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Session ordinaire de 2000-2001

RÉUNION DU MARDI 14 NOVEMBRE 2000

Projet de loi de finances pour 2001

COMMISSION DES FINANCES,
DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

Audition de M. Laurent Fabius,
Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

Présidence de M. Henri Emmanuelli,
président de la commission

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

Audition de M. François Huwart,
Secrétaire d'Etat au commerce extérieur

Présidence de M. André Lajoinie,
président de la commission

La séance est ouverte à seize heures quinze.

COMMISSION DES FINANCES,
DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

Audition de M. Laurent Fabius,
Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

PRÉSIDENCE de M. Henri EMMANUELLI

M. Henri Emmanuelli, président de la commission des finances - Avant de donner la parole à M. Fabius, je rappelle que la commission des finances se réunira demain, à 16 heures, pour examiner les articles non rattachés. La réunion prévue au titre de l'article 88 aura lieu lundi 20 novembre à 12 heures, et non à 10 heures comme initialement prévu. L'audition de M. Gadonneix, président de Gaz de France, est prévue à une date qui reste à préciser.

S'agissant du déroulement de la commission élargie, j'en présiderai la première partie. Pour ce qui a trait au commerce extérieur, nous accueillerons M. Huwart, et je laisserai alors la présidence à M. Lajoinie, président de la commission de la production.

Après que M. Fabius nous aura présenté les quatre fascicules budgétaires que nous examinerons au cours de la première partie de notre séance, je donnerai la parole à chacun des rapporteurs spéciaux et au rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale, auxquels le ministre répondra. Je donnerai ensuite la parole à un orateur par groupe puis, s'il reste du temps, aux députés qui le souhaitent. Le ministre des finances leur répondra, de manière que cette première phase de discussion s'achève vers 18 heures. Je vous invite donc à la concision.

Je demanderai aux rapporteurs spéciaux de se rendre dans la salle de la commission à 20 heures pour voter ces budgets, ainsi que l'article 56 rattaché au budget de la solidarité, que nous avons réservé le 8 novembre.

Je souhaite faire une dernière observation. Nous avons constaté, cette année, certains retards dans la transmission de l'information dont le Parlement doit disposer, qu'il s'agisse des questions ou des « jaunes ». J'appelle l'attention du Gouvernement sur le fait que le délai de transmission de ces informations est une condition essentielle de la réussite de la procédure d'examen simplifié. Je sais qu'en d'autres circonstances, Monsieur le ministre, vous avez fait part de votre souhait d'améliorer les relations entre l'exécutif et le Parlement. Je ne doute donc pas que vous ferez l'effort nécessaire pour que le délai d'envoi des réponses aux questionnaires budgétaires s'améliore. Quand il s'agit des droits du Parlement, on ne peut s'en tenir aux incantations.

Monsieur le ministre, vous avez la parole.

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Je me réjouis de venir présenter, avec Mme Parly, le projet de budget du ministère de l'économie et des finances devant votre commission élargie. Je suis, vous le savez, l'un des artisans de cette nouvelle procédure. J'en ai pris l'initiative car je souhaitais contribuer à améliorer les relations entre le Parlement et le Gouvernement. Je m'attacherai à traduire ce v_u dans mes nouvelles fonctions car, pour ce qui me concerne, les droits du Parlement ne sont jamais du domaine de l'incantatoire.

Dès mon entrée en fonctions, j'ai fixé aux services du ministère certaines priorités : apporter à la réforme-modernisation les moyens indispensables, permettre que le ministère remplisse sa mission au profit des citoyens, améliorer la transparence et la sincérité budgétaires. Le projet de budget pour 2001 s'inscrit dans ce cadre.

Le premier objectif en est donc de conduire la réforme-modernisation du ministère. Depuis plusieurs années, la nécessité d'une réforme de l'Etat est soulignée et répétée. Il faut avancer ; or, il n'est pas d'Etat moderne possible sans un ministère de l'économie rénové. Elaboré dans la concertation, le projet que j'ai annoncé lors du comité technique paritaire ministériel du 28 avril 2000 se traduit par l'allocation de moyens spécifiques, dont une part très significative sera consacrée à la modernisation de l'informatique et au développement des nouvelles technologies, pour mettre au point une organisation enfin décloisonnée et recentrée sur l'usager. Ce sont 265 millions qui sont inscrits dans le projet de budget du ministère à ce titre. Par ailleurs, une dotation spécifique de 80 millions permettra d'engager la rénovation de la gestion publique, notamment la refonte des applications du secteur public local. D'autre part, une dotation de 113 millions est réservée au financement de projets innovants et à l'expérimentation locale de l'interlocuteur fiscal unique. Il est prévu, aussi, d'instituer un interlocuteur économique unique pour les entreprises. D'autres actions seront lancées, en fonction des conclusions du rapport que me remettra votre collègue Jean Launay sur les maisons de services publics, économiques et financiers. Au total, 458 millions sont inscrits au nouveau chapitre « Réforme-modernisation du ministère de l'économie et des finances ».

J'entends parfois dire que rien ne se fera ou que le projet abandonné en début d'année est réintroduit subrepticement, sans concertation ni avec les agents, ni avec les élus. En réalité, la réforme est en train de se faire, et ce qui se fait n'est pas la reprise d'un projet désormais dépassé. La volonté qui s'exprime est de transformer pour améliorer. A cette fin, un secrétaire général a été nommé, dès mai 2000, chargé de la réforme-modernisation. C'est M. Bernard Pêcheur qui assure cette difficile fonction ; sa personnalité et sa force de travail lui donnent des atouts certains et, depuis que le poste existe, les choses vont mieux.

Tous les sites d'expérimentation de l'interlocuteur fiscal unique sont désormais opérationnels ; 150 services territoriaux répartis dans 14 départements peuvent désormais communiquer par leur réseau Intranet, ce qui est un progrès considérable ; le centre expérimental d'appels de Lille ouvrira à la fin de l'année ; l'expérimentation d'interlocuteur économique unique débutera dès janvier 2001 ; à la même époque seront lancés les premiers essais de télédéclaration de TVA. Le plan de développement du compte fiscal unique me sera soumis fin janvier 2001. Enfin, la Direction des grandes entreprises, qui gérera la fiscalité des 17 000 plus grandes sociétés du pays, sera installée à la fin de l'année 2001.

Vous l'aurez constaté : pour une réforme prétendument en sommeil, on a déjà vu plus assoupi ! Les services travaillent, les agents mènent ces projets parce qu'ils sont associés à la réflexion, et leurs représentants sont consultés. Ensemble, nous démontrons qu'il est possible, par le dialogue et grâce à la détermination, de moderniser notre administration.

Car si les entreprises travaillent en réseau, les Etats peinent à le faire, le nôtre particulièrement. Nous devons donc combler ce retard par une déconcentration plus poussée, par la simplification, par l'expérimentation. Mais que l'on ne se méprenne pas : des services publics en réseau ne sont pas seulement des services publics connectés. Il nous faut passer d'une organisation verticale et centralisée à une structure coopérative et horizontale dans laquelle sont privilégiées de larges délégations, la communication entre responsables et services sans remontée à l'échelon supérieur, la délibération avant la décision, la participation dans la gestion.

En conciliant modernisation et tradition, égalité et efficacité, le ministère peut être un exemple de l'Etat partenaire.

Deuxième objectif, lié au premier, répondre aux besoins des usagers. À ce titre, deux évolutions importantes modifient le périmètre du budget et traduisent la volonté d'une plus grande cohérence comptable et financière : la poursuite de la budgétisation, qui porte sur 1,944 milliard et l'inscription des cotisations patronales de l'Etat jusqu'ici transférées en gestion, pour 1,336 milliard.

A périmètre constant, les moyens du ministère progressent de 0,88 %. En matière d'emplois, conformément aux engagements pris, 2001 se caractérise par la poursuite de la requalification, la stabilité globale des effectifs, des redéploiements au sein du ministère. Des créations sont prévues au bénéfice de directions prioritaires -direction de la concurrence et juridictions financières- et des autorités de régulation créées ou renforcées -commission de régulation de l'électricité, conseil de la concurrence, autorités de régulation des télécommunication. Elles sont gagées par des suppressions d'emplois à la DGI, la DGCP, l'INSEE, la Douane et l'administration générale. Les transferts concernent pour l'essentiel les services généraux du Premier ministre. Pour disposer d'une image plus fidèle, 136 emplois jusque là mis à disposition des juridictions financières, sont désormais directement inscrits à leur budget.

Pour les autres moyens des services, les crédits de fonctionnement courant progressent de 1,52 % notamment au bénéfice de l'informatique. Une attention particulière a été portée aux actions d'hygiène et de sécurité et à l'action sociale, ce qui est normal dans une collectivité moderne et respectueuse des conditions de travail. La médecine de prévention sera aussi améliorée.

Les subventions de fonctionnement s'accroissent de 28 %. Les crédits d'investissement sont ajustés en crédits de paiement compte tenu des importants reports attendus. Toutefois, la dotation en autorisations de programmes est stabilisée, ce qui préserve la capacité d'investissement du ministère.

La modernisation c'est aussi la préparation de la France au passage à l'euro le 1er janvier 2002, dont le ministère de l'économie a la responsabilité principale. Les moyens qui y sont consacrés passent de 70 à 110 millions.

Un mot de la réforme du code des marchés publics, source d'économies plus que de dépenses, texte réglementaire plus que législatif. Le Gouvernement a soumis début novembre à la concertation un projet de décret à ce propos. Les présidents des assemblées en ont été destinataires. Il s'agit de simplifier, de clarifier, de rendre plus transparentes les procédures, de renforcer la sécurité juridique des acheteurs publics, d'ouvrir plus largement la commande publique aux PME et de la rendre plus efficace. Là où l'on trouvait jusqu'ici un enchevêtrement de règles dans lequel les ministères et les élus locaux ne pouvaient se retrouver, une centaine d'articles suivront désormais la démarche de l'acheteur public, dans un souci d'efficacité. Un projet de loi avait été préparé mais il est apparu qu'hormis la définition de la délégation de service public, de la sous-traitance et de la liste des pouvoirs adjudicateurs, les règles de passation et d'exécution des marchés publics relèvent du décret en Conseil d'Etat. Tel a donc été le choix du Gouvernement, avec pour objectif une entrée en vigueur en juillet 2001. Les premiers échos de la concertation sont favorables. Cette réforme, qui soulage professionnels et élus s'accompagnera d'une refonte du conseil aux acheteurs et pourra être complétée dans les prochains DDOEF.

Troisième objectif, poursuivre les opérations de refondation des régimes indemnitaires et de régularisation budgétaire. Là encore, le ministère tient ses engagements puisque ce budget porte à 15,7 milliards l'ensemble des ressources rebudgétisées depuis la fin 1997.

