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Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 17ème jour de séance, 43ème séance

3ème SÉANCE DU MARDI 27 OCTOBRE 1998

PRÉSIDENCE DE M. Arthur PAECHT

vice-président

          SOMMAIRE :

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 1999 (suite) 1

La séance est ouverte à vingt et une heures.

M. le Président - Pour laisser à la commission des affaires sociales le temps de terminer ses travaux, je suspends la séance quelques instants.

La séance est reprise à 21 heures 5.


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LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 1999 (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 1999.

M. Gérard Terrier - Cette troisième loi de financement de la Sécurité sociale, dont le budget est supérieur à celui de la nation, marquera certainement un tournant. En effet, la très grande majorité des responsables politiques s'accordent sur un point : l'offre de soins a des incidences considérables sur les dépenses de santé dont le dérapage risque d'entraîner rationnements des soins et inégalités. Il convient donc d'organiser, de maîtriser et de réguler cette offre : notre système de soins ne saurait durablement vivre à crédit.

L'évolution de son financement ne peut à lui seul garantir la pérennité de l'assurance maladie. Il faut passer à une deuxième étape. Notre système de soins s'est trop longtemps développé sur des bases quantitatives. Cela a été nécessaire pour parvenir à un taux d'équipement hospitalier satisfaisant et un nombre de médecins suffisant. Mais dans la mesure où la Sécurité sociale "payait" sans vérifier si l'accroissement de l'offre de soins s'accompagnait d'améliorations sanitaires, les aspects qualitatifs ont été négligés. Ce projet de loi offre des outils structurels qui permettront la réorganisation nécessaire. Les caisses et les syndicats de médecins pourront désormais négocier des conventions dont le contenu ne se limitera pas aux tarifs ou aux questions juridico-administratives. Paradoxe : il faut aujourd'hui passer par la loi afin qu'il y ait demain moins de loi.

Pour la première fois depuis dix ans, les comptes de la Sécurité sociale retrouvent l'équilibre...

M. Bernard Accoyer - Prévision !

M. Gérard Terrier - Nous sommes, comme tous les Français, attachés à notre système de protection sociale dont la pérennité dépend en partie de cet équilibre. Nous devrions donc sur tous les bancs en être heureux.

Certains font valoir que la majorité a de la chance, puisqu'elle bénéficie du retour de la croissance ; d'autres jugent trop optimiste l'hypothèse retenue pour l'évolution de la masse salariale ; d'autres estiment que les mesures envisagées risquent de déstructurer le système et de démobiliser les acteurs de santé publics. Je ne reviens pas sur la gestion passée de ceux qui orchestrent aujourd'hui ces critiques. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Le déficit est passé de 53,2 milliards en 1996 à 33,2 milliards en 1997 et sera réduit à 13,3 milliards pour une prévision de 12,9 milliards.

M. Bernard Accoyer - Remontez plus loin dans le passé !

M. Gérard Terrier - Ce redressement tient pour un quart à la croissance et pour les trois quarts aux mesures structurelles décidées l'an dernier. Le retour des comptes à l'équilibre s'effectue sans prélèvements supplémentaires...

M. Jean-Luc Préel - Et sur l'épargne ?

M. Gérard Terrier - ...et surtout sans diminution des prestations ni des remboursements (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Voilà qui rompt radicalement avec le plan du gouvernement précédent qui frappait de plein fouet les assurés sociaux.

Si la croissance dépend bien sûr en partie de la conjoncture économique internationale, les mesures prises par le Gouvernement pour relancer la consommation et accroître le pouvoir d'achat, par exemple le transfert des cotisations salariales d'assurance-maladie vers la CSG, ont permis de la soutenir.

Comme beaucoup de mes collègues de la majorité, je suis extrêmement attaché à une réforme de l'assiette des cotisations patronales. Or, il en est seulement question dans l'annexe au projet de loi. Je sais combien vous tenez au dialogue et à la concertation, Madame la ministre. Ce ne doit pas être une raison de retarder par trop une réforme urgente ("Tout à fait" sur les bancs du groupe communiste). Les revenus du travail sont plus mis à contribution que les revenus du capital. Une plus grande solidarité serait nécessaire tout en veillant naturellement à ne pas entraver la compétitivité de nos entreprises, elles aussi indispensables à la cohésion sociale de notre pays.

Nous apprécions dans ce projet de loi l'effort consenti en faveur des pensions. En effet, une application stricte du dispositif institué par la loi du 23 juillet 1993, qui n'expire que le 31 décembre 1998, aboutirait à une diminution de 0,5 % des retraites, écart entre le taux d'inflation prévisionnel qui a servi à calculer la revalorisation 1998 et le taux constaté. L'article 29 du projet prévoit au contraire une revalorisation de 1,2 % au 1er janvier 1999, soit un gain de pouvoir d'achat de 0,5 %. Ce n'est là que justice envers nos aînés.

Cela étant, se pose le problème de la pérennité des retraites. Le Gouvernement a choisi de privilégier la solidarité entre les générations et donc de ne pas supprimer le régime par répartition. De l'audace sera toutefois nécessaire pour garantir à chaque retraité un minimum décent tout en assurant un financement durable et équitable du système. Il faudra aussi abroger la loi Thomas dont les décrets d'application n'ont d'ailleurs pas été pris. L'ouverture de fonds de solidarité vieillesse, même si les sommes restent pour l'instant symboliques, ouvre une piste intéressante à creuser dès lors qu'il s'agira seulement de régimes complémentaires.

On peut aussi espérer plus de justice dans l'assurance maladie et de cette préoccupation participent aussi les positions de notre collègue Boulaud sur la couverture maladie universelle. Le souci de la solidarité, de la justice et de la concertation a inspiré la rédaction des articles 13 et 14 relatifs à la famille. Les souhaits de la Conférence de la famille du 12 juin sont repris avec le retour à l'universalité des allocations familiales, l'extension du bénéfice de l'allocation de rentrée scolaire aux familles d'un enfant, le relèvement de 19 à 20 ans de la limite d'âge pour le maintien du droit aux prestations familiales et aux aides au logement, pour les jeunes inactifs ou touchant au plus 55 % du SMIC, l'alignement progressif du plafond de l'allocation de logement familial sur l'APL.

Nous souhaitons enrichir ce projet ; en particulier il me paraît nécessaire d'aborder dès maintenant la revalorisation des pensions de réversion et le cas des personnes handicapées. Nous comptons sur votre soutien pour améliorer encore un projet qui marque de réelles avancées et qui s'inscrit dans la durée par l'équilibre enfin retrouvé et par une offre de soins maîtrisée, organisée et régulée (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Bernard Accoyer - Avec cette loi de financement, le Gouvernement est conforme à sa ligne d'action : c'est le projet de l'immobilisme et des occasions manquées, les soins ambulatoires subissant le dogmatisme et l'agressivité du pouvoir contre les professions libérales de santé.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires sociales - Ah !

Plusieurs députés socialistes - Ça commence fort !

M. Bernard Accoyer - L'équilibre annoncé des comptes de la Sécurité sociale est un pari osé. Les recettes sont en effet surévaluées, l'hypothèse de croissance de la masse salariale de 4,4 % semblant très optimiste dans un contexte de crise mondiale et de ralentissement de la hausse des salaires entraînée par la réduction du temps de travail.

La loi sur les 35 heures devait créer 100 000 emplois, la réalité est tout autre : les délocalisations s'accélèrent et les groupes étrangers sont dissuadés d'investir en France. Il est inacceptable qu'au titre des 35 heures, des compensations d'exonérations de charges aient été prévues et que au total 17 milliards ne soient pas portés au chapitre des recettes.

Alors que leurs appels de CSG parviennent à nos concitoyens, ils mesurent le poids de plus en plus insupportable des nouveaux prélèvements sur leurs revenus.

Bien que son rendement ait été sous-estimé en 1998, le transfert de cotisation maladie sur la CSG ne donnera pas lieu en 1999 à une baisse des taux.

L'évolution des comptes est inquiétante. S'ils font apparaître pour 1998 un déficit de 13 milliards, que le Gouvernement a présenté comme un succès, la réalité est hélas fort différente. En effet, si les recettes ont progressé -collecte de CSG supérieure aux prévisions, effets de la croissance internationale, prélèvements supplémentaires opérés par le Gouvernement en cours d'année, notamment 1,8 milliard sur les laboratoires pharmaceutiques- aucune dépense n'a été maîtrisée et des réductions, certes drastiques, n'ont porté que sur des tarifs ou des prestations : mise sous condition de ressources des allocations familiales, diminution de 50 % de l'AGED, baisse de 13 % du tarif de radiologie.

Pour 1999, le Gouvernement annonce donc l'équilibre. Nous le souhaitons bien évidemment, mais le pari est risqué. Les prélèvements exceptionnels ne peuvent par nature se répéter. Et les professions libérales de santé et les laboratoires pharmaceutiques ne sont pas taillables et corvéables à merci.

M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé - C'est exact.

M. Bernard Accoyer - Le projet fixe leurs contributions : pour les médecins dès cette année, le dépassement d'enveloppe est certain et, pour 1999, il le sera en cours et en fin d'année. Pour les laboratoires, le prélèvement sera même rétroactif au titre de 1996 et 1997, avec une très lourde surtaxe spéciale, sous prétexte d'une décision de justice, presque exclusivement appliquée aux entreprises françaises. C'est un véritable coup de poignard ! Et le ministre a même annoncé le déremboursement de familles de médicaments, comme par hasard fabriqués essentiellement par des entreprises françaises !

Les décisions du Gouvernement ne vont pas dans le sens de l'allégement des prélèvements pesant sur nos concitoyens. Elles découragent ceux qui veulent entreprendre et investir, et l'emploi comme l'avenir de la protection sociale s'en trouvent compromis.

Le projet ne comporte rien quant à la réforme des cotisations patronales. Pourtant, voilà bien un sujet sur lequel la gauche s'est exprimée et l'urgence de lutter contre le chômage est reconnue par tous.

La croissance offrait une occasion inespérée de réduire les charges pesant sur les entreprises en poursuivant sur la voie des baisses de charges sur les bas salaires qui ont fait leurs preuves depuis qu'elles ont été lancées par Edouard Balladur puis amplifiées par Alain Juppé. Elles exigent, il est vrai, une diminution de la dépense publique, car l'Etat doit compenser les exonérations. Ce gouvernement est à l'opposé puisque, fidèle à ses habitudes, il augmente la dépense publique.

Transférer les charges sur les salaires plus élevés, ou sur la seule valeur ajoutée par les entreprises, aurait des effets désastreux sur le niveau des salaires et sur la compétitivité des entreprises innovantes, moteur du développement et de la croissance.

J'en viens aux familles. Si le Gouvernement a fini par céder sur la mise sous condition de ressources des allocations familiales, son acharnement contre cette branche et contre les familles ne se dément pas. Il compromet ainsi l'équilibre de la branche car, si l'API sera à l'avenir financée par l'Etat, il y aura un écart d'un milliard entre cette dépense et la suppression de la mise sous condition de ressources. De plus ce transfert depuis le budget de l'Etat est fragile et que ce gouvernement ou un autre finira bien par le remettre en cause. Enfin, l'AGED demeure diminuée de moitié et les familles auront été spoliées d'autant en 1998.

Au total, en 1999, les familles seront spoliées de 5 à 6 milliards.

La baisse d'un tiers du quotient familial touchera 450 000 d'entre elles. Avec ce gouvernement, chaque année l'enfant devient un peu plus la cause de l'augmentation des impôts de ses parents...

Au regard de la contribution fiscale des familles, cette injustice est choquante. Ne sont-elles pas celles qui paient le plus de TVA puisqu'elles sont dans l'obligation de consommer ? Ne sont-elles pas celles qui génèrent la demande de logements et de biens d'équipement ? Elles ne comprennent pas votre acharnement, non plus que les hausses d'impôts que vous leur réservez, au moment où le pouvoir trouve 8 milliards pour financer le PACS.

En ce qui concerne la branche vieillesse, il y a urgence. Mais la création du F3R nous rappelle que certaines mesures insignifiantes sont aussi dangereuses car elles rassurent faussement.

Lors de la dernière commission des comptes de la sécurité sociale, son secrétaire général n'a pu parler que dix minutes après le discours politique d'une heure trente du ministre, vide de toute proposition sur la branche vieillesse. Il a donc fallu inventer dans la précipitation ce Fonds de réserve doté de 2 milliards, c'est-à-dire de moins de 2 mois de durée de la caisse d'amortissement de la dette sociale.

Ce n'est ni sérieux ni honnête...

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les recettes et l'équilibre général - Oh !

M. Bernard Accoyer - ...car ce F3R alimenté par la C3S peut faire croire que les régimes par répartition seraient garantis pour l'avenir, ce qui est totalement faux. Dès 2005 le financement sera très sérieusement compromis. Aussi, les groupes de l'opposition ont-ils déposé un amendement pour supprimer l'article 2.

En réalité, l'attitude de la gauche face à l'avenir des retraites est faite d'idéologie et d'inconscience. Idéologie et inconscience quand la gauche vote contre la réforme des retraites des salariés du secteur privé présentée par Edouard Balladur en 1993. Cette réforme était pourtant indispensable et elle porte déjà ses fruits.

M. Alfred Recours, rapporteur - Deux milliards par an !

M. Bernard Accoyer - Sans elle, le déficit de la branche vieillesse serait aujourd'hui d'une toute autre ampleur. Idéologie et inconscience, quand la gauche, en 1995, soutient les grévistes à propos des régimes spéciaux quand il ne s'agissait que d'établir le bilan de ceux-ci. Inconscience, quand elle refuse toute retraite par capitalisation en 1997 en votant contre les fonds de pension pourtant indispensables pour les jeunes générations.

Il existe déjà des retraites complémentaires par capitalisation ouvrant droit à des avantages fiscaux. Elles ne compromettent pas le régime par répartition et ont même été voulues par les syndicats représentatifs de fonctionnaires, défenseurs intransigeants de la répartition.

Ces régimes Préfon, CREF, UMRIFEN sont ouverts depuis plusieurs décennies aux seuls agents ou anciens agents des collectivités publiques.

J'ai déposé avec l'ensemble du groupe RPR un amendement permettant à tous les salariés et travailleurs indépendants d'accéder à ce type de régimes. Cela serait fort juste puisque ces salariés dont l'emploi est incertain, ont des retraites nettement inférieures à celles servies aux anciens agents des collectivités publiques et des régimes spéciaux.

Pour la branche maladie, votre ligne est claire.

Après l'immobilisme de 1998, rien n'est encore prévu pour l'hôpital alors que les soins ambulatoires font l'objet de toutes vos attaques.

Avec 2 900 fermetures de lits en 1998 le rythme des restructurations entamé en 1994 s'est ralenti.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Ce n'est pas vrai !

M. Bernard Accoyer - Le leurre créé par les nouveaux SROSS a fonctionné, mais les personnels sont désormais très inquiets. Ils seront d'ailleurs en grève le 2 décembre prochain.

Cet immobilisme est dangereux pour la qualité des soins, autant que le poids financier que l'hospitalisation fait peser sur la branche.

En abandonnant l'évaluation et l'accréditation vous avez ouvert la porte à l'évaluation par la presse, c'est mieux que l'ignorance qui lèse surtout les plus défavorisés et les moins malins, mais est-ce socialement acceptable ?

Pour l'encadrement des dépenses de soins ambulatoires et des professions de santé libérales, le Gouvernement use des grands moyens.

En retenant un objectif national des dépenses ambulatoires de 2,39 %, on sous-estime la part incompressible de hausse des dépenses. En effet, avec un ONDAM 1999 calculé à partir de l'ONDAM voté pour 1998 et non à partir de celui effectivement réalisé, l'ONDAM sera très réduit, voire négatif pour certaines de ses composantes.

De plus, aucune considération autre que comptable n'a été prise en compte : vieillissement, allongement annuel de trois mois de l'espérance de vie, se chiffrent à plusieurs milliards. Les dépenses de prescriptions de molécules nouvelles non remboursées tels que Viagra ou Xénical coûteront un demi milliard, les dépenses d'assurance maladie de 70 000 clandestins régularisés représenteront environ un milliard.

