ASSEMBLÉE NATIONALE


DÉLÉGATION

AUX DROITS DES FEMMES

ET À L'ÉGALITÉ DES CHANCES

ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES

COMPTE RENDU N° 6

mardi 1er février 2000
(Séance de 18 heures)

Présidence de Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Présidente

SOMMAIRE

 

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- Audition de Mme Nicole Péry, Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle

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La Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a entendu Mme Nicole PÉRY, Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle.

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Présidente : Madame la Ministre, nous souhaiterions vous entendre sur vos deux champs de compétence, droits des femmes et formation professionnelle. Je rappellerai qu'en ce qui concerne les droits des femmes, vous avez lancé un certain nombre de chantiers en ce début d'année, notamment la campagne sur la contraception et la préparation des suites à donner au "rapport Nisand" sur l'interruption volontaire de grossesse.

S'agissant de la formation professionnelle dont le projet de loi ne viendra en discussion devant le Parlement qu'en 2001, nous souhaiterions travailler en amont cette question car elle concerne en premier lieu les femmes qui y ont difficilement accès.

Mme Nicole PÉRY, Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle : Je commencerai mon propos en évoquant un dossier qui nous tient à coeur à tous et à toutes, à savoir la campagne de contraception. A cet égard, je vous demanderai de veiller à ce que, dans vos circonscriptions et vos régions respectives, la dynamique mise en place à partir de cette campagne soit réellement présente au rendez-vous. La réussite de cette campagne reposera sur le partenariat construit avec tous les services de l'État, les ministères concernés, les associations et les centres hospitaliers. Aussi, est-ce plutôt un appel que je fais sur ce dossier : si vous sentez, dans vos régions, des déceptions, ou si vous observez que tous les services de l'État, les associations ou les centres hospitaliers ne travaillent pas dans un esprit de partenariat, alertez-moi car, lorsque nous évaluerons dans un an les résultats de cette campagne, nous essaierons de faire en sorte qu'ils en démontrent l'efficacité. C'est donc plutôt un appel à la vigilance que je vous lance, sachant que nous n'avons pas hésité à consacrer un quart du budget du Secrétariat aux droits des femmes -soit 24 millions de francs- à cette campagne. Ceci démontre mieux que tout discours la priorité politique que j'accorde à cette campagne.

Nous pourrons également dialoguer sur la position actuelle du gouvernement quant aux conclusions du "rapport Nisand" et sur les suites à y donner. Néanmoins, sur ce sujet, ma réponse ne sera pas différente de celle apportée il y a un mois, lors du lancement de la campagne par Mme Martine Aubry. Nous pourrons toutefois reprendre, si vous le souhaitez, un certain nombre de ces points.

Au-delà du sujet des droits propres des femmes, qui constitue une très forte priorité pour cette année 2000, je souhaite aborder brièvement la préoccupation du gouvernement visant à construire l'égalité entre les hommes et les femmes. S'agissant de la parité politique, une première lecture du projet de loi à l'Assemblée nationale, le 25 janvier dernier, a sensiblement amélioré ce texte. Le gouvernement s'inscrit évidemment dans cette dynamique. Mais, au-delà de l'égalité politique, dans le souci d'étendre l'égalité à tous les champs de la société, il reste à construire l'égalité professionnelle.

Après un nouvel examen de la "loi Roudy" de 1983, nous nous sommes interrogés sur les raisons pour lesquelles elle n'est pas plus utilisée dans les entreprises, par les partenaires sociaux, les syndicats, voire les salariés. Nous avons, sur ce point, longuement consulté le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle que nous avons fait revivre et sur lequel nous nous appuyons. Ce Conseil est une instance très utile pour une Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle puisqu'il permet de réunir l'ensemble des partenaires sociaux et de connaître leur position sur divers sujets. En ce qui concerne l'égalité professionnelle, j'ai pu mesurer qu'un certain nombre de partenaires sociaux avaient un regard extrêmement attentif et souhaitaient reprendre la dynamique interrompue de 1983. Nous n'avons donc pas hésité à les saisir de la proposition de loi qui reprend les conclusions du rapport de Catherine Génisson sur l'égalité professionnelle.

Il convient de signaler, car c'est une démarche innovante et intéressante, que le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle a manifesté beaucoup d'intérêt à ce travail relativement inédit sur une proposition de loi parlementaire et nous a suggéré des compléments très intéressants. Il en résulte que l'actuelle proposition de loi sur l'égalité professionnelle est plus complète et plus dynamique que le texte initial, car elle tient compte de l'apport des partenaires sociaux, en particulier dans le domaine des obligations qui manquaient à la "loi Roudy" de 1983. Ainsi, trouve-t-on dans le texte de la "loi Roudy" une simple obligation de négociation : les partenaires sociaux doivent se saisir de la question de l'égalité professionnelle et négocier, dans chaque entreprise, avec un objectif d'égalité. Mais, le Conseil supérieur a estimé que l'obligation de négocier dans chaque entreprise n'était pas suffisante et a suggéré que cette obligation soit étendue à chaque branche. Nous avons donc introduit cette suggestion dans le texte, de même que le rythme de l'obligation -3 ans- qui n'existait pas dans la loi de 1983.

