N° 238
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 septembre 2024.
PROPOSITION DE LOI
mettant en œuvre certaines recommandations de nature législative du rapport Evin – Stefanini relatif à l’aide médicale de l’État et modifiant différentes dispositions en lien avec les soins dispensés aux étrangers en situation irrégulière,
(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
Mme Véronique LOUWAGIE, M. Thibault BAZIN, Mme Anne-Laure BLIN, Mme Émilie BONNIVARD, M. Hubert BRIGAND, M. Fabrice BRUN, M. Fabien DI FILIPPO, Mme Virginie DUBY-MULLER, Mme Annie GENEVARD, Mme Justine GRUET, M. Michel HERBILLON, M. Patrick HETZEL, M. Philippe JUVIN, Mme Alexandra MARTIN, Mme Frédérique MEUNIER, M. Jérôme NURY, M. Éric PAUGET, M. Alexandre PORTIER, M. Vincent ROLLAND, M. Jean-Louis THIÉRIOT, M. Antoine VERMOREL-MARQUES, M. Jean-Pierre VIGIER,
députées et députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La présente proposition de loi vise à mettre en œuvre certaines recommandations de nature législative du rapport Evin – Stefanini relatif à l’aide médicale de l’État ainsi qu’à modifier différentes dispositions en lien avec les soins dispensés aux étrangers en situation irrégulière.
Instituée par la loi n° 99‑641 du 27 juillet 1999 portant création d’une couverture maladie universelle et réformée pour la dernière fois en 2021, l’aide médicale de l’État (AME) assure la prise en charge médicale des étrangers en situation irrégulière séjournant sur le territoire français de manière ininterrompue depuis au moins trois mois et ne disposant pas de revenus annuels supérieurs à un plafond de ressources s’établissant au 1er avril 2024 à 10 166 euros pour une personne seule en métropole.
Régie par les articles L. 251‑1 et suivants du code de l’action sociale et des familles (CASF), l’AME s’applique sur tout le territoire à l’exception de Mayotte et concerne, à la fin septembre 2023, 446 532 bénéficiaires répartis entre 320 760 assurés et 125 772 ayants‑droit dont 98 926 ayants‑droit mineurs.
Si la transformation de l’aide médicale de l’État en une aide médicale d’urgence est souhaitable, cette évolution n’est pas encore envisageable à court terme en raison, d’une part, de l’absence de majorité à l’Assemblée nationale soutenant cette perspective et, d’autre part, de l’impossibilité, à ce stade, d’engager la procédure de recueil du soutien des électeurs prévue par le cinquième alinéa de l’article 11 de la Constitution en vue de soumettre directement cette proposition aux suffrages des Français ([1]).
Pour ces motifs, la présente proposition de loi suggère de réformer l’AME sur la base de certaines des recommandations de nature législative figurant dans le rapport sur l’AME publié le 4 décembre 2023 par M. Claude Evin, ancien ministre de la santé, et M. Patrick Stefanini, conseiller d’État honoraire.
Le 18 décembre 2023, Mme Elisabeth Borne, alors Première ministre, avait fait part au Président du Sénat de son intention « de préparer les évolutions réglementaires ou législatives qui permettront d’engager une réforme de l’AME à partir » des propositions figurant dans le rapport Evin – Stefanini. Le 30 janvier 2024, dans sa déclaration de politique générale, M. Gabriel Attal, Premier ministre, a revu cet engagement en indiquant que la réforme annoncée de l’AME se ferait « avant l’été par voie réglementaire, avec une base qui est connue : le rapport Evin – Stefanini ».
Après avoir ouvert la voie à une possible réforme législative de l’AME, le Gouvernement l’a donc refermée en privilégiant une réforme uniquement réglementaire. Ce choix revient cependant à renoncer à mettre en œuvre la plupart des recommandations figurant dans cette étude. Comme Mme Véronique Louwagie l’a souligné dans un récent rapport, la direction de la sécurité sociale considère ainsi que dix des treize recommandations du rapport Evin – Stefanini sont de nature législative.
Choisir une réforme par voie réglementaire revient donc à tirer un trait sur plus des trois quarts des propositions du rapport Evin – Stefanini. Une telle orientation est particulièrement regrettable au regard des nombreuses fragilités affectant l’AME.
