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Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 33ème jour de séance, 88ème séance

2ème SÉANCE DU MARDI 17 NOVEMBRE 1998

PRÉSIDENCE DE M. Laurent FABIUS

          SOMMAIRE :

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 1

    MALAISE DES MAIRES 1

    RESTRUCTURATIONS À LA CIOTAT 2

    CONFLIT SHELL À LA GUADELOUPE 3

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT (suite) 3

    IMMIGRATION 3

    CONSEILS RÉGIONAUX 5

    MALAISE DES MAIRES 6

    IMMIGRÉS À MODANE 6

    SEITA 7

    MÉDECINS SPÉCIALISTES 7

    SEITA 8

    TRÉSORERIE DES PME 8

    SOMMET DE BUENOS-AIRES 9

LOI DE FINANCES POUR 1999 -deuxième partie- (suite) 10

    ARTICLES NON RATTACHÉS (suite) 10

    APRÈS L'ART. 73 (suite) 10

    ART. 74 16

    APRÈS L'ART. 74 16

    DEUXIÈME DÉLIBÉRATION 21

La séance est ouverte à quinze heures.


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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

MALAISE DES MAIRES

M. Michel Crépeau - Ma question pourrait s'adresser à plusieurs membres du Gouvernement, y compris au Premier ministre. Je la poserai au ministre de l'intérieur par intérim, qui a la charge des collectivités locales.

Alors que va s'ouvrir leur congrès, les maires de France sont malheureux. Un quotidien du matin a parlé de leur "spleen". Un sondage a révélé que la moitié d'entre eux n'entendent pas solliciter le renouvellement de leur mandat.

Vingt-huit années d'expérience me permettent, hélas, de mesurer la dégradation. Si le maire d'une grande ville peut s'appuyer sur une équipe, comment les maires ruraux pourraient-ils connaître les dizaines de milliers de lois, décrets, réglements et arrêtés à respecter ? Ils n'en risquent pas moins d'être condamnés par le tribunal administratif, la chambre régionale des comptes, le Conseil d'Etat, voire le tribunal correctionnel. Car les moeurs américaines gagnent dans notre pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe du RPR, du groupe UDF, du groupe DL et sur quelques bancs du groupe socialiste) Et de surcroît on veut rendre indépendants ces procureurs qui ne pensent qu'à poursuivre. Où irons-nous avec de tels magistrats, n'en faisant qu'à leur tête selon leur opinion ? (Mêmes mouvements)

Un maire aura-t-il délivré en son âme et conscience un permis de construire ? Il se trouvera toujours une quelconque association de défense pour saisir le tribunal administratif et l'acte pourra être annulé en fonction de telle ou telle opportunité.

M. le Président - Veuillez conclure, je vous prie.

M. Michel Crépeau - Si les gouvernements passent, les maires restent, et les charges transférées aux communes vont toujours croissant. Quand tout cela cessera-t-il ? (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim - Monsieur le député-maire de La Rochelle, le Premier ministre assistera en effet cet après-midi à la séance inaugurale du congrès des maires de France. J'ai moi-même reçu hier des maires des départements et territoires d'outre-mer. Ils sont, il est vrai, inquiets, voire découragés !

Cependant, l'institution communale demeure très appréciée de nos concitoyens.

Le thème du congrès de cette année est le lien social -on pourrait ajouter le lien républicain. Car, comme disait Gambetta, la République commence dans les mairies. Oui, elle commence avec le travail des 36 700 maires et des 500 000 élus municipaux.

Nous devons conforter l'institution communale : c'est le sens des réformes proposées en matière de coopération intercommunale, de fiscalité et de ressources nouvelles. Nous devons de même améliorer la formation et le statut des élus, mais aussi en limitant le cumul (Protestations sur les bancs du groupe RCV, du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), afin de leur permettre d'exercer leur mandat dans les meilleures conditions.

Je suis convaincu que le spleen actuel des maires à mi-mandat, n'est que passager (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste).

RESTRUCTURATIONS À LA CIOTAT

M. Alain Belviso - L'annonce de la fermeture des chantiers navals du Havre pose avec acuité la question du devenir des sites portuaires qui accueillaient une mono-industrie et que la fermeture de leur principal employeur plonge dans le marasme. La Ciotat a connu de tels déboires...

Un protocole du 17 août 1994 y a défini les conditions de la revitalisation du site des anciens chantiers. Le travail de la société d'économie mixte locale, la SEMIDEP, au coeur du dispositif, commence à porter ses fruits : plusieurs entreprises se sont d'ores et déjà installées, d'autres projets sont en cours. Ce bilan encourageant ne saurait faire oublier que les besoins sont à la hauteur du choc économique et financier subi par la ville.

Si l'élection récente de Mme le maire de La Ciotat à la tête de la SEMIDEP a permis d'en renforcer la cohérence et la dynamique, cette structure, déjà forte du soutien de la région, du département et de la ville, a maintenant besoin de l'appui de l'Etat pour élargir et pérenniser son action.

Ainsi démontrerait-on que l'avenir des villes qui ont connu ou connaîtront de tels cataclysmes n'est pas nécessairement synonyme de chômage de masse et de désespérance...

M. le Président - Veuillez conclure, je vous prie.

M. Alain Belviso - Jamais les conditions locales n'ont été aussi favorables. L'appui de l'Etat serait maintenant nécessaire, notamment en matière de commercialisation, d'aides à la création d'activités et d'emplois, de financement d'actions structurantes.

C'est aussi en pensant à d'autres villes que je souhaiterais connaître la position du Gouvernement par l'implication renforcée de l'Etat à La Ciotat (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - Le Gouvernement est tout à fait conscient des difficultés auxquelles s'est trouvée confrontée la ville de La Ciotat après la fermeture des chantiers navals. L'Etat s'est engagé aux côtés des partenaires locaux à accompagner la réindustrialisation. Cet engagement est entier, il ne faiblira pas et ne connaîtra aucun retard. Je me réjouis comme vous de la dynamique enclenchée par la SEMIDEP. Après le travail conduit depuis plusieurs années, la très grande majorité des salariés a maintenant retrouvé une nouvelle situation...

M. Renaud Muselier - N'importe quoi !

M. le Secrétaire d'Etat - L'ouverture de la société Eole à l'été 98, qui a embauché trente salariés, dont dix des chantiers navals qui n'avaient pas encore été reclassés, est à cet égard tout à fait positive.

M. Charles Cova - Eole, c'est du vent !

M. le Secrétaire d'Etat - La collaboration de l'Etat et des acteurs locaux a été exemplaire. Le secrétariat d'Etat à l'industrie a d'ailleurs participé directement à l'investissement pour faciliter cette reconversion. De nombreux autres projets sont en cours, avec entre autres les Chantiers Réunis.

Soyez en tout cas assurés de notre soutien pour conforter le redémarrage économique de La Ciotat (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

CONFLIT SHELL À LA GUADELOUPE

M. Ernest Moutoussamy - Depuis plusieurs semaines, un conflit oppose à la Guadeloupe les gérants de stations-services Shell au PDG de cette compagnie. Le médiateur nommé par le Préfet de région, s'est résigné, après un mois d'efforts sans résultat, à mettre fin à sa mission.

La situation est alarmante. Toutes les stations sont fermées depuis cinq jours ; l'économie est mise à genoux ; les gérants voient leur contrat résilié ; aucune négociation n'est engagée ; le PDG de Shell a quitté l'île. C'est l'impasse et la Guadeloupe trépasse.

La population, victime de ce bras de fer, exige l'intervention des élus et de l'Etat. En effet, l'intransigeance de Shell porte aujourd'hui gravement atteinte aux libertés publiques et aux droits des personnes en Guadeloupe. Le PDG de cette multinationale se comporte en mercenaire, rémunéré pour appliquer sans aucune concession une politique qui fait pourtant fi des réalités et des intérêts de l'île.

A quelques jours de l'arrivée de la Route du Rhum, ce conflit risque de nuire à l'image de destination touristique de la Guadeloupe. Monsieur le ministre, que pouvez-vous faire pour ramener la direction de Shell à la table des négociations et trouver une solution ?

M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer - A l'origine de la situation que vous évoquez se trouve un conflit opposant la société Shell à ses locataires-gérants, soit 29 des 135 stations-service de Guadeloupe. Ce conflit dure depuis la fin septembre. Le Gouvernement, à travers le Préfet, a nommé un médiateur, qui a tenté un mois durant de rapprocher les points de vue. Le conflit s'est étendu, puisque les gérants des autres sociétés se sont mis en grève à leur tour, et la Guadeloupe est paralysée depuis cinq jours. Le Préfet a pris des décisions de réquisition pour les services de sécurité et de santé, et provoqué une réunion -qui aura lieu aujourd'hui à 15 heures 30, heure locale- avec la participation du directeur régional de Shell. J'espère que cette négociation aboutira. Quoi qu'il en soit je partage le point de vue que vous exprimiez dans le débat parlementaire sur l'Outre-mer : il est essentiel qu'en Guadeloupe, département qui connaît des conflits sociaux longs, on passe d'une culture de l'affrontement à une culture de la négociation. Il y va de l'activité économique et de la vie sociale de tout l'archipel (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).


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SOUHAITS DE BIENVENUE À UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE ÉTRANGÈRE

M. le Président - Je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation parlementaire conduite par Mme Onechanh Thammavong, vice-présidente de l'Assemblée nationale de la République démocratique populaire du Laos (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent).


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QUESTIONS AU GOUVERNEMENT (suite)

IMMIGRATION

M. Pierre Lequiller - Une fois de plus, Monsieur le Premier ministre, le problème des sans-papiers défraie la chronique. L'annonce par le Gouvernement italien de la régularisation de 38 000 clandestins a provoqué le déferlement de milliers de personnes aux frontières de l'Italie. Les autorités italiennes en ont déjà expulsé mille. Le phénomène risque de se reproduire. Il illustre l'urgence d'une vraie politique européenne en matière d'immigration, dont le Gouvernement français devrait prendre l'initiative. Encore faudrait-il qu'il ait une position claire, ce qui n'est pas le cas si j'en juge par la cacophonie à laquelle nous assistons. Un ministre de votre gouvernement, Mme Voynet, a en effet publiquement remis en question vos orientations. Ces critiques rencontrent un écho favorable dans les rangs de votre majorité.

Plusieurs députés socialistes - Et Pasqua ?

M. Pierre Lequiller - Sur un sujet aussi grave, les Français ont droit à des réponses claires. Or vous pratiquez l'ambiguïté, tenant d'un côté un discours de fermeté, menant de l'autre une politique laxiste. Vous assouplissez toujours plus les critères de régularisation, de commission Galabert en proposition sur le Pacs. Vous refusez d'expulser des personnes que vous ne voulez pas régulariser. Vous cultivez l'ambiguïté depuis des mois. Vous désorientez les Français, les dizaines de milliers de personnes concernées, et jusqu'à votre propre majorité. Sans oser le dire, vous pratiquez une régularisation rampante, inacceptable sur le fond, puisque contraire à la loi, et sur la forme, car vous trompez les Français.

Monsieur le Premier ministre, quand cesserez-vous de pratiquer le double langage, et mettrez-vous vos actes en conformité avec vos paroles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et sur plusieurs bancs du groupe du RPR)

M. Lionel Jospin, Premier ministre - Il y a parfois, au sein d'une majorité, expression de points de vue divergents, il semblerait que cela puisse se produire au sein d'une opposition (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe RCV ; exclamations sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF). L'important est que dans cette situation l'orientation générale de l'action et du discours soit claire, et c'est le cas. Il peut y avoir telle ou telle déclaration, mais il y a l'action du Gouvernement, qui ne sera pas changée. Je ne suis pas sûr que, des divergences au sein de l'opposition, il émerge un discours aussi clair et cohérent ! (Mêmes mouvements)

Les questions de l'immigration sont des questions importantes. En raison des différences de développement entre l'Europe riche et son pourtour méditerranéen et africain, la tentation du mouvement vers l'Europe est une tendance forte et durable, à laquelle il ne faut pas céder. Par ailleurs, on ne saurait oublier la tradition française d'ouverture et d'hospitalité envers les hommes et les femmes menacés dans leur liberté : c'est le droit d'asile, la volonté de répondre favorablement aux combattants de la liberté. Mais se pose aussi la question de notre identité nationale, entendue au sens républicain ; et celle de l'équilibre social de notre pays, de sa capacité à intégrer non seulement des étrangers, mais des citoyens français d'origine étrangère. Il y a là un composé formidable de problèmes démographiques, identitaires, économiques, sociaux et touchant aux droits de l'homme.

