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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

COMPTE RENDU N° 29

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 20 février 2002
(Séance de 11 heures 30)

Présidence de M. Jean-Claude Sandrier, Vice-président,
puis de M. Paul Quilès
, Président

SOMMAIRE

 

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- Communication sur les risques sanitaires auxquels ont pu être exposés les militaires français dans les Balkans (M. Bernard Cazeneuve, Président de la mission d'information sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer, au cours de la guerre du Golfe et des opérations conduites ultérieurement dans les Balkans, à des risques sanitaires spécifiques, Mme Michèle Rivasi, M. Claude Lanfranca, rapporteurs de la mission).





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La Commission a entendu une communication de M. Bernard Cazeneuve, de Mme Michèle Rivasi et de M. Claude Lanfranca sur les risques sanitaires auxquels ont pu être exposés les militaires français dans les Balkans.

M. Jean-Claude Sandrier, Président, a rappelé qu'à l'automne 2000, après avoir auditionné le Ministre de la Défense, la Commission avait décidé de créer une mission d'information, présidée par M. Bernard Cazeneuve, sur les conditions d'engagement des militaires français ayant pu les exposer, au cours des opérations du Golfe, à des risques sanitaires spécifiques. Il s'agissait d'examiner les causes de ce que la presse appelait à l'époque le « syndrome du Golfe » : les deux co-rapporteurs, Mme Michèle Rivasi et M. Claude Lanfranca, ont alors défini d'un commun accord avec les autres membres de la mission une méthode de travail fondée sur l'examen des données opérationnelles et scientifiques disponibles, telles qu'elles ressortent notamment des documents transmis par le ministère de la Défense et des auditions de responsables militaires, d'experts français et étrangers ainsi que d'anciens soldats ayant participé à la guerre du Golfe.

Puis, M. Jean-Claude Sandrier a rappelé que la mission avait publié, le 15 mai 2001, un rapport sur la question des risques sanitaires spécifiques auxquels ont pu être exposés les militaires français au cours des opérations de la guerre du Golfe. Ce document qui comporte un grand nombre de documents jusqu'alors inédits, formule dix recommandations.

M. Jean-Claude Sandrier a ensuite précisé que la Commission avait étendu en janvier 2001 la compétence de la mission aux opérations conduites dans les Balkans entre 1992 et 2000, période durant laquelle d'importants contingents de militaires français sont intervenus dans cette région, d'abord dans le cadre des Nations Unies puis de l'OTAN. Il a souligné à ce propos que, dans les derniers jours de l'année 2000 et au cours des mois de janvier et février 2001, certaines informations avaient suscité une réelle émotion dans la plupart des pays européens quant à l'apparition d'un syndrome dit « des Balkans ». Dans ces conditions, l'extension du cadre d'investigation de la mission d'information est apparue d'autant plus logique qu'il existait des problématiques communes aux opérations du Golfe et à celles des Balkans d'un point de vue sanitaire, même si les durées et les conditions d'exécution des missions dans ces deux régions s'avéraient différentes.

M. Jean-Claude Sandrier a alors constaté que la question d'un syndrome spécifique aux opérations conduites dans les Balkans semblait avoir perdu aujourd'hui de son actualité. La mission a néanmoins examiné avec soin, le cas échéant après déclassification, les documents établis par des experts sur la base d'observations faites sur les théâtres d'opérations de même qu'elle a également auditionné de hauts responsables militaires.

M. Jean-Claude Sandrier a ensuite fait état des évolutions observées dans les pratiques du Service de santé des armées pour la prise en considération des données environnementales au sens large, tout en précisant que la mission n'avait pas pu « découvrir » un syndrome nouveau et spécifique. Il a toutefois rappelé à ce propos qu'elle n'avait pas vocation à émettre des appréciations de nature médicale et notamment à examiner des dossiers individuels normalement couverts par le secret médical.

M. Jean-Claude Sandrier a enfin indiqué que la mission d'information avait préféré faire à la Commission une communication sur le résultat de ses travaux, cette communication et le débat en commission donnant lieu à la publication d'un compte rendu, comme le prévoit le Règlement.

M. Bernard Cazeneuve, Président de la mission d'information, a d'abord rappelé qu'au cours des dernières semaines de l'année 2000 et, de façon encore plus marquée, au début du mois de janvier 2001, la question dite d'un « syndrome des Balkans » avait occupé une place très importante dans les médias européens, alors que très peu d'informations avaient été données jusqu'alors sur ce sujet dans la grande presse, à l'exception de quelques articles en Belgique relayant les plaintes de militaires de ce pays qui avaient séjourné en ex-Yougoslavie depuis 1992. Il a jugé ce fait significatif dans la mesure où les armées belges n'avaient pas participé à la coalition alliée dans le Golfe, le syndrome dit « du Golfe » ayant retenu de façon quasi-exclusive l'attention dans les pays de cette coalition jusqu'à la fin de l'année 2000.

