
ASSEMBLÉE NATIONALE
COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES
COMPTE RENDU N° 4
(Application de l'article 46 du Règlement)
Mercredi 7 octobre 1998
(Séance de 9 heures 30)
Présidence de M. Paul Quilès, Président,
puis de M. Didier Boulaud, Vice-Président
SOMMAIRE
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Projet de loi de finances initiale pour 1999 (n° 1078)
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Audition des représentants des syndicats des personnels civils de la Défense
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Audition de M. Jean-Yves Helmer, Délégué général pour lArmement
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La Commission a entendu les représentants des syndicats des personnels civils de la Défense, sur le projet de loi de finances pour 1999 (n° 1078).
Le Président Paul Quilès a souligné lintérêt de cette audition dans la période de transformation profonde que traverse lappareil de défense.
M. Albert Sparfel, Secrétaire général de la Confédération générale du travail-Force ouvrière, relevant que le projet de budget de la Défense respectait les engagements pris par le Gouvernement lors de la revue de programmes et fournissait des perspectives plus précises pour lavenir de lindustrie de défense, a néanmoins dénoncé les risques auxquels était exposée cette industrie. Faisant référence au récent conflit social de Toulon, il sest prononcé contre lexternalisation des missions de réparation navale de la DCN, qui va à lencontre du maintien des compétences et du développement des activités en partenariat. Rappelant que le coût des restructurations était imputé sur les coûts dintervention de la DCN et dautres organismes de la Défense, il a souhaité que soit dressé un bilan de la réforme de la DGA.
Appelant lattention de la Commission sur la politique demploi des personnels civils, notamment sur les responsabilités qui leur sont confiées dans les organismes de soutien et auprès des forces, il a mis laccent sur la nécessité dun strict respect des statuts de ces personnels. Puis, il a considéré que le projet de règlement-cadre sur laménagement et la réduction du temps de travail ne permettrait pas, malgré ses objectifs affichés, de préserver des emplois ni den créer de nouveaux. Ce projet favorise en effet uniquement laménagement du temps de travail en autorisant notamment son annualisation et noblige pas les employeurs à faire connaître les postes concernés par les restructurations. En raison de leur manque dambition, les mesures envisagées en matière de réduction du temps de travail ne seront pas suffisantes pour remédier aux conséquences sociales des restructurations dans les bassins demploi.
M. François Pillet, Délégué central Force Ouvrière de létablissement de Bourges de GIAT-Industries, a tout dabord rappelé que la politique dacquisition dentreprises darmement en difficulté menée dès 1991 par lancien Président Directeur Général du groupe, M. Pierre Chiquet, avait abouti à de graves échecs financiers. Sil est vrai que son successeur, M. Jacques Loppion, a suivi une démarche inverse, le Gouvernement a néanmoins accepté, en juillet 1998, un quatrième plan social exceptionnellement rigoureux. Ce plan réduira les effectifs de près de 44 % entre 1997 et 2002 alors que la production ne diminuera que de 30 %, et prévoit des fermetures de sites. LEtat actionnaire devra recapitaliser GIAT-Industries afin de permettre à lentreprise dachever lexécution du contrat de chars Leclerc avec les Emirats Arabes Unis et de payer le plan social. Lavenir de GIAT-Industries reste ainsi suspendu au soutien de lEtat et à sa volonté daboutir dans la négociation dun contrat de 350 chars avec lArabie Saoudite.
Estimant le prix auquel les chars Leclerc sont offerts à lArabie Saoudite supérieur à celui du contrat avec les Emirats Arabes Unis, il sest interrogé sur la volonté réelle du Gouvernement dobtenir un nouveau marché dexportation pour le Leclerc. Il sest alors inquiété des conséquences sur lemploi et sur le maintien de lactivité de nombreux sites de léchec éventuel du contrat négocié avec lArabie Saoudite, et sest interrogé sur le maintien des compétences françaises en cas de nouvelles fermetures détablissements et dintégration de GIAT-Industries dans un cadre européen. Au nom de son organisation, il a enfin condamné la profonde restructuration industrielle en cours, estimant quelle était menée sans concertation.
M. Jean-Louis Naudet, Secrétaire général de la Fédération des travailleurs de lEtat-CGT, a souligné que la situation sociale des industries darmement, source de malaise et dangoisses pour les personnels civils, appelait dautres choix que ceux qui conduisent au déclin de tout un secteur industriel. Estimant que le projet de budget pour 1999 ne préparait aucunement lavenir, il a demandé au Parlement de linfléchir pour quil soit à la hauteur des attentes des salariés. Puis, il sest élevé contre la chute de 9 % des crédits de fonctionnement et la suppression de 1 800 emplois dont 1 500 à la DCN et au Service de maintenance aéronautique (SMA), sajoutant aux dégagements de cadres militaires qui ne seront pas compensés par des embauches.
Il a successivement insisté sur la nécessité :
de supprimer le système salarial des abattements de zone ;
den finir avec la précarité des personnels ne bénéficiant pas de statuts ;
de mettre un terme aux suppressions demplois dès le budget 1999 et de renoncer aux plans dadaptation ou de restructuration précédemment annoncés ;
de promouvoir parallèlement une réelle politique dembauches pluriannuelles ;
de mettre en adéquation les effectifs réalisés avec les effectifs budgétaires ;
de mettre en oeuvre une vraie réduction du temps de travail sans baisse ni gel des salaires ;
de réorienter les crédits déquipement en faveur des forces conventionnelles et de lancer en particulier le programme Vextra.
Il sest également prononcé en faveur dune reconquête par lEtat de ses missions de fabrication darmements et du développement dactivités complémentaires, estimant que la réorientation sociale et industrielle du budget 1999 est possible sans augmentation des crédits. Il a enfin considéré que lon ne pouvait pas attendre des mesures de compensation aux restructurations de la Défense un réel développement des bassins demplois.
M. Daniel André, Secrétaire général de la Fédération des Établissements et Arsenaux de lEtat-CFDT, a tout dabord estimé que la deuxième phase de restructuration, annoncée par le Ministre de la Défense le 7 juillet dernier, constituait un mouvement dune ampleur inégalée puisquil touchait, sur lensemble de la période 1999-2002, 332 sites ou établissements et 8 500 personnels civils, soit par des mesures de départ à la retraite anticipée, soit par des mobilités géographiques ou professionnelles. Les restructurations envisagées affecteront également les bassins demplois et les populations des régions concernées tant sur le plan économique que social, malgré une mobilisation des fonds dadaptation industrielle ou européens sur la gestion desquels les partenaires sociaux ne peuvent toujours pas exercer un droit de regard.
