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Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 61ème jour de séance, 154ème séance

1ère SÉANCE DU MARDI 9 FÉVRIER 1999

PRÉSIDENCE DE M. Arthur PAECHT

vice-président

          SOMMAIRE :

QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT 1

    RESTRUCTURATION DES SUCCURSALES DE LA BANQUE DE FRANCE 1

    AVENIR DE LA LIAISON MARITIME DIEPPE-NEWHAVEN 2

    AVENIR DE L'USINE MOULINEX DE FALAISE 4

    CHARGES SOCIALES DANS LES INDUSTRIES DU TEXTILE ET DE L'HABILLEMENT 5

    FINANCEMENT DES CLUBS SPORTIFS PROFESSIONNELS 6

    HUMANISATION DES HOSPICES DANS LA RÉGION NORD-PAS-DE-CALAIS 6

    RÉOUVERTURE DE LA LIGNE FERROVIAIRE DE GRANDE CEINTURE 7

    DÉVELOPPEMENT DU PÔLE DE ROISSY 7

    LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE À ORANGE 8

    FRET EN MARTINIQUE 9

QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT (suite) 10

    TRAITEMENT DES RÉSIDUS DE BROYAGE AUTOMOBILE EN MOSELLE-EST 10

    FERMETURE DE L'USINE DU GROUPE PECHINEY AU PALAIS-SUR-VIENNE 11

    MAINTIEN DE SERVICES PUBLICS À ALBERTVILLE 12

    PROGRAMMES DE DÉVELOPPEMENT DU MASSIF CENTRAL 13

    VIDANGE DU BARRAGE DE GRANGENT DANS LA LOIRE 14

    ACCUEIL DES ÉLÈVES DANS LES COMMUNES RURALES 15

    AVENIR DES CLASSES PRÉPARATOIRES AUX GRANDES ÉCOLES 15

    TRANSPORT DE PRODUITS ALIMENTAIRES FRAIS EN BACS PLASTIQUE 16

La séance est ouverte à dix heures trente.


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REMPLACEMENT D'UN VICE-PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

M. le Président - J'informe l'Assemblée qu'il y a lieu de procéder à la nomination d'un vice-président de l'Assemblée nationale, en remplacement de M. Michel Péricard.

Cette nomination aura lieu, conformément à l'article 10 du Règlement, au début de la première séance du mercredi 10 février.


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QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT

L'ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

RESTRUCTURATION DES SUCCURSALES DE LA BANQUE DE FRANCE

M. Jacques Desallangre - A propos de la restructuration du réseau de la Banque de France, M. Dominique Strauss-Kahn a insisté sur l'importance du dialogue social, et indiqué que le Gouvernement avait pour objectifs de maintenir l'emploi, favoriser l'aménagement du territoire et garantir la qualité du service public. L'action syndicale et l'engagement du ministre de l'économie ont permis d'éviter toute fermeture de succursale. Cependant, M. Trichet propose de supprimer 681 emplois, malgré l'accroissement prévisible de l'activité. La transformation de certaines succursales institutionnelles en "succursales allégées" me semble incompatible avec les exigences de la mise en circulation de l'euro et du retrait du franc, compte tenu des quantités en cause et des distances à parcourir entre les points de stockage.

En outre, la multiplication des dossiers de surendettement consécutive à l'adoption de la loi contre les exclusions justifierait une politique d'embauche, d'autant qu'une certaine célérité s'impose dans le traitement de tels dossiers.

Or la succursale de Soissons, qui doit être "allégée", va perdre cinq emplois au bénéfice de celle de Reims. Cette décision va à l'encontre des objectifs poursuivis, qu'il s'agisse de l'aménagement du territoire ou de la qualité du service public.

Quelles mesures comptez-vous prendre pour donner aux succursales, dont celle de Soissons, les moyens d'accomplir leur mission d'intérêt public ?

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - M. Strauss-Kahn, qui attache une grande importance à cette question, m'a prié de vous répondre.

Il a eu l'occasion, au printemps dernier, pendant l'examen du projet modifiant le statut de la Banque de France, d'exposer à votre Assemblée ses trois objectifs fondamentaux : l'emploi, l'aménagement du territoire et la qualité du service public.

Un accord est intervenu, le 12 juin 1998, entre la direction et quatre organisations syndicales. Cet accord, dont les dispositions ont été approuvées par le conseil général de la Banque de France, comporte deux volets.

S'agissant des caisses, aucune d'entre elles ne sera fermée. La Banque de France restera donc présente dans toutes les villes où elle est installée. Sans que cela remette en cause la qualité du service public, soixante caisses institutionnelles seront progressivement transformées en caisses allégées, au rythme de quinze par an, de 1999 à 2002.

La transformation de la succursale de Soissons en caisse allégée ne doit intervenir que l'année prochaine. Elle n'affectera ni les relations avec la clientèle individuelle ni les autres activités de comptoir, en particulier le traitement des dossiers de surendettement.

Cet accord comporte aussi un volet social, relatif au rajeunissement des effectifs de la Banque, au temps de travail et à l'amélioration des conditions de travail des agents de surveillance.

Ces mesures vont permettre d'adapter les structures de la Banque de France à l'évolution de ses missions, tout en maintenant un service public de haute qualité. C'est d'ailleurs dans le même esprit que s'engage la concertation à la Poste, à laquelle je vous sais très attentif en tant que membre de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications.

En ce qui concerne le traitement des dossiers de surendettement, la loi du 29 juillet 1998 va avoir des effets positifs sur les méthodes de travail. La Banque de France met en effet au point un logiciel, afin de supprimer les tâches répétitives, ce qui permettra aux agents de concentrer leur action sur les dossiers les plus difficiles.

Sans doute la charge de travail des commissions de surendettement va-t-elle augmenter pendant la mise en oeuvre de la réforme mais ce surcroît d'activité ne sera que temporaire. Il ne serait donc pas raisonnable d'embaucher, d'autant que les effectifs affectés à ces commissions sont passés de 750 agents en 1992 à près de mille aujourd'hui.

En revanche, il faut saisir cette occasion pour donner à des jeunes une expérience utile qui les aide à s'insérer. C'est pourquoi la Banque de France doit pouvoir recourir à des emplois-jeunes.

Comme vous, le Gouvernement est attaché à la qualité du service public, qui doit aussi savoir être efficace.

M. Jacques Desallangre - Je vous remercie de votre réponse, que je transmettrai aux agents de la succursale de Soissons. Ils craignaient que leur caisse "allégée" devienne bientôt virtuelle : vos propos les rassureront.

AVENIR DE LA LIAISON MARITIME DIEPPE-NEWHAVEN

M. Christian Cuvilliez - La situation économique et sociale de la région dieppoise devient préoccupante, au moment où la publication des dernières statistiques montre que cette zone, avec un taux de chômage de 16,1 % est déjà la plus touchée au sein du département de la Seine-Maritime.

Alors que j'ai contribué à créer une centaine d'emplois-jeunes, à travers une formule originale de groupement d'employeurs, la compagnie P & O annonce son retrait de la ligne Dieppe-Newhaven, supprimant ainsi 200 emplois et 40 millions de masse salariale.

Dans tous les dossiers que je vais évoquer, la responsabilité de l'Etat est engagée.

S'agissant du lien maritime transmanche, il est menacé depuis 1992, quand la société nouvelle d'armement transmanche a décidé de se retirer, ne conservant qu'un rôle d'agent commercial pour la France. Stena Sealink a repris cette liaison, qui représente 1,3 million de passagers et 50 000 véhicules commerciaux.

Fin 1995, l'accord de pool entre la SNAT et Stena est rompu. L'ouverture du tunnel sous la Manche et la guerre tarifaire qui a suivi ont entraîné une redistribution du marché en faveur d'Eurotunnel, qui représente aujourd'hui 50 % du marché et, selon le cabinet Arthur Andersen, aurait enlevé 110 000 passagers à la ligne Dieppe-Newhaven.

En outre, suite à l'autorisation de fusion donnée par le commissaire européen, Karel Van Miert, le géant des mers, P & O, troisième leader mondial du transport maritime a mis en place un service inadapté aux attentes de la clientèle et a abandonné tout effort promotionnel pour inciter les passagers et surtout les transporteurs à utiliser ses lignes du Havre ou de Calais. Ces raisons nous ont d'ailleurs conduits à interroger ledit commissaire européen pour "abus de position dominante".

Environ 500 millions ont été investis dans les infrastructures portuaires par l'Etat, la région, le département et la ville. En plus des 300 emplois directement concernés, l'activité transmanche injecte chaque année 250 millions dans l'agglomération dieppoise.

Quelles solutions de reprise nous propose-t-on ? Un opérateur déjà désigné, Hoverspeed, pour le transport passagers pendant la saison estivale, un autre non encore confirmé, assurant toute l'année un transport fret et un ferry mixte impliquant les collectivités publiques.

