
ASSEMBLÉE NATIONALE
COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES
COMPTE RENDU N° 6
(Application de l'article 46 du Règlement)
Mardi 13 octobre 1998
(Séance de 16 heures 15)
Présidence de M. Paul Quilès, Président
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Projet de loi de finances initiale pour 1999 (n° 1078)
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Audition de M. Jean-François Hébert, Secrétaire général pour ladministration
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La Commission a entendu M. Jean-François Hébert, Secrétaire général pour ladministration, sur le projet de loi de finances pour 1999 (n° 1078).
Accueillant M. Jean-François Hébert, le Président Paul Quilès a souligné lintérêt des informations quil allait pouvoir apporter à la Commission sur le déroulement de la professionnalisation, en particulier en ce qui concerne son accompagnement social, mais aussi sur les difficultés signalées à diverses reprises dans le domaine de la gestion des personnels civils.
Rappelant que le Secrétaire général pour ladministration participait à une réforme profonde de la gestion des crédits déquipement de la Défense, dont la présentation gagnera en clarté et lexécution en rigueur, tout en permettant un meilleur contrôle parlementaire, conformément à une préoccupation ancienne, souvent exprimée par la Commission, il a fait part de son intérêt particulier pour les informations quil pourrait donner à ce sujet.
M. Jean-François Hébert a dabord rappelé que, depuis sa dernière audition, de très nombreux projets entrant directement ou indirectement dans le champ de compétence du Secrétaire général pour ladministration avaient été menés à bien par le ministère de la Défense. Il a cité notamment la loi réformant le service national, la suppression des quotas féminins dans les armées, la revue des programmes, lannonce des mesures de restructurations qui interviendront entre 2000 et 2002, la création dune commission du secret de la Défense nationale, la parution du décret relatif au volontariat militaire, louverture, le 3 octobre, de la première journée dappel de préparation à la défense, et a ajouté que cette liste devrait continuer à sallonger dans les mois qui viennent avec le projet de loi portant organisation de la réserve militaire et la réforme du Secrétariat général pour ladministration.
Sagissant du projet de budget de la Défense pour 1999, il a estimé que celui-ci avait pour caractéristique de permettre la poursuite de la professionnalisation des forces et de la modernisation de leur équipement. Il a indiqué quil mettrait lui-même laccent sur deux points, laccompagnement social mis en place au profit des militaires et des civils du ministère de la Défense et la modernisation de la gestion des moyens financiers mis à la disposition des armées.
Abordant le dispositif daccompagnement social applicable aux militaires, le Secrétaire général pour ladministration a rappelé que la professionnalisation se traduirait par un accroissement du nombre des militaires, puisque de 298 000 en 1996, ils doivent passer à un peu plus de 357 000 en 2002, volontaires compris, soit une augmentation de 20 %. Cette progression, que masque la disparition progressive des quelques 200 000 appelés du contingent, recouvrait elle-même des évolutions différentes selon les catégories de personnel : doublement de leffectif des engagés (92 527 au lieu de 44 552), réduction globale du nombre de cadres, de 267 officiers et de 15 500 sous-officiers, et création de plus de 27 000 postes de volontaires.
Concernant les engagés, il a indiqué que la principale mesure arrêtée à loccasion de la mise au point de la réforme était la revalorisation de leur rémunération. A compter du 1er juin 1997, leur solde mensuelle nette minimale a été portée de 4 100 à 5 600 francs, soit une augmentation de 1 500 francs. De plus, lapplication aux militaires des dispositions de laccord salarial conclu le 10 février 1998 pour la fonction publique permettra aux engagés de bénéficier non seulement de la revalorisation générale des soldes, mais aussi des mesures spécifiques concernant les bas salaires. Hors primes spécifiques liées à lactivité, la rémunération nette de base des militaires du rang professionnels se situe donc désormais à 6 250 francs par mois, soit, compte tenu des avantages en nature qui leur sont alloués (hébergement, alimentation, réduction SNCF) à un niveau désormais sensiblement supérieur au SMIC, constituant un élément important dattractivité pour larmée professionnelle.
