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ASSEMBLÉE NATIONALE

 

SÉNAT

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

SESSION ORDINAIRE 2019 - 2020

Enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale

 

Enregistré à la présidence du Sénat

Le 16 juillet 2020

 

Le 16 juillet 2020

 

 

 

 

RAPPORT

 

au nom de

 

L’OFFICE PARLEMENTAIRE D’ÉVALUATION

DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES
 

 

 

L’AGRICULTURE FACE AU DÉFI DE LA PRODUCTION D’ÉNERGIE

 

 

 

 

par

 

 

M. Jean-Luc FUGIT, député, et M. Roland COURTEAU, sénateur

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Déposé sur le Bureau de l’Assemblée nationale

par M. Cédric VILLANI,

Premier vice-président de l’Office

 

Déposé sur le Bureau du Sénat

par M. Gérard LONGUET,

Président de l’Office

 

 

« Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se combinent, puis se séparent de nouveau »

Anaxagore de Clazomènes (philosophe grec), De la nature, 430 av. J.-C.

 

 

«Rien ne se crée, dans les opérations de lart, ni dans celles de la nature, et lon peut poser en principe que, dans toute opération, il y a une égale quantité de matière avant et après lopération ; que la qualité et la quantité des principes est la même, et il ny a que des changements, des modifications »

Antoine Lavoisier (chimiste français), Traité élémentaire de chimie, 1789

 

 

« Au cours dune transformation quelconque dun système fermé, la variation de son énergie est égale à la quantité dénergie échangée avec le milieu extérieur, par transfert thermique (chaleur) et transfert mécanique (travail) »

Julius Robert von Mayer (physicien allemand), Premier principe de la thermodynamique, dans un article[1] de 1842

 

 

 


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SOMMAIRE

 

Pages

L’essentiel : Principales observations et propositions

Introduction

I. La démarche de vos rapporteurs

A. De la procédure de saisine à l’adoption d’une méthode et d’un calendrier de travail

1. L’origine de la saisine

2. La méthode et le calendrier de travail

B. Le champ des investigations de l’étude

1. L’étude de faisabilité du rapport

2. Un ciblage sur certaines pistes d’investigation

C. La méthode de travail

1. Une méthode de travail fondée sur des auditions

2. Rapports, ouvrages, articles et statistiques

II. éléments de contexte

A. Le champ de l’énergie et ses dimensions

1. Comprendre les notions d’énergie et de « production d’énergie »

2. Les « sources d’énergie »

3. Le mix énergétique français

B. Les politiques énergétiques et la Programmation de l’énergie

1. Un cadre international et européen

2. Les instruments de programmation en France

3. Les scénarios de prospective

C. Le secteur agricole en perspective

1. Historique des politiques agricoles

2. L’impact des transitions agroécologique et énergétique sur le secteur agricole

3. La consommation énergétique des exploitations agricoles

III. Les enjeux de la production d’énergie dans le secteur agricole

A. enjeux généraux

1. État des lieux et données générales sur le secteur agricole comme producteur d’énergies

2. Les problèmes d’acceptabilité sociale : les positions de l’opinion publique, des parties prenantes et des agriculteurs

3. Les enjeux économiques et financiers pour les agriculteurs

4. L’accès au foncier agricole

B. Le cadre juridique et les incitations à cette production

1. Le cadre juridique de la production d’énergie comme activité agricole

2. Des incitations multiples

C. Présentation sectorielle

1. De la biomasse au biogaz : la méthanisation

a) Une énergie vertueuse

b) Les problèmes d’acceptabilité sociale

2. Les biocarburants

a) Un conflit de générations ?

b) Les problèmes d’acceptabilité sociale

c) Les biocarburants aéronautiques

3. L’énergie éolienne

a) Une énergie de moins en moins dans le vent

b) Le petit éolien

c) Les problèmes d’acceptabilité sociale

4. Le photovoltaïque et le solaire thermique

a) Histoire de la technologie photovoltaïque

b) L’amélioration progressive des panneaux photovoltaïques

c) L’énergie photovoltaïque en agriculture et l’agrivoltaïsme

d) Les problèmes d’acceptabilité sociale

5. Les autres sources d’énergie dans le secteur agricole

a) L’énergie hydraulique et l’hydroélectricité

b) La géothermie

c) Les questions d’acceptabilité sociale

D. Les perspectives technologiques des énergies renouvelables dans les terres agricoles

1. L’enjeu du stockage de l’énergie, décisif pour les sources d’énergie intermittentes

2. Le couplage de la méthanation avec la méthanisation

3. L’amélioration de la performance par l’usage du numérique et d’autres nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle dans l’agrivoltaïsme

4. D’autres démarches innovantes

IV. Des impacts environnementaux inégaux et des rendements contrastés

A. Les Bilans environnementaux

1. Généralités sur les taux d’émission de GES et les analyses ACV

2. Présentation par source d’énergie

a) Méthanisation et biogaz

b) Biocarburants

c) L’énergie éolienne

d) L’énergie photovoltaïque

e) L’hydroélectricité

f) La géothermie

3. Comparaison synthétique

B. L’enjeu transversal du stockage du carbone dans les sols

1. Le rôle des sols dans le stockage du carbone

2. Le jeu complexe de variables multiples

3. Les perspectives politiques et de recherche

C. Des rendements contrastés

1. Comprendre la notion de taux de retour énergétique (TRE)

2. Les difficultés à déterminer les écarts de TRE par source d’énergie

3. Comparaison des taux de retour énergétique des énergies renouvelables issues du monde agricole à la lumière de leurs coûts relatifs

V. Des Freins de nature variée

A. Des énergies coûteuses et peu rentables qui nécessitent de gros investissements

1. Un coût macroéconomique défavorable sauf à considérer toutes les externalités

2. Des coûts microéconomiques paralysants

B. L’accès au foncier agricole et les conflits d’usage

1. La faible disponibilité du foncier agricole

2. Les risques de conflits d’usage

C. L’intermittence et le défi technologique de stockage de l’électricité

1. L’intermittence de certaines énergies renouvelables telles que l’éolien et le photovoltaïque

2. Le défi technologique du stockage de l’énergie

D. Les freins politiques, administratifs et juridiques

1. Les freins liés à l’acceptabilité sociale

2. Des programmations peu ambitieuses

3. Une complexité administrative

E. Un manque de formations dédiées

1. La formation, enjeu majeur

2. Les formations à la méthanisation agricole

3. L’éolien et les autres filières

VI. Comparaisons internationales

A. Les situations au niveau européen et dans quelques états membres

1. Les analyses des institutions européennes

a) L’étude de la Commission européenne de 2012 sur les énergies renouvelables et le développement rural

b) Le rapport de la Cour des comptes européenne de 2018 « Énergies renouvelables et développement rural durable »

2. L’Allemagne

a) Généralités

b) La production d’énergie dans le secteur agricole par filière

c) Objectifs et incitations

d) Quelques freins au développement de ces productions d’énergie

e) Les perspectives technologiques

3. Les Pays-Bas

a) Généralités

b) La production d’énergie dans le secteur agricole par filière

c) Objectifs et incitations

d) Quelques freins au développement de ces productions d’énergie

4. Le Royaume-Uni

a) Généralités

b) La production d’énergie dans le secteur agricole par filière

c) Objectifs et incitations

d) Quelques freins au développement de ces productions d’énergie

e) Les perspectives technologiques


5. L’Italie

a) Généralités

b) La production d’énergie dans le secteur agricole par filière

c) Objectifs et incitations

d) Quelques freins au développement de ces productions d’énergie

6. L’Espagne

a) Généralités

b) La production d’énergie dans le secteur agricole par filière

c) Objectifs et incitations

d) Les perspectives technologiques

B. Les États-Unis

1. Généralités

2. La production d’énergie dans le secteur agricole par filière

3. Objectifs et incitations

4. Quelques freins au développement de ces productions d’énergie

5. Les perspectives technologiques

C. Synthèse Comparée de sept pays

1. Comparaison des mixs énergétiques

2. Comparaison de la production d’énergie d’origine agricole

VII. Les Propositions du rapport

A. Les Propositions générales

1. Concilier la politique énergétique française et ses implications pour le monde agricole avec nos objectifs de production alimentaire, de lutte contre l’artificialisation des sols, de stockage du carbone dans les sols, de maintien de la biodiversité et de santé publique, en assurant la primauté de la production alimentaire sur les autres objectifs, afin de prévenir les conflits d’usage

2. Clarifier notre stratégie énergétique nationale vis-à-vis du monde agricole et, plus généralement, améliorer la cohérence interne de la politique énergétique de la France en matière de développement des énergies renouvelables, en renforçant le rôle du Parlement

3. Soutenir la recherche sur la production d’énergie dans le secteur agricole et encourager le financement de démarches innovantes, en dotant la stratégie de recherche en énergie d’un volet agricole

4. Assurer un suivi régulier et rigoureux de la production d’énergie dans le secteur agricole, en intégrant autant que possible les approches en termes d’analyses de cycle de vie (ACV)

5. Favoriser la production d’énergie et sa consommation dans le secteur agricole, à travers des incitations, permettant d’encourager l’attractivité des modèles d’affaires pour les agriculteurs, en adaptant les tarifs réglementés, les appels d’offres et les guichets ouverts, en utilisant le levier de la fiscalité agricole (rattachement au régime des bénéfices agricoles – BA) et en levant certains freins réglementaires à la production d’énergie et à sa consommation dans le secteur agricole

6. Déployer des projets de territoire pour la production d’énergie dans le secteur agricole, dans le cadre de la politique d’aménagement des territoires

7. Adopter une démarche de certification des projets conduits, par exemple sous la forme d’un label « Agroénergie »

8. Améliorer l’offre de formation en matière de production d’énergie dans le secteur agricole, au niveau de la formation initiale (secondaire et supérieur) comme de la formation continue, certaines formations devant permettre l’apprentissage de compétences de haut niveau, y compris celles liées au montage et à la gestion des installations énergétiques

9. Protéger le foncier agricole à travers un nouveau cadre législatif

B. Les Propositions sectorielles

10. Développer de manière prioritaire la méthanisation, la coupler le plus souvent possible à la méthanation, mobiliser la biomasse au service de la bioéconomie et accroître les ambitions trop modestes de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) sur le biogaz

11. Défendre le droit à l’injection du biogaz et encourager le raccordement au réseau national de gaz des installations existantes

12. Assurer la traçabilité des intrants dans les méthaniseurs pour garantir leur pouvoir méthanogène ainsi que la bonne qualité des digestats en vue de leur épandage

13. Organiser une vigilance sur la qualité des installations par un suivi régulier et recourir à des contrôles de sécurité ponctuels

14. Réduire les fuites indésirables de gaz lors de la méthanisation, notamment de méthane, de CO2 et d’ammoniac

15. Réhausser les limites des travaux de renforcement prévus par le compte d’affectation spéciale (CAS) « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale » (Facé)

16. Pour les projets photovoltaïques, utiliser le levier des seuils des appels d’offres et des guichets ouverts et soutenir l’agrivoltaïsme, en vue d’éviter l’artificialisation des sols et recourir le plus possible aux technologies innovantes comme l’intelligence artificielle

17. Engager une réflexion sur le soutien aux éoliennes terrestres et veiller au respect de la règle de remise en état des terres à la suite des opérations de démantèlement

18. Tirer les conséquences de l’abandon progressif des soutiens aux biocarburants de première génération et développer des technologies innovantes, par exemple en matière de biocarburants aéronautiques

19. Relever le défi du stockage de l’énergie, seul moyen à ce jour de résoudre le problème de l’intermittence des filières photovoltaïque et éolienne

20. Développer les technologies et les infrastructures de stockage d’énergie à travers le « power to gas » permettant de produire de l’hydrogène et/ou du méthane de synthèse, utilisable notamment par des piles à combustible

C. Rappel des propositions pour le stockage du Carbone dans les sols

1. Poursuivre et amplifier, au niveau international, l’initiative « 4 pour 1 000 »

2. Construire une PAC incitative au stockage de carbone dans les sols

3. Se doter d’une stratégie nationale sur les sols et mettre en œuvre l’initiative « 4 pour 1 000 » selon une approche territoriale, en veillant à la cohérence des actions conduites

Saisine de l’Office

Examen du rapport par l’Office

Liste des personnes entendues

I. Institutions

II. Experts et scientifiques

III. Syndicats et Associations

IV. Entreprises


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Lessentiel : Principales observations et propositions

 

LES OBSERVATIONS

Lénergie ne se produit pas, elle se transforme. La production d’énergie revient à transformer une forme d’énergie en une autre.

À la croisée des enjeux climatiques et énergétiques, au moment où la lutte contre le réchauffement climatique et la transition énergétique appellent à renforcer le développement des énergies renouvelables et où lagroécologie permet de penser les productions agricoles à la lumière des fonctionnalités offertes par les écosystèmes, lagriculture joue plus que jamais un rôle pivot, par l’intermédiaire de la production végétale et animale nécessaire à notre alimentation, de la moindre émission de gaz à effet de serre, du stockage du carbone dans les sols, du maintien voire de la reconquête de la biodiversité, de la récupération des déchets mais aussi de la production dénergies renouvelables, car elle permet de mobiliser des terres et des matières premières nécessaires à la production d’électricité, de gaz, ou de carburants.

La production d’énergie dans le secteur agricole ne doit pas être considérée comme une question secondaire ou un enjeu conjoncturel, c’est un sujet majeur aux implications multiples pour lenvironnement et le climat, pour ses conséquences en matière d’aménagement des territoires, dorganisation des filières et des exploitations agricoles, y compris sur un plan économique. Pour autant, les productions d’énergies renouvelables issues de notre agriculture ne suffiront pas à redessiner le mix énergétique national ou international.

Les cultures alimentaires doivent toujours primer sur les cultures strictement énergétiques et lorsqu’une même production peut avoir les deux usages, sa vocation alimentaire doit primer sur sa valorisation énergétique. La première fonction de l’agriculture doit demeurer celle de produire notre alimentation : l’énergie ne peut pas entrer en compétition avec cette dernière. Les solutions de développement conjoint des deux activités de production, alimentaire et énergétique, sont à développer.

Le secteur agricole, avec un minimum de 50 000 exploitations concernées, assure déjà 20 % de la production dénergies renouvelables (396 GWh d’énergies renouvelables, soit 3,5 % de la production nationale d’énergie). Certaines énergies sont davantage produites dans le secteur agricole : 96 % de la production nationale de biocarburants revient à l’agriculture, 83 % pour l’éolien, 26 % pour le biogaz, 13 % pour le solaire photovoltaïque et 8 % pour la biomasse chaleur. Selon les scénarios prospectifs de l’Ademe, de NégaWatt ou encore de Solagro, cette production est amenée à croître de manière rapide à l’horizon de la neutralité carbone en 2050 (multiplication par 3 passant de 4,6 Mtep à 15,8 Mtep).

La production dénergies renouvelables dans le secteur agricole soulève plusieurs enjeux : économiques, financiers, technologiques, d’acceptabilité sociale, de formation ou, encore, d’usage et d’accès aux terres agricoles. Une comparaison internationale entre sept pays le confirme.

Le stockage de lénergie est un enjeu décisif pour les sources d’énergie intermittentes telles que le photovoltaïque et l’éolien. Leur intégration et leur développement dans le monde agricole sont corrélés à diverses techniques de stockage telles que les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP), les batteries et surtout l’hydrogène.

La recherche autour des énergies renouvelables est nécessaire. De récentes innovations montrent l’intérêt croissant des couplages : solaire-éolien, méthanisation-méthanation ou encore cultures agricoles et énergie photovoltaïque à travers l’agrivoltaïsme. L’usage des nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle permet d’augmenter le rendement de chaque source d’énergie.

Le monde agricole a besoin de davantage de formations et de conseil afin de préparer au mieux les agriculteurs à opérer cette transition agroécologique. Certaines productions d’énergie, telles que la méthanisation, impliquent des connaissances et des savoir-faire qui doivent être renforcés, afin d’assurer une gestion efficiente des installations de production d’énergie.

Il sera de plus en plus nécessaire, à la lumière de l’expérience de la pandémie de Covid-19, de repenser linterdépendance entre notre microbiote intestinal, notre système immunitaire, notre alimentation, notre agriculture, notre politique de santé, les pollutions, la déforestation, l’artificialisation des terres, les atteintes à la biodiversité, le réchauffement climatique, la mondialisation et le développement des pandémies. C’est pourquoi le rapport plaide pour une vision transversale et systémique des enjeux interdépendants de la santé, de lenvironnement et de lagriculture. Le contexte actuel, avec le besoin d’accélérer la transition énergétique et de définir un plan de relance suite à la pandémie, offre une occasion à saisir. Un futur projet de loi sur le foncier agricole pourrait avantageusement être déposé et être le vecteur dune réforme du monde agricole en intégrant certaines des propositions du présent rapport, allant dans le sens des orientations générales de ce dernier et de sa vision transversale et systémique des enjeux.

De façon grandissante, notre agriculture devra se tourner vers lagroécologie et vers lagroforesterie, seul mode d’exploitation des terres qui prévoit l’association des arbres et des cultures, ce qui présente de nombreux avantages, pour la protection des sols mais aussi pour la biodiversité et la productivité des terres.

Tel est le bel avenir que nous souhaitons pour lagriculture.

LES PROPOSITIONS (détaillées au chapitre VII du présent rapport)

 

L’ensemble de ces propositions doit permettre d’orienter le plan de relance du Gouvernement faisant suite à la pandémie de Covid-19 et d’en préciser certains aspects.

 

LES PROPOSITIONS GÉNÉRALES

1. Concilier la politique énergétique française et ses implications pour le monde agricole avec nos objectifs de production alimentaire, de lutte contre l’artificialisation des sols, de stockage du carbone dans les sols, de maintien de la biodiversité et de santé publique, en assurant la primauté de la production alimentaire sur les autres objectifs, afin de prévenir les conflits d’usage.

2. Clarifier notre stratégie énergétique nationale vis-à-vis du monde agricole et, plus généralement, améliorer la cohérence interne de la politique énergétique de la France en matière de développement des énergies renouvelables, en renforçant le rôle du Parlement.

3. Soutenir la recherche sur la production d’énergie dans le secteur agricole et encourager le financement de démarches innovantes, en dotant la stratégie de recherche en énergie dun volet agricole.

4. Assurer un suivi régulier et rigoureux de la production d’énergie dans le secteur agricole, en intégrant autant que possible les approches en termes d’analyses de cycle de vie (ACV).

5. Favoriser la production dénergie et sa consommation dans le secteur agricole, à travers des incitations, permettant d’encourager l’attractivité des modèles d’affaires pour les agriculteurs, en adaptant les tarifs réglementés, les appels d’offre et les guichets ouvert, en utilisant le levier de la fiscalité agricole (rattachement au régime des bénéfices agricoles – BA) et en levant certains freins réglementaires à la production d’énergie et à sa consommation dans le secteur agricole.

6. Déployer des projets de territoire pour la production d’énergie dans le secteur agricole, au sein de la politique d’aménagement des territoires.

7. Adopter une démarche de certification des projets conduits, par exemple sous la forme d’un label « Agroénergie ».

 

8. Améliorer loffre de formation en matière de production d’énergie dans le secteur agricole, au niveau de la formation initiale (secondaire et supérieur) comme de la formation continue, certaines formations devant permettre l’apprentissage de compétences de haut niveau, y compris celles liées au montage et à la gestion des installations énergétiques.

9. Protéger le foncier agricole à travers un nouveau cadre législatif.

 

LES PROPOSITIONS SECTORIELLES

10. Développer de manière prioritaire la méthanisation, la coupler le plus souvent possible à la méthanation, mobiliser la biomasse au service de la bioéconomie et accroître les ambitions trop modestes de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) sur le biogaz.

11. Défendre le droit à linjection du biogaz et encourager le raccordement au réseau national de gaz des installations existantes.

12. Assurer la traçabilité des intrants dans les méthaniseurs pour garantir leur pouvoir méthanogène ainsi que la bonne qualité des digestats en vue de leur épandage.

13. Organiser une vigilance sur la qualité des installations par un suivi régulier et recourir à des contrôles de sécurité ponctuels.

14. Réduire les fuites indésirables de gaz lors de la méthanisation, notamment de méthane, de CO2 et d’ammoniac.

15. Rehausser les limites des travaux de renforcement prévus par le compte d’affectation spéciale (CAS) « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale » (Facé).

16. Pour les projets photovoltaïques, utiliser le levier des seuils des appels d’offre et des guichets ouverts et soutenir lagrivoltaïsme, en vue d’éviter l’artificialisation des sols et recourir le plus possible aux technologies innovantes comme lintelligence artificielle.

17. Engager une réflexion sur le soutien aux éoliennes terrestres et veiller au respect de la règle de remise en état des terres à la suite des opérations de démantèlement.

18. Tirer les conséquences de labandon progressif des soutiens aux biocarburants de première génération et développer des technologies innovantes, par exemple en matière de biocarburants aéronautiques.

19. Relever le défi du stockage de lénergie, seul moyen à ce jour de résoudre le problème de l’intermittence des filières photovoltaïques et éoliennes.

20. Développer les technologies et les infrastructures de stockage d’énergie à travers le « power to gas » permettant de produire de lhydrogène et/ou du méthane de synthèse, utilisable notamment par des piles à combustible.

 

RAPPEL DES PROPOSITIONS POUR LE STOCKAGE DU CARBONE DANS LES SOLS

1. Poursuivre et amplifier, au niveau international, linitiative « 4 pour 1 000 ».

2. Construire une PAC incitative au stockage de carbone dans les sols.

3. Se doter d’une stratégie nationale sur les sols et mettre en œuvre l’initiative « 4 pour 1 000 » selon une approche territoriale, en veillant à la cohérence des actions conduites.

 

 


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Introduction

 

Au moment où la lutte contre le réchauffement climatique et la transition énergétique appellent à renforcer le développement des énergies renouvelables et où l’agroécologie permet de penser les productions agricoles à la lumière des fonctionnalités offertes par les écosystèmes, l’agriculture peut jouer un rôle pivot dont nous ne pouvons ni ne devons faire l’économie.

La saisine de l’Office par la commission des affaires économiques du Sénat s’inscrit directement dans cette réflexion.

L’agriculture et la forêt interagissent de façon étroite avec le climat et l’environnement : elles se situent donc depuis des millénaires à la croisée des enjeux climatiques et énergétiques. Le recours raisonné à la force musculaire humaine, l’énergie de la biomasse utilisable notamment grâce au feu, puis la traction animale et l’énergie tirée de l’eau et du vent - énergies renouvelables - ont en effet marqué les premiers jalons de nos civilisations. Depuis un siècle, nos cultures agricoles recourent de plus en plus aux énergies fossiles.

L’agriculture est par essence productrice dénergie, tout d’abord par l’intermédiaire de la production végétale et animale nécessaire à notre alimentation et à celle des animaux délevage, mais son rôle va bien au‑delà.

Il est vrai que son rôle a été et demeure prioritairement de produire lénergie qui nous permet de vivre et de nous déplacer chaque jour et non pas de produire de l’électricité ou du biogaz. La production alimentaire ne sera pas lobjet du présent rapport, qui consacrera cependant une partie des développements à la compréhension des notions d’énergie et de « production d’énergie ».

Des chercheurs ont pu souligner le parallèle entre l’alimentation et l’activité agricole comme objets de consommation et de production d’énergie. Ainsi, Etienne Van Hecke explique que « tout comme lalimentation humaine correspond à un système énergétique, lagriculture est également caractérisée par un input et un output dénergie »[2]. Parmi ces outputs, la production de biogaz et de biocarburants - tous deux issus de la production de biomasse végétale -, dénergie éolienne, ou encore dénergie photovoltaïque - toutes deux souvent issues de l’utilisation de surfaces agricoles bâties ou non bâties - représente un poids grandissant.

Sans annoncer de manière prématurée les conclusions du présent rapport, il convient, afin de prévenir les conflits d’usage et des déséquilibres indésirables, d’affirmer la priorité de la mission de production alimentaire du secteur agricole sur la production d’autres formes d’énergie, avec le souci de limiter lartificialisation des sols et de maintenir voire reconquérir la biodiversité.

La grande majorité de la surface terrestre ne doit pas servir à la production d’énergie, sans quoi cette dernière entrerait en concurrence de manière critique avec le processus de photosynthèse en vue de la production alimentaire, depuis les échelons les plus modestes de la chaîne alimentaire ‑ du phytoplancton aux végétaux ‑ jusqu’à l’agriculture au sens moderne.

Comme en témoignent les observations d’Anaxagore de Clazomènes, d’Antoine Lavoisier et de Julius Robert von Mayer, citées en ouverture du présent rapport et auxquelles les rapporteurs sont attachés, l’énergie se singularise par une caractéristique majeure : elle ne peut ni se créer, ni se détruire, mais juste se transformer.

Le vocabulaire courant, ainsi que celui des domaines de l’économie et des politiques publiques, évoque les concepts de « production d’énergie », de « consommation d’énergie » et de « source d’énergie », pourtant, comme il sera expliqué dans le présent rapport, l’énergie au sens de la physique n’est ni créée, ni détruite, mais seulement transformée et transférée. Par commodité, on utilisera dans le présent rapport les notions de production, de consommation et de source d’énergie, mais sans oublier que ce n’est pas strictement rigoureux d’un point de vue scientifique.

Par ailleurs, le présent rapport porte sur le secteur agricole en France et ne traite pas de la production d’énergie directe ou indirecte par la filière forêt-bois, sujet à part entière, que l’Office pourra étudier à une autre occasion. Bien sûr, la forêt et l’agriculture sont complémentaires en termes d’absorption de gaz à effet de serre (GES), en particulier de CO2.

Vouloir la neutralité carbone à l’horizon 2050 passera par la compensation des émissions liées à nos activités anthropiques par nos forêts et notre agriculture. Par exemple, le fait de stocker plus de carbone dans les sols présente l’intérêt de compenser ces émissions mais aussi de renforcer la sécurité alimentaire car le niveau de carbone des sols a des effets majeurs sur la fertilité de ceux-ci et donc sur la productivité agricole.

Cette question, qui a fait l’objet de la note scientifique n° 3 de l’Office[3], sera abordée dans la quatrième partie du présent rapport consacrée aux impacts environnementaux et aux rendements contrastés de la production d’énergie dans le secteur agricole.

Parce que nous poursuivons l’objectif de stocker de plus en plus de carbone et de consommer de moins en moins de carbone non renouvelable, il faudra penser les sols de manière plus stratégique car le cycle du carbone garantissant sa neutralité passe par les sols, dont une grande partie est agricole ou forestier, auxquels il faut ajouter la biomasse.

L’agriculture dispose donc selon Bernard Pellecuer, ingénieur agronome, d’un potentiel important permettant à la fois de réduire ses émissions de gaz à effet de serre avec la réduction des intrants, les changements d’usage des sols, l’adaptation des systèmes et la récupération des déchets, de stocker le carbone issu des autres activités, et de produire des énergies renouvelables. Ce dernier point est l’objet du présent rapport.

De manière moins liée au sujet de la production d’énergie, elle peut fournir la matière première nécessaire à la fabrication de bioproduits qui peuvent se substituer aux produits chimiques issus du pétrole, et ceci de manière avantageuse, notamment par rapport à l’environnement.

La production d’énergie dans le secteur agricole ne doit pas être considérée comme une question secondaire ou un enjeu conjoncturel, c’est un sujet majeur aux implications multiples pour lenvironnement et le climat, pour ses conséquences en matière d’aménagement des territoires, dorganisation des filières et des exploitations agricoles, y compris sur un plan économique. Pour autant, les productions d’énergies renouvelables issues de notre agriculture ne suffiront pas à redessiner le mix énergétique national ou international.

Selon le rapport de l’Institut des hautes études pour la science et la technologie (IHEST) « Les usages énergétiques des terres agricoles : cultiver lénergie au 21e siècle », qui s’interroge sur la transformation de l’agriculteur en « énergieculteur », il faut insister sur « la complexité des enjeux, très interdépendants », qui devrait conduire à un plus grand rôle de la collectivité dans la gouvernance des exploitations agricoles du futur.

Il sera de plus en plus nécessaire, à la lumière de l’expérience de la pandémie de Covid-19, de repenser linterdépendance entre notre microbiote intestinal, notre système immunitaire, notre alimentation, notre agriculture, notre politique de santé, les pollutions, la déforestation, l’artificialisation des terres, les atteintes à la biodiversité, le réchauffement climatique, la mondialisation et le développement des pandémies, tout se tient :

- la mondialisation représente un facteur de risque pour la transformation des zoonoses en pandémies ;

- l’agriculture produit notre alimentation, ce qui impacte les pollutions, les sols, le réchauffement climatique et les atteintes à la biodiversité ;

- notre système alimentaire contribue à la déforestation, qui est elle‑même un facteur de risque pour les zoonoses ;

- enfin, notre alimentation conditionne notre santé au travers de ses impacts sur notre microbiote intestinal et notre système immunitaire dont la fragilité nous rend plus sensible aux maladies infectieuses et donc aux pandémies.

La biomasse est au cœur de ces enjeux : elle fournit notre alimentation et peut contribuer à la fourniture dénergie, mais elle doit aussi en partie revenir au sol, tout autant pour réguler le climat - avec le stockage de carbone - que pour pérenniser ou améliorer la capacité des sols à la produire.

Comme l’expliquait Albert Einstein, « on ne peut pas résoudre un problème avec le même niveau de pensée que celle qui la créé », c’est pourquoi l’expérience de la pandémie de Covid-19 appelle à articuler de manière nouvelle la santé, lenvironnement, lalimentation et lagriculture.

Elle appelle notre vigilance sur le mode ordinaire de gestion des politiques publiques, compartimenté entre des politiques sectorielles en silo qui abordent les problèmes isolément, par domaine : politiques sanitaires, environnementales, agricoles, politiques de l’alimentation, du commerce international… Cette approche est frappée d’obsolescence alors qu’elle continue paradoxalement à régir l’action publique.

Ainsi que l’a fait valoir Michel Duru, directeur de recherche en agronomie à l’INRAE, nous devons recourir à un concept nouveau de « santé globale » ou de « santé unique » afin d’adopter une vision transversale et systémique des enjeux interdépendants de la santé, de lenvironnement, de lalimentation et de lagriculture.

Le contexte actuel, avec le besoin d’accélérer la transition énergétique et de définir un plan de relance suite à la pandémie, nous offre une occasion à saisir. Comme il sera vu dans les propositions, un futur projet de loi sur le foncier agricole pourrait avantageusement être déposé et devenir le vecteur dune réforme du monde agricole en intégrant certaines des propositions du présent rapport, allant dans le sens des orientations générales de ce dernier et de la vision transversale et systémique des enjeux que l’on vient de présenter.

L’ensemble de ces propositions devraient permettre de contribuer à la définition des orientations du plan de relance du Gouvernement faisant suite à la pandémie de Covid-19 et d’en préciser certains aspects.

Dans son rapport annuel pour 2020 « Redresser le cap, relancer la transition »[4], rendu public le 8 juillet 2020, le Haut conseil pour le climat identifie plusieurs mesures de sortie de crise qui sont compatibles avec les objectifs climat et la transition bas-carbone. Parmi ces mesures, le déploiement des énergies renouvelables et l’augmentation du stockage de carbone dans les sols sont évoqués. Quelques mois plus tôt, le Haut conseil avait, en avril 2020, tiré quelques enseignements de la crise liée à la pandémie en appelant à accélérer la transition vers la neutralité carbone pour renforcer notre résilience aux risques sanitaires et climatiques dans un rapport spécial intitulé « Climat, santé : mieux prévenir, mieux guérir »[5]. Les rapporteurs se félicitent de cette prise de conscience progressive.

De façon grandissante, nos cultures agricoles devront s’adapter à cette vision transversale et systémique et se tourner vers lagroécologie et lagroforesterie, seul mode d’exploitation des terres qui prévoit l’association des arbres et des cultures, ce qui présente de nombreux avantages, pour la protection des sols mais aussi pour la biodiversité et la productivité des terres.

Tel est le bel avenir que nous souhaitons pour lagriculture.

 

 


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I.  La démarche de vos rapporteurs

A.  De la procédure de saisine à ladoption dune méthode et dun calendrier de travail

1.  Lorigine de la saisine

L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a été saisi le 3 décembre 2018, en application de l’article 6 ter de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, par la commission des affaires économiques du Sénat, d’une demande d’étude sur la valorisation énergétique des terres agricoles. Comme expliqué ci-après, le champ des investigations de cette étude a été élargi à la production dénergie dans le secteur agricole.

2.  La méthode et le calendrier de travail

Les rapporteurs ont préparé en 2019 une étude de faisabilité, adoptée lors de la réunion de l’Office du 17 octobre 2019, sous la forme d’une note de méthodologie pour le rapport sur la production d’énergie dans le secteur agricole. En amont de cette réunion, ils ont conduit plusieurs auditions afin d’éclairer les différentes dimensions du sujet et de mieux délimiter le champ de leurs investigations. Ils ont également adressé des questionnaires aux ministères de l’agriculture et de l’alimentation et de la transition écologique. Ils ont ensuite poursuivi leurs auditions pendant le premier semestre 2020 jusqu’au mois de juin et ont obtenu de nos services économiques à l’étranger des données pour six pays : l’Allemagne, les Pays‑Bas, l’Italie, l’Espagne, le Royaume-Uni et les États-Unis. De telles informations ont permis de constituer une synthèse comparée inédite, objet de la sixième partie du présent rapport.

B.  Le champ des investigations de létude

1.  Létude de faisabilité du rapport

Les précisions qui suivent sont importantes car le champ des investigations de létude a évolué d’un objet initial ‑ la valorisation énergétique des terres agricoles ‑ vers la production d’énergie dans le secteur agricole. Définie par l’Agence de l’environnement et de maîtrise de l’énergie (Ademe), la valorisation énergétique est « destinée aux déchets qui ne peuvent être recyclés ou valorisés sous forme de matière, la valorisation énergétique consiste à récupérer et valoriser lénergie produite lors du traitement des déchets par combustion ou méthanisation. Lénergie produite est utilisée sous forme de chaleur ou délectricité. La valorisation énergétique peut être directe : le déchet est brûlé dans une installation dédiée, construite et opérée selon des critères définis afin de minimiser les impacts environnementaux et sanitaires. Cest le mode le plus utilisé actuellement pour les déchets municipaux. Elle peut aussi être différée - pour les déchets industriels de préférence - soit par la production dun combustible solide de récupération, soit par la production dun gaz ou dun coke dans des procédés de gazéification ou de pyrolyse ». Une telle définition aurait conduit à une étude trop restrictive, il a donc été décidé d’élargir le champ des investigations à la production d’énergie dans le secteur agricole.

Si cette définition stricte avait été utilisée, il aurait donc fallu inclure l’utilisation, à des fins de production d’énergie, des produits agricoles ainsi que des déchets et résidus afférents, ce qui aurait mené à la préparation d’un rapport sur les biocarburants et la valorisation de la seule biomasse, à travers par exemple la combustion ‑ biomasse chaleur ‑ et la méthanisation ‑ biogaz ‑ or élargir le champ de l’étude permet d’inclure non seulement l’utilisation des sols agricoles mais aussi des bâtiments et des sous-sols pour tout type de production dénergie : l’énergie éolienne, l’énergie photovoltaïque, le solaire thermique, les pompes à chaleur, la petite hydroélectricité, etc.

Au moment où la transition énergétique appelle le développement des énergies renouvelables, un tel élargissement est apparu particulièrement judicieux et justifié.

L’Office a consacré ses travaux à l’énergie ou à l’agriculture à plusieurs reprises, mais il n’a jamais consacré de rapport au sujet des relations entre agriculture et production d’énergie, seul un rapport de 1997 sur les perspectives de développement des productions agricoles à usage non alimentaire, rédigé par notre ancien collègue député Robert Galley, mérite d’être mentionné ici car, sans se concentrer sur les aspects énergétiques, il les évoquait sous langle des biocarburants et de la valorisation de la biomasse à travers la combustion[6]. Votre rapporteur Roland Courteau avait, de son côté, établi au nom de l’Office en 2016 un rapport tiré d’une audition publique : « De la biomasse à la bioéconomie : une stratégie pour la France »[7].

 

Le rapport de lOffice de 1997 sur les perspectives de développement
des productions agricoles à usage non alimentaire

Ce rapport, qui traitait aussi de la filière amidon et de la biomasse chaleur, montrait que l’apparition des biocarburants et des plans gouvernementaux idoines s’inscrivait dans un contexte historique précis, les périodes de crise et/ou de surproduction entrainant un regain d’intérêt pour les utilisations non alimentaires des produits agricoles. Les biocarburants et, en particulier, l’éthanol, étaient soutenus dans une logique de « jachère énergétique ».

La première manifestation de ce phénomène est apparue en France à partir de 1923 avec l’accumulation des stocks d’alcool suite à la Première Guerre mondiale. Les importateurs de pétrole ont alors été contraints d’acheter au Service des alcools des quantités d’alcool représentant 10 % du volume des produits pétroliers importés. La période de l’Occupation, où les approvisionnements en pétrole ont été naturellement très difficiles, a vu resurgir l’éthanol comme carburant. Ce dernier, produit à partir du topinambour comme matière première, a représenté jusqu’à la moitié des carburants consommés. Après-guerre, le pétrole étant revenu, l’écart de son prix et de celui de l’alcool se creusant, le Gouvernement a décidé en 1956 de supprimer la fabrication de carburants à base d’alcool et notamment du super carburant ternaire composé de 15 % d’éthanol, 10 % de benzol et 75 % d’essence, principalement réservé aux transports publics. Seule la R.A.T.P a continué à utiliser ce carburant jusqu’en 1970. En janvier 1981 était présenté le programme Carburols par le ministère de l’industrie, dans le but de diminuer la vulnérabilité stratégique des approvisionnements pétroliers. Les carburants prioritaires de ce plan étaient d’abord le méthanol et l’acétone-butanol et ensuite l’éthanol. Le méthanol devait être issu de produits agricoles alors que l’acétone-butanol devait être produit à partir de plantes saccharifères ou de sous-produits agricoles ligno-cellulosiques, paille, tiges et rafles de maïs. Quant à l’éthanol, il devait être produit à partir du topinambour et surtout des betteraves à sucre. Le contexte financier et la détente sur le marché du pétrole ont eu raison de ce programme après quelques réalisations. Il faut cependant noter que ce sont les crises affectant un produit extérieur à l’agriculture, le pétrole, qui ont entraîné des renouveaux épisodiques d’intérêt pour une utilisation non alimentaire des produits agricoles.

Ce rapport décrivait également les politiques publiques de soutien aux biocarburants, en précisant que les exonérations fiscales ne constituaient pas une perte sèche pour l’État - puisque l’émergence des biocarburants contribuait à utiliser des terres gelées et à maintenir des emplois en milieu rural - mais posaient des difficultés au regard du droit européen (discrimination entre produits nationaux et importés, aides directes et indirectes…) : les lois de finances pour 1992 et 1993 ont ainsi prévu des exonérations de taxes touchant les produits pétroliers, notamment les esters d’huile de colza et de tournesol et pour l’alcool éthylique et ses dérivés, la loi de finances rectificative pour 1993 a ajouté des garanties d’État pour l’amortissement des unités pilotes de production de biocarburants. Cette dernière disposition était fondée sur une directive européenne du 19 octobre 1992 prévoyant la possibilité pour les États membres d’appliquer des exonérations de taux d’accises dans le cadre de projets pilotes visant au développement de produits moins polluants d’origine renouvelable.

Outre les effets sur l’emploi et les revenus, les biocarburants permettaient de diminuer la dépendance extérieure aux produits pétroliers et les importations de produits fossiles.

Source : OPECST.

L’Office n’ayant jamais travaillé directement et globalement sur le sujet de la production d’énergie dans le secteur agricole, il est apparu pertinent dapprofondir ce thème à travers une étude intégrée et approfondie.

2.  Un ciblage sur certaines pistes dinvestigation

Vos rapporteurs ont entendu dresser un tableau des énergies renouvelables issues du monde agricole en France métropolitaine, en mettant l’accent sur les enjeux d’opinion, de revenu pour les agriculteurs, de cadre juridique, d’incitations, de freins et, surtout, de rendement et d’impact environnemental, ces deux derniers points correspondant particulièrement bien à la mission de lOffice d’informer le Parlement des conséquences des choix scientifiques et technologiques[8].

L’Office ayant en effet pour vocation d’anticiper les questions complexes dordre scientifique et technologique qui pourraient se poser au législateur, il doit pouvoir lui fournir des explications circonstanciées sur des enjeux dont les risques et les opportunités auraient été difficiles à identifier sans son éclairage.

C.  La méthode de travail

1.  Une méthode de travail fondée sur des auditions

Vos rapporteurs ont rencontré 153 personnes lors des auditions qu’ils ont organisées ainsi que lors de différentes visites, notamment sur deux journées au Salon international de l’agriculture 2020 à Paris. La liste des personnes rencontrées figure en annexe du présent rapport.

2.  Rapports, ouvrages, articles et statistiques

Outre le rapport précité de 1997 sur les perspectives de développement des productions agricoles à usage non alimentaire rédigé par notre ancien collègue député Robert Galley, vos rapporteurs ont utilisé l’étude de l’Ademe de février 2018 « Agriculture et énergies renouvelables : contributions et opportunités pour les exploitations agricoles »[9], un rapport du ministère de l’agriculture et de l’alimentation de janvier 2011 « Prospective Agriculture et Énergie 2030 »[10] et une « Enquête sur les consommations et les productions d’énergie dans les exploitations agricoles »[11], conduite la même année ; ces trois sources étant parmi les rares documents à se consacrer au sujet du présent rapport, mais le plus souvent en parlant davantage de consommation que de production d’énergie.

Ils ont également consulté plusieurs sites, ouvrages et articles[12] ainsi que les rares statistiques existantes. L’ouvrage de Bernard Pellecuer, Énergies renouvelables et agriculture, est celui qui se rapproche le plus de l’angle adopté par les rapporteurs.

Le ministère de lagriculture et de lalimentation établit la statistique agricole annuelle[13], relative à l’utilisation des terres et aux productions agricoles, le recensement général agricole[14], tous les dix ans, et dispose d’un bureau des statistiques sur les productions et les comptabilités agricoles et de son outil de données publiques Agreste[15]. Malheureusement les statistiques sont le plus souvent relatives à l’utilisation des terres et aux productions agricoles et ne donnent pas d’informations sur la production d’énergie en tant que telle[16]. Il s’agit d’un manque que le présent rapport entend combler dans l’avenir, comme l’indique la proposition n °4 présentée dans la septième partie du rapport.

Le ministère de la transition écologique produit régulièrement de nombreuses statistiques sur la production d’énergie, y compris par source (les biocarburants, la méthanisation, l’énergie éolienne, l’énergie photovoltaïque, l’hydroélectricité, etc.) mais la part du secteur agricole nest pas isolée dans le processus de production de ces énergies renouvelables.

La pauvreté des données disponibles montre que la question ne fait pas lobjet dun suivi rigoureux et régulier par les pouvoirs publics.

 


II.  éléments de contexte

A.  Le champ de lénergie et ses dimensions

1.  Comprendre les notions dénergie et de « production dénergie »

Employé dans son acception moderne pour la première fois par Jean Bernoulli en 1717, bien que le concept remonte à l’Antiquité, le terme d’énergie renvoie à la « capacité dun corps ou dun système à produire du travail mécanique ou son équivalent »[17], plus formellement elle est définie comme « la grandeur physique qui se conserve lors de tout changement détat dun système physique »[18]. Selon Jean-Marc Jancovici, cette définition scientifique « ne dit rien dautre que le fait que dès que le monde qui nous entoure - un système - change, de lénergie entre en jeu, et la mesure de cette énergie mesure le degré de transformation entre lavant et laprès ».

Il s’agit donc de la mesure de la capacité dun système à modifier un état, c’est-à-dire à produire un travail entraînant un mouvement, un rayonnement électromagnétique, de la chaleur ou encore du froid. Nous utilisons l’énergie à travers de multiples manières, parfois sans en être conscients, dans nos corps avec la force musculaire, comme dans le monde physique, sous la forme de solutions de mobilité, de production de chaleur ou de froid, de consommations d’électricité à des fins multiples, comme l’éclairage, la transmission et le traitement d’informations, de machines industrielles et plus rarement domestiques qui tordent, vissent, emboutissent, alèsent, écrasent, étirent, filent, râpent, découpent, etc.

L’énergie se singularise par une caractéristique majeure, bien connue des physiciens, elle ne peut ni se créer, ni se détruire, mais juste se transformer. Dans la continuité des observations d’Anaxagore de Clazomènes et d’Antoine Lavoisier, Julius Robert von Mayer formula en 1842 le premier principe de la thermodynamique, selon lequel, dans toute transformation, il existe une conservation de lénergie. Ainsi que l’explique Julius Robert von Mayer dans un article[19] de 1842, « au cours dune transformation quelconque dun système fermé, la variation de son énergie est égale à la quantité dénergie échangée avec le milieu extérieur, par transfert thermique (chaleur) et transfert mécanique (travail) ». Cette loi de conservation postulée en mécanique classique, appelée aussi mécanique newtonienne, est démontrable en mécanique lagrangienne par le biais d’un théorème de Noether[20].

Comme il n’est pas possible de créer de l’énergie, nous ne pouvons donc que profiter de la transformation d’une énergie qui se trouve déjà dans la nature.

Parmi ces énergies présentes à l’état naturel, Jean-Marc Jancovici distingue les matières qui brûlent (bois, pétrole, charbon, gaz), les noyaux fissiles (uranium), les rayonnements déjà présents (soleil), les mouvements déjà présents (vent, marées, chutes d’eau), etc. Il en résulte selon lui que nous ne pouvons pas « consommer » plus d’énergie que ce qui se trouve dans la nature et que si une énergie n’existe que suite à une transformation par les hommes (électricité, hydrogène…), elle n’est pas pour autant une « source » d’énergie. Il s’agit en réalité d’une manière dutiliser une autre énergie déjà présente dans la nature.

Le vocabulaire courant, ainsi que celui des domaines de l’économie et des politiques publiques, évoquent les concepts de « production d’énergie » et de « consommation d’énergie », mais comme il a été vu l’énergie au sens de la physique n’est ni créée, ni détruite, seulement transformée et transférée. Par commodité, on utilisera dans le présent rapport les notions de production d’énergie et de source d’énergie, mais sans oublier que ce nest pas strictement rigoureux dun point de vue scientifique car ni la production d’énergie ni les sources d’énergie n’existent en tant que telles[21].

2.  Les « sources dénergie »

Les principales énergies peuvent être distinguées selon les catégories suivantes :

- les énergies fossiles, dont le potentiel est évalué en termes de réserves (pétrole, gaz naturel, charbon) ;

- l’énergie nucléaire (uranium, plutonium…) ;

- les énergies renouvelables ou EnR (hydroélectricité, éolien, photovoltaïque, énergie solaire thermique, énergie thermique récupérée par pompe à chaleur[22] dans l’air, l’eau ou le sol appelée alors géothermie, bois-énergie, biocarburants, biogaz (issu de la biomasse, de résidus et de déchets, etc.).

On parle d’énergies renouvelables car leur renouvellement naturel est assez rapide pour qu’elles puissent être considérées comme inépuisables à léchelle du temps humain. Certaines d’entre elles sont intermittentes (éolien et énergie solaire photovoltaïque ou thermique). Les installations de production d’énergie renouvelable peuvent combiner la production de chaleur et d’électricité sur une même unité, on parle alors de cogénération.

Il convient de relever que les concepts d’énergie verte et d’énergie durable restent très discutés.

Le premier concept regroupe les énergies qui peuvent être extraites, générées et/ou consommées avec de moindres conséquences sur lenvironnement (outre la plupart des énergies renouvelables, certains y incluent l’énergie nucléaire, ce qui ne fait pas l’objet d’un consensus, notamment du fait des déchets nucléaires).

Le second, l’énergie durable, comprend les énergies capables de répondre aux besoins du moment présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins (outre les énergies renouvelables, certains y incluent les technologies permettant d’améliorer l’efficacité énergétique, l’énergie nucléaire et même le charbon avec stockage géologique du CO2, ces trois points faisant l’objet de polémiques).

D’un point de vue historique, la force musculaire humaine et lénergie de la biomasse utilisable grâce au feu ont été les premiers types d’énergie mobilisés.

Ils se sont enrichis ensuite de l’utilisation de la traction animale, comme celle du cheval[23], ce qui a constitué un progrès significatif, très utile en agriculture et qui a bénéficié d’outils de plus en plus performants. L’énergie des eaux courantes et du vent pour le transport ou pour des processus agricoles ou industriels simples a ensuite été mobilisée. Le secteur agricole a ainsi recouru massivement à l’énergie hydraulique et à lénergie éolienne avec les moulins à eau et à vent, dans le même temps que l’humanité se dotait de voiliers, qui ont permis le développement et l’accélération des échanges commerciaux dans le monde.

Les moulins à grain - qu’ils soient à eau ou à vent - appartenaient le plus souvent à de riches investisseurs et non pas aux agriculteurs, qui se contentaient de louer leurs terres pour que des moulins y soient implantés. On retrouve dailleurs cette organisation aujourdhui : si la terre agricole appartient bien au monde agricole, ce n’est pas souvent le cas des installations de production d’énergie qui s’y trouvent.

D’après Didier Roux, délégué à l’information et à la communication de l’Académie des sciences, spécialiste des questions d’énergie, la source principale dénergie sur terre est le soleil (exception faite de l’énergie nucléaire et de la géothermie- qui est cependant elle aussi d’origine nucléaire sur terre). Le soleil a toujours constitué pour le monde agricole un apport gratuit d’énergie pour faire pousser les plantes mais aussi faire sécher le foin, le tabac ou le bois. Le chauffage au bois-bûche a constitué partout la principale source de chaleur jusqu’à ce que le charbon le remplace au 19e siècle.

La bioéconomie, bien antérieure à la division sociale du travail, tout comme le recours à des ressources renouvelables faisaient auparavant figure d’évidence.

Comme l’explique Rémi Carrilon, « autrefois lagriculture était nettement polyvalente car, on sattachait, dans la pauvreté générale, à exploiter tout ce quelle pouvait fournir : les aliments dabord, certes, et aussi les matières premières (bois dœuvre, fibres, laine, chaumes, suif, soie, cuirs, etc.) et les produits énergétiques (bois de feu, huiles et alcool pour léclairage, déchets divers pour le chauffage et la cuisson, etc.) »[24].

À l’époque contemporaine, l’utilisation de la machine à vapeur, puis celle de lélectricité et des moteurs thermiques (essence ou diesel) ont été des jalons essentiels de la révolution industrielle, en s’appuyant sur les énergies fossiles, charbon, gaz et pétrole en tête. À partir de la seconde moitié du 20e siècle, la maîtrise des réactions de fission nucléaire a permis la production délectricité dans des centrales nucléaires.