Ce dossier, essentiel pour toute la région Haute-Normandie, suppose que l'Etat joue pleinement son rôle tant pour les autorisations et agréments nécessaires que pour les aides susceptibles de favoriser le redémarrage d'une activité économique. Comment le Gouvernement entend-il nous aider ?

D'autre part, la viabilité d'activité à Dieppe, comme la survie des autres lignes transmanche et des 140 000 emplois qui y sont liés, notamment à Calais, sont dépendantes du dossier des marchandises hors taxe.

Quels moyens envisagez-vous pour obtenir un moratoire sur l'application de la directive du Conseil des communautés européennes, initiée par un seul commissaire, M. Martini ?

Deuxième dossier sur lequel je souhaite appeler votre attention, celui de l'entreprise Regma, spécialisée dans la reprographie.

En 1995, les évolutions technologiques et la concurrence internationale ont amené cette société à opérer le redéploiement de ses activités sur le site d'Arques La Bataille, avec un apport de 48 millions de fonds publics, qui devaient permettre la création de 107 emplois en deux ans.

Or, en début d'année, le PDG de la société a déposé le bilan de l'entreprise, désormais pour six mois en administration judiciaire.

Juste avant, et c'est presque révoltant, 9 millions de francs ont été versés aux actionnaires... tandis que le versement des salaires était suspendu en décembre et laissé aux bons soins des AGS.

L'Etat doit se donner les moyens de procéder au contrôle de l'utilisation des fonds publics destinés à favoriser le développement de l'économie et de l'emploi.

Quelles dispositions envisagez-vous de prendre pour que, tout en respectant le principe de la séparation des pouvoirs pour un dossier en cours d'instruction par le Tribunal de Commerce de Lyon, le PDG respecte les engagements souscrits ?

Enfin, mon troisième sujet de préoccupation concerne encore plus directement l'Etat puisqu'il s'agit de l'agence dieppoise de France Télécom.

Depuis plusieurs jours, ses 170 agents s'inquiètent des projets de démantèlement de l'antenne, dont le directeur n'a pas été remplacé.

Cette situation est l'illustration de la nouvelle stratégie de France Télécom, qui risque d'entraîner 40 000 suppressions d'emplois au plan national, en contradiction avec l'esprit et la lettre de la loi d'aménagement du territoire.

L'Etat, actionnaire principal de France Télécom, a les moyens d'intervenir pour inverser cette logique.

A travers ces trois situations locales préoccupantes, Monsieur le ministre, se pose à nouveau la question d'un moratoire contre les licenciements.

Il y va de la crédibilité de la politique de soutien à l'emploi, affirmée comme priorité par le Gouvernement.

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - M. Strauss-Kahn, retenu, m'a chargé de vous répondre à sa place sur la question du commerce hors taxes.Au Conseil européen de Vienne, plusieurs Etats se sont inquiétés des conséquences dommageables, notamment pour l'emploi, qu'entraînerait la suppression brutale du commerce hors taxes communautaires au 1er juillet 1999, notamment pour les régions maritimes. Vous avez cité le cas de votre région et je salue les efforts d'investissement que vous avez réalisés pour le port de Dieppe, ainsi que la création d'une centaine d'emplois-jeunes -c'est une contribution exceptionnelle à la lutte pour l'emploi !

Le gouvernement français partage vos inquiétudes concernant la suppression du commerce hors taxes. Il ressort clairement du rapport demandé par le Premier ministre à M. Capet que le trafic transmanche en serait profondément affecté.

Au Conseil européen de Vienne plusieurs voix se sont élevées pour chercher des solutions, y compris la prorogation des dispositions transitoires. A la suite de ce Conseil, le président de la Commission européenne a été directement saisi de cette question par plusieurs Etats membres, dont la France, qui a fait valoir qu'une telle mesure nuirait à la crédibilité de l'Union européenne, compte tenu de la priorité qu'elle affiche en faveur de l'emploi.

Le gouvernement français souhaite vivement que la Commission prévoie des délais supplémentaires significatifs afin de permettre une adaptation des professionnels aux nouvelles règles.

Quant à l'entreprise de reprographie que vous avez citée, il est clair que quand des fonds publics sont versés en contrepartie d'engagements précis concernant l'investissement et l'emploi, ils doivent, si ces engagements ne sont pas respectés, être remboursés selon des modalités adéquates et en fonction de l'examen du dossier par le préfet et le trésorier payeur général.

En ce qui concerne France Télécom, je déments de la façon la plus catégorique la suppression de 40 000 emplois. Si des réorganisations de services sont nécessaires, elles doivent se faire dans le souci de préserver et d'améliorer la qualité du service public offert aux particuliers comme aux entreprises.

AVENIR DE L'USINE MOULINEX DE FALAISE

Mme Yvette Roudy - L'usine Moulinex de Falaise, dans le Calvados, spécialisée dans la fabrication d'aspirateurs, voit ses effectifs diminuer régulièrement. En trois ans, ils sont passés de 700 à 350 salariés et 118 postes ont été réaffectés à Carpiquet, dans le nord du département. De plus, cet automne, 115 autres emplois ont été déplacés à Cormelles-le-Royal, également dans le nord du département.

Lors du comité central d'entreprise du 19 janvier, le PDG a annoncé en outre la suppression de 93 emplois à Falaise. Samedi dernier, je participais à une manifestation avec les salariés de Moulinex dans les rues de Falaise car cette décision est trop brutale. De plus, les postes menacés sont pour la plupart des emplois féminins.

Cette situation ne peut laisser indifférent le Gouvernement, d'autant que le savoir-faire de Moulinex est reconnu.

Quelles initiatives avez-vous prises pour inciter Moulinex à revenir sur cette décision et pour favoriser la réindustrialisation de ce bassin d'emploi, lourdement frappé par le chômage ?

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - Les difficultés de l'entreprise Moulinex ne sont pas récentes, elles remontent aux années 1990. Elles s'aggravent du fait que l'entreprise n'a plus la taille critique dans le domaine des aspirateurs car elle ne fournit que 4 % de ce marché dans un contexte très concurrentiel, marqué par une grande agressivité sur les prix. La situation a encore empiré du fait que, comme d'autres entreprises du même secteur, Moulinex a choisi de se concentrer sur les pays émergents, notamment la Russie. La récente crise en Russie a entraîné une perte de chiffre d'affaires de 800 millions de francs, ce qui correspond à 650 emplois dans les usines françaises.

L'usine de Falaise notamment, dont le marché russe représenterait 20 % de l'activité annuelle, fait face à un problème de plan de charge.

L'entreprise a pris une série de mesures d'adaptation, notamment le déplacement temporaire de salariés vers l'usine de Cormelles-le-Royal et le rapatriement dans l'usine de Falaise de certaines sous-traitances.

Ces mutations provisoires n'ont toutefois pas permis d'éviter un recours important au chômage partiel en novembre et décembre derniers. Les perspectives commerciales pour 1999 incitent à la prudence et, s'agissant du marché russe, la profession estime que la reprise ne sera pas au rendez-vous.

Les pouvoirs publics s'attachent à des mesures de réindustrialisation des sites affectés par la restructuration de Moulinex. Un comité de pilotage pour la réindustrialisation des régions économiques d'Alençon, Argentan, Mamers et Falaise a été mise en place il y a deux ans. Fin novembre 1998, il avait abouti à la création de 618 emplois, dont 264 au profit des salariés de Moulinex.

Par ailleurs, la SODIE a vocation à intervenir sur le bassin d'emplois de Falaise et j'ai demandé à la direction de Moulinex de tout mettre en oeuvre pour favoriser l'implantation des fournisseurs sur le site de Falaise.

Nous allons, ensemble, être très attentifs à la création de nouvelles industries sur ce site, afin de donner des perspectives aux ouvrières, qui travaillent souvent dans des conditions difficiles.

Mme Yvette Roudy - Je vous remercie de cette réponse, que je transmettrai aux ouvrières concernées. Ce que nous comprenions mal, c'est que l'on détruise des emplois à Falaise pour en créer ailleurs et aussi que les responsables ne songent pas à fabriquer autre chose que des aspirateurs. Mais s'il y a la prise de conscience dont vous parlez, l'avenir peut s'éclairer. En tout cas, nous suivrons cette affaire avec beaucoup d'attention.

CHARGES SOCIALES DANS LES INDUSTRIES DU TEXTILE ET DE L'HABILLEMENT

M. Marc Reymann - Le Parlement a adopté, en avril 1996, un plan spécifique d'allégement des charges pour les industries du textile et de l'habillement, dont les effets ont été extrêmement positifs puisqu'il a permis de consolider des emplois et d'embaucher des milliers de jeunes. Mais la Commission européenne l'a jugé illégal en raison de son caractère sectoriel et exige le remboursement des aides pour tout montant supérieur à 1 000 écus, soit 650 000 F.

