N° 2334

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 mars 2024.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE,
SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT
APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCEDURE ACCÉLÉRÉE,


portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union
européenne en matière d’économie, de finances, de transition
écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole

par M. Ludovic MENDES
Député

——

AVIS

FAIT

AU NOM DES DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

par M. Stéphane VOJETTA

Député

——

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

par M. Damien ADAM

Député

——

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES

par M. Daniel LABARONNE

Député

 

 

 Voir les numéros :

 Sénat :  112, 213, 214 et T.A. 47 (2023-2024).

 Assemblée nationale :  2041.


 


  1  

SOMMAIRE

___

Pages

Synthèse de la commission des Lois

Synthèse de la commission des Affaires économiques

Synthèse de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Synthèse de la commission des finances

COMMENTAIRE DES ARTICLES DU PROJET DE LOI

titre ier dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne en matière économique et financière

Chapitre Ier Dispositions relatives au droit de la consommation

Article 1er Modification des obligations des exploitants d’infrastructures de recharge en carburants alternatifs et des sanctions et contrôles applicables

Article 2 Adaptation du code de la consommation au règlement relatif à la sécurité générale des produits (RGSP)

Article 3 Habilitation à légiférer par voie d’ordonnance pour modifier la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux

Chapitre II Dispositions relatives au droit des sociétés

Article 4 (art. L. 225-124, L. 236-20, L. 236-21, L. 236-22, L. 236-28 à L. 236-31, L. 236-35, L. 236-36, L. 236-38, L. 236-40, L. 236-48, L. 236-50, L. 236-52 et L. 950-1 du code de commerce, et art. L. 23711 et L. 23721 du code du travail) Ratification de l’ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales et diverses améliorations de ce même régime

Article 5 Demande d’habilitation à prendre par ordonnance des mesures pour transposer la directive (UE) 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées et à des mesures connexes et pour harmoniser les différents dispositifs nationaux préexistants relatifs à la représentation équilibrée entre les femmes et les hommes au sein des organes des sociétés commerciales

Chapitre III Dispositions relatives au droit bancaire, monétaire et financier

Article 6 (articles L. 441-1, L. 533-12, L. 762-9, L. 763-9, L. 764-9, L. 773-30, L. 774-30 et L. 775-24 du code monétaire et financier) Adaptations relatives aux dépositaires centraux de titres, aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement, aux informations sur les transferts d’actifs numériques et extension de certaines de ces dispositions à des collectivités d’outre-mer

Article 7 (articles L. 721-9, L. 712-11 [nouveau], L. 773-4, L. 774-4, L. 775-4, L. 781-3, L. 783-2, L. 783-4, L. 783-10, L. 784-2, L. 784-4, L. 784-10, L. 785-2 et L. 785-3 et L. 785-9 du code monétaire et financier) Adaptation de mesures relatives à la résolution des établissements de crédit, à la supervision des organes centraux et à l’identification des titulaires de comptes bancaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les îles Wallis et Futuna

Article 7 bis (articles L. 312-5, L. 752-2, L. 753-2 et L. 754-2 du code monétaire et financier) Correction d’une imprécision dans la transposition de la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux systèmes de garantie des dépôts

Article 7 ter (nouveau) (article L. 312-12 du code monétaire et financier) Audition du président du directoire du Fonds de garantie des dépôts et de résolution devant les commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat avant sa nomination

Article 8 (article L. 712-7 du code monétaire et financier, article L. 511-7 du code de la consommation, article L. 450-13 [nouveau], L. 950-1 et L. 954-9-1 [nouveau] du code de commerce) Mise en œuvre par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers et reconnaissance de pouvoirs d’enquête à certains fonctionnaires pour la mise en œuvre du règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur

Chapitre IV Dispositions relatives à l’assistance internationale au recouvrement

Article 9 (article L. 283 D du livre des procédures fiscales, article 349 sexies du code des douanes et articles L. 612-2 et L. 612-5 du code rural et de la pêche maritime) Assistance internationale au recouvrement des créances fiscales et d’autres créances publiques au sein de l’Union européenne

Titre II DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE TRANSITION ÉCOLOGIQUE

Chapitre Ier Dispositions relatives aux batteries, à la collecte et à la valorisation des déchets

Article 10 Devoir de diligence pour les opérateurs économiques mettant en service des batteries et les opérateurs économiques sur le marché des batteries

Article 11 Dispositions en matière de conception des batteries, ainsi que de prévention et de gestion des déchets associés

Article 12 Suppression de l’interdiction d’importation des boues d’épuration

Chapitre II Dispositions relatives au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières

Article 13 Création d’un régime de sanctions applicable aux importateurs en cas de non-respect des obligations de déclaration relatives au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pendant la période transitoire

Chapitre III Dispositions relatives au système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre

Article 14 Transposition des dispositions communes et particulières applicables aux installations suite à la révision de la directive relative  au système d’échange de quotas d’émission

Article 15 Transposition des dispositions particulières applicables au secteur aérien suite à la révision de la directive relative au système d’échange de quotas d’émission

Article 16 Extension du système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre au secteur du transport maritime

Article 17 Obligations applicables au titre du régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale (Corsia)

Chapitre IV Dispositions en matière de droit de l’énergie

Article 18  Abrogation de l’article L. 321-19 du code de l’énergie relatif au dispositif d’interruptibilité

Article 19 Actualisation de la définition de l’hydrogène renouvelable et de l’hydrogène bas carbone (article L. 811-1 du code de l’énergie)

Chapitre V Dispositions relatives aux contrats de concessions aéroportuaires

Article 20 Suppression du principe de modération tarifaire pour les premiers tarifs de redevance aéroportuaire d’un nouveau contrat de concession

titre iii DISPOSITIONS D’ADAPTION AU DROIT DE L’UNION europÉenne en matiÈre rÉpressive

Chapitre Ier  Diverses dispositions relatives à l’échange d’informations en matière répressive

Article 21 (Intitulé de la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale) Modification de l’intitulé de la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale relative à l’échange simplifié d’informations entre services

Chapitre II  Dispositions applicables aux demandes d’informations émises par les services français

Article 22 (art. 695-9-31 et art. 695-9-31-1 [nouveau] du code de procédure pénale) Désignation des services ou unité pouvant saisir directement les points de contacts uniques des autres États membres et disposition relative à l’instauration d’un point de contact unique en France

Article 23 (art. 695-9-33 du code de procédure pénale) Dispositions relatives aux demandes d’information émises par les services français

Chapitre III  Dispositions applicables aux demandes d’informations reçues par les services français

Article 24 (art. 695-9-37 et art. 695-9-38 du code de procédure pénale) Dispositions relatives aux transmissions d’informations sur demande ou spontanées émises par les services français

Article 25 (art. 695-9-39 du code de procédure pénale) Transmission, à un État membre, des informations détenues par les services et unités et leur ayant été préalablement transmises par un autre État membre

Article 26 (art. 695-9-40, art. 695-9-41, art. 695-9-42, art. 695-9-43, art. 695-9-44, art. 695945, art. 6959451 [nouveau], art. 695-9-46, et art. 695-9-47 du code de procédure pénale) Dispositions relatives à l’intervention de l’autorité judiciaire en matière d’échanges d’informations, aux refus de communication des informations demandées et à l’utilisation des informations transmises

Article 27 (art. 695-8-2 du code de procédure pénale) Adaptation du code de procédure pénale au règlement (UE) 2023/2131 du Parlement européen et du Conseil du 4 octobre 2023 relatif aux échanges d’informations numériques dans les affaires de terrorisme

titre iv dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne en matière de droit pénal

Article 28 (art. 63-2, 63-3, 63-3-1, 63-4-1 et 63-4-2 du code de procédure pénale) Mise en conformité des dispositions du code de procédure pénale relatives au droit d’accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales avec la directive 2013/48/UE

Article 29 (art. 695-43 et 695-45 du code de procédure pénale) Mise en conformité du droit français avec la décision-cadre du Conseil 2002/584/JAI du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres

Article 30 (art. 804 du code de procédure pénale) Application outre-mer et entrée en vigueur différée des dispositions relatives à la garde à vue

Titre V DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE SOCIALE ET DE DROIT DE LA SANTÉ

Article 31 Mise en conformité du code de l’environnement avec le règlement (UE) 2023/2055 en ce qui concerne les microplastiques

Article 32 (art. L. 515-8, art. L. 631-9, art. L. 632-2, art. L. 633-2 et art. L. 634-4 du code général de la fonction publique)

Article 33 Délégation de signature des aides de la politique agricole commune au titre de la programmation 2014 – 2022

Article 33 bis (nouveau)  Extension du périmètre de la délégation prévue à l’article L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales concernant la mise en œuvre des aides de la politique agricole commune par les régions

Article 34 Sécurisation juridique des missions de traçabilité animale confiées aux établissements de l’élevage (EDE)

TRAVAUX de la commission DES LOIS

TRAVAUX de la commission DES AFFAIRES économiques, saisie pour avis

TRAVAUX de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie pour avis

TRAVAUX de la commission DES FINANCES, saisie pour avis

Personnes entendues par le rapporteur de la commission des lois

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES économiques

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS DE LA COMMISSION DU Développement durable et de l’aménagement du territoire

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS DE LA COMMISSION DES FINANCES

 


  1  

   Synthèse de la commission des Lois

Le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, comportant 34 articles, a été enregistré à la présidence du Sénat le 15 novembre 2023.

Si le Sénat a choisi de réunir une commission spéciale chargée de l’examen de ce texte, notre assemblée l’a renvoyé à la commission des Lois. Toutefois, des délégations de fond ont été accordées à la commission des Affaires économiques (articles 1er, 2, 3, 18, 19, 33 et 24), celle des Finances (articles 6 à 9), et à celle du Développement durable et de l’aménagement du territoire (articles 10 à 17, 20 et 31).

Lors sa réunion du mercredi 13 mars 2024, la commission des Lois a débattu des seuls articles entrant dans son champ de compétences, et adopté les autres articles dans leur rédaction proposée par les commissions délégataires.

Les articles 4, 5, 21 à 30 et 32 lui sont revenus.

Les articles 4 et 5 portent sur le droit des sociétés. L’article 4 ratifie la transposition par ordonnance de la directive 2019/2121 qui réformait les opérations transfrontalières (fusions, scissions, apports partiels d’actifs). L’article 5 habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2022/2381 sur la représentation équilibrée des hommes et des femmes dans les conseils d’administration des grandes sociétés commerciales.

Les articles 21 à 26 concernent les échanges d’informations en matière répressive. Ils visent à transposer la directive 2023/977 du 10 mai 2023 qui instaure des règles précises et harmonisées de nature à garantir aux services répressifs de tout État membre un accès équivalent aux informations disponibles dans les autres États membres.

L’article 27 adapte le code de procédure pénale au règlement européen 2023/2131 qui fluidifie les échanges d’information numériques en matière de terrorisme.

L’article 28 met en conformité sur plusieurs points le code de procédure pénale avec la directive 2013/48 sur la garde à vue.

L’article 29 met en conformité le code de procédure pénale avec la décision‑cadre 2002/584 du Conseil de l’Union européenne, qui porte sur la procédure de mandat d’arrêt européen.

L’article 30 prévoit certains modalités d’application outre‑mer.

Enfin, l’article 32 porte sur le droit de la fonction publique. Il a pour objet de transposer un alinéa de l’article 10 de la directive 2019-1158 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants.


  1  

   Synthèse de la commission des Affaires économiques

La commission des affaires économiques était saisie pour avis, avec délégation au fond, des articles 1er, 2, 3, 18, 19, 33 et 34 du projet de loi ( 2041) portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole.

Ce projet de loi vise à assurer la conformité de notre droit avec les évolutions récentes intervenues au niveau européen dans les domaines du droit de la consommation, de l’énergie et de l’agriculture. Son article 3 vise, en particulier, à habiliter le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance afin de mettre en conformité avec le droit européen la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 visant à encadrer l'influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux.

Face à la grande diversité des sujets traités, votre rapporteur a souhaité interroger l’ensemble des acteurs concernés, soit en les auditionnant directement, soit en les sollicitant par écrit. Il ressort des échanges conduits que la rédaction de ces articles, sous réserve de quelques modifications d’ordre rédactionnel ou légistique, est conforme à leurs attentes.

Votre rapporteur a attaché un soin particulier au contenu de l’ordonnance prévue à l’article 3 précité, qui doit permettre de résoudre les quelques difficultés relevées par la Commission européenne lors de la notification de la loi précitée, afin de garantir sa juste articulation avec les exigences du droit européen. Dans cette perspective, les services compétents de la Commission européenne ont été auditionnés.

Il ressort de ces échanges que le contenu même de la loi n’est pas fondamentalement remis en cause. Cette loi s’applique en effet d’ores et déjà aux influenceurs établis en France et continuera de s’appliquer également aux influenceurs établis dans les autres pays de l’Union européenne, via la mise en place d’un mécanisme ad hoc permettant de respecter les conditions de dérogation au principe du pays d’origine telles que prévues par les directives « e-commerce » et « services des médias audiovisuels ». Les rares aménagements à prévoir seront, en outre, co-construits avec l’ensemble des parties prenantes, dans la même logique de transparence qui a présidé à l’ensemble des travaux concernant cette initiative parlementaire.

Pour ces raisons, votre rapporteur a soutenu l’adoption des articles précités lors de leur examen devant la commission des affaires économiques, en apportant simplement, par amendements, quelques corrections rédactionnelles lorsque cela était nécessaire.

L’article 1er adapte certaines dispositions du code de la consommation au règlement (UE) 2023/1804 relatif au déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs et abrogeant la directive 2014/94/UE, dit règlement "Afir". Ce règlement prévoit en effet un certain nombre d’obligations pour les exploitants de borne de recharge de véhicules électriques ou à hydrogène, parmi lesquelles celle de pratiquer des prix transparents et non discriminatoires et de fournir un certain nombre d’informations au consommateur. En l’état actuel du droit, le contrôle de ces nouvelles obligations implique que les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) soient habilités en droit à contrôler ces obligations. L’article 1er modifie en ce sens plusieurs articles du code de la consommation.

Lors de son examen devant le Sénat, cet article a été modifié par un amendement (COM-42) afin d’étendre la compétence de contrôle de la DGCCRF à l’ensemble des moyens de paiement existants (QR code), de garantir l’absence de doublons entre les sanctions prévues au sein du code de la consommation et du code de l’énergie, et de permettre à l’ensemble des zones insulaires non interconnectées au réseau dit « métropolitain continental » (ZNI) de déroger aux dispositions du règlement précité.

Lors de son examen devant l’Assemblée nationale, en commission, quatre amendements d’ordre rédactionnel ont été adoptés à l’initiative du rapporteur (CE12, CE13, CE14, CE15).

L’article 2 adapte certaines dispositions du code de la consommation au règlement 2023/988 du 10 mai 2023 relatif à la sécurité générale des produits. Ce règlement a en effet abrogé la directive 2001/95/CE relative au même sujet, et qui avait été transposée en droit français par les ordonnances n° 2004-670 du 9 juillet 2004 et n° 2008-810 du 22 août 2008, avant que l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 n’opère une refonte de la partie législative du même code. Cet article redéfinit en conséquence le périmètre d’application de la sécurité générale des produits et prévoit un régime de sanction adapté en cas de manquement.

Lors de son examen devant le Sénat, cet article a fait l’objet de deux modifications d’ordre rédactionnel (amendements COM-47 et COM 48). Des modifications de même nature ont été adoptées à l’initiative du rapporteur lors de son examen devant l’Assemblée nationale (amendements CE5, CE9, CE10 et CE11).

L’article 3 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance dans un délai de neuf mois afin de prendre les mesures nécessaires pour rendre conformes au droit européen les dispositions de la loi du 9 juin 2023 visant à encadrer l'influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux. Cette loi avait en effet fait l’objet d’observations de la part de la Commission européenne dans une lettre en date du 14 août 2023.

Lors de son examen devant le Sénat, cet article a été modifié dans le sens d’une réduction de la durée de l’habilitation à six mois et de son champ aux seuls articles 1er, 4, 5 et 9 (COM-49). Ce même amendement a prévu la suppression immédiate des articles 10, 11, 12, 15 et 18 qui ne sont pas compatibles avec les dispositions du règlement sur les services numériques (RSN).

Lors de son examen devant l’Assemblée nationale, au stade de la commission, une durée de neuf mois a été rétablie pour cette habilitation. Le champ de cette dernière a par ailleurs été modifié, afin de comprendre l’ensemble des dispositions du titre Ier de la loi précitée (amendement CE8). Une modification rédactionnelle a également été apportée (CE7).

L’article 18 abroge l’article L. 321-19 du code de l’énergie, qui constituait la base légale du dispositif d’interruptibilité permettant au gestionnaire de réseau RTE de couper l’alimentation en électricité de sites industriels recrutés par appel d’offres. L’entrée en vigueur d’un nouveau règlement européen, qui intègre désormais ce service parmi les services dits « de participation de la demande » et la nécessité d’éviter une requalification de ce dispositif en aide d’État ont conduit à la suppression de cet article. Le dispositif d’interruptibilité demeure, mais sur une base européenne et règlementaire, et il est mis en œuvre par la Commission de régulation de l’énergie et non plus par l’État, afin de pallier au risque de requalification précité.

Cet article n’a fait l’objet de modifications lors de son examen devant le Sénat puis en commission devant l’Assemblée nationale.

L’article 19 modifie l’article L. 811-1 du code de l’énergie afin d’adapter sa rédaction aux éléments de précision relatifs à la définition de l’hydrogène renouvelable et bas carbone apportés par les actes délégués 2023/1184 et 2023/1185 du 10 février 2023 adoptés en application de la directive 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, dite directive « RED II ». Il précise ainsi que le seuil d’émission de gaz à effet de serre en-dessous duquel l’hydrogène peut être qualifié de renouvelable ou de bas‑carbone doit également être vérifié lors de l’utilisation de cette énergie renouvelable, conformément aux dispositions du droit européen en vigueur.

Lors de son examen devant le Sénat, cet article a été complété afin d’introduire la même modification au sein de l’article L. 282-2 du code de l’énergie afin de rappeler que la même méthodologie s’applique pour les carburants liquides et gazeux renouvelables d'origine non biologique destinés au secteur des transports et aux carburants à base de carbone recyclé (amendement COM-25).

Cet article n’a fait l’objet de modifications lors de son examen en commission devant l’Assemblée nationale.

L’article 33 complète la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles par un article 78‑1 qui permet au représentant de l’État de déléguer sa signature au président de région et aux agents placés sous son autorité pour ce qui concerne les décisions relatives aux aides de la politique agricole commune du fonds européen agricole de développement rural qui sont cofinancées par l’État au titre de la programmation 2014-2022. Cette délégation vise à permettre une accélération de l’instruction de ces dossiers, alors que les effectifs concernés ont été transférés de l’État vers les régions.

Lors de son examen devant le Sénat, cet article a fait l’objet d’une modification de précision juridique adoptée à l’initiative du Gouvernement (COM-61). Cet article n’a pas fait l’objet de modification lors de son examen en commission devant l’Assemblée nationale.

L’article 33 bis est un article additionnel adopté par amendement à l’initiative du rapporteur de la commission des affaires économiques, M. Stéphane Vojetta (CE16). Cet article modifie l’article L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales afin d’étendre le périmètre de la délégation que le conseil régional peut accorder à son président en matière de mise en œuvre des aides de la politique agricole commune.

L’article 34 modifie l’article L. 212-7 du code rural et de la pêche maritime afin de sécuriser les missions de traçabilité animale exercées par les établissements de l’élevage (Ede). Cette référence avait en effet été supprimée lors de l’adoption de l’ordonnance du 20 octobre 2021 adaptant les dispositions du même code au règlement européen 2016/429 relatif aux maladies animales transmissibles, également appelé « législation sur la santé animale ».

Cet article a fait l’objet d’une réécriture importante lors de son adoption par le Sénat, afin de garantir la sécurité juridique des missions exercées par les établissements de l’élevage et le rôle de Chambres d’agriculture France dans ce cadre (COM-50, COM‑51, COM-52, COM-53).

Lors de son examen en commission devant l’Assemblée nationale, cet article n’a pas fait l’objet de modification.

 

 


  1  

   Synthèse de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

L’article 10 définit le régime de contrôle et de sanction applicable au devoir de diligence pour les opérateurs économiques mettant en service des batteries et les opérateurs sur le marché des batteries.

L’article 11 met en conformité le droit national avec les dispositions du règlement (UE) 2023/1542 relatif aux batteries, en matière de conception des batteries et de prévention de gestion des déchets associés.

L’article 12 supprime l’interdiction systématique d’importation des boues d’épuration, contraire au droit de l’Union européenne.

L’article 13 vise à introduire dans le droit national de nouvelles dispositions concernant le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. Un régime de sanctions est ainsi créé, applicable aux importateurs en cas de non-respect des obligations de déclaration pendant la période transitoire.

L’article 14 vise à transposer dans le droit national la directive relative au système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (SEQE-UE), suite à sa révision, concernant les dispositions communes aux installations, à l’aviation et au transport maritime et les dispositions particulières applicables aux installations.

L’article 15 vise à transposer les dispositions particulières applicables au secteur aérien suite à la révision de la directive relative au système d’échange de quotas d’émission, notamment en ce qui concerne l’allocation de quotas à titre gratuit, l’articulation avec le régime Corsia et la prise en compte des effets hors dioxyde de carbone.

L’article 16 vise à transposer les nouvelles dispositions applicables au transport maritime au sein du système d’échange de quotas d’émission (SEQE-UE), notamment concernant le périmètre d’application, les obligations en matière de surveillance et de déclaration des émissions ainsi que de restitution des quotas, et les sanctions associées.

L’article 17 vise à préciser les obligations applicables au titre du régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale (Corsia), dans le cadre de son articulation avec le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne.

L’article 20 supprime le principe de modération tarifaire pour les premiers tarifs de redevance aéroportuaire d’un nouveau contrat de concession. Il étend également le champ de l’avis de l’ART dans le cadre de l’avis conforme rendu lors de la conclusion de contrats de régulation économique.

L’article 31 met en conformité le calendrier national d’interdiction des microplastiques avec le nouveau calendrier européen adopté en 2023 par l’Union européenne.

 

 


  1  

   Synthèse de la commission des finances

Les articles 6 à 9 dont l’examen a été délégué à la commission des finances ont été examinés par cette commission lors de sa réunion du mercredi 28 février 2024.

L’article 6 adapte plusieurs dispositions du code monétaire et financier relatives aux dépositaires centraux de titres, aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement, aux informations sur les transferts d’actifs numériques et étend certaines de ces dispositions à des collectivités d’outre-mer.

L’article 7 adapte plusieurs dispositions du code monétaire et financier de mesures relatives à la résolution des établissements de crédit, à la supervision des organes centraux et à l’identification des titulaires de comptes bancaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les îles Wallis et Futuna.

L’article 7 bis adapte plusieurs dispositions du code monétaire et financier afin de corriger une imprécision dans la transposition de la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux systèmes de garantie des dépôts.

L’article 7 ter, introduit par la commission, institue le principe d’une audition, sans vote, du directeur du Fonds de garantie des dépôts et de résolution devant les commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat avant sa nomination.

L’article 8 modifie le code monétaire et financier, le code de la consommation et le code de commerce pour, d’une part, préciser les compétences de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes au regard du règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers dans l’Union et, d’autre part, reconnaître au ministre chargé de l’économie et aux fonctionnaires qu’il a désignés ou habilités des pouvoirs d’enquête pour la mise en œuvre du règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur.

L’article 9 adapte le livre des procédures fiscales, le code des douanes et le code rural et de la pêche maritime pour assurer leur pleine conformité avec les dispositions de l’article 23 de la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 relatives à l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures.


  1  

   COMMENTAIRE DES ARTICLES DU PROJET DE LOI

titre ier
dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne en matière économique et financière

Chapitre Ier
Dispositions relatives au droit de la consommation

Article 1er
Modification des obligations des exploitants d’infrastructures de recharge en carburants alternatifs et des sanctions et contrôles applicables

 

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économique s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

 

Article adopté avec modifications

 

Cet article vise à modifier les obligations des exploitants d’infrastructure de recharge en carburants alternatifs ainsi que le régime de sanction et les contrôles applicables en cas de manquements. Ces dispositions du code de la consommation doivent en effet être mises en conformité avec les dispositions du règlement (UE) 2023/1804 relatif au déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs et abrogeant la directive 2014/94/UE, dit règlement « Afir »

La commission, sur la proposition du rapporteur, a adopté trois amendements a adopté quatre amendements (CE12, CE13, CE14 et CE15) apportant des précisions d’ordre rédactionnel

I.   Le droit en vigueur

A.   La directive 2014/94/UE avait pour ambition de permettre le déploiement d’un réseau complet d’infrastructures pour carburants alternatifs au sein de L’union européenne

Le dispositif applicable aux infrastructures pour carburants alternatifs est actuellement régi par la directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs ([1]).

Cette directive établit « un cadre commun de mesures visant à déployer dans l’Union des infrastructures destinées aux carburants alternatifs afin de réduire au minimum la dépendance des transports à l’égard du pétrole et d’atténuer leur impact environnemental ». Elle fixe, dans cette perspective, « des exigences minimales pour la mise en place de ces infrastructures, y compris les points de recharge pour les véhicules électriques et les points de ravitaillement en gaz naturel (GNL et GNC) et en hydrogène, qui doivent être mises en œuvre au moyen des cadres d’action nationaux des États membres, ainsi que des spécifications techniques communes pour de tels points de recharge et de ravitaillement, et des exigences concernant l’information des utilisateurs » (article 1er).

Cette directive prévoit, en conséquence, que les États membres doivent se doter d’un cadre d’action national permettant la mise en place « d’un nombre approprié de points de recharge ouverts au public » au plus tard le 31 décembre 2020. Elle fixe à cet effet un ensemble de règles permettant de garantir, notamment, la transparence des prix, de sorte que ces derniers soient « raisonnables, aisément et clairement comparables, transparents et non discriminatoires » (article 4). Elle comprend également des dispositions spécifiques concernant le déploiement de points de ravitaillement en hydrogène (article 5) et en gaz naturel (article 6) et assurant la transparence des informations fournies aux utilisateurs (article 7).

Cette directive a été transposée en droit français par le décret n° 2017-26 du 12 janvier 2017 ([2]).

B.   Face à des résultats décevants, un nouveau règlement a été adopté en 2023

L’adoption de plusieurs communications et propositions de la Commission a conduit à relever de façon significative le niveau d’ambition de l’Union européenne.

En décembre 2019, la Commission européenne a adopté une communication intitulée « Le pacte vert pour l’Europe ». Cette communication prévoyait un objectif ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports (- 90 %), afin de faire de l’Union européenne une économie neutre en carbone à l’horizon 2050.

En septembre 2020, la Commission a adopté sa proposition de loi européenne sur le climat visant à réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % en 2030 par rapport au niveau de 1990 et à mettre l’Europe sur une voie responsable pour devenir neutre sur le plan climatique d’ici 2050.

À l’issue de la période prévue par la directive 2014/94/UE, la Commission a estimé que le cadre juridique existant n’était plus adapté à ces objectifs ambitieux. Dans un rapport sur l’application de la directive 2014/94/UE publié en 2021, elle a notamment relevé un niveau d’ambition inégal selon les États membres et fait le constat qu’il n’existait toujours pas de réseau complet et global d’infrastructures pour carburants alternatifs, couvrant l’ensemble de l’Union européenne.

Afin de surmonter ces difficultés, la Commission européenne a donc présenté, le 14 juillet 2021, un projet de règlement sur ce sujet, devenu, après avoir été adopté, le règlement (UE) 2023/1804 relatif au déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs et abrogeant la directive 2014/94/UE, dit règlement « Afir ». Ce règlement a été publié le 13 septembre 2023 et il est applicable à compter du 13 avril 2024 (article 26).

Ce règlement fixe des objectifs contraignants et des cadres d’action nationaux renforcés afin d’atteindre les objectifs de déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs à l’échelle de l’Union. Il impose notamment aux États membres d’accroître leur capacité d’avitaillement en carburants alternatifs au rythme des ventes de véhicules à émissions nulles. Les carburants alternatifs dont l’avitaillement est visé sont notamment ceux alimentant les véhicules propulsés à l’électricité (article 3) et à l’hydrogène (article 6).

Ce règlement renforce également les obligations relatives à l’affichage des prix des infrastructures de recharge électrique et des infrastructures de ravitaillement en hydrogène, et fixe des exigences d’information claire des utilisateurs concernant l’emplacement géographique, les caractéristiques et les services proposés aux points de recharge et de ravitaillement en carburants alternatifs ouverts au public (articles 5 et 7). Son article 5, paragraphe 6, mentionne explicitement la responsabilité des États membres en matière de surveillance du marché des infrastructures de recharge ([3]).

C.   Les évolutions liées au règlement Afir et la nécessité de contrôler le bon respect de ses dispositions impliquent de faire évoluer certaines dispositions du code de la consommation

Le règlement Afir est d’application directe et obligatoire dans tous ses éléments, conformément à l’article 288 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Or « aucun texte d’adaptation n’a été pris pour permettre d’en contrôler la bonne application et d’en sanctionner le non-respect », comme le rappelle l’étude d’impact relative à l’article 1er du projet de loi.

En l’espèce, plusieurs modifications du code de la consommation doivent intervenir afin d’habiliter les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à procéder aux contrôles requis. C’est le cas, en particulier, des dispositions prévues aux articles 5 et 7 du règlement Afir. Il est également nécessaire de prévoir un régime de sanction des manquements éventuellement relevés, le règlement laissant cette responsabilité aux États membres.

II.   Le dispositif proposé

Le dispositif proposé à l’article 1er du projet de loi permet de doter les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de la capacité de contrôler le respect des dispositions du règlement Afir entrant dans le champ de compétences de cette administration.

À cette fin, l’article 1er complète l’article L. 511-7 du code de la consommation, relatif aux infractions et manquements pouvant être recherchés par les agents habilités de la DGCCRF. L’habilitation accordée à ces agents recouvre notamment le contrôle des moyens de paiement (lecteur de carte de paiement et dispositif de paiement par code QR via une connexion internet) proposés par l’infrastructure de carburants alternatifs (article 5, paragraphe 1, du règlement Afir), l’information du consommateur sur le prix et l’obligation de proposer une recharge à l’acte (article 5, paragraphes 2 à 6), la signalisation sur les aires de stationnement et sur le réseau routier (article 5, paragraphe 9), et la possibilité de contrôle sur les infrastructures de ravitaillement en hydrogène (article 7).

L’article 1er du présent projet de loi crée également une nouvelle sous-section au sein de la section II du chapitre II du titre III du livre Ier de ce code, consacrée aux « infrastructures de recharge et de ravitaillement ». Cette sous-section comprend un article L. 132-29 qui prévoit un dispositif de sanction, à savoir une amende administrative, dont le montant ne peut excéder 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale, en cas de manquement à certaines des obligations prévues aux articles 5, 7 et 19 du règlement Afir.

Enfin, le II de l’article Ier exonère les collectivités territoriales régies par l’article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte et Réunion) et Saint-Martin de l’application des objectifs pour les infrastructures de ravitaillement en hydrogène des véhicules routiers.

III.   Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen en commission devant le Sénat, l’article 1er a été modifié, à la suite de l’adoption de l’amendement COM-42 présenté par le rapporteur Daniel Fargeot.

Cet amendement étend, en premier lieu, la compétence de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à l’ensemble des dispositifs de paiement prévus par le droit européen. En effet, à la suite d’auditions conduites avec la DGCCRF et la Banque de France, le rapporteur du Sénat a estimé que cette compétence, prévue par le règlement Afir et qui n’est pas sollicitée par la DGCCRF ni par la Banque de France, devait pourtant bien être exercée. Il est donc précisé que la DGCCRF est compétente pour le contrôle de l’ensemble des moyens et dispositifs de paiement prévus au 2 de l’article 5 du règlement (UE) 2023/1804, y compris pour les dispositifs connectés à Internet tels que les codes QR.

Cet amendement garantit, en second lieu, l’absence de doublons entre les sanctions administratives mises en œuvre par la DGCCRF et celles appliquées par la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC). En effet, l’article 1er du présent projet de loi, avec la création d’un nouvel article L. 132-29 au code de la consommation, renvoie à un régime de sanction sous forme d’amende administrative qui ne vise que les sanctions prises par la DGCCRF. Or le code de l’énergie prévoit déjà un régime de sanctions applicables aux infrastructures de ravitaillement en carburants alternatifs ouvertes au public. Par souci de cohérence et en accord avec les deux administrations concernées, l’article 1er du projet de loi exclut donc du champ des articles L. 353-4 et L. 641-4-2 du code de l’énergie les sanctions applicables aux manquements mentionnés au nouvel article L. 132-29 du code de la consommation.

Enfin, ce même amendement élargit le champ de la dérogation prévue au bénéfice des collectivités régies par l’article 73 de la Constitution à l’ensemble des zones insulaires non interconnectées au réseau dit « métropolitain continental » (ZNI).

Votre rapporteur observe que ces modifications ne posent pas de difficulté spécifique. La répartition des compétences entre la DGEC et la DGCCRF en matière de sanction est consensuelle, de même que l’intégration des dispositifs connectés de type « code QR » au sein de l’article. Enfin, l’extension de la dérogation prévue au II de l’article 1er tel que modifié par le Sénat ne pose pas de difficulté particulière et apparaît opportune.

IV.   Les modifications apportÉes par la commission

La commission, sur la proposition du rapporteur, a adopté quatre amendements (CE12, CE13, CE14 et CE15) apportant des précisions d’ordre rédactionnel.

 

*

*     *

Article 2
Adaptation du code de la consommation au règlement relatif à la sécurité générale des produits (RGSP)

 

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économique s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

 

Article adopté avec modifications

 

Cet article vise à modifier les dispositions du code de la consommation relatives à la sécurité générale des produits, afin de les mettre en conformité avec les dispositions du règlement (UE) 2023/988 du Parlement et du Conseil du 10 mai 2023 relatif à la sécurité générale des produits, dit « RGSP ».

La commission, sur proposition du rapporteur, a adopté trois amendements (CE9, CE10, et CE11) apportant des précisions d’ordre rédactionnel.

I.   Le droit en vigueur

A.   L’obligation de sécurité générale des produits résultant de la directive 2001/95/CE du 3 décembre 2001

Le cadre européen relatif à la sécurité générale des produits a été défini par la directive 92/59/CEE du 29 juin 1992, abrogée en 2001 par la directive 2001/95/CE du 3 décembre 2001 relative à la sécurité générale des produits ([4]). Sa définition en droit français est toutefois antérieure, ainsi que l’a rappelé la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) dans une contribution écrite à votre rapporteur, soulignant que « le dispositif de la sécurité générale des produits avait été imaginé en France dès 1983 » afin d’inspirer la construction du droit européen sur ce sujet.

La directive 2001/95/CE a imposé une obligation de sécurité générale pour les produits de consommation non alimentaires (articles 1 et 2). Cela implique, pour les entreprises concernées, de ne commercialiser que des produits sûrs (article 3) et de prendre toutes les mesures correctives utiles dans le cas contraire (article 5). Elle a aussi introduit un système d’alerte rapide européen « Rapex » pour les produits non alimentaires dangereux, via la mise en œuvre d’obligations d’échange d’informations avec les autorités nationales (article 12).

Cette directive a fait l’objet d’une transposition en droit français par les ordonnances n° 2004-670 du 9 juillet 2004 ([5]) et n° 2008-810 du 22 août 2008 ([6]), avant que l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ([7]) n’opère une refonte de la partie législative du code de la consommation. Ces mouvements successifs ont conduit à des insertions et à des modifications au sein du code de la consommation.

B.   La définition de la sécurité générale des produits prévue au sein du titre II du livre IV du code de la consommation

C’est au sein du chapitre Ier du titre II du livre IV du code de la consommation qu’est fixé le principe de sécurité générale des produits et que sont déclinées ses modalités d’application depuis 2016.

L’article L. 421-3 du code de la consommation prévoit ainsi que « les produits et les services doivent présenter, dans des conditions normales d’utilisation ou dans d’autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes ». Cette obligation générale de sécurité des produits et services s’applique aux producteurs (catégorie intégrant les fabricants ainsi que les « autres professionnels de la chaîne de commercialisation, dans la mesure où leurs activités peuvent affecter les caractéristiques de sécurité d’un produit ») et aux distributeurs (article L. 421-1 du même code). Ces professionnels doivent en conséquence prendre toutes mesures utiles pour satisfaire à cette obligation (article L. 421-4 du même code).

Sont exclus du champ d’application de ces dispositions les antiquités et les produits d’occasion nécessitant une réparation ou une remise en état lorsque cela est explicitement mentionné (article L. 421-2 du même code).

Le principe de sécurité générale des produits est réputé satisfait lorsque le produit visé est conforme à la réglementation « spécifique ayant pour objet la protection de la santé ou de la sécurité des consommateurs » qui lui est applicable (article L. 421-5). Le respect de ce principe est par ailleurs présumé, « en ce qui concerne les risques et les catégories de risque couverts par les normes qui lui sont applicables, lorsqu’il est conforme aux normes nationales non obligatoires transposant les normes européennes dont la Commission européenne a publié les références au Journal officiel de l’Union européenne en application de l’article 4 de la directive 2001/95/CE du 3 décembre 2001 relative à la sécurité générale des produits ».

Les mesures d’application de ce principe d’ordre général, dont font partie les modalités d’interdiction et de réglementation des produits ne satisfaisant pas à l’obligation de sécurité générale, sont précisées au sein du chapitre II de ce même titre. Le code de la consommation articule ainsi l’obligation générale de sécurité issue de la directive avec d’éventuelles exigences spécifiques perçues comme nécessaires dans la réglementation française pour assurer cette sécurité (article L. 422-1), ainsi qu’avec des règles spécifiques qui seraient adoptées dans le cadre d’actes européens ciblant certains produits particuliers avec le même objet (article L. 422-3).

Le chapitre III détaille, enfin, les obligations des producteurs et des distributeurs en matière de sécurité des produits. Le producteur doit notamment se tenir informé des risques des produits qu’il commercialise et fournir au consommateur les informations utiles à leur évaluation (articles L. 423-1 et L. 423‑2 du même code). Les distributeurs ont, quant à eux, l’interdiction de fournir des produits dont ils savent qu’ils ne satisfont pas à l’obligation de sécurité générale. Ils sont soumis à des obligations de transmission d’informations, de traçabilité et de collaboration avec les autorités administratives compétentes (article L. 423-4). Y sont également définies les modalités de retrait et de rappel des produits (article L. 423-3).

Les manquements aux obligations de sécurité des produits non alimentaires sont actuellement appréhendés par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sous le prisme des pratiques commerciales trompeuses (articles L. 121-2 à L. 121-4 du code de la consommation), punies d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300 000 euros.

C.   Le règlement 2023/988 a fait évoluer le cadre juridique applicable au profit d’une meilleure protection du consommateur

Un nouveau règlement européen est intervenu en 2023 afin de renforcer la protection du consommateur et les obligations des fabricants et distributeurs en matière de sécurité des produits et services. Il s’agit du règlement (UE) 2023/988 du Parlement et du Conseil du 10 mai 2023 relatif à la sécurité générale des produits, dit « RGSP ». Ce dernier abroge la directive 2001/95/CE et modifie, par ailleurs, le règlement européen n° 1025/2012. Il est applicable à compter du 13 décembre 2024.

Ce règlement doit permettre de pallier l’écueil de transpositions imparfaites dans les droits nationaux des États membres dont avait souffert la directive 2001/95/CE. Il entend donc clarifier et harmoniser le cadre relatif à la sécurité des produits au profit d’une meilleure protection de la santé et de la sécurité des consommateurs, mais aussi d’un meilleur fonctionnement du marché intérieur. Il porte en conséquence une attention particulière aux nouveaux produits (produits numériques, connectés et/ou dotés de fonctions d’intelligence artificielle) ainsi qu’aux nouveaux modes de commercialisation à distance (achat par internet, par mobile ou encore via des places de marché électroniques).

Plusieurs évolutions notables méritent d’être soulignées par rapport au cadre initialement fixé par la directive 2001/95/CE.

Ce règlement contient en effet des obligations plus précises en matière d’évaluation préalable des risques et de documentation technique pour les fabricants (article 9) et prévoit également une obligation, pour les professionnels, de mettre en place des processus internes rigoureux en matière de sécurité des produits (article 14). Il introduit, en outre, en droit européen, une obligation pour les fabricants de disposer d’une « personne responsable » au sein de l’Union européenne (article 16). La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes relève, à cet égard, que cette évolution devrait faciliter l’identification d’un responsable pour les produits distribués via
le e-commerce par des vendeurs situés hors Union européenne. Ce règlement encourage, enfin, à la coopération active des places de marché électronique afin de développer de bonnes pratiques (article 22) et renforce les procédures de rappel des produits dangereux avec, entre autres, un modèle de message obligatoire (article 36).

Ces différentes évolutions rendent nécessaire une adaptation de plusieurs dispositions du code de la consommation.

II.   Le dispositif proposé

L’article 2 du présent projet de loi procède à l’actualisation des dispositions du code de la consommation qui doivent être modifiées pour être conformes au règlement européen relatif à la sécurité générale des produits.

Les principales modifications effectuées sont les suivantes :

–  L’article liminaire du code de la consommation est complété par une définition de la notion de « prestataire de services », afin de prévoir une extension du principe de sécurité générale des produits aux prestataires de services ;

–  L’article L. 421-1 du code de la consommation est réécrit afin de substituer aux notions de « producteur » et de « distributeur » celle « d’opérateur économique », qui est plus large et recouvre tout ensemble « le fabricant, le mandataire, l’importateur, le distributeur, le prestataire de services d’exécution des commandes ou toute autre personne physique ou morale soumise à des obligations liées à la fabrication de produits [et] à leur mise à disposition sur le marché ». Cette réécriture permet, en outre, de prévoir une référence explicite à certaines dispositions du règlement européen 2023/988 ;

–  L’article L. 421-2 du même code est réécrit afin d’aligner la définition de l’obligation de sécurité générale des produits sur celle proposée au sein du règlement 2023/988 ;

–  L’article L. 422-1 code est réécrit pour prévoir une référence explicite au règlement 2023/988.

L’article 2 insère également au sein du code de la consommation un article L. 452-5-1 qui prévoit le régime de sanction applicable pour un fabricant ou importateur en cas de manquement à certaines dispositions du règlement 2023/988. Le règlement SGP précise en effet, en son article 44, que les sanctions doivent être « effectives, proportionnées et dissuasives » en laissant au législateur national le soin d’en évaluer le niveau.

Le présent projet de loi fait le choix de reprendre le régime de sanction applicable aux manquements aux obligations en matière de sécurité des produits alimentaires, à savoir cinq ans d’emprisonnement et 600 000 euros d’amende, montant pouvant être porté, au regard des avantages tirés du délit, à 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel (art. L. 452-5-1 du code de la consommation).

Au-delà des modifications évoquées ci-dessus, d’autres articles du code de la consommation sont également revus, pour des raisons d’ordre technique, par les dispositions de l’article 2 du projet de loi (insertion de références au règlement SGP, abrogation de certains articles devenus superfétatoires, etc.).

III.   Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen devant la commission spéciale du Sénat, l’article 2 du projet de loi a fait l’objet de deux modifications à la suite de l’adoption des amendements COM-47 et COM-48 présentés par le rapporteur Daniel Fargeot.

L’amendement COM-47 a aligné la définition de la notion d’opérateur économique proposée au sein de l’article 2, avec celle prévue par le règlement relatif à la sécurité générale des produits. Cet amendement intègre ainsi, avec raison, les mots « les autres personnes physiques ou morales soumises à des obligations liées à la fabrication de produits ou à leur mise à disposition sur le marché ne sont pas définies » pour se conformer au règlement européen RGSP.

L’amendement COM-48 permet de faire en sorte que les adaptations du code de la consommation prévues aux paragraphes II et III de l’article entrent en vigueur à la date de l’entrée en application du règlement relatif à la sécurité générale des produits, soit le 13 décembre 2024.

Votre rapporteur considère que ces modifications apportent des précisions utiles et qu’elles sont conformes au contenu du règlement RGSP. Il souscrit également au choix fait par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de prévoir une approche plus large du principe de sécurité générale des produits en l’étendant aux services, ce qui est conforme avec la pratique historique française dans ce domaine, sans poser de difficultés juridiques particulières.

IV.   Les modifications apportÉes par la commission

La commission, sur proposition du rapporteur, a adopté trois amendements (CE9, CE10 et CE11) apportant des précisions d’ordre rédactionnel.

*

*     *

Article 3
Habilitation à légiférer par voie d’ordonnance pour modifier la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux

 

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économique s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

 

Article adopté avec modifications

 

Cet article vise à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de prendre les mesures nécessaires à la mise en conformité de la loi du 9 juin 2023 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux avec les exigences de plusieurs directives européennes, à la suite de l’envoi au Gouvernement le 14 août 2023 d’une lettre d’observations de la Commission européenne.

La commission, sur la proposition du rapporteur, a adopté deux amendements. Le premier amendement (CE7) est d’ordre rédactionnel. Le second (CE8) vise à revenir à un délai de 9 mois concernant la durée de l’habilitation et à préciser que le champ couvert par l’ordonnance couvre l’ensemble des articles du titre Ier de cette loi.

I.   Le droit en vigueur

A.   La LOI N° 2023-451 du 9 juin 2023 A FAIT L’OBJET D’OBSERVATIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE et doit être mise en confOrmité avec le droit européen

La loi n° 2023-451 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux a été promulguée le 9 juin 2023. Issue d’une initiative transpartisane portée par les députés Arthur Delaporte et Stéphane Vojetta, elle comprend un ensemble de dispositions destinées à mieux réguler l’activité d’influence commerciale en France.

Cette loi fixe ainsi en droit, pour la première fois, une définition de l’activité d’influence commerciale et d’agent d’influenceur. Elle prévoit également l’encadrement de la promotion de certains produits ou services et l’obligation de formaliser la relation économique entre les parties prenantes d’une opération d’influence commerciale. Elle définit enfin un régime de coresponsabilité entre annonceurs et influenceurs, permettant de garantir les droits de tiers en cas de litige.

Certaines dispositions de cette loi ont fait l’objet d’une notification à la Commission européenne par le Gouvernement en application des dispositions de la directive 2015/1535 du 9 septembre 2015 prévoyant une procédure d’information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information, dite « directive SMTD ». C’est le cas des articles 10, 11, 12 et 15 au regard de leur proximité avec les dispositions du règlement sur les services numériques (RSN). Ces articles ont été notifiés le 12 mai 2023.

Le Gouvernement a transmis, par ailleurs, le 20 juin 2023, un complément d’information à la Commission européenne, à sa demande.

Dans une lettre en date du 14 août 2023, la Commission a adressé au Gouvernement des observations relatives à certaines dispositions contenues dans cette loi. Elle estime, en effet, que les dispositions adoptées posent plusieurs difficultés de compatibilité avec le droit de l’Union européenne.

Il convient de distinguer ici les observations de forme des observations de fond formulées par la Commission.

Pour ce qui concerne la procédure suivie, la Commission européenne estime que la loi n° 2023-451 a été adoptée en violation des articles 5 ([8]) et 6 ([9]) de la directive SMTD faute, pour le Gouvernement, d’avoir respecté les règles relatives à la période de statu quo que cette directive prévoit. Toute adoption d’une règle technique entrant dans le champ de cette directive doit en effet faire l’objet d’une notification à la Commission européenne, ce qui déclenche une période de statu quo de plusieurs mois pendant laquelle le texte ne doit pas être adopté définitivement, afin de pouvoir être amendé conformément aux remarques formulées en retour, le cas échéant, par la Commission. L’existence d’une clause de suspension à l’article 18 de la loi n° 2023-451, qui prévoyait une entrée en vigueur différée des articles notifiés, a été considérée par la Commission européenne comme sans effet au regard des dispositions prévues à l’article 6 de la directive SMTD.

La Commission relève, en outre, que le Gouvernement aurait dû notifier, au titre de cette même directive, les articles 1, 4, 5 et 9 de la loi, dans la mesure où ils entrent dans le champ de la directive 2018/1808 ([10]). Sur ce dernier point, elle a écarté l’argumentation du Gouvernement, aux termes de laquelle cette absence de notification tenait à la nécessité d’adopter des décrets d’application pour mettre en œuvre ces dispositions ([11]).

S’agissant des aspects de fond, la Commission européenne relève l’existence d’une incompatibilité de plusieurs articles de la loi n° 2023-451 (articles 2, 10, 11, 12 et 15) avec certaines dispositions du règlement européen sur les services numériques (articles 8, 14, 22 et 56). Cette incompatibilité tient, selon son analyse, à la création de nouvelles obligations pesant sur les fournisseurs de services intermédiaires, alors que le règlement sur les services numériques est d’application directe et d’harmonisation totale et n’appelle donc pas l’adoption, par les États membres, d’autres mesures d’application que celles qu’il prévoit explicitement ([12]).

La Commission européenne estime aussi que les dispositions de la loi n° 2023-451 sont incompatibles avec les dispositions prévues à l’article 3 de la directive e-commerce. Cet article prévoit en effet un principe de libre prestation des services transfrontaliers de la société de l’information et dispose, en conséquence et comme le rappelle la Commission, que « les États membres ne peuvent, pour des raisons relevant du domaine coordonné, restreindre la liberté de fournir de tels services depuis un autre État membre ». En l’espèce, la Commission estime que les dispositions de la loi précitée sont contraires à cet article, en ne prévoyant pas de restriction en termes d’application des règles françaises aux seuls fournisseurs de services intermédiaires établis en France (principe du pays d’origine).

B.   DES ÉVOLUTIONS prévisibles, mais incomplètement clarifiées

Les échanges conduits par votre Rapporteur avec les administrations concernées ont permis de clarifier le détail des difficultés juridiques évoquées ci-dessus et l’état d’avancement de la réflexion du Gouvernement à ce sujet.

Il apparaît, en premier lieu, que les difficultés se concentrent sur le respect du principe du pays d’origine (PPO), prévu tant par les dispositions de la directive e-commerce que par celles de la directive « Services de médias audiovisuels ».

S’agissant de l’application des dérogations prévues par la directive e‑commerce au principe du pays d’origine, l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 9 novembre 2023 ([13]) indique très clairement que la possibilité de dérogation au principe de libre circulation des services de la société de l’information, prévu à l’article 3 de cette directive, « n’a pas été conçue pour permettre aux États membres d’adopter des mesures générales et abstraites visant à réglementer une catégorie de prestataires de services de la société de l’information dans son ensemble, et ce quand bien même de telles mesures lutteraient contre des contenus portant gravement atteinte aux objectifs énoncés » au même article. En conséquence, selon la Cour de justice de l’Union européenne, ce type de mesures ne saurait être considéré comme conforme aux dispositions de la directive e-commerce. En réponse à cette lecture stricte de la directive e-commerce, le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur qu’il sera nécessaire de prévoir un dispositif ad hoc permettant de viser, de façon nominative, les individus concernés par les mesures prises par l’État membre à titre dérogatoire.

Votre rapporteur observe que l’application de la directive SMA aux influenceurs est également au cœur des difficultés juridiques concernant la loi n° 2023-451. Ainsi que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) l’a indiqué à votre rapporteur lors de son audition, les articles 4 et 5 de la loi n° 2023-451 doivent être articulés avec l’article 9 de la directive SMA de 2010, telle que modifiée par la directive 2018/1808, qui a élargi son cadre aux « plateformes de partage de vidéos ».

Dans sa contribution écrite, la DGCCRF relève qu’il apparaît que le « domaine coordonné » au sens de la directive 2010/13/UE « recouvre toutes les formes de promotion sur les médias audiovisuels » et que les influenceurs peuvent être « s’ils remplissent des critères, notamment d’audience, [considérés comme] des fournisseurs de services de médias audiovisuels ». La DGCCRF relève d’ailleurs, à ce sujet, que « la base de données prévue par le 5 ter de l’article 2 de la directive SMA intègre des Youtubeurs/influenceurs parmi les services de vidéo à la demande, du moins dans certains pays ». En conséquence, les influenceurs seraient concernés par l’application des dispositions de la directive 2010/13/UE, et notamment par le respect nécessaire du principe du pays d’origine.

Lors de son audition, la direction générale des entreprises a souligné les incertitudes qui régissent les contours exacts du domaine coordonné, qui doivent être clarifiés lors d’échanges à venir avec la Commission européenne.

En outre, votre rapporteur observe, à l’issue de ses échanges avec la Commission, que des incertitudes persistent concernant l’application de la directive SMA aux influenceurs, dans un contexte marqué notamment par la révision à venir de cette directive.

C.   Un recours à une ordonnance qui apparaît justifié au regard de ces enjeux

Votre rapporteur considère, en l’état des échanges conduits avec l’ensemble des parties prenantes, que le recours à une ordonnance pour modifier ces dispositions est un choix de prudence légitime au regard de la technicité des modifications à apporter et de l’incertitude juridique qui existe encore sur les conséquences à tirer des remarques de la Commission européenne.

Il souhaite rappeler, à cette occasion, que le Gouvernement n’a envisagé de recourir à une ordonnance que dans un second temps. L’article 3 du projet de loi intégrait en effet, dans un premier temps, des modifications « en dur » de la loi n° 2023-451. La section des finances du Conseil d’État avait néanmoins estimé plus raisonnable de disjoindre ces dispositions, en raison des difficultés juridiques soulevées par l’application du principe du pays d’origine, difficultés confirmées par l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne précité.

Votre rapporteur relève, en outre, que l’inscription à ce stade des modifications envisagées soulèverait, au-delà du risque juridique, une difficulté de calendrier pour l’ensemble du présent projet de loi. L’intégration de ces modifications directement au sein de l’article 3 impliquerait, en effet, une nouvelle notification à la Commission européenne et donc le déclenchement d’une nouvelle période de statu quo, ce qui reporterait de plusieurs mois la réunion de la commission mixte paritaire.

II.   Le dispositIf proposé

L’article 3, inséré au sein du présent projet de loi dans un second temps, prévoit d’habiliter le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance dans un délai de neuf mois afin de modifier certaines dispositions de la loi du 9 juin 2023 précitée pour les mettre en conformité avec le droit de l’Union européenne, en citant expressément les textes concernés, à savoir :

–  la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique dans le marché intérieur, dite « directive e-commerce » ;

–  la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur ;

–  la directive 2015/1535 du 9 septembre 2025 prévoyant une procédure d’information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information ;

–  la directive 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13/UE visant la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires, et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels ;

–  le règlement UE 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques et modifiant la directive 2000/31/CE.

Cet article prévoit également « de tirer les conséquences, en termes de coordination et de mise en cohérence, des modifications apportées en application du 1° sur d’autres dispositions législatives ». Il comprend enfin un alinéa permettant de rendre ces dispositions applicables en Nouvelle Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, dans certaines conditions, et de procéder, le cas échéant, à leur nécessaire adaptation en ce qui concerne Saint-Barthélemy, Saint‑Martin et Saint-Pierre et Miquelon.

L’insertion d’une référence à la directive 2005/29/CE, qui n’est pas mentionnée dans la lettre de la Commission européenne, répond à un principe de sécurité juridique. L’article 7.2 de cette directive ([14]) relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur est en effet applicable aux personnes exerçant une activité d’influence commerciale.

III.   Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen devant le Sénat, l’article 3 a été modifié par un amendement COM-49 adopté à l’initiative du rapporteur Daniel Fargeot.

Cet amendement a intégré au sein de cet article plusieurs modifications.

Il réduit, en premier lieu, la durée de l’habilitation accordée au Gouvernement pour procéder aux modifications nécessaires de la loi du 9 juin 2023 afin de la rendre conforme au droit européen à six mois, en lieu et place de la durée de neuf mois prévue dans le projet de loi initial.

Cet amendement restreint, par ailleurs, le champ de l’ordonnance quant aux articles de la loi précitée qui pourront être modifiés à cette occasion.

Dans le prolongement de la lettre adressée au Gouvernement, au mois d’août dernier, par le commissaire européen Thierry Breton, le rapporteur du Sénat a souhaité, en outre, que seuls les articles visés par les remarques de la Commission européenne puissent être modifiés. L’habilitation porte donc désormais uniquement sur les ajustements nécessaires aux articles 1, 4, 5, 7 et 9.

Enfin, cet article supprime certains articles de la loi posant une difficulté avérée de compatibilité avec le règlement sur les services numériques (RSN), à savoir les articles 10, 11, 12, 15 et 18.

Votre Rapporteur souhaite formuler plusieurs remarques sur ces modifications :

– il comprend les raisons ayant motivé le souhait du Sénat de réduire la durée de l’habilitation du Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance pour procéder aux modifications requises de la loi n° 2023-451. Néanmoins, s’il est exact que la lettre adressée par la Commission européenne au Gouvernement date du mois d’août dernier, il n’en demeure pas moins que des incertitudes juridiques persistent sur certaines des évolutions à mener et qu’il convient, en outre, d’intégrer au sein de ce délai la période de statu quo liée à la nouvelle notification de ces dispositions, qui peut durer jusqu’à 4 mois. Dans ces conditions, votre rapporteur estime que le délai initialement envisagé – à savoir 9 mois, ce qui conduirait de fait le Gouvernement, en cas d’adoption du présent projet de loi, à disposer de deux mois pour procéder aux modifications utiles et de deux mois supplémentaires pour intégrer les éventuelles remarques de la Commission européenne – n’est pas excessif.

– il comprend également le souhait du Sénat de réduire le champ de l’ordonnance, au regard des éléments fournis notamment au sein de l’étude d’impact. Il considère néanmoins qu’il faut privilégier un principe de prudence en maintenant la version initiale du texte, à savoir la possibilité de procéder aux modifications utiles sur l’ensemble du titre Ier. Les échanges conduits font en effet apparaître que les difficultés juridiques soulevées ne sont pas encore complètement éclaircies. Seul le périmètre initial de l’article 3 issu du projet de loi déposé pourra permettre, en effet, de procéder, si besoin, non seulement à la mise en cohérence des articles du titre I avec les modifications de la définition prévue à l’article 1er, mais également de découper, le cas échéant, plusieurs articles, si différentes modalités d’application devaient être dégagées selon les directives applicables au contenu desdits articles.

– il souscrit, enfin, à la suppression immédiate des articles 10, 11, 12, 15 et 18 de la loi, l’insertion de ces articles, qui n’étaient d’ailleurs pas encore entrés en vigueur, correspondant d’abord à une intention de pédagogie à destination du public et des influenceurs vis-à-vis du cadre juridique leur étant applicable.

IV.   Les modifications apportées par la commissioN.

La commission, sur la proposition du rapporteur, a adopté deux amendements CE7 et CE8.

L’amendement CE 7 est d’ordre rédactionnel.

L’amendement CE8 revient à un délai de 9 mois concernant la durée de l’habilitation à légiférer par ordonnance. Il précise également que l’ensemble des dispositions du titre Ier pourront être modifiées dans ce cadre.

*

*     *

Chapitre II
Dispositions relatives au droit des sociétés

Article 4
(art. L. 225-124, L. 236-20, L. 236-21, L. 236-22, L. 236-28 à L. 236-31, L. 236-35, L. 236-36, L. 236-38, L. 236-40, L. 236-48, L. 236-50, L. 236-52 et L. 950-1 du code de commerce, et art. L. 23711 et L. 23721 du code du travail)
Ratification de l’ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales et diverses améliorations de ce même régime

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article ratifie l’ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales et diverses améliorations de ce même régime. Il complète cette ordonnance par des modifications formelles du code de commerce.

     Dernières modifications législatives intervenues

La directive 2005/56 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières de sociétés de capitaux (codifiée ensuite par la directive 2017/1132 du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés) a institué la procédure de fusions transfrontalières. Ces fusions permettent aux sociétés de capitaux de l’Union européenne de fusionner avec une ou plusieurs sociétés constituées dans un autre État membre. Cette directive a été transposée dans le code de commerce par la loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008 portant diverses dispositions d’adaptation du droit des sociétés au droit communautaire.

La directive 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières de sociétés de capitaux a ensuite introduit deux nouvelles procédures aux côté de celle existante des fusions transfrontalières : l’une permet aux sociétés de transférer leur siège social dans un autre État membre tout en conservant leur personnalité juridique ; l’autre leur permet de se scinder en deux ou plusieurs sociétés immatriculées dans des États membres différents. La directive 2019/2121 harmonise également les procédures applicables avec celle prévue pour les fusions transfrontalières.

L’article 13 de la loi n° 2023-171 du 29 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de cette loi, les mesures nécessaires à la transposition de la directive (UE) 2019/2121 précitée, et à harmoniser avec ces mesures certaines des dispositions encadrant les opérations transfrontalières, ainsi qu’à simplifier, compléter et moderniser les régimes des fusions, des scissions, des apports partiels et des transferts de siège des sociétés commerciales prévus au chapitre VI du titre III du livre II du code de commerce.

L’ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales est intervenue sur le fondement de cette habilitation. Elle a transposé la directive.

     Modifications apportées par le Sénat

La commission spéciale du Sénat a adopté un amendement rédactionnel.

       Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté sept amendement rédactionnels du rapporteur.

I.   L’état du droit

A.   le Droit européen

La directive 2005/56 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières de sociétés de capitaux a été codifiée par la directive 2017/1132 du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés. Elle réglemente la procédure de fusion transfrontalière, qui permet aux sociétés européennes de fusionner avec une ou plusieurs sociétés d’autres États membres, par absorption ou création d’une société nouvelle.

Cette directive a été complétée par la directive 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières de sociétés de capitaux, qui crée deux nouvelles procédures d’opérations transfrontalières. La première est la procédure de transformation transfrontalière, qui permet aux sociétés constituées conformément au droit d’un État membre de se transformer en une société de forme juridique d’un autre État membre, en y transférant au moins leur siège statutaire, tout en conservant leur personnalité juridique. La seconde est la procédure de scission transfrontalière, qui permet aux sociétés de l’Union européenne de se scinder en plusieurs sociétés localisées dans d’autres États membres, la société scindée transmettant son patrimoine à plusieurs sociétés existantes ou nouvelles), ou d’effectuer des apports partiels d’actifs transfrontaliers (la société fait apport d’une partie de son actif et de son passif, à une ou plusieurs sociétés bénéficiaires).

Ces opérations s’inscrivent dans le cadre de la liberté d’établissement, principe fondamental du droit de l’Union européenne, prévu à l’article 54 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). La directive 2019/2121 institue donc un cadre harmonisé et simplifié pour ces opérations, tout en conciliant la liberté d’établissement avec la protection des parties prenantes : travailleurs, créanciers et associés.

La directive 2019/2121 a ainsi prévu un mécanisme protecteur des créanciers en maintenant un contrôle de légalité de l’opération avant sa prise d’effet qui vise à s’assurer que l’opération transfrontalière n’est pas réalisée à des fins abusives ou frauduleuses, voire criminelles. Elle renforce également la protection des travailleurs en prévoyant leur information et leur consultation, et en garantissant leur droit à participer à l’organe de direction dans le respect des droits et pratiques nationaux. Les associés (au moins ceux qui ont voté contre le projet) doivent pouvoir se retirer de la société. Les travailleurs et les associés doivent être informés par un rapport qui explique et justifie les aspects juridiques et économiques de l’opération transfrontalière envisagée et les implications de celle-ci pour les travailleurs ainsi que pour les activités futures pour la société et ses filiales.

Le délai de transposition de la directive 2019/2121 avait été fixé au 31 janvier 2023.

B.   le Droit interne

L’article 13 de la loi du 9 mars 2023  ([15]) a habilité le Gouvernement à procéder, par ordonnance, à la transposition de la directive 2019/2121. Cette transposition est intervenue avec l’ordonnance du 24 mai 2023 ([16]) (avec donc quelques mois de retard par rapport au délai fixé par la directive).

1.   L’ordonnance du 24 mai 2023 a transposé les opérations transfrontalières en droit interne

Dans leur rédaction issue de cette ordonnance, les dispositions relatives aux opérations transfrontalières sont prévues à la section 4 du chapitre VI du titre III du livre II du code de commerce. Cette section distingue la fusion transfrontalière, la scission transfrontalière, l’apport partiel d’actifs transfrontaliers et la transformation transfrontalière. L’ordonnance a aussi institué une procédure commune pour ces opérations transfrontalières, afin de faciliter la réalisation de ces opérations au sein de l’espace européen. Cette procédure prévoit notamment une étape de préparation (rédaction d’un projet commun d’opération, rapport des dirigeants, vérification par une expertise indépendante, etc.). Elle confie aux greffiers des tribunaux de commerce un rôle de contrôle des éventuelles fraudes. Ils délivrent un certificat de conformité lorsqu’il conclut que la fusion transfrontalière respecte toutes les conditions et les procédures vérifiées. Ils pourront s’appuyer sur les autorités fiscales ou sociales.

2.   L’ordonnance du 24 mai 2023 a également procédé à certaines modifications des opérations relatives aux sociétés en droit français

Cette ordonnance a aussi visé à simplifier, compléter et moderniser les règles applicables aux fusions, scissions et apports partiels d’actifs en droit national. Elle introduit notamment la « scission partielle » en droit interne. Il s’agit d’un apport partiel d’actif volontairement placé sous le régime de la scission, et qui permet d’attribuer directement les actions perçues en rémunération de l’apport aux associés de la société apporteuse (au lieu de procéder en deux temps, un apport partiel d’actif suivi d’une distribution en nature par la société apporteuse à ses actionnaires). Ce mécanisme est prévu à l’article L. 236-27 du code de commerce. Pour l’application du régime des scissions à cette opération, cet article fait référence à la section comprenant les articles L. 236-18 à L. 236-26. Cependant, il n’est pas renvoyé à l’article L. 225-124, situé dans une autre partie du code de commerce, et qui porte sur le sort des droits de vote doubles ([17]) en cas de scission. Cet article dispose qu’une scission est sans effet sur le droit de vote double qui peut être exercé au sein de la société bénéficiaire de la scission. Comme le mentionne l’étude d’impact, l’absence de référence explicite à l’article L. 225-124 s’agissant d’une scission partielle entraîne un doute parmi les praticiens ou la doctrine sur le maintien du droit de vote double dans ce cas, malgré l’application du régime de la scission.

II.   Le dispositif proposé

Le I du présent article ratifie l’ordonnance précitée.

Le II procède à des modifications essentiellement rédactionnelles dans le code de commerce. Antérieurement à l’ordonnance du 24 mai 2023, le régime applicable aux apports partiels d’actifs était celui des scissions. L’ordonnance a créé des dispositions propres aux apports partiels d’actifs, qui doivent être complétées par certaines précisions pour clarifier ce nouveau régime et maintenir le droit antérieur sur certains points dont l’application a été rendue incertaine par l’ordonnance. Plus précisément, ces modifications sont les suivantes.

Le 1° du II clarifie la règle selon laquelle l’apport partiel d’actif volontairement placé sous le régime de la scission n’interrompt pas le délai qui permet d’attribuer un droit de vote double (deux ans d’inscription nominative comme actionnaire) et ne fait pas perdre ce droit (article L. 225-124 du code de commerce). Selon l’étude d’impact, « les entreprises ne seront plus dans le doute et elles n’auront plus besoin de consulter une doctrine mitigée sur la question dès lors qu’une disposition législative le prévoit expressément. Ainsi, les opérations d’apport partiel d’actifs seront sans impact sur les équilibres en matière de droits de vote […] les actionnaires des sociétés auront la certitude du maintien de leur droit de vote suite aux opérations d’apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions. »

Le précise que les scissions comportant la participation uniquement de sociétés à responsabilité limitée (SARL) sont soumises aux mêmes règles que celles applicables aux scissions comportant la participation de SARL et de SA (hybrides) et, pour celles qui ne leur sont pas contraires, aux règles applicables aux scissions de sociétés commerciales.

Le prévoit que l’ensemble de l’article L. 236-9 du code de commerce (qui fixe les modalités de décision de fusion pour les SA ou SARL) est aussi applicable aux scissions réalisées uniquement entre SA.

Le clarifie que, lors des opérations prévues par l’article L. 236-22, ce sont les deux rapports mentionnés à l’article L. 236-10 qui ne sont pas requis (rapports des commissaires à la fusion ou des commissaires aux apports).

Le 5° du II supprime l’exigence, lors des opérations mentionnées à l’article L. 236-28, des deux rapports mentionnés à l’article L. 236-10, et non seulement celui prévu au I de cet article (rapport des commissaires à la fusion sur les modalités de la fusion). En outre, il rétablit explicitement la faculté de soumettre au régime simplifié les apports partiels d’actifs entre deux sociétés sœurs détenues en totalité par une même société ([18]) (b du 5°). Le présent article permet ainsi d’intégrer dans la même procédure d’apport partiel d’actif simplifié les opérations « par le haut » (société mère qui procède à l’apport), « par le bas » (société fille qui procède à l’apport) et « entre sœurs » (apport entre deux filiales détenues en totalité par une société mère), et ceci pour l’ensemble des formes sociales concernées (SA, SARL et opérations hybrides entre les deux formes) ([19]).

Le 6° du II complète l’ordonnance du 24 mai 2023 en adaptant par coordination la rédaction de l’article L. 236-29 du code de commerce à l’apport partiel d’actifs ([20]).

Le clarifie le fait que la solidarité peut être écartée entre la société apporteuse et la ou les sociétés bénéficiaires de l’apport ([21]).

Le corrige une erreur de référence dans la mention d’un article de la directive 2019/2121 (article 119 qui définit les sociétés de capitaux dans le champ de la directive).

Lors d’une fusion transfrontalière, chacune des sociétés participant à la fusion établit un avis informant les parties prenantes (associés, créanciers, délégués du personnel, salariés) qu’elles peuvent présenter des observations sur le projet de fusion jusqu’à cinq jours ouvrables avant la date de l’Assemblée générale (article L. 236-35 du code de commerce). Le 9° du II précise que dans les cas où l’approbation de la fusion par l’assemblée générale n’est pas requise ([22]), l’avis doit être présenté jusqu’à 5 jours ouvrables avant la date de la décision de l’organe compétent approuvant la fusion.

En cas de fusion transfrontalière, un rapport écrit est établi par les dirigeants et mis à la disposition des associés (article L. 236-36 du code du commerce). Le 10° du II corrige une erreur rédactionnelle (référence à la publication du rapport des dirigeants alors que seule une mise à disposition de ce rapport est requise.).

Le 11° corrige une erreur rédactionnelle (référence aux « associés » plutôt qu’aux « actionnaires » dans une disposition relative aux SARL) ([23]).

Le 12° corrige également une erreur rédactionnelle en ajoutant la mention des « parts sociales » à celle des « actions » dans une disposition qui s’applique tant aux SA qu’aux SARL (article L. 236-40 du code de commerce relatif à certains cas de cession de titres lors d’une fusion transfrontalière).

L’ordonnance du 24 mai 2023 a défini l’apport partiel d’actifs transfrontaliers à l’article L. 236-48 du code de commerce. Cette définition vise un apport d’actif et, le cas échéant, de passif. Or, la directive n’envisage que le transfert d’éléments d’actifs et de passif (donc une définition plus restrictive qui n’inclut pas dans l’apport partiel d’actif les opérations dans lesquelles seuls des éléments d’actif seraient transférés). Dès lors, le 13° du II modifie cet article pour indiquer que les opérations d’apport d’éléments d’actifs et de passifs seront obligatoirement soumises aux dispositions issues de la directive 2019/2121, tandis que les opérations d’apport d’actif (« plus courantes, et moins structurantes économiquement », selon l’étude d’impact) pourront se soumettre à cette procédure volontairement.

Le 14° du II complète la définition de la transformation transfrontalière en droit français (article L. 236-50 du code de commerce), définie comme l’opération par laquelle une SA ou SARL française se transforme en société de forme juridique relevant d’un autre État membre et y transfère au moins son siège statutaire, en ajoutant l’hypothèse inverse où une société d’un autre État membre se transforme en société relevant du droit français.

Le 15° du II corrige une erreur de référence à l’article L. 236-52.

Le 16° du II prévoit l’application des dispositions du projet de loi à Wallis et Futuna.

III.   Les modifications apportées par le sénat

La commission spéciale a adopté un amendement portant plusieurs modifications rédactionnelles ([24]). Cet article a été examiné selon la procédure de législation en commission ([25]). Le Sénat a donc ensuite adopté cet article sans modification en séance publique).

Les modifications rédactionnelles sont les suivantes :

– à l’article L. 225‑124 du code de commerce, l’amendement précise que ce sont les actions qui bénéficient du droit de vote double et non les sociétés bénéficiaires ;

– au même article, l’amendement précise que les seules actions qui peuvent être concernées par un maintien de droit de vote double en cas d’apports partiels d’actifs sont celles qui sont incluses dans l’actif transféré ;

– à l’article L. 236-28, qui prévoit le cas d’un apport partiel d’actif simplifié, l’amendement précise qu’il n’y a pas lieu à augmentation de capital de la société bénéficiaire de l’apport ;

– ensuite, l’amendement corrige la modification opérée par le présent article à l’article L. 236-35 : pour le délai de présentation de l’avis informant les parties prenantes, dans les cas où l’approbation de la fusion par l’assemblée générale n’est pas requise, il convient de se référer à la date de décision de la fusion ou de la constatation de sa réalisation par l’organe compétent ([26]) ;

– enfin, il procède à une coordination dans le code du travail pour prévoir que les apports partiels d’actifs transfrontaliers sont soumis aux règles sur le groupe spécial de négociation ([27]) (l’ordonnance du 24 mai 2023 n’y ayant soumis que les fusions, scissions et transformations transfrontalières alors que la directive 2019/2121 prévoit que les apports partiels d’actifs transfrontaliers sont également soumis aux règles sur le groupe spécial de négociation).

IV.   Les modifications apportées par la commission

La commission des lois a adopté sept amendements rédactionnels du rapporteur avant d’adopter l’article.

*

*     *

Article 5
Demande d’habilitation à prendre par ordonnance des mesures pour transposer la directive (UE) 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées et à des mesures connexes et pour harmoniser les différents dispositifs nationaux préexistants relatifs à la représentation équilibrée entre les femmes et les hommes au sein des organes des sociétés commerciales

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de six mois, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la directive (UE) 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées, et des mesures pour harmoniser les différents dispositifs nationaux préexistants en la matière pour les sociétés commerciales.

     Dernières modifications législatives intervenues

-         La loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle, dite loi « Copé-Zimmermann », a imposé un quota de 40 % dans les conseils d’administration et de surveillance pour le sexe le moins représenté (en pratique, les femmes).

-         La loi n° 2021‑1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, dite loi « Rixain », a prévu, pour les entreprises employant au moins 1 000 salariés pour le troisième exercice consécutif, l’obligation de calculer et publier avant le 1er mars leurs écarts éventuels de représentation entre les femmes et les hommes parmi leurs cadres dirigeants et les membres de leurs instances dirigeantes. Cette loi institue aussi une obligation de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes dans les postes de direction des grandes entreprises. Elles devront atteindre un objectif minimal de 30 % de femmes et d’hommes cadres dirigeants et de 30 % de femmes et d’hommes membres d’instances dirigeantes à partir du 1er mars 2026. Cet objectif sera porté à 40 % à compter du 1er mars 2029.

-         La directive (UE) 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées et à des mesures connexes fixe, à horizon 2026, un objectif alternatif de 40 % de membres du sexe sous-représenté parmi les administrateurs non exécutifs des conseils des sociétés cotées (globalement, au sens du droit français, les administrateurs) ou de 33 % de membres du sexe sous-représenté parmi les administrateurs non-exécutifs et exécutifs de ces conseils (globalement, au sens du droit français, les dirigeants).

-         La directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) n° 537/2014 et les directives 2004/109/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises dite « CSRD » (Corporate Sustainability Reporting Directive) prévoit, depuis le 1er  janvier 2024 et de manière progressive, de nouvelles règles de reporting applicable aux grandes entreprises en matière de publication extra‑financière, notamment en matière d’équilibre entre les hommes et les femmes au sein des organes d’administration et de direction.

-         L’ordonnance n° 2023‑1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d’informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprises des sociétés commerciales, et le décret n° 2023-1394 du 30 décembre 2023 pris en application de cette ordonnance ont transposé la directive 2022/2464 précitée.

     Modifications apportées par le Sénat

La commission spéciale du Sénat a adopté un amendement ([28]) pour encadrer l’habilitation consentie au Gouvernement par le présent article. Cet amendement prévoit :

– le maintien du quota prévu par le droit interne d’au moins 40 % de membres des organes de gouvernance des grandes entreprises ;

– l’absence de nouvelles sanctions en cas de non-respect de l’objectif de parité ;

– le choix d’un organisme disposant des moyens nécessaires pour veiller au respect des objectifs de parité ;

– l’extension des mesures aux administrateurs salariés ;

– et l’harmonisation des règles applicables aux structures économiques publiques.

     Modifications apportées par la commission

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur, ainsi qu’un amendement du rapporteur proposant une rédaction plus précise des dispositions introduites par le Sénat qui encadrent l’habilitation donnée au Gouvernement pour transposer la directive.

I.   L’état du droit

A.   le Droit européen

1.   La directive 2022/2381 du 23 novembre 2022 prévoit une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les sociétés cotées

La directive (UE) 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées et à des mesures connexes, « vise à parvenir à une représentation plus équilibrée des femmes et des hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées » (article 1er).

L’article 2 de la directive limite son champ aux sociétés cotées (sociétés ayant leur siège social dans un État membre et dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé dans un ou plusieurs États membres). Sont exclues les micro, petites et moyennes entreprises (PME).

L’article 5 de la directive prévoit les objectifs applicables aux États membres.

Ils doivent veiller, à ce que les sociétés cotées respectent, au plus tard le 30 juin 2026, l’un ou l’autre de ces objectifs :

– les membres du sexe sous-représenté occupent au moins 40 % des postes d’administrateurs non exécutifs ;

– les membres du sexe sous-représenté occupent au moins 33 % de tous les postes d’administrateurs, tant exécutifs que non exécutifs.

L’article 3 précise les notions d’administrateurs exécutifs et non exécutifs. Comme le relève le rapport de nos collègues rapporteur du Sénat ([29]), la notion d’administrateur recouvre celle de mandataire social en droit français. Globalement, les administrateurs non exécutifs sont les membres des conseils d’administration ou de surveillance ([30]) (et le président du conseil d’administration si cette fonction est dissociée avec celle de directeur général), tandis que les administrateurs exécutifs correspondent aux dirigeants (président directeur général, directeurs général, président ou membres du directoire).

 

https://www.senat.fr/rap/l23-213/l23-21322.png

Source : code de gouvernement d’entreprise des sociétés cotées de l’Afep-Medef.

 

L’article 7 prévoit que les États membres doivent exiger des sociétés cotées qu’elles fournissent annuellement aux autorités compétentes et publient sur leur site internet des informations relatives à la représentation des hommes et des femmes dans leurs conseils, en distinguant entre administrateurs exécutifs et non exécutifs, et les mesures mises en œuvre pour parvenir aux objectifs de la directive.

Les États membres devront prévoir des sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives » qui permettent d’obtenir l’exécution de la directive (article 8), comme la possibilité d’invalider ou de déclarer nulle et non avenue une décision concernant la sélection d’administrateurs effectuée en violation des dispositions nationales transposant l’article 6.

L’article 9 précise que la directive pose des exigences « minimales » et que les États membres peuvent introduire ou maintenir des dispositions plus favorables à une représentation équilibrée des femmes et des hommes.

L’article 10 de la directive prévoit que les États membres désignent « un ou plusieurs organismes chargés de promouvoir, d’analyser, de surveiller et de soutenir l’équilibre entre les femmes et les hommes dans les conseils. » Sur ce point, l’arbitrage du Gouvernement n’est pas arrêté. Votre rapporteur estime que le Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes (HCE) pourrait utilement remplir cette mission, sous réserve que ses moyens humains et financiers le lui permettent.

La transposition doit intervenir au plus tard le 28 décembre 2024 (article 11).

B.   La directive « CSRD » 2022/2464 du 14 décembre 2022 imposera aux grandes entreprises de publier des informations en matière de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes

Cette directive prévoit des normes de rapport sur la durabilité, dites normes « ESRS » pour (European Sustainability Reporting Standards). Elle a pour objectif d’harmoniser le reporting de durabilité des entreprises et d’améliorer la disponibilité et la qualité des données ESG (environnementales, sociales et de gouvernance) publiées. Les normes ESRS intègrent notamment des informations sur la représentation des hommes et des femmes au sein des organes d’administration, de direction et de surveillance de l’entreprise, avec par exemple un pourcentage par genre.

L’application de cette directive est échelonnée, mais est déjà effective pour certaines entreprises pour l’exercice 2024 :

 

C:\Users\Banduze\Desktop\CSRD.bmp

Source : entreprendre.service-public.fr.

Cette directive a été transposée en droit interne par l’ordonnance n° 2023‑1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d’informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprises des sociétés commerciales, complétée par le décret n° 2023-1394 du 30 décembre 2023.

Ces textes ont aussi harmonisé et mis en cohérence le cadre des obligations en matière de RSE, notamment au sein du code de commerce. Il est ainsi prévu que les entreprises publient ces informations de durabilité dans le rapport de gestion inclus dans le rapport financier annuel.

Le détail des informations de durabilité à publier est précisé par le règlement délégué (UE) 2023/2772 de la Commission européenne du 31 juillet 2023, auquel renvoie le décret n°2023-1394 précité. Ce règlement délégué introduit 12 normes « ESRS ».

Le détail des normes et les démarches à engager pour anticiper leur mise en œuvre, notamment s’agissant des sociétés cotées, sont présentés sur le site internet de l’Autorité des marchés financiers (AMF) ([31]). Ces obligations larges de reporting se cumulent avec les obligations spécifiques de publication (article 7 de la directive 2022/2381) des efforts accomplis en matière d’équilibre entre les hommes et les femmes dans la gouvernance.

C.   le Droit interne

1.   Le conseil d’administration a un rôle stratégique à la tête de la société

Le conseil d’administration est un organe de direction qui a comme mission, à la tête d’une société, de définir sa stratégie. Il est aussi chargé de contrôler l’action du directeur général et d’informer les actionnaires et les marchés. Il est composé d’administrateurs (au nombre de trois minimum et de 18 maximum) et d’un président. Le président du conseil d’administration peut aussi être directeur général de l’entreprise : il a alors le statut de président-directeur général (PDG). Le président-directeur général (PDG) fait donc partie du conseil d’administration de l’entreprise. Les sociétés anonymes (SA) doivent recourir à un conseil d’administration. Les sociétés par actions simplifiée (SAS) peuvent elles aussi être administrées par un conseil d’administration. Les administrateurs peuvent être nommés dans les statuts de la société, au moment de sa création (article L. 225‑16 du code de commerce). Par la suite, ils sont nommés par l’assemblée des actionnaires (article L. 225-18 du même code). Les administrateurs ne sont pas nécessairement actionnaires de la société. Les sociétés en commandite par actions (SCA) sont administrées par un conseil de surveillance. Les SA « à directoire » sont aussi administrées par un conseil de surveillance. Si les attributions du conseil de surveillance sont moins larges que celles du conseil d’administration, dans la pratique, leurs fonctions convergent, dans la mesure où ces deux organes adoptent des orientations pour l’activité de la société.

2.   Le droit national prévoit différentes obligations de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes pour les conseils d’administration des grandes sociétés commerciales

La loi du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle (loi « CopéZimmerman ») a prévu que la proportion des administrateurs de chaque sexe ne peut être inférieure à 40 % dans les conseils d’administration et de surveillance des grandes sociétés commerciales, à savoir :

– les SA qui emploient, pour le troisième exercice consécutif, au moins 250 salariés permanents et ont un chiffre d’affaire ou un total de bilan d’au moins 50 millions d’euros ([32])  ;

– les SCA ([33]) .

