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Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 63ème jour de séance, 160ème séance

2ème SÉANCE DU JEUDI 11 FÉVRIER 1999

PRÉSIDENCE DE M. François d'AUBERT

vice-président

          SOMMAIRE :

NOUVELLE-CALÉDONIE (CMP) 1

SAPEURS-POMPIERS (procédure d'examen simplifiée) 11

COOPÉRATION INTERCOMMUNALE (suite) 14

    ART. 51 14

    ART. 6 (précédemment réservé) 23

    ART. 47 (précédemment réservé) 23

    ART. 48 (précédemment réservé) 24

    ART. 49 (précédemment réservé) 24

    ART. 50 (précédemment réservé) 24

    APRÈS L'ART. 50 (amendements précédemment réservés) 26

    APRÈS L'ART. 51 26

La séance est ouverte à quinze heures.


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NOUVELLE-CALÉDONIE (CMP)

M. le Président - J'ai reçu de M. le Premier ministre les lettres par lesquelles il soumet à l'approbation de l'Assemblée nationale les textes des commissions mixtes paritaires sur les deux projets de loi relatifs à la Nouvelle-Calédonie.

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion des textes des CMP sur le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire relatifs à la Nouvelle-Calédonie.

M. le Président - La Conférence des présidents a décidé que ces deux textes donneraient lieu à une discussion générale commune.

M. René Dosière, rapporteur des CMP - L'esprit de Nouméa ayant soufflé sur le Palais-Bourbon où se sont tenues les deux commissions mixtes paritaires, nous sommes parvenus à un accord. En ces temps de relative tension entre l'Assemblée nationale et le Sénat, qui s'est manifestée notamment à propos des projets de loi relatifs au cumul des mandats, à la parité hommes-femmes et à la réforme du mode de scrutin, ce fait rare mérite d'être souligné.

Cet accord traduit l'adhésion des forces politiques nationales au processus ouvert par les accords de Nouméa, déjà constatée lors de la révision constitutionnelle. Cette adhésion s'appuie elle-même sur l'existence d'un consensus local -les trois quarts des suffrages exprimés lors de la consultation du 8 novembre dernier- et, d'une certaine manière, le renforce. Sa rupture aurait assurément des répercussions nationales.

Son maintien impose, dans les décisions qui seront prises en Nouvelle-Calédonie, de prendre en compte la dimension essentielle des accords de Nouméa, à savoir la volonté exprimée par l'ensemble des forces néo-calédoniennes de construire, ensemble, un destin commun. Il serait profondément regrettable que des considérations de politique locale l'emportent sur cet aspect majeur du processus engagé et qui va se poursuivre avec l'application de ces deux lois.

Il s'agit d'un succès pour le Premier ministre et pour vous-même, Monsieur le secrétaire d'Etat, qui avez beaucoup travaillé à l'élaboration de ces textes. En vérité, le dossier de la Nouvelle-Calédonie progresse davantage lorsque la gauche est au pouvoir : nous l'avions constaté en 1988 avec les accords de Matignon et cela s'est confirmé l'an passé. Cela résulte aussi, il est vrai, de la capacité de Jacques Lafleur à surmonter les clivages partisans et à rassembler derrière lui, non sans difficultés, une grande majorité de la population européenne sur un chemin sans alternative, n'en déplaise aux nostalgiques de l'ère coloniale. Le préambule des accords de Nouméa, texte admirable, devrait figurer au programme d'instruction civique de tous les établissements scolaires de Nouvelle-Calédonie.

M. Dominique Bussereau - Il ne faut pas exagérer !

M. le Rapporteur - L'émancipation du territoire est en cours avec une souveraineté partagée entre la France et les populations calédoniennes dans les quinze années à venir. Au terme de ce processus, il appartiendra aux Calédoniens de se prononcer sur l'accès à l'indépendance pleine et entière.

Le débat parlementaire a été particulièrement utile. L'Assemblée nationale a consacré 7 heures 53 minutes à l'examen de ces textes, le Sénat 6 heures 50. 547 amendements ont été déposés, 422 adoptés. Les deux textes, qui comportaient à l'origine 244 articles, en comptent désormais 268. Nous avons quelque peu dérogé aux pratiques habituelles et j'ai, très tôt, travaillé en étroite collaboration avec le rapporteur du Sénat, M. Hyest. Dans cette construction d'un édifice commun, chacun a apporté sa pierre, les fondations étant plutôt l'oeuvre de l'Assemblée et les finitions celle du Sénat, qui disposait de plus de temps. Je tiens à souligner la part active qu'ont prise à ce travail les parlementaires de la Nouvelle-Calédonie, en particulier M. Frogier. Je saisis l'occasion pour dire tout l'intérêt que présenterait une représentation plus diversifiée de ce territoire.

Sur le "noyau dur" des accords de Nouméa, nous ne pouvions qu'intervenir à la marge. Nous avons cependant levé les ambiguïtés qui pouvaient subsister.

Le corps électoral des assemblées de province et du congrès sera constitué de ceux qui étaient inscrits sur la liste électorale de la consultation du 8 novembre 1998 et de ceux qui, inscrits sur le tableau annexe à cette date, atteindront l'âge de la majorité électorale et rempliront progressivement la condition de séjour de dix ans.

Les modalités retenues pour les consultations sur l'accession à la souveraineté sont conformes à l'accord intervenu entre les parties : automaticité de la première consultation, qui devra intervenir au plus tôt en 2014 et au plus tard en 2019, organisation de la deuxième dans les 24 mois. En cas de réponse négative à cette dernière, le comité des signataires de l'accord de Nouméa se réunira avant que ne soit organisée une troisième consultation. Attitude sage et réaliste.

S'agissant de la protection de l'emploi local, nous avons réécrit le texte de façon qu'il corresponde exactement à l'accord de Nouméa. Les mesures restrictives, adoptées par le Congrès et soumises à l'avis du Conseil constitutionnel, visent à promouvoir l'emploi local au bénéfice des citoyens de Nouvelle-Calédonie, c'est-à-dire ceux qui ont le droit de vote aux élections provinciales.

En ce qui concerne les lois de pays, nous avons précisé que le Conseil d'Etat, et non pas le tribunal administratif, devrait rendre un avis préalable. Chaque loi de pays devra par ailleurs faire l'objet d'un rapport écrit et les débats seront publiés intégralement au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie. Afin d'éviter les saisines inutiles, nous avons prévu que ne seraient déférées que les lois ayant suscité une deuxième délibération.

Des compétences transférées, de façon irréversible, rappelons-le, nous avons ôté le contrôle budgétaire, considérant que l'Etat ne pouvait l'abandonner qu'en cas d'accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté. Pour l'heure, la France doit conserver un contrôle sur les 4,5 milliards qu'elle verse aux diverses collectivités néo-calédoniennes. Nous avons précisé que la Chambre territoriale des comptes devrait se consacrer entièrement à la Nouvelle-Calédonie et ne plus s'occuper de la Polynésie -située à plus de six mille kilomètres de Nouméa !

Pour le reste, nous avons complété le texte du Gouvernement sur plusieurs points. Nous avons supprimé la disposition qui limitait aux listes ayant des élus dans deux provinces la capacité de participer au gouvernement. Nous avons prévu la possibilité, pour les élus, de créer des commissions d'enquête, de poser des questions orales. Nous avons également abaissé à onze le nombre d'élus du congrès nécessaire pour demander une nouvelle délibération sur une loi du pays. Nous avons prévu la possibilité du vote d'une motion de renvoi, d'ailleurs acceptée sans enthousiasme par le Sénat.

Nous avons étendu à tous les élus néo-calédoniens le régime qui s'applique aux élus de métropole : incompatibilités des mandats avec d'autres fonctions, plafonnement des indemnités -nouveauté en Nouvelle-Calédonie-, déclaration de patrimoine en début de mandat.

Si une part importante des pouvoirs du haut-commissaire sera transférée au gouvernement local, son rôle ne sera pas pour autant diminué. Il occupe une place stratégique dans les divers comités et conseils, et jouera un rôle déterminant dans l'élaboration du schéma de développement et d'aménagement, ainsi que dans le contrôle de légalité. Il est heureux que le personnel qui travaille avec lui soit enfin intégré dans la fonction publique d'Etat.

Les procédures de contrôle de l'argent public ont été renforcées, et nous avons veillé à préserver les dispositions qui affirment l'identité kanak.

La priorité doit aller au développement économique et au rééquilibrage entre les provinces. Ce sera la fonction du schéma de développement et d'aménagement, qui associera l'ensemble des collectivités, en particulier les communes.

Pour participer à ce développement, les collectivités disposeront de moyens nouveaux, car le soutien de l'emploi local passe d'abord par la création de richesses.

Une nouvelle page de la présence française en Nouvelle-Calédonie va s'ouvrir. Est-elle transposable ailleurs ? Je n'en suis pas sûr, en raison de ses caractères spécifiques, en particulier un fort consensus local et une absence de corruption des élus et de la société par l'argent public.

L'Assemblée devra ne pas se désintéresser de la Nouvelle-Calédonie. La commission des lois s'efforcera de suivre le déroulement du processus.

Le Parlement a construit un cadre.

Aux responsables politiques, administratifs et économiques de faire surgir cette Calédonie nouvelle que nous appelons de nos voeux (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer - Je remercie la commission mixte paritaire, qui a su élaborer un texte de grande qualité dans un esprit de consensus.

Comme l'avait souhaité le Premier ministre lors de la réunion du Congrès, le Gouvernement et le Parlement ont veillé à appliquer l'accord de Nouméa totalement et loyalement.

Ces deux textes constituent le nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie, qui va cesser d'être un territoire d'outre-mer au sens du titre XII et de l'article 74 de la Constitution pour devenir la Nouvelle-Calédonie, collectivité particulière au sens du titre XIII nouveau et de l'article 77 nouveau de la Constitution. Soulignons l'originalité de cette construction juridique.

D'abord, la pleine reconnaissance de l'identité kanak conduit à préciser le statut civil coutumier ainsi que ses rapports avec le statut civil de droit commun, sur une base d'égale dignité.

Ce statut renouvelé est le prolongement du statut personnel de l'article 75 de la Constitution.

Ensuite, la définition de nouvelles compétences de la Nouvelle-Calédonie se traduit par d'importants transferts de l'Etat, à l'exception des pouvoirs régaliens.

La compétence de droit commun restant dévolue aux provinces, l'Etat et la Nouvelle-Calédonie disposeront des compétences d'attribution énumérées par la loi organique.

Les transferts de compétences seront progressifs et irréversibles. L'Etat compensera intégralement les charges correspondantes.

Certains transferts auront lieu dès le 1er janvier 2000. D'autres le seront en fonction du choix du Congrès, entre 2004 et 2014. Certaines compétences feront l'objet d'un dialogue entre l'Etat et la Nouvelle-Calédonie ou seront exercées en association, comme les relations extérieures dans le Pacifique.

Le projet de loi organique donne compétence au Congrès pour l'accès à l'emploi des citoyens de la Nouvelle-Calédonie et des personnes justifiant d'une durée suffisante de résidence. Cet article 23, dont le Parlement a amélioré la rédaction, est l'un des éléments essentiels de l'accord de Nouméa, qui ont nécessité la révision constitutionnelle. En conséquence, la loi organique détermine le cadre à l'intérieur duquel "la Nouvelle-Calédonie mettra en place, en liaison avec l'Etat, des mesures destinées à offrir des garanties particulières pour le droit à l'emploi de ses habitants". Il s'agit de promouvoir l'emploi local, au bénéfice des citoyens de la Nouvelle-Calédonie et des personnes justifiant d'une durée suffisante de résidence. Cette durée pourra varier selon les emplois concernés.

Le Congrès décidera au cas par cas sous le contrôle du juge constitutionnel.

Le dispositif s'accompagnera d'une révision des dispositions du traité de l'Union européenne relatives à la Nouvelle-Calédonie. Des discussions sont en cours à Bruxelles.

La loi organique introduit une nouvelle norme juridique, "les lois du pays", votées par le Congrès, leur champ sera limité à des domaines essentiels de l'activité normative du Congrès. Les projets et propositions de loi du pays seront soumis à l'avis du Conseil d'Etat.

Ces textes pourront, avant leur promulgation, être soumis à une seconde lecture, puis au contrôle du Conseil constitutionnel.

L'exécutif, assuré depuis 1988 par le haut-commissaire, sera transféré à un gouvernement élu au scrutin de liste à la représentation proportionnelle par le Congrès.

La responsabilité du gouvernement pourra être mise en cause par le Congrès par le vote d'une motion de censure.

Le haut-commissaire assistera de plein droit aux réunions du gouvernement.

Le régime électoral pour les élections aux assemblées de province et donc au Congrès est un autre point clé de l'accord de Nouméa.

Aux termes de l'article 177, participent à l'élection des assemblées de province les personnes qui remplissaient les conditions pour voter lors de la consultation du 8 novembre 1998 et celles qui, inscrites au tableau annexe au 8 novembre 1998, auront au jour du scrutin provincial rempli la condition de dix ans de résidence, ainsi que les jeunes majeurs dont l'un des parents remplissait l'une ou l'autre condition et résidant eux-mêmes en Nouvelle-Calédonie depuis dix ans.

