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Document E1407
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Communication au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions sur les transports aériens et l'environnement.


E1407 déposé le 21 février 2000 distribué le 23 février 2000 (11ème législature)
   (Référence communautaire : COM(1999) 0640 final du 1er décembre 1999)

  • Travaux en Délégation

    Ce document a été examiné

  • Adoption par les instances communautaires

    (Notification de caducité publiée au JOLD du 19/03/2003 p.4905)

Motivation et objet :

L’augmentation du trafic voyageurs, estimée à 9 % par an, pourrait se poursuivre du fait de la libéralisation des échanges et de celle du transport aérien. Ce secteur est de plus en plus confronté aux dommages de nature diverse qu’il cause à l’environnement.

Conformément au traité d’Amsterdam, qui consacre le principe du développement durable, la Commission estime dès lors nécessaire d’améliorer les performances environnementales du transport aérien et d’y intégrer les exigences de la protection de l’environnement.

Dans la présente communication, la Commission se propose donc, pour la première fois, d’analyser et de définir les voies d’une action plus intégrée et cohérente pour l’ensemble de l’Union européenne.

Dans cette perspective, la Commission se fixe plusieurs objectifs :

– l’introduction de mesures d’incitation de nature économique et réglementaire – telle que l’instauration d’une redevance environnementale européenne dans le secteur de l’aviation – en vue de favoriser les transporteurs et les utilisateurs qui choisissent de recourir aux techniques les plus récentes et aux modes d’exploitation les plus respectueux de l’environnement ;

– la poursuite de l’action de la Commission en faveur de l’instauration de conditions de concurrence équitables dans l’ensemble des systèmes de transport, par l’intégration des coûts environnementaux dans les systèmes de redevances et l’amélioration de l’infrastructure aux points de transfert intermodaux ;

– la mise en place d’un cadre communautaire pour les aéroports, destiné à concilier le besoin d’agir pour des motifs écologiques avec la nécessité de prévenir une prolifération de règles locales, qui aurait pour effet de fausser la concurrence ;

– l’encouragement de la recherche et du développement, dans le cadre du cinquième et du sixième PCRD (programmes-cadres de recherche et de développement), afin de rendre le secteur des transports aériens plus crédible sur le plan écologique et de préserver la compétitivité de l’industrie aéronautique communautaire.

La Commission indique que la présente communication constitue le texte de référence pour son programme de travail au titre des cinq prochaines années et au-delà. En outre, en fonction des résultats qui seront obtenus au sein de l’OACI à la fin de 2001, la Commission présentera une nouvelle évaluation de l’équilibre entre les mesures à prendre au niveau mondial, communautaire et local, en vue de veiller à la poursuite des objectifs fixés par le traité d’Amsterdam et le protocole de Kyoto en matière d’environnement.

Contenu et portée :

La stratégie exposée par la Commission concerne les domaines suivants :

– l’amélioration des normes environnementales ;

– la création d’incitations économiques et réglementaires plus efficaces ;

– la mise en place d’un cadre communautaire pour les aéroports ;

– la promotion de la recherche et du développement.

1. L’amélioration des normes environnementales

> Tout en se déclarant favorable à la définition de normes internationales plus restrictives pour les bruits d’avions et les émissions de gaz, la Commission considère que l’absence de négociations internationales pourrait la conduire à définir de telles normes au niveau communautaire.

? La Commission rappelle que la dernière révision importante des règles de l’OACI concernant les émissions sonores des aéronefs remonte à 1977 et correspond à l’introduction de la norme sur le bruit du chapitre 3 : cette norme désigne les normes de certification acoustique conformes à l’annexe 16 de la convention de Chicago, qui constitue le texte de base de la réglementation de l’aviation civile internationale.

Or, elle émet des doutes quant à la possibilité de continuer à utiliser les normes de l’OACI simultanément pour la fabrication des futurs types d’avions et celle de versions dérivées des appareils existants et pour la poursuite d’objectifs environnementaux au plan régional.

Pour autant, elle estime que les travaux d’élaboration de normes de certification en matière de bruit pour la conception des futurs avions devraient être poursuivis au sien de l’OACI, afin de permettre l’introduction de normes plus rigoureuses.

