ASSEMBLÉE NATIONALE


DÉLÉGATION
À L'AMÉNAGEMENT ET AU DÉVELOPPEMENT
DURABLE DU TERRITOIRE

COMPTE RENDU N°2

mercredi 3 octobre 2001
(Séance de 11 heures)

Présidence de M. Philippe Duron, président

SOMMAIRE

 

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- Audition de M. Jean-Pierre CATALAA, Directeur de la Mission nouvel aéroport, et de Mme Florence ROUSSE, Directrice-adjointe, à la Direction générale de l'aviation civile du Ministère de l'équipement, des transports et du logement, sur la création d'un nouvel aéroport à vocation internationale

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La délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire a entendu M. Jean-Pierre CATALAA, Directeur de la Mission nouvel aéroport, et Mme Florence ROUSSE, Directrice-adjointe, à la Direction générale de l'aviation civile du Ministère de l'équipement, des transports et du logement, sur la création d'un nouvel aéroport à vocation internationale.

M. le Président : La délégation à l'aménagement du territoire est une institution récente. Elle est née avec la loi d'orientation et de l'aménagement durable du territoire du 25 juin 1999.

Nous avons le souci d'informer les parlementaires et de leur permettre d'avoir un droit de regard sur tout ce qui concerne l'aménagement du territoire. Nous sommes très intéressés par le travail engagé dans le cadre de la Démarche d'utilité concertée pour un site aéroportuaire international (DUCSAI) que nous suivons de près. Nous avons d'ailleurs rencontré, au printemps dernier, M. Pierre Zémor, chargé de l'animation de ce débat public.

Nous avions convenu de ne pas intervenir pendant le temps du débat public, car il convenait de le laisser se dérouler dans toute sa sérénité. Toutefois, au moment où ce débat s'achève, nous souhaitons mener quelques auditions de manière à pouvoir émettre un avis auprès du gouvernement, comme la loi nous l'autorise.

Notre avis ne sera ni aussi complet ni aussi ciblé que celui qui sera issu du débat public qui a pour mission de délimiter ou de proposer des sites au gouvernement. Néanmoins, il représentera l'expression des parlementaires qui composent cette délégation.

Nous souhaitons que notre délégation mette en évidence les conséquences ou les implications des choix gouvernementaux, en matière d'aménagement du territoire. Il nous semble que la loi d'orientation et d'aménagement du territoire promeut l'idée que la France a besoin de plusieurs métropoles à vocation internationale. Pour notre part, nous considérons que ces métropoles doivent également bénéficier d'un certain nombre de services évolués qui leur donnent ce statut de villes européennes. Les liaisons aériennes font partie de la palette d'indicateurs et d'outils dont elles ont besoin. C'est un des éléments.

L'autre élément qui nous semble important est qu'il y ait des synergies entre les choix aéroportuaires et les autres modes de transport. C'est une des thématiques qui a été voulue par ce gouvernement et que l'on retrouve à l'intérieur du schéma de services collectifs.

Enfin, il y a les effets induits par une plate-forme aéroportuaire  : effets positifs tels que le développement économique ou de l'emploi, effets plus négatifs tels que les nuisances aéroportuaires dont on voit bien aujourd'hui qu'elles suscitent, auprès d'un certain nombre de nos concitoyens, des réactions qui peuvent être vives.

La question est de savoir comment réconcilier, dans le cadre d'un développement durable, le développement économique, l'utilité sociale des grandes infrastructures avec le développement soutenable, pour reprendre une expression qui est en amont du développement durable, mais qui n'en reste pas moins pertinente.

Il nous a semblé que, parmi nos premières auditions, la direction de l'aviation civile devait être privilégiée, en raison de son expertise sans pareille et des informations qu'elle peut nous apporter quant au besoin d'aéroports ou aux critères de choix qui semblent les plus pertinents.

En préambule de cette audition, je souhaiterais que vous reveniez sur les schémas de services collectifs, notamment les schémas multimodaux de services collectifs de transport qui présentent différents scénarios pour les transports aériens. Nous aimerions savoir sur quelles bases ils sont fondés et ce qui vous amène à penser que le troisième aéroport est une nécessité impérieuse.

M. Jean-Pierre CATALAA : Vous avez évoqué, d'une part, vos conclusions que vous allez remettre aux membres de l'Assemblée et, d'autre part, les conclusions de la DUCSAI, notamment de M. Pierre Zémor. Il existe une différence essentielle sur ce plan.

M. Pierre Zémor étant chargé d'une mission qui consiste à animer le débat public, il lui est "interdit" de parler du fond et dans ses recommandations, il n'aura aucune recommandation à faire sur, par exemple, le site qui lui paraîtrait le plus adapté. Nous sommes dans le débat public. Il s'efforce de faire parler l'ensemble des acteurs, y compris les citoyens de base, mais il ne tire aucune conclusion sur le fond, à la différence de votre délégation, puisque vous avez le droit, sinon le devoir, de donner un avis sur des éléments de fond.