Considérant que lévolution de loutil industriel de défense devait permettre son adaptation au nouveau contexte géostratégique, M. Daniel André a estimé au nom de la CFDT que cette évolution devait sinscrire dans le cadre dune action prioritaire en faveur de lemploi et saccompagner dune politique ambitieuse de diversification des activités, de réduction massive du temps de travail et daccompagnement social à la hauteur des transformations entreprises. Il a noté avec satisfaction lextension progressive à lensemble du ministère de la Défense dune démarche daménagement et de réduction du temps de travail qui correspond à une réelle attente des personnels, en soulignant toutefois la nécessité de mesures plus ambitieuses en ce domaine, qui se traduiraient par des effets durables sur lemploi.
Face aux fermetures de sites, aux restructurations, transferts et suppressions demplois qui vont affecter les établissements, M. Daniel André a considéré quil convenait dorienter en priorité les directions et établissements vers la recherche de charges de substitution pour faire face aux baisses affectant leurs activités traditionnelles. Sagissant des restructurations en cours au sein de Giat-Industries, M. Daniel André a rappelé les exigences de la CFDT au plan social : aucun licenciement, le développement, dans un cadre négocié, de solutions alternatives aux fermetures de sites et le maintien des seules mesures dâge. Au plan industriel, il a indiqué que son organisation demandait la formulation dengagements précis sur les commandes budgétaires en attente, ainsi quun soutien du Gouvernement à lexportation et une action de la tutelle ministérielle en faveur de la diversification. Pour ce qui concerne la DCN, il a estimé que sa nécessaire évolution ne devait pas compromettre la situation de lemploi. Il a regretté que le projet de budget de la Défense pour 1999 ne marque pas de réel changement dorientation, les augmentations de crédits consacrés aux aides à la mobilité et au départ ainsi quau fond dadaptation industriel démontrant la permanence de la logique suivie par le ministère. Il a pris acte de la progression de lenveloppe consacrée aux mesures catégorielles mais a regretté que les revendications formulées par la CFDT concernant louverture de la filière ouvrière, le déplafonnement de lindemnité pour travaux supplémentaires des secrétaires administratives et le repyramidage statuaire du corps des techniciens supérieurs détudes et de fabrication naient pas été prises en compte.
Soulignant quun malaise se développait au sein des personnels civils de la défense, il a considéré quil convenait de mieux définir les missions et les compétences revenant à chaque catégorie afin den préserver léquilibre général.
Après avoir souligné que le projet de budget pour la Défense présentait une hausse de 2,8 % par rapport au budget précédent, M. Jean-Pierre Dussaussois, Président de la Fédération CFTC des personnels civils du ministère de la Défense, a noté que dune manière générale, les budgets votés nétaient jamais respectés et que le projet de loi de finances pour 1999 était inférieur à lannuité de la loi de programmation correspondante. La revue de programme aura pour effet de décaler le troisième SNLE-Ng et les livraisons du Rafale Air et Marine, danticiper le retrait du porte-avions Foch et deux escadrons Jaguar, darrêter certains programmes de satellites et de missiles, de réduire le nombre de missiles Mistral et dengins porte-blindés du Char Leclerc, de diminuer de 5 % les programmes dinfrastructure et dentretien des matériels et daccentuer la réduction des coûts de fonctionnement de la DGA. Lensemble de ces mesures ne sera pas sans conséquence sur les qualités opérationnelles des armées, il limitera la puissance de la force de frappe et accentuera la dérive de lindustrie française de défense et des établissements de la DGA.
M. Jean-Pierre Dussaussois a fait part au nom de la CFTC de ses interrogations sur la volonté du ministère de la Défense de sinscrire dans le cadre de laction prioritaire du Gouvernement en faveur de lemploi. En effet, les emplois de militaires du rang, limités quant à la durée du contrat, sapparentent à des emplois précaires, de même que les créations demplois civils dans les armées seront en majorité destinées à laccueil des personnels en provenance de la DGA ou de GIAT-Industries. Par ailleurs, M. Jean-Pierre Dussaussois sest inquiété de laccueil réservé par les militaires aux personnels civils venus occuper des emplois de substitution et a souhaité quà terme, la gestion des ressources humaines des personnels de la défense intègre une gestion prévisionnelle des emplois, ce qui éviterait que ne se posent des problèmes de déroulement de carrières.
Sagissant de la sous-traitance, M. Jean-Pierre Dussaussois a noté une augmentation des crédits qui lui sont consacrés mais a considéré que le recours aux entreprises sous-traitantes ne constituait pas toujours une solution satisfaisante, dautant plus quelle était susceptible de saccompagner dune forte externalisation des compétences industrielles. Il a estimé que, dans le domaine industriel, le projet de budget ne permettait pas de préserver lemploi, mais risquait au contraire dintensifier la perte de compétences et de métiers de base par des départs prématurés, de même que le recours aux achats sur étagères pourrait mettre en péril les activités détudes.
M. Jean-Pierre Dussaussois a souhaité faire part au nom de son organisation de linquiétude quil éprouve face à la politique de regroupement des industries européennes de la défense. Il a souligné que les difficultés rencontrées dans les programmes en coopération, les choix budgétaires des partenaires européens de la France et le renforcement de lOTAN, font craindre une dépendance grandissante vis-à-vis des Etats-Unis. Dans ce contexte, la signature de la convention renforçant la personnalité de lOrganisme conjoint de coopération en matière darmement (OCCAR) risque de déstabiliser la DGA et de faire perdre à la France une part de son identité.
En conclusion, et malgré quelques améliorations dues à des mesures catégorielles, M. Jean-Pierre Dussaussois sest déclaré opposé au nom de la CFTC à un projet de budget qui cache des réductions massives deffectifs, notamment à la DCN, entérine la disparition progressive de la DGA et de ses établissements et risque de faire perdre à lindustrie nationale de Défense ses pôles dexcellence.
M. Gilbert Desmur, représentant de lUnion nationale des syndicats autonomes (UNSA)-Défense, a souhaité revenir sur les événements intervenus au cours de lannée 1998, avant dévoquer les perspectives dans lesquelles sinscrit laction de son organisation. Lannée 1998 a été notamment marquée par le conflit social qui a éclaté à la DCN de Toulon. Si certaines revendications ont été satisfaites, la source essentielle du mécontentement demeure puisque les missions de la DCN se trouvent à nouveau remises en cause par des réflexions à peine voilées sur lévolution statutaire de cette direction. M. Gilbert Desmur a estimé au nom de lUNSA-Défense que la situation de la DCN présentait de nombreuses analogies avec celle du GIAT et quelle sy dégradait selon le même scénario. Il a estimé quil appartenait à lAssemblée nationale de choisir entre une politique permettant à la DCN de conforter sa place de premier constructeur naval militaire dans le cadre de son statut actuel et la remise en cause de ce statut.
