigation pédiatrique, programme de recherche et de développement garantissant la collecte des données relatives aux conditions d'un éventuel usage pédiatrique d'un médicament : dosage, mode d'administration, évaluation des éventuels effets secondaires. Cette nouvelle obligation concernerait tant les AMM sollicitées au niveau communautaire que celles demandées aux instances nationales compétentes et relevant du principe de la reconnaissance mutuelle des autorisations délivrées par chacun des Etats membres. Ce dispositif ne serait cependant pas d'application générale. En seraient en effet exclus les projets de médicaments développés à la seule intention des adultes ou peu susceptibles de bénéficier aux enfants. Certaines pathologies, comme celle d'Alzheimer, sont en effet spécifiques aux adultes. Les produits exonérés de l'obligation pédiatrique bénéficieraient soit d'une dérogation expressément prévue et accordée par l'Agence européenne des médicaments, soit d'une décision de celle-ci, de portée plus générale, excluant certaines classes de remèdes. En outre, cette obligation serait flexible. Afin d'éviter de retarder la mise sur le marché de nouveaux médicaments destinés aux adultes, ce qui ne serait pas admissible car empêcherait l'accès aux soins d'une partie de ceux dont le rétablissement l'exige, ou afin de ne pouvoir entreprendre les études sur les enfants qu'une fois connus les résultats de celles entreprises sur les adultes, une procédure de report, négocié avec le comité des études pédiatriques, est prévue. En définitive, le dispositif proposé apparaît bien adapté, car il permettra d'atteindre l'objectif poursuivi, celui du développement d'une véritable culture pédiatrique du soin et du médicament. Il couvre l'ensemble des situations puisque tout dossier d'AMM sera accompagné soit d'un plan d'investigation pédiatrique, soit d'une demande de dérogation, si l'usage pédiatrique est exclu ou improbable, soit d'une demande de report, si des compléments d'information ou des précautions spécifiques doivent être envisagés. On observera que de manière à faciliter leur commercialisation tout en s'appuyant sur la renommée d'un médicament existant, les médicaments bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché avec indication pédiatrique continueraient à porter la dénomination commerciale du produit pour adultes, mais avec la mention, en indice supérieur, de la lettre " P ". B.- Pour les médicaments anciens, non protégés, la mise en place d'une nouvelle autorisation de mise sur le marché spécifique à un usage pédiatrique, la PUMA, est prévue Afin de permettre l'administration, selon des modalités adaptées aux enfants, des médicaments qui sont tombés dans le domaine public, les génériques( 2), la Commission propose d'inciter les laboratoires pharmaceutiques à opérer les études nécessaires par la création d'une autorisation de mise sur le marché spécifique. Désignée par le sigle PUMA ( Pediatric use marketing autorisation ), cette autorisation de mise sur le marché en vue d'un usage pédiatrique serait accordée selon les procédures existantes, mais ne couvrirait que les produits anciens faisant l'objet d'un nouveau développement pour leur usage pédiatrique. Ainsi, une demande de PUMA serait nécessairement accompagnée des éléments permettant d'apprécier le respect des trois critères classiques d'évaluation du médicament, sa sécurité, sa qualité et son efficacité, pour son utilisation spécifique chez l'enfant. Comme pour les médicaments nouveaux, ces données devraient être collectées conformément à un plan d'investigation pédiatrique approuvé par le comité pédiatrique. Par souci de simplification, les demandes de PUMA, qui concernent des médicaments déjà autorisés pour l'adulte par AMM, pourraient faire référence à des données pharmacologiques contenues dans ce dossier d'AMM. La PUMA devrait notamment permettre des progrès sur le plan de la galénique, c'est-à-dire de la forme physique (poudre, sirop, etc.) d'administration des médicaments aux enfants. C.