M. Bernard Cazeneuve a ensuite souligné que la mission d'information avait initialement été créée afin d'examiner l'éventualité d'une exposition des militaires français à des risques spécifiques à l'occasion des opérations du Golfe. Toutefois, devant le nombre et la diversité des informations faisant état d'un nouveau syndrome et l'émoi alors suscité, la Commission a décidé, en janvier 2001, d'étendre le champ d'investigation de sa mission aux opérations conduites dans les Balkans. Il a rappelé que la mission d'information avait poursuivi ses travaux sur la guerre du Golfe jusqu'à la publication de son rapport en mai 2001, en estimant que la démarche adoptée pour examiner les données opérationnelles relatives à ce conflit pouvait être transposée au théâtre d'opérations des Balkans. Il a alors souligné que la mission n'avait pas vocation à déterminer d'un point de vue médical le caractère et l'éventuelle origine de telle ou telle affection, notamment du fait de l'impossibilité pratique de faire réaliser ou de suivre des études épidémiologiques de long terme. La mission devait, en revanche, rechercher, par des auditions et l'examen de documents éventuellement déclassifiés à son intention, des éléments d'information et d'appréciation sur les conditions d'engagement des forces et les risques sanitaires qui pouvaient en découler, de manière à formuler des remarques et recommandations à destination notamment de l'Exécutif et des Etats-majors.

M. Bernard Cazeneuve a par ailleurs considéré que des problématiques communes à toutes les opérations couvrant la décennie 90 pouvaient être retenues : la première d'entre elles concerne la mise en _uvre opérationnelle d'armes incorporant de l'uranium appauvri, sujet sur lequel le rapport déjà rendu par la mission avait déjà apporté des éléments précis de réponse, pour la première fois en France, du moins dans un document public et à caractère officiel.

Après avoir rappelé que ce rapport n'avait pas fait l'objet de critiques tant en ce qui concerne la méthode que les propositions qu'il formulait, il a souligné qu'au cours de ses premières investigations sur le conflit du Golfe, la mission d'information n'avait pas été directement saisie, notamment par les associations qu'elle a entendues, de situations sanitaires particulières aux Balkans. Il a également fait observer qu'il n'y avait pas eu, en France, de dramatisation analogue à celle qui avait été orchestrée sur le conflit du Golfe, notamment de la part d'associations comme, par exemple, Avigolfe.

Mme Michèle Rivasi, co-rapporteure, a tenu à exprimer son étonnement devant l'inachèvement des travaux de la mission sur le conflit des Balkans, au regard de la somme d'informations qui avait été précédemment recueillie puis publiée sur le syndrome du Golfe. Elle a regretté, d'une part, que la mission n'ait pu effectuer un déplacement au Kosovo, afin de fonder la crédibilité de ses conclusions et, d'autre part, qu'elle n'ait pas procédé à l'audition de militaires se plaignant d'affections sérieuses pour ne pas se limiter aux déclarations des seuls hauts responsables du ministère de la Défense.

M. Jean-Claude Sandrier, Président, a tenu à préciser que les communications du Président et des co-rapporteurs de la mission seraient suivies d'un débat mais qu'elles ne donneraient pas lieu à un vote.

Après avoir exprimé son accord avec cette procédure, Mme Michèle Rivasi, co-rapporteure, a indiqué qu'elle formulerait, à titre personnel, des observations sur certains points des travaux de la mission.

Abordant les problématiques de la protection et du suivi médical des forces et de la surveillance sanitaire de l'environnement, M. Claude Lanfranca a insisté sur le devoir d'objectivité qu'il s'assignait, en rapportant sans appréciation subjective ou pré-supposé personnel ce qu'il avait vu et entendu au cours des investigations de la mission. Il a rappelé que, sur la question de l'uranium appauvri, la mission avait précisé, dès son premier rapport, des données essentielles : s'agissant du recours à ce type de munitions, il est avéré qu'aucune utilisation n'en a été faite par les armées françaises, hors expérimentation en France, sur un quelconque théâtre d'opérations, dans le Golfe comme dans les Balkans. Par ailleurs, sans que cela ait toutefois été officiellement confirmé, la mission a mis à jour la cessation, au moins depuis 1999, de toute fabrication en série des obus flèches à uranium appauvri par l'industrie française. Certaines quantités restent toutefois stockées, notamment sous la forme de munitions antichars de 105 mm, au dépôt militaire de Brienne-le-Château dans l'Aube. Un calibre de 120 mm incorporant des flèches à l'uranium appauvri destinées au char Leclerc a fait l'objet d'essais mais n'a pas été mis en production.

Puis M. Claude Lanfranca a souligné qu'à la demande expresse de la mission d'information, l'ensemble des lots d'uranium ayant servi à l'usinage de flèches avait fait l'objet d'une recherche isotopique par la Direction des applications militaires du CEA, selon un protocole transmis à la mission : la présence de plutonium 239 n'ayant pas été détectée, cet élément ne pourrait éventuellement être présent dans les lots qu'en quantités inférieures ou égales à celles rencontrées dans l'uranium naturel.

