ASSEMBLÉE NATIONALE


délégation
À L'AMÉNAGEMENT ET AU DÉVELOPPEMENT
DURABLE DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 23

Mercredi 6 juin 2001
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. Philippe Duron, président

SOMMAIRE

 

page

-Examen de l'avis sur le projet de décret mettant en _uvre les schémas de services collectifs

M. Nicolas Forissier, rapporteur
Projet de schéma de services collectifs de l'information et de la communication

2

M. Félix Leyzour, rapporteur
Projet de schéma de services collectifs du sport

6

M. Jean-Claude Daniel, rapporteur
Projet de schéma de services collectifs sanitaires

10

La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a examiné l'avis de M. Nicolas Forissier sur le projet de schéma de services collectifs de l'information et de la communication.

M. Nicolas Forissier, rapporteur, s'est tout d'abord demandé s'il fallait et si l'on pouvait établir un schéma sur un sujet aussi complexe et évolutif. Un schéma à vingt ans relatif à ce domaine est impossible : les opérateurs avouent ne pas avoir d'idées claires sur les évolutions probables au-delà de trois ans, ce qui rend indispensable une approche évolutive et permanente. Toutefois le projet de schéma a le mérite de lancer le débat, ce qui n'avait pas été fait auparavant, quelle que soit la majorité.

Le rapporteur a souligné que le projet de schéma avait le mérite d'exister, de dresser un état des lieux, ce qui est d'autant plus important que les incertitudes sur les évolutions technologiques et financières sont considérables. L'état des lieux, intéressant, met particulièrement l'accent sur trois sujets (l'école, la santé, la culture) ; la dernière rédaction du projet de schéma a été améliorée car celle a tenu compte des avis des régions, mais des lacunes demeurent. On peut déplorer l'absence de cartographies pour recenser les réseaux ; le projet de schéma adopte une vision étatique ne tenant pas suffisamment compte des initiatives des collectivités territoriales et des besoins des entreprises ; la télévision numérique terrestre est à peine mentionnée. Bien que les comparaisons internationales aient été étoffées et que l'Union européenne ait fait l'objet d'un développement dans la dernière version, le projet de schéma aurait pu être encore plus précis.

Le rapporteur a estimé qu'il ne créait pas les conditions d'une mobilisation suffisante, et ne résolvait pas la question de la prospective dans le temps. Afin de tenir compte de l'avis des régions, la dernière rédaction a prévu un observatoire des télécommunications, des téléservices et des territoires ; or, un observatoire n'est pas suffisant pour atteindre l'objectif souhaitable d'une révision régulière du schéma. Les trois échéances retenues (2003, 2010, 2020) sont inégalement traitées : plus on avance dans le futur, plus il est impossible, en effet, de définir des orientations sur ces sujets.

M. Nicolas Forissier a estimé que la philosophie du projet de schéma n'était pas satisfaisante. La concertation n'a pas été bien respectée : c'est ainsi que l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) n'a pas été consultée lors de son élaboration. Le projet de schéma ne prend pas assez en compte la réalité, le terme de "marché" n'apparaît pas, il ne mentionne pas la libéralisation du secteur des technologies de l'information et de la communication. L'État n'a pas défini son rôle et ses responsabilités ; la plupart des interlocuteurs rencontrés par le rapporteur l'ont déploré.

Le rapporteur a ensuite proposé plusieurs pistes de réflexion. En ce qui concerne la téléphonie mobile, les pourcentages de couverture de la population et du territoire fixés par les licences des opérateurs ont été dépassés, mais certaines zones ne sont toujours pas couvertes, ce qui est d'autant plus dommageable que les utilisateurs se déplacent de plus en plus. Le projet de schéma ne précise pas qui doit payer l'achèvement de la couverture. Les opérateurs invoquent la pression de la rentabilité, les collectivités locales paraissent apporter volontiers leur concours, mais, en fait, elles n'ont pas d'autre solution et l'État se défausse. Environ trois à cinq milliards de francs seraient nécessaires. Le rapporteur a estimé normal qu'une partie du produit résultant de l'attribution des licences de l'UMTS soit affectée à la poursuite de la couverture du territoire, comme l'avait d'ailleurs proposé un amendement lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2001, qui a ensuite été retiré.