M. Gilbert Desmur a évoqué ensuite lacquisition par lOCCAR de la personnalité morale et sest inquiété de laccroissement de la part des programmes gérés par cet organisme sans compensation industrielle à la hauteur des enjeux. Il a également déploré le transfert vers les entreprises privées de la maintenance des équipements dont il a jugé quil traduisait une dérive vers les pratiques de nos principaux partenaires européens.
Il a constaté ensuite que le nouveau plan de restructurations annoncé au mois de juillet accroîtrait encore le nombre détablissements touchés, faisant observer que laccompagnement social des mesures concernant le personnel civil était moins favorable que celui qui concernait les personnels militaires. Cest pourquoi il a demandé au nom de lUNSA-Défense un traitement social plus équitable de ces restructurations sur la base de lamélioration du dispositif existant.
De manière plus générale, il a regretté que les travaux tendant à la revalorisation du rôle et de la place du personnel civil ne débouchent pas sur des avancées significatives et que de nombreuses négociations catégorielles senlisent. Sagissant du projet de loi de finances pour 1999, il a considéré au nom de lUNSA-Défense que les aspirations des personnels civils ny étaient pas suffisamment prises en compte et que les mesures de saupoudrage prévues ne pouvaient être considérées comme une politique sociale digne dun ministère tel que celui de la Défense. M. Gilbert Desmur a enfin fait état des difficultés de la DGA à exécuter les crédits dont elle a la charge et déploré que le Parlement soit appelé à se prononcer sur un budget sans disposer déléments sur lexécution des crédits de lexercice en cours.
M. Jean-François Munoz, Président de la FECD-CGC, a tout dabord fait valoir que lévolution du budget de la Défense pour 1999 était satisfaisante, avec une hausse de 2,9 % hors pensions, dont 6,2 % pour les seuls crédits déquipement et quil fallait féliciter le Ministre de la Défense pour avoir refusé une nouvelle encoche. Il a jugé cependant que la puissance militaire de la France était diminuée, les économies réalisées sur les crédits déquipement allant au-delà des seuls gisements déconomies identifiés par la DGA.
Il a relevé ensuite quen dépit dune information et dune communication soutenues, la véritable concertation était toujours absente de la politique de restructuration. Il a regretté en outre que lampleur de la restructuration de la Direction des centres dessais de la DGA soit sous-estimée. Labsence de concertation est néfaste pour le dialogue social et ne permet pas une bonne utilisation des fonds de toute origine mis à disposition des différents acteurs. Son organisation a dailleurs demandé un bilan sur laction des société de conversion.
M. Jean-François Munoz a ensuite souligné quil fallait dabord définir une stratégie de survie des entreprises de défense avant denvisager des mesures de dégagement des cadres et quil convenait déviter les hémorragies de personnels mettant en cause le maintien des compétences industrielles et étatiques. Sagissant des mesures en faveur du personnel civil, il a déploré au nom de la CGC la divergence de traitement entre les personnels civils et militaires dans les domaines de la formation, des rémunérations et de la protection sociale. Il a estimé que lapplication du plan formation mobilité II était difficile pour les cadres civils et pénalisante à la Délégation générale pour lArmement. Il a enfin souhaité que leffort porte prioritairement au sein du ministère de la Défense sur lamélioration de la carrière des cadres civils.
M. Robert Poujade a estimé que, de même quil fallait distinguer en économie les effets micro-économiques et leurs répercussions macro-économiques, a souligné les conséquences considérables, à long terme, sur le plan local, de décisions prises au niveau national concernant lorganisation des forces armées. Evoquant le cas du régiment de circulation routière qui existait à Dijon avant dêtre déplacé à plusieurs reprises, il a exprimé la crainte que de tels types de décisions incohérentes se multiplient.
M. Jean-Noël Kerdraon a souhaité que la date de laudition des représentants des personnels soit avancée. Il a relevé les appréciations mitigées des syndicats sur le budget, tout en notant que la revue de programmes conférait une lisibilité de long terme à lévolution du titre V. Il a ajouté que la Commission de la Défense suivait avec attention les problèmes relatifs à la DCN et au GIAT qui, dans un contexte et pour des raisons différentes, étaient confrontés à une situation difficile. Il a exprimé le vu que, dans le cas de la DCN notamment, la construction dun outil industriel performant répondant au mieux aux besoins de la défense seffectue dans la concertation. Il a enfin demandé aux différentes délégations leur sentiment sur le rapport dinformation consacré par Mme Martine Lignières-Cassou à la diversification des industries de défense dont il a souligné la qualité.
M. Albert Sparfel, approuvant les propos de M. Robert Poujade, a rappelé que le département de lYonne avait été particulièrement touché par les restructurations et a convenu quil importait dêtre très attentif aux conséquences dune succession de décisions locales, notamment en matière sociale. Concernant le rapport établi par Mme Martine Lignières-Cassou, il a déclaré que lorganisation syndicale à laquelle il appartenait lavait examiné de manière approfondie et avait dailleurs fait connaître au rapporteur ses observations, les unes critiques, les autres favorables à ses conclusions.
M. Jean-Paul Clément, représentant de la Confédération générale du travail-Force ouvrière, évoquant le futur projet dentreprise de la DCN, a estimé que la méthode employée pour son élaboration semblait avoir pour seul objectif de faire valider par les organisations syndicales un projet dévastateur.
Il a vivement déploré que ne soit laissée aucune place à la négociation. Même si, pour Force ouvrière, la modernisation de la DCN est impérative, même sil est nécessaire de mettre fin aux gaspillages et aux doublons, lexternalisation à outrance doit être totalement rejetée. Le processus de modernisation industrielle de la DCN, qui doit seffectuer dans le strict respect des statuts des personnels et des établissements, doit concerner lensemble des étapes de la production : lingénierie, la fabrication et lassemblage. La relance des embauches constitue la première urgence, la deuxième priorité consistant à réduire le temps de travail sans perte de salaire afin de créer de nouveaux emplois. Il est également nécessaire daméliorer la formation et la promotion sociale des personnels. Il est en définitive possible de pérenniser la DCN dans le cadre du statut actuel et en conséquence un projet dentreprise dont lobjectif serait de remettre en cause ce statut paraît inacceptable.