Dans le même temps, la mission a reçu communication des résultats du suivi de 1987 à 2000 des personnels du site d'essais de Gramat du point de vue hématologique, toxico-urinaire et dosimétrique et de la surveillance environnementale de ce site. Les résultats, depuis 1990, des observations relatives aux personnels du polygone de tir de Bourges et à l'environnement de cet établissement lui ont également été communiqués : les numérations sanguines et les recherches urinaires d'uranium n'ont rien révélé d'anormal dans l'une et l'autre situation alors que pour l'eau, les sols et les végétaux, seul l'uranium naturel a été détecté.

M. Claude Lanfranca a alors indiqué que, sur la demande de Mme Michèle Rivasi, co-rapporteure, le ministère de la Défense avait transmis, en octobre 2001, sous la forme d'un volumineux classeur, le descriptif des méthodes et des matériels mis en _uvre pour les mesures radiologiques de terrain sur l'homme comme sur l'environnement. Cet ensemble de précisions concernant les protocoles n'avait pas été obtenu à l'occasion des précédentes investigations sur le Golfe. Il révèle des progrès méthodologiques mais aussi de moyens par rapport à ce qui existait alors au sein du Service de santé et notamment du Service de protection radiologique des armées.

S'agissant plus particulièrement des Balkans, M. Claude Lanfranca a indiqué que c'est seulement à la date du 27 novembre 2000 que l'OTAN avait précisé, notamment sous la pression du Secrétariat général des Nations Unies, que 10 800 projectiles à l'uranium appauvri avaient été tirés en Bosnie-Herzégovine, en 1994 et 1995, principalement autour de Sarajevo dans la zone dite « d'exclusion ».

Puis, concernant les opérations aériennes sur la République fédérale de Yougoslavie lancées après l'échec des négociations de Rambouillet avec ce pays, l'OTAN a fourni une liste précise des sites bombardés sous la forme d'un relevé des sorties aériennes et des coordonnées topographiques des objectifs : au total, 31 000 projectiles à l'uranium appauvri ont été tirés exclusivement par l'aviation américaine, principalement au Sud du Kosovo avec quelques débordements sur le Sud-Ouest de la Serbie et le Monténégro.

Ces données sont plus précises que celles fournies pour les opérations du Golfe, pour lesquelles seul un montant global des quantités de munitions utilisées, évalué à 320 tonnes de bombes et d'obus, pouvait être considéré comme crédible sans indication sur la localisation des cibles.

M. Claude Lanfranca a souligné que, pour la coalition du Golfe, conduite par les Américains, dans un cadre sui generis, la mission avait obtenu des documents opérationnels relatifs à l'opération française Daguet. En revanche, la SFOR (en Bosnie-Herzégovine) et ultérieurement, les bombardements sur la République fédérale de Yougoslavie relevant de planifications de l'OTAN, il est difficile d'obtenir d'autres documents opérationnels que ceux déclassifiés par le Secrétariat général de l'organisation, sauf à demander une déclassification spécifique par le Conseil de l'Atlantique Nord, procédure politique extrêmement lourde dont seul le Gouvernement peut prendre l'initiative. Néanmoins, une carte des zones de bombardement a pu être établie sur la base des données topographiques transmises par l'OTAN.

Le co-rapporteur a alors fait part des observations suivantes :

- il ressort de cette carte que les troupes allemandes et italiennes ont été positionnées au plus près des zones de frappes sur le Kosovo, en bordure de la frontière albanaise, contrairement aux forces américaines et françaises (la France occupant une position plus au Nord). Cependant, cet élément ne permet pas, à lui seul, de s'exonérer de toute investigation d'autant que le Kosovo est une petite région, dans laquelle les troupes ont été appelées à circuler au-delà des zones leur ayant été affectées. En revanche, s'agissant de la Bosnie-Herzégovine, les alentours de Sarajevo ayant été bombardés, les forces françaises ont pu à plusieurs reprises, traverser des zones de frappes de munitions à l'uranium appauvri ou y séjourner ;

- l'audition du Général Janvier, ancien commandant des forces de paix des Nations Unies, a démontré que la chaîne de commandement de l'OTAN, à laquelle il n'appartenait pas, avait l'entière responsabilité de la détermination des cibles et des moyens propres à les traiter en Bosnie-Herzégovine. De même, une autre audition de la mission, celle du Général Gaviard, alors représentant des éléments français auprès du Commandant des forces aériennes de l'OTAN en Europe du Sud (COMAIRSOUTH) dans le cadre de la SFOR puis de l'opération « Allied Force », a confirmé que le ciblage des objectifs et les moyens utilisés pour leur traitement par les Etats-Unis ne donnaient lieu à aucune concertation entre alliés, sauf pour les opérations engageant des moyens français pour lesquelles l'Etat-major des Armées ne disposait d'ailleurs que de la faculté d'accepter ou de récuser les cibles initialement sélectionnées par le commandement américain ;

- ces précisions apportées par de hauts responsables militaires démontrent, s'il en était encore besoin, qu'au sein de l'OTAN les Etats-Unis pratiquent une politique du fait accompli sans concertation ni échange d'informations avec leurs alliés ; cette absence de débats préalables à la détermination des objectifs et à leurs modes de traitement a été expressément confirmée devant la mission par le Général Kelche, Chef d'état-major des Armées depuis le mois d'avril 1998.