A mesure qu'elles rempliront la condition de résidence entre 1998 et 2008, ces personnes pourront voter à l'élection aux assemblées de province.

Ce point a fait l'objet de négociations longues et difficiles. La rédaction de l'article 177 est la seule qui soit exactement cohérente avec l'accord, et respecte ainsi la volonté du législateur constituant.

Ainsi est créée la citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie, qui s'applique à un seul autre domaine, l'accès à l'emploi.

Les prochaines élections aux assemblées de province et au Congrès devraient avoir lieu en mai prochain.

La consultation sur l'accession à la pleine souveraineté sera organisée soit au cours du mandat du Congrès qui commencera en 2014 et par délibération du Congrès, soit au terme de ce mandat, en 2019, et par l'Etat.

Les modalités d'organisation de cette consultation sont précisées par la loi organique.

L'accord de Nouméa rend possibles trois consultations successives pour l'accès à la pleine souveraineté. Il vous a été proposé qu'avant la troisième consultation qui devient éventuelle, le comité des signataires responsable du suivi de l'accord se réunisse.

Pour participer à cette consultation, l'électeur devra justifier de vingt ans de résidence.

Tels sont, à grands traits, les éléments juridiques du texte que les deux assemblées ont notablement contribué à conforter. Mais je tiens ici à saluer un autre apport, Monsieur Brial : d'ici à mars 2000, grâce à l'esprit constructif qui a présidé aux discussions entre les deux territoires, un accord sera signé entre la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna en vue de garantir leurs relations.

D'autre part, l'Etat s'est engagé à favoriser le développement économique de la Nouvelle-Calédonie. Ce sera l'objet des contrats pluriannuels passés entre l'Etat, la Nouvelle-Calédonie et ses provinces. De ce point de vue, je suis heureux de saluer également l'accord intervenu aujourd'hui même sur les modalités selon lesquelles le territoire entrera dans le capital de la SLN et d'ERAMET. Le nickel est la principale richesse naturelle de l'île. Il y a un an, l'accord de Bercy permettait l'échange de massifs miniers et créait les conditions nécessaires à la construction d'une deuxième usine de transformation dans le nord de l'île. Un projet évoqué depuis plus de trente ans pourra ainsi devenir réalité. C'est dans le même esprit que le Gouvernement a voulu que les Calédoniens soient présents au sein de la SLN et d'ERAMET. La première est aujourd'hui encore la seule entreprise métallurgique et le premier employeur privé. Son capital est détenu à 90 % par ERAMET, elle-même majoritairement contrôlée par l'ERAP, établissement public d'Etat. Une structure publique créée à cet effet par les trois provinces va donc recevoir 30 % du capital de la SLN et 8 % environ de celui d'ERAMET, après restructuration. Cette mesure est conforme à la démarche qui a présidé à l'accord de Nouméa : l'émancipation économique va de pair avec l'évolution politique. Grâce à ce juste retour de ses richesses à la Nouvelle-Calédonie, celle-ci pourra intervenir dans les décisions qui concernent sa propre économie. Cette entrée dans le capital est par ailleurs cohérente avec la stratégie d'un groupe qui cherche à conforter son assise industrielle et à améliorer sa position internationale.

En matière économique comme dans le domaine institutionnel, l'Etat a donc tenu parole.

M. le Rapporteur - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - L'accord de Nouméa qui, le 5 mai 1998, a jeté les bases d'un partage des responsabilités, était le fruit de concessions équilibrées de part et d'autre. La population calédonienne a largement approuvé cette démarche. Tout au long de l'année qui vient de s'écouler, les Calédoniens ont su rapprocher leurs points de vue sans renier leurs convictions, inventant avec le concours de la République des voies communes. Dans un monde marqué par des conflits dramatiques, il faut saluer l'intelligence politique d'une telle démarche.

Le Parlement a pleinement joué son rôle dans celle-ci, par les missions, auditions et débats qui ont jalonné la discussion des projets de loi.

Chacun a accepté de modifier le regard qu'il porte sur l'autre et désormais, les fondations sont là. Aux Calédoniens de continuer la construction et de la rendre solide. La République continuera d'être à leurs côtés pour les aider à réaliser cet avenir partagé (Applaudissements sur tous les bancs).

M. Pierre Frogier - Lorsque ces deux lois entreront en vigueur, près d'une année se sera écoulée depuis l'accord de Nouméa. Entre les accords de Matignon et la loi référendaire de novembre 1988, il ne s'était écoulé que cinq mois. Il est vrai qu'il s'agissait alors de trouver une solution institutionnelle qui s'apparentait à une trêve, après des années de déchirement. Cette fois, la méthode adoptée a consisté, après la conclusion d'un accord politique, à modifier la Constitution, puis à soumettre cet accord par référendum à la population de la Nouvelle-Calédonie, avant de le traduire dans deux lois. Cette méthode illustrait la détermination qui animait les plus hautes autorités de l'Etat comme le Parlement d'associer étroitement les Calédoniens à la définition des institutions qui seront les leurs au cours des vingt prochaines années, tout en faisant preuve d'imagination juridique pour adapter le droit à la volonté politique.

En cet instant, je tiens à saluer la compréhension dont a fait preuve le Gouvernement et son souci de trouver des solutions équilibrées, conformes à l'esprit et à la lettre de l'accord de Nouméa. Je veux également, en mon nom et au nom de M. Lafleur, souligner la qualité des travaux de la commission et remercier sa présidente et son rapporteur pour la disponibilité totale dont ils ont fait preuve, et pour l'attention qu'ils ont portée à toutes les sensibilités. Monsieur Dosière, vous semblez regretter que la représentation parlementaire soit ce qu'elle est aujourd'hui (Sourires) : nous n'y pouvons rien et cela ne change rien à la volonté de la grande majorité des Calédoniens.

Ainsi, les élections aux assemblées des provinces et au Congrès devraient se tenir dès le début de mai. J'ai noté que le secrétaire d'Etat n'en avait dit mot mais qu'il sache que tel est le voeu d'une large majorité en Nouvelle-Calédonie. Il importe en effet de traduire au plus vite dans les faits l'accord approuvé massivement le 8 novembre. La balle sera alors dans le camp de mes compatriotes : ils ne devront pas se tromper sur le choix des élus auxquels confier les nouvelles institutions, qui doivent permettre à la Nouvelle-Calédonie de s'émanciper au sein de la République pour devenir actrice de son propre destin.

Quant aux jeunes qui, dans vingt ans, auront à définir les liens qu'ils voudront conserver avec la France, je les appelle à apprendre à mieux partager, à se montrer solidaires : c'est ainsi seulement que ce contrat d'amitié, que ce pacte de réconciliation qu'est l'accord de Nouméa prendra tout son sens et que sera scellé à jamais le destin commun de la France et de la Nouvelle-Calédonie.

Depuis plus de dix ans, l'Assemblée nationale s'est montrée attentive à l'évolution de la Nouvelle-Calédonie, oeuvrant à une paix et à une fraternité durables en surmontant les clivages politiques. Je souhaite que cette attention ne se relâche pas, que vous continuiez de nous accompagner sur notre chemin et, pourquoi pas, que vous nous rendiez visite dans ce lointain territoire français où nous serons heureux de vous témoigner notre gratitude et notre affection. (Applaudissements sur tous les bancs)

M. Michel Vaxès - Ne pouvant être présent cet après-midi, Jacques Brunhes, qui suit la question de la Nouvelle-Calédonie pour notre groupe, m'a demandé de vous faire part de nos conclusions, ce que je fais volontiers compte tenu de l'importance de ce dossier.

Il y a dix ans, avec les accords de Matignon qui mettaient fin à une situation proche de la guerre civile, commençait un long processus. Il a mené, le 5 mai dernier, à la signature de l'accord de Nouméa, approuvé par toutes les forces politiques importantes du territoire et de la métropole : une nouvelle étape s'ouvrait pour la Nouvelle-Calédonie. En effet, tel qu'il a été transcrit dans la loi par le Congrès du 6 juillet dernier, cet accord accompagne pour la première fois un territoire national et ses habitants sur le chemin d'une décolonisation pacifique.

A présent, après le référendum approuvé à 72 %, par les Calédoniens, il reste à conclure la discussion du projet de loi organique. Nous nous félicitons très vivement que la navette ait abouti à un texte "conforme", y voyant le signe qu'aucune des deux Assemblées n'a voulu rompre ou altérer le fragile équilibre défini par les diverses composantes du territoire et par l'Etat. Le mouvement est donc engagé pour que la Nouvelle-Calédonie maîtrise son destin, dans la fidélité à l'objectif commun fixé il y a dix ans, du rééquilibrage entre ses communautés et ses régions. Beaucoup dépendra de la volonté des populations de s'emparer de la fameuse idée d'un destin partagé, que rappellent les accords de Nouméa. Nous n'avons pas la naïveté de penser que ce cheminement se fera sans confrontations d'idées, sans batailles politiques, mais c'est l'expression même de la démocratie. En ce sens, les prochaines élections aux assemblées de province et au Congrès seront un passage important pour l'avenir de la Nouvelle-Calédonie. L'accompagnement de l'Etat et de son gouvernement sera également primordial, il leur faudra veiller attentivement au respect des accords.

La commission mixte paritaire, par son vote conforme, permet la poursuite d'une expérience exceptionnelle de décolonisation pacifique, dont nous espérons tous qu'elle ira jusqu'à son terme. Le groupe communiste, qui votera avec une grande satisfaction cette loi organique, assure le Gouvernement et les signataires de l'accord de sa vigilance active pour que soient respectés les engagements pris communément (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste).

M. Dominique Bussereau - Je me réjouis, comme l'ensemble du groupe DL, qu'un consensus ait été trouvé lors des travaux de la CMP. Je dirai toutefois avec cordialité à notre rapporteur -qui s'est beaucoup investi sur ce dossier, ce dont M. Frogier l'a félicité avec raison- que sa relation de l'histoire calédonienne récente était peut-être un peu iréniste. Je ferai aussi observer au groupe socialiste qu'il ne faut pas trop encenser le Sénat d'un côté, et de l'autre, comme je l'ai entendu faire en commission des lois, lui décocher des flèches quand il n'est pas d'accord avec l'Assemblée...

Quoi qu'il en soit, il est bon que la CMP ait abouti à cet accord. L'histoire récente de la Nouvelle-Calédonie peut se diviser en plusieurs phases. Pendant le septennat de Valéry Giscard d'Estaing, la situation n'était pas parfaite, mais le territoire connaissait la paix civile. Il a dérivé après 1981, pour des raisons quelque peu idéologiques et à la suite de promesses faites pendant la campagne présidentielle, et connu des épisodes de guerre civile. Sous la première cohabitation deux nouveaux statuts -dont j'étais le rapporteur- ont été votés, mais je dois avouer qu'ils n'ont rien réglé, même si la paix civile a été brièvement renforcée. Après les terribles événements qui ont précédé les élections de 1988, il a fallu la volonté politique du Premier ministre d'alors, auquel il faut rendre hommage, et l'engagement personnel de Jacques Lafleur et de Jean-Marie Djibaou pour que s'engage le processus des accords de Matignon, et que s'établisse à nouveau une longue période de paix civile. Celle-ci n'a été possible que parce que l'Etat, sous les gouvernements successifs, avant et après 1993, a tenu ses engagements financiers : ce qui a été fait sur le territoire en termes de routes, d'hôpitaux, de lycées et de collèges pourrait rendre envieux nombre de nos départements. L'Etat a tenu parole, et nous devons tous nous en réjouir, ce qui a permis de rattraper d'importants retards d'équipement.

Puis une nouvelle alternance a eu lieu. Sous le gouvernement actuel s'est engagé le processus conduisant aux accords du 5 mai et à ces deux projets de loi. Le groupe Démocratie libérale accepte entièrement l'état d'esprit qui caractérise ces accords. Nous faisons confiance à Jacques Lafleur et à toutes les forces politiques du territoire pour jouer le jeu démocratique, même si nous avons formulé certaines interrogations. Ainsi nombre d'entre nous, dont je suis, ne sauraient approuver certaines phrases du préambule. Je ne suivrai pas notre rapporteur pour en faire un texte d'apprentissage de la morale républicaine pour les enfants des écoles, et je n'approuve pas cette dimension de repentance, à la mode. J'admets toutefois que ce préambule était nécessaire.

