ASSEMBLÉE NATIONALE


DÉLÉGATION

AUX DROITS DES FEMMES

ET À L'ÉGALITÉ DES CHANCES

ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES

COMPTE RENDU N° 8

mardi 29 février 2000
(Séance de 14 heures)

Présidence de Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Présidente

SOMMAIRE

 

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- Examen du rapport de M. André Vallini sur la proposition de loi de Mme Catherine Génisson, M. Jean-Marc Ayrault et les membres du groupe socialiste, relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (n° 2132)

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La Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a examiné le rapport de M. André Vallini sur la proposition de loi de Mme Catherine Génisson, M. Jean-Marc Ayrault et les membres du groupe socialiste, relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (n° 2132).

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, présidente a rappelé les travaux antérieurs de la Délégation sur ce texte et proposé de passer directement à l'examen des recommandations présentées par le rapporteur.

Mme Yvette ROUDY a souhaité que la Délégation précise que les informations obligatoirement requises des entreprises devaient être sexuées et chiffrées. Elle a insisté sur l'importance du rôle de l'inspection du travail à qui le Gouvernement doit donner des instructions précises et des moyens adéquats. Rappelant le succès des campagnes publiques d'information qu'elle avait organisées dans ses fonctions ministérielles, elle a souligné la nécessité d'en lancer de nouvelles de manière à sensibiliser les femmes à l'éventail des métiers qui leur sont offerts.

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, présidente, a indiqué que ces campagnes d'information devaient avoir pour objet de convaincre les femmes qu'il n'y a plus de professions qui leur sont inaccessibles.

Mme Danielle BOUSQUET a souhaité que la Délégation précise que les plans d'objectifs par ministère présentés aux comités techniques paritaires chaque année devaient être actualisés.

Plusieurs membres de la Délégation ont ensuite relevé que la notion de « représentation équilibrée » retenue par la proposition de loi devait être distinguée de celle, beaucoup plus restrictive, de « mixité ». La définition de cette notion étant renvoyée à un décret en Conseil d'État, Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, présidente, a souhaité que la Délégation invite le Gouvernement à présenter un plan d'étapes vers la parité.

Mme Danielle BOUSQUET, Mme Michèle RIVASI et M. André VALLINI, rapporteur, ont alors suggéré d'adopter une recommandation précisant que l'objectif de parité devait être atteint au plus tard en 2010.

Mme Danielle BOUSQUET a également souligné l'importance d'engager, à l'occasion de la discussion de la proposition de loi, un débat sur le harcèlement moral ou psychologique dans les rapports de travail.

Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, présidente, a suggéré de compléter les recommandations proposées par le rapporteur pour insister sur la nécessité d'inciter les organisations syndicales à équilibrer leur représentation, notamment au sein des organismes paritaires des différentes fonctions publiques ainsi que sur l'importance d'une représentation équilibrée des membres désignés par l'administration dans tous les organismes paritaires de la fonction publique de l'État et des élus locaux dans les organismes paritaires de la fonction publique territoriale.

Après l'intervention du rapporteur proposant plusieurs modifications visant à prendre en compte ces différentes observations, la Délégation a adopté les recommandations suivantes :

RECOMMANDATIONS ADOPTÉES PAR LA DÉLÉGATION

1. Il convient tout d'abord de faire émerger les conditions favorables à l'égalité professionnelle dans toutes les politiques publiques ayant trait à la formation initiale et professionnelle ainsi qu'à l'emploi.

2. Au titre d'une approche intégrée de la question de l'égalité professionnelle, il est souhaitable de prolonger le processus engagé par la proposition de loi, par des informations sexuées et chiffrées, obligatoirement requises des entreprises et notamment dans le cadre du bilan social, du plan de formation et de l'analyse des conditions de travail et des risques professionnels.