L'ONDAM sera donc largement dépassé ou très insuffisant. Pourquoi faudrait-il que le déficit soit comblé uniquement par les médecins et les laboratoires pharmaceutiques ?

Votre projet de loi de financement ne mentionne même pas la notion de maîtrise médicalisée : tout est arithmétique, collectif, comptable et proportionnel aux revenus. Aussi les groupes de l'opposition ont-ils déposé un amendement commun en vue de supprimer l'article 21.

Tous les outils de la maîtrise médicalisée sont oubliés ou malmenés : formation médicale continue, révision de la nomenclature, codage, références opposables...

Alors que, depuis plus de 30 ans, les soins bucco-dentaires sont de plus en plus mal remboursés et que la situation sanitaire devient préoccupante à cet égard, vous avez annulé brusquement, cet été, un accord de réévaluation, aggravant encore le retard. Le groupe RPR a donc déposé un amendement soumettant toute réforme de la facturation à un accord conventionnel et tarifaire préalable.

S'agissant de l'informatisation, vous vous entêtez depuis 18 mois à refuser l'indemnisation de la télétransmission des feuilles de soins. Le Gouvernement et la CNAM viennent d'établir un nouveau record : 3 milliards d'investissement des caisses et des médecins pour 3 000 feuilles, soit 1 million pour chaque feuille télétransmise !

Le sort réservé à la démographie médicale ne vaut guère mieux. Alors que le MICA poussait à grands frais 3 000 médecins prescripteurs vers la retraite, le Gouvernement augmentait de plusieurs milliers le nombre des médecins non originaires de la CEE autorisés à exercer dans les hôpitaux ! Mais le plus inquiétant pour l'avenir des professions libérales de santé, c'est l'instauration des lettres-clés flottantes, que vous avez expérimentées cet été avec les radiologues. Comment voulez-vous qu'un cabinet survive si ses tarifs flottent ainsi ? Mais puisque vous avez dit que cette baisse serait temporaire, quand cessera-t-elle ?

A cela, vous ajoutez un système de sanctions collectives dont on sait déjà qu'il fonctionnera pour 1998 et 1999 !

Collectif, systématique et comptable car dépendant du dépassement national et du revenu du médecin, le dispositif est terriblement contraignant. Nul doute qu'il sera efficace car il organise la récupération au franc près du dépassement national, ce qui était loin d'être le cas pour le dispositif issu des ordonnances de 1996 qui était surtout dissuasif et, quoique insuffisamment, individualisé.

Pour le RPR, ces reversements sont inacceptables. S'il doit y avoir une clause financière, les éventuels reversements ne sauraient être qu'individuels, et venir après l'évaluation préalable. C'est tout le contraire de ce que vous baptisez hypocritement "contribution conventionnelle" !

En ignorant les acquis de l'expérimentation et en donnant un caractère définitif aux filières et aux modes de rétribution autres qu'à l'acte, vous faites basculer le système de soins dans une logique de médecine normalisée qui ouvre inévitablement la voie à deux médecines distinctes.

Je note au passage que, loin d'attendre des économies de ces structures où le tiers payant généralisé finira par déresponsabiliser les patients, vous prévoyez 500 millions de plus pour les financer. Si on n'en voit pas la logique, on voit le coût du dogmatisme !

En 1995, Jacques Chirac affirmait que les dépenses de santé ne pouvaient être plafonnées et c'est pourquoi les ordonnances de 1996 ne concernent que les dépenses de l'assurance maladie, c'est-à-dire les dépenses remboursées. Celles-ci sont différentes des dépenses de santé, que vous appelez perfidement "dépenses remboursables" en y incluant ce qui pourrait être remboursé par les organismes complémentaires. En réalité, votre souhait est d'étouffer un secteur qui a besoin d'espaces de liberté pour survivre. En effet, même si la démonstration est difficile, la distinction est fondamentale car elle différencie deux mondes : celui de la liberté raisonnée et celui de la normalisation réductrice, qui conduit à l'échec et à l'injustice. Comment imaginer qu'on pourrait plafonner des dépenses de santé de plus en plus confondues avec les dépenses de confort, de beauté, de vigueur, demain de rajeunissement, toutes appelées à l'essor ?

Vous qui n'avez pas de mots assez durs pour critiquer les ordonnances de 1996, voici qu'après 17 mois d'immobilisme social, vous signez votre deuxième loi de financement. Oubliant l'action courageuse du gouvernement d'Alain Juppé qui a véritablement refondé la Sécurité sociale, vous méprisez ce qui a été fait non sans difficultés en le dévoyant. Vous dites avoir effectué en 1998 des réformes structurelles, mais il n'en est rien : vous avez utilisé les outils des ordonnances, hélas sans discernement !

Parce que cette loi est celle des occasions perdues pour la réforme des cotisations, des retraites ou de l'hospitalisation, parce qu'elle organise une attaque en règle entre les professions libérales de santé et contre les familles, le groupe RPR la refusera ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Mme Jacqueline Fraysse - Il y a un an, nous débattions du précédent projet de loi de financement, à peine cinq mois après la formation d'un nouveau gouvernement réunissant toutes les composantes de la gauche. Le rejet du plan Juppé et de l'autoritarisme brutal avec lequel il avait été imposé n'était pas pour peu dans le changement de majorité voulu par les électeurs. Face à un chantier immense, nous avions le devoir de ne pas décevoir nos concitoyens, c'est-à-dire de réussir. C'est encore vrai aujourd'hui plus que jamais.

Nous avions conscience il y a un an que l'été 97 ne suffirait pas à lancer toutes les réformes nécessaires, mais j'avais donné notre accord aux objectifs proposés et salué les mesures positives, tout en alertant sur leur insuffisance, y compris pour atteindre les objectifs affichés.

A l'issue des débats, j'avais pris acte, au nom du groupe communiste, des engagements que vous aviez pris, Madame le ministre, sur plusieurs points importants. Ainsi, vous vous étiez engagée à rétablir les allocations familiales pour toutes les familles d'au moins deux enfants et vous nous aviez laissé espérer que cette deuxième loi de financement serait l'occasion de rééquilibrer les contributions des revenus du capital et du travail, en posant enfin la question d'une modification de l'assiette des cotisations patronales. Enfin, considérant que notre système de santé n'était pas une machine à dépenser qu'il faudrait brider de manière autoritaire et centralisée, et vous prononçant pour "des politiques structurelles définies en concertation avec les professionnels de santé et avec les citoyens et leurs représentants", vous annonciez des états généraux de la santé pour le printemps suivant, nous donnant rendez-vous en quelque sorte pour le présent débat.

Nous y sommes, et malheureusement ces engagements ne se sont pas concrétisés, à mon grand regret.

M. Jean-Luc Préel - Au nôtre aussi !

Mme Jacqueline Fraysse - Alors que les états généraux prennent un tour préoccupant, que la question du financement a été écartée de la liste des thèmes proposés au débat, vous décidez par décret la fermeture de petites maternités, par exemple, et vous organisez des campagnes médiatiques détestables en vous appuyant sur une aspiration légitime à la sécurité pour la dévoyer et préparer le terrain à des restructurations fondées sur de simples considérations comptables.

Quant à la réforme de l'assiette des cotisations patronales, elle est encore reportée. De surcroît, le rapport que vous nous proposez d'adopter à l'article premier reflète une stratégie durable de réduction des dépenses de santé puisque cette réforme devrait s'effectuer sans en faire supporter le coût aux ménages -ce à quoi nous souscrivons- mais aussi "sans accroître globalement le poids pesant sur les entreprises".

Dans ces conditions, je ne vois pas comment on pourrait à la fois résorber le déficit et répondre aux besoins de toute la population, c'est-à-dire améliorer la qualité des soins, moderniser les hôpitaux, renforcer la politique de santé publique, développer la prévention et mieux prendre en charge la douleur et les soins palliatifs.

Vous agissez sur les dépenses, et uniquement sur les dépenses, ce qui revient à s'enfermer dans une logique comptable.

M. Jean Bardet - La quadrature du cercle !

Mme Jacqueline Fraysse - Cette démarche est dangereuse et contraire à ce que nous souhaitons faire avec vous, dans la majorité gouvernementale, au service de la population qui nous a fait confiance. Je tiens à le dire clairement et avec franchise.

Certes certaines dispositions méritent d'être saluées, par exemple la restauration des allocations familiales pour toutes les familles d'au moins deux enfants ou la meilleure reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles, en particulier des maladies de l'amiante. Mais aurons-nous les moyens d'atteindre ces objectifs ? Compte tenu de la sous-reconnaissance manifeste des maladies professionnelles et accidents du travail, qui conduit à faire supporter à la branche maladie les conséquences de cette situation, les 2,2 milliards que vous proposez, Madame la ministre, semblent très insuffisants. Il faudrait à l'évidence accroître la participation des employeurs. Le texte n'en dit mot.

En ce qui concerne la branche vieillesse, la manifestation des retraités jeudi dernier, à l'appel de leurs cinq unions confédérales, rappelle combien la situation s'est dégradée, notamment depuis la loi Balladur de 1993. Les retraités attendaient l'indexation des pensions sur les salaires mais cette promesse n'a pas été tenue.

Quant au fonds de réserve, il est instauré sans étude sérieuse préalable et sans que l'on sache comment il sera alimenté et géré. C'est donc un chèque en blanc que vous nous demandez.

Plusieurs députés RPR - Très bien !

Mme Jacqueline Fraysse - Nos préoccupations ne sont pas moins vives concernant l'assurance maladie, car l'objectif de 2,6 % est inférieur aux prévisions de croissance économique. De plus, cette évolution est calculée par rapport à l'objectif de l'an dernier, qui a été dépassé. L'évolution par rapport aux dépenses réelles est donc très inférieure au chiffre annoncé.

M. Jean Bardet - C'est exactement ce que j'ai dit.

M. Jean-Luc Préel - Oui, tout à fait.

Mme Jacqueline Fraysse - Dans ce contexte, vous êtes amenée, Madame la ministre, à faire pression sur les dépenses de santé afin de les faire rentrer dans l'enveloppe prévue.

Plusieurs députés RPR - Voilà ce que nous dénonçons aussi !

M. le Secrétaire d'Etat - Il y a une collusion intéressante...

Mme Jacqueline Fraysse - La collusion entre députés communistes et instigateurs du plan Juppé n'est pas très plausible.

M. le Secrétaire d'Etat - Vous me rassurez.

Mme Jacqueline Fraysse - Le Gouvernement annonce une évolution de 2,5 % du budget hospitalier. Or, selon la Fédération hospitalière de France, ce taux est le plancher qui permet simplement de reconduire l'existant, alors que l'hôpital se voit confier des missions nouvelles telles que la lutte contre les exclusions, la prise en charge de la douleur, les soins palliatifs, la lutte contre les maladies nosocomiales... Et puis peut-on se contenter de l'existant quand on sait le manque de personnel, ses conditions de travail à la limite du supportable, les heures supplémentaires non récupérées, le nombre insuffisant de médecins dans certaines spécialités ? L'existant, c'est aussi le manque d'entretien, la sous-traitance à des entreprises privées dans le but de réaliser des économies, fût-ce au détriment de la qualité et de la sécurité des soins... Il est évident que pour apporter une réponse humaine et efficace aux besoins de la population, il faut autre chose que la décision technocratique, chiffrée et autoritaire. Nous pensons quant à nous qu'il faut impérativement augmenter les moyens accordés à l'hôpital public. Mais la médecine de ville est également malmenée avec cette clause de sauvegarde qui suscite à juste titre la protestation des médecins et qui trahit une approche strictement comptable des problèmes. Personne ne conteste la nécessité d'une évaluation individuelle et collective de l'acte médical. Simplement, les médecins entendent y être associés sur la base d'instruments incontestables et respectueux de l'éthique médicale.

S'agissant du médicament, je comprends que les médecins s'inquiètent de voir la prescription en partie transférée aux pharmaciens.

M. Jean Bardet - Nous aussi.

Mme Jacqueline Fraysse - Et je m'inquiète de voir qu'au moment où l'on nous propose de réaliser des économies grâce aux génériques, des médicaments nouveaux et utiles ne soit pas remboursés.

M. Jean Bardet - Vous pensez au Viagra et au Xenical ?

Mme Jacqueline Fraysse - ...alors que le rapport parle d'améliorer le niveau global des remboursements.

Force est de constater que dans tous les domaines la restriction de l'offre prévaut, faute d'avoir fait ce à quoi vous vous étiez engagée l'an dernier : évaluer démocratiquement les besoins et les priorités, débattre des moyens à y consacrer et décider des modes de financement nécessaires. Un tel débat est essentiel, car il conditionne tout le reste.

Une réforme est indispensable et urgente. En effet, le financement était à l'origine essentiellement assis sur les salaires. Or, leur part dans la valeur ajoutée ne représente aujourd'hui qu'environ 50 %. L'autre moitié va ailleurs, notamment dans les placements financiers, qui, eux, ne contribuent pas du tout au financement de la Sécurité sociale.

M. Bernard Accoyer - Vous oubliez la CSG !

Mme Jacqueline Fraysse - Tant pour des raisons d'efficacité économique que de justice sociale, il est nécessaire de faire contribuer ces revenus à la sécurité sociale, comme les salaires. Vous en avez la volonté, Madame la ministre, j'en prends acte mais je reste dubitative sur les dispositions envisagées pour atteindre cet objectif. Alléger les cotisations sur les bas salaires ? Mais enfin, il faudra bien sortir de cette logique qui considère le salaire comme un coût et non comme une richesse ! Vous nous dites que cela a permis de créer des emplois, je l'espère mais je constate que le chômage et les divers allégements ou exonérations de cotisations sociales ont pour ainsi dire grandi ensemble et que ces mesures ont tiré les salaires vers le bas sans pour autant résorber le chômage, ce qui pèse de façon doublement négative sur le financement de la Sécurité sociale.

Tant que les revenus du capital seront dispensés de participer au financement de la Sécurité sociale, celle-ci manquera de moyens. Nous n'entendons pas mettre les grandes entreprises sur la paille, ni régler des comptes avec le patronat. Nous sommes simplement prêts à examiner des mesures progressives, qui enclenchent une autre logique d'efficacité, de progrès et de justice. Ce sera l'objet de nos amendements.

Nous ne sommes pas partisans du tout ou rien. La majorité plurielle, nous entendons y tenir notre place dans un esprit constructif et responsable, respectueux des différences mais avec la volonté d'atteindre nos objectifs communs.

Je veux croire que le débat permettra d'améliorer ce projet afin qu'il réponde aux besoins, sans retard, car il y a dans ce pays des personnes qui ne peuvent pas attendre. Pour notre part, nous y contribuerons de toutes nos forces, avec détermination étant entendu qu'en l'état, nous ne pouvons pas voter ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe du RPR et du groupe UDF)

M. Jean-Luc Préel - Nous entamons aujourd'hui la discussion de la troisième loi de financement de la sécurité sociale. Ce débat au Parlement constitue un progrès démocratique indéniable. Merci donc à Alain Juppé et Jacques Barrot qui l'ont rendu possible (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF). Nous pouvons enfin nous prononcer sur la protection sociale, dont les dépenses sont supérieures au budget de l'Etat et qui, outre leur rôle propre dans les secteurs majeurs de notre société, famille, retraite, santé, interviennent dans le secteur économique par les prélèvements fiscaux, parafiscaux ou par les cotisations.

Je voudrais pour commencer dénoncer l'improvisation de ce débat. Les rapports joints au projet n'ont été disponibles qu'au dernier moment, est-ce sérieux ? Ca l'est d'autant moins qu'en commission les rapporteurs, M. Evin notamment, y faisaient souvent référence pour ne pas répondre aux questions.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse - Je suis dans l'opposition mais je ne puis approuver de tels propos, qui sont inadmissibles.

M. Jean-Luc Préel - L'importance des sommes en jeu et le champ couvert par cette loi méritaient beaucoup mieux. De plus, et ce n'est pas nouveau, les possibilités d'amendement sont limitées en raison notamment de l'article 40.