La proposition de loi impose également l'obligation de définir des indicateurs. Dans la loi de 1983, il n'était pas possible de mesurer le degré des inégalités et, par conséquent, d'apprécier la réalisation de l'objectif d'égalité. Ces indicateurs -qui seront précisés par décret- feront l'objet de négociations approfondies avec les partenaires sociaux. Le Conseil supérieur a aussi proposé d'imposer une obligation d'affichage de ces indicateurs. Cela permettra à chacun d'avoir connaissance de l'état de ce sujet et mettra fin à la confidentialité qui, jusqu'à présent, entourait cet exercice. Des sanctions pénales sont également prévues si l'entreprise ne se conforme pas, tous les trois ans, à son obligation de négocier l'objectif d'égalité dans l'entreprise et dans la branche.

Au-delà de l'égalité politique et professionnelle, j'ai choisi une méthode de travail inspirée par la dimension européenne de mon parcours politique qui a duré seize ans. Bien que n'étant pas directement en charge des problèmes des droits des femmes -puisque je travaillais plutôt sur les politiques de développement, de coopération avec le tiers monde, sur le droit de la mer et de la pêche- ceux-ci revenaient régulièrement en séance plénière : je me suis donc imprégnée de l'esprit qui prévalait, à savoir une démarche globale sur l'ensemble des sujets de société, avec un objectif : l'égalité dans toutes les politiques et dans tous les champs de la société. J'ai trouvé cette démarche innovante, intelligente et efficace sur la durée. J'ai donc proposé à tous les membres du gouvernement de travailler, en partenariat, sur cette dynamique et d'inclure l'objectif d'égalité dans les politiques qu'ils mènent. Afin d'être bien comprise dans ma démarche, j'ai proposé des sujets bien précis qui restent de la responsabilité de chaque ministère, mais qui viennent ainsi étoffer une plate-forme qui sera présentée publiquement le 8 mars prochain et qui engagera l'ensemble du gouvernement.

Cette politique globale d'égalité ira donc au-delà de la parité politique et de l'égalité professionnelle, même si ces deux dimensions seront présentes dans la plate-forme gouvernementale. D'autres sujets de société seront également présentés, notamment un sujet qui sera important pour notre action en 2000, à savoir les violences dont sont victimes les femmes. C'est un sujet qui est encore aujourd'hui tabou et qui est très mal évalué puisqu'il n'y a, en France, aucune étude ou enquête sur ce sujet. Aucun organisme, ministère ou service n'a pu me fournir un rapport récent sur ce fait de société. Pour ma part, je voudrais connaître le volume des violences subies, et savoir si les chiffres qui circulent ici et là ont une réalité. Comme, sur un tel sujet, il ne m'est pas possible de tenir un discours creux ou ne reposant pas sur des bases acceptées et quasi scientifiques, j'ai décidé de lancer une enquête importante à compter de janvier 2000 et qui se poursuivra jusqu'à l'été. Mes services travaillent sur ce point en collaboration avec l'Institut de la Sorbonne, qui en est maître d'_uvre. A l'issue de cette enquête qui concernera sept mille femmes, dans l'hexagone et les DOM-TOM, nous devrions connaître le volume des violences subies et leur nature : violences domestiques, violences dans les lieux publics, violences sur les lieux de travail.

Pour mener à bien notre action en ce domaine, j'ai notamment proposé à Mme Elisabeth Guigou, Ministre de la Justice, de créer un groupe de travail qui déterminera s'il existe des dispositions dans notre réglementation -même si elles ne sont peut-être jamais utilisées- et de m'aider à dresser un tableau comparatif des législations européennes sur ce sujet. En effet, plusieurs pays d'Europe, du nord et du sud, se saisissent cette année de ce fait de société, le problème des violences demeurant présent d'une façon très préoccupante dans tous les pays, quelle que soit l'évolution positive de la situation des femmes, tant au niveau politique que professionnel. Nous examinerons comment des pays qui élaborent de nouvelles législations (l'Italie, la Grande-Bretagne, l'Espagne) considèrent ce phénomène, vers quels dispositifs ils s'orientent et comment la France pourrait se doter de dispositifs complémentaires. Sur le sujet des femmes en difficulté, je construis également un partenariat avec M. Louis Besson, Ministre du Logement. Toutes les femmes que je rencontre et qui ont connu un problème de précarité et de violences me disent en effet que leur souci premier est le logement. Si elles hésitent à quitter leur domicile, c'est parce que les lieux d'accueil d'urgence les concernent elles-mêmes, mais pas leurs enfants. Il s'agit là d'un souci immense. J'ai donc demandé au ministre de réfléchir à cette question, afin que ces femmes en difficulté soient considérées comme prioritaires et, au-delà de l'accueil d'urgence, que soit menée une politique du logement qui puisse les aider à reconstruire très vite leur cellule familiale et à accueillir leurs enfants. D'ores et déjà, nous avons signé une circulaire commune demandant aux préfets que, dans le cadre des quotas qu'ils ont à gérer en matière de logements sociaux dans les départements, les femmes en situation de grande précarité puissent être considérées comme un public prioritaire.