Pour ce qui est des officiers et des sous-officiers, il a rappelé quà la demande expresse du Chef de lEtat, Chef des armées, il avait été décidé de ne pas avoir recours à une loi de dégagement des cadres et que, pour les encourager à partir, cest donc une politique dincitation financière qui a été mise en place. Il a rappelé que le pécule était attribué à ceux dentre eux qui souhaitaient quitter le service dès lors quils disposent de lancienneté requise pour bénéficier dune retraite à jouissance immédiate, quils se trouvent à plus de trois ans de la limite dâge de leur grade et que leur départ répond aux besoins de la gestion des effectifs au regard de la loi de programmation militaire, cette dernière condition signifiant bien que le pécule nest pas un droit. Précisant que le montant du pécule, qui nest pas imposable, peut atteindre au maximum 45 mois de solde pour le militaire se trouvant à plus de dix ans de la limite dâge de son grade, quil est ensuite dégressif en fonction de la durée des services restant à accomplir avant la limite dâge et indiquant quen 1999, il sera réduit de 10 % en application de la loi de décembre 1996, M. Jean-François Hébert a indiqué quen 1997, première année dapplication de la réforme, 177 officiers ont bénéficié dun pécule moyen de 410 000 francs, tandis que 2 116 sous-officiers ont quitté les armées dotés dune somme qui sest élevée en moyenne à 235 000 francs. En 1998, ce sont 164 officiers qui ont bénéficié dun pécule moyen de 427 000 francs et 2 870 sous-officiers qui se sont vus attribuer un pécule dun montant moyen de 264 000 francs, cette augmentation des niveaux moyens sexpliquant par une plus grande anticipation des départs.
Il a ajouté quen 1999, les crédits qui figurent dans le projet de budget devraient permettre dallouer 200 pécules « rénovés » à des officiers et entre 2 000 et 2 400 à des sous-officiers.
Ainsi, en termes financiers, les « pécules rénovés » auront mobilisé 572 millions de francs en 1997 et 828 millions de francs en 1998. Lannée prochaine, il est prévu de leur consacrer 742 millions de francs. Si lon y ajoute les pécules versés aux militaires bénéficiant des dispositions des articles 5 et 6 de la loi de 1975 (68 millions de francs), ceux attribués à la DGA (17 millions de francs) et ceux qui existaient antérieurement (16 millions de francs), ce sont au total 844 millions de francs qui seront affectés à ce type daide (668 millions de francs en 1997 et 947 millions de francs en 1998).
Rappelant quen dehors du pécule, les articles 5 et 6 de la loi du 30 octobre 1975 permettent aux officiers, qui, après 25 ans de service, ont acquis des droits à pension de retraite à jouissance immédiate, de quitter larmée en demandant à bénéficier de la pension du grade supérieur et que la loi du 19 décembre 1996 a prolongé lapplication de ces dispositions jusquau 31 décembre 2002 et institué, de surcroît, lattribution aux militaires de carrière concernés dun pécule réduit des quatre cinquièmes, il a indiqué quen 1998, 753 officiers ont bénéficié de cette mesure et perçu un pécule moyen de 88 000 francs.
Enfin, il a exposé quen 1997, 52 officiers et 213 sous-officiers ont été intégrés dans les emplois civils de lEtat ou des collectivités locales vacants au titre de la loi n° 70-2 du 2 janvier 1970, dont les dispositions ont également été prolongées jusquen 2002. Il a indiqué que les intégrations seront plus nombreuses au titre de lannée 1998, puisquelles ont concerné 62 officiers et 260 sous-officiers, ce qui représente une progression globale de 22 %.
Le Secrétaire général pour ladministration a alors souligné limportance des aides à la reconversion, qui sont allouées aux officiers, comme aux sous-officiers et aux engagés, et ce non seulement pendant la période de constitution de larmée professionnelle, afin de favoriser les départs, mais aussi parce quen régime de croisière, lorsque les armées recruteront chaque année entre 15 et 20 000 jeunes, la perspective dune reconversion réussie sera un élément déterminant de leur choix.