M. Denis Jacquat, rapporteur - Ce qui a été dit sur les rapports n'est pas honnête.

M. Jean-Luc Préel - N'est-il pas exact que les rapports ont été prêts hier et aujourd'hui seulement ? M. Evin ne s'y référait-il pas constamment ?

M. Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance maladie et les accidents du travail - Pas du tout. Quant aux rapports, ils ont été mis en distribution.

M. Denis Jacquat, rapporteur - Je suis entré en politique en tant que médecin, dans un souci social, ce qui exige d'être honnête de A à Z. Certains rapporteurs se sont référés à leur rapport, mais c'est normal et je vois cela depuis douze ans que je siège puisqu'un rapport rend compte de la discussion en commission, laquelle se poursuit jusqu'au dernier moment. Or il faut le temps nécessaire à l'impression.

M. Jean-Luc Préel - Il n'empêche que M. Le Garrec lui-même, le président de la commission, a déploré nos conditions de travail.

On pourrait imaginer que la première partie du rapport soit imprimée plus tôt... ("Très bien !" sur plusieurs bancs du groupe UDF et RPR)

Quel est le pouvoir réel du Parlement ? La majorité ne se pose pas la question, puisqu'elle votera par discipline, mais il est anormal que nous ne soyons ni consultés sur la répartition géographique de l'ONDAM, ni même informés des critères de cette répartition.

Vous vous êtes placés, par votre propre faute, dans une situation délicate, tant vos prévisions de recettes comme de dépenses pèchent par optimisme. Plus grave, vous ne préparez pas l'avenir et vous ouvrez la voie à l'étatisation et à la collectivisation de notre protection sociale.

Au pouvoir depuis seize mois, vous vous êtes empressés de critiquer le plan Juppé et d'annoncer, y compris par lettre, qu'il n'était pas question d'appliquer des sanctions, puis vous avez fait preuve d'un immobilisme coupable qui a démobilisé les praticiens, hospitaliers comme libéraux. Vous vous êtes contentés, en vérité, de conserver les réformes structurelles majeures que sont le vote par le Parlement, la contractualisation, les ARH, les URCAM, l'accréditation, l'informatisation : merci, Alain Juppé et Jacques Barrot !

Comme ces réformes vous gênaient cependant, vous n'avez eu de cesse d'intervenir à temps et à contretemps afin d'étendre votre pouvoir. Le résultat est que M. Fragonard a démissionné et que le conseil d'administration de la CNAM a demandé que soit respectée son autonomie. Mais vous avez persisté à prendre des mesures autoritaires et brutales, au mépris des conventions et de l'autonomie des branches, sans justification autre que comptable, contre les radiologues, les biologistes, les dentistes, l'industrie pharmaceutique. Les radiologues avaient pourtant accepté de réviser leur nomenclature, les biologistes accompli de gros efforts et les dentistes s'étaient engagés dans une politique de prévention et de réorientation de la prise en charge des soins.

Vous êtes contraints aujourd'hui de signer une convention avec un seul syndicat de généralistes et, pour ce faire, de passer sous ses fourches caudines. Vous risquez fort, en revanche, de ne pas y parvenir, contrairement à vos prédécesseurs, pour ce qui est des spécialistes, sauf peut-être avec le même syndicat, que vous considériez pourtant comme non représentatif...

Vous vous flattez d'avoir réduit à 13 milliards le déficit de la protection sociale. Est-ce un exploit ? Pas du tout, car cette réduction est due, pour 6 milliards, à la croissance, et, pour 10 milliards, à des prélèvements supplémentaires, liés notamment au transfert des cotisations de maladie sur la CSG et à la mise des allocations familiales sous condition de ressources.

Vos prévisions de recettes sont fort optimistes. La prévision de croissance qui pouvait sembler réaliste avant les crises asiatique, russe et sud-américaine l'est-elle encore aujourd'hui ? ("Non !" sur les bancs du groupe RPR) Tout aussi déraisonnable est la prévision d'augmentation de la masse salariale : 4,3 %, alors que les employeurs ne sont guère enclins à accorder des augmentations, compte tenu de la loi sur les 35 heures !

Vous pourriez faire montre de volontarisme, en revanche, dans le domaine des exonérations de charges sociales : celles liées aux 35 heures ne seront pas compensées intégralement, et l'Etat, qui plus est, verse avec retard son dû aux organismes payeurs du RMI, de l'ARS, etc., bien qu'il perçoive la taxe sur les salaires, la TVA sur les médicaments et sur les investissements, et j'en passe...

Vos prévisions de dépenses sont également optimistes. L'objectif national paraît généreux, mais il est calculé par rapport à celui de l'an dernier, d'ores et déjà dépassé, et non par rapport aux dépenses effectives. Il ne permettra pas aux hôpitaux de procéder aux restructurations nécessaires ni de couvrir les augmentations de rémunérations décidées par l'Etat.

Surtout, le projet ne prépare pas l'avenir. Proposez-vous une politique familiale globale ? Non : après avoir placé les allocations familiales sous condition de ressources, vous avez reconnu votre erreur et rétabli le principe d'universalité, mais vous abaissez en contrepartie le quotient familial, ce qui pénalisera 450 000 familles (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste), maintenu la diminution de l'AGED et de la réduction d'impôt pour emplois familiaux, vous présentez le PACS et vous ne prévoyez aucune simplification des 23 prestations existantes. La famille n'est pas une priorité pour vous !

Si le régime général des retraites est à peu près équilibré grâce aux mesures courageuses prises par M. Balladur et Mme Veil, le problème majeur est l'avenir des régimes spéciaux, pour lesquels il faudra, à législation constante, au moins 150 milliards en 2005 et 300 en 2015. Vous nous demandez d'attendre un an, un rapport de plus, alors que vous avez toutes les données en main, vous rejetez les fonds de pension d'un revers de main et vous nous proposez un fonds de 2 milliards, sans nous dire comment il sera géré ni comment il sera alimenté.

Vous n'avez pas pris à bras-le-corps le problème de la prévention et de l'éducation à la santé, pour lesquelles la France est en retard : nous dépensons 17 200 F par an et par habitant pour le curatif, 250 F pour la médecine préventive, 17 F pour l'éducation à la santé. J'admire la précision, à la virgule près, du montant de l'ONDAM, et je n'aurai pas la cruauté de vous demander, comme l'aurait fait en d'autres temps M. Bartolone, sur quelle enquête de santé publique il se fonde... Il est regrettable que nous ne nous prononcions même pas sur sa répartition et ses critères, car les hôpitaux surdotés, comme l'Assistance Publique, tentent de bétonner leurs positions, au détriment d'établissements qui ont été étranglés par l'enveloppe globale. Vite, corrigez les inégalités ! Quand allez-vous installer les groupes de travail annoncés ? Allez-vous modifier le statut des praticiens hospitaliers en tenant compte de la pénibilité du travail ?

M. le Secrétaire d'Etat - Oui !

M. Jean-Luc Préel - Que proposez-vous pour les spécialités sinistrées, comme celle d'anesthésiste ? Les hôpitaux risquent de se restructurer en fonction du manque d'anesthésistes et non des besoins de santé publique.

L'accréditation sera-t-elle bientôt effective ? N'est-il pas souhaitable de responsabiliser les conseils d'administration ?

Pour la médecine de ville et l'industrie pharmaceutique, vous renforcez la maîtrise comptable en instituant les lettres-clés flottantes, qui empêcheront les laboratoires et les radiologues de faire des prévisions, et un impôt social sur le revenu qui constitue une responsabilisation collective inacceptable.

L'UDF souhaite sauvegarder la protection sociale à la française, fondée sur les valeurs qui lui sont chères : liberté, responsabilité, solidarité, décentralisation. Non à l'étatisation comme à la privatisation, oui à la contractualisation. Maintenir l'accès de tous à des soins de qualité, c'est possible : une étude de l'OCDE montre que, dans 29 pays, les dépenses de santé augmentent, depuis deux ans, moins vite que le PIB, alors que l'inverse est souvent jugé inévitable. En France, le déficit de la branche maladie n'est que de 1 %, et quelle entreprise, bien gérée, ne peut gagner 1 % ?

La privatisation n'est pas une solution, car elle est à la fois dangereuse pour les professionnels et pour les assurés. Les caisses dépensent peu en frais de gestion - 5 % pour la CNAM, 1,6 % pour la CNAV - car il n'y a pas de concurrence, tandis que les compagnies d'assurance dépensent 10 % de leurs recettes en publicité et en frais commerciaux. La concurrence ne serait donc pas source d'économie.

M. le Président de la commission - Très bien !

M. Jean-Luc Préel - Une expérience de délégation de gestion pourrait toutefois être tentée, avec un cahier des charges très strict, excluant toute sélection des assurés.

Ce que nous voulons, c'est une véritable autonomie des branches, une politique contractuelle responsabilisante, une autodiscipline basée sur le respect des bonnes pratiques et le codage des actes et des pathologies. Nous demandons aussi une vraie politique, coordonnée et pluriannuelle, de prévention et d'éducation, financée par une enveloppe répartie au niveau régional par des agences regroupant les ARH, les URCAM et les AREPS.

M. Bernard Accoyer - Aïe aïe aïe ! (Sourires)

M. Jean-Luc Préel - Pour les retraites, commençons par créer, dans un but de transparente, une caisse des fonctionnaires, donnons son autonomie à la CNAV et instituons rapidement une épargne-retraite complémentaire.

L'UDF n'est pas satisfaire de ce projet, qui prépare mal l'avenir et se fonde sur des prévisions irréalistes. Votre attentisme conduit à une situation explosive ; souhaitons qu'il soit encore temps de sauvegarder notre protection sociale, à laquelle nous sommes particulièrement attachés !

M. le Président - J'informe l'Assemblée que la commission demande la réserve de l'article 1er et du rapport annexé jusqu'après l'article 36, dernier article du projet.

M. Georges Sarre - Il y a un an, les députés du Mouvement de citoyens demandaient au Gouvernement, et obtenaient par voie d'amendement, qu'il s'engage à revenir sur la mise sous condition de ressource des allocations familiales. C'est chose faite, ce dont nous sommes satisfaits. Il reste encore possible de rendre plus juste et plus redistributive notre politique familiale. Nous suggérons notamment de substituer au quotient-familial enfant un abattement forfaitaire égal au plafond actuel de l'avantage fiscal.

Nous sommes dans la même position d'attente que l'année dernière sur la question des retraites. Nous sommes fortement attachés au principe de la répartition, fondement de la solidarité inter-générationnelle et garantie d'une véritable mutualisation du risque vieillesse. Avant que d'accepter la création d'un étage de retraite par capitalisation, il faut se mettre d'accord sur les principes qui devraient l'encadrer : il devra être obligatoire au moins à l'échelle des branches professionnelles et être géré par des instances représentatives des salariés. Ainsi éviterions-nous le piège des fonds de pension, tout en redonnant un nouveau souffle au paritarisme. Enfin, et c'est une condition préalable, le financement équilibré des régimes obligatoires doit être garanti. Face à la détérioration du ratio cotisants-retraités, pourquoi ne pas envisager le basculement des cotisations vieillesse salariés sur la CSG ?

La revalorisation du minimum vieillesse annoncée par Mme la ministre est bienvenue ; elle répond à une suggestion de la Cour de comptes, et surtout à l'exigence de solidarité envers nos aînés. Mais il faudra nécessairement aller plus loin. La revendication de revaloriser les retraites au même rythme que les salaires est légitime. A défaut d'y répondre à court terme, ne pourriez-vous faire un geste plus significatif que celui annoncé ? Les députés du MDC ont déposé un amendement visant à exonérer de CSG les 2 000 premiers francs des revenus de remplacement.

Une bonne retraite enfin ne servirait pas à grand-chose si, en raison d'une dépendance physique, nos aînés voyaient leurs revenus et leur patrimoine partir en fumée. C'est pourquoi j'interroge le Gouvernement : est-il dans ses intentions, et si oui, quand, de réviser la loi mal nommée sur la prestation dépendance ? Le Mouvement des citoyens a proposé une prestation servie dans le cadre de la Sécurité sociale, sans condition de ressource ni récupération sur succession, mais incluse dans le revenu imposable, et financée par une cotisation spécifique.

Enfin, le présent projet reste trop prisonnier d'une logique strictement budgétaire. Certes, les députés du MDC font leur le choix de maîtriser les dépenses de santé. Cela requiert un mécanisme d'ajustement efficace, c'est-à-dire accepté par les professionnels de santé et les patients. Mais les sanctions collectives sont d'autant plus mal acceptées qu'elles sont prises sur le fondement de ratios budgétaires ; le médecin référent sera d'autant plus rejeté qu'il contraindra les seuls patients qui ne disposent pas d'une assurance privée complémentaire prenant en charge les visites non cadrées ; les contraintes renforcées du budget global seront d'autant plus asphyxiantes que les coordinations de soins sont limitées, voire impossibles, dans le cadre d'enveloppes budgétaires affectées à des structures.

Madame la ministre, profitons du retour des comptes de la Sécurité sociale à l'équilibre prévu en 1999 pour reconstruire la régulation des dépenses maladie. Deux objectifs pourraient guider cette démarche.

D'abord, adapter l'offre de soins en laissant le patient au centre du dispositif, c'est-à-dire en lui permettant de choisir son médecin traitant, quelle que soit la structure où il exerce. Cela suppose que pour un même acte, le même tarif soit pratiqué par tout professionnel, dans le cadre d'enveloppes budgétaires définies par activités et non plus par structures. Second objectif : garantir des soins de qualité au moindre coût avec des contrôles distincts. Les médecins de caisse doivent rester garants du respect des règles de sécurité sanitaire, tandis que les professionnels pourraient organiser le contrôle médicalisé des actes au regard des références de bonnes pratiques cliniques. C'est sur ce dernier contrôle que reposerait le mécanisme de régulation. Pour être acceptées, les sanctions doivent se fonder sur un constat médical irréfutable. La logique de cette réforme alternative est simple : mettre à plat les modalités de régulation des dépenses de santé ; conserver et développer les outils existants, PMSI et RPC d'une part, Carte Vitale d'autre part, au service d'une régulation médicalisée dans laquelle les objectifs des dépenses de santé s'entendraient non plus par secteur -médecine de ville, hôpitaux, secteur médico-social- mais par actes de soins, quelle que soit la structure qui les prodigue.

Depuis juin 1997, Madame la ministre, j'ai eu plusieurs fois l'occasion de vous proposer cette alternative au plan Juppé. Si c'était pour poursuivre la même politique, à quelques nuances près, ce n'était pas la peine de tant la combattre ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Depuis est intervenu un élément nouveau. Le 13 octobre, le conseil d'administration de la CNAM a adopté des "orientations stratégiques" qui prévoient notamment le conventionnement sélectif des médecins de ville. C'est mettre le doigt dans un engrenage qui aboutira fatalement, sous la pression des médecins ainsi déconventionnés, à la mise en concurrence de l'assurance maladie de base par des assurances privées. Partagez-vous cette crainte ? Sinon, entendez-vous proposer les modifications législatives que demande la CNAM ? Pour le Mouvement des Citoyens, il est encore temps de prévenir la mise en concurrence de la Sécurité sociale, par la mise en concurrence des acteurs du système de soins telle que je l'ai évoquée, dans le cadre du monopole de la Sécurité sociale.

Le groupe RCV, et en son sein les députés du MDC, n'ont pas l'habitude du harcèlement ou des gesticulations oratoires. Mais sur ce projet nous avons déposé des amendements -j'en ai évoqué quelques-uns- et nous souhaitons qu'ils soient pris en compte par la majorité dans toutes ses nuances et, a fortiori, par le Gouvernement. De ces choix dépendra notre vote (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV).

