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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 28

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 30 janvier 2002
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. François Loncle, Président,

SOMMAIRE

 

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- Accord France-Singapour (n° 3515) - Mme Bernadette Isaac-Sibille, rapporteure

- Convention protection du Rhin (n° 2880) - M. Marc Reymann, rapporteur
- Convention sur l'environnement (no 3256) - Mme Marie-Hélène Aubert, rapporteure

- Conventions relatives aux droits de l'enfant (nos 3513 et 3514) - M. Michel Fromet, rapporteur

- Convention d'assistance administrative mutuelle internationale France-Algérie (n° 3516) -    M. Charles Ehrmann, rapporteur

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Accord France-Singapour

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Marc Reymann, suppléant Mme Bernadette Isaac-Sibille, empêchée, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Singapour relatif à la coopération de défense et au statut de leurs forces (n° 3515).

M. Marc Reymann a rappelé que la coopération militaire entre la France et Singapour, très limitée il y a peu, s'était considérablement enrichie au cours de ces quatre dernières années par le biais d'échanges à caractère opérationnel, la présence permanente depuis 1999 d'un escadron singapourien de 18 avions de chasse sur la base aérienne de Cazaux et des relations entre les différents états-majors. Cette accélération s'explique principalement par le fait que Singapour représente le seul pays de la zone sud-est asiatique capable actuellement de mettre en _uvre une force interarmées d'envergure. Le renforcement du partenariat opérationnel entre les armées française et singapourienne constitue de surcroît l'une des clefs d'une présence constructive durable de la France dans cette zone. Les récentes opérations à Timor au sein de la force internationale constituent un bon exemple de coopération commune.

En ce qui concerne son contenu, cet accord est un accord de coopération s'appuyant sur des programmes comprenant éventuellement des exercices de troupes, des échanges de personnels civils et militaires ou encore des stationnements de détachement de forces armées, mais en aucun cas une Partie ne s'engage à porter secours à l'autre Partie en cas d'agression.

L'accord prévoit également les conditions d'entrée des personnels civils et militaires sur le territoire de chacun des deux Etats, le régime douanier, le règlement des dommages, l'accès aux installations et les modalités de dénonciation éventuelle, qui est conclu pour une durée de vingt ans renouvelable par tacite reconduction.

Il est spécifié que les personnels de coopération militaire ne pourront être associés à des actions de maintien ou de rétablissement de l'ordre, de la sécurité publique ou de la souveraineté nationale, ni intervenir dans ces opérations.

Par ailleurs, en vertu des engagements internationaux qui sont les siens, la France a précisé qu'elle ne remettrait pas aux autorités singapouriennes une personne poursuivie pour une infraction passible de la peine de mort - applicable à Singapour - à moins que ces dernières ne donnent l'assurance que cette sanction ne sera pas prononcée, et si elle est prononcée, qu'elle ne sera pas exécutée.

Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 3515).

Convention pour la protection du Rhin

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Marc Reymann, le projet de loi autorisant l'approbation de la Convention pour la protection du Rhin (ensemble une annexe et un protocole de signature) (n° 2880).

M. Marc Reymann a tout d'abord rappelé que le Rhin est une voie d'eau internationale qui parcourt 1 325 km en traversant quatre pays (l'Allemagne, la France, les Pays-Bas, la Suisse) depuis les Alpes suisses jusqu'à la mer du Nord. C'est également une artère économique parmi les plus importantes au monde qui traverse les centres urbains et économiques de ces quatre pays, les reliant aux activités portuaires de Rotterdam et d'Anvers, respectivement premier port maritime au monde et deuxième port européen. C'est enfin un fleuve qui subit une pression énorme et multiforme de la part de la civilisation. Les multiples aménagements du fleuve que constituent les barrages pour la production hydroélectrique, les digues destinées à lutter contre les inondations et la canalisation des affluents ont gravement endommagé l'écologie du fleuve.

Si aujourd'hui les accidents de navigation se font plus rares, tout comme les accidents industriels - la catastrophe de Sandoz en 1986 a constitué un véritable électrochoc et les usines se sont dotées de bassins de confinement pour éviter les rejets toxiques -, la pollution par les effluents urbains et diffus demeure conséquente. L'ensemble des eaux usées, des eaux de ruissellement et des eaux superficielles se déversent dans le Rhin qui alimente en eau potable des milliers de citoyens. Or l'élimination de produits ménagers tels que les détergents et lessives qui contiennent des phosphates n'est pas parfaite. Par ailleurs, les nutriments utilisés par l'agriculture intensive contiennent des substances nocives particulièrement polluantes.

