N° 468
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 octobre 2024
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES,DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE
ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2025 (n° 324)
PAR M. Charles DE COURSON,
Rapporteur général
Député
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ANNEXE N° 30
JUSTICE
Rapporteur spécial : M. Jean-Didier BERGER
Député
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SOMMAIRE
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Pages
Principales observations du rapporteur spécial
A. des DÉpenses de personnel toujours en progression
1. Des frais de justice encore (trop) dynamiques
2. Des moyens de fonctionnement stables en AE comme en CP
3. Les crédits d’investissement immobilier du programme.
A. une hausse des crédits du programme 107 tirée par l’augmentation des dépenses de personnel
1. Le plan « prisons » : 18 000 places de détention d’ici à 2027
3. Les crédits alloués à l’aménagement des peines
4. La prévention de la récidive et la réinsertion des personnes placées sous-main de justice
IV. le programme 182 protection judiciaire de la jeunesse
A. des Dotations stables pour la protection judiciaire de la jeunesse
B. Des consÉquences de la rÉFORME du code de justice pÉnale des mineurs qUI INTERROGENT
V. le programme 101 AccÈs au droit et À la justice : un périmetre élargi
A. des CRÉDITS ALLOUÉS À L’Aide juridictionnelle ENFIN MAÎTRISÉS
B. Les autres dÉpenses du programme
VII. Le programme 335 Conseil supÉrieur de la magistrature
Personnes auditionnées par le rapporteur spécial
L’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 0 % des réponses relatives à la mission étaient parvenues à la commission des finances. Si le rapporteur spécial admet que le temps pris à former un nouveau gouvernement a pu conduire à retarder la validation politique des réponses rédigées par l’administration, il déplore toutefois n’avoir disposé des premières réponses que fin octobre. Au 1er novembre, seules 61 % des réponses lui étaient parvenues. |
Principales observations du rapporteur spécial Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit pour la mission Justice une dotation à hauteur de 11,93 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et de 12,46 milliards d’euros en crédits de paiement (CP). Il s’agit donc d’un budget en diminution en autorisations d’engagement, à hauteur de – 16,22 %, et en augmentation en crédits de paiement, à hauteur de + 2,44 %. Hors contribution au compte d’affectation spécial (CAS), les crédits de paiement du ministère de la justice s’établissent à 10,24 milliards d’euros, en augmentation de 108 millions d’euros, soit une hausse de 1,1 %. La part prévisionnelle du budget de la justice dans le budget de l’État pour 2025 s’établit à 2,1 % ([1]). Rétrospectivement, depuis 2017, les crédits du ministère de la justice auront augmenté de 3,3 milliards d’euros en valeur absolue, ce qui représente une hausse de 49 %. Ces augmentations budgétaires quasi continues depuis une dizaine d’années étaient nécessaires : les États généraux de la justice, qui se sont tenus en 2021 et 2022, avaient en effet dressé le constat accablant d’une justice en « état de délabrement avancé ». ([2]) Le rapporteur spécial rappelle d’ailleurs que, selon le dernier rapport de la Commission européenne pour l’efficacité de la Justice (CEPEJ), la France continue de figurer parmi les pays du Conseil de l’Europe qui investissent le moins dans leur justice ([3]). Ce constat appelle à poursuivre les efforts engagés, comme le prévoit la loi d’orientation et de programmation de la justice, présentée dans la continuité des travaux des États généraux de la justice et du plan d’action présenté par le Garde des Sceaux le 5 janvier 2023, et adoptée définitivement le 11 octobre 2023.
Évolution prévisionnelle des crédits de paiement (en millions d’euros)
Source : article 1er de la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023‑2027. L’augmentation des crédits proposée pour 2025 par le projet de loi de finances pour 2025 n’est toutefois pas conforme à la trajectoire définie par la LOPJ. En effet, en l’état actuel du texte, les crédits du paiement pour 2025 s’établiraient à 10,24 milliards d’euros hors CAS, contre 10,68 milliards d’euros en loi de programmation, soit une différence de plus de 440 millions d’euros. Les principaux points d’attention budgétaires portent sur quatre grands ensembles : les mesures relatives au personnel Les créations nettes d’emplois du ministère de la justice ont été fixées par la LOPJ à 10 000 équivalents temps plein (ETP) d’ici à 2027, dont 1 500 magistrats et 1 800 greffiers supplémentaires, y compris 605 équivalents temps plein recrutés en gestion pour l’année 2022 au titre de la justice de proximité. Pour 2025, 619 ETP supplémentaires sont prévus au budget, dont 270 à destination des services judiciaires et 349 à destination des nouveaux établissements pénitentiaires qui entreront en service en 2025. L’ensemble de la masse salariale progresserait en 2025 de 49 millions d’euros pour s’établir à 5 101 millions d’euros. Hors titre 2, les crédits demandés pour 2025 s’élèvent à 5,14 milliards d’euros. les frais de justice Le budget consacré aux frais de justice s’accroît de 68 millions d’euros pour s’établir à 743 millions d’euros, soit une hausse de 10 % par rapport à la loi de finances pour 2024. Il est utile de rappeler que le montant des frais de justice en 2017 s’établissait à 468 millions d’euros. Après une hausse de plus de 200 millions d’euros entre 2017 et 2024, l’accentuation des moyens se poursuit donc. Le rapporteur spécial insiste sur la nécessité d’optimiser les dépenses afférentes aux frais de justice. S’il salue le lancement d’un plan de maîtrise de ces frais depuis 2022, force est de constater que ce plan n’a pas encore produit de résultats probants. Le rapporteur spécial appelle en outre à changer en partie la façon d’aborder cette question pour ne pas s’intéresser exclusivement à la façon de réaliser des économies sur chaque type de dépenses mais également à l’engagement de la dépense, en sensibilisant davantage les jeunes magistrats notamment. les investissements en faveur des établissements pénitentiaires Pour lutter contre la surpopulation carcérale, qui atteint un nouveau record ([4]), le Gouvernement a annoncé en 2018 la mise en place du programme immobilier « 15 000 » qui vise à créer 15 000 places de prison d’ici 2027. À la fin de l’année 2022, seules 2 441 places avaient été mises en service alors que 7 000 devaient initialement l’être. Pourtant, face à ce bilan, le projet de loi de finances pour 2025 prévoit une baisse des dépenses d’investissement de l’administration pénitentiaire de 43 % en AE. Cela met en doute le réalisme de ces prévisions, d’autant que la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice a ajouté 3 000 places à cet objectif initial. De fait, le ministre de la justice le 31 octobre 2024 a annoncé que la construction des 18 000 places de prisons allait être rééchelonnée. Il a, en outre, annoncé le lancement d’une « opération vérité ». En effet, le rapporteur spécial est convaincu que les contestations locales ne peuvent pas expliquer à elles seules le retard pris et que ces chiffres reflètent aussi une problématique de pilotage du ministère de la Justice. la poursuite du plan de transformation numérique du ministère Sur la période 2023-2027, le second plan de transformation numérique vient prendre le relais d’une démarche engagée en 2018 pour rattraper le retard conséquent du ministère en la matière. Pour 2025, s’agissant de l’informatique ministérielle, sont prévus 210,7 millions d’euros en AE et 235,2 millions d’euros en CP hors dépenses de titre 2. Le rapporteur spécial s’inquiète de cette forte diminution annoncée qui, de l’aveu même du ministère, permettra « le maintien en conditions opérationnelles du socle numérique et des applications informatiques existantes » mais « nécessitera de faire évoluer certains des objectifs du plan de transformation numérique ». Alors que le premier plan de transformation numérique du ministère a été lancé en 2018, et alors que de nombreux applicatifs métiers demeurent encore défaillants, le rapporteur spécial s’interroge dans ce domaine-là également, et comme son prédécesseur, sur la qualité du pilotage des projets par le ministère ([5]).
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ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION JUSTICE (en millions d’euros)
(*) Hors fonds de concours et attributions de produits. Source : commission des finances, d’après le projet de loi de finances pour 2025.
Évolution des crédits de paiement du ministère de la justice (en millions d’euros)
Source : projets annuels de performances 2017 à 2025.
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ÉVOLUTION DU PLAFOND D’EMPLOIS DE LA MISSION JUSTICE (en ETPT)
Source : informations annexes du projet de loi de finances pour 2025. PRÉVISION ET EXÉCUTION DES FRAIS DE JUSTICE (en millions d’euros)
Source : commission des finances, d’après les réponses aux questionnaires et les documents budgétaires. ÉVOLUTION DE LA DENSITÉ CARCÉRALE GLOBALE
Source : commission des finances, d’après les données de l’administration pénitentiaire. |
La mission Justice comprend l’ensemble des moyens humains, matériels et financiers dont dispose le ministère de la justice. La mission comporte six programmes, dont trois programmes « métier » qui concourent respectivement à l’organisation et au fonctionnement des juridictions, des services pénitentiaires ainsi que des services de la protection judiciaire de la jeunesse. Deux programmes transversaux retracent les moyens de la politique d’accès au droit et à la justice ainsi que les fonctions d’état-major et législatives. Enfin, un programme finance le Conseil supérieur de la magistrature.
– le programme 166 Justice judiciaire, relatif aux crédits de fonctionnement des juridictions de l’ordre judiciaire ;
– le programme 107 Administration pénitentiaire, qui porte le budget de la direction de l’administration pénitentiaire ;
– le programme 182 Protection judiciaire de la jeunesse, qui retrace les crédits de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse.
– le programme 310 Conduite et pilotage de la politique de la justice, qui rassemble les moyens de l’état-major, des directions législatives et des services d’intérêt commun du ministère ;
– le programme 101 Accès au droit et à la justice, qui finance la politique de soutien à l’accès au droit et à la justice.
Le programme finançant le Conseil supérieur de la magistrature :
– le programme 355 vise à garantir l’autonomie budgétaire du Conseil supérieur de la magistrature.
Comme le montre le diagramme ci-après, environ 80 % des crédits de la mission sont concentrés sur l’administration pénitentiaire et la justice judiciaire.
rÉpartition des crÉdits de paiement demandÉs sur la mission Justice en 2025
Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires pour 2025.
Rappelons qu’en revanche, le périmètre de la mission Justice ne comprend ni les juridictions de l’ordre administratif, dont les crédits sont inscrits sur le programme 165 de la mission Conseil et contrôle de l’État, ni les juridictions financières, inscrites sur le programme 164 de cette même mission.
Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de porter les crédits de la mission Justice à 11,93 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 12,46 milliards d’euros en crédits de paiement (CP).
Les AE diminueraient de 16,22 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2024, tandis que les CP progresseraient de 2,44 %.
ÉVOLUTION DES crÉdits de la mission Justice en 2025
(en millions d’euros)
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Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
166 – Justice judiciaire |
4 753,94 |
4 584,61 |
– 3,56 % |
4 544 |
4 567,11 |
+ 0,51 % |
107 – Administration pénitentiaire |
6 813,98 |
4 739,61 |
– 30,44 % |
5 002,95 |
5 242,41 |
+ 4,79 % |
182 – Protection judiciaire de la jeunesse |
1 160,76 |
1 160,64 |
– 0,01 % |
1 125,94 |
1 140,95 |
+ 1,33 % |
101 – Accès au droit et à la justice |
736,23 |
798,13 |
+ 8,4 % |
736,23 |
798,13 |
+ 8,41 % |
310 – Conduite et pilotage de la politique de la justice |
768,28 |
640,49 |
– 16,63 % |
747,08 |
704,57 |
– 5,69 % |
335 – Conseil supérieur de la magistrature |
4,63 |
4,83 |
+ 4,19 % |
5,72 |
5,91 |
+ 3,40 % |
Total général |
14 237,84 |
11 928,33 |
– 16,22 % |
12 161,94 |
12 459,09 |
+ 2,44 % |
Source : projet annuel de performance 2025.
● La forte baisse du montant des autorisations d’engagement demandées pour 2025 est tirée par celle du programme 107 Administration pénitentiaire, et notamment son action 2 Accueil et accompagnement des personnes placées sous main de justice, dont les AE diminuent de plus de 68 %, ce qui représente 1,87 milliard d’euros, et par celle du programme 310 Conduite et pilotage de la politique de la justice et notamment son action 9 Action informatique ministérielle, dont les AE diminuent de 28,4 %, ce qui représente 105 millions d’euros. Le rapporteur spécial regrette ces baisses d’AE qui auront pour conséquence de retarder le déploiement de projets pourtant phares du ministère de la justice : le plan de construction de 18 000 places de prison et le second plan de transition numérique.
La hausse du montant des crédits de paiement demandés pour 2025 s’explique, elle, par l’augmentation proposée des crédits du programme 107 – Administration pénitentiaire de 4,79 %, soit plus de 240 millions d’euros. Le budget du programme 101 – Accès au droit et à la justice s’élèverait à 798,1 millions d’euros en 2025, contre 736,2 millions d’euros ouverts par la loi de finances initiale pour 2024, équivalents à 790,2 millions d’euros à périmètre constant. En effet, le programme bénéficie d’une mesure de périmètre à hauteur de 54 millions d’euros en 2025 pour assurer dorénavant le financement du fonds de financement des dossiers impécunieux (FFDI).
Cette hausse des crédits de paiement s’inscrit dans un contexte de progression du budget du ministère de la justice ces dernières années, qui s’est accélérée à compter de l’année 2021 et qui devrait se poursuivre normalement jusqu’en 2027 en application de la LOPJ.
Évolution des crÉdits de paiement de la mission justice
(en millions d’euros)
Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.
● Hors versement au compte d’affectation spécial (CAS) Pensions, les crédits de paiement de la mission progresseraient de 1,1 % en 2025 pour s’établir à 10,24 milliards d’euros, soit une augmentation de 101 millions d’euros par rapport aux crédits ouverts en 2024. Au total, le budget de la justice (hors CAS Pensions) progresserait de près de 43 % entre 2018 et 2025.
Cette hausse mérite d’être soulignée dans la mesure où, jusqu’en 2021, les crédits ouverts et exécutés sur la mission sont restés en deçà de la trajectoire fixée par la loi de programmation et de réforme pour la justice pour les années 2018 à 2022 ([7]). Depuis 2022, le montant des crédits de paiement indiqués est rigoureusement identique à celui prévu à l’article 1er de la nouvelle loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice. Toutefois, en l’état actuel du projet de loi de finances pour 2025, cette trajectoire ne serait pas respectée. Le rapporteur spécial espère ainsi voir les crédits de la mission augmenter au cours de l’examen du texte au Parlement. Il déposera des amendements en ce sens.
Après l’avoir annoncé dans la presse, le ministre de la justice, Didier Migaud, a indiqué à la commission des lois de l’Assemblée nationale le 5 novembre dernier, qu’un amendement gouvernemental serait déposé en vue de l’examen en séance du texte afin d’abonder les crédits de la mission de 250 millions d’euros supplémentaires. Cette augmentation des moyens devrait permettre :
– d’honorer les engagements qui ont été pris dans la LOPJ en termes de recrutements des différents types de personnels ([8]) ;
– de poursuivre la modernisation des outils numériques du ministère ;
– ou encore de respecter le « protocole d’Incarville », négocié avec les personnels de surveillance.
Aussi le rapporteur spécial tient-il à préciser que l’ensemble des éléments chiffrés qui figurent dans le présent rapport spécial repose sur le texte tel qu’il a été déposé à l’Assemblée nationale et ne tient pas compte de cette annonce : nul ne peut en effet savoir quel sort lui sera réservé au fil de l’examen du projet de loi de finances pour 2025.
● En 2022, la progression du budget de la mission avait pour principale origine l’augmentation des crédits hors personnel, ou hors titre 2 (HT2). En 2023, cette hausse a été principalement tirée par l’augmentation des dépenses de personnel, en raison des efforts réalisés par le ministère cette année en matière de recrutements et de revalorisation des rémunérations de certaines catégories de personnel. En 2024, cette tendance s’est poursuivie avec une hausse de 6,8 % des dépenses de titre. Pour 2025, les dépenses de personnel progresseraient également plus vite que les autres, en raison de la poursuite des recrutements notamment.
Évolution des crÉdits par titre
(en millions d’euros)
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PLF 2025 |
Évolution par rapport |
LFI 2024 |
Évolution par rapport |
Titre 2(Personnel) |
7 318,6 |
+ 2,63 % |
7 131,1 |
+ 6,8 % |
Hors titre 2 |
5 140,5 |
+ 2,22 % |
5 028,9 |
+ 2,8 % |
Mission Justice |
12 459,1 |
+ 2,44 % |
12 160 |
+ 5,1 % |
Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.
Le présent projet de loi de finances prévoit en effet la création de 619 emplois en 2025. Ces créations concerneraient exclusivement les services judiciaires (270 postes) et l’administration pénitentiaire (349 postes).
Sur le quinquennat 2023‑2027, 10 000 emplois doivent être créés ([9]).
Le plafond d’emplois du ministère, conformément aux dispositions de l’article 47 du projet de loi de finances pour 2025, s’élèverait à 95 599 ETPT, en hausse par rapport au plafond d’emplois pour 2024 qui était fixé à 94 698 ETPT, soit une hausse de 901 ETPT. Cette hausse concernerait principalement le programme Justice judiciaire (+ 460 ETPT) et l’administration pénitentiaire (+ 355 ETPT).
En outre, 27 millions d’euros financeraient des mesures catégorielles nouvelles dans le programme 107 – Administration pénitentiaire, essentiellement en raison de la réforme de la filière de surveillance.
● Par ailleurs, l’analyse de l’évolution relative des enveloppes allouées à chacun des programmes « métiers » du ministère montre que la hausse des crédits du programme 166 – Justice judiciaire a tendance à être beaucoup moins forte que l’an passé. La hausse du programme 182 – Protection judiciaire de la jeunesse ralentit elle aussi, mais dans des proportions bien moindres. La hausse des crédits s’accélère toutefois substantiellement pour le programme 107 – Administration pénitentiaire.
progression relative du budget des programmes 166, 107 et 182
(en pourcentage)
Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.
● Le projet de loi de finances pour 2025 doit permettre au ministère de la justice de prolonger les actions entreprises ces dernières années pour moderniser le service public de la justice et de conforter les réformes amorcées qui seront conduites dans les prochaines années, au premier rang desquelles la finalisation du plan 15 000.
En prévoyant une augmentation des crédits de la mission Justice de 2,44 %, bien supérieure à celle prévue pour le budget de l’État dans sa globalité, et supérieure à l’inflation anticipée pour 2025 (1,8 %), le projet de loi de finances continue de tirer les conséquences des conclusions formulées par le comité des États généraux de la justice dans son rapport Rendre justice aux citoyens. Ce rapport avait, de manière générale, dépeint une justice en grande difficulté, en raison d’un insuffisant soutien budgétaire.
Les constats alarmants dressés à l’occasion de cet exercice de concertation, bien qu’ils aient été en partie corrigés par les hausses inédites du budget du ministère des deux dernières années (respectivement 9,8 % en 2023 et 5,1 % en 2024), doivent, selon le rapporteur spécial, continuer de guider l’action des pouvoirs publics, ce qui suppose d’augmenter les crédits alloués à la mission par rapport au texte déposé par le gouvernement.
Ceci apparaît d’autant plus nécessaire que ces constats sont corroborés par les chiffres présentés régulièrement par la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (CEPEJ) du Conseil de l’Europe. Le rapport issu du 10e cycle de la CEPEJ, publié en octobre 2024, indique ainsi que la France a consacré 5,25 milliards d’euros en 2022 pour le fonctionnement de son système judiciaire, soit 77,2 euros par habitant. Si ce montant est supérieur à la médiane (74,80 euros par habitant), il est inférieur à la moyenne des quarante-six États membres de la CEPEJ (85,40 euros). À titre de comparaison, selon le mode de calcul de la CEPEJ, ce montant s’élevait à 100,6 euros en Italie, 96,8 euros en Espagne et 136,1 euros en Allemagne. Par ailleurs, la France figure parmi les pays qui affichent une part du produit intérieur brut consacrée au système judiciaire la plus faible. Ainsi, la part du PIB consacrée au système judiciaire s’élève à 0,20 % en France, contre 0,31 % en moyenne pour l’ensemble des pays membres de la CEPEJ.