Ceci vous montre la méthode que j'ai choisie pour que la préoccupation du droit des femmes et de l'égalité entre les hommes et les femmes soit présent dans tous les ministères et toutes les politiques. Je vous donne donc rendez-vous le 8 mars car il est fort probable qu'une réunion extraordinaire du gouvernement se tienne sur ce sujet et qu'il y ait une communication sur cet engagement du gouvernement.

J'évoquerai maintenant la deuxième dimension de mon action, celle de la réforme de la formation professionnelle.

Il est vrai que la réforme sur laquelle nous travaillons croise parfois le sujet de l'égalité entre les hommes et les femmes puisque les femmes, actuellement, ont deux fois moins accès que les hommes à une action de formation tout au long de leur vie. L'inégalité est très forte et particulièrement pour les emplois de femmes peu qualifiés. Les inégalités sont doubles : elles existent entre les deux sexes, d'une façon générale, et entre les niveaux de qualification. L'un des défis de cette réforme est de faire en sorte que le nouveau système de formation professionnelle puisse être un droit que chacun et chacune exerce tout au long de sa vie, ce qui est très loin d'être le cas aujourd'hui. Ce nouveau droit, lorsqu'il sera construit, servira arithmétiquement plus aux femmes qu'aux hommes puisqu'actuellement, ce sont les femmes qui, dans la population active, sont les moins qualifiées. Ce sont elles qui devront avoir accès en priorité à des actions de formation tout au long de la vie. Mon propos peut être illustré par un chiffre très peu connu sur le niveau de qualification de la population active en France : 40 % de la population active, hommes et femmes confondus, ont un niveau de qualification inférieur ou égal au niveau 5, c'est-à-dire le niveau du CAP. Parmi cette population active la moins qualifiée, il y a beaucoup de femmes. Un deuxième chiffre m'a également fait beaucoup réfléchir : 80 % des ouvriers et des employés, en France, sont des femmes.

Le droit individuel de chaque salarié à la formation professionnelle, qui sera l'objet de la loi de 2001, est d'abord, à mon avis, un sujet du dialogue social, une responsabilité des partenaires sociaux.

D'autres volets de la réforme relèvent davantage de la responsabilité de l'État, ce qui a permis de les faire avancer plus vite. Cette réforme se traduira par l'examen de plusieurs projets de loi, dont l'un, annoncé par le Premier Ministre à Strasbourg, sera traité en 2000. Le plus important concernera ce que l'on appelle encore aujourd'hui la "validation des acquis" et pour lequel je proposerai les termes de "reconnaissance de l'expérience professionnelle tout au long de la vie" qui me semblent plus compréhensibles.

Cette petite révolution m'a valu un an de travail avec le ministère de l'Education nationale, les autres ministères concernés ainsi que les partenaires sociaux car elle conduit à un véritable bouleversement. Je propose en effet que, demain, on ne reste plus essentiellement ce que l'on est à 20 ou 25 ans, lorsque l'on quitte la formation initiale -même si celle-ci est très importante- mais que chaque homme et chaque femme, plusieurs fois au cours de sa vie professionnelle, puisse demander une reconnaissance de son expérience professionnelle. Ceci implique un très vaste élargissement du champ d'application de la loi de 1992 en ce qui concerne la reconnaissance de l'expérience professionnelle pour la délivrance d'un diplôme. Des dispositions nouvelles permettront de valider l'expérience professionnelle pour l'ensemble des certifications, quel que soit le ministère valideur, que ce soit l'Education nationale, le ministère de l'Emploi, y compris les certifications accordées par les partenaires sociaux et les organismes privés. Cela concernera l'ensemble des formations, des titres et des certifications, ce que la loi actuelle ne permet pas.

La loi de 1992 ne permet actuellement qu'une reconnaissance partielle de cette expérience pour obtenir un diplôme. L'élargissement de son champ d'application fera l'objet d'un projet de loi en l'an 2000. J'insiste sur cette dimension car ce sont en priorité des femmes que l'on pourra ainsi conforter. Ces femmes, qui représentent actuellement sur le marché du travail 80 % des employés et des ouvriers et qui n'ont quasiment pas de formation initiale, ne manquent pas d'expérience professionnelle, de savoir ou de savoir-faire. Mais jusqu'à présent, elles ne pouvaient pas se voir reconnaître cette expérience professionnelle. Dès lors que cela aura été validé, mesuré et reconnu, elles pourront demander la certification correspondante.

Cette réforme interviendra très vite puisque, en principe, le projet de loi de modernisation sociale, dans lequel se situera ce volet formation professionnelle, doit être présenté le 15 mars en conseil des ministres et venir devant votre assemblée en avril prochain.