Deux autres points nous conduisent à nous interroger. A l'heure où le débat sur la préférence nationale prend en métropole des aspects désagréables, l'organisation d'une préférence calédonienne pose problème. Nous comprenons cependant que cet élément a dû être mis dans le "pot" des accords. De même -comme l'ont dit notre président José Rossi au Congrès et Gilbert Gantier avant Noël- les dispositions relatives au corps électoral ne nous satisfont pas pleinement. Il s'agit d'une mesure "a-normale". Mais là encore nous admettons que cela fait partie de la négociation

Ces réserves étant exprimées, notre groupe votera les deux projets. Je souhaite simplement appeler l'attention sur la suite des événements. On a évoqué l'accord sur le capital de la SNL, qui constitue une évolution intéressante pour l'économie calédonienne. Mais des interrogations subsistent. L'évolution des cours du nickel n'est pas celle que nous pourrions souhaiter ; or beaucoup en dépendra pour la santé économique de la Nouvelle-Calédonie. Sur le plan politique, il importera de voir comment se déroule la campagne des élections provinciales. Car si l'accord a été ratifié à une large majorité, le score du non a été important à Nouméa. Il faut donc que ce soit une campagne où l'on se rassemble. Or une campagne électorale, par nature, est plutôt un moment où chacun fait entendre sa petite musique : on le voit même dans les majorités plurielles (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) -comme d'ailleurs dans les oppositions plurielles... Il faut que la campagne respecte l'esprit des accords, et que la légitime compétition électorale ne remette pas en cause l'unanimité qui nous rassemble aujourd'hui.

Enfin, dès lors que vous faites évoluer le statut de la Nouvelle-Calédonie, d'autres évolutions devront être envisagées dans l'Outre-mer français. La demande est forte à cet égard en Polynésie, comme a pu le constater la mission de notre commission des lois. Une évolution du statut des communes est également nécessaire. Nous attendons des avancées sur le statut mahorais. Enfin Wallis-et-Futuna ne sauraient rester à l'écart de ce mouvement.

J'ai rappelé nos réserves. Mais l'intérêt national, et surtout l'intérêt du peuple de Nouvelle-Calédonie doivent primer. C'est en pensant à nos amis de là-bas, de toutes les races, que le groupe DL votera la loi organique et la loi ordinaire (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe socialiste).

M. Bernard Grasset - La CMP a fait un bon travail. Elle a su rapprocher les points de vue des deux assemblées, qui du reste étaient peu éloignés. Disons donc que le Sénat a naguère fait oeuvre utile par les précisions et les développements qu'il apportés. Nous sommes devant deux bons projets. Sans les accords de Matignon, nous n'en serions pas là. Nous sommes un certain nombre à avoir porté ce projet, à avoir su persuader les hésitants. La grande pirogue de la paix et du développement est enfin construite : nous la verrons partir sur l'Océan avec la nostalgie des vieux pêcheurs qui restent à quai. Et, selon la coutume océanienne, le navire sera accompagné de tous ceux qui, depuis dix ans, depuis cent ans, ont lutté pour une solution pacifique. Nul ne sera désormais immigré sur sa propre terre.

Mais sans un réel consensus, sans une action constante, les lois ne changent pas le cours des choses ; elles sont nécessaires, non suffisantes. La route est encore longue pour les Kanaks, pour qui leur organisation traditionnelle -malgré sa richesse, qui leur a permis de résister au désespoir- est un handicap. En une génération il leur faut assimiler des mutations qui nous ont demandé des siècles, avec d'ailleurs des résultats contrastés. Le monde occidental n'offre pas forcément les meilleures réponses en matière de consommation. Urbanisation, salariat, infrastructures lourdes, propagation effrénée des médias jusque dans les plus lointaines tribus ne peuvent que bouleverser les modes de vie et de pensée. Certains craignent, d'autres espèrent la fin de la coutume. Qu'ils soient les uns rassurés, les autres déçus. Le défi culturel est au moins aussi important que le défi institutionnel. Cet amarrage de la tradition à la modernité se réalise sous nos yeux. A côté de Nouméa la blanche se dresse désormais le symbole du centre culturel Djibaou, oeuvre commune de tout un peuple et d'un architecte à la fois humble et inspiré. Symbole de la coutume d'hier, d'aujourd'hui et de demain, mais aussi de la grande réconciliation qui permettra à tous de construire un avenir commun.

Le pari est aussi économique : il faut, à partir d'une économie actuellement assistée, répondre progressivement aux aspirations à l'autonomie d'un pays dont la production minière est soumise à un marché très cyclique, qui est marqué par le sous-développement agricole -l'agriculture représentant à peine 2 % du PIB-, et par l'importance d'un secteur tertiaire en partie artificiel. Il sera nécessaire de le conduire vers l'autosuffisance alimentaire.

L'héritage colonial est peut-être d'abord économique ; les fortunes de Nouméa reposent en bonne partie sur le commerce, et notamment sur l'importation. Il faudra réorienter l'économie en inscrivant la Nouvelle-Calédonie dans son environnement et en l'ouvrant sur les marchés asiatiques.

Kanaks, premiers occupants du sol, Européens venus au siècle dernier comme colons, déportés de la Commune ou de droit commun, Wallisiens et Futuniens, désormais plus nombreux sur la grande terre que dans leurs propres îles, Indonésiens, Vietnamiens, descendants des Kabyles des premières révoltes, tous doivent unir leurs efforts et leurs espoirs. C'est avec enthousiasme, mais dans la vigilance quant à l'avenir culturel et économique du territoire que le groupe socialiste votera ces textes (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste).

M. Henry Jean-Baptiste - En moins d'un an, depuis l'accord de Nouméa signé le 5 mai 1998, un travail considérable a été réalisé. Un cadre institutionnel original s'est progressivement dégagé des discussions et des négociations ; le souci d'aboutir à un consensus politique ne s'est jamais démenti, tant au niveau du Territoire, entre les adversaires d'hier, que dans l'ensemble -ou peu s'en faut- de la représentation nationale. La plupart des amendements adoptés ont reçu l'avis favorable du Gouvernement ; et le vote du Sénat, jeudi dernier, est intervenu, à une très large majorité, sans modification notable des textes que nous lui avions transmis ; ainsi la CMP n'a eu aucune difficulté à parvenir à un texte identique sur le fond et amélioré dans sa rédaction.

Nous ne saurions oublier pour autant que, pour assurer la sauvegarde de la paix et de l'esprit de concorde en Nouvelle-Calédonie, nous avons accepté plusieurs dispositions novatrices, certes, mais qui sont autant de dérogations à des principes fondamentaux de notre droit public et aux jurisprudences les mieux établies : le Gouvernement a donc accepté -et je m'en réjouis- d'aller très loin, moyennant une réforme de la Constitution. Le message a été, dans l'ensemble, bien compris : l'adhésion populaire manifestée le 6 novembre dernier, avec 72 % des suffrages exprimés, signifie qu'une page est tournée et que chacun dans le Territoire est comptable de l'avenir qui va se dessiner.

Dotée d'un nouveau statut, la Nouvelle-Calédonie est largement maîtresse de son destin et assurée -ce n'est point négligeable- du concours généreux de la métropole.

Le député de Mayotte ne s'étonnera pas de cette célérité ni de cette volonté d'aboutir. La population mahoraise souhaite plus modestement que le processus engagé depuis 1996, avec la mise en place de la commission Bonnelle, afin de préparer la consultation prescrite par une loi de 1976 relative au statut de Mayotte, ne soit pas abusivement retardé par des motifs que nous avons bien du mal à saisir. Vous pourriez sans doute, Monsieur le ministre, nous rassurer sur ce point.

Le cadre institutionnel d'ensemble que ces deux projets apportent à la Nouvelle-Calédonie est un peu complexe mais assez cohérent. Les mérites tiennent surtout à son caractère évolutif : les transferts de compétences de l'Etat vers la Nouvelle-Calédonie seront progressifs. Plusieurs interviendront dès le début de l'an prochain, d'autres sur une période de dix ans, à partir de 2014, parfois après négociation entre la Nouvelle-Calédonie et l'Etat, ou à la demande du Congrès. Cette démarche empirique devrait trouver de larges domaines d'application dans tous nos départements, territoires et collectivités d'outre-mer, qui peuvent être des lieux d'expérimentation économique, d'innovation sociale, de diffusion et de dialogue des cultures, d'invention d'instruments nouveaux de développement et surtout, de coopération internationale avec les pays environnants. Les initiatives méritent d'être encouragées, notamment dans le cadre d'une politique de décentralisation bien comprise.

Dans 15 ou 20 ans, la consultation référendaire sera l'heure de vérité pour la Nouvelle-Calédonie. A l'UDF, nous gardons l'espoir qu'elle saura faire le choix du maintien dans la République française, encore faut-il lui en donner les moyens...

Or plusieurs éléments de cette nouvelle organisation institutionnelle constituent de véritables paris, quelque peu risqués, sur l'avenir.

Ainsi, le projet de loi organique prévoit que le pouvoir exécutif sera transféré du haut-commissaire de la République à un gouvernement de 5 à 11 membres, élus à la représentation proportionnelle et au scrutin de liste... Responsable devant le Congrès, dont il exécute les délibérations ainsi que les "lois du pays", ce gouvernement collégial contrôlera également, par chacun de ses membres, les différents secteurs d'activités de l'administration locale. Dans ces périodes, toujours difficiles, de transition, il faudra au haut-commissaire une très large expérience, une infinie capacité d'écoute et un doigté délicat -cela peut se trouver !- pour assurer la bonne marche d'un tel exécutif. Il est vrai que les possibilités de saisine du Conseil constitutionnel et du Conseil d'Etat sur les "lois de pays" ou les actes du gouvernement limiteront les risques de dérive.

Quant au projet de loi ordinaire, il assigne aux institutions nouvelles la mission de travailler au rééquilibrage économique et social entre les différentes régions ou provinces. C'est, à l'évidence, l'enjeu fondamental, le pari par excellence sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie. Or ce sont les trois provinces qui continueront de détenir les compétences locales de droit commun : l'Etat et le Congrès du territoire ne disposeront que des compétences d'attribution inscrites dans la loi organique. Une telle organisation ne sera pas aisément conciliable avec un exercice volontariste de compensation et de répartition plus que jamais indispensable. On demandera à l'Etat dans ses missions d'accompagnement économique et par les contrats pluri-annuels de développement, de veiller à cette exigence de rééquilibrage ; mais s'agira-t-il encore d'"accompagnement" ?

S'agissant de la question de la consultation prévue dans 15 ou 20 ans, j'avais indiqué au nom de l'UDF, lors du Congrès de Versailles, combien nous paraissait contestable le dispositif qui, prévoyant trois consultations successives, semblait privilégier l'option de l'indépendance. J'observe, pour m'en féliciter, que le système, finalement retenu par la loi organique fait de la troisième consultation une simple éventualité. On préserve ainsi le temps de la réflexion, mais sans "acharnement idéologique", en offrant un véritable choix à l'ensemble des citoyens de Nouvelle-Calédonie, y compris à ceux que l'Histoire a humiliés.

Je ne saurais terminer sans vous redire la préférence qu'ont aussi les Mahorais pour un véritable choix, ouvert et dépourvu d'ambiguïtés, de leur statut définitif dans la République française.

La loi de 1976 a prévu une consultation de la population. Il faut que Mayotte sorte enfin de cette période d'incertitude qui dure depuis vingt trois ans et obtienne un véritable statut. On comprend l'attente fébrile, et même un peu nerveuse, de cette île.

Le Gouvernement, comme le précédent, a bien voulu prendre l'avis d'un groupe de réflexion sur l'avenir institutionnel de notre "collectivité territoriale". Ce travail remarquable, le premier du genre, a été réalisé par une centaine d'experts et de personnalités qualifiées connaissant bien Mayotte. Le rapport Bonnelle, issu de ces travaux, a été publié par la Documentation française -ce qui constitue encore une nouveauté- et peut être retiré à la distribution. Il décrit cinq voies possibles d'organisation institutionnelle et préconise une démarche progressive.

L'immense majorité des Mahorais souhaite une départementalisation adaptée aux spécificités locales. Leur consultation ayant été promise par les plus hautes autorités de l'Etat, j'ai demandé à M. le Premier ministre que le processus engagé soit mené à son terme, afin que les délais prévus soient respectés. La consultation doit avoir lieu avant la fin de l'année. Il est grand temps d'en définir les modalités.

Le nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie se distingue du précédent par une meilleure prise en compte des réalités du territoire. Il n'est que le premier résultat d'une réflexion générale sur l'avenir institutionnel de l'outre-mer. Une mission parlementaire travaille sur les DOM et des propositions de réforme ont été formulées par les élus de la Polynésie française et de Wallis-et-Futuna. Comme on a pu le constater au cours du débat budgétaire du 23 octobre dernier, nos demandes sont diverses et nos attentes, souvent contradictoires.

Nous partageons cependant une double exigence d'identité et de responsabilité, ce qui appelle des solutions institutionnelles adaptées. Il faut faire preuve d'imagination et de volonté.

M. le Rapporteur - Tout à fait.

M. Henry Jean-Baptiste - Il devrait en résulter une évolution statutaire différenciée. Egalité n'a jamais signifié uniformité.

Responsables enfin, nous préférons faire appel aux initiatives locales et au dynamisme de la jeunesse plutôt que nous replier dans un système d'assistance qui n'offre aucune perspective.

