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Document E945
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs et modifiant les directives 73/239/CEE et 92/49/CEE (Quatrième directive assurance automobile).


E945 déposé le 3 novembre 1997 distribué le 13 novembre 1997 (11ème législature)
   (Référence communautaire : COM(1997) 0510 final du 10 octobre 1997, transmis au Conseil de l'Union européenne le 13 octobre 1997)

  • Travaux en Délégation

    Ce document a été examiné

  • Adoption par les instances communautaires

    Ce document a été adopté définitivement par les instances de l'Union européenne :

    Directive 2000/26/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 mai 2000 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs et modifiant les directives 73/239/CEE et 88/357/CEE du Conseil (Quatrième directive sur l'assurance automobile).
    (JO L 181 du 20 juillet 2000) (Notification d'adoption publiée au JOLD du 05/08/2000 p.12199)

 Base juridique :

Articles 57 paragraphe 2 et 100 A du traité instituant la Communauté européenne.

 Procédure :

Procédure visée à l’article 189 B du Traité: codécision, majorité qualifiée du Conseil et consultation du Comité économique et social.

 Motivation et objet :

La proposition de directive tend à mieux protéger les intérêts des victimes d’accidents de la route survenus dans un Etat membre autre que leur pays de résidence et de leur garantir un traitement comparable, quels que soient les endroits de la Communauté où les accidents se produisent.

La première directive sur l’assurance automobile, adoptée en 1972 (72/166/CEE), imposait une obligation d’assurance de la responsabilité civile dans toute la Communauté économique européenne de l’époque.

Les deuxième et troisième directives « assurance automobile » (84/5/CEE et 90/232/CEE), ont pris en compte les accidents de la circulation survenant dans l’Etat de résidence de la victime et causés par des véhicules immatriculés et assurés dans un autre Etat membre ou par des véhicules immatriculés dans le même Etat mais assurés auprès d’une compagnie dont le siège social est situé dans un autre Etat.

Cependant une lacune subsistait en ce qui concerne les conditions d’indemnisation des victimes d’accidents survenus dans un autre Etat membre que celui de leur résidence.

La Commission ayant échoué a obtenir la signature d’un accord entre les organisations professionnelles des assurances, le Parlement européen a adopté le 26 octobre 1995, en vertu de l’article 138 B du traité CE, une résolution par laquelle il invitait la Commission à proposer une directive qui permettrait aux victimes d’exercer leur recours dans leur pays de résidence et de disposer d’un droit d’action directe contre l’assureur de leur adversaire.

Il est en effet plus aisé, pour des raisons de langue et de pratique juridique, d’obtenir le règlement d’un sinistre dans son propre pays qu’à l’étranger. De surcroît, à l’étranger, en raison de la position défavorable de la victime, les assureurs peuvent être tentés d’adopter des comportements dilatoires et il est même parfois difficile, pour la victime, de connaître le nom de l’assureur à mettre en cause.

Avec l’augmentation des flux de circulation entre Etats membres, il est manifeste que ces victimes doivent bénéficier d’une protection particulière.

Avec cette « quatrième directive assurance automobile », la Commission propose donc, en tenant compte des orientations tracées par le Parlement européen, de compléter les trois premières directives du secteur de l’assurance automobile et de modifier les conditions d’accès à l’activité d’assurance et d’exercice de cette activité sur le territoire de l’Union, fixées par les directives 73/239/CEE et 92/49/CEE.

 Appréciation au regard du principe de subsidiarité :

Il appartient à la Communauté européenne de supprimer les entraves, même indirectes, à la libre circulation des personnes et des services d’assurance et de consolider le marché unique de l’assurance.

