
ASSEMBLÉE NATIONALE
COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES
COMPTE RENDU N° 4
(Application de l'article 46 du Règlement)
Mardi 13 octobre 1998
(Séance de 17 heures)
Présidence de M. Jean Le Garrec, président
SOMMAIRE
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Audition, en présence de la presse, de M. Pierre Joxe, Premier président de la Cour des comptes, sur le rapport annuel de la Cour des comptes sur la sécurité sociale
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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a entendu M. Pierre Joxe, Premier président de la Cour des comptes, accompagné de M. Gabriel Mignot et de Mme Anne-Marie Boutin, respectivement président et rapporteur général de la sixième chambre de la Cour des comptes.
Le président Jean Le Garrec a relevé que le rapport annuel 1998 de la Cour des comptes sur la sécurité sociale présentait la caractéristique dêtre le premier à examiner lexécution dune loi de financement, en loccurrence celle de 1997.
Il est regrettable que la présentation de ce rapport volumineux ait lieu si tardivement alors que lannée passée, M. Pierre Joxe avait été entendu par la commission dès le 1er octobre. Des contacts plus réguliers doivent se nouer entre le Parlement et la Cour des comptes, pour préparer lexamen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce document, qui constitue un outil essentiel pour le travail en cours de la commission, lui aurait été encore plus utile il y a quelques semaines. Il est vrai que la Cour a rencontré quelques difficultés pour disposer à temps des données comptables nécessaires à lélaboration de son rapport.
Le précédent président de la commission, M. Claude Bartolone, après avoir consulté les rapporteurs, avait soumis lannée passée au premier président de la Cour des comptes une liste de demandes denquêtes dont une partie a pu être satisfaite. Le rapport de la Cour aborde en effet les problèmes de lACOSS et de lURSSAF, établit les bilans de la convention des infirmières, de lassurance-vieillesse des parents au foyer ou de lallocation déducation spéciale. Cette année, dautres requêtes de ce type pourront être formulées par la commission qui pourrait, plus largement, étudier avec la Cour les modalités dune collaboration ne se limitant pas à la commande de telles études.
M. Pierre Joxe a tout dabord insisté sur le fait que la présentation devant le Parlement dun rapport de la Cour des comptes sur une loi de financement de la sécurité sociale constituait une première. Ce rapport porte en effet sur la première loi de financement, cest à dire celle de 1997. A la suite de la réforme de la Constitution ayant prévu le dépôt annuel au Parlement de ce projet de loi de financement, les fonctions dévolues à la Cour des comptes se sont élargies aux finances sociales. Jusquà cette date, une seule chambre de la Cour était compétente pour les questions sociales ; à linitiative du Premier président, ce domaine est actuellement couvert par deux chambres, dont lune est spécifiquement compétente en matière de protection sociale.
Dans les années 70, le budget de lEtat représentait une masse supérieure en volume à celle du budget social. Aujourdhui et depuis plusieurs années, la situation est inversée : le projet de loi de financement de la sécurité sociale porte sur près de 2 000 milliards de francs tandis que le budget de lEtat sélève à 1 700 milliards.
Limportance des sommes en jeu explique le volume conséquent du rapport de la Cour des comptes, ce qui a rendu nécessaire la rédaction dun résumé de ce travail qui, sil en fait la synthèse, nengage pas formellement la Cour. Le rapport définitif résulte de lexamen comptable des conditions dexécution de la loi de financement de la sécurité sociale, des contrôles menés en toute indépendance par la Cour des comptes, de ceux réalisés par les chambres régionales des comptes et des travaux des Comités départementaux dexamen des comptes des organismes de sécurité sociale (CODEC).
La Cour des comptes a éprouvé quelques difficultés à exercer son contrôle sur les comptes des organismes sociaux, puisque ceux-ci nont été communiqués à la commission des comptes que le 22 septembre 1998. Il est impératif que des comptes à la fois fiables et homogènes puissent être adressés en temps voulu à la juridiction financière.
Au vu des chiffres disponibles, il apparaît que les deux objectifs posés dans la loi de financement pour 1997, la réduction du déficit du régime général dune part et la baisse des dépenses dassurance maladie dautre part, ont été respectés.
