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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 14

(Application de l'article 46 du Règlement)

Jeudi 29 octobre 1998
(Séance de 14 heures 15)

Présidence de M. Jean Le Garrec, président

SOMMAIRE

 

pages

Projet de loi de finances pour 1999

 

– Avis relations culturelles internationales (M. Patrick Bloche, rapporteur)

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La commission des affaires culturelles familiales et sociales a examiné, sur le rapport de M. Patrick Bloche, les crédits des relations culturelles internationales et de la francophonie pour 1999.

Le rapporteur a, au préalable, fait remarquer qu’il convenait d’apprécier le budget des relations culturelles, scientifiques et techniques dans le cadre de la réunification des ministères des Affaires étrangères et de la Coopération. Le projet de loi de finances pour 1999 en fait donc une présentation commune. La Direction générale des relations culturelles, scientifiques et techniques et la direction du développement sont regroupées dans une nouvelle structure, la Direction générale de la coopération internationale et du développement dont les crédits d’intervention atteignent 5,5 milliards de francs. Si l’on y joint les dotations de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, 2 milliards de francs, et du Fonds d’aide et de coopération, 1,8 milliards de francs et les crédits consacrés aux rémunérations et aux moyens de fonctionnement, plus de 10 milliards de francs, soit près de la moitié des crédits du ministère, sont consacrés aux relations culturelles internationales et à la francophonie. L’effort de la France dans ce secteur bénéficie ainsi d’une lisibilité qu’il n’a jamais eu. La nouvelle Direction générale est, en outre, subdivisée en directions « de métiers » centrées sur les actions.

L’audiovisuel extérieur disposera de 1,040 milliard de francs, soit une progression d’environ 10% par rapports à la loi de finances initiale pour 1998 pour mettre en place le plan de développement présenté en Conseil des ministres par M. Hubert Védrine, ministre des Affaires étrangères, au printemps. Les 130 millions de mesures nouvelles devraient permettre :

- un ambitieux redéploiement de TV5 chaîne francophone (80 millions de francs),

- le soutien à l’exportation de programmes français (10 millions de francs),

- des aides financières renforcées pour que le plus grand nombre possible de chaînes françaises soit sur le plus grand nombre possible de bouquets satellitaires (40 millions de francs). L’enjeu économique que représente l’audiovisuel et le cinéma sera plus perceptible si l’on se rappelle qu’il constitue le deuxième poste d’exportation des Etats-Unis. Le projet d’une “ CNN à la française ” est donc abandonné au profit d’une chaîne TV5 rénovée, à l’attractivité plus forte. Enfin, la participation française au conseil d’administration de la chaîne voit RFO et Arte-la Cinquième se substituer à la SOFIRAD et le renforcement de France Télévision. Il convient, enfin, d’inciter l’audiovisuel privé à participer à cette diffusion culturelle francophone.

Les bourses d’études, qui sont un support important du rayonnement extérieur, font l’objet d’un renforcement, pour l’enseignement supérieur, par la création des bourses d’excellence du programme « Eiffel », 55 millions de francs pour trois cents étudiants et, pour l’enseignement secondaire, par l’abondement des crédits de l’AEFE à hauteur de 20 millions de francs ce qui, après les 12 millions de francs de la loi de finances pour 1998 porte ce poste à 220 millions de francs.

La disparition du service national et donc des CSN qui jouent un rôle essentiel dans les projet de coopération rend urgent l’examen du projet de loi sur le volontariat actif.

Le rapporteur a ensuite fait état du rapport qu’il rédige à l’attention du Premier ministre sur le renforcement de la présence culturelle de la France et de la francophonie face aux technologies nouvelles et au développement d’Internet. La francophonie n’est pas seulement institutionnelle, elle est riche de potentialité dans une logique de mondialisation.

Après l’exposé du rapporteur, le Président Jean Le Garrec a souhaité qu’il vienne présenter prochainement devant la commission, le rapport qu’il est en train d’établir et il a posé des questions sur :

- la possibilité pour les régions de mener une action de coopération culturelle ;

- la balance des importations et des exportations françaises dans le domaine audiovisuels ;

- la place de TV5 dans le débat qui va s’engager sur le secteur audiovisuel public.