C'est pourquoi, dès 1950, les Pays-Bas, sur leur initiative, l'Allemagne, la France, le Luxembourg et la Suisse se sont réunis à Bâle pour organiser la lutte contre la pollution du fleuve sous la forme d'une coopération au sein de la CIPR, la Commission internationale pour la protection du Rhin.

Plusieurs conventions ont figuré l'expression juridique de cette volonté d'_uvrer à la dépollution du fleuve - elles font l'objet d'un développement conséquent dans le rapport -, avant d'être remplacées par un nouveau texte qui est soumis aujourd'hui à la Commission des Affaires étrangères, en l'occurrence la Convention pour la protection du Rhin signée à Berne le 12 avril 1999.

Ce nouveau texte présente des améliorations non négligeables par rapport aux textes précédents. Ainsi, les actions de la CIPR sont étendues au bassin versant du Rhin et aux eaux souterraines en interaction avec le Rhin qui est pris dans son ensemble géographique et dans tous ses aspects écologiques. Le caractère contraignant des recommandations que la CIPR adresse aux Parties contractantes est renforcé. Ces recommandations sont assorties, le cas échéant, d'un calendrier et d'une obligation de coordination, dont la mise en _uvre se fait conformément au droit interne des Parties contractantes. De même, obligation leur est imposée de faire rapport sur les mesures prises pour la mise en _uvre des dispositions de la Convention et des décisions de la CIPR, sur les résultats des actions ainsi entreprises et sur les difficultés éventuellement rencontrées. La CIPR dispose désormais de la personnalité juridique. Le néerlandais devient langue de travail au même titre que l'allemand et le français. Enfin, les ONG dont les domaines d'intérêts ou les activités sont concernés peuvent obtenir le statut d'observateurs.

Les résultats obtenus à ce jour grâce à la coopération établie au sein de la CIPR sont plus que satisfaisants dans la mesure où l'amélioration de l'écosystème du Rhin est réelle. Les eaux du Rhin peuvent à nouveau servir à alimenter en eau potable les populations sur presque tout le cours du fleuve. Les poissons sont de retour. A cet égard, le Rapporteur a rappelé que, dans la première partie du XXème siècle, il était interdit aux bourgeois de proposer à leur personnel de consommer du saumon plus de trois fois par semaine. La teneur en oxygène est proche du niveau idéal. Les rejets des principaux polluants ont été abaissés de plus de moitié. Le nombre des accidents industriels a été réduit. Les rejets de chlorure ont été fortement diminués. Par ailleurs, le Rapporteur a également signalé que ce n'est qu'en 1983 que la communauté urbaine de Strasbourg s'est dotée d'une station d'épuration biologique.

M. Pierre Brana a souhaité obtenir plus de détails sur les textes qui ont précédé cette nouvelle convention et sur les améliorations qu'elle propose. Il a par ailleurs demandé quelles étaient les mesures applicables aux centrales nucléaires.

M. Marc Reymann a répondu qu'une partie importante de son rapport faisait justement un point détaillé sur les différentes conventions consacrées à la lutte contre la pollution, et que l'amélioration majeure apportée par la nouvelle Convention résidait dans l'extension du champ d'application qui englobe dorénavant l'ensemble du bassin versant du Rhin ainsi que les eaux souterraines.

S'agissant des centrales nucléaires, et plus particulièrement Fessenheim sur le grand canal d'Alsace, la nouvelle Convention ne les cible pas directement, mais plutôt indirectement dans la mesure où par la présente Convention, les Parties contractantes s'engagent à lutter contre la pollution de l'eau sous toutes ses formes, et notamment quand elle se manifeste par une hausse de la température qui peut être provoquée par les eaux de refroidissement des centrales nucléaires, et également à veiller à la prévention des accidents et à la sécurité des installations, qu'elles soient nucléaires ou pas.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 2880).

