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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 16

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 4 novembre 1998
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. Jean Le Garrec, président

SOMMAIRE

 

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– Audition, en présence de la presse, de Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage - n° 941

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La commission a entendu Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports, sur le projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage - n° 941.

Mme Marie-George Buffet a déclaré que le projet de loi relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage est fondé sur la nécessité de donner des moyens plus efficaces à la lutte contre le dopage, lequel remet en cause les fondements de la pratique sportive qui sont le plaisir, l’épanouissement, le dépassement individuel, le respect des règles de la compétition et l’échange avec les autres. Il faut d’emblée mesurer la gravité des atteintes portées à l’intégrité physique et morale des sportifs par l’utilisation de produits dopants. Ce fléau touche de nombreuses pratiques sportives et concerne le sport de haut niveau, mais aussi les compétitions d’amateurs. Tout en réfutant le « tous dopés », affirmation contraire à la réalité, il faut alerter l’opinion sur l’extension du phénomène.

Les crédits consacrés à la recherche, à la prévention, à la lutte antidopage ont été doublés en 1998 et un travail de révision législative est entamé : en mai 1998, le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi. Depuis cette date beaucoup d’événements ont confirmé la gravité de la situation, mais aussi les possibilités d’une large mobilisation pour préserver l’éthique du sport et les individus.

Les événements dramatiques du Tour de France ont confirmé l’existence d’une véritable filière du dopage bénéficiant de complicités dans l’encadrement du sportif. Les témoignages de certains coureurs ont révélé leur état de dépendance par rapport à un système et l’existence d’un dopage à deux vitesses est apparue : un dopage à moindre coût s’oppose à un dopage sophistiqué, médicalement contrôlé, souvent non révélé par les contrôles.

Le corps médical n’est pas assez impliqué contre le dopage. Les procédures actuelles sont inadaptées et souvent contestées devant les tribunaux administratifs. Les responsabilités propres du mouvement sportif et des ministères sont apparues insuffisamment établies.

Enfin, les incohérences ont éclaté au grand jour entre les législations des différents pays, les règles des différentes fédérations nationales ou internationales. Ceci a soulevé un débat. Des sportifs et des sportives, des dirigeants ont pris la parole, des fédérations ont pris des mesures. Une campagne de prévention est lancée et le Comité international olympique (CIO) organise prochainement une conférence internationale à Lausanne. Des sponsors se sont regroupés pour élaborer une charte contre le dopage. Un groupe de travail sur la médecine du sport a été mis en place.

Le débat ne se cantonne plus au constat du dopage mais s’élargit à ses causes profondes, au premier rang desquelles se trouve le rapport non maîtrisé entre l’argent et le sport. Ce mouvement n’est pas irréversible mais une étape a été franchie et l’on peut compter sur la mobilisation du mouvement sportif, et de l’opinion pour ne pas céder aux pressions d’où qu’elles viennent.

Le projet de loi est très attendu au plan international, l’Italie travaille sur un projet comparable et le CIO est attentif au contenu de cette loi.

Le rapporteur a effectué un important travail d’auditions pour enrichir le projet de loi. De son côté, un groupe de travail fonctionnant sous l’égide du ministère a fait une série de propositions que MM. Roussel et Escande ont présentées. L’ensemble de ces travaux va enrichir le projet de loi sans bousculer les orientations issues de la première phase de concertation. Ce texte poursuit quatre objectifs essentiels :

- Mieux protéger la santé des treize millions de licenciés grâce à une prévention et une surveillance médicale renforcée, auxquelles participent les instances sportives. Tout sportif, préalablement à la délivrance d’une licence, devra désormais se soumettre à un examen médical consigné dans le carnet de santé, même s’il ne participe pas aux compétitions. Les fédérations doivent assurer des actions de prévention, veiller aux calendriers et sont chargées du suivi de la santé des sportifs de haut niveau sur la base d’un arrêté conjoint du ministère de la jeunesse et des sports et du ministère de la santé. Un livret individuel est délivré à chaque sportif de haut niveau.