Un tel remboursement mettrait en péril l'existence de centaines d'entreprises du secteur, confronté à une baisse des prix sur les marchés mondiaux ainsi qu'à une dépréciation du dollar et des monnaies asiatiques, qui entraîne un recours plus fort des grands appareils de distribution à l'importation, alors même que la demande textile fléchit.

Sur le plan juridique, il est inacceptable car les entreprises avaient pris des engagements conventionnels avec l'Etat et les ont respectés.

Que compte donc faire le Gouvernement pour préserver les emplois concernés ?

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - Ce plan d'allégement de charges sociales a fait l'objet dès le début de mises en garde formelles de la Commission européenne quant à son caractère sectoriel et donc prohibé par les règles de l'Union européenne.

Le précédent gouvernement a néanmoins décidé de le mettre en oeuvre. En avril 1997 -toujours sous le gouvernement précédent-, la Commission a pris une décision qui était prévisible dès 1996 : elle a déclaré ce plan illégal, demandé à la France d'en arrêter l'application et prévenir les entreprises qu'elles auraient à rembourser les aides perçues au-delà des allégements de droit commun autorisés.

L'actuel gouvernement a fait appel de cette décision auprès de la Cour européenne de justice de Luxembourg, qui n'a pas encore rendu sa décision. Sans attendre, j'ai toutefois négocié auprès du commissaire européen, Karel Van Miert certains aménagements : exonération accordée aux entreprises de moins de 50 salariés dans le cadre de l'aide dite "de minimis" ; franchise de 650 000 F pour toutes les autres entreprises. Sur 4 500 entreprises, 950 sont encore concernées, les moins grandes d'entre elles ayant une somme tout à fait minime à rembourser.

Les négociations se poursuivent avec la Commission car je souhaite obtenir des délais de remboursement et un taux d'intérêt qui ne pénalise pas les entreprises. Je multiplie les réunions de travail à cet effet et suis bien conscient de la dégradation du contexte économique auquel est confronté ce secteur. Je remercie le groupe parlementaire "textile et habillement" -que j'ai présidé pendant des années- de sa vigilance et l'assure de la nôtre.

FINANCEMENT DES CLUBS SPORTIFS PROFESSIONNELS

M. Bruno Bourg-Broc - Madame la ministre de la jeunesse et des sports, vous avez plusieurs fois annoncé votre intention de réformer la loi dite Pasqua qui prévoit une disparition échelonnée des subventions des collectivités locales aux clubs sportifs professionnels. Sans me prononcer sur l'opportunité d'une telle réforme, je constate qu'il faut en tout cas que les collectivités locales et les clubs sachent rapidement à quoi s'en tenir. Les communes sont en effet en train de voter leur budget primitif ; quant aux clubs, ils doivent présenter à leur fédération leur budget pour la saison 1999-2000 dès le printemps.

Permettez-moi de prendre l'exemple d'un club de basket que je connais bien, celui de Châlons-en-Champagne, qui évolue en Nationale 1 B avec un budget de 790 000 euros, soit 5,2 millions de francs. Ce budget peut sembler élevé mais il faut savoir que les charges d'un club professionnel sont lourdes sans pour autant que les joueurs soient surpayés. C'est ainsi qu'en l'occurrence le joueur le mieux payé gagne 4 600 euros, soit 30 000 F par mois, et l'entraîneur 2 100 euros, soit 14 000 F. Le club, qui rassemble au moins 2 000 spectateurs à chaque match, participe grandement à l'animation de la vie locale et bénéficie à ce titre de subventions de la ville et du district, à hauteur de 330 000 euros. C'est dire combien il est important et urgent pour lui de savoir s'il peut compter sur ce financement.

Pouvez-vous donc me dire quel type de financement sera autorisé à l'avenir ? Subventions directes ou indirectes ? Quand connaîtrons-nous le nouveau dispositif et à quelle saison s'appliquera-t-il ?

Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports - De nombreux élus et dirigeants de clubs sportifs m'ont alertée sur les conséquences de la loi dite Pasqua. De fait, si quelques clubs professionnels arrivent à vivre grâce au seul financement privé, la grande majorité des clubs de handball, de basket, de hockey ou de football de deuxième division dépendent de l'apport des collectivités locales. A juste titre, compte tenu du rôle social et économique de ces clubs et de leur contribution au développement du sport amateur et à la formation des jeunes.

C'est bien pourquoi j'ai décidé de modifier par un nouveau décret le montant des seuils au-delà desquels les clubs sont tenus de se constituer en société : ces seuils ont été portés de 2,5 à 7,5 millions de francs pour les recettes et de 2,5 à 5 millions de francs pour les rémunérations. Une telle augmentation permettra à de nombreux clubs de demeurer sous statut associatif et donc de continuer à percevoir des subventions publiques en 1999.

Mais le problème de fond ne sera réglé qu'avec le projet de loi sur le sport que je présenterai en avril au Conseil des ministres et où je souhaite maintenir la possibilité pour les clubs de recevoir des subventions -tout en prévoyant des seuils et des pourcentages. Cela devrait être possible compte tenu de la position adoptée lors du dernier sommet européen de Vienne, les 11 et 12 décembre, qui a insisté sur la nécessité de préserver les structures du mouvement sportif. Cela ouvre de nouvelles perspectives par rapport à l'époque où la Commission voulait que prévale la notion de libre-concurrence et demandait que les clubs ne bénéficient plus de financements publics.

La loi permettra donc ce financement mais nous nous entourerons de garanties afin que l'argent public ne serve pas à financer les transferts ou des transactions sur des mineurs.

HUMANISATION DES HOSPICES DANS LA RÉGION NORD-PAS-DE-CALAIS

M. Bernard Derosier - Monsieur le ministre de l'équipement, je me réjouis que vos compétences ministérielles s'étendent désormais aux affaires sociales... (Sourires). Néanmoins je regrette que votre collègue ne soit pas là pour me répondre.

En 1994, première année du XIème Plan, on avait recensé dans le département du Nord 1660 lits à "humaniser" dans les hospices et les maisons de retraite. C'était le reliquat d'opérations d'humanisation dont la responsabilité revenait à l'Etat. Dans le cadre du contrat Etat-région, l'Etat s'était engagé à contribuer au financement à hauteur de 30 %, les collectivités territoriales et les établissements apportant le reste.

Le 31 décembre 1997, 690 lits avaient été humanisés ; 170 devaient l'être en 1998, ce qui ne permettait d'arriver qu'à un total de 860 lits, soit la moitié des lits recensés en 1994. La participation de l'Etat a diminué, passant de 11,2 millions à 8 millions en 1997.

Le XIème Plan a été prolongé d'une année, jusqu'au 31 décembre 2000, mais sans que son exécution bénéficie de moyens supplémentaires. Or les besoins sont croissants car l'espérance de vie augmente... Quelles sont les intentions du Gouvernement pour réduire le retard ? Comment envisage-t-il le XIIème Plan ?

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - M. Kouchner, qui n'est pas encore rentré de Jordanie, m'a demandé de vous communiquer sa réponse.

La réalisation des opérations d'humanisation inscrites dans le contrat de plan de la région Nord-Pas-de-Calais pour la période 1994-1999 ont en effet pris du retard. L'achèvement de ce programme et la mise en oeuvre d'un programme de sécurité dans les maisons de retraite constituent une priorité gouvernementale ; Mme Aubry l'a confirmé aux préfets de région à l'occasion de la préparation du XIIème Plan. Dans le Nord-Pas-de-Calais comme dans les autres régions, les autorisations de programme des opérations prévues pour les exercices 1997 et 1998 et encore en attente seront déléguées aux préfets de région dans les prochains jours ; et il a été demandé à ceux-ci d'inscrire en priorité la fin de ce programme d'humanisation sur le XIIème Plan.

RÉOUVERTURE DE LA LIGNE FERROVIAIRE DE GRANDE CEINTURE

M. Daniel Feurtet - Monsieur le ministre de l'équipement, je me réjouis de votre intention de rouvrir prochainement la ligne SNCF dite de "grande ceinture" aux voyageurs. Cette tangentielle Nord contribuera, dans ma circonscription, au développement de Stains et de Dugny et au bien-être de leurs habitants. Je souhaiterais qu'on étudie la possibilité de rouvrir la gare de Dugny, qu'il faudrait remettre aux normes. En effet, le parc immobilier de la ville est constitué à 80 % de logements sociaux et la très grande majorité de la population utilise les transports publics pour ses déplacements professionnels ; de plus, cette remise en service permettrait de desservir le parc paysager de La Courneuve, fréquenté par des milliers de visiteurs chaque année.

Dans la même logique, ne pourrait-on envisager la prolongation de la ligne 13 du métro jusqu'à cette tangentielle ?

M. le Ministre de l'équipement, des transports et du logement - Le réseau francilien de transports en commun étant essentiellement développé en étoile à partir du centre de Paris, il existe un déficit important d'infrastructures de rocade pour les déplacements de banlieue à banlieue, appelés à se développer.