Le rapporteur a ensuite regretté que la télévision numérique terrestre ne soit que très brièvement mentionnée. Le problème de la réglementation limitant les concentrations est en voie de se résoudre pour le court terme : la loi disposait qu'aucune chaîne de télévision ne pouvait être détenue à plus de 49 % par un actionnaire ; un article du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social éducatif et culturel prévoit que l'application de cette règle sera limitée aux seuls services de télévision franchissant un seuil d'audience nationale de 2,5 %, tous supports confondus. La question risque néanmoins de se poser à nouveau dans quelques années quand l'audience des chaînes aura progressé et que ce seuil aura été dépassé.

Le projet de schéma aborde peu le problème de la régulation. La diffusion de l'émission "Loft story" à la fois à la télévision et sur Internet montre que les rôles du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et de l'Autorité de réglementation des télécommunications (ART) doivent être redéfinis, même s'il n'est pas évident qu'il faille un seul organisme, comme cela est le cas en Italie.

Le travail à distance est évoqué dans le bilan mais peu dans la partie prospective alors qu'il peut permettre le maintien ou le retour des services publics dans les zones rurales ou dans les quartiers en difficulté et être un outil de développement économique.

S'agissant du rôle de France Télécom, le projet de schéma est elliptique, alors que cette entreprise a maintenant deux missions, celle de gestionnaire du réseau national et celle d'opérateur commercial en situation de concurrence ; ce double rôle n'est pas clarifié, comme en témoigne le conflit entre France Télécom et les autres opérateurs à propos de la mise en place du dégroupage de la boucle locale. Il en résulte un frein au développement d'Internet préjudiciable à l'aménagement du territoire, les grandes villes n'étant, elles, pas pénalisées, puisqu'elles peuvent adopter d'autres solutions. L'État doit donc trancher sur ce point.

Enfin, le rapporteur a déploré que le projet de schéma n'aborde pas le problème du modèle économique applicable à ces nouvelles technologies. La question du financement de l'UMTS n'est pas réglée ; après avoir payé une licence de 32,5 milliards de francs, chaque opérateur devra financer des investissements de l'ordre de 30 milliards : cela paraît d'autant plus déraisonnable que France Télécom figure parmi les opérateurs les plus endettés.

La question du financement de l'accès à Internet n'est pas réglée. Quant à la télévision numérique terrestre, le problème de la gratuité doit être posé : c'est a priori l'objectif de l'État, mais la gratuité complète risque de compromettre le développement des chaînes diffusées par satellite ; or le satellite permet une meilleure couverture du territoire.

La question de l'extension du service universel à certaines technologies nouvelles, comme le haut débit, devrait également être examinée. Certaines régions s'y sont déclarées favorables ; la commission européenne travaille sur ce sujet. Les opérateurs rencontrés par le rapporteur se sont montrés prudents ; il sera difficile de définir la technique bénéficiaire du financement par le service universel et les besoins auxquels il faudra répondre. Le rapporteur a considéré que cette extension serait peut-être nécessaire ultérieurement, mais ne paraissait pas possible actuellement.

M. Philippe Duron, président, a souligné que le projet de schéma proposait de nombreuses pistes de réflexion et abordait de nombreux sujets, y compris la télévision numérique terrestre, et la convergence entre informatique, télécommunications et télévision, mais qu'il ne pouvait pas résoudre tous les problèmes car il s'agissait de chantiers considérables. Il a également fait remarquer que de nombreuses évolutions se produisaient à l'échelle mondiale ou européenne, ce qui rendait plus difficile leur gestion. En ce qui concerne la couverture du territoire en matière de téléphonie mobile, il a souligné qu'il était difficile d'obtenir une cartographie des infrastructures au motif qu'il s'agissait d'un secret industriel et a souligné que le schéma était intéressant car il présentait les solutions de coopération envisagées par les opérateurs pour obtenir de meilleurs résultats. A propos de l'UMTS, il s'est demandé si l'Union européenne avait retenu un concept adapté, dans la mesure où elle a défini la technologie avant l'usage, ce qui l'a mise en difficulté.

S'agissant des différents acteurs des nouvelles technologies, il a souligné que le projet de schéma comportait des développements intéressants sur le rôle de l'État et des collectivités locales, les investissements des PME, le "cocooning industriel".

En ce qui concerne les nouvelles technologies et l'école, il a indiqué que l'équipement des établissements avait considérablement progressé, ce qui permettait l'égal accès de tous les enfants aux ressources documentaires, même si la réflexion sur les contenus devait être poursuivie.