Le Chef d'état-major des Armées a, par ailleurs, détaillé au cours de son audition par la mission les priorités et les moyens arrêtés au niveau français pour la protection des militaires impliqués dans la phase terrestre des opérations au Kosovo, à partir du mois de juin 1999 ;

- plus généralement, la mission a pu, au travers des auditions de responsables militaires français, établir qu'une information générale a été donnée par les Etats-Unis, notamment par une note OTAN du 1er juillet 1999, sur le risque potentiel représenté par l'uranium appauvri dispersé. Le premier message relatif à la présence d'uranium appauvri dispersé, arrivé à l'état-major français le 17 juin 1999, a été répercuté dès le lendemain au P.C. de la Brigade française. Puis par deux messages des 21 et 26 juin, l'état-major français a détaillé les mesures de précaution à prendre impérativement en cas de découverte de carcasses de chars atteints ou susceptibles d'avoir été atteints par des munitions à l'uranium appauvri ;

- ces précautions portaient plus précisément sur les risques d'inhalation de particules dispersées dans l'environnement immédiat plutôt que sur le risque radiologique. Le dispositif de protection faisait intervenir des équipes spécialisées et un équipement lourd ;

- au vu des indications fournies par l'OTAN, seuls trois sites auraient fait l'objet d'un traitement par bombardement à l'uranium appauvri dans l'ensemble du secteur de la Brigade française. Les recherches de carcasses et d'impacts ont été de ce fait difficiles sur cette zone au Nord du Kosovo ;

- une mission d'expertise du Service de protection radiologique des armées, diligentée sur place du 9 au 14 décembre 1999, a examiné la carcasse d'un char T 35 serbe près de Likovac ainsi que l'environnement en eau et en terre de ce site. Elle a également examiné un sabot d'obus à uranium appauvri retrouvé par nos équipes NBC, de même qu'un ancien dépôt NBC serbe susceptible d'avoir été atteint par des missiles et un Tomahawk contenant une flèche d'uranium appauvri permettant de percer le béton. S'agissant de l'environnement, il n'a été retrouvé que de l'uranium naturel, aucune trace d'uranium appauvri n'ayant été relevé dans le dépôt NBC. Quant à l'uranium appauvri repéré par certains frottis sur le char et le sabot d'obus, il ne présentait que de faibles débits n'impliquant pas de risques.

M. Claude Lanfranca a ensuite indiqué que le commandement français avait néanmoins décidé de suivre l'ensemble des personnels susceptibles d'avoir été en contact avec des carcasses de véhicules détruits : sur quelque 700 contrôles effectués par des médecins d'unité, 56 recherches d'uranium appauvri dans les urines ont été prescrites et se sont toutes révélées négatives.

M. Claude Lanfranca a alors souligné que la principale préoccupation du commandement français avait concerné l'environnement dans la région de Mitrovica : les initiatives prises ont abouti à la fermeture définitive d'un site industriel générant une pollution massive, notamment au plomb. De l'automne 1999 à la décision de fermeture prise le 14 août 2000 par M. Bernard Kouchner, Représentant spécial des Nations Unies, le Laboratoire d'analyses et d'expertises de la Marine (LASEM) a examiné précisément l'évolution de la situation et poursuit encore sa surveillance sur la zone concernée pour y détecter notamment des pollutions de l'air et de l'eau par l'amiante, le cadmium, les déchets industriels et les stocks chimiques.

M. Claude Lanfranca a alors indiqué que la mission prenait acte des déclarations faites devant elle par le Chef d'état-major des Armées, selon lesquelles l'expérience des pollutions rencontrées dans la région de Mitrovica avait débouché sur une nouvelle démarche du Service de santé concernant « l'hygiène et la sécurité en opération ». Cette démarche vise à une prise en compte systématique des risques environnementaux au sens large dans la conception et la conduite de toute opération.

M. Claude Lanfranca a également précisé que, selon le médecin-général Gautier, ancien Directeur central du Service de santé, 9 863 plombémies avaient été effectuées sur les personnels français au Kosovo. Il a ajouté que le dispositif de vigilance à l'égard des risques environnementaux avait été maintenu sur ce théâtre : une limitation des séjours des femmes en âge de procréer a en particulier été décidée afin de se prémunir d'un éventuel risque cumulatif dû à une exposition prolongée.

