ASSEMBLÉE NATIONALE


DÉLÉGATION
À L'AMÉNAGEMENT ET AU DÉVELOPPEMENT
DURABLE DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 24

Jeudi 7 juin 2001
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. Philippe Duron, président

SOMMAIRE

 

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- Examen de l'avis sur le projet de décret mettant en œuvre les schémas de services collectifs

 

M. Pierre Cohen, rapporteur
Projet de schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche
Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, rapporteure
Projet de schéma de services collectifs culturels
M. Henri Nayrou, rapporteur
Projet de schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux

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La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a examiné l'avis de M. Pierre Cohen sur le projet de schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Philippe Duron, président, a évoqué l'association des deux domaines de l'enseignement supérieur et de la recherche au sein d'un même schéma de services collectifs et a posé la question de la pertinence qu'aurait pu avoir un schéma spécifique pour la recherche.

M. Pierre Cohen, rapporteur, a souligné à ce propos que la recherche et l'enseignement supérieur sont deux domaines fortement liés, à la fois par leurs missions, la création et la diffusion du savoir, et par leur fonctionnement, s'agissant en particulier des personnels. Il a noté que l'effort de recherche était fortement nourri par la participation d'enseignants-chercheurs et de doctorants aux programmes, et que les organismes de recherche coopèreraient très largement avec les établissements d'enseignement supérieur.

Il a ensuite évoqué les enjeux d'aménagement du territoire et le maillage territorial assez équilibré de l'enseignement supérieur, plus étroit que celui de la recherche. Il a néanmoins considéré que les créations de nouveaux sites universitaires -antennes, IUT... - avaient souvent été le fruit de décisions prises au coup par coup, sans stratégie d'ensemble. Il a souligné certaines incohérences de la répartition territoriale des cursus universitaires. Il a noté que le schéma devait être considéré dans une perspective d'aménagement du territoire et qu'il ne fallait pas en attendre un plan général pour l'enseignement supérieur et la recherche.

Abordant l'architecture générale du projet de schéma, il a indiqué que le contenu de la première partie, relative aux objectifs nationaux, traitait de façon globalement satisfaisante des principaux enjeux concernés, mais que, par contre, la seconde partie, qui contient la déclinaison territoriale des objectifs du schéma, a été très critiquée dans les régions, dans la mesure où elle ne représente, le plus souvent, que l'expression, parfois appauvrie, des contrats de plan État-régions.

Le rapporteur a par ailleurs estimé que la nouvelle version du schéma, transmise le 23 mai, reprenait les principaux compléments souhaités par les partenaires, en particulier par le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie. Il s'est notamment déclaré très favorable au renforcement du mouvement de déconcentration universitaire en Midi-Pyrénées, à travers la création d'un établissement public administratif multipolaire -liant Albi, Figeac, Castres et Rodez - dont le statut sera réexaminé à la fin du contrat de plan.

Il a ensuite souligné l'importance centrale du développement de la notion de réseau, dans une optique d'aménagement du territoire, et la nécessité de prendre appui sur la montée en puissance des nouvelles technologies de l'information et de la communication , instruments de complémentarité, par exemple pour l'enseignement à distance dans le domaine universitaire. Il a considéré que la logique de réseau devait se développer, notamment en matière de coopération européenne, souhaitant que celle-ci ne se réduise pas à une coopération entre des pôles d'excellence, mais qu'elle suscite l'émergence d'un "réseau d'excellence".

Le rapporteur a souhaité que les organismes de recherche renforcent leur politique de présence territoriale, estimant qu'à l'heure actuelle l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) était l'organisme le plus engagé dans ce sens.

Evoquant le développement de la mobilité des étudiants, il a souligné que l'instauration, récemment annoncée par le ministre de l'Éducation nationale, d'un système de "points" qui pourront être acquis dans l'ensemble des établissements universitaires, en France ou dans les autres pays de l'Union, permettrait de favoriser l'accroissement de cette mobilité.

A propos du développement économique induit par l'enseignement supérieur et la recherche, le rapporteur a noté qu'il était nécessaire d'introduire plus de lisibilité et de cohérence dans les dispositifs existants en matière de transfert de technologie.

M. Pierre Cohen a ensuite évoqué le devenir des établissements universitaires et souligné qu'il fallait prendre fortement en compte les difficultés d'ordre psychologique ou social auxquelles les étudiants sont de plus en plus confrontés, et mettre en place, au sein des universités, les métiers nécessaires pour répondre à ces difficultés. Par ailleurs, il a considéré que l'université "tout au long de la vie" allait devenir une réalité de plus en plus concrète.