Ces chiffres ne tiennent certes pas compte des budgets 2023 et 2024 qui se sont traduits par des augmentations importantes des crédits du ministère de la justice. Toutefois, à elles seules, ces deux années ne peuvent permettre de rattraper un tel retard. Aussi, le projet de loi de finances pour 2025 continue-t-il d’accroître les moyens alloués au ministère de la justice. Cette hausse devra être accentuée au cours de l’examen du texte au Parlement.
Le rapport de la CEPEJ a également mis en lumière le manque de moyens humains du ministère de la justice : la France comptait 11,3 juges pour 100 000 habitants en 2022 (contre 21,9 juges en moyenne dans les 46 pays de l’étude). En particulier, la France fait partie des pays qui comptent le minimum de procureurs pour 100 000 habitants, avec 3 procureurs pour 100 000 habitants contre 12 en moyenne dans les pays couverts par le rapport.
Malgré la tenue des États généraux de la justice, puis le vote de la loi de programmation du ministère, qui a confronté en 2023 la représentation nationale aux besoins du service public de la justice, les fondamentaux ne sont donc pas modifiés et le projet de budget pour 2025 ne devrait pas permettre de corriger cette tendance s’il était adopté en l’état.
Les crédits de la mission permettraient, s’agissant des juridictions judiciaires, de poursuivre les recrutements, de soutenir les moyens d’enquête de la justice, de renforcer l’attractivité des métiers judiciaires ou de poursuivre la mise en œuvre du second plan de transformation numérique pour simplifier le travail des personnels de justice et faciliter l’accès de la justice pour le justiciable.
S’agissant de l’administration pénitentiaire, le budget du programme doit permettre de poursuivre et/ou de finaliser la construction de nouveaux établissements dans le cadre du programme de construction de 15 000 nouvelles places de prison et d’appuyer trois priorités : renforcer la sécurité des personnels et des structures pénitentiaires, favoriser la réinsertion des personnes placées sous main de justice et améliorer les conditions de travail des personnels et la prise en charge des personnes sous main de justice.
En ce qui concerne la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), le rapporteur spécial déplore que le projet annuel de performance du programme 182 se borne dans sa présentation stratégique à rappeler les trois objectifs de la stratégie 2023‑2027 de la direction de la protection de la jeunesse – affirmer la place de la PJJ dans la coordination de la justice des mineurs, rénover les dispositifs de prise en charge pour s’adapter aux besoins des mineurs et éviter les ruptures de parcours et construire une PJJ exemplaire pour sécuriser l’exercice des missions – sans se donner la peine de préciser l’apport du budget 2025 à la réalisation de ces objectifs.
Les crédits du programme 101 – Accès au droit et à la justice sont, comme les années passées, alloués en très grande partie (83 %) à l’aide juridictionnelle, dont les critères d’éligibilité ont été modifiés par la loi de finances pour 2020 ([10]) et qui a été étendue à certaines procédures non juridictionnelles par la loi de finances pour 2021 ([11]). L’unité de valeur servant de calcul pour la rétribution des avocats a été revalorisée, en 2021 ([12]) et 2022 ([13]), pour être portée à 36 euros. La Cour des comptes, dans un rapport publié l’année dernière ([14]), avait dénoncé le manque de pilotage de cette aide qui a vu son coût augmenter de 13 % par an depuis 2017. Pour 2025, les crédits budgétaires consacrés à l’aide juridictionnelle s’élèveraient à 661 millions d’euros, soit une progression annuelle de 0,4 %.
Enfin, le budget du programme 310 – Conduite et pilotage de la politique de la justice porte les crédits des fonctions de gouvernance et des métiers mutualisés exercés pour le compte notamment des trois directions à réseau du ministère. Ce programme support porte également la mise en œuvre de politiques d’investissement, par exemple les crédits alloués à la modernisation des systèmes d’information du ministère sur lesquels repose le second plan de transformation numérique (PTN) pour la période 2023-2027.
En définitive, le projet de loi de finances pour 2025, malgré le contexte budgétaire contraint, poursuit l’augmentation du budget de la justice amorcée ces dernières années. Il s’inscrit toutefois en porte à faux avec la trajectoire de la LOPJ qui prévoit que 10,67 milliards d’euros soient alloués au ministère en 2025 (hors CAS Pensions), soit 440 millions supplémentaires à ce qui est proposé… Cet argent est pourtant essentiel pour financer les recrutements nécessaires au bon fonctionnement du service public de la justice, construire de nouvelles places de prison face à une surpopulation carcérale record ou encore poursuivre la transition numérique du ministère.
Le rapporteur spécial estime toutefois qu’une augmentation des crédits ne peut aller de pair qu’avec un pilotage rigoureux de ces crédits. Or, les auditions menées l’ont alerté sur plusieurs aspects, et ce pour toutes les directions métiers du ministère, qu’il s’agisse de l’utilisation de l’argent public, de la prospective pour maîtriser les dépenses ou de l’évaluation des politiques menées indispensables pour savoir si l’argent est bien dépensé et, surtout, utile aux citoyens. Le rapporteur spécial a ainsi été surpris de constater que seuls trois acteurs, et même parfois deux dans certains territoires, se partageaient les marchés de gestion délégués des prisons – ce qui les place de fait en situation d’oligopole –, qu’il n’existait aucune évaluation du taux de récidive des jeunes pris en charge par la protection judiciaire de la jeunesse – alors que l’un des objectifs de ces structures est précisément de favoriser leur réinsertion – ou encore qu’aucune réflexion d’ampleur, malgré des recrutements de magistrats et de greffiers conséquents ces dernières années et à venir, en matière de télétravail n’avait été menée par la direction des services judiciaires pour accueillir ces nouveaux personnels dans un parc immobilier contraint. D’autres exemples seront développés dans le présent rapport spécial.
Le rapporteur spécial sera ainsi attentif, à court terme, à ce que les crédits de la mission soient augmentés au cours de l’examen du projet de loi de finances et, à plus long terme, que les différentes directions du ministère revoient la façon dont les politiques publiques sont conduites et évaluées dans un souci de bonne gestion de l’argent public.
Le programme 166 représente 36,7 % des crédits de la mission et finance les moyens alloués aux juridictions de l’ordre judiciaire. La hausse régulière de leurs moyens a conduit à ce que la cible fixée pour 2024 pour l’indicateur 1.1 – Proportion d’affaires civiles terminées en moins de douze mois sur les douze derniers mois en première instance ait été atteinte dès 2023 (83,5 % contre 83 %).
En 2025, les crédits du programme 166 s’élèveraient à 4,58 milliards d’euros en AE et 4,57 milliards d’euros en CP. Les AE diminueraient de 3,56 % (169,3 millions d’euros) et les CP augmenteraient de 0,51 % (23 millions d’euros) par rapport à 2024.
Évolution des crÉdits du programme 166 Justice Judiciaire
(en millions d’euros)
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AE |
CP |
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LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
|
01 – Traitement et jugement des contentieux civils |
1 289,8 |
1 332 |
3,27 % |
1 289,8 |
1 332 |
+ 3,27 % |
02 – Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales |
1 528,3 |
1 593 |
4,23 % |
1 528,3 |
1 593 |
+ 4,23 % |
03 – Cassation |
78,6 |
79,1 |
0,64 % |
78,6 |
79,1 |
+ 0,64 % |
05 – Enregistrement des décisions judiciaires |
13 |
12,6 |
– 3,08 % |
13 |
12,6 |
– 3,08 % |
06 – Soutien |
1 632,0 |
1 343,8 |
– 17,66 % |
1 422,1 |
1 326,3 |
– 6,74 % |
07 – Formation |
196,3 |
209,9 |
6,93 % |
196,3 |
209,9 |
+ 6,93 % |
08 – Support à l’accès au droit et à la justice |
15,9 |
14,2 |
– 10,69 % |
15,9 |
14,2 |
– 10,69 % |
Total |
4 753,9 |
4 584,6 |
– 3,56 % |
4 544 |
4 567,1 |
0,51 % |
Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.
A. des DÉpenses de personnel toujours en progression
Les dépenses de titre 2 du programme s’élèveraient en 2025 à 3,03 milliards d’euros, soit deux tiers des crédits du programme, et progresseraient de 47 millions d’euros par rapport aux crédits ouverts en loi de finances pour 2024, pour un plafond d’emplois fixé à 37 982 ETPT.
Hors Pensions, les dépenses de personnel s’établiraient à 2,2 milliards d’euros, stables par rapport à 2024.
Le schéma d’emplois du programme 166 serait positif pour l’année 2025. La hausse des crédits du programme 166 financerait en effet la création de 270 emplois supplémentaires en 2024, répartis de la manière suivante :
– 125 emplois de magistrats de l’ordre judiciaire ;
– 145 métiers du greffe et du commandement.
Interrogée sur le fait de savoir comment seraient répartis ces emplois en 2025, la direction des services judiciaires n’a pas été en mesure de répondre.
Au-delà de l’année 2025, selon le rapport annexé à la LOPJ, il était prévu que la répartition des emplois nouveaux de magistrat s’appuie sur un référentiel d’évaluation de la charge de travail. Ce travail, entamé depuis des années ([15]) afin d’obtenir une vision objective des besoins des juridictions ne cesse de s’éterniser. Le groupe chargé d’évaluer la charge de travail des magistrats a achevé l’élaboration des référentiels cet été mais la Chancellerie a annoncé que ces nouveaux outils n’étaient pas opérationnels et nécessitaient d’être encore travaillés. Le rapporteur spécial s’alarme de ce nouveau retard au sujet d’une évolution qui devrait permettre de procéder à une allocation fine et objective des moyens nouveaux octroyés à l’institution judiciaire. Ce retard est d’autant plus critiquable que les alertes sur le sujet furent nombreuses et qu’il existe de nombreux exemples étrangers desquels s’inspirer. Ainsi, dans une note ([16]) publiée en 2021, la Cour des comptes relevait que « l’adoption d’un référentiel d’allocation des ressources est indispensable » et soulignait que de tels systèmes existent dans d’autres pays ou encore que « la CEPEJ a adopté un système de pondération des affaires judiciaires, susceptible de servir de modèle. » Le rapporteur spécial appelle donc la direction des services judiciaires à valider et recourir au plus vite à un tel référentiel.
La poursuite des recrutements et la bonne allocation des ressources sont indispensables pour réduire le taux de vacances des magistrats qui, s’il continue de diminuer, n’est toujours pas repassé sous la barre de 1 %. En particulier, le taux de vacances s’élève à 3,17 % pour les magistrats du parquet.
magistrats en exercice en juridiction et taux de vacance
au 2 septembre 2024
|
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
Nombre de magistrats exerçant au siège |
6 084 |
6 182 |
6 220 |
6 504 |
6 528 |
Taux de vacance des postes du siège |
0 % |
0,18 % |
2,74 % |
1,92 % |
1,66 % |
Nombre de magistrats exerçant au parquet |
2 097 |
2 117 |
2 112 |
2 176 |
2 232 |
Taux de vacance des postes du parquet |
0,47 % |
1,72 % |
5,76 % |
5,53 % |
3,17 % |
Nombre total de magistrats exerçant en juridictions |
8 181 |
8 299 |
8 332 |
8 680 |
8 760 |
Taux de vacance global |
0,10 % |
0,58 % |
3,52 % |
2,86 % |
2,05 % |
Source : direction des services judiciaires, réponse au questionnaire budgétaire.
1,5 million d’euros seraient consacrés à des mesures catégorielles mais qui ne relèvent que de l’extension en année pleine de mesures engagées en 2024 (plan de requalification de personnel administratif faisait fonction de greffiers et plan de requalification de personnel administratif permettant l’accès à la catégorie B aux agents de catégorie C). Ces mesures ont été adoptées à la suite du mouvement des greffiers intervenu l’année dernière au cours duquel ils ont mené plusieurs actions afin de sensibiliser les citoyens sur leur métier et leurs conditions de travail. Ce mouvement avait notamment conduit à bloquer le passage en comparution immédiate de certains émeutiers de juin 2023. À ce titre, la création de 145 emplois de greffe doit être saluée.
B. Hors personnel, des moyens de fonctionnement stables et unE nette chute des crédits d’investissement
Les crédits hors personnel du programme 166 s’élèveraient à 1,55 milliard d’euros en AE et 1,53 milliard d’euros en CP en 2025. Ces crédits seraient en nette diminution (un peu plus de 200 millions d’euros en moins) en AE et seraient stables en CP par rapport à 2024.
Toutefois cette stabilité en CP masque certaines évolutions. Les crédits pour les frais de justice augmenteraient en effet de 68 millions d’euros ce qui signifie que les autres dépenses seraient plus ou moins réduites d’autant pour arriver à ce niveau de crédits de paiement.
1. Des frais de justice encore (trop) dynamiques
Les crédits demandés sur les frais de justice s’élèvent à 742,30 millions d’euros en AE et CP en 2025, soit près de la moitié des dépenses hors titre deux du programme. Ils seraient ainsi en augmentation de 68,4 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2024, soit une hausse de 10 %. Cette hausse des crédits de frais de justice s’explique certes par celle de l’activité contentieuse, elle la dépasse toutefois largement. Elle s’inscrirait surtout dans une longue série d’augmentations des crédits alloués aux frais de justice comme en témoigne le graphique ci-dessous. Par ailleurs, en 2023, les CP exécutés en faveur des dépenses de frais de justice ont augmenté de 10,4 % par rapport à 2022, pour un total de 715,9 millions d’euros, un montant bien supérieur à celui projeté.
Enveloppe allouée aux frais de justice au sein du projet de loi de finances
(en millions d’euros)
Source : commission des finances.
Depuis 2022, la direction des services judiciaires poursuit un plan d’actions afin de maîtriser au mieux cette augmentation. En 2024, le plan d’actions est devenu interdirectionnel afin d’impliquer d’autres directions concernées, telles que la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG), la direction des affaires civiles et du sceau (DACS), l’Agence nationale des techniques d’enquêtes numériques judiciaires (ANTENJ), ainsi que le ministère de l’intérieur (DGPN et DGGN), qui est un prescripteur important en matière de frais de justice. Ce plan s’articule alors autour de quatre segments de frais de justice représentant plus de 50 % de la dépense : analyses et expertises médicales, interprétariat-traduction, interceptions judiciaires et gardiennage de véhicules.
Si le rapporteur spécial a bien conscience du caractère intrinsèquement imprévisible des frais de justice et de la difficulté à les maîtriser dès lors que la dépense suit les actes de prescription des magistrats et officiers de police judiciaire, dont l’indépendance et la liberté de prescription doivent être préservées, il appelle toutefois à poursuivre les efforts engagés. Comme le reconnaît la direction des services judiciaires dans les réponses au questionnaire budgétaire, « la maîtrise des frais de justice demeure un enjeu stratégique du ministère, et s’inscrit dans une logique de responsabilisation collective par l’ensemble des acteurs concernés par la chaîne de la dépense, de l’amont jusqu’à l’aval. » Le rapporteur spécial partage ce constat et suggère notamment que les nouveaux magistrats soient davantage sensibilisés à la question. Il s’est en effet rendu compte pendant les auditions qu’aujourd’hui les magistrats effectuaient seulement un travail d’analyse a priori des dépenses engagées.
2. Des moyens de fonctionnement stables en AE comme en CP
Hors frais de justice, les crédits de fonctionnement inscrits sur le programme 166 s’élèveraient à 633 millions d’euros en AE et 518 millions d’euros en CP, en tout point stables par rapport à 2023. L’augmentation des dépenses de fonctionnement du programme est donc exclusivement tirée par l’augmentation des crédits alloués aux frais de justice. Le rapporteur spécial tient à saluer cet effort qui revient à diminuer les dépenses de fonctionnement hors frais de justice une fois l’inflation prise en compte.
● Les dépenses de fonctionnement courant ouvertes en 2025 (211,9 millions d’euros en AE comme en CP), principalement inscrites sur l’action 6 Soutien du programme 166, diminueraient de 10 millions d’euros.
● Les dépenses afférentes à l’immobilier occupant s’élèveraient à 371,2 millions d’euros en AE et 257 millions d’euros en CP. La hausse des crédits de paiement (248,8 millions d’euros en LFI 2024) doit permettre d’accompagner les évolutions d’effectifs et leur impact sur l’immobilier judiciaire.
● S’agissant enfin de l’École nationale de la magistrature, opérateur rattaché au programme 166, le projet de loi de finances pour 2025 prévoit de porter la subvention pour charges de service public (SCSP) versée à 49 millions d’euros (+ 3 millions d’euros) pour accompagner l’augmentation du nombre d’auditeurs de justice. L’ENM a en effet accueilli cette année sa plus nombreuse promotion avec 460 auditeurs.
3. Les crédits d’investissement immobilier du programme.
La dotation prévue en 2025 au titre des dépenses d’investissement immobilier des services judiciaires s’élèverait à 171,89 millions d’euros en AE et 268,6 millions d’euros en CP, en très nette baisse dans les deux cas par rapport à 2024 (respectivement – 62,3 % et – 25 %).
Dans le détail :
● 127,08 millions d’euros en AE et 119,84 millions d’euros en CP relèveraient des opérations menées par les services déconcentrés : celles-ci concerneraient notamment les opérations de mise en accessibilité et de rénovation des bâtiments des juridictions au regard de la sécurité des personnes ;
● 14 millions d’euros en AE et 95,84 millions d’euros en CP financeraient les opérations de construction confiées à l’Agence publique pour l’immobilier de la justice (APIJ) ;
● Enfin, 30,8 millions d’euros en AE et 52,9 millions d’euros en CP sont alloués au paiement des loyers des contrats de partenariat conclus par le ministère de la justice, montants équivalents à ceux proposés l’an passé.
III. Le programme 107 : une augmentation significative des crédits pour l’Administration pÉnitentiaire
Le programme 107 Administration pénitentiaire représente 42 % des crédits de la mission Justice. Ses crédits sont composés à plus de 63 % de dépenses de personnel. Les dépenses d’investissement du programme (622 millions d’euros en 2025) sont principalement allouées à la mise en œuvre du plan « prisons ».
A. une hausse des crédits du programme 107 tirée par l’augmentation des dépenses de personnel
Le programme 107 serait doté de 4,74 milliards d’euros en AE et 5,24 milliards d’euros en CP en 2024. Ces crédits seraient respectivement en baisse de 30,4 % et en hausse de 4,8 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances pour 2024.
Évolution des crÉdits du programme 107 Administration pÉnitentiaire
(en millions d’euros)
|
AE |
CP |
||||
|
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
01 – Garde et contrôle des personnes placées sous main de justice |
3 659,1 |
3 447,2 |
– 5,79 % |
3 439,4 |
3 645,4 |
5,99 % |
02 – Accueil et accompagnement des personnes placées sous main de justice |
2 720,4 |
853,6 |
– 68,62 % |
1 129,1 |
1 158,2 |
2,58 % |
04 – Soutien et formation |
434,5 |
438,8 |
0,99 % |
434,5 |
438,8 |
0,99 % |
Total |
6 814 |
4 739,6 |
– 30,44 % |
5 003 |
5 242,4 |
4,79 % |
Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.
La baisse du montant des AE demandées pour 2025 s’explique par la vive hausse constatée en 2024 (+ 25 %) en raison de l’engagement de 1,5 milliard d’euros pour la passation des marchés de gestion déléguée des prisons dits MGD 2024 (2025-2031). Elle se justifie également par la forte baisse des dépenses immobilières en 2025, qui était anticipée dès le projet annuel de performance pour 2024 qui prévoyait – 79 % en autorisations d’engagement sur cette ligne budgétaire.