- Une instance d'expertise, le comité pédiatrique, garant de la valeur des études pédiatriques, sur le plan scientifique comme sur le plan éthique, sera instituée au sein de l'Agence européenne du médicament, établie à Londres Les évaluations des médicaments susceptibles de recevoir une prescription pédiatrique ne peuvent et ne doivent intervenir que dans des conditions scientifiques et éthiques incontestables. La Commission prévoit, par conséquent, une procédure centralisée, au niveau européen, par la création, au sein de l'Agence européenne du médicament, d'une instance ad hoc , pour assurer l'évaluation et la coordination des plans d'investigation pédiatriques : le comité pédiatrique. Cette mission d'encadrement des études médicales pédiatriques pour l'ensemble de l'Union, conduira ce groupe d'experts à être étroitement associé à la procédure des délivrances des AMM, et plus précisément : - à l'appréciation du contenu des plans d'investigation pédiatriques, tant sur le plan scientifique qu'éthique ; - à l'évaluation, à la demande du comité du médicament à usage humain ou d'une autorité compétente pour délivrer une AMM, des données recueillies dans le cadre du plan ; - à l'évaluation, dans les mêmes conditions, de la qualité, de la sécurité et de l'efficacité des médicaments susceptibles d'être prescrits à la population pédiatrique ; - à l'examen des demandes de dérogation et de report relatives à l'obligation de présenter un plan d'investigation pédiatrique. Le texte confie cependant au comité un rôle beaucoup plus large de définition du cadre général de l'utilisation des médicaments en pédiatrie. D'une part, le comité examinera les dérogations d'ensemble relatives à certains produits ou certaines classes thérapeutiques de produits. Il délimitera ainsi le champ des produits exclus d'une administration à l'enfant. D'autre part, la proposition prévoit qu'il fera un recensement général des besoins thérapeutiques de la population pédiatrique. Enfin, le comité est investi d'une mission générale de conseil et prêtera assistance à l'Agence pour la mise en place du réseau européen des réseaux de chercheurs et centres existants, au niveau national et européen, dans le domaine des études pédiatriques. Par ailleurs, et le règlement n'a pas besoin de le préciser, il appartiendra au comité, pour assurer la pleine efficacité des dispositions proposées, de tenir compte des éventuelles conventions propres aux autres Etats ayant une politique du médicament pédiatrique, les Etats-Unis pour l'instant. Afin de répondre à ces exigences en termes de compétence comme de vigilance, la Commission a prévu une composition très large, avec quelque trente et un membres, nommés pour une durée de trois ans renouvelable et dont les spécialités devraient couvrir l'ensemble des domaines pertinents pour les médicaments pédiatriques. Cinq membres seront cooptés au sein du comité des médicaments à usage humain, de manière à assurer la coordination entre l'instance spécialisée et celle qui conserve une compétence générale sur l'ensemble des AMM. Par ailleurs, chacun des Etats membres dont l'autorité compétente en matière de médicament ne serait pas représentée parmi ces cinq experts désignera également un membre. Par conséquent, chaque pays membre sera représenté au sein du comité. Six personnes seront en outre nommées par la Commission européenne, après un appel public à manifestation d'intérêt, afin de représenter les pédiatres et les intérêts des associations de patients. L'indépendance des membres du comité est prévue pour être garantie par l'obligation de déclarer les intérêts indirects susceptibles d'être considérés comme préjudiciables à leur indépendance. Pour assurer, enfin, au comité le concours de l'ensemble des compétences nécessaires à l'exercice de sa mission, des experts extérieurs pourront accompagner ses membres à certaines de ses réunions. II.- Des incitations financières sont prévues, en contrepartie des efforts de recherche qui seront entrepris par les laboratoires, de même qu'un dispositif de coordination et de développement de l'accès d'information pour limiter les évaluations au strict nécessaire Réaliser pour chaque médicament susceptible d'être utilisé chez l'enfant, un plan d'investigation pédiatrique - lequel ne débouchera pas nécessairement sur une prescription pédiatrique, mais dans certains cas sur des contre indications - exigera donc des laboratoires pharmaceutiques un important effort de recherche. La Commission a, par conséquent, envisagé comme avant elle la FDA aux Etats-Unis, un dispositif de récompense et de soutien administratif aux études. La légitimité de telles incitations est incontestable, dès lors que l'expérience a montré qu'en leur absence, les besoins médicaux de la population pédiatrique n'étaient pas couverts. A.