M. Jean-Louis Naudet, faisant écho aux paroles du représentant de Force ouvrière concernant la DCN, a estimé que, comme lillustrait un article récemment paru dans Les Echos, le projet dentreprise de la DCN paraissait définitivement arrêté, sans que les organisations syndicales en aient été saisies. Il sest interrogé, dans ces conditions, sur la pertinence des réunions programmées pour en discuter. Faisant allusion au rapport Foillard-Picketti relatif à létablissement de Cherbourg, il a émis la crainte que la désétatisation qui y était prônée soit progressivement étendue à toute la DCN. Il a jugé que si telle était loptique de la majorité actuelle, il était nécessaire quelle le dise ouvertement et quil était inutile de chercher à tromper les organisations syndicales. Sagissant du rapport de Mme Martine Lignières-Cassou, il a regretté que celle-ci nait pas pris contact avec sa fédération au niveau national.
Le Président Paul Quilès a observé que le contact avait été pris avec la Confédération mais quil ny avait pas à lévidence été donné suite.
M. Jean-Louis Naudet a estimé que le rapport de Mme Martine Lignières-Cassou contenait relativement peu de propositions, hormis celles concernant les entreprises et les sociétés de conversion. Il a jugé quil nouvrait pas de perspective pour une véritable politique de diversification.
M. Jean-Claude Sandrier a estimé quil convenait dêtre attentif au malaise créé par les restructurations et dapporter une réponse concrète aux revendications des personnels sous peine daccroître leur démoralisation. Il a ainsi considéré que lannonce dun retour à léquilibre de GIAT-Industries en 2002 succédait à dautres annonces du même type sans proposer de réelles perspectives.
Il a ensuite regretté, dune part, labsence de débat sur les restructurations tant à lAssemblée nationale quavec les syndicats, dautre part, limportance accordée à la logique de marché et dalliances européennes dans la politique déquipement militaire. Après avoir considéré que la diversification des activités avait été opérée jusquà présent à partir de compétences périphériques des établissements et non au cur de leurs spécialités, il a plaidé pour un débat densemble qui porterait non seulement sur la diversification mais aussi sur lévolution des plans de charges et sur laménagement et la réduction du temps de travail.
Il a alors demandé aux représentants syndicaux sils avaient réfléchi à la question de la cohérence entre la taille des entreprises et leur marché, et sils estimaient que GIAT-Industries avait déjà atteint une masse critique dans le secteur de larmement terrestre.
Mme Claudine Kervella, Secrétaire fédérale de la Fédération des Établissements et Arsenaux de lEtat-CFDT, sest déclarée satisfaite que la question de la diversification ait fait lobjet dun rapport parlementaire en raison de lintérêt quelle présente pour lemploi et de la présence au sein des établissements industriels de la Défense de compétences et dun capital humain à valoriser. Elle a rappelé que les organisations syndicales avaient déjà mené des réflexions sur la diversification dans les bassins demploi et que les personnels des établissements concernés avaient procédé à des analyses et formulé des propositions intéressantes à ce sujet. Elle a insisté sur la nécessité danticiper les actions de diversification, 15 à 20 ans pouvant sécouler entre les recherches préliminaires et le développement de nouveaux produits.
M. Albert Sparfel, après avoir regretté que Mme Martine Lignières-Cassou nait pu prendre contact avec les fédérations nationales des syndicats, a estimé que son rapport sur la diversification des industries de défense ne constituait quune étape et devrait être prolongé. Il a plaidé pour des échanges thématiques en cours dannée entre la Commission de la Défense nationale et des Forces armées et les organisations syndicales et a souhaité quune attention particulière soit portée à légard des personnels civils dans les restructurations.
M. Claude Hoffsteter, représentant de lUNSA-FADN, a fait part dun décalage entre la présentation de la réforme de la DCN par le Ministre de la Défense et la vision quen donnait la DCN elle-même. Il a par ailleurs rappelé que le groupe de travail sur lavenir de la DCN, auquel avait participé M. Michel Praderie, nétait parvenu à aucune conclusion, bien quil ait mené une très large concertation. Soulignant que le ministère de la Défense avait déploré le manque dinitiative des cadres de la DCN, il a expliqué leur démotivation par le fait que leurs propositions nétaient jamais prises en compte et a demandé un meilleur dialogue social.
M. Charles Sistach, représentant de la Confédération générale du travail-Force ouvrière, a soutenu que la fabrication darmements ne devait pas, en raison de sa nature même, être soumise aux lois du marché et obéir aux mêmes règles de compétitivité que les productions civiles. Il a également considéré que les diversifications dactivités devaient relever des responsabilités propres des établissements et sintégrer à leur projet dentreprise. Après sêtre demandé si lEtat avait encore la volonté dexercer ses missions, il a émis la crainte que la DCN ne connaisse prochainement la même évolution que GIAT-Industries.
M. Jean-Louis Naudet a insisté sur le fait que larmement ne saurait être assimilé à nimporte quel produit marchand et quil revenait à lEtat, dans un domaine qui relève de lexercice de sa souveraineté, de se prononcer clairement en faveur du maintien dentreprises industrielles de défense sous son autorité directe. La politique de coopération industrielle à léchelle européenne pose elle aussi la question de lindépendance nationale dautant plus que les regroupements qui se dessinent ne manqueront pas davoir de lourdes conséquences sociales. Il sest étonné que lon puisse aujourdhui tirer argument du manque de spécialisation de la DCN pour sen prendre à son statut alors quil y a une dizaine dannées des arguments opposés avaient été exprimés pour conduire à la désétatisation du GIAT. La politique menée à légard de la DCN semble dautant moins cohérente quelle avait su, notamment sur le site de Lorient, développer une activité pilote dans le domaine des matériaux composites quon lui a demandé dabandonner et quil lui faut à nouveau revitaliser. Enfin, il a souhaité que sinstaure un vaste débat national, débordant le cadre du Parlement, sur la question de lavenir de la défense de la France.
M. Jean-Jacques Le Gourrierec, Secrétaire général de la Fédération CFTC des personnels civils du ministère de la Défense, sest déclaré satisfait de la possibilité offerte aux représentants syndicaux de dialoguer avec les membres de la Commission. Il a souhaité exprimer le malaise profond ressenti par les personnels de la DCN face aux atermoiements qui entourent lavenir de leur direction alors quil conviendrait dengager de réelles négociations à ce sujet. Il a demandé quune attention particulière soit accordée aux conditions dans lesquelles seffectuaient les opérations de sous-traitance, plus particulièrement lorsquil sagit de travaux détudes effectués par des sociétés qui omettent parfois de prendre en compte la culture de lentreprise pour laquelle elles sont censées intervenir. Enfin, citant lexemple du bâtiment anti-mines océanique développé à Lorient, puis abandonné, il a douté de la réalité de la volonté politique affichée en faveur de la diversification tout en sinterrogeant sur lefficacité des services commerciaux de la DCN.