Volontairement, j'ai essayé de montrer comment, au travers de cette réforme de la formation professionnelle, on pouvait également répondre aux inégalités que subissent les femmes et à la fragilité de leur curriculum vitae, dans le marché de l'emploi. Mais bien sûr, je pourrais l'évoquer sur bien d'autres sujets, puisque c'est une réflexion très large et complète.

M. Michel HERBILLON : Madame la Ministre, je voudrais avoir votre sentiment sur l'ensemble des questions -parité politique, égalité professionnelle...- que vous évoquez en ce qui concerne les droits des femmes. De votre point de vue, où se situe l'équilibre entre une nécessaire égalité des femmes et des hommes dans les différents domaines évoqués et un excès de réglementations, d'obligations allant jusqu'à un degré extrêmement élevé de détails et de contraintes qui pourraient être mal perçus par la société.

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Présidente : Pourriez-vous nous dire, en quelques mots, les suites que le gouvernement entend donner au "rapport Nisand" ? Vous avez également parlé du lancement d'une enquête sur les violences ; parallèlement, un certain nombre de conseils régionaux -notamment la région PACA- engagent des études pour connaître le phénomène des violences. Y en a-t-il d'autres ? Au sujet des droits propres et de l'égalité des chances, nous travaillons actuellement à la mise en place du document unique de programmation relatif aux fonds structurels : c'est là l'occasion d'appliquer à la fois l'égalité des chances et le "mainstreaming"... Êtes-vous certaine que toutes les déléguées régionales sont intégrées dans les cellules de réflexion constituée autour du SGAR sur les fonds structurels ?

Mme Odette CASANOVA : Je voudrais vous poser quelques questions sur le "rapport Nisand" car, sur le terrain, nous connaissons de gros problèmes dans la pratique de l'IVG par les établissements publics. Il est urgent que le gouvernement intervienne sur ce point.

Vous indiquez qu'une proposition de loi sur l'égalité professionnelle va être déposée. Etait-ce nécessaire alors qu'existe déjà la "loi Roudy" ? N'aurait-il pas été possible d'amender simplement le code du travail, de façon à laisser toute sa valeur à la "loi Roudy" qui a représenté une étape essentielle dans l'histoire des droits des femmes ?

A propos de la connaissance des violences faites aux femmes -pour laquelle ma région est pilote- et du problème du logement des femmes victimes de violences et quittant leur domicile conjugal, j'ai eu connaissance de cas de femmes auxquelles on proposait un logement, mais auxquelles la DDAS enlevait leurs enfants pour des questions de revenus. Au-delà du logement, il y a donc là tout un ensemble de textes à revoir.

Mme Muguette JACQUAINT : La question concernant le "rapport Nisand" et les problèmes qui en découlent est souvent évoquée par les femmes dans toutes nos circonscriptions. Dans les services hospitaliers, les jeunes filles ou femmes qui veulent effectuer une IVG rencontrent un certain nombre de difficultés. En raison de cette situation, des IVG continuent de se faire à l'étranger. En ce qui concerne le délai de l'IVG, certains avancent un délai de 23, voire 30 semaines, ce qui me semble totalement exagéré. Mais, par rapport à l'Europe, la France accuse en ce domaine un retard de deux semaines. Quel délai envisage le gouvernement ?

S'agissant de l'égalité professionnelle, vous avez eu raison, Madame la Ministre, d'indiquer les raisons pour lesquelles la "loi Roudy" n'a pas été appliquée dans les entreprises ; cela relève en général de la responsabilité des partenaires sociaux ainsi que des organisations syndicales elles-mêmes et il faut les y sensibiliser. Les négociations importantes qui se tiennent dans le cadre de la diminution du temps de travail et des 35 heures me semblent être l'occasion de poser à nouveau la question de l'égalité professionnelle. Mais, fallait-il une loi supplémentaire par rapport à la "loi Roudy", qui date de 1983 et qui a rencontré des difficultés d'application ? Il est regrettable, pour appliquer une loi qui est bonne, d'être obligé de faire une seconde loi et d'introduire des sanctions et des contraintes pour que la première s'applique. Mais, cela permettra de relancer le débat sur l'égalité professionnelle qui, à mon avis, a manqué, de même que plus largement tout ce qui concerne les droits propres des femmes. Quoi qu'il en soit, nous manquons en France de statistiques et de références pour mener une étude scientifique sur la discrimination. Dans la prochaine loi sur l'égalité professionnelle, disposer d'indicateurs sur les discriminations et les inégalités dans ce domaine, comme dans d'autres, permettra de s'attaquer aux racines du mal.

Mme Danielle BOUSQUET : En ce qui concerne le rôle essentiel que jouent les chargées de mission aux droits des femmes dans les départements, je voudrais insister sur les propos de Mme la Présidente, à savoir la nécessité de rappeler aux préfets que ces chargées de mission doivent être associées à l'ensemble des travaux relatifs aux contrats de Plan, et en particulier aux contrats de ville. En effet, la population touchée par les contrats de ville est formée à 80 % de femmes et sauf exception, le mot "femme" n'apparaît pas dans le texte des contrats de ville. De plus, aucune action spécifique n'est prévue en matière de santé ou autres les concernant. On dit "on", les "publics en difficulté", comme s'il s'agissait d'un public asexué, alors qu'il est composé de 80 % de femmes. Je souhaite donc que les chargées de mission soient associées aux négociations actuelles des contrats de villes.