Vous comprendrez donc qu'en répondant à votre question, je ne parle pas d'abord de tel événement ponctuel, eût-il été accompagné de déclarations qui à mon sens n'étaient pas nécessaires (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), mais que j'expose le sens même de la politique du Gouvernement.

M. Jean-Louis Debré - C'est la pagaïe !

M. le Premier ministre - N'employez pas ce mot, Monsieur Debré, car il pourrait vous revenir au visage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV) Quand nous sommes arrivés aux responsabilités, nous étions confrontés à un climat de passion et de polémique qui emportait tout le pays. Nous avons confié à une personnalité compétente un rapport qui a été établi après consultation de toutes les parties prenantes. Nous avons ouvert au Parlement un débat contradictoire, où chacun a pu s'exprimer. Nous avons élaboré un projet de loi juste et équilibré, qui est désormais la règle pour tous dans notre pays (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe RCV). Ce qui était objet de passion a ainsi disparu (Exclamations sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF), même si certains essaient, à propos de tel événement ponctuel, de relancer ce climat de passion (Mêmes mouvements).

Le Gouvernement a décidé de procéder à la régularisation sur critères d'un certain nombre de personnes qui n'avaient pas de titre de séjour, en se fondant sur deux idées essentielles : le droit à vivre en famille, conformément aux conventions internationales et européennes, et la reconnaissance de la capacité ou de la volonté de certaines de ces personnes à s'intégrer en France. Voilà ce qui a guidé notre politique (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe RCV).

Nous avons donc régularisé sur critères, en partant de ceux qu'avait élaboré le médiateur à l'occasion d'un conflit que l'actuelle opposition n'avait pas su maîtriser. Nous avons régularisé sans doute 70 000 à 80 000 personnes. Reste un certain nombre d'hommes et de femmes qui ne répondaient pas à ces critères, et qui ne seront pas régularisés. Je ne vois d'ailleurs pas comment on peut, intellectuellement, dire qu'il faut régulariser sur critères, et ensuite qu'il faut régulariser tout le monde ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe RCV)

L'exemple italien qu'a cité M. Lequiller le montre : il y a une extrême sensibilité aux effets d'annonce des gouvernements. Ce qui s'est passé à Modane doit nous éclairer. Quand des gens, dont je comprends la détresse, croient voir s'ouvrir une porte, ils s'y précipitent -alors qu'inévitablement la porte se refermera : les Italiens ont annoncé 38 000 régularisations, avec des quotas par nationalité. Ces questions de l'immigration, notamment clandestine, préoccupent tous les chefs d'Etat et de gouvernement d'Europe, et nous en avons parlé au sommet de Portschach. Nous avons décidé que, sous la présidence finlandaise, ces questions seraient traitées dans un sommet particulier. Il faut donc bien le comprendre : prendre une attitude qui revient à faire passer le message qu'en France tout immigré entré irrégulièrement peut être régularisé, c'est créer un appel d'air formidable ; c'est donc une attitude totalement irresponsable (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe RCV).

A Limeil-Brévannes, Bordeaux, Avignon, nous examinons les questions posées, et nous les traitons humainement. Quand dans quelques cas des immigrés pouvaient bénéficier de la circulaire et de la loi, nous avons accordé des titres de séjour. Mais l'idée qu'il faudrait donner un permis de séjour à des personnes entrées après 1996, et parfois même après la signature de la circulaire de juin 1997, est absurde ! Tout comme n'a aucun sens l'idée qu'en régularisant 60 000 personnes qui restent, et qui ont vocation à repartir, on solderait le problème : très vite nous serait posée, par les mêmes, la question de la régularisation des sans-papiers qui seraient entrés après cela (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe RCV).

Le problème de la grève de la faim et des atteintes à l'intégrité physique interpelle le Gouvernement. C'est pourquoi nous avons procédé, par le dialogue, en nous appuyant sur l'autorité médicale indépendante, à des évacuations, et nous le referons si nécessaire. Mais je souligne l'irresponsabilité de ceux qui, dans une situation dramatique, pousseraient certaines personnes à faire la grève de la faim (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, sur plusieurs bancs du groupe RCV, du groupe DL et du groupe UDF) : il ne faut jamais jouer avec la peau des autres. Le Gouvernement assumera sa responsabilité au regard des problèmes de santé et d'intégrité.

En conclusion, la position adoptée par le Gouvernement, par l'Assemblée nationale et par le Sénat, après un ample débat, ne sera pas changée. Elle est équilibrée et responsable ; elle est comprise et soutenue par l'opinion, ce qui en démocratie est le fondement de nos décisions. Cette politique sera donc maintenue (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe RCV).

CONSEILS RÉGIONAUX

M. Renaud Donnedieu de Vabres - En urgence, alors qu'il n'y a aucune urgence, l'Assemblée est saisie après-demain du projet relatif à l'élection et au fonctionnement des conseils régionaux. Ce texte et ses nouveaux amendements sont un déni de démocratie directe et une constitutionnalisation des triangulaires, qui placeront une fois de plus le Front national en position d'arbitre de la vie politique française. C'est de la haute couture électorale pour gauche plurielle éclatée !

Cette démarche archaïque place le système électoral au service d'intérêts purement partisans, alors qu'à l'aube du nouveau siècle il faudrait de nouveaux comportements propres à rendre le goût de la politique aux Français.

Pourquoi ne cherchez-vous pas, pour l'ensemble des scrutins un accord entre les forces républicaines ? Pourquoi l'urgence ? Acceptez-vous d'étendre le principe clair retenu pour les élections présidentielles à toutes les élections ? Quand il y a deux tours, ne devraient concourir au deuxième tour que les deux premiers, listes ou candidats. C'est alors projet contre projet, c'est le respect de la démocratie directe au détriment des accords de sous-sol et des compromis de soupente.

Si vous maintenez votre texte, les leçons de morale républicaine que vous aimez tant dispenser vous seront à jamais interdites ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim - L'Assemblée examinera jeudi en deuxième lecture ce projet de loi. Le Premier ministre, après la formation du Gouvernement, avait consulté pour tenter de trouver un mode de scrutin à quelques mois des élections, qui agrée à l'ensemble des forces politiques, et qui permette de sortir de la situation telle qu'on la constate après les élections de mars dernier. En parlant d'accords de sous-sol et des compromis de soupente, vous nous avez rappelé ce qui s'est passé le 20 mars dernier dans quelques régions.

C'est pour cette raison que le Gouvernement propose que pour les conseils régionaux soit adopté un mode de scrutin calqué sur celui des élections municipales, qui permette aux grands courants politiques d'être représentés tout en dégageant une majorité par un système de prime. Dans notre pays, tout scrutin comportant un élément majoritaire est à deux tours. Tout le monde ici, je crois, approuve le mode d'élection des conseils municipaux tel qu'il résulte de la loi de 1982.

Le Gouvernement propose donc d'attribuer une prime de 25 % à la liste arrivée en tête pour que se dégage une majorité régionale. Il n'y a là aucune opération politique (Interruptions sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

Cette réforme permettra au contraire d'approfondir la démocratie régionale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

MALAISE DES MAIRES

M. Pierre Albertini - La réponse apportée à M. Crépeau ne nous a pas satisfaits. Il ne suffit pas de rendre un hommage abstrait à l'institution communale. Pour la faire vivre, encore faut-il des élus qui se dévouent.

Beaucoup de maires des 30 000 petites et moyennes communes sont découragés. Monsieur le Premier ministre, les maires sont les premiers acteurs de la démocratie locale, les meilleurs garants des valeurs de la République. C'est vers eux que se tournent nos concitoyens en quête d'emploi ou inquiets pour leur sécurité. Or ils se sentent accablés par le poids de leurs responsabilités, l'excès de réglementation, l'instabilité fiscale. Quel message allez-vous leur adresser dans quelques heures ? Par quelles mesures concrètes entendez-vous favoriser leur action au service de nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim - Je partage votre point de vue. Il faut assurer aux maires une plus grande sécurité juridique dans l'exercice de leur mandat. Les services préfectoraux sont toujours à la disposition des maires pour leur apporter assistance et conseil de même que les associations de maires.

Dans la loi de finances, le Gouvernement propose un contrat de croissance et de solidarité, qui tranche avec le pacte précédent, puisqu'il garantit l'évolution des ressources communales en fonction de la croissance du PIB. Le Gouvernement veut développer l'intercommunalité, essentielle pour mutualiser les actions (Interruptions sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

La sécurité juridique des maires, nous y pourvoirons. Mais les maires doivent de leur côté respecter les règles de droit. (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR)

Conforter l'institution communale, renforcer le rôle des maires, contribuer au développement de la décentralisation et de la démocratie locale, voilà le message du Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

IMMIGRÉS À MODANE

M. Michel Bouvard - Député de Modane, je n'ai pas été convaincu par la réponse du Premier ministre, en dépit de la force qu'il y a mise. Il est évident que le système de Schengen a mal fonctionné : soit l'Italie a informé la France, qui aurait dû alors prendre des mesures pour prévenir cette situation, soit elle ne l'a pas fait, et les accords ne sont pas appliqués. Au niveau communautaire, l'immigration n'est donc pas contrôlée. Depuis jeudi après-midi, plus de 2 000 clandestins sont arrivés à Modane, ville de 4 000 habitants dépourvue de toute structure d'accueil.

Ces clandestins sont venus par milliers parce que des associations irresponsables leur ont laissé entendre qu'ils pourraient être régularisés en Italie. Mais la police italienne les a refoulés sans faiblesse, et ils se sont retrouvés à Modane, où tout contrôle est impossible, le centre de rétention le plus proche, de 175 places, se trouvant à Lyon-Satolas, distant de 170 km. Une couverture et un pain offerts par la Croix-Rouge, c'est tout ce que nous avons pu faire pour ces clandestins, qu'on laisse ensuite repartir, après avoir relevé leur identité quand on l'a pu. Est-ce cela, contrôler l'immigration ? Combien resteront en définitive sur notre territoire ? Cette expérience est traumatisante pour tout le monde, en particulier pour les élus du canton.

Quelles dispositions comptez-vous prendre pour que de tels dysfonctionnements ne se renouvellent pas au niveau communautaire, et pour que cette ville frontière, qui est toute l'année un point de passage de clandestins, reçoive des infrastructures nécessaires pour contrôler l'immigration clandestine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. le Président - La parole est à M. le ministre de l'intérieur par intérim (Vives protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. le Ministre de l'Intérieur par intérim - Je salue le travail des fonctionnaires de police de la DICCILEC, confrontés au retour d'Italie de très nombreux immigrés attirés par l'opération de régularisation. La Croix-Rouge a joué, avec les crédits du ministère de l'intérieur, un rôle éminent pour assurer un accueil décent à ces immigrés regroupés en gare de Modane. Nous avons pris des dispositions de contrôle, en particulier à la gare de Lyon, où 700 vérifications d'identité ont été opérées, afin d'éviter un surcroît d'afflux à Modane.

Au niveau européen, les problèmes de l'immigration doivent être traités au fond pour les pays de l'espace Schengen. La France participe à l'élaboration d'un plan stratégique de l'Union européenne sur l'immigration pour les cinq années à venir (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Sous présidence autrichienne, fin octobre, se sont réunis les ministres de l'intérieur des Quinze, pour examiner les problèmes posés par l'immigration clandestine. La réponse n'est pas seulement nationale, elle est aussi européenne.

A Modane, les populations, les élus, les associations comme la Croix-Rouge et les fonctionnaires ont joué un rôle humanitaire remarquable. Nous ferons face (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

SEITA

M. Lucien Degauchy - Je m'inquiète comme les élus de Tonneins et de Morlaix de la fermeture programmée des usines de la Seita. L'usine de Saintines dans l'Oise pourrait être vendue, avec licenciements, ou même fermée. 160 emplois directs sont menacés et indirectement, toute la filière bois. L'Etat, bien que minoritaire, est partie prenante dans cette société qui fournit un montant de taxe important. L'entreprise a fait 1,2 milliard de bénéfices en 1997. Vous ne pourrez pas dire que c'est l'héritage de la droite. J'attends que l'Etat mette tout en oeuvre pour éviter une délocalisation de l'usine d'allumettes de la Seita (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - De nombreux élus s'émeuvent en effet des décisions évoquées par la Seita. Paradoxalement l'entreprise fait des bénéfices, mais sa situation se détériore par rapport aux concurrents, moins pour les allumettes que pour le tabac d'ailleurs. Pour les cigarettes brunes -70 % de chiffre d'affaires- le déclin est inexorable et pour les cigares produits à Morlaix la situation s'érode.