La loi n° 2021-1774 du 24 décembre 2021 visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, dite « loi Rixain », a étendu les exigences de la loi Copé-Zimmermann aux sociétés d’assurances mutuelles à compter du 1er janvier 2027 ([34]) .

Les sociétés par actions simplifiées (SAS) n’ont pas été incluses dans la mesure où le législateur voulait maintenir la liberté d’organisation qui caractérise l’organisation de la SAS.

Dans l’ensemble des sociétés administrées par un conseil d’administration, y compris celles qui ne sont pas dans le champ de la loi « Copé‑Zimmerman », « le conseil d’administration est composé en recherchant une représentation équilibrée des femmes et des hommes » (articles L. 225-17 et L. 226‑4 du code de commerce).

Il n’y a pas de données disponibles sur le nombre précis de sociétés incluses dans le champ d’application de ces règles.

Une nomination intervenue en méconnaissance de cette règle est nulle. La rémunération des membres du conseil d’administration (ou de surveillance) dont la composition est irrégulière est temporairement suspendue, jusqu’à ce qu’elle devienne régulière. Les délibérations auxquelles a pris part l’administrateur irrégulièrement nommé sont aussi nulles ([35]) . Ni l’administration ni les représentants des entreprises ne disposent de statistiques précises, mais il ressort des auditions menées par votre rapporteur que ces sanctions sont efficaces et dissuasives. Pour une société cotée, il paraît même « inenvisageable », pour des motifs d’image vis-à-vis du public et de ses investisseurs, d’être sanctionnée pour une méconnaissance des obligations en matière de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes.

3.   Des objectifs ambitieux pour les instances dirigeantes ont été institués pour les années à venir

La loi « Rixain » du 24 décembre 2021, précitée, a en outre fixé un objectif de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes (30 % d’ici 2026 et 40 % d’ici 2029) parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes ([36]) des sociétés comptant au moins 1 000 salariés pour le troisième exercice consécutif.

Si, au 1er mars 2026, l’objectif de 30 % n’est pas atteint, l’entreprise concernée devra définir les mesures de correction nécessaires. À compter du 1er mars 2029, si l’objectif de 40 % n’est pas respecté, l’entreprise dispose d’un délai de deux ans pour se mettre en conformité, soit au 1er mars 2031. À l’expiration de ce délai, l’employeur encourt alors une sanction financière d’un montant maximum de 1 % de la masse salariale.

4.   Le secteur public est également soumis à certaines règles spécifiques en la matière

Les entreprises publiques qui ont la forme de sociétés couvertes par les obligations légales (SA cotées ou SCA dont l’État est actionnaire) sont concernées par les dispositions de droit commun évoquées ci‑dessus.

Au sein des administrations publiques, la loi dite « Sauvadet » du 12 mars 2012 ([37]) a renforcé progressivement la présence des femmes dans la haute fonction publique. Elle avait fixé un objectif de de 40 % de femmes en 2018 pour les primonominations féminines aux emplois supérieurs et de direction ([38]), porté à 50 %, à compter de 2026, par la loi du 19 juillet 2023 visant à renforcer l’accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique, cette loi ayant par ailleurs instauré un index de l’égalité professionnelle dans la fonction publique. La loi (article 7) ajoute à ce quota de « flux » un quota de « stock » : à partir de 2027, les administrations devront respecter un taux minimal de 40 % de personnes de chaque sexe dans les emplois supérieurs et de direction. Une pénalité financière est prévue en cas de non-conformité à l’issue d’un délai de trois ans.

Dans les établissements publics de l’État, l’écart entre le nombre de femmes et le nombre d’hommes membres du conseil d’administration ou de surveillance ne peut être supérieur à un. La méconnaissance de cette obligation entraîne la nullité de la nomination (mais pas celle des délibérations auxquelles a pris part l’administrateur, contrairement au droit des sociétés). Cette règle ne s’applique cependant qu’aux aux personnalités qualifiées. Les représentants de l’État et du personnel ne sont pas concernés ([39]).

Les groupements d’intérêt public (GIP) et groupements d’intérêt économique (GIE) ou les régies (qui ne disposent pas d’un conseil d’administration) ne sont pas inclus dans le champ de ces dispositions.

 

Synthèse des règles applicables en droit interne

 

SCA, et SA de 250 salariés et CA ou bilan de 50 millions d’euros

SA et SCA dont l’État est actionnaire

Établissements publics de l’État

GIP et GIE

Règles

Quota de 40 % du sexe le moins représenté dans le conseil d’administration ou de surveillance

Écart entre le nombre de femmes et le nombre d’hommes membres du conseil d’administration ou de surveillance ne peut être supérieur à un

(personnalités qualifiées)

Règles spécifiques pour certains administrateurs salariés

-

Sanction

Nullité de la nomination

Nullité des délibérations

Suspension de la rémunération

Nullité de la nomination

-

 

 

Sociétés de 1 000 salariés ou plus pour le troisième exercice consécutif

Règle

Objectif de 30 % 2026) et 40 % (2029) parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes

Sanction

Délai de deux ans pour se mettre en conformité

À l’issue du délai, sanction financière d’un montant maximum de 1 % de la masse salariale

 

L’ensemble de ces règles ne recoupe pas entièrement le champ de la directive 2022/2381, qui vise les sociétés cotées. Toutefois, le droit français apparaît « en avance » en matière de représentation dans l’Union européenne, du fait de l’application de la loi « Copé‑Zimmerman » depuis 2011, et paraît avoir inspiré la législation européenne.

Selon le baromètre du 7 mars 2024 de l’Institut français des administrateurs (IFA), transmis à votre rapporteur, en 2024, la représentation des femmes dans les conseils d’administration du CAC 40 et du SBF 120 ([40]) atteint ainsi, respectivement, 46,7 % et 46,4 % (au-delà donc des seuils prévus par la loi). La carte de la page suivante montre une comparaison entre nations occidentales, et indique pour chaque pays la progression entre 2023 et 2024 :

 


  1  

C:\Users\Banduze\AppData\Local\Microsoft\Windows\INetCache\Content.Word\Conseils.bmp

Source : baromètre IFA – Ethics & Boards  « Où en est la mixité des  instances dirigeantes ? » 7 février 2024.


  1  

 

Au sein des instances dirigeantes, visées par la loi « Rixain », « l’évolution est plus lente mais néanmoins constante » selon le baromètre de l’IFA (27,4 % de femmes pour le CAC 40 et 27,3 % dans le SBF 120). Ces niveaux apparaissent proches du seuil de 30 % fixé par la loi pour 2026. Par ailleurs, le SBF 120 compte 21 femmes présidentes ou « CEO » (le Chief Executive Officer désigne le présidentdirecteur général ou le directeur général).

5.   Le cas des administrateurs salariés

Dans les entreprises employant au moins 1 000 salariés en France ou au moins 5 000 salariés au niveau international ([41])., les salariés nomment un à deux administrateurs chargés de les représenter ([42]). Le plus souvent, le conseil d’administration comprend donc un ou deux administrateurs salariés. Ces derniers disposent des mêmes obligations et responsabilités que les autres administrateurs. Toutefois, ils ne sont pas pris en compte pour l’application du quota de 40 %. Ils peuvent être désignés selon plusieurs modalités :

– élection par les salariés de la société et de ses filiales dont le siège est situé en France ;

– désignation par le comité de groupe, le comité central d’entreprise ou le comité d’entreprise de la société ;

– désignation par l’organisation syndicale qui a obtenu le plus de suffrages (les deux en ayant obtenu le plus si deux administrateurs sont à désigner) ;

Si deux administrateurs sont à désigner, le second est désigné selon l’une des trois modalités précédentes ou, si le comité d’entreprise européen existe, par ce dernier.

En cas d’élection (modalité n°1), chaque liste doit comporter un nombre de candidats double de celui des sièges à pourvoir et être composée alternativement d’un candidat de chaque sexe. Sur chacune des listes, l’écart entre le nombre des candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un (application des modalités prévues à l’article L. 225‑28 du code de commerce).

Si deux administrateurs doivent être désignés par le comité de groupe, le comité central d’entreprise ou le comité d’entreprise (modalité n°2), ce comité doit désigner un homme et une femme.

Les administrateurs salariés sont mentionnés par la directive 2022/2381 qui les inclut dans le champ d’application des obligations qu’elle pose en matière d’équilibre entre les hommes et les femmes. L’application de dispositions particulières en droit interne (plutôt que le quota général de 40 %) résulte de leurs modalités de désignation, en particulier lorsqu’ils sont désignés par les organisations syndicales. Votre rapporteur observe que si l’application des règles de nomination en cas d’élection par les salariés et de désignation par un comité favorisent une représentation équilibrée de chaque sexe, elle ne garantit pas nécessairement le respect de la directive (conseil d’administration dans son ensemble, y compris administrateurs salariés, composé d’au moins 40 % d’administratrices). La désignation d’une partie des administrateurs salariés résulte en effet du libre choix des organisations syndicales. Votre rapporteur attire donc l’attention du Gouvernement sur cette difficulté à résoudre dans la transposition, car il paraît difficile de sanctionner une société pour méconnaissance de la règle de quota si cette méconnaissance résulte de la désignation de certains administrateurs salariés.

II.   Le dispositif proposé

Le présent article prévoit une habilitation à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi pour transposer la directive du 23 novembre 2022 et prévoir les dispositions de coordination et d’adaptation de la législation liées à cette transposition.

Le Gouvernement est également habilité à prévoir les dispositions de coordination et d’adaptation de la législation liées à cette transposition, adapter aux modifications opérées par la transposition les différentes obligations relatives à la représentation équilibrée entre les femmes et les hommes au sein des organes des sociétés commerciales, et rendre applicable les mesures transposées à Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, et procéder, le cas échéant, aux adaptations nécessaires de ces dispositions en ce qui concerne Saint Barthélemy, Saint Martin et Saint Pierre et Miquelon.

III.   Les modifications apportées par le sénat

La commission spéciale a adopté un amendement du rapporteur Daniel Fargeot ([43]), pour encadrer les choix de transposition ouverts aux États membres.

Il tend ainsi à prévoir que, lors de la transposition, le Gouvernement devra :

– veiller à ce que la transposition corresponde, a minima, au champ d’application des articles L. 225-18-1 et L. 226-4-1 du code de commerce (c’est-à-dire, qu’il ne se borne pas aux sociétés cotées mais inclut toues les SCA et SA de 250 salariés ou plus et présentant un chiffre d’affaires ou total de bilan d’au moins 50 millions d’euros) ;

– fixer un objectif à atteindre au sein des organes de gouvernance des sociétés commerciales d’au moins 40 % des postes d’administrateurs non exécutifs (alors que la directive prévoit deux objectifs alternatifs dont l’un n’exige des États membres qu’un quota de 33 % si l’on inclut les mandataires sociaux exécutifs) ;

– s’abstenir d’instituer de nouvelles sanctions (le droit national prévoyant déjà des sanctions suffisantes selon l’auteur de l’amendement) ;

– s’assurer que l’organisme chargé de veiller au respect de la parité femmes-hommes au sein des organes de gouvernance des sociétés commerciales soit doté des moyens nécessaires pour l’exercice de ses missions ;

– harmoniser les règles applicables à l’ensemble des entreprises, établissements et autres structures publics (GIP et GIE compris) avec celles prévues pour les entreprises privées s’agissant de l’objectif de parité femmes-hommes des organes de gouvernance et les sanctions prévues en cas de méconnaissance de cet objectif (comme on l’a vu plus haut, les règles applicables en matière de parité sont distinctes du droit commun des sociétés pour ces organismes) ;

– et prévoir que les modalités de désignation des administrateurs représentant les salariés soient conformes à l’objectif de parité femmes-hommes (comme on l’a vu, seules certaines procédures de désignation sont soumises à des règles de parité spécifiques).

Le Sénat a ensuite adopté cet article sans modification.

IV.   Les modifications apportÉes par la commission

La commission des lois a adopté un amendement rédactionnel, ainsi qu’un amendement du rapporteur prévoyant une rédaction plus précise des dispositions introduites par le Sénat et encadrant l’habilitation donnée au Gouvernement pour transposer la directive ([44]). Notamment, cet amendement mentionne les obligations légales de représentation équilibrée des femmes et des hommes (quota de 40 % dans les conseils d’administration et de surveillance) plutôt qu’un « objectif de parité » (l’objectif est fixé par la directive, et ne vise pas la parité). Il revient sur l’extension des règles de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes aux GIE dans la mesure où les modalités d’organisation et de fonctionnement de ces structures se caractérisent par la liberté importante laissée aux membres, ce qui justifie une étude plus approfondie avant de leur appliquer la règle de droit commun des sociétés, d’autant que la directive ne l’exige pas.

*

*     *

Chapitre III
Dispositions relatives au droit bancaire, monétaire et financier

Article 6
(articles L. 441-1, L. 533-12, L. 762-9, L. 763-9, L. 764-9, L. 773-30, L. 774-30 et L. 775-24 du code monétaire et financier)
Adaptations relatives aux dépositaires centraux de titres, aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement, aux informations sur les transferts d’actifs numériques et extension de certaines de ces dispositions à des collectivités d’outre-mer

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

     Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 6 répond à quatre objectifs et vise à :

– modifier l’article L. 444-1 du code monétaire et financier pour harmoniser les dispositions relatives aux dépositaires centraux de titres de pays tiers avec celles figurant dans le règlement (UE) 2023/2845 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023 modifiant le règlement (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil sur les dépositaires centraux de titres ;

– modifier l’article L. 533-12 du code monétaire et financier relatif aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement afin de corriger une ambiguïté résultant de la transposition antérieure de la directive (UE) 2021/338 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2021 ;

– étendre en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna l’application des modifications relatives aux dépositaires centraux de titres et aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement ;

– habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi favorisant la transposition des modifications de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, mises en œuvre par l’article 38 du règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs.

     Dernières modifications législatives intervenues

-         L’article L. 444-1 du code monétaire et financier a été institué par l’ordonnance n° 2015-1686 du 17 décembre 2015 relative aux systèmes de règlement et de livraison d’instruments financiers et aux dépositaires centraux de titres. Sa dernière modification résulte de l’article 7 de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture et fait suite à la mise en cohérence du droit national des titres avec le régime européen instauré par le règlement (UE) 2022/858 sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués.

-         L’article L. 533-12 du code monétaire et financier a été codifié par l’ordonnance n° 2000-1223 du 14 décembre 2000 relative à la partie législative du code monétaire et financier. Sa dernière modification résulte de l’article 7 de l’ordonnance n° 2021-1652 du 15 décembre 2021 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des obligations d’information, de la gouvernance des produits financiers et des limites de position des investisseurs destinées à faciliter le financement des entreprises ; cette modification a conduit à l’adjonction d’un III bis relatif aux conditions de communication par voie électronique et sur papier de certaines informations financières.

     Modifications apportées par le Sénat

-         Le Sénat a réduit de neuf à six mois la durée de l’habilitation donnée au Gouvernement pour prendre l’ordonnance précitée.

I.   L’État du droit

A.   droit europÉen

Trois textes européens sont concernés par l’article 6 :

- le règlement (UE) 2023/2845 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023 modifiant le règlement (UE) n° 909/2014 en ce qui concerne la discipline en matière de règlement, la fourniture transfrontière de services, la coopération en matière de surveillance, la fourniture de services accessoires de type bancaire et les exigences applicables aux dépositaires centraux de titres de pays tiers, et modifiant le règlement (UE) n° 236/2012 ;

- les dispositions de la directive (UE) 2021/338 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2021 relatives aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement ;

- l’article 38 du règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs et modifiant la directive (UE) 2015/849.

1.   Le règlement (UE) 2023/2845 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023 modifiant le règlement (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil sur les dépositaires centraux de titres

Les dépositaires centraux de titres (DCT) sont des établissements intervenant sur les marchés financiers dans le but d’assurer l’enregistrement et la conservation des titres financiers (actions, obligations, etc.) ainsi que la livraison de ces titres contre paiement. Ces « infrastructures de post-marché […]contribuent de façon essentielle au bon fonctionnement des marchés financiers » en donnant « aux acteurs de marchés confiance quant au fait que les transactions sur titres seront exécutées correctement et en temps voulu, y compris en période de très fortes tensions » ([45]).

À l’heure actuelle, en France, un seul établissement, la société Euroclear France SA, assure ce rôle de dépositaire central de titres après avoir été agréé en ce sens par l’Autorité des marchés financiers (AMF) ([46]).

L’intervention d’un seul opérateur n’est pas un cas isolé. Comme l’Autorité des marchés financiers l’a rappelé lors de son audition, « si l’on exclut les sept DCT gérés par une banque centrale ou un organisme public, un seul DCT national gère dans la plupart des pays de l’Union européenne et du Royaume-Uni l’ensemble des titres financiers traités sur le marché. Toutefois, pour des raisons historiques, certains pays comptent plusieurs DCT offrant ainsi une spécialisation par catégorie de titres. C’est le cas en Belgique ».

L’activité des dépositaires centraux de titres est soumise au règlement (UE) n° 909/2014 (dit CSDR, Central Securities Depositary Regulation) du Parlement européen et du Conseil concernant l’amélioration du règlement de titres dans l’Union européenne ainsi qu’au code monétaire et financier. Le règlement (UE) 2023/2845 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023 modifiant le règlement (UE) n° 909/2014 du Parlement européen et du Conseil sur les dépositaires centraux de titres apporte plusieurs modifications au règlement CSDR en matière de fourniture transfrontière de services, de surveillance financière, de fourniture de services accessoires de type bancaire et d’exigences applicables aux dépositaires centraux de titres de pays tiers.

Proposé par la Commission européenne le 16 mars 2022, ayant fait l’objet d’un avis du Comité économique et social européen le 14 juillet 2022 et d’un avis de la Banque centrale européenne le 28 juillet 2022, le règlement précité (UE) 2023/2845 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023 (dit CSDR refit) a été adopté au niveau européen à la suite d’une procédure législative ordinaire engagée dans le cadre de la « feuille de route sur l’union des marchés de capitaux » ([47]).

Les dispositions de ce texte relatives aux dépositaires centraux de titres modifient notamment les règles applicables aux établissements provenant de pays tiers. À l’heure actuelle, « les DCT de pays tiers qui fournissaient leurs services dans l’UE avant l’entrée en vigueur du règlement sur les DCT [c’est-à-dire avant le 17 septembre 2014] peuvent continuer à le faire en vertu d’une clause de droits acquis qui ne comporte pas de date d’expiration » ([48]). Ces établissements, dont aucun n’est en activité en France ([49]), sont ainsi autorisés à fournir des services portant sur des instruments financiers constitués en vertu du droit d’un État membre sans se soumettre à des règles comparables à celles imposées depuis le 17 septembre 2014 aux établissements européens. Cela soulève des interrogations « sur l’existence de conditions de concurrence inégales entre les DCT de l’UE et les DCT de pays tiers qui continuent d’exercer leurs activités en vertu de cette clause ».

Le règlement « CSDR refit » met un terme, à compter du 17 janvier 2027, à cette « clause du grand-père » ([50]). À cette date, les dépositaires centraux de titres provenant de pays tiers qui étaient en activité avant l’entrée en vigueur du règlement CSDR devront cesser leur activité dans l’Union ou se soumettre aux mêmes règles que les dépositaires centraux de titres européens et obtenir une décision de reconnaissance de l’Autorité européenne des marchés financiers. Cette procédure ne nécessitera pas d’intervention complémentaire de l’AMF.

À compter de 2027, cette évolution permettra à l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) disposera d’une vue claire et complète de l’activité des DCT de pays tiers dans l’Union européenne alors que, selon l’AMF, « l’ESMA et les autorités compétentes ne disposent actuellement pas d’informations précises et complètes permettant d’évaluer les services offerts par des DCT de pays tiers portant sur des titres financiers constitués en vertu du droit d’un État membre » ([51]).

Cette évolution nécessite une adaptation de l’article L. 444-1 du code monétaire et financier qui, dans sa rédaction actuelle, ne se réfère pas au régime de reconnaissance européen applicable aux DCT de pays tiers.

2.   L’article 1er de la directive (UE) 2021/338 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2021 relative aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement

La directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 (dite MIFID II, Markets in Financial Instruments Directive II) relative aux marchés d’instruments financiers a été modifiée par la directive 2021/338/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2021 (dite Quick fix).

Proposée par la Commission européenne le 24 juillet 2020, ayant fait l’objet d’un avis du Comité économique et social européen le 29 octobre 2020, la directive 2021/338/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2021 a été publiée dans le cadre de l’initiative législative d’urgence « Capital markets recovery package » destinée à « soutenir la reprise en apportant des modifications ciblées et limitées au droit de l’Union en vigueur en matière de services financiers » ([52]).

Cette directive comporte sept articles.

L’article 1er de ce texte adapte en plusieurs points la directive 2014/65/UE précitée. Le b du 4 de l’article 1er modifie l’article 24 de la directive 2014/65/UE en introduisant un 5 bis disposant notamment que « les entreprises d’investissement fournissent toutes les informations que la présente directive requiert de fournir aux clients ou aux clients potentiels au format électronique, sauf si le client ou le client potentiel est un client de détail existant ou potentiel qui a demandé de recevoir ces informations sur papier, auquel cas ces informations lui sont fournies sur papier, gratuitement » ([53]).

Ces dispositions ont été transposées en droit interne par l’ordonnance n° 2021-1652 du 15 décembre 2021. La nature de cette transposition soulève cependant certaines interrogations (cf. infra).

3.   L’article 38 du règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs

Les crypto-actifs « sont des actifs numériques virtuels qui reposent sur la technologie de la blockchain (chaîne de bloc) à travers un registre décentralisé et un protocole informatique crypté. Un crypto-actif n’est pas une monnaie. Sa valeur se détermine uniquement en fonction de l’offre et de la demande. Les crypto-actifs ne reposent pas sur un tiers de confiance, comme une banque centrale pour une monnaie. Il existe à ce jour plus de 1 300 crypto-actifs. Les plus connus sont le bitcoin, le ripple, l’ether, le litecoin, le nem et le dash » ([54]).

Les crypto-actifs sont ainsi une forme d’actif numérique virtuel et relèvent de l’article L. 54-10-1 du code monétaire et financier et du règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs.

Proposé par la Commission européenne le 22 juillet 2021, ayant fait l’objet d’un avis du Contrôleur européen de la protection des données le 22 septembre 2021, de la Banque centrale européenne le 30 novembre 2021 et du Comité économique et social européen le 8 décembre 2021, le règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 s’attache à renforcer la traçabilité des transferts de fonds et de crypto-actifs dans le but de « prévenir et détecter le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ». Cette préoccupation s’explique par le fait que « certains transferts de crypto-actifs comportent des facteurs spécifiques à haut risque pour le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et d’autres activités criminelles, en particulier les transferts liés à des produits, des transactions ou des technologies conçus pour renforcer l’anonymat, y compris les portefeuilles confidentiels, les services de mixage ou de brassage »([55]).

Les dispositions de ce texte mettent en œuvre les exigences de l’organisme mondial de surveillance du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme (le Groupe d’action financière, communément appelé GAFI) ([56]) en étendant aux prestataires de services de transferts de fonds et de crypto-actifs les dispositions applicables aux opérateurs effectuant des transferts de billets de banque et de pièces, de monnaie scripturale et de monnaie électronique. Ce règlement impose différentes nouvelles obligations aux professionnels dont, par exemple, celle de conserver pendant cinq ans les informations sur le donneur d’ordre et le bénéficiaire de fonds ou sur l’initiateur et le bénéficiaire de crypto-actifs.

Le règlement (UE) 2023/1113 du 31 mai 2023 abroge le règlement (UE) 2015/847 du 20 mai 2015 du Parlement européen et du Conseil sur les informations accompagnant les transferts de fonds et modifie la directive (UE) 2015/849 du 20 mai 2015 (communément appelée « cinquième directive anti-blanchiment ») relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme.

Le règlement (UE) 2023/1113 comporte 40 articles. Son article 38 modifie en plusieurs points la directive (UE) 2015/849 précitée dans le but :

– d’assimiler les relations entre les prestataires de services sur crypto-actifs et leurs clients aux relations nouées entre un correspondant bancaire et un établissement client d’un pays tiers ;

– d’assurer, dès le premier euro, l’identification et la vérification de l’adresse de l’initiateur et du bénéficiaire du transfert de crypto-actifs, y compris en cas de portefeuille dit « auto-hébergé » ([57]) ;

– d’imposer aux prestataires de services sur crypto-actifs une obligation d’évaluation des risques de blanchiment ou de financement du terrorisme et de déclaration des opérations suspectes aux cellules de renseignement financier ;

– d’imposer à l’Autorité bancaire européenne d’émettre des « orientations sur les variables de risque et les facteurs de risque à prendre en compte par les prestataires de services sur crypto-actifs au moment de nouer des relations d’affaires ou d’exécuter des transactions portant sur des crypto-actifs » ([58]).

Si le règlement (UE) 2023/1113 s’inspire des recommandations du GAFI, il impose ponctuellement des obligations plus importantes. Ainsi, en matière de transparence des transferts d’actifs numériques (communément appelés travel rule), le règlement pose le principe d’une traçabilité du transfert dès le premier euro échangé alors que le GAFI préconise d’appliquer cette règle aux seuls transferts d’actifs numériques d’une valeur supérieure à 1 000 euros.

Les dispositions modifiant la directive (UE) 2015/849 précitée doivent être transposées le 30 décembre 2024 au plus tard.

Ces différents éléments ont une incidence sur l’application de plusieurs dispositions du code monétaire et financier.

B.   droit interne

1.   L’article L. 444-1 du code monétaire et financier relatif aux dépositaires centraux de titres

L’article L. 441-1 du code monétaire et financier figure au sein du chapitre II (Les dépositaires centraux) du titre IV (Les chambres de compensation et les dépositaires centraux) du code monétaire et financier.

Cet article définit les différents types de dépositaires centraux de titres, pose le principe de leur nécessaire agrément par l’Autorité des marchés financiers après consultation de la Banque de France et précise que leurs règles de fonctionnement doivent être approuvées par cette même autorité.

Dans sa rédaction actuelle, cet article se réfère aux dépositaires centraux de pays tiers susceptibles d’être « autorisés » à fournir leurs services en France mais ne se réfère pas aux dépositaires centraux de pays tiers qui, en application du règlement CSDR refit, seront susceptibles d’être « reconnus » au niveau européen et donc habilités à proposer leurs services en France.

Sur ce point, le règlement précité (UE) 2023/2845 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2023 nécessite donc un ajustement.

2.   L’article L. 533-12 du code monétaire et financier relatif à l’obligation d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement

L’article L. 533-12 du code monétaire et financier figure au sein de la sous-section 1 (Dispositions communes aux prestataires de services d'investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille) de la section 5 (Règles de bonne conduite) du chapitre III (Obligations des prestataires de services d’investissement) du titre III (Les prestataires de services d’investissement) du livre V (Les prestataires de services) du code monétaire et financier.

Cet article L. 533-12 porte sur la nature des informations fournies par un prestataire de services d’investissement (autre qu’une société de gestion de portefeuille) à ses clients.

En application du I de cet article, « toutes les informations, y compris les communications à caractère promotionnel, adressées par un prestataire de services d'investissement autre qu'une société de gestion de portefeuille à des clients, notamment des clients potentiels, présentent un contenu exact, clair et non trompeur. Les communications à caractère promotionnel sont clairement identifiables en tant que telles ».

En application du II de cet article, les prestataires de services d’investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille communiquent « en temps utile à leurs clients, notamment leurs clients potentiels, des informations appropriées en ce qui concerne le prestataire de services d’investissement autre qu’une société de gestion de portefeuille et ses services, les instruments financiers et les stratégies d’investissement proposés, les lieux d’exécution et tous les coûts et frais liés ».

En application du III de cet article, ces informations sont remises « en temps utile » et « sous une forme compréhensible » aux clients, notamment les clients potentiels.

La transposition de la directive (UE) 2021/338 précitée a conduit à compléter en 2021 l’article L. 533-12 par un III bis disposant que « Les informations mentionnées au II sont transmises par voie électronique. Toutefois, lorsque la personne à laquelle elles sont envoyées est un client de détail, celui-ci peut demander à les recevoir sur support papier. Les conditions d'application du présent alinéa sont fixées par décret ». L’article D 533-15 du code monétaire et financier précise, conformément au 4 de l’article 1er de la directive (UE) 2021/338 précitée, que « les prestataires de services d'investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille informent les clients de détail, notamment les clients potentiels, qu'ils ont la faculté de recevoir gratuitement, sur support papier, les informations en lien avec la fourniture d'un service d'investissement ou d'un service connexe qui doivent leur être transmises sur un support durable ».

La rédaction du III bis s’écarte en deux points du texte de la directive.

En premier lieu, le III bis en vigueur réserve le possible envoi papier d’informations financières au seul « client de détail » sans préciser si celui-ci est un client existant ou un client potentiel alors même que le b du 4 de l’article 1er de la directive 2014/65/UE modifiée se réfère expressément au client de détail existant ou potentiel. 

En second lieu, dans sa rédaction actuelle, le III bis de l’article L. 533-12 vise uniquement les informations « mentionnées au II » de l’article L. 533-12 et ne vise donc pas les informations et communications relevant du I de cet article (par exemple les communications « à caractère promotionnel »).

L’exposé des motifs du projet de loi observe que la rédaction choisie lors de la transposition effectuée en 2021 « a été critiquée par les acteurs de la place de Paris en ce qu’elle ne reflète pas précisément la disposition de la directive européenne. La Commission européenne a également relevé cette difficulté au moment d’examiner la transposition de la directive (UE) 2021/338 » ([59]). L’étude d’impact ajoute que cette « imprécision du droit français peut être préjudiciable à la prise de décision des épargnants (notamment les plus âgés) au moment d’investir » et, d’autre part, qu’elle « fragilise la base juridique »  des opérations de contrôle de l’Autorité des marchés financiers « et, le cas échéant, les motifs invoqués dans le cas de sanctions prononcées contre des intermédiaires financiers manquant à leurs obligations d’information » ([60]).

Si, lors de son audition, l’Autorité des marchés financiers a indiqué qu’aucune procédure de sanction pour méconnaissance du III bis de l’article L. 533‑12 n’avait à ce jour été engagée depuis l’entrée en vigueur, le 28 février 2022, de cette disposition, le risque mentionné par l’étude d’impact existe et justifie certains ajustements.

3.   Les dispositions du code monétaire et financier relatives aux crypto‑actifs

Comme l’étude d’impact le rappelle, « les pouvoirs publics français ont très tôt ciblé la réglementation sur les plateformes de conversion des actifs numériques en monnaie ayant cours légal. […] Celles-ci ont ainsi été assujetties au dispositif de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LBC-FT) dès l’ordonnance n° 2016-1635 du 1er décembre 2016 » ([61]).

Ultérieurement, la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (dite loi Pacte) a inséré un chapitre X « Prestataires de services sur actifs numériques » au sein du titre IV du livre V du code monétaire et financier. D’autres adaptations ont suivi en lien avec l’évolution de la réglementation européenne. Le dernier ajustement résulte de la loi n° 2023‑171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture qui a modifié l’article L. 54-10-3 du code monétaire et financier relatif aux prestataires de services sur actifs numériques pour introduire la possibilité d’un enregistrement renforcé à compter du 1er janvier 2024. Cette même loi a habilité, dans son article 9, le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai d’un an à compter de sa promulgation, « toute mesure relevant du domaine de la loi pour : 1° Adapter les dispositions du code monétaire et financier et, le cas échéant, d’autres codes ou lois pour assurer, à l'entrée en application du règlement du Parlement européen et du Conseil sur les marchés de crypto-actifs approuvé par le Conseil de l’Union européenne le 5 octobre 2022, leur cohérence et leur conformité avec ce règlement ; 2° Définir les compétences de l’Autorité des marchés financiers et de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution pour l’application de ce règlement ».

L’actualisation régulière de ce régime juridique est nécessaire pour tenir compte des modifications introduites par le règlement (UE) 2023/1113 précité au regard notamment des enjeux et des risques dont les actifs numériques sont porteurs en matière de financement du terrorisme et de blanchiment des capitaux ([62]).

4.   Les conditions d’application du code monétaire et financier en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna

L’application de la réglementation bancaire et financière dans les collectivités ultra-marines dépend de leur statut. Comme le rappelle l’étude d’impact « le régime législatif et réglementaire applicable aux départements, régions (en Guadeloupe, à la Réunion et, depuis le 31 mars 2011, à Mayotte) et collectivités uniques d’outre-mer (en Martinique et en Guyane) est celui de la métropole » tandis que « les statuts de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon prévoient que la plupart des lois et règlements y sont applicables de plein droit » ([63]).

À l’inverse, « en application du principe dit de la « spécialité législative », les lois et règlements ne sont applicables en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, et en Nouvelle-Calédonie, en application de l’article 77 de la Constitution, que dans les matières relevant statutairement des compétences de l’État et que sur mention expresse du texte en cause ou s’ils y ont été rendus applicables par un texte spécial » ([64]).

Les articles L. 762-9, L. 763-9 et L. 764-9 du code monétaire et financier assurent ainsi l’application de l’article L. 441-1 de ce code dans sa rédaction issue de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 précitée en Nouvelle-Calédonie (article L. 762‑9), en Polynésie française (article L. 763-9) et dans les îles Wallis et Futuna (article L. 764-9) tandis que les articles L. 773-30, L. 774-30 et L. 775-24 assurent l’application de l’article L. 533-12 dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2021‑1652 du 15 décembre 2021 en Nouvelle-Calédonie (article L. 773-30), en Polynésie française (article L. 774-30) et dans les îles Wallis et Futuna (article L. 775-24).

Toute modification apportée aux articles L. 441-1 et L. 533-12 du code monétaire et financier doit être reportée expressément dans les articles de ce code relatifs à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna.

II.   Le dispositif proposÉ

Dans sa rédaction déposée sur le bureau du Sénat, l’article 6 comprend vingt-et-un alinéas répartis entre quatre paragraphes.

Ces dispositions modifient huit articles du code monétaire et financier et proposent d’habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance différentes mesures relevant du domaine de la loi.

1.   Les adaptations relatives aux dépositaires centraux de titres

Les adaptations relatives aux dépositaires centraux de titres font l’objet du I et du 1° du III de l’article 6.

Le I modifie l’article L. 441-1 du code monétaire et financier en trois points :

- le 1° modifie l’intitulé d’un renvoi au règlement (UE) 909/2014 précité ;

- les 2° et 3 ° suppriment la référence aux dépositaires centraux de pays tiers « autorisés » à fournir en France certains services et la remplacent par une référence aux dépositaires centraux de pays tiers « reconnus » pour fournir ces services afin de se référer à la procédure de reconnaissance instituée par le règlement CSDR refit.

Dans son avis n° 407629, « le Conseil d’État estime que les dispositions du projet de loi […] concernant […] les dépositaires centraux de titres ne soulèvent pas de difficulté, dès lors que le Gouvernement donne l’assurance que la publication du règlement modifié est imminente, et compte tenu de ce que, d’une part, les changements qu’elles emportent sur le droit national sont très circonscrits et que, d’autre part, cette anticipation n’est en tout état de cause pas de nature à affecter la compétitivité des dépositaires centraux français face à leurs homologues européens » ([65]).

Sur ce sujet, le rapporteur considère que la modification proposée se contente de tirer la conséquence du règlement CSDR refit et ne soulève pas d’observation particulière.

2.   Les adaptations relatives aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement

Le II de l’article 6 propose une nouvelle rédaction du III bis de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier relatif aux modalités d’information des clients des prestataires de services d’investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille.

Cette modification précise que « Les prestataires de services d’investissement autres que les sociétés de gestion de portefeuille transmettent à leurs clients ou clients potentiels toutes les informations en lien avec la fourniture d’un service d’investissement ou d’un service connexe par voie électronique. Toutefois, lorsque le client existant ou potentiel est un client non professionnel qui demande à recevoir ces informations sur support papier, ces informations lui sont fournies sur ce support ».

Cette rédaction s’attache à lever les ambiguïtés de la rédaction actuelle du III bis de l’article L. 533-12. La rédaction proposée se réfère ainsi clairement au « client existant ou potentiel » (et non plus simplement au « client de détail ») et vise « toutes les informations en lien avec la fourniture d’un service d’investissement ou d’un service connexe par voie électronique » (et non plus seulement les informations « mentionnées au II » de l’article L. 533-12).

Dans son avis, le Conseil d’État n’a pas formulé d’observation sur cet article.

Le rapporteur considère que la modification proposée est utile et répond à la fois aux besoins des particuliers investisseurs, des acteurs de la place de Paris et de l’Autorité des marchés financiers. Sa portée n’est pas négligeable puisqu’elle concernerait 160 prestataires de services d’investissement.

Le rapporteur regrette cependant que la rédaction proposée ne se réfère pas explicitement au caractère gratuit des informations transmises alors même que cette mention figure expressément au b du 4 de l’article 1er de la directive (UE) 2021/338 précitée. Si la référence à cette gratuité figure bien à l’article D. 533-15 du code monétaire et financier, il lui semble préférable de conférer une valeur législative à ce principe.

Cette précision ne constituerait pas une innovation puisque la partie législative du code monétaire et financier se réfère d’ores et déjà à la gratuité de plusieurs services ou informations comme la fourniture des formules de chèques (article L. 131-71), des informations relatives aux produits d’épargne retraite (article L. 224-7-1), des motifs de refus d’ouverture d’un compte (article L. 312-1) ou de la clôture de tout compte de dépôt ou compte sur livret (article L. 312-1-7).

3.   L’application des dispositions relatives aux dépositaires centraux de titres et aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna

Le III de l’article 6 assure l’application des dispositions relatives aux dépositaires centraux de titres et aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

Le 1° du III modifie les articles L. 762-9, L. 763-9 et L. 764-9 du code monétaire et financier pour assurer l’application de l’article L. 441-1 relatif aux dépositaires centraux en Nouvelle-Calédonie (article L. 762-9), en Polynésie française (article L. 763-9) et dans les îles Wallis et Futuna (article L. 764-9). À cet effet, il supprime dans ces trois articles le renvoi à la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture et le remplace par une référence à la loi en cours de discussion.

Le 2° du III modifie les articles L. 773-30, L. 774-30 et L. 775-24 du code monétaire et financier pour assurer l’application des obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement en Nouvelle-Calédonie (article L. 773-30), en Polynésie française (article L. 774-30) et dans les îles Wallis et Futuna (article L. 775-24). À cet effet, il supprime dans ces trois articles le renvoi à l’ordonnance n° 2021-1652 du 15 décembre 2021 et le remplace par une référence à la loi en cours de discussion.

Dans son avis, le Conseil d’État n’a pas présenté d’observation sur cet article.

Le rapporteur considère que ces ajustements techniques ne soulèvent aucune difficulté particulière.

4.   L’habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures relatives à la transparence des transferts d’actifs numériques

Le IV habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la loi, toute mesure relevant du domaine de la loi visant à :

– transposer la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme dans sa rédaction résultant de l’article 38 du règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs ;

– adapter les dispositions du code monétaire et financier et, le cas échéant, d’autres codes ou dispositions législatives non codifiées, pour assurer, dès l’entrée en application du règlement précité, leur cohérence et leur conformité avec les dispositions de ce dernier ([66]) ;

– définir les compétences respectives de l’Autorité des marchés financiers et de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dans la mise en œuvre des dispositions issues de la transposition de la directive précitée.

Un projet de loi de ratification serait déposé dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.

Dans son avis, le Conseil d’État n’a formulé aucune observation sur cet article.

Sur ce sujet, le rapporteur observe que :

– L’étude d’impact justifie le recours à une ordonnance par la nécessité de rédiger les dispositions concernées « à peu près en même temps que l’ordonnance issue de l’habilitation prévue à l’article 9 de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne et qui vise à adapter le code monétaire et financier à l’entrée en application du règlement MiCA (l’habilitation court jusqu’au 8 mars 2024) » dans la mesure « où les mêmes parties du code monétaire et financier sont susceptibles d’être retouchées par les deux textes » ([67]).

Le rapporteur souscrit à cette observation et considère que l’ampleur des modifications et des coordinations à apporter légitime le recours à une ordonnance. Le Sénat partage ce point de vue puisque son rapporteur a observé que le recours à une ordonnance « peut se justifier par la nécessité de coordonner l’adaptation du droit interne au règlement européen sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs aux dispositions de la future ordonnance adaptant le droit monétaire et financier aux dispositions du règlement européen sur les marchés des crypto-actifs » ([68]) . La prochaine entrée en vigueur simultanée, le 30 décembre 2024, de ces deux textes européens (le règlement MiCA et le règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023) plaide en ce sens ;

– Les modifications ainsi apportées au code monétaire et financier concerneraient les 107 prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) actuellement enregistrés de façon obligatoire auprès de l’Autorité des marchés financiers et le PSAN agréé de façon optionnelle auprès de cette même autorité ;

– La modification des compétences des autorités régulatrices devrait concerner autant l’Autorité des marchés financiers (qui assure un rôle d’enregistrement des PSAN) que l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (qui assure un rôle de superviseur des PSAN).

III.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

Le Sénat a adopté l’article 6 avec modifications.

À l’initiative de M. Cyril Pellevat, rapporteur de la commission spéciale, trois amendements, dont deux rédactionnels, ont été adoptés en commission (2) et en séance (1).

En commission, deux amendements ont été adoptés. Le premier (n° COM 21) a réduit de neuf à six mois la durée de l’habilitation du Gouvernement pour prendre l’ordonnance tandis que le second (n° COM 22) est d’ordre rédactionnel et concerne l’habilitation.

En séance publique, le Sénat a adopté un troisième amendement (n° 32), également d’ordre rédactionnel concernant le 4° du II.

La décomposition de l’article en un I, un II, un III et un IV a également été supprimée et l’article est désormais articulé autour d’un I consacré et d’un II.

Si le rapporteur approuve les amendements rédactionnels adoptés par le Sénat, il conteste en revanche le bien-fondé de l’amendement réduisant de neuf à six mois la durée de l’habilitation du Gouvernement pour prendre l’ordonnance. Dans l’hypothèse où la loi en cours de discussion serait promulguée au mois d’avril 2024, la période d’habilitation s’achèverait au mois d’octobre, soit un peu plus de deux mois avant l’entrée en vigueur des dispositions modifiant la directive (UE) 2015/849 précitée. Or, en pratique, cette ordonnance devra tenir compte du contenu des orientations émises par l’Autorité bancaire européenne dont certaines ne seront publiées qu’en décembre 2024 peu de temps avant l’entrée en vigueur de ce texte. Il importe donc de laisser au pouvoir exécutif la capacité d’adapter le contenu de l’ordonnance jusqu’au dernier moment.

L’argument, mis en avant par le Sénat, qu’ « un délai d’habilitation de six mois ainsi qu’un délai de dépôt du projet de loi de ratification de trois mois permettraient au Parlement d’avoir connaissance des dispositions d’adaptation du droit français avant l’entrée en application des nouvelles règles » ([69]) n’est pas convaincant puisqu’il ne tient compte ni de la possible publication tardive des actes d’exécution, ni de la possibilité offerte au Parlement d’auditionner s’il le souhaite les autorités chargées de la préparation de cette ordonnance afin de suivre son élaboration.

IV.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION

Après avoir adopté trois amendements de son rapporteur, la commission des finances a émis un avis favorable à l’adoption de cet article.

La première modification, apportée par l’amendement n° CF 7 (amendement n° CL 3), revient sur la réduction de la durée d’habilitation laissée au Gouvernement pour prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi dans les domaines précités. La durée figurant initialement au projet de loi (neuf mois) a été rétablie de préférence à celle retenue par le Sénat (six mois).

La deuxième modification, apportée par l’amendement n° CF 11 (amendement n° CL2), introduit au III bis de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier le principe de gratuité de la fourniture des informations fournies aux clients de détail sollicitant un service d’investissement.

La troisième modification, apportée par l’amendement n° CF 16 (amendement n° CL1), est d’ordre rédactionnel.

La commission des lois a adopté l’article 6 ainsi modifié.

*

*     *

 

Article 7
(articles L. 721-9, L. 712-11 [nouveau], L. 773-4, L. 774-4, L. 775-4, L. 781-3, L. 783-2, L. 783-4, L. 783-10, L. 784-2, L. 784-4, L. 784-10, L. 785-2 et L. 785-3 et L. 785-9 du code monétaire et financier)
Adaptation de mesures relatives à la résolution des établissements de crédit, à la supervision des organes centraux et à l’identification des titulaires de comptes bancaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les îles Wallis et Futuna

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modification de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modification

     Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 7 répond à trois objectifs et vise à :

– Adapter dans le domaine bancaire à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, à Saint-Pierre-et-Miquelon et aux îles Wallis et Futuna les règlements d’exécution et les actes délégués de la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement ;

– Rénover les règles de résolution et de supervision des organes centraux en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna ;

– Adapter les règles d’identification des titulaires de comptes bancaires et d’intervention de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et de l’Autorité des marchés financiers en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

     Dernières modifications législatives intervenues

– Les articles L. 721-9, L. 773-4, L. 774-4, L. 775-4, L. 781-3, L. 783-2, L. 783-4, L. 783-10, L. 784-2, L. 784-4, L. 784-10, L. 785-2 et L. 785-3 et L. 785-9 ont été institués par l’ordonnance n° 2021-1200 du 15 septembre 2021 relative aux titres Ier et II de la partie législative du livre VII du code monétaire et financier ou par l’ordonnance n° 2022-230 du 15 février 2022 relative aux titres III à VIII de la partie législative du livre VII du code monétaire et financier.

 – Les articles L. 721-9, L. 781-3, L. 783-10, L. 784-10 et L. 785-9 n’ont pas été modifiés depuis leur création.

– Les articles L. 773-4, L. 774-4, L. 775-4 ont été modifiés - pour actualiser des références de renvoi à d’autres textes - par l’article 3 de la loi n° 2023-594 du 13 juillet 2023 ratifiant les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financier et portant diverses dispositions relatives à l'outre-mer.

– Les articles L. 783-2, L. 784-2 et L. 785-2 ont été modifiés - pour actualiser des références de renvoi à d’autres textes - par l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d’informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprise des sociétés commerciales.

– Les articles L. 783-4, L. 784-4 et L. 785-3 ont été modifiés - pour actualiser des références de renvoi à d’autres textes - par l’ordonnance n° 2023-836 du 30 août 2023 portant adaptation du droit français au règlement (UE) 2021/23 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2020 relatif à un cadre pour le redressement et la résolution des contreparties centrales.

     Modifications apportées par le Sénat

– Le Sénat a adopté l’article 7 avec modification dans le but de simplifier la présentation de l’article.

I.   L’état du droit

A.   droit européen

Proposée par la Commission européenne le 6 juin 2012, ayant fait l’objet d’un avis de la Banque centrale européenne le 29 novembre 2012 et du Comité économique et social européen le 12 décembre 2012, la directive 2014/59/UE du 15 mai 2014 du Parlement européen et du Conseil a été adoptée au niveau européen à la suite d’une procédure législative ordinaire ([70]).

Prise dans le prolongement de la crise financière de 2007-2008, cette directive, dite BRRD (Bank Recovery and Resolution Directive), qui comporte 132 articles, pose le principe d’une exigence minimale de fonds propres et de passifs exigibles appelée MREL (Minimum Requirement for own funds and Eligible Liabilities) et établit un cadre européen pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement.

Les notions de « redressement » et de « résolution » peuvent être ainsi définies :

– s’agissant du redressement, la directive précise que : « Les États membres veillent à ce que chaque établissement, qui ne fait pas partie d’un groupe faisant l’objet d’une surveillance sur base consolidée […] élabore et tienne à jour un plan de redressement prévoyant que l’établissement prenne des mesures pour restaurer sa situation financière après une détérioration significative de cette dernière » ([71]) ;

– s’agissant de la résolution, la directive indique que : « La résolution bancaire consiste à faire intervenir une autorité dite de « résolution » sur un établissement bancaire ou financier défaillant ou susceptible de l’être, de façon à le restructurer ou en opérer une liquidation ordonnée et d’en éviter la faillite » ([72]). Les instruments de résolution sont la cession des activités de l’établissement, le recours à un établissement-relais, la séparation des actifs et le renflouement interne.

La directive 2014/59/UE distingue plusieurs phases d’intervention des autorités de supervision : une phase de préparation et de prévention, une phase d'intervention précoce et une phase de résolution proprement dite.

En Europe, le mécanisme de résolution a été activé à deux reprises ; la première fois en 2016 (en lien avec les difficultés de Banco popular Español S. A et sa reprise par Banco Santander S. A) et la seconde fois en 2022 (en lien avec les difficultés des filiales slovène et croate de la banque autrichienne Sherbank Europe AG).

En France, le mécanisme de résolution européen n’a encore jamais été activé. Dans l’hypothèse où il le serait, sa mise en œuvre se ferait dans le cadre des dispositions du code monétaire et financier issues de la directive 2014/59/UE et de sa vingtaine d’actes d’exécution et d’actes délégués.

Les actes d'exécution et les actes délégués dans le droit de l’Union européenne

Les actes d'exécution et les actes délégués relèvent des articles 290 et 291 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et concernent l’habilitation donnée à la Commission européenne par le Parlement européen et le Conseil d’adopter des actes non législatifs de portée générale.

Concernant les actes d’exécution : si la responsabilité première de la mise en œuvre de la législation européenne incombe aux pays membres, la Commission (ou, exceptionnellement, le Conseil) peut adopter - après consultation d’un comité au sein duquel tous les pays de l’UE sont représentés - des actes d’exécution dans les domaines où des conditions de mise en œuvre uniformes sont nécessaires (fiscalité, agriculture, marché intérieur, santé et sécurité alimentaire, etc.).

Concernant les actes délégués : la Commission intervient sur la base d’une délégation octroyée par un acte législatif européen. Le pouvoir de la Commission d’adopter des actes délégués est limité :

         l’acte législatif doit définir les objectifs, le contenu, la portée et la durée de la délégation de pouvoir ;

         l’acte délégué ne peut pas modifier les éléments essentiels de l’acte législatif ;

         le Parlement et le Conseil peuvent révoquer la délégation ou exprimer des objections à l’égard de l’acte délégué.

Source : site du Conseil de l’Union européenne ([73]).

B.   droit interne

Le droit interne en lien avec l’article 7 est pour partie corrélé à la directive 2014/59/UE. Si le I et le II de l’article 7 présentent un lien direct avec cette directive, le III (qui traite de l’identification des titulaires de comptes bancaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna) en est dépourvu. Le rattachement de cette dernière disposition au projet de loi se justifie cependant au regard de la démarche de rénovation du livre VII du code monétaire et financier relatif à l’outre-mer dans laquelle il s’inscrit ([74]).

1.   L’absence d’application des règlements d’exécution et des actes délégués de la directive 2014/59/UE en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et à Saint-Pierre-et-Miquelon

La directive 2014/59/UE établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement a été transposée par l’ordonnance n° 2015-1024 du 20 août 2015 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière financière.

Ultérieurement, une vingtaine de règlements d’exécution et d’actes délégués ont été publiés.

L’application de ces dispositions diffère selon les zones du territoire. En métropole et dans les collectivités ultra-marines de droit commun, l’ensemble des règles posées par la directive, par ses règlements d’exécution et par ses actes délégués s’appliquent et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) en assure le contrôle. En revanche, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les îles Wallis et Futuna, la mise en œuvre des dispositions communautaires en matière bancaire et financière exige, en raison des statuts propres à ces collectivités ([75]), des textes spécifiques. Or, si l’ordonnance n° 2015-1024 a bien autorisé l’application de la directive 2014/59/UE dans ces territoires, aucun texte n’a pour l’heure permis l’entrée en vigueur de ces actes délégués et de ses règlements d’exécution. L’article L. 712-9 du code monétaire et financier relatif aux conditions d’application de certains textes européens en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les îles Wallis et Futuna, ne se réfère ainsi pas aux actes délégués et aux actes d’exécution. L’ACPR considère que cette situation résulte d’un « oubli lors des travaux d’extension de la réglementation métropolitaine » ([76]).

Pour répondre à cette situation, l’ACPR a pris l’initiative d’étendre l’application de certains de ces actes à ces territoires sur le fondement des pouvoirs généraux de communication d’informations qui lui sont confiés par l’article L. 612-24 du code monétaire et financier. À l’heure actuelle, les actes délégués permettant le suivi des exigences de résolution et l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles sont ainsi appliqués dans ces territoires sur ce seul fondement. Toutefois, l’étude d’impact regrette la « fragilité » de ce fondement et craint qu’il ne pose « problème en cas de contentieux » ([77]).

Lors de son audition, l’ACPR a partagé cette analyse et a souhaité que la sécurité juridique de ses interventions dans ces territoires soit améliorée.

2.   Les limitations actuelles aux pouvoirs des organes bancaires centraux envers leurs affiliés et aux compétences de l’ACPR en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna

La supervision et l’action en résolution du secteur bancaire sont assurées par les opérateurs bancaires et par l’ACPR.

Lors de son audition, l’ACPR a rappelé que les modalités de l’action en résolution des opérateurs bancaires varient selon la nature de ces établissements : si les actions des banques capitalistiques (de type BNP-Paribas ou Société Générale) sont organisées autour d’une entreprise mère, au sens de l’article L. 511-20 du code monétaire et financier, et de ses filiales, les actions des groupes bancaires mutualistes reposent sur des organes centraux dont les missions et les modalités de contrôle par l’ACPR font l’objet des articles L. 511-30, L. 511-31, L. 511-32 et L. 613-49-1 (V) du code monétaire et financier ([78]).

« La notion d’organe central est spécifique à la structure des groupes bancaires mutualistes qui sont composés d’affiliés qui détiennent (en totalité ou en partie) un organe central, et, le cas échéant, de filiales non affiliées au réseau. […]. Les organes centraux sont chargés d’assurer la cohésion et la solidarité au sein du groupe. L’ensemble du réseau (organe central et affiliés) est considéré comme une entité de résolution unique » ([79]).

Si l’action en résolution des banques capitalistiques en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna est organisée de manière satisfaisante, l’action en résolution des organes centraux dans ces territoires pâtit d’un défaut d’adaptation du code monétaire et financier.

Faute de mention spécifique dans le code monétaire et financier, les articles L 511-30, L 511-31, L 511-32 et L 613-49-1 (V) ne sont pas applicables dans ces territoires. Aucune référence à ces dispositions ne figure ainsi dans les articles de ce code relatifs aux prestataires de services bancaires en Nouvelle-Calédonie (article L. 773-4), en Polynésie française (article L. 774-4) et dans les îles Wallis et Futuna (article L. 775-4). Par ailleurs, si l’article L. 613-49-1 est bien visé par les articles du livre VII relatifs aux modalités d’intervention de l’ACPR en Nouvelle-Calédonie (article L. 783-4), en Polynésie française (article L. 784-4) et dans les îles Wallis et Futuna (article L. 785-3), cette mention est partielle puisqu’elle exclut l’application dans ces territoires du V de cet article relatif aux pouvoirs du collège de résolution de l’ACPR.

Selon l’ACPR, cette situation résulte d’une omission lors de l’adaptation du code monétaire et financier dans ces territoires et mérite d’être corrigée, même si la situation financière des banques mutualistes intervenant en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna ne soulève aucune inquiétude particulière.

La place des banques mutualistes en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna

Selon l’étude d’impact :

-          En Nouvelle-Calédonie, la banque de Nouvelle-Calédonie, affiliée au groupe BPCE ([80]), détient 25 % des dépôts locaux et 26 % des prêts accordés localement. Son bilan s’élève à 2,5 milliards d’euros.

-          En Polynésie française, la banque de Tahiti, également affiliée au groupe BPCE, détient 33 % des dépôts locaux et 35 % des prêts accordés localement. Son bilan s’élève à 2,6 milliards d’euros

Selon l’ACPR, les banques mutualistes ne sont pas présentes dans les îles Wallis et Futuna où le système bancaire repose sur une seule banque de détail, la Banque de Wallis-et-Futuna, filiale du groupe BNP-Paribas, qui représentait, au 31 décembre 2022, 100 % des parts de marché en matière d’octroi de crédit et 91,85 % des parts de marché relatives aux dépôts locaux. Les dépôts restants sont collectés par la direction des finances publiques de Wallis-et-Futuna.

Source : étude d’impact (pages 42-43) et réponse de l’ACPR au questionnaire du rapporteur.

3.   Les limites à l'identification des titulaires de comptes bancaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna

Les modalités d’identification des titulaires de comptes bancaires prévues par le code monétaire et financier à la charge des institutions financières ne sont aujourd’hui pas pleinement applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, ce qui soulève certaines difficultés.

Certains articles du code monétaire et financier intervenant en ce domaine sont applicables. Ainsi, les dispositions de l’article L. 561-5 de ce code imposant aux institutions financières, avant d’entrer en relation d’affaires avec un client ou de l’assister dans la préparation ou la réalisation d’une transaction, d’identifier ce client et de vérifier les éléments d’identification présentés s’appliquent en Nouvelle-Calédonie (article L. 773-42 (5°)), en Polynésie française (article L. 774-42 (5°)) et dans les îles Wallis et Futuna (article L. 775-36 (I)).

En revanche, les modalités d’identification des titulaires de comptes bancaires définies par les articles L. 564-1 et L. 564-2 du code monétaire et financier ne s’appliquent pas dans ces territoires.

L’article L. 564-1 (I) subordonne l’établissement d’une relation contractuelle à l’identification préalable de la résidence fiscale, et le cas échéant, des numéros d'identification fiscale du titulaire du compte et des personnes physiques le contrôlant. L’article L. 564-2 impose aux teneurs de compte, aux organismes d'assurance et assimilés et à toute autre institution financière de mettre en place un dispositif de contrôle interne chargé de veiller à la bonne application des procédures assurant le respect du I de l’article 1649 AC du code général des impôts concernant des obligations de déclaration en matière fiscale, de l’article L. 102 AG du livre des procédures fiscales relatif à l’obligation de transmission d’information à l’administration fiscale et de l’article L. 564-1 précité ([81]).

Ces différentes dispositions visent à lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.

Dans leurs domaines de compétences respectifs, l’ACPR et l’Autorité des marchés financiers (AMF) sont chargées de veiller au respect de l’article L. 564-2 en application, pour l’ACPR, du 7° du II de l’article L. 612-1 du code monétaire et financier ([82]) et, pour l’AMF, de l’article L. 621-20-6 de ce même code. Dans ce cadre, ces deux autorités peuvent communiquer à l’administration fiscale des documents et des informations nécessaires à la coopération administrative dans le domaine fiscal et aux échanges automatiques d’informations relatives aux comptes financiers en matière fiscale. L’administration fiscale peut également transmettre des éléments à l’ACPR et à l’AMF pour l’accomplissement de leurs missions.

Selon l’étude d’impact, ces dispositions ne sont pas applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna en raison de leur dimension fiscale, dans la mesure où la matière fiscale relève non de l’État mais de la compétence des autorités locales ([83]).

Pour ce motif, ces dispositions n’ont pas été étendues dans ces territoires à l’inverse des autres obligations du titre VI du livre V du code monétaire et financier relatives :

-         à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (articles L. 773-42 [Nouvelle-Calédonie], L. 774-42 [Polynésie française] et L. 775-36 [îles Wallis et Futuna]) ;

-         au gel des avoirs (articles L. 773-43 [Nouvelle-Calédonie], L. 774-43 [Polynésie française] et L. 775-37 [îles Wallis et Futuna]) ;

-         aux jeux et loteries prohibées (articles L. 773-44 [Nouvelle-Calédonie], L. 774-44 [Polynésie française] et L. 775-38 [îles Wallis et Futuna]).

Cette situation affecte les modalités d’intervention de l’ACPR (décrites aux articles L. 783-2 [pour la Nouvelle-Calédonie], L. 784-2 [pour la Polynésie française] et L. 785-2 [pour les îles Wallis et Futuna]) et de l’AMF (décrites aux articles L. 783-10 [pour la Nouvelle-Calédonie], L. 784-10 [pour la Polynésie française] et L .785-9 [pour les îles Wallis et Futuna]).

Les modalités d’identification des titulaires de comptes bancaires dans ces territoires ne sont donc pas complètes ce qui pas satisfaisant au regard, d’une part, du nombre de comptes bancaires ouverts dans ces territoires (542 501) ([84]) et, d’autre part, de l’obligation pour la France d’assurer le respect sur l’ensemble de son territoire de ses obligations d’identification des titulaires de comptes bancaires.

 

 

 

II.   Le dispositif proposé

L’article 7 dans sa rédaction déposée sur le bureau du Sénat comprend trente-trois alinéas répartis entre trois paragraphes.

Ces dispositions modifient quatorze articles du code monétaire et financier et introduisent un article supplémentaire au sein de ce même code.

1.   Extension en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et à Saint-Pierre et Miquelon de l’application des actes délégués et des actes d’exécution de la directive 2014/59(UE)

Le I vise à étendre en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et à Saint-Pierre et Miquelon l’application des actes délégués et des actes d’exécution de la directive 2014/59(UE) établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement. À cet effet, un article L. 712-11 est créé et l’article L. 712-9 du code monétaire et financier est modifié.

Le 2° du I crée un article L. 712-11 conférant au ministre chargé de l’économie le pouvoir d’arrêter les « conditions dans lesquelles sont rendus applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna les actes délégués et les actes d’exécution relatifs aux normes techniques de réglementation ou d’exécution adoptés par la Commission européenne sur le fondement de la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement ».

Le 1° modifie l’article L. 712-9 pour introduire une référence aux actes délégués et aux actes d’exécution visés au nouvel article L. 712-11.

Dans son avis, le Conseil d’État n’a pas formulé d’observation sur cet article.

Selon le rapporteur, la rédaction proposée répond utilement à la situation actuelle et devrait permettre de sécuriser le fondement juridique de l’intervention de l’ACPR pour contrôler l’application des actes délégués et des actes d’exécution de la directive 2014/59/UE dans ces territoires.

2.   Adaptation des dispositions relatives aux organes centraux et aux modalités d’intervention de l’ACPR en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna

Le II modifie sept articles du code monétaire et financier dans le but d’adapter les dispositions relatives aux organes centraux et aux modalités d’intervention de l’ACPR en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

Le 1° et le 2° modifient les articles L. 773-4, L. 774-4 et L. 775-4 relatifs aux prestataires de services bancaires en Nouvelle-Calédonie (L. 773-4), en Polynésie française (L. 774-4) et dans les îles Wallis et Futuna (L. 775-4).

Le 1° vise et rend applicables les articles L. 511-30 et L. 511-31 (à l’exception de son troisième alinéa) ([85]) et L. 511-32 dans ces territoires dans leur rédaction résultant de l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013 et de l’ordonnance n° 24-158 du 20 février 2014 ([86]). Cette modification a pour effet de rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna les dispositions du code monétaire et financier relatives à l’action des organes centraux et au rôle de l’ACPR dans leur supervision.

Le 2° modifie le II de ces mêmes articles L. 773-4, L. 774-4 et L. 775-4 afin d’adapter la rédaction de l’article L. 511-32 dans ces territoires. À cet effet, la référence aux « dispositions européennes directement applicables » est remplacée par un renvoi aux articles L. 712-7 à L. 719-9 et L. 712-11 du code monétaire et financier relatifs à l’application outre-mer des dispositions du droit de l’Union européenne en matière monétaire et financière.

Les 3° et 4° tirent la conséquence de ces ajustements et modifient les articles L. 781-3, L. 783-4, L. 784-4 et L. 785-3.

Le 3° abroge le 1° de l’article L. 781-3 disposant qu’en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna les « références aux organes centraux mentionnés à l'article L. 511-30 ne sont pas applicables ».

Le 4° abroge la disposition figurant aux articles L. 783-4, L. 784-4 et L. 785- 3 qui supprimait le renvoi au V de l’article L. 613-49-1 permettant au collège de résolution de l’ACPR d’évaluer dans ces territoires « si les conditions de déclenchement d’une procédure de résolution […] sont réunies » et de prendre le cas échéant « des mesures de résolution coordonnées à l'égard de l’organe central et de l’ensemble des affiliés ». Cette procédure sera désormais applicable.

Dans son avis, le Conseil d’État n’a pas formulé d’observation sur cet article.

Le rapporteur approuve les dispositions proposées qui permettent d’aligner la situation des organes centraux des banques mutualistes en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna sur celle des organes centraux des banques mutualistes dans les autres territoires français.

3.   Adaptation de l’identification des titulaires de comptes bancaires et des modalités d’intervention de l’ACPR et de l’AMF en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna

Le III complète six articles du code monétaire et financier afin de permettre le contrôle par l’ACPR et par l’AMF des dispositions locales permettant l’identification des titulaires de comptes bancaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna sur la base d’un renvoi aux dispositions en vigueur localement ayant le même objet que l’article L 564-2 du code monétaire et financier.

S’agissant de l’ACPR, le 1° prévoit que le 1° du III des articles L. 783-2, L. 784-2 et L. 785-2 est complété par un a bis) précisant que l’application du 7° du II de l’article L. 612-1 dans ces territoires se fera non par référence à l’article L. 564- 2 mais par « référence aux dispositions en vigueur localement ayant le même objet ».

S’agissant de l’AMF, le 2° prévoit que le II des articles L. 783-10, L. 784-10 et L. 785-9 est complété par un 3° précisant que le renvoi à l’article L 564-2, figurant à l’article L. 621-20-6, est remplacé par une « référence aux dispositions en vigueur localement ayant le même objet ».

Ces modifications répondent à l’absence d’application possible en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna de l’article L. 564-2 en raison de la portée fiscale de cet article. Faute de pouvoir effectuer un renvoi direct à l’application de l’article L. 564-2, le projet de loi propose de renvoyer à des dispositions en vigueur localement ayant le même objet ce qui permettrait à l’ACPR et à l’AMF de s’assurer que les institutions financières placées sous leur contrôle en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna procèdent à l’identification des titulaires de comptes bancaires.

Dans son avis, le Conseil d’État n’a pas formulé d’observation sur cet article.

Lors de son audition, l’ACPR a cependant contesté la solution proposée en faisant valoir plusieurs arguments :

        La solution proposée ne serait pas conforme au code monétaire et financier dans la mesure où celui-ci ne donne pas compétence à l’ACPR pour contrôler des dispositions de droit local.

L’article L. 612-1 dispose ainsi que, dans son domaine de compétence, l’ACPR contrôle le respect des dispositions européennes, des dispositions du code monétaire et financier ainsi que des dispositions réglementaires prévues pour son application, du code des assurances, du livre IX du code de la sécurité sociale, du code de la mutualité, du livre III du code de la consommation, des articles 26-4 à 26-8 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, des codes de conduite homologués ainsi que de toute autre disposition législative et réglementaire dont la méconnaissance entraîne celle des dispositions précitées.

        La solution proposée reposerait sur une interprétation erronée de l’article L. 564-2 relatif au dispositif de contrôle interne mis en place par les institutions financières pour veiller à la bonne application des procédures assurant le respect des dispositions d’identification des titulaires de comptes bancaires. Dans sa réponse au questionnaire du rapporteur, l’ACPR fait valoir que « la rédaction proposée actuellement par le projet de loi laisse entendre que les dispositions de l’article 7 relatives au contrôle interne en matière d’échange automatique d’informations à des fins fiscales « relèvent de la matière fiscale et, partant, de la compétence de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et de Wallis-et-Futuna ». Toutefois, il convient de distinguer (i) les obligations en matière d’échange automatique d’informations à des fins fiscales, qui relèvent de la matière fiscale et donc de la compétence des collectivités d’outre-mer. Elles figurent dans le code général des impôts ou le livre des procédures fiscales et relèvent de la compétence de l’administration fiscale et (ii) le contrôle interne de ces obligations qui s’inscrit dans le cadre plus large des obligations prudentielles en matière de contrôle interne applicables aux organismes financiers qui ressortissent à la matière « financière » relevant de la compétence de l’État français. Les dispositions sur le contrôle interne ont d’ailleurs été insérées par le législateur dans le code monétaire et financier et relèvent de la supervision d’autorités financières, et non fiscales (ACPR et AMF) ».

En outre, « en admettant même que les obligations prévues par ces articles, bien qu’ayant pour objet de lutter contre la fraude fiscale et son blanchiment ait une incidence sur le domaine fiscal […], il convient de souligner que l’autonomie des collectivités en matière fiscale ne paraît pas interdire l’exercice par l’État de toutes prérogatives liées à la matière fiscale dans la mesure où elles se rattacheraient à l’exercice d’attributions qu’il conserve sur les territoires. Le Conseil d’État (n° 293542 du 12 janvier 2007) et le Conseil constitutionnel (n° 2007-1 LOM, du 3 mai 2007) ont considéré que le statut de la Polynésie française n’interdisait pas à l’État d’y instituer des taxes destinées à couvrir une partie au moins des coûts exposés par lui dans l’exercice d’attributions qu’il conserve sur ce territoire, en considérant qu’une interprétation contraire aurait méconnu le principe d’égalité devant les charges publiques énoncé par l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Ainsi, même si les articles L. 564-1 et L. 564-2 du CMF [code monétaire et financier] se rattachaient partiellement à la matière fiscale, il nous semble que nous pourrions néanmoins considérer qu’ils participent, en premier lieu et à titre principal, à la mise en œuvre par l’État de ses attributions relatives à la matière financière en luttant contre la fraude fiscale et son blanchiment voire à la lutte contre la circulation illicite de capitaux qui relèvent expressément de la compétence de l’État ».

Interrogée par le rapporteur, l’AMF a indiqué qu’elle partageait l’analyse de l’ACPR et qu’elle contestait également la pertinence des dispositions de l’article 7 lui imposant de contrôler le respect de l’article L. 564-2 sur la base de dispositions de droit local.

Interrogée par le rapporteur sur ce sujet, la direction générale du Trésor a fait valoir que son analyse, partagée par la direction générale des outre-mer, n’avait pas été remise en cause par le Conseil d’État. Cette direction souligne que les dispositions relatives aux obligations à la charge des institutions financières prévues par les articles L. 564-1 et L. 564-2 du code monétaire et financier visent à faire respecter des obligations relatives à l’identification des titulaires de comptes, dans le cadre de dispositions prévues par le code général des impôts et le livre des procédures fiscales, ce qui attesterait de leur nature fiscale.

Le rapporteur prend acte de ces différents arguments mais souligne que le renvoi aux « dispositions en vigueur localement ayant le même objet » que l’article L. 564-2 comporte une fragilité liée à l’absence actuelle de dispositions de ce type dans les droits calédonien, polynésien et wallisien.  Interrogée sur ce point, la direction générale des finances publiques, a confirmé qu’à l’heure actuelle, il n’existe aucune disposition locale équivalente à l’article L. 564-2 dans ces territoires et que seule la Nouvelle-Calédonie a engagé un travail en ce sens. Le risque existe donc que, dans l’hypothèse où elles seraient adoptées en l’état, les dispositions proposées soient privées d’effet.

III.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

Le Sénat a adopté l’article 7 avec modification.

À l’initiative de M. Cyril Pellevat, rapporteur de la commission spéciale, un amendement rédactionnel COM 23 a été adopté en commission. Cet amendement simplifie la rédaction de l’article en regroupant les dispositions relatives aux organes centraux et aux modalités d’intervention de l’ACPR en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, ce qui évite certaines redondances et réduit de 33 à 20 alinéas la longueur de l’article.

La structuration de l’article en un I, un II et un III a également été supprimée et l’article se présente désormais d’un seul tenant.

IV.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION

Après avoir adopté un amendement rédactionnel n° CF 14 (amendement n° CL4) de son rapporteur, la commission des finances a émis un avis favorable à l’adoption avec modification de cet article.

La commission des lois a adopté l’article 7 ainsi modifié.

*

*     *

Article 7 bis
(articles L. 312-5, L. 752-2, L. 753-2 et L. 754-2 du code monétaire et financier)
Correction d’une imprécision dans la transposition de la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014
relative aux systèmes de garantie des dépôts

 

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission sans modification

     Résumé du dispositif et effets principaux

-         L’article 7 bis, introduit dans le texte adopté par le Sénat à l’initiative du Gouvernement, vise à corriger une imprécision dans la transposition de la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux systèmes de garantie des dépôts.

     Dernières modifications législatives intervenues

-         L’article L. 312-5 du code monétaire et financier a été codifié par l’ordonnance n° 2000-1223 du 14 décembre 2000 relative à la partie législative du code monétaire et financier. Sa dernière modification résulte de l’ordonnance n° 2015-1024 du 20 août 2015 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière financière et visait à préciser les conditions d’intervention de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

-         Les articles L. 752-2, L. 753-2 et L. 754-2 du code monétaire et financier ont été codifiés par l’ordonnance n° 2022-230 du 15 février 2022 relative aux titres III à VIII de la partie législative du livre VII du code monétaire et financier. Ces articles n’ont pas été modifiés depuis leur création.

     Modifications apportées par le Sénat

-         Le Sénat a adopté cet article sans modification.

 

I.   L’état du droit

A.   droit européen

Proposée par la Commission européenne le 12 juillet 2010, ayant fait l’objet d’un avis du Contrôleur européen de la protection des données du 9 septembre 2010, d’un avis de la Banque centrale européenne du 16 février 2011, la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux systèmes de garantie des dépôts (dite DGSD2, Deposit Guarantee Schemes Directive) a été adoptée au niveau européen à la suite d’une procédure législative ordinaire.

Ce texte, qui comporte 23 articles, « définit les règles et procédures relatives à l’établissement et au fonctionnement des systèmes de garantie des dépôts » ([87]). Comme le rappelle la Banque centrale européenne, « un dépôt est de l’argent confié par un client à sa banque, sur un compte d’épargne, par exemple. Le modèle d’activité de la plupart des banques consiste à prêter à d’autres clients une large part de cet argent et à réserver le reste pour les retraits. Pour garantir qu’une bonne partie de ces dépôts est en sécurité même en cas de défaillance bancaire, les banques alimentent un fonds d’assurance appelé « système de garantie des dépôts » » ([88]).

L’article 3 de la directive impose aux autorités administratives d’effectuer dans un délai contraint le constat de l’impossibilité pour un établissement de restituer un dépôt et de l’absence de perspective rapprochée qu’il puisse le faire. Ce constat doit être établi « dès que possible, et en tout état de cause au plus tard cinq jours ouvrables après avoir établi pour la première fois qu’un établissement de crédit n’a pas restitué les dépôts échus et exigibles ».

B.   droit interne 

La directive 2014/49/UE a été transposée par l’ordonnance n° 2015-1024 du 20 août 2015 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière financière qui a notamment modifié l’article L. 312-5 du code monétaire et financier relatif aux conditions d’engagement du mécanisme de garantie des dépôts.

Cet article dispose en son premier alinéa que « le mécanisme de garantie des dépôts est mis en œuvre sur demande de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dès que celle-ci constate qu’un établissement de crédit n’est plus en mesure de restituer, immédiatement ou à terme rapproché, les fonds mentionnés au I de l’article L. 312-4-1 », c’est-à-dire :

– les fonds laissés en compte auprès d’un établissement de crédit et libellés en euros ou dans la devise d’un autre État ([89]) ;

– les sommes correspondant à des opérations de paiement en cours ou à des opérations à caractère transitoire, effectuées au bénéfice d’une personne identifiée et provenant d’opérations bancaires normales.

La transposition de la directive 2014/49/UE ainsi assurée à l’article L 312-5 est cependant imparfaite. Ainsi, alors que le troisième alinéa de l’article 3 de la directive dispose que « L’autorité administrative concernée fait le constat visé à l’article 2, paragraphe 1, point 8) a), dès que possible, et en tout état de cause au plus tard cinq jours ouvrables après avoir établi pour la première fois qu’un établissement de crédit n’a pas restitué les dépôts échus et exigibles », l’article L. 312-5 prévoit que « le mécanisme de garantie des dépôts est mis en œuvre sur demande de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dès que celle-ci constate qu’un établissement de crédit n’est plus en mesure de restituer, immédiatement ou à terme rapproché, les fonds mentionnés au I de l’article L. 312-4-1 ».

En ne mentionnant pas explicitement le délai maximal de « cinq jours ouvrables », l’article L 312-5 est moins précis que l’article 3 de la directive.

Cette situation a suscité des observations de la Commission européenne. Selon l’exposé sommaire de l’amendement déposé au Sénat, la Commission a ainsi estimé que « la transposition de la directive 2014/49/UE relative aux systèmes de garantie des dépôts n’est pas satisfaisante au motif que la loi ne prévoit pas le délai maximal de 5 jours […] pour activer le mécanisme de garantie des dépôts ».

La garantie des dépôts couvre à hauteur de 100 000 euros par personne et par établissement bancaire, les sommes laissées en compte ou sur livret par les clients d’un établissement défaillant

Institué par la loi n ° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l’épargne et à la sécurité financière, le système de garantie des dépôts est activé par le Fonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR) sur demande de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et permet de protéger les clients en cas de défaillance de leur établissement bancaire.

En application d’un arrêté du 27 octobre 2015, la garantie des dépôts permet, en cas de défaillance d’une banque, d’indemniser ses clients jusqu’à 100 000 euros par déposant et par établissement. Ce plafond de garantie s’applique quel que soit le nombre de comptes de dépôt ouverts auprès du même établissement. Si un couple dispose d’un compte joint, chaque conjoint est considéré comme un déposant distinct (ce qui permet de prétendre à une garantie de 200 000 euros pour le compte joint). Le montant de la garantie peut atteindre 500 000 euros en cas de « dépôt exceptionnel temporaire » (consécutif par exemple à une succession, à une donation, à la vente d’un bien immobilier, au versement d’une indemnité suite à un dommage ou une rupture du contrat de travail). En cas de pluralité d’événements (vente d’un bien immobilier et donation, par exemple), le plafond rehaussé s’applique à chacune des sommes concernées.

Cette garantie couvre tous les types de dépôts : comptes courants, comptes à terme, livrets bancaires, livrets Jeunes, épargne logement (PEL et CEL), livret d’épargne populaire bancaire et compte espèces attaché à un compte titres ou à un plan d’épargne en actions. L’épargne placée sur un livret A, un livret de développement durable et solidaire, et un livret d’épargne populaire, est garantie en totalité par l’État, et non par le mécanisme de garantie des dépôts. Les sommes placées sur ces livrets d’épargne ne sont donc pas décomptées du plafond de 100 000 euros. La garantie des dépôts s’applique à tous les établissements bancaires agréés par l’ACPR, qui deviennent alors automatiquement adhérents au FGDR, qu’il s’agisse de banques françaises ou de filiales françaises de banques étrangères.  Depuis sa création, le FGDR est intervenu une fois au titre de la garantie des dépôts, en 1999, en Martinique ([90]).

Source : ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

II.   Le Dispositif PROPOSÉ

L’article 7 bis comprend un 1° et un 2° modifiant quatre articles du code monétaire et financier dans le but, d’une part, de corriger l’imparfaite transposition de l’article 3 de la directive 2014/49/UE et, d’autre part, de procéder à une actualisation des dispositions correspondantes en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

Le 1° modifie l’article L. 312-5 du code monétaire et financier pour répondre à la demande précitée de la Commission européenne. À cet effet, les mots « et au plus tard dans les cinq jours ouvrables après avoir établi pour la première fois que cet établissement de crédit ne les a pas restitués » sont ajoutés à la fin de la première phrase du premier alinéa du I de cet article. Ces compléments sont directement inspirés par le texte de la directive. Le 1° substitue également le terme « lorsque » au terme « dès que ».

Le 2° modifie les articles L. 752-2, L. 753-2 et L. 754-2 du code monétaire et financier qui précisent, dans un tableau, les références des articles de ce même code applicables, en totalité ou en partie, en Nouvelle-Calédonie (article L. 752-2), en Polynésie française (article L. 753-2) et dans les îles Wallis et Futuna (article L. 754-2). Dans sa rédaction actuelle, la treizième ligne de ce tableau indique que les articles L 312-5, L 312-6 et L 312-7 à L 312-8-1 du code monétaire et financier sont applicables dans ces territoires dans leur rédaction résultant de l’ordonnance n° 2015-1024 du 20 août 2015. La modification proposée au 1° de l’article L. 312‑5 nécessite, par coordination, de remplacer cette treizième ligne par deux lignes renvoyant, d’une part, à l’application des articles L. 312-6 et L. 312-7 à L. 312-8-1 dans leur rédaction issue de l’ordonnance précitée et, d’autre part, à l’application de l’article L 312-5 dans sa rédaction issue du projet de loi en cours de discussion.

L’article 7 bis du projet de loi ayant été introduit par voie d’amendement, le Conseil d’État ne s’est pas prononcé sur son contenu.

Le rapporteur partage la volonté du Gouvernement d’assurer une meilleure transposition de la directive 2014/49/UE et approuve l’ajout relatif à l’intervention de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dans le délai précité de cinq jours ouvrables.

III.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

IV.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION

La commission des finances a émis un avis favorable à l’adoption sans modification de cet article.

La commission des lois a adopté l’article 7 bis sans modification.

*

*     *

Article 7 ter (nouveau)
(article L. 312-12 du code monétaire et financier)
Audition du président du directoire du Fonds de garantie des dépôts et de résolution devant les commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat avant sa nomination

 

La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption d’un article additionnel et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Introduit par la commission

     Résumé du dispositif et effets principaux

-         Le présent article, introduit par la commission des finances sur proposition de son rapporteur, prévoit l’audition du directeur du Fonds de garantie des dépôts et de résolution devant les commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat avant sa nomination.

     Dernières modifications législatives intervenues

-         L’article L. 312-12 du code monétaire et financier a été codifié par l’ordonnance n° 2000-1223 du 14 décembre 2000 relative à la partie législative du code monétaire et financier. Sa dernière modification résulte de l’article 26 de la loi n° 2006-387 du 31 mars 2006 relative aux offres publiques d’acquisition qui a précisé la composition du directoire du Fonds de garantie des dépôts et de résolution et renvoyé, en tant que de besoin, à un arrêté du ministre chargé de l’économie le soin de préciser les conditions d’application de cet article.

     Modifications apportées par le Sénat

-         Sans objet.

L’article 7 bis du projet de loi modifie l’article L. 312-5 du code monétaire et financier pour corriger une erreur de transposition de la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux systèmes de garantie des dépôts dont la mise en œuvre repose en France sur l’intervention de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et du Fonds de garantie des dépôts et de résolution. Cet article 7 bis offre l’opportunité de compléter la rédaction de l’article L. 312-12 du code monétaire et financier, qui figure dans la même sous-section que l’article L. 312-5 ([91]), pour associer le Parlement à la nomination du président du directoire du Fonds de garantie des dépôts et de résolution.

I.   L’état du droit 

A.   Le FGDR : missions et ressources financières

Le Fonds de garantie des dépôts et de résolution a été créé par la loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière et est aujourd’hui constitué sous la forme d’une personne morale de droit privé chargée d’assurer une fonction de garantie des dépôts, de garantie des investisseurs, de garantie des cautions et de garantie des services de gestion.

Ces différentes missions relèvent du code monétaire et financier.

La garantie des dépôts, définie aux articles L. 312-4 et suivants du code monétaire et financier, « couvre à hauteur de 100 000 euros par personne et par établissement bancaire, les sommes laissées en compte ou sur livret par les clients d’un établissement défaillant. Elle couvre tous les clients des banques, particuliers mineurs ou majeurs, entrepreneurs, associations, sociétés civiles ou commerciales, à l’exception des établissements financiers. […] La garantie peut être accrue jusqu’à 500 000 euros supplémentaires par évènement pour couvrir différents cas de dépôts exceptionnels opérés dans les trois mois précédant la défaillance (vente d’un bien d’habitation, indemnisation d’un dommage, succession…) » ([92]).