Elle considère, en effet, que le programme de travail actuel du CPEA (Comité sur la protection de l’environnement et l’aviation) – tel qu’approuvé lors de la 32ème session de l’OACI – peut déboucher, conformément aux exigences de la Communauté, sur la fixation d’une norme plus rigoureuse que la norme actuelle du chapitre 3 et sur l’établissement de règles transitoires pour faciliter le retrait progressif des avions les plus bruyants du chapitre 3. Mais pour y parvenir, elle juge nécessaire de participer, en étroite coordination avec les Etats membres, au programme de travail du CPEA, la décision devant être prise au plus tard lors de la 33ème session de cette assemblée générale.

Dans le cas où l’OACI ne parviendrait pas à répondre aux exigences de la Communauté en 2001, la Commission pourrait être amenée à préconiser l’adoption de propositions européennes en étroite coopération avec les autres régions industrialisées. Elle précise que toute suggestion de cette nature devra prendre en considération la nécessité de prévoir une clause de sauvegarde économique pour les pays en développement et tenir compte des effets des mesures envisagées sur la compétitivité.

En second lieu, elle préparera des mesures visant à promouvoir, sur la base de conditions objectives et non discriminatoires, l’introduction de mesures plus sévères au niveau régional, en particulier pour les aéroports.

? S’agissant des émissions de gaz, la Commission indique qu’elle participera activement au programme de travail du CPEA/5 (Comité sur la protection de l’environnement et l’aviation), en vue de parvenir à un accord sur des méthodes et des normes nouvelles d’ici à 2001.

Dans le cadre de son programme de travail actuel sur les émissions des moteurs d’avions, le CPEA évalue les progrès technologiques réalisés dans le domaine des avions subsoniques et supersoniques susceptibles d’agir sur les niveaux d’émission et de consommation de carburant.

La définition de nouveaux paramètres d’évaluation des émissions des avions en vue de remplacer ceux qui existent actuellement – basés sur le cycle atterrissage-décollage – et l’établissement de paramètres pour les phases d’ascension et de croisière, fait partie des priorités les plus urgentes du programme de travail du CPEA/5. Celui-ci a été approuvé lors de la 32ème session de l’assemblée générale de l’OACI, au cours de laquelle il a été jugé nécessaire que les travaux de l’OACI tiennent pleinement compte du protocole de Kyoto sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Dans ce contexte, la Commission envisagera d’autres mesures concernant les incidences au niveau régional et local des NOx (oxyde d’azote) et des autres émissions de gaz, destinées à accroître l’efficacité de la récente norme de l’OACI sur les NOx, qui n’est applicable qu’aux moteurs de conception nouvelle. Elle présentera ses conclusions en 2001.

> Enfin, elle continuera de renforcer son soutien aux organismes chargés de la gestion du trafic aérien et, en particulier, à Eurocontrol, pour améliorer l’efficacité des systèmes de gestion du trafic aérien( 1) et réduire ainsi les émissions dues aux avions( 2).

2. La création d’incitations économiques et réglementaires plus efficaces

Dans ce domaine, la Commission souhaite poursuivre trois objectifs :

– examiner la possibilité de mettre en place une taxation du kérosène ;

– étudier plusieurs alternatives de redevances environnementales ;

– poursuivre ses recherches actuelles sur la négociation des droits d’émission et la compensation des émissions de carbone.

> Afin de corriger les déséquilibres résultant de l’exonération de droits d’accises dont bénéficie le transport aérien, la Commission a, en novembre 1996, publié un rapport recommandant que les droits d’accises sur les huiles minérales soient également appliqués au kérosène. A la demande du Conseil, qui a souhaité connaître les effets de cette taxation, la Commission a fait réaliser une étude.

Les principaux résultats de cette étude montrent l’impact de l’imposition du taux minimal des droits d’accises sur le kérosène applicable sur le territoire de la Communauté européenne (245 euros/1 000 litres). Elle comporte, en outre, plusieurs scénarios, deux d’entre eux indiquant les effets d’une application de la taxe à toutes les routes au départ d’un aéroport de la Communauté (option A, proposée par la Commission) et ceux d’une application de la taxe à toutes les routes aériennes intra–communautaires, seuls les transporteurs de la Communauté étant concernés (option B).