 Contenu et portée :

Le champ d’application de la proposition est limité aux victimes des accidents survenus dans un Etat membre autre que leur pays de résidence et causés par un véhicule assuré auprès d’une entreprise établie dans un Etat membre autre que le pays de résidence de la victime et immatriculé dans un Etat membre autre que son pays de résidence. Il s’agit donc de compléter les effets de la carte verte mise en place par les entreprises d’assurance à la suite de la deuxième directive assurance automobile. La carte verte permet aujourd’hui aux victimes d’accidents survenus dans leur pays de résidence et provoqués par un véhicule immatriculé ou assuré dans un autre Etat membre de soumettre leur demande d’indemnisation à l’assureur du véhicule en cause par l’intermédiaire des Bureaux de carte verte présents sur tout le territoire de l’Union. .

Les nouveaux droits portent sur six points.

- En premier lieu, chaque Etat membre devra introduire dans sa législation, un droit d’action directe des personnes désignées ci-dessus, à l’encontre de l’assureur concerné. Pour les Etats membres dont les législations ne prévoient pas d’action directe à l’encontre de l’assureur de l’auteur de l’accident (ce n’est pas le cas de la France), un risque de discrimination entre les victimes « visiteurs » et les victimes « domestiques » est à craindre lors de l’entrée en vigueur de la directive. Dans l’exposé des motifs de sa proposition, la Commission suggère à ces Etats, soit d’étendre l’action directe à toutes les victimes, soit de considérer que cette discrimination positive est justifiée par la situation désavantageuse des victimes-visiteurs.

Cette action directe devrait s’avérer particulièrement utile s’il existe une incertitude quant à la personne responsable ou que celle-ci est hors d’atteinte ou sans ressources. Ce nouveau droit prend toute son importance, en particulier pour les règlements extrajudiciaires (environ 90% des cas), parce qu’il est combiné avec le mécanisme, développé au point suivant, de la présence obligatoire dans tous les Etats membres d’un représentant de chaque entreprise d’assurance, chargé du règlement des sinistres.

Mais la directive ne modifie pas les conventions de droit international privé portant sur l’attribution des compétences juridictionnelles et la détermination du droit applicable, qui ne sont pas nécessairement ceux du pays de résidence de la victime (la compétence juridictionnelle est déterminée sur la base des dispositions de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale)

- Chaque entreprise d’assurance d’origine communautaire qui opère sur le territoire de l’Union sur la base de l’agrément unique prévu par la directive 73/239/CEE modifiée par la directive 92/49/CEE, ou d’origine extra-communautaire qui opère en vertu d’une autorisation prévue par la même directive, doit nommer un représentant chargé du règlement des sinistres dans chacun des Etat membres. La personne victime d’un dommage survenu en dehors de son pays d’origine, pourra donc s’adresser, dans son propre pays, à un interlocuteur compétent et disposant des pouvoirs suffisants pour se charger des dossiers d’indemnisation. L’exigence d’un représentant n’exclut pas le recours direct de la victime ou de son assureur contre l’auteur du dommage ou son assureur.

Ce représentant, librement choisi par l’entreprise, doit posséder les qualifications appropriées ; il peut être une filiale ou une agence ou un bureau ad hoc , mais sa désignation devient une condition préalable nouvelle à l’octroi de l’agrément accordé pour l’exercice de l’activité sur le territoire européen ; le défaut de désignation entraînera l’interdiction d’exercer l’activité dans la branche responsabilité civile automobile. Il semble que dans de nombreux cas les Bureaux de carte verte seront en mesure de remplir ces nouvelles fonctions.

Le représentant agit selon les instructions que lui donne l’entreprise d’assurance et ses actes engagent cette dernière à l’égard de la victime. Il doit pouvoir représenter ou faire représenter l’assureur devant les juridictions. Toutefois, il convient de souligner que, dans la majorité des cas, conformément à la Convention de Bruxelles citée précédemment, les juridictions compétentes sont celles du pays où l’accident s’est produit.