Il a ajouté que le projet de schéma contenait également des éléments positifs sur les téléprocédures et sur la possibilité de maintenir les fonctionnaires sur les territoires.

M. Nicolas Forissier, rapporteur, a répondu que le projet de schéma n'était pas inintéressant mais que, sur certains sujets, il ne contenait que des allusions. Tous les sujets sont mentionnés mais ne sont pas suffisamment développés. Quant à France Télécom, dont l'actionnaire majoritaire est l'État, il ne devrait pas se prévaloir du secret industriel.

M. Pierre Cohen a jugé qu'élaborer un schéma de l'information et de la communication était un exercice compliqué puisqu'il était impossible de faire des prévisions à plus de cinq ans. Mais il est important que le schéma existe, sinon seul le marché dicterait la mise en place des nouvelles technologies. Il a souligné que la modernisation de l'État avait permis de combler les retards pris. Il s'est par ailleurs déclaré favorable à ce que la délégation soit en permanence en état de veille sur les schémas car certains d'entre eux seront rapidement obsolètes.

M. Philippe Duron a estimé que la délégation pourrait proposer de se saisir de certains des sujets abordés par les schémas.

M. Félix Leyzour a souligné que la couverture de l'ensemble du territoire en téléphonie mobile était un problème important et a demandé si, pour un meilleur accès demain à l'Internet à haut débit, l'on parviendra à densifier le réseau de fibres optiques ou s'il faudra renforcer le réseau de paires de cuivre actuel. Une bonne connaissance du réseau tel qu'il est permettrait d'éviter aux collectivités locales de mettre en place des réseaux parallèles qui seraient redondants.

M. Serge Poignant a estimé que les critiques du rapporteur étaient constructives, que favoriser l'accès à l'Internet à haut débit permettait un meilleur aménagement du territoire et qu'il était important de réfléchir à la position de l'État sur la décentralisation afin que son rôle et celui des collectivités territoriales dans la mise en oeuvre des nouvelles technologies soit clairement délimité.

M. Nicolas Forissier, rapporteur, a ensuite présenté à la délégation plusieurs recommandations.

Après un débat auquel ont pris part M. Pierre Cohen et M. Philippe Duron, afin d'apporter des modifications rédactionnelles à ces recommandations, celles-ci ont été adoptées par la délégation.

La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a autorisé à l'unanimité, en application de l'article 7 de son règlement intérieur, la publication de l'avis sur le projet de schéma de services collectifs de l'information et de la communication.

RECOMMANDATIONS ADOPTÉES PAR LA DÉLÉGATION

1. Afin que la couverture du territoire en téléphonie mobile soit achevée au plus vite, la délégation demande la constitution d'une dotation prélevée sur le produit résultant de l'attribution des licences de l'UMTS - quel que soit le prix définitif de celle-ci - consacrée à l'achèvement rapide de cette couverture. Plus globalement, la délégation estime nécessaire que ces recettes soient affectées pour une partie au développement d'une politique nationale des technologies de l'information et de la communication ambitieuse, dynamique et équitable pour les territoires.

2. La télévision numérique et notamment la télévision numérique terrestre est un enjeu fondamental pour l'avenir ; la délégation souhaite que le schéma propose une réflexion approfondie sur la convergence entre les télécommunications, l'informatique et la télévision numérique terrestre, et notamment sur le modèle économique de cette dernière.

3. La délégation estime nécessaire de clarifier les termes de la régulation des réseaux et des contenus, ce qui suppose de définir plus précisément les attributions respectives de l'ART et du CSA, permettant ainsi une meilleure coordination de ces organismes.

4. L'aménagement du territoire repose sur la pluralité des offres pour l'accès aux services Internet à haut débit, c'est pourquoi la délégation rappelle que le dégroupage de la boucle locale prévu par le décret du 12 septembre 2000 doit devenir effectif dans les meilleurs délais.

5. La délégation demande que le schéma fournisse une comparaison internationale des équipements plus approfondie et qu'il rappelle les travaux de révision du cadre réglementaire déjà entrepris par l'Union européenne.

6. En raison de la rapidité des évolutions technologiques caractérisant le secteur de l'information et de la communication, la délégation propose qu'un comité stratégique soit constitué, comportant à parité des membres issus du secteur public et du secteur privé, et qu'il fasse le point tous les deux ans, sous forme d'un rapport et de recommandations, sur ces techniques, leur financement et leurs usages.