M. Marc Laffineur - L'assurance maladie est en crise quasi-permanente depuis 1945 et le premier trait commun aux plans de redressement est leur inefficacité. C'est que dès l'origine le système est vicié dans son essence. Ainsi s'exprime Gilles Johanet, directeur de la CNAM, dans son dernier livre. Si le système est vicié, il faut le revoir. En effet tous les plans de sauvetage se sont traduits par moins de liberté pour les professionnels, plus de contributions pour les Français, plus de taxation, plus d'étatisation, et souvent moins de remboursements. Pourtant notre système de soins n'est pas le meilleur. La mortalité infantile n'est pas moindre qu'ailleurs, ni la durée de vie supérieure.

Après un an d'immobilisme, vous perpétuez la méthode comptable et administrative. En juillet, votre seule réponse au dérapage des dépenses de santé a consisté en "mesures fortes", comme vous disiez, c'est-à-dire en sanctions collectives et aveugles : suspension unilatérale de la dernière étape de l'accord tarifaire avec les dentistes, mesures comptables désignant les professionnels comme boucs émissaires, qu'il s'agisse des industriels, des kinés, des radiologues, des orthophonistes...

Votre projet de loi de financement s'inscrit dans la même logique. Comment voulez-vous que les professionnels adhèrent à votre réforme, si vous leur imposez des sanctions aveugles et collectives, et si les lettres-clés peuvent être modifiées en cours d'année ? La logique comptable n'évite pas l'accroissement des dépenses, ni le développement -déjà en cours- d'un système de soins à deux vitesses. Elle excède tous les professionnels qui aspirent à assurer des soins de qualité.

Il faut donc sortir de cette logique, en rendant aux professions de santé liberté et responsabilité, et en leur donnant les outils qui permettent l'excellence des soins. La réforme exige une mise en concurrence des caisses -quant à la gestion, non pour les prestations sociales. Chaque assuré pourrait librement choisir sa caisse, et les caisses, grâce à une bonne gestion, amélioreraient leurs prestations. Un cahier des charges préserverait le caractère obligatoire de l'assurance et les règles du service public : maintien de l'obligation de cotisation, non-discrimination, non-sélection des risques, égalité face aux soins, remboursement des dépenses au premier franc. Pour la médecine libérale, il s'agirait de mettre en oeuvre une maîtrise médicalisée, c'est-à-dire opérée selon des critères médicaux et par une méthode incitative, et non par des sanctions collectives. La clé de la réussite de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé résidant dans la motivation des médecins, il conviendrait d'instaurer un système d'autocontrôle et de récompense individuelle. Il faudrait également accélérer l'informatisation des cabinets et renforcer l'évaluation des pratiques professionnelles.

L'hôpital doit, pour sa part, s'adapter au nouvel environnement sanitaire, économique et social et la réforme hospitalière être menée à son terme : l'évaluation permanente et l'accréditation par service s'imposent.

Coopération et complémentarité : tels doivent être les maîtres-mots pour l'ensemble des professionnels de santé. Décloisonnement des services et des spécialistes, création de véritables réseaux de soins, tels doivent être les objectifs.

Ces réformes ne pourront pas être entreprises sans l'adhésion des acteurs de santé. Les sanctionner de manière aveugle est une erreur funeste. Il faut au contraire faire confiance au corps médical tout en le mettant devant ses responsabilités et en lui donnant les moyens d'évoluer.

Deuxième sujet, l'avenir des retraites. Alors que vous aviez beaucoup promis aux retraités lors de la campagne législative de 1997, force est aujourd'hui de constater que non seulement vous n'avez rien fait mais que vous avez même stoppé la réforme Juppé. En juin 1997, vous avez promis la revalorisation des pensions et l'abrogation de la loi Thomas -lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre s'était engagé sur ce dernier point. Pourtant, le ministre de l'économie et des finances, favorable, lui, aux fonds de pension, annonçait, à peine un mois plus tard, lors du colloque Europlaces, qu'une concertation allait être lancée avec les partenaires sociaux sur le sujet. S'opposent donc deux conceptions au sein du Gouvernement, celle de Mme Aubry, qui veut ménager les syndicats, celle de M. Strauss-Kahn, qui vante les fonds de pension à la française, soutenu d'ailleurs par le président de l'Assemblée nationale, qui s'est fait l'avocat des fonds d'épargne-retraite. Lors de la séance de questions d'actualité du 21 octobre, Mme Aubry a déclaré qu'une fois consolidés les régimes par répartition, le Gouvernement ne s'opposerait pas à des formules par capitalisation, à la condition qu'elles soient ouvertes à tous et que les avantages fiscaux ou sociaux qui y seraient attachés profitent à tous. Malgré ces multiples déclarations, malgré trois rapports du Conseil d'analyse économique qui tous ont conclu au bien fondé de l'institution de fonds de pension en France, le Gouvernement s'est contenté de confier une énième mission au Commissariat au Plan. Le montant du fonds de réserve, prévu d'ailleurs dans la précipitation, est ridicule face aux besoins à terme.

Pourtant, nos concitoyens sont inquiets pour l'avenir de leurs retraites. 70 000 retraités qui estiment avoir perdu 10 % de leur pouvoir d'achat, ont manifesté la semaine dernière.

Mme Hélène Mignon - Ce n'est pas en un an qu'ils ont perdu 10 % !

M. Marc Laffineur - Selon un sondage Ipsos, 88 % des Français sont inquiets du montant des retraites qui seront versées d'ici quinze à vingt ans, 9 % seulement faisant confiance au système actuel. Plus le Gouvernement attendra, plus la facture sera élevée. 43 % des personnes interrogées estiment nécessaire de créer des fonds de pension, 11 % de reculer l'âge de la retraite et 6 % d'augmenter les cotisations. Sans bien entendu mettre fin aux régimes par répartition, il conviendrait de limiter les risques, de répartir plus équitablement la charge des retraites et de donner aux individus une plus grande liberté de choix : les fonds de pension le permettraient. Tous les grands pays occidentaux en ont et ces fonds jouent un rôle croissant dans l'économie mondiale, gérant plus de 7 000 milliards de dollars de par le monde. Sans fonds français, nos meilleures entreprises risquent de passer sous contrôle de capitaux étrangers, nos PME d'être asphyxiées et la place financière parisienne marginalisée. La politique actuelle du Gouvernement conduira notre pays à un désastre non seulement pour le régime général de retraite mais aussi pour les régimes spéciaux (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). L'heure n'est plus à se voiler la face ni se retrancher derrière un système qui a montré ses limites.

Ce projet de loi ne règle pas davantage le problème de financement de la Sécurité sociale que celui des retraites ou de notre système de santé.

Mme Odette Grzegrzulka - Contre vérités !

M. Marc Laffineur - Je voterai donc contre (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR)

M. Pascal Terrasse - Le déficit du régime général de la Sécurité sociale s'établira à 13,3 milliards en 1998 mais le Gouvernement s'est engagé à rétablir l'équilibre des comptes en 1999. Il avait promis en 1997 de maîtriser les dépenses tout en garantissant à nos concitoyens l'accès aux soins et les prestations auxquelles ils sont attachés. Equation ardue ! Vous avez su garder le cap et ce malgré les reproches, parfois démagogiques, formulés dans cette Assemblée. Il faut maintenant aller plus loin et répondre d'une manière durable et structurelle aux besoins tout en tenant compte des recettes prévisibles en 1999.

Il faut poursuivre la réforme du financement de la Sécurité sociale. Après le transfert des cotisations maladie vers la CSG, il est urgent de réformer en profondeur les cotisations patronales. Alléger les charges sociales sur les bas salaires et parallèlement élargir l'assiette des cotisations patronales répondrait aux objectifs d'emploi et de justice sociale.

Le débat est ouvert et les partenaires sociaux seront largement associés aux orientations que le Gouvernement présentera l'année prochaine. Ce chantier d'envergure ne doit pas pour autant masquer celui des régimes de retraite et de la branche vieillesse.

Deuxième poste du budget de la Sécurité sociale, les retraites constituent un grand sujet de préoccupation. Les salariés se demandent si leurs retraites seront assurées, les retraités s'inquiètent pour leur pouvoir d'achat et d'une manière générale, nous sommes tous conscients des difficultés prévisibles lorsqu'arrivera à l'âge de la retraite la génération née après-guerre.

Dans les années 1950, on comptait un retraité pour sept actifs ; demain, le rapport sera de 1 à 1,5. En outre, la durée moyenne de versement d'une pension est passée de 7 ans en 1950 à 24 ans aujourd'hui. Il ne faudrait pas pour autant briser ce qui a fait la force de notre pays et permis d'affirmer la solidarité entre les générations, nos régimes de retraite par répartition.

Notre système a permis une réelle amélioration du niveau de vie des Français les plus âgés. Il faut certainement l'aménager, l'améliorer mais certainement pas lui substituer des fonds de pension à l'américaine.

Le Premier ministre a demandé une étude au Commissariat général au Plan. Ces travaux doivent être menés dans la plus grande transparence et donner lieu à une large concertation avec les partenaires sociaux mais aussi avec les élus de la nation.

Votre projet de budget pour 1999 ouvre des perspectives. La création d'un fonds de réserve doté de 2 milliards représente une première étape. Ce fonds doit à terme s'autofinancer avec l'excédent de la CSSS après couverture des déficits de l'ORGANIC et de la CANCAVA. Cela permettra d'assurer des ressources suffisantes aux régimes de retraite des artisans et des commerçants tout en garantissant l'avenir des retraites des salariés et des non-salariés. Une partie de cet excédent a été affecté au budget annexe des prestations sociales agricoles pour un milliard de francs, ce qui permettra d'améliorer la situation des retraités agricoles les plus modestes.

En commission, le groupe socialiste a adopté un amendement tendant à créer au sein du fonds de réserve un conseil de surveillance dont l'objectif sera de veiller à ce que ce fonds soit bien utilisé aux fins pour lesquelles il a été créé. D'autres recettes l'abonderont à terme notamment issus, nous l'espérons, de la réforme des cotisations patronales.

M. Bernard Accoyer - Et des privatisations ?

M. Pascal Terrasse - Votre budget s'attache également à préserver le pouvoir d'achat des retraités, avec une revalorisation de 1,2 % au 1er janvier 1999, qui rompt avec la politique des années précédentes. Entre indexation sur les prix à la consommation et indexation sur les salaires nets, l'évolution du pouvoir d'achat des retraités sera meilleure, mais encore insuffisante pour les retraités les plus modestes.

Le groupe socialiste souhaite un signe fort en direction des retraités qui vivent parfois avec moins de 3 300 F par mois. Je pense aussi aux veuves dont l'assurance veuvage est encore inférieure au montant du RMI. La solidarité nationale doit jouer en leur faveur.

Je pense aussi aux bénéficiaires du minimum vieillesse dont le recours sur succession est porté depuis 1982 à 250 000 F, alors que, pour les bénéficiaires de la prestation spécifique dépendance, le recours a été porté à 300 000 F.

N'y a-t-il pas là une inégalité qui touche les plus faibles ? En 1982, 250 000 F, c'était le prix d'un petit appartement ; aujourd'hui, c'est le prix d'une chambre de bonne.

Enfin, pour en terminer, je voudrais évoquer avec vous le secteur social et médico-social.

Au sein de l'ONDAM l'enveloppe affectée au secteur social et médico-social est en nette progression, de 3,15 % en 1998 à 3,72 % en 1999. Elle permettra de dégager les moyens nécessaires à la création de 7 000 places en lits de section de cure médicale pour personnes âgées, de 2 000 places de service de soins infirmiers à domicile et au financement de la première tranche du plan pluriannuel de création de places pour adultes handicapés.

La réforme de la tarification des établissements pour personnes âgées devra s'accompagner de moyens financiers et du transfert de certaines dépenses de ville. Cette réforme est urgente et attendue, comme celle de la loi du 30 juin 1975. Elles peuvent toutes deux soulever de légitimes inquiétudes, mais il est indispensable de les mener à leur terme. Quel sera leur calendrier ?

Notre pays compte aujourd'hui 2,3 millions de personnes de plus de quatre-vingts ans, dont 1,2 million sont dépendantes. Ne voir dans ce problème que le devoir des familles reviendrait à oublier les évolutions considérables de notre société, éclatement des familles, urbanisation, drames du chômage.

De nombreuses associations sont parfois le seul recours des familles. Elles disposent d'un encadrement nécessaire à la formation, à l'accompagnement social et sont toujours prêtes à répondre à l'urgence sociale. Pourtant ces services sont fragilisés en raison de l'article L. 241-10 du code de la Sécurité sociale, qui ne leur permet pas de bénéficier des mêmes avantages que le service mandataire. Or leur coût est supérieur car leurs cotisations sont plus importantes.

M. Denis Jacquat, rapporteur - Très bien !

M. Pascal Terrasse - A l'occasion du DDOEF, ce problème avait été largement évoqué par ma collègue Paulette Guinchard-Kunstler et la discussion renvoyée au projet de loi de financement. Nous y voilà ! Le groupe socialiste a donc déposé un amendement visant à introduire la parité de traitement. Nous espérons pouvoir compter sur votre soutien, Monsieur le ministre, car je connais votre attachement au maintien à domicile. Vous pouvez quant à nous compter sur notre détermination...

M. Jean-Michel Dubernard - Heureusement !

M. Pascal Terrasse - ...pour atteindre vos objectifs. Un budget en équilibre, une meilleure garantie sociale, l'instauration d'une couverture maladie universelle, sont des signes forts, qui marquent à l'évidence une rupture (Rires sur les bancs du groupe du RPR) avec ceux qui veulent substituer les assurances privées à l'assurance maladie, les fonds de pension à nos régimes par répartition (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Michel Dubernard - Et si nous sortions des pourcentages, des chiffres, des comptes, pour retrouver l'esprit de la réforme constitutionnelle de 1996 voulue par Alain Juppé, celle qui nous permet de discuter, aujourd'hui, de la loi de financement de la Sécurité sociale. Nous sommes les représentants des Français, qui financent la Sécurité sociale et l'assurance maladie, et qui souhaitent que nous parlions aussi, plus concrètement, de leur santé, de politique de santé, qui souhaitent nous voir insuffler un peu d'humanité dans la lourde machine de l'assurance maladie (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Il faut remettre l'homme au coeur des préoccupations du système, en médecine de ville comme à l'hôpital, prendre en compte les professionnels de santé, sans lesquels le système ne peut fonctionner.

En médecine de ville, le patient veut être bien soigné. Il veut aussi être rassuré s'il présente une affection bénigne, soutenu s'il présente une maladie chronique, entouré s'il présente une maladie grave. Soigner, rassurer, soutenir, entourer, tel était le rôle du médecin de famille. Retrouvons-le. S'organiseront alors spontanément autour de lui, les réseaux, les filières, sans qu'il soit nécessaire de lui conférer un titre de référence.

Le patient souhaite être remboursé correctement, il sait que tel n'est pas le cas et il devine la médecine à deux vitesses. Il n'a pas besoin d'être responsabilisé, c'est lui qui paie, il le voit sur ses fiches de paie. Il souhaite certainement être mieux informé, mais il est las d'être considéré comme irresponsable. Il est prêt à accepter un contrôle des abus, mais il sait aussi que c'est lui qui doit décider et non les appareils.

A l'hôpital public et privé, dont le texte ne dit mot, tout devrait s'organiser autour du malade. Sortons des schémas théoriques, soyons pratiques, partons du malade, de ses besoins, de la nécessité de l'entourer dans des structures organisées pour lui, dans un cadre qui lui convient, en lui offrant des soins de qualité, d'une qualité égale pour tous. Ainsi, régionalisation, contractualisation, groupement de coopération sanitaire, évaluation, accréditation prendront un tout autre sens. Investissons plus dans l'ANAES. De son action dépend l'avenir de l'hospitalisation. Elle doit pouvoir travailler plus et plus vite sans oublier toutefois ses objectifs initiaux. Ne laissons pas Science et Avenir se substituer à elle.

MM. Jacques Barrot et Jean Bardet - Très bien !

M. Jean-Michel Dubernard - Pour qu'elles se consacrent entièrement aux malades, les professions de santé doivent travailler dans le calme et la sérénité. Ce n'est pas le cas et tel est mon principal sujet d'inquiétude, en médecine de ville comme à l'hôpital.

