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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 12

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 14 novembre 2001
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. Gérard Charasse, Vice-président

SOMMAIRE

 

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- Crédits du commerce extérieur pour 2002

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Examen pour avis des crédits du commerce extérieur pour 2002

M. Marc Reymann a souligné que les crédits du commerce extérieur concernaient plus de cinq millions de salariés travaillant pour l'exportation française dans le monde. Au moment où la conférence ministérielle de l'OMC s'achève à Doha, où le ralentissement économique mondial oblige les Gouvernements à revoir leurs prévisions, la politique française en matière d'exportations mérite une attention particulière.

Les échanges commerciaux français ont connu de 1990 à 2000 un fort dynamisme, les exportations progressant à un rythme moyen annuel de 6,5% et les importations de 5,7%. Le solde commercial a connu sept années de forts excédents entre 1993 et 1999. L'excédent commercial a commencé à se réduire en l'an 2000 sous l'effet d'une forte hausse des prix du pétrole et des matières premières importées. Pour le premier semestre de cette année, le solde des échanges est encore positif ; il n'est pas certain toutefois que cette situation perdure au second semestre.

Depuis dix ans, la France a su accentuer sa spécialisation dans des secteurs dynamiques, concentrant ses exportations dans les biens d'équipement professionnel (aéronautique, électronique), au détriment des produits énergétiques et agro-alimentaires. Les ventes françaises se sont en outre réorientées vers les zones géographiques les plus dynamiques : les pays industrialisés et les zones émergentes, et notamment les Pays d'Europe centrale et orientale (PECO). L'excédent commercial s'élevait à 3,8 milliards de francs en 2000, en nette diminution par rapport aux années précédentes. Les exportations industrielles ont été très dynamiques pour 2000. Les exportations de biens d'équipement ont même dégagé un excédent record de 52 milliards de francs avec une progression de 11% pour l'automobile. Les exportations vers les Etats-Unis se sont contractées en 2001 : cette évolution n'est pas une conséquence des attentats du 11 septembre, mais s'est dessinée avec le ralentissement intervenu en début d'année. En revanche, les exportations vers les PECO restent fortes.

Les crédits de fonctionnement du commerce extérieur (réseau des postes d'expansion économique et organismes d'appui au commerce extérieur) sont stables. Le ministère a en effet procédé à une réforme profonde des structures et des méthodes d'action ; il arrive donc à présent à un fonctionnement compatible avec la politique de réduction du déficit budgétaire. L'amélioration de la gestion des procédures, du réseau de l'expansion économique, les progrès réalisés en matière d'informatisation et de communication (sites Internet) ont permis la mise à la disposition des entreprises d'informations très complètes et ont permis aux administrations un travail en commun sous réseau Intranet.

Le Rapporteur a constaté une politique malheureusement frileuse quant aux aides à l'exportation. L'assurance crédit gérée par la COFACE pour le compte de l'Etat affiche un résultat en excédent depuis 1995. Cette évolution résulte notamment de la sélectivité accrue de la politique de crédit et de la réorientation du soutien vers des opérations dans des régions solvables et dynamiques. On peut s'interroger sur la pertinence de cette politique qui va d'année en année vers la moindre prise de risque. Les efforts en faveur des PME stagnent. Les trois quarts des exportations françaises sont réalisées par les grands groupes. Le volet export des Contrats de plan Etat-Région devrait jouer un rôle moteur, mais les aides au commerce extérieur y reculent de 16%. L'accès à l'assurance prospection a été élargi aux PME récentes, simplifié et les délais de réponse abrégés : il faut s'en féliciter.

M.  Marc Reymann a donné un bref compte rendu de sa mission en Pologne et en Hongrie, effectuée en qualité de Rapporteur pour avis. Les potentialités à exploiter sont grandes dans ces deux pays. Après avoir rappelé le contexte économique favorable des deux pays (notant cependant que la Pologne connaît des difficultés budgétaires et une montée du chômage), le Rapporteur a souligné que les relations commerciales de la France avec les deux pays étaient très dynamiques.

La France a été le 5ème fournisseur de la Hongrie en 2000, et les exportations françaises pour le premier semestre ont marqué une progression de 24%. La France a été le 4ème fournisseur de la Pologne en 2000. Les importations en provenance de ces pays se développent également à un bon rythme, et le solde commercial est devenu favorable à la Hongrie. La France est par ailleurs le 3ème investisseur en Hongrie, mais se situe loin derrière l'Allemagne et les Etats-Unis, et est devenue le 1er investisseur en Pologne en 2000.

Le poste d'expansion économique de Budapest est un exemple de la politique de renforcement des capacités d'expertise menée par la DREE. Le Rapporteur a pu constater les capacités d'analyse disponibles pour la meilleur information sur les secteurs stratégiques, comme sur le risque-pays ou l'élargissement. Ce poste illustre aussi la politique de rapprochement avec les réseaux consulaires et parapublics à l'étranger (chambres de commerce, conseillers du commerce extérieur, fédérations professionnelles), avec la signature de conventions entre la DREE et ces organismes.