- Elargir et renforcer les conditions dans lesquelles sont organisées les investigations administratives et judiciaires à l’encontre des pourvoyeurs ainsi que les sanctions pénales qui leur sont applicables. Les sanctions sont renforcées dans le cas de l’incitation à mineurs.

- Elargir les possibilités de contrôle qui restent un élément de prévention. Les médecins pourront convoquer des sportifs à des fins de prélèvements ou d’examens.

- Créer une autorité administrative indépendante, qui a un rôle d’appel définitif et de conseil auprès du mouvement sportif, lequel garde ses prérogatives sur la sanction sportive. Une structure indépendante composée de magistrats, de médecins, de scientifiques nommés par leurs ordres et non par le Gouvernement, disposant d’un budget propre de 4 millions de francs, sera ainsi mise en place.

Il faut bien le constater, toute la lutte anti-dopage repose sur la prévention, les contrôles et la lutte contre les pourvoyeurs.

Peut-on parler de prévention sans reconnaître le dopage comme fléau social et donc aller jusqu’à reconnaître un droit d’alerte aux médecins ? Cela pose bien sûr la question de la formation des médecins mais également de leur structuration. Les médecins inspecteurs régionaux de la jeunesse et des sports pourraient, avec des « médecins inspecteurs fédéraux » être associés aux missions d’une « cellule médicale », rattachée au Conseil de prévention et de lutte contre le dopage.

Ces médecins exerceraient un droit d’alerte sous forme, soit de refus du certificat de non contre-indication pour raisons médicales, soit en transmettant de informations à la cellule lorsqu’ils constatent que la santé du sportif est en danger. Cette cellule, composée de médecins, pourrait elle-même prendre des décisions, dans le respect du secret médical. Par rapport aux pourvoyeurs enfin, ne faut-il pas créer des cellules de travail comme celles qui ont fait leurs preuves au niveau régional, réunissant les représentants des ministères concernés ?

Le président Jean Le Garrec a posé les questions suivantes :

- quels pourraient être le contenu et le mode de financement de la visite médicale préalable à la délivrance d’une licence sportive ?

- quel devrait être le rôle de l’Etat en sa qualité de pouvoir de tutelle vis-à-vis des fédérations sportives qui ont l’obligation d’engager des procédures disciplinaires et de prononcer des sanctions à l’encontre des licenciés reconnus coupables de dopage ?

- quelle attitude adopter envers un sportif reconnu coupable de dopage qui irait poursuivre sa carrière à l’étranger et plus particulièrement dans un autre pays de l’Union européenne ?

- est-il vérifié que le dopage crée un phénomène de dépendance qui se poursuit à l’issue de la carrière sportive ?

M. Alain Néri, rapporteur, a estimé que ce projet de loi doit permettre aux parlementaires de mettre un terme à l’hypocrisie qui règne autour du dopage dans le domaine sportif. La loi de 1989 avait déjà ouvert de nombreuses pistes qu’il convient d’adapter à l’évolution du phénomène du dopage, mais la première nécessité est celle de se donner dans la loi les moyens d’assurer son efficacité. Le dopage, qui touche tous les sports, à tous les niveaux, est à la fois un problème de santé publique et d’éthique sportive, qui implique donc la double responsabilité des pouvoirs publics et des fédérations.

Il a ensuite interrogé la ministre sur :

- les conditions qui permettraient de garantir la présomption d’innocence au sportif accusé de dopage ;

- les moyens d’assurer une durée d’instruction courte ;

- les difficultés à déceler des produits nouveaux, qui militent pour l’augmentation des crédits de recherche en matière de substances dopantes ;

- la nécessité absolue de garantir le caractère réellement inopiné des contrôles ;

- le besoin d’organiser des actions de prévention auxquelles soient associés toutes les fédérations, les mouvements sportifs et les collectivités locales.