- Un important soutien est prévu pour limiter les évaluations au strict nécessaire et favoriser la diffusion et l'accès aux résultats des études déjà entreprises *Eviter les études redondantes par la centralisation de l'information et l'amélioration de son accès Afin d'éviter les doubles emplois en matière de recherches et d'études, ainsi que d'orienter plus efficacement les projets nouveaux, la proposition de règlement prévoit une gamme très complète d'éléments favorisant la fluidité de l'information, autour de l'incorporation dans la base européenne sur les évaluations cliniques EudraCT, prévue par la directive 2001/20/CE du 4 avril 2001, des informations sur les études pédiatriques achevées ou menées. Cette base ne se limiterait pas aux évaluations réalisées dans l'Union européenne, mais concernerait également celles intervenues dans les pays tiers. Elle serait complétée par un inventaire des besoins thérapeutiques en pédiatrie, qui serait établi sur la base d'une enquête portant sur les conditions d'utilisation actuelle des médicaments en Europe. Par ailleurs, la mise en place d'un réseau communautaire associant les réseaux nationaux et les centres d'essais cliniques est prévue, sous la haute direction du comité pédiatrique, pour faciliter la fluidité de la circulation de l'information, ainsi que la réalisation d'études. *La gratuité des informations délivrées par l'Agence européenne du médicament La proposition de règlement prévoit la délivrance gratuite, par l'Agence européenne des médicaments, de conseils aux opérateurs qui développeraient des remèdes à usage pédiatrique. Les dossiers comme les protocoles devraient donc être établis gratuitement en concertation avec les laboratoires. *La gratuité des évaluations réalisées par le comité pédiatrique La Commission a prévu à titre d'incitation financière, d'une part, la gratuité, pour les laboratoires, des évaluations réalisées par le comité pédiatrique au titre de l'ensemble des opérations relatives à un plan d'investigation pédiatrique et, d'autre part, l'application du tarif réduit de la redevance exigible au titre de l'examen de la demande et de la gestion de toute autorisation de mise sur le marché d'un médicament. *La faculté pour les Etats membres de prévoir des dispositifs additionnels En complément des mesures qui viennent d'être évoquées, la proposition de directive vise à autoriser les Etats membres à prévoir des mesures incitatives pour favoriser la recherche sur les médicaments utilisés en pédiatrie, ainsi que le développement et la disponibilité de ces médicaments. Il leur incombera alors de communiquer à la Commission, le cas échéant, ces mesures ainsi que le stade de développement et la disponibilité de ces médicaments. La Commission devra, en effet, en tenir l'inventaire. B.- A titre d'incitation, une prolongation des protections au titre de la propriété et des exclusivités commerciales est prévue pour les médicaments qui auront fait l'objet d'un plan d'investigation pédiatrique A titre de récompense, pour inciter les laboratoires européens à développer des médicaments pédiatriques ou à déterminer les utilisations pédiatriques d'un médicament pour adultes, la Commission propose deux mesures de prolongation des droits exclusifs d'exploitation de médicaments ainsi que, pour ceux qui ne sont pas ou ne sont plus couverts, les génériques pour l'essentiel, une protection administrative des données. *La prolongation de six mois du certificat complémentaire de protection pour les médicaments ayant fait l'objet d'investigations pédiatriques La première mesure d'incitation vise à prolonger de six mois la durée du certificat complémentaire de protection (CCP)( 3) pour les médicaments ayant fait l'objet d'un plan d'investigation pédiatrique, qu'il s'agisse de nouveaux médicaments ou de médicaments plus anciens mais encore protégés au titre de la propriété intellectuelle et faisant l'objet d'une nouvelle forme pédiatrique. Son objectif étant de