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Document E3908
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de règlement du Conseil instituant une action spécifique temporaire destinée à encourager la restructuration des flottes de pêche de l'Union européenne touchées par la crise économique.


E3908 déposé le 15 juillet 2008 distribué le 16 juillet 2008 (13ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2008) 0454 final du 8 juillet 2008, transmis au Conseil de l'Union européenne le 8 juillet 2008)

  • Travaux en Délégation

    Ce document a été examiné au cours de la réunion du 22 juillet 2008

  • Adoption par les instances communautaires

    Ce document a été adopté définitivement par les instances de l'Union européenne :

    Règlement (CE) n° 744/2008 du Conseil du 24 juillet 2008 instituant une action spécifique temporaire destinée à encourager la restructuration des flottes de pêche de la Communauté européenne touchées par la crise économique.
    (JO L 202 du 31 juillet 2008) (Notification d'adoption publiée au JOLD du 30/09/2008 p.15065)

La pêche européenne subit actuellement une très grave crise due aux restrictions à l’activité des pêcheurs et à la dégradation des conditions économiques du secteur.

Les restrictions à l’activité des pêcheurs viennent d’être illustrées par la fermeture prématurée par la Commission européenne de la pêche au thon en Atlantique de l’Est et en Méditerranée pour un certain nombre de pays dont la France. La question posée n’est pas celle des quotas, nécessaires pour protéger la ressource, mais celle de leur fixation qui ne prend pas suffisamment en compte l’expérience réellement vécue des professionnels.

La dégradation continuelle des conditions économiques de cette activité aussi bien en aval qu’en amont entraîne de graves difficultés.

En aval, on constate depuis 1993 une diminution constante des prises des bateaux de l’Union européenne au rythme de 2 % en moyenne. De cette baisse de la productivité résultent une augmentation des coûts unitaires et une dégradation des marges des entreprises.

Les prix à la première vente de nombreuses espèces stagnent, alors que d’autres baissent. Les raisons de cette situation sont bien connues : nature périssable des produits de la mer, déséquilibre du marché en faveur de la demande du fait de la puissance d’achat des circuit de commercialisation face à une offre atomisée, importations à bas prix en provenance du marché mondial.

En amont, on ne peut que constater le considérable enchérissement des prix du pétrole. Ainsi celui-ci est passé, sur le marché international, de 20 dollars le baril en 2002 à plus de 140 dollars à la fin du mois de juin 2008. En conséquence le combustible marin a subi une hausse de 240 % dans l’Union européenne sur la même période. Le prix du litre de gazole dépasse donc de façon régulière 0,70 €, il serait ainsi actuellement d’environ 0,80 €. En 2006, le coût total du carburant pour les flottes de l’Union européenne a représenté une somme de 1 milliard d’euros, soit 15 à 20 % de la valeur des produits débarqués. Actuellement ce montant est de l’ordre de 2 milliards d’euros, soit environ 30 % des débarquements dans l’Union européenne. Compte tenu du caractère mondial du marché du pétrole, aucun pays ne possède de moyens d’action directe contre ces hausses.

Il risque donc d’y avoir une dégradation continue de la situation économique de ce secteur qui représente une partie considérable de la vie économique de nos littoraux.

La France a déjà réagi, au niveau national, avec le plan d’action présenté par M. Michel Barnier, ministre de l’agriculture et de la pêche le 16 janvier dernier. Il prévoit des aides d’urgence et des mesures plus structurelles. Celles-ci seront d’ailleurs, comme M. Michel Barnier l’a annoncé dernièrement, accélérées et devraient être mises en place en deux ans au lieu de trois ans comme cela avait été prévu à l’origine. Il faut souligner cependant que le point 9 de ce plan (« Moderniser, restructurer et assurer la viabilité économique de la flotte de pêche française ») fait toujours l’objet de discussions avec Bruxelles.

Mais, au-delà des mesures nationales, il était nécessaire que des décisions soient prises au niveau communautaire afin que les pêcheurs puissent reprendre confiance en l’Europe.

On ne peut donc que se féliciter de l’accord qui s’est dégagé, sous la présidence de M. Michel Barnier, au sein du Conseil Agriculture–Pêche du 15 juillet dernier, sur la proposition de mesures d’urgence présentées par la Commission le 8 juillet. Il faut souligner la rapidité avec laquelle ces mesures ont été élaborées et examinées. Elles devraient être adoptées au Conseil du 24 juillet prochain.

Cette proposition de règlement prévoit de déroger jusqu’au 31 décembre 2010 à certaines dispositions du Fonds européen pour la pêche (FEP), institué par le Règlement 1198/2006 du Conseil, pour dépenser plus rapidement et un peu différemment les crédits prévus initialement pour la période 2007 – 2013. Elle ne présente aucune incidence budgétaire à l’exception d’une modification du profil annuel des crédits de paiement du FEP.