Depuis la privatisation, l'Etat ne détient plus que 5 % du capital. Inutile donc de rejeter la faute sur la droite. Avec un tel pourcentage, l'Etat ne peut pas décider. Mais il ne peut se désintéresser de ce qui se passe. J'ai indiqué à la direction que je souhaitais qu'elle fasse de nouvelles propositions tenant compte de l'emploi, des ressources des collectivités locales et de l'aménagement du territoire. Cela vaut pour l'usine d'allumettes comme pour celles de tabac. Elles emploient beaucoup de salariés et nous ferons tout ce qui est possible pour que ces sites soient maintenus (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste).

MÉDECINS SPÉCIALISTES

M. Jean-Claude Lemoine - Les négociations entre la CNAM et les syndicats de médecins spécialistes ont échoué. Le règlement conventionnel minimal va s'appliquer. Après avoir feint le dialogue, vous avez procédé à des sanctions et vous venez de pousser les médecins dans une fuite en avant dangereuse. Ne nous répondez pas que la convention de 1997 avait été annulée. Elle l'avait été pour vice de forme et l'UCCSF qui l'avait signée est aujourd'hui considérée comme une organisation représentative. Pourtant elle a refusé de signer cette fois.

En outre de nombreux spécialistes s'inquiètent de la diminution du nombre de places à l'internat. Enfin, la mise en place du médecin référent porterait atteinte à la liberté de choix des malades. Quelles initiatives comptez-vous prendre pour relancer la politique conventionnelle ? Confirmez-vous qu'il sera toujours possible de s'adresser à tout médecin spécialiste ? Entendez-vous assurer leur renouvellement par une bonne gestion de la démographie médicale ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du RPR)

M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé - Oui, nous sommes attachés à la politique conventionnelle. La discussion se poursuit entre la CNAM et les syndicats qui sont désormais tous représentatifs.

Oui, on pourra toujours consulter le spécialiste de son choix, même en étant inscrit chez un médecin référent.

Enfin, en 2003-2005 nous aurons un déficit de spécialistes. Il faut donc les former. J'aurai l'occasion de vous répondre bientôt sur ce sujet.

SEITA

M. Yvon Abiven - M. Georges Gouzes s'associe à ma question. La Seita vient d'annoncer la fermeture des usines de Morlaix et de Tonneins et la vente de celle de Saintines. Plus de 700 emplois sont concernés directement, plus les sous-traitants. Hier, Morlaix et Tonneins ont manifesté leur colère. Pourtant la Seita fait 1,2 milliard de bénéfices contre 350 millions en 1993, elle a 5 milliards de réserves de trésorerie grâce au régime fiscal spécial, et le cours de l'action a augmenté de 54 % depuis la privatisation.

Le Gouvernement se bat pour l'emploi. Comment accepter qu'une entreprise jette des centaines de familles dans le chômage et la précarité par seul souci de rentabilité financière ? Le Gouvernement se préoccupe de l'aménagement du territoire. Comment accepter une concentration des activités alors que des régions sont menacées de dépopulation ?

L'Etat conserve 5 % du capital. Il a donc un droit et même un devoir d'influencer la décision. Pouvez-vous nous assurer que ses représentants demanderont à la direction de revenir sur ces projets ? L'Etat envisage-t-il de revenir sur le statut fiscal dont bénéficie la Seita en vertu des accords passés avec le gouvernement Balladur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste)

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Je complète ma première réponse. Comme vous, le Gouvernement préférerait que les entreprises s'occupent au moins autant de leurs salariés que de leurs actionnaires (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste).

Pour la Seita, on doit pouvoir trouver d'autres solutions. Même s'il y a une baisse de consommation de certains produits, il n'est pas normal de ne tenir aucun compte de l'aménagement du territoire. Je pense à Morlaix, c'est vrai aussi de Tonneins. Tous les élus de Bretagne sont fortement mobilisés pour que la manufacture reste à Morlaix.

Non seulement les représentants de l'Etat vont prendre position, mais j'ai moi-même, à la demande du Premier ministre, fait savoir aux dirigeants qu'il fallait trouver d'autres solutions. J'attends leurs propositions.

Sur le plan fiscal, il y a bien un décalage entre la perception des droits et leur reversement à l'Etat. La contrepartie, c'est que les grossistes en tabac font crédit aux débiteurs quand ceux-ci achètent leur stock. Cette situation date de 1976 et n'a pas été modifiée par la privatisation. Pour le moment, nous n'envisageons pas de remettre en question cette procédure qui fournit de la trésorerie à l'entreprise et facilite la distribution. Je m'exprimerai à nouveau devant vous dès qu'une solution plus satisfaisante aura été trouvée.

TRÉSORERIE DES PME

M. François Patriat - Je salue l'action menée par Mme Lebranchu depuis un an (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). En ce qui concerne la simplification administrative comme l'aménagement de la durée du travail, elle a su concilier justice sociale et efficacité économique. Nombreux sont ceux qui parlent du commerce et de l'artisanat : peu s'en occupent réellement. Elle le fait.

Les délais de paiement et le crédit interentreprises pèsent plus sur les petites entreprises, les plus fragiles et les plus jeunes. Nous attendons du commerce et de l'artisanat qu'ils innovent et créent des emplois. Quelles mesures comptez-vous prendre sur les délais de paiement pour permettre aux entreprises d'être plus performantes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat - Effectivement le crédit interentreprises se monte à 1 800 milliards alors que les crédits bancaires aux entreprises s'élèvent à 800 ou 900 milliards. Les petites entreprises sont ainsi les banquiers des grandes.

M. Strauss-Kahn prépare la réforme du code des marchés publics. Nous espérons, dans ce cadre, proposer un dispositif relatif aux délais de paiement avant l'été 1999.

Pour l'Etat, les délais de paiement se sont heureusement réduits à 37 jours mais le Premier ministre s'est engagé à aller encore plus loin. Mais les collectivités territoriales n'ont pas actuellement la possibilité de régler cette question à l'avance par contrat, de sorte que les entreprises qui travaillent pour elles ne peuvent se prévaloir auprès de leur banque ou de leurs fournisseurs d'une date de paiement. C'est pourquoi le Gouvernement envisage d'ouvrir cette possibilité contractuelle aux collectivités territoriales.

Pour le privé, les règles édictées pour les produits alimentaires et surgelés ne suffisent pas. Le principe, c'est zéro jour, mais les contrats entre entreprises peuvent fixer d'autres délais.

Dans le cadre de la directive européenne, nous estimons qu'il faudrait revenir à ce principe du paiement immédiat, mais en veillant à ne pas mettre les fournisseurs en situation difficile par rapport à leurs donneurs d'ordres. Cela implique d'instituer des pénalités automatiques en cas de dépassement des délais et de pouvoir confier le soin de recouvrer ces pénalités à un organisme tiers, comme en Grande-Bretagne.

Enfin, l'observatoire des délais de paiement devraient pouvoir intervenir lorsque les délais contractuels sont abusifs (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

SOMMET DE BUENOS-AIRES

Mme Geneviève Perrin-Gaillard - "Sommet affligeant... fiasco à Buenos-Aires... échec du sommet" : les titres de presse sont révélateurs de l'insuccès de la rencontre des 160 pays réunis pour mettre en application les accords de Kyoto de 1997.

La proposition des Etats-Unis, premier pollueur en gaz à effet de serre, d'instaurer des permis de polluer dont ils seraient les premiers bénéficiaires n'est pas étrangère au blocage des négociations.

L'Union européenne n'a pas su convaincre les autres pays de s'engager dans un processus de réduction domestique des émissions. Pourtant les conséquences du réchauffement de la planète seront catastrophiques, à l'image du cyclone Mitch qui a ravagé l'Amérique centrale.

Quelles sont les perspectives d'amélioration des niveaux d'émission de gaz à effet de serre et comment la France pourra-t-elle jouer un rôle pilote en ce domaine ?

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire été de l'environnement - A Kyoto, il y a un an, tous les pays développés avaient pris des engagements quantifiés de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les Etats-Unis eux-mêmes avaient dû se plier aux pressions internationales.

A Buenos-Aires, il n'a pas été possible d'aller plus loin parce que la mise en oeuvre de ce protocole est prévue jusqu'à 2010. Je me réjouis que le débat sur le mécanisme des droits à polluer que les Etats-Unis voulaient imposer ait finalement donné lieu à une discussion beaucoup plus complexe sur trois systèmes différents : le mécanisme de développement propre pour les pays en voie de développement, la "mise en oeuvre conjointe" pour les pays d'Europe de l'Est et le marché des droits d'émission.

Le fait que l'Union européenne ait fait bloc à Buenos-Aires et que les pays en voie de développement aient parlé, pour une fois, d'une seule voix, a permis d'obtenir que ce marché ne se mette pas en place avant que les pays développés n'aient adopté des mesures coordonnées et des transferts de technologie vers les pays du sud.

Des plans nationaux de maîtrise des émissions sont préparés par la quasi-totalité des pays développés. En France, une réunion de la commission interministérielle sur l'effet de serre va avoir lieu dans les prochaines semaines sous la présidence du Premier ministre. Elle permettra de déterminer, ministère par ministère, les moyens par lesquels la France entend respecter ses engagements.

J'insiste sur la nécessité de développer des mesures coordonnées avec les autres pays de l'Union pour éviter des distorsions de concurrence -je pense notamment à la future directive sur la taxation de l'énergie (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

La séance, suspendue à 16 heures 5, est reprise à 16 heures 15, sous la présidence de M. Pericard.

PRÉSIDENCE DE M. Michel PERICARD

vice-président


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LOI DE FINANCES POUR 1999 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999.

ARTICLES NON RATTACHÉS (suite)

M. le Président - Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles non rattachés et s'est arrêtée à l'amendement 147 corrigé après l'article 73.

APRÈS L'ART. 73 (suite)

M. Augustin Bonrepaux, président de la commission des finances - Les amendements 147 corrigé, 146 et 145 visent tous trois à favoriser l'adoption du régime de la taxe professionnelle unique. A cette fin, ils fixent à deux tiers, et non plus à trois quarts, la majorité qualifiée requise pour en décider. Ils concernent respectivement les communautés urbaines, les districts et les communautés de communes.

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget - Le Gouvernement partage la volonté de M. Bonrepaux de favoriser le passage à la taxe professionnelle unique mais trouve un air de cavaliers budgétaires à ces trois amendements. J'invite donc le président de la commission des finances à les retirer, sachant que la mesure qu'il propose est inscrite dans le projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale, projet qui a déjà été adopté en conseil des ministres et qui sera examiné ici au début de l'an prochain.

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances - Il aurait été plus logique de discuter les amendements 147, 146 et 145, après les amendements 148 et 149. Quoi qu'il en soit, ces amendements ont une cohérence. Je demande donc la réserve du vote sur les trois qui viennent d'être présentés, et ce jusqu'à l'amendement 149 compris.

M. le Président - La réserve est de droit.

M. Jean-Pierre Balligand - L'amendement 156 que M. Edmond Hervé et moi-même défendons part du constat suivant : les contrats de plan Etat-régions vont être négociés en même temps qu'arrivent des textes importants sur l'aménagement du territoire -celui de Mme Voynet- et sur l'intercommunalité -celui de M. Chevènement-, sans parler du projet de M. Zuccarelli sur l'intervention économique des collectivités locales. Va-t-on contractualiser avec des agglomérations qui, juridiquement, n'existeront pas avant la fin de 1999 voire le début de l'an 2000 ?

L'autre raison de notre amendement est qu'il nous paraît indispensable, face aux problèmes sociaux des villes et des banlieues, d'organiser une taxe professionnelle d'agglomération. Nous proposons donc de rendre obligatoire, à compter du 1er janvier 2000, l'adoption de la taxe professionnelle unique pour tous les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 100 000 habitants. Cela n'interfère en rien avec le projet Chevènement. La presse ayant souvent tendance à penser que nous agissons plus en élus locaux qu'en législateurs désintéressés, j'en profite pour signaler qu'élu d'un département rural qui ne compte aucune agglomération de plus de 100 000 habitants, je ne suis pas personnellement intéressé, mais je crois une telle disposition nécessaire. Il est temps de mettre fin à ces écarts de taux qui existent d'une commune à l'autre dans la même agglomération : voyez par exemple les différences entre les moyens de la Seine-Saint-Denis et ceux des Hauts de Seine !

La coopération intercommunale s'est mise en place dans la France des clochers -petites villes et villes moyennes- mais guère dans celle des villes, même si l'on compte une douzaine d'agglomérations bien organisées, comme Rennes, Lille ou la Courly. D'où les dispositions de notre amendement 156 : "le nouveau régime fiscal est assorti de la suppression sans condition de la liaison à la baisse entre les taux de taxe professionnelle et des impôts ménages ; il est déclaré compatible avec la possibilité d'un complément de ressources par la perception d'une taxe additionnelle aux impôts sur les ménages ; les établissements publics de coopération intercommunale concernés par ledit article ne peuvent revenir en arrière pendant la durée d'unification des taux qui est d'au plus 10 ans".