Les énergies fossiles représentent aujourd’hui dans le monde, comme l’indique le graphique ci-après basé sur les dernières données disponibles à la fin de l’année 2019 et qui dresse un bilan pour 2017, 81 % de la consommation d’énergie primaire (pétrole : 32 %, charbon : 27 %, gaz naturel : 22,2 %); le reste de cette consommation d’énergie provenait du nucléaire (4,9 %) et des énergies renouvelables (13,8 %, dont 9,5 % de la biomasse[25], 2,5 % de l’énergie hydraulique et 1,8 % d’autres énergies renouvelables[26]). Pour certains, les statistiques de l’Agence internationale de l’énergie auraient tendance à sous-évaluer la part des énergies renouvelables électriques, telles que l’hydroélectricité, l’éolien et le photovoltaïque.

 

Les principales énergies consommées dans le monde

Source : Agence internationale de lénergie, 2019.

 

Les données de l’Agence internationale de l’énergie utilisent le million de tonnes déquivalent pétrole (Mtep), qui est le multiple de la tonne d’équivalent pétrole (tep), le pétrole étant la source d’énergie la plus utilisée dans le monde. Si l’unité de mesure officielle de l’énergie est le joule, les sources d’énergie possèdent souvent une unité de mesure privilégiée : ainsi, le pétrole et la tonne d’équivalent pétrole (tep), le gaz naturel et le mètre cube, le charbon et la tonne équivalent charbon (tec), ou encore l’électricité et le kilowatt-heure (kWh). Pour les agréger ou les comparer, les unités de base que sont le joule et le tep ou parfois le kWh sont utilisées, toute énergie primaire étant assez souvent convertie en électricité.

Pour mémoire, la conversion entre ces unités de mesure est réalisée de la manière suivante : 1 kWh = 3,6 106 J ; 1 tep = 4,186 1010 J ; 1 tep = 11630 kWh ; 1 kWh = 8,5985 10-5 tep.

3.  Le mix énergétique français

En 2018, comme l’indique le graphique ci-après basé sur les dernières données disponibles, parues à la fin de l’été 2019, la France a consommé près de 249 Mtep dénergie primaire[27] dont 12 % dénergies renouvelables (contre 6 % en 2006 et 11 % en 2016).

 

Les principales énergies consommées en France

Source : Service des statistiques du ministère de la transition écologique, 2019.

 

En dépit de cette part croissante des énergies renouvelables, le nucléaire, les produits pétroliers et le gaz restent, de loin, les sources principales dénergie. Environ la moitié de ces énergies consommées en France ont été produites sur le territoire national et il en découle des importations considérables qui pèsent sur notre balance commerciale. Environ 40 % de l’énergie primaire est absorbée dans des opérations de conversion, comme la transformation de combustibles fossiles en électricité, ou le transport de l’énergie, à travers des pertes par effet Joule[28]. Aussi, la quantité d’énergie finale restante consommée en France s’est élevée à 142 Mtep. Sur ce total, près de 13 Mtep ne sont pas utilisés en réalité à des fins énergétiques mais pour leurs propriétés chimiques : plastiques, bitumes, etc.

 

La part des énergies renouvelables est ainsi portée à 16,3 % si elle est rapportée non à lénergie primaire mais à la consommation finale brute dénergie (sur une période de 30 ans la croissance des énergies renouvelables est dans ce cadre de 70 %). C’est ce pourcentage qui est utilisé pour mesurer latteinte (ou la non atteinte dans le cas de notre pays) des objectifs de développement des énergies renouvelables.

Le mix énergétique français concernant les seules énergies renouvelables se décompose de la manière suivante : bois-énergie 39,6 %, hydraulique 16,7 %, biocarburants 10,2 %, pompes à chaleur 8,9 %, éolien 8,2 %, déchets renouvelables 5,4 %, biogaz 3,5 %, solaire photovoltaïque 3,2 % et 4,4 % d’autres énergies, telles que la géothermie, les résidus de l’agriculture, le solaire thermique, les énergies marines, etc.

 

Les énergies renouvelables en France

Source : Service des statistiques du ministère de la transition écologique, 2019.

 

La production délectricité, distincte de la production et la consommation d’énergie, représente 537,7 TWh en 2019 et continue de reposer en France à plus de 70 % sur l’énergie nucléaire[29]. Au sein de cette production, les énergies renouvelables se répartissent entre l’hydroélectricité (11,2 %), l’éolien (6,3 %), le solaire photovoltaïque (2,2 %) et les bioénergies dont le biogaz (1,8 %).

La production délectricité en France

Source : Bilan électrique 2019, RTE, 2020.

 

B.  Les politiques énergétiques et la Programmation de lénergie

1.  Un cadre international et européen

Les sommets de la Terre, et en particulier le premier sommet à Stockholm, en 1972, ont placé les questions écologiques au cœur des préoccupations internationales. C’est le sommet de 1992, à Rio de Janeiro, qui demeure la plus grande réussite avec la signature de la Déclaration de Rio, visant à assurer une meilleure gestion de la planète. Le sommet de Johannesbourg de 2002 s’est particulièrement intéressé à l’énergie et à l’agriculture, notamment à l’utilisation des énergies renouvelables et à la dégradation des sols.

Le sommet de Rio a engagé un processus d’adoption de protocoles contraignants auprès des États. Le protocole de Kyoto, traité international signé en décembre 1997, a pour objectif la réduction des émissions de gaz à effet de serre des parties signataires : 195 États et l’Union européenne sont concernés. Ce protocole contient un volet agricole, avec un objectif d’augmentation des puits de carbone.

LAccord de Paris du 12 décembre 2015 qui vise à limiter le réchauffement climatique et les émissions de gaz à effet de serre est entré en vigueur en novembre 2016. Bien que peu contraignant juridiquement (aucune sanction), cet accord a pour ambition de contenir d’ici 2100 le réchauffement climatique en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels, à poursuivre l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5°C et à atteindre la neutralité carbone, de manière ambitieuse, dans la deuxième moitié du siècle.

Au niveau européen, les programmations se font autour des différents paquets consécutifs sur le climat et lénergie. Dès 1996, la Commission européenne publie un livre vert afin de lancer un débat sur les différentes mesures urgentes relatives aux énergies renouvelables tout en fixant les objectifs (12 % de la consommation intérieure brute de sources d’énergie à partir des sources d’énergies renouvelables), cernant les obstacles et les moyens à mettre en œuvre. Par la directive 2001/77/CE (abrogée au 1er janvier 2012 par la directive 2009/28/CE du 23 avril 2009), l’objectif d’une contribution de 21 % des sources d’énergies renouvelables a été fixé.

Le paquet climat-énergie de 2009 prévoit à l’horizon 2020 un objectif dit « 3 X 20 » : une réduction de 20 % des émissions de GES de l’Union européenne par rapport à 1990, une réduction de 20 % de la consommation énergétique européenne par rapport à l’augmentation tendancielle et, enfin, une part de 20 % dénergies renouvelables dans la consommation d’énergie totale. La directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 pour la promotion des énergies renouvelables définit ainsi un cadre commun pour la promotion de la production d’énergie à partir de sources renouvelables. Elle fixe des objectifs nationaux contraignants concernant la part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie et dans la consommation d’énergie pour les transports. Ces objectifs contribuent à réaliser l’objectif global de 20 % d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie de l’UE d’ici à 2020. Les objectifs évoluent entre 10 % d’énergie renouvelable pour Malte et 49 % pour la Suède, notre pays étant à un niveau intermédiaire avec un objectif de 23 %.

En 2014, un nouveau paquet climat-énergie pour 2030 a porté l’objectif de réduction des émissions de GES à 40 % par rapport aux niveaux de 1990, la réduction de la consommation énergétique européenne à 27 % (l’amélioration de l’efficacité énergétique ayant ensuite été portée à au moins 32,5 %) et, enfin, la part des énergies renouvelables à 27 % de la consommation d’énergie totale. La directive 2009/28/CE sera ainsi abrogée avec effet au 1er juillet 2021 par la directive (UE) 2018/2001 du 11 décembre 2018 qui définit un nouvel objectif contraignant encore plus ambitieux de 32 % dénergies renouvelables à lhorizon 2030, assorti d’une clause de réexamen d’ici à 2023 pour une révision à la hausse de l’objectif. Les réexamens prévus pourront donc conduire, le cas échéant, à augmenter encore ces objectifs. Cette directive n’attribue aucun objectif aux États, ce sont eux qui fixent leurs contributions nationales afin d’atteindre collectivement l’objectif européen mais ils devront, à compter du 1er janvier 2021, se situer chacun à une part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie de chaque État membre supérieure à la part de référence figurant en annexe de la directive 2009/28/CE, soit 23 % pour la France.

Il convient de relever que selon le dernier rapport d’Eurostat sur le mix énergétique européen 18 % des énergies consommées dans l’Union européenne en 2018 étaient renouvelables (pour mémoire cette part représentait 16,3 % en France).

Enfin, le règlement européen sur l’utilisation des terres et la foresterie pour la période 2021-2030 dit « LULUCF » place le stockage du carbone dans les sols parmi les objectifs de l’Union européenne en matière climatique.

Parmi les mesures sectorielles, la directive 2003/30/EC sur la promotion de l’usage des biocarburants peut être citée : elle a fixé en 2003 des objectifs d’incorporation de 2 % en 2005, 5,75 % en 2010 et 10 % en 2020. En 2009, la directive « RED I » a fixé un objectif d’incorporation de 10 % d’EnR dans les transports à l’horizon 2020. Elle a été remplacée en 2018 par la directive « RED II », avec un objectif d’incorporation de 14 % d’EnR dans les transports à l’horizon 2030. Cette directive plafonne lincorporation des biocarburants de première génération à 7 % et fixe un plancher pour les biocarburants de deuxième génération de 3,5 %.

Selon les dernières données disponibles (2017), les carburants alternatifs à l’essence et au gazole pétroliers représentent 7,7 % des carburants consommés.

2.  Les instruments de programmation en France

Dans les années 1990 et 2000, les autorités françaises se sont engagées en faveur du développement des énergies renouvelables, notamment électriques, telles que l’éolien et le photovoltaïque. Le 15 février 2005, le Président de la République Jacques Chirac a annoncé l’intensification de la recherche « dans six domaines stratégiques : la séquestration du carbone, le véhicule propre, la pile à combustible hydrogène, les biocarburants, le solaire et le photovoltaïque et le bâtiment économe en énergie »[30]. Le Gouvernement a pris l’année suivante un arrêté tarifaire doublant le prix dachat du KWh pour les installations solaires et photovoltaïques[31].

En cohérence avec les programmations européennes, la loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte (LTECV) puis la loi relative à lénergie et au climat (loi « Énergie-Climat ») ont été promulguées, respectivement le 17 août 2015 et le 8 novembre 2019. La LTECV, selon une logique proche de celle des programmations citées précédemment, vise la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la réduction de la consommation énergétique finale, notamment fossile, la rénovation énergétique, la réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité et, pour ce qui nous intéresse ici, l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie : cette part doit représenter selon la loi « Énergie-Climat » 33 % de la consommation en 2030, dont 40 % pour l’électricité, 38 % pour la chaleur, 15 % pour le carburant et 10 % pour le gaz.

La LTECV prévoit l’élaboration d’une Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), élaborée de manière concertée mais sans vote du Parlement, fixant notamment des objectifs de production pour chaque filière énergétique et qui se veut le fondement de l’avenir énergétique de la France[32]. La PPE en vigueur, publiée le 21 avril 2020[33], fixe les objectifs suivants pour les filières d’énergies renouvelables afin de porter la capacité installée de 48,6 GW fin 2017 à 73,5 GW en 2023 et entre 101 et 113 GW en 2028[34].

Les objectifs fixés par la programmation pluriannuelle de lénergie

(capacité installée en GW)

 

2018
(PPE de 2016)

2023
(PPE de 2016)

2023
(PPE de 2020)

2028
(PPE de 2020)

Hydroélectricité

25,3

25,8 – 26,05

25,7

26,4 – 26,7

Éolien terrestre

15

21,8 – 26

24,1

33,2 – 34,7

Éolien en mer

0,5

3

2,4

5,2 – 6,2

Photovoltaïque

10,2

18,2 – 20,2

20,1

35,1 – 44

Biomasse solide

0,54

0,79 – 1,04

0,9

0,8

Biogaz-Méthanisation

0,137

0,237 – 0,3

0,27

0,34 – 0,41

Géothermie

0,008

0,053

0,024

0,024

Total

52

69,88 – 77,093

73,5

101 à 113

Source : OPECST daprès les décrets relatifs à la programmation pluriannuelle de lénergie publiés le 27 octobre 2016 et le 21 avril 2020[35].

 

En plus de la PPE, la LTECV prévoit l’élaboration de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) qui décrit la feuille de route de la France pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050, à l’aide d’orientations stratégiques pour respecter les objectifs de lutte contre le changement climatique en formulant des recommandations d’actions, et de fixation de « budgets carbone », qui sont des plafonds d’émissions à ne pas dépasser.

L’État définit et met en œuvre une stratégie nationale de mobilisation de la biomasse[36] (SNMB) qui a notamment pour objectif de permettre l’approvisionnement des installations de production d’énergie, comme les appareils de chauffage domestique au bois, les chaufferies collectives industrielles et tertiaires et les unités de cogénération.

 

La stratégie nationale de mobilisation de la biomasse (SNMB)
et les schémas régionaux biomasse (SRB)

La stratégie nationale de mobilisation de la biomasse (SNMB) définit des orientations, recommandations et actions concernant les filières de production et de valorisation de la biomasse susceptible d’avoir un usage énergétique, en vue de développer la production de biomasse et d’augmenter sa mobilisation, notamment pour l’approvisionnement des installations de production d’énergie, tout en veillant à une bonne articulation de ses usages et à l’atténuation du changement climatique. Elle identifie les efforts d’amélioration des connaissances à réaliser concernant la biomasse mobilisable et le développement de ses usages non alimentaires. Ce document-cadre n’a pas de portée juridique particulière du type « compatibilité » ou « conformité » mais elle prend en compte les orientations, objectifs et indicateurs des schémas régionaux biomasse.

La stratégie précise les objectifs nationaux de mobilisation de biomasse au plan qualitatif et quantitatif. Ces objectifs chiffrés sont déclinés par région afin d’indiquer dans quelle proportion chaque région peut contribuer à l’atteinte d’une production satisfaisant le besoin national. Le dernier mot revient aux schémas régionaux de biomasse (SRB) qui fixent les objectifs régionaux opérationnels en cohérence avec les spécificités de leur territoire. Sont ainsi fixés les besoins en biomasse pour satisfaire la demande, notamment énergétique, aux horizons 2018 et 2023 puis 2030 et 2050. Parallèlement, la SNMB liste les ressources mobilisables et les objectifs de mobilisation, en bonne synergie avec les autres politiques existantes.

Chaque schéma régional biomasse (SRB), élaboré par le préfet de région et le président du conseil régional appuyés par un comité associant des représentants des élus régionaux, des acteurs économiques et des associations de protection de l’environnement, doit définir, en cohérence avec le plan régional de la forêt et du bois et les objectifs relatifs à l’énergie et au climat fixés par l’Union européenne, des objectifs de développement de l’énergie biomasse. Il détermine les orientations et actions à mettre en œuvre à l’échelle régionale ou infrarégionale pour favoriser le développement des filières de production et de valorisation de la biomasse susceptible d’avoir un usage énergétique, en veillant au respect de la multifonctionnalité des espaces naturels, notamment les espaces agricoles et forestiers. Il prend en compte les objectifs, orientations et indicateurs fixés par la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse.

Les SRB opèrent une distinction entre la biomasse qui entre en compétition avec l’usage alimentaire et la biomasse non alimentaire. Ces usages étant potentiellement en concurrence, il est nécessaire, par type de biomasse, de pouvoir les articuler au regard des enjeux environnementaux et socio-économiques, en conservant l’usage alimentaire comme priorité. Les catégories de déchets sont hiérarchisées afin de prioriser certains usages par rapport à d’autres et de prévenir les conflits d’usage.

Source : OPECST.

 

Selon Laurent Michel, directeur général de l’énergie et du climat, « la SNBC, la LTECV et la SNMB sont cohérentes entre elles. Nous avons traduit en particulier le fait quil fallait que la vision de lénergie de demain coïncide avec la vision carbone à moyen terme (2030) et long terme (2050) que propose la SNBC. Lobjectif est de décliner la SNBC dans la PPE »[37].

La cohérence entre nos politiques agricoles, la LTECV, la PPE, la SNBC et la SNMB n’allant pas de soi, il est important de conserver une forme de vigilance à ce niveau.

La programmation de lénergie en Europe et en France

Source : OPECST.

 

Il convient de relever qu’en France comme dans la plupart des pays européens, les réalisations sont en règle générale en deçà des ambitions affichées[38].

3.  Les scénarios de prospective

Les scénarios « NégaWatt 2011 » et « NégaWatt 2017 » sont des scénarios de transition énergétique centrés sur une révision des besoins d’énergie. Ils encouragent le recours aux leviers d’une « politique en rupture avec le dogme de la croissance continue des consommations : sobriété, efficacité énergétique, énergies renouvelables ». Il s’agirait pour la France de diviser par 2 nos consommations finales d’énergie, par 16 nos émissions de CO2 d’origine énergétique, et de réduire radicalement notre dépendance aux énergies fossiles d’ici 2050 en mobilisant fortement les énergies renouvelables, tout en abandonnant progressivement le nucléaire sur deux décennies.

 

Le scénario NégaWatt (2017)

Source : NégaWatt.

 

D’après le cabinet de conseil Solagro, qui se base sur le scénario NégaWatt de 2017, la biomasse constituera la principale ressource énergétique en France à lhorizon 2050 avec près de 380 TWh en énergie primaire. Le rapport Afterres 2050, décrit ainsi un scénario prospectif pour le développement des EnR[39], comme en témoigne le graphique ci-après.

 

Le scénario Afterres 2050 en matière de bioénergies

Source : Solagro.

 

Dans un dernier scénario, la « Vision 2030-2050 » de l’Ademe[40], qui reprend certains points du scénario NégaWatt avec une diminution de près de la moitié de la demande énergétique entre 2010 et 2050, et 46 % à 69 % d’énergies renouvelables dans la demande finale en 2050, la répartition serait la suivante :

 

 

 

Comparaison de scénarios prospectifs

Source : Solagro (les variantes SAB et REP signifient « santé alimentation et biodiversité » et « résilience et production », SAB maximise la production bio et REP utilise un modèle plus productif).

 

L’entreprise GRDF avec « GRDF 2050 », l’Ademe, et GRTgaz ont, en outre, réalisé un scénario prospectif centré sur le gaz, « Un mix de gaz 100 % renouvelable en 2050 ? »[41], dans la continuité des prospectives de NégaWatt et de Solagro, en mettant en évidence un potentiel de 460 TW de gaz renouvelable d’ici à 2050. Ce gaz vert prendrait principalement sa source dans la méthanisation, la pyrogazéification, et l’hydrogène.

Le scénario GRDF, Ademe et GRTgaz en matière de gaz

Source : Ademe.

 

C.  Le secteur agricole en perspective

1.  Historique des politiques agricoles

Marquées historiquement par le protectionnisme et des mesures de soutien, et ce dès le 19e siècle au moins, les politiques agricoles ont connu depuis un siècle deux grandes évolutions : d’une part, la mise en place depuis 1962 de la politique agricole commune (PAC) à l’échelle de l’Union européenne, d’autre part, après 1992 et 1999, la réduction des interventions publiques et l’ouverture croissante aux marchés mondiaux sous l’effet du libre-échange promu lors des négociations commerciales internationales, notamment celles du GATT puis de l’OMC.

L’Union européenne assigne cinq objectifs à la PAC :

- accroître la productivité de l’agriculture en développant le progrès technique et en assurant une utilisation optimale des facteurs de production, notamment de la main d’œuvre ;

- assurer un niveau de vie équitable à la population agricole, notamment par le relèvement du revenu individuel de ceux qui travaillent dans l’agriculture ;

- stabiliser les marchés ;

- garantir la sécurité des approvisionnements ;

- assurer des prix raisonnables aux consommateurs.

2.  Limpact des transitions agroécologique et énergétique sur le secteur agricole

L’agriculture contribue aux émissions de gaz à effet de serre (GES). Cependant, elle est victime du réchauffement climatique, comme on le voit avec l’impact de l’instabilité du climat et les phénomènes de sécheresse, et elle peut aussi offrir des solutions contre le réchauffement climatique, en termes d’EnR, d’émission de GES et de stockage du carbone. Elle est un secteur clé dans la transition énergétique et climatique. Les politiques publiques n’intègrent que très progressivement cette évidence et le présent rapport entend contribuer à cette prise de conscience.

Depuis 20 ans, la PAC s’est enrichie d’un volet environnemental, qui se décline tant au niveau du premier pilier (portant sur les mesures de soutien) que du 2e pilier consacré au développement rural. Le versement des aides est ainsi soumis au respect de critères environnementaux, selon un mécanisme appelé « écoconditionnalité » basé sur les BCAE (Bonnes conditions agricoles et environnementales, qui incluent par exemple des normes définies par les États membres concernant la préservation des sols) et les ERMG (Exigences réglementaires en matière de gestion). Le « verdissement », ou « paiement vert », veille à l’observation de trois mesures environnementales (le maintien des prairies permanentes, la diversité des assolements et le maintien ou la création de surfaces d’intérêt écologique-SIE). S’agissant du 2e pilier, la promotion de la protection de l’environnement et du développement durable des territoires ruraux font l’objet de mesures de soutien.

Le rapport précité du ministère de l’agriculture et de l’alimentation, « Prospective Agriculture-Énergie 2030 », publié en 2011, affirme ainsi que « lénergie en agriculture est trop souvent considérée comme un enjeu secondaire ou conjoncturel. Elle est en réalité une question davenir majeure de par ses conséquences économiques pour les exploitations, ses liens aux questions environnementales et climatiques et son influence sur lorganisation des filières et laménagement des territoires ». Il est certain que l’agriculture doit rentrer dans la transition énergétique et dans la transition agroécologique pour y jouer un rôle pivot. Les produits et les sols agricoles sont des éléments de première importance dans ces transitions conjuguées. Acteurs de plus en plus engagés en faveur du développement de la bioéconomie et de l’économie circulaire, les agriculteurs sont des acteurs essentiels de la transition agroécologique et de l’économie circulaire, notamment à travers la préservation des sols, le tri des biodéchets et la méthanisation agricole. Comme l’a indiqué Olivier Dauger, co-président de France gaz renouvelables, président de la chambre régionale d’agriculture des Hauts-de-France et de la chambre d’agriculture de l’Aisne, administrateur de la FNSEA en charge des questions climatiques et énergétiques et agriculteur, « lidée principale est donc de remettre le sol et sa vie au centre du système, en sintéressant à ce quil peut produire, emmagasiner et capter : ce sont les principes mêmes de lagroécologie ».

3.  La consommation énergétique des exploitations agricoles

L’agriculture doit relever le défi de lefficacité énergétique et réduire autant que possible sa consommation d’énergie.

L’agriculture fait l’objet d’un suivi assez régulier en France en termes de consommation d’énergie. Comme il sera vu plus loin, ce n’est pas le cas de la production d’énergie. Bien que la consommation d’énergie ne soit pas l’objet du présent rapport, il est intéressant de fournir quelques ordres de grandeur, en matière de consommation directe. L’énergie consommée de manière indirecte – pour la fabrication des machines ou la production des engrais par exemple – n’est pas prise en compte. Elle représente des niveaux de même grandeur que l’énergie directe d’après les données disponibles[42].

Le secteur agricole consomme environ 4,5 Mtep dénergie par an, soit moins de 3 % de la consommation finale d’énergie nationale. Un tel chiffre, qui correspond à la seule consommation d’énergie directe, est raisonnable si on le compare à d’autres secteurs, comme en témoigne le tableau suivant.

 

Le secteur agricole dans la consommation dénergie en France

 

En termes de valeur, ces 4,5 Mtep représentent environ 3,3 milliards deuros, soit une part faible des 45 milliards d’euros de consommations intermédiaires du secteur. Ces dernières sont elles-mêmes inférieures aux 73 milliards d’euros de la production agricole stricto sensu (données 2018).

Selon le service de la donnée et des études statistiques du MTE, la consommation finale dénergie de lagriculture varie peu depuis une dizaine dannées et apparaît en particulier peu sensible aux fluctuations de la production agricole. Le mix énergétique est toujours dominé par les produits pétroliers, les combustibles fossiles représentant 74 % de la consommation agricole, suivis par l’électricité (17 %), le gaz (5 %) et les énergies renouvelables et déchets (4 %). Les produits pétroliers concentrent un peu moins de deux tiers de cette dépense, et l’électricité près d’un tiers.

 

Forme de lénergie consommée dans le secteur agricole (en Mtep)

Source : service de la donnée et des études statistiques du MTE.

Un graphique plus ancien du ministère de l’agriculture et de l’alimentation montre à cet égard qu’au sein des exploitations le type d’énergie consommée en reflète l’usage principal, qui correspond en effet aux tracteurs et autres machines agricoles.

 

Si au sein du monde agricole, on évalue la consommation d’énergie par sous-secteur, force est de constater que les charges occasionnées par type dexploitation sont très inégales : le maraîchage est ainsi un gros consommateur, à l’opposé de la viticulture, les autres cultures étant dans des niveaux de charges intermédiaires.

 

La consommation dénergie par type dexploitation et par énergie

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Selon une étude de l’Ademe sur la dépendance globale de l’agriculture à l’énergie[43], l’énergie représente entre 12 et 20 % des charges variables des exploitations. Cette étude montre que la consommation énergétique de l’activité agricole émet des gaz à effet de serre (GES), dont une part majoritaire provient de processus biologiques et physico-chimiques sur lesquels il existe des leviers daction, au niveau des sols agricoles, du stockage de carbone dans les sols, de la gestion des déjections animales, de la fermentation entérique, etc. Il existe aussi des consommations d’énergie indirecte dont la maîtrise peut aussi contribuer à la réduction des émissions de GES, par exemple à travers la réduction des quantités d’engrais azotés utilisés.

Parmi les pistes pour réduire la consommation d’énergie en agriculture, on peut relever la réduction du travail du sol, la réduction du chauffage (nécessaire pour la culture de la plupart des légumes hors saison) et la maîtrise de lélevage voire son redimensionnement (il faut 5 fois plus d’énergie pour produire une unité de protéine animale qu’une unité de protéine végétale). À cet égard, lagriculture de conservation des sols avec pâturage ou méthanisation des cultures intermédiaires est une voie très prometteuse, notamment car elle permet de stocker davantage de carbone, comme il sera vu plus loin.

 

L’agriculture de par son type d’activité de production émet un niveau important de GES par rapport à lénergie quelle consomme en comparaison des autres activités économiques. La réduction relative des émissions de gaz à effet de serre (carbone mais plus particulièrement méthane et protoxyde d’azote) est une question sensible dans ce secteur.

Pour mémoire, l’Ademe a consacré un rapport à l’efficacité énergétique en agriculture, publié en février 2019[44].

Pour accompagner le secteur agricole dans l’atteinte d’objectifs d’efficacité énergétique, donc de réduction de ses consommations énergétiques et de ses émissions de gaz à effet de serre, l’Ademe propose loutil ClimAgri, qui permet des diagnostics d’évaluation de l’impact énergétique et des émissions de GES liées aux activités agricoles et forestières à l’échelle des territoires.

Deux autres démarches peuvent être données à titre d’illustration d’accompagnement des agriculteurs vers une plus grande efficacité énergétique : un programme piloté par la chambre d’agriculture des Hauts-de-France[45], ou encore le cercle Énergies nouvelles[46] sur la production de tomates, lancé par Savéol avec notamment l’Ademe, EDF, Région Bretagne et plusieurs entreprises partenaires.

 


III.  Les enjeux de la production dénergie dans le secteur agricole

A.  enjeux généraux

1.  État des lieux et données générales sur le secteur agricole comme producteur dénergies

Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, le ministère de la transition écologique et l’Ademe estiment tous les trois qu’environ 20 % de la production dénergies renouvelables françaises (4,6 Mtep sur les 23 Mtep d’EnR au niveau national) est issue du secteur agricole, ce qui représenterait environ 396 GWh dénergies renouvelables[47], soit 3,5 % de la production globale dénergie.

Cette production interne au secteur est, par ailleurs, environ équivalente à la consommation énergétique du secteur de 4,5 Mtep par an (en termes de consommation directe, car la consommation indirecte ‑ fabrication des engrais ou d’autres intrants, etc. ‑ représenterait plutôt le double de la production), en soulignant que l’énergie issue de la seule biomasse propre à l’agriculture, n’en fournit qu’un tiers, soit 15 à 20 %.

En 2015, au moins 50 000 exploitations étaient impliquées en France dans la production d’EnR selon l’Ademe - sur un total de 437 000 exploitations agricoles[48]) - avec une croissance rapide prévue dans les prochaines années (plus de 140 000 à l’horizon 2030 et plus de 280 000 à l’horizon 2050, ce qui devrait représenter la grande majorité des exploitations).

Source : Ademe.

 

Comme l’ont expliqué le ministère de l’agriculture et de l’alimentation et le ministère de la transition écologique, il n’existe pas détude spécifique et exhaustive sur la part de la production dénergie du seul secteur agricole sur les dernières décennies. Les données disponibles permettent de quantifier le parc et la production d’énergies renouvelables au niveau national, mais ne répartissent pas celle-ci par secteur économique (dont l’agriculture). Le rapport de l’Ademe de 2018 précité est le seul document disponible mais il nest pas exhaustif et met l’accent sur les opportunités pour les exploitations agricoles en termes de modèles d’affaires.

On peut dénombrer une quinzaine dEnR produites par le secteur agricole, que l’on peut regrouper en 7 filières.

Les énergies renouvelables dans le secteur agricole

Source : Ademe.

 

Il faut distinguer les EnR dépendantes de lespace agricole, qui ont comme support les exploitations mais qui ne s’intègrent pas dans la production (éolien, solaire…), de celles qui sintègrent dans la production agricole et en dépendent (les biocarburants et la méthanisation), que l’on peut qualifier de « bioénergies ».

Les premières peuvent engendrer des conflits dusages de la terre et les autres une concurrence entre production alimentaire et non alimentaire, surtout dans le cas des biocarburants : la méthanisation na pas ce défaut si elle ne saccompagne pas de cultures dédiées. L’agrivoltaïsme, dont il sera question plus loin, est une autre façon d’éviter les conflits d’usage. Il est pertinent de chercher des synergies entre le développement de ces énergies et la production alimentaire : les énergies renouvelables doivent sintégrer dans le système agricole et alimentaire dans son ensemble et s’articuler avec l’activité des exploitations agricoles, y compris en termes de retour au sol des digestats de méthaniseurs et d’utilisation des biodéchets issus de la consommation de nourriture ou du gaspillage.

Le schéma suivant permet ainsi d’avoir une vision densemble de la production dénergies renouvelables dans le secteur agricole et des valeurs afférentes estimées (selon les seules données disponibles, qui datent de 2015), en distinguant les sources de bioénergies qui proviennent de l’utilisation de produits agricoles (une partie de la biomasse est utilisée pour faire par exemple des biocarburants ou du biogaz) des autres sources d’EnR, qui utilisent les surfaces agricoles pour produire de l’énergie (implantation d’éoliennes, de panneaux photovoltaïques, de pompes à chaleur…).

Agriculture et production dénergie

Source : OPECST.

 

En 2050, selon l’Ademe, les bioénergies pourraient à elles seules couvrir 100 % de la consommation dénergie directe de lagriculture (contre 50 % aujourd’hui). Dans le détail, cette répartition pourrait évoluer de la manière suivante.

 

Lavenir de la production dénergie dans le secteur agricole

Source : Ademe.

Le graphique précédent qui montre un triplement de la production dEnR entre 2015 et 2050 dans le seul secteur agricole (mais avec une part de l’énergie issue de la biomasse stagnant toujours autour du tiers), est fondé sur les données suivantes.

Source : Ademe.

Dans son rapport précité de 2018, l’Ademe donne une prévision de l’évolution de la part agricole dans la production d’EnR selon trois scénarios (bas-médian-haut), qui pourrait passer de 20 % aujourd’hui à « 18-23-25 % » en 2030 et « 18-23-29 % » en 2050.

La production d’énergies renouvelables par le secteur agricole progresse et devrait être multipliée par 3 entre 2015 et 2050 passant, selon lAdeme, de 4,6 Mtep à 15,8 Mtep. Un tel niveau reviendrait à une production de 76 TWh en 2020 - ce qui est supérieur aux 52 TWh prédits par la précédente étude de l’Ademe de 2012 « Analyse économique de la dépendance de l’agriculture à l’énergie », ce qui témoigne de l’existence de plusieurs scénarios aux valeurs fluctuantes - notamment avec une forte évolution de la production potentielle d’énergie éolienne (6,4 Mtep à l’horizon 2050), de biogaz (biométhane) avec 4,1 Mtep et de solaire photovoltaïque (1,5 Mtep). Les biocarburants ne seront plus l’énergie la plus produite à partir du périmètre agricole, puisqu’à l’horizon de 2050 c’est léolien puis le biogaz qui seraient en tête.

Le schéma ci-après permet d’identifier la part agricole de chaque EnR en France aujourd’hui (les données issues de ce rapport paru en 2018 datent toutefois de 2015).

 

Part agricole de chaque EnR en France (données 2015)

  Source : Ademe.

Selon l’Ademe, le secteur agricole contribuerait à hauteur de 25 % de la production dEnR hors hydroélectricité et la part agricole dans la production nationale dEnR (données 2015) se répartit comme suit, par ordre d’importance de cette part : 96 % pour les biocarburants (issus de la biomasse), 83 % pour l’éolien (lié à l’utilisation des terres agricoles), 26 % pour le biogaz (issu de la biomasse), 13 % dans le solaire photovoltaïque (lié à l’utilisation des terres et des bâtiments agricoles), 8 % pour la biomasse chaleur (issue de la biomasse), 3 % dans le solaire thermique et 1 % pour les pompes à chaleur.

Alors que le nombre total d’exploitations impliquées dans la production d’EnR serait d’au moins 50 000, l’Ademe prévoit à lhorizon 2050 près de 280 000 exploitations agricoles produisant des énergies renouvelables. Ce dernier chiffre est cependant surestimé, car il comprend les doubles-comptes liés aux exploitations agricoles produisant plusieurs énergies renouvelables en même temps. Comme la part des exploitations produisant plusieurs EnR n’a pas pu être déterminée, il a été considéré par l’Ademe que la majeure partie des exploitations agricoles françaises seront impliquées dans la production d’une ou plusieurs EnR. Une telle prévision semble cohérente et compatible avec l’atteinte de l’objectif facteur 4 à l’horizon 2050.

L’éolien terrestre a vu sa puissance électrique installée en France augmenter au cours de la dernière décennie, passant de 6 812 MW en 2011 à 16 617 MW en 2019. En outre, la production d’électricité à partir d’éoliennes terrestres en 2019 était de 34,1 TWh, soit 7,2 % de la consommation électrique totale[49].

Le solaire photovoltaïque connaît lui aussi une croissance forte, sa production électrique passant de 8,2 TWh en 2014 à 17,5 TWh en 2019[50].

Enfin, concernant le biogaz, fin décembre 2019, 776 installations de biogaz d’une puissance installée totale de 493 MW étaient raccordées au réseau électrique en France. Cette puissance a augmenté de 40 MW au cours de l’année 2019[51].

Le schéma de synthèse ci-après a pour objet de construire une typologie des sources dénergie propres au monde agricole en mettant en valeur deux grandes catégories : les énergies produites grâce à la mise à disposition de terres agricoles et les énergies directement liées à la production agricole elle-même, ou bioénergies. Il distingue aussi les énergies intermittentes des autres et précise le risque de conflits d’usage pour chacune.

 

Typologie des sources dénergie dans lagriculture

Source : OPECST.

 

Il faut préciser que ces conflits dusage correspondent à la seule situation présente, susceptible d’évoluer, par exemple de la manière suivante :

- une méthanisation raisonnée permettrait d’éviter les conflits d’usage en n’ayant recours qu’aux cultures intermédiaires à valorisation énergétique (CIVE), aux effluents d’élevage et aux déchets ;

- de même, pour les biocarburants de 2e génération, le conflit d’usage sera inexistant ou très modéré.


Lapproche territoriale de la production dénergie dans lagriculture

La production énergétique des exploitations agricoles est très directement reliée aux enjeux de zones géographiques et à leurs territoires. D’après Bernadette Le Baut-Ferrarese, dans son ouvrage Droit des énergies renouvelables « en un sens, le développement des énergies renouvelables sinscrit peut-être avant tout dans une logique de développement local. La raison en est simple : dans la très grande majorité des cas, les énergies renouvelables sappuient sur des ressources de proximité » (p. 50). Les gisements d’EnR (solaire, éolien, biomasse et déchets agricoles…) nécessitent une dissémination de centrales ou d’installations de production sur les territoires, avec le secteur agricole comme acteur essentiel.

Les projets agro-énergétiques doivent donc aussi être pensés dans une logique d’aménagement du territoire, sachant qu’ils mobilisent le plus souvent des « ressources territoriales » (terres agricoles, biomasse, coproduits, déchets, etc.) et deviennent des moteurs du développement économique et social local. L’ouvrage précité de Geneviève Pierre, Agro-énergies dans les territoires, Coopérer pour lautonomie locale, met bien en valeur cette double inscription territoriale. Deux thèses de doctorat ont pris pour exemple des projets agro-énergétiques pour réinterroger les dimensions et les perspectives du développement territorial. La première a pour auteur Yvan Tritz, et s’intitule « Développement territorial et valorisation en circuit court des ressources énergétiques locales. Vers des systèmes énergétiques agri-territoriaux ? » (thèse de géographie, Lyon 2, 2013). Elle a élaboré un concept-hypothèse pour les projets décentralisés de production d’énergie à partir de biomasse agricole : le « Système énergétique agri-territorial (SEAT) », inspiré des Systèmes productifs locaux (SPL) et des Système agroalimentaires localisés (SYAL), le SEAT devant faire figure d’outil pour analyser les formes locales de développement des bioénergies. La seconde de Carole Garnaud-Joubert « Les énergies renouvelables dans lagriculture de Charente-Maritime » (thèse de géographie, université de La Rochelle, 2010) prend l’exemple des « énergies renouvelables dans lagriculture de la Charente-Maritime pour montrer lémergence en milieu rural dun nouveau moteur du développement économique et social non dépourvu dincidences sur lenvironnement local ».

Ces deux thèses de doctorat sont disponibles en ligne :

http://theses.univ-lyon2.fr/documents/lyon2/2013/tritz_y/info et

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00576083/file/TheseJoubert-Garnaud.pdf

Source : OPECST.

 

L’impact environnemental des EnR est une question de première importance mais plutôt que de l’insérer dans la liste des enjeux généraux qui suit, vos rapporteurs ont choisi de consacrer un chapitre entier à cet impact (chapitre 4), en l’enrichissant de développements connexes sur le stockage du carbone et sur les rendements énergétiques des différentes EnR.

2.  Les problèmes dacceptabilité sociale : les positions de lopinion publique, des parties prenantes et des agriculteurs

Les problèmes d’acceptabilité sociale des EnR peuvent être traités de plusieurs manières, en faisant état des positions de l’opinion publique, des parties prenantes et des agriculteurs, avec des sondages d’opinion ou avec des approches plus qualitatives.

Si l’on commence avec des sondages généraux, une étude de l’Ademe de novembre 2018 sur « Les Français et l’environnement » montrait que 92 % des Français se déclarent favorables au développement des énergies renouvelables, que 57 % de la population estime que les EnR permettent de lutter contre le réchauffement climatique, que 56 % des Français estiment que les EnR évitent la pollution de l’air, des sols et de l’eau, que 43 % redoutent l’intermittence inhérente à la production de certaines EnR, que 34 % pointent des impacts sur les paysages, que 27 % pensent que les EnR ne sont pas vraiment écologiques, que 85 % de la population considère que même si elle coûte un peu plus cher, la production locale d’énergie d’origine renouvelable est souhaitable et que 54 % des Français déclarent qu’ils seraient prêts à soutenir le développement des EnR dans leur région en investissant une partie de leur épargne. De même, d’après un sondage Harris Interactive d’octobre 2018 pour La Heinrich-Böll-Stiftung France et la Fabrique écologique, 91 % des Français estiment que la transition énergétique est un enjeu important voire prioritaire, 83 % priorisent un investissement dans les énergies renouvelables plutôt que dans le nucléaire et 60 % pensent qu’il faut refuser les projets ayant un impact positif pour l’emploi mais négatif sur le climat.

La question de la multifonctionnalité de l’agriculture et de la vocation des agriculteurs à fournir à la société des biens autres qu’alimentaires font débat au sein de la profession agricole, notamment au sujet de la production d’énergie, par exemple avec les biocarburants. Vos rapporteurs ont pu mesurer l’ampleur de ce débat en rencontrant la diversité du monde agricole et ses trois principaux syndicats.

Le rendement énergétique de ces cultures et leurs impacts environnementaux sont d’autres sujets régulièrement débattus, parfois avec l’expression de tensions (cf. chapitre 4 du présent rapport). Si la perspective de nouvelles activités et de nouveaux débouchés économiques conforte l’attitude entrepreneuriale d’une partie des agriculteurs, l’attachement à la fourniture quasi exclusive de biens alimentaires est prégnant pour d’autres. Ce débat se retrouve au sein de la société comme dans les choix des décideurs, au niveau national comme local : certaines collectivités territoriales soutiennent l’approvisionnement en produits alimentaires de proximité alors que d’autres favorisent le développement de filières industrielles. Les deux logiques peuvent d’ailleurs cohabiter sur un même territoire.

Pour Geneviève Pierre, dans son ouvrage précité Agro-énergies dans les territoires, Coopérer pour lautonomie locale, les « projets agro-énergétiques, multidimensionnels  de lentrepreneuriat agricole à lexpérimentation en machinisme, à lautonomie alimentaire et énergétique, à la diversification et à la multifonctionnalité agricole , questionnent les identités professionnelles ». Parallèlement, l’approche multifonctionnelle de l’agriculture, par l’agroforesterie et par l’entretien du paysage bocager et de la haie débouchant sur la production de bois déchiqueté, participe de l’insertion de l’exploitation agricole dans son territoire.

La Commission européenne a publié en 2012 une étude commandée à un cabinet de conseil consacrée à « l’impact des énergies renouvelables sur les agriculteurs européens »[52]. Cette étude, plus large que les seules questions d’opinion, est présentée dans le chapitre 6 du présent rapport. Sur les questions d’acceptabilité par le monde agricole, il faut observer que si l’intervention d’entreprises externes peut avoir de réels avantages (moins d’endettement, prise en charge des autorisations et des raccordements…), les agriculteurs se montrent réservés voire hostiles à lintervention dacteurs tiers. La plupart des agriculteurs affirment investir dans ces projets pour des raisons économiques et notamment la volonté de diversifier leurs sources de revenu, dans le contexte de la volatilité des prix des matières agricoles. S’ils constatent que les investissements dans les EnR augmentent les revenus de leur exploitation, ils subissent aussi une masse de travail accrue, surtout s’agissant des énergies issues de la biomasse.

Un tel constat est également établi par un rapport d’étudiants de Sciences Po Rennes sur les EnR et les agriculteurs[53]. Il montre que le développement des EnR peut présenter un risque pour les agriculteurs car il s’agit d’une activité chronophage : parce qu’ils ont déjà une activité à plein temps, les agriculteurs peuvent éprouver des difficultés à monter un projet d’EnR. S’ils y consacrent trop de temps, ils risquent de ne plus pouvoir faire leur métier d’agriculteur correctement. Au contraire, s’ils n’y passent pas suffisamment de temps, ils s’exposent à la prédation d’acteurs du secteur des EnR. Toutefois, il faut garder à l’idée que la surcharge de travail est le plus souvent temporaire. Elle intervient surtout en phase d’émergence, de pré-faisabilité et de développement du projet.

Ce rapport de Sciences Po Rennes souligne aussi que la production d’énergie étant une activité spéculative et concurrentielle, les agriculteurs, dont les EnR ne sont pas le cœur de métier, sont vulnérables face à des acteurs qui enchaînent les projets. Les développeurs éoliens joueraient ainsi de cette faiblesse lors de la signature des promesses de bail en dissimulant le fait que tous les agriculteurs qui ont signé n’auront pas forcément une éolienne sur leur terrain et donc que les revenus promis n’iront qu’à quelques-uns. Ces pratiques seraient destructrices pour la solidarité locale. En traitant de manière bilatérale et non transparente, certains développeurs attisent des tensions entre agriculteurs, concurrents pour recevoir une éolienne et toucher un loyer.

L’atelier citoyen organisé par nos collègues députés Philippe Bolo et Matthieu Orphelin dans le cadre du débat public relatif à la PPE[54] a permis d’évaluer la vision du public sur diverses affirmations concernant le développement de la production d’énergies renouvelables par les agriculteurs. Les participants à l’étude étaient amenés à attribuer des points entre 5 et 20 sur diverses affirmations. L’affirmation ayant reçu le plus de points (269 points pour 44 participants) était la possibilité pour les agriculteurs de diversifier leurs revenus agricoles en contribuant au développement des énergies renouvelables. En deuxième plan venait la contribution des agriculteurs à lautonomie énergétique (179 points pour 45 participants) suivie de la possibilité de créer de lactivité économique sur le territoire (175 points pour 41 participants). Enfin, la possibilité de donner à lagriculture limage dune activité qui agit pour lenvironnement (136 points pour 35 participants) précède la dernière affirmation qui est celle d’impliquer les agriculteurs dans les objectifs nationaux pour le climat (109 points pour 33 participants).

3.  Les enjeux économiques et financiers pour les agriculteurs

Avec 20 % de la production française d’EnR et un développement attendu très important, la production d’énergie constitue une activité stratégique pour lagriculture de même que cette dernière représente un secteur stratégique pour le développement des EnR en France. Il faut donc l’organiser, la suivre et l’animer, car elle représentera un enjeu économique et financier croissant pour les agriculteurs : une source de revenus avec la vente des énergies produites et, dans une moindre mesure, un gisement d’emplois mais aussi des besoins dinvestissements considérables, des économies sur les dépenses dénergie (renforcement de l’autonomie énergétique des exploitations à travers l’autoconsommation et la récupération de l’énergie sous forme d’électricité, de gaz, de carburants ou de chaleur), des économies sur dautres intrants (engrais et amendements…) via le retour au sol des digestats, etc.

La production d’EnR a représenté des recettes de l’ordre d’1,366 milliard deuros (données 2015), elle rapporte donc au monde agricole l’équivalent de 2 % du chiffre daffaires du secteur. Ce chiffre d’affaires est développé principalement par la vente de biomasse pour les biocarburants (1 057 millions d’euros), mais aussi par le photovoltaïque (105 millions), la méthanisation (88 millions) et la production de biomasse pour la combustion (85 millions). à ce chiffre d’affaires, s’ajoutent 112 millions d’euros d’économies sur la facture énergétique des exploitations par l’autoconsommation de biomasse, la mise en place d’installations de solaire thermique et de pompes à chaleur, soit 3,4 % des dépenses énergétiques.

Si, cette production n’est que peu génératrice d’emplois directs supplémentaires, elle permet d’accroître le revenu global des agriculteurs avec des revenus supplémentaires et diversifiés, relativement stables car non soumis aux facteurs de volatilité des prix internationaux, participant ainsi à l’équilibre économique des exploitations et à l’amélioration de la compétitivité du secteur agricole.

Les montants sont très variables, pouvant aller de quelques milliers deuros de réduction de leur facture énergétique à plus de 15 000 euros annuels de revenus complémentaires. Ces chiffres sont à mettre en perspective avec le revenu courant avant impôts (RCAI) agricole moyen, évalué à 30 360 euros par l’Insee en 2018 pour l’ensemble des filières. Ces chiffres ne doivent pas masquer les écarts considérables entre agriculteurs et les pertes de certains agriculteurs, notamment dans le domaine de la méthanisation qui reste un procédé complexe et soumis à plusieurs incertitudes, comme la variation des intrants.

Les bénéfices économiques des EnR pour les agriculteurs devraient toutefois s’accentuer. L’agriculteur aura de plus en plus un rôle de producteur d’énergie qui dépasse celui de producteur de produits destinés à l’alimentation, qui doit rester sa fonction première. Pour le rapport précité de l’IHEST, il s’agira de plus en plus d’un « énergieculteur ».

La production d’énergies renouvelables à travers la production d’électricité, de biocarburants, ou de biogaz représenterait un complément de revenu pour plus de 50 000 exploitants agricoles[55], ce chiffre n’étant qu’un ordre de grandeur imprécis compte tenu de la faiblesse des données disponibles. Selon l’énergie produite, le modèle d’affaires n’est pas le même pour l’agriculteur, comme le montre bien l’étude de l’Ademe précitée de 2018. La source de revenu qui en résulte n’est donc pas de même ordre non plus. Pour les rapporteurs, il ne peut s’agir que de compléments de revenus et en aucun cas de la source principale de rémunération des exploitants agricoles.

Quatre principaux modèles daffaires, plus ou moins intégrés au système agricole de l’exploitation, peuvent être distingués :

- l’autoconsommation d’énergies renouvelables (chaleur, électricité ou gaz) pour réduire la facture énergétique de l’exploitation (géothermie, solaire thermique, photovoltaïque, méthanisation) ;

- la production et la vente de biomasse pour la production d’énergies renouvelables (cultures pour les biocarburants et la méthanisation, bois pour la chaleur) ;

- la vente d’électricité ou gaz directement sur les réseaux (photovoltaïque, méthanisation) ;

- la mise à disposition de surfaces (éolien, photovoltaïque).

Il serait pertinent, par ailleurs, de favoriser autant que faire se peut lautoconsommation, qui facilite les circuits courts et permet une plus grande autonomie énergétique dans l’agriculture. L’autoconsommation est cependant soumise à un cadre juridique complexe et peu incitatif.

4.  Laccès au foncier agricole

L’accès au foncier agricole est un enjeu majeur du développement des énergies renouvelables dans le secteur agricole. En outre, certaines énergies sont plus demandeuses en terres agricoles que d’autres, et peuvent donc entraîner davantage de conflits d’usage ou de modification de la qualité des sols. Le tableau ci-après récapitule l’espace occupé par les principales énergies développées en milieu agricole en France, en 2015[56] :

 

Les surfaces agricoles mobilisées pour la production dénergie

Surface agricole totale

28 000 000 d’ha[57]

100 %

Type dénergie

Surfaces agricoles mobilisées (en ha)

Part de la surface agricole totale (en %)

Photovoltaïque au sol

450

0,0016 %

Éolien

583

0,0021 %

Méthanisation (cultures dédiées)

14 850

0,0530 %

Biocarburants

769 000

2,7464 %

Total

784 883

2,8031 %

Source : OPECST daprès les données de lAdeme.

 

Ainsi, le photovoltaïque au sol utilise peu de foncier productif au sol, notamment car son développement est encadré par la circulaire du 18 décembre 2009 relative au développement et au contrôle des centrales photovoltaïques au sol.