En ville, infirmières, kinésithérapeutes, biologistes, pharmaciens, dentistes, médecins se considèrent comme des boucs émissaires tant les mesures successives ressemblent à de l'acharnement : baisse autoritaire des tarifs, lettres flottantes, taxation d'office des laboratoires, objectif national de dépenses déjà virtuel ou négatif car calculé sur les bases 1998, changement des règles des MICA, incertitudes conventionnelles, mais certitudes sur la contribution conventionnelle. Il faudra bien sortir un jour de cette notion de sanction collective, injuste, qui culpabilise les médecins quand il faudrait sanctionner les tricheurs. Accélérez donc la mise en place des moyens d'information. Le Conseil de transparence des statistiques de l'assurance maladie, le système national d'information interrégime de l'assurance maladie sont des pas bien timides.

A l'hôpital, public et privé, le climat se dégrade, les grèves des internes, des urgentistes, des anesthésistes et, le 2 décembre prochain, des praticiens hospitaliers sont autant de cris d'alarme. Comment expliquez-vous la désaffection pour les postes de praticiens hospitaliers ? Il y a 27 % de postes vacants en radiologie, 20 % en anesthésie, 18,6 % en chirurgie, 17,3 % en psychiatrie...

M. Bernard Outin - Pas de chiffres, aviez-vous dit (Sourires)...

M. Jean-Michel Dubernard - Ce sont des pourcentages (Rires) qui ont du sens. Allez vous faire soigner dans ces hôpitaux, vous verrez la difficulté d'y rencontrer un chirurgien, un psychiatre, de vous y faire faire une radio ! Voilà le vrai problème dans ce pays : l'accès inégal à des soins de qualité égale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Alain Clary - Que n'avez-vous donné les moyens nécessaires à l'hôpital public ?

M. Jean-Michel Dubernard - Mieux vaut avoir un accident à côté d'un grand CHU parisien que dans un village...

M. Alain Clary - Pourquoi le taux directeur zéro sous Juppé ?

M. Denis Jacquat, rapporteur - Il faut lui reconnaître que, ces observations, il les présente chaque année.

M. Jean-Michel Dubernard - Pourquoi ces postes non pourvus ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Bien sûr, la charge de travail est trop forte, les rémunérations insuffisantes mais il y a d'autres explications : le vieillissement du parc hospitalier, les équipements insuffisants, les mauvaises conditions de travail démobilisent des personnels soignants qui voient les gaspillages, savent comment les réduire en redéployant les moyens mais ne voient rien venir d'autre qu'un partage de la pénurie. Pis, la confrontation des pouvoirs va croissant au sein de l'institution. L'opposition longtemps feutrée entre administration et médecins se durcit encore avec la montée en puissance du pouvoir infirmier. Le moment est venu, en gardant toujours le malade à l'esprit, de réorganiser l'hôpital, de définir clairement le rôle et la place de chacun. Vous en avez les moyens. Les centres de responsabilité sont inscrits dans la loi, pourquoi ne pas l'appliquer ? L'administration craint-elle tant la délégation de gestion ?

Vous avez, Monsieur le ministre, une image humaine, d'ouverture. A Mme la ministre, si elle nous faisait l'honneur d'être ici, je dirais qu'elle a l'image d'une personne décidée, technicienne.

M. le Président de la commission des affaires sociales - Quel beau couple ! (Sourires)

M. le Secrétaire d'Etat - Vous me gênez... (Sourires)

M. Jean-Michel Dubernard - Vous avez ainsi les atouts pour balayer les réticences, les corporatismes, les lobbies, pour ne prendre en compte que l'intérêt du malade et le maintien du système de santé à la française auquel nous sommes tous attachés. Sortez de cette prudence, de cette frilosité politique, de cet immobilisme (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Mme Muguette Jacquaint - L'année 1998 a été fructueuse en raison de la place qu'y a pris la notion même de famille dans le débat d'idées. Y a contribué la mobilisation des associations contre la mise sous conditions de ressources des allocations familiales, dispositions à laquelle s'était d'ailleurs, comme d'autres, opposé mon groupe, au nom de l'universalité du droit de l'enfant.

De nombreux rapports ont été rédigés, la Conférence sur la famille s'est réunie, ce qui devrait d'ailleurs autoriser maintenant le Parlement à se saisir de ce dossier de la politique familiale. Toujours est-il que cette pression de la société a favorisé le retour, aujourd'hui, au versement des allocations familiales sans condition de ressources.

En outre, ces allocations seront étendues à tous les enfants à charge jusqu'à l'âge de 20 ans. Constatant ce progrès, on ne peut que s'étonner du retard pris dans l'application de la loi de 1994. D'autre part, ne s'impose-t-il pas de revaloriser les allocations familiales, notamment en les indexant sur l'évolution des salaires moyens plutôt que sur celle des prix ?

On ne peut toutefois s'en tenir là : une vraie politique familiale supposerait par exemple de verser les allocations familiales dès le premier enfant. Le coût de la mesure, pour ne pas être négligeable, ne serait pas insupportable : il serait comparable à celui des exonérations de cotisations patronales d'allocations familiales et de surcroît, cet argent serait réintroduit dans le cycle de la consommation, consolidant la croissance.

Autre motif de satisfaction pour moi : l'élargissement de l'ARS aux familles d'un enfant ne percevant pas de prestations de la CAF. Je souhaiterais toutefois que les plafonds de ressources soient relevés, pour cette prestation comme d'ailleurs pour l'AJE. Cette dernière mesure pourrait être considérée comme le prémice d'un versement des allocations familiales, sans condition de ressources, dès le premier enfant.

Grâce à toutes ces dispositions, au lieu de tendre comme aujourd'hui à devenir un simple outil d'aide sociale, la CAF pourrait favoriser réellement une autre politique familiale sans que l'Etat soit pour autant déchargé de ses responsabilités. Mais cette politique nouvelle appelle aussi un réexamen de l'ensemble des prestations. Certaines sont dénaturées : ainsi l'allocation parentale d'éducation. De nombreuses femmes ne la demande que forcées, par l'insuffisance des structures d'accueil du petit enfant et parce qu'elles ne perçoivent plus l'ASS. D'où une explosion du coût de l'APE. Réformer le système d'indemnisation du chômage dans le sens d'une plus grande justice sociale éviterait cette forme de transfert de charge.

L'allocation pour le logement familial est quelque peu réformée également : la limite dans laquelle le loyer est pris en compte pour son calcul est modifiée en vue de l'aligner en trois ans sur celle de l'APL. Plus d'un demi million de foyers en bénéficieront.

D'autre part, la meilleure prise en compte des jeunes adultes restés au foyer familial rétablira une certaine égalité.

Naturellement, la politique familiale doit recevoir l'empreinte de la gauche plurielle. Nous devons chercher à mieux concilier vie professionnelle et vie familiale, en particulier en oeuvrant à un développement des crèches collectives. Le manque de places peut être dramatique, notamment pour les familles monoparentales, dans la mesure où il fait obstacle à la recherche ou à l'exercice d'un emploi. Dépassant les déclarations d'intentions, nous devons fixer des objectifs précis.

S'agissant des dépenses de la branche famille, l'article 32 en fixe le montant pour 1999 à près de 257 milliards, soit une très légère progression par rapport à l'année passée. Le principe même de cette prédétermination ne rencontre pas notre approbation car il revient à corseter le travail de la CAF.

En conclusion, je réitérerai notre voeu d'un débat au Parlement sur la politique familiale, dans le prolongement de la conférence sur la famille du 12 juin. L'évolution qui s'est récemment fait jour sous l'impulsion de la société civile et de certains élus en démontre la nécessité. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et quelques bancs du groupe socialiste)

M. Jacques Barrot - Je m'en tiendrai pour ma part à trois questions.

En premier lieu, si ce débat nous permet de dialoguer avec le Gouvernement comme nous ne pouvions pas le faire jadis, la loi de financement mériterait quelques correctifs : ainsi en ce qui concerne les taux de progression des différentes enveloppes. En fonction de quels critères les avez-vous fixés à 2,50 pour les hôpitaux et à 2,39 pour les soins de ville ? Vous savez que les patients des hôpitaux sont de plus en plus conduits à se procurer leurs médicaments dans les officines de ville. La commission des comptes a signalé ce problème, dont on mesure cependant encore mal l'ampleur et il serait bon qu'on soit vigilant lorsqu'on fixe les taux. Le Parlement ne pourrait-il être saisi ?

S'agissant de l'objectif fixé pour la médecine de ville, ne risque-t-on pas, compte tenu de la forte progression des soins enregistrée en 1998, de se retrouver pour le régime général à plus de trois points au-dessus de l'ONDAM de 1998 ? S'il en est ainsi, en choisissant pour 1999 un ONDAM irréaliste, ne se condamne-t-on pas à faire à tout coup jouer le mécanisme de régulation, d'où s'ensuivra un risque de démobilisation ?

Ma deuxième question a trait à la régulation économique infra-annuelle. Aux termes du dispositif, si les partenaires conventionnels ne peuvent prendre en cours d'année les mesures appropriées, le Gouvernement pourra décider des baisses de tarif. Cela apparaît difficilement praticable, dans la mesure où l'ONDAM est un objectif annuel, qui ne pourra être atteint qu'approximativement ou sous le coup de décisions discrétionnaires. C'est aussi dangereux : on donnera aux médecins le sentiment que leurs efforts sont de toute façon voués à l'échec, puisqu'ils seront encadrés presque au mois le mois, de façon autoritaire.

Au lieu de lisser des évolutions sur des bases pluri-annuelles pour permettre en cours d'année de concentrer tous les efforts sur la maîtrise médicalisée, on semble s'accrocher à des mécanismes quasi automatiques d'une régulation qui risque d'être vécue comme un constat d'échec anticipé de la maîtrise médicalisée. J'observe d'ailleurs que le seul syndicat qui ait noué la négociation avec la Caisse nationale bute sur ce mécanisme.

Ma troisième question porte sur les articles 25 et 26. Tout se passe comme si nous étions ramenés en arrière vers une administration de l'industrie du médicament. La manière dont est conçue cette double régulation, censée être faite tantôt par le Comité économique, tantôt par la voie autoritaire, risque bien d'aboutir à précariser toute l'industrie du médicament en France. Comment peut-on conclure des conventions pluri-annuelles avec des laboratoires sur la base d'objectifs annuels arrêtés par le Gouvernement ? Comment passera-t-on des unes aux autres ?

Certes, comme le répète M. Evin, le conventionnement n'a sans doute pas porté tous ses fruits, sans doute parce que nous avons tardé à nous engager dans cette voie, sans doute parce qu'il faut un certain temps pour s'assurer de la fiabilité du conventionnement, et de la manière dont on peut le sanctionner. Pour autant, faut-il, poussé par une précipitation que pourrait sembler justifier l'accroissement rapide des dépenses médicamenteuses, renoncer à cette approche qui permet à la fois de respecter la bonne économie du médicament et les intérêts légitimes de l'assurance maladie ? Il est parfois de bon ton de mettre en cause systématiquement le médicament comme source de dépenses, d'oublier les grandes avancées enregistrées dans le traitement du sida. Il est donc vraisemblable que les progrès à venir seront liés à l'apparition de nouvelles molécules : obsédés par le dérapage des dépenses d'assurance maladie, n'oublions pas de laisser à la France une certaine autonomie sans son approvisionnement et ne la condamnons pas, comme le Japon, à acheter à l'extérieur tous les médicaments nouveaux, dans les conditions imposées par les grandes firmes mondiales.

En outre, ces articles 25 et 26 posent quelques problèmes techniques majeurs. En parlant du chiffre d'affaires afférent au médicament remboursable, alors même que l'objectif de dépenses d'assurance maladie fixe les dépenses de remboursement effectives, n'est-on pas en train de confondre dépenses de santé et dépenses d'assurance maladie ? Peut-on taxer des laboratoires qui vendent des produits non remboursés ? ("Très bien !" sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR)

D'autre part, l'article 24 introduit la possibilité de modifier en cours d'année le prix du médicament... Est-ce bien raisonnable ?

Enfin, peut-on imaginer que les prix français continuent à être fixés sans prendre en considération les prix pratiqués dans les autres pays de l'Union européenne ? S'il en est ainsi, on assistera à des distorsions de concurrence et à des délocalisations.

Toutes ces raisons me font souhaiter très vivement que le Gouvernement revoie ce dispositif qui manifestement fait courir des risques majeurs aux industries du médicament installées sur notre sol. Il n'est certes pas question de faire échapper le domaine du médicament à la régulation, mais encore faut-il que cette régulation préserve la stabilité sans laquelle il est très difficile de conduire des politiques de recherche longues et risquées (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. André Aschieri - Ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale tend à corriger les inégalités et à réduire le déficit. Nous nous félicitons du retour à l'équilibre des comptes prévu pour l'an prochain (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF). Mais nous constatons que trop de personnes restent encore à l'écart des progrès sanitaires et que le principe d'égalité, sur lequel repose notre système de protection sociale, reste un vain mot. D'après le Haut comité de la santé publique, la précarisation d'une part croissante de la population provoque à moyen terme une dégradation de la santé des couches sociales les plus défavorisées et, au-delà, celle de la population tout entière.

Les inégalités de santé selon les milieux sociaux tendent à s'accroître. Seule une politique de santé publique conçue sur le long terme peut y remédier. C'est pourquoi il faudrait réintroduire l'éducation sanitaire à l'école primaire.

Ce projet souffre d'une grave carence, Madame la ministre : en effet, il va falloir encore attendre des mois la mise en place de la couverture maladie universelle, alors qu'un Français sur quatre renonce à se soigner pour des raisons financières.

La gestion de la prestation spécifique dépendance par les conseils généraux est souvent un échec. Le niveau des prestations et leurs critères d'attribution varient d'un département à l'autre. Il faut donc créer une PSD universelle, ouverte à l'ensemble des personnes dépendantes, que le handicap soit de naissance ou ultérieur. Celle-ci pourrait être financée par un prélèvement social du type CSG, géré par la Sécurité sociale, et permettrait de rémunérer une tierce personne ou de compenser le manque à gagner d'un proche.

Nous sommes favorables au droit de substitution conféré aux pharmaciens. Nous souhaitons une véritable reconnaissance du pluralisme thérapeutique, étant donné que plusieurs millions de Français ont aujourd'hui recours aux médecines alternatives et que bon nombre d'entre elles ne sont pas remboursées. Nous constatons aussi que la médecine préventive reste le parent pauvre de notre système de soins et que les médecins scolaires ne sont pas assez nombreux. C'est pourquoi les députés verts appellent de leurs voeux un plan ambitieux en faveur de la médecine scolaire, de la médecine en milieu carcéral, de la médecine sociale et surtout de la médecine du travail. Et il serait souhaitable que ces domaines soient replacés sous l'autorité directe du ministre de la santé.

J'ai rencontré ces derniers mois, dans le cadre d'une mission parlementaire, nombre d'associations de victimes du travail. Savez-vous, par exemple, que jusqu'en 1992 les dockers de Dunkerque transportaient de l'amiante sans protection ? Tous ces travailleurs nous demandent de prendre nos responsabilités. Il est donc urgent de moderniser la législation relative à la prévention et à la prise en charge des maladies professionnelles et des accidents du travail. Les députés verts plaident pour une médecine du travail indépendante des industriels, pour l'application du principe de précaution et pour une véritable transparence de la gestion du risque. Il est d'autre part indispensable d'améliorer la connaissance statistique des accidents et des maladies du travail, de manière à mettre en évidence la globalité des risques professionnels. Enfin l'effort doit porter sur l'amélioration du quotidien des victimes. Nous appuyons les demandes des associations qui réclament la gratuité des soins résultant de l'accident ou de la maladie, l'amélioration du dispositif d'insertion professionnelle et la mise en place d'une retraite anticipée dès l'âge de 55 ans, à taux plein, pour les travailleurs handicapés, usés par le travail. Les Verts demandent aussi l'organisation d'un vrai débat national sur les retraites.