L'inscription au budget général des crédits nécessaires au paiement des primes des agents du ministère accompagne l'achèvement de la refondation juridique des indemnités. Par ailleurs, les ressources provenant des activités d'épargne de la direction générale de la comptabilité publique sont intégrées dans le budget du ministère, pour un montant de 1,062 milliard. Parallèlement, la DGCP mettra à la fin de l'année un terme à ses activités de gestion de fonds particuliers et les comptes de tiers qui les portaient seront clôturés. Les crédits du service de la redevance, jusque là rattachés par un fonds de concours, sont également intégrés au budget. Pour la douane, le compte de tiers « recouvrement pour le compte de tiers encaissé par les administrations financières » sera clôturé, cette ressource étant désormais budgétisée. Il sera également mis un terme à l'utilisation de sept fonds de concours qui finançaient des charges permanentes ou percevaient des recettes de nature fiscale.

La volonté de participer de façon exemplaire à la modernisation de l'Etat est aussi celle de la direction des monnaies et médailles, fière de ses traditions, de son savoir-faire, de la qualité de ses ouvriers, mais aussi tournée vers l'avenir. Pour elle, 2001 est une année charnière puisqu'elle clôt la commande de 7,6 milliards de pièces métalliques en euro, mais aussi une année difficile en raison de la baisse attendue des recettes liées à la vente des monnaies nationales. L'équilibre du budget annexe ne pourra être atteint que grâce à une subvention de fonctionnement de 19 millions.

Le montant des recettes est en forte baisse. Le programme de frappe des monnaies courantes françaises chute de 41,5 %. Le produit de la cession de ces pièces diminue de 233 millions. Les prix de cession ont été reconduits puisqu'il n'y a pas eu d'évolution significative des cours du métal. Les charges liées à la surcapacité de Pessac n'ont pas été répercutées sur les prix. Le produit de la fabrication des monnaies étrangères passe de 41 à 60 millions. Les prévisions de vente de monnaies de collection françaises sont ramenées à 112 millions, objectif plus réaliste. Les recettes des monnaies de collection étrangères et celles des médailles, fontes, décorations et jetons sont maintenues. Les prestations de services augmentent pour atteindre 141,25 millions.

Dans le même temps, les dépenses sont maîtrisées. Tous postes confondus, les dépenses d'exploitation baissent de 14 %. La diminution de 27,6 % des achats tient à la réduction du programme de frappe. L'augmentation de la masse salariale est de 0,6 %. La croissance très sensible des crédits de fonctionnement est notamment due aux frais de confection des sachets de pré-alimentation. Toutefois, hors prestations de services, les crédits de fonctionnement baissent de 5 %.

Pour les investissements, le total des autorisations de programme témoigne de la volonté tant de l'établissement de Pessac que du site parisien d'affronter la concurrence à venir. Ces investissements permettront de moderniser l'outil industriel, d'informatiser l'entreprise, de renouveler le matériel. Après avoir évalué le montant de l'investissement nécessaire à la réouverture d'un atelier de fonderie laminage, l'administration a lancé deux études complémentaires, l'une sur l'environnement industriel des productions des flans monétaires, l'autre sur la faisabilité à Pessac. Leurs résultats éclaireront utilement la décision des pouvoirs publics. Les personnels seront bien sûr étroitement associés à la démarche, de même que les élus concernés.

Ce budget annexe permet de tenir les engagements de la France et de continuer à préparer l'avenir.

Le dernier objectif est de garantir la transparence. C'est le mot d'ordre non pas seulement de ce budget, mais de toute l'action du ministère. Il faut que les Français sachent pourquoi et comment l'argent public est dépensé, que leurs représentants contrôlent davantage son utilisation. C'est à la fois une question de bonne allocation des ressources et un principe de démocratie. La réflexion sur la transparence n'a cessé de progresser au cours de la législature, elle s'accélérera avec l'examen prochain de la révision de l'ordonnance du 2 janvier 1959. Dès l'année prochaine, notre pratique budgétaire aura évolué, se sera simplifiée, aura gagné en clarté. C'est une exigence qui est depuis longtemps la mienne. Je suis heureux que le Président Forni ait décidé, avec le Président Emmanuelli et le rapporteur général Didier Migaud, et en liaison avec le Gouvernement, de créer une commission spéciale à cet effet.

S'agissant des taxes parafiscales, leur nombre ne sera plus que de 43 en 2001. Dans un souci de simplification, de rationalisation et de rebudgétisation, le produit de la taxe versée par la profession au bénéfice du comité de coordination des centres de recherche en mécanique sera réduit de 35 % en 2001 et intégralement compensé par les crédits budgétaires. Cet effort de simplification des prélèvements pesant sur les entreprises, plus spécialement les PME, porte ses fruits. La cohésion et l'efficacité n'y perdent rien. Dans le cadre de contrats d'objectifs, des engagements seront pris par les centres techniques et par l'Etat concernant l'évolution des prochaines années.

Deux comptes spéciaux me paraissent devoir retenir plus particulièrement notre attention. D'abord le compte de session des titres d'entreprises du secteur public. En dépenses, les principaux postes concernent RFF et les dépenses financières minières. En recettes, toutes le suites d'opérations passées. Les principaux postes concernent les opérations telles la deuxième ouverture du capital de TMM ou bien encore des sessions de participation minoritaire comme Dassault System.

D'autre part, nous vous proposons de créer un compte spécial du Trésor qui permettra d'affecter le produit des licences de la troisième génération de téléphone mobile au fonds de réserve pour les retraites et à la caisse d'amortissement de la dette de l'Etat. Le Gouvernement a pris l'habitude de ne pas reporter sur les générations futures un certain nombre de dépenses qui nous incombent.

J'en viens, enfin, à l'ensemble un peu hétéroclite des charges communes. Là encore, il y a la simplification. La nomenclature entreprise lors de la loi de finances pour 2000 nous a permis de passer de 81 chapitres à 40 chapitres. Elle a rendu plus lisible ce budget avec un côté très positif pour mes services. Un effort supplémentaire a été fait cette année. En effet, nous avons transféré les cotisations patronales au titre du régime d'assurance maladie personnel civil titulaire de l'Etat, du budget des charges communes sur les différents budgets ministériels.

Hors remboursement, dégrèvement et recettes d'ordre, ce budget s'élève donc à 335,8 milliards, soit un peu plus de 20 % du total des charges budgétaires. Les deux principaux postes sont, en 2001, la charge de la dette pour près de 240 milliards et les pensions pour 83 milliards.

En conclusion, les budgets que j'ai l'honneur de vous présenter visent tous à préparer l'avenir. Ils rendront le service public plus moderne, plus efficace, plus proche des usagers. Ils donneront aux agents du ministère, dont le dévouement et la compétence, honorent la nation, les moyens de remplir leurs missions dans les meilleures conditions et d'exercer chacune des responsabilités dont est investi ce ministère. Tout cela participe à la réforme de l'Etat qui, pour le ministère de l'économie et des finances, est en marche.

M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial de la commission des finances pour les charges communes - Le budget des charges communes a été simplifié et modernisé ces dernières années. Premier budget de l'Etat, ses crédits bruts représentent, avec 721 milliards, 34 % des budgets bruts totaux, et ses crédits nets, avec 354 milliards, 20,6 % des budgets nets. Globalement, ils semblent évoluer de 2,57 %, mais il faut toutefois noter des modifications de structure, pour un montant de 24 milliards puisque le Gouvernement propose d'inscrire sur chaque fascicule budgétaire le montant des cotisations d'assurance maladie versées par l'Etat au titre de ses personnels titulaires.

Les remboursements et dégrèvements sont assez difficiles à apprécier : ils atteindraient 367 milliards, soit une hausse de 11 %, mais une rectification en cours d'exercice sera sans doute nécessaire. Les remboursements de TVA augmentent de 2,7 % et représentent, à eux seuls, 187 milliards ; les dégrèvements au titre des impôts locaux diminuent de 6 % ; les restitutions d'impôts sur les sociétés progressent de 4,5 %.

Tout cela manque quand même un peu de transparence, puisqu'il faut attendre l'exécution budgétaire pour se rendre compte de ce qui se passe et que l'on sera amené à procéder à des actualisations en cours de route. Par ailleurs, on dit à la fois que la situation économique s'améliore, donc que les remboursements progressent, et que la situation n'est pas excellente pour les impôts locaux, ce qui explique l'augmentation des dégrèvements. De ce point de vue, 2000 a été une année un peu particulière, avec le dégrèvement de la part de la taxe d'habitation réservée aux régions.

La situation s'améliorera dans les prochaines années : dès 2001, il ne s'agira plus d'un dégrèvement, mais d'une compensation inscrite dans le budget du ministère de l'intérieur. Les dégrèvements de taxe professionnelle diminuent, mais ils représentent encore 30 % de la masse collectée. Les restitutions d'impôt sur les sociétés s'élèvent à 46 milliards.

La charge brute de la dette dépend du montant des déficits annuels ainsi que du mode de gestion de l'endettement. Je note avec satisfaction que, d'année en année, le déficit diminue de 30 milliards en moyenne. Il faut poursuivre dans cette voie. Entre la loi de finances initiale pour 2000 et le projet de loi de finances pour 2001, la charge nette de la dette augmentera de 5 milliards pour s'établir à 239,7 milliards. Les taux d'intérêt ont atteint un niveau plancher, il faut y prendre garde. Un déficit de 200 milliards par an financé au taux moyen de 5 % produit une charge d'intérêt supplémentaire de 10 milliards. Il est donc important de continuer à réduire le déficit.

Le besoin de financement de l'Etat pour 2001 s'élèvera à 542 milliards : 186 milliards de déficit, 348 milliards de titres arrivant à échéance et 8 milliards d'engagements divers. Ce besoin sera couvert à hauteur de 295 milliards par des émissions d'obligations à terme et de 229 milliards par des émissions de bons du Trésor.

Le ministère des finances s'est engagé dans une politique visant à dynamiser la gestion de la dette. Je souhaite des éclaircissements sur le programme de rachat de titres qui a été annoncé et pour lequel sont prévus 10 milliards d'euros. Par ailleurs, vous avez annoncé en juillet la création d'une agence de la dette, dont vous avez déjà nommé le directeur général. Quelles seront ses missions ? Nous serons presque les seuls en Europe à disposer d'une telle agence. En outre, pendant la période d'installation de cette agence, l'opération de swap confiée à France Trésor va-t-elle bien avoir lieu ? La gestion de la dette mériterait un véritable débat au sein de la commission des Finances.