La méthanisation, certes plus demandeuse en foncier productif, reste limitée grâce au décret n° 2016-929 du 7 juillet 2016 pris pour l’application de l’article L. 541-39 du code de l’environnement, qui limite la part dintrants provenant de cultures dédiées à 15 % du tonnage brut total des intrants. L’absence de plafonnement du niveau de cultures dédiées conduirait à une plus grande utilisation de terres agricoles.

Enfin, les biocarburants détiennent un record, ce qui met en lumière les risques de conflits d’usage de cette production d’énergie, avec 769 000 hectares de surfaces agricoles mobilisées en France, cette superficie ne représentant toutefois que 2,7 % de la surface agricole utile (SAU).

B.  Le cadre juridique et les incitations à cette production

1.  Le cadre juridique de la production dénergie comme activité agricole

L’activité agricole est définie dans l’article L. 311-1 du code rural : « sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à lexploitation dun cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de lacte de production ou qui ont pour support lexploitation. Les activités de cultures marines et dexploitation de marais salants sont réputées agricoles, nonobstant le statut social dont relèvent ceux qui les pratiquent. Il en est de même des activités de préparation et dentraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à lexclusion des activités de spectacle. Il en est de même de la production et, le cas échéant, de la commercialisation, par un ou plusieurs exploitants agricoles, de biogaz, délectricité et de chaleur par la méthanisation, lorsque cette production est issue pour au moins 50 % de matières provenant dexploitations agricoles ». Depuis la loi de modernisation de l’agriculture du 27 juillet 2010, les activités de production et de commercialisation, par un exploitant agricole, de biogaz, d’électricité et de chaleur par la méthanisation, sont réputées agricoles.

Un plancher de moitié dintrants agricoles est exigé pour pouvoir définir la production dénergie comme activité agricole : les matières utilisées (déchets agricoles organiques, effluents d’élevage...) doivent provenir d’exploitations agricoles à hauteur de 50 % au minimum. Le décret du 16 février 2011 (article D. 311-18 du code rural) détermine les critères liés à la qualité d’exploitant ainsi que les critères applicables à la provenance des matières premières. Cette mesure a pour but de faciliter l’encadrement juridique et fiscal des projets de production et de commercialisation agricoles de biogaz, d’électricité et de chaleur par la méthanisation.

Il résulte de cette disposition que tous les revenus tirés de la commercialisation de ces productions dénergie peuvent être considérés comme des revenus agricoles, au prorata de la participation de l’exploitant agricole dans la structure exploitant et commercialisant l’énergie produite, et être rattachés au régime avantageux des bénéfices agricoles (BA).

Dans le cas de démarches collectives de production dénergie, plusieurs agriculteurs peuvent s’associer pour monter une installation. Ces démarches relèvent du cas par cas et du volontariat, mais sont aujourd’hui fréquentes, surtout dans la méthanisation agricole. Des projets peuvent également être montés avec des partenaires non agricoles, mais l’activité de méthanisation ne peut alors pas toujours être qualifiée d’agricole en raison des dispositions de l’article L. 311-1 du code rural.

2.  Des incitations multiples

Dès 2011, le rapport précité du ministère de l’agriculture et de l’alimentation « Prospective Agriculture et Énergie 2030 » montrait que des politiques incitatives permettent de donner une impulsion à la production d’énergie dans le secteur agricole. Par exemple, l’essor des biocarburants a notamment été permis par « un contexte politique très incitatif » : autorisation de cultures non alimentaires sur les jachères, subvention aux cultures énergétiques instaurée en 2004 (supprimée depuis), dispositions fiscales incitatives (mécanisme d’exonération puis de réduction de TICPE et incitation basée sur la taxe générale sur les activités polluantes ou TGAP renommée taxe incitative relative à l’incorporation de biocarburants ou TIRIB en 2019), objectifs d’incorporation ambitieux, etc.

Il faut rappeler que ces filières énergétiques ont besoin de soutiens publics, par exemple à travers le prix d’achat de l’électricité produite (tarifs d’achat), sachant qu’il n’est que peu probable que les seuls contrats de vente à EDF soient suffisants pour assurer le développement de ces filières.

L’agriculture bénéficie traditionnellement de nombreuses incitations fiscales notamment concernant l’amortissement du matériel. Depuis 2002, un régime fiscal incitatif d’amortissements dégressifs s’applique ainsi à la méthanisation, à la valorisation de la biomasse, à l’éolien, au photovoltaïque, au solaire thermique et aux pompes à chaleur.

Au cours de la décennie écoulée et afin d’encourager la production de ces énergies renouvelables, plusieurs mesures ont été prises :

- depuis 2010, des tarifs d’achat de l’électricité produite par méthanisation, photovoltaïsme, ou biomasse ;

- depuis 2011, des tarifs d’achat pour le biométhane injecté dans les réseaux gaziers ;

- depuis 2016, des appels d’offre CRE pour la production d’électricité renouvelable issue de méthanisation ;

- depuis 2011, des garanties d’origine sur la méthanisation, l’éolien et le photovoltaïque ;

- depuis 2009, des subventions (aides Ademe à travers le fonds déchets et le fonds chaleur) pour la méthanisation, la pompe à chaleur, le solaire thermique et la biomasse ;

- des compléments de rémunération sur l’éolien depuis 2016 et le photovoltaïque depuis 2017 ;

- des participations au financement de projets par la BPI et la CDC ;

- des aides des régions ;

- des aides européennes (via le FEADER et le FEDER) sont également mobilisées pour des projets d’infrastructures de production d’énergies renouvelables, surtout dans la méthanisation, le programme Leader sur la valorisation des ressources naturelles et de culture a également pu être mobilisé.

Parmi ces incitations, les principales concernent les tarifs dachat de l’énergie par la Commission de régulation de l’énergie (CRE), qui a pour principale mission de veiller au bon fonctionnement du marché de l’énergie. Pour cela, celle-ci régule les réseaux de gaz et d’électricité en fixant leurs tarifs, et met en œuvre des dispositifs de soutien aux énergies renouvelables en instruisant des appels d’offres. Ces soutiens peuvent prendre la forme d’obligation d’achat en guichet ouvert à un tarif fixé en amont[58], ou d’un complément de rémunération, qualifié de prime variable[59]. Ainsi, la CRE exprime un avis concernant les arrêtés déterminant le niveau des tarifs d’achat de l’énergie produite par des petites installations. Ces installations, éligibles à l’obligation d’achat, sont définies aux articles D. 314‑15 et D. 314‑23 du code de l’énergie. Peuvent ainsi bénéficier d’un soutien attribué par guichet ouvert :

-       certaines installations utilisant l’énergie mécanique du vent implantées à terre bien que les éoliennes ne fassent plus partie du dispositif de l’obligation d’achat. En effet, les injections d’électricité produite par des installations ne possédant aucun aérogénérateur de puissance nominale supérieure à 3 MW et dans la limite de six aérogénérateurs sont éligibles à un complément de rémunération, dont le montant est défini par contrat[60] ;

-       les installations utilisant l’énergie solaire photovoltaïque implantées sur bâtiment d’une puissance crête installée inférieure ou égale à 100 kilowatts. Les injections d’électricité pour les installations de ce type inférieures à 9 kWc sont rémunérées 10,0 c€/kWh, et 0,06 c€/kWh pour les installations inférieures à 100 kWc[61] ;

-       les installations utilisant à titre principal le biogaz produit par méthanisation de déchets non dangereux et de matière végétale brute implantées sur le territoire métropolitain continental d’une puissance installée strictement inférieure à 500 kW. Le tarif de référence du biogaz se situe entre 64 et 95 €/MWh en fonction du type de production et de la taille de l’installation, auxquels s’ajoute une prime de 5 à 39 €/MWh en fonction de la nature des intrants et de la taille de l’installation. Les injections délectricité pour les installations de ce type sont rémunérées 175 €/MWh pour les installations dont la puissance électrique maximale installée est inférieure à 0,08 MW (80 kW), et 150 €/MWh pour les installations dont la puissance électrique maximale installée est égale à 0,5 MW (pour mémoire le rachat est à 70 €/MWh pour une puissance installée supérieure à 1 MW). Une prime de 50 €/MWh est offerte pour une valeur de traitement des effluents délevage supérieure à 60 %[62] ;

-       les installations injectant du biométhane dans les réseaux de gaz naturel. Les injections de gaz pour les installations de ce type sont rémunérées entre 80 et 120€/MWh (4,5 c€/kWh PCS et 9,5 c€/kWh PCS) selon la taille de l’installation[63] ;

-       les installations utilisant lénergie hydraulique des lacs, des cours d’eau et des eaux captées gravitairement. Les injections d’électricité pour les installations de ce type sont rémunérées entre 80 €/MWh et 122 €/MWh en fonction de l’installation[64] ;

-       les installations utilisant à titre principal l’énergie extraite de gîtes géothermiques. Ces dernières ne font pas partie du dispositif de l’obligation d’achat. Toutefois, les injections d’électricité produite par ce type d’installations sont éligibles à un complément de rémunération, dont le montant est défini par contrat[65].

Les installations n’entrant pas dans le cadre du guichet ouvert doivent suivre « les procédures de mise en concurrence, qui peuvent prendre la forme dappels doffres ou de dialogues concurrentiels, et où le soutien est attribué aux lauréats de ces procédures »[66]. Ces derniers signent alors un contrat d’achat de leur production avec Électricité de France (EDF) ou avec une entreprise locale de distribution d’électricité et de gaz (ELD). De cette manière, le prix d’achat n’est pas administré, et découle de la mise en concurrence des producteurs.

C’est la CRE qui a la charge de mettre en œuvre ces appels d’offres[67]. De manière générale, la CRE recommande de privilégier le recours aux appels doffres plutôt que le système de tarif d’achat unique lorsque les filières sont matures, comme pour l’éolien et le photovoltaïque, tandis que pour la filière biomasse il serait plus pertinent de développer des mécanismes de soutien régionaux plutôt que nationaux[68]. Les appels d’offres sont classés par catégories, afin de mettre en concurrence des installations de même type :

-       la réalisation et l’exploitation d’installations de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent, implantées à terre ;

-       la réalisation et l’exploitation d’installations hydroélectriques - développement de la petite hydroélectricité ;

-       la réalisation et l’exploitation d’installations de production d’électricité à partir d’énergie solaire photovoltaïque ou éolienne situées en métropole continentale ;

-       la réalisation et l’exploitation de nouvelles installations de cogénération d’électricité et de chaleur à partir de biomasse situées en France métropolitaine continentale.

La CRE préconise de privilégier les appels d’offres à condition de prendre en compte les disparités régionales en termes d’approvisionnement ou de débouchés pour la production de chaleur, ou bien d’instaurer un tarif d’achat régionalisé, comportant des clauses contraignantes en matière de contrôle des plans d’approvisionnement de l’installation.

Aujourd’hui, la majorité des parcs d’éolien terrestre bénéficient des tarifs d’achat du guichet fermé fin 2016 et les petits projets de moins de six mâts et de moins de 3 MWh peuvent encore bénéficier de ce tarif. En revanche, les nouveaux projets de gros parcs éoliens doivent faire l’objet d’appels d’offres. Une réforme en cours devrait conduire à réduire encore le champ des parcs éligibles. Il semble donc qu’il soit de moins en moins intéressant de construire des parcs nouveaux puisque le tarif est de plus en plus réduit à sa portion congrue.

La piste de nouveaux mécanismes de soutien pour léolien terrestre est en débat : pour favoriser son acceptabilité, le Gouvernement souhaite faire émerger le « repowering », c’est-à-dire la réingénierie des parcs existants. Soit les parcs seront entièrement nouveaux et ils entreront dans le mécanisme d’appels d’offres, soit un mécanisme de soutien au réinvestissement sera mis en place. Ce « repowering » des parcs éoliens constitue une solution moins coûteuse, qui limite les problèmes d’acceptabilité sociale, puisque l’on remet des éoliennes là où il y en avait déjà. Le renouvellement des parcs est donc un axe intéressant, qui se pratique dans d’autres pays et qui permet d’augmenter les puissances, les capacités et les durées de production sans créer de nouveaux parcs.

Il peut enfin être remarqué que certaines installations de méthanisation agricole bénéficient d’une exonération[69] de taxe foncière et de cotisation foncière des entreprises (CFE) et qu’en 2013, le Plan énergie méthanisation autonomie azote (EMAA) a eu pour but de développer un modèle français de la méthanisation agricole avec « 1 000 méthaniseurs à la ferme » à l’horizon 2020[70], en privilégiant des installations collectives, des circuits d’approvisionnement courts et des technologies et savoir-faire français. Il prévoit notamment d’optimiser le tarif d’achat pour l’électricité produite à partir de biogaz, de simplifier les procédures administratives pour le développement des projets de méthanisation ou encore d’accompagner les porteurs de projets. Ses objectifs n’ont pas été atteints.

Le dispositif de soutien à la méthanisation agricole vient d’être renforcé en 2019 par la mise en place par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation d’un fonds de garantie abondé de 25 millions d’euros, qui permettra à BPI France de proposer 100 millions d’euros de prêts sans sûreté ni caution personnelle aux agriculteurs portant un projet de méthanisation agricole pour les aider à boucler leur tour de table financier, avec l’objectif de faire émerger 400 nouveaux projets sur cinq ans.

Précédemment, le plan de performance énergétique des exploitations agricoles (2009-2013) avait permis d’accompagner le développement de 132 projets de méthanisation agricole pour un montant de subventions accordées par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation de 28 millions d’euros, complété de 38 millions d’euros en provenance de l’Ademe, des collectivités, des fonds européens (FEADER/FEDER) et, ponctuellement, des agences de l’eau. Ce plan a également permis d’accompagner le développement de chaudières biomasse (149 dossiers), de pompes à chaleur (270 dossiers), de séchage en grange (126 dossiers), de chauffe-eau solaire (343 dossiers) et de production d’énergie en site isolé / autoconsommation (53 dossiers).

Geneviève Pierre, dans l’ouvrage précité Agro-énergies dans les territoires, Coopérer pour lautonomie locale, remarque que les projets agroénergétiques bénéficient aussi d’un contexte de promotion des énergies renouvelables et de diminution des GES supporté par des dispositifs d’action publique français comme le pôle d’excellence rurale (PER) « bio ressources », et des plans climat énergie territorial (PCET) dans les collectivités.

C.  Présentation sectorielle

1.  De la biomasse au biogaz : la méthanisation

La biomasse est la fraction biodégradable des produits, déchets et résidus provenant de l’agriculture, y compris les substances végétales et animales issues de la terre et de la mer, de la sylviculture et des industries connexes, ainsi que la fraction biodégradable des déchets industriels et ménagers. Elle peut être une source dénergie (chaleur et/ou électricité) par combustion directe (avec le bois énergie par exemple) ou par valorisation énergétique après méthanisation. Comme le rappelle Geneviève Pierre dans son ouvrage précité, la fermentation du fumier a été expérimentée dès le début du 19e siècle : « en Europe, dans les années 1940 et aujourdhui en Chine, Inde, Asie du sud-est, des digesteurs familiaux, en grande partie auto-construits, sont largement développés. De nos jours, les digesteurs utilisés en Europe sapparentent à des installations industrielles ».

Aujourd’hui, en France, la biomasse est redécouverte, sous l’angle de ce moment charnière qu’est la transition énergétique qui coïncide avec celui de la transition agroécologique. Elle présente de nombreux avantages, étant une des rares alternatives au pétrole pour beaucoup d’usages. Elle est, de plus, durable et renouvelable dans la mesure où la photosynthèse peut en produire en quelque sorte indéfiniment à partir de l’énergie solaire, sous réserve toutefois de la disponibilité de divers éléments (carbone, azote, phosphore…) et d’eau. Elle n’est pas délocalisable, très rarement dépendante de marchés extérieurs ou de problèmes géopolitiques. Enfin, elle ne présente aucun risque majeur (comme les accidents nucléaires ou les marées noires…) ni de produit de déchets difficiles à gérer à long terme, à la différence du nucléaire. En outre, elle conforte les exploitations agricoles dans leur fonction première de production de matières premières.

a)  Une énergie vertueuse

La méthanisation est un processus de transformation biologique anaérobie (en absence d’oxygène), i.e. de décomposition de matières organiques qui conduit à la production de biogaz et de digestat. Outre la production d’énergie de récupération, elle est un moyen intéressant de valorisation des déchets organiques : elle a d’ailleurs été conçue et mise en place avant tout pour des questions de traitement de déchets. Elle se produit naturellement dans les gaz des marais, lieu de décomposition de matières végétales et animales, et génère entre autres du biogaz, et peut aussi être provoquée volontairement et se dérouler de manière supervisée en enceinte fermée appelée digesteur, fermenteur ou réacteur (avec un processus d’une durée d’environ 40 jours).

La méthanisation peut être mise en œuvre dans le secteur agricole, dans le secteur industriel, dans les installations de stockage des déchets non dangereux ou pour le traitement des boues urbaines. Les intrants sont donc des déchets agricoles – essentiellement les effluents d’élevage –, des déchets industriels et des déchets issus des stations d’épuration et des stations de traitement d’ordures ménagères. Elle contribue donc à dépolluer, mais elle fabrique aussi du biogaz transformable en méthane, vecteur d’énergie.

Le biogaz est le gaz issu de la fermentation anaérobie de matières organiques, composé pour l’essentiel de méthane (environ 50-60 %) et de dioxyde de carbone (environ 40-50 %), et contenant notamment des traces de protoxyde d’azote et d’hydrogène sulfuré. Le biogaz est largement d’origine agricole, mais il peut aussi être issu de milieux industriels, de boues d’épuration ou de déchets ménagers. Outre l’intérêt de traiter des déchets (ménagers, déjections animales, effluents industriels), les unités de méthanisation présentent des atouts énergétiques : le biogaz généré peut être transformé en chaleur, en électricité dans des centrales à gaz ou en carburant pour véhicules.

 

En effet, comme pour la biomasse, la combustion du biogaz permet la production d’énergie soit sous forme de chaleur simple, soit sous forme de chaleur et d’électricité : on parle alors de cogénération. Après épuration (nécessitant un étage de séparation du CO2), le biogaz devenu biométhane peut être injecté dans le réseau de distribution ou de transport de gaz naturel : il sera alors question d’injection. En fonction de la proximité du réseau et de la structuration des filières de traitement des déchets, les méthaniseurs ont le choix d’utiliser le biogaz pour produire de l’électricité et de la chaleur ou de l’injecter directement dans le réseau de gaz naturel. L’Ademe oriente les projets vers les options techniques les plus adaptées et assure un suivi de la filière.

En outre, comme l’explique Bernard Pellecuer, dans l’ouvrage précité Énergies renouvelables et agriculture, le « déchet de la méthanisation que lon appelle le digestat, devient en fait un coproduit : répandu sur les terres agricoles, il devient un excellent amendement minéral, sans odeur, remplaçant avantageusement le fumier et le lisier. Et lon fait coup double : apport dengrais (minéraux – NPK[71] – et matière organique non dégradée – lignine) et gestion de lazote plus fine qui ne peut être que bénéfique pour les nappes phréatiques ».

Les réactions biochimiques dans le processus de méthanisation sont endothermiques, c’est-à-dire qu’il est nécessaire de chauffer le digesteur (soit un coût de consommation de l’ordre de 15 % de l’énergie produite). Les technologies mises en œuvre dans la méthanisation sont très nombreuses. Deux grandes familles peuvent être distinguées selon la teneur en matière sèche du substrat :

- les procédés par voie humide (< 15 % de matière sèche) appelés aussi « infiniment mélangés » essentiellement pour les boues et lisiers. Les déchets solides nécessitent une dilution ;

- les procédés par voie sèche (15 à 40 % de matière sèche) pour les déchets solides, représentent des volumes moindres mais la circulation de la matière par pompage et brassage nécessite d’être parfaitement maîtrisée.

Selon le choix de température de la réaction, on parle de méthanisation mésophile (35 à 40°C) ou thermophile (50 à 65°C). La première est plus facile à maîtriser que la seconde (les réactions sont plus stables) et consomme moins d’énergie (autour de 15 % au lieu de 30 %), mais elle est plus lente et a un rendement moindre.

Les étapes de la méthanisation

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Source : OPECST.

 

On doit distinguer plusieurs modèles dunités de méthanisation agricole[72], de taille variable (de 30 kW à 2 000 kW de puissance électrique installée) et utilisant une quantité de substrats allant de de 2 000 à 75 000 tonnes. Le matériel est surtout issu de technologies étrangères (Allemagne, Italie, Belgique, Hollande…) notamment concernant les digesteurs. La filière française est principalement composée d’intégrateurs, de sociétés de montage de projets, de bureaux d’études, d’exploitation et de maintenance et, dans une moindre mesure, d’équipementiers, en particulier pour la purification des gaz.

Outre le biogaz, de plus en plus souvent injecté dans le réseau de gaz, les usages de la chaleur sont variés ainsi que l’explique Geneviève Pierre dans son ouvrage précité : autoconsommation pour le chauffage des bâtiments d’élevage (porcheries, poulaillers), des serres, production d’eau chaude sanitaire, séchage du digestat, chauffage d’habitations ou d’une maison de retraite. La chaleur est donc valorisée sur l’exploitation mais aussi au profit de fermes voisines, voire d’habitations. Des projets d’éleveurs se construisent sur l’utilisation des déjections animales (exemple des lisiers) auxquelles on ajoute des co‑substrats extérieurs à l’exploitation (issus des collectivités et/ou des industriels) et des résidus de culture, voire des cultures énergétiques. Des projets de territoire multi-acteurs associent le traitement de déjections animales, de déchets de collectivités et de déchets industriels.

Pour Olivier Dauger, co-président de France gaz renouvelables, président de la chambre régionale d’agriculture des Hauts-de-France et de la chambre d’agriculture de l’Aisne, « le gaz vert a lavantage de pouvoir être stocké, de pouvoir profiter des réseaux déjà existants qui nont donc pas besoin dêtre construits, et ne dépend pas du climat pour être producteur délectricité ». Le comité de prospective de la Commission de régulation de l’électricité (CRE) a rendu un rapport sur le gaz vert en 2019[73] dans lequel la méthanisation est qualifiée de technologie prometteuse, surtout en accompagnant son essor, en développant des cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE).

 

La méthanisation dans le secteur agricole

Source : OPECST.

 

La France reste très en retard sur ses objectifs, notamment en nombre d’installations, avec environ 600 méthaniseurs qui devraient être en fonctionnement cette année alors que le plan énergie méthanisation autonomie azote (EMAA) visait « 1 000 méthaniseurs à la ferme » à l’horizon 2020. Les raisons sont multiples : choix de ne pas recourir à des cultures dédiées comme en Allemagne et de cibler les déchets (effluents et déjections animales, déchets verts…), ce qui a complexifié la maîtrise des procédés en raison d’une forte variabilité des intrants et de leurs spécificités (d’où une certaine fragilité de l’équilibre biologique du digesteur) ; absence de filière industrielle et de technologies adaptées aux intrants des exploitations agricoles françaises (l’implantation de technologies étrangères notamment allemandes inadaptées ayant entraîné des surcoûts voire des problèmes de casse dus aux indésirables tels que des pierres) ; pertes financières ayant entraîné quelques agriculteurs ou des entreprises à la faillite ; lourdeur administrative du montage des dossiers ; réticence des banques par méconnaissance du secteur ; congestion du réseau de transport de gaz qui crée un goulot d’étranglement (il n’existe pas de rebours entre le réseau de distribution et de transport) ; acceptabilité insuffisante des populations locales qui ont pu retarder des projets…

 

 

En dépit de coûts de production importants (entre 90 euros et 120 euros/MWh, contre un prix du gaz naturel aujourd’hui inférieur à 25 euros/MWh et évalué à 33,2 euros/MWh en 2030 par l’AIE), la filière biogaz a connu un développement rapide ces dernières années en France, notamment avec l’injection dans le réseau, ceci après un démarrage très lent dans les années 1990 et 2000.

 

Ces données s’arrêtent en 2018 mais en utilisant le « Tableau de bord biométhane injecté dans les réseaux de gaz » du premier trimestre 2020, issu des données collectées par les fournisseurs de réseau, GRTgaz et GRDF, on voit que la filière biogaz se développe nettement : au 31 mars 2020, 139 installations ont injecté du biométhane, après production et épuration de biogaz dans les réseaux de gaz naturel. Leur capacité s’élève à 2,5 TWh/an, en progression de 15 % par rapport à la fin de l’année 2019 (444 GWh au premier trimestre 2020, soit une hausse de 76 % par rapport au premier trimestre 2019). Les seules nouvelles installations ont atteint au premier trimestre une capacité d’injection supplémentaire dans les réseaux de 324 GWh/an, en nette hausse par rapport au premier trimestre 2019 (155 GWh/an). À la fin mars 2020, la capacité des 1 134 projets en file dattente dépasse 25 TWh/an, soit une hausse de 3 % par rapport à fin 2019.

Le parc est constitué à 55 % de petites installations d’une puissance inférieure à 15 GWh/an, qui ne représentent que 30 % de la capacité totale installée. Les unités de méthanisation cumulent environ 81 % de la capacité totale du parc.

Quatre régions, Hauts-de-France, Grand Est, Bretagne et Île-de-France, concentrent 51 % des capacités installées à fin mars 2020 et 55 % des injections du premier trimestre 2020.

 

Les capacités de production des nouveaux méthaniseurs par trimestre

Source : Thomas Blosseville daprès le service des données et études statistiques (SDES) du MTE[74].

 

Le marché potentiel estimé par l’Ademe représente entre 60 000 et 70 000 exploitations qui pourraient potentiellement s’équiper d’un méthaniseur s’il existait une offre technologique pertinente et viable économiquement. Le renforcement de la filière industrielle française, la réduction des coûts dexploitation et le développement de la petite méthanisation constituent les principaux défis du secteur.

Les pistes de R&D portent sur une conception en rupture notamment au niveau du digesteur mais aussi de la valorisation du biogaz en remplaçant le groupe électrogène (inadapté pour des petites puissances) par des moteurs à combustion externe (fabriqués par Ericsson ou Stirling) ou une pile à combustible haute température de type « SOFC ». Le design to cost, l’intégration énergétique et le génie industriel sont des approches essentielles au développement de solutions de petite méthanisation efficientes, robustes et viables.

La méthanisation, qui repose sur un procédé de digestion biologique des matières, justifie des efforts de recherche, notamment pour adapter la technologie aux intrants des exploitations françaises (lisier, fumier, CIVE, tontes…). Cet effort est encore plus justifié pour la petite méthanisation à l’échelle de la ferme en raison d’une offre commerciale insuffisante et d’une fragilité de la filière industrielle. La petite méthanisation à l’échelle de la ferme est une voie prometteuse pour accéder plus largement aux gisements agricoles. La fragilité de la filière industrielle et le manque de R&D dans le domaine freinent l’émergence de solutions technologiques françaises économiquement viables.

 

La vision de lassociation des agriculteurs méthaniseurs de France (AAMF)

La méthanisation agricole doit rester cohérente vis-à-vis des spécificités de son territoire pour lui garantir un juste retour de valeur ajoutée (avec des garanties dorigine valorisées en local, la mise en place de stations BioGNV, etc.), les habitants doivent pouvoir voir le lien entre la méthanisation et la production dénergie renouvelable. En plus de la vocation alimentaire, les agriculteurs-méthaniseurs et les acteurs du territoire peuvent ainsi contribuer à la transition agricole, économique, énergétique, climatique et sociétale :

1. Transition agricole par lamélioration de la fertilité des sols via une utilisation raisonnée du digestat, le changement des pratiques agricoles, le développement de valeurs et de compétences sur nos exploitations.

2. Transition économique par lamélioration de la résilience des exploitations : valorisation des matières organiques du territoire, diversification des sources de revenus, plus dautonomie.

3. Transition énergétique par la production dénergies renouvelables pilotées pour répondre aux besoins du mix des énergies vertes.

4. Transition climatique par le stockage du carbone dans les sols par la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

5. Transition sociétale par le renforcement du tissu social et la création dune économie circulaire en réponse aux attentes de la société. 

La PPE met un coup darrêt à la filière, et la baisse des tarifs annoncée a incité les porteurs de projet à se précipiter à signer les contrats dachat, or après signature du contrat dachat, le porteur de projet a trois ans pour construire et injecter. Or, la filière na pas la capacité de construire la totalité des projets signés à lhorizon de trois ans (risque de baisse de la qualité des prestations et de hausse des coûts de construction de 30 à 50 %). Alors que la cogénération est trop laissée de côté par les pouvoirs publics, une baisse des tarifs de rachat pourrait faire disparaître la filière injection. Le biométhane est vu comme une énergie chère, cest vrai si lon compare son prix aux autres énergies, mais on ne mesure pas dans son prix ses services annexes : le stockage de carbone, la gestion des déchets, etc. La méthanisation ne présente pas quun intérêt énergétique mais de nombreux autres intérêts, elle apporte beaucoup plus aux territoires quun gaz fossile importé (résilience des exploitations, stockage de carbone, économies dengrais et de produits phytosanitaires...). Elle doit permettre une rémunération complémentaire pour les exploitations agricoles. Elle devra être vue demain come le pilote des différentes énergies renouvelables pour moduler production et consommation. Il faudra laisser aux méthaniseurs la possibilité dévoluer vers dautres technologies de production (méthanation, pyrogazéification) et de valorisation énergétique (valorisation partagée injection/cogénération).

Source : AAMF.

b)  Les problèmes dacceptabilité sociale

Le terme d’« acceptabilité sociale » est largement employé et sera utilisé dans le présent rapport, même s’il est vrai que les sciences sociales peuvent parfois se montrer réservées sur l’usage de cette notion qui peut apparaître peu respectueuse des acteurs qui n’auraient qu’à accepter les innovations technologiques et les évolutions économiques. Il n’est pas utilisé ici avec cette connotation et s’apparente plutôt au concept de perception, positive ou négative, des différents modes de production d’énergie de la part des populations concernées.

Selon le sondage de l’Ademe « Les Français et l’environnement » de novembre 2018, 19 % de la population se déclare favorable au développement de l’énergie biomasse lorsqu’elle recouvre les filières biogaz et biocarburants. Si la question est posée plus directement en excluant les biocarburants, on voit un intérêt plus marqué : 35 % des Français accepteraient en effet qu’un méthaniseur soit installé à moins d’un kilomètre de leur domicile.

Les méthaniseurs n’induisent aucune pollution visuelle ou sonore, à la différence d’autres installations d’EnR. Par ailleurs, le manque de connaissances engendre aussi des réticences. Les risques olfactifs des méthaniseurs doivent être relativisés : leurs odeurs sont souvent dénoncées, mais en réalité un digestat n’a pas d’odeur contrairement à un effluent. Dans les quelques cas de méthaniseurs odorants, la gestion des problèmes d’odeur est souvent liée au non-respect du protocole de méthanisation. Lorsque le processus n’a pas été mené à son terme, le contenu du méthaniseur continue à émettre des odeurs.

La longueur des montages des projets alimente aussi des doutes sur le terrain, surtout quand les durées sont de cinq ans ou plus. Les riverains s’interrogeraient et remettraient de plus en plus en doute les projets le temps passant.

Le ministère de la transition écologique (MTE) a consacré un rapport d’expertise sur le cas du méthaniseur BioQuercy, à Gramat dans le Lot, suite aux difficultés constatées dans ses conditions d’exploitation en vue de dessiner des pistes d’avenir. Ce rapport met en exergue trois axes de contestation :

-       les difficultés de l’exploitant à maîtriser les odeurs liées à la composition particulière du méthaniseur, et des odeurs du digestat lors de l’épandage ;

-       les caractéristiques du digestat, conforme à la réglementation mais dont les particularités suscitent des suspicions sur de potentiels impacts sur la biodiversité ;

-       la nature karstique des causses du Quercy qui exacerbe les craintes d’une vulnérabilité des eaux et du sol aux épandages du digestat, et le risque de pollution des milieux aquatiques.

Il dresse ensuite une série de recommandations pour limiter ces contestations :

- s’assurer du respect de la réglementation, et confier l’inspection et le suivi de l’ensemble du stockage du digestat, y compris chez les agriculteurs, au service chargé de l’inspection de l’unité de méthanisation. L’arrêté préfectoral MED E 2018-155 signé le 27 juin 2018 explicite que l’exploitant du méthaniseur « reste responsable de ses déchets particulièrement du digestat, jusquà leur valorisation ou élimination définitive » ;

- améliorer la traçabilité des entrées de produits et de sortie du digestat. Une liste de 29 codes de nomenclature des déchets admissibles est établie. La conformité des intrants est encadrée par les certificats d’approvisionnements en produits (CAPs), la validation des sorties des abattoirs et la traçabilité et le contrôle visuel systématique des chargements livrés à l’unité BioQuercy ;

- améliorer la mise en ligne des autocontrôles sur le digestat ;

- améliorer le suivi du plan d’épandage en intégrant, dans le plan prévisionnel d’épandage de chaque agriculteur les modalités de fertilisation des zones inaptes à l’épandage du digestat et en vérifiant le respect des conditions climatiques des épandages réalisés ;

- systématiser l’utilisation du filtre à charbon actif et prévoir, si c’est techniquement réalisable, un couplage en série avec le biofiltre ;

- mettre en place un dispositif de veille et de signalement d’observations à la commission locale de suivi ;

- mettre en place un observatoire scientifique participatif de la méthanisation permettant de suivre les mortalités apicoles, mettre à jour d’éventuelles relations avec les épandages du digestat ; caractériser l’évolution de la microfaune du sol sous différents modes de fertilisation ; étudier la dynamique d’infiltration du digestat ; suivre la qualité des eaux souterraines sur les causses du Quercy et développer les méthodes permettant d’identifier et séparer les causes possibles d’atteinte à cette qualité ; caractériser la valeur agronomique du digestat ;

- mettre en place des équipements nécessaires au traitement des odeurs et la justification de leur efficacité par la mesure dans les différents rejets à l’atmosphère de la teneur en composés soufrés, ammoniac et concentration d’odeurs.

Le consultant Philippe Vervier a rapporté une étude de sa société Acceptables Avenirs consacrée à l’acceptabilité sociétale des projets de méthanisation autour de ce même méthaniseur de Gramat, dans le Lot : suite à de nombreuses contestations, le laboratoire de sociologie CERTOP de Toulouse et sa société ont, avec le soutien de l’Ademe, mené une étude sur les origines de ces contestations et des recommandations à suivre afin daméliorer lacceptabilité sociale des méthaniseurs. L’étude conclut sur le fait que l’acceptabilité du projet est liée à trois principaux facteurs :

- sa taille, car elle a un impact proportionnel sur les transports routiers et sur les risques olfactifs générés ;

- son portage, qui conditionne la capacité du projet à s’inscrire dans une économie locale et circulaire ;

- les modalités de son développement, qui doivent répondre à l’exigence croissante de la société d’une implication citoyenne en amont et d’une forte crédibilité technico-économique.

Ainsi, l’étude recommande d’adopter une approche participative danticipation des nuisances potentielles et de définition et mise en œuvre dactions destinées à les prévenir. C’est pourquoi, elle recommande de réaliser :

- une vérification de différents points le plus en amont possible, notamment en évaluant l’adéquation entre la taille du projet, son portage et ses modalités de développement, et le niveau d’implication des parties prenantes (les riverains, les associations de protection de l’environnement, les agriculteurs eux-mêmes…) ;

- un dialogue avec les parties prenantes afin de répondre aux questionnements et craintes liés au développement du projet de méthanisation.

2.  Les biocarburants

a)  Un conflit de générations ?

Carburants liquides produits à partir de matériaux organiques non fossiles provenant de la biomasse, les biocarburants – également parfois appelés agrocarburants ou « biofuels » en anglais – sont très majoritairement issus du monde agricole. En effet, en France, 96 % de la production de biocarburants est issue de l’agriculture, les 4 % restants étant produits à base de déchets organiques.

Deux générations de biocarburants existent dans le monde agricole, la seconde devant plus ou moins remplacer la première.

La première génération en compétition avec l’alimentation est constituée d’alcools, d’huiles, d’esters d’huiles ou d’hydrocarbures, obtenus après transformation de produits agricoles destinés habituellement à l’alimentation humaine ou animale (les produits agricoles utilisés proviennent notamment de plantes sucrières, amylacées ou oléagineuses : colza, tournesol, betterave, maïs, blé…).

La deuxième génération est issue de composés lignocellulosiques oxygénés ou d’hydrocarbures qui sont obtenus à partir de bois, de cultures spécifiques à croissance rapide non destinées à l’alimentation humaine ou animale[75], de résidus agricoles et forestiers ou de déchets ménagers. Elle est rarement en compétition avec l’alimentation contrairement à la première génération[76] mais peut entrer en concurrence avec d’autres usages des territoires, notamment vis-à-vis de la conservation d’espaces (semi-)naturels et de la biodiversité associée, ou avec d’autres usages de la biomasse, comme la construction, la chimie verte ou le chauffage. Ses ressources sont aussi limitées.

La troisième génération utilise des micro-algues ou des cyanobactéries pour leurs acides gras qui sont ensuite convertis en biocarburants. Cette ressource n’est ni d’origine agricole ni en compétition avec l’alimentation, même s’il faut préciser que la culture de ces organismes nécessite beaucoup d’intrants (azote, phosphore…), ce qui peut concurrencer des usages à destination du monde agricole.

Le schéma suivant rappelle la typologie des biocarburants issus de lagriculture, qui se répartissent donc entre deux générations.

 

Typologie des biocarburants issus de lagriculture

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 Source : OPECST.

 

De fait, deux filières principales existent aujourdhui :

-   la filière huile et dérivés, reposant sur l’huile végétale mais aussi des graisses animales ou des acides gras divers, avec comme type de carburant final, le biogazole (ou biodiesel) ;

-   la filière alcool comme le bioéthanol, produit à partir de sucres, d’amidon, de cellulose ou de lignine hydrolysés, avec comme type de carburant final, l’essence via une incorporation.

b)  Les problèmes dacceptabilité sociale

Sans être populaires, les biocarburants ne posent pas de réels problèmes dacceptabilité sociale, bien que leur première génération impacte fortement lusage des terres et les prix des matières premières agricoles.

Ces risques de conflits d’usage et de concurrence avec l’alimentation incitent donc à recourir avec prudence aux biocarburants de première génération, le changement daffectation des sols étant la première cause dextinction de la biodiversité au niveau mondial.

Selon un sondage de l’Ademe de novembre 2018, seule 19 % de la population se déclare favorable au développement de l’énergie biomasse lorsqu’elle recouvre les filières biogaz et biocarburants. À l’avenir, de nombreux secteurs pourraient utiliser davantage de biocarburants (aéronautique, transport maritime…) mais il n’est pas sûr que le secteur agricole (à l’échelle nationale mais aussi sur un plan mondial) soit en capacité d’accompagner cette demande sans induire des tensions sur les produits alimentaires, ce qui conduira évidemment à une acceptabilité sociale moindre.

c)  Les biocarburants aéronautiques

Comme l’a montré en 2014 un rapport commun de l’Académie de l’Air et de l’Espace et de l’Académie des Technologies intitulé « Quel avenir pour les biocarburants aéronautiques ? »[77], les vols commerciaux utilisent aujourd’hui exclusivement du jet fuel, extrait du pétrole. Or les prévisions de forte augmentation du trafic aérien ainsi que les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre encouragent le secteur aéronautique à sintéresser aux biojet fuels. De plus, la recherche d’indépendance aux hydrocarbures fossiles pousse à identifier des alternatives. À l’échelle internationale, l’objectif est la réduction de l’empreinte carbone du transport aérien. À l’échelle nationale, c’est principalement un objectif d’indépendance énergétique qui pousse les États à se lancer dans le développement du biojet fuel.

Aujourd’hui, les États-Unis et la France se situent à la pointe des technologies dans le domaine des biocarburants mais aucun accord international ni mandat d’incorporation n’est en vigueur. Des filières sont toutefois en cours de développement à partir de sucres, amidons, lipides ou de matière lignocellulosique. Puisque les « biojet fuels » actuels ne sont pas encore totalement miscibles dans le jet fuel commercial, on procède à un mélange (50/50).

 

Il faut reconnaître que la question de la disponibilité de la matière première nécessaire à la production de biomasse se pose étant donné la demande importante du secteur aéronautique. Le gain environnemental réel de ces biocarburants fait aussi débat. De plus, le biojet fuel est au minimum 30 % plus cher que le diesel fossile et le prix des matières premières reste comme toujours soumis à des incertitudes. Même si les entreprises aériennes bénéficient déjà d’une fiscalité très généreuse pour leurs carburants, le prix des carburants est toujours perçu comme trop élevé et la situation ne s’améliorera pas avec des biocarburants encore plus chers. Il pourrait exister une concurrence d’usage entre l’aviation commerciale et les secteurs demandeurs de biomasse, notamment le transport routier.

Le rapport commun précité jugeait que la France possède toutes les forces pour être un acteur majeur du domaine des biojet fuels mais que le cadre législatif et financier reste à construire. Il préconisait donc l’inclusion claire du domaine aéronautique dans le champ de la directive énergies renouvelables, car il est difficile de se limiter à l’échelle nationale étant donné la dimension internationale du transport aérien.

La directive européenne sur les énergies renouvelables de 2018[78] a tenu compte de ce nouvel enjeu des biojet fuels. Ainsi, elle dispose que « certains États membres voient laviation occuper une part importante de leur consommation finale brute dénergie. Étant donné les contraintes techniques et réglementaires qui empêchent actuellement lutilisation commerciale des biocarburants dans laviation, il y a donc lieu doctroyer à ces États membres une dérogation partielle dans le calcul de la consommation dénergie finale brute dans le secteur du transport aérien national afin de leur permettre dexclure de ce calcul la quantité dépassant une fois et demie la moyenne de lUnion de la consommation finale brute dénergie dans laviation en 2005, telle quévaluée par Eurostat, soit 6,18 %. Vu leur caractère insulaire et périphérique, Chypre et Malte dépendent en particulier de laviation en tant que mode de transport essentiel pour leurs citoyens et pour leur économie. Dès lors, leur consommation finale brute dénergie dans le secteur du transport aérien national est élevée, et ce de façon disproportionnée, représentant plus de trois fois la moyenne de lUnion en 2005. Ils sont par conséquent touchés de façon disproportionnée par les actuelles contraintes technologiques et réglementaires. Il y a donc lieu de prévoir quils bénéficient dune exemption couvrant la quantité correspondant à leur dépassement de la moyenne de lUnion pour la consommation finale brute dénergie dans laviation en 2005, évaluée par Eurostat, soit 4,12 % ».

En amont, la Commission européenne avait énoncé dans sa communication du 20 juillet 2016 intitulée « Une stratégie européenne pour une mobilité à faible taux d’émissions » l’importance particulière, à moyen terme, des biocarburants avancés et des carburants liquides et gazeux renouvelables d’origine non biologique pour le secteur de l’aviation.

3.  Lénergie éolienne

a)  Une énergie de moins en moins dans le vent

L’énergie éolienne est produite à partir de la force du vent, grâce à une installation appelée éolienne qui transforme lénergie mécanique du vent en énergie électrique. Reliée à un générateur, elle est constituée d’un mât sur lequel est fixée une hélice que fait tourner le vent. Il existe deux catégories d’installations : les éoliennes terrestres et marines, dites éolien en mer ou offshore.

On distingue trois grandes catégories d’éoliennes : les grandes éoliennes (mât de l’ordre de 90 m pour des pales de 50 m pour les éoliennes installées actuellement), les petites éoliennes (mât de 10 à 35 m) et les éoliennes de puissance intermédiaire (mât d’environ 50 m) assez peu répandues.

En raison du besoin d’espace pour l’implantation de parcs éoliens, le secteur agricole supporte la majeure partie des parcs éoliens terrestres : 83,2 %.

Pour cette même raison, toutes les filières agricoles ne sont pas en situation d’être impliquées dans l’installation d’éoliennes. Les parcs se situent ainsi à 53 % sur des terrains dexploitations de grandes cultures, à 16 % de polycultures-élevages et 21 % d’élevages bovins.

Le modèle de lénergie éolienne dans lagriculture

Source : OPECST.

 

b)  Le petit éolien

Dans le secteur agricole, il existe aussi de petites installations éoliennes pour lesquelles on parle de « petit éolien », avec des mâts de 10 à 35 m. Dans une logique d’autoconsommation et de circuits courts, elles sont intéressantes, bien que leur rendement modéré les rende parfois coûteuses.

c)  Les problèmes dacceptabilité sociale

Outre leur forte intermittence, la fabrication des composants et leur transport (ce sont surtout des matériels importés), les difficultés à recycler certaines des matières utilisées, le fait qu’une éolienne tourne en moyenne 2 000 heures par an et soit un tiers du temps en maintenance, ces installations impliquent des pollutions sonores, visuelles et ont un impact à lampleur discuté sur la faune.

Dans le sondage de l’Ademe « Les Français et l’environnement » de novembre 2018, seuls 36 % des Français plaident pour le développement de lénergie éolienne et 43 % des Français accepteraient qu’un parc éolien soit installé à moins d’un kilomètre de leur domicile. Parmi ces personnes, 75 % expliquent leur refus par les nuisances sonores. D’après un sondage Harris Interactive précité, 73 % de l’ensemble des Français ont néanmoins une bonne ou très bonne image de l’énergie éolienne, notamment chez les 18‑49 ans et 80 % des riverains ont une bonne ou très bonne image de l’énergie éolienne. C’est en Occitanie (86 %), en Normandie (89 %), en Bretagne (82 %) et en Pays de la Loire (84 %) que les riverains ont davantage une bonne image de l’énergie éolienne.

De manière générale, les sondages montrent tous que les riverains déoliennes attribuent plus que lensemble des Français la plupart des qualificatifs positifs attribués aux éoliennes. 68 % des Français estiment que l’installation d’un parc à proximité de leur territoire serait une bonne chose, 85 % des riverains qui étaient favorables au moment de l’installation d’un parc éolien considèrent toujours que cela est une bonne chose après la mise en service et 48 % des riverains qui étaient opposés au moment de l’installation considèrent toujours que cela est une mauvaise chose.

Il existe donc un écart manifeste entre la bonne image de léolien chez les riverains et le fait que 70 % des projets dinstallation déoliennes donnent lieu à des recours, ce qui peut paraître contradictoire.

Les professionnels du secteur éolien font valoir que ce taux serait sans rapport direct avec la réalité du terrain en raison d’une opposition organisée de certaines associations derrière les contestations individuelles. Ces associations expliqueraient comment déposer des recours de façon systématique, en détaillant la procédure à suivre et en fournissant des argumentaires. Quoiqu’il en soit, il faut retenir que 95 % de ces recours échouent.

Les effets de la présence de parcs éoliens sur la faune sont traités dans le chapitre IV du présent rapport.

4.  Le photovoltaïque et le solaire thermique

L’énergie solaire est une énergie provenant du soleil, fonction de l’ensoleillement qui est lui-même variable d’une région à l’autre et selon la saison.

L’ensoleillement, à l’origine de la vie terrestre, peut être transformé en énergie calorique (solaire thermique ou énergie calorifique car la chaleur est récupérée par un absorbeur qui chauffe un caloporteur) ou bien en énergie électrique, le caloporteur chaud étant envoyé dans un système de conversion thermodynamique générant de l’électricité (ou énergie solaire thermodynamique).

La technologie solaire thermodynamique nécessite un rayonnement direct important, et son usage est donc limité au sud de la France.

 

L’énergie solaire photovoltaïque transforme spécifiquement le rayonnement solaire en électricité grâce à des cellules photovoltaïques. Fonctionnant avec des rayonnements diffus, elle peut être implantée sur tout le territoire métropolitain.

Le solaire thermique

Le solaire thermique, qui représente 3 % de la production d’EnR du secteur agricole, repose sur des capteurs qui permettent de récupérer la chaleur solaire pour la transférer à un fluide caloporteur qui, au travers d’un échangeur, va chauffer de l’eau ou un autre fluide. Il existe également des capteurs à air permettant un chauffage direct. Les capteurs peuvent être à concentration via différents procédés pour atteindre des températures de 150 à 200°C pour des capteurs plans à tubes sous vide avec réflecteurs, et 200 à 400°C pour les capteurs avec collecteurs. Il existe enfin des capteurs hybrides photovoltaïques thermiques.

Un système de stockage est le plus souvent associé aux installations de solaire thermique, ainsi qu’un système de production d’appoint, pour permettre une fourniture à la demande. Le cas le plus connu est celui des chauffe-eau solaires, mais il existe également des applications industrielles, et des usages de chauffage urbain, auquel cas le réseau constitue une forme de stockage comme pour le photovoltaïque. Il peut toutefois être nécessaire d’ajouter des systèmes de stockage thermique spécifiques, y compris en zone urbaine, pour compenser l’intermittence de la source de production solaire. Les panneaux solaires thermiques sont majoritairement utilisés par les agriculteurs pour produire de l’eau chaude afin de laver les bâtiments et le matériel dans des ateliers de transformation présents sur les exploitations, et produire de l’air chaud afin de chauffer des bâtiments ou sécher des cultures.

Le solaire thermique a connu une pénétration très lente en raison de son coût élevé par rapport aux énergies fossiles (comme le gaz) mais aussi à la biomasse et à la cogénération notamment des groupes électrogènes des installations de méthanisation. Il n’implique aucune emprise au sol si les panneaux sont installés en toiture, ce qui est très souvent le cas. Il permettra une maîtrise des charges énergétiques (en lien avec le renchérissement des énergies fossiles) et participera de plus en plus à renforcer l’autonomie énergétique des exploitations en demandant peu d’entretien et de maintenance.

Il existe des industriels français ou installés en France sur toute la filière : Viessmann, Groupe Vaillant, Giordano et BDR Therma pour les capteurs solaires ; Dualsun, Systovi et GSE pour les capteurs solaires hybrides photovoltaïques et thermiques ; Newheat et Sunti pour l’installation et l’exploitation… L’unité de fabrication de Viessman pour l’Europe est en Moselle et développe actuellement un grand capteur pour les applications industrielles et réseaux de chaleur. Bien que la plupart des composants viennent de France ou d’Europe, les tubes sous-vides viennent pour la plupart de Chine. De nouvelles technologies émergent visant à améliorer et optimiser les rendements selon les conditions d’irradiation et les gammes de température à produire.

Source : OPECST daprès des informations du CEA.

a)  Histoire de la technologie photovoltaïque

Découvert en 1839 par le physicien français Edmond Becquerel, le photovoltaïque est lié à l’effet photoélectrique par lequel des particules de lumière (photons) pénètrent dans une matrice semi-conductrice, sont absorbées par un matériau (par exemple un semi-conducteur), et extraient des électrons. Après avoir été collectés dans la jonction, ces photons se déplacent et créent un courant électrique continu[79].

Un panneau photovoltaïque (PV) repose sur un module composé de cellules photovoltaïques qui transforment l’énergie solaire en courant électrique continue. Ces cellules photovoltaïques sont des composants électroniques composés de matériaux semi-conducteurs tels que du silicium qui, lorsqu’il reçoit les photons de la lumière du soleil, transmet son énergie aux électrons des semi-conducteurs qui génèrent alors une tension électrique. Enfin, pour pouvoir être transformé en courant alternatif il est nécessaire d’utiliser un onduleur, qui transforme le courant continu en courant alternatif, afin de pouvoir alimenter le réseau public de distribution d’électricité ou d’être auto-consommé. Au total, il faut retenir que les cellules photovoltaïques utilisent leffet photoélectrique pour générer directement de l’énergie à partir de la lumière du soleil. Leur rendement dépend très largement du semi-conducteur utilisé, il est en général situé entre 10 et 20 %.