Il faut rappeler, enfin, que la Cour a eu loccasion dans ses précédents rapports de formuler des recommandations à ladresse de lexécutif et des organismes sociaux. Dans la plupart des cas, le bien-fondé de ces recommandations a été reconnu et près de 60 % dentre elles ont même connu un début dapplication.
M. Gabriel Mignot a ensuite exposé les conditions dapplication de la première loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 en notant que le bilan pouvant en être fait était contrasté. La Cour sest heurtée à des difficultés tenant aux insuffisances et au manque de qualité des informations disponibles pour apprécier lévolution des comptes sociaux. Il nest pas acceptable que les comptes pour lannée 1997 ne soient arrêtés quen septembre 1998 ; dailleurs des opérations de régularisation doivent encore intervenir dans les semaines à venir. De plus, lhétérogénéité des comptabilités selon les caisses et les régimes rend le travail de la Cour plus difficile. Du fait de la réforme de la comptabilité désormais fondée sur le principe des droits constatés et non plus sur celui des encaissements et décaissements, deux « langages » différents coexistent actuellement dans le système comptable, compliquant encore les conditions dexercice du contrôle financier.
Les objectifs quantitatifs fixés par la loi de financement pour 1997 ont été globalement atteints. Le total des recettes atteint 1 664 milliards de francs, alors que la prévision figurant dans la loi de financement était de 1 658 milliards de francs. De même, les dépenses totale sélèvent à 1 695 milliards de francs au lieu de 1 685 milliards de francs et celles entrant dans le champ de lONDAM à 597 milliards de francs au lieu de 600 milliards de francs. Enfin, le déficit du régime général est ramené à 20 milliards de francs. Laugmentation de 5,7 % à 8,7 % de la part des taxes affectées dans les ressources de la sécurité sociale doit également être notée.
Lexamen des conditions dexercice de cette loi montre limportance de la question des relations entre lEtat et les organismes de sécurité sociale. Il convient de mieux distinguer à lavenir la fonction de lEtat employeur du rôle de lEtat en tant que garant de la solidarité entre les différents régimes. On peut par exemple sétonner de ce que les exonérations de cotisations patronales de sécurité sociales pour lemployeur soient traitées comme des subventions de lEtat aux entreprises concernées. Par ailleurs, il est nécessaire de pouvoir rapprocher de manière plus systématique les comptes de lEtat de ceux des organismes de sécurité sociale afin de vérifier leur cohérence.
En ce qui concerne les questions de trésorerie, on soulignera que les plafonds davance définis par la loi de financement mêlent les notions distinctes de besoin de trésorerie et de déficit comptable. Il serait également souhaitable daméliorer la qualité des prévisions de trésorerie. Par ailleurs, la coexistence de lunité de caisse du régime général, matérialisée par le rôle dévolu à lACOSS, et de laffirmation par la loi du principe de lindividualisation de la trésorerie des branches nest pas aisée. Pour sa part, la Cour des comptes nest pas favorable à une individualisation accrue des trésoreries qui permettrait aux branches bénéficiaires de placer leurs excédents, au lieu de faire caisse commune avec ceux qui rencontrent plus de difficultés pour équilibrer leurs comptes.
Mme Anne-Marie Boutin, après avoir souligné lopacité des comptes de la sécurité sociale et notamment limpossibilité de comparer les comptes des organismes de la sécurité sociale avec les agrégats figurant dans le projet de loi de financement, a indiqué que la Cour des comptes avait réalisé, dans le domaine de lassurance maladie, cinq enquêtes concernant respectivement les outils de connaissance, de maîtrise et de gestion, ladmission des dépenses au remboursement, les conventions avec les professions, les dépenses hospitalières et la gestion des assurances sociales des étudiants.