Le rapporteur a noté que la mission essentielle de culture scientifique et technique était, à l'origine, complètement absente du schéma, mais que la nouvelle version avait introduit des développements sur ce point. Il a souligné que la culture scientifique et technique constituait un service public qui doit permettre à chacun de réfléchir en citoyen sur les problèmes essentiels posés par les sciences. Il a évoqué l'objectif, qu'il propose, de création de maisons des sciences dans toutes les villes de plus de 10 000 habitants à l'horizon de 2010.

Abordant le nécessaire développement de l'évaluation de la recherche, il a souligné la nécessité de disposer d'un outil public d'évaluation, permettant notamment une évaluation stratégique et de la connaissance.

Evoquant ensuite les très importants départs à la retraite de chercheurs prévus pour les prochaines années, il a estimé qu'une loi de programmation de l'emploi scientifique était nécessaire afin d'assurer le renouvellement démographique des chercheurs, tout en permettant de prendre en compte l'évolution des priorités thématiques. Il a également souligné que l'enseignement dispensé dans les matières scientifiques devait être rendu plus attractif pour les jeunes.

Au-delà des dispositions du schéma, le rapporteur s'est déclaré favorable à la fixation d'un objectif de 2,5 % du PIB pour l'effort public en matière de recherche.

M. Philippe Duron, président, a d'abord évoqué l'évolution de la vocation de l'université, du fait notamment de la reprise de la croissance et du développement de la formation "tout au long de la vie" ; il a considéré que le nécessaire renouvellement des chercheurs lié aux départs à la retraite pouvait constituer un instrument stratégique pour orienter l'effort de recherche vers les priorités nouvelles. Il a ensuite souligné le rôle de l'université en matière d'aménagement du territoire et la réussite que constituaient, de ce point de vue, les antennes ou les IUT implantés dans les villes moyennes. Il a posé la question de la nécessité d'une évolution plus nette des cursus universitaires français vers des modèles européens. Il a rejoint le rapporteur quant à l'importance que jouent les nouvelles technologies de l'information et de la communication comme instrument de coopération et de réseaux.

A propos des priorités thématiques, il a évoqué le risque de délaisser des domaines traditionnels pour lesquels des manques pourraient apparaître, ainsi que des besoins nouveaux : il a cité le cas des naturalistes.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont s'est déclarée en plein accord avec le rapporteur à propos de la nécessité de développer les réseaux d'excellence dans le domaine de l'enseignement supérieur, comme pour la recherche ; elle a évoqué les résistances que pouvaient susciter des projets de décentralisation universitaire.

M. Pierre Cohen, rapporteur, a souligné que le développement des nouveaux moyens de diffusion du savoir correspondait à une mission de service public, et que les risques de privatisation étaient forts.

S'agissant des priorités thématiques, il a estimé qu'il convenait d'être prudent lorsque l'on réduit les moyens d'un secteur ; il a évoqué les sciences sociales, considérant que celles-ci ne disposaient pas de moyens suffisants.

M. Philippe Duron, président, et Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont ont évoqué la prise en compte nécessaire des thématiques régionales par les formations universitaires et les difficultés rencontrées dans ce domaine.

Le rapporteur a ensuite présenté à la Délégation plusieurs propositions.

Après un débat auquel ont pris part MM. Philippe Duron, Pierre Cohen et Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, les recommandations ont été adoptées par la Délégation.

La Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a autorisé à l'unanimité, en application de l'article 7 de son règlement intérieur, la publication de l'avis sur le projet de schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche.

RECOMMANDATIONS ADOPTÉES PAR LA DÉLÉGATION

1. Le développement des missions propres à l'enseignement supérieur et à la recherche s'accompagne d'un rôle essentiel dans le domaine de l'aménagement du territoire, à travers des fonctions de proximité, même si chacun de ces deux domaines d'intérêt général conjugue d'une façon spécifique efficacité fonctionnelle et diffusion territoriale.

2. L'approfondissement des coopérations en réseau, dans le domaine de la recherche, comme pour l'enseignement supérieur, doit notamment s'appuyer sur les possibilités nouvelles offertes par les nouvelles technologies de l'information et de la communication. Cette logique de travail en réseau, basée sur les complémentarités existantes, doit permettre de conjuguer efficacité fonctionnelle et décentralisation territoriale ; elle doit concerner tous les niveaux du territoire, et notamment le niveau infrarégional. Cette même logique doit intégrer le développement de la coopération européenne, à travers la constitution de "réseaux d'excellence" dans le domaine de la recherche.