La présente proposition de loi conteste la pertinence d’une réforme de l’AME reposant uniquement sur la voie réglementaire et propose d’une part, de donner une suite à huit recommandations de nature législative du rapport Evin – Stefanini ([2]) et, d’autre part, de corriger d’autres fragilités de l’AME ou en lien avec celle‑ci.
Les articles 1er à 4 visent à donner une suite législative à sept recommandations du rapport Evin – Stefanini.
L’article 1er modifie l’article L. 251‑1 du code de l’action sociale et des familles (CASF) pour mettre en œuvre quatre recommandations du rapport Evin – Stefanini. Il s’agit ainsi de :
prendre en compte les ressources du conjoint, partenaire de PACS ou concubin pour la détermination de l’admission à l’AME. À l’heure actuelle, ces ressources ne sont pas prises en compte, ce qui, comme le souligne une étude de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques publiée en 2021 ([3]), constitue une dérogation au regard du droit commun de la sécurité et de la protection sociales. Il est donc proposé d’aligner l’AME sur le droit commun ;
réserver la qualité d’ayant‑droit d’un assuré à l’AME aux seuls enfants mineurs afin d’aligner le régime de l’AME sur le droit commun de la sécurité sociale qui exclut de la qualité d’ayant‑droit les conjoints, concubins, partenaires de PACS et personnes à charge. À l’heure actuelle, la définition des ayants‑droit en vigueur pour l’AME est nettement plus large que celle retenue pour la protection universelle maladie où, en application de l’article L. 160‑2 du code de la sécurité sociale, seuls les enfants mineurs d’un assuré peuvent prétendre à la qualité d’ayant‑droit dès lors qu’ils n’exercent pas d’activité professionnelle, sont à sa charge et « à condition que la filiation, y compris adoptive, soit légalement établie ou qu’ils soient pupilles de la Nation ou enfants recueillis ». Il est donc proposé d’aligner l’AME sur le droit commun ;
basculer les demandeurs d’asile dans l’AME durant la période d’instruction de leur demande de protection internationale. À l’heure actuelle, les intéressés relèvent du dispositif des « soins urgents » ([4]) durant les trois mois suivant l’introduction de leur demande d’asile puis de la protection universelle maladie. Afin de réduire les risques d’immigration pour soins et d’alléger les démarches administratives liées aux allers‑retours entre plusieurs systèmes de protection sociale, il est proposé de basculer les demandeurs d’asile dans l’AME durant la période d’instruction de leur demande de protection internationale ([5]) ;
exclure du bénéfice de l’AME et basculer dans le dispositif des « soins urgents » les personnes frappées d’une mesure d’éloignement du territoire (arrêté d’expulsion, interdiction du territoire français ou obligation de quitter le territoire français) prononcée pour motif d’ordre public. À l’heure actuelle, les intéressés continuent de bénéficier de l’AME alors qu’ils ont porté atteinte à l’ordre public. Qui peut comprendre qu’un étranger en situation irrégulière continue de bénéficier de l’AME après avoir porté atteinte à l’ordre public ?
L’article 2 modifie l’article L. 251‑2 du CASF pour mettre en œuvre la recommandation du rapport Evin – Stefanini proposant d’étendre le recours à l’accord préalable actuellement limité à la possibilité de bénéficier, avant un délai d’ancienneté de neuf mois à l’AME, de certains types d’actes (2) et de prestations (16) lorsque leur absence de réalisation est susceptible d’avoir des conséquences vitales ou graves et durables sur l’état de santé de la personne.
L’article 3 insère un article L. 251‑2‑1 au sein du CASF pour mettre en œuvre la recommandation du rapport Evin – Stefanini visant à subordonner la poursuite de soins chroniques et lourds à la vérification que l’étranger en situation irrégulière concerné ne peut pas bénéficier d’un traitement approprié dans son pays d’origine ([6]). La procédure proposée s’inspire de celle en vigueur en matière d’admission au séjour pour soins prévue à l’article L. 425‑9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile qui confie au service médical de l’Office français de l’immigration et de l’intégration la charge d’émettre un avis à l’autorité administrative.
L’article 4 modifie l’article L. 252‑1 du CASF afin de mettre en œuvre les recommandations du rapport Evin – Stefanini proposant de resserrer la vérification des conditions d’accès à l’AME :
en imposant la présence physique du bénéficiaire lors du dépôt de la demande de renouvellement de l’AME et lors de la remise de la carte ouvrant ou renouvelant le droit à l’AME ;
en subordonnant le renouvellement du bénéfice de l’AME à la présentation par l’étranger d’un refus de séjour ([7]).