La Cour sest en premier lieu intéressée aux outils de connaissance et de gestion de lassurance maladie. Le projet Sesam-Vitale, amorcé il y a vingt ans, présente de très nombreux dysfonctionnements, à savoir un retard de près de dix ans pris après seulement trois ans dapplication, une implication très lente et très difficile des partenaires concernés, lEtat nintervenant réellement quen 1993 et la dévolution de la maîtrise douvrage à la CNAMTS étant très récente, une grande lourdeur dans le pilotage, le comité ad hoc ne comprenant pas moins de 59 membres et une modification des objectifs poursuivis, la maîtrise médicalisée des dépenses sétant progressivement substituée à la recherche dune plus grande productivité dans le traitement des feuilles de soins.
A cette série de problèmes se sont ajoutées des difficultés de communication dans la présentation du projet, labsence de suivi de son coût, qui est évalué à 750 millions de francs pour la période 1984-1997 mais devrait atteindre 5 à 6 milliards de francs à moyen terme à partir de 1998 et le problème récurrent de la sécurité des données.
De la même façon la Cour sest penchée sur le problème de la nomenclature et du codage. Les nomenclatures utilisées pour la médecine de ville et lhôpital ne sont pas adaptées au codage, car les données quelles fournissent sont trop agrégées, et ne peuvent pas non plus être utilisées pour décrire lactivité médicale. Le suivi des dépenses est donc impossible à réaliser puisquon ne connaît pas la réalité des actes effectués.
Enfin, la mise en oeuvre du PMSI avance dans le secteur privé et le moyen séjour, mais marque le pas pour la comparaison hôpital public/cliniques privées et médecine de ville/hôpital.
Les dépenses non encadrées représentent 72 milliards de francs en 1996 soit 12 % des dépenses incluses dans le champ de lONDAM. Les agrégats correspondants sont très mal connus, notamment pour ceux qui concernent les médicaments à lhôpital ou le secteur médico-social.
En deuxième lieu, la Cour des comptes a enquêté sur ladmission au remboursement. Pour le médicament, il existe des procédures distinctes pour lautorisation de mise sur le marché, linscription sur la liste des médicaments remboursables et la fixation du prix de vente. Le fonctionnement des deux dernières procédures citées paraît perfectible : on constate notamment une insuffisante révision de la liste des médicaments remboursables, un mélange de préoccupations médicales et de préoccupations de politique industrielle et enfin un manque de formation des prescripteurs, les médecins étant informés par les laboratoires médicaux et non par les pouvoirs publics.
Concernant le remboursement des dispositifs médicaux, qui relève dune procédure dinscription au tarif interministériel des prestations sanitaires mise en oeuvre par une commission unique placée sous la double tutelle des ministères de la solidarité et des anciens combattants, lenquête a mis en évidence dimportantes disparités de tarification pour un même produit, notamment pour les prothèses dentaires et orthopédiques, ainsi quun manque de connaissance des dépenses.
En troisième lieu, la Cour a étudié les conventions avec les professions de santé. Celles-ci présentent une trop grande complexité et poursuivent des objectifs très divers. De plus, les outils mis en oeuvre pour parvenir à la maîtrise des dépenses ne sont pas assez différenciés de ceux utilisés pour répartir loffre de soins. Enfin, larticulation des conventions signées respectivement avec les professions prescriptrices et avec les professions prescrites devrait être améliorée.
En quatrième lieu, lenquête de la Cour des comptes sur les dépenses hospitalières a montré linadéquation entre les enveloppes de dépenses et les enveloppes des ressources, les difficultés à mettre en oeuvre la régionalisation de loffre de soins et enfin la mauvaise articulation entre le privé et le public. En revanche, la mise en oeuvre de la restructuration de loffre hospitalière semble bien avancée et le rôle des ARH dans ce domaine sera essentiel dans les années à venir.
En cinquième lieu, la Cour sest penchée sur la question des assurances sociales des étudiants. Le premier problème analysé est celui de laffiliation, la procédure appliquée étant très lourde et ayant pour inconvénient de ne pas prévenir les doubles affiliations. De plus, le financement de ces mutuelles seffectue par le biais de remises de gestion calculées de manière approximative et sans doute surévaluées, la plupart des mutuelles dégageant des excédents de gestion. Alors que la mutualisation des étudiants est de plus en plus faible, réexaminer lensemble du dispositif des mutuelles pour le rendre plus efficace est donc une nécessité.
