ASSEMBLÉE NATIONALE


DÉLÉGATION
À L'AMÉNAGEMENT ET AU DÉVELOPPEMENT
DURABLE DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N° 27

Mercredi 20 juin 2001
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. Philippe Duron, président

SOMMAIRE

 

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- Examen du rapport de synthèse sur le projet de décret mettant en œuvre les schémas de services collectifs

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La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a examiné le rapport de synthèse de M. Philippe Duron, président, sur le projet de décret mettant en œuvre les schémas de services collectifs.

M. Philippe Duron, président, a souligné que les projets de schémas de services collectifs étaient le produit d'une démarche nouvelle, le schéma national prévu par la loi du 4 février 1995 n'ayant pas abouti. Documents de planification élaborés sur la base d'un horizon de vingt ans, les schémas couvrent la plupart des politiques sectorielles structurant le territoire. La perspective traditionnelle est inversée, et l'offre standardisée d'équipements abandonnée pour faire place à une planification attentive aux besoins collectifs. Les schémas prennent largement en compte les priorités territoriales : à la planification "descendante" définie à Paris se substitue une planification qui intègre les demandes. L'autre originalité de cette démarche est qu'elle a fait une large place à la concertation.

Le président a ensuite évoqué quelques aspects particuliers qui auraient pu être plus largement développés, tout en soulignant que, du fait du caractère novateur de la démarche, il était normal que certaines lacunes se fassent jour.

Le suivi varie d'un schéma à l'autre, il est dans certains cas limité, dans d'autres plus complet. L'un des problèmes principaux est celui de la périodicité de la révision qui reste à définir et de l'éventuelle simultanéité de cette révision. Il faudrait en outre prévoir une normalisation des organismes de suivi qui en faciliterait la lisibilité, et la généralisation de tableaux de bord. Cette évaluation est d'autant plus nécessaire que le schéma de développement de l'espace communautaire (SDEC) met l'accent sur la nécessité de renforcer la coopération à l'échelon transnational.

Le président a ensuite estimé que la dimension européenne n'était pas suffisamment prise en compte, malgré les améliorations apportées à la dernière version, rédigée après avis des régions. Même si de nombreux schémas comportent des développements à ce sujet, on est souvent loin d'une réflexion sur la construction européenne dans les différents secteurs : les projets de schémas auraient pu présenter le contexte européen, les éventuelles modifications réglementaires et les défis à venir. Ils devraient, en outre, être mieux articulés avec le schéma de développement de l'espace communautaire.

Abordant la transversalité entre les différents projets de schémas, il a estimé qu'elle était fondamentale pour instaurer un développement durable. Plusieurs passerelles existent entre les différents schémas, mais elles pourraient être encore renforcées.

Par ailleurs, il a souligné que l'équilibre entre la compétitivité et l'équité territoriale était un des défis majeurs de ces schémas : il est clairement inscrit dans certains d'entre eux (par exemple, les schémas de l'enseignement supérieur et de la recherche, et du sport) ; dans d'autres, cette problématique pourrait être mieux dégagée.

Le président a ensuite mis l'accent sur le nécessaire maillage du territoire, estimant que la carte du "polycentrisme maillé" en 2020 proposé par la DATAR ne corrigeait qu'imparfaitement les tendances actuelles, que l'ouest français risquait d'être marginalisé, et que certains espaces intérieurs restaient à l'écart. Il a souhaité la réalisation d'un projet ouest européen et le développement de liaisons ouest-est, en proposant plusieurs exemples, et a suggéré une politique volontariste de rééquilibrage au profit des zones rurales. Il a enfin proposé que les volets régionaux des schémas permettent de montrer davantage les projets de chaque région et en a conclu qu'il fallait encourager les mailles territoriales (régions, pays, agglomérations) à se doter d'instruments de réflexion, les schémas devant inciter à la prospective régionale.

M. Pierre Cohen a souhaité que le rapport de synthèse de la Délégation, tout en soulignant les manques ou les faiblesses des projets de schémas, insiste sur l'aspect positif d'une démarche qui a le mérite d'exister et dont l'intérêt est d'être vivante et de pouvoir être accompagnée.

Il a proposé par ailleurs que le rapport de synthèse souligne la nécessité d'un meilleur maillage du territoire mais a refusé que des choix locaux soient expressément formalisés, estimant en effet que le rôle de la Délégation était plutôt de proposer des orientations de principe.

M. Jean Espilondo a évoqué les différentes possibilités de franchissement des Pyrénées et a estimé que la Délégation devait permettre l'examen de toutes les solutions proposées (traversées en différents points, collaborations entre la route et le rail...).

Il a proposé un franchissement occidental des Pyrénées qui permettrait de ne laisser de côté ni le Pays basque français et le Pays basque espagnol ni le Portugal. Il a regretté que l'aménagement du territoire tende à privilégier la région méditerranéenne qui est déjà fort bien équipée. C'est pourquoi il convient de garder une grande ouverture d'esprit sur ces problèmes et d'examiner toutes les possibilités.

M. Philippe Duron, président, a observé que le Conseil national d'aménagement et de développement du territoire (CNADT), lors de l'examen des projets de schémas, venait effectivement de prendre position sur le franchissement des Pyrénées en rappelant qu'il s'agissait d'un problème important puisque, pour un poids lourd qui franchit les Alpes, trois franchissent les Pyrénées.

Il a souligné la nécessité de mieux relier les finistères européens à l'axe européen en évitant les différents obstacles (par exemple, l'Ile-de-France, les massifs montagneux...).

M. Yves Coussain a souligné que les zones les plus enclavées devaient trouver leur place dans le maillage du territoire et que les schémas de services collectifs des transports devaient en tenir compte.

Il a souhaité par conséquent que la liaison Atlantique-Méditerranée passe par les régions très enclavées du Limousin et du Cantal, observant que la desserte de Toulouse était déjà excellente et n'avait pas besoin d'être améliorée.

M. Serge Poignant a estimé à ce propos qu'il convenait de prendre en compte toutes les demandes exprimées depuis des années, par exemple, l'arc atlantique, la route des estuaires, la liaison Rhin-Rhône, l'évitement de Paris... et d'agir afin qu'aucun maillon ne manque.

Il a constaté l'importance des pôles européens mais a insisté sur celle des réseaux européen, par exemple, en matière de recherche, d'universités, de santé.

Il a émis par ailleurs quelques réserves sur la possibilité de prévoir une politique à vingt ans dans le domaine des nouvelles technologies, et a avoué son scepticisme quant aux résultats des choix opérés pour les espaces naturels et ruraux.

M. Jean-Michel Marchand a noté que, s'agissant des transports, les projets de schémas comportaient des orientations et non des prévisions de tracés précis ; il a jugé qu'en la matière, il convenait d'évoquer l'attention qui devait être portée aux régions ouest de l'Europe à travers le renforcement des liaisons transversales, évitant le passage par la région Ile-de-France. Il a souhaité que la Délégation insiste sur le manque de transversalité entre les différents projets de schémas, ainsi que sur l'importance de la notion de réseau entre les pôles d'équilibre.

M. Jean-Claude Daniel a souligné que la transmission tardive d'une nouvelle version des projets de schéma avait handicapé la Délégation dans son travail d'analyse et de proposition ; il a considéré qu'il convenait de mettre en valeur ce défaut de procédure et d'en tirer la leçon pour l'avenir, afin que le suivi et la révision des schémas se déroulent dans de bonnes conditions.

Il a ensuite estimé que les objectifs de la politique d'aménagement du territoire, à travers les neuf schémas pris dans leur ensemble, consistaient à promouvoir un territoire équilibré, au sein duquel chacun puisse vivre dans l'équité, et à favoriser les échanges. Il a souligné qu'il convenait que le territoire français soit le mieux organisé possible pour bien s'insérer dans l'espace européen et international.

M. Jean-Claude Daniel a ensuite considéré qu'il ne fallait pas penser l'organisation actuelle du territoire européen comme une réalité immuable et que la question était de savoir comment organiser au mieux le territoire pour promouvoir une répartition plus équilibrée qui, en particulier, tienne compte du développement nécessaire des zones rurales. En ce qui concerne notamment les moyens de communication, il a noté qu'il convenait à la fois de penser aux façons "d'accrocher" notre territoire aux pays voisins et de s'efforcer d'éviter la concentration des réseaux autour de l'Ile-de-France.

S'agissant de la question de la transversalité entre les schémas, il a estimé que l'examen de chacun d'eux pris séparément avait permis un approfondissement de l'analyse de chaque secteur, en évitant que le travail engagé ne se concentre excessivement sur les sujets les plus sensibles ; il a jugé qu'il convenait à présent de mettre en valeur la démarche d'ensemble. Evoquant la notion de "polycentrisme maillé", il a considéré que l'important était d'organiser convenablement le territoire.

M. Pierre Cohen a estimé que la Délégation ne devait pas porter ses avis sur des sujets excessivement ciblés territorialement. Il a jugé que le rééquilibrage au profit des régions ouest de l'Europe ne devait pas être l'objectif principal exprimé et qu'il convenait plutôt de mettre en valeur la nécessité d'un rééquilibrage global maillant l'ensemble du territoire.

M. Jean-Claude Daniel a insisté sur l'intérêt, pour la Délégation, de ne pas restreindre sa vision à la défense de liaisons ou de zones territoriales particulières. Les liaisons transversales entre l'est et l'ouest - et la liaison Atlantique-Méditerranée ne constituent qu'un exemple - doivent toutes être soutenues, dès lors qu'elles ne traversent pas la région parisienne.

Un débat s'est ensuite engagé à propos de la rédaction précise qui devait être retenue, dans le rapport de synthèse, quant au renforcement des liaisons transversales, auquel ont participé MM. Philippe Duron, Pierre Cohen, Yves Coussain, Jean-Claude Daniel, Jean Espilondo et Henri Nayrou. A l'issue de ce débat, M. Philippe Duron, président, compte tenu de la convergence des remarques présentées portant sur la nécessité, pour la Délégation, de prendre en compte le territoire dans son ensemble, a proposé une rédaction de portée plus globale, qui affirme la nécessité d'améliorer les liaisons Atlantique-Méditerranée.

M. Pierre Cohen a regretté que certains domaines, comme la justice, n'aient pas fait l'objet d'un schéma spécifique. Par ailleurs, il a souhaité que l'avis de la Délégation insiste davantage sur la nécessité de marquer fortement l'existence d'un lien entre chaque schéma et les services publics concernés. Citant l'exemple des nouvelles technologies de l'information et de la communication, il a observé que la Délégation ne devait pas laisser entendre que la mise en œuvre de celles-ci relèverait du secteur privé.

M. Serge Poignant, regrettant que la notion de schéma national prévue par la loi du 4 février 1995 ait été abandonnée, a souhaité que les liens unissant les neuf schémas de services collectifs soient davantage mis en valeur afin d'établir la cohérence de l'ensemble du travail effectué. Par ailleurs, il s'est interrogé sur les questions que pouvait soulever le schéma sur l'énergie.

M. Philippe Duron, président, a précisé que la question de l'énergie était abordée dans le rapport de la délégation sous l'angle de la transversalité et de la cohérence avec le schéma des transports et le schéma des espaces naturels et ruraux. Indiquant que certains avaient reproché au schéma d'être resté trop centré sur les questions des économies d'énergie et des énergies renouvelables, il a précisé que le maintien d'une politique énergétique nationale restait une priorité et que cette question ferait l'objet d'un débat devant le Parlement en 2002.

Par ailleurs, il a rappelé que lors de l'examen du schéma de services collectifs du sport, la Délégation avait réservé sa décision sur la recommandation présentée par M. Félix Leyzour, rapporteur, visant à supprimer la commission nationale interministérielle sport et environnement. Il a estimé, pour sa part, que le souci de transversalité entre les schémas devait conduire, au contraire, à valider la création de cette institution.

Conformément à l'avis du président, la recommandation n'a pas été adoptée.

La Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a autorisé à l'unanimité, en application de l'article 7 de son règlement intérieur, la publication du rapport de synthèse sur le projet de décret mettant en œuvre les schémas de services collectifs.


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