Les articles 5 à 12 proposent de corriger d’autres fragilités de l’AME ainsi que des éléments associés à ce dispositif. Ces articles se fondent sur les conclusions des précédents travaux de Mme Véronique Louwagie et sur des dispositions adoptées lors de l’examen parlementaire du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration mais ne figurant pas dans la loi promulguée ([8]).
L’article 5 modifie l’article L. 251‑2 du CASF afin de réviser le panier de soins et d’en exclure les actes à visée esthétique ainsi que certains actes en lien avec la stérilisation et le transsexualisme.
L’article 6 insère deux nouveaux articles L. 251‑2‑2 et L. 254‑1‑1 dans le CASF afin d’autoriser la collecte de la nationalité des demandeurs et des bénéficiaires de l’AME et des « soins urgents ».
L’article 7 créée un chapitre V et un article L. 255‑1 au sein du titre V du livre II du CASF afin de prévoir la remise annuelle au Parlement d’un rapport sur l’AME et sur le dispositif des « soins urgents » sur le modèle du rapport établi chaque année par l’Office français de l’immigration et de l’intégration sur la procédure d’admission au séjour pour soins.
L’article 8 complète l’article L. 521‑1 du CASF pour modifier le régime de l’AME en vigueur en Guyane afin de répondre à la très forte augmentation du nombre de bénéficiaires de ce dispositif observée dans ce territoire. La Guyane, qui est le soixantième‑dix‑septième département français par sa population (295 000 habitants), est le troisième département français par le nombre de bénéficiaires de l’AME (39 814 au 30 juin 2023 dont 20 955 assurés et 18 859 ayants‑droits). Cet article autorise une adaptation du panier de soins de l’AME dans ce territoire et impose une participation financière obligatoire à ses bénéficiaires.
L’article 9 modifie les dispositions de l’article L. 160‑1 du code de la sécurité sociale relatives au maintien des droits expirés à la protection universelle maladie et à la complémentaire santé solidaire afin de subordonner le bénéfice de ce dispositif à l’engagement d’une démarche de renouvellement d’un titre de séjour, de réduire à trois mois la durée maximale de prolongation des droits et d’inclure dans cette période la procédure contradictoire engagée en cas de fermeture des droits correspondants.
L’article 10 modifie l’article L. 1113‑1 du code des transports pour supprimer les réductions tarifaires dans les transports en commun existant en faveur de certains étrangers en situation irrégulière dont les bénéficiaires de l’AME. Cet article reprend le contenu de l’article 15 de la loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration qui a été adopté par le Parlement en décembre 2023 mais censuré par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2023‑863 DC du 25 janvier 2024 en raison de son assimilation à un « cavalier législatif ».
L’article 11 complète les articles L. 312‑1 et L. 312‑2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pour permettre aux autorités de refuser un visa en cas de dette hospitalière non réglée. Cet article reprend le contenu de l’article 13 bis A du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration adopté par la commission des Lois de l’Assemblée nationale en décembre 2023 mais qui n’a pu être examiné en séance à la suite de l’adoption d’une motion de rejet préalable ([9]).
L’article 12 prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, un rapport sur l’opportunité, le cadre juridique, le coût et le calendrier d’une ouverture encadrée des traitements de données relatifs à l’AME et aux soins urgents à l’autorité administrative et aux forces de sécurité intérieure chargées de l’identification des personnes placées dans les lieux de rétention administrative.
L’article 13 prévoit que La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
– 1 –
proposition de loi
Article 1er
Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 251‑1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « mois, » sont insérés les mots : « ne faisant pas l’objet d’une mesure d’éloignement du territoire pour motif d’ordre public relevant du livre VI du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, » et, après le mot : « ressources », sont insérés les mots : « du foyer » ;
b) Au 1°, les mots : « aux 1° et » sont remplacés par le mot : « au » ;
c) Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’article L. 160‑1 du code de la sécurité sociale, l’aide médicale de l’État bénéficie également à tout demandeur d’asile et à ses ayants‑droit à compter de l’enregistrement de la demande d’asile correspondante. » ;
2° À la première phrase de l’article L. 254‑1, les mots : « ainsi qu’aux demandeurs d’asile majeurs qui ne relèvent pas du régime général d’assurance maladie » sont supprimés.