En réponse à ces questions, la ministre a apporté les éléments suivants :

- Il convient en effet de codifier le contenu de la première visite médicale autorisant la pratique d’une discipline sportive afin de l’adapter aux spécificités propres de cette discipline. Le remboursement, dont le coût s’élèverait à près de 12 millions de francs, pourrait être assuré par le Fonds national de prévention.

- Il ne faut pas séparer la responsabilité des pouvoirs publics et celle des fédérations, lesquelles prennent des décisions ayant des incidences sur les pratiques sportives. Le rôle du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage prend ici toute son importance en sa qualité de conseil des fédérations, mais également dans la rapidité des procédures qu’il devra garantir.

- L’harmonisation européenne et internationale en matière de dopage est indispensable. Il existe une charte européenne qui pourrait servir de point de départ. Des coopérations bilatérales s’amorcent avec certains pays tels que l’Espagne aujourd’hui. La France a transmis des propositions au CIO en prévision de la conférence de Lausanne et milite pour que les ministres de l’Union européenne chargés du sport préparent préalablement cette conférence.

- S’agissant du problème de la dépendance, il faut distinguer le dopage sophistiqué du dopage « pauvre », lequel, utilisant beaucoup de stupéfiants, crée en effet un phénomène de dépendance. Une enquête récente met en évidence les problèmes de dépendances et de décès prématurés chez d’anciens sportifs.

- Les moyens consacrés à la recherche afin de détecter les produits dopants doivent en effet être renforcés, mais tous les produits ne sont pas détectables par de simples analyses médicales. Il faudrait y ajouter le diagnostic médical à partir d’un suivi régulier.

- La présomption d’innocence doit reposer sur le possibilité de procéder à des contre-expertises de laboratoire et sur le maintien de trois niveaux de contrôle par la commission sportive, la commission d’appel et le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage.

Le président Jean Le Garrec a souhaité que la réflexion se poursuive concernant la prise en charge de la première visite médicale, qui doit être le point de départ pour le sportif d’une prise de conscience des risques du dopage, la question du financement n’étant pas pour l’instant résolue.

M. Denis Jacquat a estimé que le dopage n’était pas directement lié à la pratique sportive mais à la pratique du sport de compétition à tous les niveaux de celle-ci. En outre, il faut dire clairement que l’on peut se soigner sans recourir forcément à des produits dopants. Partant de ces constats, il convient de développer la prévention, les contrôles et la répression des pourvoyeurs de produits dopants. Il est indispensable de parvenir à une harmonisation des règles applicables par toutes les fédérations, que celles-ci dépendent ou non du Comité olympique. Par ailleurs, il convient de renforcer les efforts de recherche et les moyens techniques nécessaires pour améliorer la fiabilité des contrôles. Il faut aussi lutter contre la collusion entre certains praticiens et des laboratoires produisant des produits dopants, sans hésiter à affirmer que certains médecins peuvent se laisser corrompre. Il faut également diminuer le nombre de compétitions puisque c’est la multiplication des compétitions qui incite les athlètes, notamment lorsqu’ils sont blessés, à se doper.

M. Pierre Hellier a formulé les observations suivantes :

- Le dopage concerne au moins autant les compétitions des amateurs que le sport professionnel, l’expérience de tout médecin peut en témoigner.

- Il est indispensable d’harmoniser, au plan européen et international la réglementation en matière de lutte contre le dopage.

M. Henri Nayrou a formulé les observations suivantes :

- Il convient de préciser les conditions de prise en charge de la première visite médicale.

- Il est souhaitable de clarifier les conditions de l’intervention du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage en matière de contrôle.

- Il est indispensable d’harmoniser au niveau international les règles en matière de lutte contre le dopage, en particulier concernant la liste des produits dopants interdits.

- Il serait souhaitable de définir une ligne de partage plus claire entre les médicaments et les produits dopants interdits.