Convention sur l'environnement

La Commission a examiné, sur le rapport de Mme Marie-Hélène Aubert, le projet de loi autorisant la ratification de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement (ensemble deux annexes) (n° 3256).

Mme Marie-Hélène Aubert, rapporteure, a tout d'abord précisé que la Convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement (dite Convention d'Aarhus) avait été négociée dans le cadre de la Commission économique pour l'Europe des Nations unies, et signée à Aarhus, au Danemark, le 25 juin 1998. Elle vise à mettre en _uvre le principe n° 10 de la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, adoptée en juin 1992.

Mme Marie-Hélène Aubert a expliqué que cette convention s'inscrivait dans le développement d'une démocratie participative, qui ne se contente pas des procédures traditionnelles de la démocratie représentative. Elle exprime également une conception large de l'intérêt général dont l'Etat ne peut plus être considéré comme le seul garant. L'encadrement des décisions ayant une incidence en matière d'environnement ne peut plus avoir un simple objectif d'indemnisation mais doit viser dans ce domaine à une véritable transparence, qui passe par l'information, la consultation, la concertation et le contrôle.

La Convention d'Aarhus est importante pour l'ensemble des pays d'Europe car il est de l'intérêt de chacun que ses partenaires s'engagent à respecter des mesures de transparence dans ce domaine, ce qui permet d'éviter certaines formes de « dumping » écologique. A cet égard, la convention d'Aarhus est très intéressante dans la mesure où elle concerne l'ensemble des pays d'Europe, y compris donc les pays d'Europe centrale et orientale. D'ores et déjà, la ratification de la Convention d'Aarhus a entraîné l'adoption de législations environnementales dans certains pays comme la Pologne ou la Moldavie.

Mme Marie-Hélène Aubert a précisé que les grands principes qui guident la Convention d'Aarhus sont également ceux du droit français de l'environnement, même si la Convention prévoit parfois des modalités plus audacieuses.

En ce qui concerne tout d'abord le volet sur l'accès à l'information dans le domaine de l'environnement, de nombreux textes affirment ce principe dans la législation française, notamment la loi de 1978 sur l'accès aux documents administratifs et la loi Barnier de 1995. Le droit français est donc globalement conforme aux principes de la Convention d'Aarhus. En effet, les principales insuffisances généralement déplorées dans ce domaine ne sont pas comblées par la Convention d'Aarhus. La principale concerne probablement la question du secret industriel et commercial qui permet de refuser de communiquer des relevés de rejets industriels lorsque leur analyse pourrait conduire à révéler des procédés de fabrication. Or, le secret industriel et commercial fait partie des motifs permettant de refuser une demande d'informations. A cet égard, on peut s'étonner que le Gouvernement français ait jugé utile de formuler une déclaration interprétative réaffirmant encore ce principe, alors même que la Convention est assez timide sur ce point.

Sur le volet « participation du public », la Convention précise que celle-ci doit se faire le plus en amont possible, ce qui correspond à la pratique française du débat public, moins à celle de l'enquête publique. A l'inverse, le champ d'application de cette stipulation est beaucoup plus vaste que celui du débat public, puisque la Commission nationale du débat public n'a été saisie qu'une vingtaine de fois depuis sa création en 1997. Ainsi le projet de loi sur la démocratie de proximité avait notamment pour but de rendre les procédures de participation compatibles avec la Convention d'Aarhus. Mais si la discussion parlementaire a permis des progrès incontestables sur certains points, elle a au contraire débouché sur un encadrement plus strict de certaines procédures de participation du public.

Enfin, le volet sur l'accès à la justice s'inspire largement des procédures contentieuses existant en France, fondées sur un accès facile à la justice, concernant par exemple la souplesse des voies de recours, une acception large du concept d'intérêt à agir, l'existence de procédures d'urgence...

Mme Marie-Hélène Aubert a conclu en rappelant encore l'utilité d'une concertation très en amont des projets qui peut permettre de désamorcer des contentieux dont la multiplication n'est effectivement pas souhaitable. Mais penser que verrouiller l'information est une solution qui permettra de mener à bien les projets plus rapidement est une erreur, les élus locaux ont tout intérêt à ce qu'une association du public au processus décisionnel soit organisée afin que l'action au contentieux ne soit pas l'unique moyen de se faire entendre.