Rappelant que la loi du 19 décembre 1996 avait prévu que le militaire de carrière ou sous contrat, quittant définitivement les armées, pourrait bénéficier, pendant une durée maximum de douze mois consécutifs, de deux congés de reconversion, lui permettant de suivre les actions de formation adaptées à son projet professionnel, il a indiqué quen 1998, 3 500 militaires avaient bénéficié dun congé de reconversion et 200 dun congé complémentaire et ajouté quen 1999, les crédits consacrés à ce congé complémentaire devraient tripler, passant de 5 à 15 millions de francs.
En conclusion de sa présentation du dispositif daccompagnement destiné aux militaires, M. Jean-François Hébert a jugé quil avait preuve de son efficacité puisquil apparaissait que les armées ne rencontraient, pour le moment, aucune difficulté pour recruter en nombre et en qualité les engagés dont elles ont besoin, et que les objectifs de réduction des effectifs dofficiers et de sous-officiers étaient aisément atteints.
Abordant le dispositif applicable aux civils, le Secrétaire général pour ladministration a fait remarquer que la loi de programmation prévoyait, pour ce qui concerne le budget de lEtat, une augmentation de leur nombre (+ 9 276 en solde net), tandis quannée après année, leurs effectifs étaient appelés à diminuer dans les comptes de commerce, notamment à la Direction des constructions navales, et que la transformation de loutil de défense se traduisait par un grand nombre de mesures de dissolution, de transfert ou de réorganisation dunités ou détablissements. Il a indiqué quen conséquence le problème était dorganiser la mobilité des personnels des unités militaires et des établissements industriels de la DGA vers les endroits où les armées ont besoin de se renforcer en personnel civil.
Il a expliqué que le plan « formation mobilité », renégocié avec les organisations syndicales à la fin de lannée 1996, répondait à cet objectif. Ce plan postule que les évolutions deffectifs découlant de la réforme seront réalisées sans quil soit nécessaire de recourir au licenciement dautorité et en conservant aux personnels leur statut, leurs conditions de rémunération et leurs perspectives davancement. Pour ce faire, il met en oeuvre plusieurs outils : la formation, qui en est un élément central, la mobilité interne et la mobilité externe.
Le Secrétaire général pour ladministration a précisé que la mobilité interne était assortie de nombreuses garanties parmi lesquelles une bourse des emplois, des entretiens personnalisés en cas de suppression de poste, lobligation pour ladministration de faire à chaque agent trois propositions daffectation nouvelle, ainsi que le maintien de la rémunération et des conditions davancement tant pour les agents mutés que pour les ouvriers en fonction dans un établissement daccueil. Par ailleurs, toutes les catégories de personnel du ministère de la Défense bénéficient des mêmes montants dindemnités de mobilité dès lors quils se trouvent dans des situations identiques.
Il a ajouté que la mobilité externe était également encouragée, soit que les agents concernés désirent rester dans la fonction publique, soit quils veuillent rejoindre le secteur privé, soit, encore, quils envisagent de cesser toute activité professionnelle. Il a précisé que le ministère de la Défense aidait les fonctionnaires qui souhaitent demeurer dans la fonction publique à obtenir un détachement dans ladministration de leur choix et que, sagissant des ouvriers des établissements restructurés, il avait été décidé quils pourraient être mis à la disposition dautres administrations, cette mise à disposition étant assortie dun remboursement au moins partiel de la part de ladministration bénéficiaire. Sagissant des agents qui veulent quitter ladministration, lindemnité de départ volontaire, accordée à tout ouvrier qui en fait la demande dès lors quil est en fonction dans un établissement restructuré ou susceptible daccueillir des agents à reclasser, est calculée selon la durée des services accomplis et peut aller de 60 000 francs, pour six ans dancienneté, à 300 000 francs au maximum. Laide à la création dentreprise, pour les ouvriers qui quittent définitivement le ministère de la Défense pour créer ou reprendre une entreprise, dun montant de 50 000 francs est accordée indépendamment de laide délivrée par lAgence nationale pour la création dentreprise. Le régime de dégagement des cadres permet, quant à lui, à tout ouvrier âgé de plus de 55 ans et disposant au minimum de quinze années de service de bénéficier dune cessation anticipée dactivité avec revenu de remplacement et dune bonification dancienneté pouvant aller jusquà quatre ans. Compte tenu de la situation particulière de la Direction des constructions navales, un décret, pris le 12 mai 1998, a autorisé les ouvriers qui sont volontaires à bénéficier dune mesure de dégagement des cadres dès 52 ans associée à une bonification dancienneté de cinq ans au maximum, à la condition que ladministration ne soppose pas à leur départ. Enfin, la cessation anticipée dactivité est accordée aux fonctionnaires titulaires en application de larticle 99 de la loi de finances rectificative pour 1992.