Les résultats révèlent clairement que l’option A est plus efficace, sur le plan environnemental, que l’option B, puisque la première permet de réduire la consommation de carburant de 2,4 %, contre 0,5 % dans le cas de la seconde.

Pour autant, la Commission souligne que la mise en œuvre de l’option A nécessiterait des changements radicaux au sein de l’OACI, en ce qui concerne, en particulier, les accords bilatéraux sur les services aériens, qui n’autorisent la taxation qu’en cas d’accord réciproque. Or, ces changements ne pourront intervenir qu’au prix d’importantes concessions dans d’autres domaines.

C’est pourquoi la Commission estime qu’il convient de maintenir l’approche qu’elle avait proposée dans son rapport de 1996, dans l’attente d’une évolution de la réglementation internationale. En revanche, elle juge l’option B inacceptable, même si elle est envisageable au plan juridique. En effet, elle considère qu’elle ne permettrait pas d’atteindre le difficile équilibre entre les besoins environnementaux, les besoins économiques et les besoins du marché intérieur.

> Devant l’impossibilité, au stade actuel, de mettre en place la taxation du kérosène, la Commission étudie plusieurs alternatives de redevances environnementales.

Celles-ci pourraient consister en :

– une taxe ajoutée au prix du billet des passagers ;

– une taxe basée sur la distance parcourue et les caractéristiques des moteurs de l’avion, qui serait recouvrée par Eurocontrol et combinée avec une modulation des redevances en fonction des caractéristiques écologiques de l’avion ;

– une taxe associée aux redevances aéroportuaires d’atterrissage et de décollage.

La Commission indique que le travail préparatoire à l’instauration d’une redevance européenne sera coordonné avec les travaux actuellement menés dans le cadre du programme de travail du CPEA/5 de l’OACI concernant la modernisation du système des taxes d’environnement, dont les conclusions devraient être présentées à la 33ème session de l’assemblée générale en 2001. Pour la Commission, l’objectif est de parvenir à des décisions répondant aux besoins de la Communauté en 2001. Estimant toutefois qu’une action politique s’impose à brève échéance, elle indique que la Communauté européenne pourrait être amenée à agir dans le cas où l’OACI ne parviendrait pas à moderniser les règles actuelles.

> S’agissant de la négociation des droits d’émission, la Commission observe qu’il s’agit d’une notion nouvelle, qui n’a pratiquement pas encore été appliquée au transport aérien. Elle estime qu’une solution est toutefois susceptible d’y être apportée, selon trois modalités différentes :

– soit par les Etats, comme prévu dans le protocole de Kyoto ;

– soit par les compagnies, à l’échelle internationale ou nationale, de façon sectorielle ou non ;

– soit entre transporteurs aériens qui opèrent dans un aéroport imposant un contingent d’émissions.

? Dans le premier cas, la négociation des droits d’émission entre les Etats énumérés à l’annexe 1 de la convention-cadre sur les changements climatiques (FCCC) n’impose pas de contrainte sectorielle. Mais, pour la Commission, une telle situation est susceptible d’évoluer dans le cadre de la mise en œuvre du protocole de Kyoto, puisqu’il incombera aux Etats de décider si la possibilité de négocier des droits d’émission sera utilisée pour atteindre les objectifs concernant la réduction des émissions. Si la pression est exercée de manière inégale sur l’industrie aéronautique pour l’inciter à aider les Etats à remplir leurs engagements, des distorsions de concurrence pourraient en résulter.

? Quant aux compagnies, la Commission estime que les possibilités de négocier des droits d’émission entre elles à l’échelle internationale dépendront des règles qui devront être établies lorsqu’une plus grande souplesse sera introduite dans la mise en œuvre du protocole de Kyoto.

Tout dépendra des résultats de la prochaine conférence, au cours de laquelle les résultats du programme d’action adopté à Buenos Aires seront évalués.