La garantie des titres, définie aux articles L. 322-1 et suivants du code monétaire et financier, « couvre à hauteur de 70 000 euros par personne et par établissement les investisseurs pour tous les titres et instruments financiers qu’ils détiennent au travers de leurs prestataires de services d’investissement (banques, entreprises d’investissement). Comme pour la garantie des dépôts, ceci couvre tous les investisseurs, personnes physiques comme personnes morales, à l’exception des établissements financiers. Les produits couverts comprennent notamment les actions, les obligations, les parts de SICAV ou de FCP, les certificats de dépôt ou les titres de créance négociables, qu’ils soient détenus en direct (comptes-titres) ou au travers d’un PEA. Sont également couverts, à hauteur de 70 000 euros supplémentaires, les espèces associées à ces titres et instruments ».

La garantie des cautions, définie aux articles L. 313-50 et L. 313-51 du code monétaire et financier, « couvre les engagements de caution réglementés délivrés obligatoirement par un établissement bancaire ou financier habilité en faveur de certaines professions réglementées (agent immobilier, agent de voyage, promoteur…) pour garantir la bonne fin des projets qui leur sont confiés par leurs clients ».

La garantie des services de gestion « s’adresse aux clients des sociétés de gestion de portefeuille. Mise en place à l’été 2022, elle couvre les instruments financiers, notamment les parts d’OPCVM, et les espèces associées, selon le cas détenus ou gérés pour le compte de leurs clients par ces sociétés, à hauteur d’un total de 20 000 euros. La garantie des services de gestion est similaire dans son fonctionnement à la garantie des titres ».

Le FGDR est financé par des cotisations obligatoires qui, en 2022, ont représenté, 182 millions d’euros pour la garantie des dépôts, 1,3 million d’euros pour la garantie des titres et 0,6 million d’euros pour la garantie des cautions. Le FGDR dispose également de 6,9 milliards d’euros de ressources propres et peut bénéficier, le cas échéant, d’une ligne de crédit complémentaire de 1,5 milliard d’euros ([93]).

B.   L’absence d’association du parlement à la nomination du président du directoire du FGDR

En application de l’article L. 312-9 du code monétaire et financier, le fonds de garantie des dépôts et de résolution est une personne morale de droit privé gérée par un directoire agissant sous le contrôle d'un conseil de surveillance.

L’article L. 312-10 de ce même code prévoit que « le conseil de surveillance exerce le contrôle permanent de la gestion du fonds de garantie des dépôts et de résolution. Il élabore le règlement intérieur du fonds de garantie et les règles d'emploi de ses fonds […]. Il élit en son sein son président ». L’article L. 312-12 dispose que « le directoire est composé de deux membres au moins nommés par le conseil de surveillance, qui confère à l'un d'eux la qualité de président. […] Son président ne peut exercer ses fonctions qu'après agrément du ministre chargé de l'économie ».

Le président du directoire est désigné pour un mandat de quatre ans. Le président en fonction, M. Thierry Dissaux, a été renouvelé dans ses fonctions en août 2022.

Le Parlement n’est pas associé à la procédure de nomination du président du directoire du FGDR. Si les commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ont la possibilité d’auditionner à tout moment ledit président, aucun rendez-vous automatique n’est prévu au moment de sa nomination.

D’un point de vue juridique, l’absence d’information préalable du Parlement s’explique par le fait que la fonction de président du directoire du FGDR ne relève ni du périmètre de l’article 13 de la Constitution, ni du périmètre d’un autre texte spécifique.

L’article 13 de la Constitution vise trois types de nomination à des emplois publics et assortit certaines de ces nominations d’un avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée ([94]). La fonction de président du FGDR ne relève pas de ce type de nomination.

Cette fonction ne relève également pas des lois ponctuelles qui ont soumis d’autres nominations à un avis public ou à l’organisation d’une audition devant les commissions parlementaires. Cette procédure s’applique par exemple aux nominations au sein de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (article L. 612-5 du code monétaire et financier), de la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations (article L. 518-4 du code monétaire et financier) et du Haut conseil des finances publiques (article 1er (I) de la loi n° 2021-1577 du 6 décembre 2021 portant diverses dispositions relatives au Haut conseil des finances publiques et à l'information du Parlement sur les finances publiques).

II.   Le dispositif PROPOSÉ 

Sur proposition du rapporteur, la commission des finances a adopté l’amendement n° CF 12 soumettant la nomination du président du directoire du FGDR à une audition préalable par les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances, afin de poursuivre l’affirmation d’un nouveau pouvoir de contrôle du Parlement sur les conditions de nomination des dirigeants des personnes morales de droit privé chargées d’une mission d’intérêt général dans les domaines de la banque, de l’assurance ou de la finance.

1.   Instituer une audition du président du directoire du fonds de garantie des dépôts et de résolution devant les commissions chargées des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat

L’article 7 ter comprend un unique alinéa modifiant l’article L. 312-12 du code monétaire et financier dans le but de prévoir l’audition (par les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances) du président du directoire du FGDR avant son agrément par le ministre chargé de l’économie. Cette audition ne serait assortie d’aucun vote.

Le principe ainsi posé respecte la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

Dans sa décision n° 2012-658 DC du 13 décembre 2012 portant sur la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, le Conseil constitutionnel a ainsi censuré, comme contraire au principe de séparation des pouvoirs, le pouvoir de nomination par une autorité administrative ou juridictionnelle au fait de subordonner à une audition par les assemblées parlementaires ([95]). L’article 7 ter concerne une situation différente puisque le directeur général du FGDR est nommé par le conseil de surveillance de cet établissement et non par une autorité administrative ou juridictionnelle. Le ministre chargé de l’économie se contente ainsi d’agréer cette nomination et ne procède pas directement à cette nomination.

Une audition par les commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat est donc tout à fait envisageable. Dans cette hypothèse, la première application de cet article interviendrait en 2026.

2.   Poursuivre l’affirmation d’un nouveau pouvoir de contrôle du Parlement sur la nomination des dirigeants des personnes morales de droit privé chargées d’une mission d’intérêt général dans les domaines de la banque, de l’assurance ou de la finance

L’article 7 ter entend poursuivre l’affirmation d’un nouveau pouvoir de contrôle du Parlement sur la nomination des dirigeants des personnes morales de droit privé chargées d’une mission d’intérêt général dans les domaines de la banque, de l’assurance ou de la finance amorcée par la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture.

À la suite d’un amendement déposé par le rapporteur (et adopté à l’unanimité par la commission des finances de l’Assemblée nationale puis adopté, en séance publique, contre l’avis du Gouvernement), l’article 6 de cette loi a complété l’article L. 421-2 du code des assurances par un alinéa prévoyant que le directeur général du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) est entendu par les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances avant sa désignation.

Comme le FGDR, le FGAO est une personne morale de droit privé chargée d’une mission d’intérêt général dans les domaines de la banque, de l’assurance ou de la finance. Le FGAO supervise ainsi quatre formes d’indemnisation ou de paiement en matière assurantielle ([96]) et a versé 168,8 millions à ce titre en 2021. Comme pour le FGDR, la désignation de l’autorité exécutive (le directeur général) du FGAO ne relève pas directement du ministre chargé de l’économie et des finances mais résulte d’une décision de son conseil d’administration.

L’article 7 ter propose donc de confirmer ce premier pas en étendant au président du directoire du FGDR le principe d’une audition préalable, sans vote, posé pour la nomination du directeur général du FGAO.

La commission des lois a adopté l’amendement portant article additionnel (amendement n° CL5) introduisant ce nouvel article 7 ter.

*

*     *

Article 8
(article L. 712-7 du code monétaire et financier, article L. 511-7 du code de la consommation, article L. 450-13 [nouveau], L. 950-1 et L. 954-9-1 [nouveau] du code de commerce)
Mise en œuvre par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers et reconnaissance de pouvoirs d’enquête à certains fonctionnaires pour la mise en œuvre du règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur

 

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modification de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modification

     Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 8 a un double objet et vise à :

– préciser les compétences de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes au regard du règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers dans l’Union ;

– reconnaître au ministre chargé de l’économie et aux fonctionnaires qu’il a désignés ou habilités des pouvoirs d’enquête pour la mise en œuvre du règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur.

     Dernières modifications législatives intervenues

– L’article L. 712-7 du code monétaire et financier a été institué par l’ordonnance n° 2021-1200 du 15 septembre 2021 relative aux titres Ier et II de la partie législative du livre VII du code monétaire et financier. Sa dernière modification résulte de l’article 5 de l’ordonnance n° 2023-836 du 30 août 2023 portant adaptation du droit français au règlement (UE) 2021/23 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2020 relatif à un cadre pour le redressement et la résolution des contreparties centrales qui a inséré une référence aux dispositions de deux nouveaux règlements ([97]).

– L’article L. 511-7 du code de la consommation a été codifié par l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation. Sa dernière modification résulte de l’article 4 de la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux et a inclus dans le périmètre de compétence des agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraude la recherche et la constatation des infractions ou des manquements aux dispositions de cette loi.

– L’article L. 950-1 du code de commerce a été codifié par l’ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce. Sa dernière modification résulte de l’article 42 de l’ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d’informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprise des sociétés commerciales et a actualisé des références applicables.

     Modifications apportées par le Sénat

        Le Sénat a adopté cet article sans modification.

 

I.   L’état du droit

A.   droit européen

1.   Le règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers dans l’Union

Proposé par la Commission européenne le 17 juillet 2020, ayant fait l’objet d’un avis du Conseil économique et social européen le 3 décembre 2020 et d’un avis de la Banque centrale européenne le 25 janvier 2021, le règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers dans l’Union (dit règlement CBPR, Cross-Border Payments Regulation) a été adopté au niveau européen à la suite d’une procédure législative ordinaire.

Ce règlement, qui comporte 16 articles, « établit des règles concernant les paiements transfrontaliers et la transparence des frais de conversion monétaire au sein de l’Union » ([98]).

S’agissant des paiements transfrontaliers ([99]), ce texte repose sur le principe de « l’égalité des frais » et prévoit que « les frais facturés par un prestataire de services de paiement à un utilisateur de services de paiement pour des paiements transfrontaliers en euros sont identiques à ceux facturés par ce prestataire de services de paiement pour des paiements nationaux correspondants d’un même montant effectués dans la monnaie nationale de l’État membre dans lequel se trouve le prestataire de services de paiement de l’utilisateur de services de paiement ». Cette règle s’applique « aux paiements initiés ou achevés sur papier ou en espèces s’ils sont traités électroniquement au cours de la chaîne d’exécution des paiements, à l’exclusion des chèques, ainsi qu’à tous les frais liés, directement ou indirectement, à une opération de paiement, y compris les frais liés à un contrat » ([100]).

S’agissant de la transparence des frais de conversion, le règlement (UE) 2021/1230 pose le principe que « les frais pour les paiements transfrontaliers en euros ou dans la monnaie nationale des États membres participants devraient être les mêmes que pour les paiements correspondants au sein d’un État membre ».

Ce texte institue également différentes règles en matière de communication d’informations aux clients. Ainsi :

– les prestataires de services de paiement devront fournir sans frais aux clients effectuant des transactions par carte, le total des frais de conversion des devises sous la forme d’une marge de pourcentage sur les derniers taux de change de référence de l’euro de la Banque centrale européenne ;

– les prestataires de services de paiement devront fournir sans frais aux clients effectuant des virements en ligne des informations avant la transaction sur le montant total du transfert ;

– les entreprises fournissant des services de conversion de devises à un distributeur automatique de billets ou à un point de vente devront fournir aux clients des informations avant une transaction contenant le montant total des frais de conversion de devises sous forme de marge de pourcentage et le montant concerné dans les deux monnaies du payeur et du bénéficiaire et la possibilité de payer dans l’une ou l’autre.

Le règlement (UE) 2021/1230 abroge le règlement (CE) n° 924/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 concernant les paiements transfrontaliers dans la Communauté.

2.   Le règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur

Proposé par la Commission européenne le 5 mai 2021, ayant fait l’objet d’un avis du Conseil économique et social européen le 20 octobre 2021, le règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur a été adopté au niveau européen à la suite d’une procédure législative ordinaire.

Ce règlement, qui comporte 54 articles, entend « contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur en établissant un cadre harmonisé afin de lutter contre les distorsions causées, directement ou indirectement, par les subventions étrangères ». À cet effet, il « établit les règles et les procédures applicables aux enquêtes sur les subventions étrangères qui faussent le marché intérieur et celles visant à remédier à ces distorsions. Ces distorsions peuvent toucher toutes les activités économiques, notamment en cas de concentrations et de procédures de passation de marchés publics ou de concessions » ([101]).

En matière de concentration (c’est-à-dire de fusion et acquisition), une obligation de notification à la Commission européenne est instituée pour toute opération où au moins une des entreprises parties à la fusion produit un chiffre d’affaires total d’au moins 50 millions d’euros au cours des trois années précédant la conclusion de l’accord, l’annonce de l’offre publique d’achat ou d’échange, ou l’acquisition d’une participation de contrôle ([102]).

En matière de passation de marchés publics ou de concession, une obligation de notification à la Commission européenne est instituée pour tout opérateur ayant reçu une subvention étrangère d’au moins 4 millions d’euros et candidat à un marché ou une concession d’une valeur d’au moins 250 millions d’euros ([103]).

Ces obligations de notification ne constituent pas une première puisque le règlement (UE) 2019/452 du Parlement européen et du Conseil du 19 mars 2019 établissant un cadre pour le filtrage des investissements directs étrangers dans l’Union prévoit une procédure comparable.

Le règlement (UE) 2022/2560 s’applique « aux subventions étrangères octroyées pendant les cinq années précédant le 12 juillet 2023, lorsque ces subventions étrangères faussent le marché intérieur après le 12 juillet 2023 » ([104]).

Ce texte reconnaît un large ensemble de pouvoirs à la Commission : contrôle des notifications, prononcé d’amendes et d’astreintes, engagement d’enquêtes dans et en dehors de l’Union, suspension, autorisation sous conditions ou interdiction d’une opération de concentration ou d’attribution d’un marché ou d’une concession.

L’article 14 de ce règlement dispose que « pour accomplir les tâches qui lui sont assignées par le présent règlement, la Commission peut procéder aux inspections nécessaires auprès des entreprises et associations d’entreprises ».

Le paragraphe 5 de ce même article prévoit que, dans certaines circonstances, les agents de l’État membre « prêtent activement assistance aux agents et aux autres personnes les accompagnant mandatés par la Commission ». Ainsi, en application du paragraphe 6, « lorsque les agents ou les autres personnes les accompagnant mandatés par la Commission constatent qu’une entreprise ou une association d’entreprises s’oppose à une inspection au sens du présent article, l’État membre sur le territoire duquel l’inspection a lieu leur prête l’assistance nécessaire, en requérant au besoin la force publique ou une autorité disposant d’un pouvoir de contrainte équivalent, pour leur permettre d’exécuter leur mission d’inspection. Si, en vertu du droit national, l’assistance prévue au présent paragraphe requiert l’autorisation d’une autorité judiciaire, cette autorisation est sollicitée. Cette autorisation peut également être sollicitée à titre préventif ».

En complément, le paragraphe 7 prévoit qu’« à la demande de la Commission, un État membre exécute sur son territoire toute inspection ou autre mesure d’enquête en application de son droit national afin d’établir l’existence éventuelle d’une subvention étrangère faussant le marché intérieur ».

L’application du règlement (UE) 2022/2560 est susceptible de concerner un grand nombre de domaines dont le sport.

Le règlement (UE) 2022/2560 au centre d’une controverse entre le Paris Saint-Germain et la Liga

Le 12 août 2023, la Liga, l’association sportive organisant le championnat professionnel de football espagnol, a déposé plainte contre le Paris Saint-Germain auprès de la Commission européenne sur le fondement du règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur ([105]).

La Liga considère que le soutien apporté par le Qatar au Paris Saint-Germain constituerait des subventions étrangères faussant le marché intérieur et sollicite sur ce fondement l’intervention de la Commission européenne ([106]).

À la connaissance du rapporteur, aucune enquête n’a pour l’heure été ouverte par la Commission européenne à la suite de cette plainte. Toutefois, dans l’hypothèse où la Commission européenne ouvrirait une enquête contre le Paris Saint-Germain, l’appui des enquêteurs français pourrait être sollicité sur le fondement du règlement (UE) 2022/2560.

Le rapporteur souligne cependant l’ambivalence de la Liga qui, le 17 août 2023, cinq jours après avoir déposé plainte contre le Paris Saint-Germain, a conclu un accord de partenariat mondial ([107]) avec Visit Saudi, l’office du tourisme d’Arabie Saoudite. Ce partenariat confirme les relations étroites entretenues par le football espagnol avec l’Arabie Saoudite puisqu’en 2020, en 2022, en 2023 et en 2024, les demi-finales et la finale de la Supercoupe d'Espagne ont été jouées dans ce pays en application d’un accord conclu jusqu’en 2029 entre la Real Federación Española de Fútbol et l’Arabie Saoudite.

Si la Liga dénonce le soutien apporté par le Qatar au Paris Saint-Germain, les autorités du football espagnol ne voient en revanche pas d’objection à bénéficier du soutien répété de l’Arabie Saoudite.

B.   droit interne

Bien que d’application directe, les règlements (UE) 2021/1230 et (UE) 2022/2560 nécessitent d’adapter de manière limitée le droit interne.

1.   La mise en œuvre du règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 nécessite une adaptation du code de la consommation et du code monétaire et financier

La mise en œuvre du règlement (UE) 2021/1230 nécessite une adaptation du code de la consommation et du code monétaire et financier afin, d’une part, de compléter le périmètre d’intervention des agents de la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et, d’autre part, de permettre l’application de ce texte en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les îles Wallis-et-Futuna.

Le périmètre dans lequel les agents de la DGCCRF sont habilités à rechercher et à constater des infractions ou des manquements est déterminé par l’article L 511-7 du code de la consommation qui vise aujourd’hui 32 textes. Cette liste rassemble 26 textes nationaux (relevant du code de l'action sociale et des familles, du code pénal, du code monétaire et financier, du code des transports, du code de la sécurité sociale, etc.) et six textes européens dont, au 3°, « le 1 et 2 de l'article 3 du règlement (CE) n° 924/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 modifié, concernant les paiements transfrontaliers dans la Communauté ». Ce dernier texte ayant été abrogé par le règlement (UE) 2021/1230, il est nécessaire d’actualiser cette référence.

Comme cela a été indiqué dans le commentaire de l’article 7, l’application des dispositions communautaires² en matière bancaire et financière en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les îles Wallis-et-Futuna, exige, en application des statuts propres à ces collectivités, des textes spécifiques.

L’article L. 712-7 (I) du code monétaire et financier énumère actuellement douze règlements européens pour lesquels le ministre chargé de l'économie arrête leurs conditions d’application « de telle sorte que ces dispositions y aient des effets identiques à ceux produits en France métropolitaine ». Cette liste ne comprend actuellement aucune référence au règlement (UE) 2021/1230 et mérite d’être complétée pour permettre l’application de ce texte dans ces territoires.

2.   La mise en œuvre du règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur nécessite une adaptation du code de commerce

La mise en œuvre du règlement (UE) 2022/2560 nécessite une adaptation du code de commerce afin d’autoriser certains agents de l’État à diligenter des enquêtes relatives à des subventions étrangères faussant le marché intérieur.

Le livre IV du titre V du code de commerce est relatif aux pouvoirs de différents personnels susceptibles de procéder à toute enquête nécessaire à l’application des dispositions de certaines parties de ce code. L’article L. 450-1 vise ainsi les agents des services d'instruction de l'Autorité de la concurrence habilités à cet effet, les fonctionnaires habilités par le ministre chargé de l'économie et les fonctionnaires de catégorie A habilités par le ministre de la justice dans le périmètre du code de commerce. Les pouvoirs d’enquête des intéressés font l’objet des articles L. 450-2 à L. 450-10.

En l’état actuel du droit, et faute de mention spécifique dans le code de commerce, ces pouvoirs ne peuvent pas être mis en œuvre pour assurer la bonne application du règlement (UE) 2022/2560.

II.   Le dispositif proposé

L’article 8 dans sa rédaction déposée sur le bureau du Sénat comprend treize alinéas répartis entre trois paragraphes.

Ces dispositions modifient trois articles du code monétaire et financier, du code de la consommation et du code de commerce et introduisent deux nouveaux articles au sein du code de commerce.

Le I modifie l’article L. 712-7 du code monétaire et financier qui énumère une série de douze règlements européens pour lesquels le ministre chargé de l’économie arrête les conditions d’application à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna. Le I ajoute un 13° visant le règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers dans l’Union pour permettre l’application de ce texte dans ces territoires.

Le II étend l’exercice des pouvoirs des agents de la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à la recherche et la constatation des infractions ou des manquements aux dispositions du règlement (UE) 2021/1230 concernant les paiements transfrontaliers dans l’Union. Dans ce cadre, il modifie le 3° de l’article L. 511-7 du code de la consommation pour remplacer la référence actuelle aux 1 et 2 de l’article 3 du règlement (CE) n° 924/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 (aujourd’hui abrogé) par une référence aux paragraphes 1 et 3 de l’article 3 du règlement (UE) 2021/1230 ; ces paragraphes étant relatifs aux frais facturés par un prestataire de services de paiement à un utilisateur de services de paiement pour des paiements transfrontaliers en euros et à l’identification des paiements nationaux correspondants.

Le III est relatif aux modalités de mise en œuvre du règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur.

Le 1° du III introduit un nouvel article L. 450-13 au sein du titre V du livre IV du code de commerce pour conférer au ministre chargé de l’économie et aux fonctionnaires désignés ou habilités à cet effet des pouvoirs d’enquête pour assurer la « mise en œuvre des paragraphes 5, 6 et 7 de l’article 14 du règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur ». Cet ajout doit permettre aux autorités françaises de répondre favorablement à l’obligation d’assistance aux enquêtes diligentées par la Commission européenne. Les pouvoirs d’enquête reconnus aux fonctionnaires concernés sont ceux du livre IV du code de commerce déterminés par l’article L. 450-3 de ce code et sont relativement comparables à ceux reconnus par l’article 14, paragraphe 2, du règlement (UE) 2022/2560 aux agents de la Commission européenne.

Les pouvoirs d’enquête reconnus par l’article L. 450-3 du code de commerce

Les agents mentionnés à l'article L. 450-1 du code de commerce peuvent opérer sur la voie publique, pénétrer entre 8 heures et 20 heures dans tous lieux utilisés à des fins professionnelles et dans les lieux d'exécution d’une prestation de services, ainsi qu’accéder à tous moyens de transport à usage professionnel.

Ils peuvent également pénétrer en dehors de ces heures dans ces mêmes lieux lorsque ceux-ci sont ouverts au public ou lorsqu’à l'intérieur de ceux-ci sont en cours des activités de production, de fabrication, de transformation, de conditionnement, de transport ou de commercialisation.

Lorsque ces lieux sont également à usage d’habitation, les contrôles ne peuvent être effectués qu’entre 8 heures et 20 heures et avec l’autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés ces lieux, si l’occupant s’y oppose.

Les agents peuvent exiger la communication et obtenir ou prendre copie, par tout moyen et sur tout support, des livres, factures et autres documents professionnels de toute nature, et, le cas échéant, de leurs moyens de déchiffrement, susceptibles d’être détenus ou d’être accessibles ou disponibles, entre quelques mains qu’ils se trouvent, propres à faciliter l’accomplissement de leur mission. Ils peuvent exiger la mise à leur disposition des moyens indispensables pour effectuer leurs vérifications. Ils peuvent également recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement, document ou toute justification nécessaire au contrôle.

Pour le contrôle des opérations faisant appel à l’informatique, ils ont accès aux logiciels et aux données stockées ainsi qu’à la restitution en clair des informations propres à faciliter l’accomplissement de leurs missions. Ils peuvent demander la transcription par tout traitement approprié des documents directement utilisables pour les besoins du contrôle.

Les 2° et 3° visent l’application du nouvel article L. 450-13 dans les îles Wallis et Futuna qui constituent la seule collectivité d’outre-mer à statut particulier pour laquelle l’application du droit commercial exige une disposition spécifique. Ainsi, les dispositions de ce type s’appliquent de plein droit à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon et ne s’appliquent pas en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française où cette compétence relève des autorités locales et non de l’État ([108])

L’application du droit commercial dans les îles Wallis et Futuna repose sur l’article L. 950-1 du code de commerce qui recense les dispositions du code de commerce applicables dans ce territoire. Le 4° du I de cet article comprend un tableau comportant aujourd’hui 95 lignes. Le 2° du III modifie ce tableau pour ajouter une nouvelle ligne visant expressément le nouvel article L. 450-13 dans sa rédaction issue de la loi en discussion.

Le 3° du III introduit un nouvel article L. 954-9-1 au sein de ce même code afin de préciser les conditions d’application du règlement (UE) 2022/2560 dans les îles Wallis et Futuna.

Le Conseil d’État a formulé une observation sur la rédaction de l’article 8 qui a été prise en compte dans la rédaction du projet de loi déposé au Sénat ([109]).

Si le rapporteur n’a pas d’observation particulière sur le I et le II, il souligne en revanche plusieurs points sur le III de l’article 8.

Sur ce sujet, le rapporteur fait en premier lieu part de sa satisfaction sur l’adoption du règlement (UE) 2022/2560 qui institue opportunément un contrôle sur les subventions étrangères susceptibles de fausser le marché intérieur et complète le contrôle exercé de longue date par la Commission européenne sur les aides accordées aux entreprises par les États membres.

En deuxième lieu, il souligne le rôle moteur de la France qui, en 2017, a été à l’initiative de la constitution du groupe de travail à l’origine de l’adoption, le 17 juin 2020, par la Commission européenne d’un livre blanc sur les subventions étrangères ([110]) . Les négociations relatives à l’établissement du règlement (UE) 2022/2560 ont également été conclues durant la présidence française de l’Union européenne.

Par ailleurs, le rapporteur note que la Commission européenne s’est rapidement saisie de ce règlement et a ouvert en octobre 2023 une enquête sur les importations de véhicules électriques à batterie (VEB) en provenance de Chine afin de déterminer « si les chaînes de valeur des VEB en Chine bénéficient de subventions illégales et si ces subventions causent ou menacent de causer un préjudice économique aux producteurs de VEB de l'Union européenne » ([111]). Une réflexion serait également en cours au sujet de l’engagement d’une enquête sur les subventions accordées aux fabricants chinois de turbines pour éoliennes. Une enquête approfondie a également été ouverte, pour la première fois, le 16 février 2024 à la suite d’une une notification soumise à la Commission par CRRC Qingdao Sifang Locomotive Co., Ltd., une filiale de CRRC Corporation, un fabricant public chinois de trains dans le cadre d'une procédure de passation de marché public d’une valeur de 610 millions d’euros lancée par le ministère bulgare des transports et des communications concernant la fourniture de plusieurs trains électriques « poussoirs » ainsi que les services connexes de maintenance et de formation du personnel ([112]). La décision de la Commission sur les suites de cette enquête approfondie doit être connue le 2 juillet 2024 au plus tard.

En outre, le rapporteur observe que l’appui apporté à la Commission européenne pour conduire des enquêtes ne constituerait pas une innovation puisque, comme l’a rappelé la DGCCRF, « certains services de l’Etat interviennent déjà en appui de la Commission européenne pour conduire des enquêtes. C’est le cas de l’Autorité de la concurrence par exemple, qui intervient en soutien de la Commission européenne en matière de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles » ([113])

Le rapporteur souligne enfin que la fréquence d’application du III devrait être relativement limitée. Ainsi, selon l’étude d’impact, le « nombre de cas annuels pour lesquels la Commission européenne sollicitera l’assistance des autorités françaises devrait être extrêmement faible. La Commission devrait examiner environ une soixantaine de cas par an, dans toute l’Union européenne et tout instrument confondu. En conséquence, les cas qui concerneront des entreprises établies sur le territoire français devraient se limiter à une dizaine, étant précisé que la Commission ne devrait solliciter l’assistance de la France que pour une proportion minime d’entre eux, lorsque des circonstances particulières l’exigeront » ([114]).

III.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

IV.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION

Après avoir adopté un amendement rédactionnel n° CF 15 (amendement n° CL6) de son rapporteur, la commission des finances a émis un avis favorable à l’adoption avec modification de cet article.

La commission des lois a adopté l’article 8 ainsi modifié.

*

*     *

Chapitre IV
Dispositions relatives à l’assistance internationale au recouvrement

Article 9
(article L. 283 D du livre des procédures fiscales, article 349 sexies du code des douanes et articles L. 612-2 et L. 612-5 du code rural et de la pêche maritime)
Assistance internationale au recouvrement des créances fiscales et d’autres créances publiques au sein de l’Union européenne

 

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des finances sur cet article. La commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

     Résumé du dispositif et effets principaux

- L’article 9 vise à modifier le livre des procédures fiscales, le code des douanes et le code rural et de la pêche maritime pour assurer leur pleine conformité avec les dispositions de l’article 23 de la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 relatives à l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures. Cette mise en conformité du droit interne avec la directive 2010/24/UE résulte des observations adressées par la Commission européenne à la France en 2022.

     Dernières modifications législatives intervenues

- Les articles L. 283 D du livre des procédures fiscales, 349 sexies du code des douanes, L. 612-2 et L. 612-5 du code rural et de la pêche maritime ont été institués par l’article 59 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011. La dernière modification des articles L. 283 D du livre des procédures fiscales, 349 sexies du code des douanes et L. 612-5 du code rural et de la pêche maritime résulte de l’article 4 de la loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires qui a remplacé la référence au secret commercial ou industriel par une référence au secret des affaires. L’article L. 612-2 du code rural et de la pêche maritime n’a pas été modifié depuis sa création.

     Modifications apportées par le Sénat

-         Le Sénat a simplifié la rédaction de trois alinéas de l’article 9.

 

 

I.   L’état du droit

A.   droit européen

Proposée par la Commission européenne le 2 février 2009, ayant fait l’objet d’un avis du Conseil économique et social européen le 16 juillet 2009, d’un avis du Parlement européen du 10 février 2010, la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures a été adoptée au niveau européen à la suite d’une procédure législative spéciale.

Ce texte « établit les règles que les États membres doivent respecter en ce qui concerne la fourniture, dans un État membre, d’une assistance au recouvrement pour toute créance visée à l’article 2 née dans un autre État membre » ; c’est-à-dire aux créances afférentes :

« a) à l’ensemble des taxes, impôts et droits quels qu’ils soient, perçus par un État membre ou pour le compte de celui-ci ou par ses subdivisions territoriales ou administratives ou pour le compte de celles-ci, y compris les autorités locales, ou pour le compte de l’Union ;

« b) aux restitutions, aux interventions et aux autres mesures faisant partie du système de financement intégral ou partiel du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), y compris les montants à percevoir dans le cadre de ces actions ;

« c) aux cotisations et autres droits prévus dans le cadre de l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre » ([115]).

Cette directive, qui comporte 31 articles, a été transposée par l’article 59 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011, par le décret n° 2012-417 du 28 mars 2012 relatif à l’assistance internationale au recouvrement de certaines créances publiques et par le décret n° 2012-93 du 25 janvier 2012 relatif aux modalités de mise en œuvre des articles L. 612-1 à L. 612- 6 et L. 621-13 et L. 621-14 du code rural et de la pêche maritime.

L’article 23 de la directive porte sur la divulgation des informations et des documents communiqués ou reçus au titre de l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures.

Cet article 23 comprend six paragraphes posant les principes suivants :

– les informations communiquées en application de la directive sont couvertes par le secret et peuvent être utilisées aux fins de la mise en œuvre de mesures exécutoires ou conservatoires en ce qui concerne les créances couvertes par la directive (paragraphe 1) ;

– les personnes accréditées pour l’entretien et le développement de la plate-forme commune aux transmissions par voie électronique entre autorités compétentes dans les domaines douanier et fiscal (le réseau CCN) disposent d’un accès limité à cette plate-forme (paragraphe 2) ;

 l’État membre qui fournit les informations en autorise l’utilisation dans l’État membre qui les reçoit à des fins autres que celles relatives au recouvrement des créances couvertes par la directive lorsque la législation de l’État membre fournissant les informations en permet l’utilisation à des fins similaires (paragraphe 3) ;

– l’État membre recevant des informations d’un premier État peut les communiquer à un autre État membre tiers, sous réserve d’informer l’État membre à l’origine des informations et de lui laisser un délai de dix jours ouvrables pour s’opposer éventuellement à ce partage d’éléments (paragraphes 4 et 5) ;

– les informations communiquées au titre de la présente directive peuvent être invoquées ou utilisées comme preuve par l’ensemble des autorités de l’État membre qui reçoit les informations sur la même base que les informations similaires obtenues dans cet État (paragraphe 6).

B.   droit interne

En 2011, l’article 23 de la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 a fait l’objet d’une transposition partielle à l’article L. 283 D du livre des procédures fiscales, à l’article 349 sexies du code des douanes et à l’article L. 612-5 du code rural et de la pêche maritime.

Si certaines dispositions de la directive ont été transposées, d’autres ne l’ont pas été.

Ainsi, conformément à la directive :

– Les articles  L. 283 D du livre des procédures fiscales, 349 sexies du code des douanes et L. 612-5 du code rural et de la pêche maritime posent, en des termes identiques, le principe de la communication entre les administrations financières habilitées des États membres de « toute information vraisemblablement pertinente pour le recouvrement » des créances couvertes par la directive « à l’exception de celle qui ne pourrait être obtenue pour le recouvrement de leurs propres créances de même nature sur la base de la législation en vigueur dans cet État » et sous réserve de ne pas révéler « un secret des affaires ou un secret professionnel ou [une information] dont la communication serait de nature à porter atteinte à la sécurité ou à l’ordre publics » ;

– Les articles précités indiquent également que les informations échangées (dans le but de permettre par exemple l’identification d’un redevable ou de son codébiteur ou l’identification de leurs actifs bancaires) peuvent être invoquées ou utilisées comme preuve par les administrations et les organismes compétents.

En revanche, ces articles ne prévoient pas les possibilités ouvertes aux paragraphes 3, 4 et 5 de la directive portant sur :

 la possibilité d’utiliser les informations reçues à des fins autres que celles relatives au recouvrement des créances couvertes par la directive (paragraphe 3) ;

– la communication à un État tiers des informations reçues à des fins autres que celles relatives au recouvrement des créances couvertes par la directive (paragraphes 4 et 5).

L’article L. 283 D (III) du livre des procédures fiscales dispose par exemple que les informations échangées ne peuvent être « transmises qu'aux fins de mise en œuvre de mesures de recouvrement ou conservatoires ». Des dispositions comparables figurent aux articles 349 sexies du code des douanes et L. 612-5 du code rural et de la pêche maritime.

Interrogée par le rapporteur pour comprendre le caractère partiel de la transposition effectuée en 2011, la DGFIP a indiqué que celle-ci pouvait s’expliquer par une lecture antérieure restrictive du secret fiscal.

La France et l’assistance au recouvrement des créances fiscales au sein de l’Union européenne en quelques chiffres

Le rapporteur a souhaité connaître le nombre de demandes d’assistance reçues (a) et émises (b) par la France en 2022 ainsi que les pays de l’Union européenne (UE) sollicitant la France ou sollicités par la France (c) au titre du recouvrement des créances fiscales et d'autres créances publiques au sein de l'UE. En réponse, les éléments suivants lui ont été communiqués :

a)      Nombre de demandes d’assistance reçues par la France

Concernant les créances relevant de la direction générale des finances publiques (DGFiP), en 2022, la France a reçu :

 1 307 demandes de renseignement ;

 37 demandes de notification d’actes ;

 1 574 demandes de recouvrement pour un montant total de 84 millions d’euros ;

 15,2 millions d’euros ont été recouvrés pour le compte des autorités étrangères.

Les services ne disposent pas, à ce jour, de statistiques sur le nombre de demandes non satisfaites.

Concernant les créances relevant de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI), les modalités de suivi des demandes d’assistance mutuelle au recouvrement forcé ne permettent pas d’apporter une volumétrie fine du nombre de demandes reçues. En tout état de cause, la très grande majorité des demandes reçues a été traitée, pour un total de 228 demandes prises en charge.

Concernant les créances relevant des organismes payeurs des aides communautaires au titre de la politique agricole commune, aucune demande d’assistance n’a été reçue en 2022.

b)      Nombre de demandes d’assistance émises par la France

Concernant les créances relevant de la DGFiP, en 2022, la France a transmis :

 1 063 demandes de renseignement ;

 280 demandes de notification d’actes ;

 3 539 demandes de recouvrement pour un montant de 725 millions d’euros ;

 40,2 millions d’euros ont été recouvrés pour le réseau DGFiP.

Concernant les créances relevant de la DGDDI, 25 demandes d’assistance ont été transmises et satisfaites en totalité.

Concernant les créances relevant des organismes payeurs des aides communautaires au titre de la politique agricole commune, deux demandes d’assistance ont été émises et satisfaites en 2022.

c)      Pays de l’UE sollicitant la France ou sollicités par la France au titre du recouvrement

S’agissant des trois pays sollicitant le plus la France :

• Concernant la DGFiP : il s’agit de l’Allemagne (492 dossiers), de la Belgique (371 dossiers) et du Luxembourg (246 dossiers) ;

• Concernant la DGDDI : il s’agit de l’Allemagne, de la Belgique et du Portugal.

S’agissant des trois pays les plus sollicités par la France :

• Concernant la DGFiP : il s’agit de l’Allemagne (685 dossiers), du Royaume-Uni (593 dossiers) et du Luxembourg (446 dossiers).

• Concernant la DGDDI : il s’agit de l’Allemagne, du Royaume-Uni et de la Belgique.

Source : DGFiP et DGDDI.

II.   Le Dispositif PROPOSÉ

L’article 9 du projet de loi déposé sur le bureau du Sénat comprend quarante et un alinéas répartis entre trois paragraphes.

Ces dispositions modifient quatre articles du livre des procédures fiscales (un article), du code des douanes (un article) et du code rural et de la pêche maritime (deux articles).

Le I, le II et le III modifient ou complètent les articles des codes précités pour assurer leur mise en conformité complète avec l’article 23 de la directive 2010/24/UE et prévoir la possibilité, d’une part, d’utiliser les informations reçues à des fins autres que celles relatives au recouvrement des créances couvertes par la directive et, d’autre part, la possibilité de communiquer à un État tiers des informations reçues à des fins autres que celles relatives au recouvrement des créances.

Le I modifie l’article L. 283 D du livre des procédures fiscales qui constitue un des six articles de ce code dédiés à l’assistance au recouvrement de l’impôt au sein de l’Union européenne figurant au chapitre IV du titre IV de la partie législative du livre des procédures fiscales.

Le 1° complète le I de cet article pour autoriser les administrations des autres États membres à utiliser les éléments transmis par les administrations financières à d’autres fins que celles relatives au recouvrement des créances couvert par la directive « dès lors qu’une telle utilisation est permise par la législation française dans le cadre national ». Les données communiquées concernent « toute information vraisemblablement pertinente pour le recouvrement de créances mentionnées aux 1° à 4° du II de l’article L 283 A » ([116])

Le 2° complète l’article L. 283 D par un I bis prévoyant que « lorsque les informations transmises […] proviennent d’un autre État membre et que ces informations peuvent présenter un intérêt pour un État membre tiers […], les administrations financières demandent à l’administration de l’État membre de provenance l’autorisation préalable de transmettre ces informations à cet État membre tiers ». Seule l’administration de l’État membre de provenance peut accorder cette autorisation dans un délai de dix jours ouvrables à compter de son interrogation. L’absence de réponse dans ce délai vaut accord.

Le 3° procède à des ajustements rédactionnels.

Le 4° prévoit que « Les informations reçues dans le cadre des dispositions des articles L. 283 A à L. 283 F peuvent être utilisées à toute autre fin que celle mentionnée au premier alinéa du I, si une telle utilisation est permise dans l’État membre de provenance initiale des informations conformément à sa législation interne. L’administration bénéficiaire de ces informations est soumise au secret professionnel dans les termes des articles 226-13 et 226-14 du code pénal ».

Les 1°, 2°, 3° et 4° du II procèdent à l’inscription de dispositions comparables au sein de l’article 349 sexies du code des douanes ([117]) . En complément, le 5° du II insère un IV à l’article 349 sexies précité disposant que « les informations échangées dans le cadre des dispositions des articles 349 ter à 349 octies peuvent être invoquées ou utilisées comme preuve par les administrations financières ». Cet ajout n’est pas nécessaire à l’article L. 283 D puisqu’il figure déjà au IV de cet article.

Le III modifie deux articles du code rural et de la pêche maritime.

Ce code est modifié puisque quatre organismes payeurs des aides communautaires au titre de la politique agricole commune ([118]) entrent dans le champ d’application de l’article 9 du projet de loi au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER). Selon le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, les créances concernées « sont celles des titres de recette relatifs à des indus ou des sanctions sur les mesures en gestion : soutiens aux secteurs viticole, fruits et légumes et apiculture ; intervention publique, stockage privé, mesures exceptionnelles pour FranceAgriMer, programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité (POSEI) pour l’ODEADOM, diverses mesures pour l’ASP. Ces créances peuvent également comporter les intérêts et frais liés aux créances principales » ([119]).

Le 1° opère une correction de renvoi à un texte européen figurant à l’article L. 612-2 du code rural et de la pêche maritime relatif aux établissements agréés en qualité d’organismes payeurs au titre de la politique agricole commune et aux conditions d’assistance en matière de recouvrement des créances correspondantes. Dans sa version actuelle, cet article renvoie au règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil du 21 juin 2005 relatif au financement de la politique agricole commune alors que ce texte a été abrogé par l’article 119 du règlement (UE) n ° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune. Cette référence est remplacée par un renvoi au règlement (UE) 2021/2116 du Parlement européen et du Conseil du 2 décembre 2021 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune qui est applicable depuis le 1er janvier 2023.

Le 2° modifie l’article L. 612-5 en vue de procéder, en faveur des organismes payeurs des aides communautaires, à l’inscription dans le code rural et de la pêche maritime des dispositions introduites à l’article L. 283 D du livre des procédures fiscales et à l’article 349 sexies du code des douanes.

L’article 9 a appelé certaines observations du Conseil d’État. Dans son avis le Conseil d’État a relevé que « le projet de loi transpose certaines des dispositions de l’article 23 de la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures, pour assurer la complète mise en conformité du droit interne avec le droit européen. Le Conseil d’État estime qu’il convient d’écarter la disposition qui prévoit, sans autre précision, que les informations ainsi recueillies peuvent être transmises par l’administration qui les reçoit à toute autre administration française, dans la mesure où le régime d’une telle transmission entre administrations nationales n’est pas encadré par la directive et ne déroge pas aux dispositions du droit interne qui s’appliquent en ce domaine » ([120]) . Le Gouvernement a suivi cette recommandation et les dispositions concernées ne figurent pas dans le texte déposé au Sénat.

L’article 9 appelle également plusieurs observations du rapporteur.

En premier lieu, le rapporteur souligne que la mise en conformité du droit interne avec la directive 2011/24/UE est la conséquence des observations adressées par la Commission européenne à la France en juillet 2022 à la suite d’échanges intervenus en mars et mai 2022 dans le cadre du groupe d’experts du recouvrement. Cette mise en conformité du droit interne est, selon l’étude d’impact, « indispensable » pour « éviter toute ouverture d’une procédure d’infraction à l’encontre de la France » ([121]).

En deuxième lieu, le rapporteur souligne que les modifications proposées ne portent que « sur les finalités pouvant justifier la communication de ces données » et ne modifient pas « pas la nature de ces données » ([122]). Les informations susceptibles d’être communiquées sont inchangées et concernent « l’identification du débiteur, la nature et la localisation des biens meubles et immeubles en sa possession, comptes bancaires, biens meubles corporels, incorporels ou immeubles ». Les nouvelles finalités poursuivies sont susceptibles de concerner principalement la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, l’action douanière ou la prévention et le soutien aux entreprises en difficulté. En pratique, le nombre d’occurrences où ces nouvelles finalités seront employées devrait toutefois être limité.

Enfin, le rapporteur souligne le volontarisme de la France en matière de recours à l’assistance au recouvrement des créances fiscales au sein de l’Union européenne. En 2022, la DGFiP a ainsi émis deux fois plus de demandes de recouvrement (3 539) qu’elle n’en a reçues (1 574).

III.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE SÉNAT

Le Sénat a adopté l’article 9 avec modification.

À l’initiative de M. Cyril Pellevat, rapporteur de la commission spéciale, un amendement rédactionnel COM 24 a été adopté en commission et simplifie la rédaction de trois alinéas.

IV.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION

Après avoir adopté trois amendements rédactionnels nos CF 17, CF 18 et CF 19 (amendements n° CL7, CL8 et CL9) de son rapporteur, la commission des finances a émis un avis favorable à l’adoption avec modifications de cet article.

La commission des lois a adopté l’article 9 ainsi modifié.

*

*     *

Titre II
DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE TRANSITION ÉCOLOGIQUE

Chapitre Ier
Dispositions relatives aux batteries, à la collecte
et à la valorisation des déchets

Article 10
Devoir de diligence pour les opérateurs économiques mettant en service
des batteries et les opérateurs économiques sur le marché des batteries

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur cet article. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 10 définit le régime de contrôle et de sanction applicable au devoir de diligence pour les opérateurs économiques mettant en service des batteries et les opérateurs sur le marché des batteries.

I.   Le droit en vigueur

A.   Le droit europÉen

1.   Le règlement (UE) 2023/1542 du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2023 relatif aux batteries et aux déchets de batteries vise à rendre plus transparentes les chaînes d’approvisionnement

L’impératif de transition énergétique devrait conduire à l’électrification croissante des voitures, camionnettes, autobus et camions dans les prochaines années. La demande de batteries devrait plus que décupler d’ici à 2030 ([123]).

À ce titre, dans le cadre du Pacte vert, l’Union européenne a réformé le cadre applicable à l’ensemble des batteries. Le règlement (UE) 2023/1542 du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2023 relatif aux batteries et aux déchets de batteries remplace ainsi l’actuelle directive dite « batteries » de 2006 ([124]).

Alors que la directive de 2006 ne concernait que les « piles et accumulateurs », aujourd’hui considérés comme des batteries portables, le règlement (UE) 2023/1542 s’applique à l’ensemble des batteries : les batteries portables, les batteries de véhicules électriques, les batteries industrielles, les batteries start, ligthting, ignition (SLI), principalement utilisées pour les véhicules et les machines, ainsi que les batteries destinées aux moyens de transport légers comme les vélos électriques, les cyclomoteurs électriques et les trottinettes électriques.

Dans la mesure où les pays de l’Union européenne sont dépendants des États tiers pour l’extraction des métaux utilisés dans la production des batteries, la transparence de la chaîne d’approvisionnement est un enjeu majeur de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises. Les mesures introduites par le règlement visent à limiter les risques environnementaux et sociaux générés par la production de certaines matières premières contenues dans les batteries, comme le cobalt (importé à 86 %), le graphite naturel (importé à 98 %), le lithium (importé à 100 %), le nickel ainsi que des composés chimiques nécessaires à la fabrication des matières actives de batteries.

2.   L’extension du principe de devoir de diligence aux batteries

Le règlement introduit des obligations en matière de devoir de diligence pour les opérateurs économiques qui mettent des batteries sur le marché ou qui mettent en service des batteries, dont le chiffre d’affaires net annuel excède 40 millions d’euros.

Le devoir de diligence, traduction du terme juridique américain de due diligence, repose sur un système de contrôle a posteriori du respect des obligations de transparence et d’information sur l’origine des matières premières utilisées par les entreprises. Concrètement, le devoir de diligence impose aux entreprises d’identifier et évaluer les éventuels impacts négatifs dans la chaîne d’approvisionnement pour mieux les prévenir et les atténuer à l’avenir.

Ce principe a été introduit en droit européen par le règlement (UE) 995/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché, puis étendu aux importateurs de minerais (or, étain, tantale et tungstène) par le règlement (UE) 2017/821 du Parlement européen et du Conseil pour limiter les risques de violation des droits humains, de financement de groupes armés, de corruption ou de blanchiment.

En étendant le devoir de diligence aux batteries, le règlement (UE) 2023/1542 contraint les opérateurs économiques concernés à prendre en compte les risques de l’importation pour l’environnement, le climat et la santé publique ainsi que pour les droits de l’homme, les droits des travailleurs et les relations sociales (sécurité et hygiène au travail, travail des enfants, travail forcé, discrimination et libertés syndicales).

Le règlement établit quatre grandes catégories d’obligations pour les importateurs concernés :

– mise en place d’un système de gestion au sein de l’entreprise : obligation de construire une politique d’entreprise relative à sa chaîne d’approvisionnement en matières premières, communiquée clairement au public et aux fournisseurs, obligation de charger un cadre supérieur de l’entreprise de la supervision du processus, obligation d’établir un mécanisme de traitement de plaintes ou de signalements, et obligation de disposer d’un système de traçabilité ou d’une chaîne de responsabilité permettant d’obtenir certaines informations d’origine, documents à l’appui ;

– gestion des risques : examen des informations fournies et évaluation des risques, adoption, le cas échéant, de mesures en conséquence, pouvant inclure la poursuite des échanges avec le fournisseur en exerçant une pression, suspension temporaire ou cessation de toutes relations ;

– audit réalisé par un tiers indépendant ;

– communication d’informations au public, notamment l’établissement et la diffusion sur internet d’un rapport annuel présentant les politiques et pratiques de l’entreprise en matière de devoir de diligence, les mesures prises pour se conformer à ses obligations ainsi que, le cas échéant, le résumé des audits réalisés.

Le règlement laisse la vérification du respect des obligations de devoir de diligence ainsi que le régime de sanction applicable, à la discrétion des États (article 93 du règlement). Il précise toutefois que la constatation de non-conformité doit conduire l’État à exiger de l’opérateur économique qu’il respecte ses obligations et, en cas de persistance de la non-conformité, à prendre les mesures « appropriées pour restreindre ou interdire la mise à disposition des batteries sur le marché par l’opérateur économique ».

B.   Le droit national

Il n’existe aujourd’hui aucune règle relative aux obligations de diligence en matière de batteries en droit national.

À noter que le devoir de diligence pour certains minerais résultant du règlement (UE) 2017/821 peine à s’appliquer faute d’un manque d’information. L’administration étudie depuis janvier 2023 l’opportunité de créer un service à compétence nationale relatif au commerce et à l’exploitation de certaines ressources naturelles, rattaché à la direction de l’eau et de la biodiversité, qui serait chargé spécifiquement du contrôle de la mise en œuvre du devoir de diligence dans sa globalité.

II.   LE dispositif proposÉ

A.   Le texte initial du projet de loi

Les dispositions du règlement (UE) 2023/1542 relatives au devoir de diligence sont d’application directe dans le droit national, à l’exception des mesures relatives au contrôle et aux sanctions.

Le I de l’article 10 du projet de loi rappelle le champ d’application du devoir de diligence prévu par le règlement (UE) 2023/1542. Il s’applique à tout opérateur économique dont le chiffre d’affaires net annuel dépasse 40 millions d’euros, ce qui inclut à la fois les importateurs et les fabricants de batteries, dont les futures gigafactories françaises ([125]).

Le II permet aux agents chargés de contrôler le respect du devoir de diligence de prendre connaissance de tout document relatif aux obligations qui y sont attachées, sans que leur soit opposé le secret des affaires, et d’effectuer des contrôles sur place. Le II précise également que ces agents sont astreints au secret professionnel et renvoie à un décret le soin de déterminer les catégories d’agents compétents pour assurer ces contrôles.

Le III précise la procédure contradictoire prévue en cas de constat d’un manquement aux obligations résultant du devoir de diligence. Lorsqu’un agent chargé du contrôle constate un manquement, il doit adresser un rapport à l’autorité compétente, dont une copie est remise à l’opérateur économique. Ce dernier peut faire part de ses observations écrites et, sur sa demande, d’observations orales. Il peut également demander que lui soit communiqué tout document ayant contribué à la décision.

Le IV liste les sanctions possibles en cas de violation des obligations. L’autorité compétente peut :

– faire procéder d’office à l’exécution des mesures prescrites, aux frais de l’opérateur économique n’ayant pas respecté ses obligations ;

– prononcer une astreinte administrative pouvant atteindre 1 500 euros par jour ;

– ordonner la restriction ou l’interdiction de la mise à disposition des batteries sur le marché par l’opérateur économique ;

– ordonner le retrait du marché ou le rappel des marchandises mises sur le marché en cas de manquements graves.

Le V introduit une condition d’application du IV spécifique pour Saint‑Martin. Dans ce territoire, la possibilité pour le comptable d’engager la procédure de saisie administrative à tiers détenteur n’est pas possible.

Le VI introduit un nouvel article 59 vicies dans le code des douanes, facilitant la transmission d’informations entre les agents des douanes et les agents chargés des contrôles.

Enfin, le VII prévoit l’entrée en vigueur de l’article au 18 août 2025.

B.   Les dispositions adoptées par le Sénat

La commission spéciale du Sénat a adopté deux amendements du rapporteur M. Cyril Pellevat (Les Républicains). L’amendement COM‑26 aligne le champ d’application de l’article 10 avec celui prévu à l’article 47 du règlement (UE) 2023/1542, en précisant que le chiffre d’affaires de l’opérateur économique pris en compte est celui de l’exercice précédant le dernier exercice financier. L’amendement COM‑27 a remplacé le terme « metteur sur le marché », par celui d’« opérateur économique », utilisé dans le règlement 2023/1542.

Le Sénat a adopté l’article 10 ainsi modifié lors de son examen en séance publique.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’amendement CD56 de Mme Chantal Jourdan (Socialistes et apparentés), qui fixe un délai maximum d’un an au cours duquel l’opérateur peut régulariser sa situation en cas de non-conformité et de manquement aux obligations en matière de politique de devoir de diligence, de système de gestion, de gestion des risques, de vérification par tierce partie et de communication d’informations. Cet amendement avait reçu un avis favorable du rapporteur pour avis.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a également adopté les amendements rédactionnels CD4, CD5 et CD6 du rapporteur pour avis.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 10 ainsi modifié.

*

*     *

Article 11
Dispositions en matière de conception des batteries, ainsi que de prévention
et de gestion des déchets associés

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur cet article. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 11 met en conformité le droit national avec les dispositions du règlement (UE) 2023/1542 relatif aux batteries, en matière de conception des batteries et de prévention de gestion des déchets associés.

I.   Le droit en vigueur

A.   Le droit europÉen

Le règlement (UE) 2023/1542 du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2023 relatif aux batteries et aux déchets de batteries, qui remplace la directive 2006/66/CE du Parlement européen et du Conseil, établit de nouvelles règles en matière de contenu des batteries ainsi que de prévention et de gestion des déchets.

1.   Le contenu des batteries

En matière de conception des batteries, le règlement (UE) 2023/1542 introduit de nouvelles restrictions relatives aux substances contenues dans les batteries. Alors que la directive 2006/66/CE ne prévoyait de limitations qu’en matière de mercure et de cadmium, l’annexe I du règlement (UE) 2023/1542 prévoit qu’à compter du 18 août 2024, les batteries portables, incorporées ou non dans des appareils, ne contiennent pas plus de 0,01 % de plomb. Cette restriction ne s’appliquera pas aux piles bouton zinc-air portables avant le 18 août 2028.

Le règlement (UE) 2023/1542 prévoit un mécanisme, détaillé à ses articles 6, 86, 87 et 88, permettant l’adoption de nouvelles restrictions dans le futur, qui seront également susceptibles de faire l’objet d’inspections et de sanctions.

Son article 93 prévoit en outre que les États membres déterminent le régime des sanctions applicables aux violations dudit règlement et veillent à ce que ce régime de sanctions soit mis en œuvre.

2.   L’élargissement de la filière de responsabilité élargie du producteur

En application de la directive 2006/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 septembre 2006 relative aux piles et accumulateurs ainsi qu’aux déchets de piles et d’accumulateurs, lesdits produits sont soumis depuis 2009 au principe de responsabilité élargie du producteur (REP). La REP transfère la responsabilité de la prévention et de la gestion des déchets aux producteurs, selon la logique du pollueur-payeur. Concrètement, la majorité des producteurs respectent cette obligation en mettant en place des éco-organismes dont ils assurent la gouvernance et auxquels ils transfèrent leur obligation et versent en contrepartie une contribution financière appelée écocontribution. Les contributions versées aux éco‑organismes sont modulées sous la forme de primes ou de pénalités, en fonction de critères de performance environnementale des produits.

L’article 56 du règlement (UE) 2023/1542 prévoit la mise en place d’une filière REP pour l’ensemble des batteries. La filière REP ne porte plus seulement sur les « piles et accumulateurs » (ou batteries portables) mais s’applique désormais aux batteries de véhicules électriques, aux batteries industrielles, aux batteries SLI et aux batteries pour les moyens de transport légers. Le périmètre actuel de la REP est donc étendu.

Le même article 56 précise que la notion de « producteur » comprend, dans le cadre de la REP, les opérateurs économiques mettant pour la première fois sur le marché des batteries issues de l’économie circulaire. Le règlement indique ainsi qu’« un opérateur économique qui met à disposition sur le marché, pour la première fois sur le territoire d’un État membre, une batterie résultant d’une préparation en vue du réemploi, d’une préparation en vue d’une réaffectation, d’opérations de réaffectation ou de remanufacturage, est considéré comme étant le producteur de cette batterie aux fins du présent règlement et est soumis à la responsabilité élargie des producteurs ».

3.   La possibilité de points de collecte uniquement dédiés aux déchets de batteries

Les articles 59 et 60 du règlement laissent aux États membres la possibilité d’adopter des mesures exigeant que les points de collecte ne puissent collecter les déchets de batteries que s’ils ont conclu un contrat avec les producteurs ou les éco‑organismes agréés de cette filière.

Les entités concernées sont :

– les distributeurs des produits ;

– les autorités publiques compétentes en matière de gestion des déchets ;

– les installations de traitement de véhicules hors d’usage (VHU) et de déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) ;

– les opérateurs procédant au remanufacturage ou à la réaffectation de batteries ;

– les points de collecte volontaires.

4.   Une obligation de reprise des déchets par les distributeurs

L’article 62 du règlement prévoit que « les distributeurs reprennent à l’utilisateur final les déchets de batteries, quelle que soit leur composition chimique, leur marque ou leur origine, à titre gratuit et sans imposer à l’utilisateur final l’obligation d’acheter ou d’avoir acheté une nouvelle batterie ».

B.   Le droit national

Le principe de la REP est inscrit en droit national aux articles L. 541‑10 à L. 541‑10‑17 du code de l’environnement.

L’article L. 541‑10 définit le principe et les modalités de la REP. Le dernier alinéa de son I, introduit par la loi n° 2020‑105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite « AGEC », précise que « n’est pas considérée comme producteur la personne qui procède à titre professionnel à des opérations de préparation en vue du réemploi ou de la réutilisation de produits usagés, sous réserve que ces opérations ne modifient pas les caractéristiques essentielles du produit ou que la valeur des éléments utilisés pour ces opérations reste inférieure à celle du bien usagé augmentée du coût de l’opération ». Cette disposition est désormais contraire à l’article 56 du règlement (UE) 2023/1542 qui considère les opérateurs économiques mettant pour la première fois sur le marché des batteries issues de l’économie circulaire comme des producteurs.

Les règles relatives à la responsabilité élargie du producteur pour les « piles et accumulateurs » prévues par la directive 2006/66/CE avaient été transposées en droit national au 6° de l’article L. 541‑10‑1 du code de l’environnement, qui liste les produits relevant du principe de REP. L’élargissement du champ de la REP par le règlement (UE) 2023/1542 invite à modifier cette disposition pour le remplacer par la terminologie « les batteries ».

II.   LE dispositif proposÉ

A.   Le texte initial du projet de loi

L’article 11 du projet de loi comprend des modifications concernant, d’une part, la conception des batteries et, d’autre part, la prévention et la gestion des déchets des batteries.

1.   Sur la conception des batteries

L’article 11 intègre des références au règlement (UE) 2023/1542 dans le chapitre Ier du titre II du livre V du code de l’environnement dédié aux « contrôles des produits chimiques », à savoir :

– l’article L. 521‑1, qui définit le champ d’application du chapitre ;

– l’article L. 521‑6, relatif aux compétences des ministres chargés de l’environnement, de la santé et du travail pour encadrer les substances, produits ou équipements présentant des dangers graves ou des risques non valablement maîtrisés pour les travailleurs ;

– l’article L. 521‑12, qui définit les personnes habilitées à rechercher et constater les infractions prévues au chapitre Ier ;

– les articles L. 521‑17 et L. 521‑18, relatifs aux sanctions administratives, ainsi que les articles L. 521‑21 et L. 521‑24, relatifs aux sanctions pénales.

Une référence au règlement (UE) 2023/1542 est également introduite à l’article L. 541‑46, afin que des contrôles puissent être menés sur des produits en fin de vie.

2.   Sur la prévention et la gestion des déchets

L’article 11 modifie le 6° de l’article L. 541‑10‑1 du code de l’environnement pour faire évoluer l’intitulé de la filière REP de « piles et accumulateurs » à « batteries », conformément à l’élargissement du champ de la filière à l’ensemble des batteries prévu par le règlement (UE) 2023/1542.

L’article 11 prévoit ensuite une modification du dernier alinéa de l’article L. 541‑10 du même code, afin d’établir une nouvelle définition du producteur au titre de la REP, compatible avec le droit européen : « peut être considéré comme producteur, toute personne qui, à titre professionnel, met à disposition sur le marché pour la première fois sur le territoire national un produit relevant du principe de responsabilité élargie du producteur et résultant d’une opération de réemploi, de préparation en vue de la réutilisation ou de réutilisation. Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application de cette disposition, notamment les filières de responsabilité élargie du producteur concernées ».

Enfin, conformément aux articles 59 et 60 du règlement (UE) 2023/1542 qui prévoient la possibilité d’obliger les points de collecte des déchets de conclure un contrat avec les producteurs ou les éco-organismes agréés de la filière REP, l’article 11 du projet de loi inscrit cette obligation à un nouvel article L. 541‑10‑19 du code de l’environnement. Cette obligation, établie au sein de la sous-section 3 de la section 2 du chapitre Ier du titre IV du livre V du code de l’environnement, consacrée aux dispositions propres à certaines filières soumises à la responsabilité élargie du producteur (articles L. 541‑10‑18 à L. 541‑10‑28), doit entrer en vigueur le 1er janvier 2026.

Cette disposition devrait assurer une meilleure traçabilité des déchets et faciliter la lutte contre le trafic illégal, dans la mesure où les producteurs et les éco‑organismes agréés pourront fournir aux inspecteurs de l’environnement la liste des opérateurs sous contrat, et ainsi leur permettre de cibler leurs contrôles d’identification de sites illégaux sur ceux n’en bénéficiant pas. L’étude d’impact du projet de loi rappelle que la collecte des batteries de véhicules électriques et automobiles constitue un enjeu clé, dans la mesure où près de 500 000 véhicules européens hors d’usage finissent chaque année dans une filière de traitement illégale. La nouvelle disposition devrait limiter les fuites de batteries, préjudiciables à l’économie et à l’environnement.

3.   Sur l’obligation de transposition de l’obligation de reprise des déchets par les distributeurs

L’article 11 transpose enfin l’obligation de reprise des déchets par les distributeurs, inscrite à l’article 62 du règlement (UE) 2023/1542, en modifiant le V de l’article L. 541‑10‑8 du code de l’environnement.

L’obligation de reprise des déchets par les distributeurs s’applique désormais à partir du18 août 2025, aux produits mentionnés aux 5°,6°,7°, 10°, 12°, 13° et 14° de l’article L. 541‑10‑1, c’est-à-dire :

– les équipements électriques et électroniques (5°) ;

– les batteries (6°) ;

– les contenus et contenants de produits chimiques, pour lesquels la REP s’appliquait initialement à partir du 1 er janvier 2021 (7°) ;

– les éléments d’ameublement et de décoration textile, la REP devant initialement s’appliquer à ces derniers à compter du 1er janvier 2022 (10°) ;

– les jouets, pour lesquels la REP s’appliquait initialement à partir du 1er janvier 2022 (12°) ;

– les articles de sport et loisirs, pour lesquels la REP s’appliquait initialement à partir du 1er janvier 2022 (13°) ;

– les articles de bricolage et de jardin, pour lesquels la REP s’appliquait initialement à partir du 1er janvier 2022 (14°).

B.   Les dispositions adoptées par le SÉnat

Le Sénat a adopté en séance publique l’amendement 31 du rapporteur M. Cyril Pellevat (Les Républicains) qui étend l’obligation de contractualisation avec les éco‑organismes ou les systèmes individuels, à l’ensemble de la chaîne de gestion des déchets de batteries et non plus aux seuls « opérateurs de gestion de déchets », en cohérence avec le dispositif déjà existant dans la filière des déchets d’équipements électriques ou électroniques inscrit à l’article L. 541‑10‑20 du code de l’environnement.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’amendement rédactionnel CD7 du rapporteur pour avis.

Elle a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 11 ainsi modifié.

*

*     *

Article 12
Suppression de l’interdiction d’importation des boues d’épuration

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur cet article. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission sans modification

 

L’article 12 supprime l’interdiction systématique d’importation des boues d’épuration, contraire au droit de l’Union européenne.

I.   Le droit en vigueur

A.   Le droit europÉen

Les transferts frontaliers de déchets sont encadrés, au niveau international, par la convention de Bâle, adoptée le 22 mars 1989. Ce traité international, entré en vigueur en 1992, doit permettre de réduire la circulation des déchets dangereux entre les pays et en particulier d’éviter le transfert de déchets dangereux des pays développés vers les pays en développement.

L’amendement à la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et leur élimination, adopté à Genève le 22 septembre 1995, interdit les exportations de tous les déchets dangereux visés par la Convention qui sont destinés à être éliminés définitivement, réutilisés, recyclés et récupérés en provenance des parties et autres États membres de l’OCDE, de la Communauté européenne et du Liechtenstein à destination de tous les autres pays.

Au niveau communautaire, le règlement (CE) 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006 concernant les transferts de déchets met en œuvre la convention de Bâle.

L’article 11 du règlement (CE) 1013/2006 instaure la possibilité de mesures d’interdiction générale des transferts ou d’objection systématique à l’encontre de transferts, uniquement pour les transferts de déchets destinés à être éliminés, qui doivent être notifiés à la Commission européenne.

L’article 12 du même règlement prévoit que, sous réserve des procédures d’obtention des autorisations de transfert transfrontalier de déchets, les flux destinés à la valorisation des déchets doivent pouvoir circuler librement au sein du territoire de l’Union européenne.

B.   Le droit national

En droit français, la mise en œuvre du règlement (CE) 1013/2006 est précisée aux articles L. 541‑40 à L. 541‑42‑2 du code de l’environnement.

L’article 86 de la loi n° 2020‑105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a en outre interdit, au dernier alinéa de l’article L. 541‑38 du code de l’environnement, « d’importer des boues d’épuration ou toute autre matière obtenue à partir de boues d’épuration seules ou en mélanges, en France, à l’exception des boues provenant d’installations dont le fonctionnement est mutualisé avec un État voisin ou de la principauté de Monaco ».

Dans une décision n° 22PA02 680 du 29 juin 2023, la cour administrative d’appel de Paris a annulé cinq décisions du ministre chargé de la transition écologique, prises sur le fondement de l’article L. 541‑38 du code de l’environnement, qui interdisaient l’importation de boues d’épuration depuis la Belgique et le Luxembourg. La cour administrative d’appel a estimé que l’article L. 541‑38 était contraire au droit de l’Union européenne, dans la mesure où il conduisait l’administration à opposer un refus systématique à l’importation des boues d’épuration, alors même que l’article 12 du règlement (CE) 1013/2006 garantit leur libre circulation.

II.   LE dispositif proposÉ

A.   Le texte initial du projet de loi

Afin de garantir la conformité du droit national au droit de l’Union européenne, l’article 12 du projet de loi supprime le dernier alinéa de l’article L. 541‑38 du code de l’environnement.

Les importations de boues d’épuration ne feront plus l’objet d’une interdiction systématique. Leur demande devrait faire l’objet d’un examen au cas par cas par l’administration, conformément au règlement (CE) 1013/2006. L’administration aura compétence pour interdire les mouvements de transfert de déchets destinés à être éliminés. Elle sera en revanche tenue d’examiner les demandes de transferts de déchets destinés à être valorisés.

B.   Les dispositions adoptées par le SÉnat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a émis un avis favorable à l’adoption de cet article sans modification. 

*

*     *

Chapitre II
Dispositions relatives au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières

Article 13
Création d’un régime de sanctions applicable aux importateurs en cas
de non-respect des obligations de déclaration relatives au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pendant la période transitoire

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur cet article. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 13 vise à introduire dans le droit national de nouvelles dispositions concernant le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. Un régime de sanctions est ainsi créé, applicable aux importateurs en cas de non-respect des obligations de déclaration pendant la période transitoire.

I.   Le droit en vigueur

A.   Le droit europÉen

Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) est l’un des principaux axes du paquet « Fit for 55 », ou « Ajustement à l’objectif 55 », négocié sous la présidence française du Conseil de l’Union européenne au premier semestre 2022. Ce paquet, composé de douze propositions législatives, vise à réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre de l’Union européenne d’au moins 55 % en 2030 par rapport à 1990, première étape vers l’objectif de neutralité climatique à l’horizon 2050, fixé par le Pacte vert pour l’Europe.

Le MACF est un instrument qui soumet les produits importés dans l’Union européenne à une tarification carbone équivalente à celle appliquée aux industriels européens fabricant ces produits. Le MACF vise ainsi à lutter contre le phénomène de « fuites de carbone », c’est-à-dire le risque que les coûts du carbone conduisent les entreprises à déplacer leurs activités dans des pays dans lesquels les mécanismes de tarification du carbone sont moins stricts. Ce phénomène pose des difficultés à la fois en termes de souveraineté industrielle et climatique. En effet, une tarification inégale entre producteurs européens et extra-européens peut entraîner des délocalisations ou une désindustrialisation, mais aussi une augmentation des émissions dans d’autres régions du monde. Les secteurs pour lesquels le procédé de fabrication est fortement émetteur de gaz à effet de serre, et qui sont exposés à la concurrence internationale, sont considérés « à risque de fuite de carbone ».

Au sein du système d’échange de quotas d’émissions de l’Union européenne (SEQE-UE), une allocation de quotas à titre gratuit est mise en place pour les secteurs considérés « à risque de fuite de carbone ». Cette allocation de quotas à titre gratuit est cependant considérée comme un frein à l’atteinte d’objectifs climatiques plus ambitieux, dégradant l’effet d’un prix du carbone élevé. Le MACF, alternative de l’allocation de quotas à titre gratuit, va donc permettre de renforcer le SEQE-UE. Après une période transitoire du 1er octobre 2023 au 31 décembre 2025, le MACF s’appliquera réellement à partir du 1er janvier 2026. L’allocation de quotas à titre gratuit au sein du SEQE-UE pour les secteurs concernés sera réduite progressivement de 2026 à 2034 par l’application du facteur MACF ([126]) à la quantité de quotas alloués à titre gratuit, entraînant une montée en charge progressive du MACF en parallèle.

Le règlement dit « règlement MACF » ([127]), publié en mai 2023, établit ce mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. Il ne concerne que certains secteurs spécifiques, définis à son annexe I et considérés comme « à risque de fuite de carbone » : le ciment, l’électricité, les engrais, la fonte, le fer et l’acier, l’aluminium et l’hydrogène. L’inclusion des importations d’électricité répond aux inquiétudes de certains pays vis-à-vis de l’augmentation croissante des importations d’électricité carbonée depuis des pays frontaliers à l’Union européenne. Les importations d’hydrogène sont encore marginales mais pourraient augmenter fortement à l’horizon 2030. Le gaz à effet de serre à déclarer pour ces activités est le dioxyde de carbone (CO2), ainsi que le protoxyde d’azote (N2O) pour le secteur des engrais et les hydrocarbures perfluorés (PFC) pour le secteur de l’aluminium. L’annexe III du règlement MACF exempte certains pays et territoires tiers, notamment l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse.

Le MACF comprend divers acteurs participant à sa mise en œuvre. L’assujetti est l’importateur des marchandises ou son représentant en douane. L’autorité compétente en France est la direction générale de l’énergie et du climat, responsable notamment de l’octroi du statut de déclarant MACF, de la supervision de l’achat ou de la restitution des certificats MACF, et du contrôle du respect des obligations lors de l’examen des rapports MACF. Les autorités douanières sont habilitées à effectuer des contrôles sur les marchandises importées, à s’assurer que la personne qui importe est effectivement un déclarant MACF autorisé, à transmettre des données d’importation de marchandises MACF à la Commission européenne et à informer les assujettis de leurs obligations de déclaration.

1.   Un fonctionnement effectif du MACF à partir du 1er janvier 2026

La mise en œuvre effective du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières aura lieu à partir du 1er janvier 2026 avec l’obligation d’obtenir le statut de déclarant MACF. Les premières déclarations des émissions et restitutions de certificats MACF seront effectuées en 2027 sur les données 2026.

Le MACF conditionne l’importation des produits au respect d’obligations spécifiques. Ainsi, l’assujetti doit obtenir le statut de déclarant MACF autorisé en amont de toute importation. Il aura la possibilité d’effectuer la demande d’obtention du statut de déclarant MACF à partir du 1er janvier 2025.

Conformément aux articles 6 et 22 du règlement MACF, il doit présenter une déclaration chaque année et restituer des certificats MACF à hauteur de ses émissions intrinsèques déclarées et vérifiées par un vérificateur accrédité, et détenir à la fin de chaque trimestre un stock défini de certificats MACF. Les émissions intrinsèques à déclarer concernent les émissions directes et indirectes, résultant respectivement des processus de production de marchandises, et de la production d’électricité consommée lors de ces processus de production de marchandises. À défaut de pouvoir déclarer les émissions réelles, calculées à partir de données obtenues ou mesurées sur site, un système de valeurs par défaut par couple pays et produit sera mis en place afin de refléter au mieux les émissions associées aux produits importés. Le prix d’un certificat MACF reflète le prix moyen hebdomadaire de mise aux enchères des quotas d’émissions dans le cadre du SEQE‑UE ; il est donc directement lié au prix du quota carbone au sein du SEQE‑UE. Un assujetti peut demander une réduction des certificats MACF à hauteur du prix du carbone payé dans le pays de production après en avoir apporté les preuves.

Des sanctions, sous forme d’amendes, sont prévues par l’article 26 du règlement MACF en cas de non-restitution des certificats MACF par les déclarants MACF. Celles-ci sont majorées pour les personnes ayant importé des produits sans avoir obtenu préalablement le statut de déclarant MACF.

Conformément à l’article 19 du règlement, la Commission européenne effectue un réexamen des rapports MACF et communique à l’autorité compétente de chaque État membre la liste des assujettis n’ayant pas présenté de rapport MACF, ou pour lesquels le rapport semble incomplet ou incorrect. L’autorité compétente, qui peut également procéder à des réexamens de rapport, a ensuite la charge d’engager une procédure de correction, le cas échéant.

2.   La période transitoire du MACF est dédiée à l’accompagnement des assujettis

Une période transitoire est prévue aux articles 32 à 35 du règlement MACF, qui s’étend du 1er octobre 2023 au 31 décembre 2025. Durant cette période, aucun paiement relatif à la restitution des certificats MACF n’est exigé, seule l’obligation de déclaration étant requise. L’objectif de cette période transitoire est d’accompagner les assujettis dans leurs obligations et d’assurer une appropriation progressive du dispositif par les différents acteurs. Il s’agit également d’analyser les données collectées, pour affiner et rendre plus efficace le MACF dès sa mise en œuvre effective.

L’article 35 du règlement MACF prévoit l’établissement, par l’importateur ou le représentant en douane indirect, d’un rapport trimestriel contenant les informations suivantes :

– la quantité totale de chaque type de marchandises ;

– les émissions intrinsèques totales ;

– les émissions indirectes totales ;

– le prix du carbone dû dans le pays d’origine pour les émissions intrinsèques des marchandises importées.

Le premier rapport trimestriel devait donc être déposé avant le 31 janvier 2024 sur la plateforme informatique dédiée, gérée par la Commission européenne. Un premier retour de la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) indique environ 600 déclarations MACF soumises à cette date, sur les 8 500 rapports attendus, soit un taux dans la moyenne par rapport aux autres États membres. Un travail important d’information des assujettis sur leurs obligations de rapportage doit être mis en œuvre. Une campagne en ce sens est prévue par l’administration.

La Commission européenne effectue un examen de ces rapports et communique à l’autorité compétente de chaque État membre la liste des assujettis n’ayant pas présenté de rapport MACF, ou pour lesquels le rapport est incomplet ou incorrect. L’autorité compétente a ensuite la charge d’engager une procédure de correction, le cas échéant.

Les modalités relatives aux obligations de déclaration pendant la période transitoire, en particulier les sanctions associées, sont précisées par un règlement d’exécution ([128]). L’article 16 du règlement d’exécution prévoit des amendes lorsque l’assujetti n’a pas transmis de rapport MACF, ou lorsque ce dernier est incomplet ou incorrect, et non corrigé. Le montant de l’amende est compris entre 10 et 50 euros par tonne d’émissions non déclarées, augmentant conformément à l’indice européen des prix à la consommation. Des amendes plus lourdes peuvent être appliquées, conformément au paragraphe 4 dudit article 16, en cas de deux déclarations incomplètes ou inexactes transmises consécutivement, ou en cas de non-respect de l’obligation de déclaration depuis plus de six mois. Des valeurs par défaut sont publiées par la Commission européenne pour la période transitoire, permettant aux autorités compétentes de déterminer le montant de l’amende pour les émissions non déclarées. Ces dernières doivent alors tenir compte de divers facteurs tels que l’ampleur des informations et des quantités non déclarées, le comportement intentionnel ou négligeant du déclarant, son comportement antérieur, son niveau de coopération et sa volonté face aux demandes de l’autorité compétente, ainsi que la prise de mesures permettant d’éviter que ces infractions soient commises à l’avenir.

B.   Le droit national

Aucune disposition relative au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières n’est présente dans le droit national.

II.   Le dispositif proposÉ

A.   Le texte initial du projet de loi

L’article 13 du projet de loi initial vise à créer un régime de sanction applicable aux assujettis du MACF en cas de non-respect de leurs obligations de déclaration pendant la période transitoire, c’est-à-dire du 1er octobre 2023 au 31 décembre 2025.

À ce titre, il est créé une nouvelle section au chapitre IX du titre II du livre II du code de l’environnement. Cette section 11 concerne les « dispositions relatives au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pendant la période transitoire ». Elle est composée de deux sous-sections, la sous-section 1 explicitant les définitions nécessaires à la compréhension de la sous-section 2, dédiée aux sanctions applicables.

L’article L. 229-72, article unique de la sous-section 1, définit le « règlement MACF », le « règlement d’exécution relatif à la période de transition », l’« assujetti », le « rapport MACF », la « période de transition » et les « émissions ». Ces définitions reprennent les mêmes définitions que celles du règlement MACF et de son règlement d’exécution, ou y font référence directement.

La sous-section 2 dédiée aux sanctions applicables durant la période transitoire comprend six nouveaux articles, de L. 229-73 à L. 229-78.

L’article L. 229-73 propose une mise en demeure par l’autorité compétente à l’assujetti, de satisfaire à l’obligation de transmettre son rapport MACF dans un délai de deux mois.

En cas de rapport MACF incomplet ou incorrect, l’article L. 229-74 précise que l’autorité compétente doit engager une procédure de rectification de ce rapport. Elle informe alors l’assujetti des informations complémentaires, ou des corrections à apporter sur ce rapport, qu’il doit soumettre complété et corrigé dans un délai de deux mois. Si l’assujetti n’a pas transmis de nouveau rapport dans ce délai, l’autorité compétente met alors en demeure l’assujetti de s’y conformer dans un délai d’un mois.

L’article L. 229-75 prévoit une amende lorsqu’il n’a pas été déféré, dans le délai imparti, à la mise en demeure prévue à l’article L. 229-73 ou à l’article L. 229‑74. Cette amende a un montant minimal de 10 euros par tonne d’émissions non déclarées. La possibilité d’y ajouter des majorations d’un montant maximal de 20 euros par tonne d’émissions non déclarées est prévue en complément. Le choix s’est donc porté sur le montant minimal possible pour cette amende (éventuellement complété par une majoration), prévu entre 10 et 50 euros par tonne d’émissions non déclarées dans le règlement d’exécution relatif à la période transitoire. Alors que pour les cas précisés dans le paragraphe 4 de l’article 16, le règlement d’exécution propose une amende plus lourde sans précisions sur son montant et sans plafond, l’article L. 229-75 propose un doublement de l’amende, sans pouvoir excéder le montant total de 100 euros par tonne d’émissions non déclarées.

L’article L. 229-76 précise que la date à laquelle l’amende est exigible doit être indiquée dans la décision prononçant l’amende. Le recouvrement des amendes prévues à la sous-section 2 est effectué au profit du Trésor public, comme en matière de créances étrangères à l’impôt et au domaine.

L’article L. 229-77 impose la saisine par un recours gracieux obligatoire du ministère en charge de la politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre, préalablement à tout recours contentieux. Cette disposition provient de la volonté du ministère d’accompagner les assujettis dans la mise en œuvre du MACF face à ce nouveau dispositif complexe, l’un des objectifs de la période transitoire. Par ailleurs, cette disposition reflète l’obligation, prévue à l’article R. 229-27 du code de l’environnement, de saisir le ministère préalablement à tout recours contentieux, en cas de contestations liées à la délivrance des quotas à titre gratuit au sein du SEQE-UE.

Conformément à l’article L. 229-78, un décret en Conseil d’État précisera les conditions d’application de la sous-section 2.

B.   Les dispositions adoptÉes par le SÉnat

1.   L’examen en commission

La commission spéciale a adopté trois amendements du rapporteur M. Cyril Pellevat (Les Républicains).

L’amendement COM-1, de coordination, a modifié le numéro de la section créée, ainsi que les références des articles pour prendre en compte le déplacement des dispositions relatives au mécanisme « Corsia », suite à l’adoption d’un amendement à l’article 17 du projet de loi. La section 11 est ainsi devenue la section 10. De même, les articles L. 229-72 à L. 229-78 ont été respectivement renumérotés articles L. 229-70 à L. 229-76.

L’amendement COM-2, rédactionnel, a modifié les termes « période de transition » en « période transitoire », reprenant ainsi la formule utilisée dans le règlement MACF.

L’amendement COM-3, visant à simplifier le montant de l’amende applicable pendant la période transitoire prévue à l’article L. 229-75 (devenu L. 229-73), a supprimé la référence aux majorations d’un montant maximal de 20 euros, absente de l’article 16 du règlement d’exécution. Le montant de l’amende a également été modifié : l’amende devient proportionnée à la gravité des manquements constatés, d’un montant minimal de 10 euros et d’un montant maximal de 50 euros par tonne d’émissions non déclarées. Cette rédaction reprend les dispositions du règlement d’exécution. Dans les cas prévus par le paragraphe 4 de l’article 16 (deux déclarations incomplètes ou inexactes consécutives, ou un manquement à l’obligation de déclaration de plus de six mois), une reformulation a été adoptée, confirmant le doublement de l’amende sans pouvoir excéder le montant de 100 euros.

2.   L’examen en séance publique

Aucun amendement n’a été adopté en séance publique.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’amendement rédactionnel CD17 du rapporteur pour avis M. Damien Adam (Renaissance), puis a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 13 ainsi modifié.