Au-delà des institutions, le plus sûr fondement de l'outre-mer français réside dans l'adhésion des populations à la République. Il ne faut donc pas hésiter à consulter nos compatriotes d'outre-mer, comme on l'a déjà fait en Nouvelle-Calédonie et comme, je l'espère, on le fera bientôt à Mayotte. A cet égard, Monsieur le ministre, laissez-moi vous citer un proverbe indien : "Ne crains pas d'avancer lentement, redoute seulement de t'arrêter".

L'UDF soutient ces deux textes, qui nous donnent espoir en l'avenir de la Nouvelle-Calédonie et de l'outre-mer français (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe socialiste).

M. Dominique Perben - C'est aujourd'hui, pour tous ceux qui ont appris à aimer la Nouvelle-Calédonie et pour tous ceux qui y vivent, un jour de joie et de fierté.

Le groupe RPR soutient Pierre Frogier et Jacques Lafleur, dont on sait le rôle majeur qu'ils jouent dans l'évolution politique et institutionnelle de ce territoire. Le Rassemblement pour la République a approuvé vos deux textes en première lecture, Monsieur le ministre, et il fera de même aujourd'hui.

Nous pouvons faire confiance à cette génération d'hommes et de femmes qui a su mettre au point les accords de Matignon et de Nouméa.

L'expérience de large autonomie qui va commencer ne sera pas facile, mes collègues connaissent mon opinion sur ce point. Dans un territoire certes vaste mais faiblement peuplé, il faudra éviter l'éparpillement et se garder de tout esprit de clocher. Il sera nécessaire que l'action politique se concentre sur l'essentiel.

L'Etat, par ailleurs, ne devra pas disparaître, et je sais, Monsieur le ministre, que telle n'est pas votre intention. Si ses compétences, à partir de mai, seront très réduites, il continuera à jouer un rôle de premier plan, comme l'ont montré vos propos sur le dossier du nickel.

Il ne faudrait pas que le changement de statut soit perçu comme un désengagement de l'Etat ou une marque d'indifférence.

La période de vingt ans qui va s'ouvrir devra être mise à profit pour garantir la sécurité et le développement économique de la Nouvelle-Calédonie. Se pose aussi le difficile problème du rééquilibrage. Nous sommes, pour l'heure, loin du compte. Il faudra le résoudre, car cette question conditionne, à terme, l'équilibre politique du territoire.

Le nouveau cadre institutionnel est original. Un grand travail reste à faire pour aider la Nouvelle-Calédonie à se développer et à nouer des relations avec ses voisins du Pacifique. Le Parlement doit donner aux jeunes de la Nouvelle-Calédonie la possibilité de prendre leurs responsabilités. Pour le reste, comme l'a dit Pierre Frogier, à eux de jouer.

Le groupe RPR considère que le travail accompli depuis un an va donner une nouvelle chance à ce territoire de choisir, dans vingt ans, avec lucidité et enthousiasme, son maintien dans la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

La discussion générale est close.

L'ensemble du projet de loi organique relatif à la Nouvelle-Calédonie, compte tenu du texte de la CMP, mis aux voix, est adopté.

L'ensemble du projet de loi relatif à la Nouvelle-Calédonie, compte tenu du texte de la CMP, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Ces deux textes ont été adoptés à l'unanimité (Applaudissements sur tous les bancs).

La séance, suspendue à 16 heures 25, est reprise à 16 heures 50.


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RAPPEL AU RÈGLEMENT

M. Francis Delattre - Mon rappel au Règlement se fonde sur l'article 50.

C'est seulement hier, en fin de journée, que nous avons appris la modification de l'ordre du jour. Elle nous a posé de sérieux problèmes d'organisation, mais nous nous sommes efforcés d'être présents pour chacun des textes.

Et voilà qu'une suspension de séance d'une demi-heure vient d'avoir lieu alors même que restent à discuter de très nombreux articles du projet de loi relatif à l'intercommunalité, dont l'examen, en dépit de l'importance du texte, aura été "saucissonné".

Monsieur le Président, il conviendrait de veiller à ce que nous puissions travailler dans des conditions correctes.

M. le Président - Vous serez entendu.


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SAPEURS-POMPIERS (procédure d'examen simplifiée)

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant modification de la loi du 3 mai 1996 relative au développement du volontariat dans les corps de sapeurs-pompiers.

M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer - Cette proposition de loi, adoptée par le Sénat, vise à modifier et à compléter la loi de mai 1996, relatives à l'organisation départementale de la distribution des secours, et au développement du volontariat au sein des sapeurs-pompiers.

Les 200 000 sapeurs-pompiers volontaires qui oeuvrent aux côtés de 23 000 professionnels sont indispensables au bon fonctionnement des services d'incendie et de secours. Ainsi que l'actualité récente nous le rappelle, ils prennent largement leur part du lourd tribut payé chaque année pour secourir nos concitoyens. La nation leur doit sa reconnaissance.

La loi du 3 mai 1996 affirme le droit à la disponibilité des volontaires dans le cadre d'une convention avec leur employeur, leur obligation de formation, leur droit à percevoir des vacations pour leurs missions et une allocation de vétérance à la fin de leur engagement.

La proposition de loi tend à élargir les conditions d'attribution de cette allocation et en aménage le financement.

En effet, les conditions posées restreignaient fortement le nombre de bénéficiaires, en les obligeant à prolonger leur engagement jusqu'à l'âge de 55 ou 60 ans, ce qui peut présenter des risques. La proposition de loi dissocie la durée d'activité exigée de vingt ans de l'obligation d'exercer celle-ci jusqu'à la limite d'âge. La durée de service requise pourra, par ailleurs, être ramenée à quinze ans en cas d'incapacité opérationnelle reconnue.

D'autre part, les modalités de calcul de la part variable de cette allocation seront définies par décret. Le financement en sera désormais entièrement assuré par les établissements publics et les collectivités locales alors qu'il était jusqu'à présent, pour partie, à la charge des volontaires eux-mêmes. Les sapeurs-pompiers volontaires qui bénéficiaient au 1er janvier 1998 d'une allocation de vétérance supérieure à celle résultant de la nouvelle législation pourront continuer de la percevoir si les collectivités locales concernées acceptent d'en assurer le coût.

L'extension du nombre de bénéficiaires représentera une dépense d'environ huit millions et le financement intégral de la part variable une dépense supplémentaire de l'ordre de 28 millions.

Le dernier article de la proposition de loi vise à faciliter le fonctionnement des conseils d'administration des services départementaux d'incendie et de secours. La départementalisation a en effet abouti à la création d'établissements publics dotés d'institutions propres, notamment d'un conseil d'administration -les SDIS sont maintenant en place dans les différents départements et j'ai récemment reçu une délégation des présidents de leurs conseils d'administration.

Selon l'article 30 de la loi du 3 mai 1996, l'exécutif de ces établissements est assuré par le président seul. La charge de travail et la continuité du service impose de donner compétence également au vice-président. Ce dernier aura une délégation de pouvoirs du président et pourra assurer l'exécutif de l'établissement en cas d'absence ou d'empêchement de celui-ci.

Enfin, la proposition de loi fixe un délai pour la nomination d'un président ou d'un vice-président en cas de vacance de l'un ou l'autre de ces sièges.

Le Gouvernement approuve ces dispositions qui permettront aux services d'incendie et de secours de mieux assurer leur mission, et expriment la vive reconnaissance de la nation envers nos milliers de sapeurs-pompiers volontaires.

Je souhaite que l'effort de recrutement et de formation de jeunes sapeurs se consolide (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean Espilondo, rapporteur de la commission des lois - La repentance est à la mode. Et lorsque le législateur, au bout de quelques années d'intervalle, revient sur l'ouvrage, il fait inconsciemment oeuvre de repentance.

En corrigeant le dispositif de la loi du 3 mai 1996 relatif à l'allocation de vétérance, le législateur reconnaît qu'il a fait fausse route, il y a trois ans (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL).

M. Jean-Louis Debré - Vous faites de la politique là où elle n'a pas lieu d'être !

M. le Rapporteur - Attendez !

Consciente de la crise de recrutement dont est victime ce corps, l'ancienne majorité s'était employée à encourager cette forme de civisme, en adoptant la loi du 3 mai 1996 tendant à favoriser la disponibilité de ces bénévoles, à améliorer leur indemnisation et leur formation et à leur garantir le versement d'une allocation de vétérance, exonérée d'impôt et de prélèvement social, incessible et insaisissable, cumulable avec tout autre revenu.

Son versement est assuré par le SDIS dans lequel l'intéressé a effectué la durée de service la plus longue. Enfin, elle comportait une part forfaitaire et une part variable, cette dernière déterminée en fonction des services rendus individuellement par les intéressés. Les collectivités locales et leurs établissements publics prenaient intégralement en charge la part forfaitaire et assuraient également la moitié au moins du financement de la part variable, le reste étant couvert par les cotisations des sapeurs en activité.

Cependant, rapidement les conditions d'attribution de l'allocation sont apparues trop restrictives, les modalités de calcul de la part variable délicates à appliquer, et la définition de ses modalités de financement a suscité une forte opposition des intéressés.

Aussi le groupe socialiste du Sénat a-t-il déposé une proposition de loi qui tend à dissocier la condition de durée d'activité de l'obligation d'exercer cette dernière jusqu'à la limite d'âge, à imputer le financement de la totalité de l'allocation de vétérance aux autorités d'emploi, enfin à garantir le versement d'une allocation différentielle aux sapeurs-pompiers volontaires qui percevaient une allocation de vétérance supérieure avant le 1er janvier 1998.

La proposition de loi adoptée le 10 décembre dernier par le Sénat, dans un climat de grand consensus, reprend l'essentiel de ce dispositif.

M. Jean-Louis Debré - Vous devriez vous inspirer de cet état d'esprit !

M. le Rapporteur - Désormais, le sapeur-pompier volontaire, quel que soit l'âge auquel il cessera son activité, pourra prétendre à cette allocation après vingt ans d'activité, ce qui augmentera le nombre de ses bénéficiaires de 3 000 personnes pour un coût de 8,1 millions.

Seuls les services accomplis par l'intéressé seront pris en considération dans l'assiette de la part variable. Le financement de l'allocation de vétérance sera assuré intégralement par les collectivités locales et leurs établissements publics, à qui il en coûtera environ 28 millions.

Enfin, le Sénat a préservé les intérêts de ceux qui bénéficiaient, avant le 1er janvier 1998, d'un régime d'allocation de vétérance plus favorable.

Puis un débat s'est ouvert sur l'indemnisation des membres des conseils d'administration des SDIS, mais n'a pas abouti. Le Sénat a autorisé, en revanche, le président du conseil d'administration à déléguer l'exercice d'une partie de ses fonctions au vice-président.

Cette discussion sur le régime de l'allocation de vétérance, qui empoisonne la réforme du statut des 205 000 sapeurs-pompiers volontaires, trouve donc avec ce texte, que je vous invite à adopter conforme, un dénouement heureux. Le sapeur ayant 30 ans de service percevra ainsi 2 556 F et un officier totalisant 35 années de service, 3 189 F.

Quelles sont les intentions du Gouvernement sur les modalités de calcul de la part variable ? Dans quelles conditions les autorités d'emploi seront-elles appelées à assurer ce financement ?

M. Robert Pandraud - Le ministre vous répondra par écrit !

M. le Rapporteur - En votant ce texte, le Parlement témoignera de son attachement aux sapeurs-pompiers volontaires pour leur action irremplaçable (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Francis Delattre - Ce texte se justifie par les petites difficultés que rencontre l'application de l'excellente loi-cadre du 30 mai 1996...

M. Jean-Louis Debré - Les socialistes ne l'ont même pas votée !

M. Francis Delattre - ...à laquelle nous devons l'existence, sur l'ensemble du territoire, de SDIS bien organisés. Aussi parler de repentance est-il très excessif.

La difficulté ne porte que sur la part variable de l'allocation de vétérance, le décret que nous avions prévu n'ayant pas pu être mis au point faute d'accord. Certains SDIS en ont profité pour cesser tout versement, si bien que l'on se retourne vers le législateur. Nous sommes naturellement très favorables à ce texte très limité, comme à tout ce qui renforce la complémentarité entre pompiers volontaires et pompiers professionnels.

Nous souhaitons que l'Assemblée émette un vote conforme afin de réparer sans attendre quelques injustices.

M. Jean Vila - En 1996, tous ici partageaient les orientations du projet relatif au développement du volontariat dans le corps des sapeurs-pompiers, et assurant une reconnaissance juridique aux volontaires, dont le courage et le dévouement, bien connus, font des sapeurs-pompiers à part entière.