Le Secrétaire général pour ladministration a alors indiqué quun premier bilan de ce dispositif, réalisé à la date du 30 juin 1998, avait été récemment présenté aux organisations syndicales par le ministère de la Défense. Sur 8 500 agents civils concernés par la première phase des restructurations (1997-1999), 7 000 ont dores et déjà été reclassés dans un nouvel emploi ou ont bénéficié, soit de mesures dâge, soit de mesures daides au départ. Leffort en matière de formation sest traduit par lutilisation, en 1997, de la totalité des crédits prévus (34 millions de francs). Ainsi, sur le plan financier, la mise en uvre du plan « formation mobilité » aura mobilisé près de 920 millions de francs en 1997, soit 557 millions de francs au titre du dégagement des cadres, 155 millions de francs dindemnisation des agents partant en mesure dâge et ne disposant pas de la totalité de leurs annuités, 150 millions de francs dindemnités de départ volontaire et 56 millions de francs dindemnités daccompagnement de la mobilité.
Précisant que les prévisions pour 1998 étaient bien entendu supérieures et que le coût de ce dispositif devrait avoisiner le milliard de francs, le Secrétaire général pour ladministration a souligné que ces indications chiffrées donnaient la mesure de leffort fait par le ministère de la Défense pour accompagner la mobilité de ses personnels civils.
M. Jean-François Hébert a ensuite abordé la modernisation de la gestion des moyens financiers alloués au Ministère de la Défense en soulignant quelle avait pour objectif de rendre cette gestion plus lisible, plus rigoureuse, plus moderne et plus efficace.
Leffort de rationalisation des procédures a tout dabord porté sur les crédits déquipement gouvernés par les états-majors et gérés principalement par la DGA (à hauteur de 80 %). Il a rappelé que les dépenses en capital du ministère de la Défense représentaient à elles seules, avec 86 milliards de francs en 1999, un peu plus de 55 % de leffort dinvestissement de lEtat. La gestion de sommes aussi importantes, impliquant plus de 10 000 fournisseurs et donnant lieu à près de 70 000 marchés et contrats nécessite des procédures à la fois transparentes et efficaces. Engagée dès 1994, la réforme de la gestion financière des crédits déquipement sest accélérée en 1997 et sest concrétisée cette année avec la mise en place effective de dispositions arrêtées conjointement par les Ministres de la Défense, de lEconomie et des Finances, et du Budget.
Pour renforcer lefficacité de sa gestion, le ministère de la Défense sest doté dun outil informatique global à la fois budgétaire et comptable. Le système CARNOT est destiné à rassembler dans une base unique, consultable en temps réel, lensemble des données relatives à la mise en place et au suivi des ressources financières du ministère. Il permet le suivi des dépenses de ladministration centrale et sétendra progressivement à celles effectuées par les ordonnateurs secondaires au plan local. Cette intégration des dépenses effectuées localement sera facilitée par la mise en place du dispositif baptisé « nouveau suivi local des dépenses » qui assurera une remontée dinformations immédiates et fiables entre les ordonnateurs secondaires et ladministration centrale. Cette application est déjà opérationnelle dans certains services (Direction générale de la Gendarmerie nationale) et sera étendue à tous les services en 1999.