Les marchés de gestion déléguée
Les fonctions déléguées, dans le cadre de marchés publics « multi-techniques et multi-services », sont les fonctions d’intendance et de logistique, telles que la restauration (préparation et distribution des repas, respect de la sécurité alimentaire et de l’application des normes d’hygiène), l’hôtellerie, la cantine (possibilité offerte aux personnes détenues d’acheter des denrées, objets ou prestations de service sur la part disponible de leur compte nominatif), le transport, ou encore l’accueil des familles.
Les gestionnaires délégués assurent aujourd’hui le fonctionnement courant de 80 établissements pénitentiaires. Ils représentent à eux seuls plus de 70 % des places de détention (y compris gestion déléguée partielle).
La durée des marchés est fixée à sept ans. Quatre générations de contrats se sont succédées depuis 1989. Les actuels MGD sont progressivement remplacés par la cinquième génération de MGD.
Comme expliqué précédemment, le rapporteur spécial a constaté au cours de ses auditions qu’entre deux et trois acteurs se partageaient ces marchés. Ceci est incompréhensible pour le rapporteur spécial étant donné les montants en jeu. Cette situation place, en effet, les entreprises dans une situation d’oligopole – voire dans certaines régions, de duopole. Le rapporteur spécial a ainsi été très fortement surpris d’entendre la DAP se satisfaire d’une augmentation de 30 % du coût des marchés d’une génération à l’autre. Même si elle n’est pas responsable de l’environnement économique, il est impératif que la direction de l’administration pénitentiaire se tourne vers un plus grand nombre d’acteurs avec qui conclure ces marchés, en faisant pleinement jouer la concurrence.
En 2025, les crédits demandés au titre 2 s’élèvent à 3,35 milliards d’euros en AE et CP, soit une augmentation de 122,2 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Hors CAS Pensions et hors mesures de transfert, les crédits de titre 2 du programme 107 représentent 2,2 milliards d’euros.
Cette hausse s’explique en partie par le schéma d’emplois de la direction de l’administration pénitentiaire, qui prévoit la création de 349 postes par rapport à 2024.
Ce volume se décompose comme suit :
– 305 personnels de surveillance pour permettre l’ouverture de nouveaux établissements pénitentiaires ;
– 2 personnels de catégorie B administratifs et techniques ;
– 21 personnels de catégorie C administratifs et techniques ;
– 4 personnels de catégorie A relevant des métiers du social, de l’insertion et de l’éducatif ;
– 17 emplois d’encadrement.
Les créations de postes concerneraient donc au premier chef les effectifs de la filière de surveillance affectée en établissements, dont le plafond d’emplois s’élève à 35 065,39 ETPT pour 2025, soit les trois-quarts du plafond d’emplois du programme. Le plafond d’emplois du programme s’établirait en effet à 45 244,86 ETPT, en hausse de 374,61 ETPT par rapport à 2024.
Le rapporteur spécial considère que ces créations d’emplois sont nécessaires, mais elles n’auront de conséquences que si le schéma d’emplois des personnels de surveillance, régulièrement sous-exécuté([17]), est effectivement mis en œuvre. À ce titre, le directeur de l’administration pénitentiaire a déclaré qu’il était parvenu à réaliser en 2024 les recrutements prévus et qu’il n’avait aucune inquiétude pour 2025, ce dont le rapporteur spécial se réjouit. Le directeur de l’administration pénitentiaire voit dans cette hausse de l’attractivité une conséquence directe de la réforme statutaire de la filière de surveillance, annoncée par le Garde des Sceaux et le ministre de la transformation et de la fonction publiques le 21 février 2023 à l’École nationale d’administration pénitentiaire (ENAP) et entrée vigueur depuis le 1er janvier 2024.
Ainsi, sur les 26,7 millions d’euros prévus pour des mesures catégorielles en 2025, 24,4 millions d’euros relèvent directement de la poursuite de la réforme de la filière de surveillance (24,4 millions d’euros), notamment :
– Pour le corps d’encadrement et d’application : une nouvelle revalorisation de l’indemnité pour charges pénitentiaires versée aux membres du corps d’encadrement et d’application (passage de 2 524 € à 3 179 €) et la poursuite de la mise en œuvre du plan de repyramidage du poste ;
– Pour les officiers : une nouvelle revalorisation de l’indemnité de fonction et d’objectifs ainsi que le financement des avancements prévus.
Réformes des métiers de l’administration pénitentiaire
Depuis le 1er janvier 2024, les métiers de l’administration pénitentiaire bénéficient de plusieurs réformes au niveau statutaire, indiciaire et indemnitaire, dont l’objectif premier est de renforcer leur attractivité face à l’augmentation significative du nombre de détenus et à l’élargissement de leurs missions.
Ainsi, au niveau statutaire, depuis le 1er janvier 2024, le corps d’encadrement et d’application (ex : surveillants) est devenu un corps de catégorie B, le corps de commandement (ex : lieutenants) un corps de catégorie A et les directeurs des services pénitentiaires sont désormais des fonctionnaires de catégorie A+.
Au niveau indemnitaire, l’indemnité pour charges pénitentiaires (ICP) doit doubler en trois ans, pour passer de 1869 euros par an en 2023 à 3 835 euros en 2026 ([18]). Le complément forfaitaire à l’ICP est revalorisé en parallèle pour doubler lui aussi : depuis le 1er janvier 2024, il est ainsi passé de 300 à 600 euros ([19]).
Enfin, les personnels de surveillance ont également bénéficié de plusieurs revalorisations indiciaires, qu’il s’agisse, selon les cas, d’une augmentation du nombre de points d’indice ou d’une progression de carrière accélérée par exemple.
Si le rapporteur spécial salue ces mesures plus que bienvenues, il tient à alerter sur le taux de vacance des postes de surveillants qui s’élève aujourd’hui à 10 %, ce qui représente environ 3 000 ETP. C’est l’un des points sur lesquels le directeur de l’administration pénitentiaire a le plus cherché à alerter le rapporteur spécial, qui veut se faire ici le relais de ce besoin en renforts humains. Il est ainsi impératif de poursuivre les recrutements. À ce titre, le schéma d’emplois prévu par le présent projet n’est pas satisfaisant.
B. Hors personnel, les dépenses marquent le pas, laissant craindre un report des objectifs du plan 15 000
Les crédits demandés hors titre 2 du programme s’élèvent à 1,39 milliard d’euros en AE (en chute de 61 % par rapport à 2024) ([20]) et 1,89 milliard d’euros en CP (+ 6,2 % par rapport à 2022).
Ces crédits sont destinés notamment au financement du fonctionnement des établissements, à des actions de réinsertion et de probation ainsi qu’à la poursuite de la programmation immobilière. Les dépenses d’investissement du programme sont principalement allouées à la poursuite du plan « prisons », en retard sur ses objectifs.
1. Le plan « prisons » : 18 000 places de détention d’ici à 2027
Les dotations immobilières de l’administration pénitentiaire s’élèveraient à 405,5 millions d’euros en AE, en baisse de 22,7 % par rapport à la loi de finances pour 2024, et 556,3 millions d’euros en CP, en très légère diminution.
Ces crédits en sont principalement alloués à la mise en œuvre du plan « prisons », dans le cadre duquel est prévue la création « socle » de 15 000 places de détention à horizon 2027. Dans le cadre de la discussion du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023‑2027, le Gouvernement a accédé à la proposition du groupe Les Républicains d’augmenter ce programme pénitentiaire de 3 000 places supplémentaires, portant ainsi l’objectif d’ici 2027 d’un parc pénitentiaire opérationnel de 78 000 places.
Ce plan, dont l’objectif est de limiter la surpopulation carcérale et d’atteindre un taux d’encellulement individuel de 80 %, se décompose donc désormais en trois tranches :
– la construction de 7 000 premières places, qui devait intervenir au plus tard en 2022 ;
– celle des 8 000 places restantes entre 2022 et 2027 ;
– les 3 000 places ajoutées à l’objectif initial grâce au débat parlementaire, qui s’inscrivent elles aussi dans l’horizon temporel du quinquennat mais qui ne semblent pas pour l’heure avoir fait l’objet d’un début de programmation opérationnelle puisque le gouvernement continue de parler du plan « 15 000 ».
Ce plan s’inscrit dans une lignée continue de programmes lancés depuis la fin des années 80.
La succession des programmes de construction depuis 35 ans
– en 1988, le programme « 3 000 » ;
– en 1995, le programme « 4 000 » (achevé fin 2004) ;
– en 2002, le programme « 13 200 » avec l’introduction de partenariats public-privé (révisé depuis et achevé en 2017) ;
– en 2004, le dispositif d’accroissement des capacités de près de 3 000 places ;
– en 2011, le « nouveau programme immobilier » de 7 500 places qui prévoit d’atteindre un parc pénitentiaire de plus de 70 000 places en 2018, revu en 2012 à environ 63 500 places d’ici 2022 ;
– en 2014, le programme « 3 200 » dont la livraison est prévue en 2023 ;
– en 2017, le « plan 15 000 », devenu 18 000 en 2023, dont l’achèvement est prévu en 2027.
À noter que les dépenses immobilières diminuent depuis 2023. Même si elles devraient progresser à nouveau en 2026, il est difficile d’imaginer que des sommes engagées en 2026 pourraient toutes se traduire en des places de prisons dès 2027, date initiale de réalisation du plan. Ceci est d’autant plus inimaginable face à l’état d’avancement du plan.
La construction de ces places s’avère pourtant nécessaire alors que la surpopulation carcérale ne cesse de s’accroître. Le taux d’occupation des établissements est ainsi passé de 112,5 % en 2021, à 126,9 % en 2024. Comme s’en émeut la Défenseure des droits dans une communication ([21]) à l’attention des pouvoirs publics rendue publique le 7 octobre, « il n’y a jamais eu autant de personnes en prison. » Et la Défenseure des droits de citer plusieurs conséquences de cet accroissement du nombre de détenus sans places de prison qui évoluent au même rythme : « Le 1er octobre 2024, 3 810 personnes détenues dormaient sur un matelas au sol, soit une augmentation de 53,6 % par rapport à l’année précédente. Ces chiffres, en constante augmentation, poussent la surpopulation à des niveaux extrêmement préoccupants. La densité carcérale, actuellement de 127,9 %, atteint régulièrement plus de 150 %, voire 200 % dans certains établissements pénitentiaires. » Le rapporteur spécial rappelle pourtant que les conditions de détention ont des conséquences directes sur la trajectoire des détenus après leur passage en prison, et qu’améliorer ces conditions permet notamment de faire chuter la récidive.
Évolution du nombre de détenus en France (2020 – 2024)
Source : commission des finances, d’après les données de la direction de l’administration pénitentiaire.
En tout état de cause, le rapporteur spécial souhaite que la construction de ces places supplémentaires intervienne rapidement afin de lutter contre la surpopulation carcérale, améliorer les conditions de détention des détenus et les conditions de travail des agents et mettre en œuvre une politique pénale efficace.
2. Des mesures supplémentaires pour assurer la sécurité des établissements pénitentiaires et des personnels de surveillance
En parallèle de la construction de places de prisons, 116,5 millions d’euros en AE et 104,2 millions d’euros en CP seraient alloués à la maintenance et la sécurisation des établissements en gestion publique.
En particulier, à la suite des évènements tragiques survenus au péage d’Incarville en 2024, une attention particulière a été portée à la sécurité des agents pénitentiaires, notamment ceux exerçant des fonctions d’extraction judiciaire ; un protocole d’accord a été signé à l’été 2024 entre le précédent Garde des Sceaux et les syndicats représentatifs pour renforcer les moyens mis à disposition des services. Ce protocole comporte diverses mesures relatives à la sécurisation des véhicules, l’armement ou encore la sécurisation des locaux d’accès ou d’attente des juridictions et des établissements de santé. Une partie des crédits inclus dans le projet de loi de finances pour 2025 a vocation à financer ces engagements.
Le rapporteur spécial veut exprimer à cette occasion son plein soutien aux personnels de surveillance de l’administration pénitentiaire dans la difficile mission qu’ils exercent. Au-delà du terrible drame d’Incarville, il a pleinement conscience qu’ils sont confrontés constamment à tous types de violence ([22]).
Un protocole d’accord pour renforcer la sécurité des agents pénitentiaires
Le 14 mai 2024, l’attaque d’un convoi pénitentiaire dans l’Eure a entraîné la mort de deux agents pénitentiaires ainsi que trois blessés graves. Pour améliorer la sécurité des personnels de surveillance et face aux besoins exprimés par la profession, un protocole d’accord a été signé le 13 juin 2024 entre le ministère de la Justice et les syndicats pénitentiaires
Cet accord prévoit un investissement de 160 millions d’euros entre 2024 et 2027, dont 34 millions pour l’année 2024 et 75,8 millions pour 2025, qui vise à financer la sécurisation des véhicules, l’acquisition d’armement et d’autres matériels pour améliorer la protection des agents pénitentiaires. Il repose sur deux axes principaux.
De nouvelles mesures matérielles pour la protection des agents pénitentiaires
Le protocole inclut plusieurs mesures pour accroître la sécurité et l’efficacité de l’équipement des agents. Ces mesures ont notamment trait à la sécurisation des véhicules, au renforcement de l’armement, à l’augmentation du nombre de brouilleurs ou de dispositifs anti-drones. Le protocole prévoit ainsi l’acquisition de gilets pare-balles lourds, armes longues et d’épaules, armes automatiques et des holsters adaptés à la position assise en voiture.
Des aménagements visant à limiter et mieux encadrer l’extraction judiciaire
Le protocole inclut également des mesures pour limiter les extractions judiciaires de détenus considérés dangereux et mieux encadrer leur déroulement.
Il prévoit le développement de la visioconférence et le déplacement des magistrats au sein des établissements pénitentiaires pour certaines présentations et audiences. La faisabilité de cette réforme dépend toutefois d’une modification législative et se heurte à la forte opposition des syndicats de magistrats qui soulignent des difficultés organisationnelles pour gérer les audiences de détenus incarcérés dans des établissements différents ainsi qu’un allongement des délais en conséquence.
Une circulaire ([23]) du 24 juin 2024 complémentaire au protocole prévoit un recours exceptionnel aux forces de sécurité intérieure (FSI) lorsque l’administration pénitentiaire ne peut exécuter les réquisitions d’extraction judiciaire. Elle précise également que les FSI peuvent renforcer les escortes pénitentiaires lors des transferts de détenus particulièrement signalés ou présentant un risque élevé pour l’ordre public.
Dans le détail, les crédits relatifs à la sécurisation et à la maintenance des sites seraient répartis comme suit :
– Les dépenses de sécurisation active s’élèveraient à 28,9 millions d’euros en AE et en CP. Ces dépenses comprennent notamment l’achat d’équipements de sécurisation des entrées et sorties des personnes ainsi que de véhicules, d’armes, de munitions, de gilets pare-balles, etc. ;
– L’enveloppe finançant les dépenses de sécurisation passive s’élèverait à 40,3 millions d’euros en AE et à 38,3 millions d’euros en CP. Cette enveloppe concerne principalement les dispositifs de brouillage d’ondes téléphoniques mais également, de plus en plus, de drones ([24]), la vidéosurveillance et les systèmes de sécurité informatique ;
– Enfin, les dépenses de maintenance, relatives aux seuls établissements en gestion publique, atteindraient 47,3 millions d’euros en AE et 37 millions d’euros en CP.
Le rapporteur spécial souligne son attachement à ses dépenses qui sont absolument essentielles pour assurer la sécurité des personnels.
3. Les crédits alloués à l’aménagement des peines
L’aménagement de peine peut revêtir plusieurs formes, qu’il s’agisse d’une semi-liberté, d’un placement extérieur ou d’un placement sous surveillance électronique. 16 984 personnes faisaient l’objet d’un tel placement au 1er août 2024. Le pourcentage de personnes condamnées bénéficiant d’un taux d’aménagement de peine s’élevait ainsi à cette date à 27,6 %. Ce taux est en augmentation par rapport à 2023, de 1,2 point de pourcentage.
Les moyens budgétaires mobilisés au bénéfice de ces dispositifs seraient stables en 2025, et s’établiraient à 52 millions d’euros. Ces crédits auraient vocation à financer :
– les mesures liées à la surveillance électronique ([25]) à hauteur de 27,6 millions d’euros ;
– les bracelets anti-rapprochement ([26]), à hauteur de 10,6 millions d’euros ;
– le placement à l’extérieur ([27]) à hauteur de 13,8 millions d’euros.
4. La prévention de la récidive et la réinsertion des personnes placées sous-main de justice
L’administration pénitentiaire alloue des moyens à l’insertion professionnelle des personnes placées sous main de justice, qu’il s’agisse de personnes réalisant leur peine en milieu fermé ou ouvert. L’Agence nationale du travail d’intérêt général et de l’insertion professionnelle des personnes placées sous-main de justice (ATIGIP), chargée de favoriser l’insertion professionnelle des détenus et le travail en prison, ainsi que les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) sont les acteurs principaux de cette politique publique.
Les crédits demandés pour 2025 connaîtraient une stabilité totale par rapport à 2024, à 112 millions d’euros en AE et 107 millions d’euros en CP.
Dans le détail, ces dépenses seraient réparties comme suit :
– Les dépenses visant à développer le travail d’intérêt général s’élèveraient à 51,1 millions d’euros en CP ;
– 20,5 millions d’euros seraient consacrés à des actions de formation professionnelle des personnes détenues visant à favoriser leur insertion professionnelle une fois leur peine terminée. En effet, les personnes placées sous main de justice présentent en moyenne, un niveau de formation et de qualification inférieur à celui de la population générale ;
– 1,4 million d’euros seraient destinés à couvrir les frais relatifs à l’enseignement, la rémunération des enseignants relevant du ministère de l’Éducation nationale ;
– 4 millions d’euros en AE et en CP seraient destinés au renforcement des prises en charges collectives en milieu ouvert ;
– Enfin, 19,8 millions d’euros seraient alloués à d’autres dépenses de réinsertion, dans les domaines sportif et culturel, par exemple.
IV. le programme 182 protection judiciaire de la jeunesse
Le programme 182 représenterait 9,2 % des crédits de la mission en 2025. Il finance les moyens affectés à la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ), qui assure, directement ou par les associations qu’elle habilite et finance, la prise en charge des mineurs et jeunes majeurs qui lui sont confiés par la justice, et qui contrôle l’ensemble des structures publiques et associatives accueillant les mineurs sous mandat judiciaire.
Au 1er juin 2024, la DPJJ disposait de 1 233 établissements et services :
– 232 en gestion directe relevant du secteur public ;
– 1001 habilités et contrôlés par le ministère de la justice et relevant du secteur associatif habilité (SAH).
A. des Dotations stables pour la protection judiciaire de la jeunesse
Le programme serait doté de 1,16 milliard d’euros en AE et 1,14 milliard d’euros en CP, soit une augmentation modérée par rapport à la loi de finances pour 2024 : les AE seraient en effet parfaitement stables tandis que les CP progresseraient de 1,33 %.
Hors CAS Pensions, les crédits s’élèveraient à 951 millions d’euros, stables par rapport à 2024.
Évolution des crÉdits du programme 182 PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
(en millions d’euros)
|
AE |
CP |
||||
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
|
01 – Mise en œuvre des décisions judiciaires |
979,5 |
977,6 |
– 0,19 % |
949 |
961,2 |
1,29 % |
03 – Soutien |
135,9 |
135,7 |
– 0,15 % |
131,5 |
133 |
1,14 % |
04 – Formation |
45,4 |
47,3 |
4,19 % |
45,5 |
46,8 |
2,86 % |
Total |
1 160,8 |
1 160,6 |
0 % |
1 126,0 |
1 141 |
1,33 % |
Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.
Les dépenses de personnel du programme s’élèveraient à 686 millions d’euros en 2025 soit 60 % des crédits du programme. Aucune création de poste n’est envisagée pour l’année 2025.