La Commission soutient que l’on pourrait davantage recourir à la négociation des droits d’émission au niveau régional – communautaire, par exemple – en vue d’améliorer la situation sur le plan environnemental. A cet effet, il faudrait plafonner les émissions et établir des règles pour négocier les émissions au-dessous du plafond fixé. Ainsi, les secteurs en expansion, tels que le transport aérien, pourraient-ils acheter des droits d’émission à des secteurs en déclin ou à des secteurs dans lesquels les nouvelles technologiques permettent d’obtenir des réductions d’émissions de façon efficace.

La Commission estime que les effets d’un tel système pourraient être analogues à ceux résultat de l’imposition de redevances environnementales, car dans les deux cas, c’est en rendant les émissions dues au transport aérien plus onéreuses qu’on améliore la protection de l’environnement.

? Pour ce qui est de la négociation de droits d’émission au niveau d’un aéroport particulier, il serait nécessaire, selon la Commission, que des contingents d’émission globaux soient fixés pour cet aéroport en vue de les réduire progressivement et que des règles de transaction soient établies en accord avec les règles en vigueur pour l’attribution des créneaux horaires. Jugeant cette solution attrayante du fait de la logique économique qui l’inspire, la Commission a décidé de continuer à en examiner les possibilités de mise en œuvre.

> En ce qui concerne la compensation des émissions de carbone, la Commission voit dans la création de « puits de carbone », par exemple le reboisement, un moyen qui permettrait au transport aérien de compenser les effets de sa croissance sur l’environnement. Elle reconnaît toutefois que l’impact des activités de reboisement sur l’absorption des émissions de CO2 (dioxyde de carbone) est loin d’être une certitude scientifique( 3). C’est pourquoi, elle estime que la priorité à court terme doit viser à l’analyse des résultats de la recherche avant de tirer d’éventuelles conclusions sur les actions à entreprendre.

> Enfin, la Commission rappelle que les objectifs et les possibilités ouvertes par les accords dans le domaine de l’environnement sont exposés dans une communication présentée le 27 novembre 1996 (COM [96] 561 final). C’est ainsi que l’AEA (Association européenne des compagnies aériennes) s’est déclarée disposée à explorer avec la Commission les possibilités qu’offrirait la conclusion d’un accord volontaire et contraignant sur les émissions de CO2.

A cet égard, la Commission relève qu’il sera peut-être nécessaire d’inclure d’autres émissions ayant des effets sur l’atmosphère à l’échelle mondiale. En outre, elle s’interroge sur la question de savoir si de tels accords volontaires ne devraient pas également s’étendre aux exploitants et constructeurs des pays tiers, en particulier à ceux d’Amérique du Nord.

3. La mise en place d’un cadre communautaire pour les aéroports

Les actions envisagées par la Commission concernent les domaines suivants :

– le classement commun des nuisances sonores ;

– les règles à appliquer sur le plan de l’exploitation ;

– l’introduction de règles plus sévères sur le bruit dans les aéroports ;

– la promotion de l’intermodalité.

> La Commission constate que les redevances sur les nuisances sonores perçues dans plusieurs aéroports européens – sous la forme d’un supplément aux taxes d’atterrissage ou d’une redevance spécifique sur le bruit – sont actuellement basées sur des systèmes de classement des émissions sonores dues aux avions, qui ont été établis selon des principes variant d’un Etat à l’autre. Il n’existe pas de procédure ni de méthodologie communautaire pour le calcul de telles émissions sonores, les données de base utilisées à cette fin n’ayant pas fait l’objet des mêmes contrôles que les données de certification acoustique. Un certain nombre d’aéroports européens utilisent déjà un système de surveillance acoustique comme un moyen de lutter contre le bruit.

Dans ce contexte, la Commission observe que le retrait progressif des avions visés au chapitre 2 – celui-ci fixant une norme de certification acoustique de l’OACI – devrait fournir l’occasion d’adopter un système de classement commun des nuisances sonores pour les avions du chapitre 3, afin d’éviter une nouvelle prolifération de systèmes locaux différents. A cette fin, elle propose pour cette année que le classement reflète la contribution à l’exposition au bruit des riverains des aéroports et repose soit sur les valeurs de certification, soit sur les données relatives aux émissions sonores dues au trafic aérien.