7. Considérant que les techniques de l'information ne sont pas une fin en soi, la délégation souhaite que le schéma propose une réflexion plus approfondie encore sur les usages prévisibles des différentes techniques de l'information et de la communication, et que, notamment, leurs utilisations pédagogiques soient précisées.

*

* *

La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a ensuite examiné l'avis de M. Félix Leyzour sur le projet de schéma de services collectifs du sport.

M. Félix Leyzour, rapporteur, a rappelé que le projet de schéma de services collectifs du sport avait fait l'objet d'une première version, établie à la fin de l'année 2000, après une large concertation associant les représentants du Ministère de la jeunesse et des sports, de la DATAR, des élus locaux et du mouvement sportif. Ce document, soumis aux régions pour observations, a été transmis simultanément à la délégation, qui a pu ainsi débuter ses travaux immédiatement, procédant à son initiative et à celle de son rapporteur, à de nombreuses auditions. Complété pour tenir compte des observations des régions, le projet de schéma figure en annexe au projet de décret reçu le 23 mai  2000. C'est sur ce texte que doit porter l'avis de la délégation, en application de l'article 10 de la loi d'orientation, d'aménagement et de développement durable du territoire du 25 juin 1999.

La partie "contrats et enjeux" dresse, en quelque sorte, l'état des lieux de la France sportive. Figurent au nombre des constats, le développement sans précédent de la pratique sportive, la diversification des pratiques, la modification des structures de financement du sport professionnel, la diversification des acteurs du sport, la qualité des équipements sportifs et la richesse des espaces naturels et ruraux, enfin la place et le rôle de l'État dans la mise en oeuvre de la politique sportive. Le projet de schéma énumère ensuite cinq grands domaines qui, parce qu'ils apparaissent comme des freins, constituent la problématique et les enjeux du sport : la persistance de certaines inégalités sociales et territoriales ; les freins au développement des sports de nature ; la multiplicité des acteurs du sport ; l'insuffisance des instruments de connaissance du fait sportif ; les dérives potentielles du sport de nature.

La deuxième partie du projet de schéma est consacrée aux cinq objectifs prioritaires que l'État se propose d'atteindre : faire du sport un droit pour tous à dimension éducative ; assurer la place et le rayonnement de la France sur la scène internationale ; inscrire le sport dans une logique de structuration et de développement durable du territoire ; valoriser les espaces naturels et ruraux à enjeux sportifs et en promouvoir un accès raisonné ; structurer l'organisation sportive par la formation et l'emploi.

La troisième partie énonce les choix stratégiques retenus par l'État pour atteindre ces objectifs : choix de la région comme échelon territorial pertinent et création d'institutions nouvelles pour mieux coordonner les politiques sportives et favoriser la mise en réseau des acteurs du sport ; engagement de l'État de recentrer ses moyens financiers sur les cinq objectifs prioritaires ; amélioration du service rendu à l'usager et adaptation du fonctionnement des services de l'État à la mise en oeuvre du schéma ; actions spécifiques dans des territoires qualifiés de prioritaires et qui sont les territoires de proximité, les régions, les espaces de coopération interrégionale et transfrontalière, et les départements et territoires d'outre-mer.

La dernière partie concerne le suivi et l'évaluation du schéma.

Le rapporteur a considéré que si le schéma ne constituait pas un document de programmation - il ne décrit pas les équipements à réaliser, région par région, en fonction de normes et de ratios prédéfinis, ni ne détaille les financements retenus en fixant la part des intervenants et la durée de leur contribution - il était bien un document de planification à 20 ans puisqu'il énonce des objectifs prioritaires et qu'il fixe l'engagement de l'État et le cadre territorial de ses interventions. Il a également observé que les documents annexés, présentant les équipements sportifs par région, permettaient de dresser en "creux" et en "bosses" le tableau de la France sportive et d'apprécier, par comparaison, aussi bien l'éventuel suréquipement que les manques, qu'il appartiendra aux intervenants de combler, s'ils l'estiment utile.

Il a toutefois regretté, par ailleurs, que ne figurent pas dans ces annexes des documents permettant de retracer la part des financements dans les principaux domaines du sport et établissant une comparaison avec les pays européens.