M. Pierre Brana a déclaré qu'il voterait ce texte mais il s'est dit déçu de son caractère insuffisamment ambitieux, en ce qui concerne notamment l'accès à la justice et l'accès à l'information, pour lequel les motifs admis de refus de communication sont beaucoup trop nombreux.

Mme Marie-Hélène Aubert a estimé que la Convention était néanmoins plus satisfaisante que l'état actuel du droit dans de nombreux pays dont la France. Cette dernière n'est d'ailleurs pas pour rien dans l'existence dans la Convention de nombreuses exceptions, elle en a même réaffirmé une dans par une déclaration interprétative. La culture française dans ce domaine n'est pas celle de la transparence et elle a encore des difficultés à s'adapter. D'ailleurs, la Convention effraie de nombreuses personnes en France par son audace.

Le Président François Loncle a souligné la différence d'approche existant en ce domaine entre les pays du Nord et les pays latins, dont la France. Il a enfin précisé que la non-application de la Convention dans les territoires d'outre-mer était tout à fait justifiée car les questions d'environnement font partie de leurs compétences statutaires.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n°3256).

Convention relative aux droits de l'enfant

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Michel Fromet, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du protocole facultatif à la convention relative aux droits de l'enfant concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés (n° 3513) et le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du protocole facultatif à la convention relative aux droits de l'enfant concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (n° 3514).

M. Michel Fromet a d'abord cité les conclusions du discours prononcé par Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille et à l'enfance, au congrès contre l'exploitation sexuelle des enfants qui s'est tenu à Yokohama en décembre 2001 : « ...tout enfant a le droit d'être éduqué et protégé par sa famille, l'école et par la société. Les violences qui lui sont faites, et notamment les violences sexuelles, brisent en lui et en elle l'innocence et l'envie de grandir et donc le fondement même de l'humanité. »

Il a souligné le caractère essentiel des deux protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 car ils visent à accroître la protection des enfants face à deux fléaux : leur participation aux conflits armés et la vente, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. Ils complètent donc cette convention.

Il a rappelé que la communauté internationale avait d'abord accordé une protection aux enfants dans des textes généraux, comme la Convention des Nations unies de 1949 pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution ou les Conventions de Genève de 1949 et leurs Protocoles additionnels de 1977, notamment le I et le II en cas de conflits armés. Progressivement, la communauté internationale s'est efforcée d'assurer la protection des enfants par des conventions spécifiques comme la Convention n° 182 de l'Organisation internationale du travail pour l'élimination des pires formes de travail des enfants ou la Convention sur les droits de l'enfant, adoptée le 20 novembre 1989, qui confère à l'enfant la jouissance de tous les droits individuels, et édicte un ensemble de principes et d'obligations universellement reconnus sans décrire le détail des incriminations, pas plus que celui des mesures à prendre, ce qui en limite la portée.

Malgré l'existence de conventions internationales les interdisant, l'enrôlement forcé des enfants dans des conflits, leur exploitation sexuelle, leur vente sont des phénomènes qui ne régressent pas. En effet, on estime à plus de 300 000 le nombre d'enfants âgés de moins de dix-huit ans qui participent à des conflits armés sur l'ensemble du globe. Des centaines de milliers d'autres sont membres des forces armées et susceptibles d'être envoyés au combat à tout moment. D'après M. Olara Otonu, représentant spécial du secrétaire général de l'ONU chargé d'étudier l'impact des conflits armés sur les enfants, on compte actuellement plus de 22 millions d'enfants déplacés par la guerre tant à l'intérieur de leur pays qu'à l'extérieur.

Tous les jours, d'innombrables enfants en sont victimes un peu partout dans le monde. Certains d'entre eux sont loin de leur milieu d'origine. Ils peuvent avoir été enlevés et contraints de quitter leur région ; ou ils peuvent avoir décidé de partir pour échapper à de mauvais traitements ou à la pauvreté ou simplement dans l'espoir de se bâtir un meilleur avenir, sans savoir ce qui les attendait. Le Congrès des Etats-Unis estime que tous les ans, au moins 700 000 personnes, des enfants et des femmes pour la plupart, sont transférées clandestinement au sein d'Etats ou entre Etats. L'ONU estime qu'en Asie 30 millions de femmes et d'enfants ont été « vendus » aux seules fins de l'exploitation sexuelle au cours des trente dernières années.