Le dispositif que nous proposons prévoit la rétrocession aux communes de l'intégralité de la taxe professionnelle perçue par elles l'année précédant la mise en oeuvre de la taxe professionnelle unique. La deuxième part de ce produit sera conservée par le groupement pour ses propres besoins. Le solde éventuel sera redistribué sous forme d'une dotation de solidarité entre les communes membres.

Nous ne contestons pas le bien-fondé de retirer la masse salariale des bases de calcul de la taxe professionnelle, tel qu'il est prévu à l'article 29 du projet de loi de finances. Simplement nous nous interrogeons sur la compensation au fil des ans jusqu'à 2003, puisque ce sont progressivement des entreprises de plus en plus importantes qui seront concernées. C'est pourquoi il faut mettre en place sans tarder une taxe professionnelle d'agglomération. Pour contractualiser dans de bonnes conditions, l'Etat a besoin d'agglomérations structurées et puissantes -et c'est un député rural qui le dit ! La taxe professionnelle doit être mutualisée dans tous les établissements de coopération intercommunale regroupant plus de 100 000 habitants avec, bien entendu, un mécanisme garantissant les ressources des communes adhérentes (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas adopté l'amendement 156 bien qu'elle en partage la philosophie. Mais elle propose un dispositif qui lui paraît meilleur techniquement.

L'institution d'une taxe professionnelle unique d'agglomération permettra de renforcer l'intercommunalité. Il convient donc d'y arriver le plus tôt possible, c'est-à-dire le 1er janvier 2000.

Ce régime fiscal n'est actuellement obligatoire que pour les SAN, au nombre de neuf, et les communautés de ville, en nombre de cinq. Peuvent néanmoins opter pour lui les communautés urbaines et les districts créés avant le 8 février 1992, ainsi que les communautés des communes. Or, au 1er janvier 1999, seuls 83 de ces groupements ont exercé cette option. Mais, alors même que le législateur avait conçu la taxe professionnelle unique pour la coopération en milieu urbain essentiellement, seuls six de ces 83 groupements dépassent 100 000 habitants, 70 % d'entre eux en comptant même moins de 20 000.

Nous proposons donc, par notre amendement 150, de rendre obligatoire la taxe professionnelle unique pour tous les groupements de communes de plus de 100 000 habitants. Ils sont 45 en France. Cinq ont déjà opté pour ce régime fiscal intégré -Marseille, Rennes, Aix-en-Provence, Avignon et Perpignan. Quarante seraient donc concernés.

Notre amendement 148 propose que les groupements contraints d'adhérer à ce régime ou qui auront choisi de le faire, puissent continuer de prélever une fiscalité additionnelle sur la taxe foncière et la taxe d'habitation, comme cela est déjà prévu pour les syndicats d'agglomérations nouvelles.

Enfin, notre amendement 149 propose d'autoriser, comme le proposent également M. Balligand et M. Hervé, une déliaison des taux à la baisse afin de responsabiliser davantage les élus locaux et de donner plus de souplesse au dispositif.

Si la commission des finances propose la mise en oeuvre de ce dispositif à partir du 1er janvier 2000, c'est qu'elle s'inquiète du calendrier de l'examen du projet de loi relatif à la coopération intercommunale. Aucune date n'a été pour l'instant annoncée pour le début de la discussion. Il serait donc étonnant que la loi puisse entrer en application avant le 1er janvier 2000.

M. le Secrétaire d'Etat - J'ai écouté avec grande attention la présentation du dispositif très complet élaboré par la commission des finances.

Sur la nécessité de renforcer la coopération intercommunale et d'instituer donc une taxe professionnelle unique d'agglomération, nous sommes d'accord.

Mais vous souhaitez que le régime soit obligatoire pour les groupements de communes de plus de 100 000 habitants. Nous souhaitons, nous, que les groupements de plus de 50 000 habitants puissent librement, seulement s'ils le souhaitent, se constituer en communauté d'agglomération. Le débat est donc ouvert, il devra être poursuivi.

S'agissant du calendrier d'examen du projet de loi relatif à la coopération intercommunale, je suis en mesure de vous rassurer. Le Gouvernement a fait de ce projet une priorité et même si le calendrier parlementaire est chargé, le débat commencera dans votre assemblée le 2 février ; la procédure d'urgence sera utilisée. Mais s'il est bon qu'un débat commence, il faut aussi qu'il s'achève : je prends l'engagement au nom du Gouvernement que la loi sera promulguée avant la fin de 1999. Ainsi nous voulons aller vite, et le dispositif, Monsieur Balligand, sera en place avant le début de la période d'exécution des contrats de plan 2000-2006. Je ne cache pas que la pression exercée par la majorité et par l'ensemble du Parlement a poussé le Gouvernement à accélérer l'examen de ce projet, et à prendre les engagements que je viens de formuler. Dès lors que je les ai pris, et considérant que le travail considérable accompli sur ce sujet par la commission des finances viendra nourrir le débat de février, je crois qu'il serait de bonne méthode que vous retiriez ces amendements, dans l'attente d'un vrai débat, qui ira à son terme.

M. Edmond Hervé - Ce qui a conduit tant la commission des finances que M. Balligand et moi-même à déposer ces amendements, c'est que la possibilité d'une taxe professionnelle à taux unique dans les établissements publics de coopération intercommunale n'a pas été utilisée. Et ce fait est à l'origine d'une faiblesse dans l'organisation de nos collectivités, dans leurs rapports avec l'Etat -d'une faiblesse aussi au regard de l'Europe qui nous attend. La TP à taux unique n'est pas une fin en soi : la fin, c'est la justice fiscale, et aussi l'aménagement du territoire. Celui-ci est en effet impossible dans une structure intercommunale qui ne s'en donne pas les moyens fiscaux.

Je vous remercie, Monsieur le ministre, d'engager ce débat. Nos propositions, comme celles du rapporteur général, résultent du rapport que j'ai présenté au nom de la commission des finances. Or ce rapport a été publié avant que nous connaissions votre projet de réforme de la TP : il est clair que nos amendements n'ont pas pour but de contester cette réforme, qui est excellente et que nous avons votée. Je souhaite, d'autre part, que nous nous mettions d'accord sur certains principes. Première question : sommes-nous attachés au principe du système français actuel de fiscalité locale ? Je réponds oui ! Car il y a une exception française qu'on ne cite jamais, et je le regrette : la France est le seul pays où 40 % des ressources locales proviennent de la fiscalité locale. Nous sommes médaille d'or en Europe pour la décentralisation fiscale. Nous n'avons rien à envier par exemple à l'Allemagne, Etat pourtant fédéral, mais où les ressources des collectivités locales ne proviennent que pour 10 % du système de fiscalité locale.

D'autre part, si nous proposons cette taxe professionnelle, c'est qu'on observe de fantastiques écarts de richesse. Mais ne nous y trompons pas : la carte de la TP n'est que la photographie de la localisation des activités économiques. Les chiffres de 1995 font apparaître que le montant moyen par habitant de la taxe professionnelle est de 1 447 F. Mais dans la moitié des communes, il est inférieur à 200 F... On note des écarts de taux de 1 à 44. Dans la langue de bois des élus locaux, il y a un mot magique : "péréquation". Mais le fonds de péréquation ne représente que 6,5 milliards, et avec cela on n'atteint encore que 40 % du montant moyen national de TP par habitant. La vraie péréquation ne s'opère pas par les fonds de péréquation : c'est la péréquation financière qui résulte de la DGF et d'autres dotations. Or, si nous voulons réduire les écarts de TP, cela coûtera très cher : pour arriver à 50 ou 60 % du montant moyen national, il faudrait ajouter quelque 18 ou 20 milliards.

Donc, puisque la péréquation a des limites financières par le haut, voyons quelle péréquation pourrait être faite par le bas. La taxe professionnelle à taux unique est une forme de péréquation à la base, faisant appel à la responsabilité locale. Je suis affligé, en regardant la carte de la coopération intercommunale, par les déséquilibres entre départements ; j'ai la chance que mon département et ma région aient les taux de coopération les plus élevés.

La TP à taux unique est aussi pour nous un instrument de mutualisation, et d'aménagement du territoire. Enfin, je suis très surpris, Monsieur le ministre, que vous n'ayez pas évoqué un aspect du problème. Car nous souhaitons nous aussi que vous fassiez des économies ! Or la TP à taux unique en permettra de considérables pour l'Etat, à trois égards. La mutualisation des risques de perte de bases limitera les recours au fonds national de péréquation. La péréquation entre les communes limitera l'intervention de l'Etat pour corriger les écarts de richesse fiscale. Enfin, la base du taux de la TP peut limiter la compensation des écrêtements. Je suis surpris que vous nous ayez caché cela, Monsieur le ministre... (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Marc Laffineur - L'amendement de nos collègues permet au moins d'ouvrir le débat, sur un sujet auquel nous sommes tous sensibles. Je ne crois pas cependant qu'il permette de régler le problème, qui implique beaucoup de questions en aval. On connaît certes des situations où, au sein d'une agglomération, une ou deux communes refusent de contribuer aux dépenses communes, pratiquent des taux très bas et attirent les entreprises : il faut trouver des solutions face à ces situations inadmissibles. Je crains toutefois que la TP à taux unique ne pousse à la hausse ; ce sera une tentation pour la structure intercommunale, dès lors qu'il n'y aura plus de concurrence.

Il faudrait donc rechercher une solution intermédiaire. On devrait pouvoir empêcher une commune de se désolidariser de l'agglomération, comme il arrive aujourd'hui, et éviter une trop grande différence des taux de TP au sein d'une agglomération ; mais faut-il aller jusqu'à un taux unique ?

La deuxième partie de l'amendement porte sur le lien entre la taxe professionnelle et l'impôt sur les ménages : ici nous sommes tout à fait d'accord. Il faudra arriver à supprimer cela, car les élus y perdent beaucoup de liberté. Quant à la troisième partie, le fait que la TP soit perçue, puis redistribuée, par le groupement de communes pose un problème sur lequel j'appelle votre attention. Certaines communes font des investissements importants pour développer des zones industrielles. Ce faisant elles prennent des risques, et il faut en moyenne dix ans environ pour qu'elles perçoivent un retour sur ces investissements. Si le groupement des communes perçoit toute la TP, il faudra prévoir une compensation pour les communes qui ont investi et se trouveront privées de la TP supplémentaire qu'elles pouvaient espérer.

Il y a encore un autre problème. Aujourd'hui la taxe d'habitation et le foncier bâti augmentent très peu à population constante : les bases physiques de ces impôts progressent de quelque 1 ou 1,5 % par an. En revanche, dans les communes de quelque importance, la moitié des dépenses de fonctionnement sont des dépenses de personnel. Or la masse salariale, à effectif constant, augmente en moyenne de 3,5 % l'an. Les communes ne pourront pas faire face si elles n'ont que des impôts qui progressent de 1,5 %, et non plus la taxe professionnelle, qui augmente en moyenne d'environ 5 %. Voilà un second problème que ne résout pas l'amendement de nos collègues.

M. Pierre Méhaignerie - L'amendement de nos collègues Balligand et Hervé est de conviction, mais aussi d'humeur.

M. Edmond Hervé - Et d'expérience !

M. Pierre Méhaignerie - S'agissant de la conviction, il est difficile d'imaginer que le vote par des élus de la principale taxe locale n'entraîne pas tôt ou tard leur élection au suffrage universel. Sur l'humeur, cette réforme de la taxe professionnelle, que je ne soutiens pas, suscitera beaucoup de surprises pour les entreprises et beaucoup d'inquiétudes chez les élus locaux. Monsieur le ministre, vous vous étiez engagé en commission des finances à nous fournir une simulation. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ? Est-il vrai qu'une entreprise à hauts salaires bénéficiera de 5 à 10 fois plus de réduction de taxe professionnelle qu'une entreprise industrielle à bas salaires soumise à la concurrence internationale ? Nos compatriotes doivent connaître les conséquences d'une réforme si importante.

M. Serge Poignant - Je suis élu d'une petite commune faisant partie d'une grande agglomération. Si peu de communes se sont décidées à se constituer en communautés d'agglomération, c'est qu'elles rencontrent des problèmes. En particulier les écarts de revenu de taxe professionnelle par habitant peuvent varier de 1 à 40.

Créer un taux de TP unique entraînera des hausses, que certaines communes ont déjà anticipées. De plus, la commune qui perçoit 500 F par habitant restera à un niveau très bas, et celle qui perçoit 20 000 F à un niveau très haut.