S'agissant des femmes victimes de violences, vous avez indiqué très justement que se posait non seulement la question des accueils ou hébergements d'urgence, mais également du logement en général. Or on sait que beaucoup de femmes victimes de violences ne quittent pas leur domicile, non seulement parce qu'elles n'ont pas de logement, mais aussi parce qu'elles n'ont pas de travail. Même si elles ne travaillent pas, elles ne se sont pas forcément inscrites à l'ANPE. Lorsqu'elles quittent le domicile conjugal, elles se trouvent donc dans un hébergement certes, mais sans revenus. La charité ne m'ayant jamais semblé une bonne manière d'aborder les choses, je souhaite savoir si l'on peut envisager qu'elles soient, de manière impérative, prioritaires dans tous les dispositifs existants, même lorsqu'elles n'ont pas d'enfants.

Je voudrais également intervenir sur les suites du "rapport Nisand", à partir d'une situation que je viens de connaître dans mon département. Il se trouve que le service de planification, très soucieux de rendre le service normal qui est celui de l'hôpital public, a souhaité pouvoir élargir la plate-forme de médecins susceptibles d'effectuer des IVG. Il a donc fait appel à l'ensemble des médecins du département. Trois d'entre eux ont répondu, dont deux en retraite ou sur le point de l'être. Or, il est important que ces IVG puissent être effectuées à l'hôpital, sinon elles ne se feront pas. La question est donc posée de savoir comment permettre à des médecins, qui sont les seuls volontaires, de continuer d'exercer alors que, théoriquement, ils ne le peuvent plus. S'ils ne rentrent pas à l'hôpital, il n'y aura plus d'IVG dans les Côtes d'Armor.

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Présidente : Quel bilan pouvez-vous faire de la mise en application du plan national d'action pour l'emploi, notamment en ce qui concerne les femmes ?

Mme Nicole AMELINE : Il est clair que la formation professionnelle est un problème général, hommes et femmes confondus, dans ce pays. On sait très bien que si l'économie se rapproche du plein emploi, ce sont toujours les emplois peu qualifiés qui resteront les emplois exclus. J'aimerais comprendre les causes de ce non-accès à la formation. Comme vous, je considère que celle-ci est fondamentale pour des femmes qui auront plusieurs vies successives et qui auront besoin de temps pour l'éducation et de temps ensuite pour se réinsérer dans la vie professionnelle. Où se situent les blocages ? J'aimerais comprendre pourquoi des femmes qui ont un parcours scolaire, voire universitaire, remarquable, entrent ensuite dans une culture du renoncement et de la résignation qui fait qu'elles démissionnent. Y a-t-il véritablement des volontés, syndicales ou internes à l'entreprise, qui font qu'elles n'ont pas accès à ce qui est un droit général et universel ? J'aimerais savoir si nous pourrions disposer de comparaisons européennes sur les mesures, en matière de formation professionnelle, qui ont été particulièrement efficaces. Autant s'inspirer des bons exemples.

Mme Jacqueline LAZARD : Ma question concerne également la formation professionnelle car il me semble important d'aller très vite vers la reconnaissance de l'expérience professionnelle. Toutefois, il me paraît difficile de parler de formation professionnelle sans envisager l'orientation. Au niveau de l'orientation, où en sont les travaux que votre ministère mène avec celui de l'Education nationale, pour lutter contre une orientation encore sexuée ?

Mme Odette CASANOVA : Je voudrais appuyer les propos de Mme Danièle Bousquet sur le travail des chargées de mission départementales et sur leur implication auprès des préfets en matière de politique de la ville et d'orientation professionnelle. S'agissant de l'orientation professionnelle, on peut, au niveau des départements, faire des actions importantes si l'on implique les chargées de mission, sous réserve que les préfets, les recteurs et les inspecteurs d'académie aient reçu des directives précises.

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Présidente : Sans oublier les contrats de plan ainsi que les objectifs 2 et 3 des fonds structurels.

Mme Nicole PÉRY, Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle : Monsieur Herbillon, votre question porte sur le point d'équilibre entre l'évolution naturelle des faits de société et la nécessaire réglementation pour faire bouger les choses, quels que soient les sujets. Je répondrai en citoyenne. Peut-être les inspecteurs du travail ont-ils un amour instinctif pour la réglementation et la législation. Moi, je me situe avant tout dans la réflexion politique. Je reste très attentive aux faits de société pour voir de quelle façon les choses évoluent. Force est de constater que les dossiers de société n'évoluent pas par eux-mêmes d'une façon suffisante. Le législateur, quels que soient les gouvernements en place, a la responsabilité de regarder les faits de société. Parfois, le législateur traduit par une évolution législative ce qui, en fait, correspond à une une évolution de société, telle la loi de Simone Veil de 1975 qui a pris acte de ce que la société pratiquait déjà. Parfois, le législateur peut donner une impulsion, quand il existe un blocage, et devancer la société. Je pense notamment au projet de loi sur la parité. Par conséquent, la réponse ne peut être d'une extrême simplicité. Parfois le législateur prend acte et traduit une évolution de société, parfois il prend acte d'un blocage et il essaie, par la législation, de faire bouger les choses.