Demain, les maladies seront de plus en plus liées au milieu de vie. Nous devons donc compléter la loi du 1er juillet 1998, relative aux renforcements de la veille et de la sécurité sanitaire, en créant un dispositif de sécurité sanitaire environnementale, qui sera un instrument efficace d'expertise et de veille et qui réduira à terme les dépenses de la Sécurité sociale.

Nous souhaitons que le débat national, qui aura lieu à l'occasion des Etats Généraux de la Santé, permette d'initier une véritable politique de santé publique.

Si vous vous engagez, Madame la ministre, à mener les réformes indispensables que nous proposons, nous vous soutiendrons sans réserve. Pour l'heure, nous avons confiance en la volonté politique du Gouvernement de renforcer la protection des travailleurs et de lutter contre les inégalités. C'est pourquoi les députés verts voteront ce projet de loi (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

La séance, suspendue à 23 heures 25, est reprise à 23 heures 40.

M. Bernard Perrut - Le débat qui nous occupe mériterait que l'on lui consacre bien plus de temps, même si le projet se borne à une approche comptable et administrative quand l'enfant, la famille, le retraité, le malade sont au coeur de nos préoccupations.

Vous pouvez vous satisfaire que les prévisions de la loi de financement pour 1998 aient été respectées grosso modo, mais c'est au prix d'une mise à contribution des revenus de l'épargne, et donc des retraités, d'une réforme de l'AGED et d'une mise des allocations familiales sous condition de ressources, ainsi que d'un plan d'urgence de 2,7 milliards sanctionnant collectivement des professions entières. Quant au surplus de recettes engendré par la croissance, vous n'y êtes pour rien !

Par contre, les prévisions pour 1999 sont incertaines, voire imprudentes, tant pour ce qui est de la croissance du PIB que de celle de la masse salariale, sur laquelle pèseront les 35 heures. Vous nous trompez et vous vous trompez vous-mêmes, qui plus est, lorsque vous affichez un objectif de dépenses calculé par rapport à celui de cette année et non aux dépenses effectives.

Dans le domaine de l'assurance-maladie, vous manquez d'imagination. Il faut changer de logique, et des propositions intéressantes ont été faites par les groupes de l'opposition. Pourquoi ne pas les expérimenter ? La maîtrise comptable revient à sanctionner aveuglément tous les praticiens, les vertueux payant pour les autres. Je trouve positive, en revanche, ce qui est prévu en faveur de la prévention et du dépistage.

Le rétablissement des allocations familiales pour tous est contrebalancé par la baisse du plafond du quotient familial : après avoir fait 4,8 milliards d'économies sur le dos de 300 000 familles l'an dernier, vous récidivez, au détriment de 500 000 familles cette fois, à commencer par celles qui ne comptent qu'un enfant.

La garantie que vous dites apporter aux retraités n'est qu'un trompe-l'oeil. Le fonds de réserve, d'un montant de deux milliards, n'est qu'une goutte d'eau en regard des besoins du régime de base, estimés à 107 milliards en 2015. Vous voulez leur faire croire que l'essentiel est sauvé, alors que tout reste à faire. Les fonds de pension sont la seule solution qui permette d'atténuer le choc démographique ; elle n'est pas contradictoire, mais complémentaire de la répartition. Deux Français sur trois y sont d'ailleurs favorables, à l'instar du commissaire au Plan. Quant aux retraités actuels, ils dénoncent la baisse de leur pouvoir d'achat, amputé par le prélèvement de 10 % sur les revenus de l'épargne, et vous rappellent à votre promesse de revalorisation des pensions.

Les handicapés, enfin, sont un sujet qui peut nous réunir. Pour eux, l'exercice d'une activité professionnelle est souvent source de fatigue et même d'usure précoce. Ne peut-on leur ouvrir droit à la retraite dès 50 ans ?

M. Denis Jacquat, rapporteur - Très bien !

M. Bernard Perrut - Je souhaite que nous osions ensemble, au-delà des clivages politiques, avoir une vision novatrice, pour tous ceux dont nous évoquons ici la naissance, la vie et la mort ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF)

M. Jean-Paul Bacquet - Depuis des années le déficit de la Sécurité sociale se creuse. Les thérapeutiques de droite ou de gauche sont toujours les mêmes : déremboursement, hausse des cotisations. Le remboursement de la dette sociale est une solution temporaire, qu'il ne faudrait pas éterniser. Il n'y a pas d'équilibre spontané entre dépenses et recettes. Il est donc indispensable d'avoir une évaluation suffisante des besoins, pour leur adapter les recettes. Il serait regrettable que l'assurance maladie devienne un marché de soins, avec des consommateurs face à des distributeurs. Souvenons-nous aussi que si les consommateurs de soins sont aujourd'hui solvables, c'est parce qu'un tiers paye grâce aux cotisations ; et rappelons-nous quelle était la situation avant les conventions.

Vous refusez les mesures conjoncturelles, Madame la ministre, et préférez des mesures structurelles. C'est une vraie démarche de santé publique avec une loi de programmation et des lois de financement. C'est le choix de la transparence, avec une meilleure connaissance des pratiques et une définition des besoins pour fixer les priorités. C'est une évaluation des actes médicaux, pour ne retenir que ceux qui sont justifiés. C'est une approche médicalisée de la maîtrise, certes préférable à l'approche comptable, mais à condition de se donner les moyens de la mettre en place. C'est la responsabilisation des professionnels de santé. L'informatisation est indispensable. Mais la résumer à SESAM-VITALE serait la voir par le petit bout de la lorgnette, et la réduire à une gestion administrative, comptable, voire flicarde. Non, il faut que l'informatisation soit vraiment une aide à la prescription. C'est encore l'utilisation des génériques, l'optimisation, une meilleure pratique des RMO. C'est la mise en place du réseau santé social qui doit permettre d'éviter nombre d'actes inutiles. Ce sont aussi les filières, les réseaux de soins, une meilleure régulation des pratiques avec les professionnels de la santé, sans qui aucune évaluation sérieuse n'est possible.

Vous avez choisi de favoriser la continuité des soins grâce au système du médecin de référence. Vous favorisez une politique conventionnelle qui soit vraiment partenariale, librement négociée, avec bilan au quatrième et au huitième mois. Mieux vaut que les professionnels prennent les décisions, plutôt que le Gouvernement.

Certes, il y a une clause de sauvegarde. Mais elle n'est censée jouer qu'en cas de très grande difficulté. Elle est faite, vous l'avez dit, pour ne pas servir. Vous avez joué la responsabilisation des acteurs, et c'est parce qu'ils seront responsables que nous ne l'utiliserons pas.

M. Bernard Accoyer - C'est très optimiste.

M. Jean-Paul Bacquet - Mais il faut pour cela avoir le courage d'accélérer l'évolution, et laisser libre champ à la pratique conventionnelle. Il s'agit non de rationner les soins mais de les rationaliser, non de pénaliser mais de responsabiliser. Pourquoi les seuls assurés sociaux seraient-ils mis à contribution ? Oui, les professionnels de santé ont une clause de sauvegarde. Certains veulent trouver cette sauvegarde dans l'assurance. C'est tout le débat entre un système de solidarité nationale et un système d'assurance réservé à ceux qui veulent payer. Or, quand dans notre système 16 % des assurés n'ont pas de mutuelle et 20 % reconnaissent s'être privés de soins, peut-on se permettre d'aggraver les inégalités ? Non. Vous avez fait, Madame la ministre, un choix difficile et courageux, celui de pérenniser la Sécurité sociale et de la rendre plus efficace et plus solidaire : vous avez tout mon soutien (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Thierry Mariani - Tout d'abord, permettez-moi de m'interroger sur les conditions de travail de notre assemblée, durant la session budgétaire. N'étant pas membre de la commission, je trouve inadmissible que nous n'ayons pu disposer de son rapport que quelques heures avant le début de la discussion. Pour légiférer, nous devons avoir dans des délais raisonnables les documents indispensables.

Voici donc le second projet de loi de financement de la Sécurité sociale de votre majorité. Je serais tenté de dire que les années passent, et que les problèmes restent intacts et irrésolus. C'est particulièrement vrai pour la branche vieillesse : votre projet, comme l'an passé, ne résout aucune des difficultés qui l'attendent, et ne fait que gérer à courte vue la pénurie, sans perspectives d'avenir. C'est pourtant de cet avenir qu'il faudrait parler. Il est plus que temps de prendre des mesures fortes, qui aillent au-delà du symbole, pour assurer aux actuels retraités des pensions décentes, et pour garantir aux actifs d'aujourd'hui qu'ils auront, demain, les moyens de vivre dignement.

De tout cela il n'est pas question dans votre projet. Vous vous contentez de symboles et de déclarations de bonnes intentions. Ce n'est pas sérieux. Comment pouvez-vous baser votre politique de défense de notre système de retraite sur la création d'un fonds de réserve de deux milliards au bénéfice du régime par répartition ? Vous avez su trouver huit milliards pour le PACS : le lobby homosexuel vaut quatre fois plus cher que les retraités ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Mais ce n'est pas deux, dix ou même cent milliards qu'il faudrait provisionner : ce sont au moins 300 milliards qui manqueront, à terme, pour financer les pensions de la génération du baby-boom quand elle quittera la vie active.

Il y a un an, dans le rapport annexé à la loi de financement pour 1998, nous pouvions lire : "La situation financière de la branche vieillesse reste déséquilibrée. Cette situation devrait perdurer dans les années à venir à législation constante, sans connaître une aggravation significative jusqu'en 2005. Cette situation appelle une réflexion approfondie sur l'évolution des ressources des systèmes de retraite, que le Gouvernement entend conduire en prenant en compte l'évolution des conditions du vieillissement, de la durée et du mode de vie." Que lisons-nous cette année dans ce même rapport ? "La situation financière de nos régimes de retraites est déséquilibrée. Ceux-ci devront faire face à partir de 2005 à l'arrivée à l'âge de la retraite des générations nombreuses nées après la seconde guerre mondiale. Le Gouvernement entend aborder les évolutions nécessaires de nos régimes de retraite sur la base d'un diagnostic précis des problèmes auxquels ils sont confrontés..." Et vous confiez ce diagnostic au Commissariat au plan. N'avez-vous pas l'impression de vous répéter un peu d'une année sur l'autre ? Nous répéterez-vous chaque année que la situation financière est déséquilibrée, qu'elle deviendra ingérable en 2005, et qu'il faut y réfléchir ? Combien de colloques, de rapports et d'études vous faut-il encore pour prendre conscience de ce que chacun sait aujourd'hui : que nous ne pourrons plus continuer comme auparavant, et que notre système de retraite, y compris les régimes spéciaux, doit être profondément réformé si nous voulons qu'il perdure.

Mme la Ministre - Qu'avez-vous fait ?

M. Thierry Mariani - M. Balladur a agi sur l'âge de la retraite. Vous ne proposez rien, ou presque : deux milliards, le cent cinquantième de ce qui est nécessaire !

En temporisant ainsi, en poursuivant votre chasse aux épargnants, vous entraînez la France, et les retraités en particulier, dans une spirale infernale.

Pourtant, le diagnostic est connu et les solutions existent. Considérons d'abord le diagnostic et la situation des actuels retraités. Chacun connaît l'évolution démographique de notre pays, qui verra diminuer de façon inéluctable le rapport entre actifs et inactifs dans les prochaines années. Je ne reviendrai pas sur le constat d'une France qui vieillit, où des seniors de plus en plus nombreux demandent légitimement à être associés aux décisions qui les concernent. Mais je veux insister sur l'ineptie qu'il y a à décourager l'épargne comme vous le faites. En effet, beaucoup de nos concitoyens ont acquis pendant leurs années d'activité un capital qui vient aujourd'hui compléter des pensions modestes, qui souvent ne suffiraient pas pour vivre convenablement. En vous attaquant à l'épargne, vous vous attaquez principalement aux retraités. Ceci est d'autant plus choquant que vous avez renoncé à vos promesses de campagne, en particulier l'indexation des retraites sur les salaires, et non sur les prix.

Vous ne pouvez pas à la fois imposer toujours plus les retraités, amputer leur pouvoir d'achat et décourager l'épargne ! Les 100 000 retraités qui ont manifesté le 22 octobre dernier vous l'ont rappelé avec force.

De même, vous ne pouvez continuer de refuser que les neuf millions de retraités que compte notre pays soient représentés au Conseil économique et social, comme ils le demandent depuis des années.

Enfin, vous ne pouvez pas continuer à laisser sur le bas-côté de la route les retraités agricoles : ils ont droit à des pensions décentes, leur permettant de vivre dans la dignité. Nous en débattrons lors de l'examen du BAPSA (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

Quelles sont les solutions ? Vous les connaissez, mais il est vrai qu'elles exigent du courage. Il convient tout d'abord d'assortir nos régimes de retraite d'un volet fondé sur la capitalisation.

En effet, le système français de retraites à deux étages par répartition, auquel nous sommes tous très attachés, ne suffira pas pour garantir des pensions décentes, sauf à augmenter les cotisations des actifs d'une manière insupportable, ce que personne n'envisage sérieusement. Sommes-nous capables de mettre en place ensemble un troisième étage, fondé sur la capitalisation ? Préférons-nous, en ne faisant rien, laisser à chacun le soin de se constituer individuellement un capital pour ses vieux jours ? Où est l'équité entre les tenants du "tout répartition", qui laissera nombre de nos concitoyens sur le bord de la route, et ceux qui souhaitent, comme nous, organiser un système de capitalisation appuyant les régimes par répartition, afin précisément d'assurer la pérennité de ces derniers ?

Un récent sondage IPSOS montre que 43 % de nos concitoyens sont favorables à la création de fonds de pension et que plus de 83 % d'entre eux n'excluent pas d'y souscrire, et ce, malgré les vives critiques, le plus souvent infondées, dont ils font l'objet.

Mme Odette Grzegrzulka - Ils ne savent pas ce que c'est.

M. Thierry Mariani - Les mentalités sont en train d'évoluer. Il nous faut être pragmatiques, nous attacher à la réalité des faits, et non nous quereller sur des termes et des concepts qui tiennent surtout de l'idéologie.

Il convient en second lieu de revoir les régimes spéciaux, sans a priori, sans tabous, et en se gardant des idées reçues.

Déjà en 1991, le livre blanc avait mis l'accent sur leurs difficultés. Or, rien n'a été fait depuis. Avant d'aller plus loin, je souhaite tordre le coup à une idée reçue selon laquelle traiter des régimes spéciaux reviendrait à montrer du doigt leurs bénéficiaires, et en particulier les fonctionnaires. Il n'en est rien. Le rapport Briet montre qu'il faudrait augmenter les cotisations de vingt points à l'horizon 2015 pour couvrir le besoin de financement du régime des fonctionnaires de l'Etat, et de trente points pour couvrir celui du régime des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Ne pas s'en préoccuper et se voiler la face comme vous le faites, Madame le ministre, c'est aller à l'encontre même de l'intérêt des bénéficiaires de ces régimes.

De plus, il convient de s'interroger sur l'équité de ces régimes spéciaux. Comment en effet imaginer un statu quo, alors que leurs assurés bénéficient pour la plupart d'un statut nettement plus favorable que celui du régime général ?

Comment imaginer que les salariés du privé soient seuls à faire un effort, alors même qu'on a déjà augmenté pour eux le nombre d'années de cotisation pour une retraite à taux plein et allongé la période de détermination du salaire de référence ? Ne pas oser aborder la question, c'est faire preuve de bien peu de considération envers les fonctionnaires. Ils ne sont ni irresponsables, ni uniquement attachés à la préservation de leur intérêt. Dans la mesure où leurs régimes de retraite subiront le même choc démographique que le régime général, il est indispensable de les réformer afin de garantir leur pérennité.

Le problème des retraites n'est pas un problème catégoriel, il intéresse toute la nation. Je suis intimement convaincu que chacun de nos concitoyens est en mesure de comprendre et d'accepter des réformes destinées à préserver l'intérêt général. Cela suppose de parler franc et sans démagogie.

Or, ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale botte en touche et nous fait perdre un temps précieux.