M. Gilbert Desmur sest déclaré favorable à linstitution dun dialogue plus fréquent avec la Commission de la Défense, plus particulièrement sur le thème de la réorganisation de loutil de défense.
Mme Thérèse Manouvriez, représentant Force ouvrière, a souhaité que la prochaine audition des syndicats des personnels de la Défense puisse être organisée plus en amont du débat budgétaire. Elle a insisté sur la nécessité de mieux accompagner laffectation des personnels civils aux états-majors et services communs, soulignant la nécessité de leur garantir respect et égalité de rémunération.
Le Président Paul Quilès a tenu à remercier les participants pour la qualité du débat.
Il a souligné que, dans le secteur de larmement, la politique industrielle avait des incidences directes pour la souveraineté nationale et que la coopération européenne y soulevait des questions essentielles pour la construction dune union politique. Il sagissait donc de sujets politiques dune grande importance sur lesquels le Parlement aura à débattre prochainement.
Il a précisé que, lors de lélaboration de son rapport dinformation, Mme Martine Lignières-Cassou avait pris contact, par écrit, avec les différentes organisations syndicales.
Il a encouragé les représentants syndicaux à nouer des liens avec les rapporteurs budgétaires spécialisés et leur a proposé des rencontres thématiques plus fréquentes avec la Commission ou des groupes de travail constitués en son sein.
Enfin, il a suggéré quune audition des représentants des syndicats se tienne avant lété 1999, de façon à permettre une meilleure prise en considération de leurs préoccupations en amont du processus délaboration du projet de loi de finances.
fpfp
La Commission a ensuite entendu M. Jean-Yves Helmer, Délégué général pour lArmement, sur le projet de loi de finances pour 1999 (n° 1078).
Le Président Paul Quilès a accueilli M. Jean-Yves Helmer, Délégué général pour larmement, en indiquant que son audition se situait dans un contexte budgétaire favorable, avec un volume global de crédits déquipement répondant aux nécessités dune exécution satisfaisante de la loi de programmation. Il a souligné que les modalités dexécution de lexercice 1998 ayant été profondément modifiées, les nouvelles techniques de gestion budgétaire devaient être à même dassurer plus de transparence et defficacité à la dépense dans un contexte financier désormais contraint. Enfin, il a rappelé le rôle tenu par la DGA dans la recomposition de lindustrie française de Défense et dans sa participation aux regroupements européens en cours.
M. Jean-Yves Helmer a tout dabord tenu à rappeler que la gestion des crédits déquipement par la DGA avait produit de bons résultats en 1997: assainissement de la situation financière avec un retour à la normale du report de charge sur lexercice suivant (3 milliards de francs contre 10,2 milliards de francs en 1996), une forte réduction des intérêts moratoires (295 millions de francs contre 700 millions de francs lannée précédente), une exécution satisfaisante des paiements et un niveau dengagement de commandes à hauteur de 65 milliards de francs, du fait notamment de la passation de cinq commandes pluriannuelles globales en 1997 (MICA, Apache, Scalp/emploi général, MU 90 et démonstrateur Vesta).
Il a indiqué quen raison de la réforme de la gestion budgétaire des crédits du ministère de la Défense (mise en place de la comptabilité spéciale des investissements, découpage des articles en opérations budgétaires dinvestissement, déconcentration du contrôle financier, adaptation de la nomenclature budgétaire), le début de lexercice 1998 sétait avéré difficile. Toutefois, les prévisions de réalisation de lexercice en cours se présentaient désormais sous un jour meilleur, bien que la reprise comptable ne fût intervenue quen avril, alors que le montant total des factures à payer atteignait 15 milliards de francs. Les retards de paiement ont été résorbés fin juin. Lensemble des crédits gérés par la DGA devrait, normalement, être consommé en fin dexercice avec un niveau de commandes équivalent à celui de lexercice précédent. Les reports de charge devraient se situer également à un niveau proche de celui de 1997. Des commandes globales ont déjà été notifiées (modernisation des moyens de transmission des bases aériennes, dépanneurs Leclerc, développement du missile PAAMS équipant la frégate Horizon et deux années dactivités de développement du missile M51).
La DGA a consacré un effort important à la préparation du futur en établissant un plan prospectif à trente ans, document qui, à partir de la mise en perspective formalisée des hypothèses de plans déquipement des forces jusquen 2025, a pour vocation de dégager les priorités en matière détudes amont. Ces priorités se traduisent par le choix de grands axes de recherche qui rassemblent lensemble des programmes détudes amont (ramenés dun nombre de plus de 1 000 à environ 300) dans des projets fédérateurs, orientés vers la mise au point de démonstrateurs, ou des plans structurants. La gestion des crédits de recherche est donc, davantage que par le passé, tirée par les besoins de préparation des programmes, en évitant la dispersion. Si le plan prospectif à trente ans constitue désormais loutil de dialogue qui manquait en matière de prospective à lintérieur du ministère, notamment avec les états-majors, il autorise également linstauration dun véritable partenariat stratégique avec lindustrie, dont les relations avec la DGA ne se situent plus exclusivement dans le contexte habituel des échanges entre client et fournisseurs.
La DGA participe par ailleurs à la construction de lEurope de larmement en agissant, en premier lieu, sur la demande, par le développement de la coopération pour la réalisation de programmes déquipement communs. La signature le 9 septembre dernier par la France, lAllemagne, le Royaume-Uni et lItalie de la convention accordant une personnalité juridique à lOCCAR, représente un progrès majeur en ce domaine. La construction de lEurope de larmement passe aussi par une action sur loffre qui consiste à favoriser la consolidation de lindustrie de défense à léchelle européenne. M. Jean-Yves Helmer a souligné à ce propos que le rapprochement en cours entre Matra Hautes Technologies et Aérospatiale était de nature à lever certains préalables posés par nos partenaires à la constitution de la grande société aéronautique européenne civile et militaire, mais quil restait des problèmes à résoudre tant en ce qui concerne les équilibres de pouvoir que la valorisation des actifs ou la nature de lactionnariat.
Enfin, la DGA sefforce daccompagner également les industriels dans leurs activités exportatrices. Toutefois, les marchés dexportation deviennent plus difficiles, en raison notamment de la baisse du cours du pétrole et de la crise asiatique.