Article 2
Le huitième alinéa de l’article L. 251‑2 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase, les mots : « à un délai d’ancienneté de bénéfice de l’aide médical d’État qui ne peut excéder neuf mois » sont remplacés par les mots : « à l’accord préalable du service du contrôle médical mentionné à l’article L. 315‑1 du code de la sécurité sociale. » ;
2° L’avant‑dernière phrase est supprimée.
Article 3
Après l’article L. 251‑2 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 251‑2‑1 ainsi rédigé :
« Art. L. 251‑2‑1. – I. – Par dérogation à l’article L. 251‑2 du présent code, la poursuite dans le cadre de l’aide médicale de l’État de soins chroniques et lourds est subordonnée à la vérification que le demandeur ou le bénéficiaire ne puisse bénéficier d’un traitement approprié dans son pays d’origine.
« La décision d’autoriser la poursuite de ces soins est prise par l’autorité administrative après avis d’un collège de médecins du service médical de l’Office français de l’immigration et de l’intégration.
« Sous réserve de l’accord de l’étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l’office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l’accomplissement de cette mission.
« Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions de poursuite des soins sont réunies, l’autorité administrative ne peut en refuser l’exécution que par une décision spécialement motivée.
« L’autorité administrative informe le collège médical de l’Office français de l’immigration et de l’intégration de sa décision.
« II. – Lorsque l’autorité administrative refuse la poursuite dans le cadre de l’aide médicale de l’État de soins chroniques et lourds, elle propose à l’étranger un rapatriement sanitaire dans son pays d’origine. En cas de refus soit de l’intéressé, soit de son pays d’origine, les soins prodigués en France sont à la charge de l’intéressé, ou, le cas échéant, à la charge de son pays d’origine en application de la convention liant ce pays à la France
« III. – Lorsque le juge administratif saisi, à l’appui de conclusions tendant à l’annulation d’une décision refusant la poursuite dans le cadre de l’aide médicale de l’État de soins chroniques et lourds mentionnés au I, d’un moyen relatif à l’état de santé du demandeur, appelle l’Office français de l’immigration et de l’intégration à présenter des observations, celles‑ci peuvent comporter toute information couverte par l’article L. 1110‑4 du code de la santé publique en lien avec cette décision.
« IV. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. »
Article 4
L’article L. 252‑1 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Au quatrième alinéa, après le mot : « déposée » sont insérés les mots : « , par le demandeur, » ;
2° Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le dépôt d’une demande de renouvellement de l’aide médicale de l’État est subordonné à la présentation par le demandeur d’une décision de refus de séjour par l’autorité administrative. » ;
3° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La remise de la carte ouvrant ou renouvelant le droit à l’aide médicale de l’État se fait en présence du bénéficiaire. Un décret détermine les conditions dans lesquelles il peut être dérogé à cette règle, notamment pour les mineurs isolés et les personnes à mobilité réduite. ».
Article 5
Le 1° de l’article L. 251‑2 du code de l’action sociale et des familles est complété par les mots : « ou lorsqu’ils ont une visée esthétique non rattachable à un acte de chirurgie reconstructrice ou lorsqu’ils se rattachent à un acte de stérilisation ou sont en lien avec le transsexualisme ; »
Article 6
Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 251‑2‑1, dans sa rédaction résultant de la présente loi, il est inséré un article L. 251‑2‑2 ainsi rédigé :
« Art. L. 251‑2‑2. – Le ministre chargé de la santé est autorisé à mettre en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Suivi sanitaire et financier de l’aide médicale de l’État » ayant pour finalités le suivi des conditions d’accès, les soins dispensés, la lutte contre les tentatives de fraude et la lutte contre la fraude à l’aide médicale de l’État.
« La nationalité des demandeurs et des bénéficiaires de l’aide médicale de l’État et les pathologies prises en charge au titre de ce dispositif figurent parmi les données recueillies. Les données ainsi collectées sont rendues anonymes sauf lorsque leur usage vise à lutter contre une fraude, suspectée ou avérée, à l’aide médicale de l’État. Lorsque ces données sont collectées par l’intermédiaire d’un professionnel de santé, le secret médical n’est pas opposable.
» Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Ce décret précise, notamment, la durée de conservation et les conditions de mise à jour des données à caractère personnel et des informations enregistrées, les catégories de personnes pouvant y accéder et les modalités d’habilitation de celles‑ci ainsi que les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent exercer leurs droits. ».
2° Après l’article L. 254‑1, il est inséré un article L. 254‑1‑1 ainsi rédigé :
« Art. L. 254‑1‑1. – Le ministre chargé de la santé est autorisé à mettre en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Suivi sanitaire et financier des soins urgents » ayant pour finalités le suivi des conditions d’accès, les soins dispensés, la lutte contre les tentatives de fraude et la lutte contre la fraude aux soins urgents relevant de l’article L. 254‑1 du présent code.
« La nationalité des demandeurs et des bénéficiaires des soins urgents et les pathologies prises en charge au titre de ce dispositif figurent parmi les données recueillies. Les données ainsi collectées sont rendues anonymes sauf lorsque leur usage vise à lutter contre une fraude, suspectée ou avérée, aux soins urgents. Lorsque ces données sont collectées par l’intermédiaire d’un professionnel de santé, le secret médical n’est pas opposable.
« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Ce décret précise, notamment, la durée de conservation et les conditions de mise à jour des données à caractère personnel et des informations enregistrées, les catégories de personnes pouvant y accéder et les modalités d’habilitation de celles‑ci ainsi que les conditions dans lesquelles les personnes intéressées peuvent exercer leurs droits. »
Article 7
Le titre V du livre II du code de l’action sociale et des familles est complété par un chapitre V ainsi rédigé :
« Chapitre V
« Suivi de l’aide médicale de l’État et des soins urgents
« Art. L. 255. – Chaque année, avant le 1er octobre, le ministre chargé de la santé remet au Parlement un rapport exposant :
« ‑ les données générales en matière de santé publique recueillies dans le cadre de l’aide médicale et l’État et des soins urgents ;
« ‑ les données relatives à l’application de l’article L. 251‑2‑1 du présent code ;
« ‑ les données relatives à la nationalité des demandeurs et des bénéficiaires de l’aide médicale de l’État et des soins urgents ;
« ‑ la nature et le résultat des actions engagées contre la fraude à ces dispositifs. »
Article 8
Le 3° de l’article L. 521‑1 du code de l’action sociale et des familles est complété par une phrase ainsi rédigée : « En Guyane, ces conditions particulières d’application portent notamment sur l’adaptation du panier de soins et sur les modalités de participation financière obligatoire des bénéficiaires de l’aide médicale de l’État ; »
Article 9
L’article L. 160‑1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au dernier alinéa, les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de trois mois et sous réserve d’avoir déposé auprès de l’autorité administrative une demande de renouvellement de leur titre de séjour » ;
2° Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le délai de prolongation de trois mois mentionné au troisième alinéa inclut la procédure contradictoire engagée dans le cadre d’une décision de fermeture des droits à la prise en charge des frais de santé mentionnée aux articles L. 160‑8 et L. 160‑9‑1 et, le cas échéant, à la protection complémentaire en matière de santé prévue à l’article L. 861‑1. ».
Article 10
L’article L. 1113‑1 du code des transports est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « du 1° » sont supprimés ;
2° Est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Les personnes ne résidant pas sur le territoire français de manière régulière au regard de la législation sur le séjour des étrangers en France ne peuvent bénéficier de la réduction tarifaire prévue au I du présent article. »
Article 11
Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° L’article L. 312‑1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les autorités diplomatiques et consulaires françaises peuvent refuser l’octroi d’un visa de court séjour au demandeur lorsqu’elles constatent que celui‑ci est débiteur d’une dette non éteinte à l’égard d’une des personnes morales relevant des articles L. 6141‑1 et L. 6161‑5 du code de la santé publique, dans le cadre de l’appréciation portée sur la sincérité des déclarations et le montant des ressources disponibles. » ;
2° L’article L. 312‑2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les autorités diplomatiques et consulaires françaises peuvent refuser l’octroi d’un visa de long séjour au demandeur lorsqu’elles constatent que celui‑ci est débiteur d’une dette non éteinte à l’égard d’une des personnes morales relevant des articles L. 6161‑5 et L. 6141‑1 du code de la santé publique, dans le cadre de l’appréciation portée sur la sincérité des déclarations et le montant des ressources disponibles. »
Article 12
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport présentant l’opportunité, le cadre juridique, le coût et le calendrier d’une ouverture encadrée des traitements de données relatifs à l’aide médicale de l’État et au dispositif des soins urgents à l’autorité administrative et aux forces de sécurité intérieure chargées de l’identification des personnes placées dans les lieux de rétention administrative en vue de leur éloignement du territoire.