Utilisées dans de nombreux pays comme base des redevances et des règles d’exploitation, les valeurs de certification sont des valeurs « établies » s’appuyant sur une procédure détaillée recommandée par l’OACI. La procédure de certification a pour objet d’établir une méthode permettant de comparer les émissions sonores de différents avions avec ce qui est prévu dans la réglementation. La Commission note toutefois que les procédures ne donnent pas toujours des résultats représentatifs pour les vols normaux.

? En ce qui concerne la mesure des émissions sonores et les règles d’aménagement du territoire, la Commission rappelle que son Livre Blanc sur le développement futur de la politique commune des transports du 2 décembre 1992 a annoncé des mesures destinées à :

– introduire un indice standard d’exposition au bruit ;

– établir une méthode standard de calcul des niveaux d’exposition au bruit ;

– mettre en œuvre des systèmes de surveillance acoustique et des règles de zonage et d’aménagement du territoire aux abords des aéroports tenant compte du bruit.

Or, elle constate que les dispositions appliquées par de nombreux aéroports de la Communauté varient d’un Etat membre à un autre. C’est pourquoi la Commission est favorable à la création d’un indice commun d’exposition au bruit ainsi qu’à la définition d’une méthode standard de calcul de l’exposition au bruit aux abords des aéroports. Ces instruments autoriseraient une comparaison entre les niveaux et les limites d’exposition au bruit, et constitueraient un cadre de référence général pour évaluer la compatibilité des dispositions relatives aux capacités des aéroports avec les objectifs environnementaux.

En matière d’aménagement du territoire, la Commission confirme que les décisions et le contrôle du respect des règles sont et demeureront du ressort des autorités locales et nationales. Elle estime nécessaire que celles-ci prennent des mesures adaptées dans les environs des aéroports et propose que le Schéma de développement de l’espace communautaire (SDEC) fournisse un cadre permettant de progresser dans ce domaine. Elle suggère également d’étudier, en étroite collaboration avec les Etats membres, la possibilité d’établir des pratiques recommandées concernant les décisions d’affectation du sol à proximité des aéroports.

Enfin, elle proposera que l’existence de règles d’aménagement du territoire correctes soit considérée comme un critère d’éligibilité pour l’obtention d’une aide financière aux projets de construction et d’extension d’aéroports au titre des différents instruments financiers de la Communauté.

? S’agissant de l’exploitation, la Commission estime qu’il incombe aux autorités des Etats membres de prendre les mesures nécessaires dans ce domaine, en vue de réduire les nuisances sonores dans les aéroports de la Communauté. Il serait contraire au principe de subsidiarité que la Communauté prenne des initiatives d’harmonisation, par exemple, pour les vols de nuit.

Elle indique toutefois que, en étroite coopération avec les parties intéressées et les Etats membres, elle examinera les voies possibles en vue d’établir, d’une part, un cadre communautaire pour les procédures décisionnelles relatives à la restriction des activités pour des motifs touchant à l’environnement des aéroports de la Communauté et, d’autre part, une structure destinée à assurer la diffusion des meilleures règles d’exploitation et la réduction des nuisances sonores.

? En ce qui concerne l’introduction de règles plus sévères sur le bruit dans les aéroports, le souci de la Commission est de parvenir à faire prendre en compte les besoins de l’Europe. En effet, actuellement, toute introduction de nouvelles normes antibruit au niveau international est basée sur la résolution A-28-3 de 1990 de l’OACI relative au retrait progressif des avions du chapitre 2. Cette résolution a fixé une date butoir pour l’établissement d’une règle de non–exploitation, qui a été également adoptée par la réglementation communautaire régissant les vols intra-communautaires et internationaux. Par conséquent, aucune décision d’un Etat membre visant à anticiper l’introduction de règles pour lutter contre le bruit n’est conforme à la législation communautaire( 4).

Pour la Commission, il importe que, dans les débats sur les normes de certification futures pour le bruit (« chapitre 4 »), l’Europe puisse faire valoir la nécessité de distinguer clairement les normes de certification des règles régionales relatives à leur mise en œuvre, bien qu’une telle demande n’ait suscité à ce jour qu’un appui modéré au sein de l’OACI.