Mme Martine David a indiqué qu’elle ne pouvait partager le satisfecit délivré par le rapporteur et qu’il fallait bien admettre que ce budget n’était pas prioritaire. Lorsque l’on visite des établissements comme l’Institut français de Francfort dont les locaux ont été remis à neuf par le personnel lui-même, ou d’autres instituts français dans le monde qui souffrent gravement de l’absence de crédits, il ne faut pas s’étonner du recul de la francophonie. Il est donc du devoir des parlementaires d’alerter le Gouvernement sur la nécessité de redonner à la défense de la langue française toute sa place. Il en est de même pour le remplacement des coopérants du service national, qui ne semble pas sérieusement appréhendé En ce qui concerne TV5, le débat audiovisuel est en effet une occasion importante de revoir ces missions dans cette perspective.

Mme Odette Trupin s’est déclarée un peu déçue par un budget qui n’évolue guère, à un moment où la francophonie se trouve à un tournant de son histoire. Il y a une forte demande venant de l’étranger, or si notre offre est de bonne qualité, elle est trop dispersée entre les différents opérateurs. Inscrire dans la Constitution la dimension francophone, comme le souhaitent un certain nombre de sénateurs, donnerait un signal très fort à la veille du sommet de la francophonie de Moncton, au Canada. Si la langue française ne prétend pas rivaliser avec la langue anglaise, il faut promouvoir l’apprentissage général de deux langues et l’Europe du multilinguisme.

Il faut également se tourner davantage vers le monde économique pour le convaincre qu’à côté de l’usage commercial de l’anglais, il peut y avoir un discours francophone porteur de culture et de valeurs.

Enfin, une solution à la disparition des CSN pourrait être trouvée dans les emplois-jeunes mais le ministère de l’emploi et de la solidarité y semble opposé en mettant en avant le problème de la pérennisation de ces emplois.

En réponse aux intervenants, M. Patrick Bloche, rapporteur, a apporté les éléments de réponse suivants :

- La coopération régionale ou plus généralement “ décentralisée ” est riche d’une extraordinaire potentialité surtout si on ne la voit pas uniquement à travers la présence physique de personnels et de bâtiments mais si on utilise les moyens de communication à distance.

- Il est clair que la balance commerciale française de l’audiovisuel et du cinéma est largement déficitaire compte tenu de la domination des productions américaines sur 60 % des échanges dans ce secteur. Toutefois, le cinéma français est avec le cinéma indien l’un des rares à résister et peut trouver un marché alors qu’il se crée chaque année près de mille chaînes de télévision. Encore convient-il de veiller à ce que l’environnement juridique ne nous défavorise pas comme cela aurait été le cas si la France avait souscrit à l’AMI.

- Il n’est pas souhaitable que TV5 soit adossé à l’audiovisuel public. Outil multilatéral, il ne peut être intégré dans la future holding. En tout état de cause, la priorité est de donner des missions claires à l’audiovisuel public en matière de relations extérieures et en particulier à France Télévision qui est dépourvu de tout stratégie internationale. En revanche, le nouveau plan d’entreprise de TV5, qui prévoit une offre adaptée selon les zones géographiques, paraît particulièrement pertinent.

- En ce qui concerne l’évolution des crédits, il faut souligner l’élément exceptionnel que constitue l’absence de régulation budgétaire au cours de l’exercice 1998. La stabilisation des crédits, dans un tel contexte, autorise donc une pointe d’optimisme.

- Les qualifications attendues des CSN rendent difficile d’y substituer des emplois-jeunes.

- Il semble préférable de privilégier la francophonie opérationnelle sur la francophonie institutionnelle, voire constitutionnelle. Il importe de se battre sur des créneaux concrets. On ne peut qu’approuver, enfin, le combat pour le plurilinguisme.

Puis, le rapporteur a proposé d’émettre un avis favorable sur le budget des relations culturelles internationales et la francophonie.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits des relations culturelles internationales et de la francophonie pour 1999.


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