M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et léquilibre général, après avoir souligné, en sa qualité de rapporteur de la proposition de résolution tendant à créer une commission denquête sur la MNEF, lutilité des informations contenues dans le rapport de la Cour sur la gestion des mutuelles étudiantes, a posé des questions sur :
- le caractère trop peu sélectif des critères dinscription sur la liste des spécialités remboursables ;
- les effets pervers de lencadrement des dépenses hospitalières, dont les modalités ne sont pas favorables aux établissements les plus performants ;
- lefficience du contrôle politique des comptes de la sécurité sociale, tel quil est fixé par la loi organique, alors quil ny a pas de concordance entre les agrégats utilisés dans la loi de financement et les comptes des régimes.
Après avoir remarqué que ce premier bilan établi par la Cour des comptes pouvait être une source dinspiration pour le travail des parlementaires et quil était nécessaire de pouvoir disposer doutils fiables permettant la transparence des comptes et des statistiques, M. Claude Evin, rapporteur pour lassurance maladie, a posé des questions sur :
- lidentification et lévaluation du coût des dépenses non encadrées correspondant à un objectif de santé publique, la création au sein de lONDAM dune cinquième enveloppe consacrée aux dépenses de santé publique ayant par ailleurs été proposée ;
- la nécessité de supprimer les obstacles dordre juridique qui sopposent à la mise en oeuvre par les agences régionales dhospitalisation (ARH) dune politique de restructuration hospitalière plus efficace ;
- lutilisation par les unions professionnelles de médecins des quelques 750 millions de francs de cotisations quelles ont perçu chaque année depuis quatre ans ;
M. Denis Jacquat, rapporteur pour lassurance vieillesse a posé des questions sur :
- la date à laquelle pourront être présentés des comptes de la branche vieillesse permettant de donner une vision complète de la situation de lensemble des régimes ;
- la possibilité de clarifier lanalyse du financement des régimes spéciaux qui perçoivent une subvention de lEtat sajoutant au versement de compensation dont ils bénéficient par ailleurs.
Mme Dominique Gillot, rapporteur pour la branche famille, après sêtre inquiétée dune assimilation trop poussée de lallocation de parent isolé (API) au RMI, qui a une image plus dévalorisante, a posé des questions sur :
- la possibilité dinstaurer un délai ou de prévoir une franchise pour le reversement de lallocation de soutien familial (ASF) en cas de récupération de la pension alimentaire par la caisse dallocations familiales ;
- lévaluation du coût de prise en charge dun enfant handicapé par les commissions départementales déducation spéciale (CDES) et les critères de modulation des prestations quelles attribuent ;
- la possibilité daugmenter les droits ouverts au titre de lassurance vieillesse des parents au foyer (AVPF).
En réponse aux rapporteurs, M. Gabriel Mignot a apporté les informations suivantes :
- Lamélioration de la présentation des comptes de la sécurité sociale relève de la compétence de la direction des études et de la recherche du ministère de lemploi et de la solidarité. Ces efforts portent en particulier sur lharmonisation permettant dassurer le passage des comptes des organismes de sécurité sociale, organisés comme des comptes dentreprise, aux agrégats de la loi de financement et sur la nécessité den accélérer lenregistrement.
- Nétant pas au premier chef une instance chargée de formuler des propositions, le rôle principal de la Cour des comptes est détablir des constats.
Mme Anne-Marie Boutin a apporté les précisions suivantes :
- La commission de transparence a pour vocation de vérifier, avant quil ne soit inscrit sur la liste publique des spécialités remboursées, quun nouveau médicament apporte une amélioration du service médical rendu ou quil génère une baisse du coût de traitement de la pathologie. Toutefois, la commission ne dispose daucune indication sur le prix futur du médicament qui lui est soumis et traite chaque dossier séparément, alors que larrivée dun nouveau médicament pourrait justifier un réexamen de la situation des médicaments plus anciens ayant le même objet.
- Il convient, en labsence de système permettant de mieux cerner les coûts de lhôpital, de ne pas condamner le principe de la dotation globale hospitalière, même si les ARH devraient pouvoir mettre en oeuvre dautres critères pour apprécier lactivité hospitalière, tels les points ISA ou les décisions de lANAES.