3. L'importance des départs à la retraite de chercheurs et d'enseignants-chercheurs dans les dix années qui viennent implique une gestion prévisionnelle qui s'incarne dans un véritable plan pluriannuel de l'emploi scientifique ; il convient d'anticiper dès à présent le recrutement de jeunes chercheurs. Le schéma doit intégrer pleinement cet objectif en prévoyant une loi de programmation de l'emploi scientifique qui constituera la garantie d'une gestion pluriannuelle.

4. La culture scientifique et technique est trop souvent limitée aux grands équipements. Le schéma de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche doit pleinement prendre en compte la nécessaire mission de diffusion du savoir, à travers la culture scientifique et technique, tant dans ses objectifs que dans sa dimension territoriale. Réintégrer le citoyen dans le débat scientifique constitue un enjeu essentiel et le schéma doit, dans cet esprit, prévoir le développement prioritaire de la culture scientifique et les moyens nécessaires.

5. Les missions de l'enseignement supérieur et de la recherche représentent un intérêt national majeur tant dans notre contribution au développement du savoir universel, que dans sa diffusion, contribuant fortement au développement technologique et économique mais aussi écologique et social. Remettre à l'ordre du jour un objectif de 2,5 % du PIB pour le budget de la recherche publique permettra d'être au rendez-vous des grandes puissances, en particulier au sein de l'Europe.

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La Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a examiné l'avis de Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, sur le projet de schéma de services collectifs culturels.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, rapporteure, après avoir noté que l'idée d'une programmation à vingt ans du champ culturel pouvait paraître iconoclaste ou même révolutionnaire - tant ce domaine est évolutif -, a précisé que le schéma pourrait être réactualisé tous les trois ans.

Avant de commenter les principales orientations du projet de schéma, elle a présenté l'"état des lieux" des services et pratiques culturels qui constate : que malgré des années d'investissements en équipements culturels de base, perdurent des inégalités d'accès de nature géographique, sociale et culturelle ; que le rapport des Français à l'art et à la culture s'est modifié en raison d'un allongement de leur temps libre et du développement des nouvelles technologies ; et que la coordination des politiques culturelles et la multiplication des dispositifs de partenariats ont permis de renforcer l'action publique.

Le projet de schéma définit les domaines où l'État entend jouer un rôle spécifique et régulateur : les enseignements artistiques, la formation et l'intégration professionnelle de certains de ses personnels, l'information sur la ressource artistique et culturelle et enfin les échanges internationaux. Il détermine également les domaines où interviennent les collectivités territoriales afin de favoriser un accès égal aux pratiques artistiques et culturelles, de soutenir la création, d'aider les industries culturelles et de mettre en valeur le patrimoine en lien avec l'environnement urbain et rural.

Par la contractualisation de l'action territoriale, il entend par ailleurs permettre l'élaboration de projets territoriaux de développement, la correction des situations territoriales inégalitaires entre la région Île-de-France et les autres régions, l'identification de territoires d'actions prioritaires (qui bénéficieront d'une politique de discrimination positive), l'intégration des politiques de développement au sein des nouvelles structures territoriales et la constitution d'un réseau de ressources culturelles.

Se félicitant de la richesse du contenu du projet de schéma, la rapporteure a toutefois relevé qu'il convenait d'en préciser les points suivants :

- la mise en application du projet de schéma intervenant après les négociations relatives aux instruments financiers auxquels il doit s'adosser, les objectifs et les moyens financiers de la politique publique culturelle devront être réajustés lors des prochaines réévaluations (en 2003) des contrats de plan État-région et du schéma.

- bien que le projet de schéma élise les régions "comme échelons essentiels et espaces pertinents d'aménagement culturel du territoire"(alors que leur participation à la dépense publique culturelle - 2 % - est relativement modeste par rapport à celle des communes - près de 40 % - ou des départements - près de 8 % -), il devra veiller à traiter de façon égale toutes les collectivités.