Article 13
I. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
II. – La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
([1]) La proposition de transformation de l’AME en une aide médicale d’urgence recentrée sur la prise en charge de la prophylaxie et du traitement des maladies graves et des douleurs aiguës, des soins liés à la grossesse, des vaccinations réglementaires et des examens de médecine préventive constituait l’article 2 de la proposition de loi visant à réformer l’accès aux prestations sociales des étrangers présentée dans le cadre de la procédure du référendum d’initiative partagée prévue à l'article 11 de la Constitution par des députés et des sénateurs du groupe Les Républicains de l’Assemblée nationale et du Sénat. L’article 1er de cette proposition de loi a cependant été déclaré contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2024-6 RIP rendue le 11 avril 2024. Pour ce motif, la procédure a été interrompue et le principe de transformation de l’AME en une AMU n’a pas pu faire l’objet d’un recueil du soutien des électeurs préalable à une éventuelle approbation des électeurs par voie référendaire.
([2]) Les trois recommandations de nature législative du rapport Evin – Stefanini dont la mise en œuvre n’est pas proposée concernent :
l’organisation à l’arrivée en France d’un bilan de santé pour les demandeurs d’asile et les primo-bénéficiaires de l’AME ;
l’inclusion des bénéficiaires de l’AME dans des dispositifs de l’assurance maladie promouvant la prévention et facilitant l’organisation des parcours de soins coordonnés ;
l’informatisation de la carte AME. Sur ce point, Mme Louwagie est favorable à cette recommandation. Cependant, selon la direction de la sécurité sociale, cette recommandation a déjà fait l’objet d’une lettre de mission dont il est préférable d’attendre les conclusions avant de proposer une évolution législative.
([3]) Cf. direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, L’assiette des ressources et la période de référence des prestations, Minima sociaux et prestations sociales, édition 2021, pages 88-96. La DREES est une direction de l’administration centrale des ministères sanitaires et sociaux agissant sous la tutelle de plusieurs ministères.
([4]) Le dispositif des soins urgents est régi par l'article L. 254-1 du CASF disposant que « les soins urgents dont l'absence mettrait en jeu le pronostic vital ou pourrait conduire à une altération grave et durable de l'état de santé de la personne ou d'un enfant à naître et qui sont dispensés par les établissements de santé aux étrangers résidant en France sans remplir la condition de régularité mentionnée à l'article L. 160-1 du code de la sécurité sociale et qui ne sont pas bénéficiaires de l'aide médicale de l'État en application de l'article L. 251-1 ainsi qu'aux demandeurs d'asile majeurs qui ne relèvent pas du régime général d'assurance maladie sont pris en charge dans les conditions prévues à l'article L. 251-2. Une dotation forfaitaire est versée à ce titre par l'État à la Caisse nationale de l'assurance maladie ».
([5]) Cette modification de l'article L. 251-1 du CASF entraîne, par voie de conséquence, la modification de l'article L. 254-1 du même code.
([6]) Cette proposition n'a pas fait consensus au sein de la mission Evin – Stefanini.
([7]) Cette proposition n'a pas fait consensus au sein de la mission Evin – Stefanini.
([8]) Assemblée nationale, commission des finances, rapport n° 4195, annexe n° 38 sur l’évaluation du coût des soins dispensés aux étrangers en situation irrégulière, Mme Véronique Louwagie, mai 2021 ;
Assemblée nationale, commission des finances, rapport n° 1244 sur l’évaluation du coût des soins dispensés aux étrangers en situation irrégulière, Mme Véronique Louwagie, mai 2023 ;
Assemblée nationale, commission des finances, rapport d’information sur les enseignements et les suites attendues du rapport Evin – Stefanini sur l’Aide médicale de l’Etat, juin 2024.
([9]) Cet article 13 bis A résultait d’un amendement déposé par M. Laurent Marcangeli.