- Pour que le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage et les fédérations puissent jouer pleinement leur rôle en matière de contrôle antidopage, il apparaît nécessaire d’augmenter leurs moyens pour leur permettre notamment de développer la recherche scientifique et d’embaucher des médecins et des biologistes.

- Il est souhaitable d’apporter des précisions concernant l’articulation entre la justice sportive d’une part et la justice civile et la justice pénale d’autre part en matière de lutte contre le dopage compte tenu de leurs délais respectifs.

- Il apparaît également indispensable de préciser si le Comité olympique, les organisateurs de compétitions et les entraîneurs sont concernés par le texte.

M. Edouard Landrain s’est félicité de l’approche pragmatique et modeste du Gouvernement. On constate en effet que les évolutions en matière de produits dopants sont très rapides et que la loi devient vite inadaptée. Puis il a formulé les observations suivantes :

- Il faut se féliciter que le Sénat ait retenu la qualification d’autorité indépendante par le Conseil.

- On peut se demander si il ne faudrait pas ajouter au texte la possibilité d’infliger des sanctions aux sponsors de compétitions sportives.

- L’information en matière de lutte contre le dopage doit, à l’instar de ce qui s’est fait concernant la lutte contre le SIDA et qui a montré son efficacité, être particulièrement spectaculaire pour frapper les esprits et développer la prise de conscience sur les risques que représente le dopage. Dans cette perspective, il serait souhaitable de prévoir dans le texte la possibilité de diffuser gratuitement sur les chaînes de télévision des messages de prévention et d’information sur le dopage.

- Comme l’a indiqué le professeur Jean-Paul Escande, l’efficacité de la lutte contre le dopage dépend des moyens qui lui sont affectés. Malheureusement, les crédits destinés à la lutte contre le dopage s’élèvent dans le budget du ministère de la jeunesse et des sports pour 1999 à seulement 14,3 millions de francs et 2,5 millions de francs sur le FNDS. Ces crédits apparaissent insuffisants et devraient être augmentés.

M. Gérard Terrier a d’abord rappelé que le dopage résultait de la pression économique et financière très forte qui pèse sur les athlètes puis a distingué deux types de performances sportives : les performances absolues, comme le record de l’heure cycliste, et les performances relatives, comme le tour de France. Il faudra trouver des solutions pour que les sponsors ne se détournent pas des performances absolues qui vont être remises en cause par l’effet de la lutte contre le dopage.

M. François Rochebloine a formulé les observations suivantes :

- Il convient de poser le problème de la participation des jeunes athlètes aux compétitions de haut niveau.

- Il sera indispensable de renforcer les moyens des fédérations pour assurer un suivi efficace des sportifs amateurs comme des sportifs de compétition et de mieux coordonner l’action des fédérations.

- Il serait nécessaire de connaître les éléments du chiffrage du coût du développement du dépistage du dopage prévu par le projet de loi, et notamment le coût de suivi des sportifs.

M. Jean-Antoine Léonetti a fait les remarques suivantes :

- La première visite médicale, au-delà de son triple objet de non contre-indication à la pratique sportive, d’aptitude à la pratique d’un sport particulier et de décelage d’un début de dopage, doit être le moment privilégié d’une information préventive contre le dopage. Un compte rendu de visite devrait être établi systématiquement et transmis à la fédération. En tout état de cause, le financement de cette visite ne doit pas être mis à la charge de la sécurité sociale.

- La prévention de masse est certainement la meilleure solution pour lutter contre le dopage.

- La généralisation des contrôles est souhaitable, mais, compte tenu des moyens qu’elle suppose, sera difficile à réaliser. A cet égard, le livret individuel du sportif, que tend à instituer le projet de loi, doit permettre un suivi des sportifs et, le cas échéant, des contrôles anti-dopage plus ou moins approfondis.

- Il faudrait demander une contribution aux sponsors pour financer les contrôles anti-dopage.

- Enfin, il est indispensable de limiter le nombre de compétitions. La multiplication des compétitions suscite inévitablement chez les athlètes le besoin de recourir à des produits dopants.