Les crédits hors dépenses de masse salariale seraient stables. Cette stabilité masque toutefois des disparités. Ainsi, les dépenses d’investissements augmenteraient de 4,9 millions d’euros en crédits de paiement (+ 14,8 %). Cette augmentation serait quasi-intégralement allouée à la poursuite du programme de construction de six nouveaux centres éducatifs fermés. À l’inverse, les crédits de paiement des dépenses d’intervention diminueraient de 8,5 millions d’euros.
En 2025, le coût d’une place par jour et par type de structure du secteur public serait le suivant : 606 euros en centre éducatif fermé (CEF), 489 euros en centre éducatif renforcé (CER) et 445 euros dans une unité éducative d’hébergement collectif (UEHC). Ce coût est en augmentation de 3 % pour les CEF et les CER et de 1,5 % pour les UEHC par rapport à 2025.
Le rapporteur spécial déplore, malgré la publication d’un rapport ([28]) particulièrement à charge par la Cour des comptes sur le sujet il y a tout juste un an, qu’il n’existe toujours pas de réelle évaluation des centres éducatifs fermés. En effet, le projet annuel de performance du programme 182 se borne à indiquer que « la PJJ a mené des chantiers de grande ampleur pour interroger la pertinence de ses dispositifs et proposer des adaptations. Des plans d’action structurants visant à faire évoluer son offre et ses dispositifs seront conduits jusqu’en 2027 » ([29]), ce qui est flou. Interrogée en audition sur l’évaluation de la récidive à la sortie des différents types de structures, la directrice de la protection judiciaire de la jeunesse a notamment indiqué que la PJJ ne suivait, par définition, plus les jeunes une fois leur prise en charge terminée et que, faute d’un partage d’informations efficace avec les services judiciaires sur d’éventuelles condamnations futures des publics qu’elle a accueillis, disposer d’une telle évaluation lui était impossible. La directrice de la PJJ a notamment mis en cause les systèmes d’information des différentes directions métiers, qui ne sont pas connectés entre eux. Le rapporteur spécial affirme par conséquent ici l’absolue nécessité de mener à bon terme le second plan de transformation numérique du ministère.
En outre, le rapporteur spécial ne comprend pas que le ministère continue à construire des centres éducatifs fermés alors que leur taux d’occupation est particulièrement bas. Les services de la PJJ lui ont ainsi indiqué que le taux moyen d’occupation des CEF était de 73,3 %. Certes, il est important que le territoire bénéficie d’un maillage le plus équilibré possible et le plan présenté en 2018 prévoyait la création de vingt CEF. Toutefois les objectifs mis en avant il y a plusieurs années peuvent toujours être actualisés en fonction des besoins et ce d’autant plus, le rapporteur spécial le rappelle, que l’efficacité de ces structures n’est aujourd’hui pas suffisamment évaluée.
B. Des consÉquences de la rÉFORME du code de justice pÉnale des mineurs qUI INTERROGENT
Le code de la justice pénale des mineurs (CJPM) est entré en vigueur le 30 septembre 2021, date à laquelle a été abrogée l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante. Une des ambitions majeures de cette réforme était d’accélérer les procédures pour prendre en compte l’évolution rapide des mineurs. En effet, pré-réforme, la procédure ne comportait pas de délai et le jugement d’examen de la culpabilité était rendu en 18 mois en moyenne.
La procédure pénale concernant les mineurs comporte trois étapes. Le jugement se fait en deux temps (audiences sur la culpabilité du mineur puis sur la sanction), entrecoupés d’une période de mise à l’épreuve. La réforme a ainsi instauré des délais limités pour accélérer cette procédure : l’audience d’examen de la culpabilité ne peut intervenir plus de trois mois après la saisine de la juridiction tandis que la période de mise à l’épreuve éducative ne peut durer plus de neuf mois après la déclaration de culpabilité. La procédure est donc raccourcie. Or, les éducateurs ont fait valoir que cette période de mise à l’épreuve raccourcie conduisait à accroître leur charge de travail – ils doivent rédiger des rapports en vue de l’audience de prononcé de la sanction –, et ce alors même que les documents exigés sont désormais réduits. Ils demandent sur cette base des moyens supplémentaires.
Le rapporteur spécial s’étonne de cette revendication : si la période de mise à l’épreuve éducative avait été allongée, il estime en effet que les éducateurs auraient également demandé des renforts parce qu’ils auraient été conduits à passer plus de temps auprès de chaque mineur. Le rapporteur spécial a fait part de cette incohérence à la directrice de la PJJ qui lui a indiqué qu’une étude allait être conduite sur le terrain pour analyser les conséquences de la réforme sur la charge de travail des éducateurs. Le rapporteur spécial sera attentif aux conclusions de cette étude.
V. le programme 101 AccÈs au droit et À la justice : un périmetre élargi
6,4 % des crédits de la mission sont inscrits sur le programme 101 Accès au droit et à la justice. Celui-ci finance principalement les dépenses d’intervention au profit des justiciables bénéficiant de l’aide juridictionnelle, dépense emblématique du ministère.
Les crédits du programme 101 s’élèveraient à 798,1 millions d’euros en 2025 et progresseraient de 8,4 % par rapport à 2024. Toutefois, cette forte augmentation n’est que la conséquence d’une mesure de périmètre : en effet, le financement du Fonds de financement des dossiers impécunieux (FFDI) est, à partir de 2025, pris en charge sur les crédits budgétaires du programme 101. Une fois cette mesure prise en compte, l’augmentation des crédits du programme n’est que de l’ordre de 1 %.
Évolution des crÉdits du programme 101 AccÈs au droit et À la justice
(en millions d’euros)
|
AE |
CP |
||||
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
LFI 2024 |
PLF 2025 |
Évolution 2024-2025 |
|
01 – Aide juridictionnelle |
658,5 |
661 |
0,38 % |
658,5 |
661 |
0,38 % |
02 – Développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité |
16,1 |
14,5 |
– 9,94 % |
16,1 |
14,5 |
– 9,94 % |
03 – Aide aux victimes |
46,5 |
51 |
9,68 % |
46,5 |
51 |
9,68 % |
04 – Médiation et espaces de rencontre |
15,1 |
14,2 |
– 5,96 % |
15,1 |
14,2 |
– 5,96 % |
05 – Indemnisation des avoués |
|
3,5 |
|
|
3,5 |
|
06 – Subvention au fonds de financement des dossiers impérieux |
|
54 |
|
|
54 |
|
Total |
736,2 |
798,2 |
8,42 % |
736,2 |
798,2 |
8,42 % |
Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.
A. des CRÉDITS ALLOUÉS À L’Aide juridictionnelle ENFIN MAÎTRISÉS
Fondée sur la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sur l’aide juridique, l’aide juridictionnelle doit permettre l’accès à la justice des personnes dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir ou garantir leurs droits en justice. Elle consiste en la prise en charge, par l’État, de tout ou partie des frais relatifs à un procès (rétribution d’un avocat ou d’un commissaire de justice, frais d’expertise, etc.) ou à une procédure pénale (rétribution d’un avocat intervenant lors d’une garde à vue, d’une audition libre, d’une présentation devant le procureur de la République, etc.).
Les crédits alloués à l’aide juridictionnelle représentent 83 % des crédits du programme et s’élèveraient à 661 millions d’euros en 2025, contre 658,5 millions d’euros en 2024. L’essentiel des crédits de l’aide juridictionnelle est destiné à rétribuer les avocats : ainsi, sur les 661 millions d’euros prévus en 2025, 615,4 millions d’euros seraient utilisés en ce sens.
Le rapporteur spécial tient particulièrement à souligner cette stabilisation alors que les crédits de l’aide juridictionnelle n’ont cessé d’augmenter ces dernières années. Ils ont ainsi presque doublé depuis 2017. Le rapporteur spécial sera attentif à ce que cette stabilisation se poursuive les prochaines années.
B. Les autres dÉpenses du programme
Outre l’aide juridictionnelle, le programme 101 finance principalement des dépenses d’intervention au profit des associations apportant une aide aux victimes d’infraction pénale, des conseils départementaux de l’accès au droit, des associations gérant un espace de rencontre entre parents et enfants de celles intervenant en matière de médiation familiale et donc, désormais, les dépenses d’intervention relevant du fonds de financement des dossiers impécunieux.
● Les crédits de l’action 02 – Développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité s’élèveraient à 14,5 millions d’euros, en diminution de 1,6 million d’euros par rapport à 2024. Ces crédits bénéficient aux 101 conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD) et aux quatre conseils de l’accès au droit (CAD) dans les communautés d’outre-mer, ainsi qu’aux 3 029 points-justice recensés au 31 décembre 2023. Le réseau de l’accès au droit est articulé avec le dispositif France services qui facilite l’accès de tous les usagers aux services publics : en juin 2024, 895 points-justice étaient implantés dans une des 2 700 France services labellisées. Le ministère de la justice contribue ainsi pour 2 millions d’euros au fonds national France services.
● L’enveloppe allouée à l’aide aux victimes s’élèverait à 51 millions d’euros et serait ainsi en augmentation de près de 10 % par rapport à 2024. Outre les subventions aux associations, cette enveloppe permet également de financer deux dispositifs nationaux : le numéro national d’appel « 116 006 », qui délivre une première écoute et une orientation personnalisée aux victimes et le dispositif de téléprotection des personnes en grave danger dit « TGD », dont bénéficient les victimes de violences conjugales ou de viols. La hausse du budget de l’aide aux victimes doit permettre de renforcer la protection des femmes victimes de violences, en permettant à un plus grand nombre de bénéficier de TGD et de l’accompagnement dédié. Il favorisera également le développement des dispositifs de soutien additionnels tels que les chiens d’assistance et la justice restaurative.
● S’agissant des crédits alloués à la résolution des conflits familiaux portés par l’action 04 – Médiation et espaces de rencontres, ils diminueraient d’un peu moins d’un million d’euros pour s’établir à 14,2 millions d’euros.
● L’État verserait en 2025 une subvention d’équilibre de 3,5 millions d’euros au fonds d’indemnisation des avoués (FIDA) dont la ressource financière, le timbre payé par les justiciables en cause d’appel, diminue progressivement. Une nouvelle action est créée en ce sens.
● Enfin, l’action 06, nouvellement créée également, retrace le financement du Fonds de financement des dossiers impécunieux à hauteur de 54 millions d’euros. En vertu de l’article L. 663-3 du code du commerce, le financement du FFDI était jusqu’alors assuré par l’affection d’une taxe. Le FFDI n’étant pas pourvu d’une personnalité morale, cette affectation spéciale contrevient aux prescriptions de l’article 2 de la loi organique relative aux lois de finances, qui s’imposent définitivement et pleinement à partir de 2025. Ainsi, à partir du 1er janvier 2025, le produit de la taxe instituée à l’article L. 663-3 du code du commerce sera versé au budget général et l’équilibre financier du FFDI sera assuré par des crédits budgétaires du programme 101.
VI. le programme 310 Conduite et pilotage de la politique de la justice, seul programme à voir ses crédits diminuer
Le programme 310, qui concentre les moyens de l’état-major, des directions législatives et des services d’intérêt commun du ministère, porte également les crédits du second plan de transformation numérique du ministère de la justice, dont il sera essentiellement question ici.
Les crédits du programme 310 s’élèveraient à 640,5 millions d’euros en AE et 704,6 millions d’euros en CP en 2025 et seraient respectivement en baisse de 16,6 % et 5,7 % par rapport à 2024, contribuant ainsi à un effort particulièrement marqué de baisse des dépenses. Le programme 310 serait en outre le seul de la mission à voir ses crédits diminuer.
Évolution des crÉdits du programme 310 conduite et pilotage de la justice
(en millions d’euros)
|
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||||
|
LF |
PLF |
Évolution 2024-2025 |
LF |
PLF |
Évolution 2024-2025 |
01 – État-major |
11,2 |
11,96 |
6,79 % |
11,2 |
11,96 |
6,79 % |
02 – Activité normative |
31,88 |
34,41 |
7,94 % |
31,88 |
34,41 |
7,94 % |
03 – Évaluation, contrôle, études et recherche |
25,44 |
25,09 |
– 1,38 % |
25,02 |
25,25 |
0,92 % |
04 – Gestion de l’administration centrale |
219,75 |
192,9 |
– 12,22 % |
222,82 |
214,2 |
– 3,87 % |
05 – Développement des techniques d’enquêtes numérique judiciaires |
38,98 |
36,63 |
– 6,03 % |
56,31 |
54,73 |
– 2,81 % |
09 – Action informatique ministérielle |
371,9 |
266,41 |
– 28,37 % |
330,72 |
290,93 |
– 12,03 % |
10 – Politiques RH transverses |
69,13 |
73,09 |
5,73 % |
69,14 |
73,09 |
5,71 % |
Total |
768,28 |
640,49 |
– 16,63 % |
747,09 |
704,57 |
0,77 % |
Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.
Les dépenses de personnel du programme 310 s’élèveraient à 247,7 millions d’euros, quasi stables par rapport à 2024. Toutefois, 65 % des dépenses du programme sont constitués de dépenses hors titre 2, pour 457 millions d’euros en 2025 en crédits de paiement, un montant en baisse de 45 millions d’euros par rapport à la programmation 2024. La baisse est encore plus marquée concernant les autorisations d’engagement puisque les dépenses hors personnel passeraient de 523 millions d’euros à 323 millions d’euros.
Cette baisse est inégalement répartie. En effet, si les crédits relatifs aux techniques d’enquêtes numériques judiciaires ou ceux consacrés aux politiques de ressources humaines transverses du ministère sont stables, voire en augmentation, ceux consacrés à l’informatique ministérielle, à l’immobilier ou au fonctionnement courant sont en nette diminution. La baisse est particulièrement marquée s’agissant de l’informatique ministérielle, de l’ordre de 32,8 % en AE et de 13,6 % en CP pour le HT2.
exÉcution du plan de transformation numÉrique
du ministÈre de la justice
(en millions d’euros)
|
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
||||||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
Prévisionnel |
84 |
66,2 |
118,6 |
98,4 |
86,3 |
106,6 |
90 |
109,9 |
193,7 |
148,3 |
190,5 |
146,6 |
Exécuté |
82,4 |
61,5 |
128,1 |
105,1 |
98,7 |
87,1 |
99 |
108,9 |
107 |
69,2 |
118,3 |
130,2 |
Source : réponses au questionnaire budgétaire.
Cette baisse des crédits, si elle assure le maintien en conditions opérationnelles du socle numérique et des applications informatiques existantes, est particulièrement dommageable car, selon le PAP, elle « nécessitera de faire évoluer certains des objectifs du plan de transformation numérique prévue par la loi d’orientation et de programmation pour la Justice 2023-2027 » ([30]). Autrement dit, les ambitions du PTN II seront revues à la baisse. Ceci est particulièrement problématique. Si le rapporteur spécial reconnaît que le premier plan de transition numérique a permis des améliorations substantielles en matière de connectivité au sein des tribunaux par exemple ou de fourniture d’équipements aux agents du ministère, il constate que de nombreux applicatifs métiers ne sont toujours pas à la hauteur des attentes des professionnels de la justice ni suffisamment interconnectés (voir IV. A supra). Ainsi, à nouveau, le PAP reconnaît que des travaux sont prévus en 2025 dans chaque domaine applicatif, dont de refonte des systèmes d’informations qui, dans certains cas, « sont trop anciens pour que les actions de maintien en conditions opérationnelles courantes permettent de les maintenir en fonctionnement de façon durable sans éviter des dysfonctionnements majeurs ». Et le PAP de citer Portalis, Prisme, ASTREA ou encore Genesis, autant d’applicatifs métiers au cœur de l’action des directions métiers.
À noter que le programme 310 porte aussi les crédits des trois opérateurs de la mission qui ne sont pas des écoles, à savoir :
– L’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) ;
– L’Agence publique pour l’immobilier de la Justice (APIJ) ;
– L’Institut des études et de la recherche sur le droit et la justice (IERDJ).
À eux trois, ces opérateurs bénéficient de 31,5 millions d’euros. Ce montant est en diminution de 200 000 euros par rapport à 2024, la diminution portant exclusivement sur l’IERDJ. Ces opérateurs emploieraient 238 personnes en 2025, autant qu’en 2024.
VII. Le programme 335 Conseil supÉrieur de la magistrature
Le programme 335 permet au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) d’exercer les missions que lui confient la Constitution et la loi organique du 2 février 1994 en matière de nomination, de discipline et de déontologie des magistrats.
Le programme, composé d’une unique action, serait doté de 4,8 millions d’euros en AE et de 5,9 millions d’euros en CP. Ces crédits seraient en hausse de 4,2 % s’agissant des AE et de 3,5 % s’agissant des CP en 2025.
Les dépenses de fonctionnement du programme resteraient stables. Seules les dépenses de personnel progresseraient, d’un peu moins de 200 000 euros et s’établiraient à 3,47 millions d’euros. Dans la mesure où les effectifs du CSM seraient stables en 2025, comme en 2024 (24 ETPT), cette hausse des dépenses serait essentiellement le fait du différentiel salarial entre le contractuel catégorie A « chef de projet » embauché fin 2024 en lieu et place d’un contractuel catégorie B « technicien informatique » tenu compte de l’ampleur des chantiers informatiques à mener en 2025, de la prise en compte du différentiel salarial à la suite du changement secrétaire général adjoint en 2024 et, enfin, du glissement vieillesse technicité.
*
* *
Au cours de sa réunion du 31 octobre 2024, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Justice.
La vidéo de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.
Le compte rendu est consultable en ligne.
Après avoir examiné les amendements de crédits et adopté 35 d’entre eux et contrairement à l’avis défavorable du rapporteur spécial, la commission a adopté les crédits de la mission Justice modifiés.
Puis elle a adopté un amendement portant article additionnel rattaché à la mission.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Les crédits du ministère de la justice dans la copie initiale du projet de loi de finances pour 2025 augmentent, mais moins vite que ce qui est prévu dans la loi du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice. Le Gouvernement a prévu de déposer lors de l’examen du texte en séance un amendement qui augmentera les crédits de la mission, mais dont le montant nous en est encore inconnu. Je déposerai donc des amendements pour assurer la conformité du budget de la justice avec la loi de programmation. En revanche, je donnerai un avis défavorable aux amendements proposant une augmentation supérieure.
La mission Justice comprend trois programmes métiers – Justice judiciaire, Administration pénitentiaire et Protection judiciaire de la jeunesse –, dont les crédits représentent 82 % du total de la mission, un programme support – Conduite et pilotage de la politique de la justice –, un programme Accès au droit et à la justice, dont 90 % des crédits sont consacrés à l’aide juridictionnelle, et un programme Conseil supérieur de la magistrature dont l’existence est prévue par les articles 64 et 65 de la Constitution.
La loi de programmation prévoit, hors compte d’affectation spéciale Pensions, une augmentation des crédits de 8,9 milliards en 2022 à 10,7 milliards d’euros en 2027, l’essentiel de l’effort devant se faire jusqu’en 2025, avec un ralentissement en 2026 et 2027. Les auditions ont montré que les gels, suspensions et annulations de crédits n’ont pas toujours été suivis d’effet et que des reports se feront sur l’année 2025. Il est d’autant plus important de maintenir les crédits tels qu’ils avaient été prévus.
Les augmentations de crédits par programme s’établissent de la façon suivante : 0,51 % pour le programme 166, Justice judiciaire, contre 10 % l’année dernière, avec 270 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires ; 4,79 % pour le programme 107, Administration pénitentiaire, avec 349 postes nouveaux ; 1,33 % pour le programme 182, Protection judiciaire de la jeunesse ; 8,41 % pour le programme 101, Accès au droit et à la justice – augmentation à relativiser car elle s’explique par une mesure de périmètre dû à la suppression d’une taxe affectée.