Je ne suis pas un collectiviste, mais il faudra bien trouver le moyen de réduire les écarts. Le taux de TP unique ne le permettra pas. Ou bien l'on en vient à une mutualisation totale pour réaliser tous les équipements, et on ne parle plus des communes ou, si l'on veut conserver l'entité communale et procurer aux communes les moyens d'investir, il faut aller plus loin. Je suis d'accord pour que l'on réfléchisse à l'ensemble de la fiscalité locale, mais pas à la faveur d'un amendement à la loi de finances.

M. Edmond Hervé - Monsieur Poignant, si vous voulez qu'existe demain au niveau national un taux unique de TP, vous indiquez la voie la plus courte. Mais, pour ma part, je n'en veux pas.

M. le Secrétaire d'Etat - Je suis fier de participer à un débat qui laisse augurer une discussion de grande qualité le 2 février, quand vous examinerez le projet sur la coopération intercommunale. Plusieurs voies s'offrent pour parvenir à une TP unique.

Monsieur Méhaignerie, s'agissant de la réforme, qualifiée d'excellente par M. Hervé, tendant à supprimer en 5 ans l'élément salarial dans la base de la TP, une simulation a été réalisée, et figure dans le rapport de M. Migaud pour la première partie de la loi de finances.

Le Gouvernement veut développer l'emploi. Or ce sont les PME, souvent les plus petites, qui le créent, ainsi que les entreprises du tertiaire.

M. le Rapporteur général - Je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à 17 heures 10, est reprise à 17 heures 30.

M. le Rapporteur général - Nos amendements traduisaient la volonté de renforcer l'intercommunalité grâce à une taxe professionnelle unique, le plus rapidement possible. Nous avions donc posé un certain nombre de questions au gouvernement à ce sujet.

Au passage, je rejoins M. Méhaignerie qui a observé que le renforcement des structures intercommunales posait une question de légitimité et qu'il faudra bien un jour envisager l'élection de leurs responsables au suffrage universel.

Il faudra aussi s'interroger sur le nombre de niveaux administratifs. Si à chaque réforme nous empilons une structure supplémentaire, elle engendre ses propres dépenses. Il faudra s'en soucier rapidement.

Vous avez estimé, Monsieur le Secrétaire d'Etat, plus opportun de traiter cette question dans le cadre du texte sur l'intercommunalité qui sera présenté par Jean-Pierre Chevènement et vous nous avez assuré que ce texte serait discuté le 2 février et que le Gouvernement demanderait l'urgence.

Compte tenu de ces assurances nous acceptons de retirer nos amendements, étant entendu que la question du caractère obligatoire ou volontaire de la taxe unique devra être résolue et que la DGF devra être augmentée pour les agglomérations qui feront le choix de la taxe unique. Si on veut donner du crédit au renforcement de l'intercommunalité, il faut la doter de moyens supplémentaires. Donc, rendez-vous le 2 février !

M. le Président - Je comprends donc que vous retirez les amendements 147, 146, 145, 156, 150, 148 et 149.

M. Yves Cochet - Mes amendements n'ont pas trait à la taxe professionnelle, mais à l'entretien des cours d'eau ! Dans le Val-d'Oise nous avons souvent des inondations dues au défaut d'entretien des berges. Les communes peuvent se substituer aux propriétaires défaillants, mais en ce cas leurs travaux ne sont pas éligibles au FCTVA. Cette différence fiscale n'a aucune justification.

Nos amendements 166 et 167 tendent donc à étendre l'éligibilité au FCTVA aux travaux hydrauliques réalisés, d'une part, sur des propriétés n'appartenant pas à des bénéficiaires de ce fonds lorsqu'il y a urgence, d'autre part, sur des dépendances du domaine public de l'Etat mises à disposition des collectivités locales.

M. le Rapporteur général - C'est une vieille revendication de la commission des finances ! L'an dernier, nous avions obtenu une mesure positive ; cette année l'article 41 bis crée un dispositif qui devrait satisfaire en grande partie aux amendements. Je propose d'en rester là et donc de ne pas les adopter.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement a accepté de rendre éligibles au FCTVA les travaux réalisés sur des biens dont les collectivités locales ne sont pas propriétaires, mais uniquement en cas d'urgence. Il faut en rester là car le principe de base du remboursement de la TVA est qu'il s'applique uniquement aux biens dont la collectivité est propriétaire.

M. Yves Cochet - Je retire les deux amendements.

M. Michel Bouvard - Compte tenu du dispositif adopté en première partie de la loi de finances, je retire l'amendement 9 corrigé.

M. Marc Laffineur - J'observe tout de même que chaque année, et quel que soit le Gouvernement au pouvoir, le ministère des finances s'arrange pour transformer des dépenses d'investissement des communes en dépenses de fonctionnement, les privant ainsi du FCTVA.

Notre amendement 13 corrigé tendait à corriger cela, mais suivant l'exemple de mon collègue, je le retire !

M. le Rapporteur général - Je souligne que ces deux amendements sont entièrement satisfaits par l'article 41 bis, dont on a sans doute pas mesuré la portée !

M. Yves Cochet - L'amendement 168 tend à rendre éligibles au FCTVA toutes les dépenses d'investissements pour le traitement des déchets. Actuellement elles ne le sont que pour autant que les recettes n'excédent pas 15 %, ce qui ne favorise pas les systèmes les meilleurs.

M. le Rapporteur général - J'ai peine à comprendre cet amendement. La commission l'a rejeté car l'éligibilité est déjà acquise pour les travaux à hauteur de la fraction pour laquelle la TVA n'est pas déduite.

M. le Secrétaire d'Etat - Dans ce budget, le Gouvernement a accepté d'appliquer le taux réduit de TVA à la collecte et au tri sélectif des déchets et l'Assemblée l'a étendu au traitement des déchets. La TVA n'est donc plus que de 5,5 %. C'est déjà un bel effort et je propose qu'on en reste là.

Plus tard, peut-être, si la question se pose -mais le rapporteur général a l'air de penser qu'elle ne se posera pas-, nous réexaminerons les choses. En attendant, je prie M. Cochet de retirer son amendement.

M. Yves Cochet - Je le retire, comme mes deux précédents, mais la question se reposera, assurément. Au moins à l'an II de la fiscalité écologique, si nous considérons que nous sommes à l'an I.

M. Jean-Pierre Brard - A la différence de certains amendements qui viennent d'être présentés, le mien n'a pas encore eu satisfaction et nous donne l'occasion de terminer en apothéose ce projet de loi de finances (Sourires).

La défense de l'emploi doit s'appuyer sur des mesures incitatives comme les emplois-jeunes ou la réduction du temps de travail, mais aussi dissuasives. C'est pourquoi nous proposons, par l'amendement 15, de taxer de 5 % supplémentaires, au titre de la TP, les entreprises bénéficiaires qui procéderaient néanmoins à des licenciements économiques ou sans cause réelle et sérieuse. Certains éléments du patronat persistent en effet à considérer l'emploi comme une variable d'ajustement.

Une telle mesure permettrait de compenser partiellement les charges supportées par les collectivités territoriales qui viennent en aide aux familles frappées par les licenciements.

M. le Rapporteur général - La commission partage ce souci de préserver l'emploi mais pense qu'il serait difficile de cerner l'absence de cause sérieuse ou réelle. En outre, une telle disposition n'aurait qu'un faible impact sur les entreprises qui bénéficient d'un plafonnement en fonction de leur valeur ajoutée. Avis défavorable, donc.

M. le Secrétaire d'Etat - L'obstination est une vertu mais, Monsieur Brard, votre amendement est en partie satisfait par la décision récente du Gouvernement de majorer la contribution dite Delalande, versée par les entreprises bénéficiaires qui licencient les salariés les plus âgés. Et on ne peut pas se servir de la taxe professionnelle à n'importe quelle fin.

M. Jean-Jacques Jegou - L'intervention de M. Brard a fait sourire beaucoup de monde mais pas moi. Car peut-être proposera-t-il un jour de fusiller tout chef d'entreprise qui licencierait ! On ne peut pas toujours traiter l'entreprise en ennemie, Monsieur Brard. Si un jour vous avez la très bonne idée d'en créer une, vous saurez que la fierté de ses dirigeants, c'est d'embaucher, pas de licencier !

M. Jean-Pierre Brard - En toute chose, les excès sont vains (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR). Je n'ai fait que me référer à ce que disait l'actuel locataire du Palais de l'Elysée pendant la campagne présidentielle de 1995 : l'emploi ne doit plus être considéré comme une variable d'ajustement. Je sais bien, Monsieur Jegou, que, quoiqu'appartenant à l'Alliance, vous ne faites pas partie de la même chapelle, mais je vous prie néanmoins d'en rester à ce que j'ai proposé, à savoir : sanctionner les entreprises qui se moquent de l'emploi comme de leur première chemise.

Au discours idéologique que vous avez tenu, j'opposerai un exemple tiré du terrain, celui de General Foods, ou plus exactement KJS qui fait 60 milliards de chiffre d'affaires annuel et qui a fermé une entreprise de Montreuil où le taux de rentabilité n'atteignait que 10 % pour en installer une autre à Châtellerault dans le but d'atteindre un taux de 15 %. Ce faisant, ce groupe a laissé 300 personnes sur le carreau. Peu lui chante leur devenir et les dépenses qui s'ensuivent pour la collectivité. Ma proposition vise donc à moraliser les choses.

M. Jean-Jacques Jegou - Moi, je défends les créateurs d'entreprises !

M. le Président - Vous avez déjà défendu votre amendement, Monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard - Mais je constate que, dès que l'on aborde certains sujets sensibles, l'opposition s'abrite derrière son nouveau Newton, Ernest-Antoine Seillière de Laborde, qui vient d'inventer l'immobilisme perpétuel.

Bien entendu, je ne retire pas mon amendement.

L'amendement 15, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - On y reviendra !

ART. 74

M. le Rapporteur général - L'amendement 135 est rédactionnel.

L'amendement 135, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 74 est ainsi rédigé.

APRÈS L'ART. 74

M. Michel Bouvard - Les exploitants agricoles soumis à un régime réel ne peuvent modifier la date de clôture de l'exercice qu'ils ont choisie lors de leur passage au réel, sauf en cas de reconversion d'activité. Cette rigidité est excessive alors que, dans le régime des bénéfices industriels et commerciaux, la date de clôture peut être librement choisie. Dans un souci de simplification, je propose, par l'amendement 185, de permettre aux exploitants agricoles de modifier la date de clôture de leur exercice une fois tous les dix ans.

M. le Rapporteur général - Il y aurait un risque d'évasion fiscale pour ce qui est de l'imposition des plus-values. Un choix judicieux de la date de clôture permettrait en effet de minorer la base imposable d'une année. Avis défavorable donc.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 185, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - Les amendements 28 et 29 sont défendus.

M. le Rapporteur général - Défavorable sur les deux.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

Les amendements 28 et 29, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Gilbert Gantier - Mon amendement 183 tend à instituer un taux de base de 25 %, au titre de l'IS, pour toutes les entreprises dont les bénéfices n'excèdent pas 1 million. Une telle disposition renforcerait leurs fonds propres et éviterait bien des dépôts de bilan.

Le 174 vise à supprimer l'imposition forfaitaire annuelle, impôt antiéconomique que la loi de finances pour 1998 a encore alourdi.

Le 184 est aussi relatif à l'impôt sur les sociétés, qui a été sensiblement majoré ces derniers temps, au moment où l'Allemagne envisage de l'abaisser.

Ajoutée à la surtaxe de 10 % instituée en 1995, cette majoration exceptionnelle a porté le taux effectif de l'IS à 41,6 % pour 1998 et 40 % pour 1999. L'amendement 184 vise à rétablir la situation antérieure à 1995 où le taux de droit commun était de 33,33 %, conformément à une décision prise, je le rappelle, par M. Bérégovoy. Il conviendrait donc de supprimer les articles 235 ter ZA et ZB du code général des impôts.

M. le Rapporteur général - Monsieur Gantier, si vos trois amendements étaient adoptés, le projet de loi de finances s'en trouverait gravement déséquilibré. Le coût de l'amendement 174, que nous avons déjà rejeté en première partie, avoisinerait deux à trois milliards, celui de l'amendement 184 trente-cinq milliards ! Pour ce qui est de l'amendement 183, il existe déjà un dispositif similaire avec le bénéfice d'un taux réduit de 19 % pour les PME qui choisissent d'incorporer leurs bénéfices à leur capital.

Vous avancez que d'autres pays, en particulier l'Allemagne sous une majorité social-démocrate, adoptent des mesures favorables aux entreprises. Mais, Monsieur Gantier, la France n'est pas en reste. La diminution progressive de la surtaxe sur l'IS décidée l'an dernier comme la réforme envisagée de la taxe professionnelle profiteront à nos entreprises.