Sagissant des programmes, le Délégué général a indiqué que leur état davancement était conforme aux prévisions et a, à ce propos, mentionné le déroulement des programmes relatifs au porte-avions Charles de Gaulle, à lhélicoptère Tigre ou à lavion Rafale. Il sest félicité de la signature, au mois daoût, du contrat de poursuite du développement du missile balistique M 51, du lancement récent de la conception du sous-marin nucléaire dattaque de nouvelle génération, ainsi que de la poursuite des programmes de systèmes dinformation et de commandement qui bénéficient dune grande priorité.
Sagissant de lobjectif de la DGA tendant à réaliser 100 milliards de francs déconomies sur 81 programmes, représentant en septembre 1996 un total de crédits restant à engager de 537 milliards de francs, M. Jean-Yves Helmer a indiqué que des réductions de coût de 43,5 milliards de francs avaient dores et déjà été obtenues.
Il a également souligné le caractère prioritaire que revêtait à ses yeux la diminution du coût dintervention de la DGA, en commentant la réduction de plus de 10 % obtenue en 1997 par rapport à 1996.
Sagissant des activités industrielles de la DGA, M. Jean-Yves Helmer a indiqué que la mise en oeuvre du plan DCN 2000 se poursuivrait. Il a mentionné en particulier, parmi les actions menées dans ce cadre, le redéploiement des activités dans les domaines de lexportation et de la diversification, 8,9 milliards de francs de commandes ayant été passées à ce titre en 1997 dont 7,5 milliards de francs pour les exportations, lannée 1998 se révélant moins favorable en raison du marché. Il a noté que ladaptation des effectifs au plan de charge se poursuivait et quétait mené un travail de rénovation des outils et des méthodes de gestion visant à rapprocher le fonctionnement de la DCN de celui dune entreprise. Il a fait remarquer à ce propos que la DCN avait pu absorber le coût de sa sous-activité sans alourdir les devis de fabrication des bâtiments destinés à la Marine. Il a annoncé que le plan dentreprise de la DCN, qui vise à aller plus loin encore dans lamélioration de la compétitivité de cet organisme, serait très prochainement soumis au Ministre de la Défense. Quant au Service de maintenance aéronautique (SMA), il a réalisé en 1997 un chiffre daffaires de 1,7 milliards de francs, dont 120 millions de francs de prise de commandes à lexportation.
M. Jean-Yves Helmer a ensuite décrit les perspectives ouvertes par le projet de budget pour 1999.
Sagissant de lévolution globale des titres V et VI, il a noté que leur progression de 6,2 % par rapport à la loi de finances initiale précédente était à saluer puisquune telle hausse ne sétait pas produite depuis une décennie. Il a rappelé que le projet de budget était conforme aux décisions prises à lissue de la revue de programmes. Il a évoqué le changement de nomenclature budgétaire, qui consiste à rassembler dans un seul chapitre lensemble des crédits détudes amont, à regrouper dans les mêmes chapitres les crédits de développement et de fabrication, et à mieux suivre lévolution de 25 programmes, objets darticles spécifiques. Il a souligné que cette nouvelle présentation contribuait à lamélioration de la transparence et de la lisibilité du budget de la Défense. Il a toutefois fait observer quelle risquait de perturber à nouveau la gestion financière dans le premier trimestre de lannée 1999, compte tenu de la poursuite de la mise en oeuvre de nouvelles procédures.
Présentant les principales tendances du projet de budget de la défense pour 1999, il a fait observer que si lon constatait une légère baisse des crédits destinés aux études, on observait en revanche une forte augmentation des crédits de développement.
Il a ensuite présenté la liste des principales commandes et livraisons prévues en 1999. En ce qui concerne la dissuasion, il faut notamment retenir ladmission au service actif du deuxième SNLE-Ng prévue en juillet 1999 . Dans le domaine des communications et du renseignement, la redéfinition du programme successeur de Syracuse II est en cours, menée conjointement avec lAllemagne. Sagissant de la mobilité stratégique et tactique, lannée 1999 verra le lancement du NTCD, le lancement de la coopération sur lavion de transport futur et la notification de lindustrialisation du NH 90. Pour ce qui est de la frappe dans la profondeur dans le domaine naval, il convient de retenir que le porte-avions Charles de Gaulle devrait être admis au service actif à la fin de lannée 1999, que la réalisation du programme de frégate Horizon, mené en coopération avec la Grande-Bretagne et lItalie, devrait également être lancée lannée prochaine.
Sagissant du titre III, le Délégué général pour lArmement a relevé que sil augmentait globalement, la diminution de lensemble des crédits de fonctionnement du ministère de la Défense atteignait 9,1 % en francs courants. La DGA participe de cet effort avec un budget de fonctionnement pour 1999 en baisse de 8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1998. Sachant que ce budget comprend, à hauteur denviron 40 %, des dépenses sur lesquelles il existe peu de marge de manoeuvre (subventions à des établissements publics), la baisse du coût de fonctionnement de la DGA de 1998 à 1999 sétablira à 11 %, soit une contraction de 26 % depuis 1996. Quant aux effectifs budgétaires, ils diminueront de 5,6 %, soit, depuis 1996, une réduction de 14,5 %.
En conclusion, M. Jean-Yves Helmer a présenté les priorités de la DGA pour 1999. Il sagira dabord de la préparation du futur avec la mise à jour annuelle du plan prospectif à 30 ans. La DGA accordera également une attention particulière au lancement des activités de lOCCAR dont le premier contrat pourrait être conclu avant la fin de lannée 1999. Elle continuera daccompagner les restructurations industrielles, dans une perspective de consolidation européenne. Elle favorisera le développement de la coopération interétatique en amont, au niveau des études et de la recherche et sefforcera de participer à lharmonisation des besoins des différentes forces européennes. La DGA poursuivra par ailleurs son plan déconomie sur les programmes et sur son propre coût dintervention. Enfin, le plan dentreprise de la DCN qui sera approuvé par le Ministre de la Défense à la fin de lannée 1998 constituera un axe majeur de laction de la DGA au cours de lannée 1999.
M. Michel Meylan a souhaité avoir des précisions sur le coût dintervention de la DGA, notion quil a jugée particulièrement difficile à définir, sur les résultats obtenus en ce domaine en 1998 et sur les objectifs retenus pour 1999.