Le programme 310, Conduite et pilotage de la politique de la justice, voit sa dotation diminuer – de 16,63 % pour les autorisations d’engagement (AE) et de 5,69 % pour les crédits de paiement (CP). La majeure partie de cette baisse concerne le second plan de transition numérique du ministère. Les auditions ont pourtant montré l’étendue des progrès à réaliser. Ainsi, la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ne peut pas suivre le taux de récidive des jeunes après leur sortie des établissements.
Je voudrais enfin attirer votre attention sur la baisse des crédits alloués aux programmes immobiliers, ainsi que sur l’augmentation constante – et plus rapide que le nombre d’affaires – des frais de justice. Ces derniers ne sont pas suffisamment pilotés : pas de cible donnée, pas d’outil pour les maîtriser. Un changement de culture me paraît nécessaire.
Mon avis sur les crédits de la mission Justice, qui ne sont pas conformes à la trajectoire de la loi de programmation, est défavorable.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République (Justice judiciaire et Accès au droit et à la justice). J’appelle votre attention sur le lourd tribut déjà payé par la justice dans les coupes drastiques opérées en 2024 : pour la justice judiciaire et l’accès au droit, entre gels et annulations, ce sont 600 millions qui ont disparu, c’est-à-dire l’équivalent de la rémunération annuelle de 10 000 magistrats ou du budget annuel de l’aide juridictionnelle.
Il faut s’imaginer les conséquences dramatiques de ces coupes sur des juridictions déjà exsangues. Le service public de la justice tient grâce au dévouement de ses personnels – magistrats, greffiers, éducateurs, surveillants – que le Gouvernement remercie en instaurant trois jours de carence pour l’indemnisation des arrêts maladie.
La saignée se poursuit en 2025 avec un projet de budget inférieur de 500 millions à la trajectoire prévue par la loi de programmation, votée pourtant il y a un moins d’un an. Sur deux ans, si aucun dégel n’intervient, ce sera près d’un demi-milliard d’euros qui manquera.
Les chiffres publiés il y a quelques jours par le Conseil de l’Europe devraient pourtant nous alarmer : la France consacre 77 euros par habitant à la justice, soit 0,2 % de son PIB, alors que la médiane européenne s’établit à 85 euros par habitant, et notre pays ne compte que 11 magistrats pour 100 000 habitants, alors que la moyenne européenne est de 21,9.
Un an après le vote d’une loi de programmation insuffisante, les promesses se sont déjà envolées. Pour arriver aux 1 500 nouveaux postes de magistrats promis en 2027, dont 500 comblent des postes vacants, il aurait fallu 343 créations de postes cette année ; il n’y en a que 150. Il en va de même pour les greffiers : avec 145 postes créés en 2025, comment compte-t-on arriver aux 1 800 promis en 2027 ?
J’appelle enfin votre attention sur les moyens alloués à la lutte contre les violences faites aux femmes à laquelle 170 millions d’euros, sur la totalité du budget de l’État, sont dédiés alors que les associations féministes estiment que 2,6 milliards d’euros seraient nécessaires. J’ai déposé des amendements pour que les moyens alloués à cette cause soient à la hauteur de l’enjeu.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendements II-CF1493 de M. Pouria Amirshahi, II-CF892, II-CF1457 et II-CF1454 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
M. Pouria Amirshahi (EcoS). Avec 9 000 magistrats seulement pour couvrir l’ensemble du territoire – soit 11,3 pour 100 000 habitants contre 24,7 en Allemagne et 17,8 de médiane européenne –, nous sommes très loin des 18 000 magistrats dont nous aurions besoin pour rendre une justice digne de ce nom. Je rappelle aussi que, chaque année, 2 millions d’affaires civiles et 1,9 million d’affaires pénales nouvelles sont enregistrées. Les magistrats doivent travailler à un rythme industriel et le système risque de s’effondrer.
Nous proposons donc d’augmenter les crédits afin de recruter 1 000 magistrats supplémentaires.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Mes amendements proposent d’augmenter les crédits afin de recruter des magistrats supplémentaires : 1 500 pour l’amendement II-CF892, 500 pour l’amendement II-CF1457 et un nombre conforme à la loi de programmation pour l’amendement II-CF1454.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Avis défavorable à tous ces amendements, qui vont au-delà de la trajectoire prévue par la loi de programmation. Seuls les amendements II-CF510 et II-CF513 la respectent.
La commission adopte l’amendement II-CF1493.
Les autres amendements tombent.
Amendement II-CF1778 de Mme Émeline K/Bidi
Mme Émeline K/Bidi (GDR). Cet amendement vise à créer un programme spécifique de lutte contre le narcotrafic dans les outre-mer. Ce phénomène prend de l’ampleur et demande des moyens d’enquête très importants. À La Réunion, les arrestations de mules se multiplient et les procureurs se trouvent contraints, faute de moyens, de choisir les fléaux – violences intrafamiliales ou narcotrafic – contre lesquels lutter.
Je demande au Gouvernement de lever le gage.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Le problème est bien réel mais la création d’un nouveau programme n’est pas la solution. Il est préférable, le cas échéant, d’ajouter des crédits supplémentaires au programme Justice judiciaire.
Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF1777 de Mme Émeline K/Bidi.
Amendements II-CF1462 de Mme Gabrielle Cathala et II-CF982 de M. Arnaud Bonnet (discussion commune)
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Mon amendement tend à créer 235 postes de juges des enfants. Leur nombre est aujourd’hui insuffisant puisque chaque juge des enfants suit en moyenne 450 situations ; le Syndicat de la magistrature estime que ce nombre devrait être de 325. Je rappelle que, chaque année, plus de 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles et qu’un enfant est tué en moyenne tous les six jours au sein de sa famille.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Un amendement prévoyant de créer quinze fois plus de postes que ce qui est inscrit dans la loi de programmation a déjà été adopté. Ce n’est pas réaliste, il faut que vous en ayez conscience. On ne peut pas modifier à ce point ce qui a été prévu en amont !
Par ailleurs, votre amendement propose de prélever des crédits sur l’administration pénitentiaire – qui a besoin de ces crédits, vu l’état de nos prisons qui devront bientôt accueillir 80 000 prisonniers.
Avis très défavorable.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Le problème de la surpopulation carcérale, pour lequel la France a déjà été condamnée plusieurs fois par la Cour européenne des droits de l’homme, n’a pas pour seule solution la construction de nouveaux établissements pénitentiaires. D’autres solutions sont en effet envisageables : mécanismes de régulation carcérale, dépénalisation de certains délits, remise en place des crédits de réduction de peine.
Les recrutements que nous proposons sont chiffrés et réfléchis puisque ces chiffres sont issus de notre programme L’Avenir en commun.
La commission adopte l’amendement II-CF1462.
En conséquence, l’amendement II-CF982 tombe.
Amendement II-CF510 de Mme Colette Capdevielle
Mme Colette Capdevielle (SOC). Les cours criminelles départementales doivent faire face à un stock de 1 500 dossiers. Faute de magistrats, certaines personnes devront être libérées pour respecter les délais imposés par le code de procédure pénale. Quant aux personnes libres, elles ne pourront être jugées dans un délai raisonnable, ce qui a déjà valu à la France des condamnations par la Cour européenne des droits de l’homme. Nous proposons donc par cet amendement de recruter davantage de magistrats. C’est une urgence. Il s’agit de crimes !
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Les amendements votés se cumulent et nous en sommes déjà à des volumes de créations de poste sur un an supérieurs à ceux que la loi de programmation prévoit sur cinq ans.
Madame Cathala, je précise que les crédits affectés aux bâtiments pénitentiaires sont déjà en baisse.
Avis défavorable.
M. Thomas Cazenave (EPR). Je rappelle que les effectifs prévus dans le budget sont déjà en hausse. Nous étions toutefois prêts à voter cet amendement, ainsi que l’amendement II‑CF513, mais nous ne le ferons pas car ceux déjà adoptés ont fait exploser le nombre de recrutements de manière irréaliste.
Mme Colette Capdevielle (SOC). Vous l’avez compris, c’est un appel face à une situation dramatique. Encore une fois, il y a urgence : la France ne compte que 10 000 magistrats alors que, selon la norme européenne, elle devrait en compter le double. Ce que nous demandons n’est pas insensé mais nécessaire.
M. Sébastien Delogu (LFI-NFP). À Marseille, les forces de l’ordre sont désabusées : elles essaient de faire leur travail, mais les personnes qui devraient être jugées ne le sont pas faute de magistrats. Des moyens supplémentaires ont été accordés par l’ancien garde des sceaux, mais le Syndicat de la magistrature les estime insuffisants.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Je m’apprêtais à donner un avis favorable à l’amendement, qui, avec une création de 150 postes, reste dans la trajectoire de la loi de programmation ; mais je ne peux qu’y être défavorable après l’adoption des amendements précédents qui créent déjà 1 300 postes.
La commission adopte l’amendement.
L’amendement II-CF513 de Mme Céline Thiébault-Martinez est retiré.
Amendement II-CF1448 de Mme Gabrielle Cathala
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Il s’agit d’augmenter les effectifs du parquet national financier (PNF), qui sont aujourd’hui inférieurs aux effectifs estimés nécessaires par l’étude d’impact du projet de loi créant le PNF.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Vous prélevez encore une fois sur les crédits de l’administration pénitentiaire, c’est une erreur à mon sens. Avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. Nous avions, Jean-René Cazeneuve et moi-même, préconisé une augmentation des effectifs du PNF dans notre rapport concluant la mission d’information sur les différentiels de fiscalité entre entreprises.
La commission adopte l’amendement.
L’amendement II-CF1449 de Mme Gabrielle Cathala est retiré.
Amendement II-CF1451 de Mme Gabrielle Cathala
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Il ne nous appartient pas de décider de la répartition géographique des effectifs : cette tâche incombe à la direction des services judiciaires, qui a une vision panoramique. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
L’amendement II-CF1450 de Mme Gabrielle Cathala est retiré.
Amendement II-CF1453 de Mme Gabrielle Cathala
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Cet amendement propose encore des créations de poste. Nous devons en être à 1 600 depuis le début de la matinée. C’est peut-être souhaitable, mais ce n’est pas possible. Avis défavorable.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Au rythme actuel, il faudrait cinquante ans à la France pour atteindre la médiane européenne – même pas la médiane des pays comparables, c’est-à-dire les plus riches !
Cet amendement demande la création de 50 postes de juge d’instruction. Aujourd’hui, ces magistrats traitent en moyenne 122 affaires, avec pour conséquence de très longs délais d’instruction.
Il n’est pas déraisonnable de créer 1 600 postes nouveaux de magistrats : le nombre de créations prévu par la loi de programmation – 1 500 à l’horizon 2027 dont 500 pour combler des postes vacants – est déjà largement insuffisant. Cette constatation est également vraie pour les greffiers avec 1 800 postes à l’horizon 2027, dont 700 postes destinés à accueillir des personnes qui évoluent dans leur carrière.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF1376 de M. Philippe Schreck
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Je profite de l’examen de cet amendement, qui propose d’allouer des crédits à l’immobilier judiciaire pour maintenir le budget dans la trajectoire de la loi de programmation, pour constater l’absence de stratégie clairement définie sur le télétravail, qui modifie pourtant considérablement l’organisation du monde du travail.
Avis favorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1779 de Mme Émeline K/Bidi
Mme Émeline K/Bidi (GDR). Avec 5,5 magistrats pour 100 000 habitants, La Réunion se situe largement en dessous de la moyenne nationale. Pour autant, les places pour accueillir les magistrats manquent au point qu’on ne sait même pas où pourront travailler les nouveaux magistrats.
L’achat de nouveaux locaux est bien moins onéreux que leur construction et il existe au tribunal judiciaire de Saint-Pierre un projet très abouti. Mais je n’ai obtenu aucune réponse du ministère de la justice sur l’avancement de ce projet. J’ai donc déposé cet amendement, qui chiffre précisément le coût de ce projet.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Je suis prêt à vous aider à faire passer le message concernant ces problèmes, bien réels, mais relevant de la direction des services judiciaires qui a une vision panoramique des choses. Mon avis sera défavorable pour cet amendement comme pour tous les amendements géographiques à venir.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF890 de M. Jean-François Coulomme, II-CF1459 et II-CF1455 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Si vous avez eu l’occasion de rencontrer des greffiers et greffières dans nos tribunaux, vous aurez pu constater la détresse dans laquelle cette profession se trouve, pour au moins deux raisons : une sous-dotation en nombre d’ETP ; le recours à de nombreux contractuels non formés qui n’ont pas les compétences requises pour accomplir la tâche. L’indigence des effectifs constatée pour les magistrats se retrouve pour les greffiers. C’est pourquoi nous proposons le recrutement de 1 500 ETP de greffiers, un chiffre somme toute modeste puisque nous avions évalué les besoins à 20 000 ETP.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Mes deux amendements sont des amendements de repli. Rappelons que quatre greffiers se sont suicidés cette année, preuve s’il en est que cette profession est en grande souffrance.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. La loi de programmation prévoyait une création nette d’emplois de greffiers de 1 800 ETP à horizon de 2027, avec les formations afférentes. Vous proposez des amendements de tailles S, M et XL, correspondant à des recrutements de 215, 500 ou 1 500 greffiers. Mais il faut aussi être capable de former ces personnels, de les accueillir et de les mettre en condition d’exercer correctement leur métier. Respectons le cadre prévu. En outre, je vous ai dit mon hostilité à l’idée de ponctionner les crédits de l’administration pénitentiaire. Avis défavorable.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Ne pouvant pas créer des crédits supplémentaires, nous sommes bien obligés de prendre de l’argent dans l’un des programmes de la mission donnée. Quant à la loi de programmation, elle n’est pas respectée : seulement 145 postes sont créés pour 2025 alors qu’il en faudrait plus de 350 pour suivre la trajectoire prévue. Dans ce cas, optez pour la taille S et la création de 215 postes.
M. le président Éric Coquerel. Petit conseil à tous les auteurs d’amendements : quand vous voulez une levée de gage, écrivez-le, sinon on peut penser que vous désarmez une autre politique.
La commission adopte l’amendement II-CF890.
En conséquence, les amendements II-CF1459 et II-CF1455 tombent.
Amendements II-CF1491 de M. Pouria Amirshahi, II-CF1339, II-CF1695, II-CF1696 et II-CF1697 de M. Philippe Schreck (discussion commune)
M. Pouria Amirshahi (EcoS). Au-delà des aspects comptables qui nous occupent, rappelons que les greffiers, souvent mal identifiés, sont une pièce essentielle de la chaîne judiciaire : ils préparent et suivent les dossiers ; ils apportent leur assistance aux magistrats ; ils authentifient des actes judiciaires en y apposant leur signature ; ils organisent le calendrier des audiences ; ils assurent la transmission des convocations ; ils garantissent la transparence des procédures ; ils rendent les documents accessibles aux avocats, aux parties et à tous les acteurs intéressés ; ils accueillent et informent le public sur les dossiers et les démarches à suivre.
Ils sont donc bien davantage que de simples exécutants de tâches administratives. Les mouvements de grèves de 2023 avaient donné une idée de leurs conditions de travail dégradées et du niveau de leurs rémunérations puisque celles-ci leur ouvrent le droit à une pension de retraite de 1 600 euros maximum à taux plein.
Cet amendement vise à étendre le plan de requalification engagé à la suite de ce mouvement, qui ne concerne que 700 des 11 500 agents. Je demande la levée du gage pour les 55 millions d’euros nécessaires pour atteindre cet objectif.
M. Philippe Schreck (RN). Ces amendements nous donnent aussi l’occasion de rappeler l’importance du binôme magistrat-greffier dans l’organisation de notre justice civile et pénale. La loi de programmation avait prévu la création de 1 800 postes de greffiers et de 1 500 postes de magistrats, mais la baisse de l’attractivité de ces métiers a engendré des difficultés de recrutement au cours des exercices précédents. En 2024, les magistrats et greffiers ont bénéficié d’une revalorisation indiciaire, de 108 millions d’euros pour les premiers et de 11 millions pour les seconds. Mon amendement II-CF1339 vise à augmenter de 17 millions d’euros les indices et revalorisations d’indice des greffiers, afin d’augmenter l’attractivité de la profession. Mes autres amendements sont des amendements de repli.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. En 2023 et 2024, les greffiers ont bénéficié de plusieurs mesures : création d’un corps de catégorie A, qui doit accueillir à terme 25 % des effectifs ; revalorisation indiciaire pour un montant de 11,8 millions en 2023 ; revalorisation indemnitaire ; plan de requalification de 700 adjoints administratifs en greffiers sur trois ans.
Monsieur Amirshahi, il faut distinguer les greffiers et ceux qui font fonction de greffier. Grâce aux mesures adoptées en faveur de ces derniers, les deux catégories ont été mises au même niveau. Vous proposez d’accorder la même revalorisation aux greffiers, ce qui reviendrait à recréer un écart entre les deux catégories. Si vous défendez l’égalité entre les greffiers et ceux qui font fonction de greffier, votre amendement n’est pas conforme à vos souhaits. Je vous invite donc à le retirer.
S’agissant des amendements de M. Schreck, j’émettrai un avis favorable pour le II-CF1697 qui prévoit un abondement de 5 millions d’euros pour revaloriser la rémunération des greffiers, dans la ligne de ce qui était prévu dans la loi de programmation. Avis défavorable pour les autres.
La commission adopte l’amendement II-CF1491.
En conséquence, les autres amendements tombent.
Amendement II-CF1447 de Mme Gabrielle Cathala
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Cet amendement est une réponse aux associations féministes qui estiment qu’il faudrait 603 magistrats spécialisés sur les violences sexistes et sexuelles dans les juridictions pour faire face à ce contentieux de masse.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Le sujet est important, mais je voudrais vous rappeler ce qui s’est passé depuis ce matin : vous proposez de créer des postes par milliers, alors que la loi de programmation en prévoyait des centaines. Il y a un problème d’ordre de grandeur. Compte tenu des votes exprimés jusqu’à présent, je ne peux que donner un avis défavorable à cet amendement.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF1140 de M. Emmanuel Duplessy et II-CF1461 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Il vise à abonder les fonds de la formation continue à l’École nationale de la magistrature (ENM) sur les violences sexistes et sexuelles. La procédure pénale peut être si douloureuse pour les victimes que certaines femmes renoncent à déposer plainte et à recourir à la justice. Il faut donc former les magistrats à l’accueil de la parole et à l’accompagnement des victimes, éléments déterminants pour favoriser la réponse pénale aux agressions sexuelles et aux délits sexistes. Il s’agit de sécuriser le parcours pénal des victimes et de préserver leur intégrité morale.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Les crédits existants permettent de couvrir 100 % d’une promotion d’auditeurs de l’ENM. Il est inutile d’en ajouter.
La commission adopte l’amendement II-CF1140.
En conséquence, l’amendement II-CF1461 tombe.
Amendements identiques II-CF520 de Mme Colette Capdevielle et II-CF522 de Mme Céline Thiébault-Martinez, amendement II-CF1456 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
Mme Colette Capdevielle (SOC). Il faut renforcer les effectifs d’attachés de justice. Indispensables à nos juridictions, ces attachés forment une équipe autour des magistrats qu’ils assistent en termes de recherche de jurisprudence et de rédaction. Or le budget pour 2025 ne prévoit aucun recrutement. Nous proposons que l’arrivée de nouveaux magistrats s’accompagne de 1 000 ETP supplémentaires d’attachés de justice.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Remettons les choses en perspective. Le plan global prévoit le recrutement de 1 100 attachés de justice, et vous proposez d’en recruter 1 000 dès 2025. C’est totalement disproportionné et impossible à réaliser dans de bonnes conditions de formation pour ces personnels. On les enverrait exercer leur métier dans de très mauvaises conditions par la suite. Avis défavorable aux trois amendements.
La commission adopte les amendements identiques.