La mise en place d’un système communautaire d’identification des aéroports particulièrement exposés aux nuisances sonores pourrait ouvrir la voie à une solution plus équilibrée et plus acceptable et contribuerait à résoudre les problèmes qui se posent dans les différents aéroports de la Communauté.

Un tel système consisterait à établir des règles communautaires objectives et contrôlables en vertu desquelles à la demande de l’Etat membre concerné, un aéroport pourrait, à la suite d’une décision de la Commission et après examen de l’affaire par un comité consultatif, adopter des règles plus rigoureuses en matière d’émissions sonores avant qu’elles ne soient généralisées dans la Communauté. La Commission souligne que, pour assurer le respect des exigences du marché intérieur et éviter les distorsions de concurrence, il est nécessaire de fonder le droit d’introduire des règles plus sévères sur le respect de critères clairs et d’objectifs définissant une situation exceptionnelle et sur l’emploi de « balises » communes pour déterminer les incidences du bruit sur l’environnement de l’aéroport. Par exemple, une telle autorisation se justifierait lorsqu’il s’agit d’éviter de nouvelles restrictions d’exploitation ou de faciliter l’acceptation, par la population concernée, des projets d’extension d’un aéroport.

Elle considère qu’une autre manière de régler le problème des aéroports particulièrement exposés aux nuisances sonores pourrait consister à introduire des critères environnementaux dans les règles d’attribution des créneaux horaires dans les aéroports encombrés. Cette mesure permettrait de privilégier l’exploitation d’avions plus silencieux lors de l’établissement des critères de priorité pour la redistribution des créneaux et de veiller, dans tous les cas, à ce que les transporteurs aériens ne puissent remplacer leur matériel actuel par des avions moins respectueux de l’environnement.

? En dernier lieu, la Commission plaide en faveur du développement de l’intermodalité, en particulier entre le rail et l’avion. Dans cette perspective, elle rappelle qu’elle travaille actuellement à la révision des orientations pour le développement du RTE-T (Réseaux transeuropéens dans le secteur des transports), où la liaison entre les aéroports et les autres modes de transport, notamment le rail, bénéficiera d’une attention particulière dans le but de créer les conditions de connexion efficaces.

4. La promotion de la recherche-développement

Lors de la mise en œuvre du 5ème PCRD, la Commission veillera en priorité à :

– développer les moyens pour quantifier les changements dans l’atmosphère qui pourraient être causés par le transport aérien ;

– assister l’industrie aéronautique dans le développement des améliorations majeures dans la performance environnementale des aéro-moteurs et des avions.

En outre, les services de la Commission ont l’intention d’établir une position commune dans le cadre de la procédure OACI / CPEA (Comité sur la protection de l’environnement et l’aviation) et de renforcer la coopération internationale dans le domaine de la recherche environnementale.

Réactions suscitées et état d'avancement de la procédure communautaire :

> Le programme français d’action contre le risque de changement climatique pour la période 2001-2010 qui a été adopté le 19 janvier dernier lors de la réunion de la Commission interministérielle sur l’effet de serre (CIES)( 5), a identifié plusieurs mesures évoquées dans la présente communication :

– l’objectif de stabiliser d’ici 2020 les émissions du secteur des transports ;

– la possibilité de faire appel, dans le cadre européen, à des allégements fiscaux favorisant l’usage d’équipements plus efficaces, ainsi qu’à la fiscalité environnementale pour modérer la consommation ; en outre, au titre des orientations à moyen terme arrêtées par le Gouvernement en matière énergétique, il est prévu d’appliquer la Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) aux consommations d’énergie des entreprises en contrepartie d’allégements de prélèvements sociaux de montant équivalent, afin de favoriser l’emploi ;

– l’accent mis sur la nécessité, pour certaines mesures, en particulier les instruments économiques, d’être établies ou harmonisées au niveau européen, d’autant que de nombreux Etats membres de l’Union européenne adoptent, dans ce domaine, des dispositions de même nature.