En application de linstruction interministérielle du 24 avril 1997 relative à la gestion des crédits déquipement, le ministère sest attaché à recréer un lien entre autorisations de programme et crédits de paiement. Pour permettre le rétablissement de ce lien, ladministration a mis en place, au début de lannée 1998, les opérations budgétaires dinvestissement (OBI). Jusque là, les investissement étaient répartis en 7 000 opérations en ce qui concerne les autorisations de programme, et entre les 300 articles des 9 chapitres du budget déquipement pour ce qui était des crédits de paiement. Aucun lien nétait établi entre autorisations de programme et crédits de paiement. Désormais la gestion des titres V et VI est assurée, tant en ce que qui concerne les autorisations de programme que les crédits de paiement, sur la base dun peu moins de 1 000 opérations budgétaires dinvestissement. Cest dans ce cadre rénové que sétablira le lien recherché entre autorisation de programme et crédits de paiement, ce qui devrait mettre un terme aux dérives observées ces dernières années.
La gestion des crédits déquipement se devait aussi dêtre plus transparente. Cest pourquoi les procédures de droit commun telles que le contrôle financier déconcentré et la comptabilité spéciale des investissement ont été transposées au ministère de la Défense. De même, trois innovations marquent la présentation du titre V du ministère de la Défense dans le projet de loi de finances : les crédits sont désormais répartis en huit chapitres plus équilibrés, lensemble des ressources consacrées à un programme sont rassemblées au sein dun même chapitre et les sommes affectées à la construction et à la réalisation de 25 grands programmes (Rafale, Leclerc, Tigre, Horizon, NH 90, Rubis ETC) sont clairement identifiées sous un article spécifique dans le « bleu budgétaire ».
La modernisation de la gestion des crédits de fonctionnement est également engagée. Ladaptation des procédures était dautant plus nécessaire quavec la professionnalisation les rémunérations ont un poids plus conséquent au sein du titre III, tandis que les crédits de fonctionnement sont, quant à eux, soumis à de fortes contraintes.
Après les modifications intervenues cette année avec la création de chapitres distincts pour les dépenses afférentes aux rémunérations principales et celles relatives aux indemnités, trois innovations marquent la présentation du titre III dans le projet de loi de finances : les crédits destinés au financement de lindemnité journalière dabsence temporaire et de transport des unités de la Gendarmerie sont désormais regroupés dans le chapitre 34-07 consacré au maintien de lordre, les crédits de fonctionnement des états-majors interarmées outre-mer font lobjet du chapitre 34-02/60 et les crédits de fonctionnement de la Direction du service national sont imputés sur le chapitre 34-01/60, distinct de celui de lArmée de terre. Parallèlement, en concertation avec les états-majors, directions et services, une réflexion visant à mieux identifier les moyens de fonctionnement nécessaires à lactivité opérationnelle des forces et à responsabiliser les gestionnaires de crédits, a été entamée. Les premières conclusions de ces travaux devraient pouvoir recevoir une traduction dans la présentation du prochain projet de budget.
Alors que jusquà la fin de lexercice précédent, le ministère de la Défense assurait la totalité des opérations de paie de ses personnels, une expérimentation, visant à confier aux services du Trésor la prise en charge de ces opérations a concerné, dans un premier temps, les 2 000 fonctionnaires de ladministration centrale. Les avantages attendus de cette réforme (gains en personnel, économies sur les dépenses informatiques...) et le caractère concluant de lexpérience devraient conduire à létendre progressivement à lensemble des personnels civils de la Défense.
Sur instruction des Ministres de la Défense, de lEconomie, des Finances et de lIndustrie et du Secrétaire dEtat au Budget, le Secrétariat général pour ladministration, en liaison avec le Directeur du budget a entamé un examen critique de lensemble des procédures dérogatoires en vigueur au sein du ministère. Cette réflexion na pas pour objectif daligner systématiquement et immédiatement la gestion du ministère sur le droit commun, dans la mesure où les besoins spécifiques de la Défense requièrent des procédures particulières comme les fonds davance, les dépenses à bon compte et le régime des masses. Mais le souci de réexaminer la justification de chacune des procédures dérogatoires traduit une orientation nouvelle, qui témoigne de limportance des changements qui sopèrent au sein du ministère.