3. Le rapport déposé tous les deux ans par le Gouvernement sur le Bureau des assemblées parlementaires, en application de l'article 21 de la loi du 11 janvier 1984, qui ne fait que décrire la situation existante, devrait s'accompagner, pour chaque ministère, d'objectifs chiffrés comportant une définition précise des évolutions à mettre en oeuvre : corps à féminiser, concours à promouvoir... Dans les ministères où le rapport révélerait des déséquilibres, un plan d'objectifs devrait préciser les pourcentages obligatoires à atteindre. Les plans d'objectifs actualisés par ministère devraient être présentés aux comités techniques paritaires (C.T.P.) tous les ans.

4. Il est nécessaire de mieux faire connaître les carrières du secteur privé comme de la fonction publique aux jeunes filles par des campagnes publiques d'information, notamment en éditant des documents adaptés aux différents niveaux de la scolarité, en adaptant les brochures d'orientation, en sensibilisant les conseillers d'information et d'orientation, en améliorant l'information auprès des étudiants dans les filières universitaires et en promouvant une image des grandes écoles qui en démontre l'accessibilité aux femmes comme aux hommes.

5. Dans la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, il conviendrait de supprimer la disposition qui permet l'organisation de recrutements distincts lorsque l'appartenance à l'un ou l'autre sexe constitue une condition déterminante de l'exercice des fonctions. Ces recrutements distincts ne subsistent en effet plus que dans deux corps de fonctionnaires et des solutions internes aux administrations concernées devraient pouvoir être avancées.

6. La notion de « représentation équilibrée », qui se distingue de la notion plus restrictive de « mixité », devrait être précisée afin de limiter la marge d'appréciation du pouvoir réglementaire dans la définition de la proportion de représentants appartenant à chacun des sexes.

7. Au dernier alinéa de l'article 6bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, il devrait être précisé que la désignation, par l'administration, des membres des jurys et des comités de sélection constitués pour le recrutement et l'avancement des fonctionnaires et de ses représentants au sein des organismes consultés sur les décisions individuelles relatives à la carrière des fonctionnaires et sur les questions relatives à l'organisation et au fonctionnement des services, doit concourir à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. L'objectif est d'atteindre la parité au plus tard en 2010.

8. Il conviendrait de prévoir une représentation équilibrée des élus locaux au sein des commissions administratives paritaires et des comités techniques paritaires de la fonction publique territoriale, avec l'objectif d'atteindre la parité au plus tard en 2010.

9. Il conviendrait, dans la fonction publique de l'État, de prévoir également une représentation équilibrée des membres désignés par l'administration au sein du conseil supérieur de la fonction publique et des comités d'hygiène et de sécurité, avec l'objectif d'atteindre la parité au plus tard en 2010.

10. La lutte contre le harcèlement sexuel doit faire l'objet d'une réflexion dans les entreprises comme dans la fonction publique : à cet effet, le rapport de situation comparée et les négociations succédant à sa publication, de même que les débats au sein des comités techniques paritaires des administrations, constituent des cadres propices à une meilleure prise en compte de ces questions.

11. Il conviendrait d'établir un cadre juridique précis afin de permettre aux organes représentatifs des personnels de débattre, dans le secteur privé et dans la fonction publique, sur le thème du harcèlement moral ou psychologique dans les rapports de travail.

12. Il est souhaitable que l'inspection du travail qui, en vertu du droit en vigueur, est déjà destinataire des rapports de situation comparée (article L. 432-3-1, 3ème alinéa du code du travail) dispose des moyens lui permettant de veiller à la régularité de la présentation et à la crédibilité des informations de ce document obligatoire. Elle devra également recevoir des instructions précises afin de contrôler la mise en œuvre de l'obligation de négociation sur le thème de l'égalité professionnelle dans les entreprises comme au niveau des branches.

13. Il conviendrait, pour l'État, d'inciter les organisations syndicales, par diverses mesures, à équilibrer leur représentation, notamment au sein des organismes paritaires des fonctions publiques, avec l'objectif d'atteindre la parité au plus tard en 2010.

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