Les technologies photovoltaïques peuvent être distinguées en trois générations : le silicium mono-cristallin ou poly-cristallin, qui est la filière la plus répandue, les technologies de couches minces, et les nouvelles générations telles que les cellules polymères photovoltaïques ou à base de nanoparticules.

C’est en 1953 que le physicien Gerald Pearson et le chimiste Calvin Fuller sont parvenus à réaliser la première cellule photovoltaïque à base de silicium, capable de transformer les rayons du soleil en électricité[80]. L’amélioration du cœur de cette technologie revient à optimiser le rendement et l’efficacité de cette cellule photovoltaïque. Les panneaux photovoltaïques ou PV voient leur première apparition en 1958, dans le domaine de l’industrie spatiale, avec le lancement dans l’espace d’un satellite équipé d’une batterie électrochimique, et de panneaux solaires.

La baisse des coûts des PV et du silicium est alors devenue un enjeu majeur afin de développer cette technologie sur terre, de manière à que le solaire devienne plus compétitif que les combustibles fossiles.

b)  Lamélioration progressive des panneaux photovoltaïques

L’essentiel du marché est couvert par deux grandes technologies, le silicium cristallin qui représente 95 % du marché et les couches minces à base de tellurure de cadmium (CdTe ou CIGS en couche mince le plus souvent) pour 4 % du marché.

Ces technologies ont bénéficié d’améliorations continues et permettent d’atteindre en moyenne des rendements de conversion de l’ordre de 15 à 20 % pour les modules commerciaux en silicium cristallin et 14 à 18 % pour les modules commerciaux en CdTe. Cette amélioration continue des performances - y compris pour les onduleurs - s’accompagne de gains substantiels en fiabilité avec des modules garantis 25 ans (voire 30 ans pour certains fabricants) et surtout une baisse des coûts qui ne cesse de s’accélérer avec un marché qui connait une croissance très rapide. La recherche et l’innovation ont permis de baisser le coût des modules solaires de 20 $ par watt-pic en 1973 à 1,5 $ par watt-pic en 2009[81], pour tomber à moins de 1 $ le watt-pic aujourd’hui. Ces modules sont majoritairement produits à base de silicium monocristallin dont le rendement et le coût sont plus élevés, et polycristallin dont le rendement et le coût sont plus faibles. Enfin, des progrès sont également visibles pour les cellules solaires à couche mince, dont le coût est de 0,76 $ par watt et dont le rendement atteint environ 20 %.

Toutefois, selon le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), et notamment son Laboratoire d’innovation pour les technologies des énergies nouvelles et les nanomatériaux (LITEN), ces technologies à base de silicium sont amenées à devenir obsolètes, et à être remplacées par de nouvelles technologies au croisement du solaire et de la micro-électronique, lhétérojonction. Cette structutre de cellules est particulièrement adaptée à une utilisation bifaciale : les photons sont collectés sur les deux faces de la cellule, la face arrière recevant les photons réfléchis sur le sol ou une surface située derrière la cellule, augmentant ainsi le rendement du panneau, avec la mise en contact de matériaux différents, tels que du silicium monocristallin et du silicium amorphe, contrairement à l’homojonction qui repose sur un seul matériau. Une première usine de panneaux solaires se concentrant sur la production de ces modules avec des cellules solaires bifaciales en technologie à hétérojonction a ouvert récemment en Italie, à Catane.

Cette technologie offre plusieurs avantages concernant l’industrialisation du photovoltaïque : elle est bifaciale, ce qui permet la captation de 30 % de lumière en plus, possède des rendements de conversion pouvant atteindre 26 % (au lieu de 20 %), une architecture simple du composant, un impact économique et environnemental amoindri, un nombre réduit d’étapes nécessaires à sa fabrication et son intégration, utilisant des procédés propices à des cadences élevées et de l’automatisation, et un levelized cost of energy (LCOE) intéressant. Cette technologie pemet de fabriquer des cellules de faibles épaisseurs, qui pourront être intégrées dans des modules flexibles pouvant épouser différents types de formes géométriques.

Enfin, selon le CEA-LITEN, l’amélioration des technologies autour du photovoltaïque, par l’augmentation de rendement résultant, va permettre de limiter la compétition entre le solaire et le foncier agricole. Une fois le cœur de ces technologies sécurisé, il est possible selon ce laboratoire « de sintéresser à leur intégration, leur encapsulation et leur asservissement intelligent dans le monde rural ».

Il faut souligner que la production de cellules et modules photovoltaïques a quasiment disparu de France et même dEurope. Le marché du solaire est devenu un marché mondial non seulement au niveau des cellules et modules mais également pour tous les composants, onduleurs et trackers ; seuls les châssis métalliques fixes sont le plus souvent approvisionnés localement. En France il reste toutefois quelques industriels fabricants de modules disposant de capacités de production annuelle de l’ordre de 20 à 200 MW. Parmi eux, Reden Solar qui présente la particularité d’être producteur de modules PV mais aussi installateur, et qui est très présent dans le secteur agricole. Les trackers à un axe connaissent un fort développement en général et sont en particulier un élément clef pour l’agrivoltaïque dynamique. Exosun, récemment acquis par Arcelor Mittal, est un acteur français important du secteur.

c)  Lénergie photovoltaïque en agriculture et lagrivoltaïsme

L’essor du photovoltaïque dans le monde agricole (13 % de la production totale d’électricité PV) est récent tout comme l’est l’essor du photovoltaïque en général.

Différents types dinstallations PV existent pour le secteur agricole, et sont, des plus au moins répandues :

- le PV posé sur ou intégré aux toitures des bâtiments agricoles (hangars par exemple), souvent des moyennes et grandes toitures allant de 3 kWc (~30 m²) à 100 kWc (~800 m²) ;

- les centrales au sol, qui sauf exceptions ne peuvent pas être installées sur des surfaces agricoles en production. Dans quelques cas, des centrales PV et une production agricole coexistent sur le même terrain ;

- les serres à parois fermées ;

- les serres à parois ouvertes ou avec filet ou film plastique.

Le photovoltaïque a connu un certain décollage à partir des années 2007-2008 bien qu’il bénéficie de tarifs de rachat depuis 2002. La structure du parc photovoltaïque français est marquée par la prédominance des installations de petites tailles (moins de 100 kW, souvent liées au résidentiel et aux moyennes toitures) mais de plus grandes installations en toitures ou au sol connaissent une croissance ininterrompue depuis 2010.

 

Lutilisation de panneaux photovoltaïques dans le secteur agricole

Source : OPECST.

 

Dans le secteur agricole plusieurs types dinstallations photovoltaïques sont présentes, avec un couplage plus ou moins important avec la production agricole, une occupation inégale des terres et des risques variables de conflits dusage. Les différents types d’installation recensées par le syndicat des énergies renouvelables (SER) sont illustrés ci-après.

 

Ces différents types d’installation se retrouvent dans les familles des appels doffre de la CRE : « Installations au sol », « Installations sur bâtiments » et « PV innovant » mais qui sont malheureusement englobées parmi des installations non-agricoles. En 2015, l’Ademe estimait que 13 % de la production photovoltaïque était issue du monde agricole, essentiellement provenant d’installations sur hangars. Depuis les serres solaires et l’agrivoltaïque dynamique connaissent un certain essor et démontrent peu à peu les synergies possibles entre production agricole et production photovoltaïque (PV). Deux appels d’offres PV innovants (en janvier 2018 et avril 2020) ont visé spécifiquement l’agrivoltaïque dynamique. Pour mémoire, en France, le prix moyen de l’électricité PV varie de 57 euros/MWh pour les plus grandes centrales au sol à 88 euros/MWh pour les ombrières solaires.

L’installation de panneaux photovoltaïques sur les toitures des bâtiments délevage impose des contraintes spécifiques afin de garantir des bonnes conditions zootechniques dans les bâtiments (notamment en termes de ventilation). Les agriculteurs se retrouvent en concurrence lors de la réponse aux appels d’offres avec des « bâtiments » qui peuvent être de simples hangars et n’ont pas à supporter ces surcoûts spécifiques.

De même, l’installation de panneaux photovoltaïques sur les toitures de serres impose des contraintes phytotechniques, afin de permettre la croissance des plantes sous la serre. L’opacité des panneaux est une contrainte forte, et les investissements dans des panneaux semi-transparents et/ou pilotables induisent des surcoûts spécifiques.

Prix de lélectricité photovoltaïque dans les appels doffres de la CRE

Source : CRE.

 

Lorsque l’agriculteur produit directement des EnR avec revente dénergie PV, il perçoit les revenus tirés de la production dénergie. Cette situation est profitable à l’agriculteur, la production d’énergie renouvelable étant soutenue dans des conditions permettant sa rentabilité. De même, lorsque l’agriculteur produit des EnR en autoconsommation, il peut réduire sa facture énergétique en conséquence. Cette situation est profitable à l’agriculteur lorsqu’il existe un dispositif de soutien à l’autoconsommation.

Lorsque l’agriculteur nest pas lui-même le producteur dénergie, ou n’est pas au capital de l’installation de production d’énergie (exemples : bail emphytéotique pour l’implantation de bâtiments avec toiture solaire photovoltaïque ou simple apport d’intrants pour un méthaniseur extérieur à l’exploitation), il ne touche aucun revenu direct de la vente dénergie. Sa rémunération dépend donc des contrats (de droit privé) passés avec l’énergéticien et/ou le développeur et/ou le propriétaire de l’installation.

Les schémas suivants présentent les deux cas de figure : production PV par un agriculteur et production PV par un développeur.

 

Source : OPECST.

 

Source : OPECST.

 

d)  Les problèmes dacceptabilité sociale

Le sondage de l’Ademe « Les Français et l’environnement » précité, montre que 60 % des Français plaident pour le développement de l’énergie solaire et que 90 % des Français accepteraient qu’une centrale photovoltaïque soit installée à moins d’un kilomètre de leur domicile. L’énergie photovoltaïque est donc particulièrement bien acceptée.

5.  Les autres sources dénergie dans le secteur agricole

a)  Lénergie hydraulique et lhydroélectricité

L’énergie hydraulique est lénergie fournie par le mouvement de leau, sous toutes ses formes : cours d’eau, chutes d’eau, marées... Ce n’est qu’au 19e siècle que l’énergie mécanique rotative des roues à eau ou des turbines est transformée en énergie électrique avec lhydroélectricité.

Deuxième source de production délectricité en France, après l’énergie nucléaire, l’hydroélectricité est donc la première source d’énergie renouvelable. La construction de nouvelles installations hydroélectriques d’envergure est délicate car de nombreux sites pertinents ont été pourvus en barrages, en raison également de contraintes géographiques et parce que des cours d’eau sont protégés par des obligations réglementaires.

Dans le secteur agricole, il s’agit essentiellement de petites installations hydroélectriques établies sur les cours deau qui traversent les terres d’une exploitation, on parle alors de « petite hydroélectricité ».

b)  La géothermie

La géothermie est une énergie emmagasinée sous forme de chaleur sous la surface de la terre solide. Il existe différents types de géothermie avec deux grands domaines : la production de chaleur et/ou la production de froid, et la production d’électricité. On distingue - pour un usage exclusivement thermique - la géothermie très basse énergie de la géothermie basse énergie[82]. Pour la production d’électricité, trois techniques cohabitent : la géothermie haute énergie, la géothermie moyenne énergie et la géothermie profonde[83].

Les pompes à chaleur (PAC) permettent pour 1 kWh d’énergie consommée d’en restituer de 2 à 4,5 sous forme de chaleur selon la source utilisée (air, sol superficiel, roche profonde) et la performance de la pompe à chaleur.

Les récupérateurs de chaleur (RC), qui ne sont pas à proprement parler de la géothermie mais un procédé améliorant l’efficacité énergétique, permettent de récupérer la chaleur générée par un process (comme le refroidissement du lait) pour la transférer à un autre (par exemple de l’eau) par l’intermédiaire d’un processus passif (simple contact entre produit émetteur et produit récepteur). La géothermie utilisée en agriculture repose sur les principes des pompes à chaleur et des récupérateurs de chaleur.

c)  Les questions dacceptabilité sociale

L’impact environnemental est discuté comme il sera vu plus loin et lacceptabilité sociale de la géothermie reste donc incertaine dans l’avenir.

D.  Les perspectives technologiques des énergies renouvelables dans les terres agricoles

Le secteur des énergies renouvelables fait l’objet de nombreuses recherches, et présente donc des innovations technologiques dans la plupart des filières énergétiques que compte le secteur agricole.

Pour un point général sur la recherche en matière d’énergies renouvelables, un rapport récent de l’Office[84] préconise de concentrer les investissements sur quelques technologies choisies et maîtrisées, en se positionnant sur des marchés mondiaux stratégiques et en prenant en compte le retour dexpérience des filières des batteries et des panneaux solaires.

1.  Lenjeu du stockage de lénergie, décisif pour les sources dénergie intermittentes

Le stockage de lénergie et en particulier de lélectricité est à développer compte-tenu de l’essor nécessaire des énergies renouvelables, dont certaines souffrent du défaut d’être intermittentes (éolien et solaire). La question dépasse le monde agricole. La seule gestion « intelligente » de lénergie par l’association entre sources de production variables, sources de base (nucléaire), et sources d’appoint (hydraulique, centrales thermiques) ne sera pas suffisante dans le cas d’un taux d’insertion élevé d’énergies renouvelables, bien que souhaitable (idée de smart grids). De même, le foisonnement, c’est-à-dire la répartition des installations sur le territoire dans des zones climatiques différentes, est souhaitable mais pas suffisant non plus. Dans tous les cas, le développement de ces sources d’énergie demandera une adaptation des réseaux de distribution.

 

Lélectricité, par elle-même, ne se stockant pas, il est nécessaire de la transformer sous forme d’énergie de nature chimique, électrochimique ou mécanique. D’après Christophe Gégout, président de l’Alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie (Ancre), « il va nous falloir développer des innovations de rupture en matière de stockage de lélectricité pour accompagner la montée en puissance des énergies renouvelables ». Notre collègue Angèle Préville, sénatrice, a consacré une note de l’Office à ce sujet[85].

Il faut toujours distinguer les problématiques de stockage de lélectricité de celles de stockage de la chaleur, cette dernière ayant un grand avenir face au défi de l’inter-saisonnier, qui va devenir de plus en plus crucial.

Différents modes de stockage existent, parmi lesquels les STEP[86], les batteries[87], lair comprimé[88] et lhydrogène. Les technologies « power to gas » permettent de stocker l’électricité sous forme de gaz : il s’agit de produire, par électrolyse de l’eau (la molécule d’eau est cassée sous l’action de l’énergie électrique avec l’aide de métaux rares comme le platine), du dihydrogène ‑ ou H2 plus petite molécule existante plus communément appelée hydrogène ‑ pouvant être stocké (ce qui peut poser des problèmes de sécurité), transporté, et ensuite utilisé dans différents usages : mobilité, hydrogène, ou production d’électricité par l’intermédiaire de piles à combustibles (PAC).

L’hydrogène pourrait aussi être utilisé comme un carburant propre pour les voitures sans émission de polluants, ni de CO2, puisqu’il se transforme au contact de l’oxygène simplement en électricité et en eau : c’est la mobilité hydrogène.

Il peut être relevé que l’Académie des technologies a rendu public en juillet 2020 un rapport sur l’hydrogène et qu’en 2014, l’Ademe, GRDF et GRTgaz avait produit une étude sur l’hydrogène et la méthanation comme procédé de valorisation de l’électricité excédentaire[89].

Mélangé au CO2 issu d’activités industrielles (ce qui permet de valoriser du CO2), dans le processus de méthanation, procédé utilisé par Berthelot dès 1869, il se transforme en méthane de synthèse ou « syngas »[90] qui peut être injecté dans le réseau de gaz. La méthanation est en effet un processus de production de méthane de synthèse (CH4) à partir de dihydrogène (H2) et de monoxyde de carbone (CO) ou de dioxyde de carbone (CO2) en présence d’un catalyseur, cette conversion catalytique étant appelée « réaction de Sabatier ». Il s’agit d’un outil de valorisation de l’électricité excédentaire[91] qui est à développer. GRTgaz a installé à Fos‑sur‑Mer (Bouches-du-Rhône) le démonstrateur Jupiter 1 000 qui utilise l’électrolyseur McPhy a commencé à injecter sa production d’hydrogène dans le réseau de gaz le 20 février 2020 et devrait injecter de manière imminente du méthane de synthèse grâce à des technologies de capture de CO2 élaborées par Leroux & Lotz Technologies et au réacteur de méthanation d’Atmosta. Dans le futur, les progrès des catalyseurs nécessaires à la méthanation devraient permettre une production de méthane optimisée et à plus grande échelle.

Dautres technologies de stockage de lénergie sont encore à létat de simples pistes : supercondensateurs, turbomachines, piles à combustible à oxyde solide (« Solid Oxide Fuel Cell ») qui permet de consommer une grande variété de combustibles contenant un mix d’hydrogène et de carbone (gaz naturel, gaz de houille, biogaz…), batteries rechargeables à flux (« Redox Flow »), vaporeformage[92]

2.  Le couplage de la méthanation avec la méthanisation

La méthanation, processus de production de méthane de synthèse à partir de dihydrogène et de monoxyde de carbone ou de dioxyde de carbone en présence soit d’un catalyseur (méthanation catalytique) soit de microorganismes (méthanation biologique), est un outil de conversion de lélectricité en cours de développement. Dès lors qu’on vise à produire du biogaz, il est pertinent de coupler la méthanisation avec la méthanation afin de valoriser le CO2 issu de la méthanisation et de stocker de lénergie (un méthaniseur produit de l’ordre de 50 % de biogaz et 50 % de CO2).

Des pistes innovantes existent dans plusieurs pays et la France n’est pas en retard, comme en témoigne le cas de MéthyCentre, premier démonstrateur « power to gas », couplé à de la méthanation, implanté sur notre sol[93], en cours de construction par Storengy (filiale d’Engie) dans un projet auquel participe le CEA-Liten et qui est soutenu par l’Ademe via les investissements d’avenir et la région Centre-Val de Loire réunissant plusieurs partenaires industriels, technologiques, agricoles et publics[94].

Le projet MéthyCentre a pour objectif de démontrer la faisabilité technique et économique de la méthanation qui permet d’obtenir du gaz d’origine renouvelable, substituable au gaz d’origine fossile. Il s’agit de coupler une unité de méthanisation à une installation de méthanation. Le procédé de méthanisation produit un biogaz, composé environ à 50 % de méthane, et 50 % de dioxyde de carbone. Ce dioxyde de carbone peut à nouveau être valorisé en étant injecté avec de l’hydrogène dans un réacteur de méthanation qui réalise la synthèse catalytique du méthane[95].

Grâce à l’utilisation combinée de la méthanisation et de la méthanation (power to gas), MéthyCentre mettra à disposition des consommateurs du méthane renouvelable (gaz naturel) et de l’hydrogène à partir de 2021. Les matières organiques valorisées par méthanisation proviendront d’exploitations agricoles situées autour du site, en Indre-et-Loire et en Loir-et-Cher. Le méthane produit sera injecté dans le réseau de gaz local pour répondre aux besoins domestiques (chauffage, eau chaude sanitaire, cuisson) et industriels (chaleur, chimie) ainsi que les besoins en carburant des transports. L’hydrogène sera proposé pour les véhicules ou livré en bonbonnes.

 

Le couplage méthanisation-méthanation

Source : Storengy.

3.  Lamélioration de la performance par lusage du numérique et dautres nouvelles technologies comme lintelligence artificielle dans lagrivoltaïsme

Les progrès autour de lagrivoltaïsme sont un exemple probant des innovations technologiques qui entourent la production d’énergie dans le secteur agricole. En réalisant une co-production de deux activités sur le même sol, à savoir une production énergétique et une production alimentaire, l’agrivoltaïsme est une innovation en soi. Les panneaux solaires, positionnés en hauteur, apportent une protection aux cultures agricoles tout en produisant de l’énergie verte. Cela crée une synergie entre la production agricole et la production électrique.

Ces panneaux photovoltaïques, à l’inverse des panneaux sur toiture, sont le plus souvent dynamiques et mobiles à plus ou moins 90° : en position d’ombrage maximum, les plantes sont protégées d’un excès de soleil. Les panneaux peuvent également s’effacer afin d’apporter un ensoleillement maximum, ou se positionner à l’horizontale pour préserver la température au sol. Ils peuvent avoir un recours important au numérique et à d’autres nouvelles technologies comme lintelligence artificielle.

La filiale de Sun’R nommée Sun’Agri développe ainsi des projets agrivoltaïques avec des panneaux photovoltaïques intelligents. Un algorithme permet d’orienter les panneaux afin d’optimiser dynamiquement la croissance de la plante par photosynthèse. Plusieurs modèles existent : des modèles agronomiques permettant de décrire l’assimilation photosynthétique des plantes sous ombrage fluctuant, des modèles de comportement hydrique, des prévisions météorologiques, et des modèles d’optimisation du positionnement des panneaux permettant de calculer la trajectoire optimale des panneaux au cours de l’heure et de la journée[96]. Ces structures sont dotées de trackers, permettant l’inclinaison intelligente des panneaux afin de laisser passer un maximum de lumière disponible à la culture en période de photosynthèse. Le cas de l’entreprise Ombrea peut aussi être cité.

4.  Dautres démarches innovantes

Depuis dix ans, des recherches sont engagées sur la récupération et la valorisation de la chaleur fatale[97] produite par les panneaux photovoltaïques, ce qui constitue un usage méconnu de ces panneaux[98]. L’entreprise Base Innovation s’est ainsi spécialisée sur ce créneau à destination du marché du séchage, qui concerne surtout le fourrage pour les agriculteurs, mais aussi le séchage du bois ou de boues de stations d’épuration.

D’autres innovations, encore à l’étude, entourent la production d’énergie dans le secteur agricole, à l’image du couplage déoliennes et de panneaux photovoltaïques afin de pallier l’intermittence de ces énergies qui pourraient vraisemblablement être complémentaires, ou de linstallation dun électrolyseur à la base dun système photovoltaïque ou dune éolienne, qui est l’une des pistes récentes d’innovations technologiques au stade amont.

La méthanisation fait aussi l’objet d’innovations technologiques autre que la méthanation : le projet Trackyleaks a ainsi développé une méthode de détection et de quantification par caméra infrarouge des fuites de méthane des digesteurs, dans le but de conforter la pertinence environnementale des unités de méthanisation. L’Ademe estime que l’automatisation des torchères, se déclenchant en amont des soupapes de sécurité, apparaît comme une perspective réaliste d’innovation technologique pour optimiser l’impact environnemental de la méthanisation et pourrait faire l’objet d’une étude technico-économique.

L’identification de nouvelles sources dénergie ou de nouveaux modes de conversion de lénergie pourra peut-être faire partie des futures innovations.

 


IV.  Des impacts environnementaux inégaux et des rendements contrastés

A.  Les Bilans environnementaux

Au niveau mondial, toutes activités confondues, l’agriculture représentait 13,5 % des émissions de CO2 en 2017 selon le GIEC. En France, la contribution du secteur agriculture-forêt aux émissions de GES est significative avec environ 20 % des émissions nationales[99]. Ce secteur est très carboné du fait d’une consommation élevée d’énergie primaire fossile, de l’utilisation massive d’engrais azoté issu de l’industrie pétrochimique et de l’élevage. La question avait justifié en 2012 le lancement du plan « Énergie Méthanisation Autonomie Azote » (EMAA) ayant pour objet la production de biogaz et la réduction de la consommation d’engrais azotés par l’utilisation du digestat et du lixiviat comme amendements agricoles (l’intégralité de l’azote qui rentre dans un méthaniseur en ressort dans le digestat).

Selon le rapport du Haut Conseil pour le climat de 2019, le secteur de l’agriculture aurait vu en 2018 sa part des émissions de GES sétablir à 19 %. Les émissions de ce secteur proviennent de l’élevage (48 %), des cultures (41 %), ainsi que des tracteurs, engins et chaudières agricoles (11 %). Les émissions de l’agriculture sont avant tout liées à des processus biologiques. Il s’agit de CH4 (45 % des émissions de GES de l’agriculture en CO2e) émis par la fermentation entérique des ruminants et pour une moindre part par les déjections animales et leur gestion. Il s’agit également de N2O (43 % des émissions en CO2e) principalement émis par les sols agricoles après fertilisation azotée minérale ou organique. Les émissions restantes correspondent à du CO2 (12 % des émissions) provenant de la consommation d’énergie (produits pétroliers et gaz naturel) des tracteurs et engins utilisés sur les exploitations agricoles, ainsi que des chaudières pour le chauffage des serres agricoles.

Dans le monde, selon le GIEC (rapport sur les terres de 2019), les émissions liées aux activités agricoles, forestières et autres activités liées à l’usage des terres (AFOLU) ont représenté environ 23 % du total net des émissions anthropiques de GES.

1.  Généralités sur les taux démission de GES et les analyses ACV

Pour identifier et quantifier l’impact environnemental des énergies renouvelables, il faut évaluer les taux d’émission de gaz à effet de serre (GES) lors de la production d’énergie et par exemple d’électricité. Selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), « lanalyse du cycle de vie (ACV) est loutil le plus abouti en matière dévaluation globale et multicritère des impacts environnementaux »[100]. Ainsi, ce ne sont pas seulement les émissions de GES lors de la production d’électricité qui sont quantifiées, mais toutes les étapes du cycle de vie dun produit, de l’extraction et du traitement des matières premières, des processus de fabrication, du transport et de la distribution, de l’utilisation et de la réutilisation du produit fini et, finalement, du recyclage et de la gestion des déchets en fin de vie.

Une méthodologie complexe, que les professionnels semblent unanimement juger difficile à mettre en œuvre, a été établie depuis 1997 par une série de normes internationales[101], qui ont fixé les principes généraux et les bases méthodologiques et déontologiques exigées pour la réalisation des évaluations ACV, favorisant une harmonisation de la méthodologie employée, une meilleure robustesse et fiabilité des résultats, ainsi qu’une communication plus formalisée[102].

L’ACV facilite les comparaisons entre systèmes par la quantification des contributions aux impacts environnementaux de chaque système par étape de cycle de vie ou par sous-système (composants, matériaux utilisés, procédés…), afin de dégager des pistes d’amélioration du bilan environnemental du système considéré. Il s’agit à la fois d’une procédure, c’est-à-dire d’une suite d’étapes standardisées, et d’un modèle mathématique de transformations permettant de faire correspondre des flux à leurs impacts environnementaux.

Le schéma ci-après sur l’impact environnemental des énergies renouvelables utilise l’approche ACV et témoigne de l’importance de lamont et de laval dans les étapes du cycle de vie d’un produit ou d’une énergie.

 

Lapproche ACV de limpact environnemental des EnR

Source : Ademe[103].

 

En suivant cette méthodologie, une énergie renouvelable peut avoir un impact carbone nul dans son processus de production d’électricité, mais engendrer des effets négatifs sur lenvironnement en amont ou en aval. Par exemple, l’installation de l’énergie éolienne nécessite des terres rares, dont la Chine concentre 86 % de la production mondiale, par exemple du néodyme, principalement extrait en Chine. Selon l’Ademe, seule une faible part des éoliennes terrestres en utilise en France, environ 3 % pour les éoliennes utilisant des générateurs « à aimants permanents » qui concentrent la totalité des terres rares de la filière. Il est du reste possible de substituer au néodyme d’autres solutions, comme les génératrices asynchrones ou les génératrices synchrones sans aimant permanent, qui sont des génératrices transformant l’énergie mécanique en énergie électrique en étant entraînées au-delà de la vitesse de synchronisme. Le solaire photovoltaïque, quant à lui, utilise des métaux critiques, tels l’indium ou encore l’argent, qui ne sont pas des terres rares, et ne sont utilisés que dans une faible part des technologies solaires photovoltaïques, la majorité (80 % à 90 %) recourant au silicium.

Enfin, toute installation de production d’électricité d’origine renouvelable ayant besoin de transport dans sa fabrication, les énergies renouvelables ont toutes un impact environnemental en termes d’émissions de GES et d’empreinte carbone. À ce titre, et afin d’atteindre les objectifs de zéro émission carbone d’ici à 2050, il est pertinent de comparer les énergies renouvelables entre elles afin de déterminer l’impact environnemental relatif des technologies actuelles.

2.  Présentation par source dénergie

a)  Méthanisation et biogaz

Selon l’Ademe[104], la filière biogaz émet en moyenne 11 g CO2 eq/kWh. La filière biogaz émet des émissions directes de gaz à effet de serre à plusieurs égards, notamment lors du stockage des déchets solides organiques, ou lors de fuites de biogaz, qui est composé de CO2 et de CH4. Ce dernier gaz a un potentiel de réchauffement global 25 fois plus élevé que le dioxyde de carbone. De plus, la méthanisation, dans l’ensemble de son cycle de vie[105], émet des gaz à effet de serre dans le fonctionnement même de son dispositif, à savoir les transports, l’énergie utilisée sur le site, la construction du digesteur et sa maintenance. En outre, l’épandage du digestat traité, parce qu’il génère des émissions d’ammoniac et un lessivage de nitrates, est responsable d’eutrophisation et d’acidification.

Il faut aussi tenir compte de fuites de gaz à effet de serre dans le processus de méthanisation lui-même. En effet, la méthanisation, comprise comme dégradation de matières organiques par des bactéries anaérobies, conduit à la production de biogaz, composé de plusieurs gaz à effet de serre[106] :

- de 50 % à 70 % de méthane (CH4) ;

- de 20 % à 50 % de gaz carbonique (CO2) ;

- de quelques traces de protoxyde d’azote (N2O).

Le stockage des effluents d’élevage, qui n’est pas l’unique source de rejet direct de gaz à effet de serre (GES), s’accompagne d’un rejet direct vers l’atmosphère de ces GES ; en l’occurrence, le CH4 représente 13,7 millions de TgCO2e en 2010, soit 13 % des émissions totales du secteur agricole français[107], le CH4 représentant 45 % des émissions de GES de l’agriculture en CO2e. La réduction des durées de stockage liées à la méthanisation permet alors de réduire ces émissions. Toutefois, des fuites subsistent, notamment dues au manque ou aux problèmes d’étanchéité des équipements de méthanisation. Le gain environnemental de la méthanisation peut donc être mis à défaut si le manque de rigueur dans les étapes de stockage du biogaz conduit à observer des émissions atmosphériques. En 2006, le GIEC a estimé ces fuites entre 0 et 10 %, et préconise une valeur par défaut de 5 % en l’absence de données spécifiques. La durée de vie du méthane dans l’atmosphère est bien inférieure à celle du gaz carbonique, à savoir en moyenne 12 ans contre 100 ans[108]. A l’inverse, le pouvoir de réchauffement global (PRG) du CH4 est 25 fois supérieur au CO2.

L’Ademe a développé le projet Trackyleaks permettant la visualisation des fuites de biogaz et, en particulier, des émissions de méthane par caméra infrarouge dans le but de conforter la pertinence environnementale des unités de méthanisation.

Il existe ainsi de nouveaux enjeux technologiques à relever, comme une meilleure conception des méthaniseurs ou lautomatisation de torchères en amont des soupapes de sécurité, qui apparaît, selon l’Ademe, comme une solution pour optimiser l’impact environnemental de la méthanisation.

b)  Biocarburants

Lévaluation du bilan énergétique et environnemental des biocarburants est complexe. En effet, l’ACV peut se réaliser « du puits au réservoir », dans laquelle l’unité de mesure utilisée est le g CO2 eq/kWh, ou elle peut être réalisée « du puits à la roue », dans laquelle l’unité de mesure utilisée peut être le g CO2 eq/kWh, à l’instar de ce que fait l’Ademe, ou encore le g CO2/km, à l’instar des pratiques de General Motors ou Concawe. Enfin, les biocarburants n’ont pas strictement la même empreinte carbone selon les ressources utilisées (blé, betterave, colza, tournesol…), et les émissions de GES peuvent aller du simple au double selon la matière première utilisée.

Les biocarburants de première génération sont produits à partir de produits agricoles alimentaires et présentent donc les externalités environnementales négatives associées à ces cultures (impacts de l’utilisation de pesticides ou d’engrais chimiques par exemple).

L’Ademe « souligne également limpact des changements daffectations des sols, qui peut être discriminant. Ainsi, lorsque le développement de cultures utilisées pour la production de biocarburants aboutit, directement ou indirectement, à la disparition des prairies, de zones humides ou de forêts primaires, le bilan des émissions de GES des biocarburants peut salourdir jusquà devenir négatif par rapport aux carburants fossiles »[109].

Le tableau ci-dessous publié par l’Ademe[110] compare les émissions de GES de divers carburants en fonction de leur matière première, et de l’organisme d’évaluation :

 

Toutefois, l’Ademe considère que, compte-tenu de la différence de méthodologie dans la comptabilisation du cycle du carbone, les comparaisons ne peuvent être faites qu’entre les émissions de GES à l’étape de la combustion, en considérant l’étape de combustion totale. Les données des biocarburants évoluent faiblement après combustion, tandis que les carburants classiques voient leurs émissions de CO2 exploser, comme l’illustre le tableau suivant :

 

 

Les valeurs en g CO2/MJ seront précisées en g CO2/kWh dans la synthèse figurant à la fin de la présente partie, à titre de comparaison avec les autres énergies renouvelables.

c)  Lénergie éolienne

L’Ademe a réalisé en 2015 un dossier portant sur les « impacts environnementaux de l’éolien français »[111]. Celui-ci met en exergue les différentes étapes du cycle de vie d’une installation éolienne (fabrication des composants du système, installation du système, utilisation, maintenance, et désinstallation du système), afin d’évaluer leur impact sur l’environnement, en termes d’acidification du sol ou de l’eau, de l’utilisation de ces derniers, et d’émissions de dioxyde de carbone (CO2).

S’agissant de l’éolien terrestre, l’Ademe s’est appuyée sur les données récoltées auprès de 3 658 éoliennes, ayant une capacité totale de 7 111 MW, soit 87,2 % du parc éolien effectif en 2013. Les résultats de l’analyse du cycle de vie (ACV) montrent un taux d’émission faible par rapport au mix énergétique français : 12,7 g CO2 eq/kWh pour le parc français, contre en moyenne 79 g CO2/kWh pour le mix français de 2011.

Concernant les autres impacts sur l’environnement de l’éolien, l’Ademe les a résumés avec le graphique suivant.

 

Les impacts sur lenvironnement de léolien, hors GES

Source : Ademe.

 

Ainsi, l’éolien, faible consommateur en eau et peu impactant en termes d’acidification, engendre une large artificialisation des sols : l’Ademe suppose qu’en moyenne le sol ne retrouvera pas ses fonctions avant 40 ans.

L’ACV permet de montrer les étapes les plus impactantes. En l’occurrence, la fabrication des composants, demandeuse en ressources fossiles, est l’étape ayant le plus d’impacts environnementaux durant la vie d’une installation éolienne, comme le montre le graphique suivant de l’Ademe.

 

Les impacts sur lenvironnement de léolien selon une ACV

Source : Ademe.

 

Toutefois, le recyclage réalisé après le démantèlement des installations permet de réduire cet impact.

L’impact sur l’environnement de l’éolien maritime est largement similaire à celui engendré par l’éolien terrestre dans le détail de son ACV, avec toutefois des émissions de carbone de l’ordre de 14,8 g CO2 eq/kWh, contre 12,7 g CO2 eq/kWh pour l’éolien terrestre.

Enfin, le taux de retour énergétique en ACV, c’est-à-dire le temps qu’il a fallu à l’installation pour produire la quantité d’énergie qu’elle a consommée dans son cycle de vie, montre que l’énergie éolienne est plutôt efficiente : ce taux de retour correspond à 12 mois pour les installations terrestres et 14 mois pour les maritimes.

Par ailleurs, les effets de la présence de parcs éoliens sur la faune, y compris sur les élevages, sont d’une ampleur débattue.

 


Les risques de léolien pour lélevage selon le GPSE

Le Groupe permanent pour la sécurité électrique en milieu agricole (GPSE) propose une démarche d’analyse qui s’appuie sur des expertises sur la sécurité électrique et sur les phénomènes parasites dans les exploitations agricoles[112]. à la lumière des connaissances scientifiques, il s’intéresse aux problématiques zootechniques, vétérinaires et électriques, ce qui lui a permis d’indiquer dans son dossier « Courants parasites en élevage » que les courants parasites « peuvent provoquer de linconfort qui, dans certains cas, est cause de stress (...) et peut amoindrir leur résistance aux maladies »[113]. De plus, le GPSE relève que la perception de phénomènes électriques chez les animaux ne signifie pas systématiquement une perturbation de la santé ou une altération de la production, même si elle est révélatrice de l’existence d’un dysfonctionnement de nature électrique. Concernant plus particulièrement la présence de parcs éoliens à proximité des élevages, un compte-rendu établi par l’Agence Tact en janvier 2017 dans le cadre d’un groupe de travail pour à la mairie de Jans fait référence à une expertise approfondie de 18 mois du GPSE qui n’établit aucun lien entre les troubles constatés sur les exploitations de la commune de Jans et la présence d’un parc éolien[114].

Toutefois, une autre expertise du GPSE fait état d’audits contredisant cet avis. Suite à l’installation de parcs éoliens en Loire-Atlantique en 2012, des audits vétérinaires et zootechniques montrent une augmentation de l’incidence des mammites et une dégradation de la qualité du lait. Les mêmes audits ont démontré une perte de production, un retard de croissance des jeunes bovins, et de nombreux troubles du comportement animal. La conclusion de l’avis indique que « lensemble des résultats obtenus confirme la concomitance de linstallation et de la mise en service des éoliennes avec laltération des performances et les troubles du comportement des animaux dans les deux élevages analysés »[115]. Une question orale de notre collègue sénateur Christophe Priou fait référence à cette expertise : « un relevé de conclusions, suite à un audit conduit dans le cadre du GPSE en coordination avec la chambre dagriculture de la Loire-Atlantique, fait apparaître une corrélation entre les anomalies relevées par le robot de traite et la production du site éolien »[116].

Source : OPECST.

 

Notre collègue député Yves Daniel avait interpelé le Gouvernement en 2014 à propos des ondes émises par les éoliennes [117] : « [il] attire lattention de Mme la ministre de lécologie, du développement durable et de lénergie sur les éventuelles nuisances environnementales et sanitaires des ondes émises par les éoliennes. La protection de lenvironnement et de la santé publique est lun des objectifs majeurs du projet de loi de transition énergétique pour une croissance verte. Or il semblerait que, dans certains cas, les ondes émises par les éoliennes et véhiculées par le sol, notamment via les nappes phréatiques, interfèrent sur la santé des troupeaux des élevages agricoles et, plus grave encore, sur celle des habitants. Ainsi, dans sa circonscription, plusieurs agriculteurs installés à proximité dun champ déoliennes perdent des bêtes, voient la production de lait de ces dernières diminuer et sont confrontés à des vêlages difficiles. Leur activité agricole sen trouve fortement impactée : ils subissent des pertes importantes, tant au niveau financier quau niveau de leurs animaux, pertes qui ne sont pas prises en charge par les constructeurs de parcs éoliens, bien que la loi les y oblige. En outre, plusieurs habitants ont vu survenir diverses affections de santé depuis la mise en service de ce parc éolien ». Dans sa réponse, le Gouvernement a rappelé que les éoliennes pouvaient émettre des ondes électromagnétiques mais que les mesures réalisées sont inférieures à la limite réglementaire. Il a invité à mobiliser davantage le GPSE afin d’identifier et de diagnostiquer les problèmes pathologiques des animaux d’élevage.

L’ANSES a consacré une étude aux effets des infrasons[118], qui relève que les connaissances actuelles en matière d’effets potentiels sur la santé liés à l’exposition aux infrasons ne justifient ni de modifier les valeurs limites d’exposition au bruit existantes, ni d’introduire de limites spécifiques aux infrasons et basses fréquences sonores.

Une analyse de la littérature scientifique[119] montre que la filière éolienne terrestre génère des mortalités significatives chez les oiseaux et les chauves-souris (par collisions mais aussi par barotraumatisme), notamment chez les espèces migratrices, dont on ne mesure pas encore les conséquences sur le fonctionnement de ces populations, en particulier sur des populations déjà affaiblies par ailleurs (cas des grands migrateurs), mais aussi des effets en cascade sur les autres espèces.

d)  Lénergie photovoltaïque

L’énergie photovoltaïque, à l’inverse de l’éolien, dispose de chiffres moins précis au sujet de son impact environnemental. Le photovoltaïque n’a pas fait l’objet d’une étude approfondie sur son impact environnemental par l’Ademe.

Selon le CEA, le photovoltaïque a bénéficié de progrès techniques importants ces dernières années du point de vue de son impact environnemental et ce du fait d’économies de matières et de procédés industriels moins énergivores, surtout concernant la fabrication de wafers de silicium, et également en raison de l’augmentation du rendement de conversion des modules PV. Ainsi, une diminution du contenu carbone de lélectricité PV de plus de 40 % a été réalisée en dix ans.

En 2013, l’Ademe estimait qu’un système photovoltaïque (PV) émet, sur l’ensemble de sa durée de vie, 20 à 80 g CO2 eq/kWh[120]. Ce chiffre est variable selon le type de système et l’ensoleillement du site, mais s’approche donc parfois des émissions moyennes du mix électrique français qui, cette année-là, étaient de 86 g CO2 eq/kWh.

En outre, l’utilisation pendant la fabrication de procédés et de matériaux générant moins de CO2, et le recyclage des déchets de fabrication permettent de réduire l’empreinte carbone des nouveaux systèmes photovoltaïques.

Le cabinet de consultants spécialisé en ACV des systèmes photovoltaïques, SmartGreenScans, a publié en 2014 une étude comparant les émissions de carbone des installations PV de plusieurs pays européens en utilisant la méthode de lACV, confirmant partiellement la précédente étude de l’Ademe. Tout d’abord, l’empreinte carbone moyenne des systèmes PV est estimée à 55 g CO2 eq/kWh au niveau mondial[121]. Ces experts expliquent néanmoins certains écarts importants : Chypre, grâce à son ensoleillement, est le pays dont l’empreinte carbone des systèmes PV est la plus basse avec 38 g CO2 eq/kWh, tandis que l’Islande bat les records européens avec une empreinte carbone s’élevant à 89 g CO2 eq/kWh, notamment du fait de son faible ensoleillement.

La France, quant à elle, se situe dans la moyenne mondiale, avec une empreinte carbone des systèmes PV à hauteur de 56 g CO2 eq/kWh, selon la même étude. Dans les régions fortement ensoleillées, l’empreinte carbone est amoindrie. Ainsi, la Corse, avec un rayonnement solaire à hauteur de 1 846 kWh/m2/an soit le plus élevé en France métropolitaine, est la région dont l’empreinte carbone des systèmes photovoltaïques est la plus basse, avec 46 g CO2eq/kWh.

Certains procédés de fabrication font actuellement l’objet de recherches afin de réduire le bilan carbone des systèmes PV, notamment lors de létape de purification du silicium, ainsi que lors des étapes qui requièrent lutilisation de gaz et de produits chimiques pour la fabrication des cellules photovoltaïques, générant un certain nombre de déchets.

 

Limpact environnemental du photovoltaïque en France ne se réduit pas à son empreinte carbone, déjà plus élevée que l’éolien. En effet, l’Ademe estime que les centrales photovoltaïques au sol nécessitent une grande surface, ce qui peut entraîner un conflit dusage avec des terres agricoles ou forestières. Elle précise notamment que « le déboisement dune forêt, lieu de stockage du CO2, pour un projet de centrale solaire au sol pourra avoir un impact négatif en termes de bilan carbone »[122]. Il convient de souligner que si les capacités de production du photovoltaïque sont intégrées au bâti (hangars agricoles, serres…), il ny aucun conflit dusage : aussi, c’est ce type de solutions qu’il conviendra de développer. D’ailleurs la PPE prévoit qu’un tiers des installations annuelles (en puissance installée) le soit sur bâtiments. Lagrivoltaïque dynamique ouvre une voie très prometteuse en conciliant production agricole et production d’énergie renouvelable.

Enfin, le taux de retour énergétique d’un système PV se situe entre un et trois ans d’exploitation selon la technologie de module et sa région d’installation, rendant donc cette énergie renouvelable moins efficiente que l’éolien.

e)  Lhydroélectricité

Il existe peu détudes concernant lanalyse du cycle de vie de la filière hydroélectrique, ou en tous cas peu détaillées. Dans son avis publié en 2017 sur les énergies renouvelables, l’Ademe estime que la filière hydraulique émet 4 g CO2 eq/kWh, ce qui fait d’elle lénergie la moins carbonée durant lensemble de son cycle de vie[123].

f)  La géothermie

La remarque formulée pour le biogaz, les biocarburants et l’hydroélectricité se confirme aussi pour la géothermie : l’Ademe a publié en 2014 son étude « Base Carbone », détaillant avec précision les émissions de GES des filières éoliennes et photovoltaïques, sans réaliser d’études aussi approfondies pour les autres énergies renouvelables.

Ainsi, en 2014, l’Ademe fait état d’une émission de 38 g CO2 eq/kWh pour la filière géothermique française[124].

Pour certains, qui s’apparentent à des soutiens à la géothermie, cette dernière n’aurait que des impacts positifs. Cependant, pour d’autres (des collectivités locales, des associations de défense de l’environnement, etc.) elle aurait des impacts négatifs sur lenvironnement : le dégagement de vapeur de soufre (notamment de sulfure d’hydrogène), l’utilisation éventuelle de fréon pour certaines pompes à chaleur ou, encore, un forage parfois profond, qui peut nécessiter des fracturations de la roche, des injections de produits chimiques, et la mise en réseau de nappes différentes. De plus, selon Consoglobe, il ne s’agirait pas d’une « énergie 100 % renouvelable », dans la mesure où la géothermie nécessite un générateur, donc de l’électricité dont la provenance n’est pas forcément renouvelable. France Nature Environnement et le CLER dénoncent par ailleurs la faible rentabilité énergétique des systèmes géothermiques, pour des coûts économiques et environnementaux élevés.

3.  Comparaison synthétique

Les chiffres cités plus haut sont amenés à évoluer dans le temps, parfois géographiquement comme le montre le photovoltaïque, selon les études, ou encore selon les méthodes utilisées. Cette synthèse a pour vocation de présenter ces valeurs comme des ordres de grandeur, afin d’établir une hiérarchie des énergies les moins carbonées selon plusieurs études ACV, comme le montre le graphique de l’Ademe[125] :

 

 

Comparaison des émissions de GES des sources dénergie en ACV

Source : Ademe.

 

 

 

Le tableau ci-après construit par l’Office établit une hiérarchie des sources d’énergie pour leurs émissions de GES, des plus vertueuses aux moins vertueuses, en tenant compte des biocarburants et du biogaz, ce qui n’était pas le cas dans le graphique précédent de l’Ademe.

 

Classement des sources dénergie selon leurs émissions de GES en ACV

Énergies

Émissions de GES

(en g CO2 eq/kWh)

Hydroélectricité

4

Biogaz

11

Éolien terrestre

12,7

Éolien maritime

14,8

Géothermie

38 - 45

Photovoltaïque

48 - 55

Biodiesel (tournesol)

72

Biodiesel (colza)

86,4

Bioéthanol (blé/betterave)

122,4

Source : OPECST daprès plusieurs études de lAdeme[126].

B.  Lenjeu transversal du stockage du carbone dans les sols

Avoir une approche transversale des questions environnementales en considérant simultanément les questions d’énergie, d’émission de gaz à effet de serre (GES) et de stockage du carbone est essentiel. C’est pourquoi une partie du présent rapport est consacrée à ce dernier point, sachant qu’il faudra toujours privilégier les solutions qui permettent, en même temps, de produire le plus dénergie, de réduire le plus possible les GES (dont le CO2), de maintenir la biodiversité et de stocker le plus possible de carbone dans les sols, ce qui est bénéfique pour le changement climatique comme pour lalimentation.

La question du stockage du carbone dans les sols a fait l’objet de la note scientifique n° 3 de l’Office[127], « Stocker plus de carbone dans les sols : un enjeu pour le climat et pour l’alimentation », réalisée par votre rapporteur Roland Courteau. Le fait de stocker plus de carbone dans les sols présente en effet l’intérêt de compenser les émissions anthropiques de CO2 mais aussi de renforcer la sécurité alimentaire car le niveau de carbone des sols a des effets majeurs sur la fertilité de ceux-ci et donc sur la productivité agricole. Il est important dans cette partie sur les impacts environnementaux de la production d’énergie dans le secteur agricole de rappeler que l’agriculture est à plusieurs titres un levier essentiel de la lutte contre le réchauffement climatique.

1.  Le rôle des sols dans le stockage du carbone

Les sols, importants réservoirs de carbone (C) sous la forme de matière organique (MO), représentent un élément essentiel, bien que longtemps sous-estimé, de la lutte contre le réchauffement climatique et de la sécurité alimentaire.

En effet, bien que les sols soient trop souvent vus comme de simples surfaces, ils forment des volumes aux propriétés physico-chimiques complexes et nécessaires à la vie. Ainsi, leur préservation est importante non seulement à l’échelon local car des évolutions, mêmes faibles, du stock de carbone des sols ont des effets majeurs sur leur fertilité, et donc sur la productivité agricole, mais aussi au niveau global, à travers le cycle mondial des gaz à effet de serre (GES). Le sol est émetteur de GES, sous la forme de dioxyde de carbone (CO2), lorsque les matières organiques s’y dégradent mais, en même temps, il contribue au stockage de carbone lorsqu’elles s’y accumulent, la matière organique des sols étant constituée pour plus de 50 % de carbone.

Dans certaines conditions, le sol peut stocker plus quil német. Il y a, au total, plus de carbone dans le sol que dans la végétation qui le recouvre et l’atmosphère réunies, puisqu’il s’agit d’un minimum estimé de 1 500 milliards de tonnes de carbone dans la matière organique des sols mondiaux, soit deux à trois fois le carbone du CO2 atmosphérique - certaines estimations parlant même de 2 400 milliards de tonnes de carbone dans les sols, alors qu’on ne dénombre que 829 milliards de tonnes de CO2 atmosphérique.

Flux et stocks de carbone

Source : Castagnon/IPCC.

2.  Le jeu complexe de variables multiples

Le climat influe sur la teneur en carbone organique des sols en jouant sur les entrées, à travers la productivité végétale par exemple, et sur les sorties, par l’intermédiaire de l’activité biologique et de l’érosion. Le sol fait figure d’acteur-clé dans les cycles biogéochimiques du carbone. Les flux de carbone dans les sols dépendent de nombreux facteurs : nature des écosystèmes ; nature et quantité des apports de matières organiques ; activité biologique dont dépendent à la fois l’humification et la minéralisation, l’équilibre entre les deux étant principalement fonction des conditions physicochimiques, de la température et des possibilités de liaisons entre les matières organiques et des particules minérales. L’augmentation de la température, la diminution de l’humidité des sols ou encore le travail mécanique du sol favorisent la minéralisation.