M. Jean-Claude Beauchaud s’est réjoui des progrès de la prise en compte du problème du dopage au niveau européen et international, par le CIO notamment. Par ailleurs, le projet de développer des chartes entre les athlètes, leurs sponsors et leur fédération, afin de mieux prendre en compte les surcharges de calendrier et les contraintes liées au « métier de sportif » devrait utilement contribuer à l’effort de prévention en matière de dopage. Il serait d’autre part nécessaire d’apprendre à juger les sportifs sur d’autres critères que les seules performances et notamment sur leur volonté de ne pas se doper. Dans cet esprit, de façon symbolique, on pourrait envisager, à l’occasion de l’an 2000, de repartir de zéro pour la comptabilisation des records et des performances personnelles.

M. Guy Drut, après avoir souligné que les fédérations internationales s’interrogeaient effectivement actuellement sur une possibilité de révision des performances prises en référence, a jugé que si l’on ne peut qu’accorder un soutien total aux actions menées par la ministre en matière de lutte contre le dopage, il faut néanmoins avoir l’honnêteté de reconnaître que ces actions prolongent les mesures prises dans ce domaine par les précédents ministres de la jeunesse et des sports.

En ce qui concerne le dispositif du projet de loi, une inquiétude doit être soulignée : il peut être intéressant d’associer les collectivités locales à la lutte contre le dopage mais pas sur un plan financier, la mise à contribution de ces collectivités devenant actuellement systématique ce qui constitue une solution de facilité.

Par ailleurs, il faut bien être conscient du fait que le CIO n’est responsable de la sanction du dopage que quinze jours tous les deux ans, au moment des Jeux olympiques. Durant cette période, le seul pouvoir qu’il détient lorsqu’un athlète est contrôlé positif est l’exclusion de la compétition ; seule la fédération peut ensuite statuer sur l’avenir du sportif en cause. Il est vrai que le CIO a également le pouvoir d’accorder son agrément aux laboratoires. Au total cependant, même si le CIO a une part de responsabilité et fait preuve d’une véritable volonté de contribuer à la lutte contre le dopage, il ne peut à lui seul agir de façon satisfaisante au niveau international. Une action ferme au niveau mondial et coordonnée doit être menée et nécessite la coalition de toutes les fédérations internationales et des gouvernements.

M. Alain Calmat s’est félicité de ce que le projet de loi de lutte contre le dopage s’attaque au double problème de la santé du sportif et de l’éthique du sport.

Trois points difficiles nécessiteront un approfondissement des dispositions proposées :

- le contrôle des contre-indications à la pratique d’un sport, les dispositifs du certificat et du financement des activités devant être perfectionnés,

- la prévention des risques de mauvaises pratiques sportives, les accidents intervenant durant ou après une compétition n’étant pas tous liés au dopage,

- l’efficacité de la lutte contre l’utilisation des substances dopantes.

Sur ce dernier point, légiférer est difficile car il faut s’attaquer à l’utilisation de substances qui ne sont pas interdites par ailleurs. Il convient donc d’agir sur les modalités de prescription et de distribution de ces substances, ce qui ne sera pas possible par le seul biais d’un texte de loi ou d’une action nationale. Une directive européenne et l’harmonisation des actions menées par les fédérations internationales et le CIO qui mène une action permanente seront également indispensables.

En réponse aux intervenants, la ministre a apporté les précisions suivantes :

- Le combat contre le dopage doit être engagé avec humilité mais aussi avec détermination. Celle-ci est nécessaire car beaucoup d’éléments poussent à « laisser courir », comme par exemple l’organisation actuelle du système ou l’aura dont bénéficient les grands sportifs auprès de l’opinion publique. Accuser un champion, c’est accuser un héros. L’humilité est également de mise, car on est en présence d’un phénomène bien organisé et touchant de très nombreux pays, de sorte qu’une loi bien adaptée sera un instrument utile, mais insuffisant si les moyens ne suivent pas.