- La connaissance de lensemble des données relatives à la sécurité sociale est loin dêtre complète, ce constat étant lié au fait quil nexiste pas de définition satisfaisante des notions de branche et de régime.
- On peut identifier de manière précise certaines des dépenses non encadrées mais retracées au sein de lONDAM. Sont notamment concernés :
· Les dépenses prescrites dans un cadre non libéral mais exécutées dans le secteur libéral, comme par exemple un scanner effectué dans le secteur privé sur proposition dun médecin hospitalier. Il est nécessaire non pas dinterdire ces dépenses, mais de les surveiller.
· Les dépenses de médicament à lhôpital, qui devraient faire lobjet dune étude très approfondie et très concrète ;
· Une partie des dépenses à caractère médico-social, notamment celles afférentes à la prise en charge denfants handicapés ou de personnes âgées ; en revanche les dépenses correspondant à un objectif de santé publique sont déjà très largement encadrées.
- La modification apportée par larticle 18 du projet de loi de financement aux unions professionnelles de médecins devrait conduire à sintéresser à lactivité de ces unions en matière de formation et dévaluation des pratiques médicales.
- Il sera plus difficile dobtenir des comptes suffisamment précis et homogènes pour la branche vieillesse que pour les branches famille et maladie.
- La question de léquilibre des régimes spéciaux ne peut être abordée sans tenir compte des subventions qui leur sont versées par lEtat. Il arrive que les sommes que perçoivent certains de ces régimes au titre de la compensation démographique soient supérieures à leurs besoins de financement : cest notamment le cas dans le régime des mines, dont lexcédent est versé à lassurance maladie sans aucune base juridique. Les subventions versées par lEtat semblent être parfois affectées au financement de prestations extra-légales. La Cour a pu, il y a quelques années, chiffrer le coût des prestations supplémentaires maladie versées par le régime de la SNCF, qui sélève à 1,6 milliard de francs. En tout état de cause, les compensations constituent un problème très complexe, puisquelles sont régies par des règles très largement arbitraires ou conjoncturelles.
- LAPI pose des problèmes de gestion, notamment parce que la condition disolement est difficile à vérifier. Des fraudes ont pu être constatées, une personne bénéficiant de lAPI alors quelle est par ailleurs ayant droit de son concubin pour lassurance maladie. En outre, lAPI se rapproche du RMI puisquil sagit ainsi dun minimum social. Il convient, en toute hypothèse, daccompagner le versement de lallocation par des actions visant à favoriser linsertion du bénéficiaire.
- Les critères de décision des commissions départementales déducation spéciale apparaissent très aléatoires. Il convient denvisager une meilleure formation des personnels et de définir des référentiels pour mieux assurer lhomogénéité de leur fonctionnement.
M. Bernard Accoyer a posé cinq questions portant sur :
- la possibilité pour la Cour des comptes, de certifier la conformité des comptes des agents comptables des organismes de sécurité sociale avec ceux de la Commission des comptes de la sécurité sociale ;
- la nécessité dune loi de financement rectificative pour donner une base à laugmentation de 1,8 milliard de francs des recettes de lassurance maladie décidée en cours dannée en créant une contribution à la charge des laboratoires pharmaceutiques ;
- le portage de lallocation de lallocation de rentrée scolaire par la CNAF jusquà lintervention de la prochaine loi de finances rectificative ;
- les suites données aux travaux des CODEC, et le nombre dagents comptables mis en cause à la suite dun avis défavorable sur leurs comptes ;
- la possibilité de mettre en place un régime des pensions civiles et militaires et un régime dassurance maladie pour les fonctionnaires de lEtat.