Parfois aussi, on légifère et les choses ne bougent pas autant qu'on le souhaiterait. Je reprendrai l'exemple de la "loi Roudy" de 1983. Force est de constater que si les citoyens, les partenaires sociaux et les associations ne se saisissent pas de leurs droits, la loi reste pratiquement lettre morte. Sur le sujet de l'égalité professionnelle, lors de ma dernière séance de travail avec le Conseil supérieur, j'ai été frappée par la conviction avec laquelle l'ensemble des syndicats et certaines organisations patronales évoquaient l'égalité professionnelle : je les sentais d'une totale sincérité et soucieux de se saisir du sujet. Je ne dis pas pour autant que la loi de 1983 était en avance sur son temps. Des événements comme la montée croissante du chômage ont peut-être brouillé les priorités. Ce qui était ressenti largement, en 1983, comme une priorité a été surpassé par la priorité absolue de la lutte contre le chômage. Les partenaires sociaux, dans le cadre des conventions collectives dans les entreprises, étaient beaucoup plus préoccupés de l'emploi que de l'égalité devant l'emploi. Cela nécessiterait un travail d'expertise plus approfondi par des sociologues pour mesurer cet état de fait.

Personnellement, il me semble que, sur ce sujet de l'égalité, nous sommes dans une bonne période pour essayer d'aller de l'avant et de faire en sorte qu'il soit pris en compte dans les entreprises. Toutefois, il ne vivra réellement que si les partenaires sociaux en éprouvent le besoin et savent le faire avancer.

La proposition de loi de Mme Catherine Génisson offre des outils d'une certaine souplesse. Ainsi, par exemple, dans la "loi Roudy", il ne pouvait y avoir une contractualisation entre l'État et l'entreprise que s'il y avait un plan d'égalité massif, c'est-à-dire concernant l'ensemble du personnel. Après avoir travaillé sur ce sujet avec les partenaires sociaux et le Conseil supérieur, il nous a semblé que l'État devrait contractualiser dès lors qu'il y a proposition du chef d'entreprise d'avancer sur un volet de l'égalité, même si ce n'est pas un plan général : par exemple le volet formation continue, ou le volet construction progression de carrière. Au delà de cette souplesse qui sera proposée, nous allons élargir l'objet même de la contractualisation avec une incitation financière.

Pourquoi une proposition de loi, et pourquoi ne pas s'en tenir à la loi de 1983 et agir par décret pour imposer, par exemple, l'obligation de négocier, le rythme de cette obligation, et les sanctions pénales ? Parce que de telles dispositions nécessitent un acte législatif. Nous avons pensé qu'une proposition de loi, additive à la loi de 1983 et respectant le même esprit que celle-ci, était un exercice qui pouvait être défendu comme tel plutôt qu'un nouveau projet de loi gouvernemental.

Pourquoi une telle inégalité dans l'entreprise, entre les hommes et les femmes, devant une action de formation tout au long de la vie ? Dans le livre blanc que j'ai rédigé et qui a été rendu public il y a environ un an, nous avons analysé ces inégalités. J'en rappelle un certain nombre. La première explication est qu'aujourd'hui, les femmes sont très majoritaires dans les emplois peu qualifiés. Or les personnes -hommes ou femmes- qui assument les emplois peu qualifiés, ont très peu accès à une action de formation continue. En effet, les plans de formation établis par les chefs d'entreprise ont jusqu'alors davantage favorisé les cadres que les employés peu qualifiés qui, il faut le souligner, en font beaucoup moins la demande car ils en ressentent beaucoup moins la nécessité.

Je vois aussi une autre explication dans le manque de motivation. Quand on suit un plan de formation ou une action de formation continue, contrairement ce que l'on pourrait penser, ce plus de qualification est très rarement pris en compte dans une construction de carrière, une responsabilité accrue, ou une augmentation de salaire. Cela inciterait plus de personnes si l'évolution professionnelle et personnelle dans l'entreprise était mieux valorisée, mais il faudrait aussi que les salariés les moins qualifiés aient un comportement plus "agressif", c'est-à-dire fassent des demandes répétées et volontaires, dont le chef d'entreprise devrait tenir compte.

La troisième explication est que les femmes, d'une manière générale, assument, dans la vie quotidienne, de lourdes tâches domestiques, le lien avec les enfants, la garde des enfants. On peut le voir à la façon dont les salariés, qui ont un contrat de travail à temps partiel, se situent par rapport à la formation tout au long de la vie. Les hommes, qui ont un contrat à temps partiel, utilisent largement leur temps libre pour suivre une action de formation. En revanche, les femmes utilisent très peu leur temps libre pour des actions de formation car elles ont d'autres charges sur leurs épaules.

