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Document E1346
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Projet d'acte relatif à l'élection des membres du Parlement européen au suffrage universel direct


E1346 déposé le 25 novembre 1999 distribué le 29 novembre 1999 (11ème législature)

  • Travaux en Délégation

    Ce document a été examiné

  • Adoption par les instances communautaires

    Ce document a été adopté définitivement par les instances de l'Union européenne :

    Décision 2002/772/CE du Conseil du 25 juin 2002 et du 23 septembre 2002 modifiant l'acte portant élection des représentants au Parlement européen au suffrage universel direct, annexé à la décision 76/787/CECA, CEE, EURATOM (JO L 283 du 21 octobre 2002).
    (JO L 283 du 21 octobre 2002) (Notification d'adoption publiée au JOLD du 16/07/2002 p.12159)

 Base juridique :

Article 190, paragraphe 4, du Traité instituant la Communauté européenne. Article 21, paragraphe 3, du Traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Article 108, paragraphe 3, du Traité instituant la Communauté européenne de l'énergie atomique.

 Procédure :

– Unanimité du Conseil ;

– avis conforme du Parlement européen à la majorité des membres qui le composent.

 Motivation et objet :

Le Traité de Rome a prévu, dans son article 138, paragraphe 3, «  l’élection au suffrage universel direct  » du Parlement européen «  selon une procédure uniforme dans tous les Etats membres  ». Cette disposition se retrouve à l'identique dans les traités Euratom et CECA. Si la décision de principe d’élire le Parlement européen au suffrage universel a pu être prise en 1976 (Acte portant élection des représentants au Parlement européen au suffrage universel direct du 20 septembre 1976), l’idée d’une procédure électorale uniforme n’a jamais pu aboutir. Différents projets ont été élaborés par le Parlement européen mais aucun d’entre eux n’a jamais recueilli l’accord unanime du Conseil requis par le traité.

Tirant les leçons de cet échec, le Traité d’Amsterdam a modifié la rédaction de cette disposition (qui est devenue dans la nouvelle numérotation l’article 190, paragraphe 4 du TCE). Il est désormais prévu que «  Le Parlement européen élabore un projet en vue de permettre l’élection au suffrage universel direct selon une procédure uniforme dans tous les Etats membres ou conformément à des principes communs à tous les Etats membres  ». L’idée d’une procédure électorale uniforme n’est pas abandonnée, mais le Parlement européen et le Conseil sont invités à travailler sur une base différente, afin de définir des principes communs qu'il reviendrait ensuite aux Etats membres d'intégrer.

C'est sur la base de cette nouvelle disposition des traités que le Parlement européen a adopté le 26 mai 1999, sur le rapport de M. Georges Anastassopoulos (PPE, Grèce), une résolution comprenant en annexe un projet d’Acte sur l'élection du parlement européen au suffrage universel. Lors de son examen par le Conseil, ce texte a suscité une forte opposition des Etats membres. Les critiques se sont focalisées sur l’obligation faite aux Etats membres de plus de 20 millions d’habitants de constituer des circonscriptions territoriales, l'instauration de listes transnationales pour 20 % des sièges à partir de 2009 et le principe d’incompatibilité entre le mandat de député européen et le mandat parlementaire national.

Des versions modifiées du projet d'acte ont alors été élaborées au Conseil. Le texte aujourd'hui soumis à notre examen émane de la présidence finlandaise. Faisant usage de la faculté ouverte par la loi constitutionnelle du 25 janvier 1999, le Gouvernement a décidé de le transmettre au Parlement au titre de l’article 88-4 de la Constitution.

Ce texte ne soulève plus les mêmes difficultés que le projet initial du Parlement européen : un certain nombre de dispositions contestées ont été soit retirées, soit modifiées pour laisser une souplesse d’adaptation suffisante aux Etats membres.

 Appréciation au regard du principe de subsidiarité :

Si le projet d’acte crée des obligations directes pour les Etats membres (caractère proportionnel du scrutin, régime d’incompatibilité étendu), la plupart de ses dispositions se contentent de fixer de grandes orientations auxquelles les Etats membres sont invités à se conformer.

 Contenu et portée :

1. Le mode de scrutin

Le projet d’acte pose le principe de l’élection des membres du Parlement européen au scrutin proportionnel. Cette disposition ne suscite plus de difficultés depuis que le Royaume-Uni, seul Etat parmi les quinze à pratiquer un scrutin majoritaire, s’est rallié au principe de la représentation proportionnelle : la loi britannique sur les élections parlementaires européennes du 28 janvier 1999 instaure en effet un scrutin de liste à la proportionnelle dans le cadre de douze grandes circonscriptions régionales.

L’obligation faite aux Etats membres de constituer des circonscriptions territoriales à partir de 2004 (sauf pour les Etats de moins de 20 millions d’habitants), qui avait été proposée par le Parlement européen, ne figure plus dans le nouveau projet. Cette disposition avait été fortement contestée par les Etats membres, notamment par la France, parce que trop peu respectueuse de la diversité des situations nationales. Il faut savoir que seuls quatre pays (Italie, Irlande, Belgique et Royaume-Uni) ont instauré des circonscriptions régionales pour l’élection des députés européens ; deux Etats, l’Allemagne et la Finlande, ont un système complexe qui permet aux partis de présenter des listes de candidats, soit au niveau national, soit au niveau régional. Les autres Etats membres ont choisi le système de la circonscription unique. On sait que le gouvernement français avait déposé un projet de loi (n° 976) prévoyant d’instituer huit grandes circonscriptions regroupant plusieurs régions mais que ce texte a dû être retiré en juillet 1998 faute d'accord politique sur son contenu.