compenser les coûts des évaluations pédiatriques, qui a pu être estimé à 4 millions d'euros par produit, elle s'appliquera, comme aux Etats-Unis, quelles que soient les conclusions des études, que celles-ci permettent d'envisager une administration du produit à l'enfant ou qu'elles l'excluent au contraire. Deux conditions de fond sont toutefois prévues, de manière à encadrer l'accès à ce complément de protection : d'une part, le plan d'investigation pédiatrique, éventuellement adapté sous le contrôle du comité pédiatrique, devra être respecté en tous points ; d'autre part, le médicament devra faire l'objet d'une autorisation de mise sur le marché valable pour tous les Etats membres, soit qu'il s'agisse d'une autorisation délivrée au niveau européen, soit qu'il s'agisse d'une autorisation nationale étendue à l'ensemble des Etats membres dans de cadre du dispositif de reconnaissance mutuelle. *La prolongation de deux ans de l'exclusivité commerciale de droit commun prévue pour les médicaments orphelins La deuxième mesure d'incitation concerne quant à elle les médicaments orphelins, qui sont développés pour combattre les maladies rares et dont le régime est prévu par le règlement n° 141/2000/CE du 16 décembre 1999. Ces médicaments bénéficient d'une protection spécifique, sous la forme d'une exclusivité commerciale d'une durée de dix ans, à compter de l'autorisation de mise sur le marché dans l'indication orpheline Afin de faciliter de la même manière l'équilibre économique de leur développement dans les indications pédiatriques, la Commission propose un dispositif d'incitation adapté à cette spécificité, sous la forme d'une prolongation de deux ans de la durée de cette exclusivité commerciale, lorsqu'un plan d'investigation pédiatrique est intervenu. Au total, la protection serait ainsi de douze ans. Une telle mesure présente l'avantage d'être simple, dans la mesure où les médicaments orphelins ne sont pas tous brevetés, et où il serait délicat de prévoir une prolongation du CCP pour les médicaments orphelins qui sont brevetés, parce qu'ils bénéficieraient ainsi d'une double incitation. *Une protection administrative des données, à caractère spécifique, pour les médicaments non protégés faisant l'objet d'une PUMA En ce qui concerne les médicaments tombés dans le domaine public, la proposition de règlement prévoit une nouvelle période de protection administrative des données prévue à l'article 10 de la directive 2001/83/CE dès lors qu'ils font l'objet d'une autorisation de mise sur le marché en vue d'un usage pédiatrique (PUMA). Une telle mesure a pour objet d'assurer, en pratique, une situation privilégiée aux laboratoires bénéficiant de telles autorisations. Pendant la durée de la protection, les autres laboratoires ne pourraient donc obtenir une AMM pour le même produit qu'en déposant un dossier complet, la procédure abrégée de délivrance de l'autorisation de mise sur le marché, plus économique car pouvant s'appuyer sur les études réalisées pour le dépôt de la première PUMA, ne leur étant plus accessible. III.- Le dispositif proposé par la Commission apparaît, à ce stade, équilibré et n'appelle par conséquent que des ajustements d'une portée limitée Dans l'ensemble, le dispositif proposé par la Commission répond aux objectifs et aux équilibres de l'initiative initiale de la France : il assortit, dans un souci d'efficacité, des incitations financières à une obligation nouvelle, de manière à tenter de mieux couvrir les besoins thérapeutiques en pédiatrie, avec, en outre, un dispositif de pharmaco-vigilance. Il n'appelle par conséquent que peu d'observations. A.- Une inspiration similaire à celle du régime du médicament orphelin en Europe et de la pediatric exclusivity aux Etats-Unis, laquelle a donné des résultats satisfaisants La démarche retenue par la Commission pour établir la proposition de règlement s'appuie sur deux précédents. Le premier est le règlement 141/2000/CE du 16 décembre 1999 concernant les médicaments orphelins, avec, au niveau communautaire, le comité des médicaments orphelins au sein de l'Agence européenne des médicaments, des aides et incitations et, au niveau national, la collaboration technique, l'avantage commercial d'une exclusivité d'exploitation pendant dix ans dans