Les sols sont marqués par une grande diversité : la quantité maximale de matière organique qui y est contenue peut fluctuer fortement d’un écosystème à un autre, suivant les variations des différents facteurs évoqués. Selon la nature du sol et son usage, le stockage de carbone dans les sols est très inégal : entre tourbières, sols forestiers, sols agricoles, ou encore sols dégradés, artificialisés, voire imperméabilisés, les écarts sont grands[128].

Stock de carbone dans les sols selon lusage

Source : Ademe (valeur pour les 30 premiers cm de sol).

 

Le temps de résidence du carbone dans le sol est en moyenne de quelques décennies mais il est très variable puisqu’il peut aller, pour un même sol, de quelques heures à plusieurs millénaires, sous l’effet de plusieurs facteurs[129]. Ce temps est augmenté par l’association de la matière organique aux particules minérales du sol, en particulier aux argiles, car elles assurent une protection physique et physicochimique vis-à-vis des micro-organismes décomposeurs[130]. La protection physique des matières organiques est un processus dont l’amplitude est complexe à estimer, et qui est susceptible d’être affectée par les pratiques culturales comme par les changements climatiques. Ainsi, un broyage fin des agrégats du sol s’accompagne d’une minéralisation accrue du carbone organique. Favorisée par le travail mécanique et l’absence de couverture végétale, l’érosion est, sous l’effet du ruissellement, un facteur de destruction des sols et de perte de MO.

La dégradation des sols, par destruction du complexe organo-minéral ou par érosion, réduit leur capacité à stocker le carbone et leur rendement de produits agricoles et forestiers. Elle aboutit, au pire, à la désertification. Il faut pourtant plusieurs milliers d’années pour « faire un sol »[131]. Le sol est donc une ressource non renouvelable à l’échelle de temps des activités humaines[132]. Aujourd’hui, 25 % des sols de la planète sont fortement dégradés (41 % pour les sols cultivés) auxquels s’ajoutent chaque année 12 millions d’hectares supplémentaires. Lartificialisation des sols[133] a pour conséquences : leur imperméabilisation[134] (ils ne rendent alors plus d’autre service que de supporter les constructions et les voies de transport), la fragmentation des milieux et une atteinte à la biodiversité, un mitage de l’espace agricole et une moindre régulation des flux d’eau (aggravation des inondations) et des températures chaudes en ville.

Lépaisseur du sol est elle aussi très diverse, puisqu’elle peut aller de quelques centimètres à quelques mètres tout en jouant un rôle essentiel, mais différencié, selon sa profondeur et sa nature physicochimique dans les cycles de l’eau, du carbone, du phosphore et de l’azote. L’utilisation des sols pour stocker davantage de carbone, grâce aux matières organiques qu’ils contiennent, rend nécessaire d’évaluer le niveau maximal de matières organiques qu’un sol peut contenir, sachant que ce niveau dépend de nombreux facteurs : du bilan humidification/minéralisation, des apports de matières organiques et de destruction de l’humus à la suite de sa minéralisation, mais aussi de son épaisseur (les apports de matières organiques y sont intégrés), de sa minéralogie ou, encore, de la granulométrie de ses particules (argiles, limons, sables…).

Les méthodes de quantification du carbone dans le sol relèvent de deux types : des méthodes de laboratoire, dites « classiques », qui s’appuient sur la combustion sèche ou l’oxydation sulfochromique d’un échantillon de sol, et des mesures spectroscopiques (ultraviolet-visible et infrarouges), d’utilisation plus récente pour ce qui concerne la quantification du carbone du sol. Ces mesures reposent sur le traitement du spectre de réflectance du sol qui dépend, entre autres paramètres influents, de sa teneur en matière organique. Les résultats varient selon les différentes profondeurs de sol retenues : 30 ou 40 premiers centimètres, un mètre, deux mètres…

En France, les sols agricoles et forestiers (environ 80 % du territoire) stockent actuellement 4 à 5 Gt de carbone (soit 15 à 18 Gt de CO2) dont près d’un tiers dans la biomasse (arbres principalement) et plus des deux tiers dans les sols au sens strict, et toute variation positive ou négative de ce stock influe sur les émissions nationales de GES. Pour mémoire, ces émissions sont estimées à 0,5 Gt CO2 éq/an (valeur 2011). Les dynamiques d’évolution des stocks de carbone dans nos sols présentent cependant de fortes incertitudes.

Une étude réalisée en 2019 par l’INRAE pour l’Ademe a permis d’enrichir et d’actualiser ces données[135] :

Source : INRAE.

 

Stocker plus de carbone dans les sols présente un intérêt pour compenser les émissions anthropiques de CO2 face au réchauffement climatique et pour la sécurité alimentaire car la présence accrue de matière organique améliore la structure physico-chimique du sol, sa résistance à l’érosion et sa fertilité, donc le rendement des cultures.

L’amélioration des connaissances scientifiques sur le stockage du carbone dans les sols, en particulier sur l’âge du carbone stocké et les cycles biogéochimiques à différentes échelles de temps et d’espace, reste nécessaire. En effet, selon le contexte, une même pratique favorable au stockage de carbone n’engendre pas le même effet. Par exemple, les tourbières, certaines prairies ou forêts approchent déjà un niveau de stockage maximal. Les efforts ne pourront donc porter que sur une partie des sols. L’étude précitée de l’INRAE pour l’Ademe a permis de préciser ces enjeux.

Par ailleurs, la saturation ou niveau maximal de capacité de stockage globale demeure incertaine. Un stockage additionnel de carbone ne serait donc qu’une solution pertinente à moyen terme, limitée dans le temps, car les sols atteindraient un nouvel équilibre après quelques décennies jusqu’à saturation de leurs capacités (la durée d’atteinte de ce nouvel équilibre peut être de 20 ans comme de plus de 100 ans, selon les conditions).

De plus, stocker plus de carbone suppose une disponibilité accrue d’azote (N) et de phosphore (P) pour permettre la croissance des végétaux et pour stabiliser la MO, ce qui - pour éviter des engrais de synthèse - plaide pour le recyclage des effluents et la culture de légumineuses[136]. L’émission d’autres GES, comme le méthane (CH4) et les oxydes d’azote (NOx), doit être surveillée, afin qu’un effort en matière de stockage de carbone dans les sols ne conduise pas à les augmenter[137].

3.  Les perspectives politiques et de recherche

La réflexion internationale se poursuit depuis le protocole de Kyoto, qui vise à augmenter les puits de carbone[138] et a complété en 1997 la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), adoptée lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) intègre de plus en plus le rôle des sols dans ses analyses, à l’image de trois de ses rapports spéciaux récents portant sur le réchauffement de 1,5°C, les changements climatiques et les océans et la cryosphère et, enfin, les liens entre le changement climatique, la désertification, la dégradation des terres, la gestion durable des terres, la sécurité alimentaire et les flux de GES dans les écosystèmes terrestres. La FAO a conduit un travail spécifique sur le sujet[139].

L’Union européenne, qui s’est engagée à réduire d’ici à 2030 d’au moins 40 % ses émissions de GES par rapport à 1990, donne une place grandissante au stockage du carbone dans les sols : le règlement européen « LULUCF » (pour land use, land use change and forestry) fait du carbone des sols l’un des objectifs de l’Union en matière climatique ; le projet de directive sur la protection des sols, aujourd’hui abandonné, avait identifié en 2006 la diminution de la MO des sols comme l’une des huit menaces contre lesquelles lutter, la mission « Soil health and food » en cours dans le cadre d’Horizon Europe et du Pacte vert pourrait ressusciter un projet de directive du même ordre ; et, depuis 2017, les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) de la politique agricole commune (PAC) sont enrichies d’une MAEC « sols », visant la réduction du travail du sol, la mise en place de couverts végétaux et la diversification des rotations culturales dans le but, notamment, d’accroître la MO des sols[140].

En France, la politique d’atténuation du changement climatique s’incarne comme il a été vu dans le présent rapport dans la stratégie nationale bas carbone[141] (SNBC), la stratégie pour la bioéconomie et la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse[142] (SNMB) prévues par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) du 17 août 2015. La SNBC a recours au label « bas carbone » et la SNMB inclut un volet sur la séquestration du carbone. La question est sensible car la SNMB pourrait avoir de nombreuses incidences négatives sur l’enjeu de protection de la qualité des sols : la valorisation économique de la biomasse est souvent supérieure au maintien des sols en l’état, faute d’incitations spécifiques (dans le cas où prélever plus de bois s’accompagne d’une promotion de l’agroforesterie, cette valorisation peut toutefois être bénéfique). La tendance à lartificialisation du foncier agricole et le développement dusages non alimentaires de la biomasse issue de l’agriculture et de la forêt impliquent une vigilance particulière sur les conflits dusages qui peuvent être engendrés. La mise en œuvre nationale de l’initiative « 4 pour 1 000 » sera donc à suivre avec attention et nécessitera un effort en matière de recherche sur un plan national, européen et international[143].

En 2020, est lancé le programme européen sur la gestion durable des sols agricoles (European Joint Programming Cofund on Agricultural Soil Management ou EJP SOIL) « Vers une gestion climato-intelligente et durable des sols agricoles », coordonné par Claire Chenu de l’INRAE. Il s’agit d’un programme d’envergure de 5 ans, avec 26 partenaires dans 24 pays européens. Son principal objectif est de créer un environnement de recherche propice à l’amélioration de la contribution des sols agricoles aux défis sociétaux clés. Pour cela, il développera et déploiera une feuille de route de recherche sur les sols agricoles. Cette feuille de route sera élaborée conjointement avec des acteurs de la gestion des sols agricoles, des acteurs des politiques publiques et la communauté scientifique. Le programme soutiendra le développement de connaissances en organisant des appels d’offres internes (au sein de son consortium) ou externes. L’harmonisation et le développement d’informations spatialisées sur les sols y occupent une place essentielle. Les activités de partage et de transfert des connaissances seront axées sur le renforcement des capacités des jeunes scientifiques, l’échange entre communauté scientifique et agriculteurs et la sensibilisation du grand public.

 

Linitiative « 4 pour 1 000 »

Lancée le 1er décembre 2015 dans le cadre de la Cop21, cette initiative ambitieuse vise à contribuer à compenser les émissions nettes de CO2 dans latmosphère à léchelle mondiale (4,3 milliards de tonnes de carbone par an), par une augmentation annuelle de 0,4 % ou 4 pour 1 000 du stock de carbone des sols. Cette cible représente, selon le mode de calcul, 3,4 milliards de tonnes de carbone sur un total de 860 milliards dans les 40 premiers cm de sol, ou 6,3 milliards sur un total de 1 580 milliards dans le premier mètre de sol. Ces deux résultats différents expliquent une partie des controverses autour de linitiative.

Cette initiative pour le climat et la sécurité alimentaire vise à fédérer les acteurs publics et privés volontaires (États, collectivités, entreprises, organismes de recherche, ONG…). Elle regroupe environ 150 membres dans un consortium, dont le président est Ibrahim Mayaki et le vice-président Stéphane Le Foll, et 281 partenaires réunis dans un forum consultatif. Elle sappuie aussi sur un comité scientifique et technique (CST) de quatorze membres dont les membres français sont Claire Chenu, professeur à AgroParisTech, et JeanFrançois Soussana, vice-président de lINRAE.

La France est particulièrement engagée dans la mise en œuvre de linitiative, avec un projet agro-écologique national, à travers des projets et des recherches, et un suivi du « 4 pour 1 000 France » autour de lINRAE, de lAdeme et dArvalis, dans le but didentifier les pratiques agricoles et sylvicoles adaptées, dévaluer leur coût, de chiffrer et de cartographier le potentiel de stockage, de quantifier les autres effets induits (rendement, émissions dautres GES, lessivage de nitrate, consommation deau…), didentifier les freins à ladoption et de proposer des politiques incitatives.

Lobjectif mondial de stockage fixé par linitiative est élevé et sera difficile à évaluer chaque année. Il doit donc plutôt être vu comme un horizon vers lequel tendre, en complément des efforts de réduction globale des émissions de gaz à effet de serre.

Source : OPECST.

 

C.  Des rendements contrastés

1.  Comprendre la notion de taux de retour énergétique (TRE)

Il existe plusieurs manières détudier et comparer les énergies entre elles, leurs caractéristiques étant diverses. En effet, il est possible de comparer les énergies sous l’angle de leur efficacité énergétique, de leur rendement, de leurs coûts de production, des revenus qu’elles génèrent, de leur impact environnemental comme nous venons de le voir, ou encore des avantages et inconvénients qu’elles offrent. Le rendement est défini d’un point de vue scientifique[144] comme une grandeur sans dimension qui caractérise l’efficacité d’une transformation, physique ou chimique, le plus souvent la conversion d’une forme d’énergie en une autre. Il s’agit donc d’un rapport entre l’efficacité énergétique d’un système et son efficacité théorique maximale (on parle alors de « rendement comparatif »). De manière plus limitée, le rendement mesure le rapport entre l’énergie recueillie en sortie et l’énergie fournie en entrée (on parle alors de « rendement de conversion »), ce qui conduit à ne plus distinguer l’efficacité thermodynamique du rendement thermodynamique. En pratique, il faut de plus distinguer le rendement effectif (ou « industriel »), effectivement mesuré, du rendement thermodynamique issu de la théorie et du calcul[145].

Ces différentes définitions du rendement rendent son évaluation concrète plus délicate mais il est intéressant d’étudier les énergies en fonction de leurs rendements, voire de leurs rentabilités économiques, car ces deux facteurs sont généralement liés.

Il existe donc plusieurs manières de calculer les rendements énergétiques. Selon Total, le rendement énergétique d’une machine correspond au « rapport entre la valeur énergétique d’une masse de matière produite et la valeur énergétique ingérée pour produire cette masse ». En d’autres termes, le rendement énergétique reflète la capacité d’une machine ou d’un matériau à fournir de l’énergie et mesure ainsi son efficacité énergétique. Pour calculer le rendement énergétique, il faut donc diviser la quantité d’’énergie obtenue (énergie utile) par une machine, un appareil ou un matériau par la quantité d’énergie de départ consommée (énergie absorbée). »

Ainsi un rendement énergétique est nécessairement compris entre 0 et 1. Un rendement de 100 % serait le fait d’un système idéal qui n’a pas encore été observé à ce jour, conformément à la première loi de la thermodynamique citée en ouverture du présent rapport.

C’est pourquoi il est déconseillé d’utiliser le terme de rendement énergétique pour des machines qui permettent de recevoir et d’utiliser plus d’énergie qu’elles n’en utilisent, comme les pompes à chaleur par exemple. On parle alors d’efficacité énergétique (ou de coefficient de performance, COP). L’amalgame entre rendement thermodynamique et efficacité énergétique est cependant si courant qu’il est accepté comme le montre la définition précédente de Total.

La notion de rendement énergétique sapplique à une chaîne énergétique déterminée. Par exemple, en faisant circuler un courant électrique dans une ampoule, on peut déterminer la part de l’énergie produite sous forme de lumière et la part perdue sous forme de chaleur. Il suffit de diviser l’énergie produite sous forme de chaleur par l’énergie consommée en électricité pour obtenir le rendement de l’ampoule.

De la même manière, on peut déterminer pour une éolienne ou pour un panneau photovoltaïque la capacité de la technologie à transformer l’énergie qu’elle reçoit sous forme de vent ou de rayonnement solaire en énergie électrique.

Cependant, la notion de rendement énergétique reste liée à une technologie donnée et limite le calcul à lénergie captée et lénergie produite, sans prendre en considération l’énergie consommée pour construire la machine et les réseaux de transport d’électricité ensuite : elle n’incorpore pas dans son calcul l’énergie utilisée pour produire l’énergie utilisable. Ainsi, le rendement s’intéresse à la capacité de l’éolienne à produire de l’énergie électrique à partir du vent mais ne prend pas en compte la consommation d’énergie nécessaire à la fabrication et à l’installation de l’éolienne, à son entretien et aux pertes liées à la distribution de l’énergie depuis l’éolienne jusqu’au consommateur final. Il faudrait au final pouvoir être en mesure de fournir des analyses de cycle de vie (ACV) du rendement énergétique.

Pour s’inscrire dans une vision plus large de la consommation et de la production d’énergie du captage de l’énergie primaire jusqu’à son utilisation finale, l’emploi du taux de retour énergétique (TRE), qui correspond à l’acronyme anglais EROEI (Energy Returned on Energy Invested) semble plus approprié. Il s’agit d’un concept fréquemment utilisé, aux implications complexes, mais qui présente un intérêt plus grand pour le présent rapport et utilise une approche moins éloignée de celle des ACV, sans en utiliser l’étendue et toute la rigueur.

La formule du taux de retour énergétique est la suivante :

L’énergie utilisable est définie comme la somme de l’énergie nette et de l’énergie dépensée, ce qui donne :

 

 

Soit :1

 

Le TRE est logiquement supérieur ou égal à 1. Pour un processus ayant un TRE de 10, cela signifie que l’emploi d’une quantité d’énergie donnée d’énergie permet la production nette de 9 fois cette quantité. Un TRE élevé garantit un profit économique important : il est plus avantageux économiquement d’extraire la quantité d’énergie en investissant le moins d’énergie possible.

Si ce rapport est inférieur à 1, cela signifie que la quantité d’énergie produite utilisable est inférieure à l’énergie dépensée pour la produire. Une telle solution ne serait donc pas viable énergétiquement car elle consomme plus qu’elle ne produit[146].

La comparaison des différentes énergies avec le TRE n’est pas aisée, cette formule ne précisant pas jusqu’où il faut remonter dans la chaîne d’opérations intervenant dans l’exploitation d’une source d’énergie. Cela engendre des différences importantes entre les TRE dune même énergie selon létude réalisée.

Dans son ouvrage Transition énergétique, paru en 2018, Bertrand Cassoret explique qu’on « constate ainsi de grosses différences entre les études concernant le nucléaire, le charbon et le gaz. Pour le nucléaire, les chiffres vont de 5 à 100 selon les ouvrages ». De même, Charles Hall, un scientifique américain, et Pedro Prieto, un ingénieur espagnol spécialisé dans le photovoltaïque, l’illustrent dans un livre publié en 2012 et intitulé Spains Photovoltaic Revolution, The Energy Return on Investment.

Si lon ne tient compte, comme investissement énergétique, que des panneaux et de leur installation technique (hors main d’œuvre), le rendement énergétique de panneaux photovoltaïques est à 8 pour 1. En revanche si lon prend en compte toute la chaîne comprenant le transport des matériels, les fondations, les liaisons au réseau, l’entretien et la maintenance, la main d’œuvre et la compensation des variations de production (nuit, mauvais temps, etc…) par des centrales à gaz déjà existantes, ce rendement baisse à 2 pour 1. Cela ne prend pas en compte le fait que si les capacités installées augmentaient massivement, il faudrait mettre en place des capacités de stockage ou de compensation supplémentaires pour gérer les variations de la production.

Afin de comparer de manière optimale les énergies entre elles, il est nécessaire de respecter les mêmes règles de calcul : il ne serait par exemple pas judicieux de comparer le TRE du photovoltaïque en s’intéressant seulement à l’installation des panneaux comme énergie dépensée, avec l’éolien en prenant en compte toute l’énergie dépensée dans la construction de l’éolienne (liaison au réseau, transport des matériels, etc.).

Le TRE ne permet en effet une comparaison efficace des différentes sources d’énergie entre elles qu’à condition de respecter les mêmes critères de calcul, sachant que ces critères ne font pas consensus dans le monde scientifique et dans le monde économique. La réponse à la question des éléments consommateurs d’énergie que l’on prend en compte dans le calcul du TRE n’est toujours pas tranchée. Il faudrait dans l’idéal savoir déterminer avec précisions jusqu’où remonter la chaîne d’opération permettant la production de chaque énergie.

La complexité du calcul des taux de retour énergétique

Source : ActiVE daprès un graphique en anglais issu du site http://www.theoildrum.com.

À l’échelle microéconomique, le calcul du TRE a un impact important sur le modèle économique de tout producteur d’énergie et en premier lieu des entreprises du secteur énergétique. En effet, plus le TRE est élevé pour un processus, plus l’exploitation de ce processus annonce un profit économique important. Ainsi, si l’on peut, avec un baril de pétrole, extraire 100 barils de pétrole, cela est plus avantageux que de pouvoir en extraire 20. C’est l’évolution que les compagnies pétrolières ont connue entre le 19e siècle et aujourd’hui.

À l’échelle macroéconomique, de nombreux économistes et scientifiques expliquent en partie le développement économique des sociétés par le TRE. Victor Court, chercheur de la Science Policy Research Unit de l’Université du Sussex, avance ainsi que « c’est parce qu’ils généraient des surplus suffisants d’énergie avec une bonne efficacité (c’est-à-dire en peu de temps) que nos ancêtres pouvaient allouer leur temps restant à la construction d’abris, l’amélioration de l’organisation du camp, la protection des semblables, la socialisation, l’éducation, ou encore l’apport de soins aux enfants et la narration orale ». De même, Bertrand Cassoret indique dans son ouvrage précité Transition énergétique que « pour un accès correct à lalimentation, il faudrait un EROEI de 5 ; pour le logement, il faudrait 7 ; pour un système éducatif, il faudrait 10 ; pour un système de santé, il faudrait 12, et pour laccès à la culture et aux loisirs 14 (…). Les économistes Victor Court et Florian Fizaine ont démontré quun EROEI minimum de 11 était requis pour un taux de croissance économique positif ». Selon Thomas Homer-Dixon dans The Upside of Down; Catastrophe, Creativity and the Renewal of Civilisation, paru en 2007, que les chutes de Rome, de la civilisation Maya et de l’Empire Khmer d’Angkor sont liées à la baisse des TRE. Et pour Joseph Tainter dans LEffondrement des sociétés complexes, publié en 2013, la contraction du TRE est une des causes principales de l’effondrement de sociétés complexes.

2.  Les difficultés à déterminer les écarts de TRE par source dénergie

Les données suivantes sont issues de trois études scientifiques différentes et font apparaître des écarts considérables de TRE pour une même source d’énergie et nous alertent sur la vigilance dont il faut faire preuve quant à la comparaison des TRE entre plusieurs sources d’énergie, surtout si les valeurs comparées ne sont elles-mêmes pas issues de la même étude.

Les taux de retour énergétique par source dénergie

Sources dénergie

TRE 1

Étude Cutler J. Cleveland[147]

TRE 2

Étude David Elliott[148]

TRE 3

Étude Ian
Hore-Lacy[149]

Pétrole
- Jusqu’à 1940
- Jusqu’à 1970
- Aujourd’hui


> 100
23
8

50 - 100

Ø

Charbon
- Jusqu’à 1950
- Jusqu’à 1970


80
30

2 - 7

7 - 17

Gaz naturel

1 - 5

Ø

5 - 6

Schistes bitumineux

0,7 - 13,3

Ø

Ø

Uranium 235

5 - 100

5 - 100

10 - 60

Biomasse

Ø

3 - 5

5 - 27

Énergie hydroélectrique

11,2

50 - 250

50 - 200

Énergie éolienne

Ø

5 - 80

20

Géothermie

1,9 - 13

Ø

Ø

Énergie solaire

- Énergie solaire thermique

- Énergie solaire photovoltaïque


4,2
1,7 - 10

3 - 9

4 - 9

Éthanol, dont :

- canne à sucre

- maïs

- résidus de maïs

 

0,8 - 1,7
1,3
0,7 - 1,8

Ø

Ø

Méthanol (de bois)

2,6

Ø

Ø

Source : OPECST.

 

3.  Comparaison des taux de retour énergétique des énergies renouvelables issues du monde agricole à la lumière de leurs coûts relatifs

En dépit de ces difficultés et de ces écarts considérables, il semble pertinent de comparer les TRE des énergies renouvelables issues du monde agricole à la lumière de leurs coûts relatifs.

Le coût de production prend en compte les coûts d’investissement, mais aussi les coûts d’exploitation, comprenant le fonctionnement ou la maintenance, et les coûts de raccordement au réseau.

Toutefois, le coût de production ne tient pas compte des coûts engendrés par la recherche publique ou des externalités négatives que sont par exemple les émissions de gaz à effet de serre (GES) lors de la construction des matériels d’équipement. De la même manière, les externalités positives telles que les GES évités ne sont pas valorisées et les analyses ACV ne sont pas encore généralisées.

D’autres coûts, tels que ceux liés à la variabilité des énergies renouvelables pour le système électrique, ne sont pas pris en compte, et incombent donc aux consommateurs.

Le coût de production est calculé sur une durée de fonctionnement en pleine puissance hors appoint (électrique par exemple quand il s’agit des pompes à chaleur). Cette durée de fonctionnement pleine puissance de l’équipement EnR dépend de la qualité de la ressource renouvelable au site de production. Le coût ainsi calculé varie en fonction de la durée de vie économique des installations et du taux d’actualisation choisi.

Ces coûts de production doivent également être rapprochés des tarifs dachat pour pouvoir comparer utilement les énergies et leurs TRE. En effet, en France, EDF et les entreprises locales de distribution ont l’obligation de racheter la production d’électricité d’origine renouvelable à un montant fixé par arrêté tarifaire. Selon l’article L. 341-1 du code de l’énergie, tous les moyens de production renouvelable d’électricité (hydraulique, énergies marines, éolien, photovoltaïque, etc.) et les installations valorisant les déchets ménagers peuvent bénéficier de ce système d’obligation d’achat, dans la limite de la production maximale d’un certain wattage.

Dans l’idéal, d’un point de vue scientifique, il serait plus pertinent dévaluer le coût dune énergie par la quantité dénergie à utiliser pour la produire que par son strict coût.

Le tableau synthétique suivant permet de comparer plusieurs énergies renouvelables issues du monde agricole, avec des sources croisées, selon leur TRE, leurs coûts de production et leurs tarifs d’achat.

Comparaison des énergies renouvelables selon leur TRE, leur
coût de production, leur tarif dachat et leurs émissions de CO2

Énergie

TRE[150]

Coûts de production[151]

(en €/MWh)

Tarifs dachat du kWh

Émission de CO2[152]

(en g/kWh)

Éolien terrestre

18:1

De 50 à 71 €/MWh

8,2 c€/kWh[153]

7

Photovoltaïque

De 4:1 à 10:1

De 61 €/MWh à

104 €/MWh

28,52 c€/kWh[154]

55

Biocarburants

Ethanol (canne à sucre)

Ethanol (maïs)

Diesel

 

De 0,8:1 à 10:1

 

De 0,8:1 à 1,6:1

1,3:1

Ø

Ø

Ø

Biomasse chaleur

Ø

De 47 €/MWh à

108 €/MWh

4,34 c€/kWh + prime de 7,71 à 12,53 c€/kWh[155]

Ø

Méthanisation

Ø

De 96 €/MWh à

130 €/MWh

De 11,19 à 13,37 c€/kWh + prime de 4 et 2,6 c€/kWh[156]

Ø

Solaire thermique

Ø

De 156 €/MWh à

451 €/MWh

Ø

Ø

Géothermie

De 2:1 à 13:1

De 38 €/MWh à

62 €/MWh

20 c€/kWh + prime jusqu’à 8 c€/kWh[157]

45

Hydroélectricité

De 11:1 à 267:1

De 33 €/MWh à

49 €/MWh

6,07 c€/kWh + prime de 0,5 à 25 c€/kWh[158]

6

Source : OPECST.

 

Plusieurs observations peuvent être formulées à la lecture de ce tableau. Tout d’abord, la comparaison des TRE est fragile et très complexe. Les chiffres qui apparaissent sont issus d’une étude de Richard Heinberg. Toutefois, d’autres études portées par David Elliott, Ian Hore-Lacy, ou encore Cutler Cleveland concluent sur des valeurs différentes même si les ordres de grandeur sont souvent comparables, à l’exception de l’énergie hydroélectrique.

En matière de TRE, il peut également être souligné que lhydroélectricité et léolien ont des taux de rendement énergétique élevés alors que la géothermie a un taux de rendement énergétique assez faible en comparaison des autres énergies.

S’agissant des coûts de production, lhydroélectricité a le coût le plus élevé (en son sein, la petite l’hydroélectricité a une longue durée de vie et est en général largement amortie), tandis que la géothermie a le coût de production le plus faible. Il faudrait aussi tenir compte de la durée de vie des installations, par exemple démanteler les éoliennes, qui ont une durée de vie assez courtes par usure et obsolescence, est coûteux.

Enfin, pour ce qui concerne leurs tarifs dachat, reflets des choix de politiques publiques sachant qu’il ne s’agit pas des seules incitations existantes, les tarifs d’achat du photovoltaïque et de la géothermie sont les plus élevés, tandis que l’éolien et la biomasse chaleur ont les tarifs d’achat les plus faibles, la méthanisation se situant dans une position intermédiaire.


V.  Des Freins de nature variée

A.  Des énergies coûteuses et peu rentables qui nécessitent de gros investissements

1.  Un coût macroéconomique défavorable sauf à considérer toutes les externalités

Le rapport précité « Prospective Agriculture-Énergie 2030 » du ministère de l’agriculture et de l’alimentation, publié en 2011, montrait déjà que malgré des objectifs ambitieux de développement des bioénergies, la production d’EnR dans le secteur agricole restait soumise à plusieurs incertitudes, toujours valables dix ans plus tard, notamment sous l’effet d’un déficit de rentabilité économique. Aucune filière dEnR dorigine agricole nest actuellement viable économiquement sans soutien public. Leur avenir dépend donc d’une amélioration de leur efficacité énergétique, d’une augmentation des prix des autres énergies (par un coût accru de l’émission de carbone par exemple) ou du maintien de politiques de soutien suffisamment incitatives. Par ailleurs, si le fait d’intégrer leurs externalités en particulier leurs externalités positives, plaide plutôt pour un soutien public, leur développement reste toujours soumis à la démonstration de leur réelle plus-value environnementale, encore sujette à controverses pour certaines filières, comme celles des biocarburants. De même leur coût macroéconomique est encore plus défavorable si elles conduisent à des conflits dusage des sols et des productions alimentaires. C’est pourquoi il faut rester vigilant sur leur impact sur la sécurité alimentaire future : les productions d’électricité photovoltaïque au sol et, surtout, de biocarburants sont, par exemple, largement consommatrices de terres agricoles.

2.  Des coûts microéconomiques paralysants

Au niveau microéconomique, les EnR représentent souvent des investissements élevés pour les exploitants agricoles, avec une rentabilité économique inégale et incertaine, qui ne se confirme qu’après plusieurs années. Ces coûts microéconomiques peuvent être paralysants et constituer un frein majeur à l’essor des EnR dans le secteur agricole.

L’investissement requis dépend de multiples paramètres mais les montants peuvent être élevés alors que les banques sont frileuses et que les risques financiers sont réels. La difficulté daccès au financement, par prêts bancaires pour des projets dont la rentabilité est parfois incertaine, est un frein au développement des EnR et des programmes de financement dédiés, relayés par les banques, pourraient contribuer à lever ce frein. En Allemagne, la Rentenbank, banque de développement pour l’agriculture et les zones rurales, institution de droit public, propose ainsi un programme de crédits pour promouvoir la transition énergétique dans le secteur agricole, en subventionnant les PME du secteur agricole qui investissent dans les EnR. Ce programme est relayé par les banques de proximité telles que les Sparkasse. L’agriculture bénéficie actuellement d’incitations fiscales notamment sur l’amortissement du matériel, incitant fortement à des investissements importants (excédant parfois les besoins réels en matériel). Une fiscalité encore davantage orientée vers les EnR serait un signal incitatif important pour faciliter l’investissement des agriculteurs dans leur développement.

Le coût des investissements pour les installations photovoltaïques dépend du type et de la taille de l’installation comme le montre la CRE. Pour les installations mises en service en 2020, la fourchette de CAPEX se situe entre 800 euros/kWc pour les plus grandes centrales au sol et 1 200 euros/kWc pour les plus petites installations agrivoltaïques comme les ombrières qui nécessitent plus de structures, d’où des coûts de structures et de pose plus importants.

Dans le domaine de la méthanisation, plus la taille de l’installation est grande, plus le montant de l’investissement par Nm3 de biogaz ou de kW sera bas. Comme ordre de grandeur, pour une installation moyenne de méthanisation dont le biogaz est valorisé par un moteur électrogène pour produite et injecter de l’électricité, le montant de l’investissement est de l’ordre 7 000 à 8 000 euros/kWé.

Le tableau ci-après illustre les montants d’investissements requis en fonction des puissances électriques des méthaniseurs.

 

Les investissements requis pour linstallation de méthaniseurs

Source : Ademe.

Linvestissement est généralement supporté par lagriculteur luimême, qui bénéficie d’aides, le plus souvent de l’Ademe voire des régions, la production d’énergie par le secteur agricole reposant principalement sur les dispositifs d’incitation et les tarifs d’achat sans lesquels la viabilité ne serait pas atteinte pour nombre d’installations. Les projets collectifs permettent une mutualisation de l’investissement et donc du risque.

Le plus souvent, les agriculteurs ne disposent pas des fonds propres suffisants pour supporter les importants coûts d’investissement dans des installations de méthanisation agricole, souvent renchéris par le recours à des intrants de type effluents d’élevage (moins méthanogènes que les intrants habituels dans la filière industrielle), dont l’utilisation présente pourtant un très grand intérêt pour contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole et d’autres externalités négatives (odeurs, pollution des eaux…). Certaines installations peuvent pourtant être rentables, y compris dans la petite méthanisation, surtout si l’on prévoit un mécanisme d’accès au financement, en évitant que la valeur ajoutée produite ne risque de se trouver préemptée par des acteurs non agricoles.

La production directe dénergie devrait en effet être profitable par rapport à la gestion déléguée à des énergéticiens ou à lachat dénergie sur le marché, mais chaque projet est spécifique et dépend fortement de son contexte : nature du gisement et de la source d’énergie, accessibilité et proximité de ce gisement, accès au foncier, proximité des réseaux, nature du porteur de projet (individuel, collectif, exploitant(s), collectivité, coopérative agricole…), capacité d’investissement… De manière générale, les exploitants agricoles préfèrent gérer et valoriser directement leurs ressources dans une logique de circuits courts, ce qui leur permet aussi d’être bénéficiaires d’une plus grande partie de la valeur produite, sans compter que plus le transport des déchets est long plus son coût pour l’agriculteur et ses externalités négatives pour la société sont élevés.

Si le photovoltaïque et l’éolien sont arrivés à un niveau de maturité industrielle et commerciale, avec un rôle central des énergéticiens qui captent aussi la valeur, les agriculteurs se contentant souvent de louer leurs terres, la méthanisation à l’échelle de l’exploitation pose encore des questions de R&D. Ainsi, le manque d’offres viables d’un point de vue microéconomique freine le développement de la petite méthanisation alors que le plus gros gisement de méthanisation en France se trouve dans le secteur agricole, dont les exploitations sont souvent éloignées des points d’injection dans le réseau de gaz. Les principaux axes de R&D devront porter sur la digestion et la valorisation du biogaz pour arriver à des solutions adaptées et conçues dans une logique d’optimisation de l’ensemble des coûts de la conception du produit à sa fabrication (« design to cost » ou conception à coût objectif). Des solutions de type « power to gas » ou des collectes par transport routier recourant à des énergies non fossiles.

B.  Laccès au foncier agricole et les conflits dusage

1.  La faible disponibilité du foncier agricole

Le foncier agricole est peu disponible en France, alors même que lartificialisation des terres réduit encore chaque année les ressources foncières disponibles.

Le rapport de la mission d’information commune sur le foncier agricole de nos collègues députés Anne-Laurence Petel et Dominique Potier[159] met bien en valeur ces questions.

Certaines EnR, comme les biocarburants ou l’électricité photovoltaïque au sol sont, comme il a été vu, largement consommatrices de terres agricoles et sont donc très limitées dans leurs perspectives de développement.

Ce frein au développement du photovoltaïque en France entrave les acteurs nationaux qui peinent aujourd’hui à installer les capacités prévues par la PPE. L’accès au foncier demeure donc le problème principal pour les centrales photovoltaïques au sol avec une cohérence perfectible sur la classification de la nature des surfaces, et ce même dans le cas de centrales photovoltaïque adaptées au pastoralisme.

Dans ce contexte, en plus de l’agrivoltaïsme et du PV sur bâtiments et toitures, les projets sur des friches industrielles ou des terres stériles semblent une alternative à privilégier.

2.  Les risques de conflits dusage

De manière corollaire au point précédent, l’accès aux terres agricoles pour la production d’énergie, surtout pour le photovoltaïque au sol, peut induire des conflits dusage, préjudiciables aux cultures alimentaires (végétales et animales). C’est pourquoi le présent rapport défend le principe d’une priorité donnée aux productions alimentaires sur les autres activités agricoles, dont celles de production d’énergie.

L’agrivoltaïsme présente à cet égard un grand intérêt puisqu’il permet de concilier lactivité agricole (cultures ou élevage) avec lactivité de production dénergie, sans consommer de terres agricoles.

C.  Lintermittence et le défi technologique de stockage de lélectricité

1.  Lintermittence de certaines énergies renouvelables telles que léolien et le photovoltaïque

Recourir aux énergies renouvelables pose le problème de lintermittence de certaines dentre elles comme léolien et le solaire notamment photovoltaïque. Il existe de plus un décalage fréquent dans le temps entre la production d’électricité - avec par exemple des panneaux solaires fonctionnant uniquement le jour - et sa consommation pour satisfaire des besoins - par exemple l’utilisation d’électricité la nuit pour l’éclairage.

Synchroniser l’offre et la demande représente un défi technologique qui prend la forme du stockage de l’énergie, notamment de l’électricité issue de l’éolien et du solaire photovoltaïque.

2.  Le défi technologique du stockage de lénergie

Comme cela a été vu, le stockage de lélectricité étant impossible, il est nécessaire de la transformer sous forme dénergie potentielle de nature chimique ou mécanique. Des innovations technologiques seront nécessaires pour accompagner la montée en puissance des énergies renouvelables dans notre mix énergétique. Et il convient, en outre, de préciser que les solutions de stockage ont des coûts (qui peuvent aller jusqu’à doubler le coût de la technologie utilisé, en PV ou en éolien par exemple).

D.  Les freins politiques, administratifs et juridiques

1.  Les freins liés à lacceptabilité sociale

Ces freins ont déjà été présentés en détail. Ils ne doivent pas être sous-estimés car de nombreux projets sont ralentis, reportés ou abandonnés pour cette seule raison (bien entendu le cas de projets qui ne sont tout simplement pas conformes existe aussi). L’opinion doit s’approprier pleinement les enjeux de la transition climatique et agroénergétique en bénéficiant des connaissances scientifiques les plus avancées de manière transparente. Le fait que l’acceptabilité sociale soit inégale selon les EnR considérées plaide pour une hiérarchisation des solutions les plus vertueuses qu’il convient de faire connaître et d’expliquer au grand public, en ayant en tête que les grands opérateurs de l’énergie ne bénéficient pas d’un grand capital sympathie dans l’opinion publique.

2.  Des programmations peu ambitieuses

Les programmations existantes en matière d’énergie sont parfois trop peu ambitieuses pour certaines filières dénergie. C’est par exemple le cas de la PPE pour la méthanisation d’après la grande majorité des personnes entendues. La fixation d’objectifs jouant un rôle d’entrainement, le manque d’ambition de la PPE à cet égard constitue un frein dommageable.

3.  Une complexité administrative

Pour de nombreuses EnR (méthanisation, solaire et photovoltaïque par exemple), le développement des projets est limité par la lourdeur des démarches administratives. La complexité administrative et juridique du montage et de la réalisation des projets soumis à d’importantes contraintes réglementaires a été soulignée à de nombreuses reprises lors des auditions. En particulier, les procédures dinstruction ont été jugées excessivement longues : plusieurs années sont ainsi nécessaires pour monter un projet de méthaniseur en France (des cas de plus de 5 ans ont été rapportés !), alors que quelques mois suffiraient en Allemagne par exemple.

L’administration devrait faire des retours d’expérience sur les dossiers existants et identifier les difficultés et les goulots d’étranglement pour en tirer les conséquences.

La simplification de ces procédures doit en tout état de cause se poursuivre. Une organisation qui serait l’interlocutrice et le guichet unique pour les aides aux agriculteurs et démarches concernant les EnR pourrait permettre cette simplification.

Il ne s’agit pas du frein principal aux EnR, loin de là, mais réduire la complexité administrative et juridique contribuerait à fluidifier leur déploiement.

E.  Un manque de formations dédiées

1.  La formation, enjeu majeur

Les formations qui, dans le secondaire ou le supérieur, abordent les exploitations agricoles sous leur angle énergétique sont rares. Pourtant, la formation est un enjeu majeur de la production dénergie dans le secteur agricole, afin d’étudier les enjeux qui y sont liés, les interfaces, renforcer et sécuriser les revenus et éviter les conflits d’usage. Il est nécessaire d’enseigner au plus tôt ces questions aux agriculteurs. L’agriculture est amenée à se transformer afin de produire de l’énergie et, comme l’a précisé Olivier Dauger, président de France gaz renouvelables et administrateur de la FNSEA, « sil y a mutation de lagriculture, il y a mutation de la formation ». À ce sujet, le président de l’Association des agriculteurs méthaniseurs de France (AAMF), Francis Claudepierre, estime que l’une des raisons de l’échec des projets de méthanisation en France est le manque de formation, blâmant la présence de seulement quatre lycées agricoles proposant des formations certifiantes. En outre, il ne doit pas être simplement question de la formation pour les agriculteurs, mais de tous les métiers qui y sont liés (maintenance, électromécaniciens, laboratoires d’analyse…). Le fait de mettre en liaison des lycées agricoles et des lycées professionnels dans les domaines de l’énergie serait aussi pertinent.

La formation des agriculteurs-producteurs dénergie et en particulier des agriculteurs-méthaniseurs paraît essentielle, car ils sont le plus souvent eux-mêmes les acteurs de la production dénergie dans cette filière.

D’autres secteurs, tels que l’éolien ou le photovoltaïque (PV), semblent nécessiter moins de formations pour les agriculteurs, les actions de ces derniers ne participant pas directement à la production d’énergie. La formation pourrait dans ce cas mettre l’accent sur les modèles économiques et la place des Enr dans le bilan économique de l’exploitation.

Toutefois, selon Guillaume Perrin de la fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) « Territoire d’énergie », « lagrivoltaïsme nest pas une simple addition entre agriculture et photovoltaïsme, cest un troisième champ : la question de la formation est nécessaire et centrale ici ».

Les régions peuvent aussi être actrices de ces formations, comme en témoigne le nouveau programme en faveur de la transition énergétique et de l’économie circulaire de la région Grand Est, Climaxion, dont l’un des axes est de sécuriser la filière et d’accompagner la formation. A l’inverse, d’autres régions, telles qu’Auvergne Rhône-Alpes, voient leurs formations concernant l’énergie dans le milieu agricole fermer, par manque d’inscrits.

Parmi les baccalauréats, seul le baccalauréat sciences et technologies de l’industrie et du développement durable propose une spécialité dans les domaines de l’énergie et de l’environnement, mais cette spécialité s’exerce toutefois dans « l’habitat et les environnements urbains »[160].

Quelques centres de formation professionnelle et de promotion agricoles (CFPPA) proposent des formations généralistes de production d’énergie dans le secteur agricole, tels que le CFPPA Lerobillard (Saint-Pierre-en-Auge) qui dispense une formation « mettre en œuvre un projet de production d’énergie renouvelable sur l’exploitation agricole »[161]. D’autres CFPPA offrent des formations spécialisées sur une filière. Les paragraphes suivants en font un état des lieux.

2.  Les formations à la méthanisation agricole

La filière méthanisation est en quête de professionnalisation. De plus en plus d’infrastructures agricoles adopteront ces installations et pour répondre à ce besoin, de nouveaux diplômes et certificats de spécialisation sont apparus[162] afin de garantir la capacité de ceux qui les détiennent à gérer une unité de méthanisation.

Ces formations ont toujours une forte dimension pratique (plus des deux-tiers de la formation) et sont ouvertes aux agriculteurs, aux salariés du monde agricole ou à tout titulaire d’un diplôme de niveau IV : bac pro, BTS agricole, BPREA (Brevet professionnel de responsable d’entreprise agricole), etc.

Certains diplômes visent un public plus large, adjacent à celui du monde agricole, comme les salariés des collectivités territoriales, des équipementiers, des énergéticiens, etc.

Selon le réseau des centres animations ressources d’information sur la formation, il existe trois CFPPA et une maison familiale rurale (MFR) délivrant un certificat de spécialisation « Responsable dune Unité de Méthanisation Agricole »[163] de niveau IV, en lien avec l’AAMF :

- CFPPA de la Meuse (Bar-le-Duc) ;

- CFPPA AgriCampus Laval (Laval) ;

- CFPPA de la Dordogne ;

- MFR IREO Les Herbiers (Les Herbiers).

Cette formation est composée de 3 unités capitalisables (UC), en centre de formation et en entreprise : gérer les flux d’entrée et de sortie ; assurer le fonctionnement du méthaniseur ; piloter l’unité de méthanisation.

Ceci permet aux agriculteurs de pouvoir gérer une unité de méthanisation sur leur exploitation agricole de manière sûre et conforme.

Le lycée agricole La Peyrouse, près de Périgueux (Dordogne), incite à considérer les exploitations agricoles sous leur angle énergétique avec un méthaniseur en service en son sein depuis 2013 et 250 m² de panneaux photovoltaïques installés. En 2014, l’établissement a franchi une nouvelle étape[164] en mettant en place un « module d’initiative locale » (MIL) sur le thème de l’énergie à destination de ses étudiants en BTSA ACSE (Analyse, conduite et stratégie de l’entreprise agricole).

D’autres formations, de niveau II et I existent : c’est le cas du diplôme de master « Agrosciences, environnement, territoires, paysage, forêt » (AETPF), qui offre plusieurs débouchés professionnels, tels que celui de « chargé d’études en valorisation agricole des déchets »[165]. Cette formation est dispensée dans neuf universités, telles qu’AgroParisTech à Paris et Nancy, l’Université Savoie-Mont Blanc (Le Bourget du Lac, UFR Sciences et Montagne) Université de Normandie (Caen, UFR de sciences). La formation est d’autant plus pertinente qu’elle propose notamment des cours d’agro-écologie, voire de « valorisation énergétique et chimique de la biomasse »[166], notamment à l’Université de Lorraine (Vandœuvre-lès-Nancy).

Toujours dans le milieu universitaire, l’École nationale supérieure d’agronomie et des industries alimentaires (ENSAIA) offre une formation de 336 heures afin de former un public large (de l’exploitant agricole au banquier en passant par l’équipementier) à la mise en œuvre d’une unité de méthanisation[167]. Cette formation complète aborde la mise en place d’une unité de méthanisation ; la conduite d’une unité de méthanisation ; la maintenance et son entretien ; la gestion des aspects logistiques liés à la commercialisation ; la valorisation et la commercialisation des produits issus de la méthanisation ; et l’évaluation économique d’une unité de méthanisation. Elle délivre aussi un diplôme d’université[168] permettant de maitriser les aspects techniques liés à la conduite, au suivi et à l’entretien du méthaniseur, les aspects administratifs et réglementaires, les aspects partenariaux et liés à l’identification des acteurs, les aspects logistiques liés à la gestion des flux, enfin, les aspects économiques et commerciaux liés à la rentabilité de l’installation.

Les chambres dagriculture proposent aussi des formations, telles que celles des chambres d’agriculture de l’Isère[169] (un jour de formation) ou de Bretagne[170] (de 1 à 6 jours) qui délivrent un certificat de participation au stage une fois la formation accomplie.

En dépit des exceptions relevées précédemment, il semble que les formations complètes enseignant à la fois les aspects technique, agricole, commercial et économique d’une unité de méthanisation soient rares. La plupart des formations offrent en général un savoir et des compétences partielles concernant la méthanisation, alors qu’Olivier Dauger, président de France gaz renouvelables et administrateur de la FNSEA, préconise une « réflexion complète sur le rôle de lagriculteur » et que Francis Claudepierre, président de l’AAMF, estime que « lobtention dun contrat de vente avec un fournisseur délectricité devrait toujours être conditionnée par une formation professionnelle dau moins plusieurs semaines ».

3.  Léolien et les autres filières

Les autres filières disposent de moins doffres de formation destinées aux agriculteurs que la méthanisation. Ces derniers ne participant pas directement à la fabrication, au développement, à la maintenance ou au processus de production d’énergie, le besoin de formation paraît moins essentiel. Toutefois, quelques rares CFPPA proposent des formations courtes (5 jours) de construction et d’installation de petites éoliennes domestiques (4 mètres de diamètre et mât de 12 mètres de hauteur), tels que le CFPPA de Die[171]. De plus, le master AETPF offre des débouchés professionnels dans le secteur éolien, l’ONISEP donnant comme exemple de métier suite à cette formation celui de « chef de projet éolien ». Enfin, à l’instar de la méthanisation, certaines chambres dagriculture dispensent une formation afin daider les exploitants agricoles à porter leur projet éolien, telles que la chambre d’agriculture de Bretagne[172].

S’agissant du photovoltaïque, l’Institut national de l’énergie solaire (INES) offre plusieurs formations de 1 à 5 jours[173] : la conception, l’exploitation et la maintenance des grandes centrales PV ; l’exploitation et la maintenance des centrales raccordées au réseau ; l’autoconsommation photovoltaïque individuelle, collective, et la mobilité électrique ; ou encore, le stockage des énergies renouvelables.

Enfin, certaines chambres d’agriculture, en Bretagne[174] ou dans le Grand Est[175], offrent des formations afin d’accompagner le montage de projets photovoltaïques, comme « monter un projet photovoltaïque en autoconsommation » ou « maîtriser le cadre réglementaire pour être capable d’en évaluer la faisabilité économique ».

Les CFPPA ne proposent pas de formations au photovoltaïque, ce qui constitue un manque à corriger.


VI.  Comparaisons internationales

A.  Les situations au niveau européen et dans quelques états membres

1.  Les analyses des institutions européennes

a)  Létude de la Commission européenne de 2012 sur les énergies renouvelables et le développement rural

La Commission européenne a publié en 2012 une étude sur les énergies renouvelables et le développement rural qu’elle avait commandé à un cabinet de conseil[176]. Elle y montrait alors que dans l’Europe des 27, en 2008, la production totale d’énergie finale à partir de sources renouvelables d’énergie s’élevait à 11,8 Mtep (la majeure partie de cette production étant exportée sous forme d’électricité, dont la plupart provenait de l’énergie éolienne et la production de chaleur étant principalement utilisée pour l’autoconsommation à la ferme) : 8,0 Mtep délectricité et 3,8 Mtep de chaleur. La production dénergie primaire (cultures énergétiques, bois forestier, déchets et fumier) dépassait 23,4 Mtep dont une partie était utilisée dans la production de biogaz pour la production d’énergie finale (chaleur, électricité). Le rapport prévoyait une augmentation nette de la production dénergie par les agriculteurs (multiplication par quatre ou cinq entre 2008 et 2020). En termes de valeur énergétique, les cultures énergétiques pourraient prendre du retard sur les déchets agricoles, dont la production devrait être multipliée par quatre et atteindre 21 Mtep.