J'ai donc demandé que, dans le cadre du prochain contrat de plan, une priorité soit accordée aux études et à la réalisation de projets en rocade -tramways, tangentielles ferrées- qui présentent l'avantage de réutiliser largement des infrastructures déjà existantes. Il est, bien entendu, nécessaire d'assurer un bon maillage du réseau ; ce sera le cas pour la tangentielle Nord puisque, dès sa mise en service, elle sera en correspondance directe avec les RER A, B, C, D et E.

Dans le secteur de Dugny, en l'état actuel des études, sont prévues une gare au Bourget, en correspondance avec la ligne B du RER, et une vraisemblablement à Stains, à proximité du quartier de la Cerisaie. L'objectif est d'assurer une liaison de rocade rapide de type RER, ce qui implique de ne pas multiplier les arrêts. C'est la raison pour laquelle, plutôt que la remise en service de la gare de Dugny-La Courneuve, on envisage une restructuration des lignes d'autobus. Les procédures de consultation permettront à chacun de s'exprimer avant que le projet soit définitivement arrêté.

DÉVELOPPEMENT DU PÔLE DE ROISSY

M. Jean-Pierre Blazy - Dans la perspective du développement des activités du pôle de Roissy, il a été demandé au sénateur du Val d'Oise Jean-Philippe Lachenaud de rechercher les moyens d'un développement économique plus équilibré, tenant compte des fortes nuisances entraînées par l'activité aéroportuaire et d'une meilleure répartition entre les communes des retombées fiscales des activités économiques. Les principales propositions contenues dans son rapport concernent l'élaboration d'un contrat de développement économique autour de Roissy, les équipements et les infrastructures dans le prochain contrat de plan et la création d'un fonds interdépartemental pour l'environnement et le développement économique.

Ces propositions devaient être appliquées dès 1999 mais je m'inquiète du retard pris. Pouvez-vous, Monsieur le ministre, me préciser les mesures que vous comptez prendre suite au rapport Lachenaud, conformément aux engagements pris à l'égard des populations concernées et le calendrier de leur mise en oeuvre ?

M. le Ministre de l'équipement, des transports et du logement - Les décisions prises en 1997, notamment la réalisation de deux pistes supplémentaires, s'accompagnent bien évidemment de mesures de protection de l'environnement et d'orientations en faveur d'une plus juste répartition des emplois et des retombées économiques en faveur des communes qui, tout en étant trop éloignées de l'aéroport pour bénéficier de la fiscalité locale, en subissent néanmoins les nuisances.

Pareillement aux efforts en faveur du développement de l'emploi local, il a été demandé au sénateur Jean-Philippe Lachenaud d'examiner les conditions d'une meilleure répartition entre les collectivités territoriales du produit des activités de l'aéroport.

Remis fin 1997 et présenté aux acteurs locaux, le rapport prévoit la création d'un fonds interdépartemental de solidarité pour l'environnement et le développement économique, qui bénéficierait aux communes situées dans un périmètre d'une vingtaine de kilomètres autour de l'aéroport.

Les ressources seraient constituées d'une taxe sur les activités aéroportuaires, d'une contribution d'Aéroports de Paris, d'un prélèvement sur les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, des contributions des collectivités locales au niveau régional et départemental, d'un prélèvement de solidarité sur les communes dotées d'un fort potentiel de taxe professionnelle et d'éventuelles contributions volontaires.

La mise en oeuvre des propositions du rapport Lachenaud est bien sûr liée à la réforme de la taxe professionnelle actuellement en cours. Mes collègues du ministère de l'économie des finances et de l'industrie travaillent avec toute l'application et la détermination qu'on leur connaît pour aboutir rapidement.

Je tiens enfin à vous rassurer : le Gouvernement n'oublie pas votre département du Val-d'Oise. Les propositions de M. Lachenaud devraient être concrétisées, au plus tard, dans le projet de loi de finances 2000, soit avec un an de retard.

M. Jean-Pierre Blazy - C'est bien ce retard qui nous inquiète car l'engagement avait été pris de déposer un projet à la fin du premier semestre 1998 pour une application dès 1999.

Afin que nous puissions ensemble approfondir la réflexion, j'avais proposé que soit constitué un groupe de travail et il m'avait semblé que cette proposition retenait votre attention. Or ce groupe ne s'est pas encore réuni : j'insiste donc car après la mise en service de la troisième piste et conformément à votre volonté d'empêcher toute augmentation des nuisances sonores, il est indispensable que le prochain contrat de plan permette d'inverser la tendance et de traduire dans les faits notre volonté commune de promouvoir un développement économique plus équilibré du pôle de Roissy.

LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE À ORANGE

M. Thierry Mariani - L'annonce récente des chiffres de la délinquance dans l'ensemble du département du Vaucluse montre une situation très préoccupante pour la ville d'Orange où la délinquance a augmenté alors qu'elle régresse dans des communes similaires, situées elles aussi en zone de police, telles que Carpentras ou Cavaillon.

Le sous-effectif dont souffre le commissariat d'Orange est incontestablement un frein à la lutte contre la délinquance.

En effet, sur les 36 gradés et gardiens affectés théoriquement à la circonscription d'Orange, 22 seulement sont sur la voie publique ce qui semble bien insuffisant pour garantir la sécurité de 30 000 habitants. En effet, 8 fonctionnaires sont actuellement en retraite sans avoir été remplacés ou en arrêt maladie sans réelle perspective de retour, 4 autres vont partir à la retraite avant le mois d'août 1999, 2 sont détachés au service des plaintes.

Dans ces conditions, la permanence du service de voie publique n'a pu être assurée qu'au prix de très nombreux rappels et décalages de congés, au prix d'une multiplication des symptômes d'épuisement et de stress. Enfin, les prévisions de congés annuels ne laissent entrevoir qu'une à deux semaines de repos en période d'été, ce qui ne peut qu'accroître le profond malaise.

Avez-vous, Monsieur le ministre de l'intérieur, anticipé les départs à la retraite et le congés maladies ? Comptez-vous prendre des mesures afin de doter rapidement le commissariat d'Orange des effectifs qui lui sont nécessaires pour remplir sa mission de maintien de la sécurité dans des conditions satisfaisantes ?

Ma seconde question a trait à l'éventualité de la signature d'un contrat local de sécurité entre l'Etat et la ville d'Orange. L'attitude de la municipalité Front national aurait fait échouer les négociations avec les services de l'Etat. Cette situation est d'autant plus désolante que cette ville aurait bien besoin d'un tel contrat au regard du développement de la délinquance comme des désengagements répétés de la municipalité vis-à-vis des centres sociaux, des associations d'aide aux jeunes ou de la mission locale qui ne sont guère de nature à apaiser les tensions sociales. Pouvez-vous m'indiquer précisément les motifs de blocage des négociations ?

Vos réponses sont d'autant plus attendues par les Orangeois que l'Etat républicain doit, tout autant qu'ailleurs, assurer dans cette commune isolée par l'attitude de la municipalité Front national, ses tâches régaliennes, au premier rang desquelles figure la sécurité des biens et des personnes.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur - Les statistiques de la criminalité dans le Vaucluse font apparaître en 1998 une baisse de 0,2 % de la délinquance générale et de 2,6 % de la délinquance de voie publique.

Toutefois, malgré une baisse des vols à main armée et des cambriolages, la délinquance générale dans la circonscription d'Orange a augmenté, les faits constatés passant de 2 416 à 2 586. Les services de police se sont pourtant illustrés par une forte augmentation des faits élucidés, des gardes à vue et des personnes mises en cause, leur taux de réussite passant de 22,9 % à 26,6 %, grâce à la mobilisation des fonctionnaires de police du commissariat et aux efforts de l'Etat.

En effet, ce service qui comptait 42 fonctionnaires au 1er janvier 1993 en compte désormais 47 dont 34 gradés et gardiens, auxquels il faut ajouter 5 adjoints de sécurité affectés à l'îlotage. Les départs en retraite et les congés de maladie surviennent partout, mais il faudra étudier le cas particulier d'Orange.

Le recrutement d'adjoints de sécurité se poursuivra en 1999 dans le Vaucluse, considéré comme un des 26 départements sensibles en matière de sécurité, où 65 adjoints sont déjà en fonction.

Je reste disposé à examiner la possibilité d'affecter de nouveaux fonctionnaires au commissariat d'Orange à l'occasion des prochains mouvements de personnels, notamment afin de compenser les départs en retraite. Si cela n'a pas encore été fait, cela le sera. L'effort que j'accomplis pour mettre plus de policiers dans les départements sensibles se traduira aussi dans le Vaucluse.