C'est donc une addition de facteurs qui explique, à ce point, le niveau des inégalités. Et pour exprimer le cumul de toutes les inégalités dans une phrase image, je dirais que lorsque vous êtes une femme, employée, dans une entreprise de moins de vingt salariés, dans une région éloignée d'une grande ville, vos probabilités d'accès à la formation continue tout au long de la vie sont de 2,5 %. En revanche, quand vous êtes un homme, cadre d'une entreprise de plus de deux mille salariés, proche d'un grand centre urbain, vos probabilités d'accès sont de 70 %.

L'autre sujet, que vous avez largement évoqué, concerne les droits propres, et tout d'abord les suites du "rapport Nisand". Ce sujet est lié à la politique de la santé et n'est pas dans le champ de ma compétence directe, même si, d'une façon naturelle, je suis présente dans tous ces travaux car je considère ce sujet comme un dossier "droits des femmes". Un délai de douze semaines, alors qu'il est de dix actuellement, permettrait de rejoindre la moyenne de l'ensemble des pays de l'Union européenne. Aujourd'hui, même si le sujet suscite encore des débats, on sait que, sur le plan de la santé des femmes, l'on peut aller jusqu'à douze semaines, sans le moindre risque. Ce point faisait débat en 1975. Certains pays de l'Union européenne ont des lois beaucoup plus libérales en ce qui concerne le délai, mais un délai de deux semaines supplémentaires nous permettrait déjà de rejoindre la moyenne de l'Union européenne.

S'agissant des mineures, lors de mes rencontres avec les intervenants du mouvement français du planning familial, des centres d'orthogénie ou de planification dans les secteurs hospitaliers, je constate que déjà, dans la pratique, un certain nombre de centres assument cet acte quand il y a une détresse très forte de certaines mineures. Les médecins, qui sont en première ligne, veulent aujourd'hui être mieux protégés par la loi. Les représentants du planning familial et les responsables des centres de planification sont favorables à ce que nous réfléchissions à un accompagnement de la jeune fille par un adulte. Ils y sont favorables parce qu'eux-mêmes assument ce rôle, qui demande beaucoup de temps, et ils veulent être aidés dans cet accompagnement de la mineure. Cela peut être un parent proche ou un médecin, et quand il y a vacance totale, ce sera l'un des responsables du centre de planification. Ce n'est pas toujours le discours tenu par les associations qui ne demandent pas l'accompagnement de la jeune fille. Toutefois, ceux qui sont en phase directe avec ces difficultés souhaitent que l'on puisse faire accompagner la jeune fille dans cet acte.

Concernant la pratique de l'IVG dans les hôpitaux, je ne suis pas en charge de la santé, mais je puis vous faire part de ce que j'ai constaté lors de mes rencontres, dans le cadre de mes responsabilités. Lorsque je rencontre des gynécologues, chefs de service, ils me disent qu'il y a un "ras-le-bol" chez les gynécologues "militants". C'est vrai qu'on évoque rarement ces médecins qui, sur le plan de la philosophie personnelle, ne sont pas en totale harmonie avec ce droit fondamental, mais qui l'exercent, parfois pendant des heures extrêmement lourdes dans leur emploi du temps, afin de rendre service à ces femmes et assumer la loi. Les chefs de service me font part du "ras-le-bol" de certains gynécologues, car dans certains centres, cela devient beaucoup trop lourd dans le cadre même de leur travail.

Le souhait de ces médecins serait d'instaurer, dans l'ensemble des services hospitaliers, une obligation d'un minimum d'heures consacrées à l'IVG dans l'emploi du temps du gynécologue. Ils estiment que deux ou trois heures par semaine seraient supportables par tous, hormis ceux qui, au nom d'une clause de conscience, refuseraient d'effectuer cet acte. Les médecins souhaiteraient que l'on réfléchisse à cette dimension de l'exercice.

Mme Conchita LACUEY : Cela me choque parce qu'en réalité, on pourrait penser que ce n'est pas un service à part entière.

Mme Nicole PÉRY, Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle : Cela ne me choque pas. Je peux comprendre qu'au bout de dix ou quinze ans, certains médecins supportent moins bien de ne faire que cela.

S'agissant de l'enquête sur la violence envers les femmes, elle se fera pendant six mois avec un budget d'environ 4 millions de francs. Certains conseils régionaux, très intéressés, sont partie prenante à cette enquête, telle la région PACA, ce qui permettra de trouver plus facilement un financement.

Quant à l'implication suffisante ou non des chargées de mission dans les politiques pour lesquelles la dimension "égalité" apparaît et sur la prise de conscience par les préfets de leur rôle, j'ai à plusieurs occasions écrit, avec l'autorisation de M. Jean-Pierre Chevènement, aux préfets pour leur expliquer ce point. Dans certaines régions, cela fonctionne très bien, dans d'autres moins bien. Mais des circulaires sont adressées aux préfets de façon régulière. Dans une majorité de départements, la situation est tout à fait correcte. Il est vrai que nous avons oublié, dans les diverses circulaires que j'ai signées, la spécificité "contrats de ville". Nous élaborons actuellement une circulaire afin de rattraper cet oubli.