Avis défavorable aux trois amendements.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis défavorable.

M. Gilbert Gantier - Je suis surpris des chiffres avancés par le rapporteur pour le coût de mes amendements. Ils mériteraient en tout état de cause d'être vérifiés.

Dans les pays voisins, notamment en Allemagne et en Grande-Bretagne, une majorité socialiste...

M. Jean-Pierre Brard - N'exagérons pas !

M. Gilbert Gantier - ...adopte des mesures semblables et c'est un gouvernement socialiste qui, en France, avait eu l'heureuse idée d'abaisser le taux de l'IS à 33,33 %. Majorer indéfiniment les impôts n'encourage pas le développement économique.

Les amendements 183, 174 et 184, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Charles de Courson - L'amendement 4 a pour objet de permettre à un groupement foncier agricole qui acquiert des terres de bénéficier d'un taux réduit de 0,6 % pour la taxe de publicité foncière dès lors qu'il consent un bail à long terme au profit du preneur en place.

M. le Rapporteur général - La commission a rejeté cet amendement qui donnerait un avantage au propriétaire foncier et non à l'exploitant-propriétaire du matériel et du cheptel. Le redressement du prix des terres agricoles qui commence de se faire sentir paraît un meilleur moyen d'améliorer la situation des GFA. Par ailleurs, s'il est vrai que la diminution des droits de mutation à titre onéreux sur les biens professionnels a pu avoir les conséquences pour les SAFER, mieux vaut régler directement le problème. Le président de la commission des finances a d'ailleurs saisi le secrétaire d'Etat au budget sur ce point. Enfin, le projet de loi d'orientation agricole prévoit que le Gouvernement déposera avant le 1er octobre 1999 un rapport sur l'adaptation de la fiscalité agricole et la transmission des exploitations. Mieux vaudrait attendre les conclusions de ce rapport. Avis défavorable donc à l'amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - L'Assemblée a voté la diminution de 13,4 % à 3,6 % des droits perçus au profit des départements sur les acquisitions d'immeubles. Les GFA en bénéficieront bien évidemment. Un effort substantiel a donc déjà été consenti. Je me rallie donc à l'avis défavorable du rapporteur.

L'amendement 4, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson - Voilà la troisième ou quatrième fois que je présente l'amendement 195. Il ne vous surprendra donc pas !

Il arrive souvent qu'un groupement de collectivités réalise des travaux pour le compte de communes adhérentes en complément de ses propres travaux. Or si le groupement peut récupérer l'année même la TVA sur ses propres travaux, il ne le peut sur les travaux qu'il a effectués sur délégation de maîtrise d'ouvrage.

En effet, l'administration rembourse dans ce cas la TVA aux communes, deux ans plus tard d'ailleurs. Tout cela freine la coopération intercommunale. Mon amendement a pour objet de faire reconnaître que l'accessoire suit le principal même s'il est réalisé sous délégation de maîtrise d'ouvrage. Cela ne vaudrait bien sûr que pour les investissements liés.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé cet amendement. D'une part, des dispositions favorables ont déjà été prises s'agissant de l'éligibilité des dépenses au FCTVA. D'autre part, mieux vaut des règles simples et continuer de conditionner cette éligibilité aux compétences des différentes collectivités.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est déjà allé au-devant des arguments de la commission des finances sur les groupements intercommunaux. Il faut en rester là. Avis défavorable.

L'amendement 195, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Michel Bouvard - Je présenterai l'amendement 11, mon collègue M. Martin-Lalande étant retenu par le congrès des maires de France.

Cet amendement a pour objet d'aménager le seuil de 25 % de détention du capital retenu pour la définition des biens professionnels dans le cadre de l'ISF. Il ne faut pas en effet freiner les acquisitions externes de nos entreprises, indispensables à leur compétitivité. L'an dernier, le même amendement avait été repoussé, par le Gouvernement et par le rapporteur général sans la moindre motivation. S'il devait l'être encore cette année, M. Martin-Lalande souhaiterait savoir pourquoi. Estime-t-on par exemple que le seuil de 25 % ne gêne pas les PME ? Invoque-t-on le coût budgétaire de l'amendement ?

M. le Rapporteur général - Avis défavorable. La commission a estimé que cette proposition créerait des différences de traitement pour la définition des biens professionnels sans rapport direct avec l'objet de l'ISF. Par ailleurs, en cas d'ouverture du capital d'une société, le dirigeant qui ne détient plus 25 % du capital peut déjà continuer de bénéficier de l'exonération de l'ISF pour ses biens professionnels si la valeur de ses droits sociaux représente 75 % du total de sa fortune imposable.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable également. Il ne paraît pas opportun de remettre en cause la définition des biens professionnels. Par ailleurs, ce dispositif non limité dans le temps serait beaucoup trop large.

L'amendement 11, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - L'amendement 19 est défendu.

L'amendement 19, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - L'amendement 17 est défendu.

M. le Rapporteur général - La commission est défavorable à cet amendement, ainsi qu'au 173, en considération de son propre amendement 136, qui prévoit de majorer de 1 % les valeurs locatives cadastrales au titre de 1999. Ce coefficient sera applicable aux propriétés bâties et non bâties, comme aux immeubles industriels.

M. Marc Laffineur - Mon amendement 173 est un peu différent, car il exclut toute augmentation sur le foncier non bâti, et sur les immeubles industriels, c'est-à-dire sur l'appareil de production respectif de l'agriculture et de l'industrie. Si nous voulons favoriser l'emploi, n'alourdissons pas les charges sur l'appareil de production.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable à l'amendement 136, défavorable au 17 et au 173.

L'amendement 17, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 136, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - L'amendement 173 tombe.

M. Serge Poignant - Avant 1996 les serres maraîchères étaient exonérées de la taxe locale d'équipement, exonération supprimée par une circulaire de juin 1996. Je propose par l'amendement 31 de rétablir cette exonération.

M. le Rapporteur général - La commission a été convaincue et l'a adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - Pour montrer qu'il n'est pas insensible aux arguments de l'opposition, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée. Le cas échéant il lève le gage.

L'amendement 31 ainsi rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - En conséquence, le 30 tombe.

M. Charles de Courson - Les investisseurs qui achètent des terres dans les territoires ruraux de développement prioritaire pour les louer par bail à long terme à des jeunes agriculteurs qui s'installent bénéficient du taux réduit, soit 0,6 %, de la taxe de publicité foncière. Je propose par l'amendement 6 d'étendre ce dispositif, pour les groupements fonciers agricoles, à tout le territoire.

M. le Rapporteur général - Défavorable. Cette mesure abolirait la spécificité des territoires ruraux de développement prioritaire. D'autre part, lors du débat sur la loi d'orientation agricole, il a été décidé qu'un rapport sur les adaptations de la fiscalité agricole serait déposé avant le 1er octobre 1999 : c'est dans ce cadre qu'une telle mesure pourrait être discutée.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable.

L'amendement 6, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Jacques Jegou - Les amendements 1 et 10 sont identiques. C'est une proposition que je fais pour la troisième année consécutive, mais qui est plus que jamais d'actualité. Beaucoup de nos concitoyens, vivant en concubinage, ne peuvent bénéficier de la déclaration d'impôts commune. Nous proposons de la leur permettre, en la réservant toutefois au concubinage stable, et donc en exigeant un délai de deux ans de concubinage déclaré, la charge de la preuve reposant sur le contribuable, avant de lui faire produire des effets identiques à ceux du mariage. Cette possibilité n'est toutefois ouverte qu'en cas de concubinage notoire, comme pour l'ISF ; je crois savoir que moins d'une dizaine de couples de concubins sont dans ce cas... Ce qui implique, conformément à la jurisprudence, des relations stables, continues ou connues de tous entre deux personnes vivant sous le même toit. La responsabilité solidaire devant l'impôt atteste de la réalité d'un engagement de vie commune.

Il est d'autant plus intéressant de voter cet amendement aujourd'hui que nous ignorons ce que deviendra la proposition de loi dont nous reprendrons l'examen des 1er et 2 décembre. A noter qu'un des avantages prévus par cette proposition, concernant le droit au bail, est devenu sans objet pour ce qui est des bailleurs sociaux, auprès desquels désormais les concubins sont cocontractants.

M. le Rapporteur général - Nous avons rejeté des amendements similaires en première partie. Nous en avions pourtant déposé l'an dernier, car nous sommes sensibles à ce problème. Mais précisément la proposition de loi sur le Pacs actuellement en discussion répond aux préoccupations de notre collègue, que j'invite donc à favoriser l'adoption la plus rapide de ce texte.

M. le Secrétaire d'Etat - Une précision pour M. Jegou : ce sont 434 déclarations à l'ISF qui sont faites par des concubins... Pour le reste, vos propositions seront satisfaites par la proposition de loi sur le Pacs, et je sens à votre impatience que vous la voterez. Avis défavorable.

Les amendements 1 et 10, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Charles de Courson - Les retraités qui ont mensualisé le paiement de leur impôt sur le revenu ont souvent un problème de découvert lorsque la date du prélèvement est antérieure à celle du versement de la pension. Je propose par l'amendement 5 que la date du prélèvement ne puisse être antérieure à celle du versement.

M. le Rapporteur général - La commission ne l'a pas adopté. Le contrat de mensualisation précise que le prélèvement a lieu le 8 du mois : il appartient donc au contribuable de s'organiser en conséquence. Le dispositif est d'ailleurs bien adapté à une grande partie des pensions, notamment celles de l'Etat, qui sont versées à la fin du mois. Exiger de l'administration fiscale qu'elle s'adapte aux modalités de versement de la pension de chaque contribuable entraînerait une multiplication des dates de prélèvement, d'où un accroissement sensible des coûts de gestion et des risques d'erreur. Il n'est pas opportun de légiférer à ce sujet, mais il devrait être possible de dialoguer avec les banques pour obtenir d'elles une attitude de compréhension.

M. le Secrétaire d'Etat - Je n'ai rien à ajouter à l'argumentation de M. Migaud en faveur de la simplification administrative.

M. Jean-Jacques Jegou - Il n'en reste pas moins qu'il y a des problèmes. Il est vrai que la plupart des banques ont supprimé les dates de valeur, mais celles qui les ont conservées posent des problèmes. En outre, le prélèvement a lieu le 8, sauf quand c'est un samedi ou un dimanche : en réalité la date peut varier du 6 au 11.

J'ajoute que des incidents informatiques peuvent se produire, comme cela arrive, pour le virement des salaires des agents de nos collectivités locales. Le rapporteur général invite à faire des provisions. Ce n'est pas facile pour des salariés modestes ! C'est pourquoi l'amendement de M. de Courson méritait d'être pris en considération.

L'amendement 5, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - L'amendement 16 est défendu.

L'amendement 16, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson - Un jour, l'amendement 3 que je vais défendre finira par passer. En examinant la loi sur le volontariat, nous avons eu un débat homérique sur le financement de la "SDISisation" : pourquoi les conseils d'administration des SDIS ne pourraient-ils pas commencer à lever l'impôt ? Le ministre de l'intérieur a fini par me dire que j'avais raison trop tôt.

Ces conseils d'administration étant depuis 1996 uniquement composés d'élus, rien ne les empêche de lever l'impôt. La SDISisation, ne l'oublions pas, a un coût, qui s'élève à 15 milliards au total.

Je propose donc que les conseils d'administration puissent, s'ils en décident à la majorité des deux tiers, fiscaliser une partie du coût, sur une base départementale. Cela reviendrait, financièrement, à majorer les impôts départementaux, mais les taux seraient fixés par le conseil d'administration du SDIS. Ce dispositif permettrait une meilleure mutualisation, et répondrait à la volonté du législateur.

M. le Rapporteur général - Avis très défavorable. Je souhaite que notre collègue n'ait jamais raison. Un établissement ne doit pas pouvoir lever lui-même l'impôt. Seuls le peuvent des élus du suffrage universel directement responsables. Les élus aux conseils d'administration des SDIS ne sont pas dans ce cas. Que les SDIS aient des difficultés de financement, c'est vrai. Mais la réponse proposée est inopportune.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis également défavorable. Affecter à un service public un prélèvement particulier ne va pas dans le sens de la simplification. Confier cette décision à un groupement d'élus dépourvu de visibilité pour les contribuables est contestable. Enfin, le coût de gestion d'un tel prélèvement me paraît exorbitant.

M. Charles de Courson - L'affaire est très grave.

Monsieur le rapporteur général, votre raisonnement conduirait à refuser le droit de lever l'impôt aux communautés de communes, aux districts, aux communautés urbaines... De plus, le conseil général ne sera pas dessaisi en matière fiscale, comme vous l'affirmez, et si les impôts départementaux augmentent d'un côté, ils peuvent diminuer de l'autre.