Beaucoup reste à faire pour répondre à leurs aspirations, mais améliorer leur indemnisation, renforcer leurs droits à la solidarité et généraliser l'allocation de vétérance va dans le sens de la justice. Cependant, faute d'accord sur son mode de calcul, le financement de la part variable de l'allocation de vétérance a rencontré des difficultés. La proposition qui nous est soumise tend à y remédier. L'article 3 supprime ainsi la contribution des volontaires au financement de la part variable, qui sera désormais supportée par les autorités d'emplois. Nous approuvons cette suppression, mais nous regrettons ce transfert de charges supplémentaires pour les collectivités territoriales, qui confirme le désengagement de l'Etat à leur détriment. Il faut impérativement résoudre le problème de la contribution de l'Etat au service public de sécurité civile, car il est impossible que les charges des communes et des départements augmentent alors que leurs recettes diminuent. Que le coût du transfert décidé aujourd'hui se limite à 28 millions ne change rien à la question de fond. Pour le reste, les mesures proposées amélioreront la situation des pompiers volontaires, en particulier les dispositions de l'article premier qui étendront le droit à l'allocation à 3 000 nouveaux bénéficiaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste)

M. Jean-Jacques Weber - C'est, comme nous tous je pense, animé d'un profond respect pour les sapeurs-pompiers que j'ai activement participé, en février 1996, à la discussion de la loi organisant la départementalisation des services d'incendie et de secours, puis, en mai suivant à celle de l'excellente loi sur le volontariat. Les sapeurs-pompiers professionnels exercent en effet un métier qui les conduit à s'exposer à des risques souvent imprévus et ils le font avec courage ; quant aux sapeurs volontaires, ils sont animés d'un esprit de solidarité et d'une générosité de coeur qui tranchent heureusement dans une société de plus en plus égoïste. Je suis donc heureux aujourd'hui que cette proposition adoptée avec le Sénat vienne améliorer les textes précédents.

Comme je l'avais signalé, celui-ci souffrait de lacunes : la principale tenait à ce que l'allocation de vétérance n'était pas versée lorsque le volontaire n'allait pas jusqu'au terme de son engagement, eût-il servi vingt ans ou plus. Désormais, ce versement de quelque 2 000 F par an ne sera plus subordonné à la poursuite de l'activité jusqu'à la limite d'âge, les vingt années de service demeurant cependant exigées. M. Debré avait d'ailleurs prévu de telles adaptations, que la mobilité de plus en plus grande rendait nécessaires.

S'agissant de l'allocation de réversion, le texte précédent disposait qu'elle ne serait ni assujettie à l'impôt et aux prélèvements sociaux, ni saisissable. Pourquoi la proposition revient-elle sur ce point ? Ne pourrait-on y remédier, en songeant aux veuves les plus modestes ?

D'autre part, les dispositions relatives au financement de l'allocation de vétérance ne sont pas neutres pour un département qui, comme le mien, compte 8 200 volontaires, dont 500 seront concernés par ce texte. A raison de 1 927 F par homme, le coût approchera 1 million de francs. Or vous ne prévoyez que 8 millions pour l'ensemble du territoire alors que, de façon plus réaliste, M. Fréville avait estimé les besoins à 25 millions. Quant à la suppression du système de financement institué par la loi de février 1996, elle se traduira pour mon seul département par une dépense nouvelle que le président du SDIS, notre ancien collègue Charles Haby, évalue à 4,5 millions. Si j'approuve le principe de cette simplification, je ne puis que dénoncer le transfert de charges, d'autant que départements et communes se trouvent déjà devant des gouffres financiers, du fait de la départementalisation. Pardonnez-moi de citer encore le cas du Haut-Rhin, mais le budget de notre SDIS, qui n'était que de 22 millions avant cette loi, est passé en un an à 45 millions et devrait avoisiner les cent millions en l'an 2000 ! Ce n'est certes pas le sujet du débat, mais comment ne pas dénoncer cette dérive, que j'avais pressentie sans en deviner l'ampleur ?

Cela étant, il est indispensable de favoriser un volontariat qui est une école de civisme et un facteur de promotion sociale et, à cet égard, les groupes de "JSP" -jeunes sapeurs-pompiers, de 12 à 16 ans- qui préparent la relève, méritent que nous leur accordions un jour toute notre attention. Le groupe UDF votera cette proposition de loi.

M. Germain Gengenwin - Très bien !

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia - Comme vient de nous le rappeler une dramatique actualité, c'est au péril de leur vie que les sapeurs-pompiers assurent la sécurité des biens et des personnes. Mais le développement du volontariat est nécessaire : la loi du 3 mai 1996 l'a favorisé et M. Espilondo se serait honoré à le reconnaître plutôt que de parler de repentance là où il ne s'agit que d'adapter la loi que M. Jean-Louis Debré a eu le mérite de faire voter.

Cette loi répondait à une attente ancienne des sapeurs-pompiers, et vous auriez peut-être été bien inspirés de l'approuver !

Plusieurs députés RPR - Très bien !

Mme Jacqueline Mathieu-Obadia - M. Debré déclarait alors : "Le rôle essentiel que jouent les sapeurs-pompiers tient à l'extraordinaire et exemplaire disponibilité dont savent faire preuve ces hommes de devoir pour répondre aux demandes pressantes d'un public qui, en retour, leur noue une grande admiration. De ce public, nous faisons partie !

La loi de 1996 a donc doté ces volontaires d'un statut législatif dont ils étaient dépourvus. Auparavant, le versement d'une allocation de vétérance n'était que facultatif ! L'article 12 de ce texte a institué cette allocation pour tous les sapeurs-pompiers dont l'engagement prend fin, lorsqu'il atteint la limite d'âge de son grade après avoir effectué vingt années de service.

La présente proposition se limite pour l'essentiel à redéfinir les règles de financement et à assouplir les conditions d'attribution de l'allocation. Pour le reste, le Gouvernement se borne à prévoir 20 millions -seulement- pour le financement de la part variable, faisant supporter aux collectivités et à leurs établissements publics la totalité du coût de l'allocation !

Ces dispositions ne sont donc qu'un complément apporté à la loi votée par le groupe RPR en 1996, mais cet aménagement répond à l'attente des sapeurs-pompiers et de nos concitoyens. Notre groupe approuvera par conséquent cette proposition pour manifester une nouvelle fois sa gratitude à ces volontaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR)

La discussion générale est close.

M. le Secrétaire d'Etat - Je voudrais simplement apporter deux précisions.

Monsieur Weber, aux termes de l'article 2, une allocation de réversion sera versée au conjoint survivant ou à ses descendants directs lorsque le sapeur-pompier volontaire décédera en service commandé.

Monsieur le rapporteur, c'est en effet un décret qui fixera le mode de calcul de la part variable de l'allocation de vétérance. Je vous indique que ce calcul s'effectuera par application d'une vacation horaire pour chaque année au-delà de la quinzième année d'exercice. Pourront ainsi être pris en compte le grade de l'intéressé et les responsabilités qu'il aura exercées. Ce sera une incitation aussi à poursuivre son actvité jusqu'à la vingtième année.

M. le Président - Le texte ne faisant l'objet d'aucun amendement, je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans le texte du Sénat.

L'ensemble de la proposition de loi, mis aux voix, est adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)


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COOPÉRATION INTERCOMMUNALE (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la coopération intercommunale.

ART. 51

M. Germain Gengenwin - Cet article rend obligatoire la taxe professionnelle unique pour les communautés d'agglomération et pour les communautés urbaines, en contrepartie de quoi celles-ci auront la faculté de compléter leurs ressources propres par un prélèvement sur l'impôt versé par les ménages.

Pour quelle raison les communautés de communes ayant opté pour le TPU n'ont-elles pas accès à cette fiscalité mixte ? Le rapporteur parle à ce propos d'ouverture timide et il a raison. Une combinaison de la TPU, de la taxe foncière et de la taxe d'habitation mettrait les groupements en position de mieux exercer leurs compétences. Cette liberté fiscale est à la fois un élément de souplesse et un facteur de responsabilisation des délégués communautaires. En outre, la majorité des élus souhaitent cette fiscalité mixte, 59 % d'entre eux considérant qu'elle ne doit pas être réservée à certaines catégories de groupements à fiscalité propre. La commission des finances plaide dans le même sens : le Gouvernement l'entendra-t-il ?

D'autre part, la fiscalité mixte ne pourra être mise en oeuvre que si les ressources propres de l'EPCI se révèlent insuffisantes. Le système est donc tronqué par rapport à celui que proposait M. Perben. Je proposerai un amendement pour instaurer une véritable fiscalité mixte, persuadé que les élus n'abuseront pas de cette faculté pour accroître la pression fiscale.

M. Jean-Jacques Weber - Très bien !

M. Gilles Carrez - L'amendement 559 est défendu.

M. Francis Delattre - Le groupe DL n'est pas convaincu que le caractère obligatoire de la TP unique soit nécessairement un facteur de réussite ; l'expérience ne le démontre pas absolument. Je propose donc par l'amendement 338 que le choix de la TPU soit du ressort des conseils compétents sur tout le territoire, à l'exception toutefois de la région parisienne. Le principe de base, qui est la liberté et la responsabilité, se heurte en effet à un autre : le principe de justice. Or la région parisienne connaît, en matière de potentiels fiscaux et de répartition de la taxe professionnelle, des situations iniques, qui conduisent à enrichir toujours les villes les plus riches et à paupériser d'autres villes au point qu'elles ont du mal à simplement entretenir leur patrimoine. L'amendement 338 accorde donc la liberté là où les inégalités entre les communes ne sont pas excessives, mais il prévoit pour la région parisienne une taxe professionnelle unique répartie entre les communes en fonction de leur population. C'est plus le fruit de l'histoire que du talent des administrateurs si la Défense ou Roissy sont là où ils sont, et si 90 % des actifs qui y travaillent vivent dans nos cités-dortoirs et y scolarisent leurs enfants. Les inégalités choquantes ne sont pas l'effet d'une bonne ou d'une mauvaise gestion, ce sont des situations acquises, et qui sont devenues incontrôlables. Si nous voulons éviter la paupérisation de certaines villes et de certains quartiers, il faut des mesures fortes. L'amendement 338 en propose une.

Le 340 est identique.

M. Gérard Gouzes, rapporteur de la commission des lois - La commission n'a pas examiné l'amendement 559. Elle a repoussé les amendements 338 et 340, car elle est défavorable au caractère facultatif de la TPU. Tout notre dispositif est orienté vers plus d'intégration et de solidarité. Or quel élément de solidarité est plus fort que la TPU ? Ces amendements traduisent une frilosité devant l'intercommunalité.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable sur le 338. La TPU est un facteur de réduction des inégalités au sein d'une agglomération. Avis défavorable aussi sur le 559.

M. Francis Delattre - Je n'ai obtenu que des réponses parcellaires. Mon amendement propose un système de forte intégration pour la région parisienne, face aux injustices que j'ai évoquées. Sur ce point vous ne me répondez pas. Si nous proposons un système un peu différent pour les autres régions c'est que l'expérience de nos collègues, dont les situations sont diverses, ne les conduit pas à trancher nettement dans un sens ou dans l'autre, et ne leur semble pas prouver que la contrainte soit nécessairement un facteur d'intégration. Pour ma part, j'ai sur l'intercommunalité des positions au moins aussi avancées que les vôtres. Je serais même prêt à assumer un nouvel échelon d'administration territoriale et à en faire désigner les administrateurs par le suffrage universel. Cessez donc de dire que nous sommes en retrait sur ces questions. La considération des situations choquantes que connait la région parisienne devrait vous conduire à répondre à mon amendement de façon plus sérieuse.

L'amendement 559, et les amendements 338 et 340, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 513 est de coordination : il confirme le maintien de la TPU dans les syndicats d'agglomération nouvelle, qui l'ont déjà, lors de leur transformation en communautés d'agglomération.

L'amendement 513, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Gilles Carrez - L'amendement 25 est défendu.

L'amendement 25, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 176 est rédactionnel.

L'amendement 176, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Gilles Carrez - L'amendement 27 est défendu.

M. Didier Chouat, rapporteur pour avis de la commission des finances - L'amendement 138 de notre commission concerne la "fiscalité mixte", c'est-à-dire la possibilité de lever des impôts ménages en sus de la taxe professionnelle unique. Afin que le texte joue pleinement son rôle incitatif en faveur de la TPU, l'amendement définit la "fiscalité mixte", en fonction de la nécessité de lever les blocages qui nuisent à la mise en oeuvre de la taxe professionnelle unique. Seule la possibilité donnée au conseil de communauté de percevoir une fiscalité concomitante sur les trois taxes ménages peut permettre de surmonter les deux freins que sont la crainte de ne pas disposer d'une assiette fiscale assez large pour le vote intercommunal du produit fiscal, et le légitime souci de ne pas faire peser toute la pression fiscale sur les seules entreprises. Nous proposons donc de permettre aux conseils des communautés à taxe professionnelle unique, sous certaines conditions, de percevoir la taxe d'habitation et les taxes foncières.