- constatant qu'en matière culturelle, les collectivités territoriales ont le plus souvent partagé leurs compétences et leurs financements, le projet de schéma souhaite que soit recherchée une cohérence rationnelle de ces croisements. Il conviendrait d'aller au-delà du simple souhait et d'indiquer plus précisément comment pourraient se répartir ces compétences entre l'État, et les différents échelons territoriaux existants

- en l'absence de toute précision sur les modalités de définition et de gestion des territoires d'intervention prioritaire, il conviendrait de confier la conduite de ces politiques à des commissions spécifiques instituées au sein des conférences régionales de l'aménagement et du développement du territoire (CRADT) et dont la composition permettrait une représentation équilibrée des différentes structures territoriales et un accueil des divers acteurs culturels locaux.

-  le projet de schéma ne créant pas moins de neuf structures nouvelles, il conviendra de veiller à la cohérence de leurs actions.

La rapporteure déplorant enfin que le projet de schéma de services collectifs culturels ne dégage pas des priorités dans les actions qu'il se propose de mener au cours des vingt prochaines années et qu'il n'en détaille pas assez certaines, a proposé, sous réserve des choix stratégiques effectués par chaque région, d'apporter les précisions suivantes :

- les actions relatives à l'enseignement artistique pourraient être plus prescriptives, plus volontaristes ;

- parmi les actions destinées à permettre l'accessibilité de tous à la culture : la lutte contre l'illettrisme devrait définir de véritables programmes, en direction des adultes et des enfants ; la politique d'ouverture culturelle en direction des familles défavorisées et des exclus devrait être plus affirmée et l'accès des personnes handicapées aux lieux et aux pratiques culturelles devrait être aménagé ;

- les lieux-ressources établis dans les services de proximité devraient pouvoir se connecter au réseau des institutions culturelles prévu par le schéma de services collectifs de l'information et de la communication et accéder à une banque d'informations locales dédiées à la vie culturelle environnante.

- dans le cadre de la politique de rapprochement des territoires urbains et ruraux, les spectacles présentés dans les institutions culturelles urbaines les plus réputées (et le plus souvent subventionnées par des fonds publics), devraient être plus systématiquement diffusés ou présentés "hors les murs" des institutions où ils sont habituellement donnés.

- pour aider les entreprises culturelles à migrer vers les techniques numériques, il conviendrait dès à présent de définir une politique européenne de régulation des marchés de l'Internet, de créer des filières de formation aux nouveaux métiers numériques, et d'anticiper les bouleversements d'emploi que vont à terme connaître certains métiers tels ceux du livre, du cinéma et de la vidéo.

Au terme de son exposé, la rapporteure a tenu à souligner que le projet de schéma de services collectifs culturels appliquait diverses orientations du schéma de développement de l'espace communautaire. Elle a souhaité par ailleurs saluer les efforts de tous ceux qui, ayant participé à son élaboration, l'ont enrichi par leurs réflexions, leurs débats et leurs recherches de concertation.

M. Philippe Duron, président, s'est félicité du fait que la culture ne se limitait plus à la transmission, souvent réservée à une élite, de savoirs anciens et du fait qu'elle s'ouvrait aujourd'hui à un plus grand nombre de personnes et s'enrichissait de pratiques nouvelles.

Regrettant que le projet de schéma ne comporte pas de développement sur l'importance de la culture scientifique et technique, il a souhaité que cette dernière soit reconnue et protégée.

Il a indiqué que le choix de la région comme élément pertinent de l'aménagement culturel se justifiait au seul niveau de la réflexion stratégique et a convenu que, comme dans le domaine du sport, les communes étaient les maillons essentiels d'une politique culturelle proche des citoyens.

M. Pierre Cohen a souligné que les régions, bien qu'étant les plus petits financeurs de l'action culturelle, étaient des lieux de cohérence des politiques culturelles et a précisé l'importance en ce domaine des contrats de plan État-région.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, rapporteure, a rappelé que les régions ne pouvaient pas être des lieux pertinents de politiques de création culturelle et qu'elles ne prétendaient d'ailleurs pas jouer un tel rôle, préférant se réserver des compétences propres en matière de formation.

M. Philippe Duron, président, notant que seuls les projets de schéma de services collectifs culturels et de services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche préconisaient une politique d'accessibilité des personnes handicapées, a souhaité que ce point soit repris dans les recommandations générales que fera la Délégation.

La Délégation a ensuite examiné les trois recommandations de la rapporteure relatives aux objectifs prioritaires du projet de schéma et à la clarification des compétences des partenaires publics.

Sur la proposition du président, elle a également examiné une recommandation relative à la culture scientifique et technique.

Après un débat où sont intervenus Mme Marie-Françoise Pérol-Dumon, MM. Philippe Duron et Pierre Cohen, elle a adopté ces recommandations.

La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a autorisé à l'unanimité, en application de l'article 7 de son règlement intérieur, la publication de l'avis sur le projet de schéma de services collectifs culturels.

RECOMMANDATIONS ADOPTÉES PAR LA DÉLÉGATION

- Déterminer au sein de chacun des cinq objectifs du schéma de services collectifs culturels des actions à mener en priorité dans le temps ;

- Définir les droits régaliens de l'État dans les différents secteurs culturels ;

- Elaborer un projet de répartition des compétences des collectivités territoriales ;

- Intégrer davantage la culture scientifique et technique, valoriser le patrimoine, notamment le patrimoine industriel, qui a marqué les deux derniers siècles, et soutenir l'effort archéologique.

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La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a examiné l'avis de M. Henri Nayrou sur le projet de schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux.

M. Henri Nayrou, rapporteur, a tout d'abord souligné que le projet de schéma de services collectifs espaces naturels et ruraux était un exercice d'un type nouveau, qui, contrairement aux autres schémas, ne recouvrait pas des programmes d'investissement, d'un type déterminé, mais embrassait le territoire dans son ensemble : il s'agit de promouvoir les conditions territoriales du développement. Evoquant l'état de l'environnement, le rapporteur a précisé que le schéma décrivait la qualité, menacée, des territoires français, et mettait en valeur la multifonctionnalité des espaces. Au total, le rapporteur a estimé que le schéma constituait un processus nécessaire qui méritait d'être complété et renforcé.

Evoquant ensuite l'origine du projet de schéma, le rapporteur a souligné que, selon la loi, le schéma des espaces naturels et ruraux définissait les principes d'une "gestion équilibrée" de ces espaces. Il a rappelé que le schéma proposé à l'examen de la délégation était le fruit d'un processus long et complexe qui a débuté avant même le vote de la loi. Il a estimé que le résultat constituait un ensemble très complet, parfois peu "lisible", voir un peu confus, ce qui semblait difficilement évitable, compte tenu notamment de la multiplicité et de la complexité des problématiques abordées, de la diversité des acteurs concernés et du caractère de "première" de ce processus.

Le rapporteur a noté que le schéma constituait un "référent" qui tente d'éclairer l'avenir en s'efforçant de rassembler les différents partenaires autour des objectifs du développement durable et de leur traduction concrète en termes d'actions territoriales. Il a considéré qu'il était une étape positive pour créer une culture partagée du développement durable au service de l'intérêt commun.

Il a par ailleurs indiqué que la nouvelle version projet de schéma transmise le 23 mai, sans modifier l'architecture générale du projet, apportait un certain nombre de compléments. Il a précisé que ces compléments concernaient notamment la politique du paysage, la gestion forestière, la protection des zones littorales et maritimes, les zones affectées par la déprise, les régions méditerranéennes, les départements d'outre-mer, le suivi et l'évaluation du schéma.

M. Philippe Duron, président, a souligné que le schéma correspondait à une nécessité, dans un contexte environnemental marqué en particulier par l'aggravation des catastrophes naturelles et l'appauvrissement de la biodiversité. Il a par ailleurs considéré que l'on avait trop souvent confondu ruralité et agriculture, et qu'il convenait que celle-ci prenne pleinement en compte les préoccupations environnementales, s'agissant en particulier des ressources en eau et des sols. Il a également évoqué l'importance de la prévention des risques naturels.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont a noté qu'il n'existait pas de schéma relatif au tourisme ; elle a jugé que la conjugaison du développement touristique et de la préservation de la qualité de l'environnement constituait un enjeu central.

M. Philippe Duron, président, a estimé qu'une régulation des usages de la nature par les activités touristiques et sportives était indispensable, d'autant plus que la France, par la qualité et la diversité de ses espaces, était dotée d'atouts essentiels de développement touristique.

M. Henri Nayrou, rapporteur, considérant que le projet de schéma privilégiait une vision environnementale et urbaine, a estimé qu'il fallait éviter de développer une vision "récréative" du territoire ignorante de la réalité du milieu rural.

M. Philippe Duron, président, s'est déclaré en désaccord avec une vision qui risquerait de fermer les espaces ruraux à des apports nouveaux et a fait référence au mouvement de retour au monde rural, actuellement perceptible, considérant que les nouveaux arrivants intégreraient progressivement les réalités du milieu.

M. Henri Nayrou, rapporteur, a souligné qu'en tout état de cause le respect des équilibres environnementaux était une nécessité, mais qu'il convenait de se poser la question de la finalité de cette protection : le respect de la nature pour elle-même, la constitution de "réserves naturelles" pour ceux qui voudront se ressourcer, ou un nouveau développement de la vie rurale.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, évoquant la région Limousin, a estimé qu'il n'y avait pas d'antagonisme entre le développement économique, le maintien d'une vie rurale, le tourisme qui en est l'une des composantes, et la préservation de l'environnement.

M. Henri Nayrou, rapporteur, a évoqué les contrats territoriaux d'exploitation (CTE) qu'il a jugé être un instrument privilégié pour la concrétisation de l'intégration du développement et de la préservation de l'environnement. Il s'est dit convaincu que l'avenir de nos sociétés passera par un nouvel équilibre territorial porteur d'un retour au monde rural, à condition que les "espaces" soient équipés et que l'on sache éviter l'écueil de surpopulations locales. Il a considéré que l'évolution de l'agriculture en tant qu'acteur de l'entretien des milieux naturels était bien engagée.

Le rapporteur a ensuite présenté à la Délégation plusieurs recommandations.

Après un débat auquel ont pris part MM. Philippe Duron, Henri Nayrou et Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, les recommandations ont été adoptées par la Délégation.

La Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a autorisé à l'unanimité, en application de l'article 7 de son règlement intérieur, la publication de l'avis sur le projet de schéma de services collectifs des espaces naturels et ruraux.

RECOMMANDATIONS ADOPTÉES PAR LA DÉLÉGATION

1. Le projet de schéma de services collectifs espaces naturels et ruraux doit être complété par les éléments d'une politique volontariste de renouveau rural, assurant un meilleur équilibre territorial des activités et des hommes et valorisant ainsi pleinement l'atout que représentent pour un développement durable - dans ses trois dimensions, économique, sociale et environnementale - l'étendue, la qualité et la diversité de l'espace français. Cette politique d'ensemble devra notamment intégrer le maintien des services publics en milieu rural, le développement des NTIC, le soutien aux investissements économiques, la relocalisation des emplois publics. Il pourra également s'appuyer sur une étude de l'impact environnemental, économique et social de la surconcentration urbaine.

2. Certaines orientations du schéma relatives à la protection de la biodiversité sont potentiellement contraignantes pour les activités économiques et pour les particuliers. Il convient, sans les remettre en cause, de préciser, à travers en particulier une concertation approfondie, ces orientations et leur impact territorial, s'agissant notamment de la création d'un réseau écologique naturel, ainsi que la façon dont seront pris en compte les intérêts des partenaires locaux et la poursuite des activités économiques, notamment agricoles et forestières.

3. L'appropriation des enjeux du schéma par tous les partenaires concernés constitue un objectif majeur. Dans cet esprit, il convient de poursuivre les dialogues engagés, en particulier au niveau des collectivités territoriales et de leurs groupements, et de développer les débats nécessaires au niveau national, sur les sujets les plus difficiles ou controversés, comme la biodiversité, les conséquences du changement climatique, ou la protection des paysages. Afin d'éclairer le suivi du schéma et la poursuite des dialogues engagés, le travail sur les indicateurs environnementaux constitue une priorité majeure.

4. Les conséquences territoriales du changement climatique ne sont pas prises en compte par le schéma, alors même que cet aspect est expressément prévu par l'article 23 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire n° 99-533 du 25 juin 1999 qui fixe le contenu du schéma. Du fait de l'importance de ces conséquences potentielles pour le territoire, en particulier pour le littoral, la montagne, le régime des crues, les sols, l'agriculture et la forêt, et compte tenu des éléments déjà disponibles dans ce domaine, notamment à travers les travaux de la Mission interministérielle sur l'effet de serre, il convient que les dispositions du schéma soient complétées à ce propos.

5. La prise en compte des objectifs et des contraintes du développement durable par l'ensemble des schémas de services collectifs constitue un point essentiel de la démarche initiée par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire. Les projets de schémas de services collectifs transports, énergie et sport, dont l'impact sur l'environnement est potentiellement important, sont particulièrement concernés. Afin de renforcer l'intégration de l'exigence d'un développement durable, il est important de prévoir, dès que possible, l'engagement d'une procédure d'évaluation de l'impact environnemental de l'ensemble des schémas. Cette évaluation est dans l'esprit du projet de directive "relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement" qui doit être à l'ordre du jour du prochain conseil des ministres de l'environnement.


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