l'indication orpheline et les banques de données, comme Orphanet en France. Il a donc montré son efficacité en Europe après d'ailleurs avoir fait ses preuves aux Etats-Unis. Selon les informations communiquées par la mission du médicament orphelin du ministère de la santé, le nombre des médicaments orphelins ayant donné lieu à la délivrance d'une AMM en Europe, est de 20, environ, et 450 dossiers ont été déposés auprès de l'Agence de Londres. Le bilan du dispositif mis en place aux Etats-Unis dans le cadre de la pediatric rule et de la pediatric exclusivity est également positif. Alors que 11 études pédiatriques avaient été enregistrées en 1997 sur les six dernières années, 110 médicaments avec prescription pédiatrique ont été autorisées depuis 1998 et 700 études en cours ont été recensées, selon les éléments communiqués. B.- Une proposition conforme à la stratégie de Lisbonne Le succès de la stratégie de Lisbonne exige d'examiner, pour chaque initiative communautaire, notamment, si les principes sur lesquels elle repose et son dispositif vont dans le sens de ses objectifs, qui visent à faire à l'horizon 2010 de l'Europe l'économie la plus compétitive grâce à la recherche et à la maîtrise de la connaissance, et à rattraper l'écart avec l'économie américaine. En favorisant, selon des modalités inspirées de celles en vigueur aux Etats-Unis, la recherche et le développement dans un domaine aussi essentiel que celui de la santé et de la pharmacie, pour lequel l'Europe dispose encore d'une compétence incontestable et d'entreprises de pointe, de toutes tailles, la proposition de règlement est conforme à cette ambition. Les infrastructures de recherche pédiatrique, pour lesquelles le Royaume-Uni semble être le pays le plus avancé, devraient par conséquent être développées dans l'ensemble des autres Etats membres où l'industrie pharmaceutique est implantée. A l'opposé, en l'absence de dispositif communautaire, l'industrie pharmaceutique européenne pourrait être distancée, les médicaments pédiatriques n'étant développés qu'aux Etats-Unis. Il n'est guère besoin de développer les conséquences négatives qu'aurait une telle impasse stratégique, en termes d'emplois notamment. C.- Les ajustements à opérer comme les précisions susceptibles d'être apportées à la proposition de règlement, ne visent donc qu'à la compléter sur certains points très précis Au cours des entretiens auxquels il a été procédé dans le cadre de l'instruction de la présente proposition de règlement, il est apparu que le dispositif proposé devait être clarifié ou complété, pour l'essentiel, sur trois points. Le premier d'entre eux est la transparence, pour lequel deux éléments doivent être rappelés ou précisés. D'une part, l'efficacité du dispositif prévu, notamment en termes de pharmaco-vigilance, sera d'autant plus grande que le contenu de la base de données sur les résultats des évaluations et le champ de coordination dans le cadre du réseau européen seront larges. Il est ainsi nécessaire que l'ensemble des études y soit intégré, notamment celles achevées à la date d'entrée en vigueur du dispositif. Par ailleurs, les enseignements de l'insuccès étant, dans le domaine du médicament, souvent aussi importants que ceux des recherches couronnées par la création de produits nouveaux, il convient de bien préciser que les études mettant en évidence des cas de toxicité, de contre-indication ou tout autre élément négatif, devront être recensées. D'autre part, il apparaît nécessaire que la diffusion de ces études et de ces évaluations soit la plus large possible et que leur accès au public puisse être ainsi garanti par l'Agence européenne du médicament, conformément à des lignes directrices qui seraient établies par la Commission. Les associations de patients ont également insisté sur l'intérêt que la liste des médicaments pour lesquels la prescription pédiatrique est autorisée par l'AMM soit publiée. Un deuxième point, sur lequel la proposition de règlement peut d'ailleurs être notablement améliorée, concerne les médicaments anciens. En l'état, le règlement prévoit à titre de récompense une protection administrative des données, de caractère décennal, en faveur des laboratoires qui obtiendraient une PUMA. Cette incitation apparaît trop restreinte à