M. le Rapporteur - L'amendement 177 de la commission des lois concerne le déplacement du II de l'article pour regrouper dans le premier paragraphe tous les groupements afin de définir leur régime relativement à la TPU. Celle-ci est de plein droit pour les communautés urbaines, les communautés d'agglomération, et les communautés de villes pour la période transitoire précédant leur disparition. Elle est optionnelle pour les communautés de communes, ainsi que les districts en attendant leur disparition. Ce 177 est lié à un futur amendement 178 dont l'objet est semblable à celui du 138.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est défavorable au 138. La possibilité pour un EPCI de percevoir une fiscalité additionnelle sur les ménages est déjà ouverte par le projet, mais avec des limites. Supprimer celles-ci créerait un risque inflationniste quant à la pression fiscale sur les ménages. Le texte du Gouvernement, qui prévoit un prélèvement limité, est plus protecteur.

Avis défavorable également sur le 177, sachant qu'il est lié à un amendement 178 de même esprit que celui de M. Chouat.

M. Gilles Carrez - Ce point est important, et je vais soutenir le Gouvernement, car il y va de la protection du contribuable. On a longtemps hésité à accepter l'idée d'une fiscalité ménage additionnelle. Si le Gouvernement s'y est rallié, c'est pour essayer de rassurer les communes qui choisissent le regroupement avec TPU. Il y a toujours une incertitude sur la taxe professionnelle, liée à l'activité économique, aux arrivées et départs d'entreprises. Le système que propose le Gouvernement est celui qui fonctionne depuis quinze ans, de façon satisfaisante, dans les syndicats d'agglomérations nouvelles. Dans ce système, c'est seulement si la TP ne peut pas couvrir les dépenses obligatoires résultant des transferts de compétences, que va intervenir la fiscalité ménages.

Ce qui est protecteur pour le contribuable à la taxe d'habitation et au foncier bâti. A ma connaissance, jusqu'à présent, cette possibilité n'a pas été utilisée.

On reproche à l'intercommunalité d'engendrer des surcoûts ; il y a quelques jours, une enquête de la Chambre régionale des comptes de Midi-Pyrénées en faisait apparaître. Autoriser, comme le propose la commission des finances, les EPCI à décider, par simple délibération, de percevoir les impôts sur les ménages, risque d'aboutir à une aggravation de la pression fiscale, alors que la taxe d'habitation est déjà très lourde. Il est assez paradoxal, de la part du rapporteur, d'espérer, grâce à un supplément de taxe d'habitation, alléger l'imposition des entreprises : je ne suis pas sûr que ce soit l'objet des regroupements...

Un autre problème concerne la répartition entre les communes de cette fiscalité additionnelle sur les ménages. Imaginons que parmi les communes qui se regroupent, l'une ait une taxe d'habitation à 8 %, une autre à 18 % ; si l'on a besoin d'une fiscalité additionnelle supplémentaire de 2 %, on va passer pour la première à 10 % et pour la deuxième à 20 %. Les prélèvements serviront à financer la dotation de compensation au bénéfice des communes qui avaient antérieurement les ressources de taxe professionnelle les plus élevées ; or ce sont en général celles où le taux de taxe d'habitation est le plus bas... Le système n'est donc pas équitable.

Pour ces deux raisons, la rédaction du Gouvernement me semble donc meilleure que celle de la commission des finances.

MM. Robert Poujade et René André - Très bien.

M. Augustin Bonrepaux, président de la commission des finances - Je crois bien me souvenir qu'un système de fiscalité mixte était proposé par le texte de M. Perben...

M. Gilles Carrez - Avec un encadrement !

M. le Président de la commission des finances - Il faut que ce projet conserve une cohérence. Or avant-hier, nous avons décidé d'inciter les groupements à passer à la taxe professionnelle unique ; comment pourront-ils le faire tous s'ils n'ont pas la possibilité de recourir à une fiscalité additionnelle ?

M. Gilles Carrez - Je ne la refuse pas.

M. le Président de la commission des finances - De plus, je suis un peu surpris qu'on accrédite l'idée que les élus seraient irresponsables. Lorsqu'ils votent des impôts, ils font en sorte que la pression fiscale soit la plus légère possible ! Sans doute y a-t-il des excès ici ou là, mais il ne faut pas généraliser. Lorsqu'on constate que l'intercommunalité s'accompagne d'une augmentation des coûts, il faut mettre en balance les services qui, sans intercommunalité, ne seraient pas rendus.

Cela dit, notre amendement rejoint l'amendement 178 de la commission des lois.

M. Pierre Méhaignerie - Je comprends les arguments de mes collègues de la commission des finances, mais je comprends encore mieux la prudence du Gouvernement, pour quatre raisons.

D'abord, en ajoutant à la TPU des taxes sur les ménages, on risque de rendre très vite l'intercommunalité impopulaire.

M. Robert Poujade - Evidemment !

M. Pierre Méhaignerie - Ensuite, il faut un équilibre entre consommations collectives et consommations individuelles : le pays est aujourd'hui équipé ; en revanche, il ne faut pas amputer le pouvoir d'achat des familles, ce qui, en outre, nuirait à l'emploi.

En troisième lieu, la taxe professionnelle, du fait même de son mécanisme, augmente déjà de 2 à 2,5 % par an.

Enfin, si je crois à la sagesse de M. Bonrepaux, je ne crois pas nécessairement à celle de tous les élus locaux... Il faut bien reconnaître que la dépense est électoralement payante : quand on dépense 100 francs, on demande moins de 10 francs à 50 % des électeurs...

M. le Rapporteur pour avis - Je retire l'amendement 138 et je me réserve la possibilité d'intervenir sur l'amendement 178 de la commission des lois.

L'amendement 27, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 177, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Les amendements 450, 345, 451 et 242 tombent.

M. Gilles Carrez - Je ne suis pas sûr que mon amendement 243 ne tombe pas aussi mais je suis heureuse de pouvoir le défendre.

Dans le système de fiscalité additionnelle proposé par le Gouvernement, je suggère que la répartition entre les communes tienne compte des taux communaux d'imposition. Il ne serait pas normal, en effet, de demander davantage aux communes où le taux de taxe d'habitation est très élevé ; en effet dans la plupart des cas, la raison en est la faiblesse des ressources de taxe professionnelle.

M. le Rapporteur - J'ai quelque difficulté à comprendre cet amendement : s'il s'agit d'assurer un retour sur recettes fiscales vers les communes, il existe déjà un système de dotation de solidarité, plus souple. Avis défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable. Cet amendement n'est pas justifié.

M. Gilles Carrez - Monsieur le rapporteur, je ne crois pas que la dotation de solidarité puisse être augmentée si on fait appel à la fiscalité des ménages.

M. le Rapporteur - La dotation de solidarité vise à combler le différentiel constaté en appliquant un taux unique à des bases différentes. Ce différentiel peut augmenter même si on impose les ménages.

L'amendement 243, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Francis Delattre - Mon amendement 339 vise à rendre facultative la TPU dans les communautés d'agglomération, dont la liberté en matière fiscale doit être préservée, du moins en dehors de la région parisienne. Ce n'est pas en multipliant les contraintes qu'on incitera les communes à se regrouper.

Pour l'Ile-de-France en revanche, je propose de rendre la TPU obligatoire, compte tenu de la désorganisation de cette région au plan intercommunal et des inégalités de taux flagrantes qu'on y observe.

M. le Rapporteur - Cet amendement est discriminatoire. Avis défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 339, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gilles Carrez - L'amendement 26 est défendu.

L'amendement 25, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - Tout à l'heure, en adoptant l'amendement 177, nous avons regroupé l'ensemble des établissements publics intercommunaux dans un même paragraphe. C'est bien à l'ensemble de ces structures qu'il faut ouvrir la possibilité d'une fiscalité mixte. Tel est le sens de l'amendement 178 de la commission.

Contrairement à ce qui est souvent dit, l'intercommunalité n'est pas source d'inflation fiscale, car les services rendus et les impôts qui les financent sont simplement transférés des communes à la structure intercommunale. En outre, le regroupement des communes permet de réaliser des économies d'échelle. Imaginez si chacune devait créer sa propre décharge ! La fiscalité levée n'est donc qu'une fiscalité de transfert.

Il arrive, certes, que les élus, au lieu de réduire en proportion la fiscalité communale, la maintiennent au même niveau, accusant la structure intercommunale de la hausse globale des prélèvements. Cette pratique regrettable ne doit pas discréditer l'intercommunalité.

D'ailleurs, le contribuable ne peut être pressuré sans limite. Les élus sont tenus de faire attention, même si M. Méhaignerie nous a montré qu'on pouvait augmenter les impôts et se faire réélire (Sourires). Ce n'est jamais par plaisir que les élus augmentent les prélèvements.

Autoriser la mixité fiscale pour l'ensemble des EPCI, c'est préserver la liberté des élus, qui auront la sagesse de ne pas augmenter les impôts.

M. le Secrétaire d'Etat - Actuellement, les groupements à taxe professionnelle unique ne peuvent percevoir d'impôts sur les ménages. Ce projet leur en donnera la possibilité, mais de manière très encadrée. Le Gouvernement poursuit en effet trois objectifs : développer l'intercommunalité, garantir l'intérêt des collectivités, mais aussi stabiliser, voire réduire, le montant des prélèvements obligatoires.

Il faut certes faire confiance aux élus -j'en suis un moi-même-, mais nous devons prévenir les dérives.

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement 178.

M. le Rapporteur pour avis - L'introduction de la fiscalité mixte constitue une avancée, mais le projet réserve cette possibilité aux communautés d'agglomération et aux communautés urbaines à taxe professionnelle unique. Il y a là une discrimination à l'encontre des communautés de communes, c'est-à-dire principalement du monde rural, alors même que certaines d'entre elles ont déjà opté pour la taxe professionnelle unique.

M. Germain Gengenwin - Eh oui !

M. le Rapporteur pour avis - Imaginons que dans une grande agglomération comme Rennes, une entreprise comme Citroën cesse son activité (Murmures sur les bancs du groupe socialiste). Oui, ce serait une catastrophe pour toute la région. Si le district de Rennes devenait une communauté urbaine, les élus devraient recourir à la fiscalité sur les ménages pour compenser la perte de taxe professionnelle.

Imaginez maintenant qu'une entreprise importante ferme dans la communauté de communes de Loudéac, qui compte 30 000 habitants. Il nous faudrait faire de même, mais nous ne le pourrions pas.

Pourquoi la fiscalité mixte, considérée comme une bonne formule dans les communautés urbaines et les communautés d'agglomération, serait-elle le mal absolu dans les communautés de communes ?

Je sens comme une méfiance à l'encontre des élus, jugés irresponsables en matière fiscale (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Hervé Morin - On inverse l'ordre des choses. Il faut réformer la fiscalité locale, de manière à mettre en évidence la responsabilité des différents conseils élus, avant de donner à ceux-ci davantage de liberté.

En outre, nous savons bien qu'en cas d'alternance, les nouveaux responsables se défaussent sur leurs prédécesseurs, dont ils critiquent la gestion avant d'en remettre une louche.

Plutôt que de laisser les élus ajouter des impôts aux impôts, mieux vaut en rester au texte du Gouvernement.

M. Gilles Carrez - J'ai écouté avec attention notre rapporteur nous expliquer que l'intercommunalité coûtait cher aux contribuables, puisque les communes qui ont transféré certaines de leurs charges oublient de baisser corrélativement leurs impôts...

Plusieurs études sur l'intercommunalité à fiscalité propre montrent que l'addition de taux communaux et de taux intercommunaux aboutit la plupart du temps à un taux d'imposition supérieur à la moyenne. Sans doute des services supplémentaires sont-ils fournis en contrepartie. Il n'en reste pas moins que les contribuables ont inévitablement le sentiment, devant leur feuille d'impôt, de payer davantage du fait de l'existence de ces structures intercommunales, et ils s'en plaignent amèrement auprès de l'Association des maires de France.

Nous souhaitons tous le développement de l'intercommunalité, notamment à taxe professionnelle unique. Or, à instaurer une fiscalité mixte, sans l'encadrer d'aucune manière, nous risquons d'accroître les préventions, déjà fortes, des contribuables.

Je fais par ailleurs observer à M. Chouat que la proposition du Gouvernement n'interdit pas la fiscalité additionnelle, se contentant de l'encadrer. Les structures intercommunales ne peuvent recourir aux impôts prélevés sur les ménages que dans des cas exceptionnels, par exemple pour combler un manque à gagner de taxe professionnelle résultant de la fermeture soudaine d'une entreprise.

M. le Président de la commission des finances - Le texte initial visait seulement les agglomérations. Nous avons souhaité l'élargir : pourquoi ne permettrait-on pas sur l'ensemble du territoire ce qui sera possible dans les agglomérations ?

Bien des élus savent par expérience que le passage à la TPU est souvent quasiment impossible sans l'instauration d'une fiscalité mixte. C'est d'ailleurs pourquoi l'Assemblée nationale a voté une telle fiscalité additionnelle lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1999, n'acceptant de revenir sur son vote que parce qu'elle avait reçu l'engagement que la question serait réexaminée à l'occasion du présent projet de loi.

La TPU doit devenir à terme la ressource fiscale des groupements intercommunaux ; il faut donner à ceux-ci les moyens de financer un passage délicat. Une déliaison des taux doit donc être permise durant la phase transitoire.