S'agissant des dépenses de personnel, une dotation provisionnelle de plus de 3 milliards est prévue pour couvrir les répercussions des négociations salariales. Les charges de pension représentent un chapitre important des charges communes, sans compter les transferts de crédits venant des différents budgets ministériels. Au total, la charge du régime de retraite des fonctionnaires civils et militaires pour le budget général peut être évaluée à 146 milliards en 2001. Monsieur le ministre, j'aimerais connaître votre avis sur l'avenir de ce régime. Le rapport entre les cotisants et les pensionnés est actuellement plus favorable que dans le régime général. Cependant, entre 2000 et 2012, la moitié des fonctionnaires en activité vont prendre leur retraite, ce qui augmentera les besoins de financement. Pour le régime général, vous avez constitué un fonds de réserve, ce qui est une excellente mesure. Mais ce fonds n'a évidemment pas vocation à financer le régime des fonctionnaires de l'Etat. Quelle sera votre politique ? Le Conseil d'orientation des retraites pourra-t-il se saisir du problème ?

Des crédits sont aussi prévus pour les charges de garantie ainsi que le fonctionnement des assemblées parlementaires, de la présidence de la République et de différents corps constitués. Ils évoluent plus rapidement que la moyenne des charges communes.

A propos des primes d'épargne-logement, plusieurs de mes collègues souhaiteront sans doute vous interroger.

Enfin, la France a annulé la dette de plusieurs pays en voie de développement. Je souhaite savoir comment vous comptez rendre cette mesure plus efficace.

M. Henry Chabert, rapporteur spécial de la commission des finances pour les services financiers et les monnaies et médailles - M. le Ministre a parlé de transparence. Si des efforts ont été faits dans la réintégration des fonds de concours, on a toujours du mal à connaître l'évolution réelle des crédits. La Cour des comptes a regretté plusieurs fois qu'il soit difficile de déterminer, en particulier dans votre ministère, l'état exact des effectifs. Des indications nous ont été données en réponse à nos questionnaires, mais quelles garanties avons-nous qu'elles soient conformes à la réalité ?

Votre prédécesseur nous avait promis une réforme des rémunérations accessoires avant 2001. Elle prend du retard et nous aimerions vous entendre à son sujet.

Les inspecteurs des finances font un travail remarquable. Je reviens à la charge pour proposer que leurs rapports soient rendus publics. L'inspection des finances pourrait même être saisie par l'Assemblée nationale. Après tout, les rapports des chambres régionales des comptes sont publics. Pourquoi pas ceux de l'inspection des finances ?

On nous parle aussi de modernisation. La mise en place de « l'interlocuteur unique » fait l'objet d'une expérimentation, qui semble toutefois très limitée. Le rythme n'est pas celui qu'attendent les entreprises.

L'INSEE a imaginé une réforme du mode de recensement qui devait faire l'objet d'un projet de loi pour la fin de l'année 2000. De quel ordre est le retard pris ?

Qu'il s'agisse des problèmes de sécurité alimentaire ou de l'usage des nouvelles technologies, l'actualité a montré l'importance du rôle joué par les consommateurs. Or les crédits alloués au dispositif d'appui des consommateurs stagnent depuis 1992. La revue 60 Millions de consommateurs perd des lecteurs. L'effort de l'Etat n'est pas à la hauteur. Le décret en préparation va même réduire la représentation des consommateurs au sein de l'Institut national de la consommation. En outre, les consommateurs qui y siégeront ne seront plus élus mais nommés par le ministère, ce qui pose un problème de représentativité.

Pour améliorer l'efficience de vos services, vous vous efforcez de mettre fin à l'activité bancaire du Trésor public et tout particulièrement à la gestion des comptes de particuliers. Ne faudrait-il pas que la CNP Assurances fasse de même ?

Par ailleurs, fallait-il maintenir les effectifs de votre administration au même niveau que l'année dernière ? La fusion des ministères ainsi que l'apport des nouvelles technologies devraient se traduire par des gains de productivité.

J'ai noté avec satisfaction que le groupe de travail sur la redevance préconisait la suppression de ce prélèvement. Cela fait quatre ans que je défends un amendement visant à supprimer les crédits nécessaires à sa collecte et j'ai bon espoir d'être enfin entendu.

Pourquoi prévoir encore 300 millions pour la révision des bases cadastrales alors que rien ne sera fait en 2001 ?

Je souhaite que vos services fassent un peu de comptabilité analytique afin que les collectivités locales aient précisément connaissance du coût des prélèvements faits pour elles par l'Etat. Nous avons relevé l'année dernière des écarts importants.

Par ailleurs, que compte faire votre ministère en matière de communication ?

Vous n'avez pas de plan stratégique pour la direction des Monnaies et médailles, qui va être confrontée à un problème majeur avec la réduction progressive de la fabrication des euros qui dope son activité depuis deux ans. Il y a déjà dans ce budget une subvention de 19 millions : l'équilibre est donc rompu alors même que la production des euros n'est pas encore terminée. Qu'en sera-t-il demain ? Le personnel, privé de perspectives, est inquiet. Le déficit de l'établissement parisien passe de 50 à 58 millions sans que les causes en soient clairement établies. Du reste, le statut de cet organisme ne doit-il pas évoluer ? Il mène en effet de front une activité de production concurrentielle et une action de muséographie. Le moment semble venu d'une rationalisation alors que la situation nouvelle née de la fabrication des euros touche à son terme.

M. Dominique Baert, rapporteur spécial de la commission des finances sur les comptes spéciaux du Trésor et les entreprises publiques - L'ensemble des comptes spéciaux du Trésor devrait dégager un excédent de recettes par rapport aux dépenses, soit une charge nette négative. Cet excédent provient une fois encore des opérations temporaires. Le principal changement réside dans son volume puisqu'il doit tripler l'an prochain. Comme en 2000, les opérations à caractère définitif des comptes d'affectation spéciale seront pratiquement équilibrées.

Alors qu'en 2000 l'effet de la politique de réduction du nombre de comptes d'affectation spéciale était particulièrement perceptible, l'exercice 2001 sera caractérisé par une augmentation sensible du volume des opérations définitives retracées par les comptes d'affectation spéciale qui, pour l'essentiel, reflètent l'impact de la création du compte numéro 902-33 « Fonds de provisionnement des charges de retraite et de désendettement de l'Etat », alimenté par le produit des redevances UMTS, soit 32,5 milliards en 2001.

Un triplement de l'excédent des opérations temporaires étant prévu, l'excédent des ressources sur les charges est censé atteindre 9,12 milliards. Cette évolution est imputable avant tout aux comptes de prêts à des Etats étrangers, dont l'excédent devrait s'élever à 5,76 milliards.

Le solde du compte d'avance sur le montant des impositions locales croît continûment : 152 millions en 1997, 555 millions en 1998, 4,2 milliards en 1999. Pour 2000, la prévision en loi de finances initiale était de 1,7 milliard mais l'exécution devrait atteindre 3,1 milliards. Cette situation lève de légitimes interrogations. Le solde du compte confirme en effet de manière systématique une dérive en cours d'exercice qui ne peut manquer de laisser craindre aux élus locaux, dont je suis, que l'Etat ne constitue à leur détriment une sorte de « cagnotte » (Murmures sur divers bancs).

Je souhaite également attirer votre attention sur le FNDS, notamment pour ce qui concerne l'utilisation des bénéfices de la coupe du monde de football. Dans un premier temps, une priorité avait été affichée en faveur de petits clubs sportifs. Or, les informations qui me sont parvenues sur l'affectation de ces crédits dans le Nord contredisent largement ce principe.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission des finances - Il en va de même dans les Landes !

M. Dominique Baert, rapporteur spécial - Nous attendons, Monsieur le ministre, des éclaircissements sur ce point.

S'agissant du compte 902-31 relatif à l'indemnisation des emprunts russes, pouvez-vous nous préciser le calendrier et les modalités pratiques de mise en _uvre ?

Pour ce qui concerne le compte relatif à la redevance audiovisuelle, je renouvelle les observations que je formule depuis trois ans : cette redevance est une taxe vétuste, inutile, injuste et inefficace. Il faut s'acheminer sans plus tarder vers sa suppression. Je sais gré à notre rapporteur général, et au Gouvernement de l'avoir accepté, d'avoir fait voter par notre Assemblée l'exonération pour les personnes non imposables de plus de 70 ans mais il faut aller plus loin.

Enfin, je suis une nouvelle fois contraint de déplorer le laconisme des réponses qui m'ont été fournies sur les comptes de commerce du ministère de la défense, alors même que l'existence de nombre d'entre eux semble de moins en moins justifiée. Il en va ainsi du compte n° 904-05 « Constructions navales de la marine militaire ». Eu égard aux difficultés de gestion qu'a connues la DCN, le maintien de sa gestion en compte de commerce est-il justifié ? Il serait donc hautement souhaitable que la commission spéciale chargée d'examiner la propostion de loi organique relative aux lois de finances s'interroge sur la légitimité de certains comptes de commerce.

Bien qu'il soit difficile de faire la synthèse de situations extrêmement diverses, tout semble indiquer que les entreprises publiques poursuivent leur rétablissement financier : forte croissance du chiffre d'affaires, réduction des pertes, désendettement caractérisent l'évolution des comptes pour 1999.

J'en viens aux opérations de cessions de titres et à l'emploi des recettes ainsi dégagées. En 1999, les recettes brutes encaissées par le compte n° 902-24 se sont élevées à 30,5 milliards, en raison notamment de l'opération Aérospatiale-Matra et du versement opéré par la SGGP à l'issue de la cession du GAN. Je profite de ce bilan pour vous demander à nouveau, Monsieur le ministre, de fournir à la représentation nationale un bilan détaillé de la cession du GAN.

Je ne puis par ailleurs me dispenser d'évoquer pour mémoire la très désagréable impression que laisse la privatisation de la Compagnie générale maritime, opérée de gré à gré en 1996. En dépit de sa régularité juridique apparente, elle continue en effet de susciter des questions troublantes dont la presse n'a pas manqué de se faire l'écho. Je n'insisterai pas sur les épisodes rocambolesques qui ont émaillé cette affaire. Il est urgent que vos services contribuent à éclaircir ce dossier en répondant à toutes les interrogations qu'il a soulevées.

Revenons-en au compte 902-24 dont les recettes pour l'exercice en cours s'élèvent à 8,8 milliards, du fait notamment de la constitution d'EADS. Pour 2001, elles devraient atteindre 26,5 milliards du fait de la réorganisation du capital de Thomson Multimédia et de la cession de la Banque Hervet. Parmi les catégories de dépenses autorisées pour ce compte, les dotations en capital sont prépondérantes. En 1999, sur les 32,3 milliards de dépenses près de 20 milliards ont ainsi été consacrés aux dotations en capital, contre 11,8 milliards dépensés en achats de titres, surtout liées à la recomposition du capital des industries de défense. En 2000, 7,2 milliards ont été versés au titre des dotations en capital, pour l'essentiel à RFF. En 2001, les principales dotations en capital concerneront encore RFF et les défaisances financières. RFF et l'EPFR apparaissent donc depuis plusieurs exercices comme les principaux destinataires des dotations en capital financées par des recettes de cession de titres. Les dépenses du compte n° 902-24 comprennent également une partie des dépenses relatives aux cessions de titres sur lesquelles je partage l'analyse de la Cour des comptes qui souligne leur manque de transparence. Nonobstant les réponses qui m'ont été fournies, force est de constater que la diversité des lignes budgétaires où s'inscrivent ces frais nuit à leur appréciation.