deux points de vue. D'une part, elle n'apparaît pas d'une ampleur suffisante pour permettre l'obtention de l'ensemble des données pharmacologiques sur les effets, chez les enfants, de substances déjà connues mais non encore scientifiquement évaluées. Les laboratoires privés s'engageront vraisemblablement avec prudence et d'une manière limitée dans des programmes de recherche dont les coûts ne seront pas nécessairement amortis. D'autre part, il apparaît opportun de prévoir une contribution des médecins et chercheurs qui exercent dans un cadre universitaire ou indépendant, pour donner à ces études le champ le plus large possible. Aussi convient-il d'insérer dans le règlement et non, comme c'est actuellement le cas, dans le seul exposé des motifs, le programme MICE ( Medecines investigation for the children of Europe ), destiné à financer les études sur l'utilisation pédiatrique des médicaments, et de prévoir des possibilités de financement à 100 % de ces recherches sur les crédits communautaires, et non seulement à hauteur de 50 %, comme le prescrivent les règles habituelles. Au chapitre des améliorations à caractère purement technique, deux éléments sont de nature à rendre notablement plus aisé le fonctionnement pratique du dispositif qui sera établi. D'une part, afin de faciliter l'efficacité des procédures internes au comité pédiatrique, il convient de préciser dans le cadre du règlement que c'est au comité pédiatrique qu'il incombera d'évaluer le respect du plan d'investigation pédiatrique. Seule une telle obligation permet en effet de garantir une évaluation homogène des études et, par conséquent, une identité des exigences au sein de l'Union. Le dispositif proposé par la Commission, qui prévoit uniquement une possibilité de saisine du comité pédiatrique, n'offre pas les mêmes garanties. D'autre part, de manière à éviter tout risque de report des études actuellement envisagées par les laboratoires ou en cours, jusqu'à l'adoption de la présente proposition de règlement, il apparaît opportun d'insérer dans le règlement qui sera en définitive adopté une disposition de coordination prévoyant la prise en compte des études déjà achevées, pour pouvoir bénéficier des incitations accordées au titre de la propriété intellectuelle. Dans le même esprit, une prise en compte des études déjà réalisées et éventuellement soumises à l'autorité compétente dans les pays tiers permettrait de faire bénéficier les patients de formes pédiatriques déjà disponibles ou en cours d'élaboration, à l'extérieur de l'Europe. Enfin, de manière à parfaire l'information des patients, il peut être envisagé d'exiger, dans le cadre des règles générales relatives aux médicaments, que les emballages et modes d'emploi des formes adultes, les princeps , feront l'objet d'une mention spéciale lorsqu'une forme pédiatrique du même médicament a fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché. Les patients ou leurs parents souhaiteront peut-être, à l'avenir, savoir, par une indication simple et aisément identifiable, si une autre forme n'est pas plus adaptée à son âge ainsi qu'également, le degré de recherche qui a été opéré sur un médicament. Une telle mesure serait complémentaire au marquage des formes pédiatriques par la lettre " P ", prévu par la présente proposition de règlement. Telles sont les observations et suggestions qu'il est possible de faire à ce stade de l'examen du dispositif proposé par la Commission, qui se limite à l'insertion de dispositions nécessaires à la prise en compte du médicament pédiatrique, dans le cadre plus général de la législation européenne d'ensemble relative au médicament. Conclusion : Mme Arlette Franco, rapporteure, a présenté ce texte au cours de la réunion de la Délégation du 12 avril 2005. En réponse à une demande du Président Pierre Lequiller, la rapporteure a précisé que chaque Etat membre serait bien représenté au sein du comité du médicament pédiatrique. Sous le bénéfice des observations de la Rapporteure, la Délégation a approuvé la proposition d'acte communautaire, en l'état des informations dont elle dispose.
(1) International conference on harmonisation of technical requirements for registration of pharmaceuticals for human use.
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