- Il faut poser avec le mouvement sportif le problème des phénomènes de surcompétition. On peut s’interroger sur certains excès quand on voit un sportif de renom être transporté directement d’un hôpital à un stade pour participer à une compétition et cela, semble-t-il, pour la seule raison qu’il incarne l’image d’une marque de chaussures distincte de celle utilisée par l’équipe adverse. La tentative de créer une superligue procède de la même dérive et la réponse de l’UEFA consistant à augmenter le nombre de matches n’est pas nécessairement satisfaisante.

- Il est clair qu’il faut apporter une réponse internationale au problème du dopage, notamment en ce qui concerne la coopération sur la recherche et celle des polices et des justices nationales. Le CIO a un rôle essentiel à jouer dans le combat contre le dopage, non seulement du fait de ses prérogatives juridiques (fixation de la liste des produits dopants, contrôle sur les fédérations, accréditation des laboratoires de contrôle...) mais surtout parce qu’il est le garant de l’éthique du sport, ce qui devrait le conduire à assumer des décisions parfois difficiles.

- Une directive européenne consacrée à la lutte contre le dopage pourrait être utile.

- La charte des sponsors ne doit pas se réduire au principe du licenciement des sportifs pris en flagrant délit de dopage pour préserver l’image de leur sponsor et les sociétés qui investissent dans le sport doivent également se préoccuper d’éthique sportive et ne pas pousser les sportifs qu’elles soutiennent à la surcompétition, donc au dopage. En tout état de cause, l’engagement pris par les signataires de la charte de verser 1 % des sommes consacrées au sponsoring à un organisme de prévention du dopage constitue un élément positif.

- En ce qui concerne les campagnes d’information contre le dopage, il serait intéressant d’obtenir l’appui des chaînes de télévision pour faciliter le passage des spots correspondants.

- S’agissant du problème particulier des jeunes sportifs, des mesures ont déjà été prises par certaines fédérations pour lutter contre les excès constatés. On peut en outre s’interroger sur l’opportunité d’interdire toute transaction ou opération commerciale concernant un sportif mineur.

- Au-delà du dopage, il faut également lutter contre le développement de pratiques dégradantes touchant à l’intégrité physique et morale des sportifs, comme celles des combats dits « extrêmes » dans certains sports de combat.

- Il est certain que des médecins du sport se trouvant en situation de dépendance vis à vis de leur employeur ont participé au « suivi médical du dopage ». Il est également regrettable qu’il n’existe pas de véritable formation à la médecine du sport. Il faut mettre certains médecins en état d’indépendance vis à vis des pressions économiques, afin qu’ils puissent privilégier la santé des sportifs. On peut donc imaginer un système fondé sur des médecins inspecteurs fédéraux dont l’action serait relayée par des médecins inspecteurs régionaux.

- Le système actuel de contrôle du dopage devrait être complété par un dispositif de suivi médical des sportifs permettant également de constater l’existence de cas de dopage ou de cas d’atteinte à la santé des sportifs.

- L’aide des parlementaires sera la bienvenue pour aider le ministère à obtenir les moyens nécessaires pour lutter plus efficacement contre le dopage. Bien que ces moyens aient été multipliés par deux en 1998 et progressent de manière sensible en 1999, ils restent insuffisants. C’est notamment le cas pour les 4 millions de francs affectés au Conseil de prévention et de lutte contre le dopage, puisque les médecins et les magistrats composant ce Conseil devront pouvoir bénéficier d’aides extérieures. Les moyens actuels permettent d’assurer le suivi médical et biologique de 600 sportifs de haut niveau, alors qu’il en existe plusieurs milliers et que les sportifs amateurs devraient pouvoir bénéficier également d’un tel suivi. Le suivi des 3 000 sportifs de haut niveau ainsi que de ceux inscrits dans les filières coûterait 60 millions de francs.


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