M. Jean-Luc Préel, après avoir constaté que les travaux de la Cour portaient sur 1997, alors que lon votait la loi de financement pour 1999, a posé des questions sur :
- lopportunité de mettre en place une union nationale des caisses ;
- les compensations par lEtat des exonérations de charges, étant observé que 16,8 milliards de francs dexonérations ne sont pas compensés et que les exonérations résultant de la loi sur les trente-cinq heures ne seraient compensées quà concurrence des deux tiers de leur montant ;
- lopportunité de mettre en place une taxe de santé publique assise sur le tabac, étant rappelé que le Gouvernement lui a préféré lannée dernière une solution consistant à affecter une partie des droits sur les tabacs à la sécurité sociale tout en augmentant les prix de vente ;
- les mesures à prendre pour assurer le retour à léquilibre de la branche retraite et les possibilités de développer les formules de capitalisation et de mettre en place une caisse de retraite pour les fonctionnaires.
M. Jean-Paul Bacquet, après avoir regretté le caractère tardif du dépôt du rapport de la Cour des comptes, a souligné la qualité de ce travail, qui, partant dune réalité complexe et opaque, consiste à décrire des symptômes dont le remède ne sera parfois trouvé que bien plus tard.
Sagissant du système « Sesam-Vitale », les conclusions de la Cour des comptes rejoignent celles de la mission parlementaire dinformation consacrée au même sujet : on ne peut que constater un véritable gâchis et sinterroger, dune part, sur lutilité de la carte « Vitale 2 » au moment où est mis en place le réseau santé social (RSS) et, dautre part, sur le coût réel dune opération qui aboutit à des embauches supplémentaires de personnels, alors quelle devait se traduire par une économie de 8 000 postes, et qui débouche sur un simple système de gestion, alors quelle devait faciliter la mise en place de réseaux de santé.
Il a ensuite posé des questions sur :
- le PMSI, dont la valeur pour évaluer la qualité réelle des soins semble très relative ;
- la fiabilité des statistiques de la CNAM ;
- lutilité des références médicales opposables, compte tenu de leur champ dapplication limité ;
- le suivi des observations faites par la Cour, par exemple en matière de contrôle médical.
En réponse aux intervenants, M. Pierre Joxe, a apporté les précisions suivantes :
- Le contrôle politique du financement de la sécurité sociale relève du Parlement et de lui seul. La Cour des comptes commente les comptes, le Parlement les contrôle. Le contrôle des finances publiques, mis en place durant le premier tiers du XIXe siècle, a mis soixante-dix ans pour atteindre sous la IIIe République un résultat satisfaisant. Le contrôle des finances sociales est à la portée du Parlement, à condition quil le veuille, avec lassistance de la Cour des comptes qui sappuie sur des études pluriannuelles. Si les comptes nont été fournis à la Cour il y a seulement un mois, le rapport présenté correspond, quant à lui, à trois ans de travaux en amont.
- Lexamen des retraites des fonctionnaires et, plus largement, des régimes spéciaux suppose une transparence des données relatives à la fonction publique qui nexiste pas aujourdhui. La description, par les lois de finances, de la réalité et du coût des emplois publics nest pas satisfaisante. La Cour proposera lannée prochaine, au terme dune étude engagée depuis trois ans sur la fonction publique, des projections du coût induit des retraites des fonctionnaires, qui représente un problème majeur en termes de politique sociale. Cette volonté de transparence sest heurté à de grandes difficultés. Ainsi la grille « Parodi » de la fonction publique, qui date de 1946, ne correspond plus en rien au mode actuel de rémunérations des fonctionnaires. Une directrice décole maternelle a ainsi un indice équivalent à celui de tel représentant des forces de lordre, mais une rémunération finale totalement différente. Il est important que lopinion publique puisse disposer dun certain nombre de données claires dans ce domaine, quand on sait que les dépenses consacrées par lEtat à la fonction publique oscillent entre le tiers et la moitié du budget général. En matière de politique sociale, labsence de transparence des régimes dassurance maladie risquerait dentraîner une compétition directe avec des régimes alternatifs, lopacité des prestations familiales conduirait à une remise en cause de leur légitimité, morale, éthique et politique les menaçant déclatement, enfin, labsence déclairage sur lassurance vieillesse pourrait avoir des conséquences très préoccupantes à court terme.