Monsieur le ministre, les communautés de communes, les districts, sont eux aussi des services publics à qui sont affectées des recettes fiscales délibérées par eux. De plus, le service est clairement identifié, et l'on voit bien qui est responsable de quoi. Enfin, le coût de gestion est nul, puisque la base est la même que pour le conseil général.

Les arguments du rapporteur général et du ministre ne tiennent pas !

L'amendement 3, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. François Vannson - L'amendement 107 corrigé exprime une vieille revendication des bouilleurs de cru : la réduction des droits de consommation d'alcool dans le cadre d'une production personnelle. Actuellement, les droits sur les alcools s'élève à 9 510 F par hectolitre. A la veille de la mise en place de l'Union européenne, cette taxation prend une signification nouvelle si on y intègre trois paramètres : la distorsion de concurrence entre les différents Etats membres par rapport au droit à distiller ; la préservation de nos paysages, les vergers contribuant à la biodiversité et à la sauvegarde d'espèces rustiques ; enfin, le respect des traditions ancestrales.

M. Sauvadet a essayé à plusieurs reprises de déposer un amendement analogue, mais il a été déclaré irrecevable. Celui-ci est solidement gagé, sur une très faible augmentation du droit de consommation sur les alcools.

L'amendement tend à réduire de moitié le montant de la franchise, soit 4 755 F actuellement, mais seulement pour les 10 premiers litres produits et pour les seuls propriétaires récoltants. De plus la production, non commercialisable, sera destinée à la consommation familiale. Cette mesure concilierait économie, tradition et santé.

Un habitant de ma circonscription m'a chargé de faire goûter une production de ce type (M. Vannson montre à l'Assemblée une bouteille pleine).

M. le Président - Je ne suis pas sûr que la présence d'un tel objet soit tolérable dans l'hémicycle !

M. François Vannson - Ceux qui la dégusteront à l'issue de la séance constateront que ce produit est réalisé avec beaucoup de savoir-faire, de passion et d'amour C'est pourquoi je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée pour en finir avec ce vieux serpent de mer.

M. le Rapporteur général - Cela fait quelques années que nous n'avions pas examiné d'amendement de ce type et c'était heureux. Je ferai la même réponse que mes prédécesseurs, en refusant cet amendement. Mais au moins, qu'on ne vienne pas nous parler d'entretien des vergers. Rien ne sert d'être hypocrite. Parlez cru (Rires).

M. le Secrétaire d'Etat - M. Vannson a demandé si l'on pourrait faire entrer un serpent de mer dans une bouteille. Il vient de démontrer que c'est possible.

Pour ma part, je fais le rêve, qu'avec l'extinction progressive des bouilleurs de cru ces amendements disparaissent. Ce rêve ne se réalisera peut-être pas encore l'an prochain. En attendant, avis très défavorable.

M. Michel Bouvard - Il ne suffit pas de renvoyer au folklore ou à des arrière-pensées. Notre production fruitière devient uniforme pour ce qui est de la vente directe ou de la mise en conserve. Les espèces utilisées pour faire de l'alcool maintiennent la biodiversité. Des savoir-faire vont disparaître avec les derniers bouilleurs de cru. Bien entendu ces productions ne peuvent obtenir un label. Il faut consommer l'alcool de façon raisonnable, mais on peut maintenir des traditions artisanales. Peut-être que le rétablissement du droit des bouilleurs de cru n'est pas la bonne solution, mais certains pays européens ont su en trouver d'autres.

L'amendement 107 corrigé, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Marc Laffineur - L'amendement 8 demande au Gouvernement de présenter un rapport sur la spécialisation des impôts locaux par catégorie de collectivité locale. Actuellement, entre la part de la commune, de la communauté, du département, de la région, le contribuable ne s'y reconnaît plus et rend le maire responsable de tout. Que chaque collectivité soit responsable de son impôt. Par ailleurs transférer la TIPP aux collectivités permettrait de réaliser une péréquation.

M. le Rapporteur général - La commission n'a pas adopté cet amendement. On demande au Gouvernement beaucoup de rapports. Celui-là n'est pas très pertinent. Nous aurons suffisamment d'occasions l'an prochain d'aborder le sujet.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 8, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson - Dans le débat sur le RMI on s'est demandé s'il fallait inclure dans le calcul l'obligation alimentaire. La sagesse l'a emporté et l'article 23 de la loi de 1988 en tient compte. Mais il ne prévoit pas les modalités. Sur le million de Rmistes quelques milliers sont des enfants de gens très aisés, pour qui l'allocation est de l'argent de poche. On ne peut faire jouer l'obligation alimentaire. Les CLI peuvent certes proposer un contrat d'insertion et suspendre l'allocation en cas de refus. Mais cela reste marginal. Or c'est cette situation qui frappe l'opinion. Mon amendement 197 propose donc que dans un tel cas, les CLI puissent mettre en jeu l'obligation alimentaire et qu'il y ait subrogation de l'Etat dans les droits du bénéficiaire. Il fixe un plafond très élevé, l'antépénultième tranche de l'impôt sur le revenu.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable. L'article 23 règle en partie le problème puisque le versement du RMI est subordonné au fait de faire valoir les droits à créance alimentaire. On peut simplement mieux appliquer ce dispositif. En outre, il ne faut pas exonérer d'obligation alimentaire les personnes dont les revenus n'atteignent pas ce seuil. Il faut peut-être retoucher l'article 23. Mais le dispositif proposé n'est pas opportun...

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

M. Charles de Courson - Le rapporteur reconnaît le problème et j'en prends acte. Mais en l'état l'article 23 ne donne pas les moyens de faire appliquer l'obligation alimentaire. Si vous trouvez un meilleur dispositif, je suis prêt à vous suivre. En tout cas, on ne peut tolérer ces quelques milliers de cas abusifs qui sont montrés du doigt.

L'amendement 197, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Président - Nous avons terminé l'examen des articles non rattachés.

J'appelle les articles "services votés" et articles de récapitulation.

L'article 44, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - J'appelle l'article 45 tel qu'il résulte des votes intervenus sur l'état B.

L'article 45 et l'état B, mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - J'appelle l'article 46 tel qu'il résulte des votes intervenus sur l'état C.

L'article 46 et l'état C, mis aux voix, sont adoptés.

L'article 49, tel qu'il résulte des votes intervenus, mis aux voix, est adopté.

L'article 50, tel qu'il résulte des votes intervenus, est adopté.

M. le Président - Le Gouvernement ayant demandé une seconde délibération, je suspends la séance.

La séance, suspendue à 19 heures, est reprise à 19 heures 20.

DEUXIÈME DÉLIBÉRATION

M. le Président - En application des articles 101 et 118, alinéa 5, du Règlement, le Gouvernement demande qu'il soit procédé à une seconde délibération des articles 45 et de l'état B, 46 et de l'état C, 64 a, 64 b, 64 C, 64 d, 64 e, 68, 69 bis et 70 bis de la deuxième partie du projet de loi de finances et, pour coordination, à une nouvelle délibération de l'article 43 et de l'état A de la première partie.

La seconde délibération est de droit.

M. le Secrétaire d'Etat - Cette deuxième délibération a d'abord un objet budgétaire et fait l'objet des amendements 1 à 50. Le Gouvernement vous propose d'adopter les amendements de crédits qui correspondent aux voeux exprimés par votre commission des finances ainsi qu'à des ajustements proposés par le Gouvernement. La deuxième délibération vise également à assurer une coordination avec les votes déjà intervenus sur deux amendements à des articles non rattachés qui n'ont pas encore été traduits dans les états récapitulatifs de crédits. C'est le cas pour les crédits de l'emploi, où les amendements à l'article 81 votés à l'initiative de M. Bapt ont réduit de 185 millions les économies projetées par le Gouvernement en matière d'exonérations de cotisations sociales. Un amendement du Gouvernement corrige donc à la hausse les crédits de ce budget.

C'est également le cas pour les crédits du budget des Anciens combattants, relevés de 22 millions pour tenir compte du vote de deux articles non rattachés relatifs à la carte d'ancien combattant et à l'allocation de préparation à la retraite.

La coordination porte également sur le vote intervenu en première partie sur la réduction de crédits de 240 millions au titre des règles de compensation aux régimes de la baisse des droits de mutation.

Le Gouvernement souhaite abonder de 431 millions les crédits de l'Education nationale pour tenir les engagements pris par M. Allègre lors du récent mouvement des lycéens.

Le Gouvernement souhaite également répondre aux engagements pris lors du débat, d'une part, pour le logement à hauteur de 100 millions, d'autre part, en faveur des services du Quai d'Orsay et du Premier ministre pour réparer le préjudice subi par les victimes du nazisme et renforcer les moyens de la commission Mattéoli.

Enfin, le Gouvernement vous demande de revenir sur le vote intervenu sur les crédits des services généraux du Premier ministre en rétablissant les crédits de l'ENA à 16 millions.

Ces modifications étaient déjà anticipées dans le vote intervenu en première partie de la loi de finances : le plafond des dépenses avait été relevé de 247 millions.

Par ailleurs, le Gouvernement vous propose de réduire les crédits globaux des charges communes de 300 millions pour gager ces modifications.

Dans la suite de la discussion, le Gouvernement sera conduit à prendre en compte l'impact sur les recettes de l'Etat des modifications souhaitées en matière de fiscalité du tabac.

Cette seconde délibération a aussi pour objet de revenir sur certaines dispositions fiscales par huit amendements.

L'amendement 51 vise à supprimer l'article 64 A qui tendait à geler le plafond de l'abattement de 10 % sur les retraites. Cette mesure paraît en effet prématurée. Je prends l'engagement qu'elle sera examinée dans le cadre de la réflexion confiée au Commissariat général au plan, qui remettra son rapport en mars 1999.

L'amendement 52 unifie les dates retenues pour les déductions relatives aux investissements outre-mer.

L'amendement 53 abaisse à 2 millions le montant à partir duquel l'agrément est nécessaire pour les investissements outre-mer donnant droit à un avantage fiscal.

L'amendement 54 vise à sanctionner la rupture des engagements des investisseurs ayant bénéficié de l'avantage fiscal pour l'outre-mer.

L'amendement 55 vise à supprimer l'article 64 E qui étendait le régime des déductions aux productions du secteur audiovisuel. Le Gouvernement s'engage cependant à trouver dans les prochaines semaines un dispositif répondant aux préoccupations de M. Hoarau.

L'amendement 56 supprime l'amortissement accordé pour les résidences de tourisme classées. Celles-ci ne correspondent pas aux objectifs du dispositif mis au point par mon collègue Besson. Mais je suis prêt à rechercher un autre dispositif répondant à vos préoccupations dans le cadre du prochain collectif budgétaire.

L'amendement 57 supprime l'article 69 bis instituant un crédit d'impôt pour l'achat de véhicules.

L'amendement 58 supprime l'obligation déclarative instituée à l'article 70 bis, car elle fait double emploi avec certaines dispositions actuelles.

A l'issue de cette deuxième délibération, un nouvel amendement à l'article d'équilibre est nécessaire pour tenir compte de ces modifications qui portent à 237,33 milliards le déficit du projet de loi de finances. Tel est l'objet de l'amendement 59 à l'article 43.

Conformément à l'article 44 de la Constitution et à l'article 96 du Règlement de l'Assemblée nationale, le Gouvernement demande qu'il soit procédé à un seul vote sur les amendements faisant l'objet de la seconde délibération ainsi que sur l'ensemble du projet de loi de finances.

M. le Président - A la demande du Gouvernement et en application de l'article 44, alinéa 3, les votes sont réservés.

M. le Rapporteur général - Je n'ai pas d'observation particulière sur les abondements de crédits, sinon pour souligner la concrétisation des engagements pris par le Gouvernement à la suite du mouvement lycéen.

Beaucoup de propositions faites par la commission des finances ont été adoptées et nous avons eu un débat de qualité sur les articles non rattachés. Mais huit amendements de seconde délibération reviennent sur des dispositions que nous jugions souhaitables. A commencer par le gel de la baisse de l'abattement de 10 % sur les pensions et les retraites. Nous avons entendu que le Gouvernement veut réexaminer la question à l'issue de la réflexion actuellement menée par le commissaire général au plan sur les retraites. Soit, mais les membres de la commission des finances et la majorité plurielle tiennent à la mesure qu'ils ont adoptée et la veulent effective au 1er janvier 2000 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Cela reste prioritaire pour nous.