La Commission européenne a réalisé en vue de ce rapport une enquête auprès de 800 agriculteurs européens, aux exploitations de tailles différentes, parmi lesquels 372 ont déclaré avoir investi dans les énergies renouvelables pour un montant total de 125 millions d’euros, soit un investissement moyen de près de 350 000 euros par agriculteur. Les investissements varient entre 37 000 euros dans le Warminsko-Mazurski (Pologne) et environ un million d’euros dans le Brandebourg et à Valence. Des chiffres intermédiaires (environ 300 000 euros) ont été communiqués pour la Sarre, la province de Soria (Espagne) et la Haute-Autriche. Ces chiffres ne comprennent pas les investissements que des acteurs externes pourraient réaliser (location de toiture, etc…). La plupart des investissements concernent la biomasse (37 %) et plus particulièrement la biomasse solide (le bois), utilisée pour le chauffage ou la production d’électricité. Les autres sources importantes sont le photovoltaïque (26 %), le solaire thermique (11 %) et le biogaz (8 %).

La plupart des investissements ont été réalisés par les agriculteurs eux-mêmes en utilisant leurs propres fonds ou des emprunts bancaires contractés à titre personnel ou entrepreneurial. Seul 15 % des investissements concernent un acteur externe.

Si l’intervention d’entreprises externes peut avoir des avantages considérables pour les agriculteurs (moins d’endettement, prise en charge des autorisations et des raccordements…), ces derniers se montrent réservés voire hostiles à lintervention dacteurs tiers. Cela s’explique par le passé et notamment la volonté de certaines compagnies du Brandebourg d’acheter les terres et de salarier les agriculteurs, plutôt que d’investir dans les projets.

Les agriculteurs qui ont investi dans les EnR déclarent souvent des revenus supérieurs à la moyenne régionale. Leffet sur les revenus le plus fort concerne ceux qui ont investi dans le photovoltaïque et le biogaz. Ils bénéficient plus souvent d’un successeur pour reprendre leur exploitation que ceux qui n’ont pas investi dans les EnR. Il n’y a pas d’autre grande différence entre les agriculteurs qui ont investi dans ces EnR et ceux qui ne l’ont pas fait.

La plupart des agriculteurs affirment investir dans ces projets pour des raisons économiques et notamment la volonté de diversifier leurs sources de revenu, dans le contexte de la volatilité des prix des matières agricoles.

Au niveau de leurs revenus, les agriculteurs qui produisent de la matière première afin d’alimenter des installations sans pour autant posséder ces installations (méthaniseurs notamment) connaissent des effets positifs sur leurs revenus (hausse de 1 à 10 % en Allemagne, en Autriche ou en Espagne). En Pologne, cet impact positif est plus important encore. Pour les agriculteurs qui investissent dans ces installations, la situation est plus compliquée étant donné l’investissement considérable nécessaire.

Le développement des énergies renouvelables dans l’agriculture implique une masse de travail nécessaire plus importante dans les fermes. Dans le cas polonais, l’arrivée des EnR dans l’agriculture a engendré une forte demande de main d’œuvre dans les installations agricoles. Cet effet, même s’il reste positif, était moins important dans les autres régions. Pour certaines exploitations, l’effet a été négatif en raison d’une conversion de cultures intensives vers des cultures énergétiques moins intensives, si elles étaient assez rentables. Les agriculteurs constatent que les investissements dans les EnR augmentent les revenus de leur exploitation. Cette hausse de travail concerne surtout la production de biomasse solide et de biogaz, le photovoltaïque et l’éolien n’ont pas cet effet.

L’étude de la Commission européenne présente certaines limites : bien qu’un grand nombre de sources aient été consultées au cours du processus de collecte des données, il existe très peu de sources de données centralisées avec des données pertinentes recueillies selon la même méthodologie et le même format pour tous les pays ; la plupart ayant même des données incomplètes voire inexactes.

Cette limite confirme les analyses de vos rapporteurs. Étant donné que la plupart des données nécessaires n’étaient pas directement disponibles, des intermédiaires ont été utilisés pour calculer des estimations. Et parce que des données différentes étaient disponibles dans différents pays, il n’a pas été possible d’établir une règle comptable unique pour tous les pays, ce qui a introduit certaines incohérences dans les soldes d’énergies renouvelables. En raison des écarts entre les différentes sources, les chiffres totaux ne sont pas toujours la somme des sous-catégories.

b)  Le rapport de la Cour des comptes européenne de 2018 « Énergies renouvelables et développement rural durable »

En 2018, le rapport spécial de la Cour des comptes européenne « Énergies renouvelables et développement rural durable : dimportantes synergies sont possibles, mais rarement exploitées »[177] a souligné que plusieurs études démontrent que les intérêts locaux et le développement rural durable peuvent tirer parti du déploiement de projets dans le domaine des énergies renouvelables.

Si les énergies renouvelables peuvent créer des emplois directs (exploitation et maintenance du matériel, par exemple), la plupart des emplois à long terme sont indirects et se retrouvent tout au long de la chaîne d’approvisionnement (construction, fabrication, ou secteurs de la foresterie et de l’agriculture dans le cas de la biomasse).

La Cour des comptes européenne a identifié quelques facteurs clés et quelques freins à lessor de la production dénergie dans le monde rural et a souligné le manque de données disponibles, comme l’ont fait également vos rapporteurs et la Commission européenne.

S’agissant des facteurs clés permettant de faire des énergies renouvelables un vecteur de développement rural, la Cour invite à :

-      intégrer les stratégies énergétiques dans la stratégie de développement économique local, de telle sorte qu’elles coïncident avec le potentiel et les besoins locaux ;

-      intégrer les énergies renouvelables dans les chaînes dapprovisionnement plus vastes des économies rurales, telles que l’agriculture, la sylviculture, l’industrie traditionnelle et le tourisme vert ;

-      limiter les subventions tant dans leur portée que dans leur durée et ne les utiliser que pour soutenir des projets dans le domaine des énergies renouvelables en passe d’être viables économiquement ;

-      éviter dimposer des types dénergies renouvelables à des régions qui ne sont pas de nature à les accueillir ;

-      mettre laccent sur des technologies relativement matures, comme la production de chaleur à partir de la biomasse, la petite hydroélectricité et l’éolien ;

-      créer un système énergétique intégré basé sur de petits réseaux capables de soutenir des activités de production ;

-      reconnaître que les énergies renouvelables sont en concurrence avec dautres secteurs pour les intrants, en particulier les terres ;

-      évaluer les projets potentiels à laune de critères dinvestissement et non sur la base de niveaux de subvention à court terme ;

-      localement, emporter ladhésion des populations en leur procurant des avantages manifestes et en les faisant participer au processus.

Pour ce qui concerne les freins, la Cour indique que la bioénergie nest pas synonyme dénergie durable. Le caractère durable de la bioénergie dépend dans une large mesure de la manière dont la biomasse est produite et utilisée. La production de biomasse et son utilisation ne sont pas nécessairement durables, par exemple si elles ont sur les populations, l’environnement ou les ressources naturelles une incidence négative telle qu’elle pourrait compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs besoins.

La bioénergie saccompagne également de risques environnementaux et socioéconomiques pour les zones rurales. À titre d’exemple, le changement d’affectation des sols, l’intensification de la gestion des forêts ou la culture intensive de plantes énergétiques peuvent entraîner un déclin de la biodiversité, une dégradation des sols, un stress hydrique ou une pollution de l’eau. La combustion de biomasse ligneuse peut également entraîner une hausse des émissions de certains polluants atmosphériques nocifs, et des discussions sont en cours quant à la question de savoir si ce type de biomasse est réellement neutre en carbone. La Cour rappelle que la Commission européenne a recensé seize risques environnementaux et socioéconomiques liés à la production et à l’utilisation de bioénergie[178] et a analysé les risques liés à la production et à l’utilisation de bioénergie dans l’analyse d’impact relative à la durabilité de la bioénergie et élaborée à l’occasion de la refonte de la directive EnR.

Enfin, la Cour souligne le problème du manque de données : il nexiste pas, au niveau de lUE, dinformations exhaustives sur le nombre de projets, la quantité dénergie produite à partir de sources renouvelables ou la capacité installée. Il est donc impossible de quantifier la contribution du FEADER au déploiement des énergies renouvelables dans les zones rurales. En l’absence d’informations pertinentes et fiables sur les énergies renouvelables, il n’est pas possible d’apprécier l’efficacité de ces mesures sur cette période, et il demeure difficile de comprendre sur quelle base les États membres ont conçu les sections de leurs Programmes de développement rural (PDR) consacrées à ces énergies. Ces constatations concordent avec les observations précédentes concernant les données de suivi de l’aide du FEADER et du Fonds de cohésion en faveur des énergies renouvelables pour la période de programmation 2007-2013.

2.  LAllemagne

a)  Généralités

Le mix énergétique de l’Allemagne est composé à 42,4 % dénergies renouvelables en 2019. Le secteur agricole contribue principalement à la production de biogaz (5,8 % du mix énergétique). Le secteur agricole ne contribue que partiellement à la production d’énergie d’origine éolienne et photovoltaïque (en 2016, les agriculteurs sont responsables de 16 % de la capacité énergétique solaire totale de l’Allemagne). Pour mémoire, les énergies renouvelables ont représenté en 2019 14 % de la consommation d’énergie primaire.

Ainsi, en 2017, la part de la production d’énergies renouvelables dans le mix énergétique allemand est supérieure à celle du mix énergétique français ; de plus, le mix énergétique allemand repose principalement sur le charbon, à l’inverse de la France qui a privilégié l’énergie nucléaire.

b)  La production dénergie dans le secteur agricole par filière

L’Allemagne réalise la moitié de la production dénergie primaire européenne sous la forme de biogaz (9 444 unités installées selon le dernier baromètre de l’OFATE d’avril 2020 qui dresse un bilan pour 2018, dont 200 en injection) contre environ 500 méthaniseurs liés à l’agriculture en France (c’est-à-dire utilisant au moins 50 % d’intrants agricoles) pour un total inférieur à 1 000 installations toute forme d’intrants confondus[179].

La méthanisation en Allemagne témoigne de davantage de production issue des exploitations agricoles mais cela correspond aussi à une certaine dérive, à l’instar d’une méthanisation basée sur le maïs cultivé à cette fin et non pas sur les déjections animales. Ces pratiques aggravent les compétitions pour lusage de la biomasse vis-à-vis de lalimentation humaine.

Une analyse détaillée par secteur conduit aux observations suivantes :

- le secteur de léolien connaît une croissance rapide, la puissance installée ayant presque doublé entre 2010 et 2019, et la production d’électricité d’origine éolienne étant passée de 38,4 TWh à 101,8 TWh sur la même période[180]. En termes de consommation finale, l’énergie éolienne passe de 7 % de la consommation totale d’énergie renouvelable en 2009 à plus de 17 % en 2019 ;

- la biomasse a augmenté plus modestement en passant de 5 % à 8,2 % sur la même période. C’est la production principale d’énergie dans le secteur agricole allemand grâce aux cultures énergétiques, à la biométhanisation, et à la production de bois ;

      pour la chaleur, la production a atteint 2 250 millions de tonnes en 2017 ;

      la production de biocarburants représente 3,4 millions de tonnes en 2018 ;

        concernant la production d’électricité grâce à la biomasse, selon des données de 2017 avec 8 700 installations de biogaz présentes en Allemagne, il s’agit d’une puissance électrique de 4 953 MW, selon l’ambassade de France en Allemagne. L’Office franco-allemand pour la transition énergétique (OFATE) rapporte des chiffres actualisés en 2020 pour l’année 2018, avec une puissance électrique de 4 943 MW[181] avec 9 444 unités et une projection de l’OFATE pour 2019 table sur un nombre total de 9 523 unités de méthanisation, pour une puissance électrique totale installée de 5 228 MW.

- s’agissant du secteur photovoltaïque, la puissance raccordée connaît une augmentation considérable, passant de 1896 MWc en 2014 à 3943 MWc en 2019. La production d’électricité solaire photovoltaïque, quant à elle, est passée de 56,15 TWh à 71,62 TWh sur la même période. Par ailleurs, l’OFATE précise indique qu’au premier trimestre 2020, la production photovoltaïque s’est élevée à 7 TWh, représentant ainsi 4,7 % de la production brute d’électricité (contre 3,8 % sur la même période en 2019)[182]. En outre, les agriculteurs sont responsables en 2016 de 16 % de la capacité énergétique solaire en Allemagne, soit 6 528 MW, avec pourtant un potentiel technique d’au moins 1,4 TW[183].

La question de lintroduction des distances forfaitaires entre éoliennes et habitations est au cœur des débats actuels sur la politique énergétique allemande. Le régime actuel donne le pouvoir discrétionnaire aux régions (Länder). Les distances en place varient donc en fonction de la région concernée, généralement entre quelques 300 mètres à 1 000 mètres. Par exemple, la région du Schleswig-Holstein dans le nord de l’Allemagne connaît depuis quelques années une règle de distance de 1 000 mètres. En Bavière, un cas exceptionnel en ce qui concerne le développement éolien, la règle en place est 10 fois la hauteur totale de l’installation (règle « 10H »), rendant difficile l’implantation des éoliennes dans cette région.

Le gouvernement allemand a proposé d’instaurer une règle nationale dune distance forfaitaire minimale de 1 000 mètres. Néanmoins, cette proposition a été beaucoup contestée par les acteurs industriels et la population, rendant plus ou moins impossible la réalisation des projets de Repowering ou l’implantation de nouveaux projets dans un certain nombre de zones. Il faut savoir dans ce contexte que la densité du pays est environ deux fois plus intense par rapport à la France. En 2020, la volonté du ministre de l’Économie de retirer la proposition d’une règle de distance de 1 000 mètres a été exprimée. Lors d’un sommet entre le gouvernement fédéral et les gouvernements des régions le 12 mars 2020, cette question faisait partie des points débattus pour permettre la sortie du nucléaire et du charbon tout en assurant la sécurité d’approvisionnement du pays.

c)  Objectifs et incitations

Les énergies renouvelables représentent un véritable intérêt pour les agriculteurs : il s’agit d’un complément de revenu assez stable par rapport à la production alimentaire, dont les quantités produites et prix de ventes sont plus fluctuants. Les énergies renouvelables concourent à une meilleure compétitivité globale des exploitations, mais ce n’est qu’un aspect parmi d’autres.

Ce soutien des pouvoirs publics a été impulsé par la loi sur les énergies renouvelables (EEG) de 2000 et la loi sur les énergies renouvelables de 2009, qui accorde un avantage financier supplémentaire à l’utilisation des déjections animales et de la biomasse issue de l’entretien des espaces verts.

Le gouvernement allemand cherche à augmenter la part des énergies renouvelables dans la consommation délectricité à 65 % dici 2030. Ainsi, la loi sur les énergies renouvelables (EEG) a été révisée en 2017 avec les objectifs suivants concernant la part de production électrique issue des énergies renouvelables : 45 % en 2025, 60 % en 2035 et au moins 80 % en 2050. Cette loi poursuit également l’augmentation du parc photovoltaïque, éolien, et des installations biomasses, afin d’atteindre 2 800 MW d’énergie éolienne en 2020, 2500 MW d’énergie solaire en 2030 et 200 MW d’énergie issue de la biomasse en 2022.

L’EEG prévoit aussi de subventionner la production dénergie renouvelable par la mise en place de tarif de rachat fixé par l’État de 2012 à 2017, puis elle instaure un subventionnement de l’énergie par mise en concurrence au travers d’appels d’offre depuis 2017.

Le programme de financement des énergies renouvelables du ministère fédéral de l’agriculture reçoit 61 millions d’euros de budget et a pour priorité :

-      la gestion durable de flux de matière pour un approvisionnement optimal des systèmes de production et de transformation d’énergie en ressources renouvelables ;

-      le développement de la production et de l’utilisation durable des matières premières renouvelables ;

-      le développement décentralisé des ressources dans les systèmes aquatiques ;

-      l’information et le dialogue avec la société civile sur la bioéconomie et la durabilité.

Le gouvernement allemand a également prévu des bonus et des primes aux cultures énergétiques.

d)  Quelques freins au développement de ces productions dénergie

Parmi les freins au développement de ces énergies, les contraintes foncières particulièrement fortes empêchent l’augmentation des surfaces agricoles dans le but d’augmenter la production de biomasse.

e)  Les perspectives technologiques

Le groupe d’innovation APV-RESOLA étudie une nouvelle forme de système photovoltaïque qui préserve à la fois la production d’électricité et les cultures agricoles : le système dit agrophovoltaïque (APV). Ce système pourrait résoudre la concurrence pour les terres entre production alimentaire et production d’énergie.

Un centre de recherche allemand sur la biomasse (DBFZ) a été créé par le ministère fédéral de l’agriculture en février 2008 afin de renforcer le domaine de la bioénergie.

3.  Les Pays-Bas

a)  Généralités

Les Pays-Bas produisent et consomment principalement du gaz, jusqu’à développer un état de dépendance au gaz. En 2018, le gaz naturel représente 79 % de la production énergétique néerlandaise et 41 % de la demande primaire en énergie. Le gaz naturel couvrait en outre 45 % de la production électrique néerlandaise et 87 % du chauffage des foyers.

C’est pourquoi les Pays-Bas cherchent surtout à développer la production de biogaz. Il faut aussi souligner qu’il s’agit d’un des pays où la densité de lélevage est parmi la plus élevée au monde, d’où des quantités considérables d’effluents qui peuvent ainsi être valorisées.

b)  La production dénergie dans le secteur agricole par filière

En 2018, il existait plus de 250 digesteurs en fonctionnement aux Pays-Bas pour une capacité installée de 219 mW. En outre, il existe 25 usines de valorisation du biogaz qui, soit alimentent le réseau de gaz en biométhane, soit l’utilisent comme carburant pour les véhicules. Selon l’Agence Internationale de l’Energie, 56 % du biogaz néerlandais est converti en chaleur, 33 % en électricité et 8 % de l’énergie est utilisée comme carburant pour véhicules.

Les Pays-Bas misent sur le développement d’une filière de production de gaz vert, avec l’objectif d’atteindre un volume de production d’1,2 milliard de m3 de biogaz en 2020 et jusqu’à 3,7 milliards de m3 en 2030.

c)  Objectifs et incitations

L’agenda néerlandais de transition énergétique prévoit d’augmenter significativement la part dEnR dans leur mix énergétique, de 8,6 % en 2019 à 16 % en 2023 et 40 % en 2030. L’agenda politique fixe aussi un objectif de réduction des émissions de CO2 de ‑25 % en 2020 par rapport à 1990, et de ‑49 % d’ici à 2030, afin de préparer la neutralité carbone à l’horizon 2050.

Ainsi, le Gouvernement soutient le développement de la filière biogaz au travers d’une collaboration étroite entre secteur public et acteurs privés. Plusieurs mécanismes participent à ce soutien : les Green Deals (partenariats public-privés, sans subvention), les EIA et les SDE+…

d)  Quelques freins au développement de ces productions dénergie

Parmi les freins au développement des énergies, peut être relevé le défaut de volonté politique : le ministère de l’économie, des finances et de la relance et l’agence RVO ont envisagé à plusieurs reprises une réduction progressive, estimée importante selon plusieurs observateurs, du subventionnement de la filière biomasse et biogaz dans le cadre de la réforme du programme SDE+.

4.  Le Royaume-Uni

a)  Généralités

Le secteur agricole contribue très faiblement à l’économie nationale (moins de 1 %), et son revenu total est en baisse dernièrement.

Près de 40 % des agriculteurs produiraient de lénergie renouvelable. L’énergie produite génère au moins 10 % des besoins en électricité du Royaume-Uni (environ 333 TWh), ce qui équivaut à la consommation d’électricité de 10 millions de ménages.

b)  La production dénergie dans le secteur agricole par filière

Les deux principaux types de production d’énergie du secteur agricole sont le photovoltaïque et la méthanisation.

Les agriculteurs et les producteurs associés produisent environ 70 % de l’énergie solaire du Royaume-Uni, ce qui représente plus de 1 200 fermes solaires et plus de 19 000 toits solaires.

c)  Objectifs et incitations

En décembre 2018, le Gouvernement a publié une stratégie nationale de la bioéconomie pour la période 2018 à 2030, composée de quatre objectifs principaux :

-      maximiser la productivité et le potentiel des atouts bioéconomiques déjà existants ;

-      créer les bonnes conditions sociétales et commerciales pour permettre le bon développement de nouveaux produits bio-sourcés ;

-      miser sur la recherche, le développement et l’innovation des entreprises et instituts britanniques pour développer la bioéconomie ;

-      obtenir des résultats réels et quantifiables sur l’économie britannique.

NFU Energy, le principal syndicat agricole britannique, est l’une des principales sociétés de conseil en énergie du Royaume-Uni. Il accompagne fortement les agriculteurs dans la production d’énergie. Ce syndicat a publié son ambition d’atteindre la neutralité des émissions de GES pour le secteur agricole en 2040.

Afin de remplir ces objectifs, le plan Smart export guarantee est entré en vigueur au 1er janvier 2020 : il s’agit d’une obligation fixée par le Gouvernement pour les fournisseurs d’électricité de payer l’électricité produite par des petits producteurs d’énergie bas carbone, afin de pouvoir exporter cette énergie vers le réseau national. Enfin, le projet d’Agriculture bill déposé en janvier 2020 vise à remplacer la politique agricole commune afin de mettre en place de nouvelles aides basées sur les services publics.

d)  Quelques freins au développement de ces productions dénergie

L’un des freins au développement des énergies réside dans le fait que les innovations technologiques liées à l’agriculture peinent à être appliquées car peu dentreprises britanniques cherchent à commercialiser linnovation.

e)  Les perspectives technologiques

Lagritech est fortement soutenue par le Gouvernement et fait partie intégrante de la nouvelle stratégie industrielle depuis 2017. Cette dernière met en particulier laccent sur lintelligence artificielle au service de divers domaines d’application dont l’agriculture.

5.  LItalie

a)  Généralités

La production nationale d’énergie était de 43,419 Mtep en 2018. Il n’y a pas de chiffres précis concernant la part du secteur agricole à la production de chaque EnR. Les origines de l’énergie électrique sont en revanche connues.

b)  La production dénergie dans le secteur agricole par filière

L’énergie électrique produite en 2018 en Italie à partir de sources renouvelables se répartit comme suit :

- hydraulique : 49,3 TWh ;

- solaire : 22,7 TWh ;

- bioénergies : 19,2 TWh ;

- éolien : 17,5 TWh ;

- géothermie : 6,1 TWh.

L’Italie compte 1 629 exploitations agricoles actives dans la production de biogaz en 2017 pour un total de 988 MW, ce qui représente 0,14 % des exploitations. Par ailleurs, une augmentation exponentielle du nombre dinstallations de production de biogaz agricole a été constatée entre 2000 et 2015. À cette date, le nombre d’installations était de 1 300, représentant une capacité de production de 2 milliards de mètres cubes.

c)  Objectifs et incitations

Le Plan national intégré pour lénergie et le climat publié en décembre 2019 prévoit la valorisation des résidus agricoles, y compris pour éviter la pratique de la combustion en plein champ.

Le décret du 4 juillet 2019, nommé « Fer 1 », vise à inciter la production d’électricité à partir des sources renouvelables les plus compétitives (éolien, hydroélectricité, photovoltaïque), avec un tarif global incitatif.

Concernant le biogaz et biométhane, la technologie de production est consolidée et largement diffusée. De plus, la filière est capable de produire de l’énergie avec une utilisation limitée des sols. L’utilisation du digestat en substitution des fertilisants de synthèse permet de réduire les coûts de production des cultures. Enfin, c’est une production d’énergie prévisible et stable.

Au sujet des biocarburants, les technologies de production industrielle sont matures et fiables. De plus, la réglementation technique de référence et les standards qualitatifs sont bien définis. C’est une production d’énergie prévisible et stable.

d)  Quelques freins au développement de ces productions dénergie

Le premier frein est de nature politique, en raison de la position du ministère de l’agriculture et de l’alimentation italien sur le plan climat-énergie (juillet 2019), et notamment un problème de gouvernance au plan national.

De plus, la filière bioénergie est bloquée par :

- un niveau insuffisant de connaissance des opportunités du secteur ;

- le manque dune stratégie de filière au niveau territorial ;

- la limitation des financements à disposition pour des interventions efficaces de mise à jour et intégration des bases de données statistiques ;

- des incohérences et lacunes dans la législation sur les déchets et sur les fertilisants.

6.  LEspagne

a)  Généralités

Sur les 933 000 exploitations agricoles présentes en Espagne, seules 566 d’entre elles produiraient des énergies renouvelables. Cela représente 0,06 % des exploitations agricoles espagnoles.

b)  La production dénergie dans le secteur agricole par filière

Les principales sources d’énergie dans ce secteur sont l’énergie photovoltaïque et la biomasse :

-       dans le photovoltaïque, 25 % des nouvelles puissances installées photovoltaïques ces cinq dernières années ont été installées par des agriculteurs ;

-       la biomasse reste peu exploitée, le plan national intégré Énergie Climat prévoit de doubler la capacité installée de cette technologie, jusqu’à 1 677 MW.

c)  Objectifs et incitations

Le décret 244/2019 facilite l’autoconsommation et la production collective, mais ne s’adresse pas à une filière en particulier.

Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation prépare un Plan directeur d’irrigation pour la période 2020-2027, qui doit identifier 8 000 hectares prioritaires qui doivent incorporer des mesures d’efficacité énergétique.

Dans le cadre des mesures annoncées le 25 février 2020 par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, 30 millions d’euros seront destinés au déploiement d’EnR dans le secteur agricole.

Le Gouvernement actuel a un projet de loi de transition écologique avec des objectifs ambitieux de décarbonation et de pénétration des EnR dans le mix électrique (74 % à l’horizon 2030).

Le Plan national énergie climat a pour objectif l’installation, d’ici 2030, de :

- 22 900 MW de photovoltaïque ;

- 5 000 MW de thermosolaires ;

- 3 500 MW de pompes à chaleur ;

- 800 MW de biomasse ;

- 500 MW d’hydraulique ;

- 30 MW de géothermie.

d)  Les perspectives technologiques

Le Centre d’édaphologie et biologie appliquée du Bassin du Segura est l’un des principaux centres de recherche travaillant sur lutilisation de lintelligence artificielle dans le secteur agricole.

Le premier distributeur espagnol de gaz, Naturgy, travaille sur un projet (COSIN) afin de produire du biométhane synthétique à partir du surplus de l’hydrogène produit par les ENR.

B.  Les États-Unis

1.  Généralités

Les États-Unis apparaissent en avance sur la prise en compte des enjeux de la production dénergie par lagriculture. Plusieurs travaux du Congrès américain en témoignent : Randy Schnepf, « Agriculture-Based Renewable Energy Production », Report for Congress, 2006 ; « Biomass Use in Energy Production: New Opportunities in Agriculture » ; Commission de l’agriculture du Sénat américain, 2004.

En 2012, au niveau fédéral, plus de 57 000 entreprises agricoles et autres exploitations ‑ 2,7 % des exploitations américaines - étaient engagées dans la production d’énergies renouvelables, soit plus du double de 2007. En 2017, ce nombre dépassait les 133 000 ‑ 6,5 % des exploitations américaines ‑, soit un nouveau doublement par rapport à 2012. En Californie, les fermes et les ranchs représentaient en 2017 plus de 20 % de toutes les exploitations des États-Unis utilisant l’énergie solaire, éolienne et la méthanisation.

2.  La production dénergie dans le secteur agricole par filière

Selon les rapports que le Service national des statistiques agricoles (NASS) a reçus des agriculteurs, le nombre de panneaux solaires, déoliennes et de méthaniseurs installés aux États-Unis a augmenté de 800 % au cours de la dernière décennie.

Un nombre restreint mais croissant d’exploitations agricoles (près de 12 000, soit 0,5 % des exploitations en 2012) cultive de la biomasse pour permettre d’atteindre les objectifs d’incorporation de carburants renouvelables pour le biocarburant.

En 2012, un total de 36 331 entreprises agricoles et autres fermes américaines (soit 1,7 % des fermes américaines) disposaient de panneaux solaires sur leur exploitation.

En 2009, 1 420 fermes américaines (0,06 % des opérations) exploitaient 1 845 éoliennes, principalement en Californie, au Tennessee, et en Virginie.

Certaines exploitations produisent des biocarburants directement sur leur exploitation : 4 099 fermes ont produit du biodiesel et 2 364 fermes ont produit de l’éthanol en 2012, soit moins de 0,3 % des exploitations en 2012.

En 2009, 121 exploitations agricoles ont déclaré disposer de 140 méthaniseurs. Celles-ci ont produit environ 385 millions de kWh d’équivalent énergie. En juillet 2010, il y avait 145 projets de méthaniseurs à l’échelle des exploitations agricoles et 12 projets à l’échelle commerciale, qui ont produit environ 404 millions de kWh d’énergie.

3.  Objectifs et incitations

Le facteur déterminant pour la production d’énergie renouvelable dans les exploitations demeure le prix de lénergie au regard du coût net des investissements à réaliser dans l’exploitation pour installer une unité de production d’électricité. Ainsi, le revenu généré par la production est une incitation à développer des projets : en 2014, environ 6 % des entreprises agricoles américaines ont bénéficié en moyenne de 56 000 dollars, en loyers et redevances, pour la production d’énergie.

Les objectifs de développement des énergies renouvelables que se fixent les États fédérés ont pour but d’accroître l’adoption de l’électricité renouvelable au niveau des États.

Le Rural Energy for America Program (REAP) de l’USDA, introduit pour la première fois en 2008 dans la loi sur l’amélioration de l’agriculture (Farm Bill), fournit une aide financière aux producteurs agricoles et aux petites entreprises rurales dAmérique pour acheter, installer et construire des systèmes dénergie renouvelable, améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments et installations non résidentiels, utiliser des technologies renouvelables qui réduisent la consommation d’énergie, et participer à des audits énergétiques et à l’aide au développement des énergies renouvelables. L’USDA publie périodiquement des appels à projet pour ce programme, dont l’enveloppe pour 2018 s’élevait à environ 800 millions de dollars.

D’autres programmes existent, tels que Advanced Biofuel Payment Program ou encore Biorefinery Renewable Chemical, and Biobased Product Manufacturing Assistance Program.

Le 20 décembre 2018, le Farm Bill a été promulgué, poursuivant le soutien fédéral à un certain nombre de programmes liés à lélectricité renouvelable et à la bioénergie. Les autorisations de dépense prévues par le Farm Bill couvrent les exercices financiers de 2019 à 2023, au cours desquels les programmes énergétiques recevront 375 millions de dollars de financement obligatoire, avec un maximum de 860 millions de dollars supplémentaires de financement discrétionnaire.

La relation entre agriculture et production dénergie aux États-Unis

Source : ministère américain de lagriculture[184].

4.  Quelques freins au développement de ces productions dénergie

Les États-Unis ont notifié formellement en novembre 2019 leur intention de quitter l’accord de Paris sur le climat et ne se fixent à ce jour plus dobjectifs en termes de lutte contre le changement climatique.

Un rapport triennal de l’Environmental Protection Agency publié en 2018 confirme les préoccupations concernant les impacts négatifs des biocarburants sur l’environnement.

De plus, labondance de ressources fossiles constitue un frein à lincitation à développer des énergies renouvelables. Au niveau national, 70 % à 80 % des revenus de la production d’énergie peuvent être directement attribués à la vente ou à la location de droits pétroliers et gaziers.

5.  Les perspectives technologiques

Il est probable que le recours à lédition génomique sera, à un moment ou à un autre, mobilisé pour améliorer le rendement à l’hectare de la production d’énergie à partir de biomasse. Son coût est certes élevé mais il conduira à d’importantes améliorations.

C.  Synthèse Comparée de sept pays

1.  Comparaison des mixs énergétiques

Les graphiques ci-après présentent une vision densemble des mixs énergétiques nationaux, facilitant la lecture de la synthèse comparée, qui figure dans le tableau récapitulatif des pages suivantes.

Comparaison de mixs énergétiques (pour l’électricité)

Source : OPECST (le mix du Royaume-Uni est pour toutes les énergies).

 

On peut remarquer que la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique allemand est supérieure à celle du mix énergétique français et que le mix énergétique allemand repose principalement sur le charbon, à l’inverse de la France qui a privilégié l’énergie nucléaire.

2.  Comparaison de la production dénergie dorigine agricole

Le tableau suivant doit être lu comme une tentative de construire une synthèse comparée inédite de la situation en matière de production dénergie dorigine agricole dans sept pays.

 

Synthèse comparée de la production dénergie dorigine agricole

 

Part de lagriculture dans la production dénergie

Composition du mix électrique

Les incitations à la
production dénergie
par le secteur agricole

France

Environ 3,5 %

(et pour mémoire on dénombre environ 500 unités de méthanisation agricoles installées)

Données 2017 :

    71,6 % nucléaire

    18,1 % EnR

    7,7 % gaz naturel

    2,6 % autres

Tarifs d’achat de l’électricité (méthanisation, photovoltaïque et biomasse)

Tarifs d’achat pour le biométhane injecté dans les réseaux

Appels d’offre CRE pour la méthanisation

Subventions pour la méthanisation, l’éolien, le solaire thermique et la biomasse

Allemagne

Chiffre manquant, sachant que le secteur agricole produit principalement du biogaz, soit 5,8 % du mix énergétique (9 444 unités de méthanisation installées)

Données 2017 :

    36,6 % charbon

    33,2 % EnR

    13,2 % gaz naturel

    17 % autres

Lois sur les énergies renouvelables de 2000 et 2009 : subvention de la production électrique issue d’énergies renouvelables (tarifs d’achat, appels d’offre, aides aux cultures énergétiques)

Pays-Bas

Chiffre manquant. L’état de dépendance au gaz incite les Pays-Bas à produire principalement du biogaz

Données 2018 :

    75,9 % gaz naturel

    17,4 % EnR

    6,7 % autres

Green deals : partenariats public-privés sans subvention

Energy Investment Tax Allowance : déduction fiscale des investissements dans les technologies

SDE+ : Système d’achat qui subventionne les producteurs d’EnR

Royaume-
Uni

Environ 10 % de l’électricité produite

Données 2018 (toute énergie) :

    42,4 % pétrole

    28 % gaz naturel

    14,7 % EnR

    14,9 % autres

Smart export guarantee : les fournisseurs d’électricité doivent payer l’électricité produite par des petits producteurs d’énergie bas carbone

Agriculture bill : nouvelles aides publiques remplaçant la PAC

États-Unis

Chiffre manquant. En 2017, le nombre d’exploitations agricoles produisant de l’énergie est de 133 000 (6,5 % des exploitations américaines)

Données 2018 :

    32,9 % gaz naturel

    23,9 pétrole

    16 % charbon

    12,2 % EnR

    15 % autres

Rural Energy for America Program : aide financière aux producteurs agricoles pour construire des systèmes d’EnR

Biorefinery renewable chemical, and Biobased Product Manufacturing Assistance Program : Aide financière pour l’installation de technologies de transformation des produits chimiques renouvelables en produits biosourcés

Italie

Chiffre manquant. La production nationale d’énergie est de 43,419 Mtep en 2018

Données 2015 sur la part agricole dans la production nationale d’EnR :

    96 % biocarburants

    83 % éolien

    26 % biogaz

    16 % solaire

    8 % biomasse chaleur

    1 % pompes à chaleur

Fer 1 : Tarif incitatif global sur l’éolien, l’hydroélectricité et le photovoltaïque

Espagne

Seules 566 des 933 000 exploitations agricoles produiraient des EnR (soit 0,06 % d’entre elles).

Données 2018 :

    54,6 % EnR

    42,6 % nucléaire

    2,8 % fossiles

Mesures durgence du 25/02/20 : 30 millions d’euros destinés à la production d’EnR dans le secteur agricole

Décret 244/2019 : facilite l’autoconsommation et la production collective (pas seulement pour le secteur agricole)

Source : OPECST.

 

La difficulté à rassembler des données exhaustives sur la part de l’agriculture dans la production d’énergie et sur la part des exploitations agricoles produisant des EnR démontre la nécessité de se doter doutils de suivi et de comparaison.

En matière de méthanisation, le Royaume-Uni, l’Italie, la France et l’Espagne exploitent davantage le gaz résultant de l’enfouissement des déchets alors que l’Allemagne, l’Autriche et le Danemark produisent la plus grande partie de leur biogaz dans les exploitations agricoles. Il s’agit là d’un paradoxe qu’il faudra résoudre parce que la France dispose pourtant du plus fort potentiel de méthanisation[185]. Il s’agit là d’une des propositions du présent rapport.

Selon l’Association européenne de la biomasse, la Commission européenne a évalué les États-membres en 2012 et relève une production de biogaz plutôt faible en 2007 alors que le potentiel de méthanisation à l’horizon 2020 est très élevé[186].

Production de biogaz en 2007 et potentiel en 2020 dans lUE

Source : https://ec.europa.eu/energy/intelligent/projects/sites/iee-projects/files/projects/documents/biogasin_national_biogas_road_maps.pdf

 

De tels écarts s’expliquent notamment par une forte disponibilité de matières premières : la quantité totale en France de déjections issues de l’élevage, tels que du fumier ou du lisier dépasse les 20 millions de tonnes de matière sèche à la fin des années 2000 et la production de biométhane est de l’ordre de 200 à 250 m3 par tonne de matière sèche, soit un potentiel énergétique de l’ordre de 4 à 5 Mtep[187].

 


VII.  Les Propositions du rapport

Bien qu’il ressorte du présent rapport que les différentes sources d’énergie issues du monde agricole présentent des bilans contrastés en termes davantages et inconvénients, notamment en termes d’acceptabilité sociale, de rendement ou, surtout, d’impact environnemental, il est essentiel de concevoir la transition énergétique à la lumière de la complémentarité des énergies. Il n’y aura pas de solution unique et plusieurs énergies renouvelables devront continuer à être mobilisées simultanément. Parmi ces dernières, le biogaz est particulièrement à développer.

L’ensemble de ces propositions devraient permettre de contribuer à la définition des orientations du plan de relance du Gouvernement faisant suite à la pandémie de Covid-19 et d’en préciser certains aspects.

De plus, un futur projet de loi sur le foncier agricole pourrait aussi être le vecteur dune réforme du monde agricole en intégrant certaines des propositions du présent rapport et allant dans le sens de ses orientations générales en faveur de lagroécologie et de lagroforesterie, dans une vision transversale et systémique des enjeux interdépendants de la santé, de lénergie, de lenvironnement et de lagriculture.

A.  Les Propositions générales

1.  Concilier la politique énergétique française et ses implications pour le monde agricole avec nos objectifs de production alimentaire, de lutte contre lartificialisation des sols, de stockage du carbone dans les sols, de maintien de la biodiversité et de santé publique, en assurant la primauté de la production alimentaire sur les autres objectifs, afin de prévenir les conflits dusage

Cette première proposition est générale et éminemment politique. Elle pose comme principe essentiel la recherche d’une conciliation de la politique énergétique française et de ses implications pour le monde agricole avec nos objectifs de production alimentaire, de lutte contre lartificialisation des sols, de stockage du carbone dans les sols, de maintien de la biodiversité et de santé publique. Cette conciliation doit permettre d’assurer la priorité de la production alimentaire sur les autres activités du monde agricole, afin de prévenir les risques de conflits d’usage.

L’intégration de la santé publique parmi ces objectifs prioritaires vise à tirer les conséquences de l’expérience de la pandémie de Covid-19 car il faut désormais articuler de manière nouvelle dans une vision transversale et systémique les enjeux interdépendants de la santé, de lenvironnement, de lalimentation, de lagriculture et de lénergie, en recourant par exemple au concept de « santé globale » ou de « santé unique ». Entre notre microbiote intestinal, notre système immunitaire, notre alimentation, notre agriculture, notre politique de santé, les pollutions, la déforestation, l’artificialisation des terres, les atteintes à la biodiversité, le réchauffement climatique, la mondialisation et le développement des pandémies, tout se tient. Notre agriculture et notre alimentation largement mondialisées impactent lenvironnement - atteinte à la biodiversité, pollutions, réchauffement climatique, qualité des sols - et façonnent notre microbiote intestinal et notre système immunitaire - facteur de résilience ou de vulnérabilité face aux maladies infectieuses -, tandis que notre politique de santé intervient souvent en bout de course, sur le volet soins et très rarement sur le volet prévention, alors que ces sujets sont interdépendants. Ce constat nécessite de penser la contribution de lagriculture à la fourniture dénergie dans ce cadre élargi et transversal pour éviter les effets rebonds[188] et identifier les synergies possibles.

Comme l’a montré la commission des affaires économiques du Sénat dans sa « Feuille de route pour une relance bas-carbone » publiée en juin 2020[189], composée de 45 mesures réunies en 10 axes, la crise de la pandémie, la transition énergétique et la neutralité carbone sont des enjeux interdépendants qui imposent un changement de méthode politique pour gérer l’après-crise.

2.  Clarifier notre stratégie énergétique nationale vis-à-vis du monde agricole et, plus généralement, améliorer la cohérence interne de la politique énergétique de la France en matière de développement des énergies renouvelables, en renforçant le rôle du Parlement

Cette proposition concerne le pilotage stratégique et la gouvernance de la politique énergétique de la France, vis-à-vis du monde agricole mais aussi, plus généralement, en matière de développement des énergies renouvelables dans un contexte de soutien aux systèmes de production bas-carbone. Des marges d’amélioration demeurent en termes de cohérence interne de la stratégie énergétique de la France. Le présent rapport propose donc qu’un travail transversal soit mené au niveau interministériel, ce qui implique :

- de clarifier le portage politique de cette stratégie par le ministère de la transition écologique (MTE) et de sa direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) et par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, ce dernier devant être davantage associé à ce pilotage ;

- de dépasser les approches parfois restrictives en termes de périmètre ministériel au profit d’un travail interministériel transversal ;

- et de travailler autant que faire se peut dans une logique de projets car seule une telle démarche permettra de faire évoluer - dans un sens pragmatique - la gouvernance de la politique énergétique en associant tous les acteurs concernés[190], à l’heure où coexistent de nombreuses instances de consultation sans pouvoirs réels, une représentation insuffisante de certaines parties prenantes et une coordination interministérielle défaillante[191].

Les appels d’offres de la CRE représentant un outil essentiel de pilotage de la politique de développement des énergies renouvelables, il faut veiller à bien définir leurs objectifs et à optimiser de manière stratégique leur utilisation.

Cette préoccupation d’améliorer la cohérence interne de la politique énergétique de la France en matière de développement des énergies renouvelables, grâce à un pilotage interministériel stratégique dans une logique de projets, est valable pour le secteur agricole mais vos rapporteurs ont relevé, à l’occasion d’autres travaux, sa pertinence pour le stockage du carbone, la gestion des catastrophes naturelles, la pollution de l’air, l’utilisation du glyphosate ou, encore, l’encadrement des produits phytosanitaires.

En outre, il convient de renforcer le rôle du Parlement dans la définition et le contrôle de notre stratégie énergétique nationale. Plusieurs mesures peuvent être envisagées, qui dépassent le cadre du présent rapport, mais parmi elles, il serait particulièrement pertinent de remplacer la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), publiée aujourdhui par voie réglementaire, par une véritable loi de programmation pluriannuelle de lénergie, qui serait débattue dans chacune des deux assemblées. La loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat a introduit, dans le code de l’énergie, l’article L. 100‑1 A[192] qui prévoit qu’à partir de 2023 une loi de programmation quinquennale vienne déterminer « les objectifs et fixe les priorités daction de la politique énergétique nationale ». Une telle disposition va dans le bon sens mais il faudra veiller à ce qu’elle ne limite pas le rôle du Parlement à celui dun législateur fixant de grands objectifs généraux : le Parlement doit pouvoir définir les objectifs de développement des énergies renouvelables pour chacune des filières et pas seulement par type d’énergie, à savoir l’électricité, la chaleur, le carburant et le gaz. La PPE doit incomber au Parlement et la voie réglementaire ne doit être utilisée que pour fixer des niveaux de détail fins, et en tout état de cause pas les grandes orientations par filière.

Cette nouvelle PPE après 2023 ainsi que la future SNBC devront mieux tenir compte des enjeux de la production dénergie dans le secteur agricole et de ses systèmes de production bas-carbone, les objectifs actuels étant clairement insuffisants.

3.  Soutenir la recherche sur la production dénergie dans le secteur agricole et encourager le financement de démarches innovantes, en dotant la stratégie de recherche en énergie dun volet agricole

Fidèle à son rôle d’interface entre le monde politique et le monde de la recherche, l’Office appelle, par cette troisième proposition, à soutenir la recherche sur la production dénergie dans le secteur agricole et à encourager le financement de démarches innovantes.

Un tel soutien impose de mobiliser les dispositifs existants pour les enrichir d’un volet agricole. La stratégie de recherche en énergie renouvelable devra ainsi se doter utilement dun volet agricole.

En outre, le recours innovant aux TIC et à leurs usages, notamment avec lintelligence articificielle (IA) permettant la mise en place de réseaux d’énergie intelligents (smart grids), doit être le plus large possible. La recherche fondamentale, la recherche appliquée et la R&D peuvent être mobilisées à cette fin, en amont de la diffusion et de la commercialisation.

Comme il sera vu plus loin s’agissant spécifiquement du photovoltaïque, la construction de « panneaux intelligents » innovants constitue par exemple une piste d’avenir.

4.  Assurer un suivi régulier et rigoureux de la production dénergie dans le secteur agricole, en intégrant autant que possible les approches en termes danalyses de cycle de vie (ACV)

Alors que la production d’énergie ne fait pas l’objet d’un suivi régulier par les pouvoirs publics, il est proposé d’en assurer un suivi régulier et rigoureux, en intégrant autant que possible les approches en termes danalyses de cycle de vie (ACV), ce qui implique de mettre en place des questionnaires sur la production d’énergie dans le secteur agricole en s’inspirant par exemple de la méthodologie de l’Agreste[193], du recensement général agricole et de la statistique agricole annuelle mais en en élargissant les thèmes d’études. Ces données devront être publiques.

Les règles de calcul des ACV devront, à un moment ou à un autre, être fixées par le législateur ou par l’Union européenne, afin qu’elles soient les mêmes pour tous.

5.  Favoriser la production dénergie et sa consommation dans le secteur agricole, à travers des incitations, permettant dencourager lattractivité des modèles daffaires pour les agriculteurs, en adaptant les tarifs réglementés, les appels doffres et les guichets ouverts, en utilisant le levier de la fiscalité agricole (rattachement au régime des bénéfices agricoles  BA) et en levant certains freins réglementaires à la production dénergie et à sa consommation dans le secteur agricole

Cette proposition se veut opérationnelle et nécessitera une mobilisation du Gouvernement et du Parlement afin de favoriser la production d’énergie et sa consommation dans le secteur agricole.

Il s’agit tout d’abord de poursuivre et damplifier de manière ciblée le régime dincitations, permettant d’encourager l’attractivité des modèles d’affaires pour les agriculteurs, en adaptant les tarifs réglementés, les appels d’offres et les guichets ouverts. Par exemple, certains seuils de guichets ouverts doivent être relevés, notamment autour de la méthanisation et du solaire sur toiture[194] afin de faciliter les projets agricoles.

Il conviendra aussi de réfléchir à lutilisation du levier de la fiscalité agricole en élargissant la possibilité pour les agriculteurs de rattacher les revenus tirés de la production d’énergie au régime des bénéfices agricoles (BA).

Il faudrait enfin lever certains freins réglementaires à la production d’énergie et à sa consommation dans le secteur agricole ou dans les territoires à proximité, par exemple en simplifiant les démarches administratives et les procédures d’autorisation des projets de production d’énergies renouvelables, de manière à favoriser l’acquisition par le monde agricole de ses propres installations de production d’énergie et à faciliter l’autoconsommation. Une telle évolution doit se faire sans revoir à la baisse les exigences liées à la sécurité et à l’environnement.

L’ensemble des politiques publiques doit encourager lappropriation des infrastructures de production dénergie par les agriculteurs et leurs groupements plutôt que par les énergéticiens seuls ou par des opérateurs tiers. Le fait de favoriser l’acquisition par le monde agricole de ses propres installations de production d’énergie est particulièrement saillant dans les filières éoliennes et photovoltaïques dans lesquelles les agriculteurs se contentent souvent de mettre à disposition des ressources foncières. Un tel principe permettrait aussi de faire évoluer les regards sur ces filières.

De même, vendre l’énergie qu’ils produisent est aujourd’hui le modèle économique dominant pour les agriculteurs, mais lautoconsommation doit être facilitée. Il doit être possible pour eux d’utiliser l’énergie qu’ils produisent dans les exploitations, par exemple en utilisant plus de solaire thermique, de pompes à chaleur et de biogaz local, ainsi qu’en permettant aux machines agricoles d’utiliser les alcools et les huiles produits à destination de la filière biocarburants, l’usage carburant du biométhane produit en local devant être autorisé.

Vivre de leur production alimentaire est une fierté pour de nombreux agriculteurs, il en sera de même pour leur production d’énergie. À cet égard, le petit éolien, la petite hydroélectricité et la géothermie sont autant de solutions pertinentes pour l’autoconsommation à l’échelle de l’exploitation agricole.

Ne faisant pas l’objet d’une politique d’incitation, lautoconsommation à la ferme reste très limitée. La production énergétique du secteur agricole pourrait répondre aux besoins des exploitations elles‑mêmes et/ou à des usages locaux dans une logique d’économie circulaire territoriale.

La consommation locale doit donc être facilitée, au niveau des exploitations ou dans les territoires à proximité, le cas échéant dans des « communautés énergétiques ». Ces dernières, prévues par les législations européenne[195] et nationale[196] récentes, regroupent des acteurs locaux, y compris à l’échelle individuelle dans des modes de production d’énergie renouvelable, en réduisant les frais liés à la consommation d’énergie qu’ils auront produite. Dans de nombreux cas, en particulier pour la méthanisation, l’éolien ou le photovoltaïque, le raccordement aux réseaux de gaz et délectricité doit rester lobjectif principal mais lincitation à lautoconsommation et le développement de solutions technologiques adaptées à la taille des exploitations favoriseront la production d’énergie par les agriculteurs. Un dispositif d’incitation à l’autoconsommation pourrait être mis en œuvre, même si les politiques publiques doivent continuer à soutenir prioritairement l’injection de biogaz ou d’électricité dans les réseaux.

L’essor des énergies renouvelables, qui sont des énergies locales, va entraîner le basculement dun système dénergie centralisé à un monde plus distribué. C’est une transition riche d’opportunités mais aussi de risques, qui devra donc faire l’objet d’accompagnements.