Enfin, M. Marc Reymann a indiqué qu'il avait été très sensible à l'impact exemplaire de l'action culturelle sur la présence française en Hongrie. La présence de l'Institut français, inauguré en 1992, est un élément phare de l'action culturelle, à côté des autres structures, et grâce à une enveloppe financière annuelle assez importante par rapport aux autres pays de la zone. La langue française reste la troisième langue enseignée et le renforcement de la présence économique - 40 000 personnes sont employées dans les filiales françaises - donne un nouvel attrait à l'apprentissage de la langue.

Ces deux pays illustrent la capacité de la France, lorsqu'il existe une volonté politique, à s'affirmer sur des marchés où sa présence n'était pas évidente.

En conclusion, le Rapporteur a approuvé la manière dont la réforme des services du commerce extérieur avait été conduite par M. François Huwart, Secrétaire d'Etat au Commerce extérieur. Il a estimé que l'aide aux entreprises devait retrouver de l'ambition, car de nouveaux défis attendent la France, et notamment l'entrée de la Chine à l'OMC, ce qui représente un immense marché mais aussi des capacités de production sans limites. Cette nouvelle donnée doit être prise en compte pour évaluer de quelles capacités dispose la France pour trouver sa place grâce à ses capacités d'innovation et de volonté.

En conclusion, le Rapporteur a proposé à la Commission d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du commerce extérieur pour 2002.

M. Roland Blum a souhaité insister sur certaines contradictions de la politique française en matière de commerce extérieur, et notamment s'agissant de la politique d'assurance crédit menée par la COFACE. Cette société à statut mixte qui doit prochainement être privatisée, si ce n'est déjà fait, assure elle-même sa politique et définit les zones géographiques où elle estime devoir accorder son assurance crédit. De fait, elle se trouve en contradiction avec la politique déterminée par le Gouvernement qui souhaite que certaines entreprises françaises s'implantent dans des zones, comme le Caucase par exemple, où la COFACE ne veut plus assurer ce financement. Dans ces conditions, une intervention de l'Etat ne devrait-elle pas être mise en _uvre pour que la COFACE intervienne afin d'éviter que se constitue tout un secteur géographique où nos entreprises auront des difficultés à agir ? Dans cet esprit, l'adhésion d'un pays à l'OMC ne pourrait-elle être l'un des critères d'intervention de la COFACE ?

M. Pierre Brana a demandé si les prévisions du commerce extérieur pour 2002 avaient pris en compte les événements du 11 septembre 2001 et leurs conséquences, notamment sur le secteur très sensible et sinistré de l'aéronautique. Par ailleurs, il a souhaité connaître la part de l'armement dans le commerce extérieur français.

Rappelant que la Chine venait d'entrer à l'OMC, M. Michel Grégoire s'est interrogé sur l'incidence de cette adhésion sur les échanges avec la France. A-t-on une stratégie précise en la matière et si oui quelle est-elle ? Comment la France analyse-t-elle cette entrée ?

Mme Odette Trupin a estimé que les conséquences économiques de cette adhésion plaçait la France devant un marché fantastique qui va se déployer mais posait des problèmes importants.

Le Rapporteur a précisé que la COFACE était à présent une société de droit privé. Il a partagé les réticences de M. Roland Blum quant à la politique trop sélective de cet organisme, qui risque de nuire au développement de la présence française dans certaines zones du monde où elle est rare alors que les relations politiques sont très bonnes, ce qui est le cas dans l'exemple qu'il a rapporté. En outre, la COFACE devait reverser, selon la loi de finances pour 2001, 11 milliards de francs à l'Etat, et un reversement équivalent est inscrit dans le projet de loi de finances pour 2002.

Les attentats terroristes du 11 septembre n'ont pas de conséquences directes pour le moment dans nos échanges. Nos exportations vers les Etats-Unis se sont contractées en 2001, mais ce phénomène découle du ralentissement observé dès le premier semestre de l'année. Des conséquences pourraient être observées non sur le solde commercial, mais sur la demande. Il n'y a pas eu pour l'instant d'annulation de contrats ou de ralentissement de la demande de la part des pays du Moyen-Orient, au contraire, l'aéronautique a enregistré une commande très importante de 50 Airbus pour l'Arabie Saoudite.

La prise de commandes dans le secteur de l'armement en 2000 s'élève à 45 milliards de francs. Notre commerce extérieur s'élevant à 100 milliards de francs par mois, on peut donc indiquer que l'armement représente un peu moins de deux semaines d'exportations de la France.

Le Rapporteur a ajouté que les différents points soulevés dans cette discussion, et notamment de la stratégie à mettre en _uvre après l'entrée de la Chine à l'OMC, seraient exposés au Secrétaire d'Etat au commerce extérieur lors de son audition le 15 novembre en commission élargie.

Conformément à l'avis du Rapporteur, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du commerce extérieur pour 2002.

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● Commerce extérieur


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