En France d'après les statistiques des services de police, en 1999 on recense 16 307 infractions sexuelles dont 6 591, soit 28 %, commises dans le milieu familial. 46 % des viols de mineurs sont commis dans le milieu familial. Cependant de nombreuses associations de soutien aux prostitués contestent la faiblesse de ces chiffres et font état de la présence de nombreux mineurs sur les lieux de prostitution.

Face à ces fléaux, la communauté internationale a tenté de réagir par l'adjonction de deux protocoles à la Convention relative aux droits de l'enfant, afin de conduire les Etats signataires à une prise de conscience plus aiguë de ces tragédies, à une harmonisation de leur législation et de leur pratique et à une coopération accrue dans la répression.

Le protocole concernant l'enfant dans les conflits armés distingue trois situations : la participation aux hostilités, l'enrôlement obligatoire et l'engagement volontaire. L'article 1, a relevé de 15 à 18 ans l'âge prévu par la Convention de 1989 relative aux droits de l'enfant pour la participation des enfants aux hostilités. Il va au-delà du Protocole I de 1977. En élevant de 15 à 18 ans l'âge minimum des enfants pouvant faire l'objet d'un enrôlement obligatoire, le Protocole oblige chaque Etat Partie à veiller à ce que les personnes n'ayant pas atteint l'âge de 18 ans ne fassent l'objet d'un enrôlement obligatoire dans leurs forces armées. L'article 3 pose comme principe que chaque Etat Partie doit relever en années l'âge minimum de l'engagement volontaire dans ses forces armées nationales.

La mise en application du Protocole n'entraînera aucune modification de la législation française qui interdit la participation aux opérations militaires avant 18 ans. A ce jour le Protocole concernant les enfants dans les conflits armés a été signé par 91 pays et ratifié par 7 pays. Il entrera en vigueur quand 10 ratifications auront été obtenues.

Le Protocole concernant la vente d'enfants est en vigueur, il incite les Etats Parties à incriminer certains comportements liés à la vente, l'exploitation sexuelle des enfants et la pornographie les mettant en scène, et s'applique, même si l'infraction n'est commise que par un seul individu.

L'objectif du Protocole est de promouvoir, un renforcement des mesures que les Etats doivent prendre pour interdire la vente, la prostitution d'enfants et la pornographie les mettant en scène. Dans le cadre de la vente d'enfants, il incrimine certains comportements comme « le fait d'offrir, de remettre ou d'accepter un enfant, quel que soit le moyen utilisé, aux fins d'exploitation sexuelle, de transfert d'organes à titre onéreux, de travail forcé » et « le fait d'obtenir indûment, en tant qu'intermédiaire, le consentement à l'adoption d'un enfant, en violation des instruments juridiques internationaux relatifs à l'adoption (...) ».

Quant à l'adoption internationale, le Protocole renvoie à la Convention de La Haye et incite le pays d'origine et le pays d'accueil à une vigilance accrue en matière de protection des droits de l'enfant en cas d'adoption.

Par ailleurs le Protocole définit la prostitution des enfants par « le fait d'utiliser un enfant aux fins d'activités sexuelles contre rémunération ou aux fins d'avantages ou de l'offrir, de le procurer ou le fournir à de telles fins (...) ». L'enfant est ainsi érigé en victime non en auteur de l'infraction.

Prenant en considération le développement des réseaux pédophiles et des nouvelles technologies, le Protocole incrimine leur utilisation pour diffuser et détenir des matériels pornographiques mettant en scène des enfants (vidéos notamment).

La ratification de cet instrument aura peu d'incidence sur la législation française. La plupart des comportements incriminés par le Protocole le sont par le code pénal. En effet la loi sur l'autorité parentale adoptée par l'Assemblée nationale et qui devrait l'être prochainement par le Sénat insère dans notre droit pénal les dispositions incriminant la détention de matériel pédopornographique et crée un délit à l'égard des clients de prostitués de moins de 18 ans.

M. Michel Fromet a recommandé l'adoption de ces projets de loi qui répondent aux objectifs fixés par les congrès de Stockholm et de Yokohama, comme à ceux fixés par le Gouvernement et le Parlement français et notamment l'Assemblée nationale.