Enfin, conformément aux engagements pris lors de la discussion d'une proposition de constitution d'une commission d'enquête sur le Consortium de réalisation, une partie substantielle de mon rapport écrit s'attache à l'analyse des données que j'ai recueillies auprès du CDR. A ce titre, il apparaît que les défauts initiaux de la conception du CDR sont largement responsables des anomalies relevées dans la gestion. Certaines interférences de nature politique ont également pesé sur les résultats du Consortium, qu'il s'agisse de la cession de la MGM, d'AOM ou d'Artemis. Du reste, la question de l'avenir du CDR reste posée, tant il apparaît que la politique dite de compactage a montré ses faiblesses. Une réforme de fond est désormais nécessaire. C'est pourquoi, je serais reconnaissant au gouvernement de nous faire part de ses réflexions sur ce sujet d'importance.

M. Loïc Bouvard, rapporteur pour avis de la commission de la défense sur les crédits des comptes spéciaux du Trésor - Deux catégories de comptes spéciaux du Trésor intéressent le ministère de la défense : les quatre comptes de commerce qu'il gère directement et le compte d'affectation spéciale relatif aux « produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés », qui reflète la situation du secteur public de l'armement. La présentation d'un avis budgétaire sur l'ensemble de ces comptes permet de dresser un bilan des résultats des services industriels et des entreprises publiques de l'armement, ainsi que des réformes conduites pour en améliorer la compétitivité.

De profonds changements ont affecté ce secteur depuis deux ans : fusion d'Aérospatiale avec Matra Haute Technologie -puis avec DASA et CASA-, modernisation de la DCN, dissociée de la DGA, assainissement de la situation financière de GIAT Industries, réforme du service de la maintenance aéronautique.

Les choix de réforme du secteur public de l'armement peuvent conforter l'Europe de la défense. A cet égard, la création d'EADS constitue une première étape qui en appelle une autre dans les secteurs de la construction navale militaire et de l'armement terrestre.

Le statut de compte de commerce ne semble plus pertinent pour des activités ouvertes sur l'international. Ainsi, la DCN doit être transformée d'une manière plus ambitieuse que celle que semble privilégier le gouvernement. Les ajustements statutaires et les dérogations au code des marchés publics tardent et restent insuffisantes. Quelle suite le gouvernement entend-il donner à ma proposition de transformer DCN en société de capitaux d'ici à 2003 ? Une telle évolution permettrait de se rapprocher de Fincantiéri, HDW ou Bazan, tout en affranchissant DCN de ses handicaps structurels pour obtenir des contrats à l'export. Des partenariats européens sont tout aussi nécessaires pour GIAT Industries, même si la situation de la société nationale est préoccupante. Je rappelle à cet égard qu'elle a été recapitalisée à hauteur de 17,5 milliards depuis sa création, et que, si aucun transfert de fonds publics n'est intervenu depuis 1999, il est patent que de nouveaux besoins devront être couverts à hauteur de 2 milliards par le compte d'affectation spéciale 902-24 d'ici à l'automne 2001.

Malgré ces présentes difficultés, GIAT Industries reste un des fleurons européens de l'armement terrestre. Une association avec RVI a du reste été nouée et la filiale commune qui va en résulter permettra de restructurer l'ensemble de l'industrie française des blindés légers. Dès lors, pouvez-vous Monsieur le Ministre, nous indiquer si l'Etat envisage d'ouvrir le capital de l'entreprise pour favoriser des prises de participation d'éventuels partenaires européens et l'aider à faire face à la concurrence américaine ?

Je porte un jugement nuancé sur la pertinence et le mode de fonctionnement des comptes spéciaux du Trésor intéressant le ministère de la défense. Si on ne peut qu'approuver les modalités patrimoniales de la création d'EADS, les hypothèques qui continuent de peser sur l'avenir de la société GIAT Industries suscitent les plus vives inquiétudes.

S'agissant des comptes de commerce du ministère de la défense, le régime juridique actuel s'avère acceptable pour trois d'entre eux mais franchement inadapté pour la DCN : une transformation en société avec ouverture du capital semble désormais inévitable et il convient de l'engager rapidement pour éviter sa marginalisation.

En dépit de ces observations, que j'ai portées à son attention, la commission de la défense a émis un avis favorable à l'adoption des dispositions du projet de loi de finances pour 2001 relatives aux comptes spéciaux du Trésor.

M. Daniel Feurtet, rapporteur spécial de la commission des finances pour les taxes parafiscales.- Le produit des taxes parafiscales pour 2001 est estimé à 4,3 milliards, soit une baisse de 4,5 %. Cela n'est pas dû à la baisse du nombre des taxes, puisqu'il y en aura 44 au lieu de 43, la taxe sur certaines huiles minérales ayant été supprimée, tandis que deux taxes nouvelles apparaissent, la taxe par animal à tirer, qui doit servir à indemniser les dégâts causés par le gibier, et une taxe sur le lin et le chanvre pour le développement agricole. Au sujet de ces deux nouvelles taxes, les décrets ne sont pas encore publiés : pourrait-on nous préciser leur taux et leurs modalités de recouvrement ?

Ce qui diminue cette année encore, c'est le taux des taxes, notamment pour les entreprises mécaniques : en contrepartie, les centres techniques recevront une dotation budgétaire de 413 millions de francs. Le mouvement de budgétisation de la parafiscalité se poursuit donc. Cela ne va pas sans susciter quelques inquiétudes, quant à la pérennité de l'affectation, et au risque de l'assimilation à une aide sectorielle contraire à la réglementation européenne. L'Etat peut-il s'engager pour l'avenir ?

M. Henri Emmanuelli, président de la commission des finances - Je propose que les orateurs des groupes interviennent à présent.

M. Jacques Guyard - Nous apprécions la relance de la modernisation du ministère, ainsi que la clarification budgétaire et la sincérité des comptes. J'approuve l'observation de M. Baert, sur la redevance télé. Par ailleurs, au vu des insuffisances constatées en 1999, ne faudrait-il pas revoir les modalités du recensement ? Enfin, quel sera l'impact de l'évolution des taux sur le service de la dette et l'épargne administrée ? Au rythme de l'évolution actuelle, les 9 milliards inscrits suffiront-ils à financer les primes d'épargne-logement ?

M. Jean-Jacques Jégou - Je ne reviens pas sur nombre d'observations pertinentes, sur lesquelles j'attends avec impatience des réponses mais j'insiste sur l'impérieuse nécessité de faire évoluer la discussion budgétaire. Le groupe UDF votera contre ces crédits.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission des finances - Vous m'en voyez vraiment désolé.

M. Jean Vila - Je m'interroge sur l'avenir des Monnaies et Médailles. A Pessac, comme au quai Conti, j'ai trouvé des salariés inquiets. Le projet d'entreprise « Monnaie 2000 » devait relever un défi industriel, celui de la production des pièces du système euro. La réputation d'excellence de la Monnaie n'est plus à faire, mais il fallait lui accorder des moyens matériels et humains. Or, on a fermé à Pessac les secteurs laminoir et fonderie, qui assuraient l'autonomie de l'établissement. Cette fermeture, annoncée comme provisoire, risque de perdurer, ce qui réduirait l'usine de Pessac à un simple atelier de frappe monétaire.

Battre monnaie devrait pourtant rester du ressort de la souveraineté nationale. Or, si l'administration des Monnaies et Médailles demeure une direction du ministère, un flou inquiétant entoure la stratégie et les moyens. Ainsi la présentation de « l'agrégat » a changé, distinguant les activités industrielles et commerciales, d'une part, et, d'autre part, les missions régaliennes -lutte contre la contrefaçon ou conservation des collections. Cela risque d'ouvrir la voie à une attaque statutaire contre ce grand service public. Voilà pourquoi nous voterons contre le budget des Monnaies et Médailles.

M. Laurent Fabius, ministre de l'économie et des finances et de l'industrie- Je remercie tous les intervenants. La charge de la dette est lourde, en effet, Monsieur Carcenac, et je n'ai jamais compris ce débat imbécile sur la cagnotte, quand il y a 6 500 milliards de dette et 200 milliards d'intérêts annuels à payer. On a réussi à faire croire à beaucoup de Français que l'Etat est assis sur un tas d'or, ce qui est erroné, et en tout cas inconnu du ministre des finances. Pour réduire la charge de la dette, il n'y a pas de mystère, il faut réduire le déficit. Dans l'immédiat, cependant, nous avons commencé à racheter des titres, pour un montant d'environ 10 milliards d'euros. Il faudra sans doute aller plus loin, avec un portefeuille swap, nous en reparlerons.

Vous m'avez interrogé sur l'Agence de la dette. De nombreux Etats européens ont en effet confié à une agence la gestion de leur dette : les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni. L'Allemagne elle-même envisage de le faire en 2002. L'Agence de la dette sera un service à compétence nationale, rattaché à la direction du Trésor, et elle pourra recruter du personnel spécialisé. Pour éviter toute ambiguïté, je souligne que l'Agence devra fonctionner dans l'esprit du service public et, donc, rendre des comptes ; elle devra aussi être plus efficace que ne l'est le mécanisme en vigueur.

M. Carcenac a ensuite abordé la difficile question du régime de retraite des fonctionnaires. Vous le savez, le Gouvernement a décidé la création du fonds de réserve pour les retraites, destiné à consolider le système de retraite par répartition. L'évolution démographique est cependant telle que le financement des pensions ne sera pas couvert à l'horizon 2020, on le sait. Une solution doit donc être trouvée, et le Conseil d'orientation des retraites, nouvellement installé, a engagé une concertation à cette fin. Il remettra ses premières propositions au Gouvernement l'année prochaine, et je ne préjugerai pas des difficiles décisions qui devront être prises. En tout état de cause, la concertation doit être la règle. Il faudra agir progressivement, et s'adapter à l'évolution économique et démographique prévisible du pays. Les chiffres, dans leur brutalité, disent la réalité du problème. Il faudra donc trancher dans le respect des droits des fonctionnaires.

M. Carcenac s'est encore inquiété du traitement par la France de la dette des pays pauvres. Certaines organisations non gouvernementales, qui souhaiteraient une annulation inconditionnelle et immédiate de la dette, déplorent la lenteur du processus. C'est une approche généreuse, qui méconnaît cependant l'importance de l'effort consenti par la France, qui est de 7,4 milliards d'euros. D'autre part, le Gouvernement est fortement attaché à ce que les économies ainsi réalisées par les pays concernés soient tout entières consacrées à la réduction de la pauvreté et à la réalisation d'objectifs sociaux. Dans toutes les enceintes internationales, la France fait entendre sa voix pour pousser au desserrement de la dette des pays pauvres. C'est le cas, notamment, au Club de Paris, dont elle assure la présidence. Au nombre des 11 pays pauvres considérés comme très endettés, 7 ont déjà obtenu un très large accord, et les 4 autres sont en bonne voie de l'obtenir. On ajoutera que l'annulation de la dette ne doit pas avoir pour conséquence d'interdire tout prêt futur, ce qui reviendrait à soigner le mal par le mal.