- Au-delà de la présence de cet interlocuteur, la proposition de directive entend garantir le contenu même du droit de la victime en fixant des délais au règlement du litige. Les Etats membres devront prévoir l’obligation pour les assureurs exerçant sur leur territoire, sous peine de sanctions, de faire, dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la victime notifie sa demande d’indemnisation soit directement soit par l’intermédiaire du représentant, une offre d’indemnisation dans le cas où la responsabilité n’est pas contestée et où le dommage a été chiffré. Lorsque la responsabilité n’est pas clairement établie où lorsque le dommage n’est pas quantifié, l’assureur a l’obligation d’apporter la réponse appropriée et le délai prévu pour faire l’offre d’indemnisation est suspendu jusqu’à l’obtention des informations nécessaires.

Les sanctions prévues à l’encontre des assureurs relèvent de la compétence des Etats membres, mais elles devront être de nature à garantir que l’assureur remplira ses obligations vis à vis des victimes. Ces sanctions, sans doute pécuniaires, devront être distinctes du refus d’octroi ou du retrait de l’agrément pour non désignation d’un représentant.

- Pour que la victime puisse faire valoir ses droits auprès du représentant de la compagnie adverse, encore faut-il qu’elle puisse identifier cette dernière. Il ressort d’une enquête de la Commission que la disposition de la directive 90/232/CEE qui oblige les Etats à prendre les mesures nécessaires pour garantir que les personnes impliquées dans un accident de la circulation soient en mesure de connaître dans les meilleurs délais le nom des entreprises d’assurance, n’a pas été transposée de manière satisfaisante dans tous les Etats membres. C’est pourquoi, l’article 4 de la proposition fait obligation aux Etats membres de créer ou d’agréer un organisme d’information ayant pour mission de tenir un registre des véhicules immatriculés sur leur territoire, des entreprises d’assurance de la responsabilité civile attachée à ces véhicules et de leurs représentants chargés du règlement des sinistres dans chacun des Etats membres. Les législations nationales devront conférer aux victimes d’accidents survenus dans un autre Etat membre que celui de leur résidence, le droit d’obtenir de l’organisme d’information du pays de leur résidence ou du pays d’immatriculation du véhicule, le nom de l’assureur et le numéro de police d’assurance du véhicule en cause ainsi que le nom du représentant chargé du sinistre. Si le véhicule n’est pas valablement assuré, l’organisme d’information communique à la victime le nom et l’adresse du propriétaire ou du conducteur habituel.

Une bonne coopération entre les organismes d’information des différents Etats membres sera indispensable pour permettre le fonctionnement de la structure proposée qui devra probablement être gérée de manière centralisée au niveau de chaque Etat.

- Si l’ensemble des dispositions précédentes améliorent le sort des victimes-visiteurs, ces dernières peuvent néanmoins se heurter, malgré les sanctions prévues, à l’absence de représentant ou à l’attitude dilatoire de l’assureur. L’article 5 de la proposition prévoit, pour cette raison, l’obligation pour les Etats membres de créer un organisme d’indemnisation qui interviendra dans un délai de deux mois à compter de l’introduction de la demande d’indemnisation que lui présentera la victime, en l’absence de représentant chargé du règlement des sinistres, ou lorsque l’assureur n’aura pas fait d’offre dans les délais impartis ou n’aura pas répondu ou aura rejeté la demande sans motif. Cet organisme sera subrogé dans les droits de l’assureur pour procéder à l’indemnisation de la victime s’il y a lieu et pourra ensuite engager une action récursoire contre lui. La proposition prévoit même la possibilité, pour l’organisme qui a indemnisé la victime, d’obtenir le remboursement automatique de sa créance dans un délai de deux mois par son homologue du pays d’établissement de l’assureur, ce dernier ne pouvant plus contester la créance qui lui sera finalement présentée. Ce dispositif, un peu compliqué, a une vocation dissuasive et organisera un système de contrôles réciproques entre les assureurs dans la mesure où, dans la plupart des cas, les fonctions des organismes d’indemnisation seront exercées par les fonds de garantie automobile financés par les assureurs, qui se sont généralisés dans la Communauté à la suite de l’adoption de la directive 84/5/CEE.