*

*     *

Chapitre III
Dispositions relatives au système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre

Article 14
Transposition des dispositions communes et particulières applicables
aux installations suite à la révision de la directive relative
au système d’échange de quotas d’émission

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur cet article. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 14 vise à transposer dans le droit national la directive relative au système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (SEQE-UE), suite à sa révision, concernant les dispositions communes aux installations, à l’aviation et au transport maritime et les dispositions particulières applicables aux installations.

I.   Le droit en vigueur

A.   Le droit europÉen

1.   Le système d’échange de quotas d’émission, un outil de réduction des émissions de gaz à effet de serre

Le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE‑UE), ou marché carbone, est un outil européen de lutte contre le changement climatique, dont l’objectif est la réduction des émissions de gaz à effet de serre ainsi que l’incitation à se tourner vers les technologies bas carbone. La directive SEQE‑UE ([129]) a établi ce dispositif et permet sa mise en œuvre.

Le SEQE-UE concerne les installations de production d’électricité, l’industrie manufacturière et l’aviation, représentant environ 40 % des émissions de l’Union européenne. Ce système est obligatoire pour toute installation industrielle ou tout aéronef émettant du dioxyde de carbone (CO2), du protoxyde d’azote (N2O) ou des perfluorocarbures (PFC), et dépassant certains seuils, conformément à l’annexe I de la directive SEQE-UE. Pour l’aviation, seuls les vols intra-européens sont inclus dans le SEQE-UE ([130]). Environ 10 000 installations industrielles et 350 compagnies d’aviation sont ainsi soumises au SEQE-UE à l’échelle de l’Union européenne, dont environ 1 000 installations et 150 compagnies d’aviation attribuées à la France.

Chaque exploitant d’installation industrielle ou d’aéronef, soumis au SEQE‑UE, est tenu chaque année de surveiller et déclarer ses émissions vérifiées par un vérificateur accrédité, et de restituer un quota d’émissions par tonne de dioxyde de carbone équivalent émis l’année précédente. Ces quotas d’émission peuvent être acquis par une allocation de quotas à titre gratuit, aux enchères ou par échange entre acteurs privés. L’allocation de quotas à titre gratuit permet de lutter contre les « fuites de carbone », considérées comme le risque que les coûts du carbone conduisent les entreprises à déplacer leurs activités dans des pays dans lesquels les mécanismes de tarification du carbone sont moins stricts. Pour bénéficier de quotas à titre gratuit, l’exploitant d’installation doit effectuer la surveillance et la déclaration de ses niveaux d’activité, cette déclaration devant être vérifiée par un vérificateur accrédité, puis validée par la Commission européenne. L’exploitant d’aéronef doit rendre compte de son activité aérienne en termes de tonnes-kilomètres.

Le SEQE-UE est un système de « plafond et d’échange », c’est-à-dire que le volume total des émissions de gaz à effet de serre est limité par un plafond sur le nombre de quotas d’émission. Les exploitants peuvent échanger des quotas d’émission dans les limites de ce plafond. Ce plafond est ensuite réduit chaque année par un facteur de réduction linéaire, de manière à atteindre les objectifs de réduction des émissions et instaurant ainsi une logique de marché, d’offre et de la demande. Le prix du quota, entre 5 et 10 euros par tonne avant 2018, a atteint environ 80 à 90 euros par tonne ces dernières années, incitant donc davantage les exploitants à réduire leurs émissions ou à se tourner vers des technologies bas carbone.

La directive SEQE-UE prévoit des exemptions pour les installations industrielles aux articles 27 et 27 bis. L’article 27 permet aux États membres d’exclure du SEQE-UE les installations dont les émissions sont inférieures à 25 000 tonnes d’équivalent CO2 et qui ont une puissance calorifique de combustion inférieure à 35 MW, ainsi que les hôpitaux. Ces exclusions doivent alors faire l’objet de « mesures équivalentes » afin d’assurer une réduction des émissions équivalente à celle obtenue dans le cadre du SEQE-UE. L’article 27 bis donne la possibilité à l’État membre d’exclure les installations dont les émissions sont inférieures à 2 500 tonnes d’équivalent CO2. Ces installations mettent en place une surveillance simplifiée des émissions et doivent être réintégrées si elles dépassent ce seuil de 2 500 tonnes d’équivalent CO2.

Diverses phases du SEQE-UE ont eu lieu depuis sa création en 2005, marquées par un renforcement progressif du dispositif. La phase actuelle est la phase IV (2021-2030), divisée en deux sous-périodes : 2021-2025 et 2026-2030.

2.   Une révision majeure et structurante de la directive dans le cadre du paquet « Fit for 55 » en 2023

Le paquet « Fit for 55 », ou « Ajustement à l’objectif 55 » vise à réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre de l’Union européenne d’au moins 55 % en 2030 par rapport à 1990, première étape vers l’objectif de neutralité climatique à l’horizon 2050, fixé par le Pacte vert pour l’Europe. Ce nouvel objectif implique la mise en place d’un objectif rehaussé de réduction des émissions d’au moins 62 % par rapport à 2005 pour les secteurs couverts par le SEQE-UE, l’objectif précédent prévoyant une réduction d’au moins 43 % des émissions par rapport à 2005. Afin d’atteindre cet objectif, le plafond du SEQE-UE est réduit progressivement lors de la deuxième période de la phase IV, avec un facteur de réduction linéaire plus important.

Selon la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), les émissions de gaz à effet de serre incluses dans le SEQE-UE ont diminué de 35 % en 2022 par rapport à 2005, alors que la cible de réduction pour 2020 était de 21 %. Il est cependant difficile d’estimer l’impact seul du marché carbone sur cette réduction, d’autres paramètres pouvant influencer les réductions d’émissions. L’objectif de réduction de 62 % par rapport à 2005 apparaît ainsi comme ambitieux, mais crédible notamment vis-à-vis du potentiel de réduction du secteur de la production d’électricité.

La directive SEQE-UE a été révisée en 2023 ([131]), afin de répondre aux objectifs précités. Cette révision impacte à la fois les installations industrielles, l’aviation et le transport maritime ([132]). Elle met également en place, au chapitre IV bis, un nouveau système d’échange de quotas d’émission pour le bâtiment et le secteur du transport routier (appelé SEQE-UE 2), séparé du SEQE‑UE applicable aux installations, à l’aviation et au transport maritime (appelé SEQE-UE 1).

Pour les installations industrielles, les principales modifications concernent l’allocation de quotas à titre gratuit. Il est ainsi prévu une extinction progressive des quotas gratuits pour les secteurs industriels concernés par la mise en œuvre du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) ([133]), conformément au paragraphe 1 bis de l’article 10 bis de la directive SEQE-UE révisée. En parallèle, des conditionnalités environnementales sont intégrées pour l’allocation des quotas à titre gratuit au paragraphe 1 de l’article 10 bis de la directive SEQE-UE révisée. Une réduction de 20 % de cette allocation peut alors être décidée par l’autorité compétente si l’exploitant n’a pas mis en œuvre les recommandations d’un audit énergétique ou mis en œuvre un système de management de l’énergie, en matière d’efficacité énergétique, ou s’il n’a pas transmis de plan de neutralité climatique, et s’il n’a pas atteint les valeurs cibles ou respecté les jalons intermédiaires fixés dans ce plan. Le plan de neutralité climatique vise à atteindre la neutralité climatique d’ici à 2050 au niveau de l’installation. Des valeurs cibles et jalons intermédiaires permettent de mesurer, avant le 31 décembre 2025 puis tous les cinq ans, les progrès accomplis par l’installation en vue de l’objectif de neutralité.

La directive SEQE-UE a également révisé complètement l’allocation de quotas à titre gratuit du secteur aérien. Conformément au paragraphe 1 de l’article 3 quinquies, il est désormais prévu une extinction progressive des quotas gratuits « historiques » en 2024 et 2025 et leur disparition complète en 2026. Conformément à l’article 3 quater, une allocation de quotas à titre gratuit peut tout de même être accordée, jusqu’au 31 décembre 2030, afin d’encourager l’utilisation de carburants d’aviation durables, ou non dérivés de combustibles fossiles. Des quotas sont alors alloués pour couvrir tout ou partie de l’écart de prix restant entre l’utilisation de kérosène fossile et le carburant d’aviation durable, ou non dérivé de combustibles fossiles. Le régime de compensation et de réduction de carbone de l’aviation internationale, ou « Carbon Offsetting and Reduction Scheme for International Aviation » (Corsia) a été adopté en 2016 par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI). La directive SEQE-UE précise au paragraphe 6 de l’article 12 l’articulation du régime Corsia avec le SEQE-UE. Les vols intra-européens seront ainsi soumis au SEQE-UE et les vols extra-européens appliquent le régime Corsia ([134]).

Le transport maritime était précédemment réglementé par le règlement dit « MRV » ([135]) relatif à la surveillance et à la déclaration des émissions, sans avoir toutefois à restituer de quotas à hauteur des émissions. La révision de la directive SEQE-UE étend son champ d’application au transport maritime. Désormais, l’intégralité des émissions de dioxyde de carbone (CO2), et de protoxyde d’azote (N2O) et de méthane (CH4) à partir de 2026, seront soumises au SEQE-UE pour les trajets intra-européens et pour les émissions des navires à quai dans le port d’un État membre, et 50 % des émissions pour les trajets entre l’Union européenne et les pays tiers. Les compagnies maritimes devront restituer des quotas à hauteur de leurs émissions. Cette restitution fait l’objet d’une montée en charge progressive à 40 % pour les émissions de 2024, 70 % en 2025 et 100 % à partir de 2026.

B.   Le droit national

Les dispositions relatives au système d’échange de quotas d’émission figurent à la section 2 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l’environnement (articles L. 229-5 à L. 229-19). Cette section comprend quatre sous-sections : la sous-section 1 relative aux dispositions communes (articles L. 229-5 à L. 229-12), la sous-section 2 relative aux dispositions particulières applicables aux installations (articles L. 229-13 à L. 229-17), la sous‑section 3 relative aux dispositions particulières applicables aux aéronefs (article L. 229-18) et la sous-section 4 comportant les dispositions diverses (article L. 229-19).

1.   Les dispositions communes

L’article L. 229-5 établit le périmètre des assujettis au SEQE-UE et les gaz à effet de serre concernés. Des définitions y sont proposées, applicables au titre de la section 2.

Conformément à l’article L. 229-6, les assujettis sont soumis à une autorisation pour les émissions de gaz à effet de serre résultant d’activités précisées par décret. Les modalités de surveillance, de déclaration et de vérification des émissions, et le cas échéant des niveaux d’activité ou des tonnes-kilomètres, sont précisées par un arrêté.

L’article L. 229-7 établit l’obligation de restitution et ses modalités. Ainsi, chaque année, l’exploitant doit restituer à l’autorité administrative des quotas égaux au total des émissions de gaz à effet de serre de l’année précédente (II), selon les modalités précisées au III. Ces quotas sont restitués sur la base d’une déclaration effectuée par l’exploitant d’installation ou d’aéronef, et vérifiée aux frais de l’exploitant, par un organisme accrédité à cet effet, puis validée par l’autorité compétente. La déclaration est réputée validée si l’autorité compétente n’a pas formulé d’observation dans un délai fixé par l’arrêté prévu à l’article L. 229-6. Les types de quotas acceptés pour la restitution sont énumérés au IV.

Les sanctions administratives applicables aux exploitants d’installations et d’aéronefs sont indiquées à l’article L. 229-10. Au I, le compte au registre de l’exploitant est bloqué en cas d’absence de déclaration des émissions, ou si cette dernière n’est pas satisfaisante (selon les conditions fixées par l’arrêté prévu à l’article L. 229-6). L’exploitant ne peut ainsi pas céder les quotas présents sur son compte au registre, autrement que pour une restitution. En cas d’estimation des émissions par l’autorité compétente ou d’une déclaration jugée satisfaisante, le compte au registre est débloqué. Au II, une mise en demeure d’un mois, puis une amende sont prévues si l’exploitant n’a pas restitué tout ou partie des quotas pour couvrir ses émissions de l’année précédente. Le montant de l’amende est fixé à 100 euros par quota non restitué. En cas de non-respect de ces exigences, l’exploitant peut faire l’objet d’une interdiction d’exploitation. Par ailleurs, lorsque la décision prononçant l’amende est définitive, le nom de l’exploitant doit être rendu public.

L’article L. 229-11-1 liste les exceptions des quotas attribués à la France, à la mise aux enchères par défaut. Il s’agit des quotas alloués gratuitement, des quotas placés dans la réserve de stabilité du marché et des quotas annulés suite à la fermeture d’une unité technique de production d’électricité faisant partie d’une installation, ou non attribués de la réserve spéciale de l’aviation.

L’article L. 229-11-3 précise les cas possibles d’annulation des quotas.

2.   Les dispositions particulières applicables aux installations industrielles

Parmi les exemptions proposées aux articles 27 et 27 bis de la directive SEQE-UE, la France a choisi de ne transposer que les exclusions relatives aux hôpitaux à l’article L. 229-13 du code de l’environnement, et aux installations émettant moins de 2 500 tonnes d’équivalent CO2 à l’article L. 229-14 du même code.

Les hôpitaux (établissements de santé publics ou privés d’intérêt collectif) peuvent demander à être exclus du SEQE-UE au titre de l’article L. 229-13. Un arrêté publié avant le début de chaque période du SEQE-UE précise la liste des hôpitaux concernés. Les hôpitaux doivent cependant surveiller de manière simplifiée leurs émissions, les déclarer chaque année et mettre en place des « mesures équivalentes » permettant d’atteindre des réductions d’émissions équivalentes à celles qui seraient obtenues dans le cadre du SEQE-UE. Une amende sur les émissions excédentaires est prévue dans le cas où celles-ci dépassent une valeur de référence fixée.

L’article L. 229-14 est relatif aux exclusions des installations émettant moins de 2 500 tonnes d’équivalent CO2, pour chacune des trois années civiles commençant respectivement cinq à trois ans avant le début d’une période. Un arrêté publié avant le début de chaque période du SEQE-UE précise la liste des installations concernées. Ces installations doivent surveiller de manière simplifiée leurs émissions, et les déclarer chaque année. En cas de dépassement au cours d’une période du seuil des 2 500 tonnes d’équivalent CO2, elles sont réintégrées au sein du SEQE-UE. Le III précise que les installations de production d’électricité ne peuvent pas bénéficier de cette exclusion lorsque les produits qu’elles utilisent sont exonérés d’accise sur les énergies en application de l’article L. 312-32 du code des impositions sur les biens et les services.

L’article L. 229-15 du code de l’environnement rassemble les règles applicables à l’allocation de quotas à titre gratuit pour les installations. Conformément au I, des quotas d’émission de gaz à effet de serre peuvent être délivrés gratuitement, sur demande, par l’autorité administrative aux exploitants d’installations, à l’exception des installations bénéficiant de l’exclusion prévue par l’article L. 229-14 (moins de 2 500 tonnes d’équivalent CO2). Le II énumère les cas pour lesquels aucun quota à titre gratuit n’est délivré à une installation. Ainsi, une installation ayant cessé son activité ne peut pas recevoir de quotas gratuits, sauf si des éléments probants de nature à établir que la production reprendra dans un délai précis et raisonnable sont transmis à l’autorité compétente. Aucun quota à titre gratuit n’est délivré pour la production d’électricité (sauf celle produite à partir de gaz résiduaire), ni aux producteurs d’électricité définis par le u de l’article 3 de la directive SEQE-UE. Le III prévoit pour la période 2021-2026 de délivrer des quotas à hauteur de 30 % de la quantité fixée conformément au paragraphe 1 de l’article 10 bis de la directive SEQE-UE. Ce pourcentage diminue de manière linéaire jusqu’à l’extinction de la délivrance de quotas à titre gratuit en 2030, sauf pour le chauffage urbain. Pour les secteurs exposés à un risque de fuite de carbone, ils continuent de recevoir des quotas gratuits à hauteur de 100 %. Le IV précise que si le nombre total de quotas délivrés gratuitement a atteint la quantité maximale permettant de respecter la part aux enchères, un facteur uniforme adapte la quantité de quotas délivrés gratuitement pour chaque installation.

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 14 du projet de loi vise à transposer dans le droit national, suite à la révision de la directive SEQE-UE, les modifications relatives aux dispositions communes applicables aux exploitants d’installation, exploitants d’aéronefs et compagnies maritimes, et aux dispositions particulières relatives aux installations. Le projet de loi ne comporte pas de dispositions relatives à la création d’un second système d’échange de quotas d’émissions dédié aux émissions du secteur du bâtiment et du transport routier. Cela fera l’objet d’une modification législative ultérieure.

A.   Le texte initial du projet de loi

1.   Transposition des dispositions communes

a.   Révision des définitions et du périmètre d’application du SEQE-UE

Le 1° de l’article 14 vise à prendre en compte les modifications de périmètre, issues de la révision de la directive SEQE-UE, dans l’article L. 229-5 du code de l’environnement.

Le b et le c du 1° suppriment la notion d’émissions de gaz à effet de serre « dans l’atmosphère » pour les installations, et pour les aéronefs. Cette modification est la conséquence d’une suppression similaire dans la définition des « émissions » par l’article 3 de la directive SEQE-UE révisée. L’objectif est ainsi de pouvoir comptabiliser les émissions captées sur un site et réémises par la suite. Le b introduit par ailleurs le « type d’énergie utilisé ». Cet ajout prend en compte la modification du périmètre introduite à l’annexe I de la directive SEQE-UE révisée, avec une exclusion possible du SEQE-UE si les émissions de combustion provenant de la biomasse constituent plus de 95 % des émissions totales.

Le d du 1° étend le périmètre de la section 2 « Quotas d’émission de gaz à effet de serre » au transport maritime, suite à l’ajout du transport maritime dans le tableau des activités figurant à l’annexe I de la directive SEQE-UE révisée.

Le e du 1° remplace les définitions légales existantes (« tonne d’équivalent dioxyde de carbone », « exploitant d’aéronef », « exploitant d’aéronef dont la France est l’État membre responsable », « quota d’émission de gaz à effet de serre », « installation ») par des définitions similaires. Il y est surtout transposé les définitions liées au transport maritime, notamment « compagnie maritime », « compagnie maritime dont la France est l’autorité responsable », « port d’escale », « voyage », « navire de croisière », correspondant aux définitions prévues aux w à aa de l’article 3 de la directive SEQE-UE révisée. Outre ces définitions, ont été ajoutées les définitions de « régions ultrapériphériques », « pays et territoire d’outre-mer », et « effets de l’aviation hors CO2 », utiles notamment pour les dispositions relatives à l’aviation et au transport maritime.

Les a et b du 2° de l’article 14 modifiant l’article L. 229-6 du code de l’environnement ont pour objectif de supprimer les mentions « en termes de tonnes‑kilomètres » liées aux activités aériennes. Cela fait suite aux modifications des modalités d’allocation de quotas à titre gratuit pour les exploitants d’aéronefs, avec une extinction progressive du dispositif jusqu’en 2026. L’article 3 sexies de la directive SEQE-UE, relatif à l’octroi et délivrance de quotas sur la base des données en tonnes-kilomètres, a en effet été supprimé lors de la révision de ladite directive.

b.   Révision des modalités de surveillance et de déclaration des émissions ainsi que de la restitution de quotas

Le c du 2° de l’article 14 du projet de loi modifiant l’article L. 229-6 du code de l’environnement précise les modalités de mise en œuvre des obligations de surveillance, de déclaration et de vérification auxquelles sont soumises les compagnies maritimes, en application des articles 3 octies quinquies et 3 octies sexies de la directive SEQE-UE révisée. Ces obligations sont ainsi fixées par le règlement « MRV », et le cas échéant un arrêté pris par le ministère chargé de la mer.

Le 3° de l’article 14 modifie l’article L. 229-7 du code de l’environnement, relatif à la restitution des quotas, pour étendre aux compagnies maritimes l’obligation de restitution de quotas à hauteur des émissions vérifiées déclarées. Cette restitution est effectuée sur la base d’une déclaration, par les compagnies maritimes, de leurs émissions de gaz à effet de serre agrégées, comme prévu par l’article 11 bis du règlement « MRV ». Par ailleurs, divers ajouts sont prévus. Aucun quota ne doit être restitué pour les émissions de gaz à effet de serre réputées captées et qui ne peuvent pas pénétrer dans l’atmosphère, conformément au 3 ter de l’article 12 de la directive SEQE-UE révisée. L’article L. 229-7 interdit l’utilisation de quotas issu du système d’échange de quotas d’émission dédié aux secteurs du bâtiment et du transport routier aux fins de cette restitution. La possibilité d’utiliser des crédits provenant de projets des pays tiers ayant ratifié un accord international sur le changement climatique est supprimée au d. Dans les faits, ces crédits ne sont plus utilisables depuis le début de la phase IV, le 1er janvier 2021, suite à la suppression des paragraphes 8 et 9 de l’article 11 bis de la directive ([136]) révisant la directive SEQE-UE en 2018.Le b du 9° de l’article 14 du projet de loi modifiant l’article L. 229-15 du code de l’environnement supprime par ailleurs la possibilité pour un exploitant d’installation d’apporter des « éléments suffisamment probants de nature à établir que la production reprendra dans un délai précis et raisonnable » lorsqu’il a cessé son activité. En effet, dans le cas d’une cessation d’activité, aucun quota à titre gratuit n’est alloué. Cette suppression transpose la suppression similaire résultant de la révision de la directive SEQE-UE au paragraphe 19 de l’article 10 bis de ladite directive.

Le b du 3° de l’article 14 du projet de loi supprime la validation tacite de la déclaration par l’autorité compétente pour les installations et les aéronefs. En effet, il était initialement indiqué à l’article L. 229-7 du code de l’environnement que la déclaration est réputée validée sans observation formulée par l’autorité compétente à l’issue d’un délai fixé par arrêté. Cependant, la validation tacite n’est pas représentative du processus réel de validation des émissions mis en pratique par l’administration, et réglementé par la Commission européenne. En effet, chaque déclaration des émissions d’un exploitant doit être validée par l’autorité compétente. En cas de refus de transmettre une déclaration ou en cas de déclaration incomplète, l’autorité compétente a l’obligation de se substituer à l’exploitant et d’estimer les émissions, le cas échéant. Le droit européen ne prévoit donc pas de validation automatique des déclarations par les autorités compétentes.

Diverses dispositions sont prévues pour préciser l’autorité administrative responsable des obligations liées au SEQE-UE. Le 6° de l’article 14 du projet de loi remplace ainsi le terme « État » par « autorité administrative » à l’article L. 223‑11‑3 du code de l’environnement, plus précis et rendant compte de la diversité des autorités compétentes dans le cadre du SEQE. Le 7° et le a du 8° de l’article 14, modifiant les articles L. 229‑13 et L. 229-14 du code de l’environnement, remplacent le « ministre chargé de l’environnement » par le « ministre chargé de la politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre », appellation jugée plus claire suite aux nouvelles attributions et au découpage des sujets environnementaux entre les ministères.

c.   Révision des sanctions administratives applicables au SEQE-UE

Le 4° de l’article 14 du projet de loi modifie l’article L. 229-10 du code de l’environnement, relatif aux sanctions applicables aux assujettis au SEQE‑UE. Le blocage du compte au registre en cas d’absence de déclaration ou de déclaration non satisfaisante est étendu au transport maritime, à l’instar de ce qui était mis en œuvre pour les installations et l’aviation. Une précision est apportée au II : l’exploitant devra désormais s’acquitter de l’obligation de restituer les quotas suite au paiement d’une amende au plus tard lors de la restitution de l’année civile suivante.

Au 10° de l’article 14 du projet de loi, par l’insertion d’un nouvel article L. 229‑17‑1 au sein du code de l’environnement, il est proposé la création d’une nouvelle sanction spécifique aux installations. En cas d’absence de déclaration de l’exploitant d’installation ou de déclaration non satisfaisante (ne répondant pas aux conditions fixées par l’arrêté prévu à l’article L. 229-6), l’autorité compétente met en demeure l’exploitant d’installation de satisfaire à cette obligation dans un délai d’un mois. S’il n’a pas été déféré à la mise en demeure, l’autorité compétente peut ordonner une amende, proportionnée à la gravité des manquements constatés, et au plus égale à 15 000 euros. La proposition de cette nouvelle sanction fait suite au retour d’expérience de l’administration, pour inciter certains exploitants à transmettre dans les délais leurs déclarations et éviter aux services de l’État d’estimer les émissions de ces installations.

d.   Révision des modalités de mise aux enchères

Le c du 5° de l’article 14 modifiant l’article L. 229-11-1 du code de l’environnement supprime la référence au « paragraphe 2 de l’article 28 bis de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 » parmi les quotas exceptionnellement non mis aux enchères listés dans cet article. Lors de la révision de la directive SEQE-UE, le paragraphe 2 de l’article 28 bis a été totalement modifié. Il faisait référence initialement aux articles 3 sexies et 3 septies, supprimés, et notamment à la réserve spéciale pour les exploitants d’aéronefs.

Le d du point 5° de l’article 14 du projet de loi ajoute deux cas, suite à l’extension du dispositif au secteur maritime, à l’article L. 229-11-1 du code de l’environnement pour lesquels les quotas attribués à la France pour les assujettis au SEQE-UE ne sont pas mis aux enchères :

– ceux annulés conformément au dernier alinéa de l’article 3 octies ter de la directive SEQE-UE révisée, c’est-à-dire ceux non restitués pour les années 2024 et 2025 par les compagnies maritimes avec l’introduction progressive de la restitution des quotas ;

– ceux annulés conformément au second alinéa du paragraphe 3sexies de l’article 12 de la directive, c’est-à-dire ceux non restitués pour les navires de classe glace pour les émissions vérifiées rejetées jusqu’au 31 décembre 2030.

2.   Transposition des dispositions particulières applicables aux installations

a.   La directive SEQE-UE révisée introduit des conditionnalités à l’allocation de quotas à titre gratuit

Le 9° de l’article 14 modifie l’article L. 229-15 du code de l’environnement relatif à l’allocation de quotas à titre gratuit. Il est introduit au I dudit article L. 229‑15 une condition supplémentaire à l’allocation de quotas à titre gratuit. Pour pouvoir en bénéficier, les installations doivent être soumises à l’obligation de restitution prévue par le II de l’article L. 229-7 du code de l’environnement. Cela permet d’éviter l’allocation à des installations soumises au SEQE-UE, mais qui n’ont pas d’obligation de restitution, telles que les incinérateurs inclus à l’annexe I de la directive du SEQE‑UE révisée. Elle supprime par ailleurs l’interdiction de l’allocation de quotas à titre gratuit aux installations exclues au titre de l’article L. 229-14.

Au c du 9°, l’interdiction de délivrance des quotas à titre gratuit aux producteurs d’électricité au sens du u de l’article 3 de la directive SEQE-UE est supprimée, liée à la suppression de ce point u, mais également au paragraphe 3 de l’article 10 bis de la directive. L’allocation de quotas à titre gratuit pour le chauffage urbain est par ailleurs supprimée, notamment suite à la suppression du paragraphe 4 de l’article 10 bis de la directive.

Le e du 9° supprime le paragraphe relatif au chauffage urbain devenu caduc, et transpose au IV de l’article L. 229-15 du code de l’environnement les exigences fixées par le paragraphe 5 de l’article 10 bis de la directive SEQE‑UE révisée. Désormais, en cas d’atteinte de la quantité maximale permettant de respecter la part de quotas à mettre aux enchères, une adaptation de manière uniforme est effectuée, sauf pour les installations dont les émissions de gaz à effet de serre sont inférieures à la moyenne des 10 % d’installations les plus efficaces d’un secteur donné, non soumises à cette adaptation et ainsi favorisées.

Au g du 9°, des conditionnalités sur l’allocation de quotas à titre gratuit sont créées, en insérant un IV bis à l’article L. 229-15, relatif à l’efficacité énergétique, et un IV ter, relatif au plan de neutralité climatique. Ces ajouts permettent de transposer le paragraphe 1 de l’article 10 bis de la directive SEQE‑UE révisée.

Ainsi, au IV bis, une installation industrielle concernée par l’obligation d’effectuer un audit énergétique ou de mettre en œuvre un système de management de l’énergie, et n’ayant pas appliqué les recommandations issues du rapport d’audit ou du système, reçoit une allocation de quotas à titre gratuit réduite de 20 % (sauf si le temps de retour sur investissement dépasse trois ans ou si les coûts de ces investissements sont disproportionnés). L’exploitant peut démontrer qu’il a mis en œuvre d’autres mesures de réduction équivalentes à celles recommandées.

Le IV ter prévoit également une réduction de l’allocation de quotas à titre gratuit de 20 % si un exploitant ne transmet pas son plan de neutralité climatique avant le 1er mai 2024. Les exploitants concernés par le plan de neutralité climatique sont ceux dont les niveaux d’émissions sont supérieurs au 80e centile des niveaux d’émissions pour certains secteurs. Cette réduction de l’allocation de quotas à titre gratuit de 20 % s’applique également dans le cas où les valeurs cibles n’ont pas été atteintes, et les jalons intermédiaires n’ont pas été respectés pour la période courant jusqu’à fin 2025, et celle allant de 2026 à 2030. Le contenu et les modalités de la mise en œuvre du plan de neutralité climatique sont fixés par décret.

b.   Une diminution progressive de l’allocation de quotas à titre gratuit pour les secteurs couverts par le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières

Le d du 9° de l’article 14 du projet de loi modifiant l’article L. 229‑15 du code de l’environnement introduit une interdiction de l’allocation de quotas à titre gratuit pour les secteurs couverts par le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) ([137]). Par dérogation, une diminution progressive de l’allocation de quotas à titre gratuit est prévue jusqu’en 2033, par l’application d’un « facteur MACF », facteur de réduction de l’allocation. Ce facteur est égal à 100 % en 2025, 97,5 % en 2026, 95 % en 2027, 90 % en 2028, 77,5 % en 2029, 51,5 % en 2030, 39 % en 2031, 26,5 % en 2032 et 14 % en 2033.

Cette modification provient de la transposition du paragraphe 1 bis de l’article 10 bis de la directive SEQE-UE révisée.

c.   L’exclusion selon l’article 27 bis de la directive SEQE-UE est révisée

Le a du 8° de l’article 14 du projet de loi modifie l’article L. 229‑14 du code de l’environnement. Outre la modification portant sur le nom du ministre chargé d’établir la liste des installations exclues par arrêté, il supprime les termes « avant le début de la période concernée ». L’arrêté fixant la liste des installations exclues devait être établi avant le début de chaque période du SEQE-UE. La direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) précise que cette suppression est liée au délai de validation par la Commission européenne de la liste des installations exclues, qui a parfois lieu après le début de la période concernée. Cette validation par la Commission européenne est nécessaire avant la publication de l’arrêté fixant la liste des installations concernées.

Le b du même 8° abroge le III de l’article L. 229-14 du code de l’environnement, interdisant les installations de production d’électricité de bénéficier de l’exclusion prévue par l’article 27 bis de la directive SEQE-UE révisée, relative aux installations émettant moins de 2 500 tonnes d’équivalent CO2. La DGEC précise que cette interdiction concerne principalement les centrales nucléaires et les centres de données (« data centers »), inclus dans le SEQE-UE en raison des émissions de leurs générateurs de secours. Historiquement, il avait été décidé de ne pas les exclure du SEQE-UE, n’étant pas soumis à une tarification carbone par le biais de la fiscalité énergétique. Cependant, leurs émissions seront couvertes à partir de 2027 par un prix du carbone dans le cadre de la mise en œuvre du chapitre IV bis de la directive SEQE-UE révisée (marché carbone relatif aux bâtiments et au transport routier), qui s’applique aux émissions de la production d’électricité hors chapitre III de la directive SEQE-UE.

B.   Les dispositions adoptÉes par le SÉnat

1.   L’examen en commission

La commission a adopté six amendements du rapporteur M. Cyril Pellevat (Les Républicains).

L’amendement COM-20 est un amendement visant à corriger la référence « 3 bis » en « 3-bis » à l’article L. 229-7 du code de l’environnement.

L’amendement COM-4 vise à déplacer la sanction prévue à l’article L. 229‑17-1 en cas de non-respect de déclaration des émissions, dans l’article L. 229-10 rassemblant les sanctions relevant de la sous-section 1 (dispositions communes). Il supprime donc l’article L. 229-17-1 et introduit un I bis à l’article L. 229-10. Par ailleurs, il étend cette sanction administrative, prévue initialement pour les exploitants d’installations, aux exploitants d’aéronefs.

L’amendement COM-5 supprime une référence devenue sans objet à l’article L. 229-13, concernant la phase 3 du système d’échange de quotas d’émission, période comprise entre 2013 et 2020.

L’amendement COM-7 créé un II à l’article 14 du projet de loi, afin de préciser la date d’entrée en vigueur du b du 8°, du c et du f du 9°, au 1er janvier 2026. Il supprime en conséquence, au c du 9°, la mention « à compter du 1er janvier 2026 ». Pour le b du 8° et le f du 9°, cette date d’entrée en vigueur a été ajoutée par rapport à la version initiale. Cela permet de prendre en compte :

– le fait que les installations de production d’électricité peuvent être exclues au titre de l’article 27 bis de la directive à partir de 2026 ;

– la fin de l’allocation de quotas à titre gratuit pour le chauffage urbain et la cogénération à partir de 2026.

L’amendement COM-6 est un amendement correctionnel, modifiant une référence au règlement (UE) 2023/956 dans l’article L. 229-15.

L’amendement COM-8 permet de clarifier la rédaction du IV ter de l’article L. 229-15.

2.   L’examen en séance publique

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement du rapporteur M. Cyril Pellevat (Les Républicains).

Cet amendement n° 30 précise au IV ter de l’article L. 229‑15 du code de l’environnement que la vérification de l’atteinte des valeurs cibles et du respect des jalons intermédiaires du plan de neutralité climatique doit être effectuée aux frais de l’exploitant par un organisme accrédité à cet effet.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté treize amendements rédactionnels (CD18, CD19, CD22, CD42, CD20, CD23, CD43, CD21, CD24, CD30, CD33, CD25 et CD34) du rapporteur pour avis M. Damien Adam (Renaissance).

La commission a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 14 ainsi modifié. 

*

*     *

Article 15
Transposition des dispositions particulières applicables au secteur aérien suite à la révision de la directive relative au système d’échange
de quotas d’émission

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur cet article. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 15 vise à transposer les dispositions particulières applicables au secteur aérien suite à la révision de la directive relative au système d’échange de quotas d’émission, notamment en ce qui concerne l’allocation de quotas à titre gratuit, l’articulation avec le régime Corsia et la prise en compte des effets hors dioxyde de carbone.

I.   Le droit en vigueur

A.   Le droit europÉen

Le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE‑UE) a été créé en 2005 afin de réduire les émissions des installations industrielles et des installations de production d’électricité. Ce marché du carbone a été étendu en 2013 au secteur de l’aviation, pour l’ensemble des vols intra‑européens et extra-européens, soit à un secteur représentant près de 2 % des émissions mondiales. La décision dite « stop the clock » ([138]) d’avril 2013 a suspendu temporairement l’application de ce dispositif aux vols extra-européens, en attendant la mise en place d’un accord international visant à réduire les émissions de dioxyde de carbone (CO2) du secteur de l’aviation.

Seuls les vols intra-européens sont désormais inclus dans le SEQE-UE, les vols extra-européens étant soumis au régime de compensation et de réduction de carbone de l’aviation internationale, ou « Carbon Offsetting and Reduction Scheme for International Aviation » (Corsia). La directive SEQE-UE, révisée en 2023 ([139]), explicite notamment au paragraphe 6 de son article 12 la séparation des vols intra‑européens soumis au SEQE-UE et des vols extra-européens soumis au régime Corsia. Cette séparation entre le SEQE-UE et le régime Corsia est mise en place jusqu’au 31 décembre 2026. À ce titre, aucune restitution de quotas d’émission n’est attendue pour les vols extra-européens, conformément aux paragraphes 4 et 5 de l’article 25 bis de la directive SEQE-UE révisée.

Les vols soumis au SEQE-UE sont donc les vols intra-européens, c’est-à-dire :

– au sein de l’Espace économique européen, hors régions ultrapériphériques([140]) ;

– de l’Espace économique européen, y compris les régions ultrapériphériques, vers le Royaume-Uni ou la Suisse, des accords spécifiques ayant été conclus entre l’Union européenne et ces pays pour coupler leurs systèmes d’échange de quotas d’émission respectifs avec le SEQE-UE (les vols au départ du Royaume-Uni ou de la Suisse sont inclus dans leurs propres systèmes d’échange de quotas d’émission) ;

– entre un aérodrome d’une région ultrapériphérique d’un État membre et un aérodrome d’un État de l’Espace économique européen, autre que l’État membre dans lequel se situe la région ultrapériphérique. Une exonération est prévue au paragraphe 8 de l’article 3 quater, jusqu’au 31 décembre 2030, pour les vols reliant un aérodrome situé dans une région ultrapériphérique d’un État membre et un aérodrome situé dans le même État membre, y compris un autre aérodrome situé dans la même région ultrapériphérique ou dans une autre région ultrapériphérique du même État membre.

Les vols de l’Espace économique européen vers les pays et territoires d’outre-mer ([141]) sont considérés comme des vols vers des pays tiers et ne sont pas soumis au SEQE-UE.

1.   La directive SEQE-UE a complètement révisé le système d’allocation de quotas à titre gratuit de l’aviation

Lors de la phase 3 du SEQE-UE (2013-2020),le plafond total du SEQE-UE pour l’aviation correspondait à 95 % des émissions historiques (moyenne des émissions annuelles entre 2004 et 2006). 15 % de ce plafond était mis aux enchères, 82 % des quotas étaient alloués gratuitement et 3 % intégrés dans la réserve spéciale.

Suite à la révision de la directive SEQE-UE, l’article 3 quinquies, paragraphe 1, met en place une diminution progressive de l’allocation de quotas à titre gratuit en 2024 et 2025 jusqu’à leur disparition complète en 2026. Ainsi, les exploitants d’aéronefs pourront recevoir gratuitement des quotas à hauteur de 75 % en 2024, et 50 % en 2025 parmi les 85 % de quotas non mis aux enchères. Le paragraphe 1 bis indique que ces quotas alloués à titre gratuit sont proportionnels aux émissions vérifiées déclarées en 2023, diminués du facteur de réduction linéaire.

Conformément au paragraphe 6 de l’article 3 quater de la directive, une exception à la suppression de l’allocation de quotas à titre gratuit est créée, jusqu’au 31 décembre 2030, afin d’encourager l’utilisation de carburants d’aviation durables, ou non dérivés de combustibles fossiles, mentionnés dans le règlement « ReFuelEU Aviation » ([142]). Ainsi, au maximum 20 millions de quotas sur la quantité totale de quotas à allouer aux exploitants d’aéronefs sont réservés pour la promotion de ces carburants.

Les quotas réservés sont alloués pour couvrir tout ou partie de l’écart de prix restant entre l’utilisation de kérosène fossile et le carburant d’aviation durable, ou non dérivé de combustibles fossiles, à hauteur de :

– 70 % pour l’hydrogène produit à partir de sources d’énergie renouvelables, et de biocarburants avancés ([143]) ;

– 95 % pour les carburants renouvelables d’origine non biologique ([144]) ;

– 100 % pour les carburants d’aviation non dérivés de combustibles fossiles, éligibles au titre du règlement « ReFuelUE Aviation », dans des aéroports situés sur de petites îles ou dans une région ultrapériphérique ;

– 50 % pour les carburants d’aviation non dérivés de combustibles fossiles, éligibles au titre du règlement « ReFuelUE Aviation », dans les autres cas.

Pour cette allocation de quotas à titre gratuit, sont pris en compte les incitations résultant du prix du carbone et les niveaux minimaux harmonisés de taxation des combustibles fossiles.

2.   Une nouvelle obligation de prise en compte des effets hors CO2

La directive SEQE-UE révisée introduit une nouvelle obligation, relative à la surveillance, à la déclaration et à la vérification des effets hors CO2 de l’aviation, conformément au paragraphe 5 de son article 14. Cette obligation s’applique à partir du 1er janvier 2025.

Les effets hors CO2 de l’aviation sont définis au v de l’article 3 de la directive. Ils concernent « les effets sur le climat du rejet, lors de la combustion de carburant, d’oxydes d’azote (NOx), de particules de suie et d’espèces de soufre oxydées, ainsi que les effets de la vapeur d’eau, notamment des traînées de condensation, provenant d’un aéronef ».

La Commission européenne présentera un rapport au plus tard le 31 décembre 2027 sur les résultats liés à cette nouvelle obligation. Si elle le juge nécessaire, elle pourra également faire une proposition législative, visant à étendre le SEQE-UE aux effets hors CO2 de l’aviation (avec une restitution de quotas pour ces émissions).

B.   Le droit national

Outre les dispositions communes aux exploitants d’installations, exploitants d’aéronefs et compagnies maritimes présentes dans la sous-section 1, la sous‑section 3 de la section 2 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l’environnement comprend les dispositions particulières applicables aux aéronefs. Cette sous-section est composée d’un article unique, L. 229-18.

Le I de cet article L. 229-18 prévoit la possibilité pour un exploitant d’aéronef de bénéficier de la délivrance de quotas à titre gratuit, sur demande, affectés à une période du SEQE-UE et délivrés annuellement.

Le II précise les modalités de cette demande d’allocation de quotas à titre gratuit. Pour cela, l’exploitant d’aéronef doit rendre compte de son activité aérienne en termes de tonnes-kilomètres, conformément aux modalités précisées par arrêté. Le nombre de quotas à titre gratuit est calculé par l’autorité administrative.

Conformément au III, qui en précise les modalités, les exploitants d’aéronefs peuvent solliciter la délivrance de quotas à titre gratuit en provenance de la réserve spéciale, mentionnée à l’article 3 septies de la directive SEQE-UE.

II.   Le dispositif proposÉ

A.   Le texte initial du projet de loi

L’article 15 du projet de loi remplace l’article L. 229-18 du code de l’environnement, qu’il réécrit intégralement, au sein de la sous-section 3 relative aux dispositions particulières applicables aux aéronefs, et créé par ailleurs les nouveaux articles L. 229-18-1 et L. 229-18-2.

Le I de l’article L. 229-18 propose une diminution progressive des quotas à titre gratuit, à hauteur de 75 % en 2024 et 50 % en 2025, de 85 % du nombre total de quotas non mis aux enchères, ainsi que les modalités de calcul de ces quotas à titre gratuit, correspondant à la transposition des paragraphes 1 et 1 bis de l’article 3 quinquies de la directive SEQE‑UE révisée. Le II transpose dans les mêmes termes le paragraphe 6 de l’article 3 quater de la directive SEQE-UE révisée, concernant l’allocation de quotas à titre gratuit pour encourager l’utilisation de carburants d’aviation durables, ou non dérivés de combustibles fossiles.

Le nombre de quotas alloués à titre gratuit à chaque exploitant d’aéronef au titre des I et II de l’article L. 229‑18 est fixé par arrêté du ministre chargé des transports.

Par la réécriture complète de l’article L. 229-18, le III relatif à la réserve spéciale est supprimé. Cette réserve devient caduque avec la fin des quotas gratuits « historiques » pour l’aviation.

L’article L. 229-18-1 nouvellement créé traduit la séparation des vols intra‑européens inclus dans le SEQE-UE et des vols extra-européens soumis au régime Corsia. À cette fin, il reprend dans son I la dérogation à l’obligation de restitution de quotas d’émission pour les pays tiers et pour les émissions rejetées jusqu’au 31 décembre 2026, prévue aux paragraphes 4 et 5 de l’article 25 bis de la directive SEQE-UE révisée, c’est-à-dire pour les vols reliant :

– l’Espace économique européen et les pays soumis au Corsia, mentionnés dans l’acte d’exécution ([145]) adopté en application du paragraphe 3 de l’article 25 bis ;

– l’Espace économique européen et les pays tiers non mentionnés dans le même acte d’exécution, et autres que les vols à destination de la Suisse et du Royaume-Uni.

Le II de l’article L. 229-18-1 reprend la dérogation à l’obligation de restitution prévue au paragraphe 6 de l’article 25 bis, concernant les vols entre l’Espace économique européen et les pays les moins avancés, ou petits États insulaires en développement autres que ceux énumérés dans l’acte d’exécution, et autres que ceux dont le produit intérieur brut par habitant est égal ou supérieur à la moyenne du produit intérieur brut par habitant de l’Union européenne.

Le nouvel article L. 229-18-2 transpose les obligations de surveillance et de déclaration des effets hors dioxyde de carbone de l’aviation, à partir du 1er janvier 2025. Il reprend à cette fin les dispositions du paragraphe 5 de l’article 14 de la directive SEQE-UE révisée.

B.   Les dispositions adoptÉes par le SÉnat

1.   L’examen en commission

La commission a adopté cinq amendements du rapporteur M. Cyril Pellevat (Les Républicains).

L’amendement COM-9 est un amendement rédactionnel.

L’amendement COM-10 a créé un III à l’article 15 du projet de loi, afin d’abroger le I de l’article L. 229-18 du code de l’environnement, relatif à l’allocation de quotas à titre gratuit au secteur aérien à partir du 1er janvier 2026, devenant caduque après cette date.

L’amendement COM-11 a déplacé les dispositions relatives à la prise en compte des incitations liées au prix du carbone et aux niveaux minimaux harmonisés de taxation des combustibles fossiles et précisé que cela concerne la couverture de tout ou partie de l’écart de prix entre le kérosène fossile et les carburants considérés, conformément à la rédaction du paragraphe 6 de l’article 3 quater de la directive SEQE-UE révisée.

L’amendement COM-12 a introduit un III à l’article L. 229‑18‑1 du code de l’environnement, afin de préciser la dérogation à l’obligation de restitution prévue au paragraphe 8 de l’article 3 quater de la directive, relative à l’exonération dont bénéficient les vols en direction ou en provenance des régions ultrapériphériques, jusqu’au 31 décembre 2030. Cet amendement a été adopté par souci de cohérence avec la rédaction proposée à l’article 16 du projet de loi (exemption mentionnée à l’article L. 229-19-2 du code de l’environnement, devenu l’article L. 229-18-4 du même code).

L’amendement COM-13, rédactionnel, a créé un II à l’article 15 du projet de loi, afin de décodifier la date d’entrée en vigueur au 1er janvier 2025 de l’article L. 229-18-2 du code de l’environnement.

2.   L’examen en séance publique

Le Sénat a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur M. Cyril Pellevat (Les Républicains) pour remplacer les « éventuelles incitations liées au prix du carbone définies » par « éventuels soutiens par d’autres dispositifs », rédaction figurant dans la directive SEQE-UE révisée.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté sept amendements rédactionnels (CD40, CD39, CD31, CD38, CD32, CD36 et CD35) du rapporteur pour avis M. Damien Adam (Renaissance). Elle a également adopté l’amendement CD65 du rapporteur pour avis visant à corriger une référence, en cohérence avec le droit européen, puis a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 15 ainsi modifié.

*

*     *

Article 16
Extension du système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre au secteur du transport maritime

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur cet article. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 16 vise à transposer les nouvelles dispositions applicables au transport maritime au sein du système d’échange de quotas d’émission (SEQE-UE), notamment concernant le périmètre d’application, les obligations en matière de surveillance et de déclaration des émissions ainsi que de restitution des quotas, et les sanctions associées.

I.   Le droit en vigueur

A.   Le droit europÉen

Le secteur maritime est responsable d’environ 3 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales, et fait l’objet d’une augmentation constante du fret, l’Organisation maritime internationale (OMI) tablant sur un possible doublement des flux de transport maritime d’ici à 2050.

La Commission européenne a adopté en 2015 le règlement dit « MRV » ([146]) (« Monitoring, Reporting and Verification ») concernant la surveillance, la déclaration et la vérification des émissions de dioxyde de carbone (CO2) du secteur du transport maritime. À partir du 1er janvier 2018, toute compagnie maritime doit ainsi surveiller ses émissions, les déclarer et les faire vérifier par un vérificateur accrédité. Cependant, ce système ne fait pas l’objet d’une tarification carbone, et aucune restitution n’est exigée.

Cette absence de tarification carbone n’est pas compatible avec l’objectif de la Commission européenne de réduire les émissions nettes d’au moins 55 % en 2030 par rapport à 1990, issu du paquet « Fit for 55 », ou « Ajustement à l’objectif 55 ». Face, par ailleurs, à l’absence de mécanisme de réduction ou de tarification à l’échelle mondiale des émissions de carbone, à l’instar du régime « Corsia » pour l’aviation, l’Union européenne a décidé d’étendre le système d’échange de quotas d’émissions de l’Union européenne (SEQE-UE) au transport maritime.

La directive SEQE-UE révisée ([147]), adoptée en mai 2023, étend désormais son périmètre au transport maritime et se base sur le règlement « MRV » précédemment mis en place. Un règlement ([148]) a également modifié le règlement « MRV » afin de préciser les modalités associées à l’extension du SEQE-UE au secteur du transport maritime.

1.   Modification du champ d’application

L’article 2 de la directive SEQE-UE révisée, renvoyant à l’annexe I, prévoit ainsi un champ d’application en cohérence avec l’article 2 du règlement « MRV », le type et la taille des navires concernés évoluant dans le temps :

– les navires d’une jauge brute égale ou supérieure à 5 000 pour le transport de marchandises ou de passagers sont inclus dès 2024 dans le SEQ‑E‑UE ;

– les navires de haute mer d’une jauge brute égale ou supérieure à 5 000 sont soumis au règlement « MRV » à partir de 2025, puis dans le SEQE-UE à partir de 2027 ;

– les navires de haute mer et les cargos de marchandises diverses d’une jauge brute inférieure à 5 000 et supérieure à 400 sont soumis au règlement « MRV » à partir de 2025. Leur soumission au SEQE-UE sera examinée d’ici le 31 décembre 2026.

Les gaz à effet de serre concernés sont le dioxyde de carbone (CO2), déjà inclus dans le règlement « MRV », auquel s’ajoutent le méthane (CH4) et le protoxyde d’azote (N2O), soumis au règlement « MRV » à partir de 2024 et au SEQE-UE à partir de 2026. D’après le considérant (20) de la directive modifiant la directive SEQE-UE ([149]), la majorité des émissions du transport maritime sont issues des émissions de CO2. Cependant, les émissions de méthane auraient considérablement augmenté entre 2012 et 2018, selon la quatrième étude de l’OMI sur les gaz à effet de serre à l’horizon 2020. Le développement de navires alimentés en gaz naturel liquéfié ou par d’autres sources d’énergie pourrait également être à l’origine d’une augmentation des émissions de CH4 et N2O.

Conformément à l’article 3 octies bis de la directive SEQE-UE révisée, les émissions incluses dans le champ d’application pour les compagnies maritimes sont :

– 100 % des émissions des trajets à l’intérieur de l’Union européenne ;

– 100 % des émissions des navires à quai dans un port d’escale relevant de la juridiction d’un État membre ;

– 50 % des émissions des trajets entre l’Union européenne et un pays tiers.

La prise en compte partielle des émissions internationales du secteur maritime vient de l’absence de mise en place par l’OMI de mécanisme de réduction ou de tarification à l’échelle mondiale des émissions de carbone.

La directive SEQE-UE révisée introduit néanmoins à l’article 3 octies octies un réexamen possible en cas d’adoption par l’OMI d’un mécanisme de marché mondial visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre du transport maritime. Dans le cas où l’OMI n’adopterait pas d’ici à 2028 ce mécanisme, ou qu’il ne permettrait pas d’atteindre les objectifs de l’accord de Paris, les émissions des trajets entre l’Union européenne et un pays tiers pourraient être incluses dans le SEQE-UE à plus de 50 %. En juillet 2023, l’OMI a conclu un nouvel accord révisant la stratégie relative aux gaz à effet de serre pour le transport maritime. Ce dernier prévoit des mesures « de moyen terme », notamment l’étude d’un mécanisme de tarification du carbone, en vue d’une adoption en 2025 pour une mise en œuvre en 2027 si ce mécanisme est retenu.

2.   Les modalités de surveillance, de déclaration et de vérification des émissions et la restitution des quotas, pour le transport maritime

Les modalités de surveillance et de déclaration des émissions sont introduites à l’article 3 octies quinquies de la directive et renvoient au chapitre II du règlement « MRV ». De même, les modalités relatives à la vérification et l’accréditation mentionnées à l’article 3 octies sexies de la directive renvoient vers le chapitre III du règlement « MRV ».

L’article 3 octies ter de la directive SEQE-UE révisée introduit des exigences progressives concernant la restitution des quotas, à hauteur de 40 % des émissions vérifiées déclarées pour 2024, 70 % des émissions vérifiées déclarées pour 2025 et 100 % des émissions vérifiées déclarées à partir de 2026.

Diverses exemptions à la restitution de quotas sont prévues par la directive SEQE-UE révisée :

– les compagnies maritimes peuvent restituer 5 % de quotas en moins que les émissions vérifiées rejetées jusqu’au 31 décembre 2030 pour les navires de classe glace (paragraphe 3-sexies de l’article 12) ;

– aucune restitution n’est exigée pour les émissions vérifiées rejetées jusqu’au 31 décembre 2030 des voyages des navires à passagers (autres que les navires de croisière et navires rouliers à passagers) entre un port d’une île d’un État membre, ne disposant d’aucune liaison routière ou ferroviaire et d’une population de moins de 200 000 habitants, et un port de ce même État membre (paragraphe 3‑quinquies de l’article 12) ;

– aucune restitution n’est exigée pour les émissions vérifiées rejetées jusqu’au 31 décembre 2030, à la demande conjointe de deux État membres, lors de voyages effectués entre ces États membres, ou lors des activités à quai en rapport avec ces voyages, par des navires à passagers ou des navires rouliers à passagers dans le cadre d’un contrat de service public transnational ou d’une obligation de service public au niveau transnational (paragraphe 3-quater de l’article 12) ;

– aucune restitution n’est exigée pour les émissions vérifiées rejetées jusqu’au 31 décembre 2030 lors de voyages entre un port d’une région ultrapériphérique ([150]) d’un État membre et un port du même État membre, ainsi que pour les voyages entre régions ultrapériphériques d’un même État membre (paragraphe 3-ter de l’article 12).

En cas d’accord contractuel entre la compagnie maritime et une entité concernant la responsabilité ultime de l’achat du carburant ou de l’exploitation du navire, la compagnie maritime peut prétendre à un remboursement par cette entité des coûts liés à la restitution des quotas, conformément à l’article 3 octies quater de la directive SEQE-UE révisée.

3.   Les sanctions applicables aux compagnies maritimes

Le paragraphe 11 bis de l’article 16 de la directive SEQE-UE révisée propose des sanctions spécifiques aux compagnies maritimes, dont l’expulsion ou l’immobilisation. Ces dispositions sont sans préjudice des règles maritimes internationales applicables au cas des navires en détresse.

Lorsqu’une compagnie maritime ne se conforme pas à ses obligations de restitution pendant deux années consécutives malgré les mesures mises en œuvre par l’autorité compétente, les sanctions diffèrent selon l’État membre pour lequel le navire bat pavillon :

– l’État membre du port d’entrée dont le navire ne bat pas pavillon peut prononcer une décision d’expulsion. Tous les États membres, sauf celui pour lequel bat le pavillon, ont l’obligation de refuser l’accès au port des navires placés sous la responsabilité de la compagnie maritime ayant fait l’objet de la décision d’expulsion. L’État membre pour lequel les navires battent le pavillon immobilise ces navires jusqu’à ce que la compagnie maritime remplisse ses obligations de restitution.

– l’État membre dont le navire bat pavillon peut émettre un ordre d’immobilisation jusqu’à ce que la compagnie maritime remplisse ses obligations de restitution. Tous les États membres, dont le navire ne bat pas pavillon, ont alors l’obligation de refuser l’accès au port des navires placés sous la responsabilité de la compagnie maritime ayant fait l’objet de la décision d’immobilisation.

La compagnie maritime doit avoir la possibilité de présenter des observations avant la décision d’expulsion ou d’immobilisation.

Les mêmes possibilités d’expulsion ou d’immobilisation sont prévues au paragraphe 3 de l’article 20 du règlement « MRV » modifié, lorsqu’une compagnie maritime ne se conforme pas à ses obligations en matière de surveillance et de déclaration pendant deux années consécutives. Le règlement modificatif du règlement « MRV » a introduit les dispositions relatives à l’immobilisation, l’expulsion étant déjà prévue dans le règlement « MRV » initial.

B.   Le droit national

L’article L. 218-25 du code de l’environnement prévoit une sanction pénale de 15 000 euros pour l’exploitant, le propriétaire du navire ou son représentant à bord dans le cas où il n’aurait pas surveillé ses émissions de CO2 et dans le cas où il n’aurait pas déclaré ses émissions de CO2 dans les conditions prévues par le règlement « MRV ».

Le 3° de l’article L. 5241-4-6 du code des transports inscrit dans le droit national la possibilité, pour l’autorité administrative, de prendre une décision d’expulsion d’un navire, dans le cas où il n’aurait pas effectué la déclaration des émissions pendant deux années consécutives. Il transpose ainsi la possibilité d’expulsion prévue au paragraphe 3 de l’article 20 du règlement « MRV » initial.

II.   Le dispositif proposÉ

A.   Le texte initial du projet de loi

L’article 16 du projet de loi vise à transposer dans le droit national l’extension du SEQE-UE au secteur du transport maritime ainsi qu’à proposer des sanctions administratives et pénales en cas de non-respect des dispositions relatives à la mise en œuvre du SEQE-UE.

1.   Une sous-section est créée, définissant le périmètre et les obligations des compagnies maritimes vis-à-vis du SEQE

Une sous-section 4, composée de six articles (L. 229-19-1 à L. 229-19-6), est créée au sein de la section 2 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l’environnement pour y rassembler les dispositions particulières relatives aux compagnies maritimes.

L’article L. 229-19-1 transpose dans son I le champ d’application prévu à l’article 2 (renvoyant à l’annexe I) de la directive SEQE-UE révisée, concernant le type et la taille des navires, ainsi que les gaz à effet de serre soumis au SEQE‑UE.

L’article 3 octies bis de la directive SEQE-UE révisée est transposé au II du même article L. 229-19-1, en prévoyant la restitution de quotas à hauteur de 100 % des émissions des trajets intra-Union européenne, de 100 % des émissions des navires à quai dans un port d’escale d’un d’État membre, et de 50 % pour les trajets entre un État membre et un pays tiers. Les termes « à l’exception des ports situés dans un pays et territoire d’outre-mer » ont été ajoutés dans le droit français et ne figurent pas dans la directive à transposer. Ils permettent de préciser que les « pays et territoire d’outre-mer » ([151]) doivent être considérés comme un pays tiers à l’Union européenne, contrairement aux régions ultrapériphériques soumises au SEQE-UE.

L’article L. 229-19-2 précise dans son I le calendrier progressif des exigences de restitution prévu à l’article 3 octies ter de la directive SEQE-UE révisée, à hauteur de 40 % des émissions en 2024, 70 % en 2025 et 100 % à partir de 2026.

Les II, III, IV et V reprennent les diverses exemptions prévues respectivement aux paragraphes 3-ter (régions ultrapériphériques), 3-sexies (navire de classe glace), 3-quinquies (liaison vers les petites îles) et 3-quater (contrat de service public transnational ou d’une obligation de service public) de l’article 12 de la directive SEQE-UE révisée.

L’article L. 229-19-3 transpose la possibilité pour la compagnie maritime, prévue à l’article 3 octies quater de la directive, de prétendre à un remboursement des coûts liés à la restitution des quotas en cas d’accord contractuel avec une entité responsable finale de l’achat de carburant ou de l’exploitation du navire.

2.   Un système spécifique de sanctions est mis en place pour le transport maritime

Des sanctions spécifiques au transport maritime sont mises en place, plus importantes que pour les installations et aéronefs dans le cadre du SEQE-UE, ou le régime Corsia et le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pour sa période transitoire. Ces sanctions pénales, qui n’existent pas pour les installations ou pour le secteur aérien, sont justifiées, selon le Gouvernement, par les spécificités du secteur maritime. En effet, chaque navire a des modes de propulsion différents, pouvant changer à chaque voyage, avec parfois des mélanges de carburant. Contrairement au secteur aérien pour lequel il existe des outils robustes de suivi des émissions, aucun outil n’existe pour le secteur maritime. Par ailleurs, le nombre important d’acteurs (propriétaire, armateur, affréteur…) peut rendre plus difficile la communication avec un responsable de navire et la remontée d’informations.

L’article 16 du projet de loi rétablit l’article L. 226-3 du code de l’environnement pour y préciser les personnes habilitées à rechercher et constater les infractions concernant la surveillance, la déclaration et la vérification des émissions du secteur du transport maritime prévues au titre du chapitre IX du titre II du livre II du code de l’environnement.

a.   Sanctions en cas de non-respect des obligations liées à la surveillance et à la déclaration des émissions

L’article L. 229-19-4du code de l’environnement créé par l’article 16 du projet de loi initial vise à transposer les dispositions prévues au paragraphe 3 de l’article 20 du règlement « MRV », en cas de non-déclaration des émissions, en reprenant et complétant notamment les dispositions figurant actuellement au 3° de l’article L. 5241-4-6 du code des transports, qu’il remplace, le Gouvernement ayant choisi d’abroger ledit 3° afin de l’intégrer dans la section du code de l’environnement relative aux quotas d’émission de gaz à effet de serre. Ainsi, si la compagnie maritime n’a pas effectué de déclaration des émissions durant deux années consécutives, elle peut faire l’objet d’une décision d’immobilisation ou d’expulsion et d’interdiction d’accès aux ports d’un navire.

Le 1° du I de l’article 16 du projet de loi prévoit en outre l’abrogation de l’article L. 218-25 du code de l’environnement, afin d’en reprendre le contenu dans l’article L. 226-10.

L’article L. 226-10 prévoit ainsi dans son I une sanction pénale de 15 000 euros d’amende pour la compagnie maritime en cas de non-respect des obligations de surveillance des émissions et en cas de non-respect des obligations de déclaration des émissions. Il est ajouté au II, par rapport à la rédaction actuelle de l’article L. 218‑25, un doublement de l’amende, à 30 000 euros si la violation est délibérée, et au III l’affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique.

b.   Sanction en cas de non-respect de l’obligation de restitution des quotas

Dans l’article 14 du projet de loi, les compagnies maritimes ont été ajoutées au champ d’application des sanctions administratives, prévues notamment au II de l’article L. 229-10 du code de l’environnement, concernant la restitution de quotas d’émissions à hauteur des émissions.

L’article 16 du projet de loi prévoit, à L. 226-11 du code de l’environnement, une sanction durcie pour la compagnie maritime qui a fait l’objet de la sanction administrative prévue au II de l’article L. 229-10 (amende de 100 euros en cas de non-restitution), et qui n’a pas restitué les quotas à la date prévue de la restitution de l’année suivante. La sanction est d’un an d’emprisonnement et de 500 000 euros d’amende. En cas d’absence totale de restitution de quotas en contrepartie des émissions, l’amende est portée à un million d’euros. Les sanctions doivent tenir compte des gains économiques obtenus par la compagnie maritime suite à ce non-respect, ainsi que du montant du préjudice. La compagnie maritime encourt en complément l’affichage de la décision prononcée ou sa diffusion.

Les articles L. 229-19-5 et L. 229-19-6 sont en outre créés au sein du code de l’environnement pour transposer le paragraphe 11 bis de l’article 16 de la directive SEQE-UE révisée, qui présente deux types de dispositions avec une gradation continue.

Dans un premier temps, selon l’article L. 229-19-5, la France peut immobiliser un navire battant pavillon français ou peut prononcer une décision d’expulsion à l’encontre d’un navire ne battant pas pavillon français. Cette décision ne porte que sur un seul navire d’une compagnie en manquement.

Dans un second temps, conformément à l’article L. 229-19-6, lorsqu’une compagnie maritime a fait l’objet d’une décision d’expulsion ou que l’un des navires dont elle a la responsabilité a fait l’objet d’une décision d’immobilisation conformément à la première étape, la France doit immobiliser tout navire exploité par cette compagnie battant pavillon français ou doit refuser l’accès à ses ports pour tout navire exploité par cette compagnie ne battant pas pavillon français. Tous les navires exploités par la compagnie sont alors concernés.

B.   Les dispositions adoptÉes par le SÉnat

1.   L’examen en commission

La commission a adopté l’amendement de coordination COM-15 du rapporteur M. Cyril Pellevat (Les Républicains).

Il abroge l’article L. 671-1 du code de l’environnement, suite à l’abrogation de l’article L. 218-25 du même code. En effet cet article L. 671-1 précise que l’article L. 218-25 du code de l’environnement n’est pas applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Par ailleurs, le Sénat a procédé à une renumérotation de la sous-section comprenant les dispositions particulières aux compagnies maritimes : la sous‑section 4 prévue par le projet de loi initial devient la sous-section 3 bis (une sous-section 4 existant déjà dans le code de l’environnement). Cela a donné lieu en conséquence à une renumérotation des articles associés : l’article L. 229-19-1 devient l’article L. 229-18-3, l’article L. 229-19-2 devient l’article L. 229-18-4, l’article L. 229-19-3 devient l’article L. 229-18-5, l’article L. 229-19-4 devient l’article L. 229-18-6, l’article L. 229-19-5 devient l’article L. 229-18-7, et l’article L. 229-19-6 devient l’article L. 229-18-8. Les dispositions relatives aux articles L. 226-3, L. 226-10 et L. 226-11 ont par ailleurs été déplacées au sein de l’article 16.

2.   L’examen en séance publique

Aucun amendement n’a été adopté en séance publique.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté huit amendements du rapporteur pour avis M. Damien Adam (Renaissance) : les amendements rédactionnels CD37, CD44 et CD41, les amendements de coordination CD45 et CD26, suite à l’abrogation de l’article L. 218-25 du code de l’environnement et du 3° de l’article L. 5141-4-6 du code des transports, les amendements CD66 et CD67 visant à corriger ou compléter une référence, en cohérence avec le droit européen, ainsi que l’amendement de précision CD68, qui reprend la formulation du paragraphe 3 de l’article 20 du règlement 2015/757 révisé. Elle a ensuite émis un avis favorable à l’adoption de l’article 16 ainsi modifié.

*

*     *

Article 17
Obligations applicables au titre du régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale (Corsia)

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur cet article. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 17 vise à préciser les obligations applicables au titre du régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale (Corsia), dans le cadre de son articulation avec le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne.

I.   Le droit en vigueur

A.   Le droit europÉen

Lors de la mise en place du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE) pour l’aviation en 2013, l’ensemble des vols intra‑européens et extra-européens y étaient soumis. Suite à la pression de pays tiers, notamment la Chine, les États-Unis, la Russie et l’Inde, la décision « stop the clock » ([152]) d’avril 2013 a suspendu temporairement l’application de ce système aux vols extra-européens. Seuls les vols intra-européens sont désormais inclus dans le SEQE‑UE, en attendant la mise en place d’un accord international visant à réduire les émissions de dioxyde de carbone (CO2) du secteur de l’aviation. Depuis la décision « stop the clock », cette suspension a été prolongée jusqu’au 31 décembre 2026 ([153]).

1.   La mise en place d’un mécanisme mondial de réduction des émissions de dioxyde de carbone du secteur de l’aviation

L’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) a adopté en 2016 une résolution visant à mettre en œuvre un régime de compensation et de réduction de carbone de l’aviation internationale, ou « Carbon Offsetting and Reduction Scheme for International Aviation » (Corsia).

Ce mécanisme repose sur une obligation d’achat de crédits de compensation des émissions de CO2 pour compenser les émissions annuelles supérieures à un certain seuil. Ce seuil était, à l’origine de la mise en place du régime Corsia, basé sur les émissions de l’année 2020, cohérent avec l’objectif que s’était fixé le secteur aérien de « croissance neutre en carbone » dès 2020. Cependant, suite à la crise sanitaire du Covid-19, les émissions de l’année 2019 ont été retenues, sur la base d’un seuil fixé à 85 % des émissions de l’année 2019, pour chaque année à partir de 2024. Un dispositif de surveillance, de déclaration et de vérification des données relatives aux émissions de CO2 est donc mis en œuvre pour calculer les obligations de compensation du secteur aérien mondial.

D’après la liste publiée par l’OACI en octobre 2023, 126 États participent au régime Corsia à partir du 1er janvier 2024. La mise en œuvre effective et universelle de ce dispositif est prévue à partir de 2027, après la mise en place d’une phase basée sur le volontariat entre 2021 et 2026, dont une phase « pilote » entre 2021 et 2023. Des exemptions à ce mécanisme sont prévues, notamment pour les pays les moins développés, certains pays insulaires ou ayant un poids faible dans le trafic aérien mondial.

2.   Une articulation nécessaire entre le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne et le régime Corsia

La directive SEQE-UE a été révisée en 2023 ([154]) pour expliciter la séparation des vols intra-européens soumis au SEQE-UE et des vols extra-européens soumis au régime Corsia, et en préciser les exigences.

Les dispositions relatives au régime Corsia sont incluses au paragraphe 6 de l’article 12 de la directive SEQE-UE modifiée. Chaque année avant le 30 novembre, les États membres sont responsables du calcul des exigences de compensation et de la transmission de cette information aux exploitants d’aéronefs. Pour une année suivant une période de conformité (période de trois ans), l’autorité compétente doit évaluer, avant le 30 novembre, le nombre total d’unités de compensation dont un exploitant d’aéronef est redevable pour la période de conformité concernée. Une méthode sera proposée par la Commission européenne afin de préciser le calcul des exigences de compensation avant le 30 juin 2024, tel qu’indiqué au paragraphe 8 du même article 12 de la directive.

L’exploitant d’aéronef doit alors procéder à l’annulation des unités de compensation dont il est redevable pour la période de conformité, au plus tard le 31 janvier 2025 pour la période 2021-2023, et le 31 janvier 2028 pour la période 2024-2026, conformément au paragraphe 9 du même article.

Selon le paragraphe 6 de l’article 12, les États membres communiquent le niveau de compensation aux exploitants d’aéronefs qui remplissent les conditions cumulatives suivantes :

– ils sont titulaires d’un certificat de transporteur aérien délivré par un État membre ou sont enregistrés dans un État membre, y compris dans les régions ultrapériphériques, les dépendances et les territoires de cet État membre ;

– ils produisent des émissions annuelles de CO2 supérieures à 10 000 tonnes, qui proviennent de l’utilisation d’avions ayant une masse supérieure à 5 700 kilogrammes.

L’article 28 quater de la directive SEQE-UE révisée habilite la Commission à adopter des actes délégués en vue de la surveillance, de la déclaration et de la vérification appropriées des émissions aux fins de l’application du régime Corsia ([155]).

Une clause de revoyure est mise en place sur l’articulation entre le SEQE‑UE et le régime Corsia. Cette clause apparaît aux paragraphes 2 et 3 de l’article 28 ter de la directive SEQE-UE révisée. Ainsi, au plus tard le 1er juillet 2026, un rapport de la Commission européenne devra évaluer l’intégrité environnementale du mécanisme de marché mondial de l’OACI, et notamment son ambition générale. Ce rapport sera accompagné, s’il y a lieu, d’une proposition législative visant à modifier la directive SEQE-UE. Cette proposition législative pourrait inclure dans le SEQE-UE, le cas échéant, les vols au départ de l’Espace économique européen et à destination de pays tiers, et exclure les vols en provenance de pays tiers, à partir de janvier 2027. Cette proposition législative est soumise aux conditions alternatives suivantes :

– au plus tard le 31 décembre 2025, l’assemblée de l’OACI n’a pas renforcé le Corsia dans le cadre de l’atteinte de ses objectifs, notamment ceux de l’accord de Paris ;

– les États énumérés dans l’acte d’exécution ([156]) adopté en vertu de l’article 25 bis, paragraphe 3, soumis au régime Corsia, représentent au moins 70 % des émissions de l’aviation internationale.

B.   Le droit national

Aucune disposition relative au mécanisme Corsia n’est présente dans le droit national.

II.   Le dispositif proposÉ

A.   Le texte initial du projet de loi

L’article 17 transpose dans le droit national les obligations applicables aux exploitants d’aéronefs et à l’autorité administrative compétente, au titre du régime Corsia. Le paragraphe 6 de l’article 12 de la directive SEQE-UE révisée est ainsi transposé à cette fin.

L’article 17 créé ainsi une nouvelle section 10 au sein du chapitre IX du titre II du livre II du code de l’environnement, comportant quatre articles L. 229-70 à L. 229-73.

Un décret en Conseil d’État peut préciser les modalités d’application de cette section, notamment concernant les catégories d’exploitants d’aéronefs et vols concernés, ainsi que les modalités d’annulation des unités de compensation, conformément à l’article L. 229-73.

1.   La section créée précise le périmètre d’application du Corsia

Les exploitants d’aéronefs titulaires d’un certificat de transporteur aérien délivré par la France, ou immatriculés en France, devront appliquer le régime Corsia, conformément à l’article L. 229-70 créé au sein du code de l’environnement. Cet article reprend l’approche « séparée » de la Commission européenne, appliquant le SEQE-UE aux vols intra-européens et le Corsia aux vols extra‑européens.

Les dispositions de la section 10 relative aux obligations liées au Corsia s’appliquent ainsi, conformément au I de l’article L. 229-70, aux vols effectués entre un pays appliquant le Corsia et :

– un pays appartenant à l’Espace économique européen ;

– la Suisse ;

– le Royaume-Uni ;

– un autre pays appliquant le Corsia.

Le II de l’article L. 229-70 étend le champ d’application du Corsia aux vols des collectivités territoriales régies par l’article 74 de la Constitution, ou d’autres territoires mentionnés dans l’annexe II du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Les dispositions de la section 10 s’appliquent alors aux vols reliant ces collectivités territoriales ou territoires à :

– un autre pays appartenant à l’Espace économique européen (y compris dans les régions ultrapériphériques), ou un territoire mentionné à l’annexe II du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ;

– la Suisse ;

– le Royaume-Uni ;

– un autre pays appliquant le Corsia.

Les pays appliquant le Corsia sont ceux mentionnés dans l’acte d’exécution adopté en application de l’article 25 bis de la directive SEQE-UE.

2.   Les exigences de compensation, l’obligation de conformité et les sanctions associées sont insérées dans le droit national

Un exploitant doit compenser ses émissions de gaz à effet de serre en procédant à l’annulation d’unités de compensation dont le nombre est communiqué par l’autorité administrative compétente. Cette compensation est effectuée à l’issue d’une période de trois ans, appelée « période de conformité » (2021-2023, 2024‑2026, jusqu’à 2035), définie dans les normes et pratiques recommandées de l’annexe 16 de l’OACI. La directive SEQE-UE ne mentionne que les deux premières périodes de conformité, tandis que le projet de loi les définit jusqu’en 2035, afin de prendre en compte l’application du Corsia prévue jusqu’en 2035 par l’OACI.

Le nouvel article L. 229-71 inséré dans le code de l’environnement précise, dans son I, les exigences relatives au calcul des unités de compensation par l’autorité administrative compétente, et dans son II, l’exigence d’annulation de ces unités pour l’exploitant.

Ainsi, chaque année avant le 30 novembre, l’autorité compétente doit évaluer le nombre d’unités de compensation dont chaque exploitant d’aéronef est redevable, et l’en informer. Pour les années suivant une période de conformité, l’autorité compétente doit évaluer, avant le 30 novembre, le nombre total d’unités de compensation dont il est redevable pour la période de conformité concernée. L’exploitant doit alors procéder à l’annulation des unités de compensation dont il est redevable pour la période de conformité, au plus tard le 31 janvier de la deuxième année suivant une période de conformité.

Le nouvel article L. 229-72 du code de l’environnement prévoit des sanctions en cas de manquement de l’exploitant d’aéronef vis-à-vis de ses obligations de compensation.

Tout d’abord, si l’exploitant n’a pas justifié du respect de ses obligations de compensation, l’autorité administrative compétente le met en demeure d’y satisfaire dans le délai d’un mois. Elle peut prolonger cette mise en demeure d’un mois supplémentaire. La mise en demeure doit mentionner la sanction applicable et donner la possibilité à l’exploitant de transmettre des observations écrites.

À l’issue de ce délai, l’autorité administrative compétente notifie à l’exploitant d’aéronef la confirmation qu’il a rempli son obligation de compensation, ou qu’il ne s’est pas conformé à cette obligation. Dans ce cas, elle prononce une amende à hauteur des émissions non compensées.

Le montant de l’amende est de 100 euros par tonne de gaz à effet de serre émise pour laquelle l’obligation de compensation n’a pas été satisfaite. L’exploitant doit par ailleurs s’acquitter de l’obligation de compensation au plus tard l’année suivante. Le recouvrement de l’amende est effectué au profit du Trésor public comme en matière de créances étrangères à l’impôt et au domaine. Le montant de cette amende a été choisi pour s’aligner avec la règlementation SEQE-UE, et en cohérence avec le dispositif de compensation des vols effectués à l’intérieur du territoire national, issu de l’article 147 de la loi « climat et résilience » ([157]).

Cette sanction, si elle est définitive, peut être rendue publique.

B.   Les dispositions adoptÉes par le SÉnat

1.   L’examen en commission

La commission a adopté quatre amendements du rapporteur M. Cyril Pellevat (Les Républicains).

L’amendement COM-16, de coordination, a modifié l’emplacement de la section créée dans le code environnement et, en conséquence, procédé à la renumérotation des articles créés. La division relative au mécanisme Corsia devient désormais la sous-section 2 de la section 7 « Réductions d’émissions issues de projets de compensation des émissions de gaz à effet de serre » du chapitre IX du titre II du livre II du code de l’environnement. En effet, cette section 7 comprenait déjà une sous-section relative aux obligations de compensation des émissions de gaz à effet de serre des vols effectués à l’intérieur du territoire national, issue de la loi dite « climat et résilience ». En conséquence, l’article L. 229-70 devient l’article L. 229-60-1, l’article L. 229-71 devient l’article L. 229-60-2, l’article L. 229-72 devient l’article L. 229-60-3 et l’article L. 229-73 devient l’article L. 229-60-4.

La commission spéciale a également adopté l’amendement de précision COM-17. Dans l’article L. 229-70 (devenu L. 229-60-1), le périmètre de vols de/ou vers « une collectivité territoriale régie par l’article 74 de la Constitution » a été remplacé par « un pays et territoire d’outre-mer ». Cette mention permet notamment de ne pas prendre en compte Saint-Martin, une région ultrapériphérique appartenant également aux collectivités territoriales régies par l’article 74 de la Constitution, dans le champ d’application du régime Corsia. En effet, les régions ultrapériphériques sont concernées par le SEQE-UE (bien qu’exonérées jusqu’à 2030).

La commission spéciale a par ailleurs adopté l’amendement rédactionnel COM-18 et l’amendement COM-19 visant à aligner le régime de sanctions Corsia avec celui mis en place pour la restitution de quotas au titre du SEQE-UE. À cette fin, il :

– supprime la faculté pour l’autorité administrative de prolonger d’un mois le délai de la mise en demeure ;

– prévoit la publication obligatoire du nom de l’exploitant lorsqu’une décision prononçant une amende devient définitive ;

– ouvre la possibilité de prononcer une interdiction d’exploitation à l’encontre d’un exploitant d’aéronef qui ne se conforme pas aux exigences de compensation au titre du mécanisme Corsia.

2.   L’examen en séance publique

Aucun amendement n’a été adopté en séance publique.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté trois amendements rédactionnels CD27, CD28 et CD29 du rapporteur pour avis M. Damien Adam (Renaissance), puis elle a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 17 ainsi modifié.

*

*     *

Chapitre IV
Dispositions en matière de droit de l’énergie

Article 18
Abrogation de l’article L. 321-19 du code de l’énergie relatif au dispositif d’interruptibilité

 

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économique s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

 

Article adopté sans modification

 

Cet article vise à abroger l’article L 321-19 du code de l’énergie, qui constitue une base juridique obsolète pour la disposition d’interruptibilité, qui est désormais défini au niveau européen et décliné par voie réglementaire.

Cet article n’a pas fait l’objet de modification lors de son examen en commission.

I.   Le droit en vigueur

A.   Un mécanisme institué en 2011 afin de garantir la résilience du réseau électrique national

Le dispositif dit « d’interruptibilité » est un mécanisme institué par l’ordonnance du 9 mai 2011 ([158]) prise en application de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 ([159]) et qui permet au gestionnaire du réseau public de transport d’électricité d’interrompre la consommation d’électricité de certains consommateurs finaux en cas d’urgence. Il est défini à l’article L 321-19 du code de l’énergie.

Article L 321-19 du code de l’énergie

« Lorsque le fonctionnement normal du réseau public de transport est menacé de manière grave et immédiate ou requiert des appels aux réserves mobilisables, le gestionnaire du réseau public de transport procède, à son initiative, à l’interruption instantanée de la consommation des consommateurs finals raccordés au réseau public de transport et à profil d’interruption instantanée.

Les sujétions de service public ainsi imposées aux consommateurs finals agréés à profil d’interruption instantanée font l’objet d’une compensation par le gestionnaire du réseau public de transport au titre du coût de la défaillance à éviter, dans la limite d’un plafond annuel de 120 € par kilowatt.

Le niveau des tarifs d’utilisation du réseau de transport d’électricité prend en compte les effets d’une modification des conditions dans lesquelles le gestionnaire du réseau public de transport compense les sujétions imposées aux consommateurs finals agréés, dès l’entrée en vigueur de cette modification.

Le volume de capacités interruptibles à contractualiser par le gestionnaire de réseau public de transport est fixé par arrêté du ministre chargé de l’énergie.

Les conditions d’agrément des consommateurs finals à profil d’interruption instantanée, les modalités techniques générales de l’interruption instantanée et les conditions dans lesquelles le gestionnaire du réseau public de transport compense les consommateurs finals agréés sont fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie et de l’énergie, après avis de la Commission de régulation de l’énergie ».

L’existence de ce dispositif répond à la nécessité de maintenir l’équilibre du réseau et de prévenir les risques de panne généralisée (« black-out »), tout en offrant une assurance de réactivité et de fiabilité au système électrique français. De tels cas d’urgence se présentent lorsque le fonctionnement normal du réseau public de transport est menacé de manière grave et immédiate ou requiert des appels aux réserves mobilisables. Les consommateurs finaux concernés sont recrutés par appels d’offres, en fonction de leur capacité à adapter leur consommation électrique et de l’impact de cette dernière sur la stabilité d’ensemble du réseau électrique. Il s’agit essentiellement de grands industriels.

Avant son intégration en 2021 en tant que service de défense de participation active de la demande dans le plan de défense du gestionnaire du réseau, sur la base du règlement « ER » du 24 novembre 2017, ce dispositif reposait sur le recrutement de deux catégories de sites selon le délai d’activation de leur interruptibilité et leur disponibilité annuelle :

–  une première catégorie dont le délai d’activation était compris entre 0 et 5 secondes devait présenter une disponibilité annuelle supérieure à 7 500 heures. Cette catégorie représentait un volume maximal de 1 000 MW sélectionné par appels d’offres annuels avec une compensation maximale de 90 k€/MW ;

–  une seconde catégorie dont le délai d’activation était compris entre 5 et 30 secondes devait présenter une disponibilité annuelle supérieure à 4 500 heures. Cette catégorie représentait un volume maximal de 600 MW sélectionné par appels d’offres annuels avec une compensation maximale de 30 k€/MW.

Le coût de ce dispositif était plafonné à 108 M€ par an avant son évolution en 2021. En pratique, néanmoins, la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) a indiqué à votre rapporteur que « les montants globaux mobilisés en 2021, sous l’ancien dispositif, et en 2022 sous le nouveau, ont été du même ordre de grandeur, autour de 75 M€ pour des volumes souscrits également d’environ 1 200 MW ».