Mme Michèle Rivasi a ensuite évoqué la crise de l'uranium appauvri du début de l'année 2001 :

- s'agissant de la période couvrant les mois de janvier et février 2001, un rappel des faits s'impose : de façon concomitante, la presse de plusieurs pays européens annonçait des cas de leucémies, d'affections thyroïdiennes, de tumeurs diverses et de maladies inexpliquées ainsi que des décès dus à ces pathologies parmi les militaires ayant à un moment quelconque été affectés dans les Balkans entre 1992 et 2000. Mme Michèle Rivasi a souligné à ce propos que l'existence d'une note de l'OTAN de 1999 sur les dangers potentiels de l'uranium appauvri confirmait le risque encouru par nos forces dès 1994 et 1995 en Bosnie-Herzégovine ;

- un premier groupe de pays comprenant l'Italie, l'Allemagne, le Portugal et la Grèce se caractérise par des polémiques et de fortes réactions politiques. En Italie l'intensité du débat s'explique sans doute par un contexte pré-électoral alors qu'en Allemagne, le Gouvernement a été accusé tant par les Verts que la CDU de minimiser la réalité en ne mentionnant qu'un cas de leucémie sur la base de 118 examens médicaux seulement, alors que près de 60 000 militaires et 1 650 policiers allemands avaient servi dans les Balkans jusqu'à la fin 2000 ;

- pour sa part, l'Italie, où l'on a parlé de 30 cas dont 9 décès, a tenté, sans succès, d'obtenir de la Croatie qu'elle proteste contre d'éventuels largages de bombes américaines dans l'Adriatique ;

- en Grèce, la polémique a mis à jour les essais de tirs à l'uranium appauvri effectués au cours des années par les armées de ce pays en Mer Egée. On notera d'ailleurs que cet épisode a fait apparaître qu'un pays comme la Suisse avait procédé, dès les années soixante et soixante-dix à des essais de munitions à l'uranium appauvri sur son territoire, sans prendre de mesures de protection particulières ;

- un second groupe de pays, membres de l'OTAN, a adopté une attitude plus prudente voire attentiste : le Royaume-Uni se référant à des travaux épidémiologiques comparatifs entre des veterans du Golfe et d'autres cohortes de militaires ayant notamment séjourné dans les Balkans (études du King's College et de la Royal Society) a d'emblée repoussé toute idée de pathologies spécifiques ;

- la Turquie, dont les troupes étaient déployées dans une zone atteinte par des munitions à uranium appauvri, dans la région de Tirzen, les Pays-Bas, la Norvège voire l'Espagne se sont montrés réservés. En Espagne, le ministère de la Défense a contesté des prises de position de l'Office de Défense du soldat (ODS) faisant fonction de médiateur au sein des armées, qui mentionnait des statistiques préoccupantes : 4 décès, 6 hospitalisations et 12 malades en attente d'un diagnostic ;

- la France peut être rangée dans ce second groupe : le ministère de la Défense a néanmoins indiqué au cours du mois de janvier 2001 que 4 puis 5 et enfin 6 militaires français étaient hospitalisés dans des hôpitaux militaires pour des leucémies et des lymphomes (4 leucémies et 2 lymphomes aigus de haut degré de malignité), en précisant que tous avaient séjourné en ex-Yougoslavie et pour l'un d'entre eux « seulement brièvement au Kosovo » ;

- dans le même temps, il a été précisé qu'une enquête étiologique était conduite pour identifier les facteurs susceptibles d'être à l'origine de ces pathologies : 50 militaires ont fait l'objet de tests (notamment un examen urinaire par spectrométrie alpha) qui n'ont fait apparaître aucune trace d'uranium appauvri dans leur organisme ;

- le 1er février, le Directeur de la DICOD précisait après recherches que la fréquence chez les militaires des maladies en cause correspondait à celle de la population générale (de 2 à 5 pour 100 000 concernant la leucémie et de 10 pour 100 000 s'agissant de lymphomes malins). Il concluait : « Nous n'avons donc pas, sur cette étude rétrospective à caractère épidémiologique, de démonstration d'une fréquence de leucémie dans la population militaire qui soit, sur la période des quinze dernières années, supérieure à celle de la population civile ». Mme Michèle Rivasi a alors insisté sur le fait qu'il s'agissait là d'une déclaration faite par le ministère de la Défense sous sa seule responsabilité.

Elle a ensuite indiqué que les Ambassadeurs auprès du Conseil de l'Atlantique nord s'étaient saisis de la question dès le début du mois de janvier 2001, en évitant toute réunion ministérielle sur ce thème afin de ne pas dramatiser la situation :

- dès le 22 décembre 2000, l'Italie a saisi le Secrétariat général de l'OTAN pour obtenir des Américains la liste précise des objectifs visés au Kosovo ;

- au niveau des Représentants permanents, la France a soutenu les Américains, les Canadiens et le Royaume-Uni dans leur refus du moratoire d'utilisation de l'uranium appauvri à des fins militaires demandé par l'Italie, idée à laquelle l'Allemagne était également sensible selon une déclaration de son Ministre de la Défense, s'exprimant toutefois à titre personnel ;