M. Chabert s'est, pour sa part, inquiété de la refondation des régimes indemnitaires. Il a convenu qu'un gros effort avait été accompli pour budgétiser les rémunérations accessoires. Il convient, à présent, de donner un fondement juridique à ces opérations. Un avant-projet de texte a été élaboré ; la version définitive devrait être publiée au cours du premier trimestre 2001.

M. Chabert s'est interrogé sur l'évolution réelle des crédits du ministère. Des discussions techniques ont eu lieu à ce sujet, et je dispose d'une fiche dont, je suis certain, vous apprécierez toutes les subtilités (Sourires). Plus sérieusement, je ne doute pas que vous tomberez d'accord avec les estimations de mes services.

S'agissant de l'interlocuteur fiscal unique, les choses avancent, pour le plus grand bien des usagers et avec l'accord des agents. Certains se gaussent du mécanisme d'évaluation. Je considère, pour ma part, qu'il est d'une utilité particulière, car il faut montrer qu'il n'y a pas de piège, mais aussi rectifier les erreurs, si elles existent.

Plusieurs orateurs ont dit souhaiter la réforme des modalités de recensement de la population. Les moyens nécessaires devraient être trouvés dans le projet portant DDOF.

Le sort de l'INC a été évoqué. Une réforme est engagée, que le Gouvernement souhaite mener à son terme pour donner un nouvel élan à un établissement dont il mesure l'utilité.

S'agissant de la redevance, j'ai noté qu'à l'instar de votre rapporteur général, la grande majorité des orateurs était favorable à sa suppression. Vous le savez, cette disposition a été très sérieusement envisagée par le Gouvernement qui ne l'a finalement pas retenue. Il a notamment estimé qu'une telle suppression pourrait être comprise comme une réforme technique destinée à masquer un coup porté au service public de l'audiovisuel lui-même. Cela ne signifie pas que le problème n'existe pas.

Plusieurs orateurs ont parlé des monnaies et médailles. La difficulté est réelle. L'institution de la monnaie unique conduit à des interrogations sur la fonction future de cette administration. Deux études ont donc été lancées ; la première porte sur l'évolution prévisible du marché à partir de 2001 ; la seconde traite de la faisabilité de l'investissement de Pessac, en tenant compte des contraintes économiques et sociales. Ces deux rapports me seront remis dans les prochaines semaines. Je suis à votre disposition pour en discuter les conclusions avec vous. Dans l'intervalle, vous aurez constaté que le projet de budget pour 2001 prévoit le maintien des effectifs, ainsi que mon prédécesseur s'y était engagé.

M. Baert m'a interrogé sur les emprunts russes. Je tiens à sa disposition une note qui lui donnera les précisions nécessaires. Il s'est par ailleurs dit surpris des fluctuations, pour lui incompréhensibles, du compte d'avance de l'imposition locale. L'excédent dont il a fait état s'explique par un taux de recouvrement supérieur au taux d'émission, mais il n'est que temporaire. En régime de croisière, le solde annuel de ce compte est déficitaire.

M. Baert a, lui aussi, parlé de l'éventuelle suppression de la redevance, éventualité écartée cette année comme je l'ai dit, mais il a également exprimé l'idée de l'alléger. Je ne relancerai pas le débat qui a eu lieu à ce sujet lors de l'examen de la première partie de la loi de finances. En revanche, je souhaite vous rendre attentifs au fait que la France doit surveiller l'évolution de ses dépenses pour pouvoir maintenir le cap qu'elle s'est fixé. Il n'y a, dans cette approche, aucun dogmatisme, mais la constatation simple d'une relation automatique entre le niveau de la croissance, celui de l'emploi et celui des déficits. Si ces derniers ne baissent pas autant qu'ils le devraient, la conséquence mécanique sera que les taux d'intérêt grimperont, ce qui aura un impact négatif sur le taux d'emploi.

Ce n'est pas se montrer exagérément orthodoxe que de dire que toute aggravation de l'endettement doit être assumée ; ne pas le faire, ce serait reporter la charge sur les générations futures. Sans tomber dans le rigorisme, le Gouvernement entend donc maintenir le cap qu'il s'est fixé, sans l'infléchir.

M. Baert a évoqué la situation de la Compagnie générale maritime. Si des soupçons existent qui donnent à penser qu'une investigation doit avoir lieu, elle aura lieu. La transparence doit être la règle, là comme ailleurs, et il n'y a aucune raison de ne pas faire la lumière sur des opérations passées.

De même, il est tout à fait légitime que le Parlement analyse le dossier de la CDR. L'objectif donné à cette structure est de défendre les intérêts des contribuables par tous les moyens, y compris par les moyens judiciaires. Le Gouvernement tient à ce que les quelques actifs et les nombreux contentieux regroupés au sein de cette entité soient gérés au mieux. Son organisation sera adaptée à cette saine gestion, car les enjeux résiduels sont loin d'être négligeables. Je sais que M. Baert y est très attentif.

Il convient par ailleurs de chercher à réduire le besoin de financement de l'EPFR et de RFF. L'État doit assumer ses engagements soit par des cessions de titres, soit par des dotations budgétaires.

M. Bouvard m'a interrogé sur la DCN. Cette dernière a cessé en avril 2000 d'être un service du ministère de la défense. Une charte de gestion regroupe les nouvelles règles. La DCN doit désormais se comporter comme une entreprise qui connaît ses coûts. Ses relations avec l'Etat client sont maintenant fondées sur le principe de la contractualisation. Un conseil stratégique a été créé, un nouveau système de gestion est lancé, ainsi qu'un plan de réduction des coûts. Une alliance avec Thomson-CSF est en préparation. Le Gouvernement a passé à la DCN plusieurs commandes importantes dont deux frégate Horizon, en coopération avec l'Italie, qui en a aussi commandé deux. L'entreprise a aussi remporté un contrat de frégate à Singapour. Une transformation de son statut peut être envisagée, afin de lui permettre de participer à des alliances industrielles, mais le statut public de ses agents devra être préservé.

M. Loïc Bouvard, rapporteur pour avis - Tout à fait !

M. le Ministre - Nous essayons, Monsieur Feurtet, de clarifier les taxes parafiscales. La taxe destinée à financer l'indemnisation des dégâts du gibier a été requalifiée. Elle était versée jusqu'ici à l'Office national de la chasse, il faudra tirer les conséquences de cette requalification.

Pour la taxe concernant le lin, je crois que Mme Parly peut vous apporter une précision.

Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget - Le décret doit être publié avant le 31 décembre.

M. le Ministre - Sur la question de la budgétisation, on est un peu partagé car, M. Feurtet a raison, la non budgétisation offre une certaine sécurité aux organismes bénéficiaires. Je crois qu'il ne faut pas se montrer trop doctrinal mais privilégier l'efficacité.

Telles sont les réponses que je souhaitais apporter. Mme Parly et moi-même nous tenons à votre disposition pour d'éventuels compléments. Je vous remercie chaleureusement pour cette séance. J'indique enfin à votre Président que si nous avons tardé à vous apporter quelques réponses, la seule façon de s'en excuser est de faire en sorte que cela ne se reproduise pas.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission des finances - Je vous remercie.

Je rappelle que le vote des crédits aura lieu à l'issue de la commission élargie.

COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES

Audition de M. François Huwart,
Secrétaire d'Etat au commerce extérieur

PRÉSIDENCE de M. André LAJOINIE

M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur - Ce rendez-vous annuel est pour nous l'occasion de faire un bilan de l'insertion de l'économie française dans l'économie mondialisée. Mais je commencerai par quelques éléments relatifs au contexte économique.

L'activité mondiale a connu au premier semestre 2000 un rythme de croissance très soutenu. Tout en restant dynamique, elle semble se ralentir au second semestre, sous l'effet de la hausse du prix du pétrole et du resserrement des conditions monétaires. Les échanges internationaux devraient augmenter de plus de 10 % en volume cette année, soit deux fois plus qu'en 1999.

C'est dans cette perspective que s'inscrit l'évolution de notre commerce extérieur. Après un fléchissement en juillet nos échanges sont revenus en août aux tendances dynamiques du début de l'année. Tirées par leur compétitivité, nos entreprises vont exporter pour plus de 2 000 milliards de marchandises, c'est une performance sans précédent. Pour les huit premiers mois de l'année, les exportations sont en hausse de 14 %. Le léger déficit du mois d'août a, semble-t-il, occulté l'envol des exportations qui ont dépassé 180 milliards.

Les importations ont encore été plus dynamiques, en augmentation de près de 20 % au cours de la même période. La hausse du prix du pétrole est une explication puisque la facture énergétique s'est alourdie de 57 milliards, et les prix du brut devraient se maintenir en raison de la grande réactivité du marché, des tensions politiques au Moyen-Orient, de la spéculation, de la faiblesse des stocks mondiaux. Mais la facture pétrolière n'explique pas tout : le niveau élevé des importations traduit la vigueur de la demande intérieure. L'importance des achats de biens intermédiaires et d'équipements montre que les entreprises françaises investissent pour produire davantage. Ces importations sont donc nos exportations de demain.

L'excédent cumulé s'élève donc, pour les huit premiers mois, à 23,7 milliards contre 79,6 pour la même période en 1999. Le prix du pétrole devrait continuer à peser sur notre solde dans les mois à venir puisque la facture énergétique pourrait s'alourdir de 70 milliards pour toute l'année. Notre excédent sera donc en retrait par rapport aux 109 milliards de l'an passé.

Mais, au-delà de l'excédent, ce qui importe pour la croissance et pour l'emploi, c'est surtout le volume des échanges. Or ce dernier montre que la machine économique tourne à plein régime. Les schémas mercantilistes traditionnels ne correspondent plus à la réalité d'une économie ouverte sur le monde, pour les biens comme pour les services. La France est d'ailleurs, pour ces derniers, le troisième exportateur mondial. Nos exportations ont d'ailleurs augmenté de 8 % au premier semestre, avec un solde positif de 71 milliards.

L'appréciation du dollar a sans doute joué un rôle important, en améliorant notre compétitivité, mais ce n'est pas l'essentiel puisque les deux tiers de nos exportations sont destinés à l'Union européenne. Le facteur déterminant est donc bien la compétitivité de nos produits et de nos entreprises.

La croissance mondiale devrait demeurer soutenue, autour de 4 %. Dans ces conditions, l'économie française dispose de nombreux atouts pour continuer à bénéficier de sa bonne insertion dans le commerce mondial.