B.   La nécessité d’éviter le risque d’une requalification en aide d’état non NOTIFIÉE

Le dispositif d’interruptibilité a été intégré en tant que « service de participation active de la demande » au sein du plan de défense du réseau électrique, sur la base du règlement (UE) 2017/2196 du 24 novembre 2017 ([160]), dit règlement « ER », en vigueur depuis le 18 décembre 2017.

Le règlement (UE) 2017/2196 du 24 novembre 2017

En vigueur depuis le 18 décembre 2017, le règlement (UE) 2017/2196 de la Commission du 24 novembre 2017 établissant un code de réseau sur l’état d’urgence et la reconstitution du réseau électrique, dit règlement « ER », fixe un cadre européen pour la gestion des états d’urgence et la restauration du réseau électrique.

Ce règlement vise à harmoniser les actions des États membres en cas de crise énergétique au sein de l’Union européenne, notamment par la définition de protocoles que les gestionnaires de réseau de transport doivent mettre en œuvre dans des situations critiques. L’ensemble des actions automatiques à mettre en œuvre pour protéger le système électrique, en cas d’évènement dont la rapidité ne permet pas une intervention humaine, constitue le plan de défense du réseau.

Sur le fondement de l’article 3 de ce règlement, l’opérateur RTE a été défini comme fournisseur de services de défense et de services de reconstitution, dans la mesure où la gestion du réseau de transport constitue l’un des pans, tant du plan de défense que du plan de reconstitution du réseau. À ce titre, RTE élabore et met en œuvre un plan de défense du réseau (articles 11 et 12 du règlement ER), de même qu’un plan de reconstitution du réseau (articles 23 et 24 du règlement ER).

Parmi les mesures visées par le plan de défense du réseau, figurent les services dits « de participation active de la demande », qui recouvrent l’actuel dispositif d’interruptibilité. Le gestionnaire du réseau de transport (GRT) dispose ainsi de la capacité de diminuer la consommation des fournisseurs de participation active de la demande (en l’occurrence, certains types de consommateurs finals), dans le but de rétablir l’équilibre entre la production et la consommation, afin d’éviter in fine de devoir recourir à un délestage et éventuellement déboucher sur une panne généralisée (« blackout »).

Source : Direction générale de l’énergie et du climat.

Parallèlement à l’entrée en vigueur de ce règlement, la Commission européenne a ouvert en 2017 une procédure d’office concernant la compatibilité du dispositif français d’interruptibilité, tel que défini à l’article L.321-19 du code de l’énergie, avec les règles européennes en matière d’aides d’État.

Elle considérait, en effet, que la définition des modalités des appels d’offres relatifs à l’interruptibilité « par arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie et de l’énergie, après avis de la Commission de régulation de l’énergie » était de nature à faire de ce dispositif une aide d’État non notifiée, en méconnaissance de l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).

Ainsi que l’a indiqué la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) à votre rapporteur, un accord a été trouvé entre le Gouvernement et la Commission européenne à ce sujet. Le Gouvernement a accepté de clarifier le droit existant, en intégrant ce dispositif en tant que « service auxiliaire de défense » au sein du plan de défense de RTE, au titre du règlement ER. Ce dispositif se trouve ainsi, dès lors, mis en œuvre par RTE sous la supervision de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), qui en fixe les modalités en lieu et place de l’État.

Depuis 2021, sur la base de ce nouveau cadre réglementaire qui s’appuie uniquement sur les dispositions du règlement européen ER, c’est donc RTE qui lance et contractualise directement l’appel d’offres au titre du mécanisme d’interruptibilité, désormais renommé « service de participation active de la demande » ([161]).

C.   L’abrogation d’une disposition désormais sans objet

L’abrogation de l’article 321-19 du code de l’énergie est strictement formelle : le mécanisme d’interruptibilité est désormais mis en œuvre par RTE sur le fondement des dispositions du règlement « ER », dont l’article L. 321-19 ne constitue donc plus la base juridique.

L’arrêté d’application de cet article, pris le 22 décembre 2015, a d’ailleurs été abrogé dès 2022 ([162]). Les échanges conduits par votre rapporteur avec RTE et la CRE confirment la dimension strictement formelle de cette abrogation.

II.   Le dispositif proposé

L’article 18 abroge l’article L. 321-19 du code de l’énergie.

III.   Les modifications apportées par le Sénat

L’article 18 a été adopté sans modification par la commission spéciale du Sénat, dans le cadre de la procédure de législation en commission.

IV.   Les modifications apportÉes par la commission

Cet article n’a pas fait l’objet de modification lors de son examen en commission.

*

*     *

Article 19
Actualisation de la définition de l’hydrogène renouvelable et de l’hydrogène bas carbone (article L. 811-1 du code de l’énergie)

 

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économique s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

 

Article adopté sans modification

 

Cet article vise à aligner la définition de l’hydrogène renouvelable et bas carbone telle que prévue au sein du code de l’énergie, avec le contenu des actes délégués 1184 et 1195/2023 du 10 février 2023, qui sont venus préciser la définition de l’hydrogène renouvelable et de l’hydrogène bas carbone retenue au sein de la directive 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, dite directive « RED II ».

Cet article n’a pas fait l’objet de modification lors de son examen en commission.

I.   Le droit en vigueur

A.   une définition juridique anticipée de l’hydrogène sur le fondement de la loi « énergie-climat »

La loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, dite loi « Énergie-climat », a habilité le Gouvernement à prendre une ordonnance relative à l’hydrogène.

L’article 52 de la loi prévoyait en effet l’habilitation du Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi visant à « définir la terminologie des différents types d’hydrogène en fonction de la source d’énergie utilisée pour sa production » et permettant de fixer un « cadre de soutien applicable à l’hydrogène produit à partir d’énergie renouvelable ou par électrolyse de l’eau à l’aide d’électricité bas carbone ». Le champ de cette ordonnance intégrait également l’adoption de dispositions visant à permettre « la production, le transport, le stockage et la traçabilité de l’hydrogène ».

Cette ordonnance a été prise le 17 février 2021 ([163]) et son article 5 a créé, au sein du code de l’énergie, un nouveau livre consacré à l’hydrogène (livre VIII). Un nouvel article L. 811-1 vient définir, en conséquence, l’hydrogène comme un « gaz composé, dans une proportion déterminée par arrêté du ministre chargé de l’énergie, de molécules de dihydrogène, obtenu après mise en œuvre d’un procédé industriel ». Ce même article distingue également les trois catégories d’hydrogène suivantes :

–  l’hydrogène renouvelable, qui est produit à partir d’intrants renouvelables ou d’électricité renouvelable et doit respecter un seuil d’émission de gaz à effet de serre défini par voie réglementaire ;

–  l’hydrogène bas-carbone, qui respecte le même seuil mais n’a pas été produit à partir d’intrants renouvelables ;

–  l’hydrogène carboné, qui rassemble l’ensemble des types d’hydrogène ne respectant pas le seuil d’émission de gaz à effet de serre précité.

L’article 5 de cette ordonnance a également créé un nouveau chapitre au sein du code de l’énergie consacré au soutien de « la production d’hydrogène renouvelable ou d’hydrogène bas-carbone par électrolyse de l’eau » (article L. 812-1). Ses différents articles (L. 812-1 à L. 812-10) fixent notamment les modalités de sélection des installations ou des projets qui peuvent bénéficier de ce soutien.

Ces évolutions législatives ont été élaborées avec les acteurs de la filière afin de leur permettre de se développer rapidement, comme l’ont rappelé les représentants de la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) à votre rapporteur. Elles sont donc intervenues « en avance de phase » par rapport à un cadre européen encore en cours de définition. L’adoption de la directive RED II en 2018 nécessitait en effet la prise d’actes délégués permettant de la rendre pleinement opérationnelle.

A.   Des dispositions actualisées dans le cadre de la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables

Les dispositions du code de l’énergie relatives à l’hydrogène ont fait l’objet de modifications substantielles dans le cadre de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables.

L’article 81 de cette loi, issu de plusieurs amendements parlementaires, renforce le dispositif de soutien au développement de l’hydrogène en procédant à plusieurs modifications du cadre défini initialement en 2021.

Il prévoit, en premier lieu, que la Commission de régulation de l’énergie (CRE) peut désormais « concourir au déploiement des installations de production d’hydrogène renouvelable ou bas-carbone » (article L. 131-2-1 du code de l’énergie). Il donne par ailleurs une base légale à « l’autorité organisatrice d’un réseau public de distribution d’électricité et de gaz » pour soutenir également ces projets (article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales).

Cet article complète, en outre, l’article L. 811-1 précité afin de prévoir que l’électricité permettant de produire de l’hydrogène par électrolyse peut être fournie « dans le cadre d’une opération d’autoconsommation individuelle ou collective ».

Cet article a également modifié en profondeur l’article L. 812-3 du code de l’énergie afin de créer un bilan carbone qui conditionne l’accès de l’hydrogène renouvelable ou bas-carbone au dispositif de soutien public. Il prévoit ainsi que ce bilan doit inclure « au moins l’analyse de l’étape du cycle de vie jugée la plus pertinente au regard de l’objectif de discrimination effective entre les projets parmi les étapes de l’extraction, de la fabrication, du transport, de l’utilisation et de la fin de vie des installations ». Ce même article indique, à cette occasion, que « les modalités d’évaluation et de prise en compte de ce bilan carbone varient selon les filières et selon les technologies ».

Enfin, l’article 81 de la loi n° 2023-175 a également permis d’expérimenter, pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de cette loi, la création d’un « référent unique rassemblant les services chargés de l’instruction des autorisations relevant de la compétence des administrations de l’État, de ses établissements publics administratifs ou d’organismes et de personnes de droit public et de droit privé chargés par lui d’une mission de service public administratif ». Le rôle de ce référent est de faciliter l’accès aux financements pour les porteurs de projets.

L’adoption de ces dispositions répondait néanmoins davantage à la volonté d’accélérer la production des énergies renouvelables et de l’hydrogène qu’à celle de recenser exhaustivement des modifications à apporter au cadre national pour l’adapter aux évolutions européennes. En outre, pour des raisons de calendrier, ce véhicule législatif n’a pas permis de procéder à toutes les modifications utiles.

B.   unE ACTUALISATION DE l’article L. 811-1 du code de l’énergie nécessaire pour respecter un cadre européen désormais stabilisé

Le cadre juridique européen applicable à l’hydrogène s’est stabilisé en 2023 à la suite de l’adoption de deux règlements délégués complétant la directive 2018/2001 du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, dite directive « RED II ».

Pour mémoire, une première directive, dite « RED I », avait été adoptée en 2009. Elle prévoyait que 20 % de la consommation finale brute d’énergie de l’Union et 10 % de la consommation d’énergie du secteur des transports de chaque État membre devaient provenir de sources d’énergies renouvelables à l’horizon 2020. Cette directive définissait, à cet égard, les mécanismes de soutien mobilisables par les États membres et des critères de durabilité pour les biocarburants.

Dans le cadre du paquet « Une énergie propre pour tous les Européens » une directive RED II a été adoptée en 2018. Cette directive a rehaussé le niveau d’ambition de l’Union européenne dans ce domaine, avec une cible contraignante de 32 % de la part d’énergie produite à partir de sources renouvelables dans la consommation finale d’énergie de l’Union à horizon 2030. Cette directive a prévu en conséquence, ainsi que l’a rappelé la DGEC à votre rapporteur, « des sous-objectifs de consommation dans le transport et l’industrie et des besoins de consommation en carburants renouvelables d’origine non biologique [Renewable Fuels of Non Biological Origin, RFNBO] », notion qui intègre l’hydrogène renouvelable. Elle a néanmoins renvoyé à deux actes délégués le soin de préciser la définition de cette notion, tout en prévoyant que cette définition devra prévoir une réduction d’émission de gaz à effet de serre d’au moins 70 % à l’utilisation par rapport à un combustible fossile de référence.

Deux règlements 2023/1184 et 2023/1185 du 10 février 2023 ont précisé ces éléments.

Le règlement délégué 2023/1184 a complété la définition des carburants renouvelables d’origine non biologique en indiquant de quelle façon l’électricité pouvait être comptabilisée comme entièrement renouvelable et en précisant la méthodologie à suivre pour calculer les émissions associées à la production de ces carburants, dont l’hydrogène renouvelable non biologique et ses dérivés font partie.

Le règlement délégué 2023/1185 a rappelé que le seuil d’émission de gaz à effet de serre devait être vérifié en comptabilisant l’ensemble des étapes entre la production et l’utilisation du RFNBO ainsi que les éventuelles émissions dues au stockage géologique du CO2.

Ces évolutions du droit européen rendent nécessaire l’adaptation de l’article L. 811-1 du code de l’énergie, afin qu’il puisse prévoir que le seuil d’émission de gaz à effet de serre par l’hydrogène considéré comme renouvelable ou bas-carbone soit vérifié non seulement au moment de sa production, mais aussi lors de son utilisation.

II.   Le dispositif proposé

L’article 19 vise à compléter l’article L. 811-1 du code de l’énergie pour préciser que le seuil d’émission de gaz à effet de serre en dessous duquel l’hydrogène peut être qualifié de renouvelable ou de bas-carbone doit également être vérifié lors de l’utilisation de cette énergie renouvelable, conformément aux dispositions du droit européen en vigueur.

III.   Les modifications apportées par le Sénat

L’article 19 a été modifié lors de son examen devant le Sénat, au stade de la procédure de législation en commission.

La commission spéciale du Sénat a en effet adopté un amendement COM-25 déposé par le rapporteur, M. Pellevat, qui consolide les modalités de calcul prévues pour l’hydrogène renouvelable ou bas-carbone.

Cet amendement précise, au sein de l’article L. 811-1, les différentes catégories d’émissions prévues par le droit européen. Les catégories d’émissions ainsi ajoutées sont les suivantes : fourniture des intrants, transformation, transport, distribution, combustion lors de l’utilisation finale, captage et stockage géologique du carbone.

Dans une logique similaire, cet amendement rappelle également que la même méthodologie s’applique pour les carburants liquides et gazeux renouvelables d’origine non biologique destinés au secteur des transports et aux carburants à base de carbone recyclé, définis dans l’article L. 282-2 du code de l’énergie. Cette précision est conforme au contenu de l’annexe A.1 du règlement délégué (UE) 2023/1185 du 10 février 2023 complétant la directive (UE) 2018/2001.

Votre rapporteur considère que ces modifications, effectuées dans un souci de complétude, apportent davantage de lisibilité à cet article, bien qu’elles ne soient pas indispensables sur un plan strictement juridique.

IV.   Les modifications apportÉes par la commission

Cet article n’a pas fait l’objet de modification lors de son examen en commission.

*

*     *

Chapitre V
Dispositions relatives aux contrats de concessions aéroportuaires

Article 20
Suppression du principe de modération tarifaire pour les premiers tarifs
de redevance aéroportuaire d’un nouveau contrat de concession

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur cet article. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 20 supprime le principe de modération tarifaire pour les premiers tarifs de redevance aéroportuaire d’un nouveau contrat de concession. Il étend également le champ de l’avis de l’ART dans le cadre de l’avis conforme rendu lors de la conclusion de contrats de régulation économique.

I.   Le droit en vigueur

A.   Le droit europÉen

La directive 2009/12/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2009 sur les redevances aéroportuaires régit les règles relatives aux redevances perçues par les exploitants d’aéroports. Elle établit des principes communs pour la perception de redevances aéroportuaires dans les aéroports communautaires. Elle « s’applique à tout aéroport situé sur un territoire relevant du traité, ouvert au trafic commercial et dont le trafic annuel dépasse cinq millions de mouvements de passagers, ainsi qu’à l’aéroport enregistrant le plus grand nombre de mouvements de passagers dans chaque État membre ».

L’article 3 de la directive précise que les États membres doivent veiller à ce que les redevances aéroportuaires n’entraînent pas de discrimination entre les usagers d’aéroport, ce qui n’empêche pas leur modulation pour des motifs d’intérêt général, y compris environnemental.

L’article 6 de la directive définit les modalités de la consultation des usagers avant la mise en œuvre de nouveaux tarifs : « Les États membres veillent à ce qu’une procédure obligatoire de consultation régulière des usagers d’aéroport ou des représentants ou associations des usagers d’aéroport par l’entité gestionnaire d’aéroport soit mise en place en ce qui concerne l’application du système de redevances aéroportuaires, le niveau des redevances aéroportuaires et, s’il y a lieu, la qualité du service fourni ». Une autorité de supervision indépendante, dont les missions sont définies à l’article 11 de la même directive, veille à la bonne application des principes fixés par la directive.

B.   Le droit national

L’article L. 6325‑1 du code des transports permet aux exploitants d’aéroports de percevoir des redevances pour service rendu, en contrepartie des services publics aéroportuaires rendus sur la plateforme. L’article R. 224‑1 du code de l’aviation civile définit les services publics aéroportuaires comme « les services rendus aux exploitants d’aéronefs et à leurs prestataires de service à l’occasion de l’usage de terrains, d’infrastructures, d’installations, de locaux et d’équipements aéroportuaires fournis par l’exploitant d’aérodrome, dans la mesure où cet usage est directement nécessaire, sur l’aérodrome, à l’exploitation des aéronefs ou à celle d’un service de transport aérien ».

1.   L’homologation des tarifs par une autorité administrative indépendante

Préalablement à leur entrée en vigueur, les tarifs des redevances pour service rendu perçues par certains aéroports sont soumis à une homologation par l’autorité administrative compétente (article R. 224‑3‑2 du code de l’aviation civile). L’ordonnance n° 2019‑761 du 24 juillet 2019 relative au régulateur des redevances aéroportuaires, qui transposait la directive 2009/12/CE, a confié la compétence d’homologation à l’Autorité de régulation des transports (ART).

Aux termes du II de l’article L. 6327‑2 du code des transports, l’ART doit également s’assurer, lorsqu’elle homologue les tarifs des redevances, que leur évolution est modérée par rapport aux tarifs en vigueur. Cette modération, non définie par les textes législatifs et réglementaires, a « pour seul objet de protéger les usagers d’une hausse excessive » des tarifs, comme l’a précisé le Conseil d’État dans une décision n° 424088, Chambre syndicale du transport aérien, du 31 décembre 2019.

Lors de l’examen des tarifs des redevances soumis à son homologation, l’ART apprécie au cas par cas la règle de modération tarifaire, en prenant en compte notamment les projets prévus par la plateforme, l’évolution du niveau de service rendu aux usagers et l’avis des usagers.

La décision d’homologation ou non d’un tarif par l’ART peut faire l’objet d’un recours devant le Conseil d’État. Les décisions du Conseil d’État rendues en matière de redevances aéroportuaires autorisent des niveaux de hausse compris entre 0 et 5 %. L’Autorité s’est déjà fondée sur cette jurisprudence pour s’opposer à certaines demandes d’homologation. C’était notamment le cas dans sa décision n° 2023‑005 du 26 janvier 2023 relative à la demande d’homologation des tarifs des redevances aéroportuaires applicables à l’aéroport de Bordeaux-Mérignac à compter du 1er avril 2023.

À noter que le principe de modération tarifaire n’apparaît pas dans la directive 2009/12/CE : les États membres n’ont donc pas l’obligation communautaire de prévoir que l’évolution des tarifs des redevances aéroportuaires soit modérée.

2.   Un principe inadapté au renouvellement des contrats de concession

Le principe de modération tarifaire prévu au II de l’article L. 6327‑2 du code des transports pose problème lors du renouvellement d’un contrat de concession. Dans le cadre de l’exploitation d’un aéroport dont la gestion a été confiée à un tiers par un contrat de concession, la règle de modération tarifaire impose un lien entre les derniers tarifs homologués de l’exploitant sortant et les premiers de l’exploitant entrant.

Ce principe de modération tarifaire peut également contribuer à rendre des appels d’offres de contrats de concession infructueux lorsque les investissements requis sont importants, comme le montre l’expérience des aéroports de Nantes‑Atlantique et de Saint‑Nazaire‑Montoir. En effet, à la suite de l’abandon du projet d’aéroport à Notre‑Dame‑des‑Landes en 2018, un projet de modernisation de l’aéroport de Nantes-Atlantique a été lancé. Toutefois, un seul candidat s’est manifesté lors du lancement de l’appel d’offres en octobre 2019, puisque le nouveau contrat de concession prévoyait des travaux conséquents, qui nécessiteraient une hausse des tarifs de redevance supérieure à ce que permet le principe de modération.

II.   LE dispositif proposÉ

A.   Le texte initial du projet de loi

L’article 20 du projet de loi prévoit l’ajout d’un nouvel alinéa à l’article L. 6327‑2 du code des transports qui prévoit que lorsqu’un aéroport est exploité dans le cadre d’un contrat de concession, la condition relative à la modération tarifaire n’est pas applicable aux premiers tarifs des redevances homologuées par l’ART après l’entrée en vigueur du contrat.

Seule la concession des aéroports de Nantes‑Atlantique et Saint‑Nazaire‑Montoir, dont l’appel d’offres a été relancé le 15 décembre 2023 ([164]), serait concernée avant 2030.

B.   Les modifications apportÉes par le SÉnat

La commission spéciale a adopté l’amendement COM‑64 de M. Vincent Capo-Canellas (Union Centriste), qui étend la suppression du principe de modération tarifaire à l’ensemble des aéroports entrant dans le champ de l’homologation tarifaire dans le cas où l’équilibre économique de l’exploitation est substantiellement modifié.

En séance publique, le Sénat a adopté l’amendement n° 9 du Gouvernement. Cet amendement prévoit, d’une part, la suppression de l’alinéa introduit en commission permettant à l’ART d’écarter le principe de modération tarifaire. Il prévoit, d’autre part, que l’ART vérifie le caractère modéré de l’évolution des redevances aéroportuaires, en le calculant en moyenne sur la durée couverte par les contrats de régulation économique, et non plus pour chaque année du contrat en vigueur.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’amendement CD64 du rapporteur. L’amendement étend le champ de l’avis de l’ART dans le cadre de l’avis conforme rendu lors de la conclusion de contrats de régulation économique.

Dans sa rédaction actuelle, l’article L. 6327‑3 du code des transports permet au ministre chargé de l’aviation civile de demander un avis motivé à l’ART sur un contrat de régulation économique (CRE), après négociation du contrat entre l’État et l’aéroport. L’amendement adopté étend le champ de cet avis à :

– L’équilibre économique et financier global de l’avant-projet de contrat ;

– Le coût moyen pondéré du capital retenu dans l’avant-projet de contrat ;

– Les conditions de l’évolution des tarifs prévues par l’avant-projet de contrat, en vérifiant, de manière prévisionnelle sur la période couverte par le contrat, que l’évolution moyenne proposée est modérée, que l’exploitant reçoit une juste rémunération des capitaux investis sur le périmètre d’activités mentionné à l’article L. 6325‑1, appréciée au regard du coût moyen pondéré du capital calculé sur ce périmètre, et que le produit global des redevances n’excède pas le coût des services rendus.

L’extension du champ de l’avis motivé doit permettre au concédant et aux autres parties prenantes de bénéficier de l’éclairage du régulateur sur les éléments composant l’équilibre économique du futur CRE d’assurer que le dossier soumis pour avis conforme en fin de processus puisse être validé plus rapidement.

L’ART pourra également être saisie pour un avis motivé sur un avant-projet de CRE ou rendre un avis conforme sur un projet de CRE, au cours d’une procédure de passation d’un contrat de concession portant sur un aérodrome relevant de la compétence de l’État.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a également adopté l’amendement rédactionnel CD8 du rapporteur.

*

*     *

 

titre iii
DISPOSITIONS D’ADAPTION AU DROIT DE L’UNION europÉenne en matiÈre rÉpressive

Chapitre Ier
Diverses dispositions relatives à l’échange d’informations en matière répressive

Article 21
(Intitulé de la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale)
Modification de l’intitulé de la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale relative à l’échange simplifié d’informations entre services

Adopté par la Commission sans modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article modifie l’intitulé de la section du code de procédure pénale relative à l’échange simplifié d’informations entre services.

       Dernières modifications législatives intervenues

Aucune modification.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

       Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté l’article 21 sans y apporter de modification.

  1.   L’État du droit

A.   Droit europÉen

1.   La décision-cadre 2006/960/JAI dite « décision-cadre suédoise »

Depuis le début des années 1990, l’approfondissement du pilier dit « Justice et affaires intérieures » (JAI) de l’Union européenne vise à lutter contre des phénomènes criminels transfrontaliers de plus en plus fréquents, en renforçant le niveau de coopération entre les services répressifs des États membres.

La décision-cadre 2006/960/JAI a remplacé le chapitre sur la coopération policière de la convention d’application de l’Accord de Schengen du 19 juin 1990. Elle entend « simplifier l’échange d’informations en prévoyant le recours à des formulaires standardisés, en encadrant les délais de réponse et en limitant les refus de réponse » ([165]).

D’après la directive (UE) 2023/977 du 10 mai 2023 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 relative à l’échange d’informations entre les services répressifs des États membres et abrogeant la décision-cadre 2006/960/JAI, « il ressort des évaluations (…) que la décision-cadre 2006/960/JAI n’est pas suffisamment claire et ne garantit pas l’échange adéquat et rapide d’informations pertinentes entre les États membres. Les évaluations ont également montré que ladite décision-cadre était en fait peu utilisée, en partie en raison du manque de clarté constaté en pratique entre le champ d’application de la convention d’application de l’accord de Schengen et celui de la décision-cadre ».

Il est donc apparu utile d’actualiser le cadre juridique européen pour éliminer ces divergences et établir des règles harmonisées garantissant l’échange adéquat et rapide d’informations entre les services répressifs des États membres, dans un contexte d’internationalisation des organisations criminelles : 65 % des réseaux criminels dans l’Union européenne sont constitués de plusieurs nationalités et 80 % des organisations criminelles sont impliquées dans des activités transfrontières ([166]).

En 2023, la directive (UE) 2023/977 a, en conséquence, abrogé cette décision-cadre.

2.   La directive (UE) 2023/977 du 10 mai 2023

La directive (UE) 2023/977 du 10 mai 2023 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 relative à l’échange d’informations entre les services répressifs des États membres et abrogeant la décision-cadre 2006/960/JAI du Conseil a été prise sur le fondement de l’article 87 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), en application duquel l’Union développe une coopération policière qui associe toutes les autorités compétentes des États membres, y compris les services de police, les services des douanes et autres services répressifs spécialisés dans les domaines de la prévention ou de la détection des infractions pénales et des enquêtes en la matière.

Elle rénove le cadre juridique relatif aux échanges d’informations entre les services répressifs des États membres.

B.   Droit interne

Les dispositions relatives à l’échange d’informations entre services répressifs sont inscrites à la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV de la partie législative du code de procédure pénale (CPP), intitulée « de l’échange simplifié d’informations entre services en application de la décision cadre-du Conseil de l’Union européenne du 18 décembre 2006 ». Ces dispositions ont été créées par l’ordonnance n° 2011-1069 du 8 septembre 2011 transposant la décision‑cadre 2006/960/JAI du Conseil du 18 décembre 2006 relative à la simplification de l’échange d’informations et de renseignements entre les services répressifs des États membres de l’Union européenne.

Cette section contient quatre paragraphes :

un paragraphe consacré aux dispositions générales ;

un paragraphe consacré aux dispositions applicables aux demandes d’informations émises par les services français ;

un paragraphe consacré aux dispositions applicables aux demandes d’informations reçues par les services français ;

un paragraphe consacré à l’application des dispositions à certains États non membres de l’Union européenne.

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 21 du projet de loi tend à modifier l’intitulé de la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV du CPP (« De l’échange simplifié d’informations entre services en application de la décision-cadre du Conseil de l’Union européenne du 18 décembre 2006 ») pour lui substituer l’intitulé : « De l’échange simplifié d’informations entre services en application de la directive (UE) 2023/977 du 10 mai 2023 ».

Il vise exclusivement à tirer les conséquences, dans l’intitulé de cette section, du remplacement de la décision-cadre de 2006 par la directive de 2003, en modifiant la référence.

III.   Les modifications apportÉes par le SÉnat

Le Sénat a adopté cet article sans y apporter de modification.

IV.   les modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté l’article 21 sans y apporter de modification.

*

*     *

Chapitre II
Dispositions applicables aux demandes d’informations émises par les services français

Article 22
(art. 695-9-31 et art. 695-9-31-1 [nouveau] du code de procédure pénale)
Désignation des services ou unité pouvant saisir directement les points de contacts uniques des autres États membres et disposition relative à l’instauration d’un point de contact unique en France

Adopté par la Commission avec modifications

 

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article tend à inscrire dans le code de procédure pénale (CPP) que certains services ou unités sont spécialement désignés aux fins de saisir directement les points de contact uniques des autres États membres et crée un nouvel article, au sein du même code, prévoyant la désignation par arrêté d’un point de contact unique en France.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 695-9-31 du CPP a été modifié par l’article 2 de la loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude, qui a étendu le périmètre des services ou unités concernés par les dispositions relatives aux échanges d’informations à la direction générale des finances publiques.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a fusionné les deux articles en une seule disposition, qui redéfinit les attributions des services enquêteurs compétents, ainsi que celles des services spécialement désignés et du point de contact unique.

       Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a rétabli la rédaction initiale de l’article 22, en y apportant deux modifications relatives aux modalités de désignation des services compétents spécialement désignés.

  1.   L’État du droit

A.   Droit europÉen

1.   Définitions

La directive du 10 mai 2023 précitée comporte plusieurs notions ainsi définies :

une information est un contenu concernant une ou plusieurs personnes physiques ou morales, des faits ou des circonstances qui revêtent un intérêt pour les services répressifs compétents aux fins de l’accomplissement des missions de prévention ou de détection des infractions pénales, ou d’enquête en la matière, qui leur incombent en application du droit national, y compris le renseignement en matière pénale ;

un service répressif compétent désigne tout service de police, de douanes ou autre des États membres, compétent en vertu du droit national pour exercer son autorité et prendre des mesures coercitives aux fins de la prévention ou de la détection des infractions pénales, ou des enquêtes en la matière, ou toute autorité qui participe à des entités conjointes créées entre deux États membres ou plus aux fins de la prévention ou de la détection des infractions pénales ou des enquêtes en la matière ([167]). Ces services peuvent échanger directement avec leurs homologues des autres États membres ;

un service répressif désigné est un service répressif compétent autorisé à soumettre des demandes d’informations aux points de contact uniques d’autres États membres. La prérogative de pouvoir saisir directement les points de contact uniques des autres États membres est la seule supplémentaire à celles dont disposent les services répressifs compétents. Il est à noter qu’en application de l’article 4 de la directive du 10 mai 2023, la désignation de ces services est facultative (« lorsque leur droit national le prévoit »).

2.   Les demandes d’informations aux points de contact uniques

Afin de réaliser l’objectif visant à faciliter et à garantir l’échange adéquat et rapide d’informations entre États membres, la directive du 10 mai 2023 prévoit la possibilité pour les États membre d’obtenir des informations en adressant une demande d’informations au point de contact unique d’autres États membres. Elle dispose également que si le point de contact unique de chaque État membre devrait, en tout état de cause, pouvoir soumettre des demandes d’informations au point de contact unique d’un autre État membre, pour plus de souplesse, les États membres devraient être autorisés, en outre, à désigner certains de leurs services répressifs compétents, qui pourraient participer à la coopération européenne, en tant que services répressifs désignés pour soumettre de telles demandes aux points de contact uniques d’autres États membres.

L’article 4 de la directive du 10 mai 2023 porte spécifiquement sur les demandes d’informations adressées aux points de contact uniques. Il énonce un certain nombre d’exigences auxquelles les États membres doivent veiller, s’agissant des demandes d’informations que leur point de contact unique ou leurs services répressifs désignés soumettent au point de contact unique d’un autre État membre, notamment :  les États membres veillent à ce que les demandes d’informations ne soient soumises au point de contact unique d’un autre État membre que lorsqu’il existe des raisons objectives de penser que les informations demandées sont nécessaires et proportionnées et que cet autre État membre dispose des informations demandées ; les États membres veillent notamment à ce que toute demande d’informations soumise au point de contact unique d’un autre État membre précise si elle revêt un caractère urgent et, le cas échéant, indique les raisons de cette urgence.

3.   L’établissement ou la désignation et les tâches et capacités des points de contact unique

L’article 14 de la directive du 10 mai 2023 concerne spécifiquement l’établissement ou la désignation et les tâches et capacités des points de contact uniques. Il prévoit que chaque État membre établit ou désigne un point de contact unique, « entité centrale chargée de coordonner et de faciliter l’échange d’informations au titre de la présente directive ».

Il appartient aux États membres de veiller à ce que leur point de contact unique dispose du pouvoir d’action et des moyens nécessaires pour accomplir au moins un ensemble de tâches définies, notamment :

transmettre les demandes d’informations aux services répressifs compétents et, si nécessaire, coordonner entre ces derniers le traitement de ces demandes et la communication d’informations en réponse à ces demandes ;

coordonner l’analyse et structurer les informations en vue de les communiquer aux points de contact uniques et, le cas échéant, aux services répressifs compétents d’autres États membres ;

 communiquer, sur demande ou de sa propre initiative, des informations à d’autres États membres, conformément aux articles 5 et 7 de la même directive.

4.   Les échanges directs d’informations entre les services d’enquêtes des États membres

L’article 8 de la directive du 10 mai 2023 autorise l’échange direct d’informations entre les services d’enquêtes des États membres, sans passer par les points de contact uniques. Il prévoit que les États membres veillent à ce que, lorsqu’un de leurs services répressifs compétents soumet une demande d’informations ou communique des informations en réponse à une telle demande directement à un service répressif compétent d’un autre État membre, il envoie en même temps une copie de cette demande ou de ces informations au point de contact unique de son État membre et au point de contact unique de cet autre État membre ([168]).

B.   Droit interne

  1.   Dispositions générales en matière d’échanges d’informations

L’article 695-9-31 du CPP prévoit que pour l’application de la décision‑cadre 2006/960/JAI du Conseil du 18 décembre 2006, et sans qu’il soit nécessaire de prendre ou solliciter une réquisition ou toute autre mesure coercitive, les services ou unités de la police nationale, de la gendarmerie nationale, de la direction générale des douanes et droits indirects et de la direction générale des finances publiques désignés par arrêté du ministre de la justice ([169]) peuvent échanger avec les services compétents d’un autre État membre de l’Union européenne des informations qui sont à leur disposition (soit qu’ils les détiennent, soit qu’ils puissent y accéder, notamment par consultation d’un traitement automatisé de données). Cet échange doit viser à prévenir une infraction, à en rassembler les preuves ou à en rechercher les auteurs, dans les conditions prévues à la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV de la partie législative du CPP.

La partie réglementaire du CPP précise que la demande de transmission établie par ces services ou unités indique notamment le délai attendu pour la transmission des informations, les circonstances de la commission de l’infraction, la nature de l’infraction, les fins auxquelles les informations sont demandées, ainsi que les restrictions concernant l’utilisation des informations. ([170])

  1.   Points de contact auxquels les demandes de transmission d’informations peuvent être adressées par les services compétents des États membres

L’article 695-9-47 du CPP dispose qu’un arrêté du ministre de la justice, du ministre de l’intérieur et du ministre chargé du budget désigne les points de contact auxquels les demandes de transmission d’informations peuvent être adressées par les services compétents des États membres.

L’arrêté du 27 septembre 2012 désignant les points de contact habilités à recevoir les demandes d’informations provenant de services d’enquête des États membres de l’Union européenne a précisé que les points de contact habilités étaient :

la section centrale de coopération opérationnelle de police (SCCOPOL), gérée par la division des relations internationales de la direction centrale de la police judiciaire ;

le bureau de la communication et des relations extérieures (BCRE) de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières.

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 22 du projet de loi comporte deux dispositions.

  1.   Les services spÉcialement dÉsignÉs aux fins de saisir directement les points de contact uniques des autres États membres

D’une part, il modifie l’article 695-9-31 du CPP, pour remplacer la mention de la décision-cadre 2006/960/JAI par celle de la directive (UE) 2023/977 du 10 mai 2023 et y apporter une modification rédactionnelle ([171]).

Surtout, il ajoute à cet article qu’au sein des services et unités dont la liste est dressée, certains sont spécialement désignés au sens de l’article 695-9-31-1 (article créé au II du même article) pour saisir directement les points de contact uniques des autres États membres.

B.   L’instauration d’un point de contact unique

D’autre part et en conséquence, il crée un nouvel article 695-9-31-1 dans le CPP, disposant que le point de contact unique mentionné à l’article 14 de la directive (UE) 2023/977 du 10 mai 2023, désigné par arrêté du ministre de la Justice, du ministre de l’Intérieur et du ministre chargé du budget :

transmet directement les demandes d’informations sollicitées par les services ou unités compétents ;

reçoit les demandes de transmission d’informations adressées par les points de contact uniques des États membres et les services que ces derniers ont spécialement désignés pour transmettre directement les demandes d’informations aux autres États membres.

Ce nouvel article 695-9-31-1 dispose également que, lorsqu’une liste des services ou unités spécialement désignés par arrêté pour transmettre directement les demandes d’informations aux points de contact uniques des États membres est établie dans les conditions prévues aux points 1 et 2 de l’article 4 de la directive (UE) 2023/977 du 10 mai 2023 (cf. supra), le point de contact unique la transmet à la Commission européenne.

L’article 22 du projet de loi transpose ainsi dans le droit interne les principaux apports de la directive du 10 mai 2023, c’est-à-dire l’instauration d’un point de contact unique et la désignation de services et d’unités compétents pour saisir directement les points de contact uniques des autres États membres.

III.   Les modifications apportÉes par le SÉnat

Le Sénat a adopté sur cet article un amendement en Commission ([172]). Cet amendement, déposé par le rapporteur et présenté comme un « amendement rédactionnel et de clarification », réécrit entièrement l’article 22 du projet de loi.

Dans sa nouvelle rédaction issue de l’adoption de cet amendement, l’article 22 du projet de loi réécrit 695-9-31 du CPP pour y prévoir trois éléments.

D’abord, il prévoit que le point de contact unique est désigné par arrêté du ministre de la justice, du ministre de l’intérieur et du ministre chargé du budget et qu’il est transmet les demandes d’informations sollicitées par les services ou unités mentionnés à l’alinéa suivant. Il reçoit également les demandes de transmission d’informations adressées par les points de contact uniques des États membres et les services que ces derniers ont désigné pour transmettre directement les demandes d’informations aux autres États membres. Ces dispositions reprennent la rédaction du projet de loi initial.

Ensuite, il reprend les dispositions de l’actuel article 695-9-31, en y ajoutant que les « échanges se font par l’intermédiaire du point de contact unique ». En conséquence, cette rédaction supprime toute possibilité d’échanges directs entre les services répressifs compétents.

Enfin, l’article maintient les dispositions relatives à la désignation de services ou unités pour saisir directement les points de contact uniques ou les services spécialement désignés des autres États membres, ainsi que celles qui concernent la transmission de cette liste à la Commission européenne.

IV.   Les modifications apportées par la commission

La commission des Lois a adopté un amendement du Gouvernement ([173]) qui rétablit la rédaction initiale de l’article 22, en y apportant deux évolutions. D’une part, il prévoit que l’établissement de la liste des services répressifs spécialement désignés est facultative. D’autre part, il précise que cette liste ne peut être établie que par le point de contact unique.

*

*     *

Article 23
(art. 695-9-33 du code de procédure pénale)
Dispositions relatives aux demandes d’information émises par les services français

Article 23
(art. 695-9-33 du code de procédure pénale)
Dispositions relatives aux demandes d’informations émises par les services français

Adopté par la Commission avec modifications

 

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article intègre les dispositions de la directive du 10 mai 2023 relatives au point de contact unique dans les articles du code de procédure pénale (CPP) portant sur les demandes d’informations émises par les services français. Il précise également les conditions dans lesquelles les copies des demandes de transmissions d’informations peuvent ne pas être envoyées aux points de contact uniques.

       Dernières modifications législatives intervenues

Aucune.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté deux amendements tendant à supprimer les possibilités d’échanges directs entre services compétents, à mentionner que la sollicitation des informations se fait dans le strict respect des principes de nécessité et de proportionnalité, et à préciser les motifs permettant de ne pas transmettre une copie des demandes de transmissions d’informations au point de contact unique français et à ceux des États membres.

       Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté un amendement du Gouvernement qui rétablit la rédaction initiale de l’article.

  1.   L’État du droit

A.   Droit europÉen

L’état du droit européen a été précédemment présenté dans le commentaire de l’article 22 du projet de loi sur les échanges directs d’informations entre les services d’enquête des États membres.

En application de l’article 4 de la directive du 10 mai 2023, les États membres peuvent autoriser leurs services répressifs désignés à ne pas envoyer, au cas par cas, une copie d’une demande d’informations à leur point de contact unique en même temps qu’ils la soumettent au point de contact unique d’un autre État membre, lorsque cela compromettrait un ou plusieurs des éléments suivants :

a) une enquête en cours hautement sensible, pour laquelle le traitement de l’information requiert un niveau de confidentialité approprié ;

b) les affaires de terrorisme n’impliquant pas la gestion de situations d’urgence ou de crise ;

c) la sécurité d’une personne.

L’article 5 de la directive, relatif à la « Communication d’informations en réponse à des demandes soumises aux points de contact uniques », précise que les États membres peuvent autoriser leur point de contact unique à ne pas envoyer, en même temps qu’il communique les informations aux services répressifs désignés d’un autre État membre, une copie de ces informations au point de contact unique de cet autre État membre lorsque cela compromettrait un ou plusieurs des éléments précédemment mentionnés.

B.   Droit interne

Les articles 695-9-33 et suivants du CPP concernent les dispositions applicables aux demandes d’informations émises par les services français.

L’article 696-9-33 dispose que, s’il existe des raisons de supposer qu’un État membre détient des informations entrant dans les prévisions de l’article 695‑9‑31 du même code, qui seraient utiles à la prévention d’une infraction ou aux investigations tendant à en établir la preuve ou à en rechercher les auteurs, les services et unités mentionnés au même article peuvent en solliciter la transmission auprès des services compétents de cet État.

Il prévoit également que la demande de transmission expose les raisons laissant supposer que les informations sont détenues par ces services, et qu’elle précise à quelles fins les informations sont demandées et, lorsque les informations sont relatives à une personne déterminée, le lien entre cette personne et les fins de la demande.

II.   Le dispositif proposÉ

  1.   l’introduction des dispositions relatives au point de contact unique

L’article 23 du projet de loi réécrit l’article 695-9-33 du CPP pour y intégrer les dispositions de la directive du 10 mai 2023 relatives au point de contact unique.

L’article 695-9-33 tel que réécrit dispose que, s’il existe des raisons de supposer qu’un État membre détient des informations entrant dans les prévisions de l’article 695-9-31 du même code, qui seraient utiles à la prévention d’une infraction ou aux investigations tendant à en établir la preuve ou à en rechercher les auteurs, le point de contact unique mentionné à l’article 695-9-31-1 (créé par l’article 22 du projet de loi) ainsi que les services et unités spécialement désignés au second alinéa de l’article 695‑9-31 (tel que réécrit par l’article 22 du projet de loi  ) peuvent en solliciter la transmission auprès du point de contact unique de cet État, dans le strict respect des principes de nécessité et de proportionnalité.

Il prévoit que ces services et unités peuvent également solliciter la transmission directe de ces informations auprès des services compétents de cet État, maintenant ainsi la possibilité ouverte par la rédaction actuelle de l’article 695-9-33.

Le second alinéa de l’article 696-9-33, relatif à la présentation des raisons de la demande de transmission, est modifié, pour que ses dispositions intègrent le point de contact unique.

B.   demandes d’informations émises par un service ou une unité spécialement désigné

1.   Transmission au point de contact unique français

Dans le cas où la demande est adressée par un service ou une unité spécialement désigné (et non par le point de contact unique), une copie de la demande doit être envoyée en même temps au point de contact unique, sauf s’il existe des motifs laissant supposer que cet envoi compromettrait un ou plusieurs des éléments suivants :

une enquête en cours hautement sensible, pour laquelle le traitement de l’information requiert un niveau de confidentialité approprié ;

les affaires de terrorisme n’impliquant pas la gestion de situations d’urgence ou de crise ;

la sécurité des personnes.

2.   Demande de transmission d’informations adressée directement à un service compétent d’un État membre

Lorsque la demande de transmission d’informations est adressée directement à un service compétent d’un État membre, une copie de cette demande est envoyée en même temps au point de contact unique de cet État, sauf s’il existe des motifs laissant supposer que cet envoi compromettrait un ou plusieurs des éléments mentionnés au 1. du présent B.

3.   Transmission à Europol

Une copie de la demande de transmission d’informations peut être transmise à Europol, dans la mesure où elle porte sur une infraction relevant des objectifs mentionnés à l’article 3 du règlement (UE) 2016/794.

Les objectifs d’Europol tels que fixés par l’article 3 du règlement (UE) 2016/794

En application de l’article 3 du règlement (UE) 2016/794, Europol appuie et renforce l’action des autorités compétentes des États membres et leur collaboration mutuelle notamment en ce qui concerne la prévention de la criminalité grave affectant deux ou plusieurs États membres, ainsi que celle du terrorisme et des formes de criminalité qui portent atteinte à un intérêt commun faisant l’objet d’une politique de l’Union européenne.

Ses objectifs s’étendent également aux infractions pénales connexes (celles commises pour se procurer les moyens de perpétrer des actes relevant de la compétence d’Europol, les infractions pénales commises pour faciliter l’exécution d’actes relevant de la compétence d’Europol, ou les infractions pénales commises dans le but d’assurer l’impunité de ceux qui commettent des actes relevant de la compétence d’Europol).

III.   Les modifications apportÉes par le SÉnat

Le Sénat a adopté en commission spéciale deux amendements du rapporteur ([174]), qui ont pour effet de supprimer la possibilité d’échanges directs entre services compétents n’ayant pas été « désignés », et de rendre systématiquement obligatoire le passage par le point de contact unique.

Cette rédaction ajoute également à l’article 695-9-33 du CPP le principe selon lequel la sollicitation des informations se fait dans le strict respect des principes de nécessité et de proportionnalité ([175]) .

Enfin, il précise, dans les motifs permettant de ne pas transmettre une copie de la demande d’information au point de contact unique de la France et aux points de contact unique de l’État membre, que le motif de l’enquête en cours hautement sensible concerne « notamment » les « enquêtes relatives aux infractions prévues au livre IV du titre Ier du code pénal ([176])  et à l’article L. 811‑3 du code de la sécurité intérieure ([177]) ».

IV.   Les modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté un amendement du Gouvernement ([178]) ayant pour objet de rétablir la rédaction initiale de l’article 23 du projet de loi.

*

*     *

Chapitre III
Dispositions applicables aux demandes d’informations reçues par les services français

Article 24
(art. 695-9-37 et art. 695-9-38 du code de procédure pénale)
Dispositions relatives aux transmissions d’informations sur demande ou spontanées émises par les services français

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 24 du projet de loi transpose les dispositions de la directive du 10 mai 2023 relatives aux émissions d’informations, sur demande ou spontanées, des services français aux points de contact uniques et aux services compétents des États membres. 

       Dernières modifications législatives intervenues

Aucune.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté trois amendements qui modifient la rédaction initiale, afin de tirer les conséquences des modifications apportées aux précédents articles et d’ajouter à l’article 695-9-37 du code de procédure pénale (CPP) les délais de réponse aux demandes d’information reçues par des services répressifs français.

       Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté un amendement du Gouvernement qui rétablit la rédaction initiale de l’article.

I.   L’État du droit

A.   Droit europÉen

La directive du 10 mai 2023 prévoit qu’afin de permettre la souplesse nécessaire pour les besoins opérationnels, deux moyens d’échanges d’informations doivent exister en plus des demandes d’informations soumises aux points de contact uniques :

la communication non sollicitée d’informations par un point de contact unique ou un service répressif compétent au point de contact unique ou au service répressif compétent d’un autre État membre sans demande préalable, c’est-à-dire la communication d’informations de sa propre initiative ;

la communication d’informations à la suite d’une demande d’informations soumise soit par un point de contact unique, soit par un service répressif compétent, directement au service répressif compétent d’un autre État membre.

L’article 7 de la directive du 10 mai 2023 concerne spécifiquement la communication d’informations sur propre initiative.  Il dispose que les États membres peuvent communiquer, de leur propre initiative, par l’intermédiaire de leur point de contact unique ou de leurs services répressifs compétents, les informations dont ils disposent aux points de contact uniques ou aux services répressifs compétents d’autres États membres, lorsqu’il existe des raisons objectives de penser que ces informations pourraient présenter un intérêt pour ces autres États membres dans le cadre de la prévention ou de la détection des infractions pénales, ou des enquêtes en la matière.  Les États membres peuvent autoriser leurs services répressifs compétents à ne pas envoyer, en même temps qu’ils communiquent des informations au point de contact unique ou aux services répressifs compétents d’un autre État membre, une copie de ces informations au point de contact unique de leur État membre ou au point de contact unique de cet autre État membre, lorsque cela compromettrait un ou plusieurs des éléments suivants : une enquête en cours hautement sensible, pour laquelle le traitement de l’information requiert un niveau de confidentialité approprié, les affaires de terrorisme n’impliquant pas la gestion de situations d’urgence ou de crise, ou encore la sécurité d’une personne.

L’article 8 de la même directive concerne les échanges d’informations à la suite de demandes soumises directement aux services répressifs compétents. Lorsque leur point de contact unique soumet une demande d’informations directement à un service répressif compétent d’un autre État membre, les États membres veillent à ce qu’il envoie en même temps une copie de cette demande au point de contact unique de cet autre État membre. Les États membres veillent à ce que, lorsqu’un de leurs services répressifs compétents communique des informations en réponse à une telle demande, il envoie en même temps une copie de ces informations au point de contact unique de son État membre. Les États membres veillent à ce que, lorsqu’un de leurs services répressifs compétents soumet une demande d’informations ou communique des informations en réponse à une telle demande directement à un service répressif compétent d’un autre État membre, il envoie en même temps une copie de cette demande ou de ces informations au point de contact unique de son État membre et au point de contact unique de cet autre État membre. Les États membres peuvent autoriser leur point de contact unique ou leurs services répressifs compétents à ne pas envoyer de copies des demandes ou des informations lorsque cela compromettrait un ou plusieurs des éléments mentionnés au paragraphe précédent.

B.   Droit interne

Les dispositions applicables aux demandes d’informations reçues par les services français sont codifiées aux articles 695-9-37 et suivants du CPP.

1.   Les transmissions d’informations sur demande

L’article 695-9-37 du CPP dispose que les services et unités mentionnés à l’article 695-9-31 (voir précédemment) transmettent, à leur demande, aux services compétents des États membres les informations utiles à la prévention d’une infraction ou aux investigations tendant à en établir la preuve ou à en rechercher les auteurs.

2.   Les transmissions spontanées d’informations

L’article 695-9-38 du même code prévoit que, si des faits permettent de penser que des informations mentionnées à l’article 695-9-31 pourraient être utiles à un autre État membre, soit pour prévenir une infraction entrant dans l’une des catégories énumérées à l’article 694-32 et punie en France d’une peine privative de liberté d’une durée égale ou supérieure à trois ans d’emprisonnement, soit pour conduire les investigations tendant à établir la preuve ou à rechercher les auteurs d’une telle infraction, le service ou l’unité qui détient ces informations les transmet, sans demande préalable, aux services compétents de cet État.

3.   Les délais de transmission des informations

L’article R. 49-36 du CPP dispose que :

lorsque la demande d’information se rapporte à une infraction entrant dans l’une des catégories énumérées à l’article 695-23 de ce code (article relatif au refus d’exécution d’un mandat d’arrêt européen) et punie en France d’une peine d’au moins trois ans de prison, et que les informations sollicitées sont directement accessibles dans un traitement automatisé de données, les services et unités mentionnés à l’article 685-9-31 du même code peuvent demander au service compétent de l’État requis qu’elles leur soient transmises, en cas d’urgence, dans un délai maximum de huit heures et, en l’absence d’urgence, dans un délai maximum de sept jours ;

dans les autres cas, les services compétents de l’État requis peuvent être invités à transmettre les informations demandées dans un délai maximum de quatorze jours.

II.   Le dispositif proposÉ

  1.   Modifications apportées à l’article 695-9-37 du code de procédure pénale relatif aux transmissions d’informations sur demande

L’article 24 du projet de loi réécrit l’article 695-9-37 du CPP pour disposer que le point de contact unique créé par l’article 22 du projet de loi transmet, à leur demande, aux points de contact uniques spécialement désignés des États membres les informations mentionnées à l’article 695-9-31 du même code, qui sont utiles à la prévention d’une infraction ou aux investigations tendant à en établir la preuve ou à en rechercher les auteurs, dans le strict respect des principes de nécessité et de proportionnalité.

Lorsqu’une demande d’informations a été adressée directement à l’un des services et unités mentionnés au premier alinéa de l’article 695-9-31, celui-ci envoie en même temps une copie de sa transmission d’informations au point de contact unique, sauf s’il existe des motifs laissant supposer que cet envoi compromettrait un ou des éléments identiques à ceux mentionnés dans le dispositif de l’article 23 pour la non transmission des copies aux points de contacts unique : sécurité des personnes, affaires de terrorisme n’impliquant pas la gestion de situation d’urgence ou de crises et enquêtes en cours et hautement sensibles.

Lorsque les informations sont transmises à un service compétent d’un État membre, une copie de cette transmission est envoyée en même temps au point de contact unique de cet État, sauf s’il existe des motifs laissant supposer que cet envoi compromettrait un ou plusieurs des éléments dans les mêmes conditions et sous les mêmes réserves qu’à l’alinéa précédent.

B.   Modifications apportées à l’article 695-9-38 du code de procédure pénale relatif aux transmissions spontanées d’informations

L’article 24 du projet de loi réécrit l’article 695-9-38 du CPP pour y disposer que, si des faits permettent de penser que des informations mentionnées à l’article 695-9-31 du même code pourraient être utiles à un autre État membre ([179]), soit pour prévenir une infraction entrant dans l’une des catégories énumérées à l’article 694-32 de ce code et punie en France d’une peine d’au moins trois ans d’emprisonnement ([180]), ou une infraction entrant dans le champ de compétence d’Europol visée à l’article 3, paragraphe 1 ou 2, du règlement (UE) 2016/794 du 11 mai 2016 ([181]), soit pour conduire les investigations tendant à établir la preuve ou à rechercher les auteurs d’une telle infraction, le service ou l’unité qui détient ces informations ou le point de contact unique mentionné à l’article 6959-31-1 les transmet spontanément aux services compétents ou au point de contact unique de cet État.

Lorsque les informations utiles à un autre État membre concernent une infraction qui n’entre pas dans les prévisions de l’alinéa précédent, le service ou l’unité mentionné au premier alinéa de l’article 695-9-31 du CPP qui détient ces informations, ou le point de contact unique mentionné à l’article 695-9-31-1 du même code, peut prendre l’initiative de les transmettre aux services compétents ou au point de contact unique de cet État.

Lorsque les informations sont transmises par un des services et unités mentionnés au premier alinéa de l’article 695-9-31, celui-ci envoie concomitamment une copie de sa transmission d’informations au point de contact unique, dans les conditions et sous les réserves prévues à l’article 695‑9‑33. Dans les conditions et sous les réserves prévues à ce même article, lorsque les informations sont transmises à un service compétent d’un État membre, une copie de cette transmission est envoyée concomitamment au point de contact unique de cet État. 

L’article précise enfin que la transmission d’informations est traduite dans l’une des langues acceptées par l’État membre destinataire ([182]).

L’article 25 du projet de loi transpose ainsi les dispositions de la directive du 10 mai 2023 relatives à l’instauration des points de contact uniques aux articles du CPP portant sur les transmissions d’informations émises par les services français, et élargit le champ des infractions permettant une transmission spontanée d’informations.

III.   Les modifications apportÉes par le SÉnat

Le Sénat a adopté en commission trois amendements du rapporteur ([183]).

Ces amendements tirent les conséquences des modifications rédactionnelles apportées à l’article 22 du projet de loi. Ils ajoutent une précision à la liste des exceptions prévues à l’envoi d’une copie de la transmission d’informations au point de contact unique en lien avec une enquête en cours hautement sensible, pour laquelle le traitement de l’information requiert un niveau de confidentialité approprié. Il serait ainsi que précisé que ces exceptions s’appliquent « notamment s’agissant des enquêtes relatives aux infractions prévues au livre IV du titre Ier du code pénal et à l’article L. 911-3 du code de la sécurité intérieure ». Ils précisent que la notion de crise est celle « au sens de l’article L. 742-2-1 du code de sécurité intérieure » ([184]).

La rédaction adoptée inscrit également dans la loi les délais de réponse aux demandes d’information reçues par des services répressifs français (huit heures pour les demandes urgentes portant sur des informations directement accessibles, trois jours civils pour les demandes urgentes portant sur des informations indirectement accessibles, sept jours civils pour toutes les autres demandes). Ces délais sont prévus à l’article 5 de la directive du 10 mai 2023. L’article 24 ainsi réécrit dispose également que, lorsque les informations demandées ne peuvent être transmises qu’avec l’autorisation préalable d’un magistrat, il peut être dérogé à ces délais. Dans ce cas, le point de contact unique mentionné au premier alinéa de l’article 695‑9‑31 du CPP en informe sans délai le point de contact unique ou le service spécialement désigné qui est demandeur, en précisant la durée et les motifs du retard de transmission ; il tient celui‑ci informé dès que possible de la suite accordée à la demande par le magistrat compétent.

IV.   Les modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté un amendement du Gouvernement ([185]) qui rétablit la rédaction initiale de l’article 24.

*

*     *

Article 25
(art. 695-9-39 du code de procédure pénale)
Transmission, à un État membre, des informations détenues par les services et unités et leur ayant été préalablement transmises par un autre État membre

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article étend les dispositions de l’article 695‑9-39 du code de procédure pénale (CPP), relatif à la transmission, à un État membre, des informations détenues par les services et unités et leur ayant été préalablement transmises par un autre État membre, aux informations détenues par le point de contact unique prévu par la directive du 10 mai 2023. Il prévoit également dans quelles conditions ces informations peuvent être transmises à Europol.

       Dernières modifications législatives intervenues

Aucune modification législative intervenue.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a apporté, en commission spéciale et à l’initiative du rapporteur, des modifications de coordination avec les amendements adoptés aux précédents articles.

       Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté un amendement du Gouvernement rétablissant la rédaction initiale de l’article 25.

I.   L’État du droit

A.   Droit europÉen

Le d) de l’article 3 de la directive du 10 mai 2023 dispose que chaque État membre veille à ce que, lorsque les informations demandées ont été initialement obtenues auprès d’un autre État membre ou d’un pays tiers, il ne communique ces informations à un autre État membre ou à Europol qu’avec le consentement de l’État membre ou du pays tiers qui a initialement communiqué les informations, et conformément aux conditions imposées par ceux-ci à leur utilisation.

B.   Droit interne

L’article 695-9-39 du CPP dispose que :

lorsque les informations détenues par les services et unités mentionnés à l’article 695-9-31 du même code leur ont été transmises par un État membre sur le fondement des dispositions de la décision-cadre 2006/960/JAI, ces informations ne peuvent être transmises à un autre État membre qu’avec l’accord de l’État qui les avait transmises et dans les conditions fixées par lui ;

lorsque les informations détenues par ces mêmes services ou unités avaient été transmises à la France par un État membre sur un autre fondement que la décision-cadre 2006/960/JAI ou par un État tiers, elles ne peuvent être transmises à un autre État membre qu’avec l’accord de l’État qui les avait transmises à la France, et dans les conditions fixées par lui chaque fois que la France y est tenue par ses engagements internationaux.

II.   Le dispositif proposÉ

Conformément à la directive du 10 mai 2023, qui prévoit l’instauration de points de contact uniques pour les échanges d’informations en matière répressive, l’article 25 du projet de loi modifie l’article 695-9-39 du CPP afin d’étendre ses dispositions aux informations détenues par le point de contact unique.

Il prévoit également la possibilité que les informations puissent être transmises à Europol, en plus d’un autre État membre et dans les mêmes conditions.

Enfin, il modifie la rédaction du même article en remplaçant la mention de la décision-cadre 2006/960/JAI par celle de la directive (UE) 2023-977 du 10 mai 2013.

III.   Les modifications apportÉes par le SÉnat

La commission spéciale du Sénat a adopté un amendement du rapporteur ([186]), qui est un simple amendement de coordination tirant les conséquences des modifications apportées par la Commission aux précédents articles.

IV.   Les modifications apportées par la commission

La commission des Lois a adopté un amendement du Gouvernement ([187]) qui rétablit la rédaction initiale de l’article 25.

*

*     *

Article 26
(art. 695-9-40, art. 695-9-41, art. 695-9-42, art. 695-9-43, art. 695-9-44, art. 695945, art. 6959451 [nouveau], art. 695-9-46, et art. 695-9-47 du code de procédure pénale)
Dispositions relatives à l’intervention de l’autorité judiciaire en matière d’échanges d’informations, aux refus de communication des informations demandées et à l’utilisation des informations transmises

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 26 du projet de loi tire les conséquences des dispositions de la directive du 10 mai 2023 relatives au point de contact unique dans les articles du code de procédure pénale relatifs à l’autorisation préalable d’un magistrat dans certaines situations de transmissions d’informations au point de contact unique de l’État membre qui les a demandées, aux refus de communication des informations et aux conditions d’utilisation des informations transmises.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 52 de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire a modifié l’article 695-9-46 du code de procédure pénale, en remplaçant la mention d’Europol par celle d’ « unité Europol ».

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a précisé que le point de contact unique ne pouvait refuser de communiquer les informations demandées par un État que lorsque le magistrat compétent en a refusé la communication, et non en l’absence d’autorisation préalable. Il a également adopté des mesures de coordination tirant les conséquences des modifications apportées aux précédents articles. 

       Modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté un amendement du Gouvernement qui rétablit la rédaction initiale de l’article 26.

I.   L’État du droit

A.   le Droit europÉen

1.   L’exigence d’une autorisation judiciaire préalable à la communication d’informations

La directive du 10 mai 2023 dispose que « l’exigence d’une autorisation judiciaire préalable pour la communication d’informations, lorsque le droit national la prévoit, constitue une garantie importante qu’il convient de respecter ». Cependant, les systèmes juridiques des États membres diffèrent et la directive, d’après ses propres termes « ne devrait pas être comprise comme portant atteinte aux règles et aux conditions concernant les autorisations judiciaires préalables prévues par le droit national ».

L’article 9 de la directive prévoit donc deux hypothèses :

l’État membre n’exige pas d’autorisation judiciaire pour la communication d’informations au point de contact unique ou aux services répressifs compétents d’autres États membres lorsque son droit national n’exige pas une telle autorisation judiciaire pour une communication d’informations similaires au sein de cet État membre ;

lorsque le droit national exige une autorisation judiciaire pour la communication d’informations au point de contact unique ou aux services répressifs compétents d’autres États membres, les États membres veillent à ce qu’ils prennent immédiatement toutes les mesures nécessaires pour obtenir cette autorisation judiciaire dès que possible.

2.   Les refus de communication des informations

L’article 6 de la directive du 10 mai 2023 prévoit que les États membres veillent à ce que leur point de contact unique ne refuse de communiquer les informations demandées que dans la mesure où l’un des motifs suivants s’applique :

a) le point de contact unique et les services répressifs compétents de l’État membre qui a reçu la demande ne disposent pas des informations demandées ;

b) la demande d’informations ne satisfait pas aux exigences énoncées à l’article 4 de la directive [relatif aux demandes d’informations aux points de contact uniques] ;

c) l’autorisation judiciaire exigée en vertu du droit national de l’État membre qui a reçu la demande conformément à l’article 9 a été refusée ;

d) les informations demandées constituent des données à caractère personnel autres que celles relevant des catégories de données à caractère personnel visées à l’article 10, point b) ;

e) les informations demandées se sont révélées inexactes, incomplètes ou ne sont plus à jour et ne peuvent être communiquées conformément à l’article 7, paragraphe 2, de la directive (UE) 2016/680 ;

f) il existe des raisons objectives de penser que la communication des informations demandées serait contraire ou porterait atteinte aux intérêts essentiels de la sécurité nationale de l’État membre qui a reçu la demande, compromettrait le bon déroulement d’une enquête en cours en matière pénale ou la sécurité d’une personne physique ou porterait indûment atteinte aux intérêts importants protégés d’une personne morale ;

g) la demande concerne une infraction pénale punissable d’une peine d’emprisonnement maximale d’un an ou moins en vertu du droit de l’État membre qui a reçu la demande, une affaire qui ne constitue pas une infraction pénale en vertu du droit de l’État membre qui a reçu la demande, ou les informations demandées ont été initialement obtenues d’un autre État membre ou d’un pays tiers, et l’État membre ou le pays tiers en question n’a pas consenti à la communication des informations.

B.   le Droit interne

1.   L’intervention d’un magistrat dans certaines situations de transmissions d’informations

L’article 695-9-40 du code de procédure pénale prévoit la nécessité de l’intervention d’un magistrat dans certaines situations de transmissions d’informations. En effet, les informations ne peuvent être transmises aux services compétents de l’État membre qui les a demandées qu’avec l’autorisation préalable d’un magistrat chaque fois que cette autorisation est requise pour accéder à ces mêmes informations ou les transmettre à un service ou à une unité de police judiciaire. Lorsque cette autorisation est nécessaire, le service ou l’unité à laquelle les informations sont demandées la sollicite auprès du magistrat compétent. Enfin, les pièces d’une procédure pénale en cours ne peuvent être transmises, selon le cas, qu’avec l’accord de la juridiction d’instruction ou, lorsqu’une enquête est en cours ou que la juridiction de jugement est saisie, du ministère public.

2.   Le refus de communiquer des informations demandées par un État membre

L’article 695-9-41 dispose que les services et unités mentionnés à l’article 695-9-31 ne peuvent refuser de communiquer les informations demandées par un État membre que s’il existe des motifs laissant supposer que leur communication :

porterait atteinte aux intérêts fondamentaux de l’État en matière de sécurité nationale ;

nuirait au déroulement d’investigations en matière pénale ou compromettrait la sécurité des personnes ;

ou serait manifestement disproportionnée ou sans objet au regard des finalités pour lesquelles elle a été demandée.

L’article 695-9-42 prévoit que les services et unités mentionnés à l’article 695-9-31 peuvent refuser de transmettre les informations demandées lorsqu’elles se rapportent à une infraction punie en France d’une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à un an et qu’elles ne leur paraissent pas présenter un intérêt suffisant pour justifier les contraintes attachées à leur transmission.

3.   Les conditions d’utilisation des informations transmises

L’article 695-9-43 prévoit que lors de la transmission de l’information, le service ou l’unité mentionnée à l’article 695-9-31 indique au service destinataire les conditions d’utilisation de celle-ci. Lorsqu’il l’estime utile, il peut également demander au service destinataire de l’informer de l’utilisation qui a été faite de l’information transmise.

L’article 695-9-44 précise que lorsqu’une information a été transmise par l’un de ces services ou l’une de ces unités au service compétent d’un État membre et que celui-ci envisage de la communiquer à un autre État ou d’en faire une utilisation différente de celle pour laquelle la transmission avait été décidée, le service ou l’unité qui avait procédé à la transmission initiale est compétent pour apprécier s’il y a lieu d’autoriser, à la demande de l’État destinataire, le retransmission ou la nouvelle utilisation de l’information et, le cas échéant, pour fixer les conditions de celle-ci.

L’article 695-9-45 dispose que les informations transmises par les services et unités concernés peuvent être utilisés par le service destinataire à titre de preuve, sauf mention contraire lors de leur transmission.

L’article 695-9-46 prévoit que les informations transmises par les services ou unités concernés aux services compétents d’un État membre sont également transmises à l’Agence Eurojust et à l’unité d’Europol dans la mesure où elles portent sur une infraction relevant de leur mandat.

4.   Point de contact auquel les demandes de transmission d’informations peuvent être adressées par les services compétents des États membres

Enfin, aux termes de l’article 695-9-47 du même code, un arrêté du ministre de la justice, du ministre de l’intérieur et du ministre chargé du budget désigne les points de contacts auxquels les demandes de transmission d’informations peuvent être adressées par les services compétents des États membres.

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 26 du projet de loi transpose les dispositions de la directive du 10 mai 2023 au sein des articles 695-9-40 et suivants du code de procédure pénale.

1.   L’intervention d’un magistrat dans certaines situations de transmissions d’informations

L’article 26 du projet de loi étend les dispositions de l’article 695-9-40 du code de procédure pénale, relatives à l’autorisation préalable d’un magistrat dans certaines situations de transmissions d’informations, aux informations transmises au point de contact unique de l’État membre qui les a demandées, pour tirer les conséquences de la directive du 10 mai 2023 en matière d’instauration de points de contact uniques.

Il s’agit d’une inscription dans le code de procédure pénale des dispositions de l’article 9 de la directive du 10 mai 2023.

2.   Le refus de communiquer des informations demandées par un État membre

Ce même article réécrit l’article 695-9-41 du même code, relatif aux refus de communication des informations demandées par un État membre, pour y prévoir que le point de contact unique ne peut refuser de communiquer les informations demandées par un État membre qu’en présence d’un des motifs suivants :

des raisons objectives laissant penser que la communication des informations demandées  porterait atteinte aux intérêts fondamentaux de l’État en matière de sécurité nationale, nuirait au déroulement d’investigations en matière pénale ou compromettrait la sécurité des personnes, serait manifestement disproportionnée ou sans objet au regard des finalités pour lesquelles elle a été demandée ([188]), ou porterait atteinte aux intérêts importants protégés d’une personne morale ;

les informations demandées ne sont pas disponibles, se sont révélées inexactes, incomplètes, ou ne sont plus à jour ou constituent des données autres que celles relevant des catégories de données à caractère personnel énumérées à l’annexe II, section B du règlement (UE) 2016/794 du 11 mai 2016, se rapportent à une infraction punie en France d’une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à un an ou à des faits qui ne constituent pas une infraction pénale, l’État mentionné à l’article 695-9-39 n’a pas consenti à la communication, ou le magistrat compétent ou la juridiction compétente n’a pas donné son autorisation préalable ou son accord à la communication, conformément à l’article 695-9-40 du même code.

Il abroge en conséquence l’article 695-9-42 relatif aux refus de transmission des informations lorsqu’elles se rapportent à certaines infractions ou qu’elles ne paraissent pas présenter un intérêt suffisant.

Il s’agit d’une inscription dans le code de procédure pénale des dispositions de l’article 6 de la directive du 10 mai 2023.

3.   Les conditions d’utilisation des informations transmises

L’article 26 réécrit l’article 695-9-44, relatif à la transmission d’information par un service ou unité qui envisage de la communiquer à un autre État ou d’en faire une utilisation différente de celle pour laquelle transmission avait été décidée. Il étend en effet ses dispositions aux informations transmises par le point de contact unique et à celles transmises aux points de contact uniques.

Il étend également l’article 695-9-45 du même code, relatif à la valeur probatoire des informations transmises, aux informations transmises par le point de contact unique. Il complète néanmoins ces dispositions d’un nouvel article, l’article 695-9-45-1, prévoyant que si des données à caractère personnel transmises par le point de contact unique ou par le service ou l’unité mentionné à l’article 695-9-31 se révèlent inexactes, incomplètes ou ne sont plus à jour, ceux-ci informent sans tarder leur destinataire de l’effacement, de la rectification ou de la limitation du traitement de ces données.

L’article 26 du projet de loi réécrit enfin l’article 695-9-46 du même code, relatif aux transmissions parallèles à l’Agence Eurojust et à l’unité Europol. Ainsi réécrit, l’article 695-9-46 dispose que sous réserve des dispositions des articles 695‑9-39, 695-9-43 et 695-9-44, les informations transmises par le point de contact unique ou par les services ou unités mentionnés à l’article 695-9-31 au point de contact unique ou aux services compétents d’un État membre peuvent être également transmises à l’Agence Eurojust et à Europol lorsqu’elles portent sur une infraction relevant des objectifs énoncés à l’article 3 du règlement (UE) 2016-794.

4.   Point de contact auquel les demandes de transmission d’informations peuvent être adressées par les services compétents des États membres

L’article 26 supprime, enfin, l’article 695-9-47 du code de procédure pénale relatif à l’arrêté désignant les points de contact auxquels les demandes de transmission d’informations peuvent être adressées par les services compétents des États membres. Cette disposition n’a en effet plus lieu d’être avec la création d’un nouvel article 695-9-31 dans le code de procédure pénale, tel que prévu par l’article 22 du projet de loi.

III.   Les modifications apportÉes par le SÉnat

La commission spéciale du Sénat a adopté deux amendements.

Le premier ([189]) prévoit que le point de contact unique ne peut refuser de communiquer les informations demandées par un État membre que lorsque le magistrat compétent ou la juridiction compétente a refusé la communication (au lieu de « n’a pas donné son autorisation préalable ou son accord à la communication, conformément à l’article 695-9-40 » dans la rédaction du projet de loi initial). Le second ([190]) est un amendement de coordination qui tire les conséquences des modifications que le Sénat a apporté aux articles précédents.

IV.   Les modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté un amendement du Gouvernement ([191]) qui rétablit la rédaction initiale de l’article 26.

*

*     *


Article 27
(art. 695-8-2 du code de procédure pénale)
Adaptation du code de procédure pénale au règlement (UE) 2023/2131 du Parlement européen et du Conseil du 4 octobre 2023 relatif aux échanges d’informations numériques dans les affaires de terrorisme

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 27 apporte au code de procédure pénale des adaptations limitées afin de tenir compte de l’entrée en vigueur du règlement (UE) 2023/2131 du Parlement européen et du Conseil du 4 octobre 2023 qui vise à fluidifier les échanges d’informations numériques dans les affaires de terrorisme.

     Dernières modifications législatives intervenues

-         La décision du Conseil n° 2002/187/JAI du 28 février 2002 a institué l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust).

-         La décision 2005/671/JAI du Conseil du 20 septembre impose aux États membres de recueillir et de communiquer à Eurojust toutes les informations pertinentes concernant les poursuites et les condamnations pénales liées à des infractions terroristes, qui intéressent ou sont susceptibles d’intéresser deux États membres ou plus.

-         Le règlement (UE) 2018/1727 a abrogé la décision du Conseil du 28 février 2002 et constitue désormais le texte de référence pour Eurojust.

-         Le règlement 2023/2131 du Parlement européen et du Conseil du 4 octobre 2023 a précisé les obligations à la charge des États membres en matière d’échange d’informations dans les affaires de terrorisme, afin de remédier aux insuffisances constatées (informations non transmises ou transmission d’informations obsolètes).

       Modifications apportées par le Sénat

La commission spéciale du Sénat a adopté un amendement faisant du parquet national antiterroriste (PNAT) l’autorité compétente auprès d’Eurojust.

       Modifications apportées par la commission

La commission des lois a adopté un amendement du rapporteur qui supprime la désignation du PNAT comme correspondant national pour les questions de terrorisme auprès d’Eurojust, ajoutée par le Sénat.

1.   L’état du droit

Le règlement (UE) 2023/2131 du Parlement européen et du Conseil du 4 octobre 2023 modifiant le règlement (UE) 2018/1727 du Parlement européen et du Conseil et la décision 2005/671/JAI du Conseil a rénové le cadre applicable aux échanges d’informations en matière de terrorisme entre les autorités nationales compétentes et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust) ([192]) .

Ce règlement précise les obligations mises à la charge des États membres en la matière. Notamment, ces derniers doivent informer Eurojust de toute enquête pénale, poursuite ou procédure judiciaire concernant une infraction terroriste dès que les autorités judiciaires sont saisies de l’affaire, qu’il existe ou non un lien connu avec un autre État membre ou un pays tiers, à moins que l’enquête pénale, en raison des circonstances particulières qui s’y rapportent, ne concerne manifestement qu’un seul État membre ou que le partage d’information risque de compromettre une enquête en cours ou la sécurité d’une personne ou serait contraire aux intérêts essentiels de l’État membre concerné en matière de sécurité.

S’agissant d’un règlement, les dispositions qu’il comporte sont d’application directe en droit interne. Il convient cependant d’adapter le code de procédure pénale à l’entrée en vigueur de ce règlement sur deux points En effet, l’article 695-8-2 du code de procédure pénale prévoit qu’Eurojust est informé ([193]) par le procureur général, le procureur de la République ou le juge d’instruction des investigations, procédures et condamnations relatives aux infractions terroristes « qui intéressent, ou sont susceptibles d’intéresser, au moins un autre État membre » (alors que le règlement prévoit qu’Eurojust est informé qu’il existe ou non un lien connu avec un autre État membre). En outre, les seules dérogations prévues par cet article à l’obligation de transmission sont liées à un risque « d’atteinte à la sécurité de la Nation ou à compromettre la sécurité d’une personne », alors que le règlement prévoit aussi l’hypothèse où la transmission pourrait compromettre une enquête en cours.

2.   Le dispositif proposé

Le présent article modifie donc sur deux points l’article 695‑8‑2 du code de procédure pénale.

En premier lieu, il prévoit que le membre national d’Eurojust est informé des investigations, procédures et condamnations relatives aux infractions terroristes, « à l’exception de celles qui ne concernent manifestement pas les autres Etats ». La transmission pourra donc intervenir même en l’absence de lien connu. Cette formulation reprend celle de l’article 1er du règlement 2023/2131.

En second lieu, il permet de déroger à l’obligation de transmission pour l’hypothèse des infractions terroristes de nature à compromettre une enquête en cours.

3.   Les modifications apportées par le Sénat

La commission spéciale a adopté un amendement du rapporteur Daniel Fargeot pour préciser que l’autorité nationale compétente en tant que correspondant national pour Eurojust pour les questions de terrorisme est le parquet national antiterroriste (PNAT) ([194]).

En effet, l’article 1er du règlement 2023/2131 modifie l’article 20 du règlement 2018/1727 et insère un paragraphe qui prévoit que chaque État membre désigne « une autorité nationale compétente en tant que correspondant national pour Eurojust pour les questions de terrorisme. Ce correspondant national pour les questions de terrorisme est une autorité judiciaire ou une autre autorité compétente. Lorsque l’ordre juridique national l’exige, un État membre doit pouvoir désigner plusieurs autorités nationales compétentes en tant que correspondant national pour Eurojust pour les questions de terrorisme. Le correspondant national pour les questions de terrorisme a accès à toutes les informations pertinentes conformément à l’article 21 bis, paragraphe 1. Il est compétent pour recueillir ces informations et les transmettre à Eurojust, conformément au droit national et au droit de l’Union, en particulier le droit de la procédure pénale national et les règles applicables en matière de protection des données. »

Selon l’exposé des motifs, cet amendement tend à remédier à l’absence de disposition relative à l’identité ou aux modalités de désignation de ce correspondant national. L’objectif est de permettre au PNAT de maîtriser le partage de données judiciaires produites en France en matière de terrorisme, dans la mesure où il est la seule entité productrice de telles données et afin « d’écarter le risque d’une dispersion qui porterait atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou qui nuirait à une enquête en cours. »

Le rapport de nos collègues sénateurs sur le présent projet de loi fait état de « vives inquiétudes » émises par le PNAT, qui n’a pas été consulté lors des négociations sur la procédure instituée par le règlement 2023/2131. Ces inquiétudes portent sur l’identité de l’autorité nationale compétente en tant que correspondant national pour Eurojust en matière de terrorisme, sur les conséquences opérationnelles de la réforme (risque de dispersion de données sensibles), et sur la nécessité d’assurer un degré adapté de sécurisation informatique pour les informations les plus sensibles.

4.   Les modifications apportées par la commission

La commission des lois a adopté un amendement du rapporteur ([195]) qui supprime la désignation du PNAT comme correspondant national pour les questions de terrorisme auprès d’Eurojust, ajoutée par le Sénat.

En effet, il ressort des auditions menées par votre rapporteur que les échanges d’information avec Eurojust en matière de terrorisme reposent sur deux autorités distinctes.

En premier lieu, les autorités nationales compétentes (mentionnées à l’article 21 bis du règlement 2018/1727 modifié par le règlement 2023/2131), qui ont pour mission de transmettre à Eurojust les informations nécessaires en matière de terrorisme, sont les procureurs de la République, les procureurs généraux et les juges d’instruction mentionnés à l’article 695-8-2 du code de procédure pénale précité. En pratique, la direction des affaires criminelles et des grâces a indiqué à votre rapporteur qu’il s’agissait du PNAT, qui dispose d’une compétence nationale quasi-exclusive en matière de terrorisme. « Du fait de cette mission, le PNAT dispose d’une maîtrise totale sur la diffusion des informations qu’il transmet à Eurojust, dont il est un interlocuteur direct et habituel depuis de nombreuses années. »

En second lieu, « l’autorité nationale compétente en tant que correspondant national pour Eurojust pour les questions de terrorisme », mentionné à l’article 20 modifié du règlement 2018/1727, veille plus généralement à ce qu’Eurojust soit informé de manière fiable et efficace et s’assure de la bonne articulation du système national de coordination Eurojust avec le réseau judiciaire européen. Ce correspondant national a jusqu’à présent été désigné par circulaire ([196]). Il s’agit du directeur des affaires criminelles et des grâces (DACG), ce qui s’explique par son rôle de coordination et de contrôle de l’application des instructions générales d’action publique par les parquets généraux et les parquets locaux.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, cette répartition des tâches, qui devrait être reconduite, a été fixée en bonne entente avec le PNAT, et « la Chancellerie réfléchit actuellement, en concertation avec le PNAT, à la meilleure manière d’associer le PNAT à ce rôle de coordination nationale, sans entrainer un surcroit d’activité préjudiciable à ce dernier. »

*

*     *

titre iv
dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne en matière de droit pénal

Article 28
(art. 63-2, 63-3, 63-3-1, 63-4-1 et 63-4-2 du code de procédure pénale)
Mise en conformité des dispositions du code de procédure pénale relatives au droit d’accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales avec la directive 2013/48/UE

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 28 met en conformité le code de procédure pénale avec la directive 2013/48/UE du 22 octobre 2013 relative au droit d’accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales sur trois points.

En premier lieu, il permet à la personne placée en garde à vue de prévenir un tiers et de communiquer avec ce dernier, quel que soit ce tiers.

En second lieu, il supprime le « délai de carence » de deux heures, à l’issue duquel l’audition peut commencer sans avocat.

En troisième lieu, il supprime la possibilité ouverte au procureur d’autoriser que l’audition débute sans attendre, lorsque les nécessités de l’enquête exigent une audition immédiate.

Le présent article prévoit cependant que l’audition sur les faits reste possible lorsque la personne renonce expressément à la présence de l’avocat. En outre, pour conserver un caractère opérant à la procédure, dans le cas où la personne gardée à vue désignerait un avocat choisi qui s’avèrerait injoignable, ou qui ne pourrait se présenter rapidement (dans un délai de deux heures) après avoir été avisé, le présent article dispose que l’enquêteur saisit le bâtonnier afin qu’il lui en soit commis un d’office.

       Dernières modifications législatives intervenues

-         Dans la décision QPC n° 14/22 du 30 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a jugé le régime de la garde à vue contraire à la Constitution, notamment en ce qu’il ne garantissait pas l’assistance effective d’un avocat.

-         La loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 sur la garde à vue a réformé ce régime pour renforcer les droits de la défense des personnes gardées à vue.

-         Dans sa décision 2011‑191/194/195/196/197 QPC du 18 novembre 2011, le Conseil constitutionnel a déclaré l’article 63-4-2 du code de procédure pénale (CPP) conforme aux exigences constitutionnelles, considérant que ces dispositions ne méconnaissaient ni les droits de la défense, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit.

-         La directive 2013/48/UE du 22 octobre 2013 relative au droit d’accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales définit des règles minimales concernant le droit d’accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales.