6.  ployer des projets de territoire pour la production dénergie dans le secteur agricole, dans le cadre de la politique daménagement des territoires

Vos rapporteurs recommandent une approche territoriale de la production dénergie dans le secteur agricole, intégrée à la politique daménagement du territoire. Cette dernière doit donc être enrichie d’une politique énergétique d’origine agricole territorialisée, déclinée dans des projets de territoire tenant compte des caractéristiques locales et pouvant aller jusqu’à des mécanismes participatifs, avec ou sans « communautés énergétiques ». L’exemple du méthaniseur « méthamoly » est emblématique : les projets doivent être intégrés aux territoires, avec un rôle important des régions.

Geneviève Pierre, dans son ouvrage précité Agro-énergies dans les territoires, Coopérer pour lautonomie locale, promeut des changements de paradigmes sur l’énergie en privilégiant « trois caractéristiques qui justifient lintérêt pour des agro-énergies localisées : un mix de productions décarbonées, la relocalisation de la production et de la consommation et la sobriété énergétique ». La transition énergétique ne peut ignorer les atouts, les opportunités, les ressources de l’agriculture et des campagnes et contribue à redessiner les contours de la multifonctionnalité agricole et des espaces ruraux.

Un travail de rationalisation et d’amélioration des modèles d’affaires les plus performants et adaptés aux territoires et aux divers systèmes agricoles reste à mener. La diffusion de ces modèles d’affaires doit être portée à travers une animation territoriale renforcée, avec les acteurs locaux, les chambres d’agriculture et les organisations professionnelles représentatives du secteur agricole.

Les relations de partenariat peuvent prendre différentes formes, dont voici quelques exemples :

- contrat de vente d’énergie thermique (air chaud ou eau chaude) ;

- contrat de vente de biomasse vers une chaufferie collective ;

- contrat d’apport de déjections animales pour une installation de méthanisation et, inversement, récupération de déchets pour le méthaniseur (cas des boues d’épuration) ;

- location de terrains pour des installations éoliennes ou photovoltaïques, avec en retour valorisation agricole des terres ;

- participation à une structure juridique et/ou un projet participatif ;

- contrat de vente d’huiles végétales pour des flottes captives municipales, contrat de vente d’électricité à ERDF ou à un autre réseau.

Le déploiement de certaines solutions implique plusieurs acteurs du territoire avec des financements voire des équipements partagés (comme une chaudière centralisée). Ces solutions améliorent l’acceptabilité des EnR par la société, surtout quand des financements participatifs permettent des retombés économiques pour les territoires.

Ces projets de territoire pourront aussi contribuer à réunir dans des visions partagées le monde rural et le monde urbain, le premier étant peu dense mais détenteur des ressources permettant la production d’énergie ‑ dont le foncier ‑ alors que le second est plus souvent consommateur.

7.  Adopter une démarche de certification des projets conduits, par exemple sous la forme dun label « Agroénergie »

Il serait pertinent d’entamer une démarche de certification des projets de production dénergie conduits, par exemple en ayant recours à des labels. Ces derniers pourraient exister à l’échelle des filières ou bien faire l’objet d’une démarche intégrée sous un nom unique. Dans ce cas, vos rapporteurs proposent le label « Agroénergie », qui répondrait aux défis et aux risques identifiés dans le présent rapport. Le label viserait des projets qui permettent de prévenir les conflits dusage (l’agrivoltaïsme, la méthanisation raisonnée…), de respecter la priorité de la production alimentaire, d’utiliser des analyses de cycle de vie (ACV) ou encore de sinscrire dans une approche territorialisée.

Il peut être relevé que l’entreprise Akuo Energy développe des projets sous sa marque « Agrinergie », qui visent à combiner l’activité agricole sur un territoire, en tenant compte des problématiques de ce dernier, et l’activité de production d’énergie, comme le montre le premier projet de cette entreprise sur l’Île de la Réunion avec l’installation de serres photovoltaïques anticycloniques.

8.  Améliorer loffre de formation en matière de production dénergie dans le secteur agricole, au niveau de la formation initiale (secondaire et supérieur) comme de la formation continue, certaines formations devant permettre lapprentissage de compétences de haut niveau, y compris celles liées au montage et à la gestion des installations énergétiques

La sensibilisation des agriculteurs, mais aussi des techniciens et des conseillers agricoles, aux enjeux de la production d’énergie dans le secteur agricole doit commencer dès le stade de la formation initiale, dans le secondaire comme le supérieur, puis se poursuivre dans la formation continue. L’APCA pourrait, sous le contrôle du Gouvernement, assurer cette mission de formation continue.

Outre la sensibilisation et l’initiation, certaines formations doivent permettre l’apprentissage de compétences de haut niveau, y compris celles liées au montage et à la gestion des installations énergétiques. Si léolien et le photovoltaïque sont connus et ont été largement diffusés, c’est souvent la conséquence d’une méconnaissance des autres solutions technologiques
‑ comme la méthanisation ‑ et de la mobilisation d’acteurs extérieurs au monde agricole (énergéticiens et développeurs), qui ont parfois poussé à ladoption de solutions clés en main faciles mais pas toujours avantageuses en termes de retours pour le monde agricole. La production d’énergie est chronophage or la charge de travail pour les agriculteurs n’est pas la même selon les filières et elle laisse plus ou moins de possibilités de diversifier son activité.

Il est probable que des formations dédiées à la production d’énergie dans le secteur agricole permettront des stratégies plus indépendantes et plus éclairées de la part des exploitants agricoles.

9.  Protéger le foncier agricole à travers un nouveau cadre législatif

Comme il a été vu, le foncier agricole est peu disponible en France, l’artificialisation des terres réduisant encore chaque année les ressources foncières disponibles. Il s’agit d’un des freins au développement des EnR, dont certaines, comme les biocarburants ou l’électricité photovoltaïque au sol sont, largement consommatrices de terres et peuvent induire des conflits d’usage, préjudiciables aux cultures alimentaires (végétales et animales).

Il est préconisé d’engager une réflexion sur le foncier agricole, dans la continuité du rapport publié en décembre 2018 de la mission d’information commune sur le foncier agricole de nos collègues députés Anne-Laurence Petel et Dominique Potier[197].

Il doit s’agir avant tout de faire déboucher cette réflexion sur la proposition dun nouveau cadre législatif visant à mieux protéger le foncier agricole, ce que les deux anciens ministres de l’agriculture s’étaient engagés à défendre par le dépôt d’un projet de loi. Lors du salon de l’agriculture 2020, le mardi 25 février, 18 organisations du monde agricole avaient ainsi solennellement demandé au Gouvernement d’honorer sa parole en déposant un projet de loi sur le foncier agricole dès cette année.

Le nouveau ministre de l’agriculture et de l’alimentation a d’ores et déjà été saisi en juillet 2020 par les syndicats du monde agricole de la demande de préparation d’un projet de loi sur le foncier agricole donnant des moyens de lutter contre les contournements actuels et l’artificialisation des terres.

Ce futur projet de loi pourrait aussi être le vecteur dune réforme du monde agricole dans le sens des orientations générales du présent rapport en faveur de lagroécologie et de lagroforesterie, dans une vision transversale et systémique des enjeux interdépendants de la santé, de lénergie, de lenvironnement et de lagriculture.

B.  Les Propositions sectorielles

Les propositions spécifiques à telle ou telle filière visent à développer par ordre dimportance et de priorité à donner dans nos politiques publiques : la méthanisation, qui permet de valoriser la partie fermentescible de la biomasse et des déchets, le photovoltaïque, léolien et les biocarburants. Les autres productions d’énergie issues du monde agricole sont de taille si négligeable (petite hydroélectricité, géothermie…) que le présent rapport n’a pas entendu formuler de propositions spécifiques pour elles, en dépit de leur intérêt.

Les dernières propositions dépassent le strict cadre de l’étude et abordent les perspectives de stockage ou de conversion de lénergie, seul moyen de résoudre le problème de l’intermittence des filières photovoltaïques et éoliennes.

Elles évoquent aussi lutilisation de lhydrogène et des processus tels que la méthanation, à ne pas confondre avec la méthanisation et qui est un processus de production de méthane de synthèse (CH4) à partir de dihydrogène (H2) et de monoxyde de carbone (CO) ou de dioxyde de carbone (CO2), grâce à un catalyseur ou des microorganismes. La méthanation pouvant être utilisée pour la conversion d’électricité en gaz (« Power to gas »), cette électricité devant être autant que possible décarbonée, ce qui renforce l’intérêt de la méthanation.

 

Sur la méthanisation

10.  Développer de manière prioritaire la méthanisation, la coupler le plus souvent possible à la méthanation, mobiliser la biomasse au service de la bioéconomie et accroître les ambitions trop modestes de la Programmation pluriannuelle de lénergie (PPE) sur le biogaz

La méthanisation représente un mode de production dénergie vertueux et majeur à privilégier dans le monde agricole et qui lui est spécifique. En effet l’éolien, le solaire PV ou le solaire thermique ne sont pas spécifiques au secteur agricole. Outre son rendement énergétique de bon niveau, elle bénéficie d’une proximité avec lactivité agricole et lui est complémentaire, sans induire de risques de conflits dusage. Elle favorise l’économie circulaire, avec le traitement des déchets fermentescibles, qui va devenir un sujet de premier plan avec l’obligation de la collecte des biodéchets dans les villes au plus tard le 31 décembre 2023[198]. La micro-méthanisation dans les villes sera une piste[199] mais l’existence d’un plus grand nombre de méthaniseurs en zone rurale et péri-urbaine sera nécessaire.

La méthanisation peut être un levier pour la transition agroécologique, en apportant en même temps des réponses à certaines questions du monde agricole et en faisant entrer les exploitations agricoles dans une approche transversale et multiperformance. L’écart de prix de un à quatre du biogaz avec le prix du gaz naturel[200] implique d’intégrer toutes les externalités dans le modèle économique de la filière biogaz. D’après le cabinet ENEA Consulting, l’évaluation de ces externalités peut être estimée entre 40 et 70 euros/MWh, en fonction de la valeur de la tonne de CO2.

Valeur des externalités de la filière biogaz


Source : ENEA Consulting.

Il faut noter que le nombre de méthaniseurs est faible mais en croissance en France, et que cette filière est donc à valoriser. Un pays comme l’Allemagne ayant énormément développé cette filière n’a désormais plus à en faire une priorité, mais notre voisin constitue un laboratoire intéressant pour ce qu’il convient de faire et de ne pas faire.

Dans la mesure où la filière biogaz impose de valoriser la biomasse et les déchets fermentescibles, elle comporte toujours le risque dinduire des tensions sur les productions, voire de poser dans des cas rares des conflits dusage ou de réduire le retour au sol de matière organique, essentiel pour le stockage du carbone, il faut se donner les moyens d’accroître la biomasse.

Certaines solutions permettent de contourner ces difficultés en matière de tensions et de conflits et d’augmenter notre production de biomasse, à l’instar des cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE) mais aussi du recours plus systématique aux haies (facteurs de biodiversité, productrices de biomasse, bénéfiques pour le stockage du carbone…) ou plus modestement – mais les petites rivières font les grands fleuves - de la récupération des sarments dans les vignobles.

 

En plus des CIVE, il faut souligner que certaines cultures ont un intérêt particulier pour la production rapide de biomasse, à l’image du miscanthus, de surcroît potentiellement mobilisable aussi pour la production de biocarburants de 2e génération.

Il ne faut pas, en outre, négliger les difficultés potentielles liées à la mise en œuvre de ces solutions : effets du changement climatique (instabilité et phénomènes comme la sécheresse), surcoût (en termes de travail, d’énergie…), nouveaux besoins d’intrants (eau, fertilisants, voire produits phytosanitaires…), etc. Une méthanisation raisonnée doit permettre de réduire les tensions sur les productions et de prévenir les risques des cas rares de conflits d’usage.

Comme vu précédemment, il est très utile de coupler la méthanisation le plus souvent possible à la méthanation, afin de récupérer le CO2 issu de la méthanisation et de stocker de l’énergie, c’est pourquoi il faudra chercher à assortir tous les nouveaux projets de méthaniseurs d’une installation de méthanation.

Les rapporteurs déplorent les ambitions trop modestes de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) pour le biogaz et préconisent de porter davantage d’attention à cette filière, qu’il convient également d’intégrer pleinement à la SNBC (elle est évidemment d’ores et déjà pleinement partie prenante de la SNMB). Alors que la LTECV fixait en 2015 un objectif ambitieux de 10 % de la consommation de gaz en 2030, soit 39 à 42 TWh, la PPE de 2016 a fixé l’objectif de 8 TWh injectés dans le réseau en 2023, que la PPE de 2020 a ramené à 6 TWh, ce qui est clairement insuffisant[201].

11.  Défendre le droit à linjection du biogaz et encourager le raccordement au réseau national de gaz des installations existantes

Principale source d’énergie renouvelable en matière de gaz, le biométhane doit, d’une part, voir son injection dans les réseaux de transport et de distribution de gaz naturel encouragée et soutenue financièrement.

D’autre part, les méthaniseurs doivent le plus souvent possible être reliés au réseau national de gaz naturel, ce raccordement au réseau devant s’inscrire dans le cadre d’un droit reconnu et protégé, le droit à l’injection.

La loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi EGALIM, a instauré le droit à linjection dans les réseaux de gaz au profit des producteurs de biogaz (article L. 453-9 du code de l’énergie) afin de faciliter le développement des projets de méthanisation. Cette avancée mérite d’être saluée mais elle n’est pas appliquée de manière satisfaisante. Le décret d’application n° 2019-665 et l’arrêté relatif aux conditions de mise en œuvre de ce droit à l’injection ont été publiés le 29 juin 2019. Le plafond d’investissement est fixé par ce décret à 0,4 % des recettes annuelles des tarifs d’utilisation du réseau de distribution. Or, pour GRDF, ce plafond savère en pratique impossible à appliquer alors que la concertation envisageait un plafond cinq fois plus élevé et serait en contradiction évidente avec les objectifs d’une politique énergétique qui se doit d’être lisible et stable pour rassurer et inciter les acteurs à investir massivement dans la transition énergétique.

12.  Assurer la traçabilité des intrants dans les méthaniseurs pour garantir leur pouvoir méthanogène ainsi que la bonne qualité des digestats en vue de leur épandage

La traçabilité de chaque intrant dans un méthaniseur est utile à plusieurs égards : elle permet de connaître leur « pouvoir méthanogène »[202] de certifier la bonne qualité du digestat et de distinguer dès le stade de l’amont du processus de méthanisation deux types de digestats selon leur qualité, ce qui permet d’isoler les digestats de qualité incertaine des digestats de bonne qualité, sans les mélanger a posteriori. Le suivi de la provenance des intrants contribue donc à garantir dès le stade amont une méthanisation propre, sûre et durable.

Connaître les intrants est aussi nécessaire à l’identification du caractère agricole ou non du méthaniseur. Sur les 950 méthaniseurs recensés, on dénombre environ 500 méthaniseurs liés à lagriculture (c’est-à-dire utilisant au moins 50 % d’intrants d’origine agricole) mais ce chiffre est lui-même sujet à caution en raison de la faiblesse du suivi de ces installations et de leurs intrants. La traçabilité est aussi une condition au processus de labellisation évoqué précédemment.

Dans la mesure où la qualité du digestat dépend directement de la qualité des intrants, et en vue de garantir un niveau minimal de qualité des digestats destinés à l’épandage, il convient de viser le respect de critères defficacité (effet fertilisant, fonction des caractéristiques physiques et biologiques des sols, etc., ces critères nécessitant de savoir maîtriser le retour au sol des digestats et de les inclure dans les pratiques culturales) et dinnocuité (ETM[203], composés organiques, agents microbiologiques, etc.), le cas échéant des contrôles qualité doivent être réalisés.

Pour être normalisé, un digestat doit être composté selon les critères des normes existantes (NFU44-051, NFU44-095, NFU42-001...) et donc être constitué de matières premières prévues par ces normes. Aujourd’hui sauf homologation, les digestats bruts sont soumis à autorisation préfectorale pour leur épandage. Les services de l’état auront de plus en plus à analyser la qualité du digestat selon sa compatibilité avec les types d’agriculture concernés. Plutôt qu’une approche duale (accord ou rejet), une approche « contextuelle » doit permettre des épandages adaptés à la nature des cultures et des sols affectataires dont les propriétés physico-chimiques peuvent fortement varier. Pour les agriculteurs, cela peut conduire à reconcevoir leurs pratiques et leurs systèmes de culture.

Ces observations impliquent d’intégrer dans la conception du projet de méthaniseur, le dimensionnement - y compris financier - et la mise en place des installations des ateliers de traitement des digestats, avec des étapes de compostage, de séchage et d’hygiénisation.

Pour Frédéric Terrisse, directeur général adjoint d’Engie Bioz et président de la commission gaz renouvelable du syndicat des énergies renouvelables, le digestat doit pouvoir être commercialisé : « aujourdhui le digestat est considéré comme un déchet, son épandage est donc soumis à des règles administratives très strictes. Dès lors quil y a un cahier des charges strict, il semble important de sortir le digestat de son statut de déchet afin quil ait le statut de produit, et donc permettre la commercialisation du digestat ».

Le présent rapport invite à repenser globalement la notion de déchet : le digestat ne doit pas être considéré comme un simple déchet mais plutôt comme une ressource, pour autant il serait prématuré de le rendre commercialisable. Une telle évolution juridique doit être bien analysée et mesurée en termes d’impacts et d’effets collatéraux.

13.  Organiser une vigilance sur la qualité des installations par un suivi régulier et recourir à des contrôles de sécurité ponctuels

Augmenter le nombre de méthaniseurs passera par des exigences accrues en termes de sécurité, c’est pourquoi il faudra organiser une vigilance sur la qualité des installations par un suivi régulier et recourir à des contrôles de sécurité plus ponctuels. Les services du ministère de l’agriculture et de l’alimentation – les directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la Forêt (DRAAF) – et celles du ministère de la Transition écologique - les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) – pourront s’acquitter de cette mission.

Il faudra aussi réfléchir à un système de certification des exploitants, à l’image du Certiphyto pour l’utilisation des produits phytosanitaires, par exemple en recourant au label « Agroénergie », proposé au point 7 de la présente liste.

14.  Réduire les fuites indésirables de gaz lors de la méthanisation, notamment de méthane, de CO2 et dammoniac

Le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) estime les émissions fugitives de biogaz entre 0 % et 10 %. Ce biogaz, étant constitué de CO2 et de CH4 (ce dernier, le méthane, ayant un potentiel de réchauffement global 25 fois plus élevé que le dioxyde de carbone) mais aussi de traces d’ammoniac et d’hydrogène sulfuré, peut avoir un impact environnemental et sanitaire s’il est relâché. La fuite de ce biogaz peut aussi avoir un impact économique, influant sur la rentabilité des installations de méthanisation.

De plus, si le méthane est avant tout un GES il joue aussi un rôle important dans la chimie de l’atmosphère, notamment pour la production d’ozone, qui est lui-même un GES et un polluant de l’air, dont l’impact sanitaire est connu : ses effets sur la santé humaine, outre une irritation des yeux, des voies nasales et de la gorge, une toux et des maux de tête, sont une diminution de la fonction pulmonaire, le déclenchement de crises d’asthme, et l’apparition de maladies respiratoires. De plus, l’ozone a un effet sur la flore et peut affecter les rendements agricoles de manière significative.

L’ammoniac, pour sa part, contribue à la dégradation de la biodiversité végétale et à la formation des particules fines dangereuses pour la santé humaine.

Outre les opérations de transport, des émissions ont notamment lieu à l’étape de la digestion. Il est nécessaire d’identifier la localisation de ces fuites dans un objectif global de réduction de ces émissions. La maîtrise de ces émissions implique une surveillance appuyée de ces installations, en plus d’une bonne conduite et d’une conception correcte. En outre, Trackyleaks a développé une méthode d’identification et de quantification de ces émissions fugitives, à l’aide d’une caméra infrarouge à détection de gaz. L’usage de cette méthode devrait devenir systématique afin de certifier et labelliser une production de biométhane dans le secteur agricole.

15.  Réhausser les limites des travaux de renforcement prévus par le compte daffectation spéciale (CAS) « Financement des aides aux collectivités pour lélectrification rurale » (Facé)

Le Facé, qui signifiait « Fonds d’amortissement des charges d’électrification » de 1936 à 2012 et qui a été rebaptisé « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale » lors de sa transformation en compte d’affectation spéciale (CAS), prévoit entre autres le financement des opérations de production délectricité par des énergies renouvelables si ces opérations permettent déviter des extensions ou des renforcements de réseaux, ces dépenses s’intégrant dans une enveloppe plafonnée au titre des « travaux de renforcement ». Il est donc proposé, par une fongibilité asymétrique, que les limitations de cette enveloppe de travaux soient réhaussées : les autres dépenses au titre du Facé doivent pouvoir être utilisées sur cette tranche, mais l’inverse ne doit pas être possible.

 

Sur le photovoltaïque

16.  Pour les projets photovoltaïques, utiliser le levier des seuils des appels doffres et des guichets ouverts et soutenir lagrivoltaïsme, en vue déviter lartificialisation des sols et recourir le plus possible aux technologies innovantes comme lintelligence artificielle

Le levier des seuils des appels doffres et des guichets ouverts pour les projets photovoltaïques est à utiliser largement pour piloter le développement de la filière.

Lagrivoltaïsme doit être particulièrement soutenu car il permet d’éviter l’artificialisation des sols. Les installations sur toitures et les ombrières doivent être favorisées.

De plus, l’évolution des technologies photovoltaïques flexibles (cellules solaires à couche mince ou « thin-film solar cells », perovskites, siliciums organiques…) ouvrent des opportunités pour des structures photovoltaïques qui peuvent épouser différents types de forme géométrique.

Cette filière devra, en outre, avantageusement recourir le plus possible aux TIC, notamment avec lintelligence artificielle (IA), à travers des « réseaux intelligents », comme le montrent les innovations d’agrivoltaïsme dynamique des entreprises Sun’Agri, Sun’R (en coopération avec l’INRAE), Ombrea ou, encore, Akuo Energy.

 

Sur léolien

17.  Engager une réflexion sur le soutien aux éoliennes terrestres et veiller au respect de la règle de remise en état des terres à la suite des opérations de démantèlement

L’éolien est l’énergie électrique renouvelable produisant le plus d’électricité en France, selon le dernier bilan RTE, après l’hydroélectricité. De plus, les objectifs de production d’électricité d’origine éolienne fixés par la PPE précédente ont été atteints et la nouvelle PPE prévoit à nouveau un doublement pour 2028.

Vos deux rapporteurs souscrivent tous les deux à la formulation de la présente proposition, mais ils ont souhaité l’argumenter de manière différente.

Pour Jean-Luc Fugit, il semble nécessaire d’engager une réflexion sur le soutien aux éoliennes terrestres et de remettre à plat notre politique dincitations en vue de la réorienter, y compris en révisant les objectifs de la nouvelle PPE, particulièrement ambitieuse pour la filière éolienne.

Le vent tourne pour cette filière et comme l’avait déclaré le Président de la République lors d’un déplacement à Pau le 14 janvier 2020, « la capacité à développer massivement de léolien est réduite. On pourra le faire où il y a consensus, mais le consensus autour de léolien est en train de nettement saffaiblir dans notre pays ».

Il n’est donc pas sûr quil soit pertinent daccroître les soutiens à la filière de léolien terrestre, celle-ci étant déjà largement développée en France et ayant bénéficié de soutiens très importants au cours des 20 dernières années, surtout que d’autres filières pouvant contribuer au développement des EnR et à la réduction de nos émissions de GES, méritent au moins autant d’être soutenues, à l’heure où les moyens de l’Etat doivent être alloués de la manière la plus efficiente possible (pas seulement d’un point de vue économique mais surtout d’un point de vue environnemental).

Les bilans ACV sont moins favorables aux éoliennes terrestres que l’impact environnemental qui avait été imaginé dans les années 1990 : la fabrication des composants et leur transport (ce sont surtout des matériels importés), leur utilisation de terres rares (néodyme[204] et dysprosium), les difficultés à recycler certaines des matières utilisées (cas des matériaux composites « non recyclables » en particulier), le fait qu’une éolienne tourne en moyenne 2 000 heures par an et soit un tiers du temps en maintenance, tous ces éléments questionnent la pertinence de la filière, surtout que leur forte intermittence, difficile à anticiper, conduit les éoliennes à nécessiter plus de stockage que d’autres EnR - comme le photovoltaïque - car s’il est possible de déterminer le temps de fonctionnement d’un panneau photovoltaïque, ce n’est pas aussi simple pour une éolienne. Il faut ajouter à ces défauts loccupation des terres, les pollutions visuelles et sonores pour nos paysages et nos campagnes, ainsi que les impacts sur la faune, certes discutés et à l’ampleur incertaine, en particulier sur les animaux d’élevage et les oiseaux.

Selon Roland Courteau, certes les problèmes d’intermittence, de stockage et de stabilité du réseau électrique constituent de réels freins au rôle que pourra jouer l’éolien terrestre dans le futur, puisqu’il faut maintenir la tension et la fréquence constantes, malgré la variabilité du vent. Cependant, nous sommes en retard en matière d’énergies renouvelables, et nous devons accélérer notre transition énergétique. Or les énergies éoliennes et solaires permettent d’augmenter de manière significative, la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique. Il nous faudra calibrer leur développement, comme le suggérait Nicolas Hulot, « pour quil ne soit, ni trop coûteux, ni anarchique : en résumé, il faut un développement soutenable ». Ce qui est certain, c’est que la réussite de la transition écologique se jouera dans les territoires car le système centralisé national n’est plus le plus efficace économiquement. Nous devons, au total, défendre un mix énergétique plus équilibré portant sur toutes les formes d’énergie.

Il faut, en outre, et vos deux rapporteurs partagent cette préoccupation, veiller à ce que toutes les opérations de démantèlement des éoliennes s’accompagnent bien de la remise en état des terres agricoles, sachant que le droit existant ne prévoit qu’un minimum d’un mètre de profondeur et que cette exigence pourrait être accrue.

C’est à l’exploitant du parc éolien qu’incombe l’obligation[205] de démanteler les éoliennes qu’il exploite une fois qu’elles arrivent en fin de vie, et ce, afin de limiter leur impact sur l’environnement.

Ce démantèlement doit comprendre le démontage de léolienne et du poste électrique, lexcavation des fondations, le retrait de la plupart des câbles, la remise en état des terrains, et la valorisation des déchets du démontage. Les fondations excavées sont ensuite remplacées par des terres de caractéristiques comparables aux terres en place à proximité de l’installation éolienne[206].

Il convient de noter que le socle d’une éolienne nécessite la mise en œuvre d’environ 400 m3 de béton armé pour un poids d’à peu près un millier de tonnes (jusqu’environ 1 500 tonnes).

Le socle dune éolienne

https://decrypterlenergie.org/wp-content/uploads/Eolienne_Vue-fondation_CTEWind_500px.png

Fondation pour éolienne

Sources : CTE Wind et OTE Engineering.

 

Sur les biocarburants

18.  Tirer les conséquences de labandon progressif des soutiens aux biocarburants de première génération et développer des technologies innovantes, par exemple en matière de biocarburants aéronautiques

Il faut tirer les conséquences de l’abandon progressif des soutiens aux biocarburants de première génération et du faible développement des usages pertinents (comme les véhicules flexfuel), en vue d’adapter nos filières agricoles à cette réalité. Les biocarburants de première génération nont pas un grand avenir et ne seront pas des débouchés pertinents pour nos agriculteurs, notamment du fait de leurs implications en termes de conflits d’usage avec l’alimentation, de changement d’affectation des sols, de tensions sur les prix des denrées alimentaires, de rendement énergétique moindre et d’analyses de cycle de vie (ACV) illustrant un bilan global d’émission de gaz à effet de serre peu satisfaisant, mais aussi compte tenu du développement des véhicules électriques.

Le groupe Avril, leader de la production d’esters méthyliques d’huiles végétales, qui importe environ un tiers de son biogazole, va fermer deux de ses six usines, ce qui est révélateur.

Des situations surprenantes comme l’importation d’huile de palme issue de la déforestation pour produire du biodiesel interrogent, en particulier dans le cas de Total à la Mède où, pour maintenir des emplois sur le site, l’approvisionnement est garanti à des prix réduits. En ACV, comme l’ont fait apparaître les auditions, les biocarburants importés émettent probablement beaucoup plus de CO2 que le diesel issu d’énergies fossiles.

Les biocarburants de deuxième génération permettront d’éviter la concurrence entre usage alimentaire et non alimentaire et pourront utiliser la voie thermochimique dite « biomass to liquid » qui consiste à gazéifier la biomasse à haute température et à la transformer en carburant de très bonne qualité par le procédé Fischer-Tropsch[207]. En France un premier pilote a été mis en place par Total et fonctionne depuis 2019 dans sa raffinerie de Dunkerque.

À terme, et parce qu’il n’est pas du tout sûr que le transport aérien soit révolutionné par le recours à l’énergie électrique même si des projets électriques et hybrides sérieux apparaissent pour le transport aérien courtes distances, il faudrait cependant favoriser lémergence dune filière française de biocarburants aéronautiques ou biojet fuels et compenser les surcoûts liés à leur utilisation (ces biocarburants sont 30 % plus chers que les jet fuels classiques à base de kérosène). Afin d’encourager leur essor, des lignes aériennes – intérieures puis internationales – doivent se fonder sur l’utilisation de biocarburants. L’Amérique latine, qui détient le record du taux d’incorporation des biocarburants (10 %) est avancée en la matière : la compagnie aérienne chilienne LAN a réalisé en 2012 son premier vol commercial à base de biocarburants, sur une distance de 500 km. Plus récemment le constructeur Boeing s’est associé au brésilien Embraer pour créer un centre de recherche et développement visant le développement des biocarburants dans l’aéronautique. Chaque jour, un vol Paris-Toulouse utilise des biojet fuels en France.

Pour mémoire, la mission d’information du Sénat sur le transport aérien a dans son rapport « Contribution du transport aérien au désenclavement et à la cohésion des territoires »[208] préconisé dans sa proposition 29 d’initier le développement d’une filière de production et dapprovisionnement en biocarburants aéronautiques localisée dans les territoires et dans sa proposition 30 de faire de l’aviation régionale française le laboratoire du transport aérien hybride et décarboné de demain.

Il faudrait que le « plan de soutien à l’aéronautique pour une industrie verte et compétitive » annoncé par le Gouvernement le 9 juin 2020 et qui prévoit 15 milliards d’euros d’aides publiques sur les trois prochaines années, dont 1,5 milliard d’euros pour l’avion bas carbone (y compris 300 millions d’euros dès 2020), veille bien à contribuer au développement de cette nouvelle filière. Les travaux précédents, tels que la feuille de route française pour le déploiement des biocarburants aéronautiques durables[209] et le rapport pour la mise en place d’une filière de biocarburants aéronautiques durables en France[210], doivent éclairer l’usage d’une partie de ces crédits, sachant que l’option ferroviaire doit toujours être privilégiée par rapport aux vols intérieurs lorsque c’est possible.

19.  Relever le défi du stockage de lénergie, seul moyen à ce jour de résoudre le problème de lintermittence des filières photovoltaïque et éolienne

Le stockage de l’énergie est un levier majeur de la transition énergétique et comme le montre la note scientifique n °11 de l’Office de notre collègue sénatrice Angèle Préville[211], le stockage de l’électricité est appelé à se développer dans un contexte de fort essor des énergies renouvelables (EnR). C’est aussi le seul moyen à ce jour de résoudre le problème de lintermittence des filières photovoltaïque et éolienne. Les perspectives technologiques de stockage de l’énergie décrites dans le présent rapport doivent être suivies et soutenues.

20.  Développer les technologies et les infrastructures de stockage dénergie à travers le « power to gas » permettant de produire de lhydrogène et/ou du méthane de synthèse, utilisable notamment par des piles à combustible

En lien avec la proposition 19 mais de manière plus spécifique, la présente proposition appelle à développer les technologies et les infrastructures de stockage dénergie à travers le « power to gas » permettant de produire de lhydrogène renouvelable et/ou du méthane de synthèse. Ces deux derniers vecteurs vont de plus en plus s’insérer dans notre mix énergétique comme vecteur et passerelle vers les réseaux de gaz en respectant les spécifications d’injection et l’intégrité du réseau. L’hydrogène et, selon des technologies plus récentes, le méthane de synthèse après méthanation sont, en effet, utilisables par des piles à combustibles[212].

L’Union européenne a invité à développer l’hydrogène renouvelable dès que possible en mettant en place des infrastructures (stockages souterrains, réseaux) avec la conversion des infrastructures gazières existantes et en donnant la priorité aux usages industriels (ammoniac, acier, chimie) et aux transports.

LAllemagne s’est ainsi dotée d’un plan visant 5 GW d’hydrogène renouvelable (électrolyse) avec 9 milliards deuros engagés dici 2030 (7 milliards d’euros pour le marché intérieur et 2 milliards d’euros de partenariats internationaux, pour les importations).

En France, le plan de déploiement de lhydrogène présenté le 1er juin 2018 avec une enveloppe annoncée de 100 millions deuros a conduit au lancement de deux appels d’offres en 2019 (le premier appel représente 11,5 millions d’euros et le deuxième qui concerne les transports 80 millions d’euros) et de deux appels à manifestation d’intérêt (AMI). Ce plan est clairement insuffisant.

Comme il a été vu, la méthanation, processus de production de méthane de synthèse (CH4) à partir de dihydrogène (H2) et de monoxyde de carbone (CO) ou de dioxyde de carbone (CO2) grâce à un catalyseur (méthanation catalytique) ou des microorganismes (méthanation biologique), ne doit pas être confondu avec la méthanisation. Elle peut être encouragée avec la mise en place d’appels doffres avec complément de rémunération, en précisant que l’incitation doit varier selon l’origine de l’hydrogène : on distinguera donc l’hydrogène propre issu d’EnR et l’hydrogène dit « bas carbone », c’est-à-dire celui dont le niveau des émissions de CO2 est inférieur à un seuil donné, ce qui permet d’inclure l’énergie nucléaire.

C.  Rappel des propositions pour le stockage du Carbone dans les sols

Parce qu’il est nécessaire d’avoir une approche transversale des questions environnementales, en considérant simultanément les questions d’énergie, d’émission de gaz à effet de serre (GES) et de stockage du carbone, les propositions issues de la note scientifique n° 3 de lOffice[213], « Stocker plus de carbone dans les sols : un enjeu pour le climat et pour l’alimentation », réalisée par votre rapporteur Roland Courteau, sont ici rappelées, car stocker plus de carbone dans les sols présente l’intérêt de compenser les émissions anthropiques de CO2 mais aussi de renforcer la sécurité alimentaire, le niveau de carbone des sols ayant des effets majeurs sur la fertilité de ceux-ci et donc sur la productivité agricole.

1.  Poursuivre et amplifier, au niveau international, linitiative « 4 pour 1 000 »

Cet appel à la poursuite et à lamplification, au niveau international, de l’initiative « 4 pour 1 000 », concerne son volet « recherche », comme son volet « projets » : les sciences des sols, par nature interdisciplinaires, devront permettre d’éclairer les mesures à mettre en œuvre et les pratiques favorables au stockage de carbone dans les sols agricoles et forestiers (agroforesterie, implantation de cultures intermédiaires ou intercalaires, agriculture de conservation pour réduire le travail du sol…).

2.  Construire une PAC incitative au stockage de carbone dans les sols

La PAC doit inciter au stockage de carbone dans les sols et donc pouvoir rémunérer les services environnementaux fournis par les agriculteurs, diffuser les bonnes pratiques, éviter de laisser le sol à nu et donc allonger la durée de couverture des sols, y compris avec la culture de légumineuses, soutenir les prairies et supprimer la règle classant en prairie temporaire les seules prairies de durée de vie de moins de cinq ans, qui présente l’effet pervers d’inciter à retourner les prairies. Au regard du stockage possible au sein des surfaces agricoles de l’UE[214], de l’ordre de 115 millions de tonnes de carbone par an et selon un prix de 30 euros la tonne de carbone, la valeur en jeu s’élève à 3,5 milliards d’euros (soit 6 % des 56 milliards d’euros de budget annuel de la PAC). En raison des difficultés à évaluer rigoureusement les variations annuelles de stockage dans chaque exploitation, cette nouvelle PAC devrait moins reposer sur un contrôle des résultats que sur une contractualisation autour d’objectifs et de moyens, au sein par exemple de « zones homogènes » délimitées par les États membres sur leur territoire.

3.  Se doter dune stratégie nationale sur les sols et mettre en œuvre linitiative « 4 pour 1 000 » selon une approche territoriale, en veillant à la cohérence des actions conduites

La France doit se doter d’une stratégie nationale sur les sols et mettre en œuvre l’initiative « 4 pour 1 000 » selon une approche territoriale, en veillant à la cohérence des actions conduites, en particulier par le ministère de la transition écologique et par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, la stratégie nationale bas carbone (SNBC), la stratégie pour la bioéconomie et la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse(SNMB) ne devant en aucun cas se contredire. Le pilotage de ces politiques doit s’appuyer sur les expertises réunies au sein du Réseau « RNEST »[215] (Réseau national d’expertise scientifique et technique sur les sols), l’INRAE et l’ancien programme « GESSOL » (« GEStion du patrimoine SOL ») ainsi que sur les inventaires du centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (CITEPA), qui comptabilise les sources et les puits de GES, ainsi que du système d’information sur les sols et du réseau de mesure de la qualité des sols (RMQS) du « GisSol » (groupement d’intérêt scientifique sur les sols). La mesure des stocks de carbone à un moment donné est satisfaisante mais la compréhension fine de leurs évolutions dans le temps reste un enjeu pour la recherche scientifique. Plus généralement, les sols sont un compartiment de la zone superficielle de notre planète, appelée « zone critique » par les géologues, dont le fonctionnement global demeure mal compris mais qui régule la formation des sols, la composition de l’atmosphère, la qualité des eaux et la durabilité des écosystèmes.

 

 


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Saisine de lOffice

 


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Examen du rapport par lOffice

 

 

 

Réuni le 16 juillet 2020, l’Office a examiné le rapport de Jean‑Luc Fugit, député, et Roland Courteau, sénateur, sur l’agriculture face au défi de la production d’énergie.

Il a autorisé à l’unanimité la publication du rapport sur l’agriculture face au défi de la production d’énergie.

 

http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20200713/opecst_16juillet2020.html

 


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Liste des personnes entendues

 

 

I.  Institutions

Ministère de lagriculture et de lalimentation

- M. Sylvain RÉALLON, sous-directeur Filières forêt-bois, cheval et bioéconomie

- Mme Nathalie BARBE, conseillère en charge des filières animales, de la forêt et de la performance économique des entreprises agricoles et agroalimentaires

- Mme Léa MOLINIÉ, chargée de mission Méthanisation agricole, énergies renouvelables et autres énergies

 

Ministère de la transition écologique, Direction générale de lénergie et du climat (DGEC)

- M. Laurent MICHEL, directeur général

- M. Stanislas REIZINE, sous-directeur Systèmes électriques et énergies renouvelables

- Mme Ophélie RISLER, cheffe du département Lutte contre l’effet de serre

- M. Nicolas MORIN, adjoint au chef du bureau Logistique pétrolière et carburants alternatifs

- Mme Anne-Charlotte ARMYNOT DU CHÂTELET, chargée de mission Méthanisation

 

Ministère de lenseignement supérieur, de la recherche et de linnovation

- M. Frédéric FOREST, inspecteur général

- Mme Astrid BRANDT-GRAU, cheffe de Département de la recherche, de l’enseignement supérieur et de la technologie (DREST)

 

Académie des sciences

- M. Didier ROUX, délégué à l’information et à la communication, ancien président du conseil scientifique de l’Ademe, ancien directeur scientifique de Rhône-Poulenc et directeur de la recherche et de l’innovation de Saint-Gobain

Académie des technologies

- M. Olivier APPERT, délégué général, ancien président du Conseil français de l’énergie, section française du World Energy Council, ancien président de l’Institut français du pétrole - Énergies nouvelles (IFPEN)

- M. Bernard TARDIEU, ancien président de la commission « Énergie et changement climatique », ancien cadre dirigeant chez Engie, ancien vice-président de la Commission internationale des grands barrages

 

Agence de lenvironnement et de la maîtrise de lénergie (Ademe)

- M. Arnaud LEROY, président de l’Ademe

- M. Jérôme MOUSSET, chef du service Forêt, agriculture, biomasse

- Mme Émilie MACHEFAUX, adjointe du chef du service Forêt, alimentation et bioéconomie

- M. Jean-Michel PARROUFFE, chef du service Réseaux et énergies renouvelables

- M. Julien THUAL, ingénieur Méthanisation, biogaz et déchets organiques

- M. Nicolas TONNET, animateur Énergie, biomasse, innovation

- M. Jacques WIART, référent Méthanisation pour la Région Auvergne-Rhône-Alpes

 

Institut national de recherche pour lagriculture, lalimentation et lenvironnement (INRAE)

- M. Thierry CAQUET, directeur scientifique Environnement

- Mme Monique AXELOS, directrice scientifique Alimentation et bioéconomie

- M. Michel DURU, directeur de recherche

- M. Marc GAUCHÉE, conseiller parlementaire et institutionnel

 

Commissariat à lénergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)

- Mme Florence LAMBERT, directrice du Laboratoire d’innovation pour les technologies des énergies nouvelles et les nanomatériaux (LITEN), CEA de Grenoble

- M. Benoît TANGUY, chef du Laboratoire de comportement mécanique des matériaux irradiés

 

IFP Énergies nouvelles (IFPEN)

- M. François KALAYDJIAN, directeur Économie et veille

- M. Cyprien TERNEL, chef de projet mobilité durable, direction Économie et veille

- M. Jérôme SABATHIER, chef du département Économie et évaluation environnementale, direction Économie et veille

- M. Jean-Christophe VIGUIÉ, responsable des programmes « Biomasse vers carburant » et « Traitement et conversion du gaz », Centre de résultats procédés

- M. Jean-Christophe FLÈCHE, directeur des relations institutionnelles et de la communication

 

Centre nationale détudes spatiales (CNES)

- Mme Marie JACQUESSON, cheffe du service Structures, thermiques et matériaux à la Direction des lanceurs

 

Office franco-allemand pour la transition énergétique (OFATE)

- M. Sven Rösner, directeur

- Mme Lena Müller-Lohse, chargée de mission Bioénergies

- M. Markus Wagenhäuser, chargé de mission Éolien

 

Institut des hautes études pour la science et la technologie (IHEST)

- Mme Sylvane CASADEMONT, directrice

- M. François GALLON, animateur pédagogique

 

Services déconcentrés de lÉtat et Directions régionales des ministères

- Mme Christine MESUROLLE, secrétaire générale adjointe aux affaires régionales (SGAR), Préfecture de la Région Auvergne-Rhône-Alpes

- M. Arnaud JULLIAN, chargé de mission Agriculture et énergie, Préfecture de la Région Auvergne-Rhône-Alpes

- Mme Estelle SCHWEBEL, chargée de mission Méthanisation-Énergie, Préfecture de la Région Auvergne-Rhône-Alpes

- Mme Cécile PHILIBERT, chargée de mission Énergies renouvelables et chimie verte, Service régional de la forêt, du bois et des énergies, DRAAF Auvergne-Rhône-Alpes

 

Région Grand-Est

- Mme Christèle WILLER, vice-présidente

- M. Frédéric ALLAMAND, chargé de projets à la Division des opérations de la Région

 

Région Hauts-de-France

- M. Frédéric NIHOUS, conseiller régional délégué à la transition énergétique

 

Région Auvergne-Rhône-Alpes

- M. Julien SEMELET, responsable du service Expertise, Direction de l’environnement et de l’énergie de la Région

- M. Guillaume COICADAN, chargé de mission auprès de l’agence « Auvergne-Rhône-Alpes Énergie-Environnement » de la Région

 

Chambres dagriculture (APCA et chambres locales)

- M. Sébastien WINDSOR, président de l’Assemblée des chambres d’agriculture

- M. Michel JOUX, vice-président de la chambre régionale d’agriculture en charge de l’énergie, président de la chambre départementale d’agriculture de l’Ain, président de la Fédération régionale des syndicats d’exploitants agricoles (FRSEA) Auvergne Rhône-Alpes

- M. Vincent CAUSSANEL, chargé de mission Énergie à la chambre d’agriculture de l’Ain

- M. Jean-Marc RENAUDEAU, président de la chambre d’agriculture des Deux-Sèvres

- M. Mikaël NAITLHO, chef du service Innovation et développement

- M. Enzo Reulet, responsable des relations publiques

 


II.  Experts et scientifiques

Alliance nationale de coordination de la recherche pour lénergie (ANCRE)

- M. Jean-Michel MOST, directeur de recherche au CNRS, Institut Pprime et co-animateur du groupe programmatique GP8 « Industrie et Agriculture » de l’Alliance ANCRE

 

Centre régional dinnovation et de transfert technologique Génie des procédés et technologies environnementales de Toulouse (CRITT-GPTE)

- M. Xavier LEFEBVRE, directeur

- M. Sébastien POMMIER, ingénieur de recherche (CNRS-INSA de Toulouse), spécialiste de méthanisation

 

Institut parisien de chimie moléculaire (IPCM)

- M. Yves GIMBERT, directeur de recherche au CNRS

 

Université de Montpellier

- Mme Carmen GERVET, professeure des universités

 

Association NégaWatt et cabinet Solagro

- M. Christian COUTURIER, président de NégaWatt et directeur général de Solagro

 

Agridées

- M. Jean-Baptiste MILLARD, délégué général

- Mme Marie-Cécile DAMAVE, responsable Innovation et affaires internationales

 

Agridemain

- M. Guillaume LEFORT, président

 

- Mme Agnès VERNET, journaliste scientifique indépendante


III.  Syndicats et Associations

Association des maires ruraux de France (AMRF)

- M. Bruno BETHENOD, vice-président de l’AMRF de Côte-d’Or

 

Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR)

- M. Lionel GUY, chargé de mission sur les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique

- M. Guillaume PERRIN, chef du service Réseaux de chaleur et de froid

- M. Hadrien SEROUGNE, responsable Programmes énergies - action des collectivités territoriales pour l’efficacité énergétique

 

Énergie partagée

- Mme Justine PEULLEMEULLE, responsable du pôle animation et du plaidoyer

 

Fédération nationale des syndicats dexploitants agricoles (FNSEA)

- Mme Christiane LAMBERT, présidente

- Mme Carole LE JEUNE, chargée de mission Environnement, climat et énergie

- M. Laurent PAQUIN, administrateur

 

Coordination rurale

- M. Emmanuel RIZZI, premier vice-président

- Mme Yvette LAINE, 2e vice-présidente

- M. Sébastien HERAUD, 3e vice-président

- Mme Véronique LE FLOC’H, secrétaire générale

- M. Jean-Louis OGIER, président de la Coordination rurale Auvergne-Rhône-Alpes

- Mme Louise JEANTET, animatrice de la Coordination rurale Auvergne-Rhône-Alpes

- M. Pascal AUBRY, président de la Coordination rurale Pays de la Loire

 

Confédération paysanne

- M. Denis PERREAU, secrétaire national

- Mme Véronique MARCHESSEAU, secrétaire générale

- M. Nicolas GIROD, porte-parole du secrétariat national

- M. Vincent DELMAS, porte-parole de la Confédération paysanne de la Drôme

- M. Stéphane GALAIS, membre du groupe de travail « Homme/animal »

- M. Roberto LIME, chargé de communication

- Mme Violette AUBERGER, membre du conseil d’administration des Ami.e.s de la Confédération paysanne

 

Coop de France, fédération des coopératives agricoles

- Mme Virginie CHARRIER, responsable environnement et énergie

- Mme Barbara MAUVILAIN-GUILLOT, responsable des relations publiques

 

Syndicat des énergies renouvelables

- M. Jean-Louis BAL, président

- M. Alexandre ROESCH, délégué général

- Mme Johanna FLAJOLLET-MILAN, responsable des filières Bioénergie

- M. Alexandre DE MONTESQUIOU, consultant, directeur associé d’Ai2P

 

France gaz renouvelables

- M. Olivier DAUGER, co-président, président de la chambre régionale d’agriculture des Hauts-de-France et de la chambre d’agriculture de l’Aisne, administrateur de la FNSEA en charge des questions climatiques et énergétiques, agriculteur

- M. Jacques-Pierre QUAAK, co-président, agriculteur, administrateur de l’Association des agriculteurs méthaniseurs de France

- M. Jean LEMAISTRE, secrétaire général

- Mme Cécile FRÉDÉRICQ, déléguée générale

 

 

Association des agriculteurs méthaniseurs de France (AAMF)

- M. Francis CLAUDEPIERRE, président

- M. Jean-Marc ONNO, premier vice-président

- M. Jean-François DELAITRE, administrateur

- Mme Laureline BES DE BERC, animatrice

- M. Adrien PERRIER, agriculteur

 

Syndicat national des producteurs dalcool agricole (SNPAA)

- M. Sylvain DEMOURES, secrétaire général

- M. Fred GUILLO, conseiller

 

Confédération générale des planteurs de betteraves

- M. Nicolas RIALLAND, directeur Affaires publiques et environnement

 

Fédération française des producteurs doléagineux et de protéagineux (FOP)

- M. Thibaut LEDERMANN, responsable des relations terrains

 

Association générale des producteurs de maïs

- M. Gildas COTTEN, responsable nouveaux débouchés

 

WWF France

- M. Arnaud GAUFFIER, directeur des programmes

- Mme Isabelle MARX, chargée de projet Agriculture et alimentation

- Mme Marie KAZERONI, chargée de projet Énergie et durabilité

- M. Simon SUZAN, chargé de programmes Énergie et mobilité durable

 

France Nature Environnement

- M. Jean-David ABEL, vice-président

 

 

Atmo France, réseau national des associations de surveillance de la qualité de lair

- Mme Marine TONDELIER, déléguée générale

- Mme Marie-Blanche PERSONNAZ, directrice Atmo Aura

- Mme Véronique DELMAS, directrice Atmo Normandie

- M. Gaël LEFEUVRE, directeur AirBreizh

- Mme Charlotte LEPITRE, responsable projets et partenariats

 

CLER - Réseau pour la transition énergétique

- M. Alexis MONTEIL, responsable de projets

- M. Yannick RÉGNIER, responsable de projets

 

Terre de liens

- M. Michel VAMPOUILLE, président

 

IV.  Entreprises

Électricité de France (EDF)

- M. Pierre-Guy THÉROND, directeur des technologies d’EDF-Renouvelables

- M. Jacques MERLEY, chef de pôle à la direction de la stratégie

- Mme Véronique LOY, directrice adjointe des affaires publiques

- Mme Catherine GRANDCLÉMENT, chercheure en sciences sociales dans le service EDF R&D, animatrice de l’atelier énergie et agriculture de l’IHEST

 

Engie et Storengy

- M. Didier HOLLEAUX, directeur général adjoint du groupe Engie

- Mme Soizic HÉMION, directrice de la stratégie et des affaires extérieures du groupe Engie

- Mme Rosaline CORINTHIEN, directrice générale d’Engie France renouvelables

- M. Frédéric TERRISSE, directeur général adjoint d’Engie Bioz

- M. Constant MATON, directeur de la géothermie de Storengy

- Mme Mercédès FAUVEL-BANTOS, déléguée aux relations avec le Parlement, direction Institutions France et Territoires

 

Gaz réseau distribution France (GRDF)

- M. Xavier PASSEMARD, directeur Biométhane

- Mme Chloé BRUMEL-JOUAN, responsable des affaires publiques

- M. Thierry MAUDOU, délégué au développement du biométhane (Sud-Est)

- Mme Natalia ROBLES, responsable de la communication digitale

- Mme Muriel OHEIX, chargée des relations institutionnelles

 

GRTgaz

- M. Thierry TROUVÉ, directeur général

- M. Anthony MAZZENGA, directeur de l’activité gaz renouvelables de GRTgaz

- Mme Karine HYVERNAT, adjointe au délégué territorial

 

Groupe Avril

- Mme Kristell GUIZOUARN, directrice Énergies nouvelles et affaires européennes du groupe Avril, présidente d’Esterifrance (syndicat français des producteurs de biodiesel) et d’European Biodiesel Board (EBB, syndicat européen des producteurs de biodiesel)

- M. Fabrice MOULARD, agriculteur, vice-président du groupe Avril, administrateur et membre du bureau, administrateur de la Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux (FOP) en charge des relations terrains et président de la FNSEA de l’Eure

 

Neoen

- Mme Caroline ADUA, chargée de projet et responsable du foncier

- M. Romain BLANCHARD, chargé de développement territorial, spécialiste d’agri-solaire

 

Akuo Energy

- M. Éric SCOTTO, président

- M. Steve ARCELIN, directeur Europe de l’Ouest et Outre-mer

- M. Nicolas MACCIONI, directeur des affaires publiques

- M. Thibault GRANGÉ, responsable d’Agriterra

 

Nordex

- M. Adrien LOISELET, responsable régional (Occitanie, Nouvelle-Aquitaine, Normandie), anciennement chef des projets éoliens

- Mme Charlotte HENKES, responsable des relations publiques

 

Green Lighthouse

- M. David PORTALÈS, président-directeur général

- M. Pierre-Yves LE BORGN’, consultant, ancien député

 

SunAgri (groupe Sunr)

- Mme Anne-Lise SALOMÉ, responsable des relations institutionnelles

 

Méthamoly

- M. Aloïs KLEIN, directeur du site de méthanisation

 

Syndicat des entreprises de lénergie solaire de la région Auvergne Rhône-Alpes (« AuRa Digital Solaire »)

- M. Nicolas OTT, vice-président

- Mme Claudia RINZIVILLO, déléguée générale

 

Alter Way

- Mme Véronique TORNER, présidente

 

Manexi et Sophyra

- M. Damien RACLE, directeur général

 

SBT-Human(s) Matter

- M. Sébastien ALLAIN, directeur de l’expérience utilisateur et chercheur

 

 


[1] Cf. l’article des Annales allemandes de chimie et de pharmacie, « Bemerkungen über die Kräfte der unbelebten Natur », Annalen der Chemie und Pharmazie, 1842.