Rappelant que les communes sont propriétaires de la majorité des équipements sportifs et qu'elles doivent donc assurer leur entretien et leur rénovation, M. Félix Leyzour a observé qu'elles se trouvaient confrontées à de réelles difficultés face aux normes de sécurité et de qualité que les fédérations sportives veulent leur imposer.

Soulignant la nécessité de bien définir ce que doit être l'éducation physique et sportive dans le cadre de l'obligation scolaire, il s'est félicité que le projet de schéma, dans sa rédaction modifiée, retienne à cet égard une formulation plus adéquate.

S'agissant de la question du devenir des emplois-jeunes, souvent évoquée par les associations sportives et les fédérations, il a jugé que l'annonce faite par le gouvernement d'un ensemble de mesures destinées à consolider ces emplois jusqu'en 2006 offrait une perspective intéressante. Rappelant, par ailleurs, que le projet de schéma lui-même relève que la multiplicité des acteurs du sport constitue un frein à son développement, il a considéré qu'il était donc peu cohérent que celui-ci propose la création de nouvelles institutions et a émis le souhait que soient recherchés les moyens de mieux faire fonctionner les structures existantes.

Le rapporteur a précisé que les observations qu'il venait de présenter ne devaient pas être interprétées comme une marque de défiance à l'égard du schéma - sa qualité, au contraire, ayant été saluée par la très grande majorité des intervenants - mais qu'elles devaient servir à l'établissement d'un dialogue fructueux entre ses auteurs et les membres de la délégation. Il a insisté sur le fait que le projet de schéma, dû à l'initiative parlementaire, était porteur d'espoirs. La philosophie qui l'inspire, assise sur une conception humaniste du sport, sur la recherche d'une véritable éthique sportive, notamment par la lutte contre le dopage, et sur l'intégration des jeunes en difficulté, a reçu une très large approbation, a-t-il souligné.

Le rapporteur a donc demandé à la délégation de donner un avis favorable au projet de schéma de services collectifs du sport, sous réserve de quatre recommandations ayant pour objet :

- de réintégrer les départements et territoires d'outre-mer parmi les territoires d'intervention prioritaires, la version modifiée du schéma les en ayant écartés.

- d'une part de procéder à une modification formelle pour faire figurer l'objectif "développer la vie associative dans les zones d'intervention prioritaires" parmi les actions consacrées à ces territoires et d'autre part de soumettre à l'avis d'une institution tripartie - État, élus locaux, mouvement sportif - les aides allouées aux associations sportives _uvrant dans ces territoires.

- de repousser la création de "la commission nationale interministérielle sport et environnement", ses attributions pouvant être exercées, comme le prévoyait le schéma initial, par le comité national des espaces, sites et itinéraires relatifs aux sports de nature.

- de veiller à ce que la fonction, la localisation et la conception des espaces sportifs "croise" toujours mieux les apports des différentes disciplines avec les acteurs de terrains.

M. Philippe Duron, président, a rappelé combien la conception du sport avait évolué en un siècle, passant d'une discipline quasi-confidentielle telle que pouvaient la pratiquer les aristocrates anglais à une discipline universelle et démocratique. Il s'est réjoui, en particulier, de voir que toutes les disciplines sportives étaient ouvertes aux femmes et a souligné combien le sport était un facteur essentiel pour l'intégration des populations les plus fragiles, qu'il s'agisse des personnes handicapées ou des jeunes issus des quartiers sensibles.

Il a demandé des précisions complémentaires sur les raisons ayant conduit le rapporteur à proposer la suppression de la commission nationale interministérielle sport et environnement, au regard notamment des missions qui lui sont dévolues et de sa composition.

M. Félix Leyzour, rapporteur, a fait observer que c'est justement en raison de l'absence de dispositions précises sur ces points qu'il avait été conduit à présenter cette recommandation, la nouvelle version du projet de schéma étant quelque peu elliptique à cet égard.

M. Philippe Duron, président, a suggéré, compte tenu de l'importance que revêtent les espaces naturels et ruraux pour la pratique du sport que la délégation réserve son avis sur cette recommandation jusqu'après l'examen du projet de schéma de services collectifs consacré à ces espaces.

Conformément à la proposition du président, la délégation a décidé de réserver son avis sur cette recommandation.

Elle a ensuite adopté les trois autres recommandations.