- le Parquet du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie confirmait d'ailleurs qu'il n'était pas question d'engager des poursuites sur la base de l'utilisation de cette arme. D'ailleurs, au cours de ce même mois, le Royaume-Uni reprenait des tirs d'exercice en Ecosse avec ces munitions, en dépit de l'opposition de la population locale ;

- le 10 janvier 2001, l'OTAN a créé un Comité ad hoc sur l'uranium appauvri, structure réunissant les pays membres, les membres du Partenariat pour la Paix, la Bosnie-Herzégovine, les grandes institutions internationales ainsi que la Yougoslavie, invitée mais qui n'a pas participé ;

- le Comité des Chefs de services de santé militaire (COMEDS), réuni, pour la première fois sur le sujet de l'uranium appauvri, le 15 janvier, faisait, dans le même temps, le recensement des pathologies observées dans les pays contributeurs de forces dans les Balkans. Il devait faire des propositions d'ordre méthodologique au Comité ad hoc.

Abordant ensuite les réactions du Service de santé des armées, Mme Michèle Rivasi a apporté les précisions suivantes :

- depuis la guerre du Golfe et, de manière plus active, depuis le commencement des travaux de la mission, le Service de santé a développé une pratique spécifique concernant l'uranium appauvri. D'une part, une période de surveillance radiotoxicologique a été définie et d'autre part, depuis les événements du début 2001, un suivi médical a été organisé : des analyses radiotoxicologiques des urines de 24 heures ont été faites de façon ciblée (aucune trace d'uranium appauvri n'a été repérée chez les sujets retenus, affectés notamment à des missions de déminage). Le recueil des pathologies constatées a par ailleurs été amélioré car il concernait jusqu'alors essentiellement les maladies infectieuses et les pathologies traumatiques ;

- une étude épidémiologique portant sur 83 501 militaires français ayant séjourné dans les Balkans a été lancée. Fin juillet 2001, 62 392 dossiers de militaires encore en activité avaient été analysés et près de 1 000 consultations spéciales à la demande de civils et d'anciens militaires avaient été réalisées : à une numération formule et à un bilan rénal s'ajoutait une recherche urinaire d'uranium appauvri pour toute personne en faisant la demande. Tous les examens se sont révélés négatifs : les autorités militaires estiment donc qu'en dehors des névroses post-traumatiques, les anciens des Balkans ne présentent pas de différences de pathologies, en nombre comme en nature par rapport à la population générale, pour les mêmes tranches d'âge, y compris pour les leucémies et processus tumoraux.

Mme Michèle Rivasi a rappelé qu'il s'agissait de données communiquées par les armées, alors qu'elle disposait, pour sa part, d'un courrier lui ayant été adressé par un militaire, aujourd'hui décédé de leucémie, qui n'avait pas été contacté par le Service de santé alors que le ministère avait été informé de son état au cours de sa maladie. Elle a toutefois observé que les résultats de l'étude menée par les armées françaises concordaient avec ceux de l'enquête conduite auprès de 15 800 militaires belges dont la mission a obtenu la transmission au cours de son déplacement à Bruxelles, en décembre 2001, après sa rencontre avec M. Flahaut, Ministre de la Défense de Belgique ;

- par ailleurs, à la suite d'une épidémie de fièvre-Congo survenue au Kosovo à partir de mai 2001, le Service de santé a fait adopter des mesures de précaution toujours en vigueur et défini, avec l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, un traitement à base de Ribavirine. Une enquête sérologique est en outre effectuée de manière systématique auprès de tous les militaires ayant séjourné dans la zone de l'épidémie à leur retour ;

- au terme de l'année 2001, sur les 6 cas d'hémopathies aiguës recensés par le ministère, un décès était enregistré (un des deux malades atteints d'un lymphome). Pour les cinq autres malades, quatre étaient considérés en rémission persistante, après traitement au sein du service spécialisé de l'hôpital militaire Percy de Clamart. Selon les médecins militaires, les études cytogénétiques « ...n'ont montré aucune des particularités induites par des agents extérieurs chimiques ou radioactifs, notamment des anomalies affectant les chromosomes 5 et 7 ». Aucun nouveau cas d'hémopathie n'aurait été enregistré depuis janvier 2001.

Puis, Mme Michèle Rivasi a présenté les principales expertises et appréciations des grandes institutions internationales, en soulignant que, dès le 10 janvier 2001, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) avait formulé des commentaires prudents sur la situation en faisant état de l'absence de statistiques notamment sur l'incidence des leucémies chez les militaires par référence à une même classe d'âge et sur l'emploi de l'uranium appauvri.

L'OMS a également jugé assez peu probable l'existence d'un risque accru de leucémies du fait de la mise en _uvre d'armes à uranium appauvri.

Toutefois, cette organisation a d'emblée fait deux remarques importantes :

· L'expérience de Tchernobyl a montré qu'une augmentation importante du taux des cancers de la thyroïde (notamment chez les enfants) pouvait résulter d'irradiations sans que le taux des leucémies s'accroisse.