Ces projets de loi encouragent les actions de prévention et d'information et soulignent tout l'intérêt de la coopération internationale. La France a d'ailleurs souhaité qu'avant la tenue du sommet mondial des enfants en mai 2002, les pays membres de l'Organisation intergouvernementale de la Francophonie se réunissent pour renforcer la protection de l'enfance dans l'espace francophone, cette réunion devrait se tenir au Mali en mars prochain. La répression internationale des crimes tels que l'exploitation des enfants à des fins sexuelles est plus que jamais nécessaire pour lutter contre les réseaux mafieux de trafiquants qui prospèrent dangereusement.

Le Président François Loncle a rappelé que, depuis plus d'une douzaine d'années, l'Assemblée nationale se mobilise fortement sur la défense et la protection des enfants. Outre le vote d'une série de projets de loi et la ratification de conventions internationales à ce sujet, plusieurs commissions d'enquête et missions d'informations se sont penchées sur la protection de l'enfance. Il a cependant regretté que, malgré l'avance de la législation française sur ces différents thèmes, la prostitution des mineurs continue à proliférer sans que l'on s'en émeuve. Il s'est étonné qu'il n'y ait pas davantage d'interventions des forces de l'ordre à ce sujet.

M. Charles Ehrmann a évoqué l'influence néfaste d'Internet dans le développement de la pornographie mettant en scène des enfants. Il a demandé si une coopération était mise en _uvre avec les principaux pays concernés par la prostitution enfantine, comme les Philippines par exemple.

Il a enfin souligné la responsabilité des Allemands, principaux clients, d'après la presse, des réseaux pédophiles.

M. Pierre Brana a rappelé que le statut de la Cour pénale internationale incriminait l'utilisation d'enfants de moins de quinze ans dans les conflits armés. La convention l'interdit également pour les enfants de quinze à dix-huit ans, mais quelles seront les sanctions pour ceux qui ne respecteront pas la Convention tant que le statut de la Cour pénale internationale n'est pas en vigueur ?

Mme Marie-Hélène Aubert a demandé quelles étaient les sanctions prévues par la Convention à l'encontre des clients de la prostitution et de la pornographie enfantine. S'il existe un trafic, c'est parce qu'il y a des utilisateurs.

M. Michel Fromet a répondu à ces différentes interventions en reconnaissant que de nombreux Etats n'avaient pas encore ratifié les deux Protocoles facultatifs. S'agissant de celui sur l'implication des enfants dans les conflits armés, actuellement Andorre, le Bangladesh, le Canada, l'Islande, le Panama, le Saint-Siège et le Sri Lanka ont ratifié, sur les 85 signataires. Pour ce qui est du Protocole facultatif concernant la vente d'enfants, il est déjà en vigueur. Onze Etats l'ont ratifié : Andorre, le Bangladesh, Cuba, l'Islande, le Kazakhstan, le Maroc, la Norvège, le Panama, la Roumanie, le Saint-Siège et le Sierra Leone.

Il a estimé souhaitable d'exercer des pressions auprès des pays d'Europe de l'Est qui souhaitent entrer dans l'Union européenne pour les encourager à ratifier ces Protocoles et à empêcher ainsi que des filières de trafics d'enfants en provenance de ces pays ne prospèrent. Selon lui, les Protocoles permettent de lutter contre les inconvénients de l'utilisation d'Internet, car ils contiennent des dispositions qui permettent de s'attaquer au phénomène de détention de matériel pornographique mettant en scène des enfants. Désormais, la détention de cassettes vidéo est incriminée.

S'agissant de l'enrôlement des enfants et de leur utilisation sur le théâtre des opérations, le Protocole ne prévoit pas de sanctions contre les Etats mais constitue une forte incitation à interdire ces pratiques. Il prévoit en revanche des sanctions contre les groupes armés non étatiques qui enrôlent des enfants ; toutefois, le statut de la Cour pénale internationale, qui qualifie de crime de guerre l'utilisation des enfants dans les conflits armés pourrait permettre de traduire en justice les Etats qui ne respectent pas les dispositions du Protocole concernant les enfants dans les conflits armés.

S'agissant de la responsabilité pénale des clients de la prostitution enfantine, la Convention renvoie au droit des Etats.

Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté les projets de loi (nos 3513 et 3514).