M. Alain Cacheux - Je ne comprends pas l'attitude du Gouvernement. Il a fait de la TPU l'un des éléments-clés de son projet. Cet instrument de solidarité doit permettre les plus grandes avancées en matière de coopération intercommunale. Il faut donc veiller à donner aux structures les moyens d'y passer progressivement. Si les communautés de villes ont échoué, c'est en raison de certaines réticences de fond, mais surtout parce que le passage à la TPU était bien souvent impossible concrètement.

Vous pouvez avoir confiance dans les élus locaux : ils n'abuseront pas d'une fiscalité additionnelle. Leurs électeurs, très attentifs aux questions de fiscalité, sauront leur faire savoir les limites à ne pas dépasser...

M. Michel Vaxès - Notre groupe partage l'avis du Gouvernement...

M. Gilles Carrez - Très bien !

M. Michel Vaxès - Depuis des années, la pression fiscale s'accroît sur les ménages et s'allège sur les entreprises. Avec cet amendement, on propose d'accentuer encore ce transfert (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Nos concitoyens n'en peuvent plus.

Il faut trouver, nous dit-on, de nouvelles ressources pour l'intercommunalité. Soit, mais allons les chercher là où nous le suggérons : élargissons l'assiette de la taxe professionnelle, imposons davantage les actifs financiers (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste). Sans mettre en difficulté les entreprises, nous trouverons de quoi financer l'intercommunalité.

M. Jacky Darne - Cet amendement ne dispensera pas d'une réforme en profondeur de la taxe d'habitation, qui continue de poser un problème de fond.

L'intercommunalité ne peut pas être financée exclusivement par la taxe professionnelle. Sinon, ces groupements ne se créeront pas.

Par ailleurs, les structures intercommunales ont aujourd'hui compétence en matière de développement économique mais aussi de logement, d'urbanisme, de prévention de la délinquance, de politique de la ville, tous secteurs qui intéressent au premier chef les ménages.

Voter cet amendement, ce n'est pas alourdir l'impôt, c'est assurer le financement de services nouveaux. M. Perben avait d'ailleurs lui aussi prévu une fiscalité additionnelle dans son projet de loi...

M. Gilles Carrez - Oui, mais encadrée !

M. le Rapporteur - La fiscalité de l'intercommunalité n'est pas une fiscalité propre mais de transfert. Si la création de structures intercommunales conduit à accroître la pression fiscale, c'est que, corrélativement aux transferts de compétences, les conseils municipaux ne diminuent pas les impôts (Protestations sur les bancs du groupe communiste, du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

Mme Janine Jambu - Pour qui prenez-vous les élus ?

M. le Rapporteur - Qui refuse aujourd'hui la déliaison des taux ? Le MEDEF. Qui la souhaite ? Toutes les associations d'élus. Tous les maires, des petites villes, des villes moyennes comme des grandes villes revendiquent unanimement une fiscalité mixte non encadrée.

Enfin, permettez-moi de vous faire observer que cet amendement 178 s'inspire très directement de l'article 69 du projet de loi que s'apprêtait à présenter M. Perben avant la dissolution.

M. le Rapporteur pour avis - L'alinéa IV de l'article 51 prévoit tout de même la mise en place de commissions locales d'évaluation des transferts financiers. C'est un garde-fou.

Tout transfert de compétence comporte des incidences financiers qu'il faut évaluer. La logique veut ainsi que la commission d'évaluation calcule dans quelle mesure il est possible de diminuer l'impôt communal, compte tenu de la mise à la charge du groupement de dépenses supplémentaires. La disposition relative à la commission d'évaluation garantit contre tout dérapage de la fiscalité locale.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement 178 est adopté par assis et debout.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement lève le gage.

L'amendement 344 tombe.

M. le Rapporteur - L'amendement 179 est de coordination.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement est défavorable, puisqu'il était opposé à l'amendement 178.

L'amendement 179, mis aux voix, est adopté.

M. Gilles Carrez - L'amendement 139, adopté par la commission des finances, tend à porter à deux ans le délai au cours duquel peut être prise une délibération spécifique sur le rythme d'intégration fiscale progressive.

M. le Rapporteur - Il s'agirait d'une sorte de droit au remords.

M. Gilles Carrez - Non, à la réflexion !

M. le Rapporteur - De fait la décision est souvent délicate. Avis favorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Rejet. Cette possibilité de deuxième délibération compliquerait la gestion de la fiscalité directe locale, et exposerait les entreprises au risque de changements de taux.

M. Gilles Carrez - Il ne s'agit pas d'une deuxième délibération, mais de porter à deux ans le délai durant lequel il est possible de s'écarter du système général. Ce délai est nécessaire car l'affaire est très complexe.

L'amendement 139, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 180 est de coordination.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

L'amendement 180, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 181 rectifié est lui aussi de coordination.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement lui est défavorable, comme il l'était à l'amendement 178.

L'amendement 181 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 182 est de coordination.

L'amendement 182, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 183 est de coordination.

M. le Secrétaire d'Etat - Pour.

L'amendement 183, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 184 tend à mieux définir la qualité des membres de la commission d'évaluation des charges.

L'amendement 184, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 185 est lui aussi de précision.

L'amendement 185, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Francis Delattre - Notre amendement 342 tend à préciser que l'attribution de compensation est réévaluée chaque année en fonction de l'évolution moyenne des bases communautaires de taxe professionnelle.

M. le Rapporteur - Rejet de cette disposition, qui risquerait d'amputer la part dévolue au groupement.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis. Ce serait contrarier le développement des EPCI.

L'amendement 342, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 186 est rédactionnel.

L'amendement 186, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 187 est également rédactionnel.

L'amendement 187, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 514 est de coordination.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

L'amendement 514, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 188 3ème rectification tend à mettre en facteur commun le régime des attributions de compensation pour l'ensemble des EPCI soumis au régime de la TPU.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

L'amendement 188 3ème rectification, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur pour avis - Puisque nous avons renforcé la fiscalité mixte pour les groupements à TPU, le paragraphe VI de l'article n'a plus d'objet. L'amendement 140 tend donc à le supprimer.

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement ayant repoussé l'amendement 178 repousse aussi celui-ci.

L'amendement 140, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 189 est rédactionnel.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis favorable.

L'amendement 189, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Dans l'esprit de solidarité qui caractérise ce projet, M. Darne a déposé et la commission a adopté un amendement tendant à attribuer aux communautés urbaines à TPU une dotation de solidarité répartie prioritairement au profit des communes membres éligibles à la dotation de solidarité urbaine ou à la dotation de solidarité rurale.

M. le Secrétaire d'Etat - Je reconnais la perspicacité de M. Darne, qui a mis en place ce fonds à la communauté urbaine de Lyon.

M. Gilles Carrez - Cet amendement m'inspire certaines réserves. Pourquoi imposer des critères de répartition de caractère national, alors que la dotation de solidarité doit être gérée de façon locale ? Pourquoi traiter différemment les communautés urbaines et les communautés de communes, qui échapperont, elles, aux critères nationaux ?

Ainsi, en application de la loi de finances, des centaines de communes de plus de 10 000 habitants, qui sont nettement plus pauvres que la moyenne, ne percevront pas cette année la DSU et perdront jusqu'à 23 % de revenu de taxe professionnelle. Si la solidarité ne peut pas s'exercer librement au niveau de chaque EPCI, comment s'en sortiront-elles ? Je réclame un peu de souplesse.

M. Jacky Darne - Rien n'empêche de procéder comme vous le souhaitez, car il existe des critères complémentaires. Mon amendement 190 se comprend en liaison avec l'amendement 193, qui vient plus loin.

En revanche, que la loi distingue deux critères est tout à fait souhaitable. Or il n'y en a que deux possibles, toujours les mêmes, pour garantir à ces communes une certaine solidarité : le potentiel fiscal, qui est fonction du patrimoine et du nombre d'entreprises, et le revenu moyen par habitant, qui varie selon la proportion de la population en difficulté.

L'amendement 190, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 191 est de coordination.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable : il s'agit d'un amendement de conséquence de l'amendement 178.

L'amendement 191, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Jacques Weber - Notre amendement 452 vise à harmoniser le texte avec celui de la loi sur l'aménagement du territoire, qui fait obligation aux groupements de redistribuer une fraction du produit de leur taxe professionnelle aux communes membres. Il faut donc remplacer ici "peut" par "doit".

M. le Rapporteur - La commission préfère garder une certaine souplesse.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

M. Germain Gengenwin - Si cette redistribution doit rester facultative, surtout ne pas l'inscrire dans la loi ! Les communautés n'y procèderont jamais et les communes membres se trouveront déplumées !

L'amendement 452, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gilles Carrez - M. Darne nous a demandé, à l'instant, de fixer deux critères pour les communautés urbaines, s'agissant de l'éligibilité à la DSU et à la DSR. Or rien de tel n'est prévu pour les communautés d'agglomération ! Elles disposeraient d'une liberté totale ! Mon amendement 244 vise à corriger cela, en énumérant à titre purement indicatif quelques critères pour la répartition de la dotation de solidarité : potentiel fiscal, charges, population...

M. le Rapporteur - Dans les communautés d'agglomération, il revient au conseil d'arrêter les critères d'attribution. Par ailleurs, nos travaux préparatoires devraient vous donner satisfaction : point n'est besoin d'alourdir le texte.

M. le Secrétaire d'Etat - S'agissant des dispositions à caractère exceptionnel, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. Dominique Perben - Je voudrais, d'une façon un peu solennelle, exprimer ma déception. Dans la discussion générale, j'avais annoncé que nous adopterions un attitude constructive dans ce débat, car nous avions un a priori plutôt positif à l'égard de ce projet. Or à aucun moment, Monsieur le rapporteur, vous n'avez fait un geste en direction de l'opposition en acceptant un de ses amendements. Ne vous étonnez donc pas si, au terme de la discussion, la porte que nous avions laissée entrouverte se refermait.

M. le Rapporteur - Je suis surpris : nous avons accepté des amendements aussi bien du groupe communiste que de M. Carrez, et nous en avons repoussé qui venaient du groupe socialiste ! Même cet amendement 244, dont je conteste personnellement l'utilité, a été accepté par la commission. Je ne veux pas croire que vous cherchiez je ne sais quel prétexte...

M. le Rapporteur pour avis - Je comprends d'autant moins l'intervention de M. Perben, moi aussi, qu'il y a quelques minutes, nous avons adopté un amendement 139 de M. Carrez et qu'à plusieurs reprises, M. Gouzes et moi-même avons fait référence au projet Perben pour reconnaître notre dette à son égard. On ne peut mettre en doute notre volonté de parvenir à un texte équilibré, intégrant les apports de tous les groupes.

M. Dominique Perben - Dans ce cas, faites encore un effort !

L'amendement 244, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Vous voyez bien !

M. le Rapporteur - L'amendement 192 est de coordination.

M. le Secrétaire d'Etat - ...Avec l'amendement 178 : rejet, donc !

L'amendement 192, mis aux voix, est adopté.

M. Jacky Darne - J'ai déjà défendu l'amendement 193 en présentant le 190 : il s'agit encore de la dotation de solidarité et de ses critères de répartition.

L'amendement 193, accepté par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 194 est encore de coordination.

M. le Secrétaire d'Etat - Même position que sur le 192.

L'amendement 194, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 195, pour éviter la surchauffe fiscale, gèle le montant de la dotation de solidarité pour les EPCI ayant opté pour la taxe professionnelle unique après transformation. Nous répondons ainsi à la critique émise tout à l'heure.

L'amendement 195, repoussé par le Gouvernement et mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Les amendements 196 et 197 sont de coordination.

M. le Secrétaire d'Etat - L'avis du Gouvernement reste bien entendu défavorable.

Les amendements 196 et 197, successivement mis aux voix, sont adoptés.

L'article 51 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 6 (précédemment réservé)

M. le Rapporteur - Chacun comprendra maintenant pourquoi nous avions demandé la réserve de cet article. Contrairement à ce qu'on a pu lire dans une certaine presse, c'était une nécessité purement technique, comme en fait foi l'amendement 164, amendement de coordination avec les dispositions que nous adoptées sur la fiscalité mixte -contre l'avis du Gouvernement.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable, en conséquence !

L'amendement 164, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 165 tend à rendre plus explicite le fait que la communauté urbaine pourra, à l'instar de la communauté d'agglomération, disposer de recettes correspondant aux compétences transférés.

M. le Secrétaire d'Etat - La précision est utile, s'agissant notamment du versement transport.

L'amendement 165, mis aux voix, est adopté.

L'article 6 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 47 (précédemment réservé)

M. Jean Vila - Par l'amendement 441, nous souhaitons permettre aux communautés urbaines de décider en pleine connaissance de cause, et après avis conforme des communes, le passage à la taxe professionnelle unique. Il s'agit en effet d'une décision majeure, d'une extension de compétences considérable et la commune, qui reste le lieu privilégié d'exercice de la citoyenneté, doit être reconnue comme telle.

Cet amendement participe de notre souci de garantir la libre administration des collectivités locales, et les communes sont les seules collectivités de plein exercice en l'état actuel du droit.