· En cas d'inhalation et d'ingestion (possibles du fait de l'aérolisation d'une partie de l'uranium appauvri), la première conséquence prendrait la forme de graves dysfonctionnements rénaux ;

- pour sa part, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) de Vienne s'est contentée d'un exposé technique dans le cadre d'une de ses réunions scientifiques informelles organisées chaque mois sur différents sujets : les risques théoriques de cancer liés à l'uranium appauvri seraient plus faibles que ceux de l'uranium naturel. Toutefois les conséquences de la toxicité chimique de l'uranium appauvri seraient plus sérieuses que celles liées aux radiations. Mme Michèle Rivasi a alors souligné que d'autres expertises avaient confirmé le fait, déjà mis en exergue par la mission dans son rapport sur le Golfe, que les obus-flèches pouvaient renfermer outre de l'uranium 238, des traces d'uranium 236 et de plutonium 239/240. Elle a estimé que cette observation démontrait qu'au moins une partie de l'uranium appauvri américain ayant servi à la fabrication des munitions provenait de retraitements.

Elle a ensuite indiqué que, dans un communiqué de presse, le Directeur général de l'AIEA avait insisté sur la nécessité d'évaluer soigneusement l'impact de l'uranium appauvri en fonction des circonstances de son utilisation et des probabilités de son ingestion ou inhalation du fait d'un contact direct.

Elle a ajouté qu'en janvier puis en mars 2001, le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) avait communiqué des données recueillies par sa « Balkans Task Force », une équipe de 14 experts conduite par M. Haavisto (Finlande).

Cette équipe dont l'envoi au Kosovo avait été demandé dès juillet 2000 par le Secrétaire général des Nations Unies relayé, sur place, par son représentant M. Bernard Kouchner, a visité 11 sites bombardés avec des munitions à l'uranium appauvri et effectué plusieurs centaines de prélèvements d'air, d'eau, de lait, de végétaux ainsi que sur des immeubles ou véhicules détruits. Elle a également emporté pour les examiner des parties d'armes à l'uranium appauvri. Le PNUE s'est néanmoins montré globalement rassurant : l'ingestion d'un peu de terre sur un sol contaminé ne créerait qu'un risque minime. Il a, en revanche, souligné qu'une incertitude demeurait sur la qualité des eaux souterraines ;

- enfin, concernant l'Union européenne, en dépit de la fermeté initiale du Président de la Commission, M. Prodi, qui reprenait largement la position de son pays l'Italie, l'intervention s'est limitée aux conclusions du groupe des experts dits de l'article 31 du traité Euratom. Cette opinion déjà mentionnée devant la mission par l'un des membres du groupe, le Professeur Jean-François Lacronique se limitait aux observations suivantes :

· l'exposition directe à l'uranium appauvri ne produit pas d'effets décelables du moins dans l'immédiat étant donné le caractère latent des cancers et des leucémies (périodes pouvant aller jusqu'à 7 ans) ;

· l'effet combiné radioactif et chimique n'est pas exclu a priori mais il n'y aurait pas de preuves pour soutenir une telle hypothèse ;

· des contaminations de l'eau, voire de la chaîne alimentaire, ne sont pas impossibles mais les doses d'exposition à l'uranium appauvri paraissent extrêmement limitées.

M. Bernard Cazeneuve, Président, a ensuite exposé les conclusions de la mission d'information :

- comme pour la coalition du Golfe, la mission constate que les Etats-Unis qui disposent d'un monopole sur les commandements opérationnels et les planifications d'interventions armées, ne s'estiment pas obligés d'informer leurs Alliés, même a posteriori, sur les cibles de leurs frappes et les moyens de les traiter ;

- par ailleurs, en dehors des demandes d'information formulées par le Secrétaire général des Nations Unies auprès de son homologue de l'OTAN, les instances de l'ONU paraissent constituer des cadres inadaptés pour connaître et débattre des risques sanitaires auxquels sont exposées les forces : son Département des opérations de maintien de la paix basé à New York n'a visiblement pas les moyens et peut être pas la volonté d'engager des actions sur ce point, pas plus que le Service médical de l'ONU, comme la mission avait pu le constater, au siège de l'organisation, à l'occasion d'un déplacement en avril 2001 ;

- de ce fait, l'Union européenne pourrait jouer un rôle plus important, notamment en mettant en _uvre une proposition formulée par M. Flahaut, Ministre belge de la Défense (au début de la Présidence belge de l'Union européenne en juillet 2001). Cette proposition prévoyait la création d'un dispositif de collecte et d'échange d'informations sanitaires entre pays membres pour toutes les opérations extérieures et humanitaires pour lesquelles ils dépêcheraient des nationaux (militaires ou civils) : s'agissant des militaires, une structure chargée de cette fonction pourrait être créée auprès de M. Javier Solana, Haut représentant de l'Union pour la politique étrangère et de sécurité commune voire auprès du Comité militaire de l'Union européenne qui réunit les chefs d'état-major des armées ;