En conclusion, M. Jean-François Hébert a considéré que, tout en veillant scrupuleusement à préserver jalousement les spécificités indispensables à laccomplissement des missions des forces armées, il convenait dengager la gestion du ministère de la Défense sur la voie du changement. Il sest déclaré persuadé que la « banalisation » du budget de la Défense constituait une condition sine qua non du maintien dun effort de Défense conséquent.
Le Président Paul Quilès a souhaité savoir si le millier dopérations budgétaires dinvestissement isolées dans le cadre de la réforme de la gestion budgétaire du ministère figureraient dans un document et si celui-ci pouvait être porté à la connaissance du Parlement. Rappelant que M. Jean-François Hébert préside, au sein du ministère, le Comité pour la réforme et linnovation administratives, qui réunit des représentants des états-majors et des services du ministère, il a demandé au Secrétaire général pour ladministration quelles actions pouvaient être attendues de ce Comité au cours de lannée à venir. Enfin, il sest inquiété des modalités dexécution des crédits déquipement, notamment de linstrument de freinage de la dépense que constitue le refus de visa du Contrôleur financier, de la manière dont le suivi des dépenses déquipement était assuré par les services du Budget et des conséquences qui pouvaient en découler pour la gestion des marchés et les délais de paiement. Il sest interrogé à ce propos sur le niveau actuel des intérêts moratoires dus aux retards de paiement.
M. Gilbert Meyer sest félicité de la réforme de la nomenclature budgétaire qui vise à introduire plus de transparence dans la gestion des crédits du ministère, mais, prenant exemple sur les difficultés rencontrées dans lexécution des budgets des grandes villes, il a tenu à faire part de ses interrogations sur les inconvénients dune spécialisation trop poussée de la dépense et les rigidités quelle est susceptible dentraîner.
M. Jean-Noël Kerdraon a attiré lattention du Secrétaire général pour ladministration sur les inégalités de revenus entre les retraités de la DCN et les salariés bénéficiant dun départ anticipé, dans la mesure où ces derniers jouissent dune allocation unique dégressive qui se cumule avec leur retraite anticipée. Il a regretté que les départs anticipés soient subordonnés à la condition dun accord entre les personnels concernés et leur établissement, ce qui conduit parfois à les retenir contre leur gré en raison de leur savoir-faire et de leurs compétences. Il sest également interrogé sur lopportunité de créer des postes supplémentaires destinés à permettre un maintien des compétences et un pyramidage propice à un rajeunissement des effectifs. Enfin, il a considéré que la démarche qui consistait à ouvrir dans les états-majors des emplois civils, réservés en priorité aux personnels des entreprises sous-traitantes, des forces françaises stationnées en Allemagne et de la DGA pourrait être poursuivie lannée prochaine.
Relevant que la formule dun « budget sous contrainte » était de plus en plus employée, M. François Huwart a demandé sur quels postes et dans quels secteurs ces contraintes, quand bien même elles restaient raisonnables, sexerçaient le plus fortement.