En conséquence, l’amendement II-CF1456 tombe.
Amendement II-CF1690, II-CF1691 et II-CF1692 de M. Philippe Schreck
M. Philippe Schreck (RN). Le budget pour 2025 prévoit 349 créations de postes dans l’administration pénitentiaire, tous centrés sur les ouvertures de nouveaux établissements. C’est dire que ce budget marque l’arrêt du plan « 15 000 places de prison » puisque ces 349 postes ne permettent pas d’ouvrir un seul nouvel établissement pénitentiaire. En cohérence, nous avons sollicité une augmentation des crédits de l’immobilier de l’administration pénitentiaire pour coller au plan « 15 000 places » intégré dans la loi de programmation. Mon premier amendement vise à faire en sorte que les affectations de personnels dans l’administration correspondent à ce plan. Les autres sont des amendements de repli.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Vous proposez d’améliorer encore l’attractivité des métiers de l’administration pénitentiaire. Or les directeurs d’établissements vous diront que les difficultés de recrutement ne sont plus les mêmes que par le passé, grâce aux mesures de revalorisation qui ont été prises. Ils recrutent dans de bien meilleures conditions cette année et ils n’attendent pas de difficultés l’année prochaine. Vous avez pu constater que je n’étais pas hostile à vos amendements relatifs à l’administration pénitentiaire, mais en l’occurrence, c’est une demande de retrait.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF865 de Mme Marie Pochon
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Les crédits relatifs à la gendarmerie relèvent de la mission Sécurités. Demande de retrait ou avis défavorable.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF921 de Mme Danièle Obono
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Cet amendement tend à accroître significativement la formation des magistrats en matière de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, de manière à les aider à identifier les comportements qui relèvent de cette problématique systémique dans notre pays. Nous demandons la levée du gage pour ce petit budget d’un peu plus de 8 millions d’euros.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Dans votre exposé des motifs, vous reconnaissez que ces formations existent et que vous n’avez pas les informations nécessaires pour savoir si elles sont suffisantes et pertinentes. Avant de proposer d’engager des moyens supplémentaires, il faudrait peut-être s’assurer de l’insuffisance ou de l’inadéquation des formations existantes. Je vous propose de retirer l’amendement, voire de demander un rapport sur le sujet.
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Le budget demandé représente une journée de formation par magistrat et par an, si on le rapporte au nombre de candidats potentiels à cette formation. Ce n’est pas un volume délirant.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Dans l’exposé des motifs, vous déplorez ne pas avoir « de données qualitatives et quantitatives sur ces formations, qui nous permettent de juger de leur suffisance ou de leur apport ». On ne va pas ajouter une journée ou même une demi-journée sans savoir si la formation existante suffit. Sinon, il n’y a plus de budget dans notre pays !
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF1374 de M. Philippe Schreck
M. Philippe Schreck (RN). Nous arrivons au cœur de notre critique du budget de la justice pour 2025. Les investissements dans l’immobilier pénitentiaire vont baisser de près de 44 % puisque les crédits dédiés passent de 712 à 405 millions d’euros. Autant dire que le plan « 15 000 places », qui patinait déjà, est désormais à l’arrêt. Cet amendement a pour but de le réactiver conformément à ce qui est prévu dans la loi de programmation.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. J’étais favorable à votre proposition d’augmenter les crédits de 100 millions d’euros pour revenir à la trajectoire de la loi de programmation, mais je ne peux approuver celle-ci qui porte sur 200 millions d’euros. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CF1750 de M. Jean-Philippe Tanguy.
Amendement II-CF1372 de M. Philippe Schreck
M. Philippe Schreck (RN). Il s’agit d’augmenter les budgets dédiés à la sécurité passive des véhicules dédiés au transfèrement de détenus. Tout le monde se souvient du drame survenu au péage d’Incarville, le 14 mai dernier, qui a mis en lumière l’insuffisance de la sécurité passive des véhicules. Ceux-ci comportent une signalétique de l’administration pénitentiaire, qui en fait des cibles faciles, mais ils ne sont en général équipés d’aucun blindage ou dispositif anti-intrusion. Nous voulons faire en sorte que l’administration pénitentiaire dispose de véhicules sécurisés pour le transfèrement des détenus, notamment lorsque ceux-ci doivent se rendre dans les juridictions.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Des mesures budgétaires ont été prises à la suite du drame que vous évoquez, ce qui satisfait votre demande. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF972 et II-CF975 de M. Jean-François Coulomme, II-CF978 de Mme Gabrielle Cathala, II-CF1513 et II-CF1514 de M. Pouria Amirshahi, II-CF487 de Mme Céline Thiébault-Martinez et II-CF136 de M. Philippe Juvin (discussion commune)
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Nous demandons une augmentation des effectifs de conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation (CPIP), sachant que chaque conseiller s’occupe actuellement de 80 à 120 personnes sous main de justice. Or il faudrait suivre les personnes condamnées avec beaucoup plus d’attention, notamment en matière de soins et de formation professionnelle, afin qu’elles se réintègrent dans la société. Pour cela, il est nécessaire de recruter 3 000 ETP.
M. Pouria Amirshahi (EcoS). Je retire mes deux amendements pour me rallier à celui de Mme Cathala.
Depuis quelques années, la frénésie pénale et carcérale, alimentée par les discours sécuritaires, remplit les prisons. Détenus dans les conditions que l’on sait, les prisonniers ressortent de prison moins bons qu’ils n’y sont entrés. La sanction est punitive, presque vengeresse, très éloignée de la culture de l’accompagnement, de l’insertion et de la probation. Étymologiquement, probation signifie aussi « trouver bon ». C’est en renversant la perspective du sens de la peine que l’on peut espérer exercer une justice digne de ce nom, qui vise à réparer les personnes et à les remettre dans un circuit de socialisation courant. Ce n’est pas impossible. Il suffit de suivre les recommandations de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté et celles de la Défenseure des droits, et de regarder ce que font nos voisins. En Allemagne, par exemple, le taux d’emploi des personnes incarcérées est de 75 %, contre moins de 20 % en France.
Il est donc nécessaire de renforcer les missions, le statut et la reconnaissance de tous les agents du service pénitentiaire d’insertion et de probation (Spip).
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Une fois encore, nous avons toutes les tailles : 100, 500, 1 500, 3 000 et 5 000. Qui dit mieux ? La loi de programmation prévoyait 10 000 créations de poste, tous services confondus. En un amendement, vous proposez d’en créer 5 000 pour une seule catégorie. Tout ce qui est excessif est vain. Nous devons rester crédibles. J’aurais pu éventuellement émettre un avis favorable à l’amendement II-CF136, mais je demande le retrait de ces amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable pour chacun d’entre eux.
Mme Christine Arrighi (EcoS). En réalité, vu la situation dans laquelle vous laissez tous les services publics, nous pourrions demander plus de 5 000 créations de poste. Dans les médias et sur les ondes, vous nous accusez en permanence de ne pas faire preuve de sens des responsabilités – apparemment, ce sont vos nouveaux éléments de langage. Vous n’êtes pas présents ici ni dans l’hémicycle, mais vous êtes très présents dans les médias pour nous taxer d’irresponsables. Contrairement à ce que vous affirmez, nous sommes responsables et nous soutenons l’amendement de Mme Cathala qui prévoit 500 créations de poste. Nous sommes certainement plus raisonnables que vous qui ne l’êtes pas du tout.
Mme Véronique Louwagie (DR). Il est tout à fait inadmissible de tenir des propos de cette nature à l’égard de vos collègues. Chacun est libre d’organiser son temps comme il le veut, d’assister à telle ou telle réunion. Au vu des dépenses que vous proposez, on peut dire que l’irresponsabilité est bien du côté de la gauche.
M. Sébastien Delogu (LFI-NFP). Je ne vais pas invectiver qui que ce soit, rassurez-vous. Ce qui nous importe, ce sont les personnes qui tiennent ce pays à bout de bras. La direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) nous alerte sur le manque de moyens, notamment dans les Spip dont les agents ont manifesté récemment. Les députés du Nouveau Front populaire étaient à leur côté devant le tribunal de Marseille où ils avaient été rejoints par le collectif des familles de victimes, c’est-à-dire des personnes qui ont perdu des enfants. Nous sommes quelque 250 parlementaires et élus locaux à avoir signé aux côtés d’associations et de collectifs une tribune où nous demandons des moyens supplémentaires pour accompagner cette jeunesse abandonnée. On abandonne ces jeunes pour ensuite les stigmatiser et leur reprocher de ne pas être correctement insérés dans la société !
Les amendements II-CF1513 et II-CF1514 sont retirés.
La commission rejette successivement les amendements II-CF972 et II-CF975.
Elle adopte l’amendement II-CF978.
En conséquence, les amendements II-CF487 et II-CF136 tombent.
Amendement II-CF940 de M. Jean-François Coulomme
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Nous souhaitons que les personnels des Spip, qui participent à la filière socio-éducative, bénéficient de la prime mensuelle de 186 euros net accordée dans le cadre du Ségur de la santé. D’autres professionnels du secteur médical ou médico-social n’ont d’ailleurs toujours pas vu la couleur de cette prime.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Vous proposez d’ouvrir la boîte de Pandore en élargissant le nombre de bénéficiaires du Ségur de la santé qui a déjà entraîné des coûts énormes. Avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. Pour ma part, j’avais demandé un élargissement du bénéfice du Ségur de la santé aux personnels de santé municipaux. Thomas Cazenave me signale que cela a été fait pour la dernière année comme pour l’année précédente. Tant mieux : je salue cette promesse tenue par le Gouvernement. Il y avait une certaine injustice à l’égard de personnes qui occupaient le même type d’emploi sans percevoir cette prime.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1343 de M. Philippe Schreck
M. Philippe Schreck (RN). Nos établissements pénitentiaires sont trop souvent des lieux où circulent des produits stupéfiants et même où s’organisent des trafics. C’est une problématique de santé publique mais aussi de sécurité, tant ces trafics engendrent des violences, notamment physiques, entre les détenus et vis-à-vis du personnel. Les dispositifs de sécurité passive et active de nos prisons sont insuffisants. Nous proposons d’augmenter le budget dédié à l’installation de filets antiprojection dans les maisons d’arrêt, qui avait été prévu lors de l’adoption de la loi de programmation.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Beaucoup de crédits sont déjà consacrés à ces dispositifs. Si certains comme les filets antidrones ont montré leur efficacité, d’autres comme les brouilleurs reviennent à vider la mer avec une petite cuillère. Nous devons réfléchir à des solutions technologiques innovantes. Demande de retrait.
M. Emmanuel Mandon (Dem). J’irai dans le sens de M. Schreck. Les établissements anciens peinent à obtenir des moyens de protection et de sécurisation adaptés, notamment pour lutter contre ce qui peut venir de l’extérieur. L’État devrait être plus volontariste en ce domaine.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1345 de M. Philippe Schreck
M. Philippe Schreck (RN). Les trafiquants et délinquants redoublent d’ingéniosité pour introduire objets, armes et drogues dans les bâtiments pénitentiaires. Cet amendement entend doubler les crédits consacrés à la lutte contre les drones, notamment afin d’améliorer les dispositifs existants qui entrent souvent en conflit avec d’autres installations.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Beaucoup d’argent est déjà mis sur la table – 40 millions de dépenses pour la sécurisation passive, 28,9 millions pour la sécurisation active – et le déploiement de ces dispositifs progresse d’année en année. On ne peut pas se passer d’une réflexion globale pour définir une stratégie innovante. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF1494 de Mme Naïma Moutchou, II-CF1349, II-CF1701 et II‑CF1702 de M. Philippe Schreck (discussion commune)
Mme Félicie Gérard (HOR). Dans les établissements pénitentiaires, les téléphones portables, malgré leur interdiction, sont très largement utilisés non seulement pour entretenir des trafics mais aussi pour harceler à distance les victimes de violences conjugales ou intrafamiliales. Les brouilleurs constituent une solution efficace pour lutter contre ces pratiques. Plusieurs sites supplémentaires devraient en être équipés en 2024 et 2025 mais le groupe Horizons et apparentés considère qu’il faut aller plus loin : il importe que l’ensemble des établissements en disposent.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Bien sûr, il faut que l’administration pénitentiaire ait les moyens d’empêcher les détenus de continuer à harceler leurs victimes ou de commanditer des actions criminelles mais les brouilleurs m’apparaissent comme un pansement sur une jambe de bois, compte tenu des mille et une manières dont ces dispositifs sont contournés. Je le répète, mieux vaut se tourner vers des solutions technologiques alternatives et des stratégies innovantes. Avis défavorable.
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). J’ajouterai que les auteurs des amendements font preuve d’un certain illogisme puisqu’ils veulent retirer des crédits à la protection judiciaire de la jeunesse, ce qui revient à augmenter la population carcérale potentielle.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CF1344, II-CF1699 et II-1700 de M. Philippe Schreck
M. Philippe Schreck (RN). La vidéosurveillance et les portiques sont un point faible du dispositif de sécurité. Il s’agit d’augmenter les crédits qui leur sont dévolus.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Vos amendements sont satisfaits : près de 80 millions d’euros de dépenses de sécurisation active et passive sont prévus pour 2025.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CF1148 de M. Emmanuel Duplessy, II-CF1337, II-CF1693 et II‑CF1694 de M. Philippe Schreck (discussion commune)
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). L’amendement II-CF1148 vise à inscrire les moyens nécessaires à une extension des structures de contrôle judiciaire avec placement probatoire (CJPP) destinées aux auteurs de violences conjugales, dans la continuité des recommandations formulées par Caroline Abadie et Elsa Faucillon dans leur rapport d’information sur les alternatives à la détention.
Les premiers résultats de l’expérimentation de ce dispositif sont positifs et l’on ne peut qu’être convaincu du bien-fondé des peines alternatives. Bien souvent, la prison ne résout rien et nous savons que l’éventualité d’une sanction pénale forte, comme une peine de prison, peut constituer un frein au dépôt de plainte chez certaines victimes légitimement désireuses de préserver leur famille.
M. Philippe Schreck (RN). Compte tenu de l’ampleur du fléau que constituent les violences conjugales, on ne peut que déplorer qu’il n’y ait que dix structures de contrôle judiciaire, soit 165 places. Nos amendements prévoient d’augmenter les crédits qui leur sont consacrés. Les moyens doivent être à la hauteur.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Parmi les dix mesures proposées à l’issue du Grenelle des violences conjugales figurait le contrôle judiciaire avec placement probatoire. Le ministère envisage de le généraliser dès 2025 et je suis favorable à ce que nous encouragions cette évolution. Je donnerai donc un avis favorable à l’amendement le mieux-disant, le II-CF1148.
La commission adopte l’amendement II-CF1148.
En conséquence, les amendements II-CF1337, II-CF1693 et II-CF1694 tombent.
Amendements II-CF1350, II-CF1703 et II-CF1704 de M. Philippe Schreck
M. Philippe Schreck (RN). Nous souhaitons renforcer les crédits consacrés aux bracelets antirapprochement, afin notamment de moderniser ce dispositif indispensable qui a malheureusement connu des difficultés de mise en œuvre. Nous regrettons que sa montée en charge ne soit pas assez soutenue, surtout par comparaison avec d’autres pays comme l’Espagne.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Je cherche à savoir si le nombre relativement faible de bracelets antirapprochement mis en place est dû à des moyens budgétaires insuffisants ou à d’autres raisons. Toujours est-il que j’estime qu’il faut encourager leur déploiement. Je donnerai donc un avis favorable à votre amendement II-CF1704 et vous demanderai de retirer les deux autres.
Mme Véronique Louwagie (DR). Pour en avoir discuté récemment avec des magistrats, je sais qu’il reste trop de procédures non dématérialisées et de dossiers sur papier, ce qui rend difficile la transmission des informations. Le traitement informatique des données et la modernisation des outils de la justice contribuent à faciliter le travail des magistrats, à leur faire gagner du temps et permettent de faire des économies.
Les amendements II-CF1350 et II-CF1703 sont retirés.
La commission adopte l’amendement II-CF1704.
Amendements II-CF1330, II-CF1689 et II-CF1333 de M. Philippe Schreck
M. Philippe Schreck (RN). Pour 2025, il est prévu une baisse de près de 300 000 euros du budget de l’École nationale d’administration pénitentiaire (Enap), ce qui paraît contradictoire avec l’objectif affiché d’améliorer la politique de recrutement pénitentiaire. Ces amendements proposent de relever ses crédits.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Ce budget est adapté à l’évolution démographique des futures promotions de l’Enap. Avis défavorable à ces trois amendements.
L’amendement II-CF1333 est retiré.
La commission rejette les amendements II-CF1330 et II-CF1689.
Amendement II-CF1353 de M. Philippe Schreck
M. Philippe Schreck (RN). La situation extrêmement tendue dans les prisons en Guyane et à Mayotte rend la tâche des surveillants ardue. Nous avions sollicité l’an dernier une prime exceptionnelle en leur faveur pour un total de 100 000 euros. Notre amendement avait été rejeté mais le ministère leur avait accordé une mesure indemnitaire, pour près de 60 000 euros. Nous souhaiterions que celle-ci soit reconduite, avec un budget supplémentaire de 200 000 euros.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Demande de retrait. Ces agents ont bénéficié de la revalorisation de l’indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise (IFSE) en 2023 et de la réforme statutaire et indemnitaire intervenue en 2024.
Par ailleurs, nous ne saurions accepter une mesure limitée à une partie du territoire national.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF983 et II-CF981 de M. Arnaud Bonnet, II-CF922 et II-CF924 de M. Jean-François Coulomme, II-CF1486 de M. Pouria Amirshahi, II-CF929 et II-CF930 de M. Jean-François Coulomme et II-CF1460 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
M. le président Éric Coquerel. L’amendement II-CF983 ne peut pas être défendu car, en raison des amendements déjà adoptés, les crédits du programme Conduite et pilotage de la politique de la justice ne sont plus suffisants.
L’amendement II-CF983 de M. Arnaud Bonnet tombe.
Mme Danielle Simonnet. L’amendement II-CF981 est un amendement de repli par rapport au précédent, tout à fait raisonnable. Nous avons voté à l’unanimité la création d’une commission d’enquête sur les manquements des politiques de protection de l’enfance : nous sommes tous conscients qu’avec un ratio d’un encadrant pour vingt-cinq jeunes, la situation est catastrophique. Cet amendement propose un taux de un pour vingt.
L’amendement II-CF1486 est également un amendement de repli.
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Nos amendements visent également à dégager des crédits pour recruter davantage d’éducateurs. Les mineurs sous main de justice ont besoin d’un accompagnement de nature pédagogique et non pas répressive. Nous ne pouvons que nous opposer aux orientations de l’actuel Gouvernement – recours aux comparutions immédiates, fin de l’excuse de minorité – qui remettent en cause les fondements mêmes de l’ordonnance de 1945.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Notre amendement II-CF1460 vise à rétablir les 500 équivalents temps plein (ETP) de la PJJ supprimés cet été.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Revenons à la réalité des faits : ce ne sont pas 500 postes qui ont été supprimés mais environ la moitié.
Les divers amendements proposent de telles augmentations de postes que les crédits restant après toutes les dépenses que nous avons adoptées depuis ce matin sont à peine suffisants. Nous n’avons même pas pu examiner l’amendement II-CF983 de M. Bonnet. Restons dans les limites du possible. Avis défavorable.
Mme Perrine Goulet (Dem). À titre personnel, je soutiendrai l’amendement de Mme Cathala, qui me paraît raisonnable. Certes, les 500 ETP n’ont pas été supprimés en totalité mais les personnels de la PJJ ont besoin de renforts. La réforme de la justice pénale des mineurs a introduit une procédure plus rapide : le délai raccourci entre l’audience de culpabilité et le jugement définitif laisse moins de temps pour recevoir les mineurs et mettre en place un suivi, si bien que les éducateurs ont plus de dossiers à traiter.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Il faudrait que l’on m’explique : que l’on allonge ou que l’on raccourcisse les procédures, on nous dit toujours qu’il faut plus de personnels. La lucidité devrait amener à reconnaître que ces délais plus courts permettent aux agents de gagner du temps pour s’occuper d’autres cas.