A cet égard, je voudrais souligner que cela donne au maître d'ouvrage, en particulier lorsqu'il s'agit de l'État, une position qui, dans le débat, nous a souvent gênés. Nous devons à la fois intervenir en tant que maître d'ouvrage, pour l'instant global, tant qu'il n'y a pas un maître d'ouvrage concret pour la construction et l'exploitation de la plate-forme, mais également en tant qu'expert. Vous connaissez la difficulté de trouver d'autres experts indépendants.

De plus, nous avons à préparer les éléments d'information qui seront nécessaires au gouvernement pour asseoir sa décision. Nous sommes attaqués sur tous ces fronts, et il est parfois difficile d'avoir la bonne posture au bon moment, lors de débats agités en particulier. Toujours est-il que nous essayons de faire face à cette nécessité.

Reste une dernière notion sur laquelle je souhaiterais insister. L'équipe que je dirige auprès de M. Pierre Graff, le directeur général de l'aviation civile, a aujourd'hui un rôle interministériel, notamment en raison de notre action au sein du débat public et de la préparation des éléments d'information à l'attention du gouvernement.

Je suis assez fréquemment amené à exprimer un point de vue, établi en concertation avec de nombreux ministères, dont ceux, par exemple, de l'Environnement, de la Défense et avec d'autres instances, dont la DATAR au premier chef. Nous avons donc un certain rôle interministériel, mais aujourd'hui je parle au nom de la Direction générale de l'aviation civile (DGAC).

Pour l'année 2000, les aéroports de Paris ont reçu 73 millions de passagers et l'ensemble des aéroports de province 51 millions, dont le premier, Nice, 9 millions de passagers. Vous constatez la grande disproportion qui existe entre Paris et la province. C'est également la plus importante au niveau européen. Même si aujourd'hui, les aéroports de province se développent à un rythme égal au moins à celui de Paris, cela ne suffit pas.

En ce qui concerne l'évolution du trafic des aéroports de Paris, on note dans les vingt dernières années, une croissance de 5,4 %. Si vous prolongez la courbe, qui est forcément exponentielle à taux constant, nous arrivons, en 2020, à environ 210 millions de passagers alors qu'en 2000, nous étions à 70 millions. Le choix du gouvernement dans les schémas de services est de limiter le taux de croissance annuel moyen à 3,3 ou 3,4 %, ce qui correspond à une demande de transport aérien de 140 millions de passagers en 2020. Compte tenu de la limitation environnementale d'Orly et Roissy, ces aéroports ne pourront recevoir qu'environ 90 millions de passagers. En 2020, la capacité d'accueil parisienne aurait ainsi un déficit de 50 millions de passagers.

Les schémas de services collectifs de transport recommandent de réduire cette demande, c'est-à-dire d'épuiser au préalable les autres moyens de faire voyager les personnes, à savoir en priorité développer les aéroports de province et promouvoir l'intermodalité et la substitution avec le train.

Quand on prend en compte ces différents points, on prévoit le transfert de 15 millions de passagers dans les aéroports de province et dans les TGV. Le nombre de 5 millions de passagers dans les aéroports de province peut paraître ridicule à certains, mais créer des liaisons internationales dans ces plates-formes demande une volonté certaine. Par exemple, la liaison Lyon-New York était assurée par Delta Airlines. Comme toutes les compagnies américaines, elle a vu ses résultats chuter en début d'année. Par conséquent, elle supprime les liaisons qui coûtent le plus cher, dont Lyon-New York.

Cela signifie que des efforts sont certainement à faire à cet égard. Le montant de 5 millions équivaut au double ce qui se serait passé naturellement par la création de nouvelles liaisons, notamment internationales, au départ de chacune des plates-formes de province. S'agissant du TGV, on prend en compte tout ce qui est prévu jusqu'à l'horizon 2020. Comme on "transfère" des voyageurs de l'avion sur le TGV, cela réduit le taux de croissance réel moyen annuel du transport aérien par rapport à 2000, qui passe de 3,3 à 2,9 %.

Les TGV, pour des trajets de moins de deux heures prennent 50 % des passagers à l'avion, de trois heures 30 %. Certains disent aussi, de façon abusive, que lorsqu'on va à New York, certes il faut prendre l'avion, mais que pour aller à Biarritz, Toulouse, Perpignan, on peut y aller en TGV.

Une question est posée par nos contradicteurs. S'appuyant sur certains arguments sociologiques, le développement d'Internet, la télévision, ils considèrent que les gens restent davantage chez eux. Une partie de leur raisonnement est tout à fait raisonnable, mais les nouvelles technologies peuvent aussi être une incitation à voyager davantage.