La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a autorisé à l'unanimité, en application de l'article 7 de son règlement intérieur, la publication de l'avis sur le projet de schéma de services collectifs du sport.

RECOMMANDATIONS ADOPTEES PAR LA DÉLÉGATION

1. La délégation demande que les départements et territoires d'outre-mer, comme d'ailleurs le prévoyait le projet de schéma initial, figurent parmi les territoires d'interventions prioritaires.

2. La délégation considère que l'objectif "développer la vie associative dans les zones d'intervention prioritaires" doit prendre place au sein de la partie du schéma consacrée aux territoires d'interventions prioritaires ; elle demande également que les soutiens financiers ne soient attribués aux projets dynamisant le secteur associatif sportif dans ces territoires qu'après avoir été soumis pour avis à une instance regroupant des représentants de l'État, des élus locaux et du mouvement sportif.

3. La délégation exprime le voeu que la réflexion portant sur la fonction, la localisation et la conception des espaces sportifs "croise" toujours mieux les apports des différentes disciplines avec les points de vue des acteurs de terrain. Afin de permettre au schéma d'atteindre son but, elle recommande que s'engage cette démarche à tous les niveaux.

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La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a examiné l'avis de M. Jean-Claude Daniel sur le projet de schéma de services collectifs sanitaires.

M. Jean-Claude Daniel, rapporteur, a rappelé qu'en juin 2000 le système de santé français, pour la qualité et le faible coût des soins qu'il dispense, avait été classé par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) au premier rang des 191 pays membres de l'Organisation alors même qu'un an auparavant la presse avait stigmatisé ses "dysfonctionnements structurels" révélés à la fois par l'apparition brutale de l'épidémie de SIDA, la tragédie du sang contaminé ainsi que le développement des maladies nosocomiales. Il a observé que le schéma de services collectifs sanitaires, tout en prenant en compte cette apparente dichotomie, avait bien pour objectif principal d'assurer des soins de qualité en tout point du territoire, ce qui, a-t-il précisé, pose la question de la définition de l'égalité d'accès aux soins.

Le rapporteur a souligné que si la définition des "hypothèses santé" relevait du niveau national, il appartenait à l'échelon régional de les décliner. A cet égard, il a rappelé le rôle joué par les agences régionales de l'hospitalisation et l'importance des schémas régionaux d'organisation sanitaire, estimant toutefois que leur prise en compte par le projet de schéma témoignait d'une vision plus décentralisatrice de la mise en œuvre de la politique sanitaire.

Avant de présenter le projet de schéma lui-même, il a relevé la qualité du travail effectué en amont par le comité stratégique, sous la présidence de Mme Dominique Polton, insistant sur l'apport considérable que constitue le rapport préparatoire qui, par les données qu'il rassemble et les propositions qu'il recense, constitue un véritable document de référence.

Il a toutefois tenu à souligner que l'examen de la version nouvelle du projet de schéma, qui intègre, pour partie, les observations des régions, s'était effectué dans le délai d'un mois, certes prévu par la loi elle-même, mais insuffisant pour procéder à des auditions complémentaires et tenir compte du travail effectué en amont. Outre ce problème de méthode, il a fait état d'une difficulté supplémentaire, liée à l'insertion dans la nouvelle version du projet de schéma de dispositions issues d'un projet de loi actuellement en cours de préparation et dont le dépôt a simplement été annoncé. Sans vouloir se prononcer sur le bien fondé de ces dispositions, il a considéré que le schéma ne pouvait faire explicitement référence à des dispositions précises dans une matière relevant de la compétence du Parlement et dont il n'a pas encore débattu. Toutefois, il s'est montré favorable aux dispositions de ce texte, dès lors qu'elles se réfèrent à des principes généraux et donc susceptibles d'être détachés du cadre strict du projet de loi.

Présentant le schéma, le rapporteur a marqué qu'il constituait bien un document de planification sur vingt ans. Toutefois, il a souligné qu'il convenait d'écarter toute approche figée de ce document en raison de l'évolution prévisible que le système sanitaire connaîtra lui-même au cours de cette période. C'est en quelque sorte une démarche "qualité" qui est proposée par ce projet de schéma, les chiffres et les recommandations qu'il retient devant être appréciées à l'aune des actions conduites et de leur évaluation.

Après une première partie consacrée aux enjeux et aux perspectives, principalement axées sur les besoins et les demandes à venir et sur les évolutions prévisibles dans l'offre de soins, le schéma, dans une deuxième partie, retient des orientations et des choix stratégiques.