M. Jean-François Hébert a apporté les éléments de réponse suivants :
un catalogue des 1 000 opérations budgétaires dinvestissement sera établi. Ce catalogue est appelé à vivre et à évoluer ; cest un instrument de gestion interne au ministère de la Défense et son niveau de détail est inférieur à larticle, cest pourquoi il paraît excéder les limites habituelles du contrôle parlementaire qui a vocation à sexercer plutôt au niveau du chapitre et de larticle ;
la constitution du Comité pour la réforme et linnovation administratives répond à la volonté du Ministre de la Défense de dynamiser laction de modernisation de son département. Le Ministre a demandé au Comité détudier tout particulièrement la formation, la sous-traitance, et la mise en commun de leurs moyens par les armées. Le comité a vocation à élaborer des propositions sur la base du consensus. Cette volonté nexclut pas cependant des arbitrages du Ministre de la Défense. La gestion des transports aériens a ainsi été confiée à lArmée de lair ; en matière de munitions en revanche, il a été décidé que cest lArmée de terre qui mettrait ses compétences à la disposition des autres armées ;
les modalités dexercice du contrôle financier ont été très rudes dans les années où la gestion des crédits de la Défense a été la plus difficile, comme au cours de lannée 1995 où 20 milliards de francs de crédits ont été gelés ou annulés alors que les dépenses correspondantes avaient été faites, ce qui avait entraîné un volume élevé de reports de charges et donc dintérêts moratoires. Ceux-ci, qui avaient atteint 800 millions de francs en 1996, sont revenus à 350 millions de francs en 1997, largement du fait dune meilleure gestion. Cette année, pas plus que lan dernier, il ny a eu de régulation budgétaire officielle. En fait, le contrôle financier est en mesure dagir sur la dépense en retardant la sortie de certains dossiers. Cependant il semble quaucun dossier majeur ne soit actuellement concerné ;
pour établir le lien entre autorisations de programme et crédits de paiement, le nombre et le volume des opérations budgétaires dinvestissement ont été déterminés avec le double souci dune rigueur accrue et du maintien dune certaine souplesse. Cest pour cela que le nombre des opérations budgétaires dinvestissement a été fixé à 1 000 plutôt quà 7 000 ;
sagissant de lallocation unique dégressive attribuée à loccasion de certains départs, on a veillé à son écrêtement de façon à ce que le cumul dallocations ne crée pas un revenu supérieur au salaire dactivité. Quant au maintien en poste de personnels du fait de leur compétence, la difficulté est réelle. Il paraît toutefois difficile dagir autrement, sauf à porter préjudice au bon fonctionnement de la DCN. Par ailleurs, parmi les 500 civils sous statut douvrier de lEtat dont le recrutement a été autorisé cette année, 50 devraient être affectés à la DCN et pourraient contribuer à régler ce problème. Sagissant de ces recrutements, il faut insister sur le fait que les listes sont prêtes et que la possibilité dembauche est immédiate ; cette année, le Ministre de la Défense a cependant souhaité quune attention toute particulière soit accordée aux personnels des forces françaises stationnées en Allemagne, aux sous-traitants de la DCN et au personnel du GIAT. Lensemble des postes ouverts devraient être pourvus avant la fin de lannée ;
le terme de « budget contraint » est couramment employé dans les armées. Cette année cependant, il ne vise ni les crédits prévus aux titres V et VI qui correspondront à lactualisation pour 1999 des 85 milliards de francs jugés nécessaires en 1998, ni les effectifs mais les crédits de fonctionnement ;
lévolution des effectifs est conforme aux prévisions. Alors même quon nest quà mi-parcours, les instruments mis en place fonctionnent bien. Les objectifs devraient être tenus pour toutes les catégories de militaires. Le seul problème concerne les civils dont leffectif est en déficit. Sagissant des fonctionnaires cependant, la situation saméliore grandement : alors quil ny a eu que 159 recrutements en 1996 et 294 en 1997, 2 200 fonctionnaires auront été recrutés en 1998, notamment pour tenir compte des retards passés. Demeure le gel, qui concernera environ 1 100 postes, mais cette contrainte est imposée à lensemble des ministères. Sagissant des ouvriers, la difficulté vient du fait que pendant longtemps la DGA souffrait de sureffectifs supérieurs aux sous-effectifs des armées. Cette année, la situation sinverse, les sureffectifs de la DGA devenant inférieurs aux sous-effectifs des armées, le ministère de la Défense devrait être en meilleure position pour obtenir des autorisations dembauche ;
les crédits de fonctionnement diminuent de 9 % ; cette réduction est notamment liée à la diminution de 5 % des effectifs. De plus, une part significative des économies réalisées sexplique par lévolution du cours du baril de pétrole et, pour le service de santé des armées, par le niveau de ses ressources propres. Il reste que cest sur ce type de crédits que doit maintenant se porter toute notre attention.
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