- Le suivi des lois de financement de la sécurité sociale, compte tenu de la complexité du sujet, dune part, et de la faiblesse des contrôles due au statut antérieur de la sécurité sociale, dautre part, montre un taux élevé de réponses positives aux observations de la Cour et une application de ses recommandations encourageante. Toutefois, il faut constater que les moyens de ladministration des affaires sociales sont très insuffisants. Dune façon plus générale, il faut rappeler que les recommandations de la Cour ne portent que sur les moyens mis en oeuvre, les choix politiques relevant de la compétence du Parlement.
- La Cour des comptes ne pratique pas de certification comptable même si, sagissant des comptes de lEtat, le rapport sur la loi de règlement y ressemble, le taux derreur étant très faible et la fiabilité des données aussi satisfaisante que celle des comptes dune entreprise ou dune collectivité.
- La pression exercée pour homogénéiser les règles de comptabilité des centaines dorganismes de centralisation des comptes de la sécurité sociale devrait, à terme, conduire à un bilan comptable comparable, sagissant des comptes sociaux. La réforme constitutionnelle a permis au Parlement dêtre saisi de document détaillés qui vont dans le sens de la sincérité et de la fidélité des comptes de la sécurité sociale.
M. Gabriel Mignot a rappelé les points suivants :
- Il convient de distinguer les approbations des certifications des comptes. En effet, le système pyramidal de centralisation des comptes sociaux implique des retards incompatibles avec lélaboration dun projet de loi de financement de la sécurité sociale en milieu dannée. Il convient, par conséquent dobliger les caisses à disposer de système dopérations comptables transparents permettant une centralisation rapide à léchelon local comme national.
- Sagissant du prélèvement supplémentaire de 1,8 milliard de francs sur les laboratoires pharmaceutiques, la mesure entérinant ce prélèvement, qui figure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, peut apparaître comme une régularisation rétroactive.
- En ce qui concerne lactivité des agents comptables des comités départementaux dexamen des comptes des organismes de sécurité sociale (CODEC), il convient de distinguer les agents comptables proprement dit, très peu nombreux, du personnel des caisses de sécurité sociale qui exercent cette activité.
Mme Anne-Marie Boutin a apporté les précisions suivantes :
- La prise en charge par lEtat de lallocation de parent isolé ne pose pas problème et renforce même son caractère de minimum social, mais une redéfinition de la nature des transferts entre lEtat et la sécurité sociale simpose.
- Concernant lallocation de rentrée scolaire, sa majoration est prise en charge par le budget de lEtat et ne figure donc pas dans les comptes de la sécurité sociale. Elle ne figure pas non plus dans la loi de finances initiale, puisquelle est par nature décidée avant la rentrée scolaire.
- Pour ce qui est du projet Sesam-Vitale, il subsiste malgré ses nombreux dysfonctionnements et il a été en quelque sorte légitimé a posteriori. La carte Vitale 2 pourrait être utilisée comme un moyen daccès aux informations disponibles par le RSS.
- Une nouvelle évaluation de limpact de Sesam-Vitale sur les effectifs des caisses serait utile.
- Le PMSI nest pas un outil de qualité, mais il fournit une base de discussion.
- Enfin, les références médicales opposables (RMO) doivent être mises en oeuvre dans les hôpitaux publics. Dans cette optique, la fongibilité des enveloppes constituerait une mesure positive.
Le président Jean Le Garrec a souligné que le Parlement devait parvenir à un degré de contrôle satisfaisant des comptes sociaux dans un délai beaucoup plus bref que les soixante-dix ans qui lui avaient été nécessaires pour mettre en place un véritable contrôle budgétaire.
M. Pierre Joxe a estimé que lobjectif ainsi défini pouvait, au prix dun effort soutenu, être atteint en quatre ou cinq ans.
M. Claude Evin, rapporteur pour lassurance maladie, a estimé que les travaux de la Cour des comptes permettaient non seulement de mieux cerner la réalité des comptes de la sécurité sociale, mais aussi de mieux appréhender le fonctionnement du système de santé, par exemple au travers de létude sur lactivité libérale dans les hôpitaux réalisée en 1997. Ces travaux sont donc à la fois une aide à la décision législative du Parlement et un moyen lui permettant dexercer pleinement son pouvoir de contrôle.
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