Comment se répartissent les trafics d'après les statistiques des dix dernières années concernant toutes les liaisons des deux aéroports parisiens avec l'étranger ? Pour les transports aériens en France équivalant à une durée de moins de trois heures de train, le trafic a stagné. Le trafic intérieur à plus de trois heures par train a une croissance modérée. Les trafics à l'intérieur de l'Union européenne correspondant à plus de trois heures de train croissent fortement, car l'avion y est plus intéressant. Le trafic qui se développe le plus, c'est celui qui est au-delà de l'Union européenne, c'est-à-dire au-delà de 1 500 kilomètres en général, distance à partir de laquelle l'avion est irremplaçable.

Cela nous semble indiquer que, contrairement à ce que disent un certain nombre de contradicteurs, il est nécessaire d'augmenter la capacité aéroportuaire en France.

Le trafic en transit est en développement pour le trafic longue distance.

Concernant les aspects conjoncturels, nous voyons l'effet de la guerre du Golfe. La situation actuelle se présente peut-être de façon différente, on ne sait pas quelle tendance cela va prendre. La guerre du Golfe est le seul élément qui soit un peu comparable. En 1990, les trafics ont chuté de 4 %, mais dès l'année suivante, ont repris leur croissance, comme s'il ne s'était rien passé.

M. le Président : Il est trop tôt pour faire des comparaisons entre 1990 et la situation actuelle, mais il y a de fortes chances pour que l'on retrouve une même tendance, à moins d'une récession profonde ou d'un traumatisme. Actuellement, ce que l'on semble mesurer sur les lignes américaines ou internationales à partir des États-Unis, c'est une chute profonde du trafic. Un prix Nobel indiquait dans la presse que sur un vol européen, un siège sur cinq était occupé. Il y a donc là un effet émotionnel très fort, qui peut aussi avoir un impact, mais qui sera limité dans le temps, car les besoins en transport vont se révéler à nouveau.

On voit bien l'intérêt et la nécessité de prendre en compte la montée prévisible du trafic. Dans celle-ci, il y a des phénomènes conjoncturels qui peuvent être perturbants, mais il y a aussi des phénomènes structurels, notamment les conséquences des accords internationaux, par exemple sur la lutte contre l'effet de serre.

On sait que le transport aérien n'est pas touché actuellement par les limitations liées au protocole de Kyoto. Certains souhaiteraient voir établir une taxe sur le kérosène. Pensez-vous que cela puisse avoir un impact sur le trafic aérien, en réduire l'usage ou en modifier le fonctionnement ?

M. Jean-Pierre CATALAA : Je répondrai cette fois en termes de coûts et non en termes de trafics. La conséquence de la guerre du Golfe a été, pendant un certain temps, un renchérissement du coût du kérosène. Le fait que le pétrole ait augmenté de 10 %, sur une période d'un an, s'est traduit par 1 % du coût global.

Aujourd'hui, c'est la sûreté que l'on va augmenter. Il y a eu un premier chiffrage des coûts que représentera la sûreté pour les exploitants et qui se répercutera à plus long terme sur le prix de la prestation. Ce premier chiffrage donne une augmentation de 1 %. Financièrement, cela coûte le même prix aux compagnies que pendant la guerre du Golfe. Par ailleurs, le prix du pétrole a baissé, tandis que le coût de la sûreté sera plus structurel, mais il est clair qu'au démarrage, les ordres de grandeur sont comparables.

En termes de prévisions, si l'on considère des éléments du passé, les groupes automobiles, lors du choc pétrolier de 1974 comme lors du second en 1980, considéraient qu'ils devaient se diversifier. Mais c'est plus la psychologie qui a joué. On sait que la voiture connaît un développement soutenu car elle constitue un espace de liberté. Toute la question est de savoir si le transport aérien a également une composante psycho-sociologique.

La différence avec l'automobile est que le niveau de développement n'est pas du tout le même que celui que l'on connaissait en 1974,où la voiture était déjà très répandue. Globalement, d'une part, la société va-t-elle avoir une demande économique pour les relations d'affaires et, d'autre part, quelle va être l'aspiration de la société ? Va-t-on constater un îlot de résistance de la consommation comme cela a été le cas pour la voiture ? On ne peut répondre à cette question. On a simplement l'impression d'une certaine comparabilité.

M. le Président : Parmi les données dont nous disposons, l'une est la demande, dont vous estimez qu'elle est en croissance exponentielle, une autre est constituée par les compagnies aériennes. Nous sommes dans un domaine profondément changeant. On a vu que la rationalisation du trafic, à la fin des années soixante, aux États-Unis, a entraîné le recours aux hubs et la mise en place de plates-formes de regroupement et d'éclatement du trafic.

On sait que ces plates-formes, en termes de remplissage des appareils, sont économiques, mais coûteuses en termes de kilomètres et de consommation. Considérez-vous que la stratégie de la "hubisation" est durable ou alors que la réorganisation des compagnies, au sein d'ententes très importantes comme Sky Team ou autre, est de nature à modifier leur choix à cet égard, notamment en travaillant plus en réseaux et moins en concentration sur une seule plate-forme  ?