Les amendements 52, 53 et 54 nous font parvenir à un équilibre correct pour les investissements outre-mer. Nous avons la garantie que le dispositif restera inchangé jusqu'à la fin 2002, au-delà donc de la fin de cette législature. La loi de défiscalisation ayant été expurgée l'an dernier, il était légitime cette année de la conforter et de lui donner plus de lisibilité.

L'amendement 55 revient sur un vote de l'Assemblée sur la proposition faite par M. Hoarau. Je partageais les réserves du Gouvernement concernant le dispositif fiscal proposé mais je crois néanmoins indispensable de répondre rapidement -le Gouvernement s'est engagé à le faire dans les prochaines semaines- à la question posée par notre collègue.

L'amendement 56 revient sur l'extension du dispositif Besson aux résidences de tourisme classées. Mais le Gouvernement s'engage à travailler avec nous à un dispositif qui pourrait être présenté dès le prochain collectif, c'est-à-dire avant la fin de l'année. Nous n'avons pas de raison de douter de cet engagement.

L'amendement 57 supprime le crédit d'impôt accordé aux acquéreurs d'un véhicule "propre". La commission des finances le regrette, en particulier Mme Bricq. Mais puisque l'an prochain sera l'an II de la fiscalité écologique, nous représenterons nos propositions.

Le Gouvernement ne retient pas l'amendement de M. Brard -accepté par la commission des finances- tendant à instaurer une nouvelle obligation déclarative car il estime que cet amendement est déjà en partie satisfait. Néanmoins, plusieurs dispositions contre la fraude fiscale ont été adoptées, ce qui mérite d'être salué.

J'émets donc un avis favorable sur tous ces amendements et profite de cette occasion pour remercier la présidence, la commission des finances, les parlementaires qui ont participé à nos débats, les services de l'Assemblée, les collaborateurs des groupes, bref tous ceux qui nous ont permis de mener à bien nos travaux et même de les terminer avant l'heure, en fin de journée, ce qui est peut-être sans précédent et, en tout cas, une excellente chose. Je n'oublie pas la presse dans mes remerciements, que j'adresse également au secrétaire d'Etat au budget ainsi qu'au ministre de l'économie et des finances et leurs collaborateurs.

M. le Secrétaire d'Etat - Je joins aux remerciements du rapporteur général les miens et ceux de M. Strauss-Kahn. Je salue la sagesse et l'efficacité avec laquelle les présidents de séance ont mené nos travaux. Je rends hommage au sens du dialogue et à la fermeté de bon aloi dont a fait preuve le président de la commission des finances et je félicite le rapporteur général pour sa clarté et son esprit constructif.

Je remercie les députés de la majorité de leur soutien et de leurs propositions -dont beaucoup ont été retenues-, et ceux de l'opposition pour leurs critiques constructives, qui ont été écoutées avec attention.

Je remercie, enfin, l'ensemble de nos collaborateurs, ainsi que la presse qui a suivi nos travaux avec son soin habituel.

M. le Président - Je rappelle que le débat n'est pas terminé.

M. Charles de Courson - Je ne m'associe pas à ces autocongratulations...

M. Jean-Pierre Brard - Quel bonnet de nuit !

M. Charles de Courson - ...car enfin ceux qui travaillent un tant soit peu en commission des finances et dans cet hémicycle ne peuvent que se demander à quoi sert aujourd'hui le Parlement. L'écart entre le projet de budget initial et le projet qui sort de nos délibérations n'est en effet que de 800 millions, c'est-à-dire un demi-millième du budget.

Encore faut-il préciser que sur ces 800 millions, 431 résultent directement de la crise lycéenne. La preuve est faite qu'il vaut mieux être dans la rue qu'au Parlement (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Le Parlement ne sert plus à grand-chose en matière budgétaire. Loin de moi l'idée d'en tenir l'actuel gouvernement responsable. Le mal est plus profond et évolue sourdement depuis des années. Comment dès lors s'étonner que les tribunes comme les bancs de cet hémicycle soient vides ? Comment dès lors s'étonner que la majorité doive solliciter ses quelques députés de permanence afin d'être assurée de l'emporter d'une ou deux voix lors des votes ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

A six reprises cette nuit, le Gouvernement a été battu, mais les amendements 51 à 58 remettent en question nos votes. Adieu la "Bricquette" ! Adieu l'extension de la loi Pons ! Même des gâteries, allais-je dire, que nous avions votées le plus souvent à l'unanimité, il ne restera rien du fait du vote bloqué.

Dans ces conditions, faut-il encore siéger sur ces bancs ? Pourquoi ne pas s'entendre afin qu'un seul représentant de la majorité y travaille à la sauvette avec le Gouvernement ? Les quelques parlementaires qui s'intéressent au débat budgétaire pourraient de temps à autre y assister (Protestations sur les bancs du groupe socialiste).

Voilà la réalité. Cessons donc de nous autocongratuler. La démocratie française dépérit quand notre Parlement ne sert plus à rien...

M. Jean-Louis Dumont - Changeons la Constitution !

M. Charles de Courson - De nos votes, il ne reste rien. Le Gouvernement établira un rapport, réfléchira à la question, saisira un groupe de travail ou le Commissariat au Plan...

M. le Président de la commission - C'était la façon de faire des gouvernements précédents. Celui-ci tient ses promesses.

M. Charles de Courson - Mes propos vous font peut-être mal, mais c'est la vérité.

L'opposition dans son ensemble regrette ce manque de respect porté au Parlement qui aggravera encore la crise de la représentativité parlementaire dans notre pays. Il ne vous étonnera donc pas que nous votions contre tout cela.

M. Claude Hoarau - Nous prenons acte de l'engagement solennel pris par le ministre de répondre à nos préoccupations sur la filière audiovisuelle outre-mer. Celle-ci a en effet un réel avenir à La Réunion pour peu qu'elle soit soutenue.

Que des élus d'outre-mer déposent un amendement sur une question très pointue qui répond à une attente de la population locale, que l'Assemblée l'adopte et que le Gouvernement annule le lendemain ce vote, voilà qui méritait en effet une explication. Des traces profondes risquaient sinon de demeurer.

Je tiens à remercier les collègues qui ont été hier soir sensibles à nos arguments, plus nombreux d'ailleurs que ceux qui ont voté notre amendement. L'épisode désagréable de ce soir ne doit pas nous éloigner de notre objectif. Nous espérons que nous nous retrouverons dans les prochaines semaines pour mettre en oeuvre le dispositif que le Gouvernement s'est engagé à élaborer (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Jean-Louis Idiart - Depuis le début de la discussion budgétaire, nous avons travaillé de façon constructive. Je n'apprendrai pas à M. de Courson qu'un budget se prépare en amont de sa discussion en séance publique, si bien que plusieurs propositions de la majorité avaient d'ores et déjà été prises en compte. Je ne lui apprendrai pas non plus qu'un certain nombre de nos amendements ont tout de même été retenus. On ne peut en conclure que la méthode est mauvaise ni étayer un plaidoyer contre la représentation nationale sur le rejet de certains de ces amendements.

Monsieur de Courson, si les députés ne servent à rien comme vous l'avez dit, pourquoi siégez-vous encore ?

Il est par ailleurs arrivé pendant cette discussion budgétaire que l'Assemblée adopte certains de vos amendements alors que vous-même étiez absent.

M. Charles de Courson - Une seule fois !

M. Jean-Louis Idiart - Nous pouvons toujours améliorer nos façons de travailler et nous nous y employons. D'ailleurs, nous ne faisons pas partie de ceux qui ont voté les institutions de la Vème République...

Nous voterons ce projet de loi de finances, même si nous aurions souhaité que certaines mesures soient adoptées à plus brève échéance. Mais nous savons aussi que ce gouvernement a jusqu'à présent toujours tenu ses promesses.

Evitons donc, Monsieur de Courson, les excès de langage. Votre qualité ne vous autorise pas à vous ériger en donneur de leçons permanent. Nous travaillons tous ici dans l'intérêt de la nation et nous attachons à améliorer le fonctionnement du Parlement. Si nous estimons que nous ne pouvons pas remplir notre tâche, il nous faut démissionner (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Jean-Pierre Brard - Nous sommes certes toujours un peu marris quand des amendements auxquels nous tenions et qui ont été adoptés par l'Assemblée ne sont pas retenus en fin de compte. Nous n'en devons pas moins porter un regard lucide et objectif sur le travail mené en commun.

Monsieur de Courson, quand bien même l'écart entre le projet de loi de finances initial et celui qui sortira de nos délibérations serait nul, cela ne signifierait pas pour autant que nous aurions été inutiles. Non, nous ne servons pas à rien : peut-être est-ce là votre sentiment propre. Il faudrait alors en tirer les conclusions. Je suis certain qu'il est d'autres candidats de qualité sur vos terres...

Souvenez-vous, Monsieur de Courson, vous étiez déjà député, lorsqu'un certain homme "droit dans ses bottes" refusait de dialoguer non seulement avec l'opposition mais aussi avec sa propre majorité ! Souvenez-vous comment vous pestiez alors en silence ! Aujourd'hui, le Gouvernement accepte le dialogue. Cela n'efface pas toutes les divergences. L'important est de garder le cap et le meilleur moyen de ne pas se perdre est de l'atteindre le plus rapidement possible, afin d'aller ensuite plus loin.

Le Gouvernement n'a d'ailleurs pas annulé tous nos amendements en seconde délibération, contrairement à ce qui est arrivé parfois dans le passé. De plus, nous ne pouvons pas ignorer la qualité du travail mené en amont de la séance publique : au-delà des clivages partisans, il est arrivé à plusieurs reprises que l'on parvienne à une position unanime en commission. La détermination du président de la commission et du rapporteur général n'est pas étrangère à ces résultats et ces louanges, venant de moi qui ne suis pas grossiste en lauriers, sont parfaitement sincères.

Je me félicite tout particulièrement du travail réalisé en commun sur la lutte contre la fraude fiscale. Il commencera de donner dans l'opinion une autre image des hommes politiques, joignant leurs efforts en faveur d'une meilleure éthique. Beaucoup reste à faire mais des progrès significatifs ont été accomplis qui permettront à la fois de donner de nouveaux moyens à l'administration fiscale, de poursuivre les contribuables indélicats et de protéger les contribuables d'erreurs en ce domaine, toujours très déstabilisatrices (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Philippe Auberger - Cette fin de discussion montre un début de confusion dans l'organisation de nos travaux et un manque de lisibilité de ce que nous faisons. Je ne reviens pas sur les limites étroites du déplacement des crédits ; mais quand on voit que, dans le collectif budgétaire, le Gouvernement va déplacer trente milliards de dépenses, alors que nous ne parvenons pas à en déplacer un milliard, on peut se demander en quoi consiste la discussion budgétaire... Mais je veux surtout revenir sur les dispositions adoptées hier, dont la presse a déjà fait état cet après-midi, et sur lesquelles le Gouvernement demandera demain à sa majorité de revenir. Ceci est totalement incompréhensible pour quelqu'un de l'extérieur, sur le plan technique aussi bien que politique.

Sur le plan technique : oui ou non, les dispositions votées hier étaient-elles justifiées ? Si oui, il n'y a aucune raison de revenir dessus. Si elles ne l'étaient pas, le Gouvernement aurait dû examiner les problèmes avec sa majorité en amont du débat d'hier, et éviter cette parodie de démocratie qui consiste à voter des amendements un jour et à y renoncer le surlendemain.

Sur le plan politique, même manque de lisibilité. Les journaux ont publié dès aujourd'hui que le Gouvernement avait été battu sur une série de dispositions, notamment l'abattement pour les retraités. Compte tenu de l'incidence de la mesure, on peut penser qu'elle traduisait une vraie volonté politique : or la voici contrebattue.

Même chose pour les investissements outre-mer.

Déjà dans le passé on est revenu en deuxième délibération sur les décisions de l'Assemblée, mais il y allait de trois ou quatre amendements au plus, en deuxième partie. Cela devient maintenant systématique ; en première comme en deuxième partie, ce sont quelque vingt amendements importants sur lesquels on revient grâce au vote bloqué. La majorité n'a pratiquement plus l'occasion de s'exprimer ; le bon fonctionnement du Parlement est remis en cause et je ne peux que le déplorer (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF et du groupe DL).

M. le Président - En application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, le Gouvernement demande à l'Assemblée de se prononcer par un seul vote sur les dispositions ayant fait l'objet de la seconde délibération et sur l'ensemble du projet de loi.

Conformément à la décision de la Conférence des présidents, les explications de vote et le vote, par scrutin public auront lieu demain après-midi, après les questions au Gouvernement.

La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance.


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CONVOCATION D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le Président - M. le Premier ministre m'informe qu'il a décidé de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 1999.

Prochaine séance, mercredi 18 novembre, à 15 heures.

La séance est levée à 20 heures 5.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


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