M. le président Éric Coquerel. Pour ma part, je partage l’avis de Perrine Goulet dont je salue l’engagement.
Mme Perrine Goulet (Dem). J’entends votre argument, monsieur le rapporteur spécial, mais la réforme a conduit à multiplier le nombre de rapports, puisqu’il y a désormais deux évaluations à rendre et des échanges supplémentaires à organiser avec les mineurs. Certes, ce raccourcissement des délais est bénéfique pour les mineurs qui ont moins à attendre mais il faut davantage de personnels si l’on veut éviter d’avoir à demander aux juges des prolongations.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Je souscris aux propos de Mme Goulet.
Vous affirmez, monsieur le rapporteur spécial, que le ministère n’a pas supprimé 500 ETP. Certes, l’intersyndicale a été informée que certaines suppressions seraient annulées mais, pour l’heure, il n’y a rien de concret. Des promesses ont seulement été faites pour le début de l’année 2025. Je maintiens donc mon amendement.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Dans le cadre des auditions que j’ai menées, il m’a été confirmé que 220 personnes avaient été rappelées, madame Cathala.
Les amendements II-CF922, II-CF924, II-CF929 et II-CF930 sont retirés.
La commission rejette successivement les amendements II-CF981 et II-CF1486.
Elle adopte l’amendement II-CF1460.
Amendement II-CF931 de M. Jean-François Coulomme
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). La PJJ, comme d’autres services, fait appel à trop de personnels vacataires, ce qui limite le niveau de professionnalisation. Nous proposons donc des crédits pour les titulariser.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Avis défavorable. Les 500 ETP n’ont pas tous été supprimés.
Mme Perrine Goulet (Dem). Les titularisations sont, comme dans l’éducation nationale, à prendre avec précaution. Il ne faudrait pas qu’elles viennent dévaloriser les personnels ayant fait l’effort de passer un concours. Mieux vaudrait ouvrir davantage de places aux concours et encourager les vacataires à s’y préparer.
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Effectivement, cette solution semble préférable. Je retire mon amendement.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF933 de M. Jean-François Coulomme
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Notre amendement prévoit des crédits pour soutenir le recrutement de psychologues au sein de la PJJ, nécessité impérieuse pour mieux prendre en charge les mineurs exposés à la délinquance.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Compte tenu du total des crédits déjà adoptés, mon avis sera défavorable.
M. le président Éric Coquerel. Pour ma part, je soutiendrai tous les amendements renforçant l’accompagnement psychologique, en lien avec la grande cause nationale 2025, la santé mentale.
Mme Perrine Goulet (Dem). Ces augmentations passeraient-elles par des titularisations ou par des recrutements sur concours ?
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Notre but n’est pas de dévaloriser la profession en titularisant des contractuels. Il s’agirait de psychologues en titre.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF942 de M. Jean-François Coulomme
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Il s’agit de redéployer vers un nouveau programme chargé du développement des mesures en milieu ouvert les crédits relatifs aux centres éducatifs fermés (CEF), qui ne nous paraissent pas la meilleure voie vers la réinsertion.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Il nous faudrait davantage d’éléments pour apprécier les résultats obtenus dans ces centres, notamment en distinguant ceux qui relèvent du ministère de ceux qui sont gérés par des associations. Une des raisons pour lesquelles j’insistais sur le renforcement des moyens informatiques tenait d’ailleurs à la nécessité de disposer de modes d’évaluation et de suivi pertinents.
Par ailleurs, créer un nouveau programme budgétaire ne me paraît pas nécessaire. Avis défavorable.
Mme Perrine Goulet (Dem). Je comprends votre opposition politique aux CEF mais il faut bien avoir à l’esprit que, pour les jeunes ayant commis des actes graves, ils représentent une alternative à une incarcération dans les établissements pénitentiaires, qui n’est pas souhaitable. Pour certains mineurs, un cadre plus strict que le milieu ouvert s’impose.
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Je ne remets pas en cause la qualité et l’efficacité du travail fourni par les personnels des CEF mais nous sommes convaincus que ces mêmes compétences d’encadrement peuvent aboutir à de bons résultats dans des structures en milieu ouvert. Si l’on veut favoriser leur réinsertion, il faut éviter d’extraire les jeunes de l’espace public.
Mme Perrine Goulet (Dem). Il existe déjà beaucoup de structures en milieu ouvert alors que les CEF sont en nombre restreint. Ne les fermons pas.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1093 de Mme Sandra Regol
Mme Sandra Regol (EcoS). Cet amendement vise à rembourser intégralement les consultations de psychiatres et de psychologues pour les victimes de violences sexuelles. La prise en charge de ces soins par les pouvoirs publics est défaillante. Trop souvent, ce sont les victimes elles-mêmes qui doivent supporter seules les coûts de ces thérapies.
De manière plus générale, il importe d’augmenter considérablement les moyens publics consacrés à la protection des femmes contre les violences, aujourd’hui principalement assurée par des associations. Les besoins sont évalués à 2 milliards d’euros alors que seuls 185 millions d’euros ont été dépensés en 2023. Un travail collectif d’ampleur s’impose.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Je partage votre volonté d’accompagner les victimes de violences sexuelles mais votre amendement, par les moyens qu’il engage, obérerait les marges de progression de l’enveloppe budgétaire de la mission Justice. Demande de retrait.
Mme Sandra Regol (EcoS). C’est la raison pour laquelle nous appelons le Gouvernement à lever le gage.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF1262 de M. Charles Rodwell, II-CF1443 de Mme Gabrielle Cathala, amendements identiques II-CF1474 de M. Pouria Amirshahi et II-CF1780 de Mme Émeline K/Bidi, amendements II-CF1437 et II-CF144 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
M. Charles Rodwell (EPR). L’amendement II-CF1262 propose de réduire les crédits alloués à l’aide juridictionnelle (AJ). Une réforme de ce dispositif s’impose. Nous alertons le Gouvernement sur la hausse continue et exponentielle de ce poste budgétaire liée à la massification du contentieux du droit des étrangers, dont on sait le poids sur l’ensemble de notre système judiciaire et administratif et sur les personnels des préfectures et des tribunaux en particulier.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Nous proposons au contraire de revaloriser l’unité de valeur (UV) qui sert de base au calcul de l’aide juridictionnelle. Nos propositions vont de 40 euros, montant préconisé par le rapport Perben, jusqu’à 60 euros, montant réclamé par l’ensemble de la profession d’avocat.
Mme Émeline K/Bidi (GDR). La paupérisation de notre société a conduit à une augmentation du nombre de bénéficiaires de l’aide juridictionnelle. Or le montant de l’UV est si bas que certains avocats renoncent à intervenir. Des missions, comme l’assistance aux parties civiles devant les tribunaux de police, sont rémunérées à hauteur de 2 ou 3 UV, ce qui couvre à peine le prix du transport. Tout le monde comprendra qu’il n’est pas raisonnable de demander aux avocats de travailler pour si peu. Conformément à leurs demandes, revalorisons les UV.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Vous avez tous raison et c’est la raison pour laquelle je suis défavorable à l’ensemble de ces amendements.
Si l’on veut revaloriser l’UV de l’aide juridictionnelle, il faut revoir le fonctionnement de cette dernière. Les montants qui lui sont consacrés ont énormément augmenté ces dernières années et le PLF pour 2025 prévoit de les stabiliser – pour cette raison, l’amendement d’appel de M. Rodwell mériterait d’être retiré puis déposé de nouveau en séance afin d’obtenir des explications du ministre.
La commission rejette l’amendement II-CF1262.
Elle adopte l’amendement II-CF1443.
En conséquence, les amendements II-CF1474, II-CF1780, II-CF1437 et II-CF1444 tombent.
Amendement II-CF1442 de Mme Gabrielle Cathala
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Cet amendement propose d’augmenter de 36,6 millions les crédits de l’aide juridictionnelle afin de permettre aux victimes de violences conjugales d’être assistées par un avocat dès le dépôt de plainte.
Contre l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF866 de Mme Marie Pochon
Mme Christine Arrighi (EcoS). La question de l’accessibilité géographique du service public est un enjeu majeur pour les personnes qui vivent en zone rurale. Cet amendement propose de l’améliorer en octroyant 30 millions supplémentaires au plan France ruralités, afin de permettre à chaque personne d’accéder à la justice en moins de trente minutes depuis le lieu où elle vit.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Au cours des auditions, j’ai systématiquement demandé à mes interlocuteurs si certaines augmentations de dépenses leur avaient paru superflues. La réponse la plus fréquente qui m’a été apportée – y compris par les représentants syndicaux –, c’est que l’on ne savait pas comment dépenser l’ensemble des crédits prévus pour la justice de proximité. Il faut les écouter et évaluer davantage la manière dont sont utilisés les moyens en la matière avant de les augmenter encore.
Avis défavorable.
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Nous soutenons cet amendement car le besoin d’accès à la justice est tout aussi prégnant dans les territoires périurbains et ruraux que dans les centres-villes. Les violences sexistes et sexuelles y ont lieu dans les mêmes proportions. Il est donc nécessaire de garantir les moyens de la justice de proximité dans tous les territoires, comme le demandent les associations féministes.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Entendons-nous : il est bien évidemment nécessaire de pouvoir accéder aisément à la justice de proximité, car cela correspond à un besoin réel.
En revanche, les professionnels appellent notre attention sur le fait que les modalités d’utilisation des crédits destinés à cette justice de proximité devraient nous conduire à nous interroger.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF316 de M. Matthias Renault
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Par conviction, je suis plutôt favorable à la suppression d’agences et à l’internalisation de leurs missions. Mais, en l’occurrence, il n’est pas démontré que ce serait possible pour l’Agence publique pour l’immobilier de la justice (Apij), dont les missions sont très spécifiques. Il serait nécessaire de demander au préalable un rapport pour évaluer les modalités d’une telle opération, qui en l’état est prématurée.
Demande de retrait.
La commission rejette l’amendement.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CF315 de M. Matthias Renault.
Amendement II-CF1458 de Mme Gabrielle Cathala
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Avis défavorable.
Je partage les préoccupations au sujet de l’évolution des crédits informatiques, mais l’amendement ne serait pas sans conséquences car le gage porte sur les moyens de l’administration pénitentiaire.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Nous sommes favorables de manière générale à la levée des gages des amendements portant sur la deuxième partie du PLF, mais nous sommes opposés au programme de construction de 18 000 places de prison.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF901 et II-CF1440 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). L’amendement II-CF901 propose de développer un fonds destiné à la mise en œuvre de la justice restaurative, dont les bienfaits sont parfaitement illustrés par le film Je verrai toujours vos visages de Jeanne Herry.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Ces deux amendements sont encore une fois gagés par des prélèvements sur les crédits de l’administration pénitentiaire.
Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF862 de Mme Marie Pochon
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Les crédits de la gendarmerie ne relèvent pas de la mission Justice. Demande de retrait.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF1889 de Mme Perrine Goulet et II-CF1452 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
Mme Perrine Goulet (Dem). Chaque année, 4,4 millions de plaintes parviennent aux parquets. L’objectif est d’accompagner 69 % des victimes, mais on en est loin, faute notamment de subventions aux associations qui œuvrent en leur faveur.
France Victimes est un réseau national d’aide qui assiste un peu plus de 10 % des victimes et qui est chargé du numéro d’appel gratuit 116 006.
Cet amendement propose d’augmenter les crédits de 15 millions, afin de porter à 10 euros par an et par victime le financement de ces associations. Cela leur permettra de faire face aux nouveaux enjeux de protection des mineurs – les crimes et les délits les visant augmentant de plus de 20 % par an – et au coût de l’extension de la prime Ségur – évalué à 7 millions pour les associations du réseau France Victimes, qui emploient 1 700 salariés.
Les séances de soutien psychologique ont été évoquées tout à l’heure : je rappelle que ce réseau en propose. Il est nécessaire de le renforcer.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. Mon amendement est attendu par toutes les structures sociales et médico-sociales puisqu’elles doivent désormais verser la prime Ségur à leurs salariés. Comme les financements en provenance du ministère de la justice ne tiennent pas compte de cette nouvelle mesure, elles doivent le faire à moyens constants. L’amendement propose donc que l’État prenne en charge le coût de cette prime pour les associations d’aide aux victimes.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Le budget alloué à l’aide aux victimes a augmenté de 7 % en 2023 et de 4 % en 2024 ; c’est aussi celui qui progresserait le plus dans le PLF pour 2025, avec une croissance de 9,59 %. On peut toujours imaginer faire mieux, mais nos moyens sont limités.
L’amendement de Mme Cathala est un peu plus raisonnable, puisqu’il propose une augmentation de 7 millions, mais il est gagé sur les crédits de l’administration pénitentiaire.
Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement II-CF1889.
En conséquence, l’amendement II-CF1452 tombe.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission rejette successivement les amendements II-CF1439 et II-CF1438 de Mme Gabrielle Cathala.
Amendements II-CF1445 et II-CF1446 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. L’amendement II-CF1445 propose d’augmenter les crédits pour déployer 7 500 téléphones grave danger, contre 6 000 actuellement.
Cela va de pair avec l’augmentation des effectifs du ministère de la justice que nous avons réussi à voter.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Nous venons déjà de voter 15 millions de crédits supplémentaires, dont une partie pourrait être utilisée pour ces appareils.
Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement II-CF1445.
En conséquence, l’amendement II-CF1446 tombe.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CF1463 de Mme Gabrielle Cathala.
Amendement II-CF1165 de Mme Stella Dupont
Mme Stella Dupont (NI). Cet amendement concerne la tarification des enquêtes sociales en matière civile. Il a déjà été adopté l’année dernière, et certainement les années précédentes : le tarif de ces enquêtes n’a, en effet, pas été revu depuis 2011.
Lors de l’examen du PLF pour 2023, le ministre avait annoncé qu’en vue de préparer la revalorisation de leurs tarifs, un travail conjoint d’actualisation des missions à accomplir dans le cadre des enquêtes sociales allait être mené par la direction des services judiciaires et l’Association nationale des enquêteurs sociaux. Ce travail n’a, semble-t-il, toujours pas abouti.
Mon amendement est symbolique, puisqu’il propose d’augmenter les crédits de un million d’euros, mais il est invraisemblable que l’on n’arrive pas à revaloriser ce tarif alors que la question est soulevée depuis des années.
Les enquêteurs sociaux jouent un rôle important en matière de justice car les magistrats s’appuient sur leur travail pour avoir un éclairage sur les cas qui leur sont soumis. Le fait que ce travail ne soit pas suffisamment payé conduit à s’interroger sur la reconnaissance accordée aux enquêteurs sociaux, mais aussi sur la portée de nos discussions puisque rien ne se passe.
J’espère que, cette fois-ci, le garde des sceaux fera en sorte que l’on aboutisse enfin, s’agissant d’un dossier aussi technique que symbolique.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. De manière générale, ce n’est pas parce qu’un tarif n’a pas été revalorisé depuis plusieurs années qu’il n’est pas au bon niveau. Il faut se méfier de la logique qui consisterait à tout réévaluer systématiquement.
Par ailleurs, la charge du coût d’une enquête sociale pèse sur la partie condamnée aux dépens. La revalorisation des tarifs pèserait non pas sur l’État, mais sur les parties au procès.
Avis favorable.
Mme Stella Dupont (NI). J’entends vos arguments. Des gains de productivité ont pu être réalisés depuis quinze ans, notamment grâce à l’informatisation. Il reste que le tarif de 600 euros n’est pas raisonnable par rapport au travail demandé, ce dont témoigne le fait que l’on a du mal à attirer des candidats pour faire ce métier.
Mme Véronique Louwagie (DR). Le travail conjoint annoncé par le ministre en 2023 a-t-il vraiment débuté ?
Mme Stella Dupont (NI). Les informations dont je dispose sur ce point sont contradictoires.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF1890 de Mme Perrine Goulet
Mme Perrine Goulet (Dem). Cet amendement propose d’augmenter les crédits destinés aux « passages de bras » : quand les séparations sont difficiles et surtout lorsqu’existent des risques de violences dans le couple, ces espaces neutres sont utiles pour permettre dans de bonnes conditions la remise de l’enfant dans le cadre du droit de visite et d’hébergement. Cela permet d’éviter que des victimes se retrouvent seules face à leur ancien bourreau.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Ces espaces relais relèvent davantage du ministère des solidarités.
Avis défavorable.
Mme Perrine Goulet (Dem). Une partie de leur financement est assurée par le ministère de la justice, car les espaces rencontre sont utilisés par des professionnels mandatés par un juge pour procéder à l’évaluation de la relation entre les parents.
La commission adopte l’amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF968 de Mme Gabrielle Cathala.
Amendement II-CF997 de M. Jean-François Coulomme
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Cet amendement a une nature plus philosophique que budgétaire. Nous souhaitons créer un nouveau programme Missions de police judiciaire et concours à la justice au sein de la mission Justice.
Cela nous tient à cœur depuis très longtemps, car le rattachement de la police judiciaire au ministère de l’intérieur pose des problèmes au regard du principe de séparation des pouvoirs. Comme nous souhaitons donner davantage d’indépendance aux juges d’instruction, nous voudrions qu’une partie de la police judiciaire soit rattachée au ministère de la justice. Le coût de cette mesure a été évalué à 400 millions d’euros. Ce n’est pas rien, mais il faut rappeler que l’action Police judiciaire du programme Police nationale représente plus de 3 milliards d’euros.
Il est cohérent de mettre un corps de police judiciaire directement à la disposition de la justice. Nous demandons que le gage soit levé.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. L’exposé sommaire indique que « ce rattachement permettrait de couper les liens étroits entre les membres de la police judiciaire et le ministre de l’intérieur, qui entravent l’efficacité des enquêtes et sont contraires à l’indépendance nécessaire des missions qu’elle réalise ». À moins que vous ne souhaitiez mettre en cause l’indépendance de la police judiciaire – ce que je ne crois pas –, il serait plus avisé de réfléchir davantage aux implications d’un tel amendement et de le retirer.
La commission adopte l’amendement.
Contre l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte successivement les amendements II-CF980 et II-CF984 de Mme Gabrielle Cathala.
Amendement II-CF990 de Mme Gabrielle Cathala
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Les protections menstruelles sont déjà distribuées gratuitement en prison. Vous proposez qu’il y en ait davantage, mais je voudrais appeler votre attention sur un point : même le savon n’est pas forcément fourni dans les prisons. Avant même de renforcer la distribution de tel ou tel produit, il faudrait peut-être réfléchir de façon plus globale sur les produits de première nécessité qui doivent être mis à disposition.
Demande de retrait.
Mme Gabrielle Cathala, rapporteure pour avis. L’amendement prévoit seulement 1 million d’euros de crédits supplémentaires pour, de manière générale, promouvoir des conditions dignes de détention des femmes – le savon entre pleinement dans ce cadre.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF906, II-CF907 et II-CF917 de Mme Gabrielle Cathala
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. Avis défavorable à ces trois amendements, qui concernent tous l’indemnisation de gardes à vue considérées comme abusives.
La commission adopte successivement les amendements.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux explications de vote sur les crédits de la mission.
M. Jean-Didier Berger, rapporteur spécial. J’envisageais initialement de donner un avis défavorable car il aurait selon moi fallu que le projet de budget propose des crédits correspondant aux montants prévus par la loi de programmation.
Mais les amendements adoptés ce matin vont très au-delà de cette dernière tout en procédant à des coupes sévères dans les moyens de l’administration pénitentiaire. Je ne peux pas non plus donner un avis favorable au projet de budget ainsi modifié.