Les questions portant sur la détresse des femmes battues, le logement, la famille, le revenu, la garde des enfants, la priorité d'accès de ces femmes à un emploi ou à une action de formation, ouvrent un vaste sujet. Je répondrai sur ceux qui relèvent de ma responsabilité. Comment faire pour qu'une femme, qui n'a aucune activité professionnelle lorsqu'elle quitte son domicile conjugal, puisse le plus rapidement possible avoir accès à une action de formation - qu'on lui refuse actuellement - ou à un dispositif de retour vers l'emploi ? J'ai traité ce sujet au travers du plan national d'action pour l'emploi 1999 en demandant que 55 % de l'ensemble des dispositifs de formation pour le retour à l'emploi soient prioritairement accordés aux femmes et plus particulièrement aux femmes en situation de détresse. Cette proposition, qui a été présentée à Mme Martine Aubry qui l'a acceptée, est incluse dans le plan national d'action pour l'emploi.

J'ai mené par ailleurs, auprès de l'ensemble des directeurs de l'ANPE et de l'AFPA, une action de sensibilisation et de mobilisation sur tous ces sujets. J'obtiens maintenant des statistiques sexuées. Au début, ma demande de statistiques systématiquement sexuées n'a pas été comprise. J'ai exposé que ces instruments étaient indispensables pour me permettre d'évaluer les dispositifs, voir si nous sommes sur le bon chemin ou si nous commettons des erreurs qu'il convient de rectifier. Maintenant, cette démarche est comprise et se met en place. Ils ont eux-mêmes changé leurs logiciels et, dans la présentation de leurs statistiques, ont revu tous les formulaires pour que l'on puisse obtenir des statistiques sexuées. Il me sera donc possible de vérifier d'ici un an s'il y a eu un effort accru vers les femmes, sur l'ensemble des dispositifs de retour à l'emploi et d'accès à la formation tout au long de la vie. L'évaluation faite, à ce jour, montre que d'ores et déjà, nous avons atteint 55 % du public féminin, pour l'ensemble des dispositifs de retour à l'emploi et d'accès à la formation.

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Présidente : Peut-être pourrons-nous refaire un point, dans le cadre du débat budgétaire 2001 à l'automne prochain ?

Mme Nicole PÉRY, Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle : Certainement. J'ai le souci de construire des politiques très pragmatiques, mais qui répondent également à ce que j'ai analysé comme étant des besoins prioritaires. J'inscris mes actions dans la durée. Quel responsable politique pourrait croire que l'on peut tout bouleverser du jour au lendemain, quelle que soit la volonté politique des uns et des autres ? On ne change pas une société aussi rapidement. Je crois en l'efficacité d'une démarche de construction de l'égalité au travers de toutes les actions politiques et j'espère que les diverses évaluations permettront de mesurer que nous sommes sur la bonne voie.

Mme Muguette JACQUAINT : La reconnaissance des acquis professionnels sera-t-elle étendue à la fonction publique ?

Mme Nicole PÉRY, Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle : Ma compétence professionnelle se limite au monde privé de l'entreprise.

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Présidente : Cette excellente question signifie que nous devons auditionner M. Emile Zucarelli sur ce problème.

Mme Nicole PÉRY, Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle : Je soutiendrai cette démarche. S'agissant de l'orientation scolaire, dont j'ai réellement le souci, je signerai une convention avec M. Claude Allègre et Mme Ségolène Royal, autour du 25 février ou du 3 mars. Avec l'Education nationale, cette convention prendra la forme d'un partenariat qui réaffirmera la nécessité d'une action d'orientation scolaire tant pour les filles que pour les garçons, car il ne me semble pas normal que certains domaines professionnels soient exclusivement féminins. Cette action d'orientation professionnelle sera dirigée vers les filles et les garçons, mais incitera les filles à diversifier leur choix et à faire en sorte qu'elles aient connaissance des espoirs d'emploi dans tel ou tel secteur. Tout en tenant compte de leurs goûts personnels et de leurs aptitudes, il faut leur faire connaître les filières qui seront, demain, plus riches que d'autres en emplois. On connaît les métiers vers lesquels se dirigent encore beaucoup trop de jeunes filles et qui ne débouchent pas ensuite sur des emplois.

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Présidente : Peut-être aurons-nous l'occasion de nous revoir lors de discussions sur d'autres projets ou propositions de loi. Nous souhaiterions pouvoir également vous auditionner, sur une base régulière, soit dans le cadre du débat sur les orientations budgétaires, soit sur celui de la formation professionnelle, sujet auquel nous tenons tous et toutes. Il me semble que nous aurons maintes occasions, dans les prochains mois, de débattre avec vous à nouveau sur ces questions.

Mme Nicole PÉRY, Secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle : J'ai très bon espoir que la loi de modernisation sociale vienne en avril en première lecture, avec un volet formation professionnelle

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Présidente : Merci, Madame la Ministre.


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