La rédaction du nouveau projet d’acte donne de ce point de vue satisfaction : il se borne à prévoir que «  en fonction de leurs spécificités nationales, les Etats membres peuvent constituer des circonscriptions pour l’élection au Parlement européen  ». La possibilité est également offerte aux Etats de fixer un seuil minimal pour l’attribution des sièges, ce seuil ne devant pas excéder 5 % des suffrages exprimés. Un tel seuil existe déjà en Allemagne et en France (à hauteur de 5 %), en Autriche et en Suède(4 %) et en Grèce (3 %).

2. Le régime des incompatibilités

A la différence du texte proposé par le Parlement européen, le nouveau projet instaure un régime d’incompatibilité très large qui s’applique à toute une série de fonctions, les unes nationales (membre d’un Parlement national ou d'un gouvernement d’un Etat membre), les autres communautaires (membre de la Commission européenne, juge à la CCE, membre du directoire de la BCE, fonctionnaire des institutions des communautés européennes et de la BCE…).

Mais c’est la question de l’incompatibilité entre les mandats de parlementaire européen et de parlementaire national - qui figurait déjà dans le texte initial du parlement européen - qui soulève le plus de difficultés. Le Royaume-Uni et l’Irlande sont hostiles à cette disposition et réclament une clause d’exemption. Leurs partenaires de l’Union sont réticents à leur accorder une telle dérogation, ne seraitce que parce qu'elle pourrait justifier un refus du Parlement européen de donner un avis conforme au texte final.

La France est sur le fond favorable au principe de cette incompatibilité, qui d’ailleurs figure à l’article premier du projet de loi organique (n° 827) relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux («  le mandat de député est incompatible avec celui de représentant au Parlement européen  »). Mais il se trouve que ce projet de loi organique, pour les raisons que l'on sait, n’a pas encore été adopté par le Parlement : même si l’incompatibilité entre les mandats de parlementaire national et de parlementaire européen figure parmi les points d’accord entre l’Assemblée nationale et le Sénat, le Gouvernement français a préféré invoquer au Conseil une « réserve d’examen parlementaire », considérant qu’il lui était difficile d’avaliser au niveau communautaire une disposition qui n'a pas encore été adoptée par les assemblées.

3. Les modalités de vote

L’article 9 de l’Acte de 1976 prévoyait que le dépouillement ne pouvait commencer qu’après la dernière clôture du scrutin dans l’Union européenne. Or, cette clôture intervient à 22 heures en Italie. Les Etats qui ont prévu de fermer plus tôt leurs bureaux de vote ont donc décidé de garder sous surveillance leurs urnes pendant l’intervalle. Cette possibilité n'a pas été retenue en France parce qu'elle serait contraire à un principe du droit électoral français qui veut que le dépouillement commence immédiatement après la fin des opérations de vote. C’est la raison pour laquelle les bureaux de vote ferment en France à 22 heures pour les élections européennes.

C’est pour remédier aux inconvénients de cette situation que le projet d’acte prévoit, à la demande de notre pays, de supprimer l'obligation instaurée par l’Acte de 1976 de commencer les opérations de dépouillement après la clôture du scrutin dans l'Etat membre où les électeurs voteront le dernier et d'introduire une clause prévoyant que les Etats ne peuvent communiquer le résultat de leur scrutin qu’après que tous les Etats aient achevé leurs opérations de vote.

 Textes législatifs nationaux susceptibles d'être modifiés :

Aucun, dès lors que le projet de loi organique (n° 827) relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux aura été adopté.

 Réactions suscitées et état d'avancement de la procédure communautaire :

Dans sa nouvelle version, le projet d’acte ne suscite plus les mêmes difficultés que précédemment. Un certain nombre de points d'achoppement n'en subsistent pas moins, comme cela a été dit. C'est ainsi que le Royaume-Uni et l’Irlande restent hostiles au principe de l’incompatibilité entre mandats de parlementaire national et européen. Il semblerait toutefois, selon certaines informations, que ces deux pays pourraient renoncer à leur demande de dérogation.

Par ailleurs, le Royaume-Uni et l’Espagne s’opposent sur la question de Gibraltar. L’annexe I du projet d'acte prévoit, entre crochets, la possibilité pour les habitants de Gibraltar de voter aux élections européennes (ce qui n’est pas le cas jusqu’ici). Cette éventualité est récusée par l’Espagne, qui fait de cette question un motif essentiel d’opposition au projet d’acte.

En marge de ce texte, un débat porte sur la date des élections européennes, le Conseil doit en effet adopter, sur la base du projet d'acte, une décision portant fixation de la période des élections au Parlement européen en 2004 et 2009, laquelle fait l'objet de divergences entre les Etats membres.

 Conclusion :

Lors de l’examen de ce texte par la Délégation, Mme Nicole Feidt a exprimé le souhait que les règles de parité de candidatures soient incluses dans le dispositif communautaire. Ce propos a été approuvé, même si M. Didier Boulaud a estimé que notre pays n’était pas le mieux placé pour formuler une telle observation. La Délégation a alors statué favorablement sur le projet d’acte.