M. Jean-Pierre CATALAA : Je vais vous donner mon sentiment personnel. J'ai eu à m'occuper des mesures d'accompagnement en 1997, qu'on a appelées les mesures Gayssot. J'ai vécu l'époque où Air France, qui avait instauré son hub vers 1991-92, a commencé à prendre conscience que cela la sauvait. Air France était fortement en déficit à un certain moment et, en 1995 ou 1996, elle a dégagé des résultats positifs grâce au hub. C'est quelque chose d'instantané.

Aujourd'hui, on s'interroge sur ce qui va prédominer dans les années à venir. J'aurais peut-être une réponse partielle à votre question. Pour ma part, je considère que le hub est globalement moins consommateur de kilomètres. Il est évident que le nombre de mouvements est plus considérable si vous avez quatre villes toutes reliées par du point à point. Un hub vous permet à la fois de rassembler un plus grand nombre de passagers pour prendre des vols intercontinentaux et de réduire le nombre des vols, ce qui est important en matière environnementale.

M. le Président : Avez-vous des études sur ce point  ?

M. Jean-Pierre CATALAA : Non, nous n'avons pas de statistiques directement sur ce thème. Par ailleurs, le hub permet d'avoir une variété de destinations beaucoup plus forte. Traditionnellement, il y a quelques décennies, lorsque l'on partait de France pour les États-Unis, on passait par New York et à partir de New York les voyageurs se dispersaient sur Atlanta, Los Angeles et d'autres destinations. Il y avait aussi un problème de rayon d'action des avions.

Aujourd'hui, toutes les compagnies réunies proposent environ une trentaine de destinations différentes. C'est un élément là aussi qui est difficile à réduire en statistiques. Mais vaut-il mieux faire un rassemblement sur Francfort, Schiphol ou Orly de voyageurs qui viennent de Madrid, Milan ou Montpellier pour se rendre directement dans vingt ou quarante villes des États-Unis, ou alors que chacun ait son Milan-New York, Madrid-New York ou Montpellier-New York  ? C'est aux États-Unis que les passagers diffusent. La réponse se situe des deux côtés, car New York "plafonne" également.

Le système du hub pose une importante question pour l'avenir : vivra-t-il dans dix, vingt, trente ans ou plus ? De même que le trafic routier a fini par saturer, on ne peut pas imaginer que le trafic "monte au ciel". Il y a un moment où on atteindra sinon une courbe asymptotique, du moins une courbe logistique qui se développe encore, mais d'une manière beaucoup plus réduite.

Dès lors que l'on aura sur l'ensemble des plates-formes majeures du monde un plafonnement en termes de mouvements et de créneaux, il est vraisemblable que le hub disparaîtra. On aura alors établi, y compris en France par exemple pour les aéroports de province, des liaisons point à point qui éviteront les regroupements sur un hub.

M. le Président : Le hub constitue plus une stratégie de compagnie que de plate-forme.

M. Jean-Pierre CATALAA : Oui. Air France, tant que subsiste l'optique de hub et qu'elle a sa valeur commerciale, préférera rester à Roissy.

M. le Président : Il est vrai que le troisième aéroport n'est pas forcément le souhait ou le besoin d'Air France dans l'immédiat.

M. Jean-Pierre CATALAA : Non, Air France va vraisemblablement rester à Roissy.

Mme Florence ROUSSE : En fait, le hub, pour les compagnies aériennes qui sont dans un environnement très concurrentiel, constitue un peu leur survie. Elles sont amenées, dans un marché libéralisé, à réagir à la concurrence. C'est un formidable instrument pour "tuer" le concurrent car, faire payer d'une certaine façon le transport de préacheminement du passager en correspondance par le passager qui n'est pas en correspondance, permet de maximiser le remplissage des avions, d'utiliser des avions plus gros, donc plus économiques, et donc de baisser les tarifs. C'est un cercle vertueux. Cela profite au passager qui n'est pas en correspondance, sous forme aussi de baisse de tarif. C'est donc un instrument très puissant de concurrence, avec une offre beaucoup plus diversifiée de dessertes.

Il faut se rappeler qu'autrefois, quand Air France desservait certaines destinations longs courriers en Asie, elle était obligée de faire des vols à escales multiples , compte tenu de l'insuffisance du trafic en bout de ligne. Même si, en ce qui concerne la capacité aéroportuaire de Paris, cela apparaissait comme une certaine économie, d'un point de vue environnemental et global, chaque escale supplémentaire était extrêmement coûteuse. On faisait du ramassage comme, par exemple, dans le réseau africain.

Concernant la question de l'avenir du hub et le lien avec les alliances, le problème est que les compagnies aériennes n'ont pas de vision prospective. C'est logique car elles raisonnent en entreprises qui réagissent face à un marché et leur discours est de dire que tout dépend de l'environnement dans lequel elles vont se trouver. S'il leur permet de développer leur hub, elles le développeront, sinon elles feront autrement.