La lutte contre l'insécurité ne peut cependant se concevoir uniquement en termes d'augmentation des ressources humaines. La mise en place d'une réelle politique contractuelle, grâce aux contrats locaux de sécurité, qui associe les services de l'Etat, les collectivités locales et les acteurs de prévention, -encore faut-il qu'ils soient là...- doit favoriser l'émergence d'initiatives répondant aux besoins de sécurité de la population.

A cet égard, je ne peux que déplorer qu'à Orange, les travaux préalables au contrat local de sécurité soient interrompus. Je dis de la manière la plus nette mon souhait que la municipalité n'instrumentalise pas l'enquête sur les besoins de la population en matière de sécurité à des fins politiciennes, en mettant en cause telle ou telle catégorie de citoyens. Il s'agit en fait de mieux identifier les causes de la délinquance et les remèdes à apporter sur le terrain.

M. Thierry Mariani - Merci pour ces éléments d'information. Il est urgent de pourvoir au remplacement des policiers absents car il y a de moins en moins d'effectifs sur le terrain.

FRET EN MARTINIQUE

M. Camille Darsières - Le principal handicap des Antilles est l'éloignement, que ne viennent compenser ni la dérive des continents (Sourires) ni la reconversion économique.

C'est pourquoi il nous était apparu nécessaire, dans le cadre de la loi Perben de juillet 1994, d'instituer une conférence paritaire sur le coût du fret maritime et aérien. Mais nous attendons toujours les décrets d'application.

Il apparaît pourtant indispensable aujourd'hui de prendre le problème à bras le corps.

En février 1998, à la suite de la protestation très violente des petits planteurs contre la collusion entre un transporteur et des importateurs-exportateurs, une compagnie a signé un protocole aux termes duquel elle verserait au groupement de producteurs, sans expliquer pourquoi, un forfait de 30 millions. Le moins que l'on puisse dire est que tout cela manque de transparence ! D'autre part, un transporteur danois va participer à l'acheminement de la production martiniquaise de bananes vers l'Europe, menaçant ainsi le transporteur unique installé depuis plus de cinquante ans. La concurrence prévisible laisse craindre des pratiques de dumping qui pourraient conduire à l'élimination de l'une des deux entreprises, élimination suivie, à terme, de la remontée des prix.

Dans un tel contexte, le moment n'est-il pas venu d'installer la conférence paritaire prévue par le législateur de 1994, afin de contrôler le prix du transport de fret ?

M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement - La création d'une "Conférence paritaire des transports" dans les départements d'outre-mer, prévue par la loi du 25 juillet 1994 avait pour objectif d'aider les entreprises locales créatrices d'emplois et de favoriser le développement économique de ces départements en leur assurant une desserte aérienne et maritime efficace et au plus juste prix.

Il avait été d'abord envisagé d'installer des observatoires régionaux de transport comme il en existe déjà sur le territoire métropolitain. Mais les études préalables engagées par les services de l'Etat à la Réunion ont fait apparaître que ces observatoires ne répondaient pas vraiment aux objectifs de la loi. C'est pourquoi des études analogues n'ont pas été lancées dans les autres départements d'outre-mer. Mes services examinent les modalités d'installation de la conférence paritaire en tenant naturellement compte du droit de la concurrence.

Quant à la compensation qui aurait été accordée l'an dernier par un transporteur à certains importateurs-exportateurs, selon mes services, il s'agirait en fait de ristournes différées, accordées en fonction des tonnages transportés. Ces ristournes, qui résultent donc de la politique commerciale de l'entreprise, sont consenties dans le cadre de contrats de droit privé à propos desquels l'Etat n'a pas de compétence particulière.

Vous évoquez enfin l'arrivée sur le marché local du transport de la production de bananes d'une entreprise danoise. Ce transport se fait sur la base de contrats librement négociés sur la base d'appels d'offre lancés par les producteurs. Les prix du fret étant libres, l'arrivée d'un nouveau transporteur les a fait baisser sans qu'il soit possible, a priori, de qualifier cette baisse de dumping. Si tel était toutefois le cas, cette pratique contreviendrait aux règles de la concurrence et serait donc susceptible de recours devant les instances compétentes. Toute concurrence doit en effet se faire sur des bases saines.

Dans l'hypothèse où l'un des transporteurs disparaîtrait, il appartiendrait aux groupements de producteurs de lancer un nouvel appel d'offres. Je souhaite très naturellement que l'armement national remporte cette compétition !

M. Camille Darsières - Je vous remercie de cette réponse mais je tiens à rappeler que, dans les départements d'outre-mer, certains importateurs sont aussi exportateurs, ce qui permet bien des marges de manoeuvre si concurrence il y a avec des entreprises qui ne sont qu'importatrices. La vigilance doit donc être de règle.


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FIXATION DE L'ORDRE DU JOUR

M. le Président - L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au jeudi 4 mars 1999 inclus a été fixé ce matin en Conférence des présidents. Il sera annexé au compte rendu de la présente séance.

Par ailleurs, la procédure d'examen simplifiée a été engagée pour la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative au développement du volontariat dans le corps des sapeurs-pompiers, inscrite à l'ordre du jour du jeudi 11 février.

En outre, en application de l'article 65-1 du Règlement, la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur le projet de loi autorisant la ratification du traité d'Amsterdam auraient lieu le mercredi 3 mars.

Enfin, la Conférence des présidents a décidé que la séance réservée, en mars, à un ordre du jour fixé par l'Assemblée, aurait lieu le jeudi 18 mars, matin, et se poursuivrait, s'il y a lieu, le jeudi 25 mars, matin.


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QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT (suite)

TRAITEMENT DES RÉSIDUS DE BROYAGE AUTOMOBILE EN MOSELLE-EST

M. Roland Metzinger - Madame la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, j'appelle votre attention sur l'épineux problème des dépôts illégaux de résidus de broyage automobile en Moselle-Est. Ils sont situés sur le territoire de quatre communes, dans un rayon de 25 kilomètres, avec 8 000 m3 de résidus à Forbach, 13 000 m3 à Betting-lès-Saint-Avold, 3 000 m3 à Tenteling, sans oublier Sarreguemines.

Ces dépôts polluent gravement notre région depuis dix ans et présentent un danger pour la population et l'environnement, comme les récents incendies nous le rappellent. En outre, l'élimination de ces résidus présente une difficulté technique particulière en raison de leur teneur variable en polychlorobiphényle (PCB), difficulté encore accrue lorsque la teneur en PCB est supérieure à 50 mg/kg.

Dès août 1997, je vous avais soumis ce problème et votre réponse était encourageante, puisque vous m'annonciez que des solutions techniques nouvelles se dégageaient et que le dossier serait à nouveau présenté au Comité de gestion de la taxe sur l'élimination des déchets industriels spéciaux dès qu'une installation capable d'éliminer ce type de déchet serait identifiée. L'incinération des résidus de broyage automobile dans les cimenteries semblait être une hypothèse de travail mais, dans ce cas, qu'en est-il du risque d'émission de dioxine ?

Il apparaît que, depuis un an, rien ne s'est passé. Or, le 24 janvier, un incendie a ravagé en un quart d'heure un dépôt de pneumatiques dans l'enceinte d'une entreprise spécialisée dans le recyclage des pneus et, quelques jours plus tard, un feu s'est déclaré sur le site illégal de Betting qui se trouve, comme les sites illégaux de Forbach et de Tenteling, à proximité des habitations. Ils présentent donc un réel danger depuis dix ans qu'ils existent. Faute de responsables solvables, ils ont été reconnus "sites orphelins" en juillet 1993. Leur élimination revêt à présent un caractère d'urgence et j'aimerais connaître les mesures que vous prendrez à cet effet.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - C'est un très mauvais roman que l'histoire des dépôts de résidus de broyage automobile, une histoire faite d'indifférence et de cynisme et que complique encore, comme vous l'avez dit, la présence de PCB à des teneurs supérieures à 50 PPM. La défaillance des responsables de ces stockages illégaux fait que l'ADEME a été chargée de l'exécution d'office des actions nécessaires. Au début 1998, l'élimination par incinération semblait possible ; malheureusement, l'appel d'offre européen lancé par l'ADEME n'a pas permis de trouver une solution technique au problème qui se pose et nous privilégions donc maintenant l'idée d'un stockage. Une étude de faisabilité a été demandée à l'ADEME qui est chargée de consulter les professionnels. Les élus seront, bien entendu, tenus informés des résultats des démarches entreprises.

Mais le problème est beaucoup plus vaste : tous les jours, on me somme de trouver des solutions techniques urgentes à des problèmes tout aussi épineux. Parfois, on le voit, elles n'existent pas et, quand elles existent, leur prix excède largement les ressources allouées à mon ministère qui doit faire face aux conséquences de dizaines d'années d'indifférence cynique ou de méconnaissance de la réalité. Il faudra, certes, réparer les effets funestes de négligences coupables, mais il serait grand temps de privilégier la prévention, beaucoup plus efficace et beaucoup moins coûteuse. Cela implique de dépasser certains raisonnements simplistes et à courte vue qui, malheureusement, perdurent.