On peut bien entendu ne pas être d'accord avec certaines de nos propositions. Ce qui est coupable est de ne rien faire. Ce qui est inadmissible est de renvoyer à un énième rapport les décisions qui s'imposent. Ce qui est malhonnête est de continuer à parler la langue de bois.

Votre projet manque de courage, ne trace pas de perspectives pour l'avenir, ne concorde pas avec la réalité. Les Français sont las des atermoiements de la classe politique. Ils attendent que nous prenions enfin nos responsabilités, celles pour lesquelles ils nous ont élus. Votre projet, c'est une année de perdue dans le règlement des difficultés de la branche retraite.

L'an prochain, vous pourrez nous resservir dans votre rapport annexé les litanies de l'année passée et d'aujourd'hui. Vous n'aurez toujours rien réglé. Telles sont les raisons de notre opposition à ce projet de loi, en particulier pour ce qui concerne la branche vieillesse (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Maxime Gremetz - Les retraités viennent de rappeler avec vigueur leurs difficultés et leurs attentes. Ils ont souligné l'urgence de trouver des réponses justes et durables au problème des retraites et de la dépendance, tout en réaffirmant leur attachement au système de retraite par répartition.

Le financement des retraites pose problème, nul ne le conteste. C'est pour y faire face qu'a été imposée l'indexation des pensions sur les prix, allongée la durée de cotisation pour bénéficier d'une retraite à taux plein et allongée la période de détermination du salaire de référence.

Le pouvoir d'achat des pensions a régressé, alors même que les retraités doivent souvent aider leurs enfants ou petits-enfants confrontés au chômage et à la précarité. C'est donc avec amertume qu'ils ont constaté que l'engagement pris d'indexer les pensions sur les salaires n'a pas été tenu.

Rien n'a été réglé pour autant. Vous proposez comme solution de créer un fonds de réserve. Cette disposition nous pose problème ("Ah !" sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Le Gouvernement a confié au Commissariat général au plan une mission d'analyse sur notre système de retraite, associant les partenaires sociaux, les caisses de retraite et les représentants des retraités. Un rapport sera rendu public au printemps prochain. L'efficacité voudrait que les décisions importantes suivent cette concertation, au lieu de la précéder.

En outre, le financement de ce fonds reste extrêmement flou.

M. Jean-Luc Préel - Tout à fait.

M. Maxime Gremetz - Vous dites qu'il ne recevra pas les recettes des privatisations. Mais reconnaissez que "toute disposition législative ou réglementaire" est une formule trop vague pour que nous puissions émettre un avis favorable a priori. Enfin, nous ne savons pas non plus comment sera géré ce fonds. En tout état de cause, le mode de gestion actuel du fonds de solidarité vieillesse n'est pas satisfaisant.

C'est pourquoi, si nous prenons acte de vos déclarations sur la pérennité du système de répartition, la création de ce fonds nous inquiète, même si vous précisez qu'il ne s'agit pas d'un fonds de pension. Les fonds de pension, chers au CNPF et à la droite, sont une fausse solution....

Mme Odette Grzegrzulka - Tout à fait.

M. Maxime Gremetz - Pis, ils ouvrent la voie aux dérives d'une capitalisation soumise aux aléas d'une guerre boursière planétaire. La crise actuelle devrait pourtant nous inviter à réfléchir.

La loi Thomas, qui existe toujours, entretient l'ambiguïté. Son abrogation clarifierait la situation et donnerait d'ailleurs suite à la promesse faite par le Premier ministre le 19 juin 1997.

Tout en présentant des risques, la retraite par capitalisation ne résout pas pour autant les problèmes ni du financement ni de la part des richesses qui doit être consacrée aux retraites. Selon un responsable de la Caisse des dépôts, on ne saurait justifier le choix de la capitalisation par l'évolution démographique. Quel que soit le type de régime choisi, le problème reste de savoir comment partager le PIB entre actifs et retraités.

Retraite par répartition ou par capitalisation : c'est un choix de société.

Mme Odette Grzegrzulka - Tout à fait.

M. Maxime Gremetz - Soucieux de la solidarité et de la justice, nous choisissons la répartition. Pour assurer une retraite décente à tous, il faut mettre à contribution l'ensemble des revenus, développer l'emploi et les salaires. Nous avons fait des propositions en ce sens, tout comme nous avons demandé l'indexation des pensions sur les salaires.

En l'état actuel de votre texte, nos préoccupations sur l'avenir des régimes de retraite par répartition et la situation des retraités demeurent, de même que nos craintes sur les fonds de réserve. J'espère que le débat nous permettra d'y voir plus clair et d'avancer. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste)

Mme la Ministre - Je l'espère également.

M. Jean-Pierre Foucher - Comme l'année dernière, plusieurs articles concernent le médicament et c'est sur eux que portera plus particulièrement mon intervention.

La contribution due par l'industrie pharmaceutique et inscrite dans l'article 7 n'est pas remise en cause : elle relève en effet de la participation de l'ensemble du secteur santé à la diminution des dépenses de santé.

En revanche, vous modifiez, Madame la ministre, le taux, l'assiette et les modalités de la contribution déjà payée en totalité par les entreprises de l'industrie pharmaceutique. Une telle méthode bafoue les principes mêmes de la sécurité juridique. Selon l'article 14 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, il est toujours acceptable que soit remise en cause une contribution en cours, dès lors que la nécessité de la rétroactivité est prouvée par l'état des comptes de la nation. Mais là, vous remettez en cause un impôt défini, déjà versé et relatif à un exercice clos. Même en acceptant l'idée que votre conception du financement de la Sécurité sociale puisse différer de la nôtre, cela relève d'une méthode inédite et incompatible avec le droit français. Alors même que le litige opposant un laboratoire français et la Communauté européenne n'est pas encore tranché, vous proposez une solution inique, source de conflits sans fin, débouchant sur une remise en cause de l'impôt en général. J'aimerais connaître l'avis qu'en donnera le Conseil constitutionnel, ainsi que les précédents sur lesquels vous vous appuyez. Depuis quand peut-on retirer au législateur sa compétence pour renvoyer au pouvoir réglementaire les modalités et les sanctions afférentes à un impôt ? Le principe de la sécurité juridique n'est-il pas violé? Le principe de non rétroactivité de la loi pénale n'est-il pas violé ? La compétence du législateur n'est-elle pas violée ? Le principe de l'annualité de la loi de finances n'est-il pas violé ?

M. Bernard Accoyer - Tout à fait !

M. Jean-Pierre Foucher - Le Gouvernement serait-il seul habilité, Madame la ministre, à exiger ultérieurement la même rétroactivité pour l'impôt sur le revenu ?

J'en viens au droit de substitution élargi par l'article 23. Les conditions ne sont pas assez précises. Elles risquent de créer de nombreux litiges et de désorganiser le marché pharmaceutique, de nombreux points restant trop vagues en ce qui concerne l'importance du produit princeps, la concurrence entre laboratoires, le partage de responsabilités entre Etat et pharmacien d'officine, le poids de l'Agence du médicament. L'importance des génériques ne peut être connue par avance. Etes-vous donc bien certaine, Madame la ministre, de parvenir ainsi à 4 milliards d'économies ?

Dans son article 24 le projet instaure un lien entre les conventions et le respect de l'ONDAM. C'est totalement contraire à l'esprit conventionnel puisqu'une convention valable 4 ans sera remise en cause au bout de quatre ou de huit mois. L'absence totale de visibilité et de durée pénalisera gravement les laboratoires. La rupture probable des conventions incitera au désinvestissement, au nom d'une vision archaïque, purement comptable, des rapports entre Etat et industrie, contraire à une approche médicalisée des dépenses de santé.

Le mécanisme de la clause de sauvegarde économique de l'article 25 constitue quant à lui un mécanisme pérenne de régulation qui se déclenchera dès que la croissance du chiffre d'affaires de l'ensemble de l'industrie pharmaceutique sera supérieure à celle de l'ONDAM. Les laboratoires ayant conclu une convention avec le Comité du médicament n'en seront pas redevables. Le système sera donc extrêmement complexe et la base retenue pour le déclenchement du mécanisme variera perpétuellement. On peut donc se demander si cet article ne vise pas à décourager tout simplement le système conventionnel.

Madame la ministre, vous savez comme moi que l'ONDAM n'est pas réaliste. Dans le seul domaine du médicament, vous ne tenez pas compte de l'arrivée sur le marché de nouvelles spécialités qui, même si elles ne sont pas remboursées, entraîneront des dépenses remboursables, ne serait-ce que pour obtenir la prescription médicale et, éventuellement des examens complémentaires. De même, ne sont pas pris en compte les médicaments sortis de la réserve hospitalière qui, jusqu'à présent, étaient comptabilisés dans le budget de l'hôpital et qui viendront maintenant alourdir l'enveloppe ville.

Attention aux annonces qui ont un effet pervers pour l'équilibre de la branche maladie. Les déclarations répétées sur le déremboursement de spécialités pharmaceutiques dont l'efficacité ne serait pas avérée, ne me semblent pas responsables. En effet, l'activité, même si elle n'est pas spectaculaire, existe, et la prise de médicaments est souvent suivie d'amélioration. L'effet placebo remboursé à 35 % me semble peu onéreux.

M. Bernard Accoyer - C'est vrai !

M. Jean-Pierre Foucher - Le fait de supprimer le remboursement conduira le prescripteur à ordonner une spécialité remboursée à 65 % et en outre plus chère.

Enfin le fait de lier l'activité d'un médicament au remboursement va créer chez le patient un doute sur l'efficacité des médicaments et de ce fait la médication familiale, qui ne coûte rien à la Sécurité sociale, ne pourra se développer car tout produit "actif" au sens où vous l'entendez, c'est-à-dire remboursable, est inscrit sur une liste et nécessite donc une prescription, donc une visite, et par là même une demande de remboursement.

Tout ceci montre que vous ne pourrez tenir votre objectif national de dépenses d'assurance maladie. C'est une raison supplémentaire pour ne pas voter cette loi de financement (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL).

Mme Hélène Mignon - Par ses liens avec la solidarité et la justice sociale, la maîtrise des dépenses de santé est un défi majeur de notre société. Très attachés à notre système de santé, nous reconnaissons le travail remarquable effectué par la quasi-totalité des professionnels. Ils sont déterminants pour l'avenir de la médecine et de la qualité des soins.

C'est à ce titre qu'ils doivent comprendre que la maîtrise des dépenses de santé est incontournable et qu'ils y ont toute leur place. C'est bien une démarche citoyenne qui doit les animer et qu'ils doivent faire partager à leurs patients. Le dialogue singulier, c'est aussi faire passer des messages, montrer qu'on peut soigner différemment, ne pas oublier le rôle capital de la prévention.

En ce qui concerne les retraites, il faut convenir que les cotisations sociales représentent un salaire différé. L'attachement des salariés à la pérennité des retraites par répartition est donc justifié. Le fonds de réserve, même s'il est encore symbolique, est à la fois porteur d'espoir et gage de la volonté du Gouvernement.

Je m'associe aux propos de plusieurs de mes collègues sur les difficultés rencontrées par les veuves -civiles en particulier-, les handicapés vieillissants et sur la nécessaire revalorisation décente du minimum vieillesse.

J'en viens à la politique de la famille. Comme vous nous l'aviez annoncé à plusieurs reprises, Madame la ministre, nous revenons donc à l'universalité des allocations familiales et à un ajustement du quotient familial plus conforme à une meilleure égalité entre citoyens, donc entre enfants.

Une politique familiale bien comprise ne peut pas considérer l'enfant comme isolé du reste de la société, en particulier de l'évolution de la famille.

Les familles monoparentales, éclatées, sont en nombre croissant, elles sont un élément incontournable de notre paysage sociologique. La famille n'est plus forcément le havre de paix que l'on décrivait il y a quelques décennies, même si elle reste un point d'ancrage fort où se développent les premières solidarités. Elle est soumise aux conséquences du chômage, à la séparation, au surmenage des parents tiraillés entre leurs devoirs éducatifs et leurs projets professionnels. Nous devons résorber les inégalités sociales qui en résultent.

Les modes de garde des jeunes enfants doivent être adaptés à des besoins variés. Si l'AGED est une réponse, tout le monde ne peut y avoir recours et il faut pouvoir offrir aux autres parents un traitement égalitaire. Le développement de l'accueil des plus jeunes passe par l'augmentation du nombre de places en crèches traditionnelles, parentales, familiales, en haltes-garderies. L'aménagement du temps de travail devrait favoriser le développement de structures associatives. Des solutions doivent être offertes pour aider les familles en difficulté. Tout enfant a droit à une socialisation précoce. Des places d'urgence devraient toujours être réservées à des parents qui retrouvent un emploi ou qui accèdent à une formation professionnelle. Voilà qui compléterait les nombreuses mesures déjà prises en faveur des familles dans la loi contre les exclusions.

Sur le terrain, nous sentons la nécessité de trouver un lieu de dialogue pour ceux qui rencontrent des difficultés pour jouer pleinement leur rôle de parents, où les professionnels qui seront à leur écoute ne seront ni juges ni confesseurs, et en même temps un peu des deux. Il faut redonner confiance à ces parents, les aider à retrouver des repères, une dignité qui leur permette d'être parents sans culpabilisation, mais en toute confiance.

Mais pour cela, il faut aussi que l'avenir des allocations familiales soit garanti. Je souhaite donc que tous ceux qui menacent, qui montrent certains parents du doigt, comprennent que la suppression des allocations aux familles en difficulté serait un vrai danger, humainement inacceptable.

Madame la ministre, les décisions que vous avez annoncées depuis un an montrent combien le Gouvernement et vous-même êtes attachés à mener une véritable politique de la famille.

Le soutien du groupe socialiste vous est acquis, ce qui ne nous empêche pas d'avoir parfois envie de vous proposer d'aller plus loin. Ainsi faudra-t-il un jour étudier l'extension du bénéfice des allocations familiales au premier enfant (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Bruno Bourg-Broc - Les lois de financement de la Sécurité sociale, instituées par le plan Juppé, sont aujourd'hui bien installées dans le paysage parlementaire et nous ne pouvons que nous en féliciter.

La France compte près de cinquante-neuf millions d'habitants et près de neuf millions de familles. En vingt-cinq ans, les structures familiales ont été profondément modifiées par l'évolution des comportements. Les mariages sont moins fréquents, plus tardifs et moins solides. Nous sommes ainsi passés de 416 000 mariages en 1962 à 279 000 en 1996. Parallèlement, le nombre de couples concubins a atteint 2,5 millions, celui des divorces est passé de un pour dix mariages en 1970 à un pour trois et, dans certaines régions, à un pour deux. Ces chiffres montrent l'absolue nécessité d'engager un débat sur le mariage -le mariage républicain, bien sûr, et non le sacrement chrétien-, pour adapter aux temps modernes une institution qui a peu évolué en 200 ans. Cela ne signifie pas pour autant qu'il faille créer un nouveau type de contrat qui n'aboutirait qu'à l'affaiblissement du mariage. Quand une institution va mal ou n'est plus adaptée, il ne faut pas en créer une autre. Réfléchissons plutôt calmement à l'avenir du mariage, de la famille et du couple. Réformons le mariage au besoin, mais ne précipitons pas la perte des repères ! On peut défendre la famille sans rejeter personne.

Le problème est d'autant plus crucial que les enfants naissent moins nombreux et plus tard. Le taux nécessaire au renouvellement des générations est de 2,1 et nous ne sommes qu'à 1,7. Certes notre situation est meilleure que celle de la plupart des autres pays européens, mais cela ne doit pas nous consoler ni nous faire abandonner une politique nataliste.

La famille est le premier espace où l'enfant construit sa personnalité, apprenant à vivre, à découvrir les autres, à aimer et être aimé. La famille, c'est aussi un espace de culture : les liens entre générations structurent la mémoire d'un peuple. C'est également un espace de liberté et de solidarité et la valeur-refuge par excellence en période de crise. L'avenir d'un pays dépend donc étroitement des familles qui le composent, ne serait-ce que parce que les enfants sont les adultes de demain.