Par ailleurs, le programme souligne l’importance particulière que la France attache à la réussite de la conférence de La Haye, qui se tiendra au mois de novembre prochain et déterminera l’essentiel des conditions d’application du protocole de Kyoto. Il juge indispensable le succès de la 6ème Conférence des Parties à la convention climat( 6), pour maîtriser le changement climatique.

> Le ministère de l’équipement, du logement et des transports a accueilli favorablement la communication de la Commission. Le ministère souligne le fait que la Commission s’est efforcée d’exposer des orientations sur tous les points, tout en envisageant les moyens susceptibles d’être mis en œuvre. A cet égard, en ce qui concerne les incitations fiscales, il relève que la France a instauré une taxe sur le bruit des avions depuis une vingtaine d’années, qui a été remplacée par la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes) en 1999.

En second lieu, il estime que la communication met en évidence les difficultés auxquelles se heurte l’articulation des mesures relevant de la compétence respective de l’OACI, de l’Union et des Etats. Il considère que, s’agissant par exemple des normes sur les émissions sonores, il est nécessaire que l’Union adopte une position commune, afin de mieux défendre ses intérêts, que ce soit au sein de l’OACI, d’autant que la Commission n’y est pas représentée en tant que telle et que les Etats membres de l’Union ne disposent que de quinze voix sur cent quatre vingt, ou dans le cadre du contentieux opposant l’Union européenne aux Etats-Unis à propos du règlement qui interdira l’immatriculation en Europe d’avions équipés de « hushkits »( 7).

En revanche, un équilibre est difficile à établir entre l’harmonisation et le respect du principe de subsidiarité pour ce qui est des mesures plus sévères touchant les aéroports qui posent un problème de bruit particulier, ou de la définition d’indices de bruit communs dans le projet de directive sur le bruit.

> Quant aux associations, la FNAUT (Fédération nationale des associations d’usagers des transports) soutient les propositions de la Commission concernant :

– l’amélioration de la gestion du trafic aérien ;

– la taxation du kérosène pour toutes les routes au départ d’un aéroport de la Communauté ;

– la promotion de l’intermodalité, la substitution du rail à l’avion devant être facilitée pour les vols de courte distance.

La FNAUT formule également plusieurs propositions tendant, en particulier :

– à limiter l’évasion fiscale résultant de l’avitaillement dans les pays tiers, au moyen du reversement d’une partie de la taxe sur le kérosène aux Etats qui appliqueraient le taux communautaire ;

– à affecter le produit de la taxe sur le kérosène au financement du réseau à grande vitesse (TGV et ICE) ;

– à supprimer les formules de fidélisation de la clientèle, qui favorisent le transport aérien aux dépens des autres modes de transport.

> En revanche, les compagnies aériennes, tout en approuvant la prise en compte par la Commission des exigences environnementales, conteste certaines mesures préconisées, dont cette dernière n’a pas évalué réellement la portée. Elles contestent le fait que le transport aérien puisse être considéré comme la seule activité polluante et regrettent l’absence d’un débat de fond sur la contribution du transport aérien à l’économie européenne.

L’AEA a adressé à la Commission une proposition d’engagement volontaire en vertu duquel les compagnies se fixent pour objectif, conformément au protocole de Kyoto, de limiter la progression de leur consommation d’énergie d’ici à 2012 par rapport à celle d’aujourd’hui et à celle de 1990. Elles conviennent toutefois que le contrôle du respect de cet engagement peut soulever certaines difficultés, d’autant plus qu’elles ignorent pour le moment la position des petites compagnies sur cette suggestion.

La communication de la Commission a été examinée lors du Conseil « Transports » du 28 mars dernier. L’Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark et la Belgique ont insisté sur la nécessité de mesures fiscales tendant à réduire les incidences environnementales des transports aériens, même au niveau européen à défaut de mesures internationales. Mais d’autres ministres, comme ceux de l’Espagne et de l’Irlande, ont au contraire relevé qu’une telle taxe doit être adoptée en priorité au niveau international. La commissaire aux transports Mme Loyola de Palacio a réaffirmé qu’une taxe au niveau européen défavoriserait la compétitivité des compagnies aériennes européennes et doit donc être traitée dans le cadre de l’Organisation de l’aviation civile internationale.