-         La Commission européenne a émis le 28 septembre 2023 un avis motivé, qui indique que l’article 63‑4‑2 du CPP méconnaît la directive 2013/48/UE sur trois points : limitation du choix pour la personne gardée à vue du tiers à informer de la privation de liberté et avec lequel communiquer, existence d’un « délai de carence » de deux heures au terme duquel la personne peut être interrogée sans avocat, et possibilité de procéder à l’audition immédiate de la personne gardée à vue sans la présence de son avocat « pour les nécessités de l’enquête ».

       Modifications apportées par le Sénat

La commission spéciale du Sénat a adopté cinq amendements présentés par son rapporteur, M. Daniel Fargeot :

– un amendement pour inclure le tiers prévenu du placement en garde à vue dans la liste des personnes pouvant demander un examen médical du gardé à vue ;

– deux amendements identiques qui disposent, en premier lieu, qu’il appartiendra à l’avocat désigné ou commis d’office de se présenter « sans retard indu », en deuxième lieu, qu’il pourra être fait appel à un avocat commis d’office si l’avocat choisi ne s’est pas présenté dans un délai de deux heures et, en troisième lieu, que la renonciation à l’assistance d’un avocat au cours de la garde à vue sera consignée en procédure ;

– et deux amendements identiques qui autorisent audition immédiate du gardé à vue en cas de « situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale », « pour prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne » ou « lorsqu’il est impossible, en raison de l’éloignement géographique du lieu où se déroule la garde à vue, d’assurer le droit d’accès à un avocat sans retard indu ».

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement du rapporteur de sa commission spéciale pour prévoir que l’avocat, s’il se présente après le début des auditions et confrontations, pourra prendre connaissance des procès-verbaux des auditions et confrontations ayant eu lieu en son absence, et pour préciser l’intégration de l’éventuelle renonciation à l’avocat au procès‑verbal.

       Modifications apportées par la commission

La commission a adopté plusieurs amendements :

– un amendement de coordination et quatre amendements rédactionnels du rapporteur ;

– un amendement du rapporteur qui supprime l’exigence de diligence à la charge de l’avocat requise pour se présenter sans retard indu, introduite par le Sénat ;

– un amendement du rapporteur qui rétablit la possibilité pour l’avocat de consulter les procès-verbaux d’audition lorsque cette audition s’est déroulée en sa présence ;

– un amendement du rapporteur qui prévoit d’inscrire la renonciation éventuelle de la personne gardée à vue à la présence de son avocat dans le procès‑verbal d’audition plutôt que dans le procès‑verbal récapitulatif ;

– un amendement du rapporteur et un amendement identique de Mme Marietta Karamanli (Socialistes et apparentés) qui suppriment, s’agissant de la nouvelle faculté d’audition immédiate créée par le Sénat en dérogation du droit à la présence de l’avocat, la possibilité d’y recourir au motif de l’éloignement géographique du lieu où se déroule la garde à vue.

I.   L’État du droit

La garde à vue consiste à retenir une personne suspectée d’avoir commis un crime ou un délit dans les locaux de la police ou de la gendarmerie, en principe pour une durée de 24 heures.

Dans le cadre d’une procédure précontentieuse en manquement, la Commission européenne a estimé, dans un avis motivé du 28 septembre 2023, que, sur trois points relatifs au régime de la garde à vue, la France n’avait pas correctement transposé la directive 2013/48/UE du Parlement européen et du conseil du 22 octobre 2013 ([197]).

1.   L’absence de libre choix du tiers que la personne gardée à vue peut prévenir et avec qui elle peut communiquer

L’article 5 de la directive 2013/48/UE prévoit que les États membres veillent à ce que « les suspects ou les personnes poursuivies qui sont privés de liberté aient le droit, s’ils le souhaitent, d’en informer sans retard indu au moins une personne qu’ils désignent, telle qu’un membre de leur famille ou un employeur. » Son article 6 dispose que les États membres veillent à ce que les suspects ou personnes poursuivies aient « le droit de communiquer sans retard indu avec au moins un tiers, par exemple un membre de leur famille, qu’ils désignent. » La Commission européenne indique que ces dispositions donnent au suspect ou à la personne poursuivie le libre choix de la personne à informer de la privation de liberté.

Or, aux termes des articles 63-1 et 63-2 du code de procédure pénale, la personne placée en garde à vue peut prévenir « une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l’un de ses parents en ligne directe ou l’un de ses frères et sœurs » et « son employeur » et, le cas échéant, communiquer avec ces personnes.

La Commission européenne estime, dans son avis motivé, qu’en prévoyant une liste limitative de tiers qui peuvent être informés par la personne gardée à vue et avec qui cette dernière peut communiquer, le droit national n’a pas transposé correctement la directive.

2.   L’existence d’un « délai de carence » de deux heures à l’issue duquel l’audition peut commencer sans avocat

L’article 3 de la directive 2013/48/UE précitée dispose que les suspects ou personnes poursuivies « ont accès à un avocat à partir de la survenance du premier en date des événements suivants :

 avant qu’ils ne soient interrogés par la police ou par une autre autorité répressive ou judiciaire ;

 lorsque des autorités chargées des enquêtes ou d’autres autorités compétentes procèdent à une mesure d’enquête ou à une autre mesure de collecte de preuves ;

 sans retard indu après la privation de liberté. »

La Commission européenne a estimé, dans son avis motivé, qu’il résulte de ces dispositions un droit pour le suspect ou la personne poursuivie à ce que  son avocat soit physiquement présent lors de l’audition.

Or, l’article 63-4-2 du CPP dispose que, lorsque la personne gardée à vue a sollicité l’assistance d’un avocat, la première audition, sur le fond, ne peut débuter hors la présence de ce dernier avant l’expiration d’un délai de deux heures à compter de l’avis adressé à l’avocat choisi par la personne gardée à vue (délai « de carence ») ou, en l’absence d’un tel choix ou en cas d’indisponibilité de l’avocat choisi, au bâtonnier ou à l’avocat de permanence. L’avocat peut, par la suite, prendre part à l’audition ou à la confrontation en cours, qui peut être interrompue à la demande de la personne gardée à vue afin de lui permettre de s’entretenir avec son conseil.

La Commission européenne estime qu’en prévoyant un délai de carence de deux heures à l’issue duquel la personne peut être interrogée sans avocat, le droit interne méconnaît le droit à un avocat physiquement présent posé par la directive.

3.   La possibilité de procéder à l’audition immédiate de la personne gardée à vue sans la présence de son avocat « pour les nécessités de l’enquête »

L’article 3 de la directive précise que les seules dérogations au droit à la présence physique de l’avocat lors de l’audition concernent :

– le cas où les suspects ou personnes poursuivies privés de liberté ont renoncé de plein gré et sans équivoque à ce droit ;

– et, « dans des circonstances exceptionnelles », et « dans la mesure où cela est justifié, compte tenu des circonstances particulières du cas d’espèce, sur la base d’un des motifs impérieux suivants : »

Or, l’alinéa 3 de l’article 63‑4‑2 du CPP prévoit que l’audition de la personne gardée à vue peut avoir lieu immédiatement « lorsque les nécessités de l’enquête l’exigent », à la demande de l’officier de police judiciaire et sur décision écrite et motivée du procureur de la République. Cette formulation large renvoyait concrètement au risque de déperdition des preuves, d’atteinte à des personnes, etc.

La Commission européenne estime que les termes de cette dérogation prévue par le droit interne méconnaissent la directive.

Les alinéas 4 à 6 de l’article 63-4-2 du CPP prévoient en outre, « à titre exceptionnel », une seconde possibilité de dérogation à la présence physique de l’avocat. Sur demande de l’officier de police judiciaire, le procureur de la République ou le juge des libertés et de la détention (JLD) peut autoriser, par décision écrite et motivée, le report de présence de l’avocat lors des auditions ou confrontations, « si cette mesure apparaît indispensable pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête » :

– « soit pour permettre le bon déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves » (formulation différente du cadre posé par la directive) ;

– « soit pour prévenir une atteinte grave et imminente à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne » (formulation très proche de la directive).

Dans ce cas, le report est possible pour une durée maximale de douze heures, et jusqu’à vingt‑quatre heures si la personne est gardée à vue pour un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans.

II.   Le dispositif proposÉ

Le présent article corrige le code de procédure pénale pour le mettre en conformité avec la directive 2013/48/UE sur les trois points soulevés par la Commission européenne dans son avis motivé.

1.   Permettre à la personne gardée à vue de choisir librement le tiers informé de la privation de liberté et avec lequel communiquer

Les I et II du présent article modifient les articles 63-1 et 63-2 du CPP pour permettre à la personne placée en garde à vue de prévenir « toute personne qu’elle désigne » et de communiquer avec cette dernière, afin de corriger la transposition de la directive.

Le III de cet article permet à cette personne de désigner elle-même l’avocat, cette désignation devant être confirmée par la personne gardée à vue (disposition introduite à l’article 63-3-1 du même code).

2.   La suppression du délai de carence au terme duquel l’audition peut commencer sans avocat

Ensuite, le IV du présent article supprime le délai de deux heures au terme duquel l’audition peut commencer sans l’avocat.

Il est donc prévu que, si la personne gardée à vue demande que l’avocat assiste à ses auditions et confrontations, « elle ne peut être entendue sur les faits sans la présence de l’avocat choisi ou commis d’office, sauf renonciation expresse de sa part. »

Cette disposition correspond à l’une des dérogations prévues par l’article 3 de la directive.

Dans l’hypothèse où la personne gardée à vue désignerait un avocat qui s’avèrerait injoignable, ou qui ne pourrait se présenter dans un délai de deux heures après avoir été avisé, le III du présent article prévoit à l’article 63‑3‑1 du CPP  que l’enquêteur (agent de police judiciaire ou assistant d’enquête) « saisit sans délai le bâtonnier aux fins de désignation d’un avocat commis d’office. Il en informe la personne gardée à vue. »

Selon l’étude d’impact, « la suppression du délai de carence est susceptible d’avoir un impact sur le déroulement des enquêtes, dont les auditions réalisées en garde à vue constituent des actes essentiels, dès lors que ces auditions ne pourront débuter hors la présence de l’avocat, sauf exceptions ou renonciation expresse de la personne gardée à vue.

Il semble cependant que les impacts liés à l’impossibilité de procéder à l’audition en cas de carence de l’avocat initialement contacté pourront être limités par la désignation d’un avocat commis d’office, laquelle sera susceptible d’augmenter la charge administrative et procédurale reposant sur les services enquêteurs. »

3.   La suppression du motif d’audition immédiate « pour les nécessités de l’enquête »

Le IV du présent article supprime également, à l’article 63‑4‑2 du CPP, la possibilité de commencer immédiatement (sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République) l’audition lorsque les nécessités de l’enquête l’exigent, là encore afin de respecter la directive.

Le présent article ne modifie en revanche pas la possibilité de report à titre exceptionnel de la présence de l’avocat pour permettre le bon déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves ou pour prévenir une atteinte grave et imminente à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne.

III.   Les modifications apportÉes par le sÉnat

1.   Les amendements adoptés par la commission spéciale

La commission spéciale du Sénat a adopté plusieurs amendements.

En premier lieu, elle a adopté un amendement de son rapporteur, M. Daniel Fargeot ([198]) pour :

– supprimer la mention du droit de prévenir toute personne que la personne gardée à vue désigne à l’article 63-1 du CPP, qui prévoit les modalités d’information du gardé à vue de ses droits. Selon l’exposé des motifs, cette mention à cet article serait « inutile, la notion de "proche" figurant à l’article 63-1 du code de procédure pénale étant suffisamment large ». En tout état de cause, la faculté pour le gardé à vue de prévenir toute personne de son choix resterait ajoutée à l’article 63-2 du même code ;

– inclure, dans la liste des personnes ayant la possibilité de demander un examen médical du gardé à vue, le tiers qui a été prévenu du placement en garde à vue en application de l’article 63-2 du CPP. En l’état actuel du droit, en l’absence de demande de la personne gardée à vue, un examen médical est de droit si un membre de sa famille le demande (article 63-3 du même code). Aux termes de l’exposé sommaire, l’auteur de l’amendement estime que « la limitation de la possibilité de demander un tel examen aux seuls "membres de la famille" apparait de nature à constituer une limitation générale contraire à la directive » ;

– procéder à des coordinations liées à la loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 (LOPJ).

Ensuite, la commission spéciale a adopté deux amendements identiques de son rapporteur M. Daniel Fargeot et du président de la commission des lois M. François‑Noël Buffet (LR) ([199]), qui modifient certaines modalités de recours à un avocat au cours de la garde à vue, estimant, selon les exposés sommaires, que la rédaction du projet de loi est imprécise et « source d’insécurité juridique » :

– en premier lieu, ces amendements prévoient qu’il appartiendra à l’avocat désigné ou commis d’office de se présenter « sans retard indu » ;

– en deuxième lieu, ils prévoient qu’il pourra être fait appel à un avocat commis d’office si l’avocat choisi ne s’est pas présenté dans un délai de deux heures ;

– ensuite, ces amendements incluent dans le procès‑verbal établi par l’officier de police judiciaire (dont le champ est actuellement prévu à l’article 64 du CPP) le choix éventuel de la personne gardée à vue de renoncer à son avocat, afin d’écarter « le risque de nullités de procédures à chaque fois qu’une telle renonciation est exprimée » (selon l’exposé sommaire des amendements).

Enfin, la commission spéciale a adopté deux amendements identiques de son rapporteur M. Daniel Fargeot et de M. François‑Noël Buffet ([200]), qui modifient la faculté, prévue à l’article 63-4-2 du CPP pour le procureur de la République ou le juge des libertés et de la détention, de reporter la présence de l’avocat en cas de « situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale » (tandis que l’alinéa 4 de l’article 63‑4‑2 du même code vise actuellement le motif de « permettre le bon déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves »).

Surtout, cet amendement crée au sein du CPP un nouvel article 63‑4‑2‑1, qui institue une faculté, pour le procureur de la République, à la demande de l’officier de police judiciaire et sur décision écrite et motivée, de décider de faire procéder immédiatement à l’audition de la personne gardée à vue. Les auteurs souhaitent ainsi « éviter de priver indûment les officiers de police judiciaire et les parquets de la possibilité de procéder à l’audition immédiate d’un gardé à vue tout en respectant strictement les contraintes posées par la directive » (exposé sommaire). Cette proposition tend ainsi à s’inscrire dans le cadre posé par la directive, et l’ouvre en cas de « situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale », « pour prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne » ou « lorsqu’il est impossible, en raison de l’éloignement géographique du lieu où se déroule la garde à vue, d’assurer le droit d’accès à un avocat sans retard indu ».

Cette rédaction reprend en effet en partie les termes mêmes de la directive. Celle‑ci ouvre la possibilité de dérogation, « pour prévenir une atteinte grave, à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne », et en cas de « situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale ». Le considérant 32 de la directive cite, en particulier, l’objectif d’éviter « la destruction ou l’altération de preuves essentielles [et d’]éviter toute interférence avec les témoins ».

Cependant, le motif inclus par la commission spéciale pour la faculté de report de la présence de l’avocat « lorsqu’il est impossible, en raison de l’éloignement géographique du lieu où se déroule la garde à vue, d’assurer le droit d’accès à un avocat sans retard indu », s’il reprend les termes du paragraphe 5 de l’article 3 de la directive, néglige la portée restrictive conférée par le considérant 30 à cette hypothèse. Ce dernier évoque en effet l’éloignement constaté « par exemple dans les territoires d’outre-mer ou lorsqu’un État membre se livre ou participe à des opérations militaires en dehors de son territoire ». En outre, la rédaction retenue par le Sénat ne précise pas, comme le fait la directive, que cette dérogation s’exerce « dans des circonstances exceptionnelles ».

Il est prévu qu’en cas de mise en œuvre de cette procédure, la personne gardée à vue est immédiatement informée lorsque son avocat se présente. Lorsque cette présentation intervient alors qu’une audition ou une confrontation est en cours, celle-ci est interrompue à la demande de la personne gardée à vue, afin de lui permettre de s’entretenir avec son avocat et que celui-ci prenne connaissance des documents prévus à l’article 63-4-1 du CPP (procès‑verbal, certificat médical). Si la personne gardée à vue ne demande pas à s’entretenir avec son avocat, celui-ci peut assister à l’audition en cours dès son arrivée dans les locaux du service de police judiciaire ou à la confrontation.

2.   L’amendement adopté par le Sénat en séance publique

En séance publique, malgré la demande de retrait du Gouvernement, le Sénat a adopté un amendement du rapporteur Daniel Fargeot au nom de la commission spéciale ([201]), pour prévoir que l’avocat, s’il se présente après le début des auditions et confrontations, pourra prendre connaissance des procès-verbaux des auditions et confrontations ayant eu lieu en son absence, et pour préciser l’intégration au procèsverbal de l’éventuelle renonciation à l’avocat par la personne gardée à vue.

IV.   Les modifications apportÉes par la commission

La commission des lois a adopté plusieurs amendements.

En premier lieu, elle a adopté un amendement de coordination et quatre amendements rédactionnels du rapporteur.

En deuxième lieu, la commission a adopté un amendement du rapporteur qui supprime l’exigence de diligence à la charge de l’avocat requise pour se présenter sans retard indu, introduite par le Sénat ([202]).

– un amendement du rapporteur qui rétablit la possibilité pour l’avocat de consulter les procès-verbaux d’audition lorsque cette audition s’est déroulée en sa présence ([203]) ;

– un amendement du rapporteur qui prévoit d’inscrire la renonciation éventuelle de la personne gardée à vue à la présence de son avocat dans le procès‑verbal d’audition plutôt que dans le procès‑verbal récapitulatif ([204]) ;

– un amendement du rapporteur et un amendement identique de Mme Marietta Karamanli (Socialistes et apparentés) qui suppriment, s’agissant de la nouvelle faculté d’audition immédiate créée par le Sénat en dérogation du droit à la présence de l’avocat, la possibilité d’y recourir au motif de l’éloignement géographique du lieu où se déroule la garde à vue ([205]).

 

*

*     *

 

 

 

 

Article 29
(art. 695-43 et 695-45 du code de procédure pénale)
Mise en conformité du droit français avec la décision-cadre du Conseil 2002/584/JAI du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres

Adopté par la Commission sans modifications

 

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 29 met en conformité le code de procédure pénale avec la décision cadre du Conseil 2002/584/JAI du 13 juin 2002 sur deux points. En premier lieu, il restreint les exceptions au délai pour l’intervention d’une décision définitive sur l’exécution du mandat d’arrêt en cas de saisine de la Cour de cassation. En second lieu, il supprime la condition de consentement de la personne recherchée pour son transfèrement temporaire.

       Dernières modifications législatives intervenues

-         La décision-cadre du Conseil 2002/584/JAI du 13 juin 2002 modifiée par la décision cadre 2009/299/JAI du Conseil du 26 février 2009 définit les modalités de mise en œuvre du mandat d’arrêt européen.

-         Elle a été transposée en droit français par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté l’article sans y apporter de modification.

1.   L’état du droit

Le mandat d’arrêt européen est une décision judiciaire émise par un État membre en vue de l’arrestation et de la remise par un autre État membre d’une personne recherchée pour l’exercice de poursuites pénales ou pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté. Il remplace l’extradition par un système simplifié de remise des personnes recherchées (condamnées ou soupçonnées) entre autorités judiciaires, aux fins d’exécution des jugements ou de l’exercice de poursuites en matière pénale. Il repose sur le principe de la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires et est opérationnel dans tous les pays de l’UE.

La commission européenne a estimé que la décision-cadre n’a pas été correctement et intégralement transposée dans le droit national et a adressé une mise en demeure au Gouvernement français le 2 décembre 2021 sur deux points.

En premier lieu, l’article 17 de la décision‑cadre fixe un délai de 60 jours à compter de l’arrestation de la personne recherchée pour une décision définitive sur l’exécution du mandat d’arrêt européen. Ce délai peut être porté à 90 jours « dans des cas spécifiques ». Cet article prévoit aussi le cas où « dans des circonstances exceptionnelles », un État membre ne peut respecter les délais. Il doit dans ce cas informer Eurojust en précisant les raisons du retard. En droit interne, le code de procédure pénale prévoit un délai de 27 jours pour la décision de la chambre de l’instruction sur l’exécution du mandat d’arrêt, auquel s’ajoute un délai de 43 jours au cours duquel peut encore intervenir un arrêt de la Cour de cassation. Mais si la Cour de cassation ne parvient pas à vider sa saisine dans un délai de 60 jours à compter de l’arrestation, les raisons de ce retard sont notifiées à l’État membre d’émission et s’ouvre alors un délai supplémentaire de 30 jours ([206]). Le délai peut donc être porté à 90 jours en cas de pourvoi en cassation. La commission européenne considère que cette dérogation ne s’inscrit pas dans les « cas spécifiques » évoqués par la décision‑cadre. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait déjà estimé qu’un éventuel recours à l’encontre de la décision d’exécution d’un mandat d’arrêt européen ne saurait intervenir en méconnaissance des délais prévus par la décision cadre pour l’adoption d’une décision définitive ([207]).

En second lieu, l’autorité judiciaire d’exécution peut accepter l’audition de la personne recherchée ou son transfèrement temporaire. Le code de procédure pénale ([208]) subordonne cette seconde possibilité au consentement de la personne recherchée. La commission estime que cette condition, n’étant pas prévue par la décision‑cadre, constitue une transposition inexacte de celle-ci.

2.   Le dispositif proposé

Le présent article modifie le code de procédure pénale pour :

– ne permettre une dérogation au délai de 60 jours « qu’à titre exceptionnel » (à l’article 695‑43 du code). Cette formulation est plus proche de celle, restrictive, de la décision‑cadre s’agissant du non‑respect des délais (les « circonstances exceptionnelles ») que de celle prévue pour l’allongement de 30 jours du délai (« cas spécifiques ») ;

– supprime la condition de consentement de la personne recherché pour son transfèrement temporaire (à l’article 695‑45 du code).

3.   Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

4.   Les modifications apportées par la commission

La commission des lois a adopté cet article sans modification.

*

*     *

Article 30
(art. 804 du code de procédure pénale)
Application outre-mer et entrée en vigueur différée des dispositions relatives à la garde à vue

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article prévoit l’application des nouvelles rédactions du code de procédure pénale issues des articles 28 et 29 en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

       Modifications apportées par le Sénat

La commission spéciale du Sénat a adopté un amendement du Gouvernement ([209])  qui reporte de trois mois (le premier jour du troisième mois suivant la promulgation de la loi) l’application de l’article 28 aux mesures de garde à vue. Aux termes de l’exposé sommaire, le Gouvernement souhaite permettre d’anticiper au mieux les conséquences de la suppression du délai de carence de deux heures (voir commentaire de l’article 28) et le renforcement de l’intervention de l’avocat en garde à vue.

Le Sénat a ensuite adopté cet article sans modification supplémentaire.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté l’article sans y apporter de modification.

*

*     *

Titre V
DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE SOCIALE ET DE DROIT DE LA SANTÉ

Article 31
Mise en conformité du code de l’environnement avec le règlement (UE) 2023/2055 en ce qui concerne les microplastiques

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire sur cet article. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire s’est prononcée en faveur de l’adoption avec modifications de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 31 met en conformité le calendrier national d’interdiction des microplastiques avec le nouveau calendrier européen adopté en 2023 par l’Union européenne.

I.   Le droit en vigueur

A.   Le droit europÉen

Les microplastiques sont des microparticules de polymères synthétiques, présents dans de nombreux produits à usage agricole, médical ou cosmétique, dont la taille est comprise 0,1 micromètre et 5 millimètres. Leur petite taille facilite leur dispersion dans l’environnement, créant une pollution presque impossible à éliminer.

Avant 2023, les États membres étaient libres d’établir leurs règles techniques nationales relatives à la limitation de l’usage des microplastiques, tout en acceptant la commercialisation des produits respectant les règles techniques en vigueur dans les autres États membres.

Le règlement (UE) 2023/2055 de la Commission du 25 septembre 2023 modifiant l’annexe XVII du règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (Reach) interdit la mise sur le marché de certaines substances ou mélanges contenant des microplastiques.

Ce règlement module les dates d’interdiction de ces substances et mélanges selon les durées jugées nécessaires à leur reformulation et la transition vers des solutions de remplacement appropriées.

 

Type de produit

Date d’interdiction

Dispositifs médicaux

17 octobre 2029

Produits cosmétiques à rincer

17 octobre 2027

ou 17 octobre 2029 si les microplastiques sont destinés à l’encapsulation de parfums

Produits sans rinçage : maquillage et produits pour les lèvres et les ongles

17 octobre 2035

Autres produits sans rinçage

17 octobre 2029

Produits phytopharmaceutiques, semences traitées avec ces produits et produits biocides

17 octobre 2031

Produits détergents et produits d’entretien

17 octobre 2028

À noter que les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (DMDIV) sont exemptés de cette restriction sur le fondement des avis des comités scientifiques de l’Agence européenne des produits chimiques ([210]), qui a estimé que les rejets potentiels de microplastiques issus de dispositifs de diagnostic in vitro peuvent être réduits au minimum en fixant des conditions appropriées d’utilisation et d’élimination.

B.   Le droit national

L’article 82 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a créé un article L. 541‑15‑12 dans le code de l’environnement qui introduit un principe d’interdiction de mise sur le marché de substances à l’état de microplastiques.

Le calendrier d’interdiction des microplastiques établi par la loi s’applique :

– aux dispositifs médicaux ;

– aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (DMDIV) à compter du 1er janvier 2024 ;

– aux produits cosmétiques à rincer à compter du 1er janvier 2026 ;

– à tous les autres produits visés par la proposition de restriction du 22 août 2019 de l’Agence européenne des produits chimiques (produits phytosanitaires, biocides, détergents, cosmétiques sans rinçage, produits agricoles et horticoles, etc.) à compter du 1er janvier 2027.

Depuis l’adoption du règlement (UE) 2023/2055, le droit national, plus ambitieux que les stipulations du règlement, n’est plus conforme au droit européen.

II.   LE dispositif proposÉ

A.   Le texte initial du projet de loi

L’article 31 du projet de loi modifie l’article L. 541‑15‑12 du code de l’environnement, en cohérence avec le calendrier établi par le règlement (UE) 2023/2055.

Le 1° de l’article 31 supprime ainsi la mention des dispositifs de diagnostic in vitro, pour lesquels le règlement (UE) 2023/2055 ne prévoit aucune interdiction. Il reporte au 17 octobre 2029 l’interdiction pour les dispositifs médicaux, initialement prévue au 1er janvier 2024 par le droit national.

Le 2° modifie la date d’interdiction prévue au 1er janvier 2026 pour les produits cosmétiques « à rincer », par celle du 17 octobre 2027 ou du 17 octobre 2029 si ces microplastiques sont destinés à l’encapsulation des parfums.

Le 3° substitue à la disposition qui prévoyait des décrets pour interdire d’autres types de produits contenant des microplastiques, un renvoi à l’annexe XVII du règlement dit « Reach ».

Si l’adoption d’un calendrier commun au sein de l’Union européenne renforce la clarté du droit en vigueur, force est de constater que le nouveau calendrier établi par projet de loi est moins ambitieux en matière sanitaire et environnementale par rapport aux dispositions de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire.

Bien que nous puissions regretter cette évolution calendaire, votre rapporteur tient à souligner que la stratégie ambitieuse adoptée par la France en 2019 a joué un rôle moteur pour l'Union européenne, contribuant à élever le niveau des objectifs fixés pour l’ensemble des États membres. Ainsi, cette harmonisation assure un niveau uniforme de réglementation sur l’ensemble du marché, atténuant de facto les effets indésirables liés à l'importation de produits ne satisfaisant pas aux mêmes exigences en termes de qualité et de respect des normes environnementales.

B.   Les dispositions adoptées par le SÉnat

La commission spéciale a adopté deux amendements du rapporteur M. Daniel Fargeot (Union centriste) : un amendement COM‑43 alignant la terminologie du projet de loi avec celle du règlement Reach et un amendement COM‑44 corrigeant une erreur de référence.

Le Sénat a adopté l’article 31 ainsi modifié.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté les amendements rédactionnels CD8 et CD64 du rapporteur pour avis, puis elle a émis un avis favorable l’adoption de l’article ainsi modifié.

*

*     *

Article 32
(art. L. 515-8, art. L. 631-9, art. L. 632-2, art. L. 633-2 et art. L. 634-4 du code général de la fonction publique)

Maintien pour les fonctionnaires de droits acquis avant le début de certains congés

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de transposer l’article 10 de la directive (UE) 2019‑1158 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants et abrogeant la directive 2010/18/UE du Conseil. Il modifie pour ce faire le code général de la fonction publique pour prévoir un maintien des droits acquis avant le début des congés, pour les congés suivants : le congé de paternité et d’accueil de l’enfant, le congé parental, le congé de présence parentale, le congé de solidarité familiale et le congé de proche aidant.

       Dernières modifications législatives intervenues

Aucune.

       Modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a adopté ces dispositions et a ajouté à la liste des congés concernés par le principe du maintien des droits acquis les congés de maternité, de naissance, d’adoption et ceux liés à l’arrivée d’un enfant en vue de son adoption.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté l’article 32 sans y apporter de modification.

I.   L’État du droit

A.   Droit europÉen

L’Union européenne a élaboré une série d’actes législatifs conférant aux citoyens européens des droits minimaux facilitant l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle.

La directive (UE) 2019/1158 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants et abrogeant la directive 2010/2018/UE du Conseil a pour objet de fixer de nouvelles normes minimales en matière de congé de paternité, de congé parental et de congé d’aidant. Elle s’applique à l’ensemble des travailleurs de l’Union européenne, y compris aux agents publics relevant du code général de la fonction publique (CGFP).

Elle s’inscrit dans le cadre du « plan d’action sur le socle européen des droits sociaux », et plus singulièrement dans celui de l’objectif d’encourager « des politiques adéquates favorisant un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée permettant de concilier plus adéquatement l’une et l’autre » ([211]).

Le premier alinéa de l’article 10 de cette directive prévoit que : « Les droits acquis ou en cours d’acquisition par le travailleur à la date de début du congé prévu aux articles 4 [congé de paternité], 5 [congé parental] et 6 [congé d’aidant] ou de l’absence du travail prévue à l’article 7 [pour raisons de force majeure] sont maintenus jusqu’à la fin dudit congé ou de ladite absence du travail. À l’issue de ce congé ou de cette absence du travail, ces droits, y compris les changements découlant de la législation, des conventions collectives ou de la pratique nationales, s’appliquent ».

Cette directive a fixé un délai limite de transposition au 2 août 2022. Une procédure d’infraction a été ouverte contre la France le 20 septembre de la même année. Le 19 avril 2023, la Commission a adopté un avis motivé invitant la France à prendre les mesures nécessaires dans un délai de deux mois.

Le code du travail a été mis en conformité avec la directive par la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture ([212]).

La mise en conformité du code général de la fonction publique avec le premier alinéa de l’article 10 de la directive nécessite cependant une disposition législative. Tel est l’objet de l’article 32 du projet de loi.

B.   le Droit interne

1.   Le congé parental

Le droit interne définit le congé parental comme la « position du fonctionnaire placé hors de son administration d’origine pour élever son enfant » ([213]). Il est accordé de droit, sur simple demande du fonctionnaire après la naissance ou l’adoption d’un enfant survenue à son foyer. Il débute au terme, le cas échéant, du congé de maternité, du congé de paternité et d’accueil de l’enfant ou du congé d’adoption ([214]). La période de congé parental est assimilée à des services effectifs dans le corps ou le cadre d’emplois ([215]).

L’article L. 515-8 du CGFP dispose que le fonctionnaire en position de congé parental :

1° n’acquiert pas de droit à la retraite, sous réserve des dispositions législatives ou réglementaires relatives aux pensions prévoyant la prise en compte de périodes d’interruption d’activité liées à l’enfant ;

2° conserve ses droits à l’avancement, dans la limite de cinq ans pour l’ensemble de sa carrière.

2.   Les autres formes de congés familiaux et les congés pour les aidants

En application de l’article L. 631-9 du CGFP, le fonctionnaire en activité a droit au congé de paternité et d’accueil de l’enfant pour une durée de 25 jours calendaires ou de 32 jours calendaires en cas de naissances multiples. Ce congé bénéficie au père fonctionnaire ainsi que, le cas échéant, au fonctionnaire conjoint de la mère, ou à l’agent public lié à elle par un pacte civil de solidarité ou vivant maritalement avec elle.

Le congé de présence parentale est prévu à l’article L. 632-1 du code général de la fonction publique. Il est accordé de droit au fonctionnaire, sur sa demande écrite, lorsque la maladie, l’accident ou le handicap d’un enfant à charge présente une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue de sa mère ou de son père et des soins contraignants.

L’article L. 633-1 du CGFP porte sur le congé de solidarité familiale, auquel le fonctionnaire en activité a droit lorsqu’un ascendant, un descendant, un frère, une sœur ou une personne partageant le même domicile ou l’ayant désigné comme sa personne de confiance souffre d’une pathologie mettant en jeu le pronostic vital ou est en phase avancée ou terminale d’une affectation grave et incurable, qu’elle en soit la cause.

Enfin, l’article L. 634-1 du même code dispose que le fonctionnaire en activité a droit à un congé de proche aidant d’une durée maximale de trois mois renouvelable et dans la limite d’un an sur l’ensemble de sa carrière lorsque l’une des personnes mentionnées à l’article L. 3142-16 du code du travail (par exemple : son conjoint, son concubin, un ascendant, un descendant, ou un collatéral jusqu’au quatrième degré) présente un handicap ou une perte d’autonomie définis par décret. Ce congé peut être fractionné ou pris sous la forme d’un temps partiel ([216]) et le fonctionnaire n’est pas rémunéré mais perçoit dans certaines conditions l’allocation journalière du proche aidant ([217]).

3.   La notion de « droits acquis »

La notion de « droits acquis » n’a pas de définition en droit de la fonction publique. La direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), entendue par votre rapporteur, considère que pourraient notamment relever de cette notion le droit à l’évaluation annuelle et à un entretien annuel, le droit aux congés annuels et le droit à la formation.

II.   Le dispositif proposÉ

Le dispositif tend à compléter cinq articles du CGFP.

L’article 32 du présent projet de loi précise que le fonctionnaire « conserve le bénéfice des droits acquis avant le début du congé qu’il n’a pas été en mesure d’exercer en raison de ce congé », dans le cadre de plusieurs congés :

  à l’article L. 515-8 du CGFP, s’agissant du congé parental ;

à l’article L. 631-9 du même code, s’agissant du congé de paternité et d’accueil de l’enfant ;

à l’article L. 632-2 du même code, s’agissant du congé de présence parentale ;

à l’article L. 633-2 du même code, s’agissant du congé de solidarité familiale ;

enfin, à l’article L. 634-4 du même code, s’agissant du congé de proche aidant.

Ces dispositions ont pour objet de transposer l’article 10.1 de la directive précitée. En effet, ce droit n’est aujourd’hui pas inscrit dans le CGFP, qui se borne à poser le principe d’un droit à ces congés.

III.   Les modifications apportÉes par le SÉnat

Conformément à l’avis du Conseil d’État sur le projet de loi ([218]), la commission spéciale du Sénat a adopté l’amendement COM-41 du rapporteur M. Fargeot ([219]). Cet amendement a pour objet de compléter la liste des congés pour lesquels l’article prévoit le maintien du bénéfice des droits acquis avant le début du congé, en intégrant : le congé de maternité, le congé de naissance, le congé pour l’arrivée d’un enfant en vue de son adoption et le congé d’adoption.

IV.   Les modifications apportées par la Commission

La commission des Lois a adopté l’article 32 sans y apporter de modification.

*

*     *

Article 33
Délégation de signature des aides de la politique agricole commune au titre de la programmation 2014 – 2022

 

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économique s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

 

Article adopté sans modification

 

Cet article vise à permettre au représentant de l’État au niveau départemental ou régional de déléguer sa signature au président du conseil régional pour ce qui concerne les décisions relatives aux aides relatives au fonds européen agricole de développement rural cofinancées par l’État sur la programmation 2014-2022 de la politique agricole commune (PAC).

Cet article n’a pas fait l’objet de modification lors de son examen en commission.

I.   Le droit en vigueur

A.   LA gestion régionalisée de certaines AIDES RELEVANT DU FONDs EUROPÉEN AGRICOLE pour le développement rural

1.   La politique agricole commune est une politique historique de l’Union européenne

La politique agricole commune (PAC) est une des politiques européennes les plus anciennes, puisqu’elle a été instituée dès le traité de Rome en 1957. Elle avait pour objectif, au moment de son entrée en vigueur en 1962, de permettre l’inclusion des produits agricoles au sein du marché commun, en faisant évoluer, à cette fin, les mécanismes d’intervention des États membres.

Son contenu est actuellement défini par les articles 38 à 44 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Ces articles définissent respectivement son contenu (article 38), ses objectifs (article 39), ainsi que l’ensemble des règles permettant une organisation commune des marchés agricoles (articles 40 et suivants).

Le financement de cette politique repose actuellement sur deux outils :

–  le Fonds européen agricole de garantie (Feaga), dont le rôle est d’apporter un soutien direct aux agriculteurs et de financer des mesures de marché ;

–  le Fonds européen pour le développement rural (Feader), en charge de financer les aides au développement rural.

Le financement de la PAC s’établit dans un cadre pluriannuel via une programmation financière. La programmation 2023-2027 a pris la suite de la programmation courant sur la période 2014-2020, qui avait été prolongée jusqu’en 2022.

2.   Les régions se sont vues confier en 2014 le rôle d’autorité de gestion pour certaines aides de la PAC

L’article 78 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite loi « Maptam », a donné la possibilité aux régions de demander à l’État de se voir confier tout ou partie de la gestion des programmes européens soit en qualité d’autorité de gestion, soit par délégation de gestion.

Dans le cadre de la programmation de la PAC sur la période 2014-2022, les régions se sont saisies de cette possibilité. Elles ont en conséquence assuré le rôle d’autorité de gestion d’une partie des aides relevant du Fonds européen agricole pour le développement rural.

L’article 78 de la loi Maptam prévoyait, par ailleurs, la possibilité pour le président du conseil régional de déléguer sa signature aux agents des services déconcentrés de l’État pour prendre, en son nom, les décisions relatives à l’attribution ou au retrait des aides administrées par la région. Les présidents de conseils régionaux ont utilisé cette faculté pour des raisons pratiques et techniques : les effectifs d’instruction étaient en effet intégrés au sein des services de l’État ; en outre, certaines de ces aides étaient cofinancées par l’État.

Dans le cadre de la nouvelle programmation de la PAC, pour la période 2023-2027, les régions ont conservé leur rôle d’autorité de gestion mais se sont également vues transférer les effectifs nécessaires pour traiter par elles-mêmes les dossiers concernés. Elles ne disposent pas néanmoins, en droit, de la capacité de signer les décisions relatives à ces aides, dans la mesure où ces dernières sont cofinancées par l’État.

3.   La nécessité de permettre aux régions de prendre les décisions relatives aux aides du Feader cofinancées par l’État sur la programmation 2014‑2022

Ainsi que l’indiquent l’étude d’impact associée au présent projet de loi et l’audition par votre rapporteur de représentants du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, il reste actuellement des décisions nouvelles ou modificatives à prendre au titre de la programmation précédente de la PAC. Ces décisions doivent être prises au plus tard le 31 décembre 2025. Le ministère estime que le nombre de dossiers concernés est compris entre 10 000 et 15 000, pour la seule mise en application du plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles (PCAE).

Ces décisions doivent permettre de prendre en compte, notamment, l’évolution des investissements consentis par les bénéficiaires des aides du Feader. Elles sont également indispensables pour s’assurer que ces aides sont conformes aux règles européennes relatives aux aides de la politique agricole commune.

Or, en raison du cofinancement par l’État de certaines de ces aides, il est actuellement impossible de confier pleinement aux régions la capacité de prendre ces décisions, en l’absence de disposition spécifique prévue à ce sujet au sein de la loi Maptam.

II.   Le dispositif proposé

Le dispositif proposé vise à permettre au représentant de l’État dans le département ou la région de déléguer sa signature au président du conseil régional et aux agents placés sous sa responsabilité concernant les décisions relatives aux aides de la politique agricole commune cofinancées par l’État dans le cadre du Feader.

L’article 33 complète en ce sens le chapitre VII du titre II de la loi n° 2014‑58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des territoires, en créant un article 78-1 prévoyant cette possibilité.

III.   Les modifications apportées par le Sénat

Lors de l’examen du présent projet de loi devant le Sénat, dans le cadre de la procédure de législation en commission, un amendement COM-61 présenté par le Gouvernement a été adopté pour garantir la bonne application de cette possibilité dans l’ensemble des collectivités concernées.

En effet, le dispositif proposé n’est pas codifié. Il ne peut donc pas bénéficier des dispositions figurant dans plusieurs codes, applicables aux aides de la politique agricole commune et prévoyant que les références au président du conseil régional sont remplacées par les références adéquates dans certaines collectivités.

Pour ces raisons, le dispositif proposé a donc été complété par un alinéa visant à garantir sa sécurité juridique, indiquant explicitement que, pour l’application du présent article en Corse, en Guyane, en Martinique, à Mayotte et à Saint-Martin, la référence au président du conseil régional est remplacée par la référence adéquate au sein de ces différentes collectivités.

Votre rapporteur soutient ces différentes évolutions et portera un amendement pour aller encore plus loin dans la réduction des délais de traitement de ces aides.

IV.   Les modifications apportÉes par la commission

Cet article n’a pas fait l’objet de modification lors de son examen en commission.

*

*     *

Article 33 bis (nouveau)
Extension du périmètre de la délégation prévue à l’article L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales concernant la mise en œuvre des aides de la politique agricole commune par les régions

La commission des affaires économiques s’est prononcée en faveur de l’adoption d’un article additionnel et la commission des lois l’a ainsi adopté.

Introduit par la commission

L’article L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales dresse une liste limitative de matières dans lesquelles le conseil régional peut, dans les limites qu’il a fixées, déléguer à son président un certain nombre de pouvoirs.

Parmi ces pouvoirs figure la capacité du président du conseil régional à procéder, « après avis du comité régional de programmation, à l'attribution et à la mise en œuvre des subventions liées à la gestion des fonds européens dont la région est l'autorité de gestion ou l'organisme intermédiaire ou, dans le cadre du Fonds européen agricole pour le développement rural, l'autorité de gestion régionale » ([220]).

Cette rédaction a pour conséquence que le président du conseil régional ne peut pas se voir déléguer l’établissement des règlements d’intervention ni la définition des critères d’attribution des aides. Il en va de même de la possibilité, pour ce dernier, de conclure les différents actes contractuels relatifs à la mise en œuvre des fonds européens sans présentation préalable en commission permanente ou en assemblée plénière.

Dans un souci de rapidité, puisque l’ensemble des décisions concernant les aides de la politique agricole commune, dans le cadre du Fonds européen agricole de développement rural (Feader) et au titre de la programmation 2014-2022, doit intervenir avant le 31 décembre 2025, l’article 33 bis vient modifier le 13° de l’article L. 4221-5 afin d’étendre le périmètre de la délégation en ce sens.

L’article 33 bis étend également le périmètre de délégation à l’attribution et à la mise en œuvre des contreparties nationales au titre du Feader et du Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture (Feampa) afin de réduire encore davantage les délais d’instruction et de versement de ces aides.

*

*     *

 

 

Article 34
Sécurisation juridique des missions de traçabilité animale confiées aux établissements de l’élevage (EDE)

La commission des lois, saisie au fond, a sollicité l’avis
de la commission des affaires économiques sur cet article. La commission des affaires économique s’est prononcée en faveur de l’adoption sans modification de cet article et la commission des lois l’a ainsi adopté.

 

Article adopté sans modification

 

Cet article modifie le code rural et de la pêche maritime (CRPM) afin de sécuriser juridiquement les missions de traçabilité animale confiées aux établissements de l’élevage (EDE).

Cet article n’a pas fait l’objet de modification lors de son examen en commission.

I.   Le droit en vigueur

1.   Un règlement européen fixe le cadre juridique applicable en matière de traçabilité animale

Le règlement (UE) 2016/429 du 9 mars 2016 relatif aux maladies animales transmissibles, également appelé « législation sur la santé animale », définit, au niveau européen, un cadre juridique visant à prévenir la diffusion des maladies animales transmissibles aux animaux ou aux êtres humaines et à assurer l’efficacité de la lutte contre ces dernières (article 1er). Il est applicable depuis le 21 avril 2023 (article 270) ([221]) .

Ce règlement comprend un ensemble de dispositions permettant de définir les différentes obligations incombant aux États membres et aux opérateurs quant à la traçabilité des animaux. C’est l’objet, en particulier, de son chapitre 2 consacré aux exigences en matière de traçabilité des animaux terrestres détenus et des produits germinaux, qui fixe un « régime de responsabilité incombant aux États membres pour la mise en place d’un système d’identification et d’enregistrement des animaux terrestres détenus » (article 108) et prévoit « une obligation incombant aux États membres pour l’établissement et la tenue à jour d’une base de données informatique des animaux terrestres détenus » (article 109). Les articles suivants définissent les différentes obligations des opérateurs ([222]) en ce sens, qui peuvent varier selon les espèces animales concernées.

2.   Une refonte du code rural et de la pêche maritime a conduit à priver de base légale certaines missions de traçabilité animale

Le règlement UE 2016/429, qui abroge 39 directives, a conduit à une refonte importante du code rural et de la pêche maritime.

L’ordonnance n° 2021-1370 du 20 octobre 2021 a procédé, en conséquence, à des modifications significatives au sein de plusieurs chapitres du code précité. Son article 3 réécrit, en particulier, le chapitre II du titre Ier du livre II de ce code, consacré à « l’identification des animaux ». Parmi les modifications notables, l’article L. 212-7 du code rural et de la pêche maritime a été réécrit pour substituer aux établissements de l’élevage (Ede) la notion de « personnes agréées », pour ce qui concerne l’exercice des missions « de délivrance et de gestion des matériels et procédés d’identification et des documents d’identification et de circulation des animaux », selon des modalités définies par décret.

Si cette ordonnance a bien créé un article L. 212-3 au sein du code rural et de la pêche maritime prévoyant que « l’établissement de l’élevage mentionné à l’article L. 653-12 est chargé de la collecte des données relatives aux opérateurs enregistrés conformément au règlement (UE) 2016/429 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 » et que les données concernées seront « centralisées par l’assemblée permanente des chambres d’agriculture au titre de sa mission de collecte et de traitement des données prévue à l’article L. 513-1, dans des conditions définies par décret », elle n’a pas, en revanche, rétabli de base légale au titre des missions de traçabilité animale des établissements de l’élevage.

Ainsi que le résume l’étude d’impact relative à cet article, l’ordonnance n° 2021-1370 « a matérialisé la décision de confier à des personnes agréées pour la collecte des données relatives au mouvement des animaux […] la délivrance et la gestion des matériels et procédés d’identification et des documents d’identification et de circulation des animaux, ainsi que le dispositif de collecte des informations relatives à l’identification des animaux également réalisé par les Ede » mais a abrogé les dispositions de l’article L. 212-7 qui habilitait les Ede à réaliser ces missions, alors que le dispositif envisagé ne peut être mis en place à court terme et repose donc sur ces mêmes établissements.

Il convient donc d’assurer la sécurité juridique de ces missions, qui sont, de fait, toujours exercées par les établissements de l’élevage.

II.   Le dispositif proposé

L’article 34 du présent projet de loi complète l’article L. 212-7 du code rural et de la pêche maritime afin de prévoir que les établissements de l’élevage (EdE) puissent se voir confier les missions relatives à la délivrance et à la gestion des matériels et procédés d’identification, ainsi que des documents d’identification et de circulation des animaux, selon des modalités définies par décret.

III.   Les modifications apportées par le Sénat

Lors de son examen devant le Sénat, dans le cadre de la procédure de législation en commission, l’article 34 a été complété de façon substantielle afin de garantir la sécurité juridique du dispositif proposé.

Le rapporteur du Sénat a en effet identifié la présence d’incertitudes ou de vides juridiques concernant la mission d’identification et de collecte des données des opérateurs détenant des animaux, la mission d’identification et de traçabilité des ruminants, ainsi que la mission de délivrance et de gestion des matériels et procédés et des documents d’identification et de circulation des animaux.

Le rapporteur du Sénat relève, en outre, que la rédaction de l’article 34 proposée par le Gouvernement est parfois imprécise et n’intègre pas suffisamment l’évolution du statut des établissements de l’élevage.

Plusieurs amendements ont donc été adoptés par la commission spéciale à l’initiative de son rapporteur Daniel Fargeot :

– un amendement COM-50 rétablit, au sein du code rural et de la pêche maritime, l’article L. 212-6 dans une rédaction nouvelle indiquant que les missions de collecte et de traitement « des données relatives à l’identification et la traçabilité des animaux des espèces bovine, ovine et caprine ainsi que la mission de délivrance et de gestion des matériels et procédés d’identification et des documents d’identification et de circulation des animaux » sont confiées aux chambres d’agriculture et soumises à un avis conforme de Chambres d’agriculture France (CDAF). Cet amendement préserve, par ailleurs, l’organisation de la collecte et le traitement des données d’abattage lorsqu’un accord interprofessionnel a d’ores et déjà confié cette mission à un opérateur. Il complète, enfin, l’article modifié dans le dispositif initial, à savoir l’article L. 212-7 du même code, en sécurisant juridiquement la mission de collecte des données des opérateurs par les établissements de l’élevage ainsi que l’ensemble des missions déjà visées à l’alinéa premier ;

– un amendement COM-51 réécrit, avec une entrée en vigueur décalée au 1er janvier 2026, le dernier alinéa de l’article L. 513-1 du code rural et de la pêche maritime relatif aux missions de Chambres d’agriculture France, pour le mettre en cohérence avec l’amendement prévoyant le rétablissement à la même date de l’article L. 212-6 du même code relatif aux missions des chambres d’agriculture ;

– un amendement COM-52 modifie l’article L. 513-1 du code rural et de la pêche maritime afin de prendre en compte l’évolution du statut des Ede, devenus des services des chambres d’agriculture ;

– un amendement COM-53 modifie les articles 3 et 11 de l’ordonnance n° 2021-1370 du 20 octobre 2021 relative aux mesures de surveillance, de prévention et de lutte contre les maladies animales transmissibles, pour mettre leur contenu en cohérence avec le rétablissement de l’article L. 212-6 du code rural et de la pêche maritime au 1er janvier 2026 proposé par un autre amendement du rapporteur, et les évolutions envisagées concernant la date d’entrée en vigueur de cette nouvelle rédaction et de la nouvelle rédaction de l’article L. 653-12 du même code prévue par cette ordonnance.

Votre rapporteur observe, à propos de ces modifications, que la mission de collecte des données relatives aux opérateurs a bien été prévue par l’ordonnance n° 2021-1370, qui crée un article L. 212-3 consacré à cette question dans le code rural et de la pêche maritime. Il n’en demeure pas moins que l’entrée en vigueur de cet article, prévue au mois d’avril 2024, conduit en effet les EdE à être privés de base légale pour l’exercice de cette mission jusqu’à cette date.

Cette date correspondait à la date envisagée pour que la base nationale des opérateurs (BNO), qui doit remplacer la base nationale d’identification (BDNI), soit opérationnelle. Tel ne sera pas le cas pour des raisons d’ordre technique, comme l’ont confirmé les représentants de Chambres d’agriculture France lors de leur audition.

Votre rapporteur observe que le vide juridique concernant les missions de collecte des données d’identification et de traçabilité des ruminants, ainsi que les missions de délivrance et de gestion des matériels et procédés, ainsi que des documents d’identification et de circulation des animaux, est également avéré.

Votre rapporteur relève inversement, dans le prolongement de ses échanges avec le Gouvernement, que les modifications introduites par le Sénat semblent poser des difficultés d’ordre juridique, tant en ce qui concerne l’introduction d’un avis conforme de Chambres d’agriculture France que sur la disposition relative aux accords interprofessionnels. Il portera un amendement de consensus permettant d’aboutir à une version satisfaisant l’ensemble des parties prenantes.

IV.   Les modifications apportÉes par la commission

Cet article n’a pas  fait l’objet de modifications lors de son examen en commission.


TRAVAUX de la commission DES LOIS

Lors de sa réunion du mercredi 13 mars 2024, la Commission examine le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole (n° 2041) (M. Ludovic Mendes, rapporteur).

Lien vidéo : https://assnat.fr/bELwMr

M. le président Sacha Houlié. Tous les sujets abordés par ce projet de loi ne relèvent pas que de la commission des lois. C’est pourquoi nous avons sollicité l’avis au fond des commissions des finances, des affaires économiques ainsi que du développement durable et de l’aménagement du territoire.

Conformément à une pratique maintenant bien établie, s’agissant des articles et amendements adoptés par les autres commissions, nous nous contenterons de ratifier les choix faits par nos collègues sans les examiner sur le fond.

Notre examen ne portera donc que sur les dispositions relatives au droit des sociétés, à la procédure pénale et à la fonction publique.

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Nous examinons donc le deuxième « Ddadue » de la législature, autrement dit le deuxième projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne. Depuis quinze ans, le Parlement est saisi d’un Ddadue par an en moyenne.

Son objet est de transposer en droit interne des règlements et des directives de l’Union européenne. Celui-ci porte sur des matières composites : économie, finances, transition écologique, droit pénal, droit social et agricole.

Le projet de loi initial comportait trente-quatre articles. Le Sénat l’a adopté en première lecture le 21 décembre, après avoir confié son examen à une commission spéciale. Notre assemblée, elle, a choisi de le renvoyer à la commission des lois. Toutefois, des délégations de fond ont été accordées aux commissions des affaires économiques, des finances, ainsi que du développement durable et de l’aménagement du territoire.

Notre commission est ainsi chargée de l’examen des articles 4, 5, 21 à 30 et 32. Je remercie l’ensemble des personnes auditionnées – les administrations centrales, le Conseil national des barreaux, et les acteurs représentant les entreprises – pour leur précieux concours à mes travaux.

Les articles 4 et 5 portent sur le droit des sociétés. L’article 4 ratifie la transposition par ordonnance de la directive 2019/2121 qui réforme les opérations transfrontalières – fusions, scissions, apports partiels d’actifs. De nature technique, il apporte des coordinations supplémentaires dans le code de commerce afin de renforcer le libre établissement des entreprises dans l’espace économique européen. Je vous proposerai d’adopter cet article et plusieurs amendements rédactionnels.

L’article 5 habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2022/2381 sur la représentation équilibrée des hommes et des femmes dans les conseils d’administration des grandes sociétés commerciales. Le Sénat a souhaité encadrer l’habilitation afin de s’assurer que la transposition n’entraîne aucun recul en droit interne pour la représentation des femmes. En effet, la France est en avance sur ses voisins européens : elle a institué un quota de 40 % dans les conseils d’administration dès 2011, par le biais de la loi Copé-Zimmermann, et des sanctions dissuasives. La loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle de 2021, dite loi Rixain, a ensuite défini des règles pour les organes de direction. Je vous proposerai donc des ajustements essentiellement rédactionnels.

Les articles 21 à 26 concernent les échanges d’informations en matière répressive. Ils transposent la directive 2023/977 du 10 mai 2023 visant à instaurer des règles précises et harmonisées de nature à garantir aux services répressifs de tout État membre un accès équivalent aux informations disponibles dans les autres États membres. Cette directive comporte plusieurs dispositions, relatives entre autres au point de contact unique pour l’échange d’informations, ou au principe de la transmission d’une copie des envois et réponses aux points de contact uniques des États émetteurs et destinataires lorsqu’ils ne sont pas à l’origine de ces demandes ou réponses. Le Sénat a profondément réécrit ces articles, dans un sens qui n’apparaît ni respectueux de la directive, ni opérationnel pour les services. C’est pourquoi je vous proposerai d’adopter les amendements du Gouvernement qui rétablissent la rédaction initiale.

L’article 27 adapte le code de procédure pénale au règlement européen 2023/2131 qui fluidifie les échanges d’information numériques en matière de terrorisme. Après audition de la Chancellerie, je vous proposerai de supprimer un ajout inopportun du Sénat concernant l’autorité chargée de correspondre avec l’agence européenne Eurojust.

L’article 28 met en conformité le code de procédure pénale avec la directive 2013/48 sur la garde à vue. Nous y reviendrons en détail tout à l’heure car il fait l’objet d’amendements. La Commission européenne a estimé, dans un avis motivé, que la présence de l’avocat n’était pas suffisamment garantie durant la garde à vue dans le droit français, notamment du fait de l’existence d’un délai de carence de deux heures qui court à compter de l’avis adressé à l’avocat choisi : à son terme, une audition sans avocat est possible si celui-ci ne s’est pas présenté. Le Sénat a réintroduit une procédure d’audition immédiate, mais elle n’est pas complètement conforme à la directive. Il faudra donc l’amender, sous peine d’exposer la France à un recours en manquement.

L’article 29 met en conformité le code de procédure pénale avec la décision-cadre 2002/584, qui porte sur la procédure de mandat d’arrêt européen. Il n’y a pas de marge de manœuvre ici pour se conformer au droit européen. Le Sénat a adopté cet article sans modification et je vous proposerai de faire de même.

L’article 30 prévoit certaines modalités d’application outre-mer. Le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement pour reporter de trois mois l’entrée en vigueur de l’article 28 sur la garde à vue, de manière à permettre aux services judiciaires de se préparer, ce qui me semble opportun. Je vous proposerai de l’adopter sans modification.

Enfin, l’article 32 porte sur le droit de la fonction publique. Il a pour objet de transposer l’article 10 de la directive 2019/1158 du 20 juin 2019 concernant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants. Il prévoit un maintien des droits acquis – droit à la formation, aux évaluations annuelles, etc. – avant le début de certains congés, notamment le congé de paternité et d’accueil de l’enfant, le congé parental ainsi que le congé de proche aidant. Le Sénat a opportunément allongé la liste des congés concernés. Je vous proposerai d’adopter l’article 32 dans cette nouvelle rédaction.

M. le président Sacha Houlié. Nous en venons aux orateurs des groupes.

Mme Caroline Abadie (RE). Je salue l’important travail des rapporteurs Damien Adam, Stéphane Vojetta et Daniel Labaronne qui, dans leurs commissions respectives, ont contribué à améliorer ce projet de loi. Il s’agit certes d’un exercice assez technique, mais aussi récurrent – c’est le troisième en trois ans – et essentiel pour la conformité de notre droit à la législation européenne.

L’étroitesse de la marge de manœuvre des États membres pour transposer le droit européen est avérée. En dépit de la technicité du texte, d’importantes mesures ayant parfois fait l’objet de longs débats en France demeurent soumises à notre vote.

La commission devra ainsi se prononcer sur l’article 28 qui adapte le régime de la garde à vue en France, s’inscrivant ainsi dans le long processus de réforme déjà engagé dans notre pays sur ce sujet. Je tiens à saluer les propositions de notre rapporteur pour rétablir la possibilité pour l’avocat de consulter les procès-verbaux des auditions qui se sont déroulées en sa présence ou pour supprimer la possibilité de recourir à l’audition immédiate sans la présence de l’avocat, pour des raisons d’éloignement géographique du lieu où se déroule la garde à vue. Ces dispositions semblent particulièrement bienvenues pour conserver l’équilibre si subtil, propre à notre code de procédure pénale.

Engager une réflexion sur l’articulation entre la direction des affaires criminelles et des grâces et le parquet national antiterroriste, notamment s’agissant du rôle de correspondant local aux échanges d’informations numériques dans les affaires de terrorisme, est également souhaitable.

Ce projet de loi n’est pas seulement technique, il est aussi déterminant pour les droits de la défense et les droits fondamentaux. Le groupe Renaissance le soutiendra donc, ainsi que les amendements du rapporteur.

M. Jordan Guitton (RN). Ce projet de loi ne fait qu’appliquer les décisions européennes afin de les rendre conformes au droit français. Son titre témoigne à lui seul du caractère disparate et incohérent des dispositions soumises au vote national : pêle-mêle des dispositions relatives aux batteries, à la collecte et à la valorisation des déchets, aux contrats de concessions aéroportuaires, à l’échange d’informations numériques dans les affaires de terrorisme, à la politique agricole… Et l’on s’étonne encore qu’un tel texte puisse être perçu comme un amas de normes indigestes.

L’Assemblée nationale devrait à tout le moins pouvoir examiner ces textes visant à adapter le droit français au droit européen dans des conditions acceptables, autrement dit en disposant du temps nécessaire pour étudier les textes européens dont ils sont issus, et en se voyant présenter autant de projets de loi qu’il y a de domaines juridiques abordés. Mais le Gouvernement, loin de respecter le mandat confié à la représentation nationale, a engagé la procédure accélérée. Il révèle là son allégeance à l’Union européenne, qui lui dicte son calendrier sous la menace de sanctions en cas de retard ou de refus de transposition.

Le Parlement français ne peut pas être la chambre d’enregistrement de l’Union européenne. Nous vous le rappellerons constamment, le Rassemblement national s’attachera à la défense des intérêts français à chaque instant et ce, malgré les sanctions que Bruxelles pourrait prendre. Nous ne laisserons pas, sans rien faire, nos intérêts être bradés au nom d’une Europe trop souvent sourde aux aspirations et aux besoins de notre nation.

Si certains articles peuvent paraître utiles, tel l’article 29 qui supprime l’exigence du consentement de la personne dont le transfèrement est envisagé dans le cadre du mandat d’arrêt européen, ce n’est pas le cas pour de nombreux autres – je pense à l’article 5 qui prévoit « un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées » alors que ces dispositions sont déjà présentes dans le droit français. Plusieurs articles sont même contreproductifs, comme l’article 28, qui modifie plusieurs articles du code de procédure pénale afin notamment de permettre à la personne gardée à vue de prévenir le membre de son entourage de son choix. Cela multipliera les risques d’entrave au bon déroulement de l’enquête. La nécessité d’attendre l’avocat, y compris lorsque son retard se prolonge, avant de procéder à l’audition de la personne gardée à vue ne pourra là encore que nuire à l’efficacité de l’enquête. Deux amendements ont été déposés par le groupe Rassemblement national pour éviter ces modifications gravement attentatoires à la sécurité de nos ressortissants pourtant déjà tellement mise à mal.

Si 54 % des Français désavouent le fonctionnement actuel de l’Union européenne, selon une enquête publiée lundi par Le Monde, c’est parce qu’ils ne se retrouvent pas dans une Europe qui noie la souveraineté et la démocratie française sous un flot de normes techniques, souvent illisibles et trop fréquemment inutiles, voire contraires à leur intérêt. Il suffit d’aller aux manifestations des agriculteurs pour s’en rendre compte.

Ce projet de loi illustre, une fois de plus, le poids de la technocratie bruxelloise qui n’a aucune vision pour l’Europe et passe son temps à menacer et à sanctionner les États membres. Le groupe Rassemblement national défend une Union européenne soucieuse des souverainetés des nations dans les domaines mettant en jeu les intérêts vitaux de notre pays, et attachée aux coopérations fructueuses dans les autres domaines – je pense à Erasmus. Nous voulons offrir aux Français et aux Européens une Europe respectueuse de chacun et profitable à tous. Nous déterminerons notre vote sur le texte à l’issue des débats.

M. Raphaël Schellenberger (LR). Voici donc un nouveau Ddadue qui vient démontrer, une fois de plus, que nous sommes rarement en retard lorsqu’il s’agit de mettre notre droit national en conformité avec la réglementation européenne.

Ces adaptations emportent rarement des changements majeurs. Parfois même, le droit national est plus normatif que le droit européen – la responsabilité de la norme excessive, dont on parle beaucoup en matière d’agriculture en ce moment, n’est pas forcément imputable à l’Europe mais peut se loger dans les arcanes de notre droit. Le Ddadue peut donc être l’occasion de libéralisations ou d’allégements bienvenus.

Le projet de loi balaye, comme d’habitude pour les textes de cette nature, des domaines très différents.

Nous soulignons le travail effectué par le Sénat pour s’assurer que nous ne profitions pas de ce support législatif pour faire de la surtransposition, ce qui a été une fâcheuse habitude du législateur français. Nous saluons le travail de la chambre haute, qu’il s’agisse de la parité dans les conseils d’administration, de l’échange d’informations entre les services répressifs des États membres, ou encore du recours à l’avocat lors de la garde à vue. Nous soutiendrons le texte.

M. Philippe Latombe (Dem). Ce texte comporte d’abord des adaptations du droit des sociétés. Il permet de réformer le régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières ainsi que de rechercher un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées.

Le texte comprend ensuite diverses dispositions relatives à l’échange d’informations en matière répressive et dans les affaires de terrorisme. La transmission d’informations est parfois cruciale dans les affaires qui concernent plusieurs pays et les difficultés de communication entre les États peuvent nuire au bon déroulement des enquêtes. Si l’installation d’un point de contact unique n’est pas une nouveauté pour la France, il paraît bienvenu d’instaurer un cadre commun à l’ensemble des État pour la transmission des informations. En revanche, les modifications apportées par le Sénat ne nous semblent pas pertinentes. C’est pourquoi nous soutiendrons les amendements du rapporteur et du Gouvernement en la matière.

Enfin, le projet de loi prévoit une réforme de la garde à vue, motivée par l’alerte de la Commission européenne sur la mauvaise transposition de la directive de 2013. Afin d’y remédier, il adapte le code de procédure pénale s’agissant du droit de communiquer avec un proche et des dérogations possibles à l’assistance d’un avocat lors d’une garde à vue.

Le groupe Démocrate soutient évidemment ce texte.

Mme Marietta Karamanli (SOC). Ce texte, bien que très technique, n’en est pas moins nécessaire pour intégrer dans notre droit des dispositions adoptées au niveau européen. Je note que les sénateurs ont choisi de l’examiner au sein d’une commission spéciale.

La forte dimension technique des dispositions, ajoutée à l’éloignement du contexte d’origine, rend leur objet et leurs motifs difficiles à cerner. En outre, l’exercice de la déclinaison en droit français est contraint ; les marges de manœuvre laissées aux parlements nationaux pour la transposition sont limitées.

L’article 9 comporte une habilitation à légiférer par ordonnance. L’article 17, lui, modifie le code général de la fonction publique pour étendre aux praticiens hospitaliers le droit général à l’information. D’après notre rapporteur, le contenu et les modalités de ce droit seront précisés par un décret en Conseil d’État et un arrêté qui pourrait être commun aux agents du service public et aux praticiens hospitaliers, lesquels, s’ils sont agents publics, conservent une autonomie fonctionnelle dans le service public. On ne peut que se féliciter d’une telle extension.

Plusieurs articles portent sur le droit et la procédure pénale, le plus important étant l’article 28 qui concerne la garde à vue et le droit à l’assistance d’un avocat. Dans sa version initiale, cet article consacrait l’interdiction de la possibilité d’audition immédiate des gardés à vue sans la présence d’un avocat. Le Sénat a aménagé l’article 63-4-2 du code de procédure pénale afin de reporter la présence de l’avocat pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête, pour assurer le bon déroulement des investigations urgentes, ou pour prévenir une atteinte à la vie, à la liberté et l’intégrité physique des personnes. La référence à une situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale, introduite pat le Sénat, est peu précise, ce qui pourrait faciliter les dérogations à la présence de l’avocat. Nous avons présenté un amendement afin de réaffirmer ce principe. C’est un point que le Conseil de l’Europe relève régulièrement.

L’article 28 mentionne aussi la nécessité pour l’avocat de se présenter « sans retard indu ». Le diable se cachant dans les détails, j’appelle votre attention sur le risque que fait encourir une telle rédaction.

Nous soutenons ce texte. Caroline Abadie l’a rappelé, nous avons eu à examiner plusieurs Ddadue. L’un d’entre eux a été l’occasion d’introduire des dispositions importantes dans notre droit pénal en matière d’esclavage et de traite des êtres humains, qui ont facilité le travail des magistrats dans plusieurs affaires.

M. Philippe Pradal (HOR). Ce projet de loi vise à transposer dans le droit français les directives et règlements qui ont fait l’objet d’un consensus au niveau européen. À l’approche des élections européennes, il est bon de rappeler à quel point l’Union européenne sait participer à rendre l’ensemble de ses États membres plus forts.

Nous soutenons l’habilitation à légiférer par ordonnances, prévue à l’article 5, afin de transposer la directive relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées. Si la France est pionnière en la matière, avec 46 % de femmes dans les conseils d’administration et de surveillance des sociétés du SBF 120, l’harmonisation des législations des autres États européens permettra d’insuffler une dynamique commune. Si la directive adoptée l’année dernière poursuit des objectifs ambitieux, il convient de veiller à ce que sa transposition en droit français ne fragilise pas l’édifice construit depuis la loi Copé-Zimmermann.

Le projet de loi permet également de renforcer la coopération entre services répressifs des États membres sans empiéter sur les compétences régaliennes des États. Il est indispensable d’instaurer des mécanismes de collaboration entre les services nationaux afin de s’assurer d’une pleine efficacité dans les enquêtes menées, à l’heure où la criminalité, toujours plus professionnelle, s’internationalise. Cette coopération est encore plus essentielle en matière de terrorisme et d’atteinte à l’intégrité des territoires européens, d’où la nécessité de transposer le règlement relatif aux échanges d’informations numériques dans ces affaires. Cette coopération essentielle doit demeurer respectueuse des modes de fonctionnement propres à chaque pays, en particulier en matière de renseignement.

Le projet de loi réforme substantiellement les règles concernant l’assistance d’un avocat pendant la garde à vue, à la suite de l’engagement d’une procédure précontentieuse contre la France en raison de la non-conformité de la transposition de la « directive C » de 2013. Si cette directive cherche à renforcer l’effectivité du droit des gardés à vue, notamment pour l’accès à un avocat, le groupe Horizons et apparentés regrette que cette réforme substantielle soit menée dans le cadre d’un projet de loi de transposition. En effet, l’équilibre entre les deux principes constitutionnels que sont la recherche d’auteurs d’infractions pénales et le droit d’être assisté et défendu est subtil et les effets de bord, d’un côté comme de l’autre, peuvent être importants.

Ainsi, nous soutenons les précisions apportées par les sénateurs, notamment sur le maintien de certaines possibilités de procéder à l’audition de la personne gardée à vue sans délai dans des conditions très strictes d’autorisation par le procureur de la République, lorsqu’elle est indispensable, soit pour éviter une situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale, soit pour prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne.

Enfin, nous déplorons qu’ait été déclaré irrecevable notre amendement relatif aux suites que le Gouvernement entend donner aux remarques de la Commission européenne sur la loi visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne, texte adopté à l’unanimité par les deux chambres et promulgué en juillet dernier. Nous aurons l’occasion d’en reparler.

Pour l’ensemble de ces raisons et malgré cette dernière remarque, le groupe Horizons et apparentés votera en faveur du projet de loi.

M. Jérémie Iordanoff (Écolo-NUPES). Le groupe Écologiste soutiendra ce texte très technique, sur lequel la marge de manœuvre du législateur est très réduite. Il n’est toutefois pas interdit de surtransposer, malgré les réserves de M. Schellenberger.

J’insiste sur une disposition très importante en matière de libertés publiques : l’article 28, qui prévoit de mettre enfin notre procédure pénale en conformité avec les exigences d’une directive de 2013 que nous avions mal transposée. Ladite directive reconnaît un droit pour le suspect ou la personne poursuivie de bénéficier de la présence d’un avocat lors de son audition. Or notre code de procédure pénale prévoit simplement un délai de carence de deux heures pendant lesquelles la personne ne peut être auditionnée en l’absence de son avocat, une disposition manifestement incompatible avec les exigences européennes. L’article 28 met fin à cette divergence et c’est heureux. Nous aurions pu aller plus loin en donnant à l’avocat accès au dossier dès le stade de la garde à vue – cela correspond aux standards européens. Notre amendement sur ce point a malheureusement été déclaré irrecevable. Il est quelque peu difficile de comprendre pourquoi et j’espère une explication sur ce point.

Mme Elsa Faucillon (GDR-NUPES). Je m’attacherai essentiellement à cet article 28. On peut tout de même s’interroger sur l’opportunité d’examiner une réforme du régime de la garde à vue dans un texte aussi dense, technique et disparate. Nous sommes certes satisfaits de certaines avancées qui s’y trouvent, mais un tel choix n’est pas à la hauteur des enjeux. Il y a une certaine passivité fautive de la part du Gouvernement qui n’a pas transposé plus tôt et de manière plus fournie les dispositions sur la garde à vue.

La mise en conformité de notre droit avec la directive C renforce indéniablement les droits et garanties procédurales de la personne gardée à vue. Le droit de communiquer avec un proche est étendu ; la personne pourra faire intervenir non seulement un membre de sa famille et son employeur, mais toute personne de son choix. C’est une disposition que nous avons défendue dans d’autres projets de loi.

Ensuite les dérogations à l’assistance immédiate d’un avocat sont restreintes. Cependant, la commission des lois du Sénat a introduit trois conditions dans lesquelles le procureur de la République peut, à la demande de l’officier de police judiciaire, et sur décision écrite et motivée, décider de faire procéder immédiatement à l’audition du gardé à vue ou à des confrontations, sans attendre son avocat. Or ces conditions sont suffisamment vagues pour autoriser l’audition immédiate dans de nombreuses situations. Ces exceptions créent un droit de carence dérogatoire qui ne nous semble pas conforme à la directive de 2013, laquelle prévoit la possibilité de déroger temporairement au droit d’accès à un avocat dans des conditions bien plus strictes que celles introduites par le Sénat.

Si la transposition dans notre droit de la directive de 2013 renforce indéniablement les droits de la défense, ces avancées doivent être prolongées, à défaut d’avoir été devancées.

M. Jean-Félix Acquaviva (LIOT). Comme à chaque projet de loi visant à adapter le droit européen, nous avons à examiner un texte fourre-tout qui cumule les adaptations techniques, dépourvues de lien entre elles, tout en en dissimulant des changements sensibles pour les citoyens et la coopération effective au sein de l’Union. Notre groupe aurait d’ailleurs préféré que ce texte soit renvoyé à une commission spéciale, comme au Sénat, en lieu et place du découpage opéré.

Nous constatons que le Gouvernement tient souvent le Parlement, mais également les acteurs des secteurs concernés à l’écart des rappels à l’ordre et des alertes de la Commission européenne. Le manque d’information, associé parfois à l’absence de consultation des intéressés lors des négociations, conduit à légiférer dans l’urgence, donc parfois à le faire mal.

Nous tenons à insister sur un point essentiel du texte, la réforme de la garde à vue. Les travaux du Sénat laissent entendre que le Gouvernement, alerté depuis deux ans, n’a pas agi. Sur le fond, l’évolution est utile puisqu’elle donne plus de droits à la personne gardée à vue. Nous sommes favorables à la version initiale, certaines dispositions ajoutées au Sénat étant dangereuses. La possibilité de commencer l’audition sans attendre l’avocat pour des raisons d’éloignement géographique créerait ainsi une rupture d’égalité territoriale entre justiciables et toucherait durement certaines zones rurales, outre-mer et insulaires. Enfin, nous nous interrogeons sur la capacité à mettre en œuvre ces modifications puisque ni les directions du ministère de l’intérieur, ni les forces de l’ordre, ni le Conseil national des barreaux n’ont été mis en mesure d’anticiper une telle réforme.

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Je ne voudrais pas paraître agressif, Monsieur Guitton, mais alors que vous clamez sans cesse que vous voulez, aux prochaines élections, être les représentants de la France au sein de l’Union européenne, vous contestez son fonctionnement et ses directives, qui pourtant améliorent souvent notre droit.

Elles ne l’améliorent pas s’agissant des conseils d’administration, parce que la France était pionnière en la matière. Mais justement, dans ce genre de cas, l’Union européenne nous suit : ainsi la loi Copé-Zimmermann, que nous connaissons depuis un certain temps, va-t-elle s’appliquer désormais presque partout en Europe, dans une version certes allégée. Nous veillerons à ce qu’elle ne soit pas détricotée, monsieur Schellenberger, je vous rassure. Vous avez raison, le droit français est parfois plus normatif que celui de l’Union européenne mais, le texte en est la preuve, nous sommes capables aussi d’impulser des évolutions.

Madame Karamanli, en ce qui concerne la garde à vue, nous avons vous et moi déposé des amendements identiques afin de revenir sur certaines modifications apportées par le Sénat. Quant à l’article 17, son examen relevait de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, dont le rapporteur a très bien travaillé. Enfin, s’agissant du « retard indu » de l’avocat, nous en débattrons tout à l’heure.

Monsieur Pradal, vous avez raison, il n’est pas question de détricoter le droit national, mais au contraire de l’améliorer quand il en a besoin. Je l’ai dit, la France est souvent en avance. L’objectif est de se garder de toute surtransposition, comme est parfois tenté de le faire le Sénat sur certains articles. Les débats actuels illustrent qu’elles ont des conséquences fâcheuses.

Je le rappelle, le texte ne propose pas une réforme de la garde à vue. Il vise à garantir les droits du prévenu en autorisant la présence de l’avocat à ses côtés dès la première heure et en mettant fin au délai de carence. La dernière réforme de la garde à vue date de 2011. Madame Faucillon, vous regrettez la réponse tardive de l’État mais sachez que l’avis motivé de la Commission européenne sur une mauvaise transposition de la directive date de septembre 2023 et que le projet de loi a été déposé en novembre 2023. Le Gouvernement a donc fait le nécessaire pour mettre notre législation en conformité avec le droit européen dès qu’il a été informé de l’avis de la Commission.

Je note que le texte ne suscite pas d’autres objections majeures. Vous avez raison, il est ultratechnique. Les modifications apportées n’ont pas un impact significatif dans notre droit national mais auront des conséquences sur la vie quotidienne de certains acteurs, dont les agents de police et de gendarmerie ainsi que les avocats. Nous connaissons les craintes que, dans certains territoires, les avocats ne soient pas disponibles assez rapidement à cause du manque d’effectifs et de l’éloignement des tribunaux. Nous serons attentifs à la réponse qui leur sera donnée.

Quant aux conseils d’administration, le débat porte davantage aujourd’hui sur la représentation des salariés en leur sein. Parmi toutes les personnes que nous avons auditionnées, aucune ne s’oppose à la réforme. Elles considèrent que le texte est moins contraignant que le droit national et qu’il pourra s’appliquer assez facilement.

M. le président Sacha Houlié. Nous commençons par trois articles qui ont été délégués à la commission des affaires économiques.

Article 1er (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL20, CL17, CL18 et CL19 de la commission des affaires économiques.

Elle adopte l’article 1er modifié.

Article 2 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL16, CL15 et CL14 de la commission des affaires économiques.

Elle adopte l’article 2 modifié.

Article 3 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL13 et CL12 de la commission des affaires économiques.

Elle adopte l’article 3 modifié.

Article 4 (articles L. 225-124, L. 236-20, L. 236-21, L. 236-22, L. 236-28 à L. 236-31, L. 236-35, L. 236-36, L. 236-38, L. 236-40, L. 236-48, L. 236-50, L. 236-52 et L. 950-1 du code de commerce, et L. 2371‑1 et L. 2372‑1 du code du travail) : Ratification de l’ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales et diverses améliorations de ce même régime

Amendements CL80, CL81, CL82, CL83, CL84, CL85 et CL86 de M. Ludovic Mendes

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Cet article et le suivant relèvent de notre commission. Les amendements que je vous propose ici sont purement rédactionnels.

La commission adopte successivement les amendements.

Elle adopte l’article 4 modifié.

Article 5 : Demande d’habilitation à prendre par ordonnance des mesures pour transposer la directive (UE) 2022/2381 du Parlement européen et du Conseil du 23 novembre 2022 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées et à des mesures connexes et pour harmoniser les différents dispositifs nationaux préexistants relatifs à la représentation équilibrée entre les femmes et les hommes au sein des organes des sociétés commerciales

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CL87 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL88 de M. Ludovic Mendes

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Cet amendement propose une rédaction plus précise et plus correcte des dispositions introduites par le Sénat, sans en modifier le fond. Le Sénat a souhaité encadrer les modalités de transposition par ordonnance de la directive. L’amendement vise à inscrire dans le texte les obligations légales de représentation équilibrée des femmes et des hommes – soit un quota de 40 % dans les conseils d’administration – plutôt qu’un « objectif de parité ». Par ailleurs, l’amendement vise à inciter le Gouvernement à inclure les administrateurs représentant les salariés. En effet, il est assez difficile, lorsqu’on est à la tête d’un conseil d’administration, d’expliquer qu’il faut changer un représentant élu par les organisations syndicales au motif que l’on a besoin d’une femme ou d’un homme.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 5 modifié.

M. le président Sacha Houlié. Les articles 6 à 20 ont été délégués.

Article 6 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL1, CL2 et CL3 de la commission des finances.

Elle adopte l’article 6 modifié.

Article 7 (examen délégué)

La commission adopte l’amendement CL4 de la commission des finances.

Elle adopte l’article 7 modifié.

Article 7 bis (examen délégué)

La commission adopte l’article 7 bis non modifié.

Après l’article 7 bis (examen délégué)

La commission adopte l’amendement CL5 de la commission des finances.

Article 8 (examen délégué)

La commission adopte l’amendement CL6 de la commission des finances.

Elle adopte l’article 8 modifié.

Article 9 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL7, CL8 et CL9 de la commission des finances.

Elle adopte l’article 9 modifié.

Article 10 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL24, CL25, CL26 et CL27 de la commission du développement durable.

Elle adopte l’article 10 modifié.

Article 11 (examen délégué)

La commission adopte l’amendement CL28 de la commission du développement durable.

Elle adopte l’article 11 modifié.

Article 12 (examen délégué)

 

La commission adopte l’article 12 non modifié.

Article 13 (examen délégué)

 

La commission adopte l’amendement CL29 de la commission du développement durable.

Elle adopte l’article 13 modifié.

Article 14 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL30, CL31, CL32, CL33, CL34, CL35, CL36, CL37, CL38, CL39, CL40, CL41 et CL42 de la commission du développement durable.

Elle adopte l’article 14 modifié.

Article 15 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL43, CL44, CL45, CL46, CL47, CL48, CL49 et CL50 de la commission du développement durable.

Elle adopte l’article 15 modifié.

Article 16 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL51, CL52, CL53, CL54, CL55, CL56, CL57 et CL58 de la commission du développement durable.

Elle adopte l’article 16 modifié.

Article 17 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL59, CL60 et CL61 de la commission du développement durable.

Elle adopte l’article 17 modifié.

Article 18 (examen délégué)

La commission adopte l’article 18 non modifié.

Article 19 (examen délégué)

La commission adopte l’article 19 non modifié.

Article 20 (examen délégué)

La commission adopte successivement les amendements CL62 et CL63 de la commission du développement durable.

Elle adopte l’article 20 modifié.

M. le président Sacha Houlié. Les articles 21 à 30 relèvent de notre commission.

Titre II

Dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière répressive

Chapitre Ier

Diverses dispositions relatives à l’échange d’informations en matière répressive

Article 21 (Intitulé de la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale) : Modification de l’intitulé de la section 6 du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale relative à l’échange simplifié d’informations entre services

 

La commission adopte l’article 21 non modifié.

Chapitre II
Dispositions applicables aux demandes d’informations émises par les services français

Article 22 (art. 695-9-31 et art. 695-9-31-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Désignation des services ou unités pouvant saisir directement les points de contacts uniques des autres États membres et disposition relative à l’instauration d’un point de contact unique en France

Amendement CL73 du Gouvernement

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Cet amendement a trait aux échanges d’informations entre les services répressifs compétents et les services répressifs désignés. Il a pour objet d’en revenir à la rédaction initiale de l’article, à laquelle le Sénat avait apporté des modifications. Il apporte toutefois deux modifications. Premièrement, il prévoit que la désignation des services et des unités pouvant contacter directement les points de contact uniques des autres États membres est facultative. Cette évolution est conforme à l’article 4 de la directive du 10 mai 2023. Deuxièmement, la nouvelle rédaction précise que cette liste ne pourra être établie que par le point de contact unique, en l’occurrence le service central de coopération opérationnelle de police (Sccopol). Cette disposition correspond à une demande des services et me paraît cohérente. Pour l’ensemble de ces raisons, je donnerai un avis favorable à cet amendement

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 22 modifié.