- la question d'un moratoire d'utilisation des armes à l'uranium appauvri ne manquera pas d'être à nouveau évoquée, en dépit de l'opposition des Etats-Unis et du Royaume-Uni. Pour sa part, la France a, de fait, décidé un moratoire de fabrication mais n'exclut nullement une utilisation : en témoigne la Directive n° 79 de l'état-major de l'armée de Terre du 8 février 2001 sur l'emploi des munitions à l'uranium appauvri qui confirme que les unités de chars AMX 30 B2 peuvent être amenées à utiliser ces munitions en opérations, de même que les unités de Leclerc « ... après la mise en service d'une munition française ou la livraison, pour une opération déterminée, d'obus étrangers » ;

- s'agissant des institutions spécialisées de l'ONU, la mission prend acte des données notamment publiées par le PNUE et l'OMS. Elle constate que les gouvernements et autorités administratives ou scientifiques de Bosnie-Herzégovine, de Serbie et du Monténégro comme du Kosovo n'ont pas, à ce jour, saisi l'OMS, le CICR ou l'UNICEF de faits significatifs relatifs à une augmentation des cas de leucémies, lymphomes ou dysfonctionnement rénaux pour la population des zones atteintes par des projectiles à l'uranium appauvri. La mission insiste toutefois pour que soit assurée par des laboratoires indépendants, de manière continue et à long terme, une surveillance des eaux potables et de la chaîne alimentaire (notamment par l'examen de produits laitiers) sur les sites recensés comme ayant été bombardés ;

- enfin, la mission prend également acte des résultats des enquêtes épidémiologiques lancées par le Service de santé des armées qui concerneraient, à ce jour, plus des deux tiers des quelque 83 500 militaires dépêchés dans les Balkans entre 1992 et 2000. Elle rappelle toutefois son attachement à une étude de descendance pour les militaires ayant eu des enfants dans les années suivant leur retour d'opérations. Elle renouvelle également sa recommandation relative à la mise en place d'un observatoire ayant compétence pour l'étude des risques rémanents auxquels ont pu être exposés les militaires ayant participé à des opérations extérieures.

Tout en se félicitant de la qualité des communications du Président et des co-rapporteurs de la mission d'information, M. Charles Cova, vice-président de la mission d'information a regretté qu'en raison de contraintes de temps, la mission n'ait pas pu fournir à propos des conflits des Balkans une étude aussi approfondie que celle qu'elle avait réalisée sur les risques sanitaires encourus par les militaires français pendant la guerre du Golfe. Il a alors émis le v_u que ses investigations puissent être poursuivies et développées au cours de la prochaine législature.

M. Jean-Louis Bernard a rappelé que les travaux de la mission d'information visaient à mettre à jour les conditions d'exposition éventuelle des troupes françaises à des risques sanitaires spécifiques, et non à établir un diagnostic médical. Soulignant la précision des indications apportées par M. Claude Lanfranca s'agissant des cibles et du nombre de munitions à uranium appauvri employées au cours des conflits de Bosnie-Herzégovine et du Kosovo, il en a déduit qu'il était facile pour les autorités responsables de déterminer si les forces françaises avaient été en contact avec ces munitions. Remarquant ensuite qu'il n'existait pas à ce jour de preuve statistique d'une occurrence plus marquée de pathologies spécifiques, telles que les leucémies, chez les anciens combattants des conflits de Bosnie-Herzégovine et du Kosovo, il a plaidé en faveur d'un suivi épidémiologique et sanitaire de ces militaires, comme la mission d'information l'avait préconisé dans le cas de la guerre du Golfe, en faisant valoir qu'il ne lui revenait pas de se prononcer sur cette question d'ordre scientifique.

Soulignant que la mission avait pour objet de vérifier si les forces françaises n'avaient pas été exposées à des risques sanitaires graves au cours de leurs déploiements successifs dans les Balkans, Mme Michèle Rivasi a insisté sur la nécessité de recueillir les témoignages de simples soldats et de procéder à une enquête sur place.

M. Bernard Cazeneuve, Président de la mission d'information, a souligné que la mission n'avait pas rencontré de difficultés pour obtenir du ministère de la Défense tous les documents opérationnels dont elle a demandé la transmission mais qu'il ne pouvait être fait grief à ce ministère de ne pas avoir communiqué des rapports, comptes rendus ou expertises qui n'existeraient pas ou qui n'auraient pas fait l'objet d'une demande de la part de la mission.

Le Président Paul Quilès a observé que, compte tenu des contraintes inhérentes au calendrier parlementaire, la mission d'information avait opté pour une simple communication sur les opérations des Balkans qui pourrait être transmise au ministère de la Défense afin que d'éventuelles conséquences en soient tirées. Il a estimé que le contexte électoral rendait difficile toute poursuite des travaux de la mission d'information, ces derniers ne pouvant être exploités dans les semaines à venir alors que l'Assemblée nationale ne se réunira plus. Il a préconisé, en conséquence, de reporter à la prochaine législature la poursuite des travaux de la mission d'information.


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