J'en viens au budget du commerce extérieur. Soutenir nos entreprises dans la conquête de marchés hors de nos frontières, défendre leurs intérêts au sein de l'économie mondialisée, telles restent bien sûr les priorités de l'action publique. Le soutien passe aussi par la recherche de financements appropriés, même si cet outil n'est plus aussi important car la mondialisation influe sur le rôle de l'Etat. Notre action prend donc des formes nouvelles : à l'Etat interventionniste se substitue l'Etat régulateur. Il ne s'agit pas seulement pour nous de soutenir l'exportation, mais aussi de contribuer à l'édiction et à l'application des règles du commerce mondial, à l'OMC et à l'OCDE, et de fournir aux entreprises un service d'intelligence économique et de prestations sur mesure.

Les crédits de paiement sont comparables à ceux de l'année dernière. Si l'on exclut la non reconduction des crédits destinés au pavillon français de l'exposition universelle de Hanovre, la diminution n'est pas de 4 mais de 0,7 %.

Les autorisations de programme et les dépenses ordinaires diminuent, elles, de 32 %. Je comprends que cela surprenne, mais c'est en fait une illusion d'optique car les moyens disponibles pour les entreprises seront aussi importants que les années précédentes. En effet, les reports de crédits expliquent très largement cette diminution. Ils sont un signe de la bonne gestion des fonds publics dont nous avons la responsabilité.

Cette rigueur se retrouve dans les procédures d'intervention. Ainsi les prêts du trésor diminuent de 450 millions puisqu'il devrait rester 320 millions disponibles sur les 2,65 milliards mobilisés en 2000.

Pour les crédits de paiement, les besoins pour 2000 seront couverts grâce aux reports et à une diminution des provisions constituées auprès des organismes gestionnaires.

Le premier point qui mérite une attention particulière est la poursuite de la modernisation de notre réseau pour le rendre plus réactif. La Direction des relations économiques extérieures exerce aujourd'hui trois métiers distincts : les financements, l'information économique et l'appui commercial, le suivi des négociations commerciales internationales. Je vous ai présenté l'an dernier le contrat d'objectifs et de moyens qu'elle a signé avec la direction du budget. Désormais entré en vigueur, ce contrat permet une stabilisation des crédits et une gestion simplifiée et très souple. La DREE a ainsi pu gérer au mieux les difficultés qu'a entraînées le glissement de l'euro. Les crédits du réseau sont stables.

Alors que la réforme de l'Etat est en marche, je veux souligner le rôle précurseur de la DREE, qui est par ailleurs engagée dans une démarche qualité puisque deux postes d'expansion et une direction régionale sont aujourd'hui certifiés ISO 9001.

La DREE est entrée dans la nouvelle économie : forte de 112 sites, elle propose 90 000 documents en consultation. Un intranet a été mis en place et son extranet constitue un véritable service aux entreprises. L'utilisation des nouvelles technologies permet aussi d'améliorer la gestion de cette administration centrale.

Une dotation supplémentaire de 25 millions est allouée aux organismes de soutien que sont le Centre français du commerce extérieur et le CFME-ACTIM. Elle s'ajoute aux crédits des contrats de plan. Le CFME-ACTIM va perdre les ressources qu'il tirait de la gestion des volontaires du service national en entreprise. La nouvelle procédure étant en période de rodage, il n'est pas certain qu'elle compense cette perte de recettes. Compte tenu de l'intérêt du volontariat pour les jeunes comme pour les entreprises, un effort était nécessaire pour en assurer la promotion. Un crédit de 6 millions est prévu à cet effet. Le ministère des affaires étrangères y contribuera lui aussi.

J'ai souhaité que, dans la conjoncture actuelle, les subventions aux PME augmentent. Une dotation complémentaire de 11 millions s'ajoutera donc aux 116 millions de l'année dernière et aux 6 millions dont je viens de parler.

Deux bureaux de presse supplémentaires seront ouverts l'année prochaine. Le dispositif sera étendu au portugais et au russe.

Le CFCE doit relever le défi des nouvelles technologies, moderniser ses outils et revoir ses méthodes. Alors que sa dotation devait baisser pour s'établir à 120 millions, j'ai souhaité lui attribuer 8 millions supplémentaires pour financer sa modernisation.

J'ai demandé aux dirigeants de ces deux organismes d'appui de procéder aux études nécessaires pour proposer leurs prestations via Internet.

Le volet commerce extérieur des contrats de plan Etat-régions se caractérise par la hausse des autorisations de programme, qui passent de 45 à 62 millions. Des programmes d'action régionale de développement international ont déjà été signé dans les régions Centre et Midi-Pyrénées. D'autres le seront prochainement dans le Limousin, le Nord-Pas-de-Calais, la région Poitou-Charentes et en Ile-de-France. Cette politique porte donc ses fruits. Les acteurs locaux sauront tirer le meilleur parti des moyens dégagés.

Je souhaite que les PME continuent de disposer des mêmes facilités de financement pour leur internationalisation. La réforme de l'assurance prospection va dans ce sens. La procédure est considérablement simplifiée, puisque un contrat unique regroupera les trois produits aujourd'hui proposés. Le chiffre d'affaires sera désormais le seul critère retenu. Le crédit de 180 millions inscrit dans le projet de loi de finances n'est qu'une évaluation. Compte tenu des reports, il devrait être suffisant.

Je suis à votre disposition pour toutes les précisions que vous pourriez souhaiter.

M. Gilles Carrez, rapporteur spécial de la commission des finances pour le commerce extérieur - Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne partage pas votre optimisme. Depuis trois ans, le solde de notre commerce extérieur se dégrade. Il était de 157 milliards en 1997. Il est passé à 142 milliards en 1998, 111 milliards en 1999 et ne sera sans doute que de 40 milliards à la fin de l'an 2000. Cette évolution est certes liée au dynamisme de nos importations ainsi qu'à l'alourdissement de la facture énergétique. Il n'en reste pas moins que nos exportations fléchissent. Les deux tiers de notre commerce extérieur se font avec les autres pays de l'Union européenne : ce qui était hier une force devient une faiblesse, l'Asie et l'Amérique du Nord représentant aujourd'hui de plus forts potentiels. Nos parts de marché dans le monde se dégradent.

Dans ce contexte, comment analyser l'évolution du budget du commerce extérieur ? En 1999, du temps de votre prédécesseur, les bons résultats des années 1997 et 1998 avaient servi à justifier un brusque décrochage : les autorisations de programme avaient reculé de 10 % et les crédits de paiement de 47 %. Nicolas Forissier et moi-même nous en étions d'ailleurs inquiétés. Dans le budget pour l'année 2000, les autorisations de programme avaient encore diminué de 11 %. On aurait pu penser que le budget pour 2001 augmenterait. Au contraire, les autorisations de programme diminuent de 32 % et les crédits de paiement de 4 %.

S'agissant des services d'expansion économique, la dotation globale contractuelle est en principe une bonne innovation : elle rend possible la fongibilité des crédits ainsi qu'une programmation pluriannuelle des dépenses. J'en viens pourtant à me demander s'il ne s'agit pas d'un marché de dupes. Cette administration, la seule qui ait mis en place ce système, a perdu 30 % de ses effectifs en dix ans. On lui a demandé de tels efforts de modernisation que ses gains de productivité ont sans doute atteint leurs limites.

Le CFCE va recevoir une dotation de 128 millions. Cependant, sur ce total, 8 millions sont d'ores et déjà affectés à l'exploitation des nouvelles technologies. Or les recettes commerciales du CFCE, liées aux prestations des postes, vont diminuer. La dotation ne compensera pas ce manque à gagner et le CFCE risque de se retrouver en situation de déficit structurel.

La situation du CFME-ACTIM est moins préoccupante. Cet organisme va bénéficier d'une dotation supplémentaire de 11 millions, dont 6 millions pour les foires-expositions. Pensez-vous que 5 millions suffiront pour compenser les pertes de recettes liées à la baisse des effectifs du CSNE ?

On ne peut que s'alarmer de l'évolution des crédits destinés à l'assurance prospection. De 400 millions pour 1998, ils sont tombés à 265 millions pour 1999. Vous aviez accepté de les relever à 290 millions pour 2000. Ils tombent à 180 millions pour 2001. Entre le ministère des finances et les entreprises, c'est un dialogue de sourds. L'administration dit qu'elle ne reçoit pas de dossiers ; les entreprises expliquent que les critères sont devenus si sélectifs qu'elles renoncent à en déposer. Les 180 millions prévus seront peut-être suffisants, mais c'est parce que la procédure recule. On n'a signé que 486 nouveaux contrats en 1999, contre 1 750 en 1998 et près de 2 100 en 1997. L'encours est inférieur à 6 000 contrats, alors qu'il était de 6 500 contrats en 1997. La procédure ne serait-elle pas devenue trop complexe ?

Le FASEP-Garantie a été mis en place en 1999 pour aider les PME. Seulement douze dossiers ont été agréés. On patine, même si de gros efforts ont été consentis dans le cadre des contrats de plan. Les acteurs régionaux sauront sans doute mieux que d'autres évaluer les besoins des PME.

Alors qu'on avait consacré l'année dernière 400 millions au soutien aux grands contrats, aucune dotation n'est prévue pour le système de stabilisation des taux d'intérêt géré par Natexis. Or tout indique que les taux d'intérêt vont augmenter. Quant à la procédure de garantie du risque économique, elle ne bénéficie que de 250 millions au lieu de 450 millions en 1999 et 400 en 1998.

Ce budget, vous l'avez reconnu Monsieur le secrétaire d'Etat, est en recul par rapport à celui de l'année dernière. Il y avait déjà eu un important décrochage l'année précédente. Je me demande si l'effort de notre pays en faveur des exportations est à la hauteur des enjeux.

M. Marc Reymann, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères - Depuis l'excédent record de 163 milliards en 1997, le solde commercial de la France ne cesse de se tasser : 145 milliards en 1998, 112,5 milliards en 1999 et 70 milliards en 2000.

Cependant, la moitié de la baisse de notre excédent entre 1998 et 1999 résulte de l'alourdissement de la facture énergétique : le déficit énergétique s'est creusé de 15,6 milliards en 1999, le solde commercial se dégradant de 32,5 milliards. En 2000, ce phénomène va s'accentuer, la facture énergétique devant augmenter de 60 milliards. Le solde commercial devrait quant à lui s'améliorer.

La baisse de l'euro a aggravé les effets de l'augmentation du prix du baril, le marché des hydrocarbures utilisant le dollar comme unité de compte.

Au premier semestre 2000, l'augmentation des importations s'est accompagnée d'une augmentation de 5,9 % des exportations. Cette progression s'explique en partie par la vigueur de la demande mondiale. Si la baisse de l'euro a eu des effets négatifs sur la valeur de nos importations, elle nous a permis d'enregistrer des gains de compétitivité avec l'appréciation des monnaies anglo-saxonnes. Mais la part de marché des entreprises françaises n'a guère augmenté et elle a même régressé en valeur.