Article 23 (art. 695-9-33 du code de procédure pénale) : Dispositions relatives aux demandes d’informations émises par les services français

Amendement CL74 du Gouvernement

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Cet amendement rétablit la rédaction initiale de l’article 23. En effet, la rédaction du Sénat soulève deux difficultés. D’une part, elle interdit les échanges directs entre les services répressifs compétents des États membres, ce qui n’est pas conforme à l’esprit de la directive. D’autre part, elle modifie les dispositions relatives aux motifs permettant de ne pas transmettre une copie de la demande d’information aux points de contact uniques. Ces ajouts pourraient réduire le champ du texte et constituer une sous-transposition de la directive. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 23 modifié.

 

Chapitre III
Dispositions applicables aux demandes d’informations reçues par les services français

Article 24 (art. 695-9-37 et art. 695-9-38 du code de procédure pénale) : Dispositions relatives aux transmissions d’informations sur demande ou spontanées émises par les services français

Amendement CL75 du Gouvernement

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir la rédaction initiale de l’article 24. En effet, le Sénat a inscrit dans la loi les délais de réponse aux demandes d’information reçues par les services répressifs français. Or il semble plus cohérent que ces délais demeurent fixés au niveau réglementaire, comme le prévoit le droit en vigueur.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 24 modifié.

Article 25 (art. 695-9-39 du code de procédure pénale) : Transmission, à un État membre, des informations détenues par les services et unités et leur ayant été préalablement transmises par un autre État membre

Amendement CL76 du Gouvernement

M. Ludovic Mendes, rapporteur. C’est encore un rétablissement de la rédaction initiale de l’article, auquel je suis favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 25 modifié.

Article 26 (art. 695-9-40, art. 695-9-41, art. 695-9-42, art. 695-9-43, art. 695-9-44, art. 695‑9‑45, art. 695‑9‑45‑1 [nouveau], art. 695-9-46, et art. 695-9-47 du code de procédure pénale) : Dispositions relatives à l’intervention de l’autorité judiciaire en matière d’échanges d’informations, aux refus de communication des informations demandées et à l’utilisation des informations transmises

Amendement CL77 du Gouvernement

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Cet amendement tire les conséquences de l’adoption des amendements précédents, qui rétablissent la rédaction initiale du projet de loi. Favorable.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 26 modifié.

 

Article 27 (article 695-8-2 du code de procédure pénale) : Adaptation du code de procédure pénale au règlement (UE) 2023/2131 du Parlement européen et du Conseil du 4 octobre 2023 relatif aux échanges d’informations numériques dans les affaires de terrorisme

Amendement CL89 de M. Ludovic Mendes

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Je vous propose de supprimer l’alinéa 3, ajouté par le Sénat, qui prévoit la désignation du parquet national antiterroriste comme correspondant national pour les questions de terrorisme auprès d’Eurojust. Le correspondant national est habituellement désigné par voie de circulaire.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 27 modifié.

Article 28 : Mise en conformité des dispositions du code de procédure pénale relatives au droit d’accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales avec la directive 2013/48/UE

Amendement CL79 de M. Jordan Guitton

M. Jordan Guitton (RN). Cet amendement vise à supprimer les alinéas 3 à 6 afin de faciliter l’enquête lors de la garde à vue.

Le code de procédure pénale dispose que toute personne placée en garde à vue « peut, à sa demande, faire prévenir, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l’un de ses parents en ligne directe ou l’un de ses frères et sœurs de la mesure dont elle est l’objet ». Il prévoit également que la personne peut prévenir son employeur. Aux yeux de notre groupe, ces droits sont suffisants. Le projet de loi ajoute les mots : « ou toute autre personne qu’elle désigne », ce qui ne paraît pas utile et pourrait même se révéler dangereux, car le gardé à vue pourrait prévenir un coauteur ou un complice. Cela remettrait en cause une partie de la procédure et du secret de l’enquête. Par ailleurs, que l’Europe nous impose des règles sur ce sujet très sensible nous pose un problème de fond.

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Avis défavorable. Ce point est expressément visé par la Commission dans son avis motivé de septembre 2023, d’où l’insertion par le Gouvernement de cette disposition dans le projet de loi déposé en novembre.

La personne gardée à vue a peu intérêt à prévenir un complice puisqu’aux termes de l’article 63-2 du code de procédure pénale, le procureur de la République peut, à la demande de l’officier de police judiciaire (OPJ), décider que le tiers sera prévenu plus tard, ou pas du tout, « si cette décision est, au regard des circonstances, indispensable afin de permettre le recueil ou la conservation des preuves ou de prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne ». La Commission garantit la liberté de choix de la personne, qui peut décider ou non de la présence d’un avocat. Nous n’avons aucune marge de manœuvre.

M. Philippe Latombe (Dem). Nous avons ici un véritable problème. La Commission nous a dit que nous avions mal transposé la directive de 2013. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) nous sanctionnerait immanquablement si nous ne réalisions pas une transposition exacte. S’il ne faut pas surtransposer, il faut surtout éviter de sous-transposer, sous peine de fragiliser nos procédures pénales. À titre d’exemple, la semaine dernière, la Cour de cassation a invalidé en totalité une procédure de réquisition de données de connexion par le procureur au motif que notre droit n’est pas conforme à celui de l’Union. Tenons-nous-en au texte initial, qui évite la surtransposition.

M. Jordan Guitton (RN). La transposition remet en cause une partie importante de notre procédure pénale. Cette question ne devrait pas être débattue à l’occasion d’un texte d’adaptation de notre droit à celui de l’Union européenne, mais d’un véritable projet de loi, en présence du garde des sceaux. La procédure suivie relègue le Parlement au rang d’une chambre d’enregistrement du droit de l’Union européenne. J’entends que nous pourrions encourir des sanctions, mais la question est de savoir si nous sommes encore un État souverain dans le domaine du droit pénal ! Ces alinéas sont inutiles. Ils pourraient mettre en danger le travail des professionnels du droit et des forces de l’ordre.

M. Jérémie Iordanoff (Écolo-NUPES). Cet amendement constituerait clairement une sous-transposition. Or c’est parce que la directive avait déjà été sous-transposée que nous y revenons. En réalité, Monsieur Guitton, ce que vous remettez en cause, c’est l’Union européenne. J’ai du mal à comprendre votre position : si nous ne devons pas transposer les dispositions européennes dans cette matière, proposez-vous que la France sorte de l’Union ?

Par ailleurs, j’aimerais avoir une explication sur l’irrecevabilité qui a été opposée à d’autres amendements portant sur cet article.

La commission rejette l’amendement.

La commission adopte l’amendement de coordination CL90 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL72 de Mme Marietta Karamanli

Mme Marietta Karamanli (SOC). Cet amendement vise à ce que, dès son interpellation – soit avant même le début de la garde à vue – une personne puisse demander à être assistée par un avocat. C’est une demande que nous formulons de longue date.

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Le projet de loi prévoit que, si la personne a choisi de se faire assister par un avocat, elle ne peut être entendue sur les faits sans la présence de ce dernier. Le texte renforce donc les droits de la défense et de la personne gardée à vue. Aucune des personnes que nous avons auditionnées, pas même le Conseil national des barreaux, ne demande la mesure que vous proposez. Demande de retrait ou défavorable.

Mme Béatrice Roullaud (RN). Dès qu’une personne est interpellée et que l’OPJ l’informe de son placement en garde à vue, celle-ci commence. La personne peut appeler son avocat sans délai et si elle se voit imposer un délai excessif, elle peut intenter un recours. Je ne comprends donc pas bien le sens de cet amendement. Le point de départ de la garde à vue est la déclaration de l’OPJ, non le fait d’entrer dans un commissariat.

La commission rejette l’amendement.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CL91 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL92 de M. Ludovic Mendes

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la seconde phrase de l’alinéa 10, introduite par le Sénat, selon laquelle l’avocat désigné « accomplit les diligences requises pour se présenter sans retard indu ». Cette obligation est formulée dans des termes imprécis et n’est pas assortie de sanction, ce qui la prive d’effets juridiques concrets. En outre, la mention d’une obligation de diligence de l’avocat relève davantage de la déontologie que du code de procédure pénale, comme cela a été évoqué en séance au Sénat.

M. Didier Paris (RE). J’approuve cet amendement mais je rappelle que les droits de la défense doivent être conciliés avec le principe d’efficacité de l’enquête. Le Sénat a accompli un bon travail, y compris en transposant des exceptions définies notamment à l’article 3, paragraphe 6, de la directive. Il nous faut transposer cette dernière intégralement, mais en tirant parti des possibilités qu’elle offre.

Le projet de loi réécrit le code de procédure pénale, ce qui est un peu regrettable. Notre procédure, traditionnellement inquisitoire, a emprunté certains traits à la forme accusatoire et devient aujourd’hui sans conteste une procédure contradictoire. Bien que ce modèle n’existe pas en tant que tel dans notre droit pénal, il faut tirer les conséquences de cette évolution.

Je nourris quelques inquiétudes, à titre personnel, quant aux conséquences de ce genre de texte, qui devrait entraîner une diminution sensible du nombre de gardes à vue, du taux d’élucidation des procédures pénales et des mesures alternatives. Ces dernières sont souvent décidées une fois que la personne a admis la réalité des faits : elles sont appliquées dans 40 % des affaires pénales, ce qui simplifie d’autant le travail de la justice. Alors transposons, oui, mais en étant conscients que nous ajoutons de la complexité au travail des forces de sécurité, ce qui créera sans aucun doute des difficultés.

M. Philippe Latombe (Dem). Je partage ce point de vue, mais il nous revient de transposer le plus justement possible la directive en laissant la CJUE interpréter certaines de ses dispositions. La transposition proposée par le Sénat entraînerait une forte incertitude juridique. Pour préserver notre enquête pénale, il convient d’adapter le plus finement possible notre droit tout en évitant la surtransposition. J’en reviens à cette procédure de réquisition de données de connexion qui a été cassée : songez au nombre d’enquêteurs dont le travail a été mis par terre ! Par ailleurs, la CJUE devra se prononcer sur certains points de la directive : dès que les choses seront clarifiées, nous pourrons les incorporer à notre droit.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL93 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL22 de M. Emeric Salmon

M. Emeric Salmon (RN). L’article 28 prive l’OPJ de la possibilité de commencer l’audition deux heures après le début de la garde à vue en cas d’absence de l’avocat. Nous souhaitons que le délai de vingt-quatre heures qui constitue la durée maximale de la garde à vue soit suspendu jusqu’à l’arrivée de l’avocat afin de préserver le temps d’enquête.

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Avis défavorable. Prolonger automatiquement la garde à vue d’une durée indéterminée, liée au retard de l’avocat, plongerait la personne concernée dans une incertitude problématique quant à la durée maximale de sa privation de liberté. Cela ne correspond pas à l’esprit de la directive. En outre, il pourrait en résulter une rupture d’égalité selon la disponibilité des avocats dans les différents barreaux. Enfin, la durée maximale de la garde à vue doit s’apprécier à compter du début de la privation de liberté ; on ne saurait prendre pour point de départ la survenance d’un aléa extérieur.

M. Emeric Salmon (RN). Il pourrait y avoir, dans certains cas, des effets de bord liés à l’absence ou au retard de l’avocat. Des avocats pourraient jouer sur la procédure, ce qui réduirait la durée de l’audition et, partant, le temps d’enquête du policier.

M. Ludovic Mendes, rapporteur. En le formulant ainsi, vous jetez le soupçon sur les avocats.

L’article ne remet pas en question le système de la garde à vue. Ni les policiers, ni les gendarmes, ni les représentants de la douane judiciaire n’ont fait de remontées à ce sujet. Cette disposition ne leur pose pas de problème parce que la manière de conduire les enquêtes a évolué : dans les grandes affaires, l’enquête fait toute la différence et la garde à vue sert surtout à obtenir des aveux ou le nom de complices. La directive offre la possibilité de mener l’audition en l’absence de l’avocat. Le dispositif en l’état garantit les droits de la défense, mais aussi la possibilité pour la police, la gendarmerie et la douane de faire leur travail. Et je ne reviens pas sur la rupture d’égalité qu’impliquerait votre proposition.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL70 de Mme Marietta Karamanli

Mme Marietta Karamanli (SOC). Cet amendement vise à ce que l’audition ou la confrontation ne puisse pas avoir lieu avant l’arrivée de l’avocat, afin d’assurer le respect des droits de la défense dès le début de la procédure.

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Votre demande est satisfaite puisque le texte prévoit que la personne gardée à vue « ne peut être entendue sur les faits sans la présence de l’avocat choisi ou commis d’office, sauf renonciation expresse de sa part ». Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CL94 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL95 de M. Ludovic Mendes

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Il s’agit de rétablir la possibilité pour l’avocat de consulter les procès-verbaux d’audition lorsque l’audition s’est déroulée en sa présence. Le Sénat a supprimé par erreur ce droit.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL96 de M. Ludovic Mendes, rapporteur.

Amendement CL97 de M. Ludovic Mendes

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Cet amendement prévoit l’inscription de la renonciation de la personne gardée à vue à la présence de son avocat dans le procès-verbal d’audition et non dans le procès-verbal récapitulatif. Cette solution est plus opérationnelle, notamment si la personne revient sur la renonciation après l’audition. Si l’avocat arrive alors que l’audition est toujours en cours, il pourra prendre connaissance de la renonciation sur le procès-verbal d’audition et n’aura pas à attendre la fin de la procédure de garde à vue. C’est une mesure de bon sens.

La commission adopte l’amendement.

Amendements CL67 de Mme Elsa Faucillon, CL65 et CL66 de Mme Andrée Taurinya, et amendements identiques CL98 de M. Ludovic Mendes et CL71 de Mme Marietta Karamanli (discussion commune)

Mme Elsa Faucillon (GDR-NUPES). Par l’amendement CL67, nous proposons de rétablir la version initiale de l’article 28 et, ce faisant, de supprimer le dispositif de carence qui permet à l’OPJ de commencer l’interrogatoire sans la présence de l’avocat une fois le délai de deux heures expiré. Conformément à la directive de 2013, nous souhaitons garantir l’assistance d’un avocat dans le cadre de la procédure pénale. L’assistance d’un avocat dès qu’une personne gardée à vue en fait la demande, et la présence de ce dernier au cours de l’ensemble des auditions et des confrontations, est une garantie essentielle du droit à un procès équitable.

Si nous adoptions cet amendement, il ne serait plus possible d’auditionner le gardé à vue sans son avocat, à moins que l’intéressé renonce à son droit ou que la procédure relève du régime dérogatoire de la criminalité organisée. Comme le rapporteur de la commission des lois du Sénat l’a rappelé, la Commission européenne a estimé que les dispositions relatives à la carence constituaient une transposition incorrecte de la directive. Toutefois, la Commission n’a pas pour autant exclu la possibilité d’une audition immédiate du gardé à vue. Or le droit de carence dérogatoire introduit par le Sénat ne nous semble pas conforme à la directive. En effet, celle-ci ne tolère de dérogations que dans des circonstances exceptionnelles et de façon temporaire. L’alinéa 21 ne mentionne pas ces conditions, qui figurent expressément aux points 5 et 6 de l’article 3 de la directive.

Mme Élisa Martin (LFI-NUPES). Les amendements CL65 et CL66 veulent également en revenir à la rédaction initiale de l’article. Dans le texte transmis par le Sénat, la notion d’urgence – qui n’était pas, il est vrai, sans poser problème – a disparu. Par ailleurs, le texte prévoit la possibilité de recourir à une audition immédiate afin « d’éviter une situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale ». Cette formulation est beaucoup trop vague et ne permet pas de s’assurer du bien-fondé d’une procédure qui remet en cause substantiellement le droit à être défendu et, par voie de conséquence, à bénéficier d’un procès équitable. Il faut insister sur le fait que la garde à vue n’est pas neutre, puisqu’elle entraîne une privation de liberté. Elle doit être instruite avec tout le sérieux et la rigueur nécessaires afin de permettre la manifestation de la vérité, objectif qui doit être concilié avec le respect du droit de la défense. Pour ces raisons, l’amendement CL65 vise à supprimer l’alinéa 19.

L’amendement CL66 vise, d’une part, à supprimer les mots « soit pour éviter une situation susceptible de compromettre sérieusement une procédure pénale », à la première phrase de l’alinéa 21, et d’autre part à supprimer le critère de l’éloignement géographique, qui est par nature subjectif et ne saurait justifier la privation du droit à être assisté d’un avocat – à moins de considérer que celui-ci ne sert à rien : je laisse le Gouvernement et ceux qui le représentent ici s’en expliquer avec les membres de cette profession.

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Par l’amendement CL98, je vous propose de supprimer la possibilité, introduite par le Sénat, de recourir à la nouvelle audition immédiate en dérogation au droit à la présence de l’avocat, au motif de l’éloignement géographique du lieu où se déroule la garde à vue. En effet, ce motif est strictement encadré par la directive, qui évoque deux cas de figure – la présence du suspect outre-mer et la conduite d’une opération militaire extérieure – alors que le Sénat, pour sa part, en fait un motif général sans restriction.

Mme Marietta Karamanli (SOC). L’éloignement géographique ne saurait en effet être un motif suffisant pour différer l’application des droits de la défense. Cela ne peut faire partie des exceptions admissibles.

M. Ludovic Mendes, rapporteur. Je propose à Mme Faucillon et à Mme Martin de retirer leurs amendements, car leur adoption entraînerait un déséquilibre. À défaut, j’y serais défavorable. La rédaction que Mme Karamanli et moi-même proposons assurerait la conformité de notre droit à la directive et prémunirait la France contre une condamnation.

M. Philippe Latombe (Dem). Il faut là encore se garder de surtransposer comme de sous-transposer. Les termes de la directive en la matière sont très précis, il faut les reprendre exactement. À défaut, nous risquerions d’être condamnés par la CJUE. Il convient donc de voter les amendements de Mme Karamanli et du rapporteur.

La commission rejette successivement les amendements CL67, CL65 et CL66.

Elle adopte les amendements identiques.

La commission adopte l’article 28 modifié.

Article 29 (art. 695-43 et 695-45 du code de procédure pénale) : Mise en conformité du droit français avec la décision-cadre du Conseil 2002/584/JAI du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres

La commission adopte l’article 29 non modifié.

Article 30 (art. 804 du code de procédure pénale) : Application outre-mer et entrée en vigueur différée des dispositions relatives à la garde à vue

La commission adopte l’article 30 non modifié.

M. le président Sacha Houlié. L’article 31 a été délégué à la commission du développement durable.

Article 31 (examen délégué)

La commission adopte l’amendement CL64 de la commission du développement durable.

 

Elle adopte l’article 31 modifié.

M. le président Sacha Houlié. L’article 32 relève de notre commission.

Article 32 (art. L. 515-8, art. L. 631-9, art. L. 632-2, art. L. 633-2 et art. L. 634-4 du code général de la fonction publique) : Maintien pour les fonctionnaires de droits acquis avant le début de certains congés

La commission adopte l’article 32 non modifié.

M. le président Sacha Houlié. Les derniers articles ont été délégués.

Article 33 (examen délégué)

La commission adopte l’article 33 non modifié.

Après l’article 33 (examen délégué)

La commission adopte l’amendement CL21 de la commission des affaires économiques.

Article 34 (examen délégué)

La commission adopte l’article 34 non modifié.

La commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole (n° 2041) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 

 

 


TRAVAUX de la commission
DES AFFAIRES économiques, saisie pour avis

Au cours de sa réunion du mercredi 6 mars 2024, la commission a examiné, pour avis, les articles du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (n° 2041) pour lesquels la commission des lois a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques (M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis).

M. le président Stéphane Travert. Nous examinons ce matin le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, dit « Ddadue ». Ce texte, soumis à la procédure accélérée, a été adopté par le Sénat en première lecture le 20 décembre et renvoyé à la commission des lois. Celle-ci a sollicité l’avis de notre commission au sujet des articles 1er, 2, 3, 18, 19, 33 et 34. Dans le cadre de la délégation au fond qui nous a été donnée, les amendements portant sur ces articles et ceux portant articles additionnels se rattachant directement à ces dispositions devaient être déposés exclusivement auprès de notre commission.

Nous parlerons ainsi de sujets variés – des obligations des exploitants d’infrastructures de recharge de carburants alternatifs, de la lutte contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, de la participation de la demande à la stabilité du réseau électrique, de l’hydrogène renouvelable et bas-carbone ou encore des missions de traçabilité animale confiées aux établissements de l’élevage (EDE). Il s’agit, dans tous les cas, de nous assurer que notre législation est conforme au droit de l’Union européenne. L’examen de ce projet de loi nous donne en particulier l’occasion de tenir compte de ce qu’on pourrait appeler « l’état de l’art » dans le domaine de la consommation et celui de l’énergie.

J’appelle votre attention sur le cas de la loi du 9 juin 2023 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, dite loi « Influenceurs », qui montre à quel point nous devons désormais intégrer l’obligation de notifier à la Commission européenne certains textes ou dispositions que nous votons. Notre rapporteur pour avis aura l’occasion d’y revenir au moment de l’examen de l’article 3.

Avant de lui donner la parole, je précise que nous examinerons onze amendements. Cinq ont été déclarés irrecevables parce qu’ils constituaient une injonction au Gouvernement ou ne portaient pas sur les articles dont nous sommes saisis. Un autre l’a été parce qu’il étendait le champ d’une habilitation à légiférer par voie d’ordonnance, ce que la jurisprudence du Conseil constitutionnel ne permet pas.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Nous avons effectivement reçu une délégation au fond concernant les articles 1er, 2, 3, 18, 19, 33 et 34 du projet de loi, qui traitent de sujets directement liés au champ de compétence habituel de notre commission : le droit de la consommation, l’énergie, l’agriculture et le numérique. La régulation des influenceurs, question qui m’est très chère, se trouve ainsi au cœur de l’article 3.

Les projets de loi « Ddadue » portent souvent sur les sujets les plus divers. Leur cohérence tient essentiellement à la nécessité d’adapter, de façon régulière, le droit français aux évolutions du droit européen, prérequis indispensable pour satisfaire à nos obligations et offrir aux acteurs des secteurs concernés la sécurité juridique que réclame la conduite de leurs activités.

Avant de présenter les différents articles, je souhaite remercier l’ensemble des administrations et des acteurs que j’ai auditionnés au cours de mes travaux. Je salue en particulier les services de la Commission européenne, qui se sont rendus disponibles pour faire le point sur la loi Influenceurs et les négociations en cours.

Les deux premiers articles que nous examinons ont trait à la protection des consommateurs.

L’article 1er adapte certaines dispositions du code de la consommation au règlement européen du 13 septembre 2023 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs, dit règlement « Afir », qui prend la suite d’une directive visant à permettre le déploiement au sein de l’Union d’un réseau complet d’infrastructures de recharge pour les véhicules roulant à l’électricité ou à l’hydrogène. Le nouveau règlement, qui correspond à nos ambitions en matière de transition écologique et énergétique, pour la France et l’Europe, fixe des objectifs plus ambitieux de déploiement et demande aux États membres de renforcer leurs plans d’action nationaux afin de développer des réseaux exhaustifs de bornes de recharge. La France ne peut que souscrire à cette ambition : l’accès à de telles infrastructures doit être sécurisé, car il constitue un élément décisif pour les consommateurs qui s’orientent vers des véhicules propres.

Parmi les dispositions prévues figure l’obligation, pour les exploitants, de fournir des informations fiables concernant les prix, les moyens de paiement acceptés et la localisation des points de recharge. Les autorités publiques devront veiller au respect de ces obligations. Tel est le principal objet de l’article 1er, qui donnera à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) la capacité juridique de procéder aux contrôles nécessaires.

L’article 1er prévoit également un régime spécifique de sanctions pour faire appliquer le règlement européen, ce dernier laissant au législateur national le soin de se prononcer en la matière. Tout manquement aux dispositions que je viens d’évoquer sera passible d’une amende administrative dont le montant ne pourra excéder 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale.

Le projet de loi reprend, par ailleurs, les dispositions prévues à l’article 6 du règlement Afir en vue de permettre à certains territoires, notamment insulaires, de déroger aux objectifs de déploiement du réseau, pour des raisons évidentes de coût et d’organisation logistique.

Je me suis limité à déposer quelques amendements rédactionnels, car cet article ne soulève pas de difficultés de fond. Sa rédaction est consensuelle, y compris quant à la répartition des compétences d’application entre la DGCCRF, que j’ai évidemment auditionnée, et la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), également compétente pour certaines dispositions.

L’article 2 modifie, lui aussi, le code de la consommation, mais concerne la sécurité générale des produits. Un nouveau règlement européen, adopté le 10 mai 2023 et applicable à partir du 13 décembre 2024, modifie en profondeur le cadre juridique applicable dans ce domaine, longtemps régi par une directive du 3 décembre 2001. Le nouveau règlement vise à définir un cadre harmonisé au sein des États membres en clarifiant les obligations qui existent pour les opérateurs économiques. Par ailleurs, les produits nouveaux, numériques, connectés ou dotés de fonctions d’intelligence artificielle, et les nouveaux modes de commercialisation à distance – les achats par internet, au moyen d’un téléphone portable ou sur une place de marché électronique – ont fait l’objet d’une attention particulière. L’article 2 du projet de loi tire donc les conséquences de certaines évolutions. Je ne proposerai, là encore, que des amendements d’ordre rédactionnel, pour préciser certains points. Les dispositions actuelles, comme les débats au Sénat l’ont montré, ne soulèvent pas de difficultés particulières.

Je profite de l’article 3 pour saluer notre collègue Arthur Delaporte, mon éminent corapporteur lors de l’examen de la proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux. Cet article habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour prendre toute mesure utile afin d’adapter certaines dispositions de la loi Influenceurs en fonction des observations de la Commission européenne. En règle générale, nous ne portons pas les ordonnances dans notre cœur. Je tiens, néanmoins, à faire quelques remarques.

En premier lieu, certaines observations de la Commission ne posent pas de difficultés, notamment celle concernant le retrait des articles de la loi Influenceurs qui reprenaient le contenu du règlement européen sur les services numériques (DSA). Nous avions inclus ces articles en étant conscients que de telles redites d’un texte d’application directe, ne nécessitant donc pas d’adaptation en droit français, pourraient incommoder la Commission. L’objectif était notamment pédagogique : nous souhaitions bien expliquer l’articulation entre la loi française et l’action menée au niveau européen, en particulier par la direction générale des réseaux de communication, du contenu et des technologies (DG Connect), et permettre aux utilisateurs de prendre en mains les nouvelles dispositions relatives aux contenus problématiques. Ce but est atteint. En témoignent l’écho que le texte a eu et l’évolution des pratiques numériques. Supprimer dès maintenant ces articles, comme le propose le Sénat, ne pose donc pas de difficultés. Nous l’avions nous-mêmes envisagé lors de l’élaboration du texte, en étroite collaboration avec les services de Bercy.

J’en viens aux autres remarques de la Commission européenne. Nous aurions préféré recevoir un courrier de félicitations, plutôt que des suggestions de modifications, mais nous savons qu’il faut travailler, en tant que législateurs nationaux, dans le cadre européen, défini par des règles communes avec lesquelles les mesures législatives adoptées en France doivent concorder.

Le courrier adressé par la Commission au Gouvernement souligne en particulier la nécessité d’introduire une clause dite « du pays d’origine », conformément à ce que prévoit la directive dite « e-commerce ». Il conviendra de trouver la bonne rédaction, mais la difficulté nous semble surmontable. Suivant l’avis de la Cour de justice de l’Union européenne au sujet de l’application de la directive, il faudra également trouver un mécanisme ad hoc pour cibler les acteurs qui poseraient des problèmes particuliers.

La loi Influenceurs, telle que nous l’avions votée à l’unanimité en commission aussi bien qu’en séance, comportait un élément d’extraterritorialité : nous tenions à ce que ses dispositions s’imposent aussi aux influenceurs qui s’adressent depuis l’étranger à des consommateurs français. Cela ne pose pas de problème pour ceux qui sont installés hors d’Europe. De nombreux influenceurs agissant depuis des territoires éloignés, comme Dubaï, ont d’ailleurs ajusté leur manière de faire. La règle dite « du pays d’origine » s’applique en revanche à ceux qui pratiquent le commerce électronique sur le territoire de l’Union, et cette règle impose de respecter, en premier lieu, les lois du pays de résidence. Un influenceur français qui déciderait d’aller exercer son art depuis la Belgique ou les Pays-Bas devrait ainsi suivre la loi belge ou néerlandaise et non la loi française.

Néanmoins, une évolution est en cours. Une fois n’est pas coutume, le législateur français a inspiré ses homologues étrangers : on est en train de répliquer la loi Influenceurs, dans une large mesure, en Italie, en Espagne et en Belgique. Ce dernier pays a, par ailleurs, placé l’adoption d’un texte sur les influenceurs tout en haut de l’agenda pour sa présidence de l’Union européenne. Nous avons donc bon espoir que les possibilités d’arbitrage entre des législations nationales divergentes disparaissent à terme. J’encourage la Commission à se saisir au plus vite de ce sujet : une loi Influenceurs européenne ou un DSA 2 réglerait les problèmes d’interprétation une fois pour toutes.

En attendant, nous continuerons de participer, au côté du Gouvernement, à des conversations avec la Commission européenne afin d’ajuster la loi française sans bouleverser ses équilibres, en préservant son efficacité et sa force tout en respectant les règles que nous sommes tenus de suivre dans le cadre de notre participation à l’Union européenne. Je suis assez serein quant à la possibilité de trouver une issue positive. Plusieurs États membres, je l’ai dit, s’intéressent de près à ce texte, dont la majorité des dispositions sont déjà applicables, malgré le retard pris pour certains décrets, et produisent des effets tangibles sur le terrain. Nous aurons l’occasion d’y revenir la semaine prochaine, lors de l’examen du rapport d’application dont Virginie Duby-Muller, Louise Morel, Arthur Delaporte et moi-même sommes corapporteurs.

D’autres articles modifient le code de l’énergie. L’article 18 abroge ainsi une disposition qui donnait une base juridique au dispositif d’interruptibilité mis en œuvre par Réseau de transport d’électricité (RTE) en cas de surchauffe. Cet article du code n’est plus utilisé, le dispositif étant désormais intégré, pour des raisons de conformité au droit européen régissant les aides d’État, au sein de ce qu’on appelle la « participation active de la demande », dans le cadre du plan de défense du réseau de RTE. Le dispositif continue donc à exister, mais il repose désormais sur une base juridique européenne, ce qui évite des échanges récurrents avec la Commission au sujet de la nature des versements de l’État aux acteurs économiques qui participent au mécanisme. Après consultation des parties prenantes, la rédaction actuelle de l’article 18 ne me semble pas appeler de modifications.

L’article 19, quant à lui, modifie deux articles du code de l’énergie relatifs à l’hydrogène, sujet qui m’est également cher. La loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat avait prévu qu’une ordonnance permettrait de définir en droit français différentes catégories juridiques d’hydrogène, suivant leur impact environnemental, et de créer un dispositif de soutien public au développement de cette filière. Ces dispositions ont été insérées par ordonnance dans notre droit en 2021 – « en avance de phase », pourrait-on dire, puisque tous les textes européens en la matière n’avaient pas encore été adoptés. En 2023, deux actes délégués sont ensuite venus compléter la directive de 2018. Ils précisent notamment la façon dont on doit évaluer le seuil d’émissions au-dessous duquel l’hydrogène peut être dit « renouvelable » ou « bas-carbone ». Le calcul doit désormais intégrer non seulement les émissions liées à la production de l’hydrogène, mais aussi celles résultant de son utilisation. Le droit français n’ayant retenu, par anticipation, que les premières, il est nécessaire de modifier le code de l’énergie afin de bien intégrer les secondes. Nous n’avons pas identifié de difficultés particulières sur ce plan.

Je précise que c’est une question particulièrement importante, puisque l’hydrogène représente une source potentielle d’énergie renouvelable qui peut jouer un rôle déterminant dans le cadre de la stratégie française de transition écologique et énergétique. La définition de l’hydrogène bas-carbone est ainsi un élément fondamental des discussions que nous avons avec l’Union européenne s’agissant des aides au financement de l’hydrogénoduc H2Med, entre Barcelone et Marseille.

J’aborde maintenant les dispositions du projet de loi portant sur l’agriculture.

L’article 33 vise à simplifier les procédures de soutien à nos agriculteurs, en apportant une modification d’ordre technique qui concerne la bonne instruction des dossiers relatifs à certaines aides de la politique agricole commune (PAC). Les mesures visées, qui sont cofinancées par l’État et relèvent du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), peuvent notamment prendre la forme d’un soutien aux agriculteurs qui réalisent des investissements. Depuis la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (2014), dite « Maptam », les régions gèrent de façon autonome les décisions relatives à ces aides. Plus récemment, des effectifs leur ont été transférés pour instruire les dossiers. Néanmoins, la capacité juridique de signer les décisions faisant l’objet d’un cofinancement de l’État leur manque encore. L’article 33 remédiera à cette difficulté pour les aides relevant de la programmation 2014-2022. Il permettra de prendre des décisions, nouvelles ou modificatives, d’une façon plus rapide, plus simple et plus efficace en évitant d’avoir à repasser par l’échelon de l’État, lequel ne dispose plus des effectifs pour instruire les dossiers. Cet article participe donc des efforts importants qui ont été engagés pour réduire le plus vite possible les irritants actuels. Afin d’accélérer le traitement des dossiers, je proposerai un amendement conçu en concertation avec les parties prenantes, notamment Régions de France, pour donner plus de souplesse aux régions en matière de prise de décision.

L’article 34 porte sur la collecte et le suivi des données de traçabilité animale que doivent assurer les autorités publiques en application d’un règlement dit « Loi de santé animale », qui est le texte européen de référence dans ce domaine. Le présent article prévoit de sécuriser les missions de traçabilité animale exercées par les établissements de l’élevage. Leur situation est un peu complexe : en raison de l’indisponibilité technique des bases de données concernées, ils continuent de mener des missions qui auraient dû être confiées à des délégataires. Les échanges à ce sujet se poursuivaient encore il y a peu, notamment avec les chambres d’agriculture. Dans une logique de sécurité juridique, j’estime préférable de traiter cette question en séance publique. Tout n’est pas complètement stabilisé : la rédaction de ces dispositions mérite donc un peu plus de temps.

M. le président Stéphane Travert. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Nicolas Pacquot (RE). Ce projet de loi dit « Ddadue » vise à l’adaptation de diverses dispositions du droit national à celui de l’Union européenne. Les articles 1er à 9 ont ainsi trait à des questions économiques et financières, les articles 10 à 13 à la transition écologique, les articles 21 à 30 à certaines mesures répressives, les articles 31 et 32 au droit de la santé, et les articles 33 et 34 à l’agriculture. Ce type de texte constitue une sorte de passage annuel obligé pour le Parlement. Je ne m’étendrai pas sur le fond des mesures très techniques qui sont prévues, comme toujours. Il me semble toutefois important de revenir sur les articles phares soumis à notre commission.

L’article 3 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour modifier la loi Influenceurs afin de tenir compte des observations formulées par la Commission européenne. Une fois n’est pas coutume, cette habilitation a été l’occasion d’un travail mené en bonne intelligence avec les rapporteurs de la proposition de loi initiale.

L’article 33 vise à permettre au représentant de l’État dans le département ou la région de déléguer sa signature au président du conseil régional et aux agents placés sous sa responsabilité pour les décisions relatives aux aides de la PAC cofinancées par l’État dans le cadre du Feader. Notre rapporteur a déposé un amendement qui vise à diminuer les délais de mise en œuvre de ces aides, en laissant les présidents de conseil régional établir les règlements d’intervention et fixer les critères d’attribution. Cette évolution est évidemment bienvenue.

L’article 34 consacre dans la loi les missions des établissements de l’élevage en matière d’identification et de traçabilité des animaux, notamment en vue de la notification des mouvements. Le Sénat a complété cet article afin de combler des vides juridiques qui concernent les missions de collecte des données d’identification et de traçabilité des ruminants ainsi que les missions de délivrance et de gestion des matériels, procédés et documents d’identification et de circulation des animaux.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Je reprends votre expression : je vais soutenir, une fois n’est pas coutume et en tant que rapporteur pour avis, l’autorisation donnée au Gouvernement de légiférer par ordonnance. En effet, mon corapporteur et moi-même avons travaillé en bonne intelligence avec le Gouvernement à une réforme d’ampleur dont notre proposition de loi était la traduction législative. Par ailleurs, nous avons constamment été associés, depuis le début, aux échanges avec la Commission européenne et nous continuerons d’être impliqués dans la rédaction de l’ordonnance.

M. Hervé de Lépinau (RN). Le Gouvernement nous demande de nous prononcer sur sept articles du projet de loi « Ddadue ». Soumettons-nous donc à cet exercice obligé, la transposition du droit européen, qui laisse une marge de manœuvre parlementaire extrêmement limitée.

Le groupe RN souhaite tout de même faire quelques remarques de fond sur la philosophie qui préside à l’examen de ce genre de texte. Les projets de loi Ddadue que le Gouvernement nous présente, année après année, sont des fourre-tout : commissions des lois, des finances, du développement durable et de l’aménagement du territoire ou des affaires économiques, il y en a pour tout le monde dans ces textes abscons. Que faites-vous de la lisibilité de la loi pour nos concitoyens ? Le Sénat, dans sa grande sagesse, a choisi d’examiner cet objet juridique non identifié dans le cadre d’une commission spéciale, au lieu de le scinder entre plusieurs commissions permanentes. Addition de choux et de carottes, mélange de torchons et de serviettes, ce texte est une somme de transpositions de dispositions techniques, un objet de technocrates à propos duquel le politique peine d’autant plus à se faire entendre que la marge de manœuvre laissée aux États membres pour transposer le droit européen est proche de l’épaisseur d’une feuille de papier à cigarettes. Nous sommes pourtant élus pour défendre une vision politique et non pour gérer les cuisines du droit européen.

À moins de cent jours des élections européennes, comment voulez-vous que nos concitoyens aient envie de cette Europe-là, qui se mêle aussi bien de quotas d’émission de gaz à effet de serre que du fonctionnement des chambres d’agriculture, du commerce en ligne et de la consolidation des critères de durabilité de l’hydrogène renouvelable et bas-carbone ? Comment voulez-vous qu’ils se satisfassent de voir leur parlement national réduit à servir de chambre d’enregistrement de décisions prises par des technocrates à Bruxelles, pour transposer des mesures elles aussi technocratiques ? Où est la démocratie ? Ces textes sont de parfaits exemples de ce que nous rejetons, l’opacité, la technocratie et le déni de démocratie.

Bien sûr, certaines mesures peuvent être bonnes, ou du moins pas trop mauvaises. Nous nous abstiendrons s’agissant des articles 2 et 3 et nous voterons les dispositions concernant les chambres d’agriculture. En revanche, nous nous opposerons résolument aux mesures de décarbonation de la production, dont l’origine est le paquet « Fit for 55 » qui mène directement à la destruction de notre industrie.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Où est la démocratie ? Ici même, en commission des affaires économiques. Je me réjouis, pour ma part, que nous nous soyons vu déléguer la responsabilité d’examiner au fond les articles qui ont un lien direct avec notre activité : l’agriculture, la protection du consommateur, le numérique et l’énergie relèvent de nos compétences.

Pourquoi l’Europe s’occupe-t-elle de l’hydrogène bas-carbone et se mêle-t-elle de nos affaires ? Prenons l’exemple de l’hydrogénoduc que la France et l’Espagne ont décidé de construire, notamment afin de remplacer un projet de gazoduc à travers les Pyrénées qui ne correspond plus à nos ambitions en matière de transition énergétique. Les gouvernements français et espagnol comptent bien sur le soutien financier de l’Union européenne pour la construction de cette infrastructure essentielle à la réduction de la dépendance de l’Europe de l’Ouest, en particulier de l’Allemagne, vis-à-vis du gaz naturel provenant de la Russie. Le soutien financier européen, de plusieurs milliards d’euros, dépendra notamment de la qualité de l’hydrogène à transporter, laquelle est liée à son degré de décarbonation. Je me félicite que l’Europe puisse nous aider à concrétiser nos ambitions.

M. René Pilato (LFI-NUPES). En ce qui concerne l’article 1er, je rappelle que la directive de 2014 avait pour ambition de permettre le déploiement d’un réseau complet d’infrastructures pour carburants alternatifs au sein de l’Union européenne grâce à des règles visant à s’assurer que les prix sont raisonnables, aisément comparables, transparents et non discriminatoires – des qualités pouvant faire l’objet de jauges différentes. Des précisions sont donc apportées pour que des inspecteurs puissent vérifier les informations délivrées aux consommateurs et les possibilités d’utilisation des moyens de paiement. L’article 1er tend, par ailleurs, à modifier le code de la consommation pour doter les agents d’un pouvoir de contrôle, mais ne mentionne pas leur formation. Nous saluons néanmoins cette réécriture.

L’article 2 encadre et garantit la sécurité des produits non alimentaires et prévoit des sanctions en cas de non-conformité, telles que l’interdiction des produits, leur retrait du marché ou leur rappel. Je tiens toutefois à attirer votre attention sur les appareils contenant de l’intelligence artificielle : à ce jour, il n’existe aucun dispositif capable de mesurer leur non‑conformité ou de vérifier leur innocuité. Reste que dans l’état actuel des connaissances, cet article semble proposer des mesures de contrôle adaptées.

Jusqu’ici tout allait bien, mais je n’ai pu m’empêcher de me poser cette question en lisant l’article 3 : pourquoi diable une telle manie de dessaisir le Parlement de ses missions de contrôle et de laisser le Gouvernement décider par ordonnance ? Sincèrement, est-ce raisonnable alors que nous avons mangé du 49.3 jusqu’à l’indigestion ? Après sept ans de gouvernance défaillante et de contrôle insuffisant par le Parlement, notre pays est au bord de l’explosion. Ce texte ne réécrit pas seulement une proposition de loi qui n’a que quelques mois, il fait pire : en habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnance, il permet de contourner le Parlement. Pour nous, c’est non.

Au sujet de l’article 18, qui abroge l’article L. 321-19 du code de l’énergie, relatif au dispositif d’interruptibilité, j’ai besoin d’une explication : si ce n’est plus RTE, qui garantit l’équilibre du réseau pour éviter un black-out ?

Je n’ai pas d’avis sur l’article 19, car la question de l’adéquation entre la production d’énergie, intermittente, et le stockage de l’hydrogène n’est pas traitée.

L’article 33 ne précise pas les règles de répartition des aides de la PAC, que l’État délègue aux régions. Nous avons donc des doutes.

L’article 34 consacre l’incompétence de l’État en matière de planification. Son manque d’anticipation et son impréparation le condamnent, s’agissant de l’élevage des animaux, à se débarrasser de la question de la traçabilité. Pour nous, c’est également non.

Je rappelle en conclusion que nous sommes tenus de contrôler l’action du Gouvernement – votre rapport est bien indulgent.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Je suis d’accord avec l’idée qu’il faut soutenir la DGCCRF en lui donnant les moyens d’exercer ses missions.

J’imagine que vous aviez préparé votre intervention au sujet de la modification par ordonnance de la loi Influenceurs avant d’entendre mon propos liminaire. Je suis plutôt à l’aise : il ne s’agit pas de laisser le Gouvernement agir seul, mais de travailler main dans la main avec lui pour procéder à des ajustements marginaux du texte, en préservant son équilibre. Je suis convaincu que nous y parviendrons.

S’agissant de l’interruptibilité, la gouvernance associe RTE et la Commission de régulation de l’énergie (CRE).

M. Julien Dive (LR). Ces projets de loi dits « Ddadue » ne sont pas seulement techniques, ce sont des fourre-tout. En la matière, nous sommes guidés par un principe fondamental qui est d’éviter une transposition excessive des directives européennes. Nous apprécions les ajustements qui ont été apportés en ce sens, à l’initiative des sénateurs du groupe Les Républicains.

Le texte prévoit de modifier le système européen d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre et la réglementation prévue pendant la transition vers le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. Ces changements sont indispensables pour atteindre nos objectifs.

L’article 3 autorise le Gouvernement à modifier par ordonnance la loi visant à réguler l’influence commerciale afin de prendre en compte les recommandations de la Commission européenne. Bien que substantielles, les modifications envisagées préservent l’essence de la loi et le Sénat a proposé d’encadrer plus rigoureusement l’autorisation donnée au Gouvernement.

L’article 19 tend à faire évoluer les modalités de calcul des émissions de gaz à effet de serre pour l’hydrogène renouvelable et bas-carbone. La rédaction initiale était peu ambitieuse au regard de l’exigence de décarbonation de l’économie : elle ne reprenait pas l’ensemble du cadre européen applicable à l’hydrogène. Les sénateurs ont enrichi cet article afin d’intégrer l’ensemble du processus de production et d’utilisation de l’hydrogène et de ses dérivés.

L’article 34 concerne la traçabilité des animaux d’élevage. Il a également été amélioré grâce à l’adoption d’amendements des sénateurs du groupe Les Républicains visant à définir plus précisément le rôle des chambres d’agriculture, qui est incontournable.

Malgré sa complexité et sa nature hétéroclite, ce texte est nécessaire. Le groupe Les Républicains appelle donc à l’adopter.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Je salue le rôle des sénateurs lors de la première phase de l’examen de ce projet de loi. Ils ont apporté des modifications utiles, nous permettant de discuter d’un texte globalement équilibré et satisfaisant. Aussi les amendements que j’ai déposés sont-ils surtout rédactionnels.

Mme Louise Morel (Dem). Comme c’est souvent le cas avec les textes de cette nature, le projet de loi concerne de nombreux domaines. Il intègre de nombreuses avancées réalisées au cours de la législature européenne qui s’achève, notamment en matière de sécurité générale des produits. La coopération des fournisseurs des places de marché en ligne sera renforcée grâce à la création d’un point de contact unique pour la communication avec les autorités nationales. On ne le dira jamais assez : sans l’Europe, sa puissance et sa taille critique, nous ne pourrions pas progresser dans ces domaines. Le renforcement de la législation relative aux plateformes numériques repose ainsi sur les règlements DSA et DMA, qui entreront en vigueur progressivement.

Le Gouvernement propose de modifier par ordonnance la loi Influenceurs. Ce texte, fruit d’une collaboration efficace entre plusieurs groupes politiques, a constitué une avancée majeure : il a permis de réguler un secteur qui n’était jusque-là soumis à aucune règle. La France peut se targuer d’avoir adopté une législation protectrice pour tous, notamment les jeunes, victimes de dérives des réseaux sociaux. Je crois comprendre, monsieur le rapporteur pour avis, que M. Delaporte et vous-même, qui étiez corapporteurs de ce texte, avez été pleinement associés à la rédaction des ordonnances : confirmez-vous qu’elles respectent les intentions du législateur ? Il s’agit de définir des solutions concrètes, rapides – j’insiste sur ce point – et aussi efficaces que possible pour mettre un terme aux irritants en ligne dont s’agacent légitimement nos concitoyens, en particulier les plus jeunes. Le groupe Démocrate soutient naturellement ce projet de loi, suivant la ligne qui a toujours été la sienne : ce qui est interdit hors ligne doit aussi l’être en ligne.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Je confirme que M. Delaporte et moi-même sommes associés aux discussions portant sur les ordonnances, dont la rédaction n’est pas finalisée. On pourrait même parler de « négociations », car nous ne sommes pas des vassaux, mais des partenaires cherchant un équilibre dans un domaine où le débat est justifié. Des dispositions européennes doivent s’appliquer, mais elles permettent des dérogations. Il est légitime d’en demander en matière de protection du consommateur et de santé publique, suivant les objectifs de la loi Influenceurs. Les auditions ont montré l’ouverture de la DG Connect et sa volonté d’établir un dialogue équilibré : je suis donc raisonnablement optimiste.

M. Arthur Delaporte (SOC). Nous présenterons effectivement le rapport d’application de la loi Influenceurs, la semaine prochaine. L’article 3 du présent projet de loi prévoit d’habiliter le Gouvernement à modifier partiellement ce texte par voie d’ordonnance. Pourquoi l’accepter ?

Tout d’abord et cela n’aura échappé à personne, le commissaire Breton a envoyé à la France une missive peu amène, voire désobligeante, lui expliquant qu’elle faisait n’importe quoi – ce qui, du reste, n’est pas vrai. La loi Influenceurs a été élaborée d’une façon très sérieuse, notamment avec l’aide des services juridiques du Gouvernement, qui ne sont pas des amateurs en matière de droit de l’Union européenne.

Par ailleurs, une jurisprudence européenne récente, de novembre dernier, pousse à réfléchir aux procédures de notification. Je rappelle, à cet égard, que la loi Influenceurs prévoyait l’entrée en vigueur différée de certaines dispositions, après notification à la Commission européenne. La question de savoir comment légiférer correctement quand on touche à des sujets relevant du droit de l’Union européenne se pose, puisqu’il faudrait, dès lors, presque faire une notification à chaque fois qu’on amende un texte. Procéder par ordonnance permet de se limiter à une seule notification, d’engager un dialogue plutôt sain et d’avoir une réponse unique.

Mon groupe soutient le recours à une ordonnance parce que c’est le meilleur moyen de modifier les points de détail qui ont fait l’objet de remarques de la Commission européenne. De plus, comme le rapporteur pour avis l’a dit, certains articles de la loi Influenceurs avaient, en quelque sorte, pour effet de transposer par avance le DSA. Celui-ci étant entré pleinement en vigueur, depuis une quinzaine de jours, il n’est plus nécessaire de conserver ces dispositions dans notre droit, puisque celles du DSA sont d’application directe.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Si nous avions décidé d’inscrire directement dans ce projet de loi les modifications de la loi Influenceurs qui figureront dans une ordonnance, nous aurions dû les notifier à la Commission européenne et attendre sa réponse pour convoquer une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions qui resteront en discussion à l’issue de notre examen. Il faut prendre en compte la réalité de la procédure de notification si nous voulons avancer rapidement, aussi bien pour la mise à jour de la loi Influenceurs que pour l’entrée en vigueur du reste du projet de loi, qui est important et urgent.

M. Max Mathiasin (LIOT). Ce nouveau texte d’adaptation au droit de l’Union européenne nous irrite, en particulier sur la forme, même s’il y aurait beaucoup à dire également au sujet de son contenu. Une fois de plus, nous sommes confrontés à un catalogue, dépourvu de cohérence, de mesures prises par l’Union européenne ces dernières années. Les questions abordées sont pourtant d’importance : chaque article mériterait de faire l’objet d’un projet de loi à part entière ou au moins qu’on procède de façon thématique, pour gagner en lisibilité. Vous n’avez pas fait ce choix, considérant sans doute qu’il n’est pas nécessaire d’éclairer pleinement la représentation nationale et que l’on peut légiférer à la va-vite sur les sujets européens, en octroyant au Gouvernement une confiance aveugle. Selon nous, il faut rendre l’Union européenne compréhensible. Or ce n’est pas avec de tels projets de loi que nous créerons ou rétablirons un lien avec les institutions européennes.

Les politiques publiques incitent à électrifier les véhicules ; on doit donc faire en sorte que chacun puisse recharger le sien dans des conditions acceptables. Les exploitants des bornes de recharge profitent d’un vide juridique pour appliquer des tarifs opaques et des prix souvent disproportionnés. L’article 1er tend à lutter contre ce phénomène en imposant aux exploitants des obligations similaires à celles auxquelles sont soumises les stations-service. C’est un premier pas – il faudra sans doute aller plus loin.

L’article 33 autorise le préfet à déléguer sa signature aux autorités de gestion régionales en ce qui concerne les aides de la PAC. Nous sommes d’accord avec le principe, mais nous appelons à aller plus loin en décentralisant le versement des aides, afin d’éviter les doublons de compétences et les retards qui sont, légitimement, un des motifs de la colère des agriculteurs.

Par ailleurs, nous sommes favorables aux articles relatifs à l’encadrement des influenceurs et à l’interruptibilité, qui visent à résoudre les désaccords que nous avons pu avoir avec les institutions européennes.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Par définition, un projet de loi Ddadue est un fourre-tout. Néanmoins, une cohérence existe, non entre les articles du texte, mais entre chacun d’eux et la politique du Gouvernement et de la représentation parlementaire : ce sera l’objet de notre vote.

Nous partageons la volonté de protéger le consommateur français. Par ailleurs, les articles 18 et 19 sont cohérents avec notre intention de procéder le plus rapidement possible à une transition énergétique et écologique efficace, afin d’atteindre nos objectifs, ce qui est essentiel pour la survie de la planète. Enfin, les articles 33 et 34 sont cohérents avec la volonté de simplifier les procédures pour mieux aider nos agriculteurs.

M. le président Stéphane Travert. Nous en venons aux questions des autres députés.

M. Jean-Pierre Vigier (LR). Malgré sa technicité et sa nature hétéroclite, il est nécessaire d’adopter ce texte pour aligner notre législation sur les normes européennes. Je salue le travail réalisé en commission par le Sénat, en particulier sur l’article 34, qui concerne la traçabilité des animaux dans les établissements d’élevage. Il était opportun de mieux définir le rôle des chambres d’agriculture, le texte initial étant muet à ce sujet. Vous avez dit, monsieur le rapporteur pour avis, que nous en débattrions lors de l’examen en séance publique. Pouvez‑vous préciser si vous entendez maintenir la disposition prévoyant de confier explicitement aux chambres d’agriculture la traçabilité et la délivrance des documents d’identification des animaux des espèces ovines, bovines et caprines ?

M. Éric Bothorel (RE). L’autorisation de modifier par ordonnance la loi Influenceurs concerne notamment son article 1er. Pourtant, il ne paraît pas lié à une réglementation européenne. La France a été le premier pays à légiférer dans ce domaine, et l’article 1er de notre loi définit l’activité d’influence commerciale par voie électronique. Je comprends la nécessité d’abroger certaines dispositions compte tenu de l’entrée en vigueur du texte européen, mais je m’interroge sur l’article 1er.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Oui, monsieur Vigier, ce que vous avez dit correspond bien à notre intention. Nous avons auditionné longuement les représentants des chambres d’agriculture et nous avons compris la complexité du système en vigueur : dans la plupart des régions, ces acteurs sont directement chargés du dispositif, mais dans d’autres – quatre, me semble-t-il – la gestion est déléguée à des entités différentes. Il faut simplifier et veiller à établir un fonctionnement cohérent.

Monsieur Bothorel, l’article 3 donne au Gouvernement la possibilité de retoucher l’article 1er de la loi Influenceurs, donc la définition de l’activité d’influence commerciale. Il n’est pas certain que ce soit nécessaire. Si nous devions le faire, ce serait pour introduire une précision géographique.

Article 1er : Modification des obligations des exploitants d’infrastructures de recharge en carburants alternatifs et des sanctions et contrôles applicables

La commission adopte successivement les amendements CE15 et CE14, rédactionnels, CE12, de précision juridique, et CE13, rédactionnel, de M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1er modifié.

Article 2 : Adaptation du code de la consommation au règlement relatif à la sécurité générale des produits (RGSP)

Amendement CE5 de M. Lionel Tivoli

M. Lionel Tivoli (RN). Cet amendement vise à définir la plateforme numérique comme étant « tout espace virtuel délimité au sein duquel des personnes se mettent en relation et peuvent échanger ». Le développement de l’économie numérique, en dématérialisant les transactions, a affecté l’environnement et les décisions des acteurs et a bouleversé les modes de production et de consommation, ainsi que les relations d’échange. Le nouveau modèle économique qui émerge est celui de la plateforme numérique, mais l’article liminaire du code de la consommation ne le définit pas clairement.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. L’article L. 111-7 du code de la consommation définit déjà l’opérateur de plateforme en ligne. L’adoption de votre amendement ferait donc cohabiter deux définitions d’une même notion. Par ailleurs, ce que vous proposez n’est pas conforme au DSA. Lors de l’examen de la proposition de loi Influenceurs, nous n’avions pas prévu de nouvelle définition de la plateforme numérique, car le droit français et le droit européen étaient satisfaisants à cet égard. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE11, CE10 et CE9 de M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 modifié.

Article 3 : Habilitation à légiférer par voie d’ordonnance pour modifier la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux

Amendement CE8 de M. Stéphane Vojetta

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Il s’agit de rétablir la version initiale de cet article en prévoyant une durée d’habilitation à légiférer par ordonnance de neuf mois et en élargissant le périmètre de modification à l’ensemble des dispositions du titre Ier de la loi Influenceurs.

Le délai de neuf mois est nécessaire au regard des exigences de la directive (UE) 2015/1535 prévoyant une procédure d’information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information. Nous nous sommes pris les pieds dans le tapis des notifications lors de l’examen de la proposition de loi ; cette fois, nous voulons respecter les textes européens à la lettre pour éviter de ralentir le processus.

Si je propose, par ailleurs, d’élargir le champ de l’ordonnance, c’est par pragmatisme : les discussions avec le Gouvernement et la Commission ont montré que des zones d’ombre subsistaient sur les conséquences juridiques : la prudence commande de ne pas restreindre le périmètre aux articles 1er, 4, 5 et 9.

M. Arthur Delaporte (SOC). Je soutiens cet amendement. L’ordonnance vise à éviter une potion trop amère par la suite. J’ai expliqué que les procédures de notification impliquaient des délais : un défaut de prudence dans la définition du champ ou de la durée de l’autorisation fragiliserait le cadre juridique.

J’ajoute – nous y reviendrons la semaine prochaine – que l’application de la loi nécessitera des moyens. À ce jour, ils sont insuffisants.

La commission adopte l’amendement.

Amendement rédactionnel CE7 de M. Stéphane Vojetta

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Je rappelle simplement que nos collègues sénateurs ont choisi d’inscrire dans le texte l’abrogation des articles de la loi Influenceurs liés aux dispositions du DSA. Ces articles, qui avaient, je l’ai dit, une visée pédagogique, avaient d’emblée été placés sur une sorte de siège éjectable législatif. L’adoption de ces mesures dans le cadre d’articles spécifiques permettait, en effet, de s’en défaire plus facilement en cas de désaccord avec la Commission européenne. Le désaccord étant constaté, nous activons le mécanisme prévu afin de montrer à la Commission notre bonne foi et notre bonne volonté.

M. Arthur Delaporte (SOC). Tel était bien l’esprit dans lequel nous avons voté ces articles. Un dispositif transitoire avait été adopté, et il n’a désormais plus lieu d’être. Je remercie les sénateurs pour la clarification qu’ils ont introduite : en réduisant ainsi le champ de l’ordonnance, nous retrouvons une part de souveraineté.

La commission adopte l’amendement.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 3 modifié.

Article 18 : Abrogation de l’article L. 321-19 du code de l’énergie relatif au dispositif d’interruptibilité

 

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 18 non modifié.

Article 19 : Actualisation de la définition de l’hydrogène renouvelable et de l’hydrogène bas carbone

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 19 non modifié.

Article 33 : Délégation de signature des aides de la politique agricole commune au titre de la programmation ayant débuté en 2014

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 33 non modifié.

Après l’article 33

Amendement CE16 de M. Stéphane Vojetta

M. Stéphane Vojetta, rapporteur pour avis. Afin de diminuer encore les délais de versement des aides de la PAC, cet amendement vise à étendre le périmètre de la délégation prévue. Le conseil régional pourra déléguer à son président la possibilité d’établir les règlements d’intervention correspondants et de fixer les critères d’attribution des aides, ainsi que de conclure, sans présentation préalable en commission permanente ou en assemblée plénière, les différents actes contractuels relatifs à l’attribution des fonds européens, par exemple les conventions avec l’Agence de services et de paiement. Là encore, il s’agit de simplifier les procédures.

La commission adopte l’amendement.

Article 34 : Sécurisation juridique des missions de traçabilité animale confiées aux établissements de l’élevage (EDE)

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 34 non modifié.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, modifiées.

 


TRAVAUX de la commission
du développement durable et de l’aménagement
du territoire, saisie pour avis

Lors de sa réunion du jeudi 7 mars 2024, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a procédé à l’examen pour avis, sur le rapport de M. Damien Adam, du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole (n° 2041).

M. le président Jean-Marc Zulesi. Chers collègues, nous examinons à présent pour avis le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne (Ddadue) en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole. Ce projet de loi a été renvoyé à la commission des lois, qui nous a délégué l'examen au fond des articles 10 à 17, 20 et 31. La commission des lois se réunira le mercredi 13 mars pour examiner ce projet de loi. Il vous reviendra donc, monsieur le rapporteur, d’y porter la voix de notre commission. Sans plus tarder, je vais vous laisser la parole pour un propos introductif.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. Chaque jour, dans notre travail de législateur, nous voyons la présence et l’importance du droit européen dans notre système juridique. C’est une nouvelle fois le cas avec le texte que nous devons examiner cet après-midi.

Ce projet de loi a pour objet de transposer plusieurs directives et de mettre en cohérence le droit national avec plusieurs règlements que l'Union européenne a adoptés. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire est saisie des articles 10 à 17 ainsi que des articles 20 et 31 du projet de loi, qui assurent la mise en conformité de notre droit national avec plusieurs dispositions du Pacte vert pour l’Europe.

Les articles 10 et 11 du projet de loi tirent les conséquences de la réforme du cadre applicable à l’ensemble des batteries dans le nouveau règlement de 2023, qui remplace celui de 2006. L’impératif de transition énergétique devrait conduire à l’électrification croissante des véhicules au cours des prochaines années, faisant décupler la demande de batteries d’ici à 2030. L’encadrement du droit des batteries est donc un enjeu clef pour l’environnement. Le règlement prévoit un élargissement du champ des batteries couvertes par le droit européen, une évolution des règles relatives à leur contenu ainsi que des dispositions encadrant l’ensemble de leur cycle de vie, de l’approvisionnement en matières premières jusqu’à la gestion des déchets de batterie.

Concrètement, un devoir de diligence est imposé aux opérateurs économiques mettant en service des batteries et aux opérateurs économiques sur le marché des batteries. L’article 10 prévoit les modalités des contrôles et des sanctions applicables en cas de non‑respect du devoir de diligence. L’article 11 prévoit l’application de la responsabilité élargie du producteur à l’ensemble des batteries. Ce principe fonctionne sur la logique du pollueur‑payeur et implique que la prévention et la gestion des déchets des batteries incombent désormais au producteur. L’article 11 prévoit aussi des dispositions sur les points de collecte des batteries, ce qui devrait permettre de renforcer la traçabilité des batteries usagées et d’éviter que des matériaux polluants sortent des radars.

Le projet de loi comprend ensuite des mesures qui mettent en conformité le droit national avec le droit européen en matière d’économie circulaire et de santé-environnement. Prenant acte d’une décision de justice, le texte supprime, à l’article 12, l’interdiction d’importation des boues d’épuration en France, qui avait été introduite dans la loi dite « Agec ».

À l’article 31, le calendrier national d’interdiction des microplastiques est mis en conformité avec le calendrier européen récemment adopté.

Le texte effectue ensuite l’adaptation de deux axes essentiels du paquet « climat » européen afin de permettre à notre continent d’être le premier espace économique décarboné au monde.

Tout d’abord, il y a le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, finalisé pendant la présidence française du Conseil de l’Union européenne, qui permet de faire payer un prix du carbone aux marchandises importées de pays non membres afin de lutter contre les délocalisations. L’article 13 propose ainsi un régime de sanctions applicable aux importateurs en cas de non-respect de leurs obligations de déclaration pendant la période transitoire, à savoir du 1er octobre 2023 au 31 décembre 2025.

Ensuite, il y a des mesures en lien avec les quotas carbone. L’article 14 transpose ainsi les modifications du périmètre du système d’échange de quotas d’émission (SEQE), dont son extension au secteur du transport maritime. Il révise les sanctions administratives pour ce secteur ainsi que pour les installations industrielles et l’aviation. Pour les installations industrielles, une diminution progressive de l’allocation de quotas à titre gratuit est mise en place pour les secteurs soumis au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières jusqu’en 2033. Des conditionnalités à l’allocation de quotas à titre gratuit sont en outre ajoutées en matière d’efficacité énergétique et de respect du plan de neutralité climatique.

L’article 15 transpose les dispositions relatives à l’aviation et clarifie son périmètre au sein du système d’échange de quotas d’émission vis-à-vis du régime de compensation et de réduction carbone à l’échelle internationale, à savoir le régime dit « Corsia ». Une révision complète de l’allocation de quotas à titre gratuit pour les exploitants d’aéronefs y est présente, avec sa disparition en 2026, sauf pour l’utilisation de carburants durables ou non dérivés de combustibles fossiles. Une nouvelle obligation de surveillance et de déclaration des effets hors dioxyde de carbone est proposée.

L’article 16, spécifique au transport maritime, précise son champ d’application dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission, et sa mise en œuvre par une restitution progressive des quotas d’émission jusqu’en 2026. Des sanctions pénales sont prévues en complément des sanctions administratives.

L’article 17 établit les modalités d’exigences de compensation des émissions pour les exploitants d’aéronef soumis au régime Corsia, et la sanction administrative associée en cas de non-respect.

Enfin, l’article 20 propose une évolution du principe de modération tarifaire pour les premiers tarifs de redevance aéroportuaire d’un nouveau contrat de concession. Tout comme le Gouvernement, j’espère que l’appel d’offres relatif à l’aéroport de Nantes-Atlantique sera cette fois-ci fructueux. Une évolution du principe de modération tarifaire est essentielle puisque le nouveau contrat de concession prévoit des travaux d’envergure, qui nécessiteront des investissements de la part du concessionnaire et donc une hausse équivalente de la redevance.

Voilà chers collègues, les dix articles dont notre commission est saisie.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous en venons aux interventions des représentants de groupe.

Mme Pascale Boyer (RE). Tout d'abord, je salue l'excellent travail de notre rapporteur pour avis. Ce projet de loi, sur lequel nous sommes saisis pour avis pour les articles 10 à 17, 20 et 31, vise à rendre le droit national conforme au droit de l'Union européenne, en transposant plusieurs directives et en mettant en cohérence les textes avec divers règlements européens.

En matière de transition écologique, le projet de loi assure l'effectivité du devoir de diligence des opérateurs économiques qui mettent des batteries sur le marché, grâce à deux dispositions : l’instauration de contrôles ; l'obligation de reprise par les distributeurs des déchets de batteries à titre gratuit et sans obligation d'achat de nouvelles batteries, peu importe leur composition chimique, leur marque ou leur origine.

Le projet de loi comporte aussi des dispositions sur le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, comportant une nouvelle sanction applicable aux importateurs, et sur le système d’échanges de quotas d'émission de gaz à effet de serre, en particulier dans les domaines de l'aviation et du transport maritime. La définition de l'hydrogène renouvelable et de l'hydrogène bas-carbone est transposée en droit français, et le code des transports est modifié pour permettre une meilleure articulation entre la régulation économique aéroportuaire et l’application des principes de mise en concurrence des contrats de concession aéroportuaire.

Parce que ces mesures permettent à notre pays d'atteindre ses objectifs de décarbonation tout en préservant la compétitivité de nos entreprises, et pour que ces dispositions soient désormais pleinement effectives en droit français, le groupe Renaissance votera pour les articles examinés dans notre commission.

M. Antoine Villedieu (RN). Il nous est demandé de nous prononcer sur plusieurs articles du projet de loi Ddadue. Soit, soumettons-nous à cet exercice obligé de transposition du droit européen, qui nous laisse une marge de manœuvre très limitée. Mais le groupe Rassemblement national souhaite faire quelques remarques de fond sur la philosophie qui préside à l'examen de ce genre de texte.

Le projet de loi, que le Gouvernement nous présente année après année pour la transposition de directives européennes, est un texte fourre-tout où il y en a pour tout le monde : lois, finances, développement durable, affaires économiques. En plus d’être fourre‑tout, c’est un texte abscons. Que faites-vous de la lisibilité de la loi pour nos concitoyens ? Dans sa sagesse, le Sénat a d’ailleurs choisi d’examiner cet objet juridique non identifié en commission spéciale plutôt que de le scinder entre plusieurs commissions permanentes.

Nous additionnons des choux et des carottes, tout en mélangeant des torchons et des serviettes. Somme de transpositions et de dispositions techniques, c'est un texte de technocrates. Il permet d’autant plus difficilement aux politiques de se faire entendre que la marge de manœuvre laissée aux États pour transposer le droit européen est tellement étroite qu'elle s'apparente à du papier à cigarette. Nous sommes élus pour porter une vision politique, pas pour gérer les cuisines du droit européen.

Alors que nous sommes à moins de cent jours de l'élection européenne, comment voulez-vous que nos concitoyens aient envie de cette Europe-là, qui se mêle aussi bien des quotas d'émissions de gaz à effet de serre que des chambres d'agriculture, du commerce en ligne que de la consolidation des critères de durabilité de l'hydrogène renouvelable et bas‑carbone ? Comment voulez-vous qu'ils se satisfassent de voir leurs parlementaires nationaux réduits à servir de chambre d'enregistrement de décisions prises par des technocrates à Bruxelles, en transposant des mesures absconses et technocratiques ? Où est la démocratie ? Ces textes sont ainsi, dans leur esprit, l'exemple parfait de ce que nous rejetons : opacité, technocratie et déni de démocratie.

Enfin, nous regrettons que le calendrier de notre commission soit chargé au point de n’avoir pas permis de programmer les auditions avant le dépôt d'amendements.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Dans notre combat pour répondre à la crise climatique, il est essentiel de reconnaître le rôle majeur des batteries électriques dans la transition vers une économie plus respectueuse de l'environnement. Cependant, nous ne pouvons ignorer les défis sociaux et environnementaux associés à leur production, notamment l'extraction minière de composants tels que le cobalt en République démocratique du Congo.

Pour garantir une transition écologique efficace, nous soutenons fermement le renforcement des contrôles et des sanctions à l’égard des entreprises qui ne respectent pas leurs obligations en matière de diligence et de précaution dans la mise sur le marché des batteries. Afin d'accroître la souveraineté écologique de l'Union européenne, nous proposons d'encourager l'installation d'usines de batteries sur notre territoire, créant ainsi des emplois tout en réduisant notre dépendance aux importations et en garantissant des normes environnementales élevées tout au long de la chaîne de production.

Parallèlement, l'instauration d'une taxe carbone aux frontières contribuerait à dissuader les importations de produits polluants et à prévenir la délocalisation des activités industrielles européennes vers des régions où les normes environnementales sont moins strictes. Cependant, nous devons être réalistes quant aux limites du marché carbone. Bien que ce mécanisme puisse être un outil utile dans la lutte contre les émissions de carbone, il nécessite une réglementation plus stricte et une stabilité des prix pour être pleinement efficace. Sans ces mesures, le marché carbone risque de favoriser les industries les plus polluantes au détriment de l'environnement.

Enfin, nous soutenons le maintien du principe de modération des tarifs de redevances aéroportuaires par l'Autorité de régulation des transports (ART) dans le but de garantir un accès équitable aux infrastructures aéroportuaires, tout en encourageant des pratiques respectueuses de l'environnement.

En conclusion, bien que reconnaissant les progrès réalisés par ce texte, nous estimons qu'il ne répond pas entièrement aux défis environnementaux actuels. Par conséquent, nous nous abstiendrons lors du vote et nous continuerons à plaider en faveur de mesures plus ambitieuses pour protéger notre planète et assurer un avenir durable à toutes et tous.

Mme Lisa Belluco (Écolo-NUPES). Chers collègues, nous discutons aujourd'hui d'adaptation du droit de l'Union européenne, notamment dans le domaine du droit de l'environnement.

En 2019, le Pacte vert pour l’Europe est devenu le cœur de l'agenda européen. S’il a permis des avancées nombreuses, force est de constater que nous ne sommes pas à la hauteur des ambitions initiales. Certains textes ont été partiellement vidés de leur contenu, tandis que d'autres ont été sortis de l'agenda politique.

J'aurais pourtant aimé que nous transposions aujourd'hui une directive destinée à réduire l'usage des pesticides. Malheureusement, la présidente de la Commission européenne a renoncé, en abandonnant son texte qui visait à réduire de moitié l'utilisation et les risques liés aux pesticides d'ici à 2030.

J'aurais aimé que nous transposions des textes ambitieux qui améliorent le bien-être des animaux d'élevage, prévoient la fin des cages, améliorent les conditions de transport et d'abattage. Malheureusement, nulle trace de propositions législatives sur les cages, pas plus que sur l'abattage. N’est en débat qu'une version au rabais du règlement sur le transport des animaux.

J'aurais aimé que nous transposions la directive sur la surveillance et la résilience des sols car 60 % des sols européens qui nous nourrissent sont dégradés. Mais les négociations européennes n'avancent pas.

J'aurais aimé que nous discutions de la directive sur les énergies renouvelables et l'objectif d'atteindre 42,5 % de telles énergies dans notre consommation finale d'énergie brute en 2030. C'était sans compter sur les blocages répétés du Gouvernement français – particulièrement de Bercy – qui refuse d'inscrire cet objectif. Ce refus témoigne d’une certaine cohérence puisque Bercy s'efforce aussi de réduire les objectifs climatiques inscrits dans notre droit interne. Décidément, si nous voulons que l'urgence environnementale soit prise au sérieux, les élections européennes du 9 juin prochain seront décisives.

Le présent texte comporte tout de même certaines avancées concernant, par exemple, le marché des batteries et la gestion des déchets associés. En revanche, et c'est regrettable, les objectifs français de lutte contre les microplastiques sont revus à la baisse pour s'aligner sur le calendrier européen moins-disant – la loi Agec nous plaçait parmi les bons élèves, plutôt en avance en la matière.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire n'étant saisie que pour avis sur certains articles, le groupe écologiste déterminera son vote en fonction de l'avancée des débats dans l'ensemble des commissions.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. Monsieur Villedieu, vous avez affirmé à plusieurs reprises que les décisions européennes étaient prises par des technocrates. En réalité, ces décisions sont prises par des parlementaires européens. Tout se passe par consensus entre la Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil européen qui réunit les chefs d'État ou chefs de gouvernement des États-membres. Il est vrai qu’on ne sait pas trop ce que signifie être présent au Parlement européen quand on est membre du Rassemblement national, mais ce sont bien les parlementaires européens qui décident des différentes directives proposées pour l'ensemble des peuples européens. Ce ne sont pas des technocrates, mais des élus. À moins que vous ne soyez en train de me dire que les députés européens du Rassemblement national sont eux-mêmes des technocrates. N'hésitez pas à les changer si vous ne les trouvez pas à la hauteur.

Dans certains domaines, l'application de règlementations européennes permet à tous les acteurs d’être plus efficaces. Prenons le cas de l'hydrogène, il n’aurait pas été très pertinent que la France crée une norme uniquement française. Réglementer à l'échelle du continent européen, premier espace économique au monde, présente un véritable intérêt, et l'ensemble des acteurs internationaux doivent alors se conformer à la réglementation européenne. L’exemple vaut pour le recyclage des métaux utilisés pour les batteries, évoqué par M. Bouloux, où le bon niveau d'intervention est l’échelle européenne. Dans certains domaines, la France peut et doit agir seule – nous montrons, depuis 2017, que nous sommes capables de le faire. Quand le bon niveau d'intervention est l'échelle européenne, il est important d'avoir cet espace commun.

Comme vous, monsieur Bouloux, je pense qu’il nous reste beaucoup à faire en ce qui concerne les batteries. Nous devons gagner en souveraineté et limiter les extractions de ressources non nécessaires. Une économie circulaire de la batterie nous permettrait d’effectuer notre transition énergétique sans affecter notre biodiversité.

Madame Belluco, je vois bien votre liste des courses de dispositions qui ne sont pas dans la loi Ddadue. Comme indiqué à M. Villedieu, ce sont aussi les décisions de nos collègues parlementaires européens. Puisque tout se fait par consensus, il faut que vingt-sept États et 700 députés européens se mettent d’accord. L’exercice est difficile mais utile, et les avancées sont tout de même intéressantes. Grâce au Pacte vert pour l’Europe, l'Union européenne est l'acteur économique mondial le plus avancé en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Nous devons certes aller plus loin – et j’espère que la prochaine législature européenne le fera –, mais n’oublions pas que l’Union européenne est la seule zone au monde à avoir pris autant de dispositions.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Nous en venons aux questions individuelles.

M. Antoine Villedieu (RN). Monsieur le rapporteur, vous ne cessez de lancer des anathèmes et vos propos sont caricaturaux. L’Union européenne est la seule démocratie au monde où les parlementaires ne peuvent rien proposer puisque c’est la Commission européenne qui décide des textes soumis au Parlement. L’Europe à outrance montre ses limites avec les agriculteurs, avec les automobilistes et avec l’ivresse normative que vous voulez imposer aux Français et aux Européens.

Si le Rassemblement national est le premier parti de France, la Macronie est le premier parti des menteurs de France !

M. le président Jean-Marc Zulesi. Si on pouvait éviter de s’invectiver…Le débat s’est bien passé jusqu’à présent.

Mme Delphine Lingemann (Dem). Ce texte de transposition et d'adaptation de diverses mesures européennes comporte un volet environnemental ambitieux qui témoigne de l'action essentielle de l'Union européenne ces cinq dernières années dans ce domaine. Le green deal peut être certes l’objet de critiques, mais l'Union européenne se place comme un acteur central de la transition environnementale dans le monde et nos législations sont des exemples pour bon nombre de pays.

Je me réjouis que l'Union européenne ait enfin ouvert les yeux sur la force de son marché et sur la nécessité de préserver sa spécificité et la qualité de vie dont nous jouissons tous. L'Europe est forte et elle le démontre par des politiques ambitieuses. La réforme du marché du carbone en est un exemple éloquent. Trop longtemps chantre d'un libéralisme qui n'était pas respecté à l'autre bout de la planète, l'Union européenne a décidé la mise en place du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF), dispositif unique au monde qui permet de compenser la concurrence déloyale de certains pays ne respectant pas nos objectifs climatiques. L'extension du marché carbone au secteur du transport est également une nouvelle à saluer, notamment dans le secteur aérien, dont les quotas gratuits apparaissaient comme une anomalie.

Les Européens ne souhaitent pas avancer en vase clos : cette réforme s'appliquera en bonne coopération avec Corsia, le mécanisme de compensation carbone de l'Organisation de l’aviation civile internationale (OACI). Je salue cette volonté de laisser une chance à une solution internationale, tout en garantissant, en cas d'échec, une solution européenne.

Nous avons beaucoup parlé des filières à responsabilité élargie de producteurs (REP) dans cette commission. L’entrée en vigueur du règlement sur les batteries, qui jouent un rôle central dans notre quotidien, est une bonne nouvelle : elle clarifie des règles essentielles pour le recyclage et la réutilisation de matériaux précieux, comme certaines terres rares dont l'Europe est totalement dépourvue.

Le groupe Démocrate soutiendra ce projet de loi.

TITRE II

DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE TRANSITION ÉCOLOGIQUE

Chapitre Ier

Dispositions relatives aux batteries, à la collecte et à la valorisation des déchets

Article 10 : Devoir de diligence pour les opérateurs économiques mettant en service des batteries et les opérateurs économiques sur le marché des batteries

Amendement CD52 de Mme Chantal Jourdan

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement vise à étendre les obligations de diligence et de gestion des risques à tous les opérateurs économiques, indépendamment de leur taille. La nature des produits tels que les batteries exige en effet une vigilance particulière en raison des risques sociaux et environnementaux associés. Il ne faut donc pas limiter les obligations aux grandes entreprises, mais les élargir à l’ensemble du secteur. Cet amendement renforcera la responsabilité sociale et environnementale et assurera une meilleure protection tout le long de la chaîne d'approvisionnement des batteries. Il contribuera à réduire les risques pour les travailleurs, les communautés locales et l'environnement, favorisant ainsi des pratiques de production et de consommation plus durables.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. Cela reviendrait à une surtransposition. Or la crise agricole a montré combien notre pays en souffrait.

Votre amendement soumettrait en effet tout opérateur économique aux obligations en matière de politique de devoir de diligence, de système de gestion, de gestion des risques, de vérification par tierce partie et de communication d’informations. Or nous devons conserver, à l'échelle nationale, le seuil de 40 millions retenu dans la directive pour éviter une distorsion de concurrence avec les autres États qui, eux, l’auront maintenu.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD4 du rapporteur pour avis.

Amendements CD55, CD54 et CD53 de Mme Chantal Jourdan (discussion commune)

M. Mickaël Bouloux (SOC). Ces amendements de repli proposent d’abaisser le seuil à 10, 20 et 30 millions respectivement.

Suivant le rapporteur pour avis, la commission rejette successivement les amendements.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD5 du rapporteur pour avis.

Amendement CD56 de Mme Chantal Jourdan

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement vise à fixer un délai maximal d’un an au cours duquel l’opérateur peut régulariser sa situation en cas de non-conformité et de manquement aux obligations en matière de politique de devoir de diligence, de système de gestion, de gestion des risques, de vérification par tierce partie et de communication d’informations fixées par le règlement relatif aux batteries et aux déchets de batteries.

Actuellement, ce délai est librement fixé par l’autorité de contrôle compétente. Or, si une certaine souplesse doit en effet être laissée à celle-ci, il semble nécessaire de prévoir un délai maximal. Le délai d’un an semble largement suffisant, particulièrement si les non‑conformités constatées ont des impacts ou présentent des risques importants pour la santé ou l’environnement.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. Fixer un délai maximal d'un an au cours duquel l'opérateur peut régulariser sa situation n'est pas excessif. Au cours de son audition, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) a estimé qu'il s'agissait d'un délai tout à fait raisonnable et largement applicable.

Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD6 du rapporteur pour avis.

Amendement CD57 de Mme Chantal Jourdan

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement propose de doubler le montant maximal de l'astreinte journalière applicable à partir de la notification de la mise en demeure. Cette mesure vise à rendre la loi plus dissuasive pour les opérateurs économiques réalisant un chiffre d'affaires élevé en augmentant les sanctions financières. Il permet ainsi de garantir une plus grande conformité aux obligations réglementaires.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. Le cadre de sanction applicable au non‑respect du devoir de diligence en matière de batteries s'inspire de la loi de transposition du règlement prévoyant un devoir de diligence pour les opérateurs sur le marché des minerais de conflit, qui prévoit le paiement d'une astreinte journalière au plus égale à 1 500 euros. Dans un souci de clarté d'application de notre droit en matière de devoir de diligence, il est pertinent d'adopter une solution analogue pour les batteries et donc de conserver le montant de 1 500 euros.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 10 modifié.

Article 11 : Dispositions en matière de conception des batteries, ainsi que de prévention et de gestion des déchets associés

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD7 du rapporteur pour avis.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 11 modifié.

Article 12 : Suppression de l’interdiction d’importation des boues d’épuration

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 non modifié.

Chapitre II

Dispositions relatives au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières

Article 13 : Création d’un régime de sanctions applicable aux importateurs en cas de non-respect des obligations de déclaration relatives au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pendant la période transitoire

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD17 du rapporteur pour avis.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 13 modifié.

Chapitre III

Dispositions relatives au système d’échange de quotas d’émissions
de gaz à effet de serre

Article 14 : Transposition des dispositions communes et particulières applicables aux installations suite à la révision de la directive relative au système d’échange de quotas d’émission

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD18, CD19, CD22 et CD42 du rapporteur pour avis.