En outre, il convient de traiter de la même manière les communautés urbaines déjà créées qui n'auront pas fait le choix de la TPU avant la promulgation de cette loi et les communautés qui se créeront ensuite. Les communes doivent pouvoir approfondir librement la coopération intercommunale, quelle que soit la forme que celle-ci revêt.

M. le Rapporteur - La commission a préféré la majorité qualifiée à l'avis conforme.

M. le Secrétaire d'Etat - Avis défavorable : l'objet du projet est de modifier le régime optionnel en vigueur pour les communautés urbaines, en vue de mettre en place une taxe professionnelle unifiée propice à leur développement.

L'amendement 441, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Francis Delattre - Les amendements 333 et 336 sont défendus.

Les amendements 333 et 336, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - L'amendement 166 est de coordination avec l'amendement instituant une fiscalité mixte.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable.

L'amendement 166, mis aux voix, est adopté.

M. Francis Delattre - L'amendement 337 de M. Lenoir est défendu.

M. le Rapporteur - Il est satisfait par l'amendement de la commission sur la fiscalité mixte.. que M. Lenoir n'a pas voté.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable.

L'amendement 337, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Francis Delattre - L'amendement 334 est défendu.

L'amendement 334, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Francis Delattre - L'amendement 335 est défendu.

M. le Rapporteur - Défavorable : il n'y a pas de communautés urbaines en Ile-de-France !

M. Francis Delattre - Il y en aura...

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable.

L'amendement 335, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 47, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 48 (précédemment réservé)

M. Robert Poujade - L'amendement 394 est défendu.

L'amendement 394, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 167 est de coordination.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable, compte tenu de la position sur l'amendement principal.

L'amendement 167, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 168 vise à encourager le passage à la taxe professionnelle unique pour les communautés urbaines existantes : sauf opposition d'une majorité qualifiée des conseils municipaux concernés, ce régime serait de droit, ce qui contribuera à simplifier le paysage de l'intercommunalité.

M. le Secrétaire d'Etat - Sagesse.

L'amendement 168, mis aux voix, est adopté.

L'article 48, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 49 (précédemment réservé)

M. le Rapporteur - L'amendement 170 est de coordination.

L'amendement 170, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 171 rectifié vise à encourager le passage à la TPU pour les districts existants.

M. le Secrétaire d'Etat - Sagesse.

L'amendement 171 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'article 49 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 50 (précédemment réservé)

M. le Rapporteur pour avis - Nous revenons ici sur un point important : la compétence relative à la collecte et au traitement des ordures ménagères, et son financement. L'amendement 136 de la commission des finances a pour objet de permettre aux groupements d'instituer la taxe ou la redevance d'enlèvement des ordures ménagères, dès la première application des dispositions du premier alinéa, dès lors qu'ils exercent la compétence d'enlèvement et de traitement des ordures ménagères, qu'ils la déléguent ou qu'ils financent ces services. Nous avons obtenu hier quelques éclaircissements de M. le ministre de l'Intérieur, mais nous voulons éviter toute ambiguïté, comme il en est apparu dans l'application de la loi de 1992 dont les services de l'Etat n'ont pas fait partout la même interprétation. Dans le monde rural, notamment, cette compétence ne peut être réellement exercée par certains groupements, de taille insuffisante. Pour aller jusqu'au "déchet ultime", en effet, il faut au moins 200 000 ou 300 000 habitants. Les groupements qui ont cette compétence doivent donc pouvoir se regrouper sur un territoire plus vaste, et faire éventuellement appel à une société. Pour qu'ils puissent exercer vraiment cette compétence, il faut leur permettre de lever la taxe ou la redevance d'enlèvement.

M. le Rapporteur - La commission des lois avait accepté l'amendement 303 de M. Courson, qui a le même objet, mais la rédaction de M. Chouat est meilleure.

M. le Secrétaire d'Etat - Aujourd'hui la taxe ne peut être perçue que par un groupement qui exerce toutes les compétences relatives aux déchets, soit la collecte et le traitement. On a été conduit par l'expérience à faire des distinctions sur ce plan, et à permettre la perception de la taxe d'enlèvement par une commune quand il y a dissociation des deux fonctions. Il est souhaitable que les communautés de communes puissent se regrouper avec d'autres communes ou EPCI, sans perdre de ce fait la faculté d'instituer cette taxe. Il faut toutefois maintenir un lien entre la taxe d'enlèvement et la partie du service qui lui correspond, c'est-à-dire la collecte. Il faut d'autre part expliciter le cas où le groupement assure la charge financière du service. Enfin la redevance pose un problème particulier d'équilibre financier du service, et doit donc faire l'objet d'un service spécifique.

C'est donc un problème complexe, qui devrait être traité globalement dans le cadre de mesures spécifiques. Toutefois, pour amorcer la réflexion, et tout en se réservant la possibilité d'y revenir, le Gouvernement peut accepter l'amendement 136, sous réserve d'une double rectification. Tout d'abord, l'alinéa proposé ne remplacerait plus le quatrième alinéa du I, mais s'insérerait avant lui, afin de préserver la possibilité de percevoir la taxe d'enlèvement dès la première année pour les communautés de communes qui la perçoivent déjà. Ensuite il faudrait supprimer les mots "dès la première application des dispositions du premier alinéa". En effet la taxe d'enlèvement a été instituée dans les conditions de l'article 1639 A bis du code général des impôts, afin que les services fiscaux puissent recenser les bases. J'espère que le rapporteur pour avis pourra se rallier à ces modifications.

M. Germain Gengenwin - Je cherche en vain la différence entre le 303 et le 136 qui permet à M. Gouzes de dire que le second a une meilleure rédaction.

M. le Rapporteur - M. de Courson écrit "qu'elles les délèguent" alors qu'il faut : "qu'elles la délèguent" (Sourires).

M. Dominique Perben - Je souhaite soumettre une réflexion au Gouvernement et à nos collègues, surtout s'ils engagent une réflexion sur ces questions de taxe et de redevance. Il s'agit là d'une dépense qui va croître, même si on essaie d'être raisonnable -et j'espère que les réflexions en cours au ministère de l'Environnement aboutiront à des conclusions raisonnables. A l'occasion de l'intercommunalisation de la collecte et du traitement des déchets, et pour des raisons techniques, on assiste régulièrement à un remplacement de la redevance par la taxe -d'autant que les services fiscaux ne se chargent pas des calculs de redevances. Or, si l'on veut freiner la dépense, et amener nos concitoyens à un comportement plus écologique, il est paradoxal d'accepter une telle évolution, qui substitue à la redevance, calculée sur la quantité de déchets, une taxe calculée sur des valeurs foncières. Pour l'eau, nous avons mis des compteurs chez chacun. Ne faisons pas le contraire pour les déchets !

Je sais que c'est techniquement difficile, mais c'est une raison de plus pour s'en saisir dès maintenant.

Mme Nicole Bricq - Très bien.

M. Dominique Perben - Les populations rurales y sont très sensibles, et acceptent mal le passage de la redevance à la taxe. Or, dans une communauté de communes, qui peut rassembler des communes urbaines et rurales, il faut un système unique, et les ruraux sont forts mécontents de voir apparaître la taxe. Je sais que le ministère des Finances est réservé devant ce que je dis. Mais il serait intéressant de constituer un groupe de réflexion, peut-être sous l'égide du ministère de l'Intérieur, avec les Finances et l'Environnement. Il y a là l'occasion de faire un progrès à la fois écologique et financier.

M. le Rapporteur - Tout à fait.

M. le Rapporteur pour avis - J'accepte la rectification proposée par le Gouvernement, notamment quant à la date-butoir pour la mise en oeuvre de la taxe.

L'amendement 136 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Robert Poujade - L'amendement 484 est défendu.

L'amendement 484, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Robert Poujade - Les amendements 530 et 241 sont défendus.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Défavorable.

L'amendement 530, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que l'amendement 241.

M. Robert Poujade - L'amendement 483 est défendu.

L'amendement 483, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 593 donne un support légal aux reversements effectués par un établissement public de coopération intercommunale à taxe professionnelle de zone à la ou les communes qui lui ont transféré leur zone d'activités.

M. le Rapporteur pour avis - L'amendement 137, adopté par la commission des finances à l'initiative de M. Carrez, a le même objectif.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné l'amendement du Gouvernement mais j'y suis très favorable ; il précise l'amendement 137.

M. le Secrétaire d'Etat - L'amendement 137 a le défaut de ne pas préciser les modalités de calcul ; sans doute le rapporteur de la commission des finances pourrait-il se rallier à l'amendement gouvernemental.

M. Germain Gengenwin - La formulation facultative de ces amendements ne donne aucune garantie aux communes : il faudrait remplacer le mot "peut" par le mot "doit".

M. René André - Je voudrais appeler l'attention du Gouvernement sur une difficulté pratique.

Le passage d'une autoroute entraîne généralement la création de zones industrielles, dont il faut éviter la multiplication. Pour cela, plusieurs communautés de communes doivent pouvoir créer un syndicat pour gérer en commun une même zone, en partageant tant les investissements que, au prorata de ceux-ci, le produit de la taxe professionnelle de zone. Tel n'est pas le cas actuellement ; je reviendrai sur ce sujet à l'article 59 car c'est un frein à l'aménagement du territoire.

M. le Rapporteur - Je comprends d'autant mieux le problème que dans ma circonscription, des communautés de communes, des communes et le département ont formé un syndicat mixte et créé une zone industrielle, précisément à l'embranchement de l'autoroute ; le règlement intérieur précise que le produit de la taxe professionnelle est partagé en tenant compte du nombre d'habitants -ce qui n'implique pas que le syndicat lui-même perçoive la taxe professionnelle. Nous reverrons cette question à l'article 59, sur lequel le Gouvernement a déposé un amendement.

M. le Secrétaire d'Etat - La loi de 1980 ne permet pas le partage lorsque les communes appartiennent à un EPCI à fiscalité propre. La suggestion de M. André -un partage en fonction des investissements- mérite d'être étudiée pour la deuxième lecture.

L'amendement 593, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - L'amendement 137 tombe.

M. le Rapporteur - L'amendement 172 est de coordination, comme précédemment.

L'amendement 172, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Même chose pour le 173.

L'amendement 173, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 174 est rédactionnel.

M. le Secrétaire d'Etat - Celui-ci répare une omission : avis favorable !

L'amendement 174 est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 175 vise à encourager le passage à la TPU pour les communautés de communes de plus de 500 000 habitants. Il faut penser à tout...

M. le Secrétaire d'Etat - Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

L'amendement 175, mis aux voix, est adopté.

L'article 50 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 50 (amendements précédemment réservés)

M. Germain Gengenwin - M. de Courson a défendu lui-même hier soir ses amendements 306, 305 et 304.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Sur l'amendement 305, je demande éventuellement la même rectification que sur l'amendement 136 de la commission des finances.

Les amendements 304 et 306, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'amendement 305 rectifié par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 51

Mme Janine Jambu - L'amendement 442 tend à conforter le principe de libre administration des collectivités locales : il paraît nécessaire que, dans le cadre suffisamment précis de l'article 1636 B septies du CGI, toute liberté soit laissée aux collectivités locales et à leurs structures de coopération intercommunale pour déterminer les taux appliqué aux quatre taxes locales.

M. le Rapporteur - Cet amendement va dans le sens d'une inflation fiscale, que vous avez tout à l'heure redoutée avec raison. En outre, il risquerait d'accroître les inégalités entre contribuables. En conséquence, avis défavorable.

M. le Secrétaire d'Etat - Même avis.

L'amendement 442, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Germain Gengenwin - Mon amendement 580 tend à demander au Gouvernement de présenter au Parlement avant le 1er janvier 2001 un rapport analysant les implications de la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle sur la taxe professionnelle unique.

En effet certains experts prédisent que la taxe professionnelle n'existera plus dans dix ans...

C'est pourquoi il est important que le Gouvernement nous donne des assurances sur la pérennité de la taxe professionnelle.

M. le Rapporteur - Je ne sais pas de quels experts parle notre collègue, mais ce sont les parlementaires qui décident.

La suppression de la taxe professionnelle n'est pas à l'ordre du jour. La preuve en est que nous venons de voter une série de dispositions qui la confortent.

M. le Secrétaire d'Etat - Je veux rassurer M. Gengenwin. Le Gouvernement n'envisage pas de supprimer la taxe professionnelle. Ce projet ne tend-il pas à instaurer la taxe professionnelle unique dans certaines structures intercommunales ?

M. Gengenwin souhaite un rapport sur les conséquences de la suppression de la part salariale. Sur ce point, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de votre Assemblée.

M. le Président de la commission des finances - Pendant l'examen de la loi de finances, nous avons obtenu qu'un tel rapport nous soit présenté avant septembre. Comme vous, Monsieur Gengenwin, nous nous préoccupons de la pérennité de la taxe professionnelle.

M. Germain Gengenwin - Je retire mon amendement 580.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce soir à 21 heures.

La séance est levée à à 19 heures 30.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


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