Pour ce qui est de l'incendie du dépôt de Betting, le seul sujet de satisfaction que nous puissions avoir est de constater que l'intervention des pompiers a permis de circonscrire le sinistre à 250 mètres carrés sur une épaisseur de deux mètres. D'autres incendies de même type ont eu lieu ailleurs en France avec des conséquences beaucoup plus désastreuses. Et, partout en France, le problème demeure.

FERMETURE DE L'USINE DU GROUPE PECHINEY AU PALAIS-SUR-VIENNE

M. Alain Rodet - Madame la ministre de l'aménagement du territoire, des éleveurs limousins que j'ai rencontrés dans le train m'ont demandé de vous dire qu'ils étaient indignés des agissements dont vous avez été la victime. Je me joins à eux pour vous exprimer notre colère.

Cela dit, la direction du groupe Pechiney a décidé de fermer l'usine de la Compagnie générale d'électrolyse du Palais-sur-Vienne, spécialisée dans le raffinage du cuivre.

En 1993 pourtant, M. Gandois s'était rendu sur ce site pour y inaugurer de nouvelles installations, d'ailleurs subventionnés par les pouvoirs publics et les collectivités territoriales.

La décision prise par son successeur suscite un grand émoi dans un bassin d'emploi déjà affecté par la moindre activité de la branche militaire de RVI à Limoges, la fermeture de sites de la Cogema et les restructurations dans l'industrie textile.

La suppression de 200 emplois sur 240 constitue donc un véritable sinistre. Pourtant, la direction du groupe semble prendre à la légère les conséquences de sa décision, se contentant de prévoir des mesures de reconversion passive et d'accompagnement, sans imaginer aucun projet industriel alternatif. En outre, la pyramide des âges est telle qu'une grande partie de ceux qui vont perdre leur emploi ont moins de cinquante ans.

Après soixante-dix ans d'exploitation industrielle, le groupe Pechiney laisserait ainsi une friche très polluée, qu'il s'agisse des sols ou des effluents.

Certes, ce groupe n'est plus une entreprise publique, mais il doit respecter ses engagements. Il est en outre dirigé par un ancien haut fonctionnaire du ministère de l'industrie. Je trouverais regrettable que celui-ci brûle ce qu'il a adoré...

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - C'est je crois la deuxième fois que vous interrogez le Gouvernement sur ce point. Mes collaborateurs vous ont reçu à plusieurs reprises, mais nous savons comme il est difficile de faire entendre la voix des élus aux entreprises.

Le ministre de l'industrie vous a indiqué que ses services allaient porter une grande attention à ce dossier.

Les services du ministère de l'emploi et de la solidarité veillent à ce que la législation sur les plans sociaux soit respectée et que les obligations de réindustrialisation imposée à l'entreprise soient remplies.

Selon l'ADEME, qui s'est interrogée sur les perspectives de reconversion du site dans le traitement des déchets, l'utilisation du four à arc de CGEP ne pourrait sauver qu'une vingtaine d'emplois.

Par ailleurs, mon ministère veille à ce que l'entreprise assume ses responsabilités en matière d'environnement : il lui a été prescrit par arrêté préfectoral, au début du mois de janvier, la réalisation d'un diagnostic initial et d'une évaluation simplifiée des risques pour les sols.

Enfin, la DATAR examinera avec la plus grande attention tous les projets émanant des entreprises ou des collectivités susceptibles de contribuer à la réindustrialisation du site. Nous aurons besoin de travailler ensemble pour sélectionner des projets adaptés aux potentialités des salariés et aux caractéristiques du site.

MAINTIEN DE SERVICES PUBLICS À ALBERTVILLE

M. Hervé Gaymard - Madame le ministre de l'aménagement du territoire, ma question concerne aussi vos collègues de l'intérieur, de l'éducation nationale et de la justice.

Je souhaite tout d'abord que vous me confirmiez le maintien du commissariat de police à Albertville, conformément au voeu des élus, toutes tendances confondues, ainsi que des forces économiques locales et des habitants.

J'appelle en outre votre attention sur le lycée d'été Jean-Moulin, qui permet aux jeunes athlètes du ski français de s'entraîner pendant l'hiver et de suivre leur scolarité l'été. Cet établissement original fonctionne bien et donne satisfaction à tous. Le ministre de la jeunesse et des sports a confirmé son maintien en avril 1997 et le conseil régional Rhône-Alpes a décidé d'y investir 20 millions pour améliorer la qualité des équipements et de l'hébergement. Je souhaite que vous me confirmiez le maintien de ce lycée, pour faire taire certaines rumeurs auxquelles je ne crois pas.

Enfin, Albertville est le siège d'un tribunal de grande instance dont le ressort s'étend jusqu'à la vallée de la Maurienne. Son activité varie avec les saisons, car nous comptons dans cette zone 370 000 lits touristiques pour une population permanente de 150 000 habitants.

Pour la durée des Jeux Olympiques, nous avions obtenu un deuxième poste de substitut, mais cette mesure a pris fin en 1992. Comparé aux autres juridictions, le tribunal de grande instance d'Albertville est pourtant celui qui a l'activité la plus considérable, et donc les délais de jugement les plus longs.

Les magistrats et les justiciables souhaitent la création d'un poste de substitut supplémentaire.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Garantir la présence et la qualité des services publics sur l'ensemble du territoire national, tel est l'engagement pris par le Gouvernement lors du CIADT du 15 décembre 1998. On retrouve ces objectifs à l'article 22 du projet d'aménagement du territoire, qui prévoit une série de mesures en ce sens : réunion de commissions départementales d'organisation et de modernisation des services publics, contrats de services publics avec les entreprises nationales, plans de localisation des emplois publics, renforcement du rôle de concertation et du pouvoir suspensif du préfet, ouverture de crédits au sein du FNADT, mobilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication, création de maisons de services publics... Je me réjouis d'ailleurs qu'un million ait été consacré en 1997 à la réalisation d'une telle maison de services publics à Albertville, dénommée "Espace économie et emploi".

S'agissant du commissariat, la lutte contre la délinquance est une priorité de notre action et il convient d'y consacrer le plus de moyens possibles. Suite à la mission Fougier sur la répartition des effectifs entre police et gendarmerie, le Gouvernement souhaite procéder à un examen au cas par cas, de façon à identifier les opérations les plus justifiées et les plus aisément réalisables. C'est dans ce cadre que sera étudiée la situation d'Albertville, dont les spécificités saisonnières seront prises en considération.

Je vous invite à ne prêter aucune attention aux rumeurs relatives au lycée d'été.

Quant au tribunal de grande instance, ses moyens ont été renforcés depuis quelques mois en raison de la judiciarisation croissante des affaires sportives.

M. Hervé Gaymard - Je vous remercie d'avoir confirmé le maintien du lycée d'été, mais je regrette qu'on ne fasse pas un effort supplémentaire en faveur du tribunal de grande instance.

PROGRAMMES DE DÉVELOPPEMENT DU MASSIF CENTRAL

M. Alain Marleix - Grâce aux plans de développement des zones rurales fragiles financés au titre de l'objectif 5B, le Massif Central a largement bénéficié des fonds européens pour se désenclaver. La seule région Auvergne a obtenu 4 milliards en quinze ans, soit l'équivalent de trois budgets régionaux. Aujourd'hui, le resserrement des zones éligibles et la réforme des fonds structurels fait peser des incertitudes sur la pérennité des aides de l'Union européenne à des régions qui restent défavorisées et sont menacées de désertification rurale. Une baisse sensible de ces transferts pénaliserait gravement l'Auvergne, mais aussi le Languedoc-Roussillon, la région Midi-Pyrénées et le Limousin.

Je comprends la volonté du Gouvernement de ne pas atomiser les aides de Bruxelles à l'intérieur des régions et surtout de ne pas laisser Bruxelles agir à sa guise. Cependant, si plus aucune partie du territoire métropolitain ne devait être éligible à l'objectif 1, il en résulterait une situation préoccupante.

Dans ces conditions, le Gouvernement devrait envisager un effort complémentaire de l'Etat, par exemple un nouveau plan Massif Central négocié avec les élus et les forces vives de ces régions.

L'Etat devrait aussi négocier avec Bruxelles un programme d'intérêt communautaire pour les zones de montagnes françaises afin de combler leur retard de développement et de réduire les disparités à l'intérieur du territoire national, ce qui est la vocation fondamentale de la construction européenne depuis 1958.

Un tel programme a, du reste, déjà été demandé par l'Association européenne des élus de la montagne et cette initiative est, semble-t-il, très activement soutenue par les gouvernements italien, autrichien et espagnol.

D'où ma double question : y aura-t-il des secteurs du territoire métropolitain éligibles à l'objectif 1 ? Dans la négative, un zonage particulier sera-t-il opéré, dan le cadre de l'objectif 2, pour les régions de montagne ?