Amendement CD58 de Mme Chantal Jourdan

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 34 permettant à un exploitant d’aéronef ou à une compagnie maritime de ne pas restituer d’unités pour les émissions de dioxyde de carbone qui feront l’objet d’un captage et d’un transport en vue d’un stockage permanent vers un site de stockage géologique de dioxyde de carbone ou qui ont été captées et réutilisées.

Le captage, transport et stockage géologique (CSC) est une solution technologique qui peut aider à réduire les émissions de gaz à effet de serre. L’Agence de la transition écologique (Ademe) souligne toutefois que, pour être pertinents d’un point de vue écologique et économique, de tels projets doivent s’inscrire dans un schéma territorial permettant aux trois composantes du CSC d’être à proximité.

Enfin, il apparaît plus vertueux d’encourager le secteur aérien et maritime à se décarboner et de promouvoir des modes de transport moins émetteurs comme le train et les voies fluviales, lorsque cela est possible.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. Le fait de ne pas restituer de quotas dans le cas d’un captage des émissions et d’un transport en vue d’un stockage permanent vers un site de stockage géologique était déjà présent dans la directive. Seule l’extension au transport maritime est transposée, conformément au droit européen.

La suppression proposée de l’alinéa 34 dans son ensemble n’est par ailleurs pas possible, car cet alinéa transpose aussi la nouvelle exemption à l’obligation de restitution dans le cas des émissions de gaz à effet de serre qui sont réputées avoir été captées et utilisées de telle manière qu’elles sont devenues chimiquement liées de manière permanente à un produit, de sorte qu’elles ne peuvent pénétrer dans l’atmosphère.

La suppression est donc une surtransposition. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CD59 de Mme Chantal Jourdan

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement de repli vise à supprimer dans l’alinéa 34 la référence aux exploitants d'aéronefs et aux compagnies maritimes.

Suivant le rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement.

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD20, CD23, CD43, CD21, CD24, CD30, CD33, CD25 et CD34 du rapporteur pour avis.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 14 modifié.

Article 15 : Transposition des dispositions particulières applicables au secteur aérien suite à la révision de la directive relative au système d’échange de quotas d’émission

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD65, CD40, CD39, CD31, CD38, CD32, CD36 et CD35 du rapporteur pour avis.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 15 modifié.

Article 16 : Extension du système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre au secteur du transport maritime

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD37, CD66, CD44, CD67, CD68, CD41, CD45 et CD26 du rapporteur pour avis.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 16 modifié.

Article 17 : Obligations applicables au titre du régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale (Corsia)

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CD27, CD28 et CD29 du rapporteur pour avis.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 17 modifié.

Chapitre V

Dispositions relatives aux contrats de concessions aéroportuaires

Article 20 : Suppression du principe de modération tarifaire pour les premiers tarifs de redevance aéroportuaire d’un nouveau contrat de concession

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD8 du rapporteur pour avis.

Amendement CD64 du rapporteur pour avis

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. La réforme de la régulation économique aéroportuaire a notamment comme objectif de relancer la conclusion de contrats de régulation économique entre l’État et les aéroports relevant de sa compétence. Néanmoins, l’Autorité de régulation des transports (ART), appelée à rendre un avis conforme sur de tels contrats, intervient uniquement après négociation du contrat entre l’État et l’aéroport, au risque de faire échouer sa conclusion en cas d’avis défavorable.

L’article L. 6327‑3 du code des transports permet actuellement au ministre chargé de l’aviation civile de demander un avis motivé à l’ART, avis limité au coût moyen pondéré du capital. Par cet amendement, il est proposé d’étendre la portée de cet avis motivé.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CD62 de Mme Chantal Jourdan.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Cet amendement a pour objet de reconnaître à l’ART la mission de rendre des avis sur les projets de textes réglementaires relatifs à la régulation des aéroports entrant dans son champ de compétences.

À la différence des autres secteurs dont elle assure la régulation et des autres régulateurs économiques sectoriels, l’ART n’est pas investie, en matière aéroportuaire, d’une mission consistant à rendre des avis sur les projets de textes réglementaires relatifs à la régulation des aéroports entrant dans le champ de sa compétence. Cette mission, classiquement octroyée aux autorités indépendantes, est pourtant une garantie de la cohérence du cadre réglementaire applicable avec l’exercice de ses missions et donc de l’effectivité de la régulation.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. Nos échanges avec la Direction générale de l'aviation civile (DGAC), qui a elle-même consulté l'ART au sujet de l'amendement, nous indiquent que l'évolution que vous proposez n'est pas nécessaire ni demandée par les acteurs du secteur. Elle risquerait d'entraîner des lourdeurs administratives et des délais supplémentaires, puisque le collège de l’ART devrait se réunir pour rendre un avis.

Demande de retrait. À défaut, avis défavorable.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Je suis ici pour défendre l’amendement et je le défendrai jusqu’au bout !

La commission rejette l’amendement.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 20 modifié.

TITRE V

DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE SOCIALE ET DE DROIT DE LA SANTÉ

Article 31 : Mise en conformité du code de l’environnement avec le règlement (UE) 2023/2055 en ce qui concerne les microplastiques

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD9 du rapporteur pour avis.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 31 modifié.

M. Pierre Cazeneuve (RE). Merci, monsieur le président, d’avoir tenu les débats depuis le début de la semaine. Nous avons pu avoir l’impression d’être enfermés dans cette salle comme dans un casino, mais nous avons tous bien travaillé.

Mme Pascale Boyer (RE). Je voulais à mon tour vous remercier, monsieur le rapporteur pour avis, monsieur le président. Je constate l’absence des députés du Rassemblement national : ils disent soutenir les valeurs européennes, mais leur assiduité ici ou au Parlement européen ne le démontre pas. Cette absence est d’autant plus regrettable dans le contexte d’une campagne qui s'annonce courte, mais intense.

M. le président Jean-Marc Zulesi. Un petit clin d’œil pour souligner que notre commission s’est transformée ces derniers jours en commission des finances, en commission des affaires sociales, en commission des affaires économiques et en commission des affaires européennes.

M. Damien Adam, rapporteur pour avis. Je regrette également l’absence du Rassemblement national au moment du vote : il préfère se contenter de beaux discours lors de la présentation du texte. Cette absence est révélatrice de son fonctionnement, à l’échelle nationale, comme à l’échelle européenne.

Je constate également l’absence de certains groupes politiques cet après-midi et notamment de ceux qui donnent parfois des leçons de parlementarisme à la majorité.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des dispositions dont elle est saisie, modifiées.

M. le président Jean-Marc Zulesi (RE). Cette semaine, notre commission, dont on dit souvent qu’elle examine peu de textes, en a étudié trois. Elle a ainsi démontré sa capacité à débattre et l’efficacité des équipes qui l’accompagne.

 


  1  

TRAVAUX de la commission
DES FINANCES, saisie pour avis

Lors de sa réunion du mercredi 28 février 2024, la commission des finances examine pour avis, par délégation de la commission des lois, les articles 6 à 9 du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole (n° 2041) (M. Daniel Labaronne, rapporteur).

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Notre commission s’est vu confier, par délégation au fond de la commission des lois, l’examen de cinq articles du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (dit Ddadue), qui portent essentiellement sur le droit bancaire et financier. Les articles issus de nos délibérations seront donc repris sans débat supplémentaire par la commission des lois dans le texte qu’elle adoptera prochainement.

J’ai été le rapporteur du précédent projet de loi Ddadue, en 2023. Depuis, ma philosophie générale n’a pas changé : faisons simple ! Nous devons transposer les textes communautaires aussi fidèlement que possible. Évitons toute sous-transposition et toute sur-transposition ; n’imposons pas à nos acteurs économiques des normes différentes de celles qui sont en vigueur dans les autres pays de l’Union.

Je dirai quelques mots des cinq articles dont l’examen nous revient. L’article 6 concerne les dépositaires centraux de titres, qui sont les « notaires » des marchés financiers. Il traite également des obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement et des informations relatives au transfert d’actifs numériques. Il corrige notamment une ambiguïté résultant de la transposition antérieure d’une directive.

L’article 7 adapte des mesures relatives à la résolution des établissements de crédit, à la supervision des organes centraux et à l’identification des titulaires de comptes bancaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna. Le statut particulier de ces territoires requiert en effet, en application du principe à valeur constitutionnelle de spécialité, des adaptations législatives. Des questions se posent cependant sur les frontières de la compétence fiscale dévolue à ces collectivités d’outre-mer.

L’article 7 bis corrige une erreur de transposition d’une directive relative aux systèmes de garantie des dépôts.

L’article 8 met en cohérence le code de commerce avec un règlement récent relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur, et reconnaît au ministre chargé de l’économie des pouvoirs d’accompagnement des enquêtes diligentées en ce domaine par la Commission européenne.

C’est en vertu de ce règlement que la Commission a ouvert pour la première fois, le 16 février 2024, une enquête approfondie concernant un marché d’équipements ferroviaires en Bulgarie d’une valeur de 610 millions d’euros, et plus particulièrement les subventions versées par l’État chinois à une entreprise chinoise candidate. Ce règlement complète le contrôle des aides d’État assurées depuis longue date par la Commission.

De manière plus inattendue, l’été dernier, c’est sur le fondement de ce même règlement qu’une plainte a été déposée contre le Paris Saint-Germain (PSG) par la Liga, l’association sportive organisatrice du championnat d’Espagne de football. Cette plainte a trait à des subventions versées par le Qatar au PSG.

De manière plus classique, l’article 9 modifie le livre des procédures fiscales, le code des douanes et le code rural et de la pêche maritime pour assurer leur pleine conformité aux dispositions d’une directive relative à l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances. Sur ce point, le projet de loi corrige une sous-transposition antérieure.

Ces différents articles, d’un abord technique, n’en traitent pas moins d’enjeux très concrets.

L’article 7 bis concerne par exemple le système de garantie des dépôts, qui couvre, à hauteur de 100 000 euros par personne et par établissement bancaire, les sommes laissées en compte auprès d’un établissement défaillant. La modification proposée vise à favoriser une intervention plus rapide des autorités publiques, qui doit avoir lieu dans un délai de cinq jours ouvrables après la découverte de la défaillance d’un établissement.

Autre exemple : l’article 6 porte sur les conditions dans lesquelles un particulier peut imposer à un service d’investissement de lui communiquer sur un support papier – et non électronique – différentes informations financières. Ce point intéresse particulièrement les épargnants, surtout les plus âgés, pour lesquels le maniement des outils électroniques est malaisé.

Je vous proposerai d’adopter ces articles enrichis de plusieurs amendements destinés à éclaircir certains points, et à poursuivre l’affirmation du pouvoir de contrôle du Parlement en matière de nomination des dirigeants des personnes morales de droit privé chargées d’une mission d’intérêt général dans les domaines de la banque, de l’assurance et de la finance.

M. le président Éric Coquerel. Au vu de l’annonce de l’investissement qatari de 10 milliards d’euros dans l’économie française, le travail ne manquera pas !

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La délégation au fond de la commission des lois nous confère toute compétence pour étudier et amender les cinq articles qu’elle nous a confiés, avant leur incorporation au texte qu’elle examinera le 13 mars prochain. Le travail du rapporteur pour avis est donc essentiel, d’autant que le projet, très opérationnel, adapte notre droit aux directives et règlements européens entrés en vigueur récemment, tout en le corrigeant lorsque les mesures de transposition antérieures ont donné lieu à des ambiguïtés ou se sont révélées inopérantes.

J’appelle votre attention sur l’article 6, qui tend à habiliter le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi destinée à favoriser la transposition des modifications de la directive 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme, modifications relatives aux informations accompagnant les transferts de fonds et de certains cryptoactifs. Comme toute mesure d’habilitation, celle-ci doit faire l’objet d’un contrôle parlementaire étroit. Il convient de laisser au Gouvernement le temps de rédiger l’ordonnance afférente en tenant compte des orientations émises par l’Autorité bancaire européenne (ABE).

Je salue par ailleurs le travail du rapporteur pour avis sur la consolidation juridique de l’article 7, s’agissant du contrôle interne des obligations d’identification des titulaires de comptes bancaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.

Au sujet de l’article 7 bis, pourriez-vous nous en dire davantage sur le mécanisme de garantie des dépôts ? Ce mécanisme a-t-il déjà été activé en France ?

Enfin, je salue les modifications introduites par l’article 9. L’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures concourt à la bonne intelligence entre États membres et s’accorde avec notre vision de l’Union européenne.

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Alexandre Holroyd (RE). Nous soutiendrons pleinement ce texte, et notamment son article 7 bis, qui renforce le dispositif de contrôle de la défaillance des établissements bancaires et favorise la garantie des dépôts, ainsi que l’article 6, qui favorise la transparence en renforçant le droit des particuliers d’accéder à certaines informations financières. Ces dispositions, pour être techniques, n’en sont pas moins essentielles.

Notre groupe défendra deux amendements, notamment le CF12, qui vise à permettre au Parlement d’auditionner le président du fonds de garantie des dépôts et de résolution (FGDR) avant sa nomination.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Il s’agit par nature d’un projet fourre-tout. Nous partageons certains de ses objectifs, telles la fin de la « clause du grand-père » introduite par l’article 6 ou l’obligation faite aux entreprises de conseil en investissement de transmettre des informations financières sur un support papier. Cette dernière va dans le bon sens, bien qu’elle demeure dérisoire au vu des enjeux. L’article 7, qui a trait au contrôle de l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles, et l’article 7 bis, qui crée un délai maximal de cinq jours ouvrables pour l’activation du mécanisme de garantie des dépôts, sont également utiles.

En revanche nous nous opposons au recours aux ordonnances proposé à l’article 6. Nous aurions préféré que le texte prévoie des mesures concrètes, notamment pour lutter contre les déclarations fiscales frauduleuses.

Nous nous opposons également à l’article 8, qui vise à lutter contre les subventions accordées par des pays tiers à des entreprises, y compris publiques. Il est curieux d’examiner ce projet au lendemain de la réception en grande pompe de l’émir du Qatar par Emmanuel Macron, avec à la clef un chèque de 10 milliards d’euros. Nous ne sommes pas opposés à la lutte contre les ingérences étrangères, mais nous ne souhaitons pas que la doctrine libérale de l’UE fasse obstacle aux stratégies des États, y compris lorsqu’elles impliquent l’octroi par des pays tiers de subventions à des entreprises publiques.

Nous n’approuverons pas davantage l’article 9, qui pose des problèmes majeurs sur le plan du respect des libertés individuelles.

Mme Véronique Louwagie (LR). Le projet de loi comporte de nombreuses dispositions techniques. Notre groupe veillera à ce que l’on évite la sur-transposition des normes européennes, car elle contribue souvent à complexifier le droit, et la France s’en est fait une spécialité. D’une manière générale, nous devons mener une lutte vigilante contre l’excès de normes et viser toujours la simplification.

M. Luc Geismar (Dem). Nous pourrions nous attarder sur la technicité du texte mais, à quelques mois des élections européennes, il est important de rappeler qu’il constitue l’aboutissement d’un travail précieux des États membres, avec l’objectif de faire progresser nos règles communes, au service de tous les territoires de l’Union. Il nous permet en effet, comme chaque année, de conformer notre droit aux récentes évolutions législatives européennes.

Les dispositions du texte amélioreront très concrètement le quotidien de nos entreprises et de nos concitoyens, à l’instar de l’article 6 – qui habilitera le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour transposer rapidement le règlement TFR et consolidera le cadre de la lutte que nous menons contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme – ou de l’article 9 – qui étendra le pouvoir de transmission d’informations de nos administrations, dans le cadre du régime d’assistance mutuelle, au recouvrement forcé des créances fiscales et douanières, pour une plus grande justice fiscale.

En Européens convaincus, les membres de notre groupe voteront en faveur de ces dispositions utiles et équilibrées.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Je tiens à réaffirmer l’engagement fort des écologistes, en France et en Europe, en faveur de l’explication et du débat démocratique, qui confèrent du sens au travail de l’Europe politique.

Ce projet Ddadue ne nous en inquiète pas moins. Il est particulièrement insatisfaisant de constater que, tous les trois ans, nous adaptons notre droit à celui de l’Union européenne par ordonnances, sans mener un examen approfondi des effets de cette adaptation sur notre économie, notre environnement et notre société.

Le domaine des cryptoactifs, par exemple, est complexe et doit faire l’objet d’une réflexion poussée et d’une régulation appropriée. Mais, au moment de transposer les normes européennes, il est souvent abordé de façon superficielle, sans consultation ni même information du Parlement. À l’occasion de la discussion en séance du premier bilan du plan « Agir contre la fraude », hier, j’ai interrogé Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics, à ce sujet, mais il n’a pas pris la peine de me répondre, alors que nous devions débattre le lendemain du projet de loi Ddadue.

Pourtant, nous ne pouvons ignorer l’impact environnemental, à l’échelle mondiale, des centres de données, qui sont à l’origine de l’émission de 2 % des gaz à effet de serre, au même niveau que le transport aérien. En France, la part de ces centres dans l’empreinte écologique du secteur numérique s’élève à 14 %. De plus, en raison des caractéristiques qui leur sont propres, les biens virtuels, dont font partie les cryptoactifs, se prêtent aisément aux utilisations illicites et plus particulièrement au blanchiment d’argent, ce qui fait d’eux un outil de prédilection des réseaux criminels.

Comment pouvez-vous justifier de traiter de telles questions par l’intermédiaire de simples ordonnances de transposition ? Il faudrait en débattre démocratiquement pour que les Françaises et les Français comprennent l’Europe.

Cette approche paraît plus surprenante encore à la lumière des récentes déclarations de Bruno Le Maire, qui a annoncé l’élaboration d’un texte – le projet de loi Pacte 2 – sur ce sujet. Il serait plus opportun d’attendre son examen et de suivre la procédure parlementaire traditionnelle, ce qui permettrait un travail démocratique de qualité. Nous l’affirmons avec d’autant plus de force que les parlementaires européens écologistes ont soutenu le projet de règlement qu’il est question de transposer.

M. Christian Baptiste (SOC). L’article 7 bis accorde un délai de cinq jours ouvrables au FGDR pour activer, auprès de l’ACPR, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, le mécanisme de garantie des dépôts bancaires. Qu’arriverait-il si, par mégarde, ce délai n’était pas respecté ?

L’article 9 prévoit que les informations relatives au recouvrement de créances échangées entre États membres peuvent être utilisées à d’autres fins. Est-il possible de faire usage d’informations transmises à la France par un pays tiers dans un but licite au sein de ce dernier mais prohibé en France ? Lorsque la France reçoit des informations d’un pays tiers suivant une finalité licite dans ce pays tiers, est-il possible de les exploiter librement ou faut-il recueillir pour cela son autorisation ?

Lorsqu’un pays tiers transmet des informations à la France, l’article dispose que la France peut les transmettre à un autre pays tiers, sous réserve d’en demander l’autorisation au pays de provenance, et qu’une absence de réponse à cette demande dans un délai de dix jours ouvrables vaut accord. Êtes-vous certain de la constitutionnalité et de la conventionnalité d’un délai si court ?

Mme Félicie Gérard (HOR). Le groupe Horizons et apparentés souhaite mettre en exergue l’une des principales avancées qu’introduit ce projet très technique : le renforcement des dispositions concernant les transferts de fonds et de certains cryptoactifs pouvant être utilisés pour blanchir des capitaux ou financer des entreprises terroristes. Il s’agit d’un enjeu essentiel de régulation financière, car le développement rapide des cryptoactifs a suscité des dérives qu’il convient d’endiguer.

Notre groupe votera en faveur du texte.

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Monsieur le rapporteur général, le FGDR procède d’une initiative française déjà ancienne, et c’est en nous emboîtant le pas que nos partenaires européens ont créé de semblables fonds de garantie, grâce auxquels les détenteurs d’actifs sur des comptes courants jouissent de l’assurance d’être remboursés d’un montant maximal de 100 000 euros, si leur banque vient à faire défaut. Cette garantie promeut la confiance de nos concitoyens dans notre système bancaire et constitue l’une des raisons de sa solidité. Ce plafond de 100 000 euros peut d’ailleurs être porté à 500 000 euros en vue de protéger un dépôt exceptionnel temporaire, consécutif à une succession, à une donation, à la vente d’un bien immobilier, ou encore au versement d’une indemnité à la suite d’un dommage ou de la rupture d’un contrat de travail.

Cette garantie a été activée en 1999 à l’occasion de la défaillance du Crédit martiniquais. Les opérations ont été menées de telle sorte que tout mouvement de panique a été évité au sein du système bancaire martiniquais, dont la stabilité a été assurée.

Je rappelle que ce sont les cotisations des banques qui alimentent le FGDR qui dispose de ressources cumulées représentant 7 milliards d’euros. Les Européens ont donc adopté un dispositif très robuste, et le texte renforce encore la garantie des déposants.

Monsieur Holroyd, la transparence de l’information financière conforte la confiance des épargnants dans leurs démarches d’investissement ; un amendement renforcera encore cette transparence.

Monsieur Guiraud, nous ne saurions accepter que l’octroi à des entreprises de subventions étatiques fausse la concurrence. Dans le cas bulgare, il semble que l’entreprise chinoise que j’évoquais ait ainsi bénéficié d’un avantage comparatif dû à la subvention que lui avait accordé l’État chinois. En revanche, je ne suis pas défavorable aux investissements directs étrangers en France lorsqu’ils ne perturbent pas la concurrence. Les 10 milliards que vous avez évoqués s’inscrivent dans ce cadre. Je rappelle que notre pays, pour la quatrième année consécutive, est le premier pays européen d’accueil des investissements directs étrangers, lesquels créent des emplois, dynamisent l’activité économique et permettent la distribution de revenus.

Madame Louwagie, comme nombre d’entre nous, je partage bien évidemment votre opposition à la sur-transposition. L’excès de normes entraîne d’importantes pertes de compétitivité.

Je remercie M. Geismar pour son soutien.

Madame Arrighi, l’examen des projets Ddadue est plus fréquent encore que vous ne l’indiquez, puisque le précédent a eu lieu l’année dernière. Je rappelle que les dispositions que nous examinons ont été étudiées et amendées par le Parlement européen. Le débat démocratique que vous appelez de vos vœux a donc déjà eu lieu. Lors de la précédente législature, Éric Woerth, en particulier, a accompli un travail important sur les cryptoactifs. Des dispositions ont été adoptées pour favoriser la transparence et lutter contre l’évasion fiscale. Et je rappelle que les articles dont nous sommes saisis n’abordent pas les questions environnementales.

Quant à la loi Pacte 2, elle n’entrera pas en vigueur avant le 31 décembre 2024, date à laquelle nous sommes dans l’obligation de transposer les présentes directives de l’UE.

Madame Gérard, nous tiendrons compte de vos réserves éventuelles s’agissant de certaines dispositions. J’expliquerai pourquoi les habilitations à légiférer par ordonnance sont ici nécessaires, et les raisons qui m’ont conduit à revenir au délai de neuf mois initialement accordé au Gouvernement pour les prendre, alors que le Sénat l’avait réduit à six mois.

Article 6 : Adaptations relatives aux dépositaires centraux de titres, aux obligations d’information des clients de détail sollicitant un service d’investissement, aux informations sur les transferts d’actifs numériques et extension de certaines de ces dispositions à des collectivités d’outre-mer

La commission adopte l’amendement rédactionnel CF16 de M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis.

Amendement CF11 de M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à conférer une valeur législative – et non plus réglementaire – au principe de gratuité de la transmission sur un support papier des informations aux clients de détail désireux de souscrire un investissement auprès d’un prestataire de services d’investissement.

Il s’inscrit dans un mouvement d’ensemble visant à garantir le principe de gratuité par des normes de niveau législatif. Nous l’avons fait par le passé s’agissant de la délivrance des formules de chèques ou des informations relatives aux produits d’épargne retraite.

La commission adopte l’amendement CF11.

Amendement CF1 de Mme Marianne Maximi

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Nous estimons que la volonté ici affichée de légiférer par ordonnance porte atteinte à la démocratie parlementaire et participe d’une remise en question générale des prérogatives du Parlement. Nous regrettons que le texte ne prévoie pas lui-même les mesures visées par l’habilitation.

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Je comprends votre position, mais je vais vous donner quatre raisons pour justifier mon avis défavorable.

Premièrement, vous dites que le Gouvernement n’aurait qu’à déposer un projet de loi pour assurer la transposition de la directive. Mais ce Ddadue se présente à la manière des poupées russes, puisque certains dispositifs relèvent d’une directive de 2023 modifiant les dispositions d’une autre directive relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme. Or ces dispositifs dépendent d’une orientation qui sera prise par l’Autorité bancaire européenne à la fin de cette année. Aussi, si nous examinions cette transposition à l’Assemblée nationale, nous ne pourrions pas tenir les délais.

Deuxièmement, la matière est très technique et cette transposition devra faire un lien avec l’ordonnance relative à l’adaptation du droit français au règlement sur les marchés de cryptoactifs.

Troisièmement, le Sénat, pourtant sourcilleux sur les habilitations à légiférer par ordonnance, ne l’a pas remise en cause. Il a seulement modifié le délai pour le faire passer à six mois.

Enfin, notre commission a toujours la possibilité de suivre et de contrôler les travaux préparatoires de cette ordonnance, en auditionnant les administrations concernées.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Je profite de l’amendement pour parler de l’alinéa 15, qui mentionne le rôle de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et de l’ACPR. Il est important que nous ayons en séance un échange avec le Gouvernement sur l’avancée de l’union des marchés de capitaux. J’avais déposé à ce sujet un amendement qui a été déclaré irrecevable. C’est un grand sujet, dont le ministre des finances et le Président de la République ont reparlé. Nous avons un marché unique, une monnaie commune ; il nous faut désormais aller vers cette union des marchés de capitaux qui tourne en rond depuis des années.

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. M. Christian Noyer, gouverneur honoraire de la Banque de France, est en charge d’une réflexion sur cette question. Peut-être serait-il intéressant de l’auditionner, après la remise de son rapport. Nous devons en effet aller vers cette union, au sujet de laquelle il sera intéressant d’interroger le Gouvernement.

La commission rejette l’amendement CF1.

Amendement CF7 de M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Le Sénat a souhaité réduire la durée d’habilitation à six mois. L’amendement vise à revenir à la durée initiale de neuf mois, afin de tenir compte des orientations qui seront publiées par l’Autorité bancaire européenne en décembre.

M. Alexandre Holroyd (RE). Je suis assez mal à l’aise avec l’amendement. À suivre cette logique, on repousserait éternellement les habilitations. Six mois semblent suffisants. Il ne faut pas oublier qu’il y a des discussions entre le Gouvernement et l’ABE sur ces dispositifs.

Mme Véronique Louwagie (LR). Nos concitoyens souhaitent que nous luttions contre l’excès de normes, la sur-transposition et les délais excessifs entre la réflexion, la décision, l’action et son effet. Cette lenteur participe du sentiment d’une certaine impuissance publique. Il faut des actions rapides.

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Je ne suis pas du tout d’accord avec vous. Je reviens aux neuf mois de la version initiale avec des arguments très précis. L’Autorité bancaire européenne publiera ses dernières recommandations en décembre. Le délai de six mois imposerait une transposition en octobre, par définition partielle.

La commission adopte l’amendement CF7.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 6 modifié.

Article 7 : Adaptation de mesures relatives à la résolution des établissements de crédit, à la supervision des organes centraux et à l’identification des titulaires de comptes bancaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les îles Wallis et Futuna

La commission adopte l’amendement rédactionnel CF14 de M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis.

Amendement CF10 de M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Nous entrons là dans un univers un peu compliqué… L’amendement, préparé en lien avec les services de l’ACPR et de l’AMF, modifie quatre alinéas de l’article 7 relatifs aux conditions dans lesquelles s’exerce le contrôle interne des obligations d’identification des titulaires de comptes bancaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, territoires qui disposent d’une compétence fiscale. À l’heure actuelle, les modalités d’identification des titulaires de comptes bancaires s’y appliquent imparfaitement. Le but est de lutter contre le blanchiment d’argent et l’évasion fiscale. Les dispositions de contrôle des obligations d’identification des titulaires de comptes bancaires relèvent de l’article L. 564-2 du code monétaire et financier, que le Gouvernement souhaite transposer dans l’article 7.

L’amendement vise à garantir la parfaite transposition des dispositions de l’article L. 564-2.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Au mois de juin dernier, nous avons voté le projet de loi ratifiant les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financier et portant diverses dispositions relatives à l’outre-mer, dont j’étais le rapporteur. Pourquoi ne pas y avoir inclus cette disposition ? Nous devrions interroger Bercy à ce sujet. Je ne voterai pas l’amendement.

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Il y a d’autres éléments plus embarrassants encore… Même si je pense qu’il faut voter l’amendement, je vous propose de le retirer, pour vous laisser le temps d’en comprendre les ressorts et de décider quel parti doit l’emporter, de l’ACPR et de l’AMF ou du Gouvernement.

L’amendement CF10 est retiré.

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 modifié.

Article 7 bis : Correction d’une  imprécision dans la transposition de la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014
relative aux systèmes de garantie des dépôts

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 7 bis non modifié.

Article additionnel après l’article 7 bis : Audition du président du directoire du Fonds de garantie des dépôts et de résolution devant les commissions chargées des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat avant sa nomination

Amendement CF12 de M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Le FGDR est doté de 7 milliards d’euros pour faire face à une crise bancaire. Son responsable n’a été auditionné qu’une fois depuis vingt ans, en 2014. Il serait pourtant utile que la représentation nationale soit informée du fonctionnement de cet organisme de droit privé chargé d’une mission d’intérêt général. C’est pourquoi je vous propose qu’à chaque renouvellement de son président une audition préalable ait lieu en commission des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat. Dans le même esprit j’avais fait adopter, contre l’avis du Gouvernement, un amendement visant à faire auditionner le directeur général du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages avant sa désignation.

La commission adopte l’amendement CF12 portant article additionnel.

Article 8 : Mise en œuvre par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du règlement (UE) 2021/1230 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 concernant les paiements transfrontaliers et reconnaissance de pouvoirs d’enquête à certains fonctionnaires pour la mise en œuvre du règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieurAmendement CF2 de Mme Marianne Maximi

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Je ne suis pas favorable à votre amendement. Le ministre de l’économie est le ministre de tutelle des administrations de contrôle. Par ailleurs, vous préconisez de limiter le rôle de contrôle à la DGCCRF – direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes –, alors que d’autres administrations centrales pourraient être sollicitées.

La commission rejette l’amendement CF2.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CF15 de M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 modifié.

Article 9 : Assistance internationale au recouvrement des créances fiscales et d’autres créances publiques au sein de l’Union européenne

Amendement CF3 de Mme Marianne Maximi

M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Vous dites que vous vous fondez sur l’avis du Conseil d’État. Mais il n’a pas proposé de supprimer cet article ; il a suggéré de supprimer une disposition pour éviter une sur-transposition, ce qui a été fait.

La commission rejette l’amendement CF3.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CF17, CF18 et CF19 de M. Daniel Labaronne, rapporteur pour avis.

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 9 modifié.


  1  

   Personnes entendues par le rapporteur de la commission des lois

   M. Alexis Dousselain, adjoint à la cheffe du département de l’organisation, des conditions et du temps de travail

Direction générale de la police nationale (DGPN)

   Mme Charlotte Huntz, adjointe à la conseillère judiciaire

   M. Hédi Zerai, chargé de mission auprès du conseiller juridique

   Mme Aurélie Besançon, cheffe du service central de coopération opérationnelle de police, département de la coopération internationale opérationnelle

   M. Yoann Lepleux, adjoint à la cheffe de section des négociations sur l'échange d'information, département de la coopération internationale opérationnelle, service de la stratégie, de l'influence et de la gouvernance, direction nationale de la police judiciaire

Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN)

   Général Dominique Lambert, chef de la sous-direction de la police judiciaire

   Lieutenant-colonel Pascal Lhoutellier, pôle coopération judiciaire internationale

   Lieutenant-colonel Christophe Meneau, pôle judiciaire au cabinet du DGGN

   Mme Anne-Sophie Beyssac, conseillère justice au cabinet du DGGN

   Mme Élise Barbé, sous-directrice de la négociation et de la législation pénales

   Mme Pauline Biais, adjointe à la cheffe du bureau de la législation pénale générale

   Mme Clémence Cheneau, membre du bureau de la législation pénale générale

   M. Julien Goldszlagier, chef du bureau du droit des sociétés et de l’audit

   Mme Élise Pousin, adjointe au chef du bureau du droit des sociétés et de l’audit

 

   M. Christophe Perruaux, directeur

   M. Julien Autret, officier de douane judiciaire (ODJ), responsable des relations internationales

   M. Vincent Ploquin, adjoint de la directrice

   M. Pablo Rieu, chef du bureau des questions pénales

   M. Julien Brochot, président de la commission LDH

   Mme Mona Laaroussi, chargée de mission affaires publiques

   Mme Odile de Brosses, directrice des affaires juridiques

   Mme Amina Tarmil, responsable des affaires parlementaires

   Mme Karine Dognin-Sauze, directrice générale

   M. Tristan Fourault, chef de cabinet, responsable communication et relations publiques

 


  1  

   PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES économiques

 

Par ordre chronologique

Ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA)

M. Yves Auffret, Directeur de cabinet adjoint

M. Hadrien Jacquet, Conseiller souveraineté des filières animales, santé et bien-être animal une seule santé

Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)

M. Paul-Emmanuel Piel, chef du bureau médias, télécommunications, biens et services culturels

M. Thomas Berbach, adjoint au bureau des produits industriels

Mme Carole Techeney, adjointe au bureau de l’énergie.

Direction générale des réseaux de communication, du contenu et des technologies (DG Connect) – Commission européenne

Mme Renate Nikolay, directrice générale

Mme Irene Roche Laguna, chef d’unité F1

Mme Ana Balcells Cartagena Ana, unité F1

M. Pierfrancesco Lo Sasso, membre de l’unité I1

Mme Marta Sanagustin Riazuelo, membre de l’unité I1

Direction générale des entreprises (DGE)

Mme Chantal Rubin, cheffe du pôle Régulation des plateformes numériques.

Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC)

Mme Sophie Mourlon, directrice générale de l'énergie et du climat.

M. Claude Renard, coordonnateur ZFE et IRVE.

M. Julien Agier, chef de bureau gaz renouvelables et bas carbone.

 

Chambres d’Agriculture France

Mme. Christine Valentin, 1ère Vice-Présidente de Chambres d'agriculture France

M. Julien Koefoed Responsable du Service Identification et Traçabilité Animale

M. Emmanuel Bertin, chargé d’affaires publiques.

CONTRIBUTIONS ÉCRITES REÇUES

Électricité de France (EDF)*.

France Hydrogène (FH)*.

Commission de régulation de l’énergie (CRE).

Réseau de transport d’électricité (RTE)*.

 

Régions de France.

France Gaz*.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

*  Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.


  1  

   PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS DE LA COMMISSION DU Développement durable et de l’aménagement du territoire

(par ordre chronologique)

Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

– Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN)

(Article 10)

Mme Mona Tatou, cheffe du bureau de la politique des ressources minérales non énergétiques

Mme Hélène Le Boedec, chargée de mission au bureau de la politique des ressources minérales non énergétiques

– Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

(Articles 11 et 12)

M. Vincent Coissard, sous-directeur des déchets et de l'économie circulaire

Mme Nadia Herbelot, cheffe du bureau des filières à responsabilité élargie des producteurs

(Article 31)

M. Olivier Gras, chef du bureau des produits chimiques

 Direction générale de l'énergie et du climat

(Articles 13,14,15,16,17)

Mme Diane Simiu, directrice du climat, de l'efficacité énergétique et de l'air

M. Julien Viau, chef du bureau des marchés « carbone »

M. Frédéric Branger, adjoint au chef du bureau des marchés « carbone »

 Direction générale de l’aviation civile

(Article 20)

M. Michel Hermesul, sous-directeur des aéroports

M. Daniel Chouchena, adjoint au chef du bureau des concessions et de la régulation économique aéroportuaire

(Articles 14,15,17)

Mme Nora Subsielle, cheffe du bureau du climat, de la qualité de l’air et des sujets émergents

Mme Laure Demicheli, adjointe à la cheffe du bureau du climat, de la qualité de l’air et des sujets émergents


  1  

   PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS DE LA COMMISSION DES FINANCES

Autorité des marchés financiers

 M. Maxence Delorme, directeur des affaires juridiques.

 M. Clément Saudo, adjoint au directeur des affaires juridiques

Autorité de contrôle prudentiel et de résolution

 Mme Barbara Souverain-Dez, directrice des affaires juridiques.

Direction générale du Trésor

 M. Hubert Bretheau, Adjoint au Chef du Bureau Lutte contre la criminalité financière et sanctions internationales

 Mme Caroline Charme, Adjointe au Conseiller juridique, DG Trésor

 M. Aristote Cocaul, Adjoint au Chef du Bureau des Affaires bancaires

 M. Mehdi Ezzaim, Adjoint au Chef du Bureau Epargne et marché financier

 M. Paul-Henri George, Adjoint au Chef du bureau E2 - bureau en charge des affaires multilatérales et européennes - de la Direction de la législation fiscale, DGFiP

 M. Bastien Lafon, Adjoint au Chef du Bureau des Services bancaires et moyens de paiement

 M. Maxime Landreau, Adjoint au Chef du Bureau de la Politique commerciale, stratégie et coordination

 Mme Eve Maurice, Adjointe au Chef du Bureau Épargne et marché financier

 Mme Isabelle Nardot, Adjointe de la Cheffe du Bureau Financement et développement économique des Outre-mer - Bancfin 2, DG Trésor.

Fonds de garantie des dépôts et de résolution

 M. Thierry Dissaux, Président du Fonds de garantie des dépôts et de résolution ;

 M. Michel Caledano, membre du directoire ;

 Mme Clara Cohen, directrice juridique.

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

CONTRIBUTIONS ÉCRITES Reçues par le rapporteur pour avis de la commission des finances

 

Direction générale des finances publiques

 

Direction générale des douanes et droits indirects

 

Sous-direction des affaires budgétaires et comptables du ministère de l'agriculture de la souveraineté alimentaire

 

 

 

 


([1]) Directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs.

([2]) Décret n° 2017-26 du 12 janvier 2017 relatif aux infrastructures de recharge pour véhicules électriques et portant diverses mesures de transposition de la directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs.

([3]) « Les États membres veillent à ce que leurs autorités surveillent régulièrement le marché des infrastructures de recharge et, notamment, à ce qu’elles surveillent le respect des paragraphes 3 et 5 par les exploitants de points de recharge et les prestataires de services de mobilité. Les États membres s’efforcent également de veiller à ce que leurs autorités surveillent régulièrement les éventuelles pratiques commerciales déloyales affectant les consommateurs ».

([4]) Directive 2001/95/CE du Parlement européen et du Conseil du 3 décembre 2001 relative à la sécurité générale des produits (Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE).

([5]) Ordonnance n° 2004-670 du 9 juillet 2004 portant transposition de la directive 2001/95/CE sur la sécurité générale des produits et adaptation de la législation au droit communautaire en matière de sécurité et de conformité des produits.

([6]) Ordonnance n° 2008-810 du 22 août 2008 complétant la transposition de la directive 2001/95/CE du 3 décembre 2001 relative à la sécurité générale des produits.

([7]) Ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative du code de la consommation.

([8]) L’article 5 de cette directive prévoit dans son paragraphe 1 que « sous réserve de l’article 7, les États membres communiquent immédiatement à la Commission tout projet de règle technique, sauf s’il s’agit d’une simple transposition intégrale d’une norme internationale ou européenne, auquel cas une simple information quant à la norme concernée suffit; ils adressent également à la Commission une notification concernant les raisons pour lesquelles l’établissement d’une telle règle technique est nécessaire, à moins que ces raisons ne ressortent déjà du projet ».

([9]) L’article 6 de cette directive prévoit que « les États membres reportent l’adoption d’un projet de règle technique de trois mois à compter de la date de la réception par la Commission de la communication prévue à l’article 5, paragraphe 1 ».

([10]) Directive UE 2018/1808 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 modifiant la directive 2010/13/UE visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (dite directive SMA).

([11]) Cet argument est également écarté par la Commission dans sa lettre précitée, au motif que « l’obligation de notifier la loi-cadre initiale avant son adoption est sans préjudice de la nécessité pour la France de notifier également les projets de décrets d’application pertinents à un stade ultérieur ». La Commission estime, en conséquence, qu’il s’agit dès lors d’une « violation grave de l’article 5 de la directive SMTD dans la mesure où elle rend impossible la tâche de la commission d’évaluer la compatibilité de ce projet de loi avec la directive AVMSD et empêche d’autres États membres et parties prenantes de réagir à la compatibilité des dispositions pertinentes sur les influenceurs avec la directive AVMSD ».

([12]) La Commission européenne s’appuie, sur ce point, sur les dispositions du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (article 288) ainsi que sur la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (Affaire C-606/10, ANAFE).

([13]) CJUE, arrêt du 9 novembre 2023, affaire C-376/22 Google Ireland Limited, Meta Platformes Ireland Limite Tik Tok Technoloy Limited contre Kommunikationsbehörde Austria.

([14]) Cet article définit, en droit européen, la notion de « pratique commerciale trompeuse ».

([15])  Loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture

([16])  Ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales

([17]) En principe, le nombre de voix attachées aux actions ordinaires est obligatoirement proportionnel à la quotité du capital que les actionnaires détiennent. Cependant, ce nombre de voix peut être soit limité, par les statuts, soit augmenté, en attachant aux actions un droit de vote double. Ce droit de vote double peut être attaché à toutes les actions nominatives entièrement libérées et inscrites au nom d’un titulaire depuis au moins 2 ans (article L.225-123) ; il est de droit dans les sociétés cotées.

([18]) Régime caractérisé par l’absence d’approbation de l’opération par l’assemblée générale extraordinaire des sociétés participant à l’opération et l’absence d’exigence des rapports des commissaires à la fusion ou aux apports.

([19]) Cette disposition complète l’unification du régime simplifié des apports partiels d’actifs opérée par l’ordonnance du 24 mai 2023 (auparavant, il existait un régime simplifié applicable aux SA issu de la loi n° 2019‑744 du 10 juillet 2019 dite « loi Soilihi », et un régime simplifié applicable aux SARL et opérations hybrides défini par un jeu de renvoi à celui applicable aux fusions simplifiées).

([20]) L’ordonnance du 24 mai 2023 a créé une nouvelle section consacrée aux apports partiels d’actifs mais a repris cet article du régime des scissions (auquel il était auparavant renvoyé pour les apports partiels d’actifs) sans adapter sa rédaction.

([21]) La rédaction du nouvel article L. 236-30 consacré aux apports partiels d’actifs, reprise du régime des scissions, est ambiguë et pourrait laisser entendre que la solidarité ne pouvait être écartée qu’entre sociétés bénéficiaires de l’apport (et pas avec la société apporteuse).

([22]) Ces cas sont prévus aux articles L. 236-9, L. 236-11 et L. 236-12 du code de commerce.

([23]) Les actionnaires détiennent des actions dans les sociétés de capitaux (comme les SA), tandis que les associés détiennent des parts sociales dans les sociétés de personnes (comme les SARL).

([24]) Amendement n°  COM-45 de M. Daniel Fargeot, rapporteur.

https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-45.html

([25]) Le droit d’amendement des sénateurs et du Gouvernement sur les articles concernés s’exerce alors uniquement en commission, tandis que la séance plénière est centrée sur les explications de vote et le vote (articles 47 ter à 47 quinquies du règlement du Sénat).

([26]) L’exposé des motifs de l’amendement précise que la fusion n’est pas approuvée : en cas de délégation, elle est décidée par l’organe délégué ; en cas de fusion simplifiée, sa réalisation est constatée par l’organe compétent compte tenu des termes du traité.

([27]) Aux termes de l’article L. 2373-2 du code de travail, « le groupe spécial de négociation détermine avec les dirigeants des sociétés participant à l’opération transfrontalière ou leurs représentants, par un accord écrit, les modalités de la participation des salariés au sein de la société issue de l’opération. »

([28]) Amendement n° COM‑46 rectifié de M. Daniel Fargeot.

https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-46.html

([29]) Rapport n° 213 (2023-2024), déposé le 13 décembre 2023 de MM. Daniel Fargeot et Cyril Pellevat, sénateurs, sur le présent projet de loi, fait au nom de la commission spéciale.

([30]) La société anonyme (SA) à directoire et conseil de surveillance a été créée par la loi du 24 juillet 1966, pour offrir une alternative à la structure classique bâtie autour d’un conseil d’administration, un président et un éventuel directeur général. Elle repose sur une structure dualiste, où la gestion incombe au directoire, tandis que le contrôle de cette gestion est assumé par le conseil de surveillance.

([31]) Conséquences dès 2024 de la transposition de la directive CSRD pour les grandes sociétés cotées (7 février 2024) :

https://www.amf-france.org/fr/actualites-publications/actualites/consequences-des-2024-de-la-transposition-de-la-directive-csrd-pour-les-grandes-societes-cotees

Le reporting de durabilité CSRD : se préparer aux nouvelles obligations (7 février 2024) :

https://www.amf-france.org/fr/actualites-publications/dossiers-thematiques/le-reporting-de-durabilite-csrd-0

([32])  Article L. 225-18-1 du code de commerce.

([33])  Article L. 226-4-1 du code de commerce.

([34])  Article L. 322-26-2-5 du code des assurances.

([35]) Articles L. 225-45, 225-83 et 226-4 du code de commerce.

([36]) Aux termes de l’article L. 23-12-1 du code de commerce, il s’agit de « toute instance mise en place au sein de la société, par tout acte ou toute pratique sociétaire, aux fins d’assister régulièrement les organes chargés de la direction générale dans l’exercice de leurs missions »

([37]) Loi du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

([38]) Article L. 132‑5 du code général de la fonction publique.

([39]) Article 52 de la loi « Sauvadet » précitée.

([40]) Le CAC 40 et le SBF 120 sont deux indices boursiers de référence qui sont composés des 40 ou 120 plus grandes capitalisations sur Euronext Paris.

([41]) Article L. 225‑27‑1 du code de commerce.

([42])Au moins un administrateur salarié dans les sociétés dont le conseil d’administration comprend 8 administrateurs « classiques » et au moins deux pour celles dont le conseil en comprend plus de 8.

([43]) Amendement n° COM-46 rectifié.

https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-46.html  

([44]) Amendement n° CL88

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/2041/CION_LOIS/CL88

([45]) Dans sa réponse au questionnaire du rapporteur, l’Autorité des marchés financiers définit ainsi les dépositaires centraux de titres : « Un dépositaire central de titres est une personne morale qui exploite un système de règlement de titres (point 3 ci-dessous) et fournit au moins un des deux services de base définis par le règlement européen concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union et les dépositaires centraux de titres (CSDR) présentés aux points 1. et 2. ci-dessous :

1. l'enregistrement initial de titres dans un système d’inscription en compte (« service notarial ») ;

2. la fourniture et tenue centralisée de comptes de titres au plus haut niveau (« service de tenue centralisée de comptes ») ; et l’exploitation d’un système de règlement de titres ».

([46]) D’octobre 2018 jusqu'en mars 2022, il y avait deux dépositaires centraux de titre en activité en France mais, à cette date, l’AMF a prononcé le retrait de l’agrément accordé à la société ID2S SA qui s'était spécialisée sur les titres de créances négociables à court terme avant d’étendre son activité à d’autres titres. Le retrait d'agrément a été prononcé à la demande de cette société.

([47]) Cette feuille de route a fait l’objet de la communication 2020 (590 final) du 24 septembre 2020 de la Commission, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions.

([48]) Cette citation et la suivante sont extraites du rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil établi en application de l'article 75 du règlement (UE) nº 909/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres, et modifiant les directives 98/26/CE et 2014/65/UE ainsi que le règlement (UE) nº 236/2012, page 8.

([49]) Lors de son audition, l'Autorité des marchés financiers a précisé qu’Euroclear France SA entretient cependant des liens directs avec le DCT du Maroc et des liens indirects avec les DCT des États-Unis, du Japon, du Royaume-Uni et de la Suisse.

([50]) Étude d’impact, page 100.

([51]) Réponse au questionnaire du rapporteur.

([52]) Directive (UE) 2021/338 du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2021, paragraphe 1.

([53]) L’article4 de ce texte définit une entreprise d’investissement comme étant « toute personne morale dont l’occupation ou l’activité habituelle consiste à fournir un ou plusieurs services d’investissement à des tiers et/ou à exercer une ou plusieurs activités d’investissement à titre professionnel »..

([54]) Site de l’Autorité des marchés financiers.

([55])  Règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les informations accompagnant les transferts de fonds et de certains crypto-actifs, et modifiant la directive (UE) 2015/849 (refonte), paragraphes 17 et 18. Ce règlement ne devrait cependant « pas s’appliquer aux transferts de crypto-actifs entre particuliers effectués sans l’intervention d’un prestataire de services sur crypto-actifs, ni aux cas où l’initiateur et le bénéficiaire de crypto-actifs sont tous deux des fournisseurs de services de transfert de crypto-actifs agissant pour leur propre compte » (paragraphe 22).

([56])  Selon le site du Conseil de l’Union européenne, « Le GAFI élabore et promeut des politiques de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, et émet des recommandations que les pays devraient appliquer ». Le GAFI, qui compte 40 pays-membres, est basé à Paris. Le règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 s’attache plus particulièrement à la mise en œuvre des recommandations n° 15 (sur les nouvelles technologies) et n° 16 (sur les virements électroniques) du GAFI et les notes interprétatives révisées relatives à ces recommandations.

([57])  Selon l’étude d’impact, (page 118) « ce type de portefeuille permet à son propriétaire de détenir les clés privées des actifs numériques qui y sont stockés et donc d’y accéder, de les déplacer ou de les dépenser sans repasser par un organisme tiers intermédiaire ».

([58])  Règlement (UE) 2023/1113 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 précité, article 38 (3).

([59]) Exposé des motifs, page 6.

([60])  Étude d’impact, page 106.

([61])  Étude d’impact, page 114.

([62])  Comme le souligne la commission spéciale du Sénat dans son rapport, « les risques associés aux crypto-actifs occupent ainsi une place prépondérante dans la dernière Analyse nationale des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme en France. En effet, le simple fait de convertir une devise en actifs numériques, puis de reconvertir ces actifs en devise peut « s'avérer particulièrement efficace pour dissimuler l'origine légale des fonds ». L'Analyse conclut que la menace liée aux actifs numériques est « très élevée s'agissant tant du blanchiment que du financement du terrorisme » et que les vulnérabilités liées à la nature même de ces actifs sont elles aussi « élevées » (anonymat, infrastructures complexes, non-traçabilité des transactions, connaissances limitées des PSAN en matière de LBC-FT, etc.) ». Sénat, rapport n° 213 (2023-2024) de MM. Daniel Fargeot et Cyril Pellevat au nom de la commission spéciale sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, page 71.

([63])  Étude d’impact, page 104.

([64])  Étude d’impact, page 104.

([65])  Conseil d’État, avis n° 407629, novembre 2023, page 2.

([66]) L’étude d’impact mentionne (page 120) la nécessité de « compléter le code monétaire et financer (notamment le VI de l’art. L.561-3) afin […] d’étendre aux PSAN la possibilité aujourd’hui ouverte aux États membres d’accueil d’exiger que les prestataires de services de paiement (PSP) et les émetteurs de monnaie électronique (EME) établis ailleurs dans l’Union et fournissant leurs services sous une autre forme que la succursale dans ces États (en s’appuyant sur un réseau d’agents et de distributeurs notamment) y nomment un point de contact central (représentant permanent) ».

([67]) Étude d’impact, page 122.

([68]) Exposé sommaire de l’amendement COM 21 déposé par M. Pellevat.

([69])  Sénat, rapport n° 213 (2023-2024) de MM. Daniel Fargeot et Cyril Pellevat au nom de la commission spéciale sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, page 77.

([70]) Directive 2014/59/UE du 15 mai 2014 du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) n° 1093/2010 et (UE) n° 648/2012.

([71]) Directive, article 5 (1). Dans le code monétaire et financier, le terme de « rétablissement » a été préféré au terme de « redressement ». Dans ce code, le terme de « redressement » est réservé aux situations de redressement judiciaire.

([72]) Directive, paragraphe 4.4.3.

([73]) Site du Conseil de l’Union européenne.

([74]) L’architecture du livre VII a été modifiée par les ordonnances n° 2021-1200 du 15 septembre 2021 et n° 2022-230 du 15 février 2022. Ces ordonnances ont été ratifiées par la loi n° 2023-594 du 13 juillet 2023 ratifiant les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financier et portant diverses dispositions relatives à l'outre-mer.

([75]) Comme le rappelle l’étude d’impact (page 105) : « En application du principe dit de « spécialité législative », les lois et règlements ne sont applicables en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, et en Nouvelle-Calédonie, en application de l’article 77 de la Constitution, que dans les matières relevant statutairement des compétences de l’État et que sur mention expresse du texte en cause ou s’ils y ont été rendus applicables par un texte spécial ».

([76]) Réponse au questionnaire du rapporteur.

([77]) Étude d’impact, page 127.

([78]) - L’article L. 511-30 recense trois organes centraux en activité : le Crédit Agricole S.A., l'organe central des caisses d'épargne et des banques populaires (BPCE) et la Confédération nationale du crédit mutuel ;

- L’article L 511-31 indique que les organes centraux représentent les « établissements de crédit et les sociétés de financement qui leur sont affiliés auprès de la Banque de France et de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution » et définit leur mission ;

- L’article L 511-32 précise que les organes centraux « concourent, chacun pour ce qui le concerne, à l'application des dispositions européennes directement applicables, législatives et réglementaires régissant les établissements de crédit et les sociétés de financement » et « saisissent l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution des infractions à ces dispositions » ;

- L’article L 613-49-1 est relatif aux pouvoirs de l’ACPR à l’encontre des organes centraux. Son paragraphe V prévoit que le collège de résolution de cette autorité évalue « si les conditions de déclenchement d'une procédure de résolution […] sont réunies » et prend, le cas échéant, « des mesures de résolution coordonnées à l'égard de l'organe central et de l'ensemble des affiliés ».

([79]) Réponse de l’ACPR au questionnaire du rapporteur.

([80]) BPCE est l’organe central du groupe des Banques populaires et les Caisses d’épargne. Ce groupe comporte plusieurs filiales (Natixis, la Banque Palatine, Oney et pôle « Solutions et expertises financières »).

([81]) Les informations communiquées par les institutions financières à l’administration fiscale française sur le fondement du I de l’article 1649 AC du code général des impôts et de l’article L. 102 AG du livre des procédures fiscales sont susceptibles d’être transmises à l’administration fiscale d’un autre État membre de l'Union européenne ou d’un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention permettant un échange automatique d’informations à des fins fiscales.

([82]) « Depuis 2018, l’ACPR a conduit dix contrôles sur place au sein d’organismes financiers métropolitains, destinés notamment à s’assurer du respect des dispositions de l’article L. 564-2 du CMF. À la suite de ces contrôles, l’ACPR a pris une mesure de police (mise en demeure) et a adressé sept lettres de suite (rappel de la réglementation assorties de demandes de mesures correctrices faisant l’objet d’un suivi dans le cadre de la supervision) aux établissements concernés » (réponse au questionnaire du rapporteur).

([83]) L’étude d’impact indique ainsi que « ces dispositions, en dépit de leur présence dans le code monétaire et financier, relèvent de la matière fiscale et, partant, de la compétence de la Nouvelle-Calédonie (rattachement au 1° de l’article 22 de la loi n° 99-209 organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle Calédonie, qui fait de la « réglementation relative aux modalités de recouvrement, au contrôle et aux sanctions » en matière fiscale une compétence de la Nouvelle-Calédonie) ». Ces dispositions « ne peuvent donc être étendues en Nouvelle-Calédonie par le législateur. Elles ne peuvent pas non plus être étendues en Polynésie française compétente en matière fiscale (cf. article 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004), ni à Wallis-et-Futuna (article 46 du n° 57-811 du 22 juillet 1957 relatif aux attributions de l’assemblée territoriale, du conseil territorial et de l’administrateur supérieur des îles Wallis-et-Futuna) » (page 139).

([84]) Selon l'étude d'impact (pages 42-43), ces 542 501 comptes sont ainsi répartis : 284 731 comptes en Nouvelle-Calédonie, 250 801 en Polynésie française et 6 969 dans les îles Wallis-et-Futuna.

([85]) Cet alinéa dispose que : « les titres visés au dernier alinéa de l’article 19 tervicies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, détenus directement ou indirectement par un organe central au sens de l’article L 511-30, ne sont pas pris en compte pour le calcul de la limitation à 50 % du capital des établissements de crédit qui leur sont affiliés, visée à l'article 19 tervicies ». Interrogée sur cette exception, la direction générale du trésor a précisé que « le troisième alinéa de l’article L. 511-31 concerne les titres visés par la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération qui ne s’applique pas dans ces territoires, d’où son exclusion ».

([86]) Ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013 relative aux établissements de crédit et aux sociétés de financement et ordonnance n° 2014-158 du 20 février 2014 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière financière.

([87]) Directive 2014/49/UE, article 1er.

([88]) Source : Banque centrale européenne.

 

([89]) Le I de l’article L. 312-4-1 précise que les conditions suivantes doivent être respectées :

1° Ces fonds doivent être restitués par l'établissement de crédit à leur titulaire en application des dispositions législatives, réglementaires ou contractuelles qui leur sont applicables ;

2° Ces fonds ne constituent pas le gage ou la garantie d'un engagement en vigueur contracté par leur titulaire envers l'établissement de crédit.

([90]) Comme le rappelle le site du FGDR, en 1999 « la Commission bancaire (devenue aujourd’hui Autorité de contrôle prudentiel et de résolution) a sollicité le Fonds de garantie des dépôts en vue d’une intervention préventive. Il s’agissait d’éviter que la banque ne connaisse une cessation des paiements qui aurait entrainé l’indisponibilité des dépôts des clients et le blocage d’une partie de la vie économique locale. L’intervention a consisté principalement à combler l’insuffisance d’actif et à fournir au Crédit martiniquais les moyens de faire face à ses engagements immédiats, afin de permettre le rachat du réseau, avec les dépôts associés, par un opérateur tiers. Le FGDR a accédé à cette demande d’intervention et versé en début d’année 2000 près de 1,7 milliard de francs (environ 260 millions d’euros) sous forme d’avances remboursables. Après en avoir récupéré une partie grâce à la cession du réseau à la BRED, puis grâce à la vente des actifs qui pouvaient l’être au fil de la liquidation du Crédit martiniquais, le FGDR conserve encore une créance de 178 millions d’euros. Il s’efforce d’en obtenir le recouvrement auprès des anciens dirigeants. […] Le contentieux est toujours en cours ».

([91]) Les articles L. 312-5 et L. 312-12 appartiennent à la sous-section 2 (Mécanisme de garantie des dépôts et dispositif de financement de la résolution) de la section 3 (Fonds de garantie des dépôts et de résolution) du chapitre II (Comptes et dépôts) du Titre Ier (Les opérations de banque, les services de paiement et l'émission et la gestion de monnaie électronique) du livre III (Les services) du code monétaire et financier.

([92]) Cette citation et les suivantes sont extraites du rapport annuel 2022 du FGDR, page 8.

([93]) Mise en place à l’été 2022, la garantie des services de gestion « couvre les instruments financiers, notamment les parts d’OPCVM, et les espèces associées, selon le cas détenus ou gérés pour le compte de leurs clients par ces sociétés, à hauteur d’un total de 20 000 euros. » (FGDR, rapport annuel 2022, page 8). Lors de son audition, M. Thierry Dissaux, président du directoire, a indiqué qu’un mécanisme de contribution des bénéficiaires serait institué en 2024 ou 2025. Ce mécanisme de garantie procurera donc prochainement des ressources au FGDR.

([94]) Le troisième alinéa de l’article 13 concerne la nomination des conseillers d'État, du grand chancelier de la Légion d'honneur, des ambassadeurs et envoyés extraordinaires, des conseillers maîtres à la Cour des comptes, des préfets, des représentants de l'État dans les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 et en Nouvelle-Calédonie, des officiers généraux, des recteurs des académies et des directeurs des administrations centrales.

Le quatrième alinéa de l’article 13 dispose qu’une « loi organique détermine les autres emplois auxquels il est pourvu en conseil des ministres ainsi que les conditions dans lesquelles le pouvoir de nomination du Président de la République peut être par lui délégué pour être exercé en son nom ». Les emplois intéressés relèvent de l’ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l'État. La fonction de directeur général du FGAO et du FGTI ne relève pas de cette liste où figurent par exemple les « emplois de direction dans les établissements publics, les entreprises publiques et les sociétés nationales quand leur importance justifie inscription sur une liste dressée par décret en conseil des ministres ».

Le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution dispose qu’« une loi organique détermine les emplois ou fonctions, autres que ceux mentionnés au troisième alinéa, pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. La loi détermine les commissions permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés ». La fonction de président du directoire du FGDR ne figure pas dans la liste des emplois déterminée par la loi organique modifiée n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

([95]) Décision n° 2012-658 DC du 13 décembre 2012, considérant 39. En l’espèce, la loi adoptée par le Parlement et soumise à l’examen du Conseil constitutionnel prévoyait que la nomination au Haut conseil des finances publiques de quatre magistrats de la Cour des comptes désignés par le Premier président de cette Cour et d’un membre nommé par le Président du Conseil économique, social et environnemental intervenait après leur audition publique par les commissions des finances et les commissions des affaires sociales de l'Assemblée nationale et du Sénat.

([96]) Le FGAO supervise :

-          l’indemnisation des victimes ou des ayants droit des victimes des dommages nés d'un accident survenu en France dans lequel est impliqué un véhicule au sens de l'article L. 211-1 du code des assurances lorsque le responsable des dommages est inconnu ou lorsqu’il n'est pas assuré, sauf par l'effet d'une dérogation légale à l'obligation d'assurance (article L. 421-1 du code des assurances) ;

– l’indemnisation des victimes des dommages corporels occasionnés par tous actes de chasse ou de destruction des animaux susceptibles d'occasionner des dégâts dans les parties du territoire où l'assurance instituée par l'article L. 423-16 du code de l'environnement est obligatoire, même si ces actes ne sont pas compris dans l'obligation d'assurance, dès lors qu'ils sont le fait d'un auteur demeuré inconnu, ou non assuré (article L. 421-8 du code des assurances) ;

– le paiement, en cas de retrait d'agrément d'une entreprise d'assurance, de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1 du code civil, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du même code (article L. 421-9 du code des assurances) ;

– l’indemnisation de toute personne propriétaire d'un immeuble ayant, à compter du 1er septembre 1998, subi des dommages résultant d'une activité minière présente ou passée dès lors que cet immeuble est occupé à titre d'habitation principale (article L. 421-17 du code des assurances).

([97]) Règlement (UE) 2021/23 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2020 relatif à un cadre pour le redressement et la résolution des contreparties centrales et modifiant les règlements (UE) n° 1095/2010, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 806/2014 et (UE) 2015/2365, ainsi que les directives 2002/47/ CE, 2004/25/ CE, 2007/36/ CE, 2014/59/ UE et (UE) 2017/1132 ; et règlement (UE) 2022/858 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2022 sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués, et modifiant les règlements (UE) n° 600/2014 et (UE) n° 909/2014 et la directive 2014/65/ UE.

([98]) Règlement (UE) 2021/1230, article 1er.

([99]) Un paiement transfrontalier est entendu comme « une opération de paiement traitée de manière électronique et initiée par un payeur ou par, ou via, un bénéficiaire, lorsque le prestataire de services de paiement du payeur et celui du bénéficiaire sont situés dans des États membres différents » (règlement (UE) 2021/1230, article 2).

([100]) Règlement (UE) 2021/1230, article 3 et paragraphe 4.

([101]) Règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022, article 1er.

([102]) L’article 21 (paragraphe 5) du règlement précise cependant que « la Commission peut demander la notification préalable de toute concentration non soumise à l’obligation de notification […] à tout moment avant sa réalisation si elle soupçonne que des subventions étrangères ont pu avoir été octroyées aux entreprises concernées au cours des trois années précédant la concentration. Cette concentration est réputée constituer une concentration soumise à l’obligation de notification aux fins du présent règlement ».

([103]) Le paragraphe 40 du règlement précise cependant que « la Commission a également le droit de demander la notification préalable d’une contribution financière étrangère au cours d’une procédure de passation de marchés publics ou de concessions, même si sa valeur estimée est inférieure aux seuils de notification ».

([104]) Règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022, article 53.

([105]) Sur ce sujet voir le tweet de la Liga du 12 août 2023. Dans ce tweet il est indiqué que : « La LIGA presenta una denuncia contra el PSG ante la Comisión Europea La LIGA considera que las subvenciones recibidas por el club desde Catar distorsionan el mercado y van en contra del Reglamento de Subvenciones Extranjeras de la UE ». Un communiqué de presse plus détaillé expose ce point de vue.

([106]) Le règlement (UE) 2022/2560 a également été invoqué en Belgique à l’appui d’une plainte déposée auprès de la Commission européenne par le Royal Excelsior Virton, un club de deuxième division relégué en troisième division, contre le club du Lommel SK qui bénéficie du soutien actif du City Football Group, le groupe qui rassemble les clubs soutenus par l'émirat d'Abou Dhabi (dont Manchester City, le Girona FC ou l’ES Troyes AC).

([107]) Sur ce sujet voir le tweet de la Liga du 17 août 2023. Un communiqué de presse plus détaillé expose ce point de vue.

([108]) Étude d’impact, page 160.

([109]) La rédaction initiale du projet de loi désignait l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution pour la mise en œuvre du règlement (UE) 2021/1230. Le Conseil d’État a observé que les dispositions du projet étaient « redondantes, à la fois, avec celles de l’article L. 612-1 du code monétaire et financier […] et avec celles du règlement 2021/1230 précité. Elles ne sont, par suite, pas nécessaires » (avis du Conseil d’État, point 6, page 2). La disposition concernée a ensuite été retirée du projet de loi.

([110]) Livre blanc relatif à l’établissement de conditions de concurrence égales pour tous en ce qui concerne les subventions étrangères [COM(2020) 253 final].

([111]) Commission européenne, communiqué de presse du 4 octobre 2023.

([112]) Communiqué de presse de la Commission européenne du 16 février 2024.

([113]) Réponse au questionnaire du rapporteur.

([114]) Étude d’impact, pages 162-163.

([115]) Directive 2010/24/UE, articles 1er et 2.

([116]) Soit les créances afférentes :

« II- 1° A l'ensemble des taxes, impôts et droits quels qu'ils soient, perçus par un Etat membre ou pour le compte de celui-ci ou par ses subdivisions territoriales ou administratives ou pour le compte de celles-ci, y compris les autorités locales, ou pour le compte de l'Union ;

« 2° Aux sanctions, amendes, redevances et majorations administratives liées aux créances pouvant faire l'objet d'une demande d'assistance mutuelle conformément au 1° prononcées par les autorités administratives chargées de la perception des taxes, impôts ou droits concernés ou des enquêtes administratives y afférentes ou ayant été confirmées, à la demande desdites autorités administratives, par des organes administratifs ou judiciaires ;

« 3° Aux redevances perçues pour les attestations et les documents similaires délivrés dans le cadre de procédures administratives relatives aux taxes, impôts et droits ;

« 4° Aux intérêts et frais relatifs aux créances pouvant faire l'objet d'une demande d'assistance conformément aux 1° à 3°. »

En revanche, sont exclus de cette assistance mutuelle :

1° Les cotisations sociales obligatoires dues à l'Etat membre ou à une de ses subdivisions ou aux organismes de sécurité sociale relevant du droit public ;

2° Les redevances qui ne sont pas mentionnées aux 2° et 3° du II ;

3° Les droits de nature contractuelle, tels que la contrepartie versée pour l'exécution d'un service public ;

4° Les sanctions pénales infligées sur la base de poursuites à la diligence du ministère public ou les autres sanctions pénales qui ne sont pas mentionnées au 2° du II.

([117]) Les créances douanières concernées sont celles auxquelles renvoie le I de l'article 349 sexies du code des douanes, à savoir les créances mentionnées aux 1° à 3° du II de l'article 349 ter qui sont similaires à celles figurant à l'article L. 283 A du livre des procédures fiscales.

([118])  Il s’agit de FranceAgriMer (établissement national des produits de l’agriculture et de la mer), de l’office de développement de l’économie agricole d’outre-mer (ODEADOM), de l’office du développement agricole et rural de Corse (ODARC) et de l’Agence de services et de paiement (ASP). Interrogé par le rapporteur pour savoir si les dispositions du projet de loi sont susceptibles de s’appliquer aux régions qui, sur délégation de l’Agence de services et de paiement (ASP), peuvent instruire et contrôler des demandes d’aide, le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire a répondu que : « les dispositions du projet de loi ne s’appliquent [ …] pas aux régions ». Cependant, il est « possible, selon le type d'informations à transmettre entre États membres, que certaines pourraient avoir pour origine des données transmises par les régions à l'ASP en vue du paiement des aides instruites et contrôlées à leur niveau. Pour la Corse, ainsi que le prévoient les dispositions croisées des code général des collectivités territoriales et code rural et de la pêche maritime, c’est une convention passée entre l’Etat et la collectivité territoriale de Corse qui précise les conditions de son intervention dans le domaine agricole ».

([119]) Réponse au questionnaire du rapporteur.

([120]) Conseil d’État, avis n° 407629, séance du jeudi 9 et du mardi 14 novembre 2023, page 2.

([121]) Étude d’impact, pages 165 et 167.

([122]) Réponse conjointe de la DGFiP et de la DGDDI au questionnaire du rapporteur.

([123]) Étude d’impact du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, 15 novembre 2023.

([124]) Directive 2006/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 septembre 2006 relative aux piles et accumulateurs ainsi qu'aux déchets de piles et d'accumulateurs et abrogeant la directive 91/157/CEE.

([125]) Quatre usines géantes de batteries pour véhicules électriques devraient être créées en France. La première a été inaugurée le 30 mai 2023 à Billy-Berclau-Douvrin, dans le Pas-de-Calais.

([126]) Conformément au point 1 bis de l’article 10 bis de la directive 2003/87 relative au SEQE-UE, le facteur MACF est égal à « 97,5 % en 2026, 95 % en 2027, 90 % en 2028, 77,5 % en 2029, 51,5 % en 2030, 39 % en 2031, 26,5 % en 2032 et 14 % en 2033. À partir de 2034, aucun facteur MACF ne s’applique. »

([127]) Règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 établissant un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières.

([128]) Règlement d’exécution (UE) 2023/1773 de la Commission du 17 août 2023 portant modalités d’application du règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les obligations de déclaration aux fins du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pendant la période transitoire.

([129]) Directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans l'Union et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil.

([130]) Pour plus d’informations sur le périmètre du SEQE-UE applicable aux aéronefs, voir l’article 15 du projet de loi.

([131]) Directive (UE) 2023/958 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant la directive 2003/87/CE en ce qui concerne la contribution de l’aviation à l’objectif de réduction des émissions dans tous les secteurs de l’économie de l’Union et la mise en œuvre appropriée d’un mécanisme de marché mondial

Directive (UE) 2023/959 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant la directive 2003/87/CE établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union et la décision (UE) 2015/1814 concernant la création et le fonctionnement d’une réserve de stabilité du marché pour le système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre de l’Union.

([132]) Pour plus d’informations sur les nouvelles dispositions applicables au secteur de l’aviation et du transport maritime, voir les articles 15 et 16 du projet de loi.

([133]) Pour plus d’informations sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, voir l’article 13 du projet de loi.

([134]) Pour plus d’informations sur l’articulation entre le régime Corsia et le SEQE-UE, voir l’article 17 du projet de loi.

([135]) Règlement (UE) 2015/757 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 concernant la surveillance, la déclaration et la vérification des émissions de dioxyde de carbone du secteur du transport maritime et modifiant la directive 2009/16/CE.

([136]) Directive (UE) 2018/410 du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2018 modifiant la directive 2003/87/CE afin de renforcer le rapport coût-efficacité des réductions d'émissions et de favoriser les investissements à faible intensité de carbone, et la décision (UE) 2015/1814.

([137]) En application du règlement MACF : règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023.

([138]) Décision n ° 377/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 avril 2013 dérogeant temporairement à la directive 2003/87/CE établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté.

([139]) Directive (UE) 2023/958 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant la directive 2003/87/CE en ce qui concerne la contribution de l’aviation à l’objectif de réduction des émissions dans tous les secteurs de l’économie de l’Union et la mise en œuvre appropriée d’un mécanisme de marché mondial.

([140]) Définition de « région ultrapériphérique » proposée dans l’article 14 du projet de loi : « l’un des territoires mentionnés à l’article 349 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ».

([141]) Définition de « pays et territoires d’outre-mer » proposée dans l’article 14 du projet de loi : « l’un des territoires mentionnés à l’article 198 et énumérés à l’annexe II du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ».

([142]) Règlement (UE) 2023/2405 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023 relatif à l’instauration d’une égalité des conditions de concurrence pour un secteur du transport aérien durable.

([143]) Biocarburants avancés : ils sont définis à l’article 2, deuxième alinéa, point 34), de la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil.

([144]) Carburants renouvelables d’origine non biologique : définis à l’article 25 de la directive (UE) 2018/2001.

([145]) Règlement d’exécution (UE) 2024/622 de la Commission du 22 février 2024 relatif à la liste des États qui sont considérés comme appliquant le CORSIA aux fins de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les émissions en 2023.

([146]) Règlement (UE) 2015/757 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 concernant la surveillance, la déclaration et la vérification des émissions de dioxyde de carbone du secteur du transport maritime et modifiant la directive 2009/16/CE.

([147]) Directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans l'Union et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil.

([148]) Règlement (UE) 2023/957 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant le règlement (UE) 2015/757.

([149]) Directive (UE) 2023/959 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant la directive 2003/87/CE établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union et la décision (UE) 2015/1814 concernant la création et le fonctionnement d’une réserve de stabilité du marché pour le système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre de l’Union.

([150]) Définition de « région ultrapériphérique » proposée dans l’article 14 du projet de loi : « l’un des territoires mentionnés à l’article 349 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ».

([151]) Définition de « pays et territoires d’outre-mer » proposée dans l’article 14 du projet de loi : « l’un des territoires mentionnés à l’article 198 et énumérés à l’annexe II du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ».

([152]) Décision n ° 377/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 avril 2013 dérogeant temporairement à la directive 2003/87/CE établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté.

([153]) Règlement (UE) n ° 421/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 modifiant la directive 2003/87/CE établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté, en vue de la mise en œuvre, d'ici 2020, d'une convention internationale portant application d'un mécanisme de marché mondial aux émissions de l'aviation internationale.

([154]) Directive (UE) 2023/958 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023 modifiant la directive 2003/87/CE en ce qui concerne la contribution de l’aviation à l’objectif de réduction des émissions dans tous les secteurs de l’économie de l’Union et la mise en œuvre appropriée d’un mécanisme de marché mondial.

([155]) Règlement délégué (UE) 2019/1603 de la Commission du 18 juillet 2019 complétant la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les mesures adoptées par l'Organisation de l'aviation civile internationale relatives à la surveillance, à la déclaration et à la vérification des émissions de l'aviation aux fins de l'application d'un mécanisme de marché mondial.

([156]) Règlement d’exécution (UE) 2024/622 de la Commission du 22 février 2024 relatif à la liste des États qui sont considérés comme appliquant le CORSIA aux fins de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les émissions en 2023.

([157]) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([158]) Ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l’énergie.

([159]) Loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures.

([160]) Règlement (UE) 2017/2196 de la Commission du 24 novembre 2017 établissant un code de réseau sur l’état d’urgence et la reconstitution du réseau électrique.

([161]) La CRE, dans une délibération n° 2021-335 du 28 octobre 2021, a approuvé la proposition de RTE d’inclure le service de participation active de la demande (correspondant au service d’interruptibilité) dans le plan de défense dans le cadre de la mise en œuvre du règlement ER.

([162]) Arrêté du 30 mars 2022 portant abrogation de l’arrêté du 22 décembre 2015 pris en application de l’article L. 321-19 du code de l’énergie, relatif au volume de capacités interruptibles à contractualiser par le gestionnaire du réseau public de transport.

([163]) Ordonnance n° 2021-167 du 17 février 2021 relative à l’hydrogène.

([164]) Conformément à l’engagement pris par l’ancien ministre délégué chargé des transports M. Clément Beaune, le 29 septembre 2023, l’État a lancé un nouvel appel d’offres pour la concession des aérodromes de Nantes-Atlantique et Saint-Nazaire Montoir, dont l’échéance est fixée au 29 mars 2024.

([165]) Étude d’impact du projet de loi.

([166]) Exposé des motifs du projet de loi.

([167]) À l’exclusion des agences ou unités traitant particulièrement des questions de sécurité nationale et des fonctionnaires de liaison détachés en vertu de l’article 47 de la convention d’application de l’accord de Schengen.

([168]) Sauf dans certaines circonstances, précisée au 3. du même article.

([169]) Et, selon le cas, du ministre de l’intérieur ou du ministre chargé du budget.

([170]) Article R. 49-35 du code de procédure pénale.

([171]) La rédaction actuelle de l’article prévoit que les services ou unités concernés par la disposition sont « désignés » par arrêté. L’article 22 du projet de loi souhaite substituer à la mention de « désignés » celle de « listés ».

([172]) Amendement COM-28 du rapporteur M. Fargeot, accessible ici : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-28.html.  

([173]) Amendement n° CL73.

([174]) Amendement COM-29 du rapporteur M. Fargeot, accessible ici : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-29.html  et               amendement COM-30 du rapporteur M. Fargeot, accessible ici : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-30.html

([175]) Amendement COM-29.

([176]) « Des crimes et délits contre la Nation, l’État et la paix publique ».

([177]) Il peut s’agir par exemple de la prévention du terrorisme ou de violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique.

([178]) Amendement n° CL74.

([179]) Sous réserve des dispositions de l’article 695-9-40 du CPP (transmission des informations qu’avec l’autorisation préalable d’un magistrat chaque fois que cette autorisation est requise en France pour accéder à ces mêmes informations ou les transmettre à un service ou à une unité de police judiciaire) et du 1° de l’article 695-9‑41 du même code (si des motifs laissent penser que leur communication porterait atteinte aux intérêts fondamentaux de l’État en matière de sécurité nationale).

([180]) Cette disposition est identique à l’actuelle rédaction de l’article 695-9-38 du CPP.

([181]) Il s’agit ici d’une extension du périmètre des infractions concernées, notamment, aux faits de criminalité grave affectant deux ou plusieurs États membres, aux infractions pénales commises pour se procurer les moyens de perpétrer des actes relevant de la compétence d’Europol, ou encore à celle qui sont commises pour faciliter l’exécution d’actes relevant de la compétence d’Europol, ou pour les perpétrer.

([182]) Conformément à l’article 11 de la directive (UE) 2023/977 du 10 mai 2023.

([183]) Amendement COM-31 du rapporteur M. Fargeot, accessible ici : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-31.html ; Amendement COM‑32 du rapporteur M. Fargeot, accessible ici : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-32.html ; Amendement COM‑33 du rapporteur M. Fargeot, accessible ici : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-33.html  

([184]) Des événements de nature à entraîner un danger grave et imminent pour la sécurité, l’ordre ou la santé publics, la préservation de l’environnement, l’approvisionnement en biens de première nécessité ou la satisfaction des besoins prioritaires de la population.

([185]) Amendement n° CL75.

([186])  Amendement COM-34 du rapporteur M. Fargeot, accessible ici : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-34.html

([187]) Amendement n° CL76.

([188]) Ces raisons sont reprises de l’actuelle rédaction de l’article 695-9-41 du code de procédure pénale.

([189]) Amendement COM-35 du rapporteur M. Fargeot, accessible ici : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-35.html

([190]) Amendement COM-36 du rapporteur M. Fargeot, accessible ici : https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-36.html  

([191]) Amendement n° CL77.

([192])  Eurojust a « pour but de promouvoir et améliorer la coordination et la coopération entre les autorités judiciaires compétentes des États membres, en particulier en ce qui concerne la grande criminalité transfrontière (terrorisme, cybercriminalité, blanchiment d’argent, trafic d’armes ou de stupéfiants, etc.) » (étude d’impact). Eurojust est composée de procureurs, de magistrats et d’officiers de police de chaque Êtat membre.

([193]) Eurojust est informé par l’intermédiaire d’un « membre national », un magistrat hors hiérarchie mis à disposition de cette agence (article 695‑8 du code de procédure pénale).

([194]) Amendement n° COM‑40.

https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-40.html

([195]) Amendement n° CL89

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/2041/CION_LOIS/CL89

([196]) Circulaire du 18 février 2014 relative aux fonctions et prérogatives de l’unité Eurojust,telles qu’issues de l’entrée en vigueur de la décision 2009/426/JAI et des dispositions de transposition de la loi n° 2013-711 du 5 août 2013

https://www.legifrance.gouv.fr/download/pdf/circ?id=38022

([197])  Directive 2013/48/UE du Parlement européen et du conseil du 22 octobre 2013 relative au droit d’accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales et des procédures relatives au mandat d’arrêt européen, au droit d’informer un tiers dès la privation de liberté et au droit des personnes privées de libertés de communiquer avec des tiers et avec les autorités consulaires.

https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32013L0048

([198]) Amendement n° COM‑37

https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-37.html  

([199]) Amendements n° COM-38 et COM‑62

https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-38.html  

([200]) Amendements n° COM‑39 et COM-63

https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-39.html

([201]) Amendement n° 28

https://www.senat.fr/amendements/2023-2024/214/Amdt_28.html

([202]) Amendement n° CL92.

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/2041/CION_LOIS/CL92

([203]) Amendement n° CL95.

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/2041/CION_LOIS/CL95

([204]) Amendement n° CL97.

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/2041/CION_LOIS/CL97

([205]) Amendement n° CL98 et CL71.

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/amendements/2041/CION_LOIS/CL98

([206]) Article 695‑43 du code de procédure pénale.

([207]) Réponse à une question préjudicielle du Conseil constitutionnel, dans l’arrêt du 30 mai 2013.

https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:62013CJ0168

([208]) Article 695-45.

([209]) Amendement n° COM‑60.

https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-60.html  

([210]) Avis du comité d'évaluation des risques et du comité d'analyse socio-économique sur le dossier, annexe XV proposant des restrictions sur les microplastiques intentionnellement ajoutés.

([211]) Plaquette de présentation du plan d’action sur le socle européen des droits sociaux, disponible ici : https://op.europa.eu/webpub/empl/european-pillar-of-social-rights/fr/index.html#chapter2

([212]) Article 18.

([213]) Article L. 515-1 du CGFP.

([214]) Article L. 515-2 du CGFP.

([215]) Article L. 515-7 du CGFP.

([216]) Article L. 634-2 du CGFP.

([217]) Article L. 634-3 du CGFP.

([218]) Dans son avis n° 407629 issus des séances des 9 et 14 novembre 2023 sur le projet de loi, le Conseil d’État a en effet estimé que « qu’il [était] souhaitable d’étudier rapidement les modalités selon lesquelles la garantie ainsi offerte aux fonctionnaires bénéficiant de l’un des congés relevant de la directive 2019/1158 pourrait être étendue aux fonctionnaires placés en congé de maternité ou d’adoption ».

([219]) https://www.senat.fr/amendements/commissions/2023-2024/112/Amdt_COM-41.html  

([220]) Article L 4221-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction actuelle.

([221]) À l’exception de deux de ses dispositions, qui sont entrées en vigueur dès l’adoption du règlement précité.

([222]) Le terme d’ « opérateur », défini à l’article 4 du règlement précité, désigne toute personne physique ou morale ayant des animaux ou des produits sous sa responsabilité, y compris pour une durée limitée, mais à l’exclusion des détenteurs d’animaux de compagnie et des vétérinaires.