Il a également interrogé M. Jean-Yves Helmer sur lévolution de la Direction des centres dessais (DCE), qui participent pour une part importante au coût de fonctionnement de la DGA. Evoquant la rationalisation en cours de cette direction, il a souhaité savoir comment il serait remédié aux inconvénients de la dispersion géographique des centres et si la part étatique de lactivité de la DCE serait isolée de sa part commerciale.
M. Jean-Yves Helmer a apporté les éléments de réponse suivants :
le coût dintervention de la DGA sest établi à 7,4 milliards de francs en 1996 et à 6,6 milliards de francs en 1997. Il devrait être stable en 1998, lannée 1997 ayant été caractérisée par un très faible niveau dinvestissement. Pour 1999, lobjectif na pas encore été fixé. Il pourrait se situer entre 6,2 et 6,3 milliards de francs ;
la réduction du coût dintervention sera notamment obtenue par la poursuite de la réduction des effectifs. Ainsi, les rémunérations et charges sociales devraient passer de 4,64 milliards de francs en 1998 à 4,17 milliards de francs en 1999. Des économies seront également obtenues sur le fonctionnement ;
un plan stratégique de la DCE a été établi qui procède dune analyse centre par centre en essayant de dégager pour chacun les pôles dexcellence qui lui sont propres. Des choix ont été ainsi opérés, après une large concertation, ce qui a permis létablissement dune fourchette cible deffectifs en 2002 pour chacun des sites ;
un seul centre, le centre dessais en vol de Brétigny, voit la plus grande partie de ses activités transférées. Elles seront réparties entre les centres dessais en vol dIstres et de Cazaux. Même sil est vrai que la dispersion géographique des centres a des conséquences en termes de coût, il nest pas prévu de fermetures, étant donné limportance des investissements réalisés et les enjeux sociaux et régionaux qui y sont attachés ;
la DCE fait partie de la DGA étatique, au sein de laquelle elle assure, dune part, une mission de prestation de services au profit des autres directions de la DGA, et dautre part, une activité commerciale dexpertise en faveur de clients étrangers. Il convient dailleurs de développer cette branche dactivité. Il nest pas prévu de séparer fonctionnellement ces deux types dactivité. Toutefois, la création dun compte de commerce, qui retracerait lensemble des activités de la DCE, est à létude. Dans limmédiat, Une démarche de contractualisation interne a été adoptée.
Après avoir estimé que lenveloppe globale des crédits déquipement fixée pour 1999 paraissait inespérée lorsquont été connus les résultats de la revue de programmes, M. René Galy-Dejean, a émis la crainte que les dotations du Titre III soient en revanche insuffisantes en raison de limportance des coûts induits par la professionnalisation des armées et ne permettent pas dassurer dans de bonnes conditions le maintien en condition opérationnelle des forces. Il sest donc inquiété de léventualité dun transfert dune fraction des dotations en capital vers des dépenses de fonctionnement, au regard de ses conséquences sur lentretien programmé des matériels. Il a ensuite fait observer une contradiction entre la réduction des crédits détudes amont et la vision de long terme qui, selon la présentation du Délégué général, devait désormais orienter, davantage que par le passé, la gestion des programmes et souligné quactuellement, les Etats-Unis augmentent les crédits militaires consacrés aux études et aux prototypes. Tout en se félicitant de la décision davancer la date de mise en service du missile M 51 de 2010 à 2008, il sest demandé si cette mesure navait pas comme corollaire un retard dans ladmission au service actif du quatrième SNLE-NG qui en sera directement doté. Il a souhaité savoir par ailleurs si lassemblage du missile aurait bien lieu à Brest et non plus à létablissement de lAérospatiale à Bordeaux et quelle était la rationalité industrielle dun tel transfert.
M. Bernard Grasset sest interrogé sur les raisons ayant conduit la Grande-Bretagne à se retirer du programme devant assurer, pour la France, la succession de Syracuse II et sur les délais nécessaires pour élaborer un nouveau programme de satellites de télécommunications avec lAllemagne.
M. Jean-Noël Kerdraon a expliqué la démobilisation des personnels de la DCN par labsence de perspectives concernant lentreprise et estimé que le plan dentreprise devrait être loccasion de lui rendre un nouveau dynamisme sil était précédé dune bonne concertation avec les syndicats. Il a également souligné que la réduction des effectifs de la DCN contribuait à la démobilisation des personnels qui avaient le sentiment dune perte de compétences et souhaité que lentreprise procède à des recrutements non seulement pour maintenir ces compétences mais aussi pour rajeunir la pyramide des âges. Il a indiqué que le lancement dune activité de construction de plates-formes offshore montrait que les personnels du bassin demploi de Brest étaient capables de se mobiliser pour relever des défis industriels. Enfin, il a souhaité avoir des précisions sur lapplication du concept de coût objectif dans le cas du NTCD.
M. Jean-Yves Helmer a apporté les éléments de réponse suivants :
aucun transfert du titre V vers le titre III na été envisagé dans lélaboration du projet de loi de finances pour 1999. Concernant lentretien programmé des matériels, il existe un gisement damélioration de lefficacité dans ce domaine dactivités et de réduction des coûts de maintenance. Des groupes de travail ont dailleurs entamé une réflexion sur la possibilité daméliorer lorganisation existante entre les états-majors et la DGA en vue dune meilleure maîtrise du coût de lentretien programmé ;
les études amont ont pour premier objet de préparer les programmes futurs. La diminution des crédits qui leur sont consacrés conduit la DGA à être plus sélective quauparavant sur les projets de recherches. Quant aux développements, ils entretiennent pour une large part, comme les études amont, les compétences des bureaux détudes. Il est donc légitime danalyser de manière globale lévolution des ressources disponibles pour les crédits détudes amont et de développement. Il convient enfin de relever quen conclusion de la revue des programmes, il a été décidé dassurer une stabilité jusquen 2002 des crédits détudes amont ;
un économie de 5,5 milliards de francs sur les programmes concourant à la force océanique stratégique (missile M 51, SNLE-Ng) a été réalisée au cours de lopération MINOS qui a rassemblé les équipes de la DGA, les états-majors et les industriels. Les décisions qui ont suivi cette réflexion ont notamment permis de préparer le contrat de deux années de développement du missile M 51 notifié à lété. Le maintien de la seule composante sous-marine de missiles nucléaires ne justifie plus que soient réalisées des opérations de montage et de démontage au centre dachèvement et dessais des propulseurs et engins (CAEPE) près de Bordeaux, avant le montage et la vérification finale à Brest. Cette disposition sappliquera à partir du lancement de la production des missiles M 51 qui doit intervenir après 2005. Quant à la fixation de lannée 2008 pour ladmission au service actif du quatrième SNLE-Ng, elle nentraîne pas de retard significatif et garantit pleinement la posture nucléaire décidée par le Président de la République ;
le Royaume-Uni a justifié son retrait du programme Trimilsatcom par son inquiétude sur le respect du calendrier du programme, les besoins de remplacement du système britannique actuel de télécommunications Skynet 4 étant impératifs ;
la France a engagé des discussions avec lAllemagne en vue de poursuivre une coopération sur le programme successeur de Syracuse II. En cas de besoin, ou de retard de ce programme, il serait possible de recourir à une solution intermédiaire pour assurer une continuité de service avec Syracuse I ;
on ne peut parler de démobilisation mais plutôt dinquiétudes à la DCN. Ces inquiétudes sont légitimes. Pour les apaiser, les perspectives doivent être éclaircies. Cest le rôle du plan dentreprise qui devra aborder tous les problèmes posés par la gestion du personnel, en particulier ceux ayant trait au maintien des compétences ;
pour le programme NTCD, sera appliquée la démarche comparative, qui consiste à fixer un coût objectif après analyse des prix pratiqués sur le marché pour des bâtiments de ce type, puis à demander à la DCN de proposer une organisation industrielle permettant datteindre ce coût, en conservant en interne les activités qui correspondent à ses pôles dexcellence et en faisant appel à des sociétés extérieures, lorsquelle est moins compétitive.