- Enfin, si l’identification de l’assureur s’est avérée impossible, le véhicule doit être traité comme un véhicule non assuré et la réparation du dommage sera à la charge du fonds de garantie de l’Etat membre de la résidence de la victime, lequel pourra ensuite faire valoir sa créance auprès du fonds de garantie de l’Etat membre où le véhicule a son stationnement habituel, dans les mêmes conditions qu’au point précédent.

L’hypothèse où le véhicule lui-même n’a pas été identifié est couverte par le mécanisme du système de carte verte mis en place par la directive 84/5/CEE, qui désigne comme débiteur final le fonds de garantie du pays où l’accident a eu lieu.

Les Etats membres disposeront d’un délai de dix-huit mois à compter de sa notification pour se conformer à la directive,. Un autre délai, de vingt-quatre mois, courra à compter de la notification pour permettre la mise en place concrète des dispositions prévues par la directive.

 Textes législatifs nationaux susceptibles d'être modifiés 

La proposition de directive touche aux principes fondamentaux des obligations civiles et commerciales (régime de la responsabilité civile, article L 211-8 et suivants du code des assurances sur les procédures d’indemnisation).

 Réactions suscitées et état d'avancement de la procédure communautaire :

La proposition est unanimement saluée en France par les professionnels de l’assurance et en particulier par l’Association française des sociétés d’assurance et le groupement des entreprises mutuelles d’assurances(GEMA), comme un texte satisfaisant venant combler une lacune importante dans le marché unique de l’assurance.

Les associations de défense des consommateurs et l’Institut national de la consommation n’ont pas d’observations à formuler à l’heure actuelle.

Aucune difficulté majeure n’a été signalée par les différents ministères concernés et le gouvernement français entend soutenir la proposition dans ses dispositions actuelles.

Il s’agit d’une harmonisation « par le haut » du droit des assurances, qui va contribuer à généraliser dans l’Union européenne le droit d’action directe des victimes contre l’assureur adverse et l’obligation pour ce dernier de faire, sous peine de sanction, une offre d’indemnisation dans des délais fixés par la loi.

Le droit interne français, qui a inspiré en partie le contenu de la proposition, est l’un des plus protecteur du droit des victimes d’accidents de la circulation, en particulier depuis la loi du 5 juillet 1985, « loi Badinter ».

Les entreprises d’assurance françaises ne peuvent donc que se féliciter de ce qui entraînera pour elles une réduction des distorsions de concurrence résultant des moindres garanties admises par les législations de certains Etats membres.

Le coût qui résultera de la création des divers organismes mentionnés par la directive n’a pas été chiffré, ni par les professionnels, ni par le ministère de l’économie, des finances et de l’industrie. Il ne devrait pas être très élevé puisque seul l’organisme d’information sera en France une réelle novation. Cet organisme, qui nécessitera la constitution d’un fichier national des véhicules automobiles immatriculés en France et de leurs propriétaires, correspond à un véritable besoin, mais nécessitera sans doute un avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). On peut craindre que le délai de vingt-quatre mois prévu par la proposition de directive pour sa mise en place soit un peu court. Ce nouveau droit à l’information des victimes est très important et nécessitera une parfaite coopération entre les entreprises d’assurance et une grande transparence dans la gestion des informations.

Le droit français des assurances a généralisé depuis plusieurs années l’obligation de la clause « recours défense » dans les contrats, ce qui répond, par avance, à plusieurs dispositions de la directive sur le règlement des sinistres.

Cette directive met cependant une nouvelle fois en lumière la grande complexité du droit communautaire des assurances, qui résulte du fait que les directives se complètent, se répondent et se juxtaposent, rendant l’ensemble difficilement lisible. Il est urgent, comme le suggère la Commission, de procéder à sa codification.

Le Rapporteur considère qu’une adoption rapide de cette proposition de directive est souhaitable.

 Conclusion :

Ce texte n’appelle pas, en l'état actuel des informations de la Délégation, un examen plus approfondi.