En effet, les entreprises n'ont pas su profiter à plein de la demande mondiale en raison de tensions sur leurs capacités de production. De véritables pénuries de main-d'_uvre peuvent être observées dans certains secteurs et l'entrée en vigueur des 35 heures dans les PME va aggraver la situation.

Dans ce contexte, il faut regretter que la baisse des crédits du commerce extérieur, commencée en 1992, se poursuive encore cette année.

Il n'est cependant pas possible de procéder à une comparaison ligne à ligne, des éléments nouveaux devant être pris en compte. Ainsi, certains crédits n'ont pas à être reconduits, comme les 115 millions prévus l'année dernière pour financer la participation de la France à l'exposition universelle de Hanovre. De même, il n'est pas besoin de prévoir des crédits de bonification d'intérêts pour 2001, compte tenu du niveau des taux d'intérêt et de la trésorerie de Natexis.

La stagnation des crédits alloués aux réseaux économiques à l'étranger s'explique, et il y a tout lieu de s'en réjouir, par la poursuite du processus de programmation pluriannuelle dans lequel s'est engagé la DREE avec la direction du budget depuis 1991. Ainsi en janvier dernier, un contrat d'objectifs de moyens a été conclu pour la période 2000-2002. Les plans précédents, fondés sur le principe d'une baisse des effectifs en échange d'une enveloppe budgétaire stable, ont permis une baisse de 20 % des effectifs sans nuire à la qualité du service. Le nouveau contrat est particulièrement novateur puisqu'il met en place une dotation globale contractuelle qui permet une gestion plus souple. Pouvez-vous, Monsieur le ministre, nous confirmer que cette rationalisation ne s'exercera pas au détriment de la nécessaire extension du réseau de l'expansion économique dans les régions émergentes ?

La baisse des aides à l'exportation pour 2001 -légère en crédits de paiement (moins 3 %), substantielle en autorisations de programmes (moins 20 %)- nous inquiète tout particulièrement. Certes, cette réduction ne devrait pas se traduire par une baisse des aides financières à l'exportation, eu égard à la sous-consommation chronique des crédits afférents. Cependant, plutôt que d'entériner ainsi la réalité, pourquoi ne pas inciter les entreprises à utiliser davantage les procédures existantes ? Que comptez-vous faire, Monsieur le ministre, pour que les crédits d'aide à l'exportation alloués à votre département soient davantage consommés ?

Après la baisse intervenue en 2000, la progression de 8,3 % des crédits dévolus aux organismes d'appui au commerce extérieur doit être saluée. Le CFME-ACTIM reçoit ainsi une dotation en hausse de 9 % pour faire face à la baisse progressive des ressources qu'il tirait de la gestion de la procédure CSNE et pour relever le taux d'aide aux PME, lors de leur participation à des salons internationaux.

L'augmentation des dotations au Centre français du commerce extérieur est plus modeste mais elle est concentrée sur un effort particulièrement bien venu en faveur des nouvelles technologies de l'information et de la communication.

Au-delà de l'augmentation de leurs moyens, l'efficacité des organismes d'appui au commerce extérieur tient aussi à la réforme de leur structure. Ainsi, le processus de rapprochement du CFME-ACTIM avec le CFCE doit être poursuivi car il sera bénéfique pour les entreprises.

L'année 2000 a vu la création du Centre d'information sur le volontariat international, qui sera doté de 6 millions de subventions, pour permettre au CFME-ACTIM d'assurer sa mission de promotion du dispositif de volontariat international.

Quelques mots de conclusion sur l'état des négociations commerciales multilatérales : un an après l'échec de Seattle, la position française sur le besoin d'un cycle global combinant la poursuite de l'ouverture commerciale et du renforcement des règles n'a pas varié. Pour l'heure les négociations en cours s'inscrivent dans le cadre des engagements de Marrakech sur « l'agenda incorporé » de l'OMC. Ils concernent en premier lieu l'agriculture, les services et le textile ; en l'absence de cycle global, les résultats ne peuvent qu'être limités.

Le principal événement de l'année qui vient de s'écouler tient aux progrès réalisés dans le processus d'adhésion de la Chine à l'OMC. Suite aux accords bilatéraux conclus avec les Etats-Unis et avec l'Union européenne, la voie semble libre pour une adhésion définitive, qui pourrait intervenir avant la fin de cette année. Cette échéance, Monsieur le ministre, vous semble-t-elle toujours d'actualité ? Il faut en effet être conscient que l'entrée de la Chine à l'OMC n'ira pas de soi, du fait notamment de son refus d'aborder des sujets autres que proprement commerciaux, tels que des clauses sociales ou relatives à l'environnement.

Si ce budget s'inscrit dans une certaine continuité, il ne révèle pas une politique ambitieuse de soutien à l'exportation, alors que l'excédent commercial de notre pays s'est considérablement réduit au cours de cette année. Nos entreprises ont trop peu profité du regain de compétitivité lié à la hausse du dollar pour conquérir de nouveaux marchés. Il semble donc que le dispositif de soutien au commerce extérieur ne soit pas tout à fait adapté aux besoins des entreprises et qu'elles ne le connaissent pas suffisamment.

Permettez-moi, Monsieur le ministre, d'insister sur trois points : pouvez-vous nous assurer que la rationalisation des moyens n'interviendra pas au détriment du réseau d'expansion économique ? Quelles décisions allez-vous prendre pour que vos crédits soient mieux consommés ? Quel est l'état de nos rapports bilatéraux avec la Chine ?

M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis de la commission de la production - Comme vient de le rappeler M. Reymann, ce budget baisse de près de 32 % alors que le contexte international n'est pas des plus favorables. Les échanges internationaux stagnent et les prévisions retenues semblent assez optimistes eu égard à l'incertitude qui plane sur les cours du brut. De même, la négociation internationale est marquée par des contentieux persistants. A l'heure où la concurrence s'exacerbe et où l'incertitude domine, votre budget manque d'ambition alors qu'il y aurait toutes les raisons de forcer l'allure. L'argument selon lequel il ne serait pas nécessaire de reconduire d'un exercice à l'autre des crédits sous-consommés me semble relever d'une approche quelque peu technocratique que je ne puis partager. Pourquoi ne pas considérer plutôt qu'il convient de les utiliser au mieux, en opérant des transferts vers les lignes qui présentent de vrais besoins, telles que celles relatives à l'aide aux PME ?

Je ne doute pas de votre volonté personnelle mais je regrette que votre ministre ne vous donne pas les moyens de conduire une politique adaptée au contexte.

S'agissant de l'évolution du commerce extérieur, je considère que le solde est un élément déterminant. Il s'agit en effet de l'indicateur pertinent pour apprécier le dynamisme de notre économie sur les marchés extérieurs. L'analyse de ses évolutions aurait dû servir d'élément déclencheur à une réflexion approfondie en vue de moderniser notre dispositif public d'appui à l'exportation. J'observe à cet égard que ce dispositif comporte des instruments appréciés des entreprises, pour peu qu'elles les connaissent et que votre administration, très performante, doit être saluée. Pour autant, de nombreux secteurs doivent encore être réformés.

Un énorme effort doit ainsi être accompli pour fournir aux entreprises implantées en région une information plus accessible et moins éclatée entre de multiples intervenants. De même, la présence de nos entreprises sur les foires et salons internationaux reste insuffisante. Voyez les efforts de nos principaux partenaires ! Il est inadmissible que la France reste ainsi à la traîne ! Et nous n'aurions besoin que de quelques dizaines de millions supplémentaires pour améliorer les choses. Il convient aussi de renforcer la coopération entre le réseau public d'appui au commerce extérieur et les acteurs privés de soutien au commerce international, tels que notamment les sociétés de négoce qui ont réalisé de gros efforts de rationalisation.

Malgré l'urgence des réformes à entreprendre, vous subissez le joug du ministre de l'économie et des finances qui ne vous donne pas de moyens supplémentaires pour mettre en _uvre l'ensemble de votre politique dans de bonnes conditions.

Plusieurs améliorations méritent cependant d'être soulignées. Il en va ainsi de la mise en place d'une procédure d'identification des entreprises régionales d'envergure mondiale ou du rôle précurseur de la DREE dans le cadre de la réforme de l'Etat. La Coface a également accompli un gros effort pour améliorer les conditions d'internationalisation des PME. Les assurances prospection et les avances sur indemnités ont ainsi été rétablies. Le critère d'indépendance absolue pour les filiales de grands groupes a été supprimé : tout cela va dans le bon sens. Je considère en effet qu'il faut tout faire pour renforcer l'appui public au commerce extérieur. La majorité de nos PME ont un potentiel d'exportation considérable mais, pour des raisons culturelles, elles ont encore besoin de l'accompagnement soutenu des acteurs public. Il faut optimiser les outils existants car la comparaison avec nos principaux partenaires n'est pas à notre avantage. Le commerce extérieur n'est pas une dépense inutile mais un investissement pour l'avenir.

Je poserai à présent quelques questions. S'agissant de l'organisation régionale, où en êtes-vous de la clarification du rôle des différents intervenants ? Que pensez-vous faire, d'autre part, pour remédier à la faible activité du FASEP-garantie ? Le CFME-ACTIM risque de subir une baisse de ses ressources : vous engagez-vous à la compenser ? Cet organisme a une stratégie ambitieuse, qui exige des moyens : accompagnerez-vous ses efforts ? Quant au CFCE, que ferez-vous pour prévenir le risque d'un déficit structurel ? Enfin, comment organiserez-vous les synergies nécessaires entre les réseaux de la DRE et ceux du Trésor et des Affaires étrangères ?

M. Jacques Guyard - Je me félicite d'abord du remarquable dynamisme de notre commerce extérieur, les exportations augmentant de 14 % et les importations de 20 %. Les rapporteurs ont soulevé surtout la question du soutien aux PME, et j'observe que, s'ils veillent toujours à ne pas augmenter les recettes, ils sont prompts à vouloir accroître les dépenses. Cela dit, ce qui marche le mieux pour les PME, ce sont les initiatives prises au plus près du terrain. Il faut raisonner branche par branche, car les situations sont très diverses. C'est pourquoi la régression du budget ne me paraît pas significative : ce qui compte, c'est l'impulsion.

M. Maurice Ligot - J'appelle l'attention sur un problème très grave, celui de la contrefaçon, qui affecte notamment l'industrie de l'habillement. La contrefaçon, c'est le vol, car elle permet de s'approprier les dépenses de création et de publicité engagées par une marque. En outre, du fait de sa qualité inférieure, elle affecte le prestige de cette marque. Au total, on estime le préjudice à 10 % du chiffre d'affaires de l'industrie de l'habillement, soit l'équivalent de 20 000 emplois. Il peut y avoir aussi des problèmes de sécurité, lorsque la contrefaçon concerne la pharmacie ou l'automobile.