Les aides accordées sont soit des mesures générales, soit des mesures particulières

Mesures générales

Ø Arrêt temporaire des activités de pêche

Prévues pour une durée maximale de trois mois des aides couvrent non seulement une partie des coûts fixes supportés par l’armateur en raison de l’immobilisation au port des navires (taxes portuaires, frais d’assurance ou d’entretien, coûts des emprunts), mais aussi une partie du salaire des pêcheurs.

Une condition d’octroi est que les entreprises bénéficiaires fassent l’objet, dans les six mois suivant l’entrée en vigueur du Règlement, de mesures de restructuration telles que, notamment, des programmes d’adaptation des flottes, de plans d’ajustement d’effort de pêche ou de retrait de flottes.

Le montant total de l’aide accordée à ce titre ne pourra pas dépasser, pour chaque pays, 6 millions d’euros ou 8% du concours du FEP alloué au secteur dans le pays concerné.

Ø Investissements à bord des navires

Des aides sont accordées pour le financement d’équipements de nature à améliorer significativement l’efficacité énergétique des navires de pêche. Les unités de petite pêche côtière y sont aussi éligibles.

Ø Mesures de compensation socio-économiques

Le FEP peut contribuer au financement de mesures d’aide au départ anticipé y compris en préretraite des travailleurs du secteur de la pêche. Ces aides sont réservées aux pêcheurs et ne peuvent concerner les personnels du secteur aquacole ni ceux de la transformation des produits de la pêche et de l’aquaculture.

Ø Actions collectives

Des aides peuvent être octroyées pour un certain nombre de mesures comme la réalisation d’audits énergétiques pour des groupes de navires et des conseils d’experts sur des plans de restructuration ou de modernisation de flottes.

Ø Projets pilotes

Le FEP peut concourir au financement de projets pilotes visant à l’expérimentation d’équipements techniques contribuant à réduire la consommation énergétique des navires, moteurs, équipements ou engin

Mesures particulières

Cette catégorie de mesures concerne exclusivement les flottes faisant l’objet d’un programme d’adaptation mis en œuvre par les Etats membres pour restructurer les flottes touchées par la crise économique.

Ces programmes doivent répondre à un certain nombre d’exigences et, notamment, aboutir au 31 décembre 2012 au plus tard à une réduction de 30 % de la capacité de pêche de la flotte, ce seuil pouvant être abaissé de 20% si le programme concerne un pays dont la flotte compte moins de 100 navires actifs.

Enfin l’octroi d’aides publiques est exceptionnellement autorisé jusqu’au 31 décembre 2010 pour les armateurs retirant de la flotte un vieux navire pour le remplacer par un navire neuf plus petit et consommant moins d’énergie.

L’effort financier total sera, selon M. Joe Borg, Commissaire chargé de la pêche, de 2 milliards d’euros dont 1,4 milliard proviendra du FEP et des contributions des Etats membres. Ces mesures seront engagées avant le 31 décembre 2010.

Il restera donc 600 millions d’euros à financer qui ne seront pas couverts par le FEP et dont la provenance n’est pas encore indiquée. A cet égard, la Commission des Budgets du Parlement Européen s’est étonnée le 17 juillet dernier que soit prévu le déblocage de cette somme « sans que ni la source de financement ni sa base légale ne soient clairement établies.» Il conviendra donc de rester extrêmement vigilant sur le déblocage réel de cette somme qui représente une part appréciable du montant total du plan.

L’apport principal de cette proposition de règlement est contenu dans les mesures générales qui devraient permettre à nombre de nos pêcheurs de pouvoir passer un cap difficile. Ce sont donc des mesures conjoncturelles mais très substantielles.

Cependant les charges des pêcheurs, notamment le gazole, n’iront pas en diminuant et ils risquent de se trouver de nouveau dans une impasse. Il est donc absolument fondamental que des mesures pérennes soient prises afin que les pêcheurs européens puissent envisager leur avenir avec confiance.

La communication présentée par la Commission le 8 juillet dernier prévoit des mesures supplémentaires qui ne sont pas inscrites dans cette proposition de Règlement et qui devraient intervenir plus tard.

Parmi celles-ci, on peut noter des mesures concernant la surveillance des prix sur les marchés et une modification du régime des aides de minimis selon lequel les aides nationales au-dessous d’un certain seuil n’ont pas besoin d’être notifiées à la Commission. Il est ainsi prévu que le seuil actuellement en vigueur (30 000 euros sur trois ans) soit appliqué non plus à l’entreprise mais au navire dans la limite d’un plafond global par entreprise de 100 000 euros sur trois ans.

Sous la réserve que le financement complémentaire de 600 millions de ce plan d’aide soit effectivement débloqué, la Commission a approuvé la proposition d’acte communautaire, en l’état des informations dont elle dispose, au cours de sa réunion du 22 juillet 2008, après l’exposé de M. Guy GEOFFROY , rapporteur.