Les ministres ont évoqué également les moyens de réduire les nuisances sonores de l’aviation. La ministre belge, Mme Isabelle Durant, a insisté sur l’importance de tenir compte des préoccupations des riverains des aéroports mais aussi sur la difficulté d’adopter des mesures nationales ou régionales. A l’inverse, la plupart des ministres ont soutenu que les mesures concernant l’environnement des aéroports sont essentiellement du ressort des Etats membres, voire des autorités régionales.

A l’issue des débats, les ministres ont adopté des « conclusions » qui définissent trois domaines d’actions prioritaires pour intégrer les transports aériens dans la politique de développement durable définie lors de la conférence internationale de Kyoto en 1997 :

1) l’élaboration et la mise en œuvre rapide de normes internationales plus rigoureuses sur les émissions sonores, « ainsi qu’un régime transitoire approprié pour l’élimination des aéronefs les plus bruyants ». Les ministres reconnaissent à cet égard la nécessité de préparer une stratégie européenne pour la 33ème assemblée de l’OACI de septembre 2001 ;

2) l’élaboration de propositions pour l’introduction de mesures « d’incitations économiques visant à réduire les incidences sur l’environnement, en particulier les émissions gazeuses des différentes activités de transports aériens », mais en tenant compte des risques pour la concurrence et de « l’utilité de passer des accords librement consentis avec l’industrie aéronautique » ;

3) la poursuite de l’élaboration, « conformément au principe de subsidiarité et en tenant compte des meilleures pratiques, d’un cadre communautaire général de lignes directrices pour le développement d’aéroports respectueux de l’environnement ».

Conclusion :

La communication de la Commission confirme les deux exigences auxquelles l’Union est appelée à être confrontée dans plusieurs dossiers :

– adopter une démarche commune pour orienter les négociations internationales dans le sens de ses ambitions et de ses intérêts. Sur ce point, les enjeux de la 33ème session de l’assemblée générale de l’OACI, qui se tiendra en 2001, rappellent, à certains égards, ceux de la conférence de l’OMC à Seattle : dans l’un et l’autre cas, la volonté de l'Union européenne est de promouvoir une régulation plus exigeante ;

– concilier harmonisation communautaire et respect du principe de subsidiarité, en particulier pour ce qui touche aux mesures fiscales ou aux normes antibruit.

Sur la proposition du Président Alain Barrau, la Délégation a décidé d’inclure l’objet de cette communication dans le rapport d’information qui sera consacré au transport aérien.

 

(1) Voir l’exposé sur le document E 1406, relatif à la création du ciel unique européen.
(2) La Commission cite un rapport sur les effets de l’aviation à l’échelle mondiale, selon lequel l’amélioration de la gestion du trafic aérien pourrait permettre de réduire la consommation de carburant de 6 à 12 % dans les vingt prochaines années.
(3) Elle se réfère, sur ce point, aux articles du New Scientist du 24 octobre 1998.
(4) La Commission cite sa décision du 22 juillet 1998 concernant l’accès à l’aéroport de Karlstadt.
(5) Cette réunion a été consacrée aux conditions dans lesquelles la France va renforcer sa mobilisation dans la lutte contre les risques de changement climatique conformément à ses engagements internationaux.
(6) La France accueillera la conférence préparatoire au mois de septembre prochain.
(7) Les « hushkits » sont des réducteurs de bruit. Les avions ainsi équipés provoquent malgré tout davantage de nuisances autour des aéroports que les moteurs modernes. Pour autant, un avion de fabrication ancienne – par exemple classé chapitre 2 de 28 ans – équipé d’hushkits peut être classé dans une catégorie moins bruyante et respecter ainsi les normes du chapitre 3 de l’OACI. Un règlement du Conseil du 29 avril 1999 vise à empêcher une aggravation des nuisances sonores provoquées par certains anciens types d’avions, en interdisant à partir de mai prochain dans la Communauté l’immatriculation des avions les plus bruyants équipés d’hushkits, ce qui a conduit les Etats-Unis à entamer une procédure devant l’OACI à l’encontre de ce règlement.