[2] Cf. Etienne Van Hecke, « Agriculture et énergie », Courrier hebdomadaire du CRISP, vol. 871, no. 6, 1980, pp. 1-37.

[3] Cf. les liens suivants vers la note scientifique n° 3 de l’Office sur le stockage du carbone dans les sols par Roland Courteau sur les sites du Sénat et de l’Assemblée nationale :

https://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/opecst/quatre_pages/OPECST_2018_0012_note_stockage_carbone_sols.pdf

http://www2.assemblee-nationale.fr/content/download/65344/663392/version/1/file/note+4+pages+stockage_carbone_sols.pdf

Une version anglaise de cette note scientifique est aussi disponible au lien suivant :

https://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/opecst/quatre_pages_anglais/OPECST_2018_0032_storing_more_carbon_in_soils_briefing.pdf

[4] Cf. https://www.hautconseilclimat.fr/wp-content/uploads/2020/07/hcc_rapport-annuel-2020.pdf

[5] Cf. https://www.hautconseilclimat.fr/wp-content/uploads/2020/04/rapport_haut-conseil-pour-le-climat.pdf

[6] Cf. le rapport du 19 février 1997 « Les perspectives de développement des productions agricoles à usage non alimentaire » (n° 223 Sénat 1996-1997 et n° 3345 AN) de Robert Galley, député, https://www.senat.fr/rap/r96-223/r96-2231.pdf

et http://www.assemblee-nationale.fr/10/dossiers/973345.asp

[7] Cf. le rapport du 10 février 2016 « De la biomasse à la bioéconomie : une stratégie pour la France » (n° 380 Sénat 2015-2016 et n° 3489 AN) de Roland Courteau, sénateur, http://www.senat.fr/notice-rapport/2015/r15-380-notice.html

et http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-off/i3489.asp

[8] Cf. la loi n° 83-609 du 8 juillet 1983 qui dispose que l’Office doit informer le Parlement des conséquences des choix à caractère scientifique et technologique, afin, notamment, d’éclairer ses décisions.

[9] Cf. https://www.ademe.fr/agriculture-energies-renouvelables

[10] Cf. https://agriculture.gouv.fr/prospective-agriculture-energie-2030-lagriculture-face-aux-defis-energetiques

[11] Cf. http://agreste.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/energieea2014methodobssef.pdf

[12] Les ouvrages suivants peuvent être cités Bernard Pellecuer, Énergies renouvelables et agriculture, 2015 ; Alain Damien, La biomasse énergie, 2013 ; Claude Acket et Jacques Vaillant, Les Énergies Renouvelables, 2016 ; Geneviève Pierre, Agro-énergies dans les territoires, Coopérer pour lautonomie locale, 2016 ; Bernadette Le Baut-Ferrarese, Droit des énergies renouvelables, 2008 ; Randy Schnepf, Agriculture-Based Renewable Energy Production, rapport au Congrès américain, 2006 ; Biomass Use in Energy Production : New Opportunities in Agriculture, Commission de lagriculture du Sénat américain, 2004 ; Gerald Stanhill, Energy and Agriculture, 1984.

Pour les articles, relevons : Etienne Van Hecke, « Agriculture et énergie », Courrier hebdomadaire du CRISP, vol. 871, no. 6, 1980, pp. 1-37 ; Rémi Carrilon, « L’agriculture et l’énergie », Revue d’économie industrielle, vol. 18, 1981 ; Catherine Delhomme et Delphine Caroux, « Quel rôle des agriculteurs dans la transition énergétique ? Acceptation sociale et controverses émergentes à partir d’une chaufferie collective de biomasse en Picardie ? », VertigO, 2014, vol. 14, n° 3 ; Patrick Mundler et M. Daniel, « Le Développement des énergies renouvelables. Une nouvelle ressource pour les territoires ruraux ? », XLVIe colloque de l’ASRDLF, Clermont-Ferrand, 6, 7 et 8 juillet 2009.

Du côté des thèses de doctorat : Yvan Tritz, Développement territorial et valorisation en circuit court des ressources énergétiques locales. Vers des systèmes énergétiques agri-territoriaux ?, thèse de géographie, université de Lyon 2, 2013 ; et Carole Garnaud-Joubert, Les énergies renouvelables dans l’agriculture de Charente-Maritime, thèse de géographie, université de La Rochelle, 2010.

[13] La Statistique agricole annuelle (SAA) est une opération de synthèse annuelle sur les productions agricoles françaises. Elle renseigne chaque année sur l’ensemble des productions agricoles en termes physiques (surfaces et rendements, têtes de bétail) détaillées par produit et par région et département. La SAA existe depuis 1947 et permet à la France de répondre au règlement européen UE 543/2009 du 18 juin 2009. Les données sont également utilisées pour d’autres opérations statistiques. Elles permettent de recaler les évolutions conjoncturelles et servent directement de support pour établir les comptes, nationaux ou régionaux de l’agriculture (également en réponse aux obligations européennes - règlement UE 549/2013 du 21 mai 2013). La SAA porte sur le champ des exploitations agricoles, la définition de l’exploitation agricole étant celle des recensements et enquêtes de structure (ce qui suppose l’application de certains seuils sur le nombre d’hectares ou d’animaux). Ce choix permet de mieux assurer la cohérence entre les résultats de la SAA et ceux des enquêtes auprès des exploitations, de même qu’entre les productions végétales et animales. La restriction du champ a un impact quand la part des non exploitants n’est pas négligeable, sans pour autant être mesurée de façon précise.

[14] Organisé tous les dix ans environ, le recensement général agricole (RGA) établit des statistiques sur le nombre d’exploitations, les orientations technico-économiques des communes, les surfaces agricoles utilisées, les productions et surfaces concernées, les surfaces toujours en herbe, et les surfaces herbagères principales.

[15] Cf. la rubrique « Chiffres et Données » du site www.agreste.agriculture.gouv.fr

[16] Le champ de ce bureau des statistiques porte par exemple sur l’utilisation du territoire départemental, la répartition des terres arables, les superficies, les rendements, les productions récoltées pour la partie végétal, les effectifs du cheptel, de la bassecour et du clapier, la production laitière, la production avicole…

[17] Cf. la définition de lénergie dans le Trésor de la langue française informatisé.

[18] Cf. les explications de Jean-Marc Jancovici au lien suivant : https://jancovici.com/transition-energetique/l-energie-et-nous/lenergie-de-quoi-sagit-il-exactement/

[19] Cf. l’article des Annales allemandes de chimie et de pharmacie, « Bemerkungen über die Kräfte der unbelebten Natur », Annalen der Chemie und Pharmazie, 1842.

[20] Monument de la pensée mathématique d’après Albert Einstein, ce théorème fut démontré en 1915 par la mathématicienne allemande Emmy Noether. Il pose qu’à toute transformation infinitésimale qui laisse invariante l’intégrale d’action correspond une grandeur qui se conserve. Il permet donc de constater - par certaines transformations des coordonnées - l’équivalence entre les lois de conservation et l’invariance du lagrangien d’un système (on appelle lagrangien la fonction des variables qui permet d’écrire de manière concise les équations du mouvement d’un système).

[21] Le deuxième principe de la thermodynamique, énoncé par Sadi Carnot en 1824, établit l’irréversibilité des phénomènes physiques, en particulier lors des échanges thermiques. C’est un principe qui fait appel à la notion d’entropie et qui implique le fait que la transformation d’énergie en travail s’accompagne d’un travail mais aussi de chaleur et donc que le rendement utile en terme de travail n’est pas de 100 % bien que la somme travail + chaleur le soit.

[22] En toute rigueur, une pompe à chaleur conduit à une amélioration du rendement thermique d’une source énergétique en produisant du travail qui utilise une énergie qui n’est pas forcément d’origine renouvelable. Si effectivement son coefficient de performance est supérieur à un c’est parce qu’elle récupère - avec du travail - des calories d’une source froide, qu’elle réchauffe. Toutes les pompes à chaleur ne sont donc pas à classer dans les EnR, même si la géothermie rentre bien, quant à elle, dans ce cadre.

[23] Comme l’a expliqué lors de son audition Bernard Tardieu, ancien président de la commission « Énergie et changement climatique » de l’Académie des technologies, ancien cadre dirigeant chez Engie et ancien vice-président de la Commission internationale des grands barrages, « la force motrice cest dabord la force humaine puis celle du cheval. On disposait dun cheval spécialisé pour chaque chose. Les chevaux étaient omniprésents. Et pour nourrir ces chevaux qui servaient essentiellement au transport, il fallait de lavoine. En 1830, alors quon avait déjà le train, on importait lavoine dUkraine par le Havre. On le produisait et on limportait pour le transport en France ». Il a également commenté le risque de conflit d’usage des sols entre production alimentaire et production d’énergie : « en 1850, un tiers de la surface agricole de la France est consacré à lalimentation des chevaux, utiles au transport et au travail. Des surfaces importantes sont dédiées au lin, au chanvre et à dautres cultures industrielles. Cest le résultat dun consensus sociopolitique. Les conflits dusage peuvent être résolus par des consensus, plus que par des injonctions morales ».

[24] Cf. « L’agriculture et l’énergie », Revue d’économie industrielle, vol. 18, 1981.

[25] La biomasse comprend ici le bois énergie, les déchets urbains et agricoles, ainsi que les biocarburants.

[26] Les autres énergies renouvelables comprennent l’énergie éolienne, l’énergie solaire, la géothermie, etc.

[27] Les données seraient différentes si l’on utilisait l’énergie finale.

[28] L’effet Joule est la manifestation thermique de la résistance électrique qui se produit lors du passage d’un courant électrique dans tout matériau conducteur.

[29] Cf. le « Bilan électrique 2019 », RTE, février 2020.

[30] Cf. https://www.elysee.fr/front/pdf/elysee-module-10646-fr.pdf

[31] Cf. https://www.photovoltaique.info/fr/tarifs-dachat-et-autoconsommation/tarifs-dachat/anciens-arretes-tarifaires/arrete-du-26-juillet-2006/

[32] Cf. https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/programmations-pluriannuelles-lenergie-ppe

[33] Cf. https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/TRER2006667D%20signe%CC%81%20PM.pdf

[34] Cf. https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/20200422%20Synthe%CC%80se%20de%20la%20PPE.pdf

[35] Cf. https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000033312688&dateTexte=20200709&fbclid=IwAR3RikHM97xmnxty_UQx6ALMwcRebNF_bSzTI-a0F744QNrMgidROP7EtUk et https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041814432&categorieLien=id&fbclid=IwAR1FmFWDTTeMy5ZhlULTIz2kJgCZPxGLv7PHOMuw5UnKhqRQjzgzFPOSi0k

[36] Cf. https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Strat%C3%A9gie%20Nationale%20de%20Mobilisation%20de%20la%20Biomasse.pdf

[37] Audition du 28 janvier 2020.

[38] Cf. le premier rapport du Haut Conseil pour le Climat « Agir en cohérence avec les ambitions » du 25 juin 2019 : https://www.hautconseilclimat.fr/publications/rapport-2019/

[39] Cf. https://afterres2050.solagro.org/wp-content/uploads/2015/11/Solagro_afterres2050-v2-web.pdf

[40] Cf. https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/ademe_visions2035-50_010305.pdf

[41] Cf. https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/france-independante-mix-gaz-renouvelable-010503-synthese.pdf

[42] Cf. la figure 8 dans le « bilan énergétique et carbone de l’alimentation en France de la production à la consommation »

https://www.iddri.org/sites/default/files/PDF/Publications/Catalogue Iddri/Rapport/Empreinte-Carbone_Alimentation_France_VF.pdf

[43] Cf. l’étude sur la dépendance de l’agriculture à l’énergie, disponible au lien suivant :

https://www.ademe.fr/entreprises-monde-agricole/performance-energetique-energies-renouvelables/lenergie-exploitations-agricoles

[44] Cf. https://www.ademe.fr/agriculture-efficacite-energetique

[45] Cf. l’accompagnement des agriculteurs dans leur transition énergétique par la chambre d’agriculture des Hauts-de-France

https://www.lesechos.fr/thema/0600723934379-chambre-dagriculture-des-hauts-de-france-priorite-a-la-reduction-du-cout-energetique-2247072.php

[46] Cf. https://agriculture.gouv.fr/produire-des-tomates-avec-des-energies-nouvelles

[47] Rapport de l’Ademe, « Agriculture et énergies renouvelables : contributions et opportunités pour les exploitations agricoles », 2018 https://www.ademe.fr/agriculture-energies-renouvelables

[48] Données 2016. Un recensement est en cours en 2020.

[49] Cf. OFATE, Onshore Windenergie in Frankreich, 2020 https://energie-fr-de.eu/fr/energie-eolienne/actualites/lecteur/barometre-ofate-de-leolien-terrestre-en-france.html

[50] Cf. OFATE, Photovoltaik in Frankreich, 2020 https://energie-fr-de.eu/fr/energie-solaire/actualites/lecteur/barometre-sur-le-photovoltaique-en-france.html

[51] Cf. OFATE, Biogas und Biomethan in Frankreich, 2020 https://energie-fr-de.eu/fr/bioenergies/actualites/lecteur/barometre-ofate-de-biogaz-en-france.html

[52] Cf. https://ec.europa.eu/agriculture/external-studies/renewable-energy-impacts_en

[53] Cf. https://energie-partagee.org/wp-content/uploads/2017/10/Rapport-dexpertise-AgriEnR.pdf

[54] Cf. la synthèse de l’atelier « Contribution de l’agriculture au développement des ENR » https://www.philippe-bolo.fr/wp-content/uploads/2018/06/004-Synthese-PPE-CNDP-EnR-Agriculture-vf.pdf

[55]Cf. https://agriculture.gouv.fr/sia2018-stephane-travert-presente-le-plan-daction-bioeconomie

[56] Ademe, Agriculture et énergies renouvelables : contributions et opportunités pour les exploitations agricoles, 2018, disponible au lien suivant : http://presse.ademe.fr/wp-content/uploads/2018/02/Agriculture-EnR-contributions-opportunites-2018-Synthese.pdf

[57] Cf. https://agriculture.gouv.fr/agriculture-et-foret/quelle-part-du-territoire-francais-est-occupee-par-lagriculture

[58] Articles L. 314-1 à L. 314-13 du code de l’énergie.

[59] Articles L. 314-18 à L. 314-27 du code de l’énergie.

[60] Arrêté du 6 mai 2017.

[61] Article 8 de l’arrêté du 9 mai 2017.

[62] Annexe 1 de l’arrêté du 13 décembre 2016.

[63] Annexe 1 de l’arrêté du 23 novembre 2011.

[64] Annexe 1 de l’arrêté du 13 décembre 2016.

[65] Arrêté du 13 décembre 2016.

[66] Cf. le lien suivant : https://www.cre.fr/Transition-energetique-et-innovation-technologique/soutien-a-la-production/Dispositifs-de-soutien-aux-EnR

[67] Articles R. 311-10 à R. 311-25-15 du code de l’énergie.

[68] Cf. le lien suivant : https://www.cre.fr/Documents/Publications/Rapports-thematiques/couts-et-rentabilite-des-enr-en-france-metropolitaine

[69] Le plan de soutien à l’élevage de 2015 a conduit à des exonérations de fiscalité locale pour les installations de méthanisation agricole et à une adaptation des tarifs d’achat de l’électricité.

[70] Il s’agirait plutôt d’environ 600 méthaniseurs agricoles qui seraient en fonctionnement cette année.

[71] Les engrais NPK représentent une formule de fertilisant qui correspond à l’abréviation des éléments chimiques qui les composent, à savoir N pour azote, P pour phosphore et K pour potassium.

[72] Cf. l’étude Ademe et GRDF sur le marché de la méthanisation et de valorisation du biogaz, 2010 et l’étude de Solagro sur la méthanisation rurale.

[73] Cf. https://www.inrae.fr/sites/default/files/pdf/rapport-sur-le-verdissement-du-gaz-prospective-cre-1.pdf

[74] Cf. https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/publicationweb/274

[75] Il s’agit de végétaux très productifs, dits à croissance rapide, pouvant pousser dans des zones peu fertiles. C’est le cas par exemple du jatropha (Jatropha curcas) et du miscanthus géant (Miscanthus x giganteus).

[76] Elle peut cependant conduire à utiliser des surfaces agricoles ou forestières dont certaines auraient éventuellement pu être utilisées pour la production alimentaire.

[77] Cf. https://www.academie-technologies.fr/blog/categories/publications-de-l-academie/posts/quel-avenir-pour-les-biocarburants-aeronautiques

[78] Directive (UE) 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de lutilisation de lénergie produite à partir de sources renouvelables.

[79] Cf. CEA, Le solaire à hétérojonction, février 2019, disponible au lien suivant :

http://www.cea.fr/multimedia/Documents/infographies/solaire-heterojonction.pdf

[80] John Perlin, From space to earth: the story of solar electricity, Harvard University Press Edition, 1999.

[81] T.M. Razykov, « Solar photovoltaic electricity: Current status and future prospects », Solar Energy, 2011, p. 1580–1608.

[82] Dans la géothermie très basse énergie (température de la ressource inférieure à 30°C), la chaleur du sol est récupérée en surface ou à des profondeurs faibles (géothermie superficielle ou intermédiaire) avant d’être restituée par une pompe à chaleur (PAC), pour le chauffage ou l’eau chaude sanitaire. Alors que la géothermie basse énergie (température de la ressource comprise entre 30 et 90°C) utilise des ressources plus profondes (jusqu’à environ 2 000 m). Au-delà, dans les zones favorables, on peut avoir de la géothermie moyenne énergie (supérieure à 90°C). En fonction de la température de la ressource et du niveau de température des besoins thermiques, la chaleur peut être prélevée directement ou doit être relevée au moyen de pompes à chaleur.

[83] La géothermie haute énergie (température de la ressource supérieure à 150°C) est réalisée dans des environnements géologiquement actifs comme les limites de plaques lithosphériques où siègent des volcans, comme celui de Bouillante en Guadeloupe. La géothermie moyenne énergie se situe elle entre 90 et 150°C de température de la ressource. Enfin, la géothermie profonde (plus de 3 000 m), dans des zones cristallines fracturées (avec un site expérimental en France, Soultz-sous-Forêts, en Alsace). L’eau à température très élevée (milieu volcanique, à une profondeur inférieure à 1 km) est récupérée sous forme de vapeur, qui permet d’actionner les turbines afin de produire de l’électricité.

[84] Rapport « Les grandes tendances de la recherche dans le domaine de l’énergie nucléaire et des énergies renouvelables », n° 77 (2019-2020), cf. https://www.senat.fr/notice-rapport/2019/r19-077-notice.html

[85] Cf. http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/opecst/quatre_pages/OPECST_2019_0009_note_stockage_electricite.pdf

[86] Il s’agit de la technique la plus ancienne et la mieux maîtrisée, qui s’apparente à une sorte de barrage réversible : des stations de transfert d’énergie par pompage (STEP) pompent de l’eau d’un bassin vers un second situé plus haut, celui-ci pouvant servir à produire de l’électricité n’importe quand lors de l’ouverture des vannes. Elles font partie de la grande famille des modes de stockage hydrauliques de l’énergie, qui comprend également les barrages de lac ou d’écluses. Le stockage hydraulique utilise l’énergie mécanique potentielle de l’eau comme vecteur énergétique, cette énergie pouvant ensuite produire de l’électricité à la demande par turbinage. Leur rendement atteint 70 à 85 %. Ce stockage est de moyen-long terme et concentre à lui seul 99 % des moyens de stockage dans le monde.

[87] Cette forme d’énergie électrochimique est aujourd’hui surtout représentée par les batteries au lithium, appelées ainsi parce que ce sont des ions de lithium qui transitent d’une électrode à l’autre dans l’électrolyte, leur potentiel de développement étant réduit car le lithium est rare et donc coûteux. Selon Hervé Desvaux, chercheur au CEA, « pour stocker ne serait-ce que deux jours de consommation électrique française, il faudrait disposer de 360 000 tonnes de lithium. Or la production mondiale annuelle de lithium n’excède pas 40 000 tonnes ». Une piste consisterait à utiliser le sodium à la place du lithium, une autre à améliorer la densité d’énergie des batteries au lithium, en remplaçant par exemple le graphite, dans lequel est fabriquée l’une des deux électrodes, par du silicium, ce qui permettait en théorie de multiplier la densité d’énergie par 12. L’Institut rayonnement-matière de Saclay (IRaMIS) travaille à ce projet et a réussi à multiplier par 4 la densité d’énergie des batteries.

[88] La technologie CAES (de l’anglais « Compressed Air Electricity Storage ») consiste à comprimer de l’air dans un réservoir à très haute pression (jusqu’à 300 bars) puis à l’injecter avec du gaz dans une chambre de combustion où le tout fait fonctionner une turbine et un alternateur. Ce stockage est de court terme, de l’ordre de quelques heures.

[89] Cf. https://www.ademe.fr/etude-portant-lhydrogene-methanation-comme-procede-valorisation-lelectricite-excedentaire

[90] Le syngas peut aussi être obtenu par pyrogazéification (procédé de valorisation de déchets décomposant la matière en différentes molécules gazeuses en les chauffant à très haute température - entre 800 et 1 500°C, avec peu ou pas d’oxygène). Le démonstrateur Gaya installé par Engie en 2013 à Saint-Fons (Rhône) en est un exemple.

[91] Cf. https://www.ademe.fr/etude-portant-lhydrogene-methanation-comme-procede-valorisation-lelectricite-excedentaire

[92] Ce reformage à la vapeur est un procédé de production de gaz de synthèse (syngas) riche en hydrogène, grâce à une réaction d’hydrocarbures fortement endothermique en présence de vapeur d’eau, à l’instar du vaporeformage du méthane.

[93] Il s’établit sur la commune d’Angé, en région Centre-Val de Loire dans le département du Loir-et-Cher.

[94] Cf. https://methycentre.eu/projet/

[95] Ce procédé a été présenté lors de laudition du 19 mai 2020.

[96] Cf. la présentation de Sun’Agri disponible sur https://sunagri.fr/le-concept-en-detail/

[97] L’énergie dite « fatale » ou « de récupération » est la quantité d’énergie inéluctablement présente ou piégée dans certains processus ou produits, qui parfois et au moins pour partie peut être récupérée et/ou valorisée.

[98] Cf. https://www.lesechos.fr/pme-regions/actualite-pme/base-innovation-valorise-la-chaleur-des-panneaux-photovoltaiques-998751

[99] Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation n’a pu fournir de données quantitatives à vos rapporteurs que pour l’année 2006 ! Il s’agissait alors de 10,7 Mteq CO2, dont 80 % dues à la consommation de produits pétroliers. Selon le Haut Conseil pour le climat, les émissions de GES de l’agriculture française seraient « pratiquement stables », grâce à l’intensification des systèmes et pratiques, à la diminution du cheptel bovin et à la rationalisation des épandages d’engrais azotés.

[100] Cf. le dossier de lAdeme, « Quest-ce que lACV ? » : https://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-laction/dossier/lanalyse-cycle-vie/quest-lacv

[101] Toutes ces normes peuvent être retrouvées sur le site https://www.iso.org/fr/standards.html

et sur le site https://www.boutique.afnor.org/recueil/analyse-du-cycle-de-vie-la-serie-des-normes-iso-14040/article/804794/fa092881

[102] Il s’agit des normes ISO 14040:1997, ISO 14041:1998, ISO 14042:2000, ISO 14043:2000 et ISO 14044:2006, qui font partie de la famille des normes ISO 14000 qui regroupe les normes relatives au management environnemental (dont la norme générale ISO 14001 sur la certification de la performance environnementale).

[103] Cf. le lien suivant :

https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/impacts-environnementaux-eolien-francais-2015.pdf

[104] Cf. le rapport « Base Carbone 2013 », Ademe, 2014, https://www.bilans-ges.ademe.fr/static/documents/%5BBase%20Carbone%5D%20Documentation%20g%C3%A9n%C3%A9rale%20v11.0.pdf

[105] Cf. Lynda Aissani, Audrey Collet et Fabrice Béline. « Détermination de l’intérêt environnemental via l’analyse du cycle de vie du traitement des effluents organiques par méthanisation au regard des contraintes territoriales », Sciences, Eaux & Territoires, vol. 12, no. 3, 2013, pp. 78-85.

[106] Cf. Ademe, « La méthanisation » https://www.ademe.fr/expertises/dechets/passer-a-laction/valorisation-organique/methanisation

[107] Cf. INRAE, « Quelle contribution de lagriculture française à lémission des gaz à effet de serre ? » https://www.inrae.fr/sites/default/files/pdf/2e8018d27c89fb26f21e4c6a407c3a53.pdf

[108] J.-M. Jancovici, Quels sont les gaz à effet de serre ?, disponible au lien suivant https://jancovici.com/changement-climatique/gaz-a-effet-de-serre-et-cycle-du-carbone/quels-sont-les-gaz-a-effet-de-serre-quels-sont-leurs-contribution-a-leffet-de-serre/

[109] Cf. l’étude de l’Ademe « Produire des carburants de première génération », disponible au lien suivant : https://www.ademe.fr/expertises/energies-renouvelables-enr-production-reseaux-stockage/passer-a-laction/produire-biocarburants/dossier/produire-biocarburants-premiere-generation/impacts

[110] Cf. Bilan énergétique et émissions de GES des carburants et biocarburants conventionnels, https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/41339_comparatifacv.pdf

[111] Cf. l’étude de 2015 de l’Ademe « Impacts environnementaux de léolien français », disponible au lien suivant : https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/impacts-environnementaux-eolien-francais-2015.pdf

[112] Cf. http://www.gpse.fr/

[113] Cf. http://www.gpse.fr/IMG/pdf/gpse_2019_courants_electriques_parasites_en_elevage.pdf

[114] Cf. http://cdn2_3.reseaudescommunes.fr/cities/1358/documents/q1xyyxse788bz0w.pdf

[115] Cf. https://factuel.afp.com/sites/default/files/medias/factchecking/france/resume_du_rapport_du_gpse_-_44390.pdf

[116] Cf. https://www.senat.fr/questions/base/2019/qSEQ19020667S.html

[117] Cf. http://questions.assemblee-nationale.fr/q14/14-65555QE.htm

[118] Cf. https://www.anses.fr/fr/content/exposition-aux-basses-fr%C3%A9quences-et-infrasons-des-parcs-%C3%A9oliens-renforcer-l%E2%80%99information-des

[119] Cf. par exemple les actes du « séminaire éolien et biodiversité », organisé en 2017 avec le soutien de l’Ademe et du ministère de la transition écologique :

 https://crerco.fr/IMG/pdf/seminaire_eolien_et_biodiversite_2017_actes.pdf

[120] Cf. l’avis de l’Ademe de 2013 sur « Le solaire photovoltaïque »,

https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/avis-ademe-sur-solaire-photovoltaique-2013.pdf

[121] Cf. Mariska de Wild-Scholten, Valérick Cassagne, Thomas Huld, Solar resources and carbon footprint of photovoltaic power in different region in Europe, 2014,

http://smartgreenscans.nl/publications/deWildScholten-2014-Solar-resources-and-carbon-footprint-of-photovoltaic-power-in-different-regions-in-Europe.pdf

[122] Le solaire photovoltaïque, op. cit.

[123] Cf. l’avis de 2017 « Les énergies renouvelables et de récupération »,

https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/avis_ademe_enretr_201712.pdf

[124] Cf. l’étude « Base Carbone 2013 », 2014, https://www.bilans-ges.ademe.fr/static/documents/%5BBase%20Carbone%5D%20Documentation%20g%C3%A9n%C3%A9rale%20v11.0.pdf

[125] Cf. lavis de lAdeme de 2017 op. cit.

[126] Pour l’hydroélectricité, Les énergies renouvelables et de récupération, 2017,

https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/avis_ademe_enretr_201712.pdf

Pour le biogaz et la géothermie, Base Carbone 2013, 2014,

https://www.bilans-ges.ademe.fr/static/documents/%5BBase%20Carbone%5D%20Documentation%20g%C3%A9n%C3%A9rale%20v11.0.pdf

Pour l’éolien terrestre et maritime, Impacts environnementaux de l’éolien français, 2015,

https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/impacts-environnementaux-eolien-francais-2015.pdf

Pour le photovoltaïque, Le solaire photovoltaïque, 2013,

https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/avis-ademe-sur-solaire-photovoltaique-2013.pdf

Et pour les biocarburants, Bilan énergétique et émissions de GES des carburants et biocarburants conventionnels, 2006, https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/41339_comparatifacv.pdf

[127] Cf. les liens vers cette note scientifique sur les sites du Sénat et de l’Assemblée nationale :

https://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/opecst/quatre_pages/OPECST_2018_0012_note_stockage_carbone_sols.pdf

http://www2.assemblee-nationale.fr/content/download/65344/663392/version/1/file/note+4+pages+stockage_carbone_sols.pdf

Une version anglaise de cette note scientifique est aussi disponible au lien suivant :

https://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/opecst/quatre_pages_anglais/OPECST_2018_0032_storing_more_carbon_in_soils_briefing.pdf

[128] Les tourbières ne couvrent que 3 à 5 % des terres émergées mais contiendraient ainsi 30 % du carbone organique total de tous les sols. Leur potentiel de stockage supplémentaire est très faible. À l’inverse, le potentiel de séquestration du carbone est estimé à 1,4 Gt C/an pour les sols agricoles et à plus de 2 Gt C par an pour les autres sols, dont la forêt et l’agroforesterie pour lesquelles un tiers du carbone additionnel serait stocké dans les sols.

[129] Parmi ces facteurs peuvent être mentionnées la composition de la matière organique et diverses conditions locales (température, humidité, aération, érosion...).

[130] La capacité des minéraux à protéger la matière organique de la minéralisation, grâce aux liaisons organominérales, est une variable déterminante car elle affecte fortement les vitesses de minéralisation (une partie des matières organiques n’est pas biodégradée à la vitesse à laquelle sa nature chimique le permettrait).

[131] Ces évaluations sont démontrées par les reconstitutions paléoclimatiques et l’étude des sédiments lacustres.

[132] Selon le rapport spécial du GIEC sur les terres d’août 2019, l’érosion des sols provenant des sols agricoles est actuellement de 10 à 20 fois (sans travail du sol) à plus de 100 fois (travail conventionnel du sol) plus élevée que le taux de formation du sol.

[133] L’INRAE et l’Ifsttar ont conduit une expertise scientifique sur l’artificialisation des sols, publiée en décembre 2017 : https://inra-dam-front-resources-cdn.brainsonic.com/ressources/afile/420284-12ef6-resource-artificialisation-des-sols-rapport-en-francais.pdf

[134] Un sol artificialisé risque de devenir un sol imperméabilisé, de manière irréversible. L’imperméabilisation induit une transformation profonde des sols, porte atteinte à la biodiversité et diminue considérablement les stocks de carbone dans la végétation et les sols. Après un pic de 830 km² par an entre 2006 et 2008 (+ 1,8 % par an), les surfaces artificialisées en France ont crû de 540 km² par an entre 2008 et 2014 (+ 1,1 % par an). Selon la méthode de calcul utilisée, l’estimation de la surface artificialisée varie de 5,6 % à 9,3 % du territoire national. L’enjeu est de limiter l’artificialisation nette des sols, de limiter l’imperméabilisation des espaces artificialisés et de compenser autant que possible l’artificialisation, tout en assurant la capacité à répondre aux besoins sociaux, notamment en matière de logement.

[135] Cf. https://www.inrae.fr/sites/default/files/pdf/etude-4-pour-1000-resume-en-francais-pdf-1.pdf

[136] Comme les arbres, les légumineuses présentent l’intérêt de fixer davantage l’azote atmosphérique dans les sols.

[137] L’agriculture devra d’autant plus veiller à maîtriser ses émissions d’autres GES que les pratiques tendant à augmenter le stockage du carbone dans les sols pourraient avoir des effets indésirables au niveau des exploitations, comme des émissions de méthane et d’oxydes d’azote ou, encore, la diffusion de nitrates. Pour mémoire, l’agriculture et la forêt représentent d’ores et déjà 20 % des émissions nationales de GES : 10 % pour le protoxyde d’azote (N2O), sous l’effet des engrais azotés ; 8 % pour le méthane (CH4), lié à l’élevage, et 2 % pour le dioxyde de carbone (CO2), en raison de l’usage d’énergie fossile.

[138] Le protocole de Kyoto prévoit de limiter les émissions de GES et, notamment, d’augmenter les puits de carbone. Les conférences des parties de Bonn, de Marrakech et de Durban ont inclus la possibilité de comptabiliser les stocks de carbone des sols.

Cf. http://unfccc.int/portal_francophone/essential_background/kyoto_protocol/items/3274.php

[139] Cf. le rapport de la FAO « Unlocking the Potential of Soil Organic Carbon » à la suite de la Conférence internationale sur le carbone organique du sol (21-23 mars 2017) :

http://www.fao.org/documents/card/en/c/25eaf720-94e4-4f53-8f50-cdfc2487e1f8/

[140] Cette MAEC est facultative : seules les régions qui le souhaitent la mettront en place.

[141] « Stratégie nationale bas carbone » 2015. Pour mémoire, l’objectif inscrit dans la loi TECV est la diminution des émissions de gaz à effet de serre à hauteur de 40 % en 2030 et de 75 % en 2050, par rapport à 1990.

[142] Cf. l’arrêté du 26 février 2018 portant publication de la stratégie nationale de mobilisation de la biomasse https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/biomasse-energie

[143] Un effort de coordination de la recherche internationale et européenne sur le stockage du carbone dans les sols est visible autour de l’initiative CIRCASA (« Coordination of International Research Cooperation on soil CArbon Sequestration in Agriculture »). Ce projet est notamment financé par le programme « Horizon 2020 » de l’UE, avec le groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (GCRAI ou CGIAR en anglais). De plus, la France et l’Europe ont investi dans de grandes infrastructures de recherche sur l’étude et la surveillance des sols et les échanges de gaz et d’énergie entre les sols et l’atmosphère ou les eaux dans le cadre des changements environnementaux : ICOS (Integrated Carbon Observation System https://icos-france.fr/), AnaEE (Analysis And Experimentation On Ecosystems https://www.anaee-france.fr/) et OZCAR (Observatoires de la Zone Critique, application et recherche https://icos-france.fr/), coordonnées par l’Alliance nationale de recherche pour l’environnement (AllEnvi). L’initiative « 4 pour 1 000 » contribue aussi à ces recherches (cf. https://www.4p1000.org/fr).

[144] Cf. José Philippe Pérez et Anne-Marie Romulus, Thermodynamique : fondements et applications avec exercices et problèmes résolus, 1993.

[145] Cf. Élie Lévy, Dictionnaire de physique, 1988.

[146] Cf. Ian Hore-Lacy, Renewable energy and Nuclear power, 2003, http://www.feasta.org/documents/wells/contents.html?one/horelacy.html

[147] Cf. l’étude de Cutler J. Cleveland : https://www.esf.edu/EFB/hall/pdfs/energy_US_economy.pdf

[148] Cf. létude de David Elliott http://www.feasta.org/documents/wells/contents.html?two/wellselliott.html

[149] Cf. l’étude de Ian Hore‑Lacy : http://www.feasta.org/documents/wells/contents.html?one/horelacy.html

[150] Richard Heinberg, « Searching for a Miracle : “Net Energy” Limits and the Fate of Industriel Society », Post Carbon Institute Report, 2009.

[151] Ademe, Coût des énergies renouvelables et récupération, 2019.

[152] Ademe, Base carbone, 2014.

[153] Arrêté du 17 novembre 2008.

[154] Arrêté du 4 mars 2011 modifié le 7 janvier 2013.

[155] Arrêté du 27 janvier 2011.

[156] Arrêté du 19 mai 2011.

[157] Arrêté du 23 juillet 2010.

[158] Arrêté du 1er mars 2007.

[159] Cf. le rapport d’information de la mission d’information commune sur le foncier agricole, n° 1460, http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/dossiers/foncier_agricole_mic

[160] Onisep, http://www.onisep.fr/Choisir-mes-etudes/Au-lycee-au-CFA/Au-lycee-general-et-technologique/Bac-STI2D-bien-choisir-sa-specialite

[161] CFPPA Le Robillard, https://cfppa-lerobillard.fr/formation/mettre-en-oeuvre-un-projet-de-production-denergie-renouvelable-sur-lexploitation-agricole/

[162] L’association technique Énergie et environnement (ATEE) a listé l’ensemble des formations liées aux biogaz et méthaniseurs : http://atee.fr/sites/default/files/2019-10-11_formations.xlsx

[163] Réseau des Carif-Oref, https://reseau.intercariforef.org/formations/liste-formations.html

[164] Cf. https://agriculture.gouv.fr/formation-comprendre-les-enjeux-lies-lenergie-sur-une-exploitation

[165] Cf. http://www.onisep.fr/Ressources/Univers-Formation/Formations/Post-bac/Master-agrosciences-environnement-territoires-paysage-foret

[166] Cf. http://fst.univ-lorraine.fr/sites/fst.univ-lorraine.fr/files/master-AETPF-parcours-ecosystemes-agricoles-et-forestiers-ECOSAFE.pdf

[167] Cf. http://ensaia.univ-lorraine.fr/fr/content/du-mise-en-oeuvre-dune-unite-de-methanisation

[168] Cf. https://eplagro55.fr/fileadmin/user_upload/pdf/Methanisations/plaquette_du_methanisation_2019.pdf

[169] Cf. https://extranet-isere.chambres-agriculture.fr/formations/detail-de-la-formation/actualites/methanisation-une-opportunite-a-saisir-42/

[170] Cf. http://www.formation-agriculteurs.com/exploitants/energie/methanisation/

[171] Cf. https://www.cfppa-die.fr/detail-formation/alias/apprendre-a-fabriquer-une-eolienne-individuelle.html

[172] Cf. http://www.chambres-agriculture-bretagne.fr/synagri/energie-eolienne

[173] Cf. https://www.ines-solaire.org/fr/formation/

[174] Cf. http://www.formation-agriculteurs.com/exploitants/energie/photovoltaique/

[175] Cf. https://grandest.chambre-agriculture.fr/formation-emploi/agriculteurs-agricultrices-salariees-formez-vous/formations/detail-de-la-formation/actualites/monter-un-projet-photovoltaique/

[176] Cf. https://ec.europa.eu/agriculture/sites/agriculture/files/external-studies/2012/renewable-energy-impacts/exec_sum_en.pdf

[177] Cf. le rapport spécial n° 05/2018 de la Cour des comptes européenne

https://www.eca.europa.eu/fr/Pages/DocItem.aspx?did=44963

[178] Cf. le document de travail de la Commission SWD(2014) 259 final du 28.7.2014 intitulé « State of play on the sustainability of solid and gaseous biomass used for electricity, heating and cooling in the EU » ainsi que le document de travail de la Commission SWD(2016) 418 final du 30.11.2016, intitulé « Impact assessment: Sustainability of Bioenergy. Accompanying the document Proposal for a Directive of the European Parliament and of the Council on the promotion of the use of energy from renewable sources ».

[179] Données EurObserv’ER 2015.

[180] OFATE, Baromètre OFATE de léolien terrestre en Allemagne. 2020. Disponible sur : https://energie-fr-de.eu/fr/energie-eolienne/actualites/lecteur/barometre-ofate-de-leolien-terrestre-en-allemagne.html

[181] OFATE, Baromètre OFATE du biogaz en Allemagne, 2020. Disponible sur : https://energie-fr-de.eu/fr/bioenergies/actualites/lecteur/barometre-ofate-de-biogaz-en-allemagne.html

[182] OFATE, Baromètre OFATE sur le photovoltaïque en Allemagne, 2020. Disponible sur : https://energie-fr-de.eu/fr/energie-solaire/actualites/lecteur/barometre-sur-le-photovoltaique-en-allemagne.html

[183] Selon l’Institut Fraunhofer.

[184] Cf. https://www.ers.usda.gov/webdocs/publications/74658/60128_eib159.pdf?v=0 Trends in U.S. Agriculture’s Consumption and Production of Energy: Renewable Power, Shale Energy, and Cellulosic Biomass.

[185] European Biomasse Association, 2009, Calculation of biogaz potential from energy crops and manure for 2020 FAOSTAT 2009, AEBIOM calculation.

[186] Cf. https://ec.europa.eu/energy/intelligent/projects/sites/iee-projects/files/projects/documents/biogasin_national_biogas_road_maps.pdf

[187] Cf. https://www.bioenergie-promotion.fr/9758/prospective-sur-la-production-de-bioenergies-en-france/

[188] Un effet rebond, ou paradoxe de Jevons, correspond à l’augmentation de consommation liée à la réduction des limites à l’utilisation d’une technologie, ces limites pouvant être monétaires, temporelles, sociales, physiques, liées à l’effort, au danger, à l’organisation, etc. Cf. l’article de François Schneider http://decroissance.free.fr/Schneider_l_Ecologiste.pdf

[189] Cf. http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/commission/affaires_eco/Covid-19/Feuille_de_route_relance_energie_04-06-2020.pdf

[190] Le MTE et la DGEC, chefs de file de cette stratégie aujourd’hui, devront copiloter avec le ministère de l’agriculture et de l’alimentation et ses directions concernées. Ces ministères auront ensuite à cœur de mieux associer le ministère de l’économie, des finances et de la relance, la Commission de régulation de l’énergie (CRE), l’Ademe, l’INRAE, les acteurs du monde agricole, les associations de défense de l’environnement, etc.

[191] Vos rapporteurs ne sont pas allés jusqu’à la position de la Cour des comptes qui préconise la création d’une instance de pilotage interministériel de la politique énergétique placée auprès du Premier ministre ainsi que la mise en place d’un comité chargé d’éclairer les choix gouvernementaux relatifs à l’avenir de la politique de l’énergie. Créer deux nouvelles instances sans en supprimer d’autres n’a pas recueilli leur assentiment.

[192] Cf. https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000023983208&idArticle=LEGIARTI000039359744&dateTexte=&categorieLien=id

[193] Développé par le service de la statistique et de la prospective du ministère de l’agriculture et de l’alimentation, l’outil « Agreste Données en ligne » propose gratuitement, depuis le site Agreste, des résultats d’enquêtes et des séries longues sous forme de tableaux interactifs.

[194] Le seuil à partir duquel les installations sont soumises aux procédures d’appels d’offres pourrait être rehaussé de 100 kWc par projet actuellement à 500 kWc ou 1 MWc.

[195] Cf. les dispositions du 4e paquet européen énergie/climat, baptisé « Une énergie propre pour tous les Européens », en particulier la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables.

[196] Cf. la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat.

[197] Cf. le rapport d’information de la mission d’information commune sur le foncier agricole, n° 1460, http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/dossiers/foncier_agricole_mic

[198] La dernière directive cadre déchets prévoit l’obligation pour les États membres de mettre en place une gestion séparée des biodéchets au plus tard le 31 décembre 2023.

[199] Des solutions innovantes de micro-méthanisation reposant sur des unités à petite échelle permettant de mailler efficacement les territoires sont par exemple proposées par l’entreprise Tryon, cf. https://www.tryon-environnement.com/

[200] Les coûts de production du biogaz sont situés entre 90 et 120 euros/MWh, contre un prix du gaz naturel aujourd’hui inférieur à 25 euros/MWh et évalué à 33,2 euros/MWh en 2030 par l’AIE.

[201] Cf. https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/TRER2006667D%20signe%CC%81%20PM.pdf

[202] En méthanisation, le rendement dépend en premier lieu du type de ressources utilisées, chacune d’elle se caractérisant par un « pouvoir méthanogène » propre. La technologie de digestion a également un impact sur le rendement.

[203] Il s’agit des éléments traces métalliques (As, Cu, Cd, Cr, Hg, Ni, Pb, Se, Zn…).

[204] Selon l’Ademe, seule une faible part des éoliennes terrestres utilise le néodyme, environ 3 % en France. C’est le cas des éoliennes utilisant des générateurs « à aimants permanents » qui concentrent la totalité des terres rares de la filière. Oril est possible de substituer le néodyme par d’autres solutions, telles que des génératrices asynchrones ou des génératrices synchrones sans aimant permanent. Ce sont des génératrices qui transforment l’énergie mécanique en énergie électrique en étant entraînées au-delà de la vitesse de synchronisme. La problématique des aimants permanents est donc prise en compte par les constructeurs d’éoliennes.

[205] Cette obligation se retrouve notamment dans l’article L. 553-3 du code de l’environnement : « l’exploitant dune installation produisant de lélectricité à partir de lénergie mécanique du vent ou, en cas de défaillance, la société mère est responsable de son démantèlement et de la remise en état du site, dès quil est mis fin à lexploitation, quel que soit le motif de la cessation de lactivité. Dès le début de la production, puis au titre des exercices comptables suivants, lexploitant ou la société propriétaire constitue les garanties financières nécessaires ». L’exploitant doit, par ailleurs, constituer des garanties financières dès le début de l’exploitation, afin de pouvoir mener à bien le démantèlement (arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent).

[206] Cf. l’article 20 de l’arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent.

[207] La gazéification à haute température selon le procédé Fischer-Tropsch a permis à l’Allemagne de produire la moitié de ses carburants pendant la Seconde Guerre mondiale.

[208] Rapport d’information n° 734 (2018-2019) https://www.senat.fr/notice-rapport/2018/r18-734-notice.html

[209] Cf. https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Feuille%20de%20route%20fran%C3%A7aise%20pour%20le%20d%C3%A9ploiement%20des%20biocarburants%20a%C3%A9ronautiques%20durables.pdf

[210] Cf. https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/ECV%20-%20Mise%20en%20place%20d%27une%20fili%C3%A8re%20de%20biocarburants%20a%C3%A9ronautiques%20en%20France.pdf

[211] Cf. http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/opecst/quatre_pages/OPECST_2019_0009_note_stockage_electricite.pdf

[212] Les piles à combustible convertissent l’énergie chimique de combustion en énergie électrique, en chaleur et en eau. L’hydrogène est utilisé comme combustible pour alimenter l’anode de la pile à combustible, tandis que la réaction de réduction sur la cathode est alimentée par injection de dioxygène. Il existe plusieurs familles de piles à combustible en fonction des électrolytes utilisés. Celles les plus couramment utilisées sont dites « PEM » (Proton Exchange Membrane Fuel Cell), dont l’électrolyte est constitué d’une membrane solide polymère fonctionnant à basse température. Le méthane de synthèse est lui aussi utilisable par des piles à combustibles à haute température.

[213] Cf. les liens vers cette note scientifique sur les sites du Sénat et de lAssemblée nationale : https://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/opecst/quatre_pages/OPECST_2018_0012_note_stockage_carbone_sols.pdf

 http://www2.assemblee-nationale.fr/content/download/65344/663392/version/1/file/note+4+pages+stockage_carbone_sols.pdf

Une version anglaise de cette note scientifique est aussi disponible au lien suivant : https://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/opecst/quatre_pages_anglais/OPECST_2018_0032_storing_more_carbon_in_soils_briefing.pdf

[214] Rapport CAPRESE-SOIL (CArbon PREservation and SEquestration in agricultural soils) du JRC (Joint Research Centre) de la Commission européenne, 2013 ;

cf. http://publications.jrc.ec.europa.eu/repository/bitstream/JRC88295/caprese_final%20report-v2.pdf

[215] Lancé le 7 décembre 2016 par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation. Il ambitionne de fédérer les acteurs français de l’innovation, au sens large, qui travaillent sur et avec tous types de sols (forestiers, agricoles, urbains, jachères industrielles, etc.). Le réseau favorise les interactions entre des acteurs diversifiés, qui travaillent tant à la production de connaissances et d’outils mobilisables qu’à la valorisation et au transfert de ces productions auprès des utilisateurs concernés (agriculteurs, décideurs politiques, acteurs de l’aménagement du territoire, etc.). La principale mission du réseau est de faciliter le partage de connaissances liées au sol entre secteurs et de développer la transdisciplinarité des initiatives scientifiques et techniques autour de la gestion des sols afin d’apporter des réponses face aux enjeux actuels. Il est aussi une interface avec les réseaux internationaux existant et cherche à développer la visibilité internationale de l’expertise et des initiatives françaises autour de la gestion des sols.