Certes, la famille est une réalité privée, mais d'intérêt public. C'est pourquoi l'Etat républicain ne saurait rester neutre dans cette affaire : le mariage n'est pas un simple choix privé, et les choix que nous-mêmes faisons à travers cette loi de financement sont lourds de conséquence. Nous devons assurer aux enfants les conditions de leur épanouissement. Il n'est pas question que le bonheur de chacun soit décrété par une instance suprême, mais, bien au contraire, que les pouvoirs publics donnent aux familles les moyens d'assumer leurs responsabilités, sachant que mieux vaut une politique familiale préventive qu'une politique sociale curative. Quant à la politique nataliste ambitieuse dont nous avons besoin, elle implique des mesures pour le logement, des mesures fiscales, une aide au premier et au second enfant, des aides pour la garde des enfants...

Vous n'en prenez pas le chemin ici. L'année dernière, vous nous aviez annoncé une réflexion d'envergure sur la politique familiale. Si elle a eu lieu, nous en attendons toujours les résultats. Je ne crois pas en effet que les décisions prises à la conférence de la famille constituent une révolution : ce sont, soit des actes de repentance, soit des mesures déjà annoncées par le précédent gouvernement, comme le versement des allocations familiales jusqu'à 20 ans ou le fractionnement des congés parentaux. Rien par contre sur les charges indues qui faussent les résultats de la branche famille. Or, la gestion du RMI coûtant un milliard, celle des aides au logement 2 milliards et le financement du fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés, mobilisant un autre milliard, ces charges indues peuvent être évaluées à 5,4 milliards, ce sans compter les modifications d'assiette des cotisations familiales imposées entre 1989 et 1991 sans compensation aucune. Sans elles, la branche serait largement bénéficiaire et l'on pourrait relancer une vraie politique nataliste. Tel n'est pas le cas avec ce projet de loi de financement, mais nous verrons bien pendant la discussion si vous acceptez de mettre vos actes en accord avec vos discours généreux sur la famille.

Il est tout à votre honneur d'avoir reconnu votre erreur et de rétablir, par l'article 13, l'universalité des allocations familiales, même si on peut regretter que vous n'agissiez pas de même pour l'AGED. Mais pourquoi reprendre d'une main ce que l'on donne de l'autre et commettre une nouvelle erreur, sur le quotient familial cette fois ? N'est-ce pas la preuve que votre politique familiale est uniquement budgétaire et comptable ? Votre seul objectif est d'afficher des résultats acceptables et les quelques milliards que vous redonnez aux familles, vous les reprenez dans la loi de finances.

Vous confondez politique sociale et politique familiale. Le quotient familial n'est pas, et n'a jamais été, une variable de la politique sociale. Il a pour fonction de rétablir, à salaire égal, une égalité de niveau de vie entre ceux qui ont des enfants et ceux qui n'en ont pas. Et si vous souhaitez un résultat comptable plus présentable, il vous suffit de supprimer les charges indues qui pèsent sur la branche famille ou bien de renoncer au PACS ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Malgré ses articles 13 et 14, ce projet manque cruellement d'ambition : en l'état, nous ne pourrons le voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Bertrand Kern - Ce projet de loi de financement sera, nous l'espérons tous, celui du retour à l'équilibre des comptes, mais aussi celui de la poursuite de la modernisation de notre système de santé. Plaçant au centre des préoccupations le malade, c'est-à-dire l'assuré social qui paie des cotisations, il redonne la priorité à la santé publique, trop souvent oubliée par le passé pour des raisons économiques et financières.

Dans son dernier rapport, la Cour des comptes a mis en lumière un certain nombre de dysfonctionnements dans le secteur du médicament, dysfonctionnements auxquels il s'impose de remédier en satisfaisant à trois exigences : la sécurité, la qualité et l'efficacité.

Le médicament est, malgré tout, avant tout un produit industriel et il appartient donc à l'industrie pharmaceutique de prendre en compte ces exigences, même si l'on doit respecter sa liberté et son besoin de prévoir son activité. Si cette industrie rencontre des difficultés, il faut l'aider, mais dans la transparence et dans le respect des directives européennes, trop souvent ignorées.

La place modeste qu'elle occupe dans le monde a de quoi préoccuper : en termes de chiffre d'affaires par exemple, aucun laboratoire français ne figure parmi les 10 premiers de la planète et le secteur se tient à l'écart du mouvement de concentration. Un tel retard ne pourra pourtant être rattrapé qu'au prix de regroupements ou de partenariats, qui pourraient être encouragés par des mesures fiscales. Il conviendrait toutefois d'éviter que, comme lors de ces quatre ou cinq dernières années, ces opérations entraînent de trop nombreux licenciements et cela suppose que cette industrie organise suffisamment tôt sa reconversion ainsi que sa diversification dans les domaines du cosmétique, de l'agroalimentaire et de l'alicament.

Il apparaît urgent aussi de réformer le système actuel de remboursement du médicament, et celui de la fixation des prix. Le système des prix administrés en collaboration avec l'industrie a en effet failli et son opacité, soulignée par la Cour des comptes, n'y est pas étrangère. Les solutions doivent naturellement tenir compte de l'intérêt de l'assuré social et de l'efficacité en termes de santé publique.

Chaque fois qu'un médicament répondrait à cette double exigence, pourquoi ne pas porter le taux de remboursement au-delà des 65 % actuels, pour tendre vers les 100 % ? Cela permettrait de protéger plus efficacement les exclus de la santé, ceux qui ne bénéficient pas d'une assurance complémentaire. La Cour des comptes nous rappelle d'ailleurs que notre pays accuse un retard important sur l'Allemagne et le Royaume-Uni, où le taux atteint respectivement 91 et 93,7 %

Mais cela pose la question délicate et cruciale à la fois du remboursement des autres médicaments, en particulier de ceux qui ne sont pris en charge aujourd'hui qu'à 35 %.

La réflexion devrait être élargie à la gestion du prix des médicaments remboursés, gestion dont l'Etat devrait étudier une éventuelle délégation aux caisses de Sécurité sociale. La fixation des prix pourrait ainsi être assurée au travers d'appels d'offre. La Sécurité sociale est tout à fait capable d'assumer ce rôle d'acheteur avisé et l'Etat pourrait alors jouer pleinement son rôle régalien, en établissant des règles de transparence et en exerçant son activité de contrôle et d'expertise.

L'information sur les médicaments est actuellement le fait des laboratoires, qui en détiennent le quasi-monopole. Or chacun reconnaîtra qu'il serait souhaitable de dispenser une information neutre et en temps réel.

Le moyen existe : c'est l'informatisation des cabinets médicaux qui faciliterait la création et l'accès à des banques de données fiables et permettrait de développer des outils tels que les programmes d'aide au diagnostic, les fiches de transparence et les références médicales opposables. Elle favoriserait également la maîtrise des consommations abusives.

Dans la même optique, il serait intéressant que les médicaments ne soient plus prescrits selon leur appellation commerciale mais en fonction de leur dénomination commune internationale. Une telle mesure faciliterait la prescription des génériques.

On peut enfin se féliciter de l'obligation de formation continue faite aux professions médicales. Là encore, l'informatique aura un impact déterminant.

Pour réussir l'adaptation de notre système de protection sociale, il faudra moderniser notre politique du médicament, aider et soutenir notre industrie pharmaceutique tout en garantissant à l'assuré social la place que nous tentons de lui rendre aujourd'hui : la première (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Germain Gengenwin - 1999 restera dans les annales de la Sécurité sociale puisque ce sera, nous dit-on, l'année du retour à l'équilibre. Nous souhaitons que vous ayez raison, Madame la ministre, mais nous craignons que vous vous montriez en l'occurrence trop optimiste, du fait d'estimations de croissance trop élevées. La déconvenue risque d'être grave, sachant qu'une moins-value d'un point sur l'évolution de la masse salariale conduirait à une perte de recettes de 9 milliards la première année, de 20 milliards la deuxième. Vous dites en outre que l'équilibre sera atteint sans prélèvement supplémentaire sur les ménages, mais c'est faux puisque les familles sont d'ores et déjà pénalisées par la réforme du quotient familial.

L'article 4 du projet plafonne à hauteur du SMIC l'exonération de charges pour l'embauche du premier salarié. Pourquoi remettre ainsi en cause un dispositif qui a permis de créer 70 000 emplois chaque année ? Le groupe UDF s'opposera à cet alourdissement des charges des entreprises.

Ce projet renvoie à plus tard le traitement de questions majeures. Ainsi, la réforme de l'assiette des cotisations patronales, maintes fois annoncée, est enterrée. Quant au débat sur l'avenir des retraites, il est renvoyé à l'année prochaine, vous l'avez confirmé devant la commission des finances. Les réformes sont donc pour demain, voire après-demain...

Placé au sein du Fonds de solidarité vieillesse, le fonds de réserve que vous créez pour "assurer l'avenir des régimes de retraite par répartition" sera placé sous l'autorité de l'Etat, ce qui aboutit à un schéma complètement incohérent dont on peut se demander s'il signe la fin du paritarisme. Il est prévu pour l'instant que ce fonds soit alimenté par les excédents de C3S, à hauteur de 2 milliards, c'est-à-dire par des fonds en provenance des entreprises. D'autres sources de financement sont-elles envisagées ? Les salariés et les entreprises doivent être clairement avertis. De toute façon, ce fonds n'est qu'un expédient. Il n'assurera pas la pérennité du système actuel, vous le savez bien.

Alors pourquoi refuser de le compléter par des fonds de capitalisation ? Deux Français sur trois y sont favorables.

Les familles ont largement participé à la résorption du déficit et il y a un an, lorsque vous avez remis en cause l'AGED, vous avez annoncé un rééquilibrage des aides en faveur des différents modes de garde d'enfants. Or, il n'y a rien à ce sujet dans le projet. Vous avez pourtant des marges de manoeuvre puisque le solde prévisionnel de la branche famille devrait être de 4 milliards. La revalorisation des prestations familiales doit être égale à celle des retraites. Nous présenterons un amendement dans ce sens.

Et qu'en est-il de l'indemnisation de la Sécurité sociale pour la part de recettes induites par la loi sur les 35 heures ? Cette dernière est estimée à 7,2 milliards. Or vous ne prévoyez que 3,5 milliards. Qui paiera le solde ? Il serait normal que le Gouvernement respecte la loi de juillet 1994 et assume l'intégralité de la compensation.

Nous espérons, Madame la ministre, un complément d'information (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Philippe Nauche - Plusieurs collègues de la majorité ayant déjà évoqué les grandes lignes du projet, j'insisterai pour ma part sur des aspects importants mais plus discrets. Il y a tout d'abord, à l'article 15, l'accent mis sur la prévention et le dépistage, qui font désormais partie du périmètre d'intervention de l'assurance maladie. C'est un tournant.

M. le Secrétaire d'Etat - On le remarque enfin !

M. Philippe Nauche - Autre fait notable : la possibilité offerte aux partenaires sociaux de faire évoluer les modes de rémunération de façon, éventuellement, à prendre en compte d'autres tâches que curatives et tout ce qui dépasse l'acte médical proprement dit. Des systèmes de tiers payant pourront être mis en place, ce qui permettrait aux généralistes de traiter les personnes qui ont recours aux services d'urgence pour ne pas avoir à faire l'avance des frais de consultation.

Je voudrais aussi évoquer la chance que vont représenter les Etats généraux de la santé : nos concitoyens pourront ainsi s'approprier les enjeux et nous pourrons cerner leurs besoins et leurs attentes. Parmi ces besoins, il y a celui de transparence, qui explique d'ailleurs le succès de certaines publications. Cette transparence passe par l'évaluation. C'est pourquoi, dans le secteur de la médecine de ville, l'implication des unions régionales me paraît une bonne chose. Et dans le secteur hospitalier, l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation des soins doit aller au-delà d'une simple "labellisation" des établissements. Chaque patient est en effet en droit de demander des garanties sur la qualité et la permanence des prestations d'un établissement. C'est une condition décisive à l'acceptation des restructurations.

Garantir à tous nos concitoyens un accès, dans des délais acceptables, à des soins de qualité adaptés à l'affection en cause requiert une organisation territoriale performante, ce qui suppose que les fonctions de prévention et de soin soient assumées dans un souci de proximité et de cohérence sur un territoire assimilable à ce qu'on a appelé ailleurs un "pays". Ce qui suppose aussi une complémentarité entre sanitaire et médico-social, secteur public et secteur libéral, hospitalisation et consultation. Dans cette optique, les agences régionales de l'hospitalisation seront amenées à se transformer en agences régionales de santé.

Bonne gestion, responsabilisation des acteurs du système de soin, engagement de réformes structurelles à l'écoute des usagers sont autant de raisons qui m'amènent à soutenir ce projet (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme la Ministre - Très bien !

M. Jean-Jacques Weber - Les familles, les retraités, les veuves, les handicapés vieillissants, les personnes âgées en maison de retraite, les personnels de santé, les jeunes attendent que vous teniez les mirobolantes promesses que vous leur avez faites pour gagner les élections, et leur espoir est d'autant plus grand que la conjoncture semble enfin propice à des mesures structurelles, qui gomment les plus criantes inégalités du système actuel - inégalités que vous avez étrangement laissées subsister.

Vous annoncez le retour à l'équilibre pour l'an prochain. Puissiez-vous avoir raison ! Vous auriez alors les moyens de faire les réformes nécessaires, qui rendront donc plus visibles encore les lacunes du présent projet.

Les familles se sentent particulièrement oubliées. Elles attendaient une politique familiale digne de ce nom, elles n'en trouvent pas même l'ébauche, au contraire : un an après le matraquage fiscal qu'elles ont subi et la mise des allocations familiales sous condition de ressources, elles sont 400 000 à être pénalisées par la baisse du plafond du quotient familial.

Le texte ne prévoit rien non plus en faveur des veuves civiles non conjoints de fonctionnaires, victimes d'un plafond de cumul très bas, qui les prive de la plus grande part de l'effort contributif de leur mari. Il est mesquin d'opposer l'article 40 à nos amendements, dont le coût est modéré.

Notre prestigieux collègue Dubernard a fait observer que les malades n'étaient seulement pas mentionnés dans le texte. Si la Sécurité sociale est le bien commun de tous les Français, n'intéresse-t-elle pas au premier chef ceux qui n'ont pas la chance d'être en bonne santé ? Quant aux professions de santé, elles ont besoin de se sentir respectées, considérées, remerciées de leur effort, et ce ne sont pas les lettres-clés flottantes ni les sanctions collectives qui les y aideront ! Et sur les 14 000 lits promis aux maisons de retraite qui accueillent les personnes âgées dépendantes que les hôpitaux ne peuvent plus garder, combien seront financés ?

Les retraités sont plus que perplexes, et 10 000 d'entre eux ont même manifesté, le 6 octobre, pour obtenir d'être représentés dans les organismes sociaux qui décident de leur sort. Vous revalorisez leurs pensions de 2,2 %, mais vos mesures fiscales frappent de plein fouet nombre de retraités très modestes, non imposables il y a peu de temps encore. Quant au principe d'un fonds de réserve, c'est une bonne chose, mais peut-il être autre chose, avec 2 milliards de dotation, qu'un effet d'annonce ?

Le débat sur la couverture-maladie universelle s'amorce. Beaucoup de jeunes, qui ne sont plus couverts par leur mutuelle étudiante, sont mal soignés, n'étant plus couverts qu'à 70 %, et il leur en coûte 3 000 F s'ils veulent souscrire une assurance complémentaire comblant les lacunes de la Sécurité sociale. En Alsace et Moselle, en revanche, ils sont pris en charge à 90 % sitôt qu'ils ont travaillé 60 heures. Que proposez-vous ?

Rien n'est prévu non plus, enfin, en faveur des travailleurs frontaliers, souvent pénalisés en matière de chômage, d'accidents du travail et de parafiscalité.

Voilà quelques-unes des questions que nos concitoyens se posent. Nous espérons que ce débat les rassurera, et que votre approche se fera plus humaine, plus modeste et plus respectueuse (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce matin, mercredi 28 octobre, à 9 heures.

La séance est levée à 1 heure 5.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


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