M. Robert Poujade sest inquiété de lévolution du titre III du budget de la Défense, citant notamment lexemple de la Gendarmerie. A cet égard, il a relevé le paradoxe entre les efforts demandés au titre III et lexigence de sécurité exprimée par la société. Il a demandé à M. Jean-Yves Helmer de faire le point sur le programme de VBCI et sur le nombre de frégates antiaériennes susceptibles dêtre modernisées.
M. Alain Moyne-Bressand a relevé que la DGA sefforçait dévoluer mais quil existait dimportantes lourdeurs au sein de cette institution. Il sest demandé par quels moyens elle pourrait mieux sadapter et quels en étaient les points forts et les points faibles. Sagissant de la DCN, il sest interrogé sur la nécessaire évolution de son statut, qui lui permettrait de fonctionner comme une entreprise, de baisser ses coûts et de gagner des marchés. Il a par ailleurs souhaité que soit organisée une visite par la Commission de la Défense du porte-avions Charles de Gaulle.
M. Didier Boulaud, Président, a fait observer quune telle visite avait déjà eu lieu il y a environ un an mais quil nétait pas impossible den organiser une nouvelle en 1999.
M. Jean-Claude Sandrier a regretté que lobjectif des réformes actuelles soit de piloter la Défense selon une logique dentreprise. Il sest inquiété, notamment pour des raisons de souveraineté nationale, du développement des études dans des cadres européens et dun risque dabandon de compétences techniques au niveau national. Relevant que léchelon central de lOCCAR était à Bonn, il sest interrogé sur le choix de conduire les études relatives au VBCI dans le cadre dun programme européen. Il a estimé que les choix de programmes darmement devaient faire lobjet de débats en amont au plan local et national et quil fallait traiter au fond des problèmes posés par ces choix en nhésitant pas à aborder la question de la souveraineté.
M. Didier Boulaud, Président, a interrogé le Délégué général pour lArmement sur les conditions juridiques de passation des commandes globales et sest demandé sil était envisageable dassurer linformation du Parlement sur leur conclusion, leur montant et leur contenu.
Il a ensuite souhaité savoir quelles conclusions M. Jean-Yves Helmer tirait de lavis du Conseil dEtat sur la valeur des droits de vote doubles détenus par lEtat dans Dassault Aviation et sil estimait que cette situation juridique clarifiée ouvrait de nouvelles perspectives pour la politique industrielle.
Il lui a ensuite demandé comment il envisageait le partage des activités de Matra-Aérospatiale et de Thomson-CSF dans le domaine des satellites et quel était le statut juridique de la clause de non rétablissement dactivités dans le secteur des satellites acceptée par lAérospatiale lors de lapport de ses activités satellitaires à Thomson-CSF.
Enfin, il a voulu savoir comment il voyait le progrès des négociations industrielles et gouvernementales pour la création de la nouvelle société européenne aérospatiale civile et militaire.
M. Jean-Yves Helmer a apporté les éléments de réponse suivants :
le programme VBCI, conduit en coopération avec lAllemagne et le Royaume-Uni, est en phase de négociation active avec lindustrie. Cette négociation a notamment pour but dobtenir la garantie que les spécificités du besoin opérationnel français seront satisfaites par le consortium industriel retenu ;
la distinction entre lactivité industrielle et lactivité étatique de la DGA constitue son premier atout. Au sein même de la DGA étatique, ladoption dun mode de fonctionnement transversal est également un gage defficacité, dans le contexte dadministration qui est celui de la délégation. Une large marge de manoeuvre existe toutefois, en particulier en matière de « management » et de gestion des ressources humaines, que la DGA sefforce dexploiter. Une gestion motivante a également été introduite, les responsables de programme recevant la mission datteindre un certain nombre dobjectifs et disposant dune marge étendue dinitiative mais devant rendre compte régulièrement de leurs résultats ;
sagissant de la DCN, des orientations politiques très claires, définies par le Gouvernement, prévoient le maintien du statut actuel ;
la préservation des capacités de défense de la France passe par la construction dune Europe de larmement. Si le siège de lOCCAR se situe certes à Bonn, les bureaux de programme sont quant à eux répartis dans les quatre pays signataires, une majorité dentre eux étant implantés en France ;
des informations sur les commandes globales, qui sont des contrats de marchés publics, avec des dispositions spécifiques, mais sans particularité juridique, pourront être apportées au Parlement, en réponse aux demandes de la Commission de la Défense ;
les avis du Conseil dEtat sont secrets tant que le Gouvernement ne les a pas rendus publics, il nest donc pas possible pour le Délégué général de les commenter ;
les industriels concernés ont une interprétation différente de la clause de non-rétablissement dactivités dans le secteur des satellites. Il leur a été demandé de se rapprocher en vue de trouver un accord. Le Délégué général pour lArmement et le Directeur du Trésor sont chargés de suivre ce dossier et den rendre compte au Gouvernement
sagissant de la constitution de la future société européenne daéronautique civile et militaire, le rapprochement entre Aérospatiale et Matra Hautes Technologies constitue un progrès notable puisquil lève certains obstacles opposés par nos partenaires, notamment en ce qui concerne la participation de lEtat, et quil favorise la rationalisation nécessaire de loutil industriel français.
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