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Le CIADT du 15 décembre 1997 a fait un effort particulier pour le Massif Central en décidant 25 mesures destinées à promouvoir un modèle de développement durable, axé sur la qualité des produits et la valorisation des espaces et des ressources locales. Ce programme, qui couvre la période 1998-1999, représente près de 550 millions de francs de concours publics dont environ 350 millions de crédits d'Etat.

Le CIADT du 15 décembre 1998 a pris acte du bon déroulement de ce plan. Les résultats serviront de base à une réflexion pour 2000-2006, conduite par le préfet d'Auvergne, en vue de l'élaboration d'une convention interrégionle "Massif Central" dans le cadre des prochains contrats de plan Etat-région.

Le Gouvernement a fait le choix d'une stratégie unique pour les contrats de plan et les documents de programmation européens. Les nouvelles aides européennes doivent pouvoir être mobilisées au service du développement et de l'emploi dans le Massif Central.

Toutefois nous allons être confrontés, comme nos partenaires, à une restriction significative du pourcentage de population éligible au futur objectif 2. Aussi devons-nous prévoir la mobilisation complémentaire de moyens adaptés aux territoires fragiles qui se trouveront privés de cette éligibilité -je pense notamment aux programmes d'initiative communautaire comme Leader et Intereg, à défaut d'un programme d'intérêt communautaire "Montagne", qui n'a pas été retenu par la Commission européenne.

La réflexion que le Gouvernement a engagée sur la réforme des différents zonages ainsi que les orientations arrêtées lors du CIADT sur le financement du volet territorial des contrats de plan visent à encourager la dynamique de projet des territoires et vont dans ce sens.

Je plaiderai également pour une répartition plus juste des sommes versées au titre de la politique agricole. Les activités agricoles dans le Massif central me paraissent en effet présenter de nombreux atouts : qualité des produits, richesse en emplois, respect de l'environnement, aménagement équilibré du territoire.

M. Alain Marleix - Je prends acte de votre réponse concernant une future convention interrégionale du grand Massif central.

Je suis nettement moins satisfait de vous voir avaliser la nouvelle politique des fonds structurels décidée par Bruxelles, car elle va pénaliser des régions françaises qui ont d'importants retards de développement.

VIDANGE DU BARRAGE DE GRANGENT DANS LA LOIRE

M. Jean-François Chossy - Madame la ministre, si les conditions météorologiques s'y prêtaient, je vous inviterais volontiers à une visite le long de la Loire : vous y découvririez une eau claire et une vie fantastique autour de ce fleuve sauvage.

Et si vous êtes toujours ministre de l'Environnement en l'an 2000, je vous inviterais à une autre visite, cette fois dans la planète du désastre. En effet, cette année-là la vidange du barrage de Grangent est prévue : 57 millions de m3 d'eau et 3 millions de m3 de boues polluées sont retenues par ce barrage. Alors si on applique la circulaire ancienne qui oblige à une vidange complète tous les dix ans pour visualiser l'ensemble du mur du barrage, le territoire situé en aval sera pollué, les poissons mourront et plusieurs villes seront privées d'eau potable, notamment Feurs, Andrézieux-Bouthéon et Saint-Just-Saint-Rambert. Pendant des années, l'eau en aval du barrage restera polluée, comme en 1967.

Or il existe maintenant des technologies efficaces qui permettent de vérifier la solidité du mur, centimètre carré par centimètre carré sans vider le barrage.

EDF a déjà réalisé de 1994 à 1996 des travaux conséquents pour conforter le barrage.

Aujourd'hui il serait possible de l'inspecter par robots, radars et caméras, ce qui éviterait le désastre écologique que j'évoquais.

Etes-vous disposée à prendre une décision en ce sens ?

M. Pascal Clément - Très bien.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement - Permettez-moi d'abord une digression. Sur les cinq questions qui m'ont été adressées aujourd'hui, trois concernent des situations désastreuses du point de vue environnemental et sanitaire dues à des décennies d'indifférence à l'égard de l'environnement. Ce genre de démonstration apporte de l'eau au moulin de la ministre de l'Environnement et je regrette que l'on ait tendance à considérer les réglementations dans ce domaine comme d'insupportables contraintes décidées par des maniaques liberticides, alors qu'il s'agit de protéger à long terme la santé des populations, l'environnement et les finances publiques.

J'en viens au barrage de Grangent, placé sous la responsabilité du Secrétariat d'Etat à l'industrie et géré par EDF. La dernière visite approfondie du barrage, réalisée en application des dispositions de la circulaire du 14 août 1970, s'est déroulée en présence de la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, les 22 avril et 4 juillet 1996, avec un abaissement partiel du plan d'eau et l'intervention de plongeurs pour l'examen des parties restées immergées.

Cette visite a confirmé le bon état de l'ouvrage, qui fait d'ailleurs l'objet de mesures régulières d'entretien. A l'issue de cette visite, le principe d'une vidange totale en l'an 2000 au plus tard, avait été retenu de façon à pouvoir effectuer une inspection plus complète de l'ouvrage.

La réalisation d'une telle vidange est cependant subordonnée à la délivrance d'une autorisation préfectorale au titre de la loi sur l'eau, qui impose une étude préalable de l'incidence de l'opération sur la ressource en eau et sur le milieu aquatique, la réalisation d'une enquête publique et la consultation du comité départemental d'hygiène du département de la Loire.

Dans cette perspective, EDF a effectué des études préliminaires approfondies, avec le concours financier de l'agence de l'eau Loire-Bretagne et de mon ministère en vue de préciser l'impact d'une vidange complète sur la qualité de l'eau et le milieu aquatique ainsi que sur les activités industrielles, le tourisme et la pêche.

Ces études ont confirmé que les sédiments de la retenue sont constitués, pour partie, de résidus miniers accumulés. La présence de métaux dans ces sédiments a été décelée mais le risque de leur diffusion dans l'eau apparaît très faible tant que le barrage reste en eau. En revanche, il existe un risque d'entraînement des sédiments vers l'aval en fin de vidange, avec de graves conséquences pour les éco-systèmes aquatiques et l'alimentation en eau potable.

C'est pourquoi il est envisagé de procéder à une visite subaquatique, avec les moyens adaptés permettant d'éviter la vidange. Le choix sera guidé à la fois par le souci de la sécurité du barrage et celui de la préservation de la qualité de l'eau et des milieux aquatiques, ainsi que les différents usages de l'eau.

Mes services veilleront à ce que la solution d'un examen sans vidange soit examinée de façon approfondie. Elle est appliquée fréquemment dans le monde, sans que la sécurité des barrages en soit amoindrie.

Le préfet de la Loire présentera prochainement à la commission locale d'information l'état d'avancement des études.

Je vous remercie d'avoir attiré notre attention sur ce dossier, qui s'inscrit dans une stratégie globale de reconquête de la qualité de l'eau de ce grand fleuve qu'est la Loire.

M. Jean-François Chossy - Avec le président Clément, nous vous remercions de partager notre préoccupation et de veiller à l'application des technologies modernes pour éviter un désastre écologique.

ACCUEIL DES ÉLÈVES DANS LES COMMUNES RURALES

M. Claude Jacquot - La question que je vais vous exposer préoccupe un certain nombre de maires des communes rurales. L'article 23 de la loi du 22 juillet 1983 dispose qu'un maire peut s'opposer à la scolarisation d'un enfant dans une autre commune si les structures d'accueil de son école sont suffisantes. Dans le cas contraire, le préfet peut autoriser la scolarisation dans une autre commune que celle de résidence.

Afin de maintenir les possibilités de scolarisation de certaines communes rurales, ne pourrait-on considérer qu'un nombre suffisant de nourrices ou gardes d'enfant agréées inscrites en mairie constitue une structure d'accueil ? Une interprétation plus extensive des textes éviterait bien des fatigues de transport à des jeunes enfants en même temps qu'elle donnerait une activité salariée à des femmes dans des petits villages et assurerait le maintien d'écoles en milieu rural.

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire - La loi du 22 juillet 1983, précisée par le décret du 12 mars 1986 et la circulaire interministérielle du 25 août 1989, a prévu des dérogations au principe de l'accord préalable du maire pour une scolarisation hors de sa commune. Aux termes de ces textes, la scolarisation d'un enfant dans une commune d'accueil peut contraindre la commune de résidence à une participation financière si cette dernière n'assure pas la restauration et la garde des enfants dont les parents travaillent.

La présence d'assistantes maternelles sur le territoire d'une commune ne suffit pas pour que celle-ci puisse se prévaloir de l'existence d'un service de garde ou de restauration.