M. Philippe Schreck (RN). Le budget de la justice présenté par le Gouvernement constituait en effet une rupture avec la loi de programmation, et pas des moindres puisque les crédits étaient amputés de 480 millions par rapport à la trajectoire prévue dans cette dernière. En outre, l’exercice 2024 a été marqué par un coup de rabot de 250 millions décidé par Bercy en février.
C’est la raison pour laquelle nous avons présenté des amendements visant à rétablir le cap budgétaire de la loi de programmation, avec tout ce que cela implique s’agissant du plan de création de 15 000 places de prison, de la sécurité des établissements pénitentiaires et de la revalorisation des rémunérations des personnels de greffes et de l’administration pénitentiaire.
Ces amendements ont été rejetés et, au surplus, plusieurs centaines de millions supplémentaires ont été votées dès les quinze premières minutes de débat. Il n’est même plus utile de se préoccuper du bien-fondé éventuel des mesures adoptées puisque leur cumul a fait perdre toute cohérence budgétaire à la mission, dont le budget ne pourra en pratique pas être exécuté.
Nous voterons contre les crédits de cette mission.
M. Jean-François Coulomme (LFI-NFP). Le budget initialement proposé pour la justice est à l’image de l’ensemble de celui de l’État et du gouvernement illégitime qui le présente : c’est l’œuvre d’une droite décomplexée et proche des attentes de l’extrême droite, qui se concentre essentiellement sur le volet carcéral, sécuritaire et répressif. Ce budget est bien loin de combler le déficit humain, matériel et financier dont souffre ce service public pourtant essentiel.
Ce gouvernement nous vend 400 millions d’euros d’augmentation pour la justice, mais la réalité est tout autre : avec une inflation d’au moins 2 %, la progression des crédits est ramenée à 55 millions. Cela ne permet même pas de rattraper les 330 millions d’euros annulés en février 2024. Cette coupe budgétaire a été réalisée sans aucune consultation des professionnels et elle a de lourdes conséquences pour tous les travailleurs de la justice. Le justiciable est toujours la principale victime de cette logique.
En réalité la quasi-totalité des programmes de la mission Justice s’inscrivent dans une ligne politique austéritaire et subissent des coupes. Les seules modestes augmentations qui nous ont été proposées avaient pour objet l’ouverture de nouveaux centres pénitentiaires et de centres éducatifs fermés, alors que l’urgence est d’investir dans la formation, le recrutement et l’accompagnement. Ce gouvernement préfère le tout-sécuritaire et relègue loin derrière l’humain et les conditions de travail des professionnels.
Mais cette tendance a été infléchie de manière tout à fait pertinente grâce à l’adoption de nombreux amendements de notre groupe. Nous nous accommodons parfaitement de ce budget modifié et nous voterons donc en sa faveur.
Mme Véronique Louwagie (DR). Les crédits de la mission s’établissent à un peu plus de 12 milliards, avec une augmentation de plus de 2 % et une évolution des plafonds d’emplois, qui passe de 94 698 en 2024 à 95 599. Je me réjouis de cette hausse de 619 emplois, dont 349 vont au programme Administration pénitentiaire et 270 au programme Justice judiciaire. Je me réjouis également que, dans les économies annoncées dimanche dernier par le ministre en charge du budget, le ministère de la justice ne soit pas du tout concerné par les 2,6 milliards qui l’ont été au titre de l’annulation de la réserve de précaution des ministères. Il nous faudra être vigilants, comme vous l’avez d’ailleurs dit, monsieur le rapporteur spécial, à l’application de la mise en œuvre du plan 15 000, lequel prévoit la livraison de 15 000 places nettes supplémentaires à l’horizon 2027 pour répondre à une attente importante qui était aussi un engagement du Gouvernement.
Je me réjouis également de l’évolution positive, qu’il faut mettre à l’actif des agents et des personnes travaillant au service de la justice, de la proportion d’affaires terminées en moins de douze mois sur les douze derniers mois, car le délai de traitement est également un sujet de préoccupation pour les citoyens. Cela concerne tant les affaires civiles, pour lesquelles cette proportion est passée de 81,4 % en 2022 à 83,5 % en 2023, que les affaires pénales, pour lesquelles elle est passée de 79,4 % en 2022 à 81,4 % en 2023.
Cependant, les augmentations de crédits adoptées par amendements, qui atteignent, selon un décompte rapide, près de 2 milliards d’euros, avec au moins deux amendements qui prévoient des crédits supplémentaires à hauteur de 400 millions d’euros, ne sont pas acceptables et nous voterons donc contre les crédits de cette mission.
M. Pouria Amirshahi (EcoS). Le point d’arrivée est beaucoup plus positif que le point de départ et, du fait de la délibération qui a eu lieu ce matin en séance, des avancées significatives ont été accomplies dans des domaines cruciaux comme la protection judiciaire de la jeunesse, l’accompagnement des greffiers et de tous les corps de métier en général, les Spip, ou encore en termes de formation des agents, pour mieux lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Cela était nécessaire car la justice ne peut pas être seulement une priorité incantatoire. Elle ne doit pas non plus être confondue avec des objectifs de police, comme c’est trop souvent le cas, et depuis trop longtemps, dans le discours public. La justice, ce sont des moyens mis au service de la société et des individus – des victimes, bien sûr, mais aussi des femmes et des hommes qui ont commis des délits et qu’il faut savoir accompagner, notamment en évitant le tout-carcéral, pour faire le pari que l’on peut toujours se remettre de ses erreurs en ayant par ailleurs payé ce que l’on devait à la société.
Les amendements proposés ne sont pas seulement des amendements budgétaires : ils expriment aussi une logique consistant à sortir du tout-répressif et à donner véritablement des moyens à la justice, dans tous les domaines. Ainsi, on ne peut pas prononcer des grands discours sur la police judiciaire, qui doit lutter contre les trafics et les mafias, tout en l’appauvrissant. On voit bien que l’affaire de Mazan n’a pu être soulevée que parce que la police judiciaire a pu faire son travail. Or les policiers sont peu nombreux à avoir les moyens de mener ce travail jusqu’au bout.
Le groupe Écologiste et social considère donc que ce budget est une amélioration.
Enfin, monsieur le rapporteur, vous avez exprimé plusieurs critiques sur les conséquences budgétaires de ces crédits, mais je vous rappelle que nous avons pris nos responsabilités en cherchant des recettes qui permettaient de les gager, à charge pour le Gouvernement de prendre maintenant ses propres responsabilités. Si nécessaire, une loi de finances rectificatives pourra intervenir mais, en l’état, les crédits sont approuvés.
Mme Perrine Goulet (Dem). Nous avons voté une augmentation de 20 % du nombre de juges pour la rentrée prochaine, et l’École nationale de la magistrature devra donc se réorganiser pour accueillir ces 2 000 étudiants supplémentaires. Voilà l’une des choses irréalistes qui ont été votées. C’est dommage, car nous aurions pu être en accord avec certaines mesures, comme une augmentation raisonnable du nombre de juges, le soutient à la protection judiciaire de la jeunesse, les bracelets anti-rapprochement et les téléphones grave danger ou d’autres mesures encore.
Tout cela est contrebalancé par la fermeture des centres éducatifs fermés, par des mesures locales qui vont à l’encontre d’une justice égale sur tout le territoire, par la sortie des inspecteurs de la police judiciaire du champ de la sécurité, par des fonds d’indemnisation inapplicables et par des amendements qui n’ont pas été votés dans la bonne mission.
Je le déplore d’autant plus que le budget est encore très loin du budget initial, qu’il dépasse de 1,4 milliard d’euros : nous allons redonner la main au Gouvernement qui, compte tenu de la situation budgétaire du pays, ne pourra pas accepter de telles augmentations et fera son marché parmi les mesures proposées. Il est regrettable que nous nous dépouillions à nouveau de notre choix de travailler ensemble sur les vraies mesures raisonnables dont nous avons besoin. Nous ne pourrons, bien entendu, pas voter ce budget.
Mme Félicie Gérard (HOR). Tel que présenté par le Gouvernement, le budget alloué à la mission Justice pour 2025 affiche une légère hausse et prévoit la création de 619 nouveaux emplois, notamment pour les services judiciaires et pour l’administration pénitentiaire. Cette augmentation est évidemment bienvenue et nécessaire, mais elle reste bien en deçà des besoins fixés par la loi de programmation pour la justice de 2023, qui prévoyait 480 millions d’euros supplémentaires et une augmentation plus ambitieuse des effectifs. Pour le groupe Horizons et indépendants, il est essentiel de rappeler le rôle crucial de la justice dans notre société, qui est un pilier de la démocratie, mais qui a souffert d’un sous-investissement chronique durant des décennies. Depuis 2017, des augmentations budgétaires significatives ont permis de sortir la justice d’une véritable crise de moyens et il est capital de poursuivre cet effort de rattrapage.
En matière pénitentiaire, nous saluons les efforts pour remédier à la surpopulation carcérale, l’investissement dans des équipements anti-drones et le déploiement de dispositifs de brouillage des téléphones portables.
Enfin, pour répondre au défi de la prise en charge des mineurs et de la modernisation des infrastructures éducatives, nous estimons que la protection judiciaire de la jeunesse nécessite un investissement accru.
En résumé, la justice mérite vraiment un budget à la hauteur des défis qu’elle doit relever. Cependant, au vu des crédits modifiés par notre commission ce matin, nous nous opposerons à ce budget dénaturé et devenu totalement irresponsable.
M. Nicolas Sansu (GDR). Tout le monde s’accorde à dire que le budget initial était indigent. Je pense donc que nous avons sauvé Didier Migaud, ce qui n’est déjà pas mal ! Compte tenu, en outre, des moyens alloués à la PJJ et au recrutement de magistrats, le groupe GDR votera pour ce budget.
Mme Colette Capdevielle (SOC). La justice est toujours l’éternelle oubliée, surtout la justice judiciaire, à laquelle on ne s’intéresse, en fait, que lorsqu’on est personnellement concerné. La question devrait être : quels moyens pour quelle justice, et quelle justice de qualité ?
Il faut augmenter les crédits de la justice pour permettre à la police judiciaire d’élucider crimes et délits, ainsi que pour pouvoir mener les enquêtes sociales nécessaires, dans le domaine civil et en particulier dans celui du droit de la famille, de mieux appréhender les situations familiales – cela représente des milliers de dossiers et cela concerne tout le monde.
Heureusement que nous avons augmenté les moyens de la PJJ, qui subit une crise très grave, les magistrats, notamment les juges pour enfants, n’ayant même plus les moyens de faire exécuter les mesures d’assistance éducative en milieu ouvert qu’ils prononcent. Il faut des juges et des assistants de justice. Il faut aussi faire évoluer des moyens informatiques moyenâgeux, qui empêchent les magistrats de faire un travail de qualité.
Pour toutes ces raisons, parce que nous avons réussi aujourd’hui à donner à notre justice les moyens dont elle a besoin et les moyens qu’elle mérite, répondant à la question de savoir quelle place nous voulons accorder à ce domaine régalien, nous voterons pour ce budget.
M. le président Éric Coquerel. Je voterai pour ce budget de la justice. Le budget en l’état posait problème et voilà des années que, contrairement à ce qui a été affirmé, il n’avait pas été suffisamment augmenté. Quant au caractère irréaliste que certains reprochent aux amendements votés, on peut certes souhaiter que les oppositions se concertent un peu plus pour éviter l’accumulation d’amendements et se souviennent que, pour les amendements d’appel, la méthode consiste à se limiter à mettre un euro de temps en temps, mais la responsabilité principale n’incombe pas aux oppositions, auxquelles on ne peut pas demander d’agir comme si elles soutenaient le Gouvernement.
Madame Louwagie, vous avez eu tout à l’heure une réaction aux propos d’une collègue, mais permettez-moi de dire, sans rien de polémique, que, depuis hier, les sièges du groupe central sont très désertés. Ce n’est pas normal car, compte tenu de la répartition entre les trois blocs, les débats seraient plus animés et les votes plus serrés si ces sièges étaient moins dégarnis. Je respecte le droit de chacun, mais cette situation ne tient pas seulement au fait que ce soit aujourd’hui la niche parlementaire du groupe Rassemblement national, car il en allait de même hier. Je le regrette, mais ce n’est pas la responsabilité des oppositions si les bancs des groupes gouvernementaux sont aussi déserts.
Mme Véronique Louwagie (DR). La réaction que j’ai eue tout à l’heure tenait davantage aux mots et à la forme employés par notre collègue qu’au fond de son propos. Chacun ici a le droit de s’exprimer pour exposer sa manière de voir, comme vous venez de le faire, mais il faut le faire avec un ton et des mots appropriés.
Par ailleurs, votre remarque est vraie. Depuis deux ans, le recours au 49.3 provoque une démobilisation et une déresponsabilisation des députés, comme le montrent aussi les amendements déposés. Ils visent certes à faire passer des messages – et, de fait, nous sommes tous ici pour pousser nos idées et nos propositions, car c’est cela, la politique –, mais vous savez très bien que vos amendements ne sont pas applicables en l’état, ce qui est un autre facteur de démobilisation et de déresponsabilisation.
Si Mme Stella Dupont, pour ne citer qu’elle, a défendu tout à l’heure un amendement qui avait du sens et dont le montant était en adéquation avec la demande, nous voyons aussi depuis le début de l’examen des missions, et dès la première, la mission Économie, des amendements qui ne sont pas applicables. Tout cela contribue à démobiliser.
La commission adopte les crédits de la mission Justice modifiés.
Après l’article 60
Amendement II-CF1879 de M. Emmanuel Duplessy
M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Cet amendement vise à institutionnaliser un rapport d’évaluation des besoins de formation au sein du ministère de la justice, notamment en matière de lutte contre les violences faites aux femmes et d’amélioration de la réponse pénale à ces délits sexistes et sexuels. Ce rapport, qui n’entraîne pas de dépense particulière, permettra d’objectiver les choses et d’évaluer les besoins en vue d’élaborer, le cas échéant, des plans pluriannuels. Dans la période politique où nous sommes, ce n’est parce que le chiffre de la température nous déplaît qu’il faudrait casser le thermomètre.
Contre l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
Personnes auditionnées par le rapporteur spécial
Direction de l’administration pénitentiaire
– M. Sébastien Cauwel, directeur de l’administration pénitentiaire,
– M. Emmanuel Razous, directeur adjoint de l’administration pénitentiaire,
– Mme Laurence Venet-Lopez, cheffe du service de l’administration,
– M. Philippe Gicquel, sous-directeur du pilotage et soutien,
– M. Morgan Tanguy, sous-directeur des ressources humaines
Direction des services judiciaires
– M. Pascal Prache, directeur des services judiciaires
– M. Roland de Lesquen, directeur adjoint des services judiciaires
– Mme Christine Julard, sous directrice des finances, de l’immobilier et de la performance
– M. Thomas Parisotto, adjoint au chef de bureau du budget
Direction de la protection judiciaire de la jeunesse
– Mme Caroline Nisand, directrice de la protection judiciaire de la jeunesse,
– M. Christophe Labedays, sous-directeur des ressources humaines et des relations sociales
– M. Paul Taillade, chef du bureau de la synthèse au sein de la sous‑direction du pilotage et de l’optimisation des moyens
Centre pénitentiaire de Nanterre
– M. Christophe Loy, directeur
Conseil national des barreaux
– Mme Julie Coutier, présidente
– M. Anne-Charlotte Varin, directrice des affaires publiques
UFAP-UNSa Justice
– M. Emmanuel Chambaud, Secrétaire général de l’UFAP UNSa Justice,
– M. Jean-François Forget, Secrétaire général de l’UNSa Justice
– Mme Béatrice Briout, Secrétaire générale de l’UNSa Syndicat de la Protection judiciaire de la jeunesse,
– Mme Brigitte Bruneau Berchère, Secrétaire nationale de l’UNSa Services judiciaires
– Mme Sandrine Debats, Secrétaire générale de l’UNSa Justice Secrétariat général – Administration centrale
([1]) Le budget général comprend ici les dépenses de l’État par mission, crédits budgétaires et taxes affectées, budgets annexes et comptes spéciaux, hors contributions au CAS Pensions, hors charges de la dette et hors crédits de la mission Remboursements et Dégrèvements, soit un total pour 2024 de 428,8 milliards d’euros.
([2]) Voir page 18 du rapport du comité des États généraux de la justice – Rendre justice aux citoyens, avr. 2022.
([3]) Ainsi, selon l’étude de la CEPEJ parue en 2024, la France consacre à la justice un budget de 77,2 euros par habitant, contre 85,40 euros en moyenne dans la cinquantaine de pays sur lesquels porte l’étude.
([4]) En septembre 2024, la densité carcérale globale s’établissait à 127,3 %. Dans les maisons d’arrêt, elle atteignait 153,6 %.
([5]) Patrick Hetzel, Rapport d’information parlementaire sur le pilotage des projets informatiques par la Chancellerie, 2024.
([6]) La particularité de l’année 2020 s’explique par l’épidémie de Covid-19 qui a conduit à libérer un grand nombre de prisonniers.
([7]) Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.
([8]) Ainsi, 1 543 ETP devraient être créés en 2025, soit 924 que dans le projet de loi de finances pour 2025.
([9]) L’article 1er de la LOPJ prévoit la création nette de 9 395 emplois, car 605 des 10 000 emplois annoncés ont déjà été créés en 2022 au titre de la justice de proximité.
([10]) Article 243 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.
([11]) Article 234 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.
([12]) L’article 234 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 a porté de 32 à 34 euros l’unité de valeur.
([13]) L’article 188 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 a porté de 34 à 36 euros l’unité de valeur.
([14]) Cour des comptes, L’aide juridictionnelle, observations définitives, octobre 2023.
(1) Les réflexions sur ce sujet ont débuté en 2011. Après avoir été un temps abandonnées, elles avaient redémarré à l’issue des États généraux de la justice.
(2) Cour des comptes, Améliorer la gestion du service public de la justice, oct. 2021.
(1) Le plafond d’emplois était sous-exécuté à hauteur de 1 573 ETPT en 2023 et de 1 135 ETPT en 2022.
([18]) Arrêté du 29 décembre 2023 modifiant divers arrêtés relatifs à l'indemnité pour charge pénitentiaire.
([19]) Arrêté du 24 mai 2024 modifiant l'arrêté du 30 mai 2016 relatif au complément forfaitaire à l'indemnité pour charges pénitentiaires.
([20]) La baisse des autorisations d’engagement est liée à la forte augmentation constatée en 2024 pour l’engagement de nouveaux marchés de gestion régulés, comme détaillé supra, mais aussi à l’incapacité de déployer le plan 15 000 dans les proportions voulues.
([21]) Défenseur des droits, Les droits des personnes détenues : un constat alarmant nécessitant des réponses urgentes, 7 octobre 2024.
([22]) Du 1er janvier au 31 juillet 2024, 3 186 violences physiques ont été recensées (toutes typologies confondues) contre 2 743 faits en 2023 sur la même période.
([23]) Circulaire du 24 juin 2024 du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du garde des Sceaux, ministre de la justice relative à la reprise définitive des missions d’extractions judiciaires par le ministère de la Justice et procédure exceptionnelle de recours aux forces de sécurité intérieure.
([24]) À ce jour, vingt établissements sont équipés d’un dispositif de détection et de neutralisation des communications illicites (DCNI) et 47 d’un système anti-drone.
([25]) Au 1er juillet 2024, 16 973 PSE étaient en cours d’exécution.
([26]) Au 1er juillet 2024, 826 bracelets étaient déployés.
([27]) Au 1er juillet 2024, 1 005 personnes bénéficiaient d’une mesure de placement à l’extérieur.
([28]) Cour des comptes, Les centres éducatifs fermés et les établissements pénitentiaires pour mineurs, nov. 2023.
([29]) Page 4 du projet annuel de performance du programme 182 pour 2025.
([30]) Page 4 du projet annuel de performance du programme 310 pour 2025