Convention d'assistance France-Algérie

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Charles Ehrmann, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'avenant à la convention d'assistance administrative mutuelle internationale du 10 septembre 1985 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, visant la prévention, la recherche et la répression des fraudes douanières par les administrations douanières des deux pays (n° 3516).

M. Charles Ehrmann a souligné qu'un climat nouveau s'est instauré entre la France et l'Algérie depuis l'élection du Président Bouteflika. Les visites réciproques des deux ministres des Affaires étrangères en 1999 et 2000 ont permis de renouer le dialogue politique bilatéral. Surtout, la visite d'Etat en France du Président Bouteflika, en juin 2000, a constitué une étape majeure dans la relation franco-algérienne. Cette visite a permis de marquer la volonté partagée par les deux pays de donner un nouveau cadre à la relation bilatérale et de définir les secteurs prioritaires de coopération. Enfin, le Président de la République s'est rendu à Alger en décembre 2001.

La coopération a été renforcée dans tous les domaines : scientifique, technique, culturel et linguistique. Le bilan des relations économiques franco-algériennes pour l'année 2000 montre une progression sensible par rapport aux années précédentes. Les relations commerciales se sont également densifiées en 2000 pour atteindre un flux croisé d'environ 38 milliards de francs. Surtout, les investissements français en Algérie ont progressé en 2000.

La coopération douanière avec l'Algérie s'inscrit dans le cadre de la Convention d'assistance administrative mutuelle du 10 septembre 1985 entrée en vigueur en 1986. Cette Convention a permis d'établir une coopération douanière efficace. Les demandes d'assistance sont stables depuis 1995, portant sur vingt à trente dossiers par an.

Cependant, la nécessité est apparue d'adapter la Convention aux réalités actuelles en prévoyant un volet de lutte contre le trafic de stupéfiants. Au plan multilatéral, ce volet « anti-drogue » figure, par exemple, dans la Convention d'assistance mutuelle sur les infractions douanières de Nairobi (1977), récemment ratifiée par la France.

Au cours des quatre dernières années, les saisies de drogue en provenance d'Algérie, quoique relativement peu importantes, ont progressé. Les constatations portent surtout sur la résine de cannabis, dont les quantités augmentent. Le trafic a lieu surtout vers la France.

L'avenant aujourd'hui examiné élargit le champ d'application de la convention à la lutte contre le trafic de stupéfiants et de substances psychotropes et permet de nouveaux modes de coopération.

La surveillance spéciale prévue à l'article 4 de la Convention pourra être exercée sur les opérations liées à cette catégorie de trafics, à la demande de l'une des administrations. Un nouvel article permettra le recours aux livraisons surveillées, mode de coopération adapté à l'identification de personnes impliquées dans les fraudes douanières et les trafics. Enfin, est ajouté un article qui vise à autoriser les services douaniers à procéder, à la demande de l'autre partie, à des enquêtes et des interrogations de personnes suspectes et de témoins. Est prévue la possibilité, pour un agent des douanes du pays requérant, d'assister à l'enquête réalisée dans le pays requis.

Ces ajouts constituent des moyens classiques de coopération douanière.

Le Rapporteur a indiqué que l'utilité de l'avenant à la Convention de 1985 ne fait aucun doute, permettant une coopération plus approfondie et plus efficace des administrations douanières des deux pays.

M. Charles Ehrmann a rappelé que l'Algérie allait connaître des élections en 2002 : législatives en juin, puis locales en octobre. Il a espéré un meilleur avenir des relations franco-algériennes, se félicitant de l'ouverture d'un lycée international à Alger en 2002, de la réouverture des centres culturels et de la promotion de « l'Année de l'Algérie » en 2003.

Le Président François Loncle a confirmé que la relation franco-algérienne est une relation majeure pour la France, rappelant la mission qu'il a conduite à Alger en 1998, laquelle avait contribué à renouer le dialogue parlementaire. Il a souligné que la Commission des Affaires étrangères avait contribué à l'amélioration de cette relation pendant la présente législature. Il a rappelé que les crimes, commis par le GIA au nom d'un intégrisme islamique toléré et accueilli à Londres, doivent être dénoncés sans cesse, sachant qu'il se produit aussi des débordements de l'armée.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 3516).

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