Je vous invite toutefois à vous appuyer sur les contrats éducatifs locaux que je m'efforce de mettre en place et sur la circulaire du 17 septembre 1998, qui incite les écoles rurales à se mettre en réseau, pour donner suite à votre suggestion. Dans ce nouveau cadre, une commune comptant un nombre suffisant d'assistantes maternelles pourrait utilement faire valoir les efforts qu'elle consent pour se conformer à ses obligations. La mise en réseau et le partenariat doivent permettre aux collectivités locales de s'organiser pour éviter la disparition d'écoles rurales, car celle-ci n'est pas une fatalité.

AVENIR DES CLASSES PRÉPARATOIRES AUX GRANDES ÉCOLES

M. Philippe Douste-Blazy - Les classes préparatoires occupent une place particulière dans le système éducatif français, dont elle sont le pôle d'excellence démocratique. Des professeurs agrégés, sélectionnés par l'Inspection générale, garantissent la qualité de cet enseignement, laquelle est sanctionnée chaque année par les résultats aux concours ainsi que par la réussite universitaire des étudiants qui n'intègrent pas. Or l'inquiétude gagne aujourd'hui ces professeurs -qui ont déjà vu remettre en cause la rémunération de leurs heures supplémentaires- ainsi que les étudiants des classes préparatoires.

En effet, la réflexion en cours sur les passerelles à établir entre universités et grandes écoles leur fait craindre une dénaturation du principe des concours, via une modification des épreuves. Les professeurs de classe préparatoire qui forment avec les professeurs d'université l'armature de l'enseignement supérieur français craignent également la remise en cause de leur situation statutaire et indemnitaire. Quelles réponses leur apportez-vous ?

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire - M. Claude Allègre, retenu à Milan par une réunion des ministres de la recherche, m'a prié de vous faire la réponse suivante.

Les classes préparatoires aux grandes écoles constituent un élément essentiel et original de l'enseignement supérieur français. Il n'est donc pas question de leur porter atteinte et aucune réforme les concernant n'est à l'ordre du jour -d'autant que leurs programmes et leur organisation ont déjà été profondément remaniés en 1995. Il n'est pas non plus envisagé de les transférer dans les universités. Leur articulation avec celles-ci n'en constitue pas moins une réalité non négligeable.

D'abord parce que les élèves des classes préparatoires n'intègrent pas tous les grandes écoles. Dans les filières littéraires, par exemple, seulement 5 % des élèves sont admis dans les grandes écoles, les autres poursuivant en général leurs études à l'université. Cette voie est réglementée par le décret du 23 novembre 1994 qui prévoit la validation des acquis des étudiants de classes préparatoires.

Cette articulation est également visible dans le contenu même des enseignements universitaires. En effet, beaucoup d'étudiants de premier cycle reçoivent un enseignement renforcé dans le cadre de programmes de concours d'accès aux grandes écoles réservés aux titulaires de Diplômes d'Etudes Universitaires Générales. D'autre part, des titulaires de DEUG n'ayant pas forcément bénéficié de cet enseignement renforcé peuvent être admis sur dossier, dans certaines grandes écoles.

Toutefois, l'existence de ces passerelles ne remet pas en cause la spécificité des classes préparatoires.

Il n'est pas davantage envisagé de modifier le statut des professeurs de classes préparatoires : ils restent donc soumis aux dispositions statutaires de leurs corps respectifs. Mais le décret du 30 juillet 1998 a ajusté, comme cela avait été annoncé lors du débat budgétaire à l'Assemblée nationale en novembre 1997, la rémunération des heures supplémentaires à la durée réelle de l'année scolaire, soit 36 semaines et a réévalué de 6,2 % le taux des heures supplémentaires effectives dès la rentrée scolaire de 1998.

L'économie ainsi réalisée permet de financer une partie de la rémunération des aides éducateurs dont bénéficient les établissements scolaires. Le Gouvernement s'efforce, comme vous le voyez, de répartir au mieux les crédits publics.

TRANSPORT DE PRODUITS ALIMENTAIRES FRAIS EN BACS PLASTIQUE

M. Antoine Carré - L'usage des bacs plastique se généralise pour le transport de certains aliments frais -produits de la mer, viandes, fruits et légumes. Outre que cette mode du "tout plastique" porte atteinte à la filière bois, elle peut présenter certains inconvénients sanitaires, surtout si les bacs sont mal rincés ou mal séchés. Existe-t-il des règles relatives au lavage des bacs et, dans l'affirmative, comment contrôle-t-on qu'elles sont respectées ? J'aimerais d'autre part savoir si l'utilisation de granulats de plastiques recyclés -susceptibles de présenter une concentration de métaux lourds- est ou non autorisée. Si oui, leur innocuité est-elle garantie et contrôlée ?

Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire - Mme Lebranchu, bloquée à Brest par le brouillard, m'a priée de vous faire la réponse suivante.

Concernant les matières plastiques, l'arrêté du 14 septembre 1992 modifié indique les constituants autorisés et les restrictions d'emplois dont certains font l'objet.

Les matières plastiques destinées à entrer au contact des aliments doivent être conformes à ce texte, qu'elles comportent ou non des matières recyclées. Le Conseil supérieur d'hygiène publique de France s'est opposé, le 7 septembre 1993, "à l'utilisation au contact des aliments, de matériaux recyclés ne présentant pas les mêmes garanties que celles du matériau vierge auquel ils pourraient se substituer". Il a invité en outre les milieux professionnels à définir les règles permettant d'apporter l'assurance que l'utilisation, au contact des aliments, de matériaux recyclés sera strictement limitée aux seuls usages apportant des garanties identiques à celles des matériaux vierges correspondants". Le 12 mars 1996, il a recommandé qu'une demande d'autorisation préalable de mise sur le marché soit effectuée, procédé par procédé, afin de vérifier la qualité des matériaux recyclés issus de ces procédés.

Quelques dossiers ont déjà été soumis pour avis au CSHPF sur ce sujet, mais aucun ne concernait les granulats de matière plastique recyclée. En conséquence, les bacs dont vous me parlez ne peuvent être constitués que de matière plastique vierge, dont l'innocuité est assurée par les textes en vigueur. Les fabricants ou les responsables de la première mise sur le marché sont tenus de vérifier leur conformité à ces dispositions et des contrôles sont effectués par les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Prochaine séance cet après-midi à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 45.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


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ANNEXE


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ORDRE DU JOUR

M. le Président - L'ordre du jour des séances que l'Assemblée tiendra jusqu'au 4 mars 1999 inclus a été fixé ce matin en Conférence des présidents :

CET APRÈS-MIDI, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

    - explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire ;

    - suite du projet relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale.

MERCREDI 10 FÉVRIER, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

    - suite du projet relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale.

JEUDI 11 FÉVRIER, à 9 heures :

    - proposition de loi de M. Laurent Fabius et plusieurs de ses collègues tendant à la création de délégations parlementaires aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes ;

(séance mensuelle réservée à un ordre du jour fixé par l'Assemblée, en application de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution)

à 15 heures et à 21 heures :

    - texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi organique relatif à la Nouvelle-Calédonie et texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la Nouvelle-Calédonie,

ces deux textes donnant lieu à une discussion générale commune ;

    - suite du projet relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale ;

    - proposition, adoptée par le Sénat, relative au développement du volontariat dans le corps des sapeurs-pompiers,

ce texte faisant l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

MARDI 16 FÉVRIER, à 10 heures 30 :

    - questions orales sans débat ;

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

    - deuxième lecture du projet de loi constitutionnelle relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes ;

    - projet relatif à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.

MERCREDI 17 FÉVRIER, à 9 heures :

    - déclaration du Gouvernement sur l'avenir du secteur bancaire et financier et débat sur cette déclaration ;

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

    - suite du projet relatif à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.

JEUDI 18 FÉVRIER, à 9 heures :

    - éventuellement, suite de la proposition de loi de M. Laurent Fabius et plusieurs de ses collègues tendant à la création de délégations parlementaires aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes ;

    - proposition de loi de Mme Taubira-Delannon et plusieurs de ses collègues tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crimes contre l'humanité ;

(ordre du jour complémentaire)

à 15 heures et à 21 heures :

    - suite du projet relatif à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.

MARDI 2 MARS, à 10 heures 30 :

    - questions orales sans débat ;

à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

    - projet autorisant la ratification du traité d'Amsterdam.

MERCREDI 3 MARS, à 15 heures, après les questions au Gouvernement, et à 21 heures :

    - explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi autorisant la ratification du traité d'Amsterdam ;

    - texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage ;

    - deuxième lecture du projet de loi organique relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux et du projet de loi relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux,

ces deux textes donnant lieu à une discussion générale commune.

JEUDI 4 MARS, à 9 heures :

    - proposition de résolution tendant à créer une commission d'enquête sur le régime étudiant de Sécurité sociale ;

à 15 heures et 21 heures :

    - suite de la deuxième lecture du projet de loi organique relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux et du projet de loi relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux.


© Assemblée nationale


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