La création du marché unique européen a facilité la circulation des produits contrefaits, faute d'une harmonisation des législations nationales, les règlements européens restant trop laxistes. C'est ainsi que l'article 10 de la directive européenne de 1994 accorde une franchise douanière de 175 euros par voyageur, alors que la France prohibe entièrement l'entrée de produits contrefaits. Si l'on se rappelle que l'aéroport de Francfort a vu entrer 250 000 passagers en provenance d'Istanbul en 1998, cela signifie l'autorisation légale d'importer pour 50 millions d'euros de produits contrefaits. La Commission européenne a présenté en octobre 1998 un Livre vert sur les moyens de lutter contre la contrefaçon, et le Parlement européen a approuvé ce document en mai 2000. Quelle suite comptez-vous donner à cette démarche ? La présidence française ne pourrait-elle proposer qu'on durcisse et harmonise les législations nationales, et qu'on accélère le déroulement des procédures ?

M. Léonce Deprez - Le point négatif de notre solde commercial, c'est le déficit énergétique, qui a atteint 70 milliards au premier semestre 2000. L'une des forces de la France en ce domaine, c'était l'énergie nucléaire. Or, depuis quelque temps, on semble s'interroger. Ainsi, alors que l'an dernier, nous avions constaté nous-mêmes, à l'occasion de deux missions de la commission de la production, que des perspectives intéressantes s'ouvraient pour le traitement des déchets, notamment sur les marchés japonais et américain, voici que, il y a quinze jours, j'ai lu dans la presse qu'on allait réviser la politique des déchets. Qu'en est-il exactement, Monsieur le ministre ?

M. Jean-Claude Daniel - La performance budgétaire se mesure moins à la hausse ou à la baisse des crédits, qu'à leur efficacité. Pour le domaine qui nous occupe, celle-ci paraît assurée. Je me réjouis du reste que M. Forissier ait reconnu l'utilité des fonctionnaires dans certains cas.

La performance du commerce extérieur peut être parfois liée à des paramètres qui lui échappent, par exemple, l'aménagement du territoire ou les réseaux de PME. J'en donnerai un exemple : suite à la tempête de l'hiver dernier, la production de grumes a fortement augmenté, mais nous n'avons pas su en vendre autant que nous aurions dû, sur les marchés asiatiques en particulier. Cela tient notamment à des problèmes de transport. Pour les PME, le travail en réseau est souvent la meilleure réponse.

J'appelle également l'attention sur la période qui va s'ouvrir pour l'OMC, entre la réunion de Seattle et la prochaine négociation. Il faudra être très attentif à ce qui va se préparer.

M. le Secrétaire d'Etat - Je remercie les rapporteurs et les intervenants qui ont fait des suggestions fort intéressantes. Le budget du ministère baisse en AP, mais il est à peu près stable en CP.

Quant au solde de notre commerce extérieur, il sera bien positif. Et il serait bien supérieur si la facture pétrolière n'avait pas été de 70 milliards. En fait, si le prix du baril n'avait pas augmenté comme il l'a fait, le solde de notre commerce extérieur serait équivalent à celui des années précédentes. Cela signifie que nos entreprises sont particulièrement compétitives. Du reste, je n'ai pas le « fétichisme du solde », j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire. On constate d'ailleurs que le commerce extérieur des Etats-Unis présente un solde négatif constant, et les dernières statistiques publiées par l'Allemagne montrent un solde en baisse. L'objectivité commande de dire que nos entreprises exportent comme jamais et que le chiffre atteint en juillet, considéré cette année comme mauvais, aurait été jugé remarquable il y a peu. Si, donc, le prix du baril revient à quelque 25 dollars, le solde de notre commerce extérieur sera à nouveau positif. Dans l'intervalle, on aura constaté que nos entreprises, très performantes, sont désormais rompues à la concurrence internationale.

Voilà qui m'amène à traiter des parts de marché. Alors que les échanges commerciaux croissent de 10 % cette année et que l'économie des pays émergents se redresse, il aurait été peu surprenant que les parts de marché de la France régressent. Or, il n'en est rien : en valeur, la régression est infinitésimale, et en volume, nous ne perdons rien. Cette situation est d'autant plus remarquable que les parts de marché des pays producteurs de pétrole ont augmenté et que celles des pays dont les échanges ne sont pas libellés en dollars ont régressé.

Je pense, comme M. Carrez, que nous devons accentuer nos efforts en direction de l'Asie, car c'est probablement là que se jouera l'avenir. Cette situation n'est pas favorable à l'Afrique, qui vit des heures sombres.

Plusieurs orateurs ont relevé la diminution constante des crédits du commerce extérieur. Comment s'en étonner ? La mondialisation des échanges rend les interventions publiques moins directement efficaces. D'autre part, l'époque à laquelle on se réfère pour ces comparaisons est aussi celle pendant laquelle les déficits de la COFACE s'accumulaient. Ce n'est plus le cas, ce qui marque la sécurité accrue des transactions. En tout état de cause, il convient de relativiser les craintes exprimées.

S'agissant de la DREE et des postes d'expansion économique, faut-il véritablement considérer qu'il y aurait un « marché de dupes » ? Franchement, je ne le crois pas. Le budget permet au contraire à l'administration de se moderniser en recourant bien davantage que dans un passé proche aux nouvelles techniques de l'information et de la communication. Ainsi pourra-t-elle valoriser les moyens dont elle dispose sans les augmenter.

M. Carrez a fait de la situation de la CFCE une présentation quelque peu pessimiste. Les éléments dont je dispose m'indiquent que si certains postes de recettes ont effectivement diminué, d'autres ont augmenté. Quant au CFME-ACTIM, l'engagement a été pris qu'il ne serait pas pénalisé par d'éventuelles baisses de recette. Les actions des deux organismes seront rendues plus cohérentes, d'autant plus facilement qu'ils seront regroupés. Le nouvel établissement ouvrira fin 2003.

S'agissant de l'assurance crédit, le système est largement bénéficiaire, ce qui explique l'absence d'inscription budgétaire à ce sujet. On ne peut que s'en féliciter. Des doutes ont été exprimés sur les crédits affectés à l'assurance prospection. Je considère, en toute bonne foi, que les 180 millions prévus sont, pour l'instant, suffisants.

MM. Carrez et Forissier se sont inquiétés de l'évolution du FASEP. On a, c'est vrai, constaté une sous-consommation des crédits autorisés en 2000. Cependant, cette moindre demande s'explique par la crise asiatique, et le nombre des dossiers traités repart à la hausse. Une cinquantaine ont été déposés, et nous ferons le nécessaire pour que le dispositif trouve un plus grand public. L'assurance prospection fait, elle, l'objet d'une réforme visant à la rendre éligible aux filières des grands groupes. Le système d'avance consenti en faveur des très petites entreprises témoigne de ce que le Gouvernement souhaite encourager les PME. L'élu local que je suis est particulièrement conscient de l'enjeu que représente pour elles l'accès au marché international.

J'insiste sur le fait que l'Etat a un rôle de régulation irremplaçable, mais qu'il ne peut rien s'il ne s'appuie pas sur les régions. En matière de commerce extérieur, les contrats de plan sont d'une importance particulière. La complexité des dispositifs a été mise en cause à diverses reprises. La réforme du ministère progresse, vous le savez, avec l'objectif d'installer des interlocuteurs économiques uniques.

MM. Reymann, Daniel et Ligot ont évoqué les négociations au sein de l'OMC. Elles ne doivent pas susciter d'inquiétude excessive, même si les approches sont différentes.

En ce qui concerne les négociations multilatérales, il me semble qu'il faut attendre : après le bug de Seattle, il est sans doute trop tôt pour lancer un nouveau cycle. Une fois la question des élections américaines réglée, nous comptons beaucoup sur le dialogue avec l'administration américaine. Nous devrons aussi avoir des discussions approfondies avec les pays en voie de développement, qui ont quelque difficulté à admettre notre recherche, dans un cycle plus large, d'un équilibre entre la libéralisation et les régulations supplémentaires que nous jugeons nécessaires.

L'entrée de la Chine a comme première conséquence de conférer plus de légitimité à l'OMC. C'est une bonne chose aux yeux du gouvernement français, qui considère que la maîtrise de la mondialisation ne peut intervenir qu'au sein de telles institutions. L'intérêt pour nos entreprises est tout à fait évident. Quant à la Chine, elle y trouvera une ouverture supplémentaire pour son économie, favorable elle-même à un nouveau pas vers la démocratie. Au cours des négociations entre l'Union européenne et la Chine, M. Lamy a obtenu des réductions tarifaires extrêmement importantes ainsi que des avancées considérables pour la distribution.

Il est vrai, Monsieur Ligot, que les contrefaçons sont un réel problème, difficile à résoudre. L'Union européenne devra donner suite au Livre vert. Les négociations en cours à Genève sur la propriété intellectuelle sont très importantes à nos yeux. Nous serons extrêmement vigilants car les contrefaçons sont un handicap non seulement pour la mode, mais pour pratiquement tous les secteurs. Un cycle global permettrait sans doute d'équilibrer la négociation et nous offrirait la possibilité de mieux faire valoir nos propres intérêts. Je confirme à M. Daniel que le mandat de l'Union européenne, fixé le 25 octobre 1999, n'a pas changé. Ce n'est certes pas avant l'ouverture d'une négociation qu'il convient de le faire.

M. Deprez a souligné à juste titre l'impact du facteur énergétique sur notre solde commercial. Encore avons-nous limité les dégâts puisque l'énergie ne représente que 7 % du montant de nos importations contre 30 % à l'époque du premier choc pétrolier.

La question des déchets nucléaires est en effet essentielle. On a vu, notamment à l'occasion du dernier sommet franco-allemand, que nos positions diffèrent quelque peu de celles de nos partenaires. Je pense néanmoins que des solutions pourront être trouvées. Croyez que le Gouvernement porte au problème du Mox une attention particulière.

M. Nicolas Forissier, rapporteur pour avis - Je remercie le ministre pour ses explications. Je suis d'accord avec lui sur l'évolution considérable des mesures budgétaires. Les déficits de la COFACE sont devenus des excédents, on peut déplorer que nous ne puissions en récupérer quelques miettes... Par ailleurs, ce ne sont plus aujourd'hui les grands groupes, les grands contrats, qui ont besoin d'être aidés, mais les PME, insuffisamment préparées à accéder aux marchés étrangers, et qui ont donc encore besoin d'un effort public, contrairement à ce qu'ont semblé dire certains de mes collègues.

Je donne un avis favorable à l'adoption des crédits du commerce extérieur.

Les crédits sont adoptés.

La séance est levée à 20 heures.

Le Directeur du service
des comptes rendus analytiques,

Jacques BOUFFIER

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Mardi 14 novembre 2000
(séance de 16 heures 15)

Projet de loi de finances pour 2001 : Audition de M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


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