Trois orientations principales sont retenues : le maintien d'un système de santé solidaire ; le choix de la région comme cadre territorial privilégié de l'action stratégique de l'État ; la nécessité de passer d'une logique d'institutions à une logique de services de santé.

Approuvant le choix de la région comme territoire pertinent, le rapporteur a toutefois regretté, à l'examen des résultats de la consultation à laquelle il a été procédé, que les régions aient trop souvent retenu comme actions prioritaires la déclinaison de politiques nationales - comme la lutte contre le cancer - plutôt que des actions de santé spécifiques, observant que la mise en place d'une politique sanitaire pertinente en région était ainsi amoindrie.

M. Jean-Claude Daniel a présenté les six choix stratégiques retenus par le schéma sanitaire.

· l'organisation graduée et coordonnée des services sanitaires. Il a précisé sur ce point que quatre niveaux de soins étaient définis - les soins de proximité, l'hospitalisation de premier niveau, l'hôpital de référence du secteur sanitaire et le centre hospitalier universitaire (CHU) - inscrits eux-mêmes dans un réseau coordonné. Il a observé qu'il convenait, dans cette organisation, de veiller à la sauvegarde des premiers niveaux de soins, le malade pouvant être tenté de faire appel directement au niveau de soins le plus élevé, la qualité des soins dispensés y étant supposée meilleure. A cette occasion, il a montré toutefois que cette crainte pouvait être écartée, donnant en exemple l'organisation du CHU de Lille qui veille à apporter sur l'ensemble du réseau une offre de soins d'égal niveau ;

· des politiques de santé inscrites dans les territoires : outre la région, sont retenus des territoires inter-régionaux, où sont développées notamment des techniques de pointe autour de pôles d'excellence, et des territoires infra-régionaux - zones rurales en voie de désertification, zones périurbaines défavorisées, zones très enclavées, mais aussi les pays et les agglomérations issus de la loi du 25 juin 1999 ;

· le développement des réseaux de soins et de santé ;

· le développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication ;

· le développement de la prévention et la promotion de la santé ;

· l'amélioration de la sécurité sanitaire.

Sur ces deux derniers points, il s'est félicité des options retenues par le projet de schéma, le système de santé évoluant d'une politique à dominante curative, dans laquelle il s'agit d'apporter des soins à une personne malade, à une politique de maintien en bonne santé de toute la population, grâce notamment à des actions de prévention et de dépistage. Le projet de schéma recense ainsi des populations qu'il convient de protéger plus particulièrement : les personnes âgées, les personnes handicapées, la population de certains milieux défavorisés, d'origine rurale ou urbaine, qui a des habitudes de consommation particulièrement néfastes. A cet égard, et faisant état des multiples facteurs qui contribuent à la santé publique, le rapporteur a souligné que les réponses à apporter ne pouvaient pas être exclusivement d'ordre sanitaire et qu'il convenait, en conséquence, de revaloriser le rôle du secteur médico-social.

Il s'est enfin félicité des perspectives ouvertes par le schéma sanitaire qui concernent principalement l'analyse des besoins de santé, la place de la personne malade dans le système sanitaire qui, parce qu'elle disposera d'informations toujours plus précises et actualisées, sera mieux à même d'être acteur de sa propre santé ; les enjeux techniques ; l'organisation des métiers de santé, les rôles des médecins et des infirmiers méritant d'être redéfinis dans le cadre de la mise en place d'une véritable équipe soignante.

Le rapporteur a enfin mis l'accent sur le problème de la démographie médicale, qu'il a qualifié de fondamental. Rappelant l'institution du numerus clausus en 1971, il a indiqué que le corps médical avait connu une forte croissance de ses effectifs jusqu'en 1998 pour entrer progressivement dans une phase de stabilisation puis de décrue au cours des vingt ans à venir. Les projections effectuées, combinant différents critères (augmentation de la population et de la durée de vie, baisse des effectifs, féminisation et vieillissement du corps médical) aboutissent à une diminution de l'encadrement médical de l'ordre de 40 à 50 %. En outre, la pénurie prévisible se double d'une répartition déséquilibrée des médecins, certaines spécialités étant déficitaires et certaines zones territoriales étant délaissées.

Le rapporteur a considéré qu'il convenait, pour répondre à ces problèmes, d'envisager des solutions diversifiées d'ordre incitatif mais aussi d'ordre impératif, notamment en imposant une durée de services dans le système hospitalier telle que son bon fonctionnement soit partout garanti.

M. Philippe Duron, président, s'est demandé si des mesures d'ordre impératif n'étaient pas envisageables également pour la médecine libérale, citant l'exemple de l'Allemagne où le nombre d'actes que chaque médecin est autorisé à accomplir annuellement est plus important dans les secteurs déficitaires. Il a toutefois observé qu'il convenait d'agir avec prudence, l'exemple de l'étranger n'offrant pas toujours des perspectives positives : ainsi, a-t-il observé, il n'est pas rare, dans un pays voisin, de voir des malades attendre plus d'un an avant d'être reçus par un spécialiste et patienter ensuite pendant un délai équivalent avant de pouvoir obtenir l'intervention chirurgicale que leur état nécessite.

M. Jean-Claude Daniel, rapporteur, a fait observer, qu'en revanche, en matière d'équipement technique - IRM notamment - la France connaissait un certain retard par rapport à des pays frontaliers comme l'Allemagne et la Belgique.

M. Pierre Cohen a interrogé le rapporteur sur le nombre des structures médicales privées qui pourraient connaître la faillite dans un proche avenir et sur la possibilité, pour le secteur public, de compenser les manques susceptibles d'en résulter.

M. Jean-Claude Daniel, rapporteur, a souligné qu'il convenait de favoriser la coopération entre le secteur public et le secteur privé - le système français est le meilleur du monde, a-t-il rappelé -. Tout en estimant que les risques évoqués étaient plus apparents que réels en raison du nombre relativement faible de faillites constatées, il a souhaité qu'un bilan puisse être effectué sur quelques régions tests pendant une durée significative.

Le rapporteur a présenté à la délégation sept recommandations.

Après un débat auquel ont participé MM. Philippe Duron, Pierre Cohen et Jean-Claude Daniel pour préciser la rédaction de la dernière, les recommandations ont été adoptées.

La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a autorisé à l'unanimité, en application de l'article 7 de son règlement intérieur, la publication de l'avis sur le projet de schéma de services collectifs sanitaires.

RECOMMANDATIONS ADOPTÉES PAR LA DÉLÉGATION

1. La délégation, constatant l'existence de nombreux instruments de régulation dans le domaine de la santé et prenant acte que le schéma de services collectifs sanitaires fixe des objectifs prioritaires à vingt ans, affirme que ce document constitue bien un instrument de planification ;

2. La délégation, estimant que l'agence régionale d'hospitalisation, dans un contexte d'élargissement de la décentralisation, ne doit pas être seulement le lieu de mise en _uvre de la politique sanitaire décidée par l'État, préconise le choix de la région comme territoire pertinent, et approuve le choix du centre hospitalier universitaire comme centre de référence et comme pôle d'excellence régional et/ou interrégional ;

3. La délégation, soulignant l'acuité du problème de la démographie médicale et face à la pénurie prévisible sur certains territoires et dans certaines disciplines, recommande l'adoption de mesures d'urgence, d'ordre incitatif pour remédier aux déséquilibres géographiques et d'ordre impératif, notamment axées sur des engagements de durée de service, pour garantir le bon fonctionnement du service hospitalier ;

4. La délégation approuve le principe d'organisation graduée des soins sous réserve de définir les missions et les responsabilités du centre hospitalier universitaire en matière de formation et de recrutement des personnels, de transfert de technologie et de labellisation des établissements membres du réseau ;

5. La délégation insiste sur la nécessité de garantir effectivement une réelle proximité des soins, cette notion étant entendue comme compatible avec la notion de qualité et étant exclusive de tout système permettant la seule fermeture d'établissement hospitalier pour des motifs liés à la seule rationalité économique ;

6. La délégation soutient la mise en oeuvre d'une politique de prévention, ayant pour ambition prioritaire le maintien en bonne santé de la population et permettant, par l'affichage d'objectifs chiffrés, le suivi et l'évaluation des actions engagées aussi bien à l'échelon national que territorial.

7. La délégation propose que soit supprimée dans le schéma de services collectifs sanitaires la référence au projet de loi de modernisation du système de santé, non déposé et non voté par le Parlement, tout en conservant les objectifs généraux qui y sont affirmés.


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