D'autre part, elles ne savent pas anticiper une situation à dix ou vingt ans. La seule chose que peuvent dire les compagnies, c'est qu'elles sont réactives et qu'elles sauront s'adapter. Si elles doivent licencier ou annuler des commandes d'avions, elles le feront. Comment prévoir certains événements comme, par exemple, le dépôt de bilan de Swissair ? Les compagnies nous disent qu'elles sont dans un environnement, par essence, mouvant et qu'il ne faut pas leur demander quelle pourrait être leur stratégie.

Cela étant, il faut être conscient que les alliances qui se forment ont pour effet d'accentuer le phénomène de hub. Si une compagnie aérienne comme Air France noue des alliances en Amérique du Sud, aux États-Unis, etc., ce n'est pas pour multiplier ses propres vols, mais au contraire utiliser ses partenaires, via les alliances commerciales, d'où l'intérêt d'avoir une plate-forme unique d'entrée pour ensuite "éclater" le trafic sur l'autre continent. Les hubs, via le phénomène des alliances, concernent essentiellement les correspondances avec des vols longs-courriers. Les alliances favorisent complètement le phénomène des hubs. Si demain il n'y a plus que quatre ou cinq compagnies en Europe avec des alliances mondiales, cela favorisera l'installation de hubs.

Il est certain que, dans un tel contexte, les aéroports sont à la merci d'une faillite retentissante ou d'un changement stratégique, ce dont d'ailleurs ils se plaignent. Nous sommes dans un environnement presque totalement libéralisé, voulu au niveau de l'Union européenne. Actuellement, la Commission milite pour obtenir un mandat de négociation afin d'étendre cet espace libéralisé aux États-Unis, voire à l'ensemble de l'Amérique du Nord. Un des aspects importants de la création de ces espaces communs concerne l'établissement de règles de concurrence convergentes. Par conséquent, de grandes discussions - dont on parle peu - se tiennent au niveau de la Communauté européenne sur le droit de la concurrence.

La Commission, aujourd'hui, est contre le système des ententes et reste très attentive à ce que des alliances ne se transforment pas en position dominante. De leur côté, les compagnies aériennes estiment que la Commission est dépassée car elle en est toujours à sa doctrine de concurrence pure et dure. Toute nouvelle petite compagnie qui souhaite entrer peut le faire, les abus de position dominante sont interdits.

Mais ce faisant, la Commission fragilise les alliances car les compagnies ne peuvent passer des alliances intégrées. L'alliance parfaite pour les compagnies serait la fusion. Les aéroports vont dans le même sens. Certes, le hub a des inconvénients en termes de capacité aéroportuaire, car on est obligé de dimensionner la capacité de l'aéroport par rapport aux plages de pointe, mais d'un autre côté, ce serait pour les aéroports une situation plus confortable car moins incertaine.

Aujourd'hui, par exemple, Aéroports de Paris (ADP) fonctionne avec le hub d'Air France. Si Air France demain disparaissait, Aéroports de Paris se retrouverait brusquement avec des investissements qui auraient été dimensionnés par rapport aux plages de hub d'Air France. Peut-être les concurrents s'installeraient-ils immédiatement, mais cela crée une incertitude. En fait, c'est l'avenir qu'on ne sait pas prévoir : quelle sera demain la position de l'Union européenne par rapport aux alliances ? C'est le premier élément qui me parait fondamental.

Quant au deuxième élément, lorsqu'on établit des prospectives à 2050, certains considèrent que le trafic croit tellement et certaines liaisons atteignent une masse critique tellement élevée que nous, DGAC, nous demandons s'il y aura des liaisons à terme à très fort trafic qui n'auront plus besoin d'être autant alimentées par les liaisons d'apport.

On peut imaginer, sous toutes réserves, qu'à terme il n'y ait pas une suppression du hub, car le principe d'avoir des correspondances a toujours été dans l'esprit du transport aérien, mais du moins une atténuation du phénomène de hub qui en fasse moins un phénomène dominant avec une plus forte part de liaisons à très fort trafic. Mais cela reste un domaine incertain.

M. le Président : Comment percevez-vous le phénomène de privatisation des plates-formes aéroportuaires que l'on observe ici ou là, comme à Francfort ? Cela a-t-il un impact sur le trafic ?

M. Jean-Pierre CATALAA : A priori, non. Le seul impact vient du contrôle aérien. Les contrôleurs aériens français, par l'intermédiaire de leurs syndicats, trouvent très négatif le fait que le contrôle aérien de Grande-Bretagne ait été privatisé. Cela leur fait très peur. Ils n'aimeraient pas être privatisés.

M. le Président : Pensez-vous que c'est une tendance lourde et que la Commission pourrait pousser à une libéralisation de l'espace aérien ?

Mme Florence ROUSSE : Des discussions ont lieu actuellement sur le ciel unique. La Commission avait travaillé sur le thème de la privatisation et de la mise en concurrence des prestations de service, puis ayant constaté que c'était irréaliste, elle est revenue en arrière en indiquant qu'elle ne cherchait pas à privatiser ni à mettre en concurrence le cœur du métier du contrôle aérien, les deux thèmes étant liés. L'un des éléments fondamentaux de la gestion de l'espace aérien est que c'est une tâche de police, elle ne peut être faite par des entreprises en concurrence. On imagine mal le résultat si l'on mettait deux policiers en concurrence. Cela pourrait poser un problème en termes de sécurité.

La Commission est donc revenue en arrière et préconise maintenant une séparation fonctionnelle entre l'opérateur et le régulateur, de façon à garantir un meilleur contrôle du régulateur sur l'opérateur. La privatisation présente aussi des dangers, comme la surfacturation des redevances, et appelle donc un contrôle réglementaire.

C'est un débat qui continue. Il a été très passionnel au début, en particulier chez les contrôleurs aériens. Je crois que maintenant, il s'est quelque peu dépassionné, mais l'idée demeure d'améliorer l'interaction entre les États, de façon à favoriser une augmentation de la capacité globale de l'espace aérien.

M. le Président : En fait, si j'ai bien entendu Mme Loyola de Palacio il y a peu de temps, elle estime que la productivité de l'espace aérien européen est très inférieure à celle des États-Unis.

M. Jean-Pierre CATALAA : C'est en raison de ses frontières qui, en ce qui concerne le transport aérien, sont assez artificielles.

Mme Florence ROUSSE : Cela étant, il faut aussi considérer que la structure du trafic n'est pas la même aux États-Unis et en Europe. En Europe, on constate d'énormes disparités. Vous avez des pays de transit comme la France, avec énormément de survols dans toutes les directions, et des pays périphériques, comme les pays du Nord. Ces pays périphériques sont moins sur la sellette que la France ou la Suisse, lesquelles doivent assurer non seulement le trafic "origine" et "destination", mais aussi le trafic de survol qui a priorité. Un avion qui arrive des États-Unis est toujours prioritaire quand il arrive le matin. Par conséquent, cela crée des retards sur les départs et les arrivées des autres avions.

Cela étant, Mme de Palacio a eu le mérite de soulever une vraie question et d'avoir un effet accélérateur des débats, notamment sur les aspects techniques, auxquels nous croyons beaucoup. L'organisation Eurocontrol, qui regroupe trente États membres, a pour mission de faire des recommandations, d'établir des normes techniques communes pour tous les équipements, l'interface contrôleur-avion, les liens entre contrôles aériens.

Mme de Palacio a eu le mérite de poser la question d'Eurocontrol. Nous estimons que la solution passe notamment par Eurocontrol, pour faire en sorte qu'il obtienne plus de pouvoir et d'autorité, et que ses décisions soient appliquées plus rapidement et avec plus d'efficacité.

En effet, jusqu'à présent, au sein d'Eurocontrol, la règle de l'unanimité prévalait. Mme de Palacio a demandé que la Communauté adhère à Eurocontrol. Malheureusement, cette adhésion bloque depuis plusieurs années sur des questions liées au contentieux sur le statut de Gibraltar, entre le Royaume-Uni et l'Espagne.

L'adhésion à Eurocontrol est un facteur favorable, car cela permettrait de mettre en oeuvre la nouvelle convention révisée, avec le passage d'un vote à l'unanimité à un vote à la majorité simple ou qualifiée, et des positions communes des Quinze, ce qui est un point très important au sein d'Eurocontrol.

M. le Président : Vous venez d'évoquer le contrôle aérien. Cette question de la privatisation du ciel britannique est-elle susceptible d'influer sur les choix de localisation des aéroports ? On a pu voir certains syndicats de contrôle aérien indiquer que les sites du nord de la France étaient pénalisés par cette difficulté qui vient de la privatisation du contrôle aérien en Grande-Bretagne.

Mme Florence ROUSSE : C'est une réaction que nous ne partageons pas. On estime qu'à horizon 2020, il est difficile de dire que des obstacles d'organisation de l'espace aérien vont avoir un effet sur la capacité du système. Ou alors, cela reviendrait à dire que les frontières ont un effet, que le jeu de la concurrence ne s'exerce pas de façon équitable dans l'espace aérien.

Selon le discours des contrôleurs aériens, le contrôle britannique, touchant plus de redevances de la compagnie britannique implantée, par exemple, à Heathrow, aura tendance, en attribuant les créneaux de décollage et d'atterrissage, à "favoriser" son plus gros client. Ne partageons pas ce discours a priori. Comme pour les créneaux aéroportuaires, où il est convenu qu'ils soient délivrés selon certaines règles de priorité non discriminatoires, il ne faut pas dire que la privatisation va nécessairement entraîner des distorsions de concurrence.

En revanche, du fait que les sites au nord sont proches des frontières, il faudra forcément assurer une coordination pour le transfert des vols d'un centre à un autre. D'une part, les routes aériennes sont négociées au niveau international et, d'autre part, compte tenu de la présence d'une plate-forme aéroportuaire à proximité d'un autre gros aéroport, ce n'est alors plus l'effet frontière qui compte, mais le fait d'avoir deux plates-formes proches. De même qu'avec Orly, Roissy et un troisième aéroport parisien, se poseront des problèmes d'interface, de réorganisation complète de la région parisienne et de circulation en région parisienne, le même phénomène se posera forcément entre un aéroport situé au nord, et Londres et Bruxelles. On ne peut le nier, la distance et l'importance de ces aéroports font qu'il y aura des frictions entre les flux qu'il faudra gérer par des négociations avec nos partenaires, ce qui est peut-être plus compliqué que des négociations internes, entre Orly, Roissy et le troisième aéroport. C'est faisable à horizon de vingt ans, mais il faut reconnaître qu'une implantation est peut-être plus difficile au nord qu'au sud.

M. Jean-Pierre CATALAA : L'espace aérien est plus libre du côté de Beauvilliers, du fait que les avions vont plutôt au nord.

Sur le plan technique, que ce soit au nord ou au sud, dans la perpendiculaire des axes de Roissy et d'Orly, on a la possibilité d'organiser le nouvel aéroport avec le même nombre global de mouvements possibles sur le plan de la navigation aérienne à terme. En revanche, à l'est, on risque d'avoir, en raison des cônes de départ et d'arrivée de Roissy et d'Orly, une déperdition sensible de capacité globale de vols.

M. le Président : Vous avez indiqué que les compagnies s'adaptaient et qu'en termes de trafics aériens, on pouvait avoir des marges. Les Britanniques ont essayé de désengorger Gatwick et Heathrow grâce à un aéroport périphérique et en développant des aéroports de province, Manchester et Birmingham. Quels les éléments nous empêchent en France d'adopter de telles stratégies ?

M. Jean-Pierre CATALAA : Rien. Peut-être les Britanniques étaient-ils moins centralisés. Paris étant plus centré par rapport à l'Europe, la stratégie de hubs marche plus fort, d'autant que Heathrow est saturé. Mais Paris est également la première destination touristique du monde, sans oublier que les provinciaux viennent directement à Paris.

Aujourd'hui, nous avons les moyens de mener des stratégies que l'on n'a peut-être pas menées avec le volontarisme qui convenait. Par exemple, lors de discussions d'accords bilatéraux avec un pays, tel État va demander pour sa ou ses compagnies une entrée privilégiée sur Paris, voire uniquement Paris. L'État français doit lui spécifier d'aller aussi à Nice ou Lyon. Mais c'est un effort qui n'a peut-être pas été suffisamment fait.

M. le Président : Au-delà de ce que vous venez d'indiquer, il y a aussi l'autorisation des compagnies à desservir tel ou tel aéroport. M. Gérard Collomb nous a indiqué que l'un des obstacles pour Lyon est que des compagnies devraient être autorisées à desservir Lyon plutôt que d'aller à Paris.

Il parle en termes d'accessibilité aux plates-formes françaises. Il estime qu'il y a un effet à la fois vertueux, mais aussi pénalisant en sens inverse. Si on sait amener du trafic sur Lyon, on aura le développement d'autres lignes. En revanche, il considère que la suppression d'un certain nombre de lignes ou la disparition du Paris-New York peut avoir des conséquences sur l'intermodalité. M. Louis Gallois ne lui a pas caché que, faute d'un minimum de trafic, la SNCF pourrait revoir à la baisse les dessertes de Lyon.

Mme Florence ROUSSE : Il ne faut pas mélanger droits de trafic et marché. Dans le cas de Lyon-New York, la compagnie avait les droits de trafic. Une autre compagnie, quelques années auparavant, n'avait pas voulu desservir Lyon-New York. C'est donc clairement là une question de marché et non pas de droits de trafic. Ce n'est pas une question de droits de trafic si les compagnies aériennes françaises ou étrangères ne desservent pas les aéroports de province.

On pourrait peut-être avoir une politique incitant les compagnies à s'installer en province. Mais il ne faut pas réduire le problème à un problème de droits de trafic, car ce n'est pas le cas. Par ailleurs, les aéroports de province se sont beaucoup développés dans les années récentes, y compris Lyon. Ils ont des taux de croissance très importants. Comme le souligne M. Collomb, il est exact qu'il y a un effet "boule de neige", c'est une croissance relativement récente.

Aujourd'hui, nous sommes dans une situation intermédiaire, cette croissance n'a pas encore complètement porté ses fruits. On constate que les aéroports de province se sont développés essentiellement sur les principales liaisons intra-communautaires et pas assez nettement pour les liaisons internationales. Pour avoir un besoin de liaisons longs courriers, il faut aller plus loin. Il existe des cas particuliers comme Nice, car le vol Nice-New York a beaucoup de succès, mais c'est en raison d'un trafic touristique spécifique. A la base, c'est la question du marché qui compte.

M. Jean-Pierre CATALAA : Il convient d'arriver à la notion de hub régional. La gare TGV, qui est à Saint-Exupéry, n'a pratiquement pas été utilisée jusqu'à ce jour. Il faut en profiter pour se rabattre sur de tels atouts.

M. le Président : On constate que le TGV Sud-Est a une capacité d'attraction du trafic vers Lyon pour la partie sud de la France. On sait aussi que l'on peut vendre des vols New York-Avignon ou Aix-en-Provence en période de festival, avec un vol plus le TGV. Encore faut-il qu'il y ait des offres. On peut déjà acheter, depuis un an, certains vols Air France avec un billet SNCF, ce qui permet d'aller de point à point avec un seul billet.

M. Jean-Pierre CATALAA : Oui, mais une journaliste de Lyon me racontait que, lorsqu'elle téléphonait du temps de Delta Airlines pour le Lyon-New York, Air France, par exemple, lui répondait systématiquement de prendre l'avion à Lyon et de passer par Roissy, cela bien que Delta soit associé à Air France.

Mme Florence ROUSSE : A chacun aussi de mener une politique commerciale agressive. Sur ces aéroports, la croissance des liaisons intra-communautaires sera suffisante et commencera à attirer des liaisons longs courriers. Il y a des étapes successives. Cela étant, on a tenu compte d'un report supplémentaire sur les aéroports de province de 5 millions en 2020, pour prendre en compte une accélération du phénomène.

M. le Président : Concernant l'environnement des aéroports, comment voyez-vous les conditions d'acceptabilité d'une plate-forme car, même dans un lieu comme la Beauce, on constate des refus, des mobilisations ? Comment peut-on gérer les problèmes liés à l'interdiction de construction ? On a vu que Roissy était maintenant colonisé par les activités économiques et par l'habitat. Comment peut-on modifier les plans d'exposition aux bruits pour les rendre plus efficaces ?

M. Jean-Pierre CATALAA : Dans le cas de Roissy, deux phénomènes totalement différents expliquent la saturation environnementale. La décision de construire Roissy date de 1961 et son ouverture de 1974. C'était pendant les grandes années où l'on construisait Sarcelles, Villiers-le-Bel, Garges-lès-Gonesse, Deuil-la-Barre, etc. Il est clair que l'on s'est alors créé des problèmes par avance, mais sans le savoir.

Quant au deuxième phénomène, c'est qu'à l'époque, on n'avait pas conscience de tous les problèmes environnementaux du fait de la différence de trafic. Certes, les avions ont fait des progrès considérables en termes de bruit.. Une Caravelle, en termes d'énergie sonore, équivalait à cent Airbus A320. Les grands réacteurs à double flux d'aujourd'hui apportent un progrès considérable. Les recherches continuent, - d'ailleurs financées à 50 % par la DGAC - à la SNECMA et chez les autres motoristes, ainsi que sur les cellules d'avion et les questions aérodynamiques. La lutte contre le bruit est nette aujourd'hui.

Il y a eu les premières périodes où l'on a créé les plans d'exposition au bruit. Récemment, en 1999, a été créée l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA) présidée par M. Roger Léron. Actuellement, les propositions de la commission et les notions d'indices de bruit sont à la fois différentes et communes avec les autres modes de transport, mais tenant compte de la pondération entre le jour, le soir et la nuit.

Il est clair qu'aujourd'hui, lorsqu'on applique ces prescriptions, dans la simulation, on constate que le rectangle de protection est très long. Pour le troisième aéroport, le souhait est que le plan d'exploitation au bruit (PEB) soit établi pour toute la vie de l'aéroport et que l'on puisse, dès l'entrée, protéger l'ensemble du territoire contre la situation la plus bruyante de la vie de l'aéroport. Ce n'est absolument pas le cas dans les autres aéroports. J'ai l'impression qu'on ne peut le faire que dans le cadre d'un nouvel aéroport, même si cela pose aussi des problèmes.

Lors de chacune des réunions du débat de la DUCSAI, on entend dire que c'est une menace extraordinaire pour les gens qui vivent en dessous. Un agriculteur a des terres qu'il utilise pour sa production, mais il y a une sorte de droit implicite qui lui permet de vendre un terrain de temps à autre, quand il a besoin d'argent. Pour les maires et les propriétaires, bloquer tout un territoire n'est pas simple. Cela dit, il faudra le faire, et nous allons le préconiser.

Pour ce qui est des questions techniques, on sait qu'un PEB à 750 000 mouvements donne pour sa courbe C un territoire d'environ quarante kilomètres sur huit. Aujourd'hui, autour de Roissy, 350 000 personnes seraient à l'intérieur du PEB si on atteignait ce trafic. Si, comme certains le préconisent, on fait déménager 100 000 personnes, cela équivaut à un coût énorme de 30 à 40 milliards de francs. Sans parler des problèmes d'urbanisme et de fiscalité, car certains accepteront de déménager, d'autres pas. Le tissu urbain sera totalement mité. C'est surréaliste.

M. le Président : Merci pour ces éclairages. Il est très précieux pour nous d'avoir à la fois des précisions techniques sur le trafic, les conditions d'implantation d'un aéroport